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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL Affaire IT-95-14-T
2 POUR L’EX-YOUGOSLAVIE
3 Vendredi 05 juin 1998
4 LE PROCUREUR
5 c/
6 TIHOMIR BLASKIC
7 L'audience est ouverte à 9 heures 10.
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14 Pages 9483 – 9495 expurgées en audience à huis clos
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22 M. le Président. - Donc nous levons le huis clos, Maître Cayley
23 M. Cayley (interprétation). - Oui, Monsieur le Président.
24 M. le Président. - Alors nous vous écoutons.
25 M. Cayley (interprétation). - Le témoin suivant est le
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1 major Marc Bower du régiment du Prince de Galles du Yorkshire. Il a s
2 en Bosnie-Herzégovine avec le Bataillon britannique à Vitez, d'avril 1993 3 jusqu'à novembre 1993. 4 Vous avez entendu son commandant Alastair Duncan qui était, à 5 l'époque, l'officier commandant du Bataillon britannique. A l'époque, il 6 était capitaine. Je parle du major Bower. 7 Et il était responsable de la liaison. Il était officier de 8 liaison entre les organisations humanitaires, par exemple, la Croix-Rouge, 9 et d'autres instances dans la vallée de la Lasva. 10 Il parlera d'une visite qu'il a rendue fin avril au village 11 d'Ahmici. Il vous dira ce à quoi il a assisté et les conclusions qu'il a 12 tirées de ce spectacle. Il vous dira également, comment lorsqu'il était en 13 mission de reconnaissance dans la municipalité de Busovaca, il a rencontré 14 un groupe de soldats professionnels du HVO extrêmement bien équipés. Par 15 la suite, il a découvert qu'il s'agissait d'un groupe appelait les Jokeri. 16 Il parlera aussi des informations dont il dispose sur les formations 17 militaires du HVO dans la vallée de la Lasva et dont il a compris la 18 structure de commandement du HVO. Il vous dira comment, à son avis, 19 fonctionnait cette structure de commandement. 20 Il vous donnera les impressions qu'il a eues de l'hôtel Vitez, 21 du quartier général de l'hôtel Vitez. Il parlera également de la façon 22 dont il a aidé les malades et les blessés dans la ville de Vitez, que ce 23 soient des Croates ou des Musulmans. Il parlera d'un certain nombre de 24 voyages, de visites qu'il a rendues à Vitez et à Nova Bila dans deux 25 hôpitaux croates. Il parlera de l'enclave de Stari Vitez, une poche Page 9498 1 musulmane qui existait toujours à Vitez lorsqu'il est arrivé après les 2 combats en avril. Il vous parlera également de ces tentatives de convoyer 3 de l'aide humanitaire jusqu'à cette enclave musulmane. Il vous expliquera 4 la campagne qui a été menée par le HVO contre les Musulmans à moment-là. 5 Il vous indiquera comment des civils ont été touchés par des tireurs 6 isolés, principalement des femmes et des enfants. Et il vous dira que cela 7 s'est produit à quelque quatre cents mètres seulement du quartier général 8 du colonel Blaskic. Il parlera de son voyage à Kruscica, une autre poche, 9 partiellement isolée, avec un certain accès cependant aux territoires 10 contrôlés par le gouvernement bosniaque. Et puis il dira comment les 11 tentatives de transports d'aide humanitaire ont été entravées par une 12 campagne de propagande dirigée tous particulièrement contre les Croates 13 qui se trouvaient dans cette zone. Il vous parlera des unités du HOS qu'il 14 a pu observer dans la vallée de la Lasva. Il essaiera de déterminer la 15 chaîne de commandements tel qu'il l'a perçue lui-même dans ce cadre. Il 16 parlera également de la mort de Dobrila, son interprète, qui travaillait 17 pour lui. Il parlera de tranchées creusées par des personnes semblant se 18 trouver sous le commandement de soldats du HVO. Et pour finir, il vous 19 dira ce qu'il a pu observer lors d'une attaque contre Gorbavica menée par 20 le HVO ; il vous expliquera qu'il s'agissait d'une attaque bien 21 coordonnée, contre les forces musulmanes qui se trouvaient dans cette 22 région et contre la population civile qui se trouvait là également. Je 23 parle des Musulmans. Il vous parlera des civils sauvés par le Bataillon 24 britannique, car ils risquaient d'être tués au cours de l'attaque. Il dira 25 qu'il a vu des soldats du HVO et des civils piller la zone de Gorbavica Page 9499 1 juste après l'attaque. Enfin, très brièvement, il décrira à la fin de sa 2 mission ce qu'il a pu voir, les conséquences de l'attaque du HVO contre 3 Stupni Do, dans la municipalité de Vares. 4 Ce témoignage a trait au paragraphe 3 et 4 de l'acte 5 d'accusation, chef d'accusation 1, persécution, chef d'accusation 2 à 4, 6 attaque illégale contre des civils et des objectifs civils, chef 7 d'accusation 5 à 10, 11 à 13, destructions et pillages de biens, 15 et 16, 8 traitements inhumains et cruels de prisonniers. 9 Je pense que mon interrogatoire principal durera environ une 10 heure, peut-être un peu moins. 11 M. le Président. - Je vous remercie. Si j'ai bien compris, le 12 témoignage que vous attendez surtout du major Bower, compte tenu de sa 13 spécialité, tourne autour de l'aide humanitaire, c'est le point qui me 14 paraît essentiel, et en même temps sur la structure de commandement, mais 15 également sur les attaques qu'il a pu voir et les conséquences de ces 16 attaques. Cependant ce témoin peut surtout parler de l'aide humanitaire, 17 car il était chargé de l'acheminement, donc il a pu apercevoir, à vos yeux 18 tout au moins, un certain nombre de blocages. Voilà les points essentiels 19 et la structure de commandement, comme me le rappelle mon collègue : donc 20 aide humanitaire, structure du commandement, conséquences de certaines 21 attaques. Très bien. 22 Nous pouvons faire rentrer le major Bower. 23 (Le témoin est introduit dans la salle d'audience.) 24 M. le Président. - Major, vous m'entendez ? 25 M. Bower (interprétation). - Oui. Page 9500 1 M. le Président. - Vous nous rappelez votre grade, votre nom et 2 votre prénom. 3 M. Bower (interprétation). - Major Mark Bower. 4 M. le Président. - Vous restez debout le temps de lire la 5 déclaration de serment que va vous tendre l'huissier. 6 M. Bower (interprétation). - Je déclare solennellement que je 7 dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité. 8 M. le Président. - Merci major. Vous pouvez vous asseoir. 9 Vous êtes venu à la demande du Procureur devant le Tribunal 10 Pénal international pour l'ex-Yougoslavie dans le cadre du procès intenté 11 par le Procureur contre le général Blaskic, l'accusé ici présent. Nous 12 connaissons la trame générale, les points essentiels de votre témoignage. 13 C'est autour de ces points essentiels que le Procureur va vous interroger, 14 après quoi vous aurez le contre-interrogatoire. Vous connaissez cette 15 procédure puisque vous êtes d'un pays qui la pratique. 16 Sans plus attendre, Maître Cayley c'est à vous. 17 M. Cayley (interprétation). - Bonjour major Bower. Quelques 18 points d'introduction. Lorsque je vous poserai une question, je vous 19 demanderai d'adresser vos réponses aux Juges, s'il vous plaît. 20 M. Bower (interprétation). - D'accord. 21 M. Cayley (interprétation). - Vous avez rejoint l'armée en 22 1983 ? 23 M. Bower (interprétation). - C'est exact. 24 M. Cayley (interprétation). - Vous avez rejoint le régiment 25 auquel vous appartenez en 1985, après être sorti de l'académie militaire Page 9501 1 de Sandhurst, n'est-ce pas ? 2 M. Bower (interprétation). - C'est exact. 3 M. Cayley (interprétation). - Vous avez servi au Royaume-Uni, au 4 Koweit, au Canada, au Kenya, en France et en ex-Yougoslavie ? 5 M. Bower (interprétation). - C'est exact. 6 M. Cayley (interprétation). - Vous avez travaillé au niveau 7 opérationnel au Koweit et en Bosnie-Herzégovine, et je crois que vous avez 8 participé à la guerre du Golfe également ? 9 M. Bower (interprétation). - Effectivement, j'y étais 10 commandant. 11 M. Cayley (interprétation). - Vous avez servi dans le cadre du 12 régiment du Prince de Galles en Bosnie-Herzégovine d'avril à 13 novembre 1993, n'est-ce pas ? 14 M. Bower (interprétation). - C'est exact. 15 M. Cayley (interprétation). - Le Régiment du Prince de Galles 16 était le 2ème Bataillon britannique à servir sur le territoire de la 17 Bosnie-Herzégovine. Il a succédé au Régiment du Cheshire ? 18 M. Bower (interprétation). - Oui, effectivement. 19 M. Cayley (interprétation). - Vous étiez basé au camp de 20 Stari Bila à Vitez, n'est-ce pas ? 21 M. Bower (interprétation). - Oui. 22 M. Cayley (interprétation). - Quelles étaient vos 23 responsabilités en Bosnie-Herzégovine ? Vous étiez capitaine à l'époque ? 24 M. Bower (interprétation). - Oui, j'étais officier de liaison 25 entre le Bataillon britannique qui se trouvait à Stari Bila et Page 9502 1 principalement les organisations humanitaires, telles que le CICR, ainsi 2 que certaines ONG, Pharmaciens sans frontière et Médecins sans frontière 3 entre autres. Je devais parcourir toute la vallée de la Lasva, évaluer les 4 besoins en aide humanitaire et transmettre ces informations au HCR entre 5 autres. 6 M. Cayley (interprétation). - Vous êtes maintenant major et vous 7 commandez une compagnie ? 8 M. Bower (interprétation). - C'est exact. 9 M. Cayley (interprétation). - Vous avez reçu une médaille 10 militaire après votre service en Bosnie-Herzégovine ? 11 M. Bower (interprétation). - Oui, effectivement. 12 M. Cayley (interprétation). - Vous nous direz pourquoi un peu 13 plus tard dans votre témoignage. Je vous demande maintenant de vous 14 rappeler d'une visite à Ahmici à la fin du mois d'avril 1993. 15 M. Bower (interprétation). - Dès mon arrivée en Bosnie, 16 l'incident d'Ahmici s'était produit et je ne pouvais assister qu'aux 17 conséquences de cet incident. Cependant, l'atmosphère était encore très 18 lourde. Je me rappelle que le Régiment du Cheshire se trouvait encore là- 19 bas et qu'il a participé aux secours. Ils ont été chercher certains corps 20 qui se trouvaient encore dans les maisons, au nord de la ville. Cette 21 opération a pris un certain temps et nous pensions qu'il restait peut-être 22 encore quelques munitions ou quelques obus qui n'avaient pas encore 23 explosés. Il fallait une opération militaire afin de nettoyer le terrain, 24 si je puis dire, avant de récupérer les corps. Par conséquent, je suis 25 allé chercher les corps et j'ai informé les membres des familles des Page 9503 1 défunts que nous avions trouvé les dépouilles de leurs parents. 2 M. Cayley (interprétation). - Quelles conclusions avez-vous 3 tirées à ce moment-là des événements qui avaient dû se produire à Ahmici ? 4 M. Bower (interprétation). - Apparemment, c'était un effort 5 militaire très concentré et très ciblé sur une petite ville, un petit 6 village presque. Visiblement, l'opération avait été assez violente parce 7 que la plupart des maisons étaient totalement détruites. Personne n'aurait 8 pu se réinstaller dans ces maisons par la suite, parce que les toits 9 s'étaient écroulés, la plupart en tout cas, et qu'il y avait des marques 10 de flamme à l'extérieur des bâtiments. L'endroit où les flammes étaient 11 sorties des fenêtres. 12 Cependant, certaines maisons étaient restées intactes et des 13 familles vivaient encore dans ces maisons. Par la suite, nous avons 14 découvert que ces familles étaient croates, qu'elles avaient vécu avant 15 l'attaque à Ahmici et qu'elles y étaient restées par la suite. 16 M. Cayley (interprétation). - Vous avez vu des preuves de 17 destruction dans ces villages ? 18 M. Bower (interprétation). - Oui, je ne peux pas vous dire ce 19 qu'il y avait dans les bâtiments, car il y avait eu de telles 20 destructions, mais je n'ai pas vu de véritable système de tranchées, ni de 21 grands travaux qui indiquaient une installation militaire. 22 M. Cayley (interprétation). - Nous allons passer à la deuxième 23 partie du témoignage. Nous allons vous montrer un document, une carte, 24 pour aider les Juges, la Cour. Cela n'a aucune signification spéciale. 25 Quel est le numéro de ce document ? Page 9504 1 M. Dubuisson. - 394. 2 M. Hayman (interprétation). - Il faut une cote pour la 3 traduction en anglais. 4 M. Dubuisson. - Il s'agit du document numéro 394. 5 M. Cayley (interprétation). - Fin mai 1993, vous avez visité la 6 municipalité de Busovaca. Lorsque vous étiez là-bas, vous avez rencontré 7 un groupe de soldats. Pouvez-vous nous parler de cette visite et de ce 8 groupe de soldats ? Pouvez-vous nous parler de cette visite et pouvez-vous 9 nous parler de ce groupe de soldats ? 10 M. Bower (interprétation). - C'était au début du mois de mai, et 11 j'avais passé les deux premières semaines près de Travnik. J'avais donc 12 décidé de me promener dans l'environnement de Bucovaca pour évaluer l'aide 13 qui était nécessaire dans certaines régions un peu plus éloignées. J'ai 14 donc décidé de voyager, de me diriger vers la région qui est indiquée au 15 n° 1 sur cette carte. Je suis donc allé vers Bucovaca, puis je me suis 16 dirigé vers l'ouest en passant par une route de montagne. J'avais des 17 véhicules militaires à ma disposition, des véhicules qui n'étaient pas 18 armés. 19 Un quart d'heure après, je suis arrivé dans une région 20 montagneuse et j'ai vu que la route était bloquée. A ma droite, il y avait 21 un chalet, peut-être à une quinzaine de mètres de l'endroit. Il y avait un 22 certain nombre de personnes dans ce chalet, ainsi que derrière (une 23 quinzaine au total). Elles se sont approchées des véhicules. Certaines 24 (huit à neuf) étaient à 25 mètres des véhicules et ont pointé les armes 25 sur nous. Ces huit personnes se sont approchées de nous, de nos véhicules. Page 9505 1 On ne pouvait pas commencer à parler avec elles car elles nous ignoraient. 2 Deux d'entre elles se sont mises devant moi mais ne m'ont pas parlé. Le 3 reste a bien observé les deux véhicules, ceux qui commandaient, ceux qui 4 étaient dans les véhicules. Ils étaient assez menaçants. Ils étaient bien 5 armés, bien équipés. C'étaient des armes qui ne venaient pas de 6 Yougoslavie, qui ne venaient pas de l'ancien bloc soviétique. La majorité 7 avait des grands couteaux de chasse et certains avaient également des 8 revolvers. Ils étaient jeunes (une vingtaine d'années). Ils avaient l'air 9 de militaires professionnels. Ils étaient également très menaçants. 10 Mon interprète, Dobrila Kolaba, a essayé de parler avec eux. Ils 11 se parlaient entre eux et continuaient à nous ignorer, mais ils étaient 12 très intéressés par nous. Après avoir essayé d'expliquer pourquoi nous 13 étions là et que tout ce que nous voulions faire, c'était passer, 14 Dobrila Kolaba est devenue assez inquiète et nous a dit qu'on devait 15 partir. Lorsque j'ai essayé d'obtenir plus d'informations pour savoir 16 pourquoi elle nous disait cela et pourquoi nous devions maintenant partir, 17 elle avait l'air d'avoir très peur ; elle était très agitée et très 18 nerveuse. On est donc remontés dans nos véhicules et on est reparti en 19 marche arrière, car on ne pouvait pas tourner, jusqu'à Busovaca et là on 20 s'est arrêtés. 21 M. Cayley (interprétation). - Plus tard, avez-vous parlé avec 22 Dobrila de la nature de ces troupes que vous veniez de rencontrer ? 23 M. Bower (interprétation). - Oui, je voulais lui parler de ce 24 qui s'était passé car je ne l'avais encore jamais vue dans cet état. Elle 25 m'a dit que ce groupe était connu comme étant les Jokeri et qu'ils se Page 9506 1 demandaient s'ils devaient nous tuer ou s'ils allaient nous laisser 2 partir. Elle a également déclaré que ce groupe avait été impliqué à Ahmici 3 et que l'emblème qu'ils avaient sur eux était un crâne. Certains le 4 portaient sur eux ou sur leur veste et cela signifiait qu'ils 5 appartenaient à ce groupe. 6 M. Cayley (interprétation). - Y en avait-il qui portaient des 7 emblèmes du HVO ? 8 M. Bower (interprétation). - Un ou deux, oui, avaient des 9 vestons à damier rouge et blanc. 10 M. Cayley (interprétation). - Avez-vous des informations 11 complémentaires sur la participation de ces groupes dans les actions 12 militaires du HVO sur les lignes de front ? 13 M. Bower (interprétation). - Tous les soirs, nous discutions 14 entre nous -entre officiers de liaison- avec nos commandants, avec le 15 colonel Duncan, et nous parlions de temps en temps des Jokeri qui étaient 16 impliqués ou qu'on avait vus dans des actions près de Travnik et à Koveca. 17 On les a vus aussi près de Starevica. 18 M. Cayley (interprétation). - Avez-vous pu répondre à la 19 question de savoir pourquoi ces soldats étaient spéciaux, pourquoi ils 20 étaient utilisés pour des actions spécifiques ? 21 M. Bower (interprétation). - Oui. Ce groupe était un groupe de 22 professionnels, un groupe dédié et capable de faire des opérations 23 militaires. Il pouvait, en fait, renforcer les opérations là où c'était 24 nécessaire. 25 M. Cayley (interprétation). - Pourrions-nous maintenant passer à Page 9507 1 ce que vous connaissez des formations militaires en Bosnie centrale ? Je 2 sais que vous connaissez bien la structure du HVO, des unités et du 3 gouvernement de Bosnie-Herzégovine. Quelles étaient vos connaissances, à 4 l'époque, sur la structure militaire du HVO, en Bosnie ? 5 M. Bower (interprétation). - On en a été informé en arrivant en 6 Bosnie. On nous a parlé de l'Armiya, du HVO. C'était pour mieux comprendre 7 ce qui allait se passer sur les lignes de front afin qu'on puisse 8 comprendre le commandement, savoir qui on devait voir dans ces régions 9 pour chercher de l'assistance ou pour demander des permissions pour passer 10 d'une ligne à l'autre. J'ai compris que dans la vallée de la Lasva, le 11 quartier général du HVO était à Vitez, à l'hôtel Vitez. 12 M. Cayley (interprétation). - Aviez-vous des connaissances 13 particulières sur des formations militaires subordonnées dans la vallée de 14 la Lasva qui auraient fait partie du HVO ? 15 M. Bower (interprétation). - Je savais que les zones 16 géographiques étaient de la responsabilité de certains groupes militaires 17 mais qu'il y avait apparemment un rapport de soldat à sa base, vers un 18 poste de commandement. 19 M. Cayley (interprétation). - Vous connaissiez donc vous-même 20 les commandants du HVO qui étaient à l'hôtel Vitez ? Qui était le 21 commandant ? 22 M. Bower (interprétation). - Ivica Rajic. 23 M. Cayley (interprétation). - Etiez-vous au courant de l'étendue 24 de son commandement dans la vallée de la Lasva ? 25 M. Bower (interprétation). - Si j'ai bien compris, il était Page 9508 1 responsable des forces du HVO dans la vallée de la Lasva où nous étions. 2 M. Cayley (interprétation). - Pourriez-vous nous dire quelle 3 était, à votre connaissance, l'étendue géographique de son commandement ? 4 M. Bower (interprétation). - Oui. Il s'étendait de l'endroit où 5 je travaillais jusqu'à Novi Travnik, Vitez, Bucovaca et Kruscica, 6 l'endroit où nous étions basés. 7 M. Cayley (interprétation). - Vous ne voyagiez pas beaucoup en 8 dehors de cette région. C'est donc tout ce que vous savez de cette 9 région ? 10 M. Bower (interprétation). - Oui. 11 M. Cayley (interprétation). - Etes-vous allé à l'hôtel Vitez ? 12 M. Bower (interprétation). - Oui. 13 M. Cayley (interprétation). - Combien de fois ? 14 M. Bower (interprétation). - Au début de ma mission, il n'y 15 avait pas de raison d'y aller régulièrement mais, comme il y avait de plus 16 en plus de combats à ce moment-là, c'était devenu de plus en plus 17 nécessaire d'y aller. Durant les six mois et demi où je suis resté en 18 Bosnie, j'y suis peut-être allé quarante ou cinquante fois. 19 M. Cayley (interprétation). - Pourriez-vous nous décrire l'hôtel 20 Vitez qui était donc le quartier général ? 21 M. Bower (interprétation). - On aurait dit un quartier général 22 militaire bien structuré, très professionnel et qui fonctionnait bien. 23 Quand j'entrais, si je n'avais pas de rendez-vous avec une personne 24 déterminée, quelqu'un me faisait attendre. Il allait ensuite chercher 25 quelqu'un d'autre. Oui, on aurait dit un quartier général normal, Page 9509 1 militaire, efficace. 2 M. Cayley (interprétation). - Vous avez donc voyagé très souvent 3 dans des régions qui étaient sous le contrôle du HVO et du gouvernement de 4 Bosnie-Herzégovine ? 5 M. Bower (interprétation). - Oui. 6 M. Cayley (interprétation). - De ce que vous avez pu voir à 7 l'hôtel Vitez et en passant par des points de contrôle, pourriez-vous 8 expliquer aux Juges comment fonctionnait la chaîne de commandement au sein 9 du HVO ? 10 M. Bower (interprétation). - Les points de contrôle du HVO se 11 trouvaient sur la route vers Vitez. Lorsqu'on n'avait pas le droit de 12 passer, il y avait une barrière et on nous disait à ce moment-là : "Vous 13 n'avez pas le droit d'entrer". On commençait alors à négocier avec le 14 commandant du point de contrôle afin de pouvoir entrer dans Vitez pour 15 aller à l'hôtel Vitez. La première fois, on nous disait que personne 16 n'avait le droit de rentrer. Puis je demandais au commandant local, je 17 demandais à l'officier supérieur et ils communiquaient par téléphone ou 18 par un autre moyen de communication avec d'autres personnes. Il était donc 19 clair pour moi qu'il y avait une chaîne de commandement. 20 M. Cayley (interprétation). - Avez-vous jamais pu avoir de 21 contact avec les autorités civiles afin d'avoir accès à des régions 22 particulières ? 23 M. Bower (interprétation). - Un jour, lorsque j'essayais d'aller 24 à Kruscica, qui est au point n° 4 sur la carte (c'est une petite enclave 25 musulmane), on m'a empêché d'y accéder. Je voulais aller aider un convoi Page 9510 1 du HCR et je voulais récupérer des personnes blessées. On a été arrêtés. 2 Des femmes et des enfants bloquaient la route devant nos véhicules. 3 Normalement, on négociait pendant trois ou quatre heures et 4 invariablement, on n'avait pas le droit de passer. Une fois, le maire de 5 Vitez -je ne me souviens plus de son nom-, Santic est arrivé près du poste 6 de contrôle où se trouvait un capitaine de liaison britannique, Whitworth, 7 mais on n'a pas réussi à faire passer le convoi vers Kruscica. 8 M. Cayley (interprétation). - Monsieur Santic n'avait pas 9 autorité pour vous donner l'autorisation de passer ? 10 M. Bower (interprétation). - Non, il semblait qu'il en était 11 ainsi. 12 M. Cayley (interprétation). - A votre avis, les autorités 13 militaires avaient le contrôle principal dans ces régions ? 14 M. Bower (interprétation). - Lorsqu'on voulait que quelque chose 15 se passe, on allait voir la chaîne de commandement militaire plutôt que la 16 chaîne civile. C'était beaucoup plus rapide et efficace. 17 M. Cayley (interprétation). - Quand on parle des militaires, on 18 pense bien au HVO ? 19 M. Bower (interprétation). - Oui. 20 M. Cayley (interprétation). - Vous avez mentionné dans votre 21 déposition un exemple de coordination du HVO avec le CICR qui essayait de 22 transférer de l'aide humanitaire de Mostar vers la Bosnie centrale. 23 Pourriez-vous nous l'expliquer ? 24 M. Bower (interprétation). - Oui. Je devais aller voir le CICR 25 tous les jours. Je devais écouter leur rapport et ensuite leur parler. Un Page 9511 1 jour ils m'ont informé que le HVO leur avait dit, à Novi Travnik, que 2 s'ils ne recevaient pas d'aide à ce moment-là le HVO de Mostar arrêterait 3 les convois du CICR de Metkovic à Zenica. 4 M. Cayley (interprétation). - Qu'est-ce que ceci vous a indiqué 5 sur le commandement au sein du HVO ? 6 M. Bower (interprétation). - Un grand degré de communication 7 mais également de collaboration sur une distance, des efforts coordonnés, 8 des menaces. 9 M. Cayley (interprétation). - Est-ce normal au sein de 10 structures militaires assez bien développées ? 11 M. Bower (interprétation). - Oui. 12 M. Cayley (interprétation). - Nous pouvons maintenant passer à 13 deux hôpitaux qui se trouvaient à Vitez et à Bila. Pourriez-vous nous dire 14 comment vous avez travaillé avec ces institutions ? 15 M. Bower (interprétation). - Pendant l'été 1993, il y avait des 16 combats. Le HCR et le CICR ne pouvaient pas voyager dans les territoires 17 où il y avait des combats de crainte d'avoir que certains d'entre eux ne 18 soient blessés. Le Bataillon britannique a donc décidé d'aider les blessés 19 à être évacués pour sauver des vies, et c'était de ma responsabilité. Dans 20 la vallée de la Lasva, il y avait deux hôpitaux. A Vitez, c'était une 21 clinique pour des besoins médicaux quotidiens, des naissances, des actions 22 médicales habituelles et normales. Mais il pouvait également soigner des 23 blessés, de la bataille notamment dans la région de Vitez. L'hôpital, pour 24 les blessés, était à Nova Bila dans une église. On pouvait y accueillir à 25 peu près 120 personnes gravement blessées. La majorité avait été blessée à Page 9512 1 la suite de combats. 2 M. Cayley (interprétation). - Vous avez participé à une 3 évacuation de blessés qui devaient être transférés à Split. Pourriez-vous 4 nous en dire quelques mots. C'est sur cette action que vous avez eu plus 5 tard votre médaille. 6 M. Bower (interprétation). - On avait offert d'évacuer 7 55 personnes de Nova Bila à Kiseljak. On allait les envoyer par 8 hélicoptère en Croatie pour être soignées. Il fallait un certain degré de 9 coordination car on devait passer à travers les lignes du front pour aller 10 là-bas. Cela nous a pris trois ou quatre jours. Il fallait avoir une liste 11 de noms pour l'armée de Bosnie-Herzégovine. Ces personnes ont dû être 12 identifiées. Un médecin est venu pour savoir si ces personnes étaient 13 vraiment blessées, s'il fallait les soigner. Il y avait des personnes qui 14 étaient très malades et qui seraient sans doute mortes si elles n'avaient 15 pas été déplacées. 16 L'armée de Bosnie-Herzégovine pouvait voir ce qui se passait et 17 a commencé à tirer sur l'hôpital avec des mortiers, même si elle n'était 18 pas très près. 19 Un des directeurs de l'hôpital m'a dit que je devais laisser 20 certaines personnes de cette liste de 55 individus, qu'il fallait que je 21 prenne certaines personnes plus âgées, des femmes et des jeunes qui 22 n'étaient pas blessés. Une rumeur courrait selon laquelle ces personnes 23 auraient acheté des places pour faire partie de ce convoi d'évacuation, 24 mais j'ai refusé de les laisser partir dans ce convoi. Le directeur m'a 25 menacé et m'a dit que subir des dommages si je ne le faisais pas. La Page 9513 1 discussion a été coupée car l'hôpital a été bombardé. Trois mortiers sont 2 tombés sur l'hôpital. J'ai continué à évacuer les personnes qui étaient 3 grièvement blessées. Je les ai mises dans le convoi et nous sommes partis 4 le plus vite possible. 5 M. Cayley (interprétation). - Dans les autres hôpitaux, sous 6 contrôle du HVO qui se trouvaient en Bosnie, avez-vous pu voir des civils 7 qui étaient blessés par balles ? 8 M. Bower (interprétation). - Oui. 9 M. Cayley (interprétation). - Savez-vous comment ces personnes 10 ont été blessées ? 11 M. Bower (interprétation). - Par les forces de l'armée de 12 Bosnie-Herzégovine. 13 M. Cayley (interprétation). - Savez-vous où ? 14 M. Bower (interprétation). - Oui, à Nova Bila, ils étaient de 15 cette région là-bas, près des lignes de front dans la partie occidentale 16 de l'enclave de la vallée de la Lasva. Dans la clinique de Vitez, il y 17 avait un certain nombre de femmes qui avaient été blessées dans l'enclave 18 bosniaque. 19 M. Cayley (interprétation). - Nous pouvons passer à Stari Vitez. 20 M. le Président. - Nous allons faire une pause de vingt minutes. 21 Nous avons une matinée assez longue. Nous sommes à peu près à la moitié du 22 témoignage du major Bower. On peut couper à cette séquence et nous 23 retrouver à 10 heures 35. L'audience est suspendue. 24 L'audience, suspendue à 10 heures 05, est reprise à 10 heures 45. 25 (L'accusé est introduit dans la salle d'audience) Page 9514 1 M. le Président. - La technique fonctionne, 2 Monsieur le Greffier ? 3 M. Dubuisson. - Oui, Monsieur le Président. Nous vous prions de 4 nous excuser pour ce léger retard. 5 M. le Président. - Merci. Allez-y, Maître Cayley. - 6 M. Cayley (interprétation). - Merci, Monsieur le Président. 7 Major Bower, nous nous sommes arrêtés, dans votre déposition, au 8 moment où nous parlions de l'enclave de Stari Vitez. Pourriez-vous nous 9 indiquer sur la carte (qui se trouve à votre droite et où vous avez fait 10 des marquages) où se trouve exactement l'enclave musulmane de 11 Stari Vitez ? 12 M. Bower (interprétation). - Point 3 sur la carte. C'était au 13 sud de la route de Travnik-Busovaca. 14 M. Cayley (interprétation). - Pouvez-vous expliquer aux Juges 15 votre perception de l'enclave de Stari Vitez ? Pourquoi a-t-elle existé ? 16 M. Bower (interprétation). - C'était autour de la population 17 bosniaque, près de Stari Vitez, près de la mosquée. Il y avait des non- 18 combattants, mais aussi des combattants, des membres de l'armée bosniaque. 19 Ils ne pouvaient ni accéder ni quitter librement Stari Vitez, et le reste 20 de la vallée de la Lasva. 21 M. Cayley (interprétation). - Qui contrôlait l'accès à 22 Stari Vitez ? 23 M. Bower (interprétation). - Le HVO. 24 M. Cayley (interprétation). - Vous étiez très impliqué dans le 25 transfert des blessés et l'accès de l'aide humanitaire de cette région. Page 9515 1 Pourriez-vous nous faire un résumé de votre travail pendant six mois à 2 Stari Vitez et décrire vos contacts avec la population ? 3 M. Bower (interprétation). - Comme je l'ai déjà dit, les 4 organisations caritatives ne pouvaient pas aller là où il y avait un 5 danger. C'était à moi d'évaluer s'il y avait besoin d'une aide humanitaire 6 ou non et de mener à bien, suite aux combats, les évacuations 7 humanitaires. Je négociais le passage vers Stari Vitez et également 8 l'évacuation de blessés de Stari Vitez vers l'hôpital de Zenica. 9 M. Cayley (interprétation). - Avec qui avez-vous dû négocier 10 l'évacuation des blessés de Stari Vitez ? 11 M. Bower (interprétation). - J'ai dû aller à l'hôtel Vitez pour 12 cela. 13 M. Cayley (interprétation). - Y avait-il un autre moyen 14 d'accéder à Stari Vitez, à par passer par l'hôtel Vitez ? 15 M. Bower (interprétation). - Comme vous pouvez le voir sur la 16 carte, il y a une route, ici, qui traverse Stari Vitez. Mais avant 17 d'arriver en Bosnie, donc à cet endroit-là, la route a été bloquée par des 18 travaux, par un barrage, par des camions. Des explosifs et des mines y 19 avaient été placés. Il n'y avait donc pas d'accès possible à partir de 20 l'ouest. Il fallait passer à l'est. Il fallait passer par ce que nous 21 appelions la "jonction Vitez". On devait passer par l'hôtel Vitez pour 22 cela. 23 M. Cayley (interprétation). - Pourrait-on montrer au témoin la 24 pièce 395. On voit très bien, sur cette pièce, la route dont vous venez de 25 parler et qui mène à Stari Vitez. Sur le rétroprojecteur, on ne voit pas Page 9516 1 tout mais on voit bien l'image sur le moniteur. 2 Pourriez-vous nous montrer ce dont vous venez de parler ? 3 M. Bower (interprétation). - Ici, à gauche, c'est la région 4 générale de Stari Vitez. Vous voyez ici la route d'accès, le long de la 5 ligne jaune. C'était la seule possibilité d'accès pour les véhicules 6 rentrant dans Stari Vitez. Chaque évacuation de blessés devaient passer 7 par là, ainsi que chaque convoi humanitaire. 8 M. Cayley (interprétation). - Il fallait donc passer par l'hôtel 9 Vitez ? 10 M. Bower (interprétation). - Oui effectivement. 11 M. Cayley (interprétation). - Où est situé l'hôtel Vitez ? 12 M. Bower (interprétation). - Il est à droite. On ne le voit pas 13 sur le moniteur... Maintenant on le voit, c'est là. 14 M. Cayley (interprétation). - Vous avez marqué la lettre I et un 15 carré au-dessus de la lettre E. Qu'est-ce que cela indique ? 16 M. Bower (interprétation). - Dans cette zone, c'est la fin de la 17 ligne de front du HVO. La ligne bosniaque était ici et dans cette zone. A 18 la fin de l'été 1993, on avait placé des mines, ici, sur cette route, et 19 je crois ici aussi, en bas. Cela empêchait naturellement la circulation 20 des véhicules vers Stari Vitez. 21 M. Cayley (interprétation). - A gauche de la lettre E, il y a eu 22 une autre mine. Pourriez-vous nous expliquer de quelle manière vous avez 23 participé à l'évacuation de blessés de Stari Vitez pendant cette période 24 de six mois ? Comment les personnes ont-elles été blessées ? Quels étaient 25 leur sexe, leur âge ? Page 9517 1 M. Bower (interprétation). - Les blessés, que j'ai évacués, 2 venaient d'une maison. C'était un hôpital de fortune qui se trouve là, à 3 Stari Vitez, à cette marque jaune à l'extrême gauche. Il est écrit 4 "Hospital" mais cela ne se voit presque pas. Il était géré par un médecin, 5 nommé Mulalic. Il avait deux infirmières à son service. Cette équipe 6 s'occupait des soins médicaux pour toute la communauté. Mais elle avait 7 également à traiter les blessés des combats. J'ai évacué cinquante à 8 soixante personnes durant les six mois et demi où j'étais à Stari Vitez. 9 La majorité de ces personnes souffraient de traumatismes dus aux combats, 10 de blessures d'éclats d'obus. Elles ne pouvaient pas être suffisamment 11 aidées à Stari Vitez. Elles seraient mortes si elles étaient restées là- 12 bas. J'ai surtout évacué des femmes et des enfants, également des hommes 13 un peu plus âgés, de 50 à 55 ans. Plusieurs hommes en âge de combattre ont 14 été évacués. Eux aussi, ils seraient morts s'ils étaient restés. 15 Le médecin Metkovic comprenait les règles très strictes que je 16 devais appliquer. J'utilisais, comme base, la procédure du CICR. Je ne 17 devais pas déplacer d'équipements militaires et de personnes en âge de 18 combattre. Les personnes devaient laisser leurs équipements militaires, je 19 ne les aurais pas transportées avec leurs armes. Je n'aurais pas non plus 20 déplacé un ami pour les accompagner. Il s'agissait donc seulement des 21 personnes blessées. 22 M. Cayley (interprétation). - Toutes ces personnes étaient des 23 Musulmans bosniaques ? 24 M. Bower (interprétation). - Oui, de Stari Vitez. 25 M. Cayley (interprétation). - Les balles provoquaient quelles Page 9518 1 sortes de blessures ? 2 M. Bower (interprétation). - Les blessures étaient surtout 3 causées par un 7.62 et un Ak.47. 4 M. Cayley (interprétation). - A votre avis, il s'agissait de 5 tireurs isolés ? 6 M. Bower (interprétation). - Ces tirs étaient le fruit de 7 personnes qui attendaient une bonne occasion et qui ensuite tiraient. 8 M. Riad (interprétation). - Excusez-moi, qu'est-ce qu'un 7.62 ? 9 Quel est ce calibre ? Pouvez-nous l'expliquer, nous ne sommes pas des 10 experts militaires. 11 M. Bower (interprétation). - Il s'agit d'une balle ronde qui 12 vient d'un fusil. un Ak.47 a un diamètre de 7.62. 13 M. Riad (interprétation). - Est-ce une arme strictement 14 militaire ? 15 M. Bower (interprétation). - Ce sont des balles que l'on utilise 16 pour les armes de ce genre. 17 M. Cayley (interprétation). - Un tireur isolé n'a pas forcément 18 avoir un fusil à lunettes. Il peut utiliser n'importe quelle arme, n'est- 19 ce pas ? 20 M. Bower (interprétation). - Sur le fait qu'un tireur isolé doit 21 avoir en effet un fusil à lunettes et doit être bien camouflé, non, ce 22 n'est pas toujours le cas. Mais un tireur isolé est pour moi quelqu'un qui 23 attend une bonne occasion. 24 M. Cayley (interprétation). - Concernant les blessures suite aux 25 explosions, quelle était la cause principale de ces blessures ? Page 9519 1 M. Bower (interprétation). - Ces blessures étaient causées par 2 des armes, disons indirectes, des mortiers par exemple. En été, une bombe 3 artisanale a été faite à partir d'un extincteur. Elle pouvait être jetée à 4 100 ou 200 mètres de la ligne de front, remplie d'essence, d'un autre 5 liquide pour mettre le feu ou d'un explosif plus faible. 6 M. Cayley (interprétation). - De quelle sorte étaient les tirs 7 de ces armes non sélectionnées ? 8 M. Bower (interprétation). - Les gens qui utilisaient ces armes 9 ne voyaient pas où les impacts tombaient. 10 M. Cayley (interprétation). - Vous parlez de ces bombes qui 11 ressemblent à des extincteurs ? 12 M. Bower (interprétation). - Oui, en effet. Le trajet est 13 indirect. En fait, cette arme passe au-dessus du terrain qu'il veut 14 toucher. Une arme artisanale comme cette bombe est très instable. Aucun 15 guidage n'existe pour stabiliser l'arme pendant le vol. C'est une arme 16 absolument pas précise. Comme il faut un certain temps pour aller de 17 l'endroit où elle a été tirée à la cible, quelquefois 10 à 15 secondes, il 18 n'y a aucune garantie, on ne sait pas du tout qui sera dans la zone quand 19 la bombe explosera. Les tireurs ne peuvent pas voir qui est dans la zone 20 quand ils tirent, c'est donc une arme qui ne fait aucune discrimination et 21 il y a donc eu des blessés civils non-combattants. 22 M. Cayley (interprétation). - Pourrait-on montrer au témoin la 23 pièce 82/7 ? On y voit un homme qui porte un extincteur rouge. 24 M. Dubuisson. - Il s'agit de la pièce 82/5. 25 M. Cayley (interprétation). - Je m'excuse, donc le numéro de la Page 9520 1 pièce est 82/5. 2 Major Bower, reconnaissez vous cet engin ? 3 M. Bower (interprétation). - Oui. C'est ce qu'on appelait la 4 bombe extincteur. 5 M. Cayley (interprétation). - C'est ce qu'on utilisait pour 6 tirer sur Stari Vitez ? 7 M. Bower (interprétation). - Oui, on les utilisait donc pour 8 attaquer Stari Vitez. A un moment donné, je ne sais pas s'il s'agissait de 9 cet engin, on l'a amené à l'hôpital où je me trouvais à Stari Vitez. 10 L'engin que l'on voit sur la photo. Il semblait qu'il y avait toujours un 11 besoin, que le personnel médical voulait me montrer les blessures 12 infligées aux personnes, si jamais je ne voulais pas les croire. En fait, 13 le personnel médical voulait souligner l'état dans lequel les blessés se 14 trouvaient. 15 M. Cayley (interprétation). - Vous avez décrit cette campagne 16 qui a duré six mois, où on utilisait tous les genres d'engins et de tirs 17 explosifs. Tout ceci a-t-il été fait par le HVO à l'encontre de 18 Stari Vitez ? 19 M. Bower (interprétation). - Oui. 20 M. Cayley (interprétation). - Les Musulmans à Stari Vitez 21 avaient-ils très peur ? 22 M. Bower (interprétation). - Eh bien cela dépendait du degré 23 d'intensité des combats à Stari Vitez ou dans les environs mais, de façon 24 générale, un sentiment de désespoir régnait parmi la population civile, en 25 tout cas parmi les civils que j'ai eu l'occasion de rencontrer. Page 9521 1 Les représentants de Merhamet à Stari Vitez, je crois que 2 c'était notamment Mme Halilovic, demandaient toujours de l'aide 3 humanitaire, et généralement du lait pour les bébés, des outils qui 4 permettaient de stériliser les instruments, entre autres. 5 Le sentiment général était qu'ils devaient continuer, qu'ils 6 avaient suffisamment d'aides extérieures pour survivre, mais qu'ils ne 7 pouvaient faire que cela, survivre justement. 8 M. Cayley (interprétation). - Vous avez dit que les mouvements 9 autour de Stari Vitez étaient contrôlés par le HVO. Ceci vaut également 10 pour l'aide humanitaire ? 11 M. Bower (interprétation). - L'aide qui entrait dans Stari Vitez 12 était contrôlée par le point de contrôle qui se trouvait au carrefour en T 13 de Vitez, dont j'ai parlé précédemment. Un convoi de 10 à 15 tonnes d'aide 14 humanitaire était constitué de quatre ou cinq véhicules ou camions du HCR 15 ou du CICR. 16 Par conséquent, ce convoi ne pouvait pas passer inaperçu, 17 c'était évident. Les chauffeurs de ces véhicules étaient des civils et on 18 ne les emmenait pas dans une zone qui pouvait comporter un certain danger 19 à cause des combats. Le HCR avait un représentant à Stari Vitez qui 20 s'était fait tuer au moment où il garait sur le côté son véhicule. Après 21 cet incident, le HCR a choisi la prudence et a demandé des garanties, à 22 savoir ne courir aucun danger s'ils amenaient de l'aide humanitaire à 23 Stari Vitez avant de le faire. 24 L'enclave de Stari Vitez était effectivement contrôlée. Tout 25 dépendait de la quantité de médicaments, de nourriture, qui lui était Page 9522 1 apportée, ainsi que des possibilités d'évacuation des victimes de 2 Stari Vitez. Tout ceci était contrôlé au niveau du poste de contrôle, à 3 tel point que, moi, je savais que si je n'obtenais pas l'autorisation 4 d'évacuer des personnes de Stari Vitez, eh bien j'allais mettre ces 5 personnes en danger au moment où nous arriverions au poste de contrôle de 6 Vitez et où nous essaierions de sortir. 7 M. Cayley (interprétation). - Vous avez évacué un grand nombre 8 de personnes, mais pourriez-vous indiquer aux Juges quels étaient l'âge et 9 le sexe des blessés que vous avez évacués de Stari Vitez ? 10 M. Bower (interprétation). - La première victime que j'ai évacué 11 était une petite fille de 11 ans qui avait reçu une balle de 7.62 dans la 12 tête, le 21 mai je crois. Elle était grièvement blessée, la balle avait 13 traversé sa tête et ce n'est qu'à la tombée de la nuit que le Bataillon 14 britannique a reçu le message selon lequel il y avait une blessée très 15 grave. Je l'ai évacuée la nuit même. 16 Il y a eu d'autres victimes en juillet, le 18 ou le 19. Là 17 encore, il y a eu trois blessés suite à l'explosion d'une bombe, un homme 18 de 40, 45 ans à peu près, une femme d'âge moyen et un enfant, mais je ne 19 sais pas quel âge avait cet enfant. L'homme est décédé à l'hôpital de 20 Stari Vitez, il avait beaucoup de blessures au niveau de l'abdomen causées 21 par des éclats d'obus. La femme était également blessée à cause de ces 22 éclats d'obus à la gorge et au visage et elle avait des problèmes 23 respiratoires. Elle était grièvement blessée également. Quant à l'enfant, 24 elle avait aussi des éclats d'obus au niveau du visage. C'était une petite 25 fille en fait, elle était choquée et c'était un traumatisme très important Page 9523 1 visiblement. J'ai évacué la femme et sa fille, et j'ai laissé le cadavre 2 de l'homme sur place. 3 M. Cayley (interprétation). - C'était la procédure normale 4 pendant les six mois que vous avez passés là-bas ? 5 M. Bower (interprétation). - Il y avait des blessures par 6 balles, des blessures provoquées par des explosions de bombes. Voilà 7 généralement les problèmes médicaux auxquels nous devions faire face. Les 8 femmes enceintes posaient également problème et il y avait des personnes 9 âgées diabétiques qui avaient besoin d'insuline, qui avaient donc besoin 10 de médicaments et de soins médicaux. 11 M. Cayley (interprétation). - Savez-vous quel est le nombre de 12 femmes et d'enfants qui ont été tués à Stari Vitez suite aux blessures 13 infligées par des tireurs isolés ? 14 M. Bower (interprétation). - C'est difficile à dire. Si une 15 personne était tuée, j'en étais informé. 16 M. Cayley (interprétation). - Mais vous savez qu'un certain 17 nombre de femmes et d'enfants ont été tués à Stari Vitez par des tireurs 18 isolés et à la suite des explosions. 19 M. Bower (interprétation). - Chaque fois que je me rendais à 20 Stari Vitez et que je faisais une visite au médecin, elle me faisait 21 toujours le bilan de ce qui s'était passé depuis ma dernière visite. A 22 chaque fois, elle voulait me montrer les cadavres pour me montrer que 23 c'était effectivement ce qui s'était passé. 24 M. Cayley (interprétation). - Avez-vous vu ces cadavres ? 25 M. Bower (interprétation). - Oui. Page 9524 1 M. Cayley (interprétation). - Des cadavres de femmes ? 2 M. Bower (interprétation). - Des femmes et des hommes. 3 M. Cayley (interprétation). - Quelle était votre conclusion à 4 l'époque concernant la nature de la campagne militaire qui était menée à 5 l'encontre de Stari Vitez par les forces du HVO ? 6 M. Bower (interprétation). - C'était une campagne qui avait 7 quelque part pour but d'isoler. L'objectif n'était pas véritablement de 8 conquérir le territoire de Stari Vitez, mais plutôt de s'assurer que les 9 résidents de Stari Vitez ne sortent pas, n'étendent pas la superficie de 10 leur enclave et n'essaient pas d'en sortir. C'était plutôt un objectif 11 d'isolement, de limitation. 12 M. Cayley (interprétation). - A l'encontre de la population 13 civile ? 14 M. Bower (interprétation). - Pour ce qui est de la population 15 civile, nous avions la possibilité d'évacuer certains d'entre eux et de 16 leur apporter de l'aide. Mais avec l'utilisation de certaines armes, les 17 mortiers, les bombes, il semblait qu'il n'y avait pas véritablement 18 d'objectif précis. Ils ne visaient pas particulièrement les lignes de 19 front où se trouvaient la plupart des soldats de l'armée de Bosnie- 20 Herzégovine. En fait ces mortiers atterrissaient plutôt au centre même de 21 Stari Vitez et de part leur nature, ils provoquaient des victimes parmi 22 les civils. 23 M. Cayley (interprétation). - Diriez-vous qu'il y avait un 24 processus de démoralisation à Stari Vitez ? 25 M. Bower (interprétation). - Psychologiquement et physiquement, Page 9525 1 ceci avait un effet négatif sur la détermination, sur la volonté de la 2 population de Stari Vitez. Parce que la population comptait totalement sur 3 les organisations humanitaires et sur moi afin d'évacuer les personnes 4 blessées et de rapporter de l'aide humanitaire de l'extérieur. Ils 5 n'avaient aucun moyen leur permettant d'obtenir de l'aide. Ils ne 6 pouvaient pas utiliser de véhicule, il fallait que cette aide arrive de 7 l'extérieur par une organisation humanitaire. Par conséquent, cette 8 campagne militaire à laquelle venait s'ajouter cet accès limité à 9 Stari Vitez pour les organisations humanitaires telles que le HCR, le 10 CICR, pour moi-même, semblaient être un objectif d'isolement et de 11 démoralisation. Il fallait limiter les possibilités des gens qui se 12 trouvaient dans l'enclave. 13 M. Cayley (interprétation). - A votre avis, pourquoi le HVO 14 voulait isoler cette enclave de Stari Vitez au sein de la ville de Vitez ? 15 M. Bower (interprétation). - Je pensais que c'était une menace 16 implicite destinée à l'armée de Bosnie-Herzégovine, au 3ème Corps d'armée 17 de Zenica et également à la 325ème Brigade de l'armée de Bosnie-Herzégovine 18 qui se trouvait vers Kajdras et Poculica au nord de la zone de Vitez. Par 19 conséquent, le message était : si vous tentez quoi que ce soit contre la 20 région de Vitez, si vous essayez de libérer Stari Vitez, Stari Vitez en 21 subira les conséquences et subira des dégâts extrêmement importants. 22 M. Cayley (interprétation). - Pourquoi les gens ne sont pas tout 23 simplement partis de Stari Vitez ? 24 M. Bower (interprétation). - Pour un certain nombre de raisons. 25 Je crois que la quasi majorité d'entre eux ne souhaitaient pas partir Page 9526 1 malgré les conditions qu'on imposait à la population, parce qu'ils 2 savaient que s'ils quittaient volontairement leur foyer, le HCR les 3 décrirait comme étant des personnes déplacées et non plus des réfugiés. 4 Par conséquent ils ne recevraient pas le même type d'aide qu'en étant 5 réfugiés parce qu'ils auraient quitté délibérément leur foyer et puis leur 6 famille habitait là. Il y avait des personnes jeunes, des personnes âgées, 7 où pouvaient-elles se rendre ? 8 J'ai rendu visite à des réfugiés d'Ahmici à Zenica qui étaient 9 logés dans les vieux bunkers de Zenica. Les conditions étaient terribles 10 dans ces bunkers : il n'y avait pas de fenêtre, il y avait de grandes 11 pièces, tout le monde dormait par terre à même le sol. Je ne pense pas que 12 la population de Stari Vitez voulait vivre dans de telles conditions. La 13 population avait également le sentiment qu'elle encourait un certain 14 danger si elle essayait de quitter les lieux. Les gens pourraient être 15 tués par balles ou bien frappés. Ils savaient aussi qu'ils ne pourraient 16 pas emporter beaucoup d'objets personnels. En fait les opinions étaient 17 assez divisées sur la question. 18 M. Cayley (interprétation). - A quelle distance était 19 l'hôtel Vitez de Stari Vitez ? 20 M. Bower (interprétation). - Pas plus de 500 à 600 mètres de la 21 ligne de front de Stari Vitez. Il me fallait de trente secondes à une 22 minute dans mon véhicule pour aller jusqu'à l'hôtel Vitez ou bien pour 23 aller de l'hôtel Vitez jusqu'à la zone de Stari Vitez contrôlée par les 24 Musulmans, par l'armée de Bosnie-Herzégovine. 25 M. Cayley (interprétation). - Cette campagne qui a duré pendant Page 9527 1 six mois avec plus ou moins d'intensité comme vous l'avez expliqué, était- 2 il possible que ceux qui se trouvaient à l'hôtel Vitez de ne pas être au 3 courant de ce qui se passait à Stari Vitez ? 4 M. Bower (interprétation). - C'est difficile à croire. Je ne 5 pense pas que des gens qui se trouvaient à l'hôtel Vitez auraient pu ne 6 pas entendre la chute des pièces de mortier ou bien les pompes à 7 extincteur, comme on les appelait lorsque les explosions se produisaient, 8 ou même les tirs de fusil. Et, à mon avis, lorsque vous entendez un tir 9 d'artillerie ou de mortier, ou même d'une arme de petit calibre près de 10 vous, vous vous posez la question suivante : "Mais d'où vient cette arme ? 11 Ce tir est-il près de moi ou loin de moi ?". Et en tant que commandant 12 militaire, je pense que les gens qui se trouvaient au quartier général de 13 Vitez auraient voulu savoir s'il s'agissait de l'armée de Bosnie- 14 Herzégovine qui tirait vers la population croate de Vitez ou bien si 15 c'était l'inverse. En effet, on trouvait un certain nombre de victimes 16 parmi les rangs du HVO à cause des tirs de l'armée de Bosnie-Herzégovine 17 vers Vitez parce que, là aussi, j'ai évacué certaines personnes, des 18 membres du HVO, vers les hôpitaux. 19 M. Cayley (interprétation). - Quel était, à votre avis, le 20 niveau de coordination des tireurs isolés et des tirs sans 21 destination pendant cette campagne ? 22 M. Bower (interprétation). - Eh bien, cette campagne a eu une 23 certaine évolution. Au départ, au mois de mai, ce genre d'activité était 24 assez rare et puis ces tirs ont suivi la tendance générale qui s'exprimait 25 dans d'autres parties de la vallée de la Lasva, mais il semblait qu'au Page 9528 1 mois de juillet et au mois d'août, le nombre de victimes et d'incidents de 2 ce type ait augmenté. 3 Vers le 18 ou 19 juillet, je n'ai pas pu moi-même évacuer des 4 victimes pendant peut-être une période de 30 heures, parce que les 5 affrontements étaient trop intenses et que je ne pouvais pas rentrer dans 6 Stari Vitez, mais on nous avait dit que seize blessés se trouvaient à 7 Stari Vitez et avaient besoin d'être évacués. 8 Par conséquent, cela dépendait : parfois certains incidents 9 sporadiques se produisaient, et parfois cela s'intensifiait, puis à 10 nouveau une période de calme et l'intensité revenait -et ceci au cours de 11 l'été 1993. 12 M. Cayley (interprétation). - Vous avez mentionné les forces 13 bosniaques stationnées à Stari Vitez. Dans quelle mesure pouvaient-elles 14 vraiment riposter à partir de Stari Vitez ? 15 M. Bower (interprétation). - Je n'étais pas personnellement 16 responsable des liaisons ou des liens avec l'armée de Bosnie-Herzégovine à 17 Stari Vitez, ce n'était pas une de mes responsabilités. Je pense qu'ils 18 pouvaient maintenir cette enclave en l'état, mais je ne pense pas qu'ils 19 pouvaient riposter à une longue attaque qui provenait de l'extérieur de 20 Stari Vitez. Je ne pense pas qu'ils en avaient les moyens. Et ils 21 n'avaient pas non plus la volonté de le faire étant donné le nombre de 22 civils qui habitaient à Stari Vitez. Au bout du compte, s'ils essayaient 23 de sortir, de briser leur isolement, ils devaient sortir de Stari Vitez, 24 et un certain nombre de victimes pourraient alors en résulter. 25 M. Cayley (interprétation). - Avez-vous fourni des munitions aux Page 9529 1 soldats bosniaques qui se trouvaient à Stari Vitez ? 2 M. Bower (interprétation). - Non. 3 M. Cayley (interprétation). - Procédons maintenant avec la carte 4 que je vous prie de mettre devant le témoin. Pourriez-vous expliquer aux 5 Juges très brièvement -vous l'avez déjà mentionné- votre visite à 6 Kruscica ? Je crois que c'était au moi de mai 1993. 7 M. Bower (interprétation). - Je tentais de faire passer un 8 convoi d'aide humanitaire jusqu'à Kruscica, en mai. 9 M. Cayley (interprétation). - Vous êtes en train de montrer le 10 cercle qui porte le n° 4. 11 M. Bower (interprétation). - Oui. Les femmes et les enfants de 12 cette zone se positionnaient généralement sur la route pour la barrer, 13 dans la partie contrôlée par le HVO de la vallée de la Lasva, donc près de 14 la ligne de front, à Kruscica. 15 Je devais recevoir un certain nombre de demandes. On me posait 16 des questions et on me demandait pourquoi il était impossible que je passe 17 avec le convoi. Alors on me disait les choses suivantes : qu'aucune aide 18 n'était arrivée au HVO de Vitez, que je transportais moi-même des armes et 19 des munitions pour les apporter à la partie bosniaque contrôlée par les 20 Musulmans de Kruscica... Et c'étaient toujours les femmes et les enfants 21 qui barraient la route. Sur le côté de la route, on voyait un certain 22 nombre de soldats du HVO. 23 J'ai fini par parler avec le capitaine Nikola. C'était l'un de 24 ces soldats. Je le voyais régulièrement. Apparemment, ces soldats 25 dirigeaient quelque peu la foule de femmes et d'enfants. Page 9530 1 On m'a dit : "Les armes sont dans votre véhicule". Alors, au 2 bout d'une heure, nous finissions par les laisser regarder la cargaison 3 qui se trouvait dans les véhicules du HCR. Mais ils nous disaient : "Les 4 munitions sont cachées dans les paquets de nourriture". Alors nous 5 disions : "Eh bien prenez une boîte et ouvrez-la", et on nous répondait : 6 "Les munitions sont cachées dans les boîtes de conserves". 7 Chaque fois que nous essayions de répondre à l'une de leur 8 demande, eh bien il la modifiait et, pour finir, on nous disait qu'on ne 9 pouvait pas nous donner l'autorisation de passer, et ce, parce qu'on leur 10 avait montré une cassette vidéo de soldats de la Forpronu qui 11 distribuaient des armes et des munitions à l'armée de Bosnie-Herzégovine. 12 Je me suis tout particulièrement adressé au capitaine Nikola. Je 13 lui ai demandé de visionner cette cassette ou de me dire quelle était 14 l'origine de cette cassette et qui on y voyait, parce que c'était 15 apparemment un obstacle majeur et que cela posait des problèmes pour la 16 plupart des gens qui habitaient aux environs de Vitez ; mais en quelque 17 dix jours, il n'a pas pu me montrer cette cassette. 18 Alors que je parlais des événements avec lui, j'entendais des 19 conversations autour de moi et mon interprète a fini par me dire, avec ce 20 qu'elle avait glané au fil des conversations, que cette cassette 21 n'existait pas. 22 M. Cayley (interprétation). - Cet endroit où vous vouliez aller, 23 était-ce en partie une enclave musulmane ? 24 M. Bower (interprétation). - Oui. 25 M. Cayley (interprétation). - Pouvait-elle recevoir des Page 9531 1 approvisionnements d'une autre source à part celle des agences 2 internationales ? 3 M. Bower (interprétation). - Je pense que l'accès à Kruscica par 4 le sud était relativement limité mais, de toute façon, les organisations 5 humanitaires n'utilisaient pas cet itinéraire. Par conséquent, l'accès 6 pour de nouveaux approvisionnements était réduit, mais pas pour de grandes 7 quantités d'aide (généralement 25 tonnes) ou bien pour l'évacuation de 8 blessés, parce qu'il fallait que ces victimes se rendent à Zenica qui se 9 trouvait au nord. 10 M. Cayley (interprétation). - Croyez-vous que le HVO manipulait 11 la population civile afin d'empêcher votre accès à la vallée de la Lasva ? 12 M. Bower (interprétation). - Oui, et c'était très efficace. Les 13 Nations Unies et d'autres organisations humanitaires -la Forpronu 14 également- auraient eu une très mauvaise image si elles avaient tenté de 15 forcer un barrage constitué de femmes et d'enfants, et les médias 16 internationaux étaient là à plusieurs reprises au moment où nous essayions 17 de négocier notre passage et le passage du convoi humanitaire à travers ce 18 poste de contrôle. 19 Au tout début, j'ai fait marcher ma Land Rover devant pour 20 essayer de voir si nous pourrions passer, si la foule s'écarterait, mais 21 dès que nous avons mis le moteur en marche et dès que nous avons commencé 22 à avancer, les soldats du HVO, qui se trouvaient de chaque côté de la 23 route, ont tiré au-dessus de nos têtes et, pour moi, c'était le signe 24 évident que je devais m'arrêter immédiatement et que je devais revenir 25 pour négocier avec eux. Page 9532 1 M. Cayley (interprétation). - Vous avez parlé à plusieurs 2 reprises -et ceci fait également partie de votre déposition- des unités du 3 HOS qui étaient présentes dans la vallée de la Lasva. Pourriez-vous nous 4 en dire davantage ? 5 M. Bower (interprétation). - Les rapports dont nous avons eu 6 connaissance lors de notre arrivée en Bosnie nous ont informés de 7 l'existence de certaines unités et sous-unités, à la fois de l'armée de 8 Bosnie-Herzégovine et du HVO, dans la région. L'une des unités mentionnées 9 était l'unité du HOS. On nous avait donné une description générale de leur 10 apparence afin de pouvoir les reconnaître si nous les voyions. 11 Je voyais seulement ces unités en petits groupes, mais je ne 12 m'arrêtais pas, je n'avais pas ordre de leur parler. Je les voyais et je 13 les reconnaissais de par leur uniforme ou leur vêtement bleu-marine très 14 foncé ou noir. Certains portaient des insignes avec les lettres HOS, 15 certains avaient des ceintures croisées sur la poitrine, certains avaient 16 des fusils à canon long... Pardon, les soldats du HOS avaient des 17 revolvers plutôt que des fusils, et je me souviens particulièrement 18 d'avoir vu une Volkswagen bleu foncé (une Golf) qui était conduite par des 19 soldats du HOS. Ils avaient donc surtout des voitures d'Europe de l'Ouest, 20 et je crois qu'ils se trouvaient souvent sur les routes entre Novi Travnik 21 et Busovaca, et même vers Vitez. 22 M. Cayley (interprétation). - Comment était leur équipement ? 23 M. Bower (interprétation). - Eh bien, ils avaient de l'essence 24 pour leurs véhicules et cela montrait qu'ils avaient accès à la denrée la 25 plus recherchée d'un point de vue logistique à ce moment-là. Nous avions Page 9533 1 besoin d'essence pour le groupe électrogène de l'hôpital de Nova Bila, 2 mais il y avait si peu d'essence que la plupart des voitures que nous 3 voyions n'étaient pas conduites par la population normale. C'étaient 4 souvent des personnalités importantes de la société civile, des hommes 5 politiques ou bien encore des commandants militaires -les unités 6 militaires les mieux dotées disons. 7 M. Cayley (interprétation). - Votre bataillon pensait-il que ces 8 unités du HOS étaient commandées par le HVO ? 9 M. Bower (interprétation). - C'était l'impression générale qu'on 10 avait. Ils n'étaient pas limités par les régions géographiques mais le 11 commandement se trouvait finalement à L'hôtel Vitez. 12 M. Cayley (interprétation). - Avez-vous vu des soldats du HVO et 13 du HOS ensemble à des points de contrôle ? 14 M. Bower (interprétation). - Oui. En général, ils semblaient 15 être en train de parler comme s'ils se connaissaient. Ils n'ont jamais 16 essayé de prendre le commandement du point de contrôle. Ils étaient 17 toujours en train de bavarder, de fumer, de faire autre chose. 18 M. Cayley (interprétation). - Pouvaient-ils passer librement par 19 des points de contrôle ? 20 M. Bower (interprétation). - Apparemment, on ne les empêchait 21 pas de passer. 22 M. Cayley (interprétation). - Beaucoup d'autres personnes 23 étaient limitées dans leurs mouvements et pour le passage par des points 24 de contrôle, n'est-ce pas ? 25 M. Bower (interprétation). - Je ne sais pas si je peux dire Page 9534 1 "limité". Il y avait une nécessité militaire. Ils voulaient savoir qui se 2 déplaçait sur les grandes routes. C'est ce qui se passe dans chaque 3 guerre, il faut savoir qui passe sur la route. C'était plutôt dans ce 4 genre là. 5 M. Cayley (interprétation). - Avez-vous jamais vu des unités du 6 HOS en train de faire elles-mêmes des points de contrôle ? 7 M. Bower (interprétation). - Je les ai vu parler avec des gens 8 sur la route, mais naturellement je ne sais pas de quoi ils parlaient. 9 Apparemment, ils parlaient en général. Le HOS avait une voiture et les 10 gens marchaient. 11 M. Cayley (interprétation). - Avez-vous jamais vu des personnes 12 appartenant au HOS à L'hôtel Vitez ou à proximité de L'hôtel Vitez ? 13 M. Bower (interprétation). - J'en ai vu une ou deux fois dans le 14 parking mais je n'ai jamais vu quelqu'un à l'intérieur. 15 M. Cayley (interprétation). - Je vous prie de passer brièvement 16 maintenant à Dobrila Kolaba qui était votre interprète et qui a été tuée. 17 Je suis sûr que vous pouvez vous souvenir de la date. 18 M. Bower (interprétation). - Oui, elle a été tuée 19 lundi 5 juillet, vers 8 h 30 le soir. 20 M. Cayley (interprétation). - Par qui ? Quelle est votre 21 opinion ? 22 M. Bower (interprétation). - Elle a été tuée par le HVO. 23 M. Cayley (interprétation). - Ai-je le droit de dire qu'elle 24 était debout sous un drapeau bleu des Nations Unies au moment où elle a 25 été tuée ? Page 9535 1 M. Bower (interprétation). - Oui, c'est exact. La maison dans 2 laquelle elle vivait était une maison louée pour les Nations Unies. On la 3 surnommait "la maison du capitaine" et tous les capitaines du bataillon 4 britannique et les officiers de liaison vivaient dans cette maison, ainsi 5 que Dobrila Kolaba, notre interprète. 6 Au début, il était évident que si on ne mettait pas en évidence 7 que cette maison, de même que les autres, étaient habitées par le 8 personnel de l'ONU, on encourait le risque d'être attaqué ou d'être la 9 cible des tirs. On a donc mis sur ces maisons de très grands drapeaux de 10 l'ONU. En fait, ces drapeaux étaient plus grands que des drapeaux normaux. 11 Un de ces drapeaux était hissé au dessus du balcon où elle a été tuée. 12 M. Cayley (interprétation). - Nous pouvons maintenant passer à 13 ce que vous avez dit sur les personnes qui étaient obligées de creuser des 14 tranchées. Regardons donc la carte et la région qui se rapporte à ces 15 travaux. 16 M. Bower (interprétation). - Oui, c'est cette zone au sud de 17 Novi Travnik. 18 M. Cayley (interprétation). - Il s'agit de la pièce 394. Pouvez- 19 vous dire quelques mots aux Juges au sujet de cet incident ? 20 M. Bower (interprétation). - Oui. A l'époque, la route 21 principale de Busovaca à Travnik était tout près d'une zone offensive de 22 l'armée bosniaque. C'était donc une zone dangereuse. La Croix-Rouge avait 23 négocié un passage par la ligne de front du HVO au nord de Travnik, et le 24 front de l'armée bosniaque, pour faire passer un convoi humanitaire dans 25 Travnik. Comme la route passait par des montagnes et qu'il y avait peut- Page 9536 1 être un danger également dû aux combats, nous avons accompagné ce convoi. 2 Nous étions à la queue du convoi mais nous étions en communication avec 3 notre propre base et si jamais il y avait un problème, on pouvait demander 4 de l'assistance pour la Croix-Rouge. Les communications radio n'étaient 5 pas très bonnes à ce moment-là. 6 On s'approchait de la ligne de front du HVO car je voyais des 7 endroits où ils avaient enterré des mortiers ainsi que certaines tranchées 8 et certains bunkers de commandement. J'ai vu quinze hommes (je ne pense 9 pas plus de quinze) dans des costumes civils. Ils avaient l'air plutôt 10 sales, mal lavés, et ils creusaient ce qui ressemblait à des tranchées -de 11 grandes tranchées. Il y avait un certain nombre de soldats du HVO avec des 12 armes qui étaient assis et qui surveillaient ces personnes qui creusaient. 13 Toutes les personnes creusaient en même temps contrairement à ce qu'on 14 s'attend à voir. On s'attend à voir que certains creusent et que certains 15 sont à côté. En fait, ils creusaient tous en même temps. Les soldats 16 regardaient vers le sud ; ils ne regardaient pas la ligne de front mais 17 ils regardaient vraiment ceux qui creusaient. J'ai alors ralenti les 18 véhicules pour mieux regarder et les soldats m'ont indiqué d'une main 19 qu'il fallait que je passe. Je n'ai pas voulu empêcher notre passage, je 20 n'ai donc pas voulu faire quoi que ce soit. J'ai juste informé les gens de 21 la Croix-Rouge. Je leur ai demandé s'ils l'avaient vu et j'ai laissé cela 22 ainsi. 23 M. Cayley (interprétation). - Ces personnes, à votre avis, 24 étaient-elles volontaires ? 25 M. Bower (interprétation). - Elles n'étaient pas très Page 9537 1 enthousiasmées par leur travail. 2 M. Cayley (interprétation). - Je passe à la phase finale de 3 votre déposition. Concernant l'attaque que vous avez vue dans le village 4 de Gurbavica, pourriez-vous expliquer aux Juges où se trouve Gurbavica, 5 plus particulièrement par rapport à l'endroit où se trouvait le bataillon 6 britannique ? 7 M. Bower (interprétation). - C'est là, zone 6, le petit cercle 8 en haut. C'est une zone un peu élevée. La route était pratiquement dans la 9 vallée. Il y a une colline ici. La plupart des maisons étaient ici, et 10 l'armée bosniaque, les systèmes de tranchées, se trouvaient là, autour de 11 ce cercle, donc autour de cette élévation. La base du bataillon 12 britannique était là. Nous étions là. 13 M. Cayley (interprétation). - Au mois de septembre 1993, vous 14 avez vu une attaque du HVO à l'encontre de Gurbavica. Pourriez-vous la 15 décrire, s'il vous plaît ? 16 M. Bower (interprétation). - J'ai juste vu le début de 17 l'attaque. Cela semblait être une attaque professionnelle, une offensive 18 militaire bien coordonnée, pour saisir et pour garder une zone. Les forces 19 du HVO ont utilisé des fusils à grand calibre avec un impact à explosion 20 quand il touche le but. Ils ont commencé, et ils sont vraiment passés 21 d'une maison à l'autre. Certaines familles croates vivaient dans le 22 village et leurs maisons n'ont pas été touchées mais la population 23 musulmane, elle, a été éradiquée des maisons. 24 M. Cayley (interprétation). - Des maisons ont-elles été 25 incendiées ? Page 9538 1 M. Bower (interprétation). - Oui, certaines maisons du côté de 2 la colline, et une ou deux dans cette zone ici, tout près de la route. 3 M. Cayley (interprétation). - J'ai plusieurs photographies que 4 je mettrai sur le rétroprojecteur une fois que vous aurez terminé avec 5 cette partie de votre témoignage. Une fois que les Musulmans -forces 6 militaires et population civile- sont partis, qu'est-il arrivé à la 7 population civile ? 8 M. Bower (interprétation). - Ils se sont rassemblés dans des 9 maisons près de l'entrée du camp britannique et ils ont supplié qu'on les 10 fasse entrer dans le camp. Nous avions une politique : nous ne laissions 11 rentrer personne dans le camp de crainte qu'ils ne sortent plus si jamais 12 ils se trouvaient à l'intérieur. C'est ce qui se serait passé. Cela s'est 13 passé une fois et cela a posé des problèmes. Toute personne qui venait 14 avec un équipement militaire, avec une arme, était désarmée par l'officier 15 de liaison qui était là, et il lui demandait de changer de costume. 16 Ces personnes sont restées dans ces deux maisons qui étaient à 17 côté du camp britannique et on a essayé de les protéger. 18 M. Cayley (interprétation). - Pensait-on que les civils 19 encouraient un grand risque d'être tués ? 20 M. Bower (interprétation). - Ils étaient pris dans une bataille 21 et ils étaient donc en danger. Un homme a été tué en face de deux 22 officiers de liaison alors qu'il était en train de discuter et de parler 23 de l'évacuation des civils. 24 M. Cayley (interprétation). - Tout de suite après la fin de 25 l'attaque, les gens ont donc été éloignés. Est-ce que le pillage a Page 9539 1 commencé ? 2 M. Bower (interprétation). - Oui. 3 M. Cayley (interprétation). - Par qui ? 4 M. Bower (interprétation). - D'abord par des soldats du HVO. Ils 5 prenaient des objets, des meubles... Des familles croates sont, peu après, 6 entrées dans les maisons qui étaient vides et il y a eu apparemment une 7 redistribution de ce qui était dans ces maisons et cela a été fait par des 8 non-combattants. 9 M. Cayley (interprétation). - Ai-je raison de dire que certains 10 soldats du HVO sont entrés dans la maison du capitaine britannique et 11 qu'elles ont essayé de la piller ? 12 M. Bower (interprétation). - Pendant trente-six heures nous 13 avions travaillé. Quand les combats ont cessé, nous sommes revenus dans 14 nos maisons et à ce moment-là deux soldats du HVO sont entrés dans la 15 maison. L'un était ivre ; il disait qu'il voulait juste jeter un coup 16 d'oeil mais on leur a dit de partir. 17 M. Cayley (interprétation). - Et ils sont partis ? 18 M. Bower (interprétation). - Oui. 19 M. Cayley (interprétation). - Peut-on montrer au témoin les deux 20 dernières photographies 396 et 397. Je demanderai que la carte demeure sur 21 le rétroprojecteur parce qu'il y a un endroit que nous n'avons pas encore 22 identifié. 23 M. Cayley (interprétation). - Que représente cette première 24 photographie ? 25 M. Bower (interprétation). - C'est une photo que j'ai prise de Page 9540 1 la partie sud de Gurbavica, en regardant vers le nord, vers cette zone 2 élevée que vous voyez ici. Le camp était derrière cette colline, dans 3 cette direction-là. 4 M. Cayley (interprétation). - Quand est-ce que cette photo a été 5 prise ? Vous en souvenez-vous ? 6 M. Bower (interprétation). - Je crois que j'ai pris cette photo 7 fin septembre, octobre, je ne pourrais pas vous donner la date exacte. 8 M. Cayley (interprétation). - Peut-on placer la pièce 397 sur le 9 rétroprojecteur s'il vous plaît ? 10 Pourriez-vous dire, à l'attention des Juges, où se trouve 11 Gurbavica ? 12 M. Bower (interprétation). - Voici cette zone élevée. Donc vers 13 le sud. Et la route principale de Travnik à Busovaca allait dans cette 14 direction-là. Voici l'entrée près du camp du Bataillon britannique. 15 M. Cayley (interprétation). - Quelques maisons se trouvent tout 16 en haut, n'est-ce pas ? Et les toits ont disparu. Il s'agit des maisons 17 incendiées dont vous avez parlées ? 18 M. Bower (interprétation). - Oui, ici en haut de cette colline. 19 Il y en avait certaines aussi, qu'on voyait sur l'autre photo, et qui ont 20 été brûlées. 21 M. Cayley (interprétation). - Peut-on replacer la carte sur le 22 rétroprojecteur s'il vous plaît ? Pourriez-vous la monter un peu afin 23 qu'on puisse voir le chiffre 2 sur l'écran ? Non, Major Bower, excusez- 24 moi, j'ai oublié de parler de ce point 2. De quoi s'agit-il ? 25 M. Bower (interprétation). - Oui cette zone ici se trouve sur la Page 9541 1 route de Travnik-Busovaca, à cinq ou six cents mètres du cimetière qui est 2 là. On aurait dit un chalet, un petit bâtiment. Lorsque nous sommes 3 arrivés en Bosnie, tout était utilisé, c'est ce que nous croyions en tout 4 cas, par un groupe comme les Jokeri. 5 M. Cayley (interprétation). - Le groupe dont vous avez parlé 6 précédemment. 7 M. Bower (interprétation). - Oui, c'est le groupe que j'ai 8 rencontré ici à l'ouest de Busovaca. 9 M. Cayley (interprétation). - Enfin, en octobre 1993, juste 10 avant la fin de votre mission, on vous a donné l'ordre de vous rendre à 11 Stupni Do dans la municipalité de Vares. Pouvez-vous, très brièvement, 12 décrire ce que vous avez trouvé dans ce village à votre arrivée ? 13 M. Bower (interprétation). - C'était une destruction totale du 14 village. Il y avait très peu de maisons qui n'avaient pas été brûlées et 15 complètement détruites. Il y avait un certain nombre de corps, de 16 cadavres. Je me souviens de deux femmes qui avaient été tuées. Elles 17 étaient en train de ramasser des légumes, chez elles. 18 M. Cayley (interprétation). - L'accès à Stupni Do, était-il 19 contrôlé d'une façon ou d'une autre ? 20 M. Bower (interprétation). - Nous n'avions pas trop de mal à 21 entrer dans le village. On est arrivé assez vite après que l'attaque ait 22 eu lieu. Nous sommes restés là durant dix-huit heures à peu près et quand 23 j'ai essayé de partir avant les autres forces de la Forpronu, il y avait 24 un poste de contrôle en bas de la route au sud de Stupni Do. Et là, on m'a 25 menacé et les soldats étaient prêts à tirer. Ils étaient très nerveux. Ils Page 9542 1 avaient un lance roquette et il ne voulait pas que je parte. Ils voulaient 2 savoir ce que nous avions fait là-bas, ce que nous avions vu et où nous 3 allions. 4 M. Cayley (interprétation). - C'étaient des soldats du HVO, 5 n'est-ce pas, qui disposaient de ce lance roquette ? 6 M. Bower (interprétation). - Oui 7 M. Cayley (interprétation). - Ce village de Stupni Do abritait- 8 il des Musulmans ? 9 M. Bower (interprétation). - Oui. 10 M. Cayley (interprétation). - Pour en revenir à ces tirs isolés 11 dont nous avons parlées, et je vous demande l'opinion que vous vous êtes 12 faite d'après ce que vous avez vu, quel est l'effet psychologique de ce 13 genre d'activité sur des civils, sur des femmes et des enfants ? 14 M. Bower (interprétation). - Psychologiquement, c'est très dur 15 pour n'importe qui même pour des formations militaires. Cela peut être 16 très démoralisant d'avoir des tireurs isolés qui sont très efficaces. 17 C'était efficace car beaucoup de personnes à Stari Vitez ne quittaient pas 18 leurs maisons lorsqu'il y avait des combats pendant la journée. Elles 19 restaient à l'abri. Elles avaient extrêmement peur d'être blessées elles- 20 mêmes. Les gens cultivaient des légumes mais ils n'osaient pas aller les 21 chercher dans la journée. Ils n'osaient pas aller chercher de l'eau. Ils 22 restaient vraiment groupés dans le centre de Stari Vitez. Ils n'osaient 23 pas s'approcher d'une position du HVO. 24 M. Cayley (interprétation). - Je n'ai plus de questions, 25 Monsieur le Président. Je demanderai simplement le versement au dossier Page 9543 1 des pièces 3-94, 3-95, 3-96 et 3-97. 2 M. le Président. - A ce point des débats et dans la suite de ce 3 que nous avons dit hier, nous avons d'abord dit aux interprètes que nous 4 ferions une pause. Je voudrais savoir, du côté de la défense, combien de 5 temps il faut pour le contre-interrogatoire. Il n'est pas du tout question 6 de limiter la défense dans son contre-interrogatoire. 7 Maître Hayman ou Maître Nobilo, vous nous dites combien de temps 8 il vous faut, sinon nous referons redevenir le major les 29 et 30 juin. 9 M. Hayman (interprétation). - Malheureusement, Monsieur le 10 Président, ce témoin a abordé de nombreux sujets, une nouvelle période. Ce 11 n'est pas le Régiment du Cheshire, c'est le Régiment du Prince de Galle 12 qui était sur les lieux à ce moment-là. 13 Par conséquent, je pense que mon contre-interrogatoire durera 14 moins que l'interrogatoire principal mais je prévois tout de même presque 15 deux heures, peut-être même un peu plus. J'ai un certain nombre de 16 documents à soumettre au témoin. Si vous devons terminer aujourd'hui, je 17 crois que ce sera impossible. 18 Voulez vous commencer maintenant, m'interrompre et reprendre 19 dans trois semaines, ou préférez-vous avoir tout d'un bloc. Je vous laisse 20 maître de cette décision. 21 M. le Président. - Je vous en remercie, Maître Hayman. Mais vous 22 préférez vous-même faire tout d'un bloc, je suppose ? 23 M. Hayman (interprétation). - Je ne sais pas si le 24 Juge Shahabuddeen sera de retour. S'il n'a pas entendu l'interrogatoire 25 principal, il est préférable que l'interrogatoire principal et le contre- Page 9544 1 interrogatoire se déroulent ensemble. Je ne sais pas si le témoin pourra 2 revenir dans trois semaines. S'il ne peut pas revenir dans trois semaines, 3 il risque de revenir par la suite. Et s'il n'est pas le premier témoin a 4 être entendu dans ce délai de trois semaines. Peut-être faudrait-il 5 commencer maintenant. C'est à vous de prendre cette décision, 6 Monsieur le Président. Nous avons différentes possibilités 7 M. le Président. - Il faut isoler la question du 8 Juge Shahabuddeen. Nous sommes ici, aujourd'hui, comme officiers 9 instrumentaires. Le Juge Shahabuddeen prendra connaissance de 10 l'intégralité des comptes rendus et des pièces à conviction. A son retour 11 de Tanzanie, à partir du 29 juin, il sera tout à fait opérationnel et 12 pourra être là pour le contre-interrogatoire. Il fallait prendre d'abord 13 votre avis. 14 Ensuite, je vais en délibérer avec mon collègue. J'ai pris 15 l'avis de la défense. Je voudrais prendre l'avis de l'accusation. Vous ne 16 voyez pas d'inconvénient, je suppose, à ce que le major revienne, 17 Maître Cayley ? 18 M. Cayley (interprétation). - Non, bien sûr le témoin sera 19 disponible pour ce Tribunal. Il faudra que je lui parle des dates 20 éventuelles. 21 M. le Président. - Bien. Nous allons prendre 20 minutes de 22 pause. La question est de savoir si nous arrêtons maintenant, ou si au 23 contraire nous commençons le contre-interrogatoire jusqu'à 13 heures 30. 24 Nous n'irons pas au-delà de 13 heures 30. Je l'ai dit hier et j'avais même 25 prévu que le témoin ne vienne pas. A partir de septembre, nous prendrons Page 9545 1 d'ailleurs des horaires précis. Je crois que c'est tout à fait normal. 2 Chaque partie veut exercer ses droits de la façon la plus intégrale qui 3 soit. Ce témoin devait passer en une heure et il est passé en une heure 4 quarante-cinq. Je n'ai pas du tout interrompu, je n'ai pas à interrompre. 5 Je me borne à constater simplement que c'est comme cela. Mais il n'est pas 6 question non plus d'empêcher la défense dans son contre-interrogatoire. Je 7 vais me concerter avec mon collègue et puis nous en reparlerons. 8 (Les Juges se concertent sur le siège.) 9 Nous avons examiné toutes les hypothèses avec Monsieur le 10 Juge Riad. Je crois qu'il faut que chacun soit dans sa logique, c'est cela 11 un ordonnancement judiciaire et processuel. Nous avons la logique de 12 l'accusation, la logique de la défense, la logique du greffe, la logique 13 des interprètes et aussi la logique des juges. 14 A la limite, on aurait pu prolonger jusqu'à 14 heures, mais il 15 me semble que la défense ne peut pas s'engager, semble-t-il, pour dire 16 qu'elle aurait terminé à 14 heures. Nous sommes d'accord Maître Hayman ? 17 M. Hayman (interprétation). - Je ne peux pas vous donner un 18 chiffre d'une précision extrême. 19 M. le Président. - J'ai scrupule a demandé plus. Quand je passe 20 un contrat avec les interprètes, ils respectent les contrats que je leur 21 demande et donc c'est un peu difficile. C'est ainsi. Alors écoutez, je 22 crois qu'il faut être réaliste. Il nous reste donc deux solutions et c'est 23 la défense qui va choisir et je souhaite que la défense choisisse : nous 24 allons faire une pause de 20 minutes, nous avions dit, et c'était un 25 contrat que nous avions passé avec les interprètes pour les vendredis et Page 9546 1 les lundis, puisqu'il n'y a qu'une grande demi-journée. 2 Maître Hayman, Maître Nobilo et le général Blaskic vous avez le 3 choix, ou bien nous reprenons à 12 heures 20 jusqu'à 13 heures 30, comme 4 nous l'avions dit et le major reviendra pour la partie de son contre- 5 interrogatoire qui n'est pas terminée, ou bien nous arrêtons là et nous 6 ferons le contre-interrogatoire à un autre moment, compte tenu que le 7 Procureur aura un droit de réplique -je suppose-, Maître Harmon ou 8 Maître Cayley aura un droit de réplique et les Juges auront également des 9 questions sur un témoignage qui couvre une assez longue période. 10 Je souhaiterais que la défense choisisse pour qu'il n'y ait pas 11 d'ambiguïté. 12 M. Hayman (interprétation). - Nous regrettons de perdre cette 13 heure, mais je pense qu'il vaut mieux nous arrêter maintenant et que nous 14 contre interrogions le témoin d'un bloc, quand le temps le permettra. 15 M. le Président. - Oui, je pense que, par égard pour 16 M. le Juge Shahabuddeen ce sera mieux, parce qu'il aura l'intégralité du 17 compte rendu du témoignage et je crois que ce sera plus aisé pour lui. 18 Pour les interprètes, eh bien j'espère que ce sera marqué au 19 crédit des Juges qui, parfois, sont un peu débiteurs à leur égard, mais je 20 voudrais également écouter le Procureur Maître Harmon. 21 M. Harmon (interprétation). - Monsieur le Président, nous avons 22 entendu pendant tout le cours du procès que le bureau du Procureur 23 essayait de ralentir ce procès, Maître Hayman a parlé du nombre d'heures 24 qui nous restait, mais Monsieur le Président, nous avons sélectionné un 25 certain nombre de témoins afin d'utiliser le temps qui nous était Page 9547 1 disponible. 2 Nous aurions cité un autre témoin qui aurait pu terminer son 3 interrogatoire principal et son contre-interrogatoire, si nous avions su 4 que nous allions avoir la possibilité de conclure à 13 heures 30. Le 5 contrat qui était avec l'acte d'accusation, sur insistance de la défense, 6 était que nous devions remplir chacune des minutes qui étaient à notre 7 disposition et nous avons tenté de le faire, Monsieur le Président. 8 Nous faisons donc objection et nous demandons à cette Chambre de 9 reconsidérer cette possibilité et de permettre à ce témoin de conclure ce 10 témoignage à 13 heures 30, comme cela était prévu au départ. 11 M. le Président. - Je suis d'autant moins enclin à vous donner 12 raison Maître Harmon que je vous ferai remarquer que vous ne respectez, je 13 ne vous dit pas vous Maître Harmon, mais vous ne respectez jamais les 14 temps que vous annoncez. 15 Maître Cayley avait annoncé une heure d'interrogatoire sur 16 l'accusation, je l'ai noté, on a commencé à 9 heures 45 jusqu'à 17 10 heures 15 et de 10 heures 45 jusqu'à midi. Le témoignage de 18 l'accusation a duré 1 heures 45, donc 45 minutes de plus. Je n'y peux 19 rien. Je ne vous ai pas interrompu, je vous ai suivi pas à pas. 20 Je m'excuse, mais nous sommes au fondement même de cette justice 21 qui s'organise et je n'ai vraiment rien à cacher publiquement dans ce que 22 je fais. Il faut bien être conscient que, chaque témoin qu'il soit une 23 victime ou un expert, raconte toute la période où il a été sur le 24 territoire, s'il y a été six mois, il racontera six mois. 25 C'est votre choix, je n'ai rien à dire sur ce choix. Un jour je Page 9548 1 ferai différemment, je ferai peut-être un jour comme le Président Cassese, 2 je lirai la déclaration avant. Je ne l'ai pas fait parce qu'il faudrait 3 tout traduire en français et, à ce moment-là, je dirai témoin : "Vous 4 confirmez votre déclaration sur tel et tel point ?" Très bien. Donc 5 contre-interrogatoire. Je ne l'ai pas fait. 6 On vous laisse beaucoup de liberté, j'essaie avec mes collègues 7 de vous encadrer le plus possible sur les points essentiels. Je ne veux 8 pas me prononcer davantage que je ne l'ai fait avant que le témoin 9 n'entre. J'ai essayé de regarder ce que vous pouviez attendre d'essentiel 10 sur un témoin. Vous n'avez manqué aucun des index que j'ai indiqués. J'ai 11 tout noté. On est allé jusqu'à Stupni Do. On est partis de la formation à 12 l'école de Stardhust et on est allés jusqu'à Stupni Do. C'est votre droit 13 je n'ai rien à dire et je remercie beaucoup le témoin qui a été très 14 complet. 15 Je dois donner maintenant un droit équivalent de contre- 16 interrogatoire et la contre interrogation n'a pas à être coupée, elle a 17 aussi une unité. Rassurez-vous Maître Harmon, ce temps ne vous sera pas 18 décompté sur le temps de l'accusation et je demanderai à M. Dubuisson d'en 19 tenir compte, mais je dois aussi tenir compte d'un certain nombre de 20 nécessités. 21 Si personne ne fait d'effort, personne, je vous le dis, à partir 22 de septembre, cette Chambre va fixer un nombre d'heures hebdomadaires très 23 précisé. Vous y rentrerez ou vous n'y rentrerez pas mais, en tout cas, 24 tout le monde posant sa logique en premier, la logique de l'accusation, la 25 logique de la défense, la logique des interprètes, la logique du greffe, Page 9549 1 eh bien il existe une logique du juge également. Eh bien les Juges 2 aujourd'hui travaillent en officier instrumentaire, Monsieur le 3 Juge Shahabuddeen n'est pas là, ce sera plus aisé pour lui de prendre le 4 contre-interrogatoire au départ, ce temps ne sera pas décompté, ce sera un 5 profit pour les interprètes et je ne le regrette pas parce que, bien 6 souvent, ils font plus que leur horaire et le major reviendra. C'est 7 ainsi. 8 Méditons toutes ces leçons. Nous sommes dans les balbutiements 9 de cette justice internationale, mais qu'elle soit internationale ou 10 nationale, une justice doit s'organiser. Le temps n'a pas de prix pour 11 vous, Messieurs, ni pour les accusations, ni pour la défense et moi je 12 prétends le contraire. La justice a un facteur temps. Le temps est une 13 donnée essentielle dans la justice. Avec l'éternité on peut faire une 14 justice parfaite, c'est vrai, mais l'éternité nous ne l'avons pas. 15 Dans ces conditions, et en accord avec Monsieur le Juge Riad, 16 nous avons essayé de suggérer éventuellement d'aller jusqu'à 14 heures, 17 mais cela veut dire qu'il faut que je demande 30 minutes de plus aux 18 interprètes et j'ai scrupule à leur demander. La dignité de leur travail 19 est aussi importante que la nôtre et, de toute façon, le contre- 20 interrogatoire ne sera pas terminé et je regrette, mais Maître Cayley, et 21 je le dis avec toute la considération que j'ai pour lui, avait dit : "En 22 une heure". J'ai prévenu hier, j'ai dit : "Devons-nous entamer l'audition 23 du dernier témoin ?" 24 Maître Cayley, vous vous souvenez, nous avons même eu une petite 25 passe d'arme humoristique, vous avez dit : "Aucun problème". J'ai fixé les Page 9550 1 horaires. Ces horaires sont fixés, on n'en bougera pas et on respectera 2 aussi le travail du greffe et le travail des interprètes. 3 L'audience est levée, elle reprendra le 29 juin. 4 L'audience est levée à 12 heures 10. 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25