Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL               Affaire IT-94-01-A-R77

  2   POUR L’EX-YOUGOSLAVIE

  3   LE PROCUREUR

  4   C/

  5   TADIC/VUJIN

  6   Mercredi 8 septembre 1999

  7   L'audience est ouverte à 10 heures 05.

  8   M. le Président (interprétation). – L'audience est reprise.

  9   Monsieur le Greffier ?

 10   M. Dubuisson. – L'affaire IT 94-1-AR-77, le Procureur contre

 11   Dusko Tadic dans une matière concernant les allégations à l'encontre du

 12   conseil précédent.

 13   M. le Président (interprétation). – Le témoin suivant n'est pas

 14   un témoin protégé, je pense ?

 15   M. Dubuisson. – Le témoin qui va suivre n'est pas protégé ; il

 16   s'agit de Michael Wladimiroff.

 17   M. le Président (interprétation). – Pouvez-vous l'appeler afin

 18   qu'il entre dans le prétoire ?

 19   M. Dubuisson. – Cela a été fait.

 20   (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

 21   M. le Président (interprétation). – Monsieur Wladimiroff, je

 22   pense que vous n'êtes pas étranger à ce cadre et qu'il ne vous surprend

 23   pas ?

 24   M. Wladimiroff (interprétation). – Exact !

 25   M. le Président (interprétation). – Pouvez-vous donner lecture

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  1   de la déclaration solennelle.

  2   M. Wladimiroff (interprétation). – Je déclare solennellement que

  3   je dirai la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

  4   M. le Président (interprétation). – Veuillez vous asseoir.

  5   Nous avons à confirmer votre identité : vous êtes bien Michail

  6   Wladimiroff ?

  7   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

  8   M. le Président (interprétation). – Pourriez-vous nous donner

  9   votre lieu et date de naissance ?

 10   M. Wladimiroff (interprétation). – Je suis né le 10 janvier 1945

 11   à La Haye, aux Pays-Bas.

 12   M. le Président (interprétation). – Où résidez-vous

 13   actuellement ?

 14   M. Wladimiroff (interprétation). – A La Haye.

 15   M. le Président (interprétation). – Vous êtes bien avocat de

 16   métier ?

 17   M. Wladimiroff (interprétation). – C'est exact.

 18   M. le Président (interprétation). – Vous avez fourni une

 19   déclaration à la date du 6 avril 1999 ?

 20   M. Wladimiroff (interprétation). – Si je me souviens bien,

 21   c'était bien à cette date.

 22   M. le Président (interprétation). – Monsieur le Greffier, peut-

 23   on montrer la déclaration au témoin ?

 24   M. Dubuisson. – La déclaration portera la cote n°35.

 25   M. le Président (interprétation). – Est-ce bien votre

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  1   déclaration ?

  2   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

  3   M. le Président (interprétation). – Au moment où vous l'avez

  4   fournie, le contenu de cette déclaration était exact, conforme à la

  5   vérité ?

  6   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

  7   M. le Président (interprétation). – L'est-il toujours

  8   aujourd'hui ?

  9   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

 10   M. le Président (interprétation). – En l'absence d'objection, je

 11   demanderai qu'elle soit versée au dossier. Comme que le greffier l'a

 12   précisé, elle a reçu la cote 35. Monsieur Wladimiroff, êtes-vous prêt à

 13   recevoir les questions posées par Me Abell qui est le conseil défendant

 14   M. Tadic ?

 15   M. Abell (interprétation). – Monsieur Wladimiroff, je ne vais

 16   pas vous faire parcourir dans le menu détail cette déclaration que vous

 17   avez fournie, qui porte désormais la cote 35, puisque vous avez dit

 18   qu'elle représentait la vérité s'agissant des rapports que vous avez eus

 19   avec les protagonistes de cette affaire, n'est-ce pas ?

 20   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

 21   M. Abell (interprétation). – Je vais vous demander de m'aider

 22   sur l'un ou l'autre aspect de cette déclaration. Examinons, si vous le

 23   voulez bien, le paragraphe n° 4 de votre déclaration.

 24   (Déclaration que ne possèdent pas les interprètes, précise

 25   l'interprète.)

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  1   Cinq lignes plus loin, vous dites  :"Au cours de mes activités

  2   dans cette affaire, le greffier n'a jamais désigné Me Vujin en tant que

  3   co-conseil de M. Tadic".

  4   M. Wladimiroff (interprétation). – Effectivement, je n'ai jamais

  5   été informé d'aucune affectation de mission.

  6   M. Abell (interprétation). – Pour autant que vous vous en

  7   souveniez, pendant le temps où vous avez été assigné par le greffe du

  8   Tribunal à la défense de M. Tadic, est-ce que Me Vujin a reçu des

  9   paiements, une rémunération, pour le travail qu'il faisait, de la part du

 10   Tribunal ?

 11   M. Wladimiroff (interprétation). – Pas à ma connaissance.

 12   M. Abell (interprétation). – Savez-vous par quel moyen ou si

 13   M. Vujin recevait par quelque moyen que ce soit une rémunération par

 14   rapport à son travail, travail qu'il faisait en tant qu'avocat de la

 15   défense ?

 16   M. Wladimiroff (interprétation). – Pas à ma connaissance. Comme

 17   je l'ai dit dans ma déclaration. J'ai quelquefois payé les frais de

 18   déplacement, mais je n'ai jamais été informé de paiement fait par le

 19   Tribunal à Me Vujin.

 20   M. Abell (interprétation). - Merci.

 21   D'après votre déclaration, il apparaît qu'il a fait office

 22   d'avocat dans cette affaire pendant de nombreux mois, n'est-ce pas ?

 23   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, pratiquement un an,

 24   d'avril 1995 à avril 1996, si je me souviens bien.

 25   M. Abell (interprétation). - Merci. Vous dites au paragraphe 6,

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  1   "que les témoins présentés par Me Vujin étaient de piètre qualité

  2   puisqu'aucun d'eux n'avait fourni les renseignements que vous

  3   recherchiez.".

  4   Toujours sur ce même sujet, mais au paragraphe 7, et cela à la

  5   page 3, troisième ligne, vous dites "avoir réexpliqué à Me Vujin ce que

  6   vous recherchiez : pour ce qui est de témoins, vous vouliez des

  7   déclarations circonstanciées fournies par des personnes qui avaient une

  8   connaissance complète des déplacements de M. Tadic au moment des faits".

  9   Vous ne vouliez pas de déclarations de personnes qui ne pourraient parler

 10   que de M. Tadic et de sa personnalité.

 11   Je poursuis en vous citant : "En dépit de ceci, j'ai continué à

 12   recevoir des déclarations qui étaient tout à fait inutiles pour la défense

 13   de M. Tadic". (fin de citation). Est-ce exact ?

 14   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

 15   M. Abell (interprétation). - Vous souvenez-vous qu'il y ait eu

 16   des déclarations vraiment utiles qui auraient été fournies par Me Vujin ou

 17   par les deux enquêteurs qu'il vous a suggéré d'utiliser, en l'occurrence

 18   M. Kostic et M. Drazic ?

 19   Avez-vous souvenir de déclarations vraiment utiles qui vous

 20   auraient été fournies soit par Me Vujin, soit par l'un ou l'autre de ses

 21   enquêteurs pendant le temps où vous avez été avocat de la défense de

 22   M. Tadic ?

 23   M. Wladimiroff (interprétation). – S'agissant de M. Kostic et de

 24   M. Drazic, je me souviens qu'ils m'ont fourni des déclarations utiles,

 25   mais elles étaient peu nombreuses. Je ne me souviens plus de noms précis.

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  1   Je me souviens que certaines de ces déclarations furent effectivement

  2   utiles. S'agissant de Me Vujin, je ne me souviens pas de déclarations

  3   particulières, parce que, si je me souviens bien, il n'a signé aucune

  4   déclaration. Je ne savais pas qui était l'auteur ou plus exactement qui

  5   avait recueilli ces déclarations au cours d'auditions.

  6   M. Abell (interprétation). - Fort bien. Estimiez-vous qu'étant

  7   donné le lieu où habitait, où vivait Me Vujin et étant donné qu'il y avait

  8   deux enquêteurs, MM. Drazic et Kostic, avez-vous pensé que Me Vujin aurait

  9   dû être placé dans une meilleure position que vous, puisqu'il était mieux

 10   placé pour obtenir les faits, les témoins et les éléments de preuves ?

 11   M. Wladimiroff (interprétation). - D'après moi, en 1995, cela

 12   aurait dû être le cas. En 1996, j'ai eu l'impression que nous avions des

 13   rapports avec des personnes, qui n'étaient pas très bénéfiques pour Tadic.

 14   Et puis, par la suite, il m'est devenu particulièrement difficile de

 15   comprendre ce qu'il pouvait faire ou ne pas faire.

 16   M. Abell (interprétation). - Quand vous parlez de liens avec des

 17   personnes, des rapports, pour reprendre vos termes, vous avez dit : "des

 18   liens avec des personnes qui n'étaient pas très utiles pour l'affaire

 19   Tadic".

 20   M. Wladimiroff (interprétation). – Bien, il m'est difficile de

 21   me remémorer des noms, mais Me Vujin connaissait des personnes qui étaient

 22   au pouvoir à l'époque en Republika Srpska, mais aussi en Yougoslavie. Et

 23   je regrette une fois de plus de ne pas pouvoir vous donner des noms

 24   précis. C'était plutôt une impression, un sentiment général. Je ne me

 25   sentais pas à l'aise étant donné les liens qu'il avait avec des personnes

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  1   en position de pouvoir. C'est devenu particulièrement difficile parce que

  2   je n'étais pas sur place, mais j'ai eu vent des liens qu'il avait. Je me

  3   souviens, par exemple, du (expurgé). C'est une information

  4   que je vous passe à vous, mais je n'ai pas pu moi-même vérifier.

  5   M. Abell (interprétation). - Pour que nous sachions de qui vous

  6   parlez, est-ce que vous parlez de quelqu'un qui répond au nom de (expurgé)

  7   (expurgé) ?

  8   M. Wladimiroff (interprétation). – C'est exact. Je ne me

  9   souvenais plus de son prénom.

 10   M. Abell (interprétation). - Essayez de vous souvenir de ce

 11   qu'il vous a dit à ce propos, tout du moins en quintessence.

 12   M. Wladimiroff (interprétation). – Là, je parle du début, en

 13   1995. Il se vantait des liens qu'avait M. Vujin avec les autorités, avec

 14   le pouvoir jusqu'en 1996, jusqu'au mois de mars. Puis, je suis tombé

 15   malade ; je l'ai plus revu, mais nous n'avons plus reparlé de la question.

 16   Mais, au début de 1996, il se plaignait de cette situation.

 17   Je ne peux pas relater le contenu des griefs qu'il avait, mais

 18   je pense que c'était effectivement une confirmation de mon malaise,

 19   s'agissant des liens qu'il avait. J'ai essayé de le dire dans la

 20   déclaration : on avait essayé de l'écarter un peu, de le mettre sur la

 21   touche plutôt que d'avoir un affrontement direct avec lui. Nous ne

 22   voulions pas courir de risques. Mais nous ne comprenions pas ces liens.

 23   M. Abell (interprétation). - Est-ce que vous craigniez que, s'il

 24   y avait confrontation avec Me Vujin, ceci pourrait peut-être nuire aux

 25   intérêts de M. Tadic ?

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  1   M. Wladimiroff (interprétation). – Effectivement, c'est ce que

  2   nous avons pensé, mais cela ne s'est jamais passé.

  3   M. Abell (interprétation). - Qu'il y ait eu une confrontation,

  4   n'est-ce pas ?

  5   M. Wladimiroff (interprétation). – C'est exact.

  6   M. Abell (interprétation). - J'aimerais consulter le paragraphe

  7   n° 8 de votre déclaration. Vous parlez de septembre 1995, au moment où

  8   vous êtes retourné en Bosnie. Vous dites que vous êtes notamment allé en

  9   bus à Banja Luka avec votre interprète pour voir s'il était possible de

 10   traverser la frontière sans l'aide de Me Vujin. Lui est arrivé le

 11   lendemain, dans sa propre voiture. Avez-vous pu franchir la frontière sans

 12   son aide ?

 13   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

 14   M. Abell (interprétation). - Puis, il est arrivé le lendemain

 15   dans sa propre voiture. Je vous cite encore : "Nous avons procédé à

 16   certaines auditions ensemble. Lors d'une d'entre elles -et je m'en

 17   souviens fort bien-, il avait interrompu le témoin que j'interrogeais et

 18   il a dit à ce témoin ce qu'il devait dire. Mon interprète a simplement dit

 19   à ce témoin de répondre à mes questions et d'ignorer Me Vujin ; ce que

 20   Me Vujin n'a pas beaucoup aimé et il a injurié l'interprète. C'était là le

 21   premier exemple clair, patent de la tentative entreprise par Me Vujin de

 22   suborner les témoins en disant aux témoins ce qu'ils devaient dire". (fin

 23   de citation).

 24   C'est bien une relation exacte des événements ?

 25   M. Wladimiroff (interprétation). – Tout à fait. Ceci a été

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  1   enregistré sur la vidéo.

  2   M. Abell (interprétation). - Je vais demander si, dans un

  3   instant, il est possible que soit diffusé un extrait de cette vidéo, pour

  4   voir si c'est bien cet incident dont nous venons de parler ?

  5   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, tout à fait.

  6   M. Abell (interprétation). - Est-ce qu'il y a eu un programme à

  7   la télévision néerlandaise portant sur l'affaire Tadic, dans lequel vous

  8   apparaissiez dans une certaine mesure ?

  9   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

 10   M. Abell (interprétation). - Est-ce bien ce programme télévisé

 11   dont vous parlez ?

 12   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

 13   M. Abell (interprétation). - Voyons si nous avons bien

 14   identifié, retrouvé, repéré le passage pertinent. Je pense qu'il doit y

 15   avoir auprès du greffe une transcription de certains extraits de cet

 16   enregistrement vidéo. Je pense que le M. le Greffier en dispose.

 17   Pour moi, c'est la pièce AZ, parce que manifestement... Ou ceci

 18   a été montré précédemment lorsque nous siégions à la salle d'audience

 19   n° 3. Je ne sais pas si vous avez des copies de ceci ?

 20   M. le Président (interprétation). – De quelle pièce s'agit-il ?

 21   M. Abell (interprétation). - 8A.

 22   M. le Président (interprétation). – 8A. Voyons si le greffier

 23   dispose de cette pièce. Est-ce que vous allez demander que cet extrait

 24   soit diffusé ?

 25   M. Abell (interprétation). - Si tout a bien marché, le segment

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  1   devrait avoir été repéré.

  2   M. le Président (interprétation). – Des dispositions ont-elles

  3   été prises ?

  4   M. Dubuisson. – Oui.

  5   M. Abell (interprétation). - Il faudrait peut-être avoir d'abord

  6   la traduction ; puis, nous saurons de Me Wladimiroff si c'est bien le

  7   passage qui nous intéresse.

  8   M. Dubuisson. – J'aimerais préciser que je n'ai pas cette

  9   pièce 8A. Je me propose et je vous propose de donner une cote pour la

 10   cassette vidéo que nous présentons maintenant, qui sera le n° 36, et pour

 11   le transcript de cette cassette vidéo, qui sera le n° 37.

 12   M. le Président (interprétation). – Pas d'objection ?

 13   M. Abell (interprétation). - Pas d'objection.

 14   M. le Président (interprétation). – Fort bien. Il en sera ainsi.

 15   M. Abell (interprétation). - Avant la diffusion, pourriez-vous

 16   nous aider ? Pourriez-vous nous dire quand approximativement cette

 17   émission avait été réalisée ?

 18   M. Wladimiroff (interprétation). – Je ne peux pas vous donner

 19   une date précise, mais je suppose que ceci s'est fait début 1997.

 20   M. Abell (interprétation). - Merci.

 21   Je vais demander à ce que l'extrait qui est placé au point 1541

 22   soit diffusé. Veuillez suivre ces images avec nous. Ensuite, vous nous

 23   direz, Maître Wladimiroff, si c'est bien ce passage dont vous parliez.

 24   Est-ce que je peux m'asseoir pendant la diffusion ?

 25   M. le Président (interprétation). – Je vous en prie.

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  1   (Diffusion de la cassette.)

  2   "- C'est un avocat des Pays-Bas. Il veut vous poser quelques

  3   questions.

  4   - Mais demandez à mon mari : à lui aussi, ils veulent poser des

  5   questions.

  6   - Nous avons entendu que vous lui donniez souvent du café, à

  7   Dusko Tadic ?

  8   - Oui, quand j'avais quelque chose, je lui donnais. A tout le

  9   monde, d'ailleurs, et aussi à Tadic.

 10   - Oui, il était aussi ici.

 11   - Je demande simplement à Wladimiroff ce qu'il veut.

 12   - Madame, rien à faire. Occupez-vous de vos propres affaires."

 13   M. Abell (interprétation). - Est-ce bien l'extrait pertinent qui

 14   relate l'incident dont vous parliez ?

 15   M. Wladimiroff (interprétation). – Tout à fait.

 16   M. Abell (interprétation). - Je m'interroge. Bien sûr, je

 17   respecte le travail de l'interprète, mais nous avons une transcription. Je

 18   vous propose de rediffuser l'extrait sans que l'interprète interprète.

 19   M. le Président (interprétation). – Je ne sais pas ; c'est un

 20   peu difficile. Je ne sais pas si c'est un sentiment partagé par les autres

 21   Juges. L'interprétation semblait être un peu tronquée, une partie abrégée

 22   de ce que nous avons reçu par écrit.

 23   M. Wladimiroff (interprétation). – Je ne sais pas si mon

 24   interprétation est exacte ou pas.

 25   M. Abell (interprétation). - Vous parlez de l'interprétation que

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  1   nous venons d'entendre ici par les écouteurs ?

  2   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

  3   M. Abell (interprétation). – Nous comprenons tout à fait les

  4   difficultés que rencontrent les interprètes. Je vous propose ceci. Je vais

  5   demander à M. Wladimiroff de nous dire qui sont les personnes pertinentes.

  6   Et si vous en êtes d'accord, nous allons rediffuser l'extrait sans qu'il y

  7   ait une interprétation. Nous avons, de toute façon la transcription de ce

  8   dialogue qui, apparemment, traduit aussi bien les interventions aussi bien

  9   en néerlandais qu'en BCS dans la mesure où c'est nécessaire. Mais je pense

 10   que tout se fait en BCS.

 11   M. le Président (interprétation). – Mais, j'aimerais que les

 12   parties s'expriment sur ce point. Je pense que ce qui intéresse les

 13   Jjuges, c'est le fait de savoir, par le biais de l'interprète, ce qui se

 14   disait exactement au moment de cet enregistrement. Nous n'avons aucune

 15   assurance de ce que la version dactylographiée soit le reflet fidèle des

 16   propos tenus dans l'enregistrement.

 17   M. Abell (interprétation). – Deux choses sur ce point. Je

 18   comprends tout à fait. Je comprends que le Tribunal a manifestement

 19   procédé à la traduction de cet extrait; mais ceci précédemment. Vous serez

 20   peut-être rassuré quant à l'exactitude de cette traduction, si l'on

 21   fournit une copie aux interprètes, ils pourront ainsi suivre exactement ce

 22   qui se dit et vous dire si c'est bien ce que cela représente.

 23   M. le Président (interprétation). - Et bien, sur ces prémisses,

 24   puisque nous serons guidés par l'interprétation ici, en direct, je pense

 25   qu'effectivement l'équipe d'interprètes peut vérifier la traduction

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  1   dactylographiée pour voir s'il y a concordance. Nous aimerions savoir de

  2   la part des interprètes ce que dit chacun des protagonistes dans cet

  3   enregistrement que nous avons vu et que nous allons peut-être revoir.

  4   M. Abell (interprétation). - Pendant qu'on remet la

  5   transcription aux interprètes, si vous avez besoin de le voir vous-même,

  6   vous pouvez me le dire, mais pourriez-vous nous dire qui sont les

  7   personnes que l'on voit dans cet extrait ?

  8   Vous êtes en veston clair, n'est-ce pas ? C'est bien vous. Et

  9   puis, il y a Me Vujin. Je pense que nous pouvons le reconnaître sans

 10   peine. Il y a une dame avec des cheveux clairs, est-ce bien l'interprète

 11   qui vous accompagnait ?

 12   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

 13   M. Abell (interprétation). – Et une personne aux cheveux brun

 14   foncé, je pense que c'est la personne de laquelle vous essayiez d'obtenir

 15   une déclaration ?

 16   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

 17   M. Abell (interprétation). - Où ceci se passait-il ?

 18   M. Wladimiroff (interprétation). – En dehors de Prijedor, si je

 19   me souviens bien. Il y avait un point de contrôle sur la route et nous

 20   avons posé des questions à la femme d'un fermier à proximité de ce point

 21   de contrôle dans sa ferme.

 22   M. Abell (interprétation). - Quels renseignements espériez-vous

 23   recueillir grâce à cette audition ?

 24   M. Wladimiroff (interprétation). – Je voulais savoir d'abord si

 25   elle avait vu M. Tadic au moment des faits, est-ce qu'elle pourrait

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  1   corroborer une telle information au moyen de davantage de détails, par

  2   exemple, au cours de quel jour dans la semaine, il allait... La question

  3   est de savoir si elle le connaissait, où il dormait, parce qu'on m'a dit

  4   qu'il y avait une maison à proximité du point de contrôle où ceux qui

  5   étaient de garde pouvaient dormir ; elle leur donnait du café ou des

  6   fruits. C'était ce genre de détails que j'espérais obtenir d'elle.

  7   M. Abell (interprétation). - Est-ce que le moment maintenant se

  8   prête bien à la rediffusion ? Le tout est de savoir exactement ce que dit

  9   la vidéo.

 10   (Rediffusion de la cassette)

 11   M. le Président (interprétation). - Les Juges aimeraient que

 12   vous interprétiez à leur intention ce que vous allez entendre dans la

 13   cassette. Vous pouvez utiliser la transcription, pour vérifier si votre

 14   interprétation est correcte, si vous le désirez. Nous voulons savoir de la

 15   part des interprètes… c'est savoir l'interprétation de ce qui est dit dans

 16   la vidéo, ceci étant vérifié par rapport au texte. Merci.

 17   "- Peu importe. C'est un avocat des Pays-Bas, il vous demande

 18   s'il peut vous poser des questions. Voilà cet homme. C'est lui, il peut...

 19   On nous a dit que ce Monsieur…. que vous êtes ici… vous leur avez donné du

 20   café etc. ?

 21   - Oui.

 22   - Et Dusko Tadic, il y était lui aussi ?

 23   - Oui, oui, j'ai donné tout ce que j'ai eu. J'ai tout présenté

 24   ici à tout le monde.

 25   - Et Dusko Tadic était là ?

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  1   - Oui, il était là.

  2   Attends, je ne vais pas poser de question avant qu'il ne le

  3   dise.

  4   Je sais, mais ce qu'il ne dira pas… peu m'importe ce qu'il dira.

  5   Je veux dire ce que je veux. Excuse-moi, ok.

  6   M. le Président (interprétation). – Fallait-il rediffuser

  7   quelque chose d'autre ?

  8   M. Abell (interprétation). - Ma seule préoccupation, c'est que

  9   dans le transcript, on traduit un peu plus que ce que vous avez entendu.

 10   M. le Président (interprétation). - Ceci correspond à ma

 11   première observation. C'est la raison pour laquelle j'avais suggéré que

 12   nous revoyions la cassette.

 13   M. Abell (interprétation). – Peut-on voir la partie suivante,

 14   pour voir s'il y a un peu plus après cela ?

 15   M. le Président (interprétation). - Merci, nous le comprenons.

 16   Oui, Maître Domazet ?

 17   M. Domazet. - Je pense qu'il y a moins sur la transcription des

 18   interprètes, ici, surtout où M. Vujin a dit parce que nous pensons que

 19   cette traduction que nous avons reçue est correcte. Elle a tout ce qu'il y

 20   a sur la 35. Surtout, je ne vois pas du tout les mots sur le

 21   transcript :"I want to say what I want". M. Vujin a dit cela à la fin,

 22   avant de dire  :"I dont care about what (mot inaudible) to say".

 23   Nous pensons que M. Vujin a dit les mots que nous avons sur le

 24   transcript traduit en anglais.

 25   M. le Président (interprétation). – Fort bien, Maître Domazet.

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  1   Nous allons peut-être vous écouter davantage lorsque vous allez intervenir

  2   par la suite. Maître Abell, si je comprends Me Domazet, il admet au nom de

  3   son client que la traduction préparée par écrit est exacte. Je pense que

  4   c'est la concession qu'il faite ? Est-ce bien votre position ?

  5   M. Abell (interprétation). – Tout à fait, Monsieur le Président.

  6   M. le Président (interprétation). – Est-ce l'avis de toutes les

  7   parties intéressées ?

  8   M. Hollis (interprétation). – Nous avons reçu cette

  9   transcription. On nous avait dit que ceci avait été fait par les services

 10   de traduction du Tribunal. Nous n'avons aucun doute sur le fait qu'ils

 11   écoutent avec beaucoup d'attention la cassette aussi souvent qu'il le faut

 12   pour avoir une traduction exacte.

 13   M. le Président (interprétation). – Le Tribunal a reçu une

 14   traduction écrite. Par le consentement des parties, il est considéré que

 15   c'est là le reflet fidèle des propos exprimés dans la cassette.

 16   M. Abell (interprétation). – Je vous en sais gré, Monsieur le

 17   Président. Puis-je reprendre une suggestion faite précédemment ? A savoir

 18   que les interprètes ne fassent pas d'interprétation maintenant, mais

 19   puisque nous savons que c'est une traduction exacte, selon l'accord de

 20   toutes les parties, nous avons une traduction sous les yeux et nous allons

 21   simplement écouter les voix de la cassette pour avoir une idée des sons

 22   prononcés, sans qu'il y ait d'interprétation en cabine.

 23   M. le Président (interprétation). – Vous pensez que c'est

 24   nécessaire de rediffuser la cassette une troisième fois ?

 25   M. Abell (interprétation). – Oui, parce que pour le moment, nous

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  1   n'avons reçu que la traduction des interprètes, mais nous n'entendons pas

  2   les voix. C'est tout !

  3   M. le Président (interprétation). – Fort bien.

  4   M. Abell (interprétation). – Merci. Est-ce que ceci peut être

  5   fait ?

  6   (Rediffusion de la cassette.)

  7   M. le Président (interprétation). – Nous n'avons pas l'image sur

  8   les écrans.

  9   M. Dubuisson. – Il faudrait que ce soit très clair. Est-ce que

 10   vous voulez l'image et le son, rien que le son, rien que l'image sans

 11   interprétation ?

 12   M. Abell (interprétation). – Nous voulons l'image et le son de

 13   l'enregistrement, sans interprétation.

 14   M. le Président (interprétation). – C'est bien ce que je

 15   pensais.

 16   (Diffusion de la cassette.)

 17   M. Abell (interprétation). – Nous pouvons voir ici que

 18   l'interprète de terrain, la dame aux cheveux courts, s'est tournée

 19   apparemment vers M. Vujin et, d'après ce que l'on voit sur le transcript,

 20   elle a dit : "Attends, je ne vais pas poser de question à moins qu'il me

 21   dise de le faire". Là, elle parlait de vous, n'est-ce pas ?

 22   M. Wladimiroff (interprétation). – Tout à fait. Je n'étais pas

 23   conscient de cela. Je connaissais seulement la traduction en néerlandais

 24   que j'ai pu avoir par le biais du sous-titrage en néerlandais. Donc, je

 25   n'ai jamais entendu cela avec tous ces détails, comme nous venons de le

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  1   faire.

  2   M. Abell (interprétation). – Peut-être que c'est évident, mais

  3   il faudrait quand même clarifier une chose : apparemment, à cette

  4   occasion, il y avait une caméra, un caméraman qui était vraiment dans

  5   votre dos, le vôtre et celui de M. Vujin pendant cette conversation ?

  6   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui. Tout d'abord, nous avons

  7   voulu recueillir les informations et ensuite les diffuser.

  8   M. Abell (interprétation). – Est-ce que cette vidéo a été filmée

  9   afin de créer un documentaire ou bien afin de vous aider dans le cadre de

 10   votre enquête ?

 11   M. Wladimiroff (interprétation). – Vous avez raison. Le premier

 12   but était de créer une sorte de sécurité pour nous.

 13   M. Abell (interprétation). – Sécurité parce que vous étiez en

 14   train de mener des enquêtes sur le terrain ?

 15   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

 16   M. Abell (interprétation). – Vous avez dit dans votre

 17   paragraphe, que vous avez considéré que ce que M. Vujin a fait cette fois-

 18   ci était une indication claire -et là, je parle de la fin du paragraphe 8

 19   de votre déclaration-...

 20   M. le Président (interprétation). – Maître Abell, attendez s'il

 21   vous plaît. Monsieur Wladimiroff, veuillez parler encore une fois de ce

 22   que vous avez dit en ce qui concerne le but de cet enregistrement par la

 23   caméra, que le but était la sécurité. Qu'est-ce que vous avez voulu dire ?

 24   M. Wladimiroff (interprétation). – Je voulais dire que si vous

 25   meniez une enquête sur le terrain, il y avait un certain risque d'être

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  1   arrêté. C'est ce que je considérais à l'époque.

  2   M. le Président (interprétation). – Très bien. Continuez,

  3   Maître Abell.

  4   M. Wladimiroff (interprétation). – Je veux préciser la chose

  5   suivante : le fait que le caméraman était là, il faut savoir qu'on pouvait

  6   diffuser par la suite seulement les parties pour lesquelles moi j'étais

  7   d'accord, après le verdict, après le jugement.

  8   M. Abell (interprétation). – Vous dites que c'était la première

  9   fois où M. Vujin a essayé d'intervenir en disant à un témoin de quelle

 10   manière il devait répondre. Tout d'abord, est-ce que c'est ce qui est

 11   montré à votre avis dans cette séquence vidéo ?

 12   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

 13   M. Abell (interprétation). – Deuxièmement, cette fois-ci et

 14   d'ailleurs, à chaque fois lorsque vous étiez sur le terrain avec M. Vujin,

 15   qui était le chef ?

 16   M. Wladimiroff (interprétation). – C'était moi.

 17   M. Abell (interprétation). – Vous étiez le principal conseil de

 18   la défense ?

 19   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, même si j'essayais de

 20   créer un rapport de collégialité. Mais effectivement, j'étais le conseil

 21   principal.

 22   M. Abell (interprétation). – Troisièmement, est-ce qu'il y a eu

 23   d'autres exemples au cours de votre enquête, concernant M. Tadic ? Est-ce

 24   qu'il y a eu d'autres exemples où vous avez pu voir que M. Vujin essayait

 25   d'influencer un témoin en lui disant de répondre d'une quelconque manière

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  1   ou d'une autre manière ?

  2   M. Wladimiroff (interprétation). – Il est très difficile de

  3   donner des exemples détaillés, mais il essayait souvent soit de corriger

  4   ce que le témoin disait soit de le conseiller. Je me souviens que je lui

  5   disais parfois :"S'il te plaît, laisse-moi poser la question, n'interviens

  6   pas : je préfère entendre la réponse directement de la part du témoin sans

  7   que toi, tu lui dises ce qu'il doit faire."

  8   Il ne s'agissait pas de situations bien précises sur lesquelles

  9   je peux donner les dates et les noms. Il s'agissait d'un modèle de

 10   comportement qui se répétait de manière générale.

 11   M. Abell (interprétation). - Encore une fois, lorsque M. Vujin

 12   interrompait le témoin, il le faisait dans sa langue maternelle ?

 13   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui. Peut-être que, parfois,

 14   je n'étais pas conscient de ce qui se passait, mais, parfois, j'entendais

 15   ce qu'il disait : j'entendais qu'il disait quelque chose et je demandais à

 16   mon interprète de me dire ce qui se passait.

 17   M. Abell (interprétation). - Est-ce que cela vous a inquiété

 18   lorsque vous avez entendu la réponse de l'interprète ?

 19   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, mon inquiétude

 20   augmentait. Au début, j'avais l'impression qu'il voulait aider ; après,

 21   j'ai compris qu'il s'agissait vraiment d'une habitude. C'est seulement

 22   beaucoup plus tard que j'ai pu comprendre qu'il dirigeait, qu'il guidait

 23   plus ou moins le témoignage des témoins. J'avais l'impression que ceci

 24   n'était pas correct, qu'il les manipulait.

 25   M. Abell (interprétation). - Apparemment, vous avez été avocat

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  1   depuis bien des années, comme nous le savons tous. Dans le paragraphe 9,

  2   vous utilisez un mot fort : vous dites qu'il y a eu d'autres exemples de

  3   ce genre de comportement qui ne peut être décrit que comme "manipulation

  4   de témoin". Je suis sûr que vous avez choisi votre terme attentivement,

  5   n'est-ce pas, dans votre déclaration ?

  6   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui. C'est la manière dont je

  7   voyais les choses.

  8   M. Abell (interprétation). - Cette situation a provoqué une

  9   grande inquiétude pour vous ?

 10   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, à tel point que, par la

 11   suite, - et là je parle de M. Orie et de M. Kay, mes co-conseils-, après

 12   cela, ils m'ont vraiment demandé avec insistance d'essayer de corriger les

 13   choses moi-même. Ils insistaient clairement vraiment qu'il fallait que

 14   l'on se débarrasse de lui.

 15   M. Abell (interprétation). - Pour parler directement, c'est

 16   parce qu'ils considéraient qu'il n'était pas correct du tout ?

 17   M. Wladimiroff (interprétation). – Ou bien pas professionnel.

 18   M. Abell (interprétation). - Veuillez m'aider avec la chose

 19   suivante, s'il vous plaît. M. Steven Kay est un avocat d'Angleterre ?

 20   M. Wladimiroff (interprétation). – C'est exact.

 21   M. Abell (interprétation). - Depuis son engagement dans

 22   l'affaire Tadic, par la suite, il a été nommé au poste d'avocat de la

 23   Reine ?

 24   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, par la suite.

 25   M. Abell (interprétation). - En ce qui concerne M. Orie, il est

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  1   un avocat venant d'où ?

  2   M. Wladimiroff (interprétation). – Avant, il travaillait dans

  3   mon cabinet ; en ce moment, il est juge à la Cour suprême.

  4   M. Abell (interprétation). - Très bien. Il est juge en ce

  5   moment. Mais depuis quand, c'est-à-dire à quel moment a-t-il commencé à

  6   exercer en tant qu'avocat ?

  7   M. Wladimiroff (interprétation). – Tout d'abord, il a travaillé

  8   en tant que chercheur à l'université de Leyden. En 1980, il a commencé à

  9   exercer le métier d'avocat dans notre cabinet d'avocats.

 10   M. Abell (interprétation). - Je vous remercie. Question

 11   suivante : est-ce que vous pourriez m'aider avec la chose suivante, s'il

 12   vous plaît ?

 13   Je crois que vous nous avez dit déjà que vous avez essayé

 14   d'écarter Me Vujin de vos enquêtes et que vous avez voulu éviter un

 15   conflit. Est-ce que vous voulez dire que, si vous lui avez dit directement

 16   qu'il était éloigné de l'affaire à cause de son comportement, est-ce que

 17   vous avez considéré que cela aurait des retombées sur l'affaire Tadic ?

 18   M. Wladimiroff (interprétation). – Nous ne pouvions faire que

 19   des suppositions, mais étant donné que les autorités ne voulaient pas

 20   vraiment collaborer avec nous, nous avons pensé que, si nous déclarions

 21   qu'il était notre ennemi et vu les liens spécifiques qu'il avait avec les

 22   représentants des autorités, nous avons considéré que ceci n'aurait pas

 23   été bénéfique pour la défense de Tadic.

 24   M. Abell (interprétation). - Je souhaite que l'on se penche

 25   maintenant sur votre déclaration faite dans le paragraphe 14. Il s'agit là

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  1   de M. Drljaca, le chef du poste de police de Prijedor. Est-ce que vous

  2   avez eu des contacts avec M. Drljaca ?

  3   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, j'ai rencontré,

  4   M. Drljaca.

  5   M. Abell (interprétation). - Oui, et vous en parlez en quelques

  6   détails dans le paragraphe 10 de votre déclaration.

  7   Et dites-nous la chose suivante, s'il vous plaît : quelle était

  8   votre évolution de l'attitude de cette personne, de M. Drljaca, envers

  9   l'enquête portée sur les personnes accusées de crimes de guerre ?

 10   M. Wladimiroff (interprétation). – On pourrait dire pour le

 11   moins que cela n'amusait pas. En effet, c'était quelqu'un qui avait le

 12   pouvoir absolu dans la région à l'époque. Et il considérait que le fait

 13   que j'apparaissais dans la région, cela voulait dire que je me mêlais des

 14   affaires intérieures ; il considérait que ma place n'était pas là, que le

 15   Tribunal ne devrait pas envoyer le personnel sur le terrain. Il faisait

 16   tout pour m'empêcher dans mon travail.

 17   M. Abell (interprétation). - Encore une fois, étiez-vous en

 18   train d'essayer de rassembler les éléments de épreuve afin de corroborer

 19   l'affirmation de Tadic selon laquelle il était un homme innocent ?

 20   M. Wladimiroff (interprétation). – J'essayais de trouver les

 21   éléments de preuve prouvant qu'il était ailleurs au moment des faits.

 22   M. Abell (interprétation). - Et même si ceci impliquait le fait

 23   de révéler les noms d'autres personnes qui étaient éventuellement

 24   impliquées dans l'affaire ?

 25   M. Wladimiroff (interprétation). – Je vais être très direct :

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  1   les intérêts des autres personne ne me concernent pas. J'étais concerné

  2   uniquement par les intérêts de mon client. J'essayais de rassembler ce

  3   genre de preuve. Si mon engagement provoquait des conséquences par rapport

  4   auxquelles il aurait été possible pour le Tribunal de protéger la

  5   personne, j'aurais conseillé cela au Tribunal.

  6   M. Abell (interprétation). - Je suis sûr que vous étiez en train

  7   de représenter votre client et vous vouliez montrer qu'il n'était pas

  8   présent au lieu des faits, au moment des faits ?

  9   M. Wladimiroff (interprétation). – C'est exact.

 10   M. Abell (interprétation). - Vous avez voulu montrer qu'il était

 11   ailleurs, même si, ce faisant, vous deviez révéler les noms d'autres

 12   personnes impliquées ?

 13   M. Wladimiroff (interprétation). – C'est exact.

 14   M. Abell (interprétation). - Je veux vous poser la question

 15   suivante : M. Drljaca, d'après vous, était-il ouvert à l'idée de révéler

 16   que d'autres personnes étaient impliquées éventuellement dans les crimes

 17   de guerre ?

 18   M. Wladimiroff (interprétation). – Evidemment, je dirai que

 19   c'était le cas, qu'il était conscient de cela. Mais son attitude montrait

 20   une priorité qui existait dans sa tête : c'était qu'il ne voulait pas

 21   qu'on intervienne dans cette affaire. Il se comportait comme une sorte de

 22   roi local.

 23   M. Abell (interprétation). - Est-ce qu'en ce qui vous concerne,

 24   d'après l'attitude de M. Vujin, est-ce que, d'après vous, il réalisait

 25   qu'elle était l'attitude de M. Drljaca vis-à-vis des enquêtes sur les

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  1   crimes de guerre ?

  2   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, j'avais l'impression

  3   qu'il était encore plus au courant de ce qui se passait que moi ; je

  4   pensais qu'il savait très exactement qui était M. Drljaca.

  5   M. Abell (interprétation). - Et vous dites, dans le

  6   paragraphe 14, que M. Vujin avait rencontré M. Drljaca avant votre

  7   rencontre avec lui, en septembre 95, et il vous a dit que M. Drljaca ne

  8   voulait pas vous voir ?

  9   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, j'attendais devant le

 10   poste de police avec l'un des frères de M. Tadic. M. Drljaca ne voulait

 11   pas me voir, c'est ce que l'on m'a dit et c'est pour cela que M. Vujin est

 12   allé au poste de police et il s'est entretenu avec M. Drljaca. Et, par la

 13   suite, il est venu me voir ; on m'a dit que M. Drljaca ne voulait pas me

 14   voir.

 15   M. Abell (interprétation). – Donc, M. Vujin a rencontré

 16   M. Drljaca, mais est-ce que le résultat de cette rencontre était que les

 17   portes se sont ouvertes devant vous ou bien se sont-elles fermées ?

 18   M. Wladimiroff (interprétation). - Il n'a pas ouvert de porte.

 19   Par la suite, la fois d'après, j'ai pu facilement contacter M. Drljaca et

 20   je ne comprenais pas pourquoi je n'avais pas pu le faire avant.

 21   M. Abell (interprétation). – Ma question était de savoir si, à

 22   la suite de cette rencontre avec M. Drljaca, les portes se sont ouvertes

 23   devant vous ou bien est-ce qu'elles se sont fermées ?

 24   M. Wladimiroff (interprétation). - Il est très difficile de dire

 25   ce qui se serait produit au cas où les événements auraient pris un autre

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  1   cours.

  2   M. Abell (interprétation). – Nous allons nous concentrer sur le

  3   paragraphe 14, une liste des témoins de la défense a été préparée ?

  4   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

  5   M. Abell (interprétation). - C'est vous-même qui avez préparé

  6   cette liste ?

  7   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

  8   M. Abell (interprétation). - Il s'agissait des témoins

  9   potentiels, des témoins qui, sur la base des résultats de votre enquête,

 10   d'après vous, pouvaient être des personnes utiles que vous pourriez citer

 11   à la barre dans le cadre de la défense de M. Tadic ?

 12   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

 13   M. Abell (interprétation). - Est-ce que vous avez voulu que

 14   M. Drljaca voie ce document ?

 15   M. Wladimiroff (interprétation). - Non.

 16   M. Abell (interprétation). - Vous nous dites qu'au moment où

 17   vous êtes allé au poste de police de Prijedor, je crois que c'était en

 18   avril 1996, vous avez découvert cette liste sur le bureau de M. Drljaca ?

 19   M. Wladimiroff (interprétation). - Je crois que ce n'était pas

 20   au mois d'avril, parce que j'étais hospitalisé à ce moment-là.

 21   M. Abell (interprétation). – Oui ?

 22   M. Wladimiroff (interprétation). - Je crois que ceci s'est

 23   produit au mois de février.

 24   M. Abell (interprétation). - Très bien, excusez-moi.

 25   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, je l'ai vue sur son

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  1   bureau.

  2   M. Abell (interprétation). – Avez-vous été surpris de cela ?

  3   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, ma surprise était

  4   grande.

  5   M. Abell (interprétation). - Quel était votre sentiment vis-à-

  6   vis de cela ?

  7   M. Wladimiroff (interprétation). - Je me demandais comment ceci

  8   se trouvait sur son bureau.

  9   M. Abell (interprétation). - Est-ce que vous avez cru que si

 10   quelqu'un avait donné cette liste à M. Drljaca que cela allait vous aider

 11   ou bien vous entraver dans la défense de M. Tadic ?

 12   M. Wladimiroff (interprétation). - A ce moment-là, je me suis

 13   dit une chose. J'ai eu une idée qui m'était déjà venue à l'esprit

 14   auparavant, c'est-à-dire pourquoi les personnes qui ont reçu les visites

 15   de policiers et qui étaient des témoins potentiels ne voulaient plus me

 16   parler, et là, j'avais la réponse, c'est parce qu'il avait la liste. Je me

 17   souviens qu'un avocat à Prijedor qui avait été contacté par la police

 18   avait très peur. On lui avait dit qu'il ne devrait pas me parler.

 19   M. Abell (interprétation). - Est-ce que vous pourriez clarifier

 20   ceci concernant cet avocat ?

 21   M. Wladimiroff (interprétation). - La police avait contacté cet

 22   avocat et on lui a dit qu'il ne devait pas me parler. L'avocat avait très

 23   peur. J'étais très surpris. Je ne comprenais pas comment il se faisait

 24   qu'il s'était mis en contact avec cet avocat.

 25   M. Abell (interprétation). – Pendant combien de temps, d'après

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  1   vous, combien de temps avant que vous avez vu cette liste sur le bureau du

  2   chef de police de Prijedor, vous avez eu cette impression, qu'à cause de

  3   ce genre de contact avec la police les personnes refusaient de vous

  4   parler ?

  5   M. Wladimiroff (interprétation). – Il est très difficile de le

  6   dire. Je ne peux pas vous le dire.

  7   M. Abell (interprétation). - Est-ce que vous étiez frustré dans

  8   votre tentative d'obtenir les témoins pour corroborer les déclarations de

  9   M. Tadic ?

 10   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

 11   M. Abell (interprétation). - Dans le paragraphe 15, vous dites

 12   que vous avez parlé avec M. Vujin de cette liste qui se trouvait sur le

 13   bureau de M. Drljaca et qu'il vous a dit, qu'il a admis l'avoir remise à

 14   M. Drljaca ?

 15   M. Wladimiroff (interprétation). - C'est exact.

 16   M. Abell (interprétation). - Et il a essayé d'expliquer en

 17   disant qu'il croyait que cela allait l'aider, afin de trouver les témoins.

 18   Vous dites aussi que vous considériez que ceci était absurde ?

 19   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

 20   M. Abell (interprétation). - Etant donné que vous croyiez que

 21   M. Drljaca était conscient de l'attitude de M. Vujin dans cette affaire ?

 22   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

 23   M. Abell (interprétation). - Je vais vous poser la question

 24   suivante : est-ce que l'explication de M. Vujin, de ces raisons pour

 25   lesquelles il aurait remis cette liste à M. Drljaca vous a satisfait ?

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  1   M. Wladimiroff (interprétation). - Il faudrait être tout à fait

  2   extrêmement naïf pour le croire. A mon avis, ceci n'était pas du tout

  3   probable.

  4   M. Abell (interprétation). - Peut-être que la réponse à la

  5   question vous semble trop simple, mais dites-moi s'il vous plaît, est-ce

  6   qu'il s'est adressé à vous, à M. Kay ou à M. Orie pour obtenir la

  7   permission de donner cette liste ?

  8   M. Wladimiroff (interprétation). – Non.

  9   M. Abell (interprétation). - S'il avait posé cette question,

 10   quelle aurait été la réponse ?

 11   M. Wladimiroff (interprétation). - La réponse aurait été non. Je

 12   lui poserai la question de savoir pourquoi il souhaitait le faire.

 13   M. Abell (interprétation). – M. Kay et M. Orie avaient-ils la

 14   même impression que vous concernant l'attitude du chef de police vis-à-vis

 15   des témoins de la défense ?

 16   M. Wladimiroff (interprétation). - Ils avaient la même

 17   impression que moi.

 18   M. Abell (interprétation). - Quelle a été l'influence de cela

 19   sur votre défense ?

 20   M. Wladimiroff (interprétation). - Il est difficile de dire,

 21   j'ai eu clairement l'impression qu'il était beaucoup plus difficile pour

 22   nous de contacter les personnes qui se trouvaient sur la liste. Certaines

 23   de ces personnes, je n'ai jamais pu les contacter, les trouver.

 24   M. Abell (interprétation). - Si l'on vous parlait d'un témoin

 25   appelé U, à qui l'on avait attribué la lettre U, témoin qui aurait reconnu

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  1   certains faits s'agissant de ce qui s'était passé. Pourriez-vous étoffer

  2   ce propos quelque peu ?

  3   M. Wladimiroff (interprétation). – Peut-être que c'est un peu

  4   difficile parce que j'ai écrit là-dessus par la suite. Puis, je me suis

  5   dit que j'aurais dû non pas dire en fait…, mais pour autant que je m'en

  6   souvienne…, je me souviens d'un témoin ; je pensais qu'il s'agissait du

  7   témoin I. Je pense que, lors de sa déposition devant la Chambre de

  8   première instance, il a parlé du fait qu'il a été harcelé par la police.

  9   Et je me suis dit que c'était là un exemple d'un témoin arrêté par la

 10   police sur les instructions de M. Drljaca, car il savait que cette

 11   personne pouvait devenir ou être un témoin potentiel. Personne ne m'avait

 12   dit que la police avait reçu des instructions de M. Drljaca mais, pour

 13   moi, cela constituait un exemple.

 14   M. Abell (interprétation). - Au paragraphe 16, vous dites qu'il

 15   était impossible de deviner quelle était l'ampleur de ces tentatives de

 16   manipulation de témoins. Vous pouvez nous dire qu'il y a eu un effet à la

 17   suite de cela, mais il est difficile -cela relève de la spéculation- de

 18   dire quelle fut l'importance de cette démarche ?

 19   M. Wladimiroff (interprétation). – Vous savez qu'il y a un blanc

 20   là. On ne peut qu'émettre des conjectures. Mais je suis sûr qu'une

 21   influence, il y en a une : c'est certain.

 22   M. Abell (interprétation). - Vous dites -je vous cite- : "Sans

 23   être en mesure de citer des témoins de façon précise, qui auraient été

 24   manipulés, je suppose que c'était là une pratique généralisée parmi les

 25   témoins. Certes, quelques officiers de police, des fonctionnaires qui

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  1   auraient été en mesure de m'être particulièrement utiles dans le cadre de

  2   mon enquête".

  3   Maintenez-vous ces propos ?

  4   M. Wladimiroff (interprétation). – Tout à fait.

  5   M. Abell (interprétation). - Vous donnez, au paragraphe 18, un

  6   exemple de certains témoins potentiels que vous essayez de retrouver ?

  7   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

  8   M. Abell (interprétation). - Monsieur Micik, M. Milorad Tadic

  9   -en précisant que ce n'est pas un parent de M. Tadic, mais c'est le même

 10   patronyme-, ainsi que M. Milorad Danicic ?

 11   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui. M. Meakic ne s'est

 12   jamais présenté. Quant à Danicic, cette personne m'a été décrite comme

 13   étant un sosie de M. Tadic. S'agissant de M. Milorad Tadic,…

 14   M. le Président (interprétation). – Maître Abell, est-ce que

 15   nous ne nous écartons pas quelque peu de l'essentiel des chefs

 16   d'accusation retenus dans l'ordonnance portant calendrier ?

 17   M. Abell (interprétation). - Je ne veux pas entrer dans le

 18   détail. Si j'en parle, Monsieur le Président, c'est parce que je reviens

 19   ainsi à ce que j'ai dit dans mes écritures à propos de ce qu'a dit

 20   M. Wladimiroff. Ceci intervient sur la question des motifs qu'aurait

 21   Me Vujin. Ces motifs peuvent être évalués, estimés par les faits qu'ont eu

 22   ces actes.

 23   Je ne veux pas reprendre ici les arguments que j'ai présentés :

 24   s'agissant des schémas de comportement représentés ici, le fait d'aller

 25   contre les intérêts du client qu'on défend. Ce sont des allégations

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  1   spécifiques et si la preuve en est administrée, à votre avis, ce sont là

  2   des exemples. Ce contexte permettra aux Juges de bien recadrer les

  3   allégations précises.

  4   M. le Président (interprétation). – Auriez-vous alors

  5   l'obligeance d'évoquer ce contexte dans les limites déjà présentées ?

  6   M. Abell (interprétation). - Je le ferai. Excusez-moi de revenir

  7   là-dessus, mais j'essaierai d'être rapide. Parlons-en de cette façon-ci,

  8   Maître Wladimiroff. D'après vous, était-il important de parler à ces

  9   personnes pour essayer de défendre au mieux M. Tadic ?

 10   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, c'était très important.

 11   M. Abell (interprétation). - Après que cette liste de témoins a

 12   été placée entre les mains de M. Drljaca, avez-vous pensé que vous étiez

 13   entravé dans votre tentative veillant à trouver des témoins ?

 14   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

 15   M. Abell (interprétation). - Avez-vous estimé, au vu de votre

 16   expérience, que le récit que ces témoins vous ont fait, lorsque vous avez

 17   finalement réussi à retrouver leur trace, du moins pour certains d'entre

 18   eux… Je pense que vous avez réussi à parler à deux ou trois des

 19   personnes ?

 20   M. Wladimiroff (interprétation). –  Réponse. - Oui.

 21   M. Abell (interprétation). - Avez-vous estimé qu'ils vous

 22   faisaient un récit honnête, fidèle à la réalité de ce qu'ils voulaient

 23   dire ?

 24   M. Wladimiroff (interprétation). – Pas du tout. J'avais le

 25   sentiment très net qu'ils avaient été préparés pour montrer qu'ils étaient

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  1   des témoins sans importance, que je cherchais la mauvaise personne et que

  2   j'avais la stupidité de trouver leurs noms.

  3   M. le Président (interprétation). – Maître Abell, je ne suis pas

  4   tout à fait convaincu du lien qu'il y aurait entre ceci et les chefs ou

  5   les charges retenues contre Me Vujin, dont est saisie la Chambre d'appel.

  6   Ici, vos questions portent sur la question de savoir si la condamnation

  7   prononcée était juste. Vous parlez maintenant de certaines allégations

  8   dirigées contre Me Vujin, selon lesquelles il aurait délibérément certains

  9   éléments de preuve ou certains témoins, pour reprendre le terme utilisé

 10   par le témoin. Je pense que c'est une bonne formulation, car cela

 11   intervient vraiment sur le code des accusations retenues.

 12   M. Abell (interprétation). - Sans répéter ce que j'ai déjà dit,

 13   j'aimerais vous présenter que ce sera ma dernière question sur ce point,

 14   qui s'attache à la dernière phrase du paragraphe 18. Ce qui compte, c'est

 15   qu'une fois le nom de ces témoins, passés de l'autre camp, si j'ose dire,

 16   une fois le nom de ces personnes dans les mains du chef de la police, ce

 17   témoin a le sentiment non seulement que les deux autres témoins mentaient,

 18   mais il semblait se comporter comme si quelqu'un les avait entraînés,

 19   disons, les avait formés pour dire ce qu'ils ont dit. C'est important.

 20   Parce que ceci va à l'encontre des intérêts de M. Tadic.

 21   M. le Président (interprétation). – Maître Abell, veuillez poser

 22   cette dernière question.

 23   M. Abell (interprétation). - Je le ferai. Pourquoi aviez-vous le

 24   sentiment que les éléments que vous fournissaient ces témoins étaient tout

 25   à fait répétés ?

Page 1093

  1   M. Wladimiroff (interprétation). – Nous avons posé des questions

  2   de vérification ; ces témoins, sur-le-champ, on pu fournir des documents à

  3   l'appui de certaines de affirmations, sur chacune d'ailleurs de ces

  4   affirmations. J'étais très surpris parce qu'ils avaient déjà ces documents

  5   prêts dans la poche. Cela m'a tout à fait interpellé.

  6   M. Abell (interprétation). - Est-ce que c'est quelque chose que

  7   vous avez rencontré par la suite, dans le cas de personnes que vous

  8   rencontriez, de gens qui avaient préparé ces documents ?

  9   M. Wladimiroff (interprétation). – Certains avaient de temps en

 10   temps un document, mais manifestement ceux-ci étaient tout à fait bien

 11   préparés, entraînés.

 12   M. Abell (interprétation). - Puis vous dites au paragraphe 19,

 13   sans y faire référence, qu'un mois s'est passé et puis vous avez compris

 14   toute l'ampleur de ce qui se passait. Je vais vous demander une question

 15   directe : avez-vous confiance en Me Vujin ?

 16   M. Wladimiroff (interprétation). – J'ai perdu confiance en lui.

 17   M. Abell (interprétation). - Vous aviez travaillé aux côtés de

 18   Me Vujin ; vous dites ceci au paragraphe 24. Vous aviez travaillé pendant

 19   la période que vous avez précisée. En réalité, pour qui travaillait

 20   Me Vuji, à votre avis ?

 21   M. Wladimiroff (interprétation). – Parfois, j'avais l'impression

 22   qu'il travaillait que pour lui-même, dans son propre intérêt. Je vous l'ai

 23   dit d'entrée de jeu : il est apparu pour cette affaire, il n'a jamais été

 24   affecté à la défense : pourtant il s'est trouvé ici, assigné à la défense,

 25   présent. Il s'est rendu quelque peu nécessaire. Par la suite, j'ai changé

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  1   d'avis ; je me suis dit qu'il essayait de rendre service, qu'il était un

  2   peu naïf, pas très professionnel. Mais il a fini par contrôler et prendre

  3   le contrôle de cette affaire, alors que moi, j'étais le conseil principal.

  4   Mes sentiments ont évolué pour devenir le sentiment qu'il fallait que nous

  5   nous débarrassions de lui parce qu'il ne s'inquiétait pas des intérêts de

  6   M. Tadic, mais plutôt des intérêts d'autrui : était-ce les autorités ou

  7   quelqu'un d'autre, je ne sais pas ; en tout cas, il n'était pas la

  8   personne qu'il nous fallait dans cette équipe de défense et qu'il fallait

  9   nous en débarrasser.

 10   M. Abell (interprétation). - Avez-vous pensé qu'il travaillait

 11   dans les intérêts de son client, M. Tadic ?

 12   M. Wladimiroff (interprétation). – Par moments, oui. Comme je

 13   l'ai déjà écrit dans ma déclaration, c'était au moment où ceci coïncidait

 14   avec d'autres intérêts. Mais, à plusieurs reprises, j'ai senti qu'il

 15   s'agissait de quelque chose qui était contre-productif, qui n'était pas

 16   dans l'intérêt de M. Tadic.

 17   M. Abell (interprétation). - Mais au moment où l'intérêt de

 18   M. Tadic était contraire de l'Etat serbe, d'après vous, dans quel intérêt

 19   travaillait Me Vujin ?

 20   M. Wladimiroff (interprétation). – Je peux dire, à cette

 21   question, si je prends en considération ce que Me Tadic m'avait dit

 22   ultérieurement, au moment où Me Tadic avait révoqué mon équipe, il m'a dit

 23   que M. Vujin lui a dit -c'est la seconde main-, il m'a dit que Me Vujin

 24   lui a dit que lui-même, s'il avait cette affaire-là, à ce moment-là, bien

 25   évidemment, à ce moment-là, Me Vujin aurait eu à sa disposition tous les

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  1   documents et aurait pu contacter les autorités en Republika Srpska. A mon

  2   avis, c'était la réponse. D'ailleurs, en ce qui concerne notre

  3   comportement et nos sentiments vis-à-vis de Me Vujin, à la fin.

  4   M. Abell (interprétation). - A la fin du paragraphe 24, vous

  5   dites que l'intérêt de Me Vujin, vous avez pensé que c'était plutôt de

  6   protéger la question serbe et les personnes qui auraient pu également être

  7   intégrées dans la défense de M. Tadic ?

  8   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, c'est à la fin que je

  9   l'ai remarqué.

 10   M. Abell (interprétation). - Et vous vous y tenez ?

 11   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, nous pensons que c'est

 12   un bon sentiment, une bonne évaluation.

 13   M. Abell (interprétation). - Plus tard, nous allons probablement

 14   entendre que Me Vujin, sur le plan de la conscience professionnelle, a

 15   défendu M. Tadic ?

 16   M. Wladimiroff (interprétation). – Non, ce ne sont pas des

 17   normes que je pourrais approuver.

 18   M. Abell (interprétation). - Juste un petit détail, s'il vous

 19   plaît. Vous avez parlé avec un certain nombre de personnes, plusieurs

 20   personnes au cours de vos recherches. Y avait-il des cas où Me Vujin était

 21   allé voir ces personnes là, une fois que vous avez déjà interrogé ces

 22   personnes ?

 23   M. Wladimiroff (interprétation). - Non, je n'ai pas de preuve

 24   dans ce sens-là mais le frère, le plus jeune frère de M. Tadic, Ljubomir,

 25   m’a dit qu’il avait voyagé à travers cette région, au moment où nous

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  1   n'étions pas. C’était évidemment très facile. Il a parlé avec des

  2   personnes avec lesquelles nous avons parlé auparavant. Je suis désolé, je

  3   ne peux pas donner les dates et les noms, car je ne me m'en souviens pas.

  4   De toute façon, c’est ce qu’il m'a dit, le frère cadet de Tadic.

  5   M. Abell (interprétation). - Avez-vous demandé à Me Vujin

  6   d’aller voir les témoins, une fois que vous-même, M. Orie, M. Kay, vous

  7   êtes allés les voir ?

  8   M. Wladimiroff (interprétation). - Non. Cependant, il a peut-

  9   être compris que ceci était sous-entendu parce qu'il faisait partie de

 10   cette équipe ces jours-ci. De toute façon, ce n'est pas moi qui ai donné

 11   de telles instructions.

 12   M. Abell (interprétation). - J'aimerais poser une question

 13   suivante concernant les circonstances et le contexte dans lesquels

 14   Me Vujin a quitté l'équipe. Très brièvement, en quelques termes, est-ce

 15   que Me Vujin est parti parce qu'il voulait travailler dans une autre

 16   affaire ou autre chose ? Qu'est-ce que qui a provoqué son départ ?

 17   M. Wladimiroff (interprétation). - En effet, il s'agissait de

 18   M. Orie ; c’est M. Orie qui l’a fait. J'étais à l'hôpital à ce moment-là,

 19   au mois de mars et avril 1996, j'étais malade ; j'avais une hernie

 20   discale. A ma connaissance, il s'agissait d'une autre affaire dont

 21   Me Vujin devait se charger. Par conséquent, nous avons considéré que

 22   l'intérêt de ce client, dont le nom m'échappe, pourrait éventuellement

 23   provoquer un conflit d'intérêt avec l'affaire Tadic. C’est la raison pour

 24   laquelle, M. Orie, d’une façon ou d’une autre –je n’étais pas présent,

 25   c’est que l’on m’a dit-, M. Orie a dit à Me Vujin : “ Nous devons nous

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  1   séparer ”. A ma connaissance, il a profité de cette autre affaire, c'était

  2   un prétexte pour partir.

  3   M. Abell (interprétation). - C'est d'une manière tactique qu'on

  4   lui a conseillé de se retirer de l’affaire Tadic ?

  5   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, c'est à peu près ce que

  6   l’on m’a dit.

  7   M. Abell (interprétation). - J'aimerais vous montrer une

  8   lettre : si vous voulez bien jeter un coup d'œil sur cette lettre. Nous

  9   avons également une copie pour les Juges.

 10   M. Dubuisson. - La pièce à conviction n° 38.

 11   M. Abell (interprétation). – Il s’agit de la lettre qui a été

 12   rédigée ultérieurement en langue anglaise. Il y a la version anglaise,

 13   plus la traduction anglaise. Et ensuite, vous avez également une version

 14   en BCS. Vous l'avez signée, elle est du 12 mai 1997. Je pense que c'était

 15   après que le verdict ait été rendu le 12 mai 1997. Cette lettre a été

 16   adressée à Ljubo Tadic, au frère de Tadic. C'est marqué : “ Merci pour

 17   votre télécopie. Je suis désolé de constater que Dusko a cessé de

 18   coopérer, étant donné que Steven, Sylvia, et moi-même, nous ne voulions

 19   pas coopérer avec Me Vujin. Je suis véritablement désolé ; cette

 20   coopération avec Dusko a cessé, étant donné que Sylvia et moi-même nous ne

 21   voulions pas coopérer avec Me Vujin”. Il ne faut pas que l’on vous donne

 22   la raison de cette interprétation-là. Est-ce que vous voyez ce paragraphe-

 23   là ?

 24   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

 25   M. Abell (interprétation). - Est-ce que, dans ce paragraphe, on

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  1   pense à des difficultés que vous-même, M. Kay et M. Orie avez connues lors

  2   de vos activités professionnelles avec Me Vujin ?

  3   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

  4   M. Abell (interprétation). – Par conséquent, c’est à cela que le

  5   paragraphe se réfère ?

  6   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

  7   M. Abell (interprétation). - Nous n'allons pas entrer dans le

  8   détail maintenant. Vous n’avez pas souhaité entrer dans le détail ?

  9   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

 10   M. Abell (interprétation). - C'était par télécopie que vous avez

 11   reçu la lettre ?

 12   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

 13   M. Abell (interprétation). - Est-ce que vous seriez resté dans

 14   la défense si Me Vujin était de retour dans l’équipe ?

 15   M. Wladimiroff (interprétation). - Non.

 16   M. Abell (interprétation). – Etait-ce pour des raisons que vous

 17   avez expliquées ce matin, lors de votre déposition ?

 18   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

 19   M. Abell (interprétation). – Vous avez donc mis cela dans votre

 20   déclaration ?

 21   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

 22   M. Abell (interprétation). – Je vais vous poser une autre

 23   question. Nous avons déjà entendu quelque chose à ce sujet-là, je pense

 24   que vous avez fait une évaluation et que vous vous l'avez également

 25   transmise à Ljubo ; à savoir qu’il aurait pu obtenir quatre ou cinq ans ?

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  1   M. Wladimiroff (interprétation). – Attendez que je lise ce que

  2   j'ai écrit.

  3   M. Abell (interprétation). – Oui, d’accord. C’est à la fin pour

  4   savoir que cette information a véritablement été transmise par la voie

  5   écrite à Ljubo Tadic ?

  6   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, effectivement.

  7   M. Abell (interprétation). - Merci. Enfin, j'aimerais poser une

  8   dernière question. Nous avons deux extraits de la cassette vidéo que nous

  9   avons diffusée hier. Il y a une copie de transcription ; il s'agit de la

 10   cassette vidéo de ce matin, je ne sais pas si vous disposez de cet

 11   extrait. Ce sont les deux paragraphes qui se réfèrent à l'entretien qui a

 12   eu lieu entre M. Wladimiroff et le commentateur. Est-ce que vous avez

 13   cette copie, s'il vous plaît ? C'est la copie dont je dispose. Après ce

 14   paragraphe, il y a un autre qui commence avec 002125.

 15   M. le Président (interprétation). – Il y a un handicap que nous

 16   rencontrons, parce que nous voyons bien évidemment ce document que vous

 17   nous avez remis ce matin en anglais et en BCS. Ensuite, il y a sa

 18   troisième page, et cette troisième page, c'est un document intitulé… Je

 19   pense qu’au fond, il s'agit de la même chose ; c'est à peu près la même

 20   chose.

 21   M. Abell (interprétation). - Je pense que ce sont les intitulés

 22   en néerlandais, les sous-titres en néerlandais. Au fond, il s'agit d'un

 23   segment que nous avons reçu auparavant.

 24   M. le Président (interprétation). – Si vous nous donnez le

 25   numéro de référence, à ce moment-là, le greffe pourra nous expliquer

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  1   l'erreur.

  2   M. Abell (interprétation). - Je pense qu'il s'agit de 8A , au

  3   moment où Me Livingston a vu cette pièce. Me Livingston ne pouvait pas

  4   reconnaître cette pièce. Maître Hollis, également, sait qu'il s'agit de

  5   deux extraits qui ont été traduits.

  6   M. Dubuisson. - Il s'agit de deux extraits vidéo, mais ils ne

  7   sont pas repris sur l'extrait de la cassette.

  8   M. le Président (interprétation). – Pouvons-nous avoir la copie,

  9   s'il vous plaît ?

 10   M. Dubuisson. – Je vous remets la copie, l'extrait où Me Abell a

 11   signalé 21 heures 25, sous la cote 39 et l'extrait 25, 22, 27, sous la

 12   cote 40.

 13   M. Abell (interprétation). – Merci, ce sera mon dernier sujet,

 14   Monsieur le Président.

 15   M. le Président (interprétation). – Pensez-vous que nous

 16   pourrions ainsi terminer avant que nous ne débutions la pause-café ?

 17   M. Abell (interprétation). – Oui, cela prendra tout au plus

 18   quelques minutes, monsieur le Président.

 19   M. le Président (interprétation). – Maître Abell, est-ce que

 20   nous allons remettre un exemplaire de ceci aux interprètes ?

 21   M. Abell (interprétation). – Oui, et peut-être que les

 22   interprètes pourront se convaincre de l'exactitude de la traduction en

 23   cours de diffusion. Ceci vaudra pour Me Wladimiroff également.

 24   Maître Wladimiroff, vous le verrez peut-être à l'examen de ce

 25   document : ce qui nous intéresse, ce sont certains extraits au cours de

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  1   cette émission où vous êtes interrogé par le commentateur.

  2   M. le Président (interprétation). – A vous de jouer !

  3   M. Abell (interprétation). – Effectivement. Peut-on diffuser la

  4   cassette ?

  5   (Diffusion de la cassette.)

  6   M. Dubuisson. – Comme cela a été dit tout à l'heure, les deux

  7   transcripts que nous venons de donner ne sont pas repris dans la cassette

  8   vidéo.

  9   M. Abell (interprétation). – Nous avions cru comprendre -je vois

 10   que nous avons l'air interloqué, Me Hollis et moi-, nous avons cru

 11   comprendre que ceci avait été déposé auprès du Tribunal. Nous pensions

 12   que, dans cette cassette, il y avait ces deux segments également. J'ai

 13   toute une vidéo. Malheureusement, elle n'est pas arrêtée aux passages

 14   adéquats ; je le crains fort. Puis-je essayer de contourner la difficulté

 15   de cette façon-ci, monsieur le Président ?

 16   Maître Wladimiroff, vous avez une traduction sous les yeux ?

 17   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

 18   M. Abell (interprétation). – Deux, en fait ! Pour l'une d'entre

 19   elles, c'est vous-même qui parlez avec un journaliste à propos de

 20   M. Tadic.

 21   M. le Président (interprétation). – Je vois que Me Domazet s'est

 22   levé. Peut-être que nous devrions l'entendre ?

 23   M. Domazet. – Si j'ai bien compris, Me Abell a toute la

 24   cassette, la cassette intégrale. D'après ce que nous savons, elle est

 25   d'environ 20 minutes. Nous sommes d'accord et nous proposons de voir toute

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  1   la cassette, avec les deux passages. Mais nous pensons qu'il serait bien

  2   de voir l'intégralité de cette cassette.

  3   M. Abell (interprétation). – Monsieur le Président, peut-être

  4   que Me Domazet peut demander une telle chose, mais personnellement,

  5   j'essaie de m'occuper de ce qui me semble pertinent. Sans oublier qu'il

  6   s'agit ici d'un documentaire. S'il veut diffuser toute la cassette, à lui

  7   de décider ! Mais je crois qu'elle dure plus de vingt minutes.

  8   M. le Président (interprétation). – Maître Domazet, vous pourrez

  9   demander que la cassette soit diffusée dans son intégralité au moment où

 10   vous allez poser vos questions. Mais à ce stade-ci de la procédure, nous

 11   proposons que Me Abell procède comme il l'entend puisque c'est lui qui

 12   s'occupe de son affaire.

 13   M. Abell (interprétation). – Est-ce que nous pouvons régler la

 14   chose de la façon suivante : vous voyez ici...

 15   M. Wladimiroff (interprétation). – Est-ce que vous pourriez me

 16   donner l'extrait du temps ?

 17   M. Abell (interprétation). – Nous parlons du 0-021-25, première

 18   ligne.

 19   "Michel Wladimiroff : Il dit qu'il n'a rien fait.

 20   Journaliste : Vous le croyez ?"

 21   A ce moment-là, on vous pose des questions à propos de M. Tadic,

 22   n'est-ce pas ?

 23   Tout d'abord, est-ce que vous vous souvenez de cette

 24   conversation que vous avez eue avec le journaliste ?

 25   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui. Mais si je ne me trompe

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  1   pas, cet extrait intervient tout au début, en septembre, en août ou en

  2   octobre 1995.

  3   M. Abell (interprétation). – Oui. Là, on vous pose la question

  4   classique de l'avocat : "Qu'en pensez-vous ?" Vous dites : "Je suis avocat

  5   de métier. Je ne veux pas que ceci m'encombre trop. Je vais poursuivre mon

  6   travail de défense".

  7   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

  8   M. Abell (interprétation). – A la page suivante –du moins dans

  9   la copie que j'ai- le commentateur dit : "Un mois plus tard, un accord de

 10   paix est signé à Dayton". Là, manifestement, on fait référence aux accords

 11   de Dayton.

 12   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

 13   M. Abell (interprétation). – Ceci s'est passé en quel mois ? En

 14   décembre 95 ? "Un mois plus tard, un accord de paix est conclu à Dayton,

 15   mais Wladimiroff n'a pas avancé d'un pouce dans son enquête. Il se fâche

 16   sur son collègue Vujin. Il rend une visite secrète à Karadzic au cours de

 17   laquelle il ne veut pas emmener une équipe de télévision".

 18   Vous souvenez vous aussi de cette partie de la cassette ?

 19   M. Wladimiroff (interprétation). – C'est un commentaire, mais je

 20   ne sais pas quand il a été formulé. En tout état de cause, ceci a été

 21   monté par la suite. La deuxième partie intervient peut-être en 1997, au

 22   cours du premier mois de 1997.

 23   M. le Président (interprétation). – Monsieur le Témoin, est-ce

 24   que vous êtes en train de dire aux Juges que vous vous souvenez avoir dit

 25   ces choses et que, dans votre souvenir, ces éléments devaient se retrouver

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  1   dans la cassette dont on a déjà parlé ?

  2   M. Wladimiroff (interprétation). – Dans la mesure où, ici, on me

  3   cite, je ne peux pas contester ce que dit le journaliste. C'est ce qu'il

  4   m'a entendu dire au fil d'une certaine période, au cours de deux ans.

  5   M. le Président (interprétation). – Je comprends votre remarque.

  6   M. Abell (interprétation). – Lorsqu'il dit qu'il est en colère,

  7   par rapport à son collègue yougoslave Vujin, ce n'est peut-être pas un

  8   commentaire que vous, vous avez formulé, mais bien le commentateur. Ceci

  9   est-il en contradiction avec l'avis que vous aviez sur Me Vujin ?

 10   M. Wladimiroff (interprétation). – J'avais dit clairement que

 11   j'étais fâché contre M. Vujin.

 12   M. Abell (interprétation). – Dernier passage, je pense que c'est

 13   la page 00-025-22 jusqu'à 00-27-00.

 14   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

 15   M. Abell (interprétation). – Là, manifestement, c'est d'abord le

 16   commentateur qui parle, puis vous. "Février 1996, Wladimiroff doit aller

 17   en Bosnie pour une troisième fois, comme d'habitude par Belgrade. Son

 18   collègue Vujin ne fait pas un très bon travail". Puis -je vous cite- : "Il

 19   devient de plus en plus difficile de le faire parce qu'il ne tient pas ses

 20   promesses. De plus en plus, nous nous inquiétons du rôle qu'il joue. Ceci

 21   signifie que nous nous demandons s'il devrait toujours avoir sa place dans

 22   l'équipe parce que, de plus en plus, nous devons faire face à la question

 23   de savoir si c'est une véritable coopération ou une absence de

 24   coopération, ou pire encore, s'il est à la recherche d'objectifs que nous

 25   ne recherchons pas". (fin de citation).

Page 1105

  1   C'est vous qui parliez de M. Vujin hors caméra ?

  2   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

  3   M. Abell (interprétation). - Qu'entendez vous par : "manque de

  4   coopération ou peut-être, pire encore, il poursuit des objectifs que nous

  5   ne poursuivons pas".

  6   M. Wladimiroff (interprétation). - Ceci traduit très bien ce que

  7   je vous ai dit par cette évolution de la façon dont nous avons considéré

  8   Vujin et je crois que ceci est le reflet fidèle de ce qu'il n'était pas

  9   possible d'exclure, qu'il aurait été peut-être nuisible pour l'affaire de

 10   le conserver, de le garder dans l'équipe.

 11   M. Abell (interprétation). - Qui ne poursuivait donc pas vos

 12   objectifs qui était de défendre au mieux M. Tadic ?

 13   M. Wladimiroff (interprétation). - C'est tout à fait exact.

 14   M. Abell (interprétation). - Le commentateur parle de votre

 15   équipe qui travaille à Banja Luka et du fait qu'il y a vraiment un

 16   sabotage systématique de la part du chef de la police. Est-ce que c'est ce

 17   dont vous nous parliez à propos de la liste de témoins qui se trouvait

 18   entre les mains de M. Drljaca ?

 19   M. Wladimiroff (interprétation). - Je suis sûr que j'ai donné au

 20   commentateur l'impression de quelque chose ; je lui ai donné des éléments

 21   que je vous ai soumis également. Effectivement, à ce moment-là, j'avais

 22   des idées plus précises en matière de date et c'est là-dessus que le

 23   commentateur a basé son avis.

 24   M. Abell (interprétation). – Et puis, il y avait un passage

 25   entre vous-même et Me Orie ; je ne vais pas en donner lecture. Le

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  1   commentateur fait état de Milosevic et Karadzic.

  2   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, cela m'étonne un peu de

  3   lire tout ceci.

  4   M. Abell (interprétation). - Je me contente de vous poser une

  5   question relative au commentaire que vous fournissez, ainsi que Me Orie.

  6   Est-ce que ceci correspond au souvenir que vous avez des propos

  7   que vous avez tenus devant la caméra ?

  8   M. Wladimiroff (interprétation). - Vous voulez dire ce que j'ai

  9   dit ?

 10   M. Abell (interprétation). - Oui, ce que vous et Me Orie avez

 11   dit, pas le commentateur.

 12   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, je m'en souviens.

 13   M. Abell (interprétation). – Merci. Même s'il y a quelque

 14   difficulté au niveau de la diffusion de la cassette, à l'examen de la

 15   transcription, vous êtes convaincu, Maître Wladimiroff, que c'est bien la

 16   transcription de ce que vous aviez dit au cours de ce documentaire

 17   concernant M. Vujin ?

 18   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, pour ce qui est de la

 19   partie où je parle avec Me Orie. Ceci s'est passé à Belgrade, après que

 20   nous avons discuté avec M. Kostic, enquêteur que nous avons conservé ;

 21   d'après ce qu'il nous a dit, nous étions plus inquiets à propos de

 22   M. Drljaca puisqu'il avait menacé Kostic.

 23   M. Abell (interprétation). – Kostic vous a dit que M. Drljaca

 24   l'avait menacé par rapport aux renseignements ?

 25   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

Page 1107

  1   M. Abell (interprétation). - Ce qui veut dire que M. Drljaca

  2   vous avait entravé dans vos efforts de recueil d'éléments de preuve ?

  3   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, c'est ce que M. Kostic

  4   m'a dit.

  5   M. Abell (interprétation). – Dernière question : pour ce qui est

  6   du passage concernant l'absence de coopération de la part de M. Vujin "ou

  7   pire encore, que peut-être il poursuit des objectifs que nous, nous ne

  8   poursuivons pas", est-ce que vous pourriez situer dans le temps le moment

  9   où vous avez dit ceci devant la caméra ?

 10   M. Wladimiroff (interprétation). – Non, je n'ai pas de souvenir

 11   précis. Je suis sûr que je l'ai dit parce que ceci est dans le droit fil

 12   de ce que je pensais à l'époque. J'étais très très inquiet au début

 13   de 1996. Je ne me souviens pas dans de l'endroit où ceci a été enregistré.

 14   M. Abell (interprétation). - Ceci s'est donc passé au début

 15   de 1996  ?

 16   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

 17   M. Wladimiroff (interprétation). – Donc avant l'ouverture du

 18   procès de M. Dusko Tadic ?

 19   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

 20   M. Abell (interprétation). – Et c'était les inquiétudes que vous

 21   aviez à l'encontre d'un homme qui avait travaillé avec vous pendant près

 22   d'un an ?

 23   M. Wladimiroff (interprétation). – C'est exact.

 24   M. Abell (interprétation). – Je vous remercie. Je n'ai plus de

 25   question à poser, Monsieur le Président.

Page 1108

  1   M. le Président (interprétation). – Merci, monsieur Abell. Je

  2   crois qu'il est utile que je vous fasse part de quelque chose que j'aurais

  3   dû vous dire ce matin à propos de notre programme de travail pour

  4   vendredi.

  5   Nous allons commencer à 9 heures et nous allons terminer à

  6   13 heures 30. Je vous remercie. Nous allons avoir une suspension de

  7   20 minutes. Nous reprendrons à midi.

  8   L'audience, suspendue à 11 heures 40, est reprise à 12 heures.

  9   M. le Président (interprétation). – L'audience est reprise. Qui

 10   va intervenir au nom de l’accusation ? Maître Hollis, vous avez la parole.

 11   Mme Hollis (interprétation). – Bonjour, messieurs. Quand avez-

 12   vous officiellement été éloigné de l'affaire Tadic, vous et votre équipe ?

 13   M. Wladimiroff (interprétation). - Je pense que ceci s'est passé

 14   en avril 1997.

 15   Mme Hollis (interprétation). – Divers documents ont été soumis à

 16   l'audience, dont ce qui apparaît être une lettre que vous adresse

 17   M. Tadic. J'aimerais vous montrer trois lettres de M. Tadic, trois lettres

 18   que vous a écrites M. Tadic. J'aimerais les montrer à la Chambre et

 19   j'aimerais que vous confirmiez que c'est effectivement vous qui les avez

 20   reçues de M. Tadic.

 21   Je dispose de suffisamment d'exemplaires pour les parties, le

 22   greffe et les Juges.

 23   Est-ce que l'on pourrait donner une cote collective ? La

 24   première lettre est de février 1997, la deuxième de mars 1997 et la

 25   troisième du 7 avril 1997.

Page 1109

  1   M. Dubuisson. - Les lettres sont reprises sous la cote 41,

  2   41/1 pour la lettre de février 1997, 41/2 pour la lettre de mars 1997 et

  3   41/3 pour la lettre d'avril 1997.

  4   Mme Hollis (interprétation). – Maître Wladimiroff, pourrons-nous

  5   reprendre ces lettres dans l'ordre chronologique ? Commençons par la

  6   première, celle de février 1997.

  7   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

  8   Mme Hollis (interprétation). – Est-ce bien une version en

  9   anglais de la lettre reçue de M. Tadic ?

 10   M. Wladimiroff (interprétation). - Je n'ai pas de souvenir

 11   particulier de cette lettre.

 12   Mme Hollis (interprétation). – Veuillez examiner la pièce qui

 13   est la 41A ou peut-être 41/1. Il y a une certaine confusion, excusez-moi,

 14   Monsieur le Président. C’est plutôt la 41/1 qui est la première lettre ;

 15   la 41/2 qui est la lettre du 17 mars 1997. Pourriez-vous la lire et nous

 16   dire si, effectivement, c'est bien là la lettre que vous avez reçue à ce

 17   moment-là de M. Tadic ?

 18   M. Wladimiroff (interprétation). - Je dois la lire avec soin.

 19   M. le Président (interprétation). – Monsieur le Greffier, est-ce

 20   que cela peut être fait ?

 21   M. Dubuisson. – Oui, bien sûr.

 22   Mme Hollis (interprétation). – Vous souvenez-vous avoir reçu

 23   cette lettre, maître Wladimiroff ?

 24   M. Wladimiroff (interprétation). - Je n'ai pas de souvenir

 25   précis, là non plus, mais je suppose que je l'ai vue en BCS et elle m'a

Page 1110

  1   été traduite. Je ne reconnaissais pas nécessairement la police utilisée

  2   pour la dactylographie, mais j'ai reçu ce type de lettre.

  3   Mme Hollis (interprétation). – Ceci vaut pour celle du

  4   17 mars 1997. Est-ce que cela vaut également pour celle du 9 février

  5   1997 ?

  6   M. Wladimiroff (interprétation). - Je ne sais pas.

  7   Mme Hollis (interprétation). – Merci.

  8   Est-ce que vous voulez bien regarder la lettre en date du

  9   7 avril 1997 ? Il s'agirait de celle portant cote 41/3.

 10   M. le Président (interprétation). – Monsieur le Greffier, sont-

 11   elles marquées de cette façon-là ?

 12   M. Dubuisson. - Je vais répéter pour être plus sûr. Donc, la

 13   lettre 41/1 est la lettre de février 1997 ; la lettre 41/2 est la lettre

 14   de mars 1997 et la lettre 41/3 est celle d'avril 1997.

 15   M. le Président (interprétation). – Fort bien.

 16   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, je me souviens bien de

 17   cette lettre. Il s'agit de celle qui porte la cote 41/3.

 18   Mme Hollis (interprétation). – Celle du 7 avril 1997 ?

 19   M. Wladimiroff (interprétation). - C'est exact.

 20   Mme Hollis (interprétation). – Etant donné que Me Wladimiroff

 21   pense effectivement avoir reçu une lettre en serbo-croate, qui

 22   correspondrait à la cote 41/2, étant donné qu'il reconnaît celle portant

 23   la cote 41/3, nous demandons que ces deux lettres soient versées au

 24   dossier.

 25   Le témoin a indiqué ne pas se souvenir de celle qui porte comme

Page 1111

  1   cote le 41/1. Nous ne demandons pas que cette lettre soit versée au

  2   dossier.

  3   M. Wladimiroff (interprétation). - J'ajouterai que la pièce

  4   41/1, si je ne reconnais pas la police de caractères utilisée, je

  5   reconnais cependant le contenu.

  6   M. le Président (interprétation). – Vous demandez dès lors le

  7   versement au dossier de ces trois lettres pour les raisons invoquées par

  8   le témoin ?

  9   Mme Hollis (interprétation). – Oui.

 10   M. le Président (interprétation). – Maître Vujin, vous avez la

 11   parole.

 12   M. Vujin (interprétation). - Monsieur le Président, j'ai voulu

 13   tout simplement… Etant donné qu'il est possible que l'on montre les

 14   lettres en langue serbe au témoin, M. Wladimiroff ; étant donné qu'il

 15   s'agit ici simplement de traductions de ces lettres-là, alors que ces

 16   lettres-là ont été versées au dossier –excusez-moi, je vais employer les

 17   vieilles cotes- D277, D276 et D275 -il est certain que le bureau du greffe

 18   dispose de ces documents ; moi, je les ai sur moi, dans mon dossier- si

 19   vous voulez, vous pouvez tout de suite ajouter le texte en langue serbe à

 20   ces versions en anglais, étant donné qu'il s'agissait de nos propres

 21   traductions. Si cela peut vous être utile ! Sinon, je n'insiste pas. Mais

 22   je crois que cela pourrait être utile pour vous.

 23   M. le Président (interprétation). – Je comprends que vous

 24   essayiez d'aider au déroulement de la procédure, maître Vujin, mais

 25   Me Hollis est la seule qui doive déterminer si elle a besoin de ce type de

Page 1112

  1   documents. Mais je suppose que vous renvoyez…, vous faites état de la

  2   procédure en vertu de l'article 115 ?

  3   M. Vujin (interprétation). - Non, ici, il s'agit des lettres que

  4   moi j'ai envoyées au Tribunal, dans le cadre de ma réponse et dans le

  5   cadre de la demande que j'ai faite de continuer à maintenir la

  6   correspondance avec Dusko Tadic.

  7   M. le Président (interprétation). – Lorsque vous procéderez à

  8   l'interrogatoire du témoin, vous pourrez lui soumettre ces documents.

  9   M. Vujin (interprétation). – Je m'excuse auprès de la collègue

 10   du bureau du Procureur.

 11   Mme Hollis (interprétation). – Quand avez-vous, pour la première

 12   fois, rencontré John Livingston ? Vous en souvenez-vous ?

 13   M. Wladimiroff (interprétation). - Je crois que je l'ai

 14   rencontré pour la première fois lorsque j'étais parmi le public, à

 15   l'occasion du prononcé du verdict. Je ne sais pas si c'est à cette

 16   occasion-là précisément que je l'ai rencontré. Plus tard, il a pris

 17   contact avec moi ou plutôt son conseil principal. C'est lui qui m'a envoyé

 18   une lettre ; je crois qu'il m'a rendu visite par la suite et puis je me

 19   suis entretenu avec Me Livingston et je crois que, dans ce cadre-là, cela

 20   s'est passé au début de cette année-ci. Je me demande si je l'avais vu

 21   en 1997, mais je n'en suis pas sûr. C'est difficile de m'en souvenir.

 22   Mme Hollis (interprétation). – Il est possible que cela ait été

 23   à l'occasion du prononcé du jugement en 1997 ?

 24   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

 25   Mme Hollis (interprétation). – Mais il n'a jamais fait partie de

Page 1113

  1   votre équipe lorsque vous, vous meniez l’affaire ?

  2   M. Wladimiroff (interprétation). - Non.

  3   Mme Hollis (interprétation). – Vous avez parlé de Ljubo, le

  4   frère cadet de Dusko Tadic. Est-ce que Ljubo vous a aidé dans le cadre des

  5   efforts que vous avez entrepris pour la défense de M. Tadic ?

  6   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

  7   Mme Hollis (interprétation). – Il vous a aidé à repérer des

  8   témoins, à les acheminer vers tel ou tel point ?

  9   M. Wladimiroff (interprétation). – Quelquefois, il me conduisait

 10   et, parfois, il conduisait des témoins à tel ou tel endroit.

 11   Mme Hollis (interprétation). – Lorsqu'il vous aidait, était-il

 12   présent lors des auditions de témoins menées par vous et des membres de

 13   votre équipe ?

 14   M. Wladimiroff (interprétation). - A peine, puisque nous avions

 15   dit qu'aucun membre de la famille ne pouvait assister à de tels

 16   entretiens, sauf accord express. Cela s'est peut-être passé une fois ou

 17   deux mais, en règle générale, ce n'était pas le cas.

 18   Mme Hollis (interprétation). – Mais, s’il vous est arrivé de

 19   vous trouver avec Me Vujin pour mener des auditions de témoin, est-ce que

 20   Ljubo Tadic était présent ? Pour autant que vous vous en souvenez.

 21   M. Wladimiroff (interprétation). - Je le répète, en règle

 22   générale, il n'était pas présent, mais il lui est arrivé de l’être. Je ne

 23   sais plus s'il était présent lorsque Me Vujin, lui aussi, était présent.

 24   Impossible de vous le dire malheureusement.

 25   Mme Hollis (interprétation). – Merci. Lors de votre déposition,

Page 1114

  1   vous avez déclaré que votre avis avait évolué s'agissant de la présence et

  2   de la participation de Me Vujin. Au cours de cette évolution, au cours de

  3   cette période, est-ce que vous avez fait part de vos inquiétudes à l'égard

  4   de M. Vujin envers M. Tadic ?

  5   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

  6   Mme Hollis (interprétation). – Combien de fois avez-vous fait

  7   part de vos inquiétudes ?

  8   M. Wladimiroff (interprétation). - Question difficile. Je crois

  9   que j'ai commencé à lui parler de mes inquiétudes concernant Me Vujin plus

 10   tard, à un stade ultérieur, s'agissant de l'avis que j’avais, qui évoluait

 11   par rapport à M. Vujin. Ce n'est pas tout au début, c'est plutôt par la

 12   suite. Difficile de situer cela dans le temps. Je vais essayer de le faire

 13   pourtant. Je crois que cela a dû commencer soit fin 1995, soit

 14   début 1996 ; au moment où j'ai eu suffisamment de conviction, j'étais

 15   suffisamment sûr de ce que je pensais pour exprimer mes doutes.

 16   Mme Hollis (interprétation). – Alors que vous n'aviez toujours

 17   pas arrêté votre avis concernant Me Vujin, avez-vous parlé de vos

 18   inquiétudes le concernant à Ljubo Tadic ?

 19   M. Wladimiroff (interprétation). - C'est plutôt l'inverse qui

 20   s'est passé. Ljubo a commencé à parler de cette question-là avec moi. Et

 21   peut-être qu'il a compris, de la façon dont j'ai réagi, que je partageais

 22   son avis.

 23   Mme Hollis (interprétation). – Au paragraphe 8 de votre

 24   déclaration préalable, on a attiré votre attention sur un segment

 25   particulier, je le cite : “ A une reprise dont je me souviens très bien,

Page 1115

  1   il -à savoir Me Vujin- a interrompu un témoin que j'étais en train

  2   d'interroger et il a dit au témoin ce qu'il devait dire ”. Je crois que

  3   nous avons vu l'extrait vidéo relatif à cet incident.

  4   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

  5   Mme Hollis (interprétation). – Vous travailliez par le

  6   truchement d'un interprète : vous souvenez-vous de ce que cet interprète

  7   aurait dit s'agissant de ce que Me Vujin aurait dit au témoin ?

  8   M. Wladimiroff (interprétation). - Ce qui est étrange, c'est que

  9   je n'ai pas de souvenir précis de ce qu'il a dit à cette occasion-là.

 10   C'est l'incident plutôt qui m’est resté à l'esprit, le fait qu'il essayait

 11   de s'immiscer dans ce que je faisais. Alors que j'attendais à l'extérieur,

 12   étant donné les questions que m’a posées Me Abell, je me suis souvenu d'un

 13   autre incident qui ainsi m’est revenu à l'esprit. Nous avons eu une autre

 14   audition. Mme Tadic était concernée, elle était chez elle et, une fois de

 15   plus, alors que j'étais en train de poser des questions, j'étais assis

 16   dans cette pièce avec Me Vujin, l'interprète, et bien sûr le témoin

 17   éventuel, Mme Tadic.

 18   Je me souviens désormais de ce que, si je posais une question,

 19   Me Vujin lui disait ce qu'elle devait dire ; c'est du moins ce que m'a dit

 20   mon interprète et je me souviens lui avoir dit qu'il ne devrait pas agir

 21   de la sorte. Je ne pourrais pas vous dire exactement ce qu'il disait à la

 22   dame, étant donné que je ne me souviens plus de la question précise, mais

 23   il est certain qu'il interrompait ou, en tout cas, qu'il lui donnait des

 24   conseils quant à ce qu'elle devait dire.

 25   Mme Hollis (interprétation). – Merci de cette information

Page 1116

  1   supplémentaire. Revenons au paragraphe n° 7.

  2   Je vous avais demandé si vous vous souveniez de ce que

  3   l'interprète vous aurait dit. Est-ce qu’elle vous aurait dit que Me Vujin

  4   avait dit au témoin de dire quelque chose ? Pourquoi vous ai-je posé cette

  5   question : c'est parce que la transcription qui nous a été fournie ne

  6   semble rien contenir à propos de ce que Me Vujin aurait dit au témoin de

  7   dire. Est-ce qu'il n'y a pas eu peut-être un ajout dans la cassette qui

  8   n'a pas été répercuté dans la transcription ?

  9   M. Wladimiroff (interprétation). – Eh bien, mon souvenir

 10   provient de la totalité de l'incident. Je remarque avec vous

 11   qu'effectivement, seul cet incident a été enregistré ou du moins ici

 12   retransmis sur les écrans du prétoire par rapport à la réaction qu'a eue

 13   Me Vujin face à l'interprète de terrain. Mais je me souviens qu'au cours

 14   de l'audition qui s'en est suivie, il y a eu des interruptions plus

 15   substantielles. De nouveau, je ne me souviens plus de ce qu'il a dit

 16   exactement et du pourquoi de son intervention, mais je pense qu'il y a un

 17   schéma de comportement tout à fait clair qui apparaît.

 18   Mme Hollis (interprétation). – Vous parlez de l'audition qui

 19   s'en est suivie avec quelqu'un d'autre ou la poursuite de l'audition avec

 20   ce témoin-ci ?

 21   M. Wladimiroff (interprétation). - La poursuite de la même

 22   audition.

 23   Mme Hollis (interprétation). – A ce moment-là, il y a eu des

 24   interruptions plus substantielles ?

 25   M. Wladimiroff (interprétation). - C'est exact.

Page 1117

  1   Mme Hollis (interprétation). – Et l'interprète vous a dit que

  2   Me Vujin disait au témoin ce qu'il fallait dire ?

  3   M. Wladimiroff (interprétation). - L'interprète me l'a dit plus

  4   tard. J'ai remarqué que quelque chose se passait entre eux et j'ai demandé

  5   ce qui se passait parce que, quelquefois, l'interprète n'a pas toujours

  6   traduit ce que Me Vujin disait mais, par la suite, elle m'a relaté

  7   l'incident. J'ai compris pour la première fois le contenu, la substance de

  8   ce qui s'était passé.

  9   Mme Hollis (interprétation). – Et la personne avec qui vous

 10   parliez, la personne à qui, d'après l'interprète, Me Vujin donnait des

 11   instructions quant à ce que ce témoin devrait dire ou pas, est-ce que vous

 12   pourriez nous dire son nom en audience publique ?

 13   M. Wladimiroff (interprétation). - Aucun problème. Il s'agit de

 14   Zorica Antic.

 15   Mme Hollis (interprétation). – Au paragraphe 9 de votre

 16   déclaration préalable, vous dites qu'il y a eu d'autres exemples de ce

 17   type de comportement qu'on ne peut que qualifier de manipulation de

 18   témoin. Pour autant que vous vous en souveniez, vous souvenez-vous de ce

 19   que Me Vujin suggérait au témoin ?

 20   M. Wladimiroff (interprétation). – Je ne peux ici vous donner

 21   que la substance, le contenu de ce qu'il faisait. En quintessence, il

 22   donnait des conseils au témoin quant à ce que ce témoin devrait dire :

 23   dire ceci ou cela. C'est du moins ce que m'a dit l'interprète. Avant que

 24   le témoin ne puisse répondre à mes questions, Me Vujin intervenait,

 25   interrompait le dialogue et disait au témoin : "Voilà : dis ceci ou cela.

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  1   Raconte-lui ceci ou cela".

  2   M. Hollis (interprétation). – Vous souvenez-vous du nombre de

  3   témoins ainsi concernés, ainsi approchés par Me Vujin ? A votre

  4   connaissance, bien sûr !

  5   M. Wladimiroff (interprétation). – Bien sûr ! Il faut que je me

  6   souvienne des occasions où il était présent. Et puis, je dois me souvenir

  7   des circonstances précises. J'hésite à vous chiffrer le nombre d'occasions

  8   ou d'incidents, car je vois cela dans mon souvenir comme étant vraiment un

  9   schéma de comportement, un modèle de comportement. Je ne sais plus

 10   exactement, mais je crois que cela s'est passé au cours de la visite que

 11   j'ai faite en septembre ainsi que de la visite que nous avons effectuée en

 12   février.

 13   Combien de témoins avons-nous entendus au cours de cette

 14   période ? Je dirai : peut-être 9 ou 10. Mais là, je ne suis pas sûr et je

 15   ne devrais pas vous donner des choses dont je ne suis pas sûr.

 16   M. Hollis (interprétation). – Vous parlez de septembre 1995 ?

 17   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui. Septembre 1995 et

 18   février 1996.

 19   M. Hollis (interprétation). – Donc, il s'agit de deux missions

 20   ou visites différentes ?

 21   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

 22   M. Hollis (interprétation). – Je n'ai plus de questions à poser

 23   au témoin, Monsieur le Président. Je vous remercie.

 24   M. le Président (interprétation). – Maître Vujin ou Maître

 25   Domazet ?

Page 1119

  1   M. Domazet. – Monsieur le Président, avant de poser d'autres

  2   questions...

  3   M. le Président (interprétation). – Maître Domazet, voici ce que

  4   je vous propose. Avec tout le respect que je vous dois, je comprends que

  5   vous essayez d'aider la Chambre d'appel en parlant français, mais je dois

  6   vous dire ceci : si vous vous sentez plus à l'aise en BCS, n'hésitez pas à

  7   parler cette langue. Vous savez que les interprètes sont là pour traduire

  8   vos propos. Sentez-vous le plus à l'aise possible et parlez peut-être en

  9   BCS.

 10   M. Domazet. – M. Wladimiroff ne parlant pas français, je pense

 11   alors poser les questions en BCS.

 12   (Interprétation) Monsieur le Président, avant de commencer avec

 13   mes questions, je souhaite proposer que l'on verse au dossier l'ensemble

 14   de la cassette vidéo dont nous avons vu simplement certaines séquences

 15   ici.

 16   M. Wladimiroff (interprétation). – J'essaie de trouver la

 17   traduction, l'interprétation. Je n'arrive à entendre que la version en

 18   serbo-croate.

 19   M. le Président (interprétation). – Peut-être peut-on vous aider

 20   si vous lisez sur l'écran ce qui est dit ?

 21   M. Wladimiroff (interprétation). – Non, je vais essayer avec le

 22   numéro 4. Cela marche. Merci.

 23   M. Domazet (interprétation). – Je vais peut-être répéter ce que

 24   je viens de dire pour que M. Wladimiroff puisse entendre. Ou bien, peut-

 25   être a-t-il lu cela sur l'écran ?

Page 1120

  1   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui. Je l'ai fait.

  2   M. Domazet (interprétation). – En même temps, nous proposons que

  3   les interprètes fassent l'interprétation de l'ensemble du contenu de cette

  4   cassette vidéo.

  5   Maître Abell m'a dit qu'il possède cette cassette vidéo et qu'il

  6   l'a sur lui, ici.

  7   M. Abell (interprétation). – Effectivement, j'ai cette cassette

  8   et je crois que cela doit être la bonne. Je vais essayer de vous aider de

  9   cette manière-ci : je vais la remettre à M. Domazet si cela peut lui être

 10   utile. Mais peut-être que ce qui peut aider, c'est la traduction en

 11   anglais du contenu de la cassette. Je n'ai pas photocopié ; je ne savais

 12   pas qu'on aurait besoin de cela.

 13   M. le Président (interprétation). – Mais est-ce que M. Domazet

 14   l'a vue ?

 15   M. Abell (interprétation). – Non, je ne le crois pas, mais

 16   simplement, je veux dire que je dispose de la traduction et cela peut

 17   aider.

 18   M. le Président (interprétation). – Monsieur Domazet, votre

 19   collègue dispose d'un texte et il peut le mettre à votre disposition.

 20   C'est à vous de décider.

 21   M. Domazet (interprétation). – Oui, monsieur le Président, je

 22   n'ai rien contre la proposition de faire une photocopie de ce texte et de

 23   l'utiliser et aussi que cette cassette soit diffusée.

 24   M. le Président (interprétation). – A quel moment souhaitez-vous

 25   que l'on diffuse cette cassette vidéo ? Maintenant ?

Page 1121

  1   M. Domazet (interprétation). – Monsieur le Président, s'il n'y a

  2   pas de problème technique, je souhaite que ceci se fasse maintenant.

  3   Les interprètes indiquent que, sans le texte, ils ne peuvent pas

  4   le faire. Donc, ils proposent que l'on attende que le texte soit

  5   photocopié.

  6   Sinon après la pause !

  7   M. le Président (interprétation). – Est-ce que ceci ne poserait

  8   pas de problème ? Ce serait mieux si les mêmes personnes qui vont voir la

  9   cassette, disposent de la transcription. Ou bien est-ce que les

 10   interprètes peuvent faire une interprétation directement en écoutant ?

 11   M. Domazet (interprétation). – Monsieur le Président, je pense

 12   qu'il serait suffisant de recevoir l'interprétation pendant que l'on voit

 13   la cassette et que, dans ce cas-là, les interprètes ne doivent pas

 14   obligatoirement faire l'interprétation.

 15   M. le Président (interprétation). – Oui, monsieur le Greffier.

 16   M. Dubuisson. – Puis-je demander à Me Abell d'où provient la

 17   traduction de la cassette vidéo ?

 18   M. Abell (interprétation). – Tout d'abord, je l'ai déjà remise à

 19   l'huissier pour qu'il fasse une photocopie. La traduction a été faite par

 20   une dame qui m'a dit qu'elle était interprète. Elle s'appelle

 21   Mme Metselaar. Quelque part, je dispose de sa déclaration où il est

 22   indiqué que celle qui a fait la traduction, connaît à la fois les langues

 23   BCS, néerlandaise et anglaise.

 24   M. le Président (interprétation). – Est-ce qu'elle travaille

 25   pour le Tribunal ?

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  1   M. Abell (interprétation). – Je crois qu'elle a travaillé pour

  2   le Tribunal. Je ne sais pas si elle était interprète de conférence, mais

  3   je suis sûr qu'elle a été engagée pour interpréter pour les avocats et les

  4   accusés.

  5   M. le Président (interprétation). – Voyons si M. Domazet est

  6   prêt à accepter cela comme une traduction correcte ?

  7   M. Abell (interprétation). – Bien sûr !

  8   M. le Président (interprétation). – Monsieur Domazet, que dites-

  9   vous ? Souhaitez-vous que l'on diffuse la cassette avec le soutien du

 10   texte que M. Abell vient de mettre à votre disposition ?

 11   M. Domazet (interprétation). – Oui, Monsieur le Président.

 12   M. Dubuisson. – Si vous le désirez, monsieur le Président, ce

 13   que nous pouvons faire, c'est demander une traduction par nos services de

 14   la cassette vidéo. Mais celle-ci sera versée au dossier plus tard, si vous

 15   le souhaitez.

 16   M. le Président (interprétation). – Cela me paraît tout à fait

 17   raisonnable.

 18   M. Domazet (interprétation). – Nous sommes d'accord avec cette

 19   proposition aussi, Monsieur le Président.

 20   M. le Président (interprétation). – Monsieur Domazet, voulez-

 21   vous poursuivre dans ce cas-là ? Souhaiteriez-vous que l'on diffuse la

 22   cassette en ce moment ?

 23   M. Domazet (interprétation). – Oui.

 24   M. le Président (interprétation). – Monsieur le Greffier,

 25   pouvez-vous vous occuper des arrangements pratiques ?

Page 1123

  1   M. Dubuisson. – La cassette est numérotée 42 et le transcript

  2   donné par Me Abell sera numéroté 43, 43 bis pour la future traduction par

  3   nos services.

  4   M. Hollis (interprétation). – Peut-être ai-je mal compris

  5   quelque chose ? Mais d'après la traduction que j'ai reçue, j'ai cru

  6   comprendre que M. Domazet aurait préféré que l'on ait la traduction sous

  7   les yeux.

  8   Très bien. Je vois que c'est en train de se faire.

  9   M. le Président (interprétation). – Justement, c'est en train de

 10   se faire, madame Hollis.

 11   J'ai dix pages et demie de transcription sous les yeux. Est-ce

 12   que vous croyez que la cassette pourrait être diffusée en entier entre

 13   maintenant et peu après 13 heures ? Oui ?

 14   M. Domazet (interprétation). - Oui.

 15   M. le Président (interprétation). - Poursuivez dans ce cas-là.

 16   "Pour le dire très carrément, nous ne sommes pas ici, disons-le

 17   clairement, pour mettre au point un nouveau type de mensonge à la

 18   Auschwitz. Nous sommes ici pour garantir que, s'agissant de cet homme,

 19   nous puissions lui donner un jugement qui établira avec toute la certitude

 20   voulue s'il est coupable ou pas.

 21   - Vous déclarez-vous coupable ou non coupable ?

 22   - Je ne suis pas coupable et je n'ai participé à aucun des

 23   délits pour lesquels j'ai été accusé.

 24   Dusko Tadic, Serbe, soupçonné de coopération en matière de

 25   déportation, de nettoyage ethnique, de viols, meurtres, crimes contre

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  1   l'humanité, arrêté en février 1994 à Munich, extradé et déféré au Tribunal

  2   de guerre de La Haye.

  3   - Très bien j'ai couvert ce point, cet autre point, le soleil du

  4   crépuscule maintient la température à plus de 20 degrés vers 10 heures.

  5   Nous sommes le 25 avril 1995. M. Wladimiroff est chargé de la défense de

  6   Dusko Tadic. En Ex-Yougoslavie, la guerre civile sévit toujours. Michail

  7   Misa Wladimiroff est assis le dos tourné vers la rue dans son bureau. Il

  8   dit : "Il ne faut faire preuve d'aucune crainte". Il a toutefois des

  9   vitres pare-balles.

 10   - Peut-on comparer ce Tribunal avec les tribunaux de Nuremberg

 11   et Tokyo ?

 12   - Pas du tout, car l'ambiance est tout à fait différente :

 13   avant, c'était un Tribunal des vainqueurs face à une Allemagne détruite

 14   qui était perdante et qui devait être jugée par les vainqueurs. C'était

 15   une affaire tout à fait différente. Ici, nous parlons de crimes de guerre,

 16   mais ici, vous avez un pays qui est tout à fait en mouvement, un pays qui

 17   connaît toujours une situation de guerre.

 18   Question : Pourquoi est-ce là ?

 19   Réponse : Le Tribunal… Oui, là, c'est une question plus

 20   difficile. Le Tribunal a pour objet de sanctionner les crimes qui ont été

 21   commis, mais je pense que ce Tribunal existe aussi pour signaler aux

 22   parties belligérantes qu'il n'est pas possible de mener une guerre, une

 23   sale guerre avec des moyens sales aussi, qu'ils seront punis.

 24   Après cela, nous avons aussi eu un Eichmann et un Demjanjuk

 25   peut-on établir des parallèles ?

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  1   S'agissant d'Eichmann, je ne peux pas dire qu'il y ait des

  2   similitudes ; avec Demjanjuk, oui. S'agissant de Demjanjuk, j'ai eu cette

  3   idée : est-ce exact ou n'est-ce pas exact ? Un homme qui ne peut être jugé

  4   que par le témoignage de témoins bien après les événements, un garde du

  5   camp, pas l'homme qui était assis derrière un bureau à planifier tout

  6   cela. Cela, c'était Eichmann. Mais, ici, nous avons affaire à un homme qui

  7   a agi sur place et qui s'est rendu coupable de choses terribles pour

  8   lesquelles il a été accusé. Mais voilà le doute : l'a-t-il fait ou ne l'a-

  9   t-il pas fait ?

 10   C'est vraiment votre véritable profession de vous occuper d'une

 11   affaire difficile dans des circonstances difficiles.

 12   Wladimiroff est aussi professeur d'université et ses meilleurs

 13   étudiants l'aident à préparer la première phase du procès.

 14   En matière pénale, on ne peut pas dire qu'on va gagner une cause

 15   ou pas, s'il n'y a pas d'acquittement. Je suis déjà avocat depuis plus de

 16   vingt ans et je sais qu'on se demande davantage : est-ce que mon client

 17   s'en est sorti avec le moins d'égratignures possible ou bien est-il resté

 18   humain ? Est-il resté humain ou bien est-il devenu bestial ?

 19   Est-ce qu'il doit dire qu'il est coupable ?

 20   - Réponse de Wladimiroff : Il est certain qu'il serait démontré

 21   qu'il ne l'est pas, mais il faut attendre de voir ce qu'il en sera. Il y

 22   aura des questions qui seront posées et auxquelles on répondra.

 23   - Juge McDonald : L'accusation va-t-elle présenter ses éléments

 24   de preuve ? La défense est-elle prête également ?

 25   - Réponse : Oui.

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  1   - Journaliste : Au nom de la BBC, je voudrais vous poser

  2   quelques questions rapides à propos de ce procès. Les chefs d'accusation

  3   sont-ils des chefs d'accusation très graves, ceux qui ont été retenus

  4   contre votre client ?

  5   - Wladimiroff : C'est moi, Maître Wladimiroff, et voilà

  6   M. Vujin, peu importe.

  7   Je lui avais déjà rendu visite à Munich et j'avais devant moi un

  8   homme qui commençait à se rendre compte de la difficulté qu'il rencontrait

  9   puisqu'il était dans un pays étranger dont il ne parlait pas la langue.

 10   Alors que l'opinion publique était contre lui, il savait parfaitement

 11   qu'il avait le monde contre lui, et on sentait que cet homme était

 12   harcelé.

 13   Les avocats de Tadic (dit le commentaire) rendaient

 14   régulièrement visite à l'accusé en prison : il y a Wladimiroff, Vujin de

 15   Belgrade et Simic de Banja Luka, en Bosnie.

 16   Une ébauche de défense commence à se constituer. Tadic dit qu'il

 17   était agent de la circulation. Vujin a trouvé son emploi du temps, son

 18   programme de travail.

 19   - Vujin parle : Il est accusé d'avoir été à Omarska ; il était

 20   agent de circulation. Nous avons les dates, les heures, son emploi du

 21   temps.

 22   Me Wladimiroff reçoit des cassettes d'une secrétaire. Il dit :

 23   "Oui, ceci concerne M. Tadic.

 24   Nous avons interrogé Tadic pendant trois jours complets.

 25   Traduction de la cassette d'une audience : - Vous avez le droit

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  1   de garder le silence, mais vous avez aussi le droit d'être défendu par un

  2   avocat de votre choix.

  3   - Me Wladimiroff : Il s'agit, bien sûr, de savoir comment il

  4   peut se défendre au mieux. Il faut pouvoir réfléchir à la façon dont on

  5   répond à telle ou telle question.

  6   Commentaire : En juin 1995, Tadic a fait une grève de la faim en

  7   guise de protestation contre une réglementation relative aux visites qui

  8   ne marchaient pas, parce qu'il devait porter des vêtements de prisonnier.

  9   - Me Wladimiroff : En réaction, je pense qu'il est allé jusqu'à

 10   dire : “Je ne veux pas porter ces vêtements que vous m'avez donnés” et

 11   maintenant il se déplace en sous-vêtements, ce qu'il faudrait qu’il se

 12   passe. Je pense que la raison est tout à fait différente. Je pense que cet

 13   homme -et c’est compréhensible- s'inquiète beaucoup de sa défense et de ce

 14   que font les avocats yougoslaves.

 15   Dans le commentaire : Me Wladimiroff va donc se rendre sur

 16   place.

 17   - Me Wladimiroff : Les avocats yougoslaves étaient censés aider

 18   à trouver des témoins en Yougoslavie pour que ces témoins puissent être

 19   interrogés. La vérité est que, jusqu'à présent, je n'ai rien reçu.

 20   Commentaires : Il ne peut pas voyager avec la ligne aérienne

 21   JAT, ligne yougoslave, parce qu'il y a un embargo économique prononcé

 22   contre la nouvelle Yougoslavie de Milosevic.

 23   Mi-juillet : grande chaleur, la température est toujours

 24   supérieure à 30 degrés.

 25   - Me Vujin dans la voiture : Pourquoi avez-vous dû voyager avec

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  1   la Swiss Air ?

  2   - Me Wladimiroff : Je ne sais pas.

  3   - Me Vujin : A cause du Tribunal, je comprends. Oui, oui, je

  4   sais.

  5   Commentaires : L'embargo économique semble aussi sévir sur

  6   l'autoroute. L'autoroute est vide. Voici l'hôtel, l’hôtel, lui aussi, est

  7   vide. Nous sommes les seuls clients.

  8   - Me Wladimiroff le lendemain dans la voiture : Il va y avoir un

  9   contentieux juridique et il faut que nous nous préparions à ce combat

 10   parce que nous ne voulons pas perdre. Nous sommes des gagnants, n'est-ce

 11   pas ? Il faut tout du moins essayer, véritablement essayer de mener cette

 12   affaire à bien. Je m'inquiète beaucoup des possibilités que nous avons :

 13   est-ce que nous allons réussir à trouver la trace de témoin ? Est-ce que

 14   nous allons réussir au niveau du contre-interrogatoire des autres

 15   témoins ? Est-ce que nous allons finalement gagner cette cause ?

 16   Commentaires : Etant donné l'embargo économique, l’essence vaut

 17   de l’or. Au cours de notre voyage en Serbie bosniaque, nous avons un agent

 18   de la sécurité avec nous, Branko, qui surveille tout.

 19   - Me Wladimiroff : Oui, il vivait ici, dans ce bâtiment. J'ai

 20   une obligation, c'est Vujin qui devrait le faire. Tournez la caméra vers

 21   la maison.

 22   Commentaires : Les Musulmans se sont préparés avant la guerre de

 23   Kozarac ; c'était une opération appelée “ La nuit silencieuse ” dont le

 24   but était de liquider les Serbes émanant de Kozarac. Dusko, sa mère, sa

 25   femme et ses enfants devaient être massacrés par leurs voisins et leurs

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  1   amis. Alors, je vous demande de quelle sorte d'amis s'agit-il.

  2   - Question : Est-ce que vous pouvez nous dire comment se fait-il

  3   que vous connaissiez Dusko Tadic ? Vous le voyez souvent ?

  4   - Réponse : Oui, je le connais depuis avant.

  5   Comment Wladimiroff a enregistré les interventions de chaque

  6   témoin, il ne sait toujours pas si ces témoins pourront venir à La Haye.

  7   - Question : Peu importe. Ce monsieur est avocat des Pays-Bas et

  8   voudrait vous poser quelques questions.

  9   - Réponse : Oui, c'est possible, il n'y a pas de problème.

 10   -- Question : On a dit, on a reçu l'information comme quoi vous

 11   serviez du café souvent ici ?

 12   - Réponse : Oui, oui, c'est exact. Je donnais tout ce que

 13   j'avais à tout le monde mais aussi à Dusko Tadic. Oui, lui aussi. Il ne

 14   faut pas que vous dites cela avant que lui pose cela dans le cadre de sa

 15   question, mais peu m'importe ce qu'il veut dire ; moi je veux dire ce que

 16   je veux dire.

 17   - Me Wladimiroff : Nous allons vers la maison de la femme de

 18   Tadic. Là se trouve aussi le chef de la police pour qui a travaillé

 19   M. Tadic. Ce chef de la police veut faire une déclaration.

 20   - Question : Cela, c'est pour toi. Maintenant, il parle de

 21   nouveau de la période avril-mai 1992. Est-ce qu’à l'époque, vous avez

 22   travaillé dans le cadre de la police de la circulation ?

 23   - Réponse : Oui, avant la guerre, j'étais l'adjoint du chef

 24   mais, sinon, au moment où il y a eu le changement de pouvoir, je suis

 25   devenu le chef du poste de police. Et quand Tadic s'est rejoint à votre

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  1   unité, où l'avez-vous amené Tadic ?

  2   - Réponse : Il travaillait exclusivement comme policier de la

  3   circulation.

  4   La femme de Tadic dépose aussi à propos de ce poste de contrôle.

  5   Elle dit très exactement : mais souvent, c'était le cas.

  6   - Question : Est-ce que vous aviez l'impression que vous pouviez

  7   voir ce qui lui arrivait ? Quel était son sentiment ?

  8   - Réponse : Oui, je pense que nous étions suffisamment proches.

  9   Il est le genre de personne qui ne pourrait pas cacher cela, ni cela ni

 10   autre chose.

 11   Sasa, vas-y, l'avocat est pressé. Veux-tu lui dire de dire

 12   bonjour à ton père : Dis bonjour à ton père.

 13   - Me Wladimiroff :Dans ce village de Kozarac, la première chose

 14   que j'ai essayé de faire, c'est de me présenter et de comprendre un peu la

 15   vie telle qu’elle se déroulait là. Je l’ai fait exprès parce que vous

 16   viviez ici ; votre voisin est musulman, il est armé tout comme vous, vous

 17   l'êtes. La question se pose alors de savoir qui est le premier dans le

 18   village : est-ce une force armée musulmane ou est-ce une force armée serbe

 19   qui l’est ?

 20   Ainsi, quelquefois, on peut avoir un climat de suspicion

 21   mutuelle d'enquêtes et de recherches mutuelles. Est-ce que cela veut dire

 22   que quelquefois vous voulez être devant l'autre pour éviter que l'autre ne

 23   vous devance ?

 24   Et dans ce climat que moi, je ne perçois pas nécessairement

 25   bien, il est difficile de comprendre que c'est ce qui s'est passé.

Page 1131

  1   Mais on peut quelquefois mieux comprendre l'incompréhensible,

  2   mieux savoir ce qui s'est passé, plutôt que de l'accepter.

  3   4 octobre 1995 : le Tribunal de La Haye a des problèmes de

  4   financement. Wladimiroff ne peut pas trouver d'enquêteur ou financer un

  5   enquêteur lui-même et il pense qu'il ne peut plus gérer le procès lui-

  6   même.

  7   - Me Wladimiroff : Si l'on continue maintenant, vous ne pouvez

  8   pas accorder un procès honnête à cet homme parce qu'il ne peut pas trouver

  9   ses propres témoins. Il ne peut pas les interroger et donc sa défense ne

 10   lui est pas permise.

 11   Le problème du manque de fonds est toujours quelque chose de

 12   désagréable. Etant donné qu'il n'y a pas de solution véritable parce que,

 13   bien sûr, il y a certains avocats qui ont été assignés à l'affaire, mais

 14   le problème, c'est que l'on n'a pas assez d'hommes. Le problème devra être

 15   résolu d'ici décembre ; sinon moi, je vais me retirer de l'affaire. Si

 16   vraiment tout éclate en décembre, je le dis ici -bon, je ne pense pas,

 17   mais j'ai déjà dit- que si ceci n'était pas résolu d'ici décembre, je

 18   n'irai pas beaucoup plus loin.

 19   Wladimiroff gagne sa bataille face à la bureaucratie

 20   "onusienne". Sa rémunération horaire sera trois fois supérieure. Il pourra

 21   utiliser un associé, Me Orie, et deux enquêteurs yougoslaves. Il y a des

 22   bombardements de l'OTAN qui forcent les parties yougoslaves à s'asseoir

 23   autour de la table des négociations à Dayton.

 24   Tadic maintient son innocence. "Il dit qu'il n'a rien fait", dit

 25   Me Wladimiroff.

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  1   - Le journaliste : Le croyez vous ?

  2   - Réponse : Je ne suis pas en mesure de savoir si je le crois ou

  3   pas parce que ceci ne me mène à rien. Cela n'aide pas ; cela ne mène à

  4   rien parce que je ne veux pas me poser cette question. Bien sûr, elle est

  5   toujours présente à mon esprit, mais je ne peux pas me permettre de me la

  6   poser. Si je le faisais, je ne serais plus un bon avocat pour lui.

  7   Commentaire : Un mois plus tard, les accords de Dayton sont

  8   signés, mais Wladimiroff ne semble pas faire de progrès dans son enquête.

  9   Il est frustré par rapport à son collègue yougoslave, Me Vujin. Il rend

 10   rapidement visite à Karadzic. Ceci n'est pas enregistré.

 11   - Me Wladimiroff : J'ai eu le sentiment que je devais tout faire

 12   pour essayer de faire avancer l'affaire. Etant donné les signes que j'ai

 13   reçus par rapport à Karadzic, j'ai pris contact avec lui un mardi matin.

 14   C'est un homme intelligent ; il comprend très vite ce que l'on veut lui

 15   demander et il a pris des mesures, dans la mesure où, par exemple, lorsque

 16   nous avons parlé de Drljaca, le chef de la police de Banja Luka, et que

 17   nous avons dit que c'était notre plus gros obstacle parce qu'il

 18   interdisait aux gens de s'entretenir avec nous, Karadzic a tout de suite

 19   téléphoné à cet homme, lui a expliqué que ce n'est pas ce qu'il voulait,

 20   qu'il voulait que la défense puisse bénéficier de toutes les occasions

 21   possibles pour se préparer et j'ai entendu cet autre homme répondre qu'il

 22   allait se conformer aux ordres.

 23   Il a été possible, pendant deux mois, de faire une enquête,

 24   d'enregistrer. Lorsque j'ai proposé que j'aille voir dans les camps, il a

 25   réagi de façon positive, et puis nous avons parlé de façon générale. Tout

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  1   ceci a duré une heure, une heure un quart, peut-être une heure et demie.

  2   Si l'on parle de sa propre persécution et de la question de

  3   savoir si lui-même va être traduit en justice, il a dit : "S'ils me

  4   reconnaissent comme chef d'Etat, alors, à ce moment-là, je veux y aller et

  5   je le ferai sans conseil. Je ne veux pas être défendu. La seule chose que

  6   je ferai, c'est m'asseoir devant ce Tribunal et l'examiner d'un regard

  7   fixe".

  8   Commentaire : 13 janvier 1996 : c'est la nouvelle année

  9   orthodoxe pour Dusko Tadic. Sa femme vient à La Haye.

 10   - Question du journaliste : Avez-vous demandé à la femme de

 11   Tadic de venir pour un peu plus de publicité agressive ?

 12   - Réponse de Me Wladimiroff : Je pense qu'en accord avec son

 13   mari, elle veut effectivement dire quelque chose pour donner un visage

 14   humain à Tadic.

 15   "Mon mari est innocent en prison. C'est la raison pour laquelle

 16   il peut tenir le coup. Je sais qu'il doit apporter la preuve de tout cela

 17   et c'est la raison pour laquelle il supporte tout. Il est déjà en prison

 18   depuis deux ans. C'est un miracle qu'il ne soit pas devenu fou, mais ceci

 19   lui donne une bonne motivation pour résister à tout."

 20   Commentaire : En février 1996, Wladimiroff doit aller en Bosnie

 21   pour la troisième fois. Comme toujours en passant par Belgrade. Son

 22   collègue Vujin ne semble pas faire du bon travail.

 23   - Me Wladimiroff : Il est censé faire des choses qui ne se font

 24   pas. J'en suis de plus en plus inquiet. Nous nous demandons s'il a encore

 25   sa place dans l'équipe de la défense. Parce que nous nous demandons, de

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  1   plus en plus, s'il fait preuve de coopération ou plutôt de manque de

  2   coopération ou, ce qui est plus grave encore, est-ce qu'il poursuit des

  3   objectifs que nous ne poursuivons pas ?

  4   Commentaire : En dépit des promesses déjà faites par Karadzic,

  5   l'équipe de Wladimiroff qui travaille à Banja Luka est fortement entravée

  6   dans ses activités par le chef de police.

  7   - Me Wladimiroff : Drljaca a dit ceci à notre enquêteur :

  8   D'abord… -Me Orie parle d'abord-, Drljaca l'a laissé attendre avant de lui

  9   dire que si notre enquêteur faisait d'autres tentatives, il allait le

 10   mettre en prison.

 11   Commentaire : Vujin est invité à avoir une discussion sérieuse.

 12   Il reçoit comme message ceci : "Dites à Milosevic et à Karadzic que si

 13   nous n'obtenons pas de coopération de leur part, nous allons les accuser

 14   d'obstruction à la justice aux accords de Dayton. Les juges du Tribunal

 15   ont donné ce mandat à Wladimiroff."

 16   Pendant que Vujin négocie, l'ambiance, le climat est tout à fait

 17   lugubre le lendemain lorsque nous essayons d'aller à Banja Luka. Nous

 18   allons dans cette ville où trop de Serbes sont encore au pouvoir qui ont

 19   sali leurs mains au cours de la guerre.

 20   Ils ne sont pas du tout prêts à courir le moindre risque en

 21   soutenant Tadic.

 22   Et le climat ne s'améliore pas lorsqu'à Banja Luka, l'hôtel n'a

 23   ni eau, ni chauffage.

 24   Mais il apparaît alors que l'entretien que nous avions eu avec

 25   Vujin, la veille au soir, avait quand même porté ses fruits.

Page 1135

  1   Des nouvelles de Tadic ?

  2   - Interprète : Republika Srpska, le gouvernement : En

  3   application de l'ordre donné par le Président de la Republika Srpska, le

  4   docteur Radovan Karadzic, nous vous informons de ce que les témoins

  5   peuvent être interrogés sur le territoire de la municipalité de Prijedor

  6   en rapport avec l'affaire Dusko Tadic, dès le 2 février 1996.

  7   Commentaire : Equipé de ce fax, Wladimiroff obtient toute la

  8   coopération voulue. Il est escorté par la police et les avocats peuvent,

  9   pour la première fois, entrer dans les anciens camps de concentration.

 10   Nous sommes ici à Keraterm. C'est ici que les Musulmans venant du village

 11   de Tadic sont arrivés après la capture du village par les Serbes.

 12   Wladimiroff essaie de reconstituer les événements qui s'y sont déroulés.

 13   - Me Wladimiroff : Il m'est apparu clairement quelle était la

 14   réception réservée aux Serbes et les chances qu'avaient les Musulmans de

 15   trouver un endroit, chances qui étaient pratiquement nulles. Beaucoup de

 16   Musulmans ont pensé : nous allons partir d'ici.

 17   M. le Président (interprétation). – Maître Domazet, on a

 18   l'impression que cette cassette va encore durer un certain temps. Je vous

 19   propose ceci : retenons la suggestion du Juge Hunt. Nous allons mettre un

 20   "post-it" à l'endroit où nous nous arrêtons maintenant et nous allons

 21   suspendre l'audience jusqu'à 14 heures 35. Est-ce que ceci vous convient ?

 22   M. Domazet (interprétation). – Monsieur le Président, cela me

 23   convient tout à fait. Je m'excuse d'ailleurs étant donné que je croyais

 24   que la vidéo était plus brève. Mais nous pouvons tout à fait continuer

 25   après la pause.

Page 1136

  1   M. Abell (interprétation). – Monsieur le Président, comme je

  2   l'ai dit tout à l'heure, d'après mon souvenir, c'est que cette cassette

  3   dure beaucoup plus qu'une demi-heure : environ une heure, plus d'une

  4   heure.

  5   M. le Président (interprétation). – Monsieur Domazet, peut-être

  6   que, pendant la pause, vous pourriez réfléchir à la question de savoir si

  7   vous avez besoin que l'ensemble de la cassette soit diffusée ?

  8   M. Domazet (interprétation). – Je le ferai, Monsieur le

  9   Président.

 10   M. le Président (interprétation). – Dans ce cas, nous allons

 11   reprendre à 14 heures 35.

 12   La séance, suspendue à 13 heures, reprend à 14 heures 40.

 13   M. le Président (interprétation). – L'audience est reprise.

 14   Maître Domazet, souhaitez-vous prendre la parole et évoquer la question de

 15   la cassette qu'on est en train de diffuser ?

 16   M. Domazet (interprétation). – Monsieur le Président, je

 17   voudrais vous proposer, je vais vous prier même de diffuser la cassette

 18   jusqu'au bout.

 19   M. le Président (interprétation). – Fort bien. Est-ce qu'on peut

 20   reprendre la diffusion de la cassette ? Merci.

 21   (Diffusion de la cassette.)

 22   Commentaire : la situation était décrite de façon assez

 23   abstraite. On a vu comment des personnes ont été déportées, emmenées dans

 24   cet endroit qui était à l'époque une usine. Je vois qu'il y avait des

 25   problèmes vu les quantités nombreuses de personnes. Quelques mois plus

Page 1137

  1   tard, le camp va jouer un certain rôle.

  2   Me Hollis : On a montré que les personnes n'avaient aucune

  3   raison d'être là. C'était un camp établi pour la détention forcée de

  4   civils non serbes qui étaient maltraitées. Les conditions de vie étaient

  5   horribles : pas assez de nourriture, pas de toilettes. Les personnes

  6   étaient frappées lorsqu'elles se rendaient aux toilettes.

  7   Me Wladimiroff : Ceci défie toute imagination. Je trouve le

  8   jugement légitime si on dit, par exemple, étant donné le côté horrible des

  9   choses, je ne peux plus gérer ce procès. C'est aussi acceptable et logique

 10   si on est trop impliqué personnellement. On peut dire : "Je ne peux pas

 11   continuer à assurer cette défense". Ou alors, on essaie de respecter ce

 12   côté professionnel et on dit : "Oui, je peux assurer cette défense ; je

 13   suis professionnel. Je peux rester professionnel et j'espère pouvoir

 14   continuer à assurer cette défense".

 15   Question du journaliste : "Vous avez donc érigé une espèce de

 16   protection intérieure ?"

 17   Réponse de Me Wladimiroff : "Oui, c'est ce que j'ai fait".

 18   Imaginez qu'en tant qu'avocat, vous êtes vraiment pris par toute cette

 19   misère et qu'un peu comme tout le monde, on est emporté. On est bouleversé

 20   par cette horreur. Alors, on fait un choix. On dit : "Voilà, je ne veux

 21   pas comprendre, je refuse de comprendre". Mais je suppose qu'en tant

 22   qu'être humain, normal, on autorise des sentiments alors qu'en tant

 23   qu'avocat, on a une tâche à remplir. Si on fait preuve d'un esprit

 24   conséquent, cela veut dire que quiconque fait office d'avocat dans un

 25   procès, doit dire qu'il abandonne la défense parce que ce genre de chose,

Page 1138

  1   il ne peut pas la défendre. Ceci aurait pour résultat que, finalement, la

  2   justice ne peut pas faire son œuvre. Parce que la justice exige que

  3   quiconque est traduit en justice et jugé soit bien défendu, puisse le

  4   faire correctement et dispose d'un avocat. Ceci a pour conséquence

  5   qu'effectivement, vous devenez dans un cas extrême l'avocat du diable.

  6   Question du journaliste : A votre avis, combien d'hommes ont

  7   trouvé la mort ici à Omarska ?

  8   Réponse de Me Wladimiroff : "Je ne peux pas donner de chiffre.

  9   Quand je vois l'affaire Tadic, ceci ne donne pas une idée d'ensemble. On

 10   peut dire que des dizaines de personnes sont mortes ici chaque jour.

 11   Surtout ici derrière, dans ce cette maison blanche.

 12   Question : Parce que c'était le quartier général ?

 13   Réponse : Non parce que c'était là que se faisaient la plupart

 14   des tortures. Si vous étiez emmené à la Maison blanche, c'était la fin.

 15   (Images du procès).

 16   Commentaires : Dans la deuxième pièce à droite, il s'agit de la

 17   pièce de la mort. Il s'agit d'une toute petite pièce. J'ai vu Anes

 18   Medunjanin, un jeune homme que je connaissais auparavant, mais j'ai eu

 19   beaucoup de peine à le reconnaître. Il n'avait pas un visage fatigué,

 20   épuisé, mais c'était une masse. Ce n'était pas le visage. On ne voyait

 21   pratiquement pas les yeux. Il était enflé parce qu'il a été passé à tabac.

 22   Question du journaliste : "Et les prisonniers se trouvaient dans

 23   cette cantine ?

 24   - Réponse : Oui, il y avait une cantine ; et vous avez aussi la

 25   pista ici dont on a parlé.

Page 1139

  1   Un des chefs d'accusation les plus horribles retenus contre

  2   Tadic concernait le fait qu'un ordre était donné à des prisonniers de

  3   couper la "bridznita" de l'autre ?

  4   - J'ai regardé à travers la porte et j'ai vu Dusko Tadic, il

  5   était derrière, il y avait des gens qui proféraient des injures. On a dit

  6   également qu'il fallait lécher des fesses, enfin, d'enculer sa mère. Après

  7   tout ceci, on a entendu des cris de douleur. On disait : "Serre-toi" ,

  8   ensuite, on disait "Retire-le", etc. Je n'oublie jamais parce que ce sont

  9   des choses qui me reviennent, ce sont des paroles qui me reviennent à

 10   l'esprit. C'étaient des cris de douleur qu'on entendait tout le temps, des

 11   cris de ceux qui se meurent. Je ne savais pas ce qui se passait derrière

 12   la porte.

 13   - Plaidoyer de Me Wladimiroff à l'audience : "Cette Chambre a

 14   pour obligation de trouver la vérité derrière les déformations qui lui ont

 15   été présentées. Les témoins qui ont souffert, doivent être consolés, mais

 16   il ne faut pas nécessairement croire un témoin tout simplement parce qu'il

 17   a souffert.

 18   Commentaire : Les difficultés que l'on rencontre, c'est parce

 19   qu'on a affaire à des personnes qui, à côté des paramètres de la rage, de

 20   l'émotion, ont essayé de sauver leur vie. Et, bien sûr, ceci peut

 21   contribuer à établir la vérité. On peut dire : "Bon, c'est un Serbe ; il

 22   est donc de la partie opposée, mais on n'est pas tout à fait sûr que c'est

 23   lui".

 24   - Le Procureur : "I n'a jamais été comme cela. Tu dois avoir

 25   honte, tu n'étais jamais comme cela !"

Page 1140

  1   Commentaire : A côté d'Omarska, il y avait un autre camp, celui

  2   de Trnjo Polje* et, suivant l'acte d'accusation, Tadic se serait rendu

  3   coupable de toute une série de viols dans ce camp.

  4   Il est impossible de déterminer dans quelle mesure l'observation

  5   faite par quelqu'un est correcte ou pas. Il faut pouvoir contrôler ceci,

  6   vérifier ceci au regard de certains points de repère. On peut estimer si

  7   une déclaration est correcte parce que quelqu'un a certains points de

  8   repère objectifs : est-ce que les murs sont bleus, verts ou jaunes, est-ce

  9   que l'on peut regarder à l'extérieur ou faut-il se mettre sur la pointe

 10   des pieds pour le faire ?

 11   Voilà le genre de choses qui est importante. C'est ce que je

 12   suis en train de recueillir comme renseignements.

 13   Un peu plus loin se trouve la maison où, apparemment,

 14   supposément, ces viols auraient été commis.

 15   - Me Wladimiroff : Je suppose que ceci était bien cet endroit

 16   dont nous parlons.

 17   - Pourquoi penses-tu cela ?

 18   - Pour toute une série de raisons : d'abord la taille de ce

 19   bâtiment. Cela correspond à l'image que j'ai à partir de déclarations

 20   préalables. Ce n'est peut-être pas très important, mais je pense

 21   qu'effectivement, ici, il y a un matelas crevé et, dans toute cette

 22   histoire, il est important de voir que dans cette petite pièce, il n'y

 23   avait qu'un matelas, ce qui n'était pas le cas dans l'autre bâtiment,

 24   ainsi qu'on passait le long de la cage d'escalier.

 25   - Me Wladimiroff : La guerre est une affaire de "machos"; ce

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  1   sont des hommes contre des hommes qui se déchargent de leurs tensions.

  2   C'est terrible, mais effectivement, ils se délestent de leur tension par

  3   ces atrocités, par le viol, par exemple. On peut dire que c'est presque

  4   une conséquence fatale de la guerre.

  5   - Réponse de l'autre personne : Non, non, maintenant ici, nous

  6   avons un nouveau type de viols systématiques de Musulmanes afin de les

  7   humilier et afin d'annihiler un groupe ethnique.

  8   - Réponse de Wladimiroff : Je ne pense pas. Je pense que l'on

  9   peut donner à cette histoire toutes sortes de protagonistes, les Allemands

 10   ont violé les femmes russes pendant la guerre, les Russes ont violé les

 11   Allemandes. On peut le transposer à toute guerre.

 12   Pendant tout ce temps, on a parlé d'un sosie de Tadic.

 13   - Orie : "Et qu'est-ce que c'est ?

 14   - C'est une cassette que l'on vient de recevoir du frère de

 15   Tadic qui reprend une conversation téléphonique qu'il a eue avec quelqu'un

 16   d'autre qui s'appelle aussi Tadic, Brko Tadic, et qui dit que quelqu'un

 17   d'autre dans le camp était en fait le sosie de Dusko Tadic. Je n'ai pas

 18   encore écouté cette cassette, je vais l'écouter maintenant.

 19   - J'ai déjà dit que Dusko n'a participé à aucune opération : il

 20   n'avait même pas accès. Non, personne ne veut le dire. De toute façon, il

 21   ne coopère pas et on sait très bien de qui il s'agit.

 22   - L'autre voix, : Mais j'ai vu cet homme ; je l'ai vu également

 23   il y a quelques jours, il se promenait.

 24   - Commentaire : Mais Wladimiroff ne veut retenir cette théorie

 25   du sosie que si d'autres témoins la corroborent.

Page 1142

  1   Il rend visite à un ex-prisonnier du camp.

  2   - Est-ce que vous avez déjà vu Dusko Tadic au camp d'Omarska ?

  3   Est-ce qu'elle a entendu dire que Tadic s'y trouvait, même si elle ne l'a

  4   pas vu, pendant qu'elle était là ? Est-ce qu'elle a jamais vu cet homme se

  5   déplacer dans le camp ?

  6   - Voilà. J'ai la photographie ici. Mais, de toute façon, je n'ai

  7   jamais vu cet homme dans le camp. C'est Miso Danitic*.

  8   - Est-ce qu'elle pense que cet homme fait partie des personnes

  9   qui ressemblent à Tadic ou veut-elle parler des autres hommes ?

 10   - Il ressemble, oui, effectivement, il ressemble.

 11   - Commentaire : Le lendemain matin, les frères de Tadic trouvent

 12   celui qui est censé être le sosie. Nous avons filmé ceci à partir d'un

 13   combi renforcé et ils suivent l'homme quand il va à son travail.

 14   Enfin, le procès commence. Nous sommes le 7 mai 1996.

 15   Me Wladimiroff est aidé d'un avocat yougoslave, Vujin… Pardon, a

 16   remplacé Me Vujin par deux conseils britanniques.

 17   Me Niemann : Vous l'aurez remarqué, l'ouverture de ce premier

 18   procès auprès de ce Tribunal est un événement historique. Mais c'est aussi

 19   un événement solennel. Toute cour pénale a un devoir redoutable et ce

 20   Tribunal a effectivement un devoir très ardu dont il doit s'acquitter.

 21   Commentaire de Me Wladimiroff : Nous nous attendions à ce que

 22   cette histoire refasse surface. Il est aussi dans leur intérêt d'avoir une

 23   histoire complète, parce qu'ils doivent évidemment présenter leurs

 24   éléments de preuve et ils doivent bien sûr ici dresser un tableau complet

 25   de la situation en ce faisant. Nous allons dire que nous n'avons rien à

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  1   faire avec tout cela, car nous ne pouvons pas discuter de ce qui s'est

  2   passé dans les camps. Notre situation est simple : en fait, nous avons une

  3   affaire qui s'est déroulée en dehors des camps puisque Tadic n'était pas

  4   là.

  5   Jusque dans l'après-midi, Wladimiroff prépare ses remarques

  6   liminaires.

  7   - Question : Est-ce que vous l'avez quelque part ?

  8   - Réponse de Wladimiroff à Bertodano : Oui. Je crois que si l'on

  9   ajoute son prénom, cela le rend plus humain. Vladir n'a pas participé à

 10   des razzias. Il n'a joué aucun rôle dans le fait d'organiser des razzias

 11   ou dds attaques. Mais je pense...

 12   - Oui, oui, c'est moi qui vais m'en occuper.

 13   A l'audience. - Me Wladimiroff : Au dix-septième siècle, Madame

 14   et Messieurs les Juges, un auteur néerlandais bien connu, Hugo Degroot,

 15   expert en droit international, a écrit ceci : "Lorsque la justice fait

 16   défaut, la guerre commence."

 17   Commentaire : Deux mois plus tard, juste de retour d'un nouveau

 18   voyage en Bosnie, Wladimiroff a décidé de ne pas utiliser la théorie du

 19   sosie. Il ne veut pas semer la confusion pour la confusion.

 20   - Bonjour.

 21   - Bonjour. Je viens vous voir…

 22   Il sélectionne les extraits de vidéo nécessaires pour le procès.

 23   Déclaration de décembre de Dusko Tadic : Et vous dites

 24   décembre ?

 25   - Réponse : 95.

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  1   - Maître Wladimiroff : Il a l'air en bien meilleure santé. Est-

  2   ce qu'il souffre du procès ?

  3   - Mais vous voyez, il est là paralysé. Il doit bien sûr toujours

  4   préparer les entretiens que nous avons, comment nous allons présenter

  5   telle ou telle question. Ceci fait qu'il doit laisser tout le fardeau de

  6   ceci à ses avocats.

  7   Oui, au début, nous lui avons dit qu'il devait avoir l'air le

  8   plus neutre possible. Ce n'est pas facile évidemment.

  9   Je suis parti à gauche et puis, du côté droit, j'ai entendu :

 10   "Mais, mon frère, pourquoi j'en suis coupable, pourquoi tu me frappes ?"

 11   On frappait quelque part dans le hangar.

 12   Nous sommes de nouveau à l'automne. Le procès se trouve dans une

 13   phase cruciale lorsque Wladimiroff arrive avec des arguments où il essaie

 14   de contrer le principal témoin de l'accusation. C'est un cas particulier

 15   effectivement parce que, d'abord, il y a eu des accusations très lourdes :

 16   on l'a accusé d'être présent au cours d'au moins une dizaine de viols ; il

 17   est accusé d'avoir violé lui-même certaines femmes. On parle aussi d'une

 18   vingtaine de meurtre, voire trente meurtres. Et tout ceci est entre les

 19   mains du témoin L.

 20   Le témoin L a dit à l'audience que son père ne vivait plus, que

 21   sa mère est la seule qui soit restée en vie avec sa sœur. C'est la raison

 22   pour laquelle il demandait des mesures de protection parce que sa mère

 23   vivait en territoire serbe.

 24   Dans l'intervalle, nous avons parlé avec le père du témoin L qui

 25   en vie, c'est-à-dire que son histoire n'est pas exacte et que le témoin L

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  1   a des frères. De plus, le témoin L parle, dans sa déclaration, d'une

  2   maison blanche qui se trouve le long d'une certaine route ; et le long de

  3   cette route, il n'y a que des maisons blanches.

  4   - "Couché !", dit Me Wladimiroff à un chien dans une pièce. Il

  5   dit que ce n'est pas là la maison et qu'il ne connaît…, qu'aucune de ces

  6   maisons n'a une cave. Mais, en fait, tous les témoins parlent d'une maison

  7   qui se trouve près d'un puits. Et ce témoin ne connaît rien d'un puits ;

  8   c'est un puits de taille normale que l'on ne peut pas ignorer si l'on

  9   passe le long de la maison.

 10   - Commentaire : Oui, c'est cette petite photo là ? Et ça, c'est

 11   le père du témoin L ?

 12   Me Wladimiroff : Oui. Je l'ai copiée pour la montrer au

 13   témoin L. Je pense qu'il aura moins de difficulté à admettre que c'est

 14   bien son père, puisque voilà : je la place à côté de la même photographie

 15   et vous avez là le témoin L à côté du père.

 16   Nous avons déjà sélectionné ces photos, vous avez la même photo,

 17   ici. Et voici notre interprète.

 18   Commentaire : Fin octobre 1996, des journalistes vivent le

 19   moment où le témoin L se dévoile au procès. L'accusation retire la

 20   déposition du témoin L. Un des enquêteurs donne une explication.

 21   La première chose que j'ai demandée, c'est pourquoi il avait

 22   menti à propos de la mère de son père et pourquoi il n'avait pas voulu

 23   reconnaître des photographies qui lui avaient été soumises à l'audience.

 24   On lui avait montré son père. Et puis, il a dit qu'il avait été obligé de

 25   le faire par les Bosniens. Et il a dit que la première fois qu'il avait vu

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  1   Tadic, c'était à l'occasion d'une cassette vidéo qu'on lui avait montrée à

  2   Sarajevo et il a dit qu'après avoir d'abord été interrogé par les

  3   militaires, il avait été transféré à Sarajevo où il avait parlé avec des

  4   enquêteurs de la police pendant sept heures par jour pendant à peu près un

  5   mois. L'objet de ces entretiens était d'essayer de forcer Dragan Opacic à

  6   déposer contre M. Tadic.

  7   - Me Wladimiroff à l'extérieur du Tribunal : S'il est établi,

  8   c'est important, qu'il ment parce qu'effectivement on peut dire que cela

  9   peut entraîner un déni de justice, est-ce que vous allez raconter ceci au

 10   monde entier ?

 11   - Me Wladimiroff : Bien sûr, clairement, parce que c'est trop

 12   choquant. Si c'est exact, à ce moment-là, effectivement, il pourrait y

 13   avoir un vice de forme au niveau du jugement.

 14   Commentaire : Après six mois et demi de procès, le dossier Tadic

 15   fait 6000 pages. Accusation et défense procèdent à la phase finale

 16   réquisition et plaidoirie.

 17   - Me Hollis à l'audience : Il y a quelque 50 ans, le monde

 18   frissonnait d'horreur devant la destruction horrible imposée par un groupe

 19   humain sur un autre. La réaction à ces horreurs a été la promesse de ne

 20   plus reproduire cela. Ce Tribunal existe aujourd'hui et vous siégez

 21   aujourd'hui parce que cette promesse n'a pas été tenue. Treize témoins ont

 22   vu l'accusé au camp d'Omarska à partir du mois de mai, l'ont vu sur la

 23   pista, rentrer dans la maison blanche, en sortir dans la cantine. Omarska,

 24   c'était un cauchemar dont beaucoup ne se sont pas réveillés. Les meurtres

 25   et sévices étaient continus.

Page 1147

  1   - Me Wladimiroff : Il n'y a pas eu d'enquête pour déterminer

  2   l'essentiel en matière pénale : la vérité. Seule, la partie adverse a été

  3   entendue et appelée.

  4   Une telle accusation, une telle poursuite est tellement

  5   unilatérale et incomplète et vouée à l'échec si cette Chambre prend son

  6   travail au sérieux comme nous savons qu'elle le fait.

  7   Commentaire : Nous parlons du titre du documentaire. Et puis,

  8   vous avez dit : "S'il ressort quelque chose de positif de tout cela, on

  9   pourra peut-être parler du sorcier". Oui, dans cette affaire, il est

 10   évident qu'on a commencé à moins dix, ou à même plus. Le public pense

 11   qu'il est coupable, l'équipe d'enquête a procédé à l'enquête et a pensé

 12   que Tadic était le coupable. Les gens pensent en général qu'il est le

 13   coupable. Les choses étant ce qu'elles sont, il faudrait vraiment trouver…

 14   On pourrait parler de sorcellerie si je réussissais à faire comprendre aux

 15   Juges que ce n'est pas le cas et que les juges ne partagent pas cette

 16   opinion communément répandue.

 17   (Fin de la cassette.)

 18   M. le Président (interprétation). – Monsieur Domazet, je pense

 19   que nous avons terminé la diffusion de cette cassette vidéo, vous pouvez

 20   poser les questions, si vous voulez bien.

 21   M. Domazet (interprétation). – Merci, Monsieur le Président.

 22   Monsieur Wladimiroff, au cours de votre déposition

 23   d'aujourd'hui, vous avez parlé de certains comportements de Me Vujin

 24   pendant que vous avez interrogé les témoins en Bosnie. Et au cours de

 25   votre déposition, vous avez également donné la description d'un cas, vous

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  1   avez reconnu ce cas, dans un extrait du film où il y a eu donc ce conflit

  2   entre Me Vujin et votre interprète. Est-ce qu'au cours de cette cassette

  3   vidéo, vous avez trouvé un autre cas pour lequel vous pourriez dire que

  4   Me Vujin n'était pas correct, ou que son comportement n'était pas

  5   correct ?

  6   M. Wladimiroff (interprétation). - Non.

  7   M. Domazet (interprétation). - Merci. Je pense que vous vous souvenez

  8   de cette partie, de cette séquence où il y a eu ce conflit verbal. Je vais

  9   vous demander si vous pouvez vous en souvenir en dehors de ceux que vous

 10   avez reconnus : Me Vujin, vous-même, votre interprète ; il y avait

 11   également une femme à laquelle la question a été adressée. Qui étaient les

 12   deux autres hommes que l'on voit sur ce film, sur la séquence de la

 13   vidéo ?

 14   M. Wladimiroff (interprétation). – Laissez-moi réfléchir un

 15   petit peu ! A ma connaissance, il y avait un homme et je suppose que cet

 16   homme… Je ne peux pas me souvenir vraiment de qui il s'agissait. C'était

 17   probablement ce témoin potentiel, cette dame. Si c'est celui-là, c'était

 18   un homme et l'autre, c'était le frère de M. Tadic.

 19   M. Domazet (interprétation). – Oui. Exact ! En ce qui concerne

 20   la défense de M. Tadic et au cours de cette diffusion de la vidéocassette,

 21   vous avez dit à un moment donné que vous étiez inquiet ; je vais vous

 22   citer : "Qu'est-ce que les avocats yougoslaves vont faire ?"

 23   Est-ce que vous pouvez donner l'explication de ce que vous avez

 24   dit ? Ce que, d'après vous, les avocats yougoslaves auraient dû faire,

 25   étant donné que vous, vous étiez –vous l'avez expliqué d'ailleurs- le

Page 1149

  1   conseiller principal. C'est vous qui aviez deux autres avocats anglais qui

  2   faisaient partie de votre équipe.

  3   M. Wladimiroff (interprétation). – Au moment où je l'ai dit, et

  4   ce qui d'ailleurs figure sur la cassette vidéo que nous venons de voir,

  5   j'avais un seul coéquipier, un seul avocat. Il était jeune. A cette

  6   époque-là, il n'avait pas encore le droit de s'adresser au Tribunal. Par

  7   conséquent, c'était plutôt quelqu'un qui était enquêteur. C'était

  8   Mme de Bertodano. Ensuite, il y avait l'autre avocat qui s'est joint à

  9   moi. A l'époque, par conséquent, il n'y avait que M. Orie qui était co-

 10   conseil et c'est Mme de Bertodano qui nous a aidé. Au moment où j'ai fait

 11   cette déclaration dont vous parlez, je n'ai pas donné des explications à

 12   la personne qui m'avait interviewé, à quoi je pensais exactement. Je

 13   considérais que ce n'était pas tout à fait correct et approprié. J'avais

 14   une certaine appréhension. C'est dans le contexte d'un film documentaire

 15   que j'ai parlé. Ces mêmes questions et cette inquiétude, cette même

 16   tendance dont j'ai parlé ce matin lors de ma déposition devant les Juges,

 17   je les avais à l'esprit au moment où j'ai fait ces déclarations. Je n'en

 18   ai pas parlé, mais je les avais à l'esprit.

 19   M. Domazet (interprétation). – Dans cette partie de la cassette

 20   vidéo, j'ai retenu autre chose : vous avez dit que les avocats yougoslaves

 21   pourraient être utiles pour rassembler les déclarations des témoins et que

 22   c'était leur objectif, entre autres ?

 23   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui. Ils ont essayé.

 24   M. Domazet (interprétation). – Est-ce que vous considérez que le

 25   seul objectif et leur raison d'être étaient d'être des enquêteurs ?

Page 1150

  1   M. Wladimiroff (interprétation). – Eh bien, je pense que j'ai

  2   fait cette déclaration en juillet 1995. Nous devons avoir présent à

  3   l'esprit qu'au moment où, en avril 1995, on m'avait assigné pour être

  4   l'avocat de M. Tadic, à cette époque-là, il y avait une règle selon

  5   laquelle toutes les pièces jointes auraient dû être soumises dans un délai

  6   de 60 jours. A cette époque-là, il n'y avait pas de précédent. Il n'y

  7   avait pas de pratique judiciaire. J'aurais dû remettre toutes ces pièces

  8   jointes au cours et dans un délai de 60 jours. Je ne suis pas

  9   académicien ; je n'avais aucune expérience du droit international

 10   humanitaire. J'avais d'autres choses à l'esprit. C'est pourquoi j'estimais

 11   que d'autres personnes auraient dû enquêter sur le terrain. Quelqu'un qui

 12   peut -parce qu'il parle la langue- enquêter sur le terrain. C'est pourquoi

 13   j'ai accepté avec satisfaction que M. Vujin m'aide dans cette première

 14   étape de la procédure. Ce sont ces tâches que j'avais pour lui dans un

 15   premier temps.

 16   M. Domazet (interprétation). – Je pense que vous avez fait

 17   connaissance avec Me Vujin et que vous avez appris tout du moins en

 18   discutant avec lui, qu'il s'agit d'un avocat, avocat dans les affaires

 19   pénales, avec une très longue expérience, une expérience de 30 ans. Il a

 20   participé à de nombreuses affaires. Avez-vous pensé véritablement que lui-

 21   même serait utile dans une affaire d'une telle envergure pour uniquement

 22   rassembler les déclarations, compte tenu du fait qu'il parlait la langue

 23   utilisée sur le territoire dont on parle ?

 24   M. Wladimiroff (interprétation). – Il y avait également un

 25   certain nombre de considérations. Tout premièrement, il fallait prendre

Page 1151

  1   des déclarations sur le terrain. Cette question est extrêmement délicate.

  2   On peut parler très concrètement, à partir du moment où vous attendez que

  3   les autorités locales ne veulent pas coopérer, vous ne parlez pas la

  4   langue, vous n'avez pas d'instruments juridiques, vous ne pouvez pas

  5   forcer les gens à parler avec vous. Ce dont vous avez besoin, c'est d'un

  6   avocat très expérimenté, qui connaît le régime juridique sur le terrain,

  7   qui provoque la confiance des gens sur place. Il peut donc avoir des

  8   informations dont nous avions besoin. Je répète que j'étais très satisfait

  9   d'avoir Me Vujin avec moi pour faire cela. Je pense que c'était tout à

 10   fait approprié qu'il le fasse.

 11   En ce qui concerne la deuxième partie de votre question,

 12   effectivement, Me Vujin m'avait dit –d'autres me l'ont confirmé par la

 13   suite- qu'il était expérimenté, chevronné, quelqu'un qui avait beaucoup de

 14   cas qu'il menait dans les procédures pénales, même dans le cadre des

 15   crimes de guerre en ex-Yougoslavie. J'ai remarqué très vite, -cela a

 16   commencé en juillet, si mes souvenirs sont bons, en juillet 95- que la

 17   pratique yougoslave était différente par rapport à ce que moi, je

 18   considérais utile et approprié pour ce Tribunal. Pour cette raison, ce que

 19   moi je cherchais, c'était les informations qui auraient pu m'aider au

 20   moment où j'interrogeais les témoins devant le Tribunal et puis avoir les

 21   témoins qui auraient pu nous donner les informations qui tenaient debout

 22   lors du contre-interrogatoire.

 23   Par conséquent, il était parfaitement clair en ce qui me

 24   concerne que Me Vujin ne voyait absolument pas comment cela allait se

 25   passer devant le Tribunal international. Il connaissait le système

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  1   européen. A partir du moment où vous avez des déclarations écrites sur le

  2   papier, cela suffisait. Quand j'ai compris que lui ne pouvait pas suivre,

  3   car il ne comprenait pas tout à fait bien, car il se présentait ici dans

  4   un autre contexte devant un tribunal international, j'ai tout simplement

  5   considéré que ce n'était pas tout à fait dans les règles. Et puis, je

  6   pensais dans ce premier temps, qu'il y avait un manque de connaissance des

  7   activités dans une enceinte internationale où il y a la common law à

  8   laquelle on fait référence.

  9   M. Domazet (interprétation). – Nous savons tous que le cas Tadic

 10   est le premier cas devant ce Tribunal. Et par conséquent, pour tout le

 11   monde, c'était une nouvelle expérience ; pour vous-même également, Maître,

 12   aussi bien que pour Me Vujin ?

 13   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, vous avez parfaitement

 14   raison, mais il y avait une différence, c'est que moi, au cours de ma

 15   pratique dans le barreau et ici, pendant plus de dix ans, j'ai pratiqué

 16   mon métier et ma profession aux Etats-Unis, au Canada, en Europe. Par

 17   conséquent, j'avais une certaine expérience devant les forums

 18   internationaux et j'avais certaines connaissances sur la common law, même

 19   si je n'avais pas véritablement l'expérience pour faire ce travail tout

 20   seul. C'est la raison pour laquelle d'ailleurs je me suis adressé aux

 21   avocats du barreau anglais.

 22   M. Domazet (interprétation). - Est-ce que cette expérience aux

 23   Etats-Unis ou au Canada était l'expérience dans les affaires pénales ou

 24   dans d'autres affaires ?

 25   M. Wladimiroff (interprétation). - Depuis tout le début, je suis

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  1   dans les affaires pénales, et dans les procédures pénales uniquement. Pour

  2   être tout à fait précis, je peux vous dire que je fais des cas de fraude

  3   uniquement ; c'est, par conséquent, également une infraction qui relève du

  4   droit international.

  5   M. Domazet (interprétation). - Vous venez de dire, par

  6   conséquent, quels étaient les cas dont vous vous êtes occupé. Avez-vous

  7   connu des cas de meurtres, de viols ou d'autres infractions et délits

  8   pénaux ?

  9   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui, avant de me spécialiser

 10   dans le domaine dans lequel j'ai parlé, j'avais quand même une pratique

 11   générale.

 12   M. Domazet (interprétation). - Vous parlez de la Hollande, des

 13   Pays-Bas ou des Etats-Unis et du Canada ?

 14   M. Wladimiroff (interprétation). - Quand on parle de

 15   l'expérience internationale, je l'ai acquise à travers les affaires qui

 16   touchent aux infractions, délits économiques.

 17   M. Domazet (interprétation). - Je vais revenir à cette cassette

 18   vidéo étant donné que nous avons à l'esprit encore cette diffusion. Dans

 19   la partie qui est pratiquement vers la fin, une des séquences, il y avait

 20   donc un monsieur avec le dictaphone, sur un lit ; et puis, on entend une

 21   voix : qui est-ce ?

 22   M. Wladimiroff (interprétation). - Cette personne est M. Orie,

 23   co-conseil à cette époque-là.

 24   M. Domazet (interprétation). - Est-ce que vous pouvez

 25   m'expliquer ce qui a été enregistré avec ce dictaphone ?

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  1   Pouvez-vous nous relater l'entretien ? On l'entend quelque peu.

  2   M. Wladimiroff (interprétation). - Vous avez pu remarquer

  3   probablement, pendant que vous avez regardé la cassette vidéo, un des

  4   frères de M. Tadic nous a dit que c'est sa voix qu'on entendait et une

  5   autre voix également. On a mentionné le nom probablement, ce nom figure

  6   sur la transcription. On peut entendre cet entretien étant donné que, dans

  7   le transcript, il existe le texte complet. C'est tout ce que je peux vous

  8   dire.

  9   M. Domazet (interprétation). - Est-ce que vous savez si cet

 10   entretien a été enregistré en secret ou publiquement, avec l'accord de

 11   l'autre personne, si vous le connaissez ?

 12   M. Wladimiroff (interprétation). - Je n'ai aucune idée.

 13   M. Domazet (interprétation). - Est-ce que vous avez pu

 14   comprendre de cette conversation que ce témoin, ou plutôt cette personne

 15   avec laquelle l'entretien a eu lieu était importante pour votre défense ?

 16   M. Wladimiroff (interprétation). - J'ai toujours essayé de me

 17   tenir aux normes : j'allais donc soumettre aux Juges uniquement au moment

 18   où j'étais persuadé que ceci tenait debout. C'est à ce moment-là que je

 19   présentais par conséquent ce que je pensais devoir dire. Quand j'ai reçu

 20   la bande, je considérais que c'était vital, important et c'est la raison

 21   pour laquelle nous avons considéré qu'il était indispensable de soumettre

 22   devant le Tribunal ce qui a été dit.

 23   M. Domazet (interprétation). - Est-ce que vous pouvez, s'il vous

 24   plaît, nous dire ce que vous avez fait, étant donné que vous êtes au

 25   courant. Avez-vous été en contact avec le témoin en question ? Avez-vous

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  1   pris sa déclaration ?

  2   M. Wladimiroff (interprétation). - Nous avons essayé de

  3   contacter le témoin. Il s'agissait d'une des personnes dont j'ai parlé ;

  4   il s'agissait de M. Danicic, son prénom est Milorad, je pense. Il était

  5   sur la liste. C'est M Drljaca qui nous a donné son nom. Il est l'une sur

  6   les deux personnes dont j'ai donné la description, qui ont été très bien

  7   préparées, qui tout d'un coup sont apparues au poste de police, à

  8   Prijedor ; on nous a permis de parler avec lui.

  9   M. Domazet (interprétation). - Je conclus, Me Wladimiroff, que

 10   M. Drljaca vous a permis de contacter ces personnes et d'avoir cet

 11   entretien ?

 12   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

 13   Son nom figurait sur la liste, il a compris tout simplement que

 14   nous avons cherché cet homme. Un certain temps s'est écoulé depuis. Dans

 15   tous les cas, à la fin de cette période, on nous a offert de discuter avec

 16   cette personne et c'est ainsi que nous avons entendu de sa part ce qu'elle

 17   a pu nous relater.

 18   M. Domazet (interprétation). - Vous parlez de Miso Danicic ?

 19   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, c'était cela.

 20   M. Domazet (interprétation). - Si je vous ai bien compris,

 21   maître Wladimiroff, vous considérez que M. Danicic est la personne avec

 22   laquelle le frère de Dusko Tadic a parlé au téléphone et dont la

 23   conversation a été enregistrée ?

 24   M. Wladimiroff (interprétation). - Non, c'est la personne dont

 25   ils ont parlé. C'est ainsi que j'ai compris, alors que la personne avec

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  1   laquelle le frère avait parlé, on n'a jamais pu la contacter.

  2   M. Domazet (interprétation). - Vous n'avez jamais parlé avec

  3   cette personne-là. J'ai compris, merci.

  4   Monsieur Danicic, comme on le voit dans la cassette vidéo, il y

  5   a une photo qui a été montrée à une dame, et il a été représenté comme une

  6   prisonnier, ex-prisonnier à Omarska ?

  7   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

  8   M. Domazet (interprétation). - Qui était cette femme ?

  9   M. Wladimiroff (interprétation). - Je ne pourrai pas vous donner

 10   son nom en audience publique. Je me souviens tout simplement de son

 11   prénom. Elle n'a pas été citée comme témoin et, pour des raisons très

 12   concrètes et très claires, personnellement, je ne pense pas que c'est dans

 13   son intérêt de citer son nom en audience publique. Si vous souhaitez, je

 14   peux mettre son nom sur un petit papier.

 15   M. Domazet (interprétation). – Mais nous savons très bien de

 16   quel nom il s'agit, de quelle dame il s'agit, parce qu'au cours de ce

 17   procès, on en a parlé. Mais, de toute façon, ce n'est pas important : je

 18   vois que vous savez de quelle personne il s'agit. Nous aussi, on le sait.

 19   Toujours est-il que vous considérez qu'il s'agit d'un témoin

 20   important et, au cours de ce qu'elle avait dit, lors de la diffusion de la

 21   cassette vidéo, elle avait dit que Dusko Tadic n'a jamais été à Omarska.

 22   Est-ce que vous pouvez me dire pourquoi et quelles sont les

 23   raisons pour lesquelles vous n'avez pas cité ce témoin devant le

 24   Tribunal ?

 25   M. Wladimiroff (interprétation). - J'ai deux raisons, une

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  1   première raison, c'est en quelque sorte, par conséquent, le rapport entre

  2   le client et l'avocat. Et j'ai examiné quelque peu ma position.

  3   La deuxième raison que je peux donner ici : elle nous a raconté

  4   trois versions différentes qui ne se coordonnaient pas. Par conséquent, je

  5   n'étais pas du tout prêt à citer un témoin qui m'avait relaté trois fois

  6   trois versions différentes.

  7   M. Domazet (interprétation). - Par conséquent, vous n'aviez pas

  8   confiance, je suppose ?

  9   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, peut-être. Une de ces

 10   trois versions était véridique, probablement. Mais comment voulez-vous que

 11   je décide laquelle. Si vous la citez, elle va peut-être relater la

 12   première ou la troisième, ou -je ne sais pas- une quatrième ou une

 13   cinquième. Dans ce cas, ceci n'aurait pu que mettre en doute les autres

 14   témoins. Je voulais simplement citer les témoins pour lesquels je me

 15   disais que les preuves seront véridiques et acceptables pour le Tribunal.

 16   M. Domazet (interprétation). - Si elle avait donné les versions

 17   différentes, est-ce qu'elle a mis en question Dusko Tadic dans une des

 18   versions ?

 19   M. Wladimiroff (interprétation). – Je voudrais me référer ici à

 20   ce privilège professionnel qu'a l'avocat vis-à-vis de son client : secret

 21   professionnel entre l'avocat et son client.

 22   M. Domazet (interprétation). - Quand il s'agit de M. Danicic,

 23   vous avez dit que vous ne souhaitiez pas du tout croire à cette théorie de

 24   sosie, si je vous ai bien compris ?

 25   M. Wladimiroff (interprétation). – Le commentateur a dit que

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  1   moi, je ne voulais pas simplement la confusion pour une confusion. Je

  2   pense qu'effectivement, c'était la manière dont je réfléchissais. Je ne

  3   suis pas ici pour mettre de la confusion, mais pour défendre Tadic.

  4   M. Domazet (interprétation). - Mais est-ce que votre client,

  5   Dusko Tadic, vous a demandé de manière expresse que M. Danicic soit cité

  6   comme témoin pour essayer de prouver que Danicic était la personne qui

  7   était à Omarska et qu'il y avait cette question de sosie, de

  8   ressemblance ?

  9   M. Wladimiroff (interprétation). – Si je me souviens bien, nous

 10   avons parlé de cela plus d'une fois. Encore une fois, je vais me référer

 11   au secret professionnel. Le résultat est clair : nous ne l'avons pas cité

 12   à la barre.

 13   M. Domazet (interprétation). - Avez-vous parlé de cela avec le

 14   frère de M. Dusko Tadic, Ljubomir ? Est-ce que lui aussi insistait sur le

 15   même point ?

 16   M. Wladimiroff (interprétation). – La question de savoir ce qui

 17   se trouve à l'esprit du frère était quelque chose dont je devais parler

 18   avec Dusko Tadic, éventuellement. Mais c'était lui la personne qui devait

 19   prendre la décision et non pas ses frères. Je me souviens que l'un de ses

 20   frères, le frère cadet, était persuadé que cette personne était un sosie,

 21   mais en même temps ceci ne correspondait pas à quelque chose qui, à mon

 22   avis, aurait été suffisamment solidement prouvé pour que je cite ce témoin

 23   à la barre. Et puis, deuxièmement, il faut savoir que, dans ce cas-là, il

 24   se serait agi d'un témoin hostile.

 25   M. Domazet (interprétation). - Monsieur Wladimiroff, je respecte

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  1   votre opinion professionnelle et sachez que je ne vous aurais pas posé

  2   cette question étant donné que j'ai cru comprendre que vous avez décidé,

  3   vous-même, que ce n'était pas nécessaire. Mais j'ai mentionné ce fait

  4   puisqu'on l'a déjà mentionné beaucoup dans le cadre de cette affaire, cela

  5   a été mentionné à la fois par Dusko Tadic et par ses deux frères : les

  6   deux frères ont vraiment insisté pour dire que Miso Danicic aurait dû être

  7   cité à la barre. L'un de ces deux frères a même nommé Miso Danicic de

  8   meurtrier. Donc, nous avons entendu cela beaucoup dans cette procédure.

  9   Merci de votre explication.

 10   Au moment où vous avez parlé du début de votre coopération avec

 11   M. Vujin, vous avez dit que vous preniez sa voiture pour vous rendre en

 12   Republika Srpska avec lui. A un moment, vous avez dit que vous avez décidé

 13   de partir tout seul. C'est ce que vous avez fait : vous avez pris un

 14   autocar pour tester, comme vous l'avez dit, la possibilité d'aller sans

 15   lui à Banja Luka, dans la Republika Srpska.

 16   Déjà, est-ce que je vous ai bien compris ?

 17   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, vous avez bien compris.

 18   Si je me souviens bien, la première fois, c'était certainement au mois de

 19   juillet 1995. Et M. Vujin a dû déployer bien des efforts afin de me

 20   permettre d'avoir accès dans la région.

 21   M. Domazet (interprétation). - Et la deuxième fois, vous vous

 22   souvenez à quel moment ceci s'est produit ? En quel mois ?

 23   M. Wladimiroff (interprétation). – Au mois de septembre, je

 24   crois, 1995.

 25   M. Domazet (interprétation). - Est-ce que, néanmoins, avant ce

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  1   voyage, vous vous êtes adressé à M. Vujin pour qu'il vous aide, pour qu'il

  2   obtienne pour vous une sorte de permission, d'autorisation qui vous

  3   permettrait de voyager dans la Republika Srpska ?

  4   M. Wladimiroff (interprétation). – Il savait que l'on arrivait.

  5   Je suis sûr qu'auparavant j'avais en contact avec lui ; il n'y a aucun

  6   doute là-dessus. Il s'agissait là de travail de coordination. Mais je me

  7   souviens de cela de manière générale ; je ne me souviens pas concrètement

  8   des lettres ou des coups de fils. Je crois que ceci a dû se passer par

  9   lettre, mais peut-être que je lui ai téléphoné. Je ne me souviens pas.

 10   M. Domazet (interprétation). - Est-ce que vous vous souvenez,

 11   monsieur Wladimiroff, peut-être qu'il aurait réussi à obtenir une

 12   autorisation pour vous, pour que vous puissiez voyager et que vous aviez

 13   cette autorisation sur vous au moment où vous êtes parti en voyage ?

 14   M. Wladimiroff (interprétation). – La première fois, oui, je

 15   m'en souviens. La deuxième fois, je ne suis pas sûr. Je ne suis pas sûr

 16   parce que je me souviens que l'interprète est sortie de l'autobus à la

 17   frontière, afin de s'occuper des arrangements concernant le visa, afin de

 18   payer le visa. Je n'arrive pas à me souvenir de quoi que ce soit.

 19   Je vais être très attentif en formulant ma pensée. Je ne peux

 20   pas exclure la possibilité que nous ayons eu une sorte de lettre ou de

 21   recommandation, je ne peux pas le confirmer avec exactitude, mais je suis

 22   sûr que c'est Mme Antic qui s'est occupée des visas.

 23   M. Domazet (interprétation). - J'ai compris que vous avez dû

 24   payer les visas à la frontière. Mais auparavant, lorsque vous avez voyagé

 25   avec M. Vujin, est-ce que vous avez dû payer les visas aussi ?

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  1   M. Wladimiroff (interprétation). – Je ne sais pas, étant donné

  2   que c'est lui qui s'est occupé de cet arrangement. Je ne sais pas. Peut-

  3   être puisque six mois… J'essaie de me rappeler. C'est un peu bizarre, mais

  4   j'essaie de me rappeler ce qui se trouvait dans la demande de paiement

  5   auprès du Tribunal ; j'essaie de me souvenir si le visa y figurait ou pas.

  6   De toute façon, étant donné que ceci fait partie du dossier, il est tout à

  7   fait facile de vérifier si cela y figurait ou pas.

  8   M. Domazet (interprétation). - Merci. En ce qui concerne la

  9   liste des témoins potentiels, dont vous avez parlé aujourd'hui, monsieur

 10   Wladimiroff, dans votre déclaration préalable, vous avez dit que vous avez

 11   donné la même liste à votre enquêteur, M. Kostic. Est-ce exact ?

 12   M. Wladimiroff (interprétation). – Permettez-moi de réfléchir un

 13   instant... Oui, lorsque je l'ai vu pour la première fois, en janvier 1996,

 14   je crois, je lui ai donné une copie de cette liste, un exemplaire de cette

 15   liste. Oui, c'est exact.

 16   M. Domazet (interprétation). - S'agit-il de la liste dont vous

 17   parlez ? Donc de la liste que vous avez vue également sur le bureau de

 18   M. Drljaca ?

 19   M. Wladimiroff (interprétation). – Il est très difficile de le

 20   dire, étant donné que c'était une liste mise à jour sans arrêt. Certains

 21   noms étaient éliminés, certains ajoutés ; on faisait des corrections. Il

 22   s'agissait donc, à la base, de la même liste, mais je ne sais pas de

 23   quelle version de cette liste.

 24   M. Domazet (interprétation). - C'était donc une liste mise à

 25   jour, de manière continue ?

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  1   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, il s'agissait d'une

  2   liste de base et nous avons ajouté à cette liste tous ceux qui devraient

  3   faire l'objet d'enquête à notre avis.

  4   M. Domazet (interprétation). - Merci. Est-ce que est-ce que vous

  5   vous souvenez de l'ordre, des instructions que vous auriez donnés,

  6   éventuellement, à M. Kostic ?

  7   M. Wladimiroff (interprétation). – Nous lui avons donné des

  8   instructions concernant le genre d'informations qui nous intéressaient.

  9   Nous lui avons dit quelles étaient nos priorités, quelles étaient nos

 10   préférences. Je me souviens de ce genre d'instructions. On lui disait

 11   quels étaient les point forts et les points faibles de la stratégie de la

 12   défense basée sur l'alibi. Nous lui avons donc dit de chercher un peu plus

 13   assidûment certains noms de cette liste. C'était le genre d'instruction

 14   que nous lui avons donnée.

 15   M. Domazet (interprétation). - Cette liste, est-ce qu'elle

 16   contenait également les adresses complètes de ces témoins ? Ou bien

 17   s'agissait-il simplement des noms et prénoms, ou parfois juste des noms ou

 18   juste des prénoms ?

 19   M. Wladimiroff (interprétation). – Dans la plupart des cas, il y

 20   avait le nom de famille et le prénom. Parfois, dans certaines des

 21   versions, je ne suis pas sûr dans lesquelles, il y avait également leur

 22   lieu de résidence. Il n'y avait pas de rue, ni de numéro de maison dans la

 23   rue, mais simplement si c'était Omarska, ou un autre endroit. Voilà le

 24   genre d'information.

 25   M. Domazet (interprétation). - Monsieur Wladimiroff, croyez-vous

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  1   qu'il serait possible de trouver tous ces témoins sans que la police ou

  2   d'autres instances fournissent leur aide, justement à cause du fait que

  3   vous n'aviez pas les données complètes, les adresses, etc. ?

  4   Ou bien est-ce que vous avez donné les instructions à votre

  5   enquêteur selon lesquelles il ne devait absolument pas se mettre au

  6   contact avec la police en ce qui concerne ce sujet-là ?

  7   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, je comprends votre

  8   question. Effectivement, ceci nous préoccupait. La raison pour laquelle

  9   nous nous sommes appuyés tellement sur la famille de M. Tadic, c'était

 10   parce que nous pensions que nous ne devions pas contacter les témoins

 11   potentiels par le biais, par exemple, de policiers. Nous avons considéré

 12   qu'il fallait plutôt contacter ces personnes de manière informelle pour

 13   voir de manière générale ce qu'elles connaissaient sur l'affaire ; puis,

 14   si elles avaient des informations intéressantes, dans ce cas là, de les

 15   contacter en tant que témoins.

 16   D'après nous, si nous avions recours à la police dans ce cadre

 17   là, nous pensions que peut-être la police leur donnerait des instructions.

 18   Peut-être que j'ai été un peu paranoïaque, mais j'étais convaincu du bien-

 19   fondé de cette approche à l'époque, étant donné qu'il était impossible

 20   d'approcher, d'aborder un policier sans que ses supérieurs hiérarchiques

 21   soient au courant et sans leur aval.

 22   M. Domazet (interprétation). - Justement, parlons de cela. Vous

 23   vous êtes quand même adressé à M. Drljaca afin qu'il vous fournisse son

 24   assistance, alors que nous-mêmes, nous sommes d'accord avec vous pour dire

 25   qu'il ne souhaitait pas collaborer et qu'il n'avait pas une attitude

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  1   correcte vis-à-vis de vous. Mais vous avez demandé son assistance pour

  2   pouvoir parler avec Tadic Brko et Milorad Danicic qui, pour autant que je

  3   le sache, n'étaient pas des policiers. C'est grâce à l'aide de M. Drljaca

  4   que vous avez pu avoir cet entretien avec eux, n'est-ce pas ?

  5   M. Wladimiroff (interprétation). – Il faut séparer deux

  6   questions ici : d'un côté, ma visite à M. Drljaca, dans le cadre d'une

  7   tentative de bloquer ses efforts de m'empêcher de faire mon travail. Donc,

  8   moi j'ai essayé de l'éloigner, de faire en sorte qu'il arrête de bloquer

  9   mes efforts, qu'il arrête de dire aux gens de ne pas me contacter.

 10   Deuxièmement, je pouvais parler avec les policiers uniquement s'ils

 11   bénéficiaient de l'accord de leur supérieur. En l'occurrence, il

 12   s'agissait de M. Drljaca. Ensuite, je pouvais parler avec les militaires

 13   uniquement s'ils bénéficiaient de l'aval de leur supérieur hiérarchique.

 14   Si je me souviens bien, nous avons parlé de ce sujet avec M. Drljaca

 15   également. La même chose s'appliquait aux fonctionnaires. Si je me

 16   souviens bien, chaque officiel pouvait nous parler seulement si Drljaca

 17   était d'accord. Si jamais il n'était pas d'accord, il n'était pas possible

 18   pour nous de coopérer avec cette personne-là.

 19   Parlant de la coopération, je voulais dire la chose suivante.

 20   Finalement, même après cet entretien, il a quand même continué à entraver

 21   nos efforts. Deuxièmement, il n'a fait que nous mettre en contact avec

 22   deux témoins : deux témoins qui ont été amenés au poste de police afin que

 23   je puisse avoir un entretien avec eux. Je l'ai accepté étant donné que

 24   j'ai eu le sentiment qu'il m'était impossible de les trouver.

 25   Par exemple, en ce qui concerne Meakic, on me disait qu'il était

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  1   à un endroit ; je m'y rendais et il n'y était plus. On me disait alors

  2   qu'il était ailleurs : j'y allais, il n'y était plus. Je me suis dit qu'il

  3   était mieux d'accepter de parler avec ces gens dans ce contexte-là, plutôt

  4   que de ne pas leur parler du tout. Il s'agissait simplement de deux

  5   personnes. C'est tout ce que j'ai eu de sa part.

  6   M. Domazet (interprétation). - Il s'agissait de Milorad Tadic-

  7   Brk et Milorad ou Misa Danicic, n'est-ce pas ?

  8   M. Wladimiroff (interprétation). – C'est exact.

  9   M. Domazet (interprétation). – Est-ce qu'à cette occasion, vous

 10   avez pris leurs déclarations par écrit ? Est-ce que vous leur avez demandé

 11   de faire ce genre de déclarations ?

 12   M. Wladimiroff (interprétation). – Non. Comme je vous l'ai déjà

 13   dit, le premier stade de la procédure pour moi était de tester le niveau

 14   de leurs connaissances. Dès le début, il était tout à fait clair qu'ils me

 15   disaient une histoire qu'ils avaient répétée et apprise par cœur

 16   auparavant. Cela était donc complètement inutile.

 17   M. Domazet (interprétation). – Si j'ai bien compris, vous n'avez

 18   pas pris leurs déclarations, étant donné que vous avez considéré que ceci

 19   aurait été complètement inutile ?

 20   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui. Peut-être que j'ai pris

 21   quelques notes -j'en suis sûr- mais je n'ai pas pris leurs déclarations.

 22   M. Domazet (interprétation). – Etant donné que c'est exactement

 23   ce que vous avez écrit dans votre déclaration, vous avez dit que ces deux

 24   témoins n'ont rien dit d'important. Est-ce que Me Vujin était avec vous à

 25   cette occasion ?

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  1   M. Wladimiroff (interprétation). – Je ne sais pas. Peut-être

  2   était-ce Me Vujin ou bien Me Orie ou bien Me Kay ? Non, à l'époque, il

  3   n'était pas avec nous. Je ne peux pas vous le dire. Je ne sais pas.

  4   M. Domazet (interprétation). – Merci. Est-ce que vous savez que

  5   Me Vujin a pris, en ce qui concerne ces deux témoins, leurs déclarations

  6   par écrit, par la suite ?

  7   M. Wladimiroff (interprétation). – Par la suite ? Peut-être. Je

  8   ne m'en souviens pas concrètement. Mais si jamais Me Vujin a pris leurs

  9   déclarations et s'il me les a envoyées, apparemment, j'ai dû conclure que

 10   ceci n'ajoutait rien à notre attitude. Je répète que notre procédure

 11   normale était la suivante : lorsque nous essayions de contacter un témoin

 12   potentiel, nous voulions voir si ce témoin pouvait nous donner les

 13   informations utiles. Si tel était le cas, nous prenions une déclaration.

 14   Et puis, nous avions des discussions entre nous, en tant qu'avocats, pour

 15   décider ce que nous allions faire avec les témoins que nous avions

 16   considérés comme inutiles. Lorsque j'ai dit que M. Danicic et M. Tadic-Brk

 17   étaient des témoins inutiles, je suis convaincu que j'avais discuté de

 18   cela au préalable avec mes collègues avocats. Mais je ne me souviens pas

 19   si, par la suite, une déclaration a été prise. Si tel a été le cas,

 20   apparemment, ceci ne nous a pas fait changer d'opinion.

 21   M. Domazet (interprétation). – A quel moment, monsieur

 22   Wladimiroff, avez-vous donné la liste des témoins potentiels à M. Vujin ?

 23   M. Wladimiroff (interprétation). – La première version, peut-

 24   être en juillet. Je n'exclus pas la possibilité que ceci se soit produit

 25   au mois d'août ou de septembre. Au mois d'août, par fax ou par courrier,

Page 1167

  1   ou en septembre, en lui remettant cela directement. Encore une fois, je ne

  2   suis pas sûr en ce qui concerne les autres versions. Peut-être que je lui

  3   ai envoyé cela par télécopie ou je lui ai donné cela en me rendant sur

  4   place, peut-être en novembre 95, lors de la visite à Karadzic. Je ne peux

  5   pas vous donner une date exacte. C'était plus ou moins notre pratique :

  6   lorsque la liste était mise à jour, nous l'envoyions.

  7   M. Domazet (interprétation). – M. Vujin, que devait-il faire

  8   vis-à-vis de cette liste, d'après vous ?

  9   M. Wladimiroff (interprétation). – Je le tenais au courant en ce

 10   qui concerne les témoins potentiels. J'étais ouvert à toutes suggestion

 11   concernant les changements de la liste des noms des témoins potentiels, en

 12   fonction de la pertinence de leurs propos. Je crois qu'au mois de juillet,

 13   si je lui ai donné cela, si je lui ai donné cela pour qu'il sache mieux ce

 14   qui nous intéressait, ce qui m'intéressait. Je pense que cela vaut pour

 15   les mois d'août et septembre également ; pour la période ultérieure, je

 16   pense que je lui ai dit clairement déjà que je préférais qu'il mène ce

 17   genre d'enquête devant moi, en ma présence. Plus tard, encore, je lui ai

 18   dit que je préférais le faire tout seul, moi-même. Encore une fois, on a

 19   une sorte d'évolution de mon attitude.

 20   M. Domazet (interprétation). – Est-ce que vous vous souvenez que

 21   vous avez donné des instructions pour que cette liste soit envoyée à

 22   l'avocat Kosta Simic, à Banja Luka, de même qu'au frère de Dusko Tadic ?

 23   M. Wladimiroff (interprétation). – Peut-être que M. Simic posait

 24   un problème étant donné qu'il ne parlait que le serbo-croate. Ces jours-

 25   ci, je n'ai pas envoyé... Je me reprends... Si, parfois, je lui ai envoyé

Page 1168

  1   des lettres en juillet, août et septembre, des lettres traduites par

  2   l'interprète. En même temps, je considérais que c'était M. Vujin qui

  3   allait être en contact avec lui. En ce qui concerne les frères,

  4   effectivement, peut-être qu'à un certain moment, j'ai donné cette liste à

  5   Ljubo. Etant donné que Ljubo avait une opinion tout à fait clair selon

  6   laquelle Drljaca était un ennemi. Comme je vous l'ai dit, nous nous sommes

  7   appuyés sur la famille de Tadic afin de trouver les témoins. Donc peut-

  8   être, -c'est même probable- que je lui ai donné une liste mise à jour.

  9   Mais je n'ai aucune raison de penser qu'il avait abusé de ma confiance. Je

 10   n'ai jamais eu ce genre d'indice, je dirais. Bien au contraire,

 11   d'ailleurs !

 12   M. Domazet (interprétation). – Monsieur Wladimiroff, je n'ai pas

 13   parlé non plus de l'abus de confiance. J'ai tout simplement voulu savoir

 14   si vous vous souveniez du fait que vous avez demandé que l'on remette

 15   cette liste à l’avocat de Simic ; de même qu'au frère de Tadic. Je vais

 16   vous demander d'examiner ce document, cette télécopie, afin de nous dire

 17   également s'il s'agit bien de votre document et de votre signature. Je

 18   demanderais également qu'une cote soit attribuée. J'ai d'ailleurs

 19   suffisamment d'exemplaires pour toutes les parties.

 20   M. Dubuisson. - Pièce à conviction n° 44.

 21   M. Domazet (interprétation). – (Hors micro). Avez-vous reconnu

 22   cette déclaration, c'est-à-dire cette télécopie, monsieur Wladimiroff ?

 23   M. Wladimiroff (interprétation). - J'ai un problème ici. En ce

 24   qui concerne la page de garde, il n'y a aucun problème, aucun doute. Comme

 25   je l’ai dit peut-être que je l’ai fait peut-être aux mois de juillet, août

Page 1169

  1   ou septembre. Ici, il paraît que c'est au mois d'août que j'ai envoyé la

  2   lettre à M. Vujin. En ce qui concerne la pièce jointe, j'ai un problème,

  3   d'un côté : c'est une lettre en néerlandais. Je ne me souviens pas avoir

  4   envoyé des documents en néerlandais à des personnes ne parlant pas cette

  5   langue.

  6   Mon deuxième problème vient de la chose suivante : c'est que

  7   j'ai l'impression, je crois que j'ai commencé à faire ce genre de

  8   chronologie plus tard, c'est-à-dire après le mois d'août 1995, étant donné

  9   qu'en août 1995, je savais peu. Cela me paraît un peu bizarre, un peu

 10   étrange ; étant donné que peut-être j'ai commencé à faire ce genre de

 11   résumé vers la fin de l'année 1995, mais pas au mois d'août, étant donné

 12   qu'au mois d'août, j’avais effectué une seule visite avant ce moment-là,

 13   c'est-à-dire en juillet 1995. Ceci me rend quelque peu perplexe.

 14   D'autre part, en ce qui concerne l'écriture, si je l'examine

 15   attentivement, je pense que c'est mon écriture. Donc peut-être que j'ai

 16   envoyé cela une fois.

 17   M. le Président (interprétation). – Veuillez examiner l'en-tête.

 18   M. Wladimiroff (interprétation). - Il n'y a aucun doute que

 19   c’est moi ou bien ma secrétaire qui a dactylographié cela. Ce qui me rend

 20   perplexe, c'est de savoir que, dès le mois d'août 1995, je disposais de ce

 21   genre d'information. Peut-être que je me trompe en ce qui concerne ma

 22   confusion sur la langue, étant donné qu'il paraît être clair que c'est moi

 23   qui ai écrit cela. Peut-être ai-je envoyé cela en ajoutant la

 24   clarification à la personne à laquelle j'envoyais, que je n'avais pas de

 25   preuve.

Page 1170

  1   Par exemple, si vous examinez la page 4, il s'agit du jeudi

  2   7 mai 1992, il y a un point d'interrogation. Cela veut dire clairement :

  3   est-ce qu’il y a des témoins potentiels qui pourraient nous aider vis-à-

  4   vis de cette date. Mais je reste confus en ce qui concerne les détails et

  5   les connaissances que j’avais. Je n'arrive pas à comprendre cela, c'est

  6   très très étrange. C’est tout ce que je peux dire.

  7   M. Domazet (interprétation). - Est-ce que vous pourriez examiner

  8   la dernière page ?

  9   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

 10   M. Domazet (interprétation). - Est-ce que vous reconnaissez

 11   l'écriture ; l'écriture qui figure sur cette dernière page en haut ?

 12   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui, si je peux bien lire, je

 13   peux dire que je reconnais les deux dernières lignes, les lignes entre les

 14   deux signatures. Il n'y a pas de doute, que c'est l'écriture de M. Vujin,

 15   pour autant que je m'en souvienne ; c’est ce que je pense en ce moment.

 16   En ce qui concerne l'écriture au-dessus ?

 17   M. Domazet (interprétation). – Oui, ma question porte là-dessus.

 18   M. Wladimiroff (interprétation). - Je pense que le mot

 19   “ svjedok ”, “ témoin ” a été écrit par moi-même. Ce qui a été ajouté, je

 20   ne sais pas. Je ne reconnais pas cela en tant que mon écriture. Je ne

 21   l'exclus pas, mais je pense que c'est peu probable. Peut-être que c'est

 22   quelqu'un d’autre qui a écrit cela.

 23   M. Domazet (interprétation). - Est-ce que vous pensez que c'est

 24   peut-être votre interprète Zorica qui a écrit cela ?

 25   M. Wladimiroff (interprétation). - C'est possible, je ne peux

Page 1171

  1   pas le dire en ce qui concerne le deuxièmement.

  2   M. Domazet (interprétation). – Très bien.

  3   M. le Président (interprétation). – Croyez-vous que c'est le

  4   moment approprié de procéder à la pause de 15 minutes. Pensons aux

  5   interprètes.

  6   M. Domazet (interprétation). - Tout à fait, Monsieur le

  7   Président. M. Hunt souhaite vous poser une question.

  8   M. Hunt (interprétation). – Monsieur Domazet, ce document a une

  9   sorte d’en-tête de télécopieur, mais ceci ne figure pas sur chaque page.

 10   On a l'impression que les pages ont été coupées à l'endroit où l'en-tête

 11   indiquant le cabinet de M. Wladimiroff devrait figurer. Avez-vous

 12   l'original qui a servi de base, qui a servi à photocopier ces documents ?

 13   M. Domazet (interprétation). - Je crois que c'est M. Wladimiroff

 14   qui a envoyé le fax qui devrait avoir l'original. Monsieur Vujin me dit

 15   qu'il ne dispose pas d'autre version puisque, suite à sa démission, il a

 16   rendu une partie des documents à M. Dusko Tadic

 17   M. Hunt (interprétation). – Merci.

 18   M. Wladimiroff (interprétation). - Si je puis aider moi-même,

 19   j'ai remis tous les documents à M. Vujin et je suppose qu'il a fait la

 20   même chose avec les avocats qui ont suivi, donc il ne m'a pas rendu cela à

 21   moi.

 22   M. Domazet (interprétation). - Vous avez peut-être mal compris.

 23   Je n'ai pas dit qu'il vous avait rendu cela à vous. Puisque c'est vous qui

 24   avez envoyé le fax, nous supposons que vous avez cela dans votre cabinet.

 25   Bien sûr, il ne vous a pas rendu cela à vous, étant donné qu’à l’époque,

Page 1172

  1   vous n'étiez plus le défenseur de Dusko Tadic.

  2   M. Abell (interprétation). – Je m’excuse d’interrompre, mais en

  3   ce qui concerne ce sujet-ci, maintenant qu’il est toujours frais dans

  4   notre esprit, les documents qu’il devrait avoir, sur laquelle la date de

  5   l'émission doit figurer, cela doit être les documents qui parlent de la

  6   personne qui a reçu la télécopie. Etant donné que sur le document où c'est

  7   marqué le nom…, le nom de M. Vujin est marqué. Il devrait y avoir le nom

  8   de M. Vujin et la date de la réception.

  9   M. le Président (interprétation). – Nous parlerons de cela tout

 10   à l'heure.

 11   Monsieur Domazet, peut-être que nous pourrions procéder à la

 12   pause ?

 13   M. Domazet (interprétation). - Oui, la seule chose que je

 14   voulais indiquer, c’est qu’il est clair que, sur la base de la page de

 15   garde, que le document contient 17 pages. Effectivement, cela correspond

 16   au nombre de pages que nous avons devant nous.

 17   M. le Président (interprétation). – Nous allons maintenant

 18   procéder à une pause de 15 minutes.

 19   L'audience, suspendue à 16 heures 05, est reprise à

 20   16 heures 22.

 21   M. le Président (interprétation). – L'audience est reprise.

 22   Maître Domazet, vous avez la parole.

 23   M. Domazet (interprétation). – Merci, Monsieur le Président.

 24   Monsieur Wladimiroff, vous avez défendu M. Tadic jusqu'à la fin

 25   de la procédure. Je pense que la procédure a pris fin et, ensuite, vous

Page 1173

  1   avez été révoqué. Donc, vous avez été pris comme le conseil de la défense

  2   jusqu'à la présentation des moyens de preuve.

  3   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, c'était jusqu'en

  4   avril 1997.

  5   M. Domazet (interprétation). - Après quoi, il y avait le

  6   jugement qui a été rendu. M. Tadic a donc été… Il y a un certain nombre de

  7   preuves à charge, d'autres pour lesquelles M. Tadic a été acquitté ?

  8   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

  9   M. Domazet (interprétation). - Les avocats n'ont pas participé

 10   au délibéré. Bien évidemment, il y avait la fin de la présentation des

 11   moyens de preuve, n'est-ce pas, et vous y avez participé ?

 12   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, effectivement. Le

 13   verdict a été prononcé en présence d'une nouvelle équipe de la défense.

 14   M. Domazet (interprétation). - Mais il n'y avait pas de débat,

 15   n'est-ce pas ? C’est après qu'il y avait le débat sur la sentence, n'est-

 16   ce pas ? Et sur la procédure ? Je ne sais pas si vous avez suivi ou non

 17   après le délibéré, puis le procès de la sentence, etc.

 18   M. Wladimiroff (interprétation). – Tout ce que je peux vous

 19   dire, c'est que j'ai été présent uniquement au moment du prononcé de la

 20   sentence et, une fois également, lors de l'après-midi où il y avait donc

 21   le débat sur la sentence ; oui, j'ai assisté un après-midi à ce débat.

 22   M. Domazet (interprétation). - A votre lettre que vous avez

 23   envoyée à M. Ljubomir Tadic, la lettre qui a été rédigée en BCS, ici,

 24   c'est une pièce à conviction qui a été versée au dossier sous forme de la

 25   traduction. Vous avez dit que vous considérez que vous auriez pu réussir à

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  1   faire obtenir pour lui une sentence de quatre à cinq années de prison si

  2   vous étiez resté jusqu'à la fin. Vous avez pensé probablement aux débats

  3   qui ont suivi la présentation des moyens de preuve, si vous étiez resté au

  4   cours de la procédure d'appel, ou à quoi pensiez vous, s'il vous plaît ?

  5   Je ne suis pas au clair ?

  6   M. Wladimiroff (interprétation). – Laissez-moi vous dire tout

  7   premièrement la chose suivante : en ce qui concerne les avocats, ils ne

  8   doivent absolument rien écrire de ce type-là et moi, j'avoue que je suis

  9   désolé, je le regrette de l'avoir écrit.

 10   Mon point de vue, à ce moment-là, était le suivant : à cette

 11   époque-là, j'étais en pleine enquête de ce qui s'était passé avec les

 12   personnes qui ont été jugées en Allemagne, par les juridictions

 13   allemandes, et qui n'ont pas été jugées devant le Tribunal de Nuremberg.

 14   Par conséquent, il a été clair qu'à cette époque-là, que si l'on analysait

 15   tous les jugements qui ont été rendus par les juridictions allemandes,

 16   généralement parlant, il s'agissait…

 17   M. Domazet (interprétation). - Je vous ai demandé donc de me

 18   répondre à la question que je vous ai posée et vous m'avez répondu

 19   pratiquement. Vous avez dit que vous n'auriez pas dû écrire une telle

 20   chose.

 21   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, vous avez raison.

 22   M. Domazet (interprétation). - Par conséquent, je ne vous

 23   demande pas de dire davantage.

 24   M. Wladimiroff (interprétation). – Permettez-moi quand même de

 25   rajouter quelque chose. Il ne s'agissait pas de faits, mais d'analyse,

Page 1175

  1   d'une analyse concernant la sentence à prononcer.

  2   M. Domazet (interprétation). - J'ai bien compris !

  3   M. Abell (interprétation). - Je suis désolé d'interrompre, mais

  4   je voulais tout simplement dire quelque chose. Il me semble que

  5   Me Wladimiroff essaie de dire qu'une fois qu'il avait écrit, il avait

  6   regretté. Par conséquent, il faut quand même lui dire les raisons pour

  7   lesquelles il avait écrit cette lettre et je pense qu'il était en plein

  8   pour dire ce qui l'avait motivé pour écrire.

  9   M. le Président (interprétation). – Je pense que Me Domazet ne

 10   va pas être contre ; par conséquent, maître Wladimiroff, vous pouvez dire

 11   de manière très succincte.

 12   J'ai compris que, par conséquent, ceci n'aurait pas dû être

 13   fait, mais c'était une pratique allemande. Et c'est la raison pour

 14   laquelle il avait rédigé une telle lettre : est-ce que c'est vrai ou non ?

 15   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui.

 16   M. Domazet (interprétation). - Est-ce que vous vous souvenez,

 17   monsieur Wladimiroff, du témoignage de Nehad Seferovic et de son

 18   témoignage ?

 19   M. Wladimiroff (interprétation). - J'ai peur de ne pas retenir

 20   tous les noms. Je n'ai pas retenu tous les noms.

 21   M. Domazet (interprétation). - Il s'agit d'un témoin, maître

 22   Wladimiroff, qui avait dit avoir vu et il était le seul, à avoir vu

 23   personnellement Dusko Tadic tuer deux policiers musulmans ?

 24   M. Wladimiroff (interprétation). - Où ?

 25   M. Domazet (interprétation). - A l'église, à Kozarac.

Page 1176

  1   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, oui, je me souviens de

  2   ce cas de l'église. Je me souviens, effectivement, de ce cas-là mais je me

  3   souviens absolument pas du témoin qui avait témoigné à ce propos.

  4   M. Domazet (interprétation). - Mais le problème se pose là-

  5   dessus, car je voulais vous poser la question de savoir si vous avez gardé

  6   le souvenir de ce cas et si vous vous souvenez que vous avez dit à Dusko

  7   Tadic qu'il ne peut pas être condamné sur la base de la déclaration d'un

  8   seul témoin ; car c'était l'unique témoin qui avait témoigné dans ce sens-

  9   là.

 10   M. Wladimiroff (interprétation). - Je ne me souviens pas

 11   véritablement avoir dit quelque chose de similaire à M. Tadic

 12   Nous avons parlé à maintes reprises et je n'ai aucun doute que

 13   j'ai parlé entre autre chose également sur la loi continentale "unus

 14   testis, nullus testis". De toute façon, c'est effectivement une question

 15   que j'ai pu soulever, et ce dont on parle sur la première page, je lui ai

 16   donné mon point de vue : je lui ai dit que, tenant compte également du peu

 17   de certitude au sujet de telles affaires, et comme il s'agissait d'une

 18   première affaire en la matière, qu'il serait difficile de s'attendre que

 19   le jugement soit rendu en se basant sur le témoignage d'un seul témoin.

 20   Par conséquent, s'il s'agissait des événements différents et des

 21   allégations qui ne concernaient pas la même période, à ce moment-là, ceci

 22   éventuellement pourrait se produire ; et lui a suivi tout ce qui s'est

 23   passé devant le Tribunal. Je pense que je me souviens également que j'ai

 24   expliqué au Tribunal comment, aux Pays-Bas et en France, on adopte

 25   l'attitude vis-à-vis de telles affaires.

Page 1177

  1   Mais, de toutes façons, moi je n'ai pas parlé de faits et je ne

  2   pense absolument pas qu’il ait pu comprendre qu'un seul témoin ne soit pas

  3   véritablement suffisant pour…

  4   M. Abell (interprétation). - Je ne veux pas ressauter comme un

  5   yo-yo, Monsieur le Président, mais si je le fais, c'est parce que je ne

  6   veux pas exclure des questions pertinentes. Nous voulons ici découvrir la

  7   vérité et arriver au fond de l’affaire le plus rapidement possible. Si je

  8   suis intervenu, c'est parce que je m'interroge à l'instant sur la

  9   pertinence des dernières questions posées au regard des questions que vous

 10   devez trancher, Madame et Messieurs les Juges.

 11   Apparemment, nous nous aventurons sur un territoire un peu

 12   incertain. Quels sont les conseils qu'aurait prodigués Me Wladimiroff à

 13   l'accusé s'agissant des points forts et des faiblesses, quelle serait

 14   l’attitude des Juges ? Ce n'est pas cela qui est intéressant. Ce qui est

 15   intéressant, ce sont les rapports entre Me Wladimiroff et Me Vujin ; alors

 16   qu'ils coopéraient dans la même équipe et non pas ce que M. Wladimiroff

 17   aurait peut-être donné comme conseil au cours du procès dont il s'est

 18   occupé par la suite ; d'où mon objection.

 19   M. le Président (interprétation). – Maître Abell, je suis

 20   rassuré d'avoir une confirmation aussi vigoureuse de votre part, position

 21   que j'avais prise au nom de mes collègues de la formation. C'est

 22   exactement de cette façon-là que nous voyons les choses et je vous

 23   remercie de marquer votre accord avec notre position.

 24   Maître Domazet, réfléchissez-y, s'il vous plaît. Je suis sûr que

 25   vous allez le faire. Peut-être en avez-vous terminé de cet aspect-ci ?

Page 1178

  1   M. Domazet (interprétation). – Oui, Monsieur le Président, j'ai

  2   pratiquement terminé. Il a été question tout d'abord des motifs pour

  3   lesquels Me Vujin devait quitter l'équipe. Ensuite, Me Wladimiroff,

  4   également a dû partir parce que c'est Dusko Tadic qui l'avait réclamé.

  5   Nous savons quelles étaient les raisons pour lesquelles ceci était le cas.

  6   Nous avons également des informations en la matière et c'est la raison

  7   pour laquelle nous avons également insisté sur cette question-là, d'autant

  8   plus qu'il s'agissait d'un témoin qui était un témoin assez important.

  9   Je vais poser la question à Me Wladimiroff : est-ce que vous

 10   vous souvenez de ce que Dusko Tadic vous disait ? Est-ce que vous vous

 11   souvenez que Dusko Tadic vous disait qu'il fallait discréditer ce témoin

 12   parce que, tout simplement, il a été malade. Vous souvenez-vous de cette

 13   conversation avec M. Dusko Tadic et puis, c'est là où je m'arrête ?

 14   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui, généralement parlant, si

 15   par exemple, on avait une critique au sujet d'un témoin, on dépassait ce

 16   problème-là lors du contre-interrogatoire. Personnellement, je ne me

 17   souviens pas de ce témoin très concrètement. Par conséquent, je ne peux

 18   absolument pas m'en souvenir si l'on avait ou pas des instructions très

 19   concrètes à ce sujet-là.

 20   M. Domazet (interprétation). – Merci, je vous comprends. Est-ce

 21   que Me Vujin avait une influence qu'il aurait pu exercer sur vous une fois

 22   qu’il a quitté votre équipe et jusqu'à la fin de la présentation des

 23   moyens de preuve ?

 24   M. Wladimiroff (interprétation). - Au moment où je suis sorti de

 25   l'hôpital, Me Vujin avait déjà quitté notre équipe. Je pense que c'était

Page 1179

  1   en avril 1996. Après cela, il n’y avait plus de contact professionnel

  2   entre nous, je l'ai vu peut-être à quelques reprises, mais on n'a jamais

  3   parlé de cette affaire-là.

  4   M. Domazet (interprétation). - Merci. Lors de votre déclaration

  5   écrite, paragraphe 22, à ma connaissance, vous avez dit que vous saviez

  6   que Me Vujin, une fois qu’il avait quitté l'équipe, s'était rendu à

  7   plusieurs reprises dans la Republika Srpska et Banja Luka ; et vous étiez

  8   quelque peu surpris également de ce fait-là. Est-ce qu'à cette époque-là,

  9   vous étiez au courant ou bien maintenant êtes-vous au courant que Me Vujin

 10   avait d'autres affaires dont il a été chargé, d'autres clients qu'il

 11   défendait dans la Republika Srpska et, plus concrètement à Republika

 12   Srpska, à Banja Luka ? C'était la raison pour laquelle il s'était rendu en

 13   ce territoire ?

 14   M. Wladimiroff (interprétation). - Bien évidemment, je peux

 15   adopter ce point de vue que vous venez d'avancer, mais ce que l'on essaie

 16   de dire ici, c'est que des cousins de M. Tadic m'avaient tout simplement

 17   signalé qu'ils avaient vu Me Vujin dans ce territoire. Et je vais essayer

 18   véritablement de me souvenir avec précision pour vous donner quelques

 19   exemples, mais j'ai peur de ne pas pouvoir y arriver. Indépendamment de

 20   tout ceci, il s'agissait en effet de l'information que j'ai reçue : que

 21   lui se déplaçait dans cette région, qu'il avait connu un certain nombre de

 22   personnes que j'ai pu rencontrer moi-même. Je ne peux pas vous dire si

 23   c'était une personne ou deux ou trois ou plusieurs. Je ne connais même pas

 24   de noms, mais c'est de cela dont je parlais quand j'ai donc cité ceci dans

 25   ma déclaration préalable.

Page 1180

  1   M. Domazet (interprétation). - Entendu. Vous avez parlé, à

  2   plusieurs reprises, de M. Drljaca. En parlant de cette personne, vous avez

  3   dit qu'elle avait empêché, fait obstruction au travail que vous avez voulu

  4   faire, dans votre équipe également, et ceci jusqu'au moment où vous vous

  5   êtes rendu chez M. Karadzic. Est-ce que Me Vujin également a été mécontent

  6   du comportement de M. Drljaca vis-à-vis de vous ou de toutes autres

  7   personnes qui travaillaient ensemble avec vous, dans votre équipe ?

  8   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui, je pourrais dire que lui

  9   également a été inquiet.

 10   M. Domazet (interprétation). - Est-ce que vous êtes au courant

 11   si, soit sous forme écrite soit verbalement, ils s'étaient adressés aux

 12   autorités supérieures justement pour en parler.

 13   M. Wladimiroff (interprétation). - Je me souviens de quelque

 14   chose et c’est Me Vujin effectivement qui a eu cette idée-là. C'est en ce

 15   qui concerne les autorités de la Republika Srpska, il y avait des

 16   fractions différentes. Il y avait une fraction qui n'était pas d'accord

 17   avec ce qui a été dit par l'autre. Je vais donner un exemple : à ma

 18   connaissance, il y avait des tensions entre les fractions, il y en avait

 19   qui étaient plus libéraux. Je me souviens, par exemple, du nom d'un

 20   certain M. Neskovic qui, pendant un certain temps, a été le vice-ministre

 21   à l'Intérieur et il était à la Justice également et il était beaucoup plus

 22   libéral. Par conséquent, il nous laissait un peu plus de marge de

 23   manœuvre.

 24   Ensuite, il y avait une autre fraction, Drljaca, tel que Drljaca

 25   et, enfin, je dois dire que Me Vujin, à un moment donné -je pense que

Page 1181

  1   c'était en septembre 1995- il avait tout simplement dit : “Il nous avait

  2   communiqué cette appréhension à ce sujet là”. Voilà, c’est tout ce que je

  3   peux vous dire.

  4   M. Domazet (interprétation). - Est-ce que, monsieur Wladimiroff,

  5   vous vous souvenez du fait que Me Vujin, à un moment donné, vous a donné

  6   une déclaration des experts légistes, dont la conclusion était qu'il était

  7   impossible de mordre dans les testicules et de les enlever ?

  8   M. Wladimiroff (interprétation). - Oui, je me souviens que

  9   j'avais demandé également à quelqu'un d'autre de s'occuper de cette

 10   question-là, quelqu'un qui n'a aucune expérience en ce qui concerne le

 11   point de vue qu'il fallait donc avancer mais, en revanche, qui avait

 12   l'expérience en matière de médecine légale ; et ceci dans le cadre du

 13   système de common law et qui donc aurait pu être également être contre-

 14   interrogé. Par conséquent, j'avais en vu ce comportement et voir ce que

 15   nous pouvons faire devant le Tribunal.

 16   Il y avait cette deuxième expertise et mon équipe a tout

 17   simplement pris la décision de ne plus vraiment rentrer en détail.

 18   M. Domazet (interprétation). – Par conséquent, vous n'en avez

 19   pas parlé dans le Tribunal, vous voulez dire ?

 20   M. Wladimiroff (interprétation). – Non, je n'ai pas appelé cet

 21   expert légiste yougoslave effectivement.

 22   M. Domazet (interprétation). – Maître Wladimiroff, quand vous

 23   avez rencontré M. Karadzic, vous avez dit, si j'ai bien compris, -vous

 24   allez me corriger si je ne dis pas ce qui est vrai- c'est une seule fois

 25   que vous avez rencontré M. Karadzic ?

Page 1182

  1   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, c'est vrai.

  2   M. Domazet (interprétation). – Par conséquent, je vous ai

  3   compris, vous l'avez rencontré une seule fois. Mais, à plusieurs reprises,

  4   vous avez dit : "J'ai été chez Karadzic". Vous n'en avez pas parlé. Est-ce

  5   que Me Vujin vous a accompagné ? Y avait-il votre interprète également

  6   avec vous, quand vous avez vu M. Karadzic ?

  7   M. Wladimiroff (interprétation). – M. Vujin y était et Mme Antic

  8   également était avec moi. C'est Me Vujin qui m'avait conduit de Belgrade

  9   jusqu'à Pale et qui m'a ramené à Belgrade également.

 10   M. Domazet (interprétation). – Par conséquent, il était avec

 11   vous chez Karadzic ?

 12   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui, il était présent.

 13   Excusez-moi. Je voudrais tout simplement rajouter quelque chose.

 14   Je pense que je l'ai également marqué dans ma déclaration. Je pense que je

 15   me dois de dire quelque chose d'autre : l'initiative a été la mienne et

 16   c'est moi qui me suis mis en contact avec M. Karadzic.

 17   M. Domazet (interprétation). – Oui, l'initiative était la vôtre,

 18   mais de toute façon, Me Vujin était avec vous chez M. Karadzic. Etes-vous

 19   d'accord avec moi ?

 20   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

 21   M. Domazet (interprétation). – Monsieur Wladimiroff, je voudrais

 22   vous montrer les huit lettres qui sont signées par vous-même -tout au

 23   moins, j'aimerais bien que vous me le confirmiez- de votre cabinet, dont

 24   sept lettres ont été rédigées en langue anglaise. Il y a une lettre qui a

 25   été rédigée en BCS, accompagnée de la version anglaise, et qui a été

Page 1183

  1   adressée à M. Simic. Si vous voulez bien les regarder, nous souhaiterions

  2   les verser comme pièces à conviction. Monsieur le Président, ce serait la

  3   dernière question que j'aurais à poser à Me Wladimiroff. Je n'ai plus de

  4   questions.

  5   M. le Président (interprétation). – J'aurais peut-être l'une ou

  6   l'autre question à poser. Maître Abell, vous êtes toujours assis et vous

  7   n'allez pas intervenir ? C'est bien cela ?

  8   M. Abell (interprétation). – Non.

  9   M. le Président (interprétation). – Maître Wladimiroff, ceci est

 10   peut-être quelque peu embarrassant pour vous, mais est-ce que je peux

 11   conclure de tout ce qui a été dit jusqu'à présent, qu'aujourd'hui vous

 12   êtes maintenant pratiquement en position de direction au barreau

 13   néerlandais ?

 14   M. Wladimiroff (interprétation). – Je préside effectivement le

 15   barreau pénal des Pays Bas. C'était vrai, tout du moins jusqu'à récemment.

 16   Il faut que je m'habitue à la nouvelle situation qui a changé il y a deux

 17   semaines.

 18   M. le Président (interprétation). – Est-ce que j'ai raison de

 19   croire que vous avez décidé, vous qui étiez avocat de la défense, et fort

 20   de votre expérience professionnelle, au niveau de la première instance, de

 21   présenter des arguments qui vous avaient été soumis, deux types

 22   d'arguments : le premier serait qu'un certain crime avait été le fait d'un

 23   double, d'un sosie de M. Tadic ; la deuxième série d'arguments étant qu'il

 24   n'était pas possible de mordre et d'arracher des testicules avec les

 25   dents.

Page 1184

  1   M. Wladimiroff (interprétation). – C'est exact, Monsieur le

  2   Président. De toute façon, au niveau des premiers arguments, cela n'avait

  3   jamais dépassé le stade de la rumeur. Pour ce qui est du second jeu

  4   d'arguments, cela semait trop la confusion.

  5   M. le Président (interprétation). – Donc, ces idées vous ont été

  6   soumises, mais vous avez décidé, fort de votre jugement professionnel, de

  7   ne pas les poursuivre.

  8   M. Wladimiroff (interprétation). – C'est exact, Monsieur le

  9   Président.

 10   M. le Président (interprétation). – Vous vous souvenez d'un

 11   incident qui portait sur une querelle ou un litige opposant votre

 12   interprète et Me Vujin ?

 13   M. Wladimiroff (interprétation). – Oui.

 14   M. le Président (interprétation). – J'ai examiné deux séries de

 15   comptes rendus d'audience relatifs à cet incident et j'ai essayé de les

 16   mettre au regard l'un de l'autre. Je pense que l'un de ces comptes rendus

 17   -c'est le 39 ou le 40- commence par les termes 00-15-31. Monsieur le

 18   Greffier, qu'est-ce que c'est que ceci ? Quelle est la cote attribuée ?

 19   M. Dubuisson. – Le transcript est la pièce à conviction n° 37.

 20   M. le Président (interprétation). – Le numéro 37. Fort bien. Le

 21   compte rendu ou la transcription qui a reçu la cote 43, si je ne m'abuse,

 22   c'est la dernière longue transcription de la cassette intégrale.

 23   Je vais peut-être inviter le témoin à examiner ces deux

 24   transcriptions afin que, s'agissant de cet incident, les deux

 25   transcriptions évoquent la même chose.

Page 1185

  1   Monsieur le Témoin, avez-vous sous les yeux la longue

  2   transcription ? La pièce 43 ? Je suis à la page 3.

  3   M. Wladimiroff (interprétation). – Je l'ai sous les yeux.

  4   M. le Président (interprétation). – Avez-vous sous les yeux

  5   également la pièce 37 ?

  6   M. Wladimiroff (interprétation). – Pas encore, Monsieur le

  7   Président.

  8   M. le Président (interprétation). – Veuillez examiner le court

  9   segment qui porte sur ce litige ? Commençons par la transcription courte

 10   d'abord, qui dit ceci : « M. Vujin : Je sais qu'il ne s'en fait pas de ce

 11   qu'il dit. Je ne m'occupe pas de ce qu'il ne dit pas. Je veux dire ce que

 12   je veux, je veux dire ce que je veux ». Donc ceci semble effectivement

 13   bien cadrer avec le fait qu'il voulait dire quelque chose. Est-ce qu'il

 14   voulait dire ce que le témoin devrait dire ? Ce serait bien possible.

 15   Examinons maintenant la transcription plus longue (querelle

 16   entre l'interprète et Vujin) : l'interprète pensait que Vujin devait

 17   attendre jusqu'à ce que Wladimiroff pose la question et puis, je pense que

 18   c'est une citation que l'on fait ici.

 19   “ Vujin, peu m'importe ce qu'il veut. Je demande ce que je veux

 20   demander ”.

 21   Par conséquent, dans un des cas, on fait dire quelque chose à

 22   M. Vujin alors que, dans l'autre, il demande quelque chose. Et ceci semble

 23   indiquer que le témoin disait : “Mais, vous, vous ne pouvez pas poser de

 24   questions. Toutes les questions, il faut que ce soit M. Wladimiroff qui

 25   les pose”. Je ne sais pas si vous saisissez la nuance, la distinction

Page 1186

  1   entre les deux, que j'essaie ici de mettre en exergue.

  2   Quelle est la version correspondant à ce qui, dans votre

  3   souvenir, est restée de la situation ? Est-ce que c’est Me Vujin qui

  4   disait au témoin ce qu’il devait dire ou est-ce que c'était plutôt ceci :

  5   que M. Vujin posait une question et que l'interprète pensait : “Non, non,

  6   il faut que ce soit M. Wladimiroff qui pose toutes les questions”.

  7   M. Wladimiroff (interprétation). – C’est différent. C'était la

  8   première fois qu'une telle chose se produisait. Et au moment même où ceci

  9   s'est produit, je n'ai rien remarqué. J'ai simplement constaté qu'il y

 10   avait un échange entre l'interprète et Me Vujin. Par la suite, j'ai

 11   compris ce qui s'était passé. Je ne peux, dès lors, pas vous donner

 12   d'information s'agissant de la différence que vous recherchez. Tout ce que

 13   je peux dire, c'est que la totalité de la conversation en tant que telle a

 14   fait qu'il y a eu plusieurs interventions de Me Vujin.

 15   Personnellement, j'ai eu l'impression que, soit il conseillait

 16   au témoin de dire telle ou telle chose, soit il corrigeait le témoin ou,

 17   par exemple : “Mais qu’en était-il alors ? Est-ce que ce n'était pas Tadic

 18   qui faisait ceci ?”, ce genre de question, c'est-ce que j'ai gardé à

 19   l'esprit.

 20   M. le Président (interprétation). – J'essaie de déterminer ou de

 21   concilier cette version-là avec ce que dit la transcription à la pièce 37.

 22   M. Wladimiroff (interprétation). - Mais vous savez, nous n'avons

 23   vu qu'un tout petit segment de ce qui s'est passé cet après-midi-là. Je ne

 24   les autorisais à filmer ce genre de choses qu'au tout début et puis, je

 25   les ai interrompus. Donc ce que je dis, ici, c'est un peu ce dont je me

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  1   souviens pour ce qui est de la totalité de la conversation. Je ne me

  2   souviens que mal de ce qui s'est passé ici ; puisque c'est après que l’on

  3   m’a dit ce qui s'était passé.

  4   M. le Président (interprétation). – Tout à fait, mais veuillez

  5   examiner à nouveau la pièce 37, là où l’on voit Me Vujin qui aurait dit

  6   ceci : “Je veux dire ce que je veux”. Et la question est de savoir s'il

  7   disait quelque chose ou plutôt s’il posait une question. Regardez ce qu'il

  8   disait deux lignes plus tôt. L'interprète parle et dit : “Un instant, je

  9   ne poserai pas de question à moins qu'il ne me dise de le faire” ; mais

 10   qui est ce “il”, à ce moment-là, monsieur Wladimiroff ?

 11   M. Wladimiroff (interprétation). - Je crains…

 12   M. le Président (interprétation). – Ne craignez rien. Vous

 13   fournissez une déposition tout à fait utile pour les Juges. Est-ce que

 14   ceci ne vous semble pas indiquer que le problème consistait en ceci : que

 15   M. Vujin posait une question et que le témoin estimait qu'il n'avait pas à

 16   poser de question, que seul M. Wladimiroff avait le droit de poser des

 17   questions.

 18   M. Wladimiroff (interprétation). - Je me range à cette

 19   interprétation, mais je ne peux pas la confirmer, car je ne me souviens

 20   pas.

 21   M. le Président (interprétation). – Passons un peu à autre

 22   chose ; progressons. Est-ce que M. Vujin avait vu ces témoins avant

 23   l'incident ?

 24   M. Wladimiroff (interprétation). - Vous parlez de ce témoin-ci ?

 25   M. le Président (interprétation). – Oui.

Page 1188

  1   M. Wladimiroff (interprétation). - Je n'ai pas d'informations

  2   qui corroborent ceci.

  3   M. le Président (interprétation). – J'aimerais vous poser cette

  4   question-ci. Je peux, en fait, faire cette affirmation plutôt que poser la

  5   question parce que cela relève de l'évidence. Les procédures pénales

  6   varient d'un pays à l'autre ; une autre question qui se pose bien sûr est

  7   de savoir s'ils se conforment aux normes applicables en droit

  8   international. Mais ceci peut varier. Est-ce que vous vous êtes rendu

  9   compte qu’en Yougoslavie, il y avait peut-être un régime statutaire ou un

 10   règlement qui allait dans ce sens-ci : si un conseil de la défense

 11   souhaite interroger des témoins, les dispositions à prendre dans ce sens

 12   devraient être prises par une personne officiellement autorisée, de

 13   préférence au poste de police.

 14   Est-ce que vous avez appris qu'il existait des règles de ce

 15   genre ?

 16   M. Wladimiroff (interprétation). - Je n'ai pas lu de règlement

 17   me concernant, mais j'étais tout à fait conscient de la nature du système

 18   dont ceci dérivait, et comment ceci se présentait en pratique s'agissant

 19   d'enquêtes menées par la police en l'absence d'avocats, lorsque des

 20   témoins sont entendus ou lorsqu'une enquête est menée sous l'égide d'un

 21   juge d'instruction. A ce moment-là, l'avocat serait présent, sauf dans des

 22   circonstances expresses.

 23   J'en ai tenu compte. Toutefois, dans la tradition juridique

 24   continentale, avant de demander à un policier, à un juge d'instruction

 25   d'entendre quelqu'un, il faut se convaincre soi-même de la pertinence de

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  1   ce témoignage ; donc que faites-vous au fond ? C'est un peu tester ce

  2   témoin pour voir s'il est pertinent ou pas. S'il l’est, vous présentez son

  3   nom au juge d'instruction ou à l'officier de police.

  4   Au départ, il me fallait bien comprendre quelle était la

  5   tradition en matière de fonctionnement dans ce pays. De surcroît, je

  6   gardais à l'esprit qu'il était peut-être encore le bâtonnier au barreau de

  7   Belgrade. Donc, on peut s'attendre d'un bâtonnier qu'il soit le premier à

  8   appliquer le règlement.

  9   M. le Président (interprétation). – Ce qui veut dire que

 10   certaines dispositions en matière d'audition ont été prises par

 11   M. Drljaca, le chef de la police ?

 12   M. Wladimiroff (interprétation). - Vous voulez parler de mon

 13   entretien avec M. Karadzic. J'ai pris les dispositions moi-même avec

 14   l'aide de quelqu'un d'autre.

 15   M. le Président (interprétation). – Et puis, manifestement, il a

 16   émis des instructions conformément auxquelles vous avez pu rencontrer

 17   quelques personnes que vous vouliez rencontrer et interviewer ?

 18   M. Wladimiroff (interprétation). - Monsieur Karadzic a téléphoné

 19   en notre présence à M. Drljaca. Mon interprète m'a dit que M. Karadzic, en

 20   résumé, avait donné des instructions à M. Drljaca, chef de la police à

 21   Prijedor, lui avait dit dans ces instructions de ne pas entraver le

 22   travail des conseils de la défense, mais que M. Drljaca devait au

 23   contraire les aider. Si je me souviens bien, d'après ce qui m'a été

 24   traduit il y a eu certaines objections soulevées par M Drljaca, mais

 25   finalement, il a marqué son accord.

Page 1190

  1   D'après ce qui m'avait été dit à ce moment-là, j'avais

  2   l'impression que nous avions l'accord de M. Drljaca, selon lequel il ne

  3   devait pas entraver nos travaux mais au contraire les aider. C'est là-

  4   dessus que nous sommes restés. Par la suite, vous l'aurez remarqué dans le

  5   documentaire, nous avons le sentiment qu'il nous fallait une certaine

  6   confirmation par écrit, parce que M. Drljaca a opposé une certaine

  7   résistance.

  8   Nous avons pensé qu'il fallait peut-être bien prendre les

  9   autorités pour obtenir une lettre et, là, nous avons demandé l'aide de

 10   M. Vujin pour obtenir cette lettre. C'est la raison pour laquelle je

 11   prends quelques distances par rapport à ce que disait le commentateur dans

 12   le documentaire. En tout cas, M. Vujin est sorti et un fax est arrivé

 13   disant simplement ceci : “ L'enquête -notre enquête- était autorisée ”.

 14   C’est tout ce que le fax disait.

 15   Il n'y avait aucune instruction aux fins d'assistance de ces

 16   autorités ou alors on avait dit : “ A partir du 1er février, nous aurons

 17   le droit de faire notre travail ”. Cela revenait pratiquement à cela, il

 18   n'y avait rien de nouveau.

 19   M. le Président (interprétation). – J'en suis conscient mais

 20   quand on parle d'immixtion, d'obstruction, c'est une chose ; cependant,

 21   est-ce que vous avez eu vent d'une procédure par laquelle certains

 22   fonctionnaires responsables auraient un certain rôle à jouer si les

 23   conseils de la défense souhaitaient interroger les témoins.

 24   M. Wladimiroff (interprétation). - A l'époque, nous croyons que,

 25   soit nous devions informer la Chambre de première instance, s'il y avait

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  1   donc des obstructions, et qu'on ne pouvait pas simplement outrepasser

  2   certains droits, et puis l'autre position, c'était que la Chambre devrait

  3   peut-être engager une procédure officielle qui se terminerait au Conseil

  4   de sécurité ou, encore, nous devions nous débrouiller nous-mêmes. Enfin,

  5   il fallait nous repérer entre ces différents paramètres.

  6   Nous avons régulièrement informé la Chambre de première instance

  7   lors des conférences de mise en état de nos déboires.

  8   M. le Président (interprétation). – Maître Wladimiroff, je vous

  9   remercie, je vous remercie d'avoir déposé devant ce Tribunal.

 10   M. Abell (interprétation). - Je me posais une question. Puisque

 11   vous avez posé l’une ou l'autre question très pertinente, si je peux me

 12   permettre de le dire, à propos du sosie.

 13   M. le Président (interprétation). – Non, non, la Chambre ne

 14   recevra plus de questions.

 15   M. Abell (interprétation). - Qu'il en soit ainsi, j'aurais voulu

 16   poser deux ou trois questions.

 17   M. le Président (interprétation). – Non, plus aucune question ne

 18   sera autorisée, c'est une procédure ici qu'il faut appliquer. Lorsque les

 19   Juges terminent la procédure en posant quelques questions, ils

 20   n'autorisent plus d'objection.

 21   Mme Hollis (interprétation). – Je n'ai pas de question à poser,

 22   mais j'aurais une question à poser à la Chambre aux fins de précision.

 23   Avant que vous ne posiez vos questions, Monsieur le Président, j'avais cru

 24   comprendre que Me Domazet avait tout un jeu de lettres à distribuer, mais

 25   je ne sais plus si Me Wladimiroff les avait vérifiées ; s'il s'agissait

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  1   bien de ses lettres à lui, des lettres qu'il avait envoyées.

  2   M. Wladimiroff (interprétation). - C'est exact.

  3   Mme Hollis (interprétation). – Il faudrait peut-être que cela

  4   soit fait.

  5   M. le Président (interprétation). – Maître Domazet, quelle est

  6   votre position ?

  7   M. Domazet (interprétation). - Monsieur le Président, oui

  8   j’avais demandé à Me Wladimiroff de vérifier toutes ces lettres. J'ai fait

  9   distribuer ces lettres mais, effectivement, il n'a pas eu le temps, il ne

 10   l'a pas fait. Je le souhaite.

 11   M. Dubuisson. - Il s'agit pour les lettres de la pièce 45 ; 45/1

 12   pour la lettre datée du 2 mai ; 45/2 pour la lettre datée du 17 mai 1995 ;

 13   45/3 pour la lettre datée du 30 mai 1995 ; 45/4 pour celle datée du

 14   4 septembre 1995 ; 45/5 pour la lettre datée du 15 octobre 1995 ; 45/6

 15   pour celle datée du 30 septembre 1997 ; 45/7 pour la lettre adressée à

 16   Me Vujin, en date du 30 septembre 1997. C’est une lettre contenant deux

 17   pages par rapport à la précédente et 45/8 étant une lettre adressée à

 18   Me Simic, en date du 16 novembre 1995.

 19   M. le Président (interprétation). – Ces documents sont versés au

 20   dossier et ont reçu les cotes qui viennent d'être énoncées. Eh bien, ceci

 21   termine votre déposition, maître Wladimiroff. Vous pouvez vous retirer.

 22   J’agis un peu à la hâte. Vous n'avez pas encore confirmé la

 23   véracité des documents.

 24   M. Wladimiroff (interprétation). – Effectivement, Monsieur le

 25   Président.

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  1   (Le témoin examine les documents.)

  2   M. Wladimiroff (interprétation). – Effectivement, c'est moi qui

  3   ai écrit toutes ces lettres. Un petit commentaire à propos de la lettre en

  4   date du 17 mai 1995 ; la deuxième lettre. Il s'agit d'une télécopie, du

  5   moins la page de garde, puis en annexe une lettre adressée à l'ambassade

  6   de la République fédérale de Yougoslavie à La Haye. Effectivement, ces

  7   cassettes étaient bien sous scellés ; j'avais utilisé le courrier

  8   diplomatique pour les acheminer à Belgrade.

  9   M. le Président (interprétation). – Y a-t-il des objections de

 10   la part des parties ? En l'absence d'objection, je confirme le versement

 11   de ces pièces au dossier.

 12   Je vous remercie, une fois de plus, monsieur le Témoin. Vous

 13   pouvez vous retirer.

 14   (Le témoin quitte la salle d'audience.)

 15   M. le Président (interprétation). – Et bien, nous avons ainsi

 16   entendu tous les éléments de preuve présentés contre Me Vujin. Mais avant

 17   d'aller plus loin, je voudrais faire état d'une requête déposée par

 18   Me Abell.

 19   M. Abell (interprétation). - Vous vous souvenez peut-être,

 20   Madame et Messieurs les Juges, qu'une déclaration d'un témoin du témoin G

 21   avait été versée au dossier. Nous n'avons pas entendu parler de lui. Si

 22   j'ai bien compris, d'après les discussions officieuses que j'ai eues avec

 23   le greffe et M. le greffier, apparemment, des mesures sont prises pour

 24   voir si l'on peut trouver la trace de ce témoin afin qu'il vienne déposer

 25   ou qu'il le fasse par vidéoconférence, comme a fait M. Preradovic.

Page 1194

  1   Je voulais vous rappeler que cette pièce avait été versée au

  2   dossier, mais qu'elle est toujours en suspens, si vous volez. Il s'agit

  3   d'un des témoins de la Chambre.

  4   M. le Président (interprétation). – Je vais en discuter avec mes

  5   collègues.

  6   M. Abell (interprétation). - Mais bien sûr, Monsieur le Juge.

  7   (Les Juges se consultent sur le siège.)

  8   M. le Président (interprétation). – Personnellement, je ne suis

  9   pas tout à fait au courant de toutes les questions que vous avez

 10   soulevées, Maître Abell. Je suis sûr que ceci a été dit et que c'était

 11   bien l'intention poursuivie, mais l'intention n'était pas de pérenniser ad

 12   infinitum la procédure.

 13   M. Abell (interprétation). - Tout à fait. Mais rappelez-vous,

 14   lors de la première matinée de la semaine dernière… Non, excusez-moi, lors

 15   de la deuxième matinée, il y a eu une audience ex parte, à la suite de

 16   quoi cette déclaration était passée au dossier. Il s'agissait du témoin G.

 17   M. le Président (interprétation). – Oui, mais le témoin G ne

 18   s'est pas présenté. Est-ce que on s'attend à ce qu'il y ait déposition de

 19   ce témoin s'agissant de tel ou tel point précis que vous avez à l'esprit ?

 20   M. Abell (interprétation). - Vous savez que c'est un élément de

 21   preuve admis par la Chambre comme étant un autre exemple de faute

 22   professionnelle ou d'inconduite.

 23   M. le Président (interprétation). – Vous voulez dire que c'est

 24   un élément admis par ordonnance portant calendrier, mais pas à

 25   l'audience ?

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  1   M. Abell (interprétation). - Vous savez, je pense qu'il y avait

  2   des difficultés d'ordre pratique pour veiller à la présence du témoin.

  3   M. le Président (interprétation). – Monsieur le Greffier, est-ce

  4   que ces dispositions sont terminées ? Les mesures ont-elles été prises ?

  5   M. Dubuisson. – Nous avons tenté de répondre à votre ordre, mais

  6   nous ne parvenons pas à contacter le témoin G, dont il nous manque

  7   énormément de données. Donc, si Me Abell peut éventuellement nous aider à

  8   ce propos, comme nous lui avons proposé durant la semaine, ce serait le

  9   bienvenu.

 10   M. Abell (interprétation). - Si j'ai bien compris, Monsieur le

 11   Président, comment ceci s'est-il présenté ?

 12   Une déclaration avait été envoyée au Tribunal, venant de l'ex-

 13   Yougoslavie, par le témoin G. Il ne me l'a pas adressée. C'est tout ce que

 14   je sais ; moi, je ne sais que ce qui se trouve sur ce papier. Et si je me

 15   souviens bien, c'est Mme Featherstone, ou un autre membre du Tribunal qui

 16   me l'a remis. Et, du jour au lendemain, j'ai présenté cette requête ex

 17   parte que je vous ai soumise le lendemain matin. Parce que je pensais

 18   qu'il était de mon devoir de vous aider. Mais je n'ai pas moyen de

 19   contacter le témoin.

 20   Si je comprends bien, M. Ljubo Tadic, qui apparemment connaît

 21   l'endroit où habite ce témoin, a été prié de le contacter à son retour en

 22   ex-Yougoslavie. Je suppose qu'il sera rentré hier. Je ne sais pas si M. le

 23   greffier peut s'enquérir auprès de l'unité des victimes et témoins pour

 24   voir si des informations ont été obtenues. Je ne veux pas retarder la

 25   procédure ; j'essaie simplement de vous rappeler cette ordonnance portant

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  1   calendrier qui admettait cet élément de preuve, alors que nous n'en

  2   disposons pas pour le moment. Peut-être qu'on pourrait faire cela par

  3   vidéoconférence, demain matin ?. Je ne sais pas.

  4   (Les Juges se consultent sur le siège.)

  5   M. le Président (interprétation). – Monsieur le Juge Hunt veut

  6   poser une question.

  7   M. Hunt (interprétation). – Maître Abell, vous avez soulevé une

  8   question de faux et j'ai pensé que vous et l'accusation vous demandiez

  9   nous aurions peut-être de nouveaux éléments de preuve. Mais c'est tout ce

 10   que nous avons entendu à ce propos.

 11   M. Abell (interprétation). - Eh bien, c'est le point suivant que

 12   j'avais sur cette liste que j'ai dressée des questions qui restent en

 13   suspens. J'avais commencé par le témoin G. Mais, puisque je parle toujours

 14   de celui-ci -et je ne veux pas m'écarter du sujet que vous évoquez,

 15   Monsieur le Juge Hunt-, je veux vous aider, Madame et Messieurs les Juges,

 16   pour vous rafraîchir la mémoire. Voici l'ordonnance portant calendrier

 17   concernant le témoins G.

 18   Si vous voulez vous remémorer la teneur de cette dite

 19   déclaration, du moment qu'on me la rend, c'est l'essentiel.

 20   M. le Président (interprétation). – Maître Abell, si nous

 21   attendions demain matin ? Est-ce que ceci pourra vous convenir ?

 22   M. Abell (interprétation). - S'agissant du témoin G,

 23   effectivement on pourrait faire le point, on aura peut-être quelques

 24   progrès. Je veux bien passer au sujet de la question du faux, s'agissant

 25   de M. Preradovic.

Page 1197

  1   M. le Président (interprétation). – Mais vous serez content

  2   d'apprendre que moi aussi, j'ai ma petite liste d'emplettes que j'avais

  3   préparée. J'espère l'aborder dès que nous avons terminé ce point.

  4   Fort bien. Nous allons reprendre nos travaux demain. Nous

  5   verrons alors si le témoin en question est disponible. Si ce n'est pas le

  6   cas, il vous faut savoir que la Chambre estime que ceci ne peut pas se

  7   prolonger à perpétuité, bien sûr, à moins qu'un témoin…, dans l'attente

  8   d'un témoin hypothétique.

  9   Fort bien. Nous reprendrons demain à 10 heures.

 10   Oui, Maître Vujin, vous vouliez intervenir ?

 11   M. Vujin (interprétation). – (Hors micro) Monsieur le Président,

 12   j'aurais voulu évoquer encore une question. Mais je passe au BCS.

 13   Si nous attendons jusqu'à demain matin, en ce qui concerne le

 14   témoin G, compte tenu du fait des frais que nous avons à subir, parce que

 15   j'ai convoqué un certain nombre de témoins. Nous avons perdu une journée

 16   également hier et puis, ces témoins que j'ai cités sont également des

 17   avocats. Ils ont leurs obligations.

 18   Moi, je voudrais tout simplement suggérer la chose suivante :

 19   tout simplement, qu'on porte modification du calendrier. Je pense que,

 20   normalement, j'aurais dû être le premier à être cité en témoin. C'est la

 21   raison pour laquelle je vous propose de commencer à citer les témoins que

 22   j'ai invités et que moi, je vienne en dernier. D'autant plus que je ne

 23   pense absolument pas que nous allons pouvoir terminer l'interrogatoire de

 24   tous les témoins. Si la Chambre l'accepte, moi je vous propose d'être le

 25   dernier, étant donné les frais que nous avons eu à subir.

Page 1198

  1   M. le Président (interprétation). – Oui, Maître Abell ?

  2   M. Abell (interprétation). – J'aimerais vous présenter un

  3   argument. Malheureusement, je crois qu'il sera contraire à ce que propose

  4   Me Vujin. Avec tout le respect que je lui dois, c'est lui qui est en

  5   accusation dans cette procédure. En règle générale, l'accusé est le

  6   premier à déposer et tout témoin qu'il souhaite citer sera cité par la

  7   suite.

  8   Pour tout une série de bonnes raisons, et tant que j'ai la

  9   parole, tout en ne voulant pas faire de coq à l'âne, vous avez dit que

 10   nous allions reprendre nos travaux à 10 heures, mais je pensais que vous

 11   vouliez savoir ce qu'il en était de ce faux. A vous de trancher, Monsieur

 12   le Président. C'est vous qui décidez ce que je peux faire.

 13   M. le Président (interprétation). – Nous allons vous faire part

 14   d'une décision demain matin, s'agissant du faux.

 15   M. Abell (interprétation). – Je sais bien, mais je pensais...

 16   (Les Juges se consultent sur le siège.)

 17   M. Abell (interprétation). – Je n'aurai besoin que de cinq

 18   minutes.

 19   M. le Président (interprétation). – On vient de me rappeler

 20   quelque chose de tout à fait fondé. Il serait peut-être utile que vous

 21   nous disiez rapidement ce que vous vouliez dire à propos du faux et nous

 22   vous rendrons notre décision demain matin.

 23   M. Abell (interprétation). – D'accord, Monsieur le Président. Il

 24   y a trois documents pertinents. La pièce 18, il s'agit d'un document

 25   déposé au TPIY le 5 février 1998. Vous l'avez dit à juste titre : si ceci

Page 1199

  1   suscite litige, j'en ai discuté avec M. le Greffier, la preuve formelle

  2   peut être administrée. Ce document a une date d'enregistrement et une

  3   cote.

  4   Le 18 D est un document fourni par (expurgé)

  5   (expurgé). De ce document, il a dit à l'audience que c'était celui qu'il

  6   avait montré au témoin Preradovic. C'est le document dont M. Preradovic a

  7   dit que c'était un faux dans sa déclaration écrite.

  8   Troisième document : le 18 C, document pour lequel Me Vujin est

  9   intervenu à l'audience, moment auquel il a fourni l'original. Je vais vous

 10   citer les termes qu'il a utilisés et qu'on trouvera au compte rendu

 11   d'audience à la page 920. Je l'évoquerai rapidement. Il a dit ceci : -je

 12   cite- "Au cours de la déposition de M. Preradovic, peu de temps avant le

 13   contre-interrogatoire mené par Me Vujin, il dit : "Merci, messieurs les

 14   Juges. Si vous le voulez, je peux vous montrer l'original de la

 15   déclaration qui a reçu la cote 18. Petite pause, je vous l'ai dit, la

 16   pièce 18 est celle qui a été déposée par Me Vujin en 1998. Je peux vous

 17   montrer l'original de la déclaration qui a reçu la cote 18. S'il y a la

 18   moindre contestation et s'il n'y a pas de contestation, nous pouvons

 19   poursuivre immédiatement afin que vous puissiez comparer ce document à la

 20   copie que M. Preradovic". (Fin de citation.)

 21   M. Vujin, invité à une comparaison entre son original, -en tout

 22   cas, ce qu'il qualifie de son original- et la copie qu'avait

 23   M. Preradovic, en d'autres termes, il disait que l'original était le même

 24   document que celui dont nous avons une photocopie qui a reçu la cote 18.

 25   C'est bien là qu'il faut s'intéresser à la question. Il ne faut

Page 1200

  1   pas l'avis d'un expert là-dessus. L'accusation et moi, nous sommes

  2   d'accord. Il suffit d'une simple comparaison qui se fera en examinant ces

  3   documents à la lueur du jour. Je m'explique : si l'on se concentre sur le

  4   nom imprimé Preradovic Milos au bas de chacun des trois documents, si on

  5   les superpose à la lumière de telle façon que le nom imprimé soit

  6   parfaitement superposé dans chacune des copies et si l'on voit où se

  7   trouve l'endroit de la signature, à ce moment-là, après avoir fait la

  8   juxtaposition, on constate que, dans la pièce 18, document déposé par

  9   Me Vujin en février 1998 et dans la pièce 18 D, document que M. Preradovic

 10   a décrit comme étant un faux dans sa déclaration, document fourni par

 11   (expurgé) présenté à M. Preradovic, lorsqu'on voit ces

 12   documents ainsi juxtaposés, on constate que la signature se trouve

 13   exactement à la même place. Il faut donc en conclure que ce sont là des

 14   photocopies d'un seul et même document.

 15   Toutefois, si l'on prend le document fourni par M. Vujin, que

 16   moi, j'ai photocopié à des fins de commodité, vous voyez qu'ici il y a une

 17   signature en bleu.

 18   Et si l'on superpose le 18C, sur le 18D ou sur le 18, à la

 19   lumière du jour, on comprend que la signature se trouve à un endroit

 20   différent. C'est une question de millimètre. Toutefois, la position n'est

 21   pas la même. Par conséquent, le document produit comme original par

 22   Me Vujin et dont M. Preradovic a dit qu'il l'avait signé en mars 1999,

 23   -c'est à cela que revenait sa déposition- par conséquent, ce document ne

 24   peut pas être le document déposé par Me Vujin le 5 février 1998, même si

 25   lorsqu'on examine les deux documents séparément, on ne va peut-être

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  1   déceler aucune différence. Il faut les superposer, faire coïncider les

  2   polices de caractère et on voit que les signatures sont différentes.

  3   Je ne vais pas maintenant entrer dans tous les éléments de ce

  4   qu'a déposé M. Preradovic, mais nous estimons que si l'on prend la

  5   déposition de M. Preradovic et si ce qu'il a signé était similaire au

  6   document de M. Vujin, mais présentait quelques différences qu'il estimait

  7   peu pertinentes, le document signé début 1998 n'a pas été le document

  8   soumis à ce Tribunal le 5 février. Par conséquent, on peut tirer des

  9   conclusions tout à fait porteuses, convaincantes, dirai-je, selon

 10   lesquelles ce document, la pièce 18, le document déposé constitue un faux.

 11   M. Hunt (interprétation). – Maître Abell, le témoin lui-même

 12   s'est vu poser la question précise de savoir s'il a signé plus qu'une

 13   seule copie. Rappelez-vous plusieurs photocopies ont été faites et il n'a

 14   pas pu exclure cette éventualité.

 15   M. Abell (interprétation). - Monsieur le Juge, certes, mais moi,

 16   comme j'ai entendu…, la façon dont j'ai entendu sa déposition, c'est

 17   celle-ci : à ce moment-là, il avait affaire à ce qu'il a appelé un

 18   questionnaire dont il a dit, à plusieurs reprises, qu'il était similaire à

 19   celui signé en présence de Me Vujin en mars 1999, mais il était différent

 20   parce qu'il y avait une petite case oui/non qu'il fallait cocher. En

 21   d'autres termes, il disait qu'il avait signé, croyait-il, plusieurs copies

 22   d'un questionnaire, mais pas cette déclaration-là.

 23   On s'interroge aussi à ce propos. On se demande quelle serait la

 24   raison de la présence de Maître Vujin avec M. Saponja le 15 mars 1999 chez

 25   M. Preradovic, afin que ce dernier signe la déclaration. C'est du moins à

Page 1202

  1   ce moment-là qu'apparemment, cela a été signé, s'il y avait déjà plusieurs

  2   copies signées de cette déclaration.

  3   M. le Président (interprétation). - Etes-vous toujours en train

  4   de répondre à la question posée par le juge Hunt ?

  5   M. Abell (interprétation). - C'est toujours ce que j'essaie de

  6   faire sans prendre trop de temps.

  7   Je peux vous fournir la référence du compte rendu d'audience sur

  8   ce point. 887, 891, 896 et 897.

  9   M. Hunt (interprétation). – Vous dites 887, 891.

 10   M. Abell (interprétation). – 896 et 897.

 11   Ce sont autant d'exemples qui montrent que le questionnaire… il

 12   avait parlé d'une déclaration aussi, mais apparemment, il avait dit à ces

 13   endroits qu'il avait signé un questionnaire il y a longtemps de cela et

 14   que ce questionnaire, même s'il ressemblait aux documents signés en

 15   mars 1999 en était toutefois différent.

 16   Ce document qu'il avait signé en 1997 qui était soumis ici à

 17   l'audience par Me Vujin qui vous demande de le comparer avec la pièce 18

 18   impliquant qu'il s'agit d'un seul et même document. C'est du moins ce que

 19   Me Vujin affirme.

 20   M. le Président (interprétation). – Maître Vujin voudrait

 21   intervenir.

 22   M. Vujin (interprétation). – Merci, monsieur le Président. Je

 23   dois dire que je suis très, très surpris de la façon dont Me Abell

 24   réfléchit et son affirmation également qu'il s'agissait d'un faux en

 25   parlant de ce document. Sans vouloir véritablement entrer en détail de ce

Page 1203

  1   que disait le témoin -et ce n'est pas de toute façon ma plaidoirie- là

  2   maintenant, je voudrais tout simplement dire quelque chose que vous avez

  3   remarqué également : le témoin effectivement avait confirmé qu'il avait

  4   signé la déclaration ou le questionnaire, c'est à vous de juger une fois

  5   et d'évaluer une fois, quand vous aurez entendu toutes les preuves et les

  6   éléments de preuve. Il est un fait que le témoin a signé plusieurs

  7   originaux. Il l'a confirmé.

  8   Moi, je possède un original qui a été, par conséquent, signé par

  9   un crayon et j'ai déjà soumis cet original. Je ne suis pas sûr que ces

 10   originaux avaient été pris par la force au moment où mon collègue Bozovic

 11   est rentré escorté par les deux gardes et quand il a pris toute la

 12   documentation de Dusko Tadic, mais il est un fait -et c'est important- que

 13   M. Preradovic a corroboré ces signatures, qu'il avait apposées aussi bien

 14   quand il s'agit de la pièce à conviction 18, de l'autre pièce 18 D et

 15   18 C.

 16   Je vous demande, je vous prie, monsieur le Président, s'il faut

 17   vérifier, s'il y a des faux, à l'intérieur du texte, enfin dans le contenu

 18   du texte avec des experts ou non, parce qu'il va sentir que le texte

 19   dactylographié est exactement le même du point de vue contenu. Par

 20   conséquent, qu'il y a des lignes qui sont un peu plus haut, un peu moins

 21   haut sur le plan de la dactylographie, cela c'est autre chose. Mais la

 22   signature a été reconnue par le témoin ; en ce moment, je n'ai strictement

 23   rien à ajouter ici.

 24   M. le Président (interprétation). - Eh bien, des arguments de

 25   fond ont été avancés. L'accusation est autorisée à faire de même.

Page 1204

  1   Mme Hollis (interprétation). - Très rapidement, Monsieur le

  2   Président, si effectivement, vous allez prendre une décision s'agissant de

  3   cette question de faux, j'aimerais que vous vous penchiez également sur la

  4   déposition du témoin H, car je pense que dans sa déposition il a parlé de

  5   M. Preradovic qui lui aurait dit que M. Vujin l'avait contacté, lui,

  6   M. Preradovic pour lui demander confirmation de sa déclaration.

  7   Je ne sais pas si ceci va porter un éclaircissement, mais en

  8   tout cas, dans cette version, M. Preradovic ne devait pas signer cette

  9   déclaration mais la confirmer d'après les dires du témoin H.

 10   Au moment du contre-interrogatoire, lorsque nous revenons à

 11   cette question, il s'agit de la page 1158, nous essayons de savoir où il

 12   en parle pour la première fois en réponse aux questions de Me Abell.

 13   Voilà la version qu'il a apportée. Il y a eu visite de Me Vujin

 14   pour chercher confirmation. Nous avons discuté avec le Conseil de défense

 15   de cette signature et nous avons suggéré peut-être une modalité permettant

 16   de bien comparer ces documents. Il faudrait peut-être obscurcir le 18 D

 17   parce que c'était à l'encre bleue, peut-être que si on avait une copie

 18   avec une encre plus sombre, ce serait plus clair.

 19   La deuxième suggestion que nous avons faite, le Greffe pourrait

 20   peut-être agrandir uniquement cette portion-là de la déclaration, afin que

 21   vous puissiez établir une comparaison si ceci vous est utile. Voilà le

 22   type de discussion que nous avons eue avec le conseil de défense à ce

 23   propos. Mais, à première vue, à l'examen superficiel de ces documents, il

 24   semble y avoir des différences au niveau de la signature.

 25   Mais, effectivement, il faudra savoir au niveau des plaidoiries

Page 1205

  1   comment résoudre ces différences.

  2   M. le Président (interprétation). - Est-ce que nous avons

  3   entendu ce témoin, Maître Hollis ?

  4   Est-il vrai que ce témoin a fourni une déclaration dans laquelle

  5   il décrit une autre déclaration comme étant un faux ? Mais que lors de sa

  6   déposition, ce témoin n'a pas apporté une nouvelle confirmation de cette

  7   allégation de faux ?

  8   Mme Hollis (interprétation). – Effectivement, si nous parlons de

  9   M. Preradovic, il a indiqué que la déclaration qu'il avait donnée à

 10   M. Ljubo Tadic avait été recueillie par ce dernier et quand on a parlé de

 11   cette portion comme étant un faux, il a expliqué qu'il se souvenait avoir

 12   signé un questionnaire où il y avait le nom ou le terme nom au-dessus de

 13   son nom, et où il y avait aussi des données personnelles sur lui et

 14   Dusko Tadic, mais ce qui n'apparaissait pas dans la déclaration. Mais, il

 15   a dit que pratiquement, le contenu était similaire.

 16   M. le Président (interprétation). - Est-ce que je me souviens

 17   bien ? A-t-il confirmé avoir fourni cette déclaration qui avait été

 18   décrite comme étant un faux ou est-ce qu'il a dit qu'il n'était plus

 19   tellement sûr ? Il ne savait plus pourquoi il n'y avait pas certaines

 20   choses dans ce papier qui devraient y figurer.

 21   Mme Hollis (interprétation). - Il a confirmé avoir signé une

 22   déclaration, mais il croyait n'avoir signé qu'un questionnaire où il y

 23   avait le nom, le terme nom au-dessus de la signature. Il a dit qu'il avait

 24   peut-être signé plus d'une copie et il ne s'en souvenait plus, car il

 25   n'avait pas reçu copie de ce qu'il avait signé.

Page 1206

  1   Puis, on lui a montré une copie de ce qui avait été soumis en

  2   février d'après les souvenirs de l'accusation. Il a confirmé que c'était

  3   bien sa signature, mais il a dit qu'il était confus parce que le fond

  4   était le même, à l'exception de quelques petites différences d'ordre

  5   mineur. Puis, je crois qu'on lui a aussi montré la 18 C, au moment où la

  6   pièce a été produite, et je pense que, dans sa déposition, il a confirmé

  7   qu'effectivement sa signature figurait sur ce document. Donc, cette

  8   déposition a semé un peu la confusion et quand on lui a montré la

  9   déclaration qu'il avait donnée à Ljubo Tadic, il a dit qu'il pensait que

 10   les différences étaient plutôt d'ordre mineur, mais que le contenu était

 11   le même.

 12   M. le Président (interprétation). - Est-ce que j'ai raison de

 13   croire qu'ici dans ce prétoire il n'a pas réaffirmé ce qu'il avait dit

 14   dans sa déclaration écrite, à savoir qu'il avait dit qu'une certaine

 15   déclaration était un faux ?

 16   Mme Hollis (interprétation). - D'où l'équivoque, parce

 17   qu'effectivement, lorsqu'on lui a montré la déclaration qu'il avait faite

 18   à Ljubo Tadic, il l'avait pratiquement adoptée. Puis, on lui a montré

 19   différents segments de cette déclaration ; à ce moment-là, il a dit qu'il

 20   était confus, et puis il a expliqué quelles étaient les différences, mais

 21   je ne pense pas qu'il ait jamais dit que c'était un faux, mais il a dit

 22   que les différences étaient vraiment mineures, le contenu étant le même.

 23   Nous étions quelque peu confus face à cette déposition, mais

 24   nous ne nous souvenons pas qu'il ait dit expressément que c'était une

 25   fraude, un faux mais qu'il a parlé de différence.

Page 1207

  1   M. le Président (interprétation). – Mais, a-t-il admis que

  2   c'était sa signature ?

  3   Mme Hollis (interprétation). – D'après nous, oui. De toute

  4   façon, le compte rendu d'audience sera le meilleur témoin.

  5   M. le Président (interprétation). - En l'absence d'autres

  6   soumissions et d'autres arguments avancés, -et je le dis avec beaucoup

  7   d'hésitation- car il a été prouvé que je me suis trompé bien des fois

  8   lorsque j'ai pensé qu'il n'y aurait plus d'arguments entendus.

  9   M. Abell (interprétation). – Excusez-moi de me relever, mais

 10   c'est important, à mon avis du moins.

 11   Je suis d'accord avec ce que dit Me Hollis. Effectivement, cette

 12   déposition n'était pas très claire. Il n'a pas dit que c'était un faux,

 13   mais il a dit à plusieurs reprises et je vous ai donné les références 887.

 14   M. le Président (interprétation). – Je n'ai pas dit qu'il avait

 15   dit que ce n'était pas un faux, ce que j'ai dit, c’est qu'il n'avait pas

 16   réaffirmé, corroboré ce qu'il avait dit dans sa déclaration écrite à

 17   savoir que c'était un faux.

 18   M. Abell (interprétation). - Il a dit à plus d'une reprise que

 19   la déclaration était correcte mais il a étoffé ce qu'il avait dit et il a

 20   dit, de façon répétée, que le questionnaire qu'il avait signé et la

 21   déclaration qui était déposée au greffe, même s'il pensait que le contenu

 22   était similaire pour ces deux documents, que ces deux documents étaient

 23   différents.

 24   En réponse à une question que vous avez posée, tout à fait à la

 25   fin de sa déposition, il n'a pas pu expliquer. S'il n'y avait pas de

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  1   problème d'authenticité, pourquoi il avait fourni une déclaration en tout

  2   premier lieu. Une dernière pièce au puzzle : il a dit qu'il n'avait

  3   rencontré M. Vujin qu'une fois, le 15 mars 1999. Et il a déclaré que c'est

  4   à cette date-là qu'il avait signé la déclaration, produite par Me Vujin,

  5   ici, à l'audience et que Me Vujin a présenté comme étant l'original. Je ne

  6   dirai pas un mot de plus.

  7   M. le Président (interprétation). – Maintenant, c'est M. Vujin

  8   qui prend la parole. Maître Vujin, vous pouvez parler.

  9   M. Vujin (interprétation). – Merci Monsieur le Président. Je

 10   voudrais simplement mettre au clair une situation. Une fois de plus, c'est

 11   à vous d’évaluer le témoignage de ce témoin. Je vais vous faire revenir

 12   une fois de plus sur le texte qui a été dactylographié. A partir du moment

 13   où le témoin avait corroboré le contenu, pourquoi, moi, à ce moment-là,

 14   j'aurais eu à envoyer un faux si le contenu est le même ? J'ai le

 15   sentiment que le témoin a été confus, tout simplement parce que cet

 16   entretien a eu lieu et que je n'y étais pas présent et c'était la raison

 17   pour laquelle d'ailleurs je me suis rendu le 15 mars sur place car je ne

 18   pouvais pratiquement pas croire que quelqu'un aurait pu infiltrer un

 19   papier avec une signature qui était de quelqu'un d'autre. Je voulais

 20   vérifier si c'était bien sa signature. Il m'a donc signé le document

 21   quatre fois, il l'a corroboré de ses signatures et ceci pour pouvoir

 22   comparer ces nouvelles signatures avec la première sur la déclaration.

 23   M. le Président (interprétation). – Est-ce que, finalement, nous

 24   en avons terminé des arguments présentés par les parties s'agissant de la

 25   question de fond en la matière ? Je crois que nous avons entendu chacune

Page 1209

  1   des parties.

  2   Il n'y a plus qu'une question en suspens, j'aimerais en discuter

  3   un instant avec mes collègues.

  4   (Les Juges se consultent sur le siège.)

  5   M. le Président (interprétation). – La Chambre d'appel n'a pas

  6   terminé ses consultations. S'il n'y a plus d'arguments avancés par les

  7   parties, nous allons suspendre l'audience jusqu'à 10 heures, demain matin

  8   et, après notre retour, demain matin, nous espérons que nous pourrons

  9   rendre notre décision sur l'affaire ex parte, je crois que le greffier

 10   disposera de quelques informations à ce sujet d'ici là. Et nous prendrons

 11   également notre décision sur l'affaire de faux, de même que sur les

 12   arguments avancés par M. Vujin et par vous-même, c’est-à-dire la question

 13   de savoir si M. Vujin est obligé de déposer avant les autres témoins de la

 14   défense. Y a-t-il d'autres sujets sur lesquels vous souhaitez attirer

 15   notre attention ?

 16   M. Abell (interprétation). - Tout simplement, un problème

 17   technique mais, de toute façon, c'est quelque chose dont on peut parler

 18   demain. Il s'agit de certaines déclarations prises au début de la

 19   procédure.

 20   M. le Président (interprétation). – Dans ce cas-là, nous

 21   continuerons à en discuter demain matin à 10 heures.

 22   L'audience est levée à 17 heures 45.

 23  

 24  

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