Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 4 avril 2007

2 [Décision]

3 [Les accusés sont absents]

4 --- L'audience est ouverte à 15 heures 11.

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Veuillez appeler l'affaire.

6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

7 Monsieur les Juges. Il s'agit de

8 l'affaire IT-04-82-PT, le Procureur contre Lubje Boskoski et Johan

9 Tarculovski.

10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.

11 La Chambre siège aujourd'hui et cela s'inscrit dans le cadre de la phase

12 préalable au procès. La Chambre a indiqué par le truchement de ses juristes

13 que les conseils n'étaient pas obligés d'assister à l'audience et que le

14 compte rendu d'audience présenterait les questions que nous allons aborder.

15 Je vois toutefois, et nous en sommes ravis, de voir qu'il y a certains

16 conseils qui ont pris la peine de venir ici.

17 Je m'adresse d'abord à l'Accusation. Monsieur Saxon, vous êtes ici.

18 M. SAXON : [interprétation] Oui, tout à fait. Avec ma collègue Joanne

19 Motoike.

20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.

21 La Chambre telle qu'elle est constituée a été officiellement désignée pour

22 gérer la phase préalable au procès pour, à compter du 12 avril, entendre

23 l'affaire. Il y avait eu des ordonnances préalables rendues par M. le Juge

24 Agius, qui était le Président de la Chambre d'instance numéro II, eu égard

25 à la composition préalable au procès de la Chambre et il faut savoir que

26 cela a été modifié à compter du 2 avril.

27 Entre le 30 mars et le 2 avril, il y avait quatre Juges qui composaient la

28 Chambre préalable au procès, parce que le Juge Agius était toujours membre

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1 de cette Chambre. Cela a été rectifié par son ordonnance rendue le 2 avril.

2 Pour assurer qu'il n'y ait aucune confusion qui règne, nous confirmons les

3 décisions prises au titre de l'article 92 bis et 92 ter ainsi que les

4 décisions prises en matière de mesures de protection qui ont été rendues

5 vendredi 30 mars 2007. Nous avions pensé qu'il était primordial de donner

6 autant de préavis que possible aux parties à ce sujet.

7 La Chambre est maintenant composée et cette Chambre entendra l'affaire. Il

8 y a un certain nombre de requêtes qui sont pertinentes pour la préparation

9 du procès ainsi que pour le procès. Nous avons pensé qu'il était essentiel

10 de les étudier et de les rendre aussi rapidement que possible.

11 Aujourd'hui, nous nous proposons de rendre des décisions orales qui portent

12 sur six, voire pour être plus précis sept de ces requêtes. Les autres

13 requêtes sont beaucoup plus complexes et feront l'objet de décisions

14 écrites qui seront rendues dans un avenir proche. Je me rends compte qu'il

15 y a d'ailleurs davantage de requêtes qui sont déposées. Nous allons faire

16 de notre mieux pour essayer de ne pas être complètement suffoqués par cette

17 vague de requêtes.

18 La première de ces décisions que nous allons rendre aujourd'hui est

19 afférente à la requête présentée par l'Accusation aux fins d'autorisation

20 d'ajouter des pièces à conviction supplémentaires à sa première liste de

21 pièces à conviction amendée avec les annexes A à E confidentielles qui ont

22 été déposées le 16 janvier 2007. La Défense de Boskoski a répondu. Il n'y a

23 pas eu de réponses apportées par la Défense de Tarculovski et l'Accusation

24 a répondu à cela.

25 L'Accusation demandait l'autorisation d'ajouter quatre documents à sa

26 première liste de pièces à conviction amendée qui avait été déposée le 31

27 mars 2006. La Défense de M. Boskoski s'est opposée à cela. Il faut savoir

28 que la première liste de pièces à conviction amendée a été déposée

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1 conformément à une ordonnance rendue par la Chambre préalable au procès de

2 l'époque. Il avait été demandé à l'Accusation de présenter cela au plus

3 tard le 31 mars 2006.

4 Les quatre documents sont les documents suivants : le document 989, il

5 s'agit d'une photographie du cadavre d'une des victimes qui est censée être

6 une victime de l'un des chefs d'accusation de meurtre et assassinat de

7 l'acte d'accusation, l'intention étant de verser au dossier cette

8 photographie par le truchement d'un témoin de l'Accusation. Cette

9 photographie a été communiquée à la Défense le

10 16 août 2006. L'Accusation avait indiqué que la photographie avait été

11 omise de façon tout à fait accidentelle de sa première liste de pièces à

12 conviction modifiée.

13 Le deuxième document est le document 990. Il s'agit d'un document relatif

14 aux autorisations émises par le gouvernement macédonien à l'intention du

15 bureau du Procureur pour lui octroyer l'accès à des renseignements

16 considérés secrets. Une partie de ce document est également une liste de

17 documents qui ont été scannés dans les différentes archives du ministère de

18 l'Intérieur, qui se trouvaient d'ailleurs inclus dans la première liste de

19 pièces à conviction modifiée de l'acte d'accusation. Ce document avait été

20 communiqué à la Défense le 31 mars 2006, mais a été omis par mégarde de la

21 première liste de pièces à conviction amendée. L'Accusation indique que

22 cette pièce 990 est pertinente afin d'établir l'authenticité et la filière

23 de conservation des documents inclus dans cette liste.

24 Le troisième document est le document 991. Il s'agit d'une liste de

25 documents fournie par le gouvernement macédonien au bureau du Procureur le

26 15 mars 2006. Nombreux parmi ces documents sont des documents qui sont

27 inclus dans la première liste de pièces à conviction amendée. Le document

28 991 semble avoir été communiqué à la Défense le 16 janvier 2007. Une fois

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1 de plus, l'Accusation utilisera ce document qu'elle considère comme

2 pertinent pour établir l'authenticité et la filière de conservation des

3 autres documents.

4 Nous avons également le document 992 qui contient des annexes à la

5 déclaration du témoin, de M. Peter Bouckert. L'intention est de verser au

6 dossier ce document par le truchement de ce témoin.

7 Ces documents ne faisaient pas partie de la première liste de pièces

8 à conviction amendée, et cela, à la suite d'un oubli. Ils ont été

9 communiqués à la Défense le 28 avril 2006 dans leur version anglaise et le

10 23 mai 2006 en langue macédonienne. Les mêmes documents font également

11 l'objet d'une requête séparée de l'Accusation qui demande que des annexes

12 supplémentaires puissent être présentées en annexe à la déclaration écrite

13 de Peter Bouckert et cela a été déposé le 12 janvier 2007. Etant donné que

14 ces requêtes sont identiques, la Chambre tranchera cette question au vu de

15 cette décision et considérera la requête du 12 janvier 2007 comme nulle et

16 non avenue.

17 Il s'agit de la septième requête dont j'avais parlé lorsqu'au début j'ai

18 indiqué que nous allions rendre six décisions.

19 En dernier lieu, l'Accusation a précisé qu'un document qui est le procès-

20 verbal d'une réunion du 12 novembre 2003 de la commission chargée de mener

21 à bien l'enquête sur les événements à Ljuboten était en fait déjà inclus

22 sur la liste des pièces à conviction, et par conséquent, il n'y a aucune

23 autorisation qui a été demandée à propos de ce document contrairement à ce

24 qui avait été indiqué préalablement par l'Accusation.

25 La Défense de Boskoski s'oppose à la requête en invoquant le fait que

26 l'Accusation n'a pas respecté l'ordonnance rendue par la Chambre le 15

27 décembre et que l'Accusation n'a pas su montrer de bonnes raisons ou des

28 motifs convaincants en indiquant qu'il s'agissait tout simplement d'un

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1 oubli ou d'une omission. Un oubli ou une omission ne peuvent pas être

2 considérés comme des raisons et des motifs convaincants. Il est également

3 dit que si ces documents venaient à être ajoutés cela pourrait causer un

4 préjudice. Pour ce qui est de la pertinence des documents 991 et 992, la

5 Défense s'oppose également à cela.

6 Nous aimerions indiquer également à propos de cette requête et des autres

7 requêtes que nous allons aborder aujourd'hui, qu'il y a une différence

8 entre l'admission des éléments de preuve d'un document qui est une pièce à

9 conviction et le fait que ce document fait partie de la Règle 65 ter. Le

10 but est de notifier la Défense. L'Accusation veut simplement indiquer à la

11 Défense qu'elle a l'intention de fonder son argumentaire sur ce document.

12 Cette notification permet à la Défense de se préparer en connaissance de

13 cause. Dans certains cas, c'est évident qu'une pièce à conviction est

14 manifestement non pertinente ou n'est pas admise pour cette raison ou pour

15 d'autres raisons. Lorsque cela est clair, il va dans l'intérêt de tout le

16 monde que la Chambre décide lors de la phase préalable au procès, d'exclure

17 le document de l'affaire et d'éviter que l'on perde du temps à préparer ce

18 document.

19 Dans de nombreux cas, toutefois, les questions ayant une incidence

20 sur l'admissibilité d'une pièce à conviction que l'on se propose de

21 présenter ne sont pas toujours très claires ou fond l'objet d'un litige.

22 Dans ces cas, il est nécessaire, en règle générale, de surseoir à la prise

23 de décisions relative à l'admission du document jusqu'à ce que la

24 pertinence des éléments de preuve ait été exposée à la Chambre. S'il y a

25 une objection à l'admission, l'objection peut faire l'objet de la décision

26 qui sera atteinte sur la base des éléments de preuve pertinents et non pas

27 seulement sur la base des échanges d'écritures entre les conseils.

28 Les documents que le Procureur se propose maintenant d'ajouter à sa

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1 liste 65 ter sont pertinents ou fournissent davantage de détails à tout

2 l'arsenal des éléments à charge. Ces documents ont été communiqués à la

3 Défense le 16 août 2006, le 31 mars 2006, le

4 28 avril, le 23 mai 2006 et le 16 janvier 2007 respectivement. A savoir,

5 bien avant le début prévu pour le procès. La requête ne porte que sur

6 quatre documents sur un total de quasiment 1 000 documents que l'Accusation

7 a l'intention de verser au dossier pendant le procès.

8 La Chambre est d'avis que la Défense aura suffisamment de temps pour

9 préparer sa Défense eu égard à ces documents. La Défense ne souffrira

10 d'aucun préjudice si ces documents sont ajoutés à la liste 65 ter de

11 l'Accusation, même s'ils sont ajoutés après la date butoir qui avait été

12 préconisée par la Chambre l'année dernière.

13 En dépit du fait que l'Accusation n'a pas été à même de respecter ses

14 obligations pour ce qui est du temps qui avait été préconisé, nous

15 comprenons qu'il est tout à fait compréhensible que quelques documents

16 aient fait l'objet d'un oubli ou d'une omission au vu du nombre de

17 documents. Donc nous pensons que les motifs évoqués sont suffisamment

18 convaincants.

19 Par conséquent, il est fait droit à la requête.

20 La deuxième requête concerne un deuxième rapport d'expert de la part du Dr

21 Simon Eichner avec une annexe, l'annexe A qui a été déposée le 30 janvier

22 2007. Seule la Défense de Boskoski a répondu. Il y a eu deux autres

23 répliques de la part de l'Accusation suivies d'une autre duplique de la

24 part de la Défense de Boskoski.

25 Le 30 janvier 2007, l'Accusation a présenté un deuxième rapport d'expert

26 émanant du Dr Simon Eichner. Il travaille pour l'Institut de criminologie

27 de la Bavière. L'Accusation avance que ce rapport est pertinent et qu'il a

28 une valeur probante pour les éléments à charge de l'Accusation, dans la

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1 mesure où il se fonde sur l'entreprise criminelle commune, qu'il fait

2 référence aux chefs d'inculpation de meurtre et d'assassinat, et dans la

3 mesure où il est question des mesures prises par la police macédonienne

4 afin de mener à bien l'enquête sur les événements de Ljuboten.

5 L'Accusation a indiqué qu'elle avait besoin d'aide et qu'elle avait envoyé

6 une demande d'assistance au gouvernement de la Macédoine le 11 juillet

7 2005, et ce, afin d'obtenir trois armes à feu qui ont été saisies ou

8 confisquées à Ljuboten le 12 août 2001. Il s'agit donc de l'un des trois

9 jours qui correspondent à la période de temps reprise dans l'acte

10 d'accusation pour ces chefs d'inculpation bien précis. Les armes ont été

11 transportées en Allemagne pour faire l'objet d'une analyse de la part du Dr

12 Eichner, et c'est le

13 18 mai 2006. Le Dr Eichner n'a pas terminé son rapport avant le

14 15 janvier 2007 et le rapport a été communiqué à la Défense quelques jours

15 plus tard ou plus précisément le 24 janvier 2007.

16 La Défense de Boskoski réfute ou refuse la requête présentée par

17 l'Accusation en indiquant que l'Accusation n'a pas respecté la date butoir

18 précise établie par la Chambre pour la communication des rapports d'expert,

19 qui était la date également du 31 mars 2006; que le rapport n'est pas

20 pertinent et que cela ne ferait que prolonger de façon indue la procédure.

21 La Défense de Boskoski indique que jusqu'au 24 janvier 2007 elle n'avait

22 absolument pas été informée du fait que ce rapport avait été demandé et

23 qu'il a fallu au bureau du Procureur plus de cinq ans et demi pour obtenir

24 le rapport.

25 D'ailleurs, à ce sujet, la Chambre indique que l'acte d'accusation n'a été

26 confirmé que le 9 mars 2005. Par conséquent, aucune mesure de la sorte

27 n'aurait pu être prise avant, et que par conséquent, l'Accusation a agi de

28 cette façon quatre mois après la confirmation de l'acte d'accusation.

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1 Nous venons maintenant à la question de procédure préliminaire soulevée par

2 la Défense qui prétend que l'Accusation n'a présenté aucun nouvel argument

3 dans sa réplique. Il est dit que les questions soulevées n'étaient pas

4 mentionnées dans l'acte d'accusation ni dans le mémoire préalable au

5 procès, que donc la Défense n'a pas été informée comme il convient.

6 L'Accusation dans sa réplique s'établit sur un argument, et selon la

7 Chambre, il a été clairement démontré qu'aucun nouvel argument n'était

8 avancé. La pertinence également a été démontrée. Il n'y a donc aucune

9 raison de ne pas faire droit à la requête présentée par l'Accusation aux

10 fins d'obtenir l'autorisation de déposer une réplique.

11 Après avoir analysé la question, il ressort clairement que le rapport revêt

12 une certaine pertinence et pourrait étayer la thèse initiale de

13 l'Accusation selon laquelle les forces de police macédonienne ont contraint

14 les habitants albanais de souche de Ljuboten à signer des procès-verbaux de

15 confiscation d'armes, ce qui pourrait indiquer que ces personnes

16 possédaient effectivement des armes ou des munitions, alors que ces armes

17 étaient en possession de la police, qu'ils les détenaient à un autre

18 endroit.

19 L'accusation est d'avis qu'elle est en mesure de démontrer le but de

20 l'entreprise criminelle commune, lequel était de diriger une attaque

21 illicite contre les civils et les biens civils dans le village de Ljuboten,

22 une attaque non justifiée par les nécessités militaires, ce qui fait

23 l'objet d'accusations précises dans l'acte d'accusation en vigueur.

24 Compte tenu de ce qui précède, la Chambre de première instance est d'avis

25 que ce rapport semble présenter une valeur probante, et même si les délais

26 prévus pour les rapports d'expert n'ont pas été respectés, nous pensons que

27 des motifs convaincants ont été présentés au sens de l'article 127 du

28 Règlement. La Chambre pense donc qu'il est dans l'intérêt de la justice que

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1 ce rapport soit versé au dossier au moment de la comparution du Dr Eichner,

2 comme il avait été prévu. En conséquence, la Chambre de première instance

3 fait droit à la requête.

4 S'agissant de la troisième requête dont nous allons parler aujourd'hui,

5 celle par laquelle l'Accusation demande l'autorisation d'ajouter

6 (expurgé), ceux du Dr Zladko Jacovski et du

7 (expurgé) à la deuxième liste de témoins modifiée et

8 l'autorisation de supprimer de sa liste deux témoins, à savoir le témoin

9 Georgievski et le témoin Ramadani, accompagnée des annexes A à C. La

10 requête en question a été déposée le 1er mars 2007. La Défense de Boskoski y

11 a répondu, l'Accusation quant à elle a présenté une réplique.

12 Les deux témoins supplémentaires sont des experts en médecine légale pour

13 ce qui est du Dr Jacovski et (expurgé).

14 Ces experts témoigneront sur les faits et présenteront leur avis d'expert

15 concernant les lésions des victimes des crimes reprochés dans l'acte

16 d'accusation. L'acte d'accusation demande également l'autorisation de

17 supprimer deux témoins figurant actuellement sur sa liste de témoins. Le Dr

18 Jacovski a pratiqué l'autopsie sur l'une des victimes et il est prévu que

19 dans son témoignage il indique que la victime a présenté de nombreuses

20 blessures suite à l'utilisation d'un objet contondant. L'Accusation avance

21 que ces éléments de preuve pourront établir l'existence d'une entreprise

22 criminelle commune et le fait que les crimes reprochés étaient la

23 conséquence naturelle et prévisible de cette entreprise criminelle commune,

24 et que des membres de la police macédonienne à certains endroits a soumis

25 des civils, des habitants de Ljuboten à des passages à tabac et à d'autres

26 formes de traitement cruel ainsi qu'il est reproché dans l'acte

27 d'accusation.

28 (expurgé) deux détenus qui ont été emmenés à l'hôpital de

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1 Skopje, qui avaient été placés en détention par la police. Ces personnes

2 dont les noms figurent dans l'acte d'accusation comme étant victimes de

3 traitement cruel. (expurgé) indiquera qu'ils ont été frappés avant

4 d'arriver à l'hôpital et ont subi des blessures graves. Certaines personnes

5 ont modifié des dossiers qu'elle a préparés s'agissant de deux personnes en

6 inscrivant la lettre X là où elle avait indiqué que ces personnes avaient

7 été frappées par la police. Dans un cas, on a ajouté les mots "à la tête et

8 à la poitrine."

9 Pour ce qui est de la pertinence, l'Accusation fait valoir que ces preuves

10 prouveront l'existence d'une entreprise criminelle commune et des

11 allégations de traitement cruel ainsi que les allégations selon lesquelles

12 Boskoski n'a pas mené l'enquête qui s'imposait.

13 L'Accusation fait valoir qu'elle a demandé l'assistance des autorités

14 macédoniennes afin d'entrer en contact avec ces témoins en janvier 2007 et

15 qu'elle interrogé ces personnes et a recueilli leurs déclarations écrites

16 en février 2007.

17 La Défense de Boskoski s'oppose à cette requête visant à ajouter les

18 deux témoins précités au motif que les éléments de preuve proposés ne sont

19 pas pertinents et que les délais concernant la communication des rapports

20 d'expert n'ont pas été respectés. La Défense estime que l'Accusation n'a

21 pas fait preuve de la diligence voulue, ce qui entraînerait un préjudice

22 pour la Défense s'agissant, notamment la nécessité de procéder à une

23 enquête supplémentaire et d'effectuer certains préparatifs.

24 L'Accusation fait remarquer que la Défense de Boskoski a déposé sa

25 réponse hors délai.

26 Selon la Chambre, les deux témoins dont on propose la comparution

27 sont au moins en partie des témoins experts. Par conséquent, le délai de 30

28 jours prévu à l'article 94 bis doit s'appliquer. La réponse de la Défense a

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1 donc été déposée dans les délais.

2 Le Règlement de procédure et de preuve est muet pour ce qui est de la

3 situation actuelle. L'article 73 bis(E) permet à l'Accusation même après

4 l'ouverture du procès de déposer une requête aux fins de modifier le nombre

5 de témoins à comparaître. Cette requête peut être accueillie si cela est

6 dans l'intérêt de la justice. La Chambre considérera la requête présentée à

7 la lumière de ces dispositions.

8 Bien entendu, pour que des éléments de preuve soient considérés

9 admissibles, il faut démontrer leur pertinence et leur valeur probante

10 conformément à l'article 89(C) du Règlement. Pour ce qui est de l'intérêt

11 de la justice, la Chambre doit déterminer si la valeur probante des

12 éléments de preuve présentés est largement inférieure à la nécessité de

13 garantir un procès équitable conformément à

14 l'article 89(D). Il s'agit notamment de s'assurer que l'intérêt de la

15 Défense n'est pas lésé.

16 Les témoins proposés sont des médecins qui ont examiné les victimes

17 peu de temps après que celles-ci ont été blessées, comme il est allégué

18 dans l'acte d'accusation. A première vue, leur témoignage est pertinent et

19 revêt une certaine valeur probante. Les rapports d'expert en question ont

20 été communiqués le 16 février et le

21 23 février 2007. Avant cela, les exemplaires des rapports d'autopsie

22 pratiquée par le Dr Jacovski sur la victime mentionnée dans son rapport

23 d'expert ont été communiqués à la Défense dès le

24 7 novembre 2005. En outre, en décembre 2006, l'Accusation et la Défense de

25 Boskoski se sont mis d'accord sur le nombre d'habitants de Ljuboten

26 décédés, mais aucun accord n'a été conclu s'agissant de la personne

27 mentionnée dans le rapport du Dr Jacovski.

28 Un accord semblable a été conclu entre l'Accusation et la Défense de

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1 Tarculovski en février 2007. Mais là encore, il n'a pas été fait mention de

2 la victime alléguée.

3 S'agissant du (expurgé), il semble que l'Accusation a demandé

4 l'assistance des autorités macédoniennes pour qu'elle lui permette

5 d'examiner des dossiers médicaux à l'hôpital de Skopje, dossiers

6 concernant, entre autres, les deux personnes mentionnées dans le rapport

7 proposé et afin de pouvoir entendre (expurgé) le

8 29 janvier 2007. Une requête d'assistance semblable concernant l'accès au

9 dossier avait été déposée à deux reprises en 2003. Toutefois, les autorités

10 macédoniennes n'y avaient pas répondu.

11 Compte tenu du fait que dans le cas du Dr Jacovski un rapport d'autopsie

12 concernant cette même victime a été préparé et communiqué à la Défense en

13 novembre 2005 et qu'un accord concernant ce décès avait été envisagé à la

14 fin de l'année 2006, même si cela n'a rien donné, la Chambre est convaincue

15 qu'il existe des motifs convaincants pour justifier le dépôt tardif du

16 rapport du Dr Jacovski. De surcroît, nous constatons que l'Accusation a

17 déployé des efforts substantiels pour obtenir les dossiers médicaux sur

18 lesquels se fondait le nouveau rapport du (expurgé). L'Accusation a

19 cherché à obtenir ces dossiers dès 2003.

20 Nous sommes donc convaincus qu'il existe des motifs convaincants pour

21 justifier le dépôt tardif du rapport d'expert en question, ces informations

22 n'ayant pu être obtenues auprès des autorités macédoniennes qu'au début de

23 l'année 2007.

24 S'agissant du préjudice éventuel causé à la Défense, les deux rapports

25 proposés ont été communiqués à la Défense deux mois environ avant la date

26 prévue pour l'ouverture du procès. La Défense a été prévenue dès novembre

27 2005 que l'Accusation entendait faire comparaître le Dr Jacovski. Compte

28 tenu de ce qui précède, la Chambre pense que les droits de l'accusé ne sont

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1 pas mis en péril si la Défense dispose de suffisamment de temps pour se

2 préparer eu égard à ces déclarations supplémentaires.

3 Nous pensons donc que l'on pourrait prévoir davantage de temps avant

4 la comparution de ces deux témoins. La Chambre remarque que ces témoins ne

5 devraient pas comparaître au début de la présentation des moyens à charge.

6 Bien entendu, si des délais supplémentaires sont nécessaires, une demande

7 pourra être présentée à cet effet.

8 En ce qui concerne la requête visant à supprimer de la liste deux témoins,

9 il n'y a eu aucune opposition de la part de la Défense et nous ne voyons

10 aucune raison de ne pas faire droit à cette requête.

11 Par ces motifs, la requête en question est accueillie.

12 Nous en venons maintenant à la quatrième requête, celle déposée par la

13 Défense de Boskoski, le 8 mars 2007. Cette requête concerne le respect des

14 dispositions prévues à l'article 68. La Défense fait valoir que la plupart

15 des documents communiqués par l'Accusation en application de l'article 68

16 ne tombent pas dans le champ d'application dudit article et sont souvent

17 dénués de pertinence vis-à-vis des accusations. Cette question a été

18 soulevée pour la première fois dès avril 2006 à l'occasion d'une réunion

19 tenue en application de l'article 65 ter.

20 Suite à une requête présentée par la Défense, l'Accusation avait

21 communiqué à cette dernière une liste de 148 critères de recherche utilisés

22 pour localiser d'éventuels documents relevant de l'article 68. La Défense a

23 ensuite demandé à l'Accusation de lui expliquer les mesures qu'elle avait

24 prises pour examiner ces documents. Cela a été fait à deux reprises en

25 janvier et en

26 février 2007. L'Accusation n'a pas répondu à cette demande et a refusé de

27 le faire.

28 Selon la Défense, d'après ce qu'a compris la Chambre, l'Accusation

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1 n'a pas respecté ses obligations aux termes de

2 l'article 68 et n'a fait que noyer la Défense sous des documents en lui

3 laissant le soin de trouver les documents pertinents. La Défense a demandé

4 à la Chambre de rendre des ordonnances obligeant l'Accusation à respecter

5 ses obligations.

6 L'Accusation, pour sa part, fait valoir qu'elle a rempli ses

7 obligations aux termes de l'article 68 et qu'elle a activement recherché

8 d'éventuels documents relevant de l'article 68 en sa possession afin de

9 déterminer ce qui devait être communiqué. Les documents communiqués en

10 application de l'article 68 l'ont été dès décembre 2005. L'Accusation a

11 procédé à des recherches dans ses fichiers électroniques, examinant environ

12 65 000 documents dont plus de 5 000 ont ensuite été transmis à l'équipe

13 chargée du procès pour qu'elle les examine plus avant. Sur ces 5 000

14 documents, seuls 2 895 ont été sélectionnés comme relevant de l'article 68.

15 Ils ont été communiqués à la Défense. La plupart de ces documents avaient

16 été communiqués à la date du 31 mars 2006.

17 De surcroît, l'Accusation avance que pour ce qui est de chaque document

18 communiqué au titre de l'article 68, une liste détaillée a été fournie

19 décrivant la teneur des documents. De plus, lorsque des éléments à décharge

20 avaient été communiqués au bureau du Procureur à titre confidentiel, ce

21 dernier a fait le nécessaire pour essayer d'obtenir l'accord de la source

22 comme il est prévu dans le Règlement.

23 L'Accusation, selon la Chambre, a distingué à juste titre cette affaire de

24 l'affaire portée devant le TPIR, l'affaire Karemera. Dans cette affaire, il

25 était ressorti clairement que l'Accusation ne devait pas noyer des

26 documents importants parmi des documents dénués de pertinence, mais devait

27 faire en sorte que ces documents à décharge soient raisonnablement

28 accessibles.

Page 253

1 L'article 68 prévoit l'obligation continuelle de la part de

2 l'Accusation de communiquer à la Défense les éléments à décharge si elle

3 sait que ces éléments sont en sa possession et s'ils sont à décharge en ce

4 sens qu'ils tendent à prouver l'innocence de l'accusé ou qu'ils peuvent

5 porter atteinte à la crédibilité des éléments à charge.

6 Il ressort clairement des dispositions de cet article que

7 l'Accusation a cette obligation. Le fait est que l'Accusation doit examiner

8 de nombreux documents, mais le Règlement impose à l'Accusation l'obligation

9 de procéder aux recherches nécessaires. Il est toutefois nécessaire de

10 communiquer à la Défense tout élément à décharge tendant à prouver

11 l'innocence de l'accusé ou à diminuer sa responsabilité ainsi que tout

12 élément pouvant porter atteinte à la crédibilité des éléments à charge. En

13 cas de doute, l'Accusation devra toujours préférer la communication que les

14 éléments soient à décharge ou pas.

15 Souvent les documents communiqués s'avéreront ne pas être des

16 éléments à décharge lorsque la Défense les aura examinés en vue de la

17 préparation au procès; peut-être que la Défense ne pourra pas s'en servir

18 au procès, et ce, même si aux yeux à l'Accusation les éléments communiqués

19 étaient des éléments à décharge.

20 En l'espèce, la Chambre est d'avis que l'Accusation a déployé des

21 efforts certains pour examiner les documents en question et a restreint le

22 volume des documents potentiellement à décharge même si la Défense de

23 Boskoski semble ne pas être d'accord avec cela. La Chambre n'a aucune

24 raison de penser que l'Accusation n'a pas respecté les obligations que lui

25 impose l'article 68.

26 L'accusé, bien entendu, a le droit de disposer de suffisamment de

27 temps pour préparer sa défense. Si les examens en cours pour essayer de

28 localiser des éléments relevant de l'article 68 empêchent l'accusé de

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1 préparer comme il lui convient à sa défense, la Défense pourra soulever

2 cette question et si nécessaire demander une prorogation de délai pour se

3 préparer.

4 Cette requête est donc rejetée.

5 Passons maintenant à la quatrième requête de l'Accusation qui demande la

6 possibilité d'ajouter des pièces à conviction à sa première liste de pièces

7 à conviction amendée avec des annexes confidentielles de A à F. C'est une

8 requête qui a été déposée le

9 9 mars 2007, qui a fait l'objet d'une réponse de la part des deux équipes

10 de la Défense.

11 L'Accusation souhaite ajouter 14 documents à sa liste de pièces.

12 Parmi ces documents, cinq documents ont été obtenus lors d'un entretien

13 avec un médecin expert en médecine légale, qui est un témoin que

14 l'Accusation se propose de convoquer. Il s'agit des documents qui ont trait

15 à des blessures subies par les victimes des crimes allégués. Cela a été

16 communiqué à la Défense en macédonien le 23 février de cette année, en

17 anglais le 5 mars, bien qu'un des documents, le document 993, ne semble

18 avoir été communiqué qu'en macédonien.

19 La Défense de Boskoski remet en question la pertinence de quatre de ces

20 documents, les documents 993, 994, 996 et 997. Parmi les documents, deux

21 documents ont trait à l'exhumation de dix corps qui sont des victimes

22 alléguées du village de Ljuboten. Dans l'un de ces documents il y a un jeu

23 de 293 photographies prises pendant l'exhumation et les autopsies qui ont

24 suivies l'exhumation. L'autre document est une lettre du directeur de

25 l'institut médico-légal, institut responsable des exhumations. Il s'agit

26 également des autopsies. Cela a été communiqué à la Défense le 23 février

27 2007 et le 9 mars 2007 respectivement; et la Défense Boskoski a indiqué à

28 cet égard que ces documents faisaient double emploi et qu'ils n'étaient

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1 donc pas pertinents.

2 Le document 1000 est un rapport établi par le parquet de la Macédoine et

3 c'est un rapport qui porte sur des événements qui se sont déroulés à

4 Ljuboten entre le 10 et le 14 avril 2001.

5 Le document 1001 est un rapport établi par le Dr Jacovski, mentionné

6 précédemment, rapport établi à l'intention du parquet sur les tentatives

7 qu'il a faites entre les 12 et 15 août 2001 afin d'inspecter l'endroit où

8 les corps avaient été trouvés. Ces deux documents ont été obtenus des

9 autorités macédoniennes. Ils ont tous les deux été communiqués à la Défense

10 le 18 novembre 2005 et le

11 20 décembre 2005 respectivement. La Défense Boskoski indique que ces

12 documents ne présentent aucune pertinence et qu'il s'agit de l'Accusation

13 qui expose une nouvelle théorie du complot.

14 Trois documents, les documents 1002, 1003 et 1004 sont des dossiers de

15 l'hôpital de la ville de Skopje, dossiers relatifs à trois patients

16 victimes des crimes allégués. Ces documents ont été communiqués à la

17 Défense le 23 février, le 5 et le 9 mars 2007. Une fois de plus, la Défense

18 de Boskoski avance que ces documents font double emploi et ne sont pas

19 pertinents. Les deux autres documents, le document 1006 et le document 1007

20 sont des documents consignant des appels téléphoniques ayant été passés à

21 partir de deux téléphones portables qui, il est allégué, ont appartenu aux

22 accusés et à un autre témoin que l'on se propose de faire comparaître dans

23 cette affaire.

24 Ils ont été communiqués à la Défense le 9 mars 2006 bien qu'il faille

25 indiquer qu'une partie du document 1007 n'a été communiquée que le 9 mars

26 2007. Les deux équipes de la Défense contestent la pertinence de ces

27 documents et indiquent qu'il n'y absolument aucune preuve indiquant que ces

28 téléphones appartenaient à l'accusé Tarculovski et à un autre témoin,

Page 256

1 qu'ils ont l'intention de faire paraître dans cette affaire.

2 Il y a également été indiqué que la date butoir n'avait pas été respectée,

3 qu'il n'y avait pas eu de motifs assez convaincants exposés, que

4 l'Accusation n'avait pas agi avec diligence et que l'application n'avait

5 pas -- la requête plutôt n'avait pas été présentée à temps et que ces

6 amendements de dernière minute ne feraient que causer des retards et un

7 préjudice.

8 Alors la déclaration brève qui a été reçue par la Chambre à propos de la

9 teneur de ces documents est telle que la Chambre est d'avis que ces

10 documents sont suffisamment pertinents, et nous pensons à chacun des

11 documents proposés, bien qu'il soit exact que dans un ou deux cas, cela

12 sera tranché définitivement, seulement et quand les documents seront versés

13 au dossier, ce, compte tenu des éléments de preuve précis avancés dans les

14 documents et les éléments de preuve qui seront présentés pour corroborer

15 ces documents.

16 Quoi qu'il en soit, ces documents ont été communiqués depuis longtemps à la

17 Défense, dans de nombreux cas, et nous pensons que pour leur partie

18 essentielle, la Défense pouvait s'attendre à ce qu'ils soient inclus. De

19 toute façon, ils ont été communiqués dans tous les cas avant le procès, et

20 à un moment qui est tel que nous ne nous attendons pas à ce que cela cause

21 un préjudice pour la Défense si ces documents venaient à être ajoutés à la

22 liste des pièces de l'Accusation. Surtout que dans la plupart des cas, dans

23 quasiment tous les cas, les documents semblent porter sur des témoins qui

24 se trouvent sur la liste des témoins de l'Accusation.

25 Par conséquent et pour ces motifs, il est fait droit à la requête.

26 La dernière requête est une requête visant l'exclusion des pièces à

27 conviction proposées par l'Accusation et visant la protection des droits

28 fondamentaux des accusés. C'est une requête qui a été déposée le 16 mars

Page 257

1 2007. Une réponse a été apportée par la Défense de Boskoski et une réplique

2 a été présentée par l'Accusation. L'Accusation avance qu'un grand nombre de

3 pièces à conviction, notamment ceux qui se trouvent inclus dans la liste

4 des pièces à conviction de l'Accusation au titre de l'article 65 ter ne

5 sont pas pertinents, font double emploi. Il est également indiqué que

6 certaines des pièces à conviction ont été présentées deux ou trois fois,

7 qu'elles portent sur des questions qui ne font pas l'objet de litige et

8 qu'elles ne permettent pas d'alléguer qu'il y a une entreprise criminelle

9 commune, ou que lorsqu'il y a l'entreprise criminelle commune cela dépasse

10 la portée de l'acte d'accusation.

11 Il a également été avancé que l'Accusation a à dessein maintenu sur

12 sa liste de pièces à conviction des pièces qui n'ont aucune pertinence, et

13 ce, afin de porter préjudice à la Défense. Il a également été indiqué que

14 certaines des pièces n'ont pas été traduites ou n'ont pas été entièrement

15 traduites. Il s'agit de pièces qui, pour la plupart sont répétitives,

16 cumulatives et sont essentiellement des documents permettant de comprendre

17 les antécédents, ce qui fait qu'il s'agit de documents qui ne sont pas

18 pertinents et qui font double emploi.

19 L'Accusation répond que ces documents sont à la fois pertinents et

20 ont une valeur probante. Elle indique qu'à la suite d'une demande présentée

21 par la Défense de Boskoski en février 2007, l'Accusation a examiné quelque

22 630 documents [comme interprété] de sa liste. A la suite de cet examen,

23 elle a supprimé de sa liste 17 de ces documents, et qu'elle a fourni à la

24 Défense un tableau permettant d'identifier chaque pièce à conviction avec

25 un descriptif et la pertinence de la pièce à conviction. En réponse à des

26 questions posées par la Défense Boskoski, l'Accusation a également

27 identifié des parties pertinentes de certaines pièces particulièrement

28 volumineuses pour permettre à la Défense de mieux examiner ou étudier ces

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1 pièces.

2 Si la Chambre pouvait rapidement mentionner certaines questions qui

3 portent ou qui ont trait à certaines écritures bien précises de la Défense,

4 car il semblerait que dans le cas du document 264, il s'agit dans les faits

5 du même document que le document 162, et le document 241 est, en fait, le

6 même que le document 252. Par conséquent, l'Accusation demande

7 l'autorisation de supprimer dans les deux cas l'un des documents faisant

8 double emploi. C'est une autorisation à laquelle il est fait droit, sinon

9 il est avancé qu'il n'y a pas de répétition dans les documents ou de

10 documents faisant double emploi.

11 La Défense insiste beaucoup sur certains documents qui, d'après elle,

12 n'ont pas de pertinence telle que cela est indiqué dans le paragraphe 25 de

13 la requête. Ils ne sont d'ailleurs pas plus volumineux, ceux qui se

14 trouvent sur la liste actuelle, et la Chambre ne va pas traiter cette

15 question.

16 L'Accusation accepte que les documents qui sont pertinents à la

17 fonction de M. Boskoski en tant que ministre de l'Intérieur, un fait qui

18 n'est absolument pas contesté, sont toujours pertinents pour les autres

19 questions, telles que, par exemple, contrôle effectif des subordonnés,

20 mesures de sécurité prises en Macédoine. Par conséquent, ce sont des

21 documents qui se trouvent placés sur la liste des pièces à d'autres fins et

22 à juste titre.

23 La Chambre accepte également que les documents ayant trait à un

24 incident qui s'est déroulé dans une mine, incident qui ne fait pas l'objet

25 de litige, sont des documents pertinents pour d'autres questions de faits

26 et de droit. Les documents qui préoccupaient la Défense, et qui, par la

27 petite porte, essayaient ou visaient plutôt à agrandir la portée de l'acte

28 d'accusation tel que, par exemple, l'allégation portant sur l'entreprise

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1 criminelle commune, sont en fait des documents qui sont pertinents, car ils

2 permettent de mieux comprendre les événements qui se sont déroulés à

3 l'époque. La Chambre d'ailleurs trouve que ces arguments sont convaincants.

4 Et au vu de ce contexte, certains sont des documents qui précèdent ou qui

5 portent sur une date après l'entreprise criminelle commune. Qui plus est,

6 alors que certains documents qui sont vus en cavalier seul ou qui sont vus

7 de façon isolée, peuvent jeter un doute pour ce qui est de leur pertinence

8 s'ils sont examinés avec d'autres documents, leur pertinence n'en devient

9 que plus manifeste, ce qui fait que les critiques avancées à propos de

10 certaines de ces pièces qui n'auraient aucune pertinence sont des critiques

11 qui ne sont pas acceptées.

12 Alors, il y a un litige à propos de la pertinence des documents qui

13 ont trait aux chefs d'inculpation de terrorisme. Il semblerait qu'ils aient

14 une pertinence pour ce qui est de la fiabilité et de la responsabilité de

15 l'accusé Boskoski au titre de l'article 7(3). Il pourrait prouver que les

16 chefs d'inculpation concernant les personnes à Ljuboten sont des chefs

17 d'inculpation contre les Albanais de souche, et il est avancé qu'ils

18 participeraient à des activités terroristes. Cela peut avoir une pertinence

19 pour ce qui est de la question du conflit armé lorsqu'on envisage tous les

20 paramètres de cet élément.

21 Il y a également des pièces à conviction qui sont contestées. La

22 pertinence, en fait, l'Accusation indique qu'ils ont une pertinence pour ce

23 qui est de la question du conflit armé. La Chambre est d'avis que la

24 pertinence de ces documents peut être importante pour chacun des différents

25 éléments du conflit armé dans le contexte de cette affaire, et que, par

26 conséquent, ces documents ont une pertinence suffisante.

27 Il y a certaines déclarations de témoin pour lesquelles des objections ont

28 été avancées et qui sont identifiées comme autant de sources utilisées pour

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1 un rapport d'expert que l'Accusation se propose de présenter. Par

2 conséquent, il est suffisant d'établir leur pertinence dans cette affaire.

3 La Défense avance que des pièces qui appartiennent à deux unités militaires

4 de l'armée de Macédoine connue sous les noms Tigre et de Lion n'ont aucune

5 pertinence. La Chambre est d'avis qu'il est évident que lorsque l'on prend

6 connaissance de ces documents, que la nature des unités militaires qui

7 étaient actives dans les environs de Ljuboten à la période pertinente pour

8 l'acte d'accusation, sont des éléments pertinents et que les deux unités

9 qui sont mentionnées font l'objet d'un conflit pour ce qui est des éléments

10 de preuve. Nous pensons que cela va au cœur de l'affaire.

11 A cet égard, la Chambre prend note de l'objection de la Défense qu'ils ne

12 se retrouvent pas dans l'acte d'accusation, puisque ces deux unités étaient

13 présentes et ne sont pas mentionnées dans l'acte d'accusation. La Chambre

14 pense qu'il n'est pas nécessaire d'apporter des éléments de preuve à ce

15 sujet.

16 Il y a une procuration exprimée par la Défense suivant laquelle les

17 documents qui représentent des réglementations, des législations et des

18 éléments de droit ne sont pas pertinents. Il semblerait que cela est une

19 pertinence potentielle pour la responsabilité de l'accusé Boskoski aux

20 termes de l'article 7(3) et pour ce qui est également de l'existence d'un

21 conflit armé.

22 Il y a une objection qui a été avancée suivant laquelle l'inclusion de la

23 constitution de la Macédoine à l'époque n'est pas pertinente, mais nous

24 indiquerons tout simplement que l'Accusation se fonde sur ces textes pour

25 prouver que les droits constitutionnels des victimes alléguées ont été

26 violés. Il y a également un certain nombre de documents qui sont des

27 documents portant sur la structure de l'armée et qui ont leur pertinence.

28 Il s'agit de sources utilisées par l'expert, le témoin expert de

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1 l'Accusation, M. Bezruchenko.

2 Pour ce qui est de la question des traductions anglaises. La Défense a

3 présenté cet argument et a indiqué qu'il y avait de nombreuses traductions

4 qui faisaient défaut. L'Accusation, quant à elle, a indiqué que sur les 75

5 pièces, ou les 75 documents qui ont été identifiés, seuls quatre de ces

6 documents ne sont pas rédigés en macédonien, ce qui fait que le problème de

7 la traduction anglaise n'est pas un besoin capital pour la préparation de

8 la Défense, mais aura quand même son importance pour ce qui est l'aspect

9 pratique dans le procès.

10 Pour les documents qui sont en macédonien dans leur version originale, il y

11 en a six qui ont été traduits en anglais. Il y a des passages importants de

12 quelque 16 documents qui ont été fournis en traduction anglaise. Il faut

13 savoir que neuf documents sont en train d'être traduits à l'heure actuelle

14 et quatre autres documents seront traduits en anglais aussi rapidement que

15 possible. Il semblerait que pour ce qui est de tous les autres documents

16 dans cette catégorie, il s'agit de documents qui ont été utilisés par le

17 témoin potentiel Bezruchenko, et une requête devra être examinée par cette

18 Chambre afin de savoir si ce témoin aura le droit de témoigner car cela a

19 été refusé par la Défense. Tant que nous n'avons pas rendu cette décision,

20 il me semble qu'il est un tant soit peu prématuré d'envisager la question

21 de la traduction de documents qui pourraient être utilisés comme documents

22 de référence, documents de base.

23 En résumé, l'Accusation indique, sauf lorsque cela est indiqué, que tous

24 ces documents sont pertinents et sont des documents qui ont été utilisés

25 directement par des témoins que l'Accusation se propose de faire

26 comparaître.

27 Dans ce contexte, l'Accusation demande toutefois l'autorisation de

28 supprimer de la liste un document, le document 607, car il s'agit d'un

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1 document relatif à un témoin que l'Accusation ne va plus convoquer. Trois

2 de ces documents, le 175, le 190 et le 615 sont véritablement, comme l'a

3 indiqué la Défense, des documents qui sont des doublons. Donc il est fait

4 droit à la demande de supprimer ces quatre documents.

5 Dans cette requête nous aimerions répéter, sans pour autant le faire

6 littéralement, la remarque générale que nous avons faite au début de

7 l'audience à propos de la différence entre la question de l'inclusion d'un

8 document sur la liste 65 ter et l'admission de ce document lors du procès.

9 Nous aimerions rappeler au conseil, que c'est une requête qui porte

10 seulement sur l'inclusion sur la liste, et qu'il y a un certain nombre de

11 questions qui ont été évoquées dans cette décision, sur la base des

12 documents qui sont mis à la disposition de la Chambre, qui pourraient être

13 examinés à nouveau pendant le procès si et quand l'Accusation demande que

14 ces documents soient versés au dossier. Là, ces documents seront considérés

15 au vu des éléments de preuve qu'ils apportent.

16 La Chambre est d'avis qu'il va dans l'intérêt de la justice et qu'il est

17 dans l'intérêt de la justice que ces documents restent sur la liste de

18 l'Accusation afin que la notification soit apportée à la Défense, et la

19 Chambre ne pense pas qu'il y ait de raisons de les supprimer de la liste.

20 Par ces motifs, la requête est rejetée.

21 La Chambre aimerait également rendre une décision orale à l'intention du

22 CLSS afin que soit traduit le compte rendu d'audience de cette audience en

23 macédonien, et ce, pour les besoins de la Défense, car aujourd'hui nous

24 n'avons pas eu d'interprétation macédonienne pendant l'audience.

25 La Chambre aimerait également aborder la question d'une autre requête. Il

26 s'agit de la requête présentée par la Défense de Boskoski, le 2 avril, et

27 ce, afin d'empêcher que l'Accusation poursuive son enquête dans cette

28 affaire et pour empêcher les communications à propos de ces documents. La

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1 Chambre soulève cette question, car c'est une question qui est urgente et

2 qui d'ailleurs invite l'Accusation à déposer une réponse au plus tard le 10

3 avril, à moins qu'il y ait une impossibilité d'ordre pratique. Vous vous

4 rendez compte que si cette réponse est déposée au plus tard le

5 10 avril, cela donnera à la Chambre une journée pour rendre une décision

6 avant la dernière audience préalable au procès. Donc, la Chambre n'aura

7 qu'un jour pour rendre cette décision. C'est un appel que je lance à votre

8 intention.

9 Je vous invite, Monsieur Saxon, à nous livrer vos observations,

10 est-ce que vous pensez qu'il soit juste de vous demander une réponse au

11 plus tard le 10.

12 M. SAXON : [interprétation] L'Accusation comprend maintenant

13 l'urgence de la question. Elle comprend pourquoi la Chambre souhaite

14 recevoir une réponse de l'Accusation avant la Conférence préalable au

15 procès. Toutefois, je dirais avec tout le respect que je dois à la Chambre,

16 que je souhaiterais qu'elle envisage d'octroyer l'Accusation jusqu'à 13

17 heures le 11 avril pour déposer sa réponse.

18 Je crains tout simplement que la qualité de notre réponse ne soit pas

19 des plus supérieures si nous essayons de déposer cette déposer cette

20 réponse le 10 avril au plus tard à 16 heures.

21 [La Chambre de première instance se concerte]

22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je suppose que mes collègues seront

23 tout à fait disposés à travailler toute la nuit pour répondre à votre

24 requête, Monsieur Saxon, mais vous pouvez avoir jusqu'à 13 heures du 11

25 avril.

26 M. SAXON : [interprétation] Je vous remercie.

27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous aimerions vous remercier d'être

28 venus, et j'aimerais notamment rappeler à quel point la charge de travail a

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1 été lourde pour les personnes qui ont traduit pour nous. Il s'agit de six

2 décisions, même si elles ont été présentées de façon abrégée, et il est

3 évident que c'est une tâche qui exige beaucoup de la part de ces personnes.

4 Au début, il y avait quelque 23 requêtes à étudier, certaines ont

5 déjà été étudiées. Il y a des décisions qui ont été rendues vendredi

6 dernier. Ce n'est que par le biais de ce genre d'audience que nous pouvons

7 véritablement respecter le temps imparti, et ce, afin d'assurer que les

8 deux parties aient bien compris la situation, et ce, pour le début du

9 procès.

10 Je vous remercie tous.

11 La séance est levée.

12 --- L'audience est levée à 16 heures 30.

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