Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 18419

1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL AFFAIRE N° IT-95-14-T

2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE

3 Jeudi 18 mars 1999

4 L'audience est ouverte à 11 heures 15.

5 M. le Président. - Monsieur le Greffier, pouvez-vous faire

6 entrer le témoin ?

7 (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

8 Je voudrais -non pas m'assurer que les interprètes m'entendent,

9 puisque ce matin dans une affaire je savais qu'ils nous entendaient- mais

10 peut-être saluer les conseils de la défense, de l'accusation et saluer

11 notre témoin. A l'intention du public, je dirai que nous sommes toujours

12 dans le procès Blaskic, mais que c'est l'accusé qui témoigne selon nos

13 règles de procédure sous serment. A cet égard, je demanderai si le

14 greffier peut nous indiquer combien il reste de temps à la défense. A-t-

15 elle fixé le temps qui lui reste pour l'interrogation principal du général

16 Blaskic ? Si le greffier ne peut répondre, Me Hayman ou Me Nobilo peut-il

17 répondre ?

18 Ensuite, je demanderai à M. Olivier Fourmy de bien vouloir

19 rapidement nous dire où l'on en est du calendrier dont nous avons parlé,

20 les Juges et lui, jusqu'au moins jusqu'au 20 ou 30 mai, enfin jusqu'à la

21 fin mai puisque, lorsque l'on fait les calendriers à trop longue échéance,

22 les faits nous démentent.

23 Maître Hayman, ou Monsieur Abtahi, combien de jours nous reste-

24 t-il ? Nous prenons un peu de retard. Avez-vous réévalué ?

25 M. Hayman (interprétation). - Je pensais que votre question

Page 18420

1 était de savoir combien de jours il nous restait sur nos soixante jours

2 prévus.

3 M. le Président. - Il ne doit plus vous rester grand-chose,

4 Maître Hayman, je pense.

5 M. Hayman (interprétation). - Je crois qu'effectivement le temps

6 nous manque quelque peu, oui. Hier, je crois que M. Dubuisson nous a fait

7 savoir qu'il restait 12, 14, 16 jours, quelque chose comme cela pour ce

8 qui est du temps disponible, donc.

9 M. le Président. - Il ne le sait peut-être pas.

10 M. Abtahi. - Je peux confirmer ce que vient d'indiquer

11 Me Hayman, il devrait rester environ 12 à 13 jours.

12 M. le Président. - Douze à 13 jours pour la défense. Bien.

13 Pour le général Blaskic, à quel moment pensez-vous terminer ?

14 Nous sommes aujourd'hui jeudi 18 mars, nous avons une petite journée

15 aujourd'hui, demain une grande matinée.

16 M. Hayman (interprétation). - Nous ne pensons pas pouvoir

17 terminer aujourd'hui, Monsieur le Président. Comme vous le savez, la

18 semaine a été quelque peu raccourcie. Et nous avons un dialogue très

19 positif et très riche entre les Juges et les témoins, cela prend un

20 certain temps. Nous sommes tout à fait heureux de voir ce dialogue se

21 dérouler, et nous pensons que cela va raccourcir l'ensemble de la

22 procédure pour ce qui est du général Blaskic en tant que témoin.

23 Cependant, d'après notre estimation, il nous faudra encore deux

24 jours-procès entiers. Je pense qu'il nous reste une demi-journée mardi

25 prochain et une journée entière mercredi. Je pense donc qu'à la fin de

Page 18421

1 mercredi nous pourrions nous rapprocher de la fin de l'interrogatoire

2 principal.

3 M. le Président. - Dans ces conditions, Monsieur Fourmy, avez-

4 vous pris en note tout cela ? Cela bouleverse-t-il nos plans ?

5 M. Fourmy. - Oui, Monsieur le Président. J'avais essayé

6 d'établir un calendrier prévisionnel qui reposait sur l'idée que la

7 défense aurait terminé l'interrogatoire principal du générale Blaskic à la

8 fin de cette semaine, voire même que l'accusation aurait pu commencer le

9 contre-interrogatoire.

10 En fait, cela reporterait d'environ une semaine mon estimation,

11 ce qui fait que nous aurions pour la semaine du 23 au 26 mars -donc la

12 semaine prochaine- deux jours pour la défense, deux jours et demi, jusque

13 donc aux environs du 24 mars.

14 La semaine du 29 mars au 2 avril, la Chambre ne siège pas, comme

15 les parties en ont été informées.

16 Dans la semaine du 6 au 9 avril, le Procureur continuerait le

17 contre-interrogatoire du général.

18 Même chose dans la semaine du 12 au 16 avril.

19 Ensuite, entre le 19 et le 29 avril, compte tenu de l'emploi du

20 temps des Juges qui est particulièrement chargé, il n'y aurait pas

21 d'audience, et le Procureur devrait donc continuer son contre-

22 interrogatoire dans la semaine du 3 au 7 mai. Compte tenu du report dont

23 nous venons de parler, je pense qu'en fait toute cette semaine sera

24 vraisemblablement consacrée à la fin du contre-interrogatoire par

25 l'accusation, ce qui bouleverse le calendrier prévisionnel, puisque

Page 18422

1 j'avais pensé que cette semaine-là aurait été consacrée à la présentation

2 des derniers témoins de la défense, puis au début de la réplique du

3 Procureur.

4 Si cette semaine du 3 au 7 mai est entièrement consacrée à la

5 fin du contre-interrogatoire du Procureur, l'éventuelle réplique de la

6 défense et des questions des Juges, ce qui -il faut quand même en

7 convenir- sera en tout état de cause un délai bref et un temps bref, la

8 semaine du 10 au 14 mai, il n'y aura pas d'audience.

9 La semaine du 17 au 21 mai serait consacrée donc aux derniers

10 témoins de la défense.

11 M. le Président. - Du 10 au 14 mai, nous pourrions peut-être

12 mettre un point d'interrogation ?

13 M. Fourmy. - Oui, cela reste à confirmer, Monsieur le

14 Président...

15 M. le Président. - Cela reste à confirmer en fonction de ce qui

16 s'est passé ce matin. Il n'est pas convenable de parler d'une affaire dans

17 le cadre d'une autre instance, mais nous n'avons pas pris de décision

18 encore. Effectivement, nous étions occupés sur une autre affaire. Il est

19 possible que cela soit un peu différent, n'est-ce pas, Monsieur Fourmy ?

20 M. Fourmy. - Tout à fait, Monsieur le Président. Peut-être que

21 cette semaine pourrait nous donner la flexibilité ou quelques-uns des

22 jours qui sont susceptibles de manquer.

23 Dans la semaine du 17 au 21 mai, présentation des derniers des

24 témoins de la défense, réplique de l'accusation, et dans la semaine du 24

25 au 28 mai, on achèverait la réplique de l'accusation et la duplique de la

Page 18423

1 défense.

2 Cela est un calendrier que je crois malgré tout, alors qu'il est

3 assez long, relativement optimiste dans les circonstances présentes, étant

4 entendu que la Chambre, Monsieur le Président, si j'ai bien compris,

5 voudrait, en tout état de cause, que le procès s'achève à la fin juin,

6 dans la semaine du 22 au 25 juin.

7 M. le Président. - Ce qui est très symbolique par rapport à la

8 date du début de ce procès ; vous l'avez fait exprès, Monsieur Fourmy ?

9 M. Fourmy. - Un petit peu, Monsieur le Président.

10 M. le Président. - Je vous remercie. Ce n'est vraiment pas

11 facile. Les faits nous démentent périodiquement, mais c'est ainsi. Et il

12 faut que chacun puisse s'exprimer dans cette enceinte pour réaliser ce

13 procès juste et équitable que tout le monde appelle de ses voeux dans une

14 instance internationale.

15 Nous pouvons dans ces conditions continuer sans perdre davantage

16 notre temps. Je remercie M. Fourmy d'avoir fait ce travail prospectif.

17 Maître Nobilo, nous pouvons reprendre. Nous en avions terminé

18 avec le 27 mai 1993 ?

19 M. Nobilo (interprétation). - Effectivement, Monsieur le

20 Président. Hier soir, nous avons terminé notre journée avec le 27 mai.

21 En guise d'introduction, j'aimerais répéter que les événements

22 qui se sont produits en avril et en mai ont été nombreux. Par la suite,

23 nous pourrons procéder beaucoup plus rapidement pour les mois suivants,

24 les mois de 1993. Cela prendra un certain temps, mais nous ne procéderons

25 pas par jour, peut-être par semaine, ou même par mois, quand nous

Page 18424

1 relaterons tous les événements qui se sont produits au cours de cette

2 période.

3 Général, le 28 mai 1993, deux membres de votre commandement se

4 sont vu privés de leur appartement. Que s'est-il passé ? Et de quoi

5 était-ce un signe ?

6 M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Président, Messieurs

7 les Juges, Zlavko Marin et Mirko Batinic, deux membres du commandement,

8 m'ont affirmé que des Croates en exil s'étaient installés dans leur

9 appartement ; pour Zlavko dans son propre appartement et pour M. Batinic

10 dans sa maison où vivait également sa famille. Sans les prévenir

11 préalablement, ils sont entrés par effraction dans leur appartement, se

12 sont installés.

13 Il s'agissait sans doute là d'un signe du symbole de la

14 situation qui régnait de façon plus générale dans toute la vallée de la

15 Lasva. Il y avait des colonnes immenses de réfugiés qui arrivaient dans la

16 région afin d'y trouver un refuge. Et ces réfugiés entraient par

17 effraction dans les appartements d'autres personnes et notamment dans les

18 lieux de résidence des membres du commandement de la zone opérationnelle

19 et d'officiers du HVO.

20 Etant donné la situation globale, qui était très mauvaise du

21 point de vue de la sécurité, à la fois à Vitez et à Novi Travnik, j'ai

22 demandé que le commandant de la police militaire soit dans son bureau au

23 quartier général afin qu'il puisse réagir de façon immédiate à quelque

24 incident que ce soit. Malheureusement, ma demande n'a pas eu de suite.

25 J'ai également demandé que Miro Kosic et Zepko Marecevic soient

Page 18425

1 arrêtés et que des sanctions disciplinaires soient prises à leur encontre,

2 car ils avaient pénétré dans des appartements musulmans.

3 Le 28 mai, j'ai reçu une demande des services de sécurité disant

4 que l'aide de la Forpronu était nécessaire afin de pouvoir entrer dans le

5 village d'Ahmici et de poursuivre l'enquête. Cette demande a été adressée

6 aux Nations Unies, mais aucune réponse n'a été donnée pour ce qui est de

7 l'entrée dans la zone d'Ahmici et d'assurer la sécurité des personnes qui

8 souhaitaient y entrer.

9 Au cours de la journée, j'ai également souhaité en apprendre

10 plus sur l'exode des Musulmans de Vitez notamment, parce que des bandes

11 organisées provoquaient parfois certains de ces départs. Des bandes

12 organisées qui réalisaient un certain profit grâce à ces départs.

13 Nous avons également étudié la possibilité d'interdire l'entrée

14 de zones urbaines à certains groupes armés. Mais le problème était le

15 suivant : chaque ville avait un nombre important, ou regroupait un nombre

16 important, de ce type de bandes armées et c'était une tâche difficile à

17 accomplir.

18 J'ai également demandé que les personnes qui avaient été

19 sanctionnées, qui avaient un casier judiciaire, quittent les rangs de la

20 police militaire. Et selon des rapports du service de sécurité, le 28 mai,

21 il y avait environ 100 personnes dans ce cas-là ; des membres de la police

22 militaire à l'encontre de qui des mesures disciplinaires avaient été

23 prises.

24 Pour ce qui est des unités chargées de la sécurité, j'ai demandé

25 que la composition de cette unité soit changée au quartier général.

Page 18426

1 M. Nobilo (interprétation). – Excusez-moi, il semble y avoir un

2 problème dans l'interprétation. Vous avez dit que dans la police

3 militaire, il y avait une centaine de personnes qui, par le passé, avait

4 commis un délit, c'est bien cela ? Alors qu'il est dit qu'il y avait

5 100 personnes à l'encontre de qui des mesures disciplinaires avaient été

6 prises.

7 Pouvez-vous nous expliquer très exactement quelle est la

8 différence afin de pouvoir corriger le compte rendu ?

9 M. Blaskic (interprétation). - J'ai dit que j'ai reçu des

10 informations du service chargé de la sécurité, selon lesquelles dans les

11 rangs de la police militaire 100 policiers militaires avaient un casier

12 judiciaire.

13 M. Nobilo (interprétation). - Lorsque vous parlez de casiers

14 judiciaires, de quoi parlez-vous ? Qui est chargé de ces casiers

15 judiciaires et que figure-t-il dans que ces casiers ?

16 M. Blaskic (interprétation). - Il s'agissait des postes de

17 police civile qui se chargeaient de tenir ces casiers judiciaires qui

18 concernaient des personnes qui, à un moment donné de leur vie, avaient

19 commis un délit ou un crime.

20 M. Nobilo (interprétation). – Selon la réglementation en vigueur

21 en ex-Yougoslavie et dans les Etats qui ont succédé à la dissolution de

22 l'ex-Yougoslavie, toute personne ayant un casier judiciaire ne pouvait pas

23 travailler dans la police, n'est-ce pas ?

24 M. Blaskic (interprétation). – Oui, c'était la règle en vigueur.

25 M. Nobilo (interprétation). – Veuillez poursuivre.

Page 18427

1 M. Blaskic (interprétation). - J'ai également reçu des

2 informations. Ou plutôt, ce jour-là, j'ai demandé aux personnes assurant

3 la sécurité du quartier général de la zone opérationnelle de Bosnie

4 centrale, ou plutôt j'ai demandé que ces personnes soient changées,

5 remplacées et qu'un personnel militaire plus qualifié soit sélectionné

6 afin d'occuper ces différents postes.

7 M. Nobilo (interprétation). - Quelles unités militaires étaient

8 chargées d'assurer la sécurité de votre quartier général à Vitez ?

9 M. Blaskic (interprétation). – C'était la police militaire, le

10 quatrième bataillon. Le 29 mai 1993, j'ai participé à la réunion

11 d'information du matin avec mes collaborateurs. Et je demandai que l'on

12 interdise l'entrée de zones habitées ou de villes aux bandes armées.

13 J'ai également demandé que l'on assure la prévention de vols

14 d'explosifs de l'usine qui fabriquait ces explosifs. J'ai été informé que,

15 ce jour-là, au poste de contrôle d'Ovnak, un affrontement s'était produit.

16 M. le Président. – Juste une précision, quand vous dites : "Je

17 demande, je demande", à qui demandez-vous ? "Je demande l'interdiction des

18 bandes armées", mais concrètement comment cela se manifeste-t-il ? A la

19 police militaire ?

20 M. Blaskic (interprétation). – Oui, effectivement, ma demande

21 était adressée à la police militaire, monsieur le Président.

22 M. Shahabudden (interprétation). - Général, vous avez mentionné

23 vos collaborateurs qui se trouvaient avec vous. Y avait-il un représentant

24 de la police militaire ou bien avez-vous, par la suite, envoyé un

25 document, votre demande, à la police militaire ?

Page 18428

1 M. Blaskic (interprétation). - Eh bien, généralement, nous

2 envoyons une demande séparée à la polie militaire.

3 M. Shahabuddeen (interprétation). - Merci beaucoup.

4 M. Nobilo (interprétation). - Veuillez poursuivre sur la journée

5 du 29.

6 M. Blaskic (interprétation). - Il y a donc eu un affrontement

7 armé entre des contrebandiers ou plutôt des groupes armés d'individus au

8 poste de contrôle d'Ovnak entre les membres de la police militaire qui

9 occupaient le poste de contrôle et des groupes qui participaient au marché

10 noir.

11 Un homme a été tué au cours de cet affrontement, un policier

12 militaire. Il s'agit de groupes armés qui venaient pour la plupart de

13 Travnik. Il y avait également des groupes armés qui venaient de Zenica.

14 A Zenica, des biens à forte valeur ajoutée et de forte valeur

15 étaient vendus.

16 A midi, j'ai reçu la visite de Milevoj Petkovic, le chef d'état-

17 major principal et il était escorté par le bataillon espagnol de la

18 Forpronu qui arrivait de Mostar.

19 M. Nobilo (interprétation). - Lorsque Milevoj Petkovic venait

20 vous rendre visite, qui assurait son transport ?

21 M. Blaskic (interprétation). - En règle générale, c'était

22 toujours le bataillon espagnol de la Forpronu qui était basé à Medugorje

23 et qui avait compétence sur Mostar.

24 Lors de la réunion avec le général de brigade Petkovic, je lui

25 ai fait part de la situation générale, nous en avons parlé. Nous avons

Page 18429

1 parlé également du rapport que j'avais reçu, du service chargé de la

2 sécurité.

3 M. Nobilo (interprétation). - Par rapport à quoi ? Sur quoi

4 portait ce rapport ?

5 M. Blaskic (interprétation). - Le rapport de l'enquête menée sur

6 Ahmici. Une fois de plus, je lui ai dit que je pensais que ce rapport

7 n'était pas complet et que, d'après le rapport, on pouvait conclure que

8 l'enquête allait se poursuivre jusqu'à ce que les auteurs soient

9 identifiés afin que des poursuites puissent être engagées à leur encontre.

10 Outre cela, je lui ai parlé des problèmes qui se présentaient

11 avec la police militaire et je lui ai parlé de la procédure de

12 remplacement des commandants. Je lui ai demandé que la procédure soit

13 accélérée, que la structure de commandement soit modifiée, que mes

14 compétences soient modifiées également afin que j'ai le commandement et le

15 contrôle de la police militaire.

16 M. Nobilo (interprétation). - Eu égard à la police militaire,

17 pourquoi avez-vous demandé toutes ces modifications et pourquoi, plus

18 particulièrement, vouliez-vous être le commandant de la police militaire ?

19 Etait-ce parce que vous vouliez être l'autorité suprême dans cette enclave

20 de un sur douze kilomètres afin de pouvoir défendre la région ou bien y

21 avait-il d'autres raisons qui vous motivaient ?

22 M. Blaskic (interprétation). - Je devais créer une police

23 militaire qui allait être un instrument de contrôle et de commandement,

24 mais je voulais également garantir les meilleures conditions possibles

25 pour l'assistant chargé de la sécurité afin qu'il puisse mener son enquête

Page 18430

1 dans les meilleures conditions. Parce que, d'après le rapport que j'avais

2 reçu, rien ne donnait les noms des personnes, et vraisemblablement la

3 structure de commandement de la police militaire était restée identique.

4 M. Nobilo (interprétation). - Votre supérieur, le général de

5 brigade, Petkovic, que pensait-il de l'enquête menée sur Ahmici et de

6 votre demande de contrôle vis-à-vis de la police militaire ? Vous a-t-il

7 dit qu'il vous aiderait ou vous a-t-il refusé son aide ?

8 M. Blaskic (interprétation). - Non, il m'a apporté son soutien.

9 Et lors de la réunion qu'il a tenue après avec des membres de mon

10 commandement, il a insisté pour qu'il soit pris bonne note de tous les

11 crimes commis et il a déclaré qu'il s'agissait d'une obligation et d'un

12 devoir de mener un enquête précise et complète sur les crimes.

13 Il a aussi insisté pour que tous les efforts possibles soient

14 déployés afin de limiter, voire d'éradiquer les activités des bandes

15 armées, de prévenir les actions privées, individuelles et arbitraires,

16 éventuellement le fait de commandants qui auraient décidé de le faire de

17 leur propre initiative. Il a également fait du problème de la défense une

18 priorité. Il a déclaré que le conflit entre les Croates et les Musulmans

19 était quelque chose d'inutile.

20 A ce moment-là, il a dit que la partie adverse ne pensait pas la

21 même chose. Il pensait que les Musulmans bosniens ne voyaient les choses

22 de la même façon que lui.

23 M. Nobilo (interprétation). - Et pour votre demande de

24 commandement de la police militaire dans la vallée de la Lasva, que vous

25 a-t-il dit au cours de votre conversation en tête-à-tête ?

Page 18431

1 M. Blaskic (interprétation). - Il a déclaré qu'il allait régler

2 ce problème rapidement avec le bureau de la Défense. Etant donné que mon

3 enclave était assiégée et la situation qui régnait à l'époque, je devais

4 pouvoir compter sur la police militaire et avoir le pouvoir de la diriger.

5 Le chef d'état-major a déclaré qu'il réglerait cela avec le

6 responsable du bureau de la Défense.

7 M. Nobilo (interprétation). - Merci beaucoup, veuillez

8 poursuivre votre récit des événements.

9 M. Blaskic (interprétation). - Le 30 mai 1993, au cours d'une

10 réunion à nouveau avec le chef d'état-major, j'ai donné l'ordre d'établir

11 un centre de transmission, de communication pour le commandement de la

12 zone opérationnelle de Bosnie centrale.

13 M. Nobilo (interprétation). - Quand vous parlez de la réunion

14 avec le chef d'état-major, vous parlez de votre chef d'état-major, non pas

15 de M. Petkovic, n'est-ce pas ?

16 M. Blaskic (interprétation). - Je parle de M. Nakic, le chef

17 d'état-major de la zone opérationnelle de Bosnie centrale.

18 Jusque-là, nous avions fait appel au service de centre de

19 transmission municipal, de la municipalité de Vitez. Nous n'avions pas

20 notre propre centre de transmission au quartier général de la zone

21 opérationnelle de Bosnie centrale.

22 J'ai également demandé, ce jour-là, que la police militaire

23 arrête 60 soldats de Zenica qui étaient devenus incontrôlables et

24 30 soldats de Travnik qui avaient quitté la ligne de front, qui avaient

25 donc déserté et qui se trouvaient dans les rues de Travnik ou de

Page 18432

1 Novi Travnik.

2 M. Nobilo (interprétation). - Ce groupe de 60 et ce groupe de

3 30 soldats, étaient-ce des soldats du HVO ?

4 M. Blaskic (interprétation). - Oui.

5 M. Nobilo (interprétation). - Veuillez poursuivre.

6 M. Blaskic (interprétation). - Au cours de l'après-midi, une

7 tentative d'assassinat a eu lieu contre le chauffeur d'un véhicule et

8 l'escorte du commandant de la brigade Francopan dans la zone de

9 responsabilité de la 306ème Brigade de montagne de l'armée de Bosnie-

10 Herzégovine. Le chauffeur a été tué, le garde du corps a été tué et le

11 commandant de la brigade avait été retenu à une réunion et il ne se

12 trouvait pas dans le véhicule.

13 M. Nobilo (interprétation). - Afin d'éclairer quelque peu la

14 situation à Busovaca et à Vitez, sur les territoires de ces deux

15 municipalités, il y avait des lignes de front, des tranchées, n'est-ce

16 pas ? Vous étiez en guerre avec l'armée de Bosnie-Herzégovine. Dans une

17 autre partie du territoire, qui aurait dû être contrôlé par vous, à

18 Travnik et à Novi Travnik, y avait-il des confrontations entre armée de

19 Bosnie-Herzégovine et le HVO ? La situation était-elle autre ?

20 M. Blaskic (interprétation). - La situation était autre à cet

21 endroit-là.

22 Les unités du HVO et de l'armé de Bosnie-Herzégovine ne se

23 battaient pas à cet endroit. En fait, sur la municipalité de Travnik,

24 elles étaient alliées et elles s'occupaient de la ligne de front

25 conjointement, face à l'armée de la Republika Srpska.

Page 18433

1 Les commandants essayaient de résoudre de nombreux incidents par

2 le dialogue, incidents provoqués par des soldats des deux camps. Il n'y

3 avait pas de lignes de front sur le territoire de la municipalité de

4 Travnik et de Novi Travnik. Mais dans la zone de Novi Travnik, il n'y

5 avait pas de soldats de l'armée de Bosnie-Herzégovine de Novi Travnik sur

6 la ligne de front face à l'armée de la Republika Srpska.

7 M. Nobilo (interprétation). - Lorsque vous parlez de ces deux

8 municipalités, Travnik et Novi Travnik, et lorsque vous dites qu'il n'y

9 avait pas de ligne de front, vous dites qu'il n'y en avait pas entre le

10 HVO et l'armée de Bosnie-Herzégovine, vous ne dites pas qu'il n'y avait

11 pas de front vis-à-vis des serbes ?

12 M. Blaskic (interprétation). - Non, parce que la ligne de front

13 contre les Serbes est restée identique pratiquement pendant toute cette

14 période.

15 M. Nobilo (interprétation). - D'après votre témoignage, peut-on

16 en conclure que dans ces deux municipalités ou dans les deux municipalités

17 de Busovaca et de Vitez plus précisément, vous étiez en guerre contre

18 l'armée de Bosnie-Herzégovine et que sur le territoire des deux autres

19 municipalités, Travnik et Novi Travnik, il y avait une certaine

20 coopération ?

21 M. Blaskic (interprétation). - Oui.

22 M. Nobilo (interprétation). - Veuillez poursuivre.

23 M. Shahabudden (interprétation). – Excusez-moi, une autre

24 question encore. Novi Travnik, n'est-ce pas ?

25 M. Nobilo (interprétation). – Oui.

Page 18434

1 M. Shahabudden (interprétation). - Mais les Croates coopéraient

2 d'une certaine manière avec qui ? Je n'ai pas très bien compris ce qu'a

3 dit le témoin. Avec qui ?

4 M. Nobilo (interprétation). - Le témoin a dit que sur le

5 territoire de la municipalité de Travnik et de Novi Travnik, il y avait

6 une coopération entre l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO.

7 Mais permettez-moi de poser un autre question au témoin. Comment

8 expliquez-vous qu'à Vitez et Busovaca, qui se trouvent placées sous votre

9 commandement, il y avait effectivement un conflit avec l'armée de Bosnie-

10 Herzégovine, alors qu'à Novi Travnik et à Travnik, qui étaient également

11 placées sous votre commandement, il n'y avait pas de conflit entre l'armée

12 de Bosnie-Herzégovine et le HVO ?

13 M. Blaskic (interprétation). – A Travnik et à Novi Travnik, le

14 commandement du 3ème Corps d'armée, manifestement, n'a pas lancé d'attaques

15 contre le HVO suite à une décision qui avait été prise au préalable alors

16 qu'a Vitez, ce type d'attaques a eu lieu parce que l'usine d'explosifs se

17 trouvait à Vitez et qu'elle était au cœur de la production militaire parce

18 que toutes les autres, en ex-Yougoslavie, et particulièrement en Bosnie

19 centrale, étaient liées d'une façon ou d'une autre à l'usine d'explosifs

20 qui se trouvait ici.

21 M. Nobilo (interprétation). – Merci. Veuillez poursuivre. Nous

22 parlions du 30 mai. Vous avez une réunion avec Franjo Nakic et vous avez

23 pris la décision de créer un centre de transmissions ?

24 M. Blaskic (interprétation). – Oui, effectivement, et puis il y

25 a eu cette tentative d'assassinat contre le commandant de la brigade

Page 18435

1 Francopan, dans la zone de responsabilité de la 306ème Brigade de montagne

2 de l'armée de Bosnie-Herzégovine.

3 Mais les répercussions ont été à peu près les mêmes que dans le

4 cas de Totic. Mais dans ce cas-là, le commandant de la brigade ne se

5 trouvait pas dans son véhicule et, heureusement, il a donc survécu. J'ai

6 reçu à nouveau des informations selon lesquels des Musulmans bosniens

7 étaient expulsés de leur résidence et que des échanges privés étaient en

8 cours.

9 On m'a également informé qu'au cours de ces échanges, organisés

10 de façon individuelle, M. Grubesic et M. Brkic y participaient. Ces

11 échanges entre Vitez et Zenica, j'ai donc demandé que des mesures soient

12 prises à l'encontre de ces deux individus.

13 Le 30 mai, au cours de l'après-midi, l'armée de Bosnie-

14 Herzégovine a ouvert le feu en utilisant des armes d'artillerie contre la

15 ville de Vitez et la maison de la famille Safradina était touchée. Je

16 pense qu'un certain nombre des membres de cette famille a été tué.

17 Le 31 mai, la sécurité de Travnik a été troublée car, pendant

18 toute la nuit, des détonations ont pu être entendues, accompagnées de

19 coups de feu tirés dans des échanges opposants des membres de l'armée de

20 Bosnie-Herzégovine à des membres du HVO et, également, des membres de la

21 police militaire à la police civile de la ville de Travnik.

22 En effet, des groupes armés et certaines espèces d'unités

23 militaires étaient très nombreuses dans la ville à moment-là.

24 A Novi Travnik, une rixe générale a éclaté entre des membres du

25 HVO et des membres de la police militaire du HVO. On m'a informé également

Page 18436

1 que l'alimentation créait de gros problèmes car cela faisait 40 jours que

2 les soldats ne recevaient que deux repas par jour sur le front. Ces repas

3 se composaient de riz, de lentilles et de légumes très gras.

4 Le 31 mai, j'ai demandé au commandant de la police militaire de

5 s'efforcer d'éloigner les personnes qui avaient un casier judiciaire, donc

6 d'éloigner ces personnes des rangs de la police militaire afin de briser

7 la solidarité interne et le fait que ces hommes constituaient un tout avec

8 la police militaire. Ce que j'espérais, c'était obtenir ensuite, dans un

9 deuxième temps, du commandant de la police militaire, une réorganisation

10 complète de celle-ci.

11 Le 31 mai dans la journée, une vieille dame de Novi Travnik est

12 venue me rendre visite...

13 M. le Président. - Je reviens toujours sur la même question,

14 peut-être parce que je n'ai pas toujours la bonne réponse. Quand vous

15 demandez -on a l'impression que vous demandez, c'est vrai, vous demandez

16 beaucoup de choses-, mais on ne sait jamais ce qui va se produire. Le

17 28 mai, vous avez demandé que cent personnes, qui avaient des casiers

18 judiciaires dans la police militaire, quittent la police militaire. Vous

19 avez dit cela il y a dix minutes environ. Vous dites : "Je demande", vous

20 êtes le général, colonel à l'époque, vous commandez la zone

21 opérationnelle.

22 Je vous ai tout à l'heure demandé : vous demandez à qui ? Je

23 suppose que vous demandez au commandant de la police militaire. Le 31 mai,

24 vous le redemandez. Cette fois-ci, vous demandez qu'on éloigne les

25 personnes qui ont des casiers judiciaires.

Page 18437

1 Ce sont des répétitions de demandes ? Quel pouvoir avez-vous

2 pour l'imposer ? En parlez-vous à M. Petkovic ? J'ai l'impression que, le

3 lendemain, vous allez nous dire : "Je redemande que les personnes à casier

4 judiciaire soient éloignées." Que faites-vous quand cela ne se réalise

5 pas ? Vous criez, vous tempêtez ? Que faites-vous ?

6 Je pense que, le 2 juin, vous allez nous dire : "Je demande à

7 nouveau au commandant de la police militaire d'éloigner les personnes qui

8 ont des casiers judiciaires".

9 Alors, que faites-vous ?

10 M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Président,

11 malheureusement, eu égard à un grand nombre de mes ordres et de mes

12 demandes, il m'a fallu souvent les répéter très fréquemment. Jusqu'au

13 moment où j'ai fini par obtenir du quartier général le changement d'un

14 certain nombre d'hommes, à commencer par le commandant de la police

15 militaire. Et puis j'ai obtenu finalement une réorganisation complète de

16 la police militaire.

17 Il y a eu un changement de compétences, c'est-à-dire que je me

18 suis vu octroyer la compétence de traiter directement avec la police

19 militaire. Malheureusement, à l'époque, la situation était anormale, et la

20 seule chose que je pouvais faire, c'était demander, et demander avec

21 beaucoup d'insistance, très souvent.

22 M. Nobilo (interprétation). - Général, dites-nous, par la loi,

23 lorsque le commandant de la police militaire refuse d'écarter cent

24 criminels des rangs de la police militaire, que pouviez-vous faire ?

25 M. Blaskic (interprétation). - Je pouvais en avertir le chef de

Page 18438

1 mon état-major. Mais j'aimerais dire encore que si les critères qui me

2 semblent appropriés s'étaient appliqués, ces hommes n'auraient jamais fait

3 partie de la police militaire, parce qu'un homme qui a commis plusieurs

4 actes criminels n'a rien à rechercher au sein de la police militaire.

5 M. Nobilo (interprétation). - Poursuivons, si vous le voulez

6 bien. Lorsque le chef de la police refuse d'exécuter votre ordre, en

7 informez-vous votre supérieur ?

8 M. Blaskic (interprétation). - Oui.

9 M. Nobilo (interprétation). - Cela contribue-t-il favorablement

10 à la réalisation de votre but qui était de remplacer un certain nombre

11 d'hommes et d'obtenir la restructuration de la police militaire ?

12 M. Blaskic (interprétation). - Oui, mais il me fallait aller pas

13 à pas car, malheureusement, y compris en état de guerre, il y avait

14 nécessité très souvent de répéter et de répéter encore. C'est la seule

15 chose que je pouvais faire et que j'ai pu faire pour obtenir ces

16 remplacements.

17 M. Nobilo (interprétation). - Nous y viendrons dans le cadre de

18 la chronologie. Mais pour les besoins particuliers des Juges, pouvez-vous

19 nous dire dès à présent par quels moyens vous êtes parvenu à obtenir le

20 changement au sein de la police militaire et à quel moment ?

21 M. Blaskic (interprétation). - A partir du 4 août 1993, donc au

22 début du mois d'août 1993, ces changements ont été effectués.

23 M. Nobilo (interprétation). - Donc vos actions ont obtenu un

24 résultat. Mais pouvez-vous nous dire, à votre avis, qu'est-ce qui attirait

25 les criminels dans la police militaire ? Pourquoi y avait-il un si grand

Page 18439

1 nombre de criminels qui entraient dans les rangs de la police militaire ?

2 M. Blaskic (interprétation). - Leurs activités, et celles qui

3 étaient les leurs avant d'entrer au sein de la police militaire, ces

4 criminels étaient en mesure de les réaliser encore plus efficacement

5 lorsqu'ils faisaient partie de la police militaire, notamment au niveau

6 des barrages routiers qui étaient l'endroit de plus forte rentabilité. Il

7 était très avantageux à l'époque, d'un point de vue financier, de faire

8 partie de la police militaire.

9 M. Nobilo (interprétation). - Vos soldats mangent du riz, des

10 lentilles et des légumes gras. Mais que se passait-il sur les barrages

11 routiers ? Quelle était donc l'importance de ces barrages routiers pour

12 ces membres de la police militaire ?

13 M. Blaskic (interprétation). - Tous les convois devaient passer

14 les barrages routiers et les hommes qui conduisaient les camions chargés

15 de ces marchandises sont les premiers à savoir que, malheureusement, au

16 niveau des barrages routiers, ils étaient dans l'obligation de laisser

17 quelque chose, une partie de leur chargement ou une somme en numéraire.

18 Maintenant, quelle était la quantité enlevée du chargement ou la somme

19 d'argent payée, je ne sais pas, mais en tout cas, ce que je sais c'est

20 qu'il était rentable de travailler au barrage routier.

21 M. Nobilo (interprétation). - Que pensez-vous ? Y a-t-il une

22 raison pour laquelle la police militaire a refusé de transmettre vos

23 ordres à la police civile dans laquelle vous aviez plus confiance ? Y

24 avait-il à cela une raison particulière ?

25 M. Blaskic (interprétation). - Oui, il y avait une réponse qui

Page 18440

1 était toujours le profit, le gain.

2 M. Nobilo (interprétation). - Cette vieille femme qui est venue

3 vous demander dix kilos de vivres, que vous a-t-elle dit ? Pourquoi

4 venait-elle vous voir, vous, pour demander ces vivres ?

5 M. Blaskic (interprétation). - Elle m'a dit qu'elle avait subi

6 une attaque, que sa maison avaient été pillée, que la voiture de son fils

7 avait été emportée, qu'un 4x4 Nissan Patrol avait également été emporté

8 dans sa maison ainsi que tous les aliments qui s'y trouvaient et un

9 véhicule de sport. Quand je lui ai demandé les détails, elle m'a dit

10 qu'elle était la maman d'un habitant de Novi Travnik.

11 M. Nobilo (interprétation). - Qui a emporté tout cela ?

12 M. Blaskic (interprétation). - C'est la police militaire de Novi

13 Travnik qui avait emporté tout cela.

14 M. Nobilo (interprétation). - Veuillez poursuivre.

15 M. Blaskic (interprétation). - Monsieur Malden Mlakic m'a

16 également appelé pour m'informer lui aussi du fait que dans sa maison des

17 vivres et des boissons avaient été emportés. Là encore, c'étaient deux

18 membres de la police militaire qui avaient emporté ces aliments et ces

19 boissons le 31 mai à Vitez.

20 M. Nobilo (interprétation). - Et les victimes dans les deux cas

21 étaient des Croates.

22 M. Blaskic (interprétation). - Oui, la vieille dame était la

23 mère du maire adjoint de Travnik, elle était Croate et Mladen Mlakic était

24 également Croate.

25 M. Nobilo (interprétation). - Veuillez poursuivre.

Page 18441

1 M. Blaskic (interprétation). - Au cours de la journée, j'ai eu

2 une rencontre avec M. Thebault, chef de la mission d'observation

3 européenne et nous avons discuté de trois questions : l'évacuation des

4 blessés, la préparation de l'attaque de l'armée de Bosnie-Herzégovine et

5 les différentes activités des médias qui ne contribuaient qu'à augmenter

6 les tensions. Monsieur Thebault m'a informé du fait qu'il voulait que les

7 organes légaux du pouvoir travaillent conformément aux résultats des

8 élections et qu'il s'attendait à voir les municipalités fonctionner

9 normalement.

10 J'ai dit à M. Thebault que, manifestement, ces questions

11 relevaient de conversations qu'il devrait avoir avec les autorités civiles

12 de la municipalité et que je n'étais pas compétent pour discuter de ces

13 questions. Je l'ai prié, par ailleurs, d'intervenir auprès de l'armée de

14 Bosnie-Herzégovine pour tenter d'éviter le conflit, l'attaque était

15 imminente.

16 Je lui ai enfin dit que je n'étais pas le représentant officiel

17 du peuple croate et que je ne pouvais pas traiter de problèmes civils.

18 Monsieur Thebault m'a dit qu'il observait avec précision tout ce qui se

19 passait au niveau de la municipalité.

20 Dans l'après-midi, aux alentours de 19 heures, j'ai appris par

21 M. Dario Kordic qui m'appelait de Busovaca qu'on lui avait dit que

22 M. Mate Boban avait émis un ordre destiné au chef de la police militaire,

23 ordre exigeant de lui que tous les biens enlevés dans des logements de

24 Novi Travnik par des membres de la police militaire soient restitués à

25 leur propriétaire et que si cette restitution n'avait pas lieu, le chef de

Page 18442

1 la police militaire avait l'ordre de remplacer à son poste le commandant

2 du 4ème Bataillon de la police militaire. A la fin de cette conversation,

3 le commandant du 4ème Bataillon de la police militaire m'a appelé pour

4 m'infliger un cocktail d'injures, en me disant que si la moindre tentative

5 était faite pour le remplacer à son poste, j'aurais l'occasion de

6 rencontrer mon dieu.

7 J'ai répondu au commandement de la police militaire que,

8 malheureusement, je n'avais pas compétence pour le remplacer à son poste

9 de commandant de la police militaire, mais que je l'aurais fait depuis

10 très longtemps si j'avais eu cette compétence.

11 J'ai ajouté qu'il convenait qu'il appelle son supérieur, c'est-

12 à-dire le commandant en chef de la police militaire à Mostar pour vérifier

13 auprès de lui toute question lui posant problème.

14 M. Nobilo (interprétation). - Lorsque cette femme de

15 Novi Travnik est venue vous voir pour vous parler une nouvelle fois d'une

16 agression qui avait eu lieu de la part de policiers militaires, l'avez-

17 vous fait savoir à votre supérieur ?

18 M. Blaskic (interprétation). - Oui.

19 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce la raison pour laquelle il

20 vous en voulait tant qu'il vous a imputé les tentatives de remplacement à

21 son poste ?

22 M. Blaskic (interprétation). - Oui, et il n'a pas fait que me

23 reprocher cela. Il m'a dit que j'aurais l'occasion de revoir mon dieu.

24 M. Nobilo (interprétation). - Nous parlons bien, n'est-ce pas,

25 de ce logement du maire adjoint de Travnik dont la mère est venue se

Page 18443

1 plaindre auprès de vous pour l'agression qui avait été subie dans ce

2 logement ? Et c'est de cela que vous avez discuté avec M. Thebault et qui

3 a provoqué la réaction de M. Thebault. Voulez-vous le redire parce que

4 cela n'était pas tout à fait clair ?

5 M. Blaskic (interprétation). – Oui.

6 M. Nobilo (interprétation). – Pouvons-nous maintenant faire la

7 pause, Monsieur le Président ?

8 M. le Président. – Oui. Nous reprendrons à 12 heures 15.

9 (L'audience, suspendue à 12 heures, est reprise à 12 heures 25).

10 M. le Président. - L'audience est reprise, veuillez vous

11 asseoir.

12 M. Nobilo (interprétation). - Général, veuillez poursuivre. Vous

13 avez donc terminé votre conversation avec le commandant de la police

14 militaire, mais ce jour-là commence un nouveau mode d'organisation à Vitez

15 pour le centre d'information et de sécurité qui n'était pas sous votre

16 commandement direct, mais sur lequel vous aviez tout de même une

17 compétence. Pouvez-vous en dire quelques mots ?

18 M. Blaskic (interprétation). - Oui. Le 31 mai 1993, l'adjoint à

19 la sécurité me fait savoir qu'une nouvelle organisation est créée dans la

20 vallée de la Lasva qui porte le nom de "Centre du service et de sécurité".

21 Le chef de ce centre était M. Miso Mijic.

22 Après, très rapidement, peu de jours après, M. Darko Kraljevic a

23 été nommé à ce poste en remplacement du chef de service et de sécurité ;

24 service qui comptait 25 à 30 membres armés qui se désignaient par le nom

25 de Alpha.

Page 18444

1 M. Nobilo (interprétation). - L'adjoint au chef du centre

2 d'information et de sécurité, Darko Kraljevic a-t-il continué à exercer

3 ses fonctions de commandant des Vitezovi ?

4 M. Blaskic (interprétation). – Oui, et cette nouvelle structure

5 n'avait aucun rapport avec le commandement de la zone opérationnelle.

6 Autrement dit, je n'avais pas compétence sur les tâches courantes de ce

7 service et je n'avais pas pour obligation de m'informer de leur travail.

8 C'est en tout cas ce que m'a dit le chef du centre SIS -service

9 d'information et de sécurité- qui était totalement indépendant du

10 commandement de la zone opérationnelle et de l'adjoint chargé de la

11 sécurité auprès de la zone opérationnelle.

12 M. Nobilo (interprétation). - L'adjoint chargé de la sécurité

13 auprès de la zone opérationnelle vous transmet des informations provenant

14 des autorités civiles et qui portent sur les entrées dans certains

15 appartements par la force. Pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit

16 exactement ?

17 M. Kehoe (interprétation). – Excusez-moi, Maître, j'ai laissé

18 cela se dérouler un certain temps et j'ai essayé de ne pas interrompre le

19 conseil, mais je vous prierai, Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

20 de demander au conseil de ne pas faire de commentaires avant de poser ses

21 questions.

22 Je crois que ses compétences consistent uniquement à poser des

23 questions, et je l'entends sans cesse émettre des commentaires avant que

24 le témoin n'ait exprimé son point de vue. Je vous demanderai d'intervenir

25 pour que cela cesse.

Page 18445

1 M. le Président. - Ne guidez pas systématiquement les réponses

2 de votre client, Maître Nobilo.

3 M. Nobilo (interprétation). - Oui, oui, Monsieur le Président.

4 Nous avons eu une brève suspension, donc je guidais un peu le témoin pour

5 établir un lien avec ce qui précédait la pause. Bien entendu, le témoin va

6 continuer à relater les événements des jours dont nous allons parler. Je

7 voulais simplement établir la jonction.

8 Veuillez poursuivre, Monsieur Blaskic.

9 M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Président,

10 Messieurs les Juges, l'adjoint chargé de la sécurité m'a appris que la

11 police militaire avait expulsé des Musulmans bosniens de 34 appartements

12 et de 19 maisons jusqu'à la date du jour. Ce qui signifie qu'au total

13 43 logements étaient devenus la propriété de la police militaire.

14 Et dans cette information, il m'a été dit que n'étaient pas

15 comptés dans ces chiffres les appartements qui avaient déjà été revendus.

16 C'est-à-dire que n'étaient concernés par ce chiffre que les appartements

17 pris par la police militaire et dans lesquels ils habitaient.

18 Ce jour même, j'ai reçu une demande du commandant de la brigade

19 de Vitez qui souhaitait que les membres de la police militaire qui avaient

20 accompli des actes illégaux soient arrêtés. J'ai parlé de ces

21 53 appartements avec M. Santic, le maire de la ville, qui m'a dit

22 également que la police civile était impuissante par rapport à cet état de

23 fait.

24 Ce même jour, j'ai également reçu un avis de Jozo -je crois que

25 c'est son nom- le prêtre de la paroisse de Bugici qui se plaignait auprès

Page 18446

1 de moi du fait qu'au barrage routier la police militaire lui avait saisi

2 son véhicule.

3 Le prêtre Ivan Ravnic a été amené pour interrogatoire dans le

4 courant de la journée du 31 mai. Au cours de l'interrogatoire, il a été

5 ligoté à un poteau, à un réverbère, à un poteau électrique.

6 M. Nobilo (interprétation). - Qui l'a amené pour

7 interrogatoire ?

8 M. Blaskic (interprétation). - Les officiers du nouveau centre

9 SIS. C'est eux qui l'ont attaché à un lampadaire, entre douze heures et

10 treize heures.

11 Le 1er juin 1993, j'ai été informé qu'une attaque de l'armée de

12 Bosnie-Herzégovine avait eu lieu contre le village croate de Bukve dans la

13 municipalité de Fojnica.

14 Le 2 juin 1993...

15 M. Nobilo (interprétation). - Un instant, s'il vous plaît. Pour

16 que tout soit absolument clair. En dehors de cette information, avez-vous

17 participé avec vos commandants à la défense de la municipalité de

18 Fojnica ?

19 M. Blaskic (interprétation). - A ce moment-là, non. Mais j'ai

20 simplement reçu cet ordre, ou plutôt cette information selon laquelle

21 Fojnica avait été attaquée et selon laquelle les villages environnants de

22 la municipalité de Fojnica avaient été attaqués.

23 M. Nobilo (interprétation). - Veuillez poursuivre.

24 M. Blaskic (interprétation). - Le 2 juin 1993, j'ai été informé

25 d'un certain nombre d'incidents dus à la venue des soldats de la brigade

Page 18447

1 de Travnik, des soldats du HVO, qui ont arrêté un véhicule de fonction du

2 commandant du groupe opérationnel de la Krajina de Bosnie, M. Mehmed

3 Alagic, qui l'ont fait sortir de son véhicule. Après quoi, un des membres

4 de la brigade l'a giflé et puis on lui a donné l'ordre de danser alors que

5 des coups de feu étaient tirés dans ses pieds.

6 J'ai envoyé deux officiers, M. Sbinsko Vidojic et M. Gilovric

7 qui avait en main un texte écrit relatant ce que M. Alagic avait dit, et

8 j'ai stipulé que j'allais procéder à une enquête, vérifier les faits et

9 prendre des mesures disciplinaires. J'ai établi que cet incident avait été

10 causé par des membres de la brigade de Travnik, de l'unité de Tukina,

11 hommes contre lesquels aucune mesure disciplinaire n'avait été prise.

12 Le 3 juin 1993, une attaque générale se produit contre la ville

13 de Travnik, due aux forces du 3ème Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine, et

14 les opérations de combats les plus importantes ont été réalisées par

15 l'unité de la Krajina de Bosnie, Bosanska Krajina, qui était un groupe

16 opérationnel.

17 L'attaque a commencé donc le 3 juin 1993, et le commandant du

18 bataillon de la brigade de Travnik est venu me voir au quartier général

19 aux alentours de 4 heures 30 pour m'informer du déroulement de l'attaque.

20 Aux alentours de 5 heures 30, M. Alagic m'appelle, se présente,

21 me dit qu'il est M. Alagic et ajoute ce qui suit : "Je mettrai un terme à

22 cette attaque si tu signes une capitulation et une reddition.

23 Malheureusement, il ne peut plus y avoir à l'avenir d'armée commune.

24 Désormais il n'y aura plus qu'une seule armée unifiée de la Bosnie-

25 Herzégovine". Je lui ai répondu que je ne pouvais pas signer de

Page 18448

1 capitulation, et que la seule chose qu'il me restait à faire était de me

2 défendre.

3 Les combats se sont déroulés aussi bien dans les rues de la

4 ville que dans les accès à la ville de Travnik. Ils ont duré toute la

5 journée du 3 juin. Et le 4 juin 1993 les combats se poursuivent entre

6 l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO à Travnik.

7 A Novi Travnik, le 4 juin, le commandant du 2ème Bataillon

8 Stjepan Tomasevic est tué alors qu'il se dirige à partir de Novi Travnik

9 vers les lignes de front contre les Serbes. C'est sur le territoire sous

10 contrôle du HVO et de l'armée de Bosnie-Herzégovine que cet homme a été

11 tué.

12 Le 4 juin, l'attaque générale contre Travnik se poursuit. Et le

13 5 juin 1993, les forces du 3ème Corps d'armée de Zenica prennent part

14 également à cette attaque générale contre Travnik.

15 Pour ce qui me concerne, à partir du 5 juin, j'ai déménagé mon

16 poste de commandement à Nova Bila, de façon à pouvoir diriger la défense

17 de Travnik de façon plus efficace, et commander de façon plus appropriée

18 sur cette ligne de front.

19 M. Nobilo (interprétation). - Ce poste de commandement était

20 tout près du front, c'est cela que vous voulez dire ?

21 M. Blaskic (interprétation). - Oui, ma position s'est trouvée

22 située à Pescara pendant très longtemps. C'est une hauteur qui domine

23 Nova Bila. C'est un site particulièrement important pour la défense de

24 Nova Bila et pour la défense de la route Vitez-Travnik. C'est un site clef

25 qui est resté aux mains du HVO. Je suis resté à Pescara et à Nova Bila

Page 18449

1 pratiquement tout le mois de juin.

2 Le 5 juin, les unités du HVO ont été attaquées dans le dos. Ces

3 unités tenaient le front de Travnik sur le site de Mescema; si cela vous

4 intéresse, je peux vous le montrer sur la maquette. Ces forces ont été

5 attaquées dans le dos par l'armée de Bosnie-Herzégovine.

6 M. Nobilo (interprétation). - Lorsque vous dites les unités du

7 HVO qui tenaient le front, ce front les opposait à qui ?

8 M. Blaskic (interprétation). - Ces unités tenaient le front qui

9 les opposait à l'armée de la Republika Srpska sur le secteur n° 2, sur le

10 site de Mescema, indépendamment du fait que, dans les rues de la ville et

11 aux abords de la ville, l'affrontement entre l'armée de Bosnie-Herzégovine

12 et le HVO n'avait pas cessé.

13 Cette attaque dans le dos a contraint les membres du HVO à

14 reculer. Et c'est à Paklarevo, un village, et dans le village de Jankovici

15 que le HVO s'est finalement regroupé avec regroupement à Paklarevo de tous

16 les membres du HVO qui étaient encore en vie et qui venaient de Travnik.

17 Du 3 au 5 juin, 5 juin compris, et bien que les combats durent

18 toute la journée, nous avons perdu toute possibilité d'évacuer les blessés

19 vers l'hôpital, car l'hôpital de Travnik était sous le contrôle de l'armée

20 de Bosnie-Herzégovine.

21 Donc, des appels à l'aide ont été lancés et ces appels à l'aide

22 s'accompagnaient également d'appels destinés à faire en sorte que, avec la

23 participation des organisations internationales et plus précisément de la

24 Forpronu, un moyen soit trouvé pour transporter les blessés à l'hôpital

25 église de Nova Bila ou à l'hôpital de Travnik. Mais nous ne sommes pas

Page 18450

1 parvenus à cet objectif de sorte que les blessés ne recevaient que des

2 soins élémentaires d'urgence.

3 Dans la nuit du 5 au 6 juin, le commandant de la brigade de

4 Travnik s'est adressé à moi pour me demander de réaliser l'évacuation des

5 troupes, donc de l'ensemble des hommes regroupés à Paklarevo. J'ai

6 transmis ce document au chef de l'état-major principal du HVO, à qui j'ai

7 appris quelle était la situation sur le plan militaire dans la ville de

8 Travnik. Et le chef d'état-major principal a accepté de procéder à

9 l'évacuation des membres du HVO regroupés à Paklarevo et dans le village

10 de Jankovici dans la direction de Bucovica et Guca Gora, et plus loin

11 encore dans la direction de Nova Bila. Il s'agissait donc de tous les

12 membres du HVO qui restaient encore des unités de Travnik.

13 Dans la nuit du 5 au 6 juin, j'ai transmis cette décision à la

14 brigade de Travnik et l'évacuation des soldats a donc commencé.

15 Mais une masse de civils, au moins 10.000 civils, sinon plus,

16 ont pris le chemin à pied de Paklarevo à Busovica, Guca Gora et Nova Bila,

17 avec les soldats.

18 Et le 6 juin, déjà, 6 juin 1993, tôt le matin, nous avons vu un

19 grand nombre de personnes déplacées qui avaient constitué une colonne et

20 qui se dirigeaient vers Vitez et Novi Travnik.

21 Parmi ces réfugiés, ces personnes déplacées et ces éléments de

22 la brigade de Travnik, j'ai appris qu'un bataillon qui comptait environ

23 500 soldats, a décidé avec un certain nombre de civils, de s'évacuer en

24 passant par Paklarevo vers Vlasic, c'est-à-dire vers un territoire sous

25 contrôle de l'armée de la Republika Srpska. Ces personnes après quelques

Page 18451

1 jours, se sont retrouvées dans le camp de Manjaca

2 M. Nobilo (interprétation). - Mais, ce bataillon a-t-il agi en

3 contradiction avec votre ordre ?

4 M. Blaskic (interprétation). - Oui, en contradiction avec mon

5 ordre et en contradiction avec l'ordre du commandant de la brigade de

6 Travnik. Les hommes de ce bataillon étaient accompagnés des membres de

7 leur famille, de sorte qu'au total, il y avait à peu près 500 hommes en

8 état de porter les armes, et près de 2 000 civils, sans doute leurs

9 épouses, leurs enfants, leurs mères, leurs pères, les membres de leurs

10 familles, etc..

11 M. Nobilo (interprétation). - Quand vous dites qu'ils se sont

12 retrouvés dans le camp de Manjaca, quel a été le statut qu'ils se sont vu

13 accorder dans ce camp ?

14 M. Blaskic (interprétation). - Pour autant que je le sache, leur

15 statut a été celui de prisonniers de guerre. Ils pouvaient faire l'objet

16 d'échange, ils ont en tout cas fait l'objet de pourparlers réalisés par la

17 commission chargée des prisonniers de guerre de Herceg-Bosna et je sais

18 que par la suite, il ont été remis en liberté, les pourparlers ayant lieu

19 avec des représentants serbes.

20 M. Nobilo (interprétation). - Veuillez poursuivre. Que s'est-il

21 passé au cours des jours qui ont suivi ?

22 M. Blaskic (interprétation). - Le 7 Juin 1993, je me suis

23 principalement consacré aux problèmes de logements qu'il fallait trouver

24 pour les personnes déplacées, parce que, sur un territoire de très petite

25 superficie, un grand nombre de personnes déplacées de Travnik étaient

Page 18452

1 arrivées de Travnik de sorte que nous nous sommes efforcés de trouver

2 toutes formes de logements disponibles.

3 Bien sûr, le plus gros problème pour ces personnes déplacées

4 était le problème alimentaire, car, le 6 et le 7, nous avions déjà près de

5 10 000 personnes déplacées.

6 J'ai eu aussi des difficultés à répartir un certain nombre de

7 membres de la brigade de Travnik. Il y a eu finalement division de ces

8 hommes en deux groupes : l'un de ces groupes estimant qu'il fallait faire

9 mouvement à tout prix vers Novi Travnik et plus loin vers Gorni Vakuf puis

10 Prozor et Mostar et l'autre estimant qu'il serait bon de continuer à

11 défendre les territoires qui restaient à défendre, à savoir les

12 territoires entourant Guca Gora et Nova Bila dans la municipalité de

13 Travnik.

14 Le 7 juin, j'ai reçu des informations selon lesquelles des

15 forces du 1er Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine et du 3ème Corps d'armée

16 de Bosnie-Herzégovine, avaient lancé des attaques de provocation contre le

17 HVO de Kakanj et contre les Croates de Kakanj ; enfin je parle bien des

18 membres du HVO.

19 Le 8 juin 1993, à partir de Zenica, les forces attaquantes dans

20 la direction de Guca Gora ont continué à faire pression sur les soldats du

21 HVO et, dans le courant de la journée, j'ai prié le colonel Duncan

22 d'utiliser ces blindés pour défendre Guca Gora, le monastère de Guca Gora

23 et les civils qui avaient trouvé refuge dans le monastère de Guca Gora.

24 Le colonel Duncan a réagi à ma demande et il a envoyé environ

25 dix warriors et quelques chars. Il a encerclé le monastère de Guca Gora,

Page 18453

1 et il a fourni la protection aux prêtres et à tous les autres qui se

2 trouvaient dans le monastère, y compris les civils croates qui avaient fui

3 les villages environnants et qui ont trouvé refuge dans le monastère.

4 Le 8 juin aussi, environ 5 000 Croates ont été complètement

5 encerclés et bloqués à Zupa, Grahovcici et Brajkovici. Il s'agit là encore

6 une fois de la municipalité de Travnik, mais il s'agit de la partie au

7 nord-est, plus près de Zenica.

8 A Busovaca, ce jour-là, il y a eu une attaque provocatrice

9 lancée par l'armée de Bosnie-Herzégovine du sud, lancée donc du sud contre

10 le site de Polo qui se trouve dans la partie sud de la municipalité de

11 Busovaca.

12 Le 9 juin 1993, une attaque généralisée a été lancée vers

13 5 heures du matin contre la municipalité de Novi Travnik, et c'est l'armée

14 de Bosnie-Herzégovine qui l'a fait. Ils ont également établi un lien entre

15 leurs forces afin d'attaquer Busovaca. Donc l'attaque de Busovaca s'est

16 poursuivie et pendant toutes ces journées-là, entre le 3 juin et le

17 9 juin, l'offensive contre le HVO dans la vallée de la Lasva a continué.

18 J'ai également reçu l'information selon laquelle des prêtres à

19 Brajkovici ont été soumis aux mauvais traitements. J'ai également reçu

20 certaines informations selon lesquelles quelques paroissiens et quelques

21 traîtres ont été tués par des membres de l'armée de Bosnie-Herzégovine.

22 J'ai demandé que cette information soit vérifiée, j'ai demandé cela aux

23 membres du Bataillon britannique et il s'est avéré que ces rumeurs étaient

24 fausses.

25 J'ai également demandé que les blessés soient évacués -là, je

Page 18454

1 parle des blessés de la région du monastère de Guca Gora. J'ai donc

2 demandé l'évacuation et la protection de la Forpronu. Effectivement, la

3 Forpronu, l'ONU a fourni son aide, étant donné que Guca Gora était restée

4 complètement encerclée et coupée par les forces de l'armée de Bosnie-

5 Herzégovine. Au cours de l'évacuation, l'armée de Bosnie-Herzégovine a

6 permis aux personnes blessées de sortir, et les civils ont profité de

7 cette occasion également pour sortir avec les blessés qui ont été escortés

8 par l'ONU.

9 Le 9 juin, nous avons eu l'arrivée d'environ 25 000 nouveaux réfugiés et,

10 de nouveau, le problème de leur logement s'est posé, étant donné que

11 c'étaient des gens qui arrivaient pratiquement sans rien.

12 Ce jour-là, plus de 400 Croates sont arrivés de Zenica au point

13 de contrôle de Lasva qui se trouve sur la route principale entre Zenica et

14 Busovaca, et eux aussi attendaient de recevoir un accord afin de pouvoir

15 passer vers Busovaca et Vitez. Ils s'attendaient à recevoir cet accord de

16 l'armée de Bosnie-Herzégovine.

17 Le 10 juin, j'ai entendu, ou plus précisément j'ai reçu

18 l'information que durant la journée le convoi de Tuzla devait passer,

19 devait arriver.

20 J'étais toujours face à cette même situation concernant les

21 réfugiés. Au cours de la journée du 10 juin, la bataille a commencé visant

22 à défendre les paroisses de Grahovcici et Brajkovici de même que les

23 villages de la municipalité de Travnik. Pour nous, toute la journée, les

24 combats entre le HVO et l'armée de Bosnie-Herzégovine se sont produits. Ce

25 jour-là, il y a eu également un conflit armé entre les membres de la

Page 18455

1 brigade de Travnik dans l'enceinte de la base logistique à Stojkovici.

2 Deux groupes de la brigade de Travnik, brigade du HVO, se sont

3 affrontés. Il s'agissait d'un conflit interne, mais, heureusement, il n'y

4 a pas eu de morts, mais le feu a été ouvert des deux côtés et ils se sont

5 confrontés.

6 D'un côté, certains favorisaient le départ des troupes et un

7 autre groupe favorisait que les troupes restent et assurent la défense.

8 Durant cette période, les autorités civiles municipales de

9 Travnik ne fonctionnaient pratiquement plus. D'ailleurs, les soldats

10 arrivaient et menaçaient, à la fois moi, et d'autres commandants,

11 considérant que nous étions les plus grands coupables de la situation dans

12 laquelle ils s'étaient retrouvés.

13 A Kakanj, un cessez-le-feu a été signé le 10 juin, cessez-le-feu entre les

14 membres de l'armée de Bosnie-Herzégovine et les membres du HVO. Cependant,

15 malgré le cessez-le-feu signé, les opérations de combats se sont

16 poursuivies, ce qui fait que ce qui a été signé n'a pas été mis en oeuvre.

17 Le 10 juin, à Vitez, il y a eu un nouveau choc, étant donné

18 qu'un obus de mortier est tombé dans l'après-midi sur un terrain de

19 basket-ball provoquant la mort de sept enfants, et encore un enfant est

20 mort par la suite à l'hôpital qui se trouvait dans l'église de Nova Bila

21 et ceci a provoqué un choc au sein de la population de Vitez.

22 Dans la ville de Busovaca, des chars ont ouvert le feu, des

23 chars de l'armée de Bosnie-Herzégovine, et le feu a été ouvert directement

24 contre la ville.

25 Peu avant 20 heures, j'ai reçu la visite du chef d'état-major à

Page 18456

1 Nova Bila, au poste de commandement avancé, encore une fois, escorté par

2 la Forpronu. Il s'agissait là des véhicules de l'ONU appartenant à des

3 Espagnols qui se trouvaient à Mostar.

4 Encore une fois, j'ai abordé le sujet des derniers événements,

5 j'ai essayé de donner un briefing au commandant de l'état-major principal

6 concernant toutes les questions liées à la situation militaire. Je lui ai

7 dit que, vu les opérations de combats, et mis à part le fait que les

8 combats se déroulaient, je savais que le convoi de Tuzla devait passer par

9 la vallée de la Lasva.

10 Je lui ai également demandé ce qu'il en était avec les

11 changements que j'ai demandés concernant la police militaire. Il m'a

12 répondu que j'allais recevoir une information à ce sujet dès qu'un accord

13 allait être atteint à propos de cela.

14 Une heure plus tard, le général de brigade Petkovic est parti

15 ayant l'intention d'arrêter le convoi avant son entrée dans la vallée de

16 la Lasva, considérant qu'il valait mieux que ce convoi ne passe pas par la

17 vallée de la Lasva pendant la nuit, vu les opérations de combat. C'est là

18 que j'ai perdu tout contact avec lui.

19 Plus tard, vers 20 heures 30, j'ai reçu l'information que la

20 Forpronu avait tué un membre du HVO sur la route de Kaonik. Il s'agissait

21 de Jozo Prusac de Busovaca.

22 Quelques jours plus tard, le colonel Duncan m'a parlé de cet

23 incident et s'est excusé à propos de ce meurtre.

24 M. Nobilo (interprétation). - Le colonel Duncan s'est excusé à

25 cause de ce meurtre et a dit qu'une enquête allait être faite. Est-ce

Page 18457

1 qu'il vous a dit qui a commis ce crime, ce meurtre, quel était le membre

2 de la Forpronu ? Est-ce qu'il a partagé ce genre d'informations avec

3 vous ?

4 M. Blaskic (interprétation). - Non pas du tout. Il s'agissait

5 tout simplement d'un meurtre d'un soldat à côté de la route, et lui, tout

6 simplement, s'est excusé à cause de cet incident, mais rien d'autre. Cela

7 s'est terminé là, avec les excuses.

8 M. Nobilo (interprétation). - Poursuivez, s'il vous plaît.

9 M. Blaskic (interprétation). - Des combats ont continué,

10 l'artillerie de l'armée de Bosnie-Herzégovine a été utilisée contre la

11 ville de Novi Travnik, j'ai reçu l'information selon laquelle, dans le

12 village de Senkovici qui se trouvait à Novi Travnik, dans l'école

13 primaire, se trouvaient 200 civils croates qui étaient détenus. Et après

14 21 heures 30, j'ai reçu l'information selon laquelle environ 300 véhicules

15 motorisés faisaient partie du convoi qui devait passer.

16 Moi, j'ai été à la tête, j'étais responsable pour la défense de

17 Travnik et Novi Travnik, donc je me trouvais dans mon poste de

18 commandement, vers 24 heures. J'ai reçu un appel du médecin de garde à

19 l'hôpital qui se trouvait dans l'église de Nova Bila qui m'a informé des

20 problèmes qui ont surgi à Zenica à l'entrée de la ville, qui était

21 contrôlée par le HVO de la municipalité de Novi Travnik. Il m'a informé

22 que le convoi a été attaqué par une masse de réfugiés, qu'on était en

23 train de piller le convoi, que certains blessés se trouvaient dans

24 l'hôpital et qu'il y a eu d'autres blessés qui étaient toujours dans le

25 convoi et qu'ils n'ont toujours pas été évacués.

Page 18458

1 Dans la deuxième partie de la nuit, j'ai reçu un appel du

2 général de brigade Petkovic qui m'a dit que lui, personnellement, avec le

3 colonel Duncan, il a été arrêté et retenu pendant deux heures tout près du

4 convoi, alors qu'un grand nombre de réfugiés croates s'acharnaient contre

5 le convoi en l'attaquant et en pillant pratiquement tout ce qui se

6 trouvait dans le véhicule. Il m'a dit que lui, personnellement, avec le

7 colonel Duncan, a essayé d'assurer et d'organiser la protection du convoi,

8 mais qu'eux-mêmes ont eu du mal à se sortir de cette bande, comme il l'a

9 dit.

10 M. Nobilo (interprétation). - Nous pouvons peut-être nous

11 arrêter ici, avant de commencer à parler du 11 juin 1993, si vous êtes

12 d'accord ?

13 M. le Président. - Nous suspendons et ne reprenons à

14 14 heures 30.

15 (L'audience, levée à 13 heures , est reprise à 14 heures 35.)

16 M. le Président. – La séance est reprise. Maître Nobilo, c'est à

17 vous.

18 M. Nobilo (interprétation). – Merci, Monsieur le Président. Nous

19 avons donc terminé avec le 10 juin 1993 et je crois que, maintenant, nous

20 pouvons commencer à parler de la matinée du 11 juin 1993 et après aussi.

21 M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Président, Messieurs

22 les Juges, vers 3 heures du matin, le 11 juin 1993, des Croates et des

23 membres du HVO ont commencé à arriver à Nova Bila ; des soldats avec les

24 civils. C'étaient des gens de Zupa, Grahovcici et de Brajkovici et, parmi

25 eux, se trouvaient aussi des civils qui avaient déjà été expulsés des

Page 18459

1 villages croates de la partie supérieure de Zenica. Ils avaient été

2 expulsés par l'armée de Bosnie-Herzégovine au début du conflit, durant le

3 mois d'avril.

4 Ce matin, au total, le nombre de 5 000 civils sont arrivés, des

5 réfugiés. Je ne m'acquittais pas seulement de mes tâches régulières, mais

6 j'essayais aussi d'organiser leur logement, le logement de ces réfugiés.

7 Les routes étaient remplies de ces personnes et des sacs que ces personnes

8 ont apporté avec eux.

9 Vers 4 heures du matin, l'attaque de l'armée de Bosnie-

10 Herzégovine contre la municipalité de Travnik s'est poursuivie depuis la

11 direction de Zenica vers une partie de Pescara, Nova Bila et quelques

12 autres hameaux à Puticevo.

13 A 10 heures du matin, j'ai reçu un appel de l'ONU de la base du

14 bataillon britannique. C'est M. Thebault qui m'a téléphoné pour m'inviter

15 à une réunion à la base.

16 Avant cela, j'ai reçu l'information du chef de service de

17 renseignements militaires selon laquelle l'armée de Bosnie-Herzégovine a

18 continué à attaquer le HVO à Kakanj. Et qu'il y a eu un grand nombre de

19 civils morts à Kakanj. Suite à l'invitation de M. Thebault, je suis arrivé

20 à la base de l'ONU, à Vitez, à Nova Bila. C'est là que la réunion a eu

21 lieu. La réunion était présidée par M. Thebault. Le colonel Duncan a, lui

22 aussi, assisté à la réunion. Le sujet de la réunion était le règlement des

23 conséquences de l'attaque contre le convoi.

24 Au cours de ces réunions-là, j'ai reçu des informations plus

25 détaillées concernant l'attaque contre le convoi. Et déjà, lors de cette

Page 18460

1 réunion, j'ai souligné que je n'ai pas pu donner une garantie écrite pour

2 le passage de ce convoi et que c'est pour cela que j'ai proposé des

3 itinéraires alternatifs que je considérais être plus sûrs.

4 Lors de cette réunion, j'ai également dit que nous nous

5 trouvions sans cesse face aux attaques de l'armée de Bosnie-Herzégovine,

6 mais que j'étais prêt à arrêter avec tous mes devoirs pour me rendre

7 personnellement à toutes les positions conformément à la demande de

8 M. Thebault pour sauver les chauffeurs et la marchandise qui se trouvait

9 dans le convoi.

10 Peu après, nous sommes partis de Nova Bila vers Vitez dans des

11 véhicules blindés de l'ONU. J'étais accompagné de M. Thebault, de même que

12 des officiers et des soldats de la Forpronu.

13 J'ai vu des civils morts, j'ai vu des cadavres dans un camion

14 près duquel nous nous sommes arrêtés. Je pense que c'était à Stara Bila.

15 J'ai vu trois soldats près de la route et qui étaient morts.

16 M. Nobilo (interprétation). - C'étaient des soldats de quelle

17 armée ?

18 M. Blaskic (interprétation). - Ils portaient des uniformes

19 noirs, je suppose que c'étaient des membres de Vitezovi, mais à cause de

20 leur position, je n'ai pas pu voir leur insigne et je n'ai pu m'approcher

21 de leur corps. Je pense que c'étaient des membres de Vitezovi. J'ai vu

22 avec certitude qu'ils portaient des uniformes noirs.

23 Puis, comme je l'ai déjà dit, il y a eu aussi un chauffeur mort

24 dans cette partie de Stara Bila. Et près de l'endroit nommé Impregnacija,

25 qui se trouve au carrefour à l'entrée de Vitez, je me suis présenté devant

Page 18461

1 une masse de réfugiés, constituée de femmes, d'enfants et de soldats

2 armés. J'ai essayé de leur expliquer que nous essayions de reprendre le

3 convoi et de passer par cette partie de la route.

4 Cependant, il y a eu beaucoup d'agressions dans l'air, beaucoup

5 de colères à mon égard, ce qui fait que je n'ai même pas réussi à leur

6 expliquer quelles étaient nos intentions. Et eux non plus, ils n'ont pas

7 montré d'intérêt à m'écouter. Ils étaient assez amers. La situation était

8 pleine d'incertitudes et de dangers de conflits. Monsieur Thebault a lui-

9 même dit qu'il n'était peut-être pas prudent de se présenter comme cela,

10 directement devant cette masse de gens.

11 J'ai passé cet après-midi avec M. Thebault et d'autres

12 officiels, et nous avons essayé de regagner ce qui était possible de

13 regagner et ce qui appartenait aux convois.

14 M. Nobilo (interprétation). - Dites-nous, comment avez-vous

15 compris les propos de M. Thebault lorsqu'il vous a dit qu'il vaudrait

16 mieux que vous ne vous présentiez plus devant cette masse de gens ?

17 M. Blaskic (interprétation). - Il était clair que la situation

18 était très dangereuse et que ce groupe, qui était sur la route, était très

19 agressif. Nous nous trouvions devant le danger de voir quelqu'un dans la

20 foule réagir violemment en ouvrant le feu. Nous avons souhaité éviter

21 cela.

22 M. Nobilo (interprétation). - Poursuivez.

23 M. Blaskic (interprétation). - J'ai passé l'après-midi en train

24 de rassembler les moyens, les véhicules, les marchandises qui

25 appartenaient au convoi. Et je sais qu'une partie de l'aide humanitaire a

Page 18462

1 été restituée.

2 Cette partie que nous avons réussie à faire restituer le 11 juin

3 a poursuivi son chemin. Cependant, je pense qu'il s'agit d'une partie

4 insignifiante par rapport à tout le convoi qui était constitué de

5 300 véhicules.

6 Par ailleurs, l'armée de Bosnie-Herzégovine a continué ses

7 attaques et a nettoyé la route entre Travnik et Zenica en traversant

8 Guca Gora en faisant reculer les forces du HVO. Les soldats se sont

9 retirés avec les soldats dans une partie encore plus restreinte de

10 l'enclave.

11 Durant la journée, l'évacuation a été accordée pour 65 blessés

12 qui se trouvaient à l'hôpital dans l'église de Nova Bila, mais durant

13 l'après-midi nous avons eu l'information selon laquelle le 3ème Corps

14 d'armée avait retiré cet accord et nous n'avons donc pas pu effectuer

15 cette évacuation.

16 Le 12 juin 1993, l'armée de Bosnie-Herzégovine a effectué une

17 attaque contre les membres du HVO, membres de la brigade Stjepan Tomasevic

18 à Novi Travnik, et cela s'est produit dans la partie du front Mravinjac-

19 Kamenjas. La brigade Stjepan Tomasevic contrôlait cette partie du front

20 face à l'armée de la Republika Srpska. Les soldats qui défendaient cette

21 ligne de front étaient attaqués dans le dos.

22 Il y a eu le retrait des forces, et il y a eu une situation

23 assez bizarre. C'est-à-dire que les membres du HVO ont fui devant les

24 alliés, devant ceux qui étaient leurs alliés jusqu'aux jours précédents,

25 et ils se sont enfuis vers le territoire sous le contrôle de l'armée de

Page 18463

1 Republika Srpska et ils sont allés vers Dornji Vakuf.

2 Le 12 juin 1993, durant la nuit ou tôt le matin du 12 juin,

3 juste après minuit, le commandant du bataillon de cette unité a été tué,

4 encore une fois dans son véhicule, sur la route, depuis une embuscade. Je

5 parle encore une fois de la brigade Stjepan Tomasevic.

6 Le 12 juin, l'armée de Bosnie-Herzégovine a pris le contrôle de tout le

7 plateau de Vilanica -c'est cette partie que j'ai indiquée tout à l'heure-,

8 et donc l'armée de Bosnie-Herzégovine contrôlait toutes les lignes d'accès

9 allant vers Puticevo, et la route principale Novi Travnik-Puticevo-

10 Travnik.

11 J'ai également reçu l'information que le commandement de la

12 309ème Brigade de l'armée de Bosnie-Herzégovine de Kakanj avait envoyé un

13 ultimatum au HVO de Kakanj pour que le HVO se rende et que pour que ses

14 membres rendent leurs armes.

15 A 3 heures 50 du matin du 12 juin, les membres du HVO de Kakanj

16 ont commencé à se retirer vers Vares. Il ont été accompagnés d'environ

17 15 000 civils croates qui partaient de Kakanj vers Vares.

18 M. Nobilo (interprétation). - Vous venez de mentionner la perte

19 de trois territoires de la part du HVO : Travnik, Novi Travnik et Kakanj.

20 A chaque fois, vous dites : "Le HVO perd la bataille, se retire,

21 accompagné des civils".

22 A votre avis, pourquoi cela s'est-il produit ainsi ? Cela a-t-il

23 été organisé par quelqu'un ? Comment se fait-il qu'à chaque fois, quand le

24 HVO perdait une bataille, pourquoi se retirait-il avec la population de la

25 région ?

Page 18464

1 M. Blaskic (interprétation). - C'était une chose habituelle.

2 Lorsque les soldats du HVO se retiraient, ils étaient accompagnés de leur

3 propre famille également. Ceci constitue une des conséquences d'une guerre

4 civile dans laquelle les gens locaux sont sur les lignes de front, devant

5 leur maison ou près de leur village. Et si le soldat qui est la tête de la

6 famille doit se retirer, il est normalement accompagné des autres membres

7 de sa famille. Cela explique le fait que, lorsque les soldats se sont

8 retirés de Kakanj, ils ont été suivis d'environ 15 000 civils croates qui

9 se sont déplacés vers les régions qui se trouvaient sous le contrôle du

10 HVO.

11 Dans ce cas précis, ils se sont déplacés vers les régions qui se

12 trouvaient sous le contrôle du HVO. Dans ce cas précis, il s'agissait de

13 la région de Vares.

14 M. Nobilo (interprétation). - Dites-nous comment est-ce que vous

15 compreniez cette situation ? Diriez-vous que l'armée de Bosnie-Herzégovine

16 nettoyait cette région ou diriez-vous que les Croates quittaient cette

17 région avant même que les soldats de l'armée de Bosnie-Herzégovine

18 n'arrivent ?

19 M. Blaskic (interprétation). – L'armée de Bosnie-Herzégovine ne

20 nettoyait pas cette région-là. Elle lançait des attaques contre le HVO et

21 les membres du HVO étaient obligés de se retirer, étant donné que ces

22 forces-là étaient beaucoup moins fortes que celles de l'armée de Bosnie-

23 Herzégovine. Le HVO devait donc se retirer. A partir de là, les civils,

24 les membres de familles de ces soldats ont accompagné leurs propres

25 soldats et se sont retirés avec eux.

Page 18465

1 M. Nobilo (interprétation). - Poursuivez.

2 M. Blaskic (interprétation). – Au cours de la journée du

3 12 juin, environ 170 familles croates sont allées de Zenica vers Busovaca

4 et Vitez. Encore une fois, ils ont attendu au point de contrôle de Lasva

5 pour recevoir un accord de l'armée de Bosnie-Herzégovine pour aller soit

6 vers Busovaca soit vers Vitez. Aussi, au cours de cette journée-là,

7 l'armée de Bosnie-Herzégovine a continué avec ces attaques contre la ligne

8 de front à Busovaca.

9 Le 13 juin 1993, l'armée de Bosnie-Herzégovine a complètement

10 repris le contrôle de Rostovo. Ce sont surtout des villages croates qui se

11 trouvaient sur les flancs de Rostovo qui se sont vus contrôlés par l'armée

12 de Bosnie-Herzégovine.

13 M. Nobilo (interprétation). - Lorsque vous dites Rostovo, de

14 quelle région parlez-vous ?

15 M. Blaskic (interprétation). – Il s'agit de la région qui

16 appartient à la municipalité de Novi Travnik, au sud, et plus vers Gorni

17 Vakuf. Au cours de la journée, j'ai reçu des rapports selon lesquels le

18 président de la présidence de Bosnie-Herzégovine, M. Alija Izetbegovic,

19 avait donné l'ordre d'un cessez-le-feu sur l'arrêt des opérations de

20 combat et que la Forpronu devait être responsable pour surveiller la mise

21 en oeuvre de ce cessez-le-feu.

22 C'est l'information que j'ai reçue sous forme d'un rapport le

23 13 juin 1993. Cependant, au cours de la journée, les attaques contre les

24 unités du HVO dans l'enclave de la Lasva se sont intensifiées et l'armée

25 de Bosnie-Herzégovine a continué à lancer ce genre d'attaques. Nous avons

Page 18466

1 eu le problème concernant le logement des personnes blessées, étant donné

2 que nous n'avions pas suffisamment de logements pour eux.

3 Le 14 juin 1993, un ordre a été donné pour un cessez-le-feu et

4 ce même jour, l'armée de Bosnie-Herzégovine a capturé un dernier site,

5 Gostunj, ce qui lui a permis de contrôler entièrement la route entre

6 Travnik et Zenica, sans nécessité de passer par Vitez et la vallée de la

7 Lasva. Il s'agit donc de la route reliant Zenica et Travnik qui est

8 entièrement sous le contrôle de l'armée de Bosnie-Herzégovine.

9 M. Nobilo (interprétation). – Utilisant encore une fois la

10 carte, veuillez montrer sur la carte quels ont été les événements dont

11 vous venez de parler.

12 (Le témoin indique les endroits sur la carte avec un pointeur.)

13 M. le Président. - Mon collègue me suggère ceci : une cote a-t-

14 elle été donnée à cette carte qui est sur le chevalet ?

15 M. Nobilo (interprétation). - Hier ou avant-hier, nous l'avons

16 posée, mais la côte ne lui a pas été attribuée. C'est à ce moment-là que

17 nous souhaitons le faire. Elle se trouvait physiquement là.

18 M. le Président. - Merci, Maître Nobilo.

19 Général Blaskic, allez-y.

20 M. Blaskic (interprétation). - Merci, Monsieur le Président,

21 Messieurs les Juges, je montre Vitez. Ce cercle vert indique Stari Vitez

22 ou Mahala. Il s'agit de la partie contrôlée par l'armée de Bosnie-

23 Herzégovine. Ensuite, Busovaca et Novi Travnik.

24 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, il est écrit ici

25 Paklarevo, mais il s'agit de Novi Travnik. Pendant une certaine période,

Page 18467

1 cela s'appelait Novi Travnik et ensuite, cela s'appelait Paklarevo.

2 Aujourd'hui, cela s'appelle Novi Travnik. C'est une carte un peu plus

3 ancienne, donc à l'époque cela s'appelait Paklarevo.

4 Cette carte montre qu'avec la fin des hostilités, au mois de

5 juin 1993, la partie contrôlée par le HVO était d'environ 20 % de la

6 région de la municipalité de Novi Travnik, environ 10 % de la municipalité

7 de Travnik. C'est cette partie-là, Nova Bila, au nord jusqu'à Puticevo.

8 M. Nobilo (interprétation). - Veuillez montrer la ville de

9 Travnik. La ville de Travnik est restée où, sous le contrôle de qui ?

10 M. Blaskic (interprétation). - Travnik est ici, et depuis le

11 6 juin 1993, il était contrôlé par l'armée de Bosnie-Herzégovine. En ce

12 qui concerne la municipalité de Travnik, dès le 11 juin 1993, nous avions

13 la position que nous voyons ici. Cela veut dire qu'environ 10 % de ce

14 territoire sont restés sous le contrôle du HVO et les réfugiés de Travnik

15 se trouvaient eux aussi dans cette partie encerclée.

16 Ensuite, Vitez. Le HVO a maintenu le contrôle d'environ 35 % de

17 la région de la municipalité de Vitez. C'est cette partie-là, la partie la

18 plus étroite de l'enclave. Ici, c'est Dzidica Kuce, la position contrôlée

19 par l'armée de Bosnie-Herzégovine. Par la suite, dans le cadre de la

20 chronologie, nous allons voir que, plusieurs fois, on a essayé de couper

21 cette enclave ici et d'établir le lien entre les deux parties.

22 Ici, le territoire de la municipalité de Busovaca. Le HVO

23 contrôlait environ 40 % et le reste était contrôlé par le 3ème Corps

24 d'armée de Zenica. Les forces du 3ème Corps d'armée de Zenica et du

25 6ème Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine dans le poste de commandement se

Page 18468

1 trouvaient à Fojnica. Cependant, Fojnica ne figure pas ici sur cette

2 carte, mais il y a une autre carte avec Fojnica.

3 M. Nobilo (interprétation). - Pour le compte rendu, veuillez

4 dire ce que les couleurs différentes indiquent pour que les personnes

5 puissent s'orienter dans quelques mois aussi ?

6 M. Blaskic (interprétation). - La ligne bleue constitue la ligne

7 de front.

8 M. Nobilo (interprétation). - A l'intérieur de la ligne bleue,

9 qui contrôle ce territoire ?

10 M. Blaskic (interprétation). - C'est le HVO qui contrôle ce

11 territoire à l'intérieur de la ligne bleue, sauf Stari Vitez.

12 M. Nobilo (interprétation). - A l'extérieur de la ligne bleue,

13 nous voyons des lignes vertes. Qui contrôle ce territoire-là ?

14 M. Blaskic (interprétation). - C'est l'armée de Bosnie-

15 Herzégovine. Comme je l'ai déjà dit, il s'agissait de parties du 1er, du

16 3ème, du 6ème et du 7ème Corps d'armée de l'armée de Bosnie-Herzégovine.

17 M. Nobilo (interprétation). - Sur la carte sont inscrits un

18 certain nombre de mots, pouvez-vous les lire ?

19 M. Blaskic (interprétation). - Oui, là il est écrit "muslimanski

20 prostor", ce qui signifie "L'espace contrôlé par l'armée de

21 Bosnie-Herzégovine". En bas, ici à gauche, "muslimanski prostor", ce qui

22 signifie que ce sont des territoires contrôlés par l'armée de

23 Bosnie-Herzégovine.

24 M. Nobilo (interprétation). - Au milieu, à l'intérieur de

25 l'enclave ?

Page 18469

1 M. Blaskic (interprétation). - Il est écrit "hrvartski prostor",

2 ce qui signifie "territoire contenu par le HVO". Dans cette enclave qui

3 mesure au maximum entre 1 et 6 kilomètres d'un côté et 10 à 12 de l'autre.

4 M. Nobilo (interprétation). - Cette enclave est-elle restée la

5 même ? A-t-elle maintenu le même aspect jusqu'aux accords de Washington ?

6 M. Blaskic (interprétation). - L'aspect de cette enclave est

7 resté identique jusqu'aux accords de Washington. Mais au mois de

8 décembre 1993, cette enclave a été largement coupée ici dans les environs

9 de Vitez, à l'endroit que j'indique.

10 En janvier 1994, elle a été coupée au niveau de Buhine Kuce et

11 coupée complètement.

12 M. Nobilo (interprétation). - Et ensuite, a-t-elle repris sa

13 forme, la forme que nous voyons ici ?

14 M. Blaskic (interprétation). - Oui, elle a repris cette forme

15 qui est demeurée la même pratiquement jusqu'aux accords de Washington.

16 M. Nobilo (interprétation). - Merci, vous pouvez vous rasseoir.

17 Je demanderai une cote pour cette carte en tant que pièce à

18 conviction.

19 M. Abtahi. - Il s'agira donc de la pièce D548.

20 M. Shahabuddeen (interprétation). - Etait-ce votre avis que

21 l'armée de Bosnie-Herzégovine souhaitait éliminer le HVO dans l'enclave

22 que vous venez de décrire ?

23 M. Blaskic (interprétation). - Oui.

24 M. Shahabuddeen (interprétation). - A contrario, si le HVO avait

25 atteint tous ses objectifs de guerre, pourriez-vous nous montrer sur la

Page 18470

1 carte quel territoire, quelle superficie, le HVO serait parvenu à acquérir

2 ou à contrôler ?

3 M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Juge, j'ai toujours

4 considéré que la position commune du HVO et de l'armée de Bosnie-

5 Herzégovine consistait à se donner pour but la libération des territoires

6 relevant de responsabilité du 3ème Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine et

7 de la zone opérationnelle de Bosnie centrale. Cette zone de responsabilité

8 englobait le plateau Vlasic -je n'ai pas toute la carte ici-, mais cette

9 zone englobait également la ville de Jajce ainsi qu'une partie de Tesanj

10 et de Usora. Je crois que Doboj faisait également partie de cette zone de

11 responsabilité. Il y avait aussi Maglaj.

12 Donc l'objectif était, à l'issue d'un combat mené en commun,

13 d'obtenir la libération d'un certain nombre de territoires qui

14 précédemment étaient sous le contrôle de l'armée de la Republika Srpska.

15 M. Shahabuddeen (interprétation). - Je crois que je vous suis,

16 je n'en suis pas absolument sûr, mais je le crois.

17 M. Nobilo (interprétation). - Général, pour embrayer sur la

18 question que vient de vous poser M. le Juge Shahabuddeen, je vous pose la

19 question suivante : selon ce que vous saviez et selon les objectifs qui

20 étaient les vôtres, qui était votre ennemi, à vous en tant que commandant

21 de la zone opérationnelle de Bosnie centrale ?

22 M. Blaskic (interprétation). - Mon ennemi était l'armée de la

23 Republika Srpska.

24 M. Nobilo (interprétation). - Dans quelle direction allaient vos

25 efforts ?

Page 18471

1 M. Blaskic (interprétation). - J'ai consacré pratiquement la

2 totalité du mois d'août dans le village de Blazecivi à défendre la ville

3 de Jajce contre l'armée de la Republika Sprska.

4 M. Nobilo (interprétation). - C'était en 1992 ?

5 M. Blaskic (interprétation). - Oui, j'ai passé du temps à

6 Travnik, à Mescema, à Rovno pour organiser la défense de Travnik contre

7 l'armée de la Republika Sprska. J'ai également passé du temps à Maglaj et

8 personnellement je me suis engagé à fond dans la défense contre l'armée de

9 la Republika Srpska.

10 M. Nobilo (interprétation). - Général, avez-vous jamais reçu

11 l'ordre d'encercler un certain nombre de territoires en Bosnie centrale

12 pour ensuite retourner vos armes contre l'armée de la Republika Srpska ?

13 M. Blaskic (interprétation). - Je n'ai jamais reçu cet ordre.

14 M. Shahabudden (interprétation). – J'ai une petite question à

15 poser, Général.

16 Selon la carte que nous avons sous les yeux, l'armée de Bosnie-

17 Herzégovine contrôlait certains territoires ?

18 M. Blaskic (interprétation). - Oui.

19 M. Shahabudden (interprétation). - Y avait-il une portion

20 quelconque de ce territoire contrôlée par l'armée de Bosnie-Herzégovine

21 que le HVO aurait aimé occuper, s'il pouvait le faire ?

22 M. Blaskic (interprétation). - A partir du 25 juin, la situation

23 sur le terrain correspondait à ce qui est montré sur la carte.

24 Maintenant, si l'on parle de la libération d'un certain nombre

25 de territoires aux dépends de l'armée de Bosnie-Herzégovine, ce que nous

Page 18472

1 souhaitions était obtenir la libération de ces territoires et régler nos

2 problèmes de communication. Mais nous ne cherchions pas à libérer les

3 territoires sur lesquels se trouvaient les Musulmans bosniens, mais bien

4 les territoires sur lesquels se trouvaient les Croates.

5 Par exemple, ici, au niveau de ce rétrécissement et en d'autres

6 endroits également.

7 M. Shahabudden (interprétation). - Vous souhaitiez ouvrir

8 certains axes de communication et vous faites une distinction entre cette

9 volonté et une éventuelle volonté d'occuper certains territoires. Est-ce

10 que j'interprète bien vos propos ?

11 M. Blaskic (interprétation). - Oui, ce que nous souhaitions

12 faire était ouvrir, rendre disponibles certains axes de communication.

13 M. Nobilo (interprétation). – Je tiens à souligner que, dans le

14 compte rendu, la question que j'ai posée a été mal retranscrite ou mal

15 interprétée. Ma question était : "Est-ce que vous aviez pour objectif de

16 vous emparer de certains territoires pour retourner vos armes contre

17 l'armée de Bosnie-Herzégovine ?".

18 M. Blaskic (interprétation). - Non.

19 M. Nobilo (interprétation). – Dans le compte rendu, il est

20 écrit : "Est-ce que vous aviez le projet de retourner les armes contre

21 l'armée de la Republika Srpska ?". Il conviendrait de corriger.

22 (En raison de la vitesse, l'interprète française a repris

23 l'erreur en traduisant de l'anglais.)

24 M. Nobilo (interprétation). – Veuillez poursuivre.

25 M. Blaskic (interprétation). – Le 15 juin 1993, je me suis

Page 18473

1 adressé au HCR et je lui ai demandé de l'aide alimentaire pour les

2 personnes déplacées de la Vallée de La Lasva et pour les personnes

3 déplacées de Vares, donc notamment pour les Croates de Kakanj qui se sont

4 trouvés en statut de personnes déplacées à Vares.

5 A 14 heures, le 15 juin, j'ai été invité à une nouvelle réunion

6 dans la base de la Forpronu à Nova Bila. C'est M. Thebault qui m'y a

7 convié une nouvelle fois.

8 Cette réunion était une réunion du commandement conjoint des

9 forces armées de Bosnie-Herzégovine. Lors de cette réunion à laquelle ont

10 participé MM. Thebault, Stjepan Siber, adjoint du chef d'état-major

11 principal de l'armée de Bosnie-Herzégovine, M. Dzemo Merdan, commandant

12 adjoint du 3ème Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine et également

13 Filip Filipovic, membre du commandement conjoint des forces armées de

14 Bosnie-Herzégovine, ainsi que Franjo Nakic, chef de l'état-major et membre

15 du commandement conjoint du HVO et de l'armée de Bosnie-Herzégovine au

16 niveau du commandement conjoint du 3ème Corps d'armée et de la zone

17 opérationnelle de Bosnie centrale. Il y avait également Zifko Totic,

18 membre du commandement conjoint du 3ème Corps d'armé de Bosnie-Herzégovine

19 et de la zone opérationnelle de Bosnie centrale.

20 A cette réunion présidée par M. Thebault, jusqu'à 15 heures

21 environ, nous avons attendu l'arrivée du commandant du 3ème Corps d'armée

22 de Bosnie-Herzégovine, M. Enver Hadzihasanovic, qui venait de Zenica.

23 Puisqu'il n'est pas arrivé, la réunion a été reportée au lendemain.

24 Dans l'après-midi, à 18 heures, j'ai eu une rencontre avec des

25 responsables de la Croix-Rouge internationale. Je ne me souviens pas des

Page 18474

1 noms de ces personnes et je ne les ai pas inscrits dans mes notes. Mais

2 j'ai noté le thème de la réunion. La réunion a porté pour l'essentiel sur

3 la situation des personnes déplacées à Novi Travnik, à Travnik et à Vares.

4 C'est le sujet dont nous avons débattu. L'autre thème de la réunion a été

5 l'impossibilité d'évacuer les blessés.

6 A ce stade de la réunion, je me suis plaint du fait qu'il nous

7 fallait l'autorisation du 3ème Corps d'armée pour évacuer les blessés de

8 l'hôpital-église et j'ai fait savoir au représentant de la Croix-Rouge

9 internationale que sur les 70.000 personnes qui se trouvaient dans

10 l'enclave de la vallée de la Lasva, nous n'avions que deux chirurgiens,

11 trois médecins de médecine générale et une église qui est devenue un

12 hôpital improvisé. Je lui ai fait savoir qu'il y avait 1500 enfants dans

13 cette enclave.

14 Le 16 juin 1993, l'armée de Bosnie-Herzégovine a poursuivi son

15 attaque et des localités de la municipalité de Novi Travnik, à savoir les

16 villages de Rutnik, Donja et Gornja Besina, comptant environ 300 maisons,

17 ont été attaqués à ce moment-là.

18 J'ai appris qu'il y avait eu 30 morts et 80 blessés au cours des

19 combats qui se sont déroulés dans la municipalité de Novi Travnik.

20 Autrement, jusqu'à cette date, c'est-à-dire, jusqu'au 16 juin, dans la

21 vallée de la Lasva, 448 soldats avaient été tués et 1550 avaient été

22 blessés, mais il n'y avait pas eu de victime civile.

23 M. Nobilo (interprétation). - Du côté du HVO ?

24 M. Blaskic (interprétation). - Oui, du côté du HVO.

25 Le 17 juin 1993, à 15 heures, nous avons tenu une nouvelle

Page 18475

1 réunion dans la base de la Forpronu de Nova Bila. Cette réunion a une

2 nouvelle fois été présidée par M. Thebault et y participaient les mêmes

3 personnes que celles qui s'étaient trouvées à cet endroit le 15 juin.

4 En effet, le commandant du 3ème Corps d'armée de Bosnie-

5 Herzégovine n'est toujours pas venu à cette réunion.

6 Monsieur Stjepan Siber, lors de cette réunion, a dit ce qui suit : "En

7 raison de l'incident causé par l'armée de Bosnie-Herzégovine et subi par

8 le HVO, nous avons procédé à un remplacement des commandants locaux".

9 Suite à cette constatation, je lui ai dit que près de 60.000

10 civils avaient été expulsés de chez eux, que les opérations de combat

11 étaient très étendues, très intenses, à Vitez, à Busovaca, à Travnik, à

12 Novi Travnik, à Fojnica, à Kakanj et que ces actes n'étaient pas le fait

13 d'individus et n'étaient pas non plus des incidents. Il s'agissait bien là

14 d'une opération militaire d'attaque, organisée et répondant à une

15 stratégie de l'armée de Bosnie-Herzégovine, stratégie décidée par l'état-

16 major installé à Zenica.

17 J'ai dit qu'à Senkovici, un village de la municipalité de

18 Novi Travnik, 187 à 200 civils étaient enfermés dans l'école élémentaire,

19 que dans le village de Trenica, 27 civils étaient enfermés, que nous

20 n'avions pas les chiffres exacts pour le village d'Opara, que dans la

21 municipalité de Travnik des Croates avaient été expulsés de 35 villages et

22 que l'armée de Bosnie-Herzégovine interdisait l'évacuation des blessés.

23 Cette réunion a pris fin sans être parvenue à des conclusions

24 concrètes et les membres du commandement conjoint sont repartis.

25 Mais à partir du moment où Travnik a été prise, le siège du

Page 18476

1 commandement conjoint de Travnik est devenu inaccessible pour les membres

2 du HVO. Donc les représentants de mon commandement ne pouvaient plus aller

3 à Travnik participer à des réunions ou à quelque coordination que ce soit.

4 M. Nobilo (interprétation). - Je demanderai que l'on remette au

5 témoin la pièce à conviction D370, mais peut-être pourrions-nous avoir une

6 pause ?

7 M. le Président. - Puisque l'on avait dit que l'on ferait une

8 pause régulièrement, nous reprenons donc dans un quart d'heure. L'audience

9 est suspendue.

10 (La séance, suspendue à 15 heures 20, est reprise à

11 15 heures 40.)

12 M. le Président. - L'audience est reprise. Le Juge Rodrigues

13 voudrait poser deux questions ou trois, s'il le veut.

14 M. Rodrigues. - Merci, Monsieur le Président, je crois qu'il me

15 faut poser trois questions. Général Blaskic, avant de passer...,

16 j'aimerais bien poser trois questions.

17 Vous avez parlé que le 28 mai il y a eu deux habitations de deux

18 officiers du HVO occupées par des Croates. Vous vous rappelez ?

19 Il y a eu un appartement et une habitation qui étaient utilisés

20 par deux officiers du HVO qui ont été occupés ?

21 M. Blaskic (interprétation). - Oui, je me rappelle cela.

22 M. Rodrigues. - Est-ce que vous savez si les personnes qui ont

23 occupé les maisons savaient qu'elles étaient occupées par des officiers du

24 HVO, ou non ?

25 M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Juge, je ne sais pas

Page 18477

1 s'ils le savaient, mais ce dont j'étais informé c'est qu'il s'agissait de

2 personnes déplacées qui sont arrivées dans le village et sont tout

3 simplement entrées de force dans des maisons.

4 M. Rodrigues. - Merci. Ma deuxième question est : au 12 juin,

5 vous avez parlé d'un convoi de réfugiés -oui ?- auquel vous vous êtes

6 adressé en donnant des explications et M. Thebault vous a dit qu'il

7 n'était pas convenable de le faire. Vous vous rappelez ?

8 M. Blaskic (interprétation). - Un instant, je vous prie,

9 Monsieur le Juge. Si vous parlez du convoi humanitaire, le convoi Tuzla,

10 j'en ai parlé, mais à la date du 11 juin.

11 M. Rodrigues. - Oui, c'est vrai. Ce convoi était au 11, mais je

12 crois que c'était un convoi des réfugiés. Non ?

13 M. Blaskic (interprétation). – Non, Monsieur le Juge, peut-être

14 que l'interprétation était erronée. Des réfugiés bloquaient les routes, et

15 moi, à la demande de M. Thebault, je suis allé là-bas pour récupérer le

16 convoi et nous sommes arrivés à cet endroit de la route qui était coupée,

17 bloquée.

18 M. Rodrigues (interprétation). - C'est ma faute, j'ai mal

19 compris. Tout de même, je profiterai de l'opportunité pour poser la

20 question : ces réfugiés étaient-ils Croates, Musulmans ? A quelle ethnie

21 appartenaient-ils ?

22 M. Blaskic (interprétation). - Ils étaient en majorité Croates.

23 Peut-être qu'il pouvait y avoir parmi eux quelques couples mixtes,

24 Monsieur le Juge, mais la grande majorité était Croate.

25 M. Rodrigues (interprétation). – Ma troisième question : devant

Page 18478

1 cette carte -le document D458- vous avez dit que, toujours, pour vous,

2 l'ennemi était l'armée de la Republika Srpska ?

3 M. Blaskic (interprétation). – Qu'en plus grande partie, il

4 s'agissait de l'armée de Republika Srpska, mais à un certain moment j'ai

5 été attaqué et je me suis retrouvé dans la situation décrite à partir de

6 la carte à cause de l'armée de Bosnie-Herzégovine.

7 M. Rodrigues (interprétation). - A ce moment, vous avez changé

8 votre position ou vous avez continué à penser que l'ennemi principal était

9 l'armée de Republika Srpska ou l'armée de BIH ?

10 M. Blaskic (interprétation). - Pour moi, en ma qualité de

11 militaire qui me suis retrouvé dans la situation de me battre pour ma

12 survie, dans la situation que j'ai décrite, l'ennemi était l'armée de

13 Bosnie-Herzégovine, dans cette situation précise.

14 M. Rodrigues (interprétation). - Merci beaucoup.

15 M. le Président. - Maître Nobilo ?

16 M. Nobilo (interprétation). - Merci. Eh bien, je suis incité à

17 vous poser la question suivante : quelle était votre objectif tant qu'il y

18 avait encore la paix ? Est-ce que vous pensiez que la situation allait se

19 développer comme elle l'a fait ?

20 M. Blaskic (interprétation). - Vous pensez à la situation entre

21 l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO ?

22 M. Nobilo (interprétation). - Oui.

23 M. Blaskic (interprétation). – Eh bien, je crois que le

24 commandement conjoint du 3ème Corps d'armée et de la zone opérationnelle du

25 HVO pour la Bosnie centrale, qui a fonctionné jusqu'au début de l'attaque

Page 18479

1 contre Travnik, donc jusqu'au 3 juin 1993, je pense que le commandement

2 conjoint possède des documents portant sur le plan d'action concerté,

3 conjoint contre l'armée de Republika Srpska sur le mont Vlacic. Et nous

4 avons participé à l'élaboration du plan pour la libération de Vlacic.

5 Je parle donc bien du 3ème Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine et

6 de la zone opérationnelle de Bosnie centrale. C'étaient donc Franjo Nakic

7 et Dzemo Merdan qui ont travaillé à l'élaboration de ce plan commun.

8 M. Nobilo (interprétation). – Passons à l'examen du document

9 D370. Je ne vais pas en donner lecture exhaustivement ; je me contenterai

10 de certains passages. Sa date est du 16 juin 1993 ; c'est vous qui l'avez

11 signé et c'est un ordre que vous adressez à toutes les brigades et aux

12 unités autonomes.

13 J'en lis le dernier point : "Sur la base de l'accord général

14 portant sur l'arrêt des combats en Bosnie-Herzégovine à partir du

15 15 juin 1993 ; accord signé par le général de bataillon Milevoj Petkovic

16 et le général Radko Mladic ainsi que le général Hacim Delic, devant des

17 témoins de la Forpronu, le général Lars-Eric Wahlgren, Cedric Thornberry,

18 adjoint au chef de la mission, M. le général Morillon pour la Bosnie,

19 j'ordonne ce qui suit.."

20 Ensuite, nous avons une série de points constituant cet ordre

21 qui portent tous sur l'arrêt des combats. Et j'ai l'intention de donner

22 lecture des points 6, 7 et 8 de cet ordre.

23 "Point 6 : Autoriser l'accès de l'aide humanitaire et la liberté

24 de circulation aux représentants des organisations internationales et

25 humanitaires avec les mesures de contrôle habituel.

Page 18480

1 Point 7 : Ne pas utiliser l'électricité ou le téléphone comme

2 des armes mais déployer des efforts pour maintenir tous les moyens qui

3 permettent de s'approvisionner en électricité et en eau.

4 Point suivant : S'agissant des prisonniers de guerre et à

5 l'égard de toutes les victimes, déterminer leur situation exacte, leur

6 emplacement exact et établir la liste de leurs noms."

7 Point 9 : Toutes les unités de la zone opérationnelle de Bosnie

8 centrale ont pour devoir, aux termes des Conventions de Genève... -nous ne

9 lisons pas le mois, mais l'année de ces conventions est de 1949- et de ces

10 protocoles additionnels ainsi que des autres instruments régissant la loi

11 de la guerre et la protection des droits de l'Homme d'agir comme stipulé

12 ci-dessus.

13 Point 10 : Pour l'application de cet ordre, les commandants de

14 brigades et des unités indépendantes de la 3ème zone opérationnelle sont

15 responsables devant moi.

16 Signé : "Commandant-colonel Blaskic".

17 Dans quelles circonstances cet ordre a-t-il été émis ?

18 M. Blaskic (interprétation). - Il a été émis dans des conditions

19 caractérisées par la signature d'une trêve, d'un arrêt des hostilités, en

20 fonction d'un accord conclu par les trois commandants, les commandants des

21 trois armées, comme on le lit dans le texte, à savoir le chef de

22 l'état-major principal du HVO, le commandant de la Republika Srpska et le

23 commandant de l'armée de Bosnie-Herzégovine.

24 M. Nobilo (interprétation). - J'aimerais que l'on remette à

25 présent au témoin un autre document, qui est le document de la défense,

Page 18481

1 D371.

2 Le document D371 est apparemment rédigé le 19 juin 1993, même si

3 la date n'est pas facilement lisible, à 15 heures 55. Le texte se lit

4 comme suit :

5 "En vertu de l'accord signé concernant la cessation des

6 hostilités en Bosnie-Herzégovine, accords des 10 et 15 juin, et

7 acceptation des deux parties quant à la mise en oeuvre de l'accord du

8 10 juin 1993, j'ordonne ce qui suit :

9 Premièrement : interdire l'arrestation des civils dans le cadre

10 des opérations de combat. Civils qui ne doivent donc pas être faits

11 prisonniers ou pris comme otages afin d'affaiblir l'ennemi".

12 Là quelque chose est ajouté de façon manuscrite que j'ai du mal

13 à lire.

14 M. Blaskic (interprétation). - C'est mon écriture.

15 "Dans les villes et villages qui sont exclusivement sous le

16 contrôle du HVO, zone opérationnelle de Bosnie centrale".

17 M. Nobilo (interprétation). - Merci. Je passe au point 2 de

18 l'ordre qui est tapé à la machine et donc lisible.

19 Je cite : "Rendre impossible l'incendie de bâtiments et

20 notamment des monuments du culte, mosquée, Mejtef, Vakuf, Mazara...", si

21 je lis bien car c'est difficile à lire.

22 M. Blaskic (interprétation). - Mezaret.

23 M. Nobilo (interprétation). - Le point 3 : "Toute confiscation

24 de biens doit être sanctionnée et résolue grâce à des mesures

25 disciplinaires militaires émanant de Procureurs et de Tribunaux.

Page 18482

1 Point 4 : Eu égard à l'application de cet ordre, sont

2 responsables devant moi, les commandants de brigade et des unités

3 autonomes. Il importe de m'informer de l'application de cet ordre par les

4 rapports habituels".

5 Signature : "Commandant-colonel Tihomir Blaskic".

6 Général, au mois de juin, de nouveaux conflits éclatent. Quelle

7 est la raison pour laquelle vous décidez de donner l'ordre d'interdire la

8 mise en état d'arrestation de civils ? Est-ce une action interdite par la

9 loi ? Est-ce une action connue ?

10 M. Blaskic (interprétation). - Oui, c'est un fait connu, mais

11 j'ai déjà dit que dans cette enclave était arrivé un grand nombre de

12 personnes déplacées, personnes qui étaient armées, qui avaient un

13 équipement militaire et qui transportaient des sacs. Il y a eu un grand

14 nombre d'incidents car le nombre de ces personnes déplacées était au

15 minimum de 20 000.

16 Donc j'ai décidé d'agir de façon préventive pour prévenir

17 éventuellement leurs réactions prévisibles, eu égard ou vis-à-vis des

18 Musulmans bosniens qui vivaient encore dans la vallée de la Lasva.

19 M. Nobilo (interprétation). - Vous avez demandé que soit rendu

20 impossible l'incendie de bâtiments au point 2 et la destruction de biens

21 matériels. Mais vous mettez l'accent de façon distincte sur les monuments

22 du culte. Pouvez-vous expliquer aux Juges quels sont les édifices du culte

23 que vous décrivez, que vous énumérez entre parenthèses ? De quelle

24 confession relèvent-ils ?

25 M. Blaskic (interprétation). - Ils relèvent de la foi islamique.

Page 18483

1 J'ai mis l'accent sur ces bâtiments parce que des rumeurs circulaient, des

2 informations depuis le 3 juin selon lesquelles l'armée de Bosnie-

3 Herzégovine avait tué les curés de Brajkovici et Grahovcici et il était

4 question aussi d'une église qui aurait été incendiée, etc. Donc, c'était

5 déjà un fait connu que l'armée de Bosnie-Herzégovine s'était attaqué aux

6 personnes qui avaient trouvé refuge dans le monastère de Guca Gora.

7 J'ai essayé de faire ce que je pouvais pour que, sur les

8 territoires contrôlés par le HVO, les Croates n'agissent pas pour se

9 venger.

10 M. Nobilo (interprétation). - Vous décrivez dans ce texte un

11 certain nombre de bâtiments qui relèvent de la religion islamique. Pouvez-

12 vous nous dire quelle est la signification de ces termes ? Pour la

13 mosquée, nous connaissons la signification de ce terme, pratiquement tous

14 ici. Mais pouvez-vous expliquer la signification des autres termes ?

15 M. Blaskic (interprétation). - Les mezaret, ce sont des

16 cimetières ou des tombes de Musulmans bosniens. Les mejtef, pour autant

17 que je le sache, sont des maisons destinées à la prière, comme les Vakuf

18 qui sont des bâtiments relevant de la religion musulmane. Quant à la

19 mosquée, c'est une maison dans laquelle se déroule l'office.

20 M. le Président. - Excusez-moi, Maître Nobilo, j'ai un petit

21 doute sur les dates. Je n'avais pas noté que le cessez-le-feu était du

22 15 juin. Or, les deux documents que vous venez de nous présenter font

23 référence à un cessez-le-feu du 15 juin. Je ne voudrais pas me tromper.

24 Vous aviez parlé le 13 juin d'un cessez-le-feu ordonné par

25 Alija Izetbegovic. Et le 14 juin, à 14 heures, j'ai noté : "Ordre de

Page 18484

1 cessez-le-feu". Mais était-ce le cessez-le-feu du 14 juin ?

2 Parce que le 15 -cela a dû m'échapper-, le 15 vous avez une

3 réunion avec Thebault à laquelle Enver Hadzihasanovic ne vient pas. Vous

4 demandez au HCR l'aide alimentaire. J'ai noté une rencontre avec la Croix-

5 Rouge.

6 Alors je vous pose la question : finalement, ce cessez-le-feu a

7 été signé le 15 ? J'ai mal noté, certainement.

8 M. Blaskic (interprétation). - Non, il n'y a pas d'erreur,

9 Monsieur le Président. Vous n'avez pas fait d'erreur. L'accord général

10 relatif à un cessez-le-feu a été signé le 15 juin 1993 par les trois

11 commandants militaires. Et je sais, d'après mes notes, qu'il y a eu

12 également une réunion qui s'est tenue le 10 juin regroupant les

13 commandants militaires. Mais je ne sais pas si un accord a été signé lors

14 de cette réunion.

15 Peut-être qu'effectivement le 10 juin il n'y a eu qu'une réunion

16 et puis l'accord a été effectivement conclu le 15 juin, accord résultant

17 de cette première réunion. Mais l'accord général de cessez-le-feu a été

18 signé le 15 juin 1993. Il s'agit de la pièce 370, pièce de la défense.

19 M. Nobilo (interprétation). - Peut-être pourrions-nous donner

20 cette explication. Y a-t-il effectivement eu un accord général de cessez-

21 le-feu entre les trois parties belligérantes, les Serbes, les Croates et

22 les Musulmans ou bien y avait-il un cessez-le-feu entre Croates et

23 Musulmans ?

24 M. Blaskic (interprétation). - Tout d'abord, il y a eu un accord

25 général de cessez-le-feu en date du 15 juin 1993 entre les trois parties

Page 18485

1 hostiles, les trois parties belligérantes et il y a eu également un accord

2 entre les Croates et les Musulmans signé, je crois, à Vitez. Mais, je ne

3 retrouve pas très bien la date dans mes notes. Je ne sais pas sur ce

4 document s'il s'agit du 10 ou 19 juin. Je crois que c'était le 19.

5 M. Nobilo (interprétation). - Poursuivez le récit des

6 événements. Nous pourrons revenir à cela un peu plus tard.

7 M. Blaskic (interprétation). - Le 17 juin 1993, au cours de la

8 matinée, vers 6 heures 55, l'armée de Bosnie-Herzégovine a poursuivi son

9 opération d'offensive dans la municipalité de Novi Travnik. Et à 8 heures

10 environ, les autres zones de la municipalité de Travnik ont également été

11 victimes d'une attaque. Au cours de la journée du 17 juin dans l'après-

12 midi, le colonel Duncan m'a rendu visite.

13 J'ai eu une conversation avec lui, au cours de laquelle, je l'ai

14 remercié d'avoir assuré la sécurité de certains Croates à Guca Gora. Je

15 l'ai remercié pour d'autres choses encore. Nous avons également parlé des

16 victimes du HVO à la fois militaires et civiles. D'après mes notes, du

17 10 au 17 juin 1993, les forces de la Forpronu avait tué 17 Croates civils

18 et militaires.

19 M. Nobilo (interprétation). - Lorsque vous utilisez ce terme,

20 dans notre langue, vous parlez à la fois des blessés et des tués, n'est-ce

21 pas ?

22 M. Blaskic (interprétation). - Oui effectivement, certains

23 d'entre eux ont été blessés et ont succombé à leurs blessures et d'autres

24 ont été tués sur le coup. Je parle notamment de Croates qui ont été tués

25 au moment de l'attaque contre le convoi dans la nuit du 10 au

Page 18486

1 11 juin 1993. Au cours de cette conversation, le colonel Duncan m'a posé

2 la question suivante : "Vos forces du HVO, de Prozor ne vont-elles pas

3 faire une percée dans la vallée de la Lasva et lever le siège dont vous

4 êtes victime".

5 Ma réponse a été que le colonel Duncan savait très bien qu'une

6 trêve existait entre l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO. J'ai

7 également ajouté que je n'avais aucune information concernant un plan

8 éventuel de percées à partir de Prozor et dans la vallée de la Lasva.

9 M. Nobilo (interprétation). - Etant donné les connaissances

10 générales dont vous disposez, y a-t-il jamais eu tentatives de débloquer,

11 de désenclaver la Bosnie centrale en envoyant des troupes du HVO du sud de

12 la Bosnie-Herzégovine ?

13 M. Blaskic (interprétation). - Non.

14 M. Nobilo (interprétation). - Poursuivez.

15 M. Blaskic (interprétation). - J'ai également ajouté lors de ma

16 conversation avec le colonel Duncan que je savais que nous étions

17 complètement encerclés et que notre situation était pratiquement sans

18 espoir.

19 Le colonel Duncan m'a alors répondu : "Je ne pense pas que vous

20 pourrez survivre". C'est ainsi que la réunion du 17 juin 1993 s'est

21 terminée.

22 Le 18 juin, l'armée de Bosnie-Herzégovine a poursuivi son

23 attaque contre la brigade Francopan ou plutôt contre le reste du

24 territoire que nous tenions encore, à savoir 10 % du territoire de la

25 municipalité de Travnik.

Page 18487

1 Et pendant toute la journée, il y a eu des affrontements

2 relativement à la position de Pescara. Le 20 juin 1993, l'armée de Bosnie-

3 Herzégovine, en passant par Igman, a redéployé la 101ème et la

4 102ème Brigade, certains éléments en tout cas, de Sarajevo et certaines

5 parties du 6ème et du 1er Corps également. J'ai reçu des informations

6 disant que ces éléments allaient être déployés afin de poursuivre

7 l'offensive.

8 Au cours de la réunion d'information du matin, avec mes

9 collaborateurs, le chef d'état-major, M. Franjo Nakic, s'est plaint. Il a

10 déclaré que, depuis le 11 février 1993, il travaillait avec Dzemo Merdan

11 dans le cadre de la commission conjointe et du commandement conjoint et

12 que ses collaborateurs, au sein de l'état-major, se plaignaient de son

13 absence prolongée.

14 La période entre le 20 juin et le 23 juin, je l'ai passée à la

15 position de Pescara.

16 Au cours de ces différentes journées, les opérations de défense

17 étaient intenses. Il s'agit des drapeaux bleus présentés sur la maquette.

18 Il s'agit des zones de la municipalité de Travnik que nous tenions encore.

19 M. Nobilo (interprétation). - Veuillez les indiquer sur la

20 maquette ?

21 (Le témoin s'exécute.)

22 M. Nobilo (interprétation). - Regardons deux autres documents de

23 cette période, le premier est le document D372.

24 Ce document, cette pièce D372, porte une date illisible.

25 Cependant, on peut supposer qu'il a été rédigé aux environs du 19 juin,

Page 18488

1 étant donné la cote qui figure sur ce document.

2 Il est dit : "Selon l'accord conclu par le commandement conjoint

3 de l'armée de Bosnie-Herzégovine, le commandant de la 3ème Zone

4 opérationnelle de Bosnie centrale et le commandant du 3ème Corps d'armée de

5 l'armée de Bosnie-Herzégovine donne l'ordre suivant

6 1.° Assurer un passage libre du convoi alimentaire vers le

7 village de Kruscica le 21 juin 1993 qui sera escorté par le CICR, par

8 l'ECMM et par le HCR".

9 Ensuite, il est dit qu'il faut éliminer toutes les mines qui ont

10 été posées, que la police doit s'assurer que toutes ces tâches sont bien

11 exécutées.

12 Quelle force était en présence à cet endroit ? Quel groupe

13 ethnique ?

14 M. Blaskic (interprétation). - La plupart des hommes de la

15 325ème Brigade de montagne de l'armée de Bosnie-Herzégovine étaient

16 présents ainsi que les renforts de la 308ème Brigade de montagne de

17 Novi Travnik. La population majoritaire, les seules personnes vivant là à

18 l'époque, étaient des Musulmans bosniens. Pour ce qui est des mines, elles

19 se trouvaient principalement le long de la ligne de front. Le convoi

20 devait théoriquement traverser des lignes de front tenues par le HVO et

21 une autre ligne de front ensuite tenue par l'armée de Bosnie-Herzégovine.

22 M. Nobilo (interprétation). - Document suivant, s'il vous

23 plaît ? D373.

24 (Correction de l'interprète : dans le préambule de ce document,

25 il fallait lire : "Selon l'accord signé entre les trois commandants, je

Page 18489

1 donne l'ordre suivant").

2 M. Nobilo (interprétation). - Il s'agit donc d'un ordre qui

3 n'est pas non plus très lisible, je vais tenter de lire les parties qui le

4 sont. Le document est le D373 et porte la date du 21 juin 1993 et ce

5 document est adressé à tous les commandants de brigade et à tous les

6 directeurs de prisons militaires. Le titre est : "Traitements de

7 prisonniers de guerre". Il est dit : "Sur la base des dispositions de la

8 Convention de Genève, du 12 août 1949, qui régit le traitement des

9 prisonniers de guerre, j'ordonne la chose suivante : tout d'abord le

10 traitement des prisonniers de guerre et ensuite... -deux ou trois mots

11 sont illisibles, puis il est dit-: "...Que les mauvais traitements,

12 passages à tabac et tortures psychologiques sont strictement interdits".

13 Au point n° 2, on lit : "J'interdis l'utilisation de prisonniers

14 de guerre pour des projets de génie militaire sur le territoire,

15 d'aménagement du territoire, creusement de tranchée, d'abris, construction

16 de routes, de Bunkers, etc."

17 Troisième point : "J'attire l'attention des commandants de

18 brigade..."

19 M. le Président. - Il y a un problème de traduction en français,

20 je préfère la traduction qui m'a été donnée par rapport à votre lecture.

21 Vous avez parlé de projets de génie militaire ?

22 C'est un grand mot, pour parler de tranchées, c'est vrai, mais

23 de génie militaire... On peut tout de même comprendre. Dans la version

24 française, sur la traduction, "les projets d'ingénieurs sur le

25 territoire", c'est vraiment beaucoup dire. Il ne s'agit vraiment pas de

Page 18490

1 projets d'ingénieurs lorsqu'il devait s'agir de faire des recouvrements

2 d'abris, etc. Je crois que c'est plutôt des projets de génie militaire.

3 M. Nobilo (interprétation). - Oui, Monsieur le Président.

4 Effectivement, c'est ce qui est dit ici.

5 "Des projets de génie", oui c'est bien un terme militaire qui

6 fait référence à l'aménagement de tranchées, d'abris, de bunkers, etc.

7 Nous en arrivons donc au point n° 3 : "L'attention des

8 commandants de brigade et des directeurs de prison militaire est attirée

9 sur le fait que l'utilisation de prisonniers de guerre en tant que main

10 d'oeuvre devant participer à des projets de génie militaire sur le

11 territoire, constitue un crime de guerre et qu'un Tribunal international

12 pour les crimes de guerre a été constitué, Tribunal qui mènera des

13 enquêtes et qui sanctionnera une telle utilisation".

14 Point n° 4 : Je tiens pour responsable les commandants de

15 brigade et les directeurs de prisons militaires responsables de

16 l'exécution de cet ordre".

17 Signé : "Commandant Tihomir M. Blaskic".

18 Général, parliez-vous de ce Tribunal lorsque vous profériez ces

19 menaces à l'encontre de vos commandants ?

20 M. Blaskic (interprétation). - Oui.

21 M. Nobilo (interprétation). - Aviez-vous déjà reçu certaines

22 informations à l'époque ?

23 Pourquoi avez-vous utilisé ce terme ? Pourquoi avez-vous fait

24 référence au fait qu'un Tribunal international avait été constitué dans un

25 ordre de ce type ?

Page 18491

1 M. Blaskic (interprétation). - Je tentais d'agir de façon

2 préventive et d'exercer une certaine pression sur les commandants,

3 connaissant parfaitement bien la situation dans laquelle nous nous

4 trouvions. J'utilisais toutes les ressources à ma disposition afin de

5 prévenir les violations éventuelles ou les infractions aux Conventions de

6 Genève et des violations du Droit international de la guerre dans les

7 circonstances où je me trouvais en juin 1993, le 6 plus précisément.

8 M. Nobilo (interprétation). - En juin 1993...

9 M. le Président. - Je me tourne vers le général Blaskic, c'est

10 le colonel Duncan qui vous avez parlé de la création de ce Tribunal ou

11 M. Thebault ou c'est vous en lisant les journaux, à supposer que l'on en

12 ait beaucoup parlé à l'époque, ce qui n'était peut-être pas évident. Ce

13 sont plutôt les membres de la Forpronu qui vous en ont parlé ? Le

14 colonel Duncan par exemple ?

15 M. Blaskic (interprétation). - A ma connaissance, Monsieur le

16 Président, je n'ai jamais parlé de ce Tribunal avec le colonel Duncan. Je

17 sais que l'adjoint, l'assistant chargé de l'information, m'avait fait

18 savoir que ce Tribunal avait été créé. Je suppose qu'il l'avait entendu

19 dans les médias. Mais dans mes notes, rien ne me dit que j'ai abordé ce

20 sujet avec M. Thebault non plus. Et je ne pouvais pas apprendre la

21 création de ce Tribunal par la presse car il n'y avait pas de presse à

22 l'époque dans notre région.

23 M. Nobilo (interprétation). - Par conséquent, votre officier

24 chargé de l'information et de la propagande vous en a informé. Mais

25 pourquoi en avoir fait référence dans votre ordre. Quelle était votre

Page 18492

1 objectif en menaçant ainsi vos commandants ?

2 M. Blaskic (interprétation). - Je voulais éviter tout acte qui

3 pouvait constituer un crime de guerre. J'ai dit que ma tâche prioritaire

4 était de prévenir la répétition de nouveaux de crimes dans les

5 circonstances qui prévalaient à l'époque dans la vallée de la Lasva.

6 M. Nobilo (interprétation). - Vous envoyez ce document aux

7 commandants de brigades mais également aux directeurs de prison. Etiez-

8 vous le supérieur hiérarchique des directeurs de prison ou avez-vous

9 envoyé ce document pour d'autres raisons ?

10 M. Blaskic (interprétation). - C'est un ordre préventif. Je

11 cherchais simplement un moyen d'informer les directeurs de prison de ma

12 position. Je voulais les avertir. Je n'étais pas leur supérieur

13 hiérarchique et je le savais très bien.

14 Je voulais simplement informer ces personnes de ma position vis-

15 à-vis notamment du Tribunal chargé de juger les crimes de guerre.

16 M. Nobilo (interprétation). - Le document suivant, s'il vous

17 plaît, le D 374.

18 Il s'agit d'un autre ordre extraits d'une série d'ordres. Cet

19 ordre a été délivré le 19 juin 93 ; il a été adressé à plusieurs

20 destinataires.

21 Je ne vais pas lire toute la liste. Je voudrais simplement

22 signaler deux points intéressants dans cet ordre qui figurent dans le

23 corps même du texte :

24 "Tout d'abord, j'interdis l'expulsion d'habitants non croates de

25 leur maison et de leur appartement dans la zone de responsabilité de la

Page 18493

1 troisième zone opérationnelle de Bosnie centrale. Je demande également une

2 sécurité maximale pour les personnes non croates qui se trouvent dans les

3 villes et villages qui sont placés sous le contrôle exclusif des unités et

4 autorités de la zone opérationnelle de Bosnie centrale et du HVO, de la

5 communauté croate de Herceg-Bosna".

6 Vous parlez de la police civile, de la police militaire, des

7 unités du HVO, et vous dites que toutes ces instances sont responsables

8 devant vous de l'exécution de cet ordre.

9 Pourquoi avez-vous délivré cet ordre ? Ce n'était pas le premier

10 d'ailleurs.

11 Pourquoi avez-vous émis cet ordre le 19 juin 93 ?

12 M. Blaskic (interprétation). - J'ai dit que nous devions faire

13 face à un grand problème que constituait l'arrivée des nombreux réfugiés

14 et des exilés. Les autorités civiles, même si elles avaient fonctionné au

15 mieux, n'avaient pas les structures suffisantes permettant de loger un

16 nombre aussi important de réfugiés. Là encore, j'ai essayé d'agir de façon

17 préventive afin d'éviter toute réaction ou même toute tentative de

18 vengeance de Croates vis-à-vis de non Croates vivant dans les régions

19 contrôlées par le HVO. Il s'agissait pour la plupart de Musulmans

20 bosniens, mais il y avait également des Serbes et des Roms ou Tziganes.

21 Nous nous sommes également mis d'accord au sein du commandement

22 afin d'éviter ce type d'activité : expulsion mutuelle, etc.

23 M. Nobilo (interprétation). - Document suivant, s'il vous plaît,

24 D375 en date du 21 juin 1993. Il s'agit d'un ordre délivré par le

25 commandant du 2ème Bataillon, du commandement du 2ème Bataillon de la

Page 18494

1 brigade de Vitez.

2 Sur la base de l'ordre du commandant de la brigade de Vitez, les

3 choses suivantes sont ordonnées. Je vais lire seulement quelques points.

4 Tout d'abord : "Mettre un terme à l'arrestation de civils et la prise

5 d'otages visant à affaiblir l'ennemi dans les zones contrôlées par les

6 unités du 2ème Bataillon.

7 2. Eviter les incendies de bâtiments et la destruction de biens,

8 et notamment protéger les lieux de culte, mosquée, Mejtef, Vakuf et

9 mezaret.

10 3. Tout cas d'appropriation ou de vol doit être sévèrement

11 sanctionné par le biais de mesures disciplinaires, par le biais de

12 poursuites et par le biais de jugements devant les tribunaux.

13 4. Ne pas permettre de mauvais traitements de prisonniers et

14 prendre note immédiatement de tout mauvais traitement au cas où il se

15 produirait."

16 Reconnaissez-vous qu'il s'agit là d'une copie de passages qui

17 figuraient dans un autre ordre ? Qu'est-ce que cela nous apporte-t-il

18 comme information vis-à-vis de la voie hiérarchique et du transfert

19 d'ordre, de la communication d'ordre ?

20 M. Blaskic (interprétation). - Vraisemblablement, le commandant

21 de bataillon n'a fait que copier l'ordre émis par le commandant de

22 brigade. Si nous reprenons le document que nous avons vu il y a un instant

23 sur le rétroprojecteur, nous voyons qu'il s'agit d'une même copie, ou

24 d'une copie du même document. Le commandant du bataillon a copié l'ordre

25 du commandant de brigade.

Page 18495

1 M. Nobilo (interprétation). - A votre avis, qui a copié l'ordre

2 de qui ?

3 M. Blaskic (interprétation). - Là, je pense que c'était mon

4 ordre. Mais le problème principal qui se posait était l'application de ces

5 ordres. Si sur le terrain on étudiait quels étaient les effets de

6 l'application de cet ordre, on voyait tous les problèmes qu'il

7 représentait parce que je connaissais bien la zone de responsabilité de ce

8 bataillon qui se trouve dans la partie nord de Vitez, et généralement

9 cette zone était la cible d'attaques fréquentes par des unités de l'armée

10 de Bosnie-Herzégovine.

11 M. Nobilo (interprétation). - Demandiez-vous qu'un ordre qui

12 avait été rédigé par vous au niveau de la zone opérationnelle soit

13 appliqué par les soldats qui se trouvaient en bas de la voie hiérarchique,

14 et que cet ordre soit transmis aux soldats qui se trouvaient au bas de la

15 voie hiérarchique ?

16 M. Blaskic (interprétation). - Oui, tout à fait. On le voit sur

17 les documents. Je demande que cet ordre soit transmis aux soldats au

18 niveau inférieur, au niveau hiérarchique inférieur avec une signature. Ce

19 qui veut dire que le commandant de bataillon devait signer ce document

20 afin de confirmer qu'il avait effectivement reçu l'ordre en question.

21 Je devais obtenir un certificat me prouvant qu'effectivement le

22 commandant de bataillon avait reçu l'ordre. Je demandais que la même

23 procédure soit appliquée tout le long de la voie hiérarchique jusqu'en

24 bas.

25 M. le Président. - Nous allons faire une pause d'un quart

Page 18496

1 d'heure.

2 (L'audience, suspendue à 16 heures 30, est reprise à

3 16 heures 55.)

4 M. le Président. - Nous reprenons l'audience, asseyez-vous.

5 Maître Nobilo ?

6 M. Nobilo (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

7 Général, continuons avec la chronologie des événements. Allez-y.

8 M. Blaskic (interprétation). - Le 23 juin 1993, j'ai reçu

9 l'information du chef de service de renseignements militaires que le

10 Président de la Cour militaire de district, M. Percivine, avait été blessé

11 par pistolet dans les deux pieds et que les auteurs de cela étaient des

12 criminels qui ont tiré sur lui d'une distance de quelques mètres.

13 Le 24 juin 1993, une attaque généralisée de l'armée de Bosnie-

14 Herzégovine, du 3ème Corps d'armée, a été entamée contre le HVO de Zepce.

15 Cette date a probablement été choisie avec raison étant donné qu'il s'agit

16 de la date de pèlerinage à Zepce, où la plus grande partie des Croates se

17 rendent dans la paroisse de Brankovac pour fêter la fête de Saint-Yves.

18 Ce jour-là, à midi 30, j'ai eu une réunion avec M. de la Motta

19 qui a insisté pour que je fournisse de l'aide pour laisser passer un

20 convoi qui devait aller à Zenica. Je ne me rappelle pas de quel endroit le

21 convoi est parti. Cela ne figure pas dans mes notes.

22 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous avez fourni de

23 l'aide pour le passage de ce convoi ?

24 M. Blaskic (interprétation). - Oui, je l'ai fait, mais je n'ai

25 pas d'informations exactes quant à l'itinéraire de ce convoi.

Page 18497

1 J'ai eu une autre réunion avec M. de la Motta.

2 M. le Président. - (hors micro)... qu'on vous demande cette

3 aide ?

4 M. Blaskic (interprétation). - Oui.

5 Il m'a demandé de l'aider pour faire passer le convoi sur le

6 territoire contrôlé par le HVO.

7 M. Nobilo (interprétation). - Continuez.

8 M. Blaskic (interprétation). - Le 25 juin 1993, j'ai eu une

9 réunion avec M. de la Motta qui m'a informé qu'il avait rencontré

10 plusieurs difficultés dans l'exercice de ses fonctions, dans le cadre de

11 son mandat, qu'il n'était pas bien compris de la population dans la vallée

12 de la Lasva.

13 M. Nobilo (interprétation). - Vous parlez des Croates ?

14 M. Blaskic (interprétation). - Oui, je parle des Croates. Il a

15 dit également que ses mouvements, ses déplacements étaient toujours suivis

16 d'injures lancées par les gens et qu'il avait remarqué un changement de

17 comportement par rapport à la période précédente.

18 Je l'ai informé du fait qu'il y avait énormément de réfugiés

19 dans la vallée de la Lasva, qu'il s'agissait là de personnes désespérées

20 et qu'il serait bien pour lui de s'adresser personnellement au peuple par

21 le biais des médias locaux et d'expliquer son rôle et sa mission et son

22 mandat. Etant donné qu'il s'agissait surtout des réfugiés qui étaient

23 expulsés des villages et des parties urbanisées de Travnik, Novi Travnik

24 et de Zenica qui, probablement, ne connaissaient pas les détails

25 concernant le mandat de l'UNHCR, de la Croix-Rouge internationale et

Page 18498

1 d'autres institutions internationales.

2 J'ai également dit à M. de la Motta que j'avais personnellement

3 organisé un cours, un séminaire pour mes collaborateurs pour les informer

4 du travail des organisations internationales, mais qu'il serait plus

5 efficace et important si lui-même, personnellement, pouvait s'adresser au

6 peuple de la vallée de la Lasva pour expliquer quel était son rôle. C'est

7 ce qu'il a fait dans les jours suivants. Il a été l'invité de la

8 télévision de Vitez et cela a certainement produit des effets après qu'il

9 se soit adressé publiquement au peuple. Je veux dire par là que son

10 travail est devenu plus efficace.

11 J'ai également parlé d'un autre phénomène, d'un autre problème,

12 à savoir le fait qu'à chaque fois que les vivres arrivaient à Kruscica

13 dans l'organisation de la Croix-Rouge internationale, après le passage du

14 convoi, l'armée de Bosnie-Herzégovine de Kruscica, presque régulièrement,

15 ouvrait le feu contre les amonts qui entouraient Vitez ou contre Vitez

16 lui-même.

17 M. Nobilo (interprétation). - Quelle était l'opinion qui régnait

18 dans la vallée de la Lasva à propos de ce phénomène ?

19 M. Blaskic (interprétation). - L'opinion de toute la population

20 dans la vallée de la Lasva était que la Croix-Rouge internationale et que

21 l'ONU fournissaient les munitions à l'armée de Bosnie-Herzégovine. Les

22 civils ont demandé que leurs représentants participent au contrôle et à la

23 surveillance de l'acheminement de ces vivres pour vérifier que,

24 effectivement, les munitions n'étaient pas acheminées dans le cadre des

25 mêmes convois.

Page 18499

1 J'ai même dit à M. de la Motta qu'il existait une bonne

2 communication entre Novi Travnik en passant par Opara jusqu'à Kruscica.

3 J'ai dit qu'il était possible d'utiliser cette route-là pour acheminer les

4 convois avec les vivres si nous n'arrivions pas à résoudre le problème

5 concernant le comportement des civils.

6 J'ai demandé également à M. de la Motta d'organiser de l'aide

7 sous forme d'envois de vivres et de vêtements, pour évacuer les blessés

8 également. J'ai demandé aussi qu'ils se rendent à Vares, Travnik,

9 Novi Travnik, Zenica.

10 Et puis, le 25 juin, tôt le matin, le feu a été ouvert contre

11 Sebecic, il s'agit de la région au sud-est de Novi Travnik. Le HVO a perdu

12 ces positions-là et s'est retiré de Sebecic et de toute cette région dans

13 la direction de Gornji Vakuf. C'est la Forpronu qui a aidé le HVO dans le

14 cadre de ce retrait et qui a fourni la protection aux civils qui se sont

15 retirés eux aussi.

16 Au cours de la journée du 25 juin, nous avons également dû

17 engager des membres de la police civile sur la ligne de front, ce qui fait

18 que la grande majorité des membres de la police civile était sur le front

19 ce jour-là. C'est seulement le chef du poste de police et l'un de ses

20 associés qui sont restés au poste de police.

21 Dans la région contrôlée par le HVO, un véhicule a été saisi

22 d'un juge du Tribunal militaire du district et lui, personnellement, a été

23 passé à tabac. J'ai reçu également l'information que le prêtre Ivan Ravlic

24 avait été encore une fois interrogé dans le centre du SIS, et le prêtre

25 est venu me voir lui-même pour se plaindre de cet incident. Il a même

Page 18500

1 pleuré en évoquant le mauvais traitement qu'il a subi de la part des

2 membres du SIS.

3 Le 26 juin 1993, j'ai reçu l'information du service de sécurité

4 selon laquelle les entrepreneurs privés de Vitez ont créé un lance-

5 roquettes multiple et ce lance-roquettes multiple était toujours en

6 possession de ces personnes privées, et j'ai donné l'ordre pour qu'il soit

7 saisi et pour qu'il soit transmis à la brigade de Vitez. Cet ordre a été

8 exécuté par la suite.

9 Le 27 juin 1993, j'ai demandé à recevoir l'information

10 concernant un lance-roquettes à canon unique. Il y a eu une douzaine de

11 ces lance-roquettes qui ont été produits dans l'usine de Travnik et puis

12 aussi à Vitez. J'ai reçu l'information de la part du commandant de la

13 brigade de Vitez, le 27 juin, que ce lance-roquettes multiple avait été

14 saisi du groupe privé qui le possédait.

15 Encore une fois, le 27 juin, j'ai essayé, par le biais de

16 l'état-major, d'apprendre ce qui se passait à Zepce et à quoi ressemblait

17 la situation militaire dans cette région.

18 Le 30 juin 1993, le service de renseignements militaires m'a

19 informé que le soldat Ivan Zelic avait été arrêté et détenu dans la

20 caserne de Travnik et qu'il avait été tué pendant la nuit, et que son

21 corps a été transporté jusqu'à la ligne de front et laissé là.

22 Le 1er juillet 1993, j'ai demandé l'information concernant

23 l'enquête à propos du pillage du convoi de Tuzla. J'ai demandé que le

24 service de sécurité me fournisse cette information-là.

25 Le 3 juillet, il y a eu le pilonnage de Vitez par l'armée de

Page 18501

1 Bosnie-Herzégovine par des obus remplis de chlore.

2 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous avez fait quelque

3 chose afin d'enregistrer cette information, que le chlore a été utilisé

4 dans les obus lancés contre le HVO ?

5 M. Blaskic (interprétation). - Nous avons fait part de nos

6 soupçons à la Forpronu et nous nous sommes adressés à des médecins qui

7 nous ont transmis les dossiers médicaux concernant les personnes blessées

8 et nous avons retransmis toutes ces informations-là à l'état-major

9 principal.

10 Le 4 juillet 1993, j'ai reçu l'information du service de

11 renseignements militaires selon laquelle l'armée de Bosnie-Herzégovine

12 rassemblait un grand nombre de troupes dans la région du village de

13 Sljiucica dans la municipalité de Fojnica et qu'elle s'apprêtait à lancer

14 une attaque probablement contre Fojnica, alors que le service de sécurité

15 m'a informé que trois membres des Vitezovi qui faisaient partie de cette

16 unité, s'étaient suicidés.

17 Le 5 juillet 1993, j'ai reçu l'information que l'armée de

18 Bosnie-Herzégovine avait attaqué les unités du HVO dans le village de

19 Tegevice, dans la municipalité de Kracevo et que l'armée de Bosnie-

20 Herzégovine a expulsé à la fois les unités du HVO et les civils qui ont

21 quitté le village et qui sont arrivés à Kracevo.

22 Le 6 juillet 1993, j'ai demandé que la police militaire et le

23 service de sécurité participent à l'enquête menée à propos du meurtre de

24 l'interprète d'Obrila.

25 M. Nobilo (interprétation). - Dites-nous, où cet interprète a-t-

Page 18502

1 il été tué ?

2 Que pouvez-vous dire à ce sujet-là ?

3 M. Blaskic (interprétation). - Si je me souviens bien, ceci

4 s'est produit près du camp de l'ONU ou bien près du club des officiers de

5 l'ONU. Je ne sais pas très exactement quelle était la position où ceci

6 s'est produit, mais je sais que ceci était à proximité du club des

7 officiers de l'ONU à Nova Bila.

8 M. Nobilo (interprétation). - Saviez-vous quelles étaient les

9 circonstances de ce meurtre ?

10 M. Blaskic (interprétation). - Elle a été tuée par un tireur

11 embusqué depuis une position qui, depuis nos estimations, devait être

12 démilitarisée depuis le 24 avril 1993, à la suite d'un accord passé entre

13 l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO.

14 M. Nobilo (interprétation). - Poursuivez.

15 M. Blaskic (interprétation). - Le 8 juillet 1993, l'armée de

16 Bosnie-Herzégovine a lancé une attaque depuis la position de Zenica contre

17 la partie nord-ouest de Vitez. De même, il y a eu un déplacement de

18 troupes vers Grbavica et le 10 juillet, j'ai reçu une information

19 concernant le pillage du convoi, mais j'ai demandé à recevoir une

20 information plus détaillée étant donné que le service de sécurité m'a

21 envoyé une information superficielle et incomplète.

22 Le 10 juillet 1993, l'armée de Bosnie-Herzégovine a, de nouveau,

23 lancé une attaque depuis Zenica contre la ville de Vitez.

24 Le 11 juillet 1993, l'armée de Bosnie-Herzégovine a lancé une

25 attaque d'artillerie contre une partie de la ville de Novi Travnik qui

Page 18503

1 était contrôlée par le HVO. Un civil est mort, et ce jour-là, j'ai envoyé

2 une lettre au chef d'état-major principal du HVO et je lui ai demandé

3 d'insister pour que le commandant de la police militaire soit remplacé,

4 pour que les cadres de la police militaire soient dissous et pour que la

5 police militaire soit réorganisée, y compris le fait que je demandais

6 d'avoir des compétences relatives également à la police militaire.

7 Le 12 juillet 1993, les liens téléphoniques entre nous et la

8 base de la Forpronu ont été coupés. Et d'après mes informations, cette

9 coupure a eu lieu à Stari Vitez.

10 Au cours de la journée, j'ai eu une réunion avec un officiel de

11 l'ECMM qui s'appelait Stavros. Il m'a relaté quelle était l'attitude du

12 commandant Alagic qui demandait que, moi, je lui rende possible de

13 déplacer ces unités qui se trouvaient à Puricevo vers les positions du HVO

14 d'environ 300 mètres. J'ai dit à M. Stavros que si j'allais permettre

15 cela, je ne devais même pas défendre Novi Travnik parce que ceci

16 permettrait d'isoler totalement Travnik et le reste de la municipalité de

17 Travnik. Je n'ai pas pu accepter une telle demande et je l'ai dit

18 clairement aux représentants de la mission d'observateurs européens.

19 Après cela, à 15 heures 30, j'ai eu une réunion avec un officiel de l'ECMM

20 de Zagreb, qui s'appelait, je crois, M. Gear, mais je n'en suis pas sûr.

21 Et il a demandé que je l'informe sur la situation militaire qui régnait

22 dans la vallée de la Lasva à ce moment-là.

23 A 19 heures, j'ai reçu l'information de Nakic concernant les

24 activités du commandement conjoint qui a continué à fonctionner sur la

25 base de l'accord passé au mois de juin 93.

Page 18504

1 Le 14 juillet 93, j'ai demandé que le service de sécurité mène

2 une enquête concernant le meurtre de la famille Mucic, de Vitez.

3 M. Nobilo (interprétation). – Quelle était l'origine ethnique de

4 cette famille ?

5 M. Blaskic (interprétation). - Ils étaient Musulmans bosniens.

6 Et le 15 juillet 93, à 9 heures du matin, l'armée de Bosnie-Herzégovine a

7 ouvert le feu d'artillerie y compris des chars, contre le coeur de Vitez.

8 Au cours de cette journée-là, j'ai également demandé qu'une enquête soit

9 menée concernant le meurtre de Rano Cekesa, et le service de sécurité m'a

10 informé que les personnes, les suspects étaient Tozlo, Niko Sosina.

11 M. Nobilo (interprétation). - La victime était un Musulman

12 bosnien ?

13 M. Blaskic (interprétation). - La victime était un musulman

14 Bosnien et les auteurs étaient surtout des Croates.

15 M. Nobilo (interprétation). - Il va falloir que nous

16 ralentissions étant donné que tout ne figure pas dans le compte rendu.

17 M. Blaskic (interprétation). - Le 16 juillet 93, j'ai reçu

18 l'information que le HVO avait perdu les positions de Fojnica et que les

19 unités du HVO de Fojnica se sont retirées, accompagnées des Croates de

20 Fojnica, et ils sont allés vers Kiseljak et Krisevo ; donc les régions

21 contrôlées par les unités du HVO.

22 Au cours de la journée du 16 juillet, encore une attaque a été

23 lancée contre le Président du HVO de Zenica, Dominique Cakic et contre

24 Zivko Totic. Il ont été attaqués et maltraités physiquement par des

25 personnes dont les surnoms étaient Zaga, Njalko et Ramljak.

Page 18505

1 Le 17 juillet 93, l'armée de Bosnie-Herzégovine a lancé une

2 attaque d'artillerie contre le centre de Vitez mais je n'ai pas de données

3 concernant le nombre de victimes, mais j'ai des données sur la base

4 desquelles on peut conclure qu'il y a eu des victimes.

5 L'armée de Bosnie-Herzégovine a également lancé une attaque

6 contre Zepce.

7 J'ai demandé que le service de sécurité m'informe sur les

8 mesures qui ont été prises contre les agresseurs de M. Sakic et Todic et

9 aussi concernant l'attaque contre le convoi de Tuzla.

10 Le 21 juillet 1993, j'ai redemandé une nouvelle information

11 concernant l'enquête menée par le service de sécurité sur le meurtre de la

12 famille Mucic.

13 Ce même jour, tôt le matin, nous avons été confrontés à

14 l'attaque lancée contre les villages de Zabilje et contre la ligne de

15 défense qui se trouvait au nord de Vitez et aussi certaines parties de la

16 municipalité de Novi Travnik.

17 Le 22 juillet 1993, peu après 12 heures, de fortes explosions,

18 détonations ont pu être entendues dans l'usine d'explosifs. Une grande

19 quantités d'explosifs a explosé au même moment, mais, heureusement, il n'y

20 a pas eu de victime.

21 Moi, j'ai contacté personnellement Dragan Krasina, qui était le

22 conseiller juridique et je lui ai demandé de me fournir son aide juridique

23 professionnelle. Puis, je lui ai demandé de m'aider à recueillir les

24 informations concernant les actes criminels, les poursuites et la manière

25 de renforcer l'ordre public et puis de consolider des mesures

Page 18506

1 disciplinaires et aussi afin d'organiser des cours, des séminaires pour

2 former les commandants, pour leur montrer de quelle manière il fallait

3 appliquer les mesures disciplinaires. Egalement, je souhaitais avoir son

4 aide pour rédiger des documents qui serviraient de base à la définition

5 des mesures disciplinaires.

6 M. Blaskic (interprétation). - Le nom de cette personne ne

7 figure pas dans le compte rendu, veuillez répéter le nom ?

8 M. Blaskic (interprétation). - Il s'agissait de Dragan Krasina.

9 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce qu'il y avait une autre

10 personne au sein du HVO qui occupait une telle fonction ?

11 M. Blaskic (interprétation). - Non.

12 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce qu'il a travaillé pour

13 vous ? Est-ce qu'il a été engagé au sein de votre service ?

14 M. Blaskic (interprétation). - A partir de ce jour-là, il a

15 commencé à travailler. Il était une personne gravement handicapée. Je me

16 suis dit que ce serait bien de l'engager d'une telle manière.

17 M. Nobilo (interprétation). - A-t-il fait partie du commandement

18 à partir de ce jour-là ?

19 M. Blaskic (interprétation). - Oui.

20 M. Nobilo (interprétation). - Continuez, s'il vous plaît.

21 M. Blaskic (interprétation). - Ce jour-là, les attaques contre

22 Vitez et certaines parties de la municipalité de Novi Travnik ont été

23 lancées par l'armée de Bosnie-Herzégovine et ce jour-là, il y a eu surtout

24 beaucoup d'attaques, surtout des attaques d'artillerie. Il y a eu moins

25 d'attaques d'infanterie.

Page 18507

1 J'ai également reçu l'information que j'ai retransmise par le

2 biais de l'officier de liaison à l'ONU et à l'UNHCR, que l'hôpital à

3 Grahovcici n'avait plus d'eau et que la sécurité de 250 patients était

4 mise à mal.

5 M. Nobilo (interprétation). - Général, nous allons nous arrêter

6 un instant. Nous allons parler d'un autre document émis le 26 juin 1993,

7 qui existe dans la version croate, française et anglaise.

8 Je demande que ce document soit distribué. C'est la meilleure

9 copie que nous ayons. Vous pouvez l'utiliser comme pièce à conviction.

10 Est-ce que vous pourriez attribuer une cote à ce document ?

11 M. Abtahi. - Il s'agit de la pièce D549, D549A pour la version

12 en français, D549B pour la version anglaise.

13 M. Nobilo (interprétation). - Je vais lire le document, c'est un

14 document bref.

15 "Le HVO, à Vitez, le 26 juin", c'est la date du document.

16 Le titre est : "Certificat confirmant que les unités spéciales

17 de Vitezovi, que l'appartement se trouvant à l'adresse Maréchal Tito

18 n° B4/22 occupé par Mahmut et Javra Tuco ne doit pas être confisqué et

19 doit continué à être utilisé par ces mêmes personnes. Ce certificat est

20 donné afin de fournir la protection contre l'expulsion. Signé, colonel

21 Darko Kraljevic", et sur le cachet il est indiqué "Département de la

22 Défense, unité spéciale Vitezovi, Vitez."

23 La date était le 20 juin et non pas le 26 juin.

24 En haut, il est écrit : "La communauté croate d'Herceg-Bosna."

25 Dites, Général, est-ce que vous reconnaissez la signature du

Page 18508

1 colonel Darko Kraljevic ?

2 M. Blaskic (interprétation). - Oui, c'est sa signature.

3 M. Nobilo (interprétation). - Et le cachet est le cachet qu'il

4 utilisait ?

5 M. Blaskic (interprétation). - Oui, c'est le cachet de l'unité

6 spéciale des Vitezovi.

7 M. Nobilo (interprétation). - Et ce Tuco Javra appartenait à

8 quel groupe ethnique ?

9 M. Blaskic (interprétation). - Tous les deux étaient des

10 Musulmans bosniens. La famille Tuco est une famille dont je connais le

11 nom, c'est une famille de Vitez.

12 M. Nobilo (interprétation). - Est-ce que vous pouvez expliquer

13 au Tribunal comment il se fait que l'unité spéciale de Vitezovi, ou plutôt

14 le colonel Darko Kraljevic était la personne qui décidait qui allait être

15 expulsé et qui n'allait pas être expulsé d'un appartement ?

16 M. Blaskic (interprétation). - Ce comportement était contraire à

17 mes ordres, mais ce certificat confirme et indique le fait qu'il agissait

18 de manière indépendante et autonome et le fait qu'il dépassait ses

19 compétences dans ses agissements, étant donné que Tuco, Jarko et l'autre

20 personne n'étaient pas ses soldats. Et lui, en tant que commandant

21 militaire, n'était pas compétent pour décider si les appartements de

22 civils devaient être confisqués ou non.

23 M. Nobilo (interprétation). - Que reflète ce certificat par

24 rapport à la position de Darko Kraljevic et comment a-t-il été traité par

25 les autorités civiles ?

Page 18509

1 M. Blaskic (interprétation). - Ceci reflète certainement son

2 pouvoir et son indépendance totale par rapport à toute autre institution.

3 M. Nobilo (interprétation). - Que pensez-vous ? Si

4 Darko Kraljevic protégeait quelqu'un, est-ce que ceci était respecté ?

5 Quelqu'un aurait-il pu expulser ces personnes par la suite ?

6 M. Blaskic (interprétation). - Ce certificat donnait l'immunité

7 la plus totale à la famille qui disposait d'un tel document.

8 M. Nobilo (interprétation). - Poursuivez, ou peut-être nous

9 pouvons terminer..

10 M. le Président. - C'est terminé pour le 22 juillet ? On

11 pourrait peut-être terminer la journée du 22 juillet.

12 M. Nobilo (interprétation). - Il n'y a plus de question

13 concernant le 22 juillet ni concernant ce document.

14 M. le Président. - Dans ces conditions, nous allons lever la

15 présente audience.

16 Je rappelle pour des raisons diverses et multiples, d'abord la

17 santé du général Blaskic. Vous avez pu voir l'infirmière ce matin ? Vous

18 avez pu vous faire traiter ? Cela s'est bien passé ?

19 M. Blaskic (interprétation). – Merci, Monsieur le Président, de

20 votre question. Oui, je l'ai vue. Je vous remercie, et effectivement, j'ai

21 été traité.

22 M. le Président. - Demain matin, la Chambre va continuer de

23 s'occuper de l'affaire Blaskic, mais sans M. Blaskic. Vous allez donc

24 pouvoir prendre un long week-end.

25 D'autre part, les Juges de la Chambre, du moins l'un d'entre

Page 18510

1 eux, est requis dans une autre affaire le lundi 22 mars et le mardi 23 au

2 matin. Voyons, Monsieur le Greffier, nous reprenons avec l'accusation

3 demain matin à 9 heures 30.

4 Deuxièmement, en ce qui concerne la continuation et la suite de

5 la déposition de l'accusé comme témoin, nous reprenons mardi 23 à

6 14 heures 30.

7 Oui, Maître Hayman ?... dans la mesure où nous ne siégions pas

8 le lundi 22 et le mardi 23 au matin.

9 M. Hayman (interprétation). - Je ne comprends plus très bien,

10 Monsieur le Président. Le 23, c'est mardi. Dans le compte rendu, on parle

11 du mercredi 23. Le calendrier qui nous a été soumis indique qu'il y aurait

12 une audience dans l'après-midi le mardi 23, c'est cela ?

13 M. le Président. - Oui, c'est bien pour cela que je l'ai fixée à

14 14 heures 30.

15 M. Hayman (interprétation). - Dans le compte rendu, il est dit

16 que nous allions reprendre le mercredi, c'est pourquoi j'étais un peu

17 perdu.

18 M. le Président. - (inaudible) que le général Blaskic, que les

19 Juges et que vous réunis, nous reprenons le mardi 23, à 14 heures 30 et

20 non pas à 14 heures, puisque l'un de nos collègues aura siégé toute la

21 matinée dans une autre affaire. Cela a été fait en accord avec les Juges.

22 L'audience est levée à 17 heures 35.

23

24

25