Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL AFFAIRE N° IT-95-14/1-T

2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE

3 Mercredi 18 Novembre 1998

4 L'audience est ouverte à 14 heures 35.

5 (L'accusé est introduit dans le prétoire.)

6 M. le Président – Bonjour, Mesdames, Messieurs. Bonjour

7 accusation. Bonjour, défense. Bonjour, cabine technique, sténotypistes et

8 interprètes. Etes-vous près, interprètes ?

9 Interprète. - Nous sommes prêts. Bonjour, Monsieur le Président.

10 M. le Président – Nous allons, pour le compte-rendu, annoncer

11 l'affaire. Monsieur le Greffier, voulez-vous annoncer l'affaire ?

12 M. Abtahi. – Il s'agit de l'affaire IT-95-14/1-T, le Procureur

13 contre Zlatko Aleksovski.

14 M. le Président – Merci, Monsieur le Abtahi. Maître Niemann,

15 vous pouvez présenter le Bureau du Procureur, s'il vous plaît ?

16 M. Niemann (interprétation). – Bonjour, Monsieur le Président,

17 Messieurs les Juges. Je m'appelle Grant Niemann et je représente, ce

18 matin, le Bureau du Procureur, avec mon collègue Me Meddegoda.

19 M. Mikulicic (interprétation). – Je suis Goran Mikulicic et,

20 avec mon collègue Joka, je représente la défense.

21 M. le Président. – Merci beaucoup. Aujourd'hui pour notre agenda

22 de travail nous allons analyser, discuter la requête que MM Kordic et

23 Cerkez ont fait dans l'affaire, à plusieurs Chambres qui ont des affaires

24 en relation avec ce qu'on appelle la Lasva Valley. Une des Chambres qui a

25 été saisie est notre Chambre, donc la Chambre Aleksovski. Nous avons déjà

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1 été saisis officiellement par la Chambre Kordic. Mais avant de décider

2 certainement que nous aimerions bien entendre les parties à propos de la

3 question.

4 Avant de commencer à discuter de la question, j'aimerais

5 demander à Maître Mikulicic s'il connaît bien la question, ou demander aux

6 parties s'il est nécessaire de faire un point de la situation, ou si vous

7 connaissez, si vous avez une connaissance suffisante pour commencer à

8 débattre la question ?

9 Maître Mikulicic ?

10 M. Mikulicic (interprétation). – Monsieur le Président, la

11 défense connaît le contenu de la requête de la défense de

12 l'affaire Kordic, donc nous sommes prêts à discuter là-dessus maintenant.

13 M. le Président – Je crois que vous connaissez bien la question

14 de toute façon. J'aimerais bien entendre la défense ?

15 M. Niemann (interprétation). – Vous voulez que je vous présente

16 dès à présent les éléments relatifs à cette requête,

17 Monsieur le Président ? Vous ai-je bien compris ?

18 M. le Président – Oui, c'est cela.

19 M. Niemann (interprétation). – Monsieur le Président,

20 Messieurs les Juges, hier, je crois que les interprètes ont eu quelques

21 difficultés à m'entendre. Est-ce que les interprètes pourraient me dire

22 s'il n'y a pas de problème technique qui se pose ? Ils pourront intervenir

23 dès qu'il auront l'impression de perdre le volume.

24 Pour la requête déposée dans le cadre de l'affaire Kordic, il

25 s'agit d'une requête demandant à ce que cette Chambre de première instance

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1 accepte que la défense, dans l'affaire Kordic, puisse avoir accès à tous

2 les éléments de preuve, les témoignages et les documents qui ont pu être

3 déposés dans cette affaire.

4 C'est une demande qui est formulée auprès de cette Chambre de

5 première instance, on demande à ce que certains documents soient

6 communiqués. Cette requête, d'après nous, ne tient pas compte du fait que

7 le Procureur a, lui, des obligations de communication très étendues au

8 titre des articles 70 et 68 du Règlement.

9 Que vous demande cette requête ? Elle vous demande que vous

10 communiquiez des documents que le Procureur ne communique pas.

11 Elle est, d'après nous, sans fondement aucun. Si fondement elle

12 avait cependant, eh bien cela supposerait que cette Chambre de première

13 instance, que vous présidez, se penche sur tous les comptes-rendus, les

14 éléments de preuve, les décisions, les ordonnances et autres éléments qui

15 ont été divulgués dans le cadre d'audiences à huis clos ou qui sont des

16 documents confidentiels dans cette affaire. Elle se pencherait donc sur

17 tous ces éléments pour essayer de savoir si ces documents peuvent être

18 d'une certaine pertinence pour la défense de Dario Kordic et Mario Cerkez.

19 Mais comment, vous, Monsieur le Président et

20 Messieurs les Juges, seriez-vous à même de savoir ce qui est pertinent

21 pour la défense de ces deux accusés ? La requête qui vous est soumise

22 n'explique pas comment vous devriez procéder pour vous assurer de la

23 pertinence de ces documents.

24 Ce qui est certain, c'est que moi je ne sais pas quels sont les

25 documents qui pourraient être utiles à la défense de ces deux accusés. Je

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1 ne sais pas si Me Mikulicic a une meilleure idée sur la question. Mais ce

2 qui est bien certain, c'est que le représentant du Bureau du Procureur

3 dans l'affaire Kordic-Cerkez sait, lui, quels sont les documents qui

4 l'intéressent, parce qu'il est dans l'obligation juridique de savoir quels

5 sont les éléments pertinents. Au nom du Bureau du Procureur, il est dans

6 l'obligation -en vertu des articles 66 et 68 du Règlement- de se conformer

7 à certaines obligations de communication.

8 Mais cela, c'est une question qui ne concerne que l'accusation

9 dans l'affaire Kordic, et certainement pas l'accusation dans

10 l'affaire Aleksovski. Ceci n'a rien à voir non plus avec Me Mikulicic qui

11 comparaît pour défendre les intérêts de M. Aleksovski.

12 Je ne sais pas, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, si

13 vous avez l'intention d'examiner cette requête, mais sincèrement je ne

14 crois pas que cela a lieu d'être. Je ne crois pas que cette requête aurait

15 dû vous être soumise.

16 Toutes ces questions, relatives à la communication, sont des

17 questions qui doivent être tranchées par la Chambre de première instance,

18 qui connaît l'affaire Kordic-Cerkez. Et c'est la Chambre de première

19 instance qui entend, dans cette affaire, s'assurer que l'accusation se

20 conforme à ses obligations en matière de communication.

21 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, quels sont les

22 fondements à la base de cette requête ? Ils ne sont pas clairs. D'après

23 nous, ce n'est pas une requête qui peut être motivée par les articles 66

24 ou 68 de notre Règlement, car ces articles du Règlement décrivent quelles

25 sont les obligations qui incombent au Procureur et non pas aux Chambres de

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1 première instance.

2 Le Juge Vohrah se rappelle peut-être de ce qui s'est produit

3 dans l'affaire Tadic. A un certain moment de la procédure, le conseil de

4 la défense a suggéré que la Chambre de première instance devait se pencher

5 sur la question des obligations de communication qui sont celles de

6 l'accusation au titre des articles 66 et 68 du Règlement. A l'époque, le

7 Président de la Chambre de première instance, le Juge McDonald, a bien

8 précisé que ceci ne concernait que le Bureau du Procureur et certainement

9 pas la Chambre de première instance. Elle a refusé la possibilité que la

10 Chambre de première instance se penche sur ce problème.

11 Donc que nous reste-t-il à faire ? Il nous retse à examiner la

12 requête qui a été déposée par les conseils de MM Kordic et Cerkez pour

13 voir si cette requête repose sur des fondements quelconques.

14 Je vais vous renvoyer aux articles 20 et 21 du Statut,

15 Monsieur le Président et Messieurs les Juges. Je crois que j'ai raison de

16 penser que les conseils de la défense de MM Kordic et Cerkez invoquent ces

17 articles comme étant les articles qui permettent à la Chambre de première

18 instance d'intervenir dans cette affaire. Mais d'après nous,

19 Monsieur le Président, les articles 20 et 21 du Statut ne permettent en

20 aucun cas à la Chambre de première instance de l'affaire Aleksovski

21 d'entrer ou d'examiner les questions qui se posent devant la Chambre de

22 première instance de MM Kordic et Cerkez.

23 En aucun cas, la Chambre ne peut intervenir pour s'assurer qu'un

24 procès équitable soit assuré aux deux accusés que je viens de citer. Si,

25 dans l'affaire Aleksovski, Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

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1 vous avez un certain nombre d'obligations qui découlent des articles 20 et

2 21 du Statut, obligations qui vous poussent à vous assurer que

3 M. Aleksovski reçoit un procès équitable.

4 Pourquoi ces obligations seraient-elles étendues à d'autres

5 Chambres, comme par exemple la question de la communication des éléments

6 de preuve ? Si c'était le cas, si vos obligations étaient étendues à tous

7 ces différents domaines, cela entraînerait des conséquences extrêmement

8 importantes. Parce que non seulement votre Chambre de première instance

9 aurait toutes ces obligations, mais toutes les autres Chambres de première

10 instance de ce Tribunal auraient ces obligations.

11 Que veux-je dire exactement ? En vertu des articles 20 et 21 du

12 Statut, MM Cerkez et Kordic ont le droit de bénéficier d'un procès juste

13 et équitable. Parce que qu'ils jouissent de ce droit, ils pourraient,

14 d'après leurs conseils de la défense, faire appel à vous, Monsieur le

15 Président et Messieurs les Juges, pour que ces droits leur soient assurés.

16 C'est ridicule, c'est absurde, parce que cela signifierait que chaque fois

17 qu'il y a un procès, tout le monde, tous les Juges du Tribunal devraient

18 assister à ce procès. Peut-être que la seule exception à cette règle

19 seraient les juges de la Chambre d'appel. Cela ne peut être.

20 Quelle est la Chambre de première instance qui doit se pencher

21 sur la question ? C'est la seule Chambre de première instance qui entende

22 l'affaire Kordic-Cerkez.

23 Je ne veux pas dire, bien entendu, que nous ne voulons pas que

24 MM Kordic et Cerkez ne bénéficient pas d'un procès équitable. Loin de nous

25 cette idée, au contraire nous souhaitons que les droits des accusés soient

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1 respectés, mais ce n'est pas à vous Monsieur le Président, Messieurs les

2 Juges, de veiller à ce que les accusés puissent jouir des droits qui sont

3 les leurs. Il ne vous revient pas de vous assurer du fait que ces accusés

4 bénéficient de ce type de procès. Il ne vous revient pas d'entrer dans des

5 questions qui traitent de la communication de documents. Je le répète,

6 c'est au Procureur seul de se pencher sur ce problème.

7 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, vous avez tous pris

8 part à l'élaboration des différents articles qui constituent notre

9 Règlement de procédure et de preuve. Et lors de la rédaction de ces

10 différents articles, très clairement, il a été établi que c'est le

11 Procureur qui a l'obligation de la communication de pièces.

12 Les articles 66 et 68 indiquent très précisément quels sont les

13 obligations du Bureau. Si le Bureau du Procureur ne s'acquitte pas de ces

14 différentes obligations au titre des deux articles que je viens

15 d'invoquer, alors c'est aux conseils de la défense de MM. Kordic et

16 Cerkez, à la chambre de première instance de l'affaire Kordic, de demander

17 au Bureau du Procureur de s'acquitter, de façon appropriée, à ses

18 obligations en matière de communication de pièces.

19 La Chambre de première instance qui entend de l'affaire Kordic-

20 Cerkez n'hésiterait pas, nous n'en doutons pas, à prendre toutes les

21 mesures nécessaires pour que le Bureau du Procureur s'acquitte des

22 obligations qui sont les siennes. Cette Chambre de première instance

23 prendrait toutes les mesures qui s'imposerait dans une telle hypothèse.

24 Pour ce qui est, notamment de l'article 68 du Règlement, il ne

25 fait aucun doute que le Bureau du Procureur a l'obligation d'examiner les

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1 éléments de preuve qu'il soumet à l'intention de la Chambre. Bien sûr, ce

2 n'est pas moi, personnellement, qui me penche sur ces documents, mais en

3 effet ce sont les différentes parties de l'affaire Kordic et Cerkez qui se

4 penchent sur ces différents éléments.

5 L'article 68 précise quelles sont les obligations du Bureau du

6 Procureur. Cet article indique que si le Procureur prend connaissance

7 d'éléments de preuve qui sont de nature à disculper l'accusé, il doit en

8 faire part à la défense.

9 Mais que se passerait-il si le Procureur en arrivait à une telle

10 décision toujours conformément à l'article 68 et que se passerait-il si

11 ces éléments de preuve étaient protégés par une ordonnance de la Chambre,

12 rendue conformément à l'article 75 du Règlement ? Il reviendrait à

13 l'accusation de faire appel à vous , Monsieur le Président et Messieurs

14 les Juges, et de vous demander de lever cette ordonnance afin que le

15 Procureur soit à même de s'acquitter de toutes ces obligations qui

16 apparaissent aux articles 66 et 68 du Règlement.

17 Très respectueusement, Monsieur le Président, nous estimons, que

18 étant donné que le Bureau du Procureur doit faire face à cette lourde

19 charge qui l'oblige à examiner tous les éléments qu'il souhaite soumettre,

20 parce que nous devons nous acquitter de cette charge légitime et tout de

21 même lourde, il faut essayer de savoir quels sont les éléments de preuve

22 qui tombent dans le champ de l'article 66 et quels sont ceux qui tombent

23 dans le champ de l'article 68.

24 Si les éléments de preuve examinés tombent dans l'une quelconque

25 de ces catégories, et si le Procureur doit les communiquer, il doit

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1 également s'assurer que ces éléments de preuve ne sont pas protégés par

2 une ordonnance rendue au titre de l'article 75 du Règlement. S'il

3 s'aperçoit que c'est le cas, le Procureur doit prendre toutes les mesures

4 nécessaires pour s'assurer que cette ordonnance est levée, ce qui suppose,

5 dans certains cas, que des démarches soient entreprises auprès de certains

6 témoins. Lorsque, par exemple, dans cette affaire, des témoins ont

7 comparu, ils ont comparu parce qu'ils pensaient que les éléments de preuve

8 dont ils allaient permettre le versement ne concernaient que cette affaire

9 et pas d'autres affaires entendues par ce Tribunal. C'est souvent le cas.

10 C'est souvent l'impression qu'ont les témoins quand ils viennent ici. Ils

11 ne pouvaient en aucun cas s'attendre à ce qu'on leur demande à ce que

12 leurs éléments de preuve ou leurs témoignages soient versés dans le cadre

13 d'une autre affaire ou soient demandés par le conseil de la défense dans

14 une autre affaire.

15 Donc l'accusation qui est la partie qui entre en contact la

16 première avec les témoins devrait, dans l'hypothèse que je soulève,

17 rentrer en contact avec les témoins et leur expliquer que certains des

18 éléments du témoignage qu'ils ont donné à une Chambre de première instance

19 sont réclamés par une partie d'une autre Chambre de première instance. Que

20 se passe-t-il ? Le témoin peut refuser que les témoignages qu'il a fait

21 devant une Chambre soient communiqués à une autre.

22 Il ne vous incombe pas à vous, Messieurs les Juges, de lancer

23 quelque procédure que ce soit. Il ne vous incombe pas d'assurer une

24 responsabilité qui est celle, pour le moment, uniquement du Procureur. Il

25 ne vous incombe pas à vous d'assurer la communication.

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1 Ce que vous demande cette requête, c'est de procéder à la

2 communication et ce faisant, vous devriez passer un jugement et accepter

3 les responsabilités qui entraînent une telle communication. Il faudrait

4 que vous disiez s'il s'agit d'éléments de preuve qui font aider à la

5 défense dans l'affaire Kordic ou pas et il faudra voir quels sont les

6 éléments à communiquer ou pas.

7 Et ceci, à notre avis, n'est pas une obligation que vous

8 incombe, ni le Statut, ni le Règlement. Ce n'est pas une obligation qui

9 découlerait de l'article 20 de la nécessité d'un procès équitable. C'est

10 une obligation qui incombe à la Chambre qui connaît cette affaire-là.

11 Il n'existe donc, à notre avis, aucun fondement qui permette à

12 la défense de Kordic et Cerkez de vous demander d'accepter cette

13 responsabilité, alors que les prémices, sur lesquels elle se fonde, ne

14 sont pas corrects. Ce qu'ils invoquent comme raison, c'est avoir un procès

15 équitable.

16 De surcroît, Messieurs les Juges, le Bureau du Procureur estime

17 que la défense dans l'affaire Kordic et Cerkez n'a pas le droit de déposer

18 une requête devant cette Chambre. Il se peut que mon interprétation, ma

19 lecture du règlement soit trop étroite, trop restrictive telle que l'a

20 présenté la défense de Kordic et Cerkez dans la requête qu'ils ont

21 déposée. Ils pensaient que les articles étaient assez clairs.

22 Moi, j'ai examiné l'article 54, ainsi que l'article 72,

23 l'article 73, autant d'articles qui font référence aux parties. On définit

24 la partie dans l'article 2 qui se consacre aux définitions. Si je prends

25 la définition de parties au titre de l'article 2, il s'agit du Procureur

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1 ou de l'accusé.

2 A notre avis, cela ne veut pas dire l'accusé dans une autre

3 affaire mais dans l'affaire que connaît la Chambre. Or, en l'occurrence,

4 en l'espèce, il s'agit ici de M. Aleksovski. L'accusé ici n'est pas

5 M. Kordic ou M. Cerkez, M. Aleksovski est le seul accusé, considéré comme

6 partie dans cette affaire par le Règlement.

7 Ce qui veut dire que le Règlement ne permet même pas le dépôt

8 d'une telle requête. Mais j'ajouterais, dans le même souffle, que les

9 circonstances étant ce qu'elles sont, vous n'êtes aucunement dans

10 l'obligation de procéder à la communication en vertu de l'article 20 du

11 Statut. Il n'y a peut-être qu'une solution en ce qui concerne Kordic ou

12 Cerkez, c'est qu'ils s'adressent à leur propre Chambre de première

13 instance. Le Procureur, dans cette chambre-là, a pour obligation

14 d'examiner toutes les pièces jointes à l'acte d'accusation et s'il

15 constate qu'il y a certains éléments qui tombent sous cette obligation, il

16 faudra les communiquer, mais c'est une responsabilité qui ne vous incombe

17 pas.

18 Dans ce sens, il faudrait rejeter cette requête car il n'y a pas

19 de fondement sur laquelle elle s'appuie puisque le Règlement ne prévoit

20 pas qu'un accusé, dans une autre affaire, dépose une requête en cette

21 affaire-ci que vous connaissez et il y a recours. Le recours est à

22 chercher devant la Chambre qui sera saisie de l'affaire Cerkez et Kordic.

23 Il n'y a donc aucun fondement en droit, ni dans le Statut, ni dans le

24 Règlement qui crée une obligation pour cette Chambre-ci.

25 La seule obligation revient au Procureur qui est chargé de la

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1 communication. J'en ai terminé, je ne sais pas si vous voulez me poser des

2 questions, Monsieur le Président, je suis à votre disposition.

3 M. le Président – Merci, Maître Niemann. Peut-être avant

4 d'écouter les éléments de la défense, pouvons-nous traiter ensemble tous

5 les éléments ou tous les arguments, et, si nous avons des questions, nous

6 pouvons vous les poser. Merci bien, Maître Niemann.

7 Maître Mikulicic ?

8 M. Mikulicic (interprétation). – Merci, Monsieur le Président.

9 A la différence de mon éminent collègue, le Procureur

10 Me Niemann, la défense considère que la requête de la défense de

11 l'affaire Kordic est tout à fait justifiée. Et la défense est d'accord

12 avec la demande de la défense de l'affaire Kordic, de pouvoir consulter

13 tous les matériels qui étaient présentés dans cette affaire sans tenir

14 compte en avance des matériels qui, effectivement, seront utilisés par la

15 défense par la suite.

16 S'agissant des matériels non publics qui bénéficient de la

17 protection, soit sous forme d'audiences à huis clos ou une autre forme de

18 protection, nous considérons qu'il n'y a pas d'obstacle à ce que la

19 défense de l'affaire Kordic puisse consulter ces documents avec

20 l'obligation, de la part de la défense, de respecter le principe selon

21 lequel il ne faut pas divulguer ces documents-là à une tierce personne.

22 C'est le principe qui vous a guidé dans l'affaire Aleksovski. La

23 défense considère que le fondement juridique vis-à-vis de cette demande

24 peut être compris de manière très simple. Il s'agit d'une tentative, selon

25 laquelle la position des deux parties dans cette affaire arriverait à un

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1 équilibre. Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que l'équité

2 des deux parties dans une affaire constitue un des principes de base du

3 système juridique.

4 Nous avons pu voir selon l'exemple de l'affaire Aleksovski que

5 cet équilibre a été entamé à la faveur du Bureau du Procureur. Ce qui est

6 évident également, sur la base de la position du Procureur dans cette

7 affaire, c'est que le Bureau du Procureur a la possibilité de consulter

8 même les documents et les témoignages qui ont été entendus lors de séances

9 à huis clos alors que la défense n'a pas la même possibilité du tout.

10 Donc ce que la défense de l'affaire Kordic demande, c'est

11 d'arriver à un pied d'égalité avec le Procureur avec cette même affaire

12 car si une partie peut consulter les matériels qui ont été présentés lors

13 d'une séance à huis clos, pourquoi ne pas donner la même possibilité à la

14 défense, également dans la même affaire ? Je pense que c'est ainsi que

15 nous arriverons à une véritable égalité au sein d'une affaire. Mon éminent

16 collègue, le Procureur, considère, et je ne peux être que partiellement

17 d'accord avec lui lorsqu'il dit que cette situation dépend de

18 l'article 68, selon lequel le Procureur doit communiquer à la défense les

19 moyens de preuve que la défense pourrait trouver favorables en ce qui

20 concerne sa propre thèse...

21 Je suis d'accord avec lui, mais en principe la question suivante

22 se pose dans ce cas là : s'il s'agit là de l'obligation du Procureur et si

23 ceci concerne toutes les affaires qui sont entendues devant ce Tribunal,

24 est-il possible, objectivement, que le Procureur, dans l'affaire Kordic,

25 suive avec la même attention tous les moyens de preuve entendus également

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1 dans les affaires Blaskic et Aleksovski ? Il s'agit là d'un nombre énorme

2 de moyens de preuve. Je pense qu'il est physiquement impossible de suivre

3 cela. Même si nous admettons la possibilité effective et physique de

4 suivre cela, une autre question se pose : la question concernant la valeur

5 probante et la crédibilité de ces moyens de preuve. En ce qui concerne

6 l'article 68, il est possible que le Procureur ne considère pas qu'un

7 certain moyen de preuve n'est pas pertinent pour la défense, alors que la

8 défense peut considérer ce même moyen de preuve comme pertinent. Et là,

9 encore une fois, l'équilibre est rompu entre les deux parties. Pourquoi ?

10 Parce que, en ce qui concerne la question de savoir quelle est la

11 pertinence d'un certain moyen de preuve, s'agissant de savoir s'il s'agit

12 là d'un moyen de preuve à décharge, ou au moins partiellement à décharge,

13 dans ce cas là c'est uniquement le Procureur qui devrait s'exprimer à ce

14 sujet-là. Je souhaite attirer votre attention sur l'article 68 et sur un

15 mot que je considère comme très important dans ce texte : il s'agit là de

16 la formulation selon laquelle il s'agit des moyens de preuves connus par

17 le Procureur, dont le Procureur a connaissance. Je pense que

18 l'interprétation logique est que le Procureur a l'obligation de montrer à

19 la défense les moyens de preuve dont il a connaissance. Il n'est pas

20 nécessaire du tout qu'il doive avoir connaissance de tous les faits

21 concernant toutes les affaires.

22 Finalement, je ne doute pas que le Procureur souhaite procéder

23 de bonne foi, mais parfois le Procureur peut, par hasard, négliger un peu

24 cette obligation. Permettez-moi de vous rappeler une telle situation qui

25 s'est produite dans le cadre de l'affaire Aleksovski. Le Procureur a parlé

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1 avec le témoin DA et le témoin DA a informé le Procureur, donc a donné

2 l'information au Procureur, mais le Procureur n'a pas informé la défense

3 de cela, même s'il s'agissait là d'informations tout à fait pertinentes et

4 importantes pour la défense. La défense a appris cela tout à fait par

5 hasard, étant donné que c'est seulement lorsque la défense a parlé avec le

6 témoin DA, que le témoin DA a dit : "Mais j'ai déjà dit tout cela au

7 Procureur".

8 Je ne souhaite pas affirmer que le Procureur a délibérément

9 négligé de communiquer ces informations à la défense, mais nous sommes

10 tous des hommes, des êtres humains, et nous avons tous certaines

11 limitations. A mon avis, il ne faudrait pas poser d'obstacle à la défense

12 de l'affaire Kordic quant à sa possibilité de consulter les matériels,

13 tout en sachant qu'ils doivent respecter l'obligation de garder la

14 confidentialité ; c'est l'obligation qui lie toutes les parties concernées

15 dans cette procédure. En ce qui concerne l'article 68, je considère qu'il

16 n'est pas possible de l'interpréter de manière aussi vaste et de

17 considérer que cet article concerne toutes les affaires. Je pense qu'il

18 faut interpréter cet article de manière plus restrictive, dans le sens que

19 le Procureur doit informer la défense des matériels dont il a

20 connaissance, et il s'agit sans doute de documents, de matériels qui

21 apparaissent au cours de la procédure d'enquête et de la préparation du

22 procès. Donc, pour être très bref, à la fin, la défense considère qu'il

23 faut accepter la demande de la défense de l'affaire Kordic, étant donné

24 que ceci permettra d'arriver à un plus grand équilibre, et je pense que

25 ceci relève de votre Chambre de première instance, étant donné que la

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1 demande concerne une affaire qui a été menée devant votre Chambre de

2 première instance.

3 Pour le moment, la défense n'a rien à ajouter mais si vous le

4 souhaitez, si vous avez des questions à poser, nous serons à votre

5 disposition.

6 M. le Président. - Maître Niemann, je crois que Me Mikulicic n'a

7 pas utilisé cette expression, mais à la fin il a considéré que le

8 Procureur est un peu le tout-puissant, qu'il est un organe du Tribunal qui

9 contrôle l'accusation, qui contrôle aussi la défense...

10 Me Mikulicic n'a pas dit cela. Mais de toute façon, Me Mikulicic

11 a posé toute une série de questions auxquelles, peut-être, vous voudriez

12 répondre ?

13 M. Niemann (interprétation). - Je vous assure, Monsieur le

14 Président, que nous ne sommes en aucun cas omnipotents. Cette question de

15 la communication des pièces est un élément qui représente une charge

16 extrêmement lourde, charge qui incombe à l'accusation de porter et,

17 certes, nous serions heureux de pouvoir partager ce fardeau avec d'autre.

18 Mais si nous partageons ce fardeau, cela entraînera des conséquences très

19 importantes qu'il faut bien avoir à l'esprit. M. Mikulicic est accoutumé à

20 un certain type de procédure et peut-être que dans ce système juridique-

21 là, l'accusation n'est pas la seule à avoir à faire face à cette charge.

22 Parfois le juge d'instruction intervient dans la procédure de

23 recueil d'éléments de preuve et moyens de preuve. Mais mon interprétation

24 du Règlement de preuve et de procédure de ce Tribunal est telle que je

25 pense que l'approche de la question de la communication est telle que

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1 c'est l'accusation seule qui doit s'acquitter de la charge de la preuve.

2 Monsieur Mikulicic, généreusement, a indiqué qu'il serait très

3 difficile, pour l'accusation, de passer en revue tous les éléments de

4 preuve dans cette affaire pour savoir si ces éléments de preuve tombent

5 dans le champ couvert par les articles 66 ou 68 du Règlement. Il serait

6 très difficile pour l'accusation de savoir quels sont les éléments qui

7 pourraient servir à l'affaire Kordic-Cerkez.

8 Je vous précise tout de suite, Monsieur le Président, que si

9 c'était là l'étendue de notre tâche, cette tâche ne nous poserait pas tant

10 problème. Ce serait une tâche que nous pourrions accomplir relativement

11 facilement. Le Bureau du Procureur doit faire face à des milliers et des

12 milliers de documents, qu'il a emmagasinés dans le cadre des différentes

13 affaires dans lesquelles des poursuites ont été engagées.

14 Cet examen permet de savoir si ces éléments de preuve qui sont

15 touchés par les articles 66 et 68 du Règlement.

16 Mais dans aucun cas, nous ne disons que nous n'arrivons à

17 accomplir cet exercice de façon parfaite et infaillible. Mais l'avantage

18 pour nous d'avoir à traiter de l'affaire Aleksovski, c'est qu'il s'agit

19 d'un incident extrêmement ponctuel, isolé, très délimité dans le temps et

20 dans ce cadre, nos obligations en matière de communication ont été

21 relativement légères et faciles à mener à bien.

22 J'ai appris que les représentants du Bureau du Procureur dans

23 l'affaire Kordic-Cerkez s'étaient penchés, d'ores et déjà, sur tous les

24 éléments de preuve présentés dans l'affaire Aleksovski et qu'ils ont déjà

25 vu qu'il n'y avait rien dans ces éléments de preuve qui tombaient dans le

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1 cadre des articles 66 et 68 du Règlement. Aucune information relative à

2 MM. Kordic et Cerkez.

3 Si M. Mikulicic est préoccupé par les obligations qui sont

4 celles de l'accusation, s'il se demande si l'accusation et à même de faire

5 face à ses obligations, moi je peux lui assurer que les obligations qui

6 sont les nôtres sont multiples et variées, sont lourdes à porter, mais que

7 nous y faisons face.

8 Maintenant pour ce qui est la question de l'égalité des armes

9 entre les parties, c'est une expression que l'on utilise parfois à tort et

10 à travers et parfois cette expression perd un peu de son sens. Cette

11 question se pose bien mais elle ne s'étend pas à la possibilité que la

12 défense puisse se retrouver en possession de toutes les informations dont

13 dispose l'accusation. Ce n'est pas cela l'égalité des armes. L'accusation

14 a un devoir, une obligation qui est celle de mener des enquêtes relatives

15 sur des cas qui se sont produits dans l'ensemble du territoire de l'ex-

16 Yougoslavie. Le Bureau du Procureur dispose d'une quantité considérable de

17 documents. En aucun cas, il ne peut être suggéré que l'accusation dispose

18 d'un avantage parce qu'elle a en sa possession cette énorme quantité de

19 documents, ce qui n'est pas le cas de la défense.

20 Cette question de l'égalité des armes est celle en fait de

21 savoir ce que nous devons soumettre à la chambre et à la partie adverse.

22 Là encore notre charge est lourde. Nous devons nous assurer du fait que

23 tous les éléments de preuve dont nous disposons et qui sont des éléments

24 qui tombent dans le cadre de l'article 68 sont communiqués dès lors qu'il

25 s'agit d'éléments à décharge. C'est une charge très lourde que nous avons

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1 à porter et si l'accusation faillit à cette obligation, les conséquences

2 que cela entraîne sont très lourdes pour elles.

3 Jamais, jamais l'accusation n'a délibérément failli à cette

4 obligation mais parfois, du fait de la quantité considérable de documents

5 que nous avons à examiner, parfois il arrive que nous ne nous rendions

6 compte de l'existence d'un document que fort tard et parfois nous ne

7 communiquons ces documents que fort tard.

8 Mais dans l'affaire Aleksovski, cela ne s'est pas passé parce

9 que nous savons exactement quels sont les documents qui nous intéressent,

10 nous savons exactement où aller les trouver et nous avons un accès direct

11 à tous ces documents.

12 Donc pour nous, il est très facile de procéder à l'examen des

13 éléments qui nous intéressent dans cette affaire précise. Mais la question

14 qui se pose ici, c'est la question de savoir quels sont les documents qui

15 pourraient être intéressants parmi les milliers de documents qui se

16 trouvent dans les caves, si je puis dire du Bureau du Procureur. Ces

17 documents sont classés dans certaines catégories et cela prend beaucoup de

18 temps de savoir où ils se trouvent.

19 Nous disposons d'un système informatique efficace et cela nous

20 aide. Nous sommes très satisfaits de ce système qui nous permet de

21 travailler dans les meilleures conditions possibles, étant donné les

22 circonstances. Mais je pose la question. Avez-vous à vous préoccuper de ce

23 type de problème, Monsieur le Président, Messieurs les Juges en tant que

24 Juges de la chambre de première instance ? Très sincèrement, je ne le

25 crois pas et très respectueusement, je ne suis pas de cet avis.

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1 Vous avez déjà une charge considérable à assumer. Vous devez

2 examiner tous les éléments de preuve qui vous sont soumis. Vous n'allez

3 pas en sus vous préoccuper de savoir quels sont les documents qui sont

4 intéressants parmi tous ceux que détient l'accusation. Il n'y a rien dans

5 le Statut ou le Règlement et M. Mikulicic l'a dit , il n'y a rien qui

6 précise que les conseils de la défense de l'affaire Kordic-Cerkez sont en

7 droit de disposer de tous les éléments de preuve auxquels ils souhaitent

8 avoir accès.

9 Peut-être qu'eux ne se préoccupent pas de la divulgation au

10 public de certains éléments de preuve dans le cadre de leur affaire. Mais

11 pour ce qui nous concerne, nous sommes préoccupés par cette question. Il

12 est très important de savoir exactement dans quel article tombe tel ou tel

13 élément de preuve. Il est extrêmement important de savoir si les éléments

14 de preuve concernés peuvent ou non être divulgués ou communiqués.

15 Très respectueusement , je crois qu'il n'y a rien, rien dans

16 l'article du règlement de procédure et de preuve qui indique que les

17 obligations de communications vont au-delà de ce qui est précisé dans les

18 articles 66 et 68 du Règlement. Et rien ne dit que vous, Monsieur le

19 Président, Messieurs les Juges, vous avez à vous préoccuper de cette

20 question de la communication des pièces.

21 Je suis surpris que M. Mikulicic, dans cette affaire affirme que

22 d'une certaine façon, tous les documents qui nous occupent ici doivent

23 être communiqués à l'autre Chambre de première instance. Voilà quel est

24 mon opinion. Je n'ai rien d'autre à ajouter mais je suis, bien sûr, à

25 votre disposition.

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1 M. le Président. - Maitre Niemann, j'aimerais bien vous poser

2 quelques questions. Nous savons toujours qu'il y a ici dans le Tribunal

3 tout un dialogue. Je crois qu'il est très intéressant entre Common Law et

4 Civil Law. Vous avez évoqué cela. Mais je crois que nous avons vraiment un

5 système international qui n'est jamais Common Law, ni jamais Civil Law.

6 C'est notre système.

7 Donc même comme cela, j'aimerais bien, dans ce dialogue que nous

8 avons entamé, vous poser quelques questions notamment pour comprendre

9 mieux, soit la position de la défense ici, soit la position de la défense

10 à Kordic. Est-ce vrai ou non que le Procureur a concentré toute cette

11 information qui est venue de plusieurs affaires.

12 Je crois que le Bureau du Ministère public est un organe

13 coordonné hiérarchiquement, il est unique. Donc, vous avez accès à toute

14 cette information de plusieurs affaires. Est-ce vrai ou pas ?

15 M. Niemann (interprétation). - C'est exact,

16 Monsieur le Président.

17 M. le Président – Donc, vous connaissez en même temps tous les

18 éléments Blaskic, Aleksovski, Kordic, Kupreskic, Furundzija, etc.. Mais la

19 défense ne connaît pas l'ensemble de toute cette information parce que la

20 défense n'est pas un organe unique, ne concentre pas toute cette

21 information. Au moins du point de vue formel, on peut dire que la défense

22 est un organe individuel. Le Procureur est un organe individuel mais avec

23 plusieurs substituts d'audience qui peuvent partager entre eux toutes les

24 informations de chaque affaire.

25 C'est là que souvent j'ai quelques doutes moi-même. Si chaque

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1 affaire est une affaire avec son individualité, ou si c'est une affaire

2 avec des éléments d'identité d'autres affaires, parce que cela est très

3 important du point de vue, à mon avis, de conduire chaque affaire. Je ne

4 sais pas si vous m'avez bien compris...

5 Ma question porte sur le principe de l'égalité des armes. Vous

6 avez dit souvent : "On méprise ce conflit". Il y a un contenu très défini.

7 Mais dans la réalité, est-ce qu'il y a vraiment une égalité d'arme ? D'un

8 autre côté, à mon avis, c'est vrai aussi peut-être, la défense a d'autres

9 armes que l'accusation n'a pas. Car la défense est sur le terrain, connaît

10 bien tous les témoins, connaît bien toutes les personnes qui ont accès aux

11 documents, etc.. Je pose la question très ouvertement. L'égalité des armes

12 existe-t-elle ou non ?

13 Je ne sais pas si vous pouvez faire quelques commentaires sur ce

14 que je viens de dire parce que je crois vraiment que je vous ai posé une

15 question, mais aussi pour partager avec vous, les parties, quelques

16 préoccupations.

17 J'ajouterai autre chose. Il y a une particularité entre les

18 affaires Blaskic et Aleksovski. C'est vrai qu'il y a les autres affaires,

19 mais ces trois affaires ont fait partie du même acte d'accusation. Au

20 moins par rapport aux affaires Aleksovski, Blaskic et Kordic, nous

21 pourrions trouver quelques relations entre elles. A la fin, elles ont fait

22 part du même acte d'accusation, avec les mêmes matériaux et documents, qui

23 supportaient la même accusation, etc.. Ils n'ont jamais perdu certaines

24 relations communes.

25 Une autre question est celle-ci : A la fin, nous émettons

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1 quelques réserves à propos de la question parce qu'il s'agit d'éléments de

2 preuve non publics. Mais s'il n'y avait pas des mesures de protection,

3 est-ce qu'il y aurait des problèmes ? Ces éléments étaient publics. La

4 vraie question, à mon avis, est les mesures de protection peuvent-elles

5 être sauvegardées ou non ? S'il n'y avait pas ces mesures de protection,

6 ces éléments devenaient publics et, là, je crois qu'il n'y avait pas de

7 problème.

8 Une autre question est celle-ci, Maître Niemann. Nous sommes

9 dans l'affaire Aleksovski à discuter de l'affaire Kordic. Mais hier nous

10 avons touché une autre question. Le Procureur a demandé le versement des

11 éléments non publics Blaskic à Aleksovski. Quelle est la différence entre

12 le versement des éléments d'Aleksovski à Kordic ?

13 Si on tient compte, surtout dans ce que je viens de dire, que

14 l'ensemble des affaires Lasva Valley, Kordic, Blaskic et Aleksovski, ont

15 fait part du même acte d'accusation, donc s'ils ont leur individualité,

16 cette individualité est aussi constituée par des éléments dans l'identité

17 des autres affaires parce qu'elles ont maintenu des relations communes.

18 Je ne sais pas, Maître Niemann, si nous ne pouvons pas trouver

19 ici une certaine inconsistance dans le même Bureau du Procureur, dans la

20 façon que nous avons de le coordonner hiérarchiquement. Le même Bureau du

21 Procureur demande une chose, excusez-moi, je ne veux pas juger, mais il

22 demande une chose contradictoire dans une situation pareille.

23 Et je partage un peu la question de la défense. Il y a

24 l'article 68; Je crois que Maître Niemann, vous avez déjà expliqué cela

25 d'une certaine façon. Mais qui peut juger si le Procureur a donné à la

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1 défense ou non tous les éléments que nous ayons de nature à disculper ?

2 Est-ce que peut-être la défense qui a sa stratégie de défense serait mieux

3 en condition de disculper ou non ?

4 Si vous pouvez me le répondre, car j'ai fait toute une série de

5 considérations, il y a là quelques questions, excusez-moi de tout cela,

6 mais j'aimerais bien avoir votre avis et ce que vous pensez ?

7 Excusez-moi, une autre chose Maître Niemann, car j'ai mes notes.

8 L'autre chose, c'est celle-ci. J'ai compris que vous avez

9 raisonné un peu dans le schéma que Kordic, et Cerkez, demande au fond sa

10 requête devant la Chambre Aleksovski. Je crois que j'ai compris vos

11 arguments pour dire qu'ils ne sont pas légitimes ici dans cette affaire.

12 Il appartient à une autre affaire, etc..

13 Mais comme je vous ai dit vers le début de notre débat, la

14 Chambre Kordic a saisi officiellement la Chambre Aleksovski pour

15 répondre ; donc c'est un élément. J'ai vu la requête ce matin. Mais quand

16 même, au demeurant, vous avez dit que votre proposition, votre solution,

17 c'était la défense de Kordic demandée à sa Chambre, permettez-moi

18 d'utiliser ce terme, à sa Chambre, à la Chambre Kordic, et la

19 Chambre Kordic communiquerait les éléments. Mais la Chambre Blaskic,

20 excusez-moi, la Chambre Kordic...

21 Les éléments qu'il pouvait communiquer sont à la

22 Chambre Aleksovski. Et, à mon avis, seule la Chambre Aleksovski peut

23 donner ou non ces éléments. Votre solution, je crois, ne pouvait peut-être

24 pas résoudre la question parce que la Chambre Kordic ne peut pas ordonner

25 à la Chambre Aleksovski de fournir les éléments de preuve que Kordic ou

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1 Cerkez ont indiqués à la Chambre Kordic. Voilà, nous avons toute une série

2 de questions et la Chambre Aleksovski, nous, jusqu'à la fin nous avons

3 cette tâche difficile de décider, nous aimerions bien être éclaircis, avec

4 votre avis, sur toutes ces considérations, toutes ces questions qui sont

5 là. Je crois que vous pouvez peut-être dévoiler vos considérations et moi-

6 même je suis disponible pour écouter votre avis, et pour ce que vous

7 pouvez considérer sur ces questions. Je suis disponible et je voudrais

8 écouter vos réponses, Maître Niemann. Excusez-moi, c'était un ensemble

9 très lourd mais je crois que vous êtes capable de mener tout cela à bien.

10 M. Niemann (interprétation). - Je vais faire de mon mieux,

11 Monsieur le Président, et si j'oublie telle ou telle question que vous

12 avez posée au début de votre intervention, je vous saurais gré de me

13 rappeler quelles sont ces questions. Ce que vous demandez, je pense, au

14 fond, Monsieur le Président, c'est la question de savoir si le règlement

15 est satisfaisant. Il se peut que la question que vous posez porte sur le

16 Règlement lui-même. Je dirais que j'ai fourni une certaine interprétation

17 du Règlement ; il se peut qu'elle soit erronée. Mais la façon dont

18 j'interprétais le règlement est la suivante. Lorsqu'il s'agit de procéder

19 à la communication de pièces, c'est une charge qui revient au Bureau du

20 Procureur. Je ne trouve aucun autre article du Règlement, je ne trouve

21 rien dans le Statut qui me dise que ce fardeau, cette obligation, doivent

22 être partagés avec la Chambre de première instance elle-même, si ce n'est

23 que celle-ci doit veiller à ce que le Procureur s'acquitte bien de sa

24 tâche. Je ne sais pas quels sont les mécanismes, ou procédures, qui

25 permettraient aux Chambres de première instance de s'engager elles-mêmes

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1 dans un processus de communication de pièces. C'est pratiquement ce que

2 demande cette requête qui a été déposée devant vous. Je ne connais aucun

3 article du Règlement ou du Statut qui précise que ce soit là la tâche qui

4 vous revienne. En effet, ceci ne s'arrête pas à la simple affaire qui vous

5 est proposée. De la façon dont est présenté l'argumentaire des accusés

6 Kordic et Cerkez, eh bien ils disent ceci : "Nous avons le droit à un

7 procès équitable, nous avons dès lors droit que soient communiqués tous

8 les éléments non publics versés au dossier Aleksovski". Il faut sans doute

9 se prononcer sur la question de savoir s'ils vont tout recevoir. Pourquoi

10 recevraient-ils la totalité des éléments non publics ? Pourquoi

11 auraient-ils le droit de recevoir tous ces éléments versés au

12 procès Aleksovski ?

13 M. le Président. - J'ai l'opportunité d'introduire une autre

14 question. Maître Niemann, et si la défense demande aussi...

15 Excusez-moi : si la défense Kordic demande seulement à

16 connaître, à savoir quels sont les éléments de preuve disponibles, quels

17 sont les éléments seulement à connaître dans un premier temps ? Et après,

18 dans un deuxième temps, la défense peut revenir en disant : "Pour telles

19 et telles raisons, je veux avoir ces éléments de preuve".

20 Si la défense demande à avoir une vue d'ensemble de tous les

21 éléments et, après, vient dire : " Je veux le numéro 1 et le numéro 10

22 pour cette raison ", et s'il vient dire pourquoi, la défense a besoin de

23 verser au dossier Kordic ces éléments de preuve qui appartiennent à

24 l'affaire Aleksovski. Excusez-moi de vous interrompre, mais peut-être

25 serait-il opportun d'introduire cette autre perspective.

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1 M. Niemann (interprétation). - Je pense que ce que vous me

2 demandez, Monsieur le Président, c'est de savoir comment on le fait,

3 quelle est la procédure respectée. Mais cela n'est pas une question qui

4 revient à cette Chambre. Il faudra persuader la Chambre chargée de

5 l'affaire Kordic pour qu'elle rende une ordonnance afin que le Procureur

6 communique tous les éléments non publics.

7 Si le Procureur dit qu'il y a certains documents qui ne

8 devraient pas être communiqués pour telle ou telle raison, ceci se fera

9 par le biais du dépôt d'une requête ex-parte soumise à la Chambre dans

10 l'affaire Kordic-Cerkez, et on dira : " Voilà les éléments du

11 procès Aleksovski, voici les éléments qui ne sont pas communicables ", et

12 il incombera à la Chambre connaissant cette affaire-là de décider.

13 Mais c'est la Chambre appropriée qui pourra statuer. Sinon, ce

14 que vous essaieriez de faire ici, je ne sais pas ce que vous connaissez de

15 l'affaire Kordic, en tout cas moi je ne dispose pas de suffisamment

16 d'éléments pour prendre une décision en fonction des éléments qui seraient

17 communicables en raison des articles 66 et 68, mais je crois que c'est la

18 Chambre qui va connaître l'affaire, et elle seule, qui pourra déterminer

19 quel est l'équilibre à respecter en l'occurrence. Je crois que c'est là la

20 procédure à respecter. Pourquoi y a-t-il une telle procédure ? Parce que

21 le règlement permet expressément à la défense Kordic-Cerkez de déposer une

22 requête devant cette Chambre-là, pour lui dire : " Nous ne sommes pas

23 satisfaits des documents communiqués jusqu'à présent. Nous ne croyons pas

24 le Procureur en l'affaire Kordic / Cerkez qui nous dit qu'il y a des

25 éléments non publics relevant du dossier Aleksovski. Selon ce procureur,

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1 aucun des ces éléments non publics n'est couvert par les articles 66 et

2 68, et nous ne croyons pas le Procureur dans l'affaire Kordic et vous,

3 Chambre Kordic, vous devez rendre une ordonnance les forçant à

4 communiquer ". Vous avez ce pouvoir-là, si vous êtes la Chambre Kordic,

5 vous pourrez à ce moment-là dire au Procureur de l'affaire Kordic de

6 communiquer tous les éléments. Il est possible de s'adresser à la

7 Chambre Kordic et dire : " Voilà la liste de tous les éléments provenant

8 du dossier Aleksovski, mais nous n'avons pas voulu publier ces éléments

9 pour les raisons suivantes ". Les raisons sont énoncées, un débat

10 s'ensuit. Mais est-ce que c'est vous, Juges de l'affaire Aleksovski, qui

11 pouvez le faire ?

12 Pouvez-vous dire : " Nous, Juges de l'affaire Aleksovski, nous

13 pensons que ce document devrait être communiqué dans l'affaire Kordic

14 parce que nous, nous croyons que c'est un document pertinent pour la

15 défense Kordic".

16 Si vous agissez de la sorte, vous prendrez à votre charge une

17 grande difficulté car vous ne connaissez pas l'information qui a été

18 communiquée et qui n'appartient qu'à l'affaire Kordic. C'est bien la

19 raison pour laquelle le Règlement est conçu de la sorte, c'est la raison

20 pour laquelle le Règlement détermine et définit quelles sont les parties à

21 une affaire, en l'occurence le Procureur et l'accusé. En effet, si ce

22 n'est pas le cas, que se passerait-il ? Un exemple : s'il m'arrivait de ne

23 pas tout à fait respecter les obligations que m'incombe cette

24 Chambre Aleksovski, s'agissant d'éléments relevant d'une autre affaire, je

25 ne connaîtrais pas tous les éléments appartenant à cette autre affaire.

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1 Moi, je m'occupe de l'affaire Aleksovki.

2 Si je ne communique pas tel ou tel élément relevant de

3 l'affaire Aleksovski, vous saurez, Messieurs les Juges, s'il y a eu

4 communication ou pas. Manifestement, vous pourrez prendre toute mesure

5 appropriée eu égard au manquement dont je suis coupable. Mais si nous

6 commençons à nous engager sur la voie de prendre des jugements pour

7 déterminer la pertinence de tel ou tel élément dans une autre affaire

8 alors qu'elle ne nous concerne pas, je pense avoir la possibilité de dire

9 que ceci va entraîner le chaos.

10 C'est la raison pour laquelle, au titre du Statut, il est

11 précisé que c'est la Chambre de première instance de l'espèce qui est

12 chargée d'assurer à l'accusé un procès équitable, conformément au

13 Règlement. Mais cela veut dire que c'est la chambre chargée de l'affaire,

14 qui va connaître l'affaire, qui doit le faire et pas, par exemple ici,

15 l'affaire Aleksovski.

16 Vous m'avez posé une question à propos du processus de

17 communication. Vous avez demandé s'il y a une véritable égalité des armes,

18 puisqu'il y a plusieurs affaires concernées. Ce n'est pas moi qui ai

19 rédigé le Règlement. Je ne peux que m'y conformer.

20 Effectivement, on aurait pu inscrire dans le Règlement un

21 mécanisme par lequel un juge, quel qu'il soit, est désigné et aura pour

22 tâche de superviser et de veiller au bon déroulement de la communication.

23 Il se peut que ce ne soit pas un juge qui connaisse même

24 l'affaire, qu'il fasse partie de la formation plénière mais qui pourra

25 veiller à ce que, ayant un bureau dans la partie réservée au Bureau du

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1 Procureur, on prépare un dossier contenant toutes les pièces qui, de son

2 avis, sont pertinentes pour l'affaire en question. Ce juge pourra siéger

3 éventuellement, pourra trancher les questions relatives au dossier ou, à

4 défaut, pourra soumettre ce dossier à la Chambre chargée de connaître de

5 l'affaire. Mais ceci n'est pas prévu dans le Règlement. Il me semble que

6 la démarche retenue par le Règlement est la suivante. On dit : "Ce n'est

7 pas la responsabilité qui incombe à la Chambre, c'est l'obligation qui

8 revient au Procureur".

9 Si le Procureur manque à ses obligations, il sera sanctionné. Je

10 ne sais pas ce qu'il se passe quand un juge d'instruction néglige de tenir

11 compte de tel ou tel élément pertinent dans une affaire. Malheureusement,

12 je n'ai pas d'expérience dans ce domaine. Je connais bien les conséquences

13 de ce qui se passe s'il y a manquement de la part du Procureur. J'ai donc

14 le sentiment, Monsieur le Président, qu'effectivement le Bureau du

15 Procureur a en sa possession un large éventail d'informations, mais loin

16 de moi l'idée de suggérer, ne serait-ce que pour un instant, qu'il y a des

17 éléments relevant d'une affaire qui pourraient être pertinents dans une

18 autre affaire.

19 Il est difficile de juger d'entrée de jeu ce qui va se dérouler.

20 On ne sait pas si on va estimer plus tard, au cours du déroulement de la

21 procédure, si telle ou telle pièce sera pertinente ou pas. Car les

22 circonstances évoluent, tout comme le procès le fait. Donc vous avez un

23 problème, je pense, non pas avec les arguments, Monsieur le Président,

24 mais plutôt avec le Règlement, car je pense que le Règlement ne donne pas

25 cette responsabilité aux Chambres de première instance. Permettez-moi de

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1 consulter mon collègue, pour voir s'il y a des questions que j'aurais

2 omises.

3 Monsieur le Président, vous avez également posé une question, eu

4 égard aux ordonnances relatives aux mesures de protection. Il faudrait,

5 dans le cas que j'envisage, prévoir le cas où la défense Kordic/Cerkez

6 persuade la chambre que le Procureur doit soumettre une liste des éléments

7 relevant de cette affaire-ci, et si la défense était en mesure de

8 persuader la Chambre Kordic dans ce sens, il faudrait qu'il y ait

9 communication, sans qu'il y ait violation des ordonnances de protection.

10 Il faudrait dire :"Voilà ; tels et tels éléments doivent être communiqués,

11 mais nous avons telles et telles préoccupations. Nous aimerions obtenir

12 une modification des ordonnances relatives aux mesures de protection, pour

13 que celles-ci soient levées, suivant les nécessités".

14 Mais je ne pense pas qu'on puisse dire qu'il y ait

15 nécessairement des similitudes automatiques entre les affaires. Bien sûr,

16 je pense que c'est quelquefois le cas, mais ici nous parlons surtout de ce

17 qui s'est passé dans la prison de Kaonik, alors que l'affaire Kordic porte

18 sur un domaine, sur un sujet beaucoup plus vaste. Il y a peut-être des

19 questions communes, mais je n'en suis pas trop sûr.

20 Il n'est pas possible de généraliser et de dire simplement que,

21 parce que cette affaire se situe dans le contexte de la Vallée de la

22 Lasva, il y ait vraiment automatismes avec d'autres affaires de la même

23 région, sinon le procès n'aurait pas duré le temps qu'il a duré.

24 Nous aurions sans doute passé plusieurs années à essayer

25 d'obtenir tous les éléments de preuve relatifs à la Vallée de la Lasva. Ce

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1 n'est pas l'affaire Blaskic qui, elle, porte sur un sujet bien plus

2 important et complexe. Je ne pense pas que l'on puisse automatiquement

3 dire que les éléments de preuve versés à ce dossier-ci présentent une

4 pertinence pour une autre affaire, un autre dossier. Il est difficile de

5 juger et de se prononcer au titre du Règlement. C'est le Procureur qui a

6 cette responsabilité et, je le répète, cela ne rélève pas du seul apanage

7 du Procureur.

8 La Chambre de première instance doit veiller à ce que le

9 Procureur fasse bien son travail. Et la Chambre peut effectivement veiller

10 à ce qu'il n'y ait pas d'écarts commis par le Procureur.

11 Vous m'avez aussi posé une question relative aux éléments que

12 nous aimerions obtenir, nous, en tant que Bureau du Procureur, pour

13 l'affaire Aleksovski, éléments venant de l'affaire Blaskic. Nous ne

14 cachons pas le fait que nous étions au courant de ces éléments, et nous

15 avons établi un jugement de valeur pour savoir si ces éléments de valeur

16 étaient importants pour l'affaire Aleksovski.

17 Si c'était important, nous n'avons pas pensé que ça l'était

18 jusqu'au moment où certains ont été présentés.

19 Cela n'entraîne pas un manque d'égalité au niveau des armes dont

20 nous disposons. Car nous possédons énormément d'éléments d'informations et

21 il serait impossible d'engager des poursuites dans toutes ces affaires, si

22 pour chacune il fallait trier tous les éléments, car nous avons

23 l'obligation, en vertu des articles 66 et 68, d'étudier tous ces éléments.

24 Il faudrait communiquer des milliers de pages. Ce serait le chaos complet.

25 Car nous avons rassemblé beaucoup d'informations, de notes confidentielles

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1 et nous avons des éléments qui serviront à des affaires prochaines et si

2 ces éléments étaient révélés trop tôt, de façon prématurée, nos chances de

3 poursuite, à l'avenir, seraient vouées à l'échec.

4 Nous avons un travail difficile à réaliser et quelquefois, nous

5 avons des éléments qui sont pertinents ou admissibles, qui seront bien sûr

6 communiqués plus tard. Il est quelquefois difficile de décider. Nous

7 disons que ce sont des pièces communicables, mais si on les communique de

8 façon prématurée, elles perdront de leur intérêt. Il faut trancher. Nous

9 faisons cela tous les jours de façon régulière. Mais si vous nous dites

10 que le Procureur ne peut pas vraiment juger de ce qui sera nécessaire pour

11 la défense, c'est une question qui se pose non seulement pour

12 l'affaire Aleksovski mais qui se pose vraiment pour toutes les affaires.

13 Et le Règlement ne pense pas qu'il est possible d'avoir un juge

14 d'instruction qui se charge de ces questions. Evidemment, si le Règlement

15 changeait, mes arguments changeraient de même. Je vous remercie.

16 M. le Président. - Les interprètes me font signe qu'il faudrait

17 faire une pause. Nous avons tout l'après-midi pour en discuter. Nous

18 allons faire une pause de 20 minutes. Et Maître Meddegoda peut vous aider

19 à organiser les questions.

20 L'audience, suspendue à 15 heures 48, est reprise à

21 16 heures 15.

22 (L'accusé et réintroduit dans le prétoire.)

23 M. le Président – Maître Niemann, vous pouvez continuer, s'il

24 vous plaît, nous allons vous écouter avec beaucoup d'attention comme

25 toujours.

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1 M. Niemann (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

2 Au cours de l'interruption, une décision rendue par la Chambre

3 connaissant l'affaire Kordic/Cerkez m'a été montrée et j'ai lu ce qui

4 était dit sur la question. C'est la première fois que j'en prenais

5 connaissance.

6 Ce que je note c'est ceci. C'est que Monsieur le Président, vous

7 êtes aussi membre de la formation, vous pouvez donc…

8 Je retire ce que j'ai dit quand j'ai dit que vous n'étiez pas en

9 mesure de mesurer la pertinence de tel ou tel argument.

10 Mais si vous me demandez ce qu'il en est, étant donné votre

11 position de Président en cette Chambre-ci, je dirais qu'il y a quand même

12 un autre article, l'article 85, chiffre romain V, qui est concerné et qui

13 vous montrera la disposition pertinente puisque vous,

14 Monsieur le Président, vous siégez dans ces deux chambres.

15 Mais je reviens à ce que je disais avant la pause. C'est que

16 ceci n'en fait pas pour autant une question qui relève de la

17 responsabilité de cette Chambre de première instance, en ce qui concerne

18 la communication de pièces, même si les accusés dans

19 l'affaire Kordic/Cerkez disent qu'ils ont droit à un procès équitable.

20 M. le Président – C'était pour ça que nous avons décidé

21 d'accorder à Kordic que la saisine devrait être adressée à la Chambre et

22 pas au Président de la Chambre.

23 Donc, j'ai ici mes collègues et je ne suis pas tout seul.

24 M. Niemann (interprétation). – Tout à fait,

25 Monsieur le Président. Je viens d'examiner quelques-unes des questions que

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1 vous m'aviez posées précédemment.

2 Vous avez parlé des liens qui existaient entre les différentes

3 affaires et que ceci donnerait lieu à un noyau commun d'éléments de

4 preuve.

5 Disons que ce n'est pas… Nous n'avons pas dit que ce ne soit pas

6 le cas mais il faut affiner l'analyse pour voir ce qu'il se passe en cas

7 de disjonction d'instance.

8 La matière qui se présente en cas de disjonction d'instance est

9 la suivante. Dans bien des cas, une telle disjonction s'avère favorable à

10 la défense. S'il y a un acte d'accusation très complexe, reprenant

11 plusieurs accusés, il y a intérêt, pour la défense, d'avoir disjonction,

12 pourquoi ? Parce que s'il y a des chefs d'accusation retenus contre

13 d'autres accusés, ils ne sont pas repris pour l'examen d'une Chambre qui

14 déterminera, tôt ou tard, si telle ou telle personne est coupable d'un

15 crime ou pas.

16 Lorsque qu'il y a disjonction, c'est favorable à la défense, car

17 celui-ci pourra dire devant la Chambre de première instance : "Cela n'est

18 pas un élément pertinent pour moi, mais il l'est pour un autre accusé ".

19 Alors que s'il y a jonction d'instance, l'accusé ne peut pas recourir à

20 cet argument,car le Bureau du Procureur présente des éléments de preuve à

21 charge contre tous les accusés. Donc c'est la portée très large des

22 éléments de preuve qui est en cause ici. Quelquefois à juste titre,

23 quelquefois pas ; l'accusé dira que les éléments très larges retenus

24 contre les accusés sont négatifs pour un accusé.

25 Je ne veux pas ici faire de conférence ou vous donner un cours

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1 sur la question de la jonction ou de la disjonction d'instance, mais je

2 voudrais mettre le doigt sur le problème qui se pose à nous.

3 S'il y a disjonction d'instance, certains inconvénients se

4 présentent, à savoir que la trame riche des éléments de preuve, qui peut

5 être favorable à l'accusation mais aussi à la défense, se perd car il y a

6 eu, si vous voulez, dégraissage.

7 Il se présente alors une situation où, si j'étais membre de la

8 partie adverse, je pourrais aisément concevoir une situation où je

9 dirais : " Mais il y a beaucoup d'éléments qui sont apparus dans

10 l'affaire Blaskic, dans l'affaire Kordic, ou dans une autre affaire,

11 éléments que j'aurais voulu faire miens et que j'aimerais avoir à ma

12 disposition au moment où je défendais MM X ou Y". Mais c'est la

13 conséquence qui découle de la disjonction, du fait qu'il y a eu, d'un

14 côté, un acte d'accusation très vaste, alors que moi je traite d'une

15 affaire bien spécifique.

16 Ce que l'on peut faire pour résoudre ce problème et assurer un

17 procès équitable, car effectivement il se peut que des éléments de preuve

18 aient été soumis et versés au dossier d'une autre affaire qui pourraient

19 être utilisés ici pour assurer l'équité du procès... Vous avez raison de

20 demander ce qui se passerait si ces éléments ne sont pas rendus publics et

21 si nous n'en sommes pas informés.

22 Ceci crée un problème, ou plutôt deux. D'un côté, dans une

23 certaine mesure, ceci découle de la décision que vous avez prise d'assurer

24 une disjonction d'instance. C'était peut-être une décision dure, mais qui

25 ne peut pas être interprétée jusqu'au point où on dira qu'une personne ne

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1 peut pas se voir assurer un procès équitable. La solution ne consiste pas

2 à s'adresser à une autre Chambre d'instance, par exemple à dire à la

3 Chambre Aleksovski : "Moi, je m'appelle M. Kordic et je veux avoir le

4 bénéfice de certains éléments versés dans l'affaire Aleksovski, mais je ne

5 sais pas exactement ce que c'est, cet élément de preuve ".

6 Etant donné la procédure retenue par le Tribunal, il faut

7 s'adresser à la Chambre d'instance Kordic et dire : "Si je veux un procès

8 équitable, je dois véritablement savoir ce qui se trouve dans ce dossier-

9 là". Le Tribunal, au moment de la rédaction du Règlement, a décidé que

10 c'était une responsabilité qui revenait au Procureur. Je ne veux pas dire

11 que l'affaire soit ainsi réglée à tout jamais. La Chambre est peut-être

12 toujours frustrée de cet état de choses. Il se peut qu'il y ait des

13 éléments de preuve confidentiels qui devraient être communiqués pour

14 assurer l'équité du procès, mais le fait est que toute décision prise et

15 rendue dans l'affaire Aleksovski, portant sur des questions couvertes par

16 la confidentialité, ne lie pas une autre Chambre ; elle lie ces deux

17 parties-ci. Nous n'avons pas, nous, accusation, le droit de les

18 communiquer, pas plus que la défense n'a ce droit. C'est ce que je

19 disais ; le Procureur peut être enjoint de fournir une liste d'éléments

20 ex parte, pardon, je me reprends : soumettre une liste ex parte d'éléments

21 versés à ce dossier-ci, si c'est cela la décision rendue par la Chambre de

22 première instance de l'autre procès.

23 Le Bureau du Procureur peut, à ce moment-là, présenter un

24 argumentaire sur la question devant l'autre Chambre de première instance

25 qui, elle, se saisira de la question. Si tel était le cas, la Chambre,

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1 dans l'affaire Kordic/Cerkez, va superviser en quelque sorte, à ce moment-

2 là, le processus de communication, ce qu'elle a parfaitement le droit de

3 faire au titre du Règlement.

4 Mais elle peut le faire parce que c'est dans l'intérêt d'un

5 procès équitable, parce que l'accusé de cette affaire-là dit qu'il a le

6 droit à un procès équitable et, qu'en vertu de l'article 20 du Statut,

7 c'est cette Chambre-là qui doit veiller à cette équité, et "Cette équité,

8 je ne peux pas l'avoir" dira cet accusé, dans l'autre affaire "si je ne

9 sais pas ce qui a été dit dans une autre affaire".

10 C'est le processus envisagé par le Règlement. Si je l'interprète

11 bien, le Règlement ne prévoit pas une situation où c'est vous, Juges de

12 cette Chambre-ci, qui prenez cette tâche entre vos mains. Je parle ici

13 pour le Juge Vohrah, surtout, et pas pour vous, Monsieur le Président,

14 puisque vous n'êtes pas concerné en l'espèce.

15 Par conséquent, Messieurs les Juges, je comprends bien votre

16 souci manifeste. Vous craignez ici qu'il y ait ces allées et venues entre

17 les parties, qu'il y ait une partie en cette affaire-ci qui dise : "Je ne

18 peux pas faire grand chose parce qu'il y a une ordonnance de protection

19 rendue par une autre Chambre", et je comprends pourquoi vous dites, qu'en

20 fait, on veut débouter cette requête qui n'a pas abouti, et qu'il y ait

21 comme cela des allées et venues d'un requête entre deux Chambres.

22 Mais à mon avis, ce n'est pas simplement une absence de recours

23 et de solution, car vous avez toute lattitude de dire que la démarche

24 retenue est celle qui est conforme au Règlement, et que la question de

25 savoir si une liste finira par être rédigée, sera réglée par la

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1 Chambre Kordic et pas par celle-ci, parce qu'en fin de compte lorsque la

2 Chambre Kordic-Cerkez va statuer, elle dira que les éléments protégés par

3 l'ordonnance de la Chambre Aleksovski restent confidentiels mais devraient

4 être communiqués aux parties de l'affaire Kordic.

5 A ce moment-là il incombera au Procureur de s'adresser à vous,

6 Juges de l'affaire Aleksovski, pour dire : "Voilà, en vertu de

7 l'article 66 ou 68 ou d'un autre article, la Chambre Kordic a rendu telle

8 ou telle ordonnance visant à ce qu'il y ait communication des éléments

9 protégés par l'article 75" et nous demandons à cette Chambre de lever

10 l'ordonnance dans la mesure où ces éléments pourraient être communiqués à

11 la défense, sous réserve de modalités précisées.

12 Cela me semble être le processus que vous offre le Règlement et

13 je ne peux pas vous être d'une autre assistance, je ne vois pas d'autres

14 procédures que permettraient ce Règlement.

15 En dernier lieu, je crois que Me Mikulicic a fait référence au

16 témoin DA. Il a dit qu'il n'y avait pas de mauvaise foi de notre part.

17 Mais nous persistons à dire que le témoin DA a fait une déposition qui

18 n'était pas de nature à mitiger la peine, ni à disculper certains

19 éléments, et que donc il n'y avait pas là question de communication. Mais

20 il n'est pas nécessaire de nous pencher davantage sur la question.

21 Vous m'avez posé une dernière question, Monsieur le Président.

22 Vous avez demandé quelle était la différence existant entre notre requête

23 dans l'affaire Blaskic et la requête formulée par les avocats de Kordic

24 devant la Chambre Aleksovski.

25 Je reconnais que votre question sème une certaine confusion dans

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1 mon esprit, dans la mesure où je pense qu'il s'agit de questions carrément

2 différentes. Si nous voulons présenter ces éléments de preuve en cette

3 affaire-ci et si, en fin de compte vous avez décidé que c'était possible

4 de le faire, il aurait fallu, en fait, lever l'ordonnance rendue par

5 l'autre Chambre.

6 A ce moment-là, nous n'étions pas trop sûrs de ce qui allait se

7 passer, mais il aurait fallu qu'il y ait résolution de la question de

8 façon similaire. Je ne vois pas tout à fait le lien entre les deux

9 questions, avec tout le respect que je vous dois. Il se peut que j'ai raté

10 tel ou tel élément.

11 M. le Président. - Je pense, Maître Niemann, que, si vous

12 accordez qu'il est possible d'importer de Blaskic des éléments de preuve

13 non confidentiels, même si nécessaire avec des mesures de protection, en

14 maintenant les mêmes mesures de protection, on pourrait faire la même

15 chose d'Aleksovski pour Kordic. Donc on pouvait exporter de

16 l'affaire Aleksovski pour Kordic, en maintenant les mêmes mesures de

17 protection.

18 Et ma question est la suivante : pourquoi êtes-vous d'accord

19 pour faire cela de notre affaire Aleksovski et que vous n'êtes pas

20 d'accord pour faire la même chose dans l'affaire Kordic ? Vous avez

21 compris ma question ?

22 M. Niemann (interprétation). - Tout à fait, Monsieur le

23 Président. La réponse est la suivante.

24 S'agissant d'éléments de preuve provenant de l'affaire Blaskic,

25 il ne s'agissait pas pour nous de nous adresser à la Chambre Blaskic,

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1 disons avec notre casquette de l'affaire Aleksovski, et de dire par

2 exemple, pour veiller à ce qu'un procès équitable soit assuré pour la

3 communauté internationale, il serait important de disposer d'éléments de

4 preuve considérés comme confidentiels. Ces informations, le Bureau du

5 Procureur les avait, je l'ai déjà dit, nous disposons d'énormément

6 d'éléments d'information. Il n'y a pas que les informations soumises à

7 telle ou telle Chambre, il y a d'autres éléments.

8 Est-ce considéré comme un avantage ? Cela l'est peut-être, mais

9 je ne pense pas que c'est une question qui intervienne dans la

10 problématique de l'égalité des armes, parce que nous avons d'autres

11 éléments de preuve.

12 Mais nous aurions demandé à la Chambre Blaskic d'assurer ses

13 responsabilités et de déterminer ce qui était communicable ou pas,

14 s'agissant des éléments que nous aurions voulu utiliser. Le problème, que

15 j'ai soulevé ici en l'espèce, ce n'est pas le fait d'exporter des éléments

16 de preuve. Il est sûr qu'ils peuvent l'être. Le tout est de savoir s'ils

17 sont communicables, et s'ils le sont, il deviennent exportables. A ce

18 moment-là, il faut résoudre la question des mesures de protection et on

19 peut les exporter, les transférer dans d'autres affaires. Mais je ne

20 soulève pas la question de savoir si vous avez des doutes quant à

21 l'honnêteté du Bureau du Procureur.

22 M. le Président. - Maître Niemann, et peut-être pour terminer,

23 j'ai une préoccupation concernant cette matière. Je crois toujours qu'il

24 était préférable, si un témoin doit témoigner dans plusieurs affaires,

25 peut-être même si le témoin a été protégé, peut-être serait-il toujours

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1 préférable de verser au dossier où il va témoigner une deuxième ou une

2 troisième fois, et dans ce dossier, le témoin pourrait être seulement

3 demandé par rapport aux questions qui intéresseraient l'autre affaire et

4 ne révélant pas que ce

5 jonction ok

6 MER13

7 FAIT PAR Stéphanie

8 JONCTION ok

9 témoin avait déjà témoigné dans d'autres affaires.Parce que si

10 on dit qu'il a témoigné dans plusieurs affaires, si on dit par exemple

11 qu'il a été témoin dans l'affaire Aleksovski, dans l'affaire Blaskic, dans

12 l'affaire Furundzija, dans l'affaire Kupreskic, alors nous augmentons le

13 risque d'identifier le témoin ; c'était une chose.

14 Une autre chose encore, une autre question, c'était que je vois

15 un risque dangereux par rapport à ce qu'on pouvait appeler les "témoins

16 professionnels". Il y a toujours un effet, qu'on peut appeler un effet

17 frigo ou, dans la version anglaise, un freezing effect : le témoin, à

18 force de répéter une chose qui peut, au début, être douteuse pour lui-

19 même, peut déclarer cela, à la fin, comme étant une vérité tout à fait

20 sûre.

21 Moi-même, je crois que nous, les professionnels du forum, du

22 prétoire, des salles d'audience, etc., nous devons être bien conscients

23 des effets négatifs de répéter le témoignage plusieurs fois, dans

24 plusieurs salles d'audience.

25 A mon avis, il y avait toute une série d'avantages à éviter aux

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1 témoins d'apparaître devant des juges différents, des parties différentes,

2 des salles différentes...

3 Je pense que, même là, la déposition par un officier

4 instrumentaire pouvait être utile. C'est quelque chose, à mon avis, que

5 les parties devaient considérer. Parce qu'amener le même témoin une, deux,

6 trois fois, quand nous avons déjà les déclarations, si on a besoin de ce

7 témoin pour une question complémentaire, c'était seulement pour cette

8 complémentaire ; il ne faudrait pas répéter ce qu'il avait déjà dit et,

9 donc, le transcript de ses dépositions pouvaient tout à fait bien

10 fonctionner comme documents. Moi-même, je ne sais pas si je suis

11 pessimisme ou optimiste, mais au moins j'essaie d'être réaliste pour cette

12 question. Donc, si on pouvait...

13 Et à la fin, il y a une autre chose. La juridiction territoriale

14 de ce Tribunal est si petite que toutes les personnes se connaissent, à la

15 fin toutes les affaires sont relationnées. Donc, je crois qu'il y a toute

16 une série de questions qu'on devrait, je crois quand même considérer.

17 Mais, à la fin, une autre fois, je n'ai pas posé une question, mais j'ai

18 fait un commentaire. Si vous voulez réagir, je serais bien remercié.

19 M. Niemann (interprétation). - Monsieur le Président, Messieurs

20 les Juges, certains des nouveaux articles apportent pas mal de nouveauté à

21 cet égard, et ont pour vocation de ne pas devoir toujours répéter certains

22 témoignages. Je dis cela pour certains experts, mais aussi pour d'autres

23 témoins.

24 L'article 94 B, notamment, nous parle du constat judiciaire, et

25 dit que ceci pourra s'avérer très utile en temps opportun. Mais la

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1 sagacité de cette disposition, c'est qu'elle porte sur des éléments qui

2 ont déjà fait l'objet d'une décision. Voyons un témoin qui a déjà

3 longuement déposé, disons dans l'affaire Celebici ; il s'agissait d'un

4 témoin expert. Je prendrai un exemple plus spécifique. Nous avons cité à

5 la barre le professeur Economides qui a déposé sur la question de la

6 nationalité. Au cours de cette procédure, la Chambre de première instance

7 a non seulement cité les propos du professeur Economides, mais l'a aussi

8 cité avec approbation, en disant que c'était non seulement une conclusion

9 exacte, mais qu'elle était fiable et qu'on se baserait sur cette

10 conclusion. Il semblait tout à fait inutile de rappeler à la barre ce

11 témoin, qui est déjà intervenu, qui a déjà été l'objet d'un contre-

12 interrogatoire, et pour lequel le témoignage a été accepté. La question se

13 complique si quelqu'un a simplement déposé sans qu'on connaisse les

14 résultats. Il se peut que des témoins à charge ou à décharge viennent

15 déposer, viennent témoigner avec des motifs très peu honnêtes. On peut

16 espérer qu'à ce moment-là, la Chambre de première instance chargée de

17 l'affaire tranchera dans le bon sens, retiendra ou pas cette déposition,

18 la considèrera exacte ou pas, donc il y a décision prise en temps voulu.

19 Mais si une décision porte sur des questions moins pointues, beaucoup plus

20 générales, telles que la nature internationale d'un conflit, alors dans ce

21 cas, la difficulté s'accroît. Pour ce qui est de l'intention délictueuse,

22 par exemple, aussi, il faudrait avoir davantage de dépositions mais il me

23 semble que là, on a peut-être déjà eu suffisamment de dépositions qui nous

24 disent que le conflit était international ou ne l'était pas. A ce moment-

25 là, il peut y avoir constat judiciaire établi par la Chambre, parce que la

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1 question est reconnue comme ayant été étudiée. Mais il y a un risque,

2 celui d'accepter un témoignage, une déposition, avant le jugement, car à

3 ce moment-là on laisse la place à l'incohérence au niveau du résultat. Je

4 ne sais pas si j'ai ainsi répondu directement à vos questions,

5 Monsieur le Président, mais je crois que nous pourrons bien sûr amplifier

6 les procédures, penser à de nouvelles modalités. Je vous ai parlé du juge

7 d'instruction qui pourrait assurer la supervision des éléments qu'il

8 faudra communiquer ou pas ; peut-être qu'on pourrait inscrire cela dans le

9 Règlement. Moi je ne le vois pas encore, en tant que mécanisme déjà

10 établi, mais je crois que la question est loin d'être réglée. Je vous

11 remercie.

12 M. le Président. - Merci, Maître Niemann. Je vous remercie très

13 fort pour vos avis et pour votre contribution à cette question, que nous

14 devons décider à la fin.

15 Maître Mikulicic, je ne sais pas si vous avez des questions,

16 mais de toute façon mes questions, les questions que j'ai posées à

17 Me Niemann, peuvent peut-être être reprises par vous-même.

18 Mais j'avais une autre question pour vous. Je crois qu'on

19 pouvait dire que, du point de vue formel, et sûrement pour reprendre une

20 question que j'ai posée à Me Niemann, le Bureau du Procureur est un seul

21 bureau donc, et Me Niemann dit qu'il partage l'information de plusieurs

22 affaires. Aussi, du point de vue formel, nous pouvons dire que la défense

23 de chaque affaire est individuelle.

24 Plusieurs conseils n'ont pas un bureau pour partager toutes ces

25 informations. Mais au niveau réel, de la réalité, nous pouvons quand même

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1 admettre que, devant le Procureur, dans le Bureau du Procureur, il peut

2 exister des équipes qui ne partagent pas l'information avec d'autres

3 équipes.

4 Mais nous pouvons par contre admettre aussi par rapport à la

5 défense que, quoique la défense n'ait pas un bureau, ils peuvent partager

6 l'information de plusieurs affaires. Et nous savons que cela arrive, parce

7 que nous avons déjà des aveux qu'entre plusieurs conseils de la défense de

8 plusieurs affaires, ils ont partagé l'information de plusieurs affaires.

9 Donc, si du point de vue formel nous pouvons dire : "voilà une

10 différence, le Procureur concentre toute l'information de toutes les

11 affaires, le Procureur a toujours un avantage, car il dispose de toute

12 l'information", du point de vue de la réalité, je crois qu'il est vrai

13 aussi que la défense, quoique formellement elle n'ait pas un bureau

14 unique, partage aussi l'information, et cela, peut-être, peut maintenir un

15 certain équilibre.

16 Mais je reviens à la question du fond, que nous sommes en train

17 de discuter. Il est préférable, je crois qu'on doit toujours être

18 transparent, mais je crois aussi que, pour être transparent, on ne doit

19 pas être déshabillé. Et à mon avis, transparence signifie vraiment cela :

20 on peut voir quelque chose après ou derrière une autre chose, mais l'autre

21 chose qui est au milieu, on peut savoir qu'elle existe, mais on peut voir

22 encore l'autre chose qui est derrière.

23 Et je crois qu'au lieu d'avoir une situation dans laquelle la

24 défense Kordic va parler avec la défense Aleksovski, la défense Blaskic,

25 la défense Furundzija, la défense Kupreskic, ils vont le faire

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1 informellement, et peut-être créer un risque très élevé de violer des

2 ordonnances de protection.

3 Je pose la question : ne serait-il pas préférable de faire les

4 choses d'une façon claire, d'une façon tout à fait transparente ? Et donc,

5 ma question c'est toujours faire cette balance.

6 Je crois que vous avez compris, Maître Mikulicic, ce que j'ai

7 dit par rapport au Procureur du point de vue formel et informel, de

8 partager l'information ; je pose la même question et je vous dis la même

9 chose. En étant vrai que les conseils de défense ne sont pas un bureau

10 unique, c'est vrai aussi que, du point de vue de la réalité, ils partagent

11 aussi l'information. Et, pour la question du fond, s'il n'était pas

12 préférable de faire les choses de façon transparente, c'est le cœur et la

13 porte ouverte pour que les choses arrivent, pour que les informations

14 circulent informellement, et avec des risques. Donc, voilà un peu mes

15 commentaires et mes questions.

16 J'aimerais bien, Maître Mikulicic, connaître vos réactions.

17 M. Mikulicic (interprétation). – Monsieur le Président, je dois

18 dire que j'ai beaucoup de satisfaction professionnelle en prenant part à

19 une telle discussion, étant donné que je pense que l'échange des opinions

20 des parties différentes, concernant les questions soulevées au sein d'une

21 procédure, ne peuvent que contribuer à l'amélioration de la procédure, car

22 personne n'a d'illusion pour penser qu'elle est parfaite. Personnellement,

23 je pense que rien n'est parfait, et que tout peut être perfectionné. C'est

24 ainsi que je comprends la discussion d'aujourd'hui, et donc je suis

25 vraiment heureux de constater qu'une telle discussion s'est produite,

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1 notamment à l'égard de la demande de la défense dans le cadre de

2 l'affaire Kordic.

3 Je souhaite vous dire quelques réactions que j'ai eues en

4 écoutant mon éminent collègue, Me Niemann, de même que vos commentaires.

5 Nous avons parlé des pouvoirs de la Chambre de première instance

6 de statuer, et de prendre des décisions en ce qui concerne ce genre de

7 sujet.

8 Je considère que les pouvoirs sont incontestables. La Chambre de

9 première instance mène la procédure et doit résoudre tous les problèmes

10 qui surgissent au cours de cette procédure. Nous ne pouvons pas nous

11 attendre à ce que les articles et les règles englobent absolument chaque

12 cas de figure auquel vous risquez de faire face. A mon avis, vos pouvoirs

13 découlent du fait que c'est vous qui dirigez la procédure, et c'est ceci

14 qui vous donne le droit de résoudre tous les problèmes, et de décider de

15 chaque question qui est soulevée au cours de cette procédure, y compris la

16 question dont nous avons discuté aujourd'hui. Deuxièmement, en ce qui

17 concerne l'accès aux documents demandés par la défense, il faut comprendre

18 tout à fait clairement que la défense dans l'affaire Kordic demande

19 d'avoir l'accès aux documents qui ont été présentés et qui ont été versés

20 au dossier dans le cadre de cette affaire-ci, de même que dans le cadre

21 d'autres affaires.

22 Donc il ne s'agit pas de documents dont le Procureur dispose et

23 qui n'ont pas été versés au dossier, ni de documents dont la défense

24 éventuellement dispose dans le cadre de l'affaire Aleksovski mais qui

25 n'ont pas été versés au dossier mais des documents qui ont été versés au

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1 dossier. Et à mon avis, il faut tenir compte de ce fait-là.

2 Ensuite Monsieur le Président, vous avez posé la question, et à

3 mon avis, il s'agit là d'une question essentielle. Sans doute, au cours de

4 séances publiques, tous ceux qui se trouvent dans le public ou bien ceux

5 qui suivent le procès, ont regardé à l'écran, dans le lobby de cette

6 institution, toutes ces personnes-là ont la possibilité de voir les

7 témoins et de voir les éléments de preuve. Il s'agit là d'éléments de

8 preuve publics. Là, nous sommes tous d'accord et nous considérons tous que

9 ces éléments de preuve-là peuvent être utilisés comme éléments de preuve

10 dans une autre affaire.

11 Quel est le problème ici ? Le problème ici est le fait de

12 retirer la protection par rapport à un certain nombre d'éléments de preuve

13 qui ont été versés au dossier dans d'autres affaires. C'est l'hypothèse de

14 base. Si nous sommes d'accord pour dire que l'intérêt d'arriver à la

15 justice, à la vérité est plus important que l'intérêt de protéger une

16 information spécifique, surtout dans une situation où il est possible

17 d'étendre cette protection, et de telle manière que ceci concerne une

18 affaire, nous considérons qu'il n'y a aucune raison d'interdire à la

19 défense de l'affaire Kordic d'avoir accès aux documents confidentiels qui

20 ont été versés au dossier.

21 Je ne parle que de ces documents-là, donc des éléments de preuve

22 de ce genre-là qui sont confidentiels avec leur obligation de ne pas

23 divulguer cela à une tierce personne. Donc il s'agira des mêmes

24 obligations que, nous, dans notre affaire, avons dû respecter.

25 Je suis d'accord avec le Procureur quand il dit que l'article 68

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1 oblige le Bureau du Procureur à communiquer à la défense les éléments de

2 preuve qui vont dans le sens de la décharge.

3 Revenons sur la question suivante : est-ce que le Procureur a

4 ainsi interprété la valeur de ces moyens de preuve, c'est-à-dire est-ce

5 que l'interprétation du Procureur et de la défense a été la même ?

6 Je vous affirme que tel ne peut pas toujours être le cas. Nous

7 avons un bon exemple dans l'interprétation du témoignage du témoin DA dans

8 le cadre de notre affaire. Le Procureur vient de dire : "Nous avons estimé

9 que ce témoignage ne peut pas être utile pour M. Aleksovski, c'est pour

10 cela que nous n'avons pas communiqué cette information".

11 Contrairement à cela, la défense, après avoir parlé avec ce

12 témoin, a considéré que ce témoignage peut être utile à la défense. La

13 conception de la défense n'est pas connue du Procureur. Il ne peut pas

14 comprendre tous les intérêts de la défense, et nous ne pouvons pas nous

15 fier au Procureur pour que ce soit lui qui va estimer, apprécier la

16 pertinence de certaines informations.

17 C'est la défense qui doit apprécier la pertinence de ses propres

18 moyens de preuve. Et bien évidemment j'insiste, s'il s'agit là de moyens

19 de preuve confidentiels, la défense doit respecter l'obligation de garder

20 la confidentialité et la possibilité de consulter librement les éléments

21 publics, étant donné que les éléments de preuve qui ont été versés au

22 dossier en tant qu'éléments de preuve confidentiels peuvent aussi être des

23 éléments de preuve de la défense et non pas seulement du Procureur.

24 Est-ce que nous pouvons dire que les éléments de preuve qui ont

25 été versés au dossier en tant qu'éléments de preuve de la défense, est-ce

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1 que dans ce cas-là, nous pourrions dire que c'est la défense qui décidera

2 si de tels documents peuvent être consultés par quelqu'un d'autre ou pas.

3 A mon avis cela ne serait pas juste. Tous les éléments de preuve

4 à la fois les éléments de preuve qui ont été versés au dossier par le

5 Procureur et par la défense et s'il s'agit là d'éléments de preuve

6 confidentiels doivent être communiqués à la défense sous condition que la

7 défense de cette autre affaire respecte l'obligation de garder la

8 confidentialité.

9 Monsieur le Président vous avez parlé du fait que les

10 informations circulent et bien évidemment nous savons que le Bureau du

11 Procureur constitue un seul organe qui mène plusieurs enquêtes et qui

12 travaille dans plusieurs affaires.

13 Il est évident que les informations sont à la disposition du

14 Bureau du Procureur. Après la mise en accusation d'une personne,

15 pratiquement tous ceux qui travaillent pour le Bureau du Procureur peuvent

16 disposer de toutes ces informations-là, y compris les informations

17 confidentielles. C'est un fait, en ce qui concerne une des parties dans la

18 procédure.

19 En ce qui concerne l'autre partie, c'est-à-dire la défense, il

20 n'y a pas de telles circulations d'information et ceci n'est pas possible

21 non plus. Bien évidemment, je n'essaie pas de dire qu'il n'y a aucune

22 circulation d'information entre les différentes équipes de la défense,

23 mais cela ne peut pas être comparé du tout au niveau et au nombre

24 d'informations qui circulent du côté du Bureau du Procureur.

25 Cela dit, il n'y a aucune circulation d'informations

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1 confidentielles. Je n'ai pas le pouvoir et je ne peux pas attirer

2 l'attention de mon collègue de la défense dans une autre affaire. Je ne

3 peux pas attirer son attention sur une information confidentielle qui

4 pourrait être utile à son client.

5 Je ne peux pas le dire car je risquerais d'être sanctionné par

6 vous. D'autre part, le Bureau du Procureur ne se voit pas placé face à une

7 telle interdiction. La preuve en est la demande du Bureau du Procureur

8 d'introduire, de verser au dossier de cette affaire-là une autre

9 information qui est une information confidentielle. Je ne pense pas que je

10 pourrais même faire une telle demande.

11 Pour rétablir un certain équilibre, le minimum serait de donner

12 droit à la demande de la défense dans l'affaire Kordic avec la condition

13 selon laquelle la défense devrait respecter l'obligation de garder la

14 confidentialité. Je ne sais pas si j'ai bien répondu à toutes vos

15 questions sinon veuillez attirer mon attention sur les points où vous

16 voudriez que je m'exprime plus.

17 M. le Président. - Merci, Maître Mikulicic. Vous avez répondu à

18 nos questions.

19 Maître Niemann, avez-vous quelque chose à ajouter, plus ou moins

20 comme un final, car on doit quand même finir le débat ? On aurait toujours

21 d'autres choses à dire, mais on doit limiter.

22 Cela a été très intéressant, je crois, et cela peut tous nous

23 aider beaucoup, nous qui devons étudier la question et décider. De toute

24 façon, pour un mot plus ou moins final, Maître Niemann, avez-vous quelque

25 chose à ajouter ?

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1 M. Niemann (interprétation). - Un tout dernier mot, très bref.

2 Le Bureau du Procureur ne peut pas être comparé à un conglomérat d'avocats

3 de la défense qui auraient, chacun, la pousuite de certains objectifs.

4 Nous avons une fonction, avec des substituts individuels qui

5 s'occupent chacun d'une affaire ; je crois donc que l'analogie ne vaut pas

6 véritablement, de dire qu'il y a un Bureau du Procureur et plusieurs

7 avocats de la défense. C'était la seule remarque que je voulais soulever,

8 Monsieur le Président.

9 M. le Président. - Maître Mikulicic, avez-vous fini ou avez-vous

10 autre chose à dire pour terminer ?

11 M. Mikulicic (interprétation). - Monsieur le Président, merci.

12 La défense n'a pas d'autre observation à faire, sauf que nous souhaitons

13 affirmer que nous sommes entièrement d'accord avec le Procureur, et que

14 c'est là que se trouve l'essentiel du problème.

15 M. le Président. - Donc nous allons terminer avec un certain

16 sentiment de manquement, parce que je crois que la discussion a été, à mon

17 avis, très sérieuse.

18 Les Juges ne peuvent pas se féliciter, mais de toute façon je

19 pense qu'on a vraiment eu l'opportunité de discuter, avec une certaine

20 profondeur, la question. Je vous remercie beaucoup de votre participation.

21 Et donc, nous allons nous retrouver pour discuter une autre affaire,

22 vendredi, à 14 heures 30.

23 Maître Mikulicic, vous voulez dire quelque chose ?

24 M. Mikulicic (interprétation). - Monsieur le Président, merci.

25 Etant donné que vous avez mentionné le fait que nous allons nous retrouver

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1 ici vendredi, je souhaite poser une question. Nous connaissons la raison

2 de cette conférence de mise en état de vendredi. Je pose donc la question

3 suivante : est-ce que vous considérez que, lors de cette conférence de

4 mise en état, nous devons faire venir M. Aleksovski, l'accusé, ou qu'il

5 n'est pas nécessaire qu'il soit présent ici vendredi après-midi ?

6 M. le Président. - Excusez-moi, mais peut-être je vais consulter

7 mes collègues ; nous fonctionnons comme une équipe, je dois les consulter.

8 Moi-même, j'ai ma propre opinion, mais je dois les consulter, s'il vous

9 plaît.

10 (Les Juges se consultent sur le siège.)

11 Nous avons déjà notre décision, mais je me tourne vers mes

12 collègues. Nous n'avons pas entendu l'accusation. Je ne sais pas, mais

13 peut-être peut-on donner la parole à Me Niemann, et après on voit ?

14 Maître Niemann, avez-vous quelque chose à dire à propos de la

15 question ? Excusez-moi, nous étions prêts à décider, mais je n'ai pas

16 révélé la décision, donc vous êtes tout à fait disponible, et libre de

17 dire ce que voulez.

18 M. Niemann (interprétation). - Messieurs les Juges, c'est une

19 question qui est posée par la défense, mais qui est tout à fait accessoire

20 dans le procès. Puisque M. Aleksovski renonce à son droit de présence,

21 pour nous c'est une question vraiment accessoire. Nous n'avons aucune

22 objection à ce qu'il soit absent des débats.

23 (Les Juges se consultent sur le siège.)

24 M. le Président. - La Chambre pense que la question que nous

25 allons discuter vendredi à 14 heures -M. Abtahi me signale que c'est

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1 14 heures et non pas 14 heures 30- a toujours quelque chose à voir avec

2 M. Aleksovski, et donc je crois que M. Aleksovski devrait être présent.

3 Pourquoi ? Parce qu'il a intérêt dans la question. Il s'agit de la

4 question de la protection des témoins; et quand même, je vous cite, même,

5 il y a des témoins protégés qui sont ses amis personnels. Donc il y a

6 toute une série de questions qui se rapportent directement à

7 M. Aleksovski.

8 M. Aleksovski a été présent dans toutes ces sessions où on a

9 protégé des témoins, donc il était présent aussi. Je ne veux pas dire,

10 mais quand même M. Aleksovski pouvait être accusé de violer une ordonnance

11 de la Chambre. Il était présent, il savait, il connaissait.

12 Donc je crois que, pour ces raisons, je suis désolé

13 M. Aleksovski, j'ai compris tous vos intérêts de ne pas être ici, mais de

14 toute façon nous désirons aussi vous voir ici, donc M. Aleksovski va être

15 présent vendredi, à 14 heures, pour les raisons que nous avons

16 mentionnées. Je crois que c'est tout à fait raisonnable. C'est la décision

17 de la Chambre d'ordonner la présence de M. Aleksovski ; c'est notre

18 décision.

19 Pour aujourd'hui, nous allons finir, après tout ce temps. Merci

20 encore une fois aux parties qui ont contribué à ce débat, merci aux

21 interprètes qui ont dû travailler très dur, aux rapporteuses, à la cabine

22 technique, aux assistants juridiques et à mes collègues.

23 A vendredi, 14 heures.

24 L'audience est levée à 17 heures 10.

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