LE TRIBUNAL PÉNAL INTERNATIONAL POUR L’EX-YOUGOSLAVIE
Affaire n° IT-95-14-R77.2
LE PROCUREUR DU TRIBUNAL
CONTRE
IVICA MARIJACIC
MARKICA REBIC
TROISIÈME ACTE D’ACCUSATION MODIFIÉ
Le Procureur du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (le « Tribunal »), en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par l’article 18 du Statut du Tribunal et par l’article 77 du Règlement de procédure et de preuve du Tribunal, accuse :
IVICA MARIJACIC
MARKICA REBIC
d’OUTRAGE AU TRIBUNAL.
LES ACCUSÉS
1) Ivica MARIJACIC. Durant toute la période considérée dans le présent acte d’accusation, Ivica MARIJACIC était journaliste et rédacteur en chef de l’hebdomadaire Hrvatski List, dont le siège est à Zagreb.
2) Markica REBIC. Markica REBIC est l’ancien chef du Service de sécurité et d’information (« SIS ») de la République de Croatie.
ACCUSATIONS
CHEF 1
OUTRAGE AU TRIBUNAL
3) Un témoin protégé a fait une déclaration aux enquêteurs du Bureau du Procureur le 1er et le 2 août 1997. Le 12 décembre 1997, la Chambre de première instance saisie de l’affaire Le Procureur c/ Tihomir BLASKIC (l’« affaire BLASKIC »), siégeant à huis clos, a ordonné à l’Accusation, après avoir entendu les arguments de celle-ci concernant le caractère sensible de la déclaration du témoin protégé, de communiquer à la Défense une version expurgée de ladite déclaration.
4) Le 16 décembre 1997, le témoin protégé a déposé à huis clos dans l’affaire BLASKIC.
5) Le 18 novembre 2004, l’hebdomadaire Hrvatski List a publié un article intitulé « Exclusivité mondiale – première publication mondiale du DOCUMENT SECRET qui révèle le complot de Carla Del Ponte contre la Croatie ». L’auteur de l’article a été identifié comme étant Ivica MARIJACIC et l’article contient une interview avec Markica REBIC.
6) Trois décisions du Tribunal s’appliquaient lors de la parution de cet article :
a. la Décision de la Chambre de première instance I sur les requêtes du Procureur des 12 et 14 mai 1997 en matière de protection des témoins, décision datée du 6 juin 1997 ;
b. les ordonnances rendues oralement par la Chambre de première instance lorsque le témoin a déposé durant une journée devant le TPIY le 16 décembre 1997 ; et
c. l’injonction faite par la Chambre de première instance dans son ordonnance du 1er décembre 2000 de mettre fin immédiatement aux mesures de protection octroyées aux témoins.
7) L’article révèle que Markica REBIC a dévoilé à Ivica MARIJACIC l’identité du témoin protégé qui avait déposé devant le Tribunal dans l’affaire BLASKIC, et qu’il lui a communiqué des copies de la déclaration faite par le témoin au Bureau du Procureur et du compte rendu de la déposition faite par le témoin devant la Chambre de première instance dans la même affaire.
8) L’article révèle que Ivica MARIJACIC et Markica REBIC savaient tous deux que la divulgation et la publication de l’identité du témoin protégé et de sa déposition protégée étaient interdites et constituaient une violation des ordonnances de la Chambre de première instance.
9) Le même numéro de Hrvatski List contient une interview de Markica REBIC, dans laquelle celui-ci indiquait qu’il avait communiqué les déclarations du témoin protégé à la rédaction de Hrvatski List tout en sachant : a) que ces documents étaient protégés ; et b) quelles étaient les « conséquences possibles de leur divulgation ».
10) Ivica MARIJACIC a délibérément et sciemment entravé le cours de la justice d’une triple façon, en rendant publics :
11) Markica REBIC a délibérément et sciemment entravé le cours de la justice d’une triple façon, en divulguant :
12) Par leurs actes et omissions, Ivica MARIJACIC et Markica REBIC se sont rendus coupables de :
CHEF 1 : Outrage au Tribunal, infraction punissable par le Tribunal en vertu de son pouvoir inhérent et en application de l’article 77 A) ii) de son Règlement de procédure et de preuve.
Le Procureur
______________
Carla Del Ponte
Le 14 octobre 2005
La Haye (Pays-Bas)