Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 15 juin 2009

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusée est introduite dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 28.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur MacFarlane.

  6   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs

  7   les Juges.

  8   Comme je l'ai mentionné, mes propos liminaires seront brefs et concis. Il

  9   s'agit d'une affaire qui est assez simple.

 10   L'ordonnance tenant lieu d'acte d'accusation pour outrage au Tribunal

 11   présente les éléments très clairement, et je voudrais donc vous présenter

 12   cette affaire et vous dire de quoi il en retourne et vous dire quels sont

 13   les éléments qui ne sont pas pertinents à cette affaire.

 14   Il s'agit dans cette affaire de quatre éléments-clés, quatre points

 15   centraux. Pour ce qui est du livre en question, "Paix et châtiment," afin

 16   de savoir si ce livre divulgue des informations confidentielles, en

 17   d'autres termes, l'actus reus de cet outrage au Tribunal. Et deuxièmement,

 18   en ce qui concerne le livre, nous voulons savoir si lorsqu'il y a le

 19   troisième et le quatrième point qui portent sur l'article en question,

 20   l'article de l'institut du "Bosnian Institute" et à savoir si cette

 21   divulgation a été faite d'informations confidentielle, l'actus reus donc a

 22   été fait sciemment. Ce sont les quatre éléments. Par conséquent, durant

 23   tout le procès, je demanderais à cette Chambre de première instance de

 24   s'assurer que nous axons nos délibérations ici sur ces quatre points, parce

 25   que les décisions concernant ces quatre points seront les éléments

 26   principaux.

 27   Maintenant, j'aimerais vous parler des éléments qui ne sont pas en partie

 28   pertinents à l'affaire, car il est très facile dans ce type d'affaire de

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  1   partir dans des voies tangentes et d'arriver dans des zones qui ne sont pas

  2   du tout pertinentes et qui vont faire de l'ombre à ce qui est mentionné

  3   dans l'ordonnance tenant lieu d'acte d'accusation, à savoir cette affaire

  4   ne porte pas sur le conflit terrible qui s'est produit dans l'ex-

  5   Yougoslavie. Ça ne portera pas non plus sur les atrocités qui se sont

  6   produites dans cette zone. Il n'est pas question non plus de savoir qui est

  7   responsable ou qui était responsable dans ce conflit. On ne parlera pas non

  8   plus des questions politiques de la région. Il ne s'agit pas de savoir si

  9   l'accusée, Florence Hartmann, a reçu un traitement spécial étant donné

 10   qu'elle était anciennement employée de cette organisation. Il ne s'agit pas

 11   non plus de savoir si elle aurait droit à un traitement différent étant

 12   donné qu'elle est journaliste. Je ne pense pas que cette affaire porte sur

 13   cela. Il ne s'agit pas de savoir non plus ce que les médias ont dit ou

 14   diront sur cette affaire. Il ne s'agit pas non plus de prendre en compte

 15   les opinions des différents individus concernant le fait que l'accusée a

 16   été impliquée dans cette procédure ouverte.

 17   A l'issue de la présentation des éléments de preuve, je pense que nous

 18   pourrons prouver que les mesures prises par l'accusée et les propos ou les

 19   termes utilisés, les commentaires utilisés dans cette publication n'étaient

 20   pas faits par inadvertance et n'étaient pas non plus faits par accident

 21   mais étaient délibérés.Je pense que les éléments de preuve montreront que

 22   ses propres propos sont les éléments pertinents de cette procédure et qu'il

 23   s'agissait d'une déclaration de défi. Et si les éléments de preuve prouvent

 24   cela, je pense que cette affaire portera sur la responsabilité. Cette

 25   affaire se concentrera sur ses propres propos, non pas sur ce que quelqu'un

 26   d'autre a fait, non pas sur ce que ceux qui sont impliqués dans cette

 27   procédure ont fait ou n'ont pas fait.

 28   Ça va se concentrer sur ses propres propos, ses propres mots qu'elle

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  1   a décidé de publier. Et je m'attends à ce qu'en fin de la procédure, la

  2   question ne portera pas tellement sur l'actus reus ni sur la publication

  3   elle-même car ce n'est pas ça qui est en jeu. Ce qui est en jeu, c'est la

  4   mens rea, l'intention délictueuse, si elle savait ce qu'elle faisait, si

  5   elle l'a fait de manière délibérée et en connaissance de cause. Je

  6   m'attends à ce que les éléments de preuve présentés tout au long de ce

  7   procès vont prouver cela sans aucun doute.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  9   Maître Khan.

 10   M. KHAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les

 11   Juges.

 12   Mon éminent collègue a souligné avec raison qu'il est nécessaire que l'on

 13   ne soit pas détourné de notre chemin dans cette procédure, et la Défense

 14   est d'accord. La Défense considère que les Juges de cette Chambre ont eu le

 15   privilège de siéger dans des procès bien plus complexes tout au long des

 16   années, bien plus complexes que celle-ci et il n'y a pas de danger de se

 17   perdre dans des chemins annexes. Mais ce que mon éminent collègue dit

 18   également -, et je suis d'accord encore une fois - c'est qu'il faut que

 19   l'on se concentre sur les propos de mon client, Mme Hartmann. Et à mon

 20   avis, c'est justement ce que mon éminent collègue a omis de faire dans son

 21   incarnation précédente d'Amicus Curiae, d'enquêteur amicus, plutôt, dans

 22   cette affaire.

 23   Quels sont les mots utilisés par mon client qui peuvent être

 24   pertinents ? Commençons en citant son entretien du 22 mai 2008, entretien

 25   dans lequel elle a dit :

 26   "Je suis extrêmement surprise et dévastée en raison de cette procédure

 27   devant le Tribunal. J'ai travaillé pendant des années sans compter des

 28   heures que j'ai investies afin de servir le Tribunal au détriment de ma

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  1   famille et de mes enfants, et je me suis acquittée de mon travail de telle

  2   manière que personne ne pouvait douter de mon engagement, ce qui est allé

  3   certainement au-delà de ce que mon employeur, les Nations Unies, ont

  4   demandé avec une rigueur intellectuelle reconnue par de nombreux

  5   observateurs."

  6   Elle a continué à la page 4 des dix de cet entretien. Je cite :

  7   "S'agissant de ma carrière, si je peux continuer, je rejette avoir jamais

  8   violé une quelconque disposition de la loi et j'affirme que je n'ai jamais

  9   essayer d'entraver le cours de la justice de quelque manière que ce soit de

 10   manière délibérée et en connaissance de cause."

 11   Je vais lire encore un paragraphe, elle continue :

 12   "Je prends note du fait que les informations contenues dans mon livre,

 13   autrement dit les documents mentionnés dans ce dossier qui m'a été

 14   communiqué par mon conseiller, M. Bourdon, ont été communiqués, ont été

 15   divulgués. Bien des informations étaient disponibles parfois depuis des

 16   années alors que le Tribunal n'a pas du tout réagi face à cela."

 17   Ensuite elle a cité de nombreux documents.

 18   Mon éminent collègue a commencé à travailler dans cette affaire

 19   tardivement dans la procédure, et d'après cet entretien nous voyons que ma

 20   cliente fait référence aux documents, détails, documents qui n'ont même pas

 21   été traduits à mon éminent collègue et qui n'ont pas été présentés à la

 22   Chambre de première instance spécialement nommée précédemment.

 23   A mon avis, il n'est pas possible certainement de douter de

 24   l'intégrité et du niveau de qualité maximal de la Chambre spécialement

 25   nommée, mais cette Chambre a été handicapée en raison d'un dossier

 26   incomplet.

 27   Soyons clairs, les deux décisions confidentielles qui font l'objet de

 28   cette procédure n'ont jamais été lues à ma cliente à l'époque où elle

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  1   travaillait en tant que porte-parole du Procureur de l'époque, Mme Carla

  2   Del Ponte. En réalité, la première fois que ces décisions ont été lues,

  3   c'était lorsqu'elle les a reçues de la part de mon éminent collègue qui est

  4   assis en face. Et il ne s'agit pas ici d'une affirmation de ma part, car

  5   ceci fait l'objet d'un accord entre les parties. Et j'attire votre

  6   attention sur le 7 février, sur les faits qui font l'objet d'un accord en

  7   date du 7 février.

  8   Et je vous indique que Mme Hartmann n'a jamais été informée de ces

  9   décisions pendant qu'elle était porte-parole de l'Accusation. Elle n'a

 10   jamais parlé à la presse, il n'y a pas eu de réunions d'information données

 11   par elle par rapport à ces décisions, et il n'y a pas d'éléments de preuve

 12   indiquant que mon éminent collègue a l'intention de vous présenter d'autres

 13   éléments afin de contester ces affirmations.

 14   Il est important de noter également que s'agissant de la deuxième décision,

 15   celle du 6 avril, ma cliente a quitté son travail trois jours plus tard, et

 16   encore une fois ceci ne fait pas l'objet de controverse. Il s'agit d'un

 17   fait qui fait partie d'un accord sur les faits, comme indiqués dans le

 18   document du 6 février 2009. Elle est partie de son travail le 3 avril de

 19   cette année. Donc la décision a été rendue trois jours après son départ.

 20   Cette affaire ne concerne pas l'abus des fonctions ou de confiance comme

 21   c'était le cas dans la plupart des affaires d'outrage menées devant ce

 22   Tribunal.

 23   Mon éminent collègue accepte aussi, dans ce document du 7 février

 24   2009, que ma cliente n'a pas agi avec des motivations répréhensibles.

 25   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, à la fin de l'affaire,

 26   nous vous demanderons de prendre du recul pour prendre en considération les

 27   éléments de preuve dans leur intégralité. Et à notre avis, vous constaterez

 28   qu'il y avait constamment une érosion dans la présentation des moyens à

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  1   charge. Depuis le premier rapport soumis par l'Accusation, il y a eu une

  2   érosion de l'affaire qui est allée dans le sens des allégations soulevées

  3   dans les documents contenus dans le mémoire préalable au procès.

  4   Et à la fin de l'affaire, la Défense considère et croit que cette

  5   Chambre constatera que mon éminent collègue n'a pas prouvé au-delà de tout

  6   doute raisonnable la responsabilité de l'accusée.

  7   Lorsqu'il s'agit de l'évaluation des paramètres de cette affaire, bien sûr,

  8   il faut tenir compte qu'il s'agit ici du délit d'outrage qui n'est pas un

  9   délit de responsabilité stricto sensu, il s'agit techniquement d'une

 10   violation d'un ordre confidentiel. Et au nom de Mme Hartmann, nous pouvons

 11   dire, nous pouvons revenir sur les quatre faits mentionnés par

 12   l'Accusation, à savoir le premier fait, l'existence des décisions

 13   confidentielles; le fait que ces décisions étaient confidentielles;

 14   l'identité de la partie qui a eu l'initiative; et quatrièmement, les

 15   mesures de protection accordées par rapport au document.

 16   Tous ces faits, il a été prouvé, ont été rendus publics.

 17   Donc la Défense considère qu'il n'y a pas eu de violation de

 18   confidentialité et qu'il n'est pas du tout, dans ce cas-là -- enfin, nous

 19   ne disons pas qu'il est permis de publier tous les documents sans aucune

 20   retenue, mais nous considérons que nous ne disons pas que les journalistes,

 21   de manière unilatérale, peuvent décider de leur propre gré ce que le public

 22   doit savoir et ce que le public ne doit pas savoir. Nous sommes tout à fait

 23   d'accord pour dire que ces décisions constituent les déterminations de la

 24   Chambre de première instance. Nous considérons que les Juges de ce Tribunal

 25   ont rendu publiques ces décisions eux-mêmes.

 26   Nous allons prouver par le biais de documents publics que les Juges

 27   de ce Tribunal ont rendu publiques ces décisions. Nous allons traiter de ce

 28   qu'ils ont fait par rapport aux décisions confidentielles. Nous allons

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  1   faire référence le moment venu à la décision dans l'affaire Milutinovic

  2   rendue par la Chambre d'appel en 2006, les décisions de 2007, ensuite il y

  3   a la décision de la Chambre de première instance Milosevic de 2004.

  4   Et quel est l'argument de la Défense ? Il est sans équivoque. La Défense

  5   considère que le Tribunal et les Juges de ce Tribunal ont l'autorité leur

  6   permettant de modifier les ordres confidentiels, mais le Règlement ne dit

  7   rien sur la forme par le biais de laquelle les ordres confidentiels doivent

  8   être levés. Donc il revient à la Chambre de prendre une décision formelle

  9   afin de rendre publique une décision confidentielle.

 10   A notre avis, à la fin de l'affaire, la Chambre pourra constater que le

 11   Tribunal, de son propre gré, peut décider de lever la nature confidentielle

 12   d'une décision dans sa totalité ou s'agissant de certaines parties de la

 13   décision.

 14   Ceci est corroboré d'ailleurs par les propos tenus par le Juge Moloto

 15   lui-même. Si nous examinons la décision -- peut-être il faut se rappeler

 16   que le 19 mai 2009, cette Chambre a rendu une décision confidentielle

 17   concernant la requête de la Défense qui demandait de faire appel contre une

 18   décision portant sur une ordonnance contraignante soumise au greffe. Il n'y

 19   a pas de doute ni de contestation à ce sujet-là. Mais vous, Monsieur le

 20   Président, au cours de la Conférence de mise en état ce même jour, après

 21   que la décision a été rendue publique, vous avez fait référence à

 22   l'existence de cette décision mentionnant que cette décision avait été

 23   confidentielle.

 24   Et personne n'a jamais suggéré que ceci n'a pas été approprié et que

 25   le Règlement aurait été violé ainsi. La Défense considère que même

 26   s'agissant d'un cas d'aussi petite envergure, il est clair que la Chambre

 27   de première instance est en mesure de lever la nature confidentielle d'une

 28   décision ou lever cette nature dans la mesure dans laquelle la Chambre a

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  1   décidé de le faire. Or, il s'agit ici d'une partie importante de la thèse

  2   de la Défense, comme vous l'entendrez.

  3   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, lorsque vous allez prendre en

  4   considération -- mais avant je veux dire que contrairement à ce que disait

  5   mon éminent collègue, ceci concerne directement l'actus reus lié au délit,

  6   qui est tout à fait en jeu ici, car à notre avis, il est nécessaire de

  7   prouver l'actus reus de la levée de la confidentialité. Donc nous

  8   contestons sans équivoque l'actus reus. Effectivement, comme mon éminent

  9   collègue devrait savoir, il a reçu le mémoire préalable au procès, nous

 10   avons clairement indiqué qu'à moins qu'il renonce à cela, nous allons

 11   contester chaque aspect de cette affaire. Donc nous demandons à

 12   l'Accusation de prouver de manière très stricte tous les aspects liés à

 13   l'actus reus et au mens rea.

 14   Deuxième point, Monsieur le Président, Messieurs les Juges. Il est

 15   nécessaire de noter que la personne, ou plutôt, l'Etat qui a demandé les

 16   mesures de protection mentionnées avait renoncé à une telle

 17   confidentialité. De l'avis de la Défense, comment est-ce que celui qui a

 18   demandé la confidentialité puisse aller à droite et à gauche et parler des

 19   mêmes faits, alors qu'une journaliste qui répète ces mêmes faits doit être

 20   tenue pour responsable au pénal ?

 21   Lors d'une session publique tenue devant la Cour de justice

 22   internationale, l'un des organes principaux des Nations Unies, le

 23   représentant de la Serbie et du Monténégro, a publiquement dit le 8 mai

 24   2006 dans l'affaire de génocide, et je cite :

 25   "Madame la Présidente," à l'époque, c'était le Juge Rosalyn Higgins,

 26   "Madame la Présidente, avec tout le respect que je dois à cette Cour

 27   honorable, les représentants de la Serbie et du Monténégro n'ont pas le

 28   droit de discuter du contenu des parties expurgées des documents du 

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  1   conseil suprême de la Défense pour deux raisons sérieuses."

  2   Je vais faire une pause, ici. Je prends note du fait que le contenu est

  3   mentionné ici et, Monsieur le Président, ce représentant, il dit que l'une

  4   des raisons est que les parties expurgées ont été classifiées par le

  5   conseil suprême de la Défense en tant que secret militaire et, en vertu

  6   d'une décision confidentielle du conseil des ministres de la Serbie-et-

  7   Monténégro, en tant que question liée à la sécurité nationale; et

  8   deuxièmement, en raison du fait que les sections expurgées de ces documents

  9   font l'objet des mesures de protection imposées par le biais d'un ordre

 10   confidentiel du Tribunal pour l'ex-Yougoslavie.

 11   Mais il est important de noter que cette partie n'avait pas demandé de

 12   mesures de protection et les mesures ne lui ont pas été accordées. Donc la

 13   Serbie-et-Monténégro avaient déposé cette demande. Ensuite il faut se

 14   pencher sur les raisons de cette demande, et quatrièmement, sur la question

 15   de savoir si les mesures étaient accordées, leur nature confidentielle

 16   devait rester en vigueur.

 17   Or, à notre avis, la Chambre d'appel qui a rendu les décisions à

 18   l'origine n'a pas traité de cette question.

 19   S'agissant du mens rea, la nature publique des décisions est pertinente. Il

 20   ne s'agit pas ici d'une proclamation de défi comme craint mon éminent

 21   collègue. Il s'agit ici d'une question liée à l'intention.

 22   Six mois avant que le livre de ma cliente a été publié, deux journaux de

 23   diffusion mondiale, le "New York Times" et le "International Herald

 24   Tribune," le 9 avril 2007, avaient publié des articles qui citaient

 25   exactement les mêmes faits que ceux inclus dans le livre de ma cliente et

 26   on n'a même pas entendu un mot soufflé dans les couloirs de ce Tribunal

 27   pour dire que le "New York Times" ou "International Herald Tribune" avaient

 28   commis un outrage au Tribunal. Or, ici il s'agit de deux journaux de

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  1   diffusion énorme dont le monde ont parlé, ont critiqué ces mêmes décisions

  2   que ma cliente, en tant que journaliste, a inclus par la suite dans son

  3   livre.

  4   Il est important de faire une distinction - et nous traiterons de

  5   cela de manière supplémentaire à la fin - concerne la pratique judiciaire

  6   de ce Tribunal. Par exemple, les affaires Haxhiu et d'autres portant, par

  7   exemple, sur la publication du nom d'un témoin. Or, cette affaire est

  8   différente des autres à bien des égards.

  9   Pendant six mois, rien n'a été fait. Ma cliente considère qu'elle a

 10   agi de manière légitime et appropriée. Et la Défense d'ailleurs l'établira

 11   qu'il n'y a pas eu d'intention délictueuse.

 12   Le 9 mars 2007, de manière semblable, "the Institute of War and Peace

 13   Reporting" avait soumis un article détaillé où l'on disait pratiquement les

 14   mêmes choses que celles que l'on attribue maintenant à ma cliente en

 15   indiquant qu'il s'agit d'une violation pénale de ses responsabilités devant

 16   ce Tribunal. Le même argument s'applique ici. Il s'agit des documents 2 et

 17   3 de la liste 65 ter, intercalaires 2 et 3 de la liste 65 ter.

 18   Et il est important de noter que même en 2005, le 17 mai 2005, même si la

 19   Chambre de première instance avait rendu ses ordres, il y avait une longue

 20   enquête menée par "the Institute of War and Peace Reporting," un très long

 21   rapport contenu dans l'intercalaire 14, dans lequel toutes ces questions

 22   font l'objet de nombreux commentaires.

 23   Nous allons présenter l'argument que le mens rea n'a pas été prouvé.

 24   Et s'agissant des privilèges de journalistes --

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vais vous rappeler, il ne s'agit

 26   pas ici d'une plaidoirie, mais des propos liminaires. Rien n'a été prouvé

 27   encore.

 28   M. KHAN : [interprétation] Lorsque l'on se penche sur la thèse de

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  1   l'Accusation, il faut voir cela à travers le prisme du fait que ce Tribunal

  2   a été établi conformément aux normes les plus élevées de la justice

  3   internationale et que ce Tribunal pourra se pencher sur les éléments de

  4   toutes les affaires avec le plus grand soin.

  5   Afin de condamner ma cliente, mon éminent collègue devra persuader cette

  6   Chambre d'oublier la pratique judiciaire émanant de la Cour européenne des

  7   droits de l'homme. Il existe les affaires telles que Webber, l'affaire de

  8   "Sunday Times" ou de "The Observer." Dans chacune de ces affaires, la Cour

  9   européenne des droits de l'homme a été tout à fait claire en disant qu'il

 10   est nécessaire de se pencher sur un certain nombre d'éléments parmi

 11   lesquels le droit des journalistes d'être les chiens de garde d'une société

 12   démocratique et pluraliste, non pas seulement sur le plan exécutif, mais

 13   aussi dans le domaine de la législation et le domaine judiciaire.

 14   Puis lorsque l'on tient compte du fait que l'outrage n'est pas

 15   mentionné dans le Statut de ce Tribunal, mais relève de vos autorités

 16   impliquées vous permettant d'exercer votre mandat, il est d'une importance

 17   critique de n'aller pas au-delà de ce qui est nécessaire ni de déplacer les

 18   limites de la responsabilité pénale par rapport à la liberté de

 19   l'expression.

 20   Tous les aspects de la thèse de l'Accusation vont être réfutés. Les témoins

 21   que nous allons citer à la barre, Natasa Kandic, M. Joinet et Nura

 22   Alispahic, montreront que d'après les normes internationales des droits de

 23   l'homme, la liberté des journalistes constitue un droit. C'est ce qui est

 24   corroboré par le biais des affaires menées à Strasbourg. Et nous vous

 25   demanderons, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, de ne pas dévier

 26   de cette pratique judiciaire. Si tel est le cas, ma cliente sera acquittée.

 27   C'est tout ce que j'avais à dire lors de mes propos liminaires,

 28   Monsieur le Président.

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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Khan.

  2   Avant que vous ne citiez à la barre votre témoin, Monsieur MacFarlane, vous

  3   avez soulevé une autre question et je ne pense pas que nous ayons pris une

  4   décision finale, mais je souhaite vous indiquer notre position. Je souhaite

  5   simplement vous dire que Me Khan a indiqué le nombre de témoins qu'il

  6   allait citer à la barre, mais maintenant il dit qu'il va citer à la barre

  7   trois témoins; c'est cela, est-ce que vous pouvez traiter d'une telle

  8   situation ?

  9   M. MacFARLANE : [interprétation] Oui. Merci beaucoup.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous pouvez citer à la barre votre

 11   témoin.

 12   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour, Monsieur.

 14   LE TÉMOIN : Bonjour.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pouvez-vous, s'il vous plaît, lire la

 16   déclaration.

 17   LE TÉMOIN : Je déclare solennellement que je dirai la vérité, toute la

 18   vérité et rien que la vérité.

 19   LE TÉMOIN : YORRIC FELIX KERMARREC [Assermenté]

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Vous pouvez prendre place.

 21   Monsieur MacFarlane.

 22   M. MacFARLANE : [interprétation] Monsieur le Président, merci.

 23   Interrogatoire principal par M. MacFarlane : 

 24   Q.  [interprétation] Monsieur, j'ai cru comprendre que vous travaillez pour

 25   une entreprise située à Paris et qui s'appelle Flammarion.

 26   R.  [interprétation] Oui.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Khan.

 28   M. KHAN : [interprétation] Peut-être qu'avant de poursuivre, le témoin n'a

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  1   pas décliné son identité et à la page 27, ligne 2, ce témoin est identifié

  2   comme étant M. Robin Vincent, ce qui n'est, bien entendu, pas exact.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur MacFarlane.

  4   M. MacFARLANE : [interprétation]

  5   Q.  Monsieur, pourriez-vous décliner votre identité devant ce Tribunal.

  6   R.  Kermarrec, mon prénom est Yorric. Vous voulez ma date de naissance ? Je

  7   suis né le 12 novembre 1969.

  8   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Si vous pouviez nous épeler votre nom

 10   pour que nous puissions l'écrire, Monsieur, s'il vous plaît.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] K-e-r-m-a-r-r-e-c --

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 13   Est-ce que c'est votre nom de famille ou votre prénom ?

 14   LE TÉMOIN : Nom de famille.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Quel est votre prénom, s'il vous plaît

 16   ?

 17   LE TÉMOIN : Yorric. Y-o-r-r-i-c.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

 19   Monsieur MacFarlane, vous pouvez poursuivre.

 20   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci.

 21   Q.  Monsieur, j'ai cru comprendre que vous travaillez pour une entreprise

 22   du nom de Flammarion sise à Paris.

 23   R.  Absolument. Je travaille pour Flammarion dont le siège social est à

 24   Paris.

 25   Q.  Pouvez-vous nous décrire la nature de cette entreprise ?

 26   R.  Flammarion est une entreprise d'édition, de diffusion et de

 27   distribution de livres.

 28   Q.  Pouvez-vous nous décrire l'entreprise et nous dire quelle est

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  1   l'importance de cette entreprise, la taille ?

  2   R.  Flammarion est le cinquième éditeur français, en fait, chez les

  3   éditeurs généralistes.

  4   Q.  Pouvez-vous expliquer à la Chambre votre poste au sein de cette

  5   entreprise ?

  6   R.  Je m'occupe principalement des questions juridiques pour Flammarion.

  7   Q.  J'ai cru comprendre qu'en 2006, fin 2006, Flammarion a entamé des

  8   discussions avec l'accusée devant cette Chambre en vue de la publication

  9   d'un livre; est-ce exact ?

 10   R.  Exact, oui.

 11   Q.  Est-ce que ces discussions ont mené à la signature d'un contrat

 12   d'édition ?

 13   R.  Ces discussions ont mené à la signature d'un contrat d'édition décembre

 14   2006.

 15   Q.  La date exacte était le…

 16   R.  La date exacte est le 20 décembre 2006.

 17   Q.  Quel était le nom du livre qui était proposé à ce

 18   moment-là ?

 19   R.  Le nom qui apparaît dans le contrat est "Dans les coulisses du Tribunal

 20   de La Haye."

 21   Q.  Ensuite, j'ai cru comprendre que l'on a ensuite opté pour un nom

 22   différent ?

 23   R.  Oui, le titre du livre est "Paix et châtiment."

 24   Q.  Y avait-il d'autres personnes qui ont signé ce contrat ou qui ont

 25   participé aux discussions, ou est-ce que l'accusée était le seul et unique

 26   auteur ?

 27   R.  Il y a deux questions, au fait, dans votre question. Parce que je crois

 28   qu'il y a eu un agent qui a participé aux discussions du contrat, que

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  1   Florence Hartmann avait pris un agent. En revanche, Florence Hartmann est

  2   le seul auteur de ce livre.

  3   Q.  Le contrat qui a été versé devant cette Chambre parle d'une somme qui

  4   aurait été avancée, d'une avance financière faite par Flammarion concernant

  5   ce livre. Est-ce que vous pouvez nous dire s'il y a effectivement eu une

  6   avance ?

  7    R.  Absolument, oui. L'avance qui est prévue au contrat a été versée à

  8   Florence Hartmann en deux fois, comme c'est prévu au contrat. La moitié à

  9   la signature du contrat et la seconde moitié a été versée à la date de

 10   publication.

 11   Q.  Merci. Et si j'ai bien compris, dans le cadre de cet accord de

 12   publication, il y avait des royalties, c'est-à-dire qu'il était prévu

 13   qu'une partie des fonds pour ce livre serait versée à l'auteur sous forme

 14   de royalties ou de redevance; est-ce exact ?

 15   R.  Oui, oui, c'est exact.

 16   Q.  Pourriez-vous dire à la Chambre, nous dire quelques mots sur le nombre

 17   de ventes de ce livre, les statistiques les plus récentes dont vous

 18   disposiez ?

 19   R.  Au 8 juin, on a constaté qu'il y avait 3 799 ventes nettes de

 20   l'ouvrage.

 21   Q.  Est-ce que ce livre continue de se vendre activement par Flammarion ?

 22   R.  [aucune interprétation]

 23   Q.   Pourriez-vous nous dire ce qu'il en est des ventes ou d'autres

 24   éditions dans d'autres pays ? En d'autres termes, est-ce que Flammarion a

 25   des droits sur d'autres publications dans d'autres langues et dans d'autres

 26   pays ou non ?

 27   R.  Flammarion ne dispose que des droits en langue française et les droits

 28   de traduction à l'étranger ont été conservés par Mme Hartmann.

Page 135

  1   Q.  Merci.

  2   M. MacFARLANE : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur

  3   le Président.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci infiniment, Monsieur MacFarlane.

  5   Oui, Monsieur Khan, M. Mettraux.

  6   M. METTRAUX : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Bonjour,

  7   Monsieur Kermarrec.

  8   Président, avant de commencer, nous avons un certain nombre de classeurs et

  9   de documents que nous envisageons d'utiliser dans le contre-interrogatoire

 10   de M. Kermarrec et de M. Vincent, et avec votre permission nous

 11   souhaiterions distribuer ces classeurs.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur.

 13   M. METTRAUX : [interprétation] Il existe également une copie pour chacun

 14   des Juges, pour le greffe et également pour notre confrère de l'Accusation

 15   et pour le témoin.

 16   Contre-interrogatoire par M. Mettraux :

 17   M. METTRAUX : [interprétation] Merci beaucoup, et mes excuses.

 18   Q.  [interprétation] Monsieur Kermarrec, il y a quelques instants, vous

 19   avez parlé avec le Procureur du processus de négociation d'un accord

 20   d'édition entre vous-même, Flammarion, et Mme Hartmann. Etiez-vous partie à

 21   ces négociations ?

 22   R.  Non.

 23   Q.  Et pourriez-vous peut-être nous indiquer qui, au nom de Flammarion,

 24   était responsable de cela ?

 25   R.  La responsabilité incombait à Gilles Haeri.

 26   Q.  Y avait-il d'autres personnes chez Flammarion qui aient discuté avec

 27   Mme Hartmann concernant cet accord ?

 28   R.  L'éditeur direct de Florence Hartmann, c'était Fannie Chevrier qui a

Page 136

  1   négocié et qui a suivi le processus éditorial.

  2   Q.  Pourriez-vous peut-être nous expliquer brièvement pourquoi est-ce que

  3   Flammarion considérait qu'il faudrait ou qu'il serait intéressant de

  4   publier le livre de Mme Hartmann ? Pourriez-vous nous l'expliquer ?

  5   R.  Florence Hartmann est, pour Flammarion, elle était avant les

  6   négociations l'une des spécialistes des questions de justice internationale

  7   et des questions relatives au conflit en Serbie. Elle avait été journaliste

  8   au "Le Monde." Elle avait suivi tous ces  cas en tant que journaliste. Elle

  9   avait publié un ouvrage chez  [inaudible] en 1999 sur Milosevic, puis elle

 10   avait, bien entendu, eu le rôle de porte-parole de Carla Del Ponte; c'est

 11   la raison pour laquelle on a souhaité publier son ouvrage.

 12   Q.  Et est-ce que vous, et par "vous", j'entends Flammarion, est-ce que

 13   vous pensiez que ceci serait de l'intérêt que cet ouvrage, l'ouvrage que

 14   vous-même et Mme Hartmann négociiez, serait d'intérêt public ?

 15   R.  Oui, il s'agit, où il y a eu un débat politique fort autour des

 16   questions de l'intervention de la justice internationale et, enfin, sur les

 17   génocides qui ont été commis en ex-Yougoslavie. Il est évident pour nous,

 18   ça revêtait un intérêt général extrêmement fort.

 19   Q.  Et pour le compte rendu d'audience simplement, à la page 21 [comme

 20   interprété], ligne 25, il faudrait lire "of public interests".

 21   De façon générale, Monsieur Kermarrec, est-ce que les livres publiés par

 22   Flammarion sont protégés par la liberté d'expression ?

 23   R.  Tous les ouvrages sont protégés, sont effectivement protégés par la

 24   liberté d'expression.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Si c'est un moment qui vous convient -

 26   -

 27   M. METTRAUX : [interprétation] Monsieur le Président, à tout moment qui

 28   vous conviendrait.

Page 137

  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien, nous allons prendre une pause

  2   jusqu'à moins quart, donc nous reviendrons à onze heures moins le quart.

  3   --- L'audience est suspendue à 10 heures 16.

  4   --- L'audience est reprise à 10 heures 47.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Mettraux.

  6   M. METTRAUX : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  7   Q.  Monsieur Kermarrec, avant la pause je vous avais posé des questions sur

  8   le livre publié par Flammarion en vous demandant s'il était couvert par le

  9   principe de liberté d'expression, et vous avez dit que c'était bien le cas.

 10   Vous en souvenez-vous ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Puis-je considérer que cela est peut-être également le cas concernant

 13   l'ouvrage publié par Mme Hartmann; est-ce exact ?

 14   M. MacFARLANE : [interprétation] Monsieur le Président, si vous le

 15   permettez.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur MacFarlane.

 17   M. MacFARLANE : [interprétation] Je pense qu'il y a une question importante

 18   que nous devrions traiter, que j'aimerais soulever maintenant, à savoir que

 19   le témoin est cité comme témoin de faits et non pas comme expert, et il

 20   semble que nous allions de plus en plus dans le sens de la liberté

 21   d'expression, à savoir est-ce que  ce livre est couvert par la liberté

 22   d'expression, quels sont les points de vue de Flammarion en la matière. Il

 23   me semble qu'il s'agit là de questions qu'il appartient à la Chambre de

 24   voir en temps voulu, et elles ne sont pas vraiment du domaine du droit. Et

 25   ce qui m'inquiète c'est qu'il semble que nous allions dans une direction

 26   qui ne me semble pas appropriée, c'est la raison pour laquelle je

 27   souhaitais soulever ce point.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Mettraux.

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  1   M. METTRAUX : [interprétation] Monsieur le Président, souhaitez-vous que je

  2   réponde ou est-ce que je vais poursuivre ?

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous pouvez répondre.

  4   M. METTRAUX : [interprétation] Je peux rassurer la Chambre, je ne vais pas

  5   demander à M. Kermarrec de tirer des conclusions d'expert, je ne demande

  6   pas non plus de conclusions d'ordre juridique, conclusions que la Chambre

  7   pourrait vouloir faire ou ne pas faire à la fin de cette affaire. Ce que

  8   j'essaie d'obtenir de ce témoin c'est la confirmation d'un certain nombre

  9   de faits qui concernent son travail en tant que conseiller juridique de

 10   Flammarion. C'est la raison pour laquelle il a été appelé.

 11   Il y a des personnes chez Flammarion qui auraient peut-être été pertinents

 12   sur le plan des faits chez Flammarion et qui auraient participé à cet

 13   accord. Ces personnes n'ont pas été appelées. Mais cette personne a été

 14   appelée comme étant un directeur chez Flammarion. Et c'est la raison pour

 15   laquelle il a été appelé, donc je lui pose des questions qui concernent son

 16   travail.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci dans la mesure où vous n'allez

 18   pas dans la direction de l'expertise.

 19   M. METTRAUX : [interprétation] Ce sera le cas, Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 21   M. METTRAUX : [interprétation]

 22   Q.  Pourriez-vous nous indiquer, pour compléter la réponse que vous nous

 23   avez donnée il y a quelques instants, pourquoi il est important du point de

 24   vue d'un éditeur comme Flammarion, que vos publications soient protégées

 25   par le principe de la liberté d'expression ? Pourriez-vous nous expliquer

 26   brièvement pourquoi cela est important et pourquoi cela est pertinent en ce

 27   qui vous

 28   concerne ?

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  1   R.  La liberté d'expression pour un éditeur c'est le cœur de son activité,

  2   c'est en particulier pour les ouvrages qui ont une dimension politique ou

  3   qui font l'objet de contestation et qui manifeste une opinion si l'éditeur

  4   qui est un acteur privé, qui [inaudible] dans l'intérêt public, est attaqué

  5   sur le contenu de ses ouvrages, il ne peut plus exercé correctement son

  6   métier, il est amené à prendre des risques qui sont disproportionnés par

  7   rapport aux enjeux économiques de ses livres et il risque de ne plus

  8   publier et de ne plus donner la possibilité aux personnes d'exprimer des

  9   opinions concernant les éléments politiques ou d'intérêt général. C'est

 10   pour ça que les éditeurs défendent les auteurs qui donnent des opinions

 11   fortes en matière politique.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Qui est-ce que cela protège ? Est-ce

 13   que c'est l'éditeur ou l'auteur, la réponse n'est pas tout à fait claire.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] L'expression protège et l'éditeur et l'auteur,

 15   et ils font ensemble un travail qui est commun.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 17   M. METTRAUX : [interprétation]

 18   Q.  Merci, Monsieur Kermarrec. Je vous demanderais simplement de ralentir

 19   un petit peu pour les interprètes et le compte rendu d'audience pour que

 20   l'on puisse traduire tous vos mots à l'intention de la Cour et du conseil

 21   dans ce prétoire.

 22   Des questions vous ont également été posées par mon collègue concernant la

 23   vente du livre de Mme Hartmann. Vous en souvenez-vous ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Et vous souvenez-vous d'avoir dit que 3 799 exemplaires de cet ouvrage

 26   ont été vendus à la date du 8 juin 2009 ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Et mon confrère vous a également posé une question concernant ce que

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  1   l'on appelle en anglais une avance, et en français on parle d'à-valoir.

  2   Est-ce que vous pourriez nous expliquer ce que cela signifie en langage

  3   d'éditeur ?

  4   R.  L'avance qui est versée est une avance sur les droits d'auteur, les

  5   royalties qui doivent être produites par les ventes, ce qui signifie que

  6   cette avance est compensée par les droits d'auteur qui sont produits par

  7   les ventes, et l'éditeur ne commence à payer des droits d'auteur après la

  8   publication qu'une fois que cette avance est compensée par les droits

  9   d'auteur produits par les ventes. Je rappelle que les royalties sont des

 10   pourcentages versés sur les ventes.

 11   Q.  Pour que les choses soient peut-être un petit peu plus claires pour la

 12   Cour, Monsieur Kermarrec, dois-je comprendre qu'en fait, vous, Flammarion,

 13   payez une avance de 15 000 euros à Mme Hartmann, en tant que redevances,

 14   comme vous les appelez chez Flammarion, et que ces redevances ont été

 15   touchées par Flammarion et déduites des 15 000 euros; est-ce exact ?

 16   R.  Oui, déduites des 15 000 euros.

 17   Q.  Peut-être comme ma question n'était pas des plus claires, est-il exact

 18   que les redevances ne s'ajoutent pas aux 15 000 euros, mais qu'elles sont

 19   payées en partie à partir du moment où les 15 000 euros ont été payés en

 20   tant que redevances; est-ce exact ?

 21   R. Oui et on peut ajouter qu'aujourd'hui l'avance n'est pas compensée par

 22   les ventes qui ont été réalisées sur cet ouvrage, ce qui veut dire que le

 23   compte de Mme Hartmann chez Flammarion est aujourd'hui débiteur.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Les 15 000 sont déduits des redevances

 25   et non l'inverse; est-ce exact ?

 26   M. METTRAUX : [interprétation] Je pourrais peut-être essayer de préciser

 27   cela.

 28   Q.  Monsieur Kermarrec, pourriez-vous dire quel est le montant des

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  1   redevances touchées par Mme Hartmann jusque-là,

  2   approximativement ?

  3   R.  On a versé en tout 15 000 euros. Ces 15 000 euros constituent une

  4   avance sur des droits à provenir. Compte tenu des ventes qui ont été

  5   réalisées aujourd'hui, plus de 3 700 dont on parlait tout à l'heure, il y

  6   a, je crois, une production de royalties de 5 000 euros. Aujourd'hui le

  7   compte auteur de Mme Hartmann est, en conséquence, débiteur pour un montant

  8   de 10 000 euros, ce qui veut dire que les ventes qui seront réalisées à

  9   l'avenir viendront réduire ce montant de 10 000 euros. Une fois que les 10

 10   000 euros seront intégralement compensés, alors Mme Hartmann pourra toucher

 11   une nouvelle somme de Flammarion.

 12   Q.  [aucune interprétation]

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Mettraux, si je peux me

 14   permettre de vous demander, j'entends des références aux droits d'auteur

 15   dans l'interprétation, si vous pourriez préciser. Les droits d'auteur et

 16   les redevances, pour moi, sont deux choses distinctes.

 17   M. METTRAUX : [interprétation] Je suis d'accord avec vous, Monsieur le

 18   Président. D'après le terme français utilisé par M. Kermarrec, "royalties,"

 19   c'est un montant auquel Mme Hartmann a droit dans le cadre du contrat et

 20   qui concerne les droits d'auteur indiqués dans l'accord. C'est en fait le

 21   montant qu'elle reçoit pour les ventes et pour chaque vente individuelle.

 22   Comme vous l'avez dit, le terme "copyright" en anglais n'est pas tout à

 23   fait exact.

 24   Q.  Si vous le permettez, de clarifier les choses, de préciser les choses

 25   avec vous, Monsieur Kermarrec, et je pense que vous l'avez déjà dit, peut-

 26   on dire que Mme Hartmann, aujourd'hui, a un compte en débit d'environ 10

 27   000 euros chez Flammarion; est-ce exact ?

 28   R.  Oui, c'est exact.

Page 143

  1   Q.  Et peut-être pour préciser ce point, est-ce que c'est là une

  2   information que vous avez procurée à M. MacFarlane à un moment donné ?

  3   R.  A vrai dire, je ne m'en souviens plus.

  4   Q.  Vous avez indiqué, je pense, à mon confrère que le livre continue à se

  5   vendre; est-ce exact ?

  6   R.  Le livre continue à être en vente, oui.

  7   Q.  Etes-vous au courant d'effort ou de demande de la part de l'Accusation

  8   pour mettre un terme à la vente de cet ouvrage ? Etes-vous au courant d'une

  9   telle initiative de la part de l'Accusation ?

 10   R.  Non.

 11   Q.  Vous avez également parlé du processus de négociations qui s'est

 12   déroulé entre Mme Hartmann et votre entreprise Flammarion. Je souhaiterais

 13   vous demander la chose suivante : A l'époque où vous avez signé un accord

 14   avec Mme Hartmann, considéreriez-vous que Mme Hartmann était un auteur

 15   fiable ?

 16   R.  Compte tenu de son curriculum vitae et du fait, en particulier, qu'elle

 17   avait été journaliste d'un des plus grands quotidiens français, on s'est

 18   appuyé évidemment sur cette expérience pour considérer que c'était un

 19   auteur qui pouvait être publié par Flammarion.

 20   Q.  Est-ce que son expérience en tant que journaliste et sa réputation est

 21   entrée en jeu lorsque vous avez conclu cet accord avec elle ?

 22   R.  Oui, bien sûr.

 23   Q.  Est-ce que j'aurais raison de dire, compte tenu du fait que vous,

 24   Flammarion, vous avez décidé de publier le livre de Mme Hartmann, vous

 25   étiez satisfait de la qualité journalistique du livre qui avait été produit

 26   par Mme Hartmann; est-ce exact ?

 27   R.  On considère chez Flammarion que c'est un livre de qualité.

 28   Q.  Et est-ce que vous avez des raisons de penser, Monsieur Kermarrec, que

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  1   ce livre comporte des éléments qui seraient inexacts ?

  2   R.  Non.

  3   Q.  Et avez-vous des raisons de penser que ce livre contiendrait des

  4   déclarations fallacieuses ou inexactes ?

  5   R.  Non.

  6   Q.  Avez-vous des raisons de penser que Mme Hartmann a écrit ce livre dans

  7   un autre état d'esprit qu'une toute bonne foi ?

  8   R.  Non, absolument pas.

  9   Q.  Et au moment où ce livre a été publié, est-ce que vous aviez des

 10   raisons de penser que ce livre contenait des éléments qui, au moment de la

 11   publication, étaient frappés d'ordonnance de confidentialité et, par

 12   conséquent, la communication de ces éléments aurait des conséquences

 13   juridiques ? Aviez-vous des raisons de penser cela ?

 14   R.  Non.

 15   Q.  Avez-vous des raisons de penser que Mme Hartmann aurait essayé

 16   d'induire Flammarion en erreur quant au contenu de ce livre ?

 17   R.  [aucune interprétation]

 18   Q.  Au vu de la bonne réputation, puisque vous m'avez dit que vous

 19   connaissiez la bonne réputation de Mme Hartmann, est-ce que vous avez des

 20   raisons de penser que Mme Hartmann a omis de mentionner à sa maison

 21   d'édition qu'il y avait des éléments qui ne devaient pas être publiés ?

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 23   LE TÉMOIN : A ma connaissance, non.

 24   M. METTRAUX : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 25   c'est toutes les questions que je souhaitais poser.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

 27   Avant de vous demander de reprendre la parole, Monsieur MacFarlane, vous

 28   avez parlé d'un accord et vous avez parlé d'un livre et ces deux éléments

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  1   n'ont pas été versés comme pièces. Je ne sais pas quelle sera la position

  2   de ce livre et de ces documents.

  3   Est-ce que vous voulez procéder à des questions supplémentaires.

  4   [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

  6   Questions de la Cour : 

  7   M. LE JUGE GUNEY : Monsieur le témoin, vous voulez m'aider de déterminer un

  8   point, s'il vous plaît. Est-ce que vous avez participé aux négociations

  9   concernant la publication de ce livre ?

 10   R.  Personnellement, non.

 11   M. LE JUGE GUNEY : Personnellement, non. En tant que

 12   signataire ?

 13   R. Non, je ne suis pas signataire de contrat.

 14   M. LE JUGE GUNEY : Donc vous avez suivi l'affaire ?

 15   R.  J'ai commencé à suivre l'affaire à partir du moment où il y a eu des

 16   demandes juridiques qui ont été formées.

 17   M. LE JUGE GUNEY : Et vous êtes toujours engagé dans cette affaire ?    

 18   R.  Oui, en tant que témoin aujourd'hui.

 19   M. LE JUGE GUNEY : Merci beaucoup. 

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Maître MacFarlane.

 21   Nouvel interrogatoire par M. MacFarlane :

 22   Q.  [interprétation] Ma première question porte sur le contrat d'édition

 23   qui porte la cote P8, et je pense que vous avez un exemplaire de ceci dans

 24   votre dossier. Ma question est la suivante : on a fait référence il y

 25   quelque temps à des royalties et des droits d'auteur, et la différence

 26   entre ces deux termes qui peuvent se recouper. Dans l'article 5(A), il

 27   semble que l'on fasse référence en anglais à "copyright" comme à un concept

 28   différent du concept de droits d'auteur.

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  1   M. METTRAUX : [interprétation] Est-ce que l'Accusation pourrait nous

  2   indiquer de quelle phrase il s'agit.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur MacFarlane, est-ce que vous

  4   pouvez nous dire, s'il vous plaît, où --

  5   M. MacFARLANE : [interprétation] Oui. C'est le deuxième paragraphe. Il est

  6   mentionné en anglais :

  7   "…Dans le cas où l'auteur n'aurait pas perçu d'avance sur droits, c'est une

  8   somme de 305 euros qui lui serait versée à ce titre."

  9   LE TÉMOIN : Je voudrais juste préciser, si vous me le permettez, que cet

 10   article vise le cas où l'éditeur ne publie pas l'ouvrage. Donc l'ouvrage a

 11   été publié.

 12   M. MacFARLANE : [interprétation]

 13   Q.  Merci.

 14   Mon éminent collègue, dans les questions qu'ils vous a posées, vous a

 15   demandé si vous aviez des raisons de penser qu'il y avait des inexactitudes

 16   dans ce livre et vous avez répondu par la négative; est-ce exact ?

 17   R.  Oui, en effet.

 18   Q.  Ma question est la suivante : Je voudrais savoir si Flammarion a fait

 19   une enquête pour savoir s'il y avait des inexactitudes ou est-ce que vous

 20   vous fiez aux dires de l'auteur en la matière ?

 21   R.  On se fie à l'auteur en la matière et l'éditeur n'est pas là pour

 22   réécrire ou refaire le travail qui a été réalisé par l'auteur. La relation

 23   éditeur-auteur est une relation de confiance. Si on a des indications ou

 24   des doutes particuliers, mais c'est pas le cas avec Mme Hartmann, on peut

 25   éventuellement demander des vérifications ou des compléments d'information

 26   à l'auteur. 

 27   Q.  Monsieur Kermarrec, mon éminent collègue vous a demandé si vous aviez

 28   des raisons de penser qu'il y avait des informations confidentielles ou des

Page 148

  1   informations inappropriées dans ce livre. Votre position était la même, à

  2   savoir que Flammarion ne prend pas les devants et ne mène pas d'enquête,

  3   mais se fie aux dires de l'auteur en la matière ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Merci.

  6   M. MacFARLANE : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître MacFarlane.

  8   Des questions de la part des autres Juges ?

  9   Monsieur Mettraux, j'ai remarqué que le Juge Guney avait posé des questions

 10   après votre contre-interrogatoire. Avez-vous d'autres questions ?

 11   M. METTRAUX : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je vous

 12   remercie.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 14   Ceci signifie, Monsieur Kermarrec que vous avez terminé votre déposition.

 15   Nous vous remercions. Vous pouvez quitter ce prétoire.

 16   [Le témoin se retire]

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître MacFarlane.

 18   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   Le témoin suivant pour l'Accusation est Robin Vincent.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Veuillez m'excuser, Maître MacFarlane.

 21   Je me suis rendu compte que ces documents ont déjà été versés au dossier.

 22   Je vous prie de m'excuser.

 23   M. MacFARLANE : [interprétation] Parfait. Merci, Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Etes-vous sûr que votre témoin est

 25   dans la maison ?

 26   M. MacFARLANE : [interprétation] Je me demandais la même chose. J'ai toutes

 27   les raisons de penser que le témoin est ici, je pense qu'il va arriver sous

 28   peu. Il doit être dans une autre partie du bâtiment.

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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Merci.

  2   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les

  5   Juges.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  8   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  9   LE TÉMOIN : ROBIN VINCENT [Assermenté]

 10   [Le témoin répond par l'interprète]

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Vous pouvez vous asseoir et

 12   vous mettre à l'aise.

 13   Maître MacFarlane.

 14   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs

 15   les Juges.

 16   Un aspect préliminaire. Nous allons démontrer que M. Vincent est

 17   actuellement le greffier du tribunal spécial pour le Liban. Ceci, bien sûr,

 18   soulève les questions d'immunité, et je voulais donc attirer l'attention de

 19   cette Chambre, que cette question a été soulevée par moi-même et que j'ai

 20   fourni une copie des correspondances avec mon éminent collègue. Et le

 21   secrétaire général adjoint des questions juridiques, pour le nom du

 22   secrétaire général, a levé l'immunité de M. Vincent par une lettre datée du

 23   6 janvier 2009. J'ai un exemplaire de cette lettre, si mon éminent collègue

 24   ou les Juges de cette Chambre veulent verser ceci, mais mon éminent

 25   collègue a une copie qu'il a eu en sa possession de déjà un certain temps.

 26   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, si cela peut vous aider,

 27   M. Vincent était très bien connu dans ce prétoire, et comme mon éminent

 28   collègue l'a dit, la levée de l'immunité représente fidèlement la situation

Page 150

  1   et la Défense ne conteste pas la situation.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur Khan.

  3   Je ne pense pas que cette Chambre souhaite que le document soit versé comme

  4   pièce au dossier, mais c'est à vous de décider.

  5   M. MacFARLANE : [interprétation] Il me semble qu'une note consignée au

  6   dossier est suffisante, donc je ne vais pas verser cette lettre au dossier.

  7   Je vous remercie pour m'avoir donné cette possibilité.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

  9   Interrogatoire principal par M. MacFarlane : 

 10   Q.  [interprétation] Monsieur Vincent, vous êtes actuellement le greffier

 11   du tribunal spécial pour le Liban.

 12   R.  C'est exact.

 13   Q.  Et vous avez travaillé auparavant au sein d'autres tribunaux pénaux

 14   internationaux ainsi qu'au service du ministère public britannique ?

 15   R.  C'est exact.

 16   Q.  Est-ce que vous pourriez nous décrire ceci ?

 17   R.  Très brièvement, oui, j'ai travaillé pendant 39 ans au service du

 18   ministère public en Angleterre et au pays de Galles, et pendant deux ans

 19   ensuite, j'ai travaillé en Russie avant de travailler à la cour spéciale

 20   pour Sierra Leone, où j'ai travaillé pendant trois ans et demi. Ensuite,

 21   j'ai occupé plusieurs postes aux Nations Unies, à la demande des Nations

 22   Unies, au niveau des tribunaux cambodgiens et j'ai également travaillé

 23   pendant cinq ans au TPIY en tant que greffier adjoint par intérim. J'ai

 24   également été impliqué dans la constitution du tribunal spécial pour le

 25   Liban.

 26   Q.  Merci, Monsieur Vincent. J'ai quelques questions à vous poser. Compte

 27   tenu de votre expérience pratique sur le terrain - et ceci porte sur la

 28   question des mesures de protection - est-ce que vous pourriez décrire à

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  1   cette Chambre de première instance les scénarios les plus communs qui

  2   justifient des mesures de protection et les circonstances qui motivent plus

  3   communément des demandes de mesure de protection ?

  4   R.  En général, il s'agit de la protection de témoin qui dépose, des

  5   mesures de protection surviennent très souvent, notamment pour ce qui est

  6   des tribunaux pénaux. Pour les cours nationales, les mesures de protection

  7   sont moins fréquentes, mais sont assez fréquentes pour ce qui est des

  8   témoins.

  9   Depuis que je travaille à l'échelle internationale, et au vu de ma brève

 10   expérience au Tribunal pénal pour l'ex-Yougoslavie, mais également pour la

 11   cour spéciale de Sierra Leone, il y a eu des cas où des mesures de

 12   protection ont été mises en termes de confidentialité lorsqu'il y avait des

 13   Etats impliqués ou lorsqu'il y avait des informations qui venaient de

 14   l'extérieur, émanant de témoins individuels ou d'instances ou

 15   d'organisations spécifiques.

 16   Q.  Je voudrais attirer votre attention tout particulièrement au dernier

 17   scénario que vous venez de décrire, à savoir des informations concernant un

 18   Etat donné. Est-ce que vous pourriez décrire à la Chambre de première

 19   instance votre expérience ou la manière dont vous concevez l'implication

 20   d'une divulgation non correcte d'information concernant l'état dans la

 21   situation où il y a des mesures de protection ?

 22   R.  Je dois dire que mon expérience est plus importante dans la protection

 23   de témoins, mais j'ai quelques expériences dans le domaine des Etats. Et je

 24   vais vous expliquer ceci très clairement. Les tribunaux à l'échelle

 25   internationale, comme par exemple, le tribunal du Liban, pour lequel je

 26   travaille, doit faire face à des défis importants en ce qui concerne le

 27   niveau de coopération que ces tribunaux peuvent obtenir de différents

 28   Etats, et ceci, à plusieurs égards. Ce que je dirais, en fait, c'est que

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  1   c'est assez évident, s'il y a une absence de confiance vis-à-vis de

  2   tribunal, les Etats ne seront pas disposés à fournir des éléments de preuve

  3   qui seront cruciaux pour les procédures au sein de ces tribunaux. Une fois

  4   qu'on se rendra compte qu'il y a des dangers de violation, bien, il est

  5   fort peu probable que cette coopération se poursuivra avec les tribunaux.

  6   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci, je n'ai pas d'autres questions.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Khan.

  8   Contre-interrogatoire par M. Khan : 

  9   Q.  [interprétation] Monsieur Vincent, bonjour. Puisqu'en fait c'est encore

 10   le matin, donc je vous souhaite une bonne matinée. Est-ce exact, d'après

 11   votre expérience, qu'il existe toute une gamme -- est-il exact, selon votre

 12   expérience, que la simple violation d'une ordonnance de confidentialité

 13   n'amène pas nécessairement à un préjudice à l'administration de la justice

 14   ?

 15   R.  Je dois dire que je suis intéressé par votre description d'une simple

 16   violation. Est-ce que j'ai eu expérience de situation où suite à une erreur

 17   administrative, ou peut-être parce que l'identité d'un témoin avait été

 18   publiée, il y aurait eu un impact de la dimension d'un cataclysme, la

 19   réponse est non. Je n'ai pas vécu ce type d'expérience, mais je dirais que

 20   tout tribunal, que ce soit au niveau international ou au niveau national va

 21   essayer d'éviter tout incident de ce type. Et je pense que ceci a un

 22   impact. Et si vous avez une situation où un tribunal est considéré par le

 23   monde extérieur comme, de manière cohérente ou anecdotique violait la

 24   confidentialité ou les mesures de confidentialité, ceci aurait un impact

 25   grave sur l'organisation. Je pense que ce qui s'est passé de par le passé

 26   où  la confidentialité de l'identité des témoins a été violée. Je me

 27   souviens, par exemple, pour la juridiction au Sierra Leone où il y a eu des

 28   cas accidentels, ceci ne fait rien pour la réputation du tribunal et cela

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  1   peut causer des difficultés à l'avenir.

  2   Q.  En effet. Mais est-ce exact de dire que souvent les tribunaux tels que,

  3   par exemple, le tribunal spécial pour Sierra Leone, qui traitent de zones

  4   de conflit, ou dans ces tribunaux tels que ce Tribunal précis où nous

  5   siégeons à l'heure actuelle ou le tribunal du Liban, la question de la

  6   protection des témoins est peut-être une des questions les plus épineuses

  7   en ce qui concerne la confidentialité. C'est une des questions les plus

  8   cruciales. Seriez-vous d'accord avec cela ?

  9   R.  Je suis d'accord. Cela est un défi. C'est quelque chose de crucial pour

 10   ces institutions, notamment lorsqu'il y a des préoccupations de la part de

 11   ces témoins qui veulent déposer.

 12   Q.  Et la raison pour laquelle ceci présente un défi ou que cela peut créer

 13   des frustrations, c'est parce qu'en fait il peut y avoir des conséquences

 14   directes vis-à-vis des témoins si leur nom était divulgué ?

 15   R.  Oui, c'est exact. Et je pourrais rajouter, bien sûr, que j'ai

 16   mentionné, par exemple le tribunal pour le Sierra Leone, et s'il y a

 17   violation d'un conflit de neutralité vis-à-vis d'un témoin et si ceci est

 18   considéré comme étant délibéré, dans ce cas-là, il s'agit d'une affaire

 19   totalement différente par rapport à une violation par inadvertance en

 20   raison d'une erreur administrative.

 21   Q.  Oui. Mais pour répondre plus précisément à ma question, la raison pour

 22   laquelle ceci est tout particulièrement intéressant, c'est en raison des

 23   violations qui pourraient avoir des conséquences directes sur un être

 24   humain.

 25   R.  Oui, pour les témoins, bien sûr, ceci est important.

 26   M. KHAN : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait montrer un document au

 27   témoin.

 28   Monsieur Vincent, ce n'est pas dans votre jeu de documents. C'est une

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  1   édition ultérieure que je souhaiterais vous transmettre.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur l'Huissier, avant de

  3   transmettre ce document au témoin, pouvez-vous également le transmettre à

  4   l'Accusation. Merci.

  5   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai également des

  6   exemplaires à l'attention de mes éminents collègues, du greffe, et de vous,

  7   les Juges.

  8   Monsieur le Président, peut-être que mon éminent collègue, une fois qu'il

  9   aura consulté ce document, pourrait transmettre cet exemplaire au témoin,

 10   si vous êtes d'accord.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître MacFarlane.

 12   M. MacFARLANE : [interprétation] Je vois ceci pour la première fois.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'ai toute une série de documents. Je

 14   ne sais pas exactement quel est le document qui a été transmis au témoin.

 15   M. KHAN : [interprétation] Il s'agit de jeux de documents qui sont

 16   parfaitement identiques.

 17   M. MacFARLANE : [interprétation] Il y a des intercalaires post-it qui ont

 18   été apposés sur le document, mais je ne sais pas vraiment de quoi il

 19   s'agit.

 20   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, si mon éminent collègue

 21   fait preuve de patience, il recevra les documents dans un moment. Il s'agit

 22   du contre-interrogatoire. C'est le même document que je présente à mon

 23   témoin. C'est tout ce que je souhaite faire à l'heure actuelle.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous retransmets cette question.

 25   M. MacFARLANE : [interprétation] J'ai un document avec quatre petits

 26   intercalaires, et c'est tout ce que j'ai.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup. Vous pouvez continuer,

 28   Monsieur Khan.

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  1   M. KHAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   Q.  Monsieur Vincent, est-ce que vous pourriez consulter ce document. Il y

  3   a quatre intercalaires. Le premier document parle de l'article 52 et 53 des

  4   règles et procédures de preuve de la cour spéciale pour le Sierra Leone.

  5   Est-ce que vous connaissez ces différents articles ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Et pour le deuxième intercalaire, vous avez un document qui porte la

  8   date du 7 mars 2003. Il s'agit d'une décision par le juge Bankole Thompson

  9   approuvant l'acte d'accusation et rendant ordonnance de non-divulgation

 10   dans l'affaire contre Charles Ghankay Taylor. Est-ce que vous avez vu ce

 11   document ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Et vous verrez que vous avez votre nom en tant que greffier qui est

 14   apposé à ce document.

 15   R.  C'est exact.

 16   Q.  Vous étiez donc le greffier le 7 mars 2003, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Je vous demande un moment, s'il vous plaît.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous avons entendu la traduction en

 20   français. Est-ce que c'est bon, maintenant ?

 21   Poursuivez, Maître Khan.

 22   M. KHAN : [interprétation] J'espère qu'en français ça sonne plus éloquent

 23   que je suis en train de faire en anglais en ce moment.

 24   Q.  Mais je vous invite, Monsieur Vincent, de vous pencher sur l'article

 25   53, paragraphe B de cet article. Est-ce que vous voyez que dans le cadre de

 26   la cour dont vous étiez greffe, que lorsqu'il s'agit du fait d'approuver un

 27   acte d'accusation, le juge désigné peut, à la demande de l'Accusation,

 28   donner l'ordre de ne pas divulguer l'acte d'accusation jusqu'au moment où

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  1   ceci est servi à l'accusée ou aux accusés en cas de jonction d'instance.

  2   Vous voyez cela ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Merci. Et à la page suivante, intercalaire 2, il s'agit de la décision

  5   du 7 mars. Dans l'avant-dernier paragraphe, le juge Thompson l'a signé,

  6   c'est au-dessus de sa signature, et vous allez voir que l'éminent juge

  7   saisi de la matière devant cette Cour a donné l'ordre que l'acte

  8   d'accusation, le mandat d'arrestation, le transfert et la détention doivent

  9   rester confidentiels jusqu'à l'ordre suivant. Vous voyez cela ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Est-ce que vous pouvez passer à la page suivante de nouveau, et vous

 12   allez voir la déclaration de presse du procureur de la cour spéciale pour

 13   Sierra Leone, M. David Crane, et ceci est en date du 4 juin.

 14   R.  Oui, je vois.

 15   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord avec moi, après l'avoir parcouru, pour

 16   dire que le procureur David Crane a rendu public le fait que l'acte

 17   d'accusation a été rendu ? Vous voyez cela ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Et la date est le 4 juin.

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Est-ce que vous pouvez aller à l'intercalaire suivant. Est-ce que vous

 22   voyez une décision du juge Pierre Boutet, en date du 12 juin 2003 ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  C'est un ordre portant sur la communication de l'acte d'accusation, le

 25   mandat d'arrestation et l'ordre du transfert et de la détention, une

 26   décision approuvant l'acte d'accusation, un ordre de non divulgation; est-

 27   ce exact ?

 28   R.  C'est exact.

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  1   Q.  Encore une fois, dans l'avant-dernier paragraphe, vous allez voir que

  2   cet éminent juge a donné l'ordre le 12 juin que l'acte d'accusation et le

  3   mandat d'arrêt soient rendus publics; est-ce que c'est exact ?

  4   R.  Oui, c'est exact.

  5   Q.  Ai-je raison de comprendre ou bien est-ce que vous seriez d'accord avec

  6   moi pour dire que la seule conclusion raisonnable portant sur la

  7   publication faite par David Crane faite le 4 juin 2003, lorsqu'il a dit que

  8   l'acte d'accusation avait été dressé et qu'un mandat d'arrêt avait été

  9   obtenu, que la seule conclusion était qu'en tant que personne ayant demandé

 10   ces mesures de protection, il a été considéré qu'il avait le droit de

 11   rendre public cet ordre de la cour ? Est-ce que vous êtes d'accord avec

 12   cette conclusion ?

 13   R.  Certainement, dans les circonstances de cette affaire en particulier,

 14   c'est l'avis qui a été adopté.

 15   Q.  Merci. Passons à l'intercalaire 12. Mais un instant. Je vais tout

 16   d'abord vous poser la question suivante : jamais il n'y a eu d'allégation

 17   d'outrage prononcée contre M. David Crane, n'est-ce pas, en raison du fait

 18   qu'il avait rendu public l'acte d'accusation ?

 19   R.  Non, mais je pense qu'il y avait des circonstances atténuantes ou vues

 20   en tant que telles, s'agissant de cette action en particulier. Et il était

 21   un employé de la cour.

 22   Pardon, intercalaire 12 ?

 23   Q.  Oui. Et compte tenu du fait que David Crane exerçait des fonctions très

 24   élevées puisqu'il était le procureur, est-ce que ceci lui accordait des

 25   autorités particulières par rapport à un ordre judiciaire dont un membre du

 26   public ne pourrait pas bénéficier ? C'est bien ce que vous dites, Monsieur

 27   Vincent ?

 28   R.  Ce que je dis, c'est que dans le cadre des circonstances telles que je

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  1   me les rappelle, il était possible de communiquer l'acte d'accusation et

  2   tous les détails annexes à un moment très tardif. Je ne peux pas dire si

  3   c'était le 3 juin ou le 4 juin, mais comme vous le savez certainement, ceci

  4   faisait suite aux informations fournies à l'Accusation, puisque le

  5   Procureur a appris que cette personne qui faisait l'objet de l'acte

  6   d'accusation et du mandat d'arrêt, avait quitté son pays pour la première

  7   fois et le Procureur considérait qu'il agissait dans les meilleurs

  8   intérêts. Nous avons eu des contacts d'urgence avec le Juge de la Chambre

  9   et j'ai reçu l'instruction de communiquer les papiers aux officiels

 10   diplomatiques du pays en question pour que ceci puisse être communiqué le

 11   lendemain matin à la personne suite à son arrivée.

 12   Q.  Monsieur Vincent, je ne souhaite pas que l'on s'attarde trop là-

 13   dessus. Je ne vous pose pas de questions concernant votre comportement à

 14   vous.

 15   Mais est-ce que vous dites devant cette Chambre de première instance

 16   que la position officielle était qu'un Procureur a des droits particuliers

 17   vis-à-vis des ordres de la Chambre que les membres du public n'ont pas ?

 18   R.  Certainement. Et je vais vous dire immédiatement, je n'essayais pas de

 19   défendre mon comportement. Dans des circonstances qui prévalaient dans la

 20   situation mentionnée, je croyais que la personne avait l'autorité lui

 21   permettant de ce faire dans l'intérêt de la justice.

 22   Q.  Et parmi les raisons qui vous ont motivé à conclure cela était aussi le

 23   fait que puisque c'était lui qui avait demandé les mesures de protection,

 24   il pouvait décider si les mesures n'étaient plus nécessaires ?

 25    R.  Oui.

 26   Q.  Peut-on passer à l'intercalaire 12.

 27   R.  [aucune interprétation]

 28   Q.  Vous voyez le document ? Un reportage de CNN.

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Et vous pouvez voir que Christiane Amanpour de CNN a déclaré que :

  3   "Un acte d'accusation allait probablement être dressé cette semaine-

  4   là, probablement dès jeudi, concernant Slobodan Milosevic. Les détails de

  5   l'acte d'accusation ne sont pas disponibles. D'autres personnes vont peut-

  6   être en faire partie. Le Tribunal ne voulait pas faire de commentaires sur

  7   ce rapport."

  8   Est-ce que vous êtes au courant de l'affaire Milosevic ?

  9    R.  Juste ce que je lisais dans la presse, par la suite, vers la fin,

 10   j'étais ici pendant cinq mois et j'ai tiré d'autres informations.

 11   Q.  Est-ce qu'on peut conclure, d'après ce rapport, que peut-être

 12   Christiane Amanpour a rendu public le fait qu'un acte d'accusation allait

 13   être dressé alors que ceci n'avait toujours pas été rendu public par le

 14   Tribunal ? Est-ce qu'on peut conclure cela ?

 15   R.  Avec tout le respect que je vous dois, non, je ne pense pas. Je pense

 16   qu'il s'agit tout simplement des conjectures qui circulaient au sujet des

 17   tribunaux et cours internationaux. Donc je pense que s'agissant des revues

 18   de presse, vous en aurez, par exemple, dix ou 15 concernant le tribunal du

 19   Liban rien que pendant les trois derniers mois, alors qu'il n'y avait pas

 20   de base dans les faits. Il s'agissait simplement de suppositions.

 21   Q.  Attendez. Voyez le deuxième paragraphe. Vous savez qui est Christiane

 22   Amanpour ?

 23   R.  Oui, je l'ai rencontrée.

 24   Q.  Peut-on dire qu'elle est l'un des commentateurs les plus respectés des

 25   médias ?

 26   R.  Oui, je pense qu'on peut dire ça comme ça.

 27   Q.  Ce n'est pas quelqu'un qui se lance dans des conjectures toujours sans

 28   fondement d'après votre expérience ?

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  1   R.  Non. Mais bien sûr, quant à la question de savoir si elle a de

  2   l'expérience ou pas, à mon avis, il s'agit ici d'une conjecture,

  3   probablement.

  4   Q.  Et au paragraphe 2, cette conjecture devient très concrète, car elle

  5   dit que : "L'acte d'accusation va probablement être dressé au cours de la

  6   semaine, peut-être même jeudi."

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Donc c'est une conjecture très concrète ?

  9   R.  Bien, parfois une conjecture peut prendre des formes différentes, mais

 10   je dirais toujours que le mot "probablement" est le mot qui contrôle le

 11   tout.

 12   Q.  Oui. Si je vous disais que l'acte d'accusation a effectivement été

 13   rendu public cette semaine-là, peut-être vous diriez que ce rapport avait

 14   été précis.

 15    R.  Certainement, mais si j'ai bien compris, les tribunaux ne fonctionnent

 16   pas comme ça. Je suppose que probablement, au cours de votre carrière, vous

 17   avez eu l'occasion de tomber sur de nombreux rapports de presse qui ont

 18   disparu par la suite et dont aucune trace n'est restée et qui ne se sont

 19   jamais avérés exacts.

 20   Q.  Mais ici, dans cette affaire en particulier, si vous étiez greffe à

 21   l'époque, est-ce que les sonnettes d'alarme auraient été sonnées en raison

 22   de ce rapport ?

 23   R.  Si j'avais été greffier à l'époque, bien sûr, on est toujours préoccupé

 24   en raison des conjectures si elles sont fondées dans les connaissances.

 25   Mais d'après mon expérience, je suis arrivé à un stade où je suis un peu

 26   cynique lorsque je lis les revues de presse. S'il y avait suffisamment de

 27   détails où on mentionnait le nom, les événements, et cetera, j'aurais été

 28   préoccupé par rapport à une éventuelle violation de la confidentialité,

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  1   mais pas comme ça.

  2   Q.  Et on peut voir, bien sûr, dans le premier paragraphe, le nom de

  3   Slobodan Milosevic qui est mentionné, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  A la page 2, il s'agit d'un autre rapport de CNN où la même chose est

  6   dite et il est ajouté que le Tribunal ne veut pas faire de commentaires de

  7   ce rapport, mais il y aura une conférence de presse "jeudi" ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Ensuite, nous avons les détails. Donc des rapports de ce type étaient

 10   courants, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui, dans mon expérience dans tous les tribunaux, à mon avis, il y a le

 12   phénomène que l'on appelle en anglais "feeding frenzy," s'agissant de la

 13   presse. Il y a une avidité des informations et il y a énormément de

 14   conjectures autour.

 15   Q.  Donc vous pensez que Christiane Amanpour a simplement eu de la chance ?

 16   R.  Non, je ne pense pas qu'elle a eu simplement de la chance. D'ailleurs,

 17   vous dites vous-même qu'elle est très respectée. Certainement, elle

 18   comprenait très bien les choses sur le plan international. Donc il ne faut

 19   pas s'étonner que les gens peuvent ajouter deux à deux et dire que ça fait

 20   quatre ou peut-être cinq; c'est assez courant.

 21   Q.  En tant que greffier, vous faites de l'équité entre les parties. Est-ce

 22   que vous seriez d'accord avec moi pour dire que dans l'intérêt des cours et

 23   tribunaux différents pour lesquels vous avez travaillé, il serait approprié

 24   d'avoir des discussions, des débats et de critiquer le travail des

 25   institutions juridiques internationales, que l'on ne souhaite pas étouffer

 26   ?

 27   R.  Bien sûr que je suis d'accord [comme interprété] avec vous. Je pense

 28   qu'il est très important que le travail de ces tribunaux soit transparent,

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  1   et je pense que le greffier, qui est responsable des relations avec le

  2   public, doive faire de son mieux pour aller dans ce sens. Cependant, il y a

  3   une ligne entre les discussions, les relations publiques, les relations

  4   avec les médias, et aussi le traitement des décisions rendues par les

  5   Chambres de première instance ou les Chambres d'appel. La procédure

  6   judiciaire doit être respectée par le greffe et par toutes les personnes

  7   concernées d'ailleurs.

  8   Q.  Examinez l'intercalaire 31, s'il vous plaît.

  9   En attendant, j'ai annoncé dès le départ qu'il y aurait un grand

 10   nombre de documents. Je ne vais pas prendre beaucoup de temps de M. Vincent

 11   pour lui présenter tous les documents.

 12   Examinez à l'intercalaire 31, c'est une décision du Président du

 13   Tribunal à l'époque, le Juge Pocar, en date du 27 avril 2007.

 14   R.  Oui, je vois.

 15   Q.  Merci. Et si vous passez à la page suivante, vous voyez le deuxième

 16   paragraphe ?

 17   R.  Oui, qui commence par : "Prenons note de la décision."

 18   Q.  Oui. Est-ce que vous pouvez lire cela ?

 19   R.  "Prenons note de la décision concernant la demande de la Serbie-et-

 20   Monténégro concernant la révision de la décision de la Chambre de première

 21   instance du 6 décembre 2005, rendue confidentiellement par la Chambre

 22   d'appel le 6 avril 2006."

 23   Q.  Merci beaucoup. Puisque vous avez travaillé dans des cours différentes,

 24   il n'est pas inhabituel que des chambres font référence aux décisions

 25   confidentielles dans leurs écritures publiques ?

 26   R.  Ce n'est pas inhabituel.

 27   Q.  D'après ces deux lignes de la décision du président Pocar, de son

 28   ordre, est-ce que vous voyez qui a soumis la demande; ici c'est la Serbie-

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  1   et-Monténégro, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Vous voyez que la décision a été rendue de manière confidentielle,

  4   n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Et la date de la décision était le 6 avril 2006 ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Est-ce que ceci a provoqué des réactions à l'époque où vous étiez

  9   greffier ?

 10   R.  Il s'agit là du pouvoir discrétionnaire d'un juge. Je veux dire, c'est

 11   un ordre de la Chambre, probablement la formulation de l'ordre a été

 12   révélée au greffier à un moment donné et, dans cette situation en

 13   particulier, le greffe a considéré que peut-être il était possible de

 14   demander des clarifications. Mais je dois dire que dans mon expérience, je

 15   peux vous dire que ce n'est pas le premier document que j'ai vu où on fait

 16   référence à une telle décision confidentielle. Mais encore une fois, je me

 17   souviens des situations où une Chambre a évité, pour une raison en

 18   particulier, de faire référence aux décisions confidentielles qui étaient

 19   rendues. C'est ce que je peux dire par rapport au contexte.

 20   Q.  Je ne vous pose pas cette question-là, mais voici ce que j'essaie de

 21   dire : d'après votre expérience et votre compréhension de la situation, une

 22   Chambre peut déterminer -- ou un juge de ces tribunaux peut déterminer au

 23   mieux comment traiter d'une décision confidentielle; est-ce que vous êtes

 24   d'accord avec moi ?

 25   R.  Oui, je dirais que c'est effectivement le cas.

 26   Q.  Et le statut d'une décision confidentielle peut être traité

 27   différemment par des juges différents, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Passez à l'intercalaire 32, s'il vous plaît. Encore une fois, nous

  2   voyons la page de garde. Il s'agit d'une décision publique de la Chambre

  3   d'appel de ce Tribunal en date du 12 mai 2006 --

  4   R.  Oui.

  5   Q.  -- dans l'affaire Milutinovic. C'est une décision portant sur la

  6   demande de révision des Etats-Unis.

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Est-ce exact ?

  9   R.  C'est exact.

 10   Q.  Est-ce que vous pouvez maintenant aller au paragraphe 6.

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Est-ce que vous pouvez tout d'abord aller à la page suivante et vous

 13   pencher sur la note en bas de page numéro 7.

 14   R.  J'essaie encore de trouver la note en bas de page 7. Je suis au

 15   paragraphe 6 --

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ça va être à la page 3 de cette

 17   décision.

 18   M. KHAN : [interprétation] Oui.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Oui, j'ai

 21   trouvé.

 22   M. KHAN : [interprétation]

 23   Q.  Est-ce que vous voyez dans la note en bas de page 7 de la page 3 que

 24   l'on y fait référence à la décision Milosevic du 6 avril 2006 ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Et il s'agit du même document public dont il a été

 27   question ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Peut-on maintenant passer à la page 4, s'il vous plaît. Est-ce que vous

  2   pourriez parcourir très brièvement les notes en bas de page 14, 15, 16, 17,

  3   20, 66, 78, 79. Ai-je raison de dire que ces notes en bas de page font

  4   référence aux décisions Milosevic de cette date ?

  5   R.  Oui, certainement.

  6   Q.  Si je vous disais que ces décisions étaient confidentielles, vous

  7   n'auriez pas pensé que le fait d'avoir fait référence à cette pratique

  8   judiciaire était une anomalie contenue dans cette écriture publique ?

  9   R.  Pour être tout à fait sûr d'avoir compris votre question, est-ce que

 10   vous dites que toutes ces notes en bas de page font référence à la même

 11   décision ?

 12   Q.  Toutes ces notes en bas de page font référence aux décisions Milosevic.

 13   R.  Décisions Milosevic, mais non pas celles de 2006 ?

 14   Q.  Non.

 15   R.  J'ai compris, car j'en ai vu une de 2005.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pour être tout à fait clair, Monsieur,

 17   est-ce que vous suggérez, Maître Khan, que ces notes en bas de page

 18   révèlent une pratique judiciaire ?

 19   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, elles révèlent

 20   l'existence des décisions confidentielles avec des noms, comme je l'ai

 21   mentionné, par rapport au document précédent, les noms des personnes qui

 22   ont soumis la demande, la date, la décision et le fait que c'est

 23   confidentiel. Et comme ceci a été mentionné lors de l'ouverture, une partie

 24   des allégations levées contre ma cliente concernent l'outrage alors qu'ici

 25   ces mêmes allégations pourraient être portées.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc pour être rapide, est-ce que vous

 27   pouvez vous limiter aux questions qui vous sont posées ? Je vous demande

 28   simplement : est-ce que vous suggérez que les notes en bas de page ici

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  1   révèlent la jurisprudence de quelque type que ce soit ?

  2   M. KHAN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. L'existence des

  3   affaires qui font partie de la jurisprudence de ce Tribunal.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  5   M. KHAN : [interprétation]

  6   Q.  Monsieur Vincent, passons à l'intercalaire 35.

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Paragraphe 12.

  9   R.  Oui, 12.

 10   Q.  Brièvement, est-ce que vous pouvez dire que ce paragraphe fait

 11   référence aux paragraphes 11 et 12 -- enfin, que ces deux paragraphes font

 12   référence aux documents de STC [comme interprété] ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Au paragraphe 12, il est fait référence à la Cour de justice

 15   internationale, à la procédure qui est imminente ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Au paragraphe 13, l'Accusation soumet que la Serbie-et-Monténégro

 18   trouve que la Cour internationale de justice ne peut pas excuser son manque

 19   de coopération compte tenu de la production de la communication des

 20   documents concernant les crimes de guerre les plus graves dans cette

 21   affaire ? Vous voyez ça ?

 22   R.  Oui, je vois.

 23   Q.  Et dans la note en bas de page 16, page 6. Nous avons les détails de 67

 24   documents fournis par la Serbie-et-Monténégro ?

 25   R.  C'est exact.

 26   Q.  Et si vous examinez la page de garde, vous voyez que ce document a été

 27   soumis, déposé par l'Accusation le 20 mai 2003 ?

 28   R.  Oui.

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  8   [Audience à huis clos partiel]

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 22   [Audience publique]

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

 24   Monsieur Khan, vous pouvez poursuivre.

 25   M. KHAN : [interprétation]

 26   Q.  Si vous regardez votre dossier, vous voyez un communiqué de presse, qui

 27   est un communiqué de presse du greffe de ce Tribunal, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Quelle est la date de ce communiqué de presse ?

  2   R.  15 janvier 2009.

  3   Q.  Et quel est l'en-tête de ce communiqué de presse ?

  4   R.  "Stanislav Galic transféré en Allemagne pour y servir sa peine."

  5   Q.  Bien. Est-ce que vous pourriez maintenant passer à l'onglet 38.

  6   R.  [aucune interprétation]

  7   Q.  Quelle est la date de ce document ?

  8   R.  Il s'agit donc du 16 janvier 2009.

  9   Q.  Donc c'est le jour après que le greffe ait publié un communiqué de

 10   presse; est-ce exact ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Et si vous allez à la deuxième page de cette ordonnance judiciaire en

 13   date du 16 janvier, il est dit que c'est le 16 janvier que le Président de

 14   cette Cour, le Juge Robinson, a demandé au greffe de lever la

 15   confidentialité de cette ordonnance qui pouvait être considérée comme du

 16   domaine public; est-ce exact ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Si vous pouviez --

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 20   M. KHAN : [interprétation] Président, je pense avoir terminé d'ici cinq

 21   minutes.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Parce qu'il est pratiquement le temps

 23   de faire la pause suivante.

 24   M. KHAN : [interprétation] Si vous souhaitez faire la pause maintenant,

 25   nous pourrions reprendre ensuite.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien, nous allons faire une pause et

 27   nous reviendrons à 12 heures 30. Nous pouvons donc lever l'audience.

 28   --- L'audience est suspendue à 12 heures 02.

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  1   --- L'audience est reprise à 12 heures 34.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Khan.

  3   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

  4   vous en suis reconnaissant. Et avant de reprendre avec M. Vincent, je

  5   voudrais simplement lire dans le procès-verbal une correction concernant

  6   les écritures dont nous avons parlé ce matin, du 15 juin 2009. Il s'agit de

  7   la réponse de la Défense à la requête amicus de l'Accusation et, les

  8   parties expurgées, le paragraphe 30 de ces écritures de la Défense. Au

  9   sous-paragraphe (2), nous avons dit :

 10   "En utilisant les mécanismes qui sont prévus dans la note 25 en bas

 11   de page de la décision du 19 mai 2009, la Chambre de première instance

 12   devrait donner des réponses claires et évidentes aux trois questions de la

 13   Défense."

 14   Bien entendu, c'est une erreur, et je voudrais demander au juriste de haute

 15   classe de vous le montrer. Je demanderais à ce que : "La Chambre de

 16   première instance" soit effacé et remplacé par "the amicus prosecutor," le

 17   procureur amicus. Président, je dis cela simplement dans le procès-verbal

 18   d'audience. Nous n'envisageons pas de déposer une demande par écrit, à

 19   moins que Votre Honneur ne considère que cela est nécessaire.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur Khan.

 21   M. KHAN : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur Vincent, je vais vous demander de regarder l'onglet 40. Vous

 23   l'avez sous les yeux ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Est apposé dessus le mot "confidentiel," n'est-ce pas ?

 26   R.  C'est bien cela.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous ne sommes pas à huis clos

 28   partiel.

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  1   M. KHAN : [interprétation] Je sais.

  2   Q.  C'est bien marqué "confidentiel," n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Est-ce que vous connaissez bien les pratiques du TPIY concernant

  5   l'outrage ?

  6   R.  Non, pas de façon exhaustive, mais je suis au courant, effectivement,

  7   du contexte des points principaux.

  8   Q.  Est-ce que vous accepteriez de ma part que l'article 12 de cette

  9   directive concernant les pratiques exige le rapport dans son intégralité de

 10   l'enquêteur amicus et qu'il devrait être soumis de façon confidentielle au

 11   greffier pour être ensuite retransmis à la Chambre ?

 12   R.  Oui, je l'accepte tout à fait.

 13   Q.  Merci. Si nous prenons maintenant l'onglet 41, vous verrez là un

 14   document qui est du domaine public. C'est l'ordonnance qui tient lieu

 15   d'acte d'accusation pour outrage dans cette affaire. Est-ce que vous le

 16   voyez ?

 17   R.  Oui, je le vois.

 18   Q.  Il est en date du 27 août 2008; est-ce exact ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  La Chambre de première instance spécialement désignée est le Juge Agius

 21   ?

 22   R.  Oui, c'est exact.

 23   Q.  Si vous regardez maintenant à la page 2 au paragraphe 1, vous verrez

 24   dans la dernière phrase qu'une référence est faite au rapport de l'amicus

 25   curiae; est-ce exact ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord - et ceci recoupe un peu ma question

 28   précédente - que les Juges peuvent décider comment ou de quelle façon, ou

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  1   de quelle manière ils envisagent de modifier le statut de documents

  2   confidentiels émanant de ce Tribunal ?

  3   R.  Dans la mesure où ça en est à cette étape dans le cadre des Règles de

  4   procédure et de preuve agréées en plénière, je dirais oui.

  5   Q.  Et si nous pouvions maintenant passer à l'onglet 42.

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Là encore, il s'agit d'un document du domaine public, n'est-ce pas ?

  8   R.  Il semblerait bien que oui.

  9   Q.  Déposé le 1er décembre 2008 dans cette affaire, l'affaire contre

 10   Florence Hartmann ?

 11   R.  C'est exact.

 12   Q.  Si vous regardez à nouveau le paragraphe 1, là encore, les Juges avec

 13   comme Président le Juge Agius, font référence à la réponse confidentielle à

 14   la requête qui a été déposée, donc il s'agit d'une réponse confidentielle

 15   de l'Accusation à laquelle il est fait référence dans ces écritures

 16   publiques. Est-ce que vous le voyez ?

 17   R.  Oui, je le vois.

 18   Q.  Si vous allez maintenant à l'onglet 43 -- est-ce que vous le voyez ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Est-ce que vous pouvez maintenant aller au paragraphe 9, s'il vous

 21   plaît.

 22   R.  Oui, j'y suis.

 23   Q.  Est-ce que vous pouvez voir qu'au paragraphe 9 l'amicus, à nouveau,

 24   fait référence au rapport confidentiel ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Et si vous regardez le paragraphe 17, s'il vous plaît. Là encore, une

 27   référence est faite au rapport, "ainsi que cela a été noté dans le

 28   rapport," vous voyez cela ? Cela donne des détails concernant le contenu du

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  1   rapport; est-ce que vous le voyez ? 

  2   R.  Je suis en train de chercher, c'est le 17. Non, ça n'a rien à voir avec

  3   le rapport.

  4   Q.  Non, non. C'est "L'interférence avec l'administration de la justice,"

  5   et il fait référence à cette jurisprudence, n'est-ce pas.

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Paragraphe 19, là encore, il est fait référence à ce même rapport

  8   confidentiel.

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Je ne vais pas tous les mentionner. Mais le paragraphe 23, vous voyez à

 11   nouveau la même référence ?

 12   R.  Oui, je vous suis.

 13   Q.  Troisième paragraphe, là encore, il est fait référence à l'existence

 14   d'un rapport et il est fait allusion également au contenu du rapport

 15   indiquant que le rapport sur lequel l'attention de la Chambre a été

 16   attirée, l'argument de la Défense, et cetera.

 17   R.  Oui, je le vois.

 18   Q.  Etes-vous d'accord avec moi pour dire qu'une décision expresse n'est

 19   pas demandée aux Juges pour modifier le statut d'une décision

 20   confidentielle ?

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur MacFarlane.

 22   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci, Président.

 23   Il me semble que c'est une question très importante dans ces procédures qui

 24   est une question de droit. Je pense que le témoin n'est pas en position de

 25   répondre à cette question. C'est une question qui incombe à la Chambre.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur --

 27   M. KHAN : [interprétation] Oui, c'est une question tout à fait essentielle,

 28   c'est la raison pour laquelle mon éminent confrère s'est levé. Mais c'est

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  1   quelque chose qui est parfaitement pertinent dans le cadre du témoignage de

  2   ce témoin. Il est en train d'expliquer, sur la base de l'expérience qu'il a

  3   accumulée dans différents tribunaux ad hoc et dans des tribunaux spéciaux,

  4   quelles sont les pratiques concernant le versement des documents. Ma

  5   question porte sur la pratique de la Cour. Il ne fait aucun doute que mon

  6   éminent confrère a des objections, car il considère qu'il y a des règles

  7   extrêmement rigides, à moins qu'il n'y ait une dérogation expresse ou une

  8   décision expresse de la part des Juges ou d'un Juge formel stipulant que

  9   cette décision, la décision X, Y, Z, devient publique et, à moins que cela

 10   n'existe, elle reste confidentielle. Et l'objectif du contre-interrogatoire

 11   de la Défense est qu'il n'existe pas de telles règles; non pas que cela

 12   soit plus important dans le cadre d'une violation que dans le cadre

 13   d'observation, mais une telle règle n'existe pas.

 14   Et à la fin de cette affaire, une fois que nous arriverons aux

 15   réquisitoires et aux plaidoiries, vous verrez lorsque vous vous pencherez

 16   sur les pratiques de cette Cour et d'autres tribunaux, vous arriverez à la

 17   conclusion inévitable qu'en fait les Juges peuvent modifier la nature des

 18   décisions au cas par cas dans les affaires et que ceci reste à votre

 19   discrétion. Donc, Monsieur le Président, le point auquel j'ai fait allusion

 20   dans mes propos liminaires, c'est une question importante.

 21   C'est quelque chose qui est totalement entre vos mains, Monsieur le

 22   Président, mais je pense que cette objection ne peut être acceptée.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Khan, la Chambre considère

 24   que c'est une question à laquelle les Juges doivent répondre. Ça, c'est la

 25   première chose.

 26   Deuxième chose, dans la mesure où vous avez demandé au témoin de vous

 27   dire si les Juges peuvent rendre publics les documents confidentiels, cette

 28   question lui a été posée et une réponse a été donnée. Le témoin vous a dit,

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  1   il y a quelques minutes : Oui, la Chambre peut le faire, à condition que ce

  2   soit fait en conformité avec les Règles de procédure et de preuve. Et j'ai

  3   bien peur que nous devions accepter cette objection.

  4   M. KHAN : [interprétation] Mais cela, Monsieur le Président, me ramène à ma

  5   première demande, à savoir qu'il y a des espèces très --

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous êtes toujours en

  7   objection ?

  8   M. KHAN : [interprétation] C'est pour le procès-verbal --

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non, la Chambre a pris une décision.

 10   Je vous demanderais de passer à la question suivante.

 11   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, avec tout le respect que

 12   je vous dois, pour le procès-verbal, je dois pouvoir préciser ce qui était

 13   ma réponse, à moins qu'il n'y ait un malentendu.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La décision a été prise par rapport à

 15   ce que vous avez dit avant cette précision. Ce, contre quoi, vous devez

 16   faire appel, si vous devez faire appel, c'est la décision, mais vous pouvez

 17   le faire en argumentant votre demande.

 18   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, je ferai ce qui m'est

 19   demandé.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 21   M. KHAN : [interprétation] Je ferai ce qui m'est demandé.

 22   Peut-être l'on pourrait montrer au témoin les décisions du Procureur

 23   et Rasim Delic du 14 janvier 2008, présidées par le Président. Si vous me

 24   permettez de distribuer un exemplaire.

 25   Messieurs les Juges, je m'excuse. Il semblerait qu'il nous manque un

 26   exemplaire. Je me demandais s'il serait possible que vous partagiez un

 27   document pendant quelques instants - je m'en excuse - et nous allons faire

 28   en sorte de vous fournir un autre exemplaire à la prochaine pause.

Page 182

  1   Je vous en remercie d'avance et m'en excuse.

  2   Q.  Monsieur Vincent, en regardant la première page de ce document, vous

  3   verrez les Juges, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Et qui est le Juge Président ?

  6   R.  Le Juge Patrick Robinson.

  7   Q.  Excusez-moi, est-ce que vous regardez la décision sur les six requêtes

  8   de l'Accusation pour la recevabilité d'éléments de preuve en conformité

  9   avec la Règle 92 bis ?

 10   R.  Je regarde cela. Il s'agit de la Chambre de première instance I et

 11   c'est le Juge Président Moloto.

 12   Q.  Il s'agit donc du 14 janvier, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  2008 ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Et c'est une décision publique ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Si vous pouviez maintenant avoir la bonté de passer à la page 3.

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Est-ce que vous pouvez lire le troisième paragraphe qui commence par :

 21   "Noting" ?

 22   R.  "Notant qu'en conformité avec la jurisprudence, la Chambre a le pouvoir

 23   discrétionnaire de revoir une décision précédente" --

 24   L'INTERPRÈTE : L'interprète demande de ralentir.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais recommencer.

 26   M. KHAN : [interprétation]

 27   Q.  Oui, s'il vous plaît.

 28   R.  "Notant que conformément à la jurisprudence, la Chambre a le pouvoir

Page 183

  1   discrétionnaire de réexaminer une décision préalable lorsque l'intérêt de

  2   la justice le demande."

  3   Il est fait référence ensuite à une note en bas de page.

  4   M. KHAN : [interprétation]

  5   Q.  Pouvez-vous lire la note en bas de page, Monsieur Vincent.

  6   R.  La note en bas de page 8 se lit comme suit :

  7   "Voir la décision confidentielle concernant la Serbie-et-Monténégro de

  8   l'Accusation contre Slobodan Milosevic concernant la révision de la

  9   décision de la Chambre de première instance du 6 décembre 2005."

 10   Et la référence à l'affaire, il s'agit de l'affaire

 11   IT-02-54-AR-108 bis, du 3 au 6 avril 2006, paragraphe 25, note en bas de

 12   page 40.

 13   Q.  Est-il exact ou non dans ce que vous avez lu, une décision

 14   confidentielle est peut-être utilisée comme fondement pour soutenir

 15   certains résultats, les résultats publics de la Chambre de première

 16   instance; est-ce là une évaluation correcte, n'est-ce pas ?

 17   R.  Il semblerait que ce soit le cas.

 18   Q.  Passons maintenant à l'affaire Rasim Delic. Il s'agit d'une décision

 19   publique en date du 23 août 2006. Est-ce que vous voyez

 20   cela ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Qui préside ?

 23   R.  Le Juge Patrick Robinson.

 24   Q.  Pouvez-vous maintenant passer à la page 4 ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Si vous pouviez commencer au dernier paragraphe de la page 3 et le

 27   lire, s'il vous plaît, qui se lit en commençant par : "Considering…"

 28   R.  "Considérant que les critères de réexamen ont été clairement établis

Page 184

  1   par une décision de la Chambre d'appel --"

  2   Q.  Il s'agit d'une citation, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui, c'est une citation. Excusez-moi. Donc "…la Chambre a le pouvoir

  4   discrétionnaire de revoir une décision interlocutoire précédente dans le

  5   cadre de décisions exceptionnelles," et je cite à nouveau, "il y a eu une

  6   erreur de raisonnement ou pour empêcher une injustice."

  7   Là encore, il est fait référence à une note en bas de page.

  8   Q.  Je vous demanderais de bien vouloir lire cette note en bas de page à

  9   l'intention des Juges.

 10   R.  [aucune interprétation]

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Khan, si vous pouviez -- vous

 12   avez dit que le témoin doit maintenant regarder la page 4 et je suis

 13   maintenant sur la page 4 de cette décision et je ne vois pas du tout ce

 14   qu'il lit.

 15   M. KHAN : [interprétation] Est-ce que vous regardez la décision du 23 août

 16   2006 ?

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est exact.

 18   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, si vous regardez le haut

 19   de la page, ça commence à la dernière ligne de la page 3 qui se lit :

 20   "Considering…"

 21   Et M. Vincent a poursuivi en reprenant en haut de la page 4 par une

 22   citation.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais j'étais allé à la page 4, parce

 24   que vous aviez fait référence à la page 3 et non pas à la page. C'est la

 25   raison pour laquelle je ne voyais pas ce que lisait le témoin.

 26   Vous pouvez poursuivre. Je vous en remercie.

 27   M. KHAN : [aucune interprétation]

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Merci.

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  1   Q.  Si vous pouviez maintenant lire la note en bas de page à l'intention du

  2   Président.

  3   R.  La note en bas de page 10 :

  4   "Le Procureur contre --

  5   L'INTERPRÈTE : Un nom que l'interprète n'a pas entendu.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] -- il s'agit de l'affaire

  7   IT-02-54-AR-108 bis 3, une décision sur la requête de la Serbie-et-

  8   Monténégro pour revoir la décision de la Chambre de première instance du 6

  9   décembre 2005, en date du 6 avril 2006, paragraphe 25, note 40."

 10   Q.  Je vous en remercie. Etes-vous conscient du fait, Monsieur Vincent, que

 11   c'est là une des décisions qui font l'objet des procédures d'outrage contre

 12   Mme Hartmann ?

 13   R.  Oui, effectivement, j'accepte cela de votre part et ce sont des faits

 14   qui présentent quelques ressemblances avec des extraits des publications

 15   que j'ai vues. Donc je l'accepte.

 16   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord avec moi que la jurisprudence de la

 17   Chambre d'appel dans cette décision confidentielle qui est présidée par le

 18   Juge Patrick Robinson; est-ce exact ?

 19   R.  Bien, cette décision à laquelle il a été fait référence, oui, tout à

 20   fait.

 21   Q.  Oui. Et cette décision -- et vous avez la citation, c'est un extrait de

 22   la jurisprudence; c'est exact, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui, je n'étais pas au courant de cela, mais je l'accepte de votre

 24   part.

 25   Q.  Mais ne l'acceptez pas ainsi de moi. Mais si vous regardez ce document,

 26   étant donné que vous êtes un juriste expérimenté, il est clair, n'est-ce

 27   pas, que la Chambre de première instance fait référence à la décision

 28   confidentielle de la Chambre d'appel, n'est-ce pas ? C'est la seule façon

Page 186

  1   de le comprendre, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui. La seule chose que je disais, c'est que je ne connais pas

  3   exactement les termes exacts de cette décision.

  4   Q.  Si vous pouviez maintenant passer à l'affaire Perisic du 22 décision

  5   2006.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Où trouvons-nous cela, Monsieur Khan ?

  7   M. KHAN : [interprétation] Messieurs les Juges, vous devriez l'avoir. Je

  8   pense que mon assistant a dû vous le donner.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pourriez-vous nous dire à quelle page

 10   cela se trouve.

 11   M. KHAN : [interprétation] Messieurs les Juges, il s'agit donc d'un

 12   document en date du 22 --

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur.

 14   M. KHAN : [interprétation] Je vous remercie de votre tolérance.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Si vous pourriez nous dire où vous en

 16   êtes --

 17   M. KHAN : [aucune interprétation]

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Parce que vous nous avez donné ce

 19   document, vous nous avez donné ce classeur et nous ne savons plus trop où

 20   regarder. Vous nous avez donné également ce document.

 21   M. KHAN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je ferai de mon

 22   mieux.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous dites l'affaire Perisic, je ne

 24   sais pas si ça se trouve là, là ou là.

 25   M. KHAN : [interprétation] Oui, dès le départ, j'ai dit qu'il s'agit

 26   d'écritures qui ont été remises juste après la pause et qui constituent

 27   trois documents --

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien.

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  1   M. KHAN : [interprétation] -- là c'est le dernier de ces trois documents.

  2   Et, Monsieur le Président, je vais essayer d'aller lentement et je m'en

  3   excuse si cela a incommodé les Juges.

  4   Q.  Monsieur Vincent, est-ce que vous avez ce document devant vous ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Donc c'est avant une Chambre de première instance présidée par le Juge

  7   Robinson; est-ce exact ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  En date du 22 septembre 2006 ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Dans l'affaire Perisic ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Et c'est intitulé : "Une ordonnance de la requête renouvelée du

 14   requérant demandant accès au matériel confidentiel dans l'affaire

 15   Milosevic," avec l'annexe A; est-ce exact ?

 16   R.  Oui, c'est exact.

 17   Q.  Si vous pouviez avoir la bonté maintenant de passer à la page 2.

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Est-ce que vous pouvez voir la note dans le dernier paragraphe ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Est-ce que vous pourriez avoir la gentillesse de nous lire ce

 22   paragraphe.

 23   R.  Commençant par "Noting," et cetera.

 24   Q.  Oui.

 25   R.  "Notant les critères juridiques pour le réexamen d'une décision qui a

 26   été établie dans le cadre de la jurisprudence du tribunal comme suit et je

 27   cite :

 28   'La Chambre a le pouvoir inhérent et discrétionnaire de réexaminer

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  1   une décision interlocutoire précédente dans des cas exceptionnels,' et la

  2   citation se poursuit en disant : 'dans les cas où il y a eu clairement une

  3   erreur de raisonnement ou lorsqu'il est nécessaire d'éviter une

  4   injustice.'"

  5   Ensuite il y a donc une note en bas de page 3.

  6   Q.  Pourriez-vous lire cette note en bas de page.

  7   R.  Cette note numéro 3 en bas de page se lit comme suit :

  8   "Voir l'affaire du Procureur contre Milosevic, il s'agit de l'affaire IT-

  9   02-54-AR 108 bis 3, décision confidentielle à la demande de la Serbie-et-

 10   Monténégro pour réexaminer la décision de la Chambre de première instance

 11   du 6 décembre 2005, paragraphe 25, note 40."

 12   Ensuite entre parenthèses --

 13   Q.  Oui. Merci. Cela suffit largement.

 14   R.  Merci beaucoup.

 15   Q.  Une fois de plus, est-ce que ce n'est pas tout à fait évident, Monsieur

 16   Vincent, que dans ces écritures publiques de la Chambre de première

 17   instance dans l'affaire Perisic, référence est faite, non seulement à

 18   l'existence d'une décision confidentielle, mais à la jurisprudence de la

 19   décision confidentielle dans l'affaire Milosevic ?

 20   R.  Il semble tout à fait que cela fasse partie de cette jurisprudence.

 21   Q.  Oui.

 22   R.  C'est un extrait.

 23   Q.  Oui, et la jurisprudence qui a été rendue par la Chambre d'appel de ce

 24   Tribunal le 6 décembre 2005.

 25   R.  Il semblerait que ce soit le cas.

 26   Q.  Bien. Dans tous ces cas, une demande de mesures de protection demandée

 27   par la Serbie-et-Monténégro est mentionnée; est-ce exact ?

 28   R.  Oui, tout à fait.

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  1   Q.  Est-ce que votre attention a été attirée sur ce point, dans la mesure

  2   où vous êtes un juriste ayant de l'expérience dans différents tribunaux,

  3   que la Serbie se soit plainte de ces parties confidentielles de la

  4   jurisprudence rendues publiques ?

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Khan, où dans cette note en

  6   bas de page 3, référence est faite à la Serbie et à la demande de quoi que

  7   ce soit ?

  8   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, dans cette décision --

  9   Monsieur le Président, --

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non, dans cette note en bas de page.

 11   M. KHAN : [interprétation] Décision confidentielle à la demande de la

 12   Serbie-et-Monténégro pour la révision de la décision de la Chambre de

 13   première instance du 6 décembre 2005.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien.

 15   M. KHAN : [interprétation] Donc il est clair que référence est faite à la

 16   Serbie-et-Monténégro.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pour réviser une décision.

 18   M. KHAN : [interprétation] Oui.

 19   Q.  Il s'agit de décisions confidentielles, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui, tout à fait.

 21   Q.  Donc est-ce que vous pourriez répondre à la question que je vous ai

 22   posée il y a quelques minutes à savoir : Est-ce que vous saviez - et si

 23   vous ne savez pas vous pouvez le dire - si le requérant, à savoir à la

 24   Serbie-et-Monténégro ne se sont jamais plaint de la jurisprudence qui avait

 25   été citée publiquement par les Juges de cette Cour alors qu'il s'agissant

 26   d'éléments confidentiels ?

 27   R.  Je n'ai pas connaissance de cela, mais je n'ai jamais dit que j'avais

 28   des connaissances dans ce domaine précis.

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  1   Q.  Je vous demande de passer à l'intercalaire numéro 30. Est-ce que vous

  2   consultez le compte rendu d'audience de la cour internationale de justice

  3   qui porte la date du 8 mai 2006 ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Si vous pouvez le lire, parce que j'ai déjà mentionné aux Juges, est-ce

  6   que vous pouvez lire en votre for intérieur très rapidement le paragraphe

  7   55. C'est en bas de la page. Cela fait référence à l'affaire de génocide

  8   entre la Bosnie-Herzégovine et la Serbie-et-Monténégro; est-ce exact ?

  9   R.  Oui, c'est exact.

 10   Q.  Et est-ce exact ? Prenez votre temps --

 11   R.  Je viens de terminer la dernière phrase.

 12   Q.  Oui.

 13   R.  Oui, je suis arrivé à la fin de la page.

 14   Q.  Est-ce que vous pouvez également lire le paragraphe 59 qui est à la

 15   page 28.

 16   R.  Oui, je l'ai lu.

 17   Q.  Est-ce exact de dire que cet extrait de la Cour de justice

 18   internationale, et vous voyez qu'il s'agit d'une séance publique, cette

 19   séance abordait les documents du SDC ?

 20   R.  C'est exact.

 21   Q.  Il est mentionné que la Serbie-et-Monténégro stipulait que ces

 22   documents ne pouvaient pas être discutés, parce qu'ils faisaient l'objet de

 23   mesures de protection imposées par le TPIY; est-ce exact ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Et ils sont très clairs, n'est-ce pas, ils font un distinguo entre le

 26   contenu de la section qui a fait l'objet d'expurgation en disant qu'ils ne

 27   sont pas habilités à aborder le contenu des sections expurgées des

 28   documents du conseil suprême de la Défense à ce moment-là dans la

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  1   procédure; est-ce exact ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Seriez-vous d'accord pour dire que la pratique au sein des tribunaux

  4   pour lesquels vous avez travaillé montre qu'il y a une différence entre un

  5   intérêt qui sous-tend ces délibérations et qui doit être resté confidentiel

  6   et la jurisprudence de ces tribunaux ? Par exemple, s'il y a une décision,

  7   et un témoin faisant l'objet de mesures de protection, un témoin X qui est

  8   mentionné nommément, ce n'est pas inhabituel dans ce type de tribunaux que

  9   la jurisprudence soit citée sans pour autant mentionner nommément le témoin

 10   X afin de diffuser le plus largement possible la jurisprudence de la Cour

 11   et d'informer les autres Chambres de première instance; est-ce que c'est

 12   une pratique habituelle ?

 13   R.  Ce n'est pas quelque chose dont je n'ai jamais entendu parler. Cela

 14   dépend des différents cours et tribunaux, mais je dirais que ce n'est pas

 15   non plus une pratique qui est communément établie dans ces différents

 16   tribunaux. Mais vous avez peut-être une expérience plus étendue que la

 17   mienne en ce domaine.

 18   Q.  Et quelle est la pratique de manière générale ? Vous avez parlé de

 19   l'affaire contre Charles Taylor, où le procureur qui avait été le requérant

 20   avait rendu public l'acte d'accusation avant l'ordonnance de la Chambre qui

 21   avait rendu public cet acte d'accusation. Nous voyons ici que la Serbie-et-

 22   Monténégro parle d'une requête à l'attention du TPIY et parle de contenu de

 23   documents qui portait sur les activités du SDC. Est-ce en fait le cas,

 24   c'est-à-dire qu'en pratique le requérant visant à demander une mesure

 25   bénéficie d'une grande latitude quant à savoir jusqu'à quel moment les

 26   intérêts des mesures de protection pourront s'appliquer et à quel moment

 27   ces mesures de protection ne seront plus vraiment d'un intérêt

 28   quelconque ? Et est-ce qu'il est exact de dire que pour ce qui est du cas

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  1   de la Serbie-et-Monténégro, en séance publique, on a mentionné le contenu

  2   de décisions qui faisaient l'objet d'ordonnances de confidentialité ?

  3   R.  Je pense que les deux sont exacts. Pour ce qui est de la décision de

  4   David Crane, il n'y a rien de significatif dans la publication de cette

  5   ordonnance de la Cour en ce qui concerne la divulgation des actes

  6   d'accusation contre Charles Taylor, mis à part le fait qu'il y ait eu un

  7   calendrier assez ramassé, compte tenu des circonstances extrêmes dans

  8   lesquelles ces questions ont été abordées. Mais à chaque fois, il faut

  9   évaluer la situation en fonction de différents motifs et ces décisions sont

 10   prises en fonction de ces situations dans les différents tribunaux ou

 11   cours.

 12   Q.  Mais la question était : Dans votre expérience au niveau du TPIY, du

 13   tribunal au Cambodge, du tribunal spécial pour le Liban, du tribunal

 14   spécial de la Sierra Leone, est-ce la pratique que d'avoir une chambre --

 15   ou plutôt, revenons en arrière. Est-ce exact de dire que de manière

 16   générale, la Chambre rend ordonnance de protection suite à une demande qui

 17   a été faite par une des parties ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Et cette requête peut être demandée par l'Accusation, par la Défense ou

 20   par des Etats, entre autres ?  

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Et les motivations qui sous-tendent ces ordonnances de confidentialité

 23   visent à encourager la coopération des différents Etats et à permettre

 24   également que justice soit rendue de manière appropriée; est-ce exact ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Compte tenu du fait qu'une chambre d'audience va soit octroyer des

 27   mesures de protection ou les rejeter, la pratique est telle que le

 28   requérant pourra également avoir une certaine latitude pour décider du

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  1   moment où ces mesures de protection ne seront plus nécessaires. C'est ce

  2   qui se passe dans la réalité, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Avez-vous eu connaissance de plusieurs cas où des mandats d'arrêt ont

  5   été émis -- est-ce que vous connaissez la procédure des mandats d'arrêt ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Il y a deux types; vous avez le type plus ancien ou plus ordinaire,

  8   c'est-à-dire que vous avez des actes d'accusation sous pli scellé, et il

  9   était mentionné qu'un mandat d'arrêt était émis par une chambre et ce

 10   mandat d'arrêt devait rester confidentiel jusqu'à ordonnance du contraire.

 11   R.  Oui, c'est possible.

 12   Q.  Il y avait un autre type de mandat d'arrêt qui a été développé

 13   ultérieurement, à savoir que ces mandats d'arrêt devenaient confidentiels

 14   ou n'étaient pas confidentiels tant qu'il n'y aurait pas eu d'ordonnance de

 15   la part de la chambre ou tant que le mandat n'avait pas été exécuté.

 16   R.  Oui.

 17   Q.  En ce qui concerne le premier type d'ordonnance, avez-vous connaissance

 18   d'un nombre important d'affaires où, après l'exécution de l'ordonnance, des

 19   personnes, que ce soit au niveau de la Défense, de l'Accusation ou d'autres

 20   instances, aient décidé de publier le mandat d'arrêt en l'absence

 21   d'ordonnance de cette Cour ?

 22   R.  Non.

 23   Q.  Connaissez-vous le cas de la Maison blanche durant la présidence de M.

 24   Bush dans l'affaire Dokmanovic, qui a rendu public le mandat d'arrêt de

 25   Dokmanovic avant qu'un Juge de cette Cour ait rendu public le mandat

 26   d'arrêt ou l'acte d'accusation ?

 27   R.  Ce cas m'avait échappé.

 28   Q.  Mais il y a en fait de nombreux cas de ce type --

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  1   R.  Je ne suis pas d'accord. Il n'y a pas de nombreux cas de ce type.

  2   Q.  Etes-vous familier --

  3   M. McKEON : [interprétation]

  4   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, je vous demande un

  5   peu de patience, s'il vous plaît. Merci.

  6   Q.  Avez-vous entendu parler de l'affaire Vasiljevic ?

  7   R.  De nom.

  8   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

  9   n'ai pas passé en revue tous ces éléments, mais vous verrez que dans

 10   l'intercalaire 13, il y a un communiqué de presse de l'OTAN, de son

 11   secrétaire général, Lord Robinson, datant du 25 janvier, qui a rendu public

 12   cet acte d'accusation. Nous verserons ceci comme pièce durant ce procès et

 13   nous prouverons que c'est seulement le lendemain qu'une ordonnance a été

 14   rendue par la chambre d'instance pour rendre publique cette décision.

 15   Q.  Monsieur Vincent, je n'ai pas à lire les noms, mais je peux mentionner

 16   l'affaire Nikolic, Bala, Musliu, Limaj. Des déclarations ont été faites par

 17   la K-4, par la S-4 ou par l'OTAN avant qu'un jugement n'ait été rendu par

 18   cette Cour rendant publiques des informations qui, auparavant, étaient

 19   confidentielles.

 20   R.  Bien sûr, j'accepte. Tout se lit avec un seul bémol, à savoir que dans

 21   chaque affaire il y a des circonstances qui nécessitent des actions, comme

 22   par exemple, dans l'affaire Taylor.

 23   Q.  Bien sûr, toute décision est basée sur les circonstances qui entourent

 24   la décision.

 25   R.  Oui, notamment en ce qui concerne les mandats d'arrêt.

 26   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

 27   vous demande un moment, s'il vous plaît.

 28   Monsieur Vincent, je vous remercie d'avoir trouvé un peu de temps pour

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  1   comparaître. Vous serez ravi de savoir que comme nous arrivons proche de la

  2   pause déjeuner, je n'ai plus d'autres questions à vous poser.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Maître Khan, merci beaucoup.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  5   Questions supplémentaires, Monsieur MacFarlane ?      

  6    M. MacFARLANE : [interprétation] J'ai quelques questions supplémentaire.

  7   Normalement je serai assez bref.

  8   Nouvel interrogatoire par M. MacFarlane :

  9   Q.  [interprétation] Ma première question, Monsieur Vincent, est plutôt

 10   générale, et donc non pas concrète par rapport à une situation spécifique.

 11   Est-ce que vous croyez que s'agissant des situations graves liées à la

 12   communication que parfois une enquête est ouverte ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Et la question de savoir si oui ou non les charges seront portées

 15   dépend des résultats de cette enquête ?

 16   R.  Oui, certainement. D'après mon expérience, normalement il y aurait

 17   d'abord une enquête préliminaire avant de décider s'il faut poursuivre la

 18   procédure ou pas.

 19   Q.  Donc la communication, en soi, n'aboutit pas forcément à un processus

 20   par le biais duquel les charges sont portées ?

 21   R.  Non, pas d'après mon expérience. C'est plutôt une espèce de commentaire

 22   en cours, en permanence.

 23   Q.  Deuxièmement, s'agissant de la situation liée à David Crane et la cour

 24   spéciale pour la Sierra Leone, j'ai deux questions à vous poser.

 25   Tout d'abord, mon éminent collègue vous a parlé d'une série d'événements

 26   indiquant que le 4 juin un document a été rendu, puis il y avait un ordre

 27   de communication le 12 juin. C'est le document que vous avez sous les yeux,

 28   n'est-ce pas ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Je souhaite attirer votre attention à l'ordre portant sur la

  3   communication de l'acte d'accusation du 12 juin, et à la page 2, au milieu

  4   il y a un paragraphe qui commence par les mots, "ayant reçu…" est-ce que

  5   vous pouvez le lire ?

  6   R.  Oui.

  7    "Ayant reçu le 7 juin 2003 une requête du Procureur pour une

  8   communication publique ou divulgation publique de l'acte d'accusation

  9   contre l'accusée, le mandat d'arrêt et l'ordre de transfert et de

 10   détention, et la décision qui approuve l'acte d'accusation et l'ordre de

 11   non-communication."

 12   Q.  D'après cela, alors, je suppose que le Procureur a agi dans un délai

 13   des trois jours par rapport à la date de l'ordre qui a autorisé la

 14   divulgation. C'est la manière dont vous lisez cela ?

 15   R.  C'est exact. Comme je l'ai dit au conseil, Me Khan, à mon avis, il

 16   s'agissait vraiment d'une question de circonstances. Je veux dire à

 17   l'époque j'y étais. C'étaient des circonstances extrêmes qui ont persuadé

 18   le Procureur et la Cour d'agir comme ceci a été fait.

 19   Q.  Vous savez d'après votre expérience si oui ou non il y avait des

 20   communications entre M. Crane et son bureau et la Chambre, avant la

 21   déclaration du 4 juin ?

 22   R.  Je crois que j'avais compris que c'était le cas.

 23   Q.  Merci.

 24   M. KHAN : [interprétation] Je m'excuse. Bien sûr, je n'ai pas le droit de

 25   poser des questions supplémentaires, mais je ne sais pas ce que ça veut

 26   dire d'après la manière dont je comprends les choses. Je préfère une

 27   réponse par un oui ou un non.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Avec votre permission, je veux clarifier cela,

Page 199

  1   et peut-être entrer un petit peu dans des documents annexes. Lorsque

  2   l'intention du Procureur a été apportée sur le fait concernant cette

  3   personne - et je pense que je l'ai dit à Me Khan - lorsqu'il a appris que

  4   cette personne allait partir vers un endroit qui était considéré comme un

  5   endroit où il serait à l'abri de la justice. Or, l'acte d'accusation

  6   existait, le mandat d'arrêt existait, et lorsque le Procureur m'a parlé

  7   assez tard dans la soirée, il m'a demandé de m'assurer que les documents

  8   soient envoyés par le biais de représentants diplomatiques à la fois à

  9   Freetown et qu'un fax soit envoyé à Ghana. D'après la manière dont il

 10   parlait, j'ai compris qu'il avait mentionné ça à la Chambre de première

 11   instance. En fait, j'ai compris qu'il avait contacté un membre de la

 12   Chambre de première instance et que le résultat en était qu'il m'avait

 13   demandé de mettre en œuvre cette décision de transférer l'acte d'accusation

 14   et le mandat d'arrêt. C'est comme ça que j'ai compris les choses.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 16   M. MacFARLANE : [interprétation]

 17   Q.  Troisièmement, mon éminent collègue vous a montré quelques documents où

 18   référence a été faite de manière concrète à la communication in advertance.

 19   R.  C'est exact.

 20   Q.  C'étaient les noms utilisés dans les documents ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Et d'après votre expérience - et ça fait plusieurs années que vous êtes

 23   au sein des tribunaux internationaux - est-ce que vous avez jamais vu que

 24   les poursuites sont lancées en raison d'une communication inadvertante

 25   [comme interprété] ?

 26   R.  Non.

 27   Q.  Merci. Je souhaite que l'on revienne au gros classeur, intercalaire 12.

 28   Q.  Le rapport de la CCN.

Page 200

  1   R.  Oui, je l'ai.

  2   Q.  Et vous vous souvenez de la discussion avec mon éminent collègue

  3   concernant Christiane Amanpour --

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Et son commentaire au sujet de la situation et ce rapport. S'agissant

  6   de ce rapport, est-ce que Mme Amanpour a jamais dit que les informations

  7   dont elle parlait étaient confidentielles ?

  8   R.  Non.

  9   Q.  Est-ce qu'elle a déclaré devant le monde entier que les informations

 10   étaient confidentielles ?

 11   R.  Non.

 12   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci. Je n'ai plus de questions.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 14   Questions de la Cour : 

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Vincent, d'après votre

 16   expérience de greffier, dans des cours différentes, lorsqu'une décision est

 17   rendue de manière confidentielle, qu'est-ce qui est protégé à votre avis ?

 18   S'agit-il de l'existence même de l'ordre ou de la décision ou bien s'agit-

 19   il du contenu ?

 20   R.  C'est le contenu de la décision.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Y a-t-il des questions qui découlent

 22   de ma question ? Non? Monsieur MacFarlane ?

 23   M. MacFARLANE : [interprétation] Non.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Khan ?

 25   M. KHAN : [interprétation] Non, merci.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ainsi se termine votre déposition,

 27   Monsieur Vincent. Merci d'être venu déposer devant ce Tribunal. Vous

 28   pourrez disposer et je vous souhaite un très bon voyage de retour.

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les

  2   Juges, je vous remercie.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

  4   [Le témoin se retire]

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur MacFarlane.

  6   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Ainsi se

  7   termine les dépositions de vive voix du côté de l'Accusation. Mais je

  8   souhaite soulever une autre question. Je souhaite verser au dossier un

  9   document. J'ai averti mon éminent collègue de mon intention. J'ai compris

 10   qu'il allait faire objection, donc je vais expliquer la nature du document

 11   et le fondement de ma demande en ce moment.

 12   Nous avons préparé les exemplaires pour la Chambre --

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous pouvez poursuivre.

 14   M. MacFARLANE : [interprétation] Mon émient collègue --

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Votre éminent collègue est debout.

 16   M. METTRAUX : [interprétation] Oui, une objection préliminaire. Je pense

 17   que l'argument porte sur la recevabilité de ce document. Mais je pense

 18   qu'il faut en traiter avant que la Chambre n'ait le document sous les yeux.

 19   Je pense que la pertinence du contenu est presque zéro en ce moment. Il

 20   s'agit d'une question de procédure et statutaire. Je ne sais pas si M.

 21   MacFarlane souhaite présenter ses arguments allant dans ce sens, mais dans

 22   ce cas-là, nous préférons en traiter avant que la Chambre ne voie le

 23   contenu du document.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ceci serait conforme à la manière dont

 25   je comprends les choses.

 26   M. MacFARLANE : [interprétation] Si la Chambre décide que les documents

 27   sont irrecevables ou inadmissibles, il est préférable que la Chambre ne les

 28   voie pas. Donc vous pourrez présenter vos arguments sur le fondement sur

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  1   lequel vous souhaitez les verser au dossier. Ensuite la Chambre va prendre

  2   sa décision, ensuite nous allons décider si on peut les voir ou pas.

  3   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   Bien sûr, je suis obligé de faire allusion à la nature des documents pour

  5   que la Chambre puisse apprécier la pertinence et la fiabilité et peut-être

  6   avoir une idée de la valeur probante du document, et c'est ce que je vais

  7   faire. Je vais maintenant en termes généraux décrire la nature du document,

  8   ensuite la chronologie s'agissant des points contestés.

  9   Il s'agit d'une page, d'une lettre d'une page transmise par le

 10   greffier à l'accusée en date du 19 octobre 2007, et ceci concerne des

 11   questions différentes dans la Chambre est saisie. Il s'agit d'une agence de

 12   l'ONU officielle, notablement du TPIY. Ceci a été signé personnellement par

 13   le greffier et nous y voyons l'adresse à laquelle ceci a été envoyé.

 14   Au fond - et je ne vais pas entrer dans tous les détails du document

 15   - il s'agissait là d'une lettre du greffier par le biais duquel l'accusée

 16   avait été avertie au sujet de la divulgation apparente des informations

 17   confidentielles. Donc on peut dire qu'elle a été mise en garde ou avertie

 18   des verbes différents, néanmoins c'était une mise en garde.

 19   M. METTRAUX : [interprétation] Encore une fois je m'excuse à mon client,

 20   mais je crois que justement le but de notre objection initiale est

 21   maintenant rendu transparent par le biais des propos de M. MacFarlane, et

 22   je pense que M. MacFarlane maintenant essaie de présenter le contenu du

 23   document alors que nous avons dit que nous nous y opposions.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur MacFarlane, est-ce que vous

 25   avez d'autres arguments mis à part le contenu ?

 26   M. MacFARLANE : [interprétation] Oui.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Faites-le.

 28   M. MacFARLANE : [interprétation] Je vais y aller directement.

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  1   J'ai averti mon collègue et la Chambre du fait que j'avais l'intention de

  2   décrire le document, car sans une quelconque description, il est très

  3   difficile de comprendre sa pertinence. C'est la raison pour laquelle je

  4   l'ai mentionné vaguement.

  5   Pour ce qui est de la chronologie derrière le document et notre

  6   argument est que l'accusée n'était pas prise de cours et les conseils de la

  7   Défense n'étaient pas pris de cours ni les aides d'une manière quelconque,

  8   car l'accusée avait ce document depuis assez longtemps. Tout d'abord, ceci

  9   a été envoyé à l'accusée en tant que lettre. Deuxièmement, en juin de

 10   l'année dernière, il a été présenté à l'accusée pendant son entretien de

 11   suspect. Donc elle a compris que c'était un document important; et

 12   deuxièmement, c'est ce à quoi j'ai fait référence, son conseil y était avec

 13   elle à l'époque, donc elle pouvait bénéficier de son conseil juridique à

 14   l'égard de ce document et de tout ce qui est découle.

 15   Le pas suivant pour vous assurer qu'il n'y avait pas de préjudice ni

 16   que l'intéressée n'a pas été prise de cours, en automne de l'année

 17   dernière, dans le lot des pièces communiquées, ce document était communiqué

 18   également, il a été inclus dans la liste 65 ter comme faisant partie des

 19   documents sur lesquels l'Accusation s'appuyait. Ensuite on a fait référence

 20   à ce document dans la liste modifiée 65 ter. Donc il y a eu beaucoup

 21   d'éléments permettant à l'accusée et au conseil d'être conscients du fait

 22   que l'Accusation se concentrait sur ce document en ce moment.

 23   Et dans le cadre de notre correspondance au cours de ces quelques

 24   derniers mois, il a été noté que le conseil de l'Accusation avait

 25   l'intention d'utiliser peut-être le document au cours du contre-

 26   interrogatoire de l'accusée s'il décidait de déposer, et nous avons appris

 27   aujourd'hui, au début de la procédure ce matin, que l'accusée a décidé de

 28   ne pas déposer, ce qui est son droit.

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  1   Donc, avec toute la communication de ce document, puisque l'on a

  2   prêté attention plusieurs fois à ce document, l'a mis dans les mains de

  3   l'accusée et du conseil et on a clairement indiqué qu'on avait l'intention

  4   de l'utiliser dans la procédure par le biais de la liste 65 ter et de la

  5   correspondance, il ne peut pas y avoir de préjudice ni de prise de cours et

  6   je souhaite qu'il soit versé au dossier.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je résume, et vous avez dit que cette

  8   correspondance concernait ce document.

  9   M. MacFARLANE : [interprétation] Oui, oui, dans le contenu de la

 10   correspondance que le conseil a toujours dans des affaires de cette sorte,

 11   mon éminent confrère et moi-même avons des douzaines, si ce n'est des

 12   centaines de lettres et d'e-mails qui sont directement, dans ce contexte,

 13   liés à cette affaire.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 15   Monsieur Mettraux.

 16   M. METTRAUX : [interprétation] Merci, Président.

 17   La première chose que nous voudrions dire pour le procès-verbal c'est

 18   que contrairement à ce que vient de dire M. MacFarlane il y a un instant,

 19   le conseil ou l'accusée n'a jamais eu l'intention ou demandé de se fonder

 20   sur ce document, nous voulons que cela soit clair, car cela n'a jamais été

 21   le cas dans cette affaire.

 22   Et dans le processus d'une enquête, si je peux utiliser ce terme dans

 23   cette affaire et dans le processus de préparation de cette affaire à la

 24   fois pour l'Amicus et la Défense, nous avons cherché des informations

 25   auprès de M. MacFarlane, le Procureur, concernant l'origine de ce document

 26   et plus particulièrement la responsabilité, la chaîne de responsabilité de

 27   ce document.

 28   C'est-à-dire que nous voulions que M. MacFarlane nous dise comment il

Page 206

  1   a obtenu ce document. La raison de cette requête, Monsieur le Président,

  2   c'est que ce document semble venir du dossier personnel de Mme Hartmann

  3   qui, comme vous le savez, est protégée par la confidentialité. En d'autres

  4   termes, nous essayons de voir auprès de M. MacFarlane comment est-ce qu'il

  5   pouvait avoir obtenu ce document sans ordonnance de la Cour.

  6   Donc un certain nombre de lettres ont été échangées entre la Défense

  7   et l'Accusation et dans deux de ces lettres, le 14 et 15 janvier de cette

  8   année, M. MacFarlane - et je vais en lire une seule simplement - dit que :

  9   "Nous demandions qu'un certain nombre de ces documents, y compris

 10   celui-ci, viennent du dossier de Mme Hartmann et document UN, et la réponse

 11   de M. MacFarlane a été qu'aucun de ces documents ne sera versé comme

 12   faisant partie des éléments à charge.

 13   Monsieur le Président, c'est la position de l'Amicus.

 14   Et autre question sur laquelle je souhaiterais attirer votre attention,

 15   Monsieur le Président, c'est que la Défense a fait un certain nombre

 16   d'efforts dans la même direction pour obtenir des documents du greffe

 17   appartenant au dossier de Mme Hartmann et à ceux de d'autres personnes

 18   travaillant dans ce Tribunal, et en réponse à cette demande nous avons reçu

 19   plusieurs réponses, et c'était là la position du greffier à l'époque, M.

 20   John Hocking :

 21   "Les dossiers de ce Tribunal, qui ne sont pas des dossiers publics, ne

 22   peuvent être divulgués à des parties extérieures à moins qu'il n'y ait un

 23   fondement pour que le registre n'envisage cette divulgation telle que, par

 24   exemple, une ordonnance de la Chambre concernant la pertinence du dossier

 25   que vous voulez consulter."

 26   Et cela continue ainsi. Et nous avons reçu un certain nombre de réponses de

 27   ce type du greffe.

 28   Et je voudrais attirer l'attention de la Chambre sur le fait que nous

Page 207

  1   n'avons jamais pu bénéficier de la coopération du greffe dans ce domaine

  2   concernant l'accès à du matériel confidentiel de ce document, et M.

  3   MacFarlane a refusé de nous donner des informations concernant la chaîne de

  4   préservation de ce document.

  5   Contrairement à ce que M. MacFarlane a indiqué, nous n'avons jamais eu de

  6   préavis concernant son intention et d'utiliser ces documents dans ces

  7   procédures. Et comme l'indique son document du 14 et même du 15 janvier de

  8   cette année, il a clairement indiqué qu'il ne chercherait pas à verser ce

  9   document.

 10   Nous sommes, Monsieur le Président, dans une situation où il nous a

 11   été refusé la possibilité, et ayant mené une enquête sur cette question

 12   concernant le fait que M. MacFarlane n'envisagerait pas de verser ce

 13   document, il a indiqué qu'il pourrait peut-être l'utiliser avec Mme

 14   Hartmann dans son contre-interrogatoire, et que ce soit le cas ou pas, il

 15   sait maintenant que Mme Hartmann ne veut pas déposer, et je pense de ce

 16   fait que ce document ne devrait pas être reçu et versé.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Mettraux, votre toute

 18   première phrase --

 19   M. METTRAUX : [interprétation] Oui, je pense que je vois là où manque

 20   quelques mots et je pourrais peut-être la relire à nouveau.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez dit :

 22   "La première chose que nous aimerions dire au procès-verbal, c'est

 23   que contrairement à ce qu'a dit M. MacFarlane il y a quelques instants, que

 24   le conseil ou l'accusée n'avait jamais envisagé ou demandé à se fonder sur

 25   ce document."

 26   M. METTRAUX : [interprétation] C'est ce que dit le procès-verbal, mais il

 27   manque un terme --

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

Page 208

  1   M. METTRAUX : [interprétation] Le mot "jamais." Nous n'avons jamais donné

  2   d'indications d'une intention de notre part d'utiliser ce document.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je n'ai pas entendu M. MacFarlane

  4   suggérer que la Défense ou l'accusé envisageait d'utiliser le document. Je

  5   pensais avoir entendu dire que l'Accusation n'envisageait pas de.

  6   M. METTRAUX : [interprétation] Si c'est le cas, nous nous en excusons. Nous

  7   avions compris autre chose. Si ce n'est pas le cas, je m'en excuse.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Dans votre discours, vous avez

  9   également dit que vous avez demandé à M. MacFarlane -- vous aviez en fait

 10   un doute que ce document venait des dossiers personnels de Mme Hartmann.

 11   Est-ce que vous avez posé cette question à M. MacFarlane et est-ce qu'il

 12   vous a répondu ?

 13   M. METTRAUX : [interprétation] Oui, et M. MacFarlane me corrigera si je me

 14   trompe ou si je ne me souviens pas exactement des termes qui ont été

 15   utilisés. Nous avions cherché de façon plus générale la chaîne de

 16   conservation, comme on l'appelle dans ce document. Et nous avons mentionné

 17   l'origine pour voir si cela venait ou pas du dossier personnel de Mme

 18   Hartmann. Je pense, Monsieur le Président, que nous avons également fait

 19   cette référence dans deux de nos écritures, - et là encore corrigez-moi si

 20   je me trompe - nous pensons que cela a été fait dans le cadre d'une requête

 21   d'abus de procédures et dans une requête de réexamen lorsque nous avons

 22   soulevé cette question concernant ces questions.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ma question est bien ciblée et j'ai

 24   besoin d'une réponse ciblée.

 25   Est-ce que vous avez posé la question à M. MacFarlane pour lui demander si

 26   ces documents venaient des dossiers personnels de Mme Hartmann et a-t-il

 27   répondu à cette question ?

 28   M. METTRAUX : [interprétation] Nous pensons l'avoir fait, Monsieur le

Page 209

  1   Président --

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non, je veux des faits. Est-ce que

  3   vous avez ou vous ne l'avez pas posé ?

  4   M. METTRAUX : [interprétation] Je pense que nous l'avons fait, je ne veux

  5   pas prétendre que nous avons utilisé ce terme. Je pense que nous avons fait

  6   référence au dossier personnel de Mme Hartmann.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous avez reçu une réponse

  8   spécifique sur ce point ?

  9   M. METTRAUX : [interprétation] Non, la position du Procureur dans cette

 10   affaire a été que c'était une question qui n'était pas pertinente. Et une

 11   fois qu'il avait adopté la position qu'il n'utiliserait pas ce document,

 12   nous aurions cessé de poser des questions concernant ce point, puisque cela

 13   n'était plus pertinent concernant la recevabilité de ce document.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pour en revenir à la réponse du

 15   greffe, lorsque le greffier ou le greffier intérimaire, comme on l'appelait

 16   à l'époque, vous répond et vous dit qu'à moins que le greffe ne considère

 17   qu'il soit nécessaire de divulguer des documents personnels, normalement

 18   ils ne le font pas, mais dans des circonstances exceptionnelles, cela peut

 19   se faire par le biais d'une ordonnance de la cour ?

 20   M. METTRAUX : [interprétation] Bien, je ne peux que citer les mots du

 21   registre. Je ne suis pas à même d'évaluer leur position ou leur motif --

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non, c'était là simplement un prélude

 23   à ma question. Maintenant la question que je voulais vous poser : êtes-vous

 24   au courant d'une ordonnance de la Cour ordonnant que les documents

 25   personnels de Mme Hartmann soient rendus publics ?

 26   M. METTRAUX : [interprétation] Dans la mesure où nous sommes au courant, je

 27   dirais qu'il n'existe pas une telle ordonnance.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Quelle serait donc la raison

Page 210

  1   raisonnable à cette réponse du greffe ?

  2   M. METTRAUX : [interprétation] Bien, Monsieur le Président, notre requête

  3   concerne un dossier personnel différent d'une personne différente. Je

  4   préférerais ne pas donner le nom de cette personne. Mais la référence qui

  5   est faite à cette lettre du registre est sans ordonnance de la cour et il

  6   n'y a pas d'autre possibilité de donner le document à M. MacFarlane qui

  7   l'aurait donc reçu.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce là quelque chose de

  9   raisonnable, est-ce raisonnable sans ordonnance de la cour ? Il n'y a

 10   jamais eu de divulgation publique des documents des dossiers personnels

 11   d'un membre du personnel ?

 12   M. METTRAUX : [interprétation] Bien, Président, le problème, c'est que nous

 13   avons un document sous les yeux qui semblerait venir du dossier personnel.

 14   Nous n'avons pas d'autre explication.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Quel est le fondement de ceci --

 16   M. METTRAUX : [interprétation] La base, Monsieur le Président, c'est la

 17   suggestion que nous avons faite, à savoir que nous pensons que nous l'avons

 18   dit au Procureur et il a répondu autre chose. Le Procureur ne souhaite pas

 19   en parler et indiquer d'où vient le document et, en fait, il semble venir

 20   d'une autre source pour laquelle il n'y a pas eu d'ordonnance de la cour.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] M. le Procureur a dit à la Cour

 22   aujourd'hui qu'il s'agit d'une lettre écrite par le greffier à Mme Hartmann

 23   et qu'il serait la source de cette lettre, donc le greffier.

 24   M. METTRAUX : [interprétation] Mais le problème, Monsieur le Président,

 25   c'est que cette lettre, une fois envoyée, fait partie d'un certain nombre

 26   d'archives, si je peux les appeler ainsi. Un exemplaire serait donc dans le

 27   dossier personnel de Mme Hartmann, tel que nous l'avons compris, et serait

 28   entre les mains de Mme Hartmann également. Ce que nous essayons d'établir,

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  1   Monsieur le Président, c'est si M. MacFarlane a pu obtenir ces documents en

  2   toute légalité. Il nous refuse cette information et nous met dans une

  3   situation ambiguë nous disant qu'il n'est plus nécessaire de s'en inquiéter

  4   et que nous voilà maintenant face à ce document.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Mettraux, je pense que le

  6   Procureur vient juste de dire à la Cour qu'il s'agit d'un document qui

  7   vient du greffe et qui concerne directement cette procédure. Je ne

  8   comprends pas pourquoi vous dites que cela vient du dossier personnel de

  9   Mme Hartmann si c'est un document concernant ces procédures. Ces procédures

 10   ont commencé une fois que Mme Hartmann avait quitté les lieux.

 11   M. METTRAUX : [interprétation] Avec tout le respect que je vous dois,

 12   Monsieur le Président, c'est que ce document ne concerne pas ces procédures

 13   dans la mesure où il est prédaté avant toutes les procédures contre Mme

 14   Hartmann. Dans la mesure où le Procureur considère que ce document fait

 15   partie de ces procédures, c'est quelque chose qui peut-être assez trompeur,

 16   Monsieur le Président, parce que ceci empêche toute accusation, tout début

 17   d'enquête contre Mme Hartmann tel que nous le comprenons dans le dossier

 18   qui nous a été donné.

 19   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, si je peux être très

 20   bref.

 21   Le contexte, bien entendu, est pertinent, mais cette question est

 22   importante et tout à fait simple. La requête première de la Défense, c'est

 23   que la Défense a tous les droits de pouvoir se fonder en bonne foi sur les

 24   démarches de l'Accusation, en particulier lorsqu'il s'agit d'un procureur

 25   amicus. Il a donné un engagement par écrit qui va contre lui. Et il dit en

 26   termes très clairs, Monsieur le Président et Messieurs les Juges, qu'il ne

 27   se basera pas sur cet élément de preuve dans sa propre affaire. Et sans une

 28   bonne raison, il a fait volte-face. Il essaie de faire exactement ce qu'il

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  1   avait dit qu'il ne ferait pas et il doit être tenu par ses propres

  2   engagements concernant cette requête et permettre à un procureur, qui doit

  3   connaître son affaire, ses responsabilités, les éléments qu'il doit prouver

  4   --

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous avez dit que vous serez bref.

  6   M. KHAN : [interprétation] Je le serai.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous savons que le Procureur doit

  8   aussi connaître son affaire, et cetera. Ne répétez pas cela.

  9   M. KHAN : [interprétation] Je ne le ferai pas, Monsieur le Président. Nous

 10   connaissons le contexte. Ce qui est important, c'est que le procureur doit

 11   être lié par ses propres engagements --

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] S'en tenir à ses engagements, c'est ça

 13   le point important.

 14   [La Chambre de première instance se concerte] 

 15   M. METTRAUX : [aucune interprétation]

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'essaie en fait de faire la synthèse.

 17   Vous avez soulevé une objection et M. MacFarlane a répondu à votre réponse.

 18   M. METTRAUX : [interprétation] Nous avons une précision, avec la permission

 19   de vous, Messieurs les Juges, pour ce qui est de la question du dossier

 20   personnel. Dans la requête du 23 janvier 2009, ceci a été mentionné par le

 21   dossier personnel du TPIY de Mme Hartmann.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est le dossier personnel ou le

 23   dossier du personnel ?

 24   M. METTRAUX : [interprétation] Il s'agit du dossier personnel, tel que ceci

 25   est utilisé dans la terminologie des Nations Unies.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Monsieur MacFarlane, vous

 27   vous êtes levé pendant que la Chambre conférait. Est-ce que vous souhaitez

 28   dire quelque chose de plus ?

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  1   M. MacFARLANE : [interprétation] Oui.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

  3   M. MacFARLANE : [interprétation] Si vous me permettez une minute, je pense

  4   que ce qui a été mentionné est incomplet. Si vous me permettez une minute.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, allez-y.

  6   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci.

  7   Très rapidement, tout d'abord, le document n'a pas été tiré du

  8   dossier personnel. En ma qualité d'enquêteur amicus curiae, j'ai demandé ce

  9   fichier et je n'ai pas eu l'autorisation de l'avoir, donc ceci est venu du

 10   greffe dans le cadre des documents qui m'ont été transmis au début de

 11   l'enquête.

 12   Deuxièmement, mon éminent collègue a lu une lettre qui précédait le mémoire

 13   préalable au procès qui indiquait qu'aucun des documents ne serait soumis

 14   dans le cadre de l'affaire de l'Accusation. Mais il n'a pas lu la phrase

 15   suivante qui stipule très clairement que ça pourrait être lu dans le cadre

 16   de contre-interrogatoires de tout témoin de la Défense qui pourrait être

 17   appelé à comparaître, y compris l'accusé. 

 18   Troisièmement, le mémoire préalable au procès a suivi celui de l'accusé, et

 19   ceci était très clair, étant donné que ceci a été placé sur la liste 65

 20   ter. Donc mes éminents collègues ont eu énormément de préavis.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Veuillez vous asseoir.

 22   Vous avez dit que ceci ne vient pas du dossier personnel de Mme Hartmann,

 23   mais il y a un document qui a été soumis qui précède le début de ces

 24   poursuites et, par conséquent, ne pourrait pas faire partie de ces

 25   procédures. Est-ce que vous avez une réponse à cela ?

 26   M. MacFARLANE : [interprétation] Ce serait préférable de passer en séance à

 27   huis clos partiel.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

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  1   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

  2   [Audience à huis clos partiel]

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 18   --- L'audience est levée à 13 heures 48 et reprendra le mardi 16 juin 2009,

 19   à 9 heures.

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