LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE II
Composée comme suit :
M. le Juge David Hunt, Président
Mme le Juge Florence Ndepele Mwachande Mumba
M. le Juge Fausto Pocar
Assistée de :
Mme Dorothee de Sampayo Garrido-Nijgh, Greffier
Décision rendue le :
3 juillet 2000
LE PROCUREUR
C/
Radoslav BRDANIN & Momir TALIC
_____________________________________________________________
DÉCISION RELATIVE À LA REQUÊTE DE LACCUSATION
AUX FINS DE MESURES DE PROTECTION
_____________________________________________________________
Le Bureau du Procureur :
Mme Joanna Korner
M. Michael Keegan
Mme Ann Sutherland
Le Conseil de la Défense :
M. John Ackerman, pour Radoslav Brdanin
MM. Xavier de Roux et Michel Pitron, pour Momir Talic
La Requête
1. Le 10 janvier 2000, le Procureur a déposé une requête aux fins dordonner des mesures adressées aux deux accusés (Radoslav Brdanin et Momir Talic) et aux équipes chargées de leur défense - «la Défense de Brdanin et Talic» -, laquelle demandait ce qui suit :
1) La Défense de Brdanin et Talic ne divulguera aux médias aucune pièce confidentielle communiquée par le Procureur.
2) À lexception des éléments directement et spécifiquement nécessaires à la préparation et la présentation de cette cause, la Défense de Brdanin et Talic ne communiquera au public :
aucun nom, ni aucune information permettant didentifier ou de trouver un témoin ou un témoin potentiel qui leur aura été communiquée par le Procureur ;
aucun élément de preuve (documentaire, matérielle ou autre), ni aucune déclaration écrite émanant dun témoin ou dun témoin potentiel, ni la teneur, totale ou partielle , des éléments de preuve, déclarations ou dépositions préalables considérés comme confidentiels ;
3) Si la Défense de Brdanin et Talic estime directement et spécifiquement nécessaire de divulguer lesdites informations pour la préparation et la présentation de lespèce , elle informera les membres du public à qui des pièces ou des informations confidentielles (telles que des déclarations de témoins, des dépositions préalables, des cassettes vidéo ou le contenu de celles-ci) auront été communiquées, quils ne peuvent copier , reproduire ou rendre publics les déclarations ou les éléments de preuve en question , ni les montrer ou les divulguer à quiconque. Les membres du public à qui lon aura communiqué loriginal, une copie ou un double des pièces en question, devront restituer ceux-ci à la Défense de Brdanin et Talic aussitôt que lesdites pièces ne sont plus nécessaires à la préparation et à la présentation de la cause ;
4) Sagissant du paragraphe (3) ci-dessus, la Défense de Brdanin et Talic tiendra un registre mentionnant le nom, ladresse et la fonction de chaque personne ou entité qui recevra ces informations, ainsi que la date de la communication. En cas de violation perçue des ordonnances ici décrites, le Procureur informera la Chambre de première instance qui pourra alors, soit examiner les violations alléguées, soit soumettre la question à une personne désignée, comme par exemple un Juge de permanence. Si la Chambre de première instance soumet la question à un Juge de permanence, celui -ci examinera le registre des communications, tirera des conclusions et en informera la Chambre de première instance, en y joignant une recommandation quant aux éventuelles mesures à prendre.
5) Si lun des membres de la Défense de Brdanin et Talic se retire de laffaire, toutes les pièces en sa possession devront être restituées au Conseil de la Défense principal. La Défense de Brdanin et Talic restituera au Greffe, à lissue des procédures en lespèce, lintégralité des pièces et des copies de celles-ci nayant pas été consignées aux archives.
6) Le Procureur pourra expurger de façon limitée les déclarations de témoins ou dépositions préalables en ce qui a trait à lidentité et aux coordonnées de victimes ou de témoins vulnérables. Lidentité de ces personnes sera communiquée à la Défense de Brdanin et Talic dans un délai raisonnable avant le commencement du procès, à moins quil nen soit ordonné autrement. 1
Le paragraphe 2 de la Requête définit en termes généraux les expressions suivantes : «le Procureur», «la Défense de Brdanin et Talic», «le public» et «les médias».2 La Requête a été déposée à titre confidentiel.
2. La Défense ne sest pas opposée aux mesures demandées sous 1), 2) et 3) de la Requête. Elle sest opposée aux autres.
Le Statut et le Règlement de procédure et de preuve du Tribunal international
3. Sagissant de la Requête, trois dispositions du Statut du Tribunal («le Statut ») sont pertinentes.
Larticle 20 du Statut («Ouverture et conduite du procès»), pour autant quil est pertinent en lespèce, stipule comme suit :
La Chambre de première instance veille à ce que le procès soit équitable et rapide et à ce que linstance se déroule conformément aux règles de procédure et de preuve , les droits de laccusé étant pleinement respectés et la protection des victimes et des témoins dûment assurée.
[ ]
Les audiences sont publiques à moins que la Chambre de première instance décide de les tenir à huis clos conformément à ses règles de procédure et de preuve.
Larticle 21 2) du Statut («Les droits de laccusé») stipule comme suit :
Toute personne contre laquelle des accusations sont portées a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement, sous réserve des dispositions de larticle 22 du Statut.
Larticle 22 du Statut («Protection des victimes et des témoins»), enfin, stipule comme suit :
Le Tribunal international prévoit dans ses règles de procédure et de preuve des mesures de protection des victimes et des témoins. Les mesures de protection comprennent , sans y être limitées, la tenue daudiences à huis clos et la protection de lidentité des victimes.
4. Plusieurs articles du Règlement de procédure et de preuve («le Règlement») sont également pertinents pour la Requête. Larticle 66 A) i) du Règlement («Communication de pièces par le Procureur») stipule comme suit :
Sous réserve des dispositions des articles 53 et 69, le Procureur communique à la défense dans une langue que laccusé comprend :
dans les trente jours suivant la comparution initiale de laccusé, les copies de toutes les pièces jointes à lacte daccusation lors de la demande de confirmation ainsi que toutes les déclarations préalables de laccusé recueillies par le Procureur ; [...]
Larticle 53 A) du Règlement («Non-divulgation») dispose comme suit :
Lorsque des circonstances exceptionnelles le commandent, un juge ou une Chambre de première instance peut ordonner dans lintérêt de la justice la non-divulgation au public de tous documents ou informations et ce, jusquà décision contraire.
Larticle 69 du Règlement («Protection des victimes et des témoins») stipule comme suit :
Dans des cas exceptionnels, le Procureur peut demander à la Chambre de première instance dordonner la non-divulgation de lidentité dune victime ou dun témoin pour empêcher quils ne courent un danger ou des risques, et ce jusquau moment où ils seront placés sous la protection du Tribunal.
En déterminant les mesures de protection destinées aux victimes ou témoins, la Chambre de première instance peut consulter la Division daide aux victimes et aux témoins .
Sans préjudice des dispositions de larticle 75 ci-dessous, lidentité de cette victime ou de ce témoin devra être divulguée avant le commencement du procès et dans des délais permettant à la défense de se préparer.
Larticle 75 A) du Règlement («Mesures destinées à la protection des victimes et des témoins») stipule comme suit :
Un Juge ou une Chambre peut, doffice ou à la demande dune des parties ou de la victime ou du témoin intéressé, ou de la Division daide aux victimes et aux témoins , ordonner des mesures appropriées pour protéger la vie privée et la sécurité de victimes ou de témoins, à condition toutefois que lesdites mesures ne portent pas atteinte aux droits de laccusé.
Les expurgations de lAccusation
5. Le 11 janvier, lAccusation a prétendu sêtre acquittée de lobligation visée à larticle 66 A) i) du Règlement en communiquant aux Conseils de la Défense des deux accusés les copies de toutes les pièces jointes à lacte daccusation lors de la demande de confirmation. Chaque déclaration communiquée a été expurgée de manière à ce que le nom, les coordonnées ou tout autre élément didentification des témoins napparaissent pas, nonobstant, dans le cadre des mesures demandées au paragraphe 6) de la Requête, les références aux «expurgations limitées» et aux «témoins ou victimes vulnérables». Les documents étaient accompagnés dune lettre demandant aux Conseils de respecter les mesures de protection demandées dans la Requête en attendant la décision de la Chambre de première instance. 3
6. LAccusation a reconnu avoir procédé à lexpurgation des pièces jointes avant davoir obtenu que la Chambre de première instance rende une ordonnance en application de larticle 69 du Règlement, arguant du fait que ladite expurgation avait été motivée par des «raisons de sécurité». 4 La première question soulevée par la Requête est donc de savoir si, aux termes de larticle 69 A) du Règlement, lAccusation est autorisée à expurger le nom et les éléments didentification de chaque témoin, lidentité de ces personnes étant communiquée à la Défense «dans un délai raisonnable avant le commencement du procès», ainsi quil est demandé dans la Requête.5
7. Sagissant du pouvoir daccorder des mesures de protection appropriées aux victimes et aux témoins, la Chambre de première instance, dans laffaire Le Procureur c/ Tadic 6, a constaté que :
[...], en sacquittant de son obligation positive dassurer cette protection, [le Tribunal] doit interpréter les dispositions, dans le contexte du cadre juridique unique qui lui est propre, en trouvant le point déquilibre entre le droit de laccusé à un procès équitable et public, le droit du public à linformation et la protection des victimes et des témoins. La façon dont cet équilibre est atteint dépend des faits propres à chaque affaire.7
La question du point déquilibre entre le droit de laccusé à un procès équitable et public et la protection des victimes et des témoins dans le contexte du cadre juridique unique propre au Tribunal a également été évoquée dans plusieurs décisions relatives à la même affaire.8
8. LAccusation, toutefois, ne se fonde pas uniquement sur les faits relatifs à lespèce, mais également sur «les faits et les circonstances propres aux affaires du Tribunal en général» pour justifier lexpurgation des données didentification et les coordonnées de chaque témoin. Elle invoque le fait que la Bosnie-Herzégovine reste un endroit dangereux, où chacun des groupes ethniques ou politiques est perçu comme lennemi dun autre, et où
[...] le conflit nest pas encore totalement éteint. En effet, des accusés ou suspects et leurs partisans (ainsi que les sympathisants des détenus à La Haye) sont toujours en liberté et les témoins qui déposent contre eux sont considérés comme «lennemi ». 9
La Requête poursuit comme suit :
10. On a observé, durant les deux dernières années, un nombre croissant de cas impliquant la subornation et lintimidation de témoins du Tribunal, dont des manquements et des violations intéressant des ordonnances de protection de témoins (notamment des ordonnances de non-divulgation) et dautres mesures de sécurité. Ces faits vont des menaces de mort proférées contre certains témoins à des cas répétés de publication dans les médias ou le public (et ce malgré lexistence dordonnances de non-divulgation ) des déclarations préalables de témoins divulguées à des accusés ou leurs conseils , en passant par de nombreuses menaces proférées par téléphone, des licenciements ou des refus dembauche et la peur générale des témoins ainsi que la crainte de voir leur famille en danger, harcelée ou autrement souffrir sils venaient à témoigner ou à coopérer avec le Tribunal.
11. Vu les problèmes et les inquiétudes graves précités ainsi que les violations passées de la confidentialité et leurs répercussions sur les victimes et les témoins , le Procureur craint sérieusement que la sécurité des témoins, leur volonté de déposer et lintégrité des procédures ne soient réellement compromises si lidentité des témoins, leurs coordonnées et leurs déclarations venaient à être divulguées prématurément, dans des circonstances où leur protection ne peut être assurée. Le Procureur est davis que les mesures de protection demandées contribuent largement à minimiser les risques susmentionnés.
9. LAccusation considère que lissue de cette affaire, comme celle de toutes les autres dont est saisi le Tribunal, dépend de la capacité et de la volonté des témoins de témoigner et dapporter des éléments de preuve. Ainsi, en labsence de témoignages et déléments de preuve, il ny aura pas de procès ou, du moins, pas de procès équitable .10
Si aucun témoin ne comparaît ou si les témoins refusent ou sont autrement peu disposés à témoigner, les éléments de preuve à présenter sont minimes. Les menaces, le harcèlement , la violence, la subornation et toute autre forme dintimidation, les entraves et les obstacles à la justice sont des problèmes graves, tant pour le témoin lui -même que pour la capacité du Tribunal à accomplir sa mission.
10. LAccusation a reconnu que largument fondamental de sa Requête était que les conditions posées par larticle 69 A) du Règlement le fait que seuls «des cas exceptionnels» justifiaient loctroi de mesures de protection par la Chambre de première instance étaient remplies sagissant de chaque témoin dans chaque affaire «à ce stade de la procédure» (cest-à-dire au moment de la communication aux accusés des pièces jointes à lacte daccusation lors de la demande de confirmation ).11 LAccusation a également reconnu quil était difficile de prétendre que chaque témoin est vulnérable.12
11. La Chambre de première instance est davis que la situation actuelle en ex-Yougoslavie ne peut en soi être considérée comme constituant des circonstances exceptionnelles . Le présent Tribunal ne sest toujours intéressé quà lex-Yougoslavie et larticle 69 A) du Règlement a été adopté par les juges dans le contexte des inimitiés ethniques et politiques qui prévalaient en ex-Yougoslavie à lépoque. Le Tribunal a élaboré son Règlement de manière à ce que ce dernier soit adapté à la tâche qui sannonçait ; les juges qui lont conçu craignaient déjà à lépoque que bon nombre des victimes et des témoins datrocités soient dissuadés de témoigner sur ces crimes ou redoutent les conséquences éventuelles que leur témoignage pourrait avoir pour eux-mêmes ou pour leurs parents.13 En conséquence , lutilisation par ces juges de ladjectif «exceptionnel» dans larticle 69 A) du Règlement était loin dêtre fortuite. Pour être exceptionnelles, les circonstances doivent aller au-delà de ce qui a été, avant même la création du Tribunal, et reste encore maintenant, la règle ou les circonstances les plus répandues (ou normales ) en ex-Yougoslavie. Ainsi quil a été précisé dans la Deuxième Décision sur les mesures de protection dans laffaire Tadic, les circonstances de chaque affaire doivent être examinées au cas par cas.
12. LAccusation soutient que les dispositions de la Deuxième Décision sur les mesures de protection dans laffaire Tadic ne devraient plus être appliquées, étant donné quil sagit de la première affaire dont a été saisi le Tribunal et que de nombreux cas de subornation ont été répertoriés depuis.14 Même si la situation a changé depuis la Deuxième Décision sur les mesures de protection dans laffaire Tadic et la Chambre de première instance nest pas convaincue quil y ait eu des changements significatifs le libellé de larticle 69 A) du Règlement est resté le même et lexpression «circonstances exceptionnelles» dans son acception courante ne permet aucune interprétation qui lassimilerait à ce qui semble être, à lheure actuelle, la règle en ex-Yougoslavie .
13. Lexpurgation par lAccusation du nom et des données didentification de chaque témoin, bien que sans aucun doute commode sur le plan administratif, non seulement nétait pas autorisée mais nétait pas justifiée sur la base des arguments avancés.
Une autre procédure?
14. Lors de la présentation orale de la Requête, le 24 mars 2000, les débats ont porté, entre autres, sur la question de savoir sil serait possible de concevoir une procédure qui éviterait à lAccusation de soumettre à la Chambre de première instance, pour chaque témoin, une requête aux fins de mesures de protection avant de se conformer aux dispositions de larticle 66 A) i) du Règlement, qui prévoient quelle doit communiquer à laccusé les copies de toutes les pièces jointes à lacte daccusation.
LAccusation a proposé une procédure selon laquelle :
elle assumerait la responsabilité dexpurger lidentité des témoins qui auraient demandé que leur identité ne soit pas révélée et quelle estimerait vulnérables,
les accusés pourraient lui soumettre une requête «raisonnable» demandant que lidentité de certains témoins ou victimes soit révélée et dans laquelle ils exposeraient les motifs pour lesquels leur identité doit être révélée plus tôt que (par exemple) trente jours avant louverture du procès,
si ladite requête était refusée, les accusés pourraient demander réparation à la Chambre de première instance.15
Si les accusés estiment nécessaire de se voir communiquer le nom dun témoin en raison du fait, par exemple, quil peut fournir des éléments de preuve qui les mettent directement en cause, le nom dudit témoin serait communiqué à moins que lAccusation nait un très bon motif pour sy opposer.16
16. Cette proposition souffre toutefois de deux déficiences majeures. En premier lieu, elle persiste à considérer chaque témoin (ou du moins ceux qui demandent que leur identité ne soit pas révélée) comme courant «un danger ou des risques» (pour reprendre larticle 69 A) du Règlement) ou comme étant «vulnérable» (pour reprendre la Requête). Ainsi quil en a déjà été décidé, ce nest pas le cas. En second lieu, la proposition renverse complètement les obligations des parties, en ce sens que larticle 69 A) du Règlement enjoint à lAccusation de démontrer quil existe des circonstances exceptionnelles justifiant que soit rendue une ordonnance de non-divulgation, tandis que cette proposition enjoint à laccusé de justifier la divulgation.
17. Un autre problème se pose. LAccusation a affirmé que, dans la mesure où elle doit veiller à ce que laccusé bénéficie dun procès équitable, elle devrait en fait se voir confier le rôle que le Règlement donne à la Chambre de première instance , sagissant de déterminer quels témoins et victimes sont vulnérables.17 Elle demande à laccusé «daccepter le fait quil existe de très bons motifs pour lesquels lidentité de certains témoins nest pas communiquée.»18 Cet argument ne réduit en rien les obligations qui incombent à lAccusation aux termes de larticle 69 A) du Règlement. Lune des pièces jointes communiquées aux accusés en lespèce est un compte-rendu daudience expurgé relatif aux éléments de preuve fournis par un témoin proposé en audience publique dans une autre affaire dont a été saisi le Tribunal. Étant donné quil serait facile pour les accusés de retrouver le compte-rendu daudience susmentionné et, par conséquent, didentifier le témoin en question, aucune circonstance exceptionnelle ne saurait justifier lexpurgation du nom de ce dernier. Cet exemple invite peut-être à penser que lobjectivité de lAccusation nest pas sans faille.19
18. Les deux accusés se sont opposés à la proposition de lAccusation. La Chambre de première instance convient que la mise en uvre de cette proposition contreviendrait au Statut et au Règlement.
Une contradiction entre articles du Règlement?
19. LAccusation affirme quil convient de résoudre une contradiction entre lobligation qui lui incombe de communiquer à laccusé, dans les trente jours suivant sa comparution initiale, toutes les pièces jointes à lacte daccusation en application de larticle 66 A) i) du Règlement, et la protection des victimes et des témoins, telle que prévue à larticle 69 A) du Règlement.20
20. La Chambre de première instance ne considère pas quune telle incompatibilité existe. Ainsi quil en a déjà été décidé, larticle 69 A) du Règlement ne prévoit pas la protection générale revendiquée par lAccusation. Avant que soient accordées des mesures de protection, larticle 69 A) du Règlement enjoint à lAccusation détablir lexistence de circonstances exceptionnelles, en conformité avec la volonté de pondération exprimée à larticle 20 1) du Statut, qui stipule que : «linstance se déroule conformément aux règles de procédure et de preuve, les droits de laccusé étant pleinement respectés et la protection des victimes et des témoins dûment assurée .» Comme le reconnaît à juste titre lAccusation, seul le droit de laccusé à un procès équitable prévaut sur la protection des victimes et des témoins.21 Le terme «instance», tel quemployé à larticle 20 du Statut, ne se rapporte pas exclusivement au procès lui-même, mais comprend chaque phase de la procédure qui influe sur la décision afférente à laffaire en question.22
21. Si lAccusation est en mesure détablir lexistence de circonstances exceptionnelles justifiant la non-divulgation de lidentité de certains témoins ou victimes à ce stade peu avancé de la procédure, ses obligations au titre de la communication sous larticle 66 A) i) du Règlement seront respectées si elle transmet à la Défense une copie des déclarations avec, expurgés, les noms et autres données didentification de ces seuls témoins.
Larticle 69 A) du Règlement
22. Un point concernant larticle 69 A) du Règlement mérite dentrée de jeu dêtre rappelé, ne serait-ce que pour lécarter. Cet article prévoit que la Chambre de première instance peut ordonner la non-divulgation de lidentité dune victime ou dun témoin susceptible de courir un danger ou des risques «jusquau moment où ils seront placés sous la protection du Tribunal». Cette formulation quelque peu curieuse semble sous-entendre que le Tribunal dispose dun programme ou dun projet de protection des témoins qui, une fois mis en place, rendrait lordonnance de non-divulgation inutile. En réalité, le Tribunal ne dispose ni dun tel programme, ni dun tel projet .23 Larticle 69 A) du Règlement a toujours été interprété comme prévoyant la possibilité pour la Chambre de première instance dordonner la non-divulgation de lidentité de certains témoins ou victimes tout au long de linstance et après celle-ci. Si nécessaire, ce pouvoir est justifié par larticle 53 A) du Règlement qui permet dordonner la non-divulgation au public de tous documents ou informations jusquà décision contraire mais, une fois encore , seulement dans «des circonstances exceptionnelles». Sagissant de laccusé, larticle 69 C) du Règlement stipule que lidentité de la victime ou du témoin doit lui être divulguée «avant le commencement du procès et dans des délais permettant à la défense de se préparer». 24
23. Il est donc clairement établi que lon peut ordonner ce que lon peut qualifier de non divulgation dusage de lidentité de victimes ou de témoins particuliers, après que lexistence de circonstances exceptionnelles a été démontrée. Ceci, toutefois , ne constitue pas lobjet de la présente Requête. En substance, cette dernière ne cherche quà démontrer le droit quavait lAccusation de procéder à lexpurgation générale de certains documents. LAccusation a échoué dans sa tentative et devra déposer une nouvelle requête dans laquelle elle sefforcera de justifier la nécessité dune ordonnance de non-divulgation relative à certains témoins ou victimes précis . 25 Certaines des questions qui seront soulevées dans la nouvelle requête ont été débattues dans le cadre de celle dont nous sommes présentement saisis. Il convient par conséquent dexprimer à ce stade lopinion de la Chambre de première instance à ce sujet.
24. La première question concerne le risque que les témoins à charge feront lobjet de pressions ou dintimidation, une fois leur identité révélée à laccusé et à son conseil, mais non au public. LAccusation affirme, et la Chambre de première instance convient, que plus le délai entre la communication des informations permettant didentifier un témoin et la déposition de ce dernier est long, plus les risques de pression sont élevés.26 Le paragraphe 10 de la Requête allègue de manière générale que lon a observé un nombre croissant de cas impliquant des manquements et des violations aux ordonnances de protection de témoins, justifiant que lon sinquiète vivement dune multiplication de ces cas si lidentité des témoins venait à être divulguée prématurément.
25. LAccusation cite quatre exemples de ces cas. 27 Dans le premier, un conseil de la défense (et son client) a été accusé doutrage pour avoir prétendument approché un témoin éventuel pour le compte de son client . Nétant pas convaincue au-delà de tout doute raisonnable quil y avait eu effectivement subornation, la Chambre de première instance a finalement prononcé un non-lieu.28 Dans le deuxième exemple, un conseil de la défense a désigné par son nom, lors dune audience publique, un témoin bénéficiant dune ordonnance de protection dans une affaire connexe. Accusé doutrage, le conseil a affirmé être parvenu à la conclusion que ledit témoin avait témoigné dans laffaire connexe pour la simple raison que tout le monde savait quil se trouvait à La Haye à ce moment-là. LAccusation na pas affirmé que le conseil avait acquis cette connaissance en raison du manquement dune personne tenue par lordonnance précitée.29 Dans le troisième exemple, une liste de témoins a été publiée dans un journal de Sarajevo et, dans le quatrième, cest une déclaration de témoin qui a été publiée dans un journal croate. LAccusation a soutenu que :30
Du fait de ces violations, des témoins à charge, qui avaient auparavant accepté de comparaître devant le Tribunal, ont refusé de déposer.
La référence aux «violations» susmentionnées semble être limitée aux troisième et quatrième exemples.
26. Il est toutefois important de rappeler les termes de larticle sous lequel lAccusation demande que soit rendue une ordonnance de non-divulgation. Larticle 69 A) du Règlement ne porte en effet que sur «la non-divulgation de lidentité dune victime ou dun témoin pour empêcher quils ne courent un danger ou des risques». Toute crainte exprimée par des témoins potentiels qui pourraient courir un danger ou des risques ne suffit pas en soi à établir que ce danger ou ces risques constituent réellement une probabilité. Il en faut plus pour justifier latteinte aux droits de laccusé que représentent les expurgations en question. La plupart des juges peuvent citer des affaires dans lesquelles il est évident que des témoins ont été subornés , sans quil soit évident quil y ait eu manquement à une ordonnance de protection de la part de membres de léquipe de la défense. Les exemples de violation dans les quatre cas précités ayant suivi (au sens exclusivement temporel du terme) la communication à la défense de lidentité des témoins, lAccusation affirme que lesdits exemples montrent que «ce phénomène de violations est présent dans la quasi-totalité des affaires portées devant ce Tribunal».31 Cette hyperbole ne contribue en rien à résoudre la question.
27. Les conseils de la défense se sont plaints, non sans raison, de ce que leur intégrité avait été ainsi mise en doute. LAccusation a déclaré que ce nétait pas là son intention et sest efforcée dexpliquer la pertinence de ses affirmations comme suit :32
Si, pour quune ordonnance soit rendue, le Procureur doit établir quil existe des raisons de penser quun conseil de la défense particulier pourrait adopter un comportement inapproprié et/ou il faut que des pressions aient été exercées sur des témoins ou des éléments confidentiels indûment divulgués, nous considérons quune telle ordonnance (qui ne fait que répondre à lobligation statutaire de protection des victimes et des témoins) perdrait alors tout sens.
LAccusation a ensuite développé son point de vue lors de laudience consacrée à ce sujet :33
Nous suggérons que les pressions pourraient provenir, comme cela a déjà été le cas , de personnes ayant un intérêt direct à aider les accusés, que ces derniers laient explicitement demandé ou non. Et lune des manières peu sensées dont ils envisagent cette aide consiste à suborner les témoins.
Ces explications néliminent pas totalement la présomption avancée par lAccusation que des comportements inappropriés surviendront, sagissant notamment des termes de la mesure sous 4) de la Requête. 34
28. La Chambre de première instance convient quà partir du moment où la défense commence (à juste titre) à enquêter sur les antécédents des témoins dont lidentité lui a été communiquée, le risque existe que les personnes avec lesquelles les membres de léquipe de la défense se sont entretenus puissent révéler à des tiers lidentité des témoins concernés, ces derniers risquant alors dêtre la cible de pressions. Toutefois, elle rejette largument de lAccusation selon lequel, en labsence déléments de preuve spécifiques concernant un tel risque sagissant de témoins particuliers , le risque de subornation est suffisamment grand pour justifier les mesures exceptionnelles demandées par lAccusation en lespèce pour chaque témoin.
29. La deuxième question soulevée porte sur la mesure dans laquelle les ordonnances de protection peuvent être utilisées, non seulement pour protéger des victimes et des témoins en lespèce, mais également pour contribuer à la mission de lAccusation consistant à traduire dautres personnes devant le Tribunal. Rappelons à cet égard laffirmation de lAccusation, citée plus haut, selon laquelle :35
Si aucun témoin ne comparaît ou si les témoins refusent ou sont autrement peu disposés à témoigner, les éléments de preuve à présenter sont minimes. Les menaces, le harcèlement , la violence, la subornation et toute autre forme dintimidation, les entraves et les obstacles à la justice sont des problèmes graves, tant pour le témoin lui -même que pour la capacité du Tribunal à accomplir sa mission.
Cette affirmation pourrait facilement être mal interprétée. Selon la Chambre de première instance, lorsque lon sefforce de pondérer les intérêts en jeu avant dordonner des mesures de protection, il importe détablir une distinction claire entre les mesures de protection des victimes et des témoins en lespèce et les mesures qui ne font quaider lAccusation à engager des poursuites à lencontre dautres personnes.
30. Alors que le Tribunal doit convaincre les témoins et victimes potentiels dans dautres affaires quil fera tout son possible pour les protéger, entre autres, de toute tentative de subornation ou dintimidation, les droits des accusés en lespèce demeurent sa première préoccupation. Il est difficile de voir comment ces droits pourraient être dûment réduits de manière significative pour la simple raison que lAccusation craint de rencontrer des difficultés lorsquil sagira de trouver des témoins prêts à déposer dans dautres affaires.
31. La Chambre de première instance convient que toute pondération des intérêts en jeu dune manière qui limite les droits de laccusé donne nécessairement lieu à un procès entaché dimperfection. Par contre, elle convient également que cela ne signifie pas nécessairement que le procès ne sera pas équitable. Ces conclusions ont été retenues par la majorité de la Chambre de première instance dans la Première Décision sur les mesures de protection dans laffaire Tadic36, et nont jamais été contestées. La question ici est de savoir si la mesure dans laquelle il est nécessaire de priver les accusés de leurs droits pour aider lAccusation à trouver des victimes et des témoins indéterminés susceptibles de témoigner à charge dans les affaires à venir fait pencher exagérément la balance. Le droit à un procès équitable tient une place si éminente dans toute société démocratique quil ne peut être sacrifié sur lautel de lopportunité.37
32. Ceci dit, la Chambre de première instance convient que, dans les cas où il a effectivement été démontré quun témoin ou une victime pourrait courir un danger ou des risques, il serait raisonnable, pour les raisons déjà mentionnées, dordonner la non-divulgation de lidentité de ce témoin ou de cette victime, de sorte quil serait procédé à la communication desdites informations en conformité avec les dispositions de larticle 69 C) du Règlement, cest-à-dire «dans des délais permettant à la défense de se préparer» avant le procès. Le Conseil de la Défense de Brdanin, réaliste, a finalement convenu que la véritable question relevait du «quand».38 Le Conseil de la Défense de Talic a refusé le droit de lAccusation dexpurger le moindre document39, tandis que son coconseil soulignait la condition visée à larticle 69 A) du Règlement de nautoriser lexpurgation que dans des cas exceptionnels.40
33. Une troisième question se rapporte au délai, avant le procès, dans lequel il convient de communiquer aux accusés lidentité des victimes et des témoins. LAccusation reconnaît quen dépit du fait que plus les délais qui séparent la communication desdites informations et la comparution des témoins sont longs et plus les risques dintimidation desdits témoins sont grands, la date-butoir du délai de préparation accordé à la Défense doit être la date douverture du procès et non celle de la comparution des témoins.41
34. LAccusation a également reconnu de manière très réaliste que la définition du délai raisonnable varie en fonction de la catégorie particulière à laquelle appartient le témoin.42 Par exemple, dans le cas (comme en lespèce) où laction engagée contre les accusés ne suggère aucunement que lun des deux accusés a personnellement commis les actes reprochés, les témoins appelés à fournir des éléments de preuve concernant les principaux faits dont les accusés sont présumés responsables (en tant que supérieur hiérarchique ou complice ) ne mettent pas directement en cause les accusés et la connaissance de leur identité aiderait peu la Défense dans sa préparation du procès.43 Les témoins dont lidentité est beaucoup plus utile à la préparation de la défense des accusés sont ceux qui mettent directement en cause la responsabilité de ces derniers en tant que supérieur hiérarchique ou que complice.44 La distinction est pertinente, le seul problème étant que lAccusation semble davantage préoccupée du sort des témoins appartenant à la deuxième catégorie, témoins pour lesquels elle souhaite préserver lanonymat jusquau dernier moment.
35. Ces trois questions seront pertinentes lorsquil sagira de statuer sur une nouvelle requête devant maintenant être déposée par lAccusation aux fins de justifier une ordonnance de non-divulgation concernant des témoins particuliers.
36. LAccusation a suggéré que le fait de divulguer lidentité des témoins à charge trente jours avant louverture du procès laisserait suffisamment de temps aux accusés pour préparer leur défense. Selon elle, en effet, le nom dun témoin
[...] ne présente normalement dintérêt que sur le plan de la crédibilité et ne constitue donc généralement quun élément modeste dans la préparation de son dossier par la défense.45
LAccusation a posé pour la forme la question suivante :46
?Qguand bien même ?la Défenseg aurait en sa possession le nom dun témoin, en quoi cela laiderait-elle à préparer la défense de lun ou lautre des accusés?
De telles déclarations sont tout à fait irréalistes lorsquelles sappliquent aux témoins appartenant à la catégorie de ceux qui fournissent des éléments de preuve mettant directement en cause les accusés. Les Conseils des accusés ne sauraient présumer que ces témoins diront la vérité. 47 Il existe un certain nombre de cas répertoriés dans lesquels, après enquête approfondie , il sest révélé que des témoins à charge ne se trouvaient pas à lendroit où ils avaient dit sêtre trouvés48, ou sont finalement revenus sur leurs déclarations49. La Chambre dappel a enjoint fermement aux représentants dun accusé de procéder aux investigations nécessaires afin de déterminer les éléments de preuve disponibles pour la défense de ce dernier.50 Certains des témoins à charge sont probablement suffisamment importants pour quau moins la dernière phase de lenquête les concernant soit menée par les conseils qui assisteront les accusés lors du procès. Cest une évidence pour quiconque possède une expérience des affaires pénales. Les premières phases de lenquête peuvent, quant à elles, être menées par le ou les enquêteurs engagés sur le terrain pour le compte des accusés . Il est vraisemblable quil faudra interroger de nombreuses personnes avant dobtenir des informations pertinentes.
37. Selon les deux accusés, lune des difficultés en lespèce tient à ce que lacte daccusation a été, et demeure, déposé sous scellés, sauf en ce qui concerne les deux accusés. Certaines personnes que la Défense souhaiterait interroger ont refusé de coopérer de peur que leur nom apparaisse également dans cet acte daccusation , ou éventuellement dans un autre acte daccusation secret. Ce problème a été évoqué sagissant de témoins potentiels à décharge que les équipes de la Défense souhaiteraient interroger, ce qui apparaît peu pertinent eu égard à la question qui nous préoccupe ici, laquelle concerne les témoins à charge. Cela étant , la Chambre de première instance reconnaît que pareille difficulté peut également survenir sagissant des personnes auxquelles les équipes de la Défense sadressent pour obtenir des informations sur les témoins à charge51.
38. La Chambre de première instance ne pense pas quil est possible de fixer davance une période précise applicable à tous les cas de figure. Tout dépend du nombre de témoins devant faire lobjet dune enquête et des circonstances dans lesquelles les enquêtes se dérouleront. Certains accusés peuvent être dotés de plus de ressources que dautres, selon les fonctions quils occupaient avant leur arrestation. Cette période ne peut être fixée quaprès que les mesures de protection sont en place. Cependant, au vu des témoignages donnés dans dautres affaires52, la Chambre de première instance convient que les enquêtes préalables au procès représentent une tâche difficile pour toute équipe de la défense et que (à moins quun nombre très limité de témoins fassent lobjet dordonnances de protection) un délai supérieur à trente jours avant louverture du procès doit être envisagé dans la plupart des cas pour permettre à laccusé de préparer convenablement sa défense.
7. Restitution des documents
39. Sil était fait droit à la mesure sous 5), celle-ci obligerait le Conseil de la Défense à restituer toutes les déclarations des témoins au Greffe «à lissue des procédures». Il y est stipulé que puisquelles ont été fournies à laccusé dans le seul but de lui permettre de préparer son procès, les déclarations doivent être restituées au Greffe. Ainsi, on sassure que les informations que lon peut qualifier de non publiques et contenues dans les déclarations ne pourront jamais être divulguées 53. LAccusation naurait pas accès aux documents restitués54.
40. Le Conseil de Talic a fait valoir que les documents tombaient en la possession de laccusé dès quils lui étaient fournis et que, de ce fait, il devrait être en droit de les garder «afin de pouvoir ultérieurement les utiliser à bon escient»55. LAccusation a répondu que la propriété des documents ne passait pas à laccusé56. La Chambre de première instance estime quil nest pas nécessaire de trancher cette question, car elle accepte le point de vue présenté en option au nom de Brdjanin , selon lequel le «produit du travail» accompli par le Conseil (à savoir, les annotations quil a inévitablement portées sur ces documents lors de la préparation du procès et durant le procès) devient bien la propriété de laccusé et quil est de nature confidentielle57. Il importe peu de savoir si ladite confidentialité découle du secret professionnel qui lie avocat et client ; il suffit de dire que le «produit du travail» est confidentiel et que laccusé ne devrait dordinaire pas être tenu de le divulguer. La question est donc de savoir si le risque de divulgation est tel que les documents devraient néanmoins être restitués.
41. Lorsquon a insisté pour savoir sil existait un risque réel que les pièces non destinées au public contenues dans ces déclarations soient divulguées si les documents étaient conservés par le Conseil à lissue de laffaire (alors que les mesures de protection sont toujours en vigueur), lAccusation a tout dabord renvoyé à une autre affaire où un conseil de la défense avait refusé de restituer ses documents à lissue du procès et avait déclaré :58
On garde des documents dans son bureau, des gens entrent et sortent, ou on laisse des documents quelque part et, à moins quils soient restitués et retrouvés, [...] il y a toujours ce risque. Là est la difficulté.
Si le Conseil refuse délibérément de restituer les documents quand il en a reçu lordre, il doit être sanctionné pour outrage. Ce refus ne signifie pas que les documents seront inévitablement et délibérément divulgués. Cependant, une sanction pour outrage ne réparerait pas les dommages quoccasionnerait une divulgation délibérée . Mais quel est réellement le risque de voir un incident de ce genre se reproduire ? Et quel est réellement le risque quun conseil qui a conservé des déclarations à lissue du procès les laisse par inadvertance à la vue de quiconque entrerait dans son bureau ? À une exception près, tous les cas de divulgation de documents évoqués par lAccusation dans sa Requête ont eu lieu soit pendant la phase préalable au procès, soit pendant le procès proprement dit. Lexception intéresse le cas dun conseil qui a fourni une déclaration de témoin non expurgée au conseil chargé dune affaire connexe, celui-ci nayant alors reçu de lAccusation quune version expurgée de ladite déclaration59.
42. La Chambre de première instance naccepte pas lopinion selon laquelle le risque est tel quil justifie les préoccupations exprimées par lAccusation. Il est de toute façon difficile de déterminer la date exacte à laquelle se terminera le procès , qui est la date que lAccusation propose pour la restitution des documents. Il a été convenu à laudience que si ces documents devaient être restitués au Greffe à lissue du procès, ils seraient détruits plutôt que conservés, pour des raisons dordre pratique 60. On saurait très vite si un appel doit être interjeté et le conseil pourrait peut-être être autorisé à conserver les déclarations jusquà expiration du délai de dépôt dun acte dappel et, si un acte dappel a été déposé, jusquà ce quil soit statué sur le recours . Mais que se passe-t-il alors si, ultérieurement, une demande de révision est soumise en application de larticle 119 du Règlement ? Le conseil assistant laccusé à ce stade de la procédure aura perdu une ressource précieuse si le produit du travail figurant sur les déclarations a été détruit. Ce serait injuste vis-à-vis de laccusé . LAccusation a suggéré comme solution que le conseil de la défense conserve le produit de son travail ailleurs que sur les déclarations fournies. La Chambre de première instance juge cette proposition fort peu pratique.
43. La Chambre de première instance naccepte pas lopinion selon laquelle le risque probable de divulgation, délibérée ou par mégarde, à lissue du procès est tel quil justifie les conséquences incontrôlables, voire injustes, dune ordonnance enjoignant que les documents soient dans chaque espèce restitués. Le fait que des ordonnances de restitution de déclarations aient été rendues dans des termes tout aussi généraux dans dautres affaires nimpressionne pas la Chambre de première instance61. En effet, la présente espèce est la première où il est fait opposition aux mesures demandées et où il est procédé à un examen de leurs implications.
44. La Chambre de première instance est disposée à rendre une ordonnance dans les termes de la première partie de la mesure visée sous 5), à savoir, que si lun des membres de la Défense de Brdanin et Talic se retire de laffaire, toutes les pièces en sa possession devront être restituées au Conseil de la Défense principal. Cette mesure est justifiée dans la mesure où la personne en question na plus besoin des documents. Mais la Chambre de première instance nest pas disposée à ce stade à prendre une quelconque autre mesure relative à la restitution des documents. Elle accepte que de telles mesures puissent être justifiées dans une espèce particulière . De lavis du Conseil de Brdjanin, une telle mesure serait justifiée lorsquun document est «analogue à un document de la sécurité nationale»62, mais pour la Chambre de première instance, de telles mesures ne sauraient se limiter à ce cas de figure. Il est préférable dexaminer ces mesures en fin de procès, lorsque le risque impliqué peut être plus aisément identifié. À ce stade de la procédure en lespèce, le risque na pas été identifié. La mesure demandée est par conséquent refusée, sans préjudice de toute éventuelle demande à un stade ultérieur.
8. Tenue dun registre
45. Les accusés ne se sont pas opposés à la mesure sous 3), qui oblige leur Défense (voir définition) à informer les membres du public, à qui elle estime nécessaire de communiquer des pièces confidentielles ou non publiques, quils ne peuvent copier , reproduire ou rendre publics les informations divulguées, ni les montrer ou les divulguer à quiconque, et doivent restituer loriginal ou toute copie qui aurait été faite des pièces qui leur ont été communiquées. Sil est fait droit à la mesure sous 4), celle-ci obligerait le Conseil à tenir un registre mentionnant le nom, ladresse et la fonction de chaque personne ou entité recevant lune quelconque des informations non destinées au public figurant dans les pièces fournies par lAccusation . Cette dernière fait observer que des obligations légales similaires existent pour ce qui est des déclarations, photographies et rapports médicaux dans des affaires de murs au Royaume-Uni63. Ce système serait nécessaire pour les affaires portées devant ce Tribunal parce quil constitue «le seul moyen de suivre tout cela de près» 64. Une explication plus détaillée a été donnée en ces termes :65
[...] sil manque des pièces confidentielles et que la Chambre de première instance doit mener une enquête, le seul moyen de procéder est de tenir un registre. Et cest la raison pour laquelle nous demandons quun registre soit tenu [...]
La procédure établie par la mesure sous 4) est la suivante : en cas de «violation perçue» des ordonnances de non-divulgation, la Chambre de première instance, ou une personne désignée, un juge de permanence par exemple, examinera le registre mentionnant les informations divulguées de sorte à pouvoir prendre les mesures « appropriées». LAccusation affirme que le registre ne lui sera pas communiqué66.
46. Laccusé Talic soppose à cette mesure au motif quelle porte atteinte à la confidentialité des enquêtes de la Défense 67, en ce sens que a) elle permettra à lAccusation et au Tribunal de savoir qui la Défense rencontre pour organiser sa défense68 et b) elle permettra à lAccusation de poursuivre ces personnes «en secret»69. LAccusation nie que ce genre dinformation est couverte par le secret professionnel . Là encore, il est inutile que la Chambre de première instance détermine si le caractère confidentiel de lidentité des personnes auxquelles la Défense a parlé dans le cadre de la préparation de la cause de laccusé repose sur le secret professionnel . Il suffit en effet de dire que cette information est confidentielle et que lon ne devrait normalement pas demander à laccusé de la divulguer.
47. Selon la Chambre de première instance, il est significatif que lexamen de ce registre nest envisagé que dans le cas dune «violation perçue» de lordonnance de non-divulgation. Comme cette ordonnance ne lie que la Défense de Brdjanin et Talic (terme qui se limite par définition aux accusés eux-mêmes, à leurs conseils et aux membres du personnel qui leur sont assignés par le Tribunal), il apparaît que la mesure sous 4) vise tout spécialement à fournir la base permettant que des mesures «appropriées» soient prises contre les seules personnes chargées de tenir le registre. Parmi les mesures «appropriées» pourrait figurer la poursuite pour outrage au Tribunal.
48. Si, toutefois, un membre quelconque de la Défense devait être poursuivi pour outrage, il est peut-être fallacieux de la part de lAccusation daffirmer que le registre ne lui sera pas communiqué, puisque cest laide de cette dernière que la Chambre devra nécessairement solliciter dans la procédure pour outrage en application de larticle 77 du Règlement. Une fois de plus, si un membre quelconque de la Défense devait être poursuivi pour outrage, il a également le droit, au même titre que tout autre accusé, dêtre présumé innocent et de garder le silence. Lobligation de conserver le registre qui serait à lorigine de la poursuite exigerait que laccusé fournisse des éléments de preuve contre lui-même, en violation de larticle 21 du Statut du Tribunal. Une telle procédure ne pourrait être justifiée que dans les cas graves où une divulgation irrégulière a eu des répercussions profondes70. La Chambre de première instance nest pas convaincue que ce soit le cas ici.
49. Ce genre de problèmes ne se pose pas si lon exige quun registre soit tenu afin de pouvoir attribuer la divulgation irrégulière à la personne à qui la Défense a communiqué, en toute légalité, lidentité du témoin (lors de son enquête sur les antécédents de ce témoin), mais lordonnance de non-divulgation ne lie pas ces personnes et le Tribunal na pas le pouvoir de prendre des mesures contre elles si elles sont à lorigine de cette divulgation. La Chambre de première instance ne considère pas quil faille exiger de la Défense quelle tienne un registre aux fins envisagées par la mesure sous 4). La mesure est refusée.
9. Documents déposés à titre confidentiel
50. La Chambre de première instance a également soulevé la question du caractère confidentiel du dépôt de la Requête de lAccusation. Lors du dépôt de ladite Requête , une ordonnance portant calendrier a été rendue qui, notamment, levait sa confidentialité 71. LAccusation a fait une demande officieuse dannulation de cette ordonnance 72, mais il a été simplement sursis, jusquà nouvel ordre, à son exécution afin que la confidentialité de ce document et la question de savoir si une partie peut, sans autorisation, déposer un document à titre confidentiel, en se contentant de le déclarer tel, puissent être débattues à laudience73. Le Greffier a également été invité à présenter des conclusions en application de larticle 33 B) du Règlement sur la seconde de ces questions, ainsi que sur celle de savoir si toute partie souhaitant déposer un document à titre confidentiel (exception faite d'un document sollicitant des mesures de protection pour des personnes particulières ) doit tout dabord en demander, ex parte, l'autorisation préalable au juge de la mise en état 74. Le Greffier a déposé des conclusions75,.
51. La Requête aurait été déposée à titre confidentiel de crainte que les informations figurant à son paragraphe 10 reprises au paragraphe 8 de la présente Décision ne soient lues par nimporte qui, y compris des témoins potentiels et ceux qui ont un intérêt à ce quils ne déposent pas ; que ces témoins, par conséquent, refusent de coopérer 76 ; et que la possibilité dexercer des pressions sur les témoins ne vienne à lesprit de ceux qui ont tout intérêt à sassurer que les témoignages impliquant les deux accusés ne soient pas entendus77.
52. Nous lavons dit78, ce qui importe , cest de savoir quels sont les risques que les témoins à charge fassent lobjet de pressions ou dintimidation, et que les craintes de pressions exprimées (ou ressenties) par les témoins potentiels ne suffisent pas à elles seules à établir le risque des pressions ou de lintimidation. La Chambre de première instance considère quil est tout à fait fantaisiste de penser que cest en lisant un document déposé à titre public, tel que cette Requête, que ceux qui ont déjà lintention dempêcher que des témoignages soient entendus contre ces deux accusés seraient incités à exercer des pressions sur les témoins ou à les intimider79. En réalité, de graves allégations relatives à des pressions exercées sur des témoins dans dautres affaires ont déjà été formulées en public. Dans une affaire, les allégations ont été confirmées dans le cadre dune procédure pour outrage intentée à lencontre du conseil concerné80. Dans une autre espèce, les allégations à lencontre dun autre conseil et de laccusé quil assistait ont été rejetées 81. Les deux arrêts sont des documents publics et peuvent être lus par tous. Le second na été rendu que récemment, mais personne na prétendu quil y a eu multiplication des pressions exercées sur des témoins durant la période écoulée depuis le premier arrêt. Telle affirmation serait dailleurs impossible.
53. Rien ne justifie que lon dépose la Requête à titre confidentiel. Larticle 20 4) du Statut du Tribunal stipule que :
Les audiences sont publiques à moins que la Chambre de première instance décide de les tenir à huis clos conformément à ses règles de procédure et de preuve.
En vertu de cet article, larticle 79 du Règlement dispose que la Chambre de première instance peut ordonner que la presse et le public soient exclus de la salle pendant tout ou partie de laudience uniquement pour lune des trois raisons spécifiées (lune étant dassurer la sécurité et la protection dune victime ou dun témoin ou pour éviter la divulgation de son identité en conformité à larticle 75). À la lumière de ces deux dispositions, il ressort clairement que les audiences doivent être publiques sauf si, pour des motifs convaincants, il en est décidé autrement 82.
54. LAccusation a fait valoir que ces dispositions ne concernent que les audiences et non le dépôt de requêtes. Strictement parlant, cest vrai, mais on peut y percevoir lintention que tout ce qui a trait aux procédures engagées devant le Tribunal devrait être fait en public, à moins quil en soit décidé autrement pour des motifs convaincants. Cest la règle générale. Le dépôt de ladite Requête à titre confidentiel a nécessairement eu pour conséquence que le débat y afférent qui traitait de points capitaux a eu lieu à huis clos, quand bien même lAccusation a ultérieurement reconnu que rien de ce qui sy était dit, à lexception des références au paragraphe 10 de la Requête, nétait de nature confidentielle83. Si le paragraphe 10 de la Requête na pas justifié que cette dernière soit déposée à titre confidentiel, le public sest alors vu refuser son droit daccès à une audience , un droit que lAccusation comme le Tribunal devraient tenir à faire respecter.
55. LAccusation a également demandé, pour la forme :84
Quel intérêt peut avoir le public à [...] savoir inutilement quil y a une demande de mesures de protection pour des témoins et/ou quil y a déjà eu des tentatives qui ont été couronnées de succès ?
La réponse est que le public sintéresse à lactivité des instances judiciaires en général (y compris de ce Tribunal) non seulement aux audiences, mais à toute leur activité dont il ne doit être exclu que si des motifs convaincants sont invoqués . Lattitude manifestée par lAccusation en lespèce semble faire partie dune tendance privilégiant le huis clos qui, malheureusement, simpose de plus en plus dans les actions dont est saisi le Tribunal. Lorsque lAccusation demande quune question soit traitée à titre confidentiel, laccusé ne sy oppose généralement pas, parce quil est dans son intérêt que le public en sache le moins possible sur son affaire 85. Cette tendance est dangereuse pour la perception qua le public du Tribunal et il faut y mettre un terme.
56. Le sursis à lexécution de lordonnance levant la confidentialité de la Requête est levé et les documents déposés par les parties en liaison avec la Requête, ainsi que le compte rendu daudience et lenregistrement vidéo de laudience relative à la Requête seront également rendus publics.
57. Reste à répondre à dautres questions relatives à la confidentialité, à savoir le droit dune partie de déposer un document à titre confidentiel sans autorisation préalable simplement en le déclarant «confidentiel», et si toute partie souhaitant déposer un document à titre confidentiel (exception faite d'un document sollicitant des mesures de protection pour des personnes particulières) doit en premier lieu en demander, ex parte, l'autorisation préalable au juge de la mise en état .
58. Les parties nont présenté aucune conclusion particulière sur ces points, bien que lAccusation ait identifié certaines catégories pratiques dans lesquelles tombent ses documents déposés à titre «confidentiel» et qui seront exposées plus loin.
59. Le Greffier a souligné à cet égard la pertinence de larticle 12.1 de la Directive pour le Greffe, Département judiciaire, Division administration et Services d'appui judiciaires (la «Directive»),86 qui stipule que
Les documents confidentiels en totalité, ou en partie, ou dont certains mots ou certaines phrases ne sont pas publiques sont enregistrés et classés selon la procédure prévue à larticle 11. Ils sont ensuite intégrés dans le dossier approprié, mais placés dans un classeur distinct non accessible au public.
La classification des documents décrite à larticle 11 de la Directive ne mentionne pas de classification confidentielle. Le Greffier a fait valoir «qu'il ne lui appartient pas de prendre des décisions susceptibles d'affecter les droits juridiques des parties »87, et que «conformément à la pratique actuelle du Greffe», les parties ont, effectivement, le droit de déposer un document à titre confidentiel, en se contentant de le déclarer tel88. Il est d'avis que la pratique susmentionnée89
permet de garantir au mieux à la fois la sécurité des documents de chaque partie et une procédure de dépôt transparente et impartiale.
60. La Chambre de première instance conteste respectueusement plusieurs de ces affirmations . Tout dabord, larticle 12 de la Directive stipule bien que les documents auxquels il a trait sont ceux qui sont effectivement confidentiels, et non ceux qui sont simplement déclarés tels, et ceux qui ne «doivent» pas être divulgués. De prime abord, larticle exige effectivement du personnel du Greffe quil tranche . Deuxièmement, en aucun cas le Greffe na pour pratique habituelle de laisser les parties choisir si elles souhaitent déposer leurs documents à titre confidentiel et le personnel du Greffe décide bien, en certaines occasions, si le document doit être déposé sous cette forme90. Troisièmement , la Directive ne peut être interprétée en fonction de la capacité du Greffe à fournir du personnel capable de lappliquer. Et, enfin, il est illogique de dire que le personnel du Greffe ne sera plus considéré comme impartial sil doit décider du caractère confidentiel ou non du dépôt dun document. La Chambre de première instance naccepte pas la conclusion du Greffier que les parties ont le droit de déposer un document à titre confidentiel sans autorisation préalable, simplement en le déclarant tel.
61. Quant à la question de savoir si une partie qui souhaite déposer un document à titre confidentiel doit préalablement en demander lautorisation, le Greffier affirme que ce serait contraire à la Directive, qui ne peut être modifiée que par le Greffier après consultation avec les juges et le Procureur 91. Comme les parties demandent à déposer des documents à toute heure de la journée et, dans certains cas, hors des heures ouvrables, il déclare également que toute demande dautorisation risquerait dentraîner des retards en raison de lindisponibilité du juge de la mise en état ou de la chambre92.
62. Là encore, la Chambre de première instance conteste respectueusement ces affirmations . Les dispositions de la Directive ne concernent en rien la demande dautorisation préalable préconisée. La Directive nempiète pas sur le pouvoir qua la Chambre de première instance de contrôler la procédure engagée devant elle. La Chambre peut ordonner aux parties de déposer certains documents sans que cela porte atteinte à la Directive. Elle peut également ordonner aux parties de ne pas déposer certains documents sans en obtenir lautorisation préalable, là encore sans que cela porte atteinte à la Directive. Lobligation dobtenir lautorisation préalable nexige pas du personnel du Greffe quil adopte une démarche particulière. Si une partie souhaite déposer un document à titre confidentiel simplement en le déclarant tel sans en avoir lautorisation et si le personnel du Greffe nattire pas son attention sur cette obligation, la Chambre de première instance exercera alors le pouvoir quelle a dordonner den lever la confidentialité, pouvoir reconnu par le Greffier 93. Lobligation dobtenir lautorisation préalable permettra simplement déviter quil ne soit fait usage de ce pouvoir après que le dépôt du document ait été accepté.
63. Pour ce qui est de largument selon lequel des désagréments se présenteraient , lAccusation a informé la Chambre de première instance que ses documents déposés à titre confidentiel tombaient dans les catégories suivantes :94
i) mesures de protection en faveur des témoins,
ii) enquêtes en cours, actes daccusation en cours et actes daccusation sous scellés , et
iii) réponses aux requêtes confidentielles déposées par la Défense et aux décisions rendues par la Chambre de première instance relatives à des audiences ou des requêtes confidentielles.
Les documents relevant de la deuxième catégorie sont presque inévitablement déposés ex parte et, par conséquent, le sont presque inévitablement à titre confidentiel . Les documents relevant de la troisième catégorie semblent eux aussi devoir être nécessairement déposés à titre confidentiel. Cest donc pour la première catégorie que se poserait principalement un problème, quoique la Chambre de première instance reconnaisse quil existe peut-être dautres catégories de documents quil faudrait déposer à titre confidentiel.
64. Si lobligation de demander lautorisation préalable était formulée dans des termes qui excluent :
a) toutes les demandes ex parte, quelle que soit leur nature,
b) toutes les demandes inter partes de mesures de protection pour des témoins et
c) toutes les demandes qui tombent dans les deuxième et troisième catégories de lAccusation,
peu de documents nécessiteraient une autorisation. LAccusation na pas été en mesure de fournir des chiffres95, mais elle na pas dit que ces documents étaient nombreux. Aucun désagrément sensible ne serait ressenti et il y aurait même une ouverture des procédures sur lextérieur, sauf dans les cas où la confidentialité est réellement justifiée. La Chambre de première instance suggère que cette formule soit mise à lessai dans certaines affaires particulières .
10. Dispositif
65. Par ces motifs, la Chambre de première instance II ordonne ce qui suit :
1. Aux fins de la présente Décision :
a) par «le Procureur», on entend le Procureur du Tribunal et le personnel de son Bureau,
b) par «la Défense de Brdanin et Talic», on entend exclusivement les accusés Radoslav Brdanin et Momir Talic, leurs Conseils de la Défense, ainsi que leurs assistants juridiques et personnels directs et les autres personnes nommées expressément par le Tribunal aux équipes de la défense de Radoslav Brdanin et Momir Talic et énumérées sur une liste que gardera chaque conseil principal et qui sera déposée ex parte et sous scellés auprès de la Chambre de première instance dans les dix jours de lentrée en vigueur de la présente décision. De même, tout ajout ou retrait, dans lune ou lautre des catégories de la liste susmentionnée, de personnes qui sont nécessairement et à juste titre impliquées dans la préparation de la défense sera notifié à la Chambre de première instance dans les sept jours,
c) par «le public», on entend toutes les personnes physiques, États, organisations , entités, clients, associations et groupes, autres que les Juges du Tribunal, le personnel du Greffe (quil soit assigné aux Chambres ou au Greffe), le Procureur , ainsi que la Défense de Brdanin et Talic, telle que définie ci-dessus. «Le public » comprend en particulier, sans sy limiter, la famille, les amis et les associés des accusés, le coaccusé, les accusés dans dautres affaires ou actions devant le Tribunal, et le Conseil de la Défense dans dautres affaires ou actions devant le Tribunal, et
d) par «les médias», on entend tout le personnel de la presse écrite et audiovisuelle , y compris les journalistes, les auteurs, le personnel de la télévision et de la radio, leurs agents et leurs représentants.
2. Le 24 juillet 2000 à 16 heures au plus tard, lAccusation est tenue, en vertu de larticle 66 A) i) du Règlement, de "fournir à chaque accusé des copies non expurgées des pièces justificatives qui étaient jointes à l'Acte d'accusation au moment de la demande de confirmation de celui-ci, ainsi que les déclarations antérieures qu'elle a obtenues de chacun d'eux",
sous réserve que, dans le cas où elle déposerait, avant cette date, une requête aux fins de mesures de protection concernant des déclarations ou autres pièces particulières , des victimes ou témoins particuliers (qui apparaîtront dans ladite requête sous un numéro ou pseudonyme), elle ne sera pas tenue de communiquer des copies non expurgées des déclarations ou autres pièces identifiées dans ladite requête jusquà ce que la Chambre de première instance ait statué, et sous réserve de toute décision qui serait prise concernant ladite requête.
3. La Défense de Brdanin et Talic ne divulguera aux médias aucune pièce confidentielle ou non publique fournie par le Procureur.
4. Sauf si directement et spécifiquement nécessaire à la préparation et la présentation de lespèce, la Défense de Brdanin et Talic ne divulguera :
a) aucun nom, ni aucune information permettant didentifier ou de trouver un témoin ou un témoin potentiel qui leur aura été communiquée par le Procureur, ou
b) aucun élément de preuve (documentaire, matérielle ou autre), ni aucune déclaration écrite émanant dun témoin ou dun témoin potentiel, ni la teneur, totale ou partielle , des éléments de preuve, déclarations ou dépositions préalables considérés comme non publics.
5. Si la Défense de Brdanin et Talic estime directement et spécifiquement nécessaire de divulguer lesdites informations pour la préparation et la présentation de lespèce , elle informera les membres du public à qui des pièces ou des informations non publiques ( telles que des déclarations de témoins, des dépositions préalables, des cassettes vidéo ou le contenu de celles-ci ) auront été communiquées, quils ne peuvent copier, reproduire ou rendre publics les déclarations ou les éléments de preuve en question, ni les montrer ou les divulguer à quiconque. Les membres du public à qui lon aura communiqué loriginal, une copie ou un double des pièces en question, devront le restituer à la Défense de Brdanin et Talic aussitôt que lesdites pièces ne sont plus nécessaires à la préparation et à la présentation de lespèce.
6. Si lun des membres de la Défense de Brdanin et Talic se retire de laffaire, toutes les pièces en sa possession devront être restituées au Conseil principal de la Défense.
7. Le sursis imposé par la Modification de lOrdonnance portant calendrier du 27 janvier 2000, en date du 2 février 2000, qui a levé le caractère «confidentiel» de la Requête aux fins de mesures de protection déposée le 10 janvier 2000, est levé.
8. Le caractère «confidentiel» des documents déposés en réponse à la Requête aux fins de mesures de protection déposée le 10 janvier 2000, des documents déposés en réplique à ces réponses et des audiences de la Requête du 24 mars 2000 est levé .
9. Les autres mesures demandées aux termes de la Requête aux fins de mesures de protection déposée le 10 janvier 2000 sont refusées.
10. La présente décision nempêche aucunement toute partie ou personne de demander des mesures de protection autres ou supplémentaires quelle jugerait nécessaire à un témoin ou autre élément de preuve spécifique.
Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.
Le 3 juillet 2000
La Haye (Pays-Bas)
Le Président
(signé)
Juge David Hunt
[Sceau du Tribunal]
1- Requête aux fins de mesures de protection, 10 janvier 2000 («la
Requête»), paragraphe 14.
2- Ces définitions constituent le fondement de celles données au
paragraphe 65.1 de la présente Décision. LAccusation demande également que soit
préservé le droit des parties et de toute autre personne de demander que soient rendues
des ordonnances ou que soient prises des mesures aux fins de protection autres ou
supplémentaires qui seraient jugées nécessaires sagissant dun témoin
particulier ou de tout autre moyen de preuve.
3- Compte-rendu daudience en anglais, 11 janvier 2000, p. 40.
4- Compte-rendu daudience en anglais, 24 mars 2000, p. 77.
5- Requête, 24 mars 2000, p. 77
6- Affaire no IT-94-1-T, Décision relative à lexception
préjudicielle soulevée par le Procureur aux fins dobtenir des mesures de
protection pour le témoin R, 31 juillet 1996 («Deuxième Décision sur les mesures de
protection dans laffaire Tadic»), à la page 4.
7- Non souligné dans loriginal.
8- Le Procureur c/ Tadic, Décision relative à lexception
préjudicielle soulevée par le Procureur aux fins dobtenir des mesures de
protection pour les victimes et les témoins, (1995) RJ I TPIY, p. 123 («Première
Décision sur les mesures de protection dans laffaire Tadic»), à la page 150
(paragraphe 30). Voir également Le Procureur c/ Tadic, Décision relative à
lexception préjudicielle soulevée par le Procureur aux fins dobtenir des
mesures de protection pour le témoin L, (1995) RJ I TPIY, p. 306, à la page 318
(paragraphe 11).
9- Requête, paragraphe 9.
10- Ibid, paragraphe 4.
11- Compte-rendu daudience en anglais, p. 78.
12- Ibid, p. 88.
13- Première Décision sur les mesures de protection dans laffaire
Tadic, à la page 146 (paragraphe 23).
14- Compte-rendu daudience en anglais, p. 135.
15- Ibid, p. 84, 87-88, 92.
16- Ibid, p. 86.
17- Ibid, p. 86-87, 93-94.
18- Ibid, p. 140.
19- Quelles que soient les craintes que puisse avoir le témoin sil
venait à être identifié comme ayant témoigné dans le cadre de lespèce, il est
difficile de comprendre comment lAccusation, après avoir utilisé le compte-rendu
daudience comme pièce jointe lors de la confirmation de lacte
daccusation, pourrait affirmer quil existait des circonstances exceptionnelles
justifiant la non-divulgation de lidentité du témoin concerné.
20- Compte-rendu daudience en anglais, p. 140.
21- Précisions relatives à la «Requête aux fins de mesures de
protection», 8 février 2000 («Précisions»), paragraphe 4 ; Compte-rendu
daudience en anglais, p. 83. Voir également Première Décision sur les mesures de
protection dans laffaire Tadic, à la page 214.
22- Première Décision sur les mesures de protection dans laffaire
Tadic, à la page 156 (paragraphe 38), citant Axen c/ République fédérale
dAllemagne, Arrêt de la Cour européenne des droits de lhomme, Série A,
no 72 (voir au paragraphe 27).
23- Première Décision sur les mesures de protection dans laffaire
Tadic, aux pages 174 (paragraphe 65) et 201.
24- Ceci est lié aux dispositions de larticle 75 du Règlement,
qui prévoient que soient ordonnées des mesures appropriées et non limitées dans le
temps pour protéger la vie privée et la sécurité de témoins, à condition toutefois
que lesdites mesures «ne portent pas atteinte aux droits de laccusé». Aucune
question relative à ce pouvoir particulier des juges et de la Chambre de première
instance na été soulevée dans la présente Requête, qui a fait lobjet
dun examen dans la Première Décision sur les mesures de protection dans
laffaire Tadic, par la majorité, aux pages 168 à 174, 178 (paragraphes 53 à 66,
71), et par le Juge Stephen exprimant une opinion dissidente, aux pages 220, 224 à 234.
25- LAccusation a proposé que ladite requête soit déposée ex
parte (Compte-rendu daudience en anglais, p. 86). Ce ne serait approprié que dans
le cas où lidentité de certains témoins pourrait être identifiée : Le
Procureur c/ Simic, Affaire no IT-95-9-PT, Décision relative 1) à la Requête de Stevan
Todorovic aux fins de réexaminer la Décision du 27 juillet 1999, 2) à la Requête du
CICR aux fins de réexaminer lOrdonnance portant calendrier du 18 novembre 1999 et
3) aux conditions daccès aux pièces, 28 février 2000, paragraphes 40 et 41. Que
cette requête soit déposée ex parte ou inter partes, il serait néanmoins approprié
quelle le soit à titre confidentiel.
26- Précisions, paragraphe 12 ; Compte-rendu daudience en
anglais, pages 78 et 79.
27- Précisions, paragraphe 8.
28- Le Procureur c/ Simic, Affaire no IT-95-9-R77, Jugement oral, 29 mars
2000, Compte-rendu daudience en anglais, pages 904 et 905.
29- Le Procureur c/ Zlatko Aleksovski, Affaire no IT-95-14/I-T, Décision
portant condamnation pour outrage au Tribunal, 11 décembre 1998.
30- Précisions, paragraphe 8.
31- Ibid, paragraphe 9.
32- Ibid, paragraphe 10.
33- Compte-rendu daudience en anglais, p. 90.
34- Celle-ci prévoit la tenue dun registre par les conseils de la
défense à qui lAccusation aura communiqué des informations confidentielles,
registre qui pourra être examiné par la Chambre de première instance en cas de
«violation perçue» des ordonnances par les conseils de la défense ou tout autre membre
de léquipe de la défense. Voir chapitre 8.
35- Paragraphe 9 de la présente Décision.
36- Voir à la page 178 (paragraphe 72). Il est intéressant de noter que
la source sur laquelle la majorité sest fondée - arrêt rendu par la chambre
dappel de la Cour suprême de Victoria (Australie), dans laffaire Jarvie c/
MagistratesCourt of Victoria ?1994g VR 84, lequel a été prononcé, au nom de la
Cour, par M. le Juge Brooking impliquait un témoin bien connu de laccusé
sous un pseudonyme et non sa véritable identité (il sagissait dun policier
infiltré) : Première Décision sur les mesures de protection dans laffaire
Tadic, citée par le Juge Stephen, à la page 232.
37- Kostovski c/ Pays-Bas, Décision rendue le 20 novembre 1989 par la
Cour européenne des droits de lhomme, Séries A, no 166, à la page 21 (paragraphe
44).
38- Compte-rendu daudience en anglais, p. 115.
39- Compte-rendu daudience en anglais, p. 123.
40- Compte-rendu daudience en anglais, pages 126 à 128. Ce point
de vue correspond davantage à la réponse écrite déposée pour le compte de
Talic : Réponse du général Talic aux précisions complémentaires du Procureur
relatives à sa Requête aux fins de mesures de protection, 10 février 2000, paragraphe
5.
41- Compte-rendu daudience en anglais, p. 81.
42- Ibid, p. 80.
43- Ibid, pages 83 et 84. En dautres termes, il est peu probable
que les actes eux-mêmes puissent véritablement être contestés, Le Procureur c/
Krnojelac, Affaire no IT-97-25-PT, Décision relative à lexception préjudicielle
pour vices de forme de lacte daccusation modifié, 11 février 2000,
paragraphe 18 A).
44- Compte-rendu daudience en anglais, p. 89.
45- Précisions, paragraphe 13.
46- Compte-rendu daudience en anglais, p. 84.
47- Le Conseil de la défense pour Brdanin a cité Lord Owen, qui
déclarait : «Jamais auparavant, au cours de mes trente années dexpérience
dans les affaires publiques, je nai dû opérer dans un tel climat de déshonneur,
de propagande et de dissimulation. Parmi les personnes à qui jai eu affaire en
ex-Yougoslavie, nombreuses sont celles qui ignorent littéralement tout de la vérité.»
(Balkan Odyssey, David Owen, 1996, Indigo Edition, p. 1).
48- Voir, par exemple, Le Procureur c/ Tadic, Affaire no IT-94-1-T,
Décision relative à la Requête de lAccusation sollicitant le retrait des mesures
de protection en faveur du témoin L, 5 décembre 1996, paragraphe 4 ; Le
Procureur c/ Tadic, Affaire no IT-94-1-A, Jugement, 15 juillet 1999, pages 26 à 28
(paragraphes 57 à 65).
49- Voir, par exemple, Le Procureur c/ Tadic, Affaire no IT-94-1-A-R77,
Arrêt relatif aux allégations doutrage formulées à lencontre du
précédent conseil, Milan Vujin, 31 janvier 2000, paragraphes 46 et 136.
50- Le Procureur c/ Aleksovski, Affaire no IT-95-14/1-AR73, Arrêt
relatif à lappel du Procureur concernant ladmissibilité déléments de
preuve, 16 février 1999, paragraphe 18.
51- Sagissant des témoins à décharge, lattention du
Conseil de la Défense est attirée sur les dispositions de larticle 29 du Statut du
Tribunal.
52- Voir, par exemple, Le Procureur c/ Tadic, Affaire no IT-94-1-A-R77,
Arrêt relatif aux allégations doutrage formulées à lencontre du
précédent conseil, Milan Vujin, 31 janvier 2000.
53- Requête, par. 13.
54- Compte rendu daudience en anglais, p. 134.
55- Ibid, p. 120.
56- Ibid, p. 142.
57- Ibid, p. 131, 133 et 134.
58- Ibid., p. 97.
59- Autres précisions, par. 15.
60- Compte rendu daudience en anglais, p. 94 et 95.
61- Autres précisions, par. 16.
62- Ibid, p. 133. Voir également le passage du compte rendu
daudience en anglais où lAccusation fait référence à de tels documents (p.
99 et 100).
63- Loi en matière de délits sexuels (pièces protégées) de 1997, qui
comprend des dispositions élaborées visant à empêcher la communication des pièces (à
qui que ce soit, y compris laccusé, même sil nest pas assisté) de
façon à permettre à la personne de les garder à tout moment en sa possession ou
den faire une copie : Autres précisions, par. 18.
64- Compte rendu daudience en anglais, p. 97.
65- Ibid, p. 134.
66- Ibid, p. 134.
67- Réponse ?de Talicg à la Requête du Procureur, 31 janvier 2000,
par. 3.
68- Compte rendu daudience en anglais, p. 130.
69- Ibid, p. 130 à 132.
70- Une telle situation a été justifiée dans certains systèmes
juridiques nationaux par exemple, les camionneurs qui sont tenus de tenir un
carnet de bord de leurs heures de travail et de repos.
71- Ordonnance portant calendrier, 27 janvier 2000, p. 3.
72- Lettre adressée au Juge de la mise en état par M. James
Stewart, Chef de la Division des poursuites, 31 janvier 2000 («la lettre Stewart»).
LAccusation a ultérieurement été tenue de déposer la lettre : Modification
de lOrdonnance portant calendrier du 27 janvier 2000, 2 février 2000, p. 2
73- Modification de lOrdonnance portant calendrier du 27 janvier
2000, 2 février 2000, p. 2.
74- Ordonnance portant calendrier, 29 février 2000, p. 4.
75- Conclusions relatives à la question du dépôt confidentiel
présentées par le Greffier en application de larticle 33 B) du Règlement, 7
mars 2000 («les Conclusions du Greffier»).
76- La lettre de Stewart, par. a).
77- Ibid, par. b) ; compte rendu daudience en anglais, p. 102.
78- Paragraphe 26 de la présente Décision.
79- La Chambre de première instance na pas ignoré le fait
quune publicité peut être faite de ces documents déposés à titre public, bien
que cela nait pas été le cas de ladite Requête même si elle a été rendue
publique lorsque sa confidentialité a été levée. En tout état de cause, en ce qui
concerne largument de la Chambre de première instance, peu importe comment les
allégations figurant dans le document déposé sont portées à la connaissance des
personnes qui ont déjà lintention dempêcher que des témoignages soient
entendus contre ces deux accusés.
80- Le Procureur c/ Tadic, Affaire N° IT-94-1-A-R77, Arrêt relatif aux
allégations doutrage formulées à lencontre du précédent conseil, Milan
Vujin, 31 janvier 2000, Arrêt de la Chambre dappel.
81- Le Procureur c/ Simic, Affaire N° IT-95-9-R77, Arrêt relatif à la
question des allégations doutrage formulées à lencontre dun accusé
et de son conseil, 30 juin 2000.
82- Voir également larticle 21.2. du Statut du Tribunal.
83- Compte rendu daudience en anglais, p. 148.
84- Ibid, p. 104.
85- On retrouve un exemple de cette tendance dans laffaire Le
Procureur c/ Tadic, Arrêt relatif aux allégations doutrage formulée contre un
précédent conseil, Milan Vujin, 31 janvier 2000, par. 11, où lon peut voir que
les parties choisissent de tenir les audiences à huis clos. Dans Le Procureur c/ Kunarac,
Affaire n° IT-96-23-T, Ordonnance relative à la Requête de la Défense déposée en
application de larticle 79 du Règlement, 22 mars 2000, la Défense a sollicité une
audience à huis clos pour le témoignage de tous les témoins à charge qui avaient
accusé le défendeur de viol. La demande a été rejetée.
86- IT/121, 1er mars 1997, adoptée par les Juges siégeant en session
plénière le 25 juin 1996.
87- Conclusions du Greffier, par. 3.
88- Ibid, par. 4.
89- Ibid, par. 4.
90- Pour citer un exemple récent, le Greffier a pris la sage décision
de déposer un document à titre confidentiel, alors quil navait pas été
déclaré tel, parce quil citait des passages du compte rendu dun témoignage
entendu à huis clos : Le Procureur c/ Delalic, Affaire n° IT-96-21-A, Ordonnance
relative au mémoire dappel déposé au nom de Zejnil Delalic, 26 mai 2000.
91- Conclusions du Greffier, par. 5.
92- Ibid, par. 6.
93- Ibid, par. 4.
94- Ibid, p. 100.
95- Compte rendu daudience en anglais, p. 99.