Affaire n° IT-95-14-T LA CHAMBRE DE PREMIERE INSTANCE Vendredi 28 février 1997 SESSION PUBLIQUE
Devant :
C/ TIHOMIR BLASKIC
Le Bureau du Procureur :
Représentant de la Bosnie-Herzégovine :
Conseil de M. Jelavic :
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1 (Ouverture de l'audience)
2 (10 heures)
3 LE PRESIDENT : Nous parlons de l'affaire IT-95-14-PT. Le 24 février 1997, j'ai signé une
4 ordonnance visant à ce que M. Ante Jelavic comparaisse en personne devant le Tribunal
5 le 28 février 1997 à 10 heures, afin de répondre à des questions relatives à la production
6 des documents requis par la citation. Si M. Jelavic ne comparaissait pas à cette date, il
7 devait nous envoyer un représentant qui connaisse bien les lieux et aussi la teneur des
8 documents ou du moins des Archives centrales du Ministère de la défense de la
9 communauté croate d'Herceg-Bosna, et qui serait à même de nous parler de façon
10 précise des mesures prises pour veiller à l'exécution de l'ordonnance de soit-
11 communiqué depuis la réception de cette ordonnance.
12 M. HARMON : Bonjour, Madame le Juge. Je prêt à entrer dans la discussion. Je suis Mark
13 Harmon et je représente l'Accusation ce matin.
14 LE PRESIDENT : D'autres personnes peuvent-elles se présenter ? Mme Vidovic ?
15 MME VIDOVIC : Bonjour, Madame le Juge. Je m'appelle Vashija Vidovic. Je suis Ministre
16 Conseiller auprès de l'ambassade de Bosnie-Herzégovine et je représente la Bosnie-
17 Herzégovine lors de cette audience.
18 LE PRESIDENT : Merci. D'autres comparutions ?
19 MME GLUMAC : Je m'appelle Jadranka Slokovic Glumac. Je suis avocate à Zagreb et je suis
20 le représentant juridique de M. Jelavic. J'ai aussi été habilitée, par M. Jelavic, à
21 préciser quelques points relatifs à ces documents en tant que son représentant.
22 LE PRESIDENT - Connaissez-vous bien les documents, Mme Glumac ? Je reformule ma
23 question. En dehors de la nature même des documents, connaissez-vous les Archives
24 centrales ? Seriez-vous dès lors en mesure de dire au Tribunal si certains de ces
25 documents existent.
26 MME GLUMAC : Je détiens quelques informations à ce propos, Madame le Juge. Je vais vous
27 transmettre ces informations au nom du Ministère de la défense. Je ne dispose pas de
28 toutes les informations. Toutefois, j'en ai quelques-unes.
29 LE PRESIDENT : Merci. Nous verrons au fil de nos débats quelles sont les informations que
30 vous détenez et nous verrons si M. Jelavic s'est ainsi acquitté de ses obligations.
31 M. Harmon.
32 M. HARMON : Madame le Juge, depuis la dernière audience, je peux dire que nous n'avons
33 pas reçu le moindre document en réponse à l'ordonnance de soit-communiqué. J'ai
34 toute une série de pièces que j'aimerais vous soumettre, avec votre autorisation bien
35 sûr.
36 LE PRESIDENT : Vous pouvez le faire.
37 M. HARMON : La première pièce - j'en ai cinq -, la première est une lettre qui m'est adressée
38 par Mme le Juge Vidovic m'informant des mesures qu'elle a prises après que vous ayez
39 rendu l'ordonnance le 24 février 1997. Il s'agirait de ma pièce n° 1. Les pièces 2, 3, 4 et
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1 5 sont des pièces qui sont en fait des accusés de réception. La pièce n° 4 montre que M.
2 Jelavic a reçu votre ordonnance le 25 février 1997.
3 LE PRESIDENT : Ces pièces ont-elles été présentées à Mme Glumac ?
4 M. HARMON : Je ne savais pas qu'il y aurait aujourd'hui un représentant ou une représentante
5 de M. Jelavic, mais je suis tout à fait disposé à prévoir une suspension d'audience pour
6 permettre à Madame de disposer de certains exemplaires. Je ne m'attendais pas à ce
7 qu'elle soit présente aujourd'hui à notre audience.
8 LE PRESIDENT : Allez-vous faire référence à ces pièces en ce moment même ou est-il possible
9 qu'on les fasse photocopier pour que Mme Glumac dispose d'un jeu de documents.
10 Mme Glumac disposez-vous d'un exemplaire de la lettre qu'a envoyée Mme Vidovic ?
11 MME GLUMAC : Oui.
12 M. HARMON : J'ai d'autres pièces mais vous voulez peut-être avoir un moment de réflexion
13 pour étudier ceci avant que je produise les autres.
14 LE PRESIDENT : Nombre de ces documents sont en serbo-croate. Alors, en dépit de ma
15 bonne volonté, je n'en suis pas encore là. Je pense qu'on pourrait faire une photocopie
16 de ces documents et les transmettre à Mme Glumac.
17 M. HARMON : Puis-je poursuivre par la présentation des autres pièces ?
18 LE PRESIDENT : Oui.
19 M. HARMON : La pièce suivante est la pièce n° 6. Il s'agit d'une lettre qui vous est adressée,
20 Madame le Juge, et qui vient du Premier Ministre, laquelle vous informe des mesures
21 prises par le Premier Ministre. Je dispose de ce document depuis hier soir. Ce
22 document a été envoyé au Service de traduction. J'ai une traduction officielle et ce serait
23 la pièce n° 6.
24 La pièce n° 7 est une lettre en date du 18 février 1997 adressée à M. Jelavic de la
25 part du Premier Ministre par laquelle le Premier Ministre demande qu'il y ait exécution
26 de l'ordonnance de soit-communiqué. Ce document a été traduit et je dispose en annexe
27 d'une traduction officielle de ce document.
28 La pièce n° 8 est une réponse qui vient de M. Jelavic en date du 19 février 1997
29 adressée au Premier Ministre. J'ai un exemplaire de la traduction officielle qui figure en
30 annexe à l'original. Ce serait donc la pièce de l'Accusation n° 8.
31 LE PRESIDENT : Pourriez-vous répéter ceci à mon intention ?
32 M. HARMON : Oui. La pièce n° 8 est une réponse adressée par le Premier Ministre à
33 M. Jelavic, en réponse à la pièce n° 7, en date du 19 février 1997.
34 La pièce n° 9 est une lettre en date du 21 février 1997 adressée à M. Jelavic par
35 le Premier Ministre par laquelle on demande qu'il comparaisse à l'audience
36 d'aujourd'hui pour répondre aux questions concernant la non-exécution de
37 l'ordonnance de soit-communiqué ou qu'il désigne un représentant qui connaisse les
38 lieux et la teneur des Archives afin d'expliquer pourquoi il n'a pas exécuté cette
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1 ordonnance. Il y a une traduction officielle qui vient de nos services en annexe au
2 document original.
3 LE PRESIDENT : Est-ce que ceci termine...
4 M. HARMON : Non, il y a encore deux pièces, Madame le Juge. La pièce n° 10 est la réponse
5 fournie par M. Jelavic au Premier Ministre en date du 21 février 1997 par laquelle il
6 affirme qu'il n'est pas le successeur légal du dépositaire des Archives et qu'il faudrait
7 vous adresser une lettre, Madame le Juge, pour demander qu'il y ait suspension de
8 l'ordonnance. Ce document a été traduit par nos services. Il y a donc une traduction
9 officielle en annexe.
10 La dernière pièce, Madame le Juge, c'est la pièce n° 11. Il s'agit d'une lettre en
11 date du 24 février 1997 adressée à M. Jelavic par le Premier Ministre pour informer M.
12 Jelavic du fait que les Archives de la Fédération de Bosnie-Herzégovine sont bien le
13 successeur légal mais que cette entité n'a pas encore commencé à fonctionner et que, en
14 fait, les anciennes archives n'ont pas encore été transmises aux nouvelles archives de la
15 Fédération. Dans cette lettre il est également demandé à M. Jelavic de s'acquitter de ses
16 obligations au titre de l'ordonnance que vous avez rendue le 20 février. Ceci a été
17 traduit également et vous trouverez en annexe un exemplaire de la traduction officielle.
18 J'en ai terminé, Madame le Juge.
19 LE PRESIDENT : Mme Glumac, je suppose que vous disposez de certaines de ces copies mais
20 je ne sais pas si vous disposez du jeu complet de pièces. Si vous le désirez, nous
21 pouvons prévoir une brève suspension pour qu'il y ait photocopies qui soient faites et
22 vous pourriez avoir le jeu complet. Ceci vous conviendrait-il ?
23 MME GLUMAC : Madame le Juge, je dispose de la plupart de ces documents. Je les ai dans
24 mon dossier et les nouveaux documents n'ont pas une telle importance qu'il faille
25 absolument prévoir une suspension pour que ces documents soient photocopiés.
26 LE PRESIDENT : M. Harmon, avez-vous un complément d'information ?
27 M. HARMON : Non, Madame le Juge.
28 LE PRESIDENT : Mme Vidovic, voulez-vous intervenir ou laissez-vous le soin à
29 Mme Glumac de le faire d'abord ?
30 MME VIDOVIC : Je propose que nous entendions d'abord Mme Glumac.
31 LE PRESIDENT : Mme Glumac.
32 MME GLUMAC : Madame le Juge, en tout premier lieu, j'aimerais évoquer certaines des
33 circonstances qui ont débouché ou qui ont mené à cette ordonnance que vous avez
34 rendue et qui n'a pas encore été exécutée. D'abord, les archives de guerre de la
35 communauté d'Herceg-Bosna, ces documents dont vous avez demandé la production
36 pour ce Tribunal, font partie intégrante des archives. La personne qui était responsable
37 de ces archives était le Directeur. Celui-ci est décédé. Nous avons des documents à cet
38 égard et il n'a pas encore de successeur. Ces archives ont cessé de fonctionner au
39 moment où les institutions d'Herceg-Bosna ont également arrêté de fonctionner. Il n'y a
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1 pas encore constitution d'archives dans les nouveaux organes. Il y avait des
2 informations dans ces archives d'ordre civil mais aussi d'ordre militaire. Les
3 informations dont nous disposons nous portent à croire que dans ces archives il y a des
4 documents que nous avons et la traduction vous montrera qu'il ne s'agissait pas
5 d'archives officielles mais dans ces archives on retrouvait tous les documents relatifs à
6 la guerre d'Herceg-Bosna. En d'autres termes, il s'agissait d'archives tenant compte de
7 l'évolution économique, scientifique, culturelle, sportive, sur le territoire aussi, qui
8 parlaient de questions militaires. Je rappellerais que la décision régissant l'établissement
9 des archives de guerre de la communauté d'Herceg-Bosna existe et je voudrais que ceci
10 soit traduit et vous soit présenté sur le champ afin que vous voyiez de quoi je parle. Le
11 Ministère de la défense d'Herceg-Bosna n'a jamais joué de rôle important dans le cadre
12 de ces archives puisqu'elles ne relevaient pas dans leur constitution du Ministère. Les
13 archives étaient un organe indépendant, c'était un service du Gouvernement et le
14 Directeur des archives était désigné par le Gouvernement d'Herceg-Bosna. Voulez-vous
15 que je vous soumette ce document dès maintenant, Madame le Juge.
16 LE PRESIDENT : Volontiers. Ce sera la pièce A ou 1, c'est selon. Mme Glumac, pourriez-
17 vous me rappeler la nature de cette décision. Vous avez dit que c'est une décision qui
18 établissait les archives centrales.
19 MME GLUMAC : Le Gouvernement de la communauté d'Herceg-Bosna a pris une décision
20 visant à constituer ces archives. En d'autres termes, ces archives ne relevèrent jamais du
21 Ministère de la défense. Ce n'était pas le Ministère de la défense qui était responsable de
22 ces archives. C'est un civil qui était le directeur de ces archives. La gestion se faisait
23 donc par des civils et une partie de ces archives revêtait un caractère civil. Le Directeur a
24 été désigné par le Gouvernement d'Herceg-Bosna et non pas par un Ministère ou le
25 Conseil de la défense plus exactement. Le HVO n'a été consulté que lorsqu'on se
26 demandait qui devait gérer ces archives. Celles-ci n'étaient pas les archives du Ministère
27 de la défense mais bien de l'ensemble de la communauté à l'époque. Dès lors, le
28 Ministère de la défense de la Fédération de Bosnie-Herzégovine ne peut pas être le
29 successeur légal de ces archives. Celles-ci relevaient d'une décision qui est mentionnée
30 dans ces différentes lettres et, en fait, le successeur était censé être les archives de la
31 Fédération de Bosnie-Herzégovine, établies à la suite d'une loi sur les organes
32 ministériels et les organes administratifs adoptée après la conclusion des Accords de
33 Dayton pour en faciliter la mise en oeuvre. C'est seulement à ce moment là qu'on
34 pourra faire la distinction entre les documents civils et les documents militaires compris
35 dans ces archives, lesquelles avaient été constituées en Herceg-Bosna, pour traiter des
36 informations militaires qui devraient être relayées au Ministère de la défense. Ces
37 archives ont été constituées, du moins une loi a été adoptée régissant son
38 fonctionnement mais il n'y a pas encore de Directeur qui ait été nommé, ce qui pose des
39 problèmes supplémentaires. Etant donné que M. Jelavic n'a jamais été partie prenante
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1 dans la constitution de ces archives et ne les connaît pas parce que son travail n'a jamais
2 eu trait à ces archives, il est impossible pour lui de vous donner une description précise
3 de leur contenu. Par ailleurs, le Ministère de la défense ne peut pas être le successeur
4 légal de ces archives. Les archives d'Herceg-Bosna ne sont pas les archives du
5 Ministère de la défense mais bien de la communauté d'Herceg-Bosna qui existait à
6 l'époque. A la lumière de tout ceci, du fait que M. Jelavic n'a jamais eu de fonctions
7 particulières ayant trait à ces archives, je crois qu'il serait opportun, comme l'a souvent
8 demandé M. Jelavic, de demander aux autorités compétentes de la Fédération de
9 Bosnie-Herzégovine et de Bosnie-Herzégovine, aux autorités suprêmes du pays, étant
10 donné que nous parlons ici de la coopération avec le Tribunal de La Haye, de
11 transmettre le nom d'une personne qui serait à même de s'acquitter de ces tches. M.
12 Jelavic est d'avis que la lettre envoyée par le Premier Ministre et citée aujourd'hui par
13 l'Accusation ne suffit pas pour que M. Jelavic prélève ces documents sans autorisation
14 préalable pour les fournir au Tribunal. C'est le problème qui sous-tend les difficultés
15 qu'il a rencontrées dans les mesures qu'il voulait prendre. Il faudrait que ce soit le
16 Conseil des Ministres ou la Présidence qui lui donne l'autorisation permettant la
17 production de ces documents au Tribunal.
18 LE PRESIDENT : Pourquoi M. Jelavic n'est-il pas ici aujourd'hui ?
19 MME GLUMAC : M. Jelavic est tout à fait disposé à comparaître devant le Tribunal. Il a
20 toutefois le sentiment qu'avant de le faire il faudrait régler quelques questions,
21 notamment celle de savoir s'il est autorisé à procéder à toutes ces actions parce qu'en
22 fait les prémisses n'étaient pas bonnes au départ. Vous affirmez qu'il s'agissait
23 d'archives militaires relevant du Ministère de la défense ce qui impliquerait qu'il soit, en
24 tant que Ministre de la défense, désigné comme étant le successeur légal du dépositaire
25 des archives. Il veut que la question de la compétence en matière de ces archives soit
26 réglée. En effet, ces archives n'ont jamais été officiellement transmises à qui que ce soit
27 qui en aurait la possibilité.
28 LE PRESIDENT : Est-ce que M. Jelavic conteste l'autorité du Premier Ministre de lui
29 demander de comparaître ici ?
30 MME GLUMAC : Comme c'est une question très importante, en particulier parce qu'il s'agit
31 de documents de nature militaire et que cela touche à un niveau très élevé de la
32 coopération avec le Tribunal, certains de ces documents ayant aussi une incidence pour
33 la sécurité de l'Etat, M. Jelavic a le sentiment qu'il doit avoir l'autorisation de la
34 Présidence ou du Conseil des Ministres afin de comparaître.
35 LE PRESIDENT : Il a le sentiment que la Présidence de la Fédération de Bosnie-Herzégovine
36 doit l'autoriser à comparaître ? C'est le Conseil des Ministres qui doit lui donner
37 instruction de comparaître ?
38 MME GLUMAC : Ce devrait être un organe qui détermine s'il est autorisé à présenter les
39 documents intéressés dans cette affaire.
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1 LE PRESIDENT : Il s'agit donc de la Présidence de la Fédération de la Bosnie-Herzégovine ?
2 Est-ce bien juste ?
3 LE PRESIDENT : Oui, ou le Conseil des Ministres.
4 LE PRESIDENT : Pouvez-vous nous donner des noms, le nom de la Présidence de la
5 Fédération de Bosnie-Herzégovine ou de membres du Conseil des Ministres.
6 MME GLUMAC : Mme Vidovic vous donnera ces noms puisqu'elle connaît la composition du
7 Conseil des Ministres beaucoup mieux que moi-même.
8 LE PRESIDENT : Si M. Jelavic reçoit des instructions de la Présidence de la Fédération de
9 Bosnie-Herzégovine ou du Conseil des Ministres, est-il disposé alors à comparaître
10 devant le Tribunal ?
11 MME GLUMAC : Oui, bien sûr. Il le fera, il comparaîtra.
12 LE PRESIDENT : Vous avez dit qu'un directeur n'avait pas encore été désigné pour les
13 archives de guerre. Est-ce juste ?
14 MME GLUMAC : Le Directeur des archives de guerre de la communauté croate d'Herceg-
15 Bosna est décédé. Il s'agissait de M. Brkic. C'est lui qui occupait ce poste et, par la
16 suite, aucun successeur encore n'a été désigné à ce poste. Ensuite, cette institution a
17 cessé d'exister puisque la communauté d'Herceg-Bosna a cessé d'exister.
18 LE PRESIDENT : Quand le Directeur est-il décédé ?
19 MME GLUMAC : J'ai ici son acte de décès. Il est décédé le 5 novembre 1996.
20 LE PRESIDENT : Vous avez dit que les archives de guerre n'existaient plus. Où se trouvent
21 ces documents ? Il ne sera pas désigné de nouveau directeur puisque les archives
22 n'existent plus. Qui donc a le pouvoir de décider quoi faire de ces archives ?
23 MME GLUMAC : D'après l'interprétation et la jurisprudence en ce qui nous concerne le
24 successeur légal des archives est sans aucun doute les archives de la Fédération de
25 Bosnie-Herzégovine. Donc, il devrait y avoir transmission des archives vers cette
26 institution, la Fédération de Bosnie-Herzégovine. Le problème est qu'il n'y a pas
27 encore eu de nouveau directeur désigné pour les nouvelles archives de Bosnie-
28 Herzégovine. Il y a des lois qui ont été adoptées prévoyant l'existence de ces archives
29 mais ces lois n'ont pas encore été appliquées. Ce que le Premier Ministre demande dans
30 sa lettre c'est qu'on remette les documents des archives de guerre d'Herceg-Bosna au
31 Ministère de la Bosnie-Herzégovine. Il dit aussi que le Ministère de la défense de la
32 Fédération de Bosnie-Herzégovine n'est pas le successeur légal, que celui-ci est bel et
33 bien le Directeur des nouvelles archives constituées au sein de la Fédération.
34 LE PRESIDENT : A qui rend compte ce nouveau directeur des nouvelles archives de la
35 Fédération de Bosnie-Herzégovine ?
36 MME GLUMAC : Il sera responsable devant la Fédération, devant les organes les plus élevés
37 de la Fédération bien sûr. Il s'agira d'une entité administrative.
38 LE PRESIDENT : Encore une fois la Fédération ? Ou le Conseil des Ministres ?
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1 MME GLUMAC : Je pense qu'il sera responsable devant la Présidence de la Fédération de
2 Bosnie-Herzégovine.
3 LE PRESIDENT : Vous ne savez pas comment sont organisées ces archives, n'est-ce pas ?
4 Les archives de guerre de l'Herceg-Bosna ? Est-ce que vous connaissez ces archives ?
5 Est-ce que vous savez comment ces archives sont organisées ? Où elles se trouvent ?
6 Ce genre de détails pratiques ?
7 MME GLUMAC : Tout ce que je sais, c'est ce qui se trouve dans le texte de loi où il est dit que
8 certains ministères sont chargés de superviser telle ou telle agence. C'est le texte de la
9 loi. Outre cela, je sais que les archives de guerre se trouvaient à Mostar et qu'il n'y a
10 jamais eu de transfert ou de déménagement de ces archives. Comme je l'ai dit, pour ce
11 qui concerne l'organisation proprement dite des archives, je ne sais rien d'autre que ce
12 qui est dit dans le texte de loi.
13 LE PRESIDENT : Vous n'avez jamais visité ces archives ?
14 MME GLUMAC : Non.
15 LE PRESIDENT : Est-ce que M. Jelavic conteste l'autorité du Tribunal, de moi-même, pour ce
16 qui est de le contraindre à comparaître s'il était déterminé que c'est bien lui le dépositaire
17 des documents visés.
18 MME GLUMAC : Non. La seule réaction de sa part a été que l'ordonnance était un peu trop
19 forte dans les termes employés. M. Jelavic estime que l'on devrait suivre la pratique
20 établie, à savoir que si des hauts représentants sont invités à comparaître, ils devraient
21 être invités en des termes un peu plus aimables, sans qu'il soit besoin de recourir à une
22 citation. Cela étant, il ne conteste pas votre compétence.
23 LE PRESIDENT : Veut-il que je lui écrive une lettre personnelle pour l'inviter à comparaître
24 devant le Tribunal ?
25 MME GLUMAC : Je crois qu'il apprécierait. Le problème ne porte pas sur le Tribunal. Le
26 point qu'il conteste c'est la question de savoir s'il a compétence pour faire ce qui lui est
27 demandé. En d'autres termes, si la question de sa compétence est réglée il comparaîtra
28 sans aucun doute devant le Tribunal.
29 LE PRESIDENT : Savez-vous si M. Jelavic connaît la façon dont sont organisées les archives
30 de ce qui était l'Herceg-Bosna ?
31 MME GLUMAC : Pour autant que je sache d'après ce qu'il m'a dit, M. Jelavic n'a pas eu de
32 fonctions le mettant en contact avec les archives. M. Jelavic pense que tous les
33 documents se trouvaient dans les archives et ont été déposés pendant la guerre mais il
34 dit qu'il n'a jamais été en contact avec la gestion de ces archives.
35 LE PRESIDENT : Lorsque ce directeur était en charge des archives, y avait-il aussi un
36 Directeur adjoint ?
37 MME GLUMAC : Pas pour autant que je sache. La seule chose que je sais c'est que ce
38 directeur n'était qu'un directeur par intérim. Il n'était même pas désigné à ce poste de
39 façon opérationnelle à plein temps. Pour autant que je sache, il n'avait pas d'adjoint.
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1 LE PRESIDENT : Qui donc avait le contrôle des archives de guerre de l'Herceg-Bosna ? Qui
2 sait maintenant où se trouvent ces archives ? Qui est responsable de la bonne
3 conservation de ces archives ?
4 MME GLUMAC : Je pense que les archives sont effectivement conservées mais je ne sais pas
5 qui s'en occupe. Tout ce que je sais c'est ce qui m'a été rapporté et je ne suis pas au
6 courant de cet aspect des choses. Les informations que j'ai indiquent que les archives
7 n'ont jamais quitté Mostar.
8 LE PRESIDENT : Merci. Mme Vidovic.
9 MME VIDOVIC : Oui. Je voudrais expliquer quelques points. Comment nous en sommes
10 arrivés au point où M. Jelavic apparaît comme la personne ayant pouvoir en la matière.
11 LE PRESIDENT : Mme Vidovic, poursuivez, je vous en prie.
12 MME VIDOVIC : M. Jelavic était vice-ministre au Ministère de la défense de la communauté
13 d'Herceg-Bosna. Par la suite, il est devenu Ministre de la défense de la Fédération de
14 Bosnie-Herzégovine et c'est le Bureau du Procureur qui a vu en M. Jelavic le
15 successeur légal du dépositaire des archives militaires d'Herceg-Bosna. Je dois ici
16 expliquer plusieurs points de sorte que nous sachions quels sont les documents
17 demandés par le Tribunal et pourquoi M. Jelavic apparaît comme la personne détenant
18 certaines informations utiles quant aux archives d'Herceg-Bosna. L'ordonnance rendue
19 par le Tribunal demande explicitement que les archives de guerre soient remises, par
20 exemple des ordres concernant les opérations menées en Bosnie centrale par le
21 Ministère de la guerre d'Herceg-Bosna ainsi que les comptes rendus adressés au
22 Général Blaskic par Mate Boben ou par l'Etat-major d'Herceg-Bosna ainsi que le
23 Ministère de la défense de la communauté croate d'Herceg-Bosna, etc. En d'autres
24 termes, ce sont là des documents qui tous sont de nature militaire et appartiennent
25 effectivement au domaine de compétence du Ministère de la défense d'Herceg-Bosna.
26 J'ai posé des questions quant à l'endroit où se trouvent ces documents et il m'a été
27 répondu qu'ils étaient en la possession du HVO et qu'ils relevaient effectivement du
28 Ministère de la défense dirigé par M. Jelavic. Ce point n'est pas contestable. Pour ce
29 qui est des archives de la Fédération de Bosnie-Herzégovine, il est vrai que ces archives
30 n'ont pas encore été mises en place. Il n'y a pas eu encore de transfert des archives
31 d'Herceg-Bosna vers les archives de Bosnie-Herzégovine et elles sont toujours en la
32 possession du HVO sous l'autorité de M. Jelavic. Par conséquent, M. Jelavic,
33 effectivement, est la personne qui détient l'autorité nécessaire et il lui est possible de
34 déterminer qui connaît ces archives et qui sait où elles se trouvent ainsi que ce qu'elles
35 renferment. Pour ce qui est du Premier Ministre de la Fédération de Bosnie-
36 Herzégovine, comme vous le savez, la Bosnie-Herzégovine consiste en deux entités,
37 l'une étant la Fédération de Bosnie-Herzégovine dont le Premier Ministre est
38 M. Bicakcic. Vous avez connaissance de sa correspondance avec M. Jelavic.
39 M. Bicakcic occupe un rang supérieur à celui du Ministre de la défense et est la seule
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1 personne ayant l'autorité nécessaire pour donner des instructions à d'autres ministres.
2 C'est ainsi qu'est organisé le Conseil ministériel de Bosnie-Herzégovine. Je crois que
3 cette question doit être réglée dans le cadre du Gouvernement de la Fédération de
4 Bosnie-Herzégovine.
5 LE PRESIDENT : Qu'entendez-vous par cette dernière affirmation, Mme Vidovic ?
6 MME VIDOVIC : Vous voulez dire le dernier point que j'ai évoqué. Ce que je veux dire c'est
7 que M. Bicakcic étant Premier Ministre de la Fédération de Bosnie-Herzégovine a le
8 pouvoir de donner des instructions aux ministres, dont M. Jelavic. Cela étant, le
9 Tribunal peut poser des questions au Premier Ministre ou à tout autre organe de la
10 Fédération de Bosnie-Herzégovine et en attendre une réponse. Que la Fédération de
11 Bosnie-Herzégovine soit autorisée à donner des instructions à M. Jelavic pour qu'il
12 trouve la personne qui connaît les archives et doit comparaître ici, je pense pour ma part
13 que ce serait perdre notre temps que d'essayer de vérifier des faits qui semblent
14 évidents, mais si vous souhaitez aller de l'avant et vérifier ces faits, je n'ai pas
15 d'objection.
16 LE PRESIDENT : Encore une question, Mme Vidovic. Dans la lettre - je crois qu'il s'agit de la
17 pièce n° 10, non la pièce n° 8 - il s'agit d'une lettre adressée par M. Jelavic au Premier
18 Ministre de la Fédération de Bosnie-Herzégovine, au troisième paragraphe, M. Jelavic
19 dit que la citation n'est pas fondée en droit international ni sur le Statut du Tribunal.
20 C'est une lettre du 19 février envoyée par M. Jelavic à M. Bicakcic.
21 MME VIDOVIC : Quelle est votre question, Madame le Juge ?
22 LE PRESIDENT : M. Jelavic dit que seul l'Etat peut décider qui le représentera et où lorsqu'il
23 s'agit de la coopération avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie. Il est
24 représenté par le Gouvernement ou par le Bureau chargé de la coopération avec le
25 Tribunal pénal international et non par de hauts fonctionnaires. Par conséquent, pas par
26 le Ministère de la défense de la Fédération. Alors, qui est chargé de ces questions au
27 Bureau de la coopération pour le Tribunal pénal international ?
28 MME VIDOVIC : C'est moi qui suis le représentant autorisé de la Bosnie-Herzégovine pour les
29 contacts avec le Tribunal pénal international. J'y reviendrai un peu plus en détail et vous
30 présenterai sur ce point les documents pertinents. Je suis donc Ministre Conseiller à
31 l'ambassade de Bosnie-Herzégovine, en application d'une décision rendue par la
32 Présidence de Bosnie-Herzégovine en date du 30 juillet 1994. J'ai été chargée de tout ce
33 qui est contact avec le Tribunal pénal international et cette décision a été publiée au
34 Journal officiel de la Bosnie-Herzégovine le même jour. Ensuite, j'ai reçu une
35 autorisation générale de la part du Premier Ministre de la République de Bosnie-
36 Herzégovine et de la Fédération de Bosnie-Herzégovine en date du 4 juin 1994 afin
37 que je puisse être présente aux audiences lorsque les intérêts de la Bosnie-Herzégovine
38 sont concernés. C'est une décision qui a été communiquée par le Ministre des affaires
39 étrangères de la Bosnie-Herzégovine. Ces documents ont été présentés au Greffe du
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1 Tribunal mais je voudrais présenter une nouvelle fois une copie de ces documents aux
2 fins de l'audience d'aujourd'hui.
3 LE PRESIDENT : Nous recevons ces documents. Ce que je me demande, c'est ce que
4 M. Jelavic entend par le dernier paragraphe de sa lettre. Si je comprends bien votre
5 position, vous estimez que c'est M. Jelavic qui est, effectivement, la personne
6 compétente pour comparaître devant le Tribunal concernant les documents qui ont été
7 demandés dans l'ordonnance de soit-communiqué. Vous avez dit que le Premier
8 Ministre a le pouvoir de donner des instructions à M. Jelavic afin qu'il comparaisse. Or,
9 il me semble que M. Jelavic répond que c'est votre Bureau chargé de la coopération
10 avec le Tribunal qui devrait s'en charger. Vous dites, pour votre part, que c'est lui ou
11 quelqu'un qui connaisse les archives qui devrait comparaître, et que c'est lui qui a le
12 contrôle de ces archives en sa qualité de Ministre de la défense. Or, je crois comprendre
13 qu'il n'obéit pas à l'ordonnance de soit-communiqué et qu'il ne partage pas votre point
14 de vue. Je ne suis pas sûre qu'il comparaîtra si je lui en fait encore une fois l'invitation.
15 M. Harmon.
16 M. HARMON : Madame le Juge, nous en sommes au point où M. Jelavic s'est vu adresser en
17 personne une ordonnance de soit-communiqué, une citation à comparaître, et il n'a pas
18 pris les mesures qui s'ensuivaient. Une ordonnance de soit-communiqué a été rendue le
19 15 janvier. C'est la quatrième audience aujourd'hui. Il a déjà eu trois occasions de
20 comparaître. On lui a aussi demandé d'envoyer un représentant ici au Tribunal qui
21 connaisse où se trouvent les archives et ce qu'elles renferment et qui informe le Tribunal
22 ainsi que le Procureur des mesures prises en vue de faire appliquer l'ordonnance de
23 soit-communiqué. Or, la situation, aujourd'hui, est que nous recevons une déclaration
24 d'un conseil représentant M. Jelavic qui dit, essentiellement, qu'il y a différend quant à
25 la question de savoir si M. Jelavic est successeur ou non des archives. Pour notre part,
26 nous pensons qu'il l'est. Je rappelle aussi la pièce n° 11 qui a été présentée aujourd'hui
27 par laquelle le Premier Ministre informe M. Jelavic qu'il est toujours en possession des
28 archives. Le conseil de M. Jelavic nous dit aujourd'hui que le dépositaire des archives
29 étant décédé en novembre 1996, la question ne peut pas aller plus loin, or, nous savons
30 de façon certaine que les archives existent. M. Jelavic sait où se trouvent ces archives
31 qui contiennent des documents demandés dans l'ordonnance de soit-communiqué. Je
32 n'ai qu'une chose à dire aujourd'hui, Madame le Juge, à M. Jelavic à travers son
33 conseil, c'est que nous souhaiterions savoir quelles sont les mesures qui ont été prises
34 pour appliquer l'ordonnance du 15 janvier 1997. J'estime que, encore une fois,
35 aujourd'hui, on essaie d'éviter d'exécuter l'ordonnance de soit-communiqué et que l'on
36 masque la véritable question. Cette ordonnance était adressée de façon précise à M.
37 Jelavic. M. Jelavic n'a pas comparu. Son représentant n'est pas disposé à nous dire
38 quelles sont les mesures qui ont été prises pour faire appliquer l'ordonnance de soit-
39 communiqué. Je crois que c'est là que nous en sommes aujourd'hui.
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1 LE PRESIDENT : Je comprends où nous en sommes. Ce que je voudrais savoir de votre part,
2 M. Harmon, c'est ce que vous proposez que je fasse.
3 M. HARMON : Je propose, Madame le Juge, que le Tribunal constate que M. Jelavic est le
4 successeur du dépositaire des archives centrales, qu'il a encore une fois manqué à son
5 obligation de communiquer au Tribunal les renseignements demandés et de produire au
6 Bureau du Procureur les documents énumérés dans l'ordonnance de soit-communiqué,
7 qu'il a également manqué à son obligation de désigner un représentant qui aurait pu
8 comparaître et dire exactement où se trouvent les archives, ce qui s'y trouvent et les
9 mesures prises pour faire appliquer l'ordonnance de soit-communiqué et qu'en
10 manquant à ses obligations en vertu des ordonnances rendues, M. Jelavic s'est opposé
11 à la bonne poursuite de l'enquête dans l'affaire Blaskic; que, pour cette raison, M.
12 Jelavic soit déclaré coupable d'outrage au Tribunal et s'il ne comparaît pas nous
13 demanderions au Tribunal de rendre un mandat d'arrêt à l'encontre de M. Jelavic.
14 LE PRESIDENT : Le Premier Ministre dit dans sa lettre en date du 24 février adressée à
15 M. Jelavic en sa qualité de ministre de la défense, au dernier paragraphe où il énumère
16 la question des archives d'Herceg-Bosna : "Etant donné que les documents relèvent de
17 questions de défense, étant donné aussi qu'en qualité de ministre fédéral de la défense,
18 vous êtes en mesure d'être le mieux instruit sur la question, j'estime que les questions et
19 les raisons n'existent pas qui mériteraient une suspension des obligations qui vous
20 incombent à la suite de l'ordonnance rendue par le Tribunal international et je vous
21 enjoins d'honorer ces obligations découlant de l'ordonnance". Merci, M. Harmon.
22 Mme Glumac, avez-vous une réponse à formuler à l'encontre de la proposition faite par
23 l'Accusation sur la marche à suivre étant donné que M. Jelavic n'a pas comparu et qu'il
24 n'a pas dépêché un représentant qui connaisse la nature et l'emplacement des archives ?
25 MME GLUMAC : Madame le Juge, je pense que le fait que de l'avis de M. Jelavic il n'est pas
26 la personne compétente pour gérer la question des archives, qu'il n'a pas non plus
27 l'autorisation des autorités les plus élevées de la Fédération, plutôt que de parler de son
28 intention de masquer la question ou de ne pas s'acquitter des obligations qui lui
29 incombent, vous venez de citer un passage. Je crois que même M. Bicakcic, le Premier
30 Ministre, a reconnu que les archives de la Fédération de Bosnie-Herzégovine ne sont
31 pas en fait le successeur légal des archives d'Herceg-Bosna. Cela revient à dire que le
32 Premier Ministre lui-même, dans son deuxième paragraphe, était d'accord avec M.
33 Jelavic pour dire que celui-ci n'était pas le successeur légal du dépositaire des archives.
34 Le Premier Ministre demande à M. Jelavic de participer à l'exécution de ces mesures,
35 notamment au transfert des archives. Le tout, semble-t-il, est de savoir qui a l'autorité,
36 qui a la compétence, plutôt que de savoir si M. Jelavic n'avait pas l'intention de
37 répondre aux injonctions de ce Tribunal. Je propose donc de ne pas accepter les
38 propositions faites par l'Accusation.
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1 LE PRESIDENT : Mais, est-ce que le Premier Ministre ne dit pas lui-même, tout en étant
2 d'accord avec la conclusion tirée par M. Jelavic, que les archives de la Fédération sont
3 le successeur légal des archives d'Herceg-Bosna. Il sait que l'organisation n'existe pas
4 encore au niveau de la Fédération de Bosnie-Herzégovine. Il poursuit en disant que,
5 puisque le Directeur des archives n'a jamais été désigné et conformément aux
6 dispositions juridiques susmentionnées, les archives n'ont pas encore commencé à
7 fonctionner, ce qui veut dire que les documents et les différentes pièces n'ont jamais été
8 transmises de façon idoine aux archives de la Fédération de Bosnie-Herzégovine par les
9 archives d'Herceg-Bosna. Etant donné tout ceci et que les documents relèvent de la
10 défense et qu'en qualité de ministre fédéral de la défense M. Jelavic est le mieux à même
11 de connaître la question, il est de l'avis du Premier Ministre qu'il n'y a pas de raison de
12 suspendre l'ordonnance du Tribunal. Le Premier Ministre dit par conséquent à son
13 subordonné qu'il est responsable de ces documents parce qu'il s'agit de documents
14 relatifs à des questions de défense. Apparemment, il y a absence d'archives, il n'y a pas
15 de directeur pour ce qui est des archives de la Fédération de Bosnie mais le Premier
16 Ministre dit qu'en dépit de tout cela, étant donné que les documents demandés relèvent
17 de la défense, c'est M. Jelavic qui a autorité en la matière. Et là, M. Jelavic n'est pas
18 d'accord. Il conteste qu'il ait l'autorité voulue.
19 MME GLUMAC : Toutefois, Madame le Juge, on dit aussi ici que c'est seulement à partir de
20 maintenant que M. Jelavic devrait prendre cette responsabilité et participer à la
21 transmission des archives d'Herceg-Bosna aux archives de la Fédération de Bosnie-
22 Herzégovine. Il dit, en d'autres termes, que jusqu'à présent M. Jelavic n'avait pas
23 l'autorité voulue sur ces documents mais que désormais M. Jelavic devrait prendre en
24 main cette question. En effet, je crois comprendre que ces archives n'étaient pas du
25 ressort du Ministère de la défense d'Herceg-Bosna. C'était plutôt une espèce d'archives
26 de la communauté tout entière. Mais le Premier Ministre ordonne désormais à son
27 ministre de la défense d'assurer la transmission de ces documents ou du moins d'en être
28 responsable. Ce n'est donc pas en raison de l'absence d'un directeur qu'il le fait mais il
29 lui dit maintenant de s'occuper de ces documents. Ceci ne signifie pas non-exécution de
30 l'ordonnance. Le Premier Ministre fait comprendre que toute la question de la
31 succession légale n'avait pas été jusqu'à présent résolue. Ces archives existent. Elles
32 ont été constituées par une loi mais il n'y a jamais eu à cette date de directeur de ces
33 archives et nous parlons pour la première fois d'une autorisation qui permettrait à M.
34 Jelavic d'être dépositaire de ces documents provenant des anciennes archives d'Herceg-
35 Bosna.
36 LE PRESIDENT : M. Jelavic reconnaît l'autorité que lui confère M. Bicakcic, premier ministre,
37 qui lui enjoint d'assurer la responsabilité de ces documents provenant des archives
38 d'Herceg-Bosna. Puisque le successeur légitime des archives d'Herceg-Bosna était les
39 archives de Bosnie-Herzégovine, il n'y a toujours pas de directeur mais le Premier
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1 Ministre demande à son Ministre de la défense, M. Jelavic, de s'occuper des documents
2 dans ces archives relevant de la défense. C'est comme cela que je vous ai compris,
3 Madame.
4 MME GLUMAC : Oui, c'est ce qu'il dit ici. Il autorise M. Jelavic à assurer le contrôle de ces
5 documents à partir de maintenant. Comme le disait Mme Vidovic, il n'a jamais été dit
6 qu'il y ait de façon séparée les archives de guerre de la communauté d'Herceg-Bosna
7 qui seraient des archives exclusivement militaires.
8 LE PRESIDENT : Mais M. Jelavic reconnaît-il l'autorité qu'a M. Bicakcic, son Premier
9 Ministre, de lui enjoindre de s'occuper de ces documents qui relèvent de questions de
10 défense ?
11 MME GLUMAC : Tout ce que je sais c'est ce que je vous ai déjà dit, à savoir que les autorités
12 compétentes de la Fédération de Bosnie-Herzégovine ont été priées de rendre une
13 décision en matière de compétence. Si ces autorités confirment cette lettre nous ne
14 devrions plus avoir de problème.
15 LE PRESIDENT : Mais de qui parlez-vous quand vous parlez de ces autorités ? Qui devrait
16 confirmer la décision prise par le Premier Ministre, M. Bicakcic ? Pourriez-vous
17 préciser la position et le nom de ces différentes personnes représentant ces autorités ?
18 MME GLUMAC : Il y a la Présidence ou le Conseil ministériel mais ma collègue pourra sans
19 nul doute vous fournir les coordonnées complètes. Je ne connais pas exactement la
20 composition du Conseil ministériel. Je pense qu'il y a trois membres mais je n'en suis
21 pas très sûre. Mais nous pourrons vous en fournir les noms.
22 LE PRESIDENT : Mme Vidovic nous a dit que le Premier Ministre dispose de cette autorité.
23 Elle nous a dit qu'il n'était pas nécessaire d'aller plus loin, alors que, manifestement,
24 vous n'êtes pas d'accord avec les propos de Mme Vidovic.
25 MME GLUMAC : Mme Vidovic a également déclaré que mes affirmations peuvent être
26 corroborées.
27 LE PRESIDENT : Mme Vidovic ?
28 MME VIDOVIC : J'ai dit, sans aucune ambiguté, que le Premier Ministre de quelque
29 gouvernement que ce soit a autorité de donner des instructions à des ministres
30 constituant son gouvernement, ce qui veut dire que M. Bicakcic est, en tout état de
31 cause, habilité à remettre des instructions à l'un quelconque de ses ministres dont, par
32 exemple, M. Jelavic.
33 LE PRESIDENT : M. Harmon, que nous proposez- vous comme marche à suivre, puisqu'il y
34 a manifestement divergence d'avis quant à l'autorité que détient le Premier Ministre ou
35 pensez-vous que ceci ait une importance quelconque par rapport à l'ordonnance et M.
36 Jelavic ?
37 M. HARMON : Si je voulais attendre que le litige politique soit résolu je serais peut-être ici
38 jusqu'après l'ouverture du procès. Cette ordonnance donnait des instructions très
39 directes et très précises à M. Jelavic. On ne demandait pas que soit désigné un
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1 représentant qui précise où se trouvent ces archives ou sa teneur ou pour informer le
2 Tribunal des mesures prises depuis février 1997 pour faire exécuter l'ordonnance. Je
3 suppose que ma collègue pose des questions qui n'ont pas un rapport direct avec
4 l'ordonnance que vous avez rendue veillant à ce que M. Jelavic comparaisse en
5 personne ou par le biais d'un représentant. Je vous ai remis une pièce dont je ne
6 souviens plus du numéro, mais il s'agissait d'une lettre formulée par le Premier
7 Ministre en date du 21 février 1997 et adressée à M. Jelavic lui demandant de se
8 conformer aux obligations formulées par le Tribunal. M. Jelavic devait donc s'acquitter
9 de ses obligations. Cette requête a été réitérée par son Premier Ministre. Le seul fait du
10 décès du dépositaire de ces archives n'a pas fait disparaître les archives pour autant. Le
11 Conseil semble dire que les archives n'ont pas été déménagées et nous avons vraiment
12 le droit de savoir quelles sont les mesures qui ont été prises pour faire exécuter cette
13 ordonnance de soit-communiqué. Puisque je n'ai pas reçu le moindre document je
14 suppose que rien n'a été entrepris pour veiller à la bonne exécution de cette ordonnance
15 de soit-communiqué. Votre question était tout à fait pertinente. Qui détient les clefs de
16 ces archives ? Si M. Jelavic nous dit qu'il n'a pas un contrôle effectif de ces archives,
17 de notre côté nous avons été informés par le représentant de la Fédération et par le
18 Gouvernement de la Bosnie-Herzégovine que c'est M. Jelavic qui en est le successeur
19 légal. La pièce n° 11 que je vous ai transmise aujourd'hui montre que le Premier
20 Ministre dit lui-même que ces documents n'ont pas été transférés aux nouvelles archives
21 de Bosnie-Herzégovine et, à l'évidence, M. Jelavic - du moins à notre avis - détient le
22 contrôle effectif de ces archives. N'oublions pas qu'à une audience précédente, en
23 réponse à l'ordonnance de soit-communiqué, mais cela aurait pu être aussi en réponse à
24 une demande de coopération, la demande que nous avons faite le 2 mai 1996, nous
25 avions reçu 11 documents qui devaient bien venir de quelque part. J'estime dès lors
26 qu'il y a non-exécution à ce jour de l'ordonnance de soit-communiqué. M. Jelavic a eu
27 quatre fois l'occasion de s'acquitter de ses obligations. Je rappelle et je réitère ma
28 demande.
29 LE PRESIDENT : Ce qui me préoccupe, Mme Glumac, c'est que dans la lettre de M. Jelavic en
30 date du 19 février, celui-ci nous dit que seul un Etat a le droit de décider qui va le
31 représenter. S'agissant de la coopération avec le Tribunal il est représenté par son
32 gouvernement, plus précisément par le Bureau de coopération avec le Tribunal pénal
33 international et non pas ses représentants officiels, donc pas par le Ministre de la
34 défense. Pour moi, à la lecture, c'est le Bureau de coopération avec le Tribunal qui est
35 responsable de la coopération avec ledit Tribunal. Mme Vidovic nous a dit que
36 M. Jelavic devrait exécuter l'ordonnance. C'est bien ce que lui a dit son Premier
37 Ministre. Si j'étais censée accepter la position qu'il formule dans sa lettre du 19 février,
38 M. Jelavic, sans nul doute, connaît la position qu'a prise Mme Vidovic en qualité de
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1 Ministre Conseiller dans le cadre du Bureau de coopération. Je crois que Mme Vidovic
2 elle-même a eu un contact avec lui. Est-ce bien exact, Madame ?
3 MME VIDOVIC : Tout à fait.
4 LE PRESIDENT : M. Jelavic connaît donc sa propre position. Donc, s'il reconnaît la qualité
5 qu'aurait ce Bureau de coopération, celui-ci lui a également enjoint de coopérer.
6 MME GLUMAC : Madame le Juge, par ailleurs, je rappelle ce que je vous disais à l'instant. La
7 plupart des documents sont des documents secrets, des secrets d'Etat. Certains portent
8 sur la sécurité de l'Etat. Le sentiment de M. Jelavic est qu'étant donné la nature de ces
9 documents il aurait besoin d'une autorisation supplémentaire pour les transmettre.
10 LE PRESIDENT : Nous avons une disposition qui répond à une telle situation, règle qui
11 permet, s'agissant de documents qui pourraient être des secrets d'Etat ou avoir une
12 incidence sur la sécurité d'Etat, un examen à huis clos par les juges qui pourraient se
13 prononcer sur la nature de ces documents. En vertu de cet article, je suis tout à fait
14 disposée à examiner les documents si c'est cela l'inquiétude que ressent M. Jelavic
15 mais il dit que c'est le Bureau de coopération avec le Tribunal qui est responsable.
16 Mme Vidovic du Bureau de coopération lui a demandé de venir. Il ne veut pas entendre
17 ce que lui dit le Bureau de coopération, il ne veut pas entendre ce que lui dit le Premier
18 Ministre, il ne veut pas non plus entendre ce que je lui dis par le biais de cette
19 ordonnance. Alors, je ne sais pas comment on peut le faire venir devant le Tribunal.
20 Vous aviez dit que si je lui rédigeais une lettre, si je lui parlais en termes moins
21 vigoureux, il serait prêt à venir. Je pourrais peut-être formuler une lettre en sus de
22 l'ordre que je vais rendre, peut-être que cela va l'encourager à venir.
23 MME GLUMAC : J'aimerais simplement ajouter, Madame, qu'il y a peut-être eu erreur
24 d'interprétation. En dépit de la lettre qui indique que le Bureau de coopération avec le
25 Tribunal est autorisé à travailler avec le Tribunal, M. Jelavic voulait dire aussi que
26 toutes les activités d'Etat entreprises à l'égard du Tribunal passent par ce Bureau. Il ne
27 voulait pas faire preuve d'un manque de respect. Ce n'est pas lui en tant que particulier
28 qui était responsable. C'est ce qu'il voulait dire. Il ne voulait pas ici manquer de respect
29 à l'égard de décisions ou de mesures prises par Mme Vidovic, ni par vous-même,
30 Madame.
31 LE PRESIDENT : M. Jelavic n'a pas comparu et je crois qu'il aurait été utile qu'il le fasse,
32 qu'il réponde aux questions que j'aurais voulu lui poser à l'égard de ses devoirs, de la
33 connaissance qu'il a des archives. Vous n'êtes pas manifestement un représentant dans
34 ce sens-là et ce qu'il dit dans sa lettre c'est que lui non plus n'est pas un représentant
35 mais nous avons plusieurs lettres écrites par le Premier Ministre qui demande à M.
36 Jelavic de comparaître devant nous. Si comparution il devait y avoir, je pourrais savoir
37 quelles sont les responsabilités de M. Jelavic en l'interrogeant mais il faut d'abord qu'il
38 vienne en tant que directeur de ces archives. Même si le Premier Ministre se trompait
39 pour ce qui est du contrôle effectif ou de la détention de ces documents, de toute façon
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1 le Premier Ministre lui a demandé de comparaître et, pour moi, le Premier Ministre est la
2 personne compétente pour ce qui est de l'exercice des obligations de l'Etat au titre de
3 l'article 29, notamment du Règlement mais aussi d'autres articles ou règles du Statut et
4 il y a eu coopération de la part du Premier Ministre qui a demandé à son Ministre de la
5 défense de comparaître. Il me semble que ce dernier n'a pas exécuté les ordres qu'il a
6 reçus de son Premier Ministre, pas plus qu'il n'a exécuté l'ordonnance de soit-
7 communiqué. Y a-t-il d'autres éléments à présenter de part et d'autre. Si ce n'est pas le
8 cas, je vais étudier la question et je rendrais une ordonnance aujourd'hui peut-être ou
9 lundi, mais je ne pense pas que M. Jelavic comparaisse jamais quelle que soit la façon
10 dont nous le lui demandons. C'est malencontreux parce qu'il faudrait quand même
11 résoudre cette question des documents que nous avons exigés par le biais de
12 l'ordonnance. Nous allons suspendre la séance.
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