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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL AFFAIRE N° IT-95-14-T
2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE
3 Mardi 26 août 1997
4 L'audience est ouverte à 10 heures.
5 M. le Président. - Madame le Greffier, voulez-vous faire entrer
6 l'accusé, s'il vous plaît.
7 (L'accusé est introduit dans la salle d'audience).
8 M. le Président. - Monsieur Blaskic, m'entendez-vous ?
9 M. Blaskic (interprétation). - Bonjour Messieurs les Juges, je
10 vous entends fort bien.
11 M. le Président. - Vos conditions de détention se déroulent-
12 elles convenablement ?
13 M. Blaskic (interprétation). - Oui, je suis bien. Tout va très bien, merci.
14 M. le Président. - Tout le monde m'entend ? Le bureau du
15 Procureur, le bureau de la défense ?
16 M. Hayman (interprétation). - Je vous entends fort bien, bien
17 que je ne vois pas la transcription de nos propos sur l'écran.
18 M. le Président. - Vous avez tout à fait raison ; tout ne va
19 donc pas si bien que cela. Avant de commencer, il faudrait revoir le
20 problème de la transcription. Pensez-vous qu'il y en a pour longtemps ? Il
21 n'est pas convenable pour les juges de rester sur le siège aussi
22 longtemps. Nous allons suspendre la séance quelques minutes pour ne pas
23 rester et vous nous ferez savoir quand tout fonctionnera.
24 Je suis désolé, nous suspendons la séance.
25 (Suspendue à 10 h 10, la séance est reprise 10 h 20).
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1 M. le Président. - L’audience est reprise. Madame le Greffier,
2 tout fonctionne, nous allons le vérifier ?
3 Mme le Greffier. - Oui, je crois que tout fonctionne.
4 M. le Président. - Bien. Monsieur le Procureur, c’est Monsieur Kehoe ?
5 M. Kehoe (interprétation). - Oui, bonjour,
6 Monsieur le Président. Bonjour, Messieurs les Juge. L'accusation cite
7 Edin Beso à la barre, avec l'aide de Monsieur l'Huissier afin de permettre
8 à M. Beso d'entrer dans le prétoire.
9 M. Hayman (interprétation). - Une question d'intendance,
10 Monsieur le Président, en attendant l'arrivée du témoin. Le Tribunal a dit
11 à la défense qu’elle devait fournir toute la déclaration de Rémi Landry
12 qu’elle devrait verser au dossier. J'en dispose ; je vais la présenter au
13 Greffe. Il s’agit d’un document de douze pages. Cela vous est soumis étant
14 donné l’objection soulevée hier par l'accusation.
15 M. le Président. - Je crois que nous l'avons accepté comme pièce
16 dans son ensemble, me semble-t-il ? Monsieur Harmon ?
17 M. Harmon (interprétation). - Oui, Monsieur le Président.
18 M. le Président. - Il n’y a plus de problème sur ce plan-là ?
19 M. Harmon (interprétation). - La pièce est en règle, Monsieur le Président.
20 M. le Président. - Il faudra simplement en assurer la
21 traduction, Madame Fauveau ?
22 Mme le Greffier. - La pièce est en anglais.
23 M. le Président. - C’est bien pour cela que je demande si on
24 pourra en assurer la traduction en français.
25 Mme le Greffier. - Oui, je crois qu’on le pourra.
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1 M. le Président. - Je suis même sûr qu’on le pourra. Je vous le
2 rappelle.
3 Mme le Greffier. - Oui, Monsieur le Président.
4 M. le Président. - D’accord. Monsieur Kehoe, M. Edin Beso est
5 programmé pour 10 heures 30.
6 M. Kehoe (interprétation). - Oui, Monsieur le Président.
7 M. le Président. - Donc vous pouvez, avec l’aide de
8 Monsieur l’Huissier, aller chercher le témoin.
9 (Le témoin est introduit dans la salle d'audience.)
10 Monsieur Beso, m’entendez-vous ?
11 M. Beso (interprétation). - Oui, Monsieur le Président.
12 M. le Président. - Pouvez-vous me dire qui vous êtes ?
13 M. Beso (interprétation). - Je m’appelle Edin Beso. Je suis né
14 le 23 mai 1971.
15 M. le Président. - Cela me suffit, vous aurez à répéter ces
16 réponses-là auprès du Procureur qui vous a fait citer. Je vous demande de
17 lire la déclaration que vient de vous tendre l'Huissier. Pouvez-vous lire
18 le document qui est dans votre main droite dans votre langue ?
19 M. Beso (interprétation). - Je déclare solennellement que je
20 dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
21 M. le Président. - Je vous remercie, Monsieur Beso. Maintenant,
22 vous pouvez vous asseoir.
23 Vous êtes devant le Tribunal pénal international. Vous avez été
24 cité comme témoin, par M. le Procureur qui va d'abord vous interroger.
25 Puis vous subirez ensuite un contre-interrogatoire de la part de la
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1 défense. Vous devez parler sans crainte. Vous n'avez aucune crainte à
2 avoir, vous êtes devant des Juges. Voilà ce que les Juges voulaient vous
3 dire avant de commencer.
4 Monsieur le Procureur, c'est votre témoin, vous pouvez donc commencer.
5 M. Kehoe (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur le Président.
6 Monsieur Beso, vous vous êtes présenté. Vous avez déjà donné
7 votre date de naissance. Voudriez-vous la répéter ?
8 M. Beso (interprétation). - Je suis né le 23 mai 1971, à Sarajevo.
9 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur Beso, où avez-vous passé
10 l'essentiel de votre vie, dans quelle municipalité ?
11 M. Beso (interprétation). - J'ai passé l'essentiel de ma vie à Vitez.
12 M. Kehoe (interprétation). - Dans quelle partie de Vitez ?
13 M. Beso (interprétation). - Pendant un certain temps, j'ai vécu
14 à Stari Vitez, la vieille ville. A partir de 1982, j'ai vécu à Rijeka, un
15 autre quartier de Vitez.
16 M. Kehoe (interprétation). -Vous êtes musulman, Monsieur Beso ?
17 M. Beso (interprétation). - Oui.
18 M. Kehoe (interprétation). - A Rijeka, la population était-elle
19 mixte, ou bien musulmane, ou croate ? Dites aux Juges dans quelle type de
20 communauté vous habitiez ?
21 M. Beso (interprétation). - Rijeka était en fait un quartier à
22 population mixte. Il y avait beaucoup de Croates, de Serbes, de Musulmans
23 qui y vivaient. A proximité vivaient aussi des Tziganes. C'était donc une
24 population composite.
25 M. Kehoe (interprétation). - Je vous demanderai de regarder à
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1 votre gauche, sur le chevalet. Monsieur, une fois de plus,
2 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, vous avez une photographie de
3 la pièce de l’accusation 56. En consultation avec Madame Fauveau, je
4 demande s'il s'agit bien maintenant de la pièce 56b ?
5 Mme le Greffier. - Oui, il s'agit de la pièce 56b.
6 M. Kehoe (interprétation). - Si vous me le permettez,
7 Monsieur le Président, je demanderai à Monsieur Beso de prendre le feutre
8 rose, qui se trouve sur la table, de s'approcher du chevalet et d’entourer
9 d’un cercle rose la maison où il habitait. Monsieur le Président, puis-je
10 m’approcher également du chevalet ?
11 M. le Président. - Oui, Monsieur Kehoe.
12 M. Beso (interprétation). - Voici Rijeka, voici la maison où j'habitais.
13 M. Kehoe (interprétation). - Vous avez donc entouré la maison où
14 vous habitiez sur la carte, d'un cercle rose ?
15 M. Beso (interprétation). - Oui.
16 M. Kehoe (interprétation). - Je vous demande maintenant de prendre le
17 feutre vert pour délimiter, de façon approximative, ce quartier de Rijeka.
18 Il ne faut pas que ce soit exact, c'est pour avoir une idée approximative
19 de l'emplacement de ce quartier. Pourriez-vous repasser sur la ligne pour
20 que ce soit visible pour les Juges ? Oui, comme ça, cela va très bien.
21 M. Beso (interprétation). - Ce n'est peut-être pas très précis,
22 mais enfin je crois que c'est à peu près cela.
23 M. Kehoe (interprétation). - C'est donc, grosso modo, la
24 délimitation du quartier.
25 M. Beso (interprétation). - Oui.
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1 M. Kehoe (interprétation). - Je vais vous demander de vous reculer et avec
2 l'aide du pointeur d'indiquer où se trouve Kruscica, sur la carte.
3 M. Beso (interprétation). - C'est ici.
4 M. Kehoe (interprétation). - Merci beaucoup, Monsieur Beso. Vous
5 pouvez vous rasseoir.
6 M. Beso (interprétation). - Merci.
7 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur Beso, une fois de plus, en
8 quelle année votre famille a-t-elle déménagé dans cette maison, située
9 dans le quartier de Rijeka ?
10 M. Beso (interprétation). - En 1982.
11 M. Kehoe (interprétation). - Je n'ai pas entendu la traduction.
12 (L’Interprète répète la traduction.)
13 Monsieur Beso, lorsque vous viviez ex-Yougoslavie y avait-il une
14 obligation qui fait que vous deviez servir, à partir d'un certain âge,
15 dans la JNA ?
16 M. Beso (interprétation). - Oui.
17 (Me Kehoe ne semble pas recevoir la traduction.)
18 M. Kehoe (interprétation). - Le problème est réglé, merci.
19 Que devait faire chaque homme qui faisait son service dans
20 l'armée populaire yougoslave ?
21 M. Beso (interprétation). - Il y avait donc cette obligation en
22 vigueur. Si un homme était en bonne santé, il recevait ses papiers. Il
23 était conscrit et il devait être affecté à une base où il faisait douze
24 mois de service militaire.
25 M. Kehoe (interprétation). - Vous avez fait votre service dans
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1 la JNA, Monsieur Beso ?
2 M. Beso (interprétation). - Oui.
3 M. Kehoe (interprétation). - Quand avez-vous commencé ce service
4 et quand l’avez-vous terminé ?
5 M. Beso (interprétation). - J'ai commencé mon service dans la
6 JNA le 18 mars 1990 et je suis revenu le 18 mars 1991.
7 M. Kehoe (interprétation). - Cette expérience de service dans la
8 JNA était-elle pareille à celle que tout homme en bonne santé aurait pu
9 faire dans les années 80 lors de son service ou auparavant ?
10 M. Beso (interprétation). - Sans doute. C'était sans doute la
11 même expérience.
12 M. Kehoe (interprétation). - Lorsque vous êtes arrivé dans l'armée
13 populaire yougoslave, vous a-t-on d'abord fait subir une formation
14 avant l'armée ?
15 M. Beso (interprétation). - Oui, j'ai subi une formation.
16 M. Kehoe (interprétation). - Pourriez-vous parler aux Juges du
17 type de formation que vous avez reçue ?
18 M. Beso (interprétation). - J'ai reçu cette formation en
19 Vojvodine, près de Subotica, dans la ville de Senta . Quand je suis arrivé
20 à la caserne, nous avons été accueillis. Nous avons reçu les uniformes et
21 tout ce dont nous avions besoin. Puis nous avons eu besoin d'une certaine
22 période pour nous adapter à la vie de caserne. Nous avons reçu une
23 formation militaire de base, c'était la routine habituelle pour des
24 recrues, comment saluer les officiers.
25 Je me trouvais dans les services techniques, les services mécaniques de
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1 l'infanterie. Je n'ai donc pas eu vraiment une formation très longue en
2 infanterie, juste cinq ou six jours. Par la suite, nous avons reçu une
3 formation mais en classe, comment réparer un fusil par exemple.
4 M. Kehoe (interprétation). - Les soldats d'infanterie et
5 d'artillerie bénéficiaient-ils d'une formation supplémentaire ?
6 M. Beso (interprétation). - A ma connaissance, leur formation
7 durait plus longtemps. Ma formation a duré deux mois et vingt-deux jours,
8 alors que la leur était de six mois.
9 M. Kehoe (interprétation). - Une fois la formation terminée,
10 quelle fonction avez-vous dû remplir dans la JNA ?
11 M. Beso (interprétation). - Je suis allé en Macédoine dans la
12 ville de Bitoj où je travaillais à l'entretien, à la réparation d'armes
13 d'infanterie, et j'y suis resté jusqu'à la fin de mon service, le
14 8 mars 1991 où je suis rentré à la maison.
15 M. Kehoe (interprétation). - Cela veut dire que vous êtes rentré à Rijeka ?
16 M. Beso (interprétation). - Oui, et de retour à Rijeka, en 1991 ?
17 M. Beso (interprétation). - De retour à la maison, qu'avez-vous
18 alors fait ? Avez-vous commencé à vous intéresser à la politique, aux
19 affaires gouvernementales ? Qu'avez-vous fait ?
20 M. Beso (interprétation). - Non, je ne m'intéressais pas du tout
21 à la politique. Je voulais simplement reprendre la vie que j'avais avant
22 l'armée. Il était naturel que je n'aie pas d'emploi à ce moment-là.
23 J'avais terminé l'école, je faisais un petit peu de travail à la maison,
24 un peu de d'agriculture, je sortais. Je fréquentais les cafés à Vitez, à
25 Travnik, à Novi Travnik, Busovaca. C'est ainsi que je passais ma vie.
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1 M. Kehoe (interprétation). - Aviez-vous également des activités sportives ?
2 M. Beso (interprétation). - Oui, pendant un certain temps, et même avant
3 d'aller à l'armée. Il y avait le club de football de Vitez et j'y jouais
4 mais j'ai été blessé et j'ai dû abandonner.
5 M. Kehoe (interprétation). - Pourriez-vous expliquer la vie que vous aviez
6 à Vitez ? Avec qui viviez-vous et occupiez-vous cette maison à Rijeka.
7 M. Beso (interprétation). - Mes parents étaient divorcés. Mon
8 père a continué à vivre à Sarajevo où nous avions vécu jusqu'alors et,
9 moi, je suis rentré à Vitez avec ma mère et mon frère. J'étais tout petit
10 quand nous sommes revenus. Nous avons vécu pendant quatre ans à Stari
11 Vitez, puis à Rijeka où mon père avait construit une maison pour nous.
12 Nous y vivions, mon père envoyait de l'argent régulièrement. Mon frère et
13 moi-même avons été à l'école. Ma mère n'était pas employée à l'extérieur.
14 Après avoir terminé nos études, quand mon frère est revenu du service
15 militaire dans la JNA, il a obtenu un emploi dans la mine à Zenica. Il y a
16 travaillé et la vie a été un peu plus facile à ce moment- là. C'est à peu
17 près tout. Mais aussi, à proximité, il y avait deux maisons occupées par
18 des parents. J'avais une tante qui habitait dans une de ces maisons ; mon
19 oncle était décédé avant la guerre. Je ne sais plus quand il est mort.
20 Mais aussi, dans le quartier, il y avait une tante. Mon oncle paternel
21 était mort dans un accident avant la guerre et nous tous avions vraiment
22 des liens familiaux très unis. Juste avant la guerre, la mère de ma mère
23 est venue nous rendre visite. Elle était invalide et elle est restée chez
24 nous. Elle a vécu avec nous jusqu'à sa mort. Ma tante est allée en Suisse,
25 juste avant la guerre. Elle nous a donc quitté en nous laissant sa maison
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1 et tout ce dont elle disposait à l'époque. Elle avait une vache, nous avons
2 continué à nourrir la vache et à la traire.
3 M. Kehoe (interprétation). - Et lorsque la guerre éclate, vous vivez
4 dans cette même maison avec votre mère, votre grand-mère et votre frère ?
5 M. Beso (interprétation). - C'est exact.
6 M. Kehoe (interprétation). - Passons à 1992. La guerre éclate. A
7 ce moment-là, vous rejoignez les rangs de l'armée de Bosnie-Herzégovine ?
8 M. Beso (interprétation). - Ma situation était assez
9 particulière, j'étais plus jeune que mon frère. Mon frère a tout de suite
10 participé à la Défense territoriale, c'est ainsi qu'on l'appelait à ce
11 moment-là, moi je continuais à aider à la maison. Ma grand-mère était
12 invalide, je suis donc resté près d'elle et près de ma mère. Par la suite,
13 j'ai rejoins l'armée de Bosnie-Herzégovine, mais je ne sais plus quand.
14 M. Kehoe (interprétation). - Cela s'est-il passé en 1992 ?
15 M. Beso (interprétation). - Oui.
16 M. Kehoe (interprétation). - Et quelle fonction avez-vous occupé
17 lorsque vous vous êtes trouvé dans l'armée de Bosnie-Herzégovine ?
18 M. Beso (interprétation). - J'ai demandé au commandant de m'affecter à une
19 tâche qui ne m'obligerait pas à rester loin de la maison trop souvent, car
20 je devais faire beaucoup de choses à la maison. Il était normal que je
21 vaque à ces occupations-là aussi. Chez nous, en Bosnie-Herzégovine, quand
22 la guerre a éclaté, la télévision était surtout contrôlée par les Serbes de
23 Bosnie, ce qui veut dire que de Rijeka à Kruscica, il y avait une station
24 relais qui permettait de recevoir la télévision de Sarajevo. Mes supérieurs
25 m'ont donné pour ordre de veiller au bon fonctionnement de cette station
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1 relais. J'y travaillais donc de temps en temps.
2 M. Kehoe (interprétation). - Et lorsque vous travailliez à cette
3 station relais, faisiez-vous des allée et venues ? Pouviez-vous passer la
4 nuit chez vous ?
5 M. Beso (interprétation). - Ma maison n'était pas loin de la station. Je me
6 rendais à la station en vélo puisque ce n'était pas très loin. J'y passais
7 la journée et puis je passais une journée à la maison. J'alternais.
8 M. Kehoe (interprétation). - J'appelle maintenant votre
9 attention Monsieur Beso, sur la matinée du 16 avril 1993, moment où la
10 guerre éclata à Vitez. Vous souvenez-vous de cette matinée-là ?
11 M. Beso (interprétation). - Oui, je m'en souviens
12 M. Kehoe (interprétation). - Pourriez-vous raconter en vos
13 propres termes ce qui s'est passé ce jour-là à l'intention des juges ?
14 M. Beso (interprétation). - Le 16 avril 1993, à l'aube, ma mère
15 m'a réveillé. Elle m’a dit qu'elle avait entendu des détonations, on
16 entendait encore des coups de feu, des détonations. Je suis sorti de la
17 maison ; le jour venait à peine de poindre ; on entendait des coups de
18 feu et des détonations de toutes les directions. Je ne comprenais pas ce
19 qui se passait. Mais on sentait la guerre dans l'air. Je savais que la
20 guerre venait d'éclater et je ne savais pas quoi faire. Notre maison
21 n'avait pas de cave. J’ai dit à ma mère que j'allais l'emmener, elle, et
22 ma grand-mère aussi, à la maison voisine où il y avait une cave et
23 qu'elles devraient y rester jusqu'au moment où nous allions décider de la
24 suite des événements. Alors je les ai emmenées dans cette maison voisine
25 qui était vraiment à côté et qui était la propriété de Sifet Adilovic.
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1 Sifet Adilovic travaillait à ce moment-là en Suisse. Les deux filles de
2 Selica* vivaient dans cette maison. Elles s’occupaient de la maison. Je ne
3 sais pas quelle était la raison de leur séjour dans cette maison. Lorsque
4 j’ai emmené ma mère et ma grand-mère dans cette maison -ma grand-mère, je
5 vous le rappelle, était invalide- je suis donc retourné chez nous pour
6 prendre les médicaments qu'elle prenait régulièrement. A un moment donné,
7 alors que je retournai vers la maison de Sifet Adilovic, à quelque
8 cinquante mètres de distance le long de la route, j'ai vu quelques soldats
9 revêtus d'uniformes de camouflage. Ces soldats emmenaient des hommes en
10 civil. J'ai reconnu mes voisins musulmans, mais je ne savais pas où ils
11 allaient. Et lorsque j'ai apporté les médicaments à ma grand-mère, ma mère
12 m’a dit d’aller nourrir la vache. J’avais peur, mais il a fallu le faire.
13 Je suis une fois de plus retourné chez nous ; j'ai pris les clefs de
14 l'étable et du garage où il y avait la nourriture pour la vache, le
15 fourrage et je voulais prendre du foin dans l’étable pour la vache et c'est
16 sans doute à ce moment-là que les soldats du HVO m’ont remarqué. Je
17 descendais du deuxième étage vers l’étable et des hommes sont entrés.
18 C'étaient tous des voisins à moi, ils étaient tous en uniforme. Ils ont dit
19 « haut les mains », ils m'ont dit de m'adosser contre le mur, ils m'ont
20 fouillé, ils ont voulu savoir si j'avais des armes, ils ont fouillé l’étable,
21 le garage de fond en comble. Ils m’ont dit de me changer et que j'étais
22 leur prisonnier. De là, ils m'ont emmené au centre vétérinaire de Rijeka.
23 M. Kehoe (interprétation). - Je vous interromps un instant
24 Monsieur Beso… Ces soldats que vous avez vus, qui vous ont arrêté… ?
25 M. Beso (interprétation). - Oui ?
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1 M. Kehoe (interprétation). - … Vous avez dit les avoir reconnus
2 et que c'étaient vos voisins ?
3 M. Beso (interprétation). - Oui.
4 M. Kehoe (interprétation). - Et qui étaient ces hommes ?
5 M. Beso (interprétation). - L'un d'entre eux était Rajko
6 Matkovic Je l'avais bien connu tout un temps, c'était l'homme le plus âgé
7 du groupe. Il y avait aussi Krunoslav Bonic que l’on surnommait Kico,
8 Karin Goran et un autre homme jeune. Je le connaissais bien, mais je ne me
9 souviens plus de son nom. Il était aussi de Rijeka. Ils étaient tous en
10 uniforme et tous armés.
11 M. Kehoe (interprétation). - Vous dites qu'ils étaient en
12 uniforme. Quel type d'uniforme portaient-ils ?
13 M. Beso (interprétation). - Ils portaient des uniformes de
14 camouflage avec des écussons du HVO à la manche.
15 M. Kehoe (interprétation). - Vous dites que lorsque vous êtes
16 sorti de chez vous la première fois, vous avez vu des soldats qui
17 emmenaient des hommes de plusieurs maisons qui se trouvaient dans votre
18 quartier, est-ce bien exact ?
19 M. Beso (interprétation). - Oui.
20 M. Kehoe (interprétation). - Pourriez-vous vous lever, aller
21 vers la carte et indiquer cette rangée de maisons à l'intention des juges,
22 maisons desquelles on a tiré sur ces hommes et là où on les a arrêtés ?
23 Je vous demanderai de garder le pointeur pendant quelques
24 instants, ce qui permettra à la caméra de capter l'image.
25 M. Beso (interprétation). - Voilà cette rangée de maisons.
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1 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que toutes ces maisons
2 étaient occupées par des hommes musulmans ?
3 M. Beso (interprétation). - En fait, c'était une population
4 mixte qui occupait ces maisons. Il y avait des maisons musulmanes, des
5 maisons croates, il y avait une maison serbe de l'autre côté, il y avait
6 deux maisons musulmanes, puis des maisons croates, puis ici aussi des
7 maisons musulmanes, donc tout était vraiment mélangé.
8 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que tous les hommes qui ont
9 été arrêtés étaient des Musulmans ?
10 M. Beso (interprétation). - Oui
11 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur Beso, vous pouvez vous rasseoir, merci.
12 Monsieur Beso, vous avez déclaré qu'après votre arrestation, on
13 vous a emmené au poste vétérinaire.
14 M. Beso (interprétation). - Oui.
15 M. Kehoe (interprétation). - Pourrions-nous avoir la pièce n° 33
16 avec l'aide de l'huissier et si nous pouvions allumer le rétroprojecteur,
17 j'aimerais, Monsieur, vous montrer un certain nombre de photographies.
18 Nous allons regarder les photos qui se trouvent à la fin de
19 cette pièce PH 225, PH 226, simplement ces deux dernières photos.
20 Photos 225 et 226 : je crois que c'est la fin du document.On
21 voit le nombre en bas à droite ; voici les photos en question…
22 Monsieur Beso, veuillez regarder la photo qui se trouve sur le
23 rétroprojecteur. Reconnaissez-vous ce bâtiment ?
24 M. Beso (interprétation). - Oui, absolument, il s'agit du poste vétérinaire.
25 M. Kehoe (interprétation). - Et lorsqu’on vous y a emmené, où
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1 vous a t-on emmené exactement ?
2 M. Beso (interprétation). - On nous a emmenés dans la cave du
3 poste vétérinaire. Lorsque je suis arrivé, la cave était pleine de
4 Musulmans. Je ne sais pas exactement combien de personnes se trouvaient
5 dans la cave. Ils vivaient tous dans la région de Rijeka ou bien dans les
6 quartiers de Sofa. Je les connaissais tous, car c'était tous des voisins.
7 M. Kehoe (interprétation). - Pouvez-vous apercevoir l'entrée par
8 laquelle vous êtes passé sur cette photo ?
9 M. Beso (interprétation). - Oui.
10 M. Kehoe (interprétation). - Pourriez-vous indiquer avec le pointeur où se
11 trouve cette entrée sur la photo qui est sur le rétroprojecteur ?
12 (M. Beso désigne sur la photo).
13 M. Kehoe (interprétation). - Pour le compte rendu, vous indiquez
14 l'entrée qui se trouve à droite de la photographie, n'est-ce pas ?
15 M. Beso (interprétation). - Oui.
16 M. Kehoe (interprétation). - Si nous pouvions maintenant placer
17 l'autre photographie sur le rétroprojecteur... Que voyez-vous sur cette
18 photo, Monsieur Beso, s'il vous plaît ?
19 M. Beso (interprétation). - C'est là aussi une prise de vue de
20 la maison où se trouvait la station vétérinaire et c'est là que nous nous
21 trouvions, nous les prisonniers de Rijeka.
22 M. Kehoe (interprétation). - En fait, il s'agit simplement de l'autre côté
23 du bâtiment, celui que nous avons vu sur la photo précédente ?
24 M. Beso (interprétation). - Oui.
25 M. Kehoe (interprétation). - Je vous remercie Monsieur l'huissier. Monsieur
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1 Monsieur le Président, si nous pouvions garder cette pièce à conviction à
2 proximité,nous en aurons besoin plus tard. Monsieur Beso, veuillez nous
3 décrire les conditions de détention dans la cave de la station vétérinaire.
4 M. Beso (interprétation). - Les conditions de détention étaient assez
5 mauvaises. Il faisait froid, c'était une pièce très sombre, les murs étaient
6 humides et nous n'avions pas le droit de sortir pendant un certain temps.
7 M. Kehoe (interprétation). - Y avait-il beaucoup d'autres hommes
8 présents avec vous dans cette cave ?
9 M. Beso (interprétation). - Il n'y avait là que les Musulmans
10 qui avaient été amenés dans cette cave depuis leur maison. Nous étions
11 sous surveillance, il y avait des gardes tout autour de la maison.
12 M. Kehoe (interprétation). - Et tous ces gardes étaient-ils membres du HVO?
13 M. Beso (interprétation). - Oui, sans doute, tous faisaient
14 partie de nos voisins croates. Ils portaient des insignes, des fusils, ils
15 étaient revêtus d'uniformes.
16 M. Kehoe (interprétation). - Veuillez expliquer aux juges ce qui
17 vous est arrivé alors que vous vous trouviez à l'intérieur de cette cave,
18 à l'intérieur du poste vétérinaire. Vous a-t-on emmené quelque part après
19 un certain temps ? Veuillez raconter au Tribunal ce qui s'est passé.
20 M. Beso (interprétation). - Je suis resté un certain laps de
21 temps, mais je ne sais pas exactement combien de temps. Nous recevions
22 quelque nourriture, du poisson en conserve, mais c'était vraiment très
23 peu. Pas de cigarettes, seules les personnes qui avaient apporté quelque
24 chose de chez eux en avaient. Par la suite, ils ont autorisé des femmes
25 musulmanes à nous apporter de la nourriture de chez elles, des vêtements,
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1 des couvertures. Je ne sais pas exactement quand, mais à un moment donné
2 ils ont commencé à nous faire sortir et nous avons été emmenés pour creuser
3 des tranchées. J'ai été choisi. Je faisais partie d'un des groupes. Pour la
4 plupart, ils étaient composés de jeunes gens. On nous emmenait sur la
5 colline de Sofa et là nous creusions des tranchées qui faisaient face au
6 village de Kruscica.
7 M. Kehoe (interprétation). - Qui vous a emmenés creuser ces tranchées ?
8 M. Beso (interprétation). - Le groupe dont je faisais partie a été emmené
9 par Kico Bonic. Il y avait un autre soldat qui nous accompagnait également,
10 mais je ne sais plus exactement de qui il s'agissait.
11 M. Kehoe (interprétation). - Mais il s'agissait là de soldats du HVO ?
12 M. Beso (interprétation). - Oui, absolument.
13 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur le Président, le témoin peut-il être
14 autorisé à s'approcher du chevalet et puis-je, moi aussi, m'y rendre ?
15 M. le Président. - Oui, et la défense peut s'approcher, bien sûr.
16 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur Beso, vous avez dit il y a
17 quelques instants que la région qui se trouve entourée de vert est la
18 région de Rijeka et que celle qui se trouve en haut, à droite du cercle
19 vert, est Kruscica. Vous venez de parler d'une région que vous appelez
20 Sofa. Pouvez-vous, s'il vous plaît, prendre le pointeur, vous reculer un
21 peu, et indiquer quelle est cette région que vous appelez Sofa ?
22 M. Beso (interprétation). - C'est ici.
23 M. Kehoe (interprétation). - Veuillez y rester quelques
24 instants, s'il vous plaît. Fort bien. Vous avez déclaré que vous y avez
25 creusé des tranchées. Avec le feutre orange, pouvez-vous nous indiquer
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1 l'endroit où vous avez creusé ces tranchées ?
2 M. Beso (interprétation). - Tout d'abord, nous creusions des
3 tranchées par ici. Il s'agit de tranchées "ponctuelles".
4 M. Kehoe (interprétation). - Qu'entendez-vous par ponctuelles ?
5 M. Beso (interprétation). - Elles se trouvaient dans un seul
6 endroit. Nous n'avions pas à les joindre les unes aux autres, nous
7 n'avions pas à creuser des liaisons entre ces tranchées. Il s'agissait de
8 tranchées qui allaient être occupées par un seul soldat.
9 M. Kehoe (interprétation). - Pouvez-vous nous indiquer où cela
10 se trouve afin que le Tribunal puisse avoir une idée de l'endroit ?
11 M. Beso (interprétation). - Voilà où nous avons commencé à
12 creuser des tranchées.
13 M. Kehoe (interprétation). - Je veux simplement bien souligner
14 ce que vous avez indiqué. C'est bien l'endroit où vous avez commencé à
15 creuser des tranchées, n'est-ce pas ?
16 M. Beso (interprétation). - Oui, et puis par la suite on nous a
17 emmenés dans le quartier tzigane afin de creuser, ce même jour, des
18 tranchées dans cet endroit.
19 M. Kehoe (interprétation). - Pourquoi vous a-t-on emmenés dans ce quartier
20 tzigane ce jour-là ? Pourquoi y avoir été emmenés pour creuser des tranchées?
21 M. Beso (interprétation). - Pourquoi ? Je ne sais pas
22 exactement, mais selon les rumeurs qui circulaient, il était dit que des
23 membres du HVO pensaient que l'armée de Bosnie-Herzégovine se trouvait
24 dans le quartier tzigane. Mais étant donné qu'ils se sont aperçus que
25 l'armée ne s'y trouvait pas, ils nous ont emmenés dans un lieu qui faisait
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1 face au village de Kruscica afin que nous y creusions des tranchées.
2 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que c'était un commandant du
3 HVO qui a emmené le groupe creuser ces tranchées dans cet autre endroit ?
4 M. Beso (interprétation). - Oui, lorsque nous creusions au premier endroit
5 que j'ai indiqué, un commandant est arrivé et il était vraiment de mauvaise
6 humeur. Il criait après ses soldats et il demandait pourquoi nous creusions
7 des tranchées ici et pas plus près de Kruscica. Et puis, à peu près une
8 demi-heure plus tard, ils nous ont emmenés à cet autre endroit que j'ai
9 indiqué. Alors que nous creusions, les balles sifflaient au-dessus de nos
10 têtes et en direction du village de Kruscica. Nous étions là et nous
11 creusions, alors que les balles sifflaient autour de nous.
12 M. Kehoe (interprétation). - Qui tirait ?
13 M. Beso (interprétation). - Karin Goran. Il y avait également
14 une personne de Rijeka qu'on appelait Males, mais je ne me rappelle pas de
15 son nom de famille. Et puis il y avait également les Serbes locaux qui
16 vivaient à Sofa. Eux aussi faisaient partie du HVO et eux aussi tiraient
17 en direction de Kruscica.
18 M. Kehoe (interprétation). - Ils tiraient... ces tirs qui
19 passaient au dessus de vos têtes ?
20 M. Beso (interprétation). - Oui.
21 M. Kehoe (interprétation). - Sur le premier endroit que vous
22 avez indiqué, je vais apposer le chiffre n° 1. Et voici le deuxième
23 endroit, là où vous avez creusé des tranchées. Est-ce bien exact ?
24 M. Beso (interprétation). - Oui.
25 M. Kehoe (interprétation). - Vous pouvez vous asseoir, Monsieur,
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1 et je vais moi-même retourner à ma place.
2 Monsieur Beso, combien de temps avez-vous creusé ces tranchées
3 en direction de Kruscica ?
4 M. Beso (interprétation). - Je n'en ai pas une idée très
5 précise. On nous y a emmenés au cours de la matinée et on nous a ramenés
6 au poste vétérinaire en fin de soirée.
7 M. Kehoe (interprétation). - Combien d’hommes se trouvaient à
8 ces endroits pour creuser des tranchées ?
9 M. Beso (interprétation). - Je dirai que le groupe était
10 constitué de dix personnes environ.
11 M. Kehoe (interprétation). - Vous avez dit qu'en fin de soirée, on vous a
12 ramené au poste vétérinaire. Etes-vous retourné dans la cave de ce bâtiment?
13 M. Beso (interprétation). - Oui.
14 M. Kehoe (interprétation). - Et par la suite que s’est-il passé ?
15 M. Beso (interprétation). - Eh bien, un deuxième groupe a été emmené pour
16 creuser des tranchées. Lorsque nous sommes rentrés, on nous a donné à
17 manger.Je ne sais pas combien de temps nous avons passé là. Puis, une
18 nouvelle fois j'ai été emmené pour creuser des tranchées à un autre endroit.
19 M. Kehoe (interprétation). - Et où vous a-t-on emmenés pour
20 creuser ces tranchées, s'il vous plaît ?
21 M. Beso (interprétation). - Il s'agissait du village de Pirici.
22 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur le Président, avec l'aide
23 de l'huissier, j'aimerais que cette carte, ou plutôt une copie de la
24 pièce 50 ou 50B soit placée sur le chevalet par dessus l'autre carte, ce
25 serait très pratique.
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1 Mme le Greffier. - C’est la copie de la carte 50 et ce sera le document 50B.
2 M. le Président. - Je signale à la cabine que je n’ai pas la traduction.
3 L’interprète. - Veuillez m’excuser, monsieur le Président, J’avais oublié
4 de brancher mon micro. Le témoin a déclaré qu'ils avaient emprunté une
5 camionnette blanche pour se rendre à Pirici, via Rijeka et la station, et
6 qu’ils sont arrivés à Pirici. Il y avait deux groupes : un premier composé
7 d'autres hommes et le groupe dont il faisait partie a été emmené à Pirici
8 tandis que le premier est descendu à Zume.
9 M. Beso (interprétation). - Nous avons commencé à creuser des
10 tranchées, nous étions gardés par des membres du HVO.
11 M. Kehoe (interprétation). - Les membres du HVO vous ont-ils
12 emmenés du poste vétérinaire à Pirici, étaient-ce là aussi des gardes du
13 HVO qui vous accompagnaient ?
14 M. Beso (interprétation). - Oui.
15 M. Kehoe (interprétation). - M. Beso, voulez-vous vous tourner vers la
16 carte qui se trouve sur le chevalet, la pièce 50B. Monsieur le Président,
17 si je puis m'approcher de cette carte et Monsieur Beso, si vous voulez vous
18 lever... Monsieur Beso, il s'agit là d'une photographie qui est également
19 une pièce à conviction. La région dans laquelle vous vous êtes rendu pour
20 creuser des tranchées vers Pirici apparaît-elle sur cette photographie ?
21 M. Beso (interprétation). - Voici le village de Pirici. C'est là
22 que nous avons été emmenés.
23 M. Kehoe (interprétation). - Pouvez-vous indiquer cette zone avec le
24 pointeur,afin que la caméra puisse pointer l'image s’il vous plaît ? Fort
25 bien.Lorsqu'on vous a emmenés dans cet endroit, vous a-t-on forcé à y
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1 creuser des tranchées ?
2 M. Beso (interprétation). - Oui.
3 M. Kehoe (interprétation). - Une fois de plus, en utilisant le
4 feutre orange, veuillez indiquer sur la pièce 50B la zone dans laquelle
5 vous avez creusé des tranchées à proximité de Pirici.
6 M. Beso (interprétation). - Nous avons creusé des tranchées en
7 plusieurs endroits, mais je ne sais pas exactement. Je pense que ça se
8 trouverait par là.
9 M. Kehoe (interprétation). - Sans que ce soit absolument précis, il s'agit
10 là des zones dans lesquelles vous avez creusé des tranchées, n'est-ce pas ?
11 M. Beso (interprétation). - Oui.
12 M. Kehoe (interprétation). - Pour le compte rendu, Monsieur le
13 Président, messieurs les juges, trois zones ont été encerclées sur la
14 pièce 50B de l'accusation. M. Beso, vous pouvez vous rasseoir et moi-même
15 je vais reprendre ma place.
16 M. Beso (interprétation). - Monsieur Beso, quand vous êtes arrivé à Pirici
17 pour creuser des tranchées, veuillez raconter aux juges ce qui s'est passé.
18 M. Beso (interprétation). - Lorsque nous sommes arrivés là, nous avons été
19 répartis en groupes plus réduits et, groupe par groupe, les soldats nous
20 ont emmenés pour creuser des tranchées. Combien de temps cela a duré, je
21 n'en sais rien ; nous avons travaillé dur, nous n'avons pas pris de repos
22 ou à peine. A un moment donné, lorsque nous creusions les tranchées, nous
23 avons pu entendre des coups de feu, des tirs échangés entre l'armée et le
24 HVO. Nous nous trouvions entre les lignes de front ; les lignes n'étaient
25 pas bien délimitées à ce moment-là. Un de mes collègues qui avait été
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1 capturé en même temps que moi et qui ,lui aussi, a été détenu, a reçu une
2 blessure à la poitrine. Il est tombé.
3 M. Kehoe (interprétation). - Quel était son nom s'il vous plaît ?
4 M. Beso (interprétation). - Salih Sadibasic. Lui aussi vivait à Vitez.
5 M. Kehoe (interprétation). - Il était musulman lui aussi ?
6 M. Beso (interprétation). - Oui.
7 M. Kehoe (interprétation). - Racontez-nous les circonstances
8 dans lesquelles il a reçu cette balle.
9 M. Beso (interprétation). - Il n'a pas été tué, il a simplement reçu une
10 blessure à la poitrine. Lorsqu'on l'a emmené, des membres du HVO lui ont
11 apporté des soins de première urgence. Ils ont pansé sa blessure et l'ont
12 transféré à l'hôpital qui se trouvait à Travnik. Là, il s'est peu à peu
13 remis de sa blessure. Nous, nous avons continué à travailler. Nous nous
14 étions abrités pendant un certain temps des tirs échangés, mais nous ne
15 pouvions pas y rester et on nous a donné l'ordre de continuer à creuser. Je
16 ne sais pas exactement combien de temps tout cela a duré. Par la suite, ils
17 nous ont dit de rassembler tous les outils dont nous nous étions servis
18 pour creuser et de nous rendre dans une maison où nous allions recevoir un
19 peu de nourriture. Lorsque nous y sommes arrivés, nous avons laissé nos
20 outils. Nous étions vraiment épuisés, nous nous sommes assis immédiatement,
21 là, sur l'herbe. On nous a apporté à manger. Il s'agissait là encore de
22 conserves de poisson. J'avais également du pain. Je ne sais pas exactement
23 ce que c'était, peut-être une espèce de ragoût aux légumes, au chou. Alors
24 que nous mangions, les membres du HVO nous surveillaient. L'un des détenus
25 qui vivait, lui aussi, à Vitez, -je le connaissais avant la guerre- avait
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1 une santé fragile. Il avait quelques problèmes psychiques. Je ne sais pas
2 exactement de quoi il souffrait. Par la suite, au cours d'une de nos
3 discussions entre détenus, nous avons compris qu'il avait été tellement
4 choqué par la blessure de Salih qu'il en avait perdu l'esprit. Il regardait
5 les membres du HVO se trouvant à côté de nous. Il a remarqué que l'un
6 d'entre eux avait laissé son fusil abandonné à côté de lui. Il a sauté et
7 saisi l'arme. Il a essayé de l'armer, mais je crois qu'il ne savait pas du
8 tout comment se servir d'une arme. Il a commencé à courir vers les lignes
9 de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Les membres du HVO l'ont rattrapé.
10 Certains d'entre eux ne portaient pas leurs armes. Ils se sont saisis
11 d'outils, de ce dont nous nous étions servis pour creuser les tranchées,
12 une pelle, un pic, et ils ont commencé à le frapper avec ces outils.
13 Nous étions tous près de là, mais nous n'osions pas faire un
14 geste. Nous sommes restés assis là car nous nous sentions menacés. Ils
15 nous surveillaient, ils étaient armés. Et puis j'ai vu le sang de cet
16 homme couler. Son crâne était fendu, mais il est resté debout. Ils se sont
17 emparés du fusil qu'il portait et ont continué à le frapper. Il a commencé
18 à vaciller sur ses jambes. C'était un homme de carrure imposante, un grand
19 homme. Puis, subitement, une personne -je ne sais pas exactement de qui il
20 s'agissait, il portait une veste de cuir, c'était un homme relativement
21 âgé- s'est emparé d'un revolver. C'était un 7.62, un Zastava. Il a tiré
22 dans le ventre de cet homme, mais lui restait toujours debout. Puis les
23 membres du HVO... Tout était confus, on ne savait pas très bien ce qui se
24 passait, il y avait un grand groupe de soldats, je ne les connaissais pas
25 tous parce que je ne me rendais pas là très souvent. Ils s'appelaient par
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1 des noms divers. Puis quelqu'un d'autre est arrivé, lui aussi membre du HVO,
2 et il a abattu cet homme d'une rafale de Kalachnikov et cet homme est
3 tombé, là. On nous a ordonné de le retirer de là et de le placer au pied
4 d'un mur. Vous allez voir par la suite ce qu'ils allaient en faire.
5 M. Kehoe (interprétation). - Comment s'appelait l'homme qui a été assassiné?
6 M. Beso (interprétation). - IbraKovic. Nous l'appelions Jusuf.
7 Là-bas, on l'appelait Jusuf, il habitait à Vitez.
8 M. Kehoe (interprétation). - Avez-vous entendu le nom de l'un
9 des soldats du HVO qui se trouvait sur les lieux à ce moment-là ?
10 M. Beso (interprétation). - Oui. Pendant que nous creusions les
11 tranchées, ces soldats qui nous gardaient -peut-être pensaient-ils que
12 nous n'écoutions pas ce qu'ils disaient, que nous étions trop occupés par
13 ce que nous faisions- mais j'ai pu entendre qu'il y en avait un qui
14 s'appelait Slavko Papic. C'était un dirigeant apparemment sur place.
15 Plus tard, après cet assassinat, ils ont dit que Dragan n'aurait
16 pas dû agir de cette façon, qu'il aurait dû agir autrement. Comme si
17 c'était Dragan Papic qui avait tué Jusuf avec son fusil. Il y avait pas
18 mal de jeunes gens sur place, je ne les connaissais pas tous. Il y en
19 avait un que je ne connaissais pas du tout, qui avait un uniforme de
20 meilleure qualité que les autres sur le dos. Il était aussi dans ce
21 groupe. Maintenant que s'est-il passé par la suite ? Nous avons tous
22 reçu l'ordre de nous allonger sur le chemin qui allait à Ahmici. On nous a
23 dit qu'on n'avait absolument pas le droit de bouger tant qu'ils n'auraient
24 pas décidé de ce qu'ils allaient faire avec nous. Encore plus tard, un
25 soldat est arrivé qui nous a dit de prendre nos outils et de continuer à
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1 creuser. A ce moment-là, quand nous sommes repartis vers l'endroit où
2 nous creusions des tranchées, quand nous sommes sortis de la maison, ce
3 Slavko Papic, qui était un homme d'un âge un peu plus mûr -c'était un
4 commandant- a dit qu'il fallait que nous nous calmions si nous ne voulions
5 pas nous faire tuer. Il pensait que, peut-être, d'autres parmi nous
6 voudraient se révolter. Il a regardé dans la direction d'un prisonnier,
7 Amir Kopic. Nous avons creusé jusque tard dans la nuit. Les coups de feu
8 avaient cessé. Nous avons pu continuer à creuser un peu plus facilement.
9 Moi, j'avais terriblement peur, si bien que tous ces instants, pour moi,
10 ont duré très très longtemps, un peu comme si c'était l'éternité. A un
11 certain moment, il faisait nuit, je m'en souviens bien, il devait être
12 assez tard, ils nous ont emmenés dans une cave. On aurait dit une maison,
13 je n'ai pas bien vu dans l'obscurité, mais c'était apparemment une maison
14 qui avait brûlé. On nous a emmené dans la cave de cette maison et c'est là
15 qu'on nous a installé. C'était une cave, il n'y avait rien, des espèces
16 d'étagères.Peut-être que l'ancien propriétaire gardait des pommes ou des
17 poires dans cette cave, je ne sais pas exactement. On nous a donc installés
18 là. Nous étions sales parce que nous étions couverts de terre. Nous ne
19 pouvions tout simplement plus parler les uns avec les autres tellement nous
20 avions peur. Et au moment où ils ont fermé la porte à clef, un de ces
21 hommes nous a dit : "Si j'entends seulement le son de vos voix, si vous
22 vous racontez quoi que ce soit, je vais jeter une grenade par la fenêtre à
23 l'intérieur de la cave", une grenade qu'on peut tenir à la main. A ce
24 moment-là, peut-être avons-nous un peu dormi mais avant cela, pendant que
25 je creusais encore les tranchées, des membres du HVO se sont approchés de
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1 nous. Nous étions, comme je l'ai dit, divisés en plusieurs groupes. Il nous
2 ont tendu des cigarettes et nous ont dit que ce n'était pas la peine
3 d'avoir tellement peur. Mais, moi, je ne croyais rien de tout cela ;
4 j'avais terriblement peur. J'étais absolument sûr qu'il y avait de quoi
5 avoir peur. Je faisais sans doute partie du groupe le plus terrorisé.
6 Plus tard, un jeune est arrivé. Il portait un uniforme et un fusil. Il m'a
7 regardé longtemps pendant que je creusais. Il y en avait un qui me
8 regardait aussi, et il m'a dit "Ne t'exposes pas tellement, tu peux très
9 librement t'abriter un petit peu pendant que tu creuses". Moi, je ne savais
10 pas trop quoi penser de ce qu'il me disait. Il avait un accent différent.
11 Il ne parlait pas comme nous tous, les habitants de Vitez, il avait un
12 accent caractéristique. Je ne sais pas exactement d'où il pouvait être. Il
13 m'a dit qu'il était de Zagreb. Maintenant est-ce vrai ou pas ? Plus tard,
14 il a dit à d'autres qu'il était de Kotor Varos. C'est une localité qui se
15 trouve en Bosnie-Herzégovine. Alors moi, à ce moment-là, je suis entré un
16 peu en conversation avec lui, nous nous sommes racontés des choses sans
17 importance, dont on ne parlait pas pendant la guerre. Nous avons parlé de
18 la musique, ce que j'écoutais, ce qu'il écoutait, lui. Nous avons parlé de
19 sports, de choses insignifiantes dont parlent les jeunes. Le lendemain
20 matin,ce même soldat est arrivé dans la cave où nous étions enfermés et
21 a dit de le suivre. On nous a transférés dans la salle de cinéma de Vitez
22 depuis Pirici. Quand je suis arrivé dans cette salle de cinéma, j'ai vu pas
23 pas mal de prisonniers musulmans, et des hommes en uniformes qui portaient
24 un ceinturon blanc et l'insigne de la police militaire. Cet homme nous a
25 remis à Anto Kovac, que nous appelions tous entre nous Zabac, la Grenouille.
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1 Donc on nous a installés là. Les membres de la police militaire nous ont
2 trouvé une place dans cette salle de cinéma. La salle était déjà complètement
3 pleine. En bas, c’était plein. En haut, il y avait des petites pièces,un peu
4 comme des bureaux. Tout cela était rempli de prisonniers musulmans.
5 M. le Président. - Si cela vous paraît cohérent, nous pourrions
6 peut-être nous interrompre et reprendre à 11 heures 45. Cela vous va ?
7 M. Kehoe (interprétation). - Oui, Monsieur le Président.
8 M. le Président. - Nous reprendrons à 11 heures 45.
9 (L'audience, suspendue à 11 heures 25, est reprise à 11 heures 45).
10 M. le Président. - L’audience est reprise. Faites entrer l’accusé.
11 (L’accusé est introduit dans la salle d’audience.)
12 Monsieur le Procureur ?
13 M. Kehoe (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.
14 Monsieur Beso, Jusuf Ibrakovic, cet homme qui a été tué et
15 assassiné à Pirici, était-il Musulman lui aussi ?
16 M. Beso (interprétation). - Oui, il l'était.
17 M. Kehoe (interprétation). - Excusez-moi, je vais répéter la
18 question et je vous demanderai de répéter la réponse. Cet homme qui a été
19 assassiné à Pirici, Jusuf Ibrakovic, était-il Musulman lui aussi ?
20 M. Beso (interprétation). - Oui.
21 M. Kehoe (interprétation). - Bien. Monsieur Beso, avant la
22 pause, vous avez dit au Tribunal qu'on vous avait transféré de Pirici au
23 cinéma. Est-ce que c’est exact ?
24 M. Beso (interprétation). - Oui.
25 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur le Président, avec votre
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1 autorisation, et l'aide de l'Huissier, je voudrais utiliser la pièce à
2 conviction 33 de l'accusation. Les photographies que nous avons dans cette
3 pièce à conviction n°33 sont les photographies Ph197, Ph198 et Ph203.
4 M. le Président. - A l'avenir d'ailleurs, toujours dans le même but
5 d'accélérer le mouvement, on peut peut-être demander au Greffe de reconnaître
6 à l'avance les pièces qui seront citées, de sorte que l'on aille directement
7 à la photographie 197, 198, 203, si cela est possible bien sûr.
8 D'accord, Monsieur le Procureur ? Qu’en pensez-vous ?
9 M. Kehoe (interprétation). - Oui, Monsieur le Président. Madame Fauveau et
10 moi-même,nous avons discuté de cela pendant la pause. C'est la raison pour
11 laquelle les photographies sont prêtes pour le témoin.
12 M. le Président. - D’accord. Merci. Comme me le souligne mon Collègue,
13 bien entendu cela est valable aussi pour la défense. Préparez au maximum
14 les pièces pour qu'il n'y ait pas de temps mort. Merci beaucoup. Allez-y.
15 M. Kehoe (interprétation). - Oui. Merci, Monsieur le Président.
16 Monsieur Beso, reconnaissez-vous la photographie Ph197 qui se trouve sur
17 le rétroprojecteur ?
18 M. Beso (interprétation). - Oui. C'est la salle de cinéma de Vitez qui
19 s'appelait par le passé Université des travailleurs Mosa Pijade de Vitez.
20 M. Kehoe (interprétation). - Pouvons-nous passer à la
21 photographie Ph198, après quoi à la photographie Ph203. Est-ce également
22 une photographie du cinéma sous un angle différent ?
23 M. Beso (interprétation). - Oui. Effectivement, c'était la
24 sortie de la salle de cinéma.
25 M. Kehoe (interprétation). - La dernière photographie Ph203
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1 maintenant. Qu’en est il de cette photographie, Monsieur Beso ? Est-ce
2 également une photographie du cinéma sous un autre angle ?
3 M. Beso (interprétation). - Oui. Là, nous voyons l'entrée de la
4 salle de cinéma.
5 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce par cette porte que vous
6 êtes entré dans le cinéma lorsqu'on vous y a emmené, après que vous ayez
7 creusé des tranchées à Pirici ?
8 M. Beso (interprétation). - Oui.
9 M. Kehoe (interprétation). - Je ne vais plus utiliser le rétroprojecteur
10 Monsieur l'Huissier, donc nous pouvons enlever les photographies.
11 M. Beso (interprétation). - Monsieur Beso, retournons un peu en arrière.
12 Dites -nous ce qui vous est arrivé lorsque vous êtes arrivés dans le cinéma?
13 M. Beso (interprétation). - Lorsque nous sommes arrivés dans la
14 salle de cinéma, Anto Kovac, comme je l’ai déjà dit, surnommé Zabac, s'est
15 chargé de nous. C'était sans doute un commandant de la police militaire.
16 Les policiers nous ont installés dans la salle de cinéma, là où il y avait
17 de la place, parce qu'il y avait beaucoup de monde. Moi, on m'a installé à
18 l'étage, dans une pièce qui avait l’air d’être un bureau, où il y avait
19 vraiment énormément de monde.
20 Quand les autres détenus ont vu que j'étais sale, que j'avais de
21 la terre partout, y compris sur ma veste, ils m'ont demandé d'où je
22 venais. J'ai dit que j'avais creusé des tranchées et ils m'ont répondu :
23 "Ici aussi, on nous emmène creuser des tranchées".
24 M. Kehoe (interprétation). - Où vous ont-ils dit que les hommes
25 étaient emmenés pour creuser des tranchées à partir du cinéma ?
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1
2 M. Beso (interprétation). - Ils m'ont dit qu'on les emmenait à
3 Krcevine, dans la direction de Kuber, de Krizanjceve Kuce, du village de
4 Jardol. Je ne me rappelle pas s'ils ont mentionné d'autres endroits.
5 M. Kehoe (interprétation). - Bien. Monsieur Beso, que s’est-il
6 passé ensuite ?
7 M. Beso (interprétation). - Alors que nous étions dans cet endroit, j'ai
8 constaté que les détenus avaient l'autorisation de recevoir des visites.
9 Les parents pouvaient venir, les mères, les épouses, les soeurs apportaient
10 de la nourriture, des vêtements, enfin ce dont les gens avaient besoin.
11
12 Si bien qu'à la maison les miens ont aussi entendu que j'avais été
13 transféré dans la salle de cinéma. Un membre de ma famille m'a apporté des
14 vêtements, de la nourriture, du café, des cigarettes. J'ai pensé que ce
15 serait plus facile pour moi, à cet endroit. J’ai pensé que je n'allais
16 plus jamais aller creuser des tranchées. J'ai reçu d'autres vêtements. Je
17 n'étais plus dans l'état où j'étais avant. Puis, je ne sais plus exactement
18 quel jour, mais j’ai de nouveau été choisi pour aller creuser des tranchées
19 dans le village de Krcevine, qui est un autre village non loin de Vitez.
20 Nous étions de nouveau dans un groupe. Les autres hommes, qui avaient été
21 choisis, étaient aussi des
22 jeunes gens.
23 Evidemment, nous avons creusé. Nous étions dans une forêt, pas
24 loin du village de Preocica. Puis nous avons fait tout ce qu'il était
25 nécessaire de faire pour organiser, créer une ligne de front à cet
Page 2223
1 endroit. Nous avons beaucoup travaillé. Nous avions vraiment très peu de
2 repos. Nous recevions à manger ce qui restait après que les soldats sur la
3 ligne aient fini de manger.
4 Nous étions sans arrêt sous bonne garde. Dans la forêt où je me
5 trouvais, nous creusions des abris, nous creusions pour constituer ces
6 abris et ensuite des tranchées pour les réunir. On nous apportait des
7 planches là-bas, dans la forêt. D'un village voisin, nous devions
8 transporter ces planches qui étaient lourdes ; elles étaient en bois et
9 nous les utilisions pour recouvrir ces trous, ces abris que nous avions
10 creusés. Nous devions mettre des bâches par-dessus et cela créait des
11 abris souterrains. Tous les soldats qui nous donnaient des ordres nous
12 disaient de quelle façon il fallait créer ces abris.
13 Et puis, nous avons aussi créé une très longue tranchée depuis
14 la forêt jusqu'à une maison isolée qui se trouvait dans le coin. Il y
15 avait une clairière, donc nous étions à découvert, nous n'étions plus en
16 sécurité lorsque nous traversions cette clairière. A un certain moment,
17 nous transportions ces planches et, sur le chemin du retour, il faisait
18 encore jour, des coups de feu étaient échangés sans arrêt. Donc, nous
19 étions exposés au feu et j'étais accompagné d'un de mes amis, quelqu'un
20 qui était allé à l'école avec moi et qui était aussi détenu. Il était
21 musulman, il venait du quartier de Vitez qui s'appelait Kolonija.
22 M. Kehoe (interprétation). - C'était également un Musulman ?
23 M. Beso (interprétation). - Oui, oui. Quand les coups de feu ont
24 commencé, j'étais tout près de lui, j'étais avec lui. Il y avait aussi
25 Almir Gadjun, un autre musulman également détenu qui se trouvait avec
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1 nous. Il était au travail avec nous et il a été blessé au cou, si bien
2 qu'il est tombé. Il est tombé là, dans la clairière. A ce moment-là, je ne
3 savais plus quoi faire et nous aussi, nous nous sommes allongés à cet
4 endroit.
5 Puis, avec l'aide de quelques membres du HVO, nous avons réussi
6 à l'évacuer et à l'emmener à l'arrière d'une maison. Un soldat nous a
7 donné une petite caisse d'équipement de premiers secours. Il était blessé
8 au cou, c'était une blessure très dangereuse. On a fini par le mettre dans
9 une voiture et l’on nous a dit qu'il allait être emmené à l'hôpital. Mais
10 pendant que nous essayions de nous abriter avec lui, nous avons vu qu'il
11 était en très mauvais état ; sa peau devenait toute noire. Nous l'avons
12 allongé en un certain endroit.
13 Un soldat a essayé de lui tirer la langue hors de la bouche car
14 il commençait à s'étouffer. Il a juste ouvert les yeux, il nous a regardés
15 un instant et n'a réussi qu'à dire : « Saluez ma mère », après quoi il n'a
16 plus dit un mot et c'est là qu'il est mort.
17 On nous a fait retourner creuser les tranchées, et eux, ils
18 l'ont emporté. Plus tard, j'ai appris qu'il avait été enterré à
19 Stari Vitez.
20 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur Beso, je sais que vous ne
21 vous souvenez pas exactement des dates mais pourriez-vous nous dire quand
22 s’est produit le meurtre d'Almir Gadjun, combien de temps après le début
23 des hostilités, le 16 avril 1993 ?
24 M. Beso (interprétation). - Croyez-moi, savoir la date précise
25 d’un événement a été le plus gros problème que j'aie rencontré. Je dirai
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1 approximativement... je ne sais pas... peut-être dix ou quinze jours après
2 le début du conflit, mais je ne suis pas sûr.
3 M. Kehoe (interprétation). - On vous a donc emmené à Krcevine
4 mais vous étiez accompagné de combien d’hommes qui étaient censés creuser
5 ces tranchées ?
6 M. Beso (interprétation). - C'était un groupe assez important,
7 il y avaient peut-être dix à quinze personnes dans ce groupe.
8 Alors que nous creusions, il n'y a plus eu d'autres incidents.
9 Almir a été tué. Certains membres du HVO nous ont menacés, nous obligeant
10 à travailler et ils disaient que vraiment ce serait un problème et que
11 nous devrions être contents qu'ils soient là car si les Jokeri venaient,
12 ce serait encore plus grave. Moi, je ne savais pas qui étaient les Jokeri.
13 J'ai vu certains de mes amis d’école qui étaient aussi membres du HVO là-
14 haut et quand ils m'ont vu, ils ont été aussi surpris que moi. Comment se
15 faisait-il que j'aie été incarcéré ? Ils m’ont demandé si j'avais faim, si
16 j'avais besoin de quelque chose, ils m'ont donné des cigarettes.
17 M. Kehoe (interprétation). - Vous avez dit avoir été menacé par
18 des membres du HVO à propos des Jokeri ; ont-ils également mentionné des
19 Vitezovi ?
20 M. Beso (interprétation). - Non, le groupe qui nous surveillait
21 s'est contenté de dire que les choses seraient bien plus difficiles quand
22 les Jokeri viendraient et que ce serait mieux que nous terminions le plus
23 vite possible car plus tôt nous finirions, mieux ce serait pour nous.
24 Nous avons passé beaucoup de temps à creuser ces tranchées sans
25 avoir de véritable repos. Nous creusions sans cesse jour et nuit.
Page 2226
1 M. Kehoe (interprétation). - Les soldats qui vous surveillaient,
2 que ce soit à Sofa, Pirici ou Pokovina*, étaient-ils tous membre du HVO ?
3 M. Beso (interprétation). - Oui, oui, tous. C'est seulement
4 lorsque nous creusions les tranchées à Sofa que j'ai vu les serbes qui
5 habitaient là aussi. Ils ne portaient pas d'uniforme, ils étaient en civil
6 mais ils avaient des fusils aux mains, ils étaient armés mais sans
7 uniforme.
8 M. Kehoe (interprétation). - A un moment quelconque, alors que
9 vous creusiez ces tranchées, avez-vous été gardé par des membres des
10 Jokeri ou des Vitezovi ?
11 M. Beso (interprétation). - Non, jamais je n'ai eu l'occasion de
12 les voir quand je creusais les tranchées.
13 M. Kehoe (interprétation). - Après l’assassinat d’Almir Gadjun,
14 vous dites avoir poursuivi votre travail. Combien de temps avez-vous
15 continué à creuser ces tranchées avant d'être ramené au cinéma ?
16 M. Beso (interprétation). - Nous avons continué de creuser ce
17 jour-là, cette nuit-là et le lendemain. Puis, nous avons été remplacés par
18 d'autres prisonniers. On nous a remmenés dans un véhicule à Vitez, au
19 cinéma où nous étions auparavant.
20 M. Kehoe (interprétation). - Que s’est-il passé à votre arrivée
21 au cinéma ?
22 M. Beso (interprétation). - Lorsque nous sommes arrivés au
23 cinéma, nous étions tous... comment dire... perdus. Les choses se sont
24 poursuivies comme avant : des gens étaient emmenés creuser des tranchées,
25 mais moi je n'ai plus été emmené nulle part. Je sais que certains étaient
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1 amenés, que d'autres étaient emmenés vers d'autres destinations.
2 A un moment donné, des journalistes sont arrivés ; je ne sais
3 pas d'où ils venaient. Ils nous ont filmés. Il y avait une femme
4 journaliste qui parlait anglais. Elle me regardait et elle a dit au
5 cameraman de me filmer parce que j'avais de la terre partout sur tous mes
6 vêtements. C'est ce qu’il a fait.
7 Un soir, nous étions là, j'ai entendu des portes claquer, des
8 noms qui étaient lus à haute voix. Le lendemain matin, j'ai découvert que
9 des Musulmans bien connus, des ingénieurs, des professeurs, des gens qui
10 avaient travaillé à des postes de responsabilité à l'usine SPS, toutes ces
11 personnes avaient été emmenées. Pourquoi ? Je ne sais pas.
12 La Croix-Rouge est arrivée ce jour-là. Elle a inscrit nos noms
13 dans ses registres ; nous avons reçu une espèce de carte et à partir de ce
14 moment-là, cela a été très différent.
15 Ce que je n'ai pas dit, c'est que, alors que nous nous trouvions
16 dans le cinéma, les membres du HVO nous apportaient régulièrement de la
17 nourriture.
18 La nourriture que nous recevions consistait en une conserve et
19 un quart de pain. Par la suite, des hommes ont été amenés, un visiteur m'a
20 rendu visite à une occasion, des amis, des parents à moi sont venus, des
21 jeunes filles sont venues qui m'ont dit que les Croates expulsaient les
22 gens de leur domicile et que les gens expulsés ne savaient que faire.
23 Auparavant, j'avais déjà entendu parler de ces expulsions. Je
24 sais que tout ceci s'accomplissait par la force et que l'on n'était pas
25 censé offrir la moindre résistance. Je leur ai dit d'attendre, parce qu'on
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1 avait déjà entendu des rumeurs circuler selon lesquelles nous allions être
2 libérés. Une jeune fille de ma famille m'a dit qu'il y avait beaucoup de
3 femmes chez nous, dans notre maison car ces femmes avaient été elles-mêmes
4 expulsées de leur domicile. Je ne savais trop que dire à ce moment-là. Je
5 me suis contenté de dire ceci : "Si vous voulez, vous pouvez partir, mais
6 si vous voulez, attendez que je sois libéré". Je ne cessais de penser à ma
7 mère, à ma grand-mère invalide et je savais qu'il était très difficile de
8 les évacuer vers Zenica ou vers Travnik.
9 La Croix-Rouge était arrivée un jour, il y avait de nombreux
10 véhicules de la Croix-Rouge aux alentours. Les soldats se déplaçaient ou
11 déménageaient d'une pièce à l'autre, ils nous ont dit qu'il fallait plier
12 bagage, prendre nos biens et que nous allions être déménagés quelque part.
13 Nous sommes tous allés dans le hall du cinéma qui était la salle
14 la plus grande dans ce complexe. Nous étions tous alignés, les
15 représentants de la Croix-Rouge étaient assis à une table, disposant d'une
16 liste qu'ils avaient devant eux, et si vous vous avanciez vers eux, vous
17 leur montriez la carte que vous aviez reçue de la Croix-Rouge et ils vous
18 demandaient où vous vouliez aller.
19 Ce qu'ils offraient, c'était Travnik, Zenica, Stari Vitez et
20 Kruscica. Et puis, si vous vouliez rentrer chez vous, vous étiez libre de
21 le faire. C'est ce que j'ai choisi. Parce qu'où aller ? C'était le seul
22 endroit où je pouvais aller. Je me disais que le passé était le passé, que
23 tout se terminerait bien après tout. Je suis rentré à pied, chez moi, dans
24 mon quartier de Rijeka, sans rencontrer de problème. En route, j'ai vu que
25 des maisons musulmanes avaient été mises à feu et incendiées dans cette
Page 2229
1 partie de la ville.
2 Arrivé à la maison, j'ai constaté la situation qui m'attendait :
3 la maison était remplie de gens qui avaient été expulsés de leur domicile.
4 Notre maison était le seul endroit où ils avaient pu s'abriter. Ils
5 étaient heureux de me voir, mais lorsqu'ils ont commencé à parler et à me
6 raconter ce qui se passait, je me suis rendu compte que la situation
7 n'était pas bonne. Ces personnes n'osaient pas quitter la maison. Elles
8 mangeaient ce qu'il y avait dans la maison. Parfois, elles demandaient à
9 un soldat du HVO d'aller leur acheter quelque chose, bien sûr moyennant de
10 l'argent. Donc il y a eu des cas de ce genre...
11 J'étais très malade, physiquement j'étais épuisé. J'étais aussi
12 tout à fait bouleversé, nerveux du fait de ma détention, je n'osais plus
13 marcher, sortir. J'étais alité. Je n'osais plus sortir du tout.
14 Une voisine musulmane, qui travaillait au centre médical de
15 Vitez, a constaté l'état dans lequel je me trouvais. Elle m'a examiné.
16 Elle m'a donné quelques comprimés, quelques piqûres, et elle m'a dit que
17 je ferais mieux de partir.
18 En effet, elle avait entendu dire dans tout Vitez que ceux qui
19 avaient été remis en liberté et autorisés à rentrer chez eux seraient
20 repris, rassemblés de nouveau et à Vitez, au centre médical, elle a obtenu
21 un document qui disait que j'étais censé me rendre à l'hôpital de Travnik.
22 Je suis donc parti en ambulance, l'ambulance du centre médical
23 de Vitez. Il y avait aussi un représentant de la Croix-Rouge et une femme
24 croate enceinte qui devait être emmenée en toute urgence à l'hôpital de
25 Travnik pour y accoucher. Nous sommes arrivés ensemble à Travnik. J'ai été
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1 tout de suite emmené à l'hôpital. Un examen médical a été effectué et j'ai
2 été envoyé au service de pneumologie où j'ai passé beaucoup de temps.
3 M. Riad (interprétation). - J'aimerais bien vous demander une
4 précision, Monsieur Beso. Il y a quelques instants, vous avez dit qu'un
5 matin vous aviez constaté que des Musulmans de premier plan avaient été
6 tous emmenés. Emmenés par qui ? Par la Croix-Rouge ou par le HVO ? On nous
7 a parlé de professeurs, de personnes éminentes, des personnes de haute
8 volée. Toutes ces personnes avaient été emmenées ?
9 M. Beso (interprétation). - Non, par la suite j'ai appris que
10 c'était le HVO qui les avait emmenées. J'en ai entendu parler plus tard
11 après avoir été libéré de la prison. Ils ont été emmenés à Kaonik, à
12 Busovaca et ils y ont passé un certain temps. Et puis eux aussi ont été
13 libérés. Mais ils n'étaient pas là au moment où nous avons été inscrits
14 dans les registres de la Croix-Rouge.
15 M. Riad (interprétation). - Savez-vous ce qui leur est advenu
16 par la suite ? Ont-ils été accueillis par la Croix-Rouge ou sont-ils
17 rentrés chez eux ?
18 M. Beso (interprétation). - Je ne sais pas.
19 M. Riad (interprétation). - Merci.
20 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur Beso, revenons à cet
21 hôpital de Travnik. Combien de temps à peu près y avez-vous passé ?
22 M. Beso (interprétation). - Un mois et demi, peut-être deux
23 mois. Les conditions étaient très difficiles : pénurie de médicaments,
24 pénurie d'aliments. Je ne cessais de m'inquiéter du sort de ma grand-mère,
25 de ma mère : que leur était-il advenu ? Je sais bien que les autres femmes
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1 qui étaient dans la maison avec elle étaient jeunes, elles n'avaient
2 aucune difficulté à partir, mais je n'avais personne à qui poser cette
3 question. Les lignes téléphoniques ne fonctionnaient pas. Je n'ai vu
4 personne. J'ai décidé d'aller à Kruscica, un village proche de Vitez.
5
6 C'est là que se trouvait mon frère. Je me suis dit que peut-être lui
7 aurait des renseignements, mais lui non plus n'en avait pas. Les amateurs
8 radio nous ont aidés à prendre contact. Nous avons contacté nos parents de
9 Zenica qui, eux non plus, n'avaient aucun renseignement sur ma mère et ma
10 grand-mère. Par la suite, après la signature du cessez-le-feu, nous avons
11 découvert qu'elle se trouvait à Rijeka, tout du long... Mais vers la fin
12 de la guerre, ma grand-mère, invalide, est morte de mort naturelle. La
13 Croix Rouge l'a enterrée dans le village deGacice près de Vitez.
14 A partir de ce moment-là, ma mère a continué à vivre à Rijeka et
15 lorsque le cessez-le-feu a été signé, c'était la fête du Bajraim. A ce
16 moment-là, il y avait davantage de liberté de mouvements. Il y avait
17 encore des points de contrôle sur la route. Ma mère a pris le bus, elle
18 est partie en visite et elle n'est jamais rentrée chez elle. Elle a passé
19 un certain temps à Stari Vitez par la suite, ville qui était tenue par
20 l'armée de la République de Bosnie-Herzégovine et puis elle est restée
21 chez nous à Kruscica, là où j'étais.
22 Elle nous a décrit sa vie à Rijeka. Elle a dit qu'elle était
23 toujours dans la maison à se cacher, qu'elle n'osait pas sortir. Un voisin
24 croate a pris la vache et l'a abattu. Le frère de ce voisin s'est installé
25 dans notre maison, ma mère a insisté pour qu'il le fasse. Il a emmenagé
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1 avec sa femme et ses enfants. A partir de ce moment-là, ces gens l'ont
2 aidé. Ils se sont occupés de la nourriture parce que ma mère est malade
3 aussi, elle a un problème cardiaque. Ces gens ont aussi acheté des
4 médicaments pourtant très chers pour elle.
5 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur Beso, vous êtes revenu à
6 votre domicile et vous avez dit qu'il y avait beaucoup de vos parents qui
7 avaient été expulsés de leur propre domicile dans le quartier de Rijeka,
8 est-ce bien exact ?
9 M. Beso (interprétation). - Oui. C'étaient surtout des femmes et
10 des enfants puisque tous les hommes étaient incarcérés.
11 M. Kehoe (interprétation). - Le HVO a-t-il expulsé ces femmes de
12 leur domicile ?
13 M. Beso (interprétation). - Elles ont été expulsées par des Croates qui
14 venaient de Zenica, qui eux-mêmes n'avaient aucun domicile. Eux avaient été
15 expulsés de chez eux et se sont simplement installés. Ils avaient
16 simplement emporté quelques sacs avec quelques rares objets qui leur
17 appartenaient, mais ils n'étaient pas autorisés à prendre quoi que ce soit.
18
19 M. Kehoe (interprétation). - C'étaient donc des femmes qui
20 avaient été expulsées de chez elles. Que leur est-il advenu ?
21 M. Beso (interprétation). - Je ne sais pas exactement. Tout ce
22 que je sais, c'est que dans ces quelques maisons qui appartenaient à nos
23 familles, nos parents... En tout cas, ces gens se sont installés et sont
24 restés, puis ils ont franchi les lignes du HVO et de l'armée de Bosnie-
25 Herzégovine en direction de Zenica. Ces personnes ont dû continuer à vivre
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1 dans les camps de réfugiés. Ils y sont parvenus à pied.
2 M. Kehoe (interprétation). - Pourrions-nous revenir à la photo
3 précédente de la pièce 56, elle se trouve en dessous de la photographie
4 aérienne se trouvant sur le chevalet.
5 M. Riad (interprétation). - Puis-je saisir cette occasion pour
6 demander une autre précision au témoin ?
7 Vous avez dit que votre mère avait invité vos voisins croates à
8 venir vivre avec vous. Ces voisins étaient bien croates, ceux qui sont
9 venus l'aider, en lui donnant des médicaments notamment ?
10 M. Beso (interprétation). - Oui.
11 M. Riad (interprétation). - Ce qui veut dire que les rapports de
12 voisinage entre Musulmans et Croates étaient bons ? Ou a-t-elle voulu se
13 protéger en faisant cela ?
14 M. Beso (interprétation). - Elle a fait cela pour se protéger.
15 C'était la raison qui la motivait. Parce que les gens de Rijeka, et
16 certains des Croates étaient prêts à aider, d'autres pas.
17 M. Riad (interprétation). - Mais vous vous êtes senti en
18 sécurité lorsque cette famille croate est venu vivre avec vous ?
19 M. Beso (interprétation). - Pas moi en tout cas, car je n'étais
20 pas là à ce moment-là puisque j'étais à l'hôpital.
21 M. Riad (interprétation). - Oui, je voulais dire votre famille. Merci.
22
23 M. Kehoe (interprétation). - Puis-je demander à M. Beso de se
24 lever et d'examiner la pièce 56 en utilisant le pointeur ?
25 Monsieur Beso, veuillez nous indiquer la région que vous avez
Page 2234
1 décrite comme étant Krcevina.
2 M. Beso (interprétation). - Voici le village de Krcevina.
3 M. Kehoe (interprétation). - Et l'emplacement exact où vous creusiez ces
4 tranchées, se trouve-t-il sur la photo ou hors du champ de la photo ?
5
6 M. Beso (interprétation). - Je ne me retrouve pas tout à fait
7 sur cette carte, mais je crois que c'est à une certaine distance du
8 village de Krcevina, c'est là que les lignes de front avaient été
9 constituées. Je creusais à l'extérieur du village. Il y avait peut-être
10 une chapelle ou, en tout cas, un petit édifice à proximité.
11 M. Kehoe (interprétation). - Puis-je demander l'aide de
12 M. l'Huissier pour que cette carte soit placée au-dessus des deux autres.
13 C'est donc une photocopie de la pièce 29. Je suppose qu'à ce stade il
14 s'agira de la pièce 29 F, Madame Fauveau, si je ne m'abuse ?
15 Mme le Greffier. - Il s'agirait du document 29 F.
16 M. Kehoe (interprétation). - Pendant que l'on met la carte,
17 puis-je m'approcher ?
18 M. le Président. - Bien sûr. C'est toujours pour demander à quel
19 endroit étaient les tranchées ?
20 M. Kehoe (interprétation). - Oui. Nous allons utiliser cette carte pour
21 préciser l'endroit où ces tranchées étaient creusées. Nous en aurons ainsi
22 terminé de l'interrogatoire principal de ce témoin. Une fois de plus en
23 utilisant ce feutre, pourriez-vous entourer d'un cercle les trois endroits
24 où vous avez creusé des tranchées ?
25 M. Beso (interprétation). - Il y avait le village de Krcevina, de Ciganluk.
Page 2235
1
2 M. Kehoe (interprétation). - Vous l'appelez aussi Sofa ce
3 village de Ciganluk ?
4 M. Beso (interprétation). - Oui. Et aussi Perici.
5 M. Kehoe (interprétation). - Vous avez donc apposé trois
6 chiffres romains : I, II et III sur ces trois endroits. Et y a-t-il
7 d'autres endroits où les gens creusaient des tranchées là aussi. Vous
8 souviendriez-vous de ces endroits ?
9 M. Beso (interprétation). - Jardol, c'est un village, Mijador*
10 M. Kehoe (interprétation). - Fort bien. Y a-t-il d'autres endroits ?
11
12 M. Beso (interprétation). - La maison de Zanice que nous appelons Brnice,
13 près du village de Vranijska, Kuber. Je ne sais pas exactement où se
14 trouvaient les lignes puisque je n'étais pas présent à ces endroits.
15
16 Quand j'étais au cinéma, les prisonniers ont dit qu'ils s'étaient
17 approchés du stade en direction de Stari Vitez pour creuser des tranchées
18 et que, là aussi, il y avait des tranchées.
19 M. Kehoe (interprétation). - Vous avez également parlé d'un
20 village : Krizanjceve Kuce ? C'est bien cela ?
21 M. Beso (interprétation). - Il y a un village qui s'appelle Krizancevo Selo
22 et puis un ensemble de maisons où vivent les Krizance. Nous l'appelons la
23 colline rouge. Cela se trouve à proximité de Dubravica, mais je n'arrive
24 pas vraiment à me retrouver sur cette carte. C'est par là, à peu près.
25
Page 2236
1 M. Kehoe (interprétation). - Vous avez indiqué la région dans
2 laquelle vous pensez qu'il y a ce village que vous venez de citer.
3 M. Beso (interprétation). - Oui, mais je ne peux pas vous donner
4 l'emplacement des lignes.
5 M. Kehoe (interprétation). - Pourriez-vous indiquer d'autres
6 emplacements dont vous auriez entendu parler ?
7 M. Beso (interprétation). - Non, pas que je me souvienne.
8 M. Kehoe (interprétation). - Fort bien, vous pouvez prendre
9 votre place.Monsieur Beso, lorsque vous vous êtes rendu dans la maison de
10 votre frère, à Kruscica, après votre séjour à l'hôpital, y a-t-il eu un
11 moment où vous avez rejoint les rangs de l'armée de la Bosnie-
12 Herzégovine ?
13 M. Beso (interprétation). - Oui, en effet.
14 M. Kehoe (interprétation). - Vous êtes, à l'heure actuelle,
15 toujours membre de l'armée de Bosnie-Herzégovine ?
16 M. Beso (interprétation). - Oui, je suis soldat de carrière. Je
17 fais partie de l'armée de la fédération de la République de Bosnie-
18 Herzégovine.
19 M. Kehoe (interprétation). - Quel est votre grade au sein de
20 cette armée ?
21 M. Beso (interprétation). - Je n'ai pas de grade, je suis un
22 simple soldat.
23 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur le Président, puis-je
24 avoir un instant pour entrer en discussion avec mes collègues, s'il vous
25 plaît.
Page 2237
1 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, pour l'instant je
2 n'ai pas d'autre question à poser à M. Beso. J'aimerais simplement verser
3 au dossier la pièce 29f de l'accusation, la pièce 50b et la pièce 56b.
4 M. le Président. - Je pense que la défense va procéder au
5 contre-interrogatoire. Vous avez des questions ? Monsieur Beso, avant que
6 vous ne répondiez, m'entendez-vous ?
7 M. Beso (interprétation). - Oui, absolument.
8 M. le Président. - Avant que vous ne répondiez aux questions de
9 Me Nobilo, je suppose que le Procureur vous l’a dit, vous êtes un témoin
10 pour le Procureur.
11 Vous êtes devant un Tribunal. Vous avez un homme, qui est dans
12 le box qui est accusé de crimes, de crimes graves. Il doit être défendu,
13 donc vous allez être maintenant soumis à des questions que vont vous poser
14 le ou les avocats de la défense. Je suppose qu'on vous l'a dit.
15 Après quoi, des questions complémentaires vous seront
16 éventuellement posées par l'accusation dont vous êtes le témoin, et peut-
17 être quelques questions par les Juges.
18 Maître Nobilo, vous avez la parole.
19 M. Nobilo (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur le
20 Président. Bonjour, Monsieur Beso. Je m'appelle Anto Nobilo. Je suis le
21 conseil de la défense pour le général Blaskic.
22 Pourriez-vous me dire à quel moment les personnes, les
23 habitants, de Bosnie-Herzégovine ont refusé, en masse, de rejoindre les
24 rangs de l'armée de Bosnie-Herzégovine ? Pouvez-vous me donner une date ?
25 M. Beso (interprétation). - Lorsque la guerre a éclaté entre la
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1 Slovénie et la Croatie.
2 M. Nobilo (interprétation). - Vous avez travaillé dans un
3 garage. Vous étiez mécanicien, au sein de la JNA. Pouvez-vous nous dire
4 s'il s'agissait d'un service de logistique ? Qu’en était-il des autres
5 personnes qui appartenaient à ce service de logistique, les cuisiniers,
6 les gardes, etc ? Suivaient-ils la même formation ?
7 M. Beso (interprétation). - Je ne sais pas exactement. Comme je
8 l’ai dit, j'ai eu une formation particulière. Je recevais une formation
9 spécialisée, en tant que cuisinier, en tant que boulanger.
10 M. Nobilo (interprétation). - Je comprends fort bien. Mais, je
11 parle des troupes d'infanterie et de la formation reçue par ces troupes ?
12 M. Beso (interprétation). - Je ne sais pas exactement.
13 M. Nobilo (interprétation). - Saviez-vous que le
14 Président Itzetbegovic avait proclamé un avis de mobilisation générale en
15 Bosnie-Herzégovine ?
16 M. Beso (interprétation). - De mobilisation générale ? Croyez-
17 moi, je n'en suis pas absolument sûr. Je ne sais pas de quoi vous me
18 parlez exactement. Voyez-vous, je n'étais pas du tout engagé en matière de
19 politique. Je ne regardais pas la télévision.
20 M. Nobilo (interprétation). - Mais de jeunes hommes rejoignaient
21 les rangs de l'armée. Etait-ce sur une base volontaire ? Ou bien ces
22 personnes étaient-elles mobilisées et obligées de rejoindre l'armée ?
23 M. Beso (interprétation). - Pour la plupart, les jeunes gens
24 s'engageaient volontairement. Lorsqu'on a vu ce qui se passait en Bosnie-
25 Herzégovine, c'est la télévision de la Bosnie-Herzégovine qui montrait
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1 tout cela, les points de vue de chacun ont commencé à changer. Nous avons
2 vu que la JNA s'était retirée de la Slovénie, qu’elle était arrivée en
3 Bosnie. Nous avons compris que tout allait changer.
4 M. Nobilo (interprétation). - Je comprends, mais vous-même, à
5 Vitez, avez-vous été appelé par le ministère de la Défense ? Ou bien vous
6 êtes-vous rendu en quelque endroit de votre propre initiative ?
7 M. Beso (interprétation). - On m'a appelé effectivement une
8 fois. Au départ, j'ai refusé. Par la suite, j'ai rejoint les rangs, mais
9 de moi-même.
10 M. Nobilo (interprétation). - Mais, au départ, on vous a bien
11 appelé. Qu’en était-il de vos collègues, de vos voisins musulmans ? Je
12 pense aux Musulmans, plus particulièrement. Ont-ils, eux aussi, reçu un
13 appel ? Se sont-ils joints à l'armée ?
14 M. Beso (interprétation). - Cela dépendait des cas. Certains
15 oui, d’autres non. Certains se sont engagés volontairement, d’autres ont
16 quitté Vitez pour se rendre à l'étranger. Mais tout dépendait de la
17 situation dans laquelle se trouvait chacun.
18 M. Nobilo (interprétation). - Savez-vous quel était l’âge
19 limite, l'âge minimum et l’âge maximum, pour entrer au sein de la JNA ?
20 M. Beso (interprétation). - La condition absolue était que les
21 personnes qui avaient fait leur service dans la JNA pouvaient tout à fait
22 en faire partie par la suite. Si vous aviez l'âge requis, vous pouviez
23 rejoindre les rangs de l'armée.
24 M. Nobilo (interprétation). - Mais quel était l'âge maximum pour
25 entrer dans l'armée ?
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1 M. Beso (interprétation). - Je n'en sais rien.
2 M. Nobilo (interprétation). - Qui vous a appelé pour le premier
3 appel que vous avez reçu ? Les premiers papiers, que vous avez reçus, par
4 qui ont-ils été envoyés ?
5 M. Beso (interprétation). - J'ai reçu ces documents du ministère
6 de la Défense à Vitez.
7 M. Nobilo (interprétation). - A quel moment ?
8 M. Beso (interprétation). - Je ne sais pas exactement. Je n'ai
9 pas de date précise à vous donner. Je pense que c'est au moment où il y
10 avait des problèmes vers Bosanski Brod. Je crois que c’était à ce moment-
11 là.
12 M. Nobilo (interprétation). - Etait-ce en 1991, en 1992, en
13 1993 ? Pouvez-vous nous donner l'année, au moins ?
14 M. Beso (interprétation). - En 1992, si je me rappelle bien.
15 M. Nobilo (interprétation). - Où se trouvaient les officier à
16 Vitez, les officiers du secrétariat national de la Défense ?
17 M. Beso (interprétation). - Ils se trouvaient dans le centre où
18 était située l'assemblée municipale de Vitez.
19 M. Nobilo (interprétation). - Lorsque vous avez rejoint l’armée
20 de votre propre gré, la deuxième fois, où vous êtes-vous rendu ? Dans quel
21 bâtiment vous êtes-vous rendu ?
22 M. Beso (interprétation). - Je me suis rendu dans un bâtiment
23 qui se trouve à Stari Vitez. C’était, en fait, le bâtiment qui abritait le
24 service des pompiers à Stari Vitez.
25 M. Nobilo (interprétation). - A quel moment cela s’est-il
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1 produit ? En quelle année ?
2 M. Beso (interprétation). - En 1992.
3 M. Nobilo (interprétation). - Etait-ce vers la fin de
4 l'année 1992 ou bien était-ce un peu plus tôt ?
5 M. Beso (interprétation). - Etait-ce en hiver, je ne sais pas.
6 Peut-être était-ce en automne ou en hiver, au début de l'hiver, je ne sais
7 plus très bien.
8 M. Nobilo (interprétation). - Lorsque vous avez rejoint les
9 rangs de l'armée, dans quelle unité êtes-vous entré ? Nous avons entendu
10 que vous aviez fait partie d'une unité de surveillance, mais à quelle
11 unité apparteniez-vous ?
12 M. Beso (interprétation). - Comment vous expliquer cela ? Je
13 n'appartenais pas à une unité, en particulier. Simplement, j'ai reçu cette
14 affectation, il fallait que je m'occupe de cette station de relais de
15 télévision, c'est tout. Combien d’hommes y avait-il dans ce groupe, je ne
16 sais pas. Il y avait des personnes plus jeunes, des personnes plus âgées.
17 M. Nobilo (interprétation). - Et votre frère ? A-t-il rejoint
18 les rangs de l'armée de Bosnie-Herzégovine de façon volontaire ou a-t-il
19 été appelé ?
20 M. Beso (interprétation). - Il s’est présenté de façon
21 volontaire.
22 M. Nobilo (interprétation). - Dans quelle unité a-t-il été
23 affecté ?
24 M. Beso (interprétation). - Dans une unité de l'infanterie.
25 M. Nobilo (interprétation). - Où se trouvait le commandement,
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1 les bâtiments du commandement ?
2 M. Beso (interprétation). - Dans la vieille ville de Vitez.
3 Pendant un certain temps, il y a eu comme un quartier général régional qui
4 se trouvait dans le village de Novaci, près de l'usine Impregnacida, dans
5 un bureau qui appartenait à une entreprise de Vitez.
6 M. Nobilo (interprétation). - Où se trouvait votre commandement,
7 votre état-major ?
8 M. Beso (interprétation). - Dans la vieille ville de Vitez, puis
9 à Stari Vitez, enfin à Kruscica.
10 M. Nobilo (interprétation). - Mais à quel bâtiment étiez-vous
11 affecté ? A qui deviez-vous faire rapport, à quelqu'un en particulier ? Y
12 avait-il quelqu'un à qui vous deviez adresser certains rapports, certaines
13 informations ?
14 M. Beso (interprétation). - Quand je suis arrivé à Stari Vitez,
15 on m'a dit quelle était ma mission. Je devais m'occuper de la station de
16 relais. Je m'y rendais de mon domicile. C'est tout ce que j'avais à faire.
17 M. Nobilo (interprétation). - Aviez-vous un commandant, enfin un
18 supérieur hiérarchique ?
19 M. Beso (interprétation). - Nous étions trois ou quatre par
20 équipe. Nous n'avions donc pas besoin d’un commandant.
21 M. Nobilo (interprétation). - Qui décidait qui appartenait à
22 telle ou telle équipe ?
23 M. Beso (interprétation). - Cela, je ne le sais pas exactement.
24 Nous nous organisions nous-mêmes, selon nos disponibilités. C’est ainsi
25 que nous procédions.
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1 M. Nobilo (interprétation). - Lorsque vous tombiez d'accord sur
2 quelque chose, en faisiez-vous rapport à quelqu'un, en faisiez-vous part à
3 quelqu’un ?
4 M. Beso (interprétation). - Non. Il fallait simplement que
5 quelqu'un se trouve au relais de télévision, c’était la chose la plus
6 importante.
7 M. Nobilo (interprétation). - Vous portiez un uniforme ?
8 M. Beso (interprétation). - Non.
9 M. Nobilo (interprétation). - Vous aviez des armes ?
10 M. Beso (interprétation). - Non. J'avais simplement un révolver,
11 un calibre de 9 millimètres. J’avais un permis de port d'arme, émis par le
12 SUP à Vitez, cela depuis bien avant la guerre. Cette arme a été laissée
13 par un proche qui est parti pour la Suisse.
14 Lorsque j'ai été pris, capturé, lorsqu'ils ont fouillé mon
15 domicile, un des membres du HVO, Rajko Matkovic, me l’a prise. Je lui ai
16 montré le permis de port d'arme, mais il s’en est saisi tout de même.
17 M. Nobilo (interprétation). - Vos camarades, ceux qui
18 s'occupaient avec vous du relais de télévision, portaient-ils des
19 uniformes ?
20 M. Beso (interprétation). - Non. Certains d’entre eux portaient
21 des pantalons d’uniforme. Mais nous n’avions pas vraiment d'uniforme, ni
22 d’arme. Vraiment, rien du tout.
23 M. Nobilo (interprétation). - Qu’en est-il du relais de
24 télévision ? Est-ce que quelqu'un à l'intérieur portait une arme ?
25 M. Beso (interprétation). - Il y avait un fusil automatique
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1 russe. Il se trouvait-là et il est toujours resté dans cette station,
2 c'était un PPS.
3 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que les unités du HVO se
4 sont à un moment donné occupées de ce relais de télévision ? Ou bien est-
5 ce simplement l'armée de Bosnie-Herzégovine qui s'en occupait ?
6 M. Beso (interprétation). - Cette station a été créée en 1986
7 ou 1987. Nous nous trouvions dans une espèce de vallée, nous étions
8 entourés de montagnes. Par conséquent, il était difficile de recevoir les
9 chaînes et particulièrement dans le village de Kruscica. Je crois que la
10 construction a été autofinancée. La station de Sarajevo a aidé l’armée de
11 Bosnie-Herzégovine à trouver l'emplacement et à installer ce relais.
12 M. Nobilo (interprétation). - Pendant la guerre, est-ce que le
13 HVO, à un moment donné, a investi les lieux ou bien la station est-elle
14 toujours restée entre les mains de l'armée de Bosnie-Herzégovine ?
15 M. Beso (interprétation). - Je ne crois pas que le HVO soit
16 jamais arrivé là, car elle se trouvait dans un village musulman.
17 M. Nobilo (interprétation). - Quel était le village le plus
18 proche de ce poste de relais ?
19 M. Beso (interprétation). - Le village de Kruscica et de
20 Vranska.
21 M. Nobilo (interprétation). - Lorsque vous vous rendiez à ce
22 poste de relais, passiez-vous par Kruscica ?
23 M. Beso (interprétation). - Non, je traversais Rijeka, puis il y
24 avait un raccourci que j'empruntais. Il était beaucoup plus rapide de
25 l’emprunter.
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1 M. Nobilo (interprétation). - A Kruscica, vous vous trouviez
2 près du motel Lovac, en 1992 ?
3 M. Beso (interprétation). - Oui, j'avais une petite amie à cet
4 endroit-là. Souvent, j'allais à ce motel.
5 M. Nobilo (interprétation). - Y avez-vous vu le HVO dans ce
6 motel ?
7 M. Beso (interprétation). - Oui, il se trouvait dans le motel.
8 M. Nobilo (interprétation). - Il s'appelait le motel Ribnjak à
9 cette époque-là. Puis, il y avait également le motel Lovac. Oui, il se
10 trouvait-là.
11 M. Nobilo (interprétation). - Savez-vous qui occupait le motel
12 Lovac en 1992 ?
13 M. Beso (interprétation). - Je ne sais pas.
14 M. Nobilo (interprétation). - Etait-ce un état-major ?
15 M. Beso (interprétation). - Non, je ne sais pas exactement. Il y
16 avait peut-être des troupes, mais je n'en suis pas sûr.
17 M. Nobilo (interprétation). - Où vous trouviez-vous le
18 15 avril 1993 ?
19 M. Beso (interprétation). - Le 16, je sais que les tirs ont
20 commencé.
21 M. Nobilo (interprétation). - Mais la veille de cela où étiez-
22 vous ?
23 M. Beso (interprétation). - Je me trouvais dans la maison de ma
24 petite amie. Nous passions beaucoup de temps ensemble. Je me trouvais chez
25 elle, à Kruscica. J'y suis resté jusque tard, il faisait nuit. Je ne
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1 savais rien de tout cela. Vers 22 heures ou 22 heures 30, je suivais la
2 route qui va de Kruscica à ma maison, cela prend peut-être 10 minutes en
3 marchant, je n'ai rien remarqué de spécial. Mais, près de ma maison, j'ai
4 rencontré deux voisins, des Croates. Ils n'étaient pas en uniforme, ils
5 portaient des habits civils. Nous nous sommes salués et c'est tout.
6 M. Nobilo (interprétation). - La veille de ce jour-là, donc
7 le 14, où vous trouviez-vous ?
8 M. Beso (interprétation). - Le 14 ?
9 M. Nobilo (interprétation). - Le 15, vous étiez avec votre
10 petite amie. Mais la veille, où étiez-vous ?
11 M. Beso (interprétation). - Peut-être étais-je à ce poste de
12 relais de télévision.
13 M. Nobilo (interprétation). - Le 14, le 15, au cours de ces deux
14 jours avez-vous vu des convois, des camions, des attroupements de soldats,
15 deux cents, trois cents soldats, des troupes du HVO ? Avez-vous vu des
16 rassemblements de troupes ou quoi que ce soit de ce genre ?
17 M. Beso (interprétation). - Voyez-vous, la situation était
18 extrêmement tendue.
19 M. Nobilo (interprétation). - Mais pourriez-vous, s’il vous
20 plaît, répondre à ma question ?
21 M. Kehoe (interprétation). - Me Nobilo a posé une question, et
22 lorsque le témoin a répondu, M. Nobilo l'a interrompu et a posé une autre
23 question. Je voudrais simplement demander à Maître Nobilo de donner au
24 témoin le temps de finir sa réponse.
25 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, j'entends
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1 la réponse très vite, je l’ai immédiatement. Ce n'est pas votre cas ou le
2 cas d'autres personnes qui se trouvent dans le prétoire. Le témoin a
3 commencé à répondre et a dit autre chose, et je lui ai demandé simplement
4 de répondre à ma question. Je ne voulais pas du tout l'interrompre.
5 Mais, je vais répéter ma question. Ma question était la
6 suivante. Le 14 et le 15 avril, avez-vous vu un convoi, des camions
7 transportant des membres du HVO ? Avez-vous vu des troupes d'infanterie,
8 des rassemblements de cent, deux cents, trois cents personnes ?
9 M. Beso (interprétation). - Non, mais peut-être que je pourrais
10 élaborer sur ce point. Je n'ai pas vu de convois de véhicules, je n’ai pas
11 vu de rassemblements de soldats. Mais, à Vitez, à cette époque-là, la
12 situation était extrêmement tendue.
13 Si on se rendait dans la partie de Vitez où se trouvait le
14 cinéma, où se trouvait le MUP, dans ces endroits-là il y avait toujours
15 des soldats, des soldats du HVO notamment, qui s’y tenaient en permanence.
16 Il y en avait également près de la place du marché, près du centre
17 médical. Sans arrêt, ils passaient devant ma maison, dans une voiture. Ils
18 se rendaient à Kruscica et y restaient dans l'hôtel.
19 M. Nobilo (interprétation). - Mais les 14 et 15 avril, avez-vous
20 vu un attroupement, des troupes nombreuses ou pas ?
21 M. Beso (interprétation). - Non.
22 M. Nobilo (interprétation). - Vous avez dit que la situation
23 était extrêmement tendue, l’atmosphère très électrique. Pourquoi en êtes-
24 vous devenu conscient ? Qu'est-ce qui vous a fait penser que la situation
25 était tendue à ce point ? Pouvez-vous décrire, de façon plus détaillée,
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1 cette situation ? D’où venait cette tension ?
2 M. Beso (interprétation). - Il me faudrait un peu de temps pour
3 répondre à cette question. A Vitez, comme partout ailleurs, on sort le
4 soir, on va dans des cafés. Nombre de cafés musulmans avaient été
5 détruits. Ils avaient été plastiqués pendant la nuit. Pendant un certain
6 temps, le dinar bosniaque ne pouvait pas être utilisé sur la place du
7 marché. Tous ces événements, cette accumulation d'événements, ont fait que
8 les gens ont commencé à rester chez eux, qu'il y avait plus de troupes qui
9 circulaient dans la ville. Voilà ce que je veux dire, quand je dis que la
10 situation était tendue.
11 M. Nobilo (interprétation). - A Rijeka, y avait-il un café
12 croate qui a explosé ?
13 M. Beso (interprétation). - A Rijeka ? Peut-être qu'un café a
14 été touché, mais il n'a pas été plastiqué. Il a continué à fonctionner. Je
15 ne sais pas exactement à quel moment cela s'est produit, je ne sais pas
16 qui était responsable de cet acte. Vraiment, je ne sais pas.
17 M. Nobilo (interprétation). - Qu'entendez-vous par : "il a été
18 touché" ?
19 M. Beso (interprétation). - Il a reçu un projectile. Mais quelle
20 arme a été utilisée, je n’en ai absolument aucune idée. Je ne passais pas
21 souvent par là. Je passais plutôt par Cumaria pour me rendre à Vitez.
22 M. Nobilo (interprétation). - Le propriétaire était bien
23 croate ?
24 M. Beso (interprétation). - Absolument. Il s'agit seulement d'un
25 cas. Pratiquement, tous les cafés appartenant à des Musulmans ont été
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1 plastiqués. Il n’est rien resté de ces cafés.
2 M. Nobilo (interprétation). - Hormis ces cafés, ces bars, à
3 Vitez, qui ont été plastiqués, qu’en était-il des rapports entre voisins ?
4 Y avait-il des gens qui étaient harcelés par d'autres personnes ? Est-ce
5 que certains de vos voisins ont été maltraités à Rijeka ?
6 M. Beso (interprétation). - Non, pas de violence. Simplement,
7 lorsque vous saluiez certaines personnes, elles se détournaient de vous.
8 On ne peut pas dire qu'il y avait vraiment de la violence. Mais tout le
9 monde avait peur. Certaines personnes portant des masques arrivaient dans
10 nos maisons et se livraient à des actes de pillage. Mais ce n'est pas
11 arrivé à Rijeka, dans notre quartier.
12 M. Nobilo (interprétation). - Lorsque vous avez été arrêté, puis
13 lorsque vous avez été inscrit dans les registres de la Croix-Rouge, vous
14 a-t-on inscrit en tant que civil ou militaire ?
15 M. Beso (interprétation). - Ils n'ont même pas demandé quel
16 était mon statut.
17 M. Nobilo (interprétation). - Ils n'ont pas posé ce genre de
18 question ?
19 M. Beso (interprétation). - Non, simplement, il fallait donner
20 son nom et ils vous attribuaient un chiffre.
21 M. Nobilo (interprétation). - Mais vous portiez des habits
22 civils et personne ne vous a demandé si vous étiez un civil ou un soldat ?
23 M. Beso (interprétation). - Non, ils ne m'ont vraiment pas posé
24 ce genre de question, du moins je ne m’en souviens pas. Je ne suis pas
25 absolument certain.
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1 M. Nobilo (interprétation). - Parmi les civils qui se trouvaient
2 avec vous en détention, quelle était la moyenne d'âge des hommes qui se
3 trouvaient là, quel âge avaient-il approximativement ?
4 M. Beso (interprétation). - Au début, il y avait des prisonniers
5 qui avaient 16 ans, les plus jeunes avaient 16 ans, je ne sais pas quel
6 âge avaient les plus âgés. Cela a duré un certain temps puis ceux qui
7 étaient malades ou d'un certain âge ont été relâchés et ont pu rentrer
8 chez eux.
9 M. Kehoe (interprétation). - Vous ne vous rappelez pas quelle a
10 été la durée de votre séjour dans cette cave ?
11 M. Beso (interprétation). - Très franchement non, je ne sais
12 pas.
13 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, peut-être
14 le moment est-il venu de faire la pause.
15 M. le Président. - En effet, nous reprendrons à 14 heures 30.
16 (L’audience, suspendue à 13 heures est reprise à 14 heures 35.)
17 (L'accusé est introduit dans la salle d'audience)
18 M. le Président. - Nous reprenons.
19 M. Nobilo (interprétation). - Quand vous avez atteint la fin de
20 vos soins à l'hôpital de Travnik, pouvez-vous nous dire qui dirigeait ?
21 Quelle armée contrôlait l'hôpital où vous étiez soigné ?
22 M. Beso (interprétation). - Il n'y avait pas d'armée. L'hôpital
23 était à Travnik, c'était l'hôpital de Travnik et il y avait, à l'époque, à
24 Travnik, aussi bien le HVO que l'armée de Bosnie-Herzégovine.
25 M. Nobilo (interprétation). - Mais dans quel quartier de Travnik
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1 se trouvait l'hôpital, à l'endroit où se trouvait le HVO ou l'endroit où
2 se trouvait l'armée de Bosnie-Herzégovine ?
3 M. Beso (interprétation). - A ce moment-là, les deux étaient
4 ensemble à Travnik
5 M. Nobilo (interprétation). - Quand vous êtes allé à Kruscica,
6 depuis Travnik, comment y êtes-vous allé, en voiture, à pied ?
7 M. Beso (interprétation). - Non, j'y suis allé en traversant la
8 forêt. C'est un voyage assez long.
9 M. Nobilo (interprétation). - Je suppose donc que vous étiez à
10 pied.
11 M. Beso (interprétation). - Oui, j'ai marché à pied, deux jours.
12 M. Nobilo (interprétation). - Qui contrôlait le territoire que
13 vous avez traversé ?
14 M. Beso (interprétation). - C'était l'armée de Bosnie-
15 Herzégovine.
16 M. Nobilo (interprétation). - Qui contrôlait Kruscica ?
17 M. Beso (interprétation). - L'armée de Bosnie-Herzégovine.
18 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, j'aimerais
19 que nous prenions une carte maintenant. Je sais que le témoin a creusé des
20 tranchées. J'aimerais donc que nous utilisions la carte pour préciser un
21 peu les choses.
22 M. le Président. - Allez-y, Monsieur Nobilo.
23 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur le Président, je n'aime
24 pas interrompre mais je pensais que mon collègue allait nous dire ce qu'il
25 était en train de placer sur le chevalet. Je suppose qu'avant que nous
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1 commencions à parler, il faut savoir quel est ce document.
2 M. le Président. - M. Nobilo a dit que c'était une carte, ce que
3 nous constatons tous. Effectivement, il faut identifier cette carte.
4 M. Nobilo (interprétation). - Nous avons sous les yeux la carte
5 de Zenica 4 qui recouvre également le territoire de Vitez. C'est une carte
6 qui est éditée par l'armée populaire yougoslave, c'est la carte standard
7 qui était utilisée dans l'ex-Yougoslavie par l'armée populaire yougoslave
8 au 1/50.000ème. C'est celle que nous avons l'habitude d'utiliser.
9 M. Kehoe (interprétation). - Puis-je jeter un coup d'oeil à la
10 carte, Monsieur le Président ?
11 M. le Président. - Je vous en prie, allez-y.
12 M. Kehoe (interprétation). - La seule demande que je formule, eu
13 égard à cette carte et à son utilisation et elle a déjà été utilisée à
14 plusieurs reprises, cela figure dans le compte rendu. Il y a une erreur
15 sur cette carte pour cette ville figurant en haut, à gauche, sous le nom
16 de Hambila*.
17 Excusez-moi, je crois que sur une autre carte, le mot Bila est
18 inscrit en haut, à gauche, mais celle-ci est exacte. Excusez-moi.
19 Puis-je rester debout, ici, Monsieur le Président ?
20 M. le Président. - Restez debout, si vous le souhaitez.
21 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur Beso, lorsque vous êtes
22 allé creuser les tranchées pour la première fois, pouvez-vous vous lever
23 et nous indiquer quelles étaient les positions tenues par le HVO ? Je
24 parle bien de la première fois où vous êtes allé creuser des tranchées.
25 M. Beso (interprétation). - Je ne vois pas en fait.
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1 M. Nobilo (interprétation). - Quand vous êtes allé creuser les
2 tranchées pour la première fois, où se trouvaient les positions du HVO sur
3 la route qui vous a permis d'aller à l'endroit où vous avez creusé des
4 tranchées ? Quelles étaient les positions tenues par le HVO à l'endroit-
5 même où vous les creusiez ?
6 M. Beso (interprétation). - Vitez est ici, quelque part.
7 M. Nobilo (interprétation). - Vous nous montrez donc maintenant
8 les positions du HVO ?
9 M. Beso (interprétation). - C'est ici que j'ai creusé pour la
10 première fois.
11 M. Nobilo (interprétation). - Je vais indiquer au feutre bleu
12 les positions du HVO.
13 M. le Président. - Monsieur Nobilo, qu'il n'y ait pas
14 d'ambiguïté. Si j'ai bien compris, vous demandez au témoin de donner les
15 positions du HVO. Je ne sais d'ailleurs pas si le témoin est un expert
16 militaire pour vous donner ces positions-là.
17 Il vous répond en vous disant où il a creusé des tranchées.
18 Votre question est bien "les positions militaires du HVO" ?
19 M. Nobilo (interprétation). - Oui, tout à fait. A l'endroit où
20 il creusait des tranchées, je lui demande s'il y avait des positions
21 militaires du HVO.
22 Dites-moi, pouviez-vous voir les positions de l'armée de Bosnie-
23 Herzégovine en face de vous ? Qu’y avait-il en face de vous à l’endroit où
24 vous creusiez les tranchées ?
25 M. Beso (interprétation). – Il n'y avait que Kruscica.
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1 M. Nobilo (interprétation). – Pouvez-vous nous montrer où se
2 trouve le village de Kruscica ? Est-ce que je peux le signaler de cette
3 façon ?
4 Et la deuxième fois où vous êtes allé creuser les tranchées,
5 pouvez-vous nous montrer à quel endroit cela s'est passé ?
6 M. Beso (interprétation). – Le village de Pirici.
7 M. Nobilo (interprétation). – Donc j’inscris au stylo rouge les
8 positions de l'armée de Bosnie-Herzégovine et au stylo rouge les positions
9 de l'armée du HVO. Pirici était tenu par quelle armée ?
10 M. Beso (interprétation). – C'était d'abord un village musulman
11 qui ensuite a été tenu par le Conseil de Défense croate quand je suis allé
12 creuser des tranchées.
13 M. Nobilo (interprétation). – Les positions tenues par le HVO
14 près de Pirici et l’endroit où vous creusiez des tranchées, où se trouvait
15 l'armée de Bosnie-Herzégovine ? Quel était le village qui était en face ?
16 M. Beso (interprétation). – Ici.
17 M. Nobilo (interprétation). – Pouvez-vous nous montrer les
18 positions du HVO à l'endroit où vous étiez ?
19 M. Beso (interprétation). – Au-dessus du village de Pirici, je
20 ne sais pas exactement.
21 M. Nobilo (interprétation). – Est-ce qu'à l’endroit où vous avez
22 creusé les tranchées, vous pouviez voir les soldats de l'armée de Bosnie-
23 Herzégovine ?
24 M. Beso (interprétation). – Je ne les voyais pas. Comment
25 aurais-je pu les voir, nous étions entre les deux zones et les soldats de
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1 l'armée de Bosnie-Herzégovine étaient cachés.
2 M. Nobilo (interprétation). – Mais quelqu'un vous a-t-il dit ou
3 saviez-vous où se trouvaient les soldats de l'armée de Bosnie-
4 Herzégovine ?
5 M. Beso (interprétation). – Un membre du HVO nous a indiqués à
6 peu près où ils étaient.
7 M. Nobilo (interprétation). – Et qu'est-ce qu'il vous a dit ? A
8 quelle distance de l’endroit où vous vous trouviez vous a-t-il dit que se
9 trouvaient les soldats de l’armée de Bosnie Herzégovine ?
10 M. Beso (interprétation). – Il ne nous l'a pas indiqué avec une
11 très grande précision, mais à peu près ; il nous a dit : « Ils sont là
12 dans la forêt, dans ce hameau ici ou dans ces maisons-là ».
13 M. Nobilo (interprétation). – Combien cette forêt et ces maisons
14 étaient-elles éloignées de vous et dans quelle direction se trouvaient-
15 elles ?
16 M. Beso (interprétation). – Je ne connaissais pas bien le
17 terrain à l'époque, je sais simplement où se trouvaient Pirici, Ahmici,
18 Sivrino Selo. Quand on remonte, je savais que c'était dans ce sens-là.
19 M. Nobilo (interprétation). – Mais qui contrôlait ces endroits ?
20 M. Beso (interprétation). – L’armée de Bosnie-Herzégovine.
21 M. Nobilo (interprétation). – Qui tenait Sivrino Selo ?
22 M. Beso (interprétation). – Egalement l'armée de Bosnie-
23 Herzégovine.
24 M. Nobilo (interprétation). – Montrez-moi où se trouve Sivrino
25 Selo.
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1 M. Beso (interprétation). – Ici. Poculica.
2 M. Nobilo (interprétation). – Quand vous êtes allé creuser des
3 tranchées pour la troisième fois, pouvez-vous me montrer où se trouvaient
4 les positions du HVO ?
5 M. Beso (interprétation). – Dans le village de Krcevine.
6 M. Nobilo (interprétation). – Est-ce le HVO qui tenait le
7 village de Krcevine ?
8 M. Beso (interprétation). – Oui.
9 M. Nobilo (interprétation). – Est-ce que le HVO avait ses
10 positions dès l'entrée du village ?
11 M. Beso (interprétation). – Non pas dans le village lui-même,
12 mais un peu plus haut, vers Tolovici et les villages qui se trouvent au-
13 dessus. Je ne sais pas exactement où.
14 M. Nobilo (interprétation). – Donc, nous pouvons inscrire un
15 signe ici pour les positions du HVO ?
16 M. Beso (interprétation). – Oui.
17 M. Nobilo (interprétation). – Pouvez-vous me dire qui tenait
18 Tolovici ?
19 M. Beso (interprétation). – Tolovici ? L'armée de Bosnie-
20 Herzégovine.
21 M. Nobilo (interprétation). – Pouvez-vous nous montrer où se
22 trouve le village ?
23 M. Beso (interprétation). – De Tolovici ?
24 M. Nobilo (interprétation). – Dites-moi, au-dessus de Krcevine,
25 où se trouvaient encore les positions de l'armée de. Bosnie-Herzégovine,
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1 d’après ce que vous savez ?
2 M. Beso (interprétation). – Que voulez-vous dire ?
3 M. Nobilo (interprétation). – Où étaient les positions de
4 l'armée de. Bosnie-Herzégovine en dehors de Tolovici et le plus près
5 possible de Krcevine ?
6 M. Beso (interprétation). – Je ne le sais pas.
7 M. Nobilo (interprétation). – Nous venons de parler de la
8 troisième fois où vous êtes allé creuser des tranchées et je vous demande
9 maintenant si vous êtes allé une autre fois, en un autre endroit ?
10 M. Beso (interprétation). – Pour creuser des tranchées ?
11 M. Nobilo (interprétation). – Oui.
12 M. Beso (interprétation). – Je n’y suis plus allé, mais j'ai
13 entendu dire que d'autres groupes étaient allés creuser des tranchées
14 ailleurs.
15 M. Nobilo (interprétation). – Les membres des autres groupes
16 vous ont -ils dit où se trouvait l’armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO ?
17 M. Beso (interprétation). – Non, personne ne le savait à
18 l'époque. On n’avait même pas le droit de trop regarder, simplement on
19 entendait de temps en temps quelque chose de la bouche des soldats.
20 M. Nobilo (interprétation). – Qui tenait Kuber à ce moment-là ?
21 M. Beso (interprétation). – Kuber ?
22 M. Nobilo (interprétation). – Oui.
23 M. Beso (interprétation). – Je ne sais pas exactement, mais je
24 sais que des détenus sont aussi allés creuser des tranchées là-bas ; donc,
25 je pense que les lignes devaient se trouver en-dessous. Je ne sais pas
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1 exactement où elles étaient, elles étaient très proches à ce moment-là.
2 M. Nobilo (interprétation). – Les lignes des deux, de l’armée de
3 Bosnie-Herzégovine et du HVO, se trouvaient donc toutes les deux à Kuber ?
4 M. Beso (interprétation). – Oui.
5 M. Nobilo (interprétation). – Où se trouve Kuber ? Pouvez-vous
6 me le montrer ?
7 M. Kehoe (interprétation). - Excusez-moi, Monsieur le Président,
8 le témoin vient de dire qu'il ne savait pas où se trouvaient les lignes à
9 Kuber et mon collègue lui demande d'inscrire un signe au niveau de Kuber.
10 M. Le Président. – Monsieur Beso, tournez-vous vers moi, s’il
11 vous plaît. Vous sentez-vous capable, de par votre compétence de soldat et
12 de militaire, de répondre aux questions qui viennent d'être posées par
13 M. Nobilo ? Vous me dites oui ou non.
14 M. Beso (interprétation). – Je peux dire où se trouvait Kuber
15 mais indiquer où étaient les lignes, je ne le sais pas.
16 M. Le Président - Passez à une autre question, Monsieur nobilo,
17 s'il vous plaît.
18 M. Nobilo (interprétation). – Après votre séjour à l'hôpital,
19 quand vous êtes arrivé à Kruscica, pouvez-vous nous dire à quel moment
20 cela se passait ?
21 M. Beso (interprétation). – Je ne sais pas exactement.
22 M. Nobilo (interprétation). – Pouvez-vous me dire le mois,
23 l'année ?
24 M. Beso (interprétation). – Peut-être au début du mois
25 d’août 1993.
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1 M. Nobilo (interprétation). – Au début du mois d’août 1993.
2 Avez-vous trouvé immédiatement l'armée de Bosnie-Herzégovine, à Kruscica ?
3 M. Beso (interprétation). – Il s'est passé un certain temps,
4 environ deux mois.
5 M. Nobilo (interprétation). – Vous êtes devenu soldat de l'armée
6 de Bosnie-Herzégovine deux mois après votre arrivée. Cela nous amène au
7 mois d’octobre 1993, à peu près.
8 M. Beso (interprétation). – Oui, à peu près.
9 M. Kehoe (interprétation). –L’interprète anglaise n'entend pas
10 le témoin lorsqu’il répond aux questions.
11 M. Nobilo (interprétation). – Je vais répéter la question.
12 M. Kehoe (interprétation). - Le témoin devrait parler dans un
13 micro.
14 M. Nobilo (interprétation). - Je vais répéter la question. Est-
15 il exact qu'en octobre 1992, vous êtes devenu soldat de l'armée de Bosnie-
16 Herzégovine ?
17 M. Beso (interprétation). - Mais vous parlez d'octobre 1992,
18 c'est avant. Moi, je parlais d'octobre 1993.
19 M. le Président. - Si vous n'avez plus besoin de la carte, peut-
20 être que chacun pourrait regagner son banc et le témoin pourrait
21 s'exprimer depuis son banc.
22 M. Nobilo (interprétation). - Je vais encore avoir besoin de
23 poser deux ou trois questions sur ce sujet. Je vous ai demandé, après
24 votre séjour à l'hôpital, quand vous êtes sorti de l'hôpital, quand êtes-
25 vous redevenu soldat de l'armée de Bosnie-Herzégovine.
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1 M. Beso (interprétation). - A la fin du mois de septembre 1993,
2 à peu près.
3 M. Nobilo (interprétation). - A ce moment-là, en tant que
4 soldat, connaissiez-vous les positions de l'armée de Bosnie-Herzégovine à
5 Kruscica et autour de Kruscica. ainsi que dans la municipalité de Vitez ?
6 M. Beso (interprétation). - A ce moment-là, j'étais affecté à la
7 garde de la centrale de distribution d’eau qui dessert Zenica et Vitez.
8 M. Nobilo (interprétation). - Lorsque vous êtes devenu soldat de
9 l'armée de Bosnie Herzégovine, saviez-vous quelles étaient les positions
10 du HVO et de l'armée de Bosnie-Herzégovine ?
11 M. Beso (interprétation). - Dans la municipalité de Vitez ?
12 M. Nobilo (interprétation). - Oui.
13 M. Beso (interprétation). - Je sais que l'armée de Bosnie
14 Herzégovine se trouvait dans la vieille ville de Vitez et là-haut dans le
15 village de Bukva.
16 M. Nobilo (interprétation). - Donc au nord, voilà la position de
17 l'armée de Bosnie Herzégovine ?
18 M. Beso (interprétation). - Grubnic, Poculica, le village de
19 Kruscica, Jagranica, Sadovac, Beocica* (l'interprète reproduisant les noms
20 dans la mesure de ses capacités auditives) Vorgovini..
21 M. Nobilo (interprétation). - Et plus loin, est-ce qu'il y avait
22 encore des positions ?
23 M. Beso (interprétation). - Je ne sais pas.
24 M. Nobilo (interprétation). - Vers Ahmici ?
25 M. Beso (interprétation). - Je ne sais pas. Voilà les villages.
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1 M. Nobilo (interprétation). - Connaissez-vous d'autres endroits
2 tenus, à ce moment-là, par l'armée de Bosnie Herzégovine ?
3 M. Beso (interprétation). - Nous avons déjà parlé de Tolovici,
4 et puis voilà les villages de la municipalité, comme on l'a dit.
5 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, je tiens à
6 ce qu'il soit noté qu'en rouge, ce sont les positions de l'armée de
7 Bosnie-Herzégovine et en bleu...
8 M. Kehoe (interprétation). - Un instant...
9 M. Nobilo (interprétation). - J'indique que sur la carte sont
10 inscrits en rouge les positions de l'armée de Bosnie Herzégovine, en bleu
11 les positions du HVO et j'inscrirai sur la carte l'année 1993, si vous
12 êtes d'accord.
13 M. le Président. - Ce sont les positions aux dires du témoin ?
14 M. Nobilo (interprétation). - C'est cela.
15 M. Kehoe (interprétation). - Si je puis me permettre, Monsieur
16 le Président, le témoin vient de dire qu'il a dû creuser des tranchées en
17 trois endroits différents et il a dit que cela s'est passé en avril et en
18 mai 1993. Après quoi mon collègue a fait un saut jusqu'au mois
19 d'octobre 1993. Il parle des positions tenues en octobre 1993. C'est très
20 différent de ce que M. Nobilo a demandé qu’on inscrive sur la carte.
21 M. Hayman (interprétation). - Il y a des croix et des lignes, la
22 carte est tout à fait claire.
23 M. le Président. - Il serait plus simple, Maître Nobilo, que
24 vous indiquiez bien sur la carte, comme vous l'avez fait pour chacune de
25 vos pièces à conviction, les dates auxquelles correspondraient ces
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1 positions de l'armée de Bosnie-Herzégovine et celles du HVO, comme vous le
2 faites, avec de grands chiffres. D'accord ? Avec de grandes lettres.
3 Maître Kehoe, si vous voulez vous approcher...
4 M. Kehoe (interprétation). - Oui, Monsieur le Président, merci;
5 (Maître Nobilo appose des inscriptions sur la carte).
6 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur Beco, vous avez creusé
7 des tranchées en avril 1993 à peu près ?
8 M. Beso (interprétation). - Oui.
9 M. le Président. - Puisque la date a été contestée par
10 l’accusation, pouvez-vous indiquer sur la carte, comme vous l'avez fait à
11 d'autres occasions, le mois et l'année auxquels se réfèrent les
12 indications données par le témoin ? Merci.
13 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, c'est
14 exactement ce que je voulais faire, simplement je vérifiais encore une
15 fois auprès du témoin.
16 Donc vous avez creusé des tranchées en avril 1993 ?
17 M. Beso (interprétation). - Oui.
18 M. Nobilo (interprétation). - Vous avez rejoint les rangs de
19 l'armée de Bosnie Herzégovine quand ? En septembre ?
20 M. Beso (interprétation). - Quand cela, avant ?
21 M. Nobilo (interprétation). - Après la fin de vos soins à
22 Travnik ?
23 M. Beso (interprétation). - A la fin de septembre 1993, peut-
24 être même au début d'octobre.
25 M. Nobilo (interprétation). - Donc nous avons inscrit
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1 octobre 1993, X armée de Bosnie Herzégovine en rouge, et avril 1993 en
2 bleu, le HVO. Avril 1993 l'armée de Bosnie Hezégovine est en rouge, mais
3 avec une ligne droite. Est-ce suffisamment clair ?
4 M. le Président. - Est-ce clair Maître Kehoe ?
5 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur le Président, je redis que
6 ce n'est pas clair. Ce n'est pas ce qu'a dit le témoin dans sa déposition.
7 Ce que le témoin a dit dans sa déposition, au sujet des lignes bleues,
8 c'était les endroits où il a creusé des tranchées. Cela n'a rien à voir
9 avec l'emplacement des lignes de qui que ce soit. Il a indiqué qu'il
10 s'agissait des endroits où il avait creusé des tranchées, rien de plus.
11 M. le Président. - Je suis d'accord avec vous. Le conseil de la
12 défense a été très clair, il a posé des questions au témoin sur les lignes
13 du HVO et les lignes de l'armée de Bosnie. Je suis même intervenu pour
14 savoir si le témoin était habilité à répondre à ces questions-là et nous
15 avons poursuivi, avec l'accord de tout le monde. Donc Maître Nobilo a posé
16 très clairement une question. Vous pouvez la contester, nous dire ce que
17 vous voulez là-dessus, mais je crois que la question était très claire.
18 Je me suis assuré que le témoin n'était pas vulnérable au point
19 où il ne pourrait pas répondre à cette question. Le témoin s'est exprimé.
20 Reposons lui une dernière fois la question.
21 Monsieur Beso, écoutez-moi bien, n'ayez aucune crainte, est-ce
22 que cette carte correspond bien à des lignes de défense ou d'attaque de
23 chacune des deux armées, tel que vous avez pu les percevoir, vous qui
24 creusiez des tranchées, car vous n'êtes pas expert militaire ? Regardez
25 bien cette carte à nouveau, prenez votre temps et dites nous si cela
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1 correspond bien à des positions de l'armée de Bosnie ou du HVO. Est-ce que
2 cela correspond à ce que vous avez voulu faire sur la question de
3 Maître Nobilo ?
4 Prenez votre temps, soyez rassuré, c'est simplement pour la
5 clarté des débats.
6 M. Beso (interprétation). - C'est bon.
7 M. le Président. - Vous pouvez passer à une autre question,
8 Maître Nobilo. Vous pouvez vous asseoir, Monsieur Beso, merci.
9 M. Nobilo (interprétation). - Vous êtes soldat de carrière. A
10 quoi servent les tranchées ?
11 M. Beso (interprétation). - A quoi sert une tranchée... Une
12 tranchée sert à des fins de protection, afin que les soldats puissent être
13 protégés et passer dans cette tranchée.
14 M. Nobilo (interprétation). - Utilise-t-on des tranchées pour
15 des actions militaires d'offensive ou de défense ?
16 M. Beso (interprétation). - Cela dépend... On peut se préparer à
17 l'attaque à partir d'une tranchée. Cela peut être votre position de
18 départ, mais il est certain qu'une tranchée peut aussi servir à des fins
19 de défense.
20 M. Nobilo (interprétation). - Mais en règle générale, à quoi
21 servent les tranchées dans l'armée ? Pourquoi les utilise-t-on ? Que vous
22 dit-on à ce propos dans les cours ?
23 M. Beso (interprétation). - Juste ce que j'ai dit.
24 M. Nobilo (interprétation). - Très bien, merci. Quand ce jeune
25 homme vous a emmené au cinéma, vous avez dit une fois qu'il était de
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1 Kotor Varos et, une autre fois, de Zagreb. Que vous a-t-il expliqué ? Il
2 avait un ordre pour vous emmener à cet endroit ?
3 M. Beso (interprétation). - Nous n'avions pas de contact. Nous
4 n'avons pas du tout parlé ensemble. Il s'est contenté d'arriver là où nous
5 étions, de nous emmener. Nous sommes arrivés dans la salle de cinéma. Un
6 policier militaire a pris la relève et l'homme qui nous a emmenés est
7 parti. Je ne l'ai plus revu.
8 M. Nobilo (interprétation). - Avez-vous entendu parler de
9 Kotor Varos Kartojna*, une unité du HVO ?
10 M. Beso (interprétation). - Non.
11 M. Nobilo (interprétation). - Vous avez dit que la première fois
12 où vous avez été détenu, on vous nourrissait des restes que laissaient les
13 soldats de l'armée. J'aimerais savoir d'où vous avez obtenu cette
14 nourriture ? De l'assiette même des soldats ou des casseroles ?
15 M. Beso (interprétation). - Des casseroles et chaque fois qu'on
16 allait creuser des tranchées, on recevait du poisson en conserve, mais on
17 n'emmenait pas la nourriture. Ils venaient quand ils estimaient que nous
18 avions faim. Nous n'avions pas de repas réguliers.
19 M. Nobilo (interprétation). - Et quand on vous nourrissait à
20 partir des casseroles, cela veut-il dire qu'on vous donnait la même
21 nourriture que celle des soldats ?
22 M. Beso (interprétation). - Dans certains endroits, oui.
23 M. Nobilo (interprétation). - Quand vous êtes arrivé à Kruscica,
24 quand vous êtes devenu soldat, quelle unité de l'armée avez-vous rejoint ?
25 M. Beso (interprétation). - J'ai été affecté à la garde de la
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1 compagnie hydro-électrique. C'est là que j'ai monté la garde.
2 M. Nobilo (interprétation). - C'était votre affectation, mais à
3 quelle unité apparteniez-vous ?
4 M. Beso (interprétation). - Qu'entendez-vous par là ?
5 M. Nobilo (interprétation). - Quelle brigade était la vôtre ?
6 M. Beso (interprétation). - Il y avait la 325ème brigade.
7 M. Nobilo (interprétation). - Précisément, la 325ème brigade
8 avait-elle son quartier général à Kruscica ?
9 M. Beso (interprétation). - Je ne pense pas que le commandement
10 de la brigade se soit trouvé, à l'époque, à Kruscica.
11 M. Nobilo (interprétation). - Combien comptait-elle de
12 bataillons de régiment ? Le savez-vous ?
13 M. Beso (interprétation). - Je ne sais pas, trois ou quatre, je
14 ne sais pas exactement. Pendant la guerre, pendant les combats entre
15 l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO, je ne sais pas combien il y en
16 avait.
17 M. Nobilo (interprétation). - Ma question porte sur la période
18 où vous vous trouviez en 1993. Combien de soldats y avait-il dans la
19 325ème brigade ?
20 M. Beso (interprétation). - Je ne sais vraiment pas.
21 M. Nobilo (interprétation). - En tant que soldat, vous n'étiez
22 pas vraiment membre de la brigade, mais plutôt d'un bataillon ?
23 M. Beso (interprétation). - Oui, du premier bataillon.
24 M. Nobilo (interprétation). - Où se trouvait le commandement de
25 ce bataillon ?
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1 M. Beso (interprétation). - A Kruscica.
2 M. Nobilo (interprétation). - Et combien de soldats votre
3 bataillon comptait-il ?
4 M. Beso (interprétation). - Je ne sais pas. La plupart des
5 soldats étaient des gens de Kruscica.
6 M. Nobilo (interprétation). - En tant que soldat, vous
7 n'apparteniez pas à un bataillon mais, sans doute, à une unité plus
8 petite, une compagnie peut-être ?
9 M. Beso (interprétation). - Je me trouvais dans les services de
10 garde, je l'ai déjà dit. Je m'occupais de monter la garde à la compagnie
11 hydro-électrique qui se trouvait tout à fait éloignée dans la forêt.
12 M. Nobilo (interprétation). - Mais vous releviez d'une compagnie
13 ou d'un régiment dans la 325ème brigade ?
14 M. Beso (interprétation). - Non.
15 M. Nobilo (interprétation). - Les gens de Zenica, les Croates
16 qui étaient en fait des réfugiés et qui ont expulsé certains Musulmans de
17 leur domicile, étaient-ils accompagnés de leur famille pour venir
18 s'installer dans ces maisons ?
19 M. Beso (interprétation). - Je ne sais pas. Quand j'y étais, il
20 n'y avait que des soldats. Je pense que, par la suite, les familles ont
21 rejoint ces Croates. Du moins, c'est la situation telle qu'elle s'est
22 présentée pour l'un de mes parents. Un soldat est venu demander aux
23 membres de ma famille s'il pouvait prendre sa maison de Zenica pour y
24 amener sa famille, mais mon parent n'était pas d'accord. Par la suite, il
25 a été évincé de sa maison.
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1 M. Nobilo (interprétation). - Vous êtes de Rijeka,
2 Darko Kraljevic n'était-il pas votre voisin ?
3 M. Beso (interprétation). - Oui,
4 M. Nobilo (interprétation). - Habitait-il loin de chez vous ?
5 M. Beso (interprétation). - Non, tout près.
6 M. Nobilo (interprétation). - Le connaissiez-vous
7 personnellement ?
8 M. Beso (interprétation). - Oui, lui, son frère et ses parents.
9 M. Nobilo (interprétation). - C'est donc Darko Kraljevic qui
10 était le commandant des Vitezovi.
11 M. Beso (interprétation). - Oui.
12 M. Nobilo (interprétation). - Que savez-vous à son propos ?
13 M. Beso (interprétation). - Je le connaissais d'avant la guerre
14 et je le connaissais fort bien d'ailleurs puisque nous étions voisins. Il
15 allait à l'école avec un membre de ma famille. Nous sommes même sortis
16 ensemble, parfois.
17 Au début de la guerre, je l'ai à peine vu. Quand je le voyais,
18 il portait un uniforme, les rares fois où je l'ai vu à Vitez, à proximité
19 de l'hôtel. A la maison, il y avait toujours des soldats autour de lui
20 quand je le voyais.
21 M. Nobilo (interprétation). - Que pensiez-vous de ces soldats ou
22 qu'avez-vous entendu dire à leur propos ?.
23 M. Beso (interprétation). - Je sais que c'était des membres du
24 HOS, c'est la seule chose que j'ai entendue. Plus tard, j'ai entendu dire
25 qu'il n'était plus membre du HOS, mais qu'il l'était devenu des Vitezovi.
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1 Je ne sais pas pourquoi. J'en ai entendu dire que le HOS de Zenica avait
2 rejoint l'armée de Bosnie-Herzégovine. Je ne sais pas si c'est vrai.
3 M. Nobilo (interprétation). - Darko était-il un homme violent ?
4 M. Beso (interprétation). - Pas à mon égard. Quand on se voyait,
5 on se saluait.
6 M. Nobilo (interprétation). - Mais qu'avez-vous entendu dire à
7 son propos par rapport aux autres ? Quel type d'homme était-il ?
8 M. Beso (interprétation). - Je ne sais pas. Rares étaient les
9 gens qui le voyaient souvent, du moins parmi les gens que moi je voyais.
10 On ne parlait pas de lui, en tout cas, ces personnes n'en ont pas parlé.
11 M. Nobilo (interprétation). - Avez-vous davantage d'informations
12 à propos de Darko et de cette unité ?
13 M. Beso (interprétation). - Vous parlez des Vitezovi ?
14 M. Nobilo (interprétation). - Oui.
15 M. Beso (interprétation). - Je sais que c'était une espèce de
16 force d'intervention. Ils étaient logés à Vitez, je ne sais pas dans quel
17 quartier. J'ai entendu dire que lorsqu'il y avait conflit avec le HVO, ils
18 avaient coutume de fréquenter un café de Vitez, appelé Banta.
19 M. Nobilo (interprétation). - Merci. J'aimerais demander le
20 versement de cette pièce au dossier comme pièce de la défense.
21 M. le Président. - Cette pièce est répertoriée sous quel
22 numéro ?
23 Mme le Greffier - Cette pièce est répertoriée D 48.
24 M. Kehoe (interprétation). - Pas d'objection.
25 M. Nobilo (interprétation). - Nous en avons terminé de notre
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1 contre-interrogatoire.
2 M. le Président. - Monsieur le Procureur, voulez-vous compléter
3 par quelques questions ?
4 M. Kehoe (interprétation). - Très rapidement, Monsieur le
5 Président.
6 S'agissant de Darko Kraljevic, ces questions vous ont été posées
7 par le conseil de la défense à son propos. Vous avez dit l'avoir vu,
8 revêtu d'un uniforme, à proximité de l'hôtel à Vitez. De quel hôtel
9 voulez-vous parler ?
10 M. Beso (interprétation). - De l'hôtel à Vitez, je crois qu'on
11 l'appelait hôtel Vitez. Je ne pense pas qu'il portait d'autre dénomination
12 particulière.
13 M. Kehoe (interprétation). - Combien de fois l'avez-vous vu à
14 l'hôtel Vitez ? Je parle bien sûr de Darko Kraljevic.
15 M. Beso (interprétation). - Je ne suis pas entré dans l'hôtel.
16 Si je l'ai vu, c'est à côté de l’hôtel ou devant l'hôtel. Je ne sais pas
17 exactement combien de fois je l'ai vu, mais quelquefois, pas très souvent.
18 M. Kehoe (interprétation). - En réponse à la question posée par
19 le conseil de la défense à propos d'un membre de votre famille à qui on a
20 demandé d'échanger sa maison, et qui a refusé, ce sur quoi il a été
21 expulsé... Est-ce bien exact ?
22 M. le Président. - Ce n’est pas la peine d’insister davantage,
23 le témoin a répondu.
24 M. Kehoe (interprétation). - Oui, mais je préparais une
25 question.
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1 M. le Président. - J’ai cru que votre dernière phrase était une
2 forme de question. D’ailleurs sur le transcript, il y a un point
3 d’interrogation. Alors, maintenant posez votre question. Allez-y.
4 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur Beso, lorsque ce membre de
5 votre famille a refusé de procéder à l'échange de sa maison, où a-t-il été
6 expulsé ?
7 M. Beso (interprétation). - Vers Zenica.
8 M. Nobilo (interprétation). - Où vivait-il ?
9 M. Beso (interprétation). - Il vivait aussi dans le voisinage,
10 dans le quartier de Rijeka.
11 M. Kehoe (interprétation). - Près de votre maison ?
12 M. Beso (interprétation). - Oui.
13 M. Nobilo (interprétation). - Des questions vous ont été posées
14 par le conseil de la défense à propos de la Croix Rouge. On vous a demandé
15 si la Croix Rouge vous avait demandé si vous étiez civil ou soldat. Vous
16 vous souvenez de cette question posée par le conseil de la défense ?
17 M. Beso (interprétation). - Oui, je m’en souviens.
18 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que des civils, mais aussi
19 des soldats, étaient détenus, prisonniers en même temps, dans les salles
20 du cinéma ?
21 M. Beso (interprétation). - Non. Seulement des civils étaient
22 détenus. Je ne sais pas ce qu'il en était des soldats.
23 M. Kehoe (interprétation). - Je crois que la carte versée par la
24 défense au dossier porte la cote D48. C’est bien exact, Madame Fauveau ?
25 Mme le Greffier. - C’est exact, c’est D48.
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1 M. Kehoe (interprétation). - Fort bien. Vous avez indiqué trois
2 emplacements sur la carte posée sur le chevalet, en réponse aux questions
3 posées par la défense, trois emplacements en bleu. Vous les voyez ? Je
4 parle de ceux indiqués en bleu.
5 M. Beso (interprétation). - Oui.
6 M. Kehoe (interprétation). - Ce sont bien les endroits où vous
7 avez creusé des tranchées, n'est-ce pas ?
8 M. Beso (interprétation). - Oui.
9 M. Kehoe (interprétation). - Connaissez-vous les autres
10 positions occupées par les forces du HVO pendant le temps où vous étiez
11 détenu, tant au poste vétérinaire qu'au cinéma ?
12 M. Beso (interprétation). - Non, je ne sais pas.
13 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur le Président, me
14 permettez-vous de consulter un instant mes collègues ?
15 (M. Kehoe consulte ses collègues.)
16 Nous n'avons plus de question à poser à ce témoin. Merci,
17 Monsieur le Président.
18 M. le Président. - Je me tourne vers mes collègues pour savoir
19 s’ils ont des questions à poser.
20 M. Riad (interprétation). - Monsieur Beso, si je vous ai bien
21 compris bien entendu, vous avez dit avoir été arrêté lorsque vous êtes
22 sorti de l'abri où vous vous cachiez, avec votre mère et votre grand-mère.
23 Ce jour-là ou à cette date-là, étiez-vous soldat de l'armée de Bosnie-
24 Herzégovine ? Ou bien n'étiez-vous pas encore dans les rangs de cette
25 armée ?
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1 M. Beso (interprétation). - J'étais soldat, mais j'étais en
2 permission à la maison.
3 M. Riad (interprétation). - Vous n'étiez pas armé ? Vous n'avez
4 participé à aucun combat, à ce moment-là ?
5 M. Beso (interprétation). - Non.
6 M. Riad (interprétation). - Vous avez également déclaré que
7 certains Serbes locaux avaient servi dans le HVO. Est-ce exact ?
8 M. Beso (interprétation). - Oui, je les ai vus alors que je
9 creusais des tranchées à Sofa. C'est là qu'ils habitaient d'ailleurs.
10 M. Riad (interprétation). - Est-ce que des Musulmans ont aussi
11 rejoint les rangs du HVO ? Voulez-vous que je répète ma question ?
12 M. Beso (interprétation). - Non, c'est bon. Je n'ai pas
13 constaté, je n’ai pas vu non plus qu’il y ait eu un seul Musulman dans les
14 rangs du HVO.
15 M. Riad (interprétation). - Vous nous avez relaté les événements
16 lorsque Jusuf Ibrakovic a essayé de prendre la fuite, de s'évader. Vous
17 avez dit qu'ils lui ont vraiment ouvert la tête en deux, qu'ils lui ont
18 fendu le crâne, qu’ils avaient vraiment commencé à le tuer alorsqu’il
19 était à terre. Puis, le commandant Blaskic a aussi suggéré que quelqu'un
20 d’autre soit tué, pour effrayer les autres, à titre d’exemple.
21 Est-ce qu’on tuait les gens simplement à titre d'exemple ? Ou
22 est-ce que cela ne se faisait pas ? Etait-ce simplement des paroles vides,
23 sans action ?
24 M. Beso (interprétation). - C’était simplement des menaces
25 proférées en ma présence. Je n'ai plus constaté d'incident de ce genre.
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1 M. Riad (interprétation). - Vous avez aussi parlé de la mort de
2 Almir Gadjun qui a été tué quand vous creusiez des tranchées devant le
3 village de Preocica, dans les forêts. Est-ce exact ?
4 M. Beso (interprétation). - On a tiré sur lui et il est mort
5 alors qu'on le transportait à l'hôpital.
6 M. Riad (interprétation). - Etait-ce proche des lignes du front
7 où il y avait des échanges de coup de feu ? Par la suite, avez-vous malgré
8 tout continué à creuser des tranchées ou vous êtes-vous retiré ?
9 M. Beso (interprétation). - Oui, la ligne de front était tout
10 proche de l'endroit où nous creusions, lignes du HVO et de l'armée de
11 Bosnie-Herzégovine. Lorsque tout cela s'est passé, nous avons continué à
12 faire ce qui nous était ordonné de faire.
13 M. Riad (interprétation). - Est-ce que quelqu'un d'autre a été
14 tué par la suite ?
15 M. Beso (interprétation). - Pas dans mon groupe.
16 M. Riad (interprétation). - Et dans d'autres groupes, dont vous
17 auriez connaissance ?
18 M. Beso (interprétation). - Je ne sais pas.
19 M. Riad (interprétation). - Merci beaucoup.
20 M. le Président. - Monsieur le Juge Shahabuddeen ?
21 M. Shahabuddeen (interprétation). - Monsieur Beso, j'avoue ne
22 pas être un expert en cartographie. Veuillez faire preuve d'indulgence à
23 mon égard et m’aider à suivre la carte qui se trouve sur le chevalet, la
24 pièce de la défense 48. D'abord, je vous inviterai à examiner les
25 indications suivantes, la première étant avril 1993.
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1 Vous avez déjà expliqué qu'il vous était impossible de dire si
2 en avril 1993 le HVO détenait d'autres positions. Et si tel était le cas,
3 vous étiez dans l'impossibilité de préciser l'emplacement de ces
4 positions. Veuillez regarder la carte et voir si vous êtes d'accord avec
5 mes propres observations. Il y a trois positions de creusement de
6 tranchées, que vous avez indiquées, pour avril 1993. C'est bien exact ?
7 M. Beso (interprétation). - Oui, ce sont trois emplacements où
8 j'ai moi-même creusé des tranchées. Mais, il y en avait plus. Toutefois,
9 je ne connais pas leurs emplacements exacts.
10 M. Shahabuddeen (interprétation). - S’agissant toujours
11 d'avril 1993, combien de positions de l'armée de Bosnie-Herzégovine avez-
12 vous indiquées sur la carte ?
13 M. Beso (interprétation). - Je ne connais que les positions où
14 j'ai creusé et ce sont les trois que j'ai indiquées au feutre bleu.
15 M. Shahabuddeen (interprétation). - Qu’en est-il des lignes
16 courbes en rouge ? Que sont-elles censées indiquer ? Je ne parle pas des
17 croix rouges mais des lignes un peu courbées.
18 M. Beso (interprétation). - A mon avis, c'étaient les positions
19 de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Quant à savoir si c’était véritablement
20 leurs positions, je ne sais pas.
21 M. Shahabuddeen (interprétation). - Si nous comptons ensemble,
22 cela nous donne quatre ou cinq lignes rouges ? Combien de lignes rouges
23 dénombrez-vous ?
24 M. Beso (interprétation). - Il y a quatre lignes mais ceci,
25 c'était en réponse à l'une des questions que m'a posées Me Nobilo.
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1 M. Shahabuddeen (interprétation). - Et puis le point rouge
2 indique-t-il aussi une position de l'armée de Bosnie-Herzégovine à
3 Stari Vitez en avril 1993 ?
4 M. Beso (interprétation). - Oui.
5 M. Shahabuddeen (interprétation). - En avril 1993, le HVO
6 détenait-il une position à Vitez ?
7 M. Beso (interprétation). - Je ne comprends pas tout à fait votre question.
8 M. Shahabuddeen (interprétation). - En avril 1993 le HVO
9 détenait-il une position à Vitez, pas à Stari Vitez mais à Vitez même ?
10 M. Beso (interprétation). - Quand le conflit a éclaté le
11 16 avril, nous qui avions été capturés avons été utilisés pour obtenir des
12 informations sur les positions et aussi pour former certaines positions.
13 M. Shahabuddeen (interprétation). - Je passe maintenant à
14 octobre 1993 parce que je ne vais pas poursuivre l'autre question. Vous
15 avez indiqué à l'aide de croix sur la carte les positions qu'occupait
16 alors, en octobre, l'armée de Bosnie-Herzégovine. Combien de croix avez-
17 vous indiquées ? Moi j'en compte neuf.
18 M. Beso (interprétation). - C'était aussi en réponse à une question posée
19 par Me Nobilo, ce sont des villages musulmans tous autant qu'ils sont dans
20 la municipalité de Vitez, ce sont donc ceux-là que j'ai indiqués.
21 M. Shahabuddeen (interprétation). - Vous dites que ce sont des
22 villages. Etaient-ce aussi des positions occupées par l'armée de Bosnie-
23 Herzégovine ?
24 M. Beso (interprétation). - Oui. Je ne les connais pas toutes
25 avec exactitude.
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1 M. Shahabuddeen (interprétation). - En ce même mois
2 d'octobre 1993, le HVO occupait-il des positions quelles qu'elles soient ?
3 M. Beso (interprétation). - Je pense que oui.
4 M. Shahabuddeen (interprétation). - Sur cette carte, pour ce qui
5 est d'octobre 1993, avez-vous indiqué une quelconque position du HVO ?
6 M. Beso (interprétation). - A l'époque, je ne connaissais pas
7 l'emplacement des positions du HVO.
8 M. Shahabuddeen (interprétation). - Faut-il vous comprendre
9 comme disant que sur cette carte, pour ce qui est d'octobre 1993, vous
10 n'avez pas indiqué la moindre position occupée par le HVO parce que vous
11 ne connaissiez pas leur emplacement ? Est-ce exact ? C’est bien ce que
12 vous nous dites aujourd’hui ?
13 M. Beso (interprétation). - Oui, je ne savais pas où se
14 trouvaient ces positions du HVO.
15 M. Shahabuddeen (interprétation). - Donc, bien que pour ce qui
16 est d'octobre 1993 sur cette carte vous nous ayez donné neuf positions
17 pour l’armée de Bosnie-Herzégovine mais aucune pour le HVO, ceci ne veut
18 pas pour autant dire que le HVO n'occupait aucune position.
19 M. Beso (interprétation). - Le HVO avait aussi des positions,
20 mais moi je ne les connaissais pas ; je me suis contenté d'énumérer les
21 villages où il y avait une majorité musulmane dans le cadre de la
22 municipalité de Vitez, et c'étaient aussi des positions.
23 M. Shahabuddeen (interprétation). - Je vous remercie.
24 M. le Président. - Monsieur Beso, le Tribunal vous remercie. Il
25 est conscient du fait que raviver tous ces souvenirs a représenté pour
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1 vous un grand effort. Il vous invite donc maintenant à rentrer chez vous
2 en essayant de retrouver un peu de quiétude et de calme.
3 Après que Madame le Greffier vous ait fait raccompagner, nous
4 pourrons passer au témoin suivant. Merci beaucoup, monsieur.
5 Monsieur l'Huissier pouvez-vous raccompagner le témoin s’il vous plaît.
6 (Le témoin est raccompagné hors de la salle d'audience).
7 M. le Président. - Monsieur le Procureur...
8 M. Harmon (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.
9 Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les Juges. Notre
10 prochain témoin est M. Sulejman Kavazovic.
11 M. le Président. - Maître Harmon, avant que le témoin entre, vous aviez
12 indiqué approximativement deux heures et demie. C'est bien cela ?
13 M. Harmon (interprétation). - Absolument, Monsieur le Président.
14 (Le témoin est introduit dans la salle d'audience.)
15 M. le Président. - Bonjour monsieur. M'entendez-vous ?
16 M. Kavazovic (interprétation). - Oui, je vous entends Monsieur le Juge.
17 M. le Président. - Avant de lire cette déclaration, pouvez-vous
18 me rappeler votre nom et votre prénom s’il vous plaît ?
19 M. Kavazovic (interprétation). - Je m'appelle Sulejman Kavazovic.
20 M. le Président. - Vous allez lire la déclaration que vous tend l'huissier.
21 M. Kavazovic (interprétation). - Je déclare solennellement que
22 je dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
23 M. le Président. - Merci. Monsieur Kavazovic, vous pouvez vous asseoir.
24 M. Kavazovic (interprétation). - Je vous remercie.
25 M. le Président. - Vous avez été cité par l'accusation dans le cadre du
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1 procès qui est intenté contre le Général Blaskic. Vous êtes devant des
2 juges,donc vous pouvez parler sans crainte. C'est d'abord le Procureur qui
3 vous posera les questions, ensuite la défense vous posera également des
4 questions. Monsieur Harmon, vous avez la parole.
5 M. Harmon (interprétation). - Je vous remercie Monsieur le Président.
6 Monsieur Kavazovic, pouvez-vous nous donner votre âge, s'il vous plaît ?
7 M. Kavazovic (interprétation). - Je suis né le 15 juillet 1969,
8 j'ai vingt-huit ans.
9 M. Harmon (interprétation). - Où êtes-vous né ?
10 M. Kavazovic (interprétation). - Je suis né à Vehovine*, Vitez.
11 M. Harmon (interprétation). - Où cela se trouve-t-il, par
12 rapport au village d'Ahmici ?
13 M. Kavazovic (interprétation). - C'est à trois kilomètres d'Ahmici.
14 M. Harmon (interprétation). - En direction de Zenica ?
15 M. Kavazovic (interprétation). - Oui, vers Zenica, c'est exact.
16 M. Harmon (interprétation). - Quelles études avez-vous suivi ?
17 M. Kavazovic (interprétation). - Je suis expert en circulation
18 automobile. J'ai suivi des études supérieures.
19 M. Harmon (interprétation). - Veuillez nous décrire plus
20 précisément votre parcours.
21 M. Kavazovic (interprétation). - J'ai accompli mon éducation
22 secondaire technique dans une école à Belgrade.
23 M. Harmon (interprétation). - C'était en quelle année ?
24 M. Kavazovic (interprétation). - En 1987-1988.
25 M. Harmon (interprétation). - Avant d'être à Belgrade, quand
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1 avez-vous quitté la municipalité de Vitez pour vous rendre à Belgrade ?
2 M. Kavazovic (interprétation). - Je l'ai quittée en 1983-1984.
3 M. Harmon (interprétation). - Mais lorsque vous avez reçu votre
4 diplôme à l'école de Belgrade, qu'avez-vous alors ?
5 M. Kavazovic (interprétation). - Eh bien j'ai rejoint les rangs
6 de l'armée populaire yougoslave.
7 M. Harmon (interprétation). - Pour combien de temps ?
8 M. Kavazovic (interprétation). - Pour un an.
9 M. Harmon (interprétation). - Quelles étaient les tâches que
10 l'on vous a confiées au sein de la JNA ?
11 M. Kavazovic (interprétation). - J'étais chef de peloton.
12 M. Harmon (interprétation). - Qu'entendez-vous par chef de
13 peloton ? De quel type de peloton s'agissait-il ?
14 M. Kavazovic (interprétation). - C'était l'infanterie de montagne.
15 M. Harmon (interprétation). - Après avoir accompli votre service
16 d'un an au sein de la JNA, qu'avez-vous fait alors ?
17 M. Kavazovic (interprétation). - Eh bien je suis retourné à Belgrade.
18 M. Harmon (interprétation). - Et qu'avez-vous fait à Belgrade ?
19 M. Kavazovic (interprétation). - J'ai travaillé pour une entreprise.
20 J'étais responsable d'un département dans une entreprise de transport.
21 M. Harmon (interprétation). - Et vous étiez responsable des
22 camions, n'est-ce pas ?
23 M. Kavazovic (interprétation). - Oui, c'est à peu près cela.
24 M. Harmon (interprétation). - Combien de temps êtes-vous resté à
25 Belgrade avant de retourner dans la municipalité de Vitez ?
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1 M. Kavazovic (interprétation). - J'y suis resté jusqu'au 18 février 1992.
2 M. Harmon (interprétation). - Et pourquoi avoir quitté Belgrade ?
3 M. Kavazovic (interprétation). - Parce que j'étais sur le point
4 d'être mobilisé. Je m'étais établi de façon permanente à Belgrade et je
5 m'attendais à être mobilisé en tant que réserviste par la JNA.
6 M. Harmon (interprétation). - Je pense que c'est quelque chose
7 que vous ne souhaitiez pas, parce que vous ne souhaitiez pas quitter
8 Belgrade pour retourner à Vitez, n'est-ce pas ?
9 M. Kavazovic (interprétation). - Oui, je ne le souhaitais pas.
10 M. Harmon (interprétation). - Lors de votre retour à la
11 municipalité de Vitez, qu'avez-vous fait ?
12 M. Kavazovic (interprétation). - Pendant un temps, je suis resté
13 avec mes parents, pour dix ou quinze jours. Puis je me suis rendu à
14 l'état-major de la Défense territoriale à Vitez.
15 M. Harmon (interprétation). - Lorsque vous avez rejoint la
16 Défense territoriale à Vitez, est-ce que les Croates de Bosnie se sont
17 également joints aux rangs de la Défense territoriale ?
18 M. Kavazovic (interprétation). - Oui. Il y avait quatorze
19 Croates qui étaient avec moi dans les rangs de la Défense territoriale.
20 M. Harmon (interprétation). - Pouvez-vous nous donner les noms
21 des Croates qui ont rejoint les rangs de la Défense territoriale avec
22 vous, s'il vous plaît ?
23 M. Kavazovic (interprétation). - Oui, je le peux. Il y avait
24 Anto Furundzija, Zlatko Nakic, Vlatko Malakic, Cipo Zigonjak*, Zeljo
25 Sajevic*, Zeljo Vrevec*. Il y avait Dragan Calic*, Dragan Drakovic*,
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1 Vlatko Malic et puis une onzième personne qu'on appelait Botic*, mais je
2 ne sais pas exactement son nom de famille.
3 M. Harmon (interprétation). - Qui commandait la Défense
4 territoriale lorsque vous avez rejoint les rangs ?
5 M. le Président. - Ce sont des questions sur les éléments de
6 base pour identification du témoin. Si vous le voulez bien, nous pourrions
7 interrompre maintenant jusqu'à 16 heures. Merci.
8 (L'audience, suspendue à 15 heures 40, est reprise à 16 heures).
9 M. le Président. - L’audience est reprise. Madame le Greffier,
10 voulez-vous faire rentrer l’accusé, s’il vous plaît.
11 Monsieur le Procureur ?
12 M. Harmon (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.
13 Monsieur Kavazovic, qui était le commandant de la Défense territoriale
14 lorsque vous avez rejoint ses rangs, après votre retour de Belgrade ?
15 M. Kavazovic (interprétation). - Le commandant de la Défense
16 territoriale à mon retour, lorsque je me suis porté volontaire pour
17 rejoindre ses rangs, était Hakija Cengic.
18 M. Harmon (interprétation). - Quelles ont été vos tâches, au sein de la
19 Défense territoriale, après votre arrivée dans ce corps ?
20 M. Kavazovic (interprétation). - Lorsque j'ai intégré les rangs de la
21 Défense territoriale, je n'avais aucune tâche précise. J’étais
22 simplement soldat.
23 M. Harmon (interprétation). - Par la suite, avez-vous été
24 chargé de responsabilités spécifiques au sein de la Défense territoriale ?
25 M. Kavazovic (interprétation). - J'étais le chauffeur du commandant.
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1 M. Harmon (interprétation). - Un peu plus tard, avez-vous été
2 chargé d'autres tâches, d'autres responsabilités ?
3 M. Kavazovic (interprétation). - Le 24 juillet, on m'a nommé
4 responsable de l'unité des transports de l'état-major municipal de la
5 Défense territoriale à Vitez.
6 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Kavasovic, pendant que
7 vous viviez à Vitez, avez-vous été arrêté par les forces du HVO ?
8 M. Kavazovic (interprétation). - Alors que je me trouvais à
9 Vitez, j'ai été arrêté par trois fois par les forces du HVO.
10 M. Harmon (interprétation). - Je vous en prie, veuillez nous
11 raconter ce qui s'est produit.
12 M. Kavazovic (interprétation). - La première fois, j'étais un civil, je ne
13 portais pas du tout l'uniforme, je n'avais rien, je marchais tout
14 simplement dans la ville. Trois soldats du HVO se sont soudain dressés
15 devant moi,il y avaient Vlado Santic parmi eux. Ils m'ont demandé
16 de les accompagner à l'hôtel Vitez. Je les ai accompagnés à l'hôtel Vitez.
17 Nous sommes entrés dans le bâtiment, par l'autre côté, pas par l'entrée
18 principale, mais par une autre entrée. Nous sommes entrés dans une pièce
19 où j'ai été interrogé.
20 M. Riad (interprétation). - Un instant, s'il vous plaît. Quand
21 cette arrestation a-t-elle eu lieu, lorsque vous étiez en civil ? Avez-
22 vous la date en mémoire ?
23 M. Kavazovic (interprétation). - C’était le 7 septembre ou le 8 septembre.
24 M. Riad (interprétation). - En 1992 ?
25 M. Kavazovic (interprétation). - Oui, 1992.
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1 M. Harmon (interprétation). - Vous avez cité Vlado Santic. Le
2 connaissiez-vous avant votre arrestation ?
3 M. Kavazovic (interprétation). - Je le connaissais, il était
4 policier dans la police yougoslave auparavant. Il est entré dans les
5 forces de police en tant que civil.
6 M. Harmon (interprétation). - Au moment de votre arrestation,
7 était-il membre d'une unité en particulier ?
8 M. Kavazovic (interprétation). - Il était membre du HVO, mais à
9 quelle unité était-il attaché, je n'en sais rien, il était en uniforme.
10 M. Harmon (interprétation). - Si nous pouvions disposer de la
11 pièce 33, j’aimerais qu’elle soit montrée au témoin. Je vais me référer à
12 des photos qui se trouvent dans la pièce 33. Monsieur l’Huissier peut-il
13 nous aider à les placer sur le rétroprojecteur ?
14 M. le Président. - Monsieur l’Huissier pourrait peut-être en
15 profiter pour classer les pièces précédentes, qui sont sur le chevalet, en
16 cas de besoin à d'autres moments. Allez-y, Monsieur l’Huissier. Nous avons
17 peu de temps, alors désormais à la pause, Monsieur le Greffier, essayez de
18 veiller à ce que les pièces soient reclassées. Allez-y, Monsieur l’Huissier.
19 M. Harmon (interprétation). - Monsieur l'huissier, je vous
20 demande de placer sur le rétroprojecteur la photo 225, s’il vous plaît.
21 M. Riad (interprétation). - En attendant, puis-je poser une question ?
22 Monsieur,savez-vous pourquoi vous avez été arrêté, alors que vous étiez
23 civil ?Vous a-t-on donné une raison de votre arrestation le 7 septembre
24 1992 ? Ou bien arrêtaient-ils les personnes sans raison particulière ?
25 M. Kavazovic (interprétation). - Je ne sais absolument pas pourquoi j'ai
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1 été arrêté. Je pense que c'était peut-être parce que j'étais membre de la
2 Défense territoriale, c'est la seule raison à laquelle je puisse penser.
3 M. Riad (interprétation). - Je vous remercie.
4 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Kavasovic, voulez-vous
5 regarder la photo qui se trouve sur le rétroprojecteur ? Dites-nous si
6 vous reconnaissez cette photo ?
7 M. Kavazovic (interprétation). - Oui, absolument. Il s'agit de
8 l'hôtel Vitez. C'est une photo de l'hôtel Vitez. Je suis entré par ici
9 lorsque j'ai été arrêté.
10 M. Harmon (interprétation). - Lorsque vous dites par ici,
11 veuillez utiliser le pointeur et nous montrer, sur la photographie,
12 l'entrée que vous avez empruntée. Pour le compte rendu, le témoin montre
13 la porte qui se trouve à la droite de la photographie 205. Fort bien.
14 Monsieur l'Huissier, je vous remercie. Nous pouvons retirer
15 cette photographie du rétroprojecteur.
16 Monsieur Kavasovic, où vous a-t-on emmené, dans l'hôtel Vitez,
17 après votre arrestation ?
18 M. Kavazovic (interprétation). - Après mon arrestation, on m'a
19 emmené dans la chambre n° 1 qui se trouve, à droite, au premier étage.
20 M. Harmon (interprétation). - L'hôtel Vitez était-il un état-
21 major militaire ? Le savez-vous ?
22 M. Kavazovic (interprétation). - L'hôtel Vitez était le quartier
23 général du HVO. Ce qui est certain, c'est que les civils n'avaient
24 absolument pas le droit d’entrer dans le bâtiment.
25 M. Harmon (interprétation). - Que s'est-il passé après votre entrée dans
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1 cette chambre ? Veuillez expliquer au Tribunal ce qui vous est arrivé.
2 M. Kavazovic (interprétation). - On m'a emmené dans une pièce
3 qui ne contenait qu'une table, rien d'autre, pas d'autre meuble.
4 J'ai été interrogé par Vlado Santic. On m'a demandé pourquoi je
5 faisais partie de la Défense territoriale, quelles étaient les intentions
6 de la Défense territoriale. On m'a demandé combien de membres comptait la
7 Défense territoriale. Je n'ai pas répondu à ces questions.
8 M. Harmon (interprétation). - Combien de temps M. Santic vous
9 a-t-il interrogé ?
10 M. Kavazovic (interprétation). - Je suis resté dans cette pièce
11 pendant quatre heures environ. Il m'a interrogé une demi-heure, à peu
12 près. Puis, j'attendais qu'un échange ait lieu. Mon état-major de la
13 Défense territoriale a compris ou reçu l'information de mon arrestation.
14 J'attendais qu'il envoie quelqu'un pour procéder à mon échange.
15 M. Harmon (interprétation). - Finalement, avez-vous été libéré ?
16 M. Kavazovic (interprétation). - Oui, j'ai été libéré.
17 M. Harmon (interprétation). - Venons-en maintenant à votre
18 deuxième arrestation. Quand a-t-elle eu lieu ?
19 M. Kavazovic (interprétation). - Elle a eu lieu le 20 octobre 1992.
20 M. Harmon (interprétation). - Elle s'est produite au moment où
21 il y avait des incidents entre le HVO et les Musulmans, des incidents qui
22 sont survenus à Novi Travnik ?
23 M. Kavazovic (interprétation). - Oui. Cela s'est produit au moment où la
24 ville de Travnik était bloquée. Il n'y avait pas d'accès à Travnik. Le HVO
25 empêchait son accès. Personne ne pouvait entrer dans Travnik. D'une certaine
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1 façon, c'est la même situation qui prévalait à Vitez.
2 M. Harmon (interprétation). - Pouvez-vous expliquer au Tribunal
3 les incidents qui ont conduit à votre arrestation ?
4 M. Kavazovic (interprétation). - Ce jour-là, le 20 octobre, je revenais de
5 Visoko. Je conduisais une camionnette. Je suis arrivé au bâtiment de
6 commandement à Vitez où se trouvaient mes supérieurs. A ce moment-là, alors
7 que je traversais Ahmici, je me suis aperçu que des maisons étaient en
8 flamme. Je ne comprenais absolument rien, je ne savais pas ce qui se
9 passait. Cinq maisons brûlaient dans Ahmici. Ensuite, j'ai vu qu'il y avait
10 des unités un peu partout dans Vitez. J’ai vu que la ville était bloquée
11 d'une certaine façon, que des soldats se trouvaient au coin des rues. Nous
12 étions près du lycée. Quand je suis entré dans le bâtiment, je me suis
13 rendu compte que les membres de la Défense territoriale et que des civils,
14 généralement les Musulmans, n'étaient absolument plus libres de leurs
15 mouvements. Nous n'avions plus le droit de nous rendre dans quelque endroit
16 que ce soit. Nous étions, en fait, sous le siège du HVO, si l’on veut. Nous
17 avons passé à peu près quatre heures là, jusqu'à ce qu’un accord soit
18 conclu entre la Défense territoriale et le HVO.
19 M. Harmon (interprétation). - Excusez-moi de vous interrompre. Lorsque vous
20 dites : "Nous sommes restés là", à quoi faites-vous référence ?
21 M. Kavazovic (interprétation). - Nous étions à Posedena, dans une maison, où
22 l'on nous avait installés, où la Défense territoriale avait été installée.
23 M. Harmon (interprétation). - Monsieur le Président, je vais
24 donner à l'Huissier une copie de la pièce 35 et lui demander de la placer
25 sur le chevalet. Je voudrais qu'elle reçoive une cote et j'aimerais que le
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1 témoin nous indique un certain nombre d'emplacements sur cette carte.
2 Si je ne m’abuse, il s'agira de la pièce de l'accusation 45 C.
3 Mme le Greffier. - Ce sera la pièce 45 C.
4 M. Harmon (interprétation). - Veuillez prendre le feutre jaune
5 s'il vous plaît et nous indiquer l'emplacement de l’endroit où vous vous
6 trouviez et du quartier général de la Défense territoriale.
7 M. Kavazovic (interprétation). - Oui, je vais le faire. Voici
8 l'état-major de la Défense territoriale qui se trouvait dans les bâtiments
9 du lycée à Vitez.
10 M. Harmon (interprétation). - Veuillez, s'il vous plaît,
11 colorier l'ensemble du bâtiment avec ce crayon jaune, Monsieur Kavazovic.
12 M. Kavazovic (interprétation). - Voici le lycée où se trouvait
13 le quartier général de la Défense territoriale. Voici où se trouvait le
14 département de la logistique dans ce bâtiment. Moi, je me trouvais ici
15 avec quatre de mes collègues et c'est là où se trouvaient le commandant et
16 six ou sept autres personnes.
17 M. Harmon (interprétation). - Quand vous dites : « J'étais ici », vous
18 étiez dans le bâtiment chargé de la logistique chargée de la
19 Défense territoriale ?
20 M. Kavazovic (interprétation). - Oui.
21 M. Harmon (interprétation). - Pouvez-vous poursuivre à présent
22 et continuer à nous relater les événements liés à votre arrestation ?
23 M. Kavazovic (interprétation). - Quand je suis donc arrivé dans le centre
24 de logistique, ce bâtiment où se trouvait la logistique, sur l'ordre de
25 Hakija Cengic qui était le commandant à l'époque, il a été décidé, sur
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1 accord avec le HVO, que nous pouvions quitter le centre chargé de la
2 logistique en toute sécurité, c'est-à-dire nous retirer du quartier général
3 qui se trouvait dans l’école pour aller vers Mahala. Le commandement était
4 le premier à devoir partir et les membres du commandement devaient donc
5 s'installer ailleurs. Plus tard, lorsque nous avons eu des contacts avec le
6 commandant, il nous a demandé de mettre dans une voiture tout ce que nous
7 pouvions retirer du centre de logistique. Nous avons utilisé une
8 camionnette et une Fiat et nous avons réussi à emporter avec nous dans ces
9 véhicules quelques objets que nous avons pu sortir du bâtiment de
10 logistique. Cependant, l'accord n'a pas été respecté comme il aurait dû
11 car, lorsque nous sommes arrivés à un endroit qui se trouvait entre le
12 cinéma et l'hôtel Vitez, des hommes nous ont arrêtés. Ils portaient les
13 insignes du HOS, ils étaient environ une quinzaine. Ils nous ont fait sorti
14 sortir des véhicules et nous avons été arrêtés. Salih Omerdic était avec
15 moi dans la même voiture et nous avons été arrêtés tous les deux.
16 M. Harmon (interprétation). - Les soldats qui vous ont arrêtés, certains
17 d'entre eux en tout cas, portaient-ils des insignes significatifs sur
18 l'épaule ?
19 M. Kavazovic (interprétation). - Oui, ils portaient tous
20 l'insigne du conseil de la défense Croate et deux d'entre eux avaient les
21 insignes de l'unité Ludwig Pavelic*. Ce sont eux qui m'ont emmené vers
22 Vlado Santic ; lui m'a accompagné jusqu'au bureau.
23 M. Harmon (interprétation). - Cet insigne de l'unité Ludwig
24 Pavelic, à quoi ressemble-t-il ?
25 M. Kavazovic (interprétation). - C'était un insigne qui
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1 représentait une feuille de chêne sous laquelle il était écrit «Ludwig
2 Pavelic». D'après ce que je sais, d'après ce que les gens racontaient à
3 Vitez, c'était une unité qui venait de l'Herzégovine, de Mostar.
4 M. Harmon (interprétation). - Avez-vous vu cet insigne sur l'un quelconque
5 des uniformes que vous portiez ? Aviez-vous vous-même un insigne ?
6 M. Kavazovic (interprétation). - Moi, j'avais un uniforme, un fusil, un
7 insigne et un étui pour mon fusil. Lorsqu'on m'a donné l'ordre de sortir de
8 la camionnette, j'ai pris mon fusil et j'ai montré mon insigne, mais le
9 soldat a pointé son arme sur moi et je me suis rendu compte que je ne
10 pouvais rien faire ; j'ai été forcé de sortir du véhicule.
11 Sur la gauche de mon uniforme, j’avais un insigne qui montrait
12 que j'appartenais à la Défense territoriale. A ce moment-là, l'un des deux
13 hommes qui appartenaient à cette unité, Ludwig Pavelic a arraché mon
14 insigne de mon uniforme et m’a jeté des insultes. Il m'a dit : «A quoi
15 cela te sert il ? Tu n'en n'auras jamais plus besoin !», et il l'a
16 piétiné. Ensuite, il a empoigné mon revolver, l'a jeté au sol avec l'étui
17 et m’a emmené auprès de Vlado Santic, celui qui m'a arrêté. Ensuite on m'a
18 emmené dans une autre pièce la pièce N°2 à droite de la première.
19 M. Harmon (interprétation). - Donc, vous avez été emmené à
20 l’hôtel Vitez une deuxième fois ?
21 M. Kavazovic (interprétation). - Oui.
22 M. Harmon (interprétation). - Avez-vous vu du matériel de
23 transmission entre les mains des soldats qui vous ont arrêté ?
24 M. Kavazovic (interprétation). - Oui, j’ai vu des appareils Motorola, des
25 postes de radio entre les mains de ces deux membres de l’unité Ludwig
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1 Pavelic et chez Vlado Santic il y avait aussi un appareil Motorola.
2 M. Harmon (interprétation). - Qu'est-ce qu'un appareil Motorola.
3 M. Kavazovic (interprétation). - C'est un appareil utilisé par
4 la police et l'armée pour communiquer, un appareil d'utilisation courante,
5 cela fait partie de l'équipement.
6 M. Harmon (interprétation). - A quelle distance de l'hôtel Vitez
7 vous trouviez-vous lorsque vous avez été arrêté ?
8 M. Kavazovic (interprétation). - A environ 15 mètres peut-être.
9 M. Harmon (interprétation). - Où se trouvait Vlado Santic ?
10 M. Kavazovic (interprétation). - Il m'attendait sur l'escalier.
11 Il était sur les marches, il avait les mains sur les hanches et quand je
12 me suis approché de lui, il m'a emmené avec lui dans la pièce n° 2.
13 M. Harmon (interprétation). - Avec qui vous a-t-il emmené dans
14 cette pièce n° 2 ?
15 M. Kavazovic (interprétation). - Avec les deux membres de
16 l'unité Ludwig Pavelic.
17 M. Harmon (interprétation). - Pouvez-vous dire au Tribunal ce
18 qui s'est passé quand vous êtes arrivé dans cette pièce ?
19 M. Kavazovic (interprétation). - Je suis entré dans cette pièce,
20 ils m'ont donné l'ordre de m'asseoir. Je me suis assis. A ce moment-là,
21 ils sont arrivés, ils avaient trouvé du matériel radio dans la voiture,
22 c'était en fait un support de radio qui était abîmé. Ils m'ont posé des
23 questions au sujet de cette radio, pourquoi j'avais cette radio, pourquoi
24 je la gardais dans la voiture. Ils m'ont interrogé. Dans la voiture, il y
25 avait également deux fusils à lunette qui étaient abîmés et qui ne
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1 fonctionnaient pas. Ces deux fusils à lunette avaient été retirés d'un
2 arsenal qui avait explosé, donc on nous les avait apportés pour que nous
3 les fassions réparer. Quand je suis arrivé dans la camionnette, j’ai vu
4 qu’il y avait ces deux fusils à lunette, je ne savais même pas qu’ils
5 devaient s’y trouver. Alors, ils m’ont posé des questions, ils m’ont dit:
6 «Qu’est-ce que c’est que ces fusils ? Pourquoi se trouvent-ils ici ?
7 Qu'est-ce que la Défense territoriale pense faire s'il y avait eu une
8 attaque du HVO ?" Ils m'ont demandé combien il y avait d'unités à Mahala.
9 Je n'ai donné aucune réponse, je me suis tu. Un qui se trouvait debout
10 derrière moi m'a pris par l'épaule et m'a dit : "De toute façon, vous, vous
11 n'allez pas continuer longtemps". Après cet interrogatoire, on m'a emmené
12 aux toilettes de l'hôtel, à l'étage inférieur, et on m'a enfermé dans les
13 toilettes de femmes qui avaient débordé. Il y avait de l'eau partout. J'ai
14 attendu à cet endroit jusqu'à 11 heures du soir. Après 11 heures du soir,
15 m'a emmené au siège de la police civile du HVO et, là, on m'a mis dans une
16 pièce où il n'y avait pas d'électricité, rien. Tout était couvert de
17 poussière, le sol était en parquet. Et nous n'avons reçu que deux
18 couvertures. Il y avait aussi une cuvette de toilette et rien d'autre.
19 M. Harmon (interprétation). - Avant que nous en revenions au
20 bâtiment du MUP et aux conditions de détention, pendant que vous vous
21 trouviez au rez-de-chaussée de l'hôtel Vitez, y avait-il d'autres
22 prisonniers musulmans dans ce rez-de-chaussée ou dans d'autres pièces ?
23 M. Kavazovic (interprétation). - J'ai été le premier à être emmené avec
24 Salih Omerdic qui était venu avec moi dans la camionnette. Lui aussi était
25 enfermé dans les toilettes de l'hôtel. Après une demi-heure, Muhamed
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1 Patkovic, qui avait été arrêté avec moi, est arrivé également. En effet,
2 ils avaient fait le tour du bâtiment et avaient arrêté Muhamed Patkovic qui
3 a subi des violences, qui a été passé à tabac. Ils l'ont emmené ensuite à
4 l'endroit où je me trouvais. Nous avons essayé de lui apporter de l'aide,
5 mis de l'eau sur le visage. Il avait des ecchymoses et avait du mal à
6 parler car il se sentait très faible. Et depuis ces toilettes de l'hôtel,
7 on nous a emmené au siège de la police de la Herzeg- Bosna.
8 M. Harmon (interprétation). - Combien de temps êtes-vous resté à
9 cet endroit ?
10 M. Kavazovic (interprétation). - Trois jours.
11 M. Harmon (interprétation). - Pouvez-vous décrire brièvement les
12 conditions de détention au siège de la police ?
13 M. Kavazovic (interprétation). - Les conditions étaient vraiment
14 indescriptibles. Il y avait une pièce de 1,5 mètre sur 2. Il n'y avait pas
15 de place, pas de mobilier, qu'une fenêtre et une cuvette de toilette, pas
16 d'eau, pas d'électricité. Nous n'osions pas demander quoi que ce soit.
17 C'était cela, en gros, les conditions.
18 M. Harmon (interprétation). - Quand vous a-t-on remis en liberté
19 et quand vous a-t-on permis de sortir de ce bâtiment de la police ?
20 M. Kavazovic (interprétation). - Le quatrième jour, le matin,
21 j'ai été échangé. Un accord a été conclu au moment d'un cessez-le-feu à
22 Travnik portant sur l'échange des prisonniers. Et le quatrième jour, le
23 matin, on m'a dit que je devais être emmené quelque part pour être échangé
24 contre des gens, eux aussi arrêtés. On m'a remis en liberté. Mon
25 commandant Nihad Rabihic est arrivé et j'ai été échangé.
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1 M. Harmon (interprétation). - Et vous vous êtes trouvé deux fois, à l'hôtel
2 Vitez,après votre arrestation. Vous saviez que l'hôtel
3 Vitez était un quartier général militaire ? Je vais vous poser des
4 questions au sujet de l'hôtel Vitez ? Etes-vous Musulman ?
5 M. Kavazovic (interprétation). - Oui.
6 M. Harmon (interprétation). - Les Musulmans pouvaient-ils accéder librement
7 à l'hôtel Vitez alors qu'il était un quartier général de l'armée ?
8 M. Kavazovic (interprétation). - Absolument pas.
9 M. Harmon (interprétation). - Les soldats du HVO pouvait-ils
10 accéder librement à l'hôtel Vitez ?
11 M. Kavazovic (interprétation). - Oui.
12 M. Harmon (interprétation). - Connaissez-vous un homme dénommé
13 Darko Kraljevic ?
14 M. Kavazovic (interprétation). - Je le connais.
15 M. Harmon (interprétation). - Le connaissiez-vous dans votre communauté ?
16 M. Kavazovic (interprétation). - Oui.
17 M. Harmon (interprétation). - L'avez-vous jamais vu dans l'hôtel Vitez ?
18 M. Kavazovic (interprétation). - Je l'ai vu trois fois à l'hôtel Vitez.
19 M. Harmon (interprétation). - A peu près quand, si vous pouvez
20 vous rappeler ?
21 M. Kavazovic (interprétation). - Je l'ai vu aux alentours du
22 mois de juin 1992. Je l'ai vu aussi en juillet et en septembre 1992.
23 M. Harmon (interprétation). - Quand vous l'avez vu, il entrait
24 dans l'hôtel Vitez ou en sortait ?
25 M. Kavazovic (interprétation). - Je l'ai vu entrer dans l'hôtel Vitez.
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1 M. Harmon (interprétation). - Bien. Monsieur Kavazovic,
2 j'aimerais maintenant attirer votre attention sur le jour du
3 15 avril 1993. Concentrez-vous donc sur cette journée, vous viviez
4 toujours à ce moment-là à Vitez ?
5 M. Kavazovic (interprétation). - Oui. Dans une maison privée qui
6 appartenait à Resad Burak.
7 M. Harmon (interprétation). - Etes-vous allé au travail ce jour- là ?
8 M. Kavazovic (interprétation). - Le 15 au matin, je suis allé au
9 travail à 7 heures du matin et j'ai travaillé jusqu'à 15 heures.
10 M. Harmon (interprétation). - Quand vous avez fini votre journée
11 de travail, où êtes-vous allé ?
12 M. Kavazovic (interprétation). - Quand j'ai fini de travailler,
13 je me suis dirigé vers la maison où j'habitais, vers Mahala où se trouvait
14 la maison. Et sur le chemin, j'ai remarqué qu'il y avait quelque chose
15 d'inhabituel en ville, qu'il n'y avait pas de civils, qu'il y avait des
16 groupes de soldats du conseil croate de la défense en uniforme et en
17 équipement de combat, se promenant par groupe de deux ou trois.
18 Il m'a semblé que quelque chose n'allait pas. J'ai pensé que la
19 situation en ville n'était pas très bonne. J'ai vu qu'il n'y avait pas de
20 civils. Ce qui voulait dire que les choses étaient tranquilles. Mais il y
21 avait ces groupes de soldats qui se promenaient. Je suis arrivé à la
22 maison où j'habitais et voyant que la situation était difficile, que...
23 M. Harmon (interprétation). - Laissez-moi vous interrompre
24 quelques instants. Je vous prierai de vous lever et de vous approcher de
25 la grande photo qui se trouve à gauche, pièce de l'accusation 45 C et
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1 d'utiliser un feutre rose pour mettre de la couleur sur l'emplacement où
2 se trouvait votre maison.
3 M. Kavazovic (interprétation). - Ma maison se trouvait ici.
4 C'est la maison privée où j'habitais.
5 M. Harmon (interprétation). - Voulez-vous bien inscrire le
6 numéro un, à-côté de cette maison, je vous prie ?
7 Vous pouvez vous rasseoir. Merci. Quand vous êtes retourné dans
8 votre maison, qu'avez-vous fait ?
9 M. Kavazovic (interprétation). - A ce moment-là, j'ai essayé de voir si ma
10 femme se trouvait à la maison, mais ma femme était chez Kunsa Kusa* dans
11 son appartement. A ce moment-là, j'ai quitté ma maison pour aller chez mes
12 beaux- parents où se trouvait ma femme et j'ai vu, en traversant le parc,
13 un groupe de six à sept soldats qui couraient dans la direction de l'hôtel.
14 M. Harmon (interprétation). - Comment étaient habillés ces soldats ?
15 M. Kavazovic (interprétation). - Ils étaient habillés en
16 vêtement de combat. Ils avaient un uniforme de camouflage, un masque sur
17 le visage, un fusil automatique dans la main et un casque sur la tête.
18 M. Harmon (interprétation). - Je vous prierai de vous rapprocher
19 une nouvelle fois de la pièce à conviction 45 C et de mettre une marque
20 sur l'emplacement de l'immeuble où se trouvait votre femme. Deuxièmement,
21 avec un feutre rose, j'aimerais que vous indiquiez le chemin que vous avez
22 parcouru pour aller de votre maison jusqu'à cet immeuble.
23 M. Kavazovic (interprétation). - D'accord. Je suis arrivé de
24 Mahala en civil parce que j'étais dans une région qui était sous le
25 contrôle du conseil croate de la défense et j'avais peur de porter
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1 l'uniforme. Je me changeais en général quand je parcourais ce chemin.
2 Ce chemin allait de ma maison jusque chez mes beaux-parents. Je suis donc
3 parti du travail habillé en civil, je n'osais pas porter l'uniforme parce
4 que j'avais peur du conseil croate de la Défense car j'habitais dans un
5 quartier sous le contrôle de ce conseil croate de la Défense.
6 Dans ce bâtiment se trouvaient mon beau-père et ma belle-mère.
7 M. Harmon. (interprétation) - Je vous demanderai de prendre le feutre rose
8 et de mettre de la couleur sur cet immeuble en inscrivant le chiffre 2 à
9 côté. Monsieur Kavazovic, avec le pointeur je vous demanderai de nous
10 montrer le parc où vous avez vu ces groupes de soldats du HVO qui
11 couraient dans la direction de l'hôtel Vitez.
12 M. Kavazovic (interprétation). - Je suis donc parti de la
13 maison, j'ai traversé le parc, j'ai suivi ce chemin et, en provenance du
14 centre ville, j'ai vu trois ou quatre groupes de six ou sept soldats qui
15 couraient et se dirigeaient vers l'hôtel Vitez.
16 M. Harmon (interprétation) - Cela s'est passé à peu près à
17 quelle heure de la journée ?
18 M. Kavazovic (interprétation). - Cela s'est passé à 4 heures
19 moins 10, peut-être 4 heures.
20 M. Harmon (interprétation) - Monsieur Kavazovic, je suppose que vous ne
21 savez pas exactement s'ils couraient précisément vers l'hôtel Vitez ou vers
22 un autre quartier de la ville de Vitez où se trouvait l'hôtel Vitez. C'est
23 bien exact ?
24 M. Kavazovic (interprétation). - Oui, c’est exact, ils couraient
25 vers l'hôtel Vitez, c'est-à-dire que depuis cet endroit ils couraient dans
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1 cette direction. Moi, je les ai vus ici, ce qui veut dire qu'ils allaient
2 en tout cas vers le quartier de la ville où se trouve l'hôtel.
3 M. Harmon (interprétation) - Vous pouvez vous rasseoir à nouveau
4 et je vous demanderai de vous relever dans quelques instants pour inscrire
5 des marques distinctives sur le diagramme. Lorsque vous êtes arrivé dans
6 l'immeuble de vos beaux-parents, y avez-vous trouvé votre épouse ?
7 M. Kavazovic (interprétation). - Oui, j'y ai trouvé ma femme,
8 elle était chez ses parents.
9 M. Harmon (interprétation) - Que s'est il passé lorsque vous
10 êtes arrivé dans cet immeuble ?
11 M. Kavazovic (interprétation). - Je suis entré dans l'immeuble où
12 habitaient mes beaux-parents et où se trouvait ma femme et, au moment
13 où j'entrais dans l'immeuble, j'ai constaté que la situation était
14 vraiment mauvaise, que tout le monde était à l'intérieur des maisons,
15 qu'il y avait des gens qui couraient, qui avaient l'air de se hâter. Donc
16 ils couraient pour rentrer chez eux, dans leur appartement. J'ai demandé à
17 ma femme de venir avec moi pour une petite promenade pour voir ce qui se
18 passait en ville et c'est ce que j'ai fait. Je suis sorti avec ma femme et
19 j'ai fait un petit tour. Nous avons donc fait un petit tour en ville et,
20 alors que nous nous promenions, nous avons vu que la ville était
21 complètement désertée, il n’y avait pas de civil, pas de voiture, plus rien
22 et j'ai dit à ce moment-là à ma femme que nous devrions retourner chez mes
23 beaux-parents car la situation était vraiment mauvaise.
24 J'ai vu que deux ou trois soldats se tenaient à côté de
25 l'immeuble et j'ai compris, puisque j'ai vu des soldats équipés pour la
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1 guerre, que quelque chose se passait qui n'était pas très engageant. Nous
2 sommes revenus chez mes beaux-parents et à ce moment-là, mon beau-père et
3 ma belle-mère ont appris eux aussi que la situation était mauvaise en
4 ville, que la ville était bloquée, que personne ne pouvait ni y entrer ni
5 en sortir, qu'il n'y avait plus de véhicule pour les civils ni de
6 circulation des civils. Ils ont donc proposé que nous nous retirions et
7 que nous allions vers Mahala où se trouvaient les Musulmans.
8 A ce moment-là, nous nous sommes dirigés vers la porte pour
9 sortir et l'un de mes collègues est arrivé et m’a dit : «Arrête-toi, tu ne
10 vas plus nulle part. Tout est fini. La situation est mauvaise. La guerre
11 peut éclater à tout instant». Je lui ai dit : «Mais pourquoi ?» Il m’a
12 dit : «Je ne sais pas, mais retourne chez toi, dans l’appartement, et ne
13 bouge plus».
14 Malgré son avertissement, mon beau-père, ma belle-mère et ma
15 femme sont rentrés, mais moi je suis allé vers la porte. J'ai descendu les
16 escaliers, je suis sorti sur la route, et j'ai vu des soldats du conseil
17 croate de la Défense en très grand nombre qui bloquaient toutes les
18 entrées des immeubles, devant chaque porte, chaque entrée d’immeuble. Il y
19 avait trois ou quatre soldats du HVO qui bloquaient la sortie pour
20 empêcher que les gens ne sortent. Les rues étaient bloquées par des
21 containers ; là où l'on entre dans Vitez il y a un carrefour et là, il y
22 avait trois ou quatre containers qui empêchaient toute circulation.
23 Je me suis rendu compte de la situation et, en fait, j'ai pris
24 peur et je suis retourné dans l'immeuble de mes beaux-parents. Donc, je
25 suis retourné chez ma belle-mère et mon beau-père et quand je suis entré
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1 dans l'appartement, mon beau-père m'a dit : «Mais pourquoi as-tu fait tout
2 cela ?». J'ai répondu que cela m'intéressait. Il m'a dit lui aussi : «Plus
3 rien ne devrait t'intéresser puisque tout est bloqué et nous ne pouvons
4 que rester là où nous sommes».
5 M. Harmon (interprétation) - Monsieur Kavazovic, je vous
6 demanderai de prendre le feutre vert qui se trouve sur la table devant
7 vous et de vous rapprocher de la pièce à conviction de l’accusation N°45 C
8 une nouvelle fois, et avec ce feutre vert, je vous demanderai d'indiquer
9 le chemin que vous avez suivi avec votre épouse pour aller en ville.
10 M. Kavazovic (interprétation). - Je vais maintenant inscrire sur
11 le plan le chemin que j'ai suivi avec ma femme quand nous sommes sortis de
12 l'appartement.
13 M. Harmon (interprétation) - Oui, je vous en prie.
14 M. Kavazovic (interprétation). - Voilà le tour que nous avons
15 fait quand nous sommes allés nous promener.
16 M. Harmon (interprétation) - Je vous demanderai de vous
17 rasseoir, Monsieur Kavazovic, et j’ai encore quelques questions à vous
18 poser avant de passer à un autre sujet. Lorsque vous-même, votre femme et
19 vos beaux-parents avez essayé de sortir de l'immeuble, je crois vous avoir
20 entendu dire que vous aviez été arrêtés par un collègue, en tout cas c’est
21 ce que j’ai entendu de la bouche de l’interprète. Qui était-ce et comment
22 était-il vêtu ?
23 M. Kavazovic (interprétation). - C’est mon collègue qui
24 s'appelle Mirko Malec*. Il portait un uniforme, il avait un fusil et il
25 était le gardien de cet immeuble.
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1 M. Harmon. (interprétation) - Etait-ce un soldat du HVO ?
2 M. Kavazovic (interprétation). - Oui, c'était un soldat du HOS,
3 ancien membre du HOS et membre du HVO. A ce moment-là, il portait
4 l'uniforme.
5 M. Harmon. (interprétation) - J'aimerais maintenant attirer
6 votre attention sur la journée du 16 avril 1993. Dites-moi ce qui s'est
7 passé le 16 avril 1993, comment votre journée a-t-elle commencé ?
8 M. Kavazovic (interprétation). - Le soir du 15, quand nous avons
9 voulu sortir de l'immeuble alors que la ville était sous le contrôle du
10 conseil croate de la Défense, moi-même, mon épouse et mes beaux-parents
11 n'avons pas pu sortir, donc nous avons été forcés de passer la nuit chez
12 nos beaux-parents. Ce soir-là, nous nous sommes couchés vers 10 heures 30,
13 11 heures du soir et le matin, vers 5 heures, 5 heures 10, 5 heures 15,
14 une explosion s'est produite ; nous l'avons entendue et elle m'a réveillé.
15 Elle a d'ailleurs réveillé tous les autres. Moi, je dormais à côté de la
16 fenêtre avec ma femme. Je me suis levé, je suis allé vers la fenêtre pour
17 voir ce qui se passait, j'ai jeté un coup d'oeil et, à un certain moment,
18 j'ai vu que trois groupes de cinq ou six soldats du HVO couraient vers le
19 bâtiment où se trouvait le siège de la police civile du HVO.
20 Je me suis levé à ce moment-là, mon beau-père s'est levé aussi
21 et m'a dit : «C’est la guerre maintenant, nous devons rester ici quoi
22 qu'il arrive ». Je suis retourné à l'intérieur de la chambre, j'ai de
23 nouveau jeté un coup d'oeil par la fenêtre et, à côté de chaque immeuble,
24 j'ai vu deux membres du conseil croate de la Défense armés. Ils portaient
25 chacun un fusil automatique ou une Kalachnikov ; ils avait un casque sur
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1 la tête et l'uniforme complet du soldat, et ils étaient à côté des
2 immeubles. Je pense donc qu’ils gardaient vraisemblablement ces immeubles,
3 pour empêcher les gens d'y entrer ou d’en sortir -je ne sais pas- mais en
4 tout cas, à côté de chaque immeuble, il y avait deux combattants du HVO.
5 A ce moment-là, j'ai entendu des obus qui tombaient juste en
6 face de l'endroit où je me trouvais en-dessous de l'immeuble de mes beaux-
7 parents. Il y avait un centre commercial à cet endroit qui, pendant
8 l'époque de l’ex-Yougoslavie, en 1991/1992, avait commencé à se
9 construire. Et puis, à cause de la guerre qui a éclaté en Bosnie-
10 Herzégovine, le bâtiment n'a pas été achevé, donc il n'y avait qu'une
11 plaque de béton et j'ai entendu des mortiers qui tiraient des obus dans la
12 direction qui se trouvait en face de chez moi, vers Preocica et vers les
13 villages avoisinants de Vitez.
14 M. Harmon (interprétation) - Pouvez-vous vous approcher encore
15 une fois de la pièce à conviction de l’accusation 45 C ? Je vous
16 demanderai d’utiliser un feutre orange et de nous indiquer de quelle
17 direction vous avez entendu provenir les obus.
18 M. Kavazovic (interprétation). - Ce centre commercial se
19 trouvait ici. C'est depuis ce centre commercial que l’on entendait arriver
20 des obus de mortier.
21 M. Harmon (interprétation) - A quelle distance celui-ci se
22 trouvait-il de l’immeuble où habitaient vos beaux-parents ?
23 M. Kavazovic (interprétation). - Je dirai peut-être 25 à
24 30 mètres, tout au plus 50 ; en tout cas, ce n’était pas loin.
25 M. Harmon (interprétation). - Avez-vous pu distinguer le type de
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1 mortier que l'on utilisait et qu'on lançait depuis cet endroit ?
2 M. Kavazovic (interprétation). - Je ne sais pas. Est-ce que
3 c'était un calibre de 120 millimètres ? En tout cas, les obus de mortier
4 provoquaient des explosions très puissantes. Donc c’était sans doute un
5 mortier de 120 millimètres de l’ex-JNA.
6 M. Harmon (interprétation). - Avez-vous pu déterminer d'où
7 venaient ces obus de mortier ?
8 M. Kavazovic (interprétation). - D'une distance de 30 à
9 35 mètres. Ils étaient tirés dans la direction de Preocica et de Poculice.
10 C'était des villages exclusivement musulmans.
11 M. Harmon (interprétation). - Le 16 avril, depuis l'immeuble où
12 vous vous trouviez avec votre femme et vos beaux-parents, avez-vous pu
13 voir de la fumée qui s’élevait des environs ? D'un endroit particulier,
14 dans ces environs ?
15 M. Kavazovic (interprétation). - Oui. Vers 13 heures, le 16
16 toujours, j'ai vu des nuages énormes de fumée provenant de Preocica et de
17 Poculica notamment. C'étaient les villages que l'on pouvait voir depuis
18 l'une des fenêtres de l'appartement de mes beaux-parents. J'ai vu aussi de
19 la fumée venant également de Ahmici. C'était des nuages énormes, noirs de
20 fumée. Tout le monde pouvait les voir.
21 M. Harmon (interprétation). - Combien de temps avez-vous passé
22 dans l'appartement de vos beaux-parents ?
23 M. Kavazovic (interprétation). - Trois jours. Depuis le 15 au
24 soir jusqu'au 19. Donc du 16 au 19, pratiquement.
25 M. Harmon (interprétation). - J'attire votre attention sur le
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1 18 avril 1993. Avez-vous entendu une détonation puissante, une explosion ?
2 M. Kavazovic (interprétation). - Ce jour là, les citoyens de
3 nationalité croate sont entrés dans l'immeuble. Ils nous ont dit que nous
4 devions tous descendre dans la cave. En effet, les Musulmans allaient
5 faire tonner le sultan, c’est une espèce de pièce d’artillerie. Ils nous
6 ont dit que ce n’était pas une bonne idée de rester dans l’appartement.
7 Certains sont descendus à la cave, d'autres pas. Nous, nous nous sommes
8 assis près des fenêtres.
9 Vers 15 heures 30 ou 16 heures, je ne sais plus exactement, une
10 faute explosion a été entendue, qui a brisé toutes les vitres de
11 l'immeuble. Le verre tombait sur notre dos, car nous étions assis près de
12 la fenêtre. Ils nous ont dit que c'était un sultan que les Musulmans
13 avaient tiré depuis Zenica en direction de Vitez.
14 Mais vers 19 heures, 20 heures, une femme qui s'appelle Fatima a
15 dit que ce n'était pas un obus qui avait été tiré par l’armée de Bosnie-
16 Herzégovine ou par la Défense territoriale, mais un camion rempli
17 d'explosifs que le HVO avait envoyé en direction des habitants de la
18 Défense territoriale à Mahala et que l'explosion avait détruit cinq
19 maisons, les rayant vraiment de la carte.
20 M. Harmon (interprétation). - Parlons des circonstances dans
21 lesquelles vous avez quitté l’appartement de vos beaux-parents ? Pourriez-
22 vous décrire ces circonstances à l’attention des Juges ?
23 M. Kavazovic (interprétation). - Pendant le temps que j'ai passé
24 chez mes beaux-parents, je n'étais autorisé à faire aucun mouvement, même
25 pas à quitter l'appartement. Tous les Croates occupant l'immeuble,
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1 savaient que j'appartenais à la Défense territoriale. Je devais donc me
2 cacher dans l'appartement de mes beaux-parents. De temps à autres des gens
3 venaient, fouillaient l'appartement, prenaient les appareils de téléphone,
4 pillant ceci ou cela qui appartenaient à des Musulmans qui avaient déjà
5 quitté Vitez. J'ai donc dû me cacher, même dans les toilettes, pour qu'ils
6 ne me trouvent pas.
7 Le 18 au soir, un collègue est venu me voir. Il m'a dit que ce
8 n'était pas une bonne idée que je reste davantage. En effet, ils
9 fouillaient les maisons et ils rassemblaient tous les Musulmans de 12 à
10 65 ans qu'ils mettaient dans des camps. Alors, je lui ai dit : que
11 faire ?, parce qu'ils allaient m'emporter moi aussi. Il m'a répondu qu'il
12 ne savait pas, qu'il était prêt à m'aider du mieux qu'il pouvait. Ce soir-
13 là, personne n'a pénétré dans l'immeuble. Mirko Malic le surveillait pour
14 empêcher que quiconque n’entre dans l'immeuble.
15 Mais, le lendemain, le 19, vers midi, l'un de mes collègues est
16 venu. Il avait appris que je restais chez mes beaux-parents, dans leur
17 appartement. Il s'est approché de ma femme, il lui a demandé comment il se
18 trouvait que je sois encore là. Elle a dit que nous étions en train de
19 faire une promenade, que nous n'avions plus aucun endroit où aller et que
20 nous avions terminé chez ses parents. Il savait que je travaillais dans la
21 Défense territoriale, que j'avais travaillé pour eux. Il m'a dit qu'il
22 m'aiderait en m'emmenant, avec certains de ses collègues, vers le bâtiment
23 du SDK, qu'il avait sous sa responsabilité dans une certaine mesure.
24 Moi, j'avais peur. Je ne savais pas ce qu'ils allaient me faire.
25 Car, je savais que tous les hommes musulmans de 12 à 65 ans avaient été
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1 emmenés à l'école secondaire, au centre de Rijeka, au centre vétérinaire,
2 au club d’échecs, au bâtiment du SDK. Je me suis dit qu'ils voulaient
3 peut-être me tendre un piège, qu'ils allaient m'emmener ailleurs.
4 J'avais un excellent collègue, en qui pourtant je n'avais pas
5 paticulièrement confiance. Mais, il m’a promis de venir lui-même, en
6 personne, avec une camionnette pour m'emmener, pour me faire sortir de ce
7 bâtiment, pour aller au SDK. Cela s'est passé vers midi, il est venu avec
8 un certain Zuza de Krajadze*. Il a forcé tous les Musulmans de l'immeuble
9 à sortir, à descendre. L'appartement de mes beaux-parents se trouvait au
10 premier étage. Nous avons attendu que tous les Musulmans soient descendus.
11 Tous ceux qui avaient de 12 et 65 ans, parmi les hommes, ont été alignés.
12 On nous a dit d’aller au SDK. Je suis sorti, j'ai été emmené au SDK. Et
13 là, il y avait déjà des hommes en provenance d'autres immeubles. En tout
14 état de cause, 63 personnes étaient dans une toute petite pièce.
15 M. Harmon (interprétation). - Quelques questions. Ces collègues,
16 sans pourtant les citer par leurs noms, pourriez-vous nous dire si c'était
17 des Musulmans ou des Croates ?
18 M. Kavazovic (interprétation). - Ce collègue précis c'était un
19 réfugié de Kotor Varos qui était venu à Vitez. En tant que réfugié, il
20 avait fait connaissance avec ma petite amie, qui est devenue ma femme
21 en 1993. En 1992, nous n'étions toujours pas mariés. Ils se sont bien
22 compris, c'était vraiment comme des frères et des soeurs, des amis très
23 proches. Il a été désolé de voir ma situation, il était membre de la
24 police civile du HVO.
25 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Kavasovic est prêt à
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1 citer le nom de cette personne, si le Tribunal et la défense le
2 souhaitent. Mais, nous préférons le faire en audience à huis clos. Je
3 demanderai, à ce moment-là, le nom. Donc je ne demanderai pas le nom dès
4 maintenant. Je vais poursuivre mon examen, mais je précise cela à
5 l'intention des Juges.
6 Monsieur Kavasovic, prenez, si vous le voulez bien, le feutre
7 rose, une fois de plus, pour...
8 M. le Président. - Vous préférez que, le moment venu, le nom
9 soit cité en audience à huis clos, avec le risque que le nom soit répété
10 par la suite, ou bien préférez-vous que le nom se voit affecté d’une
11 lettre anonyme ? Que préférez-vous ? Préférez-vous une audience à huis
12 clos pour une fois et ensuite nous reprenons en audience publique ? Vous
13 n’avez pas peur que ce nom échappe ? C’est comme vous préférez. Vous y
14 réfléchissez, puisque ce n’est pas pour dans l’immédiat.
15 M. Harmon (interprétation). - Je n'ai pas l'intention de poser
16 cette question pour obtenir le nom du collègue de Monsieur Kavasovic ; pas
17 du tout. Je voulais simplement indiquer que si le conseil veut formuler
18 cette requête ou si le Tribunal le souhaite, je préférerais que l’on passe
19 en audience à huis clos.
20 M. le Président. - Pas d'observation ?
21 M. Hayman (interprétation). - A ce stade, nous ne pensons pas
22 qu'il soit nécessaire d'obtenir l'identité de cette personne.
23 M. Harmon (interprétation). - Monsieur Kavazovic, veuillez
24 prendre le feutre rose, vous approcher une fois de plus de la pièce
25 d'accusation 145 C et entourer d'un cercle rose le bâtiment du SDK et
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1 veuillez y annoter à côté les initiales SDK.
2 M. Kavazovic (interprétation). - Voilà le bâtiment SDK. C'est la
3 prison où je me trouvais.
4 M. Harmon (interprétation). - Pourriez-vous noter SDK à côté ?
5 M. Kavazovic (interprétation). - C'est déjà fait.
6 M. Harmon (interprétation). - Excusez-moi, je ne le voyais pas
7 d'ici. Vous pouvez vous rasseoir, merci.
8 Monsieur Kavazovic, êtes-vous allé de votre plein gré à ce
9 bâtiment du SDK ou vous a-t-on forcé à vous y rendre ?
10 M. Kavazovic (interprétation). - Moi, je ne voulais pas y aller,
11 c'était tout à fait involontaire. J'ai été forcé de le faire.
12 M. Harmon (interprétation). - En sus de votre collègue, y avait-
13 il d'autres soldats du HVO qui vous ont escorté jusqu'à ce bâtiment du
14 SDK ?
15 M. Kavazovic (interprétation). - Il y avait deux membres du HVO
16 avec nous.
17 M. Harmon (interprétation). - Pourriez-vous nous donner l'âge
18 des personnes qui sont allées avec vous à ce bâtiment SDK ?
19 M. Kavazovic (interprétation). - Ce ne sont pas en fait des
20 hommes qui y sont allés mais des gens qui avaient entre 24 et 29 ans, tout
21 au plus 30 ans.
22 M. Harmon (interprétation). - Pourriez-vous décrire l'endroit où
23 vous avez été gardé prisonnier dans ce bâtiment SDK et dans quelles
24 conditions vous l'avez été ?
25 M. Kavazovic (interprétation). - En fait, on nous a placés dans
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1 trois pièces de ce bâtiment SDK qui faisaient 3 mètres de long et 1,70 à
2 1,80 mètre de large. Il y avait donc ces trois pièces et un sanitaire. Il
3 y avait aussi un petit couloir qu'il fallait franchir pour aller aux
4 toilettes lorsque les gardes nous autorisaient à le faire. Lorsqu'ils nous
5 donnaient l'autorisation de le faire, nous allions aux toilettes. Les
6 conditions étaient mauvaises : rien au sol et, après l'explosion, le
7 bâtiment avait été pillé, les fenêtres cassées, il n'y avait plus rien. Il
8 faisait venteux, froid à l'intérieur ; nous avions chacun une couverture
9 que nous avions pu nous faire apporter de chez nous et nous étions
10 allongés comme des sardines au sol.
11 M. Harmon (interprétation). - Combien de détenus y avait-il dans
12 ce bâtiment SDK, avec vous ?
13 M. Kavazovic (interprétation). - Hormis moi, soixante-deux
14 hommes. Nous étions soixante-trois en tout.
15 M. Harmon (interprétation). - Je sais que vous avez fait une
16 grimace lorsque la question vous a été posée : le volume est-il trop fort
17 pour vous ? Entendez-vous bien ?
18 M. Kavazovic (interprétation). - Non, non, tout va bien, merci.
19 M. Harmon (interprétation). - Quel âge avaient ces détenus ?
20 M. Kavazovic (interprétation). - Ces prisonniers ? Eh bien le
21 plus jeune avait douze ans, le plus âgé soixante-quatre.
22 M. Harmon (interprétation). - Y avait-il des gardes, des
23 gardiens dans ce bâtiment SDK ?
24 M. Kavazovic (interprétation). - Oui, il y avait deux membres de
25 la police militaire. L'un était avec moi à la Défense territoriale, et
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1 c'est lui qui nous gardait. Tout mouvement nous était interdit. S'il
2 fallait que nous allions aux toilettes, nous devions demander
3 l'autorisation. Il fallait obtenir la permission pour quitter la pièce,
4 franchir ce couloir de 1,50 mètre pour arriver aux toilettes.
5 M. Harmon (interprétation). - Combien de temps êtes-vous resté
6 dans ce bâtiment ?
7 M. Kavazovic (interprétation). - Trois jours, depuis le 19
8 jusqu'au 22 avril, je suis resté dans ce bâtiment SDK jusqu'au moment où
9 j'ai été envoyé creuser des tranchées.
10 M. Harmon (interprétation). - Pourriez-vous décrire à
11 l'intention des juges les circonstances de votre départ de ce bâtiment SDK
12 pour aller creuser des tranchées ?
13 M. Kavazovic (interprétation). - A Vitez, dans toutes les
14 prisons qui s'y trouvaient, certains des membres de la police militaire et
15 même les membres du HVO venaient en camionnette à ces prisons et
16 choisissaient les personnes qu'ils allaient envoyer creuser des tranchées.
17 Ce jour-là, lorsque qu'ils m'ont choisi, ce même collègue que j'avais est
18 venu avec Zabac, un membre de la police militaire. Il a dit qu'il avait
19 besoin de neuf hommes pour aller à Rijeka, pour y creuser des tranchées.
20 Pourtant, à ce moment-là, mon collègue, qui les accompagnait,
21 m'a fait signe de la main. Il m'a dit que je devais me rendre aux
22 toilettes, ce que j'ai fait. A l'intérieur, Zabac et cet autre homme de la
23 police militaire sélectionnaient les hommes pour aller creuser les
24 tranchées. Ils en avaient huit. Et puis Zabac est entré dans les toilettes
25 et m'a dit : "Qu'est-ce que tu attends ? Sors de là, tu vas y aller
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1 aussi". J'ai donc été le neuvième homme qui est allé creuser les
2 tranchées.
3 Nous avons été placés dans la même camionnette militaire qui
4 nous avait amenés à cet endroit. C'était une camionnette militaire du HVO.
5 C'était une Wolkswagen, camionnette qui avait été camouflée. Un homme
6 dénommé Madzar en était le chauffeur. Il avait des gants noirs, plutôt des
7 mitaines.
8 Ils nous ont emmenés à Rijeka où nous avons creusé des
9 tranchées. Là, sur place, ils nous ont remis à un commandant -je ne
10 connais pas le grade- une personne d'une unité... C'est lui qui s'est
11 alors chargé de nous. D'emblée, il nous a dit dès que nous sommes sortis
12 de la camionnette : "Vous n'êtes plus des civils, vous êtes maintenant des
13 prisonniers et vous devez faire ce que nous vous disons de faire, faute de
14 quoi les choses vont mal tourner. Si vous essayez de prendre la fuite,
15 nous vous récupérerons et pratiquement vous serez tués".
16 Il nous a emmenés vers une clairière à quelque trente mètres de
17 la ligne qui séparait le HVO et la Défense territoriale, et c'est là que
18 l'ordre nous a été donné de creuser des trous près d'un rocher. C'est ce
19 que nous avons fait.
20 M. Harmon (interprétation). - Combien de temps avez-vous passé à
21 creuser ?
22 M. Kavazovic (interprétation). - Nous sommes arrivés à Rijeka
23 vers 13 heures. Nous avons creusé jusqu'à peu près 15 heures, donc deux
24 heures. On nous a tiré dessus à plusieurs reprises.
25 M. Harmon (interprétation). - Je vais vous présenter trois
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1 pièces différentes, Monsieur Kavazovic, à commencer par la pièce de
2 l'accusation 29. Cela deviendra donc le 29 G parce que c'est une copie. Je
3 demanderai à M. l'Huissier de nous aider à la placer sur le chevalet qui
4 se trouve à vos côtés.
5 Veuillez prendre un feutre rose, vous approcher de la pièce 29 G
6 et indiquer où vous avez creusé ces tranchées à Rijeka, du mieux que vous
7 le pouvez.
8 (Le témoin indique des points sur la pièce).
9 Merci, vous pouvez vous rasseoir. Je redemande l'aide de
10 M. l'Huissier pour qu'il place au-dessus de la pièce 29 G la pièce de
11 l'accusation 56 C.
12 Je vous demanderai de vous approcher de la carte, de la
13 pièce 56.
14 Toujours avec le feutre rose, veuillez nous indiquer où vous
15 avez creusé ces tranchées à Rijeka.
16 M. Harmon (interprétation). - Vous avez donc tracé une ligne en
17 haut de la carte de la pièce d'accusation 56, c'est bien exact ?
18 M. Kavazovic (interprétation). - Oui.
19 M. Harmon (interprétation). - Merci. Je vous demanderai de vous
20 rasseoir une fois de plus et je demanderai à M. l'huissier de placer la
21 pièce de l'accusation 29 C sur le rétroprojecteur.
22 Veuillez examiner la pièce 29 C, c'est une carte de Vitez avec
23 plusieurs cercles concentriques et le centre de ces différents cercles est
24 l'hôtel Vitez.
25 Voici ma question : à quelle distance l'endroit où vous creusiez
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1 des tranchées se trouvait-il de l'hôtel Vitez ? Faites de votre mieux pour
2 nous donner cette estimation grâce à cette carte.
3 M. Kavazovic (interprétation). - Je pense que la distance qui
4 séparait l'hôtel Vitez de l'endroit où je creusais les tranchées à Rijeka
5 est d'un kilomètre et demi.
6 M. Harmon (interprétation). - Merci Monsieur l'huissier.
7 Je vais utiliser cette carte une fois de plus, mais si vous
8 débranchez le rétroprojecteur, vous pouvez laisser la carte dessus, nous y
9 reviendrons dans quelques instants.
10 Et combien y avait-il d’hommes qui creusaient à cet endroit ?
11 M. Kavazovic (interprétation). - Huit, j'étais le 9ème homme.
12 M. Harmon (interprétation). - Et vous dites y avoir creusé
13 pendant quelques heures, c’est bien cela ?
14 M. Kavazovic (interprétation). - Deux heures.
15 M. Harmon (interprétation). - Et où êtes-vous allé par la suite ?
16
17 M. Kavazovic (interprétation). - Il devait être 15 heures, le
18 même véhicule qui nous avait amenés à Rijeka est revenu avec les mêmes
19 hommes : Madjar, le chauffeur, les deux policiers. Puis, ils nous ont dit
20 que nous allions aller au bungalow. Nous y sommes allés, à Raskopolje*
21 M. Harmon (interprétation). - Je demanderai à Monsieur
22 l'huissier de placer la pièce 50 C sur les deux cartes se trouvant déjà
23 sur le chevalet et je vous demanderai Monsieur Kavazovic d’y indiquer
24 certains emplacements.
25 M. Kavazovic (interprétation). - Excusez-moi, pourriez-vous
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1 répéter votre question ? Je n'ai pas tout à fait compris.
2 M. Harmon (interprétation). - Je vous demanderai de vous
3 approcher de la pièce de l'accusation, de la carte, pour nous y montrer
4 l'emplacement du bungalow.
5 M. Kavazovic (interprétation). - Ce bungalow se trouvait ici.
6 M. Harmon (interprétation). - Pourriez-vous prendre le feutre
7 rose et tracer un cercle autour de ce bungalow ?
8 Vous pouvez vous rasseoir. Merci.
9 Lorsque vous êtes arrivé à cet endroit, dites au Tribunal qui
10 vous avez vu et ce que vous avez vu.
11 M. Kavazovic (interprétation). - Lorsque nous sommes sortis de
12 la camionnette, il y avait un restaurant qui se trouvait là et une
13 terrasse en béton avec des marches qui y menaient. Sur cette terrasse,
14 j'ai vu Vlado Santic qui, dès que je suis sorti, m'a déclaré : « Ah, c’est
15 toi encore ! ». A ses côtés, se trouvaient treize Jokeri qui se tenaient
16 là, des combattants appartenant à l'unité des Jokeri.
17 M. Harmon (interprétation). - Comment était habillé M. Vlado
18 Santic lorsque vous l'avez aperçu à cette occasion ?
19 M. Kavazovic (interprétation). - Il portait un uniforme noir
20 sans aucun insigne comme le reste des Jokeri.
21 M. Harmon (interprétation). - A quel moment de la journée êtes-
22 vous arrivé au bungalow ?
23 M. Kavazovic (interprétation). - Vers 15 heures 30.
24 M. Harmon (interprétation). - Est-ce que M. Santic a donné des
25 ordres aux Jokeri qui se trouvaient à ses côtés ?
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1 M. Kavazovic (interprétation). - Oui. Il a dit qu'il fallait
2 nous aligner là-bas et qu'il fallait que nous l'attendions. Nous nous
3 sommes alignés sur la terrasse, nous avons mis nos mains contre notre dos
4 et nous avons attendu que M. Vlado Santic se lève.
5 M. Harmon (interprétation). - Que s’est-il passé ?
6 M. Kavazovic (interprétation). - Sur l'ordre de Vlado Santic, un
7 peu après, il a dit à cinq Jokeri : « Toi, toi, et toi ». Zabac et les
8 deux autres policiers de la camionnette nous ont emmenés à Kratine.
9 M. Harmon (interprétation). - Est-ce que, selon vous, Vlado
10 Santic était à même de donner des ordres aux Jokeri ?
11 M. Kavazovic (interprétation). - Ce n'est pas qu'il était à même
12 de donner un ordre, il a donné lui-même l'ordre de faire cela. Il a pris
13 la parole et a dit : « Vous, vous, vous, emmenez-les à Kratine ».
14 M. Harmon (interprétation). - Vous a t-on emmené à Kratine ?
15 M. Kavazovic (interprétation). - Oui.
16 M. Harmon (interprétation). - A quelle distance se trouvait
17 Kratine par rapport au bungalow ?
18 M. Kavazovic (interprétation). - A peu près quatre, six
19 kilomètres , entre cinq et six kilomètres de là ... quatre kilomètres ...
20 M. Harmon (interprétation). - Que s'est il passé lorsque vous
21 êtes arrivé à Kratine ?
22 M. Kavazovic (interprétation). - Bralo Mladan nous y a amenés. J'ai vu
23 d'abord Anto Furundzija lorsque je suis arrivé. Anto Furundzija m'a craché
24 dessus.Pourquoi ? Je serais incapable de le dire. Peut-être parce que nous
25 faisions partie de la Défense territoriale et qu'à un moment il en faisait
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1 partie lui aussi. Nous avons été alignés là-bas. Nous avons attendu que
2 M. Bralo Miroslav Cicko nous reçoive, qu'il nous interroge dans cette
3 vieille maison où se trouvait un commandement, sans doute le commandement
4 de Bralo que nous appelions aussi « Cicko ». Nous sommes entrés un par un
5 dans ce bâtiment. Nous en avions rapidement fini avec lui, mais d'autres
6 personnes étaient saôules dans une pièce adjacente. Lorsque je suis entré
7 dans la pièce, il m'a demandé quels étaient mes nom et prénoms, parce que
8 mon village se trouvait à deux ou trois kilomètres de Kratina. Il savait
9 les personnes qui portaient ce nom vivaient dans ce village. Il m’a demandé
10 des nouvelles de l'un de mes oncles qu’il connaissait. Il a prétendu qu’il
11 ne me connaissait pas. Mais quand nous étions enfants, nous allions nager
12 ensemble. Je savais bien qui était Bralo. Puis il m'a mis dehors et a dit :
13 « Nous partons, alignez- vous ». Nous nous sommes tous alignés. Il nous a
14 demandé qui,parmi nous, savait faire le signe de croix. Ahmic Mirsad était
15 avec moi, c'était un homme qui savait faire le signe de la croix. Mladen
16 lui a demandé de nous montrer à nous tous comment faire le signe de croix
17 et nous avons tous dû faire le signe de croix. Puis il nous a montré, lui
18 aussi, comment il fallait que nous le fassions « au nom du Père, du Fils et
19 du Saint Esprit ». Nous avons tous dû faire le signe de croix et hurler
20 tout cela, beaucoup plus fort que je ne le dis à présent.
21 Il y avait aussi un roumain qui était là ; il était complètement
22 perdu, il avait très peur. Moi aussi j’avais peur. Lui, quand il a dû
23 faire le signe de croix, il s'est levé et s'est trompé, tout simplement.
24 Il a interverti certains des mots. Il y avait une hache qui se trouvait là.
25 Mladen Bralo a placé la hache contre son front et lui a dit : « Si jamais
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1 tu fais une erreur, je te coupe la tête ». Il a eu tellement peur, ce jeune
2 homme, qu'il a réussi à sortir les bons mots, Bralo a jeté la hache par
3 terre et a dit à quelqu'un : « Emmenez-le derrière la maison et faites le
4 attendre que je sois prêt ».
5 M. Harmon (interprétation). - Est-ce que Mladen Bralo est
6 Miroslav Bralo ? S'agit-il de la même personne ?
7 M. Kavazovic (interprétation). - Oui, son vrai nom est Miroslav
8 Bralo, Cicko comme on l’appelle. Cicko est son surnom, son prénom est
9 Miroslav et son nom Bralo.
10 M. Harmon (interprétation). - Comment était-il habillé lorsque
11 vous l'avez vu ?
12 M. Kavazovic (interprétation). - Bralo portait un bandage noir sur sa tête,
13 il avait des cheveux relativement longs, des gants noirs avec des
14 incrustations de métal, un talky-walky, un ceinturon noir avec un revolver.
15 M. Harmon (interprétation). - Pour ce qui est de M. Furundzija ?
16 M. Kavazovic (interprétation). - Il portait également des
17 vêtements noirs. Il avait un ceinturon blanc et un fusil et un revolver.
18 M. Harmon (interprétation). - Combien de temps êtes-vous resté à Kratina ?
19 M. Kavazovic (interprétation). - J'y suis resté du 22 au 28 ou
20 peut-être au 29..., disons sept ou huit jours.
21 M. Harmon (interprétation). - Pouvez-vous décrire au Tribunal ce que vous
22 avez fait pendant ces sept ou huit journées passées à Kratina ?
23 M. Kavazovic (interprétation). - Notre séjour à Kratina a été extrêment
24 difficile à supporter. Nous avons dû creuser des tranchées là où eux
25 n'arrivaient pas à aller. Nous avons été exposés au tir du HVO et même aux
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1 tirs de l'armée Herceg-Bosna car, à ce moment-là, à l'endroit où les
2 tranchées devaient être creusées -là où les soldats ne pouvaient pas les
3 creuser- nous devions les creuser toute la journée. Il fallait d'abord
4 abattre les arbres qui gênaient. Lorsqu'ils ne pouvaient pas traverser la
5 forêt,il fallait que nous abattions les arbres, traînions les troncs,
6 portions le bois... C'était extrêmement difficile et pénible mais nous
7 respections l'ordre qu'ils nous donnaient.
8 M. Harmon (interprétation). - Et au cours de ces sept ou huit
9 journées, combien d'heures par jour consacriez-vous à ce travail ?
10 M. Kavazovic (interprétation). - Nous travaillions toute la
11 journée, jusqu'à 3 heures du matin. Nous nous reposions de 3 heures à
12 5 heures du matin et nous reprenions pour toute une journée de travail.
13 Nous n'avions que deux heures de repos. Nous ne dormions pas dans des
14 maisons, mais dans la prairie, sur des planches, les uns à côté des
15 autres. Nous nous allongions sur ces planches de bois et ils enlevaient
16 les couvertures qui recouvraient les chevaux transportant leur nourriture.
17 Nous les prenions pour nous protéger. Il faisait terriblement froid, il
18 pleuvait également. C'était le mois d'avril, il faisait vraiment froid.
19 Nous portions des vêtements civils, les vêtements que nous portions quand
20 nous avons été arrêtés. Pour ce qui est de la nourriture, nous obtenions
21 125 grammes de poisson vers 9 heures du matin et un quart d'une miche de
22 pain et c'est tout ce que nous mangions en 24 heures, le poisson et ce
23 petit bout de pain.
24 M. Harmon (interprétation). - Les membres du HVO se trouvant à
25 ces emplacements recevaient-ils ces mêmes ratios de nourriture ou non ?
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1 M. Kavazovic (interprétation). - Non, ils ne mangeaient pas la
2 même chose que nous, pas du tout. Ils avaient des repas de façon régulière
3 matin, midi et soir et, outre cela, ils avaient des cigarettes. Nous
4 n'avons jamais eu de cigarettes, nous n'avions même pas le droit de fumer.
5 Certains des collègues que nous connaissions pouvaient nous donner une
6 cigarette ou deux comme cela, sous la manche, mais c'est tout ce que nous
7 avions. Eux ils avaient des jus de fruits, des repas chauds, des tartes,
8 des conserves.
9 M. Harmon (interprétation). - Selon vous, les membres du HVO
10 qui se trouvaient à ces emplacements souffraient-ils de la faim de quelque
11 façon que ce soit ?
12 M. Kavazovic (interprétation). - Non. Ils ne pouvaient pas
13 souffrir de la faim puisque qu'ils avaient trois repas par jour.
14 M. Harmon (interprétation). - Vous avez dit que vous vous
15 trouviez à des emplacements exposées à des tirs, n'est-ce pas ?
16 M. Kavazovic (interprétation). - Oui, c'est exact. Nous nous
17 trouvions près d'une petite chapelle serbe, près du village de Loncari.
18 Nous avons dû construire un canal à cet endroit-là et une clairière qui
19 permette aux soldats de se déplacer afin que la Défense territoriale ne
20 puisse pas leur tirer dessus.
21 M. Harmon (interprétation). - Etiez-vous exposés à ces tirs tous
22 les jours au cours de votre séjour à Kratina ?
23 M. Kavazovic (interprétation). - Cela a été le cas pendant les
24 trois ou quatre premières journées. Nous étions exposés aux tirs. Mais les
25 membres des Forces armées se sont aperçus que nous portions des habits
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1 civils, que nous n'étions pas en uniforme. Ils ont sans doute remarqué que
2 nous ne portions pas d'armes, que nous ne faisions que creuser. Ils
3 savaient que tous les hommes musulmans étaient placés dans des camps à
4 Vitez et ils se sont sans doute aperçus que nous avions été obligés de
5 creuser des tranchées. Nous n'avons plus fait l'objet de tir. Nous avons
6 continué à creuser là où les soldats ne pouvaient pas creuser.
7 M. Harmon (interprétation). - Vous dites : "Nous creusions",
8 combien de personne se trouvaient là ?
9 M. Kavazovic (interprétation). - Huit personnes, moi, j'étais la neuvième.
10 M. Harmon (interprétation). - Quel type d'unités différentes
11 avez-vous aperçu sur ces lignes de front lorsque vous vous y trouviez ?
12 M. Kavazovic (interprétation). - Nous creusions tous le long de la ligne de
13 front sur un kilomètre et demi environ. La première section de la ligne de
14 front du HVO était occupée par la police militaire. Il y avait peut-être
15 dix-neuf ou vingt personnes membres de la police civile. Lorsque nous avons
16 terminé de couper les arbres pour eux, nous avons été creuser des tranchées
17 près des unités de Jokeri. Nous creusions des tranchées et des trous de
18 telle sorte qu'ils puissent se déplacer de façon sûre, afin que la Défense
19 territoriale ne puisse pas les atteindre, pour qu'ils puissent se trouver
20 protégés. Puis nous sommes allés vers la police militaire du HVO et avons
21 creusé des tranchées là aussi. J'ai vu quatre formations militaires et la
22 toute dernière était le HVO.
23 M. Harmon (interprétation). - Vous avez également creusé des
24 tranchées pour le HVO, n'est-ce pas ?
25 M. Kavazovic (interprétation). - Oui, pour tous ceux qui se
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1 trouvaient sur la ligne de front, nous avons creusé des tranchées tout le
2 long de la ligne et tout le temps.
3 M. Harmon (interprétation). - Et au cours de ces sept ou huit
4 journées au cours desquelles vous avez creusé, qui vous gardait ?
5 M. Kavazovic (interprétation). - Les gardes des personnes pour lesquelles
6 nous creusions des tranchées. Si nous creusions pour la police militaire,
7 c'était leurs gardes qui nous surveillaient. Lorsque nous nous déplacions
8 pour creuser des tranchées, si on nous envoyait vers des jokeri, alors un
9 garde de l'unité des jokeri nous surveillait. C'était un homme très grand.
10 Il portait un bandeau sur le front, il était toujours en colère, il jurait
11 jurait toujours. C'est lui qui nous surveillait. Lorsque nous avons creusé
12 pour les forces du HVO, c'était un soldat du HVO qui nous surveillait. A
13 chaque fois, c'était une personne appartenant aux différentes formations
14 militaires nous accompagnant qui nous surveillait toujours.
15 M. Harmon (interprétation). - Monsieur le Président, je suis
16 prêt à mettre un terme, pour aujourd'hui, à mon interrogatoire principal
17 et à continuer demain.
18 M. le Président. - Oui, je crois que c'est une bonne séquence
19 pour arrêter. Nous allons donc nous arrêter là et reprendre la séance
20 demain matin à 10 heures.
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