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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL Affaire IT-95-14-T
2 POUR L’EX-YOUGOSLAVIE
3
4 LE PROCUREUR
5 c/
6 Tihomir BLASKIC
7 Lundi 23 novembre 1998
8
9 L’audience est ouverte à 14 heures 10.
10
11 M. le Président. - Vous pouvez vous asseoir. Je salue Mesdames
12 et Messieurs les interprètes qui, j'espère, sont biens reposés et prêts à
13 continuer. Eh bien entendu je demande à M. Dubuisson. de faire entrer
14 l'accusé.
15 L'accusé est introduit dans le prétoire.
16 A présent je peux saluer les conseils de la défense, de
17 l'accusation et l'accusé. Nous reprenons. C'est ce témoin, M. Dubuisson,
18 je ne voudrais pas prononcer son nom. Il n'y a pas de mesures de
19 protection. Sur le témoin suivant, c'est le nom que vous aviez inscrit ?
20 M. le Greffier (interprétation). - Il n'y a aucune mesure de
21 protection demandée.
22 M. le Président. - C'est M. Tolo Edvard, c'est cela ?
23 M. le Greffier (interprétation). - Ce serait effectivement lui.
24 M. le Président. - Mais Maître Nobilo va nous le dire.
25 M. Nobilo (interprétation). - Oui Monsieur le Président, son nom
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1 est Edvard Tolo. C'est le prochain témoin de la défense.
2 M. le Président. - Vous avez fait un petit résumé de sa
3 déposition, donc vous n'allez donc pas le reprendre. Et nous introduisons
4 le témoin.
5 Le témoin est introduit dans le prétoire.
6 M. le Président. - Bien, vous m'entendez Monsieur ?
7 M. Tolo (interprétation). - Oui.
8 M. le Président. - Vous restez debout quelques secondes, le
9 temps de nous dire votre nom, votre prénom, votre date et lieu de
10 naissance, votre profession, votre lieu de résidence, vous n'êtes pas
11 témoin protégé vous pouvez nous le dire, et ensuite vous prêterez serment.
12 M. Tolo (interprétation). - Je m'appelle Edvard Tolo. Je suis né
13 le 22 juin 1960 à Hanovre, et je vis à Vitez.
14 M. le Président. - L'huissier va vous tendre votre déclaration.
15 M. Tolo (interprétation). - Je m’appelle M. Tolo, je déclare
16 solennellement que je dirai la vérité toute la vérité et rien que la
17 vérité.
18 M. le Président. - Merci, vous pouvez-vous asseoir. Vous avez
19 accepté de venir témoigner à la demande de la défense et des conseils du
20 général Blaskic l'accusé devant le présent Tribunal pénal international.
21 Vous allez d'abord répondre aux questions de la défense, Me. Nobilo je
22 crois et ensuite de l'accusation. C'est à vous Me. Nobilo, ou Me. Hayman.
23 Allez-y.
24 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur Tolo, bonjour, vous avez
25 dit être né à Hanovre, c'est en République allemande n'est-ce pas ?
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1 Pouvez-vous expliquer aux Juges quelle
2 est la nationalité de vos parents. Cela a son importance en Bosnie.
3 Expliquez aux Juges.
4 M. Tolo (interprétation). - Mon père est Croate et ma mère
5 Musulmane. Et je viens donc d'un foyer mixte.
6 M. Nobilo (interprétation). - Quel est votre niveau
7 d'instruction ?
8 M. Tolo (interprétation). - J'ai terminé mes études à l'académie
9 militaire pour formation supérieure dans l'armée.
10 M. Nobilo (interprétation). - L'académie de l'ex-armée populaire
11 yougoslave ?
12 M. Tolo (interprétation). - Oui l'académie de l'ex armée de
13 Yougoslavie.
14 M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous dire aux Juges, après
15 avoir obtenu votre diplôme de l'académie militaire à Belgrade je suppose,
16 à quel endroit avez-vous été cantonné officiellement pour la première
17 fois ?
18 M. Tolo (interprétation). - J'ai terminé mes études au début de
19 l'année 1990 et j’ai pris mon premier poste à Postojina, en Slovénie. J'ai
20 été chargé de commander un peloton et mon supérieur était M. Blaskic. Il
21 était commandant de bataillon.
22 M. Nobilo (interprétation). - Après avoir quitté l'ex-JNA,
23 qu'avez-vous fait ?
24 M. Tolo (interprétation). - Nous étions à ce moment-là en 1992,
25 je suis entré dans les rangs de la police spéciale à Tuzla qui dépendait
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1 de l'armée de Bosnie-Herzégovine, plus précisément du Mup de Bosnie-
2 Herzégovine.
3 M. Nobilo (interprétation). - Pour préciser, à Tuzla, c'étaient
4 les Bosniens qui tenaient le pouvoir majoritaire, n'est-ce pas ? Je vous
5 demanderai de répondre à la question en paroles pour qu'on puisse vous
6 entendre. Est-il exact que les unités étaient placées sous le commandement
7 du gouvernement de Sarajevo, c'est-à-dire de l'armée de Bosnie-
8 Herzégovine, des Bosniens Musulmans ?
9 M. Tolo (interprétation). - Oui. A Tuzla, à partir du début de
10 l’année 92, jusqu'à la mi-92, j'ai fait partie de l'unité spéciale de la
11 police qui dépendait du Gouvernement de Sarajevo,
12 c'est-à-dire de l'armée de Bosnie-Herzégovine
13 M. Nobilo (interprétation). - Au sein de ces unités, vous avez
14 été blessé ?
15 M. Tolo (interprétation). - Oui.
16 M. Nobilo (interprétation). - Est-il exact qu'après cela, vous
17 êtes retourné à Vitez ?
18 M. Tolo (interprétation). - Au cours de la première quinzaine du
19 mois de juillet, je suis retourné à Vitez.
20 M. Nobilo (interprétation). - Que faites vous aujourd'hui ?
21 M. Tolo (interprétation). - Je suis au chômage, mais je conduis
22 un autobus sur la ligne Sarajevo-Vienne.
23 M. Nobilo (interprétation). - Merci. Nous parlerons d'abord si
24 vous le voulez bien du fait de savoir où et à quel moment vous avez fait
25 la connaissance de celui qui, à l'époque, était capitaine de première
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1 classe, Tihomir Blaskic. Pouvez-vous expliquer aux Juges dans quelles
2 circonstances vous avait fait sa connaissance et à quel moment ?
3 M. Tolo (interprétation). - J'ai rencontré pour la première fois
4 M. Blaskic qui a l'époque avait le rang de capitaine, c'était mon
5 supérieur direct et comme je sortais de l'école militaire, j'avais des
6 connaissances techniques il était chargé de m'enseigner le travail
7 pratique de commandement au sein de l'armée.
8 M. Nobilo (interprétation). - Lorsque vous dites que c'était
9 votre premier supérieur, de quelle unité s'agissait-il ? Où était-elle
10 stationnée et comment s'appelait-elle ?
11 M. Tolo (interprétation). - Il s'agissait d'une compagnie qui
12 faisait partie de la 228 ème brigade de l'ex-JNA. Nous parlons en ce
13 moment de l'année 90.
14 M. Nobilo (interprétation). - Le capitaine Blaskic était donc
15 votre supérieur. Pouvez-vous expliquer au Juges, de quelle façon il était
16 perçu en tant qu'officier et en tant qu'homme ? Comment était-il perçu et
17 quelle était sa réputation au sein de cette unité de l'ex-JNA en tant
18 qu'officier et en tant que personne. Je vous demanderai, si vous le voulez
19 bien, de
20 parler plus lentement afin de permettre aux interprètes de vous
21 interpréter de façon très fidèle.
22 M. Tolo (interprétation). - Nous pouvons parler de son aspect
23 physique et de son comportement qui lui permettait immédiatement d'être
24 perçu comme officier, qu'il soit habillé en militaire ou en civil. Il
25 présentait toutes les caractéristiques d'un véritable chef, d'un véritable
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1 commandant. Par son mode de commandement, il représentait un exemplede ce
2 que devait être un commandant, par son comportement, par l'attitude qu'il
3 manifestait à l'égard des nouveaux venus. Il ne sortait jamais de ce que
4 permettait la hiérarchie de commandement.
5 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur Tolo, pouvez-vous nous
6 dire quel était le système d'évaluation des officiers au sein de la JNA ?
7 Quels étaient les échelons ? Quelles étaient les notes de la plus mauvaise
8 à la meilleure ?
9 M. Nobilo (interprétation). - Eh bien, la note la plus basse, la
10 plus mauvaise était celle d'insuffisant, ensuite il y avait un certain
11 nombre d'échelons : satisfaisant, bon, très bon, exceptionnel qui était le
12 niveau supérieur.
13 M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous dire aux Juges quelles
14 étaient les notes reçues par M. Blaskic au sein de la JNA ?
15 M. Tolo (interprétation). - Pendant que j'étais au sein de cette
16 unité, il a obtenu les meilleures notes possibles.
17 M. Nobilo (interprétation). - Dans ce milieu de la JNA, en
18 Slovénie, était-il considéré comme l'un des officiers de meilleure qualité
19 et l'un qui avait les meilleures perspectives d'avenir ?
20 M. Tolo (interprétation). – Oui, sans aucun doute.
21 M. Nobilo (interprétation). - Avez-vous un souvenir qui porte
22 sur sa promotion ?
23 M. Tolo (interprétation). - Eh bien, à l'époque il était donc
24 capitaine de première classe lorsque je l'ai rencontré et il a avancé de
25 façon exceptionnelle pour les services rendus dans le cadre de ses
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1 fonctions. Cette année-là, un nombre très réduit d'officiers a obtenu une
2 promotion et il en a fait partie.
3 M. Nobilo (interprétation). - Mais a-t-il obtenu des notes
4 telles que, dans le cadre de son travail, il aurait pu avancer encore plus
5 loin mais qu'il n'avait pas une ancienneté suffisante pour ce faire ?
6 M. Tolo (interprétation). - Pour autant que je le sache, sur la
7 base de son travail et des diplômes qu'il avait obtenus, il remplissait
8 les conditions nécessaires car il avait les examens les plus avancés. Mais
9 il n'avait pas encore achevé un an d'ancienneté, il lui manquait un an
10 d'ancienneté pour être promu à un rang supérieur, à partir du rang de
11 capitaine de première classe.
12 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce qu'il était difficile
13 d'avancer au sein de la JNA à l'époque ? Est-ce que le système mis en
14 place par la JNA, et auquel devaient satisfaire les officiers, était un
15 système rigide et exigeant ?
16 M. Tolo (interprétation). - Après un an de travail, une
17 promotion était possible mais si les notes étaient insuffisantes, cela
18 donnait des points négatifs qui ralentissaient la promotion. Alors qu'avec
19 de bonnes notes, il était possible d'avancer plus rapidement dans le cas
20 bien sûr où on avait mérité cet avancement.
21 M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous dire aux Juges, si le
22 capitaine de première classe, Tihomir Blaskic, avait de l'autorité vis-à-
23 vis des soldats débutants qu'il commandait et quel était son rapport aux
24 nouvelles recrues ?
25 M. Tolo (interprétation). - Très pratiquement, il avait, il faut
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1 le souligner, l'autorité de l'uniforme pour commencer et puis, grâce à son
2 comportement vis-à-vis des nouvelles recrues, il bénéficiait d'une
3 autorité et d'un grand respect. Et plus pratiquement, plus concrètement,
4 il ne critiquait jamais devant les nouvelles recrues leur travail en
5 public. Il le faisait toujours en prenant la nouvelle recrue, en isolant
6 la première recrue et en lui parlant de façon isolée. C'est ainsi qu'il a
7 construit son autorité et il avait également un comportement
8 objectif vis-à-vis de l'armée.
9 Je tiens à dire qu'au cours du service militaire en Slovénie,
10 nous avions à nos côtés un grand nombre de soldats de nationalité
11 albanaise. Et, lui, n'a jamais eu de comportement négatif à l'égard de
12 quelque nationalité que ce soit pour le fait d'appartenir à une autre
13 nationalité. Cela ne le poussait pas à sous-estimer ou à surestimer une
14 personne. En fait, pour lui, il y avait deux sortes de soldats : le bon
15 soldat et le mauvais soldat. Et dans chacun des cas, on savait comment il
16 fallait se comporter, c'est ce qu'il faisait.
17 M. Nobilo (interprétation). - Mais vis-à-vis des mauvais
18 soldats, prenait-il des mesures ? Et prenait-il également des mesures vis-
19 à-vis des bons soldats ? Autrement dit, accordait-il des récompenses ou
20 prenait-il des sanctions ?
21 M. Tolo (interprétation). – Oui, il accordait des récompenses,
22 félicitations ou toute autre forme de récompenses disponibles au niveau de
23 son grade. Quant aux mauvais soldats, ils étaient sanctionnés et certains
24 étaient expulsés de l'armée conformément au règlement en vigueur dans
25 l'ex-JNA.
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1 M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous dire aux Juges ce qui
2 suit, en fait, vous étiez voisin de Tihomir Blaskic, vous veniez d'une
3 municipalité voisine, vous étiez Croate, est-ce que cela vous aidait, est-
4 ce que cela vous rendait la situation plus facile, est-ce que vous
5 obteniez des notes meilleures que les autres pour cette raison ?
6 M. Tolo (interprétation). - Je n'ai pas remarqué qu'il tenait
7 compte de l'endroit d'où nous venions. Il se fondait sur les services que
8 j'avais rendus qu'il évaluait pour me noter. Je crois avoir toujours été
9 noté en fonction de mon travail. Certains pouvaient, de temps en temps,
10 obtenir une meilleure note que moi. Donc, le fait que je vienne de la même
11 région n'avait rien à voir avec la note qu'il m'affectait. Cela
12 n'intervenait pas dans le fait qu'il donnait une bonne ou une mauvaise
13 note, il était correct, il était objectif dans sa façon d'évaluer les
14 hommes.
15 M. Nobilo (interprétation). - En dehors de ce que vous venez de
16 signaler, avait-il
17 une quelconque autre manière d'imposer son autorité ? Recourait-il à la
18 force vis-à-vis des soldats ou utilisait-il d'autres méthodes pour
19 convaincre les soldats de ce qu'il convenait de faire pour remplir leur
20 fonction ?
21 M. Tolo (interprétation). - Eh bien, au cours de notre
22 enseignement, nous suivions des cours de psychologie. Et lui appliquait
23 une méthode psychologique de conviction vis-à-vis des soldats. Il
24 réussissait à susciter chez les soldats le sentiment qu'ils étaient
25 coupables lorsqu'ils étaient réellement coupables. Donc, ce qui lui
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1 importait ce n'était pas uniquement de sanctionner un soldat qui avait mal
2 agi, mais ce qui lui importait au plus au point c'était de persuader, de
3 convaincre le soldat qu'il avait mal agi. Et puis il n'avait jamais
4 utilisé la force. La force n'était jamais utilisée dans l'ex-JNA, cela
5 aurait eu un effet négatif sur la note accordée à la personne qu'il aurait
6 utilisée.
7 Donc il sanctionnait grâce à l'emploi des mots et en s'appuyant
8 sur la psychologie. Ce qui lui permettait d'obtenir de la part des soldats
9 les meilleurs résultats possibles.
10 M. Nobilo (interprétation). - S'agissant du suivi par écrit des
11 actions entreprises, au cours de l'année 1990, que disait-il ?
12 M. Tolo (interprétation). - Eh bien, c'est l'une des leçons
13 principales que j'ai reçue de lui. Il a toujours demandé et même exigé que
14 les ordres donnés par lui soient enregistrés par écrit dans un cahier.
15 M. Nobilo (interprétation). - S'agissant de l'organisation de
16 l'armée, conviendriez-vous avec moi que M. Blaskic était, jouissait
17 réellement d'une réputation selon laquelle il était le meilleur officier
18 possible pour devenir général ultérieurement ?
19 M. Tolo (interprétation). - M. Blaskic était un exemple sur tous
20 les plans, c'était un officier tout à fait exemplaire.
21 M. Nobilo (interprétation). - Parlons maintenant des fonctions
22 que vous avez remplies en tant que soldat. Vous avez une deuxième fois
23 rencontré le colonel Blaskic par la suite à Tuzla. Pouvez-vous dire en
24 quelques mots dans quelle circonstance cette rencontre a eu lieu ?
25 M. Tolo (interprétation). - M. Blaskic était déjà civil à ce
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1 moment-là et moi j'avais accepté d'être de permanence à la caserne. Le
2 colonel Blaskic a été amené dans cette caserne. En fait, il avait été
3 arrêté par la police militaire.
4 M. Nobilo (interprétation) - De l'armée populaire yougoslave ?
5 M. Tolo (interprétation). – Oui, de l’armée populaire
6 yougoslave. Il était suspecté à ce moment-là. En fait, il avait été arrêté
7 avec un autre homme, dans un véhicule de luxe. Il portait un sac chacun
8 dans la voiture et apparemment, M. Blaskic n'avait pas rendu son uniforme
9 et son revolver avant de quitter l'armée. Il a donc été accusé pour ce
10 qu'il transportait dans ce sac, une bande magnétique et des bérets.
11 M. Nobilo (interprétation) - En fait, ces bérets portaient
12 l'insigne croate, n'est-ce pas ?
13 M. Tolo (interprétation). – Oui, mais apparemment tous ces
14 objets étaient la propriété d'un jeune homme qui était dans la voiture
15 avec M. Blaskic.
16 M. Nobilo (interprétation) - Qu'en était-il du revolver ?
17 Finalement, la preuve avait-elle été apportée qu'il avait le droit de le
18 porter sur lui ?
19 M. Tolo (interprétation). – A l'époque, nous étions en Slovénie
20 et nous avions payé pour acheter ces magnums.
21 Un accord avait été conclu selon lequel ces revolvers officiels
22 pouvaient être conservés par le militaire lorsqu'il quittait l'armée.
23 C'était en fait une forme de compensation car nous avions payé ces
24 revolvers.
25 M. Nobilo (interprétation) – Et après cette deuxième rencontre,
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1 vous avez vu le Colonel Blaskic au siège du HVO à Vitez, c'était une
2 troisième rencontre. Donc, expliquez aux Juges dans quelles circonstances
3 vous lui avez parlé à ce moment-là ?
4 M. Tolo (interprétation). - C'était le lendemain de mon arrivée
5 de Tuzla et lui m'attendait devant la porte d'une maison, à l'entrée avec
6 trois autres hommes qui l'accompagnaient et un soldat qui l'escortait.
7 Il m'a posé quelques questions et m'a demandé de l'accompagner
8 en ville pour converser, et surtout pour ne pas gêner les parents, car
9 c'était assez inhabituel d'entrer dans une maison accompagné de soldats.
10 Il souhaitait éviter d'apeurer les voisins. Nous sommes donc allés en
11 ville. Nous nous sommes assis dans un café. A ce moment-là, il m'a proposé
12 de venir dans son unité dans l'armée. Il m'a proposé un grade, des armes.
13 Il a dit que finalement que l'ex-major, l'ex-commandant Bosko Pencic
14 commandait les forces armées d'en face.
15 Et il était bien connu à ce moment-là, qu'il avait eu des heurs
16 avec cet homme au sein de la JNA.
17 Il a dit également que, de cette façon, je pouvais compenser ce
18 qui m'avait été fait à moi. La conversation s'est donc poursuivie de façon
19 inhabituelle et au moment où nous l'avons interrompue, j'ai eu
20 l'impression qu'il aurait dû occuper le poste supérieur, alors qu'il
21 n'occupait pas réellement ce poste d'autorité supérieure. Mais moi,
22 j'avait toujours été habitué à écouter la personne plus âgée et à ne
23 répondre que lorsqu'on me donnait la parole. C'est ce que j'ai fait.
24 M. Nobilo (interprétation) - M. Blaskic vous a proposé d'entrer
25 dans les rangs de l'armée. Est-ce que vous avez refusé ?
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1 M. Tolo (interprétation). – A ce moment-là, j'ai refusé parce
2 que j'avais encore des problèmes physiques. D'autre part, j'avais été
3 séparé de mon père pendant quelques années et mon père avait envie, à ce
4 moment-là, que je passe quelque temps avec lui pour rattraper le temps
5 perdu dans notre relation de fils à père.
6 M. Nobilo (interprétation) - Est-ce que vous souhaitiez attendre
7 un peu pour voir comment se déroulait la situation à Vitez ?
8 M. Tolo (interprétation). – En arrivant à Vitez, j'avais déjà
9 combattu pendant la
10 guerre quelques mois et j'ai trouvé que la situation était assez calme.
11 J'ai subi quelque problème individuel. J'ai été assez blessé par le
12 comportement que les habitants adoptaient vis-à-vis de la guerre. Je
13 venais du terrain et je connaissais la situation réelle. J'étais assez mal
14 à l'aise et il me fallait du repos.
15 M. Nobilo (interprétation) - Vous étiez quelqu'un qui sortait de
16 l'académie. Vous aviez acquis une certaine expérience pratique au sein de
17 la troupe de l'ex-JNA, vous aviez une certaine expériences des combats
18 dans le cadre de la police bosniaque.
19 Alors, en tant que civil, habitant à Vitez, un civil qui avait
20 toute l'expérience que je viens d'évoquer, quel a été votre avis quant aux
21 unités qui existaient à l'époque et quel était votre avis quant à la
22 position occupée par M. Blaskic. En tant qu'observateur, que pensiez vous
23 à l'époque ?
24 M. Tolo (interprétation). – Je venais d'arriver. J'ai, en fait,
25 réparti les hommes en trois catégories. Il y avait d'abord les unités
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1 spéciales qui se faisaient remarquer le plus. Ces soldats portaient un
2 uniforme noir. On les remarquait déjà physiquement davantage que les
3 autres. Je pense que je peux les décrire plus en détail. On observait ces
4 uniformes noirs. Ceux qui portaient ces uniformes étaient assez jeunes.
5 Ils avaient tendance à imiter Rambo. A commencer par le bandeau qu'ils
6 portaient autour du front, et puis les gants sans doigts, qu'ils avaient
7 également emprunté à Rambo.
8 Ils étaient bien équipés, ils avaient tous les éléments
9 classiques de l'uniforme qui les faisaient ressembler à ces soldats
10 américains. Ils étaient réputés pour porter des fusils, des armes à long
11 canon en ville et ces armes, en général, créaient la peur dans la
12 population. On les connaissait aussi car on les voyait souvent dans les
13 cafés, ils portaient des armes et buvaient pas mal. Il y avait des
14 incidents pendant lesquels ils tiraient sans raison. En ville, ils étaient
15 souvent ivres. Il y avait pas mal de délinquants et criminels qui
16 rejoignaient leur rang. Ils faisaient porter le poids de leurs
17 criminalités dans lesquelles ils étaient versés.
18 D'autre part, il était observable également que la plupart des
19 villes possédaient leur propre unité spéciale.
20 A Vitez, par exemple, ils portaient le nom de Vitezovi et
21 étaient recrutés principalement parmi les habitants. Il étaient les plus
22 puissants et faisaient la pluie et le beau temps à Vitez. Ces unités
23 étaient composées de jeunes gens, forts, bien bâtis, mais qui manquaient
24 le plus souvent d'expérience. Ils contrôlaient la situation dans la
25 plupart des lieux publics.
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1 En ville, il leur arrivait souvent de se regrouper dans tel ou
2 tel lieu public où ils manifestaient leur pouvoir.
3 M. Nobilo (interprétation). – Mais peut-on les qualifier de
4 bandes qui, ensuite, sont devenues des unités militaires ?
5 M. Tolo (interprétation). - Oui.
6 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce qu'ils étaient totalement
7 fidèles vis-à-vis de leur commandant Drago Zuljevic ? Est-ce qu’il aurait
8 été possible de remplacer Drago Zuljevic par un autre homme ?
9 M. Tolo (interprétation). – Non. A leurs yeux, Drago Zuljevic,
10 qui a été tué ensuite, était Dieu. Tout ce que disait Drago Zuljevic
11 faisait foi, il était impossible d’aller à l’encontre de ce qu’il avait
12 dit. Il était impossible de s’opposer à Drago Zuljevic , et Drago Zuljevic
13 était respecté par ses hommes des unités spéciales.
14 M. Nobilo (interprétation). - Vous avez dit que chaque
15 territoire avait unité spéciale qui était une unité composée des gens du
16 pays et qui avait contrôlé également ce territoire à Vitez. Il y avait des
17 Vitezovi. Est-ce que vous pouvez me dire qui se trouvait à la tête ?
18 M. Tolo (interprétation). - C'était également une autre unité :
19 Zuti, c'était donc une unité tout à fait spéciale.
20 M. Nobilo (interprétation). - Vous n'avez pas probablement connu
21 ce qui se passait dans d'autres villes. Est-ce que vous pouvez me dire
22 également s’il y avait une solidarité ; une solidarité entre ces bandes,
23 villageoises ou des unités spéciales ? Est-ce qu’il y avait
24 éventuellement, également, des conflits entre ces unités spéciales ?
25 M. Tolo (interprétation). - Effectivement, une unité spéciale ne
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1 se mêlait pas dans le territoire de l’unité spéciale qui était contrôlée
2 par l’autre unité spéciale. Par conséquent, chaque unité spéciale
3 contrôlait sont territoire. Zuti, "les jaunes", ne venaient pas à Vitez,
4 ceux de Vitez n'allaient pas de l'autre côté. C'était une règle.
5 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce qu'il y avait une
6 exception, au moment où il y avait Tuka, qui était commandant d’une unité
7 spécial, et Zuti qui était le commandant de l’autre.
8 M. Kehoe (interprétation). - Excusez-moi, excusez-moi. Je ne
9 sais pas s’il y a une exception. Si le Conseil peut demander s'il y avait
10 effectivement une exception. Je crois que c'est simplement une question
11 formelle.
12 M. Nobilo (interprétation). - Je peux expliquer si vous voulez
13 bien. Il y avait ce principe par conséquent, qui a été retenu que de
14 telles genres d'unités spéciales n'entraient pas en conflit entre elles.
15 Mais, il y avait quand même une exception. Pouvez-vous expliquer aux Juges
16 de quel incident s'agissait-il ?
17 M. Tolo (interprétation). – Il y avait Munje qui était sous le
18 commandement de Tuka. Eh bien Munje, pour des raisons que j'ignore, le
19 commandant de cette unité, est rentré en conflit avec Zuti, avec le Jaune,
20 le commandant. Et Tuka a donc tiré sur Zuti. Et Zuti a fini à l'hôpital.
21 Il a même été paralysé par la suite.
22 En représailles, les accompagnateurs ou les soldats -vous pouvez
23 les appeler comme vous voulez- de Zuti ont tiré sur Tuka, dans la ville
24 même, en représailles justement pour se venger de ce qu'il avait fait à
25 Zuti au commandant donc qui s’était retrouvé à l'hôpital.
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1 M. Nobilo (interprétation). – D’après vous, qu’est-ce que vous
2 pensez, est-ce que Blaskic avait pu commander Drago Zuljevic ou Zuti ou
3 d'autres personnes de telle genre, étant donné qu'il était quand même
4 commandant ?
5 M. Tolo (interprétation). - Dans de telles conditions, ce
6 n'était même pas possible.
7 M. Nobilo (interprétation). – Et si jamais, il voulait utiliser
8 ou recourir à Vitezovi, qu'est-ce qu'il aurait dû faire ?
9 M. Tolo (interprétation). – Eh bien, dans ce cas-là, Blaskic
10 aurait dû négocier, se mettre d'accord, trouver un compromis. Essayer de
11 convaincre également que c'était indispensable d’agir de la sorte avec
12 telle ou telle unité pour que Drago accepte, par exemple, d’envoyer un
13 certain nombre de soldats dans une action, ou bien de participer à une
14 action. C'est donc Blaskic qui devait se mettre d'accord avec Drago. Drago
15 était quand même celui qui, pratiquement, décidait de ce qu'il voulait
16 faire.
17 M. Nobilo (interprétation). - Maintenant vous avez décrit les
18 unités spéciales. Quel est l’autre groupement, les autres formations qui
19 existait dans la région de la municipalité de Vitez ?
20 M. Tolo (interprétation). – On pourrait dire qu’un village était
21 particulièrement une formation. Les villageois d’un village se
22 réunissaient pour défendre leur village et constituer une formation. A
23 l'intérieur de cette formation, ils élisaient leur commandant. Ils
24 n'étaient pas bien armés, ils n’étaient pas bien équipés. C'était une
25 unité à part de villageois.
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1 Par conséquent, ils n'avaient pas en général leur propre
2 commandant auquel ils obéissaient de manière aveugle. Ce qui était le cas
3 dans ce premier groupe de cette unité spéciale. Ils pouvaient, par
4 conséquent, nommer leur commandant. Ils pouvaient également le faire
5 destituer, faire des commentaires en ce qui concerne les ordres qu’il
6 donnait. C'était plutôt une bonne volonté, parmi tous les villageois,
7 d'entreprendre une action ou non. Si jamais ils n'étaient pas tous
8 d'accord à ce moment-là, il y avait des villageois qui refusaient
9 d’entreprendre
10 une telle action, ou bien ils faisaient du bruit, ils faisaient des
11 commentaires.
12 Par exemple, il y avait également des cas de barricades qu'il
13 fallait dresser pour défendre le village. Il n'y avait pas de casernes non
14 plus dans lesquelles ces gens-là étaient installés. Chacun retournait chez
15 lui après avoir fait quelque chose dans le cadre de cette formation. Ils
16 ne pouvaient pas agir en tant que formation militaire. Ils étaient un
17 petit peu éparpillés partout, dispersés. Il n'y avait pas une logique de
18 commandement et de structure de commandement.
19 M. Nobilo (interprétation). - Quand vous parlez du contrôle,
20 pourquoi ce contrôle n'a pas été facile ?
21 M. Tolo (interprétation). – Mais à partir du moment où vous avez
22 un seul commandant, ils ne pouvaient pas véritablement. Si les villageois
23 rentraient chez eux, ils ne pouvaient pas véritablement contrôlé tout,
24 parce qu’ils voyaient juste les gens qui étaient avec eux, et pas ceux qui
25 étaient de retour.
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1 M. Nobilo (interprétation). – Et ces soldats-là, ils se
2 trouvaient où ?
3 M. Tolo (interprétation). – Mais ils se trouvaient chez eux. Par
4 exemple, ils organisaient leurs patrouilles et la patrouille de
5 villageois. Ils restaient pendant quelques heures ensemble et, ensuite,
6 ils retournaient chez eux. C'était dans le cadre du village qu'ils
7 organisaient cette unité.
8 M. Nobilo (interprétation). – Et les uniformes et les fusils,
9 ils les mettaient où ?
10 M. Tolo (interprétation). - En général, il s’agissait de fusils
11 de chasse, de carabines. En gros, ils n'avaient pas des armes
12 véritablement automatiques.
13 M. Nobilo (interprétation). - Outre ces unités qui
14 représentaient le village, outre les unités spéciales, quel était le
15 troisième groupement que l'on pouvait reconnaître pendant votre séjour à
16 Vitez ? On nommait le commandement par une voie démocratique ou bien y
17 avait-il une autre structure.
18 M. Tolo (interprétation). - C'était la compagnie de Vitez avec
19 celle qui était à la tête. Si j'ai bien compris à cette époque-là, c'était
20 une unité qui se composait de soldats actifs, c'était un bataillon. A
21 partir du moment où ces soldats étaient à la disposition, ils pouvaient
22 être commandés.
23 M. Nobilo (interprétation). - Les réserves étaient donc les
24 villageois ?
25 M. Tolo (interprétation). - Oui.
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1 M. Nobilo (interprétation). - Quelle était la caractéristique de
2 ces commandant de Vitez ? Est-ce le commandant qui était le bon Dieu ?
3 M. Tolo (interprétation). - Le bataillon et la brigade de Vitez
4 étaient le fondement d'une nouvelle armée parce que, là, on avait commencé
5 à comprendre qu'il avait des subordonnés qui lui ont été subordonnés. Il
6 devait obéir à ces ordres. Mais comme unité, comme formation militaire, il
7 n'avait pas suffisamment de soldats. Il ne pouvait pas véritablement
8 mettre en question tous les ordres.
9 M. Nobilo (interprétation). - Vous êtes diplômé de l'académie,
10 vous avez fait l'expérience de la JNA, toutes ces méthodes et la manière
11 dont vous avez agi au sein de la JNA pouvaient-elles être appliquées dans
12 cette situation là, avec une armée comme celle de Vitez ?
13 M. Tolo (interprétation). - Non, dans ces conditions là, pas du
14 tout.
15 M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous dire aux Juges, si la
16 police civile et militaire pouvaient se permettre d'arrêter un soldat,
17 Zuti ou des Vitezovi de Darko ?
18 M. Tolo (interprétation). - Il y avait une grande peur, ni la
19 police militaire ni la police civile, ne pouvait... Elle évitait d'agir à
20 leur égard.
21 M. Nobilo (interprétation). - Au bout d'un certain temps, vous
22 avez pris part dans la structure militaire du HVO, quelles étaient vos
23 tâches ?
24 M. Tolo (interprétation). - A partir de septembre 93, M. Blaskic
25 m'avait ordonné de répondre à son ordre. Il m'avait affecté à l'école
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1 élémentaire transformée en caserne. L'idée était que je devais répondre à
2 cet ordre, de prendre les soldats, de les former comme instructeurs et
3 leur apprendre comment manipuler les armes.
4 M. Nobilo (interprétation). - - Est-ce que c'était une jeune
5 armée ? C'était de jeunes gens qui n'avait pas d'expérience militaire ?
6 M. Tolo (interprétation). - Oui c'étaient des jeunes gens qui
7 avaient 18 ans seulement, qui avaient l'âge de maturité, et qui n'avaient
8 pas fait le service militaire auparavant.
9 M. Nobilo (interprétation). - Avant ces jeunes gens, y avait-il
10 des formations organisées à Vitez, y avait-il de tels entraînement comme
11 c'était le cas en octobre 93 ?
12 M. Tolo (interprétation). - Le centre de formation comme celui
13 de Nova Bila n'existait pas autrefois. On pouvait former sur la ligne de
14 front, montrer aux gens comment il fallait charger le fusil, comment il
15 fallait tirer, mais c'était très bref et il n'y avait pas de centre de
16 formation.
17 M. Nobilo (interprétation). - Il y avait combien de jeunes
18 personnes qui se trouvaient dans cette école élémentaire à Nova Bila ?
19 M. Tolo (interprétation). - Une centaine à peu près, peut-être
20 un peu moins..
21 M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous nous décrire ce que
22 vous avez fait exactement, comment vous avez formé ces jeunes gens, et qui
23 avait établi le programme de formation ?
24 M. Tolo (interprétation). - Une fois que je suis venu à Nova
25 Bila, j'ai entendu dire qu'il y avait un certain nombre de formations qui
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1 ont travaillé avant que j'arrive quelques mois auparavant. Ils étaient
2 sous le commandement de M. Vukovic. Ils avaient travaillé selon son
3 programme, il l'a établi. Ils devaient par conséquent se former pour
4 manipuler les armes. J'ai d'abord examiné un certain nombre de soldats
5 pour savoir où ils étaient pour savoir d'où je devais partir pour la
6 formation. J'ai tout de suite compris qu'ils ne savaient pas grand-chose.
7 C'est pourquoi j'ai proposé à M. Vukovic de recommencer, dès le
8 début, à zéro, et
9 c'est pourquoi j'ai fait un plan et un programme de formation que, moi-
10 même, je me suis donné la tâche de faire et selon l'exemple de la JNA,
11 pour des catégories d'armes différentes, ce que M. Vukovic avait accepté.
12 C'est comme cela que nous avons commencé la formation.
13 M. Nobilo (interprétation). - Outre des fusils, auriez-vous
14 d'autres armes ? Comment vous êtes vous organisés ?
15 M. Tolo (interprétation). - L'école a été transformée en
16 caserne, il y avait quelques classes. Il a y avait des bancs que nous
17 avons sortis, il y avait des lits que nous avons installés pour que les
18 soldats puissent rester, nous avions un tableau, des craies, en ce qui
19 concerne des armes, nous avions des armes qui n'étaient pas utilisées pour
20 les actions, elles n'avaient pas une telle importance. Nous avions
21 derrière l'école un espace dégagé, c'est là que nous avons formé les
22 jeunes. C'est surtout sur le plan théorique que j'ai pu donner des leçons.
23 Sur le plan pratique, il n'y avait pratiquement pas de possibilité d'agir.
24 M. Nobilo (interprétation). - Et est-ce que c'était une
25 formation tactique ? Avec quel groupe de personnes auriez-vous pu
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1 organiser de tels entraînements ?
2 M. Tolo (interprétation). - L'espace était limité. Il y avait
3 une dizaine de soldats avec lesquels on a pu travailler, il y également
4 souvent des heures où on ne pouvait pas véritablement organiser cet
5 entraînement. Nous n'avons pas pu travailler très sérieusement. Nous ne
6 pouvions pas aller très loin, parce qu'automatiquement, nous nous
7 trouvions sur la ligne de front.
8 M. Nobilo (interprétation). - Vous avez eu cette tâche
9 d'instructeur. M. Blaskic vous a ordonné également de participer à un
10 projet qui aurait dû maîtriser les unités spéciales. Pouvez-vous expliquer
11 aux Juges quand cela s'est passé et comment cela s'est terminé ?
12 M. Tolo (interprétation). - Au mois d'août 93, M. Blaskic
13 m'avait demandé d'aller à Prahule et de parler avec un lieutenant-colonel,
14 je ne me souviens plus de son nom, il ne m'en a pas parlé en détail. Quand
15 je me suis rendu à cet endroit, le lieutenant colonel en question m'avait
16 dit qu'il avait cette idée de mettre sur place une compagnie
17 d'intervention qui pouvait intervenir à des moments très précis.
18 J'avais été envisagé comme commandant de peloton, mais comme il
19 m'avait dit que ces unités spéciales auraient dû faire partie de cette
20 compagnie, cela me paraissait fort ridicule. Je me disais que ce n'était
21 pas impossible d'agir ensemble. C'est pourquoi j'ai laissé mon numéro de
22 téléphone à ce lieutenant colonel, j'ai dit qu'il pouvait m'appeler. J'ai
23 dit que je ne refusais pas de travailler avec lui, mais que je ne croyais
24 pas qu'ils allaient pouvoir organiser quoi que ce soit avec ces unités
25 spéciales.
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1 M. Nobilo (interprétation). - Il vous a appelé ?
2 M. Tolo (interprétation). - Non. Il n'a jamais réussi à les
3 réunir.
4 M. Nobilo (interprétation). - Vous-même, vous vous êtes trouvé
5 dans une dans une situation extrêmement délicate si je ne m'abuse.
6 A un moment donné, vous ne pouviez pas contacter ni votre père
7 ni votre mère. Vous êtes d'un mariage mixte ? Est-ce que M. Blaskic vous a
8 parlé de votre situation ?
9 M. Kehoe (interprétation). - Excusez-moi, avec tout le respect
10 que je dois à la défense, je pense que je voudrais demander au conseil de
11 poser la question au témoin et de laisser au témoin le temps de répondre à
12 sa question sans introduire d'une certaine façon la question posée.
13 Laissons simplement le témoin s'exprimer sans aide quelconque.
14 M. le Président. - Vous le faites tous aussi bien du côté de
15 l'accusation que de la défense. Les commentaires devraient être limités au
16 maximum. Enfin, essayez Maître Nobilo de répondre aux préoccupations de
17 l'accusation.
18 M. Nobilo (interprétation). - Merci M. le Président. Est-ce que
19 M. Blaskic s'était intéressé à vous-même, à votre situation personnelle, à
20 votre attitude également en ce qui concerne le conflit qui existait entre
21 les deux communautés ethniques les Musulmans et les Croates ?
22 M. Tolo (interprétation). - Oui, une fois, il m'avait convoqué.
23 Et puis nous avons parlé à titre privé. Tout à fait, il m'avait posé la
24 question à ce moment-là, tout d'abord comment allaient mes parents bien
25 évidemment, s'ils étaient en bonne santé et où ils étaient.
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1 Ensuite, il m'avait demandé quelle était mon attitude, il savait
2 que j'étais d'une famille qui était mixte. A cette époque-là, je lui ai
3 déjà répondu : "Nous allons nous défendre", et même si mon père tirait sur
4 moi, j'aurais répondu, j'aurais riposté.
5 M. Nobilo (interprétation). - Merci Monsieur le Président. Nous
6 avons terminé.
7 M. le Président. - Maître Kehoe ?
8 M. Kehoe (interprétation). – Oui Monsieur le Président, merci.
9 M. le Président. - Votre micro, Maître Kehoe, s'il vous plaît ?
10 M. Kehoe (interprétation). - Bonjour Monsieur Tolo, je m'appelle
11 Kehoe, et je suis membre du bureau du Procureur avec mes deux collègues
12 Me Harmon, et à droite de Me Harmon, M. Cayley.
13 Monsieur Tolo, faisiez-vous partie du HVO lorsque vous êtes
14 revenu à Vitez ? En juillet 1992, avez-vous rejoint les rangs du HVO ?
15 M. Tolo (interprétation). - Non, pas tout de suite.
16 M. Kehoe (interprétation). - Quand avez-vous rejoint les rangs
17 du HVO ?
18 M. Tolo (interprétation). - Au bout de quelques mois, mon père
19 m'avait acheté une camionnette. Et j'ai pour mes propres besoins, j'ai
20 conduit cette camionnette entre Vitez et Travnik. Et il y avait également
21 une activité de travail que j'avais à ce moment-là, c'était d'emmener les
22 soldats vers la ligne de front contre les Serbes. Mais c'était dans le
23 cadre de mon travail tout à fait privé.
24 M. Kehoe (interprétation). - Mais ma question est la suivante :
25 quand avez-vous rejoint les rangs du HVO ? Je vous demande une date ?
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1 M. Tolo (interprétation). - Je ne comprend pas ce que vous
2 voulez dire en tant que
3 soldat en tant qu'officier ?
4 M. Kehoe (interprétation). - Comme vous voulez. Quand êtes-vous
5 devenu membre du HVO que ce soit en tant que soldat en tant qu'officier ?
6 M. Tolo (interprétation). - En tant que soldat, c'était à la fin
7 de 91, j'étais chauffeur et comme je vous ai déjà dit c'est à Slavke Vode
8 que j'avais conduit les soldats, c'est de cette manière-là que j'ai
9 contribué aux activités du HVO.
10 M. Kehoe (interprétation). - Vous parlez de la fin 1992, peut-
11 être qu'il y a une erreur dans le compte rendu ou ai-je tort. Je crois que
12 vous avez dit que vous avez rejoint le HVO à la fin de 1992, c'est cela ?
13 M. Tolo (interprétation). - C'est exact.
14 M. Kehoe (interprétation). - Et pendant combien de temps êtes-
15 vous resté membre du HVO ?
16 M. Tolo (interprétation). - Jusqu'en 1994 où j'ai été démobilisé
17 après le conflit entre les Croates et les Musulmans.
18 M. Ryad (interprétation). - Mais c'est 1991 ou 1992 ?
19 M. Kehoe (interprétation). - Non, en fait, c'est 1991 ; j'ai un
20 document qui établit ce point. Le témoin dit qu'il a rejoint le HVO en
21 septembre 1992.
22 M. Ryad (interprétation). - Mais en 1991 ou 1992 ?
23 M. Kehoe (interprétation). - Non, en 1992, c'est en 1992,
24 excusez-moi c'est en 1992, il y avait une erreur dans le compte rendu.
25 Mais je vais poser d'autres questions au témoin. Puis-je
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1 soumettre un document au témoin ? D'ailleurs, nous n'en avons qu'une
2 version en BCS. Monsieur l'huisier, s'il vous plaît.
3 M. Dubuisson. - Document 549.
4 M. Kehoe (interprétation). – Monsieur le Président,
5 malheureusement, je n'ai ce document qu'en BCS. Mais sur la page, on
6 trouve une liste de noms de personnes faisant partie du HVO. Vous voyez
7 cette page, Monsieur Tolo, n'est-ce pas ? Vous voyez votre date de
8 naissance, il s'agit du 22 juin 1970.
9 M. le Président - Excusez-moi, je ne comprends pas. Vous en êtes
10 où ? Je n'ai pas très bien compris ? Vous pouvez nous dire la page ?
11 M. Kehoe (interprétation). - La deuxième page du document
12 Monsieur le Président. Nous voyons les noms numéro 1,2,3,4,5,6,7,8,9, à la
13 neuvième ligne.
14 M. le Président. - C'est exact, Tolo Edvard, merci.
15 M. Kehoe (interprétation). - C'est bien vous Monsieur Tolo,
16 n'est-ce pas ?
17 M. Tolo (interprétation). - Oui, c'est l'immatricule des
18 citoyens qui est à côté.
19 M. Kehoe (interprétation). - Cela montre que vous étiez du HVO à
20 partir du premier septembre 1992 jusqu'au premier juillet 1994, n'est-ce
21 pas ?
22 M. Tolo (interprétation). - Oui.
23 M. Kehoe (interprétation). - Par conséquent, dès le premier
24 septembre 1992, vous étiez membre du HVO, vous portiez un uniforme, vous
25 portiez l'insigne du HVO, sur la manche de votre uniforme également,
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1 n'est-ce pas ?
2 M. Tolo (interprétation). - Ce n'est pas exact parce qu'il n'y
3 avait pas suffisamment d'uniforme. J'avais un uniforme de l'ex-JNA, et à
4 ce moment-là, nous étions près du bureau de la défense. J'étais le
5 chauffeur à cette époque-là.
6 M. Kehoe (interprétation). - Mais, est-ce que vous étiez
7 considéré comme étant un soldat du HVO travaillant pour le département de
8 la défense et transportant les soldats ?
9 M. Tolo (interprétation). - C'est vrai.
10 M. Kehoe (interprétation). – Par conséquent lorsque vous avez
11 dit à Me Nobilo que vous aviez refusé de rejoindre l'armée du HVO, aviez-
12 vous raison ? Avez-vous bien dit cela à Me Nobilo ?
13 M. Hayman (interprétation). – Pouvez-vous nous donner une
14 date ?
15 M. Kehoe (interprétation). – Mais je suis en train de lire votre
16 déclaration, Maître Hayman.
17 M. Hayman (interprétation). – Mais parlez-lui alors du
18 printemps 1992.
19 M. Kehoe (interprétation). – Après que le témoin ait quitté la
20 JNA, il s'est rendu à la municipalité de Vitez et il a refusé de rejoindre
21 l'armée du HVO à ce moment-là. Il a participé à d'autres formes de
22 services, notamment de transporter des soldats du HVO d'un endroit à un
23 autre.
24 M. Hayman (interprétation). – Mais s'agit-il du printemps 1992 ?
25 Est-ce à ce moment-là que le témoin a reçu la proposition de participer au
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1 HVO et pourquoi a-t-il refusé ?
2 M. le Président – Pour l'instant, Maître Hayman, si cela ne vous
3 dérange pas, laissez poser à Me Kehoe ses questions. Le témoin répondra.
4 Pour l'instant, c'est très clair. Monsieur Tolo, vous avez
5 compris que le conseil de l'accusation a essayé de savoir, et c'est son
6 droit, à partir de quel moment vous avez rejoint les rangs du HVO. Le
7 conseil de l'accusation vous montre un document d'après lequel il semble
8 que vous soyez membre du HVO depuis le 1er septembre 1992. Voilà, je crois
9 qu'il faut en rester là pour l'instant.
10 Maître Kehoe, vous pouvez peut-être bien clarifier les dates
11 pour que Me Hayman soit rassuré.
12 M. Hayman (interprétation). – Tout à fait,
13 Monsieur le Président.
14 M. Kehoe (interprétation). – Vous êtes revenu de la municipalité
15 de Vitez à partir en juillet 1992, n'est-ce pas ?
16 M. Tolo (interprétation). – C'est vrai.
17 M. Kehoe (interprétation). – En été 1992, n'est-ce pas ?
18 M. Tolo (interprétation). – Oui, c'était l'été.
19 M. Kehoe (interprétation). – Et je crois que l'été succède au
20 printemps, n'est-ce pas ?
21 M. Tolo (interprétation). – C'est normal.
22 M. Kehoe (interprétation). – Après votre retour à Vitez, en
23 été 1992, et en septembre 1992, vous étiez soldat du HVO, n'est-ce pas ?
24 M. le Président – Maître Kehoe, vous aussi… Je sais que l'été
25 succède au printemps. C'est le 1er septembre 1992 que le témoin entre au
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1 HVO et retourne à Vitez quelques semaines avant. Nous sommes d'accord ?
2 M. Kehoe (interprétation). – Oui, cela semble être ce que
3 reflète le témoignage du témoin. Ce qui me pose problème, c'est la
4 déclaration qui nous a été soumise, qui nous dit qu'après le départ de la
5 JNA il est revenu à la municipalité de Vitez. Il a refusé de rejoindre
6 l'armée du HVO, à la place il a participé à d'autres formes de services,
7 notamment le transport de soldats du HVO d'un endroit à un autre.
8 M. le Président – C'est le témoignage qui a été fait par
9 Me Nobilo. C'est vrai que...
10 M. Nobilo (interprétation) - …Oui, Monsieur le Président. Il
11 serait correct qu'on puisse poser la question au témoin car mon confrère
12 affirme un certain nombre de choses et il ne lui donne pas la possibilité
13 de répondre, d'expliquer.
14 M. le Président – Jusqu'à présent, c'est plutôt vous qui avez
15 interrompu Me Kehoe, Maître Hayman et Maître Nobilo.
16 Maître Kehoe, posez vos questions et vous exercerez votre droit
17 de réplique ensuite, le moment venu. Maître Kehoe, c'est à vous.
18 M. Kehoe (interprétation). – Je vais poursuivre. Au bout du
19 compte, Monsieur Tolo, en 1992, vous étiez soldat du HVO, n'est-ce pas ?
20 M. Tolo (interprétation). – (Hors micro).
21 M. Kehoe (interprétation). – Je crois que le micro du témoin
22 n'est pas branché. Peut-être l'avez-vous éteint par erreur ?
23 M. Tolo (interprétation). – A partir du 1er septembre 1992, je
24 suis soldat du HVO,
25 c'est vrai.
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1 M. Kehoe (interprétation). – Quel était votre grade dans les
2 rangs du HVO ?
3 M. Tolo (interprétation). – A ce moment-là, personne ne
4 s'occupait des grades. J'étais soldat. Alors que mon grade de l'ancienne
5 JNA m'est resté; alors qu'il n'avait pas encore été reconnu par le HVO.
6 M. Kehoe (interprétation). – Par conséquent, étiez-vous
7 lieutenant, dans le HVO ?
8 M. Tolo (interprétation). – Non.
9 M. Kehoe (interprétation). – Mais le grade que vous aviez dans
10 la JNA était bien le grade de lieutenant n'est-ce pas ?
11 M. Tolo (interprétation). – J'étais sous-lieutenant. Au niveau
12 du HVO, j'aurais eu même un grade en dessous. Mais à ce moment-là, on
13 n'avait pas rangé tout cela. On n'y pensait pas.
14 M. Kehoe (interprétation). – D'accord, selon les critères du
15 HVO, vous auriez été sous-lieutenant ou quelque chose comme ça n'est-ce
16 pas ?
17 M. Tolo (interprétation). – Je ne sais pas comment vous voulez
18 parler de sous-lieutenant et capitaine de deuxième classe ?
19 M. Kehoe (interprétation). – Excusez-moi, je crois que je
20 parlais simplement de sous-lieutenant.
21 M. Tolo (interprétation). – Sous-officier, si vous voulez.
22 M. Kehoe (interprétation). – Et en vertu de ce grade, quelles
23 étaient vos responsabilités, en tant que sous-officier ?
24 M. Tolo (interprétation). – J'ai été soldat chauffeur. Personne
25 n'a demandé de moi d'être quelqu'un qui soit supérieur, etc. J'ai été
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1 chauffeur tout court.
2 M. Kehoe (interprétation). – Travailliez-vous à l'hôtel Vitez
3 dans la structure de commandement avec le colonel Blaskic ?
4 M. Tolo (interprétation). – Dans quelle période voulez-vous
5 préciser?
6 M. Kehoe (interprétation). – A partir du moment où vous êtes
7 arrivé en 1992 ou par la suite avez-vous travaillé à l'Hôtel Vitez ? Et si
8 c'est le cas, à partir de quand ? Dites-le nous.
9 M. Tolo (interprétation). – J'ai été envoyé à partir
10 d'octobre 93, au nom de cette région à Nova Bila pour former les soldats.
11 M. Kehoe (interprétation). – Avant octobre 1993, étiez-vous
12 membre du personnel de commandement qui se trouvait à l'Hôtel Vitez ?
13 M. Tolo (interprétation). – Non. Tout d'abord mon commandant
14 était M. Gigonic, cela jusqu'au conflit avec les Musulmans. A partir du
15 conflit entre Croates et Musulmans, j'ai été dans la brigade de Vitez
16 comme chauffeur.
17 M. Kehoe (interprétation). – Par conséquent, vous ne faisiez pas
18 partie du commandement de l'hôtel Vitez. N'est-ce pas ? Ou en tout cas,
19 pas avant octobre 1993, n'est-ce pas ?
20 M. Tolo (interprétation). – Non.
21 M. Kehoe (interprétation). – Aviez-vous les ordres du
22 colonel Blaskic délivrés par écrit à l'attention des Vitezovi ?
23 M. Tolo (interprétation). – Non.
24 M. Kehoe (interprétation). – Avez-vous vu les ordres écrits par
25 le colonel Blaskic et destinés à l'unité spéciale des Zuti ?
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1 M. Tolo (interprétation). - Non.
2 M. Kehoe (interprétation). - Je voudrais vous soumettre un
3 document. C'est un document de la défense en fait, pièce de la défense
4 250 .
5 Avant de passer à ce document à proprement parler, vous avez dit
6 n'avoir jamais vu aucun ordre écrit et de M. Blaskic à l'intention des
7 Vitezovi. Avez-vous participé à des discussions entre M. Blaskic et Darko
8 Kraljievic au cours desquelles M. Blaskic aurait parlé avec Darko
9 Kraljevic d'une éventuelle marche à suivre.
10 M. Tolo (interprétation). – Non, je n'y ai jamais participé.
11 M. Kehoe (interprétation). - Très bien, vous n'avez jamais vu
12 d'ordres écrits et vous n'avez jamais participé à une éventuelle
13 discussion au cours de laquelle M. Blaskic et Darko Kraljevic auraient
14 parlé.
15 Je me tourne maintenant vers la pièce 250. Je me tourne
16 notamment… Excusez-moi un instant, je connais le numéro de la page dans la
17 version anglaise et je vais essayer de retrouver quelle est la page dans
18 la version en BCS. Peut-être que vous pourriez-nous aider, monsieur Tolo.
19 Je cherche la première date, celle du 16 avril 1993.
20 Avez-vous retrouvé cette date ? Je crois que ce document suit un
21 ordre chronologique. Je vous demanderai donc d'examiner ces pages
22 rapidement. Je crois que c'est à la page 4 de la version BCS, à peu près à
23 la moitié de la page. Il est dit : "Dana 16 1993". Vous voyez cela ?
24 M. Tolo (interprétation). - Je vois le 16 avril 93.
25 M. Kehoe (interprétation). - Il s'agit d'une pièce de la défense
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1 qui a été versée et qui, en fait, était rapport qui a été rédigé par les
2 Vitezovi et qui a été adressé au département de la défense qui se
3 trouvaient à Mostar. Avez-vous jamais vu ce document ?
4 M. Tolo (interprétation). - Non.
5 M. Kehoe (interprétation). - Je vous renvoie au document où il
6 est dit que le 16 avril 1993, une équipe de 18 soldats a nettoyé la zone
7 de la station essence Kalen, Rakita Novaci. A cette occasion, Mato
8 Jankovic, Dragan Safradin et d'autres ont été blessés et Ivan Zulijevic a
9 été tué".
10 Qui a donné l'ordre à ces 18 soldats de nettoyer cette station-
11 service ? Vous savez où elle se trouve, n'est-ce pas ?
12 M. Tolo (interprétation). – Oui, je connais ce territoire. Mais
13 je ne peux pas vous donner une réponse à ce sujet là.
14 M. Kehoe (interprétation). – Passons à la ligne suivante, au
15 paragraphe suivant. Il est dit après cela : "Le PPN Vitezovi s'est engagé
16 dans la mise en place d'une ligne de front contre les Musulmans de Vitez à
17 Busovaca". Voyez-vous ce passage ?
18 M. Tolo (interprétation). - Je vois ce passage. Je ne sais pas
19 ce que vous voulez de moi.
20 M. Kehoe (interprétation). - Qui a donné l'ordre de déployer les
21 Vitezovi sur la ligne de front contre les Musulmans de Vitez à Busovaca ?
22 Qui a donné cet ordre ?
23 M. Tolo (interprétation). - Je ne sais pas. Je n'y étais pas.
24 Je ne sais même pas qui avait donné ce genre d'ordre, je ne savais même
25 qui les avait donnés, qui les avaient signés.
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1 M. Kehoe (interprétation). - Continuons sur cette même page.
2 Nous voyons que tous ces ordres, tels que celui du 18 avril, 6 soldats
3 vont à Vitez autour de la ligne de front, et ensuite, il y en 15 autres
4 qui vont à Stari Vitez et d'autres le 19 avril qui vont à Gornja
5 Veceriska. Vous ne savez pas qui a pu donner l'ordre de déployer les
6 Vitezovi dans ces différentes régions ? C'est bien ce que vous dites ?
7 M. Tolo (interprétation). - C'est éventuellement Darko Kraljevic
8 qui aurait pu donner des ordres aux Vitezovi.
9 M. Kehoe (interprétation). – Savez-vous si M. Blaskic a donné
10 cet ordre ?
11 M. Tolo (interprétation). - Je ne sais pas.
12 M. Kehoe (interprétation). – Disposez-vous de faits pouvant
13 étayer l'hypothèse que vous formulez selon laquelle les Vitezovi…, non
14 excusez-moi. Pouvez-vous nous donner des exemples au cours desquels les
15 Vitezovi ont refusé d'obéir à un ordre de M. Blaskic . Si c'est le cas,
16 expliquez le aux Juges.
17 M. Tolo (interprétation). - Je ne peux pas vous citer un
18 exemple. Je ne sais pas qui
19 aurait pu commander à la place de M. Blaskic.
20 M. Kehoe (interprétation). – Eh bien, il est exact, n'est-ce
21 pas, que les Vitezovi étaient placés sous le commandement opérationnel du
22 colonel Blaskic lorsqu'il était placé dans la zone opérationnelle de
23 Bosnie centrale, n'est pas exact ? Ou ne le savez-vous pas ?
24 M. Tolo (interprétation). - Je ne le sais pas.
25 M. Kehoe (interprétation). - Par conséquent, vous ne savez même
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1 pas si, oui ou non, les Vitezovi étaient placés sous le commandement
2 opérationnel du colonel Blaskic, n'est-ce pas ?
3 M. Tolo (interprétation). – Non, je ne le sais pas.
4 M. Kehoe (interprétation). - J'aimerais vous montrer un certain
5 nombre d'ordres. Excusez-moi, 546/37, tout d'abord. Il s'agit d'une pièce
6 de l'accusation.
7 M. le Président. - L'après-midi est longue, nous pourrions faire
8 une pause vers 15 heures 30. Avez-vous encore des questions ?
9 M. Kehoe (interprétation). - J'ai encore quelques questions à
10 poser, je dois dire.
11 M. le Président. – Préférez-vous que l'on arrête tout de suite
12 pendant 12 ou 15 minutes. Comme vous le voulez.
13 M. Kehoe (interprétation). - Eh bien, peut-être pourrais-je en
14 finir avec ce document ?
15 M. le Président. - Vous terminez avec ce document. Allez-y.
16 M. Kehoe (interprétation). – Monsieur Tolo, il s'agit d'un
17 document qui a été versé au dossier et qui porte la date du 19 juin 93,
18 n'est-ce pas ?
19 M. Tolo (interprétation). – Je ne vois pas bien la date.
20 M. Kehoe (interprétation). - Eh bien en tout cas en juin 1993,
21 cela vous le voyez n'est-ce pas ?
22 M. Tolo (interprétation). – Oui, le mois de juin, ça je vois.
23 M. Kehoe (interprétation). – Très bien. Eh bien, en juin 1993,
24 vous étiez dans le HVO.
25 Cet ordre est délivré par M. Blaskic à toutes les unités
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1 indépendantes placées sous le commandement du commandement de la troisième
2 zone opérationnelle. Et dans toutes ces unités indépendantes dépendant de
3 cette zone opérationnelle, on trouve les Vitezovi et les Zuti n'est-ce
4 pas ?
5 M. Tolo (interprétation). - Il s'agit de toutes les brigades, de
6 toutes les unités spéciales. Mais je ne vois pas plus en dehors de cela.
7 Mais compte tenu du fait que nous avons été encerclés, je suppose qu'ils
8 ont été effectivement placés sous ce commandement.
9 M. Kehoe (interprétation). – Mais, Monsieur Tolo, je vais vous
10 lire la version en anglais du document qui a été signé par le
11 Colonel Blaskic.
12 Dans cette version, il dit que cet ordre est destiné à toutes
13 les unités indépendantes placées sous le commandement du commandant de la
14 troisième zone opérationnelle du HVO. On parle du quatrième bataillon de
15 la police militaire, des Vitezovi, de Zuti. Saviez-vous que ces unités
16 étaient placées sous le commandement du Colonel Blaskic ?
17 M. Tolo (interprétation). - Je ne suis pas au courant.
18 M. Kehoe (interprétation). - Par conséquent vous ne détenez
19 aucune information sur des ordres délivrés par le colonel Blaskic sur des
20 éventuelles discussions avec le colonel Blaskic et Drago Zuljevic ? Et
21 vous ne savez pas non plus si les Vitezovi, et ces autres unités
22 indépendantes étaient placées sous le commandement opérationnel de
23 Blaskic ? Vous n’en savez rien, n'est-ce pas ?
24 M. Tolo (interprétation). - Je n'ai vu aucun ordre et je ne sais
25 pas s'ils se sont réunis.
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1 M. Kehoe (interprétation). – Et ma dernière question était :
2 vous ne savez pas quelle était la relation, le rapport entre les Vitezovi
3 et Blaskic n’est-ce pas ?
4 M. Tolo (interprétation). – Vous voulez savoir si, moi, je suis
5 au courant ? S’il y avait des contacts entre Blaskic et Vitezovi ? Moi, je
6 peux dire qu'il y avait des problèmes. Chaque fois qu’il s’agissait d’un
7 ordre qu’il fallait donner à M. Drago Zuljevic, c’était extrêmement
8 difficile de lui demander d’obéir l’ordre, de donner l’ordre à
9 Drago Zuljevic.
10 M. Kehoe (interprétation). – Donnez-nous, s’il vous plaît, un
11 seul ordre que Blaskic a donné à Drago Zuljevic, ordre que les Vitezovi
12 auraient refusé d’appliquer. Donnez-nous juste un seul exemple de cela.
13 M. Tolo (interprétation). - Je ne sais pas si M. Blaskic avait
14 donné un ordre aux Vitezovi. Cela, je ne connaîs pas.
15 M. Kehoe (interprétation). - Merci Monsieur le Président. Nous
16 pouvons maintenant faire la pause.
17 La séance suspendue à 15 heures 25 est reprise à 16 heures.
18 M. le Président. - Nous reprenons l'audience. Veuillez faire
19 entrer l'accusé. Veuillez d'abord nous excuser, vous savez les pauses ne
20 sont pauses que..., ne sont pas pauses toujours pour les Juges, vous le
21 savez, dès qu'on arrive dans nos bureaux, on est submergé de demandes
22 diverses.
23 Bien. Maître Kehoe, vous reprenez, s'il vous plaît.
24 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur Tolo, vous avez déclaré
25 qu'une unité indépendante telle que l'unité des Vitezovi ou l'unité de
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1 Zuti fourmillaient de criminels, vous rappelez-vous avoir dit cela ?
2 M. Tolo (interprétation). – Oui, je me rappelle. Mais je l'ai
3 dit en rapport avec les Vitezovi parce que je ne connais Zuti que d'après
4 les récits que j'ai entendus de la bouche d'autres soldats que je
5 conduisais lorsque que je leur faisais traverser Bila.
6 M. Kehoe (interprétation). - Mais à votre connaissance et selon
7 ce que vous avez déclaré, l'unité des Vitezovi fourmillait de criminels,
8 n'est-ce pas ?
9 M. Tolo (interprétation). – Oui, il y en avait un certain nombre
10 qui ont nuit à la réputation des Vitezovi.
11 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que tout le monde le
12 savait ?
13 M. Tolo (interprétation). - Pratiquement tout le monde.
14 M. Kehoe (interprétation). - M. Blaskic le savait-il ?
15 M. Tolo (interprétation). - Je ne sais pas s'il le savait.
16 M. Kehoe (interprétation). - Vous ne savez pas si Blaskic savait
17 ou ne savait pas que les membres de l'unité des Vitezovi avait commis des
18 actes criminels par le passé, c'est ce que vous dites ?
19 M. Tolo (interprétation). - Le général Blaskic en tout état de
20 cause ne circulait que dans les milieux des officiers, il n'avait donc pas
21 de contacts avec les soldats, ni proches ni autres. Lorsqu'il voulait
22 avoir un contact avec les soldats, il devait passer par la voie
23 hiérarchique, par les différents commandants dépendants de lui. Et c'est
24 par eux qu'il entendait ce que disaient les soldats.
25 M. Kehoe (interprétation). - Eh bien parlons de Blaskic et de
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1 ses subordonnés. Vous avez proposé un certain nombre d'hypothèses au cours
2 de vos réponses à l'interrogatoire principal. Etiez-vous présent lorsque
3 Blaskic rencontrait Mario Cerkez ?
4 M. Tolo (interprétation). - En tant que soldat et chauffeur, je
5 n'avais pas compétence pour participer à ce genre de réunion mais je sais
6 que Mario Cerkez se rendait souvent chez lui.
7 M. Kehoe (interprétation). - Et qu'en est-il de Dusko Grubicic,
8 le commandant de la brigade Nikola Zrinski Subic ?
9 M. Tolo (interprétation). - Non, je ne sais pas. Peut-être l'ai-
10 je rencontré mais je ne
11 le connais pas par son nom. Je ne sais pas exactement de qui il s'agit.
12 M. Kehoe (interprétation). - Mais qu'en était-il des réunions
13 entre Blaskic et les autres commandants de brigade ? Est-ce que vous avez
14 participé à de telles réunions ?
15 M. Tolo (interprétation). - J'ai déjà dit qu'en tant que soldat
16 et chauffeur, je ne pouvais pas participer à ce genre de réunions.
17 M. Kehoe (interprétation). - Donc vous ne savez rien de la façon
18 dont Blaskic se comportait vis-à-vis des commandants de brigade et vis-à-
19 vis des chefs des autres unités placées sous son commandement. Vous ne le
20 savez pas parce que vous étiez simplement soldat et chauffeur ?
21 M. Tolo (interprétation). - Je ne sais que ce que me disaient
22 les soldats avec lesquels j'avais des contacts. M. Blaskic était encore, à
23 l'époque, un homme de l'extérieur donc nous nous posions beaucoup de
24 questions par rapport à l'arrivée de quelqu'un de l'extérieur qui allait
25 prendre sur nous, nous imposer sa volonté et ses ordres.
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1 Donc il y avait pas mal d'histoires qui circulaient au sujet de
2 Blaskic, les gens se moquaient de lui. Il était souvent également question
3 de Darko, on racontait que Darko lui aurait promis quelque chose. Toutes
4 ces histoires circulaient parmi les soldats qui dépendaient des Vitezovi
5 par exemple. Il se vantait très souvent du fait que leur commandant avait
6 la plus grande autorité et Blaskic devrait s'y plier.
7 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur Tolo, vous avez déclaré,
8 en réponse aux questions de l'interrogatoire principal, que la police
9 militaire et la police civile ne pouvaient pas réduire à merci Zuti et ses
10 soldats, n'est-ce pas ?
11 M. Tolo (interprétation). - La crainte était fréquente lorsqu'on
12 parlait de ce genre de choses, car chacun craignait les représailles qui
13 pouvaient s'ensuivre.
14 M. Kehoe (interprétation). - En tant que soldat, membre du HVO,
15 savez-vous que M. Blaskic a pris des sanctions contre des soldats qui
16 faisaient partie de l'unité spéciale
17 commandée par Zuti ?
18 M. Tolo (interprétation). - Je ne le sais. Je vous le répète, la
19 seule chose que je connaissais, c'étaient les milieux de Vitez. Or, Zuti
20 était à Bila. C'était plus loin Nous nous étions concentrés sur Vitez.
21 M. Kehoe (interprétation). - Mais le Tribunal militaire
22 disciplinaire se trouvait à Vitez, n'est-ce pas ?
23 M. Tolo (interprétation). - Je ne comprend pas de quel Tribunal
24 vous parlez.
25 M. Kehoe (interprétation). - Eh bien jetons un coup d'oeil aux
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1 pièces à conviction de la défense 237 et 239.
2 Ce sont des pièces qui ont été versées par le truchement du
3 témoignage du général de brigade Slavko Marin au cours de l'interrogatoire
4 de la défense. Je répète il s'agit des pièces de la défense 237 et 239.
5 Monsieur l'huissier, vous pouvez remettre en même temps ces deux pièces,
6 les pièces 237 et 239.
7 Monsieur Tolo, avez-vous jamais vu ces documents ?
8 M. Tolo (interprétation). - C'est la première fois que je les
9 vois. C'est la première fois que je vois ces documents.
10 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur Tolo, dans ces documents,
11 M. Blaskic et le commandement du HVO de Vitez prennent des mesures
12 disciplinaires à l'encontre de membres de l'unité spéciale de Zuti pour
13 avoir refusés d'obtempérer, d'appliquer des ordres, n'est-ce pas ? C'est
14 le cas dans ces deux documents ?
15 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, je demande
16 que quelques minutes soient accordées au témoin pour lire ces documents
17 car il vient de déclarer que c'est le première fois qu'il les a entre les
18 mains. Donc, il serait bon peut-être qu'il puisse les lire de la première
19 ligne à la dernière, depuis le titre et la date jusqu'à la fin.
20 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur Tolo, effectivement je
21 vous prie de
22 m'excuser, je ne souhaite pas vous demander de répondre trop vite au sujet
23 de ces documents.
24 Si vous avez besoin de quelques instants pour prendre
25 connaissance du contenu de ces documents, je vous en prie.
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1 Monsieur le Président, je ne voulais assurément pas presser le témoin par
2 rapport à ces documents.
3 Monsieur Tolo, dites-nous, je vous prie quand vous estimerez
4 avoir disposé d'un temps suffisant pour prendre connaissance du contenu de
5 ces documents ?
6 M. Tolo (interprétation). - Vous pouvez poser vos questions.
7 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur Tolo, c'est un fait que
8 dans ces deux ordres, excusez-moi, nous allons attendre quelques instants.
9 M. le Président. - Allez-y, Maître Kehoe.
10 M. Kehoe (interprétation). - Merci Monsieur le Président.
11 Monsieur Tolo, c'est un fait que dans ces deux ordre, le
12 commandement du HVO prend des sanctions disciplinaires à l'encontre de
13 deux membres de l'unité spéciale de Zuti qui ont refusé de suivre les
14 ordres. Et ces hommes sont condamnés à 30 jours de prison militaire,
15 n'est-ce pas ? D'arrêt ?
16 M. Tolo (interprétation). - Oui, mais je dois dire que cette
17 période était déjà celle où M. Blaskic prenait le contrôle sur certaines
18 unités, à commencer par moi d'ailleurs. A partir du mois d'octobre, il a
19 déjà repris des fonctions que j'aurais peut-être dues accomplir moi-même
20 étant donné mon instruction. Et puis des officiers de l'ex-JNA ont
21 également reçu des postes de responsabilité, ont remplacé des hommes qui
22 étaient d'une formation inférieure. Donc c'est une période où, peu à peu,
23 progressivement une certaine prise de contrôle s'effectuait ou certaines
24 possibilités existaient.
25 M. Kehoe (interprétation). - Nous avez-vous dit cela au cours de
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1 l'interrogatoire principal ?
2 M. Tolo (interprétation). - Vous pouvez répéter votre question ?
3 M. Kehoe (interprétation). - Nous avez-vous dit ce que vous
4 venez de dire au sujet de Blaskic qui crée des structures en Bosnie
5 centrale ? Nous l'avez vous dit en réponse aux questions de
6 l'interrogatoire principal qui vous était posé par Me Nobilo tout à
7 l'heure ?
8 M. Tolo (interprétation). – Qu'à partir du mois d'octobre, j'ai
9 reçu un poste ? A quoi faites-vous référence ? Je ne comprends pas.
10 Je ne comprend pas exactement ce que je dois répondre parce
11 qu'en octobre, j'ai déjà pris mes fonctions. A partir du mois d'octobre,
12 une certaine image se dessine, la structure du commandement se transforme.
13 Le pouvoir au sein de la structure militaire commence à changer de mains.
14 Des possibilités de commandement aux unités inférieures se créent ; c'est-
15 à-dire le cercle de responsabilité et le milieu dans lequel le
16 colonel Blaskic a de l'autorité s'élargit.
17 M. Kehoe (interprétation). - Mais Monsieur, vous n'avez jamais
18 vu ces documents avant qu'ils ne vous soient montrés par moi, n'est-ce
19 pas ?
20 M. Tolo (interprétation). – Non, en effet. C'est exact.
21 M. Kehoe (interprétation). - Connaissez-vous quelque autre
22 membre de l'unité spéciale de Zuti qui aurait subi des sanctions
23 disciplinaires ?
24 M. Tolo (interprétation). - Je me rappelle un événement qui a eu
25 lieu au début de cette même année, événement au cours duquel la police
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1 civile avait arrêté un membre de l'unité de Zuti et M. Zuti et son équipe
2 sont venus sur les lieux pour obtenir sa libération. Avant cela, il avait
3 pris le contrôle de toute la police civile, en faisant savoir que cet
4 homme avait été libéré par lui et par la force.
5 Et puis ensuite, les hommes de Zuti ont circulé en ville en
6 maniant leurs armes pour bien faire comprendre à chacun que c'est lui qui
7 représentait le pouvoir, que personne d'autre ne pouvait imposer sa loi.
8 Donc voilà ce que j'ai à dire au sujet de Zuti. C'est un incident que je
9 me rappelle, un des hommes avait été arrêté et cela a donc eu lieu au
10 début de l'année 1993, date à laquelle l'image était très différente de ce
11 qu'elle est devenue plus tard.
12 M. Kehoe (interprétation). - A quelle date ces ordres,
13 impliquant des sanctions disciplinaires à l'égard des hommes dont nous
14 parlons, ont-ils été rédigés ?
15 M. Tolo (interprétation). - Le 26 novembre 1993.
16 M. Kehoe (interprétation). - Quelle est la date de l'autre
17 ordre, celui que vous avez dans la main droite ?
18 M. Tolo (interprétation). - L'ordre a été émis le 6 novembre et
19 quant à l'ordre principal, son application est en date du 29 novembre.
20 Mais pour celui-ci, je ne vois pas de date d'application.
21 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur Tolo, est-ce que Zuti ou
22 un membre de son unité a subi des sanctions disciplinaires en rapport avec
23 l'événement que vous nous avez relaté tout à l'heure, c'est-à-dire
24 l'incident de la libération par la force dans une prison civile ? Y a-t-il
25 eu des sanctions disciplinaires ?
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1 M. Tolo (interprétation). - Je ne suis pas au courant.
2 M. Kehoe (interprétation). - Vous étiez membre du HVO, vous y
3 êtes entré en septembre 1993. Ces ordres datent du mois de novembre et
4 vous dites que vous ne connaissez aucun membre des Vitezovi qui a subi des
5 sanctions disciplinaires en novembre ou décembre 1993 ou janvier 1994 et
6 ce, jusqu'en juillet 1994. Et par la suite, donc après votre départ du
7 HVO, vous n'avez jamais entendu parler de cela alors que l'acte en
8 question était tout à fait scandaleux.
9 Excusez-moi, j'ai dit Vitezovi, je voulais parler de Zuti.
10 Donc personne, à votre avis, n'a subi de sanctions pour avoir
11 commis cet acte d'entrer par effraction dans une prison et de libérer
12 quelqu'un par la force ?
13 M. Tolo (interprétation). - Non, vraiment, je ne connais pas
14 bien, je ne suis pas au courant de ce genre de choses. Je ne peux rien
15 dire à ce sujet.
16 M. Kehoe (interprétation). - Eh bien passons à autre chose,
17 monsieur. En rapport
18 avec cet événement particulier, la police militaire avait-elle le pouvoir
19 d'empêcher les Vitezovi, excusez-moi..., d'empêcher les membres de l'unité
20 de Zuti de faire irruption et d'entrer par effraction dans cette prison
21 civile ?
22 M. Tolo (interprétation). - Est-ce qu'ils y étaient habilités
23 par une autorisation officielle, je ne sais pas. Mais je crois qu'à
24 l'époque, personne n'aurait eu le courage ou le front de s'opposer à eux.
25 Je dis cela du commandant jusqu'au simple soldat.
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1 M. Kehoe (interprétation). - Eh bien j'aimerais vous montrer une
2 pièce à conviction, la pièce à conviction de la défense 213, il s'agit
3 d'un rapport émanantde Pasko Ljubicic et traitant de l'événement dont vous
4 vous venez de parler.
5 M. Kehoe (interprétation). – Je vous prierai de vous référer à
6 ce rapport qui traite du fait que Zuti a obtenu la libération par la force
7 d'un certain nombre d'hommes de la prison de Kaonik. Je vous prierai de
8 vous référer à la dernière page de ce document où Pasko Ljubicic,
9 commandant du quatrième bataillon de la police militaire, dit ce qui
10 suit : "J'ai reçu en temps utile des renseignements quant aux intentions
11 de ce groupe qui voulait libérer Gazibaric par la force. Au même moment,
12 j'ai signalé ce qui s'est passé. Il existait donc de multiples
13 possibilités pour organiser les unités de la police militaire et empêcher
14 ce groupe de mettre en application ses intentions".
15 (L'interprète signale que la traduction est d'assez mauvaise
16 qualité en français.)
17 M. Kehoe (interprétation). – Monsieur Tolo, sur la base de cette
18 pièce à conviction de la défense, nous voyons que le commandant du
19 quatrième bataillon de la police militaire, lui-même, dit qu'il était
20 possible d'arrêter Zuti et ses hommes et d'empêcher de commettre cet acte.
21 Aviez-vous déjà vu ce document avant de venir ici aujourd'hui ?
22 M. Tolo (interprétation). – Je n'ai jamais vu ce document
23 jusqu'à présent. Mais s'agissant de ce document, il dit qu'il transfère la
24 responsabilité sur quelqu'un d'autre. Il dit qu'il a vu tout cela, il
25 transfère la responsabilité sur quelqu'un d'autre et de cette façon
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1 échappe aux
2 conséquences. C'est-à-dire qu'il ne souhaite pas porter la responsabilité
3 de cet acte.
4 M. Kehoe (interprétation). – Monsieur Tolo, vous étiez là. Vous
5 est-il arrivé de penser que le colonel Blaskic ne souhaitait pas arrêter
6 Zuti et ses hommes ?
7 Vous est-il arrivé de penser à cela ?
8 M. Tolo (interprétation). – C’est possible aussi mais je ne le
9 crois pas. Cela aurait été négatif pour lui.
10 M. Kehoe (interprétation). – Mais la réalité des choses, c'est
11 que pendant toute la période où vous vous êtes trouvé en Bosnie centrale,
12 ni Zuti ni l'un quelconque de ses hommes n'a été poursuivi ni accusé
13 devant quelque tribunal que ce soit pour cette conduite tout à fait
14 scandaleuse dans le camp de Kaonik, n'est-ce pas exact ?
15 M. Tolo (interprétation). – Je ne sais pas si quelqu'un a été
16 poursuivi par la suite. Je n'ai jamais entendu quoi que ce soit à ce
17 sujet.
18 M. Kehoe (interprétation). – Lorsque vous avez parlé des
19 problèmes de Bosnie centrale, vous avez abordé également la question des
20 villages et des villageois. Vous rappelez-vous cette deuxième partie de
21 votre interrogatoire principal par Me Nobilo ?
22 M. Tolo (interprétation). – Le moment où j'ai décrit les
23 villages et les unités ?
24 M. Kehoe (interprétation). – Oui, c'est cela.
25 M. Tolo (interprétation). – Je me rappelle.
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1 M. Kehoe (interprétation). – Vous avez dit, à ce moment-là que
2 si une décision était prise, et qu'un habitant du village n'appréciait pas
3 la décision en question, il s'inscrirait en faux contre cette décision.
4 Vous rappelez-vous avoir dit cela ?
5 M. Tolo (interprétation). – Oui. Et je peux citer un certain
6 nombre d'exemples à l'appui de ce que j'ai dit. Lorsque nous transportions
7 des hommes à Slatke Vode, nous savions, par exemple, qu'un village devait
8 remettre par exemple cinq soldats. Je ne rentre pas dans les
9 détails. Il y avait des discussions pour savoir par quelle route il
10 fallait passer, etc.
11 Et lorsqu'on arrivait dans le village, et qu'il fallait revenir
12 du front, l'objectif principal était de rentrer chez soi le plus vite
13 possible. Il n'y avait pas de passage en revue des forces, des hommes, des
14 armes. Il n'y avait pas d'inspection.
15 Et je peux citer également l'exemple du jour où nous revenions
16 du front, il y avait des problèmes dans la partie musulmanne de Kalinsko,
17 nous ne pouvions pas passer et des discussions ont éclaté quant au fait
18 que chacun voulait arriver chez lui. Il fallait arriver le plus vite
19 possible. Les gens étaient sales, fatigués et une autre partie des hommes
20 insistaient pour passer par la voix hiérarchique, s'adressaient à la
21 police militaire et suivre les ordres conformément aux règles. Donc, il y
22 avait des cris, des affrontements, des querelles, personne ne pouvait
23 obtenir satisfaction.
24 M. Kehoe (interprétation). – Mais les soldats sont bien partis
25 n'est-ce pas ?
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1 M. Tolo (interprétation). – Il arrivait souvent que les soldats
2 qu'il était prévu d'emmener ne partent pas. Mais ils finissaient par
3 s'entendre les uns avec les autres à la suite de ces discussions et
4 étaient remplacés par d'autres hommes.
5 M. Kehoe (interprétation). – Vous alliez dans le village pour
6 prendre en charge cinq soldats et vous preniez en charge cinq soldats
7 n'est-ce pas ?
8 M. Tolo (interprétation). – Il fallait prendre en charge cinq
9 soldats dans un village, dix soldats dans un autre village jusqu'au moment
10 où mon véhicule était plein. A ce moment-là, on rentrait dans le convoi
11 pour arriver jusqu'à Slatke Vode.
12 M. Kehoe (interprétation). – Monsieur Tolo, vous faisiez partie
13 de la JNA et vous saviez que le système de défense de l'ex-Yougoslavie de
14 la part de la JNA reposait sur un principe territorial, n'est-ce pas ?
15 M. Tolo (interprétation). – Oui, mais il faut tout de même
16 distinguer les militaires d'actifs et les militaires de réserve.
17 M. Kehoe (interprétation). – Lorsque le HVO a été créé et que
18 ces unités ont été créées dans les villages, ils se sont conformés au
19 modèle qu'ils avaient hérité de l'ex-JNA, n'est-ce pas ?
20 M. Tolo (interprétation). – Dans bien des cas, tout ce qui
21 rappelait la JNA ou les Serbes étaient rejetés par haine compte tenu de
22 leur façon de penser, etc.
23 Donc, un grand nombre des règlements et des modalités suivis
24 dans l'ex-armée ont été repoussés pour cette même raison. On disait que
25 c'était pro-yougoslave, pro-communiste. C'était donc très souvent rejeté.
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1 Je parle des anciens règlements en vigueur.
2 M. le Président – L'interrogatoire principal avait duré 45
3 minutes. Vous commencez à excéder. J'aimerais que vous commenciez à
4 envisager qu'il y ait une certaine proportionnalité.
5 M. Kehoe (interprétation). – Je vais avancer le plus vite
6 possible, Monsieur le Président.
7 Le HVO, à l'instar de la JNA, avait un système, une structure
8 qui reposait sur le système territorial, n'est-ce pas ?
9 M. Tolo (interprétation). – Je ne peux rien dire au sujet du
10 mode d'organisation. Le HVO s'est créé dans le but d'assurer une défense
11 d'urgence contre l'agresseur. Les unités n'ont pas été très bien
12 organisées. Les gens achetaient leurs armes eux-mêmes. Lorsqu'ils les
13 perdaient, elles étaient reprises par d'autres, etc. Et puis dans un
14 village, si quelqu'un avait des armes, il prenait l'initiative, ou bien
15 alors on voyait se créer des unités spéciales. Mais le mode classique,
16 avec dépôt d'armes, structure correspondant à celle de l'ex-JNA n'existait
17 pas. Non, non, l'organisation n'était pas la même qu'en ex-Yougoslavie.
18 M. Kehoe (interprétation). – Disons quelques mots de
19 l'entraînement et de l'information.
20 Vous avez dit avoir commencé à instruire des soldats du HVO en
21 octobre 1993.
22 Vous saviez donc qu'il y avait des entraînements, en Bosnie centrale,
23 destinés aux soldats du HVO, ainsi que dans d'autres régions de la Bosnie-
24 Herzégovine, et que cela existait déjà avant cette date, n'est-ce pas ?
25 M. Tolo (interprétation). – Au moment où moi j'étais sur place,
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1 je n'étais pas au courant.
2 Il y avait une caserne à Draga, mais je crois que c'était plutôt
3 un entrepôt. Quant à l'Herzégovine, je ne peux pas en parler, je n'y suis
4 pas allé.
5 Je ne suis donc pas au courant que des entraînements de soldats
6 aient eu lieu où que ce soit avant l’entraînement auquel j'ai assisté dans
7 la caserne de Bila.
8 M. Kehoe (interprétation). – Eh bien, je vous demanderai de
9 jeter un coup d'oeil aux pièces à conviction de l'accusation : 456/104,
10 105, 106, 107 et 108. Si vous le voulez bien.
11 Monsieur Tolo, ces pièces sont en fait des ordres d'entraînement
12 signés par le colonel Blaskic entre juillet 1992 et mars 1993.
13 C'est une période au cours de laquelle vous vous trouviez à
14 Vitez, n'est-ce pas ?
15 M. Tolo (interprétation). - Je ne vois pas les dates. Je
16 n'arrive pas à lire les dates.
17 Pendant cette période-là, effectivement j'étais à Vitez.
18 M. Kehoe (interprétation). – Mais savez-vous qu'à partir de
19 juillet 1992, et au moins jusqu'en mars 1993 et ultérieurement, Blaskic a
20 délivré un certain nombre d'ordres afin assurer l'entraînement à des
21 soldats du HVO ?
22 M. Tolo (interprétation). - Je ne suis pas au courant, je ne
23 savais pas qu’il avait donné de tels ordres.
24 M. Kehoe (interprétation). – Eh bien, je voudrais vous montrer
25 la pièce 433/8 ; il s'agit d'une photographie.
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1 Je vous demanderai de regarder cette photo sur l'écran. C’est
2 une photo qui a été montrée par le capitaine Livuitwetz, qui était
3 capitaine dans le régiment du Yorkshire, régiment
4 du Prince-de-Galles. Et cet homme a déclaré qu'il y avait eu un
5 entraînement de soldats du HVO dans cette région à cette période, dans la
6 région de Vitez donc. C’est une photographie qu’il a prise lui même.
7 Alors, saviez-vous qu’effectivement des soldats du HVO étaient
8 entraînés à cette époque ?
9 M. Tolo (interprétation). - Je ne savais pas. Je veux dire que
10 ces uniformes ne ressemblent pas à ce que j'avais vu.
11 M. Kehoe (interprétation). – Eh bien, très bien. Passons
12 maintenant à un autre domaine : vous avez dit qu'au cours de la période au
13 cours de laquelle la JNA existait encore, le colonel Blaskic était un
14 officier excellent, et qu'il était prédestiné à devenir général. Je crois
15 que vous avez dit que c’était le meilleur officier en Slovénie.
16 M. Tolo (interprétation). – Tout à fait ça.
17 M. Kehoe (interprétation). - C'était un homme à forte
18 personnalité n'est-ce pas ?
19 M. Tolo (interprétation). - En quel sens s’il vous plaît ? Vous
20 voulez dire d’une personne forte sur le plan psychologique ? Ou …
21 M. Kehoe (interprétation). – Eh bien, il avait une forte
22 personnalité qui faisait de lui un officier excellent.
23 M. Tolo (interprétation). - Il avait une forte personnalité,
24 mais en plus il était un très grand psychologue. Il avait de grandes
25 connaissances également.
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1 M. Kehoe (interprétation). – Et il connaissait les règles,
2 n'est-ce pas ? Il savait comment appliquer ces règles afin d’assurer la
3 discipline au sein de ses soldats, n’est-ce pas ?
4 M. Tolo (interprétation). - Oui.
5 M. Kehoe (interprétation). – Et tous ces éléments rassemblés :
6 le fait qu'il était une forte personnalité, qu’il était très psychologue,
7 qu’il connaissait bien les règles et qu'il était juste dans son traitement
8 des soldats, tout ceci vous amène à penser que cet homme était un officier
9 excellent, n’est-ce pas ?
10 M. Tolo (interprétation). – Oui, ensemble. Tout ça ensemble,
11 oui.
12 M. Kehoe (interprétation). - Par conséquent, vous n'avez pas été
13 surpris d'apprendre qu'en été 1992, Blaskic est devenu chef d’état major
14 du HVO ?
15 M. Tolo (interprétation). - Est-ce que vous voulez me répéter
16 l’année s'il vous plaît ?
17 M. Kehoe (interprétation). – Excusez-moi, en décembre 1994.
18 C’est à ce moment-là qu’il est devenu chef d’état major.
19 M. Tolo (interprétation). - Je ne sais pas quand il est devenu
20 chef d'état-major. Vous parlez de 96, c'était après la guerre. Vous parlez
21 de quelle année ? Je pense que de toute façon, par rapport à tout ce qu’il
22 avait comme qualités, il l’avait mérité probablement ce grade.
23 M. Kehoe (interprétation). – Oui. Au cours de votre
24 interrogatoire principal, vous avez parlé d'un homme qui a été votre
25 commandant en Slovénie et qui s’appelle Bosko Peulic, n’est-ce pas ?
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1 M. Tolo (interprétation). – Vous parlez de Bosko qui ?
2 M. Kehoe (interprétation). – Peulic. Bosko Peulic ou Peulic.
3 M. Tolo (interprétation). – Que j’avais parlé du commandant
4 major Peulic.
5 M. Kehoe (interprétation). – Excusez-moi, Peulic oui. Excusez ma
6 prononciation.
7 M. Tolo (interprétation). – Bosko Peulic était au commandement
8 de la 228ème brigade. Il était suppléant du chef de la brigade. Il venait
9 souvent contrôler la formation, l'entraînement que j'avais moi-même
10 poursuivi avec les soldats. Souvent, il m'a mis dans des conditions assez
11 spéciales. Pour ne pas dire que j’avais des problèmes, j'étais quand même
12 un officier, sous-officier qui n’avait pas beaucoup d’expérience. Il y
13 avait probablement des erreurs que j’avais commises, mais il ne fallait
14 pas le dire devant les soldats. Et il avait construit sa propre autorité
15 en piétinant sur l'autorité des autres.
16 M. Kehoe (interprétation). – Et en Slovénie, il était le
17 supérieur immédiat de Blaskic n'est-ce pas ?
18 M. Tolo (interprétation). – Oui, il était le supérieur de
19 Blaskic. Il était au commandement de la brigade, au commandement de
20 la 228ème brigade.
21 M. Kehoe (interprétation). – Et au cours des combats, lorsque
22 vous, vous vous trouviez à Vitez en juillet 1992, Peulic faisait partie de
23 l'armée des Serbes de Bosnie donc. Où était-il stationné à ce moment-là ?
24 M. Tolo (interprétation). - Il était auprès d'une brigade qui se
25 trouvait à Banja luka, et souvent il était à Blasic.
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1 M. Kehoe (interprétation). – Blasic qui est en fait la montagne
2 qui surplombe la vallée de la Lasva, n'est-ce pas ?
3 M. Tolo (interprétation). – Oui, effectivement qui surplombe.
4 Blasic est un mont qui surplombe la vallée de la Lasva.
5 M. Kehoe (interprétation). - J'aimerais vous soumettre un autre
6 document. Il s’agit de la pièce 528 de l’accusation. Monsieur Dubuisson
7 s’il vous plaît ?
8 Monsieur Tolo, je vous demande de regarder la page où se trouve
9 la signature. Il s'agit d'une lettre relative à des négociations avec des
10 Oustachis, avec les Serbes de Bosnie. Cette lettre est signée par le
11 commandant Bosko Peulic. Voyez-vous cette signature ?
12 M. Tolo (interprétation). – Oui, je vois la signature de
13 M. Peulic.
14 M. Kehoe (interprétation). - Le même homme qui a été votre
15 commandant, qui a été celui de M. Blaskic en Slovénie, n'est-ce pas ?
16 M. Tolo (interprétation). – Oui. Bien évidemment je me réfère au
17 nom, au prénom, il n'y a que le grade qui a changé.
18 M. Kehoe (interprétation). – Monsieur Tolo, dernier sujet, je
19 n’aurai que quelques questions à ce propos.
20 Vous avez dit que vous étiez chauffeur et que vous étiez
21 également soldat lorsque vous étiez dans le HVO. Monsieur Tolo, saviez-
22 vous que des civils musulmans étaient obligés de creuser des tranchées
23 dans les régions de Vitez lorsque vous vous faisiez partie du HVO ?
24 M. Tolo (interprétation). - Il y avait une règle. La personne
25 qui ne pouvait pas porter l'arme, pouvait porter la hache où n'importe
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1 quoi pour creuser une tranchée. C'est la raison pour laquelle par
2 conséquent il y en avait d'autres qui étaient obligés de creuser les
3 tranchées. J'étais souvent avec les voisins, j'ai pu voir qu'ils étaient
4 organisés, il y avait toutes les nationalités. Parmi eux, ceux qui ne
5 pouvaient pas porter une arme pouvaient creuser les tranchées avec une
6 pelle et c'est de cette manière-là qu'ils avaient contribué aux actions.
7 Chacun devait contribuer d'une façon ou d'une autre à la défense de la
8 vallée de la Lasva, indépendamment du groupe ethnique auquel il
9 appartenait.
10 M. Kehoe (interprétation). - Lorsque vous avez dit qu'une
11 personne ne pouvait pas tenir un fusil ou pouvait porter une pelle ou
12 contribuer à l'Etat d'une façon ou d'une autre, l'Etat dont vous parlez
13 est-ce bien la communauté croate d'Herceg Bosna ?
14 M. Tolo (interprétation). - Je ne parle pas de l'Etat, je parle
15 de la défense de la vallée de la Lasva, je parle de Vitez, je me suis mal
16 exprimé. Je parle de Vitez qui appartient à la vallée de la Lasva. Vitez a
17 été encerclé et par conséquent, tout le monde avait peur, nous étions à
18 l'intérieur et nous avons tous vécu le même sort.
19 M. Kehoe (interprétation). - Ma question est la suivante, je la
20 répète : les civils musulmans de Bosnie étaient-ils obligés de creuser des
21 tranchées pour le HVO ?
22 M. Tolo (interprétation). - Je n'ai pas vu que quelqu'un était
23 forcé véritablement à creuser les tranchées, c'est à dire je n'ai pas vu
24 quelqu'un derrière pointer un fusil et lui demander de creuser des
25 tranchées.
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1 M. Kehoe (interprétation). - Par conséquent lorsque vous dites
2 avoir vu ce groupe de Tziganes creuser des tranchées pour le compte du
3 HVO, êtes-vous en train de dire que ces
4 personnes creusaient des tranchées bénévolement ?
5 M. Tolo (interprétation). - Aucun gitan ne prendra la pelle tout
6 seul pour creuser des tranchées.
7 A côté de mon agglomération, il y avait des gitans qui étaient
8 organisés comme un peloton, ils avaient leur propre commandant et le
9 suppléant du commandant, ils allaient creuser des tranchées, ensuite ils
10 retournaient dans le village. Il étaient approvisionnés en vivres, ils
11 avaient les approvisionnements en vivres, en cigarettes, en boissons,
12 comme tout autre soldat qui portait l'arme.
13 M. Kehoe (interprétation). - Sur la base de ce que vous venez
14 de dire sur les gitans, ils ont bien été forcés de creuser des tranchées.
15 C'est bien ce que vous venez de dire ?
16 M. Tolo (interprétation). - Chacun devait contribuer d'une façon
17 ou d'une autre à la défense de la ville de cette vallée. Si moi je pouvais
18 ne pas porter les armes, à ce moment-là, je ne serais pas allé comme
19 chauffeur. C'était uniquement la façon de défendre notre famille, notre
20 foyer.
21 M. Kehoe (interprétation). - Avez-vous transporté des
22 prisonniers qui se trouvaient au cinéma, au centre de la ville de Vitez
23 pour aller creuser des tranchées. Si c'est le cas, combien de fois ?
24 M. Tolo (interprétation). - Je n'ai pas conduit des prisonniers
25 pour creuser des tranchées. J'ai conduit souvent des civils. C'étaient des
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1 personnes âgées, je ne savais pas de quelle nationalité ils étaient, de
2 quelle religion. J'étais absent pendant une période longue de cette
3 région. Je ne connaissais pas beaucoup de monde. Les prisonniers devaient
4 généralement être escortés. Moi j'avais les civils avec moi et je les ai
5 transportés pour qu'ils puissent creuser les tranchées.
6 M. Kehoe (interprétation). - Combien de fois avez-vous emmené
7 des civils jusqu'aux tranchées ?
8 M. Tolo (interprétation). - Chaque fois que c'était nécessaire.
9 J'ai parlé de ceux qui étaient en âge de porter les armes. Il faut bien
10 faire la distinction entre les civils et ceux qui étaient en âge de porter
11 les armes. Les civils, étaient ceux qui avaient un peu plus de 60 ans, ou
12 un peu moins de 20 ans.
13 M. Kehoe (interprétation). - Combien de fois les avez-vous
14 emmenés ?. 50 fois, 100, 150 fois ?
15 M. Tolo (interprétation). - 50 fois, un peu moins. Je ne suis
16 pas sûr.
17 M. Kehoe (interprétation). - Combien de civils emmeniez-vous.
18 Combien de civils par voyage lorsque vous les emmeniez pour qu'ils
19 creusent des tranchées ?
20 M. Tolo (interprétation). - La camionnette pouvait prendre
21 20 personnes. Une fois de plus, je vous dis ce n'étaient pas des civils.
22 C'est des personnes en âge de porter des armes.
23 M. Kehoe (interprétation). - Vous nous avez dit qu'il y avait
24 des hommes âgés dans ce groupe ?
25 M. Tolo (interprétation). - Oui.
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1 M. Kehoe (interprétation). - Et je suppose que les Musulmans de
2 Bosnie ne faisaient pas partie du HVO ?
3 M. Tolo (interprétation). - Probablement.
4 M. Kehoe (interprétation). - Par conséquent, si vous faisiez
5 50 voyages de 20 personnes à chaque fois, vous avez emmené environ
6 1000 personnes pour creuser des tranchées, n'est-ce pas ?
7 Est-ce une estimation qui vous convient ?
8 M. Tolo (interprétation). - En général, c'étaient les gitans qui
9 se trouvaient à côté de mon voisinage. Il y avait d'autres groupes
10 également, mais je ne peux pas dire exactement, je n'ai pas vraiment une
11 estimation très précise.
12 M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que certains ont reçu des
13 balles au cours de ces 50 voyages, lorsque vous avez transporté ces
14 1000 personnes, est-ce que l'une ou l'autre de ces personnes à été tuée
15 par balle ?
16 M. Tolo (interprétation). - Il y avait un certain nombre de
17 personnes qui ont été blessées, notamment où la ligne par exemple n'a pas
18 été défendue. On commençait de nouveaux tirs. Il fallait se retirer à un
19 autre endroit. Effectivement, au niveau de la ligne, il y avait un certain
20 nombre de blessés qui ont été...
21 Mais il y avait également des erreurs qui ont été commises par
22 les personnes en question qui creusaient les tranchées. Moi, je me
23 souviens de tels cas parce que j'étais avec eux. Pendant qu'ils creusaient
24 les tranchées, ils allaient se rendre dans une maison pour piller, pour
25 voler une poule, ou autre chose. Ils traversaient les champs de mine c'est
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1 comme cela qu'ils avaient été blessés ou qu'ils étaient les victimes.
2 M. Kehoe (interprétation). - Par conséquent, les gens emmenés
3 aux tranchées, blessés ou tués, l'ont également été par des mines posées
4 le long du front ? N'est-ce pas ?
5 M. Tolo (interprétation). - On avait des gens en âge de porter
6 les armes qui ont été blessés par les membres de l'armée de Bosnie-
7 Herzégovine au moment où les tirs ont été échangés.
8 M. Kehoe (interprétation). - Quand avez-vous emmené ces
9 personnes pour qu'elles creusent des tranchées ? Et où les avez-vous
10 emmenés ?
11 M. Tolo (interprétation). - En général, c'était dans la nuit, je
12 les ai conduits à Bobasi, également sur la ligne de front du premier
13 bataillon.
14 M. Kehoe (interprétation). – Oui, où cela ?
15 M. Tolo (interprétation). - Au niveau de Kuber, et puis ensuite
16 je ne connais pas tous ces noms mais Krcevine, je m'en souviens et partout
17 où c'était indispensable.
18 M. Kehoe (interprétation). - Et où alliez-vous chercher ces
19 gens ?
20 M. Tolo (interprétation). - Vous pensez au moment où ils
21 devaient partir pour creuser les tranchées ?
22 M. Kehoe (interprétation). - Oui.
23 M. Tolo (interprétation). - Je suis allé les chercher dans leur
24 village, devant chez moi, parce qu'ils étaient à côté de chez moi.
25 M. Kehoe (interprétation). - Qui vous a demandé d'aller les
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1 chercher ?
2 M. Tolo (interprétation). - Il y avait un certain nombre de
3 bataillons qui ont été organisés, des instructions que j'avais reçues.
4 M. Minaca était chargé de gitans et c'est par son intermédiaire qu'ils
5 avaient été interpellés. On avait demandé qu'ils se rendent à telle ou
6 telle ligne, et c'était moi qui étais chargé de les conduire sur telle ou
7 telle ligne de front.
8 M. Kehoe (interprétation). - Par conséquent vous receviez vos
9 ordres de Vinac ?
10 M. Tolo (interprétation). - Je ne parle pas de mes propres
11 ordres. Il y avait M. Zuljevic qui était chef dispatching de la brigade de
12 Vitez. C'est lui qui s'est occupé également de carburants. Il m'a demandé
13 d'aller chez Vinac, de le contacter et de prendre les gens qui devaient
14 creuser des tranchées.
15 M. Kehoe (interprétation). - Et Zuljevic et Vinac faisaient
16 partie de la brigade de Vitez et étaient membres du HVO. Le fait d'emmener
17 ces gens pour creuser des tranchées sur le front était un système
18 organisé, n'est-ce pas ?
19 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, mon
20 confrère profite d'un terme en permanence alors que le témoin lui demande
21 qu'il ne faut absolument pas l'utiliser. Je pense que notre confrère
22 l'oublie, il parle tout le temps des civils alors que le témoin répète
23 qu'il s'agissait des soldats, des gens en âge de porter les armes. Par
24 conséquent, il devrait utiliser un terme plus propre. Je pense en plus,
25 que nous avons dépassé le temps de l'interrogatoire principal.
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1 M. le Président. - Poursuivez Maître Kehoe.
2 M. Kehoe (interprétation). - Tout d'abord, les personnes que
3 vous avez emmenées pour creuser les tranchées, ces gitans, étaient-ils
4 membres du HVO ?
5 M. Tolo (interprétation). - Oui.
6 M. Kehoe (interprétation). - Les noms étaient membres du HVO et
7 ces personnes étaient forcées pour creuser des tranchées ?
8 M. Tolo (interprétation). - J'ai déjà dit qu'ils n'étaient pas
9 forcés. A partir du moment où vous forcez, ça veut dire qu'il y a
10 quelqu'un qui pointe l'arme sur lui et lui demande de creuser les
11 tranchées. Ce n'était pas comme ça. Ils ne sont pas allés bénévolement,
12 mais ils savaient qu'ils devaient y aller parce que c'était de cette
13 manière-là qu'ils avaient contribué à défendre la vallée de la Lasva. On
14 parle des gitans tout le temps. Les gitans ont fait déplacer la ligne de
15 front. Ce sont eux qui ont creusé les tranchées, il y avait l'attaque, les
16 soldats du HVO sont partis, alors les gitans ont pris les armes, ils ont
17 maintenu cette position. Si ils ont été forcés, pourquoi l'ont-ils fait ?
18 M. Kehoe (interprétation). - Avant l'objection de Me. Nobilo,
19 avez-vous jamais appelé les personnes que vous avez emmenées sur le front
20 pour qu'elles y creusent des tranchées, "conscrits" ?. N'avez-vous jamais
21 utilisé ce terme ou bien avez-vous dit "des hommes en âge de combattre" ?.
22 Comment les avez-vous décrits avant que Me. Nobilo ne formule
23 son objection ?
24 M. Hayman (interprétation). - J'objecte quant à la forme de la
25 question. Le compte rendu est tout à fait clair.
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1 M. Kehoe (interprétation). - Il est très clair, et cela montre
2 que le témoin n'a jamais utilisé le terme "conscrit" avant l'objection de
3 Me. Nobilo.
4 M. Hayman (interprétation). - Avec tout le respect que je vous
5 dois, Maître Kehoe, le témoin a dit qu'il y avait une obligation de
6 travail sur la population, alors, vous pouvez l'appeler comme vous voulez,
7 " conscrit" ou quoi que ce soit d'autre, ceci est clair, et je
8 crois que la question de Me. Kehoe est tout à fait inappropriée. On ne
9 peut pas poser une question au témoin sur le compte rendu. Le compte rendu
10 reste le compte rendu. On peut lui demander ce qu'il a dit, mais on ne
11 peut pas lui poser des questions sur le compte rendu.
12 M. le Président. - (Hors micro)Je suis au moins d'accord sur une
13 chose Maître Hayman. Si vous voulez me faire parler du fond de la
14 question.... C'est Me. Nobilo qui a parlé de la différence entre les
15 civils et les militaires.
16 Il essaie de faire dire au témoin qui étaient les civils. Il
17 essaie de savoir ceux qui appartenaient au HVO... N'interrompez pas....
18 (hors micro)
19 Dernier point, c'est une question importante dans l'acte
20 d'accusation.
21 Maître Hayman ? Une dernière fois...
22 M. Hayman (interprétation). - Nous faisons une objection quant
23 au temps. Mais est-ce que vous pourriez nous dire de quel temps peut
24 disposer l'accusation pour le contre-interrogatoire ? L'accusation a déjà
25 dépassé le temps de l'interrogatoire de 30 minutes. Nous ne souhaitions
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1 pas interrompre plus avant...
2 M. le Président. - C'est une question que nous abordons à chaque
3 fois avec mes collègues, c'est une question importante. Nous essayons de
4 faire qu'il y ait un certain équilibre entre l'interrogatoire principal et
5 le contre-interrogatoire. Ceci étant, vous ne pouvez pas empêcher les
6 Juges à l'occasion de certaines questions importantes, de manifester leur
7 intérêt pour ce qui est quand même leur mission, c'est la manifestation de
8 la vérité.
9 Je suis d'accord avec vous Maître Hayman, je l'ai déjà dit à
10 Me. Kehoe, je ne souhaiterais pas que ce contre-interrogatoire se prolonge
11 trop longuement, raison de plus pour ne pas faire trop d'objections sur
12 les questions posées par Me Kehoe.
13 Me Kehoe, ne prolongez pas trop. Le problème des tranchées est
14 important, je comprends que cela vous ennuie mais il faut que le témoin
15 soit clair dans ses réponses. Les questions de Me Kehoe ne sont pas
16 inappropriées. Vous allez nous dire pour combien de temps avez-vous encore
17 pour votre contre interrogatoire, étant entendu que l'interrogatoire
18 principal n'avait pas dépassé 45 minutes.
19 M. Kehoe (interprétation). - Deux minutes.
20 M. le Président. - Maître Hayman, deux minutes, ça va ?
21 Me Hayman est satisfait, son objection a contribué à un
22 résultat, c'est deux minutes.
23 M. Riad (interprétation). - J'ajoute à votre commentaire, nous
24 avons décidé pour être équitable, que si le cross examination excède le
25 temps, cela n'est pas compté sur la partie....
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1 M. le Président. - Dans une certaine mesure. Je trouvais que
2 pour l'instant nous n'avions pas dépassé la mesure. C'est une règle
3 complexe à appliquer, elle n'est pas de ma procédure, j'essaie de
4 l'appliquer le moins mal possible, Me Hayman. Encore une fois, n'oubliez
5 jamais que nous ne faisons ni de la civil law ni de la common law, nous
6 faisons notre mission qui est de trouver la vérité. C'est la première
7 obligation que nous demande le général Blaskic, c'est quand même que nous
8 déterminions la vérité.
9 Il vous reste deux minutes Maître Kehoe, sur ce sujet ou un
10 autre.
11 Allez-y..
12 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur Tolo, combien y avait-il
13 d'autres chauffeurs qui ont emmené des gens pour creuser les tranchées à
14 part vous ?
15 M. Tolo (interprétation). - En ce qui me concerne, je sais que
16 c'est moi qui conduisais. Je ne peux pas vous dire d'autres noms. Il y
17 avait également un autre qui était soldat, chauffeur, auprès de la brigade
18 de Vitez, on a travaillé en équipe. Les gens pour creuser les tranchées ?
19 Combien de fois, je ne peux pas vous le dire.
20 Je sais pour moi-même et c'est là où je peux vous donner des
21 réponses.
22 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur Tolo vous savez qu'entre
23 vous et les autres chauffeurs, des Musulmans de Bosnie ont été emmenés sur
24 les lignes de front pour creuser des tranchées, n'est-ce pas ? Vous le
25 savez ?
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1 M. Tolo (interprétation). - On ne vous demande pas ce que vous
2 êtes de nationalité. Je ne les connais pas. Je vous ai dit que je n'ai pas
3 vécu longtemps dans cette région. J'ai connu très peu de personnes qui
4 étaient avec moi. Je connaissais un certain nombre de mes voisins, mais
5 même pas tous mes voisins, parce que beaucoup avaient changé.
6 M. Kehoe (interprétation). - Monsieur Tolo, êtes-vous en train
7 de dire à cette Chambre que vous ne saviez pas que des Musulmans de Bosnie
8 étaient emmenés pour creuser des tranchées par vous et d'autres chauffeurs
9 du HVO ? Etes-vous en train d'affirmer cela devant les Juges ?
10 M. Tolo (interprétation). - Je souhaite dire qu'ils étaient
11 conduits ensemble avec d'autres. Je répète une fois de plus que je ne peux
12 pas savoir quand j'ai quelqu'un en face de moi, qu'il est Musulman ou pas
13 Musulman. Ce n'est pas écrit sur son front. Il y avait certainement des
14 Musulmans, mais avec les autres. Il n'y avait pas d'exception. Ceux qui
15 allaient creuser le faisaient bénévolement. Chez les gitans c'était déjà
16 différent.
17 M. Kehoe (interprétation). - Aucun de ces Musulmans de Bosnie
18 n'était membre du HVO, n'est-ce pas ?
19 M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, le témoin a
20 dit qu'il n'était pas au courant s'il y avait des Musulmans ou non, alors
21 que mon confrère lui pose la question si les Musulmans étaient membres du
22 HVO.
23 M. le Président. – (Hors micro)
24 M. Kehoe (interprétation). - Un instant Monsieur le Président,
25 nous en avons peut-être terminé.
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1 Monsieur le Président je n'ai plus de question à poser à ce
2 témoin.
3 M. le Président. - Nous allons faire une petite pause de
4 dix minutes.
5 (La séance suspendue à 16 heures 55 est reprise à 17 heures 15).
6 M. le Président. - Nous reprenons. Maître Nobilo, c'est à vous.
7 M. Nobilo (interprétation). - M. Tolo, vous avez parlé avec mon
8 confrère de l'accusation, vous avez parlé de l'obligation du travail. Je
9 vais vous poser un certain nombre de questions pour que les Juges puissent
10 comprendre ce que c’était une obligation de travail, d’après ce que vous
11 dites.
12 Vous avez dit, Monsieur Tolo, que vous avez refusé l'offre de
13 Blaskic pour être membre du HVO. C'était l’été 92. Est-ce que c'est vrai ?
14 M. Tolo (interprétation). - Oui.
15 M. Nobilo (interprétation). - En octobre 92, vous avez dit que
16 vous étiez chauffeur d'un minibus. Est-ce que vous pouvez expliquer aux
17 Juges, sur la base de quoi vous avez été engagé pour les besoins du HVO ?
18 M. Tolo (interprétation). - Il y avait plusieurs camionnettes,
19 minibus, et chacun devait contribuer. Tout ceci passait par le bureau de
20 la défense. Par moment, une fois ou deux fois par semaine, on conduisait
21 les gens à Slatke Vode. Les autres jours, nous travaillions normalement.
22 Moi-même…
23 M. Nobilo (interprétation). – Je m’excuse, quand vous dites que
24 vous avez travaillé normalement votre travail, est-ce que vous pouvez,
25 s’il vous plaît, expliquer ?
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1 M. Kehoe (interprétation). – Je ne pense pas que le témoin ait
2 terminé. Il a dit : « Moi, personnellement… ». Et ensuite, je crois que
3 l'avocat de la défense l’a interrompu. Donc, je ne pense pas qu’il avait
4 fini de répondre à la question.
5 M. le Président. - C'est exact, Maître Nobilo. Essayez de poser
6 des questions pas trop longues si vous voulez que le témoin puisse
7 répondre calmement à chacune de vos questions. Prenez votre temps.
8 M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous me dire quelles
9 étaient vos activités privées ? Ce que vous avez travaillé tous les
10 jours ?
11 M. Tolo (interprétation). – Eh bien, j’ai travaillé pour
12 transporter les gens entre Travnik et Vitez. Vitez et Travnik. C'était
13 pour l'argent que je conduisais les gens. Et c'est pour ça que j’appelle
14 mes activités privées.
15 M. Nobilo (interprétation). – Et en ce qui concerne le HVO et
16 votre travail obligatoire, combien de fois par mois vous avez transporté
17 les soldats du HVO ?
18 M. Tolo (interprétation). – Cela dépendait. Une fois par
19 semaine, deux fois par semaine, cela variait d’une semaine à l’autre.
20 M. Nobilo (interprétation). - De cette façon-là, vous avez
21 travaillé depuis le mois d'octobre 92, et jusqu'au début de la guerre en
22 avril 93. Est-ce vrai ?
23 M. Tolo (interprétation). - Oui.
24 M. Nobilo (interprétation). – Dites aux Juges, s’il vous plaît,
25 du point de vue la, loi, y a-t-il des différences entre l'obligation du
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1 travail que vous avez effectué en conduisant le minibus pour les besoins
2 du HVO et l'obligation du travail que vos voisins gitans avaient rempli,
3 avaient effectué en creusant les tranchées ? Est-ce que c’est la même
4 obligation de travail ?
5 M. Tolo (interprétation). – Oui. L’obligation de travail, moi
6 j’ai contribué en conduisant, eux en creusant les tranchées. On était payé
7 sous forme de cigarettes, sous forme de vivres, bien évidemment dans le
8 cadre du possible. On avait également reçu des attestations, depuis
9 combien on avait travaillé pour le HVO, pour l'ancienneté et pour autre
10 chose.
11 M. Nobilo (interprétation). - Dites-moi, est-ce que votre
12 obligation professionnelle au HVO, entre le mois d'octobre 92 jusqu’en
13 avril 93 a été compté comme si vous aviez porté le fusil et comme si vous
14 étiez sur la ligne du front du HVO ?
15 M. Tolo (interprétation). – Moi, en tant que conducteur
16 chauffeur, et celui qui était dans les tranchées, nous avions exactement
17 le même statut au sein du HVO.
18 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que votre astreinte de
19 travail avait été accepté comme période pour l'ancienneté, comme si vous
20 étiez un soldat ?
21 M. Tolo (interprétation). - Oui.
22 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que l'astreinte de travail,
23 l'astreinte professionnelle a été reconnue au moment où vous aviez demandé
24 une attestation d'ancienneté, au moment où vous achetiez des titres pour
25 acheter une part dans les entreprises, etc ?
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1 M. Tolo (interprétation). - Oui.
2 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que les gitans également,
3 avaient le même statut, le statut au niveau d'ancienneté, au niveau de
4 retraite, au niveau également des titres qu'ils pouvaient acheter dans les
5 entreprises ?
6 M. Tolo (interprétation). - Oui.
7 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que du point de vue
8 juridique, du point du patrimoine, ceux qui avaient accédé à telle et
9 telle nombre d'années pour l'ancienneté, il y avait des différences entre
10 ceux qui étaient combattants ou d’autres qui avaient contribué sous forme
11 d’astreinte professionnelle ?
12 M. Tolo (interprétation). - Il n'y avait aucune distinction sur
13 qu’il fallait faire sur ce plan-là. Les droits étaient les mêmes.
14 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que selon vous, à votre
15 connaissance, l'astreinte de travail d'un côté, ou d'être en âge de
16 combattre étaient les deux mêmes obligations ?
17 M. Tolo (interprétation). - Oui.
18 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous avez conduit des
19 civils qui étaient escortés ? Ou par les soldats et qui allaient creuser
20 les tranchées ?
21 M. Tolo (interprétation). - Non.
22 M. Nobilo (interprétation). - Et d'où est-ce que vous avez
23 conduit les civils ?
24 M. Tolo (interprétation). - En gros, c’est dans mon
25 agglomération, dans mon village. Et je les prenais également de la ville.
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1 M. Nobilo (interprétation). - Au moment où vous partiez de votre
2 agglomération ou de la ville, est-ce que c’est la police militaire qui les
3 avait rassemblés ? Ou bien ils venaient tout seuls ?
4 M. Tolo (interprétation). – Mais, à partir du moment où les
5 commandant disaient qu'ils avaient besoin de tant et tant de personnes,
6 ils venaient tout seuls.
7 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que quelqu'un vous a dit :
8 « Moi, je suis Musulman » ?
9 M. Tolo (interprétation). - Non.
10 M. Nobilo (interprétation). - Quand il est allé creuser les
11 tranchées ?
12 M. Tolo (interprétation). - Non.
13 M. Nobilo (interprétation). - Y avait-il des Musulmans, des
14 individus qui étaient membres du HVO ?
15 M. Tolo (interprétation). – Oui, Il y avait (expurgé) qui
16 était membre de la police militaire. C'était un copain de classe et je le
17 connais très bien. Je sais qu'il est Musulman et qu'il était membre du
18 HVO.
19 M. Nobilo (interprétation). - Maintenant, si vous voulez bien
20 nous allons passer à l'autre domaine de questions. Vous avez dit que vous
21 n'avez jamais vu un ordre de M. Blaskic qui a été adressé à
22 Darko Kraljevic et qui n'avait jamais participé non plus aux entretiens
23 entre les deux ?
24 M. Tolo (interprétation). - Oui.
25 M. Nobilo (interprétation). - Maintenant, est-ce que vous pouvez
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1 dire aux Juges, sur quelle base, sur quel fait avez-vous tiré votre point
2 de vue concernant les rapports entre Kraljevic et Blaskic ? Et vous en
3 avez parlé devant les Juges sur la base de quoi ?
4 M. Tolo (interprétation). - J'étais chauffeur, j'étais
5 conducteur sur le terrain et j'étais entouré des soldats de cette armée,
6 des soldats également de M. Darko Kraljevic. Et à travers
7 leurs récits, j'ai pu comprendre que Darko Kraljevic était vraiment un bon
8 dieu. C'est Blaskic qui doit lui demander de faire cela et cela. Donc, il
9 y avait des soldats qui se vantaient. Au cours de conduite ou bien en
10 attendant que tout le monde soit rassemblé, j'ai entendu de tels récits.
11 M. Nobilo (interprétation). – Maintenant, nous allons passer à
12 un autre groupe de questions. On vous a montré l'ordre de Blaskic sur la
13 mesure disciplinaire à l'encontre d'un ordre de l'unité spéciale de Zuti
14 du 26 novembre 1993 ?
15 Monsieur l'huissier, si vous voulez mettre cette photo sur le
16 rétroprojecteur.
17 On vous a montré cet ordre datant du 26 novembre 1993 et dans
18 cet ordre on note que les membres de cette unité spéciale de Zuti doivent
19 être sanctionnés.
20 Est-ce que vous pouvez expliquer aux Juges, une fois que le
21 commandant Tuka avait blessé Zuti, il s'est retrouvé dans l'hôpital et une
22 fois qu'il y avait des représailles également, comment le conflit s'était-
23 il développé par la suite ?
24 M. Tolo (interprétation). - D'abord Munje, ceux qui étaient sous
25 le commandement de Tuka voulaient se venger. Aux membres de l'unité
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1 spéciale de tuer Zuti.
2 Cependant je sais qu'ils n'ont pas réussi véritablement à y
3 arriver. Car après, l'assassinat de Tuka, ceci s'est développé
4 différemment. Pendant que Zuti était à l'hôpital, il y avait des gardes du
5 corps qui étaient avec lui. L'armée n'avait pas son commandement. Par
6 conséquent, ils ont été placés sous le commandement de la deuxième
7 brigade. Par conséquent, ce n'était plus une unité comme Zuti l'avait
8 commandé auparavant. Il y avait quelques gardes du corps tout simplement
9 qui sont restés auprès de lui, les autres sont allés dans la deuxième
10 brigade.
11 M. Nobilo (interprétation). - Pendant que Zuti était
12 hospitalisé, quelle est l'unité qui a frappé ses subordonnés ? De quelle
13 façon ?
14 M. Tolo (interprétation). - La seule unité qui pouvait commettre
15 un acte de ce genre était le quatrième bataillon de la police militaire.
16 M. Nobilo (interprétation). - Y a-t-il eu un conflit armé ? Y a-
17 t-il eu des morts ?
18 M. Tolo (interprétation). - Il y a eu des coups de feu qui ont
19 été tirés.
20 M. Nobilo (interprétation). - Mais l'opération militaire qui a
21 permis de réduire l'unité de Zuti et de faire en sorte qu'elle se place
22 sous un autre commandement, est-elle survenue avant ou après la sanction,
23 avant l'émission de la mesure disciplinaire ou après ?
24 M. Tolo (interprétation). - Cela s'est passé avant la prise de
25 la mesure disciplinaire mais après l'assassinat de Tuka et le but était de
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1 se venger.
2 M. Nobilo (interprétation). - Donc, c'est la police militaire
3 qui a accompli cet acte. Est-ce que vous êtes en train de dire aux Juges
4 que la police militaire a d'abord brisé la résistance des membres de
5 l'unité de Zuti puis que des mesures disciplinaires ont été prises ?
6 M. Tolo (interprétation). - Eh bien oui, c'est ce que j'ai déjà
7 essayé de dire avant. A savoir que M. Blaskic a tenté à plusieurs reprises
8 de créer les conditions pour établir, pour asseoir son contrôle. Au début,
9 cela n'a pas été possible mais après un certain temps il a acquis
10 davantage de contrôle sur les unités et a réussi à manifester son
11 autorité.
12 M. Nobilo (interprétation). - Eh bien repassons à un autre
13 sujet. En 1992, le Procureur vous a montré des ordres qui concernent cette
14 période et qui émanent de M. Blaskic et qui ont trait à la formation des
15 soldats.
16 Veuillez dire aux Juges si vous avez jamais entendu dire avant
17 les mois d'août et de septembre, date à laquelle le centre de formation de
18 Nova Bila si vous avez vu quelqu'un organiser une forme ou une autre
19 d'entraînement des soldats ?
20 M. Tolo (interprétation). - Dans la région de la vallée de
21 la Lasva, je n'ai jamais entendu parler de l'existence de centres
22 d'entraînement et je n'en n'ai jamais vus.
23 M. Nobilo (interprétation). - Vous m'avez dit au cours de la
24 pause, que l'écran ne vous paraissait pas tout à fait clair. Et vous
25 m'avez demandé de vous montrer une photographie représentant les soldats,
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1 si c'était possible.
2 Alors, je vous prierai de jeter un coup d'oeil à la photographie
3 qui vous est remise à présent. De vous rasseoir. Et de nous dire si vous
4 avez reconnu des soldats dans ce groupe ?
5 M. Tolo (interprétation). - J'ai reconnu un homme qui est dans
6 la deuxième rangée et qui se trouve derrière celui qui mène le groupe. Ce
7 sont des hommes qui viennent d'achever leur entraînement et qui sont
8 versés dans la police militaire. Je ne les connais pas par leur nom, j'ai
9 passé très peu de temps avec eux. Mais je sais qu'il m'est arrivé de les
10 rencontrer plus tard au cours de mes activités professionnelles.
11 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que ce que vous voulez dire
12 c'est que ce groupe se compose des jeunes gens, des jeunes soldats que
13 vous avez entraînés ?
14 M. Tolo (interprétation). - Oui.
15 M. Nobilo (interprétation). - Passons maintenant à un autre
16 sujet.
17 Le Procureur a tenté d'obtenir de vous une réponse selon
18 laquelle la Défense territoriale fonctionnait selon le principe hérité de
19 la JNA, c'est-à-dire selon le principe un village, une unité.
20 Alors je vous pose la question suivante : au sein de la Défense
21 territoriale, je vous demande où se trouvaient les armes, où se trouvaient
22 les équipements et qui en assurait la distribution ?
23 M. Tolo (interprétation). - Les armes étaient dans des entrepôts
24 et les équipements se trouvaient à l'endroit où tous les hommes se
25 rendaient, après avoir été convoqués. Donc chacun recevait ces armes, ces
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1 vivres et ces munitions à l'endroit en question. Ces articles, ces objets
2 venaient des entrepôts.
3 M. Nobilo (interprétation). - Comment est-ce que le village
4 s'approvisionnait en armes et en équipements au sein du HVO ?
5 M. Tolo (interprétation). - En général, les hommes achetaient
6 leurs propres armes, ils achetaient, ils héritaient ou ils volaient ou
7 bien ils se les procuraient à l'étranger. Ces armes, ils les gardaient
8 sans arrêt chez eux, ils les gardaient donc à leur domicile comme un bien
9 privé et pas du tout comme un bien appartenant à l'armée.
10 M. Nobilo (interprétation). - Au sein de la Défense territoriale
11 de la JNA, qui est-ce qui dirigeait la structure de commandement ?
12 M. Tolo (interprétation). - Il y avait l'état-major, le quartier
13 général et un commandant qui décidaient qui devait être placé à tel poste.
14 Il y avait donc une structure. Il était impossible qu'un villageois dans
15 un village décide de commander. Le commandement se situait à un niveau
16 supérieur.
17 M. Nobilo (interprétation). - Mais si l'on parle des unités
18 créées par le HVO dans les villages, qui est-ce qui choisissait les
19 commandants ?
20 M. Tolo (interprétation). - Dans ces villages, c'étaient les
21 villageois qui choisissaient leurs commandants eux-mêmes. Et en général;
22 il fallait que ce soit un homme susceptible de susciter une certaine
23 crainte parmi les soldats. Eh bien entendu, il s'efforçait toujours de
24 défendre les intérêts de ces hommes.
25 M. Nobilo (interprétation). - Vous avez dit qu'un village
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1 représentait une unité à l'époque du HVO. Comment est-ce que les unités se
2 créaient et s'organisaient au sein de la Défense territoriale ?
3 M. Tolo (interprétation). - Du temps de la Défense territoriale,
4 après le service militaire, chacun recevait un lieu d'affectation en cas
5 de mobilisation. Donc c'était le lieu où ils devaient se rendre après
6 avoir été mobilisés. Et au niveau d'un groupe de villages ou d'un village,
7 en général une unité était créée qui pouvait aller de la compagnie au
8 bataillon. Alors que dans le cas du HVO, c'était un village qui créait sa
9 propre unité indépendamment des effectifs, donc on pouvait trouver des
10 groupes composés de 40 personnes constituant la compagnie représentative
11 du village ou bien on pouvait y trouver cent hommes dans cette compagnie.
12 M. Nobilo (interprétation). - Et la Défense territoriale avait
13 des détachements,
14 n'est-ce pas ?
15 M. Tolo (interprétation). - Oui, c'est exact. Plusieurs villages
16 avaient des détachements. Cela dépendait de la population du village ainsi
17 que du nombre de villages nécessaires pour créer un détachement.
18 M. Nobilo (interprétation). - J'en arrive maintenant à mes
19 dernières questions.
20 Vous avez confirmé au Procureur que M. Blaskic avait une forte
21 personnalité, qu'il était psychologue, qu'il avait de nombreuses
22 connaissances et qu'il connaissait les règles de la discipline, qu'il
23 savait également comment faire valoir son autorité, et tout cela en
24 rapport avec sa formation dans l'ex-JNA.
25 M. Tolo (interprétation). – C'est exact.
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1 M. Nobilo (interprétation). - Je vous pose maintenant la
2 question suivante : ses caractéristiques, ses connaissances, les
3 connaissances que M. Blaskic avait acquises à l'académie militaire de la
4 JNA pouvaient-elles être utilisées à Vitez dans la situation dans laquelle
5 vous vous êtes trouvé à l'époque dont nous parlons ?
6 Pouvez-vous nous dire que si les troupes que M. Blaskic avait
7 sous ses ordres pouvaient suivre ces principes, compte tenu des
8 connaissances manifestées par Blaskic, notamment eu égard à la nécessité
9 d'un changement ?
10 Est-ce qu'il a dû s'adapter à un nouvel environnement ? Et de
11 quelle façon si tel était le cas ?
12 M. Tolo (interprétation). – A mon avis, il a dû s'adapter.
13 M. Nobilo (interprétation). - A votre avis, M. Blaskic était-il
14 plus capable, plus compétent dans la situation qui était caractéristique
15 de ce moment que d'autres à Vitez ? Etait-il plus efficace ?
16 M. Tolo (interprétation). – Oui.
17 M. Nobilo (interprétation). – Ce sera tout.
18 M. le Président. – Merci beaucoup. Je me tourne vers mes
19 collègues.
20 Monsieur Riad, avez-vous des questions ?
21 M. Riad (interprétation). – Bonjour, Monsieur Tolo.
22 Je vais enchaîner avec la dernière question du conseil de
23 défense concernant votre affirmation que le colonel puis général Blaskic,
24 comme vous avez dit, était un commandant exemplaire sur tous les plans.
25 Cela implique peut-être qu'il était respecté et obéi par ses soldats ou
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1 son autorité était-elle contestée et bafouée ?
2 M. Tolo (interprétation). – Dans l'ancienne armée, au sein de la
3 JNA, tous les soldats le respectaient. Personne n'aurait pu refuser
4 d'obéir à un de ses ordres. Il était un officier exemplaire au sein de
5 l'ex-JNA. Mais quand il est arrivé à Vitez, il représentait un homme de
6 l'extérieur, qui a été imposé de l'extérieur. Les villageois n'ont pas
7 beaucoup apprécié que quelqu'un prenne le dessus sur quelque chose qu'ils
8 avaient créé eux-mêmes.
9 M. Riad (interprétation). – Est-ce qu'il avait des cas que vous
10 avez remarqués où il y avait une contestation ouverte de son autorité ?
11 M. Tolo (interprétation). – Eh bien, à mon avis, le premier
12 exemple réside dans les propos assez désobligeants qui circulaient parmi
13 les soldats. Ceux-là manifestaient un certain manque de confiance à
14 l'égard du général Blaskic et c'était le premier élément qui a mis en
15 question son autorité et ses connaissances.
16 C'est ce que j'ai pu constater parmi les soldats à l'époque.
17 M. Riad (interprétation). – Les soldats, je crois que c'est
18 souvent le cas, on peut toujours médire de son chef, et dire beaucoup de
19 choses de lui. Mais est-ce qu'il y avait une manifestation expresse de
20 désobéissance, à part le fait de rouspéter ?
21 M. Tolo (interprétation). – Je ne sais pas si le général Blaskic
22 a jamais donné directement un ordre à ses soldats. Car en général, les
23 ordres passaient par d'autres commandants.
24 Maintenant, est-ce qu'au sommet l'application de ses ordres
25 était entravée, freinée, je ne sais pas. Je ne connais pas ce genre de
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1 chose.
2 M. Riad (interprétation). – Cela m'oblige à vous demander une
3 prévision quant à votre qualité dans le HVO. Car cette qualité est un peu
4 contradictoire dans les résumés, et dans ce que vous dites.
5 Dans les résumés, il y a en anglais : "Il a refusé d'entrer dans
6 l'armée du HVO et a accepté d'autres formes d'emploi".
7 Mais vous étiez dans le HVO, vous n'avez pas refusé d'être dans
8 le HVO. Vous étiez dedans ou dehors.
9 M. Tolo (interprétation). – Monsieur le Juge, le général
10 Blaskic, à ce moment-là, m'a demandé d'entrer dans les troupes de combat,
11 c'est-à-dire actif dans les opérations menées dans la vallée de la Lasva
12 par le HVO. Mais j'ai subi une blessure, je suis devenu inapte à
13 l'accomplissement de ces tâches physiquement et il y avait également
14 d'autres raisons que j'ai déjà évoquées.
15 Mais par la suite, j'ai ouvert ma propre entreprise, je suis
16 devenu chauffeur privé et automatiquement j'ai voulu participer à la
17 défense et je me suis mis au service de l'armée.
18 M. Riad (interprétation). – En tant qu'officier du HVO, ou en
19 tant que civil ?
20 M. Tolo (interprétation). – J'étais soldat militaire, donc à
21 l'époque bien entendu, j'étais considéré comme un civil, même si à
22 l'époque par les documents qui existaient je peux être considéré comme
23 ayant eu un grade. Mais c'était un grade militaire, quand j'ai travaillé
24 pour l'armée, en tant que chauffeur, j'était chauffeur civil.
25 M. Riad (interprétation). – J'ai cru comprendre que vous avez
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1 procédé à l'entraînement des jeunes. Il y avait un programme de formation.
2 C'est vous qui avez procédé à cet entraînement ?
3 M. Tolo (interprétation). – A partir du mois d'octobre 93, oui.
4 M. Riad (interprétation). – Et ce programme était un programme
5 qui formait les soldats, un programme sérieux ou non ? Le programme
6 existait avant vous ?
7 M. Tolo (interprétation). – Je ne sais pas sur la base de quel
8 programme ils ont travaillé avant mon arrivée. Mais j'ai proposé à
9 M. Vokovic, mon propre programme que j'avais en fait copié de l'ex-JNA et
10 M. Vokovic l'a accepté. Ce qui était important, c'était d'instruire les
11 hommes pour leur apprendre ce que j'avais appris au cours de mon
12 instruction. C'est moi qui ai rédigé mon propre plan.
13 M. Riad (interprétation). – Mais avant, il y avait toujours de
14 l'entraînement. C'était un programme et un système continu ?
15 Vous n'étiez pas le premier à entraîner le HVO ?
16 M. Tolo (interprétation). – C'est la première partie de l'armée
17 qui a été formée de cette façon. Mais certains étaient arrivés dans
18 l'armée avant moi. Ces soldats étaient dans la caserne un ou deux mois
19 avant mon arrivée. Quand je suis arrivé en tant qu'instructeur, je me suis
20 trouvé face à de jeunes soldats qui étaient déjà là. Mais le premier
21 groupe qui avait cantonné dans cette caserne avait été formé avant moi.
22 M. Riad (interprétation). – Ils étaient bien formés, bien
23 entraînés ?
24 M. Tolo (interprétation). – Non, pas du tout.
25 M. Riad (interprétation). – Vous avez dit que chaque unité
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1 n'empiétait pas sur l'autre. Il n'empêche que toutes ces unités étaient
2 sous le même commandement, comme plusieurs services dans une
3 administration. Je ne suis pas militaire. Mais il y avait toujours le même
4 commandement, ils obéissaient au même commandement ?
5 M. Tolo (interprétation). – Je vous prie de m'excuser, mais je
6 ne comprends pas sur quelle période porte votre question. Car au début,
7 dans la première période, ils avaient tous les mêmes tâches. En fait, ils
8 se battaient tous pour défendre la vallée de la Lasva, mais dans la
9 pratique, les unités spéciales n'avaient pas de commandement, au niveau du
10 commandement
11 conjoint responsable de la vallée de la Lasva. Et par la suite, au fil de
12 la guerre, lorsqu’ils se sont trouvés encerclés, il n’y avait donc plus de
13 contact avec leur commandant. S’il y avait quelqu’un qui était au-dessus
14 de Drago, il était à Mostar, donc le contact n’était plus possible avec
15 lui.
16 Et donc, ils se sont rendus eux-mêmes compte qu'il fallait
17 qu'ils se placent sous les ordres d’un commandement conjoint pour des
18 raisons de logistiques, pour se nourrir et pour se répartir les tâches.
19 Mais tout dépendait encore une fois de leur propre évaluation dans ces
20 milieux en guerre. Tout dépendait de leur propre avis sur la question.
21 M. Riad (interprétation). – Leur propre avis ? C’est-à-dire que
22 chacun faisait la guerre à sa manière ?
23 M. Tolo (interprétation). - Oui.
24 M. Riad (interprétation). – Alors c’était plusieurs troupes,
25 plusieurs… comment puis-je dire ça ? Bandes ? C'est presque du guérilla
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1 alors ?
2 M. Tolo (interprétation). – Eh bien, d'un certain côté, on peut
3 décrire cela par ces mots, mais tout le monde avait le même objectif, le
4 même but.
5 M. Riad (interprétation). – Je voudrais aussi savoir un peu,
6 exactement des précisions concernant les tranchées qu'on creusait.
7 Vous êtes très bien placé pour savoir qui est Musulman et qui
8 est Croate, puisque vous avez de la famille dans les deux. Quand vous
9 transportiez des gens pour aller creuser des tranchées, vous ne pouvez pas
10 remarquer à leur accent, à leur façon de parler, etc. s'ils étaient
11 Croates ou Musulmans ?
12 M. Tolo (interprétation). - A l'âge de 17 ans, je suis parti à
13 l'académie militaire. Dans mon travail, j'ai travaillé avec tout le monde.
14 La langue que j’utilisais était la langue qui utilise le « é » et pas le
15 « yé ».Donc, j’avais beaucoup de problèmes, je parlais en fait la langue
16 serbe la plus pure à mon arrivée. Et donc, dès que j’arrivais on pouvait
17 penser, à m’entendre parler, que j'étais Serbe. Donc, il a fallu que je
18 m’habitue d’abord à parler avec le « yé », c'est-à-dire notre langue, et
19 je ne sais pas si j’aurais pu reconnaître qui que ce soit par son accent.
20 Peut-être par le nom, mais par son accent, non.
21 M. Riad (interprétation). - Par le nom. Il y avait des
22 Musulmans ?
23 M. Tolo (interprétation). - Je ne connaissais pas ces hommes. Je
24 suis arrivé en 1992. Je n’ai pas réussi à faire la connaissance réellement
25 de ces hommes. Si quelqu'un s'était présenté à moi, j'aurais pu savoir qui
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1 était qui, mais cela n’a pas été le cas.
2 M. Riad (interprétation). – Et vous avez dit que ces hommes,
3 quels qu'ils soient , les Romani ou Musulmans ou Croates ou Serbes,
4 allaient de leur plein gré creuser des tranchées. Personne n'a essayé de
5 fuir ? Et qu’est-ce qui arrivait à celui qui essayait de fuir ?
6 M. Tolo (interprétation). - Chez les Rom, les choses sont telles
7 que lorsqu'il arrivait qu’il fuit, il trouvait quelqu'un qui le cachait.
8 Donc, c'était des histoires individuelles. Maintenant, personne n'est allé
9 creuser avec plaisir. Moi-même, je préférais gagner 100 marks par jour en
10 conduisant des gens dans mon véhicule plutôt que d’aller sur des lignes de
11 front. Mais je savais que si je refusais, on pouvait prendre à mon
12 encontre des mesures disciplinaires bien précises. Et dans un village il
13 arrivait qu’un groupe d’hommes, du même village par exemple, s’enfuie et
14 aille se cacher à la maison. Mais il n’a jamais été possible, pour un
15 commandant par exemple, de prendre des mesures à leur encontre ; ils
16 étaient cachés.
17 M. Riad (interprétation). – Oui, mais ils étaient sous garde
18 quand ils allaient faire creuser ? Il y avait des soldats qui les
19 surveillaient pour ne pas s’échapper ? Ou c'était une promenade ?
20 M. Tolo (interprétation). - J'ai déjà dit cela une fois. Il n'y
21 avait pas d'escorte militaire. Il n'y avait pas de gardes qui gardaient
22 ces hommes. Ils étaient amenés sur le front et l'armée les affectait à tel
23 endroit, près de cette maison, dans la clairière, à tel et tel endroit.
24 Ils devaient creuser les tranchées qui seraient utilisées par les soldats.
25 Entre ces soldats, il y avait bien sûr des conversations qui allaient bon
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1 train, il y avait des pauses bien entendu. Et pendant
2 une pause, ce n'était pas difficile de s'enfuir parce que ce travail était
3 accompli la nuit. Et bien sûr il n'allait pas, le soldat qui s’enfuyait,
4 n’allait pas affronter les canons. Il fuyait dans le sens inverse pour
5 aller à la maison.
6 M. Riad (interprétation). - Là où vous ameniez ce que vous
7 appelez les civils ou les militaires, c'était tout près de la ligne du
8 front ? Tout près de l'ennemi ?
9 M. Tolo (interprétation). - C'est la première ligne. Bien sûr
10 tout…
11 M. Riad (interprétation). - Il pouvait être atteint par
12 l'ennemi ?
13 L'ennemi pouvait tirer dessus ?
14 M. Tolo (interprétation). - La caractéristique, chez nous,
15 c'est qu'il était possible d’être atteint en pleine ville. Parce que nous
16 étions en ville et ils étaient tous les jours. Quelquefois il y avait
17 500 mètres de ligne entre un camp et l'autre. Ce qui est toujours
18 accessible par les fusils. Donc, tout était en fait une première ligne de
19 front.
20 M. Riad (interprétation). - Peut-être aussi… ma dernière
21 question : vous avez dit que dans les Vitezovi, on recrutait des
22 criminels.
23 Qui recrutait les criminels ?
24 M. Tolo (interprétation). – Eh bien, ils arrivaient de leur
25 plein gré. Quand ils arrivaient, ils ne disaient jamais : « Je suis
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1 criminel ». Simplement ils se faisaient connaître, ils disaient qu’ils
2 voulaient être soldats du HVO, appartenir à une unité spéciale. Et c'est
3 avant tout Drago Zuljevic qui les acceptait dans ses rangs. Et personne ne
4 posait de problèmes, personne ne regardait leurs documents pour vérifier
5 s'ils avaient un casier, s'ils avaient été condamnés, s’ils étaient
6 criminels ou pas.
7 Mais simplement, par la suite, leurs actes criminels ont parfois
8 été connus. Ils ne les faisaient pas connaître. Ils ne leur faisaient pas
9 de publicité, mais chacun craignait tellement Drago, qu’en tout état de
10 cause il était impossible d'engager des poursuites contre ces hommes qui
11 étaient sous le commandement de Drago. Donc, ils utilisaient leur entrée
12 dans ces unités
13 spéciales comme moyen de se protéger contre des poursuites judiciaires.
14 M. Riad (interprétation). – Et il n'y avait pas de façon de
15 trier, de recruter ? Parce que c’est très dangereux pour une armée
16 d’accepter n’importe qui. On n’essayait pas de savoir le CV des soldats
17 qui entraient ? Ca pouvait être dangereux pour l’armée.
18 M. Tolo (interprétation). - Pour autant que je le sache, il n'y
19 avait pas de sélections particulières.
20 M. Riad (interprétation). – Merci Monsieur Tolo.
21 M. le Président. - Merci Monsieur le Juge Riad.
22 Je passe la parole à Monsieur le Juge Shahabuddeen.
23 M. Shahabuddeen (interprétation). – Monsieur Tolo, je m'efforce
24 de saisir exactement le sens de ce que vous avez dit au sujet de ces
25 unités indépendantes. Quel est le poste, quelles sont les fonctions qui
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1 auraient correspondu à l'idée populaire d'un seigneur de leur guerre ?
2 Vous savez, je suppose qu'un seigneur de la guerre est sensé être un
3 commandant militaire qui jouit d'une autorité suprême et incontestée dans
4 la zone relevant de sa responsabilité. Il peut conclure des accords et
5 manifester de la compréhension à l'égard des autres seigneurs de guerre.
6 Mais dans la zone relevant de sa responsabilité, son autorité est suprême.
7 Est-ce que c’est cela l'idée que vous avez tenté de nous transmettre ?
8 M. Tolo (interprétation). – Eh bien, c'est sans doute ce qui
9 existait à l'époque du colonel Blaskic parce que si un homme a des
10 perspectives au sein de l'armée, cet homme ne peut que servir les intérêts
11 de cette armée. Donc cette idée existait sûrement. C'est une idée qu'il a
12 mise en œuvre à la fin de la guerre.
13 M. Shahabuddeen (interprétation). - Mais alors je suis en droit
14 de vous comprendre comme ayant eu une évolution dans le système et qu'en
15 fin de compte, une forme plus structurée d'autorité militaire a émergé,
16 une forme d'autorité qui supposait qu'il y avait un commandant au sommet ?
17 Est-ce que j'ai raison de penser que vous avez voulu parler de
18 cette évolution ?
19 M. Tolo (interprétation). – Oui, c'est cela. Le pouvoir central
20 s'est créé en plusieurs étapes.
21 M. Shahabuddeen (interprétation). - Pourriez-vous m'aider sur ce
22 point particulier à présent ?
23 A quel moment, diriez-vous, que cette évolution a atteint à un
24 moment où le général Blaskic a pu effectivement exercer son autorité sur
25 l'ensemble de la structure militaire ?
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1 M. Tolo (interprétation). – Je regarde les choses d'en bas. En
2 tout cas, à partir du moment où l'action a été entreprise, il y a eu
3 remplacement des dirigeants inférieurs qui n'avaient aucune information et
4 aucune instruction, à partir du moment où les unités spéciales ont subi
5 quelques coups destinés à briser ces unités, à partir du moment où on a
6 empêché les responsables de fonctionner par la force physique, je dirais
7 que ce moment doit se situer aux alentours de septembre 93.
8 M. le Président. – Je vais vous poser une ou deux questions.
9 Mes collègues ont fort opportunément posé des questions sur lesquelles
10 j'ai apporté tout mon intérêt. Je les en remercie.
11 Vous vous êtes occupé de formation. C'est bien cela ?
12 M. Tolo (interprétation). – Oui, à partir du mois d'octobre.
13 M. le Président. – Au cours de cette formation, pour ces soldats
14 qui étaient des soldats d'occasion, des villageois, est-ce que vous aviez,
15 avec la hiérarchie qui était au-dessus de vous, conçu de les sensibiliser
16 aux lois de la guerre, de leur dire : "Voilà, il faut faire cela et pas
17 cela, ou pas du tout" ?
18 M. Tolo (interprétation). – Il y avait plusieurs instructions de
19 formation. En ce qui me concerne, je devais apprendre aux jeunes soldats
20 de manipuler les armes et de pouvoir combattre. Il y avait plusieurs
21 instructeurs et chacun avait son secteur de responsabilités.
22 M. le Président. – Y avait-il des instructeurs qui s'occupaient
23 des lois de la guerre ?
24 M. Tolo (interprétation). – Moi, je pense qu'il s'agirait plutôt
25 des connaissances théoriques. C'étaient les commandants des pelotons, des
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1 compagnies qui auraient dû probablement, à cette époque-là, s'occuper de
2 ces questions-là.
3 M. le Président. – Cela veut dire que les commandants
4 n'exerçaient pas une telle autorité. On a eu devant ce Tribunal souvent
5 l'impression que cette formation n'avait pas été assurée. On peut le
6 regretter, d'ailleurs ou le déplorer.
7 Ma question est très simple, vous me dites que ce n'était pas
8 dans votre secteur de compétences. Mais est-ce que vous aviez des
9 collègues qui, dans ce centre de formation, avaient donné une formation
10 théorique ou pas du tout. Vous pouvez me répondre simplement ?
11 M. Tolo (interprétation). – Au centre de formation, il y avait
12 les instructions de détachement et de peloton. Moi, ce n'était pas dans
13 mon secteur de compétences. Je voulais simplement apprendre aux soldats à
14 manipuler les armes.
15 M. le Président. – Quand vous discutiez avec vos collègues des
16 autres secteurs de formation, vous disaient-ils : « Aujourd'hui, je vais
17 leur dire ce qui doit se faire avec les civils, ou ce qui ne doit pas se
18 faire ». Est-ce que cela arrivait ou êtes-vous dans l'ignorance totale sur
19 ce plan-là ?
20 M. Tolo (interprétation). – Les instructeurs qui étaient avec
21 moi avaient la formation tactique, l’ingénierie. Ce secteur était
22 probablement Zvonko Vukovic, c'est lui-même qui a fait le programme. Je
23 n'étais pas au courant de son programme.
24 M. le Président. – Vous êtes chauffeur, au service du HVO, mais
25 vous aviez eu une formation militaire ?
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1 M. Tolo (interprétation). – Oui.
2 M. le Président. – Pourquoi, le colonel Blaskic ne vous a pas
3 utilisé à des fonctions de plus grande responsabilité, indépendamment de
4 votre blessure ?
5 M. Tolo (interprétation). – Vous pensez au moment où je suis
6 rentré à Vitez, après Tuzla, au moment où je me suis rendu à Vitez. Tout
7 d'abord, je souhaitais me reposer un peu et surtout me mettre à l'écart de
8 tout ce qui était combat actif. Dans tous les sens, je n'avais aucune
9 envie de le faire. Ce n'est pas M. Blaskic qui m'avait parlé
10 d'instructeur, ni de grade, ni de responsabilité. C'est moi qui voulais me
11 mettre un peu à l'écart.
12 M. le Président. – Monsieur Tolo, je n'ai pas d'autres questions
13 à vous poser. Je crois à présent que vous allez pouvoir rentrer chez vous.
14 Le Tribunal vous dit toute sa gratitude pour être venu jusqu'ici et
15 essayer de répondre le mieux que vous avez pu à toutes les questions qui
16 vont ont été posées. Vous ne bougez pas pour l'instant. Il est 18 heures.
17 C'est la seule horloge qui n'a pas été réglée par le Tribunal,
18 donc cela nous donne plus l'impression de travailler que nous ne pouvions
19 le faire.
20 L'audience est levée. Elle reprendra demain matin à 10 heures.
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22 L'audience est suspendue à 18 heures.
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