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1 Le mardi 16 octobre 2012
2 [Déclaration de la Défense - Règle 84 bis]
3 [Audience publique]
4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes.
7 La Chambre a accordé à l'accusé la possibilité de faire une déclaration en
8 application du 84 bis aujourd'hui pendant la première audience.
9 Monsieur Karadzic, vous avez la parole.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellences. Bonjour à tous et à toutes.
11 Aujourd'hui, je vais m'accuser en ma qualité d'accusé à l'auditoire, et non
12 pas en ma qualité de conseil de la Défense. Je m'appelle Radovan Karadzic,
13 je suis médecin psychiatre de par ma profession, je suis psychothérapeute,
14 analyste de groupe et analyste. Alors, pour ce qui est des accusations à
15 mon encontre concernant les événements pendant la guerre civile, il
16 faudrait plutôt me récompenser, et voilà pourquoi : parce que j'ai fait
17 tout ce qui était en mon pouvoir pour ce qui est d'éviter la guerre, afin
18 que guerre il n'y ait pas; j'ai réussi à atténuer les souffrances de la
19 totalité des civils, et le nombre de nos victimes dans cette guerre a été
20 de trois à quatre fois inférieur par rapport à ce qui a été rapporté et
21 diffusé dans le public; j'ai déclaré des cessez-le-feu unilatéraux; j'ai
22 demandé à ce que l'on se retienne de déployer des activités et j'arrêtais
23 les soldats lorsque nous étions sur le point de l'emporter; je me suis
24 employé en faveur de la paix et j'ai accepté quatre sur cinq traités de
25 paix; j'ai propagé, j'ai diffusé et initié les idées d'humanisation du
26 conflit pour ce qui est de la mise en place de toute mesure à caractère
27 humanitaire; et, en sus de mes fonctions de président, pour ce qui est de
28 l'acheminement de l'aide humanitaire, j'ai procédé à des cessez-le-feu au
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1 respect du droit international humanitaire, et j'étais la personne à qui on
2 s'adressait pour améliorer la situation humanitaire. Et j'ai mis en œuvre
3 bon nombre d'actes de miséricorde.
4 Au fur et à mesure que le temps passera, l'idée se fera jour, et les
5 accusations, la propagande, les mensonges et la haine ne feront que
6 s'atténuer. C'est inévitable parce que c'est comme ça que ça se passe
7 toujours. Je n'ai jamais rien eu contre les Musulmans et les Croates; au
8 contraire, c'est parce que je l'ai voulu que je suis devenu habitant de
9 Sarajevo. Je suis arrivé à Sarajevo quand j'avais 15 ans, alors que mes
10 compatriotes allaient plutôt à Belgrade, et bien qu'à Belgrade j'avais de
11 la famille, la sœur de mon père et autres parents à moi. J'ai choisi tout
12 de même d'aller à Sarajevo. C'est là-bas que je me suis marié. Et c'est à
13 Sarajevo que sont nés ma femme Ljiljana ainsi que ma fille Sonia et mon
14 fils Aleksandar. J'ai été ami des Croates, sans faire de différence ou de
15 distinction quelle qu'elle soit, de façon profonde et sincère. Tous mes
16 choix de psychiatres, d'enseignants, de médecins en médecine interne, de
17 tailleurs ou de cordonniers, d'avocats, tous ces choix que j'ai faits,
18 c'étaient des gens qui étaient des Musulmans. Je ne faisais pas de
19 distinction de ce point de vue-là. Mon coiffeur s'appelait Meho Sabic
20 pendant de longues années, et je suis allé le voir deux jours avant le
21 début de la guerre, dans l'espoir qu'il n'y aurait pas de guerre, et
22 restant fidèle à mes choix. Je n'ai jamais autorisé la possibilité de
23 perpétration du moindre crime individuel que ce soit, et encore moins des
24 crimes en masse ou une élimination de l'un quelconque des peuples des
25 territoires serbes. Personne que je connaisse n'a pas même pensé qu'il y
26 aurait eu une possibilité d'éradication d'un peuple, et dans le cas
27 concret, d'un peuple que nous considérons être le même que le nôtre. Ce
28 sont des Serbes d'une autre confession, qui à l'époque avaient choisi une
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1 autre religion, mais les origines du peuple sont les mêmes.
2 Alors, ma deuxième préoccupation c'est la littérature. J'ai rédigé
3 plusieurs livres de poésie, et, entre autres, un livre pour enfants. Ces
4 livres ont été récompensés de distinctions connues, mes poèmes ont été
5 traduits dans plusieurs grandes langues. Et après avoir quitté mon poste de
6 président, j'ai rédigé et publié une comédie et un roman : "La chronique
7 miraculeuse de la nuit." J'ai fait de la politique de façon active jusqu'en
8 1968. J'ai été membre de la présidence de la fédération des étudiants, et
9 pendant les événements estudiantins à l'époque, j'ai été au côté des
10 étudiants, et non pas au côté du régime, et j'ai été considéré comme étant
11 un dissident. J'ai vécu avec et j'ai fréquenté des dissidents.
12 Je suis devenu actif à nouveau dans la politique en 1989, et ce, dans
13 un mouvement écologique où ma femme Ljiljana et moi-même avons été fort
14 actifs, et ce mouvement avait été présidé par une Musulmane de grande
15 renommée. S'il n'y avait pas eu de partis ethniques, je me serais trouvé
16 dans ce mouvement de nos jours encore, parce que faire de la politique ça
17 ne m'intéressait guère. Je suis né le 19 juin 1945 à Petnica, non loin de
18 Savnik, dans ce qui constitue le Monténégro de nos jours. Jusqu'au Congrès
19 de Berlin, ça faisait partie de l'Herzégovine, et c'est la raison par
20 rapport à laquelle nous étions très proches de la Bosnie-Herzégovine, parce
21 que nous considérions que nous étions des Herzégoviens. Mon père était un
22 artisan. Ma mère était femme au logis. Mon père et sa famille étaient des
23 gens qui étaient portés sur la monarchie, et l'autre partie de la famille
24 était du côté de Tito. Mon père a commencé la guerre en faisant partie d'un
25 mouvement unifié de libération, c'était un détachement, et les communistes
26 alors ont tué nos vieillards qui avaient de la renommée, qui étaient des
27 gens en vue, ceux qui étaient les déviations gauchistes. Et mon père a
28 choisi d'aller dans l'armée du roi. Il a fait partie des rangs de cette
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1 armée jusqu'à ce que le roi n'ait donné l'ordre de se soumettre à
2 l'autorité de Tito. Et lui, il est rentré à la maison.
3 Il était très épris de l'esprit russe et de la culture russe et du
4 parlementarisme anglais, ainsi que de la monarchie. Lorsque --après 1968, à
5 l'âge de 23 ans, j'ai cessé de faire confiance à Tito. J'ai opté en faveur
6 de bien des convictions appartenant à mon père, et s'agissant de ces
7 opinions-là, jusque-là, lui et moi, on s'était disputé [inaudible]. Je
8 pense avoir dit du parlementarisme anglais, j'ai parlé de culture russe et
9 du parlementarisme et de la monarchie anglaise. Alors, en se battant dans
10 l'armée yougoslave du roi, que certains appelaient les Chetniks, dans ma
11 région à moi, ces Chetniks n'ont pas eu de conflit avec les autres groupes
12 ethniques. Ils avaient des conflits idéologiques notamment avec les
13 communistes. Dans ma région au Monténégro, non loin de Niksic, il y a
14 toujours eu des Musulmans, il y en a encore de nos jours, et ils se
15 trouvent très près de là où j'habitais. Ils étaient très proches notamment
16 de mes parents. Les Musulmans de Niksic, ce sont des médecins, des sportifs
17 de renommé, et il n'y a jamais eu de friction ou de conflit ethnique entre
18 eux. L'église catholique était juste à côté de mon école, et c'est là que
19 j'ai aimé Bach en écoutant jouer le prêtre sur l'orgue de l'église.
20 Alors, mon expérience avec les autres, ça a été plus que bien comme
21 relation. Mon frère avait un demi-frère albanais, ils étaient comme des
22 frères, et on se rendait visite pour les fêtes religieuses. Et jamais nous
23 n'avons eu quelque expérience négative que ce soit, et c'est la raison pour
24 laquelle justement j'ai opté en faveur d'une installation à Sarajevo. Dans
25 les années 1990, la communauté serbe en Bosnie-Herzégovine est devenue très
26 bouleversée, d'abord du fait de la création et de la victoire du HDZ en
27 Croatie et de l'annonce de la mise en place d'un parti du SDA par les soins
28 d'Izetbegovic. Les Serbes en Bosnie avaient pris peur de cette rhétorique
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1 oustachi et il y avait eu des suspicions pour ce qui est de voir M.
2 Izetbegovic lui aussi, puisqu'il a été l'auteur de la "Déclaration
3 islamiste", mettre en œuvre cette déclaration islamiste en tant que
4 fondement programmatique pour ce qui est de son parti. Il n'y a pas un seul
5 Serbe ou quelque individu que ce soit au monde qui aurait pu convaincre les
6 Serbes de Bosnie de la menace d'un génocide, si l'on sait quelles ont été
7 les évolutions de la vie politique en Yougoslavie. Ils ont compris les
8 choses avant que je ne dise un seul mot, en ce qui me concerne. L'élite
9 serbe dans Sarajevo et en Bosnie avait été soumise à de fortes pressions
10 pour ce qui était de créer un parti serbe une fois que le SDA et le HDZ
11 avaient été créés avec fatras et ont exprimé une orientation anti-
12 yougoslave et anti-serbe pour ce qui est de la teneur de leurs programmes
13 respectifs.
14 Pour ce qui est de M. Izetbegovic, j'habitais à côté de lui. On se
15 rencontrait, on s'entretenait. Mes amis écrivains voulaient combattre les
16 idées de la "Déclaration islamiste", mais n'ont pas été non plus d'accord
17 pour qu'il soit mis en prison. On s'est entretenus entre nous et je voulais
18 savoir de quoi allait avoir l'air son parti, et je me suis fait des idées
19 très favorable à son sujet. J'ai dit à mes amis que cet homme-là ne pouvait
20 pas, certainement pas, œuvrer de façon conforme à ce qui est écrit dans la
21 "Déclaration islamiste". Lorsqu'il est devenu clair que le parti serbe
22 devait forcement être créé, j'ai informé M. Izetbegovic de la chose, mais
23 il avait déjà appris la chose de la bouche de M. Srebrovac, avec qui il
24 avait fait de la prison. Et lorsque je lui ai dit que ni moi ni Srebrovac
25 n'allions être les présidents, il a été mécontent. Je ne sais pas si
26 c'était pour moi ou pour Srebrov. Mais toujours est-il qu'il a apporté son
27 soutien à cette idée et il a été content de voir que la communauté serbe,
28 elle aussi, allait avoir un parti politique non communiste. Il a demandé à
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1 ce que les Serbes ne votent pas en faveur des communistes dans les rangs
2 des Musulmans. Ça a été très souvent le cas chez nous. Une communauté
3 votait pour le meilleur de sa propre communauté et pour le pire de l'autre
4 communauté. Ça ne veut pas dire que c'étaient les pires des communistes,
5 mais c'était une manipulation qui est de présente de nos jours encore. Et
6 les Croates n'arrivent pas à avoir un président tel qu'ils le souhaitent
7 eux-mêmes.
8 Alors, M. Izetbegovic avait été inquiet pour ce qui était de voir les
9 communistes rester au pouvoir, et son groupe à lui et lui-même se
10 retrouveraient donc pour la troisième ou quatrième fois en prison. Alors
11 j'ai été d'accord, et nous n'avons pas voté de façon croisée de la sorte.
12 On a voté honnêtement. Et j'ai convenu avec M. Izetbegovic que si nous
13 l'emportions aux élections suivantes, chaque électeur pourra voter pour
14 l'une des quatre listes ethniques, celle qu'il voudra; et ça aurait été une
15 bonne solution pour la Bosnie-Herzégovine, du moins pour la Fédération,
16 parce qu'un électeur pourrait voter sur une liste musulmane ou sur une
17 liste croate et il n'y aurait pas les tensions que l'on connaît et les
18 problèmes que l'on connaît de nos jours. S'agissant de Mme Plavsic, elle a
19 obtenu un bon nombre de votes de la part des Musulmanes. Elle était venue
20 de milieu musulman. Ces femmes étaient contentes de voir une femme faire
21 partie de la présidence et on a pu voir une lumière au bout du tunnel,
22 c'est-à-dire une possibilité au final de vivre comme il fallait. Cependant,
23 en dépit de toutes les résistances que j'avais ressenties et formulées, il
24 m'a fallu devenir président du parti et je me suis dit que ça allait durer
25 jusqu'aux élections. Je ne voulais pas me porter candidat pour la
26 présidence, le gouvernement ou le parlement. Et j'ai dit qu'après les
27 élections, je serais président honorifique et que j'allais revenir vers ce
28 que j'étais, c'est-à-dire en premier lieu médecin et ensuite écrivain.
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1 Je crains fort que l'interprétation n'est pas la bonne. J'avais refusé de
2 me porter candidat. Je ne suis devenu, donc, ni membre de la présidence, ni
3 du parlement, ni de ce gouvernement. Je voulais rester médecin et écrivain,
4 c'est ce que j'ai dit.
5 Alors, tous ceux qui me connaissent vraiment savent que je ne suis pas un
6 autocrate, que je ne suis pas agressif, que je ne suis pas intolérant. Au
7 contraire, je suis un homme assez doux, tolérant, avec une capacité de
8 grandement comprendre les autres. Et s'agissant de moi-même, à mon égard et
9 à l'égard des autres, j'ai toujours été strict du point de vue de
10 l'exécution de ce qui a été démocratiquement décidé. Je ne me suis pas
11 servi des grandes attributions qui m'ont été données par le statut du
12 parti, ni pour ce qui est des attributions qui m'étaient conférées par la
13 constitution de la Republika Srpska.
14 Tout de suite après ces élections, il y a eu montée des tensions en Bosnie-
15 Herzégovine et notre idylle préélectorale est tombée à l'eau parce que le
16 Parti de l'Action démocratique, qui représentait la communauté musulmane, a
17 modifié son orientation fondamentale à l'égard de la Yougoslavie. Dès la
18 fin janvier, enfin à la mi-janvier, il y a eu mise en place des autorités,
19 et fin janvier, le Parti de l'Action démocratique a décidé en faveur d'une
20 sécession. Lors de la création des autorités, c'est-à-dire la partie serbe,
21 le SDS et moi-même avions fait beaucoup de concessions pour avoir la paix
22 chez nous. De par notre nombre, nous étions presque sur pied d'égalité avec
23 les Musulmans, si l'on compte les Yougoslaves qui sont au fond des Serbes;
24 mais les Croates et les Musulmans ont obtenu les fonctions les plus
25 importantes. Les Musulmans ont eu le poste de président de la présidence,
26 les Croates ont eu le poste de premier ministre et les Serbes ont dû se
27 satisfaire du poste de président du parlement. Mais on ne s'est pas arrêté
28 là. Les ministères de la force, c'est-à-dire le ministère de l'Intérieur et
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1 le ministère de la Défense, sont revenus à des Musulmans et à des Croates.
2 Qui plus est, le ministère des Affaires étrangères a été confié à un
3 Musulman, un homme que nous savions être une personne qui ferait la Bosnie
4 se déplacer en direction d'un fondamentalisme et intégrisme, et non pas en
5 faveur de l'Europe.
6 Donc, une période de tromperie, de supercherie, de blocage, d'empêchement
7 de création des pouvoirs en place. Les Serbes ne se sont pas vu attribuer
8 ce qui leur revenait d'après les accords. Dans bon nombre de situations, il
9 n'a pas pu y avoir des Serbes au ministère de l'Intérieur. On a commencé à
10 marginaliser notre groupe ethnique. Il y a eu un début de sabotage de ce
11 qui avait été convenu en temps de paix, et on a supporté, on a accepté bien
12 des choses, mais ce qui troublait la communauté, c'étaient ces
13 manipulations avec le ministère de l'Intérieur. Parce que le ministère de
14 l'Intérieur avait fait corps avec le Parti de l'Action démocratique. Le SDA
15 a envoyé des membres de ses effectifs pour ce qui est d'un entraînement
16 militaire en Croatie dans l'intention de faire en sorte qu'à leur retour,
17 ceux-là deviennent partie intégrante du MUP ou de l'armée de la république,
18 qu'ils avaient déjà commencé à mettre en place dès le 31 mars. Et le 10
19 juin, ils ont créé le Conseil national de la Défense des Musulmans.
20 Alors, l'accroissement des rangs des effectifs de réserve moyennant
21 des criminels, et on augmente de dix fois ces effectifs, pour nous ça
22 signifiait que nous étions menacés d'un péril très important. Je le dis de
23 façon publique. Ce que les Serbes ont subi dans les milieux où ils étaient
24 à moins de 50 %, par exemple à Visegrad seulement, pendant plus d'un an,
25 aucune communauté en Europe n'a eu à supporter des choses pareilles. Il y
26 avait eu des humiliations terribles, il y a eu des viols, il y a eu des
27 meurtres. Et si je vous dis que pour sa fête son patron de la famille,
28 lorsqu'un Serbe invite un Musulman pour manger avec, c'est une -- enfin, la
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1 "slava" [phon] chez les Serbes, c'est la fête du saint patron de la
2 famille, et après cela c'est à ce même homme là-bas à la porte de sa propre
3 maison, ça ce n'est pas une pathologie individuelle. Il a dû penser que
4 c'était une chose qu'on pouvait se permettre, qui était tout à fait
5 autorisé. Il en était de même avec le meurtre d'un membre -- enfin, d'une
6 concession ou d'un groupe qui est allé au mariage d'un Serbe. On a tué le
7 père du marié, et on a blessé certaines autres personnes, mais ça n'a pas
8 été le fait de l'un des Celo. Il y avait deux individus qui s'appelaient
9 Celo. Il ne l'a pas fait parce qu'il le voulait individuellement. Il s'en
10 est même vanté à la télévision. Il a estimé que tout un chacun, lorsqu'il
11 le voulait, pouvait tuer un Serbe.
12 Dans les municipalités où on vivait ensemble, l'organisation militaire des
13 Croates et des Musulmans, et en particulier des Musulmans, ce n'était pas
14 un secret pour les gens autour. On a tous pu le voir. Les gens s'armaient,
15 et lorsque avec M. Izetbegovic je me suis entretenu au sujet de ce qui se
16 passait et au sujet de l'armement, il haussait des épaules et il disait que
17 tout le monde s'armait. Alors, on comprenait -- moi, j'ai compris qu'on
18 allait vers une catastrophe. Nous n'avons entrepris que des démarches
19 politiques. Nous nous sommes fondés sur la constitution, et nous avons
20 voulu cerner des autonomies locales, des autorités autogestionnaires
21 locales, et nous avons voulu procéder à une régionalisation. M. Izetbegovic
22 - que je continue à considérer comme quelqu'un de positif, je crois que
23 quelqu'un l'a incité à faire la guerre alors qu'il ne le voulait pas - mais
24 dès 1991, vers le mois de mai, il a proposé un partage de la Bosnie-
25 Herzégovine à l'occasion des réunions de négociations. Nous étions, pour
26 notre part, stupéfaits. Cette proposition a été faite auprès de M.
27 Zulfikarpasic au moins deux fois, et Zulfikarpasic a écrit des textes à ce
28 sujet. Nous étions contre le partage de la Yougoslavie, nous étions contre
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1 le partage de la Bosnie-Herzégovine; les Croates ont, eux, accepté l'idée
2 et quelqu'un avait fait une proposition de procéder à des échanges de
3 populations. Nous avons dit que c'était un cauchemar, une idée
4 cauchemardesque, et nous l'avons rejetée. Et le "Vecernji List de Zagreb",
5 le journal de Zagreb, a publié une idée relative à la cantonisation de la
6 Bosnie-Herzégovine, et Mme Plavsic au nom de la communauté serbe a répondu
7 que c'était une idée intéressante, mais elle voulait leur faire savoir que
8 nous ne rejetions pas des idées pacifistes.
9 Tout ce que nous avons entrepris comme mesures politiques, ça était,
10 en termes de jeu d'échecs, des mouvements, des gestes où nous avons été
11 contraints de les faire. Ça été la résultante des démarches de nos
12 communautés voisines, et il n'y a pas eu un seul geste de notre part pour
13 ce qui est d'avoir pris les devants. Depuis la création des parties
14 jusqu'au début de la guerre et la fin de la guerre, nos réactions ont été,
15 et mes réactions à moi ont été également une recherche de solutions avec le
16 moins de dégâts possibles dans la contrainte où il fallait forcément faire
17 quelque chose.
18 Le président de cette organisation musulmane bosnienne, qui est le
19 deuxième des partis en présence du côté des Musulmans, M. Zulfikarpasic, un
20 jour en été 1991, m'a convié, m'a appelé au téléphone, et j'étais sur le
21 point de partir en voyage, et il m'a dit il a convié une réunion pour
22 sauver la Bosnie et procéder à un accord historique entre les Serbes et les
23 Musulmans. J'ai renoncé à tout ce que je voulais faire à ce moment-là, et
24 j'ai très volontiers accepté l'entretien, et j'ai accepté l'idée formulée
25 qui avait été aussi sincèrement, me semble-t-il, acceptée par M.
26 Izetbegovic. On s'attendait de notre part à renoncer à une régionalisation
27 et à la création de régions et de faire en sorte que la Bosnie entière
28 reste en Yougoslavie sur un pied d'égalité. A son retour de l'Amérique, M.
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1 Izetbegovic a renoncé au projet en question. Fin août, et là, de nouveau,
2 il y a eu des tensions nouvelles et une montée de ces tensions. Et ce n'est
3 que là que nous avons créé la Région autonome de la Krajina. C'est les gens
4 de la Krajina qui l'ont créée, et plus personne ne pouvait plus leur faire
5 de reproches. Ils avaient convié des municipalités musulmanes à faire
6 partie de la Krajina, mais ils ne voulaient pas de domination de Sarajevo,
7 ni à l'époque ni pendant la guerre. Ils ne voulaient pas non plus la
8 domination de Pale pendant la guerre, et ils ont souffert de tout ceci.
9 Certains voulaient créer une espèce d'autogestion locale à des fins de
10 sécurisation de cette région.
11 Lorsque M. Izetbegovic est revenu d'Allemagne, il avait et semblait
12 être découragé. A mes yeux et aux yeux de M. Koljevic, on avait eu
13 l'impression qu'il était poussé vers l'indépendance et qu'il n'avait guère
14 de choix. Ceux-là ont été des moments véritablement très pénibles, et il
15 nous semblait que quelqu'un l'incitait à aller dans le sens, dans la
16 direction d'une indépendance. Pendant cette période, bien que nous ayons pu
17 voir que les Musulmans et les Croates étaient en train de se préparer
18 militairement parlant, toute l'élite serbe et les intellectuels, les
19 membres du parti, la direction du parti, étaient contre le fait de voir le
20 Parti démocratique serbe créer des formations paramilitaires. Et il n'en a
21 pas eu. Il n'en a pas créé. Dans toutes les analyses de ces services
22 étrangers ou des services de renseignement, on a formulé des suppositions
23 en disant qu'il se pourrait que le capitaine Dragan fasse partie du SDS,
24 mais ils ne pouvaient pas montrer du doigt à untel en disant que c'est une
25 formation paramilitaire du SDS. Moi et tous les dirigeants, l'ensemble de
26 la direction serbe en Bosnie-Herzégovine, nous ne savions pas exactement
27 comment la JNA allait se comporter. Ce n'était pas clair pour nous. A
28 l'époque, la JNA avait exactement le même rapport par rapport à tous les
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1 partis nationaux. C'était conditionné par l'idéologie. C'était presque un
2 affrontement idéologique. Nous étions dans un grand dilemme quant à savoir
3 ce qu'il convenait de faire si jamais la guerre éclatait. Nos hommes
4 étaient au sein de la JNA, et donc sous leur commandement et leur contrôle.
5 C'est l'époque à laquelle j'ai eu à subir des pressions très
6 importantes sur le terrain. Les autorités locales étaient très préoccupées
7 - et de bon droit - parce qu'elles se sentaient abandonnées par l'Etat
8 fédéral et par leurs autorités républicaines en Bosnie-Herzégovine. Elles
9 ont été abandonnées à elles-mêmes, confrontées à une myriade de problèmes
10 petits et grands, et elles faisaient pression sur nous. La seule chose
11 qu'on ne pouvait pas leur prendre, c'était la Défense territoriale qui,
12 conformément aux dispositions légales, était rattachée à chaque communauté
13 locale. De plus, la loi disposait que chacun avait l'obligation de défendre
14 le pays au moment où il était attaqué. Il était impossible, inimaginable,
15 de trahir ce peuple, parce que même si j'avais bien voulu accepter quelque
16 chose que le peuple n'aurait pas accepté, ce n'aurait pas duré plus de
17 quelques heures. C'était un peuple qui avait une très bonne mémoire de tout
18 ce qui s'était passé, et il n'y avait absolument aucune possibilité de
19 dicter aux Serbes ce qu'ils allaient, ce qu'ils devaient faire. Donc, nous
20 étions sous une pression considérable pour que ce peuple reste les mains
21 liées, pour qu'on puisse le tuer, et c'est l'époque même à laquelle les
22 Serbes ont été victimes de tels actes. C'est une image complètement
23 déformée que celle qui consiste à dire que ce sont les Serbes qui ont
24 commencé la guerre en Bosnie-Herzégovine.
25 Les Serbes ont été les victimes de la guerre en Bosnie-Herzégovine
26 dès avant le 5 [comme interprété] et le 6 avril. Le 1er mars, le beau-père
27 du marié a été tué. Plus tard, il y a des Serbes qui ont été tués à Brod.
28 Le 25 et le 26 mars, il y a eu ces événements dans la boucherie de
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1 Sijekovci [phon] et à celle de Brod. Le 30 mars, des Serbes ont été tués
2 après avoir été attaqués par des Musulmans. Ce ne sont pas des Serbes qui
3 ont attaqué mais des Musulmans. Le 4 avril, dès le 4 et 5 avril à Sarajevo,
4 les Bérets verts ont attaqué des casernes, des communautés serbes, ont pris
5 position sur tous les bâtiments élevés, les immeubles, ils tuaient les
6 policiers, ils tuaient les jeunes couples qui essayaient de passer à
7 Grbavica, qui était majoritairement serbe. Et c'était là une nuit de
8 véritable terreur.
9 Ces tous débuts de la guerre dans les différentes municipalités
10 concernées n'ont rien à voir avec moi. A l'époque de ces tueries à Brod et
11 ailleurs, l'état commun existait encore. Mme Plavsic, M. Koljevic, M.
12 Miodrag Simovic et d'autres, Ostojic également, se rendaient sur place en
13 vertu des obligations qui étaient celles de l'autorité du pouvoir commun.
14 Ils le faisaient pour cette raison et non pas parce qu'ils étaient en
15 mission pour le SDS. D'ailleurs, Simovic était sur notre liste, mais il
16 n'appartenait pas au SDS. Donc, les autorités de la Bosnie-Herzégovine
17 existaient toujours, et les représentants du peuple serbe y participaient,
18 ainsi qu'au sein de la présidence, ils se rendaient sur place en tant que
19 représentants des autorités communes.
20 Le 1er mars 1993 [comme interprété], lorsque le beau-père de ce jeune
21 marié a été tué à Sarajevo, un jour après le référendum, le Pr Koljevic, M.
22 Krajisnik et moi-même, nous nous trouvions à Belgrade, et les barricades ne
23 sont pas de notre fait. Il s'est agi d'une réaction spontanée et chaotique
24 face au fait que quelqu'un avait pu tuer, avait pu tirer sur les gens
25 assemblés à l'occasion d'un mariage devant une église serbe et qu'aucune
26 protection ne leur avait été accordée. C'était la réaction à cette
27 possibilité. Nous n'avions aucune influence sur la police commune. La
28 police était entre les mains des Musulmans, des Musulmans du SDA et des
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1 extrémistes musulmans. Et c'est sous nos yeux qu'elle se transformait en
2 l'armée illégale de la Bosnie-Herzégovine, alors que nous-mêmes, nous
3 étions totalement impuissants.
4 Les policiers qui m'accompagnaient et qui étaient employés au sein du
5 MUP commun ont évacué au dernier moment ma famille sous la pluie, et c'est
6 ainsi qu'elle a pu échapper aux balles des Musulmans. C'était à la date du
7 5 avril. Moi, j'étais à l'hôtel Holiday Inn en pourparlers, et je me suis
8 rendu, accompagné d'autres leaders nationaux, pour participer ensemble à
9 une émission de télévision en direct pour essayer d'avoir une influence sur
10 la population. Autour de l'hôtel Holiday Inn se trouvaient à ce moment-là
11 50 000 manifestants sous les manteaux desquels on pouvait bien voir qu'ils
12 portaient des armes. C'est la raison pour laquelle mon escorte ne m'a pas
13 autorisé à revenir à l'hôtel Holiday Inn, alors que moi je le souhaitais.
14 Mais deux de mes gardes du corps y sont restés à l'hôtel. Ils ont été
15 arrêtés, ont subi des mauvais traitements et ils s'en sont à peine tirés en
16 vie, de justesse. Il y avait également le Pr Buha, dont le sort nous
17 inquiétait particulièrement, mais il semblerait que quelqu'un ait eu
18 l'intelligence de le mettre à l'abri à temps, avant que cette foule ne se
19 précipite à l'intérieur de l'hôtel Holiday Inn. La seule chose pour
20 laquelle il faudrait me traduire en justice, c'est le manque de
21 perspicacité politique et sociale dont j'ai eu faire preuve, cet excès de
22 confiance et d'optimisme qui aurait pu coûter cher non seulement à ma
23 famille mais à moi-même, ainsi qu'à la communauté serbe en Bosnie-
24 Herzégovine.
25 Alors, on a assisté en premier à l'expulsion des Serbes des localités
26 où les Croates et les Musulmans étaient majoritaires. Dans les parties de
27 la Bosnie-Herzégovine où les Serbes étaient minoritaires, ils servaient de
28 cibles et ils cherchaient la destination vers laquelle ils pourraient fuir.
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1 Nulle part ils n'ont eu recours aux armes et ne se sont défendus. Jusqu'à
2 la fin septembre 1992, il n'y a eu aucune localité serbe dans un contexte
3 majoritairement musulman ou croate qui soit restée intacte. Tout a été
4 incendié, les habitants ont été tués.
5 A la différence de cela, en Republika Srpska -- enfin, sur le
6 territoire de l'actuelle Republika Srpska et ce qui était à l'époque la
7 République serbe de Bosnie-Herzégovine, où nous étions majoritaires, il n'y
8 avait pas de guerre.
9 Excellences, il n'y a eu aucun schéma de comportement des Serbes dans
10 les municipalités. Lorsque nous voyons que la guerre en Bosnie-Herzégovine
11 s'est déroulée principalement à Sarajevo et dans les parties du territoire
12 où étaient présents les Musulmans et les Croates, quand nous voyons que la
13 guerre y faisait rage dès le 5 avril, alors que dans les localités serbes
14 et les régions serbes environnantes cette guerre n'a démarré que plus tard
15 le 20 mai, il est tout à fait clair que ce n'est pas la partie serbe qui a
16 commencé la guerre et qu'il n'y a pas eu de guerre avant que celle-ci ne
17 soit initiée par la partie musulmane. La plus grande partie des
18 municipalités ont été entraînées dans la guerre plus tard seulement. En
19 Republika Srpska, il y a eu un accord portant formation de deux
20 municipalités et devant permettre de poursuivre une vie pacifique. Mme
21 Rabija Subic [phon], une Musulmane en vue et progressiste, a adressé une
22 lettre ouverte à M. Izetbegovic demandant d'apporter son soutien à cette
23 conception, à ce type d'accord dans d'autres municipalités. Et au lieu de
24 recevoir son soutien, ce qui est arrivé c'est un ordre intimant aux
25 Musulmans de Bratunac et de Vlasenica de tirer et de se battre. On a
26 transformé ces deux municipalités en le théâtre d'une boucherie, et ce
27 n'était pas par ma volonté, ce n'était pas du tout ce que j'avais conçu,
28 mais uniquement du fait de l'attaque de ces extrémistes et de ces criminels
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1 du parti SDA.
2 Cela, nous l'avons vu se répéter dans les municipalités de la
3 Krajina, où malgré la guerre, il n'y avait toujours pas de guerre dans le
4 reste du territoire de la Bosnie-Herzégovine jusqu'à la fin du mois de mai,
5 moment auquel la guerre a été commencée par ces extrémistes avec pour
6 commencer la rupture des négociations, alors que chacune de ces
7 municipalités aurait pu avoir sa propre municipalité serbe avec ses
8 services municipaux, sa police, et cetera, et éviter ainsi tout conflit.
9 Or, tous ces pourparlers ont été interrompus partout, juste avant la fin du
10 mois de mai, sur ordre du SDA. Nous avons d'ailleurs entendu un témoin à
11 cet effet. C'est sur ordre du SDA que cela a été interrompu et cela a été
12 fait sur la base d'un intérêt stratégique, à savoir que la rive gauche de
13 la rivière Sana puisse être reliée à Cazin et à Bihac. Donc, dans cette
14 perspective, les combats ont commencé dans la vallée de la rivière Sana.
15 C'est quelque chose dont je n'étais pas au courant. Je ne l'ai appris
16 que plus tard. Nous n'avions pas de communication fiable avec la Krajina
17 pendant plusieurs mois, et ce, non seulement en raison de la coupure du
18 corridor, celui-ci n'ayant été définitivement consolidé et stabilisé qu'à
19 la fin de l'année, mais également en raison du manque de liaisons
20 téléphoniques et autres. Les municipalités de Kljuc, de Sanski Most, de
21 Prijedor et de Bosnaski Novi se trouvent dans la vallée de la Sana. Ces
22 quatre municipalités ont été incendiées fin mai et début juin sur la base
23 de cet intérêt stratégique visant à s'assurer le territoire situé sur la
24 rive gauche de la Sana, afin de l'annexer à la région de Cazin. Et bien que
25 nous n'ayons pas eu de communications adaptées ni de contacts sur place, la
26 Région autonome de Krajina disposait de sa propre assemblée, de son
27 gouvernement, de ses ministres, ils faisaient des efforts. Les habitants de
28 la Krajina ont toujours eu ce désir d'autonomie par rapport à Sarajevo. Les
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1 Serbes sur leur territoire l'avaient aussi. Nous avions sur place des gens
2 de confiance; par exemple, M. Kupresanin, le président de la Région
3 autonome de Krajina, qui, en son nom propre et sur sa propre initiative,
4 mais également en mon nom à moi, se rendait sur le terrain, rendait visite
5 aux maisons d'arrêt, faisait libérer des députés, coopérait avec la Croix-
6 Rouge internationale comme avec la Croix-Rouge locale, la nôtre. Il tirait
7 le signal d'alarme là où il pensait qu'il pouvait y avoir des victimes
8 civiles. Il s'est rendu en visite à Manjaca et dans les prisons de Prijedor
9 afin d'apporter son aide et de diminuer les souffrances. Mais il n'y a pas
10 eu de prisons avant l'attaque lancée contre Prijedor. La prison a été créée
11 comme maison d'arrêt aux fins de l'instruction parce que leur unité de
12 détention ne pouvait accueillir qu'une dizaine de détenus. Or, lorsque
13 cette attaque massive contre Prijedor s'est produite le 30 mai, il y a eu
14 un très grand nombre de prisonniers. Cinquante-neuf pourcents de ces
15 prisonniers ont été relâchés immédiatement après un premier tri. Ces
16 prisons n'étaient absolument pas des camps. Elles ont existé uniquement
17 pendant que les juges d'instruction et les enquêteurs ont continué leurs
18 travaux, et ils travaillaient quotidiennement. Dès que ces travaux ont été
19 terminés et dès que le tri a été terminé, 41 % des détenus ont été
20 transférés à Manjaca parce qu'ils avaient participé aux combats, et
21 certains d'entre eux, d'ailleurs, avaient également fait l'objet de
22 poursuites au pénal, et 60 % d'entre eux ont été relâchés. Donc, il n'y a
23 pas de prisons avant la guerre, avant les affrontements, et d'affrontements
24 et de guerres, il n'y en a pas eu avant fin mai. Or, ceci, nous
25 l'ignorions. Nous n'avions pas connaissance de cela ou n'avions pas,
26 d'ailleurs, moyen d'influencer cela. Srdjo Srdic, un médecin de Prijedor et
27 président de la Croix-Rouge à Prijedor, député par ailleurs, nous informait
28 quand il le pouvait de ce qui se passait. Et il me garantissait avec la
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1 plus grande fermeté qu'il n'y avait aucun fil barbelé, aucune clôture
2 entourant Trnopolje, et j'ai pu m'en convaincre plus tard seulement. A
3 cette époque, je me trouvais à la Conférence de Londres. J'ai
4 personnellement invité les journalistes britanniques à venir. Et j'ai même
5 transporté Penny Marshall et son équipe à bord de notre appareil, l'avion
6 de notre gouvernement, et je leur ai ouvert la Republika Srpska pour qu'ils
7 puissent se rendre partout et tout voir. Je les ai encouragés à prendre une
8 escorte là où ils le souhaitaient, et là où ils le souhaitaient pas, de ne
9 pas en prendre une, mais je les encourageais à tout voir. Parce que je ne
10 souhaitais rien cacher. Je ne voulais que nous cachions rien. Et je
11 souhaitais que la présence de journalistes puisse apporter un peu plus de
12 sérieux et de contrôle là où il y avait des éléments incontrôlés, pour que
13 ces éléments fassent preuve d'un peu plus d'attention. C'est encore une des
14 bêtises, disons, que j'ai faites parce qu'aucun Etat au monde n'a laissé
15 passé des journalistes jusqu'à la ligne de front.
16 Moi, je peux dire que ceux qui se sont présentés auprès de nous comme des
17 journalistes nous ont fait plus de mal et ont fait plus de dégâts que les
18 bombes de l'OTAN. Lorsqu'ils faisaient se poster quelqu'un à côté d'un fil
19 barbelé pour prendre une photographie, alors que cette personne n'était
20 absolument pas dans une enceinte en barbelé, c'est quelque chose que Thomas
21 Deichmann a révélé et qui est tout à fait clair maintenant. Plus personne
22 n'est en mesure de -- ceci dit, le problème, c'est qu'une fois que cela
23 avait été fait et monté de la sorte, plus personne n'était en mesure
24 d'expliquer aux gens et d'expliquer au public que les choses n'étaient pas
25 ainsi. Toutes les actions qui ont été les nôtres étaient toujours en retard
26 d'un coup par rapport aux Musulmans, notamment dans le cadre des
27 conférences sur la Bosnie-Herzégovine. Ce n'est qu'après avoir été expulsés
28 de la Défense territoriale des Musulmans, après que les Musulmans aient mis
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1 à pied un général serbe qui était à la tête de cette structure, que nous
2 avons constitué notre propre Défense territoriale. Ce n'est que le 22 avril
3 que j'ai présenté un programme dans lequel il était question de ne rien
4 accepter de ce qui avait été pris par la force. Pendant toute cette
5 période, nous avons continué à participer à la conférence co-présidée par
6 Carrington et Cutileiro, et ensuite nous avons également participé à la
7 conférence présidée par Cyrus Vance et Lord Owen. Mais la guerre continuait
8 à faire rage malgré nous. Il n'y avait aucune possibilité d'influencer le
9 cours des événements. Notre décision portant constitution d'une armée, nous
10 l'avons prise le 12 mai, mais la décision portant organisation de ces
11 forces armées n'a été adoptée que le 15 juin. Toute l'année 1992, nous
12 l'avons passé à mettre en place, à organiser et à structurer l'armée de la
13 Republika Srpska, et c'est à grand-peine que nous avons réussi à constituer
14 des unités à partir de paysans et de gens simples. C'était une guerre
15 défensive, et il n'a été question que de défense pendant toute cette
16 période. Nous n'avons absolument pas essayé de conquérir des territoires
17 musulmans, puisqu'il était tout à fait clair qu'un remaniement du
18 territoire de la Bosnie-Herzégovine allait intervenir en trois républiques,
19 une réorganisation territoriale, alors que nous, nous avions sous notre
20 contrôle environ 60 % du territoire. Je considérais donc qu'il aurait été
21 très peu avisé de chercher à conquérir encore plus de territoire que cela.
22 Donc, il s'est agi de combats au cours desquels nous avons essuyé de très
23 nombreuses pertes. D'ailleurs, nous avons essuyé le plus grand nombre de
24 pertes lors des soi-disant cessez-le-feu.
25 Les événements dans les municipalités ont joué leur rôle. En dehors de Foca
26 et de Zvornik - et évidemment de Bratunac - où dès le début mai le juge
27 Zekic a été tué, quatre semaines, ceci dit, après les tueries de Sarajevo.
28 Donc, en dehors de Foca et de Zvornik, au sujet desquels nous ne savions
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1 rien, dans toutes les autres municipalités la guerre a éclaté bien plus
2 tard. A Zvornik, nous n'avions pas la moindre idée de ce qui se passait.
3 Jamais personne n'a demandé à Arkan de venir. Et je considère qu'il n'a
4 jamais été sur place. Peut-être que certains de ses hommes ont été
5 présents. Il y a eu beaucoup de paramilitaires. Mais nous avons vu ici même
6 que le 16 avril, notre police ne savait même pas qui dirigeait Zvornik, et
7 le secrétaire du ministère au sein de notre police appelle Arkan pour lui
8 demander qui contrôlait Zvornik. La même chose s'est passée à Foca. Au mois
9 d'avril, alors qu'il y avait encore de la neige, M. Koljevic est allé sur
10 place pour voir comment il pouvait apporter son aide et il en a réchappé de
11 peu. Ils l'ont presque exécuté, alors qu'il était venu pour voir ce qui se
12 passait avec les Serbes qui étaient encore restés là-bas. Donc, tout ce
13 cours des événements était quelque chose sur quoi nous n'avions aucune
14 influence.
15 Quand je parle de notre participation aux conférences, Excellences,
16 de nombreux événements et incidents se sont produits lorsque j'étais à
17 l'étranger en train de participer à des pourparlers. Pour moi, il était
18 tout à fait clair que la raison n'en était pas à rechercher dans mon
19 absence, mais tout simplement parce qu'on provoquait des incidents pendant
20 les conférences pour les faire capoter.
21 Le 27 mai [comme interprété], il y a eu cette explosion dans la rue
22 Vase Miskin. Ceci a été retiré de l'acte d'accusation contre moi, mais
23 c'est un événement qui a bien eu lieu. L'ambassadeur Cutileiro a passé un
24 coup de téléphone en disant qu'il était contraint d'interrompre la
25 conférence parce qu'un mortier avait tué des gens dans une file d'attente
26 pour acheter du pain. Donc, j'ai fait une heure de pause pour m'adresser à
27 notre armée et à notre police et pour leur demander ce qu'il en était. Ils
28 m'ont répondu que c'était une ineptie, que nous n'avions pas tiré et que
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1 dans une rue aussi étroite il était impossible de viser pour procéder à un
2 tir de mortier. Mais les médias étaient déjà sur place, on avait déjà
3 publié toutes sortes de choses et d'images. Ceci dit, moi, c'est en toute
4 certitude que j'ai informé l'ambassadeur Cutileiro du fait que nous
5 n'étions pas responsables de ces événements et qu'il ne devrait pas
6 accorder de crédit à de telles versions. Alors, ceci a été le modèle de
7 nombreux incidents ultérieurs à Sarajevo. Malheureusement, il y a eu
8 également les événements de Koricanske Stijene, qui n'ont pas été du fait
9 des Musulmans. C'étaient des criminels serbes qui en étaient responsables.
10 Alors, l'armée en a informé les autorités de l'Etat, qui m'ont informé moi-
11 même, et j'ai été horrifié lorsque j'ai appris cela, et j'ai exigé que deux
12 présidents de municipalités jettent la lumière sur ces événements et
13 prennent toutes les mesures nécessaires. J'ai haussé la voix et crié sur
14 des personnes qui n'avaient aucune part dans ces événements, qui étaient
15 tout à fait innocentes, notamment sur des membres de la direction de
16 Skender Vakuf. Alors, le 28, je suis revenu à Belgrade après la fin de la
17 conférence. Le 29, j'étais à Belgrade, et juste après je suis arrivé à
18 Pale. Et le ministre Subotic s'est rendu immédiatement après sur place,
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 (expurgé)
28 A la fin du mois de septembre 1992, les Musulmans de Srebrenica ont tué un
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1 grand nombre de civils et un certain nombre de nos soldats entre Srebrenica
2 et Milici. A Vlasenica, on a organisé des obsèques pour de nombreuses
3 personnes. J'étais dans des pourparlers, mais je suis venu assister à ces
4 funérailles. J'y ai tenu un discours tout à fait mesuré, qui était marqué
5 par l'affliction avant tout, nous avons eu l'occasion de l'entendre.
6 C'était une situation terrible. Entre Srebrenica, Vlasenica, Bratunac et
7 Zvornik, dans une grande salle où se trouvaient environ 20 000 Musulmans en
8 armes auxquels nous envoyions des messages pour leur dire qu'il n'était pas
9 nécessaire qu'ils se battent, que ceci allait probablement devenir une
10 unité constitutive musulmane. Or, nous y avons essuyé des pertes terribles.
11 Des paysans dans leurs champs, des chauffeurs, des conducteurs dans des
12 mines, dans toutes sortes de situations de travail, des ouvriers. Et c'est
13 en contournant par Sekovici et Crni Vrh [phon] que nous circulions. Mais
14 ils montaient quand même des embuscades et tuaient des passagers de
15 véhicules entiers, d'autobus entiers. Donc, ils nous empêchaient d'avoir la
16 moindre communication et ils ont rendu complètement impossible le maintien
17 de la Republika Srpska et la survie du peuple dans cette partie du
18 territoire. Pendant toute cette période jusqu'au printemps 1993, nous avons
19 eu à souffrir de tout cela avant que n'intervienne la contre-offensive à
20 laquelle nous avons été contraints pour les neutraliser.
21 A ce moment-là, nous avons pris Cerska, nous avons pris Konjevic Polje, et
22 cetera, et c'est alors que nous avons assisté à une campagne et à des
23 mensonges inouïs qui visaient à montrer comment le sang coulait à Cerska,
24 comme un grand nombre de personnes avaient été tuées là-bas, alors que nous
25 avions trouvé sur place des Serbes crucifiés, qui avaient été fait
26 prisonniers ou enlevés. Malgré tout, il y a eu cette histoire sur les
27 crimes des Serbes à Cerska qui a circulé, qui visait à crier au loup et qui
28 s'est propagée dans les médias. Et si le général Morillon ne s'était pas
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1 rendu sur place, on en serait resté à cette version et on aurait continué
2 d'accorder crédit à cette histoire disant qu'il y avait un génocide commis
3 par des Serbes. Les hommes en âge de combattre sont partis à Srebrenica, du
4 côté des Musulmans, et après leurs familles. C'était leur choix. Ils sont
5 allés à Tuzla puis à Srebrenica.
6 Nous avons continué notre action, mais j'ai arrêté la progression de notre
7 armée. Certains de mes généraux ont compris cela, mais d'autres ont réagi
8 par la colère. Les simples soldats étaient très en colère parce que j'ai
9 arrêté l'avancée de notre armée devant Srebrenica en 1993, parce que je
10 savais qu'à ce stade-là déjà quelque 1 300 Serbes avaient été tués, qu'il
11 s'agissait avant tout de Serbes. Et à cette époque-là, les ministères des
12 Affaires étrangères de nombreux Etats ont fait des communiqués officiels
13 affirmant que nous étions entrés dans Srebrenica. Bien sûr, personne ne
14 s'est excusé de cela auprès de nous. Bien sûr, cette propagande pour ce qui
15 est de la commission de crimes était identique à la propagande qui a eu
16 lieu après la chute de Srebrenica en 1995. C'étaient les mêmes rhétoriques,
17 les mêmes façons de présenter la situation. Et vraiment, il s'agissait donc
18 de la propagande, donc personne ne nous croyait.
19 Je croyais au facteur de la communauté internationale. Et très souvent,
20 j'étais en conflit avec notre armée. J'attaquais les officiers pour leur
21 demander pourquoi cela était fait. Mais il s'est avéré que je croyais plus
22 à ces rumeurs, et non pas mes soldats. Ce qui a fait que je me suis mis
23 dans une situation très difficile pour ce qui est des responsables locaux
24 et pour ce qui est de nos officiers dans nos commandements, puisque
25 j'acceptais toutes les informations, toutes les allégations concernant des
26 attaques, et la plupart d'entre elles n'étaient pas vraies.
27 L'un des malentendus qui arrivait le plus souvent, ou, plutôt, la source
28 des malentendus entre les autorités civiles et l'armée était la question
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1 liée aux convois. J'avais d'autres obligations. Je devais m'occuper des
2 kilomètres de front. Je ne m'occupais pas du commandement opérationnel, ni
3 au niveau tactique, mais je m'occupais de l'alimentation de l'armée et du
4 peuple se trouvant près des lignes, puisqu'on ne pouvait pas cultiver la
5 terre là-bas puisqu'il y avait la ligne du front actif. Mais, malgré tout
6 cela, je participais aux négociations avec les représentants de la
7 communauté internationale et j'ai toujours répondu à des appels pour ce qui
8 est du passage de convois.
9 Je vous assure qu'à tout moment il y avait à peu près 700 camions de
10 transport sur les routes de la Republika Srpska. Et le seul moyen pour ces
11 convois de passer jusqu'en territoire musulman était de passer sur le
12 territoire de la Republika Srpska. Les problèmes concernant le passage des
13 convois ont été provoqués de façon délibérée en envoyant le plus grand
14 nombre de camions ou en les chargeant avec des marchandises qui n'étaient
15 pas enregistrées ou apparaissant sur les passages qui n'étaient pas
16 annoncés au préalable, où les soldats ne savaient pas qu'il y aurait des
17 convois qui devaient passer. Et dans de telles situations, encore une fois,
18 nous faisions tout pour que les civils de l'autre côté de la ligne du front
19 obtiennent l'aide humanitaire. Ce phénomène, à savoir le passage de l'aide
20 humanitaire a été quelque chose qui a été introduit en pratique par les
21 Serbes lors de la guerre entre la Serbie et la Bulgarie. Henry Dunant, qui
22 était le fondateur de la Croix-Rouge, a introduit cela et nous étions fiers
23 de cela. Lorsque l'aide humanitaire devait passer de l'autre côté en
24 Bulgarie pour les peuples pauvres de la Bulgarie, les Serbes laissaient
25 passer ces convois.
26 Le Pr Koljevic, l'un des personnages les plus humains que j'ai connus, est
27 tombé malade parce qu'il s'efforçait à ce que les convois passent. Et je
28 vous assure que j'attaquais souvent nos commandants locaux de façon
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1 injustifiée parce que les Musulmans obtenaient donc l'équipement militaire.
2 Et après chaque passage de convoi, on saisissait non seulement des bottes,
3 mais également du carburant, des munitions. Et j'avais beaucoup de
4 difficultés pour ce qui est de cela, pour que cela ne se produise plus,
5 pour éviter que le peuple ne se rende pas compte qu'il s'agissait de l'aide
6 militaire et non pas de l'aide humanitaire. Et je dis encore une fois que
7 malgré toutes ces obligations, lorsqu'ils faisaient appel à moi, nous nous
8 efforcions à ce que la situation s'améliore et à ce que les souffrances du
9 peuple s'apaisent.
10 Par exemple, Sarajevo, d'où nous étions chassés, nous étions à peu près 200
11 000 à Sarajevo. Il y avait entre 50 000 et 70 000 Serbes qui sont restés à
12 Sarajevo, qui ne pouvaient pas sortir de Sarajevo; et ceux-là, on ne les
13 laissait pas sortir de Sarajevo. Et il n'est absolument pas vrai que nous
14 aurions bombardé Sarajevo sans aucune raison. Chaque obus qui tombait sur
15 la ville me provoquait de la douleur. Mais dans cette ville il y avait plus
16 de 1 000 [comme interprété] cibles légitimes. Je proposais que Sarajevo
17 soit démilitarisé, mais cela a été refusé. J'ai proposé à ce que Sarajevo
18 soit mis sous la gestion des Nations Unies, et cela a été refusé. Ils ont
19 essayé d'avoir Sarajevo militarisé, avec trois divisions, l'une dans la
20 ville et deux autour de la ville, avec au maximum entre 50 et 70 000 de
21 membres de troupes, et ils ont donc provoqué des incidents qui étaient
22 exploités par les médias. En même temps, ils ont dénigré les Serbes et ils
23 ont fait persisté l'espoir des responsables musulmans que quelqu'un de la
24 communauté internationale allait entrer en guerre et combattre contre les
25 Serbes de leur côté, du côté des Musulmans.
26 Par exemple, les incidents à Sarajevo. Les meurtres en masse des femmes,
27 des enfants, qui faisaient la queue pour l'eau, pour le pain, surtout à
28 Markale I, Markale II. Ça faisait partie de la propagande malhonnête qui a
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1 été utilisée pour que le Tribunal confirme cela comme des événements qui se
2 sont réellement passés. Markale I, c'était une chose inventée. Markale I
3 s'est produit après que le 4 février, à Dobrinja, il y a eu un incident
4 monté dans une queue pour l'aide humanitaire, me semble-t-il, et à cette
5 date-là, le 4 février, le marché était vide, il n'y avait pas de
6 marchandise. Il y avait donc 500 ou 600 personnes, et là, on a fait cette
7 mise en scène du massacre.
8 On peut voir dans les documents que j'ai toujours demandé : "Il faut
9 reconnaître si c'était nous, parce que le mal serait moindre. Il ne faut
10 pas mentir, il faut qu'on soit crédible, il faut qu'ils nous croient." Mais
11 l'armée m'a persuadé qu'il n'était pas possible de provoquer cela par un
12 seul projectile, et nous ne pouvions pas savoir si entre 500 et 600
13 personnes ont péri. Il n'était pas probable non plus que ce nombre de gens
14 se trouve sur un tel marché, et qu'il n'était pas possible de toucher cet
15 endroit avec ces projectiles, ni provoquer autant de dommages vu les
16 étalages, les marchés, et cetera. C'était une mise en scène montée. Et il
17 est évident qu'il y a eu des pertes sur ces marchés. Il y avait quelques
18 personnes qui ont été tuées, mais on a vu également des mannequins qui
19 ressemblaient à des hommes qui ont été chargés sur les camions pour les
20 médias de la communauté internationale. Et nous avons été déterminés pour
21 ce qui est de ne pas accepter les résultats de l'enquête si le côté serbe
22 n'allait pas participer à ces enquêtes. Et l'enquête que nous avons menée a
23 montré, et eux ils ne nous ont pas permis d'enquêter sur cet incident.
24 Pour ce qui est du Markale II, Markale II eut été également une mise en
25 scène puisque qu'ils ont essayé de faire augmenter la crise à la fin du
26 mois de mai, mais c'était un projet raté. Une décision a été prise quelque
27 part pour que la guerre finisse. Et les bombardements stratégiques des
28 positions serbes qui étaient censés changer le rapport des forces, nous ont
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1 donc obligés de signer la défaite. Mais cela s'est produit à la fin du mois
2 de mai, et vers la fin du mois d'août 1995, il y a eu une occasion pour que
3 cela change, mais encore une fois, il y a eu Markale II, encore une mise en
4 scène. De notre côté, on n'a pas tiré et l'obus n'a pas pu être lancé de
5 cette façon-là. Mais encore une fois, ils ne nous ont pas permis de
6 participer à l'enquête là-dessus. Au contraire, certains membres de la
7 FORPRONU ont coopéré avec la police musulmane pour reprendre les éléments
8 de leur enquête et pour les ajuster avec les conclusions de leur enquête
9 mais, bien sûr, ils n'auraient pas dû faire cela.
10 Donc, on nous a mis dans la situation où on n'a pas pu trouver quelqu'un
11 qui aurait été impartial pour nous dire ce qui s'était passé. Les Musulmans
12 ont bénéficié d'un tel soutien pour procéder à ces ruses, et nous, de notre
13 côté, nous étions impuissants, nous ne pouvions rien faire pour éviter
14 cette catastrophe. Markale II représente un exemple par excellence. Il y a
15 eu une explosion qui s'est produite là-bas. Il y a eu des gens qui ont
16 tués, mais il y avait également des mannequins qui ont été ramenés du front
17 sur le marché, comme c'était le cas pour Markale I. Il y a eu même des
18 cadavres, des gens qui sont morts de mort naturelle et dont les cadavres
19 ont été ajoutés à ce groupe de cadavres, pour donner une image encore plus
20 catastrophique des souffrances.
21 Et pour ce qui est des tirs de tireurs embusqués, je dois dire que j'ai
22 horreur de cela, j'ai eu toujours horreur de cela parce que je ne considère
23 pas cela comme une activité humaine, mais c'était l'utilisation de la
24 méthode militaire pour éliminer certaines personnes du côté ennemi. Nous, à
25 Sarajevo, nous ne pouvions pas savoir qui, parmi eux, était Serbe et qui
26 était Musulman; nous sommes pareils et il n'était pas nécessaire de
27 développer de telles activités de tireurs embusqués. Moi, j'ai été
28 initiateur de beaucoup d'accords qui ont été signés, au moins certains
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1 d'entre eux, mais ils n'ont pas été respectés. Dans la ville même de
2 Sarajevo, près de la ligne du front, dans la portée des tirs d'infanterie,
3 c'étaient les Musulmans qui étaient en situation favorable parce qu'ils
4 pouvaient utiliser les bâtiments les plus hauts. Ils tiraient sur Grbavica,
5 où ils pouvaient toucher des petites filles, des femmes âgées, à Vojkovic,
6 par exemple. Par exemple, il y avait deux femmes qui ont été touchées par
7 une seule balle. Ils ont utilisé des sportifs avec des médailles pour les
8 employer en tant que tireurs embusqués. Ils tiraient sur leurs propres
9 hommes. Et pour ce qui est d'échanges des tirs en rafale, pour ce qui est
10 du pont de Vrbanja, ils ont accusé des tireurs embusqués serbes pour cela,
11 bien qu'il soit agi des combats avec l'utilisation des armes automatiques.
12 Pour ce qui est de ces crimes qu'ils ont commis envers leur propre peuple,
13 cela a pu être résolu avec la participation de quelqu'un qui aurait été
14 tout à fait impartial. Malheureusement, nous ne pouvions pas bénéficier
15 d'une telle activité impartiale, puisque les représentants de la communauté
16 internationale venaient là-bas et ils avaient beaucoup de préjugés pour ce
17 qui est des Serbes, et nous ne pouvions pas dévoiler tout cela. Nous étions
18 complètement piégés et tout ce qu'on a fait pour ce qui est de Sarajevo n'a
19 jamais été accepté. Nous n'avons jamais donc coupé l'électricité et l'eau.
20 Ils ont, par exemple, tiré sur un dispositif qui était nécessaire pour
21 avoir de l'eau. Mais pour ce qui est des réservoirs, des châteaux d'eau à
22 Jahorina, par exemple, on n'a jamais fermé ou coupé l'approvisionnement en
23 eau pour ce qui est de ces châteaux d'eau. Pour ce qui est des coupures
24 d'électricité, ils ont fait cela, et ils ont vendu de l'eau, et les gens à
25 qui ils ont vendu de l'eau -- les gens qui vendaient de l'eau n'avaient
26 aucun intérêt à ce que cet eau soit acheminé de façon gratuite.
27 Pour ce qui est des bombes aériennes, j'ai ouï dire -- enfin, j'ai très
28 superficiellement appris que l'on montait des moteurs de fusée qui étaient
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1 fabriqués de façon tout à fait normale pour faire des tests et pour essayer
2 de les utiliser sur des polygones de l'armée de Yougoslavie pour établir
3 des tableaux de tir. Alors, personne n'était censé me demander mon
4 autorisation pour ce qui est de certaines innovations ou modifications au
5 niveau de ce qu'utilisait l'armée. On ne m'a pas demandé cela, parce que
6 c'est une profession militaire. C'est opérationnel et tactique du point de
7 vue du commandement et de la gestion des troupes. Je ne me suis jamais mêlé
8 de la chose, mais je n'ai jamais ouï dire que telle bombe aurait été
9 utilisée où que ce soit dans une agglomération quelconque. J'ai appris que
10 c'était utilisé pour casser ou briser des bunkers dans les montagnes et
11 c'était utilisé par -- donc, fabriqué par l'industrie, mais je n'ai pas ouï
12 dire que cela a été utilisé dans des agglomérations, des lieux habités, et
13 il n'y a eu aucune information convaincante à cet effet.
14 Pour ce qui est de Srebrenica en 1995, je ne me suis pas occupé de ce
15 commandement tactique et opérationnel, mais à chaque fois que je passais
16 par une agglomération où il y avait un commandement quelconque, et en
17 particulier un commandement d'un corps d'armée, je passais pour dire
18 bonjour aux gens. Et c'est ainsi que je suis passé par Vlasenica avant le
19 début de l'opération de Srebrenica, vers le 25, 26 juin, et depuis dix
20 jours il y avait déjà eu une offensive terrible lancée par les forces
21 musulmanes autour de Sarajevo, et les forces de Naser Oric avaient repoussé
22 nos effectifs et avaient participé de façon active au côté du 1er Corps
23 d'armée issu de Srebrenica. Alors, sans parler ici de la façon dont se
24 présentait cette zone protégée, qui était une place d'armes d'où l'on
25 faisait des excursions, d'où les forces d'Oric opéraient des excursions
26 pour éviter et contourner les effectifs de la Republika Srpska et aller là-
27 bas dans le mou, c'est-à-dire là où il y avait des civils pour tuer, pour
28 égorger, pour couper les oreilles, arracher les yeux, incendier les maisons
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1 et revenir vers les lieux qui étaient protégés par les Nations Unies.
2 Alors, je n'ai pas donné l'ordre, mais j'ai été d'accord pour qu'il y ait
3 eu une opération tactique de lancée aux fins de séparer les zones protégées
4 de Srebrenica et Zepa, non pas pour ramener ceci à un réseau urbain, ou à
5 la taille d'un réseau urbain, mais ramener les choses de la façon à les
6 rendre conformes à ce qui avait été convenu par les accords, et éviter
7 qu'il y ait une voie de communication entre Srebrenica et Zepa, parce que
8 les hélicoptères atterrissaient à Zepa et ensuite on transportait vers
9 Srebrenica par voie terrestre des quantités énormes de matériel de guerre.
10 Le 9 au matin, les Musulmans ont décidé de ne pas défendre Srebrenica et
11 leurs autorités locales ont demandé à ce que Srebrenica se rende et à ce
12 qu'il y ait évacuation de la population civile. Le même jour, avant minuit,
13 le général Krstic a demandé à l'état-major principal des instructions pour
14 ce qui était de savoir ce qu'il fallait faire, parce qu'il pouvait entrer
15 dans Srebrenica, et il a demandé l'opinion de la direction. Je n'ai pas
16 donné l'ordre, j'ai donné mon approbation. Jusque-là j'arrêtais notre
17 armée, je la stoppais. Et on disait de notre armée que c'était avance,
18 arrête, avance, arrête. Donc, il n'y avait aucune finalité pour ce qui
19 était de les vaincre; eux voulaient nous vaincre, nous, et les Croates
20 aussi le voulaient. Ils voulaient la Bosnie pour eux. Nous ne voulions pas
21 la Bosnie entière pour nous, et c'est la raison pour laquelle la guerre ne
22 nous arrangeait pas.
23 Donc, j'ai donné mon approbation pour que l'on entre dedans, que l'on
24 démilitarise Srebrenica. Et les seuls civils que nous avons pu compter
25 trouver dans Srebrenica, c'étaient les Musulmans. Il n'y avait pas un seul
26 Serbe. J'ai donné l'ordre que ces Musulmans soient protégés et que l'on
27 protège également les bâtiments. J'ai voulu qu'on crée une police, que l'on
28 préserve les civils. Je savais qu'une partie des réfugiés allait peut-être
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1 vouloir s'en aller, mais personne d'entre nous n'a songé, n'a imaginé que
2 la population toute entière allait exprimer le souhait de quitter
3 Srebrenica; ça, ça été pour nous une surprise complète. L'ambassadeur, M.
4 Akashi, nous avait dit que c'était bondé, que les gens voulaient quitter
5 les lieux de Srebrenica pendant toute la durée de la guerre, et que leurs
6 autorités à eux ne les autorisaient pas à partir. Ce n'est pas les nôtres.
7 Alors, ce qui s'est passé c'est que Srebrenica est tombée, les civils se
8 sont trouvés à Potocari, et ont pris soin de lui -- ceux qui étaient
9 censés. Mais nous n'avions aucune information. Nous, moi, je n'ai eu aucune
10 information au sujet de ces civils pour ce qui est des meurtres qui se sont
11 produits à Srebrenica. J'ai reçu comme information le fait qu'il y avait eu
12 de fortes tensions à Bratunac, où il y a eu beaucoup de prisonniers et peu
13 de soldats, parce que la Brigade de Bratunac se trouvait à l'extérieur de
14 Bratunac. Et des gens qui -- enfin, les troisièmes appelés, les deuxièmes
15 appelés, les vieillards, avaient été chargés de garder les prisonniers. Ce
16 n'était pas la première fois que nous avions beaucoup de prisonniers.
17 Pendant la guerre, dans bon nombre de situations, nous avons eu un grand
18 nombre de prisonniers, et s'agissant de ces prisonniers, il y avait une
19 procédure habituelle. On faisait un tri. Il y avait des prisonniers
20 ordinaires qui n'étaient donc pas censés faire l'objet de poursuites au
21 pénal et qui étaient échangés, et il y avait ceux qui pouvaient faire
22 l'objet de procédures au pénal, et là on procédait à des échanges au niveau
23 des lignes de conflit, s'il y avait des échanges de possible, ou alors, on
24 les envoyait aux camps de Batkovici et de Manjaca, et ils étaient soumis à
25 des procédures d'échange.
26 Mais il n'y a absolument pas eu pendant trois années et demie de
27 guerre de raison d'aller s'immiscer dans une procédure habituelle où les
28 prisonniers avaient été traités de façon habituelle, et une fois arrivée à
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1 Manjaca ou à Batkovic par la suite, il y a eu des mises à disposition au
2 niveau de la Croix-Rouge internationale, et tout se passait en règle. Donc,
3 c'étaient des voisins qui s'étaient fait prisonniers les uns les autres.
4 Ils se connaissaient entre eux. Avant que d'arriver à Batkovic ou à
5 Manjaca, il y avait des échanges d'opérées, et c'est sur place qu'il y
6 avait des relations et pistons qui fonctionnaient pour que les gens sortent
7 ou soient échangés, et très souvent on allait à Batkovic, où là on
8 procédait à de gros échanges de prisonniers, en grandes quantités, je veux
9 dire. Alors, très souvent, dans mes documents d'abolition ou de merci, je
10 faisais libérer ceux qui étaient censés être jugés. Mais les soldats
11 ordinaires, ils n'avaient pas à faire l'objet d'abolition quelle qu'elle
12 soit, personne ne les poursuivait en justice. Ils étaient échangés, tout
13 simplement. Il n'y a pas eu d'indication ou d'indice qui dirait que
14 quelqu'un a été tué à Srebrenica ou juste après. Aucune information ne
15 m'est parvenue à ce sujet, ni verbalement ni par écrit. Parce que c'étaient
16 les mêmes types de rumeurs qui avaient circulé, on avait fait en 1993 tout
17 un feu d'artifice au sujet de Cerska et autre. Donc, absolument, il n'y
18 avait pas lieu de prêter foi ou de vérifier les choses parce que je serais
19 encore entré en conflit avec l'armée parce que je les avais, une centaine
20 de fois auparavant, mis en accusation sans raison aucune. Lorsque Mme
21 Albright est venue et lorsqu'elle a trouvé à la surface un corps
22 quelconque, quelqu'un qui avait été tué au combat, alors moi, j'ai donné
23 l'ordre d'enquêter. Je suis allé à l'état-major principal le 22 ou le 23
24 mars et j'ai dit à l'état-major principal que s'agissant de cette
25 propagande, nous n'allions plus la tolérer et qu'au niveau de la
26 présidence, moi et mes co-présidents allions donner des ordres pour
27 procéder à des enquêtes des plus approfondies pour chaque mort à
28 Srebrenica. Et personne au niveau de l'état-major principal n'a dit : Non,
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1 non, Monsieur le Président, ne le faites pas. Laissez tomber, on le fera
2 une fois la guerre terminée. Ils ont tous opiné de la tête et ils ont tous
3 accepté. Une semaine après, j'ai donné un ordre à l'intention de la police
4 et de l'armée, ainsi qu'à l'intention du procureur militaire, à l'intention
5 de tout un chacun, pour ce qui est de procéder à l'enquête et investigation
6 de tout décès à Srebrenica. A la mi-mai, hélas, au bout de cinq ou six
7 semaines, j'ai transféré mes pouvoirs vers Mme Plavsic et je n'ai plus pu
8 suivre la situation au sujet de ce qui s'est passé concernant les enquêtes
9 diligentées au sujet desdits événements.
10 En même temps, en sus des 2 000 kilomètres de front ou presque, j'ai eu de
11 nouveaux kilomètres de front qui se sont créés du fait de la chute de la
12 Slavonie occidentale. On a vu la Dinara [phon]tomber, des municipalités
13 tomber dans la Krajina, Bosansko Grahovo, Glamoc, et on avait mis en péril
14 Drvar et Bosanski Petrovac où il y avait -- enfin, c'étaient des
15 municipalités à 100 % serbe, et Mrkonjic Grad, avec une grande majorité
16 serbe aussi. Donc, il n'y a eu aucune raison ou aucun élément d'information
17 qui nous informerait de la présence d'événements nouveaux. Et il y a eu à
18 chaque fois ces rumeurs, ces espèces de feux d'artifice au niveau de la
19 propagande, comme on en a vu en 1993. Donc, nous n'avons pas eu
20 d'information à ce sujet. Il n'y a pas eu, pour ce qui me concerne,
21 d'information à ce sujet jusqu'à ce que je ne vienne ici, et j'ai appris
22 ici des choses que je ne savais pas.
23 Excellences, un exemple d'autorité soucieuse de ce qui se passait, c'est
24 les autorités serbes dans les municipalités serbes. Nulle part ailleurs il
25 y a eu des personnes auxquelles on aurait touché avant les attaques.
26 Partout on a fourni la possibilité, là où il y a eu possibilité de le
27 faire, qu'il y ait deux municipalités et que chacun se charge de ses
28 propres affaires, que chacun s'occupe de soi-même en attendant une solution
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1 politique. Il n'était pas question d'autre chose. Comment voulez-vous
2 expulser quelqu'un si vous lui donnez la possibilité de créer sa
3 municipalité à côté, dans le même bâtiment, avoir sa propre police, et
4 cetera ? Nous n'avions pas eu l'idée, ni l'intention de reconnaître quoi
5 que ce soit de ce qui constituerait un fait accompli. On voulait que tout
6 soit sujet à négociation. Les 24 et 25 janvier 1992, au parlement de la
7 Bosnie-Herzégovine, j'ai dit que si nous continuions de la sorte, nous
8 allions avoir une guerre civile et une guerre religieuse. Les Serbes
9 allaient fuir vers les régions serbes, les Musulmans vers les régions
10 musulmanes et les Croates vers les régions à eux. On allait avoir des
11 morts, des massacres, et cetera, mais au final on devrait quand même
12 s'asseoir à une table de négociation, signer des accords de paix et créer
13 trois communautés ethniques, et c'est ce qui s'est passé. J'avais proposé
14 d'attendre avec le référendum, de procéder à une régionalisation, Muhamed
15 Cengic avait accepté la chose, et les Serbes sont allés au référendum et
16 l'ont légitimé. Mais nous étions dans une situation impossible. Et moi,
17 j'étais dans une situation impossible qui était celle d'exposer ma
18 communauté ethnique à des périls afin qu'elle périsse et soit massacrée du
19 fait des concessions politiques que j'ai faites vis-à-vis des parties
20 adverses aux fins d'éviter la guerre.
21 Il n'y a pas eu d'exemple de ce type où on aurait fait la guerre,
22 exposés à de telles pressions, à de tels mensonges contre des ennemis qui
23 étaient bien plus nombreux. Parce que, en Bosnie-Herzégovine, la base qui
24 était celle des possibilités ou potentiel des municipalités était de 2 pour
25 1. Dans certaines municipalités, de 6 pour 1, ou de 7 pour 1. Et lorsque
26 l'OTAN s'est mêlé de la chose, il n'y avait plus aucune proportion de
27 respectée. Et nous n'avons jamais entendu dire quelqu'un au monde : Mais
28 prêtons une oreille attentive à la partie adverse, écoutons ce qu'ils ont à
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1 dire.
2 Alors, je voudrais vous dire, Madame et Messieurs, que cette vérité va
3 l'emporter. Ça ne va jamais rien modifier au fait que nous avons fait tout
4 ce qui était dans nos possibilités pour éviter la guerre et pour éviter les
5 victimes. Ça, ce n'est pas une chose qui va s'estomper dans le temps. Donc,
6 nous allons voir les mensonges disparaître et on vivra suffisamment
7 longtemps pour le voir. Merci.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Karadzic.
9 Nous allons faire une pause d'une demi-heure.
10 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.
11 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
12 --- L'audience est reprise à 11 heures 24.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous nous excusons pour le retard. La
14 Chambre a dû se réunir.
15 Bonjour, Colonel. Pouvez-vous passer à la déclaration solennelle, s'il vous
16 plaît.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement de dire la vérité,
18 toute la vérité et rien que la vérité.
19 LE TÉMOIN : ANDREY DEMURENKO [Assermenté]
20 [Le témoin répond par l'interprète]
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir.
22 D'après ce que j'ai compris, l'interprétation en russe est prévue, et je
23 suis heureux de savoir que ma collègue, le Juge Lattanzi, n'aura pas besoin
24 d'interprétation aujourd'hui.
25 Oui, M. Tierger.
26 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. Je sais que c'est
27 difficile, mais vu la configuration du prétoire, je voudrais vous annoncer
28 qu'aujourd'hui Mlle Vega Iodice nous a rejoints, elle se trouve derrière
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1 moi. Je voulais aussi vous faire part d'une brève discussion que j'ai eue
2 avec la Défense sur quelques annotations des documents. Je comprends que
3 cela a été fait de façon anticipative, et nous voulions les porter à
4 l'attention du témoin pour plus d'efficacité. Et ces annotations peuvent
5 être enlevées des documents avant qu'ils soient versés au dossier.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Robinson.
7 M. ROBINSON : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. Cela
8 sera fait.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
10 Monsieur Karadzic.
11 Interrogatoire principal par M. Karadzic :
12 Q. [interprétation] Bonjour, Colonel.
13 R. Bonjour.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche le document 1D6029,
15 s'il vous plaît. Je voudrais m'assurer que le colonel puisse voir le
16 document sur le prétoire électronique.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je le vois.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non -- ah oui. Maintenant oui.
19 M. KARADZIC : [interprétation]
20 Q. Colonel, s'agit-il de votre déclaration, la déclaration que vous avez
21 faite aux représentants de la Défense ?
22 R. Oui, c'est exact.
23 Q. Merci. Avez-vous eu l'occasion de revoir votre déclaration et de la
24 signer ?
25 R. Oui.
26 Q. Merci. Est-elle exacte ?
27 R. Oui, je vous le confirme.
28 Q. Merci. Colonel, est-ce que votre déclaration reflète ce que vous diriez
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1 aujourd'hui si je vous posais exactement les mêmes questions ?
2 R. Oui, je répondrais exactement la même chose.
3 Q. Merci.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Messieurs les Juges, Madame le Juge, j'aimerais
5 verser cette déclaration conformément à l'article 92 ter ainsi que les
6 documents connexes.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous traiterons des pièces connexes à la
8 fin de votre interrogatoire principal.
9 Y a-t-il une objection à la déclaration de l'article 92 ter, Monsieur
10 Tieger ?
11 M. TIEGER : [interprétation] Non, Monsieur le Juge.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document 1D6029 sera versé au
13 dossier.
14 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce D2270, Monsieur le
15 Juge.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] En fait, nous avons abandonné les pièces
17 connexes. Et si vous me le permettez, j'aimerais vous donner lecture du
18 résumé --
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je n'ai pas très bien compris ce que
20 vous venez de dire. Vous abandonnez les pièces connexes; c'est bien cela ?
21 Monsieur Robinson.
22 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, je pense qu'il faisait référence aux
23 pièces supplémentaires.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Veuillez continuer.
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Il y a une erreur dans l'interprétation. J'ai
26 dit pièces "supplémentaires". Je n'ai pas parlé de pièces "connexes".
27 Donc, si vous me le permettez, j'aimerais vous donner lecture du résumé de
28 la déclaration du colonel. Afin de gagner du temps, je vais vous donner
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1 lecture en anglais.
2 [hors micro]
3 L'INTERPRÈTE : Le micro de l'accusé est éteint.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Andrey Demurenko est un général à la retraire
5 de l'armée russe. En janvier 1995, il a rejoint la mission de la FORPRONU à
6 Sarajevo et y a servi jusqu'en décembre 1995 en temps que chef de l'état-
7 major pour le secteur Sarajevo. Le colonel Demurenko a participé à
8 l'enquête sur le bombardement du marché de Markale le 28 août 1995. Il
9 s'est rendu sur les sites deux heures après le bombardement. A son arrivée,
10 il a observé le cratère de l'impact. Il a vu que les experts travaillaient
11 sur le site. Suite à cela, il a donné des instructions aux membres de la
12 FORPRONU qui travaillaient sur le site et ensuite est retourné au quartier
13 général pour préparer les ordres appropriés.
14 A son retour au QG, il a appris que le porte-parole de la FORPRONU en
15 Bosnie-Herzégovine avait, à la hâte, organisé une conférence de presse. Le
16 porte-parole avait déclaré qu'il ne s'agissait que d'un autre exemple d'une
17 atrocité et d'un crime commis par l'armée serbe et qu'il fallait la punir
18 et la condamner en tant qu'ennemi de l'humanité. Le porte-parole n'avait
19 aucun fondement pour passer cette déclaration car l'enquête n'avait pas
20 encore été terminée. Le colonel Demurenko pensait que le porte-parole de
21 l'ONU avait opéré un acte de provocation. Le colonel Demurenko a reçu deux
22 rapports ce jour-là. Le premier était le rapport rédigé par un officier
23 néerlandais, il s'agissait d'un expert en trajectoire balistique. Et le
24 deuxième rapport avait été produit par un expert en balistique qui était
25 soit Croate, soit Bosniaque. Ils avaient déterminé l'angle d'approche de
26 descente au moment où l'obus a atteint le sol. C'était un document très
27 important qui a permis au colonel Demurenko et à son équipe de continuer
28 l'enquête.
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1 Le colonel Demurenko a réuni un groupe d'experts. Leur première tâche
2 consistait à procéder à des calculs balistiques pour soit confirmer ou
3 infirmer les informations qui avaient été fournies par le premier expert
4 sur l'angle d'impact de l'obus à la surface, sur le sol. Deuxièmement, de
5 calculer l'angle de l'obus et l'angle de descente sur la carte. Ensuite,
6 l'enquête devait inclure des enquêtes et des analystes de toutes les
7 positions de tir possibles de cet obus en particulier, y compris des
8 documents, des photographies de ces lieux. Ils ont travaillé pendant trois
9 jours; le 28, le 30 et le 31 août. Le 1er septembre, ils disposaient des
10 résultats de l'enquête et étaient arrivés à des conclusions. Lorsqu'il est
11 allé présenter les résultats de l'enquête et les a montré à l'assistant du
12 commandant, et que l'assistant s'est rendu compte que ces conclusions
13 étaient différentes de celles qui avaient été préparées par le public et
14 par le porte-parole de la FORPRONU, le colonel Demurenko s'est entendu dire
15 qu'il n'y aura pas de publication du rapport. Il serait impossible de le
16 publier ou de donner le rapport au supérieur. En conséquence, le colonel
17 Demurenko, dans son enquête, avait indiqué que les Serbes n'avaient pas
18 tiré l'obus lors de cet échange de tirs.
19 Le colonel Demurenko a visité tous les lieux de tirs possibles du
20 côté serbe, et avait conclu que ces lieux soit n'étaient pas appropriés
21 pour y opérer des tirs de mortier, ou qu'il n'y avait pas de traces de
22 mortiers. Ni les lieux visités du côté serbe de la ligne de confrontation,
23 ni le terrain repris par les écarts de marge de mortier possible qu'il
24 avait vu de ses propres yeux n'auraient pu permettre un tir de mortier.
25 Donc, il était impossible d'utiliser des mortiers. Le terrain n'était pas
26 approprié, car sinon lui ou son équipe aurait vu les traces de tirs de
27 mortier ou de positions de mortier, vu que les mortiers de 120 millimètres
28 sont très lourds et laissent des traces dans le sol. Le terrain à l'est de
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1 son enquête, à l'est de 170 degrés, à plus ou moins 5, était rocheux et
2 truffé de pentes, et donc inadéquat pour les mortiers. Cela s'appliquerait
3 à toutes les coordonnées de moins de 170 degrés.
4 Le colonel Demurenko a également conclu qu'il y avait une chance sur
5 un million que cet obus ait pu atteindre le marché de Markale de là où les
6 positions serbes se trouvaient, gardant à l'esprit la taille de la rue
7 entre les bâtiments à Markale et la distance des positions serbes. A ce
8 moment-là, le colonel Demurenko pensait qu'il avait deux possibilités qui
9 s'offraient à lui pour les conclusions de l'enquête. Première possibilité,
10 cesser toute activité et ne rien faire d'autre pour promouvoir l'enquête et
11 faire ressortir la vérité. Deuxième possibilité, et ce n'était pas la bonne
12 marche à suivre d'un point de vue militaire, déontologique, et d'un point
13 de vue du suivi de la chaîne de commandement, mais il a dû y recourir. Via
14 l'officier de liaison chargé des relations publiques, il est entré en
15 contact avec une société médiatique afin de faire la publicité du rapport.
16 Le colonel Demurenko avait attendu longtemps que quelqu'un de la FORPRONU,
17 du secteur Sarajevo, du commandement de Bosnie-Herzégovine, pour le
18 commandement des Nations Unies, lui demande pourquoi il se trouvait
19 toujours à Sarajevo : Colonel, pouvez-vous produire des documents pour
20 confirmer ou corroborer les informations que vous avez données à cette
21 agence de presse qui s'appelait "Associated Press" ? Mais personne ne lui a
22 rien dit. En lieu de cela, il n'a entendu que deux choses : Nous allons
23 vous éjecter, ou nous allons vous tuer. C'était le seul argument qui était
24 présenté. Personne ne lui a rien demandé. C'était des informations non
25 désirées pour tout le monde.
26 Le colonel Demurenko a été rejeté, lui et ses sources d'information,
27 car cela menait dans une direction non désirée. Il lui semblait que
28 personne au commandement de la FORPRONU ne voulait savoir la vérité. Il a
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1 déclaré publiquement les conclusions de son enquête, et le colonel
2 Demurenko a été menacé par l'officier de liaison, le capitaine Silajdzic
3 [phon], qui lui a dit qu'il lui restait un jour à vivre, qu'il n'avait
4 aucune chance de quitter le quartier général, et qu'au premier carrefour on
5 l'abattrait, qu'un ordre avait été émis de l'abattre.
6 Le colonel Demurenko soupçonnait que l'attaque de Markale II était
7 une attaque terroriste qui provenait de l'intérieur de la ville, même si un
8 obus ne peut exploser que lorsqu'il est tiré d'un mortier. Si quelqu'un le
9 jette d'un toit, il n'explosera pas. Pour simuler l'explosion d'un obus en
10 utilisant un autre appareil explosif, en revanche c'est facile à faire, car
11 le cratère est le même. Si on prend l'obus et qu'on l'arrime avec des vis
12 ou autres choses, et qu'on le fait exploser avec un autre détonateur, le
13 cratère aura l'air d'être le même. Ce sont ces facteurs qui ont conduit le
14 colonel Demurenko à croire que cela ne pouvait pas être un obus de mortier.
15 Le colonel Demurenko pense que d'autres membres des Nations Unies,
16 tels que le lieutenant-colonel Konings, au lieu de mener une enquête
17 appropriée, se sont concentrés dans le cadre de leur enquête à prouver que
18 le côté serbe devait être accusé au lieu de simplement établir les faits et
19 arriver à des conclusions objectives fondées sur ces faits. Les
20 observateurs militaires des Nations Unies et la police bosnienne se sont
21 rencontrés et se sont mis d'accord sur la méthode à employer lors de
22 l'enquête sur les incidents, sur le type de projectile, de la direction de
23 laquelle ces projectiles avaient été tirées, et d'autres faits. Le colonel
24 Demurenko pensait que cela était inacceptable et inhabituel. Les
25 observateurs militaires des Nations Unies auraient dû travailler de façon
26 indépendante.
27 L'une des principales conclusions des documents de la FORPRONU
28 consistait à dire qu'un mortier avait été tiré de moyenne portée ou à une
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1 longue distance, et que si cela avait été le cas, la trajectoire aurait été
2 plus basse que celle qui avait été définie. Le colonel Demurenko pense
3 qu'il ne s'agissait pas là du bon argument pour conclure que les Serbes
4 avaient tiré l'obus de mortier à Markale II. D'après le colonel Demurenko,
5 les mortiers tirés à moyenne distance ou à longue distance auraient une
6 trajectoire plus élevée et pas plus basse et, en conséquence, ne seraient
7 pas passés sous le radar. Le colonel Demurenko pense que la conclusion dans
8 ce document n'était pas professionnel et était une conclusion d'amateur et
9 contre les lois de la physique pour le tir de mortier, en tout cas. Cette
10 conclusion a été tirée par deux [comme interprété] officiers du G2, un
11 poste qui était toujours assumé par un officier du renseignement de l'armée
12 américaine.
13 Le colonel Demurenko pense que les médias de masse, les journalistes,
14 les reporteurs, et ses collègues occidentaux de la FORPONRU et les
15 observations militaires des Nations Unies répandaient des rumeurs selon
16 lesquelles les Serbes étaient des agresseurs, et qu'ils voulaient détruire
17 l'entièreté de la Bosnie. Cette idée n'était pas réaliste lorsqu'on la
18 comparait à la situation sur le terrain; 60 % du personnel de la FORPRONU
19 était en faveur de l'idée selon laquelle les Serbes étaient les agresseurs
20 parce que leurs commandants et les médias ne leur montraient que des faits
21 triés sur le volet, et on ne leur montrait pas ce que l'autre partie, le
22 côté musulman de Bosnie, faisait. Les 40 % restant du personnel des Nations
23 Unies avaient leur propre opinion, mais ne disaient rien à ce sujet et
24 n'osaient s'exprimer qu'en privé sur leur avis personnel. Les rapports de
25 la FORPRONU jetaient constamment la pierre aux Serbes pour la situation à
26 Sarajevo.
27 Le colonel Demurenko a observé que même si les observateurs
28 militaires des Nations Unies et la FORPRONU étaient deux forces différentes
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1 à Sarajevo, avec deux chaînes de commandement différentes, dans la pratique
2 c'étaient les mêmes personnes. Les observateurs militaires des Nations
3 Unies étaient censés s'acquitter de différentes tâches et de détecter tous
4 types d'activités militaires, que ce soit une activité offensive ou
5 défensive. Et beaucoup d'observateurs militaires des Nations Unies étaient
6 partiaux pour le côté musulman de Bosnie et n'apportaient des informations
7 que sur les tirs rentrants, mais pas sur les tirs sortants et tirés par les
8 Musulmans de Bosnie, et donc on peignait un tableau des tirs à Sarajevo
9 comme étant une agression serbe et un bombardement serbe.
10 Le colonel Demurenko a rencontré deux fois une journaliste de la CNN,
11 Mme Amanpour, à l'hôtel Holiday Inn, et il lui a demandé pourquoi elle
12 faisait de la propagande à l'encontre des Serbes, et elle lui a répondu que
13 ce n'était pas ses affaires. A plusieurs reprises, il a eu l'impression que
14 les Musulmans de Bosnie tiraient sur leur propre population, mais il était
15 difficile de prouver cela parce que le haut commandement leur disait que ce
16 genre d'enquête, si elle avait lieu, cesserait.
17 Le colonel Demurenko était conscient que l'armée des Musulmans de Bosnie à
18 Sarajevo procédait à des tirs isolés et bombardait ses propres civils. Le 8
19 juin 1995, le colonel Demurenko a rédigé un rapport déclarant que les
20 civils bosniens étaient blessés suite à des tirs isolés d'une position près
21 du parlement de Bosnie-Herzégovine qui était entre les mains de l'armée des
22 Musulmans de Bosnie. Le 30 juillet 1995, le colonel Demurenko a rédigé un
23 autre rapport déclarant que les forces des Musulmans de Bosnie de la zone
24 de la présidence tiraient sur des civils musulmans à Skenderija. Le 7 août
25 1995, le colonel Demurenko a rédigé un autre rapport déclarant que des obus
26 de mortier avaient été tirés de positions des Musulmans de Bosnie vers la
27 zone de Skenderija, qui était aussi une partie de la ville entre les mains
28 des Musulmans de Bosnie.
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1 Le colonel Demurenko était prêt à constater la guerre lorsqu'il est
2 arrivé à Sarajevo, mais il n'y a eu que des échanges de tirs occasionnels
3 et la plupart était opérée par des soldats saouls qui tiraient des fusées
4 éclairantes, et cetera. Il a aussi vu beaucoup de couples qui marchaient
5 dans les rues, et cela l'a surpris. Il était clair pour lui que Sarajevo
6 était sous le blocus des forces serbes mais qu'il y avait aussi des troupes
7 des Musulmans de Bosnie dans la ville. Les troupes serbes autour de
8 Sarajevo étaient aussi encerclées par les troupes des Musulmans de Bosnie
9 dans un cercle plus large. Il est aussi ressorti clairement pour le colonel
10 que la VRS ne voulait pas détruire ni la ville ni la population qui vivait
11 dans la ville, même s'il était possible de le faire. Le colonel Demurenko
12 pense que les forces serbes autour de Sarajevo ne voulaient pas terroriser
13 la population civile à Sarajevo sous contrôle musulman. Deux cents
14 cinquante mille civils serbes se trouvaient dans la ville et les soldats
15 serbes ne pouvaient pas identifier la nationalité des personnes juste en
16 les regardant. D'autre part, il y a eu des cas isolés où les soldats
17 serbes, qui avaient perdu des membres de leur famille, s'étaient comportés
18 de façon agressive. Il est sûr à 100 % que des soldats musulmans de Bosnie
19 tiraient et bombardaient des civils serbes. Il s'est rendu du côté serbe de
20 la ville. La vie de ce côté serbe de Sarajevo était exactement la même que
21 dans la partie musulmane de la ville. Il y avait des problèmes de
22 nourriture, d'eau, et cetera. Il est aussi sûr à 100 % que l'aide
23 humanitaire apportée au côté musulman terminait sur le marché noir à
24 Sarajevo. Voilà pourquoi il a essayé d'organiser un approvisionnement
25 direct de l'aide humanitaire aux civils.
26 Le colonel Demurenko était conscient que l'ABiH procédait à des offensives
27 depuis Sarajevo pour débloquer la ville. La plus grande partie des unités
28 de l'ABiH se trouvait dans des bâtiments civils. Il y avait environ 20
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1 tanks, cinq ou six batteries de mortier, chaque batterie comprenait cinq ou
2 six mortiers 92 -- non, 82 et 120 millimètres, des mitrailleuses lourdes,
3 et cetera. Il a vu que les unités de l'ABiH avaient provoqué les forces
4 serbes à répondre en ouvrant le feu et ensuite en se déplaçant à d'autres
5 lieux. Le seul incident entre les forces serbes et la FORPRONU à Sarajevo
6 après le bombardement de l'OTAN des positions serbes que le colonel
7 Demurenko se souvienne a été la lutte au pont de la fraternité et de
8 l'unité à Sarajevo. Il y avait deux points de contrôle des deux côtés,
9 serbe et musulman du pont, et les Serbes et les Musulmans se tiraient les
10 uns sur les autres. Les soldats serbes se sont ensuite engagés dans une
11 offensive et ont capturé ceux qui se trouvaient dans les tranchées des
12 Musulmans de Bosnie. Les Musulmans de Bosnie ont informé la FORPRONU
13 française de cela et le commandant français a ordonné aux troupes
14 françaises d'attaquer les Serbes et le point de contrôle occupé. Les
15 soldats français ont attaqué les Serbes, et les soldats français et serbes
16 sont morts dans cette attaque.
17 L'armée serbe et la FORPRONU ont pris dans les deux camps des soldats et en
18 ont fait des prisonniers de guerre. Il est clair que dans ce cas-là, l'ABiH
19 avait commencé l'offensive, que les Serbes ont répondu et ont été
20 bombardés, ce qui a été injuste et ce qui constituait une action partielle
21 de la part de pays tiers supposément impartiaux. En conséquence, les Serbes
22 ont pris ces soldats de la FORPRONU des pays qui participaient au
23 bombardement en tant que prisonniers de guerre. C'était un moment critique
24 de la guerre, à ce moment-là le côté musulman a reçu de l'aide des pays qui
25 bombardaient. Donc c'était une réponse adéquate de la part des Serbes de
26 Bosnie que de répondre de cette façon. Le terme "otages" est inacceptable
27 dans cette situation. Le mot "otages" est pris entre guillemets, car ce
28 n'est pas le terme adéquat. Le colonel Demurenko n'a pas utilisé le terme
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1 "prisonniers de guerre" car, formellement, les Nations Unies se devaient
2 d'être impartiales conformément à la convention de Genève et il ne pouvait
3 pas utiliser le terme ou l'expression "prisonniers de guerre" pour les
4 troupes de la FORPRONU détenues. Il n'y avait pas de terme adéquat pour ce
5 cas-là et donc la FORPRONU a utilisé le terme "otages".
6 Le 30 mai 1995, le général Smith a rédigé un message déclarant que les
7 soldats serbes capturés étaient des prisonniers de facto de guerre, et
8 qu'ils étaient capturés par des forces françaises lors d'un combat, qu'il
9 avait ordonné au commandant du secteur Sarajevo de les garder et d'assurer
10 leur sécurité. Pour le colonel Demurenko, il est clair que le général Smith
11 et le général Gobillard ont montré leur participation à la guerre
12 lorsqu'ils ont soutenu activement le côté musulman de Bosnie. Ils n'avaient
13 pas le droit de rédiger ces informations dans la lettre, mais le général
14 Smith lors d'un éclat a montré, a dévoilé ses véritables intentions.
15 Plusieurs unités nationales au sein de la FORPRONU ont également combattu
16 ensemble aux côtés des Musulmans de Bosnie contre les Serbes de Bosnie.
17 En juin 1995, suite à une attaque de l'ABiH, un poste d'observation russe a
18 été occupé. A cette occasion, les troupes musulmanes de Bosnie ont pris 12
19 soldats des Nations Unies et un Russe et les ont fait prisonniers, les
20 troupes russes avaient reçu l'ordre de ne pas tirer de quelque côté que ce
21 soit, mais elles avaient aussi reçu l'instruction de ne pas laisser quelque
22 côté que ce soit des parties belligérantes utiliser leurs armes. Ainsi, dès
23 que les Russes ont compris que le véhicule blindé de transport de troupes
24 pouvait tomber entre les mains de Musulmans de Bosnie, ils l'ont fait
25 explosé avec une grenade à main et ont détruit le moteur de ce véhicule.
26 Cependant, les soldats russes ont été capturés et il a reçu l'information
27 selon laquelle ils seraient tués par les Musulmans de Bosnie. Le colonel
28 Demurenko a dit à son commandant français qu'ils devaient organiser des
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1 négociations immédiatement parce qu'il ne pouvait pas se rendre dans la
2 zone sans la permission des Musulmans de Bosnie parce qu'on l'abattrait
3 aussi. Le général a appelé le ministre bosnien de la Défense qui a délivré
4 une autorisation pour se rendre sur les lieux et récupérer les corps de ses
5 soldats qui étaient tombés au combat. Tel que les Musulmans le décrivent,
6 il est parti à pied, il a couru dans le champ de mines pour aller chercher
7 ses soldats et a dit à ceux qui l'accompagnaient de suivre ses pas pour
8 passer de l'autre côté et retourner au bâtiment des PTT, et donc des pertes
9 ont été évitées à cette occasion.
10 Environ une semaine ou deux après cela, des personnes du Haut-
11 commissariat des réfugiés ont été prises par des troupes de Bosnie-
12 Herzégovine parce que la Bosnie-Herzégovine avait besoin de ressources; par
13 exemple, de 200 litres d'essence. Donc, ils les ont retenus et les ont
14 relâchés lorsque le carburant a été livré. Ils arrêtaient les convois du
15 Haut-commissariat aux réfugiés et en demandaient le matériel dont la
16 Bosnie-Herzégovine avait besoin. Si les personnes des Nations Unies
17 refusaient de s'exécuter, on retenait le personnel et on prenait le
18 matériel de toute façon. D'après un accord entre les parties et la
19 FORPRONU, la ville de Sarajevo était censée être une zone démilitarisée,
20 libre de toutes armes, mais ce n'était le cas qu'en théorie. Sarajevo, sous
21 contrôle bosniaque, fourmillait d'armes. La notion d'uniforme était
22 d'application seulement pour éviter que l'on ne tue une partie amie, et le
23 peuple de Bosnie-Herzégovine portait des ceintures ou d'autres signes de
24 reconnaissance.
25 Les civils hommes serbes ont essayé de se cacher ou de s'échapper
26 parce qu'ils étaient sujets à l'emprisonnement et étaient mis dans des
27 camps. Les informations sur les camps pour les Serbes ont été retenues de
28 la FORPRONU par les autorités des Musulmans de Bosnie. La FORPRONU a
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1 entendu parler des camps de différentes sources, y compris les citoyens de
2 Sarajevo. Le colonel Demurenko a pris une position au QG de l'OTAN en
3 Belgique en 1995, il y a assumé ses fonctions, et a pris sa retraite de
4 l'armée russe en 1997.
5 L'INTERPRÈTE : Nous voudrions noter que M. Karadzic vient de lire un très
6 long texte qu'il n'avait pas fourni aux interprètes.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je viens d'entendre l'intervention des
8 interprètes, ils disent que vous avez lu un long texte qui ne leur avait
9 pas été fourni à l'avance. Etes-vous prêt pour terminer votre lecture du
10 résumé ?
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je voudrais juste montrer un bref
12 vidéoclip au colonel et je voulais lui demander --
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, Monsieur Karadzic.
14 Si ma mémoire est bonne, vous venez de passer une demi-heure à nous
15 donner lecture du résumé. Vu qu'il s'agit du premier témoin, la Chambre
16 vous a donné un petit peu plus de marge de manœuvre. Mais en tout cas, en
17 ce qui me concerne, c'est un petit peu trop long. Puis-je vous rappeler que
18 le résumé ne sert qu'à informer le public des éléments de preuve écrits qui
19 viennent d'être versés au dossier et qu'il ne constitue pas de preuve du
20 tout. J'aimerais aussi vous rappeler cette fois-ci que le temps de lecture
21 de votre résumé sera déduit du temps accordé à la Défense. Donc, il en va
22 de votre intérêt d'être bref à l'avenir.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Juge, il s'agit d'une exception
24 parce que le colonel Demurenko, dans sa déclaration, a parlé longtemps, je
25 crois que sa déclaration fait une centaine de pages, et il est très
26 difficile de fournir un résumé bref en une ou deux pages seulement. A
27 l'avenir, mes résumés seront bien plus brefs.
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et dans l'intérêt de la justice, il
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1 serait peut-être mieux qu'on s'occupe maintenant des pièces connexes avant
2 que vous procédiez à l'interrogatoire principal de ce témoin.
3 Avez-vous toujours la liste des pièces connexes ? Je veux d'abord
4 qu'on s'occupe de quelque chose concrète.
5 D'abord, 1D08692. Il s'agit du témoignage du colonel Demurenko dans
6 l'affaire Milosevic. Est-ce que vous voulez que ce compte rendu soit versé
7 au dossier en tant que pièce connexe ? Maître Robinson.
8 M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président, cela ne devrait
9 pas être là.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
11 Avant de passer à ces questions, il faut que je m'adresse à l'Accusation.
12 Monsieur Tieger, avez-vous des objections à soulever pour ce qui est des
13 pièces connexes ?
14 M. TIEGER : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.
16 Donc, 1D8695, il s'agit de la photo du colonel Demurenko qui montre
17 des tableaux de tir -- je pense que cela a été déjà versé au dossier.
18 Quelle est la pertinence de ce document ? Nous pouvons également ne pas
19 verser cela au dossier.
20 M. ROBINSON : [interprétation] Oui.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, merci.
22 Ensuite, on a 1D20275. Il semble qu'il s'agisse du document provenant de
23 l'organe chargé de la sécurité et du renseignement de la SRK. Vu que
24 l'Accusation ne conteste pas l'authenticité ou la pertinence de ce
25 document, la Chambre décide que ce document sera versé au dossier.
26 C'est vrai, Monsieur Tieger ? C'est le cas ?
27 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
28 M. TIEGER : [interprétation] Oui, c'est vrai, Monsieur le Président.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ensuite, le document 65 ter 28118 --
2 excusez-moi, 28120, ensuite 28180, lorsque il s'agit de ces trois
3 documents, le premier étant 28118, le colonel Demurenko a dit qu'il était
4 d'accord. La Chambre estime que le verbe "être d'accord" a une acception
5 quelque peu vague et que cela ne suffit pas pour obéir à la norme
6 concernant ces documents qui sont à verser en tant que pièces connexes.
7 Donc, si vous voulez que cela soit versé au dossier en tant que tel, vous
8 devriez en parler avec le témoin en utilisant des termes plus spécifiques
9 ou plus précis. Pour ce qui est des documents suivants, 28112, 28113,
10 28123, 28125, 28134, 28178, 28179, 28184, 28185, pour ce qui est de ces
11 documents, le colonel Demurenko n'a pas fait de commentaires du tout ou il
12 n'a pas fait de commentaires substantiels; par conséquent, nous ne pouvons
13 pas les faire verser en tant que pièces connexes.
14 La même chose pour les documents 28124, 28144, 28149, 28167 - d'après
15 l'opinion des Juges de la Chambre - ces documents ne représentent pas des
16 documents indispensables ou inséparables de la déclaration 92 ter du
17 colonel Demurenko. Donc, ces documents ne sont pas versés au dossier en
18 tant que pièces connexes.
19 Et la Chambre a une question à soulever. Regardons maintenant le document
20 20274. Il s'agit du rapport de situation régulier de la FORPRONU, secteur
21 Sarajevo, le colonel Demurenko a parlé de certaines parties de ce rapport
22 de situation. Est-ce que la Défense a l'intention de demander le versement
23 au dossier de ce document dans son intégralité ou seulement des parties
24 dont le témoin a parlé ? Oui, Maître Robinson.
25 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, il s'agit d'un
26 document d'une telle longueur et nous considérerons que ce document soit
27 versé au dossier dans son intégralité, si l'Accusation n'a pas d'objection
28 là-dessus.
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1 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La même question pour ce qui est du
2 document 28117 ?
3 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger.
5 M. TIEGER : [interprétation] Je pense que nous avons déjà exprimé notre
6 position concernant ces documents, Monsieur le Président. Merci.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, tous les documents -- tous les
8 autres documents sont versés au dossier et ces documents font partie de la
9 collection de documents 92 ter, et les cotes leur seront accordés en temps
10 utile par le Greffe.
11 Mais, Monsieur Karadzic, je m'attends à ce que vous nous disiez quelle
12 était la raison pour laquelle ces documents ne figuraient pas sur votre
13 liste 65 ter auparavant et quelles sont les raisons pour cela.
14 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je peux parler
15 de cela. La plupart de ces documents ont été communiqués à la Défense après
16 la préparation de la déclaration, et donc nous les avons fait figurer sur
17 cette liste à l'époque, à savoir le 15 septembre, lorsque nous avons
18 communiqué notre liste 65 ter. Et cela nous a été communiqué seulement le
19 14 septembre, et le colonel Demurenko n'était pas en mesure de -- il
20 n'était pas possible qu'on lui pose les questions concernant ces documents
21 avant son arrivée à La Haye ce week-end. C'est pour cela que ces documents
22 ne figuraient pas sur notre liste auparavant.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est donc par rapport à la requête
24 66(B) ?
25 M. ROBINSON : [interprétation] Non, non, il ne s'agit pas de la requête
26 récente. Il s'agissait d'une requête qui a été déposée il y a quelque
27 temps. Nous avons eu un délai pour ce qui est l'Accusation jusqu'au 10 mai.
28 Malheureusement, l'Accusation nous a informés le 14 septembre. Et c'est
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1 pour cela que ces documents ne sont pas sur cette liste 65 ter.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
3 Maître Karadzic, continuez.
4 [Le conseil de la Défense se concerte]
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on peut passer maintenant la vidéo
6 qui a été versée au dossier, c'est D1010. Mais j'aimerais que le colonel
7 Demurenko voie cet extrait vidéo pour nous dire s'il s'agit de ce qu'on en
8 pense qu'il s'agit dans cette vidéo.
9 [Diffusion de la cassette vidéo]
10 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
11 "Permettez-moi de me présenter. Je m'appelle Colonel Demurenko, chef de
12 l'état-major des forces de Sarajevo. Et aujourd'hui, ce n'est pas si
13 important parce que je ne suis pas ici chef d'état-major, mais je suis un
14 citoyen de mon pays. Et en ma qualité de militaire professionnel, je tiens
15 à expliquer les détails des enquêtes qui ont été fournis -- appelées
16 l'expertise des Nations Unies. Pour ce qui est des terribles événements qui
17 se sont produits il y a quelques jours, comme vous le savez, ça s'est passé
18 au centre-ville, où suite à une explosion d'un obus de mortier dans l'une
19 des rues centrales de la ville, et ça s'est produit lorsqu'il y a eu
20 quelque 35 morts, et plus de 80 personnes, d'après les rapports, se sont
21 trouvées blessées.
22 En ma qualité de professionnel, je ne peux pas être d'accord avec les
23 arguments présentés par les spécialistes des Nations Unies pour ce qui est
24 des raisons et de la source notamment de ces tirs. C'est tout à fait
25 inacceptable pour moi et pour mes amis militaires dans ce secteur. Je vais
26 essayer d'expliquer certains nouveaux détails dont j'ai eu à connaître.
27 Tout d'abord, si vous avez eu connaissance des faits principaux, c'est de
28 ceci qu'il s'agit. Voilà la documentation de ce rapport des Nations Unies
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1 au sujet du pilonnage en question. Ici, nous avons un bref rapport, mais
2 les conclusions sont plutôt inhabituelles. Entre autres, dans ces
3 conclusions, il y a une idée de formulée pour ce qui est de l'origine du
4 tir qui serait du côté des Serbes, je veux dire des Serbes de Bosnie. Ici,
5 nous avons un petit schéma qui explique l'angle. Enfin, on est dans la rue
6 du maréchal Tito, et l'angle, c'est l'angle entre le sol et la trajectoire
7 de chute de l'obus. Je vais l'expliquer tout à l'heure. C'est très
8 important. Nous avons ici des photos de prises sur les lieux. C'est là
9 qu'il y a eu explosion de cet obus. Ça se trouve être très important, cette
10 présentation graphique. Comme vous pouvez le voir, ceci est l'axe du tir.
11 Voici le point d'impact, ici. Et conformément à ce que l'enquête a donné,
12 l'axe de tir dit qu'il s'agit de 176 degrés, et selon ce qui est pratiqué
13 en France, on indique qu'il s'agit de 29.76 minutes. Il s'agit du secteur
14 sud-est. Il est très important de le savoir aussi. L'image ici présente --
15 et c'est important que de l'indiquer, c'est une documentation qui vient de
16 la police musulmane, c'est-à-dire du gouvernement musulman, s'agissant de
17 l'angle de chute de l'obus par rapport au sol. Et il s'agit d'un angle qui
18 fait 70 degrés. La dernière feuille nous fournit un extrait de la carte
19 géographique, et c'est une idée que j'ai eue pour expliquer.
20 D'après cette documentation, je crois bien que les experts qui ont
21 participé à cette investigation sont des professionnels et des gens
22 honnêtes. Par conséquent, je vais dire une fois de plus que conformément
23 aux rapports officiels et à la documentation officielle, nous avons ici --
24 enfin, je vais montrer schématiquement l'emplacement de Sarajevo, la ligne
25 de conflit, et ici, deux bâtiments et l'endroit où cet obus a explosé.
26 D'après la documentation ici présente, l'axe du tir est de 176 [comme
27 interprété] degrés. D'après un autre document -- et question très
28 intéressante : pourquoi au niveau des Nations Unies y a-t-il deux
Page 28902
1 documentations relatives à l'enquête ? Ces documentations sont divergentes,
2 mais la conclusion est la même. Partant donc de cette enquête, on parle
3 d'un autre angle.
4 Je vais dire quelque chose au sujet du premier angle de chute ici
5 mentionné. Je vais répéter que nous savons ce qui a été utilisé. Ce qui a
6 été utilisé, c'est un obus de 120 millimètres. C'est une arme qui était
7 utilisée en Yougoslavie. L'armement yougoslave disposait de cette arme-là,
8 et ça a été utilisé en URSS. Je le sais parce que je suis un militaire de
9 carrière. Et des renseignements existent au sujet des systèmes en question.
10 Il y a des normes afférentes. Et conformément à ceci, nous avons un tableau
11 qui comporte la totalité des données relatives à ce système de tirs. Comme
12 on peut le voir, pour ce système, on utilise d'abord six charges standard.
13 Et d'après l'angle en question, l'angle de 70 degrés, c'est cet axe indiqué
14 au 176 mentionné tout à l'heure, on peut -- suite à comparaison avec les
15 tableaux de tirs, on peut voir suite à une première explosion, d'après cet
16 angle-ci, l'angle en haut et en bas. Dans le secteur, il y a 900 mètres.
17 Puis la zone suivante, 1 400 mètres. Puis la zone suivante à partir de
18 laquelle on avait pu tirer est de 2 000 mètres. Et ça se trouve sur l'axe
19 des conflits. Théoriquement parlant, ça aurait pu venir du côté serbe. Je
20 dis théoriquement, et je vais l'expliquer tout à l'heure. Le point suivant
21 à partir duquel ça avait pu être tiré est de 2 700 mètres, puis 3 400
22 mètres, et pour finir 3 600 mètres.
23 De nos jours, pour ce qui me concerne, avec un petit groupe d'investigation
24 que j'ai dirigé, et étant donné la totalité de ces emplacements indiqués
25 tout à l'heure, je puis au-delà de tout doute déterminer et affirmer que
26 cet emplacement se trouve être inapproprié comme étant potentiellement
27 l'endroit à partir duquel on a tiré l'obus. Il est impossible de tirer
28 depuis cet endroit pour que ça atterrisse à l'endroit où ça a atterri. Par
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1 conséquent, les constatations au niveau de l'investigation se trouvent être
2 erronées.
3 Je vais maintenant parler du terrain où se trouvaient les positions serbes
4 et, en particulier, je vais évoquer les idées qui sont les miennes. Ce
5 n'est pas mon travail. Je suis un soldat, un militaire, et un colonel, et
6 ça, c'est un travail pour un groupe de spécialistes en la matière, et il
7 faudrait dans ce groupe avoir très probablement des enquêteurs en matière
8 de police judiciaire, des membres des tribunaux militaires, des experts en
9 balistique et ainsi de suite. Il convient de comprendre ici qu'il s'agit
10 d'une erreur.
11 Lorsqu'il s'agit de cette distance-ci, à savoir entre le lieu de
12 l'explosion et du lieu de tir qui se trouve à 2 100 mètres, je dirais que
13 je suis allé aujourd'hui là-bas et je n'ai trouvé aucune batterie ou aucun
14 peloton de mortier, pas même un seul mortier dans le secteur, parce qu'il
15 s'agit d'un terrain qui est en fait une pente avec un rocher, et enfin, un
16 terrain rocailleux et des arbres, une forêt. J'ai des photos pour ce qui
17 est de chacun de ces sites. Je les ai prise aujourd'hui, ces photos, et je
18 peux vous montrer également la carte où l'on peut voir exactement les
19 différents axes.
20 Voici l'axe alternatif ici. Ce qui constitue le problème le plus important
21 pour ce qui est du groupe qui a procédé à l'investigation officielle, c'est
22 la chose suivante. Ils ont pris en considération les angles et les axes, et
23 automatiquement ils ont établi un lien avec des Serbes. Or, ce n'est pas
24 exact. Il convient d'organiser une expertise balistique pour examiner
25 chacun de ces sites, point par point, pour ce qui est des points potentiels
26 de tir, d'origine de tir. On pourrait utiliser des obus fumigènes pour
27 déterminer exactement l'emplacement à partir duquel on a tiré. Je n'ai pas
28 suffisamment de temps pour rentrer dans le moindre des détails, mais ce que
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1 je voudrais dire une fois de plus, c'est que la documentation est erronée,
2 les conclusions sont erronées, et les conséquences de cet événement sont
3 très mauvaises, on est à Sarajevo. Et on peut dans Sarajevo entendre les
4 explosions des obus. Il y a eu des frappes aériennes. Il y a des civils et
5 des militaires de présent. Bon nombre de personnes ont été tuées et
6 blessées. Donc, il est absolument inacceptable, pour des militaires en
7 particulier, car nous ne pouvons pas être d'accord pour dire qu'on ne peut
8 pas affirmer que notre opinion se distingue de l'autre, de celle du groupe.
9 Et en ma qualité de citoyen, je veux dire qu'il faut mettre un terme aux
10 mensonges, aux contrevérités. Il faut mettre un terme à cette histoire ou
11 ce récit relatif à l'agression serbe. Je ne parle pas du terrain en Bosnie.
12 Ce n'est pas que mon travail que de mettre qui que ce soit en accusation.
13 Ici, nous avons un problème qui doit être débattu par des membres de la
14 police judiciaire, des professionnels. Mais ce que je veux dire, c'est que
15 les forces de la police doivent procéder à une investigation précise et
16 exacte, ou alors mettre un terme à ces opérations ou ces activités des
17 Nations Unies et de l'OTAN.
18 Alors, je vais dire quelques mots dans ma langue maternelle, parce que je
19 pense que c'est indispensable pour expliquer les raisons pour lesquelles je
20 tiens à le dire. En Amérique, il y a quelques années, j'ai suivi un
21 entraînement militaire. J'aime bien ce pays, et je crois que ce pays peut
22 apporter son soutien à tout type d'activité et des activités militaires de
23 préservation de la paix de ce type."
24 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
25 M. KARADZIC : [interprétation] Merci de votre patience.
26 Q. Colonel, est-ce que cette opinion que vous avez formulée à l'époque,
27 vous la confirmez pour ce qui est de la teneur de votre intervention à
28 l'attention de l'opinion publique ?
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1 R. Oui, absolument.
2 Q. Merci. Etant donné l'importance de ces documents, je voudrais que nous
3 parcourions rapidement ces documents que vous avez eu l'occasion de revoir
4 à l'occasion du récolement.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce qu'il faudrait nous montrer, c'est le
6 1D28118 au prétoire électronique.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense qu'ici il s'agit du 1D28118.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais c'est ce que j'ai dit. Peut-être s'est-on
9 trompé dans la traduction.
10 M. KARADZIC : [interprétation]
11 Q. Colonel, est-ce qu'à l'occasion des récolements on vous a montré ce
12 document, et dites-nous si vous avez eu l'occasion d'en prendre
13 connaissance ?
14 R. Oui, bien sûr. C'est un rapport qui est signé par l'institution en
15 question, il s'agit d'un rapport journalier.
16 Q. Colonel, est-ce que ce document est authentique, et est-ce qu'il
17 exprime bien ce que les Nations Unies ont tiré comme conclusion à l'époque
18 ?
19 R. Oui, c'est exact.
20 Q. Merci.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je demander --
22 M. KARADZIC : [interprétation]
23 Q. C'est vous l'officier qui a signé ce document ? Mais vous l'avez signé
24 en quelle qualité au juste ?
25 R. J'étais le chef d'état-major et j'avais pour mission de signer ce type
26 de rapports journaliers ordinaires.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, pour ce qui est de la
28 Chambre, lorsque nous sommes en train de déterminer si un document peut
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1 être admis en tant que pièce connexe, la Chambre essaie de voir si le
2 document concret constitue une partie indissociable et indispensable du
3 document en tant que tel. Dans la déclaration du colonel, il est dit qu'il
4 était d'accord avec sa teneur, sans pour autant mentionner le fait qu'il a
5 été l'officier ayant signé le document, et il n'est pas fait mention du
6 fait de savoir si c'est ainsi qu'il a constaté les choses. Veuillez garder
7 ceci à l'esprit.
8 Toujours est-il que ce document sera admis. Veuillez lui donner une
9 cote.
10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce D2271.
11 M. ROBINSON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Mais si
12 vous vous penchez sur la page 85 de la déclaration, vous allez voir après
13 le 1D28118 qu'il est dit :
14 "L'officier qui est l'auteur du document, le colonel Demurenko…"
15 Donc c'est ce qu'on peut voir au niveau de ce document et des autres
16 documents. Je me demande si, avec l'autorisation de la Chambre, il serait
17 possible maintenant de résoudre la question de la totalité de ces rapports,
18 étant donné que le colonel Demurenko a été le signataire de la totalité de
19 ces rapports ?
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc les documents qui ont été
21 mentionnés auparavant par moi viennent du colonel Demurenko ? Pouvez-vous
22 le confirmer, Monsieur Robinson ?
23 M. ROBINSON : [interprétation] Exception faite du 28179.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, alors on va voir d'abord ce qu'il
25 en est de ce 28179 et ensuite la Chambre va se pencher sur le reste.
26 [Le conseil de la Défense se concerte]
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Robinson.
28 M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, nous allons parler
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1 ultérieurement du 28179, et nous n'insistons pas pour ce qui est du
2 versement au dossier du 28179.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien. Dans ce cas, la
4 totalité des documents qui portent le sous-titre où l'on est à même de voir
5 que l'officier signataire est le colonel Demurenko, ce sera versé au
6 dossier et on leur donnera une cote en temps utile.
7 Monsieur Karadzic, veuillez continuer, je vous prie.
8 [Le conseil de la Défense se concerte]
9 M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, nous voudrions
10 procéder à une vérification pour voir s'il y a d'autres raisons pour
11 lesquelles la Chambre voudrait exclure certains de ces documents, pour que
12 nous puissions nous pencher dessus pendant la pause. Et il serait peut-être
13 bon de faire cette pause déjeuner à présent afin de pouvoir en terminer
14 avec cette question.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien. Nous allons faire une pause
16 de 45 minutes, et nous allons reprendre à 13 heures et quart.
17 --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 26.
18 --- L'audience est reprise à 13 heures 19.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Harvey.
20 M. HARVEY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,
21 Madame et Messieurs les Juges. J'aimerais, si vous me permettez, de
22 présenter M. Sam Shnider, avocat de la Californie qui a travaillé au sein
23 de mon équipe jusqu'au mois d'avril et qui vient de me dire qu'il serait en
24 mesure de m'aider encore quelques mois, et il m'a apporté une grande aide.
25 Merci.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.
27 M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, nous allons examiner
28 des pièces pour lesquelles la Chambre a dit qu'il y avait des problèmes, et
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1 nous avons pu remarquer qu'il s'agissait également des documents rédigés
2 par le colonel Demurenko. Donc, nous n'avons plus de questions pour ce
3 témoin.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous être un peu plus
5 systématique à l'avenir pour ce qui est des listes 65 ter et déclarations
6 92 ter.
7 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, cela veut dire que la Défense en a
9 fini avec son interrogatoire principal de M. Demurenko ?
10 M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie, Colonel, d'être venu pour
13 témoigner ici. Merci.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous allez probablement avoir l'occasion
15 de poser des questions supplémentaires à ce témoin.
16 Oui, Monsieur Tieger.
17 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour à tout
18 le monde dans le prétoire.
19 Contre-interrogatoire par M. Tieger :
20 Q. [interprétation] Bonjour, Colonel. Je vais commencer par vous poser
21 quelques questions préliminaires avant de vous poser des questions
22 concernant les choses dont vous avez parlé auparavant. J'ai remarqué que
23 dans la déclaration de témoin consolidée, vous avez ajouté quelques
24 articles concernant les entretiens que vous avez accordés aux médias, et
25 j'ai eu l'occasion de voir un autre entretien du mois de mai 1996 au
26 journal "Pravda" de Moscou, et j'aimerais vous poser quelques questions
27 concernant ces entretiens.
28 M. TIEGER : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant afficher le
Page 28909
1 document --
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Tieger, il faut
3 que je vous interrompe. Vous m'avez rappelé une chose, quelque chose que
4 j'ai oublié. L'une des pièces à conviction qui a été versée au dossier en
5 tant que pièce connexe 1D28164. Est-ce qu'on peut maintenant afficher ce
6 document. Peut-on passer à la page suivante, s'il vous plaît. Je ne pense
7 pas que l'on dispose de la traduction de ce document. Pouvez-vous confirmer
8 cela ?
9 [Le conseil de la Défense se concerte]
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que l'on ne
11 dispose pas de la traduction. Mais le résumé pourrait se trouver à la page
12 précédente, ou bien nous pourrions demander au colonel qu'il nous traduise
13 cela du russe. Mais je pense qu'à la page précédente il y a un résumé de
14 cet article-là.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si l'Accusation n'a pas d'objection,
16 étant donné qu'il s'agit d'un court passage, nous pouvons le faire ainsi.
17 M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, Monsieur Demurenko, pourriez-vous,
19 s'il vous plaît, lire ce qui figure dans ce passage.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Avec plaisir. Dans le texte, on peut lire
21 comme suit :
22 "Les Serbes de Bosnie retirent leurs armes lourdes à l'extérieur de
23 Sarajevo conformément à des délais qui ont été déterminés par l'ultimatum
24 des Nations Unies et de l'OTAN. C'est ce qui a été dit aujourd'hui par le
25 chef de l'état-major, colonel Andrey Demurenko," cela veut dire par moi-
26 même. "Sur la base de son estimation, la plus grande partie de
27 l'équipement, des armes et des unités (il y en a 156 au jour d'aujourd'hui)
28 ont été déjà délocalisés dans une région qui se trouve à 20 kilomètres à
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1 l'extérieur de la zone d'exclusion. Et il n'y a aucun doute que les
2 conditions qui ont été imposées au côté serbe aient été remplies et que les
3 Serbes allaient retirer toutes leurs armes lourdes, à l'exception faite de
4 chars et de véhicules blindés de transport de troupes qui sont en fonction
5 pour le moment."
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous nous dire, Colonel, à qui
7 appartient cette écriture ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas mon écriture. Je vois ici qu'il
9 est fait référence -- je m'excuse. Ce n'est pas mon écriture. Et je vois
10 qu'il y a une référence au reporter de "Itar Tacc" [phon], Nareskin [phon],
11 que je connaissais.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur le Témoin. Encore une
13 fois, j'aimerais souligner que la Défense devrait être plus systématique
14 pour ce qui est de la préparation des listes 65 ter.
15 Monsieur Tieger, poursuivez.
16 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
17 Q. Colonel, nous allons commencer du début. J'ai donc fait référence à
18 l'entretien du mois de mai 1996 que vous avez accordé à "Komsomolskaya
19 Pravda". J'aimerais vous poser quelques questions concernant cet entretien.
20 Vous avez opiné du chef, et je peux en conclure que vous vous souvenez de
21 cet article ?
22 R. Oui.
23 Q. Voilà ma question pour vous. J'ai remarqué que dans cet article la
24 référence a été faite au général Gobillard. J'ai également vu que dans
25 votre déclaration consolidée vous avez parlé d'un grand respect que vous
26 avez eu pour les généraux français qui étaient vos supérieurs. Et dans cet
27 article, à peu près dans la troisième colonne du document - je ne sais pas
28 si vous l'avez devant vous -- mais vous pouvez peut-être vous souvenir de
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1 cela, et je vais demander que cela soit affiché si cela est nécessaire.
2 Vous avez parlé du fait qu'il courait par les rues de Sarajevo au moment où
3 on lui a tiré dessus. Et j'aimerais savoir s'il s'agissait d'une sorte de
4 criticisme à l'envers du général ou du fait que vous lui avez témoigné
5 votre admiration, ou tout simplement d'un commentaire pour ce qui est de la
6 nature de cette guerre ?
7 R. Permettez-moi de répondre à votre question. Il s'agissait d'un
8 commentaire émotionnel qui, d'une part, voulait dire que le général, après
9 son arrivée dans la zone de responsabilité, n'avait aucune idée de ce qui
10 se passait dans la ville de Sarajevo. Il a voulu courir dans les rues de
11 Sarajevo pour montrer, et c'est ce qu'il a fait lors de ses mandats
12 précédents, mais le premier jour on lui a tiré dessus. Mais il n'a pas
13 pensé que c'était du côté serbe que les tirs provenaient. Il était plus
14 probable que les gens à l'intérieur de Sarajevo auraient protesté contre
15 ses actions. Et lui, il n'a pas voulu protester contre cela de façon
16 publique, il était sous la pression de ses supérieurs. Mais il a refusé
17 d'avoir un garde du corps, ce qui était bizarre à mes yeux.
18 Q. Bien. J'ai également vu que vous aviez mentionné M. Petrovic, et vous
19 avez parlé de lui dans votre déclaration consolidée également. Vous vous
20 souvenez d'avoir parlé de M. Petrovic lors de cet entretien et que vous
21 avez dit quand vous l'avez rencontré la première fois ?
22 R. Je dois admettre que je ne me rappelle pas tous les détails de tous les
23 entretiens que j'ai accordés et de toutes les réunions que j'ai eues avec
24 des milliers d'officiers et de soldats à l'époque. Je me souviens qu'il y
25 avait un commandant Petrovic, commandant de bataillon qui se trouvait
26 déployé pas très loin de Grbavica, pas très loin du bâtiment de la PTT où
27 se trouvait le QG des forces du maintien de la paix. Mais il me serait
28 difficile de vous dire davantage là-dessus.
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1 Q. Peut-être que cela pourrait vous rafraîchir la mémoire : vous avez dit
2 dans le résumé qui a été lu aujourd'hui -- il a été dit que vous êtes
3 arrivé jusqu'à vos hommes en courant par un champ de mines, et je pense que
4 vous avez expliqué dans cet article que vous avez rencontré Petrovic la
5 première fois au moment où il vous avait vu courir par ce champ de mines.
6 C'est à ce moment-là que vous avez eu un contact avec lui, n'est-ce pas ?
7 R. Oui -- ah, le microphone fonctionne à nouveau à présent. Excusez-moi.
8 J'ai des souvenirs qui sont quelque peu différents par rapport à
9 cela. Pour moi, le moment qui est resté le plus gravé dans ma mémoire a été
10 cette course par le champ de mines puisque j'ai dû sauver 12 soldats.
11 Pourtant, je n'ai pas pu rencontrer Petrovic là-bas. Il s'agit peut-être
12 d'une erreur dans les informations dont vous disposez ou dans
13 l'interprétation que j'ai reçue. Petrovic se trouvait plus loin par rapport
14 à l'endroit où je me trouvais et où j'ai sauvé les soldats. J'étais en
15 train de revenir dans la région où se trouvaient les premières tranchées du
16 bataillon bosnien. Les premiers soldats de la FORPRONU que j'ai rencontrés
17 étaient soit de la Slovénie, soit de la Slovaquie, et ils étaient très,
18 très contents - comme c'était le cas de nos soldats également - d'être
19 libérés et d'éviter la mort.
20 Q. Merci, Colonel. J'ai voulu vous poser une question concernant votre
21 expertise concernant l'artillerie et les mortiers, en particulier
22 concernant les hommes dont vous étiez commandant. Si j'ai bien compris dans
23 votre déclaration consolidée - et par rapport à ce qu'on a vu dans la vidéo
24 - vous aviez de l'expérience pour ce qui est de commander au sein de
25 l'armée; en général, votre responsabilité était de commander les unités
26 subordonnées et d'en savoir suffisamment pour ce qui est des armes et des
27 système d'armes qui ont été utilisés. C'était votre spécialité, n'est-ce
28 pas ?
Page 28913
1 R. Oui, absolument, c'est vrai.
2 Q. Et je suppose que c'était également la raison pour laquelle, lorsque
3 vous avez commencé l'enquête ayant trait au pilonnage dont on a discuté
4 auparavant, vous avez rassemblé les experts, les spécialistes, pour ce qui
5 est de ces domaines d'activités, n'est-ce pas ?
6 R. Oui, c'était précisément comme cela que cela s'est passé. J'ai invité
7 les spécialistes pour ce qui est des systèmes d'artillerie, oui.
8 Q. Bien. Colonel, maintenant j'aimerais qu'on passe à certains éléments
9 par rapport auxquels vous avez discuté aujourd'hui brièvement et par
10 rapport à certains éléments dans la vidéo et plus en détail pour ce qui est
11 de certains éléments dans votre déclaration de témoin consolidée. D'abord,
12 vous avez expliqué dans la vidéo que vous avez suivi cet axe de tir, cet
13 angle de 176 degrés de Markale, n'est-ce pas ?
14 R. Oui. J'ai utilisé du matériel qui a été recommandé jusqu'alors par les
15 experts. Je me suis appuyé sur du matériel qui me semblait au début comme
16 étant du matériel fiable.
17 Q. Et - comme nous allons voir plus tard - les sites concrets d'éventuels
18 lancements de tir ont été basés sur l'angle de descente d'obus, de mortier,
19 qui devaient par la suite être comparés avec le nombre de charges qui se
20 trouvaient être utilisées dans ce tir, n'est-ce pas ?
21 R. Encore une fois, je vais essayer d'expliquer le mieux cela. Le mortier
22 représente une arme spécifique et il s'agit d'un canon qui n'a pas de
23 fluage.
24 Q. Je pense que je vais vous donner la possibilité d'expliquer les choses,
25 mais j'aimerais qu'on soit plus efficace et de procéder pas à pas. Donc
26 vous avez eu un axe de tir et vous avez voulu déterminer l'axe de tir en se
27 basant sur l'angle de descente et les charges potentielles, n'est-ce pas ?
28 R. Oui. Il y a trois facteurs. Il y a six charges standards pour ce qui
Page 28914
1 est des projectiles lancés des mortiers, et sur la base de l'expertise
2 balistique, où il était question de 70 degrés pour ce qui est de l'angle de
3 descente - peut-être que j'ai tort, parce que je pense que cela n'est pas
4 contesté - donc c'était l'angle de 170 degrés vers le sud par rapport à
5 l'endroit où le projectile a été lancé. Donc, l'enquête s'est centrée sur
6 ces facteurs.
7 Q. Est-ce que vous venez de dire 170 degrés ? C'est dans le compte rendu.
8 Parce qu'auparavant, vous avez parlé de 176 degrés.
9 R. Oui. J'ai examiné la documentation plusieurs fois. J'ai consulté les
10 commentaires, la traduction, et ces chiffres de 176 et 70, ça faisait
11 l'objet d'une confusion fréquente. On les intervertissait fréquemment. Mais
12 je souhaite souligner que cela ne compte pas vraiment, que ce soit 70 ou
13 176. Dans mon entretien, j'ai dit qu'il existait une marge d'erreur de plus
14 ou moins cinq, c'est tout à fait habituel. Donc cela pourrait être 175 ou
15 165. Deuxièmement, lorsque j'ai chargé mes officiers d'établir l'origine
16 des tirs, les sites de tir possibles, j'ai, en fait, exploré un territoire
17 beaucoup plus vaste que celui que l'on pouvait circonscrire à l'aide de ces
18 axes à 70 ou 176 degrés. J'ai envisagé toutes les différentes pentes de ces
19 élévations.
20 Q. Pourrions-nous à un moment revenir sur les zones que vous avez
21 indiquées lors de votre déposition précédente, et également que l'on vous
22 voit montrer dans cet enregistrement vidéo. Mais je voudrais que nous
23 procédions par étapes, en commençant par votre identification de cet axe-
24 là. Est-ce que vous nous dites que de votre point de vue, la question de
25 savoir si vous alliez choisir un axe à 165 ou à 175 degrés n'avait pas
26 vraiment d'importance ou que vous n'y accordiez pas une grande importance ?
27 R. Tout à fait, parce que le travail de reconnaissance du terrain a été
28 effectué sur un territoire beaucoup plus vaste que celui présenté sur le
Page 28915
1 schéma. L'ensemble de la zone se situant à droite et à gauche de cet axe a
2 été explorée en couvrant un secteur beaucoup plus important que celui
3 délimité par la marge d'erreur de plus ou moins cinq degrés, de façon à ce
4 qu'on ne puisse pas nous accuser par la suite de ne pas l'avoir fait et de
5 ne pas avoir été assez soigneux.
6 Q. Alors, je voudrais revenir sur ce que vous avez dit à l'époque, et ce
7 que vous avez dit, notamment, de ce que vous faisiez lors du ou des jours
8 pendants lesquels vous avez procédé à cette exploration. Vous avez dit que
9 cela n'avait pas une si grande importance que cela, la question de savoir
10 quel axe précis vous choisissiez, que cela n'avait pas d'incidence
11 particulière sur les résultats, mais je voudrais revenir justement sur
12 cette notion de cohérence des résultats et la justesse des résultats sur
13 lesquels vous dites que cela n'avait pas d'influence. Vous avez indiqué
14 dans votre déclaration consolidée, paragraphe 122, que selon la FORPRONU,
15 l'axe se situait à 171 degrés, plus ou moins cinq degrés; est-ce exact ?
16 R. Je crois que c'est le cas, que c'est une bonne approximation de la
17 vérité, oui.
18 Q. Très bien. Si à quelque moment que ce soit vous souhaitez vérifier ce
19 que vous avez dit dans votre déclaration, vous en avez le loisir,
20 évidemment.
21 R. Je vous crois sur parole. Ce n'est pas nécessaire.
22 Q. Comme nous l'avons remarqué dans l'enregistrement vidéo, vous avez dit
23 avoir suivi cet axe situé à 176 degrés, et ceci, Colonel, signifie donc que
24 vous avez choisi l'un des extrêmes de cet intervalle d'incertitude, à plus
25 ou moins cinq degrés, et que c'est cet axe-là que vous avez privilégié
26 plutôt que celui auquel a conclu l'équipe française d'enquête au sein de la
27 FORPRONU, n'est-ce pas ?
28 R. Eh bien, tout d'abord, il faut commencer par répéter le fait qu'il n'y
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1 avait pas d'enquête française à l'époque où cette déclaration relative à
2 l'agression serbe a été faite. Il n'y avait absolument aucune enquête. Il
3 n'y avait que cet angle de chute, un axe de tir approximatif en direction
4 de la ligne de front, et c'était tout. Cela résumait la déclaration faite.
5 Ce n'est que plus tard que j'ai entamé ma propre enquête, et les Français
6 et d'autres ont fait également la leur. Ce n'est que plus tard que des
7 efforts d'enquête ont été faits, mais c'était trop tard, pour ainsi dire.
8 Q. Colonel, deux choses : tout d'abord, pour éviter de jouer sur les mots,
9 je voudrais vous rappeler le Juge Robinson a lui aussi mis en avant les
10 critiques que vous aviez exprimées à l'endroit du terme particulier qu'il
11 avait utilisé en vous posant des questions dans le procès Dragomir
12 Milosevic, et il a défendu les termes qu'il a choisis.
13 Deuxièmement, je ne veux pas m'aventurer sur ce terrain, explorer
14 cette question de savoir s'il y avait véritablement une enquête ou une
15 conclusion suite à ces efforts préliminaires. Alors vous, vous semblez nous
16 suggérer qu'il n'y avait rien de fait du côté français jusqu'à ce que votre
17 enquête démarre. Je voudrais vous rappeler que pendant cet enregistrement
18 vidéo, au moment où votre déclaration aux médias était filmée, vous avez
19 présenté un document d'une équipe française présentant le nombre de minutes
20 définissant l'axe de tir, n'est-ce pas ?
21 R. Néanmoins, je persiste ce n'était pas un document en bonne et due
22 forme. C'était un morceau de papier. Cela ne peut être considéré comme une
23 enquête. Quand on parle d'enquête, cela présuppose que l'on ait envisagé de
24 façon très minutieuse toutes les différentes possibilités, les pistes. Et
25 là, il n'y avait aucune autre possibilité prise en considération. Il y
26 avait juste cet angle et cet axe de tir.
27 Q. Colonel, je crois que tout le monde a bien compris votre position, à
28 savoir que d'autres mesures auraient dû être mises en place avant que l'on
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1 puisse considérer qu'une enquête avait été menée à son terme, mais je
2 voudrais maintenant me concentrer sur les éléments dont vous disposiez à
3 l'époque où cet enregistrement vidéo a été tourné et auxquels vous vous
4 êtes d'ailleurs référé comme des documents et des éléments dont vous
5 disposiez et que vous avez d'ailleurs qualifiés comme étant le résultat
6 d'un effort honnête et tout à fait professionnel. Est-ce que nous sommes
7 d'accord là-dessus ?
8 R. Oui, je suis d'accord pour dire que j'en ai tenu compte. C'est vrai.
9 Q. Alors pour le moment, ce qui m'intéresse c'est la méthode que vous avez
10 employée, et ce qui m'intéresse tout particulièrement, c'est la marge
11 d'erreur positive ou négative. Donc, je voudrais que nous examinions
12 notamment la question de savoir d'où est venu ce chiffre de 171 degrés.
13 Est-ce que vous savez que l'équipe française - contrairement à ce que vous
14 dites au paragraphe numéro 122 de votre déclaration consolidée - n'a pas
15 conclu un angle de tir de 171 degrés plus ou moins cinq degrés ?
16 R. Oui, tout à fait, j'en conviens.
17 Q. Alors, à quel axe de tir ont-ils conclu ?
18 R. Bien entendu que je ne m'en souviens pas, mais je me souviens de cet
19 axe qui figurait sur le schéma et qui se trouvait dans la partie gauche,
20 mais je ne me rappelle pas le chiffre. Ça n'a pas d'importance.
21 Q. Eh bien, si l'on examine les distances couvertes, et nous y reviendrons
22 -- en fait, nous y reviendrons. Je voudrais pour le moment me concentrer
23 sur des questions de méthodologie avant toute chose, plutôt que sur les
24 conséquences générales de l'application de cette méthodologie. Je peux vous
25 présenter le document, si vous le souhaitez, dans lequel on peut voir que
26 l'équipe française a conclu un axe de tir de 160 degrés. Alors, est-ce que
27 c'est quelque chose que vous contestez ? Souhaitez-vous voir le document
28 correspondant ?
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1 R. Non, je vous crois. Il n'y a pas de problème.
2 Q. Cent soixante degrés dans le système français correspond à 2 850
3 millièmes. Est-ce que vous en êtes au courant ?
4 R. [aucune réponse verbale]
5 Q. Est-ce que vous hochez de la tête ?
6 R. Oui, tout à fait.
7 Q. Alors juste pour les Juges, les mils sont une unité de mesure angulaire
8 utilisée en artillerie et dont l'étalon de mesure dépend du système auquel
9 on se réfère, n'est-ce pas ?
10 R. Je n'ai pas très bien compris la question. Est-ce que c'est à moi que
11 vous demandez cela ?
12 Q. Dans le système russe, est-il exact que 6 000 mils est la référence
13 utilisée dans le système russe donc, et qu'un mil correspond à 1/6000e de
14 révolution, 1/6000e de tour complet ? Est-ce que c'est quelque chose que
15 vous savez ?
16 R. Non, il y a un système de calcul en millièmes et il y a un système de
17 calcul en degrés. C'est la même chose. Cela ne change rien. Je ne parle pas
18 de millimètres, mais de millièmes. Des millièmes, c'est-à-dire de mils.
19 Q. Colonel, je vous ai entendu dire, je crois, que c'était un seul et même
20 système, mais ne savez-vous pas que le système russe utilise 6 000
21 millièmes pour le tour ou la révolution complète, alors que les pays de
22 l'OTAN utilisent un système basé sur 6 400 parties ? Est-ce que vous savez
23 cela ?
24 R. Non.
25 Q. Eh bien, je voudrais juste demander l'affichage du document numéro
26 23896 de la liste 65 ter. C'est un article de l'encyclopédie Wikipedia.
27 Alors, nous allons également examiner des tableaux de tir qui, je crois,
28 montrent les différences existantes entre les systèmes de mesure en mils,
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1 les différents systèmes de mesure en mils qui existent.
2 Alors vous voyez, je crois, ce paragraphe indiquant qu'en France
3 c'est un système divisant le tour complet en 6 400 parties, qui a été
4 utilisé, que l'armée rouge a adopté un système divisant le cercle en 6 000
5 parties, 6 000 mils. Et si nous poursuivons, nous verrons qu'il y a une
6 différence également entre le système russe et le système utilisé par les
7 pays de l'OTAN pour ce qui est de la définition du milliradian ?
8 R. Je n'ai rien à dire à ce sujet. Je ne conteste pas que chaque pays ou
9 chaque bloc ait son propre système de mesure.
10 Q. Alors, la raison évidemment par laquelle je soulève ceci n'a rien
11 d'académique. Voici la raison pour laquelle j'insiste sur ceci. Comme je
12 l'ai dit, il faut transformer les mils ou les milliradians en degrés. Ce
13 qu'on obtient manifestement en divisant la mesure en milliradians par 360
14 degrés, et ensuite dans le système français on obtient un résultat de
15 17,777 à l'infini pour chaque milliradian, et si l'on multiplie [comme
16 interprété] par 2850, qui est le résultat en milliradians auquel a conclu
17 l'équipe française, vous obtenez 160. C'est là l'origine de ce chiffre de
18 160 degrés. Et vous pouvez voir dans les documents qui ont étaient versés
19 que ce chiffre de 2 850 radians correspond à 160 degrés dans le système
20 français. Cependant, Colonel, si vous avez par erreur utilisé la mesure à
21 laquelle a conclu l'équipe française, à savoir 2 850 milliradians, et que
22 vous l'avez convertie en appliquant le système de mesure russe, c'est-à-
23 dire en divisant par 6 000 plutôt que 6 400 -- ou plutôt, en divisant 6 000
24 par 360 plutôt que 6 400 par 360 avant de multiplier le résultat obtenu,
25 c'est-à-dire 16,666 à l'infini par le chiffre de 2 850 milliradians, eh
26 bien, effectivement, le résultat obtenu en multipliant le résultat, l'angle
27 mesuré par l'équipe française, par la référence du système de milliradians
28 russe, est de 171 degrés. Et n'est-ce pas ainsi, Colonel, que vous avez
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1 obtenu précisément cet axe de 171 degrés qui apparaît dans votre
2 déclaration consolidée au paragraphe numéro 122 ?
3 M. ROBINSON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président,
4 mais je souhaite élever une objection. Je ne crois pas qu'il soit
5 convenable de poser une question au témoin de cette façon, et peut-être que
6 si nous souhaitons savoir davantage à ce sujet, il serait possible de
7 demander au témoin de sortir, parce qu'il y a, dans la façon dont M. Tieger
8 a posé la question, quelque chose qui est susceptible d'induire le témoin
9 en erreur.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourquoi l'Accusation ne serait-
11 elle pas en mesure de présenter au témoin des éléments au sujet desquels il
12 est tout à fait en mesure de s'exprimer.
13 M. ROBINSON : [interprétation] Eh bien, je crois que M. le Procureur vient
14 juste d'énoncer des faits au témoin, de présenter au témoin des éléments
15 comme des faits alors que c'est quelque chose d'incorrect.
16 M. TIEGER : [interprétation] Eh bien, je ne sais pas ce qui préoccupe Me
17 Robinson. Est-ce que c'est la dernière phrase que j'ai prononcée ? Je peux
18 retirer la dernière phrase. Je souhaite simplement obtenir la réponse du
19 témoin quant aux données réelles qui ont été utilisées, et quant au calcul
20 qui lui a permis d'obtenir le résultat qu'il a obtenu. Donc, la question de
21 savoir quelles sont les autres enquêtes qui ont obtenu d'autres résultats,
22 peut-être c'est un autre problème auquel je reviendrais.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.
24 M. TIEGER : [interprétation]
25 Q. Alors, excusez-nous, Monsieur le Témoin, pour l'échange que nous venons
26 d'avoir. Est-ce que j'ai besoin de répéter la question ? Parce que je crois
27 qu'en mélangeant des éléments de deux systèmes différents, on comprend
28 comment vous avez obtenu le chiffre de 170 degrés. Ce n'est pas le
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1 résultat, l'angle auquel a conclu l'équipe française. C'est le résultat --
2 ce n'est pas le résultat qui apparaît dans le document que vous présentiez
3 aux médias le 2 septembre lorsque vous avez tenu cette conférence, n'est-ce
4 pas ?
5 R. Encore une fois, c'est mon point de vue. Tout d'abord, je conviens que
6 pour convertir nos tables en milliradians au sens de l'OTAN, eh bien, c'est
7 quelque chose que nous n'avons pas fait, nous n'avions pas besoin de le
8 faire. Les calculs étaient très simples et même beaucoup plus rudimentaires
9 que ce que vous imaginez. Je n'avais même pas besoin de déterminer ce que
10 représentait 160 degrés. Nous avons simplement vu quelle était la ligne
11 tracée sur la carte sans même nous poser la question de savoir combien de
12 degrés cela représentait. Nous avons repris l'axe tracé par les Français
13 sur la carte et nous avons relevé les éléments topographiques que
14 traversait cette ligne. Donc, un élément du paysage au sol, le type de
15 terrain, les points remarquables du paysage, et nous avons procédé à notre
16 enquête en ces sites. Nous n'avions même pas besoin de nous préoccuper du
17 nombre de degrés de l'angle auquel avait conclu l'équipe française, cela
18 n'avait aucune importance. Tout cela repose tout simplement sur le bon
19 vieux principe militaire des éléments remarquables du paysage, qui n'a été
20 remplacé par rien d'autre à ce jour. Et il n'y avait, à l'époque en tout
21 cas, aucun système satellitaire GPS. En tout cas, nous n'en avions pas.
22 Q. Mais lorsque vous avez parlé aux médias le 2 septembre, vous ne teniez
23 pas devant la caméra un document, une carte dessinée par l'équipe
24 d'enquêteurs français en disant c'est là l'axe tracé par l'équipe
25 française. Vous avez dit : Je sais que l'angle de chute était de tant et
26 tant, je connais l'axe auquel a conclu l'équipe d'enquêteurs bosniens et je
27 connais également l'axe auquel a conclu l'enquête française. Et c'est ainsi
28 que vous avez présenté l'axe à partir duquel vous avez travaillé, n'est-ce
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1 pas ?
2 R. Eh bien, il y a 17 ans, il était difficile d'imaginer que nous
3 débattrions de ceci aujourd'hui même d'un point de vue juridique, et non
4 pas en termes militaires, et que nous en débattrions non seulement dans le
5 contexte des tirs qui se déroulaient dans mon dos - n'oubliez pas qu'il y
6 avait une guerre à l'époque - mais dans un contexte éminemment juridique 17
7 ans plus tard, en devant répondre à une question dans laquelle il m'est
8 demandé de dire comment j'aurais éventuellement combiné les éléments de
9 deux tableaux différents ou de deux systèmes différents. Donc, j'avais à
10 présenter mes arguments aussi brièvement que possible quant au quoi, au
11 pourquoi et à ce qu'il convenait de faire. Et à l'époque, évidemment, je ne
12 pensais pas au fait que j'avais omis éventuellement de présenter tel ou tel
13 document ou tel ou tel autre tableau, ni aux raisons pour lesquelles je
14 n'avais pas fait de commentaires à tel ou tel sujet. C'est difficile de se
15 projeter 17 ans dans l'avenir.
16 Q. Colonel, vous avez peut-être procédé d'une façon différente à l'époque
17 et vous ne saviez peut-être pas que vous seriez assis dans un tribunal 17
18 ans plus tard, mais je me concentre en fait sur ce que vous avez fait et ce
19 que vous avez dit à l'époque. Je voudrais passer à un autre aspect que vous
20 avez soulevé dans votre déclaration consolidée. Donc, en supposant que vous
21 ayez suivi l'axe de droite, lorsque vous identifiez un site, vous dites
22 avoir examiné l'angle de chute et le nombre de charges indiqués
23 correspondant à ce site de tir potentiel. Alors, il y a un paragraphe de
24 votre déclaration consolidée qui est consacré à ce que vous présentez comme
25 étant une confusion faite par la Chambre de première instance entre deux
26 marges d'erreur différentes. Je voudrais d'abord passer à ce à quoi vous
27 vous référez dans le procès Dragomir Milosevic, où vous dites que la
28 Chambre de première instance dans cette affaire a pris position quant à vos
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1 conclusions portant sur les sites en question. C'est au paragraphe 722 dans
2 le jugement Dragomir Milosevic, et je voudrais que l'on affiche le document
3 23899 de la liste 65 ter, page 7.
4 Au paragraphe 722, il est dit -- alors, il y a eu un débat assez long
5 concernant votre déposition. Il est dit que vous avez déposé au sujet de
6 mortier, au sujet des sites de tir potentiels, possibles, et que vous avez
7 conclu pour chacun de ces sites que soit il était impossible de tirer à
8 partir de ces sites, soit qu'il n'y avait pas de traces de tir visibles.
9 Alors, cela se poursuit, il est indiqué que vous n'avez pas su répondre
10 quant à l'azimut précis que vous avez appliqué lorsque vous avez inspecté
11 les différents sites de tirs potentiels. Il est question d'une photographie
12 satellitaire qui vous a été présentée, figurant les différences d'azimuts,
13 et vous avez dit que l'azimut était celui utilisé par la FORPRONU. Ensuite,
14 il est dit, je cite :
15 "Le colonel Demurenko a témoigné qu'il avait été en mesure de déterminer
16 les sites de tir possibles avec une marge d'erreur de 10 à 15 mètres et que
17 cela lui avait permis d'inspecter les sites de tir correspondants. La
18 Chambre de première instance rappelle les éléments de preuve indiquant que
19 tout azimut calculé par la FORPRONU ou la police de Bosnie-Herzégovine
20 présentait une marge d'erreur de 10 degrés environ, ce qui a été confirmé.
21 Et il apparaît clairement qu'avec une marge d'erreur comme celle-là, une
22 zone plus large devait être couverte que celles correspondant aux sites
23 inspectés par le colonel Demurenko sur la base d'une marge d'erreur de 10 à
24 15 mètres. La Chambre de première instance, par conséquent, a quelque
25 difficulté à accepter les conclusions du colonel Demurenko et à exclure
26 toute possibilité que les obus aient été tirés à partir du territoire
27 contrôlé par le SRK. Cette conclusion est conforme aux résultats du contre-
28 interrogatoire de l'Accusation, à savoir que le colonel Demurenko s'est
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1 limité à un secteur étroit en cherchant à identifier les sites possibles de
2 tir. Il est significatif que le colonel Demurenko n'ait jamais répondu aux
3 questions de l'Accusation sur ce point, jamais de façon claire, en tout
4 cas. La Chambre de première instance qualifie, par conséquent, ses réponses
5 de vagues et d'évasives."
6 Alors, c'est ce que la Chambre de première instance a dit. Et dans votre
7 déclaration consolidée, au paragraphe numéro 22, vous dites que, je cite :
8 "Il semblerait que la Chambre de première instance dans le procès Dragomir
9 Milosevic ait confondu les deux marges d'erreur…"
10 Et --
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste un instant. Pourriez-vous nous
12 redonner le numéro de paragraphe.
13 M. TIEGER : [interprétation] 122, me semble-t-il.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez dit 22.
15 M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi.
16 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourquoi ne présentez-vous pas le
17 paragraphe correspondant au témoin ? C'est en page 55, à la fin de ce
18 paragraphe, juste avant le début du paragraphe suivant. Page suivante.
19 M. TIEGER : [interprétation] Veuillez faire défiler vers le bas et nous
20 verrons à la fin de ce paragraphe --
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Continuez. Faites défiler davantage.
22 M. TIEGER : [interprétation]
23 Q. Alors, Colonel, nous avons pu lire le paragraphe 122 dans son
24 intégralité avec également le paragraphe numéro 121, qui est également
25 pertinent, mais les deux marges d'erreur auxquelles vous vous référez ici
26 sont, premièrement, la marge d'erreur qui s'applique à la précision du tir,
27 c'est-à-dire la cible visée et le point d'impact réel -- la différence
28 entre les deux; et deuxièmement, la deuxième marge d'erreur, c'est l'erreur
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1 qui s'applique à l'évaluation de l'emplacement du site de tir tel qu'on
2 peut l'estimer à partir des tableaux de tirs et du nombre de charges, ainsi
3 que de l'angle de chute et l'emplacement réel du site en question. N'est-ce
4 pas ? Vous avez affirmé que la Chambre de première instance dans le procès
5 Dragomir Milosevic avait fait une confusion entre ces deux notions ?
6 R. Est-ce une question ?
7 Q. Oui, c'est quelque chose que je souhaite que vous confirmiez ou que
8 vous infirmiez. Est-ce exact ou non ?
9 R. Je ne peux rien vous dire concernant une autre Chambre de première
10 instance. J'ai un respect plein et entier envers ce Tribunal et c'est la
11 deuxième fois que je viens déposer, donc comment pourrais-je mettre en
12 doute les conclusions d'une Chambre ? J'ai confiance en le Tribunal.
13 Q. J'en conviens, Colonel. Si vous nous dites que vous êtes disposé à vous
14 appuyer sur les conclusions dans le procès Dragomir Milosevic et que vous
15 revenez sur votre déposition, dans ce cas-là nous pouvons mettre un terme à
16 mon contre-interrogatoire dès maintenant. Mais j'ai cru comprendre que ce
17 vous nous dites dans le paragraphe 122, c'est que la Chambre de première
18 instance dans le procès Dragomir Milosevic a confondu ces deux types de
19 marges d'erreur différentes. Donc, si vous nous dites que ce n'est pas le
20 cas, je vais poursuivre.
21 R. Je ne comprends pas où gît votre dilemme. Qu'est-ce que vous me posez
22 comme question, en fait ?
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste un instant. Est-ce qu'on peut
24 montrer la page précédente au témoin.
25 Monsieur le Témoin, ici, au paragraphe 122, vous expliquez d'abord le
26 tableau numéro 1, c'est ce que nous voyons à l'écran. Ensuite, à la page
27 suivante, vous expliquez l'autre tableau et l'autre type de marge d'erreur.
28 Et plus loin, dans la dernière phrase, qui se trouve juste au-dessous du
Page 28926
1 tableau numéro 2, vous dites, je cite :
2 "Il semble que dans l'affaire Dragomir Milosevic la Chambre de première
3 instance ait fait une confusion entre ces deux types de marges d'erreur
4 (tableau 1 et tableau 2)."
5 Pouvez-vous nous expliquer, s'il vous plaît, ce que vous avez voulu dire
6 par cette déclaration.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut donner au témoin une copie de
8 sa déclaration ?
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne vois aucun problème là-dessus.
10 Est-ce que vous l'avez, cette copie ?
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela se trouve à la page 54 et 55.
13 M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi, il y a d'autres documents qui,
14 par erreur, ont été attachés à ce document. Il faut que je les retire, et
15 les documents peuvent être remis à nouveau à la Défense.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai quelque chose à vous dire concernant
17 cela.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, allez-y.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai l'impression que si nous allons parler de
20 détails de la science concernant l'artillerie, nous n'allons pas arriver à
21 la fin de mon témoignage - non seulement aujourd'hui mais jusqu'à la fin de
22 l'année. Permettez-moi de vous dire, lorsqu'il s'agit des tableaux de tirs,
23 lorsqu'on les prépare, on prend en considération tous les faits et
24 également des éléments qui ne sont pas complets. Donc, la déviation ou
25 l'erreur ne peut dépendre de seulement deux tableaux de tirs, mais plutôt
26 de dizaines de tableaux de tirs. Par exemple, pour comprendre qu'il y
27 aurait peut-être une déviation de trajectoire d'un projectile, il ne faut
28 pas seulement prendre en considération la température de la charge mais
Page 28927
1 également la température des couches inférieures de l'atmosphère sur le
2 site prévu de chute du projectile, également la température de l'air des
3 couches supérieures de l'atmosphère par laquelle passe la trajectoire du
4 projectile --
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi de vous avoir interrompu.
6 Procédons de façon simple. Est-ce que vous voyez la phrase où il est dit,
7 je cite :
8 "Il semble que dans l'affaire Dragomir Milosevic la Chambre ait fait une
9 confusion entre les deux types de marges d'erreur…"
10 Est-ce que vous maintenez cette déclaration ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je suis d'accord pour dire que ce qui a
12 été dit est que ces deux tableaux de tirs n'étaient absolument pas
13 suffisants pour établir la vérité.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger.
15 M. TIEGER : [interprétation]
16 Q. Je vais poser une question qui émane de la question de la Chambre. Ce
17 n'était pas la question. La question était tout simplement de savoir si
18 vous maintenez la déclaration selon laquelle ils ont fait une confusion
19 entre ces deux types de déviation ou types de marges d'erreur ?
20 R. Non, je ne peux critiquer personne qui serait arrivé à de telles
21 conclusions il y a un certain temps, il y a cinq ans. Pour le faire,
22 j'aurais besoin d'étudier en profondeur les faits et les conclusions, et je
23 ne suis pas prêt à le faire à présent.
24 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, comme vous l'avez fait
25 auparavant, je ne vais plus parler de cela.
26 Q. Colonel, vous n'avez pas expliqué dans votre déclaration comment,
27 d'après vous, il est arrivé que la Chambre de première instance ait fait
28 une confusion entre ces deux types de marges d'erreur puisqu'il n'y a pas
Page 28928
1 eu de discussion pendant votre témoignage, si je me souviens bien, de
2 marges d'erreur qui auraient représenté une différence entre le site où
3 l'obus est tombé au sol et l'endroit où il y a eu le tir, n'est-ce pas ? On
4 ne vous a posé de questions là-dessus lors de ce témoignage. La Chambre de
5 première instance ne s'intéressait pas à savoir quelle aurait pu être la
6 déviation de la trajectoire d'un projectile par rapport à la cible au
7 moment du tir ?
8 R. Je suis d'accord avec vous pour dire qu'on n'a pas parlé de cela en
9 détail pour des raisons tout à fait évidentes et claires. Comme je l'ai
10 déjà dit dans ma première déclaration et lorsque j'ai témoigné également
11 devant le Tribunal, je crois vraiment qu'il n'y a pas eu de pilonnage au
12 mortier du tout. Il s'agissait d'un acte de terrorisme qui a été fait dans
13 les rues de Sarajevo. C'est la première chose que j'ai voulu vous dire. La
14 deuxième chose est la suivante : si vous me donnez un morceau de papier ou
15 si vous me permettez d'utiliser l'écran pour vous montrer où se trouvaient
16 les régions dans lesquelles nous avons mené notre enquête, il serait clair
17 à tout le monde de voir que non seulement nous n'avons pas pu examiner tous
18 les sites possibles montrés sur la carte; nous avons donc examiné cette
19 région très large, tous les pans de cette montagne, et il s'agissait de
20 milliers de mètres carrés, pour conclure qu'il n'y avait pas de site du
21 tout où un mortier aurait pu être placé.
22 Q. Colonel, je comprends ce que vous dites à présent après avoir vu le
23 compte rendu de votre témoignage dans Dragomir Milosevic, mais regardons ce
24 que vous avez dit à la Chambre à l'époque pour ce qui est de la nature de
25 ce que vous avez fait lors de votre examen de la possibilité d'avoir tiré
26 l'obus des régions par rapport auxquelles vous avez arrivé à la conclusion
27 qu'il s'agissait de sites possibles de tir de ce projectile. D'abord, je
28 vais poser des questions concernant certaines choses que vous avez dites
Page 28929
1 dans l'affaire Milosevic. D'abord, à la page du compte rendu 7 780, vous
2 avez mentionné les spécialistes qui se sont rendus à cette localité pour
3 désigner :
4 "…le site d'où le projectile aurait été tiré."
5 A la même page, vous avez dit, je cite :
6 "Je dispose des photographies où on voit que je pointe ce site du
7 doigt," et c'est 7780.
8 Et à 7777, vous avez dit, donc à cette page du compte rendu, vous avez dit,
9 vous et les autres qui ont examiné les tableaux de tir pour établir que "la
10 marge d'erreur était de 1 à 2 mètres par rapport à la localité exacte…"
11 Ensuite, à 7781, vous avez fait référence à nouveau à :
12 "…des sites exacts des points de tir…"
13 M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi. Merci pour cet avertissement de
14 ralentir encore une fois.
15 Q. A la page 8992, vous avez parlé du fait qu'il fallait déterminer le
16 site précis, et vous dites que toutes les photographies ont été prises à ce
17 site précis avec une marge d'erreur de 10 [comme interprété] mètres". Et
18 c'est à la page 8992. Ensuite, plus loin, vous avez dit que -- vous avez
19 répondu à la question qui vous a été posée pour savoir si vous avez vu les
20 traces qui auraient indiqué qu'un mortier de 120 millimètres avait été
21 placé dans cette région. Vous avez dit :
22 "Nous allons examiner toute la région qui entoure ce site dans un périmètre
23 de 10 à 20 mètres pour ce qui est d'identifier la position de tir
24 possible." Cela aurait pu être quelque chose qui vous a incité à arriver à
25 d'autres conclusions.
26 Colonel, je vous dis que dans l'affaire Dragomir Milosevic, la Chambre de
27 première instance n'a pas fait une confusion pour ce qui est de ces
28 différents types de marges d'erreur concernant vos tableaux de tir et les
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1 tableaux de tir dont vous avez parlé dans votre déclaration consolidée, ils
2 ont compris ce que vous avez dit lorsque vous avez parlé de détermination
3 de ces sites précis. C'était le témoignage que vous avez fait dans
4 l'affaire Dragomir Milosevic, n'est-ce pas ?
5 R. Permettez-moi de répondre à votre question. C'est vrai, puisque si
6 j'avais couvert la carte en posant ma main sur la carte et en disant, j'ai
7 examiné toute la région, cela n'aurait pas été fiable et convaincant. Il
8 faut qu'on soit précis pour ce qui est du domaine d'artillerie, il faut
9 montrer tout ce qui aurait pu être pris en considération pour ces calculs.
10 Nous avons examiné des sites précis, et j'en ai parlé, j'ai parlé de tous
11 ces sites de façon très précise parce que nous avons dû montrer que nous
12 savions comment procéder à des calculs en utilisant l'angle de chute pour
13 déterminer les sites de tir possibles. Pourtant, il faut que je vous dise
14 que cela n'exclut pas la possibilité que non seulement 10 à 15 mètres, mais
15 également 150 à 200 mètres plus loin, tout a été examiné de façon
16 systématique et photographié. Et cette chose ne contredit pas l'autre. Est-
17 ce que j'ai répondu à votre question ?
18 Q. Non, puisque vous m'avez maintenant fourni des informations
19 supplémentaires, et j'aimerais poser la question là-dessus. Comme vous avez
20 déjà dit auparavant, vous vous êtes rendu à tous ces sites, et pour ce qui
21 est de ce que vous avez montré à la Chambre, vous avez voulu donc montrer à
22 la Chambre quelle était la précision de vos calculs. Et, Colonel, vous avez
23 eu l'occasion dans l'affaire Milosevic de dire à la Chambre que vous avez
24 examiné tout ce terrain, puisque la Chambre vous a confronté à cette
25 question pour vous demander la nature précise des sites pour lesquels vous
26 avez dit que vous avez examinés. Et vous avez dit : Non, non, non, c'est
27 vrai, on ne peut pas être précis dans une telle mesure et j'ai examiné le
28 territoire plus large pour être sûr.
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1 Voilà ce que vous avez dit à la Chambre, Colonel. Permettez-moi de vous
2 dire d'abord quelle était la question qui vous a été posée concernant
3 l'accent mis sur la précision pour ce qui est de la détermination des
4 sites. Et sur la page du compte rendu 7 705 et 06 dans l'affaire Dragomir
5 Milosevic, et ainsi que dans votre déclaration consolidée, le Juge Harhoff
6 vous a posé la question suivante :
7 "N'existerait-il une large marge d'erreur pour ce qui est de ces points de
8 tir, et la marge d'erreur aurait pu être beaucoup plus large si on prend
9 par exemple six charges qui auraient été tirées de ce site ? Cela aurait pu
10 être lancé des sites se trouvant dans une région plus large, et pas
11 nécessairement du site où vous vous trouviez. S'il y avait, par exemple, à
12 quelques centaines de mètres, une route ou quelque chose d'autre, le
13 projectile aurait pu être lancé de ce site. Est-ce que vous êtes en mesure
14 d'exclure la possibilité que le projectile de mortier aurait été lancé d'un
15 endroit qui se trouve tout près de l'endroit où vous vous trouviez ?"
16 R. Je peux répondre à cette question.
17 Q. Oui, vous pouvez y répondre, mais j'aimerais vous dire d'abord quelle
18 était votre réponse à l'époque, puisque vous n'avez pas donné la même
19 réponse qu'aujourd'hui. Vous n'avez pas dit que vous avez examiné un
20 territoire large. Vous avez dit :
21 "Il faut que je souligne une chose, encore une fois. Je connais très bien
22 cette arme. Peut-être que l'interprétation du mot "charge" était erronée.
23 Il n'y a pas différents obus, il y a six charges pour un obus, qui sont
24 placés manuellement dans le tube. Et après, il faut lancer.
25 "Est-ce que pour ce qui est des tableaux de tir, pour ce qui est de
26 tirs de mortier que nous avons vus dans la vidéo, est-ce qu'il était
27 possible d'y mettre seulement six charges et que toutes ces six charges ont
28 été prises en considération."
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1 Ensuite, vous avez dit :
2 "Pour ce qui est des marges de déviation, cela est mesuré en mètres, par
3 exemple 10 à 15 mètres, cela dépend de l'espace, mais la marge de déviation
4 ne peut pas être une centaine de mètres. Nous avons pris en compte les
5 trajectoires balistiques. Il s'agit des éléments physiques. Nous ne pouvons
6 pas changer cela. Si vous prenez en considération la ligne de tir,
7 seulement six charges peuvent être utilisées. Nous avons photographié cette
8 région couvrant la surface de 20 ou 30 mètres carrés, et nous avons donc
9 conclu qu'il faut y avoir une certaine surface sur laquelle on peut poser
10 un mortier. Il ne peut pas être suspendu dans l'air ou sur un arbre."
11 Vous avez eu l'occasion de dire dans l'affaire Milosevic, mais non
12 seulement vous avez eu l'occasion mais vous avez eu l'obligation de
13 répondre à cette question puisque le Juge vous a posé cette question, et à
14 cette occasion-là, vous n'avez pas dit que vous aviez examiné toute la
15 région qui couvrait une surface de milliers et de milliers de mètres
16 carrés. Vous avez dit : Nous avons examiné le site précis qui couvrait une
17 surface de 20 à 30 mètres carrés pour déterminer que le mortier n'a pas
18 opéré de ce site, et ensuite, la Chambre dans l'affaire Milosevic est
19 arrivée à des conclusions auxquelles elle est arrivée, n'est-ce pas ?
20 R. Je vais vous donner la réponse à cette question. Concernant la première
21 partie de votre question, je pense qu'il s'agissait d'une question, il est
22 nécessaire que je réponde à la question concernant la route. En théorie, la
23 route pourrait être un site relativement souhaitable pour poser une pièce
24 d'artillerie. Mais à l'endroit où nous nous trouvions, il n'y avait pas de
25 route goudronnée. Il n'y avait que des sentiers en terre qui étaient
26 utilisables uniquement par les chevaux. Et même sur ce type de sol, il y
27 aurait eu des traces, des traces des plaques de mortiers, des caisses de
28 munitions, et même si quelqu'un avait essayé de les cacher ou de les
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1 déplacer, cela aurait été difficilement réalisable.
2 La deuxième chose : pourquoi je n'ai pas parlé de la région que nous avons
3 examinée. En tant que professionnel, expert - non pas en géologie mais dans
4 mon domaine d'expertise - il m'est difficile d'expliquer pourquoi je n'ai
5 pas parlé de cela. Peut-être qu'ils m'ont pas posé de questions là-dessus.
6 C'est possible. Mais je dois dire que dans l'entretien qui a été filmé,
7 donc dans cette vidéo, j'ai dit que nous avons exploré cette localité. Je
8 n'ai pas parlé de site concret. J'ai parlé de cette localité. Cela veut
9 dire que nous avons examiné une région large pour ne pas être accusés par
10 la suite que nous serions arrivés à des conclusions qui n'étaient pas
11 impartiales. C'est tout ce que j'ai à dire là-dessus.
12 Q. Essayons d'être un peu plus concret puisque vous continuez à dire, et
13 vous insistez, que probablement ils n'ont pas posé cette question.
14 Et on vous a lu en détail les questions qui vous ont été posées par le Juge
15 Harhoff et vous aviez parlé d'un pré. Affichons maintenant 1D08701, s'il
16 vous plaît. Lors de votre témoignage, vous avez parlé d'un pré -- je
17 suppose qu'il s'agit de ce pré dont vous avez parlé parce que je ne me
18 souviens que d'une photographie de pré des quatre que vous avez montrées
19 dans le prétoire.
20 R. Oui, cette photographie est incluse dans ces photographies. Mais il y
21 avait un énorme nombre de photographies. Et sur cette photographie, on peut
22 voir que ce que j'ai dit correspondait à la réalité.
23 Q. Le Juge Harhoff vous a clairement dit : Vous pointez la région que vous
24 avez examinée, mais s'il y a une route à la proximité du site où vous vous
25 trouviez, à quelques centaines de mètres de là, cela aurait invalidé vos
26 conclusions ? Et vous avez dit : Non, ce n'était pas le cas, puisque vous
27 pouvez voir qu'il y a une maison et une route, et j'ai regardé cette route.
28 Vous avez dit : Donc j'ai examiné le territoire qui couvrait 20 à 30 mètres
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1 carrés qui entouraient ce site et après j'ai déterminé où se trouvait la
2 position de tir. N'est-ce pas ?
3 M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que M. Tieger
4 peut lire cela du compte rendu pour voir ce que le témoin a dit également.
5 M. TIEGER : [interprétation] J'ai lu cela il y a quelques instants. Est-ce
6 que M. Robinson veut vraiment que je relise cela ?
7 M. ROBINSON : [interprétation] Eh bien, je regarde le paragraphe 97 de la
8 déclaration consolidée d'où il a cité une partie, j'hésite à le lire en
9 présence du témoin, mais en tout cas c'était la deuxième phrase à partir du
10 bas :
11 "…nous avons photographié le territoire d'une surface de 20 à 30 mètres
12 carrés."
13 M. TIEGER : [interprétation]Oui.
14 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
15 M. TIEGER : [interprétation]
16 Q. Et il est également dit, Monsieur Demurenko, que la marge de déviation
17 ne peut pas être ce que le Juge a dit. Vous ne devriez pas être inquiet
18 pour ce qui est de la route qui se trouve à quelques centaines de mètres
19 puisque la marge de déviation est mesurée en mètres, 10 à 15 mètres, et ne
20 peut pas être 100 mètres, par exemple. C'est ce que vous avez dit dans
21 votre témoignage dans l'affaire Milosevic, c'est ce que vous avez dit à la
22 Chambre, n'est-ce pas ?
23 R. Je ne vais pas nier quoi que ce soit de ce que j'ai dit précédemment
24 devant la Chambre dans l'affaire Milosevic. Je ne vais pas nier non plus ce
25 que j'ai dit aujourd'hui. Ce que j'ai dit, je l'ai dit en toute sincérité
26 et honnêteté. Et si quelqu'un voudrait me tendre un piège pour me dire
27 qu'il y avait des éléments incohérents pour ce qui est de ce que j'ai dit
28 avant et maintenant, c'est une autre question. Peut-être qu'il s'agit d'une
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1 sorte de stratégie, mais je réitère que je ne suis pas expert juridique. Je
2 suis soldat, et tout ce que j'ai dit a été déjà dit. Et pour ce qui est
3 d'autres questions à poser, il faut les poser à des spécialistes dans ces
4 autres domaines, spécialistes qui répondraient à un niveau différent à ces
5 questions.
6 Q. Colonel, laissons cela de côté pour le moment.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Permettez-moi d'essayer pour la dernière
8 fois de montrer le dernier paragraphe dans la déclaration du témoin. C'est
9 le paragraphe 122 dans la déclaration du témoin.
10 Monsieur Demurenko, comprenez-vous l'anglais ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je comprends l'anglais, mais je ne l'ai
12 pas pratiqué pendant les quelques dernières années. Et je peux comprendre
13 l'anglais lorsqu'il s'agit des conversations ordinaires ou de lire un
14 bouquin simple, mais pour ce qui est de discussions sérieuses où tous les
15 mots - et non seulement tous les mots mais toutes les virgules comptent -
16 je ne pourrais pas, donc, dire que je pourrais utiliser mon anglais.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Passons à la page suivante. Et est-ce
18 qu'on peut agrandir un peu cette page.
19 Je vous prie de lire deux lignes, ou une phrase, la phrase qui apparaît
20 juste au-dessus du paragraphe 123. Lisez cette phrase à voix haute, s'il
21 vous plaît. Ou bien, je peux la lire à vous et vous pouvez entendre la
22 traduction.
23 "Il semble que la Chambre de première instance dans l'affaire Drago
24 Milosevic fait une confusion pour ce qui est de ces deux marges d'erreur,"
25 et vous faites référence au tableau 1 et au tableau 2.
26 C'est dans votre déclaration, et vous avez dit que vous mainteniez cela.
27 Qu'est-ce que vous avez entendu par là ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Il m'est difficile de me rappeler l'état
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1 d'esprit dans lequel j'étais il y a cinq ans. Mais dans ce cas concret,
2 j'ai fait référence au fait que tous les éléments de la science
3 d'artillerie n'avaient pas été pris en considération. Comme je l'ai dit il
4 y a 15 ans, non seulement deux tableaux sont pertinents, mais plutôt 20 ou
5 30, et il n'est pas approprié de comparer seulement deux tableaux et se
6 contenter de cela. Nous devrions nous limiter soit à une marge de quelques
7 centimètres ou prendre en considération tous les 30 tableaux de tir qui
8 sont pertinents.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais c'est ce que vous avez dit
10 récemment, et non pas il y a cinq ans. Pouvez-vous tirer ce point au clair
11 pour nous dire ce que vous avez entendu par là. Pourquoi avez-vous pensé
12 que la Chambre dans l'affaire Milosevic a été mise dans un état de
13 confusion ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Il ne m'est pas facile de juger les fondements
15 sur lesquels ce haut Tribunal s'est appuyé pour arriver à ses conclusions.
16 Je crois que cela a été fait de cette façon simple parce que nous ne
17 devrions pas regarder seulement des détails sur un costume, par exemple,
18 mais le costume tout entier, et non pas des accessoires ou des détails.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Si l'on traduisait en russe ces paragraphes, le
21 témoin pourrait voir qu'il s'agissait des conclusions dans le jugement dans
22 l'affaire Milosevic. Il faut qu'on lui lise les deux paragraphes,
23 paragraphes 122 et 123.
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que M. Tieger l'a fait, mais
25 peut-être que vous pourriez reprendre ce sujet-là lors de vos questions
26 supplémentaires.
27 Veuillez continuer, Monsieur Tieger.
28 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.
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1 Q. Bien. Vu le temps qu'il nous reste, j'aimerais tout de même passer à un
2 domaine complètement différent. J'aimerais me concentrer sur vos
3 affirmations selon lesquelles vous recherchiez plusieurs traces de mortier
4 qui avait été tiré. Tout d'abord, pouvons-nous nous mettre d'accord pour
5 dire qu'il se peut qu'il existe une différence entre les traces d'une
6 position de mortier fixe qui a été placé à un endroit particulier pendant
7 un certain temps et les traces laissées par un mortier temporairement placé
8 à un endroit pour un tir unique ?
9 R. Oui. Oui, oui, tout à fait. Les positions de tir qui ont été occupées
10 pendant plusieurs années laissent des traces plus profondes,
11 indubitablement. Cela étant, même un mortier placé temporairement
12 laisserait inévitablement une trace, surtout si un tir a eu lieu. S'il a
13 juste été placé là sans tirer et ensuite a été déplacé par une grue, par
14 exemple, les traces seraient minimes. Mais s'il y a eu un tir, l'équipe
15 n'aurait jamais pu retirer toutes les traces de la charge qui a été tirée
16 et des restes de l'obus. Mais tous les spécialistes en artillerie
17 s'accorderont pour dire qu'il existe une chance sur un million pour qu'un
18 seul mortier arrive à atteindre une rue en particulier habitée par une
19 grande foule. Et laissez-moi vous rappeler que deux ans auparavant, il y
20 avait eu une attaque terroriste identique dans la même rue qui a fait 88
21 victimes et a blessé 200 personnes. Les chances qu'un obus de mortier
22 arrive dans une rue si petite, de 6 à 8 mètres de longueur entre ces deux
23 bâtiments, sont d'une sur un million. C'est presque impossible.
24 Q. Est-ce que cette probabilité serait plus élevée si le mortier devait
25 atterrir dans une région plus grande plutôt qu'en un endroit précis ? Etes-
26 vous en train de dire que l'origine du tir de mortier et le fait de savoir
27 s'il s'agissait d'un mortier se fondent sur votre conclusion d'un endroit
28 précis, d'une cible plus grande que la cible en l'occurrence ?
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1 M. ROBINSON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Juge. M. Tieger
2 pose plusieurs questions au témoin en même temps, et M. Karadzic avait été
3 critiqué pour cela. Donc, il faudrait qu'il subdivise sa question en
4 plusieurs parties.
5 M. TIEGER : [interprétation] Très bien.
6 Q. Alors, je vais vous poser une première question. Etes-vous en train de
7 dire que vos conclusions se fondent sur le fait que le mortier avait été
8 tiré à l'endroit exact où il a atterri -- excusez-moi, que le mortier
9 ciblait l'endroit exact où il a atterri, par exemple, le marché ?
10 R. Non. Non, pas du tout. Moi, je dis qu'il n'y avait pas de tir de
11 mortier. C'est sur cela que j'insiste. Mais même si l'on accepte cette idée
12 fantaisiste qu'un mortier ait été tiré sur la ville et qu'il y avait de
13 très faibles probabilités qu'il touche une très petite zone fort peuplée,
14 cette chance ou cette probabilité est d'une sur un million. J'aimerais
15 rappeler à cette Chambre et à tout le monde que ce jour-là, il y a eu
16 plusieurs explosions enregistrées par les représentants des Nations Unies.
17 Je pense qu'il y avait six détonations, six explosions dans cette zone. Et
18 après les cinq premiers tirs de mortier ou obus de mortier, seules cinq
19 personnes ont été blessées. Et cet obus en particulier a supposément tué 88
20 personnes et blessé 200 personnes. Ce n'est pas possible. Il est impossible
21 qu'un obus détermine un point où il provoquerait le plus de dommage et le
22 plus grand nombre de pertes. Beaucoup de choses ont été présentées lors de
23 la déclaration faite au public, mais je pense que ça ne tient pas la route.
24 Q. Donc, il semble que vous soyez en train de dire que vous avez parcouru
25 des milliers de mètres sur ce territoire afin de trouver les traces d'obus
26 de mortier qui, d'après vous, n'avait jamais été tiré ?
27 R. Oui.
28 Q. Donc, vous êtes parti sur le terrain en vous disant qu'il n'y avait
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1 rien à trouver, n'est-ce pas ?
2 R. Non, non. Je voulais confirmer ce que le porte-parole avait dit - du
3 territoire serbe - je voulais voir si je pouvais prendre des photos et
4 trouver des traces, mais la conclusion de mon enquête, c'est qu'il avait
5 menti. Mon objectif était atteint. Mon objectif était de réfuter sa thèse
6 et de trouver des faits.
7 Q. Est-ce que vous estimez que l'on pourrait penser que vous cherchiez les
8 traces d'un mortier qui a été tiré d'un poste temporaire, c'est-à-dire par
9 quelqu'un qui s'était rendu là pour l'occasion et avait tiré le mortier, ça
10 lui a pris une minute ou deux, et puis est reparti ? Est-ce que vous avez
11 envisagé cette possibilité et est-ce que c'est ce que vous recherchiez en
12 détail ?
13 R. Nous cherchions tout objet, tout indice, qui pourrait indiquer un
14 changement inhabituel dans la zone. Du sable qui aurait coulé de sacs de
15 sable posés pour stabiliser le mortier. Mais personne ne voyageait là-bas
16 avec des sacs de sable de toute façon. Il y aurait dû y avoir certaines
17 traces de la charge ou de l'obus. Nous cherchions quoi que ce soit qui
18 serait ressorti, qui aurait été inhabituel, pour étayer la thèse des
19 Nations Unies. Mais nous n'avons rien trouvé de cela. Et je pense que --
20 d'ailleurs, je dois vous rappeler que la pente est très forte, 70 degrés
21 environ. Et personne ne tirait de là.
22 Q. Soixante-dix degrés, donc suffisamment pour effacer le bâtiment et
23 atterrir directement dans la rue ?
24 R. Oui, c'est une façon quelque peu hypocrite d'envisager les choses. Si
25 l'obus était passé au-dessus des toits, ça n'aurait été que de quelques
26 centimètres. Et dans des attaques d'artillerie en masse, c'est ce qui se
27 passe. Les obus atterrissent dans la rue, au-dessus des toits, mais cela se
28 passe lors d'attaques d'artillerie massives. En utilisant un tir de
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1 mortier, les probabilités sont d'une sur un million.
2 Q. Merci, Colonel.
3 M. TIEGER : [interprétation] Je pense que nous en avons terminé pour
4 aujourd'hui, Monsieur le Juge.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous continuerez demain, Monsieur Tieger
6 ?
7 M. TIEGER : [interprétation] Oui.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Nous allons donc clore l'audience
9 pour aujourd'hui. Mais, Monsieur Demurenko, j'aimerais vous rappeler qu'il
10 vous est interdit de discuter de votre témoignage avec qui que ce soit, y
11 compris les parties, la Défense et l'Accusation. Est-ce que vous comprenez
12 cela, Monsieur ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous reprendrons demain à 9 heures.
15 --- L'audience est levée à 14 heures 45 et reprendra le mercredi, 17
16 octobre 2012, à 9 heures 00.
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