Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL                          AFFAIRE N° IT-95-14-T

  2   POUR L'EX-YOUGOSLAVIE  

  3   Jeudi 11 mars 1999

  4   L'audience est ouverte à 10 heures 05.

  5   M. le Président. - Veuillez vous asseoir.

  6   Monsieur le Greffier, pouvez-vous faire entrer notre témoin ?

  7   (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

  8   Je voudrais d'abord saluer nos amies interprètes, les personnes

  9   qui s'occupent du transcript, les Conseils de l'accusation, les Conseils

 10   de la défense. Je salue notre témoin, l'accusé.

 11   Nous sommes prêts à reprendre. Je sais qu'il y a beaucoup

 12   d'étudiants dans le public. Vous savez que ce Tribunal Pénal International

 13   est un tribunal qui a aussi une valeur exemplaire et pédagogique. Je

 14   signale donc que nous entendons comme témoin, dans la séquence du procès

 15   Blaskic, l'accusé lui-même, qui est un témoin sous serment.

 16   Général, comment allez-vous ? Vous êtes reposé ? Oui ?

 17   M. Blaskic (interprétation). - Je vous remercie de votre

 18   question, Monsieur le Président. Je me sens bien, je me suis reposé.

 19   M. le Président. - Dans ces conditions, Maître Nobilo, nous

 20   continuons à entendre le développement chronologique de ces journées

 21   cruciales, qui ont été celles du déclenchement du conflit, dans la période

 22   du 16 avril et celles qui ont suivi.

 23   Nous ferons une pause dans trois-quarts d'heure à une heure

 24   selon les séquences ou lorsque vous trouverez que la rupture vous paraît

 25   la plus efficiente. Maître Nobilo, c'est à vous.


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  1   M. Nobilo (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

  2   Comme vous vous le

  3   rappelez, nous avons parlé hier du problème du départ des civils, et

  4   lorsque je dis "civils", je pense aux Musulmans partis de Vitez et aux

  5   Croates partis de Zenica. Nous étions à la fin de notre journée de

  6   travail. Nous n'avions pas terminé le débat sur ce point, qui est un point

  7   très important.

  8   J'aimerais prier M. Blaskic de revenir, de façon globale, sur ce

  9   problème auquel il a fait référence, problème qui s'est posé après le

 10   début du conflit entre les Croates et les Musulmans dans la vallée de la

 11   Lasva en avril 1993.

 12   M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Président, Messieurs

 13   les Juges, j'ai présenté le problème en parlant de l'existence de doubles

 14   critères appliqués par les organisations internationales, à savoir

 15   notamment le HCR qui m'a appris que chaque déplacement et chaque départ de

 16   civils représentaient pour le HCR un signe de nettoyage ethnique, et que

 17   j'étais tenu, que j'avais pour devoir, de garantir la pleine sécurité de

 18   la population dans les localités où résidait cette population.

 19   Quant à la position de la Croix-Rouge internationale, elle

 20   consistait à penser qu'il me fallait assurer la pleine sécurité de

 21   circulation pour la population civile. Ces deux positions créaient pour

 22   moi un problème tant du point de vue de l'action que du point de vue des

 23   contacts à nouer avec les représentants du HCR ou de la Croix-Rouge

 24   internationale.

 25   Connaissant donc cette position du HCR, j'ai discuté avec les


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  1   responsables du HCR d'un autre critère, critère qui s'appliquait sur le

  2   territoire contrôlé par l'armée de la Republika Srpska.

  3   Sur ce territoire placé sous le contrôle de l'armée de la

  4   Republika Srpska, des civils Musulmans, Bosniens et des Croates arrivaient

  5   avec l'aide de la Forpronu et sous l'égide du HCR dans les localités

  6   suivantes : Banja Luka, Kotor Varos, Prijedor, Jajce et d'autres localités

  7   situées au nord-ouest de la Bosnie.

  8   Donc ces civils arrivaient à Travnik, à Zenica et dans toutes

  9   les localités de la vallée de la Lasva en provenance des localités que je

 10   viens de citer.

 11   M. Nobilo (interprétation). - Il y un problème avec

 12   l'interprétation. Vous avez utilisé un terme qui signifie que cette

 13   population provenait de quelque part, mais que vouliez-vous dire ? D'où

 14   provenait cette population ?

 15   M. Blaskic (interprétation). - Selon les données à ma

 16   disposition, j'ai été informé que le HCR participait au transfert des

 17   Croates et des Musulmans en provenance des territoires placés sous le

 18   contrôle de l'armée de la Republika Srpska et à destination de localités

 19   situées dans la vallée de la Lasva, ou en tout cas de localités placées

 20   sous mon contrôle et sous le contrôle du 3ème Corps de l'armée de Bosnie-

 21   Herzégovine. Je parle de Travnik, Novi Travnik, Zenica, Kakanj, notamment.

 22   M. le Président. - La population était-elle déjà arrivée, ou

 23   vous parlez de quelle date exactement ? Lorsque vous vous adressez au HCR,

 24   vous dites : "Ces populations arrivent encore maintenant" ou est-ce

 25   qu'elles étaient arrivées aux premières attaques sur Travnik ?


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  1   M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Président, cela s'est

  2   passé y compris avant le conflit d'avril, avant le 16 donc, et ces

  3   personnes arrivaient en grand nombre. Mais le phénomène s'est déroulé

  4   également dans le courant de l'année 1993. Si vous le souhaitez, je peux

  5   regarder plus tard dans mes notes pour vérifier la chute de Kotor Varos,

  6   si vous avez besoin de la date exacte, mais le phénomène avait commencé

  7   avant.

  8   M. le Président. - Je voulais simplement savoir si lorsque vous

  9   vous adressiez au HCR, vous lui disiez : "Vous n'appliquiez pas vous-même

 10   votre critère, alors qu'en ce moment même, des populations musulmanes et 

 11   bosniaques et croates nous arrivent de Travnik", ou bien si vous disiez

 12   simplement au HCR : "Souvenez-vous, ces populations sont arrivées avant le

 13   16 avril". Je voulais simplement savoir cela.

 14   M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Président, j'ai dit

 15   au HCR, : "Messieurs,

 16   vous avez vous-mêmes des critères différents pour les uns et pour les

 17   autres. Vous avez des critères que vous appliquez au HVO pour les

 18   territoires placés sous le contrôle du HVO et vous appliquez un autre

 19   critère pour les territoires placés sous le contrôle de l'armée de la

 20   Republika Srpska".

 21   J'ai dit également à tous les représentants des organisations

 22   dont j'ai parlé, à savoir donc aux représentants du HCR et de la

 23   Croix-Rouge internationale, que je l'ai prié de bien vouloir homogénéiser

 24   leurs positions, leurs critères et que je ferai tout ce qui était en mon

 25   pouvoir pour agir, conformément à une position qui leur serait commune,


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  1   quelle qu'elle soit, que cette position corresponde à la première ou à la

  2   deuxième des deux positions que je viens de décrire.

  3   M. Nobilo (interprétation). - Ces organisations ont-elles

  4   homogénéisé leurs positions, en tous cas en 1993 ?

  5   M. Blaskic (interprétation). - Je n'en ai jamais été informé. Je

  6   reviendrais sur un certain nombre de réunions plus tard ; je les citerai

  7   chronologiquement, réunions qui ont été tenues conjointement. Mais j'ai

  8   demandé au représentant du HCR de bien vouloir me faire connaître la

  9   teneur du mandat de cette organisation, et pour ce qui me concerne, j'ai

 10   tenté, dans les mesures de mes possibilités, de m'en tenir des positions

 11   du HCR.

 12   M. Nobilo (interprétation). – Veuillez dire aux Juges quelles

 13   étaient vos réflexions personnelles ? Que pensiez-vous personnellement ?

 14   Quelle était la solution que vous considériez la meilleure et estimiez-

 15   vous qu'il y avait une bonne solution.

 16   M. Blaskic (interprétation). – Personnellement, j'étais pris

 17   entre deux solutions qui, à mon avis, étaient mauvaises toutes les deux.

 18   Autrement dit, à mon avis, il n'y avait pas de bonne solution. Peut-être

 19   la solution la meilleure aurait-elle consisté à déplacer momentanément la

 20   population civile pour la placer hors des zones de combat.

 21   Mais j'ai appuyé et soutenu la solution du HCR et j'ai tenté de

 22   mettre en oeuvre

 23   cette position du HCR chaque fois qu'il était question de

 24   solutions relatives à la population civile.

 25   Cependant, il importe ici de parler également des critères


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  1   appliqués à la libération des prisonniers qui ont largement contribué à

  2   l'échec de l'application des critères du HCR.

  3   M. Nobilo (interprétation). - Quelle était l'organisation

  4   responsable de la libération des prisonniers et quels étaient les critères

  5   appliqués à cet égard ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - En ce qui nous concerne, c'était

  7   la Croix-Rouge internationale qui était l'organisation chargée au premier

  8   chef d'appliquer ses propres critères pour obtenir la libération des

  9   prisonniers. Et ce qui posait problème, c'était que, selon les critères de

 10   la Croix-Rouge internationale, tout prisonnier était en droit de choisir

 11   l'endroit où il souhaitait se rendre après sa libération.

 12   Et, dans la grande majorité des cas, les Musulmans, c'est-à-dire

 13   les membres de l'armée de Bosnie-Herzégovine, se prononçaient en faveur

 14   d'un départ de Zenica pour Travnik, alors que les Croates, membres du HVO

 15   se prononçaient en faveur d'un départ de Zenica vers Busovaca et Vitez.

 16   M. Nobilo (interprétation). - Selon les critères de la

 17   Croix-Rouge internationale, aussi bien que dans les faits, existait-il la

 18   possibilité, pour un Musulman, de se prononcer en faveur d'une absence de

 19   départ ? C'est-à-dire, est-ce que les Musulmans pouvaient décider de

 20   rester à Vitez ?

 21   M. Blaskic (interprétation). - Oui, il était possible, dans les

 22   faits, pour un Musulman, de décider de rester à Vitez aussi bien qu'à

 23   Travnik ou dans un autre territoire contrôlé par l'armée de Bosnie-

 24   Herzégovine.

 25   M. Nobilo (interprétation). - A part la Croix-Rouge


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  1   internationale, existait-il d'autres organisations qui intervenaient dans

  2   la libération des prisonniers et dans le choix des nouveaux lieux de

  3   résidence pour ces personnes libérées ?

  4   M. Blaskic (interprétation). - Le choix du lieu de résidence

  5   était le choix du prisonnier lui-même qui inscrivait la localité où il

  6   souhaitait se rendre sur les documents présentés par la Croix-Rouge

  7   internationale. Il y avait aussi une commission à Zenica qui participait

  8   avec la Croix-Rouge internationale à la libération des prisonniers et aux

  9   choix de ces localités.

 10   M. Nobilo (interprétation). - Que se passait-il si un Musulman

 11   libéré à Vitez -je parle donc d'un homme en âge de porter les armes-

 12   partait à Zenica pour rejoindre l'armée de Bosnie-Herzégovine dans le

 13   cadre des dispositions prévues par la Croix-Rouge internationale ? Que se

 14   passait-il dans ce cas-là pour les membres de sa famille ?

 15   M. Blaskic (interprétation). - Prenons un exemple, la famille

 16   reste à Vitez et le soldat de l'armée de Bosnie-Herzégovine va à Zenica.

 17   Dans ces conditions, bien entendu, le soldat en question recourait à

 18   toutes les disponibilités disponibles pour que sa famille le rejoigne,

 19   pour qu'elle puisse vivre à nouveau avec lui. Ce qui signifiait que la

 20   famille quittait Vitez pour arriver sur le territoire de Zenica et

 21   reprendre la vie quotidienne à Zenica. D'ailleurs, si un Croate libéré

 22   arrivait à Vitez, il avait le même problème, mais il lui fallait

 23   transférer sa famille de Zenica à Vitez.

 24   M. Nobilo (interprétation). - Comment étaient organisés ces

 25   déménagements ? Que faisait le soldat en question pour assurer ce


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  1   transfert ?

  2   M. Blaskic (interprétation). - Eh bien, cela a largement

  3   contribué à supprimer, à nuire à la sécurité publique.

  4   La Croix-Rouge nationale a transféré un jour une famille

  5   composée d'une femme et d'un enfant à destination de Zenica parce que le

  6   mari, membre de l'armée de Bosnie-Herzégovine, avait été libéré et avait

  7   décidé de poursuivre sa vie à Zenica. Donc il arrivait que soit demandée

  8   l'intervention de la Croix-Rouge internationale dans ces transferts.

  9   S'il s'agissait de membres de la famille qui étaient malades, si

 10   les membres de cette

 11   famille répondaient aux critères défendus par la Croix-Rouge

 12   internationale, celle-ci dans des cas particuliers intervenait dans les

 13   transferts des familles, mais dans des cas particuliers, je le répète.

 14   Et puis, il arrivait de façon fréquente que des Musulmans

 15   bosniens soient expulsés de leur appartement, que cet appartement soit

 16   pris par une tierce personne, que l'expulsion de cet appartement soit

 17   rendue publique auprès des institutions de Zenica et que donc des

 18   dispositions, des arrangements soient mis au point : "Vous prenez cet

 19   appartement, et moi j'en prends un autre à Zenica".

 20   Il arrivait aussi que des groupes participent à ce genre

 21   d'action dans le but de gagner de l'argent, et les sommes étaient assez

 22   importantes. J'ai appris qu'à un certain moment une agence civile a été

 23   créée, y compris sur le territoire de Vitez, agence qui contribuait à

 24   échanger les données et les renseignements nécessaires avec une agence ou

 25   une autre entité située à Zenica, une autre institution donc, ces deux


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  1   entités participant à l'échange d'appartements. Ce genre de chose est

  2   arrivée assez souvent.

  3   Mais si le soldat arrivait avec ses armes, il arrivait

  4   malheureusement que soit utilisée la violence, c'est-à-dire qu'il dise :

  5   "Moi, j'ai été chassé de Zenica, vous, je vous en prie, allez à Zenica et

  6   continuez à vivre à Zenica !".

  7   M. Nobilo (interprétation). - Mais lorsque vous étiez informé de

  8   cas de ce genre, preniez-vous des mesures destinées à protéger et à

  9   défendre les Musulmans et à leur permettre de retourner dans leur

 10   appartement personnel ?

 11   M. Blaskic (interprétation). - Oui, et cela apparaîtra dans la

 12   suite de mon récit chronologique.

 13   M. Nobilo (interprétation). - Veuillez dire aux Juges, dans la

 14   vallée de la Lasva, est-il jamais arrivé au cours du conflit qu'une unité

 15   militaire organisée vienne expulser par la force la population musulmane

 16   d'une ville ou d'un village, et expulse donc cette population

 17   musulmane de la vallée de la Lasva ?

 18   M. Blaskic (interprétation). - Je n'ai jamais commandé un tel

 19   acte et je n'ai jamais été informé du fait qu'une unité du HVO ait attaqué

 20   des civils ou expulsé des civils de ce territoire.

 21   M. Nobilo (interprétation). - Nous allons poursuivre. Le

 22   22 avril, avec les membres de la commission conjointe, vous avez discuté

 23   du sujet dont nous venons de débattre ici, à savoir la protection des

 24   civils. Veuillez en parler aux Juges.

 25   M. Blaskic (interprétation). - J'ai eu une réunion avec les


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  1   représentants de la commission conjointe, M. Nakic, M. Belisic, et j'ai

  2   demandé à ce qu'ils commencent une action et à ce que la commission

  3   conjointe, déjà à partir du 22 avril, s'oriente vers la prévention des

  4   violences.

  5   J'ai demandé également que l'on fasse des tournées dans les

  6   territoires critiques afin de voir quel était l'état des maisons, des

  7   appartements, des immeubles et de voir également quelles étaient les

  8   possibilités de retour là où les circonstances le permettaient, là où les

  9   immeubles le permettaient et où la situation en ce qui concerne la

 10   sécurité également le permettait. Je parle ici des territoires où vivait

 11   la population civile.

 12   M. Nobilo (interprétation). - Le 22 avril 1993, vous avez reçu

 13   une lettre du colonel Stewart, le commandant du bataillon britannique qui

 14   attirait votre attention pour la première fois sur la question d'Ahmici.

 15   Je voudrais maintenant présenter la pièce à conviction de

 16   l'accusation n° 456/56.

 17   M. le Président. - Il s'agit d'une pièce de l'accusation,

 18   Maître Nobilo ?

 19   M. Nobilo (interprétation). - Oui, il s'agit de la pièce de

 20   l'accusation. Il s'agit en fait d'une lettre que le colonel Stewart a

 21   adressée à M. Blaskic. La lettre est datée du 22 avril 1993.

 22   C'est une lettre très courte? mais très importante. Je vais donc

 23   la lire.

 24   Le colonel Stewart, le 22 avril 1993, vous adresse cette lettre

 25   à vous,


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  1   colonel Blaskic, étant donné que vous étiez le commandant de la zone

  2   opérationnelle de la Bosnie centrale.

  3   Le titre, c'est : "Une enquête sur les crimes commis".

  4   "Point n° 1 : à 14 heures, aujourd'hui, nous sommes le

  5   22 avril 1993, j'ai visité le village d'Ahmici.

  6   Point n° 2 : à l'entrée d'une maison, j'ai découvert les corps

  7   d'un homme et d'un garçon. Les deux corps étaient tellement brûlés qu'on

  8   ne pouvait pas les reconnaître.

  9   Au sous-sol, j'ai trouvé les corps qui pourraient correspondre

 10   au corps de la mère et d'au moins cinq enfants. Ces corps étaient

 11   également complètement calcinés. Et il est évident, en voyant l'angle des

 12   têtes, qu'au moins deux de ces personnes étaient mortes dans un état

 13   d'agonie.

 14   Point n° 3 : quiconque est responsable de ces exactions doit

 15   être puni. Toute exaction, où qu'elle soit commise, est inacceptable.

 16   Point n° 4 : je demande, d'une manière urgente, votre assistance

 17   afin de mener une enquête à propos du pillage de ce village.

 18   Signé : Colonel Robert Stewart".

 19   Avez-vous reçu cette lettre le 22 avril 1993 ?

 20   M. Blaskic (interprétation). - Oui, je l'ai reçue le

 21   22 avril 1993 dans l'après-midi.

 22   M. Nobilo (interprétation). - S'agit-il de la première mention

 23   concrète et claire du crime commis à Ahmici pour vous ?

 24   M. Blaskic (interprétation). - Oui, c'est la première lettre qui

 25   mentionnait explicitement le village d'Ahmici et le crime commis dans le


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  1   village d'Ahmici.

  2   Après avoir reçu cette lettre, j'ai convoqué mes collaborateurs

  3   M. Slavko Marin et M. Saric. Je leur ai lu la lettre à haute voix. Je leur

  4   ai dit qu'on allait demander une enquête complète, qui devrait être menée

  5   par la commission conjointe. J'ai vérifié encore une fois

  6   auprès du chef de l'unité opérationnelle et de la personne qui travaillait

  7   au service d'informations si on avait reçu d'autres informations

  8   concernant les crimes commis dans le village d'Ahmici.

  9   A part cette lettre, tous les deux m'ont confirmé que l'on

 10   n'avait pas reçu d'autres informations. Par conséquent, j'ai donné un

 11   ordre au chef de l'unité opérationnelle de me préparer tous les documents

 12   à partir du 15 avril jusqu'au 22 avril, de les mettre dans un dossier à

 13   part afin de pouvoir les donner à la commission conjointe, ainsi qu'à moi-

 14   même, de cette manière nous aurions pu être en mesure de vérifier les

 15   informations concernant le crime commis dans le village d'Ahmici.

 16   M. Nobilo (interprétation). - A cette époque-là, aviez-vous à

 17   votre disposition d'autres renseignements à part ceux concernant huit

 18   personnes qui auraient été tuées ? Avez-vous discuté de cela ?

 19   M. Blaskic (interprétation). - Oui, nous en avons discuté. Un de

 20   mes collaborateurs m'a dit : "Ici nous parlons de huit personnes tuées

 21   dans le village d'Ahmici". A ce moment-là, je lui ai répondu : "Si même un

 22   seul civil avait été tué, il s'agit d'un crime" et si son soldat avait été

 23   tué dans un combat, il ne s'agit pas d'un crime.

 24   M. Nobilo (interprétation). - Le lendemain, le 23 avril 1993,

 25   pourriez-vous nous décrire cette journée ? Que s'est-il passé dans la


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  1   matinée ?

  2   M. Blaskic (interprétation). - J'ai eu une réunion avec le chef

  3   de l'état-major qui était aussi représentant dans la commission conjointe

  4   et avec lui, j'ai relu la lettre que j'avais reçue auparavant de la part

  5   du colonel Stewart. Ensuite, j'ai feuilleté et j'ai regardé de plus près

  6   la documentation.

  7   M. Nobilo (interprétation). - Qu'est-ce que vous vouliez faire

  8   avec cette documentation ? Pourquoi l'aviez-vous prise ?

  9   M. Blaskic (interprétation). - J'ai mis cette documentation dans

 10   un autre dossier à part, afin de pouvoir la donner à M. Nakic et au

 11   représentant de la commission qui allait être chargée de mener l'enquête

 12   sur ce crime.

 13   M. Nobilo (interprétation). - Vous parlez de la commission qui a

 14   été formée entre l'armée de la Bosnie-Herzégovine et le HVO ? La

 15   commission dont nous avons parlé hier, n'est-ce pas ?

 16   M. Blaskic (interprétation). - Non seulement de cette commission

 17   formée entre l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO, mais des membres de

 18   cette commission qui étaient également les membres de la commission

 19   européenne d'observateurs.

 20   M. Nobilo (interprétation). - Qu'est-ce que vous avez mis dans

 21   cette documentation ? Qu'estimiez-vous comme importance pour constituer ce

 22   dossier ?

 23   M. Blaskic (interprétation). - Tous les ordres, à partir du

 24   15 avril 1993 jusqu'au 22 avril 1993, étant donné que j'estimais que

 25   c'étaient des ordres importants. J'y ai mis également tous les rapports et


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  1   toutes les autres informations. J'ai mis tout cela dans un dossier à part,

  2   j'ai regardé de près tous les documents avec le chef de l'état-major.

  3   Lorsque je passais en revue ces documents, j'ai constaté que l'ordre

  4   datant du 15 avril 1993, émis à 10 heures du matin, était rédigé par moi-

  5   même et donc je l'ai donné à notre dactylographe afin de le recopier à la

  6   machine. Plus tard, j'ai signé cet ordre qui était écrit à la machine.

  7   M. Nobilo (interprétation). - Pourquoi avez-vous donné cet ordre

  8   de recopier à la machine cet ordre du 15 avril ?

  9   M. Blaskic (interprétation). - Je l'ai fait pour que ce document

 10   puisse être lu par tous ceux qui voulaient le lire. En général, nous

 11   recopions à la machine tous les ordres.

 12   M. Nobilo (interprétation). - Lorsque vous avez donné le

 13   manuscrit de votre ordre du 15 avril afin que cet ordre soit recopié,

 14   quelles étaient les références mises par la personne qui l'avait

 15   dactylographié ?

 16   M. Blaskic (interprétation). - Notre dactylographe a recopié cet

 17   ordre et a mis la date du 23 avril et elle a mis également une cote.

 18   M. Nobilo (interprétation). -  Laquelle ?

 19   M. Blaskic (interprétation). - Je présume que la référence

 20   portait la date du 23 avril.

 21   M. Nobilo (interprétation). - Est-ce qu'elle l'a mis dans le

 22   registre ?

 23   M. Blaskic (interprétation). - Oui, elle l'a mis dans le

 24   registre sous la date du 23 avril.

 25   M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous êtes intervenu à


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  1   propos de cet ordre ?

  2   M. Blaskic (interprétation). - Oui, j'ai changé la date de cet

  3   ordre. J'ai mis la date du 15 avril, j'ai signé cet ordre et donc, j'ai

  4   mis cet ordre avec l'ordre original, manuscrit. J'ai mis tout cela dans

  5   une chemise à part.

  6   M. Shahabuddeen (interprétation). - S'agissait-il d'une machine

  7   à écrire ordinaire où s'agissait-il d'un ordinateur qui avait été utilisé

  8   pour copier cet ordre ?

  9   M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Juge, il s'agissait

 10   d'une machine à écrire ordinaire. Je ne connais pas la marque, mais en

 11   tout cas, il ne s'agit pas d'un ordinateur.

 12   M. Shahabuddeen (interprétation). – Je vous remercie. La marque

 13   n'est pas du tout importante.

 14   M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, nous avons

 15   ces ordres ici, nous avons aussi quelques documents scellés. Peut-être

 16   pourrions-nous revenir ici après la pause. Maintenant, je préfère

 17   continuer avec l'ordre chronologique.

 18   Avez-vous réagi à cette lettre rédigée par M. Stewart ?

 19   M. le Président. - Il a été dit beaucoup de choses depuis

 20   quelques jours. Je voudrais que le général Blaskic le précise bien : c'est

 21   la première fois, au moment où vous recevez la lettre du colonel Stewart,

 22   c'est la première fois que vous entendez parler d'Ahmici,

 23   c'est ce que vous nous dites ?

 24   M. Blaskic (interprétation). - Oui, Monsieur le Président et

 25   c'était la première fois que j'ai dû faire face d'une manière concrète au


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  1   nom du village et avec ces huit victimes. C'était

  2   la première information reçue de la part du colonel Stewart.

  3   M. le Président. -  Je le comprends bien, général Blaskic, je

  4   vous demande de bien nous préciser, c'est donc la première fois que vous

  5   entendez parler d'Ahmici et de ce qui s'y est passé le 22 avril ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Président, il y a

  7   deux questions pour moi ici. La première fois que j'ai entendu parler

  8   d'Ahmici, c'est en lisant la lettre. J'ai entendu parler pour la première

  9   fois des victimes civiles le 20 avril à Zenica lors d'une réunion, lorsque

 10   Dzemo Merdan, lors d'un débat assez houleux, s'est levé et a dit : "Vous,

 11   vous avez tué les gens, parmi ces gens il y a également des civils dont

 12   les corps gisent maintenant dans les fossés à côté de la route.". Je crois

 13   qu'il a dit qu'il y avait 100 ou 500 personnes qui auraient été tuées. A

 14   ce moment-là, je lui ai dit : "Dzemo, si tu penses que les choses se sont

 15   passées de cette manière-là, je propose que la commission conjointe mène

 16   une enquête et nous fasse part des résultats de cette enquête". Par la

 17   suite et je l'ai mentionné hier, M. Ejup Ganic a pris la parole et a

 18   dit, :"Laissons de côté les morts, laissons la parole aux commandants, ils

 19   doivent se mettre d'accord sur un cessez-le-feu".

 20   M. Nobilo (interprétation). - Une chose est très importante, le

 21   villages d'Ahmici et les victimes d'Ahmici. Est-ce que la lettre du

 22   colonel Stewart du 22 avril représente la première information pour vous

 23   sur les victimes d'Ahmici ?

 24   M. Blaskic (interprétation). - Oui. Si vous me permettez de

 25   répondre. Lorsque j'ai reçu la lettre, lorsque je l'ai lue, j'ai convoqué


Page 18067

  1   deux de mes collaborateurs qui étaient là, les chefs de l'unité

  2   opérationnelle responsables de toutes les informations, de tous les ordres

  3   de combats et d'autres combats, ainsi que le chef-adjoint du bureau des

  4   informations. Je leur ai

  5   demandé de me dire si nous avions des informations quelconques sur les

  6   victimes d'Ahmici. Leur réponse était négative. Il m'ont dit n'avoir reçu

  7   aucun renseignement sur les victimes d'Ahmici. C'est la première fois que

  8   j'ai entendu parler de ce village et de ce qui s'est passé dans ce

  9   village.

 10   M. Nobilo (interprétation). – Je vous prie de bien vouloir

 11   donner au témoin…

 12   M. Shahabuddeen (interprétation). – Permettez-moi une question.

 13   Après avoir reçu cette lettre, donc le 22 avril, vous avez demandé à vos

 14   officiers de vous fournir des informations sur ce qui aurait pu se passer

 15   à Ahmici ? Ai-je raison ?

 16   M. Blaskic (interprétation). - Ma première réaction était de

 17   voir si nous disposions des informations qui iraient dans le sens de ce

 18   qui était dit dans cette lettre.

 19   M. Shahabuddeen (interprétation). - Ce que je voudrais vous

 20   demander est de voir si, lors de votre réunion avec Dzemo à Zenica, vous

 21   avez reçu des renseignements là-dessus.

 22   Est-ce que, entre le 20 et 22 avril, vous avez demandé à vos

 23   officiers s'ils avaient des informations sur ce qui aurait pu se passer à

 24   Ahmici ?

 25   M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Juge, lorsque le


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  1   20 avril je suis rentré très tard dans la soirée, c'était après 11 heures

  2   du soir, je suis donc rentré dans le commandement et j'ai fait part du

  3   contenu de la réunion à mes collaborateurs. Je leur ai fait part notamment

  4   de ce qui a été dit par Dzemo Merdan et ils m'ont tous donné la même

  5   réponse. J'ai donc vérifié déjà le 20 avril après 23 heures ces propos.

  6   M. Nobilo (interprétation). - Je vous prie de montrer au témoin

  7   la pièce à conviction de l'accusation n° 456/57. Il s'agit de la réponse

  8   du témoin à la lettre qui lui avait été adressée par M. Bob Stewart, le

  9   22 avril. Je répète la cote : 456/57

 10   Nous allons lire cette lettre, je prie Me Hayman de lire cette

 11   lettre.

 12   M. Hayman (interprétation). - Il y a un numéro de référence :

 13   "Vitez, le 23 avril 1993. La Forpronu, lieutenant-colonel Rober Stewart,

 14   commandant du Bataillon

 15   britannique.

 16   Point 1  Je suis prêt à envoyer immédiatement une commission

 17   d'enquête dans le village d'Ahmici ainsi que dans d'autres localités

 18   qui..." -ensuite, il y a un "T" dans l'original anglais, je n'arrive pas à

 19   lire la suite-, peut-être il faudrait lire "...où cela est nécessaire de

 20   mener une enquête sur les victimes innocentes de ce conflit."

 21   Nouveau paragraphe : "Je vous prie de nous aider d'arrêter ces

 22   souffrances..." -il y a un mot qui manque- "...et de nous aider à assurer

 23   les conditions adéquates pour le travail de la commission.

 24   Comme a été déclaré par l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO,

 25   tout le monde croit avoir raison. Des combats mineurs ont toujours place


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  1   et ils menacent de devenir une grande catastrophe..." -un mot manque-,

  2   "...et de devenir un désastre pour la population de cette région.

  3   Point 2 Je suggère qu'une nouvelle réunion soit de façon urgente

  4   convoquée entre le chef de l'état-major -un mot manque- et le chef de

  5   l'état-major du HVO, ainsi qu'avec les commandants de la zone

  6   opérationnelle de la Bosnie centrale, du HVO et le commandant du 3ème Corps

  7   d'armée du Bosnie-Herzégovine afin de prévenir des désastres encore pires

  8   qui pourraient échapper au contrôle de tout le monde.

  9   Point 3 Je vous considère être un soldat professionnel et

 10   d'honneur, ce qui me donne le droit de vous prier d'homme à homme

 11   d'intervenir..." -il y a quelques caractères qui manquent dans l'original-

 12   "...d'intervenir dans les conversations à venir avec M. Thebault. Je vous

 13   remercie à l'avance. Respectueusement". Et il paraît que quelqu'un a

 14   signé : "Au nom du colonel Blaskic" et il y a également le sceau de la

 15   zone opérationnelle.

 16   M. Nobilo (interprétation). - Pourriez-vous nous dire,

 17   Général Blaskic, à l'époque où vous étiez encore colonel, nous avons lu

 18   cette lettre signée par vous. Ai-je raison de dire que cette lettre

 19   comporte beaucoup d'émotion ? Est-ce que vous pouvez vous rappeler comment

 20   vous vous sentiez à moment-là ?

 21   Vous dites au colonel Stewart : "Dites-moi, d'homme à homme, je

 22   vous supplie", etc. Quelles étaient vos réflexions, votre état d'âme à

 23   cette époque-là ?

 24   M. Blaskic (interprétation). - Ceci est ma première lettre

 25   adressée au colonel


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  1   Stewart, malheureusement, je n'ai pas la copie de la deuxième lettre

  2   adressée par la suite au colonel Stewart. Bien sûr, j'étais très

  3   bouleversé par la lettre que j'ai reçue de la part du colonel Stewart.

  4   C'était la première fois que j'ai dû faire face à un crime, à des

  5   souffrances et j'ai rédigé, le 23 dans l'après-midi, je crois, une lettre.

  6   J'ai demandé tout de suite la traduction de cette lettre et je comptais

  7   sur une assistance en matière d'application de l'accord et également en

  8   matière de l'enquête qui devait être menée.

  9   M. Nobilo (interprétation). - Vous dites dans la lettre que vous

 10   êtes prêt à envoyer sur place immédiatement une commission d'enquête dans

 11   le village d'Ahmici.

 12   M. Blaskic (interprétation). - Oui.

 13   M. Nobilo (interprétation). - Et vous demandez également que

 14   M. Bob Stewart fasse part de cette commission. Pourquoi avez-vous demandé

 15   une commission internationale ? Pourquoi n'avez-vous pas demandé une

 16   commission interne ?

 17   M. Blaskic (interprétation). - Par la suite, j'ai expliqué ma

 18   position et au colonel Stewart et à M. Thebault.

 19   Je leur ai dit que c'était dans un souci d'objectivité et dans

 20   un souci de faciliter la recherche de la vérité afin d'assurer une

 21   expertise totale de cette enquête. Je voulais que d'autres institutions

 22   fassent partie de cette commission, notamment les représentants de l'armée

 23   de Bosnie-Herzégovine et d'autres institutions comme, par exemple, la

 24   mission d'observation européenne et les représentants du CICR.

 25   M. Nobilo (interprétation). - Pourquoi, dans le point n °2, vous


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  1   avez proposé une nouvelle réunion et pourquoi avez-vous demandé que

  2   M. Sefer Alilovic, le chef d'état-major de l'armée de Bosnie-Herzégovine

  3   et M. Petkovic du HVO fassent partie avec vous de cette commission, ainsi

  4   que le commandant du 3ème Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine ?

  5   M. Blaskic (interprétation). - Il s'agissait d'un crime qui

  6   méritait sans aucun doute une réunion au plus haut niveau militaire afin

  7   d'organiser et mener une enquête.

  8   En tout cas, ceci ne pouvait que garantir une enquête complète

  9   et ceci ne pouvait donner que plus de force à cette enquête.

 10   M. Nobilo (interprétation). - Si votre avis était pris en

 11   compte, si Bob Stewart était pris en considération, Hadzihasanovic,

 12   Petkovic, vous-même, si toutes ces personnes étaient incluses dans le

 13   travail de cette commission, pensez-vous que vous auriez découvert les

 14   coupables et que vous auriez eu des résultats beaucoup plus tôt ?

 15   M. Blaskic (interprétation). - Je suis sûr que nous aurions

 16   découvert la vérité, les coupables et ceux qui avaient donné l'ordre

 17   d'exécuter les civils beaucoup plus tôt.

 18   M. Nobilo (interprétation). - Avez-vous eu le sentiment, à ce

 19   moment-là, que vous ne pourriez pas être efficace ? Avez-vous eu des

 20   soucis relatifs à l'efficacité connaissant tous les problèmes que vous

 21   aviez dans l'organisation ?

 22   M. Blaskic (interprétation). - Oui, je pressentais ce genre de

 23   problème quant à l'efficacité. Je dois dire que j'étais surpris. Tous ceux

 24   qui étaient à la réunion du 21 avril 1993, s'ils étaient au courant de ce

 25   qui s'était passé à Ahmici, je ne vois pas pourquoi les deux des plus


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  1   hauts représentants de l'armée ne s'étaient pas rendus à Ahmici au lieu de

  2   passer à côté d'Ahmici et d'aller à Kula et à Busovaca. Aujourd'hui, je

  3   suis d'avis qu'il aurait été plus utile pour eux de se rendre à Ahmici et

  4   non sur une des lignes de front.

  5   M. Shahabuddeen (interprétation). - Monsieur le Général, si je

  6   ne me trompe pas, à un moment donné vous vous êtes rendu personnellement à

  7   Ahmici, n'est-ce pas ?

  8   M. Blaskic (interprétation). - Jusqu'à ce moment-là, je ne me

  9   suis pas rendu à Ahmici.

 10   Messieurs les Juges, je vais vous l'expliquer plus tard, mais il

 11   était impossible de rentrer dans le village d'Ahmici, car Ahmici

 12   représentait la ligne de front. Dans un des points de l'accord conclu le

 13   21 avril, nous avons négocié et signé la séparation de nos forces afin que

 14   cet espace soit un no man's land sans les unités de combat.

 15   M. Shahabuddeen (interprétation). - Quand était-ce pour la

 16   première fois que vous vous êtes rendu dans le village d'Ahmici ?

 17   M. Blaskic (interprétation). - Je crois que c'était le 26 ou le

 18   27 avril, un ou deux jours après ce qui s'était passé.

 19   M. Shahabuddeen (interprétation). - A quelle distance est le

 20   village d'Ahmici de l'hôtel Vitez ?

 21   M. Blaskic (interprétation). - Trois kilomètres, mais, à cette

 22   époque-là, c'était comme si c'était une distance de 303 kilomètres, car à

 23   cette époque-là, on ne pouvait pas accéder à Ahmici d'une autre manière

 24   qu'en s'y rendant à pied. Les distances, vous voyez, ne sont pas les mêmes

 25   en période de paix qu'en période de guerre.


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  1   Effectivement, la route n'a que trois kilomètres, mais il était

  2   presque impossible de s'y rendre.

  3   M. Shahabuddeen (interprétation). - En tant que soldat

  4   professionnel, étiez-vous en mesure de voir quels types d'explosifs

  5   auraient été utilisés à Ahmici ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - Plus tard, oui. Plus tard,

  7   lorsque j'ai vu... C'était peut-être un peu avant le 27 avril, ou le

  8   27 avril, j'ai rencontré et j'ai vu de mes propres yeux, pour la première

  9   fois, de très grandes souffrances et destructions.

 10   M. Shahabuddeen (interprétation). - Le genre d'explosifs

 11   utilisés à Ahmici auraient pu l'entendre à Vitez ?

 12   M. Blaskic (interprétation). - Si ce genre d'explosifs étaient

 13   utilisés uniquement à Ahmici, je crois que l'on aurait pu l'entendre à

 14   Vitez. Mais quand les explosifs sont utilisés

 15   partout, il est difficile de dire de quelle direction provient le bruit

 16   que l'on entend, le vacarme.

 17   M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que le village d'Ahmici

 18   était sous les tirs de l'armée de Bosnie-Herzégovine à partir

 19   du 16, 17, 18 jusqu'au 22 avril ?

 20   M. Blaskic (interprétation). - Les positions de l'armée de

 21   Bosnie-Herzégovine étaient à 50 mètres de la route principale de Vitez,

 22   Busovaca, dans le village Dzidica Kuce. C'était jusqu'à l'accord de

 23   Washington.

 24   Avec M. Nakic et M. Merdan, il y avait Zoran Mravak qui était

 25   dans cette commission. A 50 mètres de la dernière maison, il y a eu


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  1   également des positions de tirs.

  2   Les collines au-dessus du village étaient contrôlées par l'armée

  3   de Bosnie-Herzégovine. Le village était plus en bas.

  4   M. le Président. - Je voudrais une précision, puisque nous

  5   sommes au cœur des questions les plus fondamentales de cette instance,

  6   Ahmici est donc la ligne de front, pour vous, Général Blaskic ? Ahmici est

  7   une ligne de front, c'est un point stratégique important ?

  8   M. Blaskic (interprétation). - Si nous parlons du village

  9   d'Ahmici, c'était un village vide, désert. Mais juste à côté du village,

 10   il y avait la ligne de front. Le village se trouve dans un creux, et juste

 11   au-dessus du village il y a la ligne de front. Le village est dans une

 12   vallée.

 13   M. le Président. - "Désert", mais il y avait quelques personnes

 14   puisque des personnes ont été tuées à Ahmici. Pas totalement désert, je

 15   suppose ?

 16   M. Blaskic (interprétation). - Monsieur  le Président, je ne

 17   sais pas de quelle date nous parlons ici ?

 18   M. le Président. - Ma question est autre. Lorsque le 22 avril

 19   vous vous réunissez pour parler de la lettre du colonel Stewart, vous vous

 20   réunissez avec Slavko Marin, qui est votre chef d'état-major opérationnel.

 21   Il est donc celui qui commande en votre nom toutes les opérations. Il ne

 22   sait rien sur Ahmici ?

 23   M. Blaskic (interprétation). - Il ne sait rien du crime commis à

 24   Ahmici, il ne sait

 25   rien des maisons brûlées, il n'est pas au courant de huit corps de civils.


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  1   M. le Président. – Vous, en tant que chef d'état-major, est-ce

  2   que des unités du HVO étaient engagées sur ce point précis de la ligne de

  3   front ?

  4   M. Blaskic (interprétation). - Sur une partie de la ligne de

  5   front, j'ai eu des unités et je savais quelles unités étaient situées sur

  6   cette ligne de front.

  7   M. le Président. - Donc Slavko Marin et vous saviez,

  8   premièrement, que vous aviez des unités sur cette ligne de front et que

  9   ces unités étaient à Ahmici dont vous dites que c'était un village

 10   important ?

 11   M. Blaskic (interprétation). - Je savais où étaient les unités,

 12   et les unités se trouvaient également dans la région d'Ahmici.

 13   M. le Président. - Quand le colonel Stewart vous écrit, vous

 14   êtes étonné, mais vous pouvez estimer qu'effectivement certaines de vos

 15   unités ont pu commettre ces exactions ?

 16   M. Blaskic (interprétation). - J'en étais conscient, je savais

 17   que certains individus de cette unité auraient pu commettre ces exactions.

 18   Mais je savais en même temps que je n'avais pas reçu de rapport du

 19   commandant de cette unité, ni verbalement, ni par écrit.

 20   M. le Président. - Est-ce que vous avez imaginé que Slavko Marin

 21   pouvait avoir dissimulé ?

 22   M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Président, je doutais

 23   rarement de mes collaborateurs principaux. Mais c'est justement pour cette

 24   raison que j'ai demandé de me présenter toutes les informations que nous

 25   avions reçues entre le 15 et le 22 avril. J'ai demandé que l'on me fasse


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  1   un dossier complet afin qu'il puisse être donné à M. Nakic -qui était le

  2   représentant dans la commission conjointe- ainsi qu'à tous les membres de

  3   la commission conjointe.

  4   M. Rodrigues. - Nous savons déjà que vous ne saviez pas avant

  5   que ce crime avait été commis à Ahmici. Mais vous saviez qu'il y avait des

  6   soldats du HVO dans ce front. Est-ce

  7   que vous avez su au moins qu'il y a eu des combats ?

  8   M. Blaskic (interprétation). - Oui, oui, je savais qu'il y avait

  9   eu des combats entre l'armée de Bosnie-Herzégovine, des unités de l'armée

 10   de Bosnie-Herzégovine et le HVO sur

 11   cette partie de la ligne de front. J'étais au courant de ces combats.

 12   M. Rodrigues. - Quand vous avez reçu cette lettre de Stewart,

 13   quelle a été votre pensée ? Vous saviez qu'il y avait eu des combats. Est-

 14   ce que vous avez eu quelque idée à propos de qui a commis ces crimes ?

 15   Quelle a été votre première réaction de ce point de vue ?

 16   M. Blaskic (interprétation). - Ma première réaction, j'étais

 17   terrifié par ce qui s'était passé. Ce n'était pas seulement ma première

 18   réaction, en fait je suis resté dans cet état dans une période un peu plus

 19   longue. Mes collaborateurs ont pu le remarquer. Ni dans le passé et

 20   heureusement ni plus tard, je n'ai jamais dû faire face à ce genre de

 21   crime. Je savais quelle unité était sur cette ligne de front, oui, j'étais

 22   au courant de cela. Mais, il ne s'agit pas d'un territoire très petit.

 23   Est-ce que ce crime aurait été commis par les membres de cette

 24   unité ou par quelqu'un d'autre ? Je ne pouvais pas le dire, mais je savais

 25   quelles unités étaient sur cette partie de la ligne de front. Oui, j'étais


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  1   au courant de cela.

  2   M. Shahabuddeen (interprétation). - Encore une petite question,

  3   Monsieur le Général. Le 20 avril 1993, Dzemo et vous avez eu une

  4   conversation à Zenica et pendant cette conversation, Dzemo, si je ne me

  5   trompe pas, a dit d'une manière assez en colère que plusieurs centaines de

  6   civils ont été tués à Ahmici. Vous avez dit qu'il a peut-être mentionné le

  7   chiffre de 500 personnes ?

  8   M. Blaskic (interprétation). - Je ne me souviens pas que Dzemo

  9   ait mentionné le nom du village, un village précis. Comme je l'ai déjà

 10   dit, Dzemo est quelqu'un de très calme, il s'est levé, il a pris la

 11   parole. C'était probablement la première fois que je le voyais dans un

 12   état pareil et il a dit en colère : "Vous avez tué des centaines de

 13   personnes là-bas, il y a des civils parmi ces personnes qui se trouvent

 14   dans le fossé, dans le côté de la route. Il y a environ 500 personnes qui

 15   auraient été tuées". Ensuite, il s'est rassis.

 16   M. Shahabuddeen (interprétation). - Avez-vous compris où se

 17   trouvait exactement le fossé dont il parlait ?

 18   M. Blaskic (interprétation). - J'avais une idée de l'endroit où

 19   se trouvait ce fossé. Je pensais que cela se trouvait sur le territoire

 20   d'Ahmici et je crois que quand il a dit : "Oui, c'était en bas sur la

 21   route", cela m'a donné l'idée sur l'endroit. Ce chiffre de 500 personnes,

 22   Monsieur le Juge, me semblait exagéré à ce moment-là. J'étais donc

 23   surpris. Vous savez, je ne suis pas resté à la réunion jusqu'à 8 heures et

 24   quart, mais beaucoup plus tard, jusqu'à 20 heures ou 19 heures 30.

 25   Par la suite, nous n'avons plus discuté de cette question. Aucun


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  1   des participants n'a discuté de cela.

  2   M. Shahabuddeen (interprétation). - Vous connaissiez Dzemo

  3   depuis longtemps, n'est-ce pas ?

  4   M. Blaskic (interprétation). - Oui.

  5   M. Shahabuddeen (interprétation). - Les allégations dont il

  6   parlait, est-ce que vous pensiez qu'il s'agissait des allégations

  7   sérieuses, qu'il avait raison ?

  8   M. Blaskic (interprétation). - Oui, et j'ai même proposé qu'une

  9   commission conjointe mène une enquête à propos de ces accusations très

 10   sérieuses. Je l'ai dit à mon collaborateur qui était assis juste à côté de

 11   moi. Je l'ai dit également à tous ceux qui étaient présents à cette

 12   réunion.

 13   M. Shahabuddeen (interprétation). - Avez-vous pensé que ces

 14   allégations étaient fondées ?

 15   (L'interprète se corrige)

 16   Avez-vous pensé que ces enquêtes devaient être organisées par

 17   vous-même et tout

 18   de suite ?

 19   M. Blaskic (interprétation). – Quand Dzemo en parlait, je

 20   pensais que quelque chose était arrivé et j'essayais qu'il y ait un

 21   cessez-le-feu. A mon avis, cela méritait une enquête

 22   unilatérale. Dans ma lettre, j'ai indiqué que les résultats d'une enquête

 23   unilatérale ne serait sans doute pas acceptable pour toutes les parties,

 24   comme pourraient l'être les résultats de la commission conjointe. Nous

 25   avons eu une commission conjointe à propos du conflit du mois de janvier.


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  1   Je pensais donc que les résultats d'une enquête conjointe allaient être

  2   acceptables.

  3   M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Président, si vous

  4   estimez que nous pouvons nous arrêter ici, je crois que nous pourrions

  5   faire une pause.

  6   M. le Président. – L'audience est suspendue.

  7   (L'audience, suspendue à 11 heures 15, est reprise à

  8   11 heures 40.)

  9   M. le Président. - L'audience est reprise, veuillez vous

 10   asseoir.

 11   Nous reprenons, Maître Nobilo. -

 12   M. Nobilo (interprétation). - Merci. Nous avons déjà parlé de

 13   cette réunion à Zenica, de votre retour le 20 avril 1993, à 23 heures.

 14   Est-ce que vous avez eu la possibilité et les conditions pour ouvrir

 15   l'enquête le 21, l'enquête sur Ahmici ?

 16   M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Président, je n'avais

 17   pas cette possibilité car les combats n'ont pas cessé, le cessez-le-feu

 18   n'a pas été mis à exécution et c'était une des premières questions dont on

 19   a parlé le 21 avril 1993 à Nova Bila.

 20   M. Nobilo (interprétation). - Vous avez dit qu'au moment où

 21   Merdan vous avait dit qu'à côté de la route, des personne avaient été

 22   tuées, qu'il y en avait 500, que c'est le HVO qui les a tuées, que vous

 23   l'avez compris sérieusement. Pouvez-vous expliquer aux Juges quelles

 24   étaient les autres informations que vous avez reçues, et quelles étaient

 25   vos propres réflexions le


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  1   21 avril concernant l'enquête au sujet de ce que Merdan vous a dit ?

  2   M. Blaskic (interprétation). - J'ai compris très sérieusement 

  3   l'affirmation de Merdan. Mais plus tard, au cours de la réunion à laquelle

  4   j'avais assisté, j'étais surpris de voir

  5   que personne n'avait soulevé cette question, personne n'a discuté de ce

  6   que j'ai proposé ni de ce que Merdan a affirmé. Il était le commandant du

  7   3ème Corps, Hadzihasanovic ainsi que d'autres participants et j'étais

  8   surpris de voir que personne d'autre n'a soulevé cette question.

  9   M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que cette affirmation de la

 10   part de Merdan était le sujet dont vous avez parlé ? C'était un sujet dont

 11   on a parlé officiellement ou bien il a parlé à propos ?

 12   M. Blaskic (interprétation). - Non, ce n'était pas un thème

 13   officiel de cette réunion, le sujet principal dont on a parlé a été

 14   annoncé par le général Morillon. C'était la mise en application de

 15   l'accord sur le cessez-le-feu qui a été signé, donc le cessez-le-feu.

 16   C'était le thème principal.

 17   M. Nobilo (interprétation). - Qu'est-ce que vous pensez d'après

 18   l'expérience que vous avez, quand il s'agit des pourparlers entre l'armée

 19   de Bosnie-Herzégovine et les représentants du HVO et en présence du

 20   général Morillon, est-ce que vous pensez qu'on pourrait ne pas mentionner

 21   une telle affirmation et ne pas poser au cours de la réunion un tel

 22   sujet ? Si l'affirmation était véridique, est-ce que vous pensez que dans

 23   ce cas-là, on aurait plutôt parlé de ce thème que d'autres ? Comment la

 24   réunion se serait-elle orientée d'après vous ?

 25   M. Blaskic (interprétation). - Pour moi, c'était inconcevable et


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  1   incompréhensible que dans le 3ème Corps, ils disposaient d'une information

  2   aussi sérieuse et que la réunion n'avait pas mis à l'ordre du jour ce

  3   sujet comme sujet principal pour les débats, parce que les résultats dans

  4   ce cas-là auraient été différents si c'était le sujet principal de la

  5   réunion.

  6   M. Nobilo (interprétation). - Quelles étaient les informations

  7   dont vous avez

  8   disposé et qui vous sont parvenues de votre état-major au sujet des

  9   événements qui on eu lieu à Ahmici ? Etaient-ce des informations qui

 10   confirmaient ce que vous avez entendu ou au contraire ?

 11   M. Blaskic (interprétation). – J'avais des informations et il y

 12   avait des confirmations des opérations de combats, cela m'a été confirmé,

 13   mais pour ce qui concerne les renseignements par Merdan et mes propres

 14   informations, cela ne coïncidait pas, notamment au sujet du nombre de

 15   personnes tuées, car il avait parlé de 500 personnes tuées ou des

 16   centaines qui ont été tuées, c'était quand même un doute qui existait là-

 17   dessus.

 18   M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous pouvez dire aux

 19   Juges au sujet de la lettre que vous avez adressé à Stewart ?

 20   M. Blaskic (interprétation). – C'est le 23.

 21   M. Nobilo (interprétation). - C'était le 22 que vous avez envoyé

 22   cette lettre. Qu'est-ce que vous aviez comme autre problème ? Pourquoi

 23   n'avez-vous pu commander à l'organe de police, d'enquêter le crime commis

 24   à Ahmici ? Quelles étaient les difficultés que vous avez rencontrées ?

 25   M. Blaskic (interprétation). - Il y avait d'abord le manque de


Page 18082

  1   coordination entre moi-même et la police militaire ensuite, les opérations

  2   de combats n'ont pas cessé. Il n'était pas possible de se rendre dans un

  3   secteur où les combats étaient en cours et je ne pouvais pas demander

  4   l'enquête de la police militaire dans ce secteur si elle-même se trouvait

  5   dans ce secteur, parce que, dans ce cas-là, les résultats de l'enquête

  6   n'auraient pas été fiables et crédibles.

  7   M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous voulez dire que

  8   c'est sur la police militaire que tomberait le doute ?

  9   Je retire ma question.

 10   M. Kehoe (interprétation). - Merci.

 11   Je voulais faire une objection, Monsieur le Président, compte

 12   tenu du terme que Me Nobilo a utilisé.

 13   M. le Président. - (Inaudible).

 14   M. Kehoe (interprétation). - En général, j'aime ces résultats,

 15   Monsieur le Président. J'apprécie beaucoup. Néanmoins, afin d'empêcher des

 16   questions de ce type, puisque nous entrons dans une zone particulière de

 17   la déposition, je suis opposé à des questions qui commencent par : "Ne

 18   pensez-vous pas que...". Nous perdons le réalisme de l'interrogatoire.

 19   M. Nobilo (interprétation). - J'ai retiré ma question. Je vois

 20   que ce n'est pas bien traduit. Je vais reposer ma question d'une autre

 21   manière. La traduction était erronée.

 22   Qui, d'après vous, qui étaient les membres qui étaient

 23   potentiellement mis en cause quand il s'agit des crimes qui ont été des

 24   atrocités commises à Ahmici ?

 25   D'après vous, sur qui pouvait tomber le doute ?


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  1   M. Blaskic (interprétation). - Je suppose que c'étaient les

  2   membres de la police militaire, car ce sont eux qui se trouvaient dans ce

  3   secteur.

  4   M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous pouvez rappeler

  5   aux Juges quand les membres de la police militaire vous ont envoyé le

  6   premier rapport le 16 avril ?

  7   M. Blaskic (interprétation). - C'était à 11 heures 42.

  8   M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous avez pu conclure

  9   du rapport envoyé qu'il y avait des civils qui avaient été tués ?

 10   M. Blaskic (interprétation). - Non.

 11   M. le Président. - J'aimerais bien le document, Maître Nobilo.

 12   Je crois que vous l'avez montré. Ne perdons pas trop de temps. Simplement,

 13   vous pouvez donner la cote. J'aimerais bien l'avoir.

 14   M. Nobilo (interprétation). - Oui.

 15   M. Hayman (interprétation). - C'est le document D280.

 16   11 heures 42, c'était un coup de téléphone. Mais la réponse

 17   n'est pas consignée au compte rendu, il faut donc revenir sur cette

 18   question pour entendre la réponse qui est : "Non".

 19   M. Nobilo (interprétation). - Je vais donc reprendre la

 20   question. La question était la suivante : sur la base de ce rapport

 21   oral...

 22   M. Kehoe (interprétation). - Si je peux me permettre

 23   d'interrompre un moment.

 24   Monsieur le Président, j'aimerais faire connaître une préoccupation de la

 25   sténotypiste. Elle a regardé dans notre direction et a demandé de ralentir


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  1   le débit. C'est la raison pour laquelle je prends la parole au nom de la

  2   sténotypiste, car je sais que vous soutiendrez sa demande également.

  3   M. Nobilo (interprétation). - Nous acceptons.

  4   M. le Président. - Vous êtes un excellent lawer pour les

  5   sténotypistes. Les Juges sont tout à fait d'accord.

  6   Pendant que le greffier nous trouve la pièce 280, reformulez

  7   votre question et écoutons bien la réponse.

  8   M. Nobilo (interprétation). - Je vais répéter la question que

  9   j'avais posée, étant donné qu'il n'y a pas de réponse dans le transcript.

 10   En ce qui concerne le rapport que vous avez reçu verbalement le

 11   16 avril, à 11 heures 42, y compris le rapport écrit qui représente la

 12   pièce à conviction D280, est-ce que, sur la base de ces rapports portant

 13   sur les opérations militaires, vous avez pu conclure qu'il y avait des

 14   victimes à Ahmici ?

 15   M. Blaskic (interprétation). - Non.

 16   M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous avez eu un

 17   fondement de soupçonner qu'il y avait des victimes parmi les civils ?

 18   M. Blaskic (interprétation). - Avant que je reçoive cette

 19   information de Merdan, et également la lettre du colonel Stewart, non.

 20   M. Shahabuddeen (interprétation). - Par conséquent,

 21   Monsieur Blaskic, vous connaissiez M. Dzemo Merdan pendant un certain

 22   temps. Combien de temps ?

 23   M. Blaskic (interprétation). - C'est en août 1992 que je l'ai

 24   rencontré la première fois. Depuis août 1992, je le connaissais et

 25   jusqu'aux Accords de Washington. Je le connais maintenant également.


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  1   M. Shahabuddeen (interprétation). - Par conséquent, maintenant,

  2   vous étiez chacun de l'autre côté ?

  3   M. Blaskic (interprétation). - Oui, effectivement.

  4   M. Shahabuddeen (interprétation). - Est-ce que j'ai raison de

  5   dire, si je vous comprends bien, que ce n'était pas quelque chose qui

  6   caractérisait M. Dzemo de se lever et de donner une affirmation, une

  7   déclaration avec la colère ?

  8   M. Blaskic (interprétation). - Cette déclaration avait

  9   effectivement provoqué une certaine réaction chez moi. Ce n'était pas

 10   caractéristique. Je voudrais rajouter, Monsieur le Juge, que j'étais un

 11   peu étonné que la réunion ait pris une autre direction et plus personne, y

 12   compris le commandant du 3ème Corps avec lequel j'ai passé un peu de temps,

 13   n'avait soulevé cette question, n'avait plus reparlé de cela.

 14   M. Shahabuddeen (interprétation). - Si je vous demande d'axer

 15   votre attention sur les entretiens à Zenica, le 20 avril, est-ce que vous

 16   avez eu l'impression, le sentiment que Dzemo croyait ou ne croyait pas en

 17   l'affirmation qui a été présentée ?

 18   M. Blaskic (interprétation). - A ma connaissance, si mon

 19   souvenir est bon, il y avait d'abord eu la réunion qui avait commencé en

 20   essayant de définir qui est coupable, pourquoi ? Les représentants de

 21   l'armée de Bosnie-Herzégovine disaient : "Vous, vous êtes coupables pour

 22   cela". Les représentants du HVO disaient : "Vous, vous êtes responsables

 23   pour cela". C'est dans ce cadre-là également que Dzemo s'est levé et qu'il

 24   a déclaré ce qu'il a déclaré.

 25   En ce qui me concerne, je pensais que par la suite d'autres


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  1   allaient prendre la parole

  2   au sujet de ce que Dzemo avait soulevé, mais plus personne n'en a parlé.

  3   M. Shahabuddeen (interprétation). - Je pense que vous avez dit

  4   que vous aviez quelques informations de la part de vos propres

  5   collaborateurs et officiers ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - J'ai demandé... J'ai dit à mes

  7   collaborateurs ce que Dzemo avait déclaré et j'ai reçu une information

  8   totalement contraire. Ils m'ont dit qu'ils n'étaient pas au courant de

  9   telles informations, qu'ils ne disposaient pas de renseignements qui

 10   pourraient confirmer ce que Dzemo avait dit.

 11   M. Shahabuddeen (interprétation). - Est-ce que j'ai raison de

 12   dire qu'à un moment donné vous avez reçu quelques informations, mais que

 13   l'envergure des événements et des massacres à Ahmici n'était pas telle

 14   comme Dzemo vous en a dit ?

 15   M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Juge, d'après mes

 16   souvenirs, Dzemo avait dit : "Vous autres, en bas" -quand on parle de

 17   Zenica et du secteur de Vitez. Donc il n'a pas parlé d'Ahmici et du

 18   village d'Ahmici de manière très concrète. Dzemo n'a pas parlé de manière

 19   très concrète. La premier lettre que j'ai reçue a contenu cette donnée

 20   très concrète du village d'Ahmici.

 21   M. Shahabuddeen (interprétation). - Encore une question, si vous

 22   voulez bien me permettre. Du point de vue de l'obligation que vous aviez

 23   d'entreprendre l'enquête, était-il important d'apprendre que 500 personnes

 24   ou 100 personne avait été tuées ?

 25   M. Blaskic (interprétation). - Bien sûr que j'étais intéressé et


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  1   que c'était fort important d'apprendre, même s'il y avait eu qu'un seul

  2   civil tué. Quand j'ai reçu l'information que huit civils avaient été tués,

  3   pour moi c'était important. Ce n'est pas important que ce soit un ou huit,

  4   de toute façon j'avais l'obligation d'entreprendre l'enquête.

  5   M. Shahabuddeen (interprétation). -  Je vous comprends, merci.

  6   M. Rodrigues. - Général Blaskic, j'aimerais savoir si j'ai bien

  7   compris cette idée. Je crois que le général a toujours été préoccupé d'une

  8   défense conjointe avec la Bosnie-

  9   Herzégovine. Est-ce bien vrai ?

 10   Vous étiez toujours préoccupé à avoir une coordination de

 11   défense devant les Serbes, une coordination entre le HVO et l'armée de

 12   Bosnie-Herzégovine ? Est-ce bien vrai ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Juge, si je vous ai

 14   bien compris, je ne sais pas de quelle période vous parlez. mais nous

 15   avons eu une coordination. Nous avons entrepris un certain nombre

 16   d'actions communes. Je n'ai pas bien compris de quelle période vous

 17   parlez ?

 18   M. Rodrigues. - Au début de votre arrivée en Bosnie, pour

 19   organiser la défense, à Kiseljak, etc., vous étiez toujours préoccupé à

 20   penser un symbole avec l'armée de Bosnie-Herzégovine. C'était votre

 21   première idée, oui ou non ?

 22   M. Blaskic (interprétation). - Oui, j'ai non seulement entrepris

 23   un certain nombre d'actions, mais j'ai également visité ces unités, à

 24   Maglaj, un secteur musulman.

 25   M. Rodrigues. - J'ai compris qu'à un moment, à un instant


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  1   quelconque, vous avez commencé à vous méfier un peu de certaines actions

  2   de l'armée de Bosnie-Herzégovine. C'était dans mon idée, le deuxième pas,

  3   n'est-ce pas ?

  4   M. Blaskic (interprétation). - Oui, c'était la deuxième période.

  5   M. Rodrigues - Ma question est celle-ci : est-ce qu'il est

  6   possible de nous dire quand vous vous êtes convaincu que, vraiment, il y

  7   avait une guerre entre le HVO et l'armée de Bosnie-Herzégovine ? Est-il

  8   possible de dire à quel moment vous êtes convaincu de cela ?

  9   M. Blaskic (interprétation). - Oui, volontiers Monsieur le Juge.

 10   A partir du moment où l'accord n'a pas été mis en application, celui de

 11   Zenica et celui de Nova Bila, je regrette de ne pas vous l'avoir montré

 12   hier, sur la maquette, ce que nous avions envisagé quand il s'agissait de

 13   l'accord de Nova Bila. Moi, j'étais sûr que nous avions mis en application

 14   cet accord et si nous avions mis en application cet accord, à ce moment-

 15   là, on n'aurait même pas eu cette affaire, tout au moins pas ici. Si on

 16   avait mis à exécution cet accord.

 17   Si je peux ajouter, au mois de mars 1993, c'est sur mon ordre

 18   que les munitions et tout ce qui était à notre disposition au niveau des

 19   moyens, nous avons envoyé cela en aide à l'armée de Bosnie-Herzégovine.

 20   Marko Prskalo qui a été blessé, il m'avait dit : "C'est maintenant, ils

 21   nous rendent les munitions, mais en passant par les tirs".

 22   M. Rodrigues - L'autre question est celle-ci : je comprends très

 23   bien que vous proposiez des commissions conjointes pour enquêter dans la

 24   première période. Mais, dans la situation, au moment où vous étiez déjà

 25   convaincu qu'il y avait déjà une guerre, est-ce que cela a un sens de


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  1   proposer une commission conjointe pour enquêter ?

  2   M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Juge, je suis membre

  3   du commandement conjoint, et commandant du 3ème Corps et au niveau des

  4   forces armées de l'armée de Bosnie-Herzégovine, le responsable, le chef de

  5   l'état-major, le mien, et le chef de l'état-major de Bosnie-Herzégovine

  6   ont le siège à Zenica, donc le commandement conjoint, et à Mostar

  7   également. Je parlais des forces armées de Bosnie-Herzégovine.

  8   Tous les incidents du premier mois et du quatrième mois ont été

  9   résolus par la commission conjointe où se trouvaient les représentants de

 10   l'armée de Bosnie-Herzégovine, du HVO et de la missions d'observation

 11   européenne.

 12   Moi-même, je croyais que la commission conjointe allait

 13   poursuivre avec les enquêtes. Ducina, Lasva, Sljivcica ont été visitées à

 14   un moment donné par les membres de la commission conjointe. Il s'agit donc

 15   des secteurs où les opérations ont été menées au mois de janvier.

 16   M. le Président. - Vous recevez la lettre du colonel Stewart le

 17   22 avril, c'est le 22 avril, je crois ?

 18   M. Blaskic (interprétation). - Le 22 avril.

 19   M. le Président. - Quand vous vous réunissez avec Slavko Marin,

 20   si j'ai bien compris ce que vous venez de dire, vous savez que la police

 21   militaire est la formation qui est

 22   sur le secteur.

 23   Deuxièmement, ce secteur est un secteur opérationnel.

 24   Troisièmement, Slavko Marin est le chef des opérations.

 25   Est-ce que vous envoyez un ordre aux commandants des brigades ou


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  1   des unités qui sont sur le secteur pour dire : "J'apprends qu'il y a eu

  2   des incidents sur Ahmici. Je veux dans une heure un rapport". Même si vous

  3   êtes partisan d'une commission conjointe, pour les raisons que vous venez

  4   d'expliquer à chacun de mes collègues, vous n'ignorez pas que la

  5   commission conjointe, à un moment donné, vous demandera un rapport.

  6   Est-ce que vous envoyez un ordre aux commandants des unités qui

  7   sont sur le front, vous et Slavko Marin, pour dire : "Je viens d'apprendre

  8   qu'il y a, vraisemblablement, des atrocités qui ont été commises. Je veux

  9   dans l'heure ou dans les deux heures, un rapport sur ces événements.".

 10   Est-ce que vous le faites, cela ?

 11   M. Blaskic (interprétation). - J'ai émis l'ordre pour l'enquête.

 12   C'est l'ordre que j'ai émis le 24 avril à l'adjoint à la sécurité. Il y

 13   avait un briefing que j'avais organisé. C'est à ce moment-là que j'ai émis

 14   l'ordre, alors que l'ordre en ce qui concerne les victimes parmi les

 15   civils datait du 18 avril 1993.

 16   Par conséquent, j'ai demandé qu'on m'informe sur toutes les

 17   victimes. J'ai demandé également à Slavko Marin qu'il insiste sur les

 18   rapports. Et cela en se référant à cet ordre.

 19   Il s'agit par conséquent de cet ordre du 18 avril, et il y a un

 20   point où j'ai stipulé que tous les subordonnés devaient le faire.

 21   M. le Président. - Vous faites cela le 24 avril ?

 22   M. Blaskic (interprétation). - Oui.

 23   M. le Président. - Pourquoi le 24 avril ?

 24   M. Blaskic (interprétation). - Le 21, j'ai assisté à la réunion.

 25   M. le Président. - Après votre réunion avec Slavko Marin ?


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  1   Depuis plusieurs jours, vous nous démontrez que vous envoyez des ordres

  2   presque minute par minute. Pourquoi attendez-vous le 24 ?

  3   M. Blaskic (interprétation). - Je n'ai pas attendu. Le 23, j'ai

  4   rédigé la lettre, j'ai arrangé la documentation.

  5   Le 23, j'ai vérifié tous les documents depuis le 15 jusqu'au 22,

  6   tous les rapports que j'avais reçus. Quand j'ai vu qu'il n'y avait rien

  7   dans ces rapports, le 24, j'ai délivré l'ordre au chef

  8   de la sécurité pour mettre en route l'enquête.

  9   M. Nobilo (interprétation). - Dites-nous pourquoi vous n'avez

 10   pas fait ce que le Juge vous a demandé ? Vous avez reçu la lettre le 23 et

 11   vous n'avez pas demandé au commandant de la police le rapport. Quelle

 12   était votre raison ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - Je n'ai pas reçu

 14   jusqu'au 23 avril le rapport de lui. Et je suppose que le rapport aurait

 15   été exactement le même le 24, si je l'avais reçu.

 16   M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous avez déjà vérifié

 17   le rapport qu'il vous a envoyé le 16 avril ?

 18   M. Blaskic (interprétation). - J'aurais pu le vérifier et le

 19   comparer avec les informations que j'avais reçues. J'avais des doutes sur

 20   les rapports qu'il m'envoyait. Je le savais.

 21   M. Nobilo (interprétation). - Dans la situation où le commandant

 22   vous ment, vous envoie des rapports qui sont faux, qu'est-ce que vous

 23   faites ?

 24   M. Blaskic (interprétation). - C'est pourquoi j'ai donné

 25   l'instruction à l'adjoint de la sécurité. Je trouvais qu'il pouvait


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  1   surveiller la police militaire d'entreprendre, de procéder à l'enquête.

  2   M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous expliquer aux Juges

  3   quelles sont les prérogatives, la compétence du service de sécurité par

  4   rapport à la police militaire qui vous a déjà envoyé un rapport qui était

  5   un faux rapport ? Quels sont les rapports entre les deux ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - C'est le seul service qui dispose

  7   d'une autorisation, de la compétence au-dessus de la police militaire, par

  8   conséquent garantit la sécurité dans le secteur du HVO. C'est en quelque

  9   sorte le parapluie.

 10   M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que au niveau de la

 11   hiérarchie militaire, qui que ce soit dans la zone opérationnelle pourrait

 12   enquêter dans les rangs de la police militaire ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - Non, outre la police militaire

 14   évidemment dans ses rangs et le service de sécurité qui est

 15   hiérarchiquement au-dessus.

 16   M. Nobilo (interprétation). - Dites-nous, parlons du 20, du

 17   22 avril, il y avait déjà cet accord sur la base de la commission

 18   conjointe que vous avez fondé ?

 19   M. Blaskic (interprétation). - Oui, c'est le 21 avril 1993 que

 20   nous avons mis en place la commission conjointe à Nova Bila.

 21   M. Nobilo (interprétation). - Pour que ce soit clair sur le

 22   transcript, vous êtes parvenu à l'accord de mettre en place la commission

 23   conjointe, n'est-ce pas ?

 24   M. Blaskic (interprétation). - Oui.

 25   M. Nobilo (interprétation). - Au moment où vous demandez la


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  1   création de la commission conjointe ou par une nouvelle réponse : "Je

  2   demande que la commission conjointe qui existait déjà, qui a déjà été

  3   créée, qu'elle procède à l'enquête."

  4   En votre qualité de militaire, au moment où vous avez compris

  5   que le commandant de la police militaire vous avait envoyé un rapport

  6   inexact, trouvez-vous qu'il est justifié de demander au commandant de

  7   donner une déclaration, de procéder à une enquête ?

  8   M. Blaskic (interprétation). - A partir du moment où j'ai

  9   compris que j'avais reçu un faux rapport et que je n'avais pas la

 10   compétence de remplacer ce commandant, au moment où je suis devenu

 11   conscient de toutes mes limites, à ce moment il n'y avait aucun sens de

 12   poursuivre la coopération et de demander des rapports à ce commandant.

 13   M. Nobilo (interprétation). - Qu'est-ce que vous avez fait

 14   alors ?

 15   M. Blaskic (interprétation). - Dans ce cas-là, j'ai chargé le

 16   chef de sécurité de procéder à l'enquête.

 17   M. Nobilo (interprétation). - Nous allons passer à un autre

 18   sujet. Nous allons y revenir chronologiquement par la suite.

 19   Nous allons maintenant parler de la lettre du colonel Stewart et

 20   de votre réponse au colonel Stewart, et nous avons également omis de

 21   parler de votre ordre très important du 20 avril 1993. C'est la pièce à

 22   conviction de la défense D359. Je vais demander l'aide de l'huissier pour

 23   vous la donner.

 24   Ce document est votre ordre du 22 avril 1993, à 13 heures. Le

 25   titre en est : "Rapport par rapport au bien de la population". J'en donne


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  1   lecture :

  2   "Dans le but de mettre un terme à l'incendie des habitations et

  3   autres lieux commerciaux, et de mettre un terme au pillage des biens de la

  4   propriété individuelle, j'ordonne :

  5   1. Sur le territoire correspondant à la zone de responsabilité

  6   du commandement de la zone opérationnelle de Bosnie centrale sous le

  7   contrôle du HVO -et là nous voyons des majuscules imprimées, et nous

  8   lisons-, je prohibe de la façon la plus stricte tout incendie de maisons

  9   ou autres locaux commerciaux ainsi que le pillage des biens individuels.

 10   2. Les commandants des brigades et des unités indépendantes ont

 11   pour devoir d'ordonner ceci à leurs subordonnés et de les responsabiliser

 12   eu égard à l'arrêt de tels abus.

 13   3. Ceux qui agiront en violation du présent ordre doivent être

 14   soumis aux mesures les plus sévères, conformément aux disciplines

 15   militaires applicables aux unités du HVO.

 16   4. Tous les membres des unités du HVO doivent être informés du

 17   présent ordre et les moyens d'informations publiques doivent être utilisés

 18   à cette fin également.

 19   5. Le présent ordre prend effet immédiatement et les commandants

 20   des brigades des unités indépendantes de la zone de Bosnie centrale sont

 21   responsables de son exécutionColonel Blaskic et signature".

 22   Général, dites-nous, dans une armée organisée, est-il

 23   nécessaire, est-il même concevable, qu'un ordre doit être émis pour

 24   prohiber l'incendie d'habitations et de maisons appartenant à des

 25   particuliers ?


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  1   M. Blaskic (interprétation). - Non. Il est sous-entendu que cela

  2   est interdit, prohibé.

  3   M. Nobilo (interprétation). - Alors expliquez-nous qu'est-ce qui

  4   vous a poussé à émettre un ordre de ce type pour ordonner quelque chose

  5   qui, en tout état de cause, est interdit par la loi ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - Ceci était, bien entendu, une

  7   tentative de rétablir l'ordre, d'assurer la sécurité. C'était mon

  8   objectif, mais mon objectif était également de faire savoir à mes

  9   subordonnés que des actes de ce genre devaient cesser et que tout devait

 10   être fait pour les faire cesser.

 11   M. Nobilo (interprétation). - Le 22 avril, ou aux environs de

 12   cette date, quels étaient les bâtiments le plus souvent incendiés ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - C'était le bâtiment des Musulmans

 14   bosniens qui était le plus souvent incendié.

 15   M. Nobilo (interprétation). – Merci. Monsieur le Président, je

 16   voudrais que nous débattions maintenant d'un document qui est sous scellé.

 17   Donc je vous demande un huis clos partiel pour quelques instants.

 18   M. le Président. - Je le dis à l'attention du public, nous

 19   allons être en huis clos partiel pour permettre de débattre d'un document

 20   qui est toujours sous scellé.

 21  

 22   (Audience à huis clos partiel)

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 13   (Audience publique)

 14   M. le Président. - Nous reprenons, Maître Nobilo pour une

 15   dizaine de minutes, environ.

 16   M. Nobilo (interprétation). - Je pense que nous pourrions

 17   maintenant passer à la journée du 24 avril 1993.

 18   Pourriez-vous décrire le déroulement de la matinée jusqu'à votre

 19   rencontre avec M. Stewart ?

 20   M. Blaskic (interprétation). - Ce matin-là, le matin du

 21   24 avril, j'ai reçu une information selon laquelle la route Busovaca-Vitez

 22   était sous le feu de tireurs isolés, de l'armée de Bosnie-Herzégovine à

 23   partir de Sljivcica et de Barin Gaj, en amont d'Ahmici, en tout cas au

 24   nord de la route ainsi qu'à partir de Grbavica. Aux alentours de

 25   13 heures, le colonel Stewart est entré dans mon bureau et j'ai eu avec


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  1   lui une réunion qui a duré jusqu'à 14 heures à peu près.

  2   M. Nobilo (interprétation). - Cette réunion étant très

  3   importante, du point de vue de la défense, nous n'allons pas entrer dans

  4   les détails maintenant, mais je demanderai les documents D360, votre ordre

  5   du 23 avril 1993 à 20 heures et cet après-midi, nous parlerons plus en

  6   détail de votre rencontre avec le colonel Stewart.

  7   Donc c'est un ordre émanant de vous pour toutes les unités

  8   subordonnées, daté du 23 avril 1993, pièce à conviction de la défense 360

  9   et le titre en est : "Comportement des

 10   membres du HVO et niveau de discipline militaire". Je lis le contenu de

 11   cet ordre :

 12   "En raison d'une condamnation très ferme de la part de la

 13   communauté internationale, en raison également de la campagne médiatique

 14   menée contre le HVO et le peuple croate, qui ont des conséquences

 15   extrêmement négatives sur la réputation générale du HVO et les

 16   réalisations du peuple croate de façon générale et afin d'empêcher de

 17   nouvelles actions destructives en garantissant l'application pleine et

 18   entière des ordres du chef du quartier général principal du HVO, j'ordonne

 19   ce qui suit :

 20   1. Mettre en exécution l'ordre n °01-4-470/93 du 21 avril 1993,

 21   dans tous ses détails. Sont responsables les commandants directement

 22   subordonnés et le délai inscrit et immédiatement.

 23   2.°Garantir la liberté complète de circulation aux véhicules des

 24   Nations Unies et de l'ECMM et leur adresser le salut militaire du HVO

 25   approprié. Sont responsables les commandants directement subordonnés.


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  1   Délai : immédiatement.

  2   3. Je vous incite instamment une nouvelle fois à vous comporter

  3   de la façon appropriée pour un militaire, dans le respect de la discipline

  4   militaire ; des mesures légales seront prises contre toute personne

  5   violant cet ordre.

  6   4. J'interdis à toutes les unité du HVO de mener des actions

  7   offensives ou d'accomplir des actes de provocation. (L'interprète se

  8   reprend : )Et les provocations isolées de l'armée de Bosnie-Herzégovine ne

  9   doivent donner lieu à aucune réponse.

 10   5. Ouvrir le feu dans le cas d'une attaque directe des forces

 11   musulmanes, mais seulement après en avoir reçu l'ordre de la part d'un

 12   commandant hiérarchiquement supérieur et les commandants de brigade

 13   doivent m'en informer immédiatement.

 14   6. Cet ordre prend effet immédiatement et les commandants de

 15   toutes les unités de la zone opérationnelle de Bosnie centrale sont

 16   responsables devant moi de son exécution.

 17   Signé, Commandant colonel Tihomir Blaskic.

 18   Si nous analysons le contenu de cet ordre, et notamment le

 19   préambule où vous faites référence, d'une part, à la communauté

 20   internationale et à la réputation du HVO et, d'autre part, à l'ordre de

 21   l'état-major principal, pour quelle raison faites-vous allusion à ces deux

 22   éléments dans le préambule de votre ordre ?

 23   Dans quel but avez-vous fait référence à la communauté

 24   internationale et à l'état-major principal ?

 25   M. Blaskic (interprétation). - Afin de donner plus de poids à


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  1   mon ordre, d'en garantir davantage l'exécution et d'exercer pleinement mes

  2   droits de commandement.

  3   M. Nobilo (interprétation). - Pourquoi est-ce que vous pensiez

  4   que votre ordre aurait un poids plus important de cette façon ?

  5   M. Blaskic (interprétation). - Je le pensais parce que je donne

  6   un ordre ici qui fait suite à un ordre, comme on le constate à la lecture

  7   du texte. Je pensais que les commandants recevant cet ordre seraient

  8   incités à le mettre en application et que donc tous les détails de cet

  9   ordre seraient appliqués.

 10   M. Nobilo (interprétation). - Sur le plan militaire, est-il

 11   courant de dire ce que vous dites au point 1 de cet ordre ? Je le cite une

 12   nouvelle fois : "Exécuter tous les détails de l'ordre émanant de moi".

 13   Est-ce que c'est courant dans une armée ?

 14   M. Blaskic (interprétation). - En général, je demandais que mes

 15   ordres soient appliqués. Ici, je demandais qu'ils soient appliqués dans

 16   tous ses détails. Il est normal qu'un ordre soit appliqué dans tous ses

 17   détails et que, suite à l'exécution de l'ordre, des renseignements soient

 18   transmis en retour pour faire rapport sur l'exécution. Cela existe dans

 19   toutes les armées.

 20   J'ai déjà dit que j'en étais toujours à la date du 17 avril, à

 21   l'organisation de l'armée dans les villages.

 22   La filière de commandement ne fonctionnait pas et je n'avais pas

 23   pour devoir...

 24   C'est donc l'une des tentatives que j'ai faites pour créer cette filière

 25   de commandement.


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  1   M. le Président. - Nous allons faire la pause du déjeuner. Nous

  2   reprendrons aujourd'hui à 14 heures 45.

  3   (L'audience, suspendue à 12 heures 45, est reprise à

  4   14 heures 50.)

  5   M. le Président. - L'audience est reprise, veuillez vous

  6   asseoir.

  7   Maître Nobilo, c'est à vous.

  8   M. Nobilo (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur le

  9   Président. Donc, avant la pause pour le déjeuner, nous nous sommes arrêtés

 10   à la pièce de la défense n° D360. C'est l'ordre qui a été donné par le

 11   témoin le 23 avril 1993. Il a donné cet ordre dans sa capacité de

 12   commandant. Nous nous sommes arrêtés au point n° 2. Vous avez dit que vous

 13   aviez dû ordonner la mise en oeuvre, l'application de votre ordre.

 14   Quel était le problème, selon vous, avec les représentants de

 15   l'ECMM et pourquoi étiez-vous obligé de rédiger ce paragraphe n° 2 afin,

 16   je cite, "d'assurer le passage libre des véhicules d'ECMM en assurant que

 17   les soldats du HVO les saluent d'une manière militaire appropriée" ?

 18   Quelle était la raison derrière ce point n° 2 ?

 19   M. Blaskic (interprétation). - Je voulais souligner ma position

 20   auprès de mes subordonnés. Je voulais souligner leurs responsabilités afin

 21   qu'ils assurent les meilleures conditions pour les représentants officiels

 22   de l'ECMM. On devait garantir, en fait, la mise en oeuvre de leur mandat.

 23   Nous étions obligés de fournir l'assistance à toutes les parties en

 24   Bosnie-Herzégovine.

 25   Il y a eu des cas où on arrêtait les véhicules, on faisait la


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  1   perquisition des véhicules, et très souvent j'étais obligé de me répéter

  2   dans ce genre d'ordre. Je faisais tout ce qui était dans mon pouvoir pour

  3   garantir les meilleures conditions possibles pour le travail du HCR, de

  4   l'ONU, de l'ECMM et d'autres organisations internationales humanitaires.

  5   M. Nobilo (interprétation). - Revenons un peu sur le point n° 3

  6   où vous dites, je cite : "Je vous avertis encore une fois que vous devez

  7   vous comporter d'une manière militaire professionnelle et ceux qui

  8   violeraient les normes devraient être punis."

  9   Je vous prie de me dire si ce genre d'ordre est indispensable ou

 10   non, parce que normalement un militaire doit respecter les ordres et les

 11   règlements ? Est-ce nécessaire de souligner cela à plusieurs reprises dans

 12   un ordre ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - Le problème résidait dans le fait

 14   que ceux qui étaient en âge de porter les armes étaient en fait des

 15   paysans. La seule ressemblance qu'ils avaient avec des soldats, des

 16   militaires, était qu'ils portaient des uniformes et des armes. En

 17   revanche, dans leur comportement, il était impossible d'envisager quel

 18   genre de réaction ils auraient, notamment lors des combats.

 19   Il s'agissait en fait de gens qui portaient des armes et qui

 20   n'avaient pas le degré d'obéissance qu'ont les militaires et qu'on

 21   s'attend à avoir auprès des militaires.

 22   M. Nobilo (interprétation). - Le jour du 24 avril, tôt dans la

 23   matinée, vous avez émis trois ordres. Il s'agit donc de la pièce D361. Il

 24   s'agit de l'ordre qui a été donné à 9 heures 20 du matin.

 25   Il s'agit donc du document D361. Il a été donné le 24 avril 1993


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  1   à 9 heures 20. Il s'agit de votre ordre.

  2   Il paraît qu'il n'y a pas de traduction.

  3   Donc, vous avez signé cet ordre le 24 avril 1993, à 9 heures 20.

  4   Vous l'avez adressé à toutes les unités. Et le titre de cet ordre est :

  5   "Prévention des actes arbitraires qui pourraient être commis par les

  6   commandants et les individus.

  7   Après une évaluation de la situation sur le terrain, il est

  8   évident que les commandants d'un rang inférieur, ainsi que leurs unités,

  9   agissent de leur propre gré. Ils ne

 10   mettent pas en oeuvre les ordres de leurs supérieurs. Ils font eux-mêmes

 11   les décisions qui sont contraires aux ordres reçus. Il font des projets,

 12   des plans et ils appliquent leur propre programme d'action militaire.

 13   Ils font une pression sur la population civile. Ils empêchent le

 14   travail de la Forpronu, du CICR et ECMM, ce qui a des conséquences

 15   négatives sur le HVO et sur les soldats qui exécutent les tâches qui leur

 16   sont imparties d'une manière consistante".

 17   Après avoir fait l'état des lieux sur le terrain, de quelle

 18   manière avez-vous procédé

 19   pour recueillir les informations ?

 20   Cet ordre correspond-il à la situation sur le terrain dans la

 21   vallée de la Lasva où se trouvait le HVO ?

 22   M. Blaskic (interprétation). - Ce sont les rapports que nous

 23   recevions de nos subordonnés hiérarchiques qui travaillaient sur le

 24   terrain. Il s'agit également des plaintes que nous avons reçues des

 25   observateurs internationaux et du CICR.


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  1   Comme vous le savez, lors des réunions, les représentants

  2   officiels de ces organisations nous faisaient part des problèmes qu'ils

  3   rencontraient sur le terrain.

  4   Ensuite, j'essayais d'éliminer ces difficultés par le biais des

  5   ordres. Ce que l'on recevait, c'étaient soit des rapports verbaux soit des

  6   rapports écrits.

  7   M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous pensez que ces

  8   rapports, ces descriptions, illustrent effectivement la situation sur le

  9   terrain telle qu'elle était au mois d'avril 1993 ?

 10   Je continue avec la lecture de l'ordre : "Afin d'éliminer toutes

 11   ces actions négatives et de mettre en oeuvre l'ordre du commandant, le

 12   chef du quartier général du HVO, dans un document du 22 avril 1993

 13   ordonne :

 14   1. J'avertis tous ceux qui ont le rang de commandant de l'impact

 15   négatif de ce genre de comportements qui seraient faits par leurs

 16   subordonnés.

 17   3. Les individus et les groupes qui sont complètement en-dehors

 18   du contrôle devraient être immédiatement arrêtés et les mandats d'arrêt

 19   doivent être donnés au commandant des unités de la police militaire.

 20   4. Vous êtes responsables de prévenir, ayant à votre disposition

 21   tous les moyens et toute la force qui vous semblent nécessaire d'utiliser,

 22   les individus et les groupes extrémistes qui sont en-dehors du contrôle et

 23   qui ne protègent pas la population civile. Vous devez les prévenir de

 24   démolir ou de brûler, de mettre à feu, les objets appartenant à la

 25   population civile,


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  1   car leurs activités représentent des actes de terrorisme.

  2   5.°Je vous incite instamment à prendre des mesures nécessaires à

  3   l'encontre de tous ceux qui entravent la mise en oeuvre du mandat de la

  4   Forpronu, du HCR, de l'ECMM, et du CICR, car ceci est un combat pour la

  5   réputation et la dignité du HVO et du peuple croate au sein de la

  6   communauté Croate d'Herceg Bosna. Toutes ces organisation ont une liberté

  7   entière de circulation et vous devez les aider dans leurs activités.

  8   6.°Afin de mettre en oeuvre ces tâches, les commandants

  9   subordonnés me sont directement responsables à tous les niveaux.

 10   Signé : "Le colonel Tihomir Blaskic".

 11   Monsieur le Général, pourriez-vous nous donner un commentaire de

 12   la situation telle que vous l'avez trouvée ? Qu'est-ce que vous avez voulu

 13   faire ? Quelles étaient vos motivations afin de rédiger un ordre de ce

 14   genre qui est plutôt sévère à l'encontre du HVO ?

 15   M. Blaskic (interprétation). - De cet ordre, il est évident que

 16   sur le terrain, il y a eu des unités et des groupes organisés qui

 17   n'étaient pas sous des ordres complets du commandement. Il y a eu aussi

 18   des extrémistes, des individus ou des groupes qui détruisaient ou

 19   mettaient à feu, qui incendiaient des immeubles. J'ai dit clairement dans

 20   cet ordre, qu'il s'agissait d'actes de terrorisme, par conséquent, j'ai

 21   dit qu'il fallait prévenir ces actes avec tous les moyens que l'on avait à

 22   notre disposition. En même temps, vous pouvez dire que par le biais

 23   de cet ordre, je voulais donner un soutien aux organisations

 24   internationales humanitaires afin qu'elles puissent accomplir leur

 25   mission. Il y a eu aussi d'autres formes d'activité où je voulais en fait,


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  1   faire connaître à la population, le travail et le mandat du HCR et

  2   d'autres organisations internationales. Donc, dans le dernier point, le

  3   point n° 6, je voulais responsabiliser tous les militaires, c'est-à-dire

  4   tant les commandants des petites unités, ou les commandants des brigades

  5   militaires que des détachement de dix hommes. Enfin, je voulais

  6   responsabiliser tout un chacun. Cependant, cet ordre n'est qu'une

  7   tentative pour stabiliser la situation et pour mettre un peu d'ordre dans

  8   ce qui se passait sur le terrain. Ce qui était très difficile de faire.

  9   M. Nobilo (interprétation). - Le 24 avril, Monsieur le Général,

 10   on a entendu dire qu'Ahmici était déjà quelque chose qui vous faisait des

 11   soucis. Etait-ce le seul point de souci que vous aviez à ce moment-là à

 12   Ahmici ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - Malheureusement, Ahmici n'était

 14   pas le seul problème que je devais confronter, il y a eu beaucoup d'autres

 15   points à l'ordre du jour, beaucoup de soucis, mais, bien sûr, Ahmici était

 16   un de mes soucis les plus importants.

 17   M. Nobilo (interprétation). - Si on pouvait se permettre,

 18   j'utilise ici, le conditionnel, si on pouvait se permettre d'établir une

 19   liste de priorité, quelle aurait été votre liste de priorité ? Prévenir ce

 20   qui s'était passé à Ahmici, que cela ne se reproduise pas dans un autre

 21   village ou mener une enquête sur ce qui s'est passé dans le village

 22   d'Ahmici ?

 23   M. Blaskic (interprétation). - Pendant la réunion avec mes

 24   collaborateurs, j'ai souligné que la priorité absolue était de prévenir

 25   une répétition d'Ahmici.


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  1   M. Nobilo (interprétation). - Vous voulez le dire d'une manière

  2   figurative ?

  3   M. Blaskic (interprétation). - Oui, je voulais qu'on évite le

  4   meurtre de la population civile et l'incendie des maisons.

  5   M. Nobilo (interprétation). - Y avait-il un danger réel que cela

  6   se reproduise dans un autre endroit ?

  7   M. Blaskic (interprétation). - A deux reprises, nous avons signé

  8   les documents sur le cessez-le-feu et la séparation des forces. Cependant,

  9   il n'y a pas eu de cessez-le-feu, il n'y a pas eu de trêve. Les forces du

 10   HVO et de l'armée de Bosnie-Herzégovine n'ont pas été séparées à la suite

 11   à ces accords. Donc la situation était toujours très complexe et difficile

 12   et, par conséquent, cette difficulté existait bel et bien.

 13   M. Nobilo (interprétation). - Passons maintenant à l'autre

 14   document rédigé ce même jour, le 24 avril 1993, mais à 10 heures. Vous

 15   avez ordonné quelque chose à toutes vos

 16   unités.

 17   Je vous prie de mettre sur le rétroprojecteur le document

 18   portant la cote D362.

 19   M. Nobilo (interprétation). - Il s'agit donc du document D362.

 20   Il s'agit d'un ordre signé par vous le 24 avril à 10 heures. Le titre

 21   est : "Le traitement des blessés.

 22   Conformément à l'ordre du chef du département de la Défense et

 23   du chef de l'état-major du HVO n° 02-1/1-54/93 du 23 avril 1993 et afin

 24   d'assurer sa mise en oeuvre entière, il faut

 25   1. Assurer un accès libre et une assistance à tous ceux qui sont


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  1   blessés, qu'ils soient des civils, des soldats ou des soldats ennemis.

  2   2. Il faut traiter les civils et les prisonniers conformément

  3   aux conventions et aux règlements internationaux. Il faut également

  4   dresser tout de suite une liste des prisonniers et la donner à la zone

  5   opérationnelle de la Bosnie centrale.

  6   3. Les commandants subordonnés sont responsables envers moi en

  7   ce qui concerne la mise en oeuvre de cet ordre."

  8   Pouvez-vous nous commenter cet ordre ?

  9   M. Blaskic (interprétation). - Nous n'avions pas l'accès à

 10   l'hôpital, mais je sais qu'à l'hôpital à Nova Bila, il y a eu des soldats

 11   ainsi que des civils. Il y a eu aussi des soldats de l'armée de Bosnie-

 12   Herzégovine qui étaient traités dans cet hôpital. J'ai toujours essayé de

 13   souligner auprès de mes commandants que chaque blessé devait être traité.

 14   En ce qui concerne le point n° 2, je crois qu'hier nous avons

 15   discuté des documents qui ont démontré qu'il y avait des arrestations

 16   privées et d'autres genres de comportements illégaux.

 17   Je voulais que les militaires se comportent conformément aux

 18   conventions internationales. Je parle ici des soldats du HVO, je l'ai

 19   souligné dans le point n° 2, et je leur ai demandé dans ce même ordre de

 20   nous fournir immédiatement une liste des prisonniers.

 21   M. Shahabuddeen (interprétation). - Monsieur le Général, dans le

 22   paragraphe n° 3, vous vous référez aux commandants immédiatement

 23   subordonnés ?

 24   M. Blaskic (interprétation). - Oui, pour la mise en oeuvre de

 25   cet ordre, tous les commandants qui me sont immédiatement subordonnés.


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  1   Donc les commandants des brigades et d'autres commandants me sont

  2   responsables. Je crois que nous avons parlé de cela à propos d'un autre

  3   ordre que j'ai donné le 17 avril à 22 heures.

  4   M. Shahabuddeen (interprétation). - Ceci inclut le 4ème Bataillon

  5   et la police militaire ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - Oui, ils m'étaient subordonnés.

  7   M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Général, lorsque vous

  8   dites qu'il faut traiter les civils et les prisonniers de guerre

  9   conformément aux conventions internationales, à votre avis, est-ce que les

 10   conventions internationales permettent que ces gens creusent des tranchées

 11   sur les premières lignes de front ?

 12   M. Blaskic (interprétation). - Il est certain que ceci n'est pas

 13   permis par les textes des conventions internationales. Par conséquent,

 14   j'ai insisté à ce qu'on se comporte conformément aux règlements et aux

 15   conventions internationales.

 16   M. Nobilo (interprétation). - Lorsque vous demandez au HVO

 17   d'agir conformément aux conventions internationales et aux règlements

 18   internationaux, cela signifie-t-il que lorsqu'il n'y a pas nécessité de

 19   participer à des combats, il est impossible de retenir des civils ?

 20   M. Blaskic (interprétation). - Oui.

 21   M. Nobilo (interprétation). - Je demande la pièce à

 22   conviction D363. La pièce D363 est un des ordres que vous avez émis le

 23   24 avril 1993 à 11 heures. Cet ordre traite de la façon de traiter les

 24   bâtiments et propriétés immobilières. Vous énumérez les unités auxquelles

 25   vous adressez cet ordre.


Page 18117

  1   Elles sont nombreuses. Le texte de l'ordre se lit comme suit, je

  2   cite : "En raison du grand nombre d'appartements qui sont temporairement

  3   vacants et dans lesquels pénètrent par la force des personnes portant des

  4   armes, soldats du HVO et autres, dans le but de raffermir l'ordre public

  5   et de renforcer la paix dans la ville de Vitez..." et là, quelque chose

  6   est écrit de votre main. Vous pouvez le lire ?

  7   M. Blaskic (interprétation). - Il est écrit : "... et dans

  8   d'autres villes".

  9   M. Nobilo (interprétation). - "... et dans d'autres villes pour

 10   prévenir des évolutions de ce type, j'ordonne :

 11   Premièrement : utilisez tous les moyens et en dernier recours y

 12   compris la force pour empêcher la saisie d'appartements ou le vol d'objets

 13   contenus dans ces appartements et appartenant à des citoyens qui, pour

 14   diverses raisons, sont temporairement absents.

 15   Deuxièmement : sont responsables devant moi le commandant du

 16   4ème Bataillon de la police militaire du HVO et les commandants des postes

 17   de police de la communauté croate de Herceg-Bosna dans les villes dans

 18   lesquelles un conflit a éclaté.

 19   Troisièmement : le présent ordre entre en vigueur immédiatement.

 20   Les membres du HVO portant l'uniforme seront soumis aux mesures

 21   applicables par la police militaire du HVO, alors que les civils seront

 22   soumis aux mesures prévues par la police civile de la communauté croate

 23   d'Herceg-Bosna. Ces deux polices agissant en coordination".

 24   Pouvez-vous nous dire comment il est advenu que des biens

 25   immobiliers soient indûment occupés ? Pouvez-vous nous donner des détails


Page 18118

  1   à ce sujet ?

  2   M. Blaskic (interprétation). - Au cours du conflit, certains

  3   édifices, bâtiments ont été temporairement abandonnés.

  4   Dans le cas dont j'ai déjà parlé, où des familles voulaient se

  5   regrouper ou bien quand il arrivait des groupes armés qui trouvaient un

  6   appartement pour satisfaire aux besoins de telle ou telle famille, en tout

  7   cas, ce qui arrivait, c'est que des appartements étaient saisis,

  8   appartements ayant appartenus à des Musulmans bosnien dans des zones sous

  9   le contrôle du HVO et dans les zones sous le contrôle de l'armée de

 10   Bosnie-Herzégovine, des appartements ont également été saisis, qui

 11   appartenaient à des Croates.

 12   Dans le but d'empêcher cette évolution négative, j'ai émis

 13   l'ordre dont nous venons de parler en tentant de limiter un phénomène qui

 14   ne cessait de croître et j'ai tenté de responsabiliser, eu égard à

 15   l'accomplissement de cette action, la police militaire, mais également la

 16   police civile, même si je me rendais bien compte que j'excédais peut-être

 17   les limites de ma compétence. Car il arrivait qu'un soldat, alors qu'il

 18   était en train de pénétrer par effraction dans un appartement, retirait

 19   son uniforme et pouvait dire à ce moment-là : "Je ne suis pas soldat, je

 20   suis civil. Je ne suis pas en opération. Je ne sais pas quelle est votre

 21   compétence à mon égard", de sorte qu'il était parfois très difficile de

 22   savoir, en dernière analyse, qui était responsable de l'acte, un civil ou

 23   un militaire.

 24   M. Rodrigues. - Excusez-moi de vous interrompre,

 25   Général Blaskic, j'ai deux questions : est-ce que les entités que vous


Page 18119

  1   indiquez ici, dans ce document 363, ces entités à qui vous adressez cet

  2   ordre sont les mêmes à qui vous avez adressé l'ordre antérieur, qui est le

  3   document 362. C'est-à-dire, quand vous dites, au document 362 : "A tous

  4   les subordonnés". Nous pouvons dire que tous les subordonnés à qui vous

  5   adressez l'ordre antérieur sont ceux que vous indiquez dans ce document ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - Dans l'ordre précédent, il était

  7   écrit : "Tous les subordonnés", mais je ne crois pas que le nom de chef de

  8   la police civile de Travnik ait figuré dans l'ordre précédent. La police

  9   civile de Travnik était une instance civile qui ne m'a jamais été

 10   subordonnée et son nom figure dans le présent document, alors que je crois

 11   que dans l'ordre précédent il n'était pas question du poste de police de

 12   Vitez, car le terme utilisé était :"Tous les subordonnés", mais les autres

 13   étaient compris effectivement.

 14   M. Rodrigues. – Si j'ai bien compris, nous pourrions dire que

 15   toutes les entités qui sont dans l'ordre antérieur sont celles-ci, à

 16   l'exception du chef du département de la police de Travnik. C'est cela ?

 17   M. Blaskic (interprétation). – Monsieur  le Juge, sauf le chef

 18   du département de la police de Travnik et le chef du poste de police de

 19   Vitez c'est à dire la police civile.

 20   M. Rodrigues. – Merci beaucoup. Ma deuxième question est celle-

 21   là : souvent, vous… Je vais poser la question d'une autre façon.

 22   Est-ce que pour vous, il y a une différence entre les mots

 23   "instantanément" et "immédiatement" ? Est-ce que ce sont des choses

 24   différentes pour vous ou ce sont des choses égales ? "Instantanément" et

 25   "immédiatement" ?


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  1   M. Blaskic (interprétation). - J'ai l'impression que

  2   l'interprétation que j'ai entendue n'est pas complète, Monsieur le Juge.

  3   M. Rodrigues. – C'est sûrement ma faute, je vais répéter. Je

  4   veux savoir si pour vous, "immédiatement" et "instantanément" ont la même

  5   signification ou s'ils ont des significations différentes ?

  6   M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Juge, on me demande

  7   s'il y a une différence entre "tout de suite" et "à l'instant" et j'essaie

  8   de répondre, mais j'ai du mal.

  9   M. Rodrigues. – Mais peut-être je vais poser la question en

 10   utilisant l'anglais. La différence entre instantly and immediately ?

 11   M. Blaskic (interprétation). - Si les deux mots signifient

 12   "immédiatement", il n'y a pas de différence. Si l'un des deux signifie

 13   "vite", il y a une différence. Il y a une différence entre "vite" et

 14   "immédiatement".

 15   M. Rodrigues. – C'est pourquoi je pose la question, parce que

 16   dans l'ordre antérieur, vous utilisez le mot "immédiatement". Dans cet

 17   ordre, vous utilisez le mot "instantanément". Donc, Général Blaskic, vous

 18   avez utilisé les deux mots et je voudrais savoir

 19   s'il s'agissait de la même chose ou de choses différentes.

 20   M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Juge, pour moi, "à

 21   l'instant" et "tout de suite" signifient la même chose. "A l'instant" et

 22   "tout de suite", si j'ai reçu la bonne interprétation. Je ne sais pas.

 23   M. Rodrigues. – Si j'ai bien compris et pour conclure cette

 24   question, "instantanément" et "immédiatement" sont des mots utilisés dans

 25   les deux ordres et signifient la même chose ?


Page 18121

  1   M. Nobilo (interprétation). - Monsieur le Juge, je peux peut-

  2   être vous apporter une aide. Dans le texte original en croate des deux

  3   ordres, c'est le même mot utilisé qui signifie littéralement "tout de

  4   suite", mais en interprétation vous avez entendu deux mots différents ou

  5   lu deux mots différents en traduction.

  6   M. Rodrigues. - Dans le document 362, le document est traduit en

  7   anglais "immediately" et l'autre document "instantly".

  8   C'est vrai, je suis correct ?

  9   M. Nobilo (interprétation). - Vous avez raison, Monsieur le

 10   Juge, mais la source croate utilise le même mot, un seul et même mot.

 11   M. Rodrigues. - Merci de m'avoir éclairé.

 12   M. Nobilo (interprétation). - Nous pouvons vous montrer ces deux

 13   mots, ces deux textes sur le rétroprojecteur, si vous le souhaitez.

 14   M. le Président. - Dans la version française du D362 -vous savez

 15   que le français c'est toujours compliqué, je suis désolé-, il n'y a ni

 16   "instantanément" ni "immédiatement". Il y a "les commandants directement

 17   sous mes ordres seront responsables devant moi". Je n'arrive pas à trouver

 18   le mot "instantanément" ou "immédiatement". Donc il y a une différence

 19   avec la version anglaise.

 20   M. Nobilo (interprétation). - Nous pouvons placer les deux

 21   textes sur le rétroprojecteur.

 22   M. le Président. - Bien.

 23   M. Nobilo (interprétation). - Dans les deux textes croates, nous

 24   avons surligné en jaune le mot en question qui est identique dans les deux

 25   cas.


Page 18122

  1   A gauche, il s'agit de la pièce D362 et à droite de la

  2   pièce D363.

  3   M. Shahabuddeen (interprétation). - Ce que vous dites, Maître

  4   Nobilo, c'est que la légère différence n'existe qu'en traduction anglaise

  5   et peut-être également en traduction française, mais que dans le texte

  6   original c'est le même terme utilisé ?

  7   M. Nobilo (interprétation). - C'est exact, absolument.

  8   M. le Président. - Bien. Monsieur le Juge Rodrigues, vous êtes

  9   satisfait de la réponse ? J'en déduis que dans la version serbo-croate qui

 10   est celle qui pour l'accusé fait foi, dans votre esprit, Général Blaskic,

 11   cela voulait dire la même chose ?

 12   M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Président, Messieurs

 13   les Juges, dans les deux documents c'est le même mot qui est utilisé.

 14   M. le Président. - Ecoutez, je vérifierai dans un dictionnaire

 15   de français. Je crois qu'en français il y a une très légère différence

 16   entre "instantanément" et "immédiatement", mais je crois qu'elle est

 17   vraiment très, très légère en français... en anglais aussi certainement.

 18   Merci, Monsieur le Juge Rodrigues, ce qui prouve que, à part le

 19   serbo-croate, vous maniez parfaitement et la langue anglaise et la langue

 20   française.

 21   Vous pouvez poursuivre, Maître Nobilo.

 22   M. Nobilo (interprétation). - Je vous remercie. J'aimerais

 23   revenir sur cet ordre de 11 heures, la pièce à conviction D363 pour poser

 24   une première question. Vous demandez à la police civile et à la police

 25   militaire d'empêcher les installations dans les appartements et de


Page 18123

  1   respecter la loi.

  2   Etait-ce votre travail ? Ou bien est-ce que la police militaire

  3   et la police civile avaient pour devoir de faire respecter la loi

  4   automatiquement, même sans votre intervention ?

  5   M. Blaskic (interprétation). - Il est certain que la police

  6   militaire et la police civile avaient pour devoir de faire leur travail, y

  7   compris en dehors du présent ordre. Mais la situation étant ce qu'elle

  8   était, j'ai estimé qu'il était de ma responsabilité, de mon devoir de

  9   faire ce que je pouvais pour essayer de réduire cet problème

 10   d'installation illégale dans des appartements et dans d'autres édifices.

 11   M. Nobilo (interprétation). - Dans une armée ordonnée comme elle

 12   l'était quand vous faisiez partie de la JNA, est-ce que vous avez jamais

 13   vu un ordre qui exigeait d'appliquer la loi ?

 14   M. Blaskic (interprétation). - Je n'ai jamais vu ni signé un

 15   ordre de cette nature pendant que j'étais membre de l'ex-armée populaire

 16   yougoslave.

 17   M. Nobilo (interprétation). - Merci. Nous allons maintenant

 18   laisser de côté ces trois ordre émanant de votre main. Mais, entre 13 et

 19   14 heures ce même jour, le 24 avril 1993, vous avez ce que j'appellerai

 20   une rencontre houleuse avec le colonel Stewart, commandant du bataillon

 21   britannique.

 22   Pouvez-vous décrire aux Juges, comment s'est déroulée cette

 23   rencontre ?

 24   M. Blaskic (interprétation). - Il s'est agi d'une rencontre

 25   parmi d'autres, mais c'est la première fois que j'ai vu le colonel Stewart


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  1   dans un état de choc, très ému, très bouleversé. Je crois qu'on peut dire

  2   que nous étions tous les deux dans une espèce d'état de choc.

  3   La réunion a commencé à 13 heures. Le colonel Stewart a proposé

  4   comme principaux thèmes à l'ordre du jour : Ahmici. Il a déclaré : "Ahmici

  5   se trouve dans votre zone de responsabilité, dans la zone de

  6   responsabilité du HVO. La responsabilité n'est toujours pas assumée,

  7   aucune commission n'ayant encore été créée. C'est une catastrophe

  8   politique pour le HVO. Or, du côté du HVO, on souhaite anéantir les

  9   Musulmans. La zone a été attaquée aux alentours de 5 heures 30 par le

 10   HVO". Je suppose qu'il pensait au secteur d'Ahmici.

 11   "Un grand nombre de victimes ont été retirées de cette zone,

 12   d'autres y compris sont calcinées. Parmi ces corps calcinés, se trouvent

 13   même des enfants. Pour la Forpronu, c'est une grande affaire qui a des

 14   conséquences impossibles à déterminer actuellement.

 15   Pour le HVO, c'est une catastrophe politique.

 16   Je considère..." -c'est toujours le colonel Stewart qui parle-

 17   "... que M. Mate Boban devrait venir aujourd'hui à Vitez pour s'adresser à

 18   la population de Vitez. Il devrait dire également devant les journalistes

 19   que les coupables seront découverts et qu'ils seront jugés. La

 20   responsabilité de ce qui est arrivé doit être assumée par le HVO".

 21   Le colonel Stewart a ensuite ajouté qu'il exigeait que

 22   M. Mate Boban garantisse en personne que les personnes responsables de ces

 23   actes en assument la responsabilité, ce qui put atténuer un peu la gravité

 24   de la situation. Il importe de garder présent à l'esprit les implications

 25   de ce qui a pu se passer.


Page 18125

  1   Après cette intervention, j'ai dit au colonel Stewart ce qui

  2   suit : "Je vous ai déjà fait connaître ma position dans ma lettre que je

  3   vous ai envoyée, le 23 avril 1993. Je n'ai émis aucun ordre à l'intention

  4   de quelque unité que ce soit lui ordonnant d'agir à Ahmici". Je pensais

  5   aux unités du HVO.

  6   Je lui ai dit qu'Ahmici était effectivement dans la zone de

  7   responsabilité du HVO et j'ai ajouté que, pour le moment, ce secteur était

  8   toujours sous le feu, sous l'attaque de l'armée de Bosnie-Herzégovine et

  9   qu'il était impossible de pénétrer dans ce secteur, à moins d'être protégé

 10   par des blindés pour aller enquêter sur place.

 11   J'ai encore dit au colonel Stewart qu'il importait d'effectuer

 12   la séparation des deux forces. Je pensais aux forces de l'armée de

 13   Bosnie-Herzégovine d'une part, aux forces du HVO de l'autre, de façon à

 14   mener une enquête complète et d'un niveau suffisant.

 15   J'ai dit également que le 16 ou pour être précis, dans la nuit

 16   du 15 au 16, le HVO avait été attaqué dans la vallée de la Lasva. J'ai dit

 17   pour être tout à fait précis : "Nous avons été

 18   attaqué". Après cela, le colonel Stewart m'a répondu : "Ce que font mes

 19   commandants, sous mes ordres, j'en suis responsable. Mais cela ne signifie

 20   pas que j'en sois personnellement coupable".

 21   J'ai rétorqué au colonel Stewart que c'étaient mes soldats qui

 22   avaient fait cela, des soldats sous mon commandement et que si c'étaient

 23   mes soldats qui avaient fait cela, si c'étaient des soldats placés sous

 24   mon commandement qui avaient fait cela, j'en serais responsable, mais que

 25   je n'avais pas émis d'ordre dans ce sens.


Page 18126

  1   A l'issue de cette première rencontre, j'ai consigné dans mon

  2   journal de guerre que la conversation s'est poursuivie sur le thème du

  3   pilonnage de Zenica.

  4   Mais, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je ne suis pas

  5   sûr que cette discussion se soit poursuivie sur ce thème ce jour-là ou le

  6   lendemain. En tout cas, je sais que le thème en a été le pilonnage de

  7   Zenica.

  8   M. Nobilo (interprétation). - Parlez-nous du contenu de cette

  9   discussion indépendamment du fait qu'elle se soit déroulée le 24 ou

 10   le 25 ?

 11   M. Blaskic (interprétation). - Le colonel Stewart m'a répondu

 12   que Zenica avait été pilonnée le 19 avril 1993. J'ai répondu : "Ce n'est

 13   pas le HVO qui a fait cela. Je n'ai émis aucun ordre pour demander le

 14   pilonnage de Zenica et je sais que le chef de bataillon d'artillerie n'a

 15   pas donné cet ordre non plus".

 16   C'est à la radio de Zenica que j'ai entendu des accusations

 17   portées eu égard au

 18   pilonnage de Zenica.

 19   Après cela, le colonel Stewart a continué la discussion. A un

 20   moment déterminé, il m'a dit : "Mais Zenica a été pilonnée avec un

 21   howitzea de 155 mm". J'ai entendu l'interprète, Jezo, qui a cité le

 22   calibre. Je lui ai demandé de me répéter le calibre. Le colonel Stewart a

 23   répété. Il s'agissait d'une arme de 155 mm.

 24   J'ai dit au colonel Stewart : "Si je vous ai bien compris, vous

 25   parlez d'un projectile


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  1   de 155 mm" " et il m'a répondu : "Oui".

  2   Après cela, j'ai dit au colonel Stewart : "Je propose que le

  3   commandant de mon bataillon d'artillerie et le commandant des unités

  4   d'artillerie fassent partie d'une commission conjointe qui se rendra à

  5   Zenica sur les lieux et qui mènera une enquête conjointe avec l'armée de

  6   Bosnie-Herzégovine au sujet du pilonnage de Zenica".

  7   Le colonel Stewart m'a posé la question de savoir qui allait

  8   garantir leur sécurité. Il pensait aux deux officiers dont j'avais proposé

  9   les noms, deux représentants du HVO qui auraient pu se rendre à Zenica.

 10   J'ai dit au colonel Stewart: "Vous seul...", car je ne voyais

 11   pas qui d'autre pouvait garantir la sécurité des officiers du HVO à

 12   Zenica.

 13   Le colonel Stewart m'a dit que ce n'était pas possible, qu'il ne

 14   pouvait pas garantir la sécurité des officiers.

 15   Après quoi, il a ajouté : "Ils disent..." -il pensait aux

 16   membres de l'armée de Bosnie-Herzégovine- "... que ce pilonnage a été

 17   effectué dans la direction de Busovaca vers Zenica".

 18   Il m'a dit savoir -il s'agit donc du colonel Stewart- qu'en fait

 19   ce pilonnage provenait de Zenica.

 20   J'ai encore rajouté : "Il est possible de se mettre d'accord

 21   pour inspecter les positions de tirs de l'artillerie et vérifier que ce

 22   n'est pas exact, que le tir provenait de la

 23   direction de Vitez".

 24   M. Nobilo (interprétation). - Mais le 24, dans la vallée de la

 25   Lasva, est-ce que vous possédiez un howitzea ou un obusier de 255 mm ?


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  1   (L'interprète se reprend)

  2   Le 19 avril, possédiez-vous un obusier ?

  3   M. Blaskic (interprétation). - Non, mais nous en possédions un

  4   dans le cadre de la défense conjointe de Travnik, lorsque je dis

  5   "conjointe", je pense à la défense de l'armée de

  6   Bosnie-Herzégovine et au HVO.

  7   Nous l'avons eu en notre possession jusqu'en janvier 1993, date

  8   à laquelle j'ai rendu à l'état-major principal du HVO un obusier de 155 mm

  9   et un lance-roquettes multiple.

 10   M. Nobilo (interprétation). - Avez-vous dit au colonel Stewart

 11   que vous ne possédiez pas un obusier de 155 mm ?

 12   M. Blaskic (interprétation). - Je ne me souviens pas lui avoir

 13   dit que nous ne possédions pas d'obusier de 155 mm.

 14   M. Nobilo (interprétation). - Avez-vous vérifié auprès de votre

 15   commandant du bataillon d'artillerie ?

 16   M. Blaskic (interprétation). - Oui, à l'instant même où la

 17   réunion s'est terminée, j'ai appelé le commandant bataillon d'artillerie

 18   pour effectuer une vérification supplémentaire. Je savais que cet obusier

 19   de 155 mm avait été expédié, mais je voulais vérifier s'il était arrivé à

 20   l'état-major principal. La réponse que j'ai reçue à ma question a été, de

 21   la part du commandant du bataillon d'artillerie, "Oui, selon vos ordres,

 22   cette pièce d'artillerie a été envoyée le 8 janvier 1993".

 23   M. Nobilo (interprétation). - Quand avez-vous entendu que le HVO

 24   était accusé d'avoir pilonné Zenica, non pas avec un obusier de 155 mm,

 25   mais bien avec un obusier de 122 mm ?


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  1   M. Blaskic (interprétation). – Eh bien, la première fois que je

  2   l'ai entendu, c'est devant ce Tribunal.

  3   M. le Président. - Nous allons faire une pause. Il y a

  4   maintenant une heure que l'accusé parle, nous reprendrons à 16 heures.

  5   (L'audience, suspendue à 15 heures 46, est reprise à

  6   16 heures 05.)

  7   M. le Président. - L'audience est reprise , asseyez vous.

  8   Maître Nobilo, allez-y.

  9   M. Nobilo (interprétation). - Merci. Notre dernière question

 10   était de savoir quand la dernière fois Zenica a été pilonnée avec un

 11   obusier de 155 mm. Maintenant, je vous demande si vous avez demandé au

 12   chef du bataillon d'artillerie s'ils ont pilonné Zenica ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - Oui, c'était le 19 avril la

 14   première fois, car c'est l'adjoint du service d'informations qui m'avait

 15   appelé et qui m'a dit que Zenica avait été pilonnée par l'armée de

 16   Republika Srpska. Ensuite, une autre information disant que c'était

 17   l'armée de HVO qui avait pilonné Zenica. J'ai donc vérifié cette

 18   information le 19 avril, auprès du commandant du bataillon d'artillerie et

 19   j'ai vérifié également cette information au moment où je lui ai demandé ce

 20   qui s'est passé avec l'obusier de 155 mm.

 21   M. Nobilo (interprétation). - Un terme en anglais a été utilisé,

 22   il était impropre. Est-ce que vous pouvez répéter, s'il vous plaît. Vous

 23   avez dit que vous avez eu l'information selon laquelle l'adjoint du

 24   service d'informations vous a informé de quelque chose. De quoi vous a-t-

 25   il informé ?


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  1   M. Blaskic (interprétation). - Il m'a dit qu'à la radio, il

  2   avait entendu l'information que Zenica avait été pilonnée et une fois

  3   qu'il m'a informé, c'est l'adjoint qui m'a informé. La première

  4   information qu'il avait entendue, c'était à la radio. Selon cette première

  5   information,

  6   c'est que les Serbes avaient pilonné Zenica et ensuite il y a eu une

  7   deuxième information que c'était le HVO qui avait pilonné Zenica. J'ai

  8   appelé le commandant du bataillon d'artillerie pour vérifier ce qui

  9   s'était passé, s'ils avaient ouvert le feu dans la direction de Zenica ou

 10   sur Zenica, et lui m'a informé qu'ils n'ont pas pilonné Zenica.

 11   Une fois que le colonel Stewart m'a informé que c'était

 12   l'obusier de 155 mm, en parlant avec le commandant du bataillon

 13   d'artillerie, j'ai vérifié s'il s'agissait de l'obusier de 155 mm, s'il

 14   avait été restitué, il m'avait dit oui. Je lui ai reposé la question pour

 15   savoir s'ils avaient ouvert le feu en utilisant d'autres pièces

 16   d'artillerie en direction de Zenica et sa réponse était non.

 17   M. Nobilo (interprétation). - On laisse Zenica maintenant et on

 18   revient au début de notre conversation. Vous avez dit aux Juges que vous

 19   avez, une fois de plus, attiré l'attention du colonel Stewart sur la

 20   lettre que vous lui avez envoyée, la veille, le 24 avril 1993 ?

 21   M. Blaskic (interprétation). - Oui.

 22   M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous dire aux Juges ce qui

 23   était d'une importance particulière pour vous, pour essayer de mettre en

 24   exécution cette lettre. En quoi consistait votre demande dans cette

 25   lettre ?


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  1   M. Blaskic (interprétation). - Il s'agissait de deux questions,

  2   la première était évidemment très importante : c'est l'appui qu'il fallait

  3   fournir et puis également me rendre possible de procéder à une enquête.

  4   J'ai déjà précisé, j'ai dit que je demande d'organiser une réunion

  5   spéciale, particulière et que la question d'enquête fasse l'objet de cette

  6   réunion qui rassemblera aussi bien les commandants du HVO que de l'armée

  7   de Bosnie-Herzégovine. Car, même pour des problèmes de moindre importance,

  8   j'ai été obligé de répéter les choses, de réécrire les ordres ou plutôt de

  9   donner des ordres d'exécution.

 10   Compte tenu du fait que j'avais émis beaucoup d'ordres, j'étais

 11   pratiquement impuissant sur le plan exécution, j'avais besoin d'un appui,

 12   d'une assistance pour faciliter ma

 13   tâche de la mise en exécution de ce que j'avais ordonné.

 14   M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous étiez conscient, à

 15   ce moment-là, vu la position que vous occupiez, le poste, et compte tenu

 16   également du fait que l'on soupçonnait la police militaire qui était

 17   auteur de telles atrocités, que vous-même vous allez pouvoir procéder

 18   difficilement à cette enquête ?

 19   M. Blaskic (interprétation). - Oui, c'est pourquoi j'avais

 20   demandé aussi bien l'assistance de mes supérieurs que des organisations

 21   internationales car c'est de cette manière-là

 22   que les ordres que j'avais émis auraient été mis en exécution d'une

 23   manière plus efficace.

 24   M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que quelqu'un vous a aidé ?

 25   Est-ce que vous avez obtenu ce que vous avez cherché de l'organisation


Page 18132

  1   internationale ou des organes internationaux concrets ?

  2   M. Blaskic (interprétation). - Même si je l'avais répété à

  3   plusieurs reprises, on le verra lors de la chronologie que je vais

  4   exposer, non seulement à travers cette lettre, à d'autres reprises

  5   personne ne m'a secouru, ne m'a aidé.

  6   M. Nobilo (interprétation). - Quelle était l'autre raison pour

  7   laquelle vous vous attendiez que surtout les autres allaient vous aider ?

  8   M. Blaskic (interprétation). - Une deuxième raison touche à

  9   l'état de sécurité. Au moment où il y a eu cette réunion, j'ai dit au

 10   colonel Stewart qu'il était impossible de se rendre dans ce secteur sans

 11   véhicule blindé. Lui est un soldat tout aussi bien que moi. Il a

 12   d'ailleurs eu beaucoup plus d'expériences que moi, et moi je sais que le

 13   HVO n'avait pas de véhicules blindés et que tout ce qu'il pouvait faire,

 14   c'était de mettre à ma disposition les véhicules blindés pour que moi-même

 15   j'y aille, ou Nakic, ou quelqu'un d'autre pour procéder à cette enquête.

 16   M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que le colonel Stewart,

 17   le 23, vingt-quatre heures après que vous avez eu l'information que

 18   quelque chose s'est passé à Ahmici, a mis à votre disposition le véhicule

 19   blindé ? Est-ce que vous étiez prêt à y aller, à commencer tout de

 20   suite l'enquête ?

 21   M. Blaskic (interprétation). - Oui, si j'avais eu des véhicules

 22   blindés, je n'aurais même pas réfléchi, je me serais rendu moi-même sur

 23   place pour enquêter sur ce qui s'était passé.

 24   M. Nobilo (interprétation). - Après cet entretien que vous avez

 25   eu avec le colonel Stewart…, un petit moment, s'il vous plaît. Je


Page 18133

  1   reprends.

  2   Après cette conversation que vous avez eue avec le colonel

  3   Stewart, vous avez entrepris une action unilatérale, sans aide de la

  4   communauté internationale. Qu'est-ce que vous

  5   avez fait ? Pouvez-vous le dire aux Juges et à qui vous êtes-vous

  6   adressé ?

  7   M. Blaskic (interprétation). - J'ai organisé une réunion à

  8   l'intention des membres du commandement, l'après-midi, à 15 heures. J'ai

  9   informé tous mes collaborateurs du contenu de mon entretien avec le

 10   colonel Stewart. J'ai dit que nous devions procéder à l'enquête d'Ahmici

 11   tout seuls, et j'ai donné des instructions au chef de sécurité, c'était

 12   une instruction verbale. Je lui ai demandé d'entreprendre cette action

 13   indépendamment de l'aide qui viendrait ou pas de la part des organisations

 14   internationales. Par conséquent, je lui ai donné l'ordre verbal de

 15   commencer tout de suite l'enquête.

 16   J'ai également insisté lors de cette réunion sur le fait que je

 17   condamnais vigoureusement ces crimes. J'ai dit que, pour nous autres,

 18   membres du HVO, ceci était un événement tragique et que si de tels crimes

 19   se répétaient, ceci serait une destruction de nous-mêmes. C'est la raison

 20   pour laquelle j'ai demandé que de tels types de crimes ne se répètent pas.

 21   M. Nobilo (interprétation). - Pouvez-vous dire aux Juges

 22   maintenant pourquoi, à partir du moment où vous avez compris que personne

 23   ne vous aidait, pourquoi vous avez demandé au service de sécurité, de

 24   renseignements d'entreprendre les enquêtes ?

 25   M. Blaskic (interprétation). - Mais c'était la seule autorité,


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  1   l'unique autorité.

  2   M. le Président. - Poursuivez, reprenez juste un peu avant,

  3   Maître Nobilo, s'il vous

  4   plaît. Vous reprenez juste un peu avant.

  5   M. Nobilo (interprétation). - La question que j'avais posée

  6   était la suivante. Pourquoi avez-vous attendu 48 heures pour vous adresser

  7   au service de sécurité et leur demander d'entreprendre l'enquête sur les

  8   crimes commis à Ahmici ?

  9   M. Blaskic (interprétation). - Moi, je n'avais aucune autorité

 10   ou organe ou organisation à ma disposition, sauf le service de sécurité.

 11   Moi, je me disais que cette enquête qu'ils entreprendraient donnerait des

 12   résultats meilleurs que de donner de telles instructions à la police

 13   militaire. Parce que la police militaire devait faire une enquête sûre

 14   soi-même et sur ce

 15   qu'ils étaient supposés avoir fait.

 16   M. Nobilo (interprétation). - Pourquoi donnez-vous cet ordre,

 17   cette instruction 48 heures plus tard, le 24 avril, et pas avant, donc les

 18   premières heures qui ont suivi l'information que vous avez reçue ?

 19   Pourquoi avez-vous attendu 48 heures ?

 20   M. Blaskic (interprétation). - Moi, j'ai écrit une lettre et

 21   j'ai attendu la réaction et l'aide : l'aide au niveau de la protection et

 22   également, l'aide au niveau de la création d'une commission conjointe.

 23   M. Nobilo (interprétation). - Quand vous dites "l'aide, la

 24   protection", c'est de qui ?

 25   M. Blaskic (interprétation). - L'aide et la protection dans le


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  1   sens de mettre également à ma disposition des véhicules blindés. En

  2   d'autres termes, la Forpronu aurait pu mettre à ma disposition des

  3   véhicules blindés. C'est une première chose.

  4   Deuxièmement, de m'autoriser pour que l'on crée une commission

  5   conjointe. Dans ce cas-là, les organisations internationales auraient

  6   fourni cette aide que j'ai demandée.

  7   M. Nobilo (interprétation). - Vous avez réagi par conséquent

  8   48 heures plus tard pour enquêter sur ce qui s'était passé à Ahmici. Est-

  9   ce que vous avez compris que c'était une solution qui n'était pas aussi

 10   bonne que si la communauté internationale vous avait soutenu, aidé, dans

 11   la création de cette commission, dans l'enquête à entreprendre ?

 12   M. Blaskic (interprétation). - J'étais conscient que ce n'était

 13   pas la meilleure solution, mais pour moi, c'était une seule solution. Je

 14   n'en voyais pas une autre.

 15   M. le Président. - Excusez-moi, vous aviez des forces sur le

 16   front à Ahmici quand même ?

 17   Vous aviez des forces à vous quand même sur la ligne de front ?

 18   Sur Ahmici, vous aviez bien des forces ? Vous les avez décrites ce matin.

 19   M. Blaskic (interprétation). - Sur la ligne d'Ahmici, il y avait

 20   une unité de la police militaire et des villageois étaient armés.

 21   M. le Président. - Quand vous faites une réunion avec les

 22   membres du commandement 48 heures après, toujours personne dans votre

 23   état-major ou dans votre commandement d'unité qui vous dit ce qui s'est

 24   passé à Ahmici toujours ?

 25   M. Blaskic (interprétation). - En ce qui concerne l'information


Page 18136

  1   complète, ce qui passait à Ahmici, à mon plus grand regret, je ne l'ai

  2   toujours pas maintenant. J'ai eu une information écrite, mais tout ce qui

  3   s'est passé, je n'en ai jamais disposé.

  4   M. Nobilo (interprétation). - Vous avez dit que vous n'aviez pas

  5   l'information complète jusqu'à nos jours, n'est-ce pas ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - Oui, effectivement, je n'ai

  7   jamais reçu une information complète sur ce qui se passait à Ahmici le

  8   16 avril 1993 et qui portait sur le crime qui a été commis.

  9   M. Nobilo (interprétation). - Le 24, quand vous avez émis

 10   l'ordre, avez-vous pu savoir ce qui c'était passé à Ahmici ?

 11   Est-ce que vous pouvez nous donner un résumé ?

 12   M. Blaskic (interprétation). - J'ai reçu la lettre du

 13   colonel Stewart. J'ai également eu des allégations de M. Dzemo Merdan.

 14   J'ai eu également un certain nombre d'informations qui me sont parvenues

 15   par l'intermédiaire du colonel Stewart verbalement. Il m'a dit qu'il y

 16   avait des victimes civiles. En dehors de cela, je n'avais aucun autre

 17   renseignement, aucune autre donnée.

 18   M. le Président. - Vous n'avez pas l'idée de convoquer... Ahmici

 19   est à 3 km de Vitez. Vous n'avez pas l'idée de convoquer le commandant de

 20   la brigade la plus proche d'Ahmici, ne serait-ce que le convoquer, ne

 21   serait-ce que pour dire à M. Stewart que vous faites quelque chose ?

 22   On a l'impression que vous continuez à dire : "Il me faut des

 23   chars, il me faut des blindés pour y aller. Je ne peux rien faire sans".

 24   Puisque vous faites souvent des réunions avec des commandants de brigade,

 25   vous êtes sensibilisé à ce problème, à ces crimes. Monsieur Stewart vous


Page 18137

  1   en a parlé. Il y a 3 km entre Vitez et Ahmici et vous ne faites pas venir

  2   le commandant le plus proche du terrain pour lui demander ce qui s'est

  3   passé, même si vous vous méfiez de ce qu'il va vous dire. J'avoue que je

  4   ne comprends pas. Vous ne dites pas à ce commandant : "Venez me voir, que

  5   s'est-il passé ?", même si vous savez qu'il va vous mentir. Vous ne le

  6   faites pas ?

  7   M. Blaskic (interprétation). - Le commandant qui aurait dû

  8   m'envoyer les informations me les a envoyées régulièrement, y compris

  9   le 16, le 17 et le 18 et tous les autres jours.

 10   Monsieur le Président, il est vrai que nous étions à

 11   3 kilomètres, mais en temps de guerre, vu les opérations de combats, ce

 12   n'est pas la même chose qu'en temps de paix.

 13   M. le Président. - Poursuivez.

 14   Oui, Monsieur le Juge Rodrigues ?

 15   M. Rodrigues. - Monsieur Blaskic, vous avez dit que vous ne

 16   pouviez pas aller à Ahmici parce qu'il faudrait avoir un char blindé. Mais

 17   le responsable de vos forces pouvait venir chez vous ou non ?

 18   M. Blaskic (interprétation). - Vous pensez pour se rendre depuis

 19   Ahmici ? Mais c'est lui qui m'a donné des informations, celui qui était

 20   responsable, c'est de lui que j'ai eu des informations. Mais ces

 21   informations ne correspondaient pas à ce qui s'était passé réellement.

 22   M. Rodrigues. - Il vous a donné ces informations

 23   personnellement ?

 24   M. Blaskic (interprétation). - Il m'a donné des informations sur

 25   la situation au front, par téléphone, et il m'a envoyé le rapport par


Page 18138

  1   écrit. Un des rapports a été présenté ici.

  2   M. Rodrigues. - Est-ce qu'il pouvait venir chez vous et vous

  3   donner l'information personnellement, ou non ? C'est-à-dire, la situation

  4   militaire permettait que le responsable de vos forces venait vous donner

  5   l'information personnellement, oui ou non ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - Oui, il est venu et il m'a donné

  7   des informations le

  8   16 avril 1993. Mais le problème est dans l'information elle-même, ce

  9   qu'elle avait contenu.

 10   M. Rodrigues. - Donc nous savons déjà que souvent les

 11   commandants, les responsables ne vous donnaient pas toute l'information,

 12   et je vous pose une autre question : vous avez dit à un moment que le

 13   responsable de Busovaca vous a informé qu'il n'a pas ouvert le feu. Vous

 14   avez fait confiance à cette information, ou non ?

 15   M. Blaskic (interprétation). - Je ne me souviens pas. De quelle

 16   information s'agit-il ?

 17   M. Rodrigues. - Sur le pilonnage de Zenica. Vous avez dit qu'à

 18   la suite de la réunion de discussions, vous avez demandé au responsable de

 19   Zenica s'il avait ouvert le feu ou non. Il y avait la célèbre question de

 20   l'obusier de 155 mm, vous vous rappelez. Vous avez dit que le responsable

 21   a dit :"Non, nous n'avons pas ouvert le feu". C'est vrai ?

 22   M. Blaskic (interprétation). - Oui.

 23   M. Rodrigues. - Vous avez fait confiance à cette information, ou

 24   non ?

 25   M. Blaskic (interprétation). - Au moment où il m'a dit qu'il


Page 18139

  1   n'avait pas ouvert le feu avec un obusier de 155 mm, j'avais des raisons

  2   de le croire parce que je savais que de tels

  3  

  4   obusiers n'existaient pas. Je lui ai demandé : "Est-ce que l'obusier a été

  5   restitué ?".

  6   J'ai vérifié une fois de plus et on a rappelé l'ordre également.

  7   Ensuite, il m'a dit qu'il n'avait pas ouvert le feu et moi je croyais à

  8   cette information et je n'avais pas d'autre choix, car il ne pouvait pas

  9   se rendre chez moi, ni moi chez lui.

 10   M. Rodrigues. - Pour une fois que nous sommes ici, j'en profite

 11   pour poser une autre question à M. Blaskic. Quand vous avez parlé avec le

 12   colonel Robert Stewart, il a mentionné l'hypothèse du HVO d'avoir fait feu

 13   sur Zenica, à ce moment est-ce que vous saviez déjà, vous étiez sûr

 14   d'avoir ou de ne pas avoir l'obusier de 155 mm ?

 15   M. Blaskic (interprétation). - Au cours de notre entretien, j'ai

 16   demandé au colonel Stewart, pour savoir s'il était au courant du calibre.

 17   Il m'a dit qu'il était au courant. Je savais que

 18   cette arme aurait dû être restituée en fonction de mon ordre, restituée au

 19   quartier général. Je savais que j'avais émis un tel ordre, mais je voulais

 20   vérifier quand même, une fois de plus, et c'est la raison pour laquelle

 21   j'ai appelé le commandant.

 22   M. Rodrigues. - A ce moment-là, vous étiez convaincu que vous

 23   n'aviez pas l'obusier avec ce calibre ?

 24   M. Blaskic (interprétation). - Oui, je le croyais et puis j'ai

 25   vérifié.


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  1   M. Rodrigues. - L'important était votre état d'esprit à

  2   l'instant. Quand vous avez parlé avec le colonel Robert Stewart, vous

  3   étiez presque sûr. Donc il était raisonnable de supposer que vous aviez

  4   déjà l'obusier, parce que vous aviez ordonné la dévolution. C'est cela ?

  5   M. Blaskic (interprétation). - Oui, c'est comme cela, mais avec

  6   une réserve, car j'ai émis beaucoup d'ordres qui n'ont pas été mis à

  7   exécution.

  8   M. Rodrigues. - Merci.

  9   M. Nobilo (interprétation). – Merci. Dites Colonel, le

 10   commandant de la brigade qui se trouvait à Vitez pouvait-il enquêter sur

 11   les actes commis par la police militaire, celle qui vous a été

 12   subordonnée ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - Tout d'abord, je vais répondre à

 14   la première partie de la question. Il ne pouvait pas faire l'enquête. Moi-

 15   même, je n'avais pas la liste des membres du commandement de la brigade.

 16   C'est une brigade qui était en train d'être créée. Elle n'a pas été créée,

 17   elle était en train de se créer.

 18   M. Nobilo (interprétation). - Maintenant, en ce qui concerne la

 19   position par rapport à Ahmici, est-ce que vous pouvez vous lever et nous

 20   montrer où se trouvait la ligne de défense par rapport à Ahmici et d'où

 21   les membres de l'armée de Bosnie-Herzégovine tiraient et vous rendaient

 22   impossible de vous rendre à Ahmici ?

 23   Est-ce que vous pouvez donc montrer les positions de l'armée ?

 24   M. Blaskic (interprétation). - Je montre d'abord la route

 25   principale, Vitez-Busovaca. Sur la route principale, deuxième village,


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  1   Ahmici se trouve à cet endroit-là.

  2   Sur la route principale à la sortie de Vitez, en se dirigeant

  3   vers Busovaca, nous avons appelé cette position les maisons de Dzidica.

  4   50 mètres par rapport à la route principale se trouvaient les forces de

  5   Bosnie-Herzégovine qui contrôlaient la route.

  6   Dans l'ensemble, derrière, c'est Sljivcica et Sivrino Selo

  7   également contrôlés par l'armée de Bosnie-Herzégovine. Ensuite, quelque

  8   part à l'est, par rapport aux maisons de Vidovici, Barin Gaj, le contrôle

  9   du village, le contrôle complet.

 10   Ensuite, la position suivante, il faudrait que je voie sur la

 11   carte, car sur la maquette il n'y a pas de désignation des installations.

 12   Il y a un village qui, en prolongement de Barin Gaj, est à côté de

 13   Hadrovci.

 14   Il faudrait que je voie maintenant sur la carte pour préciser.

 15   M. Nobilo (interprétation). - Les gens qui se trouvaient sur la

 16   ligne du front, pouvaient-ils circuler librement ou étaient-ils dans les

 17   tranchées ?

 18   M. Blaskic (interprétation). - Il y a un certain nombre de

 19   maisons qui sont restées, dont on a profité, des abris également. Il

 20   n'était pas possible de circuler, je le sais car le

 21   colonel Stewart est venu le 3 mai 1993 et il m'a informé, il m'a dit que

 22   sous sa protection, haute protection, les représentants de l'organisation

 23   des Droits de l'Homme sont entrés à Ahmici et l'un de ses soldats a été

 24   blessé grièvement, même si toutes les mesures de protection étaient

 25   entreprises. Il n'était pas possible de circuler, de se déplacer car les


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  1   positions et la route principale étaient sous le contrôle de l'armée de

  2   Bosnie-Herzégovine de manière continue.

  3   M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que le village d'Ahmici…

  4   Est-ce qu'on pouvait tirer sur Ahmici de Barin Gaj, du sommet ? Ou

  5   éventuellement on pouvait se positionner en contrebas et tirer sur Ahmici

  6   ?

  7   M. Blaskic (interprétation). - Oui, il a été possible de tirer

  8   sur Ahmici de Barin Gaj, également de la position au-dessus de Kratine et

  9   également de Vranska et de Kruscica en

 10   utilisant les mortiers.

 11   M. Nobilo (interprétation). - Est-ce qu'on pouvait également

 12   utiliser des tirs d'infanterie sur Sljivcica ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - Oui.

 14   En provenance de Barin Gaj, les snippers pouvaient agir et j'ai

 15   montré tout à l'heure, il y a la maison de Dzidica. Zoran Mravak a été tué

 16   et lui il se déplaçait de Busovaca. Il allait à Nova Bila pour se joindre

 17   à nous où a eu lieu la réunion de la commission conjointe. Ensuite, il y

 18   avait Safer Kokanja également qui a été tué à cet endroit-là.

 19   M. Nobilo (interprétation). - Vous avez dit que vous faisiez

 20   confiance au commandant du bataillon d'artillerie. Est-ce que le

 21   commandant du bataillon d'artillerie vous a été subordonné ? Est-ce que

 22   c'était l'officier que vous aviez désigné, que vous avez pu remplacer ?

 23   M. Blaskic (interprétation). - Oui.

 24   M. Nobilo (interprétation). - Et le commandant de la police

 25   militaire qui vous envoyait de faux rapports, est-ce qu'il était votre


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  1   officier ? Vous avez pu le remplacer ou

  2   entreprendre des mesures disciplinaires contre lui ?

  3   M. Blaskic (interprétation). - Non.

  4   M. Shahabuddeen (interprétation). - Au moment où vous avez parlé

  5   avec votre commandant du bataillon d'artillerie pour déterminer si un

  6   obusier de 155 mm avait été utilisé contre Zenica, la situation était-elle

  7   telle que les médias parlaient de ce qui s'était passé à Zenica ?

  8   M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Président, Messieurs

  9   les Juges, si j'ai bien suivi la traduction, est-ce que les médias

 10   parlaient de ce qui se passait à Zenica ?

 11   Je dois répondre que l'adjoint du service d'informations m'a

 12   transmis l'information. Personnellement, je n'écoutais pas la radio à ce

 13   moment-là. Je n'avais pas beaucoup de temps

 14   pour écouter la radio.

 15   M. Shahabuddeen (interprétation). - A ce moment-là, vous ne

 16   saviez donc pas si les médias avaient parlé de cela, s'ils avaient parlé

 17   de ce qui s'était passé à Zenica au moment où vous avez discuté avec votre

 18   commandant d'artillerie ?

 19   M. Blaskic (interprétation). - Le 19 avril, au cours de la

 20   matinée, l'adjoint du centre d'informations m'avait dit que les masses

 21   media avaient diffusé la nouvelle sur le pilonnage de Zenica.

 22   M. Shahabuddeen (interprétation). - Si votre commandant de

 23   l'artillerie n'avait pas restitué l'obusier de 155 mm et s'il l'avait

 24   utilisé pour pilonner Zenica, vous seriez-vous attendu à ce qu'il vous

 25   dise qu'il l'avait utilisé ?


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  1   M. Blaskic (interprétation). - Il aurait été normal qu'il me le

  2   dise, mais il m'est très difficile de vous répondre à cette question. De

  3   toute façon, j'aurais pu vérifier cela d'une manière très simple.

  4   M. Shahabuddeen (interprétation). - Je vous remercie, Général.

  5   M. Nobilo (interprétation). - Général, dites maintenant si on

  6   savait de manière exacte quelles étaient les positions des pièces

  7   d'artillerie, est-ce que c'était facile également de vérifier s'il y avait

  8   des pièces d'artillerie de 155 mm ?

  9   M. Blaskic (interprétation). - Oui, c'était simple de vérifier,

 10   même si le commandant du bataillon d'artillerie m'avait trompé, s'il ne me

 11   le disait pas, j'aurais pu vérifier.

 12   M. le Président. - Je voudrais vous demander une précision.

 13   Lorsque vous discutez avec le colonel Stewart, j'ai pris en notes, vous

 14   dites : "Si ce sont mes soldats qui ont fait cela à Ahmici, j'en serai

 15   responsable". Par ailleurs vous nous dites que la police militaire...

 16   Enfin, on finit par admettre comme évident que la police militaire vous

 17   envoyait toujours de faux rapports.

 18   Alors, puisque vous ne pouvez rien obtenir de la communauté, des

 19   forces de la Forpronu -vous n'avez pas les chars, les blindés qui vous

 20   permettraient de faire diligenter

 21   l'enquête-, le Juge Rodrigues vous a demandé si vous pouviez au moins

 22   faire venir le commandant jusqu'à vous, vous dites que ce n'est pas

 23   possible, alors j'essaie de trouver une autre solution.

 24   Finalement, est-ce que vous dites au général Petkovic :

 25   "Général, j'ai eu une conversation avec le colonel Stewart qui a été très


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  1   sévère avec le HVO. Moi-même, je suis persuadé que c'est le HVO qui a

  2   commis les atrocités à Ahmici. Aidez-moi, trouvez-moi une solution.

  3   Renvoyez le commandant de la police militaire" puisque, me semble-t-il, il

  4   dépend de Mostar. Est-ce que vous faites quelque chose de cette nature-

  5   là ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - Oui, Monsieur le Président, je

  7   vais d'abord répondre par l'affirmative à votre question. J'ai dit au

  8   colonel Stewart : "Si mes soldats avaient fait quelque chose qui n'aurait

  9   pas été correct selon mes ordres, à ce moment-là c'est moi qui en serais

 10   responsable." Quand je disais "mes soldats", je pensais toujours aux

 11   soldats qui m'ont été subordonnés directement, hiérarchiquement.

 12   J'ai informé par écrit et verbalement, et même pour que ce

 13   rapport soit en vigueur et qu'il soit interprété de manière plus ferme,

 14   j'ai donné du poids à chaque mot.

 15   M. le Président. - Elle est à vous, la police militaire, depuis

 16   le 16 avril, 11 heures 42. Elle est à vous. Donc, vous dites bien : "Si ce

 17   sont mes soldats", y inclue la police militaire, y inclues les forces

 18   spéciales. Mais ma question, c'est vers le général Petkovic : puisque les

 19   blindés, vous ne les avez pas, le commandant ne peut pas venir, ne peut

 20   pas faire les 3 kilomètres pour venir à votre réunion répondre devant vous

 21   de ce qui s'est passé ; vous êtes conscient que c'est tragique pour le

 22   HVO, Stewart vous l'a dit, c'est une catastrophe politique pour le HVO.

 23   Vous en êtes conscient, vous émettez les ordres D363, D362, D361. Vous

 24   vous occupez des immeubles, des propriétés, des cambriolages, vous nous le

 25   dites ce matin. Il ne vous reste plus qu'à vous tourner vers votre


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  1   hiérarchie supérieure.

  2   Est-ce que vous faites quelque chose avec le général Petkovic ?

  3   M. Blaskic (interprétation). - Je l'ai fait, pas seulement vis-

  4   à-vis du général Petkovic, mais vis-à-vis de tout homme qui était

  5   supérieur à moi, y compris vis-à-vis du commandant des forces armées du

  6   HVO, le commandant suprême.

  7   M. le Président. - Alors, vous faites quelque chose ? Vous

  8   téléphonez ? Vous écrivez ? Vous faxez ? Vous allez à Mostar ? ... puisque

  9   vous êtes capable de minuter toutes vos journées ? Vous vous souvenez,

 10   vous faites beaucoup de choses dans la journée.

 11   C'est un événement majeur : le colonel Stewart vous a dit deux

 12   jours avant : "C'est une catastrophe !", et il vous dit : "Ce sont vos

 13   soldats !", et vous répondez : "Si ce sont mes soldats, j'en serai

 14   responsable."

 15   Qu'est-ce que vous faites vis-à-vis du général Petkovic ? Vous

 16   faites quelque chose de concret ?

 17   M. Blaskic (interprétation). - J'envoie un rapport, relatif à

 18   tout ce que dit un rapport écrit, que j'envoie au général Petkovic. Je

 19   crois que ce rapport est dans les pièces à

 20   conviction. Je ne sais pas exactement...

 21   M. Nobilo (interprétation). - Nous y viendrons plus tard.

 22   M. le Président. - Maintenant nous allons faire la pause puisque

 23   nous en sommes à trois-quarts d'heures. Donc, nous faisons un quart

 24   d'heure de pause.

 25   (L'audience, suspendue à 16 heures 45, est reprise à


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  1   17 heures 10.)

  2   M. le Président. – L'audience est reprise.

  3   Je crois que c'est le souhait de la défense d'arrêter un peu

  4   plus tôt. Vous préférez que l'on fasse une séquence plus courte, c'est

  5   cela Maître Hayman ?

  6   M. Hayman (interprétation). - Nous savons que le général Blaskic

  7   est arrivé ici à 8 heures 30 ce matin, la journée est un peu longue pour

  8   lui.

  9   M. le Président. - Nous n'attendrons pas 17 heures 45, vers

 10   17 heures 30, 35, nous arrêterons.

 11   M. Nobilo (interprétation). - D'accord.

 12   Je vous remercie.

 13   Général, au moment où nous avons suspendu momentanément

 14   l'audience, vous aviez encore une réponse à fournir au Président.

 15   Avez-vous demandé le remplacement de la police militaire et

 16   avez-vous informé vos supérieurs ?

 17   Pourriez-vous rapidement, dans le cadre de la chronologie,

 18   expliquer ce que vous avez fait, eu égard à cette question ?

 19   M. Blaskic (interprétation). - Oui, j'ai demandé le

 20   remplacement. Nous verrons dans la chronologie que ce remplacement a eu

 21   lieu à ma demande avec l'appui du chef d'état-major principal du HVO.

 22   M. Nobilo (interprétation). - Sommes-nous en droit de dire qu'à

 23   l'issue d'une soixantaine de jours, ce remplacement a pu être effectué ?

 24   M. Blaskic (interprétation). - Oui, et cela apparaîtra lorsque

 25   nous reprendrons la chronologie dans la partie suivante de ma déposition


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  1   M. Nobilo (interprétation). – Ce jour-là, nous parlons de la

  2   journée du 24 avril, vous avez eu une réunion à 16 heures avec

  3   M. de la Motta du CICR. Vous rappelez-vous le sujet de cette réunion ? De

  4   quoi a-t-il été question ?

  5   M. Blaskic (interprétation). - Ce jour-là, juste avant la

  6   réunion, j'ai reçu des informations selon lesquelles les villages croates,

  7   de la municipalité de Travnik, Grahovcici et Brajkovici étaient bloqués.

  8   J'ai également été informé du fait qu'à Novi Seher, des réfugiés de Zenica

  9   arrivaient et dans l'après-midi, j'ai eu une réunion avec M. de la Motta

 10   du CICR qui a lui-même abordé le sujet du rôle joué par les médias.

 11   Il a parlé des médias qui étaient sous le contrôle de la partie

 12   croate et de la partie musulmane bosnienne, en signalant que ces médias

 13   étaient en train d'aggraver les tensions, et notamment les tensions

 14   opposant l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO.

 15   Après cela, M. de la Motta a parlé du déplacement d'une certaine

 16   catégorie de personnes ; il s'agissait des malades, des personnes âgées,

 17   des femmes enceintes, des enfants. Je l'ai informé une nouvelle fois du

 18   fait que j'avais reçu l'opinion du HCR qui n'autorisait pas de tels

 19   déplacements, mais que si le CICR et lui-même le décidaient, je me suis

 20   déclaré prêt à lui fournir le soutien le plus entier pour l'exécution de

 21   ces tâches.

 22   Nous avons ensuite parlé de la liberté de circulation. J'ai dit

 23   à M. de la Motta que, malheureusement, en raison de la situation en

 24   vigueur à ce moment-là, la liberté de circulation se résumait à une

 25   liberté de départ, c'est-à-dire à une liberté de déménager, car


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  1   pratiquement tous les Croates s'efforçaient de partir vers les territoires

  2   sous contrôle du HVO et pratiquement tous les Musulmans bosniens, pour

  3   d'autres raisons, s'efforçaient de se rendre sur le territoire

  4   placé sous le contrôle de l'armée de Bosnie-Herzégovine. J'ai dit que cela

  5   me créait de grandes difficultés dans ma tâche à garantir la sécurité des

  6   immeubles et de la propriété des personnes qui quittaient ce territoire.

  7   Après cela, il m'a demandé quelle était ma position et je lui ai

  8   répondu que, d'après moi, il ne fallait pas effectuer ces déplacements de

  9   personnes, mais, dans les limites de la sécurité, s'efforcer que chacun

 10   continue à vivre là où il est né et où il se trouve à ce moment-là.

 11   Ensuite, je l'ai prié de tenter d'intervenir auprès du Président

 12   de l'armée de Bosnie-Herzégovine, en raison de l'action des tireurs isolés

 13   à partir de Grbavica sur des cibles déterminées.

 14   Je lui ai déclaré que nous avions déjà l'accord du 20 avril 1993

 15   selon lequel ce territoire devait être démilitarisé, mais que se

 16   trouvaient toujours à cet endroit des positions de tireurs embusqués qui

 17   mettaient des vies en danger.

 18   Ensuite, nous avons encore parlé des relations de la Croix-Rouge

 19   internationale. Monsieur de la Motta m'a dit que, ce que jour-là, donc le

 20   24 avril, il souhaitait se rendre à Kruscica, qui était sous le contrôle

 21   de l'armée de Bosnie-Herzégovine.

 22   Je l'ai appuyé dans son intention et je lui ai déclaré que

 23   j'allais m'efforcer de faire en sorte que cette visite se déroule sans

 24   encombre.

 25   Monsieur de la Motta m'a dit qu'il constatait l'existence d'une


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  1   volonté favorable au cessez-le-feu. Il pensait aux accords conclus, d'un

  2   arrêt des combats. Je lui ai répondu : "Vous la constatez peut-être au

  3   sein du HVO, mais, malheureusement, je ne vois pas la même bonne volonté

  4   au sein de l'armée de Bosnie-Herzégovine s'agissant de la signature d'un

  5   accord de cessez-le-feu".

  6   Monsieur de la Motta a déclaré que, y compris au cours de cette

  7   journée du 24, Zenica avait été pilonnée aux alentours de

  8   14 heures 5 minutes. Il l'a dit lors de la réunion que nous avions

  9   ensemble. Je l'ai informé une nouvelle fois du fait que cet acte était

 10   sans doute dû aux Serbes à partir de leur position en vue d'augmenter les

 11   tensions et les difficultés entre le HVO et l'armée de Bosnie-Herzégovine.

 12   Ce pilonnage visait parfois des territoires sous le contrôle du

 13   HVO et parfois des territoires sous le contrôle de l'armée de

 14   Bosnie-Herzégovine.

 15   Ce même jour, j'ai également noté qu'il aurait dû y avoir une

 16   tournée de toutes les positions de tirs du HVO de la part de patrouille

 17   des Nations Unies.

 18   Dans l'après-midi, j'ai reçu des informations relatives au

 19   comportement des membres du 91ème Département de sabotage de l'armée de

 20   Bosnie-Herzégovine, un comportement inacceptable. Et on m'a informé que

 21   les membres du commandement conjoint, M. Dzemo Merdan et M. Franjo Nakic

 22   étaient allés inspecter les positions dans la région de Kiseljak. Cela m'a

 23   surpris également, car je me serais attendu à ce que cette commission

 24   conjointe se rende en priorité dans le secteur d'Ahmici.

 25   M. Nobilo (interprétation). - A-t-il été question d'Ahmici dans


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  1   votre conversation avec M. de la Motta ?

  2   M. Blaskic (interprétation). - Oui, j'ai parlé d'Ahmici aussi

  3   avec lui. Je lui ai fourni des informations quant au fait que deux

  4   problèmes se posaient à moi ; un problème de sécurité et un problème lié à

  5   la réalisation d'une enquête.

  6   Je lui ai dit que j'avais émis un ordre favorable au démarrage

  7   d'une enquête. C'est tout ce que nous nous sommes dits sur ce sujet lors

  8   de notre réunion à 16 heures.

  9   M. Nobilo (interprétation). - Pourriez-vous dire aux Juges, au

 10   cours de toutes ces rencontres et réunions, quelle était la situation sur

 11   le terrain ? La situation était-elle calme, tranquille ou était-elle

 12   caractérisée par les conflits dont nous avons déjà parlé qui duraient

 13   depuis le 16 avril 1993 ?

 14   M. Blaskic (interprétation). - Malheureusement, nous le

 15   constaterons davantage par la suite, le commandement agissait dans un

 16   certain sens, mais les conflits se poursuivaient

 17   sur le terrain.

 18   Les opérations de combats étaient toujours en cours. Nous

 19   n'étions pas séparés, même par un mètre. Nous nous trouvions dans cette

 20   situation un peu étonnante où nous avions signé un cessez-le-feu, mais les

 21   combats se poursuivaient alors que la commission conjointe travaillait à

 22   Travnik. Les combats avaient peut-être une intensité un peu amoindrie,

 23   mais, malheureusement, ils se poursuivaient. Nous le constaterons dans la

 24   suite de la déposition.

 25   M. Nobilo (interprétation). - Général, l'ordre du 18 et cet


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  1   accord de cessez-le-feu exigeaient un retrait des troupes et une

  2   séparation, une cessation du contact. L'armée de Bosnie-Herzégovine, je

  3   crois, si elle s'était retirée de 500 mètres comme cela avait été conclu,

  4   décidé, est-ce que cela aurait signifié que vous auriez eu à votre

  5   disposition un espace libre que vous auriez pu traverser tranquillement

  6   pour aller voir à Ahmici pour voir ce qui s'était passé ?

  7   M. Blaskic (interprétation). - Eh bien, je voudrais m'approcher

  8   de la maquette, si

  9   c'est possible, pour vous montrer de la façon la plus claire ce qu'il en

 10   était.

 11   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, selon l'accord du

 12   22 avril, le territoire de Ponjavor, Vrhovine, dans la direction de

 13   Jelinak et Putis, y compris la route principale, devait être un territoire

 14   sur lequel étaient censées patrouiller les forces de Nations Unies. Toutes

 15   les forces de Bosnie-Herzégovine étaient censées se retirer à partir de la

 16   position que je montre ici, dans la direction de Zenica.

 17   Quant à l'ensemble des forces du HVO, elles étaient censées se

 18   retirer en aval de la route principale Vitez-Busovaca. C'est donc ce

 19   territoire dont je suis en train de parler qui aurait dû être démilitarisé

 20   et laissé à la simple disposition de la Forpronu qui aurait pu y

 21   patrouiller.

 22   Donc, je montre Vitez, la route principale en direction de

 23   Zenica, et ensuite à partir de Zenica, on continue vers Vjetrenica. C'est

 24   tout ce territoire sur lequel il n'y aurait eu aucune force autre que

 25   celle des Nations Unies. Il aurait été possible de travailler de façon


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  1   très

  2   avantageuse sur ce territoire.

  3   Ce territoire nous aurait permis de nous transférer vers Vlasic.

  4   D'ailleurs, le commandement conjoint travaillait à cela, il travaillait

  5   notamment au déblocage de la ville de Travnik, tâche à laquelle nous

  6   aurions pu nous consacrer. Nous le verrons de plus près lorsque nous

  7   reprendrons la chronologie plus tard.

  8   M. Nobilo (interprétation). - Etes-vous en train de dire que si

  9   l'armée de Bosnie-Herzégovine avait respecté cet accord, vous auriez eu un

 10   espace disponible, libre, pour mener une enquête sur Ahmici ?

 11   M. Blaskic (interprétation). - Oui, je n'aurais pas eu besoin

 12   d'aide pour accéder à cette zone, mais j'aurais eu besoin d'appui, bien

 13   entendu, cela ne fait aucun doute.

 14   M. Nobilo (interprétation). - Merci. Je demande que l'on remette

 15   au témoin le document, pièce à conviction de la défense D364, qui a été

 16   rédigé également le 24 avril 1993.

 17   Donc vous avez rédigé cet ordre à 14 heures 20 minutes, et vous

 18   dites à tous les commandants de la zone opérationnelle de Bosnie centrale,

 19   vous l'adressez aussi aux brigadiers. Le titre de l'ordre est : "Le

 20   traitement des civils et des prisonniers : demande ou requête.

 21   En se basant sur une demande du chef du quartier général du HVO

 22   n° 02-2/I-01673/93, du 22 avril 1993, et eu égard de l'application des

 23   principes de base du droit international humanitaire, je demande à tous

 24   les membres et à toutes les unités du HVO :

 25   1. Respect et la protection de la population civile qui a été


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  1   touchée par les combats. Les civils par la définition n'ont pas un rôle

  2   actif dans ces conflits et ne peuvent pas être la cible des attaques.

  3   2. Traiter des combattants et des civils capturés d'une manière

  4   humaine et leur fournir une protection adéquate.

  5   3. Rapporter au CICR l'identité de tous les prisonniers et de

  6   tous les détenus et permettre aux représentants du CICR de leur rendre

  7   visite conformément aux standards du CICR.

  8   4. Recueillir, s'occuper de (fournir des soins chirurgicaux) et

  9   protéger tous ceux qui ont été blessés quelle que soit leur appartenance.

 10   5. Assurer un accès sans entrave aux convois humanitaires afin

 11   d'assurer un traitement sans délai aux victimes du conflit.

 12   Signé Colonel Tihomir Blaskic".

 13   C'est le quatrième ordre du 24, relatif à la protection des

 14   civils, ou des blessés ou des prisonniers de guerre. Qu'est-ce que vous

 15   avez voulu, en fait, faire avec autant d'ordres qui ont été émis ?

 16   M. Blaskic (interprétation). - Comme je l'ai déjà dit, une de

 17   nos tâches principales était de mener une enquête. Pour moi, ce qui était

 18   encore plus important était d'empêcher une répétition de ce qui s'était

 19   passé à Ahmici. Par conséquent, j'ai fait de mon mieux pour que ce crime

 20   ne soit pas répéter. Ici, on parle de l'application des principes de base.

 21   On parle également du traitement des civils et des prisonniers.

 22   M. Nobilo (interprétation). - Principe de base de quoi ?

 23   M. Blaskic (interprétation). – L'application des principes de

 24   base du droit humanitaire international. J'ai demandé le respect de tous

 25   ces principes de la part de tous les membres du HVO.


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  1   M. Nobilo (interprétation). - Je vous remercie. Je crois que cet

  2   ordre est très clair. On n'a pas besoin de l'expliquer en détail.

  3   Si cela est possible, nous pourrions passer à la journée du

  4   25 avril ou, si peut-être M. le Président l'estime, nous pourrions nous

  5   arrêter. Nous avons terminé la journée du 24 avril.

  6   M. le Président. – Il s'agit de vous, là, Maître Nobilo.

  7   M. Nobilo (interprétation). - Je peux continuer, bien sûr.

  8   M. le Président. - J'avais cru comprendre que la demande de la

  9   défense était d'arrêter, compte tenu de la fatigue de votre client, était

 10   d'arrêter. Je tiens à ce qu'il soit bien dit que ce n'est pas nous qui

 11   arrêtons. Nous, nous avons commencé à 14 heures 45, il est tout à fait

 12   normal de continuer jusqu'à 17 heures 45. Cela étant, compte tenu des

 13   accords que nous avons pris pour une déposition un peu exceptionnelle

 14   comme celle de l'accusé, qui est quand même longue et difficile pour lui,

 15   nous agréons tout à fait à votre demande d'arrêter. Qu'il soit très clair,

 16   il s'agit de votre demande. Il ne s'agit pas de la fatigue des Juges. Les

 17   Juges ne sont jamais fatigués.

 18   M. Nobilo (interprétation). - La défense non plus. C'est notre

 19   client. C'est dans l'intérêt de notre client que je propose que nous nous

 20   arrêtions ici pour aujourd'hui.

 21   M. le Président. - Nous suspendons. Et demain, nous reprendrons

 22   à 9 heures. Il me semblait que nous avions avancé. C'est le cadeau que

 23   nous a fait le Juge Rodrigues en arrivant dans notre Chambre. Il nous a

 24   mis le vendredi à 9 heures. Nous le remercions. L'audience est levée, à

 25   demain.


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  1   L'audience est levée à 17 heures 30.

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