Affaire n° : IT-02-60-A

LA CHAMBRE D’APPEL

Composée comme suit :
M. le Juge Theodor Meron, Président
M. le Juge Fausto Pocar
M. le Juge Mohamed Shahabuddeen
M. le Juge Mehmet Güney
Mme le Juge Inés Mónica Weinberg de Roca

Assistée de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le :
20 juillet 2005

LE PROCUREUR

c/

Vidoje BLAGOJEVIC
Dragan JOKIC

______________________________________________

DÉCISION RELATIVE À LA REQUÊTE DE L’ACCUSATION AUX FINS D’OBTENIR L’AUTORISATION DE MODIFIER L’ACTE D’APPEL RELATIF À VIDOJE BLAGOJEVIC

______________________________________________

Le Bureau du Procureur :

M. Norman Farrell

Les Conseils de la Défense :

M. Vladimir Domazet, pour Vidoje Blagojevic
Mme Cynthia Sinatra, pour Dragan Jokic

LA CHAMBRE D’APPEL du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le « Tribunal international »),

VU le jugement de la Chambre de première instance I, rendu oralement en l’espèce le 17 janvier 2005 et par écrit le 24 janvier 2005 (le « Jugement »),

VU l’acte d’appel déposé par l’Accusation le 23 février 2005 (l’« Acte d’appel  »),

VU la requête de l’Accusation aux fins d’obtenir l’autorisation de modifier son acte d’appel relatif à Vidoje Blagojevic (Prosecution’s Request for Leave to Amend its Notice of Appeal in Relation to Vidoje Blagojevic) (la « Requête  »), déposée le 6 juin 2005, dans laquelle l’Accusation demande à pouvoir procéder à des modifications afin 1) de préciser que la Chambre de première instance a commis une erreur de droit, et non pas simplement de fait, lorsqu’elle a déclaré qu’il n’existait aucun lien de subordination entre Vidoje Blagojevic et Momir Nikolic, et 2) de demander que la déclaration de culpabilité prononcée contre Vidoje Blagojevic pour le chef 5 de l’acte d’accusation soit réformée et que sa peine soit revue à la hausse pour corriger les erreurs alléguées dans le troisième moyen d’appel ;

ATTENDU que l’Accusation affirme qu’il y a des motifs valables d’autoriser les modifications demandées parce qu’elles revêtent pour le succès de l’appel une importance à ce point capitale que leur exclusion serait susceptible d’entraîner une erreur judiciaire, parce qu’elles permettent de rectifier des erreurs commises par l’Accusation en dépit de tous ses efforts et qu’elles ne portent pas, de par leur nature, injustement préjudice à Vidoje Blagojevic,

ATTENDU que Vidoje Blagojevic n’a pas déposé de réponse distincte à la Requête, mais qu’il y a répondu dans un des paragraphes de sa réponse au mémoire d’appel de l’Accusation (le « Mémoire d’appel »), déposée le 20 juin 2005 (le « Mémoire d’intimé »), en indiquant que le fait que l’Accusation n’a pas inclus ces points dans la version initiale du Mémoire d’appel « ne peut constituer un motif valable1 »,

ATTENDU que l’article 108 du Règlement de procédure et de preuve du Tribunal international (le « Règlement ») dispose que la Chambre d’appel « peut, s’il est fait état dans la requête de motifs valables, autoriser une modification des moyens d’appel »,

ATTENDU que la première modification que demande l’Accusation revient essentiellement à clarifier une erreur déjà alléguée dans la version initiale de l’Acte d’appel2, et que l’Accusation s’est expliquée en tous points sur cette clarification dans le Mémoire d’appel3,

ATTENDU que Vidoje Blagojevic a eu la possibilité de répondre, dans le Mémoire d’intimé, aux arguments présentés par l’Accusation à ce sujet4 et qu’il ne serait pas injustement lésé si la Chambre d’appel autorisait l’Accusation à modifier le paragraphe 13 iii) de l’Acte d’appel,

ATTENDU que la seconde modification sollicitée correspond à un argument que l’Accusation a présenté dans la version initiale de l’Acte d’appel à l’appui de son troisième moyen d’appel, selon lequel la Chambre de première instance a commis une erreur en concluant que Vidoje Blagojevic n’était pas le supérieur hiérarchique de Momir Nikolic, et par lequel elle a indiqué expressément que Vidoje Blagojevic devait être tenu responsable selon la théorie de la responsabilité du supérieur hiérarchique,

ATTENDU que la Chambre de première instance a précisément conclu en l’espèce que la responsabilité de Momir Nikolic n’était engagée que pour les persécutions, de sorte que le lien existant entre Vidoje Blagojevic et Momir Nikolic ne présentait vraiment d’intérêt que pour le chef de persécutions (chef 5 de l’acte d’accusation établi contre Vidoje Blagojevic),

ATTENDU que, pour cette raison, l’Accusation n’a pas précisé qu’elle renvoyait au chef de persécutions (chef 5) dans son troisième moyen d’appel et n’a pas demandé que le Jugement soit réformé pour ce qui est de ce chef, et qu’elle n’a donc pas été suffisamment claire lorsqu’elle a fait valoir cette erreur, mais qu’elle a néanmoins indiqué de manière implicite que la Chambre de première instance avait commis une erreur concernant ce chef, en alléguant que la Chambre s’était trompée dans son appréciation du lien existant entre Vidoje Blagojevic et Momir Nikolic,

ATTENDU qu’en conséquence, l’Accusation demande à présent à ajouter la phrase suivante aux mesures demandées : « En conséquence, il y a lieu de réformer la déclaration de culpabilité prononcée pour le chef 5, de déclarer l’appelant Blagojevic coupable au regard de l’article 7 3) du Statut pour ne pas avoir prévenu ou puni les agissements de Momir Nikolic, et s’agissant de tous les chefs mentionnés, d’alourdir la peine. »,

ATTENDU que la seconde modification sollicitée modifie profondément la mesure formellement demandée par l’Accusation, mais qu’elle tend à corriger des erreurs déjà relevées dans la version initiale de l’Acte d’appel,

ATTENDU que la seconde modification sollicitée met l’Acte d’appel en conformité avec le Mémoire d’appel dans lequel l’Accusation s’est expliquée en tous points au sujet de son argument concernant l’application du troisième moyen d’appel au chef 5 de l’acte d’accusation5,

ATTENDU que Vidoje Blagojevic a brièvement répondu dans le Mémoire d’intimé aux arguments de l’Accusation concernant le chef 5, en traitant spécifiquement de ses liens avec Momir Nikolic et en affirmant qu’il ne fallait pas réformer le Jugement concernant le chef 5 comme le demandait l’Accusation6,

VU la décision rendue par la Chambre d’appel dans l’affaire Kordic et Cerkez, dans laquelle il a été indiqué, s’agissant de la condition selon laquelle un appelant devait invoquer des « motifs valables » pour modifier un acte d’appel, que « [s]i, par inadvertance ou négligence, le conseil d’un appelant n’a[vait] pas invoqué un moyen d’appel avec suffisamment de clarté, l’appelant concerné ne devrait pas être privé de son droit de soulever ce moyen si celui-ci revêt[ait] une importance pour le succès de l’appel telle que son exclusion serait susceptible d’entraîner une erreur judiciaire7  »,

ATTENDU que, si l’Accusation parvient à démontrer les erreurs alléguées dans son troisième moyen d’appel sans être autorisée à modifier l’Acte d’appel pour indiquer explicitement que cette erreur concerne le chef 5 et demander que le Jugement soit réformé pour ce qui est de ce chef, l’erreur qui invalide la décision de la Chambre de première instance sur ce point ne sera pas rectifiée, si bien que la modification sollicitée revêt en effet « une importance capitale pour le succès » de l’appel de l’Accusation et que son exclusion entraînerait une erreur judiciaire,

ATTENDU que, pour les raisons qui précèdent et dans les conditions particulières de la présente espèce, il existe au sens de l’article 108 du Règlement des « motifs valables » justifiant les deux modifications demandées,

ATTENDU que Vidoje Blagojevic a effectivement répondu dans le Mémoire d’intimé aux erreurs alléguées par l’Accusation en ce qui concerne le chef 5, mais qu’il peut souhaiter présenter de nouveaux arguments à ce sujet compte tenu des modifications autorisées par la Chambre d’appel, et que le fait de permettre la présentation de tels arguments écarte tout risque que Vidoje Blagojevic soit injustement lésé du fait que l’Accusation n’a pas indiqué plus tôt en quoi son troisième moyen d’appel concernait le chef 5,

PAR CES MOTIFS,

FAIT DROIT à la Requête de l’Accusation, ce que conteste en partie le Juge Pocar, et ORDONNE à Vidoje Blagojevic de déposer toutes écritures supplémentaires en réponse aux modifications apportées à l’Acte d’appel, dans un délai de 15 jours à compter de la date de la présente Décision, et à l’Accusation de répliquer à toutes nouvelles écritures dans un délai de 7 jours à compter de la date de leur dépôt.

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le 20 juillet 2005
La Haye (Pays-Bas)

Le Président de la Chambre d’Appel
_______________
Theodor Meron

Le Juge Pocar joint une opinion dissidente à la présente Décision.

Le Juge Shahabuddeen joint une opinion individuelle à la présente Décision.

[Sceau du Tribunal]


OPINION PARTIELLEMENT DISSIDENTE DU JUGE POCAR

1. Je n’approuve pas cette décision car j’estime qu’il ne faut pas autoriser l’Accusation à modifier son troisième moyen d’appel concernant l’appelant Blagojevic au paragraphe  14 de son acte d’appel (la « modification » ou la « seconde modification sollicitée  »). Cette modification est inacceptable selon l’article 108 du Règlement de procédure et de preuve (le « Règlement ») et notre jurisprudence. La majorité du collège de la Chambre d’appel affirme qu’il y a lieu d’autoriser cette modification afin d’éviter une « erreur judiciaire ». J’estime au contraire qu’autoriser cette modification peut en entraîner une.

2. D’après un principe fondamental de notre jurisprudence, lorsqu’en appel, une partie ne conteste pas en temps opportun une déclaration de culpabilité ou une peine prononcée par la Chambre de première instance contre un accusé, le jugement est définitif. Selon le principe de la res judicata8, la Chambre d’appel ne peut reconsidérer, réformer ou infirmer une déclaration de culpabilité ou réviser une peine si elle n’a pas été saisie de la question par une partie9. En application de l’article  108 du Règlement, les parties disposent de 30 jours à compter du prononcé du jugement pour communiquer à l’autre partie l’ensemble de leurs moyens d’appel10 précisant les erreurs de droit ou de fait commises par la Chambre de première instance et l’incidence que ces erreurs ont eue sur la déclaration de culpabilité et la peine 11. Une fois ce délai passé, les parties n’ont pas d’autre recours pour élargir le champ de leur appel. Aux termes de l’article  108 du Règlement, elles peuvent toutefois demander une « modification » des moyens d’appel déjà soulevés, « s’il est fait état dans la requête de motifs valables »12. C’est en règle générale au cas par cas qu’il convient de déterminer si les motifs présentés sont valables, mais la Chambre d’appel a estimé que les critères exposés ci-après étaient pertinents pour en juger : la modification proposée est minime de sorte qu’elle est sans effet sur le fond de l’acte d’appel ; la modification a été traitée de manière exhaustive dans le mémoire de l’appelant et dans celui de l’intimé de sorte que la partie adverse n’est pas lésée ; la partie adverse ne s’est pas opposée à la modification ; et la modification mettrait l’acte d’appel en conformité avec le mémoire d’appel13. Ainsi, par exemple, la Chambre d’appel a conclu qu’il existait clairement des motifs valables lorsque les modifications demandées n’étaient que des « modifications de forme » apportées à l’acte d’appel, telles que les corrections de fautes d’orthographe, de fautes de grammaire ou d’erreurs de rédaction14.

3. Dans ces conditions, la majorité du collège de la Chambre d’appel se trompe lorsqu’elle conclut que des motifs valables justifient la seconde modification sollicitée par l’Accusation. Un seul des critères énumérés plus haut justifie cette modification  : le fait qu’elle mettrait l’acte d’appel de l’Accusation en conformité avec son mémoire d’appel. C’est clairement insuffisant.

4. Tout d’abord, contrairement à ce qu’estime la majorité, il ne s’agit pas en l’occurrence d’une modification minime qui ne fait que clarifier les erreurs alléguées dans le troisième moyen d’appel de l’Accusation ou corriger des erreurs matérielles. Il s’agit en fait d’une modification substantielle qui a clairement une influence sur le fond de l’acte d’appel, à tel point qu’elle élargit la portée de ce moyen. Il est à noter que, selon l’article 108 du Règlement, lorsqu’elles présentent leurs moyens d’appel, les parties doivent préciser : 1) l’ordonnance ou la décision de la Chambre de première instance attaquée, 2) la nature des erreurs relevées dans celle-ci, et 3) toute mesure sollicitée. En l’occurrence, l’Accusation cherche à contester une toute autre décision de la Chambre de première instance et demande à la Chambre d’appel de prendre d’autres mesures pour corriger les erreurs alléguées dans le troisième moyen d’appel.

5. L’Accusation cherche, pour la première fois, à contester la déclaration de culpabilité que la Chambre de première instance a prononcée contre Vidoje Blagojevic pour les persécutions visées au chef 5. Dans la version initiale de l’acte d’appel, l’Accusation contestait simplement l’acquittement de Vidoje Blagojevic pour extermination (chef  2) et demandait son annulation, ainsi que les déclarations de culpabilité prononcées contre lui pour assassinat et meurtre (respectivement chefs 3 et 4), qu’elle demandait à la Chambre d’appel de reconsidérer. Selon moi, la mise en cause de la déclaration de culpabilité prononcée contre Vidoje Blagojevic pour les persécutions visées au chef 5 porte aussi sur tous les actes sous-jacents qui, selon les conclusions de la Chambre de première instance, constituaient des persécutions et englobaient, outre les meurtres, le traitement cruel et inhumain de civils musulmans de Bosnie, le fait de terroriser des civils musulmans de Bosnie et le transfert forcé de Musulmans de Bosnie15. Dans le cadre de cette modification, l’Accusation demande en outre pour la première fois à la Chambre d’appel d’alourdir la peine pour tous les chefs d’accusation concernés, et non pas simplement de réformer ou d’infirmer les conclusions de la Chambre de première instance concernant ces chefs comme elle l’avait initialement demandé. Selon les propres termes de la majorité, « la seconde modification sollicitée modifie profondément la mesure formellement demandée par l’Accusation » (non souligné dans l’original).

6. La majorité déclare que cette modification ne fait que clarifier des erreurs qui avait été « implicitement alléguées » dans la version initiale du troisième moyen d’appel de l’Accusation. Je ne suis pas de cet avis. Dans ce moyen, il n’est à aucun moment fait référence aux « persécutions » ou au « chef 5 ». En fait, dans le troisième moyen d’appel, il est seulement indiqué que Vidoje Blagojevic aurait dû être tenu responsable, en tant que supérieur hiérarchique, des actes que ses subordonnés auraient commis pendant l’« opération meurtrière », et par lesquels ils s’étaient plus précisément « rendus complices de meurtres » et « d’extermination  »16. L’Accusation précise donc en toute logique que son moyen porte sur les conclusions de la Chambre de première instance relatives aux chefs 2 à 4 (assassinat/meurtre et extermination) et demande que celles-ci soient revues ou annulées. Selon moi, dans ce moyen, l’Accusation fait valoir que les conclusions rendues par la Chambre de première instance aux paragraphes 794 et 795 du Jugement sont erronées. Ces paragraphes résument les conclusions de la Chambre de première instance concernant la responsabilité de Vidoje Blagojevic en tant que supérieur hiérarchique pour la participation de ses subordonnés à tous les crimes précédemment établis dans le Jugement, et dont il a été reconnu individuellement responsable en tant que complice : génocide, assassinat/meurtre, persécutions et transfert forcé17. Bien qu’il soit explicitement indiqué dans le Jugement que les « persécutions » constituent l’un des crimes, au moins, auxquels Momir Nikolic a participé 18, l’Accusation a clairement précisé qu’elle alléguait spécifiquement que la Chambre de première instance avait commis une erreur en concluant, dans ces paragraphes, que la responsabilité de Vidoje Blagojevic n’était pas engagée « pour ne pas avoir empêché ses subordonnés (membres de la brigade de Bratunac dont Momir Nikolic) d’apporter leur soutien à l’exécution de l’opération meurtrière ou pour ne pas les en avoir punis19  ».

7. Ensuite, bien l’Accusation ait examiné la teneur de la seconde modification sollicitée dans son mémoire d’appel, il n’est pas certain que Vidoje Blagojevic ait pleinement traité, dans le mémoire d’intimé, des conséquences qu’entraînait cette modification. Même si la majorité compte à présent autoriser celui-ci à compléter son mémoire d’intimé sur ce point, vu l’importance de la modification envisagée, cela ne permettra pas de réparer le préjudice qui a pu lui être injustement causé. Enfin, il convient de tenir compte du fait que, comme le signale la majorité, Vidoje Blagojevic s’oppose à la seconde modification sollicitée par l’Accusation.

8. Je tiens à relever un dernier point. L’Accusation déclare à juste titre que «  pour que des motifs soient valables et justifient une modification de l’acte d’appel, il faut que le requérant démontre qu’il n’a pas pu invoquer plus tôt son nouveau moyen20 ». Je rappelle que l’Accusation a présenté sa requête aux fins d’autorisation de modifier son acte d’appel (la «  Requête ») le 6 juin 2005, c’est-à-dire 103 jours après la date limite de dépôt de son acte d’appel21. Celle-ci affirme qu’elle avait « simplement oublié » de faire référence au chef 5 et à la révision de la peine de Vidoje Blagojevic pour tous les chefs visés dans son troisième moyen d’appel et qu’elle ne s’en est aperçue que lors de la préparation de son mémoire d’appel22. En toute honnêteté, j’ai peine à comprendre comment l’Accusation a pu mettre plus de 100 jours avant de porter un oubli de cette nature à l’attention de la Chambre d’appel.

9. En résumé, la seconde modification sollicitée par l’Accusation ne tend pas simplement à rectifier une erreur commise « par inadvertance ou négligence [par] le conseil d’un appelant [qui] n’a pas invoqué un moyen d’appel avec suffisamment de clarté » et l’Accusation n’a pas établi l’existence de motifs valables justifiant cette modification23. L’Accusation est certes en droit d’introduire un recours en application de l’article 25 du Statut, mais ni la Chambre d’appel ni la partie adverse n’est responsable si elle n’exerce pas ce droit comme il se doit. Selon les propres termes de la Chambre d’appel dans l’affaire Kupreskic, « [l]es Appelants ne devraient pas être autorisés à contourner des procédures prévues par le Statut et le Règlement. Ils ne devraient pas non plus avoir l’opportunité de continuer à signaler des erreurs au fur et à mesure qu’ils croient qu’elles sont relevées24.  » Comme l’affirme l’Accusation, il ne fait aucun doute que la seconde modification qu’elle demande « [pourrait revêtir] une importance pour le succès » de son appel25. Il ne fait pas non plus de doute que cette modification pourrait fondamentalement porter préjudice à Vidoje Blagojevic en appel.

10. Par ces motifs, je m’oppose à la décision de la Chambre d’appel.

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le 20 juillet 2005
La Haye (Pays-Bas)

______________
Fausto Pocar


OPINION INDIVIDUELLE DU JUGE SHAHABUDDEEN

A. Introduction

1. Je souscris à la décision rendue ce jour et propose d’expliquer pourquoi je l’estime fondée.

2. L’Accusation a demandé l’autorisation de procéder à deux modifications de son acte d’appel, ayant trait toutes les deux à des questions relatives au chef 5 de l’acte d’accusation établi contre Vidoje Blagojevic. Tout d’abord, l’Accusation cherche à faire valoir que la Chambre de première instance a commis une erreur de droit, en plus d’une erreur de fait, en acquittant Vidoje Blagojevic au regard de la théorie de la responsabilité du supérieur hiérarchique visée à l’article 7 3) du Statut du Tribunal international. Ensuite, elle cherche à faire valoir qu’en raison des erreurs qu’elle allègue, Vidoje Blagojevic devrait être déclaré coupable en application de l’article 7 3) du Statut pour ce chef, et qu’en conséquence la peine devrait être revue à la hausse. Voici un rappel de la procédure sur ce point  :

3. Le chef 5 de l’acte d’accusation concernait des persécutions qualifiées de crime contre l’humanité et ayant pris la forme de meurtres, traitements cruels et inhumains, terreur infligée à la population civile, destruction de biens personnels et transfert forcé de personnes. S’agissant de ce chef, Vidoje Blagojevic était tenu responsable au regard des articles 7 1) et 7 3) du Statut, l’accusation fondée sur l’article  7 3) ayant trait à la responsabilité de supérieur hiérarchique qu’il avait vis-à -vis de Momir Nikolic (lequel n’était pas mis en cause dans cet acte d’accusation ). Au paragraphe 795 du Jugement, la Chambre de première instance a constaté que Momir Nikolic avait commis des persécutions, mais également conclu que l’Accusation n’avait pas établi la responsabilité de supérieur hiérarchique de Vidoje Blagojevic vis-à-vis de Momir Nikolic. Vidoje Blagojevic a donc été acquitté au regard de l’article  7 3) du Statut, mais reconnu coupable de complicité en application de l’article  7 1) du Statut26.

4. L’acte d’appel de l’Accusation a été déposé le 23 février 2005. Les demandes d’autorisation d’apporter ces deux modifications aux moyens soulevés dans l’acte d’appel ont d’abord été exposées dans le mémoire d’appel de l’Accusation, daté du 9 mai 2005. Vidoje Blagojevic a ensuite déposé son mémoire d’intimé le 20 juin 2005. L’Accusation a réitéré ses demandes dans sa requête du 6 juin 2005, sur laquelle la Chambre d’appel s’est prononcée dans la présente décision.

B. Première modification proposée

5. La Chambre d’appel a décidé à l’unanimité d’autoriser la première modification sollicitée par l’Accusation. Or, il est nécessaire de connaître la teneur de cette première modification afin d’apprécier le bien-fondé de la seconde.

6. Les paragraphes 12 et 13 de la version initiale de l’acte d’appel sont libellés en ces termes :

12. La Chambre d’appel a commis une erreur de droit et de fait aux paragraphes 794 et 795 en constatant que Vidoje Blagojevic n’était pas responsable au regard de l’article 7 3) du Statut des actes commis par ses subordonnés dans le cadre de l’opération meurtrière pour ne pas les avoir empêchés de commettre ces actes ou pour ne pas les en avoir punis. Vidoje Blagojevic devrait être tenu responsable en application de l’article 7 3) pour ne pas avoir empêché ses subordonnés (membres de la brigade Bratunac dont Momir Nikolic) d’apporter leur soutien à l’exécution de l’opération meurtrière ou pour ne pas les en avoir punis.

13. Ce moyen comprend quatre erreurs :

i) […]

ii) […]

iii) La Chambre de première instance a commis une erreur de fait en constatant au paragraphe 795 qu’il n’existait aucun lien de subordination entre Vidoje Blagojevic et Momir Nikolic ;

iv) […]

7. Ainsi, aux paragraphes 12 et 13 iii) de la version initiale de son acte d’appel, l’Accusation a indiqué que la Chambre de première instance avait commis une erreur en constatant, au paragraphe 795 du Jugement, qu’il n’existait pas de lien de subordination entre les deux hommes et en acquittant pour cette raison Vidoje Blagojevic au regard de l’article 7 3) du Statut. Il est indiqué au paragraphe 12 que la Chambre de première instance a « commis une erreur de fait et de droit », et au paragraphe 13 iii), qu’elle a « commis une erreur de fait ». La première modification consiste à faire état d’une autre erreur de droit au paragraphe 13. Comme il a été dit plus haut, cette modification ne pose aucun problème.

C. Seconde modification proposée

8. S’agissant de la seconde modification sollicitée par l’Accusation, il est indiqué au paragraphe 12 de la version initiale de l’acte d’appel, comme il a été relevé, que « Vidoje Blagojevic devrait être tenu responsable en application de l’article 7 3) pour ne pas avoir empêché ses subordonnés (membres de la brigade Bratunac dont Momir Nikolic) d’apporter leur soutien à l’exécution de l’opération meurtrière27 ». Cela dit, un tribunal pourrait difficilement tenir Vidoje Blagojevic « responsable » (comme il est allégué dans la version initiale de l’acte d’appel) d’un crime aussi grave que celui mettant en cause sa responsabilité en tant que supérieur hiérarchique pour persécutions s’il ne le déclarait pas formellement coupable et s’il ne le sanctionnait pas comme il se doit. À mon avis, il était donc implicitement demandé dans la version initiale de l’acte d’appel de prendre des mesures en ce sens ; la seconde modification proposée permet d’expliciter cette demande.

9. On pourrait contester le fait qu’au paragraphe 12 de la version initiale de l’acte d’appel, il n’est pas fait expressément référence au chef de persécutions, c’est -à-dire au chef 5. Toutefois, je pense qu’il est clair vu le contexte que, dans ce paragraphe, l’Accusation entend renvoyer principalement, si ce n’est exclusivement, à ce chef d’accusation. La responsabilité de Vidoje Blagojevic en tant que supérieur hiérarchique de Momir Nikolic n’a de pertinence que dans la mesure où ce dernier était responsable de l’un quelconque des crimes allégués. En l’espèce, la Chambre de première instance a déclaré que Momir Nikolic était responsable « de crimes comprenant, au moins, les persécutions28 ». Sachant cela, il est logique que l’Accusation demande (concernant l’erreur qu’aurait commise la Chambre de première instance en concluant qu’il n’existait aucun lien de subordination entre les deux intéressés) qu’une déclaration de culpabilité pour persécutions soit prononcée en application de l’article 7 3) du Statut. En effet, il est difficile de dire quelle autre mesure pourrait être sollicitée pour rectifier cette erreur.

10. Le fait que l’Accusation mentionne dans la version initiale de son acte d’appel « l’opération meurtrière » et non les « persécutions » n’y change rien. Vidoje Blagojevic a été accusé de persécutions ayant notamment pris la forme de meurtres. Je ne vois aucune distinction pertinente entre « meurtre » et « opération meurtrière ». Compte tenu du contexte décrit ci-dessus, l’emploi par l’Accusation de l’expression « opération meurtrière » ne peut raisonnablement s’interpréter comme excluant les persécutions.

11. Ainsi, il me semble que tant l’erreur alléguée que la mesure sollicitée en ce qui concerne le chef 5 étaient forcément sous-entendues aux paragraphes 12 et 13  iii) de la version initiale de l’acte d’appel. La seconde modification, par laquelle l’Accusation cherche à être plus explicite, vise à clarifier une demande formulée de manière implicite dans la version initiale de l’acte d’appel.

D. Vidoje Blagojevic a-t-il été injustement lésé ?

12. Vidoje Blagojevic a-t-il compris la question différemment ? Dans sa réponse au mémoire d’appel (où l’Accusation a demandé pour la première fois l’autorisation d’apporter ces deux modifications), il a dit que le fait que l’Accusation n’a pu inclure ces points dans la version initiale de l’acte d’appel « ne [pouvait] constituer un motif valable »29. Vidoje Blagojevic a donc eu la possibilité de répondre, ce qu’il a fait. Il a consacré une douzaine de paragraphes ou plus30 à défendre la conclusion de la Chambre de première instance selon laquelle il n’était pas le supérieur hiérarchique de Momir Nikolic. Ses arguments en réponse se rapportaient directement aux erreurs soulevées par l’Accusation dans les paragraphes 12 et 13  iii) de la version initiale de son acte d’appel. On ne peut pas dire qu’il n’a pas eu la possibilité de traiter la question au fond, qu’il ne l’a pas fait, ou encore qu’il a été pris par surprise.

13. Dans la décision rendue aujourd’hui, Vidoje Blagojevic se voit accorder de nouveau la possibilité de s’expliquer. Selon moi, il ne faut pas y voir l’aveu qu’il n’a pas pu auparavant répondre à l’Accusation. La Chambre d’appel reconnaît au contraire que, dans la mesure où il est dans l’intérêt de la justice d’entendre les arguments de Vidoje Blagojevic, celui-ci devrait être autorisé à les présenter une fois de plus. Mais, en tout état de cause, la décision de lui accorder de nouveau cette possibilité devrait permettre de dissiper toute crainte qu’il soit injustement lésé par les modifications autorisées ce jour.

14. La question du préjudice causé à l’intimé présente toujours un intérêt pour déterminer s’il y a lieu d’autoriser la modification d’un acte d’appel. Cependant, il est à noter que la question ne peut être simplement celle de savoir si l’accusé sera dans une situation moins favorable si la modification demandée est accordée. L’intimé sera presque toujours en moins bonne posture quelle que soit la modification accordée car une partie ne demande des modifications que si elle pense en tirer profit, et ce généralement aux dépens de la partie adverse. La véritable question qui se pose est celle de savoir si l’intimé est injustement lésé par la modification à laquelle il est à présent procédé. À mon avis, dans les circonstances de la présente espèce, Vidoje Blagojevic n’a subi aucun préjudice.

15. On pourrait imaginer un tout autre cas de figure. Ainsi, la nature de la modification sollicitée pourrait avoir une telle incidence sur la stratégie adoptée par l’intimé qu’aucun supplément au mémoire ne pourrait remédier au préjudice causé, mais ce n’est pas le cas en l’espèce. On pourrait également imaginer le cas où la demande de modification serait rejetée car la préparation de documents supplémentaires retarderait indûment la procédure en appel, mais ce n’est pas non plus le cas : les audiences d’appel sont retardées en raison des nombreuses prorogations de délai accordées dans le cadre de l’appel de Vidoje Blagojevic, et non pas dans celui de l’Accusation. En l’occurrence, il n’y a pas lieu de s’inquiéter quant à la régularité de la procédure. L’octroi d’un nouveau report simplement pour modifier un acte d’appel ne justifie pas en soi une telle inquiétude.

16. La Chambre d’appel a autorisé des modifications à un stade très avancé de la procédure d’appel ; dans l’affaire Jelisic, elle avait autorisé une modification lors des débats en appel31. Je tiens également à faire observer que le Règlement n’envisage pas de traiter différemment les modifications demandées par l’Accusation ou par la Défense, et qu’une interprétation restrictive des « motifs valables » pour ce qui est des modifications de l’acte d’appel risquerait, dans d’autres affaires, de léser les droits des condamnés à ce que leur appel se déroule en bonne et due forme.

17. Dans des conditions similaires à bien des égards à celles de la présente espèce, lorsque les modifications demandées visaient à mettre l’acte d’appel en conformité avec le mémoire d’appel et lorsqu’aucun préjudice n’était alors causé, la Chambre d’appel avait accordé l’autorisation de modifier les actes d’appel dans les affaires  Nikolic32 et Simic33. Il est vrai que, dans ces affaires, la partie adverse ne s’était pas opposée aux modifications demandées, et que c’était l’une des raisons citées par la Chambre d’appel. Mais je ne suis pas convaincu que, selon la jurisprudence pertinente, il ne faille jamais autoriser une modification à moins que la partie adverse ne l’accepte d’une façon ou d’une autre. En tout état de cause, je ne suis pas persuadé qu’il soit indispensable d’avoir l’accord de la partie adverse lorsque les modifications proposées ne changent rien en substance, et lorsque la partie demanderesse sollicite l’autorisation d’employer des termes destinés à mettre en évidence les conséquences logiques de ce qui est implicitement dit dans la version initiale de l’acte d’appel.

E. Peut-on procéder à des modifications substantielles de l’acte d’appel ?

18. Comme il a été expliqué plus haut, je pense que la seconde modification sollicitée par l’Accusation n’apporte rien de nouveau en substance. Ce que veut ajouter l’Accusation était implicitement contenu dans la version initiale de l’acte d’appel dans laquelle elle affirmait que Vidoje Blagojevic était responsable de persécutions au motif précis (rejeté par la Chambre de première instance) qu’il était le supérieur hiérarchique de Momir Nikolic. Quel intérêt y a-t-il à demander dans la version initiale de l’acte d’appel que Vidoje Blagojevic soit déclaré « responsable au regard de l’article  7 3) du Statut », si ce n’est pour demander à la Chambre d’appel de prononcer une déclaration de culpabilité et une peine qui reflètent cette responsabilité ? La modification demandée porte sur la manière de donner effet à cette responsabilité  ; en réalité, elle ne vise pas à élargir la portée de l’appel.

19. Cependant, même si l’Accusation demandait à procéder à une modification substantielle tendant à élargir la portée de l’appel, il n’y aurait pas lieu, à mon avis, de rejeter cette demande pour ce motif dans les circonstances de la présente espèce. Il ne s’agit pas, bien évidemment, d’autoriser toute modification de l’acte d’appel sans restriction. Il ne s’agit pas non plus d’autoriser automatiquement toute modification tendant à mettre l’acte d’appel en conformité avec le mémoire d’appel. La question est de savoir s’il existe des « motifs valables » au regard de l’article 108 du Règlement.

20. L’expression « motifs valables » a été étudiée à maintes reprises dans la jurisprudence du Tribunal. Un aspect en particulier a été examiné dans l’affaire Kordic et Cerkez34 où le juge de la mise en état en appel a déclaré :

La justification, par des « motifs valables », de la modification de moyens d’appel est un concept à géométrie variable, apprécié en fonction des circonstances de chaque affaire. Dans les circonstances de l’espèce, cette appréciation dépend, dans une large mesure, de l’importance du moyen pour le succès de tout appel. Si, par inadvertance ou négligence, le conseil d’un appelant n’a pas invoqué un moyen d’appel avec suffisamment de clarté, l’appelant concerné ne devrait pas être privé de son droit de soulever ce moyen si celui-ci revêt une importance pour le succès de l’appel telle que son exclusion serait susceptible d’entraîner une erreur judiciaire.

21. La décision rendue dans l’affaire Kordic et Cerkez, même si elle émane d’un seul juge, a été citée et approuvée dans la présente décision. Il n’y a pas – et ne peut y avoir – de doute quant à l’importance de la modification demandée puisque l’Accusation ne pourra remédier efficacement aux erreurs alléguées dans son troisième moyen d’appel s’il n’est pas fait droit à sa requête. L’allusion à une inadvertance commise par le conseil est également pertinente en l’espèce. Comme l’explique l’Accusation, l’absence de renvoi spécifique au chef 5 dans le troisième moyen de la version initiale de son acte d’appel était due à une simple erreur, ce que Vidoje Blagojevic ne conteste pas. Il s’agissait d’une erreur purement formelle que tout juriste très absorbé par son travail repère lorsqu’il se penche de nouveau sur la question. Si, après réflexion, il estime prudent de demander l’aide du tribunal pour présenter ses véritables arguments, celle-ci doit lui être accordée dès lors que la partie adverse n’est pas lésée, et je pense qu’elle ne l’est pas dans le cas présent.

22. Naturellement, à mesure que l’on avance dans l’appel, il sera de moins en moins possible de conclure à l’existence de « motifs valables », lesquels comprendront notamment l’intérêt qu’a le public pour la finalité de la décision. Mais, je tiens à réaffirmer que la Chambre d’appel peut à tout moment conclure à l’existence de « motifs valables », que la modification proposée tende ou non à élargir la portée de l’appel. Comme je l’ai observé plus haut, elle l’a déjà fait même lors des débats en appel. À l’heure actuelle, le procès en appel n’aura pas lieu avant plusieurs mois.

23. Enfin, je pense qu’il serait judicieux pour la Chambre d’appel de tenir compte de la pratique des juridictions nationales qui, sous certaines conditions, peuvent faire droit à une demande de modification tendant à présenter un nouveau moyen dans le cadre d’un appel au pénal, et ce même lors du procès en appel, ou plutôt même lorsque la version initiale de l’acte d’appel passait sous silence la teneur de la modification envisagée35. Cette pratique montre que, lorsque qu’une modification s’impose afin de permettre à une partie de présenter ses véritables arguments, que la partie adverse n’en est pas injustement lésée, et que cette mesure ne fait pas obstacle à la bonne marche de la justice, cette modification doit être autorisée. Comme il a été exposé plus haut, ces conditions sont réunies en l’espèce.

F. Conclusion

24. La règle selon laquelle la Chambre d’appel a le pouvoir d’autoriser la modification d’un acte d’appel repose sur la responsabilité qu’a le Tribunal de rendre la justice. Selon la jurisprudence, pour servir l’intérêt de la justice, il faut veiller à ce que les parties présentent leurs véritables arguments. Bien évidemment, cela ne veut pas dire qu’il faille toujours faire droit à une demande de modification lorsque le rejet de celle-ci porterait préjudice au demandeur en ce sens qu’il ne serait pas en mesure de présenter sa cause. Mais c’est un facteur parmi d’autres à prendre compte. En l’espèce, comme il a été mentionné plus haut, il y a d’autres facteurs ; selon moi, ils justifient d’accorder à l’Accusation l’autorisation de procéder aux deux modifications qu’elle sollicite.

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le 20 juillet 2005
La Haye (Pays-Bas)

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Mohamed Shahabuddeen

[Sceau du Tribunal]


1 - Defence of Accused Vidoje Blagojevic’s Response Brief on Prosecution’s Brief on Appeal, 20 juin 2005, par. 4.2 (« Mémoire d’intimé »).
2 - Acte d’appel, par. 13 iii).
3 - Mémoire d’appel de l’Accusation, 9 mai 2005, par. 4.1 et 4.33 à 4.40.
4 - Voir Mémoire d’intimé, par. 4.8 et 4.9.
5 - Ibidem, par. 4.1 et 4.33 à 4.78.
6 - Mémoire d’intimé, par. 4.3 à 4.16.
7 - Le Procureur c/ Dario Kordic et Mario Cerkez, affaire n° IT-95-14/2-A, Décision autorisant Dario Kordic à modifier ses moyens d’appel, 9 mai 2002, par. 5 et 8.
8 - Comme l’a fait observer la Chambre d’appel du TPIR dans l’affaire Kajelijeli c/ Le Procureur, ce principe « renvoie à la situation où “un jugement définitif sur le fond” rendu par un tribunal compétent à la suite d’une plainte, d’une revendication ou d’une prétention des parties empêche toute possibilité d’engager “de nouvelles poursuites fondées sur la même plainte” entre les mêmes parties » (citation non reproduite) ; voir ibidem affaire n° ICTR-98-44A-A, Judgement, 23 mai 2005, par. 202.
9 - Voir, par exemple, Le Procureur c/ Kupreskic et consorts, affaire n° IT-95-16-A, Arrêt, 23 octobre 2001 (« Arrêt Kupreskic »), par. 468 à 471 (où la Chambre d’appel a indiqué qu’elle n’examinerait pas l’affirmation de l’Accusation selon laquelle la Chambre de première instance avait eu tort de prononcer une peine moindre pour le crime de persécutions que pour celui d’assassinat, au motif qu’elle n’avait pas « été régulièrement saisie de cette question » qui avait été soulevée pour la première fois dans le mémoire d’appel modifié de l’Accusation et n’avait aucun rapport avec les moyens que celle-ci avait présentés). En tant qu’arbitre ultime du droit, la Chambre d’appel peut examiner des questions proprio motu ou des allégations d’erreurs, même si elles n’ont pas été dûment soulevées par une des parties, lorsque celles-ci présentent un intérêt général pour l’évolution de la jurisprudence du Tribunal international et tant qu’elles n’influent pas sur le verdict. Voir Le Procureur c/ Kordic et Cerkez, affaire n° IT-95-14/2-A, Arrêt, 17 décembre 2004, par. 1031 et 1032 (citant Le Procureur c/ Krnojelac, affaire n° IT-97-25-A, Arrêt, 17 septembre 2003, par. 6 et 7).
10 - La partie qui soulève un moyen doit préciser l’ordonnance ou la décision attaquée, la nature des erreurs relevées et la mesure sollicitée. Voir article 108 du Règlement.
11 - Voir article 25 1) du Statut en vertu duquel les parties peuvent soulever des moyens d’appel pour une erreur sur un point de droit qui invalide la décision ou une erreur de fait qui a entraîné un déni de justice.
12 - Article 108 du Règlement.
13 - Momir Nikolic c/ Le Procureur, affaire n° IT-02-60/1-A, Décision relative à la requête de l’appelant aux fins de modification de l’acte d’appel, 21 octobre 2004, p. 3 et 4.
14 - Ibidem, p. 2 et 3.
15 - Voir Le Procureur c/ Vidoje Blagojevic et Dragan Jokic, affaire n° IT-02-60-T, Judgement, 17 janvier 2005 (« Jugement »), par. 797.
16 - Prosecution’s Notice of Appeal, 23 février 2005, par. 12 et 14.
17 - Voir Jugement, par. 729 à 787, 794, 795 et 797.
18 - Ibidem, par. 795.
19 - Prosecution’s Notice of Appeal, par. 12 (non souligné dans l’original).
20 - Prosecution’s Request for Leave to Amend Notice of Appeal in Relation to Vidoje Blagojevic, 6 juin 2005 (« Requête »), par. 8.
21 - L’Accusation avait dûment déposé la version initiale de son acte d’appel le 23 février 2005, 30 jours après la publication de la version écrite du Jugement le 24 janvier 2005.
22 - Requête, par. 31.
23 - Le Procureur c/ Dario Kordic et Mario Cerkez, affaire n° IT-95-14/2-A, Décision autorisant Dario Kordic à modifier ses moyens d’appel, 9 mai 2002, par. 5.
24 - Arrêt Kupreskic, par. 470.
25 - Requête, par. 8.
26 - Jugement, p. 283 à 286, 304 et 305.
27 - Non souligné dans l’original.
28 - Jugement, par. 795.
29 - Réponse, par. 4.2.
30 - Ibid., par. 4.3 à 4.14.
31 - Voir Le Procureur c/ Jelisic, affaire n° IT-95-10-A, Arrêt, 5 juillet 2001, par. 18.
32 - Momir Nikolic c/ Le Procureur, affaire n° IT-02-60/1-A, Décision relative à la requête de l’appelant aux fins de modification de l’acte d’appel, 21 octobre 2004.
33 - Le Procureur c/ Blagoje Simic, affaire n° IT-95-9-A, Décision relative à la requête de Blagoje Simic aux fins de modification de son acte d’appel, 16 septembre 2004.
34 - Le Procureur c/ Kordic et Cerkez, affaire n° IT-95-14/2-A, 9 mai 2002, par. 5 (Juge Hunt).
35 - Dans le cadre d’une affaire pénale, une demande aux fins d’ajouter aux moyens d’appel initialement invoqués un nouveau moyen a été présentée pendant les débats en appel dans l’affaire Miah, (1997) 2 Cr. App. Rep. 12, p. 23 et 24. Elle a été rejetée, mais uniquement parce que, d’après ce que la cour d’appel a indiqué à la page 24, « le moyen d’appel supplémentaire proposé [était] tout bonnement indéfendable ».