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Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 4 octobre 2007

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 18.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour à tous.

7 Madame la Greffière, pourriez-vous, s'il vous plaît citer l'affaire.

8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, il s'agit de l'affaire IT-04-

9 83T, le Procureur contre Rasim Delic.

10 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

11 Les présentations, s'il vous plaît. Tout d'abord l'Accusation.

12 M. MUNDIS : [interprétation] Bonjour à tous dans le prétoire.

13 Je suis Daryl Mundis pour l'Accusation, aidé par les commis aux affaires,

14 Fraser McIlwraith et Alama Imamovic.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

16 Qu'en est-il de la Défense.

17 Mme VIDOVIC : [interprétation] Bonjour à tous dans ce prétoire.

18 Je suis Vasvija Vidovic, avec Nicholas Robson pour le général Delic. Notre

19 commis aux affaires est Lejla Gluhic, ici présente.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Madame Vidovic.

21 Monsieur le Témoin, pourriez-vous, s'il vous plaît, vous lever.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour. Pourriez-vous faire la

24 déclaration solennelle.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

26 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

27 LE TÉMOIN: VELIBOR TRIVICEVIC [Assermenté]

28 [Le témoin répond par l'interprète]

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1 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Vous pouvez vous asseoir.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Mundis, c'est à vous.

4 Interrogatoire principal par M. Mundis :

5 Q. [interprétation] Merci. Pour le compte rendu, s'il vous plaît, Monsieur

6 le Témoin, pourriez-vous me dire vos noms et prénoms.

7 R. Je m'appelle Velibor Trivicevic.

8 Q. Pourriez-vous nous dire quelle est votre date et lieu de naissance ?

9 R. Je suis né le 25 avril 1970 à Prnjavor.

10 Q. Pourriez-vous nous dire quel était votre métier lorsque la guerre a

11 commencé en Bosnie-Herzégovine ?

12 R. Au début de la guerre, j'ai fait mon service militaire avec la JNA.

13 Q. Pourriez-vous nous dire quand votre service national au sein de la JNA

14 s'est terminé ?

15 R. Le 17 janvier 1992.

16 Q. Monsieur Trivicevic, après le 17 janvier 1992, avez-vous eu un métier

17 vous permettant de gagner votre vie, et que faisiez-vous ?

18 R. J'ai commencé à travailler au centre dispensaire de Prnjavor en tant

19 que technicien. J'étais ambulancier, principalement.

20 Q. Très bien. Au moment ou à un autre, après le

21 17 janvier 1992, avez-vous, à un moment ou à un autre, rejoint les rangs

22 d'une force militaire quelconque, et si oui, pourriez-vous nous dire de

23 laquelle il s'agissait ?

24 R. J'ai été appelé par le secteur de Prnjavor au ministère de la Défense,

25 et j'ai rejoint les rangs de l'armée de Republika Srpska le 20 juillet

26 1992.

27 Q. De quelle unité de l'armée de Republika Srpska faisiez-vous partie ?

28 R. La 1ère Brigade d'infanterie légère de Prnjavor.

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1 Q. Pourriez-vous nous dire combien de temps vous avez servi au sein de

2 cette 1ère Brigade d'infanterie légère de Prnjavor de la VRS ?

3 R. J'ai été dans cette unité jusqu'au 1er janvier 1993. J'ai quitté l'unité

4 à ce moment-là, ensuite j'ai rejoint à nouveau la

5 1ère Brigade d'infanterie légère le 4 août 1994.

6 Q. Très bien. Quand vous avez rejoint votre unité le

7 4 août 1994, pourriez-vous me dire quel était votre poste ?

8 R. Si j'avais été civil, ça aurait été d'être assistant médical de

9 l'organe médical de la 1ère Brigade d'infanterie légère, donc je travaillais

10 au service médical.

11 Q. En juillet 1995, Monsieur Trivicevic, pourriez-vous nous dire où vous

12 avez été déployé ?

13 R. Sur une position qui était détenue par le 3e Bataillon de notre unité.

14 Q. Pourriez-vous me dire où se trouvait exactement cette position qui

15 était détenue par le 3e Bataillon de la 1ère Brigade d'infanterie légère ?

16 R. Près du hameau de Krcevine, à Lozna, c'est un village de Lozna, donc

17 c'était sur le théâtre d'Ozren. C'était tout près de la municipalité de

18 Banovici.

19 Q. Nous allons y revenir, mais je pense qu'il y a une erreur au compte

20 rendu, puisqu'il est écrit à la ligne 8, page 3, que vous avez rejoint les

21 rangs de la VRS le 20 juin 1992. Est-ce bien la date exacte, s'il vous

22 plaît ?

23 R. Non. C'était le 28 juin 1992.

24 Q. Merci. Lorsque le 3e Bataillon de la 1ère Brigade d'infanterie légère de

25 la VRS était près de ce village de Krcevine, pourriez-vous nous dire quelle

26 force se trouvait de l'autre côté de la ligne de front, ou peut-être même

27 quelle unité de quelle force se trouvait de l'autre côté de la ligne de

28 front ?

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1 R. Etant donné les informations dont nous disposions à l'époque, de

2 l'autre côté du front, il y avait l'ABiH dirigée par le Détachement El

3 Moudjahidine.

4 Q. Pourriez-vous nous dire plus précisément où vous vous trouviez

5 exactement en juillet 1995 ?

6 R. Quand j'ai été capturé, j'étais à la maison de Radovan Todorovic, donc

7 dans ce fameux hameau de Krcevine, à 300 mètres de la ligne de front. Je

8 crois que cet homme s'appelait bien Radovan Todorovic.

9 Q. Pourriez-vous nous dire ce que vous faisiez devant la maison de ce

10 Radovan Todorovic ou dans la maison de Radovan Todorovic, dans ce hameau de

11 Krcevine en juillet 1995 ?

12 R. Il y avait une action entreprise par les Moudjahidines le 27 mai 1995.

13 Une partie de notre unité dont je faisais partie, avait été séparée du

14 reste des troupes et les blessés ne pouvaient pas être aidés. Donc nous

15 avons été obligés de mettre sur pied une antenne médicale avancée pour

16 aider ces blessés. Je travaillais en tant qu'assistant médical.

17 Q. Très bien. Donc dans la maison de Radovan Todorovic qui servait

18 d'antenne médicale avancée à Krcevine en juillet 1995, pourriez-vous nous

19 dire si vous étiez la seule personne ayant des compétences médicales ?

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant d'avoir la réponse, j'aimerais

21 vérifier quelque chose. A la réponse précédente, le témoin nous a dit que :

22 "Les Moudjahidines avaient lancé une action le

23 27 mai 1995."

24 La question suivante parle de l'antenne médicale avancée qui avait été

25 organisée dans la maison de Radovan Todorovic en

26 juillet 1995." Est-ce bien le mois de juillet dont on parle ?

27 M. MUNDIS : [interprétation] Je vais demander au témoin pour qu'il nous

28 éclaircisse la chose, mais il a dit que suite à l'action du 27 mai 1995,

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1 une partie de l'unité a été séparée du reste des troupes et pour cette

2 raison-là ils ont dû établir une antenne médicale avancée.

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien, je vois.

4 M. MUNDIS : [interprétation] Cela vous suffit, Monsieur le Président ?

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Tout à fait.

6 M. MUNDIS : [interprétation]

7 Q. Monsieur Trivicevic, revenons-en à cette antenne médicale avancée qui

8 avait été installée dans la maison de Radovan Todorovic à Krcevine. Pendant

9 le mois de juillet 1995, étiez-vous la seule personne ayant des compétences

10 médicales ? Y avait-il d'autres personnes ?

11 R. Nous n'étions que trois dans la maison; le médecin, Branko Sikanic; un

12 étudiant en médecine, deuxième année, Miroslav Knezevic; et moi-même.

13 Q. Très bien. Monsieur Trivicevic, vous nous avez dit que vous avez été

14 capturé. Pourriez-vous nous dire exactement quand vous avez été capturé, à

15 quelle date ?

16 R. Le 21 juillet 1995, un vendredi.

17 Q. Pouvez-vous rapidement nous relater ce dont vous vous souvenez pour ce

18 qui est du 21 juillet 1995, en commençant par le moment où vous êtes

19 réveillés. Voulez-vous nous expliquer le déroulement de cette journée ?

20 R. On a été réveillé par des tirs ce jour-là, des tirs d'armes légères et

21 des obus aussi qui étaient lancés. Dans l'antenne médicale, nous nous

22 sommes préparés. On est descendu à la cave de la maison pour se préparer à

23 accueillir des blessés, puisqu'on était certains qu'il y aurait des

24 blessés. D'ailleurs, les premiers blessés sont arrivés très rapidement et

25 on essayait de leur porter assistance. On leur a donné les premiers

26 secours.

27 Ensuite, je suis sorti de la cave, je marchais un peu devant la maison, et

28 j'ai vu une colonne de personnes qui venaient de la ligne de front et qui

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1 s'avançaient vers notre maison. Je pensais que c'était des nôtres qui

2 venaient de notre côté de la ligne de front et qui essayaient de battre

3 retrait de façon organisée, donc j'ai dit au médecin, Branko Sikanic, qu'il

4 valait mieux que l'on retourne dans notre pièce récupérer notre équipement

5 pour nous préparer à nous occuper des blessés.

6 On est rentré dans la maison, mais là, immédiatement, dans la maison, on

7 s'est retrouvé devant un groupe de Moudjahidines. Ils étaient devant nous

8 lorsqu'on est ressorti de la maison.

9 Q. Je vous interromps ici, pour vous poser quelques questions, s'il vous

10 plaît.

11 Vous nous avez dit, c'est à la page 6, ligne 9 : "Nous avons été réveillés

12 par des tirs ce jour-là." Vous souvenez-vous de l'heure à laquelle vous

13 avez été réveillés par ces tirs, le 21 juillet 1995 ?

14 R. Je ne me souviens pas de l'heure exacte. Je pense qu'il était environ -

15 -

16 L'INTERPRÈTE : Le témoin pourrait-il répéter l'heure du jour, car

17 l'interprète de la cabine anglaise ne l'a pas saisie.

18 M. MUNDIS : [interprétation]

19 Q. Veuillez, s'il vous plaît, répéter l'heure à laquelle vous avez été

20 réveillés.

21 R. Il devait être quatre heures moins quart, 4 heures moins dix du matin.

22 Q. Très bien. Monsieur Trivicevic, vous nous avez aussi dit - et cela se

23 trouve à la page 6, ligne 23 : "Nous sommes sortis de la maison à toute

24 vitesse et juste devant nous il y avait un groupe de Moudjahidines." Tout

25 d'abord, quand vous dites : "Nous sommes sortis à toute vitesse de la

26 maison," qui ce nous, s'il vous plaît ?

27 R. Je parlais du Dr Sikanic et de moi-même, puisque c'est nous qui sommes

28 retournés dans la maison pour récupérer l'équipement pour nous préparer à

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1 aller chercher les blessés.

2 Q. Très bien. Et quand vous nous dites qu'en sortant de la maison vous

3 êtes tombé face à face avec un groupe de Moudjahidines qui se tenaient là,

4 pouvez-vous nous en parler de ces Moudjahidines, combien étaient-ils, que

5 portaient-ils, étaient-ils armés, si oui, quel type d'arme avaient-ils ?

6 R. Ils étaient environ à 30 mètres de moi à ce moment-là. Je me suis rendu

7 compte qu'ils étaient environ 10. Je ne sais pas exactement combien ils

8 étaient, une dizaine. Il y avait deux ou trois hommes qui étaient en train

9 de parler dans une langue qu'on comprenait. La plupart d'entre eux avaient

10 des fusils automatiques, ils avaient aussi des sabres, des haches, enfin

11 toutes sortes d'armes blanches coupantes.

12 Q. Je ne suis pas certain de ce qui est écrit sur le compte rendu parce

13 que - est-ce que vous compreniez leur langue, puisque dans le compte rendu

14 il est écrit que vous compreniez leur langue ?

15 R. Ils étaient une dizaine environ. Il y en avait deux ou trois de ces dix

16 qui parlaient dans une langue que nous comprenions. Les autres employaient

17 une langue qu'on ne comprenait absolument pas.

18 Q. Très bien. Ce groupe d'environ dix personnes, comment étaient-ils

19 habillés ?

20 R. Ils n'étaient pas tous habillés pareil. Ils n'avaient pas tous le même

21 type d'uniforme. Certains étaient en civil, d'ailleurs. Il y en avait des

22 morceaux de civil, certains avaient des habits civils, certains habillés en

23 civil. C'étaient des uniformes extrêmement dépareillés. Personne n'avait un

24 uniforme standard.

25 Q. Est-ce que vous vous souvenez avoir vu des insignes quelconques sur les

26 vêtements, les vestes d'uniforme ou les vêtements d'uniforme que ces

27 personnes pouvaient porter ?

28 R. Non, absolument pas.

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1 Q. Vous avez dit il y a peu de temps, à la ligne 23, page 7, ils étaient

2 environ à 30 mètres de vous. Vous souvenez-vous de ce qui s'est passé juste

3 après que vous les ayez vus à environ 30 mètres de vous ?

4 R. Je suis sorti de la pièce en toute vitesse, la pièce dans laquelle on

5 était en train de porter secours aux blessés. Il n'y avait personne à

6 l'extérieur de cette pièce. Ils se sont sans doute rendu compte qu'une

7 unité de Moudjahidines était arrivée, et ils avaient quitté la maison. Les

8 Moudjahidines ont commencé à hurler dans une langue incompréhensible, nous

9 hurlaient de nous rendre. Je me suis rendu compte que c'était la seule

10 chose à faire, donc j'ai levé les mains en l'air et je me suis rendu.

11 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Une chose que je ne comprends pas très

12 bien et j'aurais dû poser la question avant.

13 A la page 7, lignes 17 à 18, en réponse à votre question quand on vous

14 demandait à qui faites-vous référence quand vous dites : "Nous sommes

15 sortis de la maison à toute vitesse," vous avez répondu en disant qu'il

16 s'agissant du Dr Sikanic et de vous-même. Qu'est-il arrivé à Miroslav

17 Knezevic ? Où était-il ? Il n'était plus avec

18 vous ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Miroslav Knezevic était resté avec les blessés

20 dans la pièce où on les aidait. Quand on est revenu dans la maison, il y

21 avait tous ces blessés qui étaient en train d'être secourus, avec les gens

22 qu'il soignait. Tout le monde, ils sont tous partis. D'ailleurs, il est

23 toujours porté disparu, encore maintenant.

24 Certaines des personnes qui quittaient la maison ce jour-là vont très bien,

25 fort heureusement.

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Vous pouvez poursuivre,

27 Monsieur Mundis.

28 M. MUNDIS : [interprétation] Merci.

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1 Q. Vous dites que vous avez "levé les mains en l'air pour montrer que je

2 voulais me rendre." Pourriez-vous me dire ce qui s'est passé après, une

3 fois que vous ayez levé les mains en l'air ?

4 R. Le Dr Sikanic, entre-temps, est lui aussi sorti de la maison en

5 courant. Il s'est rendu compte de ce qui se passait. Il est parti

6 directement à la cave, sans doute pour essayer de cacher les listes et tout

7 ce qu'il essayait de conserver à l'époque. Mais quand ils ont vu ça, ils

8 ont pensé qu'il voulait se battre, et c'est pour ça qu'ils nous ont tiré

9 dessus. Ils ont tiré pendant un bon moment, jusqu'à ce que le docteur

10 décide de se rendre. Ensuite, il est sorti avec moi, puis ils hurlaient :

11 "Rendez-vous, rendez-vous." J'ai dit : "Qu'est-ce qu'on pourrait

12 [imperceptible] à faire ?" Il faut qu'on se rende.

13 Il y avait des Bosniaques dans ce groupe, et ils nous ont dit que dans le

14 monde arabe, quand on se rend on s'allonge par terre et on met ses mains

15 sur la nuque. On a obéi à la consigne.

16 Q. Très bien. J'ai quelques questions à vous poser à propos de tout cela.

17 Vous venez de nous dire : "Ils hurlaient, 'rendez-vous, rendez-

18 vous.'" Vous souvenez-vous qui hurlaient cela, s'il vous plaît ?

19 R. Il y avait plusieurs hommes dans ce groupe qui hurlaient des choses

20 qu'on ne comprenait absolument pas, mais il y avait deux ou trois qui

21 parlaient serbe, et c'était ceux-là qui nous disaient que les autres

22 étaient en train de nous dire de se rendre : "Rendez-vous, rendez-vous."

23 Ils ont répété cela plusieurs fois. Ils nous ont suggéré qu'il nous fallait

24 mieux faire ce que ces hommes nous disaient, comme les autres nous disaient

25 de nous rendre.

26 Q. Quand vous vous êtes allongé les mains sur la nuque, avez-vous la

27 moindre idée de l'endroit où se trouvaient Miroslav Knezevic et les blessés

28 ?

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1 R. Non, à ce moment-là, je n'ai vu aucune de ces personnes.

2 Q. Essayons de rendre les choses les plus claires possibles. Où se

3 trouvait le Dr Sikanic lorsque vous vous êtes allongé les mains sur la

4 nuque ?

5 R. Ensemble. On était tous les deux allongés. Juste quelques secondes

6 avant il avait levé les mains en l'air, quand il était sorti de la cave,

7 ensuite il était à côté de moi, et tous les deux, on s'est allongés pour

8 nous rendre.

9 Q. Très bien. En tant que membres de l'antenne médicale au sein de la VRS,

10 aviez-vous un insigne bien particulier sur vos uniformes pour indiquer que

11 vous faisiez partie du service de santé ?

12 R. Rien. Non, il n'y en avait pas. Il y avait une croix rouge que nous

13 avions dessinée sur un des murs de la maison pour signifier qu'il y avait

14 là une antenne médicale, mais nous n'avions pas d'insignes. On ne pouvait

15 pas nous distinguer d'autres personnes. On ne voyait pas qu'on faisait

16 partie du service de santé.

17 Q. Très bien. Monsieur Trivicevic, pouvez-vous nous dire à peu près à

18 quelle heure le 21 juillet 1995, le Dr Sikanic et vous-même, vous vous êtes

19 rendus aux mains de ce groupe d'une dizaine de Moudjahidines ?

20 R. Il n'était presque plus nuit. C'était à l'aube, vers quatre heures et

21 quart ou quatre heures et demie, mais je ne suis pas sûr de l'heure exacte.

22 Q. Pouvez-vous décrire à la Chambre, pour autant que vous en vous

23 souveniez, quelles étaient les conditions météorologiques, ainsi que la

24 visibilité, au moment où vous êtes rendus, à savoir le

25 21 juillet 1995 ?

26 R. Il n'y avait pas de nuages. Le ciel était ouvert. Pour ce qui est de la

27 visibilité, on peut dire que c'était à 50 %. Parce que c'était à l'aube,

28 c'était entre la nuit et le jour, en quelque sorte.

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1 Q. Après que vous et le Dr Sikanic vous vous êtes rendus le

2 21 juillet 1995, est-ce que les personnes auxquelles vous vous êtes rendus

3 vous auraient emmenés quelque part, le Dr Sikanic et

4 vous-même ?

5 R. Il y avait plusieurs endroits où nous arrêtions pour quelque temps, et

6 après cela ils nous amenaient au village de Livade.

7 Q. Monsieur Trivicevic, maintenant, dans quelques instants, je vais vous

8 poser des questions concernant le village de Livade, mais vous nous avez

9 dit que vous vous êtes arrêtés à plusieurs endroits pour quelque temps.

10 Pouvez-vous dire à la Chambre à quels endroits vous vous êtes arrêtés

11 pendant que vous étiez emmenés au village de Livade ?

12 R. Nous nous sommes arrêtés devant la maison dans laquelle se trouvait le

13 commandement du bataillon. Ensuite, nous nous sommes arrêtés devant une

14 tombe de notre côté de la ligne, et nous nous sommes arrêtés près de

15 l'unité médicale de l'autre côté, c'est-à-dire du côté des Moudjahidines.

16 Il s'agissait de leur antenne médicale.

17 Q. Monsieur, lorsque vous dites "la maison dans laquelle se trouvait le

18 commandement du bataillon," est-ce que vous savez et est-ce que vous

19 pouvez nous dire à quel bataillon vous avez fait référence quand vous avez

20 dit "la maison dans laquelle se trouvait le commandement du bataillon" ?

21 R. Il s'agissait du commandement du 3e Bataillon de la

22 1ère Brigade d'infanterie légère de Prnjavor.

23 Q. C'est l'unité de la VRS à laquelle vous apparteniez ?

24 R. Oui.

25 Q. Pouvez-vous dire brièvement à la Chambre si quelque chose se serait

26 passé pendant que vous étiez près de cette maison et pendant que vous étiez

27 escortés par dix Moudjahidines dans la direction du village de Livade ?

28 R. Nous étions escortés par seulement trois Moudjahidines. Les autres

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1 étaient partis. Nous étions emmenés devant la maison où nous avons dû être

2 allongés dans la poussière. Il y avait une paire de ciseaux qui se trouvait

3 dans notre antenne médicale, et à l'aide de ces ciseaux ils m'ont coupé les

4 cheveux. Ils m'ont dit qu'ils ont fait cela pour qu'un chien se distingue

5 des frères.

6 Ils nous ont pris la chaîne en or, la bague en or, l'argent, c'est-à-dire

7 les marks allemands. Ils les ont pris. Ils ont incendié les documents tels

8 que mon livret militaire et mon permis de conduire parce qu'il y avait ma

9 photo dans des documents. Ils m'ont dit que je vais brûler à l'enfer, parce

10 que je me suis opposé à Allah.

11 L'un qui était dans ce groupe est revenu plus près de chez nous parce qu'il

12 a été blessé à la jambe. Quand j'ai voulu l'aider, ils m'ont dit qu'un

13 chien ne peut pas aider un frère. Il a donc pansé la jambe, et il est

14 parti. Lui, il a dit Allah lui a été favorable, lui a été indulgent.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'ai besoin de clarifier un point.

16 Vous avez dit qu'ils avaient dit "Tu vas être brûlé parce que vous êtes

17 opposé …" ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils ont brûlé nos documents dans lesquels se

19 trouvait ma photo. Ils les ont brûlés pour nous montrer comment nous

20 allions brûler à l'enfer, parce que nous nous sommes opposés à Allah. Parmi

21 ces documents il y avait mon permis de conduire et ma carte d'identité.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

23 Vous pouvez poursuivre.

24 M. MUNDIS : [interprétation]

25 Q. Monsieur Trivicevic, vous nous avez dit à la ligne 2, à la page 13 :

26 "Ils ont coupé mes cheveux pour, comme ils ont dit, pour distinguer un

27 chien des frères."

28 Qu'est-ce que cela veut dire ?

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1 R. Je portais une barbe comme aujourd'hui - tous les Moudjahidines portent

2 une barbe - et ils voulaient que je me distingue d'eux, que je sois

3 différent d'eux. C'est comme cela que j'ai interprété ce geste à l'époque

4 et ces mots.

5 Q. Vous nous avez également dit qu'à un moment donné vous êtes arrivés

6 dans une tranchée ou à côté d'une tranchée. Vous avez dit "de l'autre côté

7 de la ligne." C'est à la page 12, à la ligne 12.

8 Pouvez-vous nous décrire, nous dire ce qui s'est passé près de cette

9 tranchée "de l'autre côté de la ligne," c'est ce que cela veut dire ?

10 R. Lorsque nous avons été amenés tout près d'une tranchée dans une forêt

11 de pins, devant se trouvait un corps et il n'y avait pas de tête dans ce

12 corps, ce corps a été décapité.

13 Q. Est-ce que vous avez vu d'autres choses près du cadavre décapité ?

14 R. Oui. A côté du corps décapité, il y avait une grande hache.

15 Q. Savez-vous à qui appartenait ce corps que vous avez vu près cette

16 tranchée ?

17 R. Je ne sais pas de qui il s'agissait, mais ils ont montré les papiers

18 d'identité de Bogomir Danicic. Pourtant cet homme, ce jour-là, a fui, il

19 s'est sauvé et ses documents sont restés sur place. J'ai pensé qu'il

20 s'agissait de cet homme-là, mais en fait, après avoir été libéré, j'ai

21 appris que cet homme était toujours en vie, mais je ne sais pas de qui il

22 s'agit.

23 Q. Pendant que vous étiez dans cet endroit près de la tranchée, Monsieur,

24 est-ce que d'autres choses se seraient passées ?

25 R. A côté du cadavre décapité, on m'a abattu au sol, et après le Dr

26 Sikanic également a dû s'allonger au sol. L'un des Moudjahidines a pris la

27 hache en disant "Allah Ekber," et il a donné un coup à l'aide de la hache

28 juste à côté de ma tête, au sol.

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1 Q. Monsieur, à la ligne 25, ensuite à la ligne 1 de la

2 page 15, il y figure "la même chose a été faite à Igor Sikanic." Est-ce que

3 ce que vous avez dit a été bien consigné au compte rendu ?

4 R. Igor Sikanic - ce n'est pas Igor "Sikanic," c'est "Branko" Sikanic. Il

5 était médecin.

6 Q. Merci. Aux lignes de 11 à 13, à la page 12, vous nous avez dit que vous

7 vous êtes arrêtés à côté de l'antenne médicale de l'autre côté, du côté des

8 Moudjahidines. Pouvez-vous dire à la Chambre de première instance si

9 quelque chose se serait passé au moment où vous êtes arrêtés à cet endroit

10 ?

11 R. Nous nous sommes arrêtés et nous sommes restés à cet endroit pendant

12 une période plus longue. Voilà ce qui s'est passé. Il y avait beaucoup de

13 choses qui se sont passées. Je ne sais pas à quoi vous avez pensé

14 précisément pour ce qui est de toutes ces choses qui se sont passées à cet

15 endroit-là.

16 Q. Comment ils se sont comportés envers vous pendant que vous étiez à cet

17 endroit pour quelque temps ?

18 R. Ils nous ont amenés de l'antenne médicale, un médecin est sorti, il

19 avait la blouse verte de chirurgien, un stéthoscope. Lorsque nous avons dit

20 que nous étions médecins, donc ce collègue, il nous a donné des gifles

21 devant tout le monde.

22 Q. Qui était ce médecin pour lequel vous avez dit qu'il portait une blouse

23 verte de chirurgien ?

24 R. Je ne sais pas. Je pense que c'était le médecin du Détachement El

25 Moudjahidine. Je ne l'ai jamais vu par la suite et je ne l'ai pas vu non

26 plus avant cet événement. Je ne sais pas de qui il s'agissait.

27 Q. Après cet incident où ils vous ont donné des gifles, est-ce que

28 d'autres choses se sont passées ?

Page 3610

1 R. Nous avons dû nous allonger sur un amas de gravier. Ils nous ont

2 attaché les poignets et les pieds, et l'un des membres du personnel de

3 l'antenne médicale a sorti un petit couteau. Il l'a enfoncé dans le gravier

4 à côté de nous et il a écrit sur un bout de papier la phrase suivante :

5 "C'est la fin des Chetniks," et il l'a collé sur le manche de ce petit

6 couteau.

7 Q. Monsieur Trivicevic, pour que tout cela soit clair, lorsque vous avez

8 dit que vous avez dû vous allonger sur l'amas de gravier, vous avez pensé à

9 qui ?

10 R. J'ai pensé à moi-même et au Dr Sikanic.

11 Q. Le bout de papier sur lequel vous avez dit qu'ils avaient écrit "C'est

12 la fin des Chetniks," est-ce que cela est resté sur ce petit couteau ?

13 R. Après avoir vu que nous n'avons pas été intimidés par ce petit couteau,

14 ils nous ont amené un grand couteau, ils l'ont enfoncé dans le gravier et

15 ils ont collé le même bout de papier sur le manche de ce couteau, et après,

16 ce même bout de papier ils l'ont collé sur le dos du Dr Sikanic, et c'est

17 comme cela qu'il est venu au village de Livade.

18 Q. Maintenant, en parlant de votre arrivée à Livade. Vous vous souvenez

19 approximativement à quelle heure vous êtes arrivés dans ce village ce jour-

20 là ?

21 R. Je ne sais pas exactement à quelle heure nous sommes arrivés au

22 village, je pense que c'était vers 7 heures.

23 Q. C'était dans la matinée ou dans la soirée ?

24 R. Dans la matinée, à 7 heures du matin.

25 Q. Quelle était la date de votre arrivée au village ?

26 R. Le 21 juillet, c'était le même jour où nous avons été arrêtés ou

27 capturés.

28 Q. C'était en quelle année, aux fins du compte rendu ?

Page 3611

1 R. En 1995.

2 Q. Lorsque vous êtes arrivés au village de Livade, pouvez-vous dire à la

3 Chambre où vous avez été amenés dans ce village ?

4 R. Ils nous ont mis dans un entrepôt où il y avait des caisses et de

5 boîtes de conserve.

6 Q. Aux fins du compte rendu, dites-nous pendant combien de temps vous

7 étiez restés dans l'entrepôt au village de Livade ?

8 R. Nous étions restés jusqu'à midi le même jour.

9 Q. Avez-vous vu d'autres personnes mis à part le Dr Sikanic dans cet

10 entrepôt ?

11 R. Dans cet entrepôt, il y avait un groupe. Entre dix et

12 11 personnes, c'est-à-dire des Musulmans qui étaient de notre côté, que les

13 Moudjahidines ont capturés lors de l'action. Pourtant, comme il ne savait

14 pas de qui il s'agissait, ils les ont amenés dans l'entrepôt pour vérifier

15 leur identité.

16 Q. Est-ce que vous connaissiez l'un de ces dix ou 11 musulmans que vous

17 aviez vus à l'entrepôt au village de Livade ?

18 R. Je connaissais un Musulman très bien, et les autres je les connaissais

19 de vue parce que je les voyais à Prnjavor.

20 Q. Vous vous souvenez du nom du Musulman que vous connaissiez bien ?

21 R. Djodjic, c'était son nom de famille. Mais j'ai oublié son prénom.

22 Q. Quand vous dites que "ces Musulmans étaient de notre côté," qu'est-ce

23 qu'ils faisaient de votre côté ? Pouvez-vous nous le dire, si vous le savez

24 ?

25 R. Il s'agissait des gens qui ont refusé à se présenter après l'appel à la

26 mobilisation dans la VRS, et ils ont été emmenés sur la ligne du front pour

27 creuser des tranchées, pour porter de la nourriture et pour effectuer

28 d'autres sortes de travail auxiliaire, d'autres corvées.

Page 3612

1 Q. Vous nous avez dit à la ligne 12 de la page 17 que vous étiez restés

2 dans l'entrepôt jusqu'à midi. Qu'est-ce qui s'est passé ou dans quelle

3 direction vous avez été emmenés le 20 juillet 1995 ?

4 R. Avant de vous répondre, il faut que je souligne que peut-être une heure

5 après notre arrivée dans l'entrepôt, Igor Guljevatej a été emmené dans

6 l'entrepôt. Il était un autre soldat sur notre ligne du front. Donc à

7 partir de ce moment-là nous étions trois dans l'entrepôt.

8 Q. Savez-vous à quelle unité appartenait Igor Guljevatej ?

9 R. Il était dans notre unité. Il était combattant au

10 3e Bataillon de la Brigade de l'infanterie légère.

11 Q. Monsieur, maintenant, est-ce que vous pouvez nous dire où Dr Sikanic,

12 vous-même et Guljevatej vous avez été emmené à midi le

13 21 juillet 1995 ?

14 R. Vers midi, ils nous ont emmenés dans une maison qui était à la

15 proximité, une maison ancienne qui avait deux étages, enfin, deux niveaux

16 plutôt.

17 Q. En tout, combien de temps êtes-vous restés avec les deux autres hommes

18 dans cette maison ?

19 R. Nous sommes restés dans cette maison jusqu'au matin du

20 23 juillet 1995, donc jusqu'au dimanche.

21 Q. Pourriez-vous nous dire ce qui vous est arrivé lorsque vous étiez dans

22 cette maison depuis le midi du 21 juillet jusqu'au matin du 23 juillet 1995

23 ?

24 R. Oui, je peux tout vous dire. Je peux vous dire exactement tout ce qui

25 s'est passé.

26 D'abord, l'homme qui nous avait emmenés là est venu. Il nous a dit

27 d'enlever nos chaussettes et nos chaussures. On était en pantalon et en

28 tee-shirt. Ensuite, j'ai été emmené dans une pièce, où apparemment les

Page 3613

1 Musulmans qui avaient été capturés avaient été emmenés. Devant eux, il m'a

2 frappé pour me faire tomber à terre. Il a pris un sabre ou une épée. Il

3 s'est assis sur mon dos et il m'a soulevé la tête pour expliquer comment il

4 fallait traiter les Serbes et les Chetniks, pour leur expliquer comment les

5 égorger.

6 Q. Très bien. Je vous arrête.

7 Vous avez dit que les Musulmans qui avaient été capturés se trouvaient dans

8 cette pièce. Il s'agit des dix ou 11 Musulmans que vous avez vus

9 précédemment, c'est cela, qui étaient dans l'entrepôt ou était-ce d'autres

10 Musulmans ?

11 R. Il s'agissait des mêmes gens.

12 Q. Poursuivez de décrire ce qui s'est passé.

13 R. Il a pris mon tee-shirt, il m'a mis mon tee-shirt sur la tête. Il a

14 pris un bout de ficelle pour attacher le tee-shirt autour de mon cou.

15 Ensuite, il a attaché encore plus mes mains, mes poignets qui se trouvaient

16 sur mon dos, à quoi il m'attaché les pieds sur le dos en les reliant avec

17 les poignets, et tout cela il l'a donc attaché sur mon dos. Il a relié le

18 bout de la ficelle des poignets avec le bout -- la ficelle autour de mon

19 cou. Les deux autres, il leur a fait la même chose, et à plusieurs reprises

20 il revenait pour nous toucher les poignets, et lorsqu'il a vu que cela

21 n'était pas enflé, il continuait. Et lorsque cela a commencé à être enflé,

22 il a détaché nos mains, il nous a dit de se mettre au coin de la pièce où

23 se trouvait d'autres gens se trouvant dans la même pièce.

24 Q. Savez-vous ce qui s'est passé pour ce qui est du Dr Sikanic et Igor

25 Guljevatej pendant qu'ils étaient avec vous dans cette maison au village de

26 Livade ?

27 R. La même chose. La procédure a été répétée. Ils leur ont fait la même

28 chose qu'ils ont fait à moi-même.

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1 Q. Receviez-vous de la nourriture pendant que vous étiez capturés dans

2 cette maison, détenus dans cette maison ?

3 R. A un moment donné, les Moudjahidines sont arrivés. Ils ont emporté des

4 vivres aux Musulmans. Ils leur ont demandé s'ils recevaient de la

5 nourriture chez nous. Lorsqu'ils ont dit que oui, ils nous ont emmené à

6 chacun un morceau de pain et une boîte de conserve de poisson.

7 Q. Est-ce que quoi que ce soit se serait passé pendant que vous étiez en

8 train de manger ce poisson ?

9 R. Non.

10 Q. Pouvez-vous nous dire si d'autres choses se seraient passées ou si vous

11 avez vu d'autres choses se passer dans la maison au village de Livade ?

12 R. Devant la maison on entendait des cris, du vacarme. Je ne savais pas ce

13 qui se passait. Ils criaient : "Allahu Akbar." L'un des Moudjahidines qui

14 nous surveillait est sorti de la pièce en courant, mais très vite il est

15 rentré dans la pièce où nous nous trouvions, en apportant entre ses mains

16 la tête coupée de l'homme que je connaissais. C'était Momir Mitrovic.

17 Q. Pouvez-vous nous dire, Monsieur Trivicevic, si Momir Mitrovic était

18 civil ou soldat pendant la guerre ?

19 R. Momir Mitrovic était soldat au 1er Bataillon de la

20 1ère Brigade d'infanterie de Prnjavor.

21 Q. Pouvez-vous nous dire, Monsieur, ce qui s'est passé au moment où cette

22 personne a apporté la tête de Momir Mitrovic dans la pièce ?

23 R. Il est entré dans la pièce en apportant la tête entre ses mains, devant

24 lui. Il nous a montré la tête en nous demandant si nous connaissions cet

25 homme. Moi, je le connaissais depuis -- enfin, n'osions dire que nous le

26 connaissions. Il a mis la tête dans une caisse en bois à fruits et il l'a

27 emmenée hors de la pièce.

28 Q. Je m'excuse d'avoir interrompu, mais je pense qu'une erreur s'est

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1 glissée au compte rendu à la ligne 8 de la page 21 : "Il a mis la main dans

2 cette caisse en bois."

3 R. Il a mis la tête de Momir Mitrovic dans la caisse en carton et il l'a

4 emmenée hors de la pièce.

5 Q. Qu'est-ce qui s'est passé par la suite après que la tête de Momir

6 Mitrovic a été sortie de la pièce dans cette caisse en carton ?

7 R. Cette même personne est entrée dans la pièce en apportant une autre

8 tête qui saignait et il nous a demandé si nous connaissions cet homme-là.

9 Je ne le connaissais pas, mais j'ai bien retenu tous les traits de son

10 visage. Lorsque je suis sorti, une femme serbe, à cet homme-là, a apporté

11 les photographies de cet homme-là en me demandant si j'en savais quelque

12 chose. Sur ces photos, j'ai reconnu Predrag Knezevic. C'était l'homme dont

13 la tête a été coupée. Il était membre du 1er Bataillon de la 1ère Brigade de

14 l'infanterie de Prnjavor.

15 Q. Qu'est-il advenu de la tête de Predrag Knezevic ?

16 R. La procédure a été répétée. Il a également placé cette tête dans un

17 carton, ensuite il l'a emmenée. Je ne sais pas ensuite ce qui est advenu

18 des têtes et des corps.

19 Q. Monsieur Trivicevic, après cette scène au cours de laquelle on a mis

20 ces deux têtes dans cette salle où vous étiez, qu'est-il advenu de vous-

21 même et des deux autres; Igor Guljevatej et le Dr Sikanic ?

22 R. On est resté là un certain temps, ensuite des gens sont venus. Ils se

23 sont installés dans la pièce d'à côté. Les Musulmans qui étaient là ont

24 attaché nos bras et nos jambes à des bâtons. C'est comme ça qu'ils nous ont

25 emmenés pour être interrogés.

26 Q. Vous dites qu'on vous a attachés, qu'on vous a attachés à des branches,

27 des bouts de bois. Combien de temps êtes-vous restés dans cet état ?

28 R. Il y avait deux façons de nous attacher. La première façon, c'était de

Page 3616

1 nous attacher autour de la tête et du cou, et les mains et les bras

2 attachés derrière le dos. Ou ils faisaient passer un bout de bois derrière

3 nos genoux et on devait pencher la tête en avant. Tout dépendait, parce

4 qu'au cours de ces deux jours, ils ont alterné. Il arrivait qu'ils nous

5 attachent d'une certaine manière, puis plus tard d'une autre manière. Plus

6 tard, ils nous ont libérés, nous ont détachés, mais en tout cas, on est

7 resté pendant toute la première nuit exactement comme on avait été attaché

8 avant.

9 Q. Vous dites qu'ils vous faisaient passer un bout de bois derrière les

10 genoux et la tête en avant. Que faisiez-vous avec votre tête quand vous

11 étiez dans cette position, avec ce bâton derrière les genoux ?

12 R. Rien. Ils faisaient passer la corde autour du cou, puis ils attachaient

13 la corde à nos genoux, si bien qu'on était attaché à ce bout de bois toute

14 la nuit. Ils changeaient régulièrement la manière de nous attacher.

15 Q. Est-ce que, par ailleurs, vous-même et les deux autres hommes avez été

16 soumis à d'autres mauvais traitements ?

17 R. Parfois, ils laissaient des civils du village entrer dans la maison et

18 des hommes jeunes, des hommes âgés, des grand-mères venaient regarder les

19 Chetniks. Ils les ont même autorisés à prendre ces perches, ces bâtons avec

20 lesquels nous étions attachés pour nous frapper.

21 Q. Quand vous étiez dans cette maison de Livade, est-ce qu'il y avait des

22 gardes qui vous gardaient, vous-même et les deux autres ?

23 R. On n'était jamais seuls dans la pièce. Il y avait toujours quelqu'un

24 d'autre. Il y avait toujours un Moudjahidine qui était là avec un fusil.

25 Q. Ceux qui vous gardaient, est-ce qu'ils parlaient votre langue ou est-ce

26 qu'ils parlaient une autre langue que la vôtre ?

27 R. Non, ils ne parlaient pas notre langue.

28 Q. Monsieur Trivicevic, il y a quelques instants vous avez expliqué qu'on

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1 vous a emmenés pour être interrogés, attachés à cette perche, à ce bâton.

2 Pourriez-vous décrire cet interrogatoire ?

3 R. Deux hommes qui se trouvaient dans la pièce avec nous, nous ont

4 transportés avec ces perches. Ils nous ont amenés dans une autre pièce où

5 il y avait deux hommes. Je m'en souviens très bien. Il y en a un que j'ai

6 vu plus tard au centre de détention de Zenica. S'agissait de l'autre, je me

7 souviens simplement qu'il avait une moustache. Je me souviens qu'il était

8 assis et qu'il nous parlait, mais j'ignore qui il était. J'ignore si je

9 serais en mesure de le reconnaître.

10 Q. Ces deux hommes dont vous venez de nous parler, vous rappelez-vous

11 quelle était leur tenue vestimentaire ?

12 R. Ils étaient en uniforme, des uniformes traditionnels, classiques, rien

13 d'autre.

14 Q. Vous souvenez-vous de la langue que parlaient ces deux hommes ?

15 R. Ils parlaient notre langue.

16 Q. Vous m'avez parlé de cet interrogatoire. Est-ce que c'est la seule fois

17 que vous avez été interrogés pendant votre détention à Livade ou bien est-

18 ce que vous avez été interrogés à d'autres reprises ?

19 R. Non, nous avons été interrogés une fois seulement à Livade.

20 Q. Vous dites "nous avons été interrogés." Que représente ce "nous" ?

21 R. Je parle du Dr Sikanic, de moi-même et d'Igor Guljevatej.

22 Q. Vous nous avez dit, Monsieur, que vous êtes restés dans cette maison

23 jusqu'au matin du dimanche 23 juillet 1955. Au moment où vous avez quitté

24 cette maison de Livade, est-ce qu'il y avait d'autres prisonniers détenus

25 dans la maison ?

26 R. Oui. Pendant cette première nuit de captivité qui a été la nôtre, il y

27 a neuf autres soldats de notre unité qu'on a amenés à cet endroit.

28 Q. Monsieur Trivicevic, vous souvenez-vous du nom des neuf autres soldats

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1 de la 1ère Brigade d'infanterie légère de Prnjavor qui sont arrivés dans la

2 maison ?

3 R. Je me souviens de tous leurs noms. Je peux vous donner tous leurs noms,

4 si vous le souhaitez.

5 Q. Veuillez le faire, s'il vous plaît.

6 R. Miodrag Samac, Goran Stokanovic, Vinko Aksentic, Vlado Cucic, Gojko

7 Vujicic, Velibor Tosic, Krstan Marinkovic, Petko Maric et Dusko Pejicic.

8 Q. Ces neufs hommes dont vous venez de nous donner les noms, combien de

9 temps sont-ils restés dans cette maison de Livade?

10 R. Ils sont restés avec nous, et quand on nous a emmenés, ils ont été

11 emmenés aussi.

12 Q. Je vais vous interroger sur ce point ultérieurement, dans quelques

13 instants, mais vous souvenez-vous d'un événement qui aurait eu lieu peu

14 après l'arrivée de ces neuf hommes à la maison ? Est-ce qu'il s'est produit

15 quelque chose d'inhabituel ?

16 R. Il faudrait peut-être que j'évoque l'incident concernant Vinko

17 Aksentic. On l'a emmené dans une pièce les mains liées derrière le dos. Ils

18 lui ont montré un endroit. Ils lui ont dit qu'il fallait s'asseoir à cet

19 endroit, mais au lieu de faire ça, il a sauté par la fenêtre en arrière. Il

20 a sauté en arrière, puis il a sauté par la fenêtre. Les Moudjahidines sont

21 restés interdits pendant quelques instants. Ils étaient stupéfaits. Puis

22 ensuite, ils sont tous sortis en courant de la maison. On les a entendu

23 tirer. Nous avons pensé qu'ils tiraient sur Vinko, qu'ils l'avaient tué,

24 mais ils l'ont rapidement ramené à l'intérieur de la maison. Il était

25 toujours conscient.

26 Ils ont commencé à le frapper, le rouer de coups à tel point qu'il a

27 fini par perdre connaissance. Il bafouillait. Il tenait des propos déniés

28 de tout sens.

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1 Un jeune Moudjahid a arraché la chemise de Vinko. Ensuite, il lui

2 avait enlevé les ramjers [phon], les chaussures, et il a arraché avec ses

3 dents, il a arraché les doigts de pied de Vinko Aksentic.

4 Q. Page 25, ligne 4, vous dites qu'on vous a emmenés, et que si on les

5 emmenaient avec vous. Qui vous a emmenés où ?

6 R. Ce sont les Moudjahidines qui nous ont emmenés. Nous étions toujours

7 les prisonniers de ce détachement. Ils nous ont emmenés jusqu'à une

8 fourgonnette. Ils ont arraché nos chemises. Ils ont fait des lambeaux de

9 nos chemises, et avec ces lambeaux de tissu, ils nous ont bandé les yeux.

10 Donc on ne pouvait pas voir où ils nous emmenaient.

11 Je me souviens que j'étais numéro 8 dans cette file, dans cette ligne, et

12 quand mon tour est arrivé, il n'y avait plus de tissu pour me bander les

13 yeux. Alors, ils ont mis quelque chose sur ma tête. Ils m'ont assis à côté

14 de la portière de la fourgonnette et j'ai pu voir où on allait, parce que

15 le tissu qu'on m'avait mis sur la tête était transparent. J'ai reconnu

16 certains bâtiments qui se trouvaient en direction de Zavidovici. Puis on

17 s'est arrêté à un endroit que je ne connaissais pas, que personne ne

18 connaissait, mais c'était le camp des Moudjahidines.

19 Q. Monsieur Trivicevic, cet endroit, à quelle distance se trouvait-il de

20 la ville de Zavidovici ?

21 R. Je dirais que ça se trouvait à 10 ou 15 kilomètres.

22 Q. Pouvez-vous nous décrire l'aspect du paysage autour de ce camp des

23 Moudjahidines, ou décrire cet endroit, géographiquement parlant ?

24 R. C'était un plateau au bord d'une route où il y avait deux maisons. Au

25 bout du plateau, il y avait une rivière avec une très haute colline qui se

26 dressait à côté, derrière. Il fallait beaucoup de temps au soleil chaque

27 matin pour apparaître derrière cette colline. C'est la meilleure

28 description que je puisse vous faire. A l'ouest de la route, il y avait le

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1 camp; au sud de la route, la rivière; et derrière la rivière, cette très

2 haute colline.

3 Q. Monsieur Trivicevic, comment s'appelait ce cour d'eau qui était à

4 proximité du camp ?

5 R. Selon moi, cette rivière, c'est la Gostovic, la rivière Gostovic. Ça on

6 l'a appris quand un des Moudjahidines a menacé un des prisonniers à cet

7 endroit en lui disant : "Fais gaffe, sinon la rivière Gostovic risque

8 d'avoir à emporter ta tête."

9 Q. Pouvez-vous dire aux Juges ce que vous avez pu observer alors que vous

10 vous trouviez dans ce que vous avez appelé "le camp des Moudjahidines" ?

11 R. Quand j'ai pu le voir clairement, il y avait une maison qui avait été

12 incendiée, puis il y avait un saule pleureur, puis un endroit qui servait

13 de stade de foot ou de terrain de foot aux Moudjahidines, où ils se

14 mettaient en rang. Puis il y avait un grand nombre de tentes.

15 A l'entrée, il y avait deux drapeaux avec un drapeau noir et une

16 inscription en arabe. A droite, il y avait un drapeau noir ou vert, je ne

17 me souviens pas, avec quelque chose d'écrit en arabe.

18 Q. Monsieur Trivicevic, page 26, lignes 20 et 21, vous dites que c'était

19 "un plateau qui se trouvait au bord d'une route où il y avait deux

20 maisons." Ensuite, à la page 27, ligne 9, vous dites, je cite : "Au moment

21 j'ai pu voir ça clairement, j'ai vu qu'il y avait une maison qui avait été

22 incendiée."

23 Vous souvenez-vous du nombre de maisons qu'il y avait à cet endroit, cet

24 endroit que vous appelez "le camp des Moudjahidines" ?

25 R. Deux, mais au moment dont je parlais, il y avait une tente derrière

26 laquelle nous nous tenions et qui nous empêchait de voir l'autre maison.

27 Quand j'ai parlé d'une maison, c'est parce que l'autre maison, je ne

28 pouvais pas la voir de l'endroit où je me tenais à ce moment-là.

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1 Q. Vous souvenez-vous de l'heure de votre arrivée au camp des

2 Moudjahidines, et le jour de votre arrivée dans ce camp ?

3 R. C'était le 23 juillet 1995. C'était vers midi.

4 Q. Pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre ce qui s'est passé au moment

5 où vous êtes arrivés à cet endroit ?

6 R. Ils ont ouvert les portières de la fourgonnette, ils nous ont attrapés

7 par nos liens. On peut dire qu'ils nous ont tirés par les pieds. Ma tête a

8 heurté le sol, nos têtes ont heurté le sol, et ils nous ont tirés ainsi

9 dans la poussière et dans les graviers jusqu'à l'entrée du camp. Nous

10 mourions de faim et de soif. Il faisait une chaleur insupportable dans la

11 fourgonnette. On leur a demandé de l'eau.

12 L'homme a emmené un jerrycan avec de l'eau. Nous étions étendus face

13 contre terre. Il a versé l'eau par terre dans la poussière et il nous a dit

14 : "Si vous pouvez, buvez ça. Mais sinon, je ne peux rien faire pour vous."

15 Q. Combien de temps êtes-vous restés dans ce lieu que vous appelez "le

16 camp des Moudjahidines" ?

17 R. Nous sommes restés là jusqu'au 23 août 1995.

18 Q. Combien de personnes y avait-il dans votre groupe au jour de votre

19 arrivée ?

20 R. Quand nous sommes arrivés, il y avait un groupe avec les

21 12 hommes dont j'ai donné les noms.

22 Q. Quand vous êtes partis le 23 août 1995, combien étiez-vous à partir ?

23 R. Onze.

24 M. MUNDIS : [interprétation] Je vois l'heure, Monsieur le Président. Je

25 pense que le moment serait bien choisi pour faire la pause.

26 J'ai une demande à formuler.

27 Précédemment, lorsqu'il est venu déposer, lorsqu'il a fait une déclaration

28 aux autorités locales, a fait un croquis très détaillé du camp. Je

Page 3623

1 souhaiterais demander à la Chambre de première instance de lui permettre de

2 dessiner ce croquis pendant la pause, ce qui nous permettra de gagner du

3 temps. Ensuite, nous montrerons le croquis à la Défense et nous poserons

4 des questions au témoin au sujet de ce croquis après la pause.

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Vidovic.

6 M. ROBSON : [interprétation] Oui, cela nous paraît acceptable.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien.

8 M. MUNDIS : [interprétation] Je vais donc demander à ce que l'on remettre

9 au témoin une ou deux feuilles de papier ou deux ou trois feuilles de

10 papier.

11 Je dois également vous dire que je pense avoir besoin d'un peu plus

12 de temps, un peu plus de une heure 30 minutes que j'avais envisagé. J'ai

13 encore un certain nombre de questions à poser au témoin, un certain nombre

14 de documents à lui présenter, deux séquences vidéo. Je pense que j'aurais

15 encore besoin de 30 à 45 minutes même s'il ne nous reste que 15 minutes. Je

16 vous demande donc la possibilité de poursuivre jusqu'à la fin de mon

17 interrogatoire principal.

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

19 Est-ce que le moment est bien choisi pour faire la pause ?

20 M. MUNDIS : [interprétation] Bien.

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pause. Nous reviendrons à 16 heures.

22 --- L'audience est suspendue à 15 heures 30.

23 --- L'audience est reprise à 16 heures 03.

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous pouvez reprendre, Monsieur

25 Mundis.

26 M. MUNDIS : [interprétation] Merci.

27 Q. Monsieur Trivicevic, au cours de la pause, avez-vous eu l'occasion de

28 dessiner un dessin de ce que vous nous avez appelé "le camp des

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1 Moudjahidines" ?

2 R. Oui, tout à fait. J'ai fait de mon mieux.

3 M. MUNDIS : [interprétation] Il me semble que l'huissière a le dessin en

4 question. Peut-être pourrions-nous tout d'abord le montrer à la Défense,

5 ensuite le mettre sur le rétroprojecteur.

6 Q. Monsieur Trivicevic, pourriez-vous tout d'abord, peut-être avec un

7 stylo, nous aider à comprendre ce dessin. Commencez déjà par ce que vous

8 avez dessiné. Je vous arrêterai peut-être à un moment ou à un autre pour

9 vous demander des éclaircissements supplémentaires. Donc veuillez procéder

10 et allez-y lentement, s'il vous plaît.

11 R. Ici, j'ai commencé par dessiner la route en premier. La rivière se

12 trouve de l'autre côté de la route. Je crois que c'est la rivière Gostovic.

13 Là vous avez l'entrée du camp, avec des drapeaux de chaque côté. Un peu

14 plus loin, une grande tente où les Moudjahidines faisaient leurs prières.

15 Ici, c'est le saule pleureur. Et là, la maison dans laquelle nous étions

16 détenus. Ici, l'autre maison, qui est juste derrière. Donc la tente du

17 commandant des Moudjahidines, ils l'appelaient "Emir". Ici, vous avez tous

18 les terrains où ils allaient jouer au foot, par exemple, où ils se

19 mettaient en rang, et tout autour des tentes, sans doute les tentes dans

20 lesquelles ils dormaient.

21 Q. Très bien. Monsieur Trivicevic, vous avez d'abord parlé de la route.

22 Avec le marqueur, pourriez-vous mettre un "1" sur cette route.

23 R. [Le témoin s'exécute]

24 Q. Ensuite vous avez parlé de la rivière qui se trouve de l'autre côté de

25 la route. Pourriez-vous l'identifier à l'aide d'un "2."

26 R. [Le témoin s'exécute]

27 Q. Ensuite vous avez parlé du portail où de l'entrée du camp. Veuillez le

28 marquer d'un "3".

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1 R. [Le témoin s'exécute]

2 Q. Vous nous avez parlé de drapeaux qui flottaient des deux côtés.

3 Pourriez-vous nous dire où se trouvaient les drapeaux.

4 R. Les drapeaux étaient à gauche de l'entrée, enfin ça c'est le drapeau

5 noir avec les armoiries au milieu. A droite il y avait l'autre drapeau.

6 Enfin, je ne me souviens plus très bien de la couleur de l'autre drapeau,

7 mais il y avait des écritures arabes sur ce drapeau.

8 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, mettre un "4" à côté de l'endroit où se

9 trouvait le drapeau noir qui portait une armoirie.

10 R. [Le témoin s'exécute]

11 Q. Maintenant un numéro "5" à côté de l'endroit où vous avez vu ce drapeau

12 noir avec des écritures en arabe.

13 R. [Le témoin s'exécute]

14 Q. Ensuite, à la ligne 2, page 31, vous avez dit : "Pas loin de là, il y

15 avait une grande tente où les Moudjahidines faisaient leurs prières."

16 Pourriez-vous, s'il vous plaît, indiquer cela d'un "6", d'indiquer cette

17 tente d'un "6".

18 R. [Le témoin s'exécute]

19 Q. Merci. Ensuite, vous avez parlé d'un saule pleureur. Pourriez-vous,

20 s'il vous plaît, le marquer du chiffre "7".

21 R. [Le témoin s'exécute]

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il vaudrait mieux faire un 7 plus

23 clair parce que là on ne le voit pas très bien.

24 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

25 M. MUNDIS : [interprétation]

26 Q. Ensuite, vous avez dit : "Ici, c'est la maison où nous étions détenus."

27 Veuillez marquer cette maison d'un "8".

28 R. [Le témoin s'exécute]

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1 Q. Ensuite, vous nous avez dit : "Juste derrière, il y avait une autre

2 maison." Veuillez, s'il vous plaît, annoter cette autre maison d'un "9".

3 R. [Le témoin s'exécute]

4 Q. Ensuite, à la ligne 5, page 31, vous avez dit : "Ici, il y a la tente

5 du commandant des Moudjahidines qu'ils appelaient 'Emir.'"

6 Notez cette tente d'un "10", la tente qui, selon vous, était la tente du

7 commandant des Moudjahidines ?

8 R. [Le témoin s'exécute]

9 Q. Ensuite, la page [comme interprété] 6 et 7 de la page 31, vous avez dit

10 : "Ici, c'est le terrain où ils se rassemblaient soit pour jouer au foot,

11 soit pour faire des exercices ?

12 R. [Le témoin s'exécute]

13 Q. Ensuite, vous avez dit : "Autour il y avait les tentes où ils

14 dormaient, très certainement." Pourriez-vous, s'il vous plaît, marquer ces

15 tentes d'un "12" ?

16 R. [Le témoin s'exécute]

17 Q. Il y a d'autres objets qui, visiblement, représentent des tentes dans

18 le dessin, objets qui sont au-dessous de 1 [comme interprété] et qui sont

19 au-dessus du fameux champ de manœuvre représenté par un 11 ? Pourriez-vous

20 me dire de quoi il s'agit ?

21 R. Ce sont des tentes. Ça, c'est des tentes. Je n'ai pas réussi à toutes

22 les marquer d'un 12.

23 Q. Vous pourriez peut-être tout simplement marquer aussi les tentes qui

24 sont au-dessus du 11 d'un "12", pour que nous sachions qu'il s'agit de ces

25 tentes.

26 R. [Le témoin s'exécute]

27 M. MUNDIS : [interprétation] Merci.

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il y a un petit rectangle qui se

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1 trouve à droite de la tente numéro 6. Pouvez-vous dire de quoi il s'agit ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est un hangar, une cabane en bois. Il y

3 avait deux ou trois lavabos dans cet endroit ainsi que des toilettes.

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que vous voulez le marquer d'un

5 "13".

6 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ensuite à gauche du premier "12" que

8 vous avez écrit, il y a quelque chose assez flou qui ressemble à une route

9 ou un embranchement d'une autre route qui arrivait sur la route numéro 1.

10 Qu'est-ce que c'est, s'il vous

11 plaît ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, c'est un petit ruisseau, un tout

13 petit ruisseau. C'est le ruisseau où cette petite rue rejoint la rivière

14 Gostovic, et il y avait un petit pont, je crois, à cet endroit-là, avec des

15 tuyaux isolés. Selon nous, c'est ce qui était utilisé pour avoir l'eau

16 chaude.

17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Pouvons-nous marquer cela

18 avec un "14".

19 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pour ce qui est de ce champ qui, selon

21 vous, est le terrain de manœuvre ou le terrain de foot, tout autour du 11

22 il y a des lignes un peu irrégulières. Vous avez fait cela exprès ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, j'ai fait ça comme ça pour démarquer le

24 fait que c'était une cuvette, puisque les tentes qui étaient autour du

25 terrain au centre étaient un peu plus hautes. C'est pour ça que j'ai fait

26 cette ligne irrégulière.

27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

28 Monsieur Mundis.

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1 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous allons

2 conserver ce dessin pour l'instant et nous allons nous en servir plus tard.

3 Pourrions-nous, s'il vous plaît, maintenant montrer une séquence vidéo du

4 P06032. C'est une séquence qui fait environ quatre minutes. Nous allons ne

5 pas écouter la bande audio. Je vais poser des questions au témoin à propos

6 de ce qu'il voit, mais d'abord, nous allons la regarder une fois.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce qu'on va l'entendre, ce qui est

8 dit à un moment ou un autre ?

9 M. MUNDIS : [interprétation] Il s'agit d'une vidéo. Il y a une narration

10 principalement. Je ne sais pas qui a écrit la narration. Je ne sais pas qui

11 parle. Nous n'allons très certainement pas utiliser la bande audio, à moins

12 d'avoir des témoins par la suite qui peuvent nous en parler. Nous montrons

13 juste les images et nous allons demander au témoin de nous expliquer ce que

14 l'on voit sur cette vidéo.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

16 Monsieur Robson.

17 M. ROBSON : [interprétation] Vous savez peut-être que la Défense a déposé

18 une réponse à propos de laquelle l'Accusation avait déjà déposé une

19 requête, et nous avons vraiment proposé qu'il fallait absolument voir à la

20 fois l'image et le son. Pour ce qui est de cette séquence vidéo, bien sûr,

21 nous avons exactement la même position.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, je ne m'en doutais. C'est pour ça

23 que j'ai posé la question de savoir si on allait à un moment ou un autre

24 entendre le son ?

25 M. ROBSON : [aucune interprétation]

26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'essayais un petit peu d'anticiper

27 votre objection.

28 M. MUNDIS : [interprétation] Si la Défense veut qu'on entende le son, nous

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1 allons le faire.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est parce que nous voulons avoir la

3 pièce en tant que telle. Nous ne voulons pas que l'on enlève quoi que ce

4 soit à une pièce.

5 M. MUNDIS : [interprétation] Très bien. Très bien. Mais si j'ai bien

6 compris ce qu'a dit le conseil de la Défense, nous ne soulèverons plus

7 d'objections pour ce qui est des séquences vidéo qui sont étiquetées ou qui

8 ont des écritures parce que, bien sûr, nous comprenons bien ce que vous

9 dites à propos des preuves qui ne doivent pas être modifiées. Mais parfois

10 nous avons des photos qui ont été expurgées. Ça a été fait par la Défense

11 précédemment, mais nous n'allons plus faire d'expurgations soit bien aux

12 clichés ni aux séquences vidéo.

13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allez-y donc.

14 M. MUNDIS : [interprétation] Dans ce cas-là, nous allons faire jouer la

15 vidéo avec la bande audio. Je suis désolé pour l'interprète et les

16 interprètes. Rien n'est écrit. Il n'y a pas de sous-titres, et parfois, de

17 plus, on parle tous --

18 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

19 M. MUNDIS : [aucune interprétation]

20 M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

21 [Diffusion de la cassette vidéo]

22 M. MUNDIS : [interprétation]

23 Q. Monsieur Trivicevic, pourriez-vous, s'il vous plaît, nous expliquer ce

24 que nous avons vu sur cette bande vidéo ?

25 R. Sur cette séquence vidéo on voit le camp où nous avons été détenus

26 pendant un mois. Ici, on voit ce dont j'ai parlé dans mon dessin, ce que

27 j'ai annoté dans mon dessin, d'ailleurs.

28 Q. Très bien.

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1 M. MUNDIS : [interprétation] Pourrions-nous verser cette séquence vidéo au

2 dossier, ensuite j'ai quelques clichés qui ont été pris à partir de cette

3 vidéo, et j'aimerais qu'on les montre au témoin pour qu'il puisse nous

4 expliquer un peu ce que l'on voit sur ces clichés qui sont tirés de la

5 séquence vidéo.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Robson.

7 M. ROBSON : [interprétation] Le témoin a dit que la séquence vidéo montre

8 le camp où il a été détenu, donc je concède que l'on puisse verser cette

9 pièce au dossier sur cette base. Cela dit, étant donné que la séquence

10 vidéo est intitulée "El Moudjahidine," ne signifie pas que nous, de la part

11 de la Défense, acceptons le fait que cette séquence ait été filmée et

12 préparée par le Détachement El Moudjahidine. Nous nous réservons le droit

13 de contester l'authenticité de cette pièce. Cela dit, nous nous attendons à

14 ce que l'Accusation fasse venir plus de témoins afin d'établir

15 l'authenticité de ce document. Mais pour la fin, nous ne nous opposons pas

16 à son admission.

17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien.

18 Il faudrait lui donner une cote.

19 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la cote 546, s'il vous plaît.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

21 M. MUNDIS : [interprétation] Très bien.

22 Q. Monsieur Trivicevic, nous avons extrait certaines photos de cette

23 séquence vidéo qui sont maintenant sur le rétroprojecteur. Pourriez-vous

24 nous expliquer tout d'abord ce que l'on voit dans ce premier cliché qui se

25 trouve à votre droite, qui est aussi d'ailleurs sur l'écran devant vous.

26 Pourriez-vous nous décrire ce que vous

27 voyez ?

28 R. Le cliché a été pris du terrain de manœuvre. On voit le saule pleureur,

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1 on voit l'endroit où nous étions détenus et on voit l'autre maison

2 derrière. On voit aussi le drapeau qui se trouvait à l'entrée du camp, mais

3 à droite.

4 Q. Très bien.

5 M. MUNDIS : [interprétation] Pour que ceci soit le plus simple possible,

6 peut-être pourrions-nous aussi montrer au témoin le dessin qu'il a fait du

7 camp. Ce qui serait bien, c'est de pouvoir avoir les deux pièces côte à

8 côte afin qu'il puisse repérer sur la photo ce qu'il a déjà repéré sur le

9 dessin avec les mêmes numéros.

10 Q. Vous nous avez dit que vous avez vu le saule pleureur. Je crois que

11 vous avez mis un "7" sur le saule pleureur. Pourriez-vous mettre un "7" sur

12 le saule pleureur dans la photo.

13 R. [Le témoin s'exécute]

14 Q. La maison où vous étiez détenu, pouvez-vous nous dire ou la

15 marquer du même chiffre que sur le dessin ?

16 R. C'est le 8.

17 Q. Qu'en est-il de l'autre maison, s'il vous plaît ?

18 R. L'autre maison c'est le numéro 9.

19 Q. Très bien. Maintenant pourrions-nous passer à la photographie suivante.

20 Pouvez-vous nous dire ce que l'on voit dans cette photo ?

21 R. C'est un cliché qui est à nouveau pris du même endroit, et pour ce qui

22 est de ce que j'ai repéré sur le dessin, on ne voit que le saule pleureur

23 et la maison que j'avais marqué d'un "8".

24 Q. Très bien. Pourriez-vous à nouveau marquer cette photographie d'un "8"

25 ?

26 R. [Le témoin s'exécute]

27 M. MUNDIS : [interprétation]

28 Q. Très bien. Passons maintenant à la photographie suivante.

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1 Que voit-on sur cette photographie ?

2 R. On voit ce fameux terrain de manœuvre où passaient les soldats en

3 revue. On voit même le terrain de jeu avec les buts du terrain de foot, et

4 à l'arrière on voit les tentes.

5 Q. Commençons par les tentes. Pouvez-vous mettre un "12" sur l'endroit où

6 l'on voit les tentes sur cette photographie.

7 R. Toutes les tentes devraient avoir un 12.

8 Q. Qu'en est-il du terrain de foot ? Pourriez-vous marquer cet endroit

9 d'un "11".

10 R. [Le témoin s'exécute] Le numéro 11 se trouve ici, en indiquant toute la

11 zone où se trouvent les soldats et l'endroit dégagé qui est devant les

12 soldats.

13 Q. Vous nous avez parlé des buts du terrain de foot. Pourriez-vous, s'il

14 vous plaît, les marquer d'un "X".

15 R. [Le témoin s'exécute]

16 Q. Pouvez-vous dire de quoi était fait ce but de foot, ces cages de but ?

17 R. C'était juste du bois.

18 Q. Très bien.

19 M. MUNDIS : [interprétation] Passons à la photographie suivante.

20 Q. Que voyons-nous sur cette photographie ?

21 R. Ici, on voit encore les deux maisons; la maison 8 et la maison 9. On

22 voit un membre du Détachement El Moudjahidine, celui que les Moudjahidines

23 nous ont décrit comme étant un garçon de 12 ans qui était venu de l'Arabie

24 saoudite pour se battre. C'est lui, personnellement, qui m'a coupé les

25 oreilles avec un canif dans la maison de Livade.

26 Q. Très bien. Pourriez-vous, s'il vous plaît, tout d'abord, marquer les

27 maisons sur la photographie d'un "8" et d'un "9".

28 R. [Le témoin s'exécute]

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1 Q. Ensuite, maintenant, pouvez-vous encercler la personne qui vous a été

2 décrite comme étant le garçon de 12 ans venant de l'Arabie saoudite, celui

3 qui vous a coupé les oreilles avec un canif ?

4 R. [Le témoin s'exécute]

5 M. MUNDIS : [interprétation] Passons maintenant à la photographie suivante.

6 Q. Que voit-on ici ?

7 R. Sur cette photographie on voit encore les tentes, on voit aussi le

8 terrain où l'on passait les troupes en revue et le terrain où ils jouaient

9 au foot dans leur temps libre.

10 Q. Très bien. Pouvez-vous marquer les tentes d'un "12" à nouveau.

11 R. [Le témoin s'exécute]

12 Q. Marquez le terrain d'un "11".

13 R. [Le témoin s'exécute]

14 Q. Et des "X" sur ce que vous nous avez décrit comme étant les cages de

15 foot.

16 R. [Le témoin s'exécute]

17 M. MUNDIS : [interprétation] Dernière photo, maintenant.

18 Q. Reconnaissez-vous qui que ce soit dans cette photographie ou quoi que

19 ce soit dans cette photographie ?

20 R. Ici, on voit un homme qui nous a été présenté comme "Abu Hamza" et on

21 voit aussi le drapeau qui flottait à droite de l'entrée du camp.

22 Q. Très bien. Pouvez-vous marquer la personne qui selon vous a été

23 présentée comme étant "Abu Hamza", pouvez-vous écrire "Abu Hamza" sur cette

24 personne ?

25 R. [Le témoin s'exécute]

26 Q. Merci.

27 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais que l'on

28 verse dans le dossier ce jeu de photographies, qu'on lui attribue une seule

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1 cote.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Les photographies sont versées au

3 dossier. Est-ce qu'on peut leur attribuer une seule cote.

4 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera 547.

5 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

6 Monsieur Mundis, poursuivez.

7 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

8 Q. Monsieur Trivicevic, avant la pause, vous nous avez dit - et cela se

9 trouve à la page 28, la ligne 23, ensuite à la page 29, jusqu'à la ligne 5

10 - vous nous avez dit que vous étiez au camp des Moudjahidines jusqu'au 23

11 août 1995 et que vous étiez 11 ce jour-là qui étaient partis.

12 Pouvez-vous nous dire ce qui s'est passé pour ce qui est de la

13 douzième personne qui était entrée au camp avec vous le

14 23 juillet 1995 ?

15 R. Dans la nuit du 23 au 24 juillet 1995, nous étions sortis de la maison

16 où nous nous trouvions. Emir et d'autres Moudjahidines étaient à la porte

17 de la maison pour nous demander, de demander les prisonniers qui se

18 trouvaient dans la pièce qui était la personne qui avait essayé de fuir.

19 Nous n'étions pas au courant de cela à ce moment-là et nous devions sortir

20 l'un après l'autre avec des bandeaux sur les yeux jusqu'à un endroit dans

21 le camp où nous étions attachés par les pieds à quelque chose qui était

22 surélevé par rapport au sol, donc nous étions dans cette position-là,

23 surélevés. Dans cette même position, nous étions jusqu'à la matinée,

24 jusqu'au matin, le lendemain et Gojko Vujici qui était cette douzième

25 personne a été tué devant moi, et il a été décapité.

26 Q. Je ne suis pas -- je suis désolé de parler de cela, Monsieur, je vous

27 interromps là. Pouvez-vous regarder le croquis qui est sur le

28 rétroprojecteur à votre droite ?

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1 Pouvez-vous nous indiquer sur le croquis l'endroit dans le camp où vous

2 avez été amené ainsi que l'endroit où Gojko Vujicic avait été tué devant

3 vous ?

4 R. Cet endroit se trouvait près de la grande tente où ils priaient. Cela

5 se trouve quelque peu au-dessus de la pièce où se trouvaient les douches.

6 Il ne s'agissait pas d'une pièce proprement dite, il s'agissait d'un

7 endroit, d'une cabane.

8 Q. Il ne s'agissait pas d'un bâtiment, d'un édifice ?

9 R. Non.

10 Q. Pouvez-vous apposer le "15" à cet endroit où Gojko Vujicic a été tué

11 devant vous ?

12 R. [Le témoin s'exécute]

13 Q. Pouvez-vous décrire le terrain à cet endroit-là où vous venez d'apposer

14 le 15 ?

15 R. Il s'agissait d'un terrain de terre, sans pelouse. Il y avait de la

16 poussière et des cailloux mélangés.

17 Q. Pouvez-vous décrire, pour autant que vous en souveniez, ce qui s'est

18 passé cette nuit-là, du 23 au 24 juillet 1995, pendant laquelle Gojko

19 Vujicic a été tué ?

20 R. On m'a amené jusqu'à cet endroit-là, où on m'a soulevé les pieds vers

21 le dos. Nous avions nos visages contre le sol. Nous respirions à peine. A

22 un moment donné, un Moudjahidine pour lequel je savais qu'il s'appelait

23 "Habib," et qui était dans le groupe qui m'a arrêté, il est arrivé pour

24 mettre une pièce de carton devant mon visage pour que je puisse respirer.

25 Il m'a apporté une tasse de café. A un moment donné, il m'a détaché mes

26 poignets pour m'aider. Je ne pouvais pas bouger mes poignets. Je ne pouvais

27 pas, j'étais paralysé, mes poignets étaient paralysés.

28 Après une certaine période, je me suis endormi. Je me souviens très

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1 bien qu'au sommeil j'ai arraché les bandeaux qui se trouvaient autour de ma

2 tête et qui couvraient mes yeux. Habib s'est approché à ce moment-là, il a

3 pris un pansement pour me poser un nouveau bandeau sur mes yeux pour que je

4 ressemble à d'autres prisonniers, et à travers ce pansement je pouvais très

5 bien voir ce qui se passait. Il m'a attaché les poignets sur mon dos, il

6 m'a détaché les pieds en m'avertissant que je ne devais pas essayer même de

7 penser à fuir.

8 Je me suis endormi, et j'ai dormi jusqu'au matin, où la prière des

9 Moudjahidines a commencé. La prière m'a réveillé en fait. A ma gauche, j'ai

10 vu Gojko Vujicic qui, je ne sais pas comment, pendant la nuit il a réussi à

11 faire la même chose sur le dos, et comme il a été blessé en haut des

12 jambes, il souffrait beaucoup, il leur a demandé de lui donner de l'eau, de

13 lui détacher les poignets et les pieds parce qu'il ne pouvait plus

14 supporter cela.

15 Les Moudjahidines nous ont dit que nous ne devions pas proférer des jurons.

16 Il a commencé à jurer, et il a mentionné le nom de Dieu. L'un des

17 Moudjahidines qui était en train de prier dans la tente, est sorti de la

18 tente, a pris le fusil automatique qui se trouvait à côté de l'entrée de la

19 pièce, il l'a armé, il s'est mis à côté de la tête de Gojko, et Gojko l'a

20 vu en train de s'approcher. Il a tourné sa tête vers moi, donc à sa gauche,

21 et lui il s'est arrêté à côté de sa tête et il a tiré une balle dans la

22 tempe droite de Gojko.

23 Donc il a rebroussé le chemin, il est entré dans la tente, j'ai regardé

24 Gojko et j'ai vu un de ses doigts de sa main gauche qui tremblait toujours.

25 Le même Moudjahidine a laissé son fusil à l'entrée de la tente, il a pris

26 une épée ou un sabre, et il s'est approché de Gojko et en quelques gestes,

27 il l'a décapité. Il a essayé de mettre sa tête sur sa poitrine, mais le

28 corps était en arrière et il ne pouvait pas poser la tête sur la poitrine,

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1 il a essayé de refaire cela plusieurs fois, une fois la tête a été placée

2 sur son abdomen, elle y est restée.

3 A ce moment-là, il s'est tourné vers moi, il m'a montré la tête de

4 Gojko qui se trouvait sur son abdomen qui était tourné vers moi à ce

5 moment-là.

6 Q. Monsieur Trivicevic, pendant combien de temps vous et les autres dix

7 personnes qui étaient en vie êtes restés à l'endroit indiqué par le chiffre

8 15 sur le croquis où Gojko a été tué ?

9 R. On m'a détaché. J'ai été le premier qui a été détaché et on m'a amené

10 dans la maison, après quoi, ils ont amené les prisonniers l'un après

11 l'autre dans la maison.

12 Q. Encore une fois, Monsieur, il faut qu'on s'appuie sur le croquis qui

13 est à votre droite, lorsque vous dites : "Ils nous a amené dans la maison

14 où nous étions détenus," pouvez-vous nous dire à quel numéro cela

15 correspond sur votre croquis ?

16 R. C'est le numéro "8". C'est la maison indiquée par le numéro "8".

17 Q. Pouvez-vous nous dire ce qui s'est passé après que tous les membres de

18 votre groupe ont été ramenés dans la maison ?

19 R. Une fois tous ramenés dans la maison, l'un des Moudjahidines, mais je

20 ne me souviens pas lequel, a apporté la tête de Gojko accrochée à un

21 crochet de boucher qui avait la forme de la lettre S, et à la porte de la

22 pièce déjà, il a jeté la tête à Igor Guljevatej ou à Marinkovic, dans les

23 [inaudible] d'une de ces deux personnes. Et après tous les mauvais

24 traitements qu'ils nous ont infligés, ils prenaient cette tête on nous

25 disant : "Embrasse ton frère." Et sur le mur de cette pièce, sur ce

26 crochet, ils ont accroché cette tête pour que Gojko, ils ont dit, pour que

27 Gojko soit avec nous, dans cette même pièce.

28 Q. Pendant combien de temps cette tête restait-elle accrochée à ce crochet

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1 dans la pièce ?

2 R. Jusqu'à l'après-midi, où Emir est entré et au moment où il a remarqué

3 la tête accrochée au crochet, il l'a donc décrochée et il était très en

4 colère. Il a parlé aux gardes qui étaient là. Après quoi ils ont pris la

5 tête, mais je ne sais pas ce qui s'est passé par la suite pour ce qui est

6 de la tête.

7 Q. Lorsque vous dites "les gardes" ou "les sentinelles", pouvez-vous nous

8 dire qui étaient les personnes qui vous gardaient, vous et les autres dix

9 personnes qui se trouvaient dans la même

10 pièce ?

11 R. Il s'agissait des membres du Détachement El Moudjahidine, et toutes les

12 deux heures, ils se relayaient. Il y avait plusieurs personnes qui nous

13 gardaient. Ce n'était pas toujours les mêmes personnes.

14 Q. Monsieur Trivicevic, s'il vous plaît, dites à la Chambre quelles

15 étaient les circonstances dans lesquelles vous et les autres hommes avez

16 quitté finalement le camp le 23 août 1995 ? Dites-nous ce qui s'est passé

17 ce jour-là.

18 R. Nous étions dans une pièce qui avait un sol en planches et les portes

19 et les fenêtres étaient condamnées par les planches. Dans cette pièce, il y

20 avait des chaînes sur nos pieds. Il y avait des cadenas pour ces chaînes. A

21 plusieurs reprises, ils nous ont fait sortir au terrain de jeu, et ce jour-

22 là également. Ils nous ont fait sortir à ce terrain de jeu, et ce jour-là,

23 il y avait inhabituellement plus de personnes que d'habitude, et ils nous

24 ont fait sortir de cette ligne.

25 Je me souviens que Goran Stokanovic et le Dr Sikanic ont été battus.

26 Ils ont subi des chocs électriques. Les autres, ils ont été passés à tabac

27 et ils nous ont ordonné de faire des onomatopées des porcs, des ânes. Igor

28 Guljevatej, il a été emmené à l'autre bout du terrain où se trouvaient les

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1 tentes. Ils ont tiré là-bas. Nous avons pensé qu'il avait été tué, mais

2 après un certain temps les gens sont venus pour nous libérer des chaînes,

3 pour nous mettre des bandeaux sur nos yeux. On nous a fait monter à bord de

4 bus. Nous ne pouvions pas nous asseoir dans le bus mais nous étions entre

5 les sièges. Ce jour-là, nous avons été transférés à l'établissement

6 pénitentiaire à Zenica.

7 Q. Monsieur Trivicevic, lorsque vous dites "Ils nous ont transportés

8 à l'établissement pénitentiaire à Zenica," vous avez pensez à qui ? Qui

9 sont ces "eux". De qui avez-vous parlé ?

10 R. Je parle de la police militaire du 3e Corps de l'ABiH.

11 Q. Comment savez-vous, Monsieur, qu'il s'agissait des membres du 3e

12 Corps de l'ABiH, qu'il s'agissait de la police militaire de ce 3e Corps qui

13 vous a transporté à l'établissement pénitentiaire à Zenica ?

14 R. A l'établissement pénitentiaire à Zenica, j'ai été attaché avec

15 un bout de ficelle, et les autres, ils avaient des menottes. L'un des

16 gardes est arrivé pour me détacher avant que l'on me fasse entrer dans la

17 salle pour m'interroger, et à ce moment-là il a dit à l'un de ses collègues

18 : "Vois, quand c'est moi qui attache quelqu'un, même un ours ne pourrait

19 pas se détacher." C'est lui qui m'a attaché les poignets au camp des

20 Moudjahidines, et qui m'a détaché les poignets à l'établissement

21 pénitentiaire à Zenica.

22 Q. Peut-être que ma question n'a pas été très claire. Comment savez-

23 vous - parce que vous nous avez dit qu'il s'agissait de la police militaire

24 du 3e Corps de l'ABiH qui vous a emmené à l'établissement pénitentiaire à

25 Zenica. Ma question est la suivante, Monsieur - comment savez-vous qu'il

26 s'agissait de la police militaire du 3e Corps de l'ABiH, que c'était un

27 membre de cette police militaire qui vous emmené à Zenica à l'établissement

28 pénitentiaire ?

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1 R. En route, ils parlaient. Ils nous parlaient en bosnien et ils

2 nous disaient aux points de contrôle tenus par les Moudjahidines de nous

3 cacher, parce qu'il ne fallait pas que les Moudjahidines nous capturent à

4 nouveau. A Zenica, il y avait une inscription, un panneau avec

5 l'inscription "3e Bataillon, la police", ou une autre abréviation à

6 l'entrée de l'établissement. Je ne sais pas. C'est tout ce que je peux vous

7 dire par rapport à votre question.

8 Q. Combien de temps êtes-vous resté à l'établissement pénitentiaire à

9 Zenica ?

10 R. A Zenica, je suis resté jusqu'au 7 janvier 1996.

11 Q. Est-ce qu'entre votre arrivée dans la fin du mois d'août jusqu'à votre

12 libération le 7 janvier 1996, est-ce que pendant cette période-là vous avez

13 jamais parlé à d'autres personnes qui se trouvaient au même endroit que

14 vous avez décrit comme étant "le camp des Moudjahidines" ?

15 R. Je ne me souviens pas de l'heure ou de la période exacte.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Juste un instant, s'il vous plaît.

17 Oui, Maître Robson.

18 M. ROBSON : [interprétation] Il s'agit d'une question directrice,

19 extrêmement directrice, et j'objecte par rapport à cela.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Qu'est-ce qui est de nature directrice

21 dans cette question ? J'ai compris.

22 Monsieur Mundis.

23 M. MUNDIS : [interprétation] Je vais reformuler ma question.

24 Q. Monsieur Trivicevic, mis à part le groupe de personnes qui étaient avec

25 vous détenues au camp des Moudjahidines avec qui vous avez été transférés à

26 l'établissement pénitentiaire à Zenica, savez-vous d'autres personnes qui

27 auraient été détenues au camp des Moudjahidines ?

28 R. Oui. Je connais les personnes qui ont été détenues au camp des

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1 Moudjahidines après la chute de Vozuca, après l'action qui a eu lieu en

2 septembre. Je ne connais pas le nombre exact de ces personnes, mais elles

3 ont été emmenées à Zenica dans notre cellule.

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur Trivicevic. Je

5 m'excuse de vous avoir interrompu. Lorsque vous voyez que ce monsieur à

6 votre gauche est debout, cessez de parler.

7 Oui, Maître Robson.

8 M. ROBSON : [interprétation] La première objection qui concernait le fait

9 que mon éminent collègue a demandé au témoin de faire des commentaires sur

10 les gens qui se trouvaient dans le même camp des Moudjahidines, c'était

11 l'essence de mon objection. Et encore une fois la même question a été

12 répétée, donc encore une fois il s'agissait d'une question directrice posée

13 à ce témoin.

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je m'excuse. Il faut que je comprenne

15 cela. Donc la deuxième question était la suivante : "Connaissez-vous

16 d'autres personnes qui ont été détenues au camp des Moudjahidines ?" Bien.

17 Monsieur Mundis.

18 M. MUNDIS : [interprétation] Je ne suis pas d'accord avec

19 Me Robson pour dire qu'il s'agit d'une question directrice.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vais vous dire pourquoi je pense

21 que la Défense pense que c'est une question directrice. C'est parce que

22 vous avancez qu'il y avait d'autres personnes

23 mis à part ces 12 personnes qui ont été détenues au camp, n'est-ce pas ?

24 Est-ce qu'on a eu un témoignage par rapport à cela ?

25 M. MUNDIS : [interprétation] Oui, c'est juste.

26 Q. Monsieur Trivicevic, pendant cette période pendant que vous étiez

27 détenu à l'établissement pénitentiaire à Zenica, y avait-il d'autres

28 personnes de la VRS qui ont été amenées à l'établissement pénitentiaire à

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1 Zenica ?

2 R. Pendant que nous étions à l'établissement pénitentiaire à Zenica, il y

3 avait plusieurs dizaines de membres de la VRS qui ont été capturés à de

4 différents endroits sur le front en Bosnie.

5 Je m'excuse auprès du monsieur à ma gauche parce que je ne l'ai pas

6 vu debout.

7 Q. Monsieur Trivicevic, ces autres personnes, ces plusieurs dizaines

8 de personnes de la VRS qui ont été capturées à différents endroits, de

9 différentes régions sur le front en Bosnie, est-ce que vous leur avez parlé

10 ?

11 R. Nous étions ensemble dans des cellules, et nous parlions de tous les

12 événements survenus sur les lignes du front ainsi que sur les conditions de

13 nos arrestations.

14 Q. Sur la base de vos conversations, savez-vous si quelqu'un parmi ces

15 personnes se serait trouvé dans le même camp des Moudjahidines que vous ?

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Maître Robson.

17 M. ROBSON : [interprétation] Monsieur le Président, mon éminent collègue

18 semble être déterminé d'y arriver, mais moi, encore une fois, j'objecte par

19 rapport à cette question, parce qu'encore une fois il a posé des questions

20 directrices au témoin en essayant de lui suggérer la réponse.

21 M. MUNDIS : [interprétation] Je vais parler de cela d'un autre angle.

22 Maintenant, j'aimerais qu'on montre une séquence vidéo PT06032.

23 [Diffusion de la cassette vidéo]

24 M. MUNDIS : [interprétation]

25 Q. Monsieur Trivicevic, pouvez-vous nous faire part de vos observations au

26 sujet de la séquence vidéo que nous venons de voir ? Qu'est-ce qu'on y voit

27 ? Quelles sont les personnes qu'on voit ? Quel est l'endroit qui a été

28 filmé ici ? Quels sont les lieux que l'on voit sur ces images ?

Page 3644

1 R. Ce groupe d'hommes ce sont des hommes qui se sont constitués

2 prisonniers auprès des Moudjahidines après la chute de Vozuca. Ils sont

3 restés entre leurs mains pendant environ 15 jours, ensuite on les a emmenés

4 à l'établissement pénitentiaire de Zenica, c'est-à-dire au KP Dom de

5 Zenica, où nous-mêmes nous étions. Moi j'ai été remis en liberté avec

6 quelques hommes qui appartenaient à ce groupe.

7 Pendant cette période, on a pu échanger des informations, on a pu se

8 parler. J'ai reconnu Gojko Macanovic, Radivoje Rajcic, Boro Glavic, Drago

9 Gajic et Mile Gojic. Les deux ou trois quatre qui restent et que j'ai vu à

10 l'écran, je ne peux pas vraiment vous dire de qui il s'agit.

11 Ce qu'ils m'ont expliqué à ce moment-là, c'est qu'à un moment donné

12 on les a filmés pour une chaîne de télévision arabe. Ils n'avaient plus

13 rien mangé ni rien bu depuis une semaine avant qu'on les filme. Dans la

14 maison où on les détenait, on les emmenait au premier étage. On les

15 emmenait au premier étage et là on a mis sur la table devant eux des

16 boissons et des dattes ou des noix, ensuite tout ceci a été filmé pour

17 montrer au monde entier à quel point ils traitaient leurs prisonniers

18 humainement.

19 Q. Monsieur Trivicevic, savez-vous où cet enregistrement vidéo a été

20 réalisé ?

21 R. Je ne peux me prononcer avec certitude, mais vu ce qu'ils m'ont

22 raconté eux-mêmes, ceci a été filmé dans une pièce qui se situait au

23 premier étage de la maison où nous-mêmes avions été détenus.

24 Q. Une fois encore, en vous servant du croquis qui se trouve à votre

25 droite, pouvez-vous nous dire quel est le numéro du bâtiment dans lequel

26 vous pensez que cette vidéo a été filmée ?

27 R. Il s'agit du bâtiment numéro 8.

28 M. MUNDIS : [interprétation] Nous demandons le versement au dossier de la

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1 séquence vidéo.

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Robson.

3 M. ROBSON : [interprétation] Nous acceptons le versement au dossier de

4 cette vidéo, mais avec la même réserve que précédemment, c'est-à-dire que

5 nous avons certains doutes quant à l'authenticité de cette vidéo.

6 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bien. Nous allons, bien entendu, si

7 vous n'avez pas d'objections, inutile de vous lever à nouveau. Nous avions

8 bien compris précédemment.

9 La vidéo est versée au dossier. Une cote, s'il vous plaît.

10 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 548, Monsieur le

11 Président.

12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

13 M. MUNDIS : [interprétation] Je souhaiterais demander l'aide de l'huissier,

14 car je voudrais présenter un certain nombre de photographies, photographies

15 de prises de vue qui ont été réalisées à partir de la vidéo de la pièce

16 548.

17 Pendant que l'on place ces photographies sur le rétroprojecteur,

18 j'aimerais demander le versement au dossier du croquis.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le croquis qui a été réalisé par le

20 témoin est versé au dossier. Une cote, s'il vous plaît.

21 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 549, Monsieur le

22 Président.

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

24 M. MUNDIS : [interprétation]

25 Q. Monsieur Trivicevic, excusez par avance de la mauvaise qualité de ces

26 photographies. Ce sont des photographies qui sont extraites de la vidéo que

27 nous allons voir, certaines d'entre elles sont bien floues. Mais je

28 voudrais que vous nous disiez si vous reconnaissez les personnes que l'on

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1 va vous montrer, et si c'est le cas j'aimerais que vous écriviez le nom de

2 personne concernée sur la photo placée sur rétroprojecteur.

3 On va passer en revue ces photos une par une, et si vous reconnaissez les

4 personnes concernées, dites-nous-le et écrivez le nom de l'intéressé sur la

5 photo.

6 R. Il s'agit de Gojko Macanovic.

7 Q. Si vous reconnaissez quelqu'un, dites-nous comment cette personne

8 s'appelle et écrivez ensuite le nom sur la feuille située sur le

9 rétroprojecteur.

10 R. [Le témoin s'exécute]

11 Q. La photographie suivante, s'il vous plaît.

12 R. Il s'agit de Mile Gojic. C'était un prisonnier, un prisonnier qui s'est

13 converti à l'Islam au camp des Moudjahidines. C'est la raison pour laquelle

14 sur cette photo on peut voir qu'il est privilégié, il est privilégié par

15 rapport aux autres prisonniers.

16 Q. Pourriez-vous nous donner des explications supplémentaires en faisant

17 référence également à la vidéo que nous avons visionnée, pourriez-vous

18 expliciter votre réponse, s'il vous plaît ?

19 R. D'après ce que d'autres m'ont dit, le groupe des hommes qui sont

20 arrivés au KP Dom de Zenica, à un moment donné, cet homme a demandé à

21 parler à un des dirigeants des Moudjahidines. Il a décidé de se convertir à

22 l'Islam, et ils ont accepté sa demande. A cause de cela, il a commencé à

23 bénéficier de certains privilèges. Il n'était plus attaché, il ne se

24 trouvait plus dans la même salle que les autres prisonniers. Il les

25 accompagnait pour apprendre toutes les prières, pour prier lui-même. Il

26 mangeait avec eux, il buvait avec eux. Dans la soirée, on le ramenait avec

27 les autres prisonniers pour qu'il passe la nuit avec eux, mais c'était

28 tout. On l'a amené au KP Dom de Zenica avec les autres prisonniers, et à

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1 deux ou même à trois reprises, les Moudjahidines sont venus le voir, ils

2 lui ont amené un exemplaire du Coran avec une reliure dorée, et ils lui ont

3 emmené un fez également.

4 Il a quitté le KP Dom avec moi. Mais avant de partir, un garde a donné

5 lecture de son nom, il a appelé son nom, en disant qu'il allait le libérer,

6 puis il lui a donné le Coran. Puis le garde lui a dit : "Tu n'as pas le

7 courage de ramener ça en Serbie," et l'autre a répondu : "Si, si, j'ai le

8 courage de le faire et je pourrais le faire, je pourrais amener ça en

9 Serbie, mais il n'y aucune raison que je le fasse, parce que ce livre ne

10 m'est plus utile. Il n'a plus d'utilité maintenant."

11 M. MUNDIS : [interprétation] Photographie suivante, s'il vous plaît.

12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Robson.

13 M. ROBSON : [interprétation] La qualité de cette photographie est très

14 médiocre. J'aimerais d'abord que l'on demande au témoin s'il arrive à

15 discerner les traits des personnes que l'on voit à l'écran.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est ce que je m'attendais à vous

17 entendre dire à chaque intervention du témoin, à chaque réponse d'ailleurs

18 du témoin.

19 Monsieur Mundis.

20 M. MUNDIS : [interprétation] Nous allons essayer de déterminer le code

21 horaire à quoi cela correspond sur la vidéo pour ensuite poser la question

22 au témoin en regardant la vidéo.

23 Q. Est-ce que vous reconnaissez quelqu'un sur cette photo ?

24 R. Sur cette photographie, je reconnais l'homme qui se trouve à droite.

25 C'est Gojko Macanovic, celui qu'on avait déjà vu sur la photo précédente.

26 M. MUNDIS : [interprétation] On va peut-être mettre cette photo de côté

27 pour l'instant, on essaiera de trouver le code horaire à quoi elle

28 correspond dans la vidéo. Photographie suivante.

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1 Q. Est-ce que vous reconnaissez sur cette photographie des personnes ?

2 R. L'homme qui est au milieu, c'est Drago Gajic, je le reconnais. Je le

3 reconnais, parce que c'est un homme qui a une chevelure très abondante et

4 une grande moustache.

5 Q. Veuillez, je vous prie, écrire son nom sur la photographie "Drago

6 Gajic."

7 R. [Le témoin s'exécute]

8 Q. Sur cette photographie, est-ce que vous reconnaissez quelqu'un d'autre

9 ?

10 R. Il y a un autre homme que je vois sur cette photographie, mais je ne le

11 reconnais pas. Il y a deux hommes qui se ressemblaient beaucoup, Major

12 Vuckovic et un autre qui s'appelait Major Pecanac. Je ne suis pas très sûr,

13 je préfère ne rien dire.

14 Q. Ce n'est pas grave. Photographie suivante.

15 R. Au premier plan, on voit Mile Gojic et à l'arrière-plan on voit de

16 nouveau Gojko Macanovic.

17 Q. Veuillez, s'il vous plaît, écrire les noms de ces deux personnes sur la

18 photographie.

19 R. [Le témoin s'exécute]

20 Q. Sur la photographie suivante, reconnaissez-vous certaine des personnes

21 qui l'on voit sur cette photographie ?

22 R. C'est vraiment trop flou pour que je puisse me prononcer.

23 M. MUNDIS : [interprétation] Mettons cette photographie de côté et passons

24 à la photographie suivante, s'il vous plaît.

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Encore une fois ici l'homme qui est à droite

26 c'est peut-être Gojko Macanovic, c'est-à-dire celui qu'on a déjà vu

27 précédemment.

28 M. MUNDIS : [interprétation] On va mettre cette photographie de côté.

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1 Vu que le temps qui m'avait été imparti, je crois que j'en resterai là. Je

2 souhaiterais que les photographies qui ont été annotées par le témoin,

3 celles où il a pu reconnaître certaines personnes soient versées au

4 dossier. S'agissant des photographies sur lesquelles il n'a pu reconnaître

5 personne parce qu'elles étaient trop floues, nous les enlevons du jeu de

6 photographies.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Les photographies qui sont extraites

8 de la vidéo numéro 548 sur lesquelles le témoin a pu identifier un certain

9 nombre de personnes sont versées au dossier. Une cote, s'il vous plaît,

10 pour ces photographies-là.

11 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 550.

12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

13 Combien y a-t-il de photographies en tout ? Est-ce que c'est quatre sur un

14 total de sept ou cinq sur un total de sept ?

15 M. MUNDIS : [interprétation] Quatre, je crois. Le greffe peut peut-être

16 nous le faire savoir. Oui, c'est quatre, quatre photographies.

17 Q. Monsieur Trivicevic, je vous remercie d'avoir bien voulu répondre à mes

18 questions.

19 M. MUNDIS : [interprétation] L'Accusation n'a plus de questions à poser au

20 témoin, nous remercions la Chambre de son indulgence et de nous avoir donné

21 plus de temps prévu.

22 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

23 Maître Robson, c'est à vous.

24 M. ROBSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

25 Contre-interrogatoire par M. Robson :

26 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Trivicevic. Je m'appelle Nicholas

27 Robson. Je vais vous poser un certain nombre de questions au nom du général

28 Rasim Delic.

Page 3651

1 Il est exact, Monsieur Trivicevic, que vous avez fait plusieurs

2 déclarations au sujet des événements qui ont suivi l'attaque menée contre

3 Krcevine ?

4 R. Je ne sais pas de quelle déclaration vous parlez, je n'en suis pas sûr.

5 Q. Il est exact que vous avez fait une déclaration à un juge d'instruction

6 pour un tribunal de première instance, le tribunal de Prnjavor et que cette

7 déclaration-là vous l'avez faite en mai 1997 ? Vous en souvenez-vous ?

8 R. Je me souviens que dans le cadre d'une enquête, j'ai fait une

9 déclaration au juge. C'est une enquête qui a suivi la déclaration que j'ai

10 faite aux enquêteurs du Tribunal de La Haye en février 2000. Mais avant, je

11 n'avais fait de déclarations à personne, pas aux juges de Prnjavor en tout

12 cas. Quelqu'un du Tribunal de La Haye, du bureau de Belgrade ou du TPIY est

13 venu me voir.

14 Un jour - je ne me souviens pas exactement de la date exacte - mais en tout

15 cas on était à Belgrade --

16 Q. Vous souvenez donc avoir fait des déclarations à des enquêteurs du

17 bureau du Procureur du Tribunal pénal international, mais vous ne vous

18 souvenez pas avoir fait de déclarations en 1997 à un juge d'instruction.

19 Vous ai-je bien compris ?

20 R. Les juges d'instruction n'étaient pas de Prnjavor. C'était le bureau

21 chargé de la coopération avec le Tribunal de La Haye qui se trouve à

22 Belgrade. La déclaration a été recueillie à Prnjavor.

23 Q. On va revenir à cette déclaration que vous avez faite à un juge

24 d'instruction plus tard. Mais premièrement, vous avez dit qu'en 1991 vous

25 étiez dans les rangs de la JNA. Où cela se déroulait-il ?

26 R. Non, ce n'est pas en 1991 que j'ai fait mon service militaire. J'ai

27 commencé mon service militaire à partir du

28 15 décembre 1990, et j'étais à la caserne de Bileca.

Page 3652

1 Q. Veuillez préciser aux Juges de la Chambre où se trouve la caserne de

2 Bileca.

3 R. La caserne de Bileca se trouve à Bileca, dans la ville de Bileca.

4 Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise de plus ? Ça se trouve en

5 Republika Srpska. D'ailleurs, c'est une ville qui est restée sur le

6 territoire de la Republika Srpska même après la guerre.

7 Q. Dans votre déposition, vous nous avez expliqué qu'en juillet 1995 vous

8 aviez été infirmier au sein du 3e Bataillon de la 1ère Brigade d'infanterie

9 légère, et j'aimerais vous interroger au sujet des événements qui ont eu

10 lieu en juillet.

11 Parlons de l'attaque qui a eu lieu le 21 juillet 1995. Conviendrez-vous

12 avec moi qu'au moment où cette attaque a eu lieu, vous ne saviez absolument

13 pas quelles étaient les unités ou l'unité qui vous attaquait, vous ne le

14 saviez pas ? Vous n'en aviez aucune idée ?

15 R. C'est exact. C'était de l'autre côté de la ligne, de l'autre côté de la

16 colline. On ne savait pas qui se trouvait à cet endroit. On l'ignorait

17 complètement. Mais sur la base des renseignements que nous avons reçus, qui

18 nous ont été fournis par nos services de Renseignements et de ce qui s'est

19 passé le 27 mai, des informations reçues le 27 mai, nous avons à ce moment-

20 là su que c'était des Moudjahidines. Il était déjà arrivé que des

21 Moudjahidines soient tués dans le cadre d'attaques et que leurs corps

22 restent de notre côté, donc on avait déjà trouvé les corps de Moudjahidines

23 décédés.

24 Q. Mais il est vrai, n'est-ce pas, que lorsque cette attaque a eu lieu le

25 21 juillet, au départ vous ne saviez absolument pas qui vous attaquaient,

26 vous ne saviez pas que c'était les Moudjahidines ? Est-ce que vous le

27 reconnaissez ?

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Est-ce que ce n'est pas exactement la

Page 3653

1 même question ou une question qui ressemble beaucoup à la question que vous

2 avez posée précédemment au témoin ? D'abord vous avez parlé d'unités,

3 maintenant vous parlez des Moudjahidines. Je ne suis pas sûr de bien suivre

4 la logique de vos questions.

5 M. ROBSON : [interprétation]

6 Q. Au cours de votre déposition, Monsieur le Témoin, vous nous avez dit

7 que l'attaque était menée par l'ABiH, dirigée ou avec à sa tête le

8 Détachement El Moudjahidine. Le moment où cette attaque a eu lieu, vous ne

9 saviez pas que c'était une attaque qui était menée par l'ABiH avec à la

10 tête de l'attaque, en fer de lance, le Détachement El Moudjahid.

11 R. A ce moment-là ou juste avant, il y a eu des activités très visibles de

12 la part de l'ABiH sur cette partie du front avec le Détachement El

13 Moudjahid. Nous ne savions pas exactement qui était en train de nous

14 attaquer, mais nous sommes partis du principe que c'était le Détachement El

15 Moudjahidine.

16 Q. Ultérieurement, est-ce que quelqu'un vous a dit que l'attaque avait été

17 menée par le Détachement El Moudjahidine ? C'est quelque chose que vous ne

18 saviez pas au moment où l'attaque s'est produite, n'est-ce pas ?

19 R. Je ne le savais pas, mais je ne le savais pas pendant une demi-heure,

20 pendant la première demi-heure de l'attaque, puis après je m'en suis rendu

21 compte.

22 Q. Pendant les 30 premières minutes de l'attaque, vous ne le saviez pas.

23 Vous nous avez expliqué que vous avez été fait prisonnier par une dizaine

24 de Moudjahidines. Parmi ces Moudjahidines, il y avait deux ou trois

25 Moudjahidines qui venaient de la région, n'est-ce pas, qui était du coin ?

26 R. C'est exact.

27 Q. J'aimerais que nous précisions une chose ensemble. Avant de voir cette

28 dizaine de Moudjahidines, vous n'aviez pas assisté aux opérations de cette

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1 offensive, vous n'avez rien vu, n'est-ce pas ?

2 R. Non, je ne comprends pas très bien votre question. Est-ce que vous

3 pourriez me dire précisément ce que vous attendez de moi, parce que je ne

4 comprends pas bien. Je veux essayer de faire de mon mieux.

5 Q. Bien sûr. N'est-ce pas, vous avez, n'est-ce pas, été réveillé par des

6 tirs ?

7 R. C'est exact.

8 Q. Vous avez dit que vous avez commencé à voir arriver des blessés à

9 l'antenne médicale. Vous vous êtes occupé d'eux ?

10 R. Exact. Vous avez tout à fait raison.

11 Q. Donc quand vous avez quitté l'antenne chirurgicale ou l'antenne

12 médicale pour la première fois, quand vous êtes sorti, c'est à ce moment-là

13 que vous vous êtes retrouvé nez à nez avec ce groupe de Moudjahidines qui

14 se tenait là debout ?

15 R. Non, non. Ce n'est pas tout à fait ça. Si vous avez un peu de temps, je

16 me ferai un plaisir de vous donner des explications et de préciser ce qu'il

17 en est.

18 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] On y reviendra plus tard. Ça vous va,

19 Maître Robson ?

20 M. ROBSON : [interprétation] Oui.

21 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pause maintenant jusqu'à 17 heures 45.

22 --- L'audience est suspendue à 17 heures 16.

23 --- L'audience est reprise à 17 heures 46.

24 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Robson, c'est à vous.

25 M. ROBSON : [interprétation] Je vais reprendre. Je vais essayer de parler

26 le plus lentement possible. Si je vais trop vite,

27 faites-le-moi savoir.

28 Q. Monsieur Trivicevic, pouvons-nous résumer un peu ce que vous avez dit

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1 lors de votre déposition et corrigez-moi si je me trompe.

2 Le matin du 21 juillet 1995, vous avez été réveillé par des tirs ?

3 R. C'est cela.

4 Q. Peu de temps après, des blessés ont commencé à venir à l'antenne

5 médicale ?

6 R. Oui.

7 Q. A un moment, vous êtes sorti et là vous avez vu une colonne de gens et

8 vous vous êtes dit qu'il s'agissait de personnes appartenant à l'armée de

9 la Republika Srpska ?

10 R. Oui. C'est cela.

11 Q. Vous êtes re-rentré, à nouveau, dans l'antenne médicale, et à un moment

12 ou à un autre, pas trop longtemps après, vous en êtes sorti à nouveau et

13 vous êtes retrouvé nez à nez avec un groupe de Moudjahidines qui se tenait

14 là ?

15 R. Non, ce n'est pas tout à fait cela. Je ne suis pas rerentré [phon] dans

16 la pièce où nous soignions les blessés. Je suis rentré dans la pièce qui

17 était à l'étage, là où nous dormions, là où il y avait nos effets

18 personnels et là où il y a avait la liste des membres du bataillon qui

19 étaient enregistrés quand ils étaient blessés, ou qui étaient enregistrés

20 parce qu'ils étaient ailleurs. Peu de temps après, le Dr Sikanic et moi-

21 même sommes rentrés pour récupérer ses effets.

22 Lorsque nous avons quitté ces pièces - c'est un seul bâtiment - il y

23 avait au rez-de-chaussée l'endroit où on soignait les gens et à l'étage la

24 pièce où on avait nos effets. Quand je suis sorti, j'ai vu un groupe, et

25 c'est là que j'ai clairement compris qu'il s'agissait d'un groupe de

26 Moudjahidines. Ils étaient environ à 30 mètres de moi.

27 Q. Très bien. Vous nous avez expliqué comment vous vous êtes rendus, vous

28 et le médecin, et à ce moment-là les Moudjahidines vous ont emmenés, et au

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1 cours de ce trajet avec les Moudjahidines, vous vous êtes arrêtés à

2 plusieurs reprises; c'est bien cela ?

3 R. Oui.

4 Q. Vous nous avez expliqué comment vous vous êtes retrouvés à Livade, dans

5 le village de Livade. Voici ma question : était-ce que vous nous avez dit,

6 il était impossible pour vous de savoir que le Détachement El Moudjahidine

7 était le fer de lance de l'attaque de l'ABiH ce jour-là, n'est-ce pas ?

8 R. Au cours de ce trajet, puisqu'on va l'appeler un trajet, d'un côté de

9 la ligne et de l'autre côté de la ligne, les Moudjahidines qui venaient

10 avec nous essayaient de savoir combien nous étions. Ceux qui parlaient

11 notre langue, ils nous disaient qu'il y avait 62 participants, des

12 personnes qui appartenaient au Détachement El Moudjahidine. C'est basé sur

13 ça, sur les connexions radio.

14 Q. Il y a quelques minutes vous dites "dans la mesure vous arrivez à

15 parler en notre langue," puisque vous avez dit que parmi les Moudjahidines,

16 il y avait quand même des Bosniaques qui parlaient votre langue ?

17 R. Oui, en effet, c'est vrai, et j'ai d'ailleurs dit dans ma déclaration

18 que cinq d'entre nous sont rentrés. Donc il y avait trois Moudjahidines. Il

19 y avait un devant moi, ensuite moi, ensuite un autre Moudjahidine dans le

20 milieu, ensuite le Dr Sikanic, et ensuite un dernier Moudjahidine qui

21 fermait la file. Ils venaient tous du Détachement El Moudjahidine. Ils

22 étaient tous Arabes. J'ai parlé d'un des Bosniaques qui est revenu du front

23 à la maison, parce qu'il était blessé et j'ai pansé d'ailleurs sa blessure,

24 ensuite il a repris son chemin.

25 Q. J'aimerais vous montrer un document, s'il vous plaît. Il s'agit de la

26 pièce D510. Pourrions-nous, s'il vous plaît, regarder les premières pages,

27 à la fois dans la version anglaise et dans la version en B/C/S. Pourrions-

28 nous regarder le haut de ces deux documents.

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1 Monsieur Trivicevic, conviendrez-vous avec moi que ce document est intitulé

2 : "Enregistrement d'une déclaration de témoin" ?

3 R. Oui.

4 Q. Conviendrez-vous avec moi que ce document a été rédigé le 22 mai 1997

5 devant le juge d'instruction de la cour de première instance de Prnjavor,

6 lors d'une poursuite au pénal contre X ?

7 R. Oui, en effet.

8 Q. On voit aussi que le témoin ici est Velibor Trivicevic, n'est-ce pas ?

9 R. Oui.

10 M. ROBSON : [interprétation] Pourrions-nous regarder maintenant le bas de

11 la pièce en B/C/S.

12 Q. A la dernière ligne, Monsieur Trivicevic, vous serez d'accord avec moi

13 pour dire qu'il s'agit de votre signature, n'est-ce pas ?

14 R. Oui. C'est ma signature.

15 Q. Après vous avoir montré le document, est-ce que vous vous souvenez

16 avoir fait cette déposition devant un juge d'instruction au tribunal de

17 première instance de Prnjavor en mai 1997 ?

18 R. La seule déclaration dont je me souvienne - et ça je le maintiens -

19 c'est celle que j'ai faite devant les enquêteurs du bureau du Procureur à

20 l'antenne de Belgrade. C'était Mira Andjelic qui prenait la déclaration en

21 l'espèce. Ça, je me souviens c'était en effet Mira Andjelic, mais je me

22 souviens pas du tout qu'il y ait eu un juge d'instruction présent, ce

23 fameux Savo Music.

24 Q. Expliquez-nous ce qu'est ce document. Puisque c'est un document

25 officiel qui porte votre signature, pouvez-vous nous expliquer comment il

26 se fait que ce document existe ?

27 R. Je n'en sais rien. Je ne peux pas l'expliquer.

28 Q. Qu'en est-il de ce qui est consigné sur le document ? On voit votre

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1 nom, on voit le nom de votre père, "Mirko." C'est vraiment le nom de votre

2 père ? Dites-le-moi.

3 R. Les informations sont correctes, en effet.

4 Q. Ça, vous dites que c'est votre signature ? Vous conviendrez avec moi

5 que c'est votre signature ?

6 R. En effet.

7 Q. Vous conviendrez avec moi que vous avez bien signé cette déclaration à

8 un moment ou à un autre après avoir fait une déclaration devant un juge

9 d'instruction ?

10 R. Oui, en effet, j'ai bel et bien signé ce document. On le voit bien sur

11 le document qui est à l'écran, mais je ne me souviens absolument pas ce 22

12 mai et ce M. Savo Music. Je ne me souviens pas du tout avoir fait une

13 déclaration de ce type à qui que ce soit.

14 Q. Donc vous acceptez quand même avoir signé cette déposition, mais vous

15 ne vous souvenez pas avoir fait la déposition et de l'avoir signée par la

16 suite ?

17 R. C'est ma signature, c'est sûr, mais pour ce qui du document et de la

18 teneur du document, je ne m'en souviens absolument pas. Je n'ai aucune idée

19 de ce que cela peut bien être. Je ne sais pas du tout quelle est l'affaire

20 sur laquelle porte ce document.

21 Q. Très bien. Nous allons étudier un passage de cette déposition. A la

22 page 3 de la version en anglais, et en B/C/S, je pense que c'est à la page

23 2.

24 Pour ce qui est de la version anglaise, ce qui m'intéresse c'est le

25 troisième paragraphe, en haut de la page.

26 Voyez-vous le paragraphe où il est écrit, et je cite : "A environ 4 heures

27 moins 10, le 21 juillet 1995, les forces armées musulmanes ont lancé une

28 attaque très puissante contre notre ligne et ont rapidement percé la

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1 ligne."

2 Le voyez-vous ?

3 R. Oui.

4 Q. Un peu plus bas, vous dites : "Nous avons été capturés par un groupe de

5 12 Moudjahidines."

6 Vous voyez ce passage ?

7 R. Oui.

8 Q. Donc vous conviendrez avec moi que lorsque vous avez parlé à ce juge

9 d'instruction et que vous avez expliqué ce qui vous était arrivé ce jour-

10 là, vous lui avez dit que l'attaque avait été lancée par les forces armées

11 musulmanes et vous n'avez absolument pas parlé du Détachement El

12 Moudjahidine qui aurait été le fer de lance de cette attaque ?

13 R. Je ne sais pas ce que vous voulez dire. Je ne comprends pas votre

14 question. Elle n'est pas claire. Si un groupe de 12 Moudjahidines est

15 mentionné ici dans ce texte, il est clair de ce fait que le groupe qui nous

16 a attaqués était des Moudjahidines et c'est d'ailleurs ce qui est écrit

17 dans cette déclaration. Je le confirme, je le maintiens dans toutes mes

18 dépositions que j'ai faites, celle qu'on voit ici, celle que j'ai faite

19 aussi devant le Procureur de ce Tribunal.

20 Q. Oui, je suis d'accord avec vous. Je ne conteste pas le fait que vous

21 étiez capturé par des Moudjahidines, mais je vous dis qu'en 1997, quand

22 vous avez fait cette déposition devant le juge d'instruction, dans aucun

23 cas, vous n'avez jamais dit que le Détachement El Moudjahidine avait été

24 impliqué dans votre capture. Etes-vous d'accord avec moi ?

25 R. Non. Non, pas du tout, parce que j'ai dit très clairement qu'un groupe

26 de 12 Moudjahidines m'ont capturé. Ils étaient Moudjahidines. Cette fois-

27 ci, je n'ai pas dit "12", parce que ça fait quand même 12 ans que j'ai été

28 capturé, donc cette fois-ci je vous ai dit qu'il y en avait environ 10,

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1 aujourd'hui. Je suis d'accord qu'il y a une petite différence entre 10 et

2 12, mais ce que je confirme et ce que je refuse que l'on conteste, c'est

3 que j'ai été absolument capturé par un groupe de Moudjahidines.

4 Q. C'est à un moment ou à un autre après 1997 que quelqu'un vous a dit que

5 ces Moudjahidines étaient appelés le "Détachement El Moudjahidine" ?

6 R. Non, ça, je ne suis pas d'accord du tout. Non, non, je ne suis

7 absolument pas d'accord.

8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je ne comprends pas du tout le

9 raisonnement de votre question, parce que dans la phrase que vous avez lue

10 de la déposition qu'il a faite en 1997 au juge d'instruction : "Nous avons

11 été capturés par un groupe de 12 Moudjahidines qui appartenaient au

12 Détachement El Moudjahid des forces armées musulmanes."

13 M. ROBSON : [interprétation] Je vais passer à autre chose. Je voulais

14 savoir qui était le fer de lance de quoi, qui dirigeait quoi.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Certes, certes, mais vous avez dit :

16 "Vous êtes d'accord pour nous dire que c'est uniquement après 1997 que

17 quelqu'un vous a dit que ces Moudjahidines faisaient partie du 'Détachement

18 El Moudjahid.'" Je ne comprends pas votre question. Il a clairement dit

19 dans sa déposition qu'ils faisaient partie du Détachement El Moudjahid.

20 C'est écrit noir sur blanc dans la déposition.

21 M. ROBSON : [interprétation]

22 Q. Monsieur Trivicevic, conviendriez-vous avec moi que dans cette

23 déclaration qui date d'août 1997, dans la page que nous avons à l'écran,

24 vous ne faites aucune mention du Détachement El Moudjahidine ?

25 R. Non, je ne suis pas d'accord avec vous. Le Détachement El Moudjahidine

26 est écrit noir sur blanc. Je vous l'ai répété. Il y est écrit un groupe de

27 12 Moudjahidines qui appartenaient au Détachement El Moudjahid. Ils m'ont

28 capturé. Ils ont fait de rites. Ils étaient extrêmement fiers de cela. Ils

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1 nous ont demandé de nous convertir à l'Islam. C'était ce groupe, c'est

2 certain. Je le sais. C'est l'El Moudjahid. D'ailleurs, on l'a vécu dans

3 notre propre chair pendant qu'on était captif et détenu par ce groupe.

4 Q. Sur la page où est-il écrit le "Détachement El Moudjahidine," pouvez-

5 vous me le trouver ?

6 R. J'aurais dû dire le Détachement El Moudjahidine qui appartenait au 3e

7 Groupe d'assaut du 3e Corps, peut-être, et cetera, et cetera, comme ça,

8 j'aurais dit les choses que vous voulez entendre. Mais le groupe El

9 Moudjahidine était un corps. La

10 1ère Brigade d'infanterie légère de Prnjavor était ce qu'elle était. J'ai

11 été capturé en tant que membre de la 3e Brigade légère de Prnjavor. Le

12 groupe de Moudjahidines qui m'a capturé, c'était des Moudjahidines. Ils

13 faisaient partie de ce détachement. Il n'y avait pas tout le détachement

14 évidemment pour ce combat. Ils ne sont pas tous jetés sur nous.

15 Mme VIDOVIC : [interprétation] Je crois que j'ai compris le problème.

16 Je viens de remarquer quelque chose. A l'écran, vous n'avez pas la

17 bonne traduction. Au lieu de regarder la traduction en bosniaque, on

18 regarde autre chose que ce que vous avez sous les yeux.

19 J'aimerais demander au témoin de lire à haute voix la phrase -- enfin, je

20 vais le faire parce qu'il faut parler bosnien pour cela.

21 Dans l'anglais, il est écrit : "Nous avons été capturés par un groupe de 12

22 Moudjahidines qui étaient membres de l'unité Moudjahidines." Il n'est écrit

23 nulle part dans la version en B/C/S, "le Détachement El Moudjahidine."

24 C'est pour cela qu'il y a ce malentendu entre mon collègue et le témoin.

25 C'est un problème de traduction écrite.

26 Pouvez-vous demander au témoin ?

27 Mme LE JUGE LATTANZI : Si je vous comprends bien, c'est une unité. Donc,

28 détachement, unité, ça veut dire cela.

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1 M. ROBSON : [interprétation]

2 Q. Je vais vous reposer la question, Monsieur Trivicevic. Seriez-vous

3 d'accord avec moi pour dire que dans la déclaration qui est sous vos yeux,

4 il n'est fait référence nulle part au Détachement El Moudjahidine ?

5 R. Très clairement il est écrit un groupe de 12 Moudjahidines, qui

6 appartenaient à l'unité El Moudjahidine, fait partie des forces armées

7 musulmanes. C'est ça qui est écrit en B/C/S, dans ma version. Je ne sais

8 pas quel était le nom exact du groupe. Je n'en sais rien. Je ne le sais

9 pas. Je ne sais pas si ce nom était le nom de leur unité. Cela dit, je sais

10 ce qu'ils étaient quand même. Et maintenant vous allez me demander de vous

11 donner un ordre, de vous fournir un ordre où il serait écrit ce que c'est

12 l'unité ou le détachement, ceci ou cela, mais je ne peux pas le faire.

13 Q. Vous nous avez dit que vous ne saviez pas quel était le nom de l'unité.

14 Dans la déclaration que vous avez faite au juge d'instruction,

15 conviendriez-vous avez moi qu'il n'est pas écrit noir sur blanc que c'était

16 les Moudjahidines qui dirigeaient l'attaque, qui étaient le fer de lance de

17 l'attaque ?

18 R. Non, je ne suis pas d'accord. Les Moudjahidines étaient une super

19 force. Ils étaient 62 participants dans leur réseau radio. Chaque groupe

20 possédait une radio couvrant un certain nombre de soldats. Eux-mêmes, ils

21 nous ont dit que ce jour-là, il y avait 64 participants dans leur réseau

22 radio. Il n'y a pas tout le groupe, bien sûr, qui est venu pour nous

23 arrêter, pour venir arrêter le Dr Sikanic et moi.

24 Q. Vous venez de me dire qu'il y avait 62 participants en réseau radio,

25 chaque groupe avait une radio en tant que telle, mais tout ceci n'est pas

26 contenu dans la déposition que vous avez faite au juge d'instruction,

27 n'est-ce pas ?

28 R. Oui, c'est vrai, ce n'est pas écrit dans la déposition, c'est vrai,

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1 mais ici, j'ai fait une déposition extrêmement brève. J'aurais pu donner

2 beaucoup plus de détails, mais il y avait beaucoup de contraintes.

3 Q. Mais vous vous souvenez maintenant avoir fait cette déposition, cela

4 dit ?

5 R. Ce que je viens de vous dire ne porte pas sur la déclaration qui est

6 sous les yeux, mais à la déposition que j'ai faite ici en l'espèce, qui a

7 commencé au début d'après-midi.

8 Q. Très bien. Passons à autre chose.

9 Vous nous avez dit que lors d'une de vos étapes vers Livade, vous êtes

10 arrivé à une antenne médicale, mais une antenne médicale cette fois-ci du

11 côté moudjahidine. Vous nous avez dit --

12 R. Oui.

13 Q. Vous nous avez dit qu'il y avait une note écrite disant : "C'est la

14 fin des Chetniks. Ici s'arrêtent les Chetniks." Vous en souvenez ?

15 R. Oui.

16 Q. Quelle langue est-ce que ces mots étaient écrits ?

17 R. En serbe, bosniaque, bosnien, B/C/S, enfin, comme vous voulez. En tout

18 cas, c'était quelque chose que je pouvais comprendre.

19 Q. Ensuite, vous avez été emmené au village de Livade. Pouvez-vous dire

20 quelle était la distance entre Livade et votre propre antenne médicale ?

21 R. Je ne sais pas exactement à quoi vous faites référence. Vous voulez

22 savoir la distance entre Livade et l'antenne médicale des Moudjahidines, ou

23 l'endroit où j'ai été capturé par les

24 Moudjahidines ?

25 Q. Je voulais parler de la distance entre Livade et l'antenne médicale de

26 l'armée de la Republika Srpska où vous vous teniez, où vous avez été

27 capturé.

28 R. La distance de cette antenne médicale jusqu'à l'antenne médicale des

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1 Moudjahidines était, à mon avis, 1,5 kilomètre ou peut-être 2. Maintenant,

2 de l'antenne médicale jusqu'à - on était en tout-terrain, on avait un

3 vieux véhicule tout-terrain et ça nous a pris environ dix à 20 minutes.

4 Mais je ne peux pas vous donner la distance en kilomètres.

5 Q. Vous nous dites donc que vous avez été transportés à bord d'un véhicule

6 de l'antenne médicale des Moudjahidine à Livade ?

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je suis désolé, mais là vous

8 m'embrouillez complètement. Je ne sais plus où nous en sommes. Reprenons.

9 Je croyais que vous parliez de l'endroit où le témoin a été capturé,

10 jusqu'à l'antenne médicale des Moudjahidines. C'est la distance que vous

11 essayer d'établir ?

12 M. ROBSON : [interprétation] Absolument pas. J'essaie de savoir quelle est

13 la distance approximative entre l'antenne médicale de la Republika Srpska

14 et Livade, le village de Livade.

15 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc c'est de l'endroit où il a été

16 capturé jusqu'à Livade; c'est bien cela ? Donc il y a environ un kilomètre

17 et demi à 2 kilomètres; c'est ça ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous assure, c'est vraiment très confus. Je

19 ne comprends rien.

20 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je pense que la question que vous pose

21 M. Robson est la suivante : de l'endroit où vous êtes capturé jusqu'au --

22 donc, estimez la distance entre l'antenne médicale de la VRS où vous avez

23 été arrêtés, et le village de Livade.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas vous donner une réponse exacte,

25 parce que nous avons été pris d'abord de notre antenne médicale à pied

26 jusqu'à l'antenne médicale des Moudjahidines, ensuite de l'antenne médicale

27 des Moudjahidines on a été emmené en véhicule, en 4x4, jusqu'à Livade.

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, c'est ce que j'avais cru

Page 3666

1 comprendre.

2 M. ROBSON : [interprétation]

3 Q. Donc, vous ne pouvez pas estimer la distance; c'est cela ?

4 R. Non.

5 Q. Avant de vous poser des questions sur le village de Livade, vous nous

6 avez dit que l'un des endroits où vous vous êtes arrêtés était l'endroit où

7 vous avez vu une tranchée dans laquelle se trouvait un soldat dont la tête

8 a été coupée, n'est-ce pas ?

9 R. Non, ce n'était pas comme cela. Nous nous sommes arrêtés à côté d'une

10 tombe, et à côté de cette tombe ou de cette tranchée se trouvait la tête

11 coupée, et non pas dans la tranchée ou dans la tombe.

12 Q. Merci. Une fois arrivé au village de Livade, avez-vous reconnu cet

13 endroit ou quelqu'un vous a-t-il dit qu'il s'agit du village de Livade ?

14 R. Avant ce moment-là, je ne me suis jamais rendu au village de Livade. Je

15 ne pouvais pas le reconnaître, absolument pas. Mais en écoutant des

16 Moudjahidines se parler entre eux, j'ai appris qu'il s'agissait du village

17 de Livade, parce qu'eux ils avaient un dictionnaire sur eux, ils essayaient

18 d'apprendre la langue bosnienne, entre autres. Ils ont dit, par exemple :

19 "J'étais au village de Livade, je vais aller au village de Livade, je me

20 trouve au village de Livade," et cetera. Donc ils prononçaient de telles

21 phrases et c'est comme cela, ils ont essayé d'apprendre la langue serbe.

22 C'est comme cela que j'ai appris qu'il s'agissait du village de Livade.

23 Q. Une fois arrivés au village, il est vrai n'est-ce pas, qu'un groupe de

24 villageois vous a encerclés et a commencé à vous attaquer, vous et le

25 médecin, n'est-ce pas ?

26 R. Oui, c'est vrai.

27 Q. Un des habitants du village a commencé à vous donner des coups de pied,

28 n'est-ce pas ?

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1 R. Non, il n'a pas commencé à me donner des coups de pied. Il m'a donné un

2 seul coup de pied à l'œil gauche.

3 Q. Et l'un des Moudjahidines qui était avec vous était en colère après

4 avoir vu cela. Il a demandé au villageois pourquoi ils étaient en train de

5 vous passer à tabac.

6 R. Il a demandé à cette personne âgée pourquoi - il s'agissait d'un homme

7 âgé - pourquoi il a fait cela.

8 Q. Est-ce que le nom de ce Moudjahidines était "Habib" ?

9 R. Oui.

10 Q. Après il vous a emmené, pour vous écarter des villageois qui étaient en

11 train de vous attaquer, et vous emmené dans l'entrepôt se trouvant au

12 village ?

13 R. Oui.

14 Q. Vous nous avez dit que dans l'entrepôt, il y avait entre dix et 11

15 Musulmans qui travaillaient pour l'armée de la Republika Srpska. Vous vous

16 souvenez d'avoir dit cela ?

17 R. Oui.

18 Q. Est-ce qu'on peut dire que ces Musulmans avaient été utilisés en tant

19 que bouclier humain lors de l'attaque et que c'était ça la raison pour

20 laquelle ils se trouvaient avec l'armée de la Republika Srpska ?

21 R. Pour ce qui est du bouclier humain, ce n'est pas une question qui

22 relève de ma compétence, mais pour ce qui est du bouclier humain, ils n'ont

23 pas été utilisés pour constituer le bouclier humain, parce qu'ils se

24 trouvaient dans une maison qui se trouvait tout près du commandement du 2e

25 Bataillon, peut-être même

26 1 kilomètre derrière les lignes de front.

27 Q. Moi, je parle de la fin pour laquelle ils ont été utilisés avant d'être

28 libérés par les Moudjahidines.

Page 3668

1 R. Non, ils n'ont pas été utilisés pour constituer le bouclier humain,

2 mais plutôt pour creuser des tranchées, pour emmener des vivres et d'autres

3 corvées qui devaient être effectuées sur la ligne du front. Ils n'ont pas

4 été utilisés pour constituer le bouclier humain. Mais je ne vois pas le

5 lien entre moi et le contenu de votre question.

6 Q. Alors, la fin dont vous nous avez parlé pourquoi ces Musulmans ont été

7 utilisés, seriez-vous d'accord pour dire que ces Musulmans ont été forcés

8 d'effectuer ces corvées ?

9 R. Vous voulez que je vous dise la vérité sur moi-même ? Moi aussi, j'ai

10 été forcé de me rendre sur le front. Eux, ils ont refusé à se présenter

11 après l'appel à la mobilisation, et comme c'était l'état de guerre, ils

12 devaient être actifs ou avoir une activité. Ils ont refusé de prendre le

13 fusil, d'aller dans les tranchées. Ils ont été mobilisés pour effectuer ces

14 autres travaux.

15 Et moi, je ne me vois pas du tout. Cela fait l'objet d'une autre

16 enquête, probablement.

17 Q. Je vais poser des questions concernant vos expériences, Monsieur

18 Trivicevic. Vous nous avez dit qu'à un moment donné, on vous a emmené dans

19 une maison à deux étages, et après une certaine période de temps, le

20 troisième membre de l'armée est arrivé, Igor Guljevatej. Vous rappelez

21 avoir dit cela ?

22 R. Non, je ne me rappelle pas avoir dit cela.

23 Q. Bien. Vous nous avez dit dans votre témoignage qu'à un moment donné, on

24 vous a emmené de l'entrepôt dans une maison qui avait deux étages. Vous

25 vous souvenez de cela ?

26 R. Oui.

27 Q. Vous nous avez expliqué comment on vous donnait de la nourriture dans

28 cette maison ?

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1 R. Oui.

2 Q. Et un moment donné, un Moudjahidine est entré dans la maison en

3 apportant la tête de quelqu'un que vous avez reconnu comme étant Momir

4 Mitrovic, n'est-ce pas ?

5 R. Oui, c'est exact. Mais maintenant on s'éloigne de la question que vous

6 m'avez posée concernant la période avant l'entrée dans la maison, à savoir

7 si Igor Guljevatej a été emmené dans cette maison. Non. Il a été emmené

8 dans l'entrepôt avant que deux aient été emmenés à l'étage qui avait --

9 dans la maison qui avait un rez-de-chaussée et deux étages et non pas trois

10 étages. En fait, la maison avait le rez-de-chaussée et un étage. C'est

11 tout.

12 Q. Voilà. Il est arrivé à l'entrepôt. Mais maintenant, j'aimerais en

13 savoir plus sur les événements survenus dans la maison. Vous nous avez dit

14 qu'un moment donné, des Moudjahidines sont arrivés en apportant une

15 deuxième tête. Ai-je raison pour dire que vous n'aviez pas reconnu cette

16 personne, vous ne saviez pas à qui appartenait cette tête ?

17 R. C'est exact.

18 Q. Vous nous avez dit que plus tard vous avez rencontré une femme dont le

19 frère avait disparu ?

20 R. Oui, mais ce n'était pas de cette façon-là que j'ai raconté cela.

21 Q. Quand avez-vous rencontré cette femme qui vous a dit que son frère

22 avait disparu ?

23 R. Cette femme est arrivée chez moi au centre de santé de Prnjavor au

24 moment où j'ai commencé à y travailler. Elle a apporté une photo et sur

25 cette photo j'ai reconnu la personne qu'elle cherchait.

26 Q. Est-ce que je peux vous dire que vous ne pouvez pas être sûr que la

27 tête que vous avez vue aurait appartenu au frère de cette femme ?

28 R. Vous pouvez le dire, mais moi, je n'accepterai pas cela.

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1 Q. Bien. C'était le 21 juillet, n'est-ce pas, c'est la date à laquelle

2 vous avez vu ces deux têtes ? C'était le jour de l'attaque, n'est-ce pas ?

3 R. Oui.

4 Q. Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que le village de Livade ne se

5 trouvait pas très loin de la région où les combats ont eu lieu ?

6 R. Oui, je suis d'accord avec vous pour dire cela. Ce n'était pas loin,

7 parce que le 22, à l'aube, les obus ont commencé à tomber de notre côté,

8 donc ces endroits se trouvaient à la portée des mortiers de notre brigade.

9 Q. Vous n'avez vu aucun de ces deux hommes le jour avant, précédent leur

10 meurtre, n'est-ce pas ?

11 R. Oui.

12 Q. Ils n'ont pas été emmenés au village avec vous et le

13 Dr Sikanic à bord du même véhicule, n'est-ce pas ?

14 R. Oui.

15 Q. Et vous ne les avez pas vus dans l'entrepôt ni dans la maison qui a un

16 niveau ?

17 R. Dans la maison à un niveau, je n'ai vu que leurs têtes. Deux têtes

18 coupées.

19 Q. Pendant votre témoignage, vous nous avez dit que vous avez vu un soldat

20 serbe qui se trouvait au sol, à côté de la tranchée et qui était décapité.

21 Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que ces deux hommes auraient pu

22 être tués sur le champ de bataille. Peut-être pour vous intimider, leurs

23 têtes qui ont été coupées ont été emmenées dans l'entrepôt ?

24 R. Je ne sais pas de quoi vous parlez. Encore une fois, vous me parlez

25 maintenant de la tranchée à côté de laquelle il y avait un cadavre

26 décapité, ensuite vous parlez de deux têtes qui ont été emmenées dans

27 l'entrepôt. Ce n'est pas exact.

28 Le cadavre décapité à côté de la tranchée --

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1 Q. Un peu plus tôt, ce jour-là, vous avez vu un cadavre décapité se

2 trouvant à côté de la tranchée, n'est-ce pas ?

3 R. Oui.

4 Q. Et il est exact, n'est-ce pas, que ces deux têtes qui ont été emmenées

5 dans l'entrepôt, que ces têtes auraient pu être coupées également au champ

6 de bataille et emmenées dans l'entrepôt où vous vous trouviez. Seriez-vous

7 d'accord avec moi pour dire cela ?

8 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je m'excuse, Maître Robson, mais vous

9 demandez au témoin de se lancer dans des conjectures. Vous ne posez pas des

10 questions portant sur les faits. A moins que vous ne lui demandiez à dire

11 que c'est ce qui s'est passé et que c'est le fait que vous voulez établir.

12 M. ROBSON : [interprétation] Monsieur le Président, il a donné une

13 explication lors de l'interrogatoire principal sur la base de laquelle la

14 Chambre de première instance pourrait déduire certains faits. Et moi,

15 j'essaie tout simplement d'aller plus en détail pour ce qui est de ce que

16 le témoin a dit à la Chambre plus tôt. Je crois que je peux donc lui poser

17 de telles questions.

18 Peut-être que je devrais me concentrer plus sur cela.

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je pense que ces questions sont

20 des questions qui appellent à des conjectures, à moins que vous, vous

21 pouvez peut-être dire, à moins que --

22 M. ROBSON : [interprétation] Comment il peut savoir cela, du genre, enfin.

23 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Est-ce que je peux poser des

24 questions par rapport aux observations du Président. Le problème qui est le

25 mien c'est le problème concernant la pertinence. Où est la différence, si

26 on a deux têtes qui ont été coupées au champ de bataille, qu'elles étaient

27 emmenées pour intimider les autres ?

28 M. ROBSON : [interprétation] Avec tout le respect que je vous dois, il y a

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1 une grande différence. Parce que si ces personnes dont les têtes ont été

2 coupées au champ de bataille et si on ne peut pas dire qui a commis cela,

3 par conséquent, la Chambre ne serait pas en mesure d'imputer ces actes aux

4 Moudjahidines.

5 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Mais où est le crime alors ? Dans le

6 fait que les têtes ont été coupées ou dans le fait qu'on a essayé

7 d'intimider le témoin ?

8 M. ROBSON : [interprétation] Monsieur le Président, dans l'acte

9 d'accusation, il est dit que les Moudjahidines ont tué ces deux hommes, et

10 je pense que c'est ça la question principale. Si le témoin ne peut pas dire

11 qui les avait tuer et dans quelles circonstances --

12 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Mais je pense que le témoin a déjà

13 témoigné par rapport à cela, à savoir qu'il n'avait pas vu ce meurtre, et

14 en tout cas, en aucun cas il ne peut être en mesure de vous dire qui les

15 avait tués.

16 M. ROBSON : [aucune interprétation]

17 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Donc si vous insistez plus longtemps

18 sur ce cela, je pense que vous ne pouvez pas avoir de résultat. Vous pouvez

19 aborder un autre sujet.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je demande des positions.

21 J'ai clairement dit que les têtes qui ont été emmenées dans la pièce,

22 il y avait du sang qui coulait ce ces têtes sur les pieds de nous trois. Et

23 pendant quinze ou vingt minutes, j'étais à bord du véhicule et si cela

24 avait été fait sur la ligne du front, je ne sais pas quelle aurait été la

25 quantité de sang qui aurait coulé de ces deux têtes.

26 M. ROBSON : [interprétation]

27 Q. Monsieur Trivicevic, vous ne nous avez pas dit qu'il y avait du sang

28 qui coulait de ces deux têtes et qui coulait sur vos pieds. C'est quelque

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1 chose qui est nouveau. C'est un nouvel élément. Vous ne pouvez pas nous

2 dire comment ces hommes ont été tués ou où ces hommes ont été tués, n'est-

3 ce pas ?

4 R. Je m'excuse si je n'avais pas dit cela. Maintenant, je vais vous dire.

5 Nous trois, nous étions dans la pièce, assis. Assis en face il y avait un

6 groupe de Musulmans qui ont été arrêtés. A un moment donné il y avait du

7 vacarme. Il n'y avait pas de tir devant la pièce. Les Moudjahidines qui

8 nous gardaient dans la pièce où nous nous trouvions --

9 Q. Non, Monsieur Trivicevic. Je comprends que vous avez besoin de nous

10 expliquer cela, mais, s'il vous plaît, concentrez-vous sur la question que

11 je vous ai posée.

12 Il est juste de dire que vous n'êtes pas en mesure de nous dire où

13 ces hommes ont été tués et comment ces hommes ont été tués ?

14 R. Il est juste de dire que je suis certain que ces hommes n'avaient pas

15 été tués sur la ligne de front, parce que je viens de vous dire, de vous

16 affirmer que le sang frais coulait de ces deux têtes coupées.

17 Q. Je veux vous poser des questions portant sur le camp des Moudjahidines.

18 Dans votre témoignage, vous avez dit --

19 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Mundis.

20 M. MUNDIS : [interprétation] Je m'excuse. Je suis debout tout simplement

21 pour souligner quelque chose que mon éminent collègue a dit il y a quelques

22 instants. J'attire l'attention de la Chambre sur la page 21, lignes de 16 à

23 18, avant qu'il ne commence à parler d'un autre sujet. Cela se rapporte à

24 ce que le témoin avait déjà dit par rapport à la deuxième tête qui a été

25 amenée dans la pièce. Je veux que cela soit consigné au compte rendu

26 maintenant, dans la lumière de ce que Me Robson vient de dire.

27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Monsieur Mundis.

28 Vous avez vu cela, Maître Robson ?

Page 3675

1 M. ROBSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. J'ai vu cela.

2 Q. Monsieur Trivicevic, vous nous avez dit que vous vous rendiez au camp à

3 bord d'un camion. Dans votre témoignage, vous avez déclaré que vous étiez

4 en mesure de voir qu'il s'agissait de Zavidovici, de la ville par où vous

5 passiez. Vous nous avez dit que vous aviez des bandeaux sur les yeux, mais

6 que vous étiez toujours en mesure de voir à travers ces bandeaux ?

7 R. Non. D'abord, nous n'étions pas à bord d'un camion, mais à bord d'une

8 fourgonnette. J'ai dit clairement ici, il y a quelque temps, que les autres

9 prisonniers avaient des tee-shirts déchirés pour utiliser leurs tee-shirts

10 pour leur bander les yeux. Au moment où je suis venu, on m'a mis un bonnet

11 en laine sur les yeux, et je n'ai pas dit que je pouvais voir clairement.

12 J'ai dit que je pouvais voir partiellement, mais j'ai pu reconnaître les

13 bâtiments dans la ville de Zavidovici par laquelle on passait, parce que

14 sur le point de contrôle des Moudjahidines, la porte arrière de la

15 fourgonnette était ouverte et n'importe qui pouvait nous aborder pour nous

16 donner des coups.

17 Q. D'après vous, vous étiez en mesure de voir une portion de la route en

18 se rendant vers le camp, n'est-ce pas ?

19 R. Ceux ne sont pas mes propos. Je n'ai pas dit cela. J'étais allongé dans

20 la fourgonnette qui était fermée. J'étais allongé sur le dos. J'ai pu voir

21 la route uniquement au moment où la porte arrière de la fourgonnette était

22 ouverte. J'étais dans la fourgonnette, allongé sur le dos. Je n'ai pas vu

23 la route même.

24 Q. Comment pouviez-vous être en mesure de voir ces endroits ? Je ne veux

25 pas passer beaucoup de temps là, mais vous avez dit que vous avez passé par

26 Zavidovici --

27 Mme LE JUGE LATTANZI : [chevauchement] -- calmez, parce que l'avocat de la

28 Défense, il a le droit de tester votre crédibilité. C'est le travail de

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1 l'avocat de la Défense en ce moment. C'est le contre-interrogatoire. Donc

2 soyez tranquille et patient et répondez selon ce que vous savez.

3 M. ROBSON : [interprétation]

4 Q. Monsieur Trivicevic, puis-je vous montrer votre déclaration que vous

5 avez faite au juge d'instruction ? C'est à la page 7 de la version en

6 anglais.

7 Dans la version en B/C/S, c'est à la page 5. Il s'agit du dernier passage.

8 En anglais, il s'agit du passage qui commence par les mots, je cite :

9 "Après cela, ils nous ont fait sortir devant …"

10 Monsieur Trivicevic, voyez-vous le passage qui commence par les mots :

11 "Après cela, ils nous ont fait sortir devant le bâtiment l'un après

12 l'autre, et une foule de civils a commencé à nous insulter" ?

13 Voyez-vous cela ?

14 R. Oui.

15 Q. Dans cette passage, vous avez expliqué au juge d'instruction votre

16 itinéraire jusqu'au camp, et vous avez dit que, je cite : "Ils nous ont mis

17 des bandeaux sur les yeux. On m'a mis une sorte de capuche sur la tête,

18 parce qu'il n'y avait plus de tissu pour appliquer des bandeaux."

19 Voyez-vous ce passage ?

20 R. Oui, je vois cela.

21 Q. Pouvez-vous nous expliquer comment vous pouviez voir l'itinéraire que

22 vous avez suivi jusqu'au camp, alors que vous aviez une sorte de capuche

23 sur votre tête ?

24 R. Il s'agissait d'une sorte de capuche en laine, fabriquée à la main. Une

25 fois sur la tête, le tissu, ou plutôt la laine s'élargit et on peut voir à

26 travers les mailles, quelque chose. On ne peut pas voir distinctement,

27 clairement les choses, mais on peut entrevoir certaines choses.

28 Q. Vous avez dit que cela peut être un peu élargi, on peut voir à travers,

Page 3677

1 mais dans la phrase suivante vous avez dit, je cite : "J'ai presque

2 suffoqué à cause de cela." Cela peut vouloir dire que cela ne pouvait pas

3 s'élargir, cette sorte de capuche. Pouvez-vous m'aider ?

4 R. J'ai failli me suffoquer non pas à cause de cela, mais à cause de la

5 ficelle qui était autour de notre cou, à cause du fait que nos pieds et nos

6 poignées ont été attachés sur notre dos, et c'est dans cette position qu'on

7 voyageait. Nous étions assis au sol et dans cette position. C'est pour cela

8 que nous avons failli suffoquer. C'est pour cela que je parle ici des

9 douleurs aiguës dans les poignets et dans les pieds, à cause de cette

10 ficelle à l'aide de laquelle nos pieds et nos poignets ont été attachés.

11 Q. Vous êtes arrivés au camp. Conviendrez-vous avec moi qu'à votre arrivée

12 au camp, une fois qu'on vous a fait sortir du véhicule, on vous a donné à

13 manger, on vous a donné un peu de riz.

14 R. Ça ne s'est pas passé quand on nous a fait descendre du véhicule.

15 D'abord, on nous a sortis. On nous a tirés du véhicule. Ensuite, ils ont

16 versé de l'eau dans la boue devant nous. Nous sommes restés là un certain

17 temps. Ensuite on nous a emmenés dans une tente. A l'époque, je pensais que

18 c'était la tente de l'Emir. C'est dans cette tente qu'ils nous ont donné du

19 riz, si je me souviens bien.

20 Q. La question que je vous avais posée, c'était de savoir si après votre

21 arrivée au camp on vous avait donné à manger.

22 R. Pas tout de suite à l'arrivée. C'était un peu plus tard.

23 Q. Vous conviendrez avec moi concernant la nourriture, pendant que vous

24 étiez au camp, tous les jours on vous a donné à manger, n'est-ce pas ? Les

25 Moudjahidines vous ont donné à manger ?

26 R. Non. Les Moudjahidines nous ont donné à manger, mais pas tous les

27 jours.

28 Q. Mais c'était deux fois par jour. Une fois le matin, une fois le soir ?

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1 R. Parfois c'était trois fois par jour, mais il arrivait qu'on ne nous

2 donne rien à manger ni à boire. En août, par exemple, à un moment donné,

3 nous avons passé 36 heures sans qu'on nous donne une seule goutte d'eau,

4 ensuite ils amenaient une bouteille d'un litre et demi de coca-cola que

5 nous devions tous partager, les onze que nous étions.

6 Q. Oui, mais pour ce qui est de l'eau, est-ce que vous conviendrez avec

7 moi que les Moudjahidines vous amenaient de l'eau dans des récipients qui

8 étaient à leur disposition, dans des bouteilles en plastique, des

9 jerrycans, vous avez parlé d'un jerrycan. C'est bien vrai, n'est-ce pas ?

10 R. C'est exact.

11 Q. Il est exact que certains Moudjahidines ont fait preuve de gentillesse

12 à votre égard. Vous avez parlé de "Habib," du Moudjahidine qui s'appelait

13 "Habib," qui vous a détaché, qui a détaché vos mains et vos jambes alors

14 que vous étiez étendu dans le champ, n'est-ce pas ?

15 R. Oui. Oui, je lui en suis extrêmement reconnaissant.

16 Q. Il vous a donné du café, puis il vous a amené des couvertures alors que

17 vous étiez étendu à cet endroit; est-ce bien exact ?

18 R. C'est exact.

19 Q. Conviendrez-vous avec moi que dans la séquence vidéo que nous avons vue

20 aujourd'hui, on voit un homme plutôt âgé à un moment donné sur ces images,

21 et cet homme, lui aussi, il vous amenait à manger et il vous traitait

22 correctement. J'aimerais vous présenter cette photographie.

23 Est-ce que vous reconnaissez ce vieil homme ?

24 R. Selon moi, c'est l'homme qui, lorsqu'il était de garde, nous donnait

25 tout ce dont nous avions besoin. Nous ne manquions de rien lorsqu'il était

26 de garde, lorsqu'il était de service. Il nous donnait à boire et à manger

27 régulièrement. Je dois dire que je ressens un grand sentiment de gratitude

28 envers cet homme.

Page 3679

1 Q. J'aimerais parler de Gojko Vujicic. Est-il exact que l'incident au

2 cours duquel il a été tué s'est produit le 22 ou le

3 23 juillet, c'est-à-dire un jour après votre arrivée au camp; est-ce

4 exact ?

5 R. Gojko a été tué dans la matinée du 24 juillet, et nous sommes arrivés

6 le 23 au camp.

7 M. ROBSON : [interprétation] Avant de poursuivre, j'aimerais demander le

8 versement au dossier de cette photographie.

9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Robson, avant de parler de

10 cette photographie, qu'en est-il de la pièce D510 ?

11 M. ROBSON : [interprétation] C'est une déclaration. Je ne demande pas son

12 versement au dossier. Il s'agissait simplement de présenter au témoin une

13 déclaration qu'il avait faite précédemment.

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est la photographie de qui ?

15 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Cette photographie, ce n'est pas

16 Habib ?

17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Connaissez-vous le nom de la personne

18 que l'on voit sur cette photographie ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne connais pas le nom de cette personne.

20 Habib, d'après ce qu'il m'a dit, avait 17 ans à l'époque. Il était du Yémen

21 du Sud, ce qui semble nous indiquer qu'il ne s'agit pas ici de la même

22 personne.

23 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Indéniablement.

24 Enfin, quel que soit le nom de cette personne, la photographie est versée

25 au dossier. J'aimerais que lui soit attribuée une cote.

26 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 551, Monsieur le

27 Président.

28 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

Page 3680

1 M. ROBSON : [interprétation]

2 Q. Conviendrez-vous avec moi que Gojko Vujicic avait été touché par une

3 balle au niveau de l'aine pendant l'attaque du

4 21 juillet; il avait reçu une balle à l'aine ?

5 R. Quand on a emmené Gojko à la maison à Livade le 21 juillet, il était

6 déjà blessé à ce moment-là. C'était une blessure par balle, mais j'ignore

7 dans quelles circonstances il avait été blessé.

8 Q. Est-ce qu'il était grièvement blessé ?

9 R. Non. Non, on ne peut pas dire qu'il était grièvement blessé. C'était

10 une blessure. On voyait l'orifice d'entrée, l'orifice de sortie au niveau

11 de la cuisse. Mais c'était une blessure qui ne faisait pas plus de 5

12 centimètres de profondeur.

13 Q. Est-il exact que la nuit de sa mort il a beaucoup

14 souffert ? Pouvez-vous nous dire quoi que ce soit sur ce point ?

15 R. J'ignore ce que ressentait les gens, à quel point ils souffraient.

16 C'est très difficile pour moi de vous le dire si ou comment, de quelle

17 manière Gojko a souffert cette nuit-là.

18 Q. Oui, mais il criait, il a insulté Dieu. Est-il exact que les

19 Moudjahidines s'en sont émus ou trouvaient ça inacceptable, c'est la raison

20 pour laquelle ils l'ont tué ?

21 R. Je ne peux pas dire que c'était ça la raison. Je crois que c'est une

22 des raisons. Ce n'est pas la raison principale. Je ne peux pas le dire que

23 c'est une des raisons.

24 Q. Vous nous avez expliqué que lorsqu'on vous a ramené dans la pièce où la

25 tête a été également placée, vous avez dit qu'Emir a pris cette tête et a

26 commencé à hurler sur un ton extrêmement furibond. Est-ce que vous vous en

27 souvenez ?

28 R. Oui. Je me souviens avoir dit cela, et c'est comme ça que ça s'est

Page 3681

1 passé.

2 Q. Il est manifeste qu'Emir, que cet Emir n'était pas content de ce qui

3 s'était passé ?

4 R. Je suis d'accord.

5 Q. Est-il exact que peu après l'incident concernant Gojko Vujicic, Emir

6 est revenu dans la pièce avec un interprète ? Est-ce que vous vous en

7 souvenez ?

8 R. Emir est entré dans la pièce avec un interprète, mais je ne peux pas

9 vous dire si c'était le même jour, le lendemain, à quelle heure, et cetera.

10 En tout cas, quand ils sont venus, il faisait déjà presque nuit.

11 Q. Il vous a expliqué qu'on allait vous donner plus d'eau, qu'on allait

12 vous donner des habits de rechange et que des représentants de la Croix-

13 Rouge allait venir vous enregistrer à un moment donné; est-ce exact ?

14 R. C'est exact.

15 Q. Est-il exact et reconnaissez-vous avec moi que dans une certaine

16 mesure, après cet incident, les conditions de détention se sont améliorées

17 au camp ?

18 R. C'est exact, également.

19 Q. Je vais passer rapidement à cette journée du 23 août. C'est la date à

20 laquelle vous-même et les autres avez été emmenés en bus au KP Dom.

21 Quand vous êtes montés à bord de ce bus, de cet autocar, est-ce que sur vos

22 mains, sur vos visages il y avait des signes de sévices ? Des traces ?

23 R. Il est possible qu'on ait eu des cicatrices à cause des chaînes que

24 nous portions. Il est possible qu'il y ait eu des cicatrices à cause des

25 cordes qui nous liaient les mains, mais je ne me souviens pas de quoi

26 j'avais l'air à l'époque. Je crois qu'il n'y avait pas d'autres blessures

27 ou lésions visibles.

28 Q. J'aimerais vous présenter un document. Je vais faire ça très vite.

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1 P02480.

2 Non, excusez-moi. Il s'agit de la pièce 499 [comme interprété].

3 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] 4 999 ou 499 ?

4 M. ROBSON : [interprétation] 499.

5 Q. Conviendrez-vous avec moi que nous avons un document en date du 29 août

6 ici intitulé "Prise en charge des membres de la soi-disant VRS provenant du

7 Détachement d'infanterie légère d'El Moudjahidine" ?

8 R. Je vois ce document, mais je ne sais pas vraiment de quoi il s'agit. Je

9 ne le sais pas du tout même.

10 Q. On voit qu'il y a 11 noms qui figurent sur ce document. J'aimerais

11 qu'en anglais on nous présente la deuxième page.

12 R. C'est exact.

13 Q. L'un de ces noms, l'un des noms qui figure dans cette liste de 11 noms,

14 c'est votre nom, il se trouve au regard du numéro 4.

15 R. C'est exact.

16 Q. J'aimerais que nous examinions la partie inférieure de ce document

17 aussi bien en B/C/S qu'en anglais. En anglais, c'est la page suivante. La

18 troisième page.

19 Conviendrez-vous avec moi que dans ce paragraphe on peut lire, je cite :

20 "Aucun problème, aucun obstacle n'a surgi au moment où les soldats de

21 l'agresseur énumérés ont été transférés et escortés sous bonne garde et ils

22 ont tous été escortés en toute sécurité amenés jusqu'au centre de réception

23 des prisonniers de guerre."

24 Est-ce que c'est exact ?

25 R. Oui, c'est exact. C'est ce que je peux lire ici.

26 Q. Rien n'indique ici que vous-même ni les autres prisonniers portaient

27 des traces, indiquaient qu'ils avaient été maltraités ?

28 R. Certes. Enfin, il n'y avait personne à même de consigner d'éventuelles

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1 blessures, d'éventuelles lésions dans un document.

2 Q. Oui, mais vous avez dit précédemment dans votre déposition qu'on vous a

3 conduit dans un véhicule jusqu'au KP Dom. J'imagine que ces hommes-là

4 auraient pu garder trace de telles choses s'il y avait eu quelque chose à

5 voir, s'ils avaient décidé de le faire.

6 R. Il me semble qu'il s'agissait de policiers militaires, puis ce n'était

7 pas leur travail. Ce n'était pas leur travail de déterminer les blessures

8 figurant sur les organes et les corps des prisonniers. Au centre, il y a

9 Goran Stokanovic qui a été pris en charge. Il avait été blessé par balle,

10 c'était au niveau de sa jambe, sous le genou, puis il y en avait un autre

11 qui avait été blessé à Livade. Ensuite, il avait été attaché avec du fil de

12 fer, si bien que le sang avait cessé de circuler dans ses mains, et la

13 gangrène avait commencé à s'installer.

14 Cet homme est donc venu dispenser ou prodiguer des soins à ces deux hommes.

15 Il leur a fait des piqûres, et cetera. Donc ça on a dû en garder trace

16 quelque part, ça dû être consigné quelque part. Mais il n'y avait personne

17 là pour noter quelles étaient les blessures des prisonniers de guerre.

18 Q. Dernier sujet que je voudrais aborder avec vous, document P02460.

19 Monsieur Trivicevic, est-ce que vous parvenez à déchiffrer ce document

20 puisque ce n'est pas très lisible. Pouvez-vous voir qu'il s'agit d'un mémo

21 officiel qui a été établi à Zenica le 26 août 1995 ?

22 R. Exact.

23 Q. On peut voir que c'est un document qui émane du service de Sécurité du

24 3e Corps.

25 Précédemment, vous avez déclaré, Monsieur Trivicevic, que vous aviez

26 été interrogé. Vous souvenez-vous avoir dit cela ?

27 R. Oui, je m'en souviens très bien.

28 Q. Les hommes qui se sont entretenu avec vous, vous souvenez-vous s'ils

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1 ont couché sur le papier ce que vous disiez, s'ils ont pris des notes ?

2 R. C'est moi qui ai rédigé cette déclaration moi-même.

3 Q. J'aimerais qu'on passe en revue ce document. Est-il exact qu'ici on

4 trouve des informations qui vous concernent ? On voit votre nom : "Velibor

5 Trivicevic, fils de Mirko et de Cvijeta," on voit ici votre date de

6 naissance; est-ce exact ?

7 R. C'est exact.

8 Q. On peut voir qu'il est indiqué que vous faisiez partie de la 1ère

9 Brigade d'infanterie légère de Prnjavor au sein du

10 3e Bataillon, que vous étiez infirmier. Est-ce que vous voyez ce passage ?

11 R. Oui.

12 Q. Ensuite, on voit dans le reste du document qu'il y a beaucoup

13 d'éléments d'information relatifs à votre famille. Il est question de votre

14 mère, de votre sœur ?

15 R. C'est exact également.

16 Q. Un peu plus bas on peut voir qu'on décrit la manière dont vous avez été

17 mobilisé, puis comment vous êtes devenu un soldat de la 1ère Brigade

18 d'infanterie légère. Est-ce que vous voyez ce passage ?

19 R. Oui.

20 M. ROBSON : [interprétation] J'aimerais qu'on nous présente la deuxième

21 page en B/C/S.

22 Q. Veuillez parcourir rapidement ce document. Est-il exact qu'ici vous

23 donnez des informations au sujet de différentes unités de la VRS qui se

24 trouvent dans votre zone ? Est-ce que c'est bien cela que vous avez dit et

25 décrit aux hommes qui vous interrogeaient ?

26 R. Il ne s'agit pas de différentes unités, il s'agit de notre unité.

27 Q. Bien. En bas de la page, on peut voir que vous donnez à ces hommes des

28 informations au sujet de ce que vous savez des unités de l'ABiH; est-ce

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1 bien exact ? On voit que vous dites, "s'agissant des unités de l'ABiH --"

2 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Quel est le passage que vous lisez,

3 Maître Robson ?

4 M. ROBSON : [interprétation] J'aimerais qu'on fasse défiler le document

5 vers le bas. En réalité, ça se trouve à la page 3 de la version en anglais

6 du document. Toutes mes excuses.

7 Q. Monsieur Trivicevic, est-ce que vous voyez ce passage :

8 "S'agissant des unités de l'ABiH, il avait entendu parler de Crni Labudovi,

9 Dzamijski Golubovi," à savoir les pigeons de la mosquée, et les

10 "Moudjahidines". Est-ce que vous voyez ce passage ?

11 R. Oui.

12 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Quel est le passage que vous lisez,

13 Maître Robson ?

14 M. ROBSON : [interprétation] Monsieur le Président, ça se trouve vers le

15 milieu de la page.

16 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et la phrase commence par les mots :

17 "En ce qui concerne…"

18 Oui, j'ai trouvé.

19 M. ROBSON : [interprétation] Et à la phrase suivante, je cite : "Il déclare

20 que ce sont les Moudjahidines dont les Chetniks auraient plus peur."

21 Q. Est-ce que vous voyez ce passage ? Est-ce que vous trouvez la phrase en

22 question, Monsieur Trivicevic ?

23 R. Non.

24 Q. Ça se trouve au milieu de la page.

25 R. Oui, j'ai trouvé.

26 Q. Conviendrez-vous avec moi que ces deux phrases dont je viens de vous

27 donner lecture, ce sont les deux seuls passages où on fait référence aux

28 Moudjahidines dans ce document-ci ?

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1 R. Je suis d'accord avec vous.

2 M. ROBSON : [interprétation] J'aimerais demander le versement au dossier du

3 document.

4 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le document est versé au dossier. Une

5 cote, s'il vous plaît.

6 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce 552.

7 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

8 M. ROBSON : [interprétation] Je n'ai plus de questions.

9 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Robson.

10 Monsieur, nous n'en avons pas terminé de votre déposition. Je vais vous

11 demander de revenir demain dans ce même prétoire à 9 heures du matin pour

12 la poursuite de votre déposition. Etes-vous d'accord ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

14 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] L'audience est suspendue jusqu'à

15 demain 9 heures, salle II.

16 --- L'audience est levée à 19 heures et reprendra le vendredi

17 5 octobre 2007, à 9 heures 00.

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