Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL Affaire IT-95-14-T

2 POUR L’EX-YOUGOSLAVIE

3

4 LE PROCUREUR

5 c/

6 Tihomir BLASKIC

7 Jeudi 19 novembre 1998

8

9 L’audience est ouverte à 10 heures 10.

10

11 M. le Président. - Veuillez vous asseoir. Monsieur le greffier,

12 faites introduire l'accusé s'il vous plaît.

13 (L'accusé, M. Blaskic, est introduit dans le prétoire.)

14 Bonjour aux interprètes.

15 Les Interprètes. - Bonjour Monsieur le Président.

16 M. le Président. - Bonjour aux conseils, bonjour monsieur

17 l'accusé.

18 Nous commençons cette dernière journée de la semaine.

19 C'est un témoin protégé, Monsieur le greffier ? Non ?

20 M. Dubuisson. - Non, je n'ai aucune requête en ce sens.

21 M. le Président. - Il s'agit de M. Miroslav Pejcinovic.

22 Ce n'est pas la peine de faire le sommaire puisque nous

23 disposons du résumé. Je l'ai même en français. Merci.

24 Nous introduisons M. Miroslav Pejcinovic.

25 (Le témoin, M. Pejcinovic, est introduit dans la salle.)

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1 M. le Président. - Bonjour. Est-ce que vous m'entendez d'abord ?

2 M. Pejcinovic (interprétation). - Je vous entends.

3 M. le Président. - Vous allez indiquer, tout en restant debout

4 encore quelques instants, votre nom, votre prénom, votre âge, votre

5 profession, votre résidence. Ensuite, vous lirez la déclaration, le

6 serment qui doit être lu par tous les témoins devant ce Tribunal.

7 M. Pejcinovic (interprétation). - Je m'appelle Miroslav

8 Pejcinovic, j'ai 36 ans. Je suis né en 1962 à Vares.

9 J'ai un diplôme d'ingénieur mineur, j'ai vécu à Vares jusqu'à la

10 guerre ; ensuite, j'ai eu le statut de réfugié. En 1997, je suis retourné

11 à Vares. Aujourd'hui, je suis adjoint du chef de la police de Vares, de la

12 police civile. Je suis marié et père de deux enfants.

13 M. le Président. - Merci. Vous restez encore debout quelques

14 secondes, le temps de lire votre serment sur une formule que vous tend

15 l'huissier.

16 M. Pejcinovic (interprétation). - Je déclare solennellement que

17 je dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

18 M. le Président. - Merci beaucoup. Vous avez accepté de venir

19 témoigner à la demande de la défense dans le cadre du procès intenté par

20 le Bureau du Procureur devant le Tribunal pénal international contre le

21 général Blaskic, colonel à l'époque des faits, qui est ici présent.

22 Vous allez d'abord répondre aux questions que vont vous poser

23 les conseils de la défense qui vous ont demandé de venir, après quoi vous

24 répondrez aux questions du Bureau du Procureur et ensuite, aux questions

25 des Juges. Maître Nobilo, c'est à vous.

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1 M. Nobilo (interprétation). - Merci Monsieur le Président.

2 Bonjour Monsieur.

3 Monsieur Pejcinovic, vous venez de vous présenter, mais

4 j'aimerais que vous disiez encore quelques mots au sujet de ce que vous

5 faisiez avant la guerre ?

6 M. Pejcinovic (interprétation). - Avant la guerre, je

7 travaillais à la mine de Vares. J'étais ingénieur en chef pour

8 l'exploitation.

9 En 1990, lors des élections, j'ai été élu en tant qu'adjoint à

10 l'Assemblée municipale.

11 M. Nobilo (interprétation). - J'aimerais que vous nous montriez

12 où était le site de la municipalité de Vares, quelles étaient les

13 municipalités qui entouraient la municipalité de Vares, quelle est la

14 distance entre la ville de Vares et celle de Sarajevo, par exemple, ainsi

15 que la distance séparant Vares d'autres endroits dont nous avons déjà

16 parlé. Nous en viendrons ensuite à parler du nombre des habitants selon le

17 recensement. Et, si vous le pouvez, vous pourrez nous montrer les endroits

18 que vous évoquez sur la carte.

19 M. Pejcinovic (interprétation). - La municipalité de Vares est

20 une municipalité qui se trouve en Bosnie centrale et, sur le plan

21 géographique, elle se trouve à 50 kilomètres au nord-est de Sarajevo. La

22 route qui mène à la ville de Vares quitte la grande route Sarajevo-Zenica

23 à un carrefour important et se trouve à 60 kilomètres environ de

24 municipalités qui se trouvent au sud où l'on trouve la municipalité de

25 Breza ; à l'ouest et au sud-ouest on trouve la municipalité de Visoko ; à

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1 l'ouest se trouve Kakanj et au nord-ouest Zavidovici ; au nord et au nord-

2 est de la municipalité se trouve une autre localité et au sud-est se

3 trouve la municipalité d'Olovo et au sud-est la municipalité d'Ilijas.

4 M. Nobilo (interprétation). - Pourriez-vous nous montrer la

5 ville de Vares sur la carte ? J'espère que nous pourrons la voir.

6 M. Pejcinovic (interprétation). - (hors micro.)

7 M. Nobilo (interprétation). - Très bien, veuillez vous rasseoir

8 dans ce cas. Sur cette carte ne figurent pas les municipalités mentionnées

9 mais plus tard nous remettrons à la Chambre une carte où nous verrons ces

10 municipalités.

11 Monsieur Pejcinovic, pouvez-vous nous dire quel était le nombre

12 des habitants de la municipalité de Vares ? Vous pouvez utiliser vos notes

13 pour nous le dire. Je vous demande ce nombre selon le dernier recensement,

14 celui de 1991. Je vous demande également de nous dire quel était le

15 rapport en pourcentage entre le nombre de Musulmans et le nombre de

16 Croates.

17 M. Pejcinovic (interprétation). - En 1991, il y avait

18 22 203 habitants à Vares. Les Croates étaient au nombre de 9 014, soit

19 40,6 % du total, les Musulmans 6 714, soit 13,2 % du total, les Serbes

20 3 644, soit 16,42 % du total. Les autres nationalités, groupes divers,

21 comptaient 2 892 habitants, soit 12,74 % du total. Il s'agissait pour la

22 plupart d'habitants qui s'étaient déclarés yougoslaves.

23 M. Nobilo (interprétation). - Je vous demanderai, Monsieur, de

24 ralentir un peu votre débit et d'expliquer à la Chambre comment se sont

25 déroulées les premières élections démocratiques en 1994.

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1 M. le Président. - Si 6 700 Musulmans font 13,2 % -je ne suis

2 pas très fort en calcul- mais je pense qu'il doit y avoir une inversion.

3 M. Nobilo (interprétation). - 30,32 %.

4 M. le Président. - Merci, continuez.

5 M. Nobilo (interprétation). - A l'évidence, il y a eu une erreur

6 dans l'interprétation, le pourcentage exact est de 30,2 %. C'est sans

7 doute une erreur de compte rendu et non pas une erreur de traduction.

8 Dites-moi, Monsieur, les élections ont eu lieu en 1990. Quels

9 ont été les résultats de ces élections ?

10 M. Pejcinovic (interprétation). - Après les premières élections

11 démocratiques, la municipalité de Vares comptait 50 députés. Le SDP a

12 obtenu 19 députés, le HDZ., Communauté démocratique croate, 9, le SDA,

13 Union d'action démocratique, 8, l'ancien conseil des forces réformistes de

14 Ante Markovic a obtenu un député, le DSS, qui est un mouvement de jeunesse

15 de Hazim Kadic, a obtenu un député également.

16 M. Nobilo (interprétation). - A Vares, c'est donc le parti

17 social démocrate qui l'a emporté et ce n'est pas un parti nationaliste qui

18 l'a emporté, n'est-ce pas ?

19 M. Pejcinovic (interprétation). - En effet, Vares est la seule

20 municipalité des 190 municipalités qui existaient en Bosnie avant la

21 guerre où le parti social démocrate l'a emporté et pas un parti

22 nationaliste, sur les 109 municipalités existant en Bosnie avant la

23 guerre.

24 M. Nobilo (interprétation). - Au vu des résultats des élections,

25 quel a été le pouvoir mis en place dans la municipalité ? Je parle du

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1 pouvoir exécutif et du pouvoir juridique.

2 M. Pejcinovic (interprétation). - Les instances du pouvoir se

3 sont constituées selon les résultats des élections et le recensement qui

4 datait de 1981. Le premier poste, celui de Président de l'Assemblée

5 municipale de Vares, est allé au SDP, parti social-démocrate et c'est un

6 représentant du peuple croate qui a détenu ce poste.

7 M. Nobilo (interprétation). - Le parti social-démocrate, vous

8 voulez parler du SZP ?

9 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui. M. Zvonimir Dugonjic,

10 candidat du peuple croate, a obtenu le poste de Président du conseil

11 exécutif du gouvernement municipal, c'est-à-dire le deuxième poste de la

12 municipalité. Le troisième poste, celui de vice-président de l'Assemblée

13 municipale de Vares, qui était un poste octroyé à un volontaire, ce

14 n'était pas un poste payé, est allé à un représentant du parti d'action

15 démocratique, le SDA. C'est une femme qui a obtenu ce poste. Elle

16 représentait le groupe ethnique des Bosniens.

17 Le quatrième poste, celui de vice-président du gouvernement

18 municipal, est allé à un représentant du parti social-démocrate, membre du

19 groupe ethnique serbe.

20 M. Nobilo (interprétation). - On nous demande encore une fois de

21 ralentir un peu notre débit. Pouvez-vous expliquer à la Chambre de

22 première instance quelles étaient vos fonctions à partir de 1990 ?

23 M. Pejcinovic (interprétation). - Après les élections

24 pluripartites de novembre 1990, j'ai été élu en tant que conseiller et

25 président du club des représentants du HDZ au sein de la municipalité de

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1 Vares. Au premier signe de risque de guerre en Bosnie-Herzégovine, sur

2 décision de la municipalité de Vares en avril 92, j'ai été nommé au poste

3 d'adjoint du commandant du quartier général du HVO de Vares, responsable

4 de l'information. J'ai rempli ces fonctions jusqu'au 1er juillet 1992.

5 M. Nobilo (interprétation). - Un instant, s'il vous plait, le

6 quartier général municipal du HVO nous y reviendrons plus tard, mais

7 c'était un organe mixte, représentant tous les citoyens ?

8 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui, tous les citoyens.

9 M. Nobilo (interprétation). - Veuillez poursuivre.

10 M. Pejcinovic (interprétation). - Le 1er juillet 1992, lorsque

11 le Conseil croate de défense a été instauré en tant que pouvoir exécutif à

12 Vares, j'ai été nommé au poste de responsable des affaires communales, au

13 sein du Conseil exécutif de la municipalité. Je m'occupais

14 particulièrement des questions de logement et des problèmes opérationnels

15 liés à la présidence du HVO. J'étais l'un des cinq membres de la

16 présidence du HVO de Vares. J'ai rempli ces fonctions jusqu'au 18 octobre

17 1993 lorsque j'ai quitté Vares dans un convoi de réfugiés pour aller en

18 Herzégovine.

19 Plus tard, je suis retourné à Kiseljak parce que Vares avait été

20 prise par l'armée de Bosnie-Herzégovine. Donc, le 26 novembre 1993, à mon

21 retour à Kiseljak, j'ai accepté des fonctions au sein de l'Assemblée du

22 HVO à Vares qui avait son quartier général à Kiseljak.

23 J'ai remplis ces fonctions jusqu'au 1er avril 1994 où, sur

24 décision du président de l'Assemblée d'Herceg-Bosna, j'ai été nommé au

25 poste de président de l'assemblée municipale de Vares, fonction que j'ai

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1 remplie jusqu'à la création de l'autorité conjointe, le 3 février 1998.

2 A partir du 10 février 1998, j'ai rempli les fonctions d'adjoint

3 du chef de la police de Vares.

4 M. Nobilo (interprétation). – C'est une force de police fédérale

5 n'est-ce pas, donc conjointe, qui travaille conjointement avec la force de

6 police Bosnienne ?

7 M. Pejcinovic (interprétation). – Oui, c'est une force de police

8 mixte croato-bosnienne. Tous les six mois, il y a rotation entre moi-même

9 et mon collègue bosnien en tant que chef de la police.

10 M. Nobilo (interprétation). – Dites-nous en quelques mots, et

11 dites à la Chambre de première instance, quelles ont été les évolutions

12 des rapports politiques existant à Vares, parce que la situation était

13 assez spécifique à Vares comparée à celle des autres municipalités de

14 Bosnie-Herzégovine ?

15 M. Pejcinovic (interprétation). – Avant 1991 et au moment où la

16 guerre a éclaté en Bosnie-Herzégovine, compte tenu du fait que Vares

17 abritait des installations d'industrie lourde qui avaient cessé de

18 travailler, la situation humanitaire à Vares était très difficile. Les

19 conditions élémentaires de vie de la population faisaient défaut. A ce

20 moment-là, le HVO a entamé une action pour qu'à partir de là République de

21 Croatie soient apportées des quantités importantes d'aide humanitaire à

22 Vares, aide humanitaire qui devait être distribuée de façon égalitaire

23 entre tous les habitants. C'est la situation qui a prévalu jusqu'au début

24 de 1992. Parce que le SDP, en tant que parti social-démocrate, avait le

25 pouvoir à Vares, mais ne pouvait établir aucun contact avec les autorités

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1 supérieures de Bosnie-Herzégovine puisqu'à ce niveau, c'étaient des

2 représentants de partis nationalistes qui étaient au pouvoir. Il n'y avait

3 donc pas de relations avec ces niveaux supérieurs.

4 Vares ne pouvait donc pas s'approvisionner en articles de base

5 qui eussent permis à la population de vivre dans des conditions

6 acceptables ou, par exemple, aux transports en communs de fonctionner.

7 A ce moment-là, le Président de la municipalité de Vares,

8 M. Dario Andric a demandé à M. Dugonjic que le HDZ puisse tenter de faire

9 quelque chose pour qu'une certaine quantité de tous ces articles

10 nécessaires pour que le travail puisse s'effectuer normalement à Vares

11 arrive donc dans la ville en provenance d'Herzégovine. C'est à ce moment-

12 là que les premiers convois ont été organisés.

13 M. Nobilo (interprétation). - Qu'elle était la situation de

14 l'armée ? Comment était organisée la composante militaire de la

15 municipalité ?

16 M. Pejcinovic (interprétation). – En avril 1992, suite aux

17 événements qui ont lieu à Sarajevo et que chacun connaît, une séance du

18 Conseil municipal a eu lieu au cours de laquelle il a été décidé de créer

19 un état-major municipal conjoint dans la municipalité de Vares. Le

20 commandant de l'état-major municipal a été nommé, M. Gajic, représentant

21 de la population croate. Mais l'état-major comptait à la fois des Croates

22 et des Bosniens.

23 Les unités qui relevaient de l'autorité de l'état-major

24 municipal étaient des unités du HVO, des unités de la Défense territoriale

25 également, qui fonctionnaient selon le principe territorial principalement

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1 dans les différents villages avoisinants. A 99 %, ces unités étaient mono

2 nationales.

3 M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous expliquer à la Chambre

4 de première instance ce qui s'est passé par la suite ? Est-il arrivé un

5 moment où les Bosniens et les Croates se sont séparés au cours de

6 l'année 1992 ?

7 M. Pejcinovic (interprétation). - Au cours des mois de mai et

8 juin, suite aux événements déjà évoqués, des pourparlers intensifs ont eu

9 lieu entre le SDA et le HDZ. C'étaient les deux partis qui avaient le plus

10 de pouvoir.

11 Ces pourparlers portaient sur la création d'un pouvoir commun où

12 siégeraient à la fois les Bosniens et les Croates, parce que les

13 représentants Serbes s'étaient déjà retirés de ces instances. Une partie

14 des villages serbes avaient pris la décision de se séparer de la

15 municipalité de Vares au cours de l'année 1992, pour entrer dans la

16 municipalité d'Ilijas.

17 Ces pourparlers ont duré un certain temps. Ils ont porté sur la

18 création d'un pouvoir commun. Au cours du mois de juin, une réunion a eu

19 lieu avec les représentants du SDA qui avait pour but de tenter de mettre

20 en place un pouvoir mixte. Il a été convenu, à cette réunion, de créer des

21 instances du pouvoir et la proposition du HDZ consistait à demander que

22 cette instance du pouvoir s'appelle "Conseil croate de défense", alors que

23 les représentants bosniens à ces pourparlers souhaitaient que l'on appelle

24 cette instance "Présidence de guerre de la municipalité de Vares".

25 Les négociations se sont poursuivies avec difficulté, car les

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1 deux points de vue étaient difficile à concilier. Finalement, le Président

2 du SDA de Vares, M. Kovacevic, a déclaré que les Bosniens pourraient sans

3 doute accepter la mise en place d'un pouvoir commun de ce genre, mais

4 n'accepteraient en aucun cas que le terme "croate" figure dans la

5 dénomination de cette instance.

6 Suite à l'échec de ces négociations, à la fin de juin 1992, la

7 cellule de crises du HDZ, qui fonctionnait à Vares, a décidé de créer un

8 pouvoir autonome qui porterait le nom de : "Conseil de défense croate".

9 Ce pouvoir a été mis en place à Vares à partir du 1er juillet 1992. Il

10 s'agissait d'un pouvoir exécutif agissant dans la municipalité de Vares.

11 M. Nobilo (interprétation). - Quel était le sens de cette

12 décision pour les entreprises, pour les habitants ? Est-ce que certains

13 ont dû signer des actes d'allégeance ? Certains ont-ils perdu leur

14 emploi ?

15 M. Pejcinovic (interprétation). - Personne n'a perdu son emploi,

16 son poste, dans les instances municipales. Personne ne s'est retrouvé sans

17 travail. Hormis le fait que les directeurs d'entreprise ont exprimé leur

18 soutien à ce pouvoir par écrit, car dès les premiers jours, ils se sont

19 rendus compte que la situation subissait un changement draconien par

20 rapport au passé, à savoir au moment où le pouvoir était entre les mains

21 du parti social-démocrate, puisque désormais le chemin était ouvert vers

22 la Croatie et le Herceg-Bosna. Tous les approvisionnements en vivres et en

23 équipements médicaux arrivaient jusqu'à Vares, la situation se

24 normalisait.

25 M. Nobilo (interprétation). - Les chefs des instances

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1 bosniennes, c'est-à-dire du SDA, quelle a été leur situation à ce moment-

2 là ?

3 M. Pejcinovic (interprétation). - Dès le 1er juillet 1992, dès la

4 création de ce pouvoir, une réunion a été convoquée. Elle devait réunir

5 les représentants des partis politiques membres de l'assemblée municipale

6 de Vares et les représentants du HVO.

7 A cette réunion, où les représentants du peuple bosnien étaient

8 M. Avdija Kovacevic, Président du SDA de Vares, et Melle Mervana

9 Hadjimurtezic, vice-présidente de la municipalité de Vares. A cette

10 réunion, une tentative a été faite pour atteindre un compromis selon

11 lequel le HVO se chargerait du pouvoir exécutif et selon lequel la

12 présidence de la municipalité de Vares serait mise en place avec

13 représentation de toutes les parties existantes. Il était prévu également

14 que les décisions prises par la municipalité soient vérifiées. Mais la

15 partie bosnienne n'a pas accepté cette proposition, donc la présidence de

16 guerre de la municipalité de Vares, dont le siège se trouvait à Strijejo a

17 été créé pour représenter les Bosniens.

18 M. Nobilo (interprétation). - Donc le pouvoir politique dans les

19 faits s'est divisé, n'est-ce pas ?

20 M. Pejcinovic (interprétation). - Effectivement, le pouvoir

21 politique s'est trouvé divisé et le résultat de cela a été que, le

22 9 juillet 1992, l'état-major municipal de Vares qui était conjoint s'est

23 divisé en deux parties. Les Croates créant leur état-major municipal du

24 HVO de Vares et les Bosniens créant leur état-major dans le village de

25 Dabravine, également dans la municipalité de Vares.

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1 M. Nobilo (interprétation). - Qu'en a-t-il été de la police ?

2 Est-elle restée mixte ?

3 M. Pejcinovic (interprétation). - La police a toujours

4 fonctionné en tant que force mixte, mais le commandant a été remplacé ; je

5 parle du commandant du commissariat de Vares. Les policiers bosniens ont

6 continué à travailler à côté de leurs collègues croates. Cette situation a

7 duré jusqu'au mois d'octobre 1992.

8 En octobre 1992, dans le village de Dabravine une patrouille de

9 police a été attaquée et désarmée. Elle venait du commissariat de Vares.

10 Les Croates ont été envoyés à Vares et les Bosniens ont créé leur poste de

11 sécurité publique dont le siège était à Dabravine et qui représentait la

12 municipalité de Vares.

13 Le siège de la présidence de guerre a également déménagé dans le

14 village de Dabravine.

15 M. Nobilo (interprétation). – Donc la division a été complète,

16 elle a concerné toutes les instances du pouvoir. Mais qu'en était-il des

17 habitants ? Est-ce que la division du pouvoir a eu un effet sur l'homme de

18 la rue dans la municipalité de Vares.

19 M. Pejcinovic (interprétation). – Jusqu'à la division du

20 pouvoir, les habitants qui habitaient dans la municipalité, qu'ils soient

21 Musulmans ou Croates, ont continué par la suite à y résider. Il n'y a eu

22 aucun incident. Tous ceux qui occupaient un poste de directeur ont

23 continué à être directeurs ; tous ceux qui avaient un emploi ont continué

24 à travailler et ceux qui faisaient partie des unités de la Défense

25 territoriale, ou du HVO, ont continué à avoir leur poste dans leur

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1 entreprise, mais ils n'avaient pas à se rendre au travail tous les jours.

2 En tout cas les rapports sociaux, les rapports au sein de

3 l'entreprise ont continué à fonctionner comme par le passé.

4 Dans les municipalités de Sokolac et de Han-Pijesak, en 1992,

5 nous avons également accepté des réfugiés bosniens. Nous les avons

6 installés dans un centre de transit et même après la division du

7 Gouvernement, ces réfugiés bosniens sont restés là où ils se trouvaient.

8 Nous leur avons fournis de l'aide humanitaire. Cette situation a duré

9 jusqu'aux premiers conflits qui ont éclaté en 1993 dans la municipalité de

10 Vares.

11 M. Nobilo (interprétation). - En janvier 1993, des conflits ont-

12 ils éclaté entre les Bosniens et les Croates dans votre région ?

13 M. Pejcinovic (interprétation). - En janvier 1993, comme je l'ai

14 dit et vous l'avez d'ailleurs mentionné également, deux gouvernements

15 existaient : un gouvernement croate et un gouvernement bosnien, mais il

16 n'y avait pas eu de conflits, pas eu de heurts.

17 En août et septembre, des problèmes se sont posés qui étaient

18 liés au passage des convois apportant de l'aide humanitaire à Vares. Au

19 moment de leur passage dans le village de Dabravine, ils ont été arrêtés

20 et n'ont pas reçu l'autorisation de passer par le territoire sous contrôle

21 du HVO.

22 Donc des problèmes ont surgi. Les Croates ont construit une

23 route pour livrer la municipalité de Kakanj et tous les convois passaient

24 par cette route, donc par la municipalité de Kakanj. Mais la situation est

25 restée calme, malgré la présence de Bosniens dans ces villages également.

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1 M. Nobilo (interprétation). - Que s'est-il passé en avril 1993,

2 lorsque le conflit entre les Croates et les Bosniens a éclaté en Bosnie

3 centrale ?

4 M. Pejcinovic (interprétation). – En avril 1993, lorsque les

5 conflits ont commencé en Bosnie centrale, Vares a été complètement

6 encerclée. Il n'y avait plus une seule route ouverte pour permettre le

7 l'arrivée des convois humanitaires à Vares. Mais, contrairement aux autres

8 régions de la municipalité de Vares, aucun conflit, aucun incident n'a eu

9 lieu dans la Ville de Vares. La situation est restée calme.

10 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que des lignes de front ont

11 été créées opposant le HVO et l'armée de Bosnie-Herzégovine, en avril

12 1993 ?

13 M. Pejcinovic (interprétation). – La seule décision prise par le

14 HVO de Vares, au moment où le conflit a éclaté, et ce suite à la réception

15 de rapports de police provenant d'autres villages et évoquant la situation

16 au barrage routier, des lignes des fronts auraient été créées à Kiseljak

17 pour empêcher le passage de personnes en uniforme représentant la Défense

18 territoriale et interdire la circulation autour de la ville de Vares.

19 Le barrage routier a été créé, mais ce n'était pas encore une

20 réelle ligne de front.

21 M. Nobilo (interprétation). - Lorsque le premier incident a

22 éclaté entre le HVO et l'armée de Bosnie-Herzégovine, à quelle date cela

23 s'est-il passé ?

24 M. Pejcinovic (interprétation). – Le premier incident entre

25 l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO de Vares s'est produit le 1er juin

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1 1993, lorsqu'un tireur isolé a tué un soldat du HVO. Mais cet incident n'a

2 pas créé de réaction particulière de la part de la partie croate. La

3 situation a continué à être calme. Il n'y a pas eu de tentative de

4 vengeance, aucune réaction de ce genre. Tout est resté dans le même état

5 que par le passé.

6 M. Nobilo (interprétation). - Pourriez-vous expliquer, à la

7 Chambre de première instance, ce qui s'est passé le 13 juin 1993, le jour

8 de Saint Ante à Vares ?

9 M. Pejcinovic (interprétation). – Le 13 juin 1993, un dimanche,

10 un jour de congé et on fêtait la fête de Saint Ante, de nombreux réfugiés

11 croates sont arrivés de la municipalité de Kakanj, ils étaient environ 13

12 à 14 000 et ils sont arrivés en une seule journée. Ils sont arrivés par

13 les villages de Kopljari, à pied par la montagne de Perun. Ils ont suivi

14 les rives de la rivière pour arriver dans la municipalité de Vares et des

15 organes d'urgence ont immédiatement été créés dans la municipalité du HVO,

16 à l'école élémentaire, au lycée de Vares, dans le gymnase, dans les

17 centres de sports, dans le village de Borovica, dans certaines usines

18 désaffectées.

19 Des centres d'accueil ont été créés et la vie a été paralysée

20 dans la ville, rien ne fonctionnait plus normalement.

21 M. Nobilo (interprétation). - Outre les 13 000 à 14 000 Croates

22 qui sont arrivés de Kakanj et de ses environs en tant que réfugiés, est-ce

23 que des gens sont également arrivés de Travnik ? Et si oui, en quel nombre

24 et en passant par quel territoire ?

25 M. Pejcinovic (interprétation). - Le même jour, dans la soirée

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1 du 13 juin, 700 à 800 habitants de Travnik sont arrivés. C'étaient des

2 personnes qui étaient transférées par les Serbes en provenance du camp de

3 Gradacac vers Vares en passant par les territoires serbes.

4 M. Nobilo (interprétation). - Ces hommes étaient Croates ?

5 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui, en effet.

6 M. Nobilo (interprétation). - Mais que pouvez-vous dire de la

7 situation des réfugiés ? Pourquoi est-ce qu'ils ont commencé à quitter les

8 endroits où ils habitaient ? Pourquoi est-ce qu'un si grand nombre de

9 colonnes ont été créées dans la municipalité de Kakanj pour se diriger

10 vers Vares ?

11 M. Pejcinovic (interprétation). - Les gens qui arrivaient

12 parlaient du fait qu'ils avaient été attaqués par le MOS, par l'armée de

13 Bosnie-Herzégovine, donc les Forces armées musulmanes, et que les

14 pilonnages n'arrêtaient pas, qu'ils avaient donc pris peur et qu'un grand

15 nombre des hommes qui les attaquaient le faisaient au son du cri "Alahu

16 Ekber !", ce qui semait la terreur parmi les personnes attaquées et

17 qu'elles avaient donc décidé de fuir les endroits où elles résidaient.

18 M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous nous parler des

19 autorités qui ont pris la place des autorités antérieures ? Et que s'est-

20 il passé avec les logements ?

21 M. Pejcinovic (interprétation). - En provenance de Kakanj, un

22 flot de réfugiés de 13 000 à 14 000 personnes est arrivé à Vares. Aucun

23 appartement libre dans la ville de Vares n'a été occupé par un des

24 réfugiés en provenance de Kakanj et ce, grâce à l'action au sein du SIS de

25 M. Druzinovic, M. Zvonko Druzinovic qui était responsable de cet organe.

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1 Je parle donc des appartements qui étaient vides mais aucun des Bosniens

2 qui se trouvaient en ville n'a été maltraité ou expulsé de son

3 appartement. Les réfugiés croates ont été hébergés dans des centres de

4 transit, des centres d'accueil.

5 M. Nobilo (interprétation). - A ce moment-là, il n'y avait pas

6 encore de guerre. Les forces militaires et policières du HVO étaient

7 encore capables d'assurer la défense de la population, n'est-ce pas ?

8 M. Pejcinovic (interprétation). - A ce moment-là, il n'y avait

9 pas encore la guerre à Vares. La situation était électrique, mais le HVO,

10 à Vares, n'a autorisé personne à agir d'une façon illicite parmi ceux qui

11 provenaient de Kakanj. En provenance de Visoko, des villages de Zuznjo et

12 Przici, des réfugiés qui étaient arrivés de ces villages ont essayé de

13 repartir chez eux, mais ils n'y sont pas parvenus.

14 En tout état de cause, le HVO de Vares a fini par arriver à un

15 conflit avec les représentants bosniens de Kakanj et c'est ce conflit au

16 niveau de Kakanj qui ensuite a eu des répercussions sur Vares.

17 M. Nobilo (interprétation). - Vous avez dit que par conséquent

18 il n'y avait pas de guerre à Vares, que Vares a été encerclée. Mais

19 comment avez-vous pu résoudre la question du logement ?

20 M. Pejcinovic (interprétation). - Dans un premier temps, la

21 situation était effectivement très difficile : il manquait plein de

22 choses, d'approvisionnements, de vivres ; les réfugiés et les expulsés ne

23 pouvaient qu'obtenir un quart du pain, quelque peu de vivres et ceci

24 notamment aux enfants et aux vieillards car il n'y avait pas de réserves.

25 Dans une situation pareille, il y avait des gens qui n'étaient

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1 pas satisfaits, notamment parmi les réfugiés, parmi les expulsés. Le HVO

2 de Vares avait pris la décision au début du mois de juillet d'assurer

3 l'aide humanitaire à Vares et en même temps d'aider les blessés, les

4 vieillards, tous ceux qui sont arrivés de Kakanj et notamment de les

5 envoyer dans des endroits beaucoup plus sûrs.

6 Dans ce sens-là, on avait pris la décision, on avait essayé de

7 se mettre en contact avec les Serbes qui, dans le cadre de la municipalité

8 de Vares, se trouvaient et qui tenaient sous le contrôle cette partie de

9 Vares et avec lesquels les Croates n'avaient pas été en conflit. Les

10 négociations avaient duré pendant un mois, un mois et demi.

11 Le résultat de ces négociations était le suivant : on avait

12 adopté que le premier convoi partirait de Vares à la fin du mois d'août,

13 d'apporter l'aide humanitaire et un certain...

14 Il y avait les 3 bus également qui étaient prévus pour

15 transporter les blessés, les malades et les personnes qui étaient

16 épuisées. Ce convoi, par conséquent, devait traverser le territoire de la

17 Republika Srpska, par Sokolac, Zvornic, Drvar jusqu'à Livno. Le voyage

18 durait 15 jours à peu près et on payait aux Serbes pour un tel service une

19 bonne enveloppe. On devait donner une bonne enveloppe d'argent.

20 M. Nobilo (interprétation). - Par conséquent, les gens ne

21 souffraient plus de faim ?

22 M. Pejcinovic (interprétation). - Avec ce premier convoi,

23 beaucoup de réfugiés sont partis, comme je l'ai déjà précisé, mais la

24 situation s'est améliorée quelque peu parce que dans ce convoi, il y avait

25 64 camions. Il y avait également des vivres qui sont arrivés. La situation

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1 s'est améliorée. Par la suite, il y avait d'autres convois qui ont été

2 prévus et la situation s'était améliorée. Les boutiques étaient ouvertes ;

3 le commerce travaille. Il y a également des entrepôts qui ont été

4 approvisionnés, des quantités d'articles commerciaux comme le café, les

5 cigarettes, l'alcool qui arrivent, d'autres articles. A partir de ce

6 moment-là, il y a le commerce qui commence à fonctionner avec le bassin de

7 Tuzla, avec Ergerdavice, Brnjko, du côté de Tuzla, notamment partout où il

8 y avait des Bosniens.

9 M. Nobilo (interprétation). - Ce commerce, comment se développe-

10 t-il ? Nous avons le HVO et le HVO a une chaîne de commerces. Il y avait

11 certainement des particuliers qui avaient des boutiques. Qu'est-ce qu'en

12 revanche, vous pouviez obtenir des Bosniens ?

13 M. Pejcinovic (interprétation). - Il y a le HVO qui a toute une

14 chaîne de commerces, de magasins. Il y a des particuliers également et des

15 sociétés privées qui s'ouvrent. Le commerce se développe normalement sur

16 un principe économique. Les articles sont payés en espèces, en charbon

17 également, de Banjric et de Tuzla, en sel également qui est importé en

18 Bosnie-Herzégovine. Une partie est utilisée à l'intention de la

19 population. Le charbon a été partagé entre les habitants, les hôpitaux,

20 les écoles; etc. Les écoles fonctionnent. Tous les enfants viennent à

21 l'école aussi bien des villages bosniens que des villages croates. Le

22 transport est organisé. Tout fonctionne normalement.

23 M. Nobilo (interprétation). - En ce qui concerne cette chaîne de

24 commerces du HVO et les particuliers ont commercé également avec le

25 deuxième corps de l'armée de Bosnie-Herzégovine de Tuzla. Est-ce qu'il

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1 avait une certaine protection que vous attendiez de ce côté-là ?

2 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui. Etant donné que les

3 représentants du deuxième corps de l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO

4 de la brigade Zrinjski de Tuzla se sont approvisionnés là-bas. Il n'y

5 avait aucune ligne du côté du nord vers la municipalité d'Olovo où il y

6 avait la zone de responsabilité du deuxième corps. La situation là-bas est

7 parfaitement normale.

8 M. Nobilo (interprétation). - Qu'est-ce que qui se passe le

9 17 octobre 1993 ?

10 M. Pejcinovic (interprétation). - Le 17 octobre 1993, il y a

11 d'abord un convoi qui est arrivé. Il y avait à peu près 104 camions et bus

12 ensemble, à ma connaissance. Ils devaient prendre les réfugiés de Kakanj,

13 Kraljeva Sutjeska par la Republika Srpska vers la Bosnie-Herzégovine et de

14 les installer dans des endroits où il avait plus de sécurité étant donné

15 qu'à Vares, ils étaient dans les centres de rassemblement. Il y avait

16 l'hiver qui arrivait également. Par conséquent, on ne pouvait pas les

17 approvisionner correctement. C'est la raison pour laquelle le 17 octobre

18 1993, c'était un dimanche tout le monde monte dans ces camions. Au moment

19 où le convoi a été formé, dans un endroit qui se trouvait au-dessus de

20 Vares, qui s'appelle Ponikve, ce jour-là, le 17 octobre 1993 que le

21 colonel Ivica Rajic je pense qu'il était colonel à cette époque-là arrive

22 à Vares pour prendre un certain nombre de soldats qui étaient capables de

23 porter les armes vers Kiseljak, toujours en traversant les territoires

24 serbes.

25 M. Nobilo (interprétation). - Qu'est-ce qui s'est passé ce soir-

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1 là à Vares ?

2 M. Pejcinovic (interprétation). - Le fait qu'il y avait des

3 soldats en âge de porter les armes et qui devaient traverser le territoire

4 serbe. Ce convoi est resté, y compris ce convoi qui devait emmener les

5 soldats de Kakanj et de Herzégovine à Kiseljak, de Kakanj et de Kiseljak,

6 c'est la raison pour laquelle le convoi est resté. L'armée de Bosnie-

7 Herzégovine attaque la région de Donja Lejesnica. Il y a deux soldats qui

8 ont été tués. Un a été enlevé, kidnappé. La ligne a été percée et c'est,

9 en fait, le début de la guerre dans la municipalité de Vares.

10 M. Nobilo (interprétation). - C'était le 17 octobre 1993 ?

11 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui. Les lignes ont été

12 enfoncées.

13 M. Nobilo (interprétation). - Le 17 octobre 1993, vous partez en

14 Herzégovine. Pouvez-vous expliquer aux Juges où vous êtes parti et quelles

15 étaient les raisons pour lesquelles vous êtes parti ?

16 M. Pejcinovic (interprétation). - Le 18 octobre 1993, très tôt

17 le matin, je suis allé devant le siège du HVO.

18 C'est le jour où les unités musulmanes ont attaqué le village

19 Kopljari, la situation est chaotique, il y a un certain nombre au quartier

20 général qui prétendait qu'ils y étaient nombreux et que nous n'avions pas

21 été en mesure de nous défendre.

22 Ce jour-là, à peu près entre 14 heures et 15 heures de l'après-

23 midi, le colonel Ivica Rajic est parti en direction de Kiseljak. Il avait

24 emmené avec lui M. Malbasic, ex-commandant de la brigade Busovac.

25 M. Nobilo (interprétation). - Vous êtes parti en Herzégovine ?

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1 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui, et comme je l'ai dit, je

2 suis parti en Herzégovine le 18 octobre 1992. C'était le soir quand je

3 suis parti.

4 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous pouvez parler un

5 peu plus lentement et faire des intervalles entre les questions et les

6 réponses.

7 M. Pejcinovic (interprétation). - Je suis parti le soir.

8 M. Riad (interprétation). - Dites question réponse, c'est pour

9 la cabine anglaise.

10 M. Pejcinovic (interprétation). - Le 18 octobre 1992, je suis

11 parti en Herzégovine et j'avais la tâche d'accompagner le convoi avec des

12 réfugiés qui devait se rendre à Sokolac. Je devais emmener une certaine

13 quantité de vivres, d'autres moyens également dont on avait besoin dans la

14 municipalité de Vares.

15 Cependant, en Herzégovine, à Zabrezje plus particulièrement, je

16 suis resté jusqu'au 26 novembre 1993. Quand je suis rentré à Kiseljak

17 entre-temps Vares a connu cette chute. Il y avait la chute de Vares.

18 M. Nobilo (interprétation). - Vous êtes en Herzégovine. Est-ce

19 que vous êtes en contact avec les gens de Vares ? Si c'est la cas, est-ce

20 que vous pouvez expliquer cela aux Juges ?

21 M. Pejcinovic (interprétation). - Comme je l'ai déjà dit, je me

22 trouvais à Vijak. C'est là où le HVO avait sa représentation. Et c'est

23 grâce à ce fait, dans le village Dastansko, c'est la maison de

24 Jelina Kuca, que j'ai disposé d'un portable et j'ai pu rester en

25 communication. C'est Vares qui est resté en communication avec les gens de

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1 Vares. Je suis resté en communication tous les jours.

2 M. Nobilo (interprétation). - Dans ce village, vous avez donc le

3 portable et c'est uniquement dans l'ensemble de la municipalité de Vares,

4 il n'y avait pas de radio ?

5 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

6 M. Nobilo (interprétation). - Dans le transcript, il était

7 marqué le 18 octobre 1992, je pense que c'était 1993.

8 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui, 18 octobre 1993, j'ai

9 fait une erreur.

10 M. Nobilo (interprétation). - Quelles sont les informations que

11 vous obtenez, vous êtes en contact permanent grâce à ce portable ? Qu'est-

12 ce que vous en pensez ? Vous êtes en Herzégovine, vous avez les

13 informations quand même, et vous savez ce qui se passe de l'autre côté ?

14 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui, plusieurs fois par jour

15 j'étais en contact avec les représentants du HVO, le plus souvent avec le

16 chef de la sécurité M. Zvonko Druzinovic, ma première information date du

17 18 octobre. Un policier a été tué.

18 Par la suite, une deuxième information, le 21 octobre 1993, il y

19 avait une fois de plus un incident, il y avait un jeune homme qui

20 travaillait dans le village de Dastansko, il y avait un incident. En 1993,

21 M. le colonel Ivica Rajic s'était rendu à l'endroit, ce sont quelques

22 personnes des autorités civiles qui ont été arrêtées.

23 M. Nobilo (interprétation). - Qui avait arrêté les autorités

24 civiles ?

25 M. Nobilo (interprétation). - C'est Emil Harah qui était à

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1 l'époque le commandant de la brigade Bogovac qui avait appelé le

2 21 octobre M. Ivica Rajic pour l'aider, pour stabiliser les lignes de

3 défense attaquées par l'armée de Bosnie-Herzégovine.

4 Le jour même, au moment où M. Rajic s'est rendu au QG du HVO, il

5 avait appelé les représentants des autorités civiles et membres de la

6 présidence pour se mettre d'accord avec eux. C'est là qu'il les a arrêtés.

7 Il a arrêté le commandant Ivica Garon, et le chef de SCI,

8 Zvonko Druzinovic, il les avait transportés à Kiseljak en passant par le

9 territoire serbe. Les deux autres, M. Pejcinovic, et membre de la

10 présidence, M. Vidovic, il les avait gardés, arrêtés dans le quartier

11 général.

12 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que M. Rajic est arrivé

13 seul ou accompagné de Maturica ?

14 M. Pejcinovic (interprétation). - Monsieur Rajic était venu

15 accompagné de Maturica qui travaillait dans la section pour les

16 destinations spéciales, ceci pour stabiliser la ligne de défense.

17 M. Nobilo (interprétation). - Qu'est-ce qui se passait avec le

18 commandant de la brigade du HVO ? Il y avait éventuellement quelques

19 changements qui sont survenus ?

20 M. Pejcinovic (interprétation). - Comme je l'ai dit, le

21 21 octobre, ces gens-là ont été arrêtés. Le 21, il avait pris la décision

22 de remplacer Harah, qui était le commandant sur place. Il l'avait nommé

23 pour le commandant de la brigade Brogovac, Kresimir Bozic.

24 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous pouvez dire qui

25 "il" ?

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1 M. Pejcinovic (interprétation). - C'est M. Ivica Rajic parce que

2 lui, il était le supérieur de cette brigade.

3 M. Nobilo (interprétation). - Tout à l'heure nous allons en

4 parler, mais pourriez-vous nous dire quelles étaient les raisons pour que

5 de tels genres d'arrestations se produisent ?

6 M. Pejcinovic (interprétation). - Le jour même, le

7 21 octobre 1993, au moment où j'ai appris cette information, j'ai été

8 appelé par le frère du HVO, Bosko Pejcinovic. Il m'avait confirmé cette

9 information : il m'a dit qu'ils avaient été arrêtés. Il m'avait demandé

10 que j'intervienne auprès du Président de la République croate d'Herceg-

11 Bosna, auprès de M. Mate Boban, et de voir les raisons pour lesquelles ils

12 ont été arrêtés.

13 M. Nobilo (interprétation). - Qu'est-ce que vous avez entendu

14 par la suite ? Quelles étaient les raisons ?

15 M. Pejcinovic (interprétation). - Ultérieurement, j'ai appris

16 que, au moment où je suis allé à Kiseljak et quand je me suis rendu à

17 Kiseljak et quand j'étais en Herzégovine, on m'avait dit que soi-disant il

18 y avait une contrebande et le commerce avec le bassin de Tuzla.

19 M. Nobilo (interprétation). - Vous êtes allé chez Mate Boban.

20 Est-ce que vous pouvez nous raconter ce qui s'est passé, ce que vous avez

21 entendu, quel était le but dans lequel vous vous êtes rendu chez Mate

22 Boban ?

23 M. Pejcinovic (interprétation). - Je me suis rendu chez Mate

24 Boban comme je l'ai déjà précisé. Je suis allé à Grude, par conséquent, et

25 je voulais tout simplement savoir les raisons pour lesquelles ils avaient

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1 été arrêtés. J'ai appelé également M. Zvonko Dugonic, le représentant du

2 HVO.

3 Il y avait également de M. Kruno Ridzic que j'ai appelé, pour

4 venir avec moi. Mais eux, ils ne voulaient pas venir avec moi chez

5 M. Boban. Quand ils ont appris que les autres avaient été arrêtés, ils ont

6 eu peur pour leur propre sécurité.

7 Grâce au fait que le représentant du bureau de M. Boban était

8 M. Vladislav Pogac, dont le père est de Vares, j'ai réussi tout de suite à

9 rencontrer le Président Boban et à discuter avec lui. Tout d'abord, ce que

10 je lui ai dit, j'ai dit : "Monsieur le Président, à Vares, le Président du

11 HVO à Vares, M. Ante Pejcinovic a été arrêté ainsi que les membres du HVO

12 municipal." Sa réaction a été la suivante : "Personne ne peut arrêter le

13 Président du HVO sauf si, moi, j'en donne l'ordre." J'ai donc pris le

14 numéro de téléphone sur le portable et devant moi il a appelé le village.

15 A la question, si le Président du HVO, M. Ante Pejcinovic a été

16 arrêté, celui qui avait travaillé de l'autre côté avait dit "oui". Son

17 prénom était Ljudevit. Il avait précisé également qu'il se trouvait dans

18 le quartier général. Il a été arrêté et il se trouvait dans le quartier

19 général.

20 Après cet entretien, M. Boban m'a dit : "Maintenant, je vais

21 appeler M. Petkovic à Kiseljak pour voir ce qui se passe à Vares."

22 M. Nobilo (interprétation). - Il s'agit du général Petkovic, le

23 chef d'état-major central ?

24 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

25 M. Nobilo (interprétation). - Il était à Kiseljak ?

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1 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

2 M. Nobilo (interprétation). - Vous pouvez poursuivre.

3 M. Pejcinovic (interprétation). - Quand M. Boban a parlé avec

4 M. Petkovic, ce que moi j'ai entendu, c'était la question : "Est-ce que tu

5 peux vérifier, s'il te plaît, ce qui se passe à Vares ? Quelles sont les

6 raisons pour lesquelles M. Ante Pejcinovic a été arrêté ?" Je n'ai pas

7 entendu ce qu'il a eu comme réponse de la part de M. Petkovic.

8 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous-même ou

9 éventuellement M. Boban vous avez eu l'idée de vous mettre en contact avec

10 M. Blaskic parce qu'il était commandant en chef de la Bosnie centrale ? Si

11 cela ne vous est pas venu à l'esprit, pourquoi ?

12 M. Pejcinovic (interprétation). - J'ai déjà dit que M. Boban a

13 tout de suite appelé M. Petkovic. Il n'a pas parlé du colonel Blaskic de

14 l'époque, ni de qui que ce soit de Vitez. Il avait appelé Petkovic et il

15 lui avait transmis le message : il lui a demandé de vérifier ce qui se

16 passait à Vares.

17 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que cette intervention de

18 M. Boban vis-à-vis du général Petkovic qui était à Kiseljak a eu du

19 succès ?

20 M. Pejcinovic (interprétation). - C'est le lendemain que j'ai su

21 que, le soir même, M. Ante Pejcinovic a été laissé en liberté, ainsi que

22 Vidovic et que, par la télévision, le représentant du HVO, Ante Pejcinovic

23 s'était adressé à la population et avait dit qu'il ne fallait pas paniquer

24 et que la situation était sous le contrôle.

25 M. Nobilo (interprétation). - Cependant, quelles sont les

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1 informations qui sont parvenues de la ville de Vares jusqu'à vous-même,

2 car Rajic avec Maturice a pratiquement fait un coup d'Etat à Vares ?

3 Qu'est-ce qui s'est passé dans la ville ?

4 M. Pejcinovic (interprétation). - Dans la ville, la situation

5 était assez tendue. Tous les soldats en âge de porter les armes, une fois

6 que Rajic est arrivé, ceux qui n'étaient pas mobilisés ont été mobilisés.

7 Les gens étaient très préoccupés, s'enfermaient. Dès le 23, le matin, au

8 moment où j'ai encore une fois appelé à ce endroit-là, il y avait une

9 autre personne au bout du fil -c'était Zlavko Pavici. Il m'a dit qu'à

10 Vares, ce matin-là, il y avait une action qui avait commencé par Rajic et

11 Maturice. Il y avait un certain nombre de Musulmans qui avaient été

12 arrêtés à Vares, qu'ils les avaient conduits dans des écoles, dans des

13 salles d'école, soi-disant qu'ils possédaient des armes, qu'ils avaient

14 trouvé les armes chez ces Musulmans, qu'ils avaient transporté les armes à

15 Zabrezje et qu'en même temps, il y avait une autre action qui avait

16 commencé de nettoyage à Stupni Do.

17 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que qu'il y avait des

18 pillages également qui ont commencé ?

19 M. Pejcinovic (interprétation). - Ultérieurement, j'ai pu

20 apprendre par les gens qui étaient des réfugiés à Kiseljak que lors de ces

21 arrestations, les soldats prenaient tout ce qui été technique, l'or,

22 qu'ils s'emparaient des voitures et qu'ils transportaient, par le

23 territoire serbe, ces objets à Kiseljak.

24 M. Nobilo (interprétation). – Qu'est-ce qui s'est passé à Stupni

25 Do ? Vous êtes en Herzégovine, mais vous avez quand même le portable,

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1 quelles étaient les informations ?

2 M. Pejcinovic (interprétation). – Il y a eu des informations que

3 j'ai reçues effectivement et il y avait des combats azzez atroces.

4 M. Riad (interprétation). – Questions, réponses pour la cabine

5 anglaise.

6 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, Messieurs

7 les Juges, essayons s'il vous plaît, je m'adresse cette fois-ci au témoin,

8 de ne pas parler trop rapidement et surtout de faire des intervalles pour

9 que les interprètes puissent suivre.

10 Je vais répéter la question, si vous voulez bien. Quelles

11 étaient les informations que vous avez pu obtenir par votre portable sur

12 les événements qui se sont passés à Stupni Do ?

13 M. Pejcinovic (interprétation). - J'ai reçu les informations

14 comme quoi il y avait des combats, que les combats ont duré deux jours et

15 qu'on ne pouvait pas s'emparer de Stupni Do, que l'action a été terminée

16 uniquement le dimanche. C'était les premières informations, pendant que

17 j'étais en Herzégovine, je n'avais pas d'autres informations sur quoi que

18 ce soit.

19 M. Nobilo (interprétation). - Eh bien, une fois que vous étiez

20 de retour à Kiseljak est-ce que vous avez pu compléter les informations au

21 sujet de Stupni Do ?

22 M. Pejcinovic (interprétation). – Oui, à ce moment-là, j'ai pu

23 apprendre par nos propres gens, qu'à Stupni Do, il y avait des civils

24 également qui avaient été des victimes des combats.

25 M. Nobilo (interprétation). - Après Stupni Do, qu'est-ce que qui

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1 se passent avec Maturica ? Est-ce qu’il reste dans la municipalité de

2 Vares ou bien se retire ?

3 M. Pejcinovic (interprétation). - Même s'ils sont arrivés pour

4 renforcer la ligne de la défense, tout de suite, l'après-midi, ils se sont

5 retirés de la municipalité de Vares. Ils sont partis dans la direction de

6 Kiseljak.

7 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous voulez expliquer

8 aux Juge ce qui s'est passé le 30 octobre 1993, toujours à Vares, d'après

9 les informations que vous avez eues pendant votre séjour en Herzégovine ?

10 M. Pejcinovic (interprétation). - Le 30 octobre 1993, il y a

11 une action généralisée de l'armée de Bosnie-Herzégovine sur les lignes de

12 front de Bobas, Vares et en provenance de toutes les directions et sous la

13 pression de Sarajevo, les forces du deuxième Corps de l'armée de Bosnie-

14 Herzégovine et de Tuzla également se sont joints dans le cadre de cette

15 action.

16 C'était le 30 octobre, on s'était emparé de Dubastica. On avait

17 pilonné les villages Donja et Gornja Borovica. La population civile de ces

18 villages s'était retirée à Vares, ainsi que les villages de la paroisse de

19 Vjaka et tous se sont retirés et se sont installés au centre-ville de

20 Vares, au centre urbain.

21 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous pouvez expliquer

22 aux Juges jusqu'à quand ont duré les combats, si on peut parler de manière

23 plus précise, de la défense de ces lignes de défense ?

24 M. Pejcinovic (interprétation). - La défense de la municipalité

25 de Vares, de l'armée de Bosnie-Herzégovine a duré jusqu'au 2 novembre

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1 1993, et ceci dans le cadre de la montagne Perun où étaient concentrées

2 les forces du HVO, les lignes ont été démantelées, un chaos général dans

3 la région de Pogar également, du village Pogar. Entre le 2 et 3 novembre

4 1993, il y a la décision prise d'évacuer la population civile de la ville

5 de Vares.

6 M. Nobilo (interprétation). – Pouvez-vous me dire avant tout,

7 quelle était la destination vers laquelle on évacuait les civils ? Combien

8 il y avait de civils qui s'enfuyaient ? Combien de Croates se sont

9 enfuis ? Et combien en est-il resté à Vares.

10 M. Pejcinovic (interprétation). – Les civils sont évacués de la

11 ville de Vares en direction du village de Dastansko et du village de

12 Mrgle, qui se trouvaient déjà sur le territoire de la Republika Srpska.

13 C'est par, en traversant l'entité serbe en direction de Kiseljak et de

14 Kresevo qu'ils partent puis en direction de Sokolac, sur le territoire de

15 la Republika Srpska et c'est là qu'ils sont réunis dans un camp pour

16 réfugiés. Après, ils seront transportés à Vares. Dans la nuit du 2 au 3

17 novembre 1993, et dans la journée du 3 novembre, environ 7 500 Croates ont

18 fui de la ville.

19 M. Nobilo (interprétation). - Quel est le nombre de Croates qui

20 restent sur le territoire de la municipalité de Vares ?

21 M. Pejcinovic (interprétation). – Sur le territoire de la

22 municipalité de Vares, il reste 914 Croates et, dans une partie de la

23 municipalité de Vares, où ils tiennent la ligne de front, il reste

24 1 600 soldats du HVO.

25 Naturellement les Serbes ne leur ont pas permis de traverser

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1 leur territoire.

2 M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous me dire pendant ce

3 conflit qui n'a pas duré très longtemps, qui n'a duré que quelques jours

4 avec les Musulmans, combien de morts y a-t-il eu du côté croate, combien

5 de morts parmi les soldats ?

6 M. Pejcinovic (interprétation). - Dans les conflits avec l'armée

7 de Bosnie-Herzégovine, 63 soldats sont morts, 63 membres du HVO. Pour la

8 plupart, ils sont tombés dans la région de Perun, le 2 novembre. Il y en a

9 eu trente qui ont été tués, puis onze ont été tués à un autre endroit.

10 Plus tard, on pourra établir que d'autres ont d'abord été faits

11 prisonniers, puis tués.

12 M. Nobilo (interprétation). - On s'arrêtera pour le moment pour

13 ce qui est de la révision chronologique des événements pour aborder un

14 autre sujet. Pouvez-vous me dire...

15 M. le Président. - Maître Nobilo, nous allons peut-être procéder

16 à la pause puisque vous êtes en train de changer de sujet.

17 Nous allons suspendre pour 20 minutes, nous reprendrons à

18 11 heures 40.

19 La séance, suspendue à 11 heures 15, est reprise à 11 heures 45.

20 M. le Président. - L'audience est reprise. Introduisez l'accusé.

21 M. Nobilo (interprétation). - Avant la pause, nous avons annoncé

22 un autre sujet que nous allons aborder brièvement. Il s'agit des

23 commandants de la brigade des HVO à Vares. Qui était le premier commandant

24 de la brigade du HVO à Vares ?

25 M. Pejcinovic (interprétation). - Le premier commandant de la

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1 brigade du HVO Bobovac Vares était M. Borivoje Malbasic.

2 M. Nobilo (interprétation). - A quel moment a-t-il été remplacé,

3 par qui et pour quelles raisons ?

4 M. Pejcinovic (interprétation). - En été 1993, M. Malbasic, en

5 tant que commandant de la brigade Bobovac Vares, a envoyé à l'adresse du

6 HVO civil de Vares, une lettre. Dans cette lettre, il exprime son

7 mécontentement. Il demande à être payé pour son travail. Il demande un

8 appartement plus grand pour sa famille. Puisque le HVO de Vares n'a pas pu

9 répondre à ses demandes, et que par ailleurs M. Borivoje Malbasic avait

10 tendance à consommer de l'alcool, le HVO civil de Vares a pris la décision

11 qui était celle de relever M. Malbasic de ses fonctions de commandant.

12 M. Nobilo (interprétation). - A ce moment, qui a été nommé

13 commandant ?

14 M. Pejcinovic (interprétation). - A la tête de la brigade

15 Bobovac Vares en tant que commandant a été nommé M. Emil Harah.

16 M. Nobilo (interprétation). - Qui, à quel moment et pour quelles

17 raisons l'a relevé de ses fonctions ?

18 M. Pejcinovic (interprétation). - Il a été relevé de ses

19 fonctions à la date du 22 octobre 93 par le colonel Ivica Rajic. Il a été

20 relevé de ses fonction par ce colonel et c'est Kresimir Bozic qui a été

21 nommé à la tête de cette brigade.

22 M. Nobilo (interprétation). - Qui est devenu commandant après

23 Kresimir Bozic?

24 M. Pejcinovic (interprétation). - C'est Ivica Rajic qui a nommé

25 Kresimir Bozic et il reste à ce poste jusqu'à la sortie des Croates de

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1 Vares.

2 M. Nobilo (interprétation). - A partir de ce moment, qui est

3 devenu commandant ?

4 M. Pejcinovic (interprétation). - Le 4 novembre, il est parti à

5 Kiseljak et il devient coordinateur de la brigade Bobovac Vares de

6 Kiseljak. A la tête du commandement est placé Borivoje Malbasic.

7 M. Nobilo (interprétation). - Qui a nommé Borivoje ?

8 M. Pejcinovic (interprétation). - C'est Ivica Rajic.

9 M. Nobilo (interprétation). - Poursuivons alors dans l'ordre

10 chronologique. Votre municipalité de Vares, autrement dit la population

11 s'est exilée à Kiseljak. Vous, vous êtes revenu d'Herzégovine le

12 26 novembre 1993 à Kiseljak avec le convoi. Pouvez-vous nous dire à

13 l'époque où Vares était encore encerclée, autrement dit avant la chute de

14 Vares, avez-vous tenté un retour vers Vares avec le convoi ? En avez-vous

15 été empêché ? Si oui, pour quelle raison ?

16 M. Pejcinovic (interprétation). - A plusieurs reprises, à

17 l'époque où Vares était encore encerclée et pendant que les combats

18 avaient encore lieu, nous avons essayé de revenir à Vares. Cependant, au

19 début, nous n'avons pas pu obtenir suffisamment de carburant pour le

20 voyage. Puis, quand nous l'avons trouvé, ce qui nous manquait, c'était

21 l'autorisation des Serbes pour traverser leur territoire. Ainsi donc,

22 pendant 40 jours, les chauffeurs des véhicules de ce convoi sont restés à

23 découvert sur un pont découvert, à Caplina. Moi-même, je leur apportais du

24 pain pour qu'ils puissent manger, du pain d'une organisation humanitaire

25 de Caplina, une organisation qui s'appelle "du pain pour les enfants".

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1 M. Nobilo (interprétation). - Comment êtes-vous revenu ? Avec

2 qui vous êtes-vous mis d'accord pour ce retour ?

3 M. Pejcinovic (interprétation). - A plusieurs reprises, j'ai

4 essayé à Cikluk de voir avec un officier, Stanko Matic, comment on pouvait

5 décider des termes de ce retour. Mais nous n'avons pas pu nous mettre de

6 d'accord.

7 Puis par téléphone, j'ai parlé à M. Rajic ; par la suite, ce

8 passage nous a été garanti. Mais uniquement jusqu'à Kiseljak.

9 M. Nobilo (interprétation). - Dites-moi, donc d'Herzégovine avec

10 Rajic, vous avez pu vous entretenir par voie de téléphone normal ?

11 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui, téléphone normal.

12 M. Nobilo (interprétation). - Quand je dis téléphone normal, je

13 ne veux pas dire téléphone sans-fil. Pas téléphone portable.

14 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui, tout à fait et nous

15 n'avons discuté que du passage de ce convoi.

16 M. Nobilo (interprétation). - Une fois à Kiseljak, que se passe-

17 t-il ? Quel travail faites-vous ? Que se passe-t-il à Kiseljak ?

18 M. Pejcinovic (interprétation). - Une fois arrivé à Kiseljak, je

19 rencontre le coordinateur de la brigade BobovacVares, M. Kreso Bozic. Il

20 m'emmène chez le colonel Ivica Rajic à la caserne de Kiseljak.

21 C'est là, si je puis dire, que l'on m'ordonne d'être chargé

22 désormais du HVO civil à Kiseljak. HVO Vares dont le siège est à Kiseljak.

23 M. Nobilo (interprétation). - Concrètement de quel travail

24 s'agissait-il à ce moment-là ?

25 M. Pejcinovic (interprétation). - Il fallait s'occuper des

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1 réfugiés croates qui étaient à ce moment-là placés dans des centres de

2 rassemblements de Kiseljak et de Krecevo.

3 M. Nobilo (interprétation). - Que se passe-t-il à Kiseljak

4 concernant M. Druzinovic qui est à la tête du SIS, et concernant son

5 collègue Gavran ?

6 M. Pejcinovic (interprétation). - Le soir où je suis arrivé à

7 Kiseljak avec ce convoi, par l'intermédiaire d'une femme que je

8 connaissais et qui travaillait à la station radio de Kiseljak, j'ai appris

9 que MM. Druzinovic et Gavran se trouvaient à la prison de Kiseljak.

10 M. Nobilo (interprétation). - Qui les a arrêtés ?

11 M. Pejcinovic (interprétation). - Une fois de plus, ils avaient

12 été arrêtés par M. Rajic.

13 M. Nobilo (interprétation). - Ils étaient accusés de quoi ?

14 M. Pejcinovic (interprétation). - Paraît-il, ils auraient été

15 mis à l'abri devant les soldats enragés du HVO Vares, qu'ils se sont

16 trouvés dans une situation extrêmement difficile, pris en sandwich entre

17 les Serbes et les Musulmans.

18 M. Nobilo (interprétation). - Le chef du SIS, MM Druzinovic et

19 Gavran ont été relâchés plus tard ? Monsieur Druzinovic était un simple

20 soldat ?

21 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

22 M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous nous dire en quelques

23 mots ce qui est arrivé au chef du SIS de Vares ? Qu'avez-vous entendu à ce

24 sujet ?

25 M. Pejcinovic (interprétation). - Comme je l'ai déjà dit, quand

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1 je suis revenu à Kiseljak, entre-temps celui qui était à la tête du HVO

2 Vares, Ante Pejcinovic, était sorti de Kiseljak par hélicoptère. Il s'est

3 rendu à Grude. Vraisemblablement, suite à son entretien avec M. Boban, ont

4 été libérés de prison MM. Gavran et Druzinovic.

5 Monsieur Rajic les a affectés en tant que simple soldat dans les

6 unités locales. Monsieur Druzinovic, avec sa famille, a été placé dans un

7 centre collectif qui se trouvait à l'école primaire de Lipnica

8 M. Nobilo (interprétation). - Que s'est-il passé par la suite

9 avec Druzinovic, qu'avez-vous entendu à ce sujet ?

10 M. Pejcinovic (interprétation). - A la date du 23 février 1994,

11 il a été emmené de cet endroit, et plus tard, j'ai appris qu'il avait été

12 tué.

13 M. Nobilo (interprétation). - Qui l'avait emmené ?

14 M. Pejcinovic (interprétation). - Il a été emmené par des

15 soldats du HVO de Kiseljak. Il a été dit à son épouse qu'il était

16 recherché par M. Rajic.

17 M. Nobilo (interprétation). - Qu'avez-vous entendu dire au sujet

18 de la raison de cet assassinat ?

19 M. Pejcinovic (interprétation). - La véritable raison était le

20 fait que M. Druzinovic savait beaucoup de choses sur tous ces événements.

21 M. Nobilo (interprétation). - Passons maintenant à la question

22 du fonctionnement des pouvoirs de Kiseljak quand vous y êtes arrivé.

23 Vous aviez l'impression qu'ils fonctionnaient de la même manière

24 depuis quelques mois ? Pouvez-vous nous dire en quelques mots comment

25 fonctionnaient ces pouvoirs de Kiseljak ?

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1 M. Pejcinovic (interprétation). - Dès que j'ai pris ces

2 fonctions à la tête du HVO Vares, dont le siège était à Kiseljak, il m'a

3 été dit que tous les soirs, dans la caserne de Kiseljak, on tenait des

4 réunions où participaient des commandant militaires, ainsi que les

5 représentants civils du HVO de Kiseljak, de Krecevo, et que moi, qui était

6 donc de Vares, je devais assister à ces réunions.

7 A partir de ce moment-là, jusqu'à la signature des accords de

8 Washington, tous les soirs, à 19 heures, j'ai participé à ces réunions qui

9 se tenaient à la caserne de Kiseljak.

10 M. Nobilo (interprétation). - Vous en avez déduit que cette

11 forme de fonctionnement du pouvoir existait déjà depuis plus mois avant

12 que vous n'y veniez ?

13 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui. Mes collègues, les

14 Présidents du HVO, m'ont confirmé que ce genre de fonctionnement était

15 établi depuis le début du conflit dans cette région.

16 M. Pejcinovic (interprétation). - Pouvez-vous dire à la Chambre

17 comment fonctionnait ce pouvoir unique militaro-civil ? Qui présidait ?

18 Qui prenait les décisions ? Pouvez-vous décrire l'ambiance qui régnait à

19 ces réunions ?

20 M. Pejcinovic (interprétation). - A toutes les réunions

21 présidait le colonel Ivica Rajic et, lors de ces réunions, on discutait de

22 tous les sujets d'importance par rapport au fonctionnement de la vie dans

23 la zone, qu'il s'agisse d'aspects militaires ou de questions d'hébergement

24 des réfugiés, de questions de départ des convois ou autre. On pourrait

25 dire que nous étions tous présents en tant qu'exécuteurs des taches qui

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1 nous étaient confiées par M. Rajic, chargés de certains aspects des

2 choses. Mais sans lui, rien ne pouvait être fait.

3 M. Nobilo (interprétation). - Peut-on dire alors qu'Ivica Rajic

4 réunissait les aspects militaires et civils ?

5 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

6 M. Nobilo (interprétation). - Dites-nous, où étaient hébergés

7 les gens de Vares qui étaient exilés ? Est-ce qu’il y a eu des problèmes ?

8 M. Pejcinovic (interprétation). - Comme je l'ai déjà dit, les

9 exilés de Vares étaient au départ hébergés dans des centres collectifs,

10 dans des salles où ils se retrouvaient à plus de 500 en un seul et même

11 lieu. Il y avait des matelas par terre, des moyens de bord.

12 Comme c'était en hiver, les réfugiés ont exprimé leur

13 mécontentement. Ils n'étaient pas du tout contents des conditions de leur

14 hébergement. Ils étaient nombreux à dire qu'il y avait des appartements

15 vides et des maisons des Croates de Kiseljak où les réfugiés ne pouvaient

16 pas emménager.

17 Au moins, pour ceux qui avaient des enfants en bas âge ou des

18 personnes âgées, une décision a été prise par M. Rajic. J'ai été chargé de

19 parler avec mes hommes et d'installer ces réfugiés dans les maisons vides

20 qui appartenaient aux Musulmans bosniaques, que ce soit dans la ville même

21 de Kiseljak ou dans les environs, les maisons qui étaient situées en

22 premières lignes de front face à l'armée de Bosnie-Herzégovine.

23 Alors, nos hommes ne voulaient pas l'accepter. Ce qu'ils

24 demandaient, c'est qu'ils sortent de Kiseljak et qu'ils partent vers des

25 destinations plus sûres. C'est pourquoi, à plusieurs reprises, nous nous

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1 sommes trouvés dans une situation où, pour la non-exécution de ces ordres,

2 nos vies se trouvaient en danger.

3 M. Nobilo (interprétation). - Vous avez dit...

4 M. Riad (interprétation). - Les interprètes peuvent-ils annoncer

5 "question-réponse" pour que nous puissions suivre ?

6 M. Nobilo (interprétation). - Pendant une période donnée, vous

7 avez assisté à des réunions quotidiennes chez Rajic où Rajic donnait des

8 ordres, que ce soit aux soldats ou aux civils ?

9 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

10 M. Nobilo (interprétation). - Dites-nous, à un moment

11 quelconque, avez-vous entendu Rajic évoquer un ordre émis par le colonel

12 Rajic lors de ces réunions où toutes ces décisions importantes pour

13 Kiseljak étaient prises ?

14 M. Pejcinovic (interprétation). - Comme je l'ai dit, j'ai

15 participé à chacune de ces réunions, et aucun ordre émanant du colonel

16 Blaskic n'a jamais été lu en ma présence à une quelconque de ces réunions.

17 M. Nobilo (interprétation). - Rajic a-t-il mentionné à un moment

18 quelconque le colonel Blaskic lors de ces réunions ?

19 M. Pejcinovic (interprétation). - Non.

20 M. Nobilo (interprétation). - Vous fréquentiez les gens qui

21 étaient des collaborateurs de Rajic, que ce soit des militaires ou civils.

22 Dites à la Chambre, s'il vous plaît, ce que vous avez entendu dire au

23 sujet des relations entre Rajic et Blaskic et que disaient-ils au sujet de

24 Blaskic ?

25 M. Pejcinovic (interprétation). - Il est exact que j'ai

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1 fréquenté les collaborateurs de M. Rajic et l'impression que j'ai eue

2 pendant cette période, c'est que M. Rajic -comment dire ?- était vraiment

3 le Bon Dieu pour ces gens-là, de Kiseljak. Sans lui, ces gens-là

4 n'auraient pas pu s'y maintenir. C'était leur opinion, à eux, qu'il était

5 un combattant véritable.

6 Dans ces conversations avec eux, j'ai appris qu'avant lui, à

7 Kiseljak, c'était le colonel Blaskic qui était commandant. A ce moment-là,

8 c'est l'armée de Bosnie-Herzégovine qui a pris Bilalovac et que c'est là

9 que la communication Kiseljak-Busovaca a été coupée. Ils étaient

10 convaincus que si Rajic avait été à ce poste-là, jamais pareille chose ne

11 se serait produite. C'est ce que j'ai entendu.

12 Egalement, à l'époque où les moments étaient les plus difficiles

13 à Vitez, avant Noël 1993, quand certains commandants ont dit que si Rajic

14 avait été là, la situation aurait été la même qu'à Kiseljak. Puisque je

15 n'étais pas très proche du colonel Blaskic, puisque je ne le connaissais

16 pas en tant que militaire, je dois reconnaître que moi aussi j'avais eu

17 l'impression à l'époque, en écoutant ce qu'ils disaient eux, qu'il

18 s'agissait d'un soldat qui n'était pas capable d'exercer la fonction de

19 commandant.

20 M. Nobilo (interprétation). - Quand vous dites que pour les

21 militaires et la population de Kiseljak, Rajic était un dirigeant

22 charismatique, le bon Dieu, que voulez-vous dire par là ?

23 M. Pejcinovic (interprétation). – Je veux dire très précisément

24 que rien, rien ne pouvait se passer sans qu'il soit impliqué. Par exemple,

25 lorsqu'on a constitué un convoi pour que les malades et personnes âgées

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1 puissent quitter Kiseljak et qu'ils se dirigent vers l'Herzégovine, à ce

2 moment, il m'a été dit que douze cars de réfugiés de Vares devaient partir

3 de Kiseljak, qu'il fallait constituer des listes et qu'il fallait les

4 apporter. Ce n'est qu'une fois vérifiés par M. Rajic, que ces gens ont eu

5 le feu vert de partir ; ces gens que lui a laissé sur les listes. Ceux

6 dont le nom avait été rayé par M. Rajic n'ont pas pu partir.

7 Lorsqu'un incident quelconque se produisait de la part des

8 individus non disciplinés, je pense ici aux soldats, la seule personne qui

9 pouvait remettre de l'ordre, voire qui pouvait enfermer ces gens-là,

10 c'était le colonel Rajic.

11 M. Nobilo (interprétation). – Merci. Nous allons passer à un

12 autre sujet que nous n'avons pas encore abordé jusqu'à présent. Dites-

13 nous, pour ce qui est des villages de la municipalité de Vares, qui ont

14 été quittés par les Croates, que s'est-il passé dans ces villages ?

15 Mais avant, j'aimerais passer à la présentation d'une pièce.

16 Peut-on avoir la cote de cette pièce ?

17 M. Dubuisson. – Il s'agit du document D440, D440(a) pour la

18 version anglaise.

19 M. Nobilo (interprétation). - Je pense que vous disposez du

20 document. Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît, nous dire qui avait

21 rédigé ce document ? Quel était l'objectif ? A qui ce document était-il

22 adressé ?

23 M. Pejcinovic (interprétation). - Il s'agit d'un document que

24 j'ai rédigé moi-même. J'étais Président du conseil municipal de Vares,

25 j'ai adressé le document à M. Nobilo. Dans ce document, il y a la

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1 chronologie des souffrances et des épreuves du peuple croate dans la

2 municipalité de Vares au cours de la période qui s'étend du

3 3 novembre 1993 et plus loin.

4 A partir du 3 novembre 1993, le document a été rédigé sur la

5 base des données que j'ai pu obtenir de la part des responsables et des

6 membres du conseil municipal de Vares, en d'autres termes, des membres de

7 la commission chargée des crimes de guerre auprès de la communauté Herceg-

8 Bosna, des responsables de la station de police à Dastansko, de la

9 paroisse et du prêtre de la paroisse de Vares, Vijak Borovica, des

10 déclarations également d'un certain nombre de témoins qui nous ont fourni

11 les informations.

12 Ce document contient par conséquent un résumé de toutes les

13 épreuves que les civils ont traversées, les assassinats qui ont eu lieu

14 parmi les civils, les destructions des cimetières, des bâtiments de culte

15 religieux, des maisons qui ont été détruites, des ensembles de villages

16 qui ont été détruits.

17 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous pensez que, compte

18 tenu de la méthodologie que vous avez utilisée à Vares, il s'agit de

19 données qui peuvent être considérées comme exactes ?

20 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui, à 100 %.

21 M. Nobilo (interprétation). - On va peut-être jeter un coup

22 d'oeil sur le document, même s'il parle de lui-même. On ne va pas parler

23 de la population civile et des victimes. A la page 7, on parle des

24 églises, des chapelles et des cimetières. On parle des destructions

25 massives des bâtiments de culte.

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1 M. Pejcinovic (interprétation). - Il s'agit là des églises

2 catholiques, des demeures paroissiales, des chapelles, des cimetières. La

3 situation la plus difficile était dans la paroisse de Borovica. En

4 d'autres termes, l'église paroissiale de la Transfiguration dans le

5 village de Gornja Borovica, ensemble, avec la demeure paroissiale, étaient

6 incendiées, pillées et, actuellement il n'y a pratiquement rien dans cette

7 église. Il n'y a que des déchets. En ce qui concerne la croix, la grande

8 croix qui se trouvait dans la tourelle a été jetée devant le portail, le

9 grand portail.

10 J'ai vu de mes propres yeux tout ceci et je l'ai vu la première

11 fois le 6 août 1994. On ne voyait pas grand-chose dans l'église. Il n'y

12 avait que des bancs qui avaient été incendiés, juste des restes de ces

13 bancs qui sont restés. L'autel a également été détruit ainsi que l'endroit

14 où l'on baptisait les enfants, le baptistère. Il y avait pratiquement un

15 certain nombre de restes à l'intérieur de l'église ; le toit également a

16 été incendié.

17 Ensuite, les chapelles à Donja Borovica ont été détruites,

18 pillées et les croix ont été brisées. Ensuite, dans un hameau, Borovicke

19 Njive, c'est dans la paroisse de Borovica, la chapelle du cimetière a été

20 démolie, endommagée plutôt, quelques pierres tombales également.

21 Dans le hameau Kopljari, qui était dans les environs et qui

22 avait été détruit tout au début, un cimetière également avait été dévasté

23 parce qu'il y avait des coups de tir qui ont été échangés sur les pierres

24 tombales.

25 Toutes les croix qui étaient en fonte ont été brisées,

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1 saccagées, il y en avait qui ont été jetées en dehors du cimetière.

2 Il y avait des toits de pierres tombales qui ont été démolis,

3 détruits, la chapelle également était totalement endommagée. Elle a été

4 endommagée parce qu'on avait fait tomber le tronc qui se trouvait à côté

5 du cimetière qui est tombée sur la chapelle, sur le toit, et sur le

6 monument. C'était tout un arbre.

7 Par ailleurs, il y avait un autre cimetière, à Dubastica. Au

8 moment où l'armée de Bosnie-Herzégovine est rentrée dans ce village, la

9 chapelle, on avait enfoncé la porte, on est entré là-dedans, on a pillé,

10 on a mis les affaires un peu partout. Il y a un autre village également

11 Njive, à côté de Stupni Do, les soldats musulmans ont saccagé le cimetière

12 à deux reprises. La dernière fois, c'était en temps de paix, entre le 2 et

13 le 3 novembre 1996, au moment où ils ont complètement détruit la chapelle

14 et les 60 monuments. Toutes les croix, que ce soit en bois ou en fonte,

15 tout a été brisé et les monuments ont été détruits. Cette même nuit, entre

16 le 2 et le 3 novembre 1996, à Bjelo Bore, un autre village, la chapelle a

17 également été pillée, saccagée, les objets de culte ont été jetés à gauche

18 et à droite alors que les 14 autres monuments ont été détruits.

19 Toutes les croix en bois, en fonte, en fer, ont été jetées à

20 travers le cimetière. J'ai vu cela de mes propres yeux.

21 M. Nobilo (interprétation). - On va peut-être pas aller en

22 détail. Si vous voulez bien nous énumérer les localités dans lesquelles se

23 sont produits à peu près les mêmes choses, notamment quand il s'agit des

24 cimetières ou éventuellement des bâtiments de culte ?

25 M. Pejcinovic (interprétation). - D'accord. Il y avait d'abord

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1 la paroisse de Vijak. L'église a été pillée, on a enfoncé le portail.

2 Ensuite, on a jeté les objets de culte. La demeure paroissiale a été

3 pillée également et les membres de l'armée de Bosnie-Herzégovine avaient

4 mis le bétail dans cette demeure paroissiale au moment où ils pillaient

5 les villages.

6 Ensuite, dans le village de Krecevine, il y a des impacts de

7 tirs sur le clocher, la croix en fer qui se trouvait au centre du village

8 a été cassée, brisée.

9 Le même sort a frappé la chapelle de Kocevj où la croix a été

10 jetée du côté des poubelles.

11 Ensuite, à Pogar, c'est un autre village où deux obus sont

12 tombés. On avait enfoncé également l'église à Vares, Majdan, de la sainte

13 Barbara. On avait ouvert les sarcophages, les hosties ont été détruites.

14 Il y a une autre église qui a subi des destructions très

15 massives à celles de la grande croix et c'était dans la paroisse Vares,

16 dans le village Besic.

17 Les membres de l'armée de Bosnie-Herzégovine avaient utilisé

18 cette église comme un point de contrôle, d'où ils tiraient également en

19 direction des formations du HVO.

20 M. Nobilo (interprétation). - Je vous remercie. De toute façon,

21 il y a tous les détails dans le document.

22 Maintenant, nous allons parler des villages croates et dire

23 quelle était la situation dans ces villages. Nous allons mettre à la

24 disposition des Juges une carte (1/50 000). Nous nous préparons pour

25 mettre cette carte. Vous voulez bien nous dire qui avait placé les signes

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1 sur cette carte et qu'est-ce qu'ils représentent ?

2 M. Pejcinovic (interprétation). – C'est moi qui ai posé les

3 signes et ils représentent les villages croates dans la municipalité de

4 Vares, les villages qui ont été détruits et saccagés au moment où l'armée

5 de Bosnie-Herzégovine est entrée dans la municipalité.

6 M. Nobilo (interprétation). – Nous avons les deux cartes, une

7 petite et une grande. Toute la municipalité de Vares ne figure pas sur la

8 première carte, c'est la raison pour laquelle nous vous avons donné une

9 photocopie et c'est un complément donc.

10 M. Dubuisson. – Document D441.

11 M. Nobilo (interprétation). - Il y a une grande carte et une

12 toute petite, les deux vont ensemble. Si vous voulez bien,

13 monsieur l'huissier, porter les deux cartes au Procureur.

14 C'est la photocopie et l'original. J'aimerais bien également,

15 s'il vous plaît, monsieur l'Huissier, que vous portiez la grande carte au

16 Procureur.

17 M. Dubuisson. – Si je comprends bien, je reçois deux grandes

18 cartes différentes au niveau des annotations.

19 M. Hayman (interprétation). - L'original est constitué par deux

20 grandes cartes. Ensuite, il y a les copies. Les copies qui contiennent une

21 grande et une petite carte, l'une complète l'autre.

22 M. le Président. – Le même numéro affecte la grande et la

23 petite. C'est ce que vous voulez dire, maître Hayman. C'est-à-dire,

24 monsieur le greffier, que le D442 sera la grande carte, à laquelle est

25 adjointe la petite. C'est cela ?

Page 14619

1 M. Hayman (interprétation). – Je pense qu'il s'agit de D441 et

2 D441(a).

3 M. Dubuisson. – Je suis d'accord, mais les autres cartes ne sont

4 pas annotées de la même façon que la première.

5 M. le Président. - Que voulez-vous dire par là, monsieur le

6 greffier ?

7 La carte que vous donnez au Bureau du Procureur, Me Nobilo et

8 Me Hayman, c'est bien la D441, je suppose ? C'est cela ?

9 M. Nobilo (interprétation). – Excusez, Monsieur le Président, il

10 y a deux cartes, des originaux, que nous allons verser au greffier. Les

11 deux sont grandes. Ce sont des originaux de la municipalité de Vares. Mais

12 les copies concernent une grande et ensuite une photocopie, une toute

13 petite qui est adjointe à la première photocopie. Je vais vous montrer.

14 C'est la première carte, et cela c'est la photocopie de la deuxième

15 ensemble. Voilà ce que nous vous présentons.

16 M. le Président. – Du même numéro, c'est cela ?

17 M. Nobilo (interprétation). – Oui. Le greffier n'aura pas la

18 photocopie, mais des originaux, la grande carte originale. Tous les autres

19 auront donc la petite photocopie.

20 M. Dubuisson. – Sans aucun problème.

21 M. le Président. – Sans aucun problème, a dit le greffier.

22 M. Nobilo (interprétation). - Si vous voulez bien mettre une

23 carte sur le rétroprojecteur. L'autre s'il vous plaît pas celle que vous

24 tenez dans votre main gauche et ensuite, nous allons donc la déplacer au

25 fur et à mesure. Nous allons pouvoir travailler plus facilement. Mettez

Page 14620

1 s'il vous plaît l'autre sur le moniteur.

2 M. le Président. - Est-ce que nous y sommes ?

3 M. Nobilo (interprétation). - Oui, nous essayons de régler les

4 petits problèmes qui se posent. Alors, peut-on agrandir un peu.

5 Maintenant, cela va. Monsieur Pejcinovic, j'aimerais maintenant que nous

6 partions de la page 10 de votre document et que vous nous montriez, sur

7 l'écran du rétroprojecteur, à l'aide du pointeur, les différents villages

8 en nous expliquant ce qui s'est passé dans chacun d'entre eux.

9 M. Pejcinovic (interprétation). - Le village de Gornja Borovica,

10 Donja Borovica.

11 M. Nobilo (interprétation). - Gardez le pointeur à l'endroit où

12 il se trouve et veuillez maintenant nous dire ce qui s'est passé dans le

13 village qui est indiqué par le pointeur.

14 M. Pejcinovic (interprétation). - Dans le village de Donja

15 Borovica, après le retrait des militaires et des civils, il est tout de

16 même resté dans le village des civils qui ont trouvé la mort à cet

17 endroit. Quant aux bâtiments, aux destructions dans le village de Borovica

18 ou plutôt dans le diocèse de Borovica qui est constitué par Donja Borovica

19 et Gornja Borovica, avant la guerre, il y avait 262 familles croates.

20 Et bien, sur ces 262 foyers, 340 maisons ont été incendiés et

21 750 autres bâtiments ont été détruits également, des étables et autres

22 bâtiments de ce genre.

23 M. Nobilo (interprétation). - Pouvons-nous passer au village de

24 Kopljari qui se trouve sur une autre carte. Il faut placer cette deuxième

25 carte sur le rétroprojecteur. Le village de Kopljari est sur cette

Page 14621

1 deuxième carte dont j'aimerais qu'elle soit placée sur le rétroprojecteur.

2 Je vous demanderai, Monsieur, de placer le pointeur à

3 l'emplacement du village de Kopljari et de nous dire ce qui s'est passé.

4 M. Pejcinovic (interprétation). - Le village de Kopljari a été

5 pris par l'armée de Bosnie-Herzégovine le 21 octobre 1993. Avant la

6 guerre, 150 personnes, toutes croates, y habitaient. Le village a été

7 repris deux fois je dois dire, la première fois il a été pris le

8 18 octobre. A ce moment, deux maisons seulement ont été incendiées. La

9 deuxième fois, il a été pris le 21 octobre et ce jour-là, la totalité du

10 village a été incendiée. Des images, tournées plus tard dans la

11 municipalité de Vares, prouvent que 62 maisons familiales ont été

12 incendiées ainsi que tous les bâtiments annexes secondaires.

13 M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous nous montrer où se

14 trouve Borovicke Njive ? Avec le pointeur !

15 M. Pejcinovic (interprétation). - A Borovicke Njive, nous étions

16 dans un petit hameau du diocèse de Vares. Il y avait 11 familles qui

17 habitaient dans ce hameau avant la guerre. Elles étaient toutes croates.

18 Toutes les maisons ont été détruites et pillées. Il n'est plus possible

19 d'y habiter.

20 M. Nobilo (interprétation). - Le village de Dubastica.

21 M. Pejcinovic (interprétation). - Le village de Dubastica est un

22 village qui se trouve non loin de la rivière qui porte le même nom. Avant

23 la guerre, il s'y trouvait 29 familles croates. Après l'entrée dans le

24 village de l'armée de Bosnie-Herzégovine, 4 maisons ont été incendiés, les

25 autres étant pillées et détruites. C'est-à-dire que tous les biens que

Page 14622

1 contenaient ces maisons ont été emportés.

2 M. Nobilo (interprétation). - Le village de Kopaliste ?

3 M. Pejcinovic (interprétation). - Dans le hameau de Kopaliste

4 résidaient dix-sept familles croates. Aucune maison n'a été incendiée,

5 mais elles ont toutes été pillées, détruites. Certaine d'entre elles ont

6 vu leur toit arraché et tous les objets de valeurs qui étaient contenus

7 dans ces maisons ont été emportés.

8 M. Nobilo (interprétation). - Le village de Pogar ?

9 M. Pejcinovic (interprétation). - Dans le village de Pogar

10 habitaient avant la guerre 120 familles croates : 28 maisons ont été

11 incendiées ainsi que 16 bâtiments annexes, secondaires. Les maisons qui

12 n'ont pas été incendiées ont été pillées. Je dois dire que c'est le

13 village dans lequel est resté le nombre le plus importants de Croates.

14 Lors de l'entrée du 2ème Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine dans ce

15 village, tous les Croates qui restaient encore dans le village ont été

16 emmenés dans la maison de M. Stjepan Surkic, dans laquelle ils ont été

17 détenus quatre ou cinq jours, ce qui a permis d'achever le pillage et la

18 destruction des maisons, les objets étant emportés vers Tuzla et Banovici,

19 notamment.

20 M. Nobilo (interprétation). - Les villages de Semizova Ponikva

21 et de Polozac ?

22 M. Pejcinovic (interprétation). - Ces deux villages étaient

23 habités exclusivement par des familles croates avant la guerre. Il s'y

24 trouvait 44 familles : 20 maisons ont été incendiées, ainsi que

25 34 bâtiments secondaires. Les maisons qui n'ont pas été incendiées ont été

Page 14623

1 pillées et dévastées, c'est-à-dire que tous les biens et meubles contenus

2 dans ces maisons ont été emportés.

3 M. Nobilo (interprétation). - Le village d'Ivancevo ?

4 M. Pejcinovic (interprétation). - Dans le village d'Ivancevo

5 habitaient avant la guerre 49 familles qui étaient toutes croates. Dans

6 les maisons dans lesquelles aucun habitant n'est resté, tout a été pillé,

7 tout a été emporté dans la direction des villages Golobska Obstina. Pas

8 une seule maison n'a été incendiée, mais 5 bâtiments secondaires ont été

9 incendiés en revanche.

10 Même si tout a été pillé, dès le début de ce que certains

11 appellent la "libération de Vares", c'est néanmoins l'endroit où se

12 trouvait le siège de la sécurité publique de Vares.

13 M. Nobilo (interprétation). - Le village de Krcevine ?

14 M. Pejcinovic (interprétation). - Le village de Krcevine

15 comptait également 75 familles croates : 18 maisons, 10 bâtiments

16 secondaires ont été incendiés et toutes les autres maisons ont été

17 pillées.

18 M. Nobilo (interprétation). - Le village de Radosevici.

19 M. Pejcinovic (interprétation). - Avant la guerre, le village de

20 Radosevici abritait 62 familles exclusivement croates. Toutes les maisons

21 ont été pillées et dévastées, aucun immeuble n'a été incendié, mais la

22 majeure partie des toits des maisons ont été enlevés et emportés dans des

23 villages musulmans.

24 M. Nobilo (interprétation). - Le village de Tribija ?

25 M. Pejcinovic (interprétation). - Là encore, c'est un village

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1 qui se trouve non loin d'une rivière portant le même nom. Quinze familles

2 y habitaient : une maison a été incendiée, toutes les autres pillées et

3 dévastées complètement.

4 M. Nobilo (interprétation). - Le village de Donja Vijaka ?

5 M. Pejcinovic (interprétation). - Le village de Donja Vijaka

6 comptait 50 familles croates.

7 M. le Président. - Peut-être, Maître Nobilo, je vous demande si

8 ce n'est pas la reprise. Je suis le rapport dans la version anglaise, à la

9 page... C'est un peu pour essayer d'alléger l'audience. Ce n'est pas du

10 tout...

11 M. Nobilo (interprétation). - Oui, oui.

12 M. le Président. - Vous voyez ce que je veux dire ? Ce n'est pas

13 du tout pour enlever de la force à votre démonstration. Je crois que le

14 témoin est en train de lire. Je vois "Donja Vijaka, il y avait

15 50 maisons"... Vous lisez le rapport ? Ce n'est peut-être pas la peine de

16 le lire. La Cour a la carte, il me semble que l'on pourrait essayer

17 d'aller plus vite.

18 M. Nobilo (interprétation). - C'est exact, Monsieur le

19 Président. Les éléments dont il est question sont les mêmes que ceux qui

20 figurent dans le rapport. Mais à nos yeux, ce qui était important, c'est

21 que le Tribunal se rende compte que le nombre de villages incendiés et

22 pillés a été très important. C'est la raison pour laquelle nous avons

23 passé à revue les villages les uns après les autres, ce qui peut être un

24 peu ennuyeux, même si chacun de ces villages a été la scène de tragédies.

25 Mais si vous voulez, nous pouvons continuer, simplement localiser les

Page 14625

1 villages.

2 M. le Président. - (Hors micro) dans la tâche qui est confiée au

3 Président d'organiser les débats pour faire qu'ils soient les plus

4 rapides. Si je me permets de couper un témoin, ce n'est pas pour du tout

5 pour qu'il soit dit ou véhiculé quelque part que nous ne voulons pas

6 entendre les atrocités qui ont été commises. Que ce soit bien clair,

7 Maître Nobilo. C'est simplement pour une organisation claire des débats.

8 Si la carte est au soutien du rapport, il est du pouvoir

9 des Juges de dire : "Nous le consignons, c'est répertorié par le Greffe".

10 Les Juges, bien entendu, apprécieront. Je voudrais quand même nuancer vos

11 propos, ne pas donner au témoin ni au public que les Juges ne veulent pas

12 entendre parler des atrocités qui auraient pu commises de tel ou tel côté.

13 Voilà ce que je voulais dire. Merci, vous pouvez continuer.

14 M. Nobilo (interprétation). - Ce n'est pas ce que je pensais,

15 mais peut-être que j'ai été un peu mal compris. Je voulais dire que je

16 suis d'accord sur le fait que c'est peut-être un peu trop long de répéter

17 ce qui est déjà écrit dans le document que vous avez entre les mains.

18 Mais le témoin pourrait peut-être, sur la carte, nous montrer où

19 se trouvent les autres villages qui ont subi des pillages et des

20 incendies. Donc, je demanderai au témoin simplement de les montrer sur la

21 carte, par exemple le village d'Ocevija.

22 M. Pejcinovic (interprétation). - Gornja et Donja Ocevija, ici.

23 M. Nobilo (interprétation). - Bijelo Borje ?

24 (Le témoin montre l'emplacement de ce village.)

25 Le village de Mir ?

Page 14626

1 (Le témoin montre l'emplacement de ce village.)

2 Le village de Dikinici ?

3 (Le témoin montre l'emplacement de ce village.)

4 Le village de Mlakve ?

5 (Le témoin montre l'emplacement de ce village.)

6 Le village de Brezik ?

7 (Le témoin montre l'emplacement de ce village.)

8 Le village de Przici ?

9 (Le témoin montre l'emplacement de ce village.)

10 Le village de Kolonija, le village de Tisovci, le village de

11 Javornik, le village de Ljepovici, le village d'Osoje ? Les villages de

12 Zvijezda et de Ponikva et la ville de Vares ainsi que de Vares-Majdan ?

13 (Le témoin montre tous ces emplacements sur la carte.)

14 Est-ce que vous pourriez nous dire, de mémoire, le nombre total

15 de bâtiments qui ont été pillés, détruits, incendiés, en tout cas rendus

16 inaptes à l'habitation ?

17 M. Pejcinovic (interprétation). - D'après les informations dont

18 je dispose, le nombre total est d'environ 450 s'agissant des immeubles de

19 logement et environ 1000 pour les bâtiments secondaires, annexes.

20 M. Nobilo (interprétation). - Et qu'en est-il de la situation eu

21 égard au retour des Croates à Vares ? Est-ce que des Croates sont revenus

22 à Vares ?

23 M. Pejcinovic (interprétation). - Je dois dire que, à la

24 différence des autres lieux, des autres localités de Bosnie-Herzégovine,

25 nous pouvons dire qu'à Vares le nombre de retours de Croates est assez

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1 important. Mais, ce qui pose problème c'est qu'un grand nombre de

2 bâtiments ont été détruits et que les rénovations sur le territoire de la

3 municipalité sont assez peu nombreuses : une vingtaine de maisons

4 seulement ont été rénovées.

5 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, nous en

6 avons terminé avec l'interrogatoire principal. Nous demandons le versement

7 au dossier des pièces D450, c'est le rapport, et D451, à savoir les deux

8 cartes géographiques.

9 M. le Président. - Pas d'observation, pas d'objection ?

10 M. Nobilo (interprétation). - D440 et D441.

11 M. le Président. - Merci. Nous avons dix minutes encore. Nous

12 pouvons commencer le contre-interrogatoire. Monsieur Pejcinovic, vous

13 allez répondre aux questions que va vous poser le Bureau du Procureur.

14 M. Cayley (interprétation). - Bonjour, Monsieur Pejcinovic. Je

15 m'appelle Cayley, je représente le Bureau du Procureur aux côtés de mes

16 collègues, Me Harmon et Me Kehoe.

17 Parlons, si vous le voulez bien, de cette carte qui a été versée

18 au dossier et des villages qui ont été détruits. Si ces événements ont

19 effectivement ont eu lieu, il s'agit -comme vous l'avez dit- véritablement

20 de tragédies.

21 Mais pouvez-vous nous dire dans quelle période la majeure partie

22 de ces destructions s'est produite ?

23 M. Pejcinovic (interprétation). - La majeure partie de ces

24 destructions, comme je l'ai dit, c'est-à-dire le moment ou la période

25 pendant laquelle le plus grand nombre de bâtiments ont été détruit à

Page 14628

1 Gornja et Donja Borovica a tourné autour du 5 novembre 1993. Elle a duré

2 sept jours.

3 C'est ce que montre la lettre du major Hakan Birger qui

4 commandait le bataillon des Nations Unies. C'est lui qui m'a envoyé

5 personnellement à Kiseljak pour constater quelles étaient les destructions

6 dans les deux villages dont j'ai parlé. J'ai le document qui a été rédigé

7 à la suite de cette inspection ici, sur moi, avec sa traduction.

8 Il est possible de confirmer qu'après le départ des Croates et

9 des unités du HVO, après donc l'entrée des unités de l'armée de Bosnie-

10 Herzégovine à Vares, ces maisons ont été détruites, car très peu de

11 maisons ont été détruites au cours des combats.

12 M. Cayley (interprétation). - Donc les villages de Gornja et

13 Donja Borovica ont été attaqués et détruits en novembre 1993 ? C'est

14 cela ?

15 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

16 M. Cayley (interprétation). - Tous les autres villages qui

17 figurent sur cette carte et dont le nom est souligné ont-ils également été

18 détruits dans cette même période ?

19 M. Pejcinovic (interprétation). - Ces villages ont été détruits

20 au cours de la même période, étant entendu que le pillage de ce qui

21 n'avait pas été détruit s'est poursuivi plus longuement et a duré encore

22 en 1994. On peut même dire en 1995.

23 M. Cayley (interprétation). - A quel moment s'est produite la

24 profanation du cimetière dans le village de Mir ?

25 M. Pejcinovic (interprétation). - La profanation du cimetière du

Page 14629

1 village de Mir a eu lieu dans la nuit du 2 au 3 novembre 1996, comme je

2 l'ai déjà dit.

3 M. Cayley (interprétation). - Et la profanation qui s'est

4 produite dans le village de Bijelo Borje a également eu lieu en 1996, la

5 profanation qui a eu lieu dans le cimetière ?

6 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui, elle n'a pas eu lieu dans

7 le village, mais seulement dans le cimetière.

8 M. Cayley (interprétation). - Donc, la majeure partie des

9 destructions que vous avez décrites, qui se sont produites dans les

10 villages dont les noms sont signalés sur la carte, ont eu lieu au cours

11 d'un processus qui s'est poursuivi en 1994 et 1995 ?

12 M. Pejcinovic (interprétation). - J'ai dit que les maisons

13 incendiées dans ces villages l'on été en novembre et décembre 1993.

14 M. Cayley (interprétation). - Parlons de l'année 1992. Je crois

15 vous avoir entendu dire au cours de l'interrogatoire principal que, en

16 juillet 1992, le HVO avait pris le pouvoir exécutif dans la municipalité

17 de Vares ?

18 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

19 M. Cayley (interprétation). - Quelle a été la signification de

20 cet acte pour la communauté musulmane de Vares ?

21 M. Pejcinovic (interprétation). - Cela n'a eu aucune

22 signification particulière pour les habitants musulmans de Vares car ils

23 sont tous restés chez eux, à la maison, et ils ont tous conservé leur

24 emploi. Je parle, bien sûr, de ceux qui en avaient un.

25 M. Cayley (interprétation). - Mais cela signifiait que la

Page 14630

1 communauté musulmane n'avait plus son mot à dire dans le pouvoir exécutif

2 au niveau municipal, n'est-ce pas ?

3 M. Pejcinovic (interprétation). – Les représentants du peuple

4 bosnien, notamment le président du Bureau de la Santé était le docteur

5 Mehmed Ascerija ; le président de la défense civile était Rusmir

6 Berberovic ; le département des activités sociales était dirigé par Mufida

7 (l'interprète n'a pas saisi le nom de famille), qui étaient tous

8 représentants du peuple bosnien mais qui ne relevaient pas du parti

9 politique SDA.

10 M. Cayley (interprétation). - Donc les Musulmans, en juillet

11 1992, et par la suite, ont continué à participer au pouvoir gouvernemental

12 à Vares, au même titre que les Croates ?

13 M. Pejcinovic (interprétation). – Oui, mais l'organe qui n'était

14 pas représenté au niveau du gouvernement municipal, c'était le parti

15 politique SDA.

16 M. Cayley (interprétation). – Regardons la pièce à conviction

17 456/95, si vous le voulez bien.

18 Avant que l'on vous remettre ce document, je dirai qu'il s'agit

19 de l'extrait d'un compte rendu, suite à une réunion du HVO qui s'est tenue

20 à Busovaca le 22 septembre 1992.

21 Ante Pejcinovic était présent à cette réunion, mais qui était-il

22 en septembre 1992 ? Quelles étaient ses fonctions à Vares ?

23 M. Pejcinovic (interprétation). - Il présidait le HVO de Vares.

24 M. Cayley (interprétation). - Je vous demanderai de placer ce

25 document sous vos yeux. Voyez-vous, dans le coin, en haut, à droite, dans

Page 14631

1 le coin, les termes "Secret militaire défense" ?

2 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

3 M. Cayley (interprétation). - Comme vous le voyez, il s'agit

4 d'une réunion qui s'est tenue à Busovaca, le 22 septembre 1992, n'est-ce

5 pas ?

6 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

7 M. Cayley (interprétation). - Je vous demanderai, à présent, de

8 vous référer au paragraphe intitulé : "Ordre du jour ".

9 Est-ce que vous voyez que le premier point, sur cet ordre du

10 jour; est la mise en oeuvre des décisions du HVO destinée à établir

11 l'autorité de ce même HVO ? Vous voyez cela ?

12 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

13 M. Cayley (interprétation). - Au-dessus de ce passage, vous

14 voyez que la présidence exécutive est décrite comme étant constituée de

15 Dario Kordic, Anto Valenta, Thihomir Blaskic et Ignas Kostroman ?

16 M. Pejcinovic (interprétation). – Oui.

17 M. Cayley (interprétation). – Et Anto Pejcinovic, entre autre,

18 est décrit comme ayant participé à la prise de décision ? Nous n'allons

19 pas lire le nom de toutes les personnes qui ont participé à cette prise de

20 décision.

21 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

22 M. Cayley (interprétation). – Si vous le voulez bien, je propose

23 que nous passions en revue brièvement le contenu de ce document. Et je

24 vous référerai plus précisément à votre page 5. Vous constaterez que ce

25 document décrit les conditions en vigueur dans toutes les municipalités

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1 relevant de ce qui s'appelait alors la communauté croate de Herceg-Bosna.

2 Ce que j'aimerais faire, pour le plus grand profit des Juges, ce serait de

3 lire ce que Ante Pejcinovic a dit lors de cette réunion s'agissant des

4 conditions en vigueur à Vares. Est-ce que vous voyez ce passage qui traite

5 de Vares ?

6 C'est le paragraphe qui suit immédiatement, intitulé Kakanj.

7 M. Pejcinovic (interprétation). – Oui. Je vois ce à quoi vous me

8 référez, je lis : "Vares est la municipalité la plus extérieure de

9 l'Herceg-Bosna, l'économie est pratiquement paralysée, la population est

10 au bord de la famine, l'autorité du HVO y est complètement établie, et

11 près de 82 000 réfugiés ont quitté Vares pour se rendre dans la direction

12 de Brcko et Tuzla. Les taxes sont prélevées au moment de la sortie de ces

13 réfugiés. Nous n'allons pas appliquer les mêmes taux que le HDZ.

14 L'enseignement a commencé en langue croate, la ville est approvisionnée,

15 Vares a reçu un certain nombre de vivres, mais en nombre minimal.

16 1 200 Musulmans réfugiés et 800 réfugiés croates s'y trouvent et des camps

17 de réfugiés ont été érigés".

18 M. Cayley (interprétation). – Vous avez dit aux Juges que les

19 Musulmans participaient, à égalité avec les Croates, au gouvernement

20 municipal de Vares. Comment se fait-il que M. Pejcinovic, vous ayez…

21 Comment se fait-il que les représentants à cette réunion dont nous sommes

22 en train de parler affirment que le HVO a établi pleinement le contrôle

23 sur la municipalité de Vares ?

24 M. Pejcinovic (interprétation). - Cela vient du fait que

25 l'institution du conseil croate de défense de Vares a pris le pouvoir et

Page 14633

1 que les autorités civiles ont nommé pour président de la municipalité un

2 homme nommé à ce poste par la communauté croate d'Herceg-Bosna et son

3 président, Mate Boban. Mais, on a également la liste des noms des

4 Musulmans qui également ont participé au gouvernement municipal du HVO.

5 M. Cayley (interprétation). – Le HVO était-il pleinement au

6 contrôle de la municipalité de Vares en septembre 1992 ?

7 M. Pejcinovic (interprétation). - Il avait le contrôle sur une

8 partie de la municipalité de Vares, si on parle sur le plan territorial.

9 Le pouvoir et l'autorité du HVO n'ont fonctionné que dans cette partie de

10 la municipalité de Vares, alors que l'autre partie de la municipalité

11 était sous le contrôle de la présidence de guerre qui était bosnienne et

12 je parle des villages peuplés par des Bosniens lorsque je parle de la

13 partie sous le contrôle bosnien.

14 M. Cayley (interprétation). - Dans ce territoire contrôlé par le

15 HVO, le HVO avait-il pleinement l'autorité ?

16 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui, le HVO avait pleinement

17 l'autorité, mais des Musulmans étaient représentés au sein de ce pouvoir

18 du HVO et étaient responsables de certains départements, de certains

19 services.

20 Mufida Dzindo était notamment responsable de l'éducation dans

21 les écoles.

22 M. Cayley (interprétation). - Qu'en est-il de cette question des

23 taxes de passage ?

24 A qui était exigé ces taxes ? D'après le document, les taxes

25 étaient exigées des réfugiés traversant Vares. Est-ce exact ?

Page 14634

1 M. Pejcinovic (interprétation). - Lorsque des biens commerciaux

2 traversaient la région relevant de la base de Tuzla ou de Brcko, des taxes

3 étaient prélevées. Les convois humanitaires et les réfugiés étaient

4 exonérés de ces taxes.

5 M. Cayley (interprétation). - D'après le document, ce n'est pas

6 ce qui est dit. Nous laisserons les Juges tirer leurs propres conclusions

7 à la lecture de ce document.

8 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, c'est

9 exactement ce qui est écrit dans le document. Il n'est pas écrit dans le

10 document que des taxes étaient prélevées sur les réfugiés. Je lis

11 directement en langue croate, ce qui suit : "La taxe est prélevée au

12 moment du transit".

13 M. le Président. - Maître Cayley avait terminé. Les Juges

14 apprécieront.

15 M. Cayley (interprétation). - Ce qui n'est pas dit dans ce

16 document, c'est que des taxes de transit sont prélevées sur des convois

17 commerciaux.

18 M. le Président. - Vous pourriez poursuivre à 14 heures 30,

19 Maître Cayley, sauf si vous voulez terminer... Vous avez encore une

20 question sur ce document ?

21 M. Cayley (interprétation). - Je peux arrêter mes questions au

22 sujet de ce document.

23 M. le Président. - Avec l'accord de mes collègues, continuez.

24 M. Cayley (interprétation). - Vous avez déclaré au moment où

25 vous avez lu ce document que les écoles avaient commencé à travailler en

Page 14635

1 langue croate. Les Musulmans de Vares étaient-ils d'accord avec ce fait ?

2 M. Pejcinovic (interprétation). - Dans ma déposition, j'ai dit

3 que les enfants bosniens allaient à l'école à Vares, dans les écoles

4 qu'ils fréquentaient jusqu'à la période antérieure à la guerre en Bosnie-

5 Herzégovine.

6 M. Cayley (interprétation). - Mais Monsieur, vous n'avez pas

7 répondu à ma question.

8 Les Bosniens étaient-ils d'accord avec l'introduction de la

9 langue croate dans les écoles de Vares ? Oui ou non ?

10 M. Pejcinovic (interprétation). - S'ils envoyaient leurs enfants

11 à l'école, il est logique de penser qu'ils étaient d'accord avec cette

12 décision.

13 M. Cayley (interprétation). - Les Musulmans représentés au sein

14 du gouvernement municipal de Vares ont-ils été d'accord pour

15 l'introduction de la langue croate dans les écoles de Vares ?

16 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

17 M. Cayley (interprétation). - Ah oui ? Savez-vous si, oui ou

18 non, les Musulmans ont été d'accord pour que la langue croate soit

19 introduite dans toutes les écoles sur l'ensemble des territoires contrôlés

20 par les Croates en Bosnie-Herzégovine ?

21 M. Pejcinovic (interprétation). - Cela, je ne le sais pas.

22 M. Cayley (interprétation). - Nous pouvons terminer sur cette

23 question, Monsieur le Président.

24 M. le Président. - Nous reprenons à 14 heures 30.

25 La séance est suspendue à 13 heures.

Page 14636

1 L'audience est reprise à 14 heures 30.

2 M. le Président. - L'audience est reprise. Faites entrer

3 l'accusé s'il vous plaît.

4 (L'accusé est introduit dans le prétoire.)

5 M. le Président. - Je rappelle que nous sommes, dès que nous

6 aurons introduit le témoin, dans la phase du contre-interrogatoire de

7 M. Pejcinovic Miroslav.

8 Maître Cayley, je me permets de vous rappeler, n'y voyez aucune

9 malice de ma part, que l'interrogatoire principal de la défense a duré

10 2 heures 05. N'est-ce pas, Monsieur Dubuisson ?

11 M. Dubuisson. - C'est bien cela, Monsieur le Président.

12 M. le Président. - Nous sommes à combien du contre-

13 interrogatoire ?

14 M. Dubuisson. - 15 minutes.

15 M. le Président. - C'est pour que vous puissiez tracer vos

16 priorités et que vous ne soyez pas frustré comme Me Kehoe hier.

17 M. Cayley (interprétation). - Les montres se sont arrêtées hier,

18 Monsieur le Président. Mais enfin, pour être sincère avec vous, mon

19 contre-interrogatoire prendra beaucoup moins de temps que l'interrogatoire

20 principal de Me Nobilo. Vous n'avez aucune raison de vous inquiéter.

21 M. le Président. - Merci. Nous reprenons. Monsieur Pejcinovic,

22 vous m'entendez ? Vous êtes prêt, vous êtes reposé ?

23 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

24 M. le Président. - Maître Cayley va continuer les questions qui

25 vous sont destinées. Maître Cayley, c'est à vous.

Page 14637

1 M. Cayley (interprétation). - J'ai encore quelques questions au

2 sujet de la pièce à conviction 456/95. J'aimerais donc que l'on remette

3 une nouvelle fois cette pièce au témoin.

4 M. le Président. - Et le rétroprojecteur en même temps,

5 Monsieur Dubuisson afin que le public puisse suivre.

6 M. Cayley (interprétation). - Bonjour une nouvelle fois,

7 Monsieur Pejcinovic.

8 Je vous demanderai de prendre la page 5 de ce document dans sa

9 version en BCS lorsque vous l'aurez reçu. Et si vous le voulez bien, sur

10 votre copie, je vous demanderai de regarder le bas de la page, le

11 paragraphe où nous lisons : "Observations notées dans toutes les

12 municipalités". Vous voyez ce passage ?

13 Vous voyez ce passage Monsieur ?

14 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

15 M. Cayley (interprétation). - Je vous prierai de lire le

16 troisième titre où nous lisons "Mora".

17 M. Pejcinovic (interprétation). - "Il faut travailler à tous les

18 niveaux à élargir les compétences du HVO".

19 M. Cayley (interprétation). - Pouvez-vous, en tant qu'homme

20 politique et en tant que représentant connu de la communauté croate de

21 Vares, expliquer aux Juges ce que signifient ces termes ?

22 M. Pejcinovic (interprétation). - Ce que signifient les termes :

23 "Il faut travailler à l'extension de l'action du HVO, de la réputation du

24 HVO." ?

25 Cela signifie qu'il faut créer la confiance de tous les

Page 14638

1 habitants de la municipalité pour leur faire comprendre que ce pouvoir

2 travaille dans l'intérêt de tous les habitants.

3 M. Cayley (interprétation). - Je vous demanderai de reprendre la

4 page 6 où nous trouvons un paragraphe qui commence par : "Il faut une

5 relance de l'économie", puis nous voyons un passage qui commence par les

6 termes : "de nouveaux réfugiés arrivent quotidiennement". Vous voyez ce

7 passage ?

8 Le paragraphe commence par le mot "Busova". Vous voyez ce

9 passage ?

10 M. Pejcinovic (interprétation). - "Tous les jours, on constate

11 l'arrivée de nouveaux réfugiés, principalement des Musulmans, ce qui

12 risque de perturber l'équilibre ethnique dans nos régions. La police doit

13 travailler pour que notre municipalité serve de point de passage pour les

14 réfugiés musulmans qui devraient être dirigés vers des municipalités

15 musulmanes."

16 M. Cayley (interprétation). - Cette politique a été mise en

17 oeuvre dans tout le territoire de la communauté croate d'Herceg-Bosna,

18 n'est-ce pas ?

19 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne serai pas d'accord avec

20 cette observation. J'ai déjà dit que des réfugiés venant de Han-Pijesak,

21 de Olovsi et d'ailleurs ont été reçus dans des municipalités croates.

22 M. Cayley (interprétation). - Mais pouvez-vous commenter ce qui

23 s'est passé dans d'autres communautés de la communauté croate d'Herceg-

24 Bosna ?

25 M. Pejcinovic (interprétation). - Je n'ai pas travaillé dans ces

Page 14639

1 domaines. Je ne connais donc pas très bien cette problématique.

2 M. Cayley (interprétation). - Monsieur Pejcinovic, à cette

3 réunion, a-t-il dit qu'il n'était pas d'accord avec cette politique menée

4 par la communauté croate de Herceg-Bosna ?

5 M. Pejcinovic (interprétation). - Je n'ai pas dit que je n'étais

6 pas d'accord avec cette politique. J'ai dit ce qui s'est fait dans la

7 municipalité de Vares.

8 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, une

9 remarque d'abord et ensuite, je crois qu'il y a, à l'évidence, un

10 malentendu. Mon collègue de l'accusation demande si M. Pejcinovic à cette

11 réunion a donné son accord à cette politique de l'Herceg-Bosna. Il pense

12 sans doute à Ante Pejcinovic qui a participé à cette réunion. Or, le

13 témoin répond en pensant qu'il s'agit de lui. C'est le premier point.

14 Le deuxième point est le suivant : le témoin qui est ici,

15 Miroslav Pejcinovic, n'a pas participé à cette réunion. Il ne sait pas ce

16 que Anto Pejcinovic a dit lors de cette réunion. Il est donc impossible de

17 demander ce que Ante Pejcinovic a dit lors de cette réunion en dehors de

18 ce

19 qui figure dans le document.

20 M. le Président. - Cette réflexion de Me Nobilo est pertinente,

21 Maître Cayley. Comment vous y répondez ?

22 M. Cayley (interprétation). - Ma réponse consiste à dire que ce

23 témoin s'est présenté comme représentant important de la communauté croate

24 de Vares. Je trouverais bizarre que M. Pejcinovic ait pu revenir de cette

25 très importante réunion en septembre 1992 à Busovaca sans en informer un

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1 membre éminent de la communauté locale.

2 M. Hayman (interprétation). - Pourquoi mon collègue ne lui

3 demande pas s'il en a été informé ?

4 M. le Président. - Votre objection est valable. D'abord, est-ce

5 qu'il était à la réunion. Est-ce que c'est la même personne ? Vous voulez

6 bien lui poser la question ? Sinon, je vais la lui poser, moi.

7 M. Cayley (interprétation). - Je poserai une autre question,

8 Monsieur le Président. Comme vient de le souligner Me Nobilo,

9 Monsieur Pejcinovic, il pensait que j'étais en train de vous demander si

10 vous, vous aviez été en désaccord avec la politique consistant à déplacer

11 des réfugiés musulmans en dehors des territoires contrôlés par la

12 communauté croate d'Herceg-Bosna. Vous avez dit que vous n'étiez pas en

13 désaccord avec cette politique. Mais étiez-vous en accord avec cette

14 politique ?

15 M. Pejcinovic (interprétation). - Votre constatation est

16 inexacte car il n'est pas question en ce moment du déplacement des

17 réfugiés hors du territoire contrôlé par le HVO mais du passage de

18 réfugiés en transit qui fuyaient l'agression serbe et passaient par des

19 municipalités croates. C'est ce qui est écrit très clairement dans ce

20 document.

21 M. Cayley (interprétation). - Donc vous dites dans votre

22 déposition que vous ne souhaitiez pas que ces personnes demeurent sur des

23 territoires contrôlés par la communauté croate de Herceg-Bosna parce que

24 cela aurait déséquilibré la municipalité sur le plan ethnique.

25 M. Pejcinovic (interprétation). - Cette deuxième constatation

Page 14641

1 que vous faites est inexacte également. J'ai dit que, dans la municipalité

2 de Vares, il y a toujours eu des réfugiés d'Olovo, Bobovac et de Han-

3 Pijesak qui se trouvaient regroupés dans des centres de transit de la

4 municipalité de Vares.

5 C'est le HVO qui s'en occupait.

6 M. Cayley (interprétation). - Donc votre politique à Vares était

7 opposée à la politique établie par la Présidence de la communauté croate

8 de Herceg-Bosna ?

9 M. Pejcinovic (interprétation). - La politique menée à Vares

10 l'était dans l'esprit de la politique mise en œuvre dans tous ces

11 territoires car il n'était possible d'accepter, d'accueillir que le nombre

12 de réfugiés correspondant aux possibilités de logement. N'oubliez pas que

13 les municipalités de Bosnie centrale ont accueilli un grand nombre de

14 réfugiés croates provenant de territoires dont les avaient chassés les

15 Serbes.

16 M. Cayley (interprétation). - Mais vous conviendrez avec moi que

17 cette réunion de responsables de haut rang de la communauté croate

18 d'Herceg-Bosna a établi de la façon la plus claire que les Musulmans

19 doivent passer par les territoires contrôlés par la communauté croate

20 d'Herceg-Bosna mais en sortir de façon à maintenir l'équilibre ethnique ?

21 M. Pejcinovic (interprétation). - Sur la base du document que

22 j'ai entre les mains aujourd'hui, je ne pourrais pas aller jusqu'à dire

23 cela.

24 M. Cayley (interprétation). - Pourquoi ne souhaitez-vous pas en

25 discuter plus avant ?

Page 14642

1 M. Pejcinovic (interprétation). - Parce que je ne prends

2 connaissance du contenu de ce document qu'aujourd'hui, ici.

3 M. Cayley (interprétation). - Donc M. Anto Pejcinovic ne vous a

4 jamais mis au courant de ce document, à son retour de la réunion de

5 Busovaca ?

6 M. Pejcinovic (interprétation). - Au sujet de ce document, non.

7 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, encore une

8 objection. La question était la suivante : est-ce que Anto Pejcinovic vous

9 a mis au courant du contenu de ce document ? Or, ce témoin n'a pas eu la

10 possibilité de lire ce document, il n'en a lu que trois lignes et, en ce

11 moment, il est en train de discuter d'un document qu'il n'a jamais vu et

12 qu'il n'a jamais lu.

13 M. le Président. - C'est quand même une question... Je pense que

14 notre témoin est quand même un responsable d'un niveau intellectuel, me

15 semble-t-il, tout à fait suffisant pour avoir compris, avoir apprécié

16 rapidement ce document. Donc je crois que la question n'est pas du tout

17 illégitime de la part de l'accusation.

18 Veuillez répondre, Monsieur Pejcinovic. Maintenant, si vous

19 voulez prendre quelques minutes pour prendre connaissance du document,

20 comme cela Me Nobilo sera satisfait, vous aussi et les Juges aussi.

21 M. Cayley (interprétation). - Souhaitez-vous lire la totalité du

22 document ?

23 M. Pejcinovic (interprétation). - Non, ce n'est pas nécessaire

24 car je n'ai pas vu ce document au moment où il était actuel. Donc je ne

25 souhaite pas le commenter aujourd'hui.

Page 14643

1 M. Cayley (interprétation). - Eh bien, je vais vous poser un

2 certain nombre de questions qui ne porteront pas sur l'ensemble du

3 document mais sur certains éléments de la politique émanant de

4 responsables de haut rang du HVO. Vous étiez un responsable du HVO. Si

5 vous ne connaissez pas les éléments de la politique que je vais vous

6 citer, vous pouvez le dire aux Juges.

7 Je vais donc lire pour accélérer les choses : "Les exilés du

8 gouvernement de Bosnie-Herzégovine et de ces instances qui ont des

9 instances pro-musulmanes ne sont pas souhaités sur notre territoire,

10 compte tenu du fait qu'ils peuvent mener des activités contraires aux

11 principes du HDZ. Ils ne seront donc pas tolérés." Fin de citation.

12 Connaissez-vous cette politique du HVO ?

13 M. Nobilo (interprétation). - J'aimerais que vous nous disiez à

14 quelle page vous avez trouvé cet extrait.

15 M. Cayley (interprétation). - Il s'agit toujours du même

16 document et je crois qu'il s'agit de la page 6 de la version en BCS.

17 M. le Président. - J'ai une version française. C'est dans les

18 observations, Maître Cayley. Ce sont les "observations dans toutes les

19 municipalités" ?

20 M. Cayley (interprétation). - Je peux lire le français,

21 Monsieur le Président. Pour votre texte, cela commence par les mots : "Le

22 gouvernement de Bosnie-Herzégovine..." et le numéro IRN sur votre édition

23 française, le numéro ERN est 00516706, à peu près au milieu de la page.

24 M. le Président. - Je vous remercie.

25 M. Cayley (interprétation). – Monsieur Pejcinovic, vous avez eu

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1 quelques instants pour rassembler vos idées. Est-ce que vous connaissiez

2 cette ligne politique en Herceg-Bosna ?

3 M. Pejcinovic (interprétation). – Non.

4 Les Interprètes. – Les interprètes n'ont pas le texte sous les

5 yeux.

6 M. Cayley (interprétation). – J'aimerais maintenant vous lire le

7 dernier élément de politique qui se lit comme suit. Je cite : "Il n'y a

8 pas de langue bosniaque, c'est une insulte pour les Croates lorsque

9 quelqu'un tente de transformer la langue croate en une espèce de langue

10 bosniaque."

11 Connaissiez-vous cette déclaration politique émanant du HVO de

12 Busovaca ?

13 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne sais rien de la

14 politique du HVO à Busovaca. Simplement, je peux dire que jusqu'en 1992,

15 jusqu'à la guerre, c'est la langue serbo-croate qui existait dans notre

16 pays. Il n'y avait aucune autre langue.

17 M. Cayley (interprétation). – Monsieur Pejcinovic, autre élément

18 du compte rendu de la réunion du HVO dans toutes les municipalités

19 d'Herceg-Bosna et pas seulement à Busovaca, ce texte concerne toutes les

20 municipalités ?

21 M. Pejcinovic (interprétation). – Mais vous m'avez posé votre

22 question au sujet du HVO de Busovaca.

23 M. Cayley (interprétation). – Peut-on passer aux notes des

24 dirigeants municipaux, et j'en ai pratiquement fini. Je cite : "Sur la

25 base des observations faites par les dirigeants de toutes les

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1 municipalités représentées à cette réunion, chaque municipalité est tenue,

2 dans le respect des conditions spécifiques en vigueur sur son territoire,

3 d'adopter les décisions des séances du gouvernement dans le cadre de ces

4 principes généraux."

5 Est-ce que vous êtes d'accord, monsieur Pejcinovic sur le fait

6 que cette déclaration ordonne aux dirigeants municipaux de toutes les

7 municipalités d'Herceg-Bosna d'adopter automatiquement les déclarations

8 politiques que l'on lit dans ce document ?

9 M. Pejcinovic (interprétation). - Je n'ai pas compris votre

10 question.

11 M. Cayley (interprétation). - Si l'on se fonde sur le passage du

12 document dont je viens de donner lecture, vous conviendrez avec moi qu'un

13 ordre est donné par les représentants à cette réunion, ordre qui enjoint

14 d'adopter les orientations politiques émanant de cette réunion. Etes-vous

15 d'accord avec cela ?

16 M. Pejcinovic (interprétation). - Je n'ai pas lu ce document, je

17 ne peux pas donc pas m'exprimer sur l'ensemble de ce document.

18 M. le Président. – Monsieur Pejcinovic, il faut être très clair.

19 Vous avez eu l'occasion de prendre connaissance du document. On vient de

20 vous lire une phrase qui me paraît très claire. Il faut essayer de

21 répondre. Je vais vous répéter la question.

22 Au bas du document, on peut voir une note des dirigeants

23 municipaux. On vous la lue. La question me paraît claire. Soit vous prenez

24 votre temps pour lire cette phrase, qui ne me

25 semble pas très compliquée, mais c'est votre droit de prendre votre temps,

Page 14646

1 simplement il me semble que vous ne pouvez pas uniquement répondre que

2 vous n'avez pas pris connaissance du document. Sinon, le Tribunal va vous

3 laisser le temps de prendre connaissance du document.

4 M. Cayley (interprétation). – Avez-vous trouver ce passage,

5 monsieur, il est à la page 7 de votre exemplaire.

6 M. Pejcinovic (interprétation). – Oui, je l'ai lu.

7 M. Cayley (interprétation). – Vous conviendrez avec moi qu'il

8 s'agit d'un ordre donné par les représentants à cette réunion, à tous les

9 dirigeants municipaux des municipalités de Herceg-Bosna, selon lequel la

10 politique émanant de cette réunion doit être adoptée par ces

11 municipalités ?

12 M. Pejcinovic (interprétation). – Oui.

13 M. Cayley (interprétation). - Mais vous disiez qu'à Vares, vous

14 n'aviez adopté aucune des décisions politiques que je viens d'évoquer.

15 M. Pejcinovic (interprétation). - J'ai simplement dit que je ne

16 me rappelais pas le contenu de ce document.

17 M. Cayley (interprétation). - Avez-vous, dans la municipalité de

18 Vares, mis en œuvre les décisions politiques dont je viens de vous donner

19 lecture ?

20 M. Pejcinovic (interprétation). – J'ai dit que dans la

21 municipalité de Vares, je l'ai dit dans ma déposition, qu'une politique a

22 été mise en œuvre qui ne nuisait à aucun habitant de Vares, quelle que

23 soit sa nationalité.

24 M. Cayley (interprétation). - Est-ce que vous avez approuvé

25 l'emploi de la langue bosniaque dans la municipalité de Vares.

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1 M. Pejcinovic (interprétation). - Répondant à votre question, je

2 vous ai dit que tout le monde avait accepté l'emploi de la langue croate

3 dans les écoles de Vares. Mais personne n'interdisait que des cours soient

4 donnés en langue bosniaque. Dans les écoles, les instituteurs et les

5 enseignants qui travaillaient à ce moment-là étaient les mêmes que ceux

6 qui y travaillaient avant la guerre.

7 M. Cayley (interprétation). - Est-ce qu'une banque croate a

8 jamais été créée à Vares ?

9 M. Pejcinovic (interprétation). - Non.

10 M. Cayley (interprétation). - Est-ce que le programme

11 d'enseignement mis en place à Vares, je parle du programme d'enseignement

12 dans les écoles, avait été approuvé par la communauté croate de Herceg-

13 Bosna ?

14 M. Pejcinovic (interprétation). - Le programme d'enseignement

15 mis en place à Vares était le même que celui de toutes les écoles de la

16 communauté croate de Herceg-Bosna.

17 M. Cayley (interprétation). - Ce programme d'enseignement était

18 orienté favorablement, eu égard à la langue croate, à la culture croate et

19 à l'histoire croate, n'est-ce pas ?

20 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

21 M. Cayley (interprétation). - En fait, il consistait à exclure

22 la culture bosnienne ou musulmane. Cette culture était exclue du programme

23 d'enseignement, n'est-ce pas ?

24 M. Pejcinovic (interprétation). - Le programme d'enseignement

25 était celui qui avait été mis en place par la communauté croate de Herceg-

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1 Bosna. Puisque ce domaine n'est pas mon domaine de compétence, je ne peux

2 pas en dire grand-chose.

3 M. Cayley (interprétation). - Nous allons passer à autre chose,

4 Monsieur Pejcinovic.

5 Est-ce que vous connaissez le plan Vance-Owen ?

6 M. Pejcinovic (interprétation). - Je le connais.

7 M. Cayley (interprétation). - Connaissez-vous l'accord conclu en

8 janvier 1993 à Genève, accord approuvé par M. Tudjman et M. Boban ?

9 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne connais pas cet accord.

10 M. Cayley (interprétation). - Eh bien, si vous me le permettez,

11 je vais vous rafraîchir la mémoire.

12 Peut-on remettre au témoin la pièce à conviction 19 de

13 l'accusation ?

14 C'est une carte géographique, donc vous pourrez également

15 montrer aux Juges où se trouve la ville de Vares, puisque la carte qui se

16 trouve sur votre droite n'englobe pas la région de Vares.

17 Je vous demanderai de pointer à l'intention des Juges la

18 municipalité de Vares.

19 (Le témoin indique l'emplacement de Vares à l'aide du pointeur.)

20 M. Cayley (interprétation). - Peut-être ne connaissez-vous pas

21 les frontières provinciales établies par le plan Vance-Owen, mais savez-

22 vous que les zones qui figurent en bleues sur cette carte sont les zones

23 qui étaient destinées à devenir les cantons croates de Bosnie-

24 Herzégovine ?

25 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

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1 M. Cayley (interprétation). - Savez-vous également, ou saviez-

2 vous, que lorsque l'accord a été conclu en janvier, Vares était destinée à

3 faire partie d'une province bosnienne contrôlée par le Gouvernement de

4 Sarajevo ?

5 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

6 M. Cayley (interprétation). - Suis-je en droit de dire que le

7 HDZ et les autorités du HVO de Vares n'étaient pas très satisfaits de cet

8 état de chose, n'est-ce pas ?

9 M. Pejcinovic (interprétation). - L'accord était tel qu'il

10 était. Notre devoir consistait à mettre en oeuvre tout ce qui avait été

11 conclu et signé par les autorités supérieures.

12 M. Cayley (interprétation). - Savez-vous si oui ou non

13 M. Ante Pejcinovic a communiqué avec les autorités supérieures de Mostar

14 ou de Zagreb au sujet de ce plan de paix de Genève ?

15 M. Pejcinovic (interprétation). - Il a contacté les autorités de

16 la communauté croate de Herceg-Bosnie. Je ne sais pas si, en pratique, il

17 les a réellement contactées pour parler du plan de Genève.

18 M. Cayley (interprétation). - Seriez-vous surpris d'entendre

19 qu'il s'est plaint directement à M. Boban et à M. Tudjman quant au fait

20 que Vares ne devait pas être incorporée à la dixième province croate ?

21 M. Pejcinovic (interprétation). - Cela ne me surprendrait pas.

22 Parce qu'en tout état de cause le Président du HVO était l'homme qui avait

23 pour tâche de communiquer avec les autorités supérieures sur toute

24 question à régler.

25 M. Cayley (interprétation). - Je suis donc en droit de penser,

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1 qu'en fait, vous, les Croates de Vares, souhaitiez faire partie de la

2 communauté croate de Herceg-Bosna et non de l'Etat bosniaque contrôlé par

3 Sarajevo ?

4 M. Pejcinovic (interprétation). - Nous, les Croates de Vares,

5 souhaitions nous trouver à l'endroit où se trouvait l'ensemble du peuple

6 croate de Bosnie-Herzégovine.

7 M. Cayley (interprétation). - Et vous avez totalement rejeté

8 l'autorité du gouvernement de Sarajevo, n'est-ce pas ?

9 M. Pejcinovic (interprétation). - Le gouvernement de Sarajevo

10 n'a jamais manifesté le moindre intérêt pour nous, à Vares. Peut-être

11 qu'il manifestait un certain intérêt pour la partie de la municipalité

12 contrôlée par les Bosniens, dans le village de Dabravine.

13 M. Cayley (interprétation). - Mais pour vous et tous les Croates

14 de Vares, il était plus intéressant de faire partie de la Dixième province

15 de Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

16 M. Pejcinovic (interprétation). - A l'époque, c'était l'opinion

17 du peuple croate de Vares.

18 M. Cayley (interprétation). - Avançons, si vous le voulez bien.

19 Vous avez dit, en réponse aux questions de l'interrogatoire principal, que

20 vous vous rendiez régulièrement dans des territoires contrôlés par les

21 Serbes. Vous rappelez-vous avoir dit cela ?

22 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

23 M. Cayley (interprétation). - A quel moment la coopération avec

24 les Serbes a-t-elle commencé ?

25 M. Pejcinovic (interprétation). - Le premier convoi est parti à

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1 la fin du mois d'août 1993.

2 M. Cayley (interprétation). - J'imagine que des négociations ont

3 eu lieu au plus haut niveau pour vous permettre, à vous et à d'autres

4 Croates, de traverser les territoires contrôlés par les Serbes de Bosnie ?

5 Ai-je tort de penser cela ?

6 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne suis pas au courant de

7 cela.

8 M. Cayley (interprétation). - Donc vous ne savez pas qui, à

9 Vares, a négocié avec l'armée des Serbes de Bosnie et les autorités serbes

10 de Bosnie ?

11 M. Pejcinovic (interprétation). - Ce n'est pas ce que j'ai dit.

12 J'ai dit que je n'étais pas au courant de négociations au niveau le plus

13 important du pouvoir. Mais, dans le village de Brgule et Sokolac, le

14 Président du service d'informations, M. Zvonko Druzinovic, a négocié avec

15 l'armée des Serbes de Bosnie en tant que représentant de Vares.

16 M. Cayley (interprétation). - Donc il était le représentant

17 nommé par le HVO en provenance de Vares pour négocier avec les Serbes de

18 Bosnie et l'armée de la Republika Srpska ?

19 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

20 M. Cayley (interprétation). - A-t-il eu des réunions à Pale avec

21 Radovan Karadzic ?

22 M. Pejcinovic (interprétation). - Non.

23 M. Cayley (interprétation). - Qui M. Druzinovic a-t-il rencontré

24 parmi les Serbes de Bosnie ?

25 M. Pejcinovic (interprétation). - Monsieur Druzinovic n'a

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1 rencontré que des commandants militaires des Serbes de Bosnie.

2 M. Cayley (interprétation). - Qui étaient ces hommes ? Vous

3 rappelez-vous qui il a rencontré ?

4 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne le sais pas mais, ce que

5 je sais, c'est qu'il n'avait de contact qu'avec des commandants

6 militaires. A plusieurs reprises, lorsque je revenais dans un convoi, je

7 les rencontrais à Sokolac mais je ne sais pas qui il était allé voir.

8 M. Cayley (interprétation). - Cette coopération avec les Serbes

9 de Bosnie a commencé en août 1993. C'est bien ce que vous avez dit, n'est-

10 ce pas ?

11 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

12 M. Cayley (interprétation). - Elle s'est poursuivie pendant le

13 reste de l'année 1993 et pendant l'année 1994 ?

14 M. Pejcinovic (interprétation). - Excusez-moi, Monsieur, mais

15 cette coopération a duré jusqu'à la signature de l'accord de Washington,

16 date à laquelle les routes permettant de traverser le territoire de la

17 Fédération musulmane de Bosnie se sont ouvertes. A ce moment-là, la

18 coopération avec les Serbes a cessé.

19 M. Cayley (interprétation). - Cela s'est passé en février ou

20 mars 1994, n'est-ce pas ?

21 M. Pejcinovic (interprétation). - En mars 1994.

22 M. Cayley (interprétation). - Ces accords avec les Serbes

23 devaient-ils être approuvés à Mostar ?

24 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne sais pas s'ils étaient

25 approuvés à Mostar, car notre seul objectif consistait à garantir le

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1 passage pour permettre de faire accéder à Vares les produits dont nous

2 avions besoin.

3 M. Cayley (interprétation). - Avançons dans le temps jusqu'au

4 mois de juin 1993. A cette date, vous avez déclaré qu'un grand nombre de

5 réfugiés est arrivé à Vares en provenance de la municipalité de Kakanj.

6 Vous rappelez-vous avoir dit cela ?

7 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

8 M. Cayley (interprétation). - Parmi ces réfugiés se trouvaient

9 des Croates de Kakanj ainsi qu'un certain nombre de membres du HVO, donc

10 de militaires croates en provenance de Travnik, n'est-ce pas ?

11 M. Pejcinovic (interprétation). – Des soldats et des civils sont

12 arrivés en provenance de Kakanj, au nombre de 13 à 14 000 ; et en

13 provenance de Travnik, des personnes qui provenaient du camp de Manjaca et

14 avaient traversé, pour arriver à Vares, des territoires contrôlés par les

15 Serbes, sont arrivée à Vares.

16 M. Cayley (interprétation). – Savez-vous, au cours de cette

17 période, si des Musulmans, donc des habitants musulmans de Vares, ont été

18 chassés de leur domicile pour laisser la place à des réfugiés qui

19 arrivaient dans la ville ?

20 M. Pejcinovic (interprétation). – Je ne suis pas au courant. Je

21 ne connais aucun cas de ce genre.

22 M. Cayley (interprétation). - Si des cas de ce genre s'étaient

23 produits, en auriez-vous été informé ?

24 M. Pejcinovic (interprétation). - Il aurait fallu que je le

25 sache parce que je serais intervenu dans tous les cas, puisque j'avais

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1 pour responsabilité les questions de logement.

2 M. Cayley (interprétation). – Savez-vous que le gouvernement

3 bosnien a fait des démarches pour que ces réfugiés soient renvoyés ou

4 qu'ils puissent retourner à Kakanj ? Savez-vous cela ?

5 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne le sais pas. J'ai dit

6 que des entretiens ont eu lieu avec la municipalité de Visoko. Il était

7 question de retour de personnes qui relevaient de la municipalité de

8 Visoko. Quand aux personnes provenant de Kraljeva Supina, les entretiens à

9 ce sujet n'ont malheureusement pas abouti.

10 M. Cayley (interprétation). – Parlons du mois d'octobre 1993, si

11 vous le voulez bien, plus précisément de la date du 21 octobre 1993. Je

12 crois vous avoir entendu dire que ce jour-là, le colonel Rajic et les

13 Maturice, qui sont une unité spéciale du HVO provenant de Kiseljak, sont

14 arrivés à Vares. Je crois que vous avez dit cela en question de

15 l'interrogatoire principal, n'est-ce pas ?

16 M. Pejcinovic (interprétation). – Oui, j'ai dit que j'avais

17 appris cela, notamment par téléphone.

18 M. Cayley (interprétation). - Parce que vous, bien sûr, étiez en

19 Herzégovine, donc vous aviez des contacts quotidiens grâce au téléphone

20 mobile avec une personne à Vares ?

21 M. Pejcinovic (interprétation). – Oui.

22 M. Cayley (interprétation). – Ante Pejcinovic et Zvonko

23 Druzinovic, par qui ont-ils été arrêtés ?

24 M. Pejcinovic (interprétation). - Ils ont été arrêtées par Ivica

25 Rajic, quand il est arrivé le 21 octobre au sein du commandement de la

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1 Brigade Bobovac Vares, il les a invités à venir s'entretenir au siège du

2 commandement et c'est là qu'il les a retenus.

3 Par la suite, au bout d'une heure et demi, Gavran et Druzinovic

4 ont été transférés à Kiseljak, alors que deux autres personnes ont été

5 retenues sous escorte militaire au sein du siège de la brigade Bobovac qui

6 se trouvait à l'hôtel Ponikve.

7 M. Cayley (interprétation). – C'était d'après l'ordre donné par

8 Ivica Rajic ?

9 M. Pejcinovic (interprétation). – Oui, selon l'ordre explicite

10 donné par Ivica Rajic qui a relevé de ses fonctions, le jour en question,

11 Emil Harah, qui était auparavant à la tête de cette brigade et qui a mis à

12 sa place, Bojic.

13 M. Cayley (interprétation). – Monsieur, pensez-vous que M. Rajic

14 a agi sous les ordres directs du général Petkovic ?

15 M. Pejcinovic (interprétation). – J'ai dit qu'à l'époque, à

16 Kiseljak, se trouvait M. Milivoj Petkovic, mais je ne sais pas qui a donné

17 les ordres, à qui et dans quel sens.

18 M. Cayley (interprétation). – Si M. Petkovic a effectivement

19 donné des ordres à M. Rajic d'arrêter ces individus-là, vous n'en n'auriez

20 pas eu connaissance ?

21 M. Pejcinovic (interprétation). - Je n'ai pas. On m'a dit

22 uniquement ce qui s'est déjà produit. Les gens sont venus, ils sont montés

23 là-haut, au Siège, et, de la part de l'escorte d'Ivica Rajic, ils ont été

24 désarmés et ont été placés sous la surveillance de cette escorte

25 militaire. D'après l'ordre qui a été signé par M. Rajic, il y a eu ce

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1 changement à la tête du commandement de cette brigade. Je ne sais pas, par

2 ailleurs, de qui M. Rajic aurait pu obtenir un ordre ni évidemment, par

3 voie de conséquence, si cela venait de M. Petkovic.

4 M. Hayman (interprétation). - Je voudrais qu'il soit consigné au

5 procès-verbal que le conseil a affirmé qu'apparemment le Bureau du

6 Procureur possède confirmation qu'un ordre aurait été donné par

7 M. Petkovic à l'adresse de M. Rajic. Ce serait une preuve à décharge que

8 la défense ne possède pas. Je voudrais simplement que ceci soit consigné

9 au procès-verbal.

10 M. le Président. – Maître Cayley, tout ceci est au procès-verbal

11 de toute façon.

12 M. Cayley (interprétation). - Il est parfaitement naturel, au

13 sein d'une organisation militaire, que les supérieurs émettent des ordres

14 à l'adresse de leurs subordonnés. Ceci peut aller à plusieurs niveaux plus

15 bas. Donc M. Petkovic aurait pu émettre un ordre à M. Petkovic (Rajic) qui

16 était sous les ordres de M. Blaskic.

17 M. Hayman (interprétation). - Les ordres militaires peuvent

18 sauter plusieurs niveaux de hiérarchie militaire. Ceci est pertinent pour

19 l'ensemble de cette affaire.

20 M. Cayley (interprétation). – Il s'agit de sauter un seul

21 niveau, Monsieur le Président, en l'occurrence.

22 M. le Président. – Maître Cayley poursuivez. Maître Hayman, a

23 fait son observation qui est transcrite au compte rendu. Les juges

24 apprécieront le moment venu.

25 M. Cayley (interprétation). – Monsieur Pejcinovic, je pense que

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1 vous êtes intervenu au nom de M. Pejcinovic auprès de M. Boban ?

2 M. Pejcinovic (interprétation). – Oui.

3 M. Cayley (interprétation). – Et vous êtes allé le voir à

4 Grude ?

5 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

6 M. Cayley (interprétation). - Je pense qu'il a appelé

7 directement M. Petkovic qui se trouvait à Kiseljak ?

8 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

9 M. Cayley (interprétation). - Monsieur Petkovic était l'officier

10 le plus haut gradé au sein du HVO dans cette zone à l'époque ?

11 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne sais pas exactement quel

12 était le grade de M. Petkovic, mais je pense qu'il était adjoint au chef

13 du quartier général.

14 M. Cayley (interprétation). - A l'époque, il était à la tête du

15 quartier général du HVO. Il était directement sous les ordres de M. Boban

16 qui était le commandant en chef des forces armées du HZ-HB de la

17 communauté croate de Herceg-Bosna ?

18 M. Pejcinovic (interprétation). - Il se peut qu'il en était

19 ainsi, mais je ne m'en souviens pas.

20 M. Cayley (interprétation). - Ainsi vous déposez aujourd'hui que

21 vous ne connaissez pas très bien la structure militaire du HVO sur

22 l'ensemble du territoire de la communauté croate de Herceg-Bosna ?

23 M. Pejcinovic (interprétation). - Je la connais bien, mais je ne

24 me souviens pas si M. Petkovic était à la tête ou bien s'il était

25 seulement adjoint parce que plus tard, c'est M. Paraga qui apparaît. Je ne

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1 sais pas exactement quelle fonction il avait.

2 M. Cayley (interprétation). - Vous connaissez bien la structure

3 militaire, mais pour cette période, plus concrètement, vous ne savez pas

4 qui était à la tête des forces armées de la HZ-HB ?

5 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne sais pas ce qu'était

6 M. Petkovic.

7 M. Cayley (interprétation). - Conviendrez-vous avec moi pour

8 considérer qu'il aurait été raisonnable de la part de M. Boban d'appeler

9 son subordonné immédiat afin d'intervenir dans les événements de Vares ?

10 Cet individu était M. Petkovic.

11 M. Pejcinovic (interprétation). - C'est ce que j'ai dit dans ma

12 déposition. Monsieur Boban a appelé M. Petkovic pour demander ce qui était

13 en train de se passer à Vares, quand je lui ai dit que le Président du

14 HVO, Ante Pejcinovic, venait d'être arrêté.

15 M. Cayley (interprétation). - Vous seriez d'accord avec moi pour

16 dire que puisque M. Petkovic se trouvait basé à Grude avec M. Boban, que

17 c'était naturel qu'il fasse cela s'il voulait savoir ce qui se passait en

18 Bosnie centrale.

19 M. Pejcinovic (interprétation). - Je n'ai dit dans ma déposition

20 que ce qui s'est produit en ma présence dans le bureau de Mate Boban. Je

21 ne peux pas parler de supposition.

22 M. Cayley (interprétation). - Vous avez déposé pendant

23 l'interrogatoire principal que le village de Stupni Do, le village

24 musulman de Stupni Do, a été attaqué par les forces du HVO sous le

25 commandement d'Ivica Rajic le 23 octobre 1993, vous vous en souvenez ?

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1 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui. J'ai dit que j'avais reçu

2 cette information par voie du téléphone mobile.

3 M. Cayley (interprétation). - Vous étiez en contact permanent

4 par téléphone mobile avec Vares à cette époque-là.

5 Pouvez-vous dire maintenant à la Chambre combien de maisons ont

6 été incendiées dans ce village par les soldats du HVO ?

7 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne pourrais pas le dire

8 avec précision. Je pourrais estimer leur nombre à environ une soixantaine.

9 M. Cayley (interprétation). - En fait, c'est la plupart des

10 maisons de ce village ?

11 M. Pejcinovic (interprétation). - Je n'ai pas dit le contraire.

12 M. Cayley (interprétation). - Combien de personnes ont été tuées

13 dans ce village le jour en question ?

14 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne peux pas vous le dire.

15 Ce que je sais de la presse bosniaque, c'est qu'il s'agit de 38 personnes

16 dont dix combattants.

17 M. Cayley (interprétation). - Savez-vous, Monsieur, combien de

18 femmes et d'enfants ont été tués pendant cette attaque ?

19 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne sais pas exactement

20 combien de femmes et d'enfants ont été tués pendant cette attaque.

21 M. Cayley (interprétation). - Connaissez-vous le nombre de

22 femmes musulmanes qui ont été violées par les membres des forces du HVO le

23 jour en question ?

24 M. Pejcinovic (interprétation). - Cela non plus, je ne le sais

25 pas.

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1 M. Cayley (interprétation). - Savez-vous qu'Ivica Rajic a

2 accepté le fait qu'il était responsable des événements qui se sont

3 produits à Stupni Do et qu'il l'a fait devant un officier suédois qui

4 était placé à Vares ? Il l'a fait le 25 octobre 93.

5 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne suis pas au courant.

6 M. Cayley (interprétation). - Savez-vous qu'Ivica Rajic a

7 déclaré que c'étaient ses unités de ce commandement de Kiseljak qui ont

8 effectué ce massacre de Stupni Do.

9 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne le sais pas. Quand je

10 suis revenu à Kiseljak, il n'en était plus question.

11 M. Cayley (interprétation). - Vous seriez d'accord avec moi pour

12 affirmer que les événements qui se sont produits à Stupni Do ont été

13 horribles, n'est-ce pas ?

14 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

15 M. Cayley (interprétation). - L'attaque par l'armée de Bosnie-

16 Herzégovine sur Vares s'est produite immédiatement après cette attaque

17 menée par le HVO sur Stupni Do, n'est-ce pas ?

18 M. Pejcinovic (interprétation). - L'attaque principale s'est

19 produite immédiatement après. Mais je ne serai pas d'accord à vous pour

20 dire que ceci a été la principale cause de cette attaque.

21 M. Cayley (interprétation). - Vous seriez néanmoins d'accord

22 pour dire que l'attaque principale sur Vares s'est produite après le

23 23 octobre 1993 ?

24 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui. On peut dire que

25 l'attaque décisive menée par l'armée de Bosnie-Herzégovine, la prise de

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1 Vares, est le fait de chasser la population croate de cette ville.

2 M. Cayley (interprétation). - Je pense que vous vous trouviez en

3 Herzégovine pendant tous ces événements ?

4 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

5 M. Cayley (interprétation). - Mais comme vous l'avez dit à

6 plusieurs reprises, vous étiez en contact permanent par téléphone mobile

7 avec Vares ?

8 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

9 M. Cayley (interprétation). - Le général Petkovic était-il

10 présent à Kiseljak pendant cette période, le 21, le 22, le 23 octobre

11 1993.

12 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne le sais pas et je n'ai

13 pas parlé de cela. Sauf le 22, quand j'ai eu l'occasion de parler avec M.

14 Boban. Là, je sais qu'il se trouvait à Kiseljak. Quand il est arrivé ?

15 Quand il est reparti ? Je ne sais pas.

16 M. Cayley (interprétation). - Vous seriez d'accord pour dire

17 qu'après la conversation par téléphone qui s'est déroulée entre M. Boban

18 et M. Petkovic, le général Petkovic savait qu'Ivica Rajic se trouvait à

19 Vares et qu'il s'y trouvait pendant cette période.

20 M. Pejcinovic (interprétation). - Cela non plus, je ne le sais

21 pas. Je ne sais pas s'il le savait ou s'il ne le savait pas. Je ne peux

22 pas ici me lancer dans des suppositions.

23 M. Cayley (interprétation). - Vous-même, vous étiez présent lors

24 de la conversation par téléphone entre MM. Boban et Petkovic ?

25 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

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1 M. Cayley (interprétation). - M. Boban, qu'a-t-il dit à

2 M. Petkovic ?

3 M. Pejcinovic (interprétation). - "S'il te plaît, vois ce qui se

4 passe à Vares. J'ai reçu une information disant que le président du HVO à

5 Vares, Anto Pejcinovic a été arrêté".

6 M. Cayley (interprétation). - A-t-il dit par qui Anto Pejcinovic

7 a été arrêté à Vares ?

8 M. Pejcinovic (interprétation). - Non.

9 M. Cayley (interprétation). - Il a simplement dit qu'il a été

10 arrêté ?

11 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

12 M. Cayley (interprétation). - A Kiseljak, au mois de novembre, à

13 ce moment-là, vous étiez à Kiseljak ? N'est-ce pas ?

14 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui. A partir du 26 novembre

15 1993.

16 M. Cayley (interprétation). - Savez-vous si oui ou non, pour

17 cette période-là, M. Rajic ou les Maturice ont fait l'objet d'une enquête

18 pour sanctionner quelqu'un pour les événements qui se sont produits à

19 Stupni Do?

20 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne sais pas.

21 M. Cayley (interprétation). - Mais vous étiez présent à des

22 réunions quotidiennes avec M. Rajic, n'est-ce pas ?

23 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

24 M. Cayley (interprétation). - S'il y avait eu une enquête,

25 M. Rajic en aurait parlé à ces réunions quotidiennes ? C'était un

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1 événement important ?

2 M. Pejcinovic (interprétation). - Je vous ai dit que, concernant

3 ces événements terribles de Stupni Do, personne n'en a parlé. Et moi-même,

4 je ne posais pas de question car je voulais protéger ma vie.

5 M. Cayley (interprétation). - A quel moment êtes-vous parti de

6 Kiseljak ?

7 M. Pejcinovic (interprétation). - Je suis parti de Kiseljak sur

8 une partie de la municipalité de Vares qui se trouvait sous le contrôle du

9 HVO au début du mois de septembre 94.

10 M. Cayley (interprétation). - Et pendant l'ensemble de cette

11 période, savez-vous si une enquête quelconque a été menée, si une sanction

12 quelconque aurait été prononcée contre les personnes responsables des

13 événements de Stupni Do ?

14 M. Pejcinovic (interprétation). - Non, je ne suis pas au courant

15 de cela.

16 M. Cayley (interprétation). - Vous savez qu'au mois de septembre

17 94, l'accusé Blaskic était à la tête du quartier général du HVO ?

18 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, nous nous

19 sommes écartés un an par rapport au champ de l'interrogatoire principal.

20 M. Cayley (interprétation). - Absolument pas, Monsieur le

21 Président. Le document qu'ils ont versé couvre les événements de 1996.

22 M. le Président. - Le témoin lui-même, Maître Nobilo, a indiqué

23 qu'un certain nombre de villages qui ont connu des atrocités, ces villages

24 avaient fait l'objet de ces atrocités à une période qui était de 1994.

25 Cette question peut donc être posée.

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1 D'autre part, s'agissant d'un responsable important du HVO, la

2 question ne me paraît pas saugrenue ou étrange. Donc, poursuivez, Maître

3 Cayley.

4 M. Cayley (interprétation). - Savez-vous qu'en septembre 1994,

5 l'accusé Blaskic était à la tête du quartier général du HVO ? Il était en

6 fait le commandant du HVO ?

7 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne sais pas exactement à

8 quel moment le colonel Blaskic est devenu chef du quartier général du HVO

9 puisque la paix était déjà rétablie. Moi-même, j'étais à la tête du

10 conseil municipal de Vares, à la tête des pouvoirs civils de Vares.

11 L'armée était démobilisée. Je ne sais pas exactement par quel ordre, à

12 quel moment, qui a été nommé et à quel poste.

13 (L'interprête se reprend : L'armée n'a pas été démobilisée mais

14 bien constituée.)

15 M. Cayley (interprétation). - Vous saviez qu'à un certain moment

16 de l'année 94, le colonel Blaskic a effectivement été commandant du HVO du

17 HZ-HB ?

18 M. Hayman (interprétation). - Nous sortons du champ de

19 l'interrogatoire principal. Et ceci, nous l'avons dépassé de 11 mois.

20 M. Cayley (interprétation). - C'est la défense qui nous y a

21 emmenés par les documents qu'ils ont versés.

22 M. le Président. - C'est la défense qui a amené sur ce point-là,

23 Maître Hayman. Donc, Me Cayley continue.

24 M. Hayman (interprétation). - Je veux qu'il soit consigné au

25 procès-verbal que nous avons versé..

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1 M. le Président. - A chaque fois que vous dites cela, c'est un

2 peu outillé dans le procès-verbal. Vous en ferez usage à tout moment,

3 comme tout le monde d'ailleurs, comme les Juges aussi. C'est consigné.

4 M. Hayman (interprétation). - D'accord, Monsieur le Président.

5 Mais je voudrais exposer notre position. Si vous ne m'y permettez pas,

6 ceci ne rentrera pas dans le procès verbal.

7 M. le Président. - Exposez votre position, mais c’est pris sur

8 votre temps, Maître Hayman.

9 M. Hayman (interprétation). - D'accord, Monsieur le Président,

10 nous avons versé des éléments de preuve pour montrer l'état de dégradation

11 des relations entre ces groupes ethniques. Nous n'avons absolument pas

12 introduit des éléments de preuve concernant des crimes concrètement commis

13 par le HVO, des sanctions qui auraient été prononcées.

14 Actuellement, la partie adverse cherche à montrer que l'accusé a

15 failli faire quelque chose en décembre 1994 ou mars 1995. Cela veut dire

16 un an après le moment de l'accusation, des charges portées dans l'acte

17 d'accusation.

18 M. le Président. - Maître Cayley, vous répondez et ensuite nous

19 poursuivrons le débat. Je rappelle que l'acte d'accusation va jusqu'en

20 mai 1994, mais je crois que le problème n'est pas là, Maître Hayman.

21 M. Hayman (interprétation). - Le mois de janvier.

22 M. Cayley (interprétation). - Tout d'abord, Monsieur le

23 Président, ces éléments de preuve qui sont introduits par le biais de ce

24 témoin couvrent la période allant jusqu'en 1996 et il s'agit de la

25 destruction des villages croates. Là, je ne peux parler qu'au nom de mon

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1 propre système juridique et je veux dire que les éléments de preuve qui ne

2 rentrent pas strictement dans le champ chronologique de l'acte

3 d'accusation ne sont jamais exclus s'ils sont pertinents par rapport au

4 chef d'accusation.

5 Devant un Tribunal, on peut les présenter parce que cela peut

6 être lié à la date d'aujourd'hui. Le mois de novembre 1988, cela ne veut

7 pas dire que cela exclut les moyens de preuve qui relèvent d'une période

8 immédiatement antérieure ou ultérieure. Ce n'est pas du tout sérieux de

9 suggérer cela.

10 Permettez-moi de dire qu'il est tout à fait raisonnable de poser

11 ce genre de question, à savoir : est-ce que M. Blaskic, qui était

12 commandant du HVO, savait quelque chose au sujet des événements de Stupni

13 Do ?

14 M. Shahabuddeen (interprétation). - Permettez-moi de poser une

15 question. Il y a

16 une chose qui est de savoir si le général Blaskic avait la possibilité de

17 faire en sorte que les manquements à la discipline soient sanctionnés,

18 supposant qu'il l'ait eue, et qu'il ait cherché à garantir que des

19 problèmes d'indiscipline soient punis. Est-ce que la défense aurait le

20 droit de présenter ces éléments de preuve ? Est-ce que quelque chose

21 aurait pu l'empêcher de présenter ce genre de moyens de preuve ?

22 La question de savoir si le général Blaskic est devenu chef de

23 l'état-major, est-ce pertinent ou non pertinent concernant cette

24 question ?

25 M. Hayman (interprétation). - Monsieur le Juge, la question qui

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1 est pertinente pour la Chambre est de savoir quelles sont les chefs

2 d'accusation. Ici, nous avons quatre municipalités : Vitez, Busovaca,

3 Kiseljak et Zenica. La période va de mai 1993 à janvier 1994.

4 Alors, ce que nous suggère M. Cayley en disant cela, c'est que

5 cette Chambre peut condamner le général Blaskic pour une omission qui

6 s'est produite après ou avant, donc pour ne pas avoir mené d'enquête pour

7 sanctionner quelqu'un, et ceci à l'extérieur du territoire qui est

8 concerné par l'acte d'accusation.

9 Je pense que ceci n'est pas exact. Je suis tout à fait d'accord

10 sur le fait que les moyens de preuve que nous cherchons à introduire, à

11 savoir les preuves de bon comportement, de caractère, qu'elles peuvent

12 sortir du champ de l'acte d'accusation. Mais ce que nous entendons

13 maintenant, c'est de dire que la Chambre peut condamner mon client pour

14 quelque chose qui dépasse largement le champ de l'acte d'accusation, que

15 ce soit sur le plan territorial ou chronologique. Ceci me fait très peur

16 d'entendre mon collègue avancer ce genre d'opinion devant cette Chambre.

17 M. le Président. - Je ne peux pas laisser suggérer ici, dans une

18 audience publique, que vous pourriez imaginer que les Juges composent

19 cette Chambre, pourraient déterminer l'éventuelle culpabilité ou

20 responsabilité de l'accusé sur des faits qui ne sont pas inclus dans

21 l'acte d'accusation.

22 Deuxième observation. On parle toujours de système judiciaire.

23 Je vous rappelle qu'ici ce n'est un problème de savoir si nous appliquons

24 le système judiciaire de la common law ou le système judiciaire de la

25 civil law ou je ne sais quel autre système. Ici, il y a des Juges qui

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1 cherchent à savoir la vérité et le Règlement -je vous le rappelle- leur en

2 donne tous les pouvoirs. Il y a nombre de dispositions qui permettent

3 aux Juges de se faire toute une série de convictions à partir de nombres

4 d'éléments de preuve.

5 Troisièmement, Maître Hayman, lorsque, au cours

6 d'interrogatoires ou de contre-interrogatoires particulièrement longs, qui

7 peuvent parfois durer des jours et des jours, je ne me permets que très

8 rarement d'intervenir parce que je sais que vous pouvez me répondre à tout

9 moment : "Monsieur le Juge, Monsieur le Président, vous n'avez pas le

10 dossier". Peut-être la question qui vous apparaît superfétatoire

11 maintenant viendra à l'appui de notre thèse dans trois jours, dans trois

12 mois, dans six mois.

13 Eh bien, permettez aux Juges également, qui détiennent de par le

14 Statut et le Règlement le pouvoir d'arriver tout simplement à la

15 manifestation de la vérité, qui disposent d'un article 98 leur permettant

16 d'ailleurs à tout moment de faire appel à certains éléments de preuve,

17 permettez simplement à ces Juges -d'abord faites leur confiance- et

18 permettez à ces Juges, lorsqu'il y a un témoin qui a exercé des fonctions

19 importantes au sein du HVO, de pouvoir répondre sur un certain nombre de

20 points. Sinon, il faudrait peut-être effectivement le rappeler, ce qui ne

21 serait pas non plus d'une bonne administration de la justice.

22 Enfin dernier point, mais j'aurais dû le dire en premier, les

23 observations pertinentes de M. le Juge Shahabuddeen auraient dû clore le

24 débat beaucoup plus rapidement.

25 M. Shahabuddeen (interprétation). - Permettez-moi d'ajouter une

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1 remarque à ce que M. le Président vient de dire.

2 Comme vous le savez très bien, il n'est pas dans mes habitudes

3 d'intervenir pendant la présentation des moyens de preuve, puisque je

4 comprends parfaitement que les conseils poursuivent selon la manière dont

5 ils ont conçu leur présentation de leurs preuves, et qu'il n'est pas bien

6 d'intervenir.

7 Mais ce que je souhaite dire maintenant, c'est que je partage

8 absolument les garanties dont vient de vous parler M. le Président. Vous

9 n'avez absolument pas à avoir peur. Cette Chambre n'imaginera même pas de

10 condamner un accusé par rapport aux faits qui dépassent le champ de l'acte

11 d'accusation. Ceci n'était absolument pas en question.

12 Ce que je souhaite dire, c'est que les éléments qui sortent de

13 la période couverte par l'acte d'accusation ne sont pas admissibles. Ce

14 que je souhaite dire, c'est que cela vient dans la suite de la période qui

15 est couverte par l'acte d'accusation.

16 Est-ce qu’il y a quelque chose dans la loi qui empêcherait la

17 défense de présenter ce genre de moyens de preuve ? Non, je ne pense pas.

18 Ces moyens de preuve sont présentables ou non selon leur pertinence.

19 M. Hayman (interprétation). - Je suis d'accord, Monsieur le

20 Juge, mais je ne pense pas que la situation est symétrique. Ici, par

21 exemple, nous avons des questions qui dépassent, sur le plan chronologique

22 et territoriale, ce qui est dans l'acte d'accusation. Est-ce acceptable ?

23 M. Cayley (interprétation). - Est-ce que je dois répondre avec

24 ce que vient de dire mon collègue ou je poursuis mes questions ?

25 M. le Président. - Poursuivez vos questions. Je pense qu'il faut

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1 bien savoir que le maniement de cette Règle, qui est d'ailleurs de votre

2 système, Maître Cayley et Maître Hayman, de l'interrogatoire et du contre-

3 interrogatoire est uniquement d'essayer de rééquilibrer le contre-

4 interrogatoire par rapport à l'interrogatoire. C'est uniquement une

5 question de bonne organisation des débats.

6 Je crois savoir, pour m'être informé, qu'il y a des pays de

7 common law où il n'y a aucune limite au contre-interrogatoire. Je crois

8 pouvoir le dire. Nous avons beaucoup de Juges qui disent que la règle de

9 l'adéquation du contre-interrogatoire et de l'interrogatoire principal

10 n'est pas reconnue par tous les systèmes de common law de la même façon.

11 C'est donc complexe.

12 De surcroît, nous ne sommes pas liés par ces principes.

13 J'essaie, en accord avec mes collègues qui m'ont mandaté pour vous le

14 dire, d'essayer pour une bonne administration des débats de faire en sorte

15 que lorsque des questions sont posées d'un côté, on essaie d'y répondre de

16 l'autre.

17 Mais concevez, Maître Hayman et Maître Nobilo, je le dirais à

18 l'accusation en situation inverse, que l'on ne peut pas appliquer cela

19 sans un minimum de flexibilité. Pourquoi ? Je vais l'expliquer. Je fais

20 preuve de pédagogie pour le public. Quand vous faites venir un témoin,

21 vous la défense, ou vous l'accusation, évidemment vous l'avez préparé,

22 vous avez discuté avec lui. Il vient donc sur un champ extrêmement précis

23 de questions que vous allez lui poser.

24 Evidemment, cela serait beaucoup plus confortable pour vous si

25 très exactement la partie adverse se calait sur ces questions. Mais vous

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1 savez bien que ce n'est pas comme cela que ça se passe. Vous avez usé de

2 votre droit lorsque les témoins venaient de l'accusation. Nous sommes bien

3 obligés, nous les Juges, dont la mission première n'est pas de savoir qui

4 a raison de l'accusation ou de la défense, notre mission première est de

5 savoir ce qui s'est passé réellement. Nous ne pouvons pas nous priver d'un

6 certain nombre d'informations. Celles-ci en font partie.

7 Cela ne veut pas dire que nous renonçons à cette adéquation

8 souple de l'interrogatoire et du contre-interrogatoire. Mais concevez que

9 c'est une application qui doit se faire avec flexibilité.

10 Poursuivez, Maître Cayley. Si vous voulez bien, Maître Hayman,

11 ce temps ne vous sera pas décompté.

12 Allez-y, Maître Cayley, vous terminez cette question puisque

13 nous ferons une pause ensuite.

14 M. Cayley (interprétation). - Monsieur Pejcinovic, par

15 conséquent, vous avez déposé en disant que depuis votre séjour à Kiseljak,

16 qui s'est passé entre le mois de novembre 1993 et septembre 1994, vous

17 n'étiez pas au courant qu'il y avait une poursuite contre Ivica Rajic ou

18 les autres collaborateurs du HVO de Kiseljak.

19 M. Pejcinovic (interprétation). - J'ai bien dit que, depuis les

20 accords de Washington, toutes les réunions qui avaient eu lieu tous les

21 jours ont cessé.

22 A partir de ce moment-là, j'avais beaucoup moins d'informations

23 et je n'étais pas aussi au courant comme je l'étais pendant la période qui

24 avait précédé.

25 Pour cette période, j'affirme qu'il n'y avait aucune mesure

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1 disciplinaire qui avait été commencée. Par la suite, j'ai cessé de

2 contacter les militaires à Kiseljak et je ne sais pas ce qui s'est passé

3 par la suite.

4 M. Cayley (interprétation). - Est-ce que vous étiez au courant

5 si Ivica Rajic, après les accords de Washington, était resté à Kiseljak ?

6 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne sais pas s'il est parti

7 tout de suite après la signature des accords de Washington ou quinze

8 jours, un mois plus tard. Je ne peux pas m'en souvenir. Je n'en ai pas

9 tenu compte.

10 M. Cayley (interprétation). - On peut éventuellement faire la

11 pause, Monsieur le Président.

12 L'audience, suspendue à 15 heures 50, est reprise à

13 16 heures 15.

14 M. le Président. - Nous reprenons. Faites entrer l'accusé.

15 (L'accusé, M. Blaskic, est introduit dans la salle d'audience.)

16 Maître Cayley.

17 M. Cayley (interprétation). – Monsieur Pejcinovic, je voudrais

18 vous poser quelques

19 autres questions concernant M. Anto Pejcinovic. Au moment où M. Boban

20 avait appelé M. Petkovic concernant la situation dans laquelle se trouvait

21 M. Anto Pejcinovic, pouvez-vous me dire s'il a été libéré ou non ?

22 M. Pejcinovic (interprétation). – J'ai pu savoir

23 qu'ultérieurement que M. Anto Pejcinovic a été libéré le 22 février 93 et

24 que le soir, il s'est adressé à la télévision à la population. Il a parlé

25 à la population civile de Vares.

Page 14673

1 M. Cayley (interprétation). – En d'autres termes, M. Boban a

2 parlé uniquement avec M. Petkovic. Par conséquent, nous pouvons conclure

3 qu'après cet entretien, M. Petkovic a parlé avec M. Rajic qui avait laissé

4 en liberté M. Pejcinovic ?

5 M. Pejcinovic (interprétation). - Je peux dire que M. Pejcinovic

6 a été laissé en liberté, après cette conversation qui a eu lieu entre

7 M. Petkovic et M. Boban. Je ne peux pas savoir qui est intervenu par la

8 suite et comment la conversation s'est déroulée. C'est une hypothèse, ce

9 n'est pas ma conclusion.

10 M. Cayley (interprétation). – Monsieur Pejcinovic, le

11 26 novembre 1993, vous avez dit que M. Anto Pejcinovic était parti en

12 hélicoptère de Kiseljak, en direction de Grude ?

13 M. Pejcinovic (interprétation). – Avant le 26 novembre, il est

14 parti en hélicoptère à Grude parce qu'au moment où je me suis rendu à

15 Kiseljak, le 26 novembre, alors que cela durait quelque jours depuis

16 Herzégovine jusqu'à Kiseljak, un peu avant mon départ, j'ai pu rencontré

17 Anto Pejcinovic. Donc c'est à (?) que je l'ai rencontré.

18 M. Cayley (interprétation). – Comment avez-vous su que

19 M. Pejcinovic avait pris l'hélicoptère pour se rendre à Grude.

20 M. Pejcinovic (interprétation). – C'est Ashir Kiprje qui m'avait

21 dit qu'il était venu en hélicoptère.

22 M. Cayley (interprétation). – Pouvez-vous me dire à quel endroit

23 ce trouvait un héliodrome à Kiseljak ?

24 M. Pejcinovic (interprétation). – Les hélicoptères qui prenaient

25 les blessés se posaient sur le stade de football.

Page 14674

1 M. Cayley (interprétation). – Pendant que vous avez séjourné à

2 Kiseljak, les hélicoptères volaient-ils régulièrement de Kiseljak en

3 provenant ou en direction d'autres villes ?

4 M. Pejcinovic (interprétation). – Cela dépendait également du

5 nombre de blessés ou de malades, mais ce n'était pas régulier.

6 M. Cayley (interprétation). – Saviez-vous si les hélicoptères

7 volaient en direction de Vitez ou de Busovaca ?

8 M. Pejcinovic (interprétation). – A ma connaissance, non. Tout

9 au moins, je ne suis pas au courant. Je peux seulement parler des

10 hélicoptères qui avaient transporté les blessés. J'ai vu cela

11 personnellement, il y avait des ambulances qui transportaient les blessés

12 en direction de l'hôpital Split.

13 M. Cayley (interprétation). - Vous ne savez pas quels étaient

14 endroits qui ont été utilisés à Busovaca ou à Vitez pour les hélicoptères,

15 pour se poser ?

16 M. Pejcinovic (interprétation). – Non.

17 M. Cayley (interprétation). - Vous voulez dire que vous n'êtes

18 pas au courant.

19 M. Pejcinovic (interprétation). – Non, je ne connais pas les

20 endroits où les hélicoptères pouvaient se poser à Busovaca ou Vitez.

21 M. Cayley (interprétation). – Vous avez dit, par ailleurs,

22 qu'après le 26 octobre 1993, vous avez pu rencontrer régulièrement

23 M. Ivica Rajic et d'autres collaborateurs d'Ivica Rajic ?

24 M. Pejcinovic (interprétation). – C'est effectivement entre le

25 mois d'octobre et le mois de novembre que j'étais à Kiseljak, jusqu'au

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1 27 novembre j'y suis resté.

2 M. Cayley (interprétation). - Ces réunions se sont arrêtées

3 après les accords de Washington ?

4 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

5 M. Cayley (interprétation). - Est-ce que lors de ces réunions on

6 avait passé en revue la situation militaire en Bosnie centrale ? Est-ce

7 que cela s'est fait régulièrement ?

8 M. Pejcinovic (interprétation). - On a parlé de tous les

9 problèmes lors de ces réunions et tout ce qui concernait l'enclave de

10 Kiseljak et de Krecevo. On n'a pas parlé d'autres espaces de la Bosnie

11 centrale.

12 M. Cayley (interprétation). - Monsieur, est-ce que la situation

13 militaire à Kiseljak a-t-elle été examinée lors de ces réunions ?

14 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui, elle a été examinée, mais

15 pas en détail.

16 M. Cayley (interprétation). - En ce qui concerne les lignes de

17 front entre l'armée de Bosnie-Herzégovine et du HVO, est-ce qu'on en a

18 parlé lors de ces réunions ?

19 M. Pejcinovic (interprétation). - Comme je suis venu de

20 Kiseljak, je ne connaissais pas ces lignes de front. Cela ne m'intéressait

21 pas beaucoup. C'est la raison pour laquelle c'était assez étrange pour

22 moi. Je ne me suis pas intéressé lorsqu'on a parlé de ces lignes de front.

23 M. Cayley (interprétation). - Mais il a été question lors de ces

24 réunions de ces lignes de front ?

25 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

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1 M. Cayley (interprétation). - Est-ce que vous savez que les

2 prisonniers musulmans, que ce soit des combattants ou des civils, ont été

3 utilisés pour creuser des tranchées sur ces lignes de front ?

4 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne suis pas au courant.

5 M. Cayley (interprétation). - Un des témoins de la défense qui

6 avait déposé ici il y a deux semaines, et un prêtre catholique,

7 Iva Pervan, est-ce que vous le connaissez ?

8 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

9 M. Cayley (interprétation). - Eh bien, il avait assisté de temps

10 à autres à ces réunions dont vous parlez avec M. Ivica Rajic et il avait

11 dit que lors de ces réunions on avait parlé régulièrement de creusements

12 de tranchées.

13 M. Nobilo (interprétation). - Je pense que le témoin de la

14 défense n'a pas été bien interprété. Il disait qu'il se rendait chez

15 Ivica Rajic pour prendre un café. Il n'a pas parlé des réunions auxquelles

16 il assistait.

17 M. le Président. - C'étaient des réunions où l'on prenait le

18 café ou des réunions stratégiques ?

19 M. Cayley (interprétation). - Je ne peux pas dire, Monsieur le

20 Président, que le témoin en question avait parlé des boissons chaudes

21 qu'il prenait. Je me souviens fort bien qu'il avait dit qu'il avait

22 assisté à un certain nombre de ces réunions, qu'il avait parlé des

23 creusements des tranchées aussi bien avec le général Petkovic qu'avec le

24 colonel Rajic.

25 M. Hayman (interprétation). - En ce qui me concerne, je me

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1 souviens qu'il l'avait rencontré de temps à autres, soit dans sa demeure

2 paroissiale ou dans la caserne et que c'étaient des réunions de tête à

3 tête et pas véritablement des réunions auxquelles ont présidé les civils

4 et les militaires.

5 M. le Président. - Maître Hayman, on va demander au témoin.

6 C'était quoi ces réunions ? Vous vous rencontriez régulièrement

7 pour prendre le café ou je ne sais quoi ?

8 M. Pejcinovic (interprétation). - C'était tous les soirs à

9 19 heures que nous nous sommes réunis en réunion de travail. Lors de ces

10 réunions, on n'a pas bu de café, mais lors de ces réunions jamais le

11 Père Iva Pervan y était.

12 M. le Président. - Je crois que c'est clair, merci.

13 Maître Cayley, modifiez votre question en conséquence.

14 M. Cayley (interprétation). - Monsieur Pejcinovic, lors de ces

15 réunions à Kiseljak, est-ce qu'on avait parlé de ces creusements de

16 tranchées pour lesquelles on avait utilisé les Musulmans et les

17 prisonniers musulmans ?

18 M. Pejcinovic (interprétation). - Non.

19 M. Cayley (interprétation). - Combien de fois vous étiez à la

20 caserne de Kiseljak pendant cette période-là ?

21 M. Pejcinovic (interprétation). - Tous les soirs à 19 heures les

22 réunions avaient lieu dans la caserne de Kiseljak.

23 M. Cayley (interprétation). - Est-ce qu'à ce moment-là, vous

24 étiez au courant que les prisonniers musulmans se trouvaient à la caserne

25 de Kiseljak ?

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1 M. Pejcinovic (interprétation). - Au moment où je me rendais à

2 ces réunions, il fallait que je m'annonce à l'entrée et j'étais accompagné

3 par un garde. Après la réunion, c'était exactement que j'étais escorté et

4 je n'ai jamais vu quoi que soit au sein de la caserne.

5 M. Cayley (interprétation). - Par conséquent, s'il y avait des

6 prisonniers musulmans dans la caserne, dans d'autres bâtiments, pas dans

7 le bâtiment où il avait le siège, dans ce cas-là, vous n'auriez pas été au

8 courant qu'ils y étaient ?

9 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne les ai pas vus. C'est la

10 raison pour laquelle je ne peux pas dire qu'ils y étaient.

11 M. Cayley (interprétation). - Est-ce que vous avez eu l'occasion

12 de vous rendre dans d'autres bâtiments dans le cadre de cette caserne ?

13 M. Pejcinovic (interprétation). - Non, je n'avais pas besoin de

14 visiter ces autres bâtiments.

15 M. Cayley (interprétation). - Lors de l'interrogatoire

16 principal, vous avez dit qu'un grand nombre de personnes à Kiseljak

17 avaient dit que le colonel Rajic, si lui avait été en janvier à Bilalovac,

18 Bilalovac n'aurait pas connu la chute. Est-ce vrai ?

19 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

20 M. Cayley (interprétation). - Qui, à ce moment-là, se trouvait

21 au poste de commandement de Kiseljak, en janvier 1993 ?

22 M. Pejcinovic (interprétation). - Au moment où Bilalovac a connu

23 la chute, c'est le colonel Blaskic qui se trouvait à ce poste-là. Mais je

24 ne peux pas vous dire qui était à ce poste en janvier 1993, mais au moment

25 où Bilalovac a chuté, oui.

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1 M. Cayley (interprétation). - Quand Bilalovac a chuté ?

2 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne sais pas mais je pense

3 qu'au début des conflits en Bosnie centrale, Bilalovac est tombée, mais

4 quand exactement, je ne sais pas.

5 M. Cayley (interprétation). - Par conséquent, vous ne savez pas

6 que Bilalovac est tombée en janvier 1993 ?

7 M. Pejcinovic (interprétation). - Non.

8 M. Cayley (interprétation). - Vous avez dit par ailleurs que

9 beaucoup de personnes vous ont dit que M. Blaskic n'était pas un

10 commandant capable ?

11 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

12 M. Cayley (interprétation). - Est-ce que vous êtes au courant

13 qu'après cela il a été promu au poste du commandant du HVO ? On en a parlé

14 dans le contre-interrogatoire.

15 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui, je suis au courant.

16 M. Cayley (interprétation). - Par conséquent, nous pouvons dire

17 que les autorités à Mostar avaient un autre point de vue sur les capacités

18 militaires de M. Blaskic, si on compare ce point de vue avec les personnes

19 avec lesquelles vous en avez parlé.

20 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne peux pas vous dire. Je

21 ne sais pas quel était le point de vue des autorités de Mostar. Moi, je

22 vous ai parlé des conversations que j'ai eues dans les couloirs, qui

23 n'étaient pas des entretiens officiels. J'ai parlé avec des collaborateurs

24 de Rajic. Je vous ai dit ce qu'ils en pensaient : pour eux, le véritable

25 combattant était Ivica Rajic. Ils ne reconnaissaient ni Milivoj Petkovic

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1 ni Tihomir Blaskic, ni qui que ce soit d'autre.

2 M. Cayley (interprétation). - En d'autres termes, il s'agissait

3 des entretiens qui avaient lieu entre les amis à Kiseljak, quand il s'agit

4 des capacités militaires du colonel Blaskic ?

5 M. Pejcinovic (interprétation). - C'étaient les collaborateurs

6 d'Ivica Rajic qui étaient chargés des domaines différents et qui, au

7 moment des réunions, participaient aux discussions. Quand ils parlaient de

8 ce qui s'était passé, ils avaient l'habitude de dire que celui qui était

9 véritablement capable, capable de défendre le peuple croate, était

10 M. Ivica Rajic.

11 M. Cayley (interprétation). - Est-ce que vous pouvez nous donner

12 les noms des personnes avec lesquelles vous vous êtes entretenues ?

13 M. Pejcinovic (interprétation). - Il y avait beaucoup de

14 personnes. Mais c'étaient les collaborateurs les plus proches. Je ne

15 pourrais pas véritablement me souvenir de leur nom, mais je sais qu'ils

16 étaient une vingtaine au moins.

17 M. Cayley (interprétation). - Pourriez-vous nous donner les noms

18 des collaborateurs les plus proches ?

19 M. Pejcinovic (interprétation). - J'en connaissais quelques-uns

20 par le prénom et par le petit nom également, cela m'intéressait par leur

21 surnom. Je n'étais pas véritablement intéressé pour savoir quels étaient

22 leur nom et leur prénom. De toute façon, ils ne m'ont pas posé la question

23 à moi non plus.

24 M. Cayley (interprétation). - Monsieur Pejcinovic, vous avez

25 rencontré ces personnes tous les soirs et vous dites devant les Juges que

Page 14681

1 vous ne connaissez pas leur nom ?

2 M. Pejcinovic (interprétation). - Je n'ai pas dit que je ne

3 savais pas comment ils s'appelaient, mais j'ai dit que je connaissais la

4 plupart parmi eux par les surnoms et quelques-uns seulement par leur nom.

5 M. Cayley (interprétation). - Est-ce que vous voulez nous dire

6 ces noms, s'il vous plaît, les noms que vous connaissez, avec lesquels

7 vous avez parlé ?

8 M. Pejcinovic (interprétation). - Je peux dire par exemple -mais

9 je ne sais pas ce que ça peut vous donner- il y avait Zuna, Kopa, Cona,

10 etc.

11 M. Cayley (interprétation). - Mais dites un certain nombre de

12 noms avec lesquels vous avez parlé.

13 M. Pejcinovic (interprétation). - J'ai dit leurs surnoms. Je ne

14 connais pas leurs noms.

15 M. Cayley (interprétation). - Par conséquent, devant les Juges,

16 vous dites que les personnes avec lesquelles vous avez parlé des capacités

17 militaires de M. Blaskic, que vous ne connaissiez pas leur nom mais que

18 vous les voyiez quand même tous les soirs ?

19 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

20 M. Nobilo (interprétation). - Oui, bien évidemment, il a dit

21 oui. Il a dit également les surnoms. Tout le monde à Kiseljak sait qui est

22 Zomo. Vous aussi, vous pouvez le savoir. Zuno également, tout le monde

23 sait qui est Zuno et tout le monde les connaît selon les surnoms. Il a

24 énuméré les surnoms.

25 M. Cayley (interprétation). - Monsieur le Président, nous

Page 14682

1 pouvons poursuivre.

2 Est-ce que vous savez quand Ivica Rajic avait été nommé au poste

3 de commandement à Kiseljak ?

4 M. Pejcinovic (interprétation). - Non.

5 M. Cayley (interprétation). - Est-ce que je peux rafraîchir

6 quelque peu votre mémoire ?

7 Je vais demander de montrer au témoin la pièce à conviction 456.

8 C'est la pièce à conviction de l'accusation. 456/62.

9 Est-ce que vous avez pu lire, s'il vous plaît ?

10 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

11 M. Cayley (interprétation). - Vous allez voir que le

12 4 juillet 1992, Ivica Rajic a été le représentant de sa zone

13 opérationnelle. Il a été nommé par M. Blaskic.

14 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

15 M. Cayley (interprétation). - Ce sont Busovaca, Fojnica,

16 Kiseljak, Vares, et Krecevo qui sont couvertes par cette zone

17 opérationnelle ?

18 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

19 M. Cayley (interprétation). - Lors de l'interrogatoire

20 principal, vous avez dit qu'en novembre 1993, Ivica Rajic avait commandé

21 les municipalités de Fojnica, de Kiseljak et de Krecevo ? N'est-ce pas ?

22 M. Pejcinovic (interprétation). - Fojnica, Kiseljak, Krecevo et

23 Vares.

24 M. Cayley (interprétation). - Mais en novembre 1993, Vares est

25 tombé dans les mains de l'armée de Bosnie-Herzégovine ?

Page 14683

1 M. Pejcinovic (interprétation). - Les trois village sont restés

2 sous le contrôle du HVO.

3 M. Cayley (interprétation). - En novembre 1993, au cours de

4 cette période, M. Ivica Rajic commandait à Fojnica, Kiseljak, Krecevo et

5 les trois villages dont vous avez parlé ?

6 M. Pejcinovic (interprétation). - Fojnica, Kiseljak, Krecevo,

7 une partie également de Vares qui était sous le contrôle du HVO.

8 M. Cayley (interprétation). - Alors Kakanj est resté jusqu'en

9 novembre 1993 sous le contrôle du HVO, ensuite il est tombé sous le

10 contrôle de l'armée de Bosnie-Herzégovine ?

11 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

12 M. Cayley (interprétation). - Et en ce qui concerne Busovaca, il

13 a été transféré dans la deuxième zone opérationnelle. Est-ce que vous

14 étiez au courant ?

15 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne suis pas un soldat, un

16 militaire. Je n'étais pas au courant.

17 M. Cayley (interprétation). - Est-ce que vous êtes au courant

18 qui avait l'ensemble du commandement de la zone opérationnelle de la

19 Bosnie centrale depuis septembre 1992 jusqu'en janvier 1993 et là-dedans

20 il y a la municipalité dont on a parlé ?

21 M. Pejcinovic (interprétation). - Je sais que le colonel Blaskic

22 a été supérieur pour cette région. Mais en ce qui concerne la région dont

23 j'ai parlé, c'était uniquement sur le papier.

24 M. Cayley (interprétation). - Je n'ai plus de question pour le

25 témoin.

Page 14684

1 M. le Président. - Maître Nobilo, vous voulez...

2 M. Nobilo (interprétation). - Oui, Monsieur le Président, très

3 brièvement.

4 Il a été question de la langue, même si ce n'est pas la chose la

5 plus importante dans notre affaire. Essayons de tirer au clair ces

6 questions de langue croate et bosniaque. Avant que le conflit n'éclate en

7 Bosnie-Herzégovine, à savoir avant 1992, quel était le nom de la langue

8 qu'on apprenait à l'école en Bosnie-Herzégovine ?

9 M. Pejcinovic (interprétation). - Le nom de la langue était

10 croato-serbe, serbo-croate.

11 M. Nobilo (interprétation). - Pour autant que vous le sachiez,

12 vous êtes un homme cultivé, pendant les 50 années de l'existence de la

13 république de Yougoslavie, est-ce que la langue bosniaque a-t-elle jamais

14 existé ?

15 M. Pejcinovic (interprétation). - Non, jamais.

16 M. Nobilo (interprétation). - Pour quelle raison avez-vous

17 rejeté la partie serbe de la dénomination de la langue.

18 M. Pejcinovic (interprétation). - Pour la raison qu'il y a eu

19 une agression menée par les Serbes envers la Bosnie-Herzégovine.

20 M. Nobilo (interprétation). - Dites à la Chambre, cette langue

21 qui s'appellait croato-serbe, serbo-croate, puis croate, bosniaque,

22 quelles que soient les modifications qui ont été apportées à la

23 dénomination, quelle a été la langue qui a été enseignée dans les écoles ?

24 M. Pejcinovic (interprétation). - Les programmes scolaires sont

25 restés les mêmes. Aujourd'hui, vous avez toujours Mme Karamehic, une

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1 Bosniaque musulmane qui enseigne la langue.

2 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce qu'il y a eu des

3 professeurs qui ont été renvoyés ou des nouveaux qui sont venus ?

4 M. Pejcinovic (interprétation). - C'est uniquement un certain

5 nombre de professeurs serbes qui sont partis au Monténégro ou ailleurs.

6 M. Nobilo (interprétation). - La personne chargée de l'éducation

7 dans votre municipalité, qui était-ce?

8 M. Pejcinovic (interprétation). - C'était Mme Mufida Dzinda, une

9 Musulmane bosniaque. Madame Mufida a été nommée par la décision de M. Mate

10 Boban, Président du HZ-HB.

11 M. Nobilo (interprétation). - Magib Rusmir, Berberovic, ces

12 gens-là sont de quelle appartenance nationale ?

13 M. Pejcinovic (interprétation). - Ce sont des Bosniaques

14 musulmans. Monsieur Rusmir Berberovic était chargé de la défense civile et

15 l'autre personne était chargée des télécommunications et de la poste. Mais

16 il a abandonné son poste. Comme je l'ai dit dans ma déposition, c'est

17 M. Ascerija Edhem qui a été nommé à la tête des travaux qui concernaient

18 la santé.

19 M. Nobilo (interprétation). - Ecoutez, nous n'allons pas verser

20 tous ces documents mais, dites-nous, comment avez-vous perdu votre poste

21 dans les mines de Vares ?

22 M. Pejcinovic (interprétation). - J'ai été renvoyé par une

23 décision où il est dit que c'est à la date 2 novembre 1993 que je dois

24 quitter mon emploi en disant que je m'étais rangé du côté de l'ennemi de

25 l'Etat de Bosnie-Herzégovine en étant membre du HVO.

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1 M. Nobilo (interprétation). - On peut considérer que c'est vous

2 qui avez perdu votre emploi pour des raisons politiques ?

3 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui, c'est pour des raisons

4 politiques que j'ai perdu mon emploi ainsi que tous les autres Croates.

5 Tous les Croates qui étaient en âge de porter les armes ont reçu le même

6 genre de lettre qui les obligeait à quitter leur poste alors que d'autres

7 personnes ont été licenciées pour ne pas être arrivées au travail pendant

8 trois semaines consécutives.

9 M. Nobilo (interprétation). - Vous avez parlé d'une lettre d'un

10 commandant du Bataillon nordique. Pouvez-vous nous lire les parties les

11 plus importantes de cette lettre ? Pourriez-vous brièvement annoncer la

12 date de cette lettre, dites de qui vous l'avez reçue. Mais lisez lentement

13 cette lettre.

14 M. Cayley (interprétation). - Si le témoin lit une lettre, nous

15 souhaiterions avoir un exemplaire de cette lettre.

16 M. le Président. - Il faudrait que le conseil de l'accusation

17 ait un exemplaire de la lettre. Cela me paraîtrait plus convenable et

18 peut-être les Juges aussi. Mais au moins que le conseil de l'accusation...

19 Il s'agit d'une lettre de moralité, je suppose.

20 M. Nobilo (interprétation). - Non. Moi, je n'ai pas en ma

21 possession cette lettre. Je ne l'ai jamais vue. C'est un document que

22 possède le témoin et si vous lui permettez, il peut lire quelques passages

23 de ce document. Sinon, on peut poursuivre. Moi, personnellement, je ne

24 l'ai jamais vu.

25 M. Cayley (interprétation). - Quand nous lisons des parties des

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1 documents, nous communiquons ces documents à la défense.

2 M. Nobilo (interprétation). - J'y renonce. Nous renonçons à

3 cette lettre. Nous ne souhaitons pas gaspiller le temps de cette Chambre.

4 Mais nous souhaitons néanmoins entendre la réponse de ce témoin. Racontez-

5 nous donc librement ce qu'il y avait dans cette lettre du commandant du

6 Bataillon nordique. Mais c'est de ses propres souvenirs !

7 M. le Président. - Quelque chose qui le concerne

8 personnellement. Qu'il ne lise pas la lettre. Qu'est-ce que vous avez à

9 nous dire ? On commence à être impatients maintenant. Cela va vous

10 intéresser vraiment. Allez-y !

11 M. Nobilo (interprétation). - Racontez librement.

12 M. Pejcinovic (interprétation). - A la date du 8 décembre 1993,

13 j'ai adressé une lettre via la Forpronu de Kiseljak au commandant de la

14 Brigade nordique des Nations Unies qui était basée à Vares. J'ai reçu une

15 réponse le 15 décembre 1993. Dans ma lettre, j'ai mentionné un certain

16 nombre d'événements d'importance qui se sont produits dans la municipalité

17 de Vares. J'ai parlé également des problèmes dans les villages de Gornja

18 et Donja Borovica.

19 Monsieur Hakan Birger qui était le commandant du Bataillon

20 nordique de l'O.N.U. m'a dit la chose suivante : "Pour ce qui est des

21 événements de Borovica, le lendemain de la prise de Borovica par des

22 forces importantes de l'armée de Bosnie-Herzégovine, j'ai envoyé une

23 patrouille dans ce village. Dans le village, plusieurs maisons étaient en

24 train de brûler. A l'intérieur, l'église catholique était dévastée. Dans

25 le village, nous avons trouvé un membre du HVO mort. Sept jours plus tard,

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1 j'ai envoyé une deuxième patrouille dans le village de Borovica. Cette

2 patrouille a pu constater que le village dans sa totalité, y compris

3 l'église catholique, avait été totalement brûlé et rasé.

4 Le lendemain, dit le commandant Birger, je me suis rendu

5 personnellement à Borovica. J'ai été extrêmement ému par ce que j'ai vu. A

6 cette occasion, ma patrouille a trouvé 2 soldats morts, 2 civils morts qui

7 ont été transportés à l'hôpital de Visoko."

8 Puis, dans un paragraphe vers la fin, il dit : "Pour ce qui est

9 des événements qui se sont produits à Borovica, je dois dire que je

10 regrette que la destruction de Borovica n'a pas mérité la même attention

11 que celle portée à Stupni Do."

12 Puis à la fin même de la lettre, il dit : "J'ai pris

13 connaissance du fait que Vares était habitée depuis des siècles par des

14 Croates bosniaques".

15 M. Nobilo (interprétation). - Dites à la Chambre, par rapport à

16 l'ensemble de votre expérience, jusqu'à aujourd'hui, à un moment

17 quelconque, avez-vous entendu dire que quelqu'un ait été poursuivi ou tenu

18 responsable pour la destruction des maisons et des villages croates, des

19 centaines de ménages croates ?

20 M. Pejcinovic (interprétation). - Pour les pillages, les crimes,

21 le meurtre de 14 civils de la manière la plus ordurière qui soit, personne

22 n'a jamais été tenu responsable. Tout simplement comme si cela n'avait

23 jamais eu lieu.

24 M. Nobilo (interprétation). - Pour qu'on soit clair là-dessus,

25 dites à la Chambre : pensez-vous que l'arrivée des unités de Kiseljak qui

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1 ont commis le crime de Stupni Do pour se retirer par la suite de la

2 municipalité de Vares, était-ce bien une provocation par rapport à l'armée

3 de Bosnie-Herzégovine et le peuple bosniaque ?

4 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui, c'était une provocation

5 mais ceci n'a pas été la cause principale de l'attaque menée par l'armée

6 BH contre Vares. Dans le rapport, ils disent que les préparations ont

7 commencé au 1er septembre.

8 M. Nobilo (interprétation). - Il y a eu une erreur dans la

9 traduction de ma question. Peut-être ai-je moi-même fait une erreur.

10 Stupni Do, c'était une provocation à l'égard des Bosniaques musulmans ?

11 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

12 M. Nobilo (interprétation). - Merci, j'en ai terminé.

13 M. le Président. - Merci, Maître Nobilo. Monsieur le Juge Riad ?

14 M. Riad (interprétation). - Bonjour, Monsieur Pejcinovic.

15 J'espère pouvoir bénéficier de votre excellente connaissance de la

16 situation. Vous avez dit que le colonel Ivica Rajic était considéré par

17 les gens que vous connaissiez, et là je cite ce que vous avez dit, la

18 traduction de ce que vous avez dit : "qu'il était comme un saint". Je

19 pense, effectivement, à un personnage saint.

20 Est-ce que cela exclurait le colonel Blaskic de cette image, à

21 savoir que l'autorité du colonel Blaskic n'était pas véritablement en

22 place ? Qu'il ne contrôlait pas la situation ? Que ses ordres n'étaient

23 pas respectés ? Est-ce qu'un général lui aussi doit être une sainteté ou

24 n'est-ce pas totalement indispensable ?

25 M. Pejcinovic (interprétation). – Monsieur le Président,

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1 Messieurs les Juges, alors, pour ce qui est d'Ivica Rajic, c'est tout à

2 fait exact qu'il était absolument respecté. Il était considéré comme une

3 idole de la défense du peuple croate. Quand quelqu'un se retrouve dans un

4 encerclement total, mais c'est tout à fait naturel d'accepter ce fait-là !

5 J'ai dit, dans ma déposition que, sur la base de tout ce qui se racontait,

6 j'en ai déduit que le colonel Blaskic était vraiment un mauvais soldat.

7 Non seulement on pensait cela du colonel Blaskic, mais on

8 pensait cela également de tous les autres commandants du HVO, allant

9 jusqu'au niveau le plus élevé, à savoir l'état-major. Parce qu'ils

10 considéraient que seul M. Rajic pouvait défendre le peuple croate qui se

11 trouvait dans un encerclement total.

12 M. Riad (interprétation). - Cela empêcherait-il le

13 colonel Blaskic d'émettre des ordres quand cela est nécessaire ?

14 M. Pejcinovic (interprétation). - De la manière dont je l'ai

15 compris, de tout ce qui s'est passé là-bas, c'est que cela ne

16 l'empêcherait pas. Mais je pense que ses ordres ne seraient pas respectés.

17 Comme je l'ai dit, les gens ne respectaient pas vraiment le colonel

18 Blaskic. Je vous ai dit ce qu'ils en pensaient.

19 M. Riad (interprétation). - Peut-être que vous savez également

20 quels ont été les ordres du colonel Blaskic qui n'ont pas été respectés

21 dans la réalité ?

22 M. Pejcinovic (interprétation). - Pour ce qui est de la période

23 où moi-même j'ai été à Kiseljak, lors de ces réunions, je n'ai jamais vu

24 ni entendu d'ordres du colonel Blaskic, aucun de ces ordres. Je n'ai

25 jamais vu un ordre par écrit. Tout simplement, tous les ordres étaient

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1 émis par M. Rajic.

2 M. Riad (interprétation). - Vous parlez uniquement de Kiseljak ?

3 M. Pejcinovic (interprétation). - De Kiseljak, de Krecevo, une

4 partie de la municipalité de Fojnica et une partie de la municipalité de

5 Vares.

6 M. Riad (interprétation). - Vous n'avez jamais vu un ordre signé

7 par le colonel Blaskic ?

8 M. Pejcinovic (interprétation). - Non.

9 M. Riad (interprétation). - Vous avez parlé dans votre

10 déposition... Je crois que vous avez dit vous-même que les événements de

11 Stupni Do étaient horribles, et vous avez confirmé ce qu'a dit l'avocat de

12 l'accusation, que 60 maisons ont été brûlées ; ou c'est vous-même qui

13 l'avez dit, que 60 maisons ont été incendiées. Ceci a été fait par les

14 soldats du HVO ?

15 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

16 M. Riad (interprétation). - Eh bien, à partir du moment où vous

17 avez dit que vous ne saviez pas que des ordres auraient été donnés par

18 Rajic de commettre ces crimes, le fait qu'on ait laissé les soldats

19 commettre ces crimes, est-ce que cela veut dire que ces soldats n'étaient

20 absolument sous aucun contrôle sérieux, ou qu'il n'y a eu aucune tentative

21 sérieuse pour les empêcher de commettre ce genre d'acte ?

22 M. Pejcinovic (interprétation). - C'étaient des unités

23 spéciales. Elles étaient sous le commandement de M. Rajic. Je ne peux pas

24 affirmer qu'il y ait eu des ordres émis pour commettre un crime. Ce n'est

25 pas ce que j'ai dit.

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1 M. Riad (interprétation). - Non, ma question était la suivante :

2 vous ne savez pas que quelqu'un ait émis des ordres, mais les soldats du

3 HVO étaient libres de commettre des atrocités en toute impunité ?

4 M. Pejcinovic (interprétation). - Quand il s'agit de ces unités

5 que j'ai mentionnées, je peux vous dire qu'ils avaient la liberté de le

6 faire.

7 M. Riad (interprétation). - Vous avez dit qu'ils étaient sous la

8 juridiction de M. Rajic ou bien c'était la juridiction du

9 colonel Blaskic ?

10 M. Pejcinovic (interprétation). - C'était sous la juridiction du

11 colonel Rajic.

12 M. Riad (interprétation). - Il était sur un pied d'égalité avec

13 M. Blaskic ?

14 M. Pejcinovic (interprétation). - La seule chose que je sais, -

15 là je ne comprends pas bien ces choses-là- c'est que ces unités étaient

16 sous le commandement de M. Rajic parce que c'est lui qui se trouvait à

17 Vares à ce moment.

18 M. Riad (interprétation). - Oui, mais dans le système de

19 commandement, est-ce que M. Blaskic était son supérieur à ce moment ?

20 M. Pejcinovic (interprétation). - Je ne sais pas. Dans ces zones

21 opérationnelles, vous savez je ne connais pas très bien tout cela, mais je

22 sais que le colonel Blaskic était à la tête du district militaire de

23 Vitez.

24 M. Riad (interprétation). - Dans un des documents que nous avons

25 reçus, je pense que c'est D 456, il y a eu un passage que nous avons

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1 entendu par le défense... (Monsieur le Juge Riad poursuit en français) :

2 "Il n'existe pas de langue bosniaque et c'est une insulte aux Croates que

3 d'essayer de transformer la langue croate en une quelconque langue

4 bosniaque".

5 (Monsieur le Juge Riad poursuit en anglais)

6 Est-ce que cela veut dire qu'on refusait l'identité culturelle

7 nationale des Musulmans Bosniaques, c'était une expression du rejet de

8 leur identité culturelle dans la zone donnée ?

9 M. Pejcinovic (interprétation). - Monsieur le Juge, au moment où

10 ce document a été rédigé, il n'y avait vraiment pas de langue bosniaque,

11 parce qu'il n'existait aucun manuel en langue bosniaque dans lequel on

12 aurait pu apprendre ou à partir duquel on aurait pu enseigner. Il

13 n'existait que des livres en langue serbo-croate, croato-serbe.

14 M. Riad (interprétation). - Il n'y a pas eu de changement dans

15 les programme scolaire, aucun changement ?

16 M. Pejcinovic (interprétation). - Non.

17 M. Riad (interprétation). - Merci beaucoup.

18 Pouvez-vous nous dire si vous avez un lien de parenté avec

19 M. Anto Pejcinovic ?

20 M. Pejcinovic (interprétation). - C'est un parent très lointain.

21 Nous sommes très nombreux. Nous constituons la moitié de la ville de

22 Vares.

23 M. Riad (interprétation). - Je vois, c'est un grand clan.

24 M. le Président. - Merci. Monsieur le Juge Shahabuddeen ?

25 M. Shahabuddeen (interprétation). - Monsieur Pejcinovic, des

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1 choses terribles se sont produites à Vares. Avant que ces choses ne se

2 produisent, aurais-je droit de dire que la situation était la suivante :

3 deux communautés vivaient harmonieusement ensemble. Cependant petit à

4 petit, ces relations harmonieuses se sont détériorées. Serait-ce une

5 manière correcte de décrire la situation générale ?

6 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui, Monsieur le Juge.

7 M. Shahabuddeen (interprétation). - Pouvez-vous, s'il vous

8 plaît, remonter dans le temps jusqu'à la période où les relations entre

9 les deux communautés étaient harmonieuses ?

10 A cette époque, quelle était l'instance qui détenait le

11 pouvoir ?

12 M. Pejcinovic (interprétation). - A cette époque, à peu près

13 jusqu'au mois d'avril 1992, fonctionnait l'Assemblée municipale de Vares.

14 Autrement dit, les députés au sein de cette assemblée avaient le pouvoir

15 législatif, mais nous avions également un pouvoir exécutif, à savoir un

16 gouvernement municipal qui était constitué des représentants des trois

17 peuples.

18 M. Shahabuddeen (interprétation). - Vous avez dit qu'au mois de

19 juillet 1992, le HVO a pris le pouvoir à Vares, est-ce exact ?

20 M. Pejcinovic (interprétation). – Oui, monsieur le Juge, non pas

21 dans l'ensemble de la municipalité de Vares, mais uniquement dans une

22 partie de la municipalité, celle qui est peuplée en majorité de Croates.

23 M. Shahabuddeen (interprétation). - Ce qui a existé auparavant a

24 été abandonné, et donc nous avons à partir de ce moment-là une nouvelle

25 structure ?

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1 M. Pejcinovic (interprétation). – Oui, monsieur le Juge.

2 L'Assemblée a cessé de se réunir puisque les représentants du peuple qui

3 était le moins représenté, à savoir les Serbes, ont déserté les organes

4 aussi bien du pouvoir législatif que du pouvoir exécutif de la

5 municipalité de Vares. La partie de la municipalité qui était peuplée de

6 Serbes a effectué une sécession et a été rattachée à la municipalité

7 d'Ilijas ?

8 M. Shahabuddeen (interprétation). - D'après la structure, telle

9 qu'elle était auparavant, le SDA, le Parti d'action démocratique, a-t-il

10 participé aux instances de pouvoir ?

11 M. Pejcinovic (interprétation). – Oui, dans l'ancien système.

12 Mais dans le nouveau, à partir du moment où le HVO a pris le pouvoir, le

13 SDA ne participait pas au pouvoir. Mais il y avait la participation

14 d'autres représentants du peuple musulman bosniaque.

15 M. Shahabuddeen (interprétation). – Oui, mais pourquoi le SDA

16 n'a-t-il pas participé à cette nouvelle structure de pouvoir ?

17 M. Pejcinovic (interprétation). – Parce qu'il considérait que

18 compte du fait que le président de l'Assemblée municipale, M. Dario

19 Andrijevic, a présenté sa démission, donc un Croate, que sa place devait

20 être occupée par Mervana Hadjimurtezic, donc une Musulmane, et que c'était

21 à elle de prendre la tête d'un organe qui s'appellerait "Présidence

22 municipale de Vares" et qui remplacerait l'Assemblée dans une situation de

23 guerre.

24 M. Shahabuddeen (interprétation). - Nous avons deux communautés

25 sur le terrain, les Croates et les Musulmans. Les Croates étaient-ils

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1 satisfaits de la composition de cette nouvelle instance de pouvoir ?

2 M. Pejcinovic (interprétation). – Oui.

3 M. Shahabuddeen (interprétation). - Pour ce qui est des

4 Musulmans, eux aussi étaient-ils satisfaits ?

5 M. Pejcinovic (interprétation). – Monsieur le Juge, la majorité,

6 à savoir 99 % des Musulmans qui habitaient la ville de Vares, ont continué

7 à vivre sur place, à aller à l'école, à travailler, ainsi que la plupart

8 des élèves qui venaient à l'école des villes et des villages musulmans aux

9 alentours en 1992 et une partie de 1993. Jusqu'à ce que les réfugiés

10 croates n'arrivent de Kakanj, la vie s'est donc déroulée tout à fait

11 normalement.

12 M. Shahabuddeen (interprétation). – Monsieur Pejcinovic, je vous

13 a écouté, mais je dois vous dire que j'ai l'impression que ceci ne répond

14 pas tout à fait à ma question. Peut-être bien que les gens sont restés sur

15 place, mais ce que je voulais savoir, c'est si les Musulmans étaient

16 satisfaits de la nouvelle composition des instances du pouvoir ?

17 M. Pejcinovic (interprétation). – Monsieur le Juge, je ne peux

18 pas savoir si tous étaient satisfaits, mais ceux avec qui j'ai eu

19 l'occasion de parler étaient satisfaits. Il y avait certainement des gens

20 qui n'étaient pas satisfaits, parce que si tout le monde avait été

21 satisfait, il n'y aurait pas eu création d'un pouvoir parallèle musulman

22 bosniaque dans le village de Dabravine.

23 M. Shahabuddeen (interprétation). - Vous avez parlé du

24 changement de la langue ici.

25 Je vais vous demander la chose suivante : la communauté

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1 musulmane dans son ensemble, comment a-t-elle perçu ce changement de

2 langue ? Est-ce qu'elle a considéré que l'intention de ce changement était

3 de modifier la langue à laquelle ces gens ont été habitués, de remplacer

4 leur langue par une autre langue, même si elle est très proche ?

5 M. Pejcinovic (interprétation). - A l'époque où le HVO était au

6 pouvoir, il n'y avait aucun moyen de mettre sur place une modification

7 profonde de la langue. Il y a eu quelques tentatives d'ajouter un peu plus

8 de mots croates mais, comme on n'avait que des manuels anciens qui

9 dataient des systèmes socialistes, comme les professeurs étaient toujours

10 les mêmes, et souvent c'étaient des Serbes qui sont restés à Vares, il

11 était tout à fait impossible en un an de mettre en oeuvre des

12 modifications profondes.

13 Vous savez très bien, Monsieur le Juge, que ce n'est que

14 fin 1993, début 1994 que commencent à apparaître des mots musulmans en

15 bosniaque et en croate, et que c'est à partir de ce moment-là que,

16 finalement, par la Constitution de Washington, autrement dit dans la

17 Constitution de la Fédération, nous aurons deux langues sur un pied

18 d'égalité.

19 M. Shahabuddeen (interprétation). - Mon impression à partir de

20 ce que vous venez de dire est qu'il n'y avait pas réellement de

21 différences entre les deux langues. Mon impression est-elle exacte ?

22 M. Pejcinovic (interprétation). - Les linguistes disent qu'il y

23 a très peu de différence, mais que celle-ci existe quand même, même si

24 elle n'est que très faible.

25 M. Shahabuddeen (interprétation). - Si cette différence n'est

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1 que très faible, pourquoi a-t-on procédé à une modification ? Pourquoi a-

2 t-on insisté sur le fait qu'il fallait modifier les choses ?

3 M. Pejcinovic (interprétation). - Monsieur le Juge, parce que la

4 langue qu'on a parlée jusqu'à la guerre en Bosnie-Herzégovine, dans sa

5 dénomination, on lisait croato-serbe ou serbo-croate. Mais c'était en fait

6 la langue serbe et, suite à l'agression par les Serbes contre la Bosnie-

7 Herzégovine, que ce soit les Croates ou les Musulmans bosniaques, ils

8 n'ont pas pu accepter, adopter pour eux-mêmes la langue de l'agresseur.

9 M. Shahabuddeen (interprétation). - Passons maintenant à la

10 vallée de la Lasva ou, plutôt, abordons l'entité appelait "zone

11 opérationnelle de Bosnie centrale". Connaissez-vous cette appellation ?

12 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

13 M. Shahabuddeen (interprétation). - Diriez-vous que ce nom

14 englobe une zone géographique assez large ?

15 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

16 M. Shahabuddeen (interprétation). - Diriez-vous que, du point de

17 vue du HVO, cette zone constituait une seule unité militaire ?

18 M. Pejcinovic (interprétation). - Cette zone opérationnelle de

19 Bosnie centrale, Monsieur le Juge, pouvait d'un point de vue

20 organisationnel effectivement représenter une entité militaire unique

21 mais, sur le plan territorial, c'était impossible parce que là vous aviez

22 en fait sous le commandement de la zone opérationnelle de Bosnie centrale

23 plusieurs enclaves où les Croates étaient majoritaires.

24 M. Shahabuddeen (interprétation). - Dites-moi, des évolutions

25 militaires qui se seraient produites dans une partie de la zone

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1 opérationnelle de Bosnie centrale auraient-elles pu avoir une incidence

2 sur la situation militaire prévalant dans une autre partie de la même

3 zone ?

4 M. Pejcinovic (interprétation). - Au début, c'est-à-dire au

5 cours de l'année 1992 et au début de l'année 1993, le HVO était placé sous

6 un commandement conjoint, effectivement. Mais il était possible de

7 remarquer tout de même que l'organisation de la défense répondait

8 exclusivement au principe territorial dans les petites enclaves.

9 Il n'y avait pas d'organisation homogène unique de la défense.

10 Et ceci était dû sans doute au fait que les communications entre une

11 enclave et une autre étaient devenues particulièrement difficiles, que

12 toutes sortes de problèmes se posait sur ce point, de sorte que les gens

13 qui vivaient à l'intérieur de ces enclaves se sont organisés et se sont

14 préparés de façon autonome au combat.

15 Le résultat de tout cela a effectivement été que ces enclaves

16 croates sont tombées les unes après les autres entre les mains de

17 l'ennemi.

18 M. Shahabuddeen (interprétation). - J'aimerais vous poser la

19 question suivante : la région de Kiseljak, par exemple, n'était-elle

20 qu'une partie de la zone ?

21 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui, elle correspondait à un

22 groupe opérationnel qui dépendait de la zone opérationnelle de Bosnie

23 centrale.

24 M. Shahabuddeen (interprétation). - Si l'on prend en

25 considération les problèmes que vous avez évoqués, était-il nécessaire

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1 d'avoir quelqu'un au sein des autorités qui aurait pu coordonner les

2 actions dans les diverses enclaves ?

3 M. Pejcinovic (interprétation). - Si l'on considère les choses

4 sur un plan théorique, Monsieur le Juge, cette nécessité existait

5 effectivement. Mais il était très difficile de la mettre en œuvre parce

6 que lorsque le contact physique avec ces commandants est rompu, c'est

7 quelque chose de très difficile à réaliser.

8 M. Shahabuddeen (interprétation). - Je comprends la distinction

9 que vous établissez. Je crois comprendre également que ce que vous dites,

10 c'est que précisément en raison de ces très grandes difficultés il était,

11 ne serait-ce que théoriquement, nécessaire de disposer d'un coordinateur

12 central ?

13 M. Pejcinovic (interprétation). - Cette nécessité existait

14 effectivement. Dans des circonstances normales, cette coordination aurait

15 existé, mais dans des circonstances marquées par le conflit, au moment où

16 ces territoires de Bosnie centrale se sont séparés pour constituer de

17 petites enclaves autonomes, c'était une chose pratiquement impossible à

18 réaliser.

19 M. Shahabuddeen (interprétation). - Qui était ce coordinateur

20 central ?

21 M. Pejcinovic (interprétation). - Si vous parlez de la

22 composante militaire, Monsieur le Juge, il aurait fallu que le

23 coordinateur soit le commandant du district militaire.

24 Mais compte tenu de l'éparpillement des enclaves, des groupes

25 opérationnels ont été créés et les commandants des groupes opérationnels

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1 étaient chargés d'établir la coordination avec les brigades dans le cas où

2 une telle coordination était possible. Par téléphone ou pas le biais des

3 transmissions, il était impossible d'établir un lien entre la brigade de

4 Kiseljak et la brigade de Vares, alors que la distance entre les deux

5 n'était que de 50 kilomètres à vol d'oiseau, ne parlons pas de la distance

6 par route.

7 M. Shahabuddeen (interprétation). - Indépendamment des

8 difficultés, y avait-il un coordinateur militaire central dans la zone

9 opérationnelle de Bosnie centrale ?

10 M. Pejcinovic (interprétation). - Sur le papier, oui. Mais je ne

11 sais pas comment cette coordination fonctionnait dans la pratique. Je

12 n'étais pas militaire. Je n'avais pas de contact sur un pied d'égalité,

13 Monsieur le Juge, avec ce coordinateur.

14 M. Shahabuddeen (interprétation). - Sur le papier, si cela

15 n'était le cas que sur le papier, qui était ce commandant central, ce

16 coordinateur central ?

17 M. Pejcinovic (interprétation). - Le commandant du district

18 militaire ou plutôt de la zone opérationnelle.

19 M. Shahabuddeen (interprétation). - Qui était ce commandant ?

20 M. Pejcinovic (interprétation). - C'était le colonel Blaskic.

21 M. Shahabuddeen (interprétation). - Eh bien, passons à un autre

22 sujet. D'après ce que vous avez dit, j'ai cru comprendre qu'il y avait des

23 réfugiés, que le HVO a accueilli les réfugiés croates, mais s'est organisé

24 de façon à ce que les réfugiés musulmans ne fassent que passer. Est-ce

25 exact ?

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1 M. Pejcinovic (interprétation). - S'il est question du

2 territoire avec lequel j'avais un lien, à savoir la municipalité de Vares,

3 en 1992 les réfugiés croates et musulmans y ont été accueillis ainsi que

4 les Bosniens de Sokolac, de Han-Pijesak et d'une partie de la municipalité

5 de Olovo, ainsi qu'un certain nombre de bosniens de la municipalité

6 d'Ilijas.

7 Mais en 1993, lorsque les réfugiés de Kakanj sont arrivés, plus

8 personne ne pouvait trouver un logement à Vares qu'ils soient Croates ou

9 Musulmans. En 1992, suite à l'agression serbe, la municipalité de Vares a

10 accueilli, tant qu'elle en a eu la capacité aussi bien des réfugiés

11 musulmans, bosniens que croates.

12 M. Shahabudden (interprétation). – Est-il arrivé un moment où le

13 HVO a chassé les réfugiés musulmans alors qu'il accueillait et trouvait un

14 logement pour les réfugiés croates ?

15 M. Pejcinovic (interprétation). - Dans la municipalité dans

16 laquelle je vivais, non.

17 M. Shahabudden (interprétation). - Je vous remercie, monsieur.

18 M. le Président. - J'ai une seule question à vous poser. Le

19 colonel Blaskic, à votre avis, disposait-il de pouvoirs civils ?

20 M. Pejcinovic (interprétation). - Non. à mon avis, le

21 général Blaskic n'avait pas de compétences civiles, de pouvoir civil. Il

22 n'était que commandant militaire.

23 M. le Président. - Il ne pouvait pas, par exemple, donner

24 d'ordres à la police civile ?

25 M. Pejcinovic (interprétation). - Non.

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1 M. le Président. – Jamais ?

2 M. Pejcinovic (interprétation). - Je pense que c'était jamais.

3 M. le Président. - On a beaucoup parlé de son autorité qui,

4 semble-t-il, n'était pas reconnue, notamment par Ivica Rajic. Vous,

5 finalement, de votre position de responsable politique du HVO, est-ce que

6 vous lui reconnaissiez une forme d'autorité, une forme de compétence ?

7 M. Pejcinovic (interprétation). – Monsieur le Président, je n'ai

8 pas compris de quelle personne vous parlez dans votre question ? Est-ce

9 que vous parlez du colonel Blaskic ou du colonel Rajic ?

10 M. le Président. - Je vous ai peut-être mal posé la question. Je

11 reprends. J'ai cru comprendre que dans cette zone de commandement, Rajic

12 était considéré comme le chef, considéré même comme plus compétent que

13 l'accusé ? Je ne me trompe pas ?

14 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

15 M. le Président. - Je voulais vous demander, vous, en tant que

16 responsable politique important, est-ce que vous reconnaissiez à l'accusé

17 une compétence et une autorité ?

18 M. Pejcinovic (interprétation). - S'agissant du colonel Blaskic,

19 dans les moments dont j'ai parlé, je n'ai pas ressenti qu'il avait une

20 compétence particulière sur les territoires dont nous avons parlé ici

21 même. Parce que j'ai dit, Monsieur le Président, que tout ce qui s'est

22 passé dans cette enclave, toutes les décisions aussi bien civiles que

23 militaires étaient sous l'autorité du colonel Rajic.

24 M. le Président. - Est-ce que vous avez été étonné lorsqu'on lui

25 a confié une telle responsabilité ? Commandant de la zone opérationnelle

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1 de Bosnie centrale ? Vous avez vous-même été étonné, je suppose ?

2 M. Pejcinovic (interprétation). - Oui.

3 M. le Président. - Vous avez été étonné… A quoi estimez-vous,

4 mais peut-être ne pouvez-vous pas répondre, quels sont les facteurs qui

5 ont pu bénéficier à l'accusé d'une telle confiance de la part des

6 autorités politiques ?

7 Au fond, beaucoup de personnes responsables, on a l'air de dire

8 qu'il n'était pas compétent, et peut-être même sur le plan militaire. A

9 quoi attribuez-vous cette carrière, au moment d'événements militaires si

10 complexes ?

11 A quoi attribuez-vous que, tout d'un coup, on le propulse à un

12 niveau de responsabilités élevées ?

13 M. Pejcinovic (interprétation). - C'est sans doute, le résultat

14 du fait que les Croates, en Bosnie-Herzégovine, n'avaient pas d'officiers

15 sortant de l'académie militaire. Ils

16 n'avaient pas d'officiers formés sur le plan théorique. Ils n'avaient que

17 de simples soldats.

18 M. le Président. - On l'a nommé parce qu'au fond il avait une

19 formation théorique ?

20 M. Pejcinovic (interprétation). - Je pense que c'est la raison,

21 effectivement. Parce qu'après toutes ces histoires, et Monsieur le

22 Président, je parle de l'état d'esprit dans une partie de la Bosnie

23 centrale, j'ai déjà dit en réponse aux questions de l'interrogatoire

24 principal, moi aussi j'entretenais quelques doutes quant aux compétence et

25 capacités du général Blaskic.

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1 M. le Président. – C'est ma dernière question. Si tout le monde

2 entretient des doutes sur la capacité militaire, pratique, de l'accusé

3 pour exercer un commandement aussi élevé, est-ce que vous seriez d'accord

4 avec moi pour dire que peut-être on lui a fait confiance parce qu'il

5 adhérait, il était en communauté de pensée avec le projet politique de la

6 communauté croate ?

7 Vous avez compris ma question ?

8 M. Pejcinovic (interprétation). - Je comprends votre question et

9 je ne sais pas si, Monsieur le Président, tout le monde avait confiance

10 dans M. le colonel Blaskic, mais je parle et je peux parler et je peux

11 vous en dire ce qu'il en était dans la région où j'avais une

12 responsabilité. Je peux vous dire qu'en parlant avec les gens, ces mêmes

13 gens n'avaient pas confiance. Je ne sais pas ce qu'il en était dans les

14 autres enclaves parce que je n'y suis jamais allé.

15 M. le Président. - Vous n'avez pas tout à fait répondu à ma

16 question. J'essayais de demander, je vous le demande à vous qui étiez un

17 responsable local important, je me posais la question de savoir pourquoi,

18 dans une situation aussi troublée, une situation de guerre, les échelons

19 les plus élevés au plan politique et au plan du commandement font

20 confiance pour un poste de haute responsabilité à l'accusé, à l'époque le

21 colonel Blaskic ?

22 Vous me dites qu'il n'était pas reconnu comme étant compétent

23 sur le terrain. Vous me dites que c'est parce qu'il y avait une compétence

24 théorique. Je peux le comprendre, il est de l'académie militaire, c'est

25 peut-être un peu court, un peu bref, lorsque l'on est dans une situation

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1 de guerre.

2 Ma question était celle-ci : est-ce que vous pensez qu'il aurait

3 pu être nommé à ce poste parce que, sur le plan politique, il pouvait

4 adhérer à l'ensemble des affirmations qui figurent dans le fameux rapport,

5 compte rendu qui fait l'objet de la pièce 456/95 sur laquelle l'accusation

6 vous a longuement interrogé ?

7 Si vous ne pouvez pas répondre, vous ne répondez pas. Il ne

8 s'agit pas de faire des plans sur la comète.

9 M. Pejcinovic (interprétation). - Monsieur le Président, je ne

10 peux pas émettre une telle affirmation parce que mes compétences n'étaient

11 pas suffisamment importantes pour me permettre de savoir pour quelles

12 raisons le colonel M. Blaskic a été nommé à ce poste.

13 En tant qu'homme, en tant qu'être humain, je peux simplement

14 dire que la nomination de quelqu'un à un poste est une chose lorsqu'il n'y

15 a pas beaucoup de problèmes sur le territoire placé sous sa responsabilité

16 et c'est une autre chose lorsque les problèmes surgissent et que tout

17 éclate au grand jour.

18 M. le Président. – Monsieur Pejcinovic, nous allons en rester

19 là. Le Tribunal tient à vous remercier pour votre contribution qui a été

20 un peu longue, peut-être fatiguante. Raison de plus pour, au nom de mes

21 collègues, vous en remercier, vous souhaiter un bon retour dans votre

22 région d'origine et puis ajourner nos travaux à lundi, 14 heures. C'est

23 bien cela, Monsieur Dubuisson ? Il est à présent 17 heures 30.

24

25 L'audience est levée à 17 heures 30.