Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL  Affaire IT-95-14-T

  2   POUR L’EX-YOUGOSLAVIE

  3  

  4   LE PROCUREUR

  5   c/

  6   Tihomir BLASKIC

  7          Vendredi 21 mai 1999

  8  

  9  

 10   L’audience est ouverte à 9  heures 10.

 11   M. le Président. – Veuillez vous asseoir. Monsieur le Greffier,

 12   faites introduire le témoin.

 13   (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

 14   M. le Président. – Je salue les interprètes, s'ils m'entendent.

 15   Les interprètes. – Bonjour, Monsieur le Président.

 16   M. le Président. – Je salue les conseils de la défense, je salue

 17   les conseils de l'accusation, je salue notre témoin.

 18   Nous allons reprendre. A la fin de la matinée, Monsieur le

 19   Greffier, vous nous indiquerez le nombre de jours qu'il nous reste. Avec

 20   M. Olivier Fourmy, nous essayons d'établir un nouveau calendrier qui

 21   tienne compte notamment de la venue des témoins de la Chambre. Nous avons

 22   encore quelques incertitudes, mais nous commençons à y voir un peu plus

 23   clair. Nous tâchons de finaliser notre procès pour la fin du mois de

 24   juillet.

 25   Monsieur le Procureur, c'est à vous. Bonjour, Général Blaskic.


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  1   Nous commençons.

  2   M. Kehoe (interprétation). – Merci, Monsieur le Président.

  3   Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les Juges Je salue également les

  4   conseils de la partie adverse. Bonjour, Général Blaskic.

  5   M. Blaskic (interprétation). - Bonjour.

  6   M. Kehoe (interprétation). - Général, j'aimerais que nous

  7   revenions sur ce que nous disions hier à propos du rapport envoyé par

  8   Sliskovic au SIS, à la fin du mois de septembre 1993. Général, en

  9   septembre 1993, à la fin de ce mois, qui était le responsable à la tête du

 10   SIS à Mostar ?

 11   M. Blaskic (interprétation). - Je n'en suis pas certain. Je ne

 12   sais pas qui faisait partie de l'administration du SIS et quand. Ce que je

 13   sais, c'est que pendant un certain temps, M. Lucic était responsable de

 14   l'administration du SIS. Etait-il en septembre à ce poste ? Je n'en suis

 15   pas absolument certain.

 16   M. Kehoe (interprétation). - Eh bien, Général , à Mostar,

 17   Sliskovic devait-il envoyer ce rapport ? A qui ce rapport a-t-il été

 18   envoyé ? Je fais, bien sûr, mention du rapport qui détaillait le nom des

 19   auteurs des actes perpétrés à Ahmici.

 20   M. Blaskic (interprétation). – Eh bien, il est allé à

 21   l'administration qui était supérieure.

 22   M. le Président. – Maître Hayman veut dire quelque chose.

 23   M. Hayman (interprétation). - Il me semble que Me Kehoe

 24   interroge le témoin à propos d'un document placé sous scellés, non ?

 25   M. Kehoe (interprétation). – Non. Je parle du rapport envoyé par


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  1   M. Sliskovic à la fin du mois de septembre 1993 au SIS. Ce rapport

  2   contenait le nom des auteurs des crimes commis. A qui ce rapport est-il

  3   envoyé ? Telle est ma question.

  4   M. Hayman (interprétation). - Je vois, merci.

  5   M. le Président. - La question est posée, Général Blaskic,

  6   concentrez-vous et répondez à la question, s'il vous plaît, si vous en

  7   avez bien sûr la réponse.

  8   M. Blaskic (interprétation). – Le rapport a été envoyé à

  9   l'administration du SIS. Cette administration était l'administration

 10   directement compétente et était le supérieur de Sliskovic.

 11   M. Kehoe (interprétation). - Oui, mais à qui ? Peut-être n'ai-je

 12   pas été clair. Je demande le nom de la personne à qui Sliskovic a envoyé

 13   ce rapport.

 14   M. Blaskic (interprétation). - J'ai dit que je ne connaissais

 15   pas le nom des personnes qui composaient cette administration du service

 16   de sécurité. Ce que je sais, c'est que ce rapport a été envoyé au SIS qui

 17   est une entité subordonnée au ministère de la Défense, mais je ne connais

 18   pas les noms.

 19   M. le Président. - Vous avez la réponse, Monsieur  le Procureur.

 20   M. Kehoe (interprétation). - Général, avez-vous demandé à qui

 21   M. Sliskovic avait envoyé ce rapport ?

 22   M. Blaskic (interprétation). - Eh bien, c'est de Sliskovic lui-

 23   même que j'ai essayé d'obtenir ce rapport à la fin du mois de septembre,

 24   lorsqu'il m'a dit qu'il avait envoyé le rapport au service de sécurité qui

 25   était compétent. C'est ainsi que j'ai compris que le SIS avait pris


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  1   l'affaire en main. Je me suis basé sur ce qu'il me disait, j'en ai conclu

  2   que c'est eux qui allaient s'occuper de toute l'affaire.

  3   M. Kehoe (interprétation). - Général, je ne suis peut-être pas

  4   clair, si c'est le cas dites-le. Je vais essayé d'être plus précis. Dans

  5   le cadre de vos conversations avec Sliskovic, lui avez-vous demandé le nom

  6   de la personne à qui il avait envoyé ce rapport ?

  7   M. Blaskic (interprétation). – Je ne lui ai pas demandé le nom

  8   de cette personne. Il m'a déclaré qu'il l'avait envoyé à l'administration

  9   de la sécurité, le rapport et la liste.

 10   M. Kehoe (interprétation). -  Bien. Est-ce que le ministre de la

 11   Défense, Bruno Stojic a obtenu ce rapport ?

 12   M. Blaskic (interprétation). - Je ne sais pas. Je ne sais pas

 13   qu'elle a été le degré de correspondance entre l'administration du SIS qui

 14   était placée directement sous les ordres du ministère de la Défense et le

 15   ministre de la Défense. Moi, je n'ai jamais été membre de ce service. Ce

 16   service est un service qui fonctionne de façon relativement confidentielle

 17   et qui avait compétence pour engager des enquêtes sur toutes personnes

 18   faisant partie du HVO, y compris moi-même, y compris toutes personnes

 19   travaillant pour le HVO. A-t-il eu ce rapport ou pas, je n'en sais rien.

 20   Je ne sais rien de ce rapport que j'ai vu ici pour la première fois dans

 21   ce prétoire, qui est un document confidentiel sous scellés.

 22   M. Kehoe (interprétation). - Est-ce que le Général Praljak, qui

 23   était alors chef de l'état major, ou est-ce que le Général Petkovic, qui

 24   était alors le chef d'état major adjoint ont obtenu ce rapport ?

 25   M. Blaskic (interprétation). - Je ne sais pas s'ils ont reçu ce


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  1   rapport. J'ai informé le chef de l'état-major principal de ce qui était en

  2   train de se passer. Je lui ai donc dit que tout le dossier avait été

  3   confié au SIS. Je lui ai dit ce que mon collaborateur chargé de la

  4   sécurité m'avait dit, mais je ne sais pas s'il a vu ce rapport.

  5   M. Kehoe (interprétation). -  Pour autant que vous sachiez,

  6   après que Sliskovic ait envoyé ce rapport, stipulant le nom des

  7   perpétrateurs des actes à l'administration à Mostar, est-ce que qui que ce

  8   soit, par la suite, a fait l'objet de sanctions pour les crimes commis à

  9   Ahmici, sanctions qui auraient été attribuées sur la base de ce rapport ?

 10   M. Blaskic (interprétation). - Pour autant que je le sache,

 11   d'après ce dossier, il semble qu'aucune poursuite pénale n'ait été engagée

 12   contre les auteurs des actes. Ils n'ont pas été mis en procès. Je me fonde

 13   sur ce qui était dit officiellement. Je n'ai vu le rapport. Je le répète

 14   ici, à l'époque, je ne pouvais pas obtenir le dossier. Je n'avais rien

 15   entendu dire à propos de poursuites pénales engagées contres les auteurs .

 16   M. Kehoe (interprétation). - Général, est-ce que des sanctions

 17   disciplinaires ont été prises à l'époque contre quelqu'un ?

 18   M. Blaskic (interprétation). - J'ai déjà parlé de la pratique

 19   qui était en vigueur à l'époque au sein du HVO. Si nous parlons ici

 20   d'actes criminels et d'auteurs d'actes criminels, alors c'est la loi sur

 21   la procédure pénale qui devait s'appliquer et non pas la loi sur les

 22   sanctions disciplinaires. Tout ceci, n'est-ce pas, traitait d'infractions

 23   pénales, il fallait engager par la suite des poursuites pénales. A priori,

 24   des sanctions disciplinaires ne sont pas prises dans de tels cas. Ce sont

 25   des mesures que l'on prend contre des auteurs d'actes criminels qui


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  1   doivent être prises.

  2   M. Kehoe (interprétation). - Général, aucun soldat membre du HVO

  3   n'a fait l'objet de sanctions disciplinaires pour la conduite qu'il avait

  4   pu avoir, ou pour les actes qu'il avait pu perpétués à Ahmici ? C'est bien

  5   ce que vous nous dites ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - J'affirme que ce crime

  7   constituait une infraction pénale. Cela permettait aux personnes

  8   compétentes d'engager des poursuites pénales. Je n'ai aucune information

  9   supplémentaire quant au fait de savoir si des sanctions disciplinaires ont

 10   été prises, du fait des crimes commis à Ahmici.

 11   M. le Président (interprétation). – La question était de savoir

 12   s'il y avait eu des mesures, des sanctions. Il n'y a pas eu de sanctions.

 13   C'est ce que demandait le procureur.

 14   M. Blaskic (interprétation). – Moi j'ai entendu la question de

 15   la façon suivante : est-ce que des sanctions disciplinaires ont été

 16   prises ? C'est l'interprétation que j'ai reçue.

 17   M. le Président. – A cela, vous avez répondu. Vous avez répondu

 18   en  donnant même une interprétation juridique sur le fait les sanctions

 19   pénales englobent les sanctions disciplinaires à partir du moment où la

 20   juridiction pénale est saisie du point du disciplinaire. Vous avez répondu

 21   sur ce point-là.

 22   Monsieur le Procureur, poursuivez.

 23   M. Kehoe (interprétation). – Général, permettez-moi de vous lire

 24   une référence sur la discipline militaire. Je fais référence, Monsieur le

 25   Président, à l'article 29 de ce document. Ce règlement fait partie de la


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  1   pièce de l'accusation n° 38, c'est le paragraphe 2 de la page 42 de ladite

  2   pièce. Je vais lire un extrait rapide de ce document.

  3   Mais avant que je ne fasse lecture de ce document, permettez-

  4   moi, Général, de vous poser une question. Pensez-vous qu'il aurait été

  5   dans les intérêts du HVO d'expulser de ses rangs tous les soldats du HVO

  6   qui, de près ou de loin, avaient participé aux crimes commis à Ahmici ?

  7   M. Blaskic (interprétation). - Est-ce que cela aurait été dans

  8   l'intérêt du HVO ? Je crois qu'il aurait été dans l'intérêt du HVO

  9   d'expulser de ses rangs tous les soldats qui s'étaient responsables de

 10   crimes, quels qu'ils soient, et je comprends là-dedans les crimes commis à

 11   Ahmici.

 12   M. Kehoe (interprétation). – Bien. Je vais vous lire maintenant

 13   l'article 29 du règlement militaire qui stipule, je cite : "Lorsqu'un

 14   officier, habilité pour ce faire, énonce qu'une violation de la discipline

 15   militaire est un acte passible de sanction, un officier membre du bureau

 16   du procureur général est saisi du cas par des voies officielles".

 17   La phrase suivante précise, je cite : "S'il est dans l'intérêt

 18   du service de procéder de la sorte, un officier prendra également des

 19   mesures visant à engager des poursuites permettant de prendre des

 20   sanctions disciplinaires".

 21   Général, vous êtes bien d'accord avec moi pour dire que le

 22   règlement par lequel vous étiez tenu d'agir envisageait, dans le cas d'un

 23   crime, non seulement des poursuites pénales, mais également des poursuites

 24   qui permettaient de prendre des sanctions disciplinaires contre les

 25   soldats du HVO qui s'étaient rendus coupables d'un acte passible de


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  1   sanction. N'est-ce pas exact ?

  2   M. Blaskic (interprétation). - Vous me lisez cet article, mais

  3   moi je ne suis pas juriste. Ce qui est clair, c'est que cet article dit

  4   que lorsqu'un officier habilité pour ce faire établit qu'il y a eu un

  5   crime, cela veut dire en fait qu'il arrive à savoir quels sont les noms

  6   des auteurs des actes. D'ailleurs, si j'avais eu, moi, les noms des

  7   auteurs des actions, j'aurais fait un rapport contre ces personnes.

  8   M. le Président. – La question n'est pas là. Ecoutez bien la

  9   question. Vous êtes moins fatigué qu'hier soir. La question posée est de

 10   savoir si vous êtes d'accord sur l'interprétation de cet article du

 11   règlement. En tant qu'officier commandant, exerçant un commandement,

 12   a priori, vous connaissez, puisque vous avez dit vous-même qu'à l'académie

 13   militaire, vous aviez des notions.

 14   Pour l'instant, nous n'en sommes pas à savoir si vous avez fait

 15   ou pas fait. Vous le saurez quand les juges auront délibéré. Nous sommes

 16   encore loin de la fin du procès. Concentrez-vous sur les questions qui

 17   vous sont posées. Ne perdons pas de temps. Pour l'instant, le procureur,

 18   légitimement, vous pose une question. Je suis là pour faire en sorte qu'il

 19   soit apporté des réponses aux questions. Sinon, dites ce que vous ne savez

 20   pas ou dites ce que vous voulez, mais répondez au moins à la question. Ne

 21   faisons pas la théorie des trains qui se croisent.

 22   Le procureur vous a posé une question sur l'interprétation de

 23   l'article 29 qui comprend deux alinéas : l'un qui prévoit, dans son

 24   premier alinéa, une procédure…, si j'ai bien compris parce que je le

 25   découvre en même que vous, prévoit la saisine du procureur général. Le


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  1   deuxième alinéa, de cet article 29, prévoit en même temps qu'il peut être

  2   décerné des sanctions disciplinaires. La seule question, pour l'instant,

  3   est de savoir si vous êtes d'accord sur la lecture de ce texte. C'est

  4   tout.

  5   M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Président, je vais

  6   essayer de répondre sur la base des pratiques en vigueur au sein du HVO.

  7   Si un soldat commet un crime, alors un rapport est établi qui comprend son

  8   nom et son prénom, ce rapport est remis aux des tribunaux. Il se peut que

  9   ce soldat soit expulsé de l'unité.

 10   M. le Président. – Il faut que vous répondiez à la question ou

 11   alors renoncez et dites que vous ne voulez pas y répondre, Général

 12   Blaskic. Nous n'allons pas perdre toute la journée. On vous lit une

 13   interprétation du texte. Vous pouvez me dire, par exemple, que vous avez

 14   besoin de lire le texte. C'est possible. Il s'agit d'une question d'ordre

 15   théorique pour l'instant. Vous nous parlerez de la pratique du HVO.

 16   Nous avons à peu près compris que ce n'est pas ce qui a été

 17   fait. Monsieur le Procureur, pouvez-vous reprendre le texte de cet

 18   article 29, s'il vous plaît et nous allons donner le texte de

 19   l'article 29.

 20   Oui, Maître Nobilo, intervenez. Je ne demande pas mieux que vous

 21   interveniez, en l'occurrence, ou Maître Hayman. Mais donnons le texte de

 22   l'article 29 au Général.

 23   M. Kehoe (interprétation). – Il s'agit de la pièce de

 24   l'accusation n° 38, intercalaire 2, je crois. Il s'agit du journal

 25   officiel, Narodni List. Dans l'intercalaire 2, monsieur le Greffier, je


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  1   crois qu'on trouve l'article 29 à la page 42, en tout cas de la version en

  2   BCS.

  3   M. le Président. - Cela fera beaucoup de bien au Président de

  4   relire cet article.

  5   M. Kehoe (interprétation). - Nous disposons d'une version en

  6   français, Monsieur le Président.

  7   M. le Président. - Si en plus, c'est en français… Dans quel

  8   intercalaire, Monsieur le Procureur. Dites-moi, dans l'intercalaire 2,

  9   pour que je puisse le montrer également à mes collègues, dans la version

 10   française, de quel texte s'il vous plaît ?

 11   M. Kehoe (interprétation). – Il s'agit du règlement de

 12   discipline militaire, Monsieur le Président, qui se trouve à la page 42 de

 13   la version en BCS.

 14   M. le Président. - 42, en BCS. Je crois que c'est celui-là.

 15   Je vous demande deux secondes pour que très rapidement, mes deux

 16   collègues puissent prendre connaissance, en version française, Monsieur le

 17   Juge Shahabuddeen, mais vous lisez très bien le français.

 18   (Les Juges prennent connaissance du document, sur le Siège.)

 19   Voilà, je crois que les choses sont claires. Les Juges ont pris

 20   connaissance effectivement de cet article 29 qui comporte, comme je

 21   l'avais entendu, deux alinéas, l'un qui parle de la voie pénale, l'autre

 22   qui met plutôt l'accent sur la voie disciplinaire, les deux étant

 23   d'ailleurs imbriqués.

 24   Général, avez-vous eu le temps de prendre connaissance de cet

 25   article 29 ? Nous allons demander au Procureur de vous poser à nouveau la


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  1   question d'ordre théorique qui vous a déjà été posée. Ensuite,

  2   éventuellement, vous aurez à répondre à des questions d'ordre pratique.

  3   Même si la question ne vous est pas posée, vos défenseurs ou vous-même,

  4   pourrez dire ce qui se faisait dans la pratique, quitte à ce que vous le

  5   prouviez, évidemment.

  6   Monsieur le Procureur, posez votre question sur cet article 29.

  7   M. Kehoe (interprétation). - Général, d'après l'article 29, si

  8   un soldat commet un crime, non seulement il est susceptible d'être

  9   passible de poursuites pénales, mais, s'il y va de l'intérêt du HVO,

 10   l'officier responsable, le commandant peut-être, peut entamer des mesures

 11   visant à prendre des sanctions disciplinaires contre le soldat. Il y a

 12   donc double possibilité : la voie pénale et la voie disciplinaire qui

 13   existent parallèlement l'une à l'autre. N'est-ce pas exact ?

 14   M. Blaskic (interprétation). - Oui, c'est bien ce qui apparaît

 15   dans l'article 29. Je le répète : je ne suis pas juriste et je vois bien

 16   que l'on parle de l'officier habilité à ce faire, c'est-à-dire l'officier

 17   compétent pour prendre des mesures disciplinaires contre le soldat.

 18   M. Kehoe (interprétation). - Pardon, il y a une petite

 19   plaisanterie entre M. Harmon et M. Hayman : il faut que vous sachiez que

 20   j'ai été très longtemps procureur général du district du "milieu", comme

 21   l'on dit en anglais, "central" et non "middle district". Là, je

 22   m'embrouille un peu entre ces différentes précisions.

 23   M. le Président. – Je sais qu'il vous tarde de retourner aux

 24   Etats-Unis, mais quand même. Allez-y. Reprenons notre sérieux et

 25   concentrons-nous.


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  1   Sur la question théorique, nous sommes à peu près d'accord.

  2   Maintenant, poursuivez.

  3   M. Kehoe (interprétation). – Oui, Monsieur le Président.

  4   Général, dans la zone opérationnelle de Bosnie centrale, la personne,

  5   l'officier compétent en matière de prise de sanctions disciplinaires et la

  6   personne qui avait compétence pour ce qui est tribunaux militaires,

  7   c'était vous-même, n'est-ce pas ?

  8   M. Blaskic (interprétation). - J'étais compétent en matière de

  9   sanctions disciplinaires dès lors qu'elles étaient prises contre des

 10   unités qui m'étaient immédiatement subordonnées. Je ne parle donc pas des

 11   unités spéciales et des unités de la police militaire ; je n'étais pas

 12   compétent en ce qui les concerne, je ne pouvais pas prendre de mesures

 13   disciplinaires contre ces deux types d'unité ; et je ne l'ai pas fait.

 14   M. Kehoe (interprétation). – Revenons-en, Général, à cette

 15   enquête et au dépôt de ce rapport par M. Sliskovic, à la fin du mois de

 16   septembre 1993. Pour autant que vous le sachiez, personne n'a, par la

 17   suite, fait l'objet de sanctions disciplinaires, personne n'a fait l'objet

 18   de poursuites pénales suite au dépôt de ce rapport par Sliskovic, n'est-ce

 19   pas ?

 20   M. Blaskic (interprétation). – En effet, le problème était

 21   d'obtenir le dossier contenant le nom des auteurs des actes.

 22   M. Kehoe (interprétation). – Eh bien, Général, parlons du nom de

 23   ces personnes. Avez-vous demandé à Sliskovic le nom des responsables de

 24   ces actes ?

 25   M. Blaskic (interprétation). – Je lui ai demandé de me confier


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  1   tout le dossier ; c'est ce que j'ai demandé à Sliskovic.

  2   M. Kehoe (interprétation). – Sliskovic était votre subordonné à

  3   l'époque, n'est-ce pas ?

  4   M. Blaskic (interprétation). - Il n'était pas mon subordonné, il

  5   était un très proche collaborateur. Il était directement subordonné à

  6   l'administration du service de sécurité parce qu'il est officier de ce

  7   service de sécurité.

  8   M. Kehoe (interprétation). - Si Slavko Marin a déclaré que

  9   Sliskovic était votre subordonné, il aurait alors fait preuve

 10   d'imprécision, n'est-ce pas ?

 11   M. Blaskic (interprétation). - Il était mon collaborateur, il

 12   était directement subordonné -je crois que cela se trouve déjà dans les

 13   dossiers de l'affaire-, il était directement subordonné au chef du service

 14   de sécurité. Il était mon collaborateur pour toutes les questions de

 15   sécurité. Il ne m'était pas subordonné : il était subordonné de

 16   l'administration de la sécurité.

 17   M. Kehoe (interprétation). – A plusieurs reprises, dans le cadre

 18   de votre témoignage, Général, …

 19   M. le Président. – Excusez-moi, vous l'avez quand même désigné

 20   pour faire l'enquête, je vous le rappelle.

 21   M. Blaskic (interprétation). - En effet, parce qu'il était la

 22   seule personne compétente, à l'époque et dans cette circonstance, pour le

 23   faire.

 24   M. le Président. – C'est un peu difficile à comprendre. Il n'est

 25   pas dans votre hiérarchie, mais vous lui dites quand même, dans le rapport


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  1   du 10 mai, qu'il faut faire l'enquête. C'est quand même un lien de

  2   subordination et de supérieur à quelqu'un à qui vous donnez des

  3   instructions, je vous le rappelle, et des ordres : "Je nomme comme

  4   assistant, je nomme M. Sliskovic pour faire l'enquête et recueillir les

  5   informations, etc." On peut donc espérer que, dans la chaîne de

  6   commandement, dans cette affaire-là, il a à vous rendre des comptes.

  7   Poursuivez, Monsieur le Procureur.

  8   M. Kehoe (interprétation). – Général, après que Sliskovic vous a

  9   dit avoir envoyé le rapport à Mostar, est-ce que vous êtes allé le voir ou

 10   avez-vous exigé de lui qu'il vous livre le nom des auteurs de ces actes ?

 11   M. Blaskic (interprétation). - Je lui ai demandé tout le

 12   dossier. Lui m'a dit qu'il avait envoyé le dossier à l'administration

 13   compétente à Mostar. Il a dit que c'était cette administration qui

 14   dorénavant allait se charger de l'affaire.

 15   Que s'est-il passé par la suite ? Les officiers membres du

 16   service de sécurité se trouvaient dans la région et ils menaient à bien

 17   l'enquête.

 18   M. Kehoe (interprétation). - Ma question est la suivante : après

 19   que Sliskovic a envoyé le rapport, êtes-vous allé le voir pour exiger de

 20   lui qu'il vous donne le les noms des auteurs de ces actes ? Oui ou non ?

 21   M. Blaskic (interprétation). - Je lui ai demandé ces noms, mais

 22   je n'ai plus, par la suite, demandé de lui qu'il me fournisse le dossier :

 23   j'avais compris que c'était l'administration chargée de la sécurité qui se

 24   chargeait de l'affaire ainsi que des enquêtes et des poursuites pénales.

 25   M. Kehoe (interprétation). – Après que ce rapport a été envoyé à


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  1   Mostar, avez-vous essayé d'entrer en contact avec qui que ce soit au sein

  2   du SIS ? Est-ce que vous avez essayé d'entrer en contact avec Bruno Stojic

  3   ou avec Milivoj Ptekovic ou avec le Général Proljak ? Avez-vous essayé

  4   d'entrer en contact avec ces hauts représentants afin d'obtenir le nom des

  5   auteurs de ces actes ? L'avez-vous fait ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - J'ai informé le chef de l'état-

  7   major du HVO des éléments les plus importants de cette affaire. Mais, au

  8   sein de la hiérarchie, je n'occupais pas une position telle que je pouvais

  9   exercer une pression sur mes supérieurs. Mes supérieurs étaient informés

 10   de cette procédure et l'administration du service de sécurité était

 11   responsable de prendre des mesures contre toute personne pouvant en faire

 12   l'objet au sein du HVO.

 13   M. Kehoe (interprétation). – Mais Général, vous étiez

 14   certainement à même de demander à vos supérieurs quels étaient les noms de

 15   ces personnes, n'est-ce pas ?

 16   M. Blaskic (interprétation). - Lorsque l'administration chargée

 17   de la sécurité a pris l'affaire entre ses mains, j'en ai conclu qu'elle se

 18   chargeait également de l'enquête. Dès lors, je n'étais ni compétent ni

 19   dans une position telle que je pouvais exercer une pression sur mes

 20   supérieurs. D'autant plus que cette enquête pouvait être menée sur mon

 21   service de commandement et sur moi-même, personnellement. Donc j'ai laissé

 22   l'administration faire son travail de son côté et j'ai pensé que c'était

 23   elle qui aller mener à bien toute l'enquête et qui allait faire en sorte

 24   d'entamer des poursuites pénales si nécessaire.

 25   M. Kehoe (interprétation). – Dans le cadre de votre


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  1   interrogatoire principal, en réponse à des questions posées par mon

  2   éminent collège, Maître Nobilo, vous avez expliqué pourquoi vous aviez

  3   insisté sur le renvoi de M. Pasko Ljubicic. Je me réfère aux pages 19 546

  4   et 19 547 du compte rendu. Vous précisez que vous avez insisté, à

  5   l'époque, pour que Pasko Ljubicic soit démis de ses fonctions, notamment

  6   parce que, ligne 17 du compte rendu, je vous cite : "Une des raisons était

  7   que les crimes perpétrés à Ahmici ne soient répétés."

  8   "Une autre raison était…" et je cite la ligne 23 "que j'étais

  9   bien conscient du fait que le crime perpétré à Ahmici avait été préparé

 10   derrière mon dos sans que je le sache. J'avais des soupçons, je pensais

 11   qu'il y avait un complot contre moi et que j'avais été sacrifié en tant

 12   que commandant officiellement en charge de la situation."

 13   Page 19547, ligne 4, vous dites, Général, je cite : "Et puis il

 14   y avait également la question…"

 15   Excusez-moi, je vais reprendre ce passage, Monsieur le

 16   Président.

 17   A la ligne 4, page 19547 du compte rendu, vous dites, je cite :

 18   "Et puis, il y avait également la question des crimes et de la lutte menée

 19   contre la perpétration de crimes dans la vallée de la Lasva. Dans ce

 20   cadre, la police militaire devait jouer le rôle prééminent. En fait, au

 21   sein de la police militaire, et d'après nos rapports, une centaine

 22   d'individus avaient des dossiers criminels déjà établis contre eux."

 23   Général, c'est ce que vous nous avez dit. Vous avancez plusieurs

 24   raisons, notamment le fait que vous vouliez que Pasko Ljubicic soit démis

 25   de ses fonctions et pourtant, vous n'avez même pas demandé à vos


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  1   supérieurs de vous communiquer le nom des auteurs des actes perpétrés à

  2   Ahmici, noms qui vous auraient permis d'empêcher un autre Ahmici, noms qui

  3   vous auraient permis de faire toute la lumière sur le complet que l'on

  4   était en train de monter derrière votre dos afin que vous puissiez

  5   identifier cette centaine de criminels qui faisaient partie de la police

  6   militaire. Vous n'avez rien fait de tout cela, n'est-ce pas ?

  7   M. Blaskic (interprétation). – Pour autant que je le sache,

  8   j'étais la seule personne à l'époque à demander une enquête. J'ai été le

  9   seul à insister sur le fait que cette enquête devait être menée. Puis,

 10   d'autre part, en de nombreuses occasions, j'ai demandé à mon collaborateur

 11   chargé de la sécurité de mener à bien cette enquête.

 12   Lorsque le 30 septembre, il m'a informé du fait que le dossier

 13   avait été confié au service de sécurité et qu'il comportait le nom de tous

 14   les auteurs des actes, j'ai  pensé que c'était le service de sécurité et

 15   l'administration chargée de la sécurité qui allaient tout prendre en main

 16   et mener l'enquête à son terme et également engager des poursuites pénales

 17   contre les auteurs des actes.

 18   Dans ma chronologie, j'ai également retrouvé certaines choses et

 19   j'ai parlé du fait qu'à de nombreuses reprises, j'ai demandé qu'une

 20   enquête soit menée sur le crime et qu'elle soit menée jusqu'à son terme.

 21   Je précise que dans le cadre de l'opération "PAUK", j'ai essayé

 22   d'obtenir le dossier et j'ai essayé également de faire en sorte que les

 23   perpétateurs des actes fassent l'objet de poursuites criminels.

 24   M. Kehoe (interprétation). – Général, n'est-il pas exact

 25   qu'alors que des opérations de combat avaient lieu dans le courant des


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  1   mois de septembre, octobre, novembre, décembre 1993, vous n'avez rien fait

  2   pour essayer de découvrir le nom des auteurs des actes commis afin de

  3   pouvoir les expulser du HVO. N'est-ce pas exact ?

  4   M. Blaskic (interprétation). – J'ai déjà déclaré que les

  5   opérations de combat me préoccupaient énormément. Mais j'ai fait tout ce

  6   qui était en mon pouvoir jusqu'à ce que j'apprenne que le dossier avait

  7   été établi et envoyé à l'administration de la sécurité. J'ai essayé de me

  8   renseigner et j'ai appris, notamment, qu'ils s'étaient rendus sur le

  9   terrain, les membres de cette administration, et qu'ils avaient essayé de

 10   rassembler des éléments d'enquête en 1993, 1994.

 11   M. Kehoe (interprétation). - Général, pensez-vous que le

 12   procureur général, sachant qu'un crime avait été commis à Ahmici, aurait

 13   souhaité obtenir le nom des auteurs des actes afin de pouvoir mener une

 14   enquête ?

 15   M. Blaskic (interprétation). – Oui, c'est que je pensais. C'est

 16   d'ailleurs ce qui apparaît dans l'ordre qui a été émis en août et dans le

 17   cadre duquel je lui demande, au point 1, que l'affaire soit remise au

 18   procureur militaire de district.

 19   Mais dans le deuxième ordre, je crois, ordre qui a un impact

 20   plus grand que celui que j'avais émis et qui a été remis aussi, il

 21   apparaît au point 1, qu'il me revenait précisément de faire ce que j'ai

 22   fait, à savoir de confier l'affaire au procureur militaire du district.

 23   M. Kehoe (interprétation). – Général, étant donné que vous vous

 24   trouviez dans cette enclave, le procureur militaire de district de Vitez

 25   était le seul procureur de district militaire qui aurait pu engager des


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  1   poursuites contre ces personnes. N'est-ce pas exacte ?

  2   M. Blaskic (interprétation). – C'est exact. Le procureur

  3   militaire de district du tribunal militaire du district de Vitez était la

  4   personne compétente et s'il avait reçu le dossier, il aurait dû engager

  5   des poursuites contre les auteurs de ces crimes.

  6   M. Kehoe (interprétation). – Général, quand vous n'avez pas pu

  7   obtenir les noms des auteurs de ces actes du SIS, en septembre, en

  8   octobre, en novembre et en décembre, êtes-vous allé voir le procureur

  9   militaire de district pour lui dire : "Monsieur le Procureur, menez une

 10   enquête sur ces éléments criminels et expulsez-les du HVO dès que

 11   possible". Avez-vous pris ce genre de mesure, oui ou non ?

 12   M. Blaskic (interprétation). – Eh bien non, pas dedans ce sens-

 13   là. Mais j'ai eu nombre de réunions avec les membres du Tribunal militaire

 14   de district. Cela dit, la pratique était la suivante : le procureur

 15   militaire de district devait recevoir les dossiers qui identifiaient les

 16   auteurs des actes criminels.

 17   M. Kehoe (interprétation). – Général, en fait, après que

 18   Sliskovic vous ai dit que le rapport avait ait été envoyé à Mostar, vous

 19   n'avez rien fait pour connaître les auteurs de ce crime, n'est-ce pas ?

 20   M. Blaskic (interprétation). - Ce n'est pas que je n'ai rien

 21   fait pour essayer d'obtenir ces noms dans le cadre de l'opération PAUK,

 22   j'essayais d'avoir accès au dossier, d'avoir accès aux noms. J'essayais de

 23   faire en sorte de m'assurer que des poursuites allaient être engagés. Mais

 24   tout cela faisait partie de l'opération PAUK qui se penchait sur les

 25   crimes ordinaires qui étaient commis.


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  1   M. Kehoe (interprétation). – Parlons justement de l'opération

  2   PAUK, puisque vous l'avez citée, général. PAUK est une opération qui a

  3   commencé en juin 1994. Vous nous avez expliqué que vous aviez élargi le

  4   cadre de cette opération.

  5   M. le Président. – Je me doute que la cabine en serbo-croate me

  6   traduit. Je ne sais pas si PAUK c'est en anglais ou en français… ce n'est

  7   pas en français…

  8   L'interprète. – PAUK signifie "Araignée". Pardon, Monsieur le

  9   Président.

 10   M. le Président. – Je vous demanderais de bien vouloir dire

 11   qu'il s'agit de l'opération "Araignée", s'il vous plaît, merci.

 12   Bien, Monsieur le Procureur, vous êtes autorisé à parler de

 13   l'opération "Pauk" et, moi, je comprendrais l'opération "Araignée". Nous

 14   sommes d'accord ?

 15   M. Kehoe (interprétation). - Moi aussi, Monsieur le Président

 16   j'ai utilisé le terme opération "Pauk" parce que le témoin l'a citée telle

 17   quelle.

 18   M. le Président. - C'est sa propre langue. On y va comme ça,

 19   merci.

 20   M. Kehoe (interprétation). - Général, vous avez été nommé à la

 21   tête de cette opération en juin 1994. Sur votre insistance le mandat de

 22   cette mission a été élargi, il comprenait désormais les crimes de guerre,

 23   n'est-ce pas exact ?

 24   M. Blaskic (interprétation). - C'est exact.

 25   M. Kehoe (interprétation). - L'opération a duré du mois de juin


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  1   au mois d'octobre 1994, soit 5 mois à peu près, n'est-ce pas.

  2   M. Blaskic (interprétation). - Oui.

  3   M. Kehoe (interprétation). - Vous nous avez également dit,

  4   Général, qu'au cours de cette période de temps, le SIS était placé sous

  5   votre commandement pendant que vous-même meniez des enquêtes dans le cadre

  6   de cette opération.

  7   M. Blaskic (interprétation). - Les officiers du SIS m'ont était

  8   envoyés et ont été placés sous mon commandement, mais pas l'administration

  9   du SIS. L'administration du SIS a toujours été placée sous le commandement

 10   direct du ministère de la Défense, via le ministre adjoint ou parfois

 11   directement.

 12   M. Kehoe (interprétation). - Mais, Général, ne nous avez-vous

 13   pas dit qu'il vous arrivait de confier des missions à ces officiers du

 14   SIS. Ne leur avez-vous pas demandé de se concentrer sur les crimes commis

 15   à Vitez et à Busovaca ? Et je vous renvois aux pages du compte

 16   rendu 19 642 et 19 643. Général, vous souvenez-vous de cela ? Vous pourrez

 17   peut-être consulter votre journal pendant la pause si vous voulez que tout

 18   soit très clair. Mais, avez-vous le souvenir de cela ?

 19   Général, je vous parle des officiers du SIS auxquels vous avez

 20   confié la mission de mener une enquête sur les crimes commis à Ahmici. Qui

 21   étaient ces officiers, ou cet officier ?

 22   M. Blaskic (interprétation). - Je crois qu'il s'appelait

 23   M. Sesar.

 24   M. Kehoe (interprétation). - C'est un nom, un prénom ou un

 25   surnom ?


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  1   M. Blaskic (interprétation). - C'est un nom de famille.

  2   M. Kehoe (interprétation). - Vous avez déclaré qu'on lui avait

  3   interdit l'accès au dossier d'Ahmici, au sein de SIS. Qui lui a interdit

  4   l'accès à ce dossier ? Pouvez-vous donnez le nom de la personne qui lui en

  5   a interdit l'accès ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - Il m'a dit qu'on ne lui avait pas

  7   permis d'avoir accès au dossier, mais il ne m'a pas pour autant dit qui

  8   l'en avait empêché, de quelle façon il en avait été empêché. Il a

  9   simplement dit qu'il n'avait pas pu avoir accès au dossier d'Ahmici qui se

 10   trouvait au SIS. Il m'a dit qu'il savait bien que ce dossier existait,

 11   mais qu'il n'avait pas pu le consulter. Il ne m'a pas dit qui ou comment

 12   on l'avait empêché d'accéder à ces informations.

 13   M. Kehoe (interprétation). - Lui avez-vous demandé qui était la

 14   personne qui l'avait empêché de consulter le dossier sur Ahmici ?

 15   M. Blaskic (interprétation). - Non seulement je lui ai demandé,

 16   mais je lui ai également demandé de me dire de quelle façon on l'avait

 17   empêché d'accéder au dossier. Lui m'a répondu que tout simplement il

 18   n'avait pas pu trouver le dossier, qu'il avait été bloqué. Il n'a pas dit

 19   qui était responsable de la situation.

 20   M. Kehoe (interprétation). - M. Sesar a refusé de vous donner le

 21   nom de la personne qui l'avait empêché d'accéder au dossier, c'est ce que

 22   vous dites ?

 23   M. Blaskic (interprétation). - Je répète ce qu'il m'a dit mot

 24   pour mot. Il m'a dit : "J'ai été bloqué, on ne m'a pas permis d'accéder au

 25   dossier". J'ai demandé qui était la personne responsable de cette


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  1   interdiction d'accès et lui il ne m'a pas donné d'information sur ce

  2   point.

  3   M. Kehoe (interprétation). - La réponse à ma question est :

  4   "Oui, il a refusé de vous donner le nom de la personne qui lui avait

  5   interdit l'accès au dossier".

  6   M. Blaskic (interprétation).  Il ne m'a pas donné le nom de la

  7   personne. Disons les choses comme cela, il n'a pas dit qui l'avait empêché

  8   d'avoir accès au dossier ou de quelle façon on l'avait empêché d'avoir

  9   accès au dossier. Toujours est-il qu'il n'avait pas eu accès au dossier.

 10   Il en avait été empêché.

 11   M. Kehoe (interprétation). – Il y a donc là obstruction active

 12   de quelqu'un qui fait partie du SIS, n'est-ce pas ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - De toute façon, cela montrait

 14   quel était le degré d'autonomie du service de sécurité, un service qui

 15   fonctionnait de façon totalement indépendante par rapport à moi.

 16   M. Kehoe (interprétation). - Le refus qui a été opposé à

 17   M. Sesar, le fait qu'il n'ait pas pu accéder au dossier, est un acte

 18   d'obstruction dont s'est rendu une personne se trouvant au sein du SIS,

 19   n'est-ce pas ?

 20   M. Blaskic (interprétation). -  Oui, l'interdiction d'accès a

 21   été un acte d'obstruction opposé à mes propres efforts.

 22   M. Kehoe (interprétation). - Général, en tant que chef d'état-

 23   major à l'époque, avez-vous discuté de cet acte d'obstruction avec le

 24   responsable du SIS ?

 25   M. Blaskic (interprétation). - Je n'ai pas abordé ce sujet avec


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  1   le responsable du SIS, parce que je n'étais pas dans une position qui me

  2   permettait de le faire. D'autre part, je n'étais pas compétent pour

  3   m'adresser au responsable du SIS, qui n'a jamais été subordonné à mes

  4   ordres.

  5   M. Kehoe (interprétation). - Général, de juin 1994 à août 1994,

  6   vous étiez chef d'état-major adjoint du HVO et, à partir du mois

  7   août 1994, jusqu'à la fin de l'opération "Araignée", en octobre 1994, vous

  8   étiez le chef de l'état-major du HVO, n'est-ce pas ?

  9   M. Blaskic (interprétation). - Je n'ai pas réussi à suivre les

 10   dates que vous avez annoncées. Mais à partir du mois d'août 1994, par la

 11   suite, j'ai été le chef de l'état major.

 12   M. Kehoe (interprétation). - D'après votre témoignage est-ce que

 13   vous souhaitez dire qu'en tant que chef d'état-major du HVO, vous n'étiez

 14   pas à même de discuter de cette obstruction de la part du chef du SIS.

 15   C'est cela que vous affirmez ?

 16   M. Blaskic (interprétation). - En tant que chef d'état-major

 17   principal, je n'ai jamais été supérieur au service de sécurité. A aucun

 18   moment, lorsque j'ai reçu ces informations des officiers du service de

 19   sécurité, j'ai compris que la direction du service de sécurité avait

 20   probablement d'autres intentions.

 21   M. Kehoe (interprétation). - Vous nous avez dit que vous avez

 22   reçu cette mission et, après cela, après que vous avez appris que le SIS a

 23   fait obstruction, avez-vous discuté de cela avec le président Zubak ?

 24   M. Blaskic (interprétation). - En ce qui concerne toutes les

 25   opérations qui faisaient partie de l'opération "Araignée" ou "Pauk", j'ai


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  1   informé mes supérieurs. Je crois que le président Zubak a été informé de

  2   cela aussi, étant donné que des criminels de guerre ont été arrêtés et

  3   emprisonnés. Je ne peux pas parler de cela en séance publique. Je pense

  4   que cela figure dans ma déposition, c'est-à-dire que les personnes

  5   suspectes d'avoir commis des crimes de guerre ont été arrêtées.

  6   M. Kehoe (interprétation). – Donc vous affirmez que vous avez

  7   discuté avec le président Zubak de cette obstruction de la part du SIS et

  8   de son refus de vous remettre le dossier sur Ahmici. C'est cela ?

  9   M. Blaskic (interprétation). - J'ai dit que j'ai informé par

 10   écrit le président Zubak de tous les événements. Je ne me souviens pas si

 11   je lui ai parlé de cela oralement également, mais toutes les informations

 12   dont je disposais concernant l'opération "Araignée" lui ont été remises

 13   par écrit.

 14   M. Kehoe (interprétation). – Quelle a été la réponse de Zubak

 15   face à cet acte de refus de subordination ?

 16   M. Blaskic (interprétation). – Je ne sais pas très exactement,

 17   vu que l'action "Araignée" s'est terminée. Ensuite, des opérations de

 18   combats se sont déclenchées à Kupres. Je n'ai plus été actif dans le cadre

 19   de cette affaire.

 20   M. Kehoe (interprétation). – Général, il s'agissait là du crime

 21   le plus grave qui a eu lieu pendant votre carrière militaire en Bosnie

 22   centrale, en tant que commandant de la zone opérationnelle. Est-ce que

 23   vous affirmez que, dès que vous avez envoyé le rapport à Zubak, concernant

 24   ce refus de subordination, vous n'avez plus montré d'intérêt par rapport à

 25   ce sujet ?


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  1   M. Blaskic (interprétation). - Non, je ne dis pas que je n'avais

  2   plus d'intérêt pour cela. D'ailleurs, ma décision, prise en novembre 1995,

  3   lorsque j'ai appris qu'un acte d'accusation a été levé contre moi, a été

  4   de me rendre ici. Mais il faut savoir que j'étais engagé dans le cadre

  5   d'autres missions et je n'étais plus à même, plus en position d'agir par

  6   rapport à la direction du SIS

  7   M. Kehoe (interprétation). – Général, avez-vous demandé,

  8   oralement ou par écrit ou d'une quelconque manière, que les personnes au

  9   sein du SIS, qui ont fait obstruction par rapport à vous, se voient

 10   sanctionnées de manière disciplinaire ? Si oui, qu'avez-vous fait ?

 11   M. Blaskic (interprétation). - J'ai déjà dit que, concernant

 12   toutes les activités, j'ai informé mes supérieurs pendant que j'étais à la

 13   tête de l'action opérationnelle "Pauk" ou "Araignée". Ensuite, il faut

 14   savoir que j'étais chef d'état-major principal et je n'avais pas de

 15   compétence vis-à-vis de la direction du SIS. Peut-être ai-je fait des

 16   choses concrètes, mais je ne m'en souviens pas en ce moment.

 17   M. le Président. – Simplement pour l'édification et la bonne

 18   connaissance par mes collègues de l'ensemble de cette question, je vous

 19   rappelle que, d'après les notes personnelles que j'ai prises, ce problème

 20   a été longuement traité à l'audience du 25 mars. Il faut bien concevoir

 21   qu'à l'époque, quand vous vous êtes occupé de l'opération "Araignée", vous

 22   n'aviez plus beaucoup de supérieurs au-dessus de vous. Si, comme le

 23   Procureur l'a avancé et comme vous l'avez confirmé, c'est le crime le plus

 24   grave que vous ayez connu dans votre carrière militaire, on peut se poser

 25   des questions.


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  1   Pour faire avancer le débat, je vous signale que, le 25 mars,

  2   plusieurs questions ont été posées et que, personnellement, je ne compte

  3   pas reposer celles que j'ai posées. Elles ont été posées, elles sont dans

  4   le transcript et je ne les reposerai pas.

  5   Je me permets quand même, pour faire avancer le débat, que votre

  6   initiative, au moment de l'opération "Araignée", a été présentée par vos

  7   défenseurs comme étant positive de votre part, mais qu'on s'est étonné, à

  8   l'époque, du peu de résultat obtenu alors que vous occupiez une position

  9   aussi éminente. Plusieurs mois après Ahmici, vous avez quitté le

 10   commandement de la zone opérationnelle et vous vous trouvez dans une

 11   position pour arriver enfin à connaître ce qui s'est passé à Ahmici.

 12   Nous avons déjà parlé de l'organigramme où, soi-disant, vous

 13   n'avez pas de possibilité d'action sur le SIS. Je vous rappelle qu'un de

 14   mes collègues, le Juge Shahabuddeen, vous avait fait préciser votre

 15   position définitive sur Ahmici. Notamment, la position de combat de la

 16   police militaire, puisque vous avez des doutes sur la police militaire.

 17   Vous avez tellement de doutes qu'alors que vous ne vous préoccupez pas

 18   trop de l'enquête, vous demandez en même temps le départ du commandant

 19   Ljubicic. Voilà.

 20   Cela pour simplement rappeler un peu à mes collègues que tout

 21   ceci a fait l'objet de longs débats. Avant la pause, je voudrais que le

 22   Procureur aille à des questions très concrètes et très directes.

 23   M. Kehoe (interprétation). – Oui, Monsieur le Président.

 24   Général, pour autant que vous le sachiez, est-ce que qui que ce soit, au

 25   sein du SIS, a jamais reçu de sanctions disciplinaires, a jamais fait part


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  1   de mesures disciplinaires à cause de cette obstruction, de cette

  2   insubordination ?

  3   M. Blaskic (interprétation). - J'ai déjà dit que le SIS était un

  4   service complètement séparé. Je n'étais pas en position d'en parler, je ne

  5   dispose pas d'information étant donné que je n'étais pas en position de

  6   les avoir.

  7   M. Kehoe (interprétation). – Mais, à l'époque, le SIS faisait

  8   partie du ministère de la défense, n'est-ce pas ?

  9   M. Blaskic (interprétation). – Oui. Mais pas seulement à cette

 10   époque-là : le SIS a toujours fait partie du ministère de la Défense.

 11   M. Kehoe (interprétation). – En tant que chef d'état-major de

 12   tout le HVO, est-ce que vous affirmez que vous n'avez pas de conséquence

 13   concernant les procédures militaires qui ont éventuellement été entamées à

 14   l'encontre des membres du SIS, dans cette affaire ?

 15   M. Blaskic (interprétation). - Personnellement, je n'ai pas de

 16   connaissance à ce sujet. En effet, si nous regardons la structure, il est

 17   clair que le SIS était complètement séparé, complètement autonome : il

 18   s'agit d'un service secret qui travaille de manière totalement

 19   indépendante.

 20   M. Kehoe (interprétation). – Général, lorsque vous avez parlé de

 21   ceci avec M. Sesar, du SIS –comme vous l'avez dit, M. Sesar a été une

 22   personne au sein du SIS qui devait enquêter sur l'affaire d'Ahmici-, avez-

 23   vous insisté pour que les gens du SIS aillent à Ahmici ou ailleurs en

 24   Bosnie, afin de parler, afin d'avoir une interview avec Pasko Ljubicic ?

 25   M. Blaskic (interprétation). - J'ai insisté pour que cette


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  1   personne se rende dans la région de Vitez, dans toute la région pour

  2   essayer de recueillir des informations et mener son enquête ; et, bien

  3   sûr, de parler avec tous les subordonnés dans les rangs de la police

  4   militaire. Je n'ai pas concrètement énuméré toutes les personnes

  5   individuellement, mais bien sûr que j'ai parlé également du chef de la

  6   police militaire.

  7   M. Kehoe (interprétation). – A-t-il alors eu un entretien avec

  8   Pasko Ljubicic ?

  9   M. Blaskic (interprétation). - Il m'a dit qu'il n'était pas à

 10   même, qu'il n'était en position de recueillir quelque information que ce

 11   soit parce qu'il se trouvait face à un complot de silence. C'est pour cela

 12   qu'il n'a pas pu me remettre des informations. C'était son rapport.

 13   M. Kehoe (interprétation). – Et là, a-t-il eu un entretien avec

 14   Pasko Ljubicic ?

 15   M. Blaskic (interprétation). – Il m'a dit qu'il n'était pas à

 16   même, qu'il n'était pas en position de recueillir quelque information que

 17   ce soit parce qu'il s'est trouvé face à un complot de silence et c'est

 18   pourquoi il n'a pas pu remettre des informations. C'était son rapport.

 19   M. Kehoe (interprétation). – Général, Pasko Ljubicic était

 20   toujours au sein du HVO lorsque l'affaire PAUK, Araignée, faisait l'objet

 21   d'enquête.

 22   M. Blaskic (interprétation). – Je crois qu'il n'était pas dans

 23   la partie du HVO, mais je ne suis pas certain de l'endroit où il a été

 24   muté. Il l'a été plusieurs fois, je crois. A l'époque, je crois, il

 25   faisait partie de la police civile. Mais je crois, en tout cas, qu'il


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  1   n'était pas dans les rangs du HVO.

  2   M. Kehoe (interprétation). - Mais pendant qu'il était au HVO, il

  3   faisait partie de la chaîne de commandement qui dépendait du président

  4   Zubak, n'est-ce pas ?

  5   M. Blaskic (interprétation). – Il ne faisait pas partie de la

  6   police militaire du HVO à l'époque, pour autant que je le sache.

  7   M. Kehoe (interprétation). – Pour autant que vous le sachiez,

  8   est-ce que M. Sesar a fait un entretien avec Ljubicic.

  9   M. Blaskic (interprétation). – Sesar ne m'a pas informé de cela.

 10   De toute façon, je ne m'en souviens pas.

 11   M. Kehoe (interprétation). – Et Vlado Santic, membre de la

 12   police militaire qui était près de vous dans l'hôtel Vitez, Sesar a-t-il

 13   eu un entretien avec lui ?

 14   M. Blaskic (interprétation). - Peut-être oui, peut-être non, je

 15   ne dispose pas d'informations à ce sujet.

 16   M. Kehoe (interprétation). – Général, vous étiez à la tête de

 17   cette affaire et vous ne savez pas si oui ou non il a interrogé Vlado

 18   Santic concernant les événements d'Ahmici.

 19   M. Blaskic (interprétation). - Je ne peux pas m'en souvenir

 20   étant donné que j'étais le chef de l'opération araignée dans toute la

 21   région de la Bosnie, de l'Herceg-Bosna et nous avons mené beaucoup

 22   d'activités. Il y a eu environ 300 personnes arrêtées.

 23   M. Kehoe (interprétation). – Mario Cerkez. Sesar a-t-il

 24   interrogé ou eu un entretien avec Mario Cerkez ?

 25   M. Blaskic (interprétation). – Vraiment je n'ai pas


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  1   d'informations à ce sujet. Peut-être a-t-il eu un entretien et n'a-t-il

  2   pas été content de celui-ci. Comme je le dis, c'est possible, mais je ne

  3   m'en souviens pas.

  4   M. Kehoe (interprétation). – Et Dusko Grubcic, un autre

  5   commandant de Busovaca, de la Brigade Nikola Subic-Zrinjski, Sesar l'a-t-

  6   il interrogé, a-t-il eu un entretien avec lui ?

  7   M. Blaskic (interprétation). - Encore une fois, je ne me

  8   souviens pas. C'est possible parce qu'il a passé une longue période dans

  9   cette région. Quant à la question de savoir si, concrètement, il a parlé

 10   avec toutes ces personnes, il faut savoir qu'il m'a informé très

 11   brièvement du résultat de ses entretiens.

 12   M. Kehoe (interprétation). – Général, cette opération concrète,

 13   vous en avez parlé avec M. Nobilo, ici, devant nous, de la manière dont

 14   vous avez dit à une certaine personne d'aller et de mener, encore une

 15   fois, l'enquête sur Ahmici.

 16   Avez-vous lu les documents avec lesquels Sesar est rentré ?

 17   M. Blaskic (interprétation). – Sesar m'a informé oralement des

 18   résultats de son travail et il m'a remis un rapport.

 19   M. Kehoe (interprétation). – Dans ce rapport qu'il vous a remis,

 20   vous a-t-il lui le contenu des entretiens et vous indiquait-il avec qui il

 21   a parlé ?

 22   M. Blaskic (interprétation). – Je n'ai pas lu cela étant donné

 23   qu'il n'a pas constitué une liste des suspects parce qu'il s'est trouvé

 24   face à un complot de silence sur le terrain. Cela figurait dans son

 25   rapport.


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  1   M. Kehoe (interprétation). - Après avoir reçu ce rapport, avez-

  2   vous revu Zubak pour souligner le problème auquel était confrontée cette

  3   enquête et pour insister encore une fois sur le fait que l'on mène à bien

  4   l'enquête et pour que des personnes responsables de ce crime soient

  5   poursuivies ? L'avez-vous fait ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - J'ai déjà dit que j'ai informé

  7   par écrit sur toutes mes activités et, concernant ce rapport sur

  8   l'opération Araignée, que ce rapport faisait partie de ces informations.

  9   Lorsqu'il m'a donné toutes ces informations, j'ai envoyé un rapport à mes

 10   supérieurs. J'ai déjà dit que c'était une époque où il y avait quelques

 11   changements dans le cadre de ces activités.

 12   M. Kehoe (interprétation). - Au fond, personne n'a jamais été

 13   poursuivi pour les crimes commis à Ahmici et personne n'a jamais été

 14   expulsé du HVO en conséquence de ces crimes, n'est-ce pas exact ?

 15   M. Blaskic (interprétation). – Il est exact que personne n'a été

 16   poursuivi, mais le dossier a été constitué, dossier contenant le noms des

 17   suspects, et que celui-ci se trouve dans les archives du service de

 18   sécurité.

 19   M. Shahabuddeen (interprétation). – Tout d'abord, je souhaite

 20   dire à quel point j'apprécie le résumé qu'a fait le Président Jorda

 21   concernant les événements qui ont eu lieu au mois de mars, dans le cadre

 22   de votre interrogatoire par M. Nobilo et M. Hayman.

 23   Maintenant, vous avons réussi à réfléchir notre mémoire et j'ai

 24   quelques questions à vous poser. Vous avez parlé, tout à l'heure, du fait

 25   que vous vous êtes rendu volontairement à ce Tribunal. Aurais-je raison de


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  1   dire que vous avez pris cette décision de vous rendre volontairement afin

  2   d'établir votre innocence, est-ce exact ?

  3   M. Blaskic (interprétation). - Oui.

  4   M. Shahabuddeen (interprétation). - Est-ce que ceci voudrait

  5   dire qu'à l'époque où vous avez pris cette décision de manière volontaire

  6   de vous rendre à ce Tribunal, que vous avez considéré que vous disposeriez

  7   de tous les documents qui vous permettraient de prouver votre innocence ?

  8   M. Blaskic (interprétation). - Je croyais que mes avocats

  9   pourraient avoir accès à tous les documents qui permettraient de prouver

 10   mon innocence.

 11   M. Shahabuddeen (interprétation). - Est-ce que votre opinion

 12   était la suivante, à savoir que le dossier dont il est question ici,

 13   dossier relatif à Ahmici, contiendrait des documents précieux qui vous

 14   permettraient de préparer une défense efficace et de montrer le fait que

 15   vous êtes innocent ?

 16   M. Blaskic (interprétation). – Oui, tout comme tous les

 17   documents relatifs à mon travail effectué pendant que j'étais dans la zone

 18   opérationnelle de la Bosnie centrale, à Vitez. Et j'ai cru également que

 19   mes défenseurs allait obtenir tous ces documents au moins avant le début

 20   du procès.

 21   M. Shahabuddeen (interprétation). - Quant à la question de

 22   savoir si vos défenseurs allaient réussir à obtenir ces documents, c'était

 23   une inconnue pour vous, à l'époque.

 24   Ma question est la suivante : pourquoi avez-vous décidé de vous

 25   rendre à ce Tribunal sans être sûr, à ce moment-là, que vous auriez accès


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  1   à ce dossier extrêmement important ?

  2   M. Blaskic (interprétation). – J'était profondément convaincu

  3   qu'une fois le procès entamé, mes défenseurs allaient réussir à obtenir

  4   tous les documents pertinents dans mon affaire et qu'il n'y aurait pas

  5   d'obstruction vis-à-vis de mes défenseurs.

  6   M. Shahabuddeen (interprétation). – Au moment où vous avez

  7   décidé de vous rendre, avez-vous cru que vos défenseurs allaient être

  8   handicapés, c'est-à-dire que votre défense allait être handicapée dans le

  9   cas où vos défenseurs n'auraient pas réussi à avoir accès à ce dossier ?

 10   M. Blaskic (interprétation). – Il m'est difficile en moment de

 11   me souvenir de tout ce que je pensais à l'époque. Mais dès le mois de

 12   novembre, j'ai résolu le dilemme concernant la question de savoir si

 13   j'allais me rendre ou pas. Des témoins peuvent affirmer cela, témoins qui

 14   n'ont pas encore été cités à la barre. Il y a des personnes avec qui j'ai

 15   parlé de cet acte d'accusation. Je m'attendais à certaines difficultés,

 16   mais je ne m'attendais pas du tout aux difficultés auxquelles mes

 17   défenseurs ont été confrontés par la suite. Peut-être était-je emprunt

 18   d'une trop grande confiance ?

 19   M. Shahabuddeen (interprétation). - Est-ce que la Chambre de

 20   première instance doit conclure qu'à l'époque où vous avez pris votre

 21   décision de vous rendre, vous avez agi conformément au conseil juridique

 22   que vous avez reçu par votre défenseur ? A l'époque, aviez-vous un

 23   défenseur, un conseil ?

 24   M. Blaskic (interprétation). – A l'époque, je suis sûr que je

 25   n'avais pas de défenseurs au moment où j'ai pris cette décision. Mais


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  1   j'avais de bons amis avec qui je discutais, avec qui j'échangeais des

  2   points de vue. Malgré tout, j'ai décidé de me rendre. C'était en novembre

  3   1995. A l'époque, je n'avais aucun avocat.

  4   M. Shahabuddeen (interprétation). - Général, êtes-vous d'accord

  5   pour dire qu'à l'époque où vous avez pris la décision de vous rendre

  6   devant ce Tribunal, vous n'aviez aucune raison pour croire que les

  7   conseils de la défense que vous auriez par la suite n'auraient accès à ce

  8   dossier ?

  9   M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Juge, je croyais qu'à

 10   partir du moment où le procès commencerait, ou bien au moins durant la

 11   préparation pour le procès, que le climat général allait changer et que

 12   les défenseurs n'auraient pas de problèmes pour avoir accès à ce dossier.

 13   M. Shahabuddeen (interprétation). - Merci.

 14   M. le Président. - Je n'ai pas de questions en ce qui concerne,

 15   mais pourquoi vos chefs vous ont-ils placés à la tête de cette opération

 16   Araignée, plusieurs mois après les faits ?

 17   M. Blaskic (interprétation). – Je ne sais pas étant donné que je

 18   n'étais pas dans cette situation. Ce sont d'autres personnes qui ont pris

 19   ce genre de décision. Je suppose qu'ils ont basé leur considération sur

 20   mon travail, sur mes activités. Il s'agissait d'une opération portant sur

 21   tous les auteurs de crimes, de délits, élargie aussi aux crimes de guerre.

 22   Ils se sont basés sur les résultats de mon travail.

 23   M. le Président. - Quand votre travail vous est confié, on peut

 24   légitimement s'étonner que vous, qui avez été commandant opérationnel au

 25   plus haut niveau et qui avez donc vécu de très près ce drame d'Ahmici, qui


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  1   a secoué toute la Communauté internationale, que vous-même avez dénoncé

  2   comme tel, comme un crime, on peut s'étonner que vous ne vous soyez pas

  3   tout de suite précipité sur le dossier Ahmici ?

  4   M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Président, dans sa

  5   première phase, ce n'était même pas prévu que l'opération Araignée porte

  6   sur les crimes de guerre. Il a fallu d'abord faire une enquête. Après,

  7   lorsque l'opération a été élargie pour englober les crimes de guerre, j'ai

  8   essayé d'obtenir le dossier, mais je n'ai pas réussi.

  9   M. le Président. – Quand l'opération Araignée a-t-elle été

 10   étendue aux rimes de guerre ?

 11   M. Blaskic (interprétation). - Après sa création. Je ne me

 12   rappelle la date exacte, mais cela a pu se passer au mois de juin ou au

 13   mois de juillet, ou peut-être plus tard. Je ne me rappelle pas exactement

 14   la date, mais en tout cas après sa création.

 15   M. le Président. – En été 1994. Vous êtes quel numéro dans la

 16   hiérarchie militaire, au sein du HVO, à ce moment-là ? Vous êtes à

 17   Mostar ? Où êtes-vous exactement à ce moment-là ?

 18   M. Blaskic (interprétation). – Je ne suis pas à Mostar, mais à

 19   Posusje, cela se trouve à une soixantaine de kilomètres de Mostar.

 20   M. le Président. – Et le SIS, où se trouve-t-il ?

 21   M. Blaskic (interprétation). – La direction du SIS était à

 22   Mostar.

 23   M. le Président. – Bien. A ce moment-là, vous êtes le chef

 24   d'état-major adjoint du HVO, chargé de l'opération Araignée ?

 25   M. Blaskic (interprétation). – J'étais chef d'état-major


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  1   principal à partir du mois d'août. Il y a eu un moment où j'étais adjoint

  2   et ensuite chef du quartier général.

  3   M. le Président. – Vous étiez numéro 1 de la hiérarchie du HVO ?

  4   M. Blaskic (interprétation). – Oui, mais la hiérarchie du HVO,

  5   s'agissant de la direction de la police militaire et du service de

  6   sécurité, est restée indépendante. Donc même dans les positions que

  7   j'occupais, je n'avais pas compétence de donner le moindre ordre à un seul

  8   policier militaire.

  9   M. le Président. - J'étais sûr que vous me répondriez cela,

 10   Général, mais ce n'est pas ma question.

 11   La question que je vous pose est un peu en relation avec le

 12   climat moral de l'affaire. Le Tribunal pénal a été créé en 1993. On sait

 13   qu'à partir de 1994, le Bureau du procureur fait des enquêtes. Vous avez

 14   été bouleversé par Ahmici. Vous êtes dans une position, au sein du HVO,

 15   qui est éminente. Eminente. Et, je ne sais pas si nous pourrons le

 16   vérifier, il est possible que le SIS ne soit pas dans votre hiérarchie,

 17   c'est possible mais peu importe. Il me semble qu'ayant ce remord, ce

 18   problème de conscience, très fort puisqu'en réponse de ce que vous a

 19   demandé le juge Shahabuddeen vous décidez de vous rendre à La Haye en

 20   1995, c'est donc bien un problème qui vous hante, le problème d'Ahmici,

 21   d'après ce que vous nous dites. Vous êtes le n° 1 de la hiérarchie du HVO

 22   et vous vous contentez du fait qu'un collaborateur vous dise : "Le dossier

 23   d'Ahmici, on ne sait pas où il est.

 24   Silence. On ne veut pas en parler."

 25   Concevez quand même qu'il y a quelque chose qui est


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  1   difficilement assimilable. Est-ce que vous le concevez au moins que ce

  2   soit difficilement assimilable ?

  3   Vous n'interrogez personne, vous ne passez pas de coups de

  4   téléphone, vous n'allez pas voir ceux qui sont encore vivants de cette

  5   tragédie, vous ne vous dites pas : "On dira un jour que je suis coupable".

  6   Même moralement d'ailleurs, sans même parler du Tribunal pénal, pour vos

  7   enfants, pour votre famille, pour la postérité, pour l'Histoire avec un

  8   grand H. Non. Vous êtes le numéro un de la hiérarchie ; un fonctionnaire

  9   vous dit "Top secret sur Ahmici" et vous dites "Top secret". C'est cela

 10   que vous nous dites ? Répondez-moi : c'est cela que vous nous dites ? Vous

 11   avez accepté le fonctionnement de l'organigramme tel quel ? Oui ou non ?

 12   Oui ou non ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - Je ne l'ai pas accepté. J'ai fait

 14   tout. D'ailleurs, dans ce procès, on constatera que j'étais le seul à

 15   demander une enquête et à insister pour que cette enquête soit menée.

 16   M. le Président. – Je ne vous demande pas du moment où vous avez

 17   demandé une enquête. Nous n'en sommes pas là, Général Blaskic ! Nous en

 18   avons parlé hier du moment où vous avez demandé une enquête et le

 19   Procureur vous a posé des questions sur ce que signifiait cette demande

 20   d'enquête. Les Juges ne se déterminent pas sur un papier ; nous essayons

 21   de connaître la réalité intime de ce qui s'est passé.

 22   Je vous parle d'août 1994. Le hasard ou pas le hasard vous met à

 23   la tête du HVO, très près des archives. Je vous demande de confirmer que

 24   vous vous contentez de la réponse d'un fonctionnaire subalterne qui vous

 25   dit : "Ahmici, mon Général, vous n'y touchez pas !"  Et vous êtes le


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  1   numéro un du HVO ; et vous avez moralement… Je ne parle pas vis-à-vis de

  2   nous, mais vous avez vos enfants, votre famille, vous avez la postérité,

  3   la communauté internationale qui a parlé du crime d'Ahmici. Et vous

  4   dites : "D'accord. Le dossier existe –car, en plus, vous dites que le

  5   dossier existe- mais d'accord, il n'y a pas plus de dossier !". Par

  6   exemple, au-dessus de vous, le Président de la République cache le

  7   dossier ; peut-être, mais vous avez des moyens. C'est cela que je ne

  8   comprends pas. Vous avez des moyens : vous pouvez téléphoner, écrire, vous

  9   faire écrire, par Stojic, par beaucoup de personnes.

 10   Simplement, ce que je voulais vous demander, c'est si vous

 11   pouvez me confirmer que vous avez accepté le fait accompli qu'on ne vous

 12   donnait pas le dossier ? Ma question est très simple. Acceptez-vous qu'on

 13   vous dise : "Vous ne pouvez pas avoir accès au dossier" ? Oui ou non ?

 14   M. Blaskic (interprétation). – De ce qu'ils m'ont dit, j'en ai

 15   informé mes supérieurs. Y compris, par la suite, je me suis efforcé de

 16   trouver les documents dans les archives,. J'ai fait tout ce que je pouvais

 17   dans les circonstances dans lesquelles je me trouvais : nous étions dans

 18   des circonstances de guerre. J'ai fait ce que j'ai pu. Par rapport à mes

 19   supérieurs, j'ai agi dans les limites de mes possibilités.

 20   M. le Président. – Nous prenons note de votre réponse que vous

 21   dites que vous avez fait tout ce que vous avez pu. Je voulais que vous

 22   nous donniez ce genre de réponse : vous avez fait ce que vous avez pu.

 23   C'est ainsi que c'est marqué au compte rendu.

 24   Je crois que le Juge Rodrigues voudrait vous poser une question

 25   ou plusieurs questions avant la pause. Tant pis, mais je crois que nous en


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  1   terminerons sur ce point-là.

  2   M. Rodrigues. – Très rapidement. Général, j'aimerais revenir à

  3   avril 1993 et les mois suivants et vous poser cette question : du point de

  4   vue militaire, quelles ont été les conséquences par rapport aux combats

  5   qui se sont développés dans la Bosnie centrale ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - Les conséquences ont, bien

  7   entendu, été un grand nombre de victimes, des deux côtés, d'importantes

  8   destructions et une situation sans issue pour nous, à l'époque, une

  9   situation où nous étions menacés de destruction complète.

 10   M. Rodrigues. - Je parle des conséquences postérieures dans

 11   l'évolution future des combats ?

 12   M. Blaskic (interprétation). - Je ne comprends pas la question,

 13   excusez-moi.

 14   M. Rodrigues. - Je pose la question différemment. Imaginez qu'il

 15   n'y ait pas eu Ahmici ; d'autres choses auraient-elles pu arriver, en

 16   termes militaires ?

 17   M. Blaskic (interprétation). - Si vous pouviez éclaircir encore

 18   la question ?

 19   M. Rodrigues. - Peut-être pourrai-je poser la question après la

 20   pause ? Peut-être est-ce préférable, car vous pourriez vous reposer.

 21   Monsieur le Président, je crois que c'est mieux.

 22   M. le Président. – Oui, nous allons laisser se reposer le témoin

 23   et tout le monde, d'ailleurs. Nous prenons vingt minutes de pause.

 24   L'audience, suspendue à 10 heures 25, est reprise à 10 heures 45.

 25   M. le Président. - Veuillez vous asseoir. L'audience est


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  1   reprise. Monsieur le Juge Rodrigues c'est à vous.

  2   M. Rodrigues. - Vous êtes-vous reposé ?

  3   M. Blaskic (interprétation). - Oui, merci Monsieur le Juge.

  4   M. Rodrigues. - Ma question était celle-ci. Je ne voudrais pas

  5   induire la question, mais peut-être que je peux vous le dire de cette

  6   façon. Peut-être Ahmici a fâché beaucoup les Musulmans et donc la

  7   dynamique des combats qui s'en sont suivis doit être vue à cette lumière.

  8   Quelle est votre opinion, en tant que militaire maintenant, comme

  9   militaire ? Donc, est-ce que Ahmici a eu des conséquences dans l'évolution

 10   des combats dans la Bosnie centrale ?

 11   M. Blaskic (interprétation). - Monsieur le Juge, absolument.

 12   Ahmici a eu des conséquences. La meilleure preuve en est le nombre

 13   important de victimes sur un territoire aussi limité, ainsi que les

 14   actions importantes engagées par l'armée de Bosnie-Herzégovine.

 15   Mais pendant la pause je réfléchissais à ce que vous aviez dit

 16   et je me suis rappelé qu'entre les premiers incidents et ce qui a suivi,

 17   il y a une espèce de spirale ascendante. J'ai déjà parlé de Dusina et

 18   d'autres endroits où des violences ont eu lieu. Et je me rends compte que

 19   la violence n'a pas cessé d'augmenter. Et, sans doute qu'une des

 20   conséquences a consisté aussi à rendre plus difficile, sinon impossible,

 21   la conclusion d'un cessez-le-feu avec l'armée de Bosnie-Herzégovine. Mais,

 22   je ne connais pas tous les pourparlers qui ont eu lieu entre les

 23   représentants des trois peuples. Cela étant, un concept prévalait et nous

 24   l'avons vu dans certaines pièces à conviction soumises par le procureur.

 25   Donc, il existait des points de vue selon lesquels les Croates étaient


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  1   sensés disparaître de la région de Bosnie centrale. En tout cas, ce que je

  2   peux dire, c'est que les difficultés, les obstacles ont crû, se sont

  3   développés.

  4   M. Rodrigues. - Vous nous avez dit que vous étiez très préoccupé

  5   avec les combats, avec les réfugiés, etc, et vous n'avez eu quand même du

  6   temps pour faire attention à Ahmici. Ma question est la suivante. Y a-t-il

  7   un moment où vous avez pensé dire à vos supérieurs hiérarchiques quelque

  8   chose comme cela : quelqu'un a fait ma tâche de commandant très difficile,

  9   sinon insupportable, je ne suis pas responsable d'Ahmici : ou vous

 10   expliquez à la partie contraire et vous punissez les responsables comme

 11   façon d'apaiser nos ennemis, ou je m'en vais ? Est-ce que vous avez pensé

 12   à quelque chose de ce genre et l'avez dit à vos supérieurs hiérarchiques ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - J'ai envoyé de nombreux rapports

 14   à mes supérieurs hiérarchiques au sujet de ces problèmes, des rapports

 15   rédigés dans cet esprit, peut-être pas à la lettre de ce que vous venez de

 16   dire.

 17   M. Rodrigues. - Ma  question est de savoir si vous avez posé,

 18   comme façon de pression, si vous avez posé l'hypothèse de démission à vos

 19   supérieurs hiérarchiques s'ils n'expliquaient pas Ahmici ?

 20   M. Blaskic (interprétation). - A ces moments-là, je n'étais pas

 21   dans cette situation. J'ai déjà dit qu'alors que je conduisais les

 22   combats, je n'ai pas réfléchi à la possibilité de donner ma démission

 23   lorsque nous étions encerclés. Mais effectivement, j'ai dit à mes

 24   supérieurs qu'il fallait démanteler la structure interne de la police

 25   militaire et que je suspectais certains individus de la police militaire


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  1   d'être les auteurs d'Ahmici. Mais, j'ajouterais encore Monsieur le Juge,

  2   si vous me le permettez, que je ne considérais pas ne pas avoir le temps

  3   de m'occuper de l'enquête sur Ahmici ; ce que j'ai dit c'est qu'à ce

  4   moment-là j'avais aussi d'autres problèmes et d'autres priorités, donc

  5   d'autres tâches également à accomplir. Mais, j'ai dit aussi que je n'étais

  6   pas un expert, que je n'étais pas professionnellement formé à mener une

  7   enquête.

  8   M. Rodrigues. - Toutes ces préoccupations, tous les combats,

  9   tous les réfugiés,  etc., découlaient d'Ahmici. Si vous, vous aviez résolu

 10   Ahmici, peut-être auriez-vous résolu tous les autres problèmes ?

 11   M. Blaskic (interprétation). - Si seulement j'avais eu la force

 12   de commandement nécessaire, le pouvoir nécessaire pour résoudre Ahmici.

 13   Mais je ne l'ai absolument pas eu. Cela dit, je répète ce que j'ai dit il

 14   y a un instant, la spirale s'accroissait déjà à ce moment-là. Ahmici était

 15   effectivement un crime très grave, mais malheureusement pas le seul.

 16   M. Rodrigues. - Donc, est-ce qu'on peut conclure, ce que vous

 17   avez dit hier, que vous étiez très fier de rester, de ne pas

 18   démissionner ? Mais, est-ce que cela signifie que vous aviez accepté aussi

 19   les responsabilités de rester ?

 20   M. Blaskic (interprétation). - Je ne sais pas à quelles

 21   responsabilités vous faites référence parce que dans une armée il y a

 22   différentes formes de responsabilité.

 23   M. Rodrigues. - Je pense quand même à la responsabilité morale

 24   dont le monsieur le Président a parlé.

 25   M. Blaskic (interprétation). - J'étais conscient de la situation


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  1   dans laquelle je me trouvais, du fait que j'étais encerclé. La situation

  2   était sans issue. Je ne vais pas ennuyer les Juges en décrivant cette

  3   situation qui, en fait, peut être décrite par un seul mot. Tout ce qui,

  4   dans la vie, n'est pas naturel, n'est pas normal se produisait sur ce

  5   territoire. Chez nous, il était étonnant d'entendre parler de quelqu'un

  6   qui était mort si on disait ensuite qu'il n'était pas mort tué par des

  7   coups de feu.

  8   M. Rodrigues. – Est-ce que vous vous êtes rendu compte que vous

  9   étiez encerclé, dans tous les sens ? Vous étiez encerclé militairement,

 10   encerclé par des personnes qui appartenaient apparemment au même

 11   objectif : à la fin, le ministère de la Défense, la police militaire vous

 12   avaient encerclé aussi. Vous vous êtes rendu compte de cela ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - Je ne sais pas si je vais

 14   parvenir à répondre à votre question. Sur le plan militaire, j'étais

 15   complètement encerclé et menacé d'anéantissement. A la veille de

 16   l'anéantissement, je m'efforçais de me battre au jour le jour, tout

 17   simplement. Quand les accords de Washington ont été conclus, je crois que

 18   c'est précisément sur le territoire de la vallée de la Lasva que cet

 19   accord a été le plus rapidement et le plus complètement appliqué.

 20   M. Rodrigues. – Merci, Général.

 21   M. le Président. – Je vous remercie, monsieur le Juge Rodrigues.

 22   Nous sommes ici au cœur de beaucoup de questions. Pardonnez-nous, monsieur

 23   le Procureur, de vous avoir interrompu. Nous avions déjà posé beaucoup de

 24   ces questions lors de l'interrogatoire principal. Ceci nous permettra

 25   certainement de faciliter ensuite le temps des Juges à la fin du contre-


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  1   interrogatoire et du droit de réplique.

  2   Merci, monsieur le Procureur. Vous allez retrouver votre fil ?

  3   M. Kehoe (interprétation). – Oui, monsieur le Président.

  4   Général, nous allons continuer à parler des efforts que vous

  5   avez. déployés dans le cadre de l'opération "Araignée". Monsieur le

  6   Greffier, j'aimerais soumettre une pièce à conviction de la défense, cette

  7   fois-ci : la pièce 255 de la défense, s'il vous plaît ?

  8   C'est cela, oui. Merci.

  9   Général, durant votre interrogatoire principal, vous avez parlé

 10   de cet article avec mon collègue, Maître Nobilo. Vous avez remarqué à

 11   notre intention qu'Ivica Rajic et d'autres ont été arrêtés durant

 12   l'opération "Pauk-Araignée" menée par vous ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - Oui.

 14   M. Kehoe (interprétation). - Rajic n'a pas été arrêté pour crime

 15   de guerre, n'est-ce pas ? Il a été arrêté pour avoir assassiné des soldats

 16   du HVO ?

 17   M. Blaskic (interprétation). - Il a été mis en état de

 18   détention. Tout ce qui a été retenu contre lui, tous les documents à cet

 19   effet ont été remis au tribunal militaire de district.

 20   M. Kehoe (interprétation). - J'aimerais vous montrer un article

 21   de presse, en date du 8 septembre 1995. Cet article de presse générale

 22   vient de Nedjeljna Dalmacija.

 23   Monsieur le Président, ce journal, si j'ai bien compris, est un

 24   hebdomadaire croate.

 25   M. Abtahi. - Il s'agit de la pièce 698 de l'accusation, 698 A


Page 21082

  1   pour la version en anglais.

  2   (L'interprète signale qu'il s'agit de Nedjeljna Dalmacija,

  3   signifiant "Le journal du dimanche de Dalmatie".)

  4   M. Kehoe (interprétation). - Général, jetez un coup d'œil à cet

  5   article. Quand vous l'aurez lu rapidement, vous constaterez qu'Ivica Rajic

  6   et Dominik ilijasevic, dit Como, ainsi que Vlatko Trogrlic, dit Zuna, ont

  7   été arrêtés pour le meurtre des soldats du HVO, Zelsko Bosnjak, Ivica,

  8   quelquefois dit Marko Precirip, ainsi que pour le meurtre de Davro Lovric

  9   et Zvonko Duznovic.

 10   M. Kehoe (interprétation). - Toutes ces victimes étaient

 11   croates, n'est-ce pas ?

 12   M. Blaskic (interprétation). – Oui. La question qui se pose là

 13   est celle de savoir comment le procureur militaire de district a évalué la

 14   culpabilité de ces hommes. En tout cas, il s'est appuyé sur tous les

 15   documents disponibles à ce moment-là.

 16   M. Kehoe (interprétation). – Général, dans la pièce à conviction

 17   de la défense 255 -et je prierai l'huissier de rendre cette pièce au

 18   témoin- il s'agit donc cet extrait d'un article de Slobodna Dalmacija.

 19   Ivica Rajic admet son implication dans les événements de

 20   Stupni Do, n'est-ce pas ?

 21   M. Blaskic (interprétation). - J'ai deux pages : pouvez-vous me

 22   dire sur quelle page figure cette affirmation ?

 23   M. Kehoe (interprétation). – A la première page, Général ;

 24   quatrième question de l'interview.

 25   Nous lisons : "Dans la nuit précédant l'opération du HVO, des


Page 21083

  1   forces musulmanes sont arrivées dans la village de Stupni Do et se

  2   préparaient à une attaque finale sur Vares.

  3   Réponse : Oui, c'est exact."

  4   Ensuite, Rajic parle de Stupni Do. Vous voyez ce passage,

  5   Général ?

  6   M. Blaskic (interprétation). - Oui, je l'ai trouvé, je suis en

  7   train de le lire.

  8   M. Kehoe (interprétation). – Général, Stupni Do a été un crime

  9   de guerre abominable. Abominable, n'est-ce pas ?

 10   M. Blaskic (interprétation). – Stupni Do a été un crime de

 11   guerre et je n'en ai été informé personnellement que plus tard.

 12   M. Kehoe (interprétation). - J'aimerais vous montrer une série

 13   de photographies. Monsieur le Président, je vous demanderai, si vous le

 14   voulez bien de dire quelques mots d'avertissement.

 15   M. le Président. – Oui, nous allons-y revenir. Mais j'aimerais

 16   comprendre. Les questions que vous préparez sont une comparaison entre les

 17   deux articles de presse ?

 18   M. Kehoe (interprétation). – Le premier article, l'article qui

 19   constitue la pièce à conviction de la défense 255, fait remarquer qu'Ivica

 20   Rajic et ce dont Ivica Rajic a été accusé, Monsieur le Président, c'est le

 21   meurtre de Croates bosniaques.

 22   M. le Président. - Pas à Stupni Do. Ivica Rajic n'a jamais été

 23   mis en accusation pour Stupni Do.

 24   M. Kehoe (interprétation). – Exact. Ce que j'ai sur moi,

 25   Monsieur le Président, ce sont des photographies, plusieurs photographies


Page 21084

  1   prises par des membres du bataillon britannique, des sous-officiers du

  2   bataillon britannique, donc une série de photographies relatives à Stupni

  3   Do et prises le 23 octobre 1993.

  4   Je vous demanderai simplement, Monsieur le Président, de bien

  5   vouloir dire quelques mots d'avertissement pour le public car certaines de

  6   ces photographies sont très pénibles.

  7   M. le Président. – Le public est averti. Ce sont des

  8   photographies qui vont passer. Nos audiences sont en principe publiques et

  9   ces photographies sont certainement, comme le dit le Procureur, très

 10   pénibles à regarder. Ceux qui ont des sensibilités particulières peuvent,

 11   s'ils le désirent, quitter la salle.

 12   M. Abtahi. – Une question à l'intention de Me Kehoe. S'agira-t-

 13   il d'un même document ?

 14   M. le Président. – C'est la même pièce à conviction avec des

 15   barre ?

 16   M. Kehoe (interprétation). – Oui, Monsieur le Président.

 17   M. le Président. - Allons-y, s'il vous plaît.

 18   Quand vous le pouvez, Monsieur le Greffier, préparez ces pièces

 19   le matin. Là, nous perdons un peu de temps. C'est long. Tout ceci aurait

 20   du être préparé ce matin. Je le signale.

 21   M. Kehoe (interprétation). – C'est ma faute, je vous prie de

 22   m'excuser. J'aurais dû le faire à l'avance, je ne l'ai pas fait. Donc j'en

 23   prends la totale responsabilité. Ce n'est pas la faute du Greffier.

 24   M. le Président. - Je n'ai aucun pouvoir disciplinaire sur vous,

 25   Monsieur le Procureur.


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  1   M. Kehoe (interprétation). - Je comprends bien, Monsieur le

  2   Président. J'aurais dû le faire.

  3   M. le Président. – Allez-y, Monsieur le Greffier.

  4   M. Abtahi. – Il s'agit de la pièce de l'accusation 699/1, 699/2,

  5   699/3, 699/4, 699/5.

  6   M. le Président. - Merci.

  7   M. Kehoe (interprétation). – Monsieur le Président, je

  8   demanderai que ces photographies soient placées sur le rétroprojecteur. Ce

  9   sont des photographies prises, comme je l'ai déjà dit, par un sous-

 10   officier du bataillon britannique, le 23 octobre 1993. La première

 11   photographie est une vue générale du village de Stupni Do.

 12   Nous pouvons passer à la deuxième photographie, pièce 699/2, le

 13   village vu sous un autre angle.

 14   Pièce 699/3, toujours un autre angle de vue du même village.

 15   Nous passons à la photographie suivante, Monsieur l'Huissier, un

 16   autre angle de vue. La photographie suivante est une photographie qui nous

 17   montre l'un des corps retrouvé dans le village.

 18   Monsieur l'huissier, nous continuons avec la photographie

 19   suivante, je crois la pièce 699/4. C'est encore la photographie d'un

 20   corps. Ici, les corps de trois femmes dans une maison dont nous parlerons

 21   plus tard, Monsieur le Président, en rapport avec un rapport.

 22   Photographie suivante, le corps d'un vieillard abattu bien sûr.

 23   Puis, est-ce la dernière photographie ? Merci beaucoup.

 24   Général, avant de parler de ces photographies, une par une,

 25   j'aimerais que nous parlions de certains rapports de l'ECMM, la mission


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  1   d'observation de la Communauté européenne.

  2   Monsieur le Président, ce rapport de l'ECMM date du 27 octobre

  3   1993.

  4   M. Abtahi. – Il s'agit de la pièce de l'accusation 700.

  5   M. Kehoe (interprétation). – Général, c'est la partie inférieure

  6   de cette première page, le point 6 pour être plus exact.

  7   Au n° 6, sujet divers, on parle du massacre de Stupni Do. Il est

  8   indiqué, je cite : "Ce rapport doit être lu parallèlement au CC de Travnik

  9   DR du 28 octobre 1993.  V4 a rejoint un convoi de la Fropronu qui s'est

 10   rendu à Stupni Do en compagnie de deux équipes de télévision. Les forces

 11   menées par la Forpronu se sont vu refuser l'accès au site par le HVO et

 12   ont répondu à cette réaction en entrant de façon forcée.

 13   Les troupes du Nortbat ont déplacé des mines et ont abattu des

 14   barrages routiers. Le village est détruit, il n'y a aucun survivant. Vingt

 15   corps ont été trouvés à la fin de la journée. Les recherches continueront

 16   demain. La plupart des cadavres recouvrés jusqu'à présent sont brûlés de

 17   telle façon

 18   Cependant trois ont été identifiés comme des hommes, trois comme

 19   étant des femmes d'âge moyen. Certains avaient été abattus d'une balle

 20   dans la tête, certains avaient été égorgés. Nous présumons que certains

 21   des cadavres carbonisés sont ceux d'enfants. Cette conclusion, nous la

 22   tirons du fait que les squelettes sont de taille relativement restreinte.

 23   Il y a des signes de tortures, de brûlures qui apparaissent sur certains

 24   de ces cadavres."

 25   Nous passons à la page suivante. En haut de la page, nous


Page 21087

  1   lisons, je cite :

  2   "Le chef de l'état-major du commandant de la Forpronu de Bosnie-

  3   Herzégovine a déclaré aux médias que les éléments de preuve recouvrés

  4   tendaient à montrer qu'il s'agit de crimes de guerre. Des enquêtes

  5   complémentaires seront menées à bien et les rapports seront confiés à la

  6   Commission chargée des crimes de guerre à Genève."

  7   Nous sautons un paragraphe et nous reprenons au paragraphe qui

  8   commence par le mot "témoin", je cite :

  9   "Des témoins déclarent que le HVO a commencé à arrêter tous les

 10   hommes de Vares de plus de 18 ans, le 23 octobre. Les autres personnes ont

 11   été soumises à des passages à tabac ou à des viols. Les Musulmans de Vares

 12   pensent que ces atrocités ont été perpétrées par les forces du HVO de

 13   Kiseljak, mais qu'ils avaient eu l'assistance des autorités locales du

 14   HVO, étant donné la façon très organisée dont les hommes musulmans ont été

 15   rassemblés.

 16   Sur la base des rapports selon lesquels des Musulmans sont

 17   détenus et soumis à toutes sortes d'abus dans l'école élémentaire de

 18   Vares, le V4 a tenté d'avoir accès au lieu mais il se l'est vu refusé par

 19   le HVO.

 20   Un commandant de détachement du bataillon nordique, qui a essayé

 21   de venir en aide aux forces de l'ECMM, a fait état d'une forte odeur de

 22   désinfectant à l'entrée de l'école. Le V4 reviendra demain pour essayer de

 23   déterminer qu'elle a été le sort réservé aux Musulmans qui restent encore

 24   à Vares et quel est le statut qui leur est ménagé.

 25   Bilan :


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  1   Les éléments de preuve que nous avons réussi à rassembler

  2   indiquent que les actes menés à Stupni Do n'étaient pas un événement

  3   spontané, inattendu, mais plutôt quelque chose de très organisé et de très

  4   bien orchestré. Les motifs restent obscurs.

  5   L'officier de liaison du HVO à Vitez a déclaré au HCC qu'il

  6   n'avait que très peu d'informations provenant de la région de Vares, mais

  7   que contrairement à d'autres rapports, le commandant de la Brigade du HVO,

  8   Bobovac, avait été démis de ses fonctions et qu'un successeur n'a pas

  9   encore été désigné.

 10   Des détails extrêmement frappants du massacre ont été montrés ce

 11   soir sur les images de la télévision locale. Il faut s'attendre à une

 12   réponse extrêmement rapide, qu'il s'agisse d'une simple réaction à des

 13   mesures de représailles. Les commandants de l'armée de Bosnie-Herzégovine

 14   auront peut-être des difficultés non seulement à contrôler les factions

 15   les plus radicales, mais aussi les factions des troupes régulières.

 16   Les dirigeants croates qui se sont plaints aux équipes de

 17   télévision étrangère auront beaucoup de mal à faire face à la nouvelle

 18   image désormais donnée d'eux".

 19   Maintenant je me tourne vers une autre pièce à conviction,

 20   Monsieur le Président. Il s'agit d'un extrait d'un rapport du 17 novembre

 21   1993, rapport rédigé par l'ambassadeur Mazowiecki  et je vais m'attacher

 22   notamment aux paragraphes de ce rapport qui traitent de Stupni Do. Je vais

 23   faire parvenir ce document à l'huissier qui va vous en faire parvenir une

 24   copie.

 25   Monsieur le Président, ce rapport a été publié en français et en


Page 21089

  1   anglais. Je vais m'assurer de l'obtention de l'exemplaire de ce rapport en

  2   français. Il va falloir un peu de temps.

  3   M. le Président. – Le rapport Mazowiecki ?

  4   M. Kehoe (interprétation). – Oui, Monsieur le Président.

  5   M. le Président. – Oui, oui, il a été publié en français.

  6   M. Abtahi. - Il s'agit de la pièce à conviction n° 701.

  7   M. Kehoe (interprétation). - C'est le paragraphe 50 de ce

  8   document qui m'intéresse plus particulièrement, Monsieur le Président. Il

  9   s'agit donc d'un extrait, je le répète, d'un rapport du 17 novembre 1993,

 10   rédigé par l'ambassadeur Mazowiecki, sous le titre "Violation des droits

 11   de l'homme dont se sont rendus coupables les forces croates de Bosnie".

 12   Nous lisons le paragraphe 50, je cite :

 13   "Les corps d'au moins quinze civils musulmans ont été retrouvés

 14   dans le village de Stupni Do en Bosnie centrale, lieu où ils ont été

 15   massacrés le 23 octobre 1993, apparemment par des troupes du HVO.

 16   Ces personnes ont soit été abattues à bout portant, soit ont été

 17   brûlées. Parmi elles, on trouve un groupe de femmes que l'on a trouvé se

 18   tenant encore par les bras.

 19   Les représentants du HVO ont nié le fait que le massacre avait

 20   eu lieu et, pendant trois jours, ont empêché les observateurs

 21   internationaux d'avoir accès au village".

 22   Je vais soumettre un nouveau document, permettez-moi de passer

 23   rapidement en audience à huis clos partiel parce qu'il y a des principes

 24   dont nous devons discuter en vertu de l'article 70 du Règlement de

 25   procédure et de preuve. Ce sera très bref.


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  1   M. le Président. – Un bref passage en huis clos partiel, s'il

  2   vous plaît ?

  3   (L'audience se poursuit à huis clos partiel.)

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  1   (L'audience reprend en audience publique)

  2   M. le Président. – Nous poursuivons en audience publique. Alors,

  3   Monsieur le Procureur?

  4   M. Kehoe (interprétation). - Oui, merci, Monsieur le Président.

  5   Je vais demander que ce document soit placé sur le rétroprojecteur.

  6   Comme je l'ai fait remarquer, Monsieur le Président, il s'agit

  7   d'un rapport qui provient d'un périodique de la République de Croatie, le

  8   Rijeka Novi List ; il est daté du 28 octobre 1993. C'est un rapport

  9   intitulé: "Les forces du HVO ne sont pas responsables du massacre".

 10   Je cite : "Après avoir mené une enquête sur la crédibilité des

 11   faits dont il est fait état dans les rapports des agences de presse

 12   internationale relatifs au massacre des habitants musulmans du village de

 13   Stupni Do, et sur la base des déclarations faites par les témoins

 14   oculaires, les entités militaires et civiles de la République croate

 15   d'Herceg-Bosna ont mené une enquête sur la situation et sur les événements

 16   s'étant produits sur le territoire placé sous le contrôle du HVO, le

 17   conseil de défense croate, dans la municipalité de Vares, les 23 et

 18   24 octobre 1993, et ont établi les faits suivants : les soldats du HVO

 19   n'ont pas perpétré le massacre qui s'est produit dans le village de

 20   Stupni Do ; une formation armée du HVO n'est pas non plus entrée dans le

 21   village sans défense. Voilà ce qu'indique le rapport du département des

 22   relations publiques du bureau de la présidence de la République croate

 23   d'Herceg-Bosna, rapport émanant de ABENA, l'agence de presse d'Herceg-

 24   Bosna.

 25   Le rapport indique, en outre, qu'il n'y a aucun signe permettant


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  1   de penser que les membres du HVO ont massacré et tué des soldats musulmans

  2   faits prisonniers dans le village de Stupni Do. Les combats opposant le

  3   HVO et le MOS, les forces de défense musulmanes, qui se sont produits dans

  4   le village sont le résultat d'une agression musulmane perpétrée contre la

  5   population croate sur le territoire de la ville de Vares, qui a été

  6   assiégée pendant plus d'un an, de même que les villages environnants.

  7   Les activités du HVO étaient exclusivement liées à la défense de

  8   Vares et de la population croate qui était sous menace directe et aiguë –

  9   indique le rapport. Afin d'atténuer l'échec des actions militaires qui

 10   avaient pour but de conquérir la ville de Vares et pour passer sous

 11   silence le fait qu'il y a eu 39 victimes qui sont dues aux ordres

 12   suicidaires émis par le centre de commandement musulman, la direction et

 13   les dirigeants musulmans ont accusé les membres du HVO d'avoir été

 14   responsables du massacre.

 15   Suivant les ordres émanant du général Milivoj Petkovic, le

 16   commandant adjoint du centre de commandement du HVO, la Forpronu s'est vue

 17   autoriser l'accès à la zone de Stupni Do.

 18   "Si la Forpronu ou toute autre entité internationale pertinente

 19   confirme ne serait-ce qu'un homicide qui n'a pas été provoqué par des

 20   activités de combat et de guerre, une demande sera formulée auprès des

 21   entités législatives militaires et civiles de la République croate

 22   d'Herceg-Bosna afin d'identifier les auteurs des actes et d'entamer des

 23   poursuites pénales contre eux. Toutes les entités de la République croate

 24   d'Herceg-Bosna se prononcent en faveur d'une enquête détaillée sur tous

 25   les crimes de guerre commis pendant la guerre en Bosnie-Herzégovine. Cette


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  1   enquête serait menée par les forces internationales compétentes. Les

  2   entités de la République de Herceg-Bosna offrent toute leur coopération

  3   dans le cadre du rassemblement d'éléments de preuve sur le territoire de

  4   la République croate d'Herceg-Bosna'.

  5   A la fin du rapport signé par Slobodan Lovrenovic, qui est le

  6   conseiller du Président en matière de relations publiques, il est souligné

  7   que nombre de crimes graves qui n'ont pas fait l'objet d'enquêtes

  8   suffisantes et perpétrés notamment contre la population civile croate,

  9   dont plusieurs centaines de personnes ont été massacrées à Trusina,

 10   Doljani, Maljina, Uzdol et Tachina, entre autres, n'ont pas été pris en

 11   compte de façon tout à fait satisfaisante par les organisations

 12   internationales responsables d'établir la perpétration de crimes de guerre

 13   et responsables d'assurer la protection des Droits de l'Homme". (Fin de

 14   citation)

 15   Général, vous étiez l'officier commandant les opérations de la

 16   zone opérationnelle de Bosnie centrale, dont faisait partie le village de

 17   Stupni Do, n'est-ce pas ?

 18   M. Blaskic (interprétation). – Officiellement, oui, j'étais

 19   l'officier de commandement. Mais, sur la base des documents que vous venez

 20   de me soumettre, il apparaît très clairement que le commandement

 21   fonctionnait de la façon suivante : le commandement de Kiseljak, qui était

 22   responsable directement de Stupni Do, était en relation avec l'état-major

 23   principal.

 24   M. Kehoe (interprétation). – Parlons-en justement, Général.

 25   L'état-major principal avec qui étaient en contact les personnes de


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  1   Stupni Do, de qui était-il composé et quelles étaient les personnes qui

  2   donnaient les ordres ?

  3   M. Blaskic (interprétation). - Je sais qui était chef de l'état-

  4   major principal à l'époque : il s'agissait du général Praljak. Déjà à

  5   cette époque, l'état-major principal avait son commandement avancé à

  6   Kiseljak. De temps à autres, le général Petkovic se rendait sur place. Qui

  7   y était ? Pour combien de temps ? Je n'en ai pas trace, je n'étais pas en

  8   contact avec eux. Je ne pouvais pas exercer de commandement et de contrôle

  9   sur Kiseljak.

 10   M. Kehoe (interprétation). – Général, qui était responsable du

 11   poste de commandement avancé à Kiseljak, dont vous venez de parler ? Je

 12   parle bien du poste de commandement avancé de l'état-major principal à

 13   Kiseljak. Qui était responsable ?

 14   M. Blaskic (interprétation). - Je suis en train de dire que,

 15   pendant un certain temps, c'est le général Petkovic qui était responsable.

 16   Qui se trouvait sur place avec lui ? Qui étaient ses collaborateurs ? Qui

 17   était chargé de telle ou telle mission ? Je n'en sais rien parce que je

 18   n'étais pas en contact avec eux. Moi, j'apprenais ce qui se passait à

 19   Kiseljak depuis le quartier général de Kiseljak.

 20   M. Kehoe (interprétation). – Vous nous avez déclaré qu'en

 21   septembre 1993, vous aviez appris que l'état-major principal avait un

 22   poste de commandement avancé à Kiseljak. Vous nous avez également dit

 23   qu'en septembre 1993 toujours, vous aviez appris que ce poste de

 24   commandement avancé existait déjà depuis un certain temps.

 25   Alors, ma question est la suivante : qui commandait le poste de


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  1   commandement avancé de Kiseljak ? Je voudrais un nom.

  2   M. Blaskic (interprétation). - J'ai dit que, de temps à autres,

  3   le général Petkovic se rendait dans ce poste de commandement avancé.

  4   Qui le remplaçait ou combien de temps lui-même passait-il sur

  5   place ? Je n'en sais rien. Je n'ai pas de trace de tout cela.

  6   M. Kehoe (interprétation). - Général, qui commandait le poste de

  7   commandement avancé de l'état major principal à l'époque des événements de

  8   Stupni Do, donc en octobre 1993 ?

  9   M. Blaskic (interprétation). - Je sais qui commandait le groupe

 10   opérationnel numéro 2, mais ce que je ne sais pas, c'est qui se trouvait

 11   dans les locaux du poste de commandement avancé à ce moment-là. Je ne le

 12   sais pas parce que je n'avais pas de contacts directs avec Kiseljak. Ce

 13   n'est que de temps à autres que ce type de liaison était établi. Je sais

 14   que pendant un certain temps, c'était le général Petkovic qui était là. Y

 15   était-il à cette époque-là ? Etait-il remplacé par quelqu'un d'autre de

 16   l'état major principal ? Je n'en sais rien. Ce que je sais, c'est que le

 17   poste de commandement avancé du quartier général se trouvait à Kiseljak.

 18   M. Kehoe (interprétation). - Vous nous dites donc que, quand

 19   vous avez eu cette discussion avec Praljak, lorsqu'il vous a parlé de

 20   l'existence de ce poste de commandement avancé, il ne vous a pas dit qui

 21   était responsable dudit poste de commandement avancé.

 22   M. Blaskic (interprétation). - Non. Il m'a dit, lors de cette

 23   discussion, qui se trouvait sur place. Mais ce qu'il faut comprendre,

 24   lorsqu'on dit que quelqu'un se trouve au poste de commandement avancé,

 25   cela ne veut pas dire qu'il s'y trouve de façon permanente : ce peuvent


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  1   être des séjours de courte durée. Il m'a dit que le général Petkovic

  2   s'était trouvé de temps à autres dans le poste de commandement avancé.

  3   C'était à Praljak de dire quels étaient les membres de l'état-major

  4   principal qui devaient être placés au poste de commandement avancé.

  5   M. Kehoe (interprétation). - Qui était le responsable et le

  6   commandant du groupe opérationnel 2 de la Bosnie centrale ?

  7   M. Blaskic (interprétation). - C'était Ivica Rajic.

  8   M. Kehoe (interprétation). - Vous nous avez déclaré qu'Ivica

  9   Rajic, en octobre 1993, recevait ses ordres de l'état-major et non pas de

 10   vous. C'est bien cela, n'est-ce pas ?

 11   M. Blaskic (interprétation). - Oui. Ivica Rajic dit lui-même

 12   dans la pièce 255 qu'il dépendait du point de vue du commandement

 13   opérationnel de l'état-major principal, par le biais du poste de

 14   commandement avancé. S'il y avait des ordres de type administratif ou

 15   d'une autre nature, alors peut-être que cela arrivait par le biais de la

 16   zone opérationnelle. Mais le commandement opérationnel, pour ce qui est du

 17   groupe opérationnel 2, provenait du poste de commandement avancé.

 18   M. Kehoe (interprétation). - En octobre 1993, si ce n'est pas

 19   vous qui donniez des ordres directs à Ivica Rajic, qui le faisait ?

 20   Donnez-nous un nom.

 21   M. Blaskic (interprétation). - Le quartier général principal,

 22   par le biais du poste de commandement avancé à Kiseljak. Si vous me donnez

 23   une période de temps plus précise, je ne peux pas vous dire avec précision

 24   qui se trouvait présent au poste de commandement avancé à Kiseljak en

 25   octobre 1993. Je sais qu'en septembre, le général Petkovic s'y trouvait.


Page 21098

  1   J'ai eu une discussion avec le général Praljak.

  2   M. Kehoe (interprétation). - Vous affirmez que, lorsque ce crime

  3   atroce a été perpétré à Stupni Do, vous ne savez pas qui était le

  4   commandant du poste avancé ?

  5   M. Hayman (interprétation). - La question a été posée et a reçu

  6   la réponse.

  7   M. le Président. - C'était une conclusion qu'en tirait le

  8   Procureur, je pense, non ? Mise en forme de dernière question. Est-ce que

  9   vous confirmer ce que vient de dire le Procureur ? Vous ne saviez pas…

 10   Quelle était votre question exactement ? Vous avez témoigné que,

 11   lorsque les événements ont eu lieu, vous n'aviez aucune idée de savoir qui

 12   était le commandant du poste avancé. C'était ça ? Le Procureur a posé

 13   cette question. Vous ne le savez pas ? Vous le confirmez.

 14   M. Blaskic (interprétation). - Ma réponse,

 15   Monsieur le Président, est que je ne suis pas certain de qui se trouvait

 16   au poste de commandement avancé à Kiseljak, de qui s'y trouvait

 17   physiquement. Ce que je sais, ce que je souhaite confirmer c'est que, de

 18   temps à autres, le général Milivoj Petkovic s'y rendait. Est-ce qu'il s'y

 19   trouvait justement à cette période-là, vers le 23. Je n'en suis pas

 20   certain.

 21   M. Kehoe (interprétation). - Est-ce qu'Ivica Rajic devait

 22   répondre de ses actes directement à Milivoj Petkovic en tant que chef de

 23   l'état-major adjoint au cours des mois de septembre et octobre 1993 ?

 24   M. Blaskic (interprétation). - Il était directement placé sous

 25   le commandement du poste de commandement avancé et de l'état-major


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  1   principal. Lorsque le poste de commandement avancé fonctionnait, je

  2   suppose qu'il devait répondre de ses actes directement à l'état-major

  3   principal ou peut-être aussi au poste de commandement avancé.

  4   M. Kehoe (interprétation). - Essayons de voir quelle était la

  5   structure de commandement, en nous fondant sur votre déclaration. D'après

  6   vous, vous ne faisiez pas partie de cette chaîne de commandement ; vous

  7   affirmez aussi que Rajic répondait de ses actes à Petkovic et que

  8   Petkovic, lui, répondait de ses actes au général Praljak, en octobre 1993.

  9   C'est bien la structure de commandement qui était en place en

 10   octobre 1993, n'est-ce pas ?

 11   M. Blaskic (interprétation). - C'était une chaîne de

 12   commandement dans les faits, mais du point de vue officiel, du point de

 13   vue légal, je n'ai jamais perdu le commandement. Mais, dans les faits,

 14   tout cela allait directement à l'état major principal, parce que moi,

 15   j'étais coupé, j'étais encerclé dans l'enclave. Mais officiellement, la

 16   zone opérationnelle, la structure de commandement n'avait pas changé.

 17   M. Kehoe (interprétation). - Le général Praljak, lui, devait

 18   répondre de ses actes à Bruno Stojic, qui lui était ministre de la Défense

 19   en octobre 1993, n'est-ce pas ?

 20   M. Blaskic (interprétation). - Je ne sais pas si Bruno Stojic

 21   était ministre de la Défense en octobre 1993. Le général Praljak, c'est

 22   bien certain, soumettait certaines informations au ministère de la

 23   Défense. Mais qui était à ce poste à l'époque ? Je n'en suis pas certain :

 24   il y a eu des changements qui sont intervenus dans le ministère de la

 25   Défense à cette époque-là.


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  1   M. Kehoe (interprétation). -  Général, quel commandant du HVO

  2   était responsable de ces crimes atroces, dont nous avons pu voir les

  3   images à l'instant, ces crime commis à Stupni Do ?

  4   M. Blaskic (interprétation). - En tout état de cause, je sais

  5   que c'est dans cette région que se trouvait la brigade Vares et que se

  6   trouvait également le commandant de la brigade de Vares. Il y avait

  7   également Ivica Rajic, le commandant du groupe opérationnel numéro 2.

  8   Donc, je sais qu'Ivica Rajic commandait ce groupe. Je pense que, dans de

  9   telles circonstances, c'est lui qui devait être responsable.

 10   M. le Président. -  La question ne me paraît pas très correcte

 11   vis-à-vis du témoin. Vous ne pouvez pas lui dire : "Quel était le membre

 12   du HVO responsable de ces crimes "? Le HVO les conteste, si je comprends

 13   bien. Je crois qu'il vaudrait mieux que vous posiez la question : "A

 14   supposé que ces crimes fussent de la responsabilité du HVO, qui commandait

 15   le HVO à ce moment-là ?" Cela me paraîtrait plus correct.

 16   M. Kehoe (interprétation). - Oui, Monsieur le Président.

 17   Général, dans cet article que nous avons lu, il y a une citation de

 18   Milivoj Petkovic qui dit que la communauté croate de Herceg-Bosna et le

 19   HVO étaient prêts à poursuivre les personnes responsables de ceci. Au mois

 20   d'octobre ou novembre ou décembre 1993 jusqu'en juin 1994, est-ce que qui

 21   que ce soit à été poursuivi ou sanctionné de manière disciplinaire pour

 22   des crimes qui ont été commis à Stupni Do ?

 23   M. Blaskic (interprétation). - Je ne connais pas les détails

 24   concernant l'enquête et les mesures prises par rapport aux crimes de

 25   Stupni Do, mais je sais qu'Ivica Rajic et d'autres commandants ont été


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  1   traduits devant le tribunal militaire de district qui a entamé une

  2   procédure contre Ivica Rajic. Le Procureur a avancé plusieurs allégations,

  3   mais non pas celles du crime de guerre.

  4   M. Kehoe (interprétation). - Général, parlons maintenant de

  5   l'opération "Araignée", dans le cadre de laquelle Rajic a été arrêté ou

  6   poursuivi pour le meurtre des Musulmans bosniaques de Stupni Do ?

  7   M. Blaskic (interprétation). -  Rajic et d'autres personnes ont

  8   été privés de liberté pour le soupçon d'avoir commis des actes criminels,

  9   tous les actes criminels. Donc ce meurtre, mais aussi d'autres crimes. Je

 10   sais qu'on a essayé de remettre l'ensemble du dossier au Procureur

 11   militaire du district.

 12   M. Kehoe (interprétation). – Général, il y a eu d'autres soldats

 13   du HVO à côté d'Ivica Rajic qui ont pris part au massacre de Stupni Do,

 14   n'est-ce pas  ? Et ceci n'a-t-il pas été révélé par votre opération

 15   Araignée ?

 16   M. Blaskic (interprétation). - Les officiers qui ont collaboré

 17   avec moi m'ont fait connaître la liste des personnes que l'on devait

 18   arrêter et ces personnes ont été arrêtées et poursuivies. La procédure a

 19   été entamée. Bien sûr, il y a eu d'autres officiers également. Mais moi je

 20   connais seulement le nom d'Ivica Rajic et celui de deux autres

 21   commandants, l'un était

 22   commandant de bataillon et l'autre commandant d'une autre unité.

 23   M. Kehoe (interprétation). – Est-ce qu'un quelconque officier ou

 24   soldat du HVO a jamais été condamné pour les crimes ayant eu lieu à Stupni

 25   Do ou sanctionné de manière disciplinaire pour les actions, pour la


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  1   participation aux événements de Stupni Do en octobre 1993 ? Donc un

  2   quelconque soldat du HVO et, si tel a été le cas, veuillez nous dire quel

  3   était son nom ?

  4   M. Blaskic (interprétation). – Je n'ai pas ces noms sur moi.

  5   Ceci n'a jamais relevé de ma compétence d'avoir les noms dont disposait le

  6   tribunal militaire du district. Je ne disposais pas de ce genre

  7   d'information sur le travail du tribunal, étant donné que je n'étais pas

  8   compétent pour surveiller les activités du tribunal militaire du district.

  9   M. Kehoe (interprétation). – Général, n'est-il pas exact

 10   qu'aucun soldat du HVO n'a jamais été puni ou n'a jamais subi des

 11   sanctions disciplinaires pour ce qui s'est passé à Stupni Do, n'est-ce

 12   pas ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - J'ai déjà dit que je ne dispose

 14   pas d'informations directes à ce sujet. Je ne peux pas dire ni oui ni non

 15   étant donné que je ne dispose pas de ces informations.

 16   M. Kehoe (interprétation). – Général, l'opération Araignée,

 17   c'est vous qui en étiez chargé et vous avez dit que c'était votre

 18   responsabilité de mener les enquêtes sur les crimes, y compris les crimes

 19   de guerre comme celui de Stupni Do ?

 20   M. Blaskic (interprétation). – Oui, c'était ma responsabilité,

 21   mais je n'étais pas compétent dans cet aspect-là. S'il y avait une liste

 22   de suspect, je devais assurer leur arrestation. Quant à la question de la

 23   procédure et de l'action du procureur, c'était la l'action du tribunal.

 24   M. le Président. – Je vous demande quand même de réfléchir avant

 25   la pause, Général Blaskic. On peut quand même se poser la question de


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  1   savoir à quoi servait l'opération Araignée à la tête de laquelle vous

  2   étiez. Si vraiment vous ne savez rien sur Ahmici, vous ne

  3   savez rien sur Stupni Do, que faisiez-vous ? Vous êtes resté combien de

  4   temps à la tête de l'opération Araignée ?

  5   M. Blaskic (interprétation). – Depuis le mois de juin jusqu'au

  6   mois d'octobre. Le but était d'arrêter plus de 300 personnes accusées

  7   d'avoir commis des actes criminels.

  8   Ensuite, c'est le tribunal militaire de district qui entamait la

  9   procédure contre eux.

 10   M. le Président. – Vous faites souvent du droit et c'est tout à

 11   fait à votre honneur. Vous vous adressez à des juges professionnels. Nous

 12   avons compris que ce n'était pas vous qui arrêtiez, mais je vous pose la

 13   question de savoir si cette haute mission qui vous était confiée vous a

 14   permis de savoir des choses sur les crimes les plus graves. Or, vous

 15   semblez dire que pour Ahmici on vous a refusé l'accès au dossier alors que

 16   vous étiez le chef de la mission, que pour Stupni Do vous n'étiez pas

 17   compétent, donc que vous ne savez rien. Avant la pause, je me permets de

 18   vous demander de bien vouloir réfléchir pour savoir ce que vous faisiez à

 19   la tête de l'opération Araignée.

 20   Nous allons faire une pause de 20 minutes.

 21   

 22   L'audience, suspendue à 11 heures 55, est reprise à 12 heures 15.

 23   M. le Président. - Nous reprenons, jusqu'à 13 heures 25 puisque

 24   les cinq dernières minutes seront consacrées à M. Irad pour donner le

 25   point du sablier, de l'écoulement du temps.


Page 21104

  1   M. Abtahi. – Par souci de clarté, Monsieur le Président, je

  2   tenais à souligner que la pièce 699 porte huit sous catégories, de 1 à 8.

  3   M. le Président. – Merci. Monsieur le Shahabuddeen ?

  4   M. Shahabuddeen (interprétation). – Non, non. Il y a peut-être

  5   un malentendu, je n'avais pas de question à poser.

  6   M. le Président. - J'avais peut-être envie que vous posiez une

  7   question. Monsieur le Procureur, c'est donc à vous de poser des questions.

  8   M. Kehoe (interprétation). – Oui, Monsieur le Président.

  9   Général, passons à autre chose. Oublions pour le moment Stupni Do. Je

 10   souhaite vous soumettre la pièce à conviction 512, la pièce à conviction

 11   de la défense.

 12   Monsieur le Greffier, je crois qu'il existe une version en

 13   Croate. Je ne pense pas que nous ayons la version ni en anglais ni en

 14   français.

 15   M. Abtahi. - Tout à fait.

 16   M. Kehoe (interprétation). - Général, c'est un document dont

 17   vous avez discuté avec Me Nobilo. Bien évidemment, je ne peux pas lire.

 18   Mais le résumé du contenu a indiqué qu'il s'agissait d'un ordre donné au

 19   général de brigade Filipovic pour qu'il fournisse des documents aux

 20   instances charges de l'enquête. Est-ce une bonne évaluation ?

 21   M. le Président. - Dans le cadre d'Ahmici, toujours ?

 22   M. Kehoe (interprétation). - C'est en général, Ahmici n'est pas

 23   indiquée directement.

 24   M. le Président. – Excusez-moi, continuez.

 25   M. Blaskic (interprétation). – Oui.


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  1   M. Kehoe (interprétation). – Général, avez-vous envoyé une

  2   lettre semblable au SIS demandant tous les documents concernant Ahmici ?

  3   M. Blaskic (interprétation). - Ceci n'est pas une lettre, c'est

  4   un ordre. Et je ne pouvais pas donner des ordres à la direction du SIS.

  5   Mais c'est un ordre que j'ai envoyé au commandant du corps d'armée, le

  6   général de brigade Filipovic.

  7   M. Kehoe (interprétation). - Si vous n'avez pas envoyé d'ordre,

  8   avez-vous envoyé une demande par écrit demandant les informations tout

  9   comme ce que vous avez fait dans l'ordre donné à Filipovic ?

 10   M. Blaskic (interprétation). - J'ai demandé à l'officier qui

 11   appartenait au SIS qu'il

 12   fasse ceci.

 13   M. Kehoe (interprétation). - Je dois conclure, général, que vous

 14   n'avez pas envoyé une demande par écrit au SIS demandant les informations

 15   concernant Ahmici ?

 16   M. Blaskic (interprétation). - Je ne l'ai pas envoyée par écrit

 17   étant donné que j'ai donné cette tâche à cet officier du SIS, en lui

 18   demandant de demander ce dossier auprès du SIS. Mais je n'était pas

 19   compétent à par rapport à la direction du SIS et je ne pouvais pas leur

 20   envoyer d'ordre.

 21   M. Kehoe (interprétation). – Avez-vous envoyé une lettre

 22   semblable aux archives de l'état-major principal afin de recueillir des

 23   informations qu'ils avaient en leur possession concernant Ahmici ?

 24   M. Blaskic (interprétation). - Je crois que non, étant donné que

 25   les archives de l'état-major principal n'avaient que des documents


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  1   opérationnels et de combat. Je ne me souviens pas, mais je ne crois pas

  2   leur avoir envoyé une telle lettre.

  3   M. Kehoe (interprétation). - A ce moment-là, Général, durant la

  4   période de l'opération Araignée, vous agissiez conformément à l'accord et

  5   le soutien du Président Zubak ?

  6   M. Blaskic (interprétation). – Oui, avec le soutien et l'accord

  7   du président Zubak.

  8   M. Kehoe (interprétation). – Général, au cours de votre

  9   déposition, vous nous avez dit faire partie de l'armée de fédération et

 10   que votre homologue, du côté de la Bosnie-Herzégovine, était Hasim Delic.

 11   Ma question est la suivante : avez-vous envoyé une lettre au général Delic

 12   en lui demandant de vous fournir les opérations qu'il possédait ou bien

 13   que la République de Bosnie-Herzégovine possédait concernant les crimes

 14   d'Ahmici ? Avez-vous fait cela ?

 15   M. Blaskic (interprétation). - Je n'ai pas demandé, mais nous

 16   avons eu une fois une discussion à ce sujet. Je ne l'ai pas demandé par

 17   écrit. Ceci s'est produit au mois d'août 1994 et au cours d'une réunion,

 18   nous avons abordé aussi ce sujet-là, c'est-à-dire le sujet d'Ahmici.

 19   C'est à ce moment-là que j'ai compris que la position du

 20   président de la Présidence de la République de Bosnie-Herzégovine, Aljia

 21   Izetbegovic, au cours de cette réunion était d'avoir une commission

 22   séparée qui allait faire son travail de façon indépendante. Je n'ai pas pu

 23   lui poser la question de quelle commission il parlait, mais j'ai compris

 24   qu'il devait s'agir d'une commission dont les autorités musulmanes

 25   devaient être compétente. Cette réunion qui a eu lieu à Grasnica, je


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  1   crois, au mois d'août 1994.

  2   M. Kehoe (interprétation). - Général, est-ce que vous avez

  3   demandé, par écrit ou oralement, au général Delic, en lui disant : "S'il

  4   vous plaît, Général, donnez-moi tous les documents écrits que la

  5   République de Bosnie-Herzégovine possède concernant Ahmici.". Est-ce que

  6   vous l'avez fait ? Si oui, qu'a répondu le général Delic ?

  7   M. Blaskic (interprétation). - Personnellement, je ne l'ai pas

  8   fait étant donné que ces enquêtes relevaient de la compétence du SIS. Je

  9   ne sais pas si des services de sécurité des deux côtés échangeaient les

 10   informations qu'ils possédaient. Je n'ai pas de connaissance directe à ce

 11   sujet. Je parlais personnellement avec le général Delic des questions pour

 12   lesquelles nous étions directement compétents.

 13   M. Kehoe (interprétation). - Général, je parle de la période

 14   pour laquelle vous étiez chargé de l'opération "Araignée" : est-ce que

 15   votre déposition reste la même ? Vous n'avez pas posé de questions ni

 16   oralement ni par écrit au général Delic pour qu'il vous fournisse des

 17   informations qu'il possédait à ce sujet ?

 18   M. Hayman (interprétation). - La question a déjà été posée et le

 19   témoin a répondu. Il a dit : "Je ne l'ai pas fait". Le problème est qu'il

 20   répète toujours les mêmes questions.

 21   M. le Président. – Il ne répète pas toujours les mêmes

 22   questions, Maître Hayman : elles sont présentées un peu différemment.

 23   Mais, en l'occurrence, vous avez raison. Je trouve qu'effectivement la

 24   question a été posée. Poursuivez, Monsieur le Procureur.

 25   C'est peut-être aussi parce que le témoin fait toujours les


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  1   mêmes réponses. J'espère que vous vous êtes interrogé aussi là-dessus,

  2   Maître Hayman ? Allez-y, continuez.

  3   M. Kehoe (interprétation). - Dernière question concernant vos

  4   contacts avec le général Delic. Etes-vous allé voir le général Delic, à

  5   quelque moment que ce soit, pendant que vous étiez chargé de l'opération

  6   "Araignée" ou pendant que vous étiez chef d'état-major principal ? Etes-

  7   vous allé le voir en lui disant : "Général, s'il vous plaît, veuillez

  8   permettre aux services chargés de l'enquête au sein du HVO le contact avec

  9   les victimes des crimes d'Ahmici qui ont survécu, avec qui ils pourraient

 10   parler pour recueillir les informations" ? L'avez-vous

 11   dit ? Si oui, quand?

 12   M. Blaskic (interprétation). - Je suis allé plusieurs fois voir

 13   Delic. J'ai eu plusieurs rencontres avec lui. Mais j'ai déjà dit que c'est

 14   le service de sécurité qui menait l'enquête, Ce sont eux qui avaient une

 15   collaboration à ce sujet. A l'époque, j'ai considéré qu'en faisant une

 16   telle demande à Delic, je l'aurais mis dans une situation défavorable,

 17   embarrassante, étant donné que, d'après la réunion que nous avions eue au

 18   mois d'août, j'ai compris que son supérieur direct a clairement indiqué

 19   que c'est la commission qui devait être chargée de ce travail. C'est pour

 20   cela que je n'ai pas voulu poser cette question, faire cette demande

 21   auprès de Delic.

 22   M. Kehoe (interprétation). - Général, vous avez dit que

 23   l'opération "Araignée" s'est terminée en octobre 1994 et qu'à l'époque,

 24   vous étiez chef d'état-major principal. Qu'avez-vous fait après

 25   l'opération "Araignée" afin de continuer de faire vos efforts poux


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  1   découvrir les auteurs des atrocités qui ont eu lieu à Ahmici ? Quelles

  2   sont les mesures que vous avez prises ? S'il y en a eu, veuillez nous

  3   décrire ces mesures-là ?

  4   M. Blaskic (interprétation). - Comme je l'ai déjà dit, dans le

  5   cadre de l'opération "Araignée", j'ai essayé d'obtenir le dossier et je me

  6   suis trouvé face à une obstruction. A cette époque-là, il y a eu beaucoup

  7   d'opérations de combat sur le front. J'étais engagé dans ce cadre-là et je

  8   n'étais pas en position ni compétent pour demander quoi que ce soit.

  9   M. Kehoe (interprétation). – Général, nous parlons d'une période

 10   pendant laquelle vous étiez chef d'état-major de l'ensemble du HVO. Et

 11   vous dites que vous n'aviez pas de compétence, pas d'autorité pour mener

 12   de nouvelles enquêtes sur les crimes commis à Ahmici ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - J'ai déjà dit que, selon le

 14   rapport que j'ai reçu, l'enquête a été menée et terminée et que l'ensemble

 15   du dossier avait été créé. Mon problème était d'avoir accès au dossier tel

 16   qu'il a été constitué.

 17   M. Kehoe (interprétation). - Général, avez-vous exprimé votre

 18   mécontentement

 19   auprès du Président Zubak ou auprès du ministre de la Défense de voir se

 20   terminer l'opération "Araignée" sans avoir trouvé les auteurs d'Ahmici ?

 21   M. Hayman (interprétation). - Nous en avons déjà parlé avant la

 22   pause. J'ai déjà entendu cette question avant la pause s'il est allé voir

 23   M. Zubak et le témoin a dit qu'il a écrit un rapport sur les résultats de

 24   l'opération "Pauk-Araignée" et qu'il a envoyé cela à ses supérieurs. A mon

 25   avis, nous avons déjà abordé ce sujet.


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  1   M. Kehoe (interprétation). - Ma question, Monsieur le Président,

  2   était de savoir ce que le témoin a fait après la fin de l'opération

  3   "Araignée" et après que cette...

  4   M. le Président. – Après la fin de l'opération "Araignée" :

  5   depuis votre intervention, je crois que la question a été changée grâce à

  6   votre intervention, je le reconnais. C'est donc à la fin de l'opération

  7   "Araignée".

  8   M. Blaskic (interprétation). - Après la fin de l'opération

  9   "Araignée", je n'avais plus de compétence pour prendre quelque mesure que

 10   ce soit à l'égard des services de sécurité. Je me suis rendu compte que

 11   j'étais bloqué. Mon problème était d'accéder à la liste.

 12   M. le Président. – Ai-je bien entendu la traduction ? Vous

 13   n'aviez plus compétence pour… vis-à-vis du service de sécurité ? Cela

 14   veut-il dire que, pendant l'opération "Araignée", vous aviez compétence ?

 15   Je ne sais plus dans quoi vous étiez compétent. Vous allez peut-

 16   être nous l'expliquer ?

 17   M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Président, ce n'est

 18   pas ce que je pensais ; il est possible que je me sois mal exprimé. Après

 19   l'opération "Araignée", je n'étais dans aucune fonction qui m'aurait

 20   permis de m'adresser à un service de sécurité pour demander la liste. On

 21   m'interroge sur l'enquête. Je suis convaincu que l'enquête a été menée,

 22   mais le problème était d'accéder à la liste, au rapport de l'enquête.

 23   M. le Président. – Si je comprends bien, vous dites que, pendant

 24   l'opération

 25   "Araignée", vous étiez théoriquement compétent, mais quand même


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  1   pas compétent pour vous adresser au service de sécurité ? La question du

  2   Procureur est maintenant : après l'opération "Araignée",… Voulez-vous

  3   répéter votre question, Monsieur le Procureur ?

  4   M. Kehoe (interprétation). – Oui, c'est la question que je

  5   pose : après la fin de l'opération "Araignée", quelles mesures avez-vous

  6   prises en tant que chef d'état-major principal pour arriver au fond de la

  7   chose, au fond des choses ? Je n'ai pas d'autre expression que je puisse

  8   utiliser.

  9   M. Blaskic (interprétation). - J'ai déjà dit qu'après la fin de

 10   l'opération "Araignée", une fois que je me suis rendu compte que la liste

 11   était bloquée pour moi, j'ai écrit des rapports à mes supérieurs. Plus

 12   tard, j'ai été préoccupé par d'autres activités ; je n'étais plus en

 13   position de m'occuper des activités liées à l'enquête.

 14   M. Shahabuddeen (interprétation). – Général, je ne voudrais pas

 15   revenir exagérément sur ce qui a déjà été dit. Mais permettez-moi de poser

 16   une question : lorsque vous avez décidé de vous présenter devant le

 17   Tribunal, vous aviez compris qu'Ahmici constituerait une partie tout à

 18   fait centrale dans ce procès, n'est-ce pas ?

 19   M. Blaskic (interprétation). - Pour être tout à fait franc,

 20   Monsieur le Juge, je n'ai eu la possibilité de lire l'acte d'accusation

 21   qu'une fois arrivé ici. Mais j'ai discuté avec mon premier avocat, à

 22   l'époque, et il est possible qu'il m'ait dit quelque chose dans ce sens, à

 23   savoir qu'Ahmici constituerait un élément central.

 24   Je crois que l'acte d'accusation, le premier acte d'accusation

 25   allait jusqu'au mois de mai 1993, je crois, acte d'accusation dans lequel


Page 21112

  1   Ahmici est décrit comme étant un problème central.

  2   M. Shahabuddeen (interprétation). - Il y a un point sur lequel

  3   j'aimerais être tout à fait clair.

  4   C'est le moment où vous vous êtes rendu compte qu'Ahmici constituerait un

  5   élément central du procès : l'avez-vous compris avant de vous présenter

  6   devant le Tribunal ?

  7   M. Blaskic (interprétation). - Oui.

  8   M. Shahabuddeen (interprétation). - Et vous étiez prêt à vous

  9   défendre par rapport à Ahmici, en démontrant votre innocence absolue ?

 10   Etait-ce bien votre position ?

 11   M. Blaskic (interprétation). - Oui.

 12   M. Shahabuddeen (interprétation). - Cela permet-il de penser que

 13   vous aviez un devoir par rapport à vous-même, par rapport à votre famille,

 14   par rapport à d'autres ? Et que ces devoirs exigeaient de vous, avant de

 15   vous présenter devant le Tribunal, d'être en possession de tous les

 16   documents pertinents ou de disposer d'une forme d'assurance relativement

 17   solide quant au fait que ces documents seraient accessibles durant le

 18   procès ? Est-ce ce que vous pensiez ?

 19   M. Blaskic (interprétation). – Monsieur le Juge, je vais

 20   m'efforcer de répondre brièvement. Bien entendu, j'avais le devoir

 21   d'entrer en possession de ces documents, mais une autre question se pose,

 22   à savoir : en avais-je la possibilité ou pas ? Je considérais que je

 23   devais faire tout ce que je pouvais faire, n'étant pas un expert sur le

 24   plan juridique. Je pensais qu'au cours du procès, les avocats de la

 25   défense accéderaient, entreraient en possession de ces documents ou que


Page 21113

  1   ces documents seraient disponibles au procès d'une autre manière. Cette

  2   autre manière dont je suis en train de parler, c'est pendant le procès,

  3   alors que j'étais ici, les différentes ordonnances contraignants émises

  4   par le Tribunal.

  5   M. Shahabuddeen (interprétation). - Merci.

  6   M. le Président. – Monsieur le Procureur ?

  7   M. Kehoe (interprétation). – Général, j'aimerais vous donner

  8   lecture d'une partie de votre déposition. Cet extrait très bref a été

  9   entendu en huis clos partiel, Monsieur le Président, mais je ne crois pas

 10   que le contenu rende nécessaire un huis clos partiel. Cela étant, pour les

 11   six lignes que je vais lire, j'aimerais que cela se passe en huis clos

 12   partiel. Je fais référence à la page du compte rendu d'audience 19.662.

 13  

 14   (L'audience se poursuit à huis clos partiel.)

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  1   (L'audience se poursuit en audience publique)

  2   M. Kehoe (interprétation). - J'aimerais donc, Général, revenir

  3   sur une partie de votre déposition, en page 19.868 du compte rendu

  4   d'audience. C'est un moment où vous passez en revue votre chronologie. Et,

  5   en ligne 13 de cette page, vous faites remarquer que "le 13 novembre 1993,

  6   j'ai reçu ou plutôt j'ai obtenu des informations du service de

  7   renseignement militaire selon lesquelles deux prêtres avaient été tués

  8   dans le monastère de Fojnica. Et par Gelic, l'officier de liaison, j'ai

  9   demandé à la Forpronu de vérifier cette information. Par la suite, cette

 10   information s'est révélée exacte."

 11   Vous rappelez-vous avoir dit cela au cours de votre déposition,

 12   Général ?

 13   M. Blaskic (interprétation). - Je me rappelle cette partie de ma

 14   déposition.

 15   M. Kehoe (interprétation). - Très bien. Maintenant, j'aimerais

 16   que nous passions en revue une série de documents, à commencer par le

 17   premier. Je demande l'aide de l'huissier.

 18   M. le Greffier. - Il s'agit d'une pièce de l'accusation 703,

 19   703A pour la version anglaise.

 20   M. Kehoe (interprétation). - Nous allons examiner ces documents

 21   l'un après l'autre. Donc je pense qu'ils peuvent vous être remis tous

 22   ensemble, ce sera plus facile.

 23   M. le Greffier. - La pièce suivante est la pièce 704 et 704 A

 24   pour la version anglaise de l'accusation. La pièce suivante porte la

 25   cote 705, 705 A pour la version anglaise.


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  1   M. Kehoe (interprétation). - Monsieur le Président, nous

  2   n'allons pas lire l'intégralité de ces trois documents, mais j'aimerais

  3   simplement que nous les examinions avec vous, Messieurs les Juges.

  4   La pièce 703 est la mise en accusation au pénal de quatre

  5   individus liés au meurtre des deux prêtres de Fojnica dont le témoin a

  6   parlé dans sa déposition. L'un d'entre eux est accusé d'homicide en tant

  7   que tel, et les trois autres sont accusés d'avoir manqué à leurs devoirs

  8   de transmission de l'information à leur commandant respectif.

  9   La pièce à conviction 704 est l'arrêt du tribunal militaire de

 10   district de Sarajevo, au sujet de ces homicides. Il y est révélé que

 11   Miralem Cengic, l'auteur principal de cet acte, a été condamné à sept ans

 12   de prison, les quatre autres étant condamnés à six mois de prison.

 13   La dernière pièce, la pièce 705, est un arrêt de la Chambre

 14   d'appel. Dans cette pièce à conviction, l'accusé fait appel de sa

 15   condamnation et le Bureau du Procureur fait appel de la sentence. La

 16   condamnation de l'accusé est confirmée et la cour suprême de Bosnie-

 17   Herzégovine augmente la durée d'incarcération de M. Cengic qui passe de

 18   onze ans à quinze ans.

 19   Si nous regardons, Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 20   la pièce à conviction 704, nous trouvons dans le corps du texte la

 21   condamnation de M. Cengic à onze ans. Ce document est daté du

 22   23 septembre 1994. En page de garde, nous voyons une note quant à

 23   l'augmentation de la durée d'incarcération. Donc, je pense que ce texte a

 24   été rédigé après les faits et que les Juges ont décidé une période

 25   d'emprisonnement de quinze ans contre M. Cengic pour le meurtre de ces


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  1   deux prêtres, quinze ans lieu de onze.

  2   L'interprète se reprend : Lorsque la première incarcération a

  3   été mentionnée, il s'agissait de onze ans et non de sept.

  4   M. Kehoe (interprétation). - Nous fournissons ces documents aux

  5   Juges à titre d'information. Nous pouvons passer maintenant à un autre

  6   domaine de questions.

  7   M. Kehoe (interprétation). - Général, pour en terminer sur ce

  8   point, il y a eu des poursuites engagées, au moins contre les

  9   ressortissants d'un groupe ethnique au sujet de crimes commis contre un

 10   autre groupe ethnique. Les documents que nous venons de verser rendent

 11   bien compte de ce fait, n'est-ce pas ?

 12   M. Blaskic (interprétation). - Dans ma déposition, lorsque je me

 13   suis exprimé, je n'ai pas pensé un instant à justifier une telle pratique.

 14   J'ai simplement dit que sur la base de ce que je savais, il n'y avait pas

 15   eu de condamnation. Mais je considère qu'en toute circonstance, une

 16   personne doit répondre de ses actes.

 17   M. Kehoe (interprétation). - Général, revenons au secteur de

 18   Vitez et revenons à la période qui commence le 16 avril 1993.

 19   Vous nous avez dit au cours de votre déposition qu'à partir du

 20   17 avril, à peu près, je crois me rappeler que vous avez dit que vous vous

 21   battiez pour votre survie biologique ?

 22   M. Blaskic (interprétation). – Oui.

 23   M. Kehoe (interprétation). – Le 17 avril, d'après ce que vous

 24   nous avez dit en page 18 780 du compte rendu d'audience : "Du point du

 25   militaire, pas une seule position au nord de Vitez n'était sous le


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  1   contrôle du HVO à partir du 17 avril, ce qui aurait pu nous donner une

  2   possibilité de mener à bien notre défense avec succès."

  3   Le 18 avril, ce qui correspond à la page 18 814 du compte rendu

  4   d'audience, vous dites : "A 23 heures, j'ai parlé au général de brigade

  5   Petkovic et je l'ai informé de la gravité importante de la situation."

  6   Donc, Général, lorsque nous passons du 17 au 18 avril 1993, vous

  7   décrivez dans votre déposition une situation caractérisée par le fait qu'a

  8   Vitez en tout cas le HVO était assiégé. Est-ce exact ?

  9   M. Blaskic (interprétation). - Oui.

 10   M. Kehoe (interprétation). – Passons maintenant à certains des

 11   événements déjà discuté  hier, mais que nous allons replacer dans un

 12   contexte différent. Je parle de la journée du 19 avril. Le 19 avril, dans

 13   la ville de Vitez et dans les environs, la situation était-elle toujours

 14   caractérisée par le siège de Vitez ?

 15   M. Blaskic (interprétation). - La ville était encerclée et,

 16   selon les souvenirs que j'ai

 17   aujourd'hui, mes souvenirs personnels car je n'ai pas toutes mes notes

 18   sous les yeux, les combats les plus intenses se déroulaient sur le

 19   territoire de Busovaca. C'était donc à  Busovaca que les combats étaient

 20   les plus intenses.

 21   M. Kehoe (interprétation). - J'aimerais vous lire une partie de

 22   la déposition du Dr Muhamed Mujezinovic qui a déposé au sujet de la soirée

 23   du 19 avril. Nous trouvons cette déposition en page 1706 du compte rendu

 24   d'audience où il parle d'une rencontre avec Mario Cerkez et d'autres

 25   représentants du HVO à l'université ouvrière ou au quartier général de la


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  1   brigade du HVO.

  2   Ligne 3 de la page 1706, je cite : "Mario Cerkez, que je

  3   connaissais d'avant, était le commandant des forces du HVO à Vitez. Il m'a

  4   demandé si je me rendais compte de la situation dans laquelle je me

  5   trouvais. Je lui ai répondu que je me rendais compte de la situation. Il

  6   m'a dit : dans ces conditions, vous devez faire ce que vous nous ordonnons

  7   de faire.

  8   Il m'a demandé si j'avais entendu parler d'Ahmici. J'ai dit que

  9   j'avais entendu parler d'Ahmici. Mario Cerkez m'a répété que je devais

 10   faire ce qu'il m'ordonnait de faire. Il a d'abord dit que les lignes du

 11   HVO avaient été enfoncées à Vitez, dans le village de Dubravica a-t-il

 12   dit, en provenance de  Zabrde, et il a ajouté que l'armée de Bosnie-

 13   Herzégovine avançait et entrait dans la ville dans la direction de l'usine

 14   chimique, pénétrait dans la ville.

 15   Il m'a dit qu'il fallait que j'appelle le commandant du 3ème

 16   Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine, pour lui demander d'appeler à Aljia

 17   Izetbegovic, Haris Silajdzic, Ejub Ganic et toute autre personne de ma

 18   connaissance pour leur dire que si l'armée de Bosnie-Herzégovine

 19   continuait son avance en direction de la ville, il y avait

 20   2 223 prisonniers musulmans, et il a souligné qu'il y avait des enfants

 21   parmi eux, et leur dire qu'il allait tous les tuer.

 22   Il m'a dit aussi qu'il fallait que j'apparaisse à la télévision

 23   locale pour demander

 24   aux Musulmans de Stari Vitez de rendre leurs armes."

 25   Nous passons maintenant à la déposition du Dr Mujezinovic qui


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  1   parle des premières heures de la matinée du 20. Tout à l'heure, nous

  2   parlions de la soirée du 19. Maintenant nous parlons des premières heures

  3   de la matinée du 20, à 2 heures du matin.

  4   Page 1714 du compte rendu d'audience, ligne 8 : "A 2 heures du

  5   matin à peu près, Zvonimir Cilic et Boro Jozic ont informé les personnes

  6   présentes que lorsque ce serait fini, elles pouvaient rester dans la pièce

  7   pour passer la nuit ou aller à la cave. Nous sommes tous restés dans la

  8   pièce, sauf Fuad Kaknjo qui est parti dans la cave.

  9   Le matin, aux environs de 6 heures du matin, on nous a dit que

 10   M. Ivan Santic et M. Pero Skopljak allaient venir nous parler.

 11   Question : Sont-ils effectivement venu vous parler le lendemain

 12   matin ?

 13   Réponse : Ils sont venus, mais pas à 6 heures. Ils sont venus à

 14   5 heures du matin, MM. Santic et M. Pero Skopljak.

 15   Question : Décrivez votre rencontre avec ces hommes ?

 16   Réponse : Voyez-vous, je peux reconstituer cette matinée.

 17   Monsieur Ivan Santic s'est adressé aux personnes présentes en disant que

 18   le gouvernement du HVO, c'est-à-dire le Conseil de défense croate, avait

 19   pris la décision, la décision dont Zvonimir Cilic et Boro Jozic m'avaient

 20   informé, la décision donc de tuer les prisonniers si l'armée de Bosnie-

 21   Herzégovine continuait son avance.

 22   Ivan Santic a dit qu'il regrettait beaucoup que les choses se

 23   soient passées ainsi, qu'il y avait eu beaucoup de tués et de blessés,

 24   mais qu'il ne se considérait pas comme responsable. Qu'il considérait que

 25   c'était Alija Izetbegovic et les dirigeants musulmans à qui cela devait


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  1   être reproché, car ils voulaient un état musulman. Et, comme il l'a dit,

  2   parce la dissolution de la Bosnie-Herzégovine avait été terminée. J'ai

  3   averti à plusieurs reprises les dirigeants de Vitez, les représentants du

  4   HDZ que c'était la partie la plus forte qui allait

  5   dominer

  6   Pero Skopljak a pris la parole. Il a dit aussi qu'il était

  7   désolé, mais que la politique des dirigeants musulmans était déraisonnable

  8   et n'était pas réaliste. Et il a ajouté qu'il avait dit à plusieurs

  9   reprises qu'il y aurait des combats à Vitez parce que les décisions du

 10   gouvernement du HVO à Vitez devaient être respectées. Enfin, je parle des

 11   décisions de la communauté croate de Herceg-Bosna, parce que ces

 12   territoires étaient croates, qu'Alija Izetbegovic, par sa politique

 13   déraisonnable et non réaliste, menaçait d'anéantissement, notamment pour

 14   les Musulmans.

 15   Voilà en bref, en gros, ce qui a été dit devant les personnes

 16   présentes. Pero Skopljak a-t-il renouvelé sa menace de tuer plus de

 17   2 000 prisonniers civils ?

 18   Réponse : "Oui, j'ai dit qu'il l'avait fait. Il était d'accord

 19   avec l'orateur précédent et avec les exigences de Mario Cerkez qui avait

 20   dit cela. Et c'est ce qui a été dit aux autres par Zandko, Cilic et Boro

 21   Jozic".

 22   Général, pouvez-vous nous parler de cette menace d'assassinat de

 23   prisonniers civils prononcée dans la soirée du 19 et aux premières heures

 24   de la matinée du 20 avril 1993 ?

 25   M. Blaskic (interprétation). - J'aimerais commencer par dire que


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  1   j'ai vu ce témoin pour la première fois ici, dans ce prétoire. Cela étant

  2   dit, j'avais entendu parler de lui avant cela, car il n'y avait pas

  3   beaucoup de médecins aux alentours. Et comme il était lui-même médecin, je

  4   savais qu'il avait cette fonction à Vitez.

  5   Pour ce qui est maintenant de ces menaces qui ont été énoncées,

  6   jamais je n'ai reçu des informations sur ce type de menaces, ni émis des

  7   instructions allant dans ce sens. Je suis assez surpris par ce que j'ai

  8   entendu dire, la description de la situation qui est faite à partir de la

  9   ligne dont on dit qu'elle est interrompue à partir à Dubravica en

 10   direction de Zabrde. Et je sais que cette ligne n'a été rompue qu'une

 11   seule fois, le 20 avril 1993, alors que moi, je participais à une réunion

 12   qui se tenait à Zenica.

 13   Je souhaite préciser également qu'il s'agissait là de discussions qui

 14   impliquaient les autorités civiles, à savoir M. Santic, Skopljak et

 15   Mujezinovic. Les autorités civiles, bien évidemment, avaient une approche

 16   très différente pour ce qui est du traitement à réserver aux prisonniers

 17   civils. M. Mujezinovic était président de la Présidence de guerre de la

 18   municipalité de Vitez. Il représentait donc les Bosniens, les Musulmans de

 19   Bosnie de la municipalité de Vitez à ce titre . Jamais je n'ai émis de

 20   menaces de ce genre, et ce n'est pas de moi que des menaces ont émanées.

 21   Jamais, je n'ai été informé du fait que de telles menaces avaient été

 22   énoncées par mes subordonnés.

 23   M. Kehoe (interprétation). - Général, à cette période de temps,

 24   Mario Cerkez était placé sous vos ordres, n'est-ce pas ?

 25   M. Blaskic (interprétation). - C'est exact. Mario Cerkez en tant


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  1   que commandant de la brigade de Vitez était mon subordonné. C'est la

  2   raison pour laquelle je dis que des menaces quant à l'assassinat des

  3   prisonniers au cas où l'armée de Bosnie-Herzégovine poursuivrait son

  4   avancée, ce type de menaces, je ne les ai pas autorisées et jamais, elles

  5   n'ont été énoncées par moi et jamais on ne m'en a parlé.

  6   M. Kehoe (interprétation). - Vous avez dit, hier je crois, que

  7   son quartier général, celui de Mario Cerkez, était à environ 50 mètres de

  8   l'hôtel Vitez, qu'il se trouvait au cinéma, je crois ou dans le bâtiment

  9   d'Université du peuple ?

 10   M. Blaskic (interprétation). - C'est exact.

 11   M. Kehoe (interprétation). - Parlons de la situation qui

 12   prévalait dans la ville de Vitez même. Vous avez déclaré -je fais

 13   référence à la page 18 850 du compte rendu-, vous avez donc déclaré que le

 14   premier jour, la porte arrière de l'hôtel de Vitez avait été touchée par

 15   des tirs d'artillerie, n'est-ce pas ?

 16   M. Blaskic (interprétation). - C'est exact. Des tirs

 17   d'artillerie sont tombés à proximité de l'hôtel Vitez ; il y avait des

 18   éclats d'obus et notamment, ces éclats d'obus sont

 19   entrés dans la porte.

 20   M. Kehoe (interprétation). - Je crois que vous nous avez dit

 21   qu'aux toutes premières heures de la matinée du 16, enfin ce que vous avez

 22   dit à la page 18 503, vous avez dit : "Les détonations toute proches de

 23   l'hôtel m'ont réveillé. Et, dans la période qui a suivi, c'est-à-dire

 24   après 5 heures du matin et jusqu'à 6 heures ou 7 heures 30 du matin, des

 25   détonations très fortes pouvaient être entendues. Et l'on pouvait entendre


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  1   également les vitres de l'hôtel voler en morceaux. On entendait également

  2   entendre les tirs endommager différentes parties du bâtiment." C'est bien

  3   ce que vous avez dit, n'est-ce pas ?

  4   M. Blaskic (interprétation). - Oui.

  5   M. Kehoe (interprétation). - Je crois, d'autre part, que vous

  6   avez précisé à notre intention, à la page 18 513 du compte rendu,

  7   ligne 15 : "Je peux identifier les positions où se trouvaient les sources

  8   des tirs, à savoir le plateau de Kuber. Et puis, il y a également Preocica

  9   où se trouvait un blindé. Il y avait également d'autres positions où se

 10   trouvaient des mortiers. A ce moment de la journée, l'hôtel a été atteint,

 11   ainsi que le bureau de poste, l'Hôtel de Ville et des maisons

 12   particulières appartenant notamment à la famille Mlakic. Nous pensions que

 13   ces obus de mortiers provenaient de la vieille partie de Vitez. Certains

 14   domiciles se trouvant près de l'église de Vitez ont été frappés. Nous

 15   pensions là aussi que les obus provenaient de Stari Vitez."

 16   Donc le 16, à la fois aux environs de l'hôtel et sur le site de

 17   l'hôtel même et près de la poste, il y avait des tirs d'artillerie, n'est-

 18   ce pas ?

 19   M. Blaskic (interprétation). – Le 16, oui.

 20   M. Kehoe (interprétation). - Le général Marin, à la page 12.391

 21   du compte rendu, nous parle du 17 avril. Une question lui est posée, à la

 22   ligne 15 : "Est-ce que les blindés qui s'y trouvaient fonctionnaient ? –

 23   Réponse : Oui, les blindés se trouvaient à Poculica et tiraient sur la

 24   ville de Vitez. Mais pas de façon sélective : les cibles n'étaient pas

 25   choisies. En fait, ils


Page 21126

  1   tiraient sur la ville de Vitez en tant que telle".

  2   Cette déclaration est bien exacte, n'est-ce pas ?

  3   M. Blaskic (interprétation). - Le 17 avril ? C'est sur cette

  4   période-là que porte votre question ?

  5   M. Kehoe (interprétation). - Oui.

  6   M. Blaskic (interprétation). – Eh bien, oui, mais il faudrait

  7   que je jette une coup d'œil à ma chronologie. Mais je crois que bien que,

  8   ce jour-là, c'est bien la situation qui se présentait.

  9   M. Kehoe (interprétation). – Bien. Je reviens donc sur votre

 10   déclaration quant aux événements du 18 avril. Vous notez qu'à

 11   16 heures 20,… A la ligne 22 de la page 18.803 du compte rendu, vous

 12   déclarez que, le 18 avril, à 16 heures 20 -je vous cite- : "J'ai reçu un

 13   rapport émanant du chef du service de renseignement déclarant que les

 14   forces de Bosnie-Herzégovine s'apprêtaient à ouvrir le feu sur la

 15   pharmacie de la ville de Vitez. Le rapport précisait qu'il était

 16   nécessaire de retirer de cette position à la fois le personnel qui s'y

 17   trouvait et les pièces d'artillerie qui y étaient situées." Fin de

 18   citation.

 19   Il y avait donc des tirs d'artillerie qui visaient les quartiers

 20   centraux de Vitez, le 18 avril, également, n'est-ce pas, Général ?

 21   M. Blaskic (interprétation). - Un instant, s'il vous plaît.

 22   Donnez-moi le temps de vérifier mes notes. Vous dites 16 heures 20 ?

 23   M. Kehoe (interprétation). – Oui, 16 heures 20. Pendant que vous

 24   regardez, Général, …

 25   M. le Président. – C'est un passage de la déclaration du témoin,


Page 21127

  1   si j'ai bien compris ?

  2   M. Kehoe (interprétation). - C'est exact.

  3   M. le Président. – On ne peut quand même pas tout vérifier.

  4   C'est un passage de

  5   votre déclaration. Vous pouvez demander à vérifier la déclaration, mais on

  6   ne peut pas encore revenir à votre chronologie, Général. On vous lit votre

  7   déclaration ; vous réagissez donc sur votre déclaration. Vous êtes

  8   d'accord ?

  9   M. Blaskic (interprétation). - Je suis d'accord avec vous,

 10   Monsieur le Président.

 11   M. le Président. – Dans le droit de réplique, les défenseurs

 12   contesteront.

 13   M. Blaskic (interprétation). - Permettez-moi, Monsieur le

 14   Président. On me lit ce qui s'est passé ce jour-là, minute par minute. Il

 15   faut que je vérifie. Ici, nous parlons des différentes minutes qui ont

 16   rythmé la journée du 18. Là, on parle de 16 heures 20, le 18 avril.

 17   M. le Président. – Le temps s'écoule, Général. Moi, je suis

 18   comptable du temps de chacune des parties. Vous avez témoigné pendant six

 19   semaines, minute par minute, faisant d'ailleurs preuve d'une mémoire qui a

 20   fait l'admiration de tout le monde, avec votre chronologie. Là, c'est le

 21   Procureur qui lit votre témoignage. S'il faut encore vérifier votre propre

 22   témoignage avec votre propre chronologie, effectivement, nous y serons

 23   encore dans plusieurs années.

 24   Je regrette. Il y aura le droit de réplique où la défense,

 25   éventuellement, si le Procureur a tronqué… Je vais parler lentement pour


Page 21128

  1   que la défense m'entende bien : si vos défenseurs estiment, dans le droit

  2   de réplique, que le Procureur a tronqué votre témoignage, ils le diront.

  3   Oui, Maître Hayman ?

  4   M. Hayman (interprétation). – Je ne veux pas gaspiller le temps

  5   de la Chambre de première instance, Monsieur le Président, mais je crois

  6   que le témoin est en train de dire la chose suivante : si on lui demande

  7   de confirmer ce qui s'est passé, minute par minute, alors, il avoue que sa

  8   mémoire a quelques défaillances et qu'il faut qu'il se réfère à ses aide-

  9   mémoire, d'une certaine façon.

 10   M. le Président. – C'est une façon de lui dire : "Vous êtes bien

 11   d'accord ? On vous

 12   lit votre témoignage."

 13   Maître Hayman, je vous dis tout de suite que je suis dans un

 14   système où toutes les pièces sont versées et où l'on discute autour des

 15   pièces. Je veux bien admettre que nous sommes dans un système un peu

 16   différent, alors qu'on pourrait encore en discuter ! Là, il ne s'agit pas

 17   de se reporter. On ne dit pas au témoin : "Le 20 avril, vous êtes bien

 18   d'accord que vous avez fait ceci ?" On lui lit son témoignage. Et vous

 19   avez le contrôle du transcript, si vous le voulez. Et vous aurez votre

 20   droit de réplique.

 21   Moi, je suis comptable de l'égalité des armes.

 22   M. Hayman (interprétation). - Je vous comprends parfaitement,

 23   Monsieur le Président. Mais, si je répétais une phrase de vos déclarations

 24   d'il y a deux mois et que je vous demandais si, ce jour-là, vous avez

 25   déclaré cela, qu'à 18 heures 22, vous avez effectivement déclaré qu'il y


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  1   aurait la pause, il vous faudrait vérifier. Et nous devrions vérifier si

  2   l'on vous demandait de confirmer ce que vous aviez dit il y a deux mois.

  3   M. le Président. – C'est vous qui vérifierez ; vous ferez la

  4   rectification à un autre moment. Tandis que là, le témoin veut vérifier

  5   avec sa chronologie. Sa chronologie a pris six semaines, Maître Hayman. Il

  6   faut être raisonnable.

  7   M. Hayman (interprétation). – Je vais m'asseoir, Monsieur le

  8   Président, mais le témoin essaie de dire la vérité, il essaie d'être

  9   précis.

 10   M. le Président. – Vous pouvez rester debout, si vous le voulez.

 11   Il s'agit de la déclaration ; j'insiste bien là-dessus. Chaque

 12   fois qu'on doit revérifier la chronologie, même le Procureur le demande,

 13   et moi-même et mes collègues aussi, nous insistons. Là, on lui lit son

 14   témoignage. Ou alors, qu'il dise : "Je ne m'en souviens pas." Vous

 15   vérifierez et vous ferez le droit de réplique. Je veux qu'on avance.

 16   Monsieur le Procureur, relisez cette partie du témoignage.

 17   M. Kehoe (interprétation). - Il s'agit donc de la déclaration

 18   portant sur la journée

 19   du 18 avril, à la ligne 22. Le général Blaskic fait état…

 20   M. le Président. – Si vous lisez lentement, peut-être que cela

 21   permettra au témoin d'aller très vite dans sa chronologie. Vous la

 22   connaissez, votre chronologie, Général Blaskic ? Redites bien la date. Ce

 23   sont vos déclarations, Général.

 24   M. Kehoe (interprétation). – "Le 18 avril, à 16 heures 20, j'ai

 25   reçu un rapport du responsable du service de renseignement militaire,


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  1   rapport déclarant que l'armée de Bosnie-Herzégovine se préparait à ouvrir

  2   le feu sur la pharmacie de la ville de Vitez. Le rapport précisait qu'il

  3   était donc nécessaire de retirer de cette position à la fois les troupes

  4   qui s'y trouvaient et les pièces d'artillerie qui y étaient situées".

  5   M. Blaskic (interprétation). – Oui.

  6   M. le Président. – Monsieur le Procureur, vous avez votre

  7   réponse. Posez une autre question.

  8   M. Kehoe (interprétation). - Je vais me référer à deux autres

  9   pièces à conviction. D'abord, à la pièce à conviction de la défense 327,

 10   en date du 19 avril 1993, qui fait état du fait "qu'à 16 heures environ,

 11   des forces musulmanes ont bombardé les quartiers centraux de la ville de

 12   Vitez ; notamment l'hôtel de ville a été touché. L'ennemi visait dans

 13   doute les bâtiments de la poste, de l'hôtel, de l'université du peuple. Il

 14   y a eu cinq personnes tuées et trente-huit blessés."

 15   Eh bien, Général, le bâtiment de l'université du peuple est le

 16   bâtiment, n'est-ce pas, où se trouvait le quartier général de la brigade

 17   de Vitez, n'est-ce pas ?

 18   M. Blaskic (interprétation). – Oui, l'université des ouvriers,

 19   c'est le bâtiment où se trouvait le quartier général de la brigade de

 20   Vitez.

 21   M. Kehoe (interprétation). - Le général de brigade Marin a

 22   déclaré que ce rapport était arrivé au quartier général de la zone

 23   opérationnelle de Bosnie centrale. Vous n'avez pas de raison de douter de

 24   ce qu'il a affirmé, n'est-ce pas ?

 25   M. Blaskic (interprétation). – Non, pas de raison de remettre


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  1   ceci en doute. Je voudrais seulement souligner le fait que, le 19 avril,

  2   nous avons été les témoins des combats les plus violents dans la région de

  3   Busovaca. Il s'agissait peut-être de tirs destinés à des cibles très

  4   précises, mais il n'y avait pas de combats très violents à Vitez en

  5   comparaison de ce qui s'est passé à Busovaca.

  6   M. le Président (interprétation). – C'est la déclaration de

  7   votre adjoint.

  8   M. Kehoe (interprétation). - Général, je souhaite que l'on parle

  9   de la pièce à conviction de l'accusation 187. C'est un rapport en anglais

 10   de l'ECMM. A la ligne 3, c'est-à-dire point 3, c'est marqué qu'un char T24

 11   a été en position sur la route de montagne entre Zenica et Vitez et qu'il

 12   pilonnait le quartier général du HVO et la poste de Vitez. D'après le HVO,

 13   il posait un ultimatum à Gacice. Après l'échec, dans ce cadre, le HVO a

 14   commencé à attaquer le village. Le 20, Général, d'après ces rapports, le

 15   HVO –là, il est indiqué qu'il s'agit d'un rapport non confirmé- selon

 16   lequel le HVO indique que l'armée de Bosnie-Herzégovine avait un char sur

 17   la route de montagne et pilonnait la ville de Vitez, le quartier général

 18   et la poste.

 19   M. Blaskic (interprétation). - Quelle date, s'il vous plaît ?

 20   M. Kehoe (interprétation). - Le 20 avril.

 21   M. Blaskic (interprétation). - Non, pas le 20 avril. Le 17, des

 22   chars de l'armée de Bosnie-Herzégovine étaient à Poculica et, le 20 avril,

 23   il y a eu des opérations de combat sur la ligne du front de nord. Veuillez

 24   me permettre de consulter mes notes. Pour autant que je m'en souvienne, le

 25   quartier général n'a pas été pilonné ce jour-là.


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  1   M. Kehoe (interprétation). - M. le Greffier, en attendant,

  2   veuillez préparer les pièces de l'accusation 157 et 158.

  3   M. Blaskic (interprétation). - D'après ma chronologie, c'est

  4   marqué que, le 20 avril, il y a eu plus de combats à Krcevine et

  5   Krizanicevo Selo et Kratine. C'est ce que j'ai dit dans le cadre de ma

  6   déposition. C'est donc la ligne du nord, depuis la direction de Zenica

  7   vers Vitez.

  8   M. Kehoe (interprétation). - Je souhaite vous soumettre une

  9   partie du témoignage d'Advija Hrustic, qui commence sur la page 4 811, qui

 10   a été à Gacice le 20. Voilà ce qu'elle a dit.

 11   Ligne 2, cela commence sur la page 4 811 : "Il y a eu beaucoup

 12   de soldats avec des insignes. Certains avaient une lettre "U", certains

 13   avaient des insignes du HVO, certains les insignes de la HV. Il y avait

 14   aussi le mot "Jastrebovi". Ils ont commencé à lire et ont dit : "Nous

 15   savions que vous étiez là, vous les balija". Ils nous ont poussé et nous

 16   ont dit de prendre une route. Ils étaient autour de nous. Nous avons

 17   constitué une grande rangée. Nous sommes tous arrivés jusqu'à une maison

 18   où l'on nous a dit que l'on allait poursuivre le chemin. Ils nous ont

 19   amenés devant l'hôtel Vitez, les hommes, les femmes, les enfants, tout le

 20   monde".

 21   C'était sur la ligne 18. Page suivante, ligne 11 de la

 22   page 4 812 :

 23   "Question : à un certain moment, vous avez dit que vous et un

 24   certain nombre de civils avez quitté cette maison ; et vous avez retrouvé

 25   d'autres  civils et vous êtes allés à pied jusqu'à la ville de Vitez dans


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  1   une longue colonne. Combien de civils se trouvaient dans cette longue

  2   colonne, approximativement ?

  3   Réponse : Nous étions 247.

  4   Question : Vous a-t-on dit pourquoi vous deviez aller à pied

  5   jusqu'à l'hôtel Vitez ?

  6   Réponse : non.

  7   Question : Lorsque vous étiez sur le chemin vers l'hôtel Vitez,

  8   avez-vous pu entendre le pilonnage ?

  9   Réponse : Oui, tout le long du chemin, nous entendions le son

 10   des pilonnages. Les enfants étaient effrayés et ils se cachaient derrière

 11   nous. Nous entendions des coups de feu et des sons de pilonnage.

 12   Question : Vous êtes arrivés à l'hôtel Vitez.".

 13   Général, cette question est dans la ligne 24.

 14   "Réponse : Devant l'hôtel Vitez, oui".

 15   Maintenant, examinons la page 4 812. Je souhaite vous demander

 16   de placer la pièce à conviction 157 sur le rétroprojecteur.

 17   Général, il s'agit ici de la partie qui se trouve juste devant

 18   l'hôtel Vitez ?

 19   M. Blaskic (interprétation). – Ceci, d'après moi, se trouve

 20   derrière l'hôtel Vitez.

 21   M. Kehoe (interprétation). - Très bien, veuillez placer la pièce

 22   à conviction 158 sur le rétroprojecteur et retirer la pièce à

 23   conviction 157. Dans la partie encerclée de la pièce à conviction 158,

 24   c'est la partie juste à côté de l'hôtel Vitez, c'est-à-dire la région

 25   entre l'hôtel Vitez et la poste, n'est-ce pas ?


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  1   M. Blaskic (interprétation). - On ne voit pas très bien.

  2   Permettez-moi de regarder un peu plus de près.

  3   M. Kehoe (interprétation). - Vous pouvez prendre cette photo et

  4   l'examiner de près. Peut-être cela pourrait nous aider si l'on montre au

  5   témoin également la pièce à conviction de l'accusation 45. Il s'agit là

  6   d'un élargissement d'une partie de la pièce à conviction 158, à moins que

  7   vous puissiez répondre maintenant, Général ?

  8   M. Blaskic (interprétation). – Oui, je crois que c'est ceci ;

  9   même si on voit mal cette région sur la photo.

 10   M. Kehoe (interprétation). - Je pense que nous pouvons passer à

 11   autre chose. Peut-être n'est-il pas nécessaire de chercher l'autre pièce à

 12   conviction. Sur la page du compte rendu 4 814, mon collègue, M. Harmon,

 13   pose la question à Mme Hrustic en disant : "Voyez-vous, sur la pièce à

 14   conviction, sur le rétroprojecteur, ce qui est dans le grand cercle marqué

 15   par le n°1 ? Réponse : C'est la partie où nous avons passé 2 heures

 16   environ ou 3 heures, le 20 avril. Question : C'est donc là que 247 civils

 17   étaient détenus le 20 ? Réponse : oui. Question : Madame Hrustic, pouvez-

 18   vous dire, en utilisant vos propres mots, un récit concernant votre

 19   arrivée à l'hôtel Vitez et ce qui s'est produit ensuite là-bas ? Réponse :

 20   Nous

 21   étions là-bas, nous attendions et nous ne savions pas quoi faire. Il y a

 22   eu des hommes avec nous qui nous ont dit que les hommes devaient se

 23   séparer, les femmes et les enfants de l'autre côté. Il devait y avoir

 24   environ un ou deux mètres entre les deux groupes. Ensuite, ils ont emmené

 25   les hommes avec eux. Tout ceci s'est produit dans l'espace de 10 minutes.


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  1   Ensuite, nous avons continué à rester debout. Nous nous sommes assis et

  2   l'un des soldats a dit : je vais entrer pour informer le commandant de

  3   ceci. Et il a montré par sa tête vers nous. L'un des soldats a dit nous

  4   pouvons les placer dans le cinéma. Il y avait un cratère d'obus devant

  5   l'hôtel, et je me suis assise à l'intérieur".

  6   Si l'on passe à la page 4 815, ligne 10. Vous avez dit, je

  7   cite : "Le soldat pouvait entrer pour informer le commandant. Y a-t-il eu

  8   d'autres commentaire des soldats du HVO concernant le pilonnage, notamment

  9   concernant les civils. Réponse : l'un des soldats a dit, pendant qu'il

 10   était là : "Vous allez vous asseoir maintenant et permettre à vos gens de

 11   pilonner, étant donné que jusqu'à maintenant c'est vous qui pilonniez. Il

 12   vaut mieux que vous vous asseyez et que vous attendiez. Question : les

 13   soldats sont-ils restés avec les 247 civils ou après qu'ils ont dit ceci,

 14   sont-ils rentrés dans l'hôtel Vitez ? Réponse : L'hôtel est surtout fait

 15   de vitres, donc nous pouvions les voir, ils pouvaient nous voir. Ils ont

 16   dit qu'ils étaient bien à l'abri dans l'hôtel et qu'ils n'avaient pas

 17   peur. Personne ne pouvait les blesser. Les soldats sont donc entrés, ils

 18   étaient donc à l'intérieur. Pendant que l'on filmait, et plusieurs nous

 19   observaient à travers les vitres, on nous a dit que si on se déplaçait, si

 20   on bougeait, on allait nous tirer dessus. Ils ont voulu pouvoir nous

 21   observer. Question : Vous êtes restée là-bas environ 2 heures et demie, 3

 22   heures ? Réponse : Oui".

 23   Sur la page 4 817 : "Question : avez-vous cru que d'autres

 24   civils qui étaient regroupés autour de l'hôtel Vitez étaient des boucliers

 25   humains, eux aussi ? Réponse : Oui".


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  1   Général, le 20 avril 1993, vous étiez le commandant dans l'hôtel

  2   Vitez, n'est-ce pas?

  3   M. Blaskic (interprétation). - J'étais le commandant dans

  4   l'hôtel Vitez le 20 avril,

  5   jusqu'à l'après-midi. A ce moment-là, je suis parti à une réunion présidée

  6   par le général Morillon à Zenica. J'affirme que je n'ai jamais donné

  7   l'ordre de placer qui que soit comme boucliers humains. En ce qui concerne

  8   les combats entre le HVO et l'armée de Bosnie-Herzégovine dans le village

  9   de Gacice, c'est seulement par la suite, dans le journée, que j'ai appris

 10   et reçu cette information de la part de mes subordonnés directs. Je n'ai

 11   jamais reçu d'information que des personnes étaient utilisées comme

 12   boucliers humains, ni d'ailleurs que l'on avait fait venir des civils.

 13   Personne n'est venu m'informer de cela.

 14   M. Kehoe (interprétation). -  Général, vous avez su que des

 15   civils de Gacice étaient emmenés dans le centre-ville de Vitez ?

 16   M. le Président (interprétation). - Je savais qu'il y avait des

 17   opérations de combats entre l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO de

 18   Gacice. Dès l'après-midi, je suis parti assister à la réunion. J'étais

 19   escorté et transporté par la Forpronu. Veuillez au moins, s'il vous plaît,

 20   m'indiquer le temps de cet incident dont vous parlez.

 21   M. le Président (interprétation). - Le débat va être un peu long

 22   autour de cette question ?

 23   M. Kehoe (interprétation). - Je crois que je n'ai que deux ou

 24   trois questions. Je terminerai très rapidement.

 25   Général, dans l'après-midi du 20 avril 1993, vous avez su que


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  1   des soldats du HVO avaient amené des civils de Gacice dans le centre-ville

  2   de Vitez, n'est-ce pas ?

  3   M. Blaskic (interprétation). – J'ai déjà dit que je ne disposais

  4   pas d'informations dans ce sens car je n'ai reçu aucune information dans

  5   ce sens. S'agissant du pilonnage et du cratère d'obus, j'affirme que, le

  6   16 au matin, l'hôtel Vitez a été pilonné et qu'il est possible qu'il y ait

  7   eu d'autres pilonnages mais, le 20, l'hôtel Vitez n'a pas été pilonné. Il

  8   n'y avait aucune action au voisinage de l'hôtel mais les actions se

  9   déroulaient dans le village de Krcevine et dans les secteurs nord du

 10   front. L'après-midi, je suis parti pour participer à la réunion de Zenica.

 11   M. Kehoe (interprétation). - Général, j'aimerais vous donner

 12   lecture d'une partie de la déposition de votre chef d'état-major, à

 13   l'époque, chef des opérations également, Slavko Marin, qui fait remarquer

 14   en page 13 554 du compte rendu d'audience, je cite : "Je sais que, ce

 15   jour-là, plusieurs centaines de civils ont été renvoyés dans le village de

 16   Gacice. Pour autant que je m'en souvienne, il s'agissait principalement de

 17   femmes et d'enfants".

 18   Ligne 19 : "Question : Monsieur parlons de ces femmes et enfants

 19   qui ont été ramenés à Gacice, les a-t-on ramenés dans le centre de Vitez

 20   avant de les ramener à Gacice ? Réponse: le village de Gacice se trouve à

 21   côté de la ville. Pour autant que je le sache, ces civils étaient en ville

 22   mais je ne peux pas dire à quel endroit précis. Je ne peux pas le dire

 23   aujourd'hui. Quoi qu'il en soit, la ville de Vitez n'est pas une très

 24   grande ville. Ces personnes auraient pu se trouver entre le bâtiment de la

 25   Poste, le cinéma et de la mairie".


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  1   Général, votre chef d'état-major, votre chef des opérations, un

  2   homme avec qui vous passiez beaucoup de temps, savait que des civils de

  3   Gacice se trouvaient dans la ville de Vitez le 20, mais, vous, vous ne le

  4   saviez pas. Est-ce que c'est ce que vous affirmez dans votre déposition ?

  5   M. Blaskic (interprétation). – Moi, j'étais à Zenica à la

  6   réunion. C'est Slavko Marin qui me remplaçait. C'est pourquoi, j'ai

  7   demandé d'ailleurs à ce que l'on me donne l'heure. Pour autant que je m'en

  8   souvienne, non.

  9   M. Kehoe (interprétation). - Général, vous n'êtes pas allé à

 10   Zenica avant 16 heures 30, le 20. Avant cette heure-là, vous étiez dans le

 11   Hôtel Vitez, n'est-ce pas ?

 12   M. Blaskic (interprétation). - J'étais dans le Hôtel Vitez, je

 13   n'ai pas reçu la moindre information au sujet de quelque civil que ce soit

 14   et je ne suis sorti nulle part avant 16 heures 30, parce que j'étais lié

 15   au téléphone, dans le cadre de l'organisation liée à la défense de

 16   Krcevine et de toute la partie nord de Vitez. Quand je suis sorti, il y

 17   avait trois blindés de la Fropronu, je n'ai pas vu un seul civils en

 18   sortant de l'hôtel de Vitez aux alentours de 16 heures 30.

 19   M. Kehoe (interprétation). – Monsieur le Président, nous avons

 20   d'autres questions sur ce sujet, sous un angle un peu différent.

 21   M. le Président (interprétation). - Il vaudrait mieux arrêter.

 22   Cela va permettre au témoin, pendant cette longue fin de semaine, de se

 23   pencher dessus. Nous avons beaucoup parlé d'Ahmici, il y a d'autres faits

 24   inclus dans l'acte d'accusation. Le témoin doit pouvoir essayer, nous

 25   sommes allés un peu vite à la fin… Il peut essayer, avec l'aide de ses


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  1   défenseurs, éventuellement, il pourra reprendre contact avec les

  2   transcripts pour que les choses soient très claires. En ce qui me

  3   concerne, et avec l'accord de mes collègues, je préfère que, pendant cette

  4   longue fin de semaine, le témoin puisse avoir largement le temps, pour

  5   qu'ensuite il ne puisse pas nous dire qu'il a été pris par le temps.

  6   Nous reprenons  mardi matin à 10 heures.

  7   M. le Président (interprétation). – Nous reprenons à 14 heures,

  8   il me semble.

  9   M. Kehoe (interprétation). - On nous a informés que l'heure

 10   prévue pour la reprise était 10 heures.

 11   M. Hayman (interprétation). - A nous, on a dit 14 heures.

 12   M. le Président (interprétation). – Je le repréciserai. Je pense

 13   plutôt 14 heures.

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 15   L'audience est levée à 13 heures 35.

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