Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 29 mai 2009

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 14.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour. Voulez-vous, s'il vous plaît,

  6   appeler la cause.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

  8   les Juges. C'est l'affaire IT-03-67-R77.2, le Procureur contre Vojislav

  9   Seselj.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Pourriez-vous me dire

 11   qui représente les parties, s'il vous plaît.

 12   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je suis

 13   Bruce MacFarlane. Je suis du Canada et je fais fonction de Procureur dans

 14   cette procédure, et avec moi cet après-midi et pour tout l'ensemble du

 15   procès, Lori Ann Wanlin, également du Canada.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur MacFarlane.

 17   Bonjour, Monsieur Seselj. Pour le compte rendu, pourriez-vous déclinez

 18   votre identité, s'il vous plaît.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Professeur Vojislav Seselj, professeur

 20   d'université. Je suis l'accusé mis en accusation par le Tribunal de La Haye

 21   qui a la plus longue durée de mise en détention dans toute l'histoire.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je comprends que vous suivez la

 23   procédure et les débats dans une langue que vous comprenez.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si à un moment quelconque vous avez un

 26   problème de compréhension, veuillez nous le faire savoir.

 27   La Chambre de première instance a indiqué dans son ordonnance du 22 mai que

 28   le procès en l'espèce aura lieu aujourd'hui. Avant que nous ne commencions

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  1   ce procès il y a quelques questions qui doivent être réglées qui font

  2   partie d'une Conférence préalable au procès, pour commencer, il y a le

  3   calendrier de ce procès.

  4   Monsieur MacFarlane, combien de temps pensez-vous qu'il vous faudra pour la

  5   présentation de vos moyens à charge ?

  6   M. MacFARLANE : [aucune interprétation]

  7   L'INTERPRÈTE : Microphone, s'il vous plaît.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous allumer votre microphone,

  9   s'il vous plaît, Monsieur MacFarlane.

 10   M. MacFARLANE : [interprétation] Monsieur le Président, les moyens de

 11   l'Accusation ont deux éléments principaux. Le premier, c'est le fait de

 12   déposer matériellement un certain nombre de documents pour admission au

 13   dossier; le deuxième sera la présentation des arguments à charge en ce qui

 14   concerne ces documents une fois qu'ils auront été placés dans leur

 15   contexte.

 16   Il n'y aura pas de témoins, donc d'après mes prévisions, il faudra à

 17   l'Accusation environ trois heures pour l'essentiel. Ceci comportera mes

 18   arguments à charge présentés à la Chambre en ce qui concerne les documents

 19   qui auront été d'abord présentés.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je n'ai pas complètement compris ce que

 21   vous dites. Vous dites qu'il vous faut trois heures pour présenter les

 22   pièces ?

 23   M. MacFARLANE : [interprétation] Non, peut-être que je pourrais être un peu

 24   plus clair sur ce point. Ce que je voulais dire, c'était que le dépôt

 25   matériellement parlant --

 26   L'INTERPRÈTE : Microphone, s'il vous plaît, Monsieur MacFarlane.

 27   M. MacFARLANE : [interprétation] -- le dépôt des pièces à présenter ne

 28   prendra guère, je pense, plus d'une demi-heure. En ce qui concerne les

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  1   arguments, notamment les arguments en clôture, c'est ça qu'il me faudra

  2   comme temps essentiellement. Donc la présentation des éléments de preuve

  3   sera relativement brève.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et le reste du temps dont vous aurez

  5   besoin prendrait combien de temps ?

  6   M. MacFARLANE : [interprétation] Je pense que j'aurais besoin d'environ

  7   deux heures.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci serait à la fois la déclaration

  9   liminaire et les arguments en clôture ?

 10   M. MacFARLANE : [interprétation] Oui.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Combien de temps pensez-vous qu'il va

 12   vous falloir pour votre déclaration liminaire ?

 13   M. MacFARLANE : [interprétation] Ce sera relativement peu de temps. Je

 14   pense que ce serait peut-être dix minutes.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Nous devrions

 16   maintenant traiter la demande visant à admettre au dossier des pièces

 17   directement à l'audience.

 18   Comme nous l'avons indiqué dans une ordonnance précédente, nous

 19   allons en traiter et régler la question verbalement. Est-ce que vous avez

 20   quelque chose à ajouter à ce qui a été dit dans votre requête ?

 21   M. MacFARLANE : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Le cadre

 22   juridique et les arguments qui sont présentés figurent effectivement dans

 23   ces écritures. Il n'y a rien de plus que je veuille ajouter. Je voulais

 24   simplement réaffirmer tout ce que nous avons dit dans le document contenant

 25   la requête.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce qui n'était pas clair pour moi,

 27   c'était la question du livre, à savoir le numéro 1 de la liste 65 ter a

 28   trait à la version en B/C/S, tandis que le numéro 2 a trait à la traduction

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  1   en anglais. Est-ce que j'ai bien compris cela ? Et est-ce que votre

  2   intention c'est de demander le versement de l'ensemble du livre en B/C/S ?

  3   M. MacFARLANE : [interprétation] Non, mon intention n'est pas de demander

  4   le dépôt de l'ensemble du livre matériellement parlant. Ce qui sera

  5   présenté, ce sont des copies papier en anglais et en B/C/S des parties

  6   pertinentes du livre, mais pour ce qui est de l'ouvrage matériellement

  7   parlant avec sa couverture, celui-là ne sera pas présenté pour versement au

  8   dossier.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Une catégorie de documents

 10   que vous avez l'intention de présenter au versement au dossier, ce sont les

 11   documents qui appartiennent au procès principal, ainsi qu'à la présente

 12   instance de la Chambre et l'accusé a accès, ainsi que vous-même, à cette

 13   partie du compte rendu. Ça fait partie du compte rendu.

 14   M. MacFARLANE : [interprétation] Oui.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez l'intention d'en

 16   demander le dépôt comme pièce à conviction ?

 17   M. MacFARLANE : [interprétation] Je m'y référerai et j'indiquerai les

 18   rapports ou les liens avec la traduction du livre. Il m'a semblé que faire

 19   en sorte que cela fasse partie du dossier serait préférable. Je reconnais

 20   qu'ils font partie de l'ensemble des archives du Tribunal, mais il m'a

 21   semblé qu'on pourrait comparer et voir les différences entre certaines

 22   parties. Ceci pourrait être utile.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Je voudrais maintenant

 24   entendre ce que M. Seselj a à dire.

 25   D'après ce que j'ai compris, la traduction de la requête vous a été

 26   communiquée hier. Est-ce exact, Monsieur Seselj ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce que je voudrais vous dire d'abord, c'est que

 28   je vais insister pour bénéficier du droit qui est le mien d'utiliser un

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  1   temps égal à celui qui est accordé à l'Accusation, mais j'ai une remarque à

  2   faire sur l'exigence exprimée par le Procureur. Il dit avoir besoin de

  3   trois heures. J'estime que c'est beaucoup trop et qu'il peut exposer sa

  4   thèse en un temps beaucoup plus réduit et qu'en fait le procès pourrait se

  5   terminer aujourd'hui. Je considère qu'il est de l'intérêt de chacun de

  6   gagner du temps dès lors que la chose est possible, d'autant plus qu'à mon

  7   avis, cette affaire est une affaire secondaire alors que j'ai à m'occuper

  8   de choses beaucoup plus importantes.

  9   Eu égard à l'exigence exprimée par le Procureur s'agissant du versement au

 10   dossier de ces documents, il est exact que c'est seulement hier que j'ai

 11   reçu la traduction de cette requête et qu'il y a quelques jours, on m'a

 12   communiqué de très nombreux documents. Cela étant, je suis parvenu à

 13   prendre connaissance de ces documents, donc je n'émets pas d'objections par

 14   rapport au temps qui m'a été alloué.

 15   Troisième chose que je voudrais vous dire : ce qui pose un grand problème,

 16   c'est de voir le Procureur demander le versement au dossier direct de ces

 17   documents dans ces conditions. Cependant, si l'on tient compte du fait que

 18   l'on parle ici de documents qui sont de notoriété publique, en tout cas,

 19   qui sont des documents très connus par ce Tribunal, je ne vais pas

 20   m'opposer à cela non plus. J'estime qu'il n'y a aucune raison pour moi à

 21   m'opposer au versement au dossier de documents dont chacun sait qu'ils

 22   existent. Il serait absolument incompréhensible de s'opposer à cela.

 23   Mais j'appelle votre attention sur le fait que parmi ces documents

 24   figurent de très nombreux documents inutiles, ce qui alourdit exagérément

 25   le compte rendu d'audience. Il y a dans la présente affaire un grand nombre

 26   de choses incontestables. Il est incontestable que je suis l'auteur du

 27   livre dont nous parlons. Il était inutile, par conséquent, de le prouver à

 28   partir de documents, puisque je l'ai dit à de nombreuses reprises. J'ai

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  1   déjà dit, dans ce procès, y compris dans quelles conditions j'ai écrit ce

  2   livre et dans quelles conditions je l'ai donné à imprimer.

  3   Donc il y a de nombreux éléments ici qui sont incontestables et qui

  4   n'ont rien à voir avec le problème qui est au cœur de ce procès, à savoir

  5   est-ce que oui ou non les noms de témoins protégés ont été divulgués.

  6   Ensuite se pose la question de mon prétendu mobile. Est-ce que mon

  7   mobile était de nuire à la réputation de ces prétendus témoins protégés ou

  8   est-ce que mon mobile était de démolir ce qui est à la base du procès qui

  9   m'est intenté, qui n'est justifié par rien. Voilà, je crois, les questions

 10   qui se posent sur le fond. Par ailleurs, il n'y a aucune raison de verser

 11   immédiatement au dossier des éléments de preuve indiquant que ces trois

 12   témoins bénéficiaient de mesures de protection et que j'ai été informé en

 13   temps utile de ce statut de témoin protégé qui était le leur, et donc que

 14   je savais que leurs noms ne devaient pas être divulgués. Ceci peut entrer

 15   au compte rendu. Il n'y a aucune raison que je m'y oppose. Je vois ici

 16   toute une série de documents que j'ai sous les yeux actuellement qui sont

 17   proposés par le Procureur.

 18   Je n'ai pas non plus la moindre objection par rapport au fait de

 19   verser au dossier des comptes rendus d'audiences d'affaires précédentes

 20   dans lesquelles je m'exprime au sujet de ce livre en disant en particulier

 21   dans quelles conditions ce livre a été imprimé. Parmi ces documents, je

 22   trouve aussi des documents qui évoquent la publication de ce livre et le

 23   succès qu'il a remporté auprès de l'opinion en Serbie. Ces documents, je

 24   n'ai pas non plus la moindre raison de m'opposer à leur versement au

 25   dossier, mais c'est un fait incontestable, alors pourquoi les verser ?

 26   Puis il y a ici un certain nombre de comptes rendus qui portent sur

 27   ce que ces témoins ont dit à plusieurs reprises ailleurs. Est-ce que cela

 28   mérite d'être versé au dossier de la présente affaire ou pas, c'est à vous

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  1   de le déterminer. Pour ma part, je considère qu'on alourdit de façon

  2   absolument inutile le compte rendu au moyen du versement de ces documents

  3   qui ne sont pas contestés.

  4   A présent, ce qui pose problème, c'est qu'en examinant tous ces documents,

  5   je suis arrivé à la conclusion que le livre dans sa version intégrale n'a

  6   pas été traduit. Seules des portions du livre ont été traduites. Je

  7   considère qu'il n'y a pas un seul tribunal au monde qui soit un tribunal

  8   sérieux et qui puisse aboutir à un verdict dans une affaire de ce genre

  9   sans que les juges n'aient eu la possibilité de prendre connaissance de

 10   l'intégralité du livre contesté. Monsieur le Président, Messieurs les

 11   Juges, je considère que vous ne pouvez pas saisir ce livre dans son

 12   intégralité si vous n'en lisez que des portions. D'ailleurs, je vous

 13   citerai un propos du Cardinal Richelieu, un cardinal français, qui a dit un

 14   jour : Donnez-moi une seule phrase hors de son contexte et cela me

 15   permettra de trouver un motif valable pour envoyer l'auteur à la pendaison.

 16   Donc pourquoi est-ce que le Procureur n'a pas fait en sorte que tout le

 17   livre soit traduit ?

 18   D'ailleurs le Procureur, la dernière fois, vous a donné un

 19   renseignement inexact en vous disant que ce livre comptait 1 400 pages. Ce

 20   livre n'a que 1 200 pages, donc 200 pages de moins. Cela fait 200 pages de

 21   moins à traduire, et le Procureur avait tout le temps nécessaire à sa

 22   disposition pour faire en sorte que l'intégralité du livre soit traduite.

 23   On ne peut comprendre ce livre que si on le lit de la première à la

 24   dernière page. Lorsque je prononcerai le propos liminaire de la Défense, de

 25   même que dans mon plaidoyer à la fin du procès, je dirai pourquoi ce livre

 26   est aussi long. Mais accepter l'attitude du Procureur et vous contenter de

 27   ne lire que des portions du livre, je considère que ceci ne vous permet pas

 28   de travailler dans de bonnes conditions. Si vous estimez le contraire,

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  1   alors poursuivons.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  3   [La Chambre de première instance se concerte]

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur MacFarlane, pourriez-vous nous

  5   expliquer la pertinence ou la nécessité de présenter pour le dossier ces

  6   déclarations de témoins, est-ce que vous pourriez procéder sans vous en

  7   servir ?

  8   M. MacFARLANE : [interprétation] Les charges contre M. Seselj plus

  9   particulièrement concernent le fait d'avoir révélé, communiqué les parties

 10   des déclarations de l'un des témoins. Ceci fait donc tout à fait partie de

 11   l'un des chefs d'accusation. Et en ce qui concerne les deux autres témoins,

 12   les parties de déclarations ne sont pas simplement révélées, il y a

 13   également l'aspect, un renseignement qui permet d'identifier. Donc pour

 14   tous ces motifs, les déclarations font parties effectivement du tableau

 15   général en l'espèce.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Voudriez-vous répondre

 17   à l'argument de M. Seselj selon lequel l'ensemble du livre devrait être

 18   admis au dossier ?

 19   M. MacFARLANE : [interprétation] Oui, il y a quelque chose que je

 20   souhaiterais dire à ce sujet. Pour commencer, en ce qui concerne la

 21   longueur, le nombre de pages du livre, M. Seselj a aujourd'hui la copie

 22   papier avec couverture, et d'après ce que je comprends, il s'agit donc de 1

 23   200 pages. La version électronique fait 1 400 pages, et c'est la version

 24   que nous utilisons. C'est la réponse à la question de la différence entre 1

 25   200 et 1 400.

 26   Pour la traduction de l'ensemble du livre, à savoir s'il faudrait la faire

 27   plutôt que seulement les parties pertinentes, comme je l'ai dit la dernière

 28   fois, nous avons un traducteur pour l'ensemble du livre, et il est devenu

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  1   très évident que cette personne avait vu dans l'ensemble du livre qu'il

  2   était tout à fait dénué de pertinence. Il traite de questions qui sont

  3   extrêmement éloignées des problèmes qui nous occupent et qui sont portés

  4   devant la Chambre, donc ces parties du livre, il y a des parties qui sont

  5   pertinentes et qui ont été identifiées ou qui permettraient d'identifier,

  6   ce sont des parties qui ont été traduites officiellement. Dans ce contexte,

  7   pour les replacer dans le contexte nous avons fait preuve de la plus grande

  8   prudence. En fin de compte, il est devenu clair que c'était essentiellement

  9   une question de temps qu'il faudrait pour avoir une traduction officielle

 10   d'un livre de 1 400 pages avec un texte extrêmement dense. Donc il y avait

 11   également cette question dont il fallait tenir compte du fait qu'une

 12   procédure pour outrage doit être relativement simple et se dérouler avec

 13   une certaine célérité. Enfin, ce sont les raisons dont on a tenu compte

 14   pour les parties du livre qui ont été traduites.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une dernière question, Monsieur

 16   MacFarlane. Cette question de présentation directe des documents, elle

 17   devait être réglée au cours d'une Conférence préalable au procès, en

 18   quelque sorte, donc il ne serait pas nécessaire de séparer les propos

 19   liminaires et le réquisitoire, ou est-ce que vous pouvez faire tout ça dans

 20   un seul coup ?

 21   M. MacFARLANE : [interprétation] Je serais tout à fait près à le faire,

 22   Monsieur le Président, et en fait ça dépendra de savoir combien de temps

 23   dureront les débats, et quelle sera leur évolution cet après-midi, mais il

 24   se peut effectivement que je puisse accélérer la présentation de mes

 25   arguments et commentaires d'une façon qui fait que je n'aurais pas besoin

 26   du nombre d'heures mentionnées.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 28   Monsieur Seselj, est-ce que vous souhaitez dire quelque chose ?

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Messieurs les Juges, j'espère que vous avez

  2   remarqué un point qui est très significatif dans les propos que vient de

  3   tenir le Procureur devant vous. Le Procureur a dit que dans mon livre

  4   existaient des éléments susceptibles de permettre l'identification des

  5   témoins. Donc le Procureur met le doigt en disant cela sur le point le plus

  6   fondamental. Il existe des éléments qui pourraient permettre

  7   l'identification. C'est probable, mais le Procureur n'a pas eu le courage

  8   de dire : J'ai identifié les témoins par leurs noms, car si nous parlons

  9   d'identification, il faut que ça soit une identification tout à fait

 10   claire, elle ne peut pas être simplement envisagée ou hypothétique. Alors

 11   écoutez, comment est-ce que vous pouvez déterminer le motif qui m'a poussé

 12   à écrire ce livre si vous n'avez pas accès aux portions du livre dont le

 13   Procureur affirme qu'elles ne sont pas pertinentes ?

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Seselj, ça c'est aux membres de

 15   la Chambre qu'il appartiendra d'en juger dans le courant du procès. Nous

 16   reviendrons à ces aspects très brièvement quand le procès aura commencé.

 17   Aux fins de calendrier, je voudrais maintenant savoir quel type d'éléments

 18   de preuve vous avez l'intention de présenter aujourd'hui. D'après ce que

 19   j'ai compris, vous n'avez pas l'intention de proposer la comparution de

 20   témoins.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puisque le Procureur ne prévoit pas d'entendre

 22   des témoins, je ne le prévois pas non plus. Si le Procureur avait cité des

 23   témoins à la barre, j'en aurais cité cinq, je les avais déjà choisis, et

 24   ils étaient déjà prêts à témoigner. Mais puisque le Procureur renonce à

 25   présenter des témoins, je n'en présenterai pas non plus. Cela dit, je

 26   considère que la version intégrale du livre doit être versée au dossier,

 27   sinon, le compte rendu d'audience n'aurait aucun sens.

 28   Car me mettre en accusation pour le contenu d'un livre que vous ne

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  1   connaissez pas dans son intégralité, je considère que c'est absolument

  2   inacceptable et inadmissible. Le Procureur a reçu de moi un exemplaire de

  3   ce livre. Il a donc la possibilité d'en réaliser la traduction en un temps

  4   très court. Je ne comprends pas pourquoi les responsables du bureau du

  5   Procureur n'ont pas donné ce livre à traduire. Il est possible qu'il soit

  6   tellement passionné par le contenu du livre qu'il ne puisse pas le lâcher.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Seselj, est-ce que vous avez

  8   d'autres pièces à présenter, d'autres documents à présenter pour versement

  9   au dossier autres que le livre en question ?

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai rien d'autre à proposer en tant

 11   qu'élément de preuve matériel à verser au dossier.

 12   [La Chambre de première instance se concerte]

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre considère que les pièces

 14   présentées par l'Amicus curiae faisant fonction de Procureur sont

 15   pertinentes et ont valeur probante, et par conséquent, ces pièces sont

 16   admises intégralement au dossier. Mais les documents qui sont susceptibles

 17   de révéler des renseignements confidentiels concernant des personnes

 18   protégées, doivent être déposées sous pli scellé. Je vais maintenant

 19   prendre les questions point par point, avec l'aide du Greffier, pour ce qui

 20   va être communiqué aux parties.

 21   Et maintenant s'agissant de votre livre, Monsieur Seselj, nous allons

 22   l'admettre au dossier intégralement comme élément de preuve. Toutefois,

 23   ceci ne veut pas dire nécessairement que l'ensemble du livre devra être

 24   traduit. Les parties nécessaires pourront faire l'objet de référence ou de

 25   citation au cours du procès par vous-même, ce qui veut dire que ces parties

 26   pourront être traduites, et si nécessaire, la Chambre pourra examiner les

 27   parties qui pourraient être évoquées au cours du procès par la suite.

 28   Ceci étant dit, c'est à vous qu'il appartient, Monsieur MacFarlane, de

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  1   présenter vos propos liminaires.

  2   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Le premier

  3   point, probablement, serait la présentation des documents et l'attribution

  4   d'une cote, à moins que la Chambre ne préfère procéder autrement et ait

  5   d'autres idées concernant les documents en question.

  6   [La Chambre de première instance se concerte]

  7   M. SESELJ : [interprétation] J'ai une objection par rapport à la demande du

  8   Procureur.

  9   M. MacFARLANE : [interprétation] Je n'ai pas entendu M. Seselj.

 10   M. SESELJ : [interprétation] J'ai une objection à faire par rapport à la

 11   demande du Procureur. Je ne me suis pas opposé au versement au dossier de

 12   l'un quelconque des documents soumis par le Procureur, donc il peut

 13   automatiquement en obtenir le versement et obtenir soit un numéro de cote

 14   par document, soit un document unique pour l'ensemble des documents,

 15   puisque le Procureur en a déjà fait la demande. Je pense que cela nous

 16   permettrait de gagner du temps, mais j'ai l'impression qu'en fait le

 17   Procureur souhaite nous faire perdre beaucoup de temps. A mon avis, la

 18   question des éléments de preuve peut être réglée sur base d'une phrase

 19   prononcée par chacune des parties et d'un accord verbal entre les parties,

 20   et nous pouvons passer à autre chose, mais je pense que ce n'est pas la

 21   volonté du Procureur.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ai tendance à être d'accord avec vous,

 23   Monsieur Seselj. Ceux qui ont été déjà présentés, admis, communiqués, les

 24   numéros peuvent être attribués par la suite et communiqués aux parties.

 25   M. MacFARLANE : [interprétation] Certainement. Je tiens à ce que les débats

 26   se déroulent avec célérité. Mais j'allais suggérer qu'une des façons de

 27   procéder serait de faire en sorte que les numéros qui figurent dans

 28   l'annexe à ma requête soient ceux qui puissent être acceptés comme numéros

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  1   de pièces, et que ceci pourrait se faire très rapidement et peut-être au

  2   cours d'une suspension de séance ou après.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci peut être fait facilement. Je veux

  4   simplement vérifier avec le Greffier si ceci présenter des problèmes ou

  5   non.

  6   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur MacFarlane, vous pouvez

  8   procéder sur cette base. Donc, vos numéros seront identiques dans la

  9   requête présentée au titre de l'article 65 ter. Et ce qui est demandé

 10   directement à l'audience, vous avez utilisé les mêmes numéros ?

 11   M. MacFARLANE : [interprétation] C'est exact.

 12   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Excusez-moi, mais moi, je ne suis pas

 13   très au clair là-dessus. J'ai ici une annexe A et une annexe B, et ils

 14   semblaient à un moment donné être identiques sauf pour la référence au

 15   livre. Alors, maintenant, est-ce que l'une d'entre elles doit être vue

 16   comme étant des numéros d'index pour ces pièces ?

 17   M. MacFARLANE : [interprétation] Ma suggestion, c'est que nous utilisions

 18   l'annexe B confidentielle à la requête qui porte pour titre "Teneur ou

 19   contenu du CD utilisant les numéros de pièces de la liste 65 ter." Et ça,

 20   c'est l'annexe B.

 21   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Et donc, l'annexe B comprend la

 22   version B/C/S du livre, telle qu'elle se présente.

 23   M. MacFARLANE : [interprétation] Et ceci pourrait d'ailleurs faire ce que

 24   souhaite l'accusé en l'espèce.

 25   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais alors donc, c'est sur la

 26   deuxième page et porte le numéro 1.

 27   M. MacFARLANE : [interprétation] C'est exact.

 28   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bon, alors ceci permet de régler le

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  1   problème, en l'occurrence, de l'admission du livre lui-même. Il fait partie

  2   des documents que vous présentez. Je vous remercie.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Poursuivons.

  4   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Juste

  5   quelques commentaires avant que l'on n'en vienne aux éléments de preuve

  6   proprement dits.

  7   Respectueusement, je voudrais dire qu'il s'agit là, je pense, d'un procès

  8   relativement simple. Il s'agit de la publication de textes qui

  9   comporteraient un outrage au Tribunal. Il y a un accusé, une accusation,

 10   une publication, ce qui fait que l'affaire est un peu différente, c'est --

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur MacFarlane, premièrement,

 12   pourriez-vous parler dans le microphone. J'ai oublié de vous dire, ainsi

 13   qu'à M. Seselj, d'éviter de donner des renseignements qui pourraient

 14   révéler l'identité des témoins protégés. Donc, je veux rappeler à M. Seselj

 15   une fois encore le fait que le titre du livre, qui est déposé sous pli

 16   scellé -- de ne pas mentionner le titre exact du livre à l'audience

 17   publique. Quand ce sera nécessaire, nous pourrons aller en audience à huis

 18   clos partiel.

 19   Excusez-moi de vous avoir interrompu, Monsieur MacFarlane.

 20   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci. Je vais faire en sorte de m'assurer

 21   que je suis bien entendu, enregistré et interprété.

 22   Donc, je disais, ce qui, évidemment, distingue cette affaire, d'une

 23   certaine manière, des autres affaires, c'est que les éléments de preuve

 24   pourront prouver que l'accusé a pris un comportement, s'est lancé dans un

 25   comportement qui avait pour but de camoufler l'identification des témoins

 26   en vue d'éviter des poursuites au pénal, et c'est ça qu'il a soutenu.

 27   Compte tenu de ce que l'on a comme éléments de preuve, les éléments de

 28   preuve démontreraient qu'il a eu l'impression que seule une personne très

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  1   astucieuse serait en mesure de procéder à des identifications de témoins.

  2   Selon moi, d'après les éléments dont on dispose, ce type d'identification

  3   peut être fait par toute personne raisonnable qui a connaissance des faits,

  4   et on peut imaginer que pratiquement tout le monde pourrait faire cette

  5   identification par rapport au livre. Et de plus, l'accusé s'est exprimé de

  6   façon relativement claire en ce qui concerne son plan en l'espèce. Ceci

  7   m'amène d'ailleurs à parler des comptes rendus de procès. Il s'agit des

  8   comptes rendus du procès principal. Tous ne seront pas nécessaires pour que

  9   je puisse faire des références, en raison de ce que l'accusé a admis, a

 10   reconnu.

 11   La question de la promotion du livre, bon, l'accusé a déjà fait des

 12   commentaires à ce sujet. Je voudrais simplement noter certains passages du

 13   compte rendu qui sont pertinents. Le premier, c'est le 7 mai 2009, page 29.

 14   L'accusé note que non seulement il est l'auteur du livre, mais il en est

 15   très fier, et grâce à ces procès, ceci a suscité un grand intérêt pour ce

 16   livre, et également sur son site internet, plusieurs milliers d'exemplaires

 17   ont été photocopiés et reproduits, et de cela, il est très satisfait.

 18   Ceci, donc, règle la question de la portée de la publication de son livre.

 19  (expurgé)

 20  (expurgé)

 21  (expurgé)

 22  (expurgé)

 23   Je pense que j'en resterai là pour ce moment. Il y a d'autres comptes

 24   rendus d'audiences qui traitent de la promotion et de la publicité de cette

 25   publication, de sa portée, mais de façon à accélérer les débats, je

 26   voudrais simplement noter (expurgé)

 27   (expurgé) distribuées à Belgrade. Il y a un bâtiment donc de syndicat pour la

 28   promotion, et il y avait environ 3 000 personnes qui étaient présentes au

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  1   moment où il y a eu cette distribution. Et je pense que là aussi, j'en

  2   resterai là sur la question de la portée de cette publication.

  3  (expurgé)

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 21  (expurgé)

 22   Certaines parties des comptes rendus sont pertinentes, à mon avis, à

 23   la question de l'intention. L'élément moral mens rea, deux comptes rendus

 24   en particulier; le premier, c'est le 9 octobre 2008, à la page 10 582 du

 25   compte rendu, l'accusé a dit ceci :

 26  (expurgé)

 27  (expurgé)

 28  (expurgé)

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  1  (expurgé)

  2   (expurgé) Donc le fruit de leurs

  3   travaux, en vertu de mes instructions, ils sont comme le prolongement de

  4   mon bras dans tout ceci."

  5   Ceci indique d'ailleurs la nature des relations entre les conseillers

  6   de l'équipe de l'accusé. Le conseiller et l'équipe semblent, pour

  7   l'essentiel, avoir préparé conformément aux instructions ce qui leur était

  8   donné en tant que prolongement du bras de l'accusé.

  9   Un commentaire analogue a été fait par l'accusé le 21 octobre 2008 aux

 10   pages 10 810 et 10 811. Donc, pour être bien sûr que ceci est bien vu dans

 11   le contexte, je donnerai lecture de ce paragraphe.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur MacFarlane, excusez-moi de vous

 13   interrompre, mais je voudrais vous prier de vous efforcer de ne pas révéler

 14   de renseignements qui seraient susceptibles de donner le titre du livre, et

 15   cetera.

 16   M. MacFARLANE : [interprétation] Je vous remercie.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pouvez poursuivre.

 18   M. MacFARLANE : [interprétation] Je vais m'efforcer d'éviter certains mots.

 19   Il est dit que l'accusé aurait dit ceci :

 20   "Maintenant, en plus de (expurgé), il y a une mystification très

 21   importante sur la base de ce livre et il est dit que mes associés

 22   l'auraient compilé comme une annexe pour la dernière plainte par rapport à

 23   l'acte d'accusation. Vous savez, le texte, c'est une lettre assez longue,

 24   d'environ 300 pages, et il a été ordonné qu'elle ne devrait pas être

 25   traduite en anglais. J'ai dit qu'il fallait l'imprimer et la publier, mais

 26   qu'il fallait biffer et écarter les noms et donner des noms de codes, des

 27   codes qui étaient utilisés par l'Accusation, et dans ce livre vous verrez

 28   ces codes."

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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur MacFarlane, quand vous lisez un

  2   texte, pourriez-vous aller un peu plus lentement pour les interprètes.

  3   M. MacFARLANE : [interprétation] Oui, merci.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et si vous pouviez répéter ce que vous

  5   avez dit depuis le moment où on voit : "Il est question du fait que

  6   l'accusé ait donné des instructions."

  7   M. MacFARLANE : [interprétation] Je vais répéter cette partie pertinente,

  8   Monsieur le Président.

  9   "C'est un rapport que mes associés ont compilé pour moi comme annexe à ma

 10   dernière plainte contre l'acte d'accusation. Vous savez que ce texte était

 11   assez long, environ 300 pages, et vous avez donné l'ordre de ne pas le

 12   traduire en anglais. J'ai dit qu'il fallait l'imprimer et le publier, mais

 13   que les noms soient enlevés et que l'on donne des noms de codes, à savoir

 14   les noms de code utilisés par l'Accusation, et dans ce livre vous verrez

 15   ces noms de codes." Et l'accusé continue ensuite d'une façon

 16   particulièrement importante.

 17   "Le fait que quelqu'un qui est intelligent et astucieux peut tirer ses

 18   propres conclusions pour savoir qui était cette personne, ça, qu'est-ce que

 19   ça peut me faire ?"

 20   D'autres commentaires qui sont pertinents dans le cadre de la question de

 21   l'élément moral, mens rea, il semble que l'accusé ait pris une décision

 22   consciente d'éviter plus particulièrement le nom d'un témoin, et il a donné

 23   des instructions précises pour éviter de donner ce nom. Je vais en parler

 24   maintenant, parce que si on regarde en lisant ce livre, il devient apparent

 25   que même cette personne pourrait être identifiée. Pour l'essentiel, c'est

 26   comme un puzzle que l'accusé et ses associés s'efforcent de recomposer de

 27   façon à faire échec à des poursuites au pénal.

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 10   A une autre occasion -- Je vais terminer mon propos sur les comptes rendus

 11   d'audiences dans un instant.

 12   Le 25 février 2009, à la page 14 261, l'accusé a formulé la remarque

 13   suivante concernant le livre en question :

 14   "En ce qui me concerne, dans un magnifique ouvrage de 1 200 pages avec un

 15   merveilleux titre, dans le propos liminaire, je n'ai jamais divulgué les

 16   noms de témoins protégés. Dans l'appendice au livre et dans différents

 17   documents que j'ai recueillis, vous trouvez des documents où les noms

 18   entiers de témoins sont indiqués, mais vous ne trouvez pas leurs

 19   pseudonymes juste à côté de ces noms, donc il faut véritablement consacrer

 20   un effort et il faut être assez futé afin de pouvoir deviner l'identité de

 21   ces témoins."

 22   A mon sens, il s'agit là d'un extrait particulièrement révélateur qui

 23   provient du compte rendu d'audience sur la question de la mens rea. Son

 24   plan est d'assurer que nullement retrouve-t-on le pseudonyme et le

 25   véritable nom ensemble à la même ligne ou dans la même partie de l'ouvrage.

 26   Dans mon examen du livre, il semble qu'il a assez bien réussi à faire cela.

 27   Ça, c'était le plan.

 28   Donc il dit : "Nous ne les avons jamais mis côte à côte. Il faut donc

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  1   faire un effort, il faut être assez avisé pour pouvoir deviner l'identité."

  2   En parcourant l'ouvrage, je ferai valoir à la Chambre que c'est

  3   essentiellement la nature de l'ouvrage. Il a réussi à éviter de placer le

  4   pseudonyme et le nom du témoin ensemble, mais grâce au contexte, au contenu

  5   et à l'activité, toute personne dotée d'un intellect raisonnable est à même

  6   de déterminer qui sont les témoins.

  7   Il y a une dernière remarque que je souhaiterais faire concernant les

  8   comptes rendus d'audience du procès principal, mais par nécessité, je vais

  9   devoir traiter d'informations protégées, donc il y aura peut-être lieu de

 10   passer à huis clos partiel pour quelques instants.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Tout à fait. Donc je pense que le huis

 12   clos partiel devrait suffire. Merci.

 13   Nous sommes maintenant à huis clos partiel.

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Messieurs les Juges, nous sommes à

 15   huis clos partiel.

 16   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 53-81 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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 16   [Audience publique]

 17   M. MacFARLANE : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges. En cas où l'on

 18   arriverait à une culpabilité en matière de chef d'accusation, il y a

 19   ensuite mes éléments de preuve par rapport à la sentence appropriée. Il y a

 20   en fait plusieurs situations s'agissant d'outrage par publication. Il y a

 21   différence qu'on pourrait qualifier d'outrage par publication de faible

 22   niveau jusqu'à des tentatives pour s'immiscer avec des témoins, et en

 23   certains cas, intimider les témoins ou les effrayer. Donc il y a différents

 24   scénarios qui peuvent surgir. Dans mes éléments à charge, ces trois témoins

 25   disposaient d'une très forte protection qui a été fournie par la Chambre.

 26   Il était évident à la Chambre qu'ils avaient besoin de protection et que

 27   les mesures prises étaient extrêmement importantes.

 28   Ça c'est la première chose.

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  1   Deuxième point, qu'il est devenu apparent que l'accusé s'est lancé dans une

  2   tentative d'action délibérée. Il a sciemment dissimulé ou a cherché à

  3   dissimuler les noms des témoins afin de pouvoir sortir son livre, et à ce

  4   moment-là, toute personne qui regardait ce livre, qui lisait ce livre,

  5   comprendrait bien qui était ces témoins, et à ce sens les exposer au monde

  6   non seulement parce que le monde peut lire ce livre et sur le site Web de

  7   l'accusé.

  8   Donc le champ est clairement en question, la protection autour des

  9   témoins est une caractéristique aggravante, c'est clairement une tentative

 10   visant à manipuler ou à intimider les témoins en les exposant.

 11   L'accusé affirme qu'il ne s'est pas livré à une intimidation.

 12   J'affirme devant la Chambre que cela est inexact. Il y a eu une tentative

 13   d'intimidation à les exposer, malgré les mesures de protection imposées par

 14   la Chambre.

 15   J'ai eu l'occasion de passer en revue pratiquement tous les procès

 16   d'outrage qui vont de 1999 à 2008, et dans certains cas une sanction

 17   pécuniaire a été imposée, dans d'autres cas une sentence d'emprisonnement

 18   allant de trois, quatre à cinq mois imposée par la Chambre.

 19   J'affirme respectueusement que les faits dans cette affaire où des

 20   témoins soigneusement protégés ont été exposés par un plan délibéré, que la

 21   sanction qui est prévue et que la Chambre ne devrait pas tolérer cette

 22   sorte de manipulation et de subterfuge d'un témoin qui a été manipulé. Donc

 23   j'affirme effectivement que s'agissant de la durée d'emprisonnement est

 24   nécessaire et plutôt dans la fourchette supérieure sur la base des faits de

 25   cette affaire. Voilà donc les éléments de base sur ma question de sentence.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur MacFarlane.

 27   Monsieur Seselj, maintenant vous avez le temps de présenter vos éléments à

 28   la Chambre, ainsi que les éléments de preuve.

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

  2   me dois d'emblée d'admettre devant vous que je suis très désagréablement

  3   surpris après l'exposé de M. MacFarlane dans ses fonctions d'amicus curiae.

  4   Je m'attendais à un exposé beaucoup plus compétent, beaucoup plus

  5   professionnel. C'est un homme qui, en dehors de cela, a tout fait pour

  6   empêcher que l'on ait une vision globale sur le fond des raisons qui

  7   motivent la mise en accusation, et maintenant il prend la parole, et il dit

  8   : Il y aura un acte criminel, et sur la base du fait qu'il peut se produire

  9   un acte criminel à l'avenir, il se met à rechercher l'élément moral, le

 10   mens rea. Mais il n'a rien fait d'autre. Son abord de la question a été

 11   théolologique [phon], c'est-à-dire à la recherche d'un objectif, d'un but.

 12   Je tiens qu'une correction soit immédiatement apportée au compte rendu

 13   d'audience. Il est écrit "théologique", et j'ai dit "théléologique" [phon].

 14   Je crois que le problème qui se pose ici c'est l'absence d'interprètes

 15   compétents dans ce Tribunal. J'ai dit "théléologique" et il a été consigné

 16   au compte rendu d'audience théologique. Mais vos interprètes ne sont pas

 17   assez éduqués pour faire la différence entre les deux mots.

 18   Voilà, c'est une bonne occasion pour moi de parler du compte rendu

 19   d'audience, car j'ai une très mauvaise impression déjà de l'interprétation

 20   dans ce Tribunal issue du procès principal qui se mène contre moi.

 21   Donc le Procureur a recherché au départ tous les arguments qui pourraient

 22   être utilisés pour exprimer des accusations, mais en ne cessant de sortir

 23   les arguments défendus par lui du contexte établi par le livre. Donc peut-

 24   être cela peut-il servir à asseoir sa mise en accusation, mais sur le fond

 25   cela crée un écran de fumée qui empêche de voir quel est le problème

 26   principal. Le Procureur n'a pas lu le livre et ne peut donc émettre aucun

 27   jugement par rapport à lui. Il déclare que l'objectif que poursuivait

 28   l'impression de ce livre consistait à divulguer l'identité de témoins

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  1   protégés. S'il avait lu le livre, il n'aurait jamais pu défendre un tel

  2   argument devant les Juges.

  3   Ecoutez, faisons un petit test. En utilisant ce test, je vous démontrerai

  4   que M. MacFarlane n'a pas la moindre idée de ce qui est écrit dans ce

  5   livre. Il n'a pas la moindre idée, par exemple, du nombre de fois où le nom

  6   de M. le Juge Ian Bonomy, membre de la présente Chambre de première

  7   instance, est mentionné dans ce livre. Ça, M. MacFarlane ne le sait

  8   absolument pas. Il n'a pas été informé du fait que le nom de M. le Juge

  9   Bonomy est écrit dans le livre. D'ailleurs, regardez-le maintenant. Par sa

 10   gestuelle, il montre qu'il n'en avait pas la moindre idée. Le nom de M. le

 11   Juge Bonomy est évoqué dans le livre quatre fois, parce que le Juge Bonomy

 12   a été membre de la Chambre à laquelle je me suis adressé à plusieurs

 13   reprises en rapport avec un certain nombre de questions juridiques liées à

 14   la procédure. C'est la raison pour laquelle son nom figure dans les pages

 15   de garde de quatre documents qui sont produits dans le livre.

 16   Cette situation nous amène à nous poser la question de savoir comment ce

 17   livre a été publié, de quoi il se compose. La Chambre de première instance

 18   numéro II qui a mené la procédure préalable au procès intenté à mon

 19   encontre, et ce, jusqu'au début de l'année 2007, m'a privé de mon droit de

 20   faire appel par rapport au deuxième acte d'accusation modifié. Et pour des

 21   raisons de procédure qu'elle a invoquées, elle m'a même ôté le droit

 22   d'utiliser les dates limites de dépôt de certaines requêtes. C'est la

 23   raison pour laquelle j'ai fait appel auprès de la Chambre de première

 24   instance numéro III. J'ai présenté le problème qui se posait par rapport au

 25   délai qui m'a été autorisé et n'a pas été respecté pour faire appel et j'ai

 26   demandé un nouveau délai. La Chambre de première instance numéro III - vous

 27   trouverez tout ça dans des documents qui figurent au début de mon livre et

 28   le Procureur aurait dû le savoir - la Chambre de première instance numéro

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  1   III, par conséquent, en octobre 2007, m'a accordé un nouveau délai pour

  2   interjeter appel contre l'acte d'accusation, et je l'ai fait. Cette requête

  3   a été rédigée par mes collaborateurs, conseil juridique, et j'ai annexé à

  4   cette requête un document à l'appui de 300 pages.

  5   Dans cette analyse, je souhaitais fournir à la Chambre de première instance

  6   des éléments de preuve très nombreux qui la contraindraient à éliminer une

  7   partie des charges retenues contre moi de l'acte d'accusation au motif

  8   qu'elles étaient totalement infondées. Je suppose que M. le Juge Parker se

  9   rappelle qu'en 2004, alors qu'il était membre de la Chambre de première

 10   instance qui menait la procédure préalable au procès à mon encontre, donc

 11   en 2004, la Chambre de première instance dont il faisait partie a délibéré

 12   au sujet de ma requête préliminaire contre l'acte d'accusation.

 13   Et parmi les divers lieux qui sont mentionnés comme ayant un rapport

 14   avec les charges retenues contre moi, charges qui concernent des crimes, il

 15   y a un lieu qui devait être retiré de l'acte d'accusation, car le Procureur

 16   n'avait apporté aucune preuve du fait que dans cette localité, il y aurait

 17   eu un conflit, une guerre.

 18   La Chambre d'appel a replacé cette localité dans l'acte d'accusation en se

 19   contentant de dire qu'il importait peu de savoir si au départ s'il y avait

 20   eu guerre ou pas dans cette localité, puisque cette question serait

 21   discutée et tranchée pendant le procès lui-même. Donc le procès devait

 22   commencer et la preuve à ce sujet devait être apportée ultérieurement. Mais

 23   pour ma part, j'avais suffisamment de preuves à ma disposition pour

 24   déclarer que non seulement il n'y avait pas eu de guerre dans cette

 25   localité, mais qu'il n'y avait même eu aucune attaque.

 26   Vous savez, Messieurs les Juges, que selon l'article 5 du Statut, pour que

 27   cet article s'applique, il faut d'abord qu'il y ait une guerre dans une

 28   localité considérée, mais il faut aussi que soit prouvée l'existence d'une

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  1   attaque systématique ou généralisée. J'ai apporté pour ma part un certain

  2   d'éléments de preuve dans ce document annexé de 300 pages démontrant qu'il

  3   n'y avait pas eu la moindre attaque et encore moins une attaque

  4   systématique ou généralisée. Reynaud Theunens du bureau du Procureur a

  5   confirmé d'ailleurs qu'aucune attaque n'avait été lancée contre la

  6   population civile dans ces localités.

  7   Mais que s'est-il passé ? La Chambre de première instance saisie était

  8   impatiente, elle subissait des pressions de la part du Conseil de l'Europe

  9   qui exigeait que le procès qui m'était intenté commence dans les plus brefs

 10   délais et n'a donc pas estimé nécessaire de respecter toutes les

 11   contraintes en statuant sur cette étude que je lui avait soumise. La

 12   Chambre a même décidé que cette étude n'avait pas besoin d'être traduite,

 13   et le début du procès, la date du début du procès a été fixée comme ça,

 14   sans qu'aucune contrainte, qu'aucune exigence de procédure n'ait été

 15   pleinement respectée. Tous les éléments de preuve regroupés dans le cadre

 16   des documents 65 ter ne m'avaient pas encore été communiqués, les décisions

 17   relatives aux requêtes interlocutoires n'étaient pas rendues. Donc, en

 18   bref, rien n'était prêt pour que le procès commence dans le respect du

 19   Règlement.

 20   Dans de telles conditions, j'ai décidé de publier ce texte, cette étude, et

 21   j'ai donné instruction très ferme à mes collaborateurs de ne mentionner

 22   dans ce texte aucun nom des témoins protégés, ce qui est d'ailleurs indiqué

 23   dans la préface du livre. Dans cette étude, entre la page 77 et la page 330

 24   et quelques - je ne vais pas chercher la page exacte - maintenant, si vous

 25   me le permettez, le nom d'aucun témoin n'est nulle part mentionné. Mais les

 26   allégations qui ont été retenues contre moi sont évoquées et leur

 27   inexactitude mise en exergue. Parce que j'aimerais appeler votre attention

 28   sur le nombre incroyable de déclarations fallacieuses qui ont été faites à

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  1   mon encontre. Par exemple, il est dit que lors des meetings du Parti

  2   radical serbe, j'aurais préconisé en public de tuer tous les enfants issus

  3   de mariages mixtes et toutes sortes d'autres monstruosités. Vous savez,

  4   j'ai déjà publié un livre de plus de 1 000 pages qui est intitulé

  5   "Instrumentalisation des faux témoins par le Tribunal de La Haye," qui

  6   reprend un très grand nombre de déclarations préliminaires écrites de

  7   témoins, témoins qui sont des faux témoins ayant subi des pressions de la

  8   part du Procureur et qui ont refusé de venir comparaître en personne.

  9   Ne passons pas à huis clos partiel, je vous prie, parce que ceci n'est

 10   vraiment pas justifié. Le livre dont je viens de parler a été évoqué à

 11   plusieurs reprises durant le procès principal.

 12   Alors, revenons à l'étude dont je parlais. J'avais donné instruction à mes

 13   collaborateurs, eu égard à tous les documents dont nous traitions pour

 14   qu'ils ne soient pas publiés, même s'ils indiquaient bien la réalité des

 15   événements survenus dans les diverses localités évoquées à l'acte

 16   d'accusation. Je ne vais pas mentionner le nom de ces localités. On trouve

 17   en tout cas dans mon livre des interviews des personnes qui peu ou proue

 18   ont participé aux événements, ainsi que des interviews de membres des

 19   Services de sûreté de l'Etat, de la police et des habitants de ces

 20   localités. Il y a également des dépositions faites par des policiers, des

 21   notes d'information provenant de la police et des documents judiciaires.

 22   Donc ce très grand nombre de documents, puisqu'ils composent 900 pages de

 23   documents, grâce à tous ces documents, je décrivais la situation réelle

 24   dans les localités en question, sans omettre quoi que ce soit.

 25   Les trois témoins qui sont mentionnés ici étaient des personnalités

 26   publiques étant donné les fonctions ou les professions qui étaient les

 27   leurs. C'était des personnalités bien connues au sein de la communauté, et

 28   il était impossible d'éviter que dans tel ou tel document inclus dans ces

Page 90

  1   900 pages, une mention de leur nom ne surgisse pas ici ou là, puisqu'ils

  2   avaient eu une participation aux événements dont nous parlons. Je n'avais

  3   pas le droit, puisque moi, ces documents je les ai trouvés en faisant des

  4   recherches dans des lieux déterminés. Mais je n'avais pas le droit

  5   d'intervenir en falsifiant ces documents et en supprimant telle chose qui

  6   figurait dans un document public, par ailleurs.

  7   Lorsque le Procureur déclare qu'un témoin peut être identifié sur la

  8   base d'un contrat d'échange d'appartements qu'il aurait signé, il sort la

  9   situation de son contexte. Mais il y a toutes sortes de contrats de vente,

 10   d'achat, de location d'appartement qui sont signés par toutes sortes de

 11   personnes qui ne sont pas nécessairement des témoins dans un procès au

 12   TPIY, parce que j'ai publié un tel contrat, j'aurais eu l'intention de

 13   faire connaître le nom d'un témoin protégé. C'est l'allégation qui est

 14   retenue contre moi.

 15   Si mon objectif avait été de divulguer le nom d'un témoin protégé et

 16   d'intimider ce témoin par là même, Messieurs les Juges, vous savez bien que

 17   pendant près d'un demi-siècle, la Serbie et la Yougoslavie communiste ont

 18   subi une dictature communiste sous le régime du Maréchal Tito et de ses

 19   successeurs. Ce régime communiste m'a opposé une interdiction décidée par

 20   les tribunaux de publier cet ouvrage dont j'étais l'auteur. Je dois

 21   admettre, même avec une certaine réticence, que ces procureurs des

 22   tribunaux de l'ex-Yougoslavie qui préparaient des procédures à mon encontre

 23   l'ont fait beaucoup plus soigneusement que cela n'est le cas ici au TPIY.

 24   Les procureurs de Serbie avaient lu de la première à la dernière page les

 25   livres dont il était question dans les débats, ils ont donc fait leur

 26   travail comme leur imposait la procédure en vigueur à l'époque.

 27   Nous avons ici un Procureur, face à nous, qui n'a pas la moindre idée

 28   du contenu du livre dont il parle. Il avance des allégations arbitraires

Page 91

  1   indiquant que mon intention était de communiquer les noms de témoins

  2   protégés et, par conséquent, de les intimider.

  3  (expurgé)

  4  (expurgé)

  5  (expurgé)

  6  (expurgé)

  7  (expurgé)

  8  (expurgé)

  9  (expurgé)

 10  (expurgé)

 11  (expurgé)

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14  (expurgé)

 15  (expurgé)

 16  (expurgé)

 17   Par conséquent, ce n'était pas mon objectif d'intimider ou de faire

 18   peur à des témoins protégés ou même de rendre leurs noms publics. Mon

 19   objection était de faire la vérité sur (expurgé) dans l'acte

 20   d'accusation, de contrer des fausses accusations, de fausses déclarations

 21   écrites de témoins et de faux témoins entendus pendant le procès. Il n'y a

 22   pas une pierre qui n'a pas été retournée par l'Accusation ou qui que ce

 23   soit d'autre, et d'ailleurs c'est ce qui a fini par bloquer le procès, car

 24   ces pierres, je les ai contrées. La Chambre de première instance ne sait

 25   pas dans quel cul-de-sac elle est engagée désormais. Mais c'est un jeu

 26   d'échecs que nous jouons.

 27   Tant qu'il durera, il durera, je ne sais pas combien de temps. Nous

 28   verrons. Cela n'a aucune importance. J'ai une très grande patience. Cela

Page 92

  1   fait sept ans que cela dure. Je peux encore supporter 70 ans, le cas

  2   échéant.

  3   Dans le livre que nous avons ici, le Procureur a trouvé des éléments

  4   susceptibles d'identifier les témoins protégés. En principe, c'est vrai,

  5   mais vous avez une longue expérience dans d'autres procès qui ont déjà été

  6   jugés avec votre participation, Messieurs les Juges, et dans tous ces

  7   procès, vous savez que l'on peut s'exprimer en public ou à huis clos

  8   partiel, et que si entendre la voix d'un témoin risque de permettre son

  9   identification, on déforme sa voix. Vous savez que l'image du visage du

 10   témoin à l'écran peut être déformée, que les témoins peuvent témoigner avec

 11   un pseudonyme, et que seul le contenu du témoignage est connu et rien

 12   d'autre.

 13   Monsieur Kwon, à l'époque où vous étiez Juge dans la Chambre saisie

 14   de l'affaire Milosevic, par exemple, c'est bien ce que vous avez vécu. Je

 15   ne pense pas que M. Bonomy ait oublié que Milan Babic a témoigné en tant

 16   que témoin protégé dans le procès auquel il a participé. J'ai suivi le

 17   procès de Belgrade et j'ai immédiatement identifié Milan Babic sur la base

 18   de ce qu'il disait dans le prétoire. Plusieurs jours plus tard, les mesures

 19   de protection ont été levées et Milan Babic a poursuivi sa déposition en

 20   public.

 21   Donc par déduction ou en se servant de son intelligence, on peut

 22   toujours reconnaître un témoin, même protégé. Des experts ont établi il y a

 23   plus de 20 ans que j'avais un QI supérieur à 240, mais peut-être ces

 24   experts ont-ils menti.

 25   Alors quel est le QI de M. MacFarlane ? Je ne sais pas. Avant le

 26   procès, je pensais qu'il avait un QI bien supérieur à ce que je constate

 27   ici, mais bien sûr, je ne voudrais rien dire de négatif à son sujet, parce

 28   qu'il a employé le mot intelligence, il a parlé des aptitudes d'un homme

Page 93

  1   moyen. Donc c'est par association d'idées que j'ai dit ce que je viens de

  2   dire, mais sans aucune volonté de l'insulter.

  3   Qui est-ce qui aurait pu, en lisant mon livre, déterminer l'identité

  4   des trois témoins en question ? Posez-vous la question : Qui a eu le temps

  5   ou qui a pu déployer les efforts nécessaires pour lire un livre de 1 200

  6   pages simplement pour découvrir le nom de trois témoins protégés ?

  7   Personne, à mon avis, qui aurait le moindre bon sens n'agirait ainsi. On

  8   peut imprimer un tract, même anonyme, et le distribuer. Personne ne peut

  9   savoir qui est l'auteur de ce tract, mais peut découvrir les noms des

 10   témoins protégés d'une façon beaucoup plus facile si l'objectif poursuivi

 11   est de créer la peur. Dans l'affaire Haradinaj, par exemple, vous vous

 12   rappellerez que des témoins ont été tués, mais dans aucun procès intenté à

 13   des Serbes, une chose de ce genre ne s'est produite. Combien de témoins ont

 14   été tués dans l'affaire Haradinaj, des dizaines ? Qui est-ce qui peut le

 15   savoir ?

 16   Le Procureur poursuit en disant que le problème qui se pose dans la

 17   présente affaire est très grave. Ceci est tout simplement contraire à la

 18   vérité. Ce n'est pas vrai. Il n'y a aucun problème ici. Tout ce que nous

 19   avons, c'est un Procureur qui pense qu'il a un problème, parce qu'il risque

 20   de se trouver confronter à l'échec total de la thèse défendue par lui dans

 21   le procès principal.

 22  (expurgé)

 23  (expurgé)

 24  (expurgé)

 25  (expurgé)

 26  (expurgé) Par la suite, il a été distribué gratuitement, mais à ce moment-

 27   là, on pouvait de toute façon télécharger ce livre sur internet, et on peut

 28   le faire encore aujourd'hui, car je ne fais rien payer pour ce

Page 94

  1   téléchargement.

  2   Donc pas mal de temps s'est écoulé avant que le Procureur n'ait

  3   l'idée de poser une question qui ressort logiquement de la lecture du livre

  4   et qu'il amène soudain la thèse qu'il nous présente.

  5   Le Procureur est confronté à un problème, et pour sortir de ce

  6   problème, il veut m'empêcher d'assurer ma propre défense, il veut m'imposer

  7   un conseil de la Défense dans mon procès principal, qui ne défendrait pas

  8   mes intérêts, mais les intérêts du Procureur des Etats-Unis, de l'OTAN, de

  9   l'Union européenne, et cetera. Voilà ce qui est au cœur de la question.

 10   C'est pour cette raison que le Procureur a soudain estimé nécessaire de me

 11   proclamer et de vous demander de me proclamer coupable de façon à disposer

 12   d'un fondement juridique pour m'empêcher d'assurer moi-même ma défense dans

 13   le procès principal.

 14   Les sanctions dont il est question ici n'ont pas la moindre

 15   importance. Vous devez, bien entendu, trancher en prononçant des sanctions,

 16   mais ce qui importe, c'est ce qui se passe dans le procès principal. Les

 17   sanctions pour outrage au Tribunal ne sont que symboliques. Si quelqu'un

 18   passe sept ans en prison pour un tel motif, ce serait ridicule.

 19   Ce qui m'intéresse dans toute cette affaire, c'est les autres sanctions que

 20   l'on risque de m'imposer. Qu'est-ce qui est fondamental et vital pour moi,

 21   c'est que si vous me déclarez coupable ici, le Procureur va, tout d'un

 22   coup, pouvoir sortir une requête sur la base de votre jugement en disant

 23   que le Tribunal a établi que par mes soins, les mesures de protection

 24   consenties à des témoins avaient été violées, que j'ai donc abusé du droit

 25   qui était le mien d'assurer moi-même ma défense, et que ceci renforce

 26   l'Accusation dans son désir de m'empêcher de le faire. Voilà ce que le

 27   Procureur veut obtenir. Maintenant cela permettrait, lorsque des témoins

 28   éventuels viendraient s'exprimer ici dans le cadre de la présentation de

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  1   mes moyens, puisque nous sommes arrivés au stade de la présentation des

  2   moyens de la Défense, d'avoir du côté du Procureur un espion qui agirait

  3   prétendument pour ma défense dans mon procès principal.

  4   Il y a très peu de procès où un accusé peut participer à l'interrogatoire

  5   des témoins. Mais si ce que je viens de décrire se passait, je pourrais

  6   dire au revoir à mon avenir et me désintéresser de mon procès, car nous

  7   serions en présence d'une coopération absolument idéale pour le Tribunal

  8   entre l'Accusation et la Défense.

  9   Car aucun avocat de la Défense agissant dans ce Tribunal n'assure

 10   réellement les intérêts de son client.

 11   Puis il y a un autre point important. M. MacFarlane n'a pas le moindre

 12   élément de preuve susceptible de démontrer qu'après la publication de mon

 13   livre, l'un des trois témoins dont nous parlons ici aurait eu le moindre

 14   problème, aurait subi le moindre désagrément, que quelqu'un l'aurait

 15   provoqué, intimidé, menacé ou quoi que ce soit de ce genre ou qu'il aurait

 16   subi des agressions physiques contre sa personne ou contre des membres de

 17   sa famille ou des agressions contre ses biens ou quoi que ce soit. Rien de

 18   cela ne s'est passé.

 19   Et je vais vous dire encore une chose. Ces trois témoins protégés ont

 20   déjà comparu à plusieurs reprises en qualité de témoins. Ils ont donné des

 21   interviews à des journaux, ils ont évoqué le même genre de choses lors de

 22   ces interviews, les mêmes choses qu'ils avaient discutées avec le Procureur

 23   au moment de la rédaction de leur déclaration préliminaire.

 24   Donc d'où vient le problème ? Où serait l'intimidation, et pourquoi

 25   d'ailleurs aurais-je le désir d'intimider ces témoins pour commencer,

 26   puisque je pourrais les avoir en face de moi et les interroger dans un

 27   prétoire. J'ai retourné complètement les dépositions de ces témoins lorsque

 28   je les ai contre-interrogés. Donc pourquoi est-ce que j'aurais encore

Page 96

  1   besoin de les intimider ?

  2   La force de mes arguments est telle qu'il ne reste plus rien dans

  3   l'acte d'accusation. Il ne reste plus une lettre de l'acte d'accusation qui

  4   puisse tenir, et en conversation privée, de nombreuses personnes me l'ont

  5   dit. Vos collègues de l'Accusation vous le diront, ne pourront pas vous

  6   dire autre chose. J'en suis certain, parce qu'il y a tout de même le poids

  7   de l'opinion publique sur ce Tribunal, et ce Tribunal est tout à fait

  8   conscient du fait que le bureau du Procureur et l'Accusation dans mon

  9   procès principal ont vécu un échec complet. Le procès est maintenant

 10   interrompu, nous attendons quelque chose, semble-t-il. Ce que nous

 11   attendons, je ne le sais pas. Nous attendons qu'on m'impose un conseil de

 12   la Défense, sans doute pour qu'il puisse agir en milieu et place pendant la

 13   présentation des moyens de la Défense. Ce conseil soutiendrait le Procureur

 14   et viendrait au secours des faux témoins qui ont été entendus grâce à cette

 15   collaboration maximum avec le Procureur.

 16   Vous voyez, M. MacFarlane prétend que je voudrais cacher quelque chose. Je

 17   n'ai rien à cacher. Je ne veux pas masquer quoi que ce soit. Dans l'étude

 18   dont je parlais tout à l'heure, qui a été élaborée par mes collaborateurs,

 19   l'identité d'aucun témoin protégé n'est divulguée nulle part.

 20   Si vous lisez mon livre du début à la fin avec une grande attention,

 21   d'ailleurs c'est un point sur lequel j'aimerais appeler votre attention,

 22   sur la multitude de faits que l'on trouve évoqués dans ces 1 200 pages.

 23   D'ailleurs, il y a plus que 1 200 pages, mais enfin, si c'étaient des

 24   feuillets de journalistes, cela ferait 2 400 feuillets. Donc si quelqu'un

 25   se voit indiquer à l'avance les passages que M. MacFarlane a cités, peut-

 26   être pourra-t-il connaître l'identité de ces témoins dans ces passages.

 27   Mais tout le monde ne peut pas le faire. Tout le monde n'en a pas la

 28   capacité.

Page 97

  1   Et je vous demande, par conséquent, quel est le lecteur qui peut se

  2   concentrer tellement de la première page à la 1 200e page ou plus ? C'est

  3   seulement quelqu'un qui a une très, très grande expérience. Or,

  4   pratiquement aucun lecteur ne peut s'appliquer et se concentrer aussi

  5   longtemps à la lecture d'un livre. Il n'est donc même plus nécessaire

  6   d'évoquer la déduction, la conclusion ou le caractère logique d'une

  7   conclusion. Ce qui est en cause ici, c'est le très grand nombre de pages et

  8   la nécessité d'extraire d'un livre aussi volumineux les portions qui ont

  9   été abordées par le Procureur.

 10   Tous les incidents qui sont évoqués dans le livre et qui auraient eu lieu

 11   dans certaines localités ont été évoqués dans des procès menés en Serbie.

 12   Là nous avons des preuves matérielles qui montrent que le bureau du

 13   Procureur a proposé des faux témoignages, parce que dans la deuxième

 14   citation du Procureur, l'homme qu'il évoque a été entendu à plusieurs

 15   reprises dans des procès en Serbie. Des documents de tribunal existent, et

 16   si ces documents avaient été déposés ici, le Procureur en aurait eu

 17   connaissance.

 18   Le Procureur poursuit en disant que je serais satisfait en constatant que

 19   plusieurs milliers d'exemplaires avaient été téléchargés à partir de mon

 20   site. C'est ce que tout auteur souhaiterait voir, à savoir que son livre

 21   soit publié dans un très grand nombre d'exemplaires, mais le fait est que

 22   ce livre est beaucoup trop coûteux pour que je puisse en publier une

 23   nouvelle édition.

 24   Une première édition a été vendue à perte, donc il a été distribué

 25   gratuitement. Une deuxième édition serait beaucoup trop coûteuse. Nous ne

 26   pouvons pas distribuer un très grand nombre d'exemplaires gratuitement. Si

 27   quelqu'un souhaite lire le livre, à ce moment-là, ils peuvent le

 28   télécharger à partir de mon site. Il a été publié sur le site du Parti

Page 98

  1   radical serbe, et c'est donc un livre qui ressemble au parti. Et dans ce

  2   Parti radical serbe, c'est dans ses intérêts, les intérêts du Parti radical

  3   serbe, de démontrer au public et de démontrer à une opinion publique

  4   professionnelle que l'orientation de ces livres est que l'une des affaires

  5   qui est mentionnée dans le chef d'accusation contre moi, en tant que

  6   président du Parti radical serbe, a été totalement construit de manière

  7   artificielle et dit effectivement que le Parti radical serbe est l'éditeur

  8   de cet ouvrage, que je suis l'auteur exclusif de cet ouvrage et que les

  9   gens ont agi sur mes instructions, en suivant mes instructions à la lettre.

 10   Donc je suis responsable pour chacune des pages qui se trouvent dans cet

 11   ouvrage. Il ne fait aucun doute de cela. Nous n'aurions pas dû perdre du

 12   temps sur des affaires de ce genre.

 13   Le Procureur réfère à ma déclaration concernant des personnes qui sont

 14   intelligentes et qui peuvent comprendre. C'est pas une question d'être

 15   intelligent, ça concerne le professionnalisme. Seule une personne qui

 16   comprend certaines notions de base et des catégories peuvent lire ce livre.

 17   Ce livre n'est pas destiné au public en général. L'homme dans le traitement

 18   qui peut être fasciné par la couverture de cet ouvrage et le nombre de

 19   pages, mais une personne ordinaire n'a pas suffisamment de patience pour

 20   lire la totalité de l'ouvrage.

 21   Un juriste, qui est particulièrement intéressé dans ce domaine, va

 22   bien sûr s'intéresser à lire cet ouvrage, mais ça n'est destiné qu'à un

 23   très petit nombre de personnes.

 24   Si mon intention était d'intimider les témoins, j'aurais donné

 25   l'instruction à quelqu'un de rédiger un tract publié comportant une dizaine

 26   ou une trentaine de pages et de le distribuer. Même ce tract aurait pu

 27   comporter une invitation à ce que les témoins soient attaqués ou que

 28   quelque chose soit entrepris. Il n'y avait rien de ce genre dans mon

Page 99

  1   intention. Pendant tout ce processus, rien de cela ne s'est passé. Ce n'est

  2   pas la première fois que le bureau du Procureur à La Haye souhaite

  3   fabriquer un procès contre moi pour outrage de la Cour.

  4   Je voudrais vous rappeler, peut-être que le Juge Parker s'en souviendra

  5   puisqu'il était à l'époque Président de la Chambre, qu'en 2005, le bureau

  6   du Procureur, sur la seule base d'une conférence téléphonique que j'avais

  7   eue lorsque j'ai dit à un ami la chose suivante : "J'ai entendu qu'un tel

  8   était un faux témoin secret, que dans une partie du procès et qu'il a un

  9   emploi dans votre municipalité. Essayez de vous débarrasser de cela" et des

 10   choses de ce genre.

 11   Après que le bureau du Procureur ait été informé par l'administration du

 12   centre pénitentiaire, avait ordonné une interdiction me soit imposée

 13   s'agissant d'appels téléphoniques et de visites, en alléguant du fait que

 14   j'avais divulgué le nom d'un témoin protégé. Pendant deux mois, je n'ai

 15   aucun contact avec le monde extérieur. Je n'ai pas reçu une seule visite de

 16   ma famille. Mon beau-père est décidé pendant cette période, de même que le

 17   mari de ma belle-sœur, et je n'ai aucun contact avec quiconque.

 18   Après l'expiration des deux mois, le bureau du Procureur a décidé de ne pas

 19   poursuivre et de me poursuivre pour outrage au Tribunal. Bien qu'ils

 20   avaient affirmé que cet homme était un témoin protégé dans mon procès, il

 21   ne m'en avait jamais informé.

 22   Vous savez, quand j'ai été informé de cela, que cet homme allait

 23   comparaître comme témoin dans mon procès, seul récemment en début d'année

 24   mais pas avant, je n'ai même pas reçu sa déclaration préliminaire. Il n'y

 25   avait aucune déclaration qu'il aurait, lui, donnée. La première déclaration

 26   qu'il a donnée au bureau du Procureur était en décembre de l'année

 27   dernière, pratiquement trois années après l'événement que je viens de

 28   décrire.

Page 100

  1   Oui, il est vrai qu'il a été interrogé en tant que suspect. Je vous

  2   dis ceci pour illustrer des tentatives analogues de la part du bureau du

  3   Procureur pour que je sois inculpé d'outrage au Tribunal, et me priver par

  4   là même du droit de me représenter moi-même. C'était là leur principale

  5   motivation.

  6   Une fois qu'ils aient échoué à parvenir à cela, ils ont eu recours à

  7   une méthode plus brutale, et ça s'est terminé en 2006, et qu'il a donc

  8   fallu remplacer toute la Chambre de première instance.

  9   Il y avait une autre tentative de la part de l'Accusation pour

 10   outrage, je suppose que le Juge Parker s'en souviendra, mais je n'avais

 11   aucune idée de quoi il s'agissait --

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Combien de temps vous faudrait-il

 13   pour conclure ?

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien sûr, effectivement, si vous souhaitez que

 15   nous faisions une pause, nous pouvons faire une pause. Je ne peux pas vous

 16   donner une estimation exacte, mais je peux effectivement me rallier à votre

 17   demande. Dites-moi, combien de temps vous avez besoin jusqu'à la fin, mais

 18   je ne veux pas, bien sûr, dépasser le temps qui a été alloué au bureau du

 19   Procureur. Dites-moi, si j'ai déjà dépassé les délais. Mais je souhaiterais

 20   savoir combien de temps, j'ai encore quelque chose à dire.

 21   Si vous pensez que le moment est venu pour faire la pause, après la pause

 22   nous pourrons revenir, mais dites-moi combien de temps. Je parlerai pendant

 23   aussi longtemps que vous me laisserez la parole.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Nous allons faire une pause, après

 25   quoi je voudrais conclure dans une demi-heure après la pause.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Une demi-heure me convient parfaitement.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vingt minutes.

 28   --- L'audience est suspendue à 17 heures 30.

Page 101

  1   --- L'audience est reprise à 18 heures 04.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Seselj, veuillez poursuivre.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Avant la pause, j'ai commencé à évoquer un

  4   autre cas où le Procureur s'était efforcé de lancer un procès pour outrage

  5   au tribunal. Ce cas s'est produit en 2005. Bien, encore aujourd'hui, je

  6   n'ai pas la moindre idée de ce sur quoi était fondée cette demande. Et

  7   quand tout s'est terminé, la Chambre de première instance à laquelle

  8   participait M. Parker a donné l'ordre au Greffe de m'informer en une phrase

  9   quant à l'existence de cette requête du Procureur en vue de procès pour

 10   outrage et quant au fait que la Chambre avait rejeté cette requête. Donc il

 11   s'agit là de la troisième tentative de la part du Procureur pour lancer un

 12   tel procès, tout cela dans le but de créer artificiellement un prétendu

 13   fondement susceptible de justifier qu'on me retire le droit à assurer moi-

 14   même ma défense.

 15   Je ne sais pas, Messieurs les Juges, si vous savez que bien d'autres formes

 16   de persécution ont été engagées par moi au cours des sept dernières années.

 17   Vers la fin de 2003 et jusqu'au mois de juillet 2004, au mépris du droit,

 18   j'ai été privé de tout contact téléphonique et de toute visite de la part

 19   de mes familles, sous prétexte que mon parti avait obtenu un grand nombre

 20   de voix aux élections et que par téléphone ou par le biais d'une visite,

 21   j'aurais pu agir sur la formation du gouvernement ou du pouvoir politique

 22   en Serbie.

 23   Et il y a deux jours, quelque chose de très étonnant s'est produit. Il y a

 24   deux jours, la direction du quartier pénitentiaire m'a interdit d'aller en

 25   promenade. Donc le 27, le 28 mai et aujourd'hui, interdiction de promenade.

 26   Vous savez, Messieurs les Juges, que ceci est complètement interdit. Même

 27   les condamnés à mort ont droit à une heure de promenade par jour. Qu'est-ce

 28   qui s'est passé ? Il y a deux jours alors que je partais pour la promenade

Page 102

  1   dans un lieu qu'on nous a imposé récemment, où il n'y a pas un brin

  2   d'herbe, et où l'hiver on doit passer devant la salle réservée aux visites,

  3   donc pour arriver à cet endroit je passe devant des bureaux où travaillent

  4   les avocats. Je vois un autre prisonnier, c'est un général âgé, et je crie

  5   son nom et à ce moment-là un des gardes en civil intervient et entame une

  6   querelle verbale avec moi.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Seselj, je me demande quelle

  8   est la pertinence de ce que vous dites en ce moment. Pourriez-vous vous

  9   concentrer sur l'affaire ?

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] La pertinence c'est que je suis concentré sur

 11   mon procès principal, et je pense que l'effort qui a été déployé ici c'est

 12   un effort destiné à me déstabiliser sur le plan psychique. Je ne peux pas

 13   être déstabilisé sur le plan psychique, mais les nouveaux dirigeants de la

 14   prison qui sont nouveaux ne le savent pas. Donc je pense qu'il est

 15   important que je le dise. Vous savez, Messieurs les Juges, que personne ne

 16   peut se voir interdire la promenade. Je suis d'accord sur le fait que je

 17   suis le pire des prisonniers à Scheveningen. J'admets que je suis le moins

 18   discipliné de tous les prisonniers. Mais l'interdiction d'une promenade ne

 19   peut pas et ne doit pas être une sanction disciplinaire. Et d'ailleurs ceci

 20   n'est jamais arrivé jusqu'à présent. C'est arrivé deux jours avant le début

 21   du procès auquel nous participons ici. Alors tirez les conclusions,

 22   déterminez pour quelles raisons ceci a été fait, car ceci est en tout état

 23   de cause totalement contraire au droit.

 24   Encore quelques mots, si vous voulez bien, eu égard à la thèse défendue par

 25   les représentants de l'Accusation. A plusieurs reprises M. MacFarlane a dit

 26   qu'il semblerait que j'aurais donné des consignes, qu'il semblerait que

 27   j'aurais pris consciemment la décision de ne pas prononcer le nom d'un

 28   témoin.

Page 103

  1   Alors, Messieurs les Juges, en droit pénal, qu'est-ce que c'est ce que

  2   concept de "il semble que" est-ce que c'est une constatation sérieuse ? Il

  3   semble que j'aurais commis un acte criminel, et d'ailleurs on me juge en

  4   raison de cette apparence. L'apparence n'existe pas dans le droit pénal. En

  5   droit pénal, soit on a des preuves, soit on n'en a pas. Le droit pénal ne

  6   supporte pas les supputations. Or, le Procureur ici ne cesse de faire des

  7   supputations. Il le fait de la façon la plus explicite qu'il soit. Pourquoi

  8   le fait-il ? J'ai l'impression qu'il est persuadé à l'avance que sa mise en

  9   accusation va réussir. Et dans ces conditions, il peut se permettre, y

 10   compris d'émettre des supputations. Le Procureur, s'il n'est pas convaincu

 11   à l'avance du succès de sa thèse ne se permettra pas d'agir ainsi. Dans ce

 12   cas, il fait son travail et laisse la décision aux Juges de la Chambre de

 13   première instance qui se prononcent en fonction du comportement

 14   professionnel du Procureur.

 15   Le Procureur a dit également que j'avais mis au point un plan avec

 16   mes collaborateurs pour échapper à des procédures pénales. Bien, je vous

 17   pose la question : qui dans le monde serait capable de mettre au point un

 18   puzzle aussi compliqué que celui-ci simplement pour échapper à des

 19   procédures ? Si on agit de façon artificielle, on ne réussit pas. Un puzzle

 20   n'a aucune chance de réussir. Mais la réunion d'un très grand nombre de

 21   documents très convaincants pourrait être le résultat d'un travail

 22   compétent et professionnel. Cela étant, ce n'est même pas le cas. Ce dont

 23   il est question ici, ce qui est le cas, c'est un exposé fructueux qui

 24   évoque un prétendu plan, un prétendu complot, une prétendue conspiration.

 25   Vous savez, Messieurs les Juges, que les événements dont il est

 26   question se sont déroulés dans un lieu déterminé, et qu'en dehors de moi

 27   personne n'a été mis en accusation pour quelque fait en rapport avec cette

 28   localité.

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  1   Alors, en quoi est-ce que les efforts déployés par le Procureur

  2   s'englobent dans la défense de l'idée de l'existence d'une entreprise

  3   criminelle commune ? Le Procureur veut manifestement, en invoquant ce que

  4   j'aurais écrit dans mon livre, démasquer un complot qui ferait partie d'un

  5   prétendu plan. Mais il n'y a rien dans ce livre qui démontrerait, qui

  6   prouverait l'existence d'un plan que j'aurais mis au point pour intimider

  7   et effrayer les témoins.

  8   Il y a autre chose qui m'a frappé. C'est de façon tout à fait

  9   délibérée que j'évite de commenter dans le détail les propos de M.

 10   MacFarlane, simplement parce que je voudrais éviter que nous passions à

 11   huis clos partiel puisque tout cela ne m'intéresse guère. Mais parmi tous

 12   les principes que les tribunaux civilisés appliquent en cas de procès, un

 13   des premiers principes est le principe de la publicité des débats. Et vous

 14   savez que je tiens beaucoup à cette publicité. C'est la raison pour

 15   laquelle je ne vais pas répondre à tout ce qu'a dit M. MacFarlane.

 16   Mais je vais tout de même reprendre une chose qu'il a dite. M.

 17   MacFarlane a énuméré les diverses méthodes que j'aurais utilisées pour

 18   divulguer l'identité des témoins, et que parmi ces méthodes, s'agissant

 19   d'un témoin, il y avait le fait que j'aie dit que l'un de ces témoins était

 20   alcoolique notoire, et que ce faisant, j'avais permis l'identification de

 21   ce témoin. Alors c'est possible, disons. Mais comme je n'ai pas l'intention

 22   d'utiliser pleinement les 30 minutes que vous m'avez octroyées tout à

 23   l'heure je vais en arriver à la conclusion de mon exposé.

 24   Dans la présente affaire, affaire intentée à mon encontre pour

 25   outrage au tribunal, aucune infraction, aucun acte criminel n'a été commis.

 26   Il n'y en a pas le moindre début. Et le Procureur s'est montré totalement

 27   incapable de démontrer un quelconque élément moral de ma part, autrement

 28   dit une intention que j'aurais eue de divulguer le nom de certains témoins

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  1   dans le but de les terroriser. Tout cela est inexistant dans la présente

  2   affaire.

  3   Maintenant, vous, les Juges de cette Chambre, vous ferez ce que vous

  4   voudrez, selon votre conscience ou selon d'autres intérêts qui sont les

  5   vôtres, mais la décision vous appartient. J'ai pour ma part dit tout ce que

  6   j'avais à dire.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Seselj.

  8   [La Chambre de première instance se concerte]

  9   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Seselj, si j'ai bien

 10   compris ce que vous avez dit, dans une de vos propositions il était permis

 11   de penser que les trois témoins avaient consenti des interviews à la presse

 12   en certaines occasions en s'exprimant dans des termes qui étaient

 13   comparables à ceux qu'ils avaient utilisés dans leurs déclarations écrites

 14   pour le bureau du Procureur. Qu'avez-vous de concret à l'appui de cette

 15   proposition ?

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il existe le texte des interviews à la

 17   presse.

 18   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Auriez-vous la possibilité de

 19   nous soumettre par écrit après votre retour au quartier pénitentiaire un

 20   exemplaire de ces interviews à la presse ?

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puisque nous sommes maintenant en audience

 22   publique, je peux en public demander à Dejan Mirovic, mon conseiller

 23   juridique, et à Marina Raguz, mon assistante, de transmettre au Greffe par

 24   courriel avant lundi un certain nombre de ces articles de presse qui

 25   reprennent ces interviews.

 26   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur MacFarlane, considérez-vous que

 28   vous êtes dans la nécessité de répondre à M. Seselj ?

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  1   M. MacFARLANE : [interprétation] Non, je ne pense pas que ce soit

  2   nécessaire. Je vous remercie.

  3   [La Chambre de première instance se concerte]

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les Juges de la Chambre remercient

  5   l'amicus curiae, également Procureur en exercice, ainsi que l'accusé pour

  6   leurs exposés. Ils réservent leur décision, vont réfléchir à tous les

  7   éléments de l'affaire, et rendront leur décision ultérieurement.

  8   L'audience est levée.

  9   --- L'audience de la Règle 77 est levée à 18 heures 19.

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