Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le lundi 4 juillet 2005

2 [Audience sur requêtes]

3 [Audience publique]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

5 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Mesdames et Messieurs, Monsieur le

7 Greffier d'audience, veuillez appeler l'affaire.

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Il s'agit de

9 l'affaire IT-04-82-PT, le Procureur contre Ljube Boskoski et Johan

10 Tarculovski.

11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Boskoski, pouvez-vous suivre

12 l'audience dans une langue que vous comprenez ?

13 L'ACCUSE BOSKOSKI : [aucune interprétation]

14 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui. La Chambre de première instance

15 souhaiterait savoir si vous êtes en mesure de suivre l'audience dans une

16 langue que vous comprenez. En d'autres termes, entendez-vous

17 l'interprétation dans votre langue ?

18 Veillez bien à avoir le bon canal d'interprétation; sinon, vous ne pourrez

19 pas entendre l'interprétation.

20 L'ACCUSE BOSKOSKI : [interprétation] Oui, très bien. Je peux entendre.

21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, mais cela ne répond pas à ma

22 question. Je souhaiterais obtenir la confirmation suivant laquelle vous

23 entendez l'interprétation dans votre langue.

24 L'ACCUSE BOSKOSKI : [interprétation] Oui, je reçois l'interprétation en

25 langue macédonienne.

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1 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Tarculovski, j'aimerais vous

2 poser la même question. La Chambre de première instance souhaiterait savoir

3 si vous recevez l'interprétation dans votre langue.

4 L'ACCUSE TARCULOVSKI : [interprétation] Oui, j'entends l'interprétation.

5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Que les parties se présentent, pour

6 l'Accusation dans un premier temps.

7 M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

8 Kenneth Scott pour l'Accusation. J'ai avec moi M. Smith, avocat, ainsi que

9 M. Hasan Younis.

10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie.

11 J'aimerais que la Défense de M. Boskoski se présente.

12 M. GODZO : [interprétation] Monsieur le Président, je suis Dragan Godzo,

13 aidé de M. Kiril Waite.

14 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie.

15 Je souhaiterais que la Défense de M. Tarculovski se présente.

16 M. APOSTOLSKI : [interprétation] Bonjour. Je suis Antonio Apostolski,

17 avocat. Je représente l'accusé, Johan Tarculovski.

18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour à vous tous. J'ai été informé -

19 je l'ai également remarqué d'ailleurs - de la présence dans le prétoire de

20 représentants de l'ancienne République yougoslave de Macédoine. Je

21 souhaiterais que vous vous présentiez aux fins du compte rendu d'audience,

22 et que l'un d'entre vous prenne la parole.

23 Mme MLADENOVSKA-GJORGJIVESKA : [interprétation] Monsieur le Président, nous

24 avons comme représentant du gouvernement de la République de Macédoine,

25 moi-même, pour le ministre de la Justice. Je suis Meri Mladenovska-

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1 Gjorgjiveska. Je vous remercie.

2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie, Madame, et bienvenue

3 à ce Tribunal. Je voulais juste m'assurer que vous entendiez

4 l'interprétation dans votre langue, et j'aimerais d'ailleurs attirer votre

5 attention sur le fait suivant. Si à un moment donné lors de l'audience,

6 vous avez des problèmes d'interprétation, je vous demanderais de bien

7 vouloir attirer notre attention sur ces problèmes de suite pour que nous

8 puissions les corriger.

9 Madame le Ministre, je remarque que vous êtes également accompagnée de deux

10 autres personnes, et je souhaiterais avoir le nom de ces personnes qui vous

11 accompagnent.

12 Mme MLADENOVSKA-GJORGJIVESKA : [interprétation] J'ai, parmi les membres de

13 la délégation, Mme Biljana Micevska-Josifovska, conseillère pour la

14 coopération avec le TPI, ainsi que M. Todor Mirovski, qui est le premier

15 secrétaire à l'ambassade, à l'ambassade à La Haye, au Royaume des Pays-Bas.

16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie. Il s'agit d'une

17 audience spéciale ou extraordinaire que nous avons décidé de convoquer,

18 après avoir lu les documents relatifs à la requête de mise en liberté

19 provisoire. Il y a deux requêtes différentes, et c'est une audience que

20 nous avons convoquée, pour justement essayer de régler certaines questions

21 laissées en suspens par les requêtes et les réponses respectives aux

22 requêtes. J'aimerais dire aux fins du compte rendu d'audience que je dois

23 tout simplement mentionner que M. Tarculovski a déposé sa requête aux fins

24 de mise en liberté provisoire le 20 mai 2005, alors que M. Boskoski a

25 déposé la sienne le 25 mai. Puis, l'Accusation a déposé une réponse le 2 et

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1 7 juin respectivement. Nous avons, ensuite, eu la Chambre de première

2 instance qui a autorisé la Défense et les deux accusés à déposer leurs

3 répliques respectives, ce qu'ils ont fait tout les deux le 27 juin. Puis,

4 après avoir étudié les documents, comme je vous l'ai déjà dit, nous en

5 avons dégagé la conclusion que l'intérêt de la justice serait mieux

6 desservi si nous pouvions avoir cette audience.

7 Nous n'allons pas vous demander aujourd'hui de réitérer la plupart des

8 éléments présentés dans vos différents arguments. Donc, aujourd'hui, il se

9 peut que vos présentations orales ne soient pas très longues, et chaque

10 partie - et cela est aussi valable pour vous, Madame le Ministre - chaque

11 partie, disais-je, aura un maximum de 15 minutes pour pouvoir présenter sa

12 thèse à la Chambre de première instance et, bien entendu, vous aurez

13 également le droit de répondre ensuite.

14 Avant que nous ne poursuivions, j'aimerais m'assurer d'une chose. Il n'y a

15 pas de représentant du gouvernement de la Croatie, c'est en tout cas ce que

16 l'on m'a indiqué, et j'aimerais obtenir la confirmation de la part de M. le

17 Greffier qu'il n'y a pas de représentant officiel de la Croatie.

18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai été informé

19 par téléphone par le consulat hier que la République de la Croatie ne sera

20 pas représentée lors de cet audience.

21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie. Donc, cela sera

22 consigné au compte rendu d'audience également, et je souhaiterais commencer

23 en donnant la parole aux représentants ou aux conseil de la Défense de M.

24 Boskoski. Je vous donne la parole, Monsieur, et j'aimerais vous demander de

25 vous en tenir à nous présenter une synthèse brève des bases qui vous

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1 permettent de demander la mise en liberté provisoire de votre client.

2 J'aimerais vous demander de revenir sur les éléments qui font l'objet de

3 litige entre vous et l'Accusation. Je pense, notamment, à la raison qui

4 vous pousse à demander la mise en liberté provisoire de votre client vers

5 l'ancienne République yougoslave de la Macédoine, alors qu'il y a des

6 poursuites qui ont été intentées à l'encontre de votre client en Croatie.

7 Je vous donne la parole Maître et vous avez un quart d'heure.

8 M. GODZO : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

9 Parmi toutes ces questions qui font l'objet de notre requête, je vais en

10 choisir certaines pour vous demander la mise en liberté provisoire de mon

11 client, et je vais le faire brièvement.

12 Dans un premier temps, j'aimerais insister sur la bonne moralité de

13 l'accusé, ainsi que sa coopération avec l'Accusation et le Tribunal. Des

14 circonstances juridiques n'ont pas malheureusement permis à M. Boskoski

15 d'exprimer le respect qu'il éprouve pour le Tribunal, ainsi que de prouver

16 sont engagement pour le droit international, dans la mesure où il n'a pas

17 pu se présenter volontairement. Malheureusement, au moment où l'acte

18 d'accusation a été prononcé contre lui, l'accusé était en détention dans le

19 cadre d'une autre affaire.

20 Il a été inculpé par ce Tribunal, et M. Boskoski n'a jamais essayé de

21 s'opposer à son transfert vers La Haye. Lors de sa comparution initiale, il

22 a plaidé sans autre délai et a demandé à la Chambre de première instance de

23 bien vouloir commencer, ou faire en sorte que le procès commence le plus

24 rapidement possible.

25 Pour étayer ce qu'avance la Défense, à savoir que l'accusé est une

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1 personne digne de foi, et que s'il était mis en liberté provisoire il

2 viendrait pour le procès, nous avons présenté différentes recommandations

3 affirmant qu'il s'agit d'un homme de confiance, émanant de plusieurs

4 personnalités du monde politique macédonien. Il faut savoir que dans des

5 déclarations personnelles, ils ont fait référence à sa bonne moralité, aux

6 solutions pacifiques, aux problèmes politiques qu'il a trouvées. A son

7 attitude extrêmement démocratique vis-à-vis des partis politiques et à sa

8 coopération envers le Tribunal et l'Accusation. Leurs conclusions

9 conjointes ne font aucun doute que l'Accusation ne pose pas de danger pour

10 les victimes et les témoins, et comparaîtra au procès. Il faut savoir que

11 la meilleure description de sa personnalité a été fournie par l'ancien

12 ministre macédonien des affaires étrangères, qui en fait est en annexe à la

13 réplique et que j'aimerais citer brièvement. Je cite :

14 "Ljube Boskoski est une personne extrêmement religieuse, est une personne

15 extrêmement intègre et honnête, un père de famille et un ami dévoué. Je

16 dois dire que c'est une personne que tout le monde voudrait avoir avec lui

17 en cas de problèmes."

18 Le deuxième élément que j'aimerais soulever et qui a son importance

19 est ce que j'appelle le test -- le critère de proportionnalité. M. Boskoski

20 est inculpé de trois chefs d'inculpation, aux titres de l'Article 3 du

21 Statut : violation du droit et des coutumes de la guerre et manquement à

22 imposer des sanctions. Il n'est pas, en fait, inculpé comme auteur direct

23 d'une violation directe, mais est inculpé de façon indirecte. Il faut

24 savoir que ce Tribunal ne s'occupe que d'infractions extrêmement graves et

25 sérieuses. Toutefois, la Défense aimerait faire remarquer que les chefs

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1 d'inculpation à l'encontre de l'Accusation se trouvent véritablement tout

2 en bas de l'échelle.

3 Il faut savoir que d'une longue période de détention de l'accusé ne

4 représente pas une mesure nécessaire et adéquate. De surcroît, la

5 jurisprudence du Tribunal et de la Cour européenne des droits de l'homme

6 met en exergue que la gravité de l'infraction ne peut pas justifier de

7 longues périodes de détention préventive.

8 Le troisième élément de mon argumentation porte sur la question

9 essentielle, à savoir : est-ce que l'accusé, s'il est mis en liberté

10 provisoire, comparaîtra pour son procès ? Il faut prendre en considération

11 son contexte, ses antécédents en tant que politicien macédonien. Je pense

12 également à son honneur personnel, à son honneur familial, qui sont tels

13 que cela ne lui laisse aucune autre option, si ce n'est que de venir ici au

14 Tribunal pour être jugé. Il est absolument convaincu de son innocence et a

15 le plus grand respect pour les membres de la Chambre de première instance.

16 Qu'il soit mis en liberté provisoire ou non, il veut absolument venir ici,

17 être jugé, venir ici devant la Chambre de première instance afin de pouvoir

18 prouver son innocence aux nom de sa famille et au nom de la République de

19 Macédoine, dont il était ministre lors des événements en question.

20 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, j'aimerais vous présenter

21 une analyse succincte de sa déclaration. Il a exprimé le fait qu'il était

22 tout à fait disposé à participer à toutes procédures. Il a offert ses

23 actifs personnels comme cautionnement. Il a indiqué qu'il respectera tout

24 restriction qui lui serait imposée par la Chambre. Il a accepté de mettre

25 en suspens ou, entre parenthèses, sa carrière politique jusqu'à la fin de

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1 ce procès. J'aimerais indiquer qu'il a tout à fait l'intention de

2 poursuivre et de reprendre sa carrière politique après le procès. Pour ce

3 faire, il serait absolument essentiel dans un premier temps qu'il vienne

4 comparaître lors de son procès. Par conséquent, ce que je viens d'indiquer

5 prouve que la Chambre de première instance n'a aucune crainte à avoir, pour

6 ce qui est du fait qu'il s'enfuirait.

7 Ce qui m'amène à parler du quatrième élément, à savoir la possibilité

8 d'intimidation de témoins. Dans un premier temps, je dirais qu'il n'est

9 absolument nulle part indiqué que l'accusé est un homme violent, et il a un

10 casier judiciaire vierge. A partir du moment où l'acte d'accusation a été

11 dressé à son encontre, et surtout à partir du moment où les documents ont

12 été communiqués à la Défense, il n'a absolument pas essayé de prendre

13 contact avec des victimes ou des témoins. Il faut savoir que quatre années

14 après l'événement en question, il n' y a pas eu une seule fois une

15 indication suivant laquelle il aurait essayé de menacer des témoins en

16 Macédoine. Qui plus est, l'accusé n'est pas inculpé en tant qu'auteur

17 direct des infractions, mais est inculpé du fait de sa responsabilité

18 supérieure, puisqu'il n'a pas pu sanctionner et punir au titre de l'Article

19 7(3) du Statut. Il n'a absolument pas l'intention de prendre contact avec

20 des témoins ou des victimes et d'essayer de les subordonner, parce que cela

21 n'améliorerait absolument pas sa situation. Il faut savoir que pour ce qui

22 est de la présentation des éléments à charge de la part de l'Accusation,

23 l'intimidation des témoins ne servirait pas à grand-chose, puisque la

24 présentation des éléments à charge de la part de l'Accusation se fonde

25 essentiellement non pas sur la déposition des témoins, mais sur des

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1 documents.

2 S'il est mis en liberté provisoire, et il préfère être mis en liberté

3 en Macédoine, l'accusé a donné à la Chambre de première instance des

4 garanties personnelles, entre autre du fait qu'il ne prendra aucun contact

5 avec les témoins et les victimes, et il ne se rendra pas dans le village de

6 Ljuboten, et je vous dirais d'ailleurs à ce sujet qu'il ne s'y est jamais

7 rendu de sa vie.

8 J'aimerais également vous parler de la sécurité des témoins, car la

9 déclaration de la part de témoins ne justifie pas le refus de mise en

10 liberté provisoire, et l'existence d'un danger doit être identifié. Il faut

11 qu'il y ait menace claire à la portée -- à l'encontre de la sécurité des

12 témoins, avec liens à des actes spécifiques ou une conduite de la part de

13 l'accusé. Ce fut l'approche retenue par le Tribunal dans les affaires

14 Haradinaj, Prlic, Cermak, Stanisiic et Delic.

15 Il faut savoir que, dans cette affaire, l'Accusation n'a pas su

16 indiquer un comportement ou une action, une déclaration de la part de

17 l'accusé qui aurait représenté une menace véritable ou potentielle, vis-à-

18 vis de potentiels témoins dans cette affaire. Il faut savoir que la Défense

19 souhaiterait souligner le fait que dans la République de Macédoine, il n'y

20 a pas d'antécédents d'intimidation de témoins.

21 Le cinquième élément, qui est extrêmement important, est la question

22 des garant -- que le monde politique Macédonien a fourni des

23 recommandations pour M. Boskoski, à savoir qu'il viendrait être sujet

24 lorsqu'on lui demandera de le faire. La majorité parlementaire a émis une

25 garantie gouvernementale, le parti de l'opposition au parlement a exprimé,

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1 par l'entremise de ses dirigeants, leur soutien dans le cadre de

2 déclarations écrites qui se trouvent en annexe à la réplique.

3 Monsieur le Président, dans ce prétoire, le ministre de la Justice

4 pour la Macédoine est venue, personnellement, à cette audience, et ce, afin

5 d'étayer les garanties qui ont été fournies, et pour indiquer quelle est

6 l'attitude de la République de Macédoine vis-à-vis de ce Tribunal. Le

7 gouvernement de la Macédoine a de façon absolument efficace, prouvé très

8 clairement à quel point il est engagé pour la cause du droit international,

9 et par rapport à la primauté de ce Tribunal sur ces institutions. Le

10 gouvernement de la Macédoine a agi en connaissance de cause. Par

11 conséquent, nous ne pouvons qu'en conclure que la République de la

12 Macédoine a coopéré de façon positive avec le Tribunal, ce qui fait que les

13 garanties offertes par ce gouvernement sont dignes de foi.

14 Finalement, en guise de conclusion, comme la Chambre de première

15 instance l'a indiqué lors d'affaires précédentes, il est évident que le

16 facteur temps est un facteur pertinent, lorsque l'on prend une décision à

17 propos d'une mise en liberté provisoire. Il faut savoir que, lors de sa

18 comparution initiale, le Tribunal n'a pas été en mesure de promettre à M.

19 Boskoski un procès rapide. Il ne s'agit pas d'une option envisageable, et

20 étant donné que ce procès ne commencera pas avant l'année prochaine, la

21 durée ou la longue durée d'une période de détention préventive représente

22 un fardeau supplémentaire pour l'accusé, qui n'est pas en proportion des

23 chefs d'inculpation, et pourrait représenter une violation de l'Article 5

24 et de l'Article 6 de la convention Européenne des droits de l'homme.

25 Par conséquent, compte tenu de tous les documents pertinents, la

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1 Défense aimerait souligner une fois de plus qu'il s'agit -- qu'il serait,

2 en fait, tout à fait logique de déterminer la mise en liberté provisoire.

3 Il est évident que, si l'accusé est mis en liberté provisoire, il

4 comparaîtra pour son procès lorsqu'on lui demandera de le faire, et qu'il

5 ne posera pas de -- ne représentera pas un danger pour les victimes et les

6 témoins. Par conséquent, nous demandons à la Chambre de première instance

7 de bien vouloir faire droit à la requête, afin qu'il soit mis en liberté en

8 Macédoine, parce que la Macédoine est l'endroit où se sont déroulés les

9 événements, et Ljube Boskoski est un homme politique macédonien. Qui plus

10 est, il n'a aucune objection à être mis en liberté en Croatie. Il est tout

11 à fait disposé à être jugé là, et il y a une très petite possibilité que le

12 gouvernement macédonien puisse récupérer sa juridiction dans cette affaire

13 -- ou sa compétence dans cette affaire, afin que cette affaire soit jugée

14 devant les tribunaux macédoniens.

15 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, voilà ce que je

16 souhaitais indiquer.

17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie.

18 Monsieur Scott, est-ce que vous préfèreriez répondre tout de suite,

19 ou est-ce qu'il vaudrait mieux que nous entendions les arguments de

20 M. Apostolski ?

21 M. GODZO : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi. Une

22 petite erreur s'est glissée au compte rendu d'audience. Je n'ai pas dit

23 qu'il y avait une petite possibilité. J'ai dit qu'il y avait une

24 possibilité juridique, "legal" en anglais.

25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien.

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1 Monsieur Scott, est-ce que nous allons entendre les arguments de M.

2 Apostolski, ou est-ce que vous souhaiteriez répondre tout de suite aux

3 arguments avancés par Me Godzo ?

4 M. SCOTT : [interprétation] C'est M. Smith qui va répondre ce matin.

5 Je crois qu'il préférerait répondre après chacun des arguments présentés.

6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Smith, si vous souhaitez

7 répondre aux arguments avancés par le conseil de M. Boskoski, je pense

8 qu'il vaut mieux d'abord donner la parole à

9 Mme le Ministre de la Justice macédonienne, eu égard, notamment, aux

10 garanties présentées. Bien entendu, vous pourrez aborder cet aspect

11 immédiatement plutôt que d'attendre.

12 M. SMITH : [interprétation] Je m'en remets à la Chambre. Nous pouvons

13 procéder d'une manière comme d'une autre, mais c'est à vous de décider --

14 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] La décision vous appartient. Si

15 vous préférez traiter de ces présentations une par une, cela vous regarde,

16 mais je pense qu'il vaudrait mieux que nous entendions votre réponse, après

17 avoir entendu l'intervention de

18 Mme le Ministre.

19 M. SMITH : [interprétation] Très bien.

20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Madame le Ministre, vous avez la

21 parole, s'il vous plaît.

22 Mme MLADENOVSKA-GJORGJIVESKA : [interprétation] Monsieur le

23 Président, en tant que représentant des autorités de Macédoine, je souhaite

24 vous dire que, si les accusés, M. Ljube Boskoski et

25 M. Tarculovski bénéficient d'une mise en liberté provisoire, et s'ils

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1 restent sur le territoire de la République de Macédoine, les autorités de

2 Macédoine garantissent qu'elles prendront toutes les mesures nécessaires,

3 afin de veiller à ce qu'ils soient présents suite à toutes les citations à

4 comparaître livrées par la Chambre de première instance, ainsi que lors des

5 audiences préalables au procès et au procès. Les autorités de la République

6 de Macédoine garantissent, conformément aux dispositions de l'Article 65 du

7 Règlement de procédure et de preuve de ce Tribunal, qu'elles respecteront

8 les conditions suivantes, à savoir qu'elles feront tout ce qui est

9 nécessaire pour que l'accusé comparaisse au procès, s'il bénéficie d'une

10 mise en liberté provisoire, et de façon à veiller à ce que l'accusé ne

11 menace d'aucune manière que ce soit les victimes, les témoins ou d'autres

12 personnes.

13 Nous sommes conscients de l'importance de cette instance au sein de

14 la communauté internationale, et à cette occasion, le gouvernement de la

15 République de Macédoine souhaite réaffirmer sa volonté politique, en vue

16 d'une coopération totale avec ce Tribunal. La République de Macédoine,

17 comme beaucoup d'autres états jusqu'à présent, soutient pleinement les

18 activités de ce Tribunal, dans le cadre de toutes les affaires qui relèvent

19 de la compétence de ce Tribunal. S'agissant de personnes qui se sont

20 rendues coupables d'infractions pénales, et dont la responsabilité pénale

21 est engagée devant ce Tribunal.

22 Le gouvernement de la République de Macédoine souligne le fait que

23 les accusés devant ce Tribunal, M. Boskoski et M. Tarculovski, ont le droit

24 de bénéficier d'une aide juridictionnelle totale tout au long de la

25 procédure et jusqu'à ce que le verdict final soit rendu.

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1 Au cours de la période qui s'est écoulée, la coopération efficace

2 avec ce Tribunal a été manifeste, la coopération entre ce Tribunal et la

3 République de Macédoine et nous pensons que cette coopération va se

4 poursuivre à l'avenir. Les institutions gouvernementales de la République

5 de Macédoine, par le passé, ont toujours respecté toutes les questions

6 relevant de la compétence du Tribunal et ont toujours fait preuve

7 d'assistance et ont répondu aux demandes des informations qui leur étaient

8 présentées. Les institutions compétentes de la République de Macédoine ont

9 toujours fait preuve de coopération et cette pratique s'inscrit dans

10 l'orientation politique du gouvernement de la République de Macédoine et

11 nous continuerons à agir ainsi.

12 Le gouvernement de la République de Macédoine veillera à ce que le

13 code de procédure pénal ainsi que le loi sur les affaires internes soient

14 respectés, mis en œuvre et nous ferons tout le nécessaire pour respecter

15 les décisions de cette Chambre de première instance afin de veiller à

16 assurer la présence des accusés au procès et tous les endroits où il leur

17 sera demandé de se présenter et nous empêcherons toute tentative de

18 subornation de témoins dans le cadre de cette procédure.

19 Sur la base des dispositions de la constitution de la République de

20 Macédoine, le gouvernement garantit aux accusés la protection de la vie, la

21 sécurité personnelle et la protection de leurs biens. Nous réaffirmons

22 notre décision de respecter les conditions de la mise en liberté provisoire

23 envisagée pour chacun des accusés par la Chambre de première instance et

24 nous nous engageons à entreprendre toutes les activités nécessaires, si les

25 accusé enfreignent l'une quelconque des conditions prévues. Les organes

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1 gouvernementaux de la République de Macédoine disposent de la capacité, des

2 mécanismes juridiques, de respecter pleinement la décision qui sera rendue

3 par la Chambre de première instance du Tribunal de La Haye, eu égard aux

4 garanties que la République de Macédoine a présentées.

5 Notre gouvernement a pour priorité de continuer à coopérer de façon

6 efficace avec le Tribunal de La Haye. Les relations entre le gouvernement

7 de la République de Macédoine et le Tribunal de La Haye sont bonnes; il n'y

8 a aucune raison que la situation change. A cet égard, cela signifie que le

9 gouvernement de la République de Macédoine ne permettra pas et fera tout

10 son possible pour empêcher toute violation potentielle de l'ordonnance qui

11 sera rendue par la Chambre et informera sans délai la Chambre de première

12 instance, si les accusés enfreignent les dispositions de l'ordonnance qui

13 sera rendue par celle-ci.

14 Je vous présente la position des autorités de Macédoine. Nous sommes prêts

15 à nous conformer pleinement à toute ordonnance rendue par la Chambre de

16 première instance, eu égard aux deux accusés.

17 Les autorités de la République de Macédoine, après avoir remis les

18 personnes à la garde du Tribunal, garantissent au Tribunal qu'elles

19 disposent de la législation nécessaire en Macédoine, législation applicable

20 à l'intégralité du territoire de l'Etat et à tous les citoyens; nos

21 autorités ont la capacité d'entreprendre toutes les mesures juridiques

22 nécessaires pour respecter les dispositions de la décision rendue par la

23 Chambre. Selon nous, aucun citoyen, aucune personne ne peut commettre une

24 infraction sans être sanctionnée. Pour parler plus précisément des deux

25 accusés en l'espèce.

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1 Comme tout le monde le sait, la République de Macédoine ne dispose d'aucune

2 loi relative à la coopération avec le Tribunal de

3 La Haye, mais ceci ne nous a pas, jusqu'à présent, empêché d'agir. Bien au

4 contraire, les organes gouvernementaux macédoniens ont fait preuve de leur

5 volonté d'agir et ont soumis toutes les informations qui leur étaient

6 demandées; en d'autres termes, la coopération a toujours été efficace. Il

7 est dans notre intérêt de poursuivre cette coopération, à l'avenir, de la

8 même manière qu'elle s'est déroulée jusqu'à présent.

9 Les autorités de Macédoine se sont trouvés dans une situation tout à fait

10 nouvelle après le conflit qui a fait rage en 2001. Nous n'avons pas une

11 grande expérience en la matière. Je souhaite vous assurer qu'il est dans

12 notre intérêt d'agir conformément aux requêtes et aux ordonnances rendues

13 par la Chambre de première instance et adressées aux institutions de

14 Macédoine. C'est dans notre intérêt et cela se poursuivra. Etant donné que

15 la coopération avec le Tribunal de La Haye, comme je l'ai déjà dit, est

16 l'une des priorités de notre gouvernement car nous sommes en plein

17 processus d'intégration européenne, il s'agit d'une étape importante pour

18 notre pays en matière de réforme; il est dans notre intérêt que toutes ces

19 activités continuent à l'avenir, notamment, dans le domaine des réformes et

20 de la coopération avec le Tribunal de La Haye.

21 Aux yeux du public macédonien, l'image du TPIY qui a été créé conformément

22 à la Résolution 827, en date du 25 mai 1993, est positive.

23 J'espère que vous accepterez les garanties présentées par le gouvernement

24 de la République de Macédoine en vue de l'élargissement des accusés, M.

25 Boskoski et Tarculovski; ceci permettra de renforcer l'image positive de ce

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1 Tribunal aux yeux du public macédonien.

2 Je vous remercie de m'avoir donné la possibilité de m'exprimer.

3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Madame le Ministre.

4 Monsieur Apostolski, je vous donnerais la parole plus tard et ensuite, nous

5 terminerons.

6 Monsieur Smith, allez-y.

7 M. SMITH : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je pense que je

8 dispose de 15 minutes pour m'exprimer, mais peut-être que j'aurai besoin de

9 davantage de temps, eu égard à M. Boskoski, car il y a certaines questions

10 qui concernent les deux accusés, d'autres qui concernent uniquement l'un ou

11 l'autre.

12 La demande présentée par M. Boskoski doit, selon l'Accusation, être

13 rejetée. Comme vous le savez, il appartient à la Défense d'établir, sur la

14 base de l'hypothèse la plus probable, que l'accusé comparaîtra au procès et

15 ne cherchera pas à exercer de pressions ou ne menacera, d'aucune manière

16 que ce soit, des victimes, des témoins, ou d'autres personnes.

17 S'agissant de la première question, à savoir, est-ce que

18 M. Boskoski comparaîtra au procès, je note d'emblée qu'en ce qui concerne

19 la réponse de l'Accusation à la demande de mise en liberté provisoire

20 présentée par la Défense, l'Accusation a soulevé la question du fait que M.

21 Boskoski ne s'est pas présenté devant les tribunaux macédoniens dans le

22 cadre de l'affaire qui a donné lieu à sa détention en Croatie. L'an

23 dernier, M. Boskoski a fui la Macédoine, après avoir appris qu'il était mis

24 en accusation et que les poursuites judiciaires étaient engagées à son

25 encontre devant les tribunaux macédoniens.

Page 64

1 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Un instant. M. Boskoski a fermement

2 contesté ce point dans sa réplique. Il a déclaré qu'il avait quitté de

3 façon tout à fait légale la Macédoine pour se rendre en Croatie où il a,

4 ensuite, été détenu. Mais vous, vous utilisez le terme "fui," alors qu'il

5 dit qu'il est simplement parti; il conteste cela. Si vous êtes en mesure

6 d'aborder ce point plus en détail, allez-y. Sinon, je vous redonnerai la

7 parole plus tard pour que vous abordiez cette question qui est très

8 importante.

9 M. SMITH : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président. M. Boskoski a

10 la double nationalité et il peut résider soit en Croatie, soit en

11 Macédoine. Toutefois, l'Accusation avance qu'au vu des éléments de preuve,

12 il apparaît que la raison pour laquelle

13 M. Boskoski a quitté la Macédoine au début de l'année dernière, c'est-à-

14 dire, en 2004, était dû au fait que des procédures judicaires étaient

15 engagées contre lui devant les tribunaux macédoniens.

16 Dans la réponse de l'Accusation, vous verrez que le 7 juin,

17 l'Accusation a demandé au gouvernement macédonien d'obtenir des éléments

18 d'information au sujet ou plutôt, en vue de l'audience consacrée à la mise

19 en liberté provisoire. A ce jour, l'Accusation n'a reçu aucune réponse de

20 la part des autorités macédoniennes -- ou plutôt, nous avons reçu ces

21 documents très récemment et ces documents viennent de vous être distribués.

22 Les documents en question ont été communiqués à la Défense hier et

23 ils permettent de mettre en exergue certains points importants.

24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Peut-être que

25 Mme le Ministre pourrait nous aider sur ce point. Est-ce que vous pouvez

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1 nous confirmer que le texte en macédonien apparaît à l'écran ainsi que le

2 texte anglais ?

3 Mme MLADENOVSKA-GJORGJIVESKA : [interprétation] Oui, tout marche bien.

4 Merci.

5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Qu'en est-il des accusés ? Monsieur

6 Boskoski, est-ce que le texte apparaît à l'écran ? Est-ce que vous le

7 voyez, Monsieur Boskoski ?

8 L'ACCUSE BOSKOSKI : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

9 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Qu'en est-il du conseil, Maître Godzo ?

10 M. GODZO : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien, poursuivons, alors.

12 M. SMITH : [interprétation] Monsieur le Président, ceci --

13 L'INTERPRÈTE : Les interprètes précisent que le texte a disparu de l'écran.

14 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous n'avons plus ce texte, non plus.

15 Je pense qu'il convient d'appuyer sur le bouton qui convient.

16 M. SMITH : [interprétation] Peut-être que je pourrais résumer la

17 teneur de ce document très brièvement.

18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Le texte apparaît à l'écran.

19 M. SMITH : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Il s'agit

20 d'une traduction résumée; un document plus complet sera distribué

21 aujourd'hui. Ce document illustre les activités de

22 M. Boskoski ou ses réactions par rapport à la procédure judiciaire qui a

23 été engagée contre lui l'an dernier.

24 Comme vous le savez, M. Boskoski doit être jugé en Croatie pour sa

25 participation au meurtre de sept immigrants clandestins en Macédoine le 2

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1 mars 2002. En compagnie de quatre autres personnes, dont trois membres du

2 ministère de l'Intérieur, il est accusé d'avoir exécuté ces hommes pour des

3 raisons politiques; voilà la teneur du procès engagé contre M. Boskoski à

4 l'heure actuelle en Croatie.

5 Ces accusations à l'encontre de M. Boskoski ont, d'abord, été rendues

6 publiques le 30 avril 2004. Comme il ressort du paragraphe 2, le bureau du

7 Procureur, sur la base des accusations portées à l'encontre de M. Boskoski,

8 a demandé qu'une enquête soit lancée, le

9 30 avril. Les documents nécessaires ont été remis au Juge d'instruction de

10 Skopje qui travaille sur cette affaire qui implique quatre autres accusés.

11 Ce même jour, le comité parlementaire chargé de l'examen des questions

12 d'immunité au sein de l'assemblée macédonienne a convenu que la décision

13 relative au maintien de l'immunité de M. Boskoski serait annulée;

14 l'immunité a été levée.

15 Ce même jour, une citation à comparaître a été remise à

16 M. Boskoski aux termes de laquelle il devait se présenter devant un Juge

17 d'instruction le 1er mai 2004, en relation avec ces accusations de meurtre.

18 La citation de comparaître en question a été reçue par l'avocat de M.

19 Boskoski, Stavre Dzikov, à l'hôtel Ambassador où

20 M. Boskoski tenait une conférence de presse sur la question même de savoir

21 si son immunité pouvait être levée, suite à une demande de l'Accusation. Le

22 3 mai [comme interprété], lorsque M. Boskoski était censé se présenter au

23 bureau du Juge d'instruction, trois avocats sont apparus, mais M. Boskoski

24 n'était pas là. Ces avocats ont dit au Juge d'instruction que M. Boskoski

25 ne comparaîtrait pas en raison d'un vice de procédure lié à la levée de son

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1 immunité parlementaire.

2 Etant donné que M. Boskoski ne s'est pas présenté, comme il lui était

3 demandé ce jour-là, le Juge d'instruction -- je pense qu'il y a une erreur

4 qui s'est glissée dans le document, il est question, ici, du 30 avril,

5 alors qu'il doit s'agir du 1er mai -- a rendu une décision visant à ce qu'il

6 soit amené de force; un mandat d'arrêt a été délivré.

7 Au paragraphe 8, il est dit que le 4 mai 2004, des mandats d'arrêt

8 régionaux et internationaux ont été délivrés à l'encontre de M. Boskoski.

9 D'après le Juge d'instruction et en rapport avec l'interrogatoire

10 mené plus tard par le Juge d'instruction en Croatie, M. Boskoski a déclaré,

11 le 1er mai 2004 -- mais vous verrez que, dans la requête présentée par la

12 Défense, il est dit que M. Boskoski a fait une déclaration devant ce

13 Tribunal selon laquelle il a quitté la Macédoine le 30 avril 2004, à

14 savoir, le jour où il a reçu la convocation en question.

15 Les autorités macédoniennes se sont vues poser cette même question, à

16 savoir, si M. Boskoski avait été obligé de se présenter au tribunal ou

17 devant les autorités de police sur la base de cette citation à comparaître

18 et de l'enquête en cours; le Juge d'instruction a répondu par la négative.

19 Il a dit qu'il n'était pas obligé de se présenter à la police ou devant un

20 tribunal, mais il était obligé de se présenter devant le Juge d'instruction

21 le 1er mai car il avait reçu une convocation, une citation à comparaître et

22 il a, également, été informé de la raison pour laquelle il avait été

23 convoqué. Il a été informé de ses droits et des conséquences qui

24 découleraient de son manquement à son obligation de se présenter devant le

25 Juge d'instruction.

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1 L'Accusation avance que ces faits montrent clairement que

2 M. Boskoski a quitté la Macédoine afin d'éviter des poursuites au titre des

3 crimes qui lui étaient reprochés. Manifestement, il serait beaucoup plus

4 difficile, pour M. Boskoski, d'être poursuivi pour ses crimes en dehors du

5 territoire de Macédoine.

6 Mais ceci est, également, étayé par l'annexe à la requête de

7 l'Accusation daté du 7 juin 2005.

8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Avant que nous ne passions à un autre

9 document, je remarque qu'en haut de la page, il y a une référence qui

10 concerne la traduction; on peut lire, en première ligne, Référence du

11 document; deuxième ligne, numéro 504/05, daté du 28 avril; on peut lire 28

12 avril 1005, mais clairement, il s'agit du

13 28 avril 2005.

14 M. SMITH : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous nous

15 excusons de cette erreur. Une version complète et plus correcte sera

16 distribuée plus tard.

17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Passons à l'intercalaire numéro 7 car

18 je pense que c'est de cela que vous voulez parler.

19 M. SMITH : [interprétation] Merci. Ce n'est pas l'intercalaire numéro

20 7, mais dans le nouveau classeur, il s'agit de l'annexe D à la réponse du

21 Procureur en date du 7 juin, mais ceci apparaît à l'écran.

22 Il s'agit de la réponse faite par M. Boskoski au Juge d'instruction

23 croate où il a été arrêté par la suite. Il a expliqué à ce Juge qu'il avait

24 quitté la Macédoine après avoir reçu des informations de la part de

25 policiers concernant un ordre qui leur avait été donné de l'emmener jusqu'à

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1 la frontière entre la Macédoine et la Serbie afin de le liquider. Il a

2 quitté la République d'urgence.

3 M. Boskoski a reconnu, devant le Juge d'instruction croate, qu'il

4 avait connaissance des poursuites judiciaires engagées contre lui. Il a

5 découvert cela par le biais de la citation à comparaître qu'il a reçue ou

6 que ses avocats ont reçue le 30 avril, mais, également, de la bouche

7 d'officiers de police. Clairement,

8 M. Boskoski n'a pas été liquidé à la frontière, mais a été aidé par la

9 police -- par certains policiers pour quitter le pays.

10 Selon l'Accusation, si M. Boskoski était véritablement en danger de mort,

11 cela aurait été indiqué dans la demande présentée par la Défense. Nous

12 demandons à la Chambre de ne pas considérer qu'il s'agit d'un fait établi.

13 Ceci est, en outre, étayé par une autre affirmation de

14 M. Boskoski selon laquelle il s'est efforcé d'échapper aux poursuites

15 engagées contre lui, en Macédoine; il en a parlé dans le cadre d'une

16 émission de SBS qui a été filmée alors que M. Bosokski se trouvait en

17 Croatie. Cela date de l'année dernière et ceci figure à l'annexe G de la

18 requête du 7 juin; cela apparaît à l'écran. On peut voir que

19 M. Boskoski a été interviewé par des journalistes sur l'affaire Rashtanski

20 Lozja. Il affirme, je cite : "Ils savaient qu'ils devaient faire pression

21 en levant mon immunité. Ils ont monté de toutes pièces un procès de façon à

22 ce que je quitte le territoire pour être, soit arrêté, soit éliminé à la

23 frontière. J'ai reçu des informations au sujet de leurs projets et ceux qui

24 étaient censés faire cela à mon encontre m'ont laissé partir;" voilà ce

25 qu'affirme M. Boskoski, il sait qu'il n'était pas légal de partir et il

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1 poursuit en disant : "Ils m'ont emmené illégalement de l'autre côté de la

2 frontière, entre la Macédoine et la Serbie. Je n'ai pas fui, je suis

3 toujours en Macédoine --"

4 En fait, il était en Croatie, à l'époque.

5 L'Accusation demande à la Chambre d'accepter que cette version des faits ne

6 soit pas crédible, à savoir que la vie de M. Boskoski n'était pas en

7 danger, lorsqu'il a quitté la Macédoine. Nous vous demandons de reconnaître

8 qu'il a quitté la Macédoine afin d'éviter des poursuites engagées contre

9 lui. Nous vous demandons d'accepter qu'il y a une forte probabilité qu'au

10 cas où M. Boskoski serait libéré dans le cadre de la procédure engagée en

11 l'espèce, il y a une forte probabilité, disais-je, qu'il referait

12 exactement la même chose; M. Boskoski doit répondre d'accusation devant ce

13 tribunal, mais, également, d'autres accusations devant les tribunaux

14 croates et il est doublement motivé pour chercher à échapper à ces

15 poursuites.

16 M. Boskoski était en fuite en Croatie pendant quatre mois; il a, par la

17 suite, été arrêté par les autorités croates; c'était en août 2004. Non

18 seulement il a fui, mais il a, également, cherché à éviter les poursuites

19 en Macédoine. Il savait que des mandats d'arrêt régionaux et internationaux

20 avaient été délivrés contre lui et qu'il était obligé de répondre des

21 accusations portées contre lui; il ne l'a pas fait. Il a enfreint, de façon

22 manifeste, ces obligations.

23 En ce qui concerne sa motivation au titre général de fuir, s'il devait

24 bénéficier d'un élargissement, je rappelle que les accusations portées

25 contre lui en Croatie sont très graves et que ceci serait un motif de fuite

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1 de sa part. Je pense que la Défense a cherché à minimiser la gravité des

2 accusations portées contre lui devant ce Tribunal. On reproche à M.

3 Boskoski d'avoir manqué à son obligation de punir des subordonnés dans le

4 cadre du meurtre de sept civils dans un village, il doit répondre de la

5 destruction d'un certain nombre de maisons et du traitement cruel infligé à

6 une centaine de villageois. L'Accusation a fait valoir, également, que M.

7 Boskoski risque une peine d'emprisonnement assez importante.

8 Quant à savoir s'il représenterait un danger pour les victimes, les

9 témoins ou d'autres personnes, s'il était amené à revenir dans sa

10 communauté d'origine où les victimes et les témoins de l'espèce habitent,

11 c'est-à-dire, en Macédoine, inévitablement, cela augmenterait le risque que

12 l'accusé exerce ou cherche à exercer une influence sur les témoins à

13 charge. Dans de nombreuses affaires dont ce Tribunal est saisi, des accusés

14 ont été mis en liberté à titre provisoire dans des régions où les victimes

15 et les témoins ne vivaient pas. Le problème en Macédoine est exacerbé par

16 le fait que les victimes et les témoins habitent dans la même région que

17 l'accusé. L'accusé a reçu un certain nombre de documents qui lui ont été

18 communiqués par l'Accusation, notamment, l'identité des victimes et des

19 témoins.

20 Si les allégations sont exactes, M. Boskoski pourrait être amené à

21 chercher à suborner des victimes et des témoins.

22 Quant au fait de savoir s'il pourrait entraver le cours de la

23 justice, nous devons nous rappeler que les forces de police l'ont aidé à

24 quitter le territoire de la Macédoine afin de se rendre en Croatie, sachant

25 que des procédures étaient engagées contre lui.

Page 72

1 Je vous demanderais de bien vouloir prendre en considération l'annexe

2 A confidentielle à la requête de l'Accusation déposée le

3 27 avril, par rapport à M. Boskoski et M. Tarculovski.

4 En ce qui concerne la durée du procès, telle qu'elle est

5 envisagée, je pense que plus on attend, plus cela pourrait être invoqué

6 comme un argument en faveur de la mise en liberté provisoire. Selon les

7 indications actuelles, il est possible que le procès s'ouvre plus tôt que

8 ce que prévoit la Défense.

9 Il est vrai qu'en ce qui concerne les garanties pour ce qui est des

10 autorités croates, l'Accusation est d'avis que le gouvernement croate a agi

11 de bonne foi par rapport à l'affaire en ce qui concerne le point de vue du

12 gouvernement croate ou des tribunaux croates.

13 Ces derniers pensent qu'au cours des sept derniers mois,

14 M. Boskoski pourrait chercher à fuir, s'il était mis en liberté provisoire.

15 Selon eux, il aurait pu chercher à fuir la Croatie. Le président du

16 tribunal pense que ce risque n'existe plus, mais le ministère public croate

17 a déclaré qu'il mettrait tout en œuvre pour son placement en détention,

18 s'il était mis en liberté provisoire par ce tribunal.

19 En ce qui concerne les garanties du gouvernement macédonien, l'Accusation

20 est d'avis que le gouvernement macédonien a agi en bonne foi par rapport à

21 l'enquête. La relation a été une bonne relation au niveau politique. Les

22 fonctionnaires du gouvernement macédonien ont été extrêmement coopératifs.

23 De toute évidence, la difficulté existe au niveau politique; il faudra

24 essayer de maîtriser cela sur le terrain. De toute évidence, par rapport à

25 la fuite de M. Boskoski de la Macédoine vers la Croatie l'année dernière,

Page 73

1 M. Boskoski a admis, lui-même, que certains membres de la police du

2 gouvernement macédonien l'ont aidé et de toute évidence, les garanties ne

3 peuvent pas véritablement être délivrées. Mais pour ce qui est de la bonne

4 foi du gouvernement macédonien, l'Accusation ne le conteste absolument pas.

5 Il y a autre chose que nous devrions soulever, à savoir,

6 M. Boskoski en tant qu'ex-ministre de l'Intérieur en Macédoine et le fait

7 qu'il veuille reprendre sa vie politique, a un pouvoir, une influence

8 notoire sur la société macédonienne et nous demandons à la Chambre

9 d'accepter qu'il soit un peu plus difficile pour un gouvernement de faire

10 en sorte d'arrêter une personne puissante --

11 personnalité plutôt, que quelqu'un qui a moins d'importance au sein du

12 gouvernement. Cet élément a été soulevé dans la décision Mrksic lors de

13 l'appel contre le refus de mise en liberté provisoire en octobre 2002.

14 Pour ce qui est de M. Boskoski, Monsieur le Président, et de Monsieur

15 Tarculovski, je n'ai plus rien à dire.

16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie. Maître Apostolski,

17 avant de vous donner la parole, je vous inviterais à répondre au dernier

18 élément qui a été invoqué par l'Accusation. J'aimerais vous poser une

19 question qui est comme suit : si votre client - et nous avons d'ailleurs eu

20 la déclaration préalable de votre client, nous l'avons vu sur l'écran - si

21 ce qui est indiqué dans cette déclaration est exact, en d'autres termes,

22 s'il est vrai que son propre gouvernement a agi de telle façon que cela

23 était considéré comme une persécution avec un risque inhérent pour sa vie,

24 et nous parlons d'événements qui se sont déroulés, il y a très peu de

25 temps, je suppose que cela est toujours le cas, j'aimerais savoir pourquoi

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1 est-ce qu'il veut retourner en Macédoine dans ce cas d'espèce ?

2 M. GODZO : [interprétation] Je vais --

3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur le Juge Eser, qui était le

4 Juge de la mise en état, souhaiterais en fait poser une question.

5 M. LE JUGE ESER : [interprétation] Nous avons entendu que M. Boskoski a la

6 double nationalité, croate et macédonienne. Nous avons obtenu une garantie

7 de la part de la Macédoine, nous avons obtenu certaines déclarations de la

8 part de la Croatie, de la part du pouvoir judiciaire, mais nous n'avons

9 pas, en fait, eu de garantie de la part du gouvernement croate. J'aimerais

10 vous demander de vous pencher sur cette question. Notamment, si Monsieur

11 Boskoski venait à être mis en liberté provisoire en Macédoine, quelle

12 serait l'incidence sur les poursuites judiciaires qui ont été instituées en

13 Croatie ?

14 M. GODZO : [interprétation] J'aborderai cela, Monsieur le Président,

15 Messieurs les Juges. Alors, à propos de votre première question : il a

16 quitté la Macédoine et vous nous avez demandé quelles étaient les raisons

17 qui l'avaient poussé à le faire, et je vais vous fournir une explication

18 brève.

19 Ljube Boskoski est parlementaire. Il l'était, il l'est toujours, et il

20 l'était en avril et en mai 2004. Il est membre du parti politique de

21 l'opposition au sein du parlement, et il y a une ancienne animosité entre

22 lui-même et un membre du gouvernement qui faisait partie du gouvernement en

23 avril et mai 2004. Par conséquent, Ljube Boskoski n'a pas souhaité faire

24 l'objet de poursuites politiques dressées à son encontre. Il était

25 absolument appréhensif, car il pensait que de nombreux éléments de preuve

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1 allaient être fabriqués, inventés de toutes pièces contre lui, et il

2 pensait qu'il courait un véritable danger, à savoir, le danger de ne pas

3 être jugé de façon équitable en Macédoine. Par conséquent, il a quitté la

4 Macédoine en toute légalité en faisant usage de son passeport diplomatique.

5 Il a pénétré sur le territoire croate en toute légalité. Il s'est présenté

6 auprès des autorités croates. Il est resté en liberté en Croatie pendant

7 quatre mois, et a eu d'ailleurs des contacts quotidiens avec les autorités

8 croates à propos de l'affaire Rashtanski Lozja, et il s'est présenté

9 volontairement auprès des autorités croates à propos des chefs

10 d'inculpation dans le cas de l'affaire Rashtanski Lozja.

11 Le fait est que lorsqu'il est parti de la Macédoine, il n'y avait pas

12 encore d'acte d'accusation dressé à son encontre, et il n'y avait pas de

13 décision du Tribunal aux fins de sa détention. Il n'est pas vrai, et cela a

14 été dit dans le résumé à son sujet. Au moment où il a quitté la Macédoine,

15 c'était un homme libre qui craignait pour sa vie parce qu'il avait été

16 informé par certains membres de la sécurité que sa vie était en danger.

17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Alors une petite précision. Au moment

18 où il est parti de la Macédoine en toute légalité ou en toute illégalité,

19 je ne veux pas entrer ou aborder ce domaine, est-ce qu'il était ministre à

20 l'époque ou est-ce qu'il faisait partie du parti de l'opposition ?

21 M. GODZO : [interprétation] Il faisait partie de l'opposition.

22 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] A l'époque, la personne avec qui il

23 était en conflit, je suppose que cette personne était ministre à l'époque.

24 Est-ce que vous parlez du ministre de l'Intérieur à l'époque ?

25 M. GODZO : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

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1 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Est-ce que cette personne est toujours

2 ministre de l'Intérieur à l'heure actuelle ?

3 M. GODZO : [interprétation] J'allais justement aborder cette question.

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Les grands esprits se

5 rencontrent.

6 M. GODZO : [interprétation] En novembre 2004, le gouvernement macédonien a

7 démissionné. Après la démission du gouvernement, M. Ljube Boskoski, alors

8 qu'il était en détention à Pula, a immédiatement présenté une requête

9 écrite, et trois requêtes écrites aux autorités du Tribunal de Pula pour

10 être transféré en Macédoine, étant donné qu'il y avait eu des changements

11 importants, et qu'il pouvait s'attendre à bénéficier d'une procédure

12 équitable. Depuis, il y a eu un nouveau gouvernement. Il a demandé à être

13 transféré en Macédoine, car il n'a jamais voulu échapper ou se soustraire à

14 la justice. Le fait est qu'il a toujours voulu pouvoir bénéficier d'un

15 procès équitable en Macédoine. Voilà ce qu'il en est pour Ljube Boskoski.

16 Quelle était la deuxième question ? Je vous prierais de bien vouloir

17 répéter votre question Monsieur le Juge --

18 M. LE JUGE ESER : [interprétation] Jusqu'à présent, vous n'avez parlé que

19 de la situation en Macédoine. Mais quelle est la réaction du système

20 judiciaire croate, parce que nous avons entendu que M. Boskoski faisait

21 l'objet de poursuites en Croatie, et jusqu'à présent, nous n'avons pas

22 obtenu de garantie gouvernementale de la part de la Croatie.

23 M. GODZO : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge. Nous n'avons pas de

24 garanties écrites de la part du gouvernement croate, mais il faut savoir

25 que dans la réplique de l'Accusation, vous avez l'annexe confidentielle C,

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1 et au paragraphe 7, les autorités croates indiquent et déclarent que la

2 République de la Croatie n'a pas l'intention de demander la mise en liberté

3 provisoire de l'inculpé sous la supervision des autorités croates afin de

4 terminer les poursuites à son encontre en République de la Croatie, car le

5 gouvernement de la Croatie n'a pas d'objection à ce que ces poursuites

6 soient reprises lorsque la procédure sera terminée auprès du TPIY.

7 Au 7(B), ils indiquent que s'il est fait droit à la requête de M.

8 Ljube Boskoski, en ce sens qu'il fait l'objet d'une mise en liberté

9 provisoire en Croatie, il agira comme cela a été le cas d'autres inculpés

10 qui ont été mis en liberté provisoire en Croatie étant donné que la

11 République de la Croatie a déjà des antécédents pour ce qui est de ces

12 situations.

13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie. Je vais maintenant

14 donner la parole à Me Apostolski qui va s'exprimer au nom de l'accusé

15 Tarculovski.

16 M. APOSTOLSKI : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

17 Juges, Messieurs les confrères de l'Accusation, la requête aux fins de mise

18 en liberté provisoire de l'accusé Johan Tarculovski a été présentée après

19 que nous ayons évalué les véritables possibilités, les conditions et les

20 faits. Nous pensons d'ailleurs que nos arguments sont tout à fait

21 véritables et justifiés.

22 Comme la Défense l'a indiqué dans la requête aux fins de mise en liberté

23 provisoire, l'accusé répond tout à fait aux conditions requises par le

24 Règlement de procédure et de preuve de ce Tribunal. L'accusé garantit qu'il

25 se présentera au procès et qu'il ne représentera pas un danger pour les

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1 victimes, témoins et autres personnes.

2 Eu égard aux infractions pénales sérieuses qui sont reprochées à l'accusé,

3 la Défense souhaite insister sur le fait qu'il a été fait droit à des

4 requêtes de mise en liberté provisoire dans le cas de crimes beaucoup plus

5 sérieux. Je pense notamment à des infractions graves aux conventions de

6 Genève, à des crimes contre l'humanité, dans les affaires le Procureur

7 contre Haradinaj, le Procureur contre Milutinovic et consorts, le Procureur

8 contre Prlic et consorts. Ces personnes ont été mises en liberté

9 provisoire.

10 Comme le Tribunal le sait pertinemment, l'accusé n'a jamais refusé de

11 coopérer avec le Tribunal. Du fait d'une erreur commise par les autorités

12 de la Macédoine, il a malheureusement fait l'objet d'arrestation et de

13 détention sans avoir été notifié de l'acte d'accusation, ce qui lui aurait

14 permis, en fait, de se présenter volontairement au Tribunal. Le fait est

15 que Johan n'a jamais été convoqué et n'a jamais été notifié du fait qu'un

16 acte d'accusation avait été prononcé contre lui.

17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Permettez-moi de vous interrompre un

18 petit moment, parce que je me souviens avoir lu quelque part lors de ma

19 préparation pour cette audience, avoir lu disais-je, une déclaration de la

20 part de l'Accusation qui indiquait que votre client savait qu'il y avait un

21 acte d'accusation dressé contre lui, qu'il le savait, il y a un moment de

22 cela, et qu'en fait, il a laissé des années s'écouler avant de réagir

23 lorsque le bureau du Procureur a essayé de prendre contact avec lui à ce

24 sujet. Je voudrais que vous abordiez cette question parce que je me

25 souviens avoir lu cela quelque part. Donc, il ne s'agit pas de dire que

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1 tout à coup, tombé du ciel, il y a eu cette nouvelle et qu'il s'est

2 retrouvé ici, et qu'il n'a jamais eu la possibilité de se présenter

3 volontairement, ce dont il se plaint maintenant. Il me semble que d'après

4 ce que j'ai lu, si bien entendu, ce que j'ai lu est exact, qu'il savait

5 depuis un certain temps déjà qu'il était non seulement un suspect, mais

6 qu'il y avait un acte d'accusation dressé à son encontre, et qu'il a décidé

7 pour des raisons personnelles, qui peuvent être tout à fait bonnes ou

8 mauvaises, d'essayer d'éviter de se retrouver ici. Je ne suis pas en train

9 de vous dire qu'il a essayé de s'échapper ou de fuir, mais il a juste réagi

10 de façon très passive à un moment donné. C'est quelque chose qu'il faille

11 que vous abordiez ou, en tout cas, nous aimerions entendre votre point de

12 vue à ce sujet.

13 M. APOSTOLSKI : [interprétation] Je voulais aborder cette question dans le

14 cadre de mes arguments.

15 L'accusé Johan Tarculovski a été informé par téléphone, où on lui a demandé

16 de se présenter à un interrogatoire. Un appel téléphonique, selon la

17 législation macédonienne, ne représente pas une citation à comparaître

18 valide en vue d'une audition. La seule manière légitime de procéder est de

19 convoquer une personne par le biais d'une situation à comparaître sous

20 forme écrite, qui doit être personnellement remise à la personne

21 intéressée. Donc, voilà la procédure qui a été suivie lorsqu'on l'a

22 convoqué à une audition. Après que cet acte d'accusation a été délivré à

23 son encontre, il ne savait même pas, et comment aurait-il pu le savoir

24 qu'un acte d'accusation avait été dressé à son encontre par le Tribunal de

25 La Haye ?

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1 L'accusé, en outre, accepte de coopérer pleinement avec le Tribunal, y

2 compris en fournissant des déclarations au Procureur, conformément aux

3 Articles 63, 42 et 43 du Règlement de procédure et de preuve.

4 Est-ce que mes explications vous suffisent ?

5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] S'il s'agit là de vos explications, ce

6 n'est pas à moi de vous dire si elles suffisent ou pas. Nous vous le ferons

7 savoir lorsque nous rendrons notre décision. Vous devez également entendre

8 ce que l'Accusation a à dire à ce sujet.

9 M. APOSTOLSKI : [interprétation] La République de Macédoine garantit que si

10 Johan bénéficie d'une mise en liberté provisoire, il serait à la

11 disposition du Tribunal. Comme l'a déclaré notre ministre de la Justice,

12 par le passé, les autorités macédoniennes ont démontré en pratique qu'elles

13 coopéraient avec le Tribunal, même s'il n'existe pas de loi relative à la

14 coopération avec le Tribunal en tant que telle. La Macédoine a mis en place

15 les conditions nécessaires pour qu'il n'y ait pas d'obstacles à la

16 coopération avec le Tribunal, et a transmis tous les documents à caractère

17 sensible au bureau du Procureur. Comme l'a demandé le Procureur, des

18 auditions ont été menées avec des personnes importantes au sein des

19 structures de renseignement. Certains témoins ont même été arrêtés.

20 La coopération avec le Tribunal représente une priorité fondamentale pour

21 les autorités macédoniennes, lesquelles ont mis en place, une commission

22 chargée de la Coopération, composée du ministre de la Justice, du ministre

23 de l'Intérieur et du ministre des Affaires étrangères.

24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Inutile de s'attarder sur cette

25 question. L'Accusation a reconnu cela. En d'autres termes, nous avons reçu

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1 des documents et des écritures sur cette question. Inutile de perdre du

2 temps.

3 M. APOSTOLSKI : [interprétation] Je souhaiterais simplement répondre

4 brièvement à cela. L'accusé n'a jamais cherché à influencer des témoins, ni

5 à contacter l'une quelconque des victimes des attaques terroristes intenses

6 qui ont eu lieu entre l'an 2001 et le jour de son arrestation.

7 Johan Tarculovski n'a jamais fait l'objet de poursuites au pénal. A l'heure

8 actuelle, aucune poursuite n'est engagée contre lui. A l'appui de cela,

9 nous avons communiqué des éléments de preuve à la Chambre, notamment son

10 casier judiciaire. Les dossiers de Johan Tarculovski, tels qu'ils figurent

11 au ministère de l'Intérieur, ainsi qu'une déclaration certifiée des

12 tribunaux compétents de la République de Macédoine.

13 En Macédoine, contrairement à d'autres pays de l'ex-Yougoslavie, il n'est

14 jamais arrivé que des témoins soient intimidés, si bien que le Tribunal ne

15 devrait pas s'inquiéter du fait que l'accusé Johan Tarculovski, au cas où

16 il serait élargi, chercherait à intimider des témoins ou à les influencer

17 de quelque manière que ce soit. Par le passé, il n'a jamais rien fait de

18 tel.

19 Le 19 mai 2005, le parlement macédonien a adopté une loi relative à la

20 protection des témoins, et cette loi prévoit les modalités de la protection

21 de l'assistance apportée aux témoins et aux victimes comparaissant en

22 qualité de témoins.

23 Après les attaques terroristes intenses qui ont fait rage en 2001, Johan

24 Tarculovski s'est marié et a eu une petite fille. Il menait une vie

25 heureuse avant les faits reprochés, et après ceci, il a pu profiter de sa

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1 petite fille. Vingt jours après la naissance de sa fille, Johan a été

2 arrêté et n'a pas revu sa petite fille depuis.

3 Je demande au Tribunal de bien vouloir tenir compte du fait que selon les

4 estimations de la Défense, il est peu probable que le procès en l'espèce

5 s'ouvre avant l'an 2007. Ce, même si l'Accusation consacre toutes les

6 ressources nécessaires en vue de veiller à la préparation rapide du procès.

7 La Défense aurait besoin d'un temps considérable pour se préparer en vue de

8 ce procès. Nous demandons au Tribunal de garder à l'esprit que toutes les

9 personnes sont égales devant le Tribunal international et que les accusés

10 doivent bénéficier d'une présomption d'innocence; ils sont présumés

11 innocents jusqu'à leur culpabilité soit prouvée.

12 Nous avons présenté une déclaration écrite de Johan Tarculovski dans

13 laquelle il garantit qu'en cas de mise en liberté provisoire, il se

14 représenterait au procès et ne constituerait pas une menace pour les

15 victimes et les témoins ou d'autres personnes. Nous demandons à la Chambre

16 de bien vouloir accueillir la demande de mise en liberté provisoire de

17 l'accusé Johan Tarculovski.

18 Merci.

19 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Maître Apostolski.

20 Madame le Ministre, est-ce que vous souhaitez ajouter quoi que ce soit eu

21 égard à ce que vous avez déjà déclaré par rapport à l'accusé Johan

22 Tarculovski ou est-ce que vous souhaitez réitérer votre position telle

23 qu'exprimée tout à l'heure ?

24 Mme MLADENOVSKA-GJORGJIVESKA : [interprétation] Je souhaiterais ajouter

25 quelques phrases très brièvement.

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1 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je souhaite apporter une

2 correction à ce que j'ai dit tout à l'heure. En réalité, à l'heure

3 actuelle, en République de Macédoine, un processus de réforme est en cours;

4 ce processus de réforme concerne essentiellement les organes de la police

5 et de la justice. Nous cherchons à informer les institutions judiciaires.

6 Je souhaite avancer quelques chiffres importants pour les activités de la

7 police depuis le début de l'année. Cinq cents treize mandats d'arrêt ont

8 été délivrés en République de Macédoine et les personnes concernées ont été

9 arrêtées. On peut également constater une diminution du taux de

10 criminalité, entre 18 et 43 % sur l'ensemble du territoire de la République

11 de Macédoine. Il convient de noter que le taux de criminalité a

12 considérablement diminué dans les régions touchées par le conflit de 2001,

13 notamment, dans la région de Tetovo où le taux de criminalité a diminué

14 d'environ 40 %. Cette réduction du taux de criminalité va de pair avec

15 l'identification des auteurs des crimes les plus graves, par exemple, entre

16 le début de l'année 2005 et jusqu'au mois de juin 2005, sur le territoire

17 de la République de Macédoine, 22 meurtres, au total, ont été commis et

18 seul un de ces meurtres n'a pas encore été résolu. En ce qui concerne les

19 autres affaires de meurtres, leurs auteurs ont été identifiés et des

20 procédures ont été engagées en leur encontre. Je vous remercie.

21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie, Madame le Ministre.

22 Permettez-moi de vérifier quelque chose.

23 En ce qui concerne Ljube Georgievski ou plutôt, Ljubco Georgievski, quelle

24 est la situation ? Il s'agit de l'ancien premier ministre.

25 M. GODZO : [interprétation] Ljubco Georgievski était premier ministre de la

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1 République de Macédoine jusqu'en 2002.

2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Que fait-il actuellement ?

3 M. GODZO : [interprétation] Il est parlementaire.

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] De quel parti.

5 M. GODZO : [interprétation] Il est membre du Parti national.

6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Est-ce qu'il s'agit du même parti que

7 celui auquel votre client appartient ?

8 M. GODZO : [interprétation] Ce parti s'est récemment scindé en deux

9 branches et je ne sais pas de quelle branche il fait partie.

10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Est-ce qu'il s'agit d'un parti

11 gouvernemental ou non ? Apparemment, non, n'est-ce pas ?

12 L'INTERPRÈTE : M. Godzo confirme.

13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] C'est un parti d'opposition. Très bien.

14 Je pense que nous pouvons redonner la parole à l'Accusation pour qu'elle

15 s'exprime sur les arguments avancés par Me Apostolski. Maître Apostolski,

16 vous aurez, ensuite, la possibilité de répondre, si le besoin s'en fait

17 sentir. Vous avez la parole, Monsieur Smith.

18 M. SMITH : [interprétation] Je vous remercie. Quelques remarques d'emblée.

19 Pour ce qui est du début du procès, les indications ont été avancées en ce

20 sens que le procès commencerait l'année prochaine et c'est un facteur qu'il

21 faut prendre en considération en cas de mise en liberté provisoire.

22 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] C'est une éventualité, mais cela fait

23 quatre ans que je suis ici et je préférerais entendre quelque chose de

24 beaucoup plus concret que de dire 'il se peut que' parce qu'il est très

25 facile de formuler les choses comme cela. Cela dépend.

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1 M. SMITH : [interprétation] Je comprends tout à fait votre doute, Monsieur

2 le Président.

3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] S'il n'y a pas d'indication concrète

4 indiquant que le procès va commencer en 2006, nous ne pouvons pas supposer

5 qu'il va commencer en 2006. C'est la situation.

6 M. SMITH : [interprétation] Eu égard à ce qu'a dit mon confrère suivant

7 lequel il n'y a pas eu de tentative de prise de contact avec les témoins et

8 les victimes en Macédoine, pour ce qui est de l'affaire Rashtanski Lozja et

9 c'est l'affaire, en Croatie, pour

10 M. Boskoski, il faut savoir que les quatre accusés ont été acquittés en

11 Macédoine et l'Accusation a interjeté appel sur la base du fait que le

12 verdict a été évalué ou qu'il y a eu un certain nombre de manquements et

13 qu'il y a eu procès contradictoire et non exhaustif.

14 Vous avez l'annexe F qui est un rapport de la presse écrite et qui fait

15 partie de la requête de l'Accusation du 7 juin et vous voyez, dans le

16 dernier paragraphe, que le retrait des déclarations des principaux témoins

17 lors de l'audience a existé ou s'est fait du fait des pressions et des

18 menaces qui ont été exercées sur les familles des personnes en question et

19 ce, de la part des familles des inculpés. Voilà, par opposition à ce qui a

20 été dit par mon confrère.

21 Pour ce qui est de la capacité de M. Tarculovski à venir au procès, il est

22 évident que la Défense admet que l'accusé a été contacté par l'Accusation

23 l'année dernière et ce, aux fins d'un entretien parce qu'on nous dit que la

24 convocation ne lui a pas été donnée; il ne s'est pas présenté.

25 J'aimerais remercier mon confrère de me donner la possibilité de vous

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1 relater toute une série de faits car le bureau du Procureur a fait

2 plusieurs tentatives, l'année dernière, pour essayer de prendre contact

3 avec M. Tarculovski avant son arrestation, en mars 2005 et nous souhaitions

4 qu'il vienne à des entretiens en Macédoine.

5 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je pense que vous avez reçu ce

6 document qui correspond à l'intercalaire numéro 9; il s'agit d'une demande

7 d'assistance présentée auprès du gouvernement macédonien afin que des

8 mandats leur soient donnés et il s'agit de plusieurs personnes. En dépit

9 des meilleurs efforts déployés par l'Accusation, nous n'avons pas pu leur

10 transmettre ces convocations.

11 M. LE JUGE ESER : [interprétation] Pourriez-vous --

12 M. SMITH : [interprétation] Il s'agit d'un seul document, Monsieur le

13 Président. Il ne se trouve pas dans la liasse ou dans le jeu de documents.

14 Je disais que la cote est BS/T07/EIC [comme interprété] --

15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] J'avais justement fait une note de cela

16 et je voulais le soulever car je pense que vous devez verser officiellement

17 ces deux documents parce qu'ils n'ont pas encore été versés au dossier.

18 M. SMITH : [interprétation] Je le ferai.

19 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous devons les avoir.

20 M. SMITH : [interprétation] Dans le cadre de cette demande d'assistance,

21 l'Accusation a insisté sur le fait qu'elle avait fait des tentatives pour

22 essayer de localiser M. Tarculovski. Par rapport à ce qui a été dit par mon

23 confrère, à la deuxième page, vous verrez que des tentatives ont été faites

24 en juin, au début du mois de juillet, pour essayer justement de prendre

25 contact avec

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1 M. Tarculovski. Je dois vous dire qu'il s'agissait de tentatives qui ont

2 été déployées pendant une période de dix à 15 jours. Nous n'avons pas été

3 en mesure de lui délivrer les mandats. L'adresse qui était indiquée pour M.

4 Tarculovski n'était pas l'adresse où il résidait; ce qui a compliqué notre

5 tâche pour délivre les convocations. Les autorités de Macédoine, le

6 ministère de l'Intérieur ne savait absolument pas où résidait M.

7 Tarculovski. Ce qui fait qu'il y a eu un certains nombres de contacts pris

8 avec M. Tarculovski par l'entremise d'informateurs confidentiels. Vous

9 verrez, d'après les faits établis dans ce document, que deux différentes

10 sources ont contacté M. Tarculovski, lui ont transmis le message suivant

11 lequel les enquêteurs de l'Accusation avaient l'intention de lui poser des

12 questions et qu'il a décidé de ne pas se présenter. L'un des messages que

13 nous avons obtenus en retour a été que M. Tarculovski ne viendrait pas tant

14 qu'il n'aurait pas reçu de mandat, mais

15 M. Tarculovski ne nous a pas indiqué où il résidait.

16 Après un certain nombre de tentatives faites pour essayer de le

17 localiser, le numéro de téléphone de M. Tarculovski a été donné; il a parlé

18 à un enquêteur. Il a dit qu'il viendrait, qu'il se présenterait, ce qu'il

19 n'a pas fait. En juillet, vous pouvez voir que son numéro de portable ou

20 son portable a été vendu à une autre personne et que cette autre personne

21 n'avait pas la carte SIM et que cette personne n'était pas en mesure de

22 nous dire où se trouvait

23 M. Tarculovski.

24 L'Accusation souhaiterait indiquer que la vente de sa carte SIM, au

25 moment où l'Accusation faisait des efforts intenses pour essayer de le

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1 localiser, correspond au fait que M. Tarculovski a essayé d'éviter de

2 coopérer avec ce Tribunal.

3 Ce fait d'éviter de parler aux enquêteurs du Tribunal a abouti à

4 l'arrestation de M. Tarculovski en octobre 2004, une arrestation aux fins

5 de répondre à des questions. Ce qui a, ensuite, entraîné son arrestation

6 ultérieure en mars. L'Accusation n'a pas pensé qu'il était approprié de le

7 convoquer qu'il ait essayé d'éviter cela par le passé.

8 Pour ce qui est de la motivation de M. Tarculovski à s'enfuir, il

9 faut prendre en considération son comportement préalable. Les chefs

10 d'inculpation qui lui sont reprochés sont extrêmement graves. Il a été

11 allégué par l'Accusation qu'il a été l'instigateur principal du meurtre de

12 sept personnes, de la destruction d'un certain nombre de propriétés dans un

13 village et du traitement cruel infligé à dix personnes dans ce village. Il

14 a été la personne qui a dirigé, d'après les allégations de l'Accusation, un

15 groupe qui a commis ou effectué cette attaque contre le village de

16 Ljuboten, attaque qui a été menée à bien contre une population civile.

17 Si M. Tarculovski est considéré coupable de ces infractions,

18 l'accusation avance que cela représente une peine d'emprisonnement assez

19 longue.

20 La Défense a indiqué qu'il n'avait pas les moyens de s'enfuir. Il est

21 clair et manifeste, d'après le document, que sa famille reçoit des subsides

22 importants, qu'il a également des véhicules à bord duquel il pourrait

23 s'enfuir.

24 Pour ce qui est de la menace qu'il représente pour des témoins, des

25 victimes ou d'autres personnes, il faut savoir qu'il a participé aux

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1 événements de Ljuboten, et l'Accusation avance qu'il s'agit d'une personne

2 violente. L'Accusation a pensé, au départ, que l'accusé avait un casier

3 judiciaire pour délit de violence, mais il semblerait plutôt que le casier

4 judiciaire est maintenant considéré comme vierge.

5 La difficulté vient du fait que si M. Tarculovski est mis en liberté,

6 il se retrouvera au cœur de la communauté où résident les victimes et les

7 témoins. L'Accusation avance qu'il représente un danger pour ces victimes

8 car cela crée des possibilités d'intimidation. Je vous rappellerais la

9 décision prise dans l'affaire Delalic, le 24 octobre 1996; il s'agissait

10 d'une requête aux fins de mise en liberté provisoire et l'accusé était

11 Hazim Delic. "Le Tribunal a indiqué que l'accusé souhaitait être mis en

12 liberté provisoire dans l'endroit où les cimes allégués avaient lieu. Par

13 exemple, la simple présence de l'accusé qui se serait retrouvé dans le

14 voisinage de victimes et de témoins pourrait avoir un impact important sur

15 la disponibilité des victimes ou la disposition des victimes à coopérer

16 avec le Tribunal international."

17 Ce qui serait un argument qui ne militerait pas en faveur de la mise

18 en liberté provisoire.

19 Monsieur le Président, l'Accusation vous demande de prendre note de

20 la situation relative à la sécurité en Macédoine. Cela a été présenté en

21 annexe à la requête de l'Accusation aux fins de mesures de protection pour

22 les victimes et les témoins.

23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie. C'est justement à

24 partir de ces tous derniers renseignements qui ont été transmis que je vais

25 m'adresser aux deux parties car cela représente une certaine préoccupation

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1 pour nous. Je vais demander aux parties et au conseil de la Défense,

2 notamment, de réagir à la suite de ce que je vais dire.

3 Des rapports secrets ou portant sur les services secrets que nous

4 avons, Maître Godzo, à propos de votre client, font état d'une

5 manifestation qui s'est déroulée le 18 mars 2005, dans la ville de Tetovo.

6 Il s'agissait d'une manifestation qui a été organisée pour soutenir votre

7 client, mais en protestation de la question portant sur la personne portée

8 disparue et il s'agit de votre soutien à propos de l'affaire Rashtanski

9 Lozja.

10 Il nous a été indiqué que la famille de votre client a participé à

11 cette manifestation. Il nous a également été indiqué que lors de cette

12 manifestation, des posters ou des affiches

13 anti-TPIY ont été arborés et qu'il a également été fait mention de l'acte

14 d'accusation du TPIY. Cela s'est passé le 18 mars.

15 Le 22 mars, il semblerait qu'une autre manifestation ait eu lieu, il

16 s'agissait d'apporter un soutien à votre client ainsi qu'à l'accusé

17 Tarculovski et d'ailleurs, à ce sujet, je dirais que cela a eu lieu juste

18 en face de l'immeuble de la Cour suprême à Skopje.

19 Le rapport indique qu'il y a eu quelque 1 500 manifestants, certains,

20 d'ailleurs, ayant poursuivi leur marche en direction du bâtiment du

21 parlement. Les informations que nous avons reçues nous font comprendre

22 qu'il ne s'agissait pas d'une manifestation spontanée, mais plutôt qu'il

23 s'agissait d'une manifestation qui avait été orchestrée et qui présentait

24 tous les indices d'une manifestation organisée, les manifestants ayant,

25 d'ailleurs, été retenus ou choisis hors de Skopje et ont été emmenés à

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1 Skopje. Il y avait des affiches. On nous a également indiqué que

2 finalement, cette manifestation a été une manifestation pacifique.

3 Cela concerne, d'ailleurs, beaucoup plus votre client, Maître Apostolski,

4 plutôt que M. Boskoski, mais il nous a également été indiqué que lors de

5 cette manifestation pacifique du

6 22 mars 2005, à Skopje, des supporters de football d'un comité ont

7 participé à la manifestation. On nous a dit que votre client était le

8 dirigeant de cette formation par le passé et les indications que nous avons

9 reçues nous permettent de comprendre que cette formation a été décrite

10 comme un groupe violent par le passé et nous avons été informés que lors de

11 la manifestation, des appels ont été lancés, des appels pour que des armes

12 et des munitions soient obtenues et ce, toujours pour apporter un soutien à

13 votre client.

14 Eu égard à votre client, M. Boskoski, et je pense toujours à la

15 manifestation du 22 mars, à Skopje, nous avons été informés du fait qu'une

16 partie importante des manifestants, qui ont montré un soutien pour votre

17 client, venait de cette formation qu'on appelle la formation des Lions;

18 elle nous a été décrite comme un groupe de la police, un groupe composé

19 d'ex-membres de la police spéciale, de réservistes de la police qui a été

20 fondée par votre client en 2001 et il y était affilié. On nous a indiqué

21 que cette formation a été démantelée par le ministère de l'Intérieur après

22 la démission de votre client et il nous a été expliqué que cette formation

23 a été démantelée à cause d'incidents graves et sérieux auxquels cette unité

24 a participé.

25 Alors, je ne pense pas que je doive élaborer cela davantage. Je vous

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1 le dis, mais je vous le dis afin de vous expliquer les préoccupations que

2 nous avons lorsque nous pensons à la mise en liberté provisoire de vos deux

3 clients, parce qu'il est évident que la Chambre de première instance est

4 tout à fait certaine des garanties qui ont été offertes à la Chambre de

5 première instance par

6 l'ex-République yougoslave de la Macédoine, mais il n'empêche que nous

7 devons encore gérer et traiter ces problèmes.

8 Je vais vous donner la parole, mais je souhaiterais obtenir une

9 confirmation de votre part, une confirmation afin de savoir si

10 l'information que nous avons reçue est exacte ou non; j'ai vérifié tout

11 cela, mais il se peut que vous parveniez à une conclusion différente.

12 M. GODZO : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. En ce

13 qui concerne la question que vous m'avez posée, je vais parler de la

14 réunion qui s'est tenue à Tetovo, le 18 mars ou plutôt, le rassemblement

15 qui s'est tenue à Tetovo.

16 Ce rassemblement n'a été organisé par personne et ne visait à soutenir

17 aucun groupe politique. Il s'agissait d'un rassemblement politique spontané

18 des villageois de Celopek, à savoir, le village natal de M. Boskoski situé

19 à proximité de Tetovo. Ce rassemblement a eu lieu sur la place principale

20 de Tetovo. Il n'y a pas eu beaucoup de participants à ce rassemblement car

21 ce n'est pas un grand village. Le village de Celopek est un petit village.

22 Il est tout à fait possible qu'au centre de Tetovo, il y avait un certain

23 nombre de passants qui se sont arrêtés pour regarder en tant que

24 spectateurs.

25 Le fait est que M. Boskoski n'a aucunement pris part à l'organisation de

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1 protestation contre ce Tribunal. Il a montré son plus grand respect à

2 l'égard du Tribunal et il a montré à quel point il était dédié au concept

3 d'état de droit. A l'époque où il était ministre de l'Intérieur en

4 République de Macédoine, c'est lui, personnellement, qui a entamé la

5 coopération avec ce Tribunal au sujet d'éventuels incidents qui auraient pu

6 se produire lors des événements de 2001. Par conséquent, en ce qui concerne

7 le rassemblement à Tetovo, le 18 mars, selon moi et selon lui également, je

8 pense, ce rassemblement n'a rien à voir avec lui. Il n'a absolument pas

9 participé à l'organisation de ce rassemblement.

10 Quant à l'autre question soulevée, à savoir, le rassemblement à Skopje, le

11 22 mars, devant la Cour suprême, selon moi, ce rassemblement qui s'est tenu

12 devant la Cour suprême ne visait aucunement la procédure engagée en

13 l'espèce. Ce rassemblement ne visait pas à soutenir Ljube Boskoski. Je ne

14 dispose d'aucune information concernant ces deux rassemblements à titre

15 officiel, mais en tant que ressortissant de la Macédoine, d'après ce que je

16 sais, le rassemblement qui s'est tenu devant la Cour suprême de Skopje

17 concernait essentiellement l'affaire Rashtanski Lozja. Il s'agit d'une

18 autre affaire.

19 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ce que je voulais dire, c'est que ces

20 deux épisodes, ces deux rassemblements, quelles qu'en soient les raisons et

21 même si votre client n'a pas directement participé à leur organisation - ce

22 que je ne laisse aucunement entendre - ce que je veux dire, c'est que ces

23 manifestations ont bel et bien eu lieu. Le fait que ces manifestations ont

24 eu lieu prouve que les accusés jouissent d'une certaine influence,

25 aujourd'hui encore, en République de Macédoine. Pour ce qui est de votre

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1 client, en particulier, ces unités, les Lions, ont été démantelées en

2 raison de leurs antécédents. C'est de cela que je voudrais que vous

3 parliez.

4 M. GODZO : [interprétation] Je vais en parler tout de suite, Monsieur le

5 Président. Depuis que j'ai été commis à la défense de mon client, toutes

6 les questions relatives à cette affaire ont été surveillées par ce

7 Tribunal, mais je ne me souviens d'aucune manifestation organisée depuis ma

8 désignation en tant que conseil de la Défense. Il n'y a pas eu de

9 manifestation publique contre ce Tribunal. Cela ne s'est jamais produit en

10 Macédoine. En Macédoine, la population croit profondément à la justice

11 rendue par ce Tribunal et à l'état de droit. Il n'est aucunement nécessaire

12 de manifester contre une institution à laquelle ils croient.

13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Godzo, ne confondons pas ces

14 deux sujets. Je sais tout à fait, plus que vous ne croyez, que l'ex-

15 République yougoslave de Macédoine a été la première des anciennes

16 républiques yougoslaves à être admise au conseil de l'Europe car j'ai un

17 ami juge qui siège à la Cour européenne des droits de l'homme. Je peux vous

18 dire que la question de la démocratie et des garanties présentées par les

19 autorités macédoniennes n'est pas en cause. Nous n'en doutons absolument

20 pas. Nous savons que la Macédoine croit à l'état de droit, bien entendu.

21 Sinon, la Macédoine ne jouirait pas du respect dont elle jouit au sein du

22 comité des Nations. Ceci n'est pas en cause.

23 Je siège au sein de cette Chambre en compagnie de deux autres Juges.

24 Nous avons été informés de certains rapports établis par les services de

25 Renseignement selon lesquels, le 18 mars, une manifestation avait eu lieu à

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1 Tetovo, le village natal de votre client; ce que vous décrivez comme une

2 manifestation spontanée. Il y avait des affiches qui ont spontanément été

3 présentées contre le Tribunal, et je sais de par mon expérience politique

4 qu'il n'y a jamais d'affiches qui sont spontanément brandies, qui tombent

5 de nulle part. Tout cela est mis à disposition au préalable, donc il n'y a

6 rien de spontané là-dedans.

7 Est-ce que vous souhaitez dire quelque chose à ce sujet ?

8 M. GODZO : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

9 L'ACCUSE BOSKOSKI : [aucune interprétation]

10 M. GODZO : [aucune interprétation]

11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Il y a une certaine distance entre

12 vous-même, le conseil et votre client. Si vous avez besoin de consulter

13 votre client, allez-y, Maître Godzo.

14 M. GODZO : [interprétation] Je sais ce qu'il veut dire.

15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Mais je n'ai reçu aucune interprétation

16 de ses propos. Je ne sais pas ce qu'il a dit. Est-ce que c'est quelque

17 chose que le Tribunal devrait avoir connaissance ?

18 M. GODZO : [interprétation] Oui, très brièvement, Monsieur le Président.

19 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Allez-y.

20 M. GODZO : [interprétation] Mon client souhaitait préciser à la Chambre que

21 l'unité appelée les Lions n'avait pas été créée par lui-même. Elle a été

22 créée par le gouvernement macédonien, et ce, de façon tout à fait légale.

23 Cette unité a été démantelée à la fin de la crise de façon tout à fait

24 légale. C'est ce qu'il voulait dire.

25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Si votre client ressent le besoin

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1 d'ajouter quoi que ce soit par rapport à ce que vous avez déjà déclaré, il

2 est libre de le faire. En principe, la pratique veut que vous parliez en

3 son nom, mais s'il souhaite ajouter quoi que ce soit, vous pouvez tout à

4 fait le consulter. Il peut tout à fait prendre la parole.

5 M. GODZO : [interprétation] Il souhaiterait prendre la parole très

6 brièvement en réalité.

7 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Monsieur Boskoski, vous avez

8 la parole.

9 M. GODZO : [interprétation] Si vous lui permettez, bien sûr.

10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui. Monsieur Boskoski, vous n'êtes pas

11 contraint de prendre la parole. Vous avez tout à fait le droit de garder le

12 silence pendant toute la procédure. Mais si vous souhaitez vous exprimer,

13 nous vous donnons la parole. Je souhaite simplement être tout à fait clair,

14 puisque vous bénéficiez du droit de garder le silence. Si vous souhaitez

15 prendre la parole, tout ce que vous direz sera consigné au compte rendu

16 d'audience. Si nécessaire, tout cela pourra être utilisé dans le cadre de

17 la procédure. Donc, il vous appartient de décider si vous souhaitez prendre

18 la parole ou non.

19 L'ACCUSE BOSKOSKI : [interprétation] Monsieur le Président, je n'avais pas

20 l'intention de prendre la parole, mais un certain nombre de questions ont

21 été abordées ici, et cela m'a contraint de m'exprimer, afin de répéter une

22 fois de plus, que le seul ministre de l'Intérieur depuis 2001, depuis le

23 début du conflit et de la crise en République de Macédoine, a publiquement,

24 par le biais des médias macédoniens et en coopération avec le Tribunal de

25 La Haye, confirmé qu'il croyait profondément en cette institution, soutenue

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1 par la République de Macédoine qui fait partie des Nations Unies. Donc,

2 personne plus que Ljube Boskoski, en tant qu'homme politique, en tant que

3 personne, en tant que père de trois enfants et en tant que profond

4 patriote, croyant au plus profond de lui-même à l'état de droit, aux

5 institutions légales. Personne plus que moi, disais-je, n'a pensé que la

6 crédibilité de l'Etat et du processus de réforme ne pouvait être mis en

7 cause par le fait que j'ai quitté la République de Macédoine. Je n'ai pas

8 fui la République de Macédoine.

9 Je crois profondément en cette institution. Je crois également à la

10 République de Macédoine. Je crois au système judiciaire. Je suis un

11 légaliste, je suis un juriste et personne ne peut me faire croire le

12 contraire.

13 Il n'existe qu'une seule vérité. Je crois en Dieu, je pense que Dieu

14 est de mon côté. Je m'appelle Ljube Boskoski. Ce n'est pas pour cela que

15 Dieu croit en moi, mais simplement parce que je dis la vérité.

16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] On m'informe du fait que nous avons

17 besoin de faire une pause technique. Il nous reste quelques minutes avant

18 de lever l'audience, mais je pense qu'il faut faire la pause toute de

19 suite. Il s'agit simplement de changer les bobines, je pense.

20 L'audience est suspendue. Je pense que nous pouvons tous rester dans le

21 prétoire. Lorsque nous serons informés que les bobines ont été changées,

22 nous pourrons poursuivre nos débats.

23 On m'a informé du fait que nous pouvons poursuivre. Je peux vous

24 assurer que cette audience se terminera dans quelques minutes et nous

25 pourrons conclure. Oui, Maître Apostolski.

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1 M. APOSTOLSKI : [interprétation] J'aimerais répondre brièvement à la suite

2 de l'intervention du Procureur.

3 Dans les éléments de preuve qui m'ont été fournis par le bureau du

4 Procureur à propos de l'acte d'accusation, il y a des déclarations faites

5 par l'accusé Johan Tarculovski. Nous pouvons voir, par conséquent, que sur

6 invitation de la part du ministère de l'Intérieur de la République de

7 Macédoine, l'informant d'une convocation lui demandant de comparaître, dans

8 ce cas d'espèce, M. Tarculovski a réagi. Mais lorsqu'il s'agissait

9 d'informations transmises par d'autres personnes, cela n'est pas recevable

10 conformément à la législation de la République de Macédoine. La seule façon

11 qui permet à une personne d'être convoquée se fait par une convocation

12 écrite qui doit être donnée à la personne.

13 Voilà ce que j'aimerais dire à l'intention du Procureur.

14 Pour ce qui est des supporteurs du club de football, le Tribunal nous a

15 informé qu'il y avait eu des organisateurs de la manifestation qui a eu

16 lieu le 22 mars. J'aimerais indiquer à l'intention de la Chambre que

17 l'accusé Tarculovski a été employé, en 1999, pour assurer la sécurité,

18 qu'il n'a jamais participé à un match de football ou n'a jamais été vu à un

19 match de football et qu'il ne peut, encore moins, être le dirigeant de ce

20 groupe. Je peux informer la Chambre qu'il n'en a jamais été le dirigeant et

21 qu'il n'a jamais organisé un groupe de supporteurs de football. J'aimerais

22 demander à la Chambre de prendre en considération ce fait.

23 Il s'agit d'un homme de famille qui a établi et créé sa propre

24 famille, a un enfant, qui, dans sa jeunesse, a été voir des matchs de foot,

25 mais qui ne peut pas être considéré comme le dirigeant de se groupe. Je

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1 vous remercie.

2 J'aimerais informer la Chambre que M. Tarculovski souhaiterait

3 s'adresser à la Chambre de première instance.

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Monsieur Tarculovski. Je vous

5 fournis le même avis qu'à votre co-accusé : vous avez tout à fait le droit

6 de garder le silence. Personne ne peut vous forcer à parler devant cette

7 Chambre, mais si vous vous exprimez, il faut que vous sachiez que vos

8 propos pourraient être utilisés comme moyens de preuve plus tard.

9 L'ACCUSÉ TARCULOVSKI : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs

10 les Juges, vous êtes en train de débattre de ma requête aux fins de mise en

11 liberté provisoire qui a été déposé en mon nom par mon conseil. Je ne peux

12 qu'approuver ce qu'a dit mon conseil, mais je souhaiterais ajouter quelques

13 phrases. Même si j'ai été arrêté et détenu, je peux vous assurer que si

14 j'avais su qu'il y avait un acte d'accusation dressé contre moi, je me

15 serais présenté à ce Tribunal. Je suis tout à fait disposé à venir à chaque

16 fois qu'on me le demandera. Ce Tribunal est mon seul espoir qui me

17 permettra de prouver mon innocence et de revenir parmi les miens, ma mère,

18 ma fille et ma femme. Mon seul objectif est de m'occuper de ma famille en

19 liberté et de préparer ma défense.

20 J'espère que vous m'entendrez et j'espère que vous comprendrez

21 pourquoi je souhaite être mis en liberté provisoire pour être dans mon

22 pays, en Macédoine, avec ma famille. Je vous remercie.

23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Tarculovski.

24 Je m'adresse à l'Accusation, à propos de ces incidents, de ces

25 manifestations qui ont eu lieu en mars 2005. J'aimerais savoir si vous avez

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1 des observations à faire à ce sujet ? Est-ce que cela représente un sujet

2 de préoccupation pour vous ou est-ce que cela est beaucoup moins grave que

3 je ne l'ai présenté ?

4 M. SMITH : [interprétation] L'Accusation pense qu'il s'agit d'incidents

5 graves, en ce sens que les deux accusés bénéficient d'un soutien fanatique

6 en Macédoine. Certes, cela n'est pas important. Mais du fait de ce qui a

7 été dit par certains membres de l'ancien groupe des Lions qui ont demandé

8 que les armes, et cetera, soient données, cela représente un sujet de

9 préoccupation pour nous. Je pense à l'intimidation des témoins de la part

10 de personnes associées avec l'accusé, du comportement de ces personnes.

11 Cela ne peut pas être considéré comme la faute de l'accusé, mais je pense à

12 la protection des témoins.

13 Puis, Monsieur le Président, pour ce qui est de la précision de

14 l'information qui a été confidentielle et qui fait partie de l'annexe A Ex

15 Parte du 22 avril 2005, en annexe à la requête de l'Accusation,

16 l'Accusation avance que cela est extrêmement précis. Il y a eu un certain

17 nombre d'articles dans la presse écrite qui ont fait état de ces

18 événements. Il faut savoir que les deux organisations les plus importantes

19 pour la sécurité ont été mentionnées dans les rapports. Vous pouvez voir,

20 d'après les annexes, qu'il s'agit de rapports extrêmement complets,

21 extrêmement exhaustifs et nous pourrions, d'ailleurs, convoquer des témoins

22 en se sens.

23 Pour ce qui est des entretiens avec M. Tarculovski, il est vrai qu'il

24 a accordé des entretiens en 2003, un entretien lorsqu'il était membre du

25 ministère de l'Intérieur et un autre peu de temps après. Les circonstances

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1 de sa coopération, à l'époque, sont assez différentes des circonstances qui

2 ont prévalu et qui nous font dire qu'il n'a pas coopéré récemment.

3 Pour ce qui est de verser les pièces à conviction au dossier, à moins

4 qu'il n'y ait d'objection, voilà ce que suggère : vous avez le jeu de

5 documents numérotés de 1 à 8. Nous souhaiterions que cela soit versé au

6 dossier bien que nous allions faire référence essentiellement à ce qui se

7 trouve à l'intercalaire 6 et nous aimerions que cela corresponde au

8 document P1.

9 Pour ce qui est de la demande d'assistance auprès du gouvernement

10 macédonien auquel nous avions demandé de contacter

11 M. Tarculovski qui porte la cote RFA : BS/T07/MAC-0775 [comme interprété],

12 nous aimerions que cela soit versé au dossier sous la cote P2.

13 Nous aimerions que les annexes aux requêtes, qui ont été présentées

14 par l'Accusation, soient versées au dossier. Du fait qu'elles sont

15 présentées en annexe aux requêtes, l'Accusation n'a aucune objection à ce

16 que des pièces à conviction de la Défense soient versées au dossier dans

17 cette affaire.

18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie.

19 J'aimerais vous poser une toute dernière question. C'est une question

20 que j'adresse à Madame le Ministre. Il nous a été dit, auparavant, qu'en

21 Macédoine il existe une loi ou une loi est en train d'être rédigée, loi

22 relative à la protection des témoins. Est-ce que c'est une loi qui existe

23 d'ores et déjà ou qui est en projet ?

24 Mme MLADENOVSKA-GJORGJIVESKA : [interprétation] La loi relative à la

25 protection des témoins a été adoptée au parlement au mois de mai; c'est une

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1 loi qui est effective, mais sa mise en vigueur commencera à compter du 1er

2 janvier 2006, et ce, du fait d'activités supplémentaires qui doivent être

3 effectuées pour pouvoir mettre en œuvre cette loi. Il y a, au ministère de

4 l'Intérieur, un service qui étudiera cette question et qui s'occupera de la

5 protection des témoins et à l'avenir, un conseil pour la protection des

6 témoins sera formé, la loi stipule qui sera membre de ce conseil ex officio

7 et ainsi que pour ce qui est des représentants de cet organe.

8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie, Madame le Ministre,

9 et la Chambre de première instance vous serait extrêmement reconnaissante

10 de bien vouloir faire en sorte que nous puissions obtenir un exemplaire de

11 cette législation dans votre langue, document que nous ferons traduire.

12 J'aimerais savoir si les parties souhaitent intervenir à nouveau.

13 Apparemment, non. Nous allons lever l'audience et nous rendrons notre

14 décision écrite en temps voulu. Mais cela se fera bientôt.

15 Je vous remercie, Madame le Ministre.

16 --- L'audience sur requêtes est levée à 11 heures 11.

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