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1 Le jeudi 8 mai 2008
2 [Audience publique]
3 [Réplique de l'Accusation]
4 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour.
7 Nous allons reprendre et nous en sommes arrivés à la dernière phase du
8 réquisitoire et de la plaidoirie pour toutes les parties avec la réplique
9 et la duplique pour ce qui est de réagir à propos de ce qui a été dit au
10 cours des deux derniers jours.
11 Monsieur Saxon.
12 M. SAXON : [interprétation] Oui. Très brièvement, j'aimerais juste vous
13 parler d'un problème administratif. Mardi après-midi, Jesenka Residovic, la
14 commis aux affaires de l'équipe de Boskoski, a indiqué à l'Accusation qu'il
15 y avait un élément qu'il fallait préciser : c'est lorsque moi-même et Mme
16 Valabhji avons fait référence à la pièce P00379, mardi, alors qu'il aurait
17 été préférable de faire référence à la pièce 379.01, qui était la note de
18 service de M. Tarculovski, ainsi que la pièce 379.04. Vous trouverez ces
19 références aux pages 11 115 ainsi que 11 004 et 11 005 du compte rendu
20 d'audience. Je pense qu'il serait plus précis de faire référence non pas à
21 la pièce P96, mais plutôt à la pièce P96.12 [comme interprété] alors que
22 mardi, l'Accusation a fait référence à la pièce P96.
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Saxon, j'aimerais vous
24 indiquer que nous avons du mal à vous entendre, en partie parce qu'il me
25 semble que votre microphone se trouve très éloigné de vous et il y a
26 visiblement beaucoup d'autres choses qui se passent en même temps dans ce
27 prétoire. Je pense que c'est parce que vous utilisez votre pupitre, qui est
28 trop éloigné. Je pense que c'est cela qui pose le premier problème, je ne
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1 vous suggère pas de ne pas utiliser votre pupitre, mais je pense que vous
2 pourriez peut-être faire un petit effort et parler un petit peu plus fort
3 si vous souhaitez continuer à utiliser ce pupitre.
4 M. SAXON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
5 Aux pages 11 065 à 11 066, mon confrère, Me Mettraux, a fait référence hier
6 au jugement en première instance et à l'arrêt rendu par la Chambre d'appel
7 dans l'affaire Ntagurera, il s'agit d'une affaire du TPIR. L'argument était
8 que M. Boskoski n'avait pas le contrôle effectif des auteurs auxquels on
9 reproche les crimes dans l'acte d'accusation. Mais si vous lisez
10 méticuleusement le jugement dans l'affaire Ntagurera, vous vous rendrez
11 compte que les circonstances de M. Boskoski étaient extrêmement différentes
12 du contexte dans lequel oeuvrait l'accusé Bagambiki dans l'affaire
13 Ntagurera.
14 M. Bagambiki était un civil, un administrateur d'une des zones au Rwanda
15 pendant la tragédie de l'année 1994. Toutefois, dans cette affaire, les
16 auteurs des crimes étaient la gendarmerie, à savoir des membres du
17 ministère de la Défense du gouvernement rwandais. M. Bagambiki n'avait pas
18 l'autorité juridique ou l'autorité de facto sur la gendarmerie, et c'est la
19 raison pour laquelle en première instance ainsi que pour ce qui est de la
20 Chambre d'appel, il a été estimé que M. Bagambiki n'exerçait pas le
21 contrôle effectif sur les auteurs des crimes en l'espèce et ils ont estimé
22 qu'il n'y avait pas de relation supérieur/subordonné entre l'accusé et les
23 auteurs des crimes.
24 Vous trouverez cela aux paragraphes 633 à 639 dans le jugement de première
25 instance de l'affaire Ntagurera et aux paragraphes 242 à 347 de l'arrêt.
26 En l'espèce dans notre affaire, les éléments de preuve ont prouvé que M.
27 Boskoski était l'autorité suprême au sein du ministère des Affaires
28 intérieures, et ce, pendant les années 2001 et 2002. Et les éléments de
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1 preuve montrent qu'il exerçait à la fois un contrôle effectif de jure et de
2 facto, et ce, sur les officiers de police de métier ainsi que les officiers
3 de police de réserve qui ont commis les crimes reprochés dans l'acte
4 d'accusation, notamment qu'il avait la possibilité de les punir.
5 Madame, Messieurs les Juges, mes confrères avancent qu'il n'y a absolument
6 pas d'élément de preuve permettant de suggérer que Zoran Krstevski, le
7 conseiller du ministre Boskoski en 2001, était présent à l'OVR de Cair le
8 10 août 2001 et qu'il n'y a pas non plus d'élément de preuve qui suggère
9 qu'il était à ce moment-là conseiller du ministre. Mais, Madame, Messieurs
10 les Juges, lors du contre-interrogatoire de l'expert qui comparaissait à
11 décharge, je fais référence à Slagjana Taseva, ce qu'elle a avancé
12 corroborait le témoignage du Témoin M-052 à propos de la présence du
13 conseiller de M. Boskoski, Zoran Krstevski, avec M. Tarculovski qui se
14 trouvait à l'OVR de Cair ce vendredi après-midi du 10 août. Le professeur
15 Taseva a expliqué qu'une personne pouvait faire office de conseiller auprès
16 des ministères macédoniens sans pour autant être un salarié officiel du
17 ministère en question.
18 Cela faisant l'objet des pages 9 787 à 9 790 du compte rendu d'audience.
19 Mon confrère, Me Mettraux, à la page 11 070, ainsi que mon confrère, Me
20 Apostolski, à la page 11 114, ont indiqué hier que rien ne prouvait que M.
21 Tarculovski et M. Boskoski se trouvaient ensemble au domicile de Brace le
22 12 août. Mais si vous lisez avec toute l'attention qu'il mérite le
23 témoignage du Témoin M-037, aux pages 873 à 876, vous vous rendrez compte
24 qu'il a indiqué que M. Tarculovski et M. Boskoski se trouvaient ensemble
25 chez Brace, dans son domicile, le dimanche après-midi.
26 Cela commence à la page 873, il s'agit des questions supplémentaires qui
27 avaient été posées au Témoin M-037, à ce sujet j'ai lu au témoin le
28 paragraphe 14 d'une note d'enquête préparée par l'enquêteur du bureau du
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1 Procureur, voilà ce que j'ai dit au témoin : "Monsieur, puisque nous
2 parlons du paragraphe 14, si vous y voyez quelque chose qui n'est pas
3 exact, dites-le-nous le parce que vous êtes ici pour dire la vérité."
4 Puis, je dis : "Voyons le paragraphe 14, je vous prie. Lors du
5 contre-interrogatoire, mon confrère vous a posé des questions à propos de
6 la présence de M. Boskoski près de la Muraille de Chine et il vous a posé
7 des questions à propos de ce qu'il avait compris et ce qu'il n'avait pas
8 compris et de ce qu'il faisait là."
9 Puis, il y a eu une objection soulevée par Me Residovic, objection qui n'a
10 pas été retenue, puis j'ai poursuivi.
11 Cela se trouve au bas de la page 874 : "Vous voyez que dans la version
12 anglaise du paragraphe 14, il y a une lettre 'A' qui correspond à votre
13 réponse, à la réponse que vous avez apportée.
14 "Et vous avez dit : 'Le ministre se trouvait là-bas.'"
15 Et je poursuis : "En fait, cette question a été posée à propos d'une
16 conversation entre Ljube Boskoski et Johan Tarculovski. Et vous avez repris
17 votre réponse.
18 "Et voilà ce que vous avez dit, vous avez dit que le ministre se trouvait
19 là, qu'il montrait un intérêt pour la situation. Vous avez dit : 'Je pense
20 qu'il parlait au commandant de police Ljube Krstevski. Johan était à côté.
21 J'ai supposé que Ljube Krstevski a parlé Ljube Boskoski, et lui a parlé
22 d'armes qu'ils avaient trouvées avec des terroristes. Je suppose que le
23 ministre avait demandé à Ljube Krstevski de pouvoir voir les armes et le
24 ministre est venu voir les armes.'"
25 Puis je poursuis : "Dans votre réponse à la question suivante, après que
26 l'enquêteur vous ait demandé pourquoi vous aviez utilisé le terme de
27 'discrétion' lors d'un entretien préalable avec le bureau du Procureur,
28 voilà ce que vous avez dit : 'Johan montrait les armes, il les indiquait du
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1 doigt,' puis ensuite, vous avez dit : 'Johan était toujours un peu de côté,
2 Ljube Krstevski parlait et Ljube Boskoski demandait une explication à
3 propos de l'action.'"
4 Puis je lui ai demandé ce qui suit : "Est-ce que vous pourriez nous dire,
5 je vous prie, si Ljube Boskoski a obtenu une explication à ce moment-là ?"
6 Voilà quelle fut la réponse du Témoin M-037 : "Une explication de la part
7 de qui ?
8 "Question : A ce moment-là, de la part de Ljube Krstevski.
9 "Réponse : Lorsqu'il se trouvait près de l'Hermelin.
10 "Question : Oui.
11 "Réponse : Je suppose qu'il a obtenu sa réponse, s'il a pu obtenir une
12 réponse pendant ces dix secondes, mais j'insiste et je reviens à la charge,
13 je pense qu'il s'agissait de Ljube Krstevski. Je ne suis pas sûr de qui il
14 s'agissait."
15 La seule observation que voulait faire M-037 était qu'il voulait expliquer
16 son incertitude, il ne savait pas si M. Krstevski était présent à ce
17 moment-là. Il n'a absolument pas exprimé de l'incertitude à propos de la
18 présence de M. Tarculovski.
19 Tout aussi important à propos du même sujet, de ne pas oublier la
20 déposition du garde du corps de M. Boskoski en 2001, Blagoja Jakovoski, à
21 propos de la présence justement de M. Tarculovski et M. Boskoski qui se
22 trouvaient ensemble chez Brace cet après-midi du 12 août. Vous vous
23 souviendrez peut-être que M. Jakovoski a accompagné M. Boskoski chez Brace
24 ce jour-là.
25 J'aimerais attirer votre attention sur la page 3 925 du compte rendu
26 d'audience, voilà quel fut le dialogue entre moi-même et M. Jakovoski,
27 voilà ce que j'ai dit : "Très bien. Alors…" Je vais en fait commencer un
28 peu plus tôt. Voilà ce qui a été dit :
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1 "En 2001, où travaillait l'homme qui répondait au nom de Bucuk ?
2 "Réponse : Bucuk, pour l'agence Kometa.
3 "Question : Très bien. Est-ce que vous vous souvenez du nom d'autres
4 personnes qui travaillaient avec l'agence Kometa en 2001 ou qui avaient des
5 liens avec cette agence ?
6 "Réponse : Je ne m'en souviens pas maintenant. Cela s'est passé il y a fort
7 longtemps.
8 "Question : Auriez-vous l'obligeance de bien vouloir examiner à nouveau le
9 paragraphe 24."
10 Il s'agit du paragraphe 24 de la déclaration préalable qui avait été faite
11 par M. Jakovoski à l'intention du bureau du Procureur.
12 On lui a demandé qui il connaissait de l'agence Kometa qui était présent à
13 Ljuboten, et il a dit : "Bucuk; Johan Tarculovski; Sasa, celui qui a été
14 tué; le frère du blessé, Vlado Janevski, l'ancien chef de l'agence Kometa.
15 Je peux les identifier."
16 Puis je lui ai demandé : "Est-ce que cela vous rafraîchit la mémoire,
17 inspecteur ?"
18 Et voilà ce qu'a répondu M. Jakovoski : "Oui. Mais je ne me souviens pas
19 maintenant qui est ce Vladko, je ne me souviens pas de qui est Sasa non
20 plus. Je ne les ai pas vus depuis sept ans au moins.
21 "Question : Au moment où vous avez fait votre déclaration, ces
22 renseignements étaient exacts à votre connaissance ?
23 "Réponse : Je ne m'en souviens pas."
24 Une fois de plus, Madame, Messieurs les Juges, la seule précision que
25 voulait apporter M. Jakovoski portait sur le fait qu'il ne se souvenait
26 plus de qui était Vlado Janevski et Sasa; il n'a pas du tout essayé de
27 préciser quoi que ce soit à propos de la présence de M. Tarculovski.
28 J'aimerais maintenant en venir au sujet de ce que M. Boskoski savait à
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1 propos des crimes qui avaient été commis. Premièrement, contrairement à ce
2 qui a été avancé par mon confrère hier, à la page 11 075 du compte rendu
3 d'audience, dans le mémoire de clôture de l'Accusation il est indiqué que
4 M. Boskoski avait le contrôle effectif des officiers de police aux postes
5 de police et aux autres sites décrits dans l'acte d'accusation.
6 J'aimerais faire référence aux paragraphes 269, 274 à 286, ainsi qu'au
7 paragraphe 340 du mémoire de clôture de l'Accusation.
8 Madame, Messieurs les Juges, voilà quelle est la seule conclusion que l'on
9 peut dégager des éléments de preuve qui ont été apportés, cela commence en
10 août 2001, après qu'il a mis sur pied cette commission chargée d'enquête,
11 M. Boskoski était, ou aurait dû, être informé du fait que la police avait
12 fait subir des traitements cruels à plusieurs personnes de Ljuboten, et ce,
13 dans différents postes de police dans les environs de Ljuboten.
14 Risto Galevski, membre de la commission créée par le ministre Boskoski,
15 s'est vu poser des questions pendant sa déposition, on lui a demandé si la
16 commission avait été informée des allégations de traitement cruel dans les
17 postes de police à Skopje ou si cela faisait partie du mandat de cette
18 commission. M. Galevski a répondu qu'il avait insisté pour que ses
19 subordonnés lui présentent ce genre de renseignements, s'ils en
20 disposaient.
21 Cela faisant l'objet de la page 3 588 du compte rendu d'audience.
22 M. Galevski n'aurait jamais demandé cela s'il n'avait pas de bonnes raisons
23 d'obtenir ces renseignements. Manifestement, il avait été informé du fait
24 qu'il se pouvait qu'il y ait eu des cas de traitement cruel dans des postes
25 de police autour de Ljuboten. M. Galevski a indiqué que lui-même ainsi que
26 Goran Mitevski ont parlé du travail de la mission de cette commission, et
27 ce, à plusieurs reprises avec le ministre Boskoski.
28 De surcroît, l'information qu'a reçue M. Boskoski avant et juste après les
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1 événements de Ljuboten aurait dû le mettre sur le qui-vive et aurait dû lui
2 faire comprendre qu'il était vraisemblable que les détenus de Ljuboten
3 puissent subir des mauvais traitements alors qu'ils étaient en détention.
4 La pièce P328 est un communiqué de presse de "Human Rights Watch" qui
5 porte la date du 31 mai 2001. C'est un communiqué de presse qui a été
6 largement diffusé et qui fait état de sévices, de passages à tabac et de
7 tortures imposés à des détenus d'appartenance ethnique albanaise dans des
8 postes de police à Kumanovo et Skopje. Peter Bouckaert a indiqué que ce
9 communiqué de presse avait été largement diffusé et repris par la presse en
10 Macédoine.
11 La pièce P361 est un autre rapport de "Human Rights Watch" qui a été
12 largement distribué et qui exhorte le gouvernement de la Macédoine à
13 confronter le problème de la violence à l'encontre des Albanais de souche
14 dans les postes de police. Un cas est cité, le cas d'un Albanais de souche
15 battu à mort par la police le 13 août, et ce, dans le poste de police de
16 Beka. Ce rapport de "Human Rights Watch" a été diffusé le 22 août 2001.
17 Ce sont des rapports qui ont informé le ministre Boskoski du fait qu'il
18 était extrêmement vraisemblable qu'une violence se soit déclenchée contre
19 les détenus originaires de Ljuboten, et ce, dans les différents postes de
20 police où ils étaient détenus.
21 De plus, la pièce P352, qui est un autre rapport de "Human Rights Watch"
22 toujours sur les événements de Ljuboten, fait référence précisément au
23 traitement cruel infligé aux détenus à Cair, Kisela Voda et Karpos dans
24 leurs postes de police. Cela aurait dû certainement informer le ministre
25 Boskoski du besoin qu'il avait de diligenter une enquête sur le traitement
26 infligé aux détenus de Ljuboten dans ces postes de police où ils étaient
27 détenus.
28 Madame, Messieurs les Juges, hier mon confrère a beaucoup cité l'arrêt
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1 Halilovic, et cela, aux pages 11 077 et 11 078 du compte rendu d'audience.
2 Il a également fait référence à l'affaire von Leeb, et ce, à la page 11
3 709. Je pense que ce sont des références qui sont erronées, car il s'agit
4 de deux affaires où les accusés ne disposaient pas de l'autorité et ne
5 contrôlaient pas les auteurs des crimes. Comme je l'ai déjà mentionné ce
6 matin, le contexte dans lequel opérait M. Boskoski, ses circonstances en
7 2001, c'est son degré de pouvoir, d'autorité, de responsabilités sur les
8 auteurs des crimes reprochés dans l'acte d'accusation sont importants.
9 Me Mettraux hier a fait référence au jugement Kvocka aux pages 11 074 du
10 compte rendu d'audience. Il a présenté cette référence pour étayer ce qu'il
11 avançait, à savoir que M. Boskoski n'avait pas de contrôle effectif sur les
12 auteurs du crime. Mais la grande différence, Madame, Messieurs les Juges,
13 entre Miroslav Kvocka au camp d'Omarska à Prijedor en 1992 et M. Boskoski
14 en août 2001 est que M. Boskoski avait la possibilité et la possibilité
15 matérielle de punir les auteurs du crime. Donc le jugement dans l'affaire
16 Kvocka est également tout à fait opposé et contraire à notre affaire.
17 Aux pages 11 077 à 11 078, mon confrère s'est focalisé sur les concepts des
18 devoirs et obligations de M. Boskoski. Or, l'Accusation s'est déjà beaucoup
19 exprimée en la matière aux paragraphes 365 à 387 de son mémoire de clôture,
20 mais il est important toutefois de se souvenir de deux éléments :
21 premièrement, le ministère des Affaires intérieures n'a pas déployé
22 d'efforts véritables et compétents pour diligenter des enquêtes à propos
23 des crimes allégués dans l'acte d'accusation, il n'a pas fait d'efforts
24 pour présenter des rapports à propos de faits pertinents qui auraient dû
25 être présentés au système judiciaire, et il n'a pas fait d'efforts pour
26 discipliner les auteurs. Il était l'autorité suprême du ministère des
27 Affaires intérieures à l'époque, il était en fait le supérieur des auteurs
28 de ces crimes, et en tant que tel, le ministre Boskoski avait pour devoir
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1 d'assurer que cela soit fait.
2 J'aimerais faire référence à la pièce P86, la législation relative aux
3 affaires intérieures ainsi que la pièce P88, notamment les articles 140 à
4 142 pour ce qui est de la pièce P88, car vous vous souviendrez certainement
5 qu'il s'agit du code de procédure pénal de la Macédoine.
6 Au vu de cela, M. Boskoski n'a même pas su ou a peu critiqué le
7 comportement erroné de la police, comportement entre le 10 et le 12 [comme
8 interprété] août 2001.
9 J'aimerais également faire référence au témoignage du témoin à décharge
10 Petre Stojanovski aux pages 9 270, 9 093 à 9 094 ainsi que 9 371 à 9 373.
11 Petre Stojanovski décrit comment une méthode est utilisée par la police
12 macédonienne, et ce, afin d'obtenir davantage de renseignements à propos
13 des auteurs potentiels de crimes. Il s'agit tout simplement de prendre
14 contact et de parler avec ces auteurs de crimes, il s'agit également des
15 témoins de crimes. Mais Petre Stojanovski a expliqué que la police
16 macédonienne avait pour obligation la vérification des faits, et je cite :
17 "pour fournir au moins un minimum de faits pertinents qui pourraient
18 corroborer le concept de la commission d'un crime."
19 Deuxièmement, Monsieur le Président, à la page 11 081, mon confrère avance
20 que la législation macédonienne permettait au ministre Boskoski d'exécuter
21 ses fonctions tout en imposant des limites aux devoirs de M. Boskoski en
22 tant que ministre. Mon confrère a suggéré qu'une fois que l'officier de
23 permanence du poste de police de Mirkovci a informé le juge d'instruction
24 le 12 août de la présence de corps dans le village de Ljuboten, les devoirs
25 et obligations de M. Boskoski cessent. Il s'agirait là d'une très mauvaise
26 interprétation du droit, si c'était vrai cela mettrait à jour l'existence
27 d'une énorme lacune dans le droit international humanitaire. Comme
28 l'Accusation l'a indiqué dans son mémoire, la police a seulement signalé
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1 des actes terroristes qui auraient été commis par des Albanais de souche.
2 La police n'a jamais signalé aux instances judiciaires des faits concernant
3 des crimes commis par la police entre le 12 et le 14 août.
4 Si vous acceptez l'argument de la Défense, cela voudrait dire
5 qu'hypothétiquement parlant la police pourrait massacrer tous les habitants
6 d'un village et signaler aux instances judiciaires que quelques personnes
7 ont été tuées dans le village. Et le ministère de l'Intérieur ensuite
8 pourrait se laver les mains et être dégagé de toute responsabilité dans
9 cette affaire. L'Accusation ne pense pas que le droit international
10 humanitaire puisse être interprété de cette manière.
11 Mes confrères, hier, ont mentionné un certain nombre de mesures que
12 M. Boskoski et le ministère de l'Intérieur auraient pris pour enquêter sur
13 les crimes commis à Ljuboten et dans les environs ainsi qu'à Skopje et dans
14 les environs.
15 Il n'existe aucun élément de preuve crédible indiquant que des
16 mesures ont été prises pour véritablement enquêter sur les traitements
17 cruels infligés à des Albanais de souche qui se trouvaient au domicile
18 d'Ametovski, au domicile de Brace, au poste de contrôle de Buzalak, au
19 poste de police mentionné dans l'acte d'accusation, au tribunal d'instance
20 de Skopje et à l'hôpital municipal de Skopje.
21 Je souhaiterais revenir sur l'une des mesures mentionnées par la
22 Défense. Il s'agissait d'une proposition relative à une exhumation
23 présentée par Goran Mitevski, le directeur de la sécurité publique. Cette
24 proposition a été envoyée au procureur général et au juge d'instruction. On
25 lui demandait de procéder à une exhumation à Ljuboten. Il s'agit de la
26 pièce 1D33.
27 Si vous examinez le dernier paragraphe de ce document, vous constaterez que
28 pour le ministère de l'Intérieur et pour les collaborateurs les plus
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1 proches du ministre Boskoski, l'objectif de cette exhumation était
2 d'identifier les cinq corps et de déterminer les causes de leur décès; rien
3 de plus.
4 Je vous invite à comparer ce document avec la pièce P55.02 qui a été
5 versée au dossier sous pli scellé. La proposition du procureur général
6 adjoint, Dragoljub Cakic, portait sur une exhumation. Le procureur général
7 voulait s'intéresser à ce qui compte vraiment, à savoir les circonstances
8 dans lesquelles les décès sont survenus. Or, le ministère de l'Intérieur
9 n'a jamais demandé que l'on mène à bien cette tâche.
10 La Défense a indiqué hier que l'Accusation devait prouver que le
11 comportement de l'accusé au titre de l'article 7(3) constituait "une
12 violation flagrante de ses devoirs", par conséquent revenait à dire que
13 l'accusé avait approuvé les crimes commis. L'Accusation n'accepte pas qu'il
14 s'agisse là du critère applicable s'agissant de la responsabilité engagée
15 au titre de l'article 7(3). Mais si tel était le cas, de toute façon les
16 éléments de preuve présentés en l'espèce suffisent à ce que ce critère soit
17 rempli. L'intention de Boskoski n'était pas de corriger ou d'agir suite aux
18 crimes commis entre le 10 et le 14 août 2001. Son comportement revenait à
19 les accepter, à les tolérer et à faire en sorte que les auteurs de ces
20 crimes ne soient pas tenus responsables.
21 Mon confrère a laissé entendre hier que la pièce P464, l'ouvrage
22 intitulé "La guerre en Macédoine", ne devait pas se voir accordé un poids
23 important, soi-disant parce qu'il n'est pas corroboré par d'autres éléments
24 de preuve. Or, ce n'est pas ce que nous dit le dossier. Par exemple, la
25 pièce P464 fait mention de l'existence d'une guerre en Macédoine pendant
26 l'année 2001. Cet élément de preuve est corroboré par le témoignage de
27 Peter Bouckaert à la page 3 242 du compte rendu d'audience. Les
28 informations ayant trait à la guerre en Macédoine et aux objectifs
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1 poursuivis par l'ALN ont été corroborées par Nazim Bushi aux pages 6043 à
2 6046 du compte rendu d'audience. La pièce P493, page 3, corrobore ce qui
3 est dit dans l'ouvrage intitulé "La guerre en Macédoine," pour ce qui est
4 de la description de l'ALN et de ses capacités en 2001.
5 Mes confrères, hier, vous ont dit que le témoignage de M-084, à
6 propos de la délivrance de postes radio et de gilets pare-balles à l'OVR de
7 Cair le 11 août, n'était pas corroborée. Or, ce n'est pas vrai. Le Témoin
8 M-052 a mentionné que plusieurs membres de l'unité de police qui ont suivi
9 M. Tarculovski dans le village ce jour-là portaient des gilets pare-balles.
10 Le Témoin M-037 a déclaré que M. Tarculovski avait un émetteur-récepteur
11 sur lui à Ljuboten le 12 août.
12 Mes confrères vous ont dit hier que l'unité chargée des normes
13 professionnelles au sein du ministère de l'Intérieur n'était pas en état
14 d'opérer en 2001. Mais ceci est contraire à ce que l'on trouve dans la
15 pièce P00395, qui est la déclaration faite en application de l'article 92
16 bis par un témoin qui nous explique que cette unité était bien active en
17 2001, même si ses effectifs se sont ensuite développés en 2002.
18 Je souhaiterais revenir maintenant sur les commentaires faits par mon
19 confrère, Me Apostolski, à propos de l'accusé Johan Tarculovski.
20 Tout d'abord, Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges,
21 l'Accusation n'a jamais fait valoir qu'une entreprise criminelle commune
22 aurait existé après le 12 août 2001. L'Accusation a toujours fait valoir
23 que "l'entreprise criminelle commune en question avait vu le jour le
24 vendredi 10 août 2001, et avait existé jusqu'au dimanche 12 août 2001
25 compris."
26 Cela se trouve au paragraphe 4 du deuxième acte d'accusation modifié
27 dressé en l'espèce.
28 Au paragraphe 59 de son mémoire préalable au procès modifié,
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1 l'Accusation explique que le but commun de l'entreprise criminelle commune
2 "devait exister avant que la police ne pénètre dans le village, ou, tout du
3 moins se développer très rapidement après que les premiers crimes eurent
4 été commis."
5 Cependant des preuves relatives à une opération de dissimulation
6 menée après le 12 août peuvent attester de l'existence d'un but commun de
7 l'entreprise criminelle commune au cours de cette période allant du 10 au
8 12 août, je vous réfère au jugement Krajisnik, paragraphes 970 et 1054 qui
9 traitent de ce point.
10 La Défense de M. Boskoski et celle de M. Tarculovski avancent que
11 l'Accusation n'a pas prouvé que des personnes ayant des antécédents
12 judiciaires aient participé aux événements de Ljuboten, cela se trouve aux
13 pages 11 108 et 11 136 du compte rendu d'audience d'hier. Les éléments de
14 preuve qui en attestent sont décrits de façon détaillée aux paragraphes 43
15 et 44 du mémoire en clôture de l'Accusation.
16 Les témoignages de M-052, M-084, M-053, ainsi que les pièces P591, 1D326,
17 P231 versées au dossier sous pli scellé, tout ceci montre bien que les
18 personnes qui ont reçu des armes à l'OVR de Cair le 11 août avaient des
19 casiers judiciaires et ont participé subséquemment aux événements de
20 Ljuboten. Ces casiers judiciaires sont mentionnés dans la pièce P592.
21 Et dans la pièce P32 également, qui a été versée au dossier sous pli
22 scellé, ce que j'aurais dû préciser tout à l'heure.
23 S'agissant de l'une de ces personnes, Ilija Sekarovski, son casier
24 judiciaire constitue la pièce P231, numéro ERN N006-4710. En ce qui
25 concerne les individus dont les noms se trouvent dans la pièce P232, M-084
26 a reconnu au moins l'un de ces individus et a déclaré que cette personne
27 avait un casier judiciaire. Cela se trouve à la page 1 475 du compte rendu
28 d'audience.
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1 Mon confrère a laissé entendre hier que ces casiers judiciaires avaient été
2 en quelque sorte blanchis, que ces personnes ont été blanchies, mais je
3 vous renvoie sur ce point à la pièce P592.
4 La Défense affirme que les personnes -- que la liste des personnes ayant
5 des casiers judiciaires, pièce P592, a été montrée au témoin Popovski, et
6 que l'on peut voir que ces personnes sont devenues réservistes de la police
7 le 16 août 2001. Bien au contraire, les témoignages que vous avez entendus
8 indiquent bien que ces personnes se sont présentées à l'OVR de Cair les 10
9 et 11 août et que c'est à cette occasion qu'on leur a remis des armes. On
10 leur a remis également des uniformes de la police et ils devenus membres
11 des forces de réserve.
12 A la page 11 115 du compte rendu d'audience, M. Apostolski semble dire que
13 l'Accusation n'a pas fait preuve de cohérence en s'appuyant sur la pièce
14 487, une carte établie par Gzim Ostreni, qui a servi au témoin pour
15 indiquer certains endroits passés sous le contrôle de l'ALN, et que
16 l'Accusation a maintenu par ailleurs sa position selon laquelle l'ALN
17 n'était pas présente à Ljuboten le 12 août.
18 Mais l'un n'exclut pas l'autre. Le témoignage d'Henry Bolton, à la page 1
19 608 du compte rendu, nous permet de comprendre que la notion de contrôle
20 exercé sur un territoire peut signifier que certaines régions en Macédoine
21 n'étaient pas accessibles aux autorités du gouvernement macédonien en 2001.
22 Le contrôle ne suppose pas nécessairement une présence sur les lieux.
23 A titre d'exemple, lorsque l'on dit que l'armée américaine contrôlait le
24 sud du Vietnam pendant une partie des décennies des années 1960 et 1970,
25 cela ne veut pas dire pour autant que l'armée américaine était présente
26 physiquement dans tous les villages vietnamiens. Le même principe
27 s'applique à la pièce P487 pour ce qui est du village de Ljuboten, comme
28 Nazim Bushi l'a dit à la page 5 605 du compte rendu : "Le village de
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1 Ljuboten se trouvait dans la zone de responsabilité de la 114e Brigade de
2 l'ALN, mais pas dans sa zone opérationnelle."
3 La thèse de l'Accusation n'a pas changé. Aux pages 11 115 à 11 116, Me
4 Apostolski prétend que l'Accusation a cherché à modifier sa thèse parce
5 qu'elle présente certains arguments dans son mémoire en clôture selon
6 lesquels certaines victimes étaient hors de combat. Au paragraphe 23 de
7 l'acte d'accusation, chef 1, et au paragraphe 42 de ce même acte
8 d'accusation, chef 3, il est question de l'article 3 commun A aux
9 conventions de Genève qui fait mention des personnes hors de combat. De
10 surcroît, le paragraphe 117 du mémoire préalable au procès de l'Accusation
11 mentionne expressément les personnes hors de combat. Il y est dit : "Il y a
12 une exigence d'ordre général prévue par l'article commun 3 selon laquelle
13 les victimes doivent être de simples témoins des hostilités, cela englobe
14 les civils, les membres des forces armées qui ont déposé leurs armes et les
15 membres des forces armées placés hors de combat."
16 Hier, à la page 11 117, Me Apostolski a reconnu qu'il y avait plus de 2 000
17 civils dans le village de Ljuboten lors du week-end du 10 au 12 août. Cela
18 suffit pour que tous les participants à cette attaque soient conscients de
19 la possibilité que les Albanais de souche qu'ils rencontreraient sur leur
20 chemin le 12 août soient des civils, mais cela n'a pas tempéré pour autant
21 le comportement des membres de l'unité de police qui est entrée à Ljuboten
22 le 12 août.
23 Page 11 118, Me Apostolski a prétendu que l'attaque dirigée contre Ljuboten
24 visait uniquement des membres de l'ALN qui se seraient trouvés à Ljuboten
25 et qu'il n'existait pas de but commun visant à prendre les civils pour
26 cible.
27 Les éléments de preuve relatifs à la présence de l'ALN à Ljuboten, même si
28 on leur accorde beaucoup de poids et si on les examine en faveur de la
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1 thèse de la Défense, indiquent tout au plus qu'il y avait trois membres de
2 l'ALN armés dans le village, car seules trois armes ont été retrouvées à
3 Ljuboten le 12 août, à savoir celles qui se seraient trouvées près de la
4 maison de Jashari. Alors pourquoi a-t-on également pris pour cible les
5 personnes qui se trouvaient au domicile d'Ametovski ? Pourquoi ces
6 personnes ont-elles été frappées, tuées ? Pourquoi Rami Jusufi a-t-il été
7 tué ? Pourquoi tant de maisons ont-elles été incendiées ?
8 L'Accusation souscrit au point de vue exprimé par la Défense de
9 Tarculovski, à la page 11 121 du compte rendu d'audience d'hier, selon
10 laquelle "aucun civil n'a été tué par des balles perdues".
11 C'est vrai, aucun civil n'a été tué par des balles perdues le 12 août, tout
12 simplement parce que les membres de la police macédonienne ont délibérément
13 abattu les personnes qui ont perdu la vie à Ljuboten : Sulejman Bajrami,
14 Muharem Ramadani, Xhelal Bajrami, Bajram Jashari et Kadri Jashari. Lorsque
15 mon confrère a expliqué qu'aucun civil n'avait succombé à des balles
16 perdues en raison des précautions prises par les forces de sécurité, il
17 s'est livré à une interprétation tout à fait étonnante des éléments de
18 preuve, c'est le moins qu'on puisse dire.
19 Les éléments de preuve admis au procès ne montrent pas que le président
20 Trajkovski ait ordonné l'attaque de Ljuboten le 12 août. Les éléments de
21 preuve montrent que les seules consignes données par le président étaient
22 des commentaires faits au commandant Despodov lui demandant de prendre
23 certaines mesures et d'entreprendre certaines activités relevant de sa
24 compétence de façon à ce que l'opération de Ljuboten soit couronnée de
25 succès. Je vous renvoie au témoignage de Mitre Despodov, page 2 579, et au
26 témoignage de M. Keskovski, page 10 139.
27 La pièce P304 contient un passage qui laisse à penser que le président
28 Trajkovski a ordonné l'attaque de Ljuboten au matin du 11 août; mais si le
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1 président a donné pareil ordre, cet ordre n'a pas été exécuté. Le président
2 n'était absolument pas au courant de l'attaque contre Ljuboten le 12 août,
3 c'est ce qui ressort clairement du témoignage de M. Keskovski, témoin à
4 décharge, qui a déclaré qu'au matin du 12 août le président avait reçu des
5 informations selon lesquelles "il y avait quelque chose qui se passait à
6 propos de la population civile qui s'était rassemblée au village de
7 Radisani." Rien de plus. Cela se trouve à la page 10 112 du compte rendu
8 d'audience.
9 Après le 12 août, le président Trajkovski a demandé à M. Tarculovski s'il
10 s'était trouvé à Ljuboten. Pages 10 028 et 10 029, pages 10 019 et 10 120
11 du compte rendu d'audience. Si le président Trajkovski avait commandé
12 l'opération de Ljuboten, comme le prétend la Défense, il est très peu
13 probable que le président ait posé une telle question à M. Tarculovski, qui
14 dirigeait l'unité de police qui a attaqué Ljuboten.
15 Mais même, si vous acceptez la position de la Défense selon laquelle
16 le président aurait donné certains ordres concernant l'attaque de Ljuboten,
17 rien ne prouve que les ordres du président exonèrent M. Boskoski de son
18 contrôle effectif et de la capacité matérielle qu'il avait de punir les
19 auteurs de crimes, à savoir de punir les policiers qui ont mené l'attaque.
20 A la page 11 112 du compte rendu, (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé)
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24 (expurgé)
25 (expurgé) Mitre Despodov "devait
26 prendre certaines mesures."
27 Il n'a absolument pas été fait mention d'ordre donné par le président
28 Trajkovski. On n'a pas du tout parlé du président Trajkovski d'ailleurs. Je
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1 vous renvoie aux pages 8 270 et 8 271 du compte rendu ainsi qu'aux pages 8
2 312 et 8 313.
3 A la page 11 126 du compte rendu d'audience d'hier, quelques minutes
4 après s'être appuyé sur le témoignage de M-052, (expurgé)
5 (expurgé), Me
6 Apostolski vous a demandé de ne pas tenir compte du tout du témoignage de
7 M-052, il a prétendu que le témoignage de M-052 n'était pas véridique,
8 n'était pas fiable et que M-052 cherchait simplement à servir ses propres
9 intérêts. Il s'agit d'un argument pour le moins surprenant de la part de la
10 Défense de Tarculovski qui cherche par ailleurs à s'appuyer sur de nombreux
11 passages du témoignage de M-052.
12 A la page 11 130, (expurgé)
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1 (expurgé)
2 A la page 11 124 du compte rendu d'audience, mon confrère dit à la
3 Chambre : "Après que la résistance a été neutralisée, l'attaque a cessé."
4 On peut laisser de côté le fait que trois hommes aient été abattus à
5 la maison Jashari, mais qu'est-ce qui a été "neutralisé" finalement dans la
6 maison Ametovski ? Les éléments de preuve ont montré que les hommes et les
7 femmes qui étaient dans la cave ont été obligés de quitter leur abri, les
8 hommes ont été passés à tabac et ensuite la police en a abattu deux. Les
9 attaques contre les civils à Ljuboten ne se sont absolument pas arrêtées
10 avant que les dix hommes détenus à la maison Ametovski soient embarqués à
11 bord d'un camion pour être envoyés au poste de police de Mitrovski où les
12 traitements cruels se sont poursuivis.
13 A la page 11 142, Me Apostolski affirme que l'attaque sur Ljuboten
14 n'était qu'une opération antiterroriste tout à fait légitime et qu'il
15 n'était absolument pas prévu d'attaquer les civils au cours de cette
16 attaque.
17 Madame, Messieurs les Juges, à ce moment-là, non seulement il y avait
18 la nouvelle Unité des Lions, mais le ministère de l'Intérieur disposait
19 aussi de l'unité posebna et de l'Unité des Tigres. S'il s'agissait d'une
20 opération légitime, le ministère de l'Intérieur aurait dû envoyer l'une de
21 ces unités pour se charger de l'attaque sur Ljuboten. Nous savons, suite à
22 ce qu'a dit M. Galevski et d'autres personnes, que l'unité posebna était
23 tout à fait disponible le 12 août 2001.
24 M. Tarculovski, qui faisait partie du ministère des Affaires intérieures,
25 qui faisait partie des services de Sécurité, savait bien que ces unités de
26 police spéciales existaient, elles étaient formées à ce type d'opérations.
27 M. Boskoski, lorsqu'il était à la maison de Brace le 12 août, aurait pu
28 aussi se demander pourquoi aucune de ces deux unités n'était sur place, ni
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1 l'unité posebna, ni les Tigres.
2 S'il s'agissait bel et bien d'une opération antiterroriste légitime,
3 pourquoi a-t-on eu recours à des personnes disposant d'un casier judiciaire
4 pour mener à bien cette opération ? S'il s'agit d'une opération
5 antiterroriste légitime, pourquoi a-t-on fait appel à des volontaires de la
6 réserve des unités de police, c'est-à-dire des individus qui avaient très
7 peu de formation pour exécuter cette opération ? S'il s'agissait d'une
8 opération vraiment légitime et une opération antiterroriste, pourquoi est-
9 ce que ces officiers de police ont entaillé le dos des détenus pour y
10 dessiner des croix avant de les battre, puis de les tuer ?
11 A la page 11 127 du compte rendu, mon éminent confrère avance que M.
12 Tarculovski n'avait pas la maîtrise de la situation à Ljuboten de façon
13 générale et n'avait aucune autorité sur les autres officiers de police qui
14 étaient entrés dans le village ce jour-là. Mais les éléments de preuve
15 pourtant montrent bien que c'est M. Tarculovski qui dirigeait l'unité de
16 police qui a attaqué Ljuboten et qu'il avait toute autorité sur les
17 participants à cette attaque. Les 10 et les 11 août, M. Tarculovski s'est
18 débrouillé pour que les unités de police bénéficient de toute l'assistance
19 dont ils avaient besoin. Le soir du 11 août, M. Tarculovski a dit au
20 commandant Despodov : "Demain, je vais lancer l'action."
21 Il s'agit ici des pièces P302 et P303.
22 Le 12 août, (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé) dans le
25 village parce qu'on attendait encore le soutien ou l'appui de l'artillerie
26 venant des unités de l'armée. C'est M. Tarculovski qui a expliqué
27 exactement à M-037 ce qui se passait, il l'a fait à la maison Ametovski, et
28 c'est lui qui a dit à M-037 qu'il n'était pas nécessaire d'enquêter ou
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1 d'inspecter la maison Jashari.
2 A la page 11 128, Me Apostolski avance que l'Accusation n'a pas réussi à
3 prouver que M. Tarculovski aurait dit : "Il n'y a pas besoin d'inspection,
4 puisqu'on est en état de guerre." Et il n'a pas réussi à prouver qu'il
5 avait déclaré cela du fait de sa position d'autorité envers les autres
6 personnes présentes. Mais ici c'est un cercle vicieux, puisque c'est
7 justement ce qu'a dit M. Tarculovski, qui prouve bel et bien qu'il était en
8 position de pouvoir.
9 M-052 décrit le rôle de M. Tarculovski de la façon suivante, à la page 8
10 271 : "Les unités -- enfin, celui qui était responsable de l'unité c'était
11 M. Johan. C'était lui le chef. Alors qu'il soit gradé ou pas, je n'en sais
12 rien. Je ne savais pas quel était son poste. Tout ce que je sais c'est que
13 c'était le chef."
14 Me Apostolski déclare que l'Accusation a vérifié les dossiers au tribunal
15 d'instance de Skopje, ainsi que les dossiers du ministère public, les
16 dossiers du ministère des Affaires étrangères, et n'a jamais réussi à
17 identifier qui étaient les véritables auteurs des crimes. Certes, c'est
18 vrai, mais c'est parce que M. Boskoski et ses subordonnés n'ont absolument
19 pas rempli leurs obligations et leurs fonctions en 2001.
20 M. Apostolski a déclaré que M. Tarculovski savait que les trois personnes
21 tuées à la maison Jashari n'étaient pas des civils parce qu'ils étaient
22 armés; donc, M. Tarculovski et ses collègues devaient savoir que les
23 personnes qu'ils détenaient dans la maison Ametovski, eux, étaient des
24 civils parce que eux, en revanche, ils n'étaient pas armés.
25 Me Apostolski a déclaré que ce n'est pas parce qu'il y a présence de civils
26 qu'une cible ne va pas être attaquée. On peut lire cela à la page 11 120 du
27 compte rendu de la journée d'hier. Mais il faudrait faire référence ici à
28 l'arrêt Galic, paragraphe 194, qui fait référence au jugement en première
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1 instance Galic, paragraphe 61, où la Chambre d'appel a noté ce qui suit :
2 Le fait qu'une partie ne satisfasse pas à ses obligations au titre du droit
3 international ne l'exonère pas du fait qu'elle doit absolument obéir aux
4 règles de la proportionnalité et de la distinction lorsqu'elle prépare une
5 attaque ou lorsqu'elle la lance.
6 Les éléments de preuve montrent bien que le 12 août 2001, l'unité de police
7 qui a attaqué le village de Ljuboten ne s'est absolument pas préoccupée de
8 ce principe de distinction, elle l'a jeté aux orties, c'est pour cela que
9 nous sommes ici aujourd'hui d'ailleurs, et c'est pour cela que l'Accusation
10 vous demande de juger les deux accusés coupables de tous les crimes qui
11 leur sont reprochés dans l'acte d'accusation.
12 J'en ai fini de mes arguments. Je ne sais pas si vous avez des questions à
13 me poser, mais je suis près à y répondre.
14 [La Chambre de première instance se concerte]
15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Saxon.
16 Je pense que nous avons suffisamment de temps pour entamer les arguments de
17 l'autre partie.
18 Madame Residovic, c'est à vous.
19 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Peut-être serait-il plus opportun d'avoir
20 la pause tout de suite, ainsi nous pourrions répondre de façon concise et
21 brève à tous ces arguments qui ont été présentés par mon éminent collègue.
22 Je pense qu'il serait vraiment plus opportun de faire la pause tout de
23 suite et de reprendre ensuite.
24 [La Chambre de première instance se concerte]
25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je pense que vous n'en avez pas pour
26 très longtemps, n'est-ce pas, ni pour la présentation de vos arguments ni
27 pour la présentation du conseil de la Défense de M. Tarculovski ?
28 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Tout à fait, nous en terminerons
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1 aujourd'hui. Nous aimerions avoir la pause tout de suite, mais si vous
2 pensez que ce n'est pas adéquat, nous commencerons tout de suite, mais à
3 notre avis la présentation des arguments sera plus simple si on peut le
4 faire tout d'une traite.
5 [La Chambre de première instance se concerte]
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La Chambre de première instance
7 préfèrerait que vous commenciez tout de suite pendant un bon quart d'heure,
8 ensuite nous ferons la pause à l'heure normale. Ensuite, vous aurez une
9 demi-heure pour reprendre vos esprits avant de poursuivre.
10 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Très bien.
11 M. METTRAUX : [interprétation] Merci.
12 [Duplique]
13 M. METTRAUX : [interprétation] Nous allons commencer à répondre aux
14 différents arguments qui ont été présentés hier par l'Accusation, ensuite
15 après la pause, nous reprendrons ce qui a été présenté ce matin.
16 Tout d'abord, j'aimerais répondre à une affirmation de l'Accusation en
17 réponse à l'argument de la Défense parlant de cette fameuse histoire de
18 village selon laquelle les villageois auraient répété des rumeurs.
19 L'Accusation invite la Chambre à ignorer totalement ceci. Ceci se trouve à
20 la page 10 092 du compte rendu : "Etant donné que les témoignages des
21 témoins des faits ont toujours été cohérents, ils n'ont jamais dévié."
22 L'Accusation a dit la chose suivante : "Les témoins des faits ont toujours
23 maintenu leur identification des auteurs de crimes, ils ont déclaré qu'ils
24 étaient soit des officiers de police en uniforme ou parfois, pour ce qui
25 est des sévices, des civils qui agissaient avec l'accord et les
26 encouragements de la police."
27 Donc la suggestion que les villageois n'ont jamais dévié de leur version
28 est tout à fait incorrecte, d'ailleurs la suggestion que vous devriez vous
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1 tenir aux faits qu'ils n'ont jamais dévié de leur version et de ce fait
2 penser que ce qu'ils disent est vrai, est crédible, n'est absolument pas
3 prouvée et fondée.
4 En effet, lorsque les villageois ont été interviewés par les autorités des
5 instances macédoniennes, particulièrement P47, je parle de la pièce P47
6 ici, sur les 16 personnes interviewées, il n'y en avait qu'un qui a dit
7 qu'il avait assisté de visu à des sévices sur des points de contrôle. La
8 plupart des témoins ont parlé plutôt des sévices qui auraient été commis
9 par des civils. Or, tout ceci a complètement disparu ici dans le prétoire,
10 on n'en a jamais parlé.
11 Pour ce qui est de ces 16 personnes encore, que l'on retrouve dans la pièce
12 P47, qui parlent des postes de police, ici on ne comprend pas le poste de
13 police de Mirkovci, il y a qu'une personne qui parle de sévices et il ne
14 dit absolument pas si mon pair était ou n'était pas membre de la police.
15 Donc le fait qu'ils ont toujours maintenu leur version et qu'ils disent
16 maintenant que c'est les officiers de police qui les ont battus et qu'aucun
17 d'entre eux n'ait déclaré qu'ils avaient été maltraités par des civils, ne
18 prouve pas absolument pas que ce qu'ils disent est fiable. Au contraire,
19 cela voudrait plutôt dire que les témoins se sont mis d'accord pour réciter
20 une version bien préparée à l'avance par l'Accusation, ici dans ce
21 prétoire.
22 Ensuite, le contrôle effectif, à la page 11 014, après avoir parlé de la
23 pertinence alléguée de certains documents, l'Accusation a déclaré ce qui
24 suit : "Tous ces éléments de preuve montrent bien à nouveau que M. Boskoski
25 avait un contrôle effectif sur les membres du ministère de l'Intérieur et
26 sur la police."
27 Mais c'est une mauvaise interprétation des exigences et des critères du
28 contrôle effectif, mais c'est aussi la preuve que l'Accusation essaie
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1 sûrement de prouver les faits qui sont erronés.
2 En effet, dans le but du droit international pour montrer qu'il y a eu un
3 contrôle effectif, il faut montrer qu'il existe une relation entre l'accusé
4 et l'un des auteurs, non pas comme l'Accusation semble vouloir le dire
5 entre l'accusé et la police ou les membres du ministère de l'Intérieur.
6 Ici, je peux faire référence à l'arrêt Blaskic, paragraphe 67; au jugement
7 de Stakic, paragraphe 459; à l'arrêt Celebici 992, entre autres.
8 Comme nous l'avons noté d'ailleurs dans notre mémoire en clôture, et nous
9 l'avons répété hier d'ailleurs, l'Accusation ici se trompe de but, elle
10 n'essaie pas de prouver ce qui doit être prouvé. Je vais vous parler
11 maintenant d'une affaire de haut commandement qui vient de la Deuxième
12 Guerre mondiale, à la page 543 à 544, qui pourrait être tout à fait
13 pertinente.
14 Le tribunal militaire dit : "La subordination militaire est essentielle,
15 mais pas suffisante pour prouver la responsabilité pénale. L'autorité, à la
16 fois administrative et militaire, d'un commandant et sa responsabilité
17 pénale sont liées mais ne sont pas indissociables. Un commandement
18 supérieur ne peut pas contrôler toutes les opérations militaires de ses
19 subordonnés et ni toutes les mesures administratives. Certes, il doit
20 s'assurer que les détails qu'il délègue à ses subordonnés seront
21 correctement exécutés.
22 "Le Président des Etats-Unis est le commandant suprême des forces armées.
23 Les actes criminels commis par ses forces ne peuvent pas lui être reprochés
24 sur la base uniquement de la théorie de la subordination. D'ailleurs, la
25 même chose s'applique aux autres commandants supérieurs dans la chaîne de
26 contrôle et de commandement. La responsabilité pénale ne vient pas
27 uniquement du fait qu'il y ait une chaîne de commandement. On doit pouvoir
28 prouver qu'il y a eu négligence de sa part.
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1 "Et dans l'affaire qui nous intéresse, ça doit être une négligence
2 personnelle qui équivaudrait à tolérer les crimes commis. Toute autre
3 interprétation du droit international irait bien au-delà des principes de
4 base du droit pénal connu dans tout le monde civilisé."
5 Autre chose maintenant, pour reprendre la théorie du contrôle effectif
6 présenté par l'Accusation à propos des postes de police. Hier nous avons
7 dit que l'Accusation avait laissé tomber sa thèse en ce qui concerne le
8 contrôle effectif pour ce qui est du poste de police, du tribunal et de
9 l'hôpital municipal.
10 Mais dans sa réponse, M. Saxon a cité un certain nombre de paragraphes qui
11 semblent suggérer, en fait, que l'Accusation présente ses arguments.
12 Mais nous vous invitons à regarder ces paragraphes pour voir si dans ces
13 paragraphes il y a des conclusions quelconques à propos de ce contrôle
14 effectif. A notre avis, il n'y en a pas justement.
15 Ensuite, l'Accusation déclare que la loi macédonienne n'a pas été
16 parfaitement employée dans le cadre du ministère de l'Intérieur à l'époque.
17 Or, à notre avis, ce n'est pas du tout étayé par les moyens de preuve.
18 En effet, l'Accusation semble suggérer qu'une situation pourrait être mise
19 en œuvre sans que les critères nécessaires prévus par la loi ne soient
20 satisfaits, donc la Chambre doit conclure que c'est ce qui est arrivé aux
21 personnes qui sont entrées dans Ljuboten le 12 août. En fait, l'Accusation
22 voudrait vous faire penser que bien que la loi n'ait pas été suivie
23 parfaitement, ces personnes qui sont entrées dans Ljuboten auraient quand
24 même été des réservistes.
25 Mais il y a des problèmes quand même. Tout d'abord, il faudrait prouver
26 l'existence de la relation supérieur à subordonné, ceci doit être prouvé
27 au-delà de tout doute raisonnable, puisque c'est essentiel pour le droit de
28 la responsabilité du supérieur hiérarchique, donc, la seule déduction,
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1 quand vous verrez les moyens de preuve, les choses s'imposeront d'elles-
2 mêmes. Ici, la Défense a dit que la plupart des personnes qui, selon
3 l'Accusation, étaient à Ljuboten n'étaient pas des membres du ministère de
4 l'Intérieur.
5 De plus, étant donné que la thèse de l'Accusation dépend sur la
6 preuve que l'on pourrait faire selon laquelle une personne pourrait devenir
7 réserviste de la police sans remplir les commissions prévues au titre de la
8 loi, nous considérons que cette preuve n'a pas été faite jusqu'à présent.
9 Il n'y a aucun exemple de réserviste qui serait devenu réserviste sans
10 avoir suivi tout ce qui est prévu par la loi.
11 L'Accusation vous demande non pas de faire des déductions, mais de tout
12 simplement laisser de côté le droit et la loi pour en revanche prendre en
13 compte des faits que l'Accusation n'arrive même pas à prouver. On vous
14 demande de suivre le raisonnement suivant : malgré ce que stipule la loi,
15 vous êtes censés conclure qu'une personne peut devenir réserviste sans
16 avoir à satisfaire aucune des exigences prévues par la loi, vous devriez
17 donc laisser de côté à la fois le droit macédonien, la loi, et le fait
18 qu'il n'y a aucun exemple qui étaye tout ceci.
19 Ensuite on vous demande, sans prouver quoi que ce soit, que c'est justement
20 ce qui s'est passé à Ljuboten, et on vous demande surtout de ne pas prendre
21 en compte les preuves contraires. On vous demande en plus, que c'était
22 exactement le statut des auteurs, or, l'Accusation n'a jamais réussi à
23 prouver quoi que ce soit. Je tiens à vous rappeler qu'aucun des auteurs
24 présumés n'a été identifié jusqu'à présent.
25 Avec tout le respect que je vous dois, ce n'est pas une déduction qu'on
26 vous demande ni une conclusion, on vous demande une invention pure et
27 simple; et les allégations de l'Accusation non seulement manquent
28 totalement de fondement, mais vont en plus à l'encontre de sa propre thèse.
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1 A la page 11 016, l'Accusation déclare que ce ne sont pas les
2 exigences de jure qui devraient permettre de déterminer si M. Boskoski
3 contrôlait de façon effective ces officiers de police, mais on vous demande
4 uniquement de prendre en compte le fait qu'entre M. Boskoski et les auteurs
5 présumés des crimes, la seule relation qui existait était le fait qu'il
6 était ministre de l'Intérieur à l'époque. Or, les droits et devoirs des
7 ministres sont réglementés par la loi uniquement, il n'y a absolument rien
8 de facto à propos du poste du ministre de l'Intérieur de Macédoine. Il n'y
9 a rien non plus de facto à propos du statut de réserviste dans la loi.
10 L'Accusation déclare que le facteur déterminant n'est pas la capacité
11 matérielle de sanctionner des crimes; l'Accusation, donc, va à l'encontre
12 même de la thèse selon laquelle les obligations et les responsabilités de
13 M. Boskoski sont gravées dans la loi macédonienne, ce qui le relie aux
14 auteurs présumés.
15 Nous tenons à dire que la thèse l'Accusation selon laquelle des
16 individus auraient pu faire partie des forces de réserve du ministère de
17 l'Intérieur sans répondre aux critères prévus par la loi va tout à fait à
18 l'encontre de ce que nous ont dit un grand nombre de témoins ici. Et comme
19 l'a dit Me Apostolski dans ses arguments d'hier, à moins que l'Accusation
20 ne prouve tout ceci, elle ne peut pas demander à la Chambre d'en déduire le
21 contraire.
22 Je fais référence ici au compte rendu d'audience pages 51 -- 4 901
23 [comme interprété], 5 152 à 50 -- 9 115 à 9 116, 6 827 à 6 828, 1 971, 4
24 918, 3 717 à 3 722 et 10 671 à 1071 [comme interprété] ainsi qu'à la pièce
25 1D310, paragraphe 47.
26 Tous ces éléments de preuve sont en contradiction flagrante avec la
27 thèse de l'Accusation et jusqu'à présent n'ont absolument pas été
28 contestés.
Page 11179
1 Pouvons-nous faire la pause maintenant ?
2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Tout à fait.
3 Nous allons faire la pause et nous reprendrons à 11 heures, après
4 notre demi-heure de pause.
5 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.
6 --- L'audience est reprise à 11 heures 06.
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Mettraux.
8 M. METTRAUX : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
9 J'aimerais aborder rapidement la question du conflit armé allégué et
10 de la pertinence alléguée pour le critère de mens rea par rapport à ce
11 conflit.
12 Nous avons remarqué que l'Accusation ne s'est pas penchée sur une question
13 très importante que nous avions soulevée dans notre mémoire, à savoir le
14 statut des actions de l'ALN pour ce qui est des activités terroristes et la
15 conséquence que cela pourrait avoir pour l'Accusation afin de déterminer
16 qu'il y a eu conflit armé. Nous n'allons pas réitérer ce que nous avons
17 déjà dit à ce sujet, mais nous aimerions tout simplement faire référence à
18 notre mémoire de clôture, car il y a une question sur laquelle nous
19 aimerions mettre l'accent.
20 Comme nous l'indiquons dans notre mémoire de clôture, des actes
21 terroristes ne constituent pas des moyens de preuve permettant de prouver
22 l'existence d'un conflit armé et dépassent les limites du droit humanitaire
23 international. Comme cela est indiqué dans le manuel du Royaume-Uni relatif
24 aux Lois de la guerre, que nous avons cité au paragraphe 265 de nos
25 mémoires de clôture, on ne peut pas établir l'équation entre acte de
26 terrorisme et conflit armé. Cela signifie que pour établir l'existence d'un
27 conflit armé, l'Accusation ne peut pas être tributaire d'incidents qui ne
28 sont qu'effectivement que des activités terroristes. C'est quelque chose
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1 qui a sa pertinence, car il s'agit de savoir s'il y a eu ou non conflit
2 armé à cette époque-là en République de Macédoine, ce qui nous amène à
3 poser une autre question qui a un lien avec la première, il faut savoir
4 s'il était raisonnable que M. Boskoski ait comme point de vue le fait qu'il
5 n'y avait pas de conflit armé. Voilà le fait important, car il faut savoir
6 qu'à tout moment M. Boskoski et le ministre de l'Intérieur ont considéré et
7 décrit les activités et les attaques de l'ALN comme autant d'exemples
8 d'activités terroristes.
9 J'aimerais faire référence à la pièce 1D342 qui énumère toute une série
10 d'incidents qui, d'après l'Accusation, ont leur pertinence et permettent
11 d'établir, d'après ce qu'ils disent, l'intensité du conflit armé, mais qui,
12 en fait, sont des incidents qui sont considérés comme autant de cas de
13 terrorisme.
14 Monsieur le Président, lorsque ma consoeur indique que ce qui est important
15 est que l'accusé soit informé des circonstances factuelles pertinentes, et
16 ce, afin finalement de déterminer s'il y a eu existence d'un conflit armé,
17 je dirais qu'elle avait raison. Ce qui n'est pas exact, toutefois, c'est de
18 suggérer que les faits qui sont évoqués par l'Accusation sont assez
19 pertinents pour pouvoir déterminer qu'il y a eu cet état d'esprit.
20 En fait, l'Accusation fait référence à un certain nombre d'incidents
21 factuels qui sont des actes terroristes et qui, d'après eux, sont la preuve
22 du mens rea de M. Boskoski. Mais en fait, l'Accusation a tout simplement
23 déterminé que M. Boskoski était au courant d'incidents qui ne sont pas
24 pertinents pour permettre d'établir l'existence d'un conflit armé. En
25 d'autres termes, l'Accusation n'a pas su déterminer qu'elle était
26 consciente de la base factuelle qui aurait permis de parvenir à ce point de
27 vue. En d'autres termes, l'Accusation n'a pas pu établir le mens rea au
28 titre de l'article 3 du Statut.
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1 L'Accusation a répondu à la Défense en indiquant qu'il y avait des
2 erreurs de droit et des erreurs de fait en suggérant qu'il n'appartenait
3 pas à l'Accusation d'exclure la possibilité d'une erreur. Ce qui est tout à
4 fait erroné parce que lorsque l'on envisage la question technique de la
5 charge de la preuve, il est évident qu'il appartient à l'Accusation de
6 prouver cette charge de la preuve. Il appartient à l'Accusation d'exclure
7 la possibilité raisonnable suivant laquelle les accusés auraient pu
8 commettre des erreurs de fait excusables ou des erreurs de droit
9 excusables.
10 J'aimerais citer l'affaire Michael Schwartz, il s'agit d'une décision
11 en appel, pages 862 à 864. Il s'agit d'un arrêt de 1987.
12 L'Accusation n'a pas raison lorsqu'elle réfute ce que la Défense a
13 dit en disant que cela n'avait pas son importance dans ce contexte. La
14 Défense notamment, la Défense indique que des erreurs de droit jouent un
15 rôle important dans le cadre du droit pénal international, parce que cela
16 compense, en partie, les imprécisions générales. Le juge préconise en
17 l'espèce, il s'agit à nouveau d'une affaire de la Deuxième Guerre mondiale
18 : "Aucun marin et aucun soldat ne peut transporter avec lui une
19 bibliothèque de droit international."
20 Et cela est tout à fait vrai pour ce qui est des chefs civils. A la
21 suite, je dirais d'ailleurs que M. Cassese, le premier président de ce
22 Tribunal, l'avait indiqué, voilà ce qu'il avait dit : "Puisque nous avons
23 ces lacunes dans le droit pénal international, vous avez en contrepoids le
24 fait que les tribunaux ont tendance à accorder aux erreurs de droit un
25 poids plus important que ce qui est fait dans le cadre de systèmes
26 juridiques nationaux."
27 A titre d'illustration de ce principe, je fais référence à l'affaire
28 des otages. A ce sujet-la, voilà ce qui a été dit : "Lorsqu'il est possible
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1 d'envisager une erreur honnête commise par un commandant d'armée, il faut
2 envisager la présomption d'innocence."
3 Ce principe, ou ces défenses d'erreur de droit et d'erreurs de faits
4 ont leur pertinence, à notre avis. Il ne s'agit pas tout simplement de
5 savoir s'il y avait un conflit armé ou non, ou s'il était raisonnable ou
6 non que M. Boskoski adopte ce point de vue, mais nous pensons qu'il a tout
7 à fait le droit d'aboutir à la conclusion suivant laquelle il s'était
8 exécuté de tous ses devoirs conformément à la législation pertinente pour
9 lui.
10 J'aimerais citer à nouveau, non pas verbatim, mais une autre affaire
11 dont le principe est énoncé comme suit : Lorsque l'accusé pense en toute
12 bonne foi qu'il a le droit d'agir comme il l'a dit ou qu'il a le droit de
13 se comporter comme il l'a dit, il peut être dit qu'il a fait une erreur,
14 mais cela ne peut pas être considéré comme une responsabilité au titre
15 pénal.
16 Je dirais qu'il y a également une affaire néerlandaise, une affaire
17 du 2 janvier 1951, que l'on trouve à la page 247 pour "L'année 1952 au
18 Pays-Bas".
19 L'Accusation aujourd'hui, et cela a été réitéré, a suggéré que M.
20 Boskoski et M. Tarculovski étaient présents ensemble chez Brace. Comme nous
21 l'avons indiqué dans notre mémoire de clôture, et nous l'avons indiqué à
22 plusieurs reprises, les moyens de preuve n'étaient absolument pas ce qu'ils
23 avancent, car l'Accusation fait état des moyens de preuve présentés par
24 deux personnes, M-037 et M. Jakovoski.
25 Pour commencer par le Témoin M-037, l'Accusation a cité deux pages du
26 compte rendu d'audience et M. Saxon a effectivement relu au témoin une
27 déclaration qui avait été faite par ce témoin préalablement. La teneur de
28 cette partie de la déclaration, qui est maintenant utilisée par
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1 l'Accusation, n'a jamais été présentée à ce témoin. Le témoin n'a jamais
2 adopté cette partie de la déclaration que l'Accusation souhaite utiliser
3 maintenant. Dans la mesure où il s'agit de moyen de preuve, il s'agit d'un
4 moyen de preuve présenté par le conseil, par l'Accusation, et non pas par
5 le témoin.
6 Le Témoin M-037 n'a jamais indiqué ici lors de sa déposition qu'il
7 avait vu M. Tarculovski et M. Boskoski ensemble. Si telle est la thèse
8 préconisée par l'Accusation, ils auraient dû présenter cela au témoin. Et
9 j'aimerais attirer votre attention, Madame, Messieurs les Juges, sur les
10 pages 875 et 876, l'Accusation vous en a donné lecture de certains
11 extraits.
12 A la suite de l'extrait qui a été lu par l'Accusation, voilà ce que
13 l'Accusation a dit : "Très bien. C'est tout ce que je voulais savoir à
14 propos de ce document."
15 M. Saxon a dit : "Point n'est besoin d'aborder les autres éléments de
16 ce document. Est-ce que ce document pourrait maintenant être retiré au
17 témoin."
18 Nous, ce que nous avançons, c'est que puisqu'il s'agit de quelque
19 chose qui a une telle importance, et dans la mesure où l'Accusation a
20 essayé d'obtenir de la part de ce témoin des moyens de preuve, l'Accusation
21 devait présenter sa proposition au témoin, ce qu'elle n'a absolument pas
22 fait.
23 A propos du deuxième témoin, il s'agit de M. Jakovoski, l'Accusation
24 souhaite utiliser sa déposition. La situation est assez semblable, car M.
25 Jakovoski n'a jamais adopté la teneur et le contenu du document qui lui
26 avait été lu par mon confrère. D'ailleurs, il l'a absolument rejeté lorsque
27 le conseil lui a posé une question. D'ailleurs, je pourrais citer 3 925
28 [comme interprété]. On lui a demandé à propos de cette page qui suit :
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1 "Est-ce que vous vous souvenez d'avoir vu le ministre Boskoski, Bucuk
2 et Johan Tarculovski ensemble pendant la crise en 2001 ?"
3 La réponse a été comme suit : "Non, je ne m'en souviens pas non
4 plus."
5 Dans d'autres parties du compte rendu d'audience, le même témoin, M.
6 Jakovoski, a indiqué qu'il ne savait même pas à quoi ressemblait M.
7 Tarculovski, page 3 942.
8 Par conséquent, l'Accusation a suggéré que M. Jakovoski avait reconnu
9 formellement avoir vu M. Boskoski et M. Tarculovski qui étaient ensemble.
10 Je dirais que le dossier et le compte rendu d'audience ne permettent
11 absolument pas de corroborer cette proposition.
12 Aujourd'hui, l'Accusation est également revenue sur un des arguments
13 présentés par la Défense lors de sa plaidoirie d'hier. Il s'agit du degré
14 de faute nécessaire pour déclencher la responsabilité supérieure
15 conformément au droit pénal international. La Défense a indiqué que le
16 critère qui doit être respecté est un critère d'une infraction grave, ce
17 qui correspond, en fait, à ce que doit faire le supérieur au vu de sa
18 responsabilité. L'Accusation a indiqué que cela n'était pas un des critères
19 du Tribunal et n'a pas --
20 J'aimerais citer un autre jugement du TPIR où il est dit ce qui suit
21 : "En fonction de la nature de l'infraction du devoir et lorsqu'il y a
22 infraction grave, cela indique qu'il doit y avoir infraction au devoir
23 imposé par les lois de la guerre, ce qui doit déclencher un processus
24 disciplinaire plutôt que la responsabilité pénale du supérieur qui fait
25 l'objet de la discipline militaire."
26 Donc voilà ce que la Chambre d'appel a eu à dire à ce sujet.
27 Deuxièmement, et dans la mesure où cela est pertinent pour la
28 responsabilité du supérieur hiérarchique qui est utilisée dans ce Tribunal,
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1 vous avez, entre autres, l'arrêt dans l'affaire Hadzihasanovic. Je dirais
2 que la Défense a fait référence aux pages 15 à 20 de l'intercalaire 25 de
3 vos classeurs qui représentent des précédents dans le domaine du droit
4 pénal international et représentent une indication importante de ce
5 qu'envisage le droit international pénal à ce sujet. L'Accusation n'a pas
6 expliqué pourquoi ou comment la Chambre ne devrait pas tenir compte de ce
7 critère.
8 Nous aimerions également attirer l'attention de la Chambre sur le
9 point de vue adopté par le comité international de la Croix-Rouge à ce
10 sujet. Voilà ce qui est dit au paragraphe 3 354 [comme interprété], il
11 s'agit du Protocole I supplémentaire.
12 Il est indiqué que : "Pour que cela soit considéré comme une
13 infraction, le manquement au devoir qui est attribué au commandant ou au
14 supérieur doit être si grave qu'il doit être l'équivalent d'une intention
15 délictueuse, abstraction faite du lien entre le comportement en question et
16 les dégâts qui en résultent."
17 Dans plusieurs affaires qui se sont déroulées après la Deuxième
18 Guerre mondiale, le critère qui a été considéré par le Tribunal est
19 pertinent pour établir la forme de responsabilité.
20 Il faut savoir que : "Le manquement au devoir doit être considéré ou
21 doit être l'équivalent d'une négligence personnelle. Toute autre
22 interprétation du droit pénal international dépasserait les principes
23 fondamentaux du droit pénal tel qu'il est connu par les nations."
24 Je vous remercie de votre patience, Madame, Messieurs les Juges. Je
25 souhaiterais maintenant donner la parole à Mme Residovic.
26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Maître Mettraux.
27 Maître Residovic.
28 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
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1 Dans le cadre de sa réplique, l'Accusation est revenue sur la position de
2 la Défense selon laquelle le ministère de l'Intérieur, lorsqu'il a informé
3 le juge d'instruction, s'était acquitté de ses obligations. L'Accusation a
4 dit qu'en interprétant ainsi la position du ministère de l'Intérieur, que
5 cette interprétation constituait une violation grave du droit
6 international.
7 Monsieur le Président, l'Etat macédonien a mis sur pied un système complet
8 chargé d'identifier et de poursuivre les auteurs de crimes. Dans ce
9 système, comme vous l'avez vu dans les éléments de preuve présentés et dans
10 les témoignages entendus, certaines instances se voient conférer des
11 devoirs et des responsabilités bien définis.
12 Comme il ressort des éléments de preuve présentés, lorsque les devoirs ou
13 les responsabilités d'une instance particulière ne s'appliquaient plus,
14 c'est une autre instance qui s'en chargeait. Si bien qu'en République de
15 Macédoine, il est impossible que les ordres portant sur la détection et la
16 poursuite de crimes ne puissent pas être pleinement appliqués.
17 Vous avez entendu Vilma Ruskovska, le procureur adjoint, et Petre
18 Stojanovski qui en ont parlé dans le cadre de leur déposition.
19 Si bien, qu'il n'existe aucun vide, aucune lacune dans le système qui
20 permettrait à quelqu'un de se laver les mains, de ne pas assumer la
21 responsabilité d'un crime qu'il aurait commis. Alors, il faut savoir qui,
22 conformément à la législation en vigueur, avait le devoir et la
23 responsabilité d'agir et quelles mesures ont été prises à cet égard.
24 Le Procureur ne s'est appuyé que sur un seul exemple. Il a dit que c'est la
25 police qui devait prendre des mesures suite à l'information du 12 août
26 selon laquelle on avait retrouvé des corps dans le village. Mais les
27 éléments de preuve présentés en l'espèce indiquent que ni le 12, ni le 14,
28 le ministère n'a cessé de coopérer activement avec les instances
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1 judiciaires compétentes afin d'élucider ce qui s'était passé à Ljuboten et
2 dans les environs. Monsieur le Président, nous avons présenté des éléments
3 de preuve à l'appui de notre thèse et nous en parlons de façon détaillée
4 dans notre mémoire en clôture. Je ne reviendrai pas là-dessus.
5 Cependant, le Procureur cherche à démontrer que le ministère de l'Intérieur
6 ne voulait pas véritablement enquêter sur les événements en cause. Il a
7 donné un exemple, la pièce 1D33, qui est une proposition relative à une
8 exhumation et une autopsie présentée le 7 septembre au ministère public et
9 au juge d'instruction de permanence du tribunal d'instance de Skopje. Cette
10 proposition venait du ministère. S'agissant de cette pièce, l'Accusation
11 affirme, sans présenter quoi que ce soit à l'appui de cette thèse, que
12 cette pièce démontre que le ministère n'avait pas l'intention de faire la
13 lumière sur les événements, ni d'établir les faits et les circonstances de
14 l'espèce.
15 Je vais lire la conclusion de cette proposition, dans cette phrase,
16 le ministère de l'Intérieur explique sa proposition en disant que
17 l'identité de cinq corps doit être établie ainsi que la cause de leur
18 décès. Ces personnes provenaient du village de Ljuboten. Etablir la cause
19 du décès signifie également établir les circonstances, les raisons et les
20 conditions dans lesquelles ces cinq personnes ont trouvé la mort.
21 A propos de cette proposition, vous avez entendu le témoignage de Vilma
22 Ruskovska et d'autres personnes suivant lesquelles cette proposition
23 d'exhumation était une initiative qui allait au-delà des responsabilités et
24 des compétences du ministre de l'Intérieur à l'égard des instances
25 judiciaires. Lorsqu'on a su que ces corps avaient été inhumés, l'affaire
26 relevait du procureur. Et comme le procureur n'a rien dans les 20 jours qui
27 ont suivi, c'est le ministre qui a pris l'initiative pour les raisons
28 indiquées par la Défense, car il était important pour le ministre et pour
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1 le ministère de faire toute la lumière sur ces événements et d'établir
2 exactement ce qui s'était passé.
3 La meilleure illustration de ce fait, ce qui prouve bien que c'est vrai,
4 c'est le rapport établi par la commission d'enquête mise sur pied par M.
5 Boskoski le 13 août. A la fin de son opinion, il est dit : "Afin d'analyser
6 l'affaire en question et d'avoir une vue d'ensemble, il est nécessaire que
7 les instances compétentes de la République de Macédoine entreprennent des
8 actions légitimes, à savoir l'exhumation des corps en présence d'experts et
9 de représentants des organisations internationales compétentes, ce qui
10 suppose qu'il faut prendre toutes les mesures légales et nécessaires
11 permettant de déterminer les faits et d'obtenir des réponses aux questions
12 essentielles qui se posent en l'espèce."
13 Donc d'après le Procureur, le ministère ne voulait pas savoir ce qui
14 s'était passé. Pourtant les documents versés au dossier de l'espèce
15 témoignent du contraire.
16 Enfin, pour terminer sur cette question soulevée par mon éminent
17 confrère aujourd'hui, je vous renvoie à la pièce 1D73; il s'agit de la note
18 officielle qui fait état d'une réunion tenue le 14 septembre 2001 à
19 l'institut médico-légal sur initiative du juge d'instruction Nikolovski
20 qui, sur proposition du ministère public et suite à l'initiative du
21 ministère de l'Intérieur et des responsables de l'affaire de Ljuboten
22 jusqu'à la fin, jusqu'à ce que cette affaire soit renvoyée devant le
23 Tribunal international.
24 Dans ce document, on peut lire : "Au cours de cette réunion, le juge
25 d'instruction, Nikolovski, a informé les personnes présentes que le
26 ministère de l'Intérieur avait présenté au bureau du tribunal d'instance de
27 Skopje un rapport concernant les activités entreprises dans le secteur de
28 Ljuboten par les forces de sécurité du ministère de l'Intérieur."
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1 Ceci, donc, va à l'encontre de ce que suggère l'Accusation. Le
2 dossier de l'espèce montre que le ministère et le ministre Boskoski ont agi
3 conformément à leurs obligations telles qu'énoncées par la loi, et ils sont
4 même allés au-delà afin de faire toute la lumière sur les événements de
5 Ljuboten et les personnes responsables lorsqu'il y avait des raisons
6 plausibles de soupçonner certaines personnes.
7 Donc, je vous renvoie à la page P88, article 42 qui parle
8 expressément des devoirs du ministère public s'agissant de procédure
9 pénale. C'est lui qui était chargé de la phase d'instruction après que les
10 crimes ont été établis. A l'article 144, paragraphe 2 de cette même loi, il
11 est dit expressément que lorsque le ministère public obtient des
12 informations suivant lesquelles il y a des raisons de penser qu'un crime a
13 été commis, il présente des requêtes à d'autres instances, notamment au
14 ministère de l'Intérieur concernant les mesures à prendre. Donc tous les
15 autres éléments de preuve versés au dossier contredisent totalement les
16 allégations présentées par mon confrère.
17 Dans son réquisitoire, le Procureur a cherché à démontrer que le
18 ministre de l'Intérieur exerçait un contrôle de facto sur la police. Il a
19 notamment mentionné le fait que le ministre en 2001 avait donné un ordre
20 par lequel les congés annuels étaient annulés.
21 Miodrag Stojanovski, sur ce point, a dit que l'ordre avait été adressé aux
22 postes de police.
23 Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, la Défense n'a
24 jamais affirmé que le ministre ne pouvait pas donner d'ordre. Cependant la
25 Défense a indiqué très clairement, c'est ce qui ressort du dossier, que le
26 ministre pouvait donner des ordres lorsque la loi l'y autorisait. A maintes
27 reprises, nous avons mentionné la pièce P92, article 55, il s'agit de la
28 loi portant sur l'organisation de l'administration publique qui énonce ou
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1 définit les autorités et les attributions du ministre.
2 En ce qui concerne les questions soulevées par mon confrère en parlant du
3 contrôle de facto exercé par M. Boskoski, lorsqu'il a ordonné que soit
4 suspendu les congés annuels, tout cela se retrouve dans la loi et il arrive
5 exceptionnellement seulement qu'un ministre puisse donner des ordres. C'est
6 ce qui ressort de la pièce P86, article 61 qui dispose ce qui suit :
7 "Lorsque les besoins du ministère l'exigent, un ministre ou un
8 fonctionnaire habilité par ce dernier peut reporter ou annuler le congé
9 annuel d'un salarié."
10 Ceci va à l'encontre de l'affirmation de l'Accusation et corrobore la
11 position de la Défense selon laquelle le ministre avait certains droits, il
12 avait le droit, dans certain cas prévus par la loi, de prendre certaines
13 décisions.
14 Dans son réquisitoire, le Procureur a également cherché à démontrer que
15 certaines situations existaient de facto avant d'être officialisées de
16 jure. Le Procureur a notamment renvoyé au témoignage de M-056 en disant que
17 ce témoin était inspecteur en chef même si le poste n'existait pas
18 officiellement à l'époque.
19 Toujours sur ce point, nous avons entendu le témoignage du général Zoran
20 Jovanovski, lequel a dit très clairement lorsqu'on lui a posé la question,
21 que la pièce 1D62, qui a permis au Procureur de conclure que ce poste
22 existait avant d'être officialisé dans les textes de loi pertinents. Le
23 témoin a dit, disais-je, que ce manuel portant sur les modifications et les
24 amendements ne faisait qu'amender les règles en vigueur, au point 5, en
25 introduisant au point 5.1 la mention faite au Bataillon "Lavovi" "les
26 Lions", bataillon d'intervention rapide qui a été constitué en application
27 d'une pièce versée au dossier. Il ressort du témoignage de M-056 que l'on
28 retrouve à la page -- excusez-moi, je donnerai la référence plus tard.
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1 S'agissant des pièces, il est clair que le titre de "conseiller en chef"
2 existait déjà et que la modification ne concernait que l'introduction de la
3 décision du ministre en date du 6 août 2001.
4 Le Procureur avance que certaines situations existaient avant d'être
5 officialisées. La décision du 26 juin portant sur le rétablissement de
6 l'unité posebna montre que c'est une unité qui existait à l'époque de la
7 RSFY. C'est ce qui est mentionné dans la pièce utilisée par l'Accusation,
8 mais cette pièce fait état que de changements mineurs par rapport à la
9 décision précédente, il ne s'agit pas là donc de créer une nouvelle unité.
10 Dans son réquisitoire -- excusez-moi, on vient de me donner les références
11 du compte rendu d'audience où le général Jovanovski décrit la situation;
12 pages 4 894 à 4 898.
13 Pour étayer sa thèse selon laquelle une situation pouvait exister de facto
14 et pas de jure, le Procureur renvoie de nouveau au témoignage de M-052 qui
15 a témoigné de façon erronée au sujet d'une autre question qui nous
16 intéresse dans ce procès, et cela nous permet de douter de la crédibilité
17 de ce témoin. Page 11 017 du compte rendu d'audience, il a dit que le poste
18 de police de réserve de Kuceviste existait de facto, même s'il a été créé à
19 une date ultérieure ou mis sur pied à une date ultérieure. Lorsque la
20 déclaration écrite de Marjan Taskovski a été montrée au Témoin M-052,
21 déclaration dans laquelle Marjan Taskovski confirmait que le poste de
22 police existait seulement à partir du 15 août 2001, M-052 a fait le
23 commentaire cité par mon confrère.
24 Cependant, le poste de police de Kuceviste a vu le jour le 15 août. Il a
25 été ouvert ou il a commencé à fonctionner le 16 août 2001.
26 Dans le classeur que nous vous avons donné hier, nous avons inclus la pièce
27 P586, il s'agit d'un aperçu des rémunérations versées aux réservistes de ce
28 poste de police de réserve de Kuceviste. Il s'agit d'une lettre du
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1 ministère de l'Intérieur, secteur des affaires intérieures de Skopje,
2 département de Cair, poste de police de réserve de Kuceviste. La date est
3 celle de septembre 2001.
4 Nous voyons une liste de personnes qui, entre le 16 août 2001 et le
5 31 août 2001, ont travaillé dans ce poste de police. Cette pièce se trouve
6 à l'intercalaire 17D.
7 Pourtant, à l'intercalaire 17E du classeur que nous vous avons distribué
8 hier, vous trouverez un extrait du journal ou du registre tenu par le
9 Témoin M-084. Cette liste de réservistes a été vérifiée par Gjoko Popovski.
10 Mais à la page N006-4709 --
11 L'INTERPRÈTE : Remplacez 4709 par 4715.
12 Mme RESIDOVIC : [interprétation] -- donc à la page que je viens de
13 mentionner du texte en anglais, enfin --
14 Je vous présente toutes mes excuses, Monsieur le Président, Madame et
15 Monsieur les Juges, je pense que je ne m'y retrouverai jamais dans ces
16 références du système de prétoire électronique.
17 Il s'agit du numéro ERN N006-4714. Nous trouvons là une note
18 personnelle rédigée par le Témoin M-084 en date du 15 août 2001 où il est
19 fait référence à une réunion tenue au ministère de l'Intérieur. Ce qui est
20 essentiel ici, c'est qu'à la fin du texte il est fait mention de
21 préparatifs concernant le poste de police de réserve. Dernier ligne, on
22 peut lire que : "Le 15 août, les préparatifs concernant ce poste sont en
23 cours."
24 Page suivante, nous trouvons une note datée du 16 août 2001. N006-4715, 7
25 heures 30. On peut lire : "Inauguration du poste de police de réserve de
26 Ljubanci." Cela confirme ce que Marjan Taskovski, commandant de ce poste de
27 police, a rédigé, ce qui a été présenté au Témoin M-052. M-052 a pourtant
28 nié ces faits irréfutables.
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1 En cherchant à prouver sa thèse suivant laquelle il y avait bien contrôle
2 effectif et il y avait bien une situation de facto avant qu'elle ne
3 devienne une situation de jure, le Procureur a mentionné la pièce P402. A
4 cet égard, il a déclaré qu'une partie de cette pièce montrait que l'Unité
5 des Lions existait avant d'être officialisée.
6 Lors d'une réunion tenue le 29 août et mentionnée par mon confrère, si nous
7 examinons la pièce qui s'y rapporte, nous voyons très clairement que le
8 ministre Boskoski s'est adressé aux personnes présentes en parlant de cette
9 question et en disant que les actions menées par les Lions, unité qui était
10 sur le point d'être constituée conformément à ce que l'on voit dans la
11 pièce P74 et dans d'autres pièces à conviction, 1D61 fait mention de
12 modifications apportées au manuel sur l'organisation et le fonctionnement;
13 1D62, nous voyons que l'appellation Lions a été donnée à cette unité. On a
14 dit que c'est l'unité qui, après le départ des forces de l'OTAN de la
15 Macédoine, pourra assurer la défense de la Macédoine.
16 Donc le fait de se servir de cette conversation pour prouver que
17 l'unité existait déjà contredit ce qu'a affirmé le ministre Boskoski aux
18 pages que j'ai mentionnées. De même, lors de la réunion qui a suivi, autre
19 réunion mentionnée par le Procureur, je vous renvoie à la pièce P402, cette
20 réunion doit être vue ou interprétée de la même manière. Il s'agit de la
21 réunion du 10 juin concernant les événements à venir, et non pas les
22 événements déjà passés.
23 Le témoin Zoran Jovanovski, qui était sous-secrétaire adjoint de la
24 police avant de devenir sous-secrétaire de la police, nous a expliqué tout
25 cela de façon détaillée. Cependant, les preuves versées au dossier parlent
26 d'elles-mêmes, je vous renvoie à la pièce 1D59, décision du gouvernement;
27 1D60, décision du président portant sur la création de cette unité; P74,
28 qui est la décision du ministre portant sur la création de l'Unité des
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1 Lions; il s'agit de la pièce qui permet la création de l'unité, 1D62, 1D61,
2 je vous renvoie également aux témoignages de tous ceux qui ont déclaré que
3 cette unité n'est devenue opérationnelle qu'à l'automne 2001.
4 Le Procureur vous a également renvoyé aux pièces P439 et 277.
5 [Le conseil de la Défense se concerte]
6 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Excusez-moi, le Procureur a
7 seulement renvoyé à la pièce P439. Il s'agit d'une séquence vidéo où il est
8 mentionné que les Lions existaient déjà depuis huit mois.
9 A cet égard, dans le cadre du contre-interrogatoire et de
10 l'interrogatoire supplémentaire du témoin, le général Jovanovski, ce
11 dernier a apporté une explication.
12 Il a dit que sur la base de la pièce P74, on voit quelle est la
13 procédure à suivre pour créer l'Unité des Lions et on voit bien qui va en
14 devenir membre. On voit que certains éléments de l'unité posebna allaient
15 être intégrés à l'Unité des Lions, nous voyons qu'il s'agit d'une unité
16 permanente qui existait dans les structures du ministère de l'Intérieur qui
17 faisait partie des forces de réserve et qui allait, à l'avenir, collaborer
18 avec le ministère de l'Intérieur.
19 Donc, ces personnes, qui par la suite allaient devenir membres de
20 l'Unité des Lions, étaient des membres de l'unité posebna ou des forces de
21 réserve. Donc dans leurs unités de police d'origine ils ont participé au
22 combat, mais en tant que membres de l'unité posebna ou en tant que membres
23 des forces de réserve. Ils sont sans doute devenus membres du Bataillon
24 d'Intervention rapide, c'est-à-dire les Lions, au travers de la procédure
25 qui a été expliquée. Comme l'a dit le général Jovanovski, lorsque le
26 ministre s'est adressé aux Lions, lorsqu'il leur a dit qu'ils avaient
27 combattu bravement au cours des six derniers mois, il faisait référence aux
28 élites de l'unité, à ceux qui avaient participé au combat de l'époque, et
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1 absolument pas aux Lions qui, soi-disant, auraient existé auparavant mais
2 qui n'avaient été créés qu'officieusement et non pas officiellement.
3 Donc, lorsque l'on regarde tous ces éléments de preuve et lorsque l'on
4 parle surtout de la création de l'Unité des Lions, et lorsque l'on revoit
5 tous les témoignages qui parlent de ceci, on se rend compte que la théorie
6 avancée par l'Accusation, à la fois dans son mémoire en clôture et dans son
7 réquisitoire, est totalement infondée.
8 Pour clarifier le clip vidéo dont j'ai parlé, le P439, on a montré aussi au
9 général Jovanovski la séquence vidéo P277. Tout ceci a été versé au
10 dossier; mais le général Jovanovski en a profité pour éclaircir autre
11 chose; pourquoi est-ce que ces braves sont appelés des Lions et pourquoi
12 les a-t-on appelés les Lions une fois qu'on a créé cette unité. Il nous a
13 expliqué tout cela. J'ai déjà dit que ce n'est que le 5 septembre que cette
14 unité a été baptisée les Lions. Le témoin a expliqué qu'il s'agissait ici
15 de l'histoire macédonienne, que dans les temps reculés les unités qui
16 avaient participé au soulèvement s'appelaient les Lions.
17 Donc rien n'étaye l'affirmation de l'Accusation selon laquelle les
18 Lions, en tant qu'unité ou groupe, existaient avant leur création
19 officielle, et jusqu'à présent nous n'avons entendu aucune preuve qui
20 affirmerait le contraire. D'ailleurs, ce que je viens de dire peut être
21 retrouvé dans le témoignage du général Jovanovski à la page 5 113,
22 lorsqu'il commentait la pièce P277 et la pièce P439.
23 Pour aborder très rapidement le dernier point abordé par mon éminent
24 confrère, le fait de savoir si les personnes qui ont pris part à l'action à
25 Ljuboten avaient des casiers judiciaires ou non.
26 Nous connaissons bien tout cela étant donné que nous travaillons tous
27 dans le pénal, nous savons que le processus de réinsertion existe chez tous
28 les peuples civilisés du monde entier. Le fait que l'on blanchisse un
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1 casier judiciaire existe partout, il n'y a pas que dans la législation
2 pénale macédonienne que cela existe. Nous avons accepté au travers du
3 témoignage de Vesna Dorevska que ceci était possible par la loi
4 macédonienne, donc on peut blanchir un casier. Vous le trouvez à la pièce
5 P86. Un casier vierge n'était pas essentiel pour devenir membre des forces
6 de la police régulière.
7 Mais ce qui est important ici, c'est ce qui est dans le dossier et dans les
8 classeurs, c'est que jusqu'à présent l'Accusation n'a pas réussi à prouver
9 qu'aucune des personnes à qui on avait donné des armes le 11 août, sur
10 ordre de Petre Stojanovski ou Goran Mitevski, avait un casier judiciaire
11 qui ne soit pas vierge; jusqu'à présent, l'Accusation n'a absolument pas
12 prouvé quoi que ce soit qui pourrait prouver cela ou qui pourrait
13 corroborer quoi que ce soit ayant trait à la liste obtenue auprès des camps
14 [inaudible] de PSOLO.
15 L'Accusation nous dit que c'étaient des villageois de Ljuboten à qui on a
16 donné des armes et qui n'avaient aucune relation avec le ministère de
17 l'Intérieur. En tout cas, ce que l'Accusation n'a pas réussi à prouver
18 jusqu'à présent, c'est que les auteurs des crimes auraient à un moment ou à
19 un autre été membres du ministère de l'Intérieur, et il n'a jamais réussi à
20 prouver non plus qu'il était sous le contrôle effectif du ministre
21 Boskoski.
22 De ce fait, nous maintenons notre thèse, c'est-à-dire que le ministre a
23 pris toutes les mesures raisonnables et nécessaires qu'il devait prendre au
24 titre de la loi de la République de Macédoine, il est même allé au-delà de
25 ses devoirs et obligations pour essayer d'élucider ce qui s'était passé à
26 Ljuboten.
27 Donc nous maintenons notre position et nous demandons que M. Boskoski soit
28 acquitté de tous les chefs reprochés dans l'acte d'accusation.
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1 Maintenant, je tiens à vous remercier de nous avoir permis de présenter
2 notre thèse au cours de tout ce procès, de nous avoir permis aussi de poser
3 toutes les questions que nous voulions poser aux témoins présentés par
4 l'Accusation, de nous avoir permis d'étudier et de prendre connaissance
5 d'un grand nombre de documents et de citer tous les témoins que nous
6 voulions citer.
7 Je tiens aussi à remercier mes confrères du bureau du Procureur, qui
8 ont montré énormément de bonne volonté et qui ont un grand souci de
9 coopération afin que ce procès se déroule du mieux possible.
10 Je tiens à remercier aussi les membres du greffe qui, on le voit à de
11 nombreuses reprises, ont fait tout leur possible pour aider la Défense à
12 présenter au mieux ses moyens de preuve.
13 Nous tenons aussi à remercier le CLSS et les interprètes qui ont
14 souvent dû gérer le débit extrêmement rapide des membres de la Défense dans
15 leur présentation. Je tiens à remercier aussi les interprètes macédoniens
16 qui ont fait des efforts pour interpréter dans une langue qui n'est pas
17 leur langue maternelle. Je vous remercie aussi de m'avoir autorisée à
18 présenter mes arguments dans ma propre langue.
19 Etant donné aussi que nous avons énormément été aidés par nos
20 équipes, je tiens à remercier notre commis aux affaires, mes consultants,
21 et cetera, et tous les stagiaires sans lesquels nous n'aurions pas pu
22 présenter de façon adéquate la Défense de M. Boskoski.
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Madame Residovic.
24 Maître Apostolski, c'est à vous, avez-vous besoin du pupitre ?
25 M. APOSTOLSKI : [interprétation] Je vous remercie. Oui, j'aimerais bien que
26 ma collègue me donne le pupitre.
27 Madame, Messieurs les Juges, à la page 16 du compte rendu de ce jour,
28 l'Accusation allègue qu'elle n'a absolument changé sa thèse et que
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1 certaines des victimes étaient hors de combat, et l'Accusation étaye sa
2 thèse en faisant référence au droit cité dans leur mémoire préalable au
3 procès, au paragraphe 117, qui explique exactement quelles sont les
4 personnes qui sont protégées au titre de l'article commun 3 de la
5 convention de Genève. Cela dit, dans l'acte d'accusation, dans le mémoire
6 préalable au procès, ainsi que lors du procès, il y a été affirmé que
7 toutes les victimes étaient des civiles et qu'elles n'étaient pas des
8 personnes hors de combat.
9 Le fait qu'on ait amené que trois fusils automatiques, le fait que de façon
10 irréfutable ces armes aient été trouvées à Ljuboten n'exclut pas la
11 possibilité que dans le village de Ljuboten il y aurait eu d'autres armes.
12 L'Accusation, mes éminents confrères de l'Accusation, au paragraphe 68 de
13 l'acte d'accusation énumèrent quelque chose - que la Défense ne conteste
14 pas d'ailleurs - dans ce paragraphe 68 -- non, je suis désolé. Je vais
15 reformuler mes propos.
16 A l'article 68 de l'acte d'accusation, il est écrit que le samedi 12 août
17 2001, on a évalué la présence de combattants armés de l'ALN à dix à 15
18 personnes, armées de fusils automatiques et d'au moins une mitrailleuse.
19 Ces personnes auraient agi soit seules soit par petits groupes dans le but
20 d'éviter que les unités de police de Johan Tarculovski puissent progresser.
21 L'Accusation déclare qu'il y avait dix à 15 personnes armées de fusils
22 automatiques sur place et que de plus ces personnes avaient au moins une
23 mitrailleuse.
24 De plus, il est certain qu'aucune maison a été fouillée, et le témoin
25 Bolton a déclaré que le 14 août il avait trouvé un fusil dans la maison
26 Ametovski que ceci était la preuve même que plusieurs armes à feu auraient
27 été cachées dans la maison Ametovski.
28 L'Accusation affirme qu'il ne s'agit pas d'une action antiterroriste
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1 légitime parce qu'aucune unité spéciale n'a été employée dans cette action,
2 ni les Lions, ni les Tigres. Mais malheureusement, à l'époque, les Lions
3 n'existaient pas encore, de plus les Tigres combattaient aux côtés de l'ALN
4 et du Corps de Protection du Kosovo à Radusa, pour éviter qu'il y ait
5 pénétration dans cette direction vers Skopje. Oui, ce serait l'idéal si en
6 Macédoine il y avait une pléthore d'unités antiterroristes bien entraînées.
7 Malheureusement, la Macédoine n'était absolument pas prête à lutter contre
8 ces terroristes. Puisque la Macédoine était un Etat très jeune qui s'est
9 battu de toutes ses forces en employant les défenseurs qui étaient souvent
10 uniquement des volontaires ou des réservistes. Ce sont les réservistes
11 d'ailleurs qui ont mis à mal l'ALN à Vaksince, ce sont eux qui ont montré
12 le plus de valeur au combat.
13 A la page 22 du compte rendu d'aujourd'hui, l'Accusation affirme qu'hier
14 j'aurais dit que le parquet du tribunal en Macédoine avait vérifié ce qui
15 s'était passé au ministère de l'Intérieur, au tribunal d'instance, et
16 cetera, ainsi qu'au bureau du procureur de la Macédoine, parce qu'ils
17 n'avaient pas réussi à trouver qui avait bien pu prendre part à cette
18 action. Mais ce n'est pas ce que j'ai dit hier. Hier, j'ai dit que les
19 Procureurs du Tribunal avaient vérifié les choses et avaient demandé les
20 casiers judiciaires des participants qui auraient pris part à l'unité de
21 Johan Tarculovski. Dans ce but, ils avaient fait des vérifications au
22 niveau du ministère de l'Intérieur, du bureau du procureur en Macédoine,
23 ainsi qu'aux tribunaux macédoniens, mais qu'ils n'ont pas réussi à trouver
24 le moindre casier judiciaire portant sur l'un des participants allégués à
25 l'opération.
26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Saxon.
27 M. SAXON : [interprétation] J'aimerais savoir quelque chose.
28 M. Apostolski est en train de présenter des arguments, mais j'aimerais
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1 savoir si ceci a un fondement quelconque dans le dossier ?
2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je pense que c'est à vous de répondre,
3 Monsieur Apostolski.
4 M. APOSTOLSKI : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je voulais
5 juste clarifier une chose, je voulais juste qu'il soit clair que les
6 représentants du bureau du Procureur de ce Tribunal s'étaient rendus au
7 tribunal d'instance de Skopje I, au tribunal d'instance de Skopje II.
8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais ici on vous parle du dossier de
9 ce procès-ci dans ce tribunal-ci ?
10 M. APOSTOLSKI : [interprétation] Non, je ne parle pas du dossier de ce
11 procès-ci. Je fais des commentaires --
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Evitez de faire des commentaires sur
13 quoi que ce soit qui n'ait pas été versé au dossier. Passez à autre chose.
14 M. APOSTOLSKI : [interprétation] Très bien. Merci.
15 Ensuite l'Accusation a déclaré que Tarculovski était commandant d'unité,
16 ils se basent pour pouvoir affirmer cela sur la déposition du Témoin M-052,
17 leur chouchou, si je puis dire, parmi nos témoins, qui avait conclu un
18 accord avec l'Accusation en vue d'éviter d'être incriminé lui-même, il a
19 donc décidé de témoigner contre Tarculovski.
20 Mais je tiens à dire que (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé) les
23 forces de sécurité macédonienne rentre dans le village. C'est lui a rendu
24 compte au ministre après l'opération, c'est lui qui a préparé les rapports
25 au pénal suite à l'opération.
26 Le M-052 est le témoin qui n'a jamais voulu dire la vérité au Tribunal, qui
27 n'a jamais voulu dire qu'il voulait que toute sa famille soit réinstallée
28 en dehors de la Macédoine, et que pour se disposer de ses responsabilités,
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1 il était prêt à raconter absolument n'importe quoi.
2 Donc, Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, je vous demande
3 de bien regarder tous les éléments de preuve qui ont été présentés au
4 dossier, et ensuite d'acquitter M. Tarculovski de tous les chefs
5 d'accusation.
6 Je tiens à remercier toutes les personnes de la Chambre de première
7 instance qui ont suivi avec énormément d'attention toutes nos
8 délibérations. Ils nous ont permis d'avoir un procès équitable qui a permis
9 à la Défense de contre-interroger les témoins afin de rétablir la vérité.
10 Je remercie aussi mes collègues du bureau du Procureur, mes confrères de la
11 Défense de M. Boskoski avec qui nous avons pu coopérer en l'espèce, procès
12 qui s'est déroulé de la façon la plus efficace possible.
13 Je tiens aussi à remercier le greffe pour l'aide précieuse qu'il nous
14 a apportée.
15 Je vous remercie de m'avoir autorisé à prendre la parole une nouvelle
16 fois.
17 J'en ai terminé avec la présentation de mes arguments.
18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Apostolski.
19 [La Chambre de première instance se concerte]
20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La Chambre de première instance tient
21 à faire savoir que si l'un ou l'autre des accusés veut prendre la parole,
22 il le peut. Ceci n'est pas prévu au titre du Règlement, mais la Chambre de
23 première instance est prête à les autoriser à prendre la parole si tant est
24 qu'ils le veuillent. Il serait assez important qu'ils prennent la parole
25 maintenant s'ils en ont envie. Les conseils ont-ils une objection à ça à
26 soulever ?
27 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Nous n'avons rien à dire à ce propos, mais
28 peut-être avant que nos clients ne vous parlent, peut-être pourrions-nous
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1 bénéficier d'une petite pause pour qu'ils parlent ensuite.
2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le problème c'est que notre système
3 d'enregistrement est tel que si nous devons faire une pause, il faudra que
4 la pause dure une demi-heure parce qu'il faut rembobiner la bande.
5 Il serait quand même beaucoup plus efficace qu'ils prennent la parole tout
6 de suite s'ils le veulent. Cela vous pose-t-il un problème ? Faut-il
7 vraiment que nous fassions une pause ou que nous levions la séance ?
8 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Non, nous n'avons aucun soucis, mais il
9 s'agit quand même du réquisitoire de la plaidoirie, des dernières paroles
10 prononcées par nos confrères. Nous aurions préféré avoir une pause
11 anticipée.
12 Mais si vous pensez que ce n'est pas une bonne solution, bien sûr,
13 nous pouvons nous passer de pause.
14 [La Chambre de première instance se concerte]
15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La Chambre de première instance pense
16 qu'il serait plus pratique pour tout le monde que nous entendions les
17 accusés maintenant, si tant est qu'ils aient envie de nous parler.
18 Nous tenons quand même à souligner qu'il s'agit d'une procédure qui n'est
19 pas prévue par les textes, nous nous attendons donc à des commentaires très
20 brefs et concis. Cela dit, nous comprenons bien que les accusés ont sans
21 doute envie de s'adresser enfin à la Chambre.
22 Je pense qu'il conviendrait que M. Boskoski parle en premier.
23 Monsieur Boskoski, vous avez la parole.
24 [Allocution de l'accusé Boskoski]
25 L'ACCUSÉ BOSKOSKI : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, je
26 tiens tout d'abord à vous remercier pour m'avoir autorisé à parler. Je sais
27 bien que ce n'est pas la pratique habituelle, mais je vous remercie de me
28 donner la parole et de pouvoir m'exprimer après ce long processus qui a
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1 quand même duré un an. Après quatre ans de silence, merci de me permettre
2 enfin de parler. Je tiens à vous exprimer mes sentiments avant de dire
3 exactement ce que j'ai pensé au cours de ce procès.
4 Tout d'abord, je tiens à vous dire que je soutiens tout à fait les
5 positions et les arguments avancés par mes conseils qui ont fait tout ce
6 qui était dans leur mesure au cours de cette année pour faire tout ce
7 qu'ils pouvaient avec un seul but qui est d'arriver à la vérité à propos
8 d'un moment très difficile qu'a traversé mon pays, la République de
9 Macédoine.
10 Je tiens aussi à exprimer ma gratitude à mon équipe, à mes conseils.
11 Pendant toute cette année, ils ne sont basés que sur les faits, que sur les
12 éléments de preuve. Ils se sont basés sur la loi macédonienne, sur le droit
13 international, sur les textes du droit humanitaire afin que toute la vérité
14 soit faite sur cette période, période difficile qu'a vécue l'Etat
15 macédonien.
16 Je tiens aussi à dire qu'en tant qu'homme et en tant que ministre à
17 l'époque, il y avait un document essentiel à l'époque que je devais
18 respecter, c'est la constitution de la République de Macédoine, c'est-à-
19 dire les textes constitutionnels et les lois et règlements inhérents à tout
20 pays civilisé et moderne, de tout pays qui veut devenir membre de l'Union
21 européenne et de l'OTAN.
22 Nous ne sommes pas un Etat en dehors des lois, nous ne sommes pas un Etat
23 de papier. Notre système juridique est calqué sur celui des pays européens
24 et inspiré de l'expérience internationale. C'est pour cela qu'à l'époque je
25 ne pouvais que respecter les lois de la Macédoine, et aider toute personne
26 qui avait besoin de mon aide. Toute personne qui s'adressait au ministère
27 pour obtenir de l'assistance recevait ma pleine attention, je n'ai jamais
28 fait de différence entre qui que ce soit au titre de leur confession ou de
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1 leur appartenance ethnique parce que moi aussi je suis né et j'ai vécu
2 toute ma vie dans un environnement interethnique.
3 Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, j'étais un ministre
4 qui a travaillé en toute transparence. J'étais bien connu pour cela,
5 d'ailleurs. J'ai d'ailleurs prêté toute mon aide à ce Tribunal. A plusieurs
6 reprises, j'ai rencontré Mme Carla Del Ponte.
7 Nous nous sommes entretenus des difficultés de la Macédoine et ceci ne peut
8 être contesté par personne, je savais que des décisions essentielles
9 seraient prises dans ce Tribunal qui pourrait contribuer à la stabilisation
10 de notre pays et à la stabilisation du sud-est des Balkans.
11 Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, j'ai passé des milliers
12 de jours de solitude, cent années de solitude tout comme Marques, si je
13 puis dire. Mais je tiens à dire que je ne me plains de rien car je crois à
14 ce Tribunal, je crois au processus mis en œuvre dans ce Tribunal.
15 Je tiens vraiment à remercier tout le monde, à la fois les personnes
16 au quartier pénitentiaire qui se sont révélées être des personnes tout à
17 fait intéressantes. Même si j'étais loin de ma famille, loin de ma chère
18 Macédoine, à laquelle je reste profondément attaché, je tiens à dire que ce
19 Tribunal est bel et bien une institution juste; après tous les moyens de
20 preuve qui vous ont été présentés, je pense que vous ne pouvez en arriver
21 qu'à un verdict juste et que vous m'acquitterez de tous les chefs qui me
22 sont reprochés dans l'acte d'accusation.
23 En tant qu'être humain, ici je reprends le symbole qui est inscrit dans mon
24 propre nom, je veux rappeler à un célèbre macédonien Mihail Rendzov qui a
25 dit : "O Dieu, parfois nous sommes épuisés, nous n'avons plus de prières,
26 nous n'avons plus de sang pour de nouvelles victimes."
27 J'aimerais qu'on mette enfin un terme aux souffrances de toutes les
28 victimes et je tiens à rappeler le message qui est inscrit dans le Statut
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1 du Tribunal, le Tribunal-ci pour apporter la réconciliation dans mon pays,
2 dans toute la région des Balkans.
3 Il faut que la communauté internationale joue pleinement son rôle
4 pour aider mon peuple à enfin tourner la page.
5 Je tiens à vous remercier.
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.
7 M. Tarculovski, c'est à vous.
8 [Allocution de l'accusé Tarculovski]
9 L'ACCUSÉ TARCULOVSKI : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je
10 souhaiterais vous remercier de m'avoir donné la possibilité de prendre la
11 parole, tout comme cette possibilité a également été offerte à l'équipe de
12 la Défense, de ma défense qui a montré que j'avais commis aucun crime, ni
13 contre des civils, ni contre des biens civils.
14 Je n'ai pas d'objection vis-à-vis du traitement que j'ai reçu pendant ce
15 procès. Je dirais au début que j'ai été arrêté en toute illégalité et que
16 j'avais de sérieux doutes à propos de l'équité de mon procès, mais
17 j'aimerais envoyer un message à ma famille proche, je dirais que leur
18 soutien représente mon bien le plus précieux.
19 J'ai appris beaucoup de choses ici. J'ai appris notamment à être patient et
20 à apprécier ce que j'avais et à comprendre les différences.
21 Ma famille s'est agrandie de membres, ma vie a maintenant une dimension
22 tout à fait différente. La tragédie tout à fait inutile qui est survenue en
23 République de Macédoine en 2001 est une tragédie fort triste et il y a eu
24 des esprits malades et maléfiques qui ont commis des crimes.
25 Mais nous, Macédoniens, sommes un peuple avant tout pacifique. Nous sommes
26 tout à fait disposés à aider toutes les personnes qui en ont besoin. Aucun
27 Macédonien n'a souhaité les événements de l'année 2001. Nulle part, dans
28 aucun pays sur cette planète, vous trouverez quelqu'un qui se rallierait à
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1 la cause dans actions terroristes. C'est un devoir sacré pour toute
2 personne de mon pays que de défendre son pays.
3 J'aimerais remercier le soutien qui m'a été offert par le gouvernement, qui
4 a été offert à ma famille. Et j'aimerais remercier la Chambre de première
5 instance parce que pendant ce procès je n'ai jamais eu l'impression de
6 quelqu'un qui avait déjà été condamné.
7 Ce procès est un petit procès, mais pour mon pays biblique et fier, cela
8 représente un précédent historique. Cela nous permettra de défendre l'ordre
9 constitutionnel ou de voir si les terroristes seront encouragés dans leur
10 quête évasive.
11 Je vous remercie et je dois vous dire que je crois fermement en votre
12 justice et en votre équité.
13 [La Chambre de première instance se concerte]
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous sommes maintenant arrivés au
15 terme du réquisitoire et des plaidoiries ainsi que de la réplique et
16 duplique de ce procès qui a commencé il y a juste un peu plus d'un an. La
17 Chambre souhaiterait remercier vivement les différentes équipes de la
18 Défense, aimerait remercier l'Accusation, les greffes, les interprètes, le
19 personnel de sécurité qui nous ont tous permis de mener à bien ce procès
20 sans problème et avec efficacité dont nous avons tous pu bénéficier.
21 Il appartient maintenant à la Chambre de se pencher sur la vaste quantité
22 de documents, de preuves documentaires, de preuves présentées à l'oral, et
23 ainsi que de nous pencher sur les différents documents que nous avons reçus
24 par voie écrite ou par voie orale au cours de ces trois derniers jours. Il
25 est inévitable que cela va prendre un certain temps et la Chambre devra
26 réserver sa décision avant de parvenir à une conclusion, car nous devons
27 véritablement apprécier tous les éléments.
28 C'est ce que nous allons faire maintenant. Nous déclarons l'affaire close
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1 et réservons notre décision plus tard.
2 --- L'audience est levée à 12 heures 32, sine die.
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