Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le lundi 14 juillet 2003

2 [Audience publique]

3 --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.

4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Veuillez vous asseoir. Est-ce que les

6 audiences vont se dérouler uniquement aujourd'hui dans cette salle ? Où

7 est-ce que cela va se poursuivre toute la semaine ? J'ai cru comprendre

8 qu'il s'agissait de toute la semaine.

9 Madame la Greffière d'audience, veuillez avoir l'obligeance de citer

10 l'affaire.

11 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Il s'agit

12 de l'affaire IT-99-36-T. Le Procureur contre Radoslav Brdjanin.

13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci. Monsieur Brdjanin, je m'adresse

14 à vous. Pouvez-vous suivre les débats dans une langue que vous comprenez ?

15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je vous entends.

16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez prendre

17 place.

18 Madame Korner veuillez présenter l'Accusation.

19 Mme KORNER : [interprétation] Je m'appelle Joanna Korner, je suis assisté

20 de Ann Sutherland et Denise Gustin.

21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour. Est-ce que l'on pourrait

22 présenter les parties qui représentent la Défense ?

23 Mme BARUCH : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je m'appelle

24 Barbara Baruch, M. Vujic semblait s'être égaré dans les corridors du

25 Tribunal. Il ne s'est jamais rendu dans cette salle précise. Donc, je me

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1 demande s'il sait comment, il doit se diriger ici. Je vous présente mes

2 excuses pour cela, mais il se joindra à moi plus tard et je crois qu'en

3 fait, la raison pour laquelle, il n'a pas emboîté mes pas, et qu'on fait la

4 photocopieuse de la Défense était hors d'état. Et par conséquent, il devait

5 aller faire d'autres photocopies ailleurs.

6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Fort bien. Bonjour, Madame la Greffière

7 d'audience. Je suis désolé de vous ennuyer avec cela, mais il faudrait

8 peut-être, déplacer le chariot pour que je puisse voir les membres qui

9 constituent la Défense. Est-ce que le chariot dérange là, où il se trouve

10 actuellement je n'arrive pas à voir, s'il y a le même obstacle, non, il ne

11 semble pas être le cas.

12 Bien, par conséquent nous pouvons commencer. Il faut d'abord re procéder au

13 contre-interrogatoire du premier témoin. Est-ce que cela doit se faire à

14 huis clos partiel ?

15 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, non, il s'agit du

16 témoin de Mme Sutherland, je ne sais pas si vous me permettez d'examiner un

17 certain nombres de questions.

18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Fort bien. J'ai oublié de vous demander

19 cela.

20 Mme KORNER : [interprétation] Tout d'abord, il s'agit du calendrier qui est

21 prévu pour cette semaine, je crois que vous avez reçu un mémorandum de la

22 section chargé des victimes et des témoins et que vous avez également été

23 informé du témoin qui doit revenir pour subir son contre-interrogatoire ce

24 vendredi-ci.

25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui.

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1 Mme KORNER : [interprétation] Vous devrez avoir reçu son certificat

2 médical.

3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Non.

4 Mme KORNER : [interprétation] Ce document était joint --

5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Non cela n'avait pas été communiqué à

6 mon attention. Avez-vous vu cet exemplaire ?

7 [La Chambre de première instance se concerte]

8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je me souviens de rien, Madame Korner.

9 Mme KORNER : [interprétation] Je pourrais peut-être remettre ce document et

10 nous pourrions peut-être faire des photocopies de ce document. Mais ce

11 document, nous a été remis par la section chargée des victimes des témoins.

12 [La Chambre de première instance se concerte]

13 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, nous proposons de

14 procéder comme suit, apparemment ce témoin ne pourra pas revenir ce

15 vendredi.

16 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]

17 Mme KORNER : [interprétation] Nous pourrions peut-être demander à ce que

18 les photocopies soit faite par le truchement de l'Huissier, non, Madame

19 l'Huissière. En fait sur ce document figure l'adresse et le lieu de

20 résidence du témoin. Nous allons peut-être veiller à faire des photocopies

21 de ces documents nous-mêmes à moins que vous ne souhaitiez demander cela à

22 la greffière d'audience.

23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Par conséquent, il semblerait que nous

24 soyons confrontés à un problème, puisque le témoin n'est pas apte

25 médicalement parlant à se rendre à la Haye pour venir déposer. Je ne sais

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1 pas si ce témoin pourra se présenter ou non.

2 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, nous espérons que

3 compte tenu de la période de vacances d'été nous espérons qu'il se remettra

4 et nous espérons que nous pourrons peut-être entendre ces experts au début

5 de la présentation des moyens à charge.

6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Madame Korner, nul besoin pour moi

7 de consulter mes collègues à cet égard. Je vous ai dit que cela était

8 possible.

9 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, par conséquent nous

10 avons une possibilité pour ce vendredi et c'est la raison pour laquelle, il

11 devrait normalement se présenter ce vendredi-ci pour se soumettre au

12 contre-interrogatoire. Nous avions également compris que la Défense

13 disposait d'écoutes, mais qu'il voulait que les deux témoins en

14 l'application de l'Article 92 soient présentés pour contre-interrogatoire.

15 Nous comprenons qu'il s'agit à présent d'une erreur. Nous n'avons pas

16 besoin que ces personnes comparaissent. S'il souhaite présenter un autre

17 témoin, nous ne sommes pas préparé.

18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] En fait, c'est ce que j'ai cru

19 comprendre.

20 Mme KORNER : [interprétation] En effet.

21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] C'est du moins-là, mon interprétation.

22 Mme KORNER : [interprétation] Suite à cela, il n'y a pas d'autre témoin qui

23 soit prévu pour ce vendredi. Parce que le prochain témoin ne doit se

24 présenter que lundi.

25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Fort bien.

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1 Mme KORNER : [interprétation] Par conséquent, si je peux vous expliquer la

2 situation, je sais que ce jeudi-ci on a débattu de la possibilité de se

3 réunir voir de ne pas assister à toute la plénière. Le témoin se présente

4 ici demain, il s'agit d'un témoin extrêmement important par conséquent on

5 pourrait peut-être le faire déposer mardi, mercredi et ensuite vendredi.

6 Par ailleurs, M. Koumjian est prêt à s'occuper de l'argument juridique

7 concernant la recevabilité.

8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, c'est en effet ce que j'allais

9 vous suggérer. Ce vendredi sera en partie utiliser pour examiner la

10 question de la légalité.

11 Mme KORNER : [interprétation] Fort bien.

12 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Concernant les écoutes.

13 Mme KORNER : [interprétation] Fort bien.

14 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Par conséquent, j'ai cru comprendre que

15 M. Koumjian était disposé, n'est-ce pas ?

16 Mme KORNER : [interprétation] Oui.

17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Et ceci s'applique également à Me

18 Ackerman.

19 Mme BARUCH : [interprétation] Je transmettrai ce message.

20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Fort bien.

21 Mme KORNER : [interprétation] Enfin, Monsieur le Président, la personne qui

22 a eu un accident de voiture, je crois que son secrétaire a pris contact

23 avec nous le 10. Je crois qu'il s'agissait de jeudi dernier pour dire qu'en

24 fait, il n'avait pas souffert de séquelles plus graves qu'un bras cassé.

25 Par conséquent, il sera ici ce vendredi et pourra se déplacer en Afrique ce

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1 samedi. Par conséquent, si vous l'estimez nécessaire il pourrait déposer ce

2 jeudi le 28 août et le vendredi 29 selon que le besoin. Par conséquent, Me

3 Ackerman disposera suffisamment de temps.

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ceci ne constitue pas un problème pour

5 nous.

6 Mme KORNER : [interprétation] Fort bien. Il s'agissait simplement de

7 questions que je souhaitais porter à votre attention.

8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Il est prêt à témoigner dans deux

9 jours.

10 Mme KORNER : [interprétation] En fait, il était prévu pour un jour si

11 nécessaire.

12 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Non, non, gardez-le pour un jour. Il a

13 présenté un rapport écrit, je suppose.

14 Mme KORNER : [interprétation] Non.

15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Non.

16 Mme KORNER : [interprétation] Non.

17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je croyais qu'il se déplaçait muni d'un

18 rapport écrit.

19 Mme KORNER : [interprétation] Je crains que non.

20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vois.

21 Mme KORNER : [interprétation] Il a fait une déclaration, mais il n'y a pas

22 de rapport écrit.

23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Fort bien. Je pense qu'il faut limiter

24 ce témoin à un jour. Cela serait plus adéquat que deux jours quels que

25 soient ces jours.

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1 Mme KORNER : [interprétation] Le jeudi 28, et selon que le besoin le

2 vendredi 29. J'espère que nous pourrons l'interroger en une seule journée.

3 Mme BARUCH : [interprétation] Si j'ai bien compris, ce témoin plus le

4 témoin de vendredi, plus deux contre-interrogatoires ceci doit être fait au

5 cours du mois d'août, n'est-ce pas ?

6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Non, j'ai donné la possibilité à Me

7 Ackerman de choisir. L'idée était que le contre-interrogatoire de ces deux

8 témoins experts se déroule avant la présentation des moyens à charge par Me

9 -- avant la présentation des moyens à décharge [sic] -- de Me Ackerman. Par

10 conséquent, nous en étions à la date du 6 octobre. Qui est la date à

11 laquelle la présentation des moyens à décharge [sic] devait commencer.

12 L'idée était que les deux premiers jours voir les trois premiers soit

13 consacrée au contre-interrogatoire des témoins experts. J'ai donné la

14 possibilité à Me Ackerman de lui dire, s'il préférait terminer cela à la

15 fin du mois d'août. Mais le choix est sien. Nul -- la seule chose qu'il

16 doit faire c'est se mettre en contact avec Mme Korner afin d'organiser les

17 choses du point de vue pratique.

18 S'agissant de la personne qui avait eu un accident de voiture à (Expurgé)

19 où quelque soit la ville, j'ai cru comprendre qu'il se déplacera pour être

20 présent ici le 28 août, le 29 août, n'est-ce pas ? Et il sera contre

21 interrogé par Me Ackerman. Je ne sais pas si ce contre-interrogatoire

22 durera un jour ou davantage cela on verra. Peut-être qu'il faudra expurger

23 ce passage.

24 Mme KORNER : [interprétation] Il s'agit de Mme Sutherland qui s'en

25 chargera.

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1 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je sais, oui parce que je sais que Mme

2 Sutherland suit cela d'un œil de lynx.

3 Mme KORNER : [interprétation] Mme Sutherland comme vous le savez prépare

4 soigneusement ses dossiers.

5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] En fait, veuillez expurger ce passage,

6 Madame Chuqing. Ensuite, il est question d'une personne nous ne savons pas,

7 s'il sera en mesure de se re déplacer une fois de plus, toutefois après la

8 suggestion de Mme Korner, si je l'ai bien comprise, est que cette personne

9 se présentera en octobre et non pas à la fin du mois d'août. Par

10 conséquent, il disposera suffisamment de temps pour se remettre de cet

11 accident, n'est-ce pas ?

12 Mme KORNER : [interprétation] Oui, c'est tout à fait exact.

13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Du moins, c'est ainsi que je vous ai

14 comprise.

15 Mme KORNER : [interprétation] Pourrions passer à huis clos partiel pour

16 examiner un aspect.

17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Passons à huis clos partiel

18 [Audience à huis clos partiel]

19 (Expurgé)

20 (Expurgé)

21 (Expurgé)

22 (Expurgé)

23 (Expurgé)

24 (Expurgé)

25 (Expurgé)

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1 (Expurgé)

2 (Expurgé)

3 (Expurgé)

4 (Expurgé)

5 (Expurgé)

6 [Audience publique]

7 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour, Monsieur Druzic. Je vous salue

8 à nouveau dans ce prétoire.

9 Madame Chuqing, veuillez prendre ce feuillet, je vous prie.

10 Monsieur le Témoin, vous connaissez la procédure. Veuillez vous munir du

11 texte de la déclaration solennelle, et je vous invite à le lire à voix

12 haute. Je vous en prie.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

14 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

15 LE TÉMOIN : MIDHO DRUZIC [Reprise]

16 [Le témoin répond par l'interprète]

17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez prendre

18 place.

19 Madame Baruch, je ne sais pas si vous étiez présente le jour de son

20 interrogatoire principal. Je -- Nous aurions peut-être pu mettre un terme à

21 son interrogatoire si les choses ne s'étaient déroulées comme elles l'ont

22 fait ce jour-là. Il est à présent temps pour vous de contre-interroger ce

23 témoin.

24 Mme BARUCH : [interprétation] Merci.

25 Contre-interrogatoire par Mme Baruch :

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1 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Druzic. Je m'appelle Mme Baruch. Je

2 représente les intérêts de l'accusé en l'espèce. Vous ne m'avez pas vu ici

3 parce que l'autre avocat était présent à ce moment-là. Je vous salue dans

4 cette salle. Et je vais vous poser un certain nombre de questions.

5 Avez-vous parlé à quiconque au sujet de votre témoignage auparavant ?

6 R. Non, cela était inutile.

7 Q. Fort bien. Et une fois de plus, vous n'avez pas pris contact avec les

8 membres de l'Accusation, si ce n'est au sujet d'une brève question ?

9 R. Non, c'est exact. Vous avez correctement décrit les choses. Ce matin

10 j'ai vu le Procureur.

11 Q. Avez-vous eu un entretien avec l'Accusation ce matin ?

12 R. Non.

13 Q. J'ai cru comprendre que vous étiez membre de l'assemblée en 1990 à

14 Petrovac et que vous faisiez partie du parti SDA. Etes-vous actuellement

15 membre de l'assemblée ?

16 R. Non.

17 Q. J'ai cru qu'à un moment donné, vous étiez président du conseil de la

18 communauté islamique de Bosanski Petrovac, n'est-ce pas exact ?

19 R. Oui, c'est exact. De 1988 à 1997, j'étais le président de la communauté

20 islamique.

21 Q. Et occupez-vous une position au sein de cette communauté, hormis le

22 fait que vous ne soyez pas président. Par exemple, faites-vous partie du

23 conseil ?

24 R. Je suis le président de Dzemat.

25 Q. Dzemat fait partie de cette communauté islamique. Est-ce que je vous ai

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1 bien compris ?

2 R. Oui. Elle fait partie de Medzlis.

3 Q. On vous a posé des questions au sujet de la population de Bosanski

4 Petrovac et vous avez répondu que vous n'en saviez rien. N'est-ce pas

5 exact ?

6 R. S'agissant des pourcentages, ceux qui vivent encore à Bosanski

7 Petrovac, je ne sais pas quels étaient ses pourcentages à l'époque. Mais je

8 sais que de nombreux Serbes sont revenus à Bosanski Petrovac dans leur

9 domicile.

10 Q. Est-il vrai de dire qu'à l'heure actuelle, la majorité des citoyens de

11 cette municipalité sont des Musulmans ?

12 R. A l'heure actuelle, depuis leur retour, je dirais que les Serbes sont

13 majoritaire. Parce que de nombreuses personnes sont retournées dans leur

14 village et la plupart sont Serbes.

15 Q. Par conséquent, votre déposition est la suivante, à savoir que la

16 majorité de la population de Bosanski Petrovac est Serbe, n'est-ce pas ?

17 R. Oui.

18 Q. Merci. Vous avez utilisé l'expression "depuis leur retour", est-ce que

19 vous parlez des Serbes qui étaient déjà retournés à Bosanski Petrovac ?

20 R. Oui.

21 Q. Fort bien. Connaissez-vous une personne qui s'appelle Isnam Talic ?

22 R. Je ne crois pas avoir compris son nom. Je vous présente mes excuses ?

23 Q. Isnam Talic.

24 R. Non, ce nom ne me dit rien.

25 Q. Je me demande dans quelle mesure vous connaissez l'existence d'un

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1 mouvement qui visait à changer l'appellation de la ville de Bosanski

2 Petrovac depuis 1996 ?

3 R. Je ne sais rien. A cette époque-là, j'étais en Allemagne en qualité de

4 réfugié.

5 Q. Je suis désolée. Peut-être que ma question n'était pas très claire.

6 Avez-vous connaissance d'un mouvement qui visait à changer le nom de la

7 ville depuis que la guerre s'est achevée, pour que cette ville ait un nom

8 bosniaque et qu'elle ne s'appelle plus Petrovac ?

9 R. Je connais Bosanski Petrovac et s'agissant de Talic, il doit s'agir

10 d'un nom de famille. Isnam Talic, c'est probablement le prénom et le nom de

11 famille de quelqu'un. Pour autant que je me souviens, Bosanski Petrovac

12 était toujours là, mais il n'y avait pas de Talic qui s'appelait ainsi là-

13 bas.

14 Q. Fort bien. Mais en fait, j'avais changé la question et j'aurais dû

15 préciser. Connaissez-vous l'existence d'un mouvement visant à changer le

16 nom de Bosanski Petrovac, à un nom qui serait plus bosnien ?

17 R. Une fois de plus, après avoir quitté le camp le 3 novembre 1992

18 jusqu'au 9 avril 1997, j'ai passé toute cette période en Allemagne. Par

19 conséquent, je n'ai aucunement connaissance de toute tentative de changer

20 le nom.

21 Q. J'ai cru comprendre qu'avant la guerre, il y avait quatre mosquées à

22 Bosanski Petrovac, deux en ville, une à Bijela, et une ailleurs à

23 Rasinovac. Je ne sais pas si j'ai prononcé les noms correctement. Mais

24 êtes-vous d'accord qu'à l'époque, il y avait ce nombre de mosquées à

25 Bosanski Petrovac ?

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1 R. Oui.

2 Q. Et je crois qu'avant la guerre, il y avait 12 églises orthodoxes à

3 Bosanski Petrovac. Pouvez-vous corroborer ce nombre même si ce n'est pas le

4 chiffre exact ?

5 R. Je n'ai pas connaissance de leur nombre exact. Je sais qu'il y avait

6 certaines églises orthodoxes.

7 Q. Mais savez-vous qu'il y a aujourd'hui cinq mosquées à Bosanski

8 Petrovac ?

9 R. Oui.

10 Q. Et qu'il n'y a qu'une église orthodoxe, c'est exact, n'est-ce pas ?

11 R. Dans la ville même, oui, c'est exact, et cette église était présente

12 avant la guerre.

13 Q. Et il n'y a pas d'autres églises à votre connaissance dans la

14 municipalité, n'est-ce pas ? Il y en a qu'une ?

15 R. Je dois vous informer du fait suivant : L'église existait dans le

16 village de Krnjavusa et elle était opérationnelle. Je crois qu'il essaie de

17 trouver des sponsors [sic] pour passer en revue toutes les églises, afin

18 qu'elles soient réparées.

19 Q. Monsieur Druzic, ma question concernait le fait qu'à l'époque, il y

20 avait 12 églises orthodoxes avant la guerre, et que maintenant, il n'y en a

21 plus qu'une. Quelque soit leur utilisation, qu'elles aient ou non été

22 utilisées. Est-ce bien votre compréhension ?

23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Dans la ville ?

24 Mme BARUCH : [interprétation] Non dans la municipalité.

25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Dans la municipalité ?

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1 Mme BARUCH : [interprétation] Dans la municipalité.

2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Madame Sutherland.

3 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, quelle est la

4 pertinence de cette question ?

5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vois qu'il y a une pertinence. Nul

6 besoin pour vous de revenir sur cela, mais il y a une pertinence. Monsieur

7 le Témoin, veuillez essayer de répondre à cette question, je vous prie pour

8 autant que vous puissiez y répondre.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans la ville, il y a une église et cette

10 église, était là avant la guerre. Il y a les autres églises qui se

11 trouvaient dans le village de Krnjavusa et c'est là qu'il y a eu le nombre

12 le plus important de réfugiés serbes. Et l'église a été réparée,

13 reconstruite et les services religieux sont -- existent à cet endroit-là.

14 Les services religieux ont été maintenus et je suis surpris que vous ne

15 soyez pas au courant de cela.

16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous savez, Madame Baruch, n'a pas

17 voyagé dans la région. La question qui vous a été posée, est la suivante :

18 Il y avait 12 églises orthodoxes dans la municipalité avant la guerre,

19 maintenant, il n'y a plus qu'une seule église orthodoxe. Quelle est votre

20 réponse ? Est-ce que ceci est exact ou non ? Le savez-vous ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Et bien, je ne me promenais pas beaucoup dans

22 les différents villages. Et dans la ville, je passais devant l'église tous

23 les jours et dans le village de Krnjavusa, là, j'ai vu que l'église avait

24 été réparée et qu'elle peut être utilisée normalement.

25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Et qu'en est-il des autres églises?

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1 Vous ne le savez pas ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Et bien, je ne me promenais dans les

3 différents villages.

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Baruch, vous avez la parole.

5 Mme BARUCH : [interprétation] Oui.

6 Q. Vous êtes-vous jamais battu aux côtés des forces du BIH dans la

7 municipalité de Petrovac ?

8 R. Comment aurais-je pu faire cela, alors que j'étais placé en détention à

9 partir du 15 juin 1992.

10 Q. Je comprends votre réponse comme étant une réponse négative. Savez-vous

11 que 10 % de la municipalité -- de la population de la municipalité

12 Petrovac, s'est battue dans les rangs de l'armée de la BIH. Saviez-vous

13 cela ?

14 R. Non. Je ne le savais pas.

15 Q. La question que -- je vous pose cette question, parce que vous êtes

16 très au courant des faits et gestes de la communauté musulmane de Petrovac.

17 Savez-vous que 10 % de la communauté musulmane, s'était battue dans les

18 rangs de l'armée BIH ? Je n'ai pas eu la réponse ?

19 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]

20 Mme BARUCH : [interprétation] Très bien.

21 Q. Savez-vous si le SDA a continué à organiser des réunions après le

22 printemps de l'année 1992 ?

23 R. Non.

24 Q. Cette personne au nom de Kecman, dont vous avez entendu le discours

25 politique lors d'un rassemblement politique, à votre avis, était-ce le plus

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1 grand agitateur qui semait la discorde dans la région de Petrovac ?

2 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, cette question a

3 déjà été posée par Me Cunningham, à la page 17834 [sic], du compte rendu.

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je ne peux pas confirmer cela.

5 L'INTERPRÈTE : Si Monsieur le Président, pourrait bien mettre son micro,

6 nous ne l'entendons pas.

7 Mme BARUCH : [interprétation] Je pense qu'il a parlé du discours de M.

8 Kecman et on a entendu dire que c'était -- il incitait à la discorde et

9 c'était le plus grand agitateur dans la municipalité de Petrovac en 1992,

10 est-ce exact ?

11 L'INTERPRÈTE : Votre microphone, Monsieur le Président, s'il vous plaît. On

12 ne vous entend pas du tout.

13 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]

14 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Il s'agit de la date du 2 juin, Monsieur

15 le Président.

16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Le 6 juin ?

17 Mme SUTHERLAND : [interprétation] Non le 2 juin. La question portait sur

18 les remarques faites par M. Kecman. Cela semblait insulter -- constituait

19 une insulte, une menace à l'encontre de toute personne bosnienne, c'est ce

20 qu'a répondu le témoin.

21 Mme BARUCH : [interprétation] Je vais expliquer un petit peu, Monsieur le

22 Président, Mesdames les Juges. Il ne s'agit pas en fait de l'essentiel à ma

23 question ici. La question que je pose est M. Kecman a-t-il été à l'origine

24 de cette discorde dans la région de Petrovac.

25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je n'ai pas la date du 2 juin. Je n'ai

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1 pas le compte rendu du 2 juin. Il doit s'agir d'une audience qui s'est

2 tenue dans un autre prétoire.

3 Mme BARUCH : [interprétation]

4 Q. Avant votre incarcération, êtes-vous d'accord pour dire que M. Kecman,

5 était le plus grand incitateur à la discorde dans la région ?

6 R. Non. Il y avait d'autres choses qui s'étaient produites à ce moment-là.

7 Ce que Kecman a dit, il a dit ça lors d'un rassemblement politique,

8 lorsqu'il y avait des personnes qui venaient de Stara Basala [phon] de

9 Belgrade. Mais en 1992, les choses battaient leur train déjà et moi j'étais

10 détenu le 15 juin 1992 et bon nombre de choses se sont produites à ce

11 moment-là et même avant cette date, avant le 15 juin.

12 Q. Vous avez évoqué les stations radio dans votre témoignage antérieur.

13 Autrement dit, pouvez-vous recevoir des programmes radio à l'extérieur du

14 territoire de la Bosnie-Herzégovine. Autrement dit, en dehors de la région

15 de Petrovac, les programmes étaient-ils diffusés ?

16 R. Et bien, je ne regardais pas la télévision. Je n'écoutais pas

17 énormément la radio. Il est vrai que j'écoutais davantage la radio parce

18 que là j'écoutais radio Petrovac. Lorsqu'il faut parler de Bosanski et

19 Milan Latinovic était le directeur des programmes et il était professeur à

20 l'école élémentaire où j'étais allé moi-même. Et c'est lui qui a fait

21 démarrer cette haine ethnique contre les Bosniens. C'est eux qui ont

22 commencé à diffuser ces chants nationalistes sur les ondes. Et il a pensé

23 très clairement à ce moment-là qu'un mal très profond allait s'installer.

24 Q. Vous avez dit que Kecman et Latinovic incitaient les gens à la haine.

25 La question que je vous pose par rapport à ces programmes radio, les

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1 personnes à Petrovac, pouvaient-elles recevoir des émissions qui venaient

2 de Bihac, par exemple ?

3 R. Non.

4 Q. Et qu'en est-il de d'autres régions de la Croatie ? Pouvaient-ils

5 recevoir des émissions qui venaient de Croatie ?

6 R. Je viens de vous dire -- je viens de vous donner ma réponse. Je viens

7 de vous dire que j'écoutais rarement la radio parce que je travaillais et

8 je me déplaçais beaucoup.

9 Q. Très bien. Peut-être qu'à ce moment, il y a une confusion. Je crois que

10 vous ne travailliez plus depuis le mois de mars 1992, mais encore une fois,

11 la raison pour laquelle je vous pose cette questions, Monsieur Druzic,

12 c'est que j'essaie de comprendre si, comme aujourd'hui, je peux recevoir

13 une émission FM sur ondes moyennes ou ondes courtes alors que je suis au

14 Pays-bas, et je reçois une émission qui est diffusée en Grande-Bretagne. La

15 question que je vous pose, si des gens en Petrovac pouvaient recevoir les

16 émissions qui venaient d'un autre territoire. Et je crois que vous avez

17 répondu en disant que vous n'écoutiez jamais de telles émissions à la

18 radio.

19 R. Je vais vous expliquer comment les choses se passaient. Pendant très

20 longtemps, nous avons pu écouter les programmes sur l'ensemble de la

21 Bosnie-Herzégovine. Ensuite, les émetteurs ont été détruits et nous avons

22 dû écouter la télévision et la radio diffusées par Banja Luka. Et pour ce

23 qui est des émetteurs ou les programmes relayés par les émetteurs, on ne

24 pouvait entendre que les radios couvertes par Banja Luka parce que la

25 plupart des émetteurs avaient été détruits.

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1 Q. Autrement dit, dans votre témoignage, vous dites que parce que les

2 émetteurs étaient dirigés dans une seule direction, vous ne pouviez

3 recevoir que les émissions de la télévision. Ce qui avait une incidence sur

4 les ondes radio, comme les ondes courtes ou les ondes longues ? Est-ce cela

5 l'essentiel -- ce que vous dites pour l'essentiel dans votre témoignage ou

6 est-ce que simplement vous n'écoutiez pas la radio du tout ?

7 R. Et bien, écoutez, je ne cesse de vous le dire, je n'écoutais pas la

8 radio beaucoup et j'ai regardé rarement la télévision.

9 Q. Est-ce que, après avoir quitté l'ex-Yougoslavie, avez-vous remis de

10 l'argent ou des renseignements concernant la situation en Petrovac à

11 quiconque que vous estimiez être en rapport ou un partisan du SDA ou de

12 l'armée de Bosnie -- un sympathisant de l'armée de Bosnie ?

13 R. Je n'ai pas très bien compris votre question.

14 Q. Très bien.

15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je le comprends fort bien. Je crois

16 qu'il vaut mieux que vous sépariez votre question en deux parce que donner

17 de l'argent ou des renseignements, je crois, prête un petit peu à

18 confusion.

19 Mme BARUCH : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, de m'avoir

20 signalé cela.

21 Q. Alors, je crois que certains réfugiés ont réussi à collecter de

22 l'argent parce que c'étaient des sympathisants de la cause bosnienne,

23 lorsqu'ils ont quitté le territoire de l'ex-Yougoslavie. Avez-vous

24 participé à cette collecte de fonds.

25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Encore une fois, quand vous dites,

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1 participé à la collecte de fonds, on entend que quelqu'un qui a remis de

2 l'argent.

3 Mme BARUCH : [interprétation] Il s'agit de la collecte de fonds.

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Avez-vous collecté des fonds et avez-

5 vous collecté des fonds auprès des Bosniens pour servir la cause du SDS ou

6 de l'armée de Bosnie ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr, car lorsque j'ai été relâché, la

8 guerre en Bosnie-Herzégovine avait éclatée, bien évidemment, les Musulmans

9 et les Bosniens se retrouvaient dans les enclaves où ils ne retrouvaient

10 pas grand-chose -- ils ne recevaient pas grand-chose. Car c'était tout à

11 fait naturel, pas seulement dans l'endroit où je me trouvais en Allemagne,

12 mais dans le monde entier, il s'était formé des groupes de soutien qui

13 assuraient la collecte de fonds pour porter aide et assistance aux

14 personnes qui se trouvaient en Bosnie-Herzégovine.

15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Souhaitez-vous poser votre question sur

16 les renseignements fournis ?

17 Mme BARUCH : [interprétation] Oui, tout à fait.

18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Procédez.

19 Mme BARUCH : [interprétation]

20 Q. Pour ce qui est des renseignements que vous avez peut-être fournis eu

21 égard à l'endroit où vous avez grandi, Bosanski Petrovac, avez-vous

22 également donné des renseignements sur la région aux forces de Bosnie une

23 fois que vous aviez quitté le territoire de l'ex-Yougoslavie ?

24 R. Et bien, ma famille, pour la plupart, se trouvait à Bihac. Et entre

25 1992 et 1995, comme vous savez, quels types de communication nous avions

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1 avec Bihac, je -- de quel contact parlons-nous ? C'était quasiment nul.

2 Néanmoins, quelquefois on envoyait quelque chose à un membre de sa famille

3 ou quelqu'un qui vivait dans la région. Quelques fois, on réussissait à

4 envoyer quelque chose.

5 Q. Je parle de renseignements qui auraient pu être utiles aux forces

6 bosniaques. Avez-vous pu remettre des renseignements à l'armée sur

7 Petrovac ? Autrement dit, les personnes qui auraient pu utiliser ces

8 renseignements pour des raisons tactiques ?

9 R. Je ne vois pas quel type de renseignements j'aurais pu leur fournir

10 étant donné que je ne, moi-même je n'étais pas au sein de l'armée de Bosnie

11 et puis en 1993 j'ai été transféré par le HCR en Suisse et ensuite, en

12 Allemagne.

13 Q. Bien sûr, on ne conteste pas ceci, mais vous avez été élevé à Bosanski

14 Petrovac, vous avez grandi dans la région, vous connaissez bien la

15 disposition de la région et vous saviez peut-être où se trouvaient les

16 réservistes. Vous connaissiez peut-être les camps d'entraînement de ces

17 réservistes. Vous connaissez peut-être les -- la manière dont le

18 gouvernement était organisé. Vous connaissiez peut-être l'emplacement du

19 bureau municipal. Peut-être que vous auriez pu communiquer ce type de

20 renseignements ou en tout cas des renseignements similaires à des gens qui

21 auraient pu utiliser ce type de renseignements pour des raisons tactiques.

22 En tout cas, cela aurait pu être utilisé par l'armée dans ce sens.

23 R. Et bien, écoutez, à ce moment-là, nous étions en guerre, et les gens de

24 Petrovac étaient déjà à Bihac et à Travnik où ils avaient fuis le 24

25 septembre 1992. Il y avait les personnes qui avaient rejoint l'armée de

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1 Bihac déjà, et je ne vois pourquoi j'aurais eu besoin de leur remettre

2 quelque renseignement que ce soit étant donné qu'il y avait des habitants

3 de Petrovac qui avaient déjà rejoint l'armée.

4 Q. Je crois comprendre que votre réponse est la suivante. Vous n'avez pas

5 remis de tels renseignements. Donc, ceci fait partie du témoignage que vous

6 fait sous serment ?

7 R. Je n'avais pas besoin de faire cela puisqu'il y avait des gens qui

8 avaient rejoint+ l'armée.

9 Q. Vous savez qu'il y a beaucoup d'articles de journaux et d'articles sur

10 Internet à propos de la guerre. Et certains articles disent que certaines

11 personnes ont -- de Bihac ont été libérées près de la ville de Petrovac.

12 Parmi elles, il y avait 20 Bosniaques de Petrovac qui avaient -- qui

13 faisaient partie du 3e et 7e Corps, êtes-vous au courant de cela ?

14 Mme KORNER : [interprétation] Je crois que bon je comprends bien qu'on ait

15 envie de poser ce genre de questions. Mais nous avons un problème de

16 calendrier. Quelle est la pertinence de l'allusion aux évènements de 1995

17 par rapport à ce qui s'est passé en 1992 ?

18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Quelle est la pertinence, Madame

19 Baruch ?

20 Mme BARUCH : [interprétation] Parlant de l'année 1995, Monsieur le

21 Président, je vais vous le dire --

22 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Si vous parlez de la libération de

23 Bosanski Petrovac, ceci ne s'est pas produit avant 1995.

24 Mme BARUCH : [interprétation]

25 Q. N'est-ce pas, Monsieur Druzic ?

Page 19382

1 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien sur.

2 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

3 Mme BARUCH : [interprétation] J'ai indiqué qu'il y avait des articles sur

4 Internet à propos de 1992.

5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Cunningham, je crois qu'il lui

6 restait 5 à dix minutes, pour son contre-interrogatoire, malheureusement

7 les choses se sont passées de façon inhabituelle ce jour-là. Et nous avons

8 le témoin suivant que nous devons entendre aujourd'hui et je ne --

9 Mme BARUCH : [interprétation] Je suis d'accord.

10 J'en ai terminé avec les questions que je dois poser à ce témoin.

11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie. Monsieur Druzic, je

12 vous remercie d'avoir été patient et d'avoir coopéré avec nous et d'avoir

13 accepté de revenir ici. Je sais que c'était -- cela était difficile pour

14 vous. Je sais que les choses se sont un petit peu mal passées la dernière

15 fois et vous avez dû revenir de façon à ce que vous puissiez -- nous

16 puissions terminer le contre-interrogatoire. Je vous remercie par

17 conséquent, de la part de nous tous dans ce prétoire et je vous souhaite un

18 bon voyage et Madame l'Huissière, va vous raccompagner.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

20 [Le témoin se retire]

21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je crois que le témoin suivant n'aura

22 pas de mesures de protection.

23 Mme KORNER : [interprétation] Le témoin suivant va s'exprimer en anglais.

24 Et son anglais est excellent. Et bien évidemment si certains termes lui

25 posent problème, à ce moment-là il demandera à les faire traduire mais de

Page 19383

1 façon générale cela ne devrait pas être un problème.

2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui ceci facilite les choses.

3 Mme BARUCH : [interprétation] Vous avez dit oui, Mme Korner, vous avez dit

4 qu'il n'était pas protégé.

5 Mme KORNER : [interprétation] Oui, ce n'est pas un témoin à protéger. Je

6 pensais que c'était Me Ackerman qui allait contre-interroger ce témoin.

7 Mme BARUCH : [interprétation] Si c'est M. Pasic, c'est moi.

8 Mme KORNER : [interprétation] M. Pasic.

9 Mme BARUCH : [interprétation] M. Pasic, c'est moi.

10 Mme KORNER : [interprétation] C'est vous.

11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Quand revient M. Cunningham, -- va-t-il

12 revenir ?

13 Mme BARUCH : [interprétation] Lundi.

14 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]

15 Mme BARUCH : [interprétation] Et Me Ackerman va entendre le témoin.

16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je veux simplement m'assurer que ces

17 deux conseils de la Défense se portent bien.

18 Qui va interroger ce témoin, Madame Korner ?

19 Mme KORNER : [interprétation] C'est moi.

20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Faites entrer le témoin suivant, s'il

21 vous plaît.

22 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour, Monsieur Pasic. Je souhaite

24 vous accueillir dans ce Tribunal. Avant de témoigner, je vous demande de

25 lire la déclaration solennelle ce qui correspond à [imperceptible] en vertu

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1 de quoi vous devez dire la vérité. Le texte est sous vos yeux sur un

2 feuillet que Madame l'Huissière va vous remettre. Je vous demande de dire

3 cette déclaration à voix haute, s'il vous plaît. Et cela constituera votre

4 déclaration solennelle.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

6 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

7 LE TÉMOIN : ELVEDIN PASIC.

8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez vous

9 asseoir. Et je crois que vous avez demandé à témoigner en anglais.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ce qui facilite la tâche pour tout à

12 chacun ici dans le prétoire. Si à aucun moment vous avez une difficulté

13 quelconque à propos d'un terme, à ce moment-là, bien sûr vous pouvez nous

14 donner le terme dans votre propre langue. Il y a des interprètes qui

15 suivent votre déclaration par conséquent si un terme vous pose ce problème

16 vous pouvez le dire dans votre langue et il sera traduit immédiatement en

17 anglais et en français. Mme Korner va vous poser un certain nombre de

18 questions. Et en premier lieu, il serait suivi par Me Baruch qui représente

19 ici M. Brdjanin, l'accusé ici dans le cadre de cette affaire. Madame Korner

20 vous avez la parole.

21 Interrogatoire principal par Mme Korner. :

22 Q. [interprétation] Monsieur Pasic est-ce que vous vous appelez bien

23 Elvedin Pasic ?

24 R. Oui, Madame.

25 Q. J'ai oublié de vous prévenir hier que nous parlons tous les deux

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1 l'anglais, c'est important de faire une pause entre les questions et les

2 réponses, parce que sinon les interprètes ont du mal à suivre.

3 Monsieur Pasic, êtes-vous né le 3 juin 1978, à Hrvacani, à Kotor Varos ?

4 R. Oui, Madame.

5 Q. Donc pour la période qui nous concerne ici à savoir les évènements qui

6 se sont produits entre le mois de juin et novembre 1992, à ce moment-là

7 vous étiez -- vous aviez à peu près 13 ans, ou 14 ans, est-ce exact ?

8 R. Oui, c'est exact.

9 Q. Je souhaite tout d'abord vous demander de regarder une carte s'il vous

10 plaît, une carte de Kotor Varos, qui correspond à la pièce P2120. Mme

11 Korner veuillez bien s'il vous plaît mettre cette carte sur le

12 rétroprojecteur ? Si vous voulez bien mettre -- déplacer cette carte un

13 petit peu s'il vous plaît. Je crois que nous voyons bien cette carte. On

14 peut voir Kotor Varos et à droite ici Hrvacani, qui se trouve à droite de

15 Kotor Varos quand on regarde la ville, et le village qui se trouve entre

16 les deux est Cirkin Brdo ?

17 R. Oui.

18 Q. Quelle distance y a-t-il environ entre ce village et Kotor Varos ?

19 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Un moment s'il vous plaît, Madame

20 l'Huissière. Je crois qu'il faut soit demander au témoin de se rapprocher

21 du micro ou alors de déplacer le micro.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vois Hrvacani, je vois bien sur la carte.

23 Mme KORNER : [interprétation]

24 Q. Et quelle distance y a-t-il environ entre ce village et le centre Kotor

25 Varos ?

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1 R. 13 kilomètres environ.

2 Q. Dans votre village, combien de foyers y avait-il ?

3 R. Il y avait une centaine de maisons environ.

4 Q. Bien qu'il ne soit pas indiqué sur la carte, y avait-il un village du

5 nom de Tepici qui se trouvait à proximité de votre village ?

6 R. Oui, Madame.

7 Q. Hrvacani, tel que nous le voyons sur la carte ici, était-ce un village

8 musulman ?

9 R. C'est exact Madame.

10 Q. Et par conséquent, j'aurais dû vous poser la question plus tôt, il en

11 découlait que vous étiez vous-mêmes de nationalité musulmane, que vous êtes

12 de nationalité musulmane ?

13 R. Oui, c'est exact.

14 Q. Et qu'en est-il de Tepici ? Quelle était la nationalité des habitants

15 qui restaient à Tepici ?

16 R. 100 % de Serbes.

17 Q. Y avait-il un autre village qui s'appelait Savici ?

18 R. Oui, Madame.

19 Q. Et où se trouvait ce village par rapport au vôtre ?

20 R. A l'est de Hrvacani qui se trouve ici sur la carte et qui doit se

21 situer à droite ici.

22 Q. Et qu'en est-il de la nationalité des habitants de ce village ?

23 R. Ils étaient Serbes à 100 % également.

24 Q. Par conséquent, vous aviez un village serbe à l'est, et où se trouvait

25 Tepici par rapport à cela ?

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1 R. Au nord.

2 Q. Et ces villages étaient -- y avaient-ils la même -- y avait-il le même

3 nombre d'habitants ?

4 R. Tepici était beaucoup plus petit et Savici n'était pas aussi important

5 que Hrvacani mais plus important que Tepici --

6 Q. Je crois que nous n'avons plus besoin de regarder la carte pour

7 l'instant. Il y a deux autres endroits que nous allons devoir identifier

8 sur la carte. Tout d'abord, Dabovci. Dabovci, s'agit-il d'un village que

9 vous avez -- que vous connaissiez, que vous avez appris à connaître ?

10 R. C'est exact, Madame.

11 Q. Aviez-vous des parents ou de la famille qui habitaient dans ce

12 village ?

13 R. Oui, ma sœur y habitait. Elle avait épousé son mari.

14 Q. Vrbanjci également et Vecici qui juste en dessous --

15 R. Oui, Madame.

16 Q. Vous pouvez maintenant enlever la carte, s'il vous plaît.

17 L'école que vous avez fréquentée, pourriez-vous nous dire quelle était

18 cette école ?

19 R. A cinq kilomètres de Hrvacani à Vrbanjci.

20 Q. S'agissait-il d'une école mixte que fréquentaient aussi bien des élèves

21 musulmans et serbes ou peut-être même croates ?

22 R. Oui, c'est exact. Il s'agissait d'une école mixte, avec des élèves

23 croates, serbes et musulmans.

24 Q. Aviez-vous des amis appartenant à tous les groupes ethniques ?

25 R. Oui, Madame.

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1 Q. Je pense qu'en ce qui concernait votre famille, avant le début de la

2 guerre, votre père travaillait à Sarajevo, n'est-ce pas ?

3 R. Oui, c'est exact.

4 Q. Mais, il venait vous voir tous les week-ends ?

5 R. Oui, c'est exact, Madame.

6 Q. Aviez-vous un frère aîné, Ahmedin ?

7 R. Oui.

8 Q. Et une sœur, la sœur dont vous venez de parler qui était mariée et qui

9 habitait Dabovci, s'appelait-elle Hamida ?

10 R. C'est exact.

11 Q. Pourriez-vous me dire quel était son nom de femme mariée à l'époque ?

12 R. Je ne m'en souviens pas, je ne me souviens pas du nom de famille de son

13 mari.

14 Q. Très bien. Puisque vous allez nous dire que son mari s'est fait tuer et

15 que depuis, elle s'est remariée. Vous allez nous le dire, n'est-ce pas ?

16 R. Oui, oui. C'est exact, Madame.

17 Q. Avez-vous remarqué un changement au niveau de la situation générale

18 dans votre région un peu près au mois de mai 1992 ?

19 R. Oui, Madame.

20 Q. Pourriez-vous nous décrire quel est cet événement qui vous a le plus

21 frappé au début ?

22 R. Oui, bien sûr. J'ai été à la septième, huitième classe de l'école

23 élémentaire. A la fin de l'année scolaire, l'armée est venue de Kotor Varos

24 en direction de Doboj, et il s'agissait des troupes de la JNA, c'était sûr.

25 Et je me souviens qu'un jour alors que je me tenais debout près dans la

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1 route en attendant le bus de l'école, j'ai vu un convoi d'à peu près une

2 trentaine de véhicules et là, un soldat, nous a fait un signe. Enfin le

3 signe des trois doigts en l'air et c'est-là que j'ai demandé, enfin, je ne

4 comprenais pas donc j'ai demandé à mes profs ce que cela voulait dire. Et

5 ils nous ont dit qu'il ne fallait pas s'inquiéter, que c'était juste des

6 exercices militaires, du mouvement de troupes.

7 Q. Donc, là, il s'agissait des membres de la JNA. Comment le saviez-vous ?

8 R. Et bien à cause de leurs armes et à cause de leurs véhicules qui

9 portaient des insignes de la JNA. Et puis, ils portaient les uniformes de

10 la JNA, et d'ailleurs avec des insignes de la JNA sur les uniformes. Et

11 puis il y en avait aussi qui avaient des uniformes de camouflages.

12 Q. Et qu'en est-il de vos voisins serbes ? Avez-vous pu remarquer quoi que

13 ce soit de différent dans leurs tenues vestimentaires ?

14 R. Oui. La première fois que je l'ai remarqué -- que j'ai remarqué ces

15 changements dans leurs comportements et dans leurs tenues vestimentaires.

16 Et bien, c'était le 2e jour de Bajram, et nous avons remarqué que les

17 Serbes de Tepici et Savici sont en train de creuser des tranchées au niveau

18 de Novakovo Brdo. Et nous savions que là-bas, il y avait deux chars dont

19 les canons étaient dirigés vers nos villages.

20 Q. Nous allons parlé de ce qui s'est passé au tour des fêtes de Bajram.

21 Donc, vous dites avoir vu des Serbes en train de creuser des tranchées ou

22 bien vous avez vu ces deux chars. Vous avez décrit aussi ce convoi que vous

23 avez vu, le convoi de la JNA. Y avait-il qui que ce soit, à part les

24 membres de la JNA, qui arborait de tels uniformes ?

25 R. Je ne m'en souviens pas, Madame, tout ce que je sais, c'est qu'il y

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1 avait ces uniformes de la JNA et les uniformes de camouflage.

2 Q. Très bien. Nous allons parler de Bajram. Donc, le deuxième jour de

3 Bajram, nous avons entendu déjà parler de fête religieuse et il y a déjà

4 une déposition qui nous a indiquée que le deuxième jour de Bajram tombait

5 le 11 juin, dans cette année-là. Donc, vous nous dites que vous avez pu

6 remarquer quelqu'un en train de creuser des tranchées, des Serbes de Tepici

7 et Savici, donc le deuxième jour de Bajrem. Et vous avez vu aussi deux

8 chars. Vous les avez vus où exactement ?

9 R. Et bien, au-dessus de Dabovci c'est un lieu dit pour Novakovo Brdo au

10 sud de Hrvacani -- en face de Hrvacani. Donc on pouvait les voir clairement

11 et ma maison était au sud ouest de Hrvacani, fait face au sud ouest, en

12 face de Novakovo Brdo. Donc on pouvait clairement voir Novakovo Brdo de

13 chez nous.

14 Q. Est-ce que qui que ce soit de votre village est allé voir ce qui se

15 passait là-bas après avoir vu ces chars ?

16 R. Oui, Madame.

17 Q. Et qui était-ce ?

18 R. Et bien, c'était les deux personnes les plus riches, les plus connues

19 de Hrvacani. Il s'agissait -- enfin après avoir vu ces mouvements, ils

20 voulaient parler avec un de nos voisins de Savici et Tepici. Et donc, ils

21 sont allés les voir au milieu de l'école pour leur demander. L'école qui se

22 trouve entre Tepici et Savici. Ils leur ont demandé mais pourquoi tout cela

23 se passe et qu'est-ce que c'est tout ça ? Et ils lui ont répondu -- leur

24 ont répondu de ne pas s'inquiéter, qu'il s'agissait juste des manœuvres de

25 la JNA.

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1 Q. Est-ce qu'il y avait des Serbes qui sont arrivés dans votre village ?

2 R. Oui, Madame.

3 Q. Et ils sont arrivés comment -- ils sont venus comment ?

4 R. Un jour, nous étions auprès -- au milieu du village, dans un endroit où

5 nous nous rencontrons d'habitude -- pour nous rencontrer pour socialiser.

6 Et à ce moment-là des soldats très bien armés sont entrés dans la ville, du

7 côté sud. Ils étaient armés, ils portaient des uniformes de la JNA, des

8 uniformes de camouflage, des armes automatiques. Et donc ils sont passés

9 par là en regardant la maison. Et donc, en s'approchant de nous, ils nous

10 ont salués et ils n'ont rien dit d'autre.

11 Q. Est-ce que vous avez pu reconnaître qui que ce soit d'entre eux ?

12 R. Oui, j'en ai reconnu un, Boro Tepic, mais personne d'autre.

13 Q. Et il venait d'où, celui-là ?

14 R. De Tepici je pense, mais ils sont arrivés ce jour-là de Vrbanjci, en

15 marchant -- à pieds.

16 Q. Et quel effet cela a eu sur les villageois ?

17 R. Et bien, cela les a vraiment marqués car à ce moment-là, nous savions

18 que quelque chose allait se passer. Et qu'en définitive, nous allions avoir

19 la guerre.

20 Q. Pourquoi vous avez dit cela ? Qu'est-ce qu'il y avait de si étrange

21 dans le passage de ces soldats ?

22 R. Nous avons entendu dire que ces cinq soldats avaient parié avec

23 d'autres soldats comme quoi ils allaient entrer dans Hrvacani, traverser

24 les villages, complètement armés, équipés et veillaient et comme ça de

25 signes qui peuvent annoncer la guerre.

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1 Q. Après avoir vu ces soldats traverser votre village, après avoir vu ces

2 chars, les gens en train de creuser des tranchées, qu'est-ce que les autres

3 villageois ont décidé de faire suite à tout cela ?

4 R. Et bien, nous avons compris qu'il y avait -- qu'on ne pouvait faire

5 rien d'autre que de se préparer. Nous avons essayé de contacter nos

6 familles. Par exemple, moi, j'ai essayé de rentrer en contact avec ma sœur,

7 mais le téléphone ne marchait pas. On n'arrivait pas à avoir les numéros

8 que l'on voulait. Plus tard, il n'y avait plus de lignes téléphoniques du

9 tout, et donc en fait, on ne faisait rien d'autre que de prier le bon Dieu

10 et attendre pour voir ce qui allait se passer.

11 Q. Est-ce que vous avez participé à une quelconque réunion où on aurait

12 discuté de la défense de Hrvacani ?

13 R. Je ne suis pas au courant d'une quelconque réunion, mais je peux vous

14 dire que, pendant cette fête religieuse, et bien notre hodza va de maison

15 en maison pour parler, pour manger quelque chose, pour fêter, et la hodza,

16 le deuxième jour de Bajram, est venu chez nous. Notre maison était assez

17 grande et beaucoup de gens sont venus, mais il n'y avait que des hommes qui

18 sont venus et ils étaient assis et c'était une tradition, ils étaient en

19 train de discuter. Et je me souviens que j'étais dans une pièce et on a

20 parlé de nos voisins, du fait qu'ils étaient en train de creuser des

21 tranchées. Et à ce moment-là, mon père m'a demandé de quitter la pièce.

22 Q. Est-ce que vous êtes au courant de l'existence d'un quelconque ordre

23 transmis par les ondes de la radio ou bien par des policiers qui seraient

24 venus directement dans le village, demandant que les gens de votre village

25 remettent leurs fusils de chasse ?

Page 19393

1 R. Non, Madame.

2 Q. Votre frère, Ahmedin, où était-il pendant cette période ?

3 R. Pendant cette période-là, il était élève -- étudiant à l'académie

4 militaire de Belgrade. Et la nuit où il est venu, nous étions vraiment

5 surpris parce qu'il est venu -- il est revenu de Belgrade tout simplement,

6 au milieu de cette confusion.

7 Q. A présent, je voudrais parler de la deuxième -- de la nuit, de la

8 deuxième de Bajram, à peu près le 13 juin. Est-ce que vous avez entendu

9 quoi que ce soit venir de la direction de Tepici ?

10 R. Oui, Madame. Nous avons entendu des soldats parler par les haut-

11 parleurs, les mégaphones et [imperceptible] autre chose, toujours est-il

12 que nous pouvions les entendre dire, "Joyeuses Bajram, balija, nous allons

13 venir bientôt. Muho et Murat, préparez du café et des baklava, nous allons

14 venir bientôt."

15 Q. Donc, ils disaient ça par -- en utilisant des haut-parleurs, n'est-ce

16 pas ?

17 R. Oui.

18 Q. Est-ce qu'ils ont nommé quelqu'un de particulier ? Est-ce qu'ils ont

19 apostrophé quelqu'un de particulier de votre village ?

20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Il vient --

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je viens de vous le dire, Madame, Muho, Murat.

22 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Effectivement, cela ne figure pas dans

23 le compte rendu d'audience, mais il a effectivement mentionné les deux

24 noms, Murat et Muho, qui figuraient dans sa déclaration préalable.

25 Mme KORNER : [interprétation] Oui, c'est exact.

Page 19394

1 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je pense qu'il s'agit-là de deux

2 personnes très bien connues et assez riches du village ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Et bien, nous allons prononcer ces

5 noms. Il s'agit de Murat et Muho Dugonjic, comme cela -- nous allons

6 retrouver cela dans le compte rendu d'audience.

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.

8 Mme KORNER : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

9 Q. Pendant combien de temps ont-ils parlé dans les mégaphones ?

10 R. Cela a duré 15 ou 30 minutes.

11 Q. Que s'est-il passé ensuite ?

12 R. Et bien, ils ont commencé à bombarder, à pilonner.

13 Q. Et avant que cela ne commence, ont-ils, à l'aide des mégaphones, averti

14 le village qu'ils allaient faire -- les villageois, qu'ils allaient faire

15 l'objet d'un pilonnage ?

16 R. Je ne m'en souviens pas, Madame.

17 Q. Est-ce que vous souvenez s'il y avait eu un ultimatum du style, rendez-

18 vous ou bien on va pilonner votre village ?

19 R. Non, non, Madame.

20 Q. Et dans le village, y avait-il des femmes, des enfants, enfin des

21 jeunes comme vous-même ?

22 R. Oui, Madame.

23 Q. Pour cette fête religieuse, était-il habituel que les familles se

24 rassemblent ?

25 R. Oui, Madame.

Page 19395

1 Q. Et donc, il y avait des gens qui n'habitaient dans le village

2 d'habitude et qui revenaient au village pour cette fête-là ?

3 R. Oui, c'est exact.

4 Q. Que s'est-il passé au moment où le pilonnage avait commencé ?

5 R. J'étais dans une maison -- dans la maison de mon cousin, au sous-sol.

6 C'est une maison qui se trouve à la gauche de la mienne, et c'est à ce

7 moment-là que le pilonnage a commencé. Je ne savais pas à l'époque où se

8 trouvaient ni mon père ni mon frère, mais je savais que toute cette nuit

9 était terrible. Pendant toute la nuit, il y avait du pilonnage, mais tôt

10 dans la matinée, il est venu frapper à la fenêtre pour nous dire de partir,

11 car les autres maisons du voisinage étaient en train de brûler à cause du

12 pilonnage Et nous étions les seuls à rester encore dans ce village de

13 Hrvacani.

14 Q. Et donc ils vous ont dit à ce moment-là que tout le monde était parti

15 déjà ?

16 R. Oui, c'est exact.

17 Q. Et vous et votre frère ainsi que votre mère, êtes-vous partis à ce

18 moment-là ? Non, vous avez dit que vous étiez chez votre cousin donc vous

19 et votre cousin peut-être ?

20 R. Oui, c'est exact, Madame.

21 Q. Au moment où vous partez, est-ce que le village a été déserté, vide ?

22 R. Je dirais que 98 % des personnes étaient parties. Il ne restait que

23 huit personnes à Hrvacani. Et je me souviens Ibro Dugonjic, qui était un

24 homme de foi, et bien, il est resté derrière. Il ne voulait pas quitter sa

25 maison. Mais 98 % des gens sont partis pour Plitska.

Page 19396

1 Q. A quelle distance se trouvait Plitska ?

2 R. Je dirais environ deux kilomètres de chez nous.

3 Q. Quelle était l'appartenance ethnique des habitants de Plitska ?

4 R. A 100 % Croates.

5 Q. Donc, vous quittez votre village. Est-ce que pendant que vous partez,

6 au moment où vous partez, le pilonnage s'est poursuit ?

7 R. Oui.

8 Q. Il y avait des tirs aussi ?

9 R. Oui.

10 Q. De quelle direction ? Les tirs venaient de quelle direction ?

11 R. Au moment où nous nous apprêtions à quitter le village, nous étions

12 quelque part entre Plitska et Hrvacani. Nous avions passé un terrain vague

13 et là nous avons entendu des tirs embusqués, des tirs venant de Novakovo

14 Brdo et de Tepici, sur nous -- tirés sur nous. Et donc, nous devions

15 marcher à plat ventre -- ramper jusqu'au Novakovo Brdo et Tepici pour

16 éviter d'être touchés par les tireurs embusqués.

17 Q. Très bien. Donc, vous quittez votre village. Pouvez-vous nous dire ce

18 qui se passe avec votre père et votre frère ?

19 R. Nous les avons retrouvés à mi-chemin entre Plitska et notre village.

20 Ils étaient en train de fuir avec des civils et des enfants. Mais à partir

21 du moment où nous arrivons à Plitska, et bien, ils ont disparus et je pense

22 que tous les hommes se sont rassemblés pour partir ailleurs.

23 Q. A l'époque, saviez-vous où ils partaient ?

24 R. Non, Madame.

25 Q. Donc, vous nous avez dit qu'un certain nombre de personnes sont restées

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1 derrière à Hrvacani. M. Ismet Dugonjic faisait partie de ces personnes. Il

2 s'agissait d'un homme, d'un pratiquant, un croyant, assez âgé. Avez-vous

3 appris quel était son sort plus tard ?

4 R. Mais ils se sont tous fait tuer, Madame.

5 Q. Vous l'avez appris quand ?

6 R. Trente jours plus tard, au moment où nous avons décidé de retourner

7 dans le village. Donc de Plitska et Garici, nous avons décidé de retourner

8 chez nous, même si le village était détruit, et en revenant, nous avons

9 trouvé leurs corps. Parmi d'autres, le corps d'Ibro Dugonjic et sa maison

10 étaient incendiés.

11 Q. Très bien. Je vais aller un petit peu en avant. Donc, tout d'abord,

12 vous allez à Plitska. De là, vous allez à Bilice, n'est-ce pas ?

13 R. Oui.

14 Q. Etiez-vous tous de Hrvacani ?

15 R. Il y en avait quelques-uns parmi nous qui étaient partis à Cirkino

16 Brdo, d'autres étaient partis à Plitska. Cela dépendait des familles.

17 Q. Est-ce que vous êtes tous d'abord allés à Cirkino Brdo ?

18 R. Oui.

19 Q. Etait-ce un village musulman ?

20 R. Oui à 100 % musulman.

21 Q. Est-ce que ce village a fait l'objet d'une attaque quelconque ?

22 R. Non, pas du tout. Parce qu'ils ont signé l'acte de loyauté vis-à-vis

23 des Serbes et ils se sont rendus.

24 Q. Très bien. Vous êtes resté combien de temps à Cirkino Brdo ?

25 R. Vingt jours, 30 jours, je ne me souviens plus.

Page 19398

1 Q. Qui se trouvait à cet endroit-là ? Vous, votre mère ?

2 R. Oui, et aussi mon cousin et la plupart de mes cousins.

3 Q. Pourquoi avez-vous quitté Cirkino Brdo ?

4 R. Car nous n'avions -- nous sommes partis parce que nous n'avions pas

5 suffisamment de nourriture. Et puis, nous étions 15 à vivre dans une maison

6 à Cirkino Brdo. Nous n'avions pas suffisamment d'eau, suffisamment de

7 nourriture et nous avons pris la décision de revenir -- de continuer pour

8 Plitska.

9 Q. Est-ce que les autorités ont vu un problème dans le fait que vous

10 restiez tous dans Cirkino Brdo ?

11 R. Oui, Hasan nous a donné sa maison pour que nous y habitions. Et les

12 Serbes et -- qui se trouvaient à Hrvacani et qui décidaient de tout cela

13 ont découvert qu'il y avait des civils de Hrvacani qui habitaient Cirkino

14 Brdo. Et donc ils ont dit à Hasan Vilic de nous laisser partir. Parce

15 qu'ils ont dit que -- ils lui ont dit que si jamais ils découvraient et

16 qu'il y avait encore des civils de Hrvacani qui habitaient Cirkino Brdo, et

17 bien, qu'ils allaient nous tuer. Et comme on ne voulait pas poser des

18 problèmes, et bien, nous sommes partis pour Bilice.

19 Q. Et Bilice c'était un village croate ?

20 R. Oui.

21 Q. Et comment les villageois de ce village se sont-ils préparés pour

22 affronter l'attaque ?

23 R. Je pourrais dire qu'ils étaient bien organisés. Quand nous sommes

24 arrivés à Bilice, nous avons trouvé là-bas 20 à 30 hommes très bien armés,

25 des Croates qui portaient des uniformes de camouflage. Ils étaient bien

Page 19399

1 organisés, préparés -- préparés pour la guerre.

2 Q. Est-ce qu'ils ont pris des mesures, des précautions pour empêcher les

3 Serbes à entrer dans le village ? Puis il y avait des tranchées par exemple

4 ?

5 R. Oui, oui, oui, il y avait des tranchées. Quand -- au fur et à mesure

6 que nous approchions du nord de Bilice, nous avons pu voir ces soldats en

7 train de creuser des tranchées devant leurs maisons. Et ils savaient que

8 nous étions en train de venir parce qu'ils étaient informés de cela. Et

9 donc ils sont sortis pour nous fournir de la nourriture et de l'eau.

10 Q. Et il y avait combien de personnes faisant partie de votre groupe, des

11 personnes qui sont -- qui ont quitté Cirkino Brdo pour aller dans Bilice ?

12 R. On était entre 20, 30.

13 Q. Au moment où vous y êtes arrivés, est-ce que vous y retrouvez votre

14 frère et votre père ?

15 R. Au moment où nous arrivons à Bilice, enfin un petit peu plus tard, nous

16 avons été hébergés dans des maisons croates. Et je me souviens de cette

17 nuit-là où il pleuvait. Je me souviens, et que presque tous les hommes de

18 Hrvacani étaient là, à Plitska. Mon père aussi et mon frère aussi, ils

19 étaient tous là.

20 Q. Et que s'est-il passé avec votre père et les autres hommes de

21 Hrvacani ? Est-ce qu'ils sont restés là-bas ou bien est-ce qu'ils sont

22 partis ailleurs ?

23 R. Un certain nombre d'entre eux sont restés à Bilice et d'autres sont

24 partis à Vecici.

25 Q. Et pourquoi sont-ils partis à Vecici ?

Page 19400

1 R. Pour se défendre.

2 Mme KORNER : [interprétation] Je vais passer à un autre sujet. Je pense que

3 le moment est opportun pour prendre une pause.

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien, une pause de 25 minutes à

5 présent.

6 --- L'audience est suspendue à 10 heures 28.

7 --- L'audience est reprise à 10 heures 56.

8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Madame Korner.

9 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, je suis désolé, j'ai

10 perdu, je n'ai pas fait attention. Je n'ai pas vu que l'heure est passée.

11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Aucun problème.

12 [Hors micro]

13 [Audience à huis clos partiel]

14 (Expurgé)

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25 (Expurgé)

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1 (Expurgé)

2 (Expurgé)

3 (Expurgé)

4 (Expurgé)

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6 (Expurgé)

7 (Expurgé)

8 (Expurgé)

9 (Expurgé)

10 (Expurgé)

11 [Audience publique]

12 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Mme Korner s'adressant au témoin va

13 poursuivre votre interrogatoire principal, Monsieur le Témoin.

14 Mme KORNER : [interprétation]

15 Q. Monsieur Pasic, nous avons donc parlé du moment où vous vous trouviez à

16 Bilice. Y avait-il suffisamment de nourriture pour tous pour que vous

17 puissiez rester dans cet endroit pendant un certain temps ?

18 R. Je ne sais pas. Mais ce que je peux vous dire c'est que nous partagions

19 notre nourriture avec les villageois de Bilice et en fait, il partageait

20 également la nourriture avec nous. Il y avait une espèce d'organisation qui

21 se faisait le matin, ils nous remettaient par exemple de la farine et

22 cetera.

23 Q. Mais comme vous l'avez déjà remarqué, avez-vous pris une décision de

24 revenir à Hrvacani ?

25 R. Oui, Madame.

Page 19402

1 Q. Et ce stade, qui restait dans le village ? Y avait-il encore des hommes

2 en âge militaire ?

3 R. Vous parlez de notre village, pourriez-vous répéter votre question ?

4 Q. De votre village, oui ?

5 R. De Hrvacani ? Comme je l'ai déjà fait remarqué, il y avait encore

6 certaines personnes qui étaient parties en direction de Vecici d'autres

7 avaient décidé de rester.

8 Q. Et par conséquent, quelles sont les personnes qui sont revenues ?

9 R. Uniquement les civils.

10 Q. Et par civils, vous entendez qui ?

11 R. Les femmes et les enfants.

12 Q. Vous souvenez-vous du nombre que vous étiez ?

13 R. Je dirais 30 à 50.

14 Q. Etes-vous revenus dans votre village en passant par Plitska le lieu où

15 vous étiez rendus auparavant ?

16 R. Oui.

17 Q. Et alors que vous vous rendiez en direction de Hrvacani, avez-vous vu

18 des Serbes ?

19 R. Oui, Madame. Nous avons été arrêtés par deux soldats qui se trouvaient

20 à proximité de mon village, nous les avons dépassées, ils étaient armés,

21 ils portaient des uniformes de camouflage. Et l'un d'entre eux étaient

22 blessés mais il tenait son estomac comme-ci, il semblait souffrir, ils nous

23 ont arrêté et nous ont demandé où nous allions, nous le groupe de balija.

24 Et à ce moment-là, la réponse que nous avons dit c'est que ma mère et une

25 vieille femme se sont placées devant le groupe et ont dit que nous

Page 19403

1 retournions dans notre village parce que nous ne pouvions pas aller nulle

2 part d'autres. Et à ce moment-là, le soldat nous a dit peu importe où vous

3 allez de toute façon vous allez vous faire tuer il n'y a pas de place pour

4 vous ici. Rentrer en Turquie. C'est là, où vous devez être. Nous n'avons

5 rien dit et à ce moment-là, il a poursuivi et il a dit, de toute façon vous

6 allez vous faire tuer, personne n'est responsable de votre sort.

7 Q. Vous avez dit où vous comptiez vous rendre. Est-ce qu'ils vous ont

8 précisés dans quel état se trouvait le village de Hrvacani ?

9 R. Oui. Ils ont dit que ce village de Hrvacani appartenait à la République

10 serbe, elle ne nous appartenait plus. Que tout avait été rasé, brûlé et qui

11 n'avait plus d'endroit où nous pouvions vivre. Et à ce moment-là, ma mère a

12 dit :

13 "Nous allons nous rendre dans ce village puisque nous ne pouvons pas aller

14 ailleurs de toute façon. Donc nous voulons rentrer chez-nous."

15 Q. Et lors de votre arrivée au village de Hrvacani, dans quel état se

16 trouvait ce village ?

17 R. Nous sommes arrivés du sud au village de Hrvacani, les premières

18 maisons que nous avons longées appartenaient à mon oncle, et cette maison

19 avait été complétée détruites. Le reste des maisons avait été incendié, il

20 ne restait plus que les murs et deux cheminées mais tout le reste avait été

21 incendié.

22 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous avez dit auparavant qu'il y avait

23 environ 100 maisons dans le village ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Et combien de maisons étaient encore

Page 19404

1 debout ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dirais environ deux ou cinq maisons parce

3 que ces maisons étaient en cours de construction, il y avait donc deux

4 maisons vides mais je dirais qu'il y avait encore deux à cinq maisons.

5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Et les autres maisons étaient en partie

6 ou totalement détruites ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

8 Mme KORNER : [interprétation]

9 Q. Est-ce que ces maisons avaient été pilonnées ou est-ce qu'elles avaient

10 été incendiées ?

11 R. Certaines avaient été pilonnées mais la plupart avaient été incendiées.

12 Q. Et qu'en étaient-ils des biens qui se trouvaient à l'intérieur de ces

13 maisons ?

14 R. Les biens qui se trouvaient dans ces maisons avaient en fait disparus

15 parce que lorsque nous nous sommes approchés de notre maison il n'y avait

16 plus de meubles, il n'y avait plus que les murs. J'ai également trouvé un

17 coran qui est un livre saint un livre de prière pour un Musulman qui avait

18 été brûlé mais on pouvait encore lire certains passages mais tout le reste

19 avait été pris, volé.

20 Q. Et aviez-vous un chien ?

21 R. Oui.

22 Q. Et qu'a-t-il advenu du chien ?

23 R. Mon père était le propriétaire d'un chien parce qu'il était en fait un

24 chasseur. Il l'utilisait comme chien de chasse et lorsque nous nous sommes

25 approchés de notre maison, nous l'avons vu qu'il était tué.

Page 19405

1 Q. Est-ce que les villageois étaient propriétaires de bétails ?

2 R. Oui. Nous avions quatre vaches et lorsque nous étions à Plitska nous

3 avions vu des Serbes à Cirkino Brdo qui avaient rassemblé tous les bétails

4 et qui assuraient leur transport depuis Tepici et Savici par tracteur et

5 par camion.

6 Q. Y avait-il une mosquée à Hrvacani ?

7 R. Oui, au milieu du village.

8 Q. Et qu'est-il advenu de cette mosquée ?

9 R. La mosquée a été totalement détruite.

10 Q. Avez-vous pu voir en la regardant si cette destruction était le

11 résultat de pilonnage ou d'une autre attaque ?

12 R. Lorsque nous sommes arrivés dans le village vers le milieu de ce

13 village, nous nous sommes rassemblés là puisque c'était l'endroit où nous

14 nous retrouvions avant la guerre. Nous voulions nous rendre à la mosquée et

15 lorsque nous sommes arrivés à cet endroit nous avons vu qu'elle avait été

16 détruite, qu'elle avait été en fait détruite par explosifs et qu'il ne

17 s'agissait pas de résultat de bombardements.

18 Q. Et sur les murs des maisons y avaient-ils quelque chose d'écrit ?

19 R. Oui, nous avons vu la JNA disant ceci est la Serbie ainsi que des

20 marques, c'est-à-dire une croix avec quatre C et quatre S.

21 Q. Et je crois que vous nous avez dit qu'à ce moment-là, vous avez

22 constaté qu'il y avait des cadavres, des hommes qui étaient restés

23 derrière ?

24 R. Oui.

25 Q. Après avoir vu la situation dans laquelle se trouvait le village,

Page 19406

1 qu'avez-vous décidé de faire ?

2 R. Nous nous sommes rassemblés dans le milieu du village, certaines

3 personnes ont décidé de rester parce qu'elles avaient trouvés de la

4 nourriture mais ma mère et moi-même nous avions une famille à Garici qui

5 avait signé un acte d'allégeance qui s'était rendu aux Serbes. Par

6 conséquent nous avons décidé de rendre à Garici, nous ne voulions pas

7 rester parce que tout avait été détruit et nous n'avions pas de --

8 nourriture.

9 Q. Et lorsque vous -- étiez encore à Hrvacani, est-ce qu'il y a encore des

10 soldats qui sont arrivés ?

11 R. Oui, environ 15 à 30 minutes après notre arrivé à Hrvacani, il y a un

12 tracteur, rempli de soldats, qui est arrivé depuis Tepici, certains d'entre

13 eux étaient masqués, d'autres portaient des uniformes du camouflage. Ils

14 nous ont rencontré au milieu du village.

15 Q. Avez-vous reconnu certains de ces soldats ?

16 R. Non. Pas personnellement, mais ma mère oui.

17 Q. Est-ce que ces soldats se sont adressés à vous ?

18 R. Oui. Un des soldats nous a offert de l'eau et environ dix minutes plus

19 tard, de l'eau nous a été apportée, mais ils nous ont dit pourquoi, vous

20 trouvez-vous ici ? Vous n'avez nulle part où rester ? Et certains d'entre

21 nous se sont approchés de lui, et on dit, mais nous voulons nous rendre à

22 Garici, nous ne voulions pas. Et je crois que la moitié du groupe est resté

23 à Hrvacani et l'autre moitié des soldats nous a accompagné de Garici et

24 l'autre moitié est restée à Hrvacani et je ne sais pas ce qui s'est passé

25 ensuite.

Page 19407

1 Q. Vous avez dit que l'un des soldats vous a donné de l'eau. Quelle était

2 l'attitude de l'ensemble de ces soldats ? Était-il amical ?

3 R. Oui, Madame, il était très amical. En fait, il aidait une femme

4 enceinte. Il nous a aidé à avoir de l'eau. Il était très amical.

5 Q. Et qu'on est-il du reste des soldats ? Étaient-ils tout aussi gentils ?

6 R. Non, Madame.

7 Q. Et que faisaient-ils ? Où que faisait l'un d'entre eux ?

8 R. Comme je l'ai déjà dit, l'un des soldats est devenu un peu fou. Il nous

9 a dit, il n'y a pas de place pour vous, pourquoi revenez-vous ici. Ici

10 c'est la Serbie. Si vous décidez de rester à Hrvacani, il ne pouvait pas

11 nous assurer notre survie, par conséquent, si nous allons -- si nous

12 allions mourir tant pis pour nous. En fait, il proférait des menaces à

13 notre égard.

14 Q. Fort bien. Donc, vous-même et votre mère, vous vous êtes rendus à

15 Garici, n'est-ce pas exact ?

16 R. C'est exact, Madame.

17 Q. Et il en allait du même des autres personnes ?

18 R. Oui.

19 Q. Et pour vous rendre à Garici, avez-vous dû passer à travers le village

20 de Savici ?

21 R. Oui, c'est exact.

22 Q. Et s'est-il passé quelque chose là-bas ?

23 R. Oui.

24 Q. De quoi s'agissait-il ?

25 R. Alors, que nous rentions à Savici, de nombreux civils nous attendaient.

Page 19408

1 Et je me souviens que Dalibor qui allait à l'école avec moi, sa mère était

2 devenue complètement folle, elle nous criait dessus, elle voulait nous

3 tirer dessus. En fait, elle a pris le fusil d'un soldat et elle nous

4 menaçait de cette arme. Elle nous disait, vous balija, vous traînez ici,

5 alors que nos soldats meurent à Vecici. J'aimerais tuer un des balija parmi

6 vous.

7 Q. Et est-ce que quelqu'un l'a empêché de faire quoi que ce soit ?

8 R. Oui. Un des soldats qui était particulièrement amical, l'a écarté et

9 lui a dit, déplace-toi, déplace-toi de sorte que nous puissions nous rendre

10 rapidement à Savici.

11 Q. Fort bien. Vous-même et votre famille, vous êtes rendus à Garici, mais

12 est-ce que d'autres personnes sont restées à Vakufci ?

13 R. C'est exact.

14 Q. Et combien du temps êtes-vous restés à Garici ?

15 R. Je dirais environ 30 jours.

16 Q. Et une fois de plus, en raison des problèmes de nourriture, vous-même

17 et votre mère, vous vous êtes rendus en direction de Bilice ?

18 R. C'est exact, Madame.

19 Q. Et alors que vous étiez à Bilice, est-ce que votre frère est arrivé ?

20 R. Oui.

21 Q. Et lors de son arrivée, qu'est-ce qu'il a voulu que vous fassiez ?

22 R. Il nous a dit que Bilice, ne pouvait plus être contrôlé par des Croates

23 et qu'il fallait qu'on l'accompagne à Vecici.

24 Q. Et à ce stade, est-ce que vous êtes vous rendu à Vecici ?

25 R. Non. Nous sommes repartis en direction de Garici, parce que nous avions

Page 19409

1 peur de traverser Kotor Varos et Vrbanja, parce qu'en fait, il y avait des

2 champs de mines et nous avions peur. Par conséquent, nous sommes retournés

3 à Garici.

4 Q. Et avez-vous entendu ce qui s'est passé à Bilice ?

5 R. Oui.

6 Q. Et de quoi s'agissait-il ?

7 R. La plupart des personnes et des soldats qui étaient là, se sont rendus

8 et on leur avait promis la survie, s'ils se rendaient et qu'on allait

9 organiser leur transfert du côté bosniaque.

10 Q. Par conséquent, vous êtes une fois de plus retourné à Garici, et

11 combien du temps approximativement êtes-vous restés là-bas ?

12 R. Je dirais entre 25 à 30 jours.

13 Q. Et à ce stade, je crois que nous sommes à présent arrivé au mois

14 d'octobre. Y avait-il des villages, en dehors de Garici et de Vecici qui

15 n'étaient pas sous le contrôle des Serbes ?

16 R. Vecici était le seul village qui était sous le contrôle des personnes

17 qui luttaient contre les Serbes. Tous les autres avaient cédé aux Serbes,

18 étaient placés sous le contrôle des Serbes.

19 Q. Fort bien. Est-ce qu'à ce stade, quelques quatre jours avant la chute

20 de Vecici, vous êtes-vous rendus là-bas ?

21 R. C'est exact.

22 Q. Et avez-vous fait cela suite à des injonctions qui vous avez été

23 données ?

24 R. Je me souviens d'une nuit. Nous nous trouvions dans la maison de Atif

25 Agambegovic. Nous regardions les nouvelles et quelqu'un est venu frappé à

Page 19410

1 la porte et à ce moment, nous avons ouvert la porte et nous avons vu M.

2 Pasic, qui était le voisin et également mon cousin et qui nous a dit qu'il

3 y avait eu signature d'un accord qu'il n'y aurait pas de lutte ou de combat

4 pendant cinq jours et que tous les civils de Hrvacani devaient se rendre à

5 Vecici. C'était l'accord tel qu'il avait été conclu avec les Serbes. Et le

6 lendemain, nous sommes partis en direction de Vecici.

7 Q. Et je crois que vous êtes passés par Vrbanjci pour aller chercher un

8 document de déplacement, n'est-ce pas exact ?

9 R. C'est exact.

10 Q. Et combien étiez-vous pour vous rendre à Vecici ce jour ?

11 R. Je dirais entre 30 et 50 personnes.

12 Q. Une fois de plus, y avait-il des femmes et des enfants ?

13 R. C'est exact.

14 Q. Et lorsque vous êtes arrivés à Vecici, dans quel état se trouvait la

15 ville ou plutôt le village ?

16 R. Lorsque, nous nous sommes approchés de Vecici, en provenance de

17 Vrbanjci, la plupart des maisons avaient été, en fait je veux dire que

18 toutes ces maisons avaient été détruites. Nous avons rencontré certains

19 soldats qui nous attendaient, mais il y avait des trous qui étaient couchés

20 sur la route. Par conséquent, nous avons eu du mal à pénétrer dans Vecici.

21 Toutes les maisons étaient incendiées et je dirais qu'elles étaient

22 détruites à 100 % en raison des bombardements et des événements qui se sont

23 déroulés.

24 Q. Et avez-vous entendu que le village avait été bombardé ?

25 R. Oui.

Page 19411

1 Q. Avez-vous également retrouvé votre frère et votre père dans le village

2 de Vecici ?

3 R. Oui, Madame.

4 Q. Et est-ce que votre beau-frère était également présent ?

5 R. C'est exact.

6 Q. Et à ce stade, avez-vous su ce qui s'était passé avec votre soeur ?

7 R. Oui.

8 Q. Votre sœur vivait à Dabovci, et qui est-il advenu du

9 Village ?

10 R. Dabovci. Je ne sais pas qu'est-ce qui est arrivé à ce village. Nous

11 avons entendu de sa bouche, lorsque nous sommes arrivés à Vecici, que tout

12 le village avait été rasé, incendié, que tous les civils avaient été

13 conduits à Vrbanjci et que tous les hommes avaient été rassemblés y compris

14 lui-même et qu'ils avaient été tués. Mais qu'il avait survécu. Et

15 qu'ensuite, il avait pu s'enfuir à Vecici. Toutes les maisons avaient été

16 incendiées et les -- la population civile avait été conduite à Vrbanjci, y

17 compris ma sœur.

18 Q. Est-ce que votre sœur se trouvait à Vecici ?

19 R. Non, Madame.

20 Q. J'aimerais avancer un petit peu dans le temps. Vous souvenez-vous de la

21 première fois où vous avez revu votre soeur ?

22 R. Lorsque nous sommes arrivés du côté sécuritaire, c'est-à-dire du côté

23 de Travnik et de Zenica. Lorsqu'elle nous a rendu visite en provenance de

24 Croatie.

25 Q. Fort bien. Je reviendrai plus tard sur cela. J'aimerais à présent vous

Page 19412

1 inviter à voir une vidéo.

2 Mme KORNER : [interprétation] Je vais simplement faire diffuser des

3 parties.

4 Mme BARUCH : [interprétation] Est-ce que cette pièce porte une référence ?

5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, il s'agit d'une vidéo qui contient

6 de nombreuses données d'information.

7 Mme KORNER : [interprétation] Mais il ne s'agit pas d'une pièce qui a déjà

8 été versée. Pourrions-nous marquer une pause ?

9 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Mais vous avez déjà fait allusion à

10 cette séquence, n'est-ce pas ?

11 Mme KORNER : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Bien qu'il

12 contienne un certain nombre de séquences.

13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Fort bien.

14 Mme KORNER : [interprétation] Il s'agit du numéro V 000-2908. Et cela

15 deviendra la pièce 2431. Pourrions-nous faire diffuser cette séquence, je

16 vous prie ?

17 [Diffusion de cassette vidéo]

18 Mme KORNER : [interprétation] Il semblerait que nous ayons perdu le son.

19 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Mais quelle sera la cote attribuée au

20 compte rendu de cette séquence ?

21 Mme KORNER : [interprétation] Il s'agira de la pièce 2431-1.

22 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]

23 Mme KORNER : [aucune interprétation]

24 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]

25 Mme KORNER : [interprétation] Je ne comprends pas pourquoi on n'entend pas

Page 19413

1 le son. Peut-être que c'est parce que je ne porte pas une -- mon casque.

2 Mme BARUCH : [interprétation] Je vois apparaître le visage de Mme Korner.

3 J'ai pourtant appuyé sur le bouton qui correspond à vidéo, mais je ne

4 reçois rien.

5 Mme KORNER : [aucune interprétation]

6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous devriez normalement appuyer sur le

7 bouton ordinateur "computer". Et vous devriez avoir la séquence.

8 Mme KORNER : [aucune interprétation]

9 Mme BARUCH : [interprétation] Je ne vois simplement une image en gris et en

10 blanc. C'est tout.

11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] C'est cela. Nous n'avons pas encore de

12 bande de son pour le moment.

13 Mme KORNER : [interprétation] Ceci figure également sur un CD-ROM -- sur

14 une vidéo. A moins que le son ne soit arrivé. Pouvons-nous marquer un arrêt

15 sur l'image, je vous prie.

16 Q. Nous venons de voir une pierre tombale qui dit Ekrem Pasic. Est-ce que

17 cette personne a un lien avec votre famille ?

18 R. Oui.

19 Q. S'agissait-il d'un membre proche de votre famille ?

20 R. Il s'agit de mon cousin.

21 Q. Et savez-vous comment il est décédé ?

22 R. Oui. Lorsque nous sommes arrivés à Vecici, son père nous a dit qu'Ekrem

23 et son ami, dont je ne me souviens pas de son prénom, étaient partis en

24 direction de Travnik et qu'ils avaient été tués. Au nord de Vecici, il

25 s'agissait d'un petit village dont le nom me revient, il s'agit de Staza.

Page 19414

1 Ce village était également contrôlé par les Serbes. Ces personnes étaient

2 parties de nuit et par la suite il y a eu de nombreux combats. Et quatre

3 jours plus tard, son père s'est déplacé et il a trouvé son cadavre.

4 Q. Fort bien.

5 Mme KORNER : [interprétation] Pourrions-nous faire défiler

6 l'enregistrement ?

7 [Diffusion de cassette vidéo]

8 Mme KORNER : [interprétation] Il semblerait qu'une fois de plus nous ayons

9 perdu la bande de son. Le son a été perdu en cours de route.

10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je ne sais pas si nous n'avons jamais

11 entendu quoi que ce soit.

12 Mme KORNER : [interprétation] Quelqu'un m'a fait savoir que le son était

13 activé. Je me demande dans quelle mesure nous ne pourrions pas faire

14 diffuser la bande vidéo.

15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Fort bien. Faites-le.

16 Mme KORNER : [interprétation] A ce stade, s'il s'agit d'une bande vidéo,

17 est-ce que j'appuie sur le bouton de vidéo ?

18 Mme BARUCH : [aucune interprétation]

19 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, je crois. Je vous invite à le

20 faire. Parfois si vous utilisez le bouton qui fait apparaître le mot "vidéo

21 évidence", à ce moment-là, vous pouvez également voir les séquences.

22 Mme KORNER : [interprétation] Pouvons-nous procéder à la diffusion, je vous

23 prie. Apparemment, les effets sont faits.

24 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]

25 [Diffusion de cassette vidéo]

Page 19415

1 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] Des soldats de tous les villages se trouvent

2 ici. On ne peut pas aller d'une tombe à une autre, mais nous allons

3 survoler cette région d'une manière générale. Dites-leur que toute une

4 famille se trouve ici. Toute une famille, père, enfants, femme. Ils ont été

5 tués par une bombe.

6 Mme KORNER : [interprétation]

7 Q. On voit ici les restes d'un obus. Avez-vous vu cela de vos propres

8 yeux ?

9 R. Oui.

10 Q. Qui vous l'a montré ?

11 R. Mon père.

12 Mme KORNER: [interprétation] Veuillez procéder au défilement de la vidéo,

13 je vous prie.

14 [Diffusion de cassette vidéo]

15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Mais où sommes-nous ici ?

16 Mme KORNER : [interprétation] A Vecici.

17 Q. Monsieur le Témoin, pouvez-vous confirmer, qu'il s'agit de cela ?

18 R. Oui, lorsque je suis arrivé à Vecici mon père m'a montré des obus qui

19 avaient été utilisés dans les attaques aériennes.

20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

21 Mme KORNER : [aucune interprétation]

22 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Veuillez poursuivre.

23 [Diffusion de cassette vidéo]

24 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] Ce que vous voyez là, ce sont des bombes en

25 napalm, ces bombes ont également été lancées. Et qui a fait cela ? Nos

Page 19416

1 voisins serbes, nos kums, et le nom de famille, Zoran Zajdan [phon], Zoran,

2 il s'agissait de nos voisins. Mais de qui d'autres encore ?

3 Il s'agit ici d'une nouvelle mosquée qui vient d'être construite. Elle

4 devait être inaugurée le 1er août, mais voyez-vous étant donné la situation,

5 et ce qui s'est passé. Il y avait 200 missiles de différents calibres

6 lancés par différents chars sans compter des impacts de balles. Et vous

7 voyez ça été pilonné de toute part. On voit ici quelques deux millions de

8 marques ont été investies dans cela. Les voisins sont en train de tout

9 détruire, il ne reste plus rien ils ont tout détruit.

10 Ici nous voyons dans quel état se trouve la mosquée de l'autre côté.

11 L'intérieur ici, nous voyons en fait la mosquée qui avait été la mieux

12 préservée, on voit maintenant ce qu'il en reste. On voit ici un éclat

13 d'obus, on voit ici des éléments d'obus des obus perforants.

14 Mme KORNER : [aucune interprétation]

15 Mme BARUCH : [interprétation] Je pense que nous n'avons pas encore visionné

16 cette vidéo.

17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Non, non.

18 Mme BARUCH : [interprétation] Par conséquent, le témoignage qui en découle,

19 je crois constitue un témoignage qui ne peut pas être fait sous serment et

20 je dois dire que je m'opposerais à ce que l'on entende d'autres propos ou

21 que l'on entende le bon son de cette vidéo.

22 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Madame Korner ?

23 Mme KORNER : [interprétation] C'est la première fois que j'entends une

24 telle objection. Nous avons entendu et vu différentes vidéos les unes après

25 les autres y compris la bande son. Je crois que les Juges pourront juger du

Page 19417

1 foi (sic) accordé à ce témoignage à savoir s'il s'agit d'un témoignage sous

2 serment ou non.

3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ce n'est pas considéré comme un

4 témoignage sous serment de toute façon. Mais je ne comprends toujours pas

5 l'objection qui est cité ici. Nous avons déjà eu des vidéos où nous n'avons

6 pas entendu la bande son, précisément à cause de cette raison parce que

7 nous avions décidé auparavant de ne pas écouter le son.

8 Mme KORNER : [aucune interprétation]

9 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien évidemment ceci n'est pas le cas

10 ici. Et bien sûr, si vous voulez poser une question à tout moment au

11 témoin.

12 Mme KORNER : [aucune interprétation]

13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous pouvez le faire bien sûr s'agit-

14 il de la mosquée à Vecici répondra oui mais c'est son témoignage ici qui

15 est pris en compte en même temps que la vidéo, Mme Baruch, je comprends

16 bien ce que vous dites mais vous n'avez pas besoin de vous en inquiéter.

17 Mme BARUCH : [interprétation] Autrement dois-je comprendre, qu' il s'agit

18 de quelque chose que vous voyez mais le témoignage du témoin ne porte pas

19 sur ce que vous entendez c'est exact.

20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ce que nous attendons peut-être

21 important mais les questions sont posées à la suite de cela. Par exemple,

22 nous avons un commentaire ici qui parle de bombes napalm, les questions

23 n'ont pas été posées là-dessus.

24 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, je suis tout à fait

25 d'accord de la même façon que le témoignage je peux pas vous dire ont été

Page 19418

1 pris également il s'agit à ce moment-là, le témoignage pourra vous le dire.

2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous n'avez pas besoin de vous

3 inquiéter Madame Baruch, ceci est montré au témoin et on va lui poser des

4 questions au moment opportun, et ce sont les réponses du témoin qui sont

5 importantes ici, la réponse aux questions.

6 Mme BARUCH : [interprétation] Je voulais simplement soulevé cette objection

7 pour que ce soit consigné au compte rendu d'audience.

8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien.

9 Mme KORNER : [interprétation]

10 Q. Avez-vous vu de vos propres yeux, cette mosquée détruite ?

11 R. Oui tout à fait. Je suis passé devant cette mosquée en compagnie de mon

12 père.

13 Q. Etes-vous entré à l'intérieur ?

14 R. Non, car je craignais qu'il y ait quelque chose.

15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Des pièges ou des choses de la sorte.

16 Mme KORNER : [interprétation] Très bien. Et bien pouvons-nous poursuivre,

17 s'il vous plaît, pour un cours moment.

18 Et à ce moment-là, je vais demander d'avancer la vidéo. Mais nus allons

19 poursuivre pour l'instant.

20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous avons vu deux personnes à un

21 moment donné marcher. Est-ce que vous avez été filmé ? Est-ce qu'on vous

22 voit sur cette vidéo ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien.

25 Mme KORNER : [interprétation] Une date en fait est ensuite imposée. Il

Page 19419

1 s'agit du 3 octobre, pour M. Pasic.

2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien.

3 [Diffusion de cassette vidéo]

4 Mme KORNER : [interprétation] Je crois que nous allons avancer un petit

5 peu. Pouvons-nous avancer de 13 minutes, environ, s'il vous plaît ? Je vais

6 maintenant parler du passage qui se trouve à la page 3 du compte rendu

7 d'audience, à la ligne 20, on entend ici le mot "voix".

8 Mme BARUCH : [interprétation] Je n'ai pas de transcript de la vidéo

9 personnellement. La Chambre on a-t-elle ?

10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui.

11 Mme KORNER : [interprétation] En fait, ceci vous a été remis vendredi

12 dernier.

13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Le transcript ici qui porte un numéro

14 0308-3027, c'est un numéro ERN de cette retranscription.

15 Mme KORNER : [aucune interprétation]

16 Mme BARUCH : [interprétation] Néanmoins, je souhaite encore une fois

17 soulever une objection quant au terme utilisé ici.

18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien.

19 Mme KORNER : [interprétation]

20 Q. Est-ce que nous pouvons maintenant avancer normalement et voir --

21 visionner le film à sa cadence normale.

22 [Diffusion de cassette vidéo]

23 Mme KORNER : [interprétation]

24 Q. Monsieur Pasic, reconnaissez-vous cet homme ?

25 R. Oui, Madame.

Page 19420

1 Q. Qui est cet homme ?

2 R. C'est Hodza, qui vient de Vecici. Et bien, je l'ai vu à Grabovica.

3 Q. L'avez-vous vu lorsque vous étiez pendant très peu du temps à Vecici ou

4 pour la première fois à Grabovica ?

5 R. Pour la première fois à Grabovica.

6 Q. Très bien. Et je crois que si nous -- si vous voulez bien regarder

7 cette partie de la vidéo, s'il vous plait ?

8 [Diffusion de cassette vidéo]

9 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] Je vais simplement filmer ce qui reste du

10 bâtiment. Vous pouvez voir de vous-même comment les choses se sont passées

11 et ce qui s'est passé. Tout ceci aurait pu être évité. Et bien, ici un

12 homme, il y a un homme qui tente d'être meilleur dans les deux mondes. IL

13 peut parler maintenant. C'est une personne qui travaille pour le bien

14 commun, est heureux dans les deux mondes et à ce moment-là, nous serions

15 heureux pour le restant de nos jours et nous ne pouvions pas faire porter

16 la faute à d'autres. Souhaitons-nous être comme ceci. Voulons-nous être

17 comme ceci. Devons-nous être comme ceci. Si nous voulons maintenir la paix,

18 la liberté et le bonheur, je crois qu'il faut être ainsi, car ils disent

19 qu'un homme à le devoir de s'occuper de l'autre et de respecter son voisin

20 comme il se respecte lui-même. Et aucune croyance ne s'applique à ceux qui

21 ne respectent pas leurs voisins. Efendi, dites-moi s'il vous plaît, qui

22 doit porter la responsabilité de tout ceci, que tous nos parents proches,

23 cousins, amis, voisins, seront lorsqu'ils regarderont cette vidéo, qui doit

24 être tenu pour responsable. Non seulement, sur ce qui s'est passé sur ces

25 événements, sont produites dans notre village, mais sur l'ensemble du

Page 19421

1 territoire de la Bosnie-Herzégovine. A qui incombe la faute, à nous les

2 Musulmans ? Je me posais simplement cette question--

3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Non.

4 Mme KORNER : [interprétation] Pouvez-vous arrêter la vidéo s'il vous

5 plait ? Cet homme -- je tiens à préciser que cet homme est mort.

6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Mais je -- les commentaires de cet

7 homme dans la vidéo, vous n'allez pas vous reposer là-dessus ?

8 Mme KORNER : [interprétation] Non, je ne vais pas tenir compte de ces

9 propos. Mais je crois qu'il est important d'entendre ce qu'il a à dire et

10 particulièrement, lorsqu'il s'agit de parler des circonstances de sa mort.

11 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]

12 Mme KORNER : [interprétation] Pourrions-nous simplement terminer ce

13 passage, s'il vous plait ?

14 [Diffusion de cassette vidéo]

15 L'INTERPRÈTE : Celui qui n'attaque pas autrui, peut rester en paix. Et tout

16 à chacun sera en paix à cause de lui, celui qui attaque l'autre, agresse

17 les autres et lui-même également. Et je crois que cela a un sens. Il ne

18 s'agit pas de savoir de quelle religion, de quelle croyance, on est. Je

19 crois qu'il est important que nous soyons tous honnête, il est important

20 que nous nous fassions confiance mutuellement, c'est ce que nous demande

21 l'homme et dieu. Et car dieu se préoccupe de notre bien-être.

22 Efendi, encore une question, vous êtes ici depuis le 1er jour, je crois ?

23 Oui. Depuis quand ? Et depuis combien de jours, vous n'êtes allé nulle

24 part, vous n'êtes pas sortis de cette maison. Non, depuis le 1er jour, c'est

25 moi qui a commencé cette -- la construction de cette maison ensemble avec

Page 19422

1 les personnes qui sont ici. Nous avons -- nous nous y sommes installés par

2 la suite, pour ce qui est de la congrégation de Dzematlija [phon], ils

3 étaient toujours prêts à s'entendre avec tout le monde, ainsi que tous les

4 autres voisins, quelque soit leur confession. Il y a 18 confessions dans

5 notre état, notre état avait 18 confessions religieuses et en Bosnie-

6 Herzégovine, il y en avait 16, 16 différentes confessions religieuses. Si

7 vous considérez cela, si vous prenez ceci en compte, la Bosnie-Herzégovine

8 représente le terrain le plus fertile, qu'il permettrait d'engendrer le

9 bonheur de toutes les personnes qui vivent sur le territoire. Il y avait

10 deux confessions dans les autres républiques, deux confessions

11 représentées.

12 Souhaitez-vous envoyer des vœux à quelqu'un ? Parce que ceci sera diffusé

13 en Autriche et en Suisse et dans le monde entier. Le monde entier regardera

14 cette vidéo. Donc, si vous souhaitez dire bonjour à quelqu'un, c'est le

15 moment de le faire à toutes les personnes qui s'y trouvent, à tous les

16 Musulmans, j'envoi mes vœux et à tous les Catholiques et à toutes les

17 différentes personnes qui souhaitent vivre une vie agréable. Se sont des

18 gens bons, je leur envoi mes vœux et de façon à ce qu'ils soient --

19 puissent être heureux parce que ces vœux viennent du cœur, que puis-je dire

20 d'autres. C'est tout Efendi. Et j'aimerais que dieu vous aide dans tout ce

21 que vous entreprenez, non seulement vous-même, mais tous vos amis et ceux

22 qui s'opposent à l'homme, doivent s'éloigner du mal et suivre le chemin

23 dont on a besoin, c'est le bien de l'humanité peut voir le jour et pour le

24 bien-être de l'homme dans l'avenir -- à l'avenir.

25 Mme KORNER : [interprétation] Merci. Je n'ai plus besoin de la vidéo.

Page 19423

1 Q. Monsieur Pasic, vous avez passé je crois quelques quatre jours à

2 Vecici, est-ce exact ?

3 R. Oui.

4 Q. Et que s'est-il passé le 5e jours ?

5 R. Le 5e jour, je me trouvais du côté EST de Vecici, et nous étions assis,

6 nous étions dans le sous sol. Mon frère -- mon père est arrivé, il a

7 discuté avec ma mère et il m'a dit que je devais partir avec lui en

8 direction de Travnik car, il avait entendu dire et qu'il craignait de

9 m'envoyer avec ma mère parce que les Serbes, emmenaient les enfants et tous

10 les hommes. Et séparaient les hommes des femmes à Banja Luka et Vlasic. Par

11 conséquent, ils avaient peur et ils ont décidé que je devais partir avec

12 mon père et nous sommes partis cette nuit-là. Je crois qu'il devait être

13 huit heures du soir, avec un groupe des personnes.

14 Q. Donc, avant votre départ. Y avait-il eu une attaque lancée contre

15 Vecici ou non ?

16 R. Non. Pas une offensive de grande envergure. Simplement des tirs, des

17 coups de feu venant de tireurs embusqués, c'est tout.

18 Q. Vous êtes partis aux environs du 21 heures ce soir-là, un groupe de

19 personnes. Le groupe était-il important ou non ?

20 R. Je ne me souviens pas exactement combien de personnes composaient ce

21 groupe et c'était une colonne assez longue et je ne peux pas vous dire

22 combien de personnes composaient ce groupe.

23 Q. Est-ce que cela comprenait votre père, faisait il partie de ce groupe ?

24 R. Oui.

25 Q. Et votre frère également ?

Page 19424

1 R. Mon frère était parti la veille. Et je ne sais pas exactement à quelle

2 heure, il est parti. Mais, nous l'avons retrouvé par la suite à Travnik.

3 Donc, je pense qu'il s'est échappé la veille.

4 Q. Et votre beau-frère, faisait-il partie de ce groupe également ?

5 R. Oui, tout à fait et nous nous tenions par la main, lorsque nous

6 marchions, mon père se trouvait devant, moi j'étais derrière mon père, moi

7 je tenais la main de mon oncle et nous essayons de rester proche les uns

8 des autres et --

9 Q. Et votre beau-père, comment s'appelle-t-il ? Quel était son prénom ?

10 R. Il s'appelait Elvir.

11 Q. Et parmi ce groupe ?

12 R. Pardonnez-moi. Je me souviens maintenant. Il s'appelait Lihovic.

13 Q. Parmi ce groupe d'hommes -- parmi ce groupe, combien il y avait-il de

14 femmes et combien y avait-il d'enfants dans ce groupe ?

15 R. Pouvez-vous expliquer davantage, s'il vous plaît ?

16 Q. Vous dites que vous étiez un groupe de personnes. Combien, vous ne vous

17 souvenez pas du nombre exact de femmes ou d'enfants. Votre mère était

18 présente. Combien d'autres femmes et d'enfants il y avait-il ?

19 R. Il y avait des personnes du village de Vecici, d'Hrvacani et ils sont

20 restés à Vecici pour la plupart. Je ne sais pas combien exactement.

21 Q. Il y avait-il des enfants de votre âge dans ce groupe ?

22 R. Oui, dans mon groupe, oui. Et il y en avait deux qui allaient à la même

23 école que moi, et ils avaient mon âge.

24 Q. Très bien. Et comment êtes-vous parti ? Où êtes-vous allé ?

25 R. Comme je vous l'ai déjà précisé, nous sommes partis vers 20 heures, 21

Page 19425

1 heures et nous nous sommes dirigés vers Travnik. Nous marchions -- nous

2 avons marché toute la nuit.

3 Q. Autrement dit, avez-vous traversé des bois ou avez-vous traversé un

4 terrain découvert ?

5 R. [aucune interprétation]

6 Q. [aucune interprétation]

7 R. Aux alentours de minuit, je crois qu'il était 1 heure ou 2 heures du

8 matin, il y a une embuscade -- nous avons été pris dans une embuscade

9 montée par les Serbes, et deux personnes ont été tuées. Et il y avait un

10 type de Vecici et son fils, son nom de famille Zec. Je ne me souviens pas

11 de leur nom, mais je les ai vus et nous les avons laissés sous un arbre.

12 Q. Et ce groupe est-il resté intact à ce stade-ci ? Autrement dit, est-ce

13 que tout le monde est resté ensemble ou est-ce que les gens sont partis en

14 groupes différents ?

15 R. Non, nous nous sommes divisés en deux groupes et vers 4 heures, 5

16 heures du matin, nous nous sommes retrouvés. Nous avons rassemblés les deux

17 groupes et nous avons -- nous nous sommes retirés dans un endroit qui était

18 un petit peu à découvert et qui était entouré d'arbres.

19 Q. Vous y a-t-on découverts ?

20 R. Je -- nous avons découvert par la suite qu'il y avait quelqu'un qui

21 était en contact avec les Serbes dans notre groupe. Mais cette nuit-là, ou

22 en tout cas, aux premières heures du matin, ils savaient exactement où nous

23 nous rendions. Ils savaient exactement où nous nous trouvions à ce moment-

24 là. Et aux premières heures du matin, ils nous attendaient. Ils attendaient

25 que l'on se repose et que l'on se rassemble, et qu'on reparte. Et à ce

Page 19426

1 moment-là, que nous avons été pris dans une embuscade, la deuxième

2 embuscade, aux premières heures du matin.

3 Q. Et que s'est-il passé à ce moment-là ? Qu'est-il arrivé à votre

4 groupe ?

5 R. Les combats ont commencé. On entendait des balles de fusil de toute

6 part. J'avais très peur et j'avais tellement peur qu'un groupe est parti en

7 courant, avec Besim qui dirigeait le groupe. Nous avons dévalé la pente et

8 nous sommes allés dans l'eau et je ne me souviens pas du nom de cette pente

9 ni de la rivière qui se trouvait en dessus. Et quelques-uns des combattants

10 -- certains membres de l'autre groupe ont décidé de riposter. Donc, il y

11 avait des coups de feu tirés en haut de la colline. Et nous avons -- et

12 nous sommes en fait tombés sur les mines puisque les champs près du bord de

13 l'eau étaient minés. Et je portais un très grand manteau et mon manteau

14 était trempé. J'ai arrêté mon père et j'ai dit, il faut arrêter, il faut

15 enlever ce manteau. Et à ce moment-là, Besim qui était notre leader, on a

16 vu ses deux jambes explosées par ces mines. Les autres en fait, ont dû

17 traverser les champs de mines.

18 Q. Donc vous avez été les champs de mines -- vous avez évité les champs de

19 mines, et où êtes-vous allés ?

20 R. Et bien, nous avons traversé l'eau. Et il y avait deux hommes qui nous

21 ont dit que cette région-là, n'était pas minée donc nous avons pu arriver à

22 l'autre côté -- de l'autre côté de la rive d'en face. Il y avait 150 à 200

23 personnes y compris Hodza qui se trouvait là. Et nous nous sommes

24 rassemblés et nous avons prié --

25 Q. Et que s'est-il passé par la suite ?

Page 19427

1 R. A ce moment-là, on entendait toujours des coups de feu. Les Serbes

2 étaient sur les collines et on entendait des cris disant : "Balija, rendez-

3 vous. Vous n'avez aucune chance. Remettez vos armes et à ce moment-là, vous

4 serez libres."

5 Et on entendait ça aux haut-parleurs, qu'ils lançaient ces appels et nous

6 ne savions pas quoi faire. J'avais tellement peur que je ne savais pas où

7 aller. Par conséquent, nous nous y sommes et nous avons prié. Et pour

8 finir, nous avons décidé de nous rendre.

9 Q. Lorsque vous vous êtes rendus, comment avez-vous signalé aux Serbes que

10 vous souhaitiez vous rendre ?

11 R. Tout d'abord, il y avait un tunnel à proximité. Et nous nous sommes

12 engouffrés dans ce tunnel. Nous étions 200 environ. Et le type qui était en

13 contact avec les Serbes, a enlevé sa chemise qui était une chemise blanche.

14 Et il a attaché sa chemise blanche sur un bâton et a commencé à marcher en

15 direction des Serbes.

16 Q. Et c'est ce que vous avez fait ?

17 R. Oui, tout à fait. Nous avons marché lentement en direction des

18 positions serbes. Ils attendaient. Et ils étaient environ à 100 ou 200

19 mètres de ce tunnel.

20 Q. Votre père et votre beau-père, Elvir, étaient-ils avec vous dans ce

21 groupe ?

22 R. Oui, Madame.

23 Q. Et que s'est-il passé lorsque vous êtes arrivés à l'endroit où se

24 trouvaient les Serbes ?

25 R. Lorsque nous sommes arrivés à l'endroit où se trouvaient les Serbes,

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1 ils tiraient des coups de feu tout autour et ils nous ont dit que si nous

2 étions en possession d'armes, il fallait les leur remettre. Il fallait

3 remettre les armes d'un côté, l'argent et l'or de l'autre côté. Et s'ils

4 trouvaient une simple aiguille sur nous, ils nous tueraient. Par

5 conséquent, il fallait que nous vidions nos poches. Et ceci s'est passé.

6 Ensuite, nous avons commencé à marcher lentement en direction de la ville

7 de Grabovica -- de l'école de Grabovica.

8 Q. Lorsque vous êtes arrivés dans ce champ, que s'est-il -- qu'est il

9 advenu des hommes et de vous-même ?

10 R. Lorsque nous sommes arrivés à cet endroit-là, les soldats nous ont dit

11 de nous allonger sur trois rangs. Nous étions comme ça, nous avions -- nous

12 étions sur le ventre et le sol était tellement boueux que nous avons du mal

13 à respirer. Et ils nous ont demandé par conséquent de nous allonger et de

14 rester calme. Et si l'un d'entre nous bougeait, ils allaient nous tirer

15 dessus. Nous sommes restés là, deux heures durant, face à terre. Et c'est à

16 ce moment-là, que les choses commençaient à se produire.

17 Q. Qu'est-il arrivé à ce moment-là ?

18 R. Ils nous ont d'abord demandé qui était à la tête de notre groupe. Ils

19 ont choisi un type. Je ne me souviens pas de son nom parce que j'étais face

20 à terre. Ils lui ont demandé qui dirigeait ce groupe d'hommes, et ils ont

21 dit, Besim. Et ils lui ont demandé où il était. Et ils ont répondu, il

22 n'est plus parmi nous. Il a sans doute été tué. Il est sans doute mort. Et

23 donc il a crié son nom, et il riait et il tirait des coups de feu. Et il

24 est revenu vers un groupe d'hommes et il s'est allongé. Et c'est à ce

25 moment-là, qu'ils ont commencé à poser des questions. Et ils avaient une

Page 19429

1 liste des gars qui avaient des armes, et ils ont commencé à appeler les

2 gens par leur nom. Je ne sais pas pour quelle raison, mais ils ont appelé

3 le nom de mon père. Mon père était à côté de moi. Ils lui ont demandé de se

4 lever. Et ils avaient le numéro de son fusil de chasse parce qu'il avait un

5 permis de porte d'armes parce qu'il était chasseur. Et ils lui ont demandé,

6 où as-tu trouvé ces bottes ? Et lui a répondu, j'étais chasseur. Et

7 réponse, non, ça n'est pas vrai. Tu n'étais pas chasseur. Tu as tué un de

8 nos soldats. Et ils ont commencé à le passer à tabac. Il s'est mis pleurer.

9 Et ils ont demandé est-ce qu'il y a d'autres membres dans votre groupe ? Il

10 a répondu que non, mais il est revenu vers nous après.

11 Et il y avait un -- il y avait également hodza qu'ils ont passé à tabac.

12 Ils l'ont rappelé par son nom, ils ont dit que c'était ce gars-là qui

13 dérangeait le groupe d'hommes.

14 Je sais qu'il pleurait et il disait : "Non je ne suis pas responsable de

15 tout ceci, mon enfant". C'est qu'il disait, c'était son expression

16 favorite, "mon enfant", je ne sais pas ce qu'il lui est arrivé. Mais par la

17 suite, je l'ai vu dans une flaque de sang. Lorsque je me suis levé il était

18 dans ce sang-là et je ne pouvais pas me retourner pour le regarder parce

19 qu'ils nous demandaient de regarder droit devant nous. Nous n'avions pas le

20 droit de nous retourner. Et lorsque nous étions allongés face à terre, j'ai

21 découvert par la suite, il y avait trois camions de l'armée qui avaient été

22 garés à côté des groupes. Ils allaient, ils venaient deux groupes d'hommes

23 de camions. C'était simplement pour nous faire peur et si quelqu'un -- et

24 ils nous disaient que si quelqu'un se lève on va vous tirer là-dessus.

25 Après ils allaient, ils venaient et mon oncle m'a dit "ils vont nous passer

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1 là-dessus avec leurs camions". Et ils sont retournés, ils sont allés, ils

2 revenaient mais ils ne sont passés sur nous avec leurs camions. C'était

3 simplement pour voir si quelqu'un allait se lever de façon à ce qu'ils

4 puissent leur tirer dessus.

5 A ce moment-là, ils nous ont dit, ils ont dit à tous les enfants, toutes

6 les femmes de se lever. Moi je refusais parce que je ne savais pas ce qu'il

7 allait se passer. Mais mon oncle m'a dit que j'allais survivre, qu'il

8 fallait que je parte. Et donc je me suis levé enfin et je suis parti avec

9 ce groupe, ce groupe de six garçons de mon âge et des femmes et un homme

10 blessé. Ils nous ont dit de marcher vers Grabovica, nous l'avons fait. Je

11 ne sais pas ce qui s'est passé avec les hommes. On les a laissé derrière.

12 En partant à l'école de Grabovica, ils ont enligné, il faisait assez sombre

13 je ne pouvais pas voir cet homme, qui était, je pense responsable du

14 groupe. Il est venu nous voir et nous a dit que rien n'allait nous arriver,

15 que le lendemain ils allaient organiser notre départ en bus pour Travnik.

16 En revanche, il a dit que notre père allait payer pour cela. Ensuite ils

17 nous ont fait pénétrer dans l'école et nous ont hébergé dans une classe.

18 Q. Quand vous arrivez à l'école dans le village de Grabovica, y avait-il

19 des serbes locaux là-bas ?

20 R. Oui. La plupart des femmes portaient des habits noirs. Ils criaient et

21 nous jetaient des pierres là-dessus, ils nous crachaient là-dessus. Et même

22 s'il faisait noir et bien ils nous attendaient dehors en criant. Mais nous

23 avons réussi à pénétrer dans l'école escortés par les soldats et ensuite

24 ils nous ont fait entrer dans la classe. Après il y avait des hommes qui

25 sont entrés à l'école avec leurs mains liées dans le dos, on les a tous

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1 placés au deuxième étage.

2 Q. La personne qui était responsable du groupe, qui a dit que rien allait

3 vous arriver, et vous alliez être emmenés à Travnik, cette personne

4 portait-elle un uniforme quelconque ?

5 R. Il faisait assez noir, je sais qu'il avait une espèce de couvre-chef

6 avec une pile enfin une lumière et il portait un uniforme de camouflage, me

7 semblait-il. Je ne me souviens pas avoir vu des insignes, il faisait trop

8 noir.

9 Q. Très bien. Donc on vous a placé dans une classe se trouvant au rez-de-

10 chaussée. Vous avez été gardés là-bas, n'est-ce pas ? Excusez- moi, on vous

11 a placé au premier étage, n'est-ce pas ? Dans une classe se trouvant au

12 premier étage, donc vous voulez dire le rez-de-chaussée. Ensuite vous

13 montez l'escalier et vous y arrivez ?

14 R. Non, en réalité, il n'y a pas de rez-de-chaussée. C'est-à-dire que

15 c'était vraiment au rez-de-chaussée.

16 Q. Oui, donc vous entrez par la porte et vous rentrez directement dans la

17 classe ?

18 R. Oui.

19 Q. Et vous dites que les hommes, on les a placés au deuxième étage, là

20 vous faites référence à l'étage au-dessus du vôtre ?

21 R. Oui, on les a entendu marcher, monter l'escalier.

22 Q. Est-ce qu'il y avait des gardiens près de vous ?

23 R. Oui, deux hommes, deux soldats. Il en avait un qui était prisonnier, il

24 était vraiment gentil, il était prisonnier à Vecici avant et il était

25 vraiment gentil avec nous. Il m'a demandé si je me souvenais de lui et

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1 qu'il ait été à Vecici. Mais nous avions peur de parler mais c'est vrai

2 nous avons été gardé par deux soldats.

3 Q. Et vous avez dit que les hommes au moment où ils arrivaient avaient

4 leurs mains ligotées dans le dos. Est-ce que vous l'avez vu vous-mêmes de

5 vos propres yeux ou bien est-ce que quelqu'un d'autre vous en a parlé ?

6 R. Je l'ai vu moi-même car ils -- afin ils y avaient ces camions avec les

7 phares, il pleuvait. Donc leurs phares étaient allumés et -- les camions

8 étaient derrière, ils étaient illuminés et on a pu les voir marcher dans un

9 groupe. Je pouvais les voir par la fenêtre. Ils se trouvaient à notre

10 gauche.

11 Q. Et pendant votre détention à l'école et après l'arrivée des

12 combattants, vous a-t-on donné la possibilité d'aller les voir ?

13 R. Oui. Plus tard dans la nuit à un moment donné, ils nous ont demandé, si

14 on voulait voir notre famille, les membres de notre famille faisant partie

15 de ce groupe mais moi j'ai refusé. Je ne voulais pas le faire, j'avais

16 peur. Je savais qu'ils avaient demandé à mon père de se lever et ils lui

17 avaient posé des questions au sujet des bottes, et lui avaient demandé s'il

18 y avait d'autres membres du groupe. Et ils avaient dit qu'ils n'en avaient

19 pas et c'est pour cela que je ne voulais pas aller le voir. Mais d'autres

20 personnes faisant partie de notre groupe sont allés voir les membres de la

21 famille.

22 Q. Votre mère est-elle allée voir votre père ?

23 R. Non.

24 Q. Et est-ce qu'on vous a gardé dans cette classe pendant toute la nuit ?

25 R. Oui en effet.

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1 Q. Vous dites que certaines personnes, faisant partie de ce groupe, sont

2 allées voir leur famille, les membres de leur famille. Au retour, vous ont-

3 ils dit dans quelles conditions étaient détenus ces hommes à l'étage ?

4 R. Harija Ahmedovic [phon] est allée voir son mari parce qu'ils venaient

5 de se marier. Elle est montée le voir lui, il s'appelait Sead Rahmanovic,

6 originaire de Okuci [phon]. Et elle y est allé et leur a parlé. Et en

7 rentrant elle a dit qu'ils étaient tous bien, qu'ils étaient tous là-haut,

8 qu'ils avaient été passés à tabac. En revanche que son mari avait un bleu,

9 un œil au beurre noir et que son visage était couvert d'ecchymoses.

10 Q. Très bien. Et que s'est-il passé le lendemain ?

11 R. Le lendemain, deux soldats sont venus nous voir pour nous dire qu'un

12 bus nous attendait, que nous partions pour Travnik. Et ils nous ont dit de

13 marcher lentement en quittant la classe. Et en sortant nous avons vu à

14 l'extérieur de l'école tout un groupe de civils, en général des femmes et

15 des enfants. Ils nous attendaient à l'extérieur.

16 Q. Que s'est-il passé au moment où vous sortiez de l'école ?

17 R. En sortant de l'école, ils nous ont dit de marcher un par un,

18 doucement, et que des deux côtés il y avait des gens alignés. C'était comme

19 un tunnel, le bus était garé à peu près -- un 50, un 100 mètres de l'école,

20 un soldat nous a dit, si vous survivez ceci, vous allez survivre. Et il y

21 avait des gens qui étaient dehors, munis de haches, de bâtons, de pierres.

22 Ils nous attendaient. Ils attendaient notre groupe, le passage de notre

23 groupe. Et je me souviens de ce garçon qui est allé à l'école avec moi. Et

24 bien, ils l'ont laissé traverser cette haie d'honneur. Et à peu près au

25 milieu, et bien, il est tombé. Je ne sais pas ce qui s'est passé, mais il

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1 est tombé à genoux et il a dû ramper. Il ne pouvait plus marcher. Et

2 ensuite, le deuxième homme qui marchait derrière lui, et bien, il l'a

3 ramassé. Il l'a conduit jusqu'au bus. Donc, nous devions marcher doucement,

4 marcher à travers cette haie d'honneur où ils nous assénaient des coups

5 pour qu'ils puissent mieux nous battre. Je me souviens qu'une femme vêtue

6 d'une robe noire m'a attrapé et a dit, je voudrais tuer ce petit balija,

7 car mes deux fils sont morts à Vecici. Et elle avait un couteau. Et moi,

8 j'avais tellement peur que je ne pouvais pas bouger. J'avais tellement

9 peur, et Dieu merci, un soldat l'a poussée et il m'a fait entrer dans le

10 bus. A ce moment-là, la porte du bus s'est renfermée. Mais nous avons dû

11 attendre quand même une quinzaine de minutes avant de partir, car il y

12 avait des problèmes. Donc, nous attendions dans ce bus. Et les gens dehors

13 étaient tellement fâchés. Ils nous jetaient des pierres. Ils ont craché --

14 ils crachaient sur nous. Et notamment, on ne devait pas regarder à travers

15 la fenêtre, car on pouvait être blessé. Mais je l'ai fait tout de même.

16 J'ai regardé et j'ai vu des gens à l'étage, là où se trouvaient nos hommes.

17 Et c'est la dernière fois où j'ai vu nos hommes, les hommes de Grabovica.

18 Q. Depuis ce jour-là, avez-vous jamais revu votre père ou votre beau-

19 frère ?

20 R. Non, Madame. Jamais.

21 Q. A présent, je voudrais vous demander d'examiner un document. Il s'agit

22 de la pièce P2302. Peut-être veut-il passer -- placer sur le

23 rétroprojecteur le document en langue anglaise ?

24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, en effet parce que moi je n'ai pas

25 ce document sous mes yeux.

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1 Mme KORNER : [interprétation]

2 Q. Pouvions-nous regarder le 2e paragraphe où il est écrit : "Au niveau de

3 Kotor Varos, il y avait des combats entre les membres des forces musulmanes

4 et nos unités, car ils avaient refusé de négocier et de quitter la région

5 du village de Vecici. A peu près 40 Bérets verts ont été tués et 200

6 d'entre eux ont été arrêtés. Un massacre brutal des membres des Bérets

7 verts qui ont été arrêtés a commencés, à cause d'un soldat -- parce que

8 quatre de nos soldats se sont fait tués à Kotor Varos, Jajce."

9 Monsieur Pasic, est-ce que, d'après vous, il s'agit là, de ces hommes que

10 vous avez laissés derrière à l'école de Grabovica ?

11 R. Pas de doute du tout. C'est bien cela.

12 Q. Donc, vous quittez, en partant dans des bus. Est-ce que vous vous

13 dirigiez vers Vrbanjci ?

14 R. Oui.

15 Q. Et ensuite, est-ce que vous partez pour Travnik ?

16 R. Oui. Nous sommes partis dans une colonne de 13 bus. Il y avait des

17 femmes et des enfants qui étaient là. Ils nous attendaient, les gens de

18 Grabovica. Et donc nous avons traversé les monts de Vlasic, en direction de

19 Travnik.

20 Q. Est-ce que quoi que ce soit s'est passé après être arrivés à Travnik ?

21 R. Oui. Au niveau du mont Vlasic, nous avons été arrêtés par un groupe de

22 soldats. Ils étaient tous armés. Ils étaient à peu près une quinzaine de

23 mètres de nous. Leurs visages étaient masqués et je dirais qu'on nous

24 arrêtait à peu près toutes les 15 minutes et on nous demandait des objets

25 de valeur, de l'argent, de l'or. Ils nous ont dépouillé de tout pour

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1 trouver de l'argent, de l'or, des objets de valeur.

2 Q. Et après avoir pris -- après vous avoir dépouillé de tout cela, comment

3 êtes-vous arrivés à Travnik ?

4 R. L'armée de Bosnie-Herzégovine était au courant de cela. Ils nous

5 attendaient. Ils nous attendaient avec leurs bus, et nous avions traversé

6 une distance, une certaine distance. Je ne sais pas quelle était cette

7 distance. Et enfin, nous sommes arrivés dans le bus organisé -- envoyé par

8 l'armée bosniaque. Et ils nous ont amenés à Travnik.

9 Q. Pouvons-nous passer à huis clos partiel ?

10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, en effet.

11 [Audience à huis clos partiel]

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22 [Audience publique]

23 Mme KORNER : [interprétation]

24 Q. Monsieur Pasic, tout ce qui vous est arrivé, à vous et à votre famille,

25 pourriez-vous nous dire quelles séquelles, gardez-vous de tous ces

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1 événements ?

2 R. Et bien, tout cela a gardé -- a gravé des séquelles très graves dans ma

3 vie, dans ma mémoire. J'ai encore des cauchemars. Encore, hier, j'avais

4 rêvé de mon père et à chaque fois, que je reviens et bien je repense à ces

5 événements. Cela revient dans ma mémoire. C'est vraiment difficile.

6 Mme KORNER : [interprétation] Très bien. Merci.

7 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Madame Korner, très bien. Je pense que

8 nous allons prendre une pause maintenant.

9 Mme KORNER : [aucune interprétation]

10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] De 25 minutes et ensuite la Défense va

11 contre-interroger le témoin. Donc, nous allons recommencer nos travaux à 12

12 heures 45.

13 --- L'audience est suspendue à 12 heures 20.

14 --- L'audience est reprise à 12 heures 46.

15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Qui est ce témoin 7.279 ? Madame

16 Korner.

17 Mme KORNER : [interprétation] C'est le témoin de demain, Monsieur le

18 Président.

19 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui. Très bien. C'est moi qui me suis

20 trompé. Merci.

21 Mme KORNER : [aucune interprétation]

22 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]

23 Mme KORNER : [interprétation] Oui. Il s'agit de la liste du témoin de

24 demain, BT95.

25 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Moi, je pensais qu'il s'agissait de la

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1 liste des documents qui allaient être présentés au cours du contre-

2 interrogatoire de ce témoin et j'ai eu peur. Donc, Monsieur le Témoin, je

3 dois vous expliquer la procédure ici. L'Accusation doit -- à le droit de

4 vous contre interroger, de vous contre interroger sur la base de votre

5 déposition. Donc, nous allons faire cela. Mme Baruch représente les

6 intérêts de l'accusé en l'espèce et donc, elle va vous contre interroger au

7 sujet de votre déposition. Maître Baruch ?

8 Mme BARUCH : [interprétation] Très bien.

9 Serait-il possible de passer à huis clos partiel pour quelques instants,

10 puisque le Procureur a fait de même pour un certain nombre de questions.

11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Publique ou huit clos partiel ?

12 Mme BARUCH : [interprétation] Huis clos partiel.

13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Allons en huis clos partiel.

14 [Audience à huis clos partiel]

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23 [Audience publique]

24 Mme BARUCH : [interprétation]

25 Q. Monsieur Pasic --

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1 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous sommes en audience publique.

2 Mme BARUCH : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

3 Q. Donc, il y a deux autres points que j'ai voulu tirer au clair. Je pense

4 qu'il a été dit que vous aviez peur de vous rendre dans la mosquée. La

5 mosquée qu'on a vue sur la cassette vidéo car elle était minée mais elle

6 était piégée, mais est-ce que je vous ai bien compris. Est-ce c'était la

7 mosquée de Vecici qui se trouvait sous le contrôle des Musulmans et des

8 Croates ?

9 R. Oui, c'est exact.

10 Q. Donc, les Serbes normalement n'auraient -- n'ont rien à voir avec le

11 minage de cette mosquée ? Ce ne sont pas les Serbes qui l'ont

12 éventuellement piégée ?

13 R. Et bien, j'avais peur que, suite à toute ce pilonnage et toutes les

14 bombes, que la mosquée allait s'effondrer. Donc, j'étais tout près, je

15 regardais autour mais je refusais d'entrer -- de pénétrer à l'intérieur,

16 car j'avais peur que la mosquée ne s'effondre -- ne s'effondre sur moi.

17 Q. Savez-vous si cette mosquée se trouvait près du théâtre, du théâtre des

18 opérations ?

19 R. La mosquée, la mosquée celle qui est la plus récente --

20 Q. Je parle de la mosquée que nous avons vue sur la vidéo ?

21 R. Je ne sais pas.

22 Q. Vecici est-ce un village grand, étendu ?

23 R. Et bien, je pourrais dire qu'il s'agit d'un village assez étendu. Je ne

24 sais pas combien il y a de maisons exactement. Mais, vous savez, il y avait

25 une rivière qui passait, qui traversait le village. Des deux côtés de la

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1 rivière, il y avait une mosquée.

2 Q. Et la mosquée dont nous parlons, est-ce qu'elle se trouvait sur la rive

3 gauche ou droite ?

4 R. Je pense qu'elle se trouvait sur la rive droite, car moi avec ma

5 famille, c'est là que j'ai été sur la rive est.

6 Q. Avec votre mère et votre père ?

7 R. Oui.

8 Q. Et vous avez aussi dit que vous vous êtes fait arrêté en partant pour

9 Travnik. Donc, vous étiez dans un bus et les gens qui se trouvaient dans le

10 bus. Etaient-ce les gens qui étaient avec vous détenus dans l'école de

11 Grabovica ?

12 R. Oui. Je vous ai dit qu'il y avait à peu près 13 bus qui sont partis et

13 dans le dernier bus, c'étaient les gens de Grabovica.

14 Q. Très bien. Et si je vous ai bien compris, vous avez dit qu'on vous a

15 tout pris dans votre maison. Vous n'avez plus rien et ensuite, avec les

16 combattants capturés -- et vous étiez un peu près 200 et vous avez dit que

17 les soldats serbes vous ont arrêtés et vous ont tout pris, qu'il nous vous

18 restait plus rien. Vous n'avez plus une aiguille, un cordon dans vos

19 poches ?

20 R. Oui. C'est vrai, j'ai parlé d'une aiguille.

21 Q. Très bien. Et donc, à ce moment-là, vous êtes dans ces bus qui se

22 dirigent vers Travnik et vous n'avez plus rien ?

23 R. Non.

24 Q. Et je pense que quelqu'un vous a demandé et si, Mme Korner plutôt, et

25 si votre mère était allée voir votre père pendant que vous étiez dans la

Page 19444

1 classe de Grabovica. Et vous avez été séparé de votre mère et votre mère

2 n'est jamais arrivée à l'école. Et puisque, elle est partie avec les femmes

3 et elle est partie directement pour Travnik, de l'endroit où il y avait des

4 combats ?

5 R. Oui. C'est vrai. J'étais assez surpris. Je suis parti cette nuit-là

6 avec mon père et avec -- et ma mère est restée derrière à Vecici. Et

7 ensuite, elle est partie avec tous les civils et je l'ai vue plus tard

8 quand je suis arrivé avec le reste de ma famille.

9 Q. Très bien. Donc, elle n'était pas en Grabovica avec vous ?

10 R. Non.

11 Q. Et vous avez parlé d'elle, je pense vous avez dit que votre oncle est

12 venu vous chercher à Vecici ?

13 R. Non. C'était mon frère.

14 Q. Votre frère ?

15 R. Oui. Mais attendez, je vais retirer cela. Donc, j'étais à date à Garici

16 avec mon cousin, il est venu avec deux soldats.

17 Q. Oui. Et il est venu avec deux soldats serbes, n'est-ce pas ?

18 R. Oui, c'est exact.

19 Q. Et là où ils ont passé un accord, n'est-ce pas ?

20 R. Oui. C'est vrai.

21 Q. Et vous avez -- ce que vous avez compris, c'est que les gens de votre

22 village Hrvacani, s'ils retournent à Vecici, et si les combattants se

23 rendent, et bien que les autres allaient être échangés et placés, enfin

24 être en sécurité. Est-ce que c'est ce que vous avez compris ?

25 R. Non, Madame.

Page 19445

1 Q. Est-ce que vous voulez revenir sur votre réponse --

2 R. Je ne comprends pas très bien. Peut-être que vous pourriez reformuler

3 votre question.

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Baruch, je vous invite à

5 reformuler votre question et peut-être préciser le contexte. Parce que je

6 pense que le témoin est un peu confus.

7 Mme BARUCH : [interprétation] Pour les uns et les autres, ceux

8 dans le prétoire. J'en suis à la page 7 de la déclaration préalable du

9 témoin.

10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous invite à donner lecture de ce

11 passage.

12 Mme BARUCH : [interprétation]

13 Q. Il a précisé, nous sommes restés à Garici pendant un certain temps,

14 dans la maison de mon cousin Atif. A cette époque-là, tous les villages

15 dans la région, exception faite de Vecici, étaient tombés aux mains des

16 Serbes.

17 Quatre jours avant la chute de Vecici, nous nous trouvions dans la maison

18 d'Atif lorsqu'un autre cousin d'Akif est arrivé. Il était armé. Il portait

19 une barbe. Il avait des longs cheveux. Il était sale. Il y avait deux

20 soldats armés avec lui qui attendaient à l'extérieur de la maison. Il nous

21 a informés que nous avons passé un accord avec les Serbes en fonction

22 duquel tous les Serbes de Hrvacani devaient se rendre à Vecici.

23 Il nous a informé que le lendemain, nous devions nous rendre à Vrbanjci

24 pour obtenir des documents de voyage.

25 Je faisais allusion à ce paragraphe. C'est exact n'est-ce pas ?

Page 19446

1 R. Exact.

2 Q. A un stade, j'ai cru que vous aviez dit, et en fait, je n'arrive plus à

3 trouver le passage, que si les hommes à Vecici s'étaient rendus, ils

4 feraient l'objet d'un échange.

5 R. Je n'ai jamais dit cela.

6 Q. Et vous n'avez pas de connaissance à cet égard ?

7 R. Non.

8 Q. Tout au long de vos déplacements, depuis votre village jusqu'aux autres

9 villages, il y avait des soldats serbes qui vous ont aidé vous ainsi que

10 les femmes et qui vous ont également protégés, n'est-ce pas ?

11 R. Oui, c'est exact.

12 Q. Et --

13 R. Il s'agissait d'un soldat, mais je ne me souviens plus de son nom. Il

14 s'agissait d'un soldat qui se trouvait à Hrvacani lorsque nous sommes

15 arrivés. Il s'agissait du plus gentil.

16 Q. Fort bien. Mais même lorsque vous avez quitté Vecici, lorsque vous avez

17 été capturés, il y avait un soldat qui vous a

18 dit : "que vous n'allez pas être blessés, qu'on ne va rien vous faire."

19 N'est-ce pas exact ?

20 R. Oui, je crois qu'il était responsable. Mais je crois qu'il s'adressait

21 aux enfants et aux femmes. En fait, il nous donnait des garanties.

22 Q. Fort bien. Mais il parlait également des combattants. Mais s'agissant

23 des femmes et des enfants, dans la déclaration que j'ai.

24 R. [aucune interprétation]

25 Q. En fait, il a précisé, qu'il ne leur sera pas fait de mal et ceci

Page 19447

1 s'applique aux femmes et aux enfants ?

2 R. C'est exact.

3 Q. Il s'agissait de soldats qui accompagnaient les combattants. Par

4 conséquent, à deux reprises, des soldats serbes ont veillé à ce que rien ne

5 vous arrive.

6 R. Oui, mais au cours de cette nuit, lorsque nous sommes arrivés à

7 Grabovica, mais le lendemain, nous avons été passés à tabac.

8 Q. Les femmes ?

9 R. Par des personnes locales, oui.

10 Q. Vous avez dit qu'il s'agissait de femmes, de femmes serbes. Et vous

11 avez précisé qu'elles étaient habillées de noir.

12 R. Oui.

13 Q. Et vous avez supposé qu'il s'agissait de femmes serbes ?

14 R. Oui.

15 Q. Et ces personnes avaient des haches dans leurs mains. Et elles vous ont

16 frappés avec des battes de bois, mais pas avec des haches ?

17 R. Non.

18 Q. Fort bien. Et puis, lorsque vous avez dû passer cette zone, une femme

19 vous a pris dans les bras et elle était un peu en panique, n'est-ce pas ?

20 R. Oui.

21 Q. Elle pleurait, elle hurlait, elle criait parce qu'elle avait perdu deux

22 enfants.

23 R. Oui.

24 Q. A Vecici, et cetera. Elle voulait se venger sur vous en raison de la

25 perte qu'elle avait subie ?

Page 19448

1 R. C'est exact.

2 Q. Et à ce stade, un soldat serbe s'est approché de vous et vous a jeté

3 "dans le bus", n'est-ce pas ?

4 R. C'est exact.

5 Q. Afin de vous protéger. Afin que cette femme ne puisse pas vous faire

6 quoi que ce soit, n'est-ce pas ?

7 R. C'est exact, Madame.

8 Q. Et lorsque vous étiez à Vecici, avant de vous rendre à Grabovica, les

9 soldats serbes avaient séparé les hommes combattants, des femmes et des

10 enfants parce que les femmes qui sont restées, comme votre mère, devaient

11 en fait se rendre à Travnik, n'est-ce pas exact ?

12 R. Pourriez-vous répéter ?

13 Q. Lorsque vous avez quitté Vecici --

14 R. [aucune interprétation]

15 Q. -- tout à la dernière heure -- vers la fin, lorsque vous alliez vers ce

16 dernier village, Grabovica. Avant de quitter en direction de Grabovica, les

17 soldats serbes ont séparé les combattants des hommes et des enfants, n'est-

18 ce pas exact ?

19 R. Je ne me souviens pas de cela parce que nous avons quitté Vecici, mais

20 les Serbes ne savaient rien de cela.

21 Q. Les Serbes ne savaient pas ?

22 R. Ils ne l'ont pas su à ce moment-là, mais par la suite, ils ont su qu'il

23 y avait un homme avec nous qui avait collaboré avec les Serbes.

24 Q. Par conséquent, vous vous êtes séparés vous-mêmes ? C'est-à-dire que

25 les hommes combattants se sont séparés. Les femmes et les enfants devaient

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1 se rendre à Travnik. Et il s'agissait également de votre femme -- de votre

2 mère ?

3 R. C'est exact.

4 Q. Ils sont restés à Vecici ?

5 R. C'est exact.

6 Q. Et les hommes combattants ont traversé les bois -- ont traversé la

7 forêt ?

8 R. Oui, parce que nous avons entendu parler des convois qui nous

9 précédaient. Les Serbes faisaient descendre tous les adolescents de sexe

10 masculin, et lorsque je parle des hommes, on parlait de la séparation des

11 hommes et des femmes à Banja Luka, également à Vlasic. C'est la raison pour

12 laquelle, mon père s'est présenté chez nous et lui a dit qu'il fallait que

13 je l'accompagne parce qu'il avait peur que si j'accompagne ma mère, je sois

14 tué.

15 Q. Fort bien. Donc, vous auriez pu être pris pour un combattant ?

16 R. C'est exact, mais --

17 Q. Fort bien. Mais en raison de cette peur, votre père a suggéré que vous

18 ne restiez pas avec les femmes ni les enfants, mais que vous

19 l'accompagniez, avec votre frère et votre oncle, pour fuir. N'est-ce pas

20 exact ?

21 R. C'est exact.

22 Q. Et certaines femmes ont également choisi de les accompagner ?

23 R. C'est exact.

24 Q. Dix femmes, je crois, y compris deux jeunes adolescentes ?

25 R. Oui.

Page 19450

1 Q. Et certains adolescents de votre âge ont également accompagné les

2 combattants. C'est exact, n'est-ce pas ?

3 R. Oui.

4 Q. Savez-vous où ils devaient se rendre ? Ils essayaient de fuir les

5 Serbes pour se diriger vers où ?

6 R. Pour se diriger vers Travnik.

7 Q. Par conséquent, vous vous êtes rendus à Travnik, mais pas les femmes

8 qui sont restées derrière ?

9 R. C'est exact.

10 Q. Donc, vous avez emprunté un itinéraire différent. Et je crois qu'à un

11 stage, vous avez précisé dans votre déclaration qu'il y avait environ 200

12 personnes qui s'étaient jointes à vous et qui allaient traverser les bois.

13 N'est-ce pas exact ?

14 R. J'ai parlé de 200 personnes qui étaient prêtes à se rendre dans le

15 tunnel. Nous avions compté environ 200 personnes qui étaient sur le point

16 de se rendre.

17 Q. Fort bien.

18 R. Mais je ne sais pas ce qui s'est passé avec les autres personnes qui

19 continuaient.

20 Q. Parce que certains jeunes ont décidé de s'arrêter et de lutter avec les

21 Serbes, n'est-ce pas exact ?

22 R. C'est exact.

23 Q. Par conséquent, nous aimerions savoir s'il y avait plus de 200

24 personnes, y compris les combattants qui vous ont quitté, vous et votre

25 père, lorsque vous avez quitté Vecici et que vous êtes rendus dans les

Page 19451

1 bois ?

2 R. C'est exact. Et comme je l'ai dit, il s'agissait d'une longue colonne.

3 Je ne sais pas combien de personnes faisaient partie de cette colonne.

4 Q. Et ces personnes qui sont parties avec vous, même si elles n'étaient

5 pas armées, de nombreuses personnes d'entre eux avaient combattu à Vecici.

6 Certains d'entre eux étaient armés et avaient leurs armes avec eux, n'est-

7 ce pas ?

8 R. Oui.

9 Q. Fort bien. Et en fait, vous n'avez jamais compté ces armés, n'est-ce

10 pas ?

11 R. Non.

12 Q. Mais vous savez qu'il y avait un grand nombre d'armes -- pour deux

13 raisons. D'une part, il y avait un petit groupe de jeunes hommes qui

14 avaient décidé de quitter le groupe plus important et qui avaient décidé de

15 lutter contre les Serbes. Par conséquent, ils avaient des armes, n'est-ce

16 pas ?

17 R. C'est exact.

18 Q. Et lorsque les Serbes vous ont capturés, vous êtes sortis du tunnel et

19 ces Serbes vous ont dit, prenez vos armes dans les mains. Et ils ont dit,

20 mettez les armes d'un côté et les biens de l'autre côté. Par conséquent,

21 vous saviez qu'il y avait de nombreuses armes avec vous. Qu'il y avait des

22 personnes qui, parmi ce groupe de 200 personnes, qui étaient munies

23 d'armes.

24 R. J'ai vu des armes, mais je ne savais pas combien d'hommes étaient

25 réellement armés.

Page 19452

1 Q. Oui, en effet. Vous avez parlé des personnes qui ont collaboré avec des

2 Serbes, des personnes dont vous avez entendu parler à la radio. Mais j'ai

3 cru comprendre que vous avez dit également qu'il y avait une décision

4 collective de la part de ce groupe de 200 personnes qui avaient essayé de

5 fuir par les bois. Il s'agissait d'une décision globale de se rendre aux

6 Serbes, n'est-ce pas exact ?

7 R. C'est exact. Et dans notre groupe, il y avait un homme qui collaborait

8 avec les Serbes. Il prenait contact avec les Serbes et, lors de notre

9 deuxième embuscade, nous avons vu qu'il était derrière un arbre et qu'il

10 était en train de parler avec des Serbes. Et par la suite, il faisait

11 partie de notre groupe. Et par conséquent, il a fui avec nous et lorsque

12 nous sommes allés à Grabovica, un des soldats serbe s'est approché de nous,

13 il lui a tapoté l'épaule en lui disant bon boulot. Et ensuite, il est parti

14 à Grabovica avec nous en direction de Travnik.

15 Q. Fort bien. Mais en dépit de cette collaboration, il s'agit ici encore

16 d'une décision collective de votre part, de ce groupe qui se trouvait dans

17 le tunnel de se rendre, n'est-ce pas ?

18 R. Oui, c'est exact.

19 Q. Est-il vrai de dire que votre père et les hommes qui ont quitté Vecici

20 ne voulaient pas se rendre aux Serbes, que leurs intentions n'étaient pas

21 celles-là lorsqu'ils ont quitté Vecici ? Que leurs intentions étaient en

22 fait de fuir et non pas de se rendre ?

23 R. Oui, c'est exact. Parce que, lorsque Bilice est tombé au contrôle des

24 Serbes, nous avons entendu que tous les combattants, les Croates, et

25 certains Musulmans ont remis leurs armes aux Serbes, qu'ils ont été battus,

Page 19453

1 conduits à Banja Luka ou d'autres camps de concentration, et c'est la

2 raison pour laquelle de nombreuses personnes ont commencé à avoir peur. Et

3 c'est pourquoi nous avons fui, parce que nous avons pensé que si la plupart

4 d'entre nous n'avions pas d'armes, s'ils nous capturaient, ils allaient

5 nous tuer.

6 Q. J'aimerais revenir sur ce que vous avez dit, pour être certain d'avoir

7 bien compris. Donc, il y avait certains Musulmans de Vecici qui avaient été

8 capturés. Et vous avez dit que ces personnes ont été conduites à Banja

9 Luka ?

10 R. Non. J'ai dit que lorsque Bilice était le dernier bastion croate de

11 Kotor Varos avant que Vecici ne soit contrôlé par les Serbes, ils ont

12 décidé de se rendre, ils ont remis leurs armes et cetera, et les Serbes

13 leur avaient promis de les conduire dans un lieu sûr en direction de

14 Travnik. Mais certains soldats des villages avoisinants étaient à Bilice à

15 cette époque-là, et ils ont accompagné les personnes croates lorsque Bilice

16 est tombé sous le contrôle des Serbes. Mais je ne sais pas ce qu'il c'est

17 passé au sujet des combattants de Vecici ou si quelqu'un s'est remis --

18 s'est rendu.

19 Q. Fort bien. C'est la raison pour laquelle je n'avais pas très bien

20 compris ce que vous aviez dit. Donc en fait tous les évènements se sont

21 déroulés à Bilice où les Serbes vous ont dit que si vous vous rendiez, on

22 allait vous autoriser à vous rendre à Travnik ou à faire l'objet d'un

23 échange pour d'autres prisonniers de la BiH, c'est exact ?

24 R. Je ne peux rien vous dire au sujet de ces échanges, mais ils ont dit

25 aux combattants que si vous vous rendez, la plupart d'entre vous pourront

Page 19454

1 arriver à Travnik.

2 Q. Fort bien.

3 R. Mais ils n'ont jamais rien dit au sujet de Vecici du fait qu'il fallait

4 se rendre ou d'abandonner ses armes.

5 Q. Fort bien. Mais en fait en raison de la peur des soldats musulmans qui

6 se trouvaient à Vecici, ils ne voulaient pas courir le risque qu'il y ait

7 des survivants, et c'est la raison pour laquelle ils ont essayé de

8 s'échapper, n'est-ce pas exact ?

9 R. C'est exact.

10 Q. S'agissant de la séquence vidéo, l'avez-vous vue auparavant ?

11 R. Non.

12 Q. Pouvez-vous convenir avec moi qu'il y avait des endroits où l'armée de

13 la BiH était l'assaillant au cours de cette guerre ? Je ne parle pas de

14 votre expérience, mais je vous parle d'endroits où l'armée de la BiH était

15 l'assaillant.

16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Veuillez attendre avant de répondre.

17 Madame Korner, je vous en prie.

18 Mme KORNER : [interprétation]Je soulève une objection au sujet de cette

19 question. Nous en avons déjà parlé à maintes reprises de cet aspect. Je

20 tiens simplement à vous dire qu'on ne peut pas utiliser le principe tu

21 quoque. L'armée de la BiH peut avoir été l'assaillant dans d'autres

22 endroits en Bosnie, mais ceci ne peut pas être débattu par le truchement de

23 ce témoin.

24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui en effet. Je partage la position de

25 Mme Korner.

Page 19455

1 Mme BARUCH : [interprétation] Je crois que ma question découlait des propos

2 que l'on a entendus sur la vidéo et propos dont ne tiendra pas compte les

3 Juges de la présente Chambre de première instance.

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Il vaut mieux --

5 Mme BARUCH : [interprétation] Oubliez tout cela.

6 Q. Vous avez dit que vous-mêmes et votre cousin, vous étiez en train de

7 regarder la télévision, les nouvelles lorsque votre autre cousin est apparu

8 à Garici, n'est-ce pas exact ?

9 R. Oui, je regardais les nouvelles avec ma mère et mon cousin. C'est

10 exact.

11 Q. Vous souvenez-vous de quelle chaîne il s'agissait ? De quelle émission

12 s'agissait-il ?

13 R. Il s'agissait des nouvelles locales qui provenaient de la partie serbe.

14 Q. Puis-je vous demander ce que vous être en train d'étudier ?

15 R. Gestion de l'administration.

16 Q. N'est-il pas exact de dire quand revenant sur cette mosquée que nous

17 avons vue sur cette vidéo, vous avez pu comprendre que cette mosquée avait

18 été pilonnée lors du bombardement, n'est-ce pas exact ?

19 R. Oui.

20 Q. A la lecture de votre déclaration préalable, j'ai été intéressée par le

21 passage où vous avez dit que certains villages musulmans avaient remis

22 leurs armes après avoir signé les déclarations d'allégeance. Je ne suis pas

23 certaine d'avoir tous les noms, mais puis-je vous demander si vous vous

24 souvenez des noms des villages qui l'avaient fait ?

25 R. Cirkino Brdo, Nafici [phon], Garici, Vakufci.

Page 19456

1 Q. Et vous alliez dire ?

2 R. C'est cela. Je n'ai pas d'autres noms.

3 Q. Et il s'agissait de villages dans lesquels les citoyens avaient signé

4 une déclaration d'allégeance en disant qu'ils n'allaient pas entrer en

5 combat contre les Serbes et ils ont donc abandonné leurs armes. Et par

6 conséquent, ces villages étaient sûrs pour vous, n'est-ce pas exact ?

7 R. Non pas exactement, parce qu'en fait lorsque nous sommes arrivés à

8 Cirkino Brdo la première fois, nous étions passés à travers de Plitska,

9 nous n'avions plus de nourriture ni d'eau, et il y avait un homme de

10 Cirkino Brdo qui avait remis son arme. Je ne sais pas en fait s'il l'avait

11 fait, mais nous avons vécu dans sa maison, et lorsque les Serbes ont trouvé

12 -- ont pu constater qu'il nous nourrissait et que nous venions de Hrvacani,

13 alors à ce moment-là ils lui ont dit que nous allons revenir et les tuer et

14 tuer tous ceux-là afin que -- de nous pousser à aller nous installer à

15 Plitska, à Bilice.

16 Q. Ces villages qui avaient abandonné leurs armes qui avaient signé sa

17 déclaration de loyauté, est-ce que ces villages n'allaient plus combattre

18 avec les Serbes ? Et par conséquent, ces villages étaient saufs, étaient

19 sécures [sic] pour ces personnes-là, n'est-ce pas ?

20 R. C'est exact.

21 Q. Et les Serbes ne voulaient pas que ces villages soient sûrs pour les

22 habitants d'autres villages parce que votre village, si j'ai bien compris,

23 n'avait pas signé cette déclaration d'allégeance, n'est-ce pas exact ?

24 R. C'est exact.

25 Q. Fort bien.

Page 19457

1 R. Je ne me souviens pas si les Serbes nous avaient donné l'occasion de

2 nous rendre.

3 Q. Je comprends que vous ne sachiez pas cela. Parce qu'à l'époque vous

4 n'aviez que quatorze ans, n'est-ce pas ?

5 R. C'est exact.

6 Q. Et vous ne connaissez rien de cela ?

7 R. C'est exact.

8 Q. Je crois que vous avez dit que c'est exact ?

9 R. Oui.

10 Q. Fort bien. Bien, s'agissant de votre père, il faisait partie des

11 combattants, et votre père combattait avec d'autres à Bilice ?

12 R. Non, mon père se trouvait à Bilice et cette nuit-là il est parti pour

13 Vecici.

14 Q. Fort bien. Mais lorsque vous l'avez vu à Bilice, vous avez dit que il

15 se trouvait dans un endroit croate ?

16 R. Oui.

17 Q. Vous avez parlé d'un endroit important de personnes qui étaient armées

18 de plusieurs armes et que votre père était là, avant que vous n'arriviez ?

19 R. C'est exact.

20 Q. Et votre frère, votre père étaient là-bas. Par conséquent, il avait une

21 arme, n'est-ce pas ?

22 R. C'est exact.

23 Q. Fort bien. Bien, à présent, votre mère -- père avait abandonné votre

24 mère et vous-même afin qu'il puisse se déplacer dans un endroit plus sûr ?

25 R. Je ne sais pas.

Page 19458

1 Q. Vous ne pensiez pas que votre père vous avait abandonné pour aller dans

2 un endroit plus sûr ?

3 R. Je ne sais pas.

4 Q. Mais lorsque votre père se déplaçait. Il prenait son arme et il luttait

5 contre les Serbes, n'est-ce pas dans les endroits tel que Bilice ?

6 R. Non. Je n'ai jamais dit, qu'il était resté à Bilice. Il a parti -- il

7 était parti lorsque nous sommes arrivés à Bilice et cette même nuit il a

8 dit, je vais à Vecici. Il n'est jamais resté à Bilice.

9 Q. Mais, il était à Bilice, lorsque vous étiez, n'est-ce pas ? Lorsque

10 vous êtes arrivés ?

11 R. Mais uniquement pour un jour, parce que nous avons fui le lendemain.

12 Q. Par conséquent, avez-vous pu parler avec votre père ? Lui avez-vous

13 demandé ce qu'il était en train de faire lorsqu'il était absent ?

14 R. Non. Je ne lui ai pas demandé cela.

15 Q. Avez-vous parlé avec votre frère au sujet des endroits où il était allé

16 et ce qu'il faisait, alors qu'il n'était pas avec vous ?

17 R. Non.

18 Q. Parfois, je vous entends et je comprends mais je ne sais pas si tout

19 cela est enregistré pour le besoin du compte rendu d'audience. Savez-vous

20 s'il y a eu des combats à Hrvacani ? Est-ce qu'il y a eu des combats dans

21 votre village ?

22 R. Je ne sais pas parce que j'étais dans la cave avec ma mère et je ne

23 sais pas s'il y a eu des combats, parce qu'il y avait des bombardements,

24 des pilonnages. Je ne suis sorti que le lendemain, lorsque mon père est

25 apparu.

Page 19459

1 Q. Bien.

2 R. Mais je ne sais pas s'il y a eu des combats ou non.

3 Q. Donc, lorsque vous étiez dans la cave, votre village Hrvacani, votre

4 père et votre frère n'étaient pas avec vous, n'est-ce pas exact ?

5 R. Non. Ils n'étaient pas avec nous.

6 Q. Mais vous avez entendu des tirs et des bombardements alors que vous

7 étiez dans la cave, n'est-ce pas exact?

8 R. C'est exact.

9 Q. Et lorsque vous êtes arrivés à Bilice, votre père était là, vous avez

10 pu voir qu'il y avait eu des combats, n'est-ce pas exact ?

11 R. A Bilice ?

12 Q. Oui.

13 R. Je réponds par l'affirmatif, parce que nous avons vu que l'armée croate

14 avait creusé des tranchées, et cetera.

15 Q. Fort bien. Et lorsque vous étiez à Vecici, vous avez pu voir qu'il y

16 avait de nombreux éléments de preuve, de lutte, n'est-ce pas ? Et que votre

17 père avait combattu, n'est-ce pas ?

18 R. Je ne sais s'il avait combattu.

19 Q. Mais, il avait été là, pendant un certain temps ?

20 R. Oui.

21 Q. Vous avez parlé de la façon dont vous-même et votre cousin, vous vous

22 trouviez dans votre village de Hrvacani, qui se situait en surplomb par

23 rapport aux autres villages serbes avoisinants, et que vous utilisiez des

24 jumelles afin de voir ce qui se passait dans ces villages, n'est-ce pas

25 exact ?

Page 19460

1 R. C'est exact.

2 Q. Puis-je vous demander où vous aviez [sic] procuré ces jumelles ?

3 R. Je les ai obtenues par mon père. Il était chasseur.

4 Q. Et lorsque vous avez vu des activités dans les villages avoisinants,

5 vous êtes-vous rendu chez les adultes, chez votre père, pour leur dire ce

6 que vous avez vu ?

7 R. Comme je l'ai déjà dit, Hodza circulait de maison en maison. Il se

8 rendait d'une maison à maison [sic], c'était le deuxième jour de la fête de

9 Bajram et tout le monde était à la maison. On savait ce qui se passait.

10 Nous étions des enfants et nous regardions ce qui se passait. Mais je n'ai

11 pas parlé de quoi que ce soit.

12 Q. J'ai cru comprendre que votre père comme vous l'avez dit, savait ce qui

13 se passait, mais lorsque vous voyez quelque chose d'aussi important ou

14 d'aussi stimulant pour un enfant, vous avez signalé cela, n'est-ce pas à un

15 adulte ?

16 R. Oui. J'ai parlé à ma mère et lorsque nous étions dans la maison, je

17 parlais qu'il y avait des chars qui se trouvaient à Novakovo Brdo.

18 Q. Par conséquent, lorsque vous-même et votre cousin, utilisiez les

19 jumelles et lorsque vous voyez quelque chose intéressant, vous communiquiez

20 cela ?

21 R. Oui.

22 Q. Je suis désolé de sauter ainsi d'un sujet à un autre, puisque je suis

23 l'ordre chronologique inverse. Vous avez parlé des personnes âgées qui

24 étaient restées dans le village de Hrvacani. La première fois lorsque vous

25 êtes parti, lorsque vous parlez des personnes âgées, qu'est-ce que vous

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1 entendez ? Parce que ma perspective est différente de la vôtre ?

2 R. Ibro Dugonjic qui a été tué. Nous avons vu que son corps avait été

3 brûlé. Je dirais qu'il avait -- qu'il était plus -- qu'il avait plus que 50

4 ans.

5 Q. C'est exactement ce que je voulais dire.

6 R. Mais je ne sais pas.

7 Q. L'âge des autres personnes ? Fort bien. Et cette personne Dugonjic,

8 vous avez dit que son n-- qu'il avait été brûlé à l'intérieur de sa

9 maison ?

10 R. Oui.

11 Q. Et de nombreuses maisons avaient été incendiées, n'est-ce pas exact ?

12 R. Oui.

13 Q. Avez-vous pu trouver un signe quelconque qui vous permettait de

14 conclure que cette personne avait été identifiée avant que sa maison ne

15 soit incendiée ?

16 R. Non.

17 Q. Alors que vous quittiez votre village Hrvacani, pour la première fois,

18 vous êtes -- vous avez rencontré des tireurs isolés et que vous avez dû

19 ramper pendant un certain temps, pour éviter et échapper aux balles. Savez-

20 vous de combien de personnes il s'agissait ?

21 R. Non. Parce qu'en fait, j'avais peur. Ils tiraient sur des arbres au

22 dessus de nous et les branches, les feuilles tombaient sur nous. Je sais

23 que les tirs provenaient de Novakovo Brdo et de Tepici.

24 Q. Et savez-vous, s'il y avait des tirs très proche de Hrvacani avant que

25 vous n'arriviez dans cette zone en contrebas pour autant que vous en

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1 souveniez ?

2 R. Je ne m'en souviens pas.

3 Q. Il est tout à fait logique en tant qu'adolescent, vous vous souvenez

4 que des endroits où vous avez connu des dangers, n'est-ce pas exact ?

5 R. Oui.

6 Q. Fort bien. Y avait-il un endroit dans le village où on pouvait venir

7 avec des renseignements. Quelqu'un qui pouvait diffuser ces renseignements

8 par exemple. Je sais, que vous évoqué, cela peut vous paraître un petit peu

9 compliqué mais quelques fois, il y a un endroit où on placarde des

10 affiches. Est-ce qu'il y avait un endroit comme ceci ?

11 R. Non. Non, Madame.

12 Q. Y avait-il un bâtiment officiel dans votre village. Je ne parle pas

13 d'un bâtiment religieux, mais je parle d'un bâtiment officiel comme par

14 exemple, je sais que dans une municipalité, il peut aussi juste s'agir de

15 quelque chose comme un centre -- le centre du village ?

16 R. Non, Madame.

17 Q. Donc, si quelqu'un souhaitait communiquer avec les dirigeants de votre

18 village à Hrvacani, ces personnes devaient-elles se rendre dans un autre

19 endroit ?

20 R. La plupart du temps, nous nous rendions à la mosquée, les gens se

21 rassemblaient à la mosquée, en particulier le vendredi pour les prières.

22 Q. Et à la mosquée, y avait-il des hommes et des femmes également ?

23 R. Non. Pas le vendredi, parce que les femmes et les enfants ne peuvent

24 pas assister aux prières des vendredis.

25 Q. Dans une mosquée, est-ce que vous traitiez des affaires courantes et

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1 concernant le village pendant le temps de prière ?

2 R. Non, pas du tout.

3 Q. Non, je ne pense.

4 R. Mais le vendredi cela fait partie de votre religion le vendredi. Cela

5 porte un nom particulier. Les femmes ne sont pas autorisées. Ça s'appelle

6 la Dzuma. Les femmes ne peuvent pas entrer dans la mosquée.

7 Q. Très bien. Je comprends cela. Très bien.

8 R. [aucune interprétation]

9 Q. Mais la question que je vous pose en effet, est-ce que vous discutiez

10 de certaines questions propres au village lors de vos prières à la

11 mosquée ?

12 R. Non, normalement non. Mais s'il y avait quelque chose que nous

13 souhaitions communiquer à d'autres, nous le faisions après la prière.

14 Q. Très bien. Après la prière.

15 R. Oui, tout à fait.

16 Q. Et si les gens dans la municipalité de Kotor Varos souhaitaient vous

17 communiquer des éléments, les dirigeants du village, et cetera, comment

18 faisaient-ils ? Je sais que vous étiez jeune à l'époque.

19 R. Je ne sais pas du tout.

20 Q. Vous avez dit au début que lors des vacances ou du Bajram, un certain

21 nombre de personnes s'étaient rassemblées chez nous, et un homme avait

22 commencé à parler du -- de qui possédait des armes. Et votre père a dit à

23 ce moment-là, que vous-même et votre mère, vous deviez quitter la pièce.

24 R. C'est exact.

25 Q. Et votre père, est-ce quelque chose -- est-ce qu'il s'agissait en fait

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1 d'une fête religieuse, est-ce que c'était normal que votre père vous

2 demande de quitter la pièce alors qu'il s'agissait d'une fête religieuse ?

3 R. Je ne sais pas pourquoi on a quitté la pièce, mais je lui ai obéis

4 parce que je respectais mon père. Il m'a dit, non, qu'il ne fallait pas que

5 l'on reste là. Donc, j'ai fait ce qu'il m'a dit de faire. Je ne souhaitais

6 pas avoir un différend avec lui.

7 Q. Très bien. Est-ce que votre père vous demandait souvent de quitter la

8 pièce comme cela ?

9 R. Oui, s'il y avait quelque chose d'important, oui. Sinon, non.

10 Q. De façon générale, non ?

11 R. Oui, c'est cela.

12 Q. Vous avez également dit dans votre déclaration qu'il y avait plusieurs

13 tentatives en vue d'entrer en contact avec votre sœur ainsi que la sœur

14 d'Akif. Savez-vous pourquoi Akif a tenté d'appeler votre sœur, Kamida --

15 Hamida pardon?

16 R. Parce qu'à ce moment-là, il se trouvait chez nous, dans notre maison.

17 Et moi, j'ai essayé de le contacter et il y avait de la friture sur la

18 ligne, et j'avais du mal. Et à ce moment-là, il m'a dit; est-ce que je peux

19 essayer ? Et il a essayé, mais il y avait beaucoup de gens qui parlaient en

20 même temps. On voulait simplement l'appeler pour savoir si elle allait

21 bien.

22 Q. Et également la sœur d'Akif qui vivait à Vrbanjci, l'a appelé aussi.

23 Savez-vous à quel propos elle l'a appelé ?

24 R. Je ne sais pas exactement pourquoi elle l'a appelé, mais elle l'a

25 appelé pour lui dire qu'il y avait deux chars dans Vrbanjci et qu'elle

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1 n'avait pas eu le temps de le contacter auparavant.

2 Q. Très bien. Akif, vivait-il à Vrbanjci ?

3 R. Non. Il habitait dans la maison à côté de la mienne. C'était mon

4 voisin.

5 Q. Très bien. A un moment donné, vous avez parlé de soldats serbes qui

6 était armés jusqu'aux dents et qui sont arrivés jusqu'à Hrvacani.

7 R. Hrvacani.

8 Q. Hrvacani. Je crois que vous avez dit dans votre déclaration qu'ils

9 avaient dit qu'il ne vous arriverait rien s'ils traversaient ce -- le

10 village. Est-ce exact ?

11 R. Oui, tout à fait.

12 Q. A quel moment ?

13 R. Les gens qui s'enfuyaient en direction de Plitska nous avaient dit

14 cela. Et des gens parlaient.

15 Q. Maintenant, votre frère -- non. Vous aviez 14 ans à l'époque. Pourquoi

16 pensiez-vous que des soldats avaient dit qu'il ne vous arriverait rien

17 s'ils traversaient le village ? Pourquoi avez-vous, à ce moment-là, pensé

18 que cela engendrerait la guerre ?

19 R. Je ne sais pas. Je suis désolé --

20 Q. Mais c'est ce que vous pensiez ?

21 R. C'est ce que j'ai entendu dire, ils avaient fait un pari.

22 Q. Très bien. Et votre frère, Ahmedin ?

23 R. [aucune interprétation]

24 Q. Avant le jour où a éclaté le combat dans votre village, votre frère

25 était enrôlé dans l'armée. C'est exact ?

Page 19466

1 R. Oui, tout à fait.

2 Q. Et l'avez-vous vu -- il avait dû vous dire cela parce que c'est dans

3 votre déposition. Vous dites qu'il a quitté sa formation militaire parce

4 que dans votre village, on l'appelait Chetnik. C'est exact ?

5 R. Oui, c'est exact.

6 Q. C'est lui-même qui vous a dit cela ?

7 R. Oui, tout à fait.

8 Q. Et des gens de votre village ne faisaient pas la distinction entre lui,

9 votre frère, et quelqu'un qui faisait partie de la JNA ? On ne savait pas

10 que ça n'était pas un Chetnik ? Ils ne savaient pas cela, puisque vous

11 aviez tous grandis ensemble ?

12 R. Je ne sais pas.

13 Q. Très bien. Autrement dit, vous dites que si quelqu'un portait

14 l'uniforme, si quelqu'un s'est enrôlé dans l'armée, c'était forcément des

15 Chetniks. C'est exact ?

16 R. Oui.

17 Q. Les villages de Tepici et Savici, qui étaient assez proches de votre --

18 assez près de votre village. Ces villages étaient en contrebas parce que

19 votre village était celui qui était le plus en hauteur ?

20 R. Tepici était au nord de Hrvacani. Ils étaient en fait au même niveau

21 que Savici, et ils étaient un peu plus en contrebas. Et Novakovo et Brdo

22 également.

23 Q. Et vous avez commencé à vous inquiéter quand on a commencé à construire

24 des tranchées. C'est exact ?

25 R. Oui.

Page 19467

1 Q. Vous considérez que la construction des tranchées constitue un élément

2 offensif ou défensif, Monsieur Pasic ?

3 R. Je ne sais pas.

4 Q. Très bien. Vrbanjci est un autre village que vous avez évoqué. Je crois

5 que c'est celui dans lequel vivait votre sœur. Quelle était l'appartenance

6 ethnique des habitants de ce village ?

7 R. [aucune interprétation]

8 Q. Pardonnez-moi, je me suis un peu perdue dans les noms.

9 R. [aucune interprétation]

10 Q. Vous avez dit que la sœur d'Akif vivait à Vrbanjci. Et quelle était

11 l'appartenance ethnique des habitants de ce village ?

12 R. C'était, pour la plupart, des Musulmans. Mais je sais qu'il y avait

13 quelques Croates et quelques Serbes également. Mais je ne peux pas vous

14 donner de chiffres.

15 Q. Très bien. Et à quelle distance cela se situait-il par rapport à

16 Hrvacani ?

17 R. Environ cinq kilomètres.

18 Q. Et vous avez dit qu'un de ces villages, et deux, je crois même, de ces

19 villages -- pardonnez-moi, Tepici et Savici étaient à 100 % serbes --

20 habités par des Serbes. Et Hrvacani qu'en était-il aussi -- était à 100 %

21 musulman. Et Hrvacani était à 100 % musulman ?

22 R. C'est exact.

23 Q. Et je me demande si vous avez un lien de parenté avec un homme du nom

24 d'Ibrahim Pasic, un historien et professeur à l'université de Sarajevo ?

25 R. Non.

Page 19468

1 Q. En lisant toutes vos déclarations, je constate que le nom Pasic est un

2 nom assez courant. Et -- c'est exact ?

3 R. Peut-être vous avez mélangé les deux noms parce que j'ai parlé

4 d'Ibrahim Pasic, mon cousin qui a été tué à Vecici.

5 Q. Oui. C'est vrai que j'ai mélangé les noms un petit peu. Et votre

6 cousin, j'ai réalisé qu'il s'agissait de votre cousin qui avait été tué.

7 Donc, je me posais la question, votre père qui travaillait à Sarajevo avant

8 le début des combats, peut-être que vous aviez un autre parent proche du

9 nom d'Ibrahim Pasic, qui était professeur à l'université de Sarajevo, mais

10 peut-être que vous ne savez pas ?

11 R. Non.

12 Q. Vous êtes sûr que vous ne savez pas ou vous dites simplement que vous

13 ne savez pas ?

14 R. Je ne connais pas un certain Ibrahim Pasic, un professeur. Je n'ai

15 aucune idée.

16 Q. Et connaissez-vous quelqu'un du nom de Sema Pasic ?

17 R. Non.

18 Q. Et Said Pasic ?

19 R. Said Pasic ?

20 Q. Je vais vous dire comment j'ai obtenu ce nom.

21 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]

22 Mme KORNER : [interprétation] Il serait bien de terminer avec ce témoin

23 aujourd'hui. Je crois qu'il serait bien de poser des questions pertinentes.

24 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]

25 Mme BARUCH : [interprétation] J'ai une pièce ici que je souhaite versée --

Page 19469

1 Mme KORNER : [interprétation] Je ne connais pas cette pièce. Je ne l'ai pas

2 vue.

3 Mme BARUCH : [aucune interprétation]

4 Mme KORNER : [interprétation] Et avant de remettre un document au témoin,

5 je souhaite le voir moi-même, s'il vous plaît.

6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien sûr, je ne vais pas laisser au

7 témoin -- laisser le témoin voir ce document. Mais je -- qu'en est-il de la

8 pertinence oubliant nos professeurs d'université, nous savons qu'il ne sait

9 rien à son propos. Il ne s'agit pas simplement du professeur, ensuite Said

10 Pasic. Qu'est-ce que vous essayez d'obtenir de la bouche du témoin ?

11 Mme BARUCH : [interprétation] Je souhaite savoir si le témoin connaissait

12 cet homme qui est devenu -- qui dirigeait la présidence de guerre à Kotor

13 Varos.

14 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Et quand bien même, c'était le cas,

15 qu'est-ce cela changerait ?

16 Mme KORNER : [aucune interprétation]

17 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]

18 Mme BARUCH : [interprétation] Et bien, je pense que ceci est très important

19 puisque cela met un petit peu en perspective les évènements qui ont lieu

20 dans la région. Il y avait une présidence de guerre, et je laisse le soin à

21 toutes les personnes présentes de regarder mes documents.

22 Mme KORNER : [interprétation] Vous savez très bien que l'équipe de la

23 Défense a tout à fait l'occasion de verser ces éléments au dossier. S'ils

24 veulent montrer autre chose, il faut que ce soit pertinent. Mais pour ce

25 témoin-ci, qui était à Vecici ce -- pendant quatre jours, qui avait 14 ans,

Page 19470

1 je pensais qu'il pourrait faire un commentaire à cet égard.

2 Mme BARUCH : [interprétation] Et c'est simplement de savoir s'il connaît

3 cette personne.

4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Connaissez-vous cette personne ?

5 Mme BARUCH : [interprétation] Said Pasic.

6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Avez-vous jamais entendu parler de

7 quelqu'un du nom de Said Pasic ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

9 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Non.

10 Mme BARUCH : [aucune interprétation]

11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ecoutez, il ne peut pas répondre à

12 cette question. Si vous souhaitez poser une question sur la présidence de

13 guerre, faites en sorte que cette question soit posée au moment opportun,

14 mais ne posez pas cette question au témoin qui est devant nous aujourd'hui.

15 Mme BARUCH : [interprétation] Oui.

16 Q. Est-il vrai, Monsieur Pasic, qu'il y avait bon nombre d'habitants de

17 votre village qui s'étaient organisés en une unité militaire de façon à

18 pouvoir venir en aide aux forces armées de Bosnie ?

19 R. Je ne sais pas.

20 Q. Et bien, si je vous citais des noms, pourriez-vous me dire si vous

21 aviez croisé ces gens-là, à Vecici ou non ?

22 R. Peut-être.

23 Q. Namko Turan ?

24 R. Non.

25 Q. Je vais simplement vous donner les noms, puis si vous connaissez

Page 19471

1 quelqu'un que je n'ai pas cité, dites-le moi s'il vous plaît. Alija Mensil

2 [phon], Elmedin Turan, Sead Mensil, Efem Mensil, Sakib Pasic, Akif Pasic,

3 est-ce un de vos cousins ?

4 R. Oui.

5 Q. Et Ibrahim Pasic, c'était votre cousin également ?

6 R. Oui, il est mort.

7 Mme BARUCH : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai une pièce ici qui

8 est une déclaration fournie par l'Accusation en vertu de quoi --

9 Mme KORNER : [interprétation] Pardonnez moi.

10 Mme BARUCH : [interprétation] Puis-je terminer ma phrase ?

11 Mme KORNER : [interprétation] Non, pas devant le témoin. Règle numéro un :

12 Vous devez nous fournir les pièces à l'avance, celle que vous avez

13 l'intention de présenter.

14 Mme BARUCH : [aucune interprétation]

15 Mme KORNER : [interprétation] J'ai déjà soulevé des objections contre la

16 déclaration faite par d'autres témoins et qui sont versées de cette façon.

17 Je m'y oppose. Il ne s'agit pas ici d'une façon communément -- cela n'est

18 pas approprié.

19 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] De quoi s'agit-il ?

20 Mme BARUCH : [interprétation] C'est un document officiel, il s'agit de

21 combattants à Vecici. Et j'ai obtenu ce document de l'Accusation et je

22 souhaite ici le verser au dossier.

23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous rappelle que la procédure veut

24 que vous nous informiez des différents documents et pièces que vous

25 souhaitez verser soit pendant le témoignage du témoin soit des pièces que

Page 19472

1 vous allez utiliser pendant votre contre-interrogatoire.

2 [La Chambre de première instance se concertent]

3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Il s'agit ici d'un document de --

4 s'agit-il d'un document qui a déjà été versé au dossier ou non ?

5 Mme BARUCH : [interprétation] Je ne peux pas répondre à cette question, car

6 je sais simplement que je vais obtenir l'Accusation. C'est un document qui

7 se porte sur Banja Luka et qui vient des services de sûreté de l'état. Mais

8 je ne peux pas dire si cela a été versé au dossier ou non.

9 Mme KORNER : [interprétation] Ecoutez, je suis sûre que c'est vrai. Nous

10 avons remis des milliers de documents. Monsieur le Président, mais ça doit

11 être quelque chose qui porte directement sur le témoin. Tout autre élément

12 ne peut pas être présenté comme élément de preuve à décharge par la

13 Défense. Il faut que ça soit pertinent.

14 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ecoutez, je crois que ce point de

15 départ est le suivant : Le témoin vous a déjà dit, Maître Baruch, qu'il n'a

16 pas eu connaissance de tel, comment appelez ça -- de mouvements de

17 résistance. Je vais me tourner à la page précédente --

18 Mme KORNER : [interprétation] Puis-je avoir le document, s'il vous plaît,

19 celui vous souhaitez verser ?

20 Mme BARUCH : [interprétation] Bien sûr.

21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Quelle était votre question précédente

22 : "Est-ce exact, Monsieur Pasic, de dire qu'un certain nombre d'habitants

23 de votre village s'étaient regroupés pour venir en aide aux forces armées

24 de Bosnie ?"

25 Et il a répond : "Je ne sais pas."

Page 19473

1 Donc, vous pouvez tout à fait verser cette pièce au dossier et -- puisque

2 cela indique qui faisait partie de l'armée.

3 Mme KORNER : [interprétation] Il s'agit ici des soi-disant notes

4 officielles, autrement dit des déclarations faites par les Serbes, et je

5 soulève une objection quant au versement de ces pièces au dossier.

6 M. LE JUGE JANU : [aucune interprétation]

7 Mme KORNER : [interprétation] Ce n'est pas un document qui vient de nous.

8 C'est un document qui s'est trouvé en fait au poste de police, au poste de

9 sécurité publique de Banja Luka et qui est une déclaration de quelqu'un qui

10 cite un certain nombre de noms.

11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ecoutez, s'il s'agit de déclaration de

12 quelqu'un d'autre, il vous a déjà répondu qu'il n'avait pas connaissance

13 d'une telle formation militaire à l'époque. Bon, si vous vous en parlez par

14 la suite.

15 Mme BARUCH : [interprétation] Ecoutez cela prête à confusion. Mme Korner a

16 dit que la seule chose que l'on peut proposer ici, c'est ce sur quoi le

17 témoin avait -- c'est sur quoi le témoin est en mesure de parler puisqu'il

18 était au courant. Je n'ai pas bien retenu la leçon je vois.

19 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Avez-vous d'autres questions ?

20 Mme BARUCH : [interprétation] Oui.

21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Combien de questions ?

22 Mme BARUCH : [interprétation] Pas énormément.

23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous savez qu'il est déjà 13 heures 45

24 et que nous devons terminer avec ce témoin maintenant.

25 Mme BARUCH : [interprétation] Si vous m'accordez encore quelques minutes,

Page 19474

1 je vais pouvoir terminer avec ce témoin.

2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous allons terminer bientôt et je

3 présente mes excuses aux interprètes et à la régie technique.

4 Mme BARUCH : [interprétation] Et que deux erreurs en fait qui se sont

5 glissées ici.

6 Q. Lorsque vous étiez à Bilice, vous avez vu non seulement votre père, et

7 que vous avez dit à cette Chambre qu'il était là pour un seul jour, vous ne

8 lui avez pas posé des questions sur ce qui lui était arrivé. Vous avez

9 également vu votre frère, votre cousin Nihad Mehmedalija, Sakib, Ibrahim,

10 Mustafa et votre oncle Safik, et votre voisin Redzo Pasic et ses fils et

11 son voisin Alija et son frère, Refik, Alija et ils étaient tous à Bilice,

12 c'est exact ?

13 R. Oui c'est exact.

14 Q. Avez-vous vu toutes ces personnes munies d'armes ?

15 R. Non.

16 Q. Toutes ces personnes se sont-elles rendues en direction de Vecici ?

17 R. Je n'ai aucune idée, Madame.

18 Q. Deuxième fois, vous avez parlé de quelqu'un qui vous aurait dit à

19 Vecici qu'il y avait des personnes qui ont été tuées à l'hôpital. Les

20 personnes qui se trouvaient à l'hôpital, vous a-t-on dit que ces personnes

21 avaient été des combattants, n'est-ce pas, d'après vous ?

22 R. Cela n'est pas vrai. Je ne sais pas.

23 Q. Vous ne savez pas si c'étaient des combattants ?

24 R. Je ne sais pas du tout s'il s'agissait de combattants ou non.

25 Q. Est-il vrai de dire aussi que vous n'avez aucune idée, vous ne savez

Page 19475

1 pas ce qui se passait avant -- vous ne savez pas ce qu'il s'est passé dans

2 les heures qui ont précédé leur mort ?

3 R. C'est exact.

4 Mme BARUCH : [interprétation] J'en ai terminé avec ce témoin, Monsieur le

5 Président.

6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Veuillez allumer votre micro, s'il vous

7 plaît. Merci Maître Baruch, Monsieur Pasic. Je souhaite vous remercier en

8 mon propre nom et il n'y a plus de questions.

9 Mme KORNER : [interprétation] Je me serais levée de toute façon.

10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Pardonnez-moi, Madame Korner.

11 Mme KORNER : [aucune interprétation]

12 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous avions un certain nombre de

13 questions à poser, mais je ne pas que -- nous n'avons plus le temps, nous

14 ne pouvons pas le retenir davantage.

15 Mme KORNER : [interprétation] Il sera certainement là, encore demain matin.

16 Donc, si vous souhaitez poser des questions. Vous pouvez le faire demain

17 matin.

18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Non. Je crois que le témoin, est ici

19 depuis assez longtemps déjà. Monsieur le Témoin, au nom de Mme la Juge Janu

20 et la Juge Taya et moi-même, je vous remercie beaucoup d'être venu déposer

21 votre témoignage ici. Ceci a dû être difficile pour vous, j'en suis tout à

22 fait conscient. Et on va vous raccompagner et vous aider à rentrer chez

23 vous dans des conditions confortables et vous allez pouvoir rentrer chez

24 vous le plus rapidement possible. Et je vous souhaite un bon voyage.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

Page 19476

1 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Demain, nous allons démarrer par le

2 témoin BT95, demain.

3 Mme KORNER : [interprétation] Nous allons commencer avec le témoin demain

4 BT95 et le lendemain également.

5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Le lendemain également.

6 Mme KORNER : [interprétation] Oui, le lendemain également ainsi que

7 vendredi. Je dois préciser que c'est un témoin que nous n'avons pas pu

8 préparer mais qui est capable, je crois ou à même de dire la vérité sur un

9 certain nombre de points et cela ne fait aucun doute Me Ackerman, s'il

10 n'est pas au courant, je souhaite, Monsieur le Président, Mesdames les

11 Juges, que vous l'en teniez informé, s'il vous plaît.

12 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]

13 Mme KORNER : [interprétation] Je propose ici, de verser au dossier le

14 compte rendu d'audience qui nous concerne ici, à savoir l'interview.

15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je n'ai encore rien lu à son sujet et

16 mais je vais le faire.

17 Mme KORNER : [interprétation] Nous allons en tout cas vous remettre des

18 exemplaires de ces pièces.

19 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] C'est que, je n'ai encore rien lu à

20 propos de ce témoin.

21 Mme KORNER : [interprétation] Nous allons nous assurer qu'on va vous

22 remettre des exemplaires de ce compte rendu cet après-midi.

23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

24 Mme BARUCH : [interprétation] Est-ce que nous avons un exemplaire de cela ?

25 Mme KORNER : [interprétation] L'Accusation vous a remis ceci déjà.

Page 19477

1 Mme BARUCH : [aucune interprétation]

2 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]

3 Mme KORNER : [interprétation] Et soyez sûr, que Me Ackerman reçoive bien

4 cette liste de pièce, s'il vous plaît. Nous n'avons pas de nouvelle

5 communication. Donc, il faudra vérifier cela -- certaines de ces pièces

6 constituent des pièces nouvellement communiquées et certaines se trouvent

7 déjà dans le classeur qui comprend toutes ces pièces.

8 Mme BARUCH : [interprétation] Merci beaucoup. Je vais m'entretenir de cela

9 avec vous après l'audience.

10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci. L'audience est levée.

11 --- L'audience est levée à 13 heures 53 et reprendra le mardi 15 juillet

12 2003, à 9 heures 00.

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