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1 Le mardi, 27 janvier 2004
2 [Audience sentencielle]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 20.
5 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Veuillez vous asseoir. Bon après-
6 midi à tout et chacun. Je souhaite demander à Madame la Greffière de citer
7 l'affaire, s'il vous plaît.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,
9 Messieurs les Juges. Il s'agit de l'affaire IT-02-61-S, l'Accusation contre
10 Miroslav Deronjic.
11 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Merci. Puis-je avoir la
12 présentation des parties, s'il vous plaît. L'Accusation.
13 M. HARMON : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, je m'appelle
14 Mark Harmon. Je représente le bureau du Procureur dans le cas de cette
15 affaire. A ma droite, se trouve Lisse-Lotte Karlsson, qui est le commis des
16 audiences.
17 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] La Défense, s'il vous plaît.
18 M. CVIJETIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs
19 les Juges. Je m'appelle Slobodan Cvijetic et je représente l'accusé
20 Miroslav Deronjic. A ma droite, se trouve le co-conseil, M. Slobodan
21 Zecevic.
22 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Puis-je demander à Monsieur
23 Deronjic ? Pouvez-vous suivre la procédure dans une langue que vous
24 comprenez ?
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,
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1 Messieurs les Juges. Je peux suivre la procédure dans une langue que je
2 comprends.
3 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie. Les parties ont
4 reçu une ordonnance portant calendrier qui était provisoire. Ceci a été
5 rendu public et il se peut qu'il y ait quelques modifications qui y seront
6 apportées. A la lumière des témoignages que nous avons entendus la semaine
7 dernière, je souhaite simplement vous en avertir. Il ne s'agit pas de vœux
8 pieux mais il s'agit de quelque chose qui pourra, effectivement, se
9 produire. Nous aurons besoin des trois jours et non pas simplement de deux
10 jours. Pour l'instant, nous allons simplement nous consacrer à ces deux
11 jours tels que c'est indiqué dans l'ordonnance portant calendrier.
12 Je pense que cela permettra d'accélérer la procédure si nous commençons par
13 quelques questions d'ordre administratif ou technique. Je crois que lorsque
14 nous versons les éléments au dossier, il est plus aisé de présenter
15 simplement la cote de la pièce plutôt que le titre entier du document. Par
16 conséquent, je souhaite demander à l'Accusation la question suivante : vous
17 avez versé dans votre mémoire portant sur le prononcé de la sentence,
18 l'Annexe A, il s'agit de six interviews datées du 16 décembre 1997 jusqu'au
19 9 avril 2002. Y a-t-il une objection, eu égard, au versement au dossier de
20 ces pièces ?
21 M. HARMON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
22 M. CVIJETIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président, aucune
23 objection.
24 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Madame la Greffière, pourriez-vous,
25 s'il vous plaît, nous donner un numéro de cote pour les documents en
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1 question. Ils se trouvent dans l'Annexe A.
2 C'est exact, ces entretiens ont été versés au dossier par la Défense, par
3 conséquent il s'agit de pièces à conviction de la Défense. La vie est
4 parfois difficile.
5 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, le numéro de
6 cote de cette pièce est DS1.
7 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Et ensuite 2, 3, 4, 5, 6, les
8 documents qui sont consécutifs à ceci d'une façon à ce que nous puissions
9 différencier les six entretiens. Est-ce exact ?
10 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
11 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Merci.
12 Ensuite, nous avons l'Annexe B. Il s'agit des entretiens du mois de juin et
13 du mois de juillet 2003. Eu égard au document numéro 2, nous avons la
14 déclaration du témoin Deronjic datée du 26 octobre 2003, malheureusement
15 nous avons un document qui n'est pas signé, qui n'est signé par personne.
16 Est-ce qu'une des deux parties peut nous aider en la matière ?
17 M. HARMON : [aucune interprétation]
18 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Malheureusement, nous pouvons lire
19 une annotation "ou novembre." Cela n'est pas très clair. Est-ce que vous
20 pourriez nous préciser, s'il vous plaît ?
21 M. HARMON : [interprétation] Il s'agit d'un document qui comporte 71 pages.
22 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Très bien.
23 M. HARMON : [interprétation] La version en B/C/S est signée. La version
24 anglaise ne l'est pas.
25 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Bien. Est-ce que nous pouvons
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1 procéder ainsi, à savoir ce document sera versé au dossier et nous
2 supposerons que la version anglaise sera signée après la pause ? La
3 Défense, êtes-vous d'accord ?
4 M. HARMON : [interprétation] L'accusé devrait lire ce document et ce
5 document devrait être traduit de façon à ce qu'il puisse y apposer sa
6 signature. Je crois qu'il nous faudra un temps un peu plus long que le
7 temps d'une pause. Je suis tout à fait certain qu'au cours de cette
8 procédure, au cours des trois jours suivants, je pense que quelqu'un
9 pourrait le lui lire, pourrait lui lire la version anglaise et demander à
10 ce qu'il confirme que cela correspond bien à la version en B/C/S.
11 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Si les deux parties sont d'accord
12 avec cette proposition, nous allons travailler sur la traduction en anglais
13 sachant que le document original en B/C/S est le seul qui ait été signé, et
14 par conséquent, ces deux documents sont versés au dossier. La version
15 anglaise porte la cote A, et la version en B/C/S la cote B.
16 Ensuite l'Annexe C. Madame la Greffière, s'il vous plaît.
17 M. CVIJETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, cela ne pose
18 aucun problème. Nous sommes tout à fait d'accord avec votre proposition.
19 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie pour votre
20 coopération.
21 Madame la Greffière, quels sont les numéros des cotes s'il vous plaît ?
22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous avons les deux entretiens datant
23 juin et de juillet 2003, qui porte la cote DS7. Et la déclaration du témoin
24 du 26 octobre 2003, qui porte la cote DS8.
25 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons
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1 maintenant nous tourner vers la page suivante. Le compte rendu d'audience
2 de M. Deronjic lors de son témoignage, l'Accusation contre Momir Nikolic,
3 l'audience se portant sur le prononcé de la sentence datée du 28 octobre
4 2003. Le compte rendu d'audience de M. Deronjic, il s'agit de l'audience en
5 appel datée du 21 novembre 2003 dans le cadre de son témoignage contre
6 Krstic et le compte rendu d'audience de Miroslav Deronjic, son témoignage
7 dans l'audience du 26, 27 novembre dans le cadre de l'affaire Milosevic,
8 l'Accusation contre Milosevic. Y a-t-il eu des objections à cet égard ? Je
9 n'en vois aucune.
10 Le numéro de cote s'il vous plaît, Madame la Greffière.
11 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le numéro de cote de l'audience portant
12 condamnation dans l'affaire Nikolic, 28 octobre 2003, porte la cote pièce
13 DS9; le témoignage dans le cadre de l'audience en appel dans le cadre de
14 l'affaire Krstic, le 21 novembre 2003, DS10; et le témoignage dans le cadre
15 de l'affaire Milosevic, daté du 26, 27 novembre porte la cote DS11.
16 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je propose que nous essayons de
17 respecter l'ordre, à savoir les pièces qui seront versées au dossier seront
18 les comptes rendus d'audience, l'Accusation contre Blagojevic. IT-02-60-T.
19 Il s'agit de comptes rendus d'audience datés du 19 janvier et qui se
20 termine le mardi, 22 janvier 2004. Avez-vous des objections ? Si tel n'est
21 pas le cas, ce document est versé au dossier et constitue la pièce
22 suivante.
23 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que je
24 dois considérer qu'il s'agit d'un document de l'Accusation ou est-ce que je
25 donne simplement un numéro suivant ? Je peux simplement dire que c'est la
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1 pièce PS12, simplement pour clarifier ce point, DS sont les documents de la
2 Défense, PS sont les documents de l'Accusation. Mais nous pouvons
3 poursuivre avec des chiffres qui se suivent. Par conséquent, nous allons
4 attribuer la cote PS12 à ce document.
5 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Merci.
6 Mme LA GREFFIÈRE : [aucune interprétation]
7 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Nous allons maintenant nous tourner
8 vers l'annexe D. Je ne souhaite pas dire les 11 points qui y figurent. Il
9 s'agit d'un certificat attestant d'un casier judiciaire vierge, un
10 certificat de naissance, et cetera, ainsi que la transcription d'un vidéo
11 clip, le discours de M. Deronjic. Le 1er septembre 1990. Y a-t-il des
12 objections à cet égard ? Je n'en vois aucune. Par conséquent, ce document
13 est versé au dossier. Ces 11 documents comporteront la cote suivante,
14 Madame la Greffière, s'il vous plaît.
15 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] L'annexe D portera la cote DS13, et
16 pour ce qui est du certificat, DS13/1, le certificat suivant DS13/2, et
17 jusqu'à DS13/11.
18 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Très bien. Nous avons reçu hier, je
19 ne sais pas si l'Accusation souhaite joindre des numéros de cotes qui
20 commencent par la lettre P ou est-ce que nous devons simplement suivre les
21 numéros que présenteront les Juges. Il s'agit d'un document qui est daté du
22 6 mai [comme interprété] 1992 et qui parle d'objectifs stratégiques.
23 M. HARMON : [interprétation] Je propose que ce document soit marqué aux
24 fins de note d'identification comme il s'agissait d'une pièce de la
25 Chambre, et c'est une pièce que la Chambre a demandé à voir.
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1 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Bien. Alors nous allons donner le
2 numéro de cote qui va commencer par un J.
3 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira donc du document qui portera
4 la cote JS14.
5 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Merci.
6 Sur ma liste je regarde, je crois que ce document a été versé au dossier
7 dans le cadre de l'affaire Blagojevic. Il ne s'agissait pas d'un document
8 confidentiel, c'est quelque chose qui a été porté à la connaissance de la
9 Chambre en audience publique. Il s'agit de la pièce portant la cote D92
10 [comme interprété] intitulé "accord entre les parties." Y a-t-il des
11 objections ? Si tel n'est pas le cas, nous allons attribuer la cote JS.
12 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le D96/1 portera la cote JS15.
13 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Merci. Nous avons ensuite le
14 rapport d'expert qui est fourni par Anna Najman. Je ne vois aucune
15 objection, les parties sont déjà d'accord sur le fait qu'il ne sera pas
16 nécessaire de contre-interroger ce témoin. Il s'agit du numéro de cote tel
17 que cela a été ordonné par la Chambre.
18 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce portant la cote
19 JS16.
20 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Ensuite le rapport de Oric Sieber,
21 qui a déjà été versé au dossier, et les parties ont précisé qu'elles ne
22 souhaitaient pas contre-interroger le témoin expert, le Professeur Sieber,
23 portant sur les grilles des peines. Quel numéro de cote attribue-t-on ici ?
24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce portant la cote
25 JS17, Monsieur le Président.
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1 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] J'ai sans doute oublié l'une ou
2 l'autre des pièces. Puis-je demander à l'Accusation s'il y a autres
3 choses ?
4 M. HARMON : [interprétation] Et lorsque je prendrai la parole, je verserai
5 au dossier différents documents. Si vous le souhaitez pendant la pause
6 suivante, je peux les remettre à la Greffière d'audience, si vous le
7 souhaitez. Nous n'allons pas utiliser ces pièces pour l'instant.
8 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Bien. Alors avant de verser ces
9 éléments au dossier, la Chambre se réserve le droit de les lire et de
10 constater s'ils sont recevables ou non. Cela est également, je crois, juste
11 d'entendre les observations de la Défense à cet égard. Nous allons attendre
12 et reporter ceci un petit peu, si vous voulez bien.
13 M. HARMON : [interprétation] D'accord. Merci.
14 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Y a-t-il autres choses que la
15 Défense souhaite verser à ce dossier ?
16 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je crains simplement
17 que la déclaration du témoin, peut-être que nous n'avons pas compris
18 quelque chose, je ne sais pas si la déclaration du témoin avancée par
19 l'Accusation, par la Défense, je ne sais pas si les numéros de cote ont été
20 attribués. Je crois que ces déclarations au témoin ne comportent pas de
21 cote encore.
22 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Vous avez tout à fait raison. Et je
23 me demande si Madame la Greffière a déjà une liste de ceci. Nous pouvons
24 poursuivre. Je craignais que vous ne l'ayez pas, par conséquent, Madame la
25 Greffière, si vous avez l'amabilité de bien vouloir nous lire les
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1 déclarations ainsi que les pièces jointes, les numéros des pièces jointes.
2 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Je souhaite préciser que la liste a été
3 déposée de façon confidentielle. Je ne suis pas certaine de pouvoir
4 prononcer les noms des témoins qui figurent sur cette liste.
5 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je préfère que vous ne mentionnez
6 pas le nom du témoin.
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Très bien.
8 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vois que les parties sont
9 d'accord puisqu'elles hochent de la tête.
10 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Je vais donner un numéro de cote au
11 document de la Défense DS18. Il s'agit de l'annexe C, considérée comme
12 confidentielle, annexe 1, et je leur attribuerai la cote DS18/1 et DS18/8,
13 toutes les pièces de DS18/1 à DS18/8. Comme c'est indiqué, il s'agit d'une
14 annexe qui a été déposée de façon confidentielle.
15 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] C'est tout à fait exact.
16 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pour ce qui est des témoins à charge,
17 il s'agit de la pièce portant la cote PS19/1 jusqu'à 8, pour les huit
18 témoins en question.
19 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie. Je crois qu'à ce
20 stade, nous avons évoqué toutes les pièces.
21 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
22 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, il y a seulement un
23 point que je souhaite aborder très rapidement. Nous aurons deux documents
24 supplémentaires lors de notre plaidoyer et nous avons l'intention de
25 présenter ces deux documents. Il s'agit d'une vue aérienne de la Ville de
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1 Glogova. Et nous avons également en suspens la vidéo qui a la création de
2 l'assemblée du SDA et du parti du SDA, au mois de septembre 1992. Nous
3 souhaitons verser ceci au dossier. Nous remettons la transcription au cours
4 de laquelle on voit M. Deronjic. Nous aimerions également verser au dossier
5 la vidéo.
6 La retranscription de son discours a déjà été versée au dossier, portant la
7 cote DS13. Nous aimerions y rattacher la vidéo, s'il vous plaît.
8 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Pouvez-vous, par conséquent,
9 accorder la cote, le même numéro de cote /1.
10 M. ZECEVIC : [interprétation] Pardonnez-moi, mais je crois qu'il y a une
11 erreur au niveau du compte rendu d'audience. La transcription porte la cote
12 DS11. Donc, nous pouvons rajouter un numéro pour y inclure la vidéo, si
13 vous voulez, lui rajouter un A, par exemple.
14 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Très bien, donc /A.
15 Nous n'avons pas encore le compte rendu d'audience du témoignage de M.
16 Sieber. Je crois que ceci devrait être rattaché au rapport d'expert Sieber
17 qui porte la cote /1. Est-ce exact, Madame la Greffière ?
18 Mme LA GREFFIÈRE : Il s'agit de la pièce JS17A.
19 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie. Et vous avez
20 apporté à mon attention le fait qu'il reste trois documents en suspens, qui
21 n'ont pas encore été versés au dossier.
22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Si c'est exact, il s'agit de
23 témoignages précédents dans le cadre d'autres affaires. L'Accusation en a
24 fait mention. Un moment, s'il vous plaît, si c'est exact, L'Accusation
25 contre Krstic, Momir Nikolic et M. Milosevic. Mais je crois que nous avons
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1 déjà versé ces documents-là.
2 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Oui, tout à fait, car ceux-ci ont
3 été versés par la Défense, et cetera.
4 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Oui.
5 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Mais nous avons encore du temps. Si
6 d'autres pièces devaient être versées au dossier, nous pouvons alors le
7 faire un peu plus tard.
8 Avant de commencer la procédure en tant que telle, je crois qu'il est utile
9 de clarifier un certain nombre de points. Cette Chambre de première
10 instance est saisie uniquement dans le cadre des événements qui se sont
11 produits à Glogova, en date du 9 mai 1992. L'évolution des événements,
12 l'enchaînement des événements à partir de la date du 19 décembre 1991, à
13 une réunion qui a été organisée à Sarajevo et présidée par Radovan
14 Karadzic, auxquels il y fait référence au paragraphe 10 dans l'exposé des
15 faits, et y compris le 11 mai lorsque la réunion à Pale a été tenue. Encore
16 une fois, M. Karadzic en était le président.
17 Je dois souligner ceci pour deux raisons : L'application de principe de
18 non bis in idem , à savoir que, l'Accusé, vous, Monsieur Deronjic, ne serez
19 pas accusé une deuxième fois. Nous nous en tenons uniquement à l'attaque
20 sur Glogova. Ceci est clairement indiqué au paragraphe 11 du plaidoyer de
21 culpabilité. Vous pouvez être accusé de tous les crimes suivants auxquels
22 vous aurez participé, y compris Srebrenica, devant ce Tribunal ou dans
23 d'autres pays et d'autres juridictions.
24 Vous ne devez pas vous méprendre sur ce point. Parce que vous avez plaidé
25 coupable dans le cas des événements de Glogova, ceci constitue un obstacle
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1 ou empêche que vous soyez accusé dans le cadre d'autres événements. A cet
2 égard, l'Accusation et les enquêteurs de ce Tribunal s'en remettent à
3 l'Accusation uniquement. Par opposition à d'autres systèmes juridiques, la
4 Chambre de première instance de ce Tribunal n'a pas autorité pour ordonner
5 des enquêtes, ni ordonner l'Accusation portant sur d'autres évènements ou
6 faits concrets, quand bien même il y aurait des raisons valables pour le
7 faire. A deux exceptions près : il s'agit de l'Article 91, dans le cas d'un
8 faux témoignage sous serment, et de l'Article 77, outrage au Tribunal. Par
9 conséquent, cette audience a fait que le témoignage envisagé de M. Deronjic
10 est limité stricto senso à la période en question.
11 Quoi qu'il en soit, il nous faut aborder tous les facteurs dont on tient
12 compte dans le prononcé de la sentence ; gravité du crime, circonstances
13 atténuantes et aggravantes. Dans ce contexte-là, et je précise, dans ce
14 contexte, uniquement dans l'audience qui a porté sur le plaidoyer de
15 culpabilité, j'avais demandé au bureau du Procureur si oui ou non, il y
16 avait d'autres engagements de l'Accusation à l'égard de M. Deronjic, en
17 particulier, s'il existe bel et bien un niveau d'engagement de ne pas
18 accuser M. Deronjic pour sa participation au massacre de Srebrenica.
19 A la page 46 du compte rendu de cette audience, on peut lire la réponse
20 donnée par M. Harmon :
21 "Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, toutes les promesses
22 qui ont été faites à M. Deronjic sont exposées dans le plaidoyer de
23 culpabilité. Il n'y a pas d'autres promesses qui aient été faites à M.
24 Deronjic, ni d'autres accords avec M. Deronjic, ni son conseil. Eu égard
25 aux évènements de 1995 à Srebrenica, nonobstant le fait que des mots de
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1 M. Deronjic aient peut-être été évoqués dans le cadre d'autres affaires, un
2 acte d'accusation contre M. Deronjic, pour ces évènements-là, n'est pas
3 requis."
4 Puis-je demander à l'Accusation : Avez-vous quelque chose à ajouter à la
5 réponse que vous avez donnée ? Y a-t-il eu autre chose à la lumière des
6 nombreux témoignages tenus par M. Deronjic depuis le 13 septembre ? Et y a-
7 t-il un engagement pour de ne pas accuser ou à accuser M. Deronjic, par
8 rapport à d'autres événements ? Y a-t-il eu une position différente par
9 rapport à cette date du 13 septembre, ceci devrait nous permettre de mieux
10 évaluer les facteurs aggravants et les facteurs et les circonstances
11 atténuantes.
12 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, ma réponse n'a pas
13 changé eu égard à ce que nous avons dit à propos de M. Deronjic et ce que
14 j'ai dit à ce moment-là et ce que j'ai dit aujourd'hui est la même chose.
15 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Oui.
16 M. HARMON : [interprétation] Si Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
17 vous souhaitez avoir une réponse plus complète depuis le mois juillet 1995,
18 nous avons enquêté sur les événements de Srebrenica de façon très
19 approfondie. Les juristes que j'ai nommés, dans le cadre de cette affaire,
20 se sont occupés de l'enquête depuis le mois de juillet 1995. J'ai passé en
21 revue tous les éléments de preuve dans le cadre de l'affaire Srebrenica. Et
22 comme vous le savez peut-être, je suis avocat au bureau du Procureur et
23 j'ai moi-même rédigé l'acte d'accusation contre M. Karadzic lorsque ce
24 Tribunal a ouvert ses portes ainsi que l'acte d'accusation contre le
25 général Mladic, l'acte d'accusation contre Erdemovic, et j'étais le
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1 Procureur dans le cas de l'affaire Krstic.
2 Et je dois dire qu'à mes côtés M. McCloskey, et moi-même, je connais les
3 éléments de preuve dans le cas de l'affaire Srebrenica extrêmement bien.
4 J'ai examiné tous ces éléments. Je m'en suis entretenu avec M. McCloskey,
5 bon nombre de reprises.
6 L'Accusation, dans le but de pouvoir rendre un jugement de façon
7 indépendante. L'Accusation a annulé 13 actes d'accusation, actes
8 d'accusation publics contre des individus qui avaient été tenus pour
9 responsable pour les tueries dans l'opération de Srebrenica. Ces opérations
10 à Srebrenica, qui étaient une opération militaire et les personnes contre
11 qui ces actes d'accusation ont été annulés. Je vais nommer les noms de ces
12 personnes : Ratko Mladic, qui a été le chef de l'état major de l'armée
13 serbe; Radovan Karadzic, qui en était le commandant suprême; le général
14 Krstic, qui en était le commandant du Corps de la Drina, il a été accusé et
15 condamné et a reçu une peine d'emprisonnement de 46 ans pour sa
16 participation dans le cas de cette affaire; Momir Nikolic, qui était le
17 chef de la sécurité du Corps de la Drina, il a plaidé coupable, et a reçu
18 27 ans; Obrenovic, qui était le commandant adjoint de la Brigade de
19 Zvornik, il a plaidé coupable devant ce Tribunal et a reçu une peine
20 d'emprisonnement de 17 ans; Erdemovic, qui était membre du 10e Bataillon de
21 sabotage a participé à des exécutions en masse et a été condamné dans le
22 Branjevo, qui a plaidé coupable, a été condamné à cinq ans; Vinko
23 Pandurevic, qui était le commandant de la Brigade de Zvornik, a été accusé,
24 il a fui la justice; Drago Nikolic, qui était le chef de la sécurité de
25 Zvornik, a été accusé et c'est un fugitif; le colonel Ljubisa Beara, qui
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1 était le chef de la sécurité du chef d'état major de la VRS, a été accusé,
2 c'est un fugitif de la justice; et lieutenant colonel Popovic est également
3 un fugitif --
4 L'INTERPRÈTE : Ce sont toutes personnes dont les actes d'accusation ont été
5 rédigés.
6 M. HARMON : [interprétation] Ljubomir Borovcanin et de Dragan Jokic, qui
7 était le chef de la brigade d'ingénieurs à Zvornik et ils y sont tous les
8 deux actuellement ici dans le quartier pénitentiaire en attendant le procès
9 devant ce Tribunal.
10 Avec M. McCloskey, nous nous sommes consultés et après avoir évalué les
11 preuves, [imperceptible] changé d'avis à l'égard de M. Deronjic et a fait
12 différentes dépositions qu'il a pu faire devant ce Tribunal. J'espère que
13 ceci apporte une réponse à votre question.
14 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Merci beaucoup. Vous venez de nous
15 donner une réponse très exhaustive, et l'Accusation a beaucoup travaillé
16 pour que toutes ces personnes soient jugées. Mais je suis obligé de revenir
17 à la deuxième partie de la question, à savoir y a-t-il un engagement
18 supplémentaire quelconque à l'égard de M. Deronjic ? Y a-t-il eu des
19 promesses qui lui ont été faites, je parle ici en vertu de l'Article 62 ter
20 (C) dans le cadre de plaidoyer de culpabilité, la Chambre de première
21 instance entérinera la teneur de cet accord en audience publique.
22 Effectivement, nous avons reçu cet accord portant sur le plaidoyer de
23 culpabilité, la seule question en suspend est la suivante. Etait-ce
24 réellement l'accord complet ou bien y a-t-il des choses qui n'ont pas été
25 mentionnées, qui ont été omises. Quand aux parties et je cite ici
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1 l'Accusation dans le cas, le Procureur contre Blagojevic : "Les parties
2 devraient s'entendre dans le cadre d'un plaidoyer de culpabilité, dans un
3 accord de plaidoyer de culpabilité." Nous avons donc été surpris qu'il y a
4 eu une entente entre les parties. Nous avons été surpris de l'apprendre et
5 pour nous ceci d'un aspect technique d'un côté et de l'autre côté d'un
6 aspect qui porte sur le fond.
7 Est-ce que cette attente partie de l'accord de passer entre les parties ?
8 M. HARMON : [interprétation] Non, non, pas du tout.
9 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Oui.
10 M. HARMON : [interprétation] Quant à un accord qui doit être présenté à
11 nouveau en audience publique, on y mentionne tous les engagements et les
12 promesses qui auraient pu être faites par le bureau du Procureur, et c'est
13 bien cela que nous avons fait et nous n'avons fait rien d'autre, quant à
14 une entente entre les parties. C'est un document différent et
15 [imperceptible] avec l'accord portant sur le plaidoyer de culpabilité.
16 On y fait mention qu'à n'importe quel moment où M. Deronjic n'était pas
17 tout à fait convaincu qu'il fallait qu'il donne des renseignements complets
18 et bien que cela a été noté. Ce type d'engagement est pris tout simplement
19 pour connaître M. Deronjic qui peut parler avec nous librement et que ce
20 moment ne sera pas utilisé contre lui dans le cadre d'une autre procédure.
21 C'est quelque chose que nous avons [imperceptible] tous les jours lors de
22 nos entretiens mais cela n'a en aucun cas été utilisé pour le convaincre à
23 plaider coupable. Si la façon, dont le paragraphe 16 a été rédigé, a peut-
24 être induit la Chambre en erreur, mais en tout cas, l'entente des parties
25 ne fait pas partie de l'accord qui porte sur le plaidoyer de culpabilité.
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1 Mes collègues de la Défense peuvent vous le confirmer.
2 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] La seule question qui nous reste à
3 poser est la suivante : est-ce que le paragraphe 7 qui fait partie de
4 l'entente des parties, dans lequel il dit que tout ce que M. Deronjic peut
5 dire dans cet entretien ne peut pas être utilisé contre lui. N'est-ce pas
6 là une promesse sotte, à M. Deronjic ?
7 M. HARMON : [interprétation] Vous parlez ici du paragraphe 10 de l'entente
8 entre les parties ?
9 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Non, je parle du paragraphe 7.
10 M. HARMON : [interprétation] C'est tout simplement une promesse simple pour
11 que M. Deronjic nous parle. Autrement, il n'aurait pas parlé avec nous et
12 nous n'aurions pas pu bénéficier de son aide. C'était tout simplement fait
13 pour que M. Deronjic se sente en confiance en nous parlant, pour qu'il
14 sache qu'il n'a aucune obligation juridique pour qu'il parle avec le bureau
15 du Procureur.
16 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Merci beaucoup pour toutes ces
17 clarifications. Vous ayez signé ce document. Ceci fait partie de la façon
18 dont travaille le bureau du Procureur. Si vous affirmez que ceci ne fait
19 pas partie de l'accord portant sur le plaidoyer de culpabilité, dans ce
20 cas-là, la Chambre de première instance en déduit qu'elle ne doit pas
21 s'occuper de cette entente entre les parties.
22 M. ZECEVIC : [interprétation] La Défense souhaite confirmer tout ce qui
23 vient d'être dit par mon collègue du bureau du Procureur. Pour nous, cela
24 n'a jamais fait partie de l'accord qui portait sur le plaidoyer de
25 culpabilité. Je suis entièrement d'accord avec ce que vient de dire M.
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1 Harmon.
2 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je remercie les deux parties pour
3 les clarifications qu'elles viennent de nous apporter. La Défense a indiqué
4 à la Chambre qu'elle souhaitait appeler à la barre M. Deronjic dans le
5 cadre de son procès. Est-ce toujours le cas ?
6 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, tout à fait.
7 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Dans ce cas-là, je demande à ce que
8 l'on raccompagne M. Deronjic à la barre.
9 [L'Accusé passe à la barre]
10 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Monsieur Deronjic, maintenant, vous
11 n'êtes plus l'Accusé, mais le Témoin dans le cadre de cette affaire, je
12 vous demande de lire la déclaration solennelle.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
14 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
15 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie, vous pouvez vous
16 asseoir.
17 Je dois vous informer et vous dire que vous devez nous dire la vérité et
18 rien que la vérité. J'ai de bonnes raisons pour lesquelles, je souligne
19 cela. Ces raisons peuvent être lues sur la page 6407, lors de l'audience
20 dans le cadre de l'affaire le Procureur contre Blagojevic, du jeudi 22
21 janvier 2004. A ce moment-là, vous avez déclaré : "J'ai dit que mes
22 déclarations précédentes n'étaient pas correctes, pour diverses raisons. Je
23 l'ai déjà mentionné. Une, c'était la crainte pour ma propre sécurité ou
24 bien je n'ai pas eu le "knowledge" des conséquences politiques, si la
25 vérité était connue. Et, par ailleurs, je voulais me saisir de mon droit,
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1 bien connu, que je ne suis pas obligé de dire la vérité si celle-ci peut
2 m'être nuisible. Pour ces raisons-là, je n'avais pas fait une déclaration
3 complètement véridique. Par ailleurs, il ne s'agissait pas de déclarations
4 qui étaient complètement fausses. Il s'agissait, tout simplement, de
5 déclarations qui, en partie, n'étaient pas vraies…"
6 Et, par la suite, vous avez continué votre déposition. Vous êtes, peut-
7 être, dans l'erreur. Vous pouvez [imperceptible] parce que vous pensez que
8 l'Accusé, dans la plupart des juridictions, peut être tenu responsable des
9 propos, qui seraient faux, obtenus sous une déclaration solennelle. C'est
10 le cas des lois romano germaniques, mais ceci n'est pas le cas dans le
11 cadre de la common law et, surtout, ce n'est pas le cas dans le cadre des
12 règlements de ce Tribunal.
13 L'Article 91 du Règlement dit : que les fausses déclarations faites sous
14 serment peuvent être punies d'une amende de 100 000 euros, ou bien d'une
15 peine d'emprisonnement allant jusqu'à sept ans d'emprisonnement ou bien les
16 deux; et que cela peut permettre, aussi, à ce qu'une enquête soit ouverte.
17 Vous devez, donc, savoir que vous avez la possibilité de vous taire
18 complètement. Cela veut dire que vous n'avez pas besoin de faire aucune
19 déclaration. Vous pouvez vous taire quand il s'agit de réponses à certaines
20 questions. Mais, vous n'avez pas le droit, comme vous l'avez dit, lors
21 d'une déposition précédente, de ne pas dire la vérité si celle-ci peut vous
22 être nuisible, d'une façon ou d'une autre, à un moment donné. Donc, si, à
23 un moment donné, vous êtes d'avis qu'une réponse pourrait vous nuire,
24 taisez-vous plutôt, mais ne donnez pas une fausse réponse. M'avez-vous
25 compris ?
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je vous ai très
2 bien compris.
3 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je pense que le moment est venu de
4 commencer avec votre déposition. Vous êtes, bien sûr, le Témoin de la
5 Défense et, de ce fait, les conseils de la Défense peuvent vous guider,
6 mais tout ce que vous allez dire doit se limiter aux évènements de Glogova
7 et doit se limiter à la période du 19 décembre 1991 jusqu'au 12 mai 1992.
8 J'espère que nous aurons tous les détails nécessaires et que cela nous
9 permettra d'apporter des explications quant aux certaines choses qui
10 n'étaient pas conformes et qui étaient différentes entre le contexte et
11 l'acte d'accusation. Dans la préparation de la présente audience, nous en
12 avons parlé avec vos conseils.
13 Pour commencer, vous pourriez peut-être nous parler du contexte et nous
14 remettre en situation. Que s'est-il passé à partir du 19 décembre 1991 ?
15 Vous avez été invité à une réunion, de quoi a-t-on parlé ce jour-là ?
16 Qu'est-ce qui s'est passé, qu'est-ce qui a mené aux événements qui avaient
17 eu lieu à Glogova ? Je suppose que la meilleure chose, c'est que vous nous
18 le décriviez spontanément.
19 [La Chambre de première instance se concertent]
20 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Le Juge Agius doit s'absenter
21 pendant deux minutes si les parties n'ont rien contre. Pendant ces deux
22 minutes, nous allons travailler d'après l'Article 15 bis du Règlement.
23 Etant donné que vous vous apprêtez à commencer votre déposition, nous
24 pouvons, peut-être, attendre le retour du Juge Agius. Attendons donc un
25 instant.
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1 Nous pourrions, peut-être, en l'absence du juge voir si l'une ou l'autre
2 partie aurait quelque chose à nous dire qui ne se trouve pas dans
3 l'ordonnance portant calendrier que vous souhaitiez évoquer ?
4 M. HARMON : [interprétation] Je souhaiterais mentionner que je devrais
5 commencer mon travail de Procureur lors du procès Krajisnik qui s'ouvrira
6 le 3 février prochain. On m'a demandé à assister à une audience dans le
7 cadre d'une audience en vertu de l'Article 65 ter demain après-midi à 17
8 heures. Mais j'ai demandé à ce que ce soit reporté à jeudi. Je
9 souhaiterais, vraiment, participer parce que c'est un procès important qui
10 s'ouvre d'ici quelques jours.
11 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je suppose que vous serez ici
12 demain après-midi et que le Juge Orie va reporter cette conférence ?
13 M. HARMON : [interprétation] J'ai demandé à ce que ce soit fait.
14 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] D'accord.
15 M. HARMON : [interprétation] D'un autre côté, j'espère aussi que nous
16 allons terminer d'ici demain soir.
17 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Nous vous avons attendu, Monsieur
18 le Juge Agius et nous pouvons maintenant procéder à la déposition de M.
19 Deronjic.
20 Monsieur Deronjic, vous avez la parole.
21 LE TÉMOIN: MIROSLAV DERONJIC [Assermenté]
22 [Le témoin répond par l'interprète]
23 Questions de la Cour :
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je
25 voulais commencer à vous parler à partir du mois d'avril 1991. Si vous
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1 estimez que ceci n'est pas nécessaire, je ne vais pas parler de cette
2 période-là. Ceci étant, j'avais prévu d'en parler en quelques phrases.
3 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] C'est vous qui faites ces
4 dépositions et nous ne voudrions pas vous imposer des limites. Vous pouvez
5 continuer de la façon dont vous aviez prévue.
6 R. Lors du dernier entretien que j'ai eu, au mois d'octobre dernier avec
7 le bureau du Procureur, j'ai mentionné toute une série d'événements de
8 1991. Ma déclaration se base sur le mois d'avril 1991. D'après moi, il
9 s'agit d'un mois car malheureusement, je ne me souviens pas de la date
10 exacte de la réunion qui a eu lieu au mois d'avril 1991. J'ai, toujours,
11 pensé que cette réunion avait annoncé des changements dans le climat
12 politique et nominalement des principes publics, jusqu'à ce moment-là, du
13 parti démocratique serbe du SDS. C'était un programme qui, en gros, était
14 pour que la Yougoslavie reste ce qu'elle avait été auparavant, donc
15 couramment tiennent la Yougoslavie. Je n'ai pas grand-chose à rajouter
16 quant à ces principes-là.
17 Il s'agissait d'une réunion qui avait eu lieu à Sarajevo et je ne me
18 souviens pas, exactement, où cela avait eu lieu, si c'était bien au Holiday
19 Inn ou à un autre endroit. En 1991, je me suis rendu à Sarajevo à un très
20 petit nombre de réunions. Toutes ces réunions avaient lieu soit à l'hôtel
21 Holiday Inn ou bien à l'hôtel Villa Srbijanka qui avait lieu dans une
22 périphérie de Sarajevo à Ilidza. D'après mes souvenirs, il s'agissait d'une
23 réunion qui avait eu lieu à l'hôtel Holiday Inn.
24 Lors de cette réunion, donc, il s'agissait d'une réunion de plénière, ce
25 qui veut dire que le comité directeur avec tous les comités municipaux du
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1 SDS étaient représentés et tous les délégués qui à l'assemblée de Bosnie-
2 Herzégovine [comme interprété]. Il s'agit bien sûr, des délégués serbes. Il
3 y avait aussi les chefs de file du SDS. A l'époque, le président du SDS
4 était Radovan Karadzic. A l'époque, c'était sa seule fonction. A l'ordre du
5 jour de la réunion, il y avait un thème qui souvent chez nous est défini
6 comme la situation politique et sécuritaire. Dans le contexte de tous les
7 événements que ce soit en Croatie ou en Bosnie-Herzégovine et aussi il y a
8 eu mention d'un certain nombre de décisions prises par les dirigeants de la
9 SRFY et aussi on a mentionné certaines décisions prises par les dirigeants
10 de la Serbie.
11 J'ai soulevé un certain nombre d'événements qui, à mes yeux, m'étaient
12 apparus importants et intéressants. Quelque temps avant, quelque chose est
13 apparu en Croatie; le gouvernement de la région autonome de la Krajina qui
14 venait d'être formé avait décidé de se rattacher à la Serbie. Il s'agissait
15 d'un acte politique, un acte déclaratif de sécession du peuple serbe qui
16 vivait en Croatie et qui voulait se rattacher à la Serbie. A ma
17 connaissance, lors d'une autre réunion de l'assemblée de Serbie, cet acte
18 de sécession avait été refusé. Je ne sais pas pour quelle raison, elle
19 n'avait pas été adoptée mais je sais qu'il s'agissait là d'un événement
20 politique qui avait eu beaucoup de retentissements.
21 Il y a eu des conflits qui étaient directement liés à ces événements
22 politiques. Il y a eu des conflits, donc, entre la république autonome de
23 la Krajina serbe et des dirigeants de la Croatie. Pour en débattre,
24 c'étaient les dirigeants du SDS de Bosnie qui avaient convoqué cette
25 réunion. Par ailleurs, je m'excuse auprès des interprètes. J'essaierai de
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1 ralentir.
2 Il s'agissait d'une réunion qui était publique. Je pense que les médias
3 avaient transmis une partie de cette réunion. Cette réunion qui avait donc
4 eu lieu en plein centre de Sarajevo. Je pense qu'il y avait que le
5 président Karadzic qui avait pris la parole et qui nous avait expliqué la
6 situation politique et dans quel contexte nous devrions agir à ce moment-
7 là ? Je mentionne cette réunion aussi pour une autre raison. Pour la
8 première fois, à ladite réunion, j'ai entendu M. Karadzic tenir des propos,
9 utiliser des formules que j'ignorais et qui ne faisaient pas partie du
10 programme du SDS.
11 Il avait déclaré à l'époque quelque chose que j'ai retenue. J'ai retenu
12 cette phrase tout simplement parce que moi-même et toute une série de
13 d'autres dirigeants politique locaux, et bien, nous n'avions répriocité
14 [comme interprété]. M. Karadzic avait dit à ce moment-là, je vous dis ici
15 le sens, je ne cite pas la phrase exacte. C'était donc si la Yougoslavie
16 fédérale n'existait plus. Il ne reste qu'une seule option pour les Serbes,
17 à savoir Grande Serbie. Douze ans plus tard, je ne pourrais pas vous citer
18 la phrase exacte, mais c'était bien cela la teneur de ses propos.
19 C'était donc pour la première fois que j'ai entendu cette formule, à savoir
20 "la Grande Serbie." C'était une formule que je n'avais pas entendue
21 auparavant et que je n'avais pas pu lire dans les documents, ni les
22 programmes du Parti démocratique serbe. Il avait par ailleurs parlé de la
23 situation politique en Bosnie-Herzégovine et il a évoqué un événement qui
24 l'avait marqué ainsi que beaucoup d'autres participants à la réunion. Dans
25 l'assemblée de Bosnie-Herzégovine, l'assemblée commune, on avait débattu de
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1 l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine, et de sa cessation de
2 l'Yougoslavie.
3 Tous ces discours, tous ces événements qui avaient été évoqués à la réunion
4 étaient donc liés à cette demande d'indépendance qui pour nous était un
5 acte anti-constitutionnel, une proposition anti-constitutionnelle de la
6 séparation de la Bosnie-Herzégovine du reste de l'Yougoslavie.
7 Les participants étaient nombreux à la réunion, mais la réunion était
8 présidée uniquement par M. Karadzic. C'était lui qui avait pris la parole.
9 Et j'ai eu la possibilité de le trouver dans une situation où nous étions
10 assis peu nombreux à un moment donné, et c'était dans le cadre d'un dîner
11 au restaurant alors le restaurant de Sarajevo. Je me souviens, nous avons
12 ouvert une bouteille de vin, ça je me souviens bien, je ne me souviens pas
13 de tous les détails. Je me souviens que nous y sommes restés assez peu de
14 temps. Je veux dire quelque chose comme une heure.
15 A côté de moi, il y avait M. Zekic et c'est à cause de lui que je me suis
16 trouvé dans ce restaurant. Il s'agissait de quelqu'un qui m'est connu. Il y
17 avait aussi M. Ostojic. M. Ostojic est quelqu'un que j'avais connu
18 auparavant parce qu'il a déjà été là lors de la réunion qui avait fondé le
19 SDS de Bratunac. Mme Hrvacanin, dont le prénom, je crois était Slobodanka.
20 Il y avait quatre, trois ou quatre autres personnes. Mais je ne me souviens
21 pas qui c'étaient. Il ne s'agissait pas de personnes que je connaissais
22 bien. Et mis à part Karadzic et Ostojic, je ne pense pas que quelqu'un
23 d'autre me connaissait.
24 On avait continué à débattre dans ce restaurant des thèmes semblables à
25 ceux qui avaient été évoqués à la réunion. Karadzic, donc a repris la
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1 parole et il avait dit qu'un accord avait déjà été fait pour que la Bosnie-
2 Herzégovine soit partagée. C'est bien la première fois que j'entendais
3 quelque chose du genre. Et donc ça avait attiré mon attention. Ça n'était
4 pas connu dans le milieu politique et je n'ai donc pas osé poser des
5 questions à ce sujet. Mais j'ai écouté très attentivement. Mme Slobodanka
6 Hrvacanin a pris la parole. Elle avait parlé des Serbes à Zenica. Et je me
7 souviens d'un certain nombre de propos échangés entre elle et Karadzic.
8 Est-ce que Zenica est la région qui faisait partie du partage que feraient
9 les Serbes de Zenica et ainsi de suite. Je n'ai pas pu réellement trancher
10 quel était le plan pour Zenica.
11 Mais M. Karadzic a utilisé une formule que j'ai bien retenue. C'était une
12 sorte de suggestion à nous nous qui étions autour de la table et peut-être
13 pour les autres aussi. Il disait tout simplement quelque chose comme :
14 "Si quelqu'un a peur de participer dans tout cela et bien il n'est pas
15 obligé de le faire. Je le comprendrais. Bien sûr, cela ne concernait pas
16 seulement les gens présents autour de la table."
17 Pourquoi est-ce que je vous parle de cette réunion ? Je ne voudrais pas me
18 répéter, mais je pense que c'était la première fois qu'on commençait avec
19 une initiation et que c'était cela qui avait pu indiquer des événements qui
20 allaient suivre et je crois que c'était quelque chose qui n'était jamais
21 apparue auparavant dans le programme du SDS.
22 Alors, dans une certaine mesure, lorsque nous sommes rentrés avec M. Zekic,
23 j'ai parlé de ce qui avait l'objet de la réunion. J'en ai parlé parce qu'il
24 a été mis au courant comme moi. Mais j'ai eu l'impression qu'il n'était
25 tout à fait absolument informé des changements stratégiques des principes
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1 du Parti démocratique serbe. Et en ce sens, je n'ai pas obtenu de plus
2 amples informations depuis, je n'ai pas véritablement pu me rafraîchir la
3 mémoire à propos de ces événements.
4 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je m'excuse de vous interrompre.
5 Alors si vous avez déjà abordé les événements d'avril 1991, car à la page 4
6 de votre déposition au paragraphe 8 et 9, voilà ce qui est indiqué :
7 "Karadzic s'est vanté d'avoir personnellement convaincu Milosevic et que
8 les Serbes devaient maintenant s'armer et il n'avait absolument pas
9 confiance dans la JNA. Il ne pensait pas que la JNA pourrait protéger les
10 Serbes. Karadzic souhaitait armer la population. Djukic a indiqué que nous
11 devions nous armer et qu'au niveau du SDS, il fallait déterminer quelles
12 sont les personnes
13 qui devraient participer et dans quelle région. Et à ce moment-là, il a dit
14 à Goran Zekic et à moi-même, il nous a indiqué ce que seraient nos
15 fonctions pour Srebrenica, Bratunac et cette région."
16 Est-ce bien exact ?
17 R. C'est exact. Il ne s'agit pas de la même réunion. Je m'en excuse. Mais
18 cette réunion est une réunion qui a également eu lieu en avril 1991 avec M.
19 Djukic. Mais c'est une réunion qui a eu lieu à Milici, et c'est une réunion
20 que je souhaitais relater dès la fin de ce que j'avais à dire à propos de
21 la première réunion.
22 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Très bien.
23 R. Donc je m'excuse.
24 Mais j'aimerais maintenant parler des événements qui ont suivi cette
25 réunion de Sarajevo dont je viens vous parler. Je vais essayer de me
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1 rappeler de l'essentiel. Pendant le mois d'avril il a été question de
2 l'armement des Serbes. D'aucun a commencé à en parler. Lorsque je le dis,
3 je parle essentiellement de mes conversations avec Goran Zekic, qui était
4 la seule personne qui venait de la région de Birac et qui avait en quelque
5 sorte un poste assez élevé au SDS et dans l'état. Il était député à
6 l'assemblée. Il était membre du comité principal. Il avait également des
7 fonctions professionnelles au sein de l'assemblée, ce qui fait qu'il était
8 souvent à Sarajevo où il rrencontrait les dirigeants politiques du SDS et
9 il avait certaines informations. Ces informations étaient meilleures que
10 celles que nous possédions nous, qui ne faisions pas partie de ce cercle.
11 Donc, lors de ces conversations, et j'ai mentionné les détails relatifs à
12 ces conversations et je ne veux pas me répéter : il a fait état des
13 activités d'armement des Serbes; il a fait également état de ces activités
14 illégales, par le biais de contrebande, de contrebandiers, il a parlé de
15 ces méthodes. En avril, probablement à la fin du mois d'avril, j'ai eu
16 l'occasion de participer à une réunion à Milici et j'ai déjà expliqué ce
17 qui fut l'objet de cette réunion. Et c'est justement la réunion à laquelle
18 vous avez fait allusion, Monsieur le Président, c'est une réunion, donc,
19 avec M. Djukic. Elle a eu lieu à Milici, dans un restaurant de poisson, le
20 seul restaurant et le meilleur restaurant de cette petite ville.
21 Alors, pour vous expliquer brièvement ce dont il est question, bien que je
22 l'aie déjà avancé, M. Djukic, donc, Rajko Djukic, était une personnalité
23 très connue politique et commerciale dans cette région. Il était directeur
24 depuis de nombreuses années, et il était directeur des mines de bauxite, à
25 l'époque. C'est quelqu'un qui au début du système politique, était un homme
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1 d'affaires et était un politicien qui a joué un rôle essentiel, car quand
2 il s'agit d'un des membres fondateurs du SDS et d'un des meilleurs dauphins
3 du SDS. Donc, c'est une personne qui avait des liens avec les dirigeants
4 politiques du SDS. Et au début et je ne sais pas combien de temps cela a
5 duré, il était président du comité exécutif du SDS. Donc, c'est un homme
6 qui connaissait la situation, qui connaissait très bien la direction
7 politique ou les dirigeants politiques du SDS.
8 Et maintenant, je parle de quelque chose que dont j'ai oui dire, de façon
9 indirecte. Car, en Serbie, dans les milieux politiques du SDS, il était
10 particulièrement prisé. Il a fondé plus tard un parti, le parti JUL. Donc,
11 son nom est également lié à ce parti et son autorité, dans cette région,
12 était véritablement bien établie.
13 Je ne souhaiterais pas de vous donner de plus amples détails sur la façon
14 dont la réunion fut convoquée. Mais, à la réunion, il a dit que les
15 dirigeants politiques du SDS en Bosnie-Herzégovine avaient décidé que les
16 Serbes en Bosnie-Herzégovine devraient s'armer. Et c'est à ce moment-là
17 qu'il a dit que Karadzic avait convaincu personnellement M. Milosevic, le
18 président de la Serbie à l'époque, d'armer les Serbes en Bosnie-
19 Herzégovine. Alors, je ne connais pas le contexte plus ample, mais je
20 suppose que Karadzic était surtout intéressé par les Serbes de Bosnie.
21 Et j'ai eu l'occasion, à une des réunions ultérieures qui ont eu lieu avec
22 M. Karadzic. Il m'est assez difficile de me souvenir de la date exacte de
23 cette réunion, je ne pense pas qu'il s'agissait d'une réunion officielle,
24 plutôt d'une réunion officieuse. Et j'ai littéralement entendu M. Karadzic
25 dire et confirmer, non pas à moi personnellement, mais il s'adressait à
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1 quelqu'un qui était présent. Et il a dit que c'est lui qui, en fait, avait
2 fait en sorte qu'il soit possible que les Serbes de Bosnie-Herzégovine
3 s'arment par le truchement de Milosevic. Et il nous a présenté les raisons
4 de sa requête : il nous a dit qu'il n'était pas d'accord avec le rôle des
5 militaires dans la résolution de la crise politique en Bosnie-Herzégovine
6 et en Yougoslavie également.
7 Il pensait à un certain désaccord politique et, par exemple, il pensait à
8 l'armée qui était une unité multi-ethnique dans l'ex-Yougoslavie. Et il
9 pensait à la façon dont cette armée s'adapterait à certaines mutations et
10 certains changements qui se produisaient quasiment au quotidien. Il y a
11 probablement réfléchi, c'est ce qu'il nous a expliqué. Donc, qu'il y avait
12 un certain désaccord à l'époque, pour ce qui était de l'armée et un
13 désaccord entre les différents dirigeants. Et l'opinion de Milosevic à
14 propos de la JNA était qu'il avait entièrement confiance dans la JNA et
15 dans la façon dont elle avait été constituée pendant la période précédente.
16 Alors quel fut notre point de vue, notre point de vue ainsi que celui de
17 Goran Zekic ? Je vous l'ai déjà décrit, donc, je ne voudrais surtout pas
18 répéter toutes les informations, à savoir comment est-ce que Djukic nous a
19 donné un papier avec le nom et l'adresse de l'homme que nous étions censés
20 contacter. Donc, j'omettrai ces détails. Mais, au début du mois de mai,
21 Goran Zekic et moi-même nous nous sommes rendus à Belgrade. Il m'a cherché
22 le matin, nous sommes partis pour Belgrade. Il m'a dit qu'il avait déjà
23 pris contact, comme cela avait été convenu. Nous sommes arrivés. J'ai déjà
24 décrit par le menu détail cet homme. Je me souviens d'ailleurs d'un très
25 grand nombre de détails relatifs à cette réunion.
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1 M. Milosevic a essayé de réfuter cela lors de son procès, mais il est
2 absolument indubitable que j'étais présent et que j'ai entendu et vu ce qui
3 devait être entendu. Donc, je ne voudrais surtout pas répéter ces détails.
4 Donc, il y avait donc un accord avec Kertes et je lui ai parlé. L'accord
5 auquel nous sommes parvenus ne nous satisfaisait pas. Je pensais qu'il
6 était très indiscret à propos, justement, de sujets pour lesquels il ne
7 fallait pas être indiscret. Mais, ce qui est important, je pense que cela a
8 son importance, est que Goran Zekic a posé une question à M. Kertes. Il lui
9 a demandé : Qu'avait l'intention de faire la Serbie pour résoudre la crise
10 politique en Bosnie-Herzégovine ? Quel est le rôle de la Serbie ? Quelles
11 sont ses intentions par rapport aux Serbes de Bosnie-Herzégovine ? Et ce
12 que j'ai entendu, est que M. Kertes a dit que la décision des dirigeants
13 politiques de la Serbie étaient comme suit : A 50 kilomètres de la Drina,
14 nous sommes justement de cette région, il a dit donc que cette région,
15 donc, à 50 kilomètres de la Drina, serait Serbe. C'est ce qu'il nous a dit.
16 Nous n'avons pas véritablement fait beaucoup de remarques, après qu'il a
17 dit cela. Nous avons accepté ce qu'il a dit et nous avons eu, par la suite,
18 la possibilité de faire des observations à ce sujet, un peu. Et lors de
19 cette réunion, la première livraison d'armes pour Bratunac fait l'objet
20 d'une décision, et c'est la seule à laquelle j'ai participé directement.
21 J'ai déjà décrit comment cela se déroulait et je ne pense pas qu'il faille
22 que je vous répète les détails, car j'ai décrit tout cela, avec les noms
23 des participants, avec les méthodes de transfert des armes vers Bratunac.
24 Je vous ai dit qui avait transporté ces armes.
25 Et, lorsque je faisais état d'armes, j'ai présenté des renseignements
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1 détaillés, à propos des armes. Mais, je n'ai plus véritablement, participé
2 à cela, par la suite. Les armes sont arrivées par le truchement de l'armée
3 yougoslave à l'époque. Je vous ai déjà mentionné les deux centres à partir
4 desquels les armes sont arrivées à Bratunac et à Srebrenica. Il s'agit de
5 Tuzla et de Uzice. Et le Corps d'Uzice, à ce sujet d'ailleurs je vous ai
6 mentionné les personnes qui y étaient, qui avaient des postes importants,
7 de nouveau, dans ces unités militaires. Je n'ai pas rencontré ces
8 personnes. J'ai également mentionné la personne qui nous a dit, à moi-même
9 et à Goran Zekic, que les armes allaient être distribuées par les
10 militaires. J'ai déjà décrit comment, pendant l'été de 1991, les Serbes de
11 Bratunac et de Srebrenica s'étaient armés. Il s'agissait des activités de
12 la Défense territoriale. Je pense que je l'ai expliqué de façon très, très
13 claire.
14 J'ai expliqué quelles étaient les idées de la TO et comment cela a été mis
15 en pratique sur le terrain. Je ne pense pas que j'ai grand-chose à ajouter
16 à tout cela, car c'est déjà très clair. J'ai fourni, à titre
17 d'illustration, un exemple : à savoir, il y a eu donc un événement qui
18 s'est produit à partir d'un mouvement pour la Yougoslavie, le nouveau
19 communisme ou quelque chose de ce goût-là. Je ne me souviens pas exactement
20 de son nom, a également envoyé une livraison d'armes à Bratunac.Il est
21 important et cela je peux le confirmer, c'est que cela correspond bien à
22 une stratégie. Et il faut savoir que pendant l'automne de 1991, donc à la
23 fin ou à la fin de l'été de 1991, un centre a été formé à Milici à partir
24 duquel d'autres distributions d'armes ont été faites, effectuées. Je ne
25 sais pas même aujourd'hui quelle était l'origine de ces armes à Milici,
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1 mais je m'y suis rendu une fois et j'ai accepté une livraison pour
2 Bratunac. Je m'y suis rendu avec Goran Zekic. J'ai vu M. Djukic ainsi que
3 certains membres de la police locale et des municipalités avoisinantes.
4 Pour ce qui est des armes, je pense que je vous ai donné suffisamment de
5 preuve pour indiquer que tout cela avait été planifié par les dirigeants
6 politiques du SDS en Bosnie-Herzégovine, la structure militaire en
7 Yougoslavie et en Bosnie-Herzégovine et par la structure étatique en Serbie
8 --
9 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Nous vous remercions beaucoup pour
10 tous ces détails. Toutefois, je pense que vous ne devez pas répéter tout ce
11 qui a déjà été versé au dossier comme preuve. En conclusion, j'aimerais
12 vous poser une toute dernière question. Une fois de plus Monsieur Deronjic,
13 est-il vrai qu'en avril, que déjà dès le mois d'avril, M. Djukic vous a dit
14 à vous-même et à M. Goran Zekic que vous deviez, que la zone de Srebrenica
15 et de Bratunac vous était assignée. Est-ce bien exact ?
16 R. Monsieur le Président, c'est tout à fait exact.
17 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Nous devons avoir une pause
18 d'environ quatre minutes. Pourriez-vous, je vous prie, brièvement nous
19 parler des événements du 14 et 15 octobre 1991, et ensuite après la pause,
20 je vous demanderais de poursuivre avec les événements de décembre 1991 pour
21 pouvoir aborder le plus rapidement possible l'essentiel de cette affaire, à
22 savoir l'attaque contre Glogova. Donc je vous saurais gré de bien vouloir
23 vite, pendant les quelques minutes qui nous restent jusqu'à la pause,
24 mentionner donc les événements des 14 et 15 octobre 1991.
25 R. Je vous remercie, Monsieur le Président, et bien sûr je vais mentionner
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1 très brièvement ces événements. Donc l'événement du 15 octobre 1991 est
2 bien entendu bien connu, l'assemblée mixte de Bosnie-Herzégovine a adopté
3 une déclaration visant l'établissement d'une Bosnie-Herzégovine souveraine,
4 ce qui fut présenté par les députés du SDA. Après cela, les députés du SDS
5 sont partis de l'assemblée, ce sont des événements forts connus et je n'ai
6 pas de nouvelles informations à ce sujet.
7 Mais ce qui est important pour Bratunac et j'entends également les
8 répercussions pour les régions locales et que le 18 -- et je ne l'avais pas
9 encore mentionné parce que je m'en suis souvenu que tardivement. Le 18
10 octobre disais-je, j'ai été convoqué de toute urgence à Sarajevo pour
11 participer à une réunion assez semblable, semblable à celle d'avril 1991.
12 Donc il s'agissait d'une réunion plénière du comité principal à laquelle
13 participaient tous les présidents des conseils municipaux de Bosnie-
14 Herzégovine.
15 Il s'agissait d'une réunion extraordinaire qui a été convoquée et j'ai reçu
16 l'invitation de la part du secrétariat du SDS; je pense que j'ai été
17 convoqué par téléphone. Donc je m'y suis rendu et j'ai participé à cette
18 réunion qui fut présidée par le président du SDS et en fait, c'est
19 essentiellement M. Karadzic qui s'est exprimé pendant la réunion. Ils ont
20 fait des observations sur les événements fort connus de la session de
21 l'assemblée du 15 octobre et puis ils nous ont donné un jeu de documents et
22 nous devions mettre en pratique ces documents dans nos régions locales.
23 Alors je ne suis pas très sûr mais je vais essayer de m'en souvenir, il
24 s'agissait des principes de l'organisation du peuple serbe aux vues des
25 nouvelles circonstances politiques ou quelque chose de ce style. Mais
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1 l'élément le plus important du document était l'obligation qu'il nous était
2 donné d'exécuter cela sur le terrain à savoir, il fallait nous préparer
3 pour que soit organisé un plébiscite du peuple serbe en Bosnie-Herzégovine.
4 Et une décision avait été prise pour organiser ce plébiscite en novembre.
5 Alors la question qui était posée était : est-ce que les Serbes souhaitent
6 rester en Yougoslavie ? Cela est tout à fait connu.
7 Et qui plus est, il nous a été demandé de créer une cellule de Crise et
8 c'est la première fois que l'on nous donnait des instructions politiques
9 pour former des cellules de Crise dans les municipalités. A l'époque cette
10 cellule de Crise était intitulée la cellule de Crise du peuple serbe. Ce
11 n'était pas juste quelque chose de politique. La recommandation était que
12 les cellules de Crise devraient inclure des personnes qui ne sont pas des
13 membres du parti, mais qui sont des personnalités connues des différentes
14 communautés locales.
15 Et puis la troisième obligation qui nous a été transmise, était ou
16 consistait à organiser des fora publics dans nos communautés locales et ce,
17 afin d'informer la population locale des grands événements politiques
18 importants, notamment ceux du 15 octobre et il s'agissait d'expliquer cela
19 à la population. Et des instructions très précises nous ont été fournies à
20 propos des explications que nous devions donner. Notre point de vue était
21 tout à fait connu. Nous pensions que ces décisions n'étaient pas
22 constitutionnelles, nous y étions fermement opposés et nous étions en
23 quelque sorte en train de nous organiser. J'ai mis en pratique ces
24 conclusions à Bratunac et il y a des procès-verbaux qui le prouvent.
25 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Avant de conclure, avant la pause,
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1 ai-je le droit d'indiquer que tous les événements que vous venez de
2 mentionner se sont déroulés dans ce que vous appelez dans l'exposé des
3 faits avec Radovan Karadzic, Momcilo Krajisnik et Biljana Plavsic, ainsi
4 que Nikola Koljevic ont pris des mesures pour établir des territoires
5 ethniquement serbes en Bosnie-Herzégovine ? Est-ce bien exact ?
6 R. Oui, cela est tout à fait exact, Monsieur le Président.
7 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] L'audience est levée jusqu'à 16
8 heures 15.
9 --- L'audience est suspendue à 15 heures 47.
10 --- L'audience est reprise à 16 heures 16.
11 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Monsieur Deronjic, je vous
12 demanderais de bien comprendre que le temps qui nous est imparti est
13 limité. J'aimerais vous demander de vous concentrer sur les éléments
14 essentiels qui sont pertinents pour le crime dont nous sommes sévi, à
15 savoir, à l'attaque contre Glogova. Je suppose qu'après le 15 octobre, il a
16 été décidé de constituer une cellule de Crise. Est-ce que vous pourriez
17 nous dire, exactement, quand vous êtes devenu membre ou responsable de la
18 cellule de Crise pour Bratunac ?
19 R. Oui, Monsieur le Président. Je vais répondre à votre question. La
20 cellule de Crise qui, dans un premier temps, était intitulé la cellule de
21 Crise du peuple serbe conformément à la décision prise à la réunion du 18
22 octobre à laquelle j'ai fait allusion. Un ou deux jours après, nous avons
23 établi une cellule de Crise du peuple serbe à Bratunac, dont je suis devenu
24 le président. En novembre ou plutôt en décembre, nous avons constitué une
25 deuxième cellule de Crise en fonction des instructions reçues d'après les
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1 variantes A et B dont je parlerai ultérieurement. Il s'agit de la cellule
2 de Crise du SDS et c'est de cette cellule de Crise dont je suis devenu le
3 président.
4 Je voudrais juste ajouter une phrase à propos des événements en octobre et
5 de la réunion à Sarajevo. Nos instructions étaient de convoquer un forum
6 public, ce que je fis à Bratunac. Nous devions informer la population à
7 propos des intentions des dirigeants serbes en Bosnie-Herzégovine.
8 J'entends les dirigeants du gouvernement. Les dirigeants politiques à
9 savoir les personnes de l'organe mixte de Bosnie-Herzégovine, à l'époque.
10 Lors de cette réunion, il nous a été dit que la politique de création d'un
11 état serbe ou d'une entité Serbe en Bosnie-Herzégovine continuerait, et que
12 des mesures précises seraient prises à cet égard.
13 C'est la première fois que j'entendis parler de la création d'un état serbe
14 en Bosnie-Herzégovine. Je souhaiterais mentionner une session de
15 l'assemblée du peuple serbe qui a eu lieu en novembre. Je ne me souviens
16 pas de la date exacte, mais je sais, par contre, que plusieurs conclusions
17 ont été dégagées à cette réunion et que les provinces autonomes serbes qui
18 furent établies, pendant l'été de 1991, ont été corroborées.
19 Je voudrais mentionner que la région Romanija et Birac a fait l'objet de
20 vérifications, et les instructions étaient que nous devions créer une
21 province autonome spéciale Birac. Ces instructions sont arrivées en
22 décembre. L'assemblée constituante de la SAO Birac fut créée. J'en connais
23 encore la date exacte, le 8 janvier 1992. Je souhaite ajouter que je n'ai
24 pas participé aux préparatifs de cette réunion, parce que je n'y étais pas
25 présent. S'il y a des questions à ce sujet, je sais exactement quels
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1 étaient les dirigeants et quels étaient les dirigeants qui ont été élus à
2 cette réunion.
3 Je souhaiterais, maintenant, parler d'une réunion semblable qui eut lieu le
4 23 décembre. Une réunion semblable à celle qui avait été convoquée
5 auparavant. Le conseil principal du SDS et les présidents des conseils
6 municipaux y étaient présents. L'assemblée a convoqué une session le 23
7 décembre ou plutôt le 21 ou le 22 décembre, mais nous y avons été invité
8 auparavant.
9 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je m'excuse de vous interrompre.
10 Mais avant d'aborder le 23 décembre, j'aimerais que vous vous concentriez
11 sur le 19 décembre parce que -- en fait nous souhaiterions que vous nous
12 donniez de plus amples renseignements qui ne se trouvent pas contenus dans
13 l'exposé des faits. Qui donc vous a invité à cette réunion ? Qui a
14 participé à la réunion ? Qui a pris la parole lors de cette réunion ? Qui
15 en fait était responsable pour l'invention de la variante A et de la
16 variante B ? Quel était l'objectif final de ces deux variantes A et B ?
17 R. Oui, c'est tout à fait exact, Monsieur le Président. Le 19 décembre,
18 nous avons été convoqué à une réunion du conseil principal du SDS à
19 laquelle participaient les présidents des conseils municipaux. Je dois dire
20 que cela a été organisé dans le cadre des préparatifs pour la convocation
21 de l'assemblée. Je sais qu'à cette réunion, les députés de l'assemblée
22 serbe étaient présents, ainsi que tous les dirigeants politiques et lorsque
23 je dis politique j'entends le SDS, j'entends également le gouvernement et
24 M. Karadzic présida cette réunion.
25 Je peux énumérer les membres du comité principal que je connaissais, à
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1 l'époque, ainsi que les présidents des conseils municipaux mais je ne suis
2 pas sûr qu'ils étaient tous présents. Pour la région de Birac, il y avait
3 M. Zekic, le président du conseil municipal de Srebrenica, M. Milenko
4 Stanic, le président du conseil municipal de Vlasenica, il y avait
5 également M. Rajko Djukic, qui était au comité exécutif à l'époque, et il
6 avait le président à l'époque je ne suis pas sûr en fait, il y avait M.
7 Vlacic, alors il y avait M. Brano Grujic, le président du conseil
8 municipal.
9 Il y avait, également, plusieurs députés que je connaissais. Certains, par
10 exemple, avaient des fonctions parallèles tel que M. Zekic. Je sais que M.
11 Novakovic de Bijeljina, également, participait à cette réunion. Ils étaient
12 tous censés y participer mais je ne suis pas sûr qu'ils étaient tous
13 présents parce que, à l'époque, je ne connaissais pas tous les présidents
14 des conseils municipaux du SDS. Lorsque je parle des dirigeants politiques
15 ou de la direction politique, toutes ces séances ont été présidées par le
16 président ou la présidence du SDS. Etant donné que les membres changeaient
17 fréquemment, ce que je peux vous dire en toute certitude, c'est que la
18 réunion fut présidée par M. Karadzic.
19 Je vous dis que je suis sûr que j'ai vu M. Krajisnik, Mme Biljana Plavsic,
20 M. Koljevic, mais je ne peux pas, véritablement, vous dire dans quelle
21 mesure ils étaient présents à la réunion et s'ils ont participé aux travaux
22 de l'assemblée. Je suppose qu'ils étaient présents à ces deux occasions et
23 je sais, d'ailleurs, que je les ai vus. M. Karadzic s'est exprimé pendant
24 la réunion et il nous a informé de tous les documents que nous devions
25 amener dans nos différentes municipalités. Ces documents étaient marqués,
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1 bon, je ne suis pas sûr de pouvoir vous donner les titres exacts, mais il
2 s'agissait des mesures prises pour l'organisation du peuple serbe en
3 Bosnie-Herzégovine. Je ne suis pas absolument sûr du titre officiel du
4 document. Il nous a, également, été dit que ces documents, où il était
5 indiqué strictement confidentiel, nous seraient donnés à la fin de la
6 réunion.
7 Ce document, en fait, a été transmis par la présidence du SDS. C'est ce
8 qu'on nous a dit et contenait des instructions préconisant les mesures qui
9 devaient être prises par toutes les personnes participant à la réunion,
10 notamment nous, les présidents des conseils municipaux. Je me souviens,
11 seulement, de certains détails à propos des explications fournies sur les
12 variantes A et B parce que le président Karadzic, après la session
13 politique de la réunion, a parlé avec une grande précision des instructions
14 conformément aux documents A et B. Je me souviens qu'il nous a mis en
15 garde, et qu'il nous a dit qu'il fallait prendre cela très sérieusement et
16 qu'il fallait absolument exécuter cela sur le terrain. Il nous a expliqué
17 que la crise politique avait atteint un certain niveau; qu'un conflit armé
18 pouvait éclater; que nous devions conserver le contact avec les personnes
19 qui oeuvraient dans la municipalité; que nous étions responsables pour
20 informer les personnes de toutes les mesures et de toutes les décisions
21 prises par les dirigeants des Serbes. Je me souviens qu'il nous a dit qu'il
22 fallait que nous gardions le contact avec tous les foyers même si nous les
23 faisions par messager, même s'il n'y avait pas d'autre possibilité. Je sais
24 qu'il faisait allusion, exclusivement, aux Serbes qui vivaient sur le
25 territoire.
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1 A la fin de la réunion, les documents écrits, dont avait parlé M. Karadzic
2 à la réunion, nous ont été transmis. Lorsque je suis rentré à Bratunac,
3 j'ai convoqué une session du conseil municipal. J'ai indiqué au conseil
4 municipal quel était le point de vue du SDS, de la présidence du SDS, et
5 j'ai donné la parole aux différentes personnes aux fins de discussion. Nous
6 nous sommes consultés afin de voir ce que nous pourrions, véritablement,
7 mettre en pratique dans la municipalité de Bratunac pour ce qui est de ces
8 mesures. Je souhaite simplement ajouter que les conditions de Bratunac
9 étaient telles -- ou plutôt que nous n'avons pas pu mettre en application
10 toutes ces mesures. Ces mesures figurent aux variantes A et B -- deux
11 paragraphes. Il s'agissait de deux étapes. Il s'agissait de mettre en
12 pratique la première étape. La deuxième étape serait mise en œuvre selon
13 l'évolution des circonstances et nous serions tenus informés en temps et en
14 heures.
15 Lors de la première étape de ce système, certaines mesures devaient être
16 prises. Il s'agissait, en premier lieu, d'établir des cellules de Crise du
17 SDS et il s'agissait d'une procédure automatique indiquée dans ces
18 documents des municipalités où les Serbes étaient minoritaires puisqu'elles
19 étaient représentées à moins de 50 % au niveau des organes du gouvernement
20 local. Le président du conseil municipal était le président de la cellule
21 de Crise. Dans la plupart des municipalités, il s'agissait du président de
22 cette même municipalité. Nous avons suivi cette règle. Car à Bratunac, nous
23 n'avions pas suffisamment de personnel. C'est une toute petite ville, la
24 même cellule de Crise, par conséquent, que nous avions mise en place au
25 départ à savoir la cellule de Crise du peuple serbe est devenue la cellule
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1 de Crise du SDS. Et, conformément aux instructions que nous avons reçues,
2 je suis moi-même devenu le président de la cellule de Crise du SDS.
3 C'était assez particulier, mais toutes les personnes qui avaient été
4 membres de la cellule de Crise précédente, étaient soit des membres ou des
5 sympathisants du SDS. Je ne souhaite pas entrer dans le détail de toutes
6 les mesures qui ont été prises à ce moment-là conformément à la première
7 phase, la variante A. Mais je dois dire que certaines mesures
8 disciplinaires, comme par exemple, l'organisation de réunions quotidiennes,
9 des cellules de Crise ainsi que des conseils municipaux, nous avons reçu
10 des instructions -- pardonnez-moi
11 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Monsieur Deronjic, dans l'intérêt
12 du gain de temps, de façon à ce que nous puissions nous consacrer aux
13 points importants que vous nous avez dit, que vous vous souvenez de qui
14 était présent lors des réunions, est-ce que je peux vous poser la question
15 : Qui d'autre était présent lors de la réunion en question, par exemple, M.
16 Brdjanin qui était le représentant de la région de Prijedor, vous en
17 souvenez-vous ?
18 R. Monsieur le Président, je ne peux pas répondre à cette question car je
19 ne m'en souviens pas. Je ne me souviens pas d'avoir vu ces différentes
20 personnes à ce moment-là et à l'époque, je ne les connaissais pas.
21 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Très bien. Ensuite, la variante A
22 et la variante B, à ce moment-là, étaient-elles déjà en place ou est-ce que
23 c'est quelque chose qui a été débattu lors de la réunion en question ?
24 R. La variante B existait déjà sous forme écrite. Le président Karadzic
25 avait fait des commentaires à propos de ces documents et sur les documents
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1 écrits qui nous ont été remis à la fin de la réunion. Nous avons reçu ces
2 documents dans une enveloppe scellée à la fin de la réunion.
3 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Est-ce que je peux vous poser une
4 question très franche : quel était l'objectif de cette stratégie. Nous
5 connaissons tous les six objectifs stratégiques adoptés le 12 mais 1992.
6 Est-ce qu'à ce moment-là déjà vous aviez évoqué les objectifs finaux de la
7 mise en œuvre de ces variantes A et B ?
8 R. Lors de cette réunion, on nous a dit qu'un état serait créé. Je ne me
9 souviens pas si le terme entité a été utilisé. La République Serbe de
10 Bosnie-Herzégovine. Et on nous a dit que c'étaient des mesures qui étaient
11 adoptées par le peuple serbe qui s'était organisé dans des circonstances
12 extraordinaires, des circonstances particulières. Lors de cette réunion, on
13 ne nous a pas dit s'il y avait un lien avec cela et les documents qui
14 avaient été rédigés et qui nous avaient été remis.
15 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Dans l'exposé des faits, on peut
16 lire quelque chose que vous avez déjà évoquée, instructions
17 confidentielles, mais le terme: "des actions doivent être entreprises et
18 des politiques sur l'utilisation de la force, des objectifs exposés par les
19 dirigeants serbes de Bosnie." Pourriez-vous expliquer ceci, s'il vous
20 plaît, ce que je viens de citer au paragraphe 12 "eu égard aux politiques
21 adoptées quant à l'utilisation de la force" au paragraphe 13, s'il vous
22 plaît, dans l'exposé des faits ?
23 R. Oui, Monsieur le Président, cette réunion est, dans les variantes A et
24 B, on pouvait y lire que des mesures avaient été prises pour la séparation,
25 la division, au plan institutionnel, des organes de ces différentes
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1 municipalités. Ceci était particulièrement difficile dans les communautés
2 où les Serbes étaient minoritaires, car il était impossible de trouver une
3 solution d'ordre institutionnel. On nous avait tout simplement dit que ceci
4 devait être fait de façon unilatérale. Des organes parallèles devaient être
5 mis en place dans les municipalités où les Serbes étaient minoritaires.
6 Dans les municipalités où les Serbes n'étaient pas minoritaires,
7 évidemment, cela ne posait pas de problème. Ce n'était que dans les cas où
8 les Serbes étaient minoritaires que cela causait un problème. Je souhaite
9 en parler aujourd'hui. Ces mesures étaient le prolongement de la politique
10 du SDS depuis le printemps de l'année 1991, dont l'objet était de mettre en
11 place des territoires ethniquement serbes en Bosnie-Herzégovine. Ce qui,
12 plus tard, a donné lieu à des méthodes qui faisaient usage de la force et
13 de la violence. A l'époque où je parle, je n'avais aucun renseignement là-
14 dessus. Personne ne m'a dit que ces mesures politiques et stratégiques
15 allaient déployer de telles méthodes, chose que j'ai pu constater par la
16 suite. Et aujourd'hui, je sais que ces méthodes faisant usage de la
17 violence étaient des méthodes qui faisaient partie de la stratégie proposée
18 par les Serbes, qui souhaitaient mettre en place des territoires
19 ethniquement serbes en Bosnie-Herzégovine.
20 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Pourriez-vous avoir l'obligeance de
21 nous dire ce que vous entendez lorsque vous plaidez coupable dans la phrase
22 suivante : "Miroslav Deronjic" au paragraphe 12 : "après des mesures
23 concrètes et positives a fait usage de la force dans le but d'expulser par
24 la force des non-Serbes des territoires qui étaient considérés comme
25 serbes."
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1 Qu'entendez-vous par "usage de la force" ?
2 R. Monsieur le Président, le 5 mai 1992, dans une conversation que j'ai
3 eue avec M. Zekic, j'ai découvert qu'en outre, tous les plans qui
4 n'exprimaient pas clairement qu'il y aurait un recours à la force, que le
5 recours à la force avait déjà été organisé. Et que ceci était déjà impliqué
6 dans les municipalités voisines. Et des méthodes assez violentes avaient
7 déjà été utilisées à Bratunac et à Srebrenica. A partir de cette date-là,
8 le 5 mai 1992, je savais que ces méthodes-là faisaient partie intégrante
9 des plans qui avaient pour objet de mettre en place une république serbe en
10 Bosnie-Herzégovine.
11 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Conseil de la Défense, s'il vous
12 plaît, vous avez la parole.
13 M. ZECEVIC : [interprétation] Monsieur Deronjic a un exemplaire de ce
14 document en Serbe, par conséquent, il peut ouvrir le document qu'il a sous
15 les yeux et il peut faire ses observations à partir de là, dans le but de
16 gagner du temps.
17 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie et je souhaite
18 parler de "recours à la force" et "usage de la force" et si vous pouviez
19 nous dire ce que vous entendez par là. Venons-en aux faits, s'il vous
20 plaît.
21 M. HARMON : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je faire une autre
22 proposition, s'il vous plaît. M. Deronjic n'a pas un exemplaire de l'exposé
23 des faits sous les yeux, auquel, lorsque vous faites référence à certains
24 paragraphes. Je crois que cela pourrait être utile si M. Deronjic pouvait
25 avoir une copie du document.
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1 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Oui, absolument. Je fais référence
2 au paragraphe 13 de l'exposé. Cela étant dit, puisque M. Deronjic est en
3 train de lire cette partie du document, je souhaite dire que, lorsque l'on
4 fait concorder l'acte d'accusation avec l'exposé des faits, l'élément
5 fondamental à prendre en considération ici est effectivement l'acte
6 d'accusation, et M. Deronjic plaide coupable à l'ensemble de l'acte
7 d'accusation sans aucune réserve. J'estime par conséquent, qu'au numéro 1
8 et le numéro 2, lorsque nous avons des exposés de faits supplémentaires,
9 aux fins du prononcé de la sentence, nous devons considérer que ces faits
10 expédiés ont été acceptés, et nous n'avons pas besoin d'aborder dans les
11 détails ces différents points.
12 Par exemple au paragraphe 10, entre de 10 à 13 lorsque nous demandons à
13 entendre des faits supplémentaires aux fins du prononcé du jugement, est-ce
14 quelque chose que les parties acceptent ou non ? Ensuite je souhaite
15 répondre aux clarifications sur l'acte d'accusation lui-même, il y a peut-
16 être ou y -t-il ou non une discordance entre l'acte d'accusation et
17 l'exposé des faits, pouvons-nous procéder ici de façon à avancer
18 rapidement, s'il vous plaît.
19 M. HARMON : [interprétation] L'acte d'accusation lui-même est l'élément
20 primordial, l'exposé des faits sous-tend cet acte d'accusation et sous-tend
21 le plaidoyer de culpabilité. Mais c'est l'acte d'accusation qui est
22 l'élément essentiel d'après nous.
23 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Très bien.
24 M. ZECEVIC : [interprétation] Nous sommes tout à fait d'accord, Monsieur le
25 Président, Madame, Messieurs les Juges.
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1 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Merci pour ces éclaircissements qui
2 facilitent notre tâche. Nous sommes toujours au paragraphe 12 et 13 de
3 l'exposé des faits car nous essayons de mieux comprendre les termes assez
4 vagues qui y figurent. "Usage de la force pour expulser les Serbes" et
5 "actions déterminées ou décidées." Apparemment il s'agit d'instructions qui
6 ont été données en toute confidentialité, est-ce exact le l9 décembre
7 1991 ?
8 R. Oui, tout à fait, Monsieur le Président. Paragraphe 12 où j'ai agi de
9 façon décisive et déterminante, et où j'ai adopté les mesures qui figurent
10 dans les variantes A et B, à savoir les mesures qui ont été prises dans la
11 municipalité de Bratunac. Ce que j'entends par là, la division de la police
12 à Bratunac, quelque chose que j'ai mise en place lors de l'assemblée mixte
13 régionale à Bratunac avec les représentants du SDA. Nous avons un compte
14 rendu un procès-verbal qui a été rédigé après cette réunion. Nous avons un
15 document qui l'atteste. J'ai également pris d'autres mesures mais à cause
16 des circonstances propres à Bratunac, certaines de ces instructions par
17 exemple, qui figurent dans les variantes A et B à savoir les éléments qui
18 ne pouvaient pas être mis en œuvre, à savoir par exemple la création de
19 tribunaux spéciaux serbes. Pour ce qui est des postes de police dans
20 certaines régions, il s'agissait de séparer les différents organes du
21 pouvoir de façon générale.
22 Au paragraphe 13 par exemple, il est indiqué "et plus tard également,
23 d'avoir recours à la force." J'entends par là ce qui est contenu dans
24 l'exposé des faits et lors de mon entretien le 5 mai et fait de façon non
25 équivoque, découvert que "l'usage de la force" est une méthode qui devait
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1 être utilisée pour réaliser ces objectifs. Et j'ai agi en ce sens eu égard
2 aux événements qui ont eu lieu à Glogova.
3 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Bien. Qu'entendez-vous par usage de
4 la force, pourriez-vous élaborer là-dessus un petit peu s'il vous plaît,
5 car l'usage de la force peut être compris de bien différentes manières. On
6 peut parler de l'utilisation d'armes ou toutes autres choses. Je ne
7 souhaite pas répondre à votre place, donc si vous auriez l'amabilité de
8 nous le dire avec plus de précision ce que signifie le terme "usage de la
9 force."
10 R. Le terme "usage de la force" signifie transfert de la population des
11 territoires et ce, de façon violente. Le comportement des unités de
12 volontaires, qui étaient déjà arrivés dans la région ainsi que le
13 comportement de l'armée du peuple yougoslave lors de ces événements, ainsi
14 que le comportement des cellules de Crise et des individus du côté serbe au
15 cours de ces périodes. Par conséquent, le terme "usage de la force" à mon
16 sens recouvre tout cela dans ce contexte.
17 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Par conséquent, ceci comprend
18 également le comportement des unités de volontaires qui étaient déjà
19 arrivées dans la région, ainsi que le comportement de la JNA. Est-ce que
20 exact ?
21 R. C'est exact Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Est-ce que vous entendriez par là
23 également l'utilisation d'armes ou de chars ?
24 R. C'est exact Monsieur le Président, oui tout à fait.
25 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Est-ce que vous entendez par là que
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1 cela peut signifier le massacre de personnes ?
2 R. Oui Monsieur le Président, c'est exact. Des personnes appartenant au
3 groupe ethnique musulman ont été tuées au cours de cette période.
4 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Et ceci faisait partie du plan qui
5 avait été mis en œuvre. Est-ce quelque chose qui figure déjà dans le
6 document intitulé instructions strictement confidentielles, usage de la
7 force qui pouvait mener au massacre de personnes, ou était-ce quelque chose
8 qui avait déjà été élaboré dans le plan mis en place au mois de décembre ?
9 R. Monsieur le Président, ceci n'a pas été exprimé clairement. De tels
10 instruments ne nous ont pas été remis sur le terrain, eu égard à l'usage de
11 la force.
12 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Par conséquent, qui a décidé qu'il
13 fallait recourir à la force ? Et dans quelle mesure il s'agissait de
14 recourir à la force ? Nous parlons maintenant des événements qui ont abouti
15 au 9 mai, quel rôle avez-vous joué concrètement ?
16 R. Monsieur le Président, avant que cet événement ne se produise, j'avais
17 découvert au cours de ma conversation avec M. Zekic qu'on allait faire
18 usage de la force. Et les événements à Bijeljina, les événements à
19 Zvornik, qui sont des municipalités très proches de la mienne, puisque
20 Zvornik est voisin de la municipalité de Bratunac. Les événements avaient
21 déjà eu lieu le 1er avril et se sont poursuivis pendant tout le mois
22 d'avril, ce sont des faits de notoriété publique.
23 A ce moment-là, j'ai moi-même conclu ce que signifiait l'usage de la force
24 à Bijeljina, Zvornik et dans d'autres municipalités, chose que j'ai appris
25 des médias. J'ai appris l'usage de la force par les médias dans ces
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1 municipalités-là. Et j'en avais conclu que ces unités paramilitaires
2 étaient des unités connues sous le nom la Garde d'Arkan, les Aigles blancs
3 et d'autres volontaires de Serbie. C'étaient des unités qui venaient de
4 Serbie et qui faisaient usage de la force contre la population musulmane
5 dans cette région. L'objectif étant d'expulser la population non-serbe de
6 ces municipalités.
7 Par conséquent, j'ai eu l'occasion de suivre ces événements en Bosnie de
8 l'est et en Bosnie orientale et à Podrinje, qui sont des municipalités très
9 proches des nôtres et la composition ethnique était tout à fait semblable.
10 Donc j'en avais conclu que la mise en œuvre ou l'usage de la force avait
11 été dicté par Belgrade. Et lorsque je me suis entretenu le 5 mai avec M.
12 Zekic, j'ai découvert qu'effectivement ceci faisait partie du plan et que
13 les dirigeants serbes de Bosnie avaient été à l'origine de tout cela, y
14 compris le président Karadzic et toutes les autres personnalités politiques
15 et les Serbes de Bosnie. Quelque chose qui avait été préparée conjointement
16 avec les dirigeants serbes et l'application de ces méthodes en tout cas sur
17 le terrain était dictée par Belgrade.
18 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Retournons à Glogova maintenant.
19 Vous avez parlé des unités paramilitaires, des gardes d'Arkan. Et
20 simplement pour les besoins du compte rendu d'audience dans le cadre de
21 cette affaire, qui était la personne qui dirigeait les Aigles blancs ? Est-
22 ce que vous le savez ?
23 R. Oui. J'ai découvert par la suite que le nom de M. Jovic était sur les
24 lèvres d'un certain nombre de personnes. Je ne me souviens pas de son
25 prénom. C'était celui qui avait créé l'unité qui s'intitulait les Aigles
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1 blancs, c'était un petit parti d'opposition en Serbie. Et lorsque je dis
2 parti "d'opposition," on doit entendre par là qu'il s'agit de quelque chose
3 qu'il faut citer entre guillemets.
4 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vais maintenant apporter la
5 discordance très légère qui existe dans l'acte d'accusation au paragraphe
6 20, je pense que vous avez là l'acte d'accusation en B/C/S sous les yeux ?
7 Est-ce exact ? Paragraphe 20.R. Oui, Monsieur le Président.
8 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Dans l'acte d'accusation on peut
9 lire que : "La municipalité a été contrôlée par les forces serbes de Bosnie
10 le 17 avril 1992." Et dans l'exposé des faits, on peut lire que : "Le 17
11 avril 1992, des volontaires sont entrés de la RSFY, sont entrés à Bratunac,
12 et ont établi leur QG à l'hôtel Fontana où ils ont rencontré leurs
13 commandants qui ont lancé un ultimatum aux dirigeants des communautés de
14 Srebrenica et des Musulmans de Bratunac de rendre leurs armes aux autorités
15 légales en place, aux Serbes de Bosnie ou d'être détruits par des milliers
16 de soldats serbes," et cetera.
17 Est-ce qu'il s'agit d'une action conjointe entre les forces serbes de
18 Bosnie et les volontaires, comment devons-nous comprendre ceci ? Vous êtes,
19 je crois, à même de nous répondre et de savoir qui était responsable de
20 cette prise de contrôle.
21 R. Monsieur le Président, je vais répondre à votre question. M. Zekic a
22 fait venir les volontaires à Bratunac. Personnellement je n'ai rien eu à
23 voir avec leur arrivée à Bratunac. J'ai assisté à la réunion à l'hôtel
24 Fontana car j'y avais été convié. Et je souhaitais apporter une correction
25 mineure. Nous avons parlé de la réunion qui avait déjà démarrée à l'hôtel
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1 Fontana, le 17 avril 1992. Et lorsque je suis arrivé, il n'y avait que le
2 représentant des Musulmans de Srebrenica qui s'y trouvait, les
3 représentants des groupes de volontaires ainsi que les dirigeants du SDS de
4 Srebrenica --
5 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi tous les noms.
6 R. J'y ai trouvé M. Simic, et à ce moment-là c'était le président de
7 l'assemblée serbe de Bratunac. Et il a quitté la réunion très rapidement.
8 Et je dois ajouter qu'il n'y avait aucun représentant des Musulmans de
9 Bratunac. Mais on m'a rapporté qu'on devait lancer un ultimatum et on
10 devait leur demander de renoncer au pouvoir à Bratunac. La prise de
11 contrôle du pouvoir, eu égard au poste de sécurité publique à Bratunac, a
12 été effectuée par les volontaires après que le chef du poste de sécurité
13 publique et le représentant des Musulmans ainsi qu'un nombre important de
14 policiers, après ma conversation avec eux, ont quitté le poste de sécurité
15 publique à Bratunac et sont partis en direction de Tuzla.
16 Il n'y avait aucune unité, aucun individu de Bratunac qui a participé à
17 ceci. J'en suis tout à fait certain. Je m'y trouvais et j'ai encore à
18 l'esprit des différentes images. Il y avait un homme.
19 Je crois que c'était un policier, un Musulman, qui était assis sur les
20 marches lorsqu'ils sont entrés dans le poste de sécurité publique. Ils y
21 sont restés pendant une heure environ. Et ils ont pris des documents. Ils
22 ont pris les véhicules. Ils ont pris les timbres. Et les véhicules du poste
23 de sécurité publique. Et ensuite, accompagnés de Goran Zekic et d'autres
24 membres de ce groupe, ils sont partis en direction de Srebrenica. Je pense
25 que ceci est un court récit de cet événement. Si vous avez des questions,
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1 je suis bien sûr disposé à vous répondre.
2 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Quel rôle avez-vous joué lors de
3 cette réunion ? Etiez-vous sur un pied d'égalité avec votre collègue, M.
4 Zekic, ou y avait-il quelqu'un d'autre présent qui commandait la prise de
5 contrôle de la ville ? Qui pour finir était le responsable ? Je vous ai
6 déjà dit, je sais que vous avez plaidé coupable eu égard à ce point. Mais
7 il nous faut éclaircir ce point. Quels liens entreteniez-vous avec les
8 volontaires ? Avez-vous accepté la présence des volontaires à l'hôtel
9 Fontana ainsi que le recours à la force comme vous venez de nous dire, il y
10 a quelques instants ?
11 R. Oui, Monsieur le Président. J'étais présent à cette réunion, laquelle
12 j'avais été convoquée. J'y suis resté très brièvement puisque les
13 représentants musulmans m'avaient demandé de venir un peu à la sécurité
14 publique pour avoir un entretien avec moi. Je sais que ce représentant des
15 Musulmans bosniaques m'avait demandé une garantie que les volontaires ne
16 leurs feraient aucun mal. J'ai dit que je ne connaissais pas ces
17 volontaires et que je n'étais pas en mesure de donner aux représentants
18 musulmans les garanties qu'ils demandaient. Ils m'ont demandé si je pouvais
19 les aider à quitter Bratunac en sécurité. J'ai dit que, pour ma part,
20 j'allais tout faire pour qu'ils puissent partir en sécurité et donc pendant
21 la réunion, en réalité, je suis resté très peu de temps. C'était le thème
22 central de la réunion, la situation à Srebrenica. Je ne sais pas pourquoi
23 les représentants du régime de Bratunac n'étaient pas là parce qu'ils
24 avaient reçu l'ultimatum. Je ne peux que supposer que la raison était la
25 peur que ressentaient les personnes en se rendant à la réunion. Je suis
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1 allé au poste de police. J'ai parlé avec eux. Ils m'ont demandé de quitter
2 Bratunac. Je ne m'y suis pas opposé. Par ailleurs, je ne disposais d'aucun
3 instrument qui me permettait de leur garantir quelque sécurité que ce soit.
4 A ce moment-là, je n'occupais aucune fonction au sein de la municipalité de
5 Bratunac. Je n'étais que le président de la cellule de Crise de Bratunac.
6 Voici toutes les données dont je dispose. Voilà ce que j'ai dit.
7 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vais vous poser une question
8 directe. Avez-vous ordonné à ce que Glogova soit désarmée avant la fin du
9 mois d'avril et au début du mois de mai 1992 ?
10 R. Non, Monsieur le Président. La décision de désarmer les Musulmans dans
11 le village de Bratunac et d'autres villages était prise par la JNA. C'était
12 M. Reljic. C'était une fois que la JNA était arrivé à Bratunac. Je pense
13 que ceci avait eu lieu après le 20 avril. La réunion a eu lieu dans une
14 entreprise à Bratunac qui s'appelle Vihor Bratunac. C'est lui qui a pris la
15 décision. Le fait que M. Reljic avait introduit le contrôle militaire de
16 Bratunac est bien connu. On a pu voir les affiches partout dans Bratunac;
17 que c'était lui le commandant de la ville et que c'était lui le responsable
18 de tous les événements qui avaient eu lieu.
19 Il faut que je souligne que le désarmement des Musulmans à Bratunac avait
20 commencé dès le jour où il avait pris sa décision. Je crois que cela peut
21 se situer quelque part déjà le 23 et le 24 parce qu'à Glogova, le
22 désarmement devait avoir lieu le 27. J'ai, personnellement, participé aussi
23 dans le village de Pocus [phon] à ce désarmement parce que j'ai été
24 mobilisé en tant que soldat de la Défense territoriale. En ce qui concerne
25 la cellule de Crise, M. Reljic, qui était le chef de l'unité, a pris la
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1 décision qu'il fallait désarmer les Musulmans et nous avons exécuté ses
2 ordres. Je n'ai pas pu parler avec lui de l'intention éventuelle de
3 désarmer les Musulmans. C'était quelque chose qu'il avait fait lui-même au
4 moment où il est arrivé Bratunac.
5 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] A partir de quel moment vous
6 considérez que Glogova était un village désarmé, sans armes et sans
7 défense ?
8 R. Je pourrais affirmer avec certitude que c'était le 27 avril puisque
9 tous les témoins disent que c'était ce jour-là qu'on avait collecté la
10 plupart des armes. Je dois dire que Glogova est un assez grand village et
11 que le désarmement avait pris deux à trois jours. Ce désarmement a été fait
12 par les unités de la Défense territoriale et de la police. Personnellement,
13 j'étais au courant et je sais qu'un jour donné, je ne me souviens pas
14 lequel, nous avons exprimé notre accord quant à ce désarmement. Je dois
15 dire qu'au début du mois de mai, il n'y avait plus d'armements, plus
16 d'armes à Glogova.
17 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Tournons-nous, maintenant, sur les
18 événements de Glogova. Je vais citer, ici, l'acte d'accusation, paragraphe
19 8(e), vous avez déjà plaidé coupable quant à ce chef d'accusation : "M.
20 Deronjic qui était le président de la municipalité de Bratunac, qui lui a
21 donné le contrôle, de fait, de la police et de la Défense territoriale, a
22 donné l'ordre d'attaquer le village de Glogova, de le mettre à feu et
23 d'expulser les habitants musulmans de ce village." Est-ce que vous
24 reconnaissez ce que je viens de lire puisque vous avez plaidé coupable à ce
25 sujet ?
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1 R. Oui, Monsieur le Président. Ce que vous venez de lire est, tout à fait,
2 exact et je n'ai rien à changer.
3 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] A qui avez-vous donné l'ordre
4 d'attaquer ?
5 R. L'ordre d'attaquer était un ordre que j'ai émis, le 9 mai au soir, à la
6 Défense territoriale de Bratunac ce qui inclus aussi les forces de police
7 qui se trouvaient à Bratunac. Je n'ai pas pu donner aucun ordre aux unités
8 de la JNA. Je leur ai, tout simplement, posé la question s'ils allaient
9 participer à l'action. M. Reljic, qui était le commandant de l'unité en
10 question, m'a répondu qu'ils allaient participer à l'opération.
11 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Qu'est-ce qu'il en avait été des
12 volontaires ? Est-ce qu'ils avaient participé aussi à l'attaque ?
13 R. Monsieur le Président, à l'époque, nous avions des conflits avec les
14 volontaires. Personnellement, il y a eu plusieurs incidents entre moi et
15 mes volontaires. A un moment donné, la population aussi n'était pas
16 d'accord. L'armée, quand elle est arrivée à Bratunac, a commencé à
17 s'occuper des volontaires aussi. A la réunion de la cellule de Crise, il
18 n'y avait aucun des volontaires. Ma décision, je ne sais pas dans quelle
19 mesure elle est concernée, mais ce que je peux dire, c'est que les
20 volontaires avaient bel et bien participé à l'opération à Glogova, et si
21 besoin était, je pourrai vous en donner plus de détails.
22 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Pourriez-vous, s'il vous plaît,
23 nous donner plus de précision à cet égard, surtout concernant le paragraphe
24 35 de l'exposé des faits puisque vous avez déjà plaidé coupable en disant
25 que vous avez demandé au capitaine Reljic de tirer un obus dans l'une des
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1 maisons pour provoquer la panique. Pourriez-vous élaborer un peu plus là-
2 dessus et pourriez-vous nous dire ce qui s'était passé le soir du 9 mai
3 1992.
4 R. Toutes ces allégations sont complètement exactes. Lors de la réunion en
5 question, j'ai demandé à M. Reljic de faire preuve de force lors de
6 l'attaque. J'essaierai de vous expliquer pour quelles raisons, je me suis
7 conduit ainsi. Auparavant, j'avais discuté avec M. Zekic, celui-ci m'avait
8 dit que l'utilisation de force était quelque chose dont on avait convenu et
9 que cela était déjà utilisé dans toute une série de municipalités. J'ai
10 pris ma décision en connaissance de ces faits-là. J'ai, aussi, une
11 confirmation d'un autre côté et quand je parle d'un autre côté, je pense
12 ici à la Serbie.
13 A Bratunac, un représentant de la police de la Serbie était présent. Son
14 nom était Predrag Spasojevic. Il est apparu à Bratunac vers la mi-avril. Je
15 lui ai demandé ce que ce service de sécurité pensait de mon intention
16 d'expulser par la force les Musulmans de Bratunac y inclus de deux villages
17 en périphérie de Bratunac. Il a dit qu'il pensait que ma décision était
18 bonne et que je pouvais avoir la confirmation que ma façon d'agir, mes
19 intentions étaient approuvées.
20 Je ne pouvais pas savoir, à ce moment-là, comment se comporterait, ce que
21 ferait la JNA. Cependant le 7 mai, j'ai rencontré M. Reljic. Il m'avait
22 invité de monter sur une côte, à savoir dans mon village natal, et de
23 regarder sur cette côte le village de Glogova tout entier. Nous avons pu
24 regarder comment nous allions procéder dans les jours à venir. Il me disait
25 toujours, lors de nos entretiens, que moi, je n'avais aucune autorité sur
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1 celui qui tire, et qu'il allait, toujours, consulté son commandement.
2 Le commandement de son unité se trouvait, à l'époque, je crois à Sekovici.
3 Il s'agissait d'une brigade qui est complètement mécanisée. Je ne
4 connaissais personne au sein du commandement de la Brigade et je ne me suis
5 jamais rendu. Je pensais que ce qu'il me disait était tout à fait
6 raisonnable et je lui ai demandé s'ils allaient participer. Il avait
7 répondu par l'affirmative et il avait, aussi, dit qu'il allait consulter
8 son commandement. Ce que je lui ai demandé, c'était que, s'ils allaient
9 participer à l'opération lors de la première attaque. Je ne savais pas à
10 quoi nous pouvions nous attendre dans le village de Glogova car il s'agit
11 d'un village énorme. Je demandais, donc, que l'armée joue un rôle actif et
12 non pas un rôle d'observateur.
13 Lors de la réunion, je lui ai proposé que lors de la première étape, au
14 moment où nous allions nous retrouver aux alentours de Glogova, qu'il tire
15 un obus. C'était pour montrer aux Musulmans que l'armée était complètement
16 de notre côté, car cela allait nous donner un avantage et cela allait
17 provoquer la peur et la panique auprès de la population musulmane. Cela
18 allait diminuer leur ambition et leur espoir d'opposer une résistance à nos
19 forces pendant l'opération.
20 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Permettez-moi de vous interrompre.
21 Quand il s'agissait d'un obus tiré par un char sur une maison, vous avez
22 accepté et vous avez tenu compte du fait qu'il pouvait y avoir des
23 habitants qui occupaient la maison ? Vous étiez conscient du fait que
24 l'obus qui allait être tiré pouvait, très bien, tuer les occupants de la
25 maison.
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1 R. Monsieur le Président, je dois apporter une clarification. Je n'ai
2 réellement pas donné un ordre. J'ai tout simplement émis une suggestion. Je
3 ne le dis pas pour me justifier. J'ai émis une suggestion, une
4 recommandation que j'ai donnée à un officier de la JNA qui a passé toute sa
5 vie à s'instruire en matières militaires et qui était un professionnel. Je
6 peux dire que ce que j'ai donné à faire, commande un nombre de
7 clarification, mais tout simplement que j'ai dit : c'était qu'on pouvait
8 tirer un obus qui n'était pas, forcément, en lieu d'habitation. Il y avait,
9 par exemple, des étables où d'autres types de bâtiments où il n'y avait pas
10 d'habitants. Peut-être que je m'étais mal exprimé.
11 Dans les clarifications que j'ai pu apporter depuis, on en avait beaucoup
12 parlé. Je pense que c'était lui aussi qui pouvait être remis en question si
13 jamais il utilisait, cet obus, mal. En tout cas, je voulais créer une
14 situation de panique et non pas tuer. Ceci étant dit, il n'a pas accepté ma
15 recommandation et je pense, que d'un point de vue militaire, sa façon
16 d'agir était tout à fait justifiée.
17 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Le 30 septembre lors d'une
18 déposition vous avez accepté sans émettre aucune réserve à cet égard et je
19 vous cite : "Miroslav Deronjic a incité le capitaine Reljic de tirer un
20 obus dans l'une des maisons au moment du début de l'attaque pour semer la
21 panique auprès de la population musulmane de Glogova."
22 Est-ce que vous souhaitez retirer cela ou vous continuez à accepter ces
23 mots ?
24 R. Non, je ne retire rien de ce que j'ai dit à ce moment-là, mais j'ai
25 essayé d'apporter quelques explications. C'est à la Chambre de décider si
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1 mes propos, visant à apporter des explications, étaient pertinents ou pas.
2 Je peux dire que j'ai agi de la sorte lors de la réunion de la cellule de
3 Crise à Bratunac.
4 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Faisons cela étape par étape. Donc,
5 avez-vous incité le capitaine Reljic ?
6 R. Je pourrais dire que j'ai répété cela plusieurs fois pour essayer de
7 voir s'il était prêt à participer de manière active dans l'opération, où
8 voir même s'ils allaient participer du tout, parce qu'il y avait des doutes
9 à ce sujet-là. Je peux répéter ce que j'ai dit aussi au bureau du Procureur
10 [comme interprété]. A côté de Reljic, il y avait l'un de ses adjoints qui
11 avait dit, à un moment donné : "Oui, l'armée va quand même participer à
12 l'opération, M. Deronjic," et il s'est tourné aussi vers tous les membres
13 de la cellule de Crise. Il a dit voilà : "L'armée va participer à
14 l'opération," et voilà comment il avait répondu à ma question.
15 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Vous vous en tenez au propos fait
16 lors du plaidoyer de culpabilité. Et comme, M. Deronjic, je voudrais passer
17 à l'entretien qui a eu lieu soit en octobre, soit en novembre, comme
18 l'affirme M. Harmon. Malheureusement, nous ne trouvons pas de date à ce
19 document. En tout cas à la page 30, paragraphe 101, je cite : "Lors de
20 l'une des réunions de la cellule de Crise, M. Reljic nous a dit qu'il avait
21 pris la décision de désarmer les villages musulmans. Nous avons appelé cela
22 la campagne pour le désarmement des extrémistes, mais nous savions que cela
23 se référait aux villages musulmans. Cette campagne a été menée de la façon
24 suivante : d'abord, on a mobilisé la Défense territoriale et par la suite,
25 très tôt le matin avant l'aube, on allait créer un étau autour du village.
Page 147
1 Par la suite, on allait rentrer dans le village et après son signal, une ou
2 deux balles allaient être tirées par chaque soldat."
3 Est-ce exact ?
4 R. Oui, c'est exact.
5 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Nous allons continuer.
6 M. Reljic et vous-même, et ceci est la conclusion à laquelle j'arrive, je
7 vous prie de me corriger si elle n'est pas bonne, donc devant vous, vous
8 avez un village où il n'y a pas d'arme et les villages sans défense. Vous
9 avez tout de même incité le capitaine Reljic "de tirer un obus dans l'une
10 des maisons au début de l'attaque." Quel est le but, quel que serait le
11 bâtiment où cela allait atterrir. Vous acceptez que l'une des conséquences
12 que l'on pouvait prévoir, était que quelqu'un aurait pu se trouver à
13 l'intérieur de ce bâtiment, et être tué comme conséquence de ce tir d'obus.
14 R. Oui, Monsieur le Président.
15 M. HARMON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, je regarde
16 les comptes rendus d'audience, 17 heures 18 minutes 14 secondes, vous citez
17 le passage, et dans le paragraphe 101, à la page 30. Quant à l'exemplaire
18 que j'ai en anglais, il s'agit du paragraphe 102, de l'exemplaire que j'ai.
19 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Est-ce que je pourrais demander à
20 l'huissier de m'apporter ce document ? Je vais regarder ici l'exemplaire du
21 document que j'ai en ma possession,
22 M. HARMON : [interprétation] Il va falloir comparer ces paragraphes.
23 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Oui, nous allons regarder après
24 quel est le document qui va faire foi, parce qu'il va être signé
25 ultérieurement.
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1 Monsieur Deronjic, pourriez-vous continuer et nous dire, s'il vous plaît,
2 faites-le librement. Qu'avez-vous fait entre le soir du 8 mai et la journée
3 du 9 mai ?
4 R. Si je vous ai bien compris, Monsieur le Président, vous entendez par là
5 ce que j'ai fait après la fin de la réunion.
6 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Oui, tout à fait.
7 R. Après la réunion de la cellule de Crise du SDS, lors de laquelle nous
8 avons pris la décision d'attaquer le village de Glogova, je suis rentré
9 chez moi, très brièvement pour me changer. Cela, c'est quelque chose dont
10 je suis sûr. Après quoi, j'ai rejoint une unité de la Défense territoriale
11 qui se trouvait devant le bâtiment de la municipalité. Son commandement
12 était M. Bozic, quelqu'un qui est malheureusement décédé. J'ai rejoint
13 cette unité tout simplement parce que c'était une unité où j'appartenais
14 d'après ma formation militaire. Cette unité avait pour but de rentrer dans
15 le village de Glogova et dans la zone de Srebrenica. La zone de Srebrenica
16 contient Potocari et toute une autre série de villages qui ne sont habités
17 que par les Musulmans. Notre mission était de veiller à ce que les
18 Musulmans n'essaient pas de s'enfuir ou bien de prévenir cette fuite soit
19 vers Srebrenica, soit qu'ils viennent de la région de Srebrenica, ce qui
20 pourrait provoquer une surprise pour nos forces.
21 Vers 10 heures, si je ne me trompe pas, nous nous sommes mis en route. Je
22 me souviens exactement du chemin que nous avons pris. Nous avons pris un
23 chemin de village. C'était tout simplement un chemin comme il y en a dans
24 les villages, ce n'est pas une vraie route. Nous sommes passés derrière le
25 village de Glogova, au sud du village, et sur les hauteurs. Nous avons
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1 décidé où allaient se mettre différents soldats en groupes. C'était M.
2 Bozic qui avait décidé de cela. Avec deux autres soldats, je devais rester
3 à un point bien défini, et j'ai obéi à cet ordre. Nous sommes restés ainsi,
4 jusqu'à l'aube du 9 mai.
5 Pendant la nuit, rien ne s'était passé. Nous nous trouvions à une distance
6 tout à fait en sécurité par rapport au village de Glogova. Etant donné que
7 nous étions sur les hauteurs, nous pouvions voir, en toute sécurité, et
8 bien, le village de Glogova. Le matin, je pense qu'il devait être à peu
9 près 6 heures, nous avons remarqué, et c'est tout à fait comme nous avions
10 convenu auparavant, nous avons remarqué que les forces serbes commençaient
11 à rentrer dans le village de Glogova. Ils arrivaient en direction de
12 Bratunac. Nous avons vu que sur à un endroit sûr, ils devaient arrêter les
13 camions et les autobus. On avait demandé à ces camions et à ces autobus de
14 se trouver là pour pouvoir transporter les habitants de Glogova vers
15 Kladanj. Nous avons vu que l'attaque, en d'autres termes, l'entrée de nos
16 forces à Glogova, procédait comme prévu. Lors de cette première étape, j'ai
17 pu observer que la rentrée de nos forces à Glogova, se faisait par le nord.
18 Il y avait un certain nombre de bâtiments qui étaient déjà en feu.
19 De manière concrète, comment avaient agi les soldats, moi inclus, qui
20 étions là à encercler Glogova. Les instructions qu'on nous avait données,
21 c'était d'être là et de ne faire aucun mouvement. Le commandant Miloje
22 Bozic, se rendait d'un groupe à l'autre. A un moment donné, je lui ai
23 demandé de me donner un walkie-talkie de marque Motorola, pour que je
24 puisse communiquer avec quelqu'un et savoir ce qui se passait à Glogova.
25 J'ai pu observer qu'on mettait à feu beaucoup plus de maisons, qu'on n'en
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1 était convenu lors de la réunion de la cellule de Crise. C'était une
2 manière de communication dont on s'était mis d'accord auparavant. M. Bozic
3 m'avait passé quelqu'un qui s'appelait Predrag Spasojevic. Je lui ai
4 demandé ce qui ce qui était en train de se passer à Glogova, je lui ai
5 demandé si tout se passait comme prévu. On pouvait entendre aussi des tirs.
6 Nous étions à quelque deux kilomètres du village, ou peut-être un peu
7 moins, peut-être que nous nous trouvions à un kilomètre du village.
8 Il m'a répondu que tout se déroulait sans problèmes. Il était en contact
9 avec les chefs des différentes unités. Je n'ai fait aucun commentaire quant
10 à ces incendies qui étaient trop importants. C'est comme cela que j'ai
11 terminé ma conversation avec lui.
12 Au centre de Glogova, à côté de lui, il y avait le commandement de la
13 Défense territoriale et le capitaine Reljic. J'ai pu observer que les chars
14 se trouvaient au centre de Glogova. Pour être tout à fait précis, il
15 s'agissait d'un char et de quatre transporteurs blindés. J'ai pu voir
16 qu'ils se trouvaient au centre de Glogova. On n'a pas réellement pu
17 observer comment ces unités étaient rentrées dans Glogova, puisqu'il s'agit
18 d'un terrain qui est assez accidenté. Il y a pas mal de collines.
19 Vers 9 heures à peu près, si je me souviens bien, et j'ai essayé de
20 vérifier cela, nous avons reçu un ordre qui disait que notre tâche se
21 terminait, que nos unités étaient entrées à Glogova, qu'on amenait les
22 gens de force au centre de Glogova. J'ai aussi vu que les engins qui
23 étaient prévus pour les transporter en direction de Kladanj, étaient sur
24 place aussi. L'intention était de se diriger vers le carrefour, au sud de
25 Glogova où nous devrions aller, nous aussi pour y retrouver un moyen de
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1 transport qui allait nous ramener à Bratunac.
2 Nous sommes partis sur cette vieille route bitumée qui allait de Bratunac à
3 Kravica qui est derrière, qui est après Glogova, Kravica étant un village
4 serbe. Sur cette route bitumée, nous sommes arrivés dans la région de
5 Avdagina Njiva. Nous sommes arrivés ensuite sur la route asphaltée qui
6 passe d'ailleurs directement dans le village de Glogova. En fait, c'est une
7 zone qui ne fait pas véritablement partie du village de Glogova. C'est là
8 que j'y ai rencontré une unité de Kravica.
9 J'ai remarqué que ces personnes en fait, n'avaient pas pénétré dans le
10 village de Glogova. Nous avons parlé un peu de l'opération. Je connaissais
11 certaines personnes, je connaissais bien certaines personnes de Kravica,
12 par exemple, Milosevic qui était le commandant de l'unité, quelqu'un
13 d'autre qui était membre du conseil municipal du SDS. Je me suis entretenu
14 avec eux. Ils n'étaient pas véritablement satisfaits de l'incendie du
15 village, et prétendument, c'était la raison pour laquelle ils se
16 dirigeaient vers le village. J'ai appris par la suite, qu'une partie de
17 leur unité était entrée dans le village de Glogova à partir de la zone de
18 Halilovici.
19 En fait, j'ai omis de dire que lorsque nous nous dirigions vers cette route
20 bitumée qui se trouvait directement au-dessous de nous, il y avait
21 plusieurs maisons musulmanes. Les soldats qui se trouvaient autour de moi,
22 ont pénétré dans ces maisons pour voir s'il n'y avait pas quelqu'un à
23 l'intérieur. A ce moment-là, une des maisons a été incendiée. Les autres
24 soldats m'ont demandé ce qu'ils devaient faire des autres maisons. Il y en
25 avait environ trois ou quatre. Je leur ai dit que j'étais d'accord pour
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1 qu'ils brûlent ces maisons.
2 Nous avons ainsi poursuivi notre chemin, et j'ai rencontré un groupe de
3 personnes. Je connaissais l'une de ces personnes. Il commandait un peloton.
4 On l'appelait, enfin il avait un surnom Djedura. Je ne me souviens plus de
5 son nom de famille. Il se trouvait à l'arrière-garde, dans un bois. Il
6 était particulièrement connu pour certains incidents extrêmes pendant la
7 période précédent la guerre. J'étais un peu provocateur en quelque sorte.
8 Je lui ai dit qu'il était ici, qu'il faisait semblant d'être très
9 courageux. Je lui ai ordonné de brûler plusieurs maisons qui se trouvaient
10 dans la région, dans la zone. Je voulais voir s'il allait le faire, et
11 c'est ce qu'il a fait. Ils ont brûlé quelques maisons qui se trouvaient là.
12 Après que je suis parti pour Avdagina Njiva, Monsieur le Président, je suis
13 resté pendant un certain temps avec les gens que j'ai déjà mentionnés
14 auparavant. Ensuite, je suis parti pour Bratunac. J'avais l'intention en
15 fait, d'arriver pour les obsèques de M. Zekic qui avait été tué le 8 mai.
16 Je suis passé par le village de Glogova. Je peux maintenant vous dire de
17 façon assez certaine, qu'un véhicule privé, une voiture privée m'a
18 accompagné, je suis arrivé à l'hôtel Fontana.
19 Sur le chemin vers le village de Glogova, je me suis rendu compte qu'il y
20 avait un certain nombre de personnes qui se trouvaient rassembler au centre
21 de Glogova. J'ai vu qu'il y avait nos bus qui s'y trouvaient. J'ai observé
22 la présence de l'armée, de la police de Bratunac. Je ne peux pas vous dire
23 exactement qui j'ai vu, mais ils se trouvaient au centre du village. Je
24 n'ai rien remarqué qui aurait pu me faire comprendre qu'il y avait des
25 choses qui se passaient en sus de ce qui avait été un accord à la cellule
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1 de Crise, à savoir que tous les résidents de Glogova sans exception
2 devaient être rassemblés, et envoyés dans la direction de Kladanj.
3 Je me suis rendu à l'hôtel Fontana. Auparavant, je pense que je me suis
4 arrêté à la morgue, au centre de Santé, au dispensaire de santé à Bratunac.
5 J'étais présent lorsque le corps de M. Zekic a été préparé pour ses
6 obsèques. Ensuite, je suis reparti à Fontana, parce que nous avions
7 convenus qu'une cérémonie devrait être organisée à l'hôtel Fontana pour M.
8 Zekic, parce que sa famille avait décidé qu'il serait enterré en Serbie,
9 dans un endroit qui s'appelle Ljubovija. En fait, c'est la municipalité
10 avoisinante en Serbie. Son père, son épouse et ses enfants en avaient ainsi
11 décidé.
12 Devant l'hôtel Fontana, nous nous sommes recueillis près du corps de M.
13 Zekic, et en tant que président de la cellule de Crise, je devais prononcer
14 un discours pour ses obsèques. Je ne l'ai pas fait. Je pense que j'ai
15 demandé à M. Tesic de le faire, parce que j'étais particulièrement ému,
16 étant donné que M. Zekic avait été un ami très proche, Je n'ai pas été en
17 mesure de prononcer ce discours pour ses obsèques.
18 A la suite de quoi, la procession s'est mise en marche. Je ne puis plus
19 être vraiment très précis. Je pense que cela s'est passé pendant l'après-
20 midi de cette journée. Nous sommes partis en direction de Ljubovija. Avec
21 cette procession, nous avons participé à la cérémonie dans l'église --
22 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Pour ne pas trop perdre de temps,
23 Monsieur, je me permets de vous interrompre, parce que cela ne fait pas
24 véritablement partie de notre affaire. Vous avez déjà abordé les événements
25 du 9 mai. Je pense que nous devrions véritablement cibler en quelque sorte
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1 les crimes qui ont été commis en ce jour.
2 J'aimerais vous poser une question très, très directe. Lorsque vous avez
3 prévu la réunion, aviez-vous déjà planifié de brûler et de détruire la
4 mosquée ? Est-ce que cela avait été planifié à l'avance ?
5 R. Non, Monsieur le Président. Je peux vous dire de façon tout à fait
6 catégorique, personne n'avait mentionné la mosquée. Cela n'a même pas fait
7 l'objet de discussion. Lorsque je suis passé par Glogova, elle n'avait pas
8 été détruite d'après les indications que j'ai obtenues, elle a été détruite
9 pendant la soirée du 9 mai.
10 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Par qui ? Qui a été l'auteur de la
11 destruction de la mosquée ?
12 R. D'après les informations que je détiens, et je n'en suis pas absolument
13 sûr et certain, la mosquée a été dynamitée par des volontaires.
14 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Est-ce que vous considérez cela
15 comme une conséquence prévisible de l'attaque contre Glogova ?
16 R. Monsieur le Président, je dois vraiment vous dire que dans le contexte
17 des événements, j'aurais dû prévoir cette éventualité.
18 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Dans le document qui fut mentionné
19 auparavant, à la page 31, paragraphe 106 dans ma copie, il s'agit du mois
20 de novembre 2003. Vous avez déclaré et je cite :
21 "A la suite de l'attaque contre le village de Glogova, le 9 mai 1992, 65
22 Musulmans, résidants du village, ont été assassinés. La population
23 musulmane du village a été expulsée par la force et un nombre important de
24 résidences des Musulmans à Glogova ont été détruites, et absolument
25 rasées."
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1 Cela est tout à fait conforme à l'exposé des faits et l'acte d'accusation à
2 propos duquel vous avez plaidé coupable. Pour ce qui est de ces 65
3 meurtres, vous vous souviendrez que nous avons entendu le nom de ces 65
4 personnes décédées, donc le meurtre ou les meurtres de ces 65 Musulmans
5 bosniens étaient le résultat prévisible de l'attaque et vous avez pris en
6 considération et accepté le fait que cela risquait de se produire.
7 R. Oui Monsieur le Président, je déclare que tel est bien le cas, et que
8 la façon dont vous avez présenté les choses est tout à fait exacte.
9 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Merci.
10 Je voudrais que vous compreniez que, pour des raisons d'ordre juridique, je
11 dois revenir sur certaines choses car nous avons jusqu'à présent abordé la
12 partie objective de tous les actes. Nous devons maintenant aborder les
13 parties de l'acte d'accusation et de l'exposé des faits qui porte sur votre
14 état d'esprit à l'époque. Et au paragraphe 18 du chef d'accusation et au
15 paragraphe 18 de l'exposé des faits, il est dit :
16 "Miroslav Deronjic a, en sa qualité de président de la cellule de Crise de
17 Bratunac, autorisé la Défense territoriale et les forces de police de
18 Bratunac à désarmer la population musulmane dans le village de Glogova."
19 Et dans l'exposé des faits, il est dit que vous avez autorisé la TO à
20 désarmer la population musulmane, et vous comprendrez la question, compte
21 tenu de votre réponse précédente en fait, le désarmement a été autorisé par
22 d'autres et vous nous avez mentionné des noms concrets. Donc, comment
23 devons-nous comprendre cela, devons-nous comprendre que vous avez autorisé
24 le désarmement ?
25 R. Monsieur le Président, j'avais compris que les chefs d'accusation de
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1 l'acte d'accusation représentent un fait qui émane de la décision avec
2 laquelle nous avons marqué notre accord. Lorsque je dis "nous" je pense à
3 la cellule de Crise pendant la période de temps où M. Reljic nous a fait
4 état de cette décision, il nous a demandé de prendre des mesures concrètes
5 à propos de cette décision.
6 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Soit. En d'autres termes, vous
7 avez adhéré à cette mission qui consistait à désarmer la population de
8 Glogova. Non seulement vous l'avez acceptée mais vous l'avez avalisée en
9 votre capacité ou en vos différentes capacités pour ce qui est de toutes
10 les capacités que vous aviez à l'époque à Glogova. Est-ce qu'il s'agit
11 d'une évaluation exacte de la situation ?
12 R. Monsieur le Président, je pense que la décision, qui consiste à
13 approuver cette opération, a été prise ultérieurement, lorsque le
14 désarmement du village de Glogova a été terminé. Si vous pensez à mon point
15 de vue personnel, à l'époque j'étais à proximité de l'opération lorsqu'elle
16 a été menée à bien. J'y ai participé personnellement, je ne me suis pas
17 opposé à ces mesures.
18 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je pense que le moment est venu de
19 faire une pause, et peut-être que le moment serait venu pour que vous
20 discutiez avec votre conseil de cette question sur laquelle je dois
21 revenir, car cela n'est pas toujours très clair. Lorsque l'on utilise les
22 termes "autoriser le désarmement", j'aimerais savoir ce que cela signifie
23 exactement dans son contexte. Donc je reviendrai sur cette question à la
24 fin de la pause et l'audience est levée jusqu'à 18 h 15.
25 --- L'audience est suspendue à 17 heures 46.
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1 --- L'audience est reprise à 18 heures 17.
2 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] J'aimerais revenir tout de suite au
3 paragraphe 8 de l'acte d'accusation et sur le paragraphe 18 de l'exposé des
4 faits. Pourriez-vous nous expliquer ce que vous entendez par l'expression
5 "autoriser à désarmer."
6 R. Monsieur le Président, je vais vous fournir une explication. J'ai dit
7 qu'à une réunion de la cellule de Crise nous avions autorisé que la
8 décision soit prise pour désarmer les Musulmans à Bratunac. En ce sens,
9 nous avons marqué notre accord avec cette opération, nous l'avons acceptée
10 comme la nôtre, nous l'avons acceptée comme une opération justifiée pendant
11 la période au cours de laquelle elle a été effectuée. En ce sens, en tant
12 que président de la cellule de Crise j'ai accepté la décision comme notre
13 décision. Et c'est en ce sens que j'indique que nous l'avons autorisée et
14 que j'ai autorisé en ce sens, le capitaine Reljic à mener à bien son
15 action.M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie de cette
16 précision. J'aimerais vous demander de prendre le paragraphe 8(d) et le
17 paragraphe 19 de l'exposé des faits. C'est une question d'ordre secondaire.
18 Dans l'acte d'accusation, il est indiqué que :
19 "Milosevic a ajouté qu'il s'exprimait au nom de Miroslav Deronjic," alors
20 que dans l'exposé des faits nous pouvons lire que Milutin Milosevic a dit
21 aux habitants de Glogova que leur village ne serait pas attaqué puisqu'ils
22 avaient remis leurs armes. Est-ce que Milosevic s'est exprimé comme cela
23 est formulé dans l'acte d'accusation en votre nom ?
24 R. Monsieur le Président, je n'étais pas présent à Glogova. J'ai accepté
25 les faits qui ont été cités par l'Accusation, et j'ai accepté qu'il ait dit
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1 cela en mon nom, mais je ne peux pas exactement vous dire ce qui s'est
2 passé puisque je n'y étais pas présent. Donc j'accepte cette déclaration et
3 je pense que cela est possible.
4 Je n'en ai jamais parlé avec lui et j'accepte qu'il ait pu dire cela.
5 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Donc, vous êtes absolument d'accord
6 avec ce qu'a dit Milosevic. Est-ce bien exact ?
7 R. J'ai déjà répondu à cette question. J'ai accepté toutes ces actions, et
8 j'ai marqué mon accord avec ces actions.
9 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Eu égard à votre état d'esprit,
10 pour revenir sur la question des volontaires, je pense que nous avons déjà
11 trouvé une conclusion acceptable. Car au paragraphe 36 de l'exposé des
12 faits, il est indiqué que vous avez coordonné, et surveillé l'attaque
13 contre Glogova. Alors est-ce que vous vous en tenez à cette réponse ou est-
14 ce que vous tenez à votre plaidoyer ?
15 R. Oui, Monsieur le Président.
16 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Merci. Et pour ce qui est du
17 paragraphe suivant de ce document, je pense que ce n'est pas la peine
18 d'entrer dans les détails puisque vous avez déjà témoigné à ce sujet.
19 En conclusion, pourriez-vous donc nous dire ce qui s'est produit
20 immédiatement après votre passage à Glogova. Et d'ailleurs avez-vous vu des
21 personnes à Glogova, qui avaient été tuées pendant l'attaque, lorsque vous
22 êtes arrivé dans la ville ?
23 R. Monsieur le Président, je déclare que je n'ai pas vu et d'ailleurs,
24 donc je n'ai rien vu. Et d'ailleurs à l'époque, je ne savais pas ce qui
25 s'était passé et cela correspond véritablement à la vérité.
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1 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Pourriez-vous maintenant, nous
2 expliquer les événements qui se sont produits plus tard le 9 mai, puis le
3 10 et le 11 mai 1992 ?
4 R. Monsieur le Président, afin de ne pas répéter ce que j'ai fait l'après-
5 midi, et la soirée de ce même jour. J'aimerais vous dire qu'après les
6 obsèques de Goran Zekic, nous nous sommes réunis, puisque la majorité de la
7 cellule de Crise était présente aux obsèques. Donc, nous avons eu une
8 réunion officieuse. D'ailleurs, il n'y a même pas eu de procès-verbal de
9 cette réunion. Mais nous avons discuté de la situation qui prévalait à
10 Glogova. Et nous avons essentiellement abordé le fait que Glogova avait été
11 incendiée, et ce sur une échelle qui n'avait pas véritablement été prévue
12 ou planifiée. Nous avons parlé des assassinats. Et je dois vous dire que
13 jusqu'à aujourd'hui, je n'ai pas eu d'information personnelle à propos de
14 ces assassinats. Pendant la réunion, il a été convenu que j'informe M.
15 Reljic de ces mesures futures. Et que tout type d'incendie de maisons,
16 devrait être interdit.
17 M. ZECEVIC : [interprétation] Il y a une erreur au compte rendu, puisqu'il
18 est dit à la ligne 69.7 : "Nous avons parlé des assassinats" et je pense
19 que notre client a dit : "Nous n'avons pas parlé des assassinats."
20 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] C'est tout à fait exact. Pouvez-
21 vous donc corriger la page 69, ligne 7, pour indiquer que "nous n'avons pas
22 discuté des assassinats." Donc, il faut inclure la négation, "not" dans la
23 version anglaise.
24 Et le 10 mai. Vous souvenez-vous d'événements particuliers qui se seraient
25 produits le 10 mai à Bratunac ?
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1 R. Oui, Monsieur le Président. Tel que cela fut convenu lors de la réunion
2 de la cellule de Crise du 9 mai. L'opération s'est poursuivie. La
3 population musulmane qui restait encore à Bratunac a été invitée à se
4 rendre à des endroits désignés. Et la police et les militaires les
5 transporteraient donc en direction de Kladanj. Et cela est le résultat de
6 l'accord obtenu le 9 mai, pendant la réunion de la cellule de Crise que
7 nous avons mentionnée. Et à un moment donné, le stade était l'un des
8 endroits où les personnes étaient censées venir. J'ai été informé que les
9 hommes et les femmes avaient été séparés, ceux que le groupe qui s'était
10 rendu au stade. Donc, je suis allé avec le président du comité exécutif qui
11 m'en a informé. Je suis allé donc avec Djukanovic au stade pour vérifier ce
12 qui se passait. Alors avec le président, ce fut la première fois que
13 j'entendais parler de ces actes. Je suis arrivé au stade. Je n'ai rencontré
14 personne de l'armée au stade. J'ai vu un grand groupe de volontaire, et M.
15 Predrag qui était leur commandant.
16 J'ai vu un groupe de musulmans qui avait été séparé des hommes qui se
17 trouvaient le long du mur du stade. Je lui ai demandé ce dont il
18 s'agissait. Puis il y a eu une discussion. J'ai insisté, je lui ai dit
19 qu'il fallait qu'il m'explique ce qui était en train d'être fait. Et il m'a
20 dit qu'il s'agissait d'un ordre de l'armée, et que ces personnes feront
21 l'objet d'échange avec des Serbes. Après cette conversation qui fut assez
22 houleuse, je me suis rendu à la station de police. J'ai demandé au
23 commandant de la police ce dont il s'agissait. Et en fait, il s'agissait de
24 Luka Bogdanovic, qui à l'époque était le commandant de la station de police
25 à Bratunac. Il m'a dit qu'il n'y avait pas d'officiers de police à
Page 161
1 Bratunac, qu'ils étaient tous sur le terrain. Et qu'il m'avait invité à
2 venir à certain endroit.
3 Je suis ensuite retourné à la cellule de Crise au bâtiment municipal, et
4 j'ai été convoqué à Pale. Je ne me souviens plus d'ailleurs comment j'ai
5 obtenu cette information. Je me souviens que quelqu'un m'a dit que j'avais
6 été convoqué à Pale à propos d'une réunion.
7 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je m'excuse de vous interrompre.
8 Mais je pense vous serez d'accord pour dire que l'expression : "Qu'ils
9 avaient invité les Musulmans à se rendre dans certains endroits, notamment
10 au stade," est une façon très diplomate d'indiquer que ces gens avaient
11 reçu l'ordre de se rendre au stade entre autres endroits. Est-ce bien
12 exact ? Et est-il exact de dire que certaines de ces personnes ont en fait
13 été tuées ?
14 R. Monsieur le Président, vous avez tout à fait raison. J'ai utilisé cette
15 expression de façon technique, ils ont été convoqués ou invités par le
16 biais de haut-parleurs de la police. En fait, c'était un ordre qui leur
17 était donné. Il s'agissait d'un transport forcé de personnes depuis
18 Bratunac, et depuis la banlieue avoisinante. Je suis tout à fait conscient
19 du fait qu'il y a une séparation de ces personnes pendant la nuit. Il
20 s'agit des personnes qui se trouvaient dans le stade. Ensuite ces personnes
21 ont été emmenées dans un hangar près de l'école Vuk Karadzic. Lorsque je
22 suis revenu pendant la journée, je me suis rendu compte qu'il y avait un
23 grand nombre de personnes, quelques 500 personnes qui avaient été placées
24 dans ce hangar. Si vous pensez qu'il est nécessaire d'aborder cette
25 question, je pourrais poursuivre. Mais ce que je voulais dire, c'est que le
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1 10, je me suis rendu à Pale, et je voulais en fait présenter une
2 explication chronologique de ce qui s'est passé, mais il est évident que je
3 le ferai comme bon vous semblera.
4 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Pouvez-vous, je vous prie, nous
5 dire ce que vous savez des meurtres de certaines de ces personnes qui ont
6 reçu l'ordre de se rendre au stade ainsi qu'à d'autres endroits ?
7 R. Monsieur le Président, lorsque je suis revenu de Pale, le lendemain on
8 m'a dit que ces personnes qui avaient été séparées au niveau du hangar ont
9 été maltraitées, que des volontaires s'y rendaient, ainsi que certains
10 citoyens de la région. Dans l'entretien, j'ai dit que j'ai découvert que le
11 père de Goran Zekic, Drago Zekic, s'était rendu -- Il menait des enquêtes
12 sur son fils et on m'a dit que ces personnes sont sorties du hangar, ont
13 été amenées dans une direction inconnue et ne sont jamais revenues. Au
14 cours de cette journée, nous avons pris un certain nombre de mesures pour
15 empêcher que ceci ne se reproduise. Je vais parler de quelques éléments que
16 j'ai déjà abordés avec le bureau du Procureur. Je me suis entretenu avec le
17 commandant de l'unité paramilitaire. C'est quelqu'un qui n'était pas très
18 au fait de la situation ou, évidemment, il ne disait pas la vérité. Il a
19 dit qu'il empêcherait ses unités de s'y rendre. Je me suis rendu auprès de
20 la police militaire dirigée par M. Reljic. Je ne l'ai pas vu à Bratunac ce
21 jour-là, et jusqu'à ce jour, je ne peux pas vous dire de quoi il s'agit et
22 où il se trouvait ce jour-là.
23 Nous avions également demandé à une de mes unités locales de nous prêter
24 renfort, de façon à empêcher ce qui se passait dans le hangar. Promesse
25 nous a été faite que quelqu'un ferait le nécessaire pour empêcher ce siège.
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1 Je me suis également entretenu avec M. Savo Babic, le commandant de la
2 police, qui m'a dit qu'il allait empêcher que ceci ne se reproduise et
3 qu'il allait renforcer la sécurité autour du hangar. Le lendemain, le 12,
4 ces agissements se sont poursuivis. Certains m'ont dit qu'ils ont vu des
5 personnes tuées dans le fleuve Drina, dans lequel on les avait jetés, on
6 avait jeté les corps et j'ai demandé à les voir par moi-même. Je me suis
7 rendu sur les lieux : Il s'agissait d'un endroit qui se trouvait en dessous
8 du pont. J'ai vu quelques corps dans le fleuve. Je suis retourné à la
9 cellule de Crise et nous avons continué à parler des mesures qui pouvaient
10 être entreprises pour empêcher cela. Le 12 au soir, entre le 12 et le 13,
11 il y a eu une réunion tenue à la cellule de Crise cette nuit et nous avons
12 adopté un certain nombre de mesures que nous souhaitions mettre en place à
13 l'époque. Nous avons décidé de relâcher toutes les personnes du hangar,
14 celles qui étaient toujours en vie, et de les transporter à Pale, la
15 municipalité dans laquelle se trouvaient les dirigeants serbes à l'époque.
16 Pendant la nuit, après minuit, avec l'aide de la police locale et de la
17 police civile locale, ainsi que de la police militaire, nous avons relâché
18 tous les personnes de cet endroit. Nous les avons fait monter dans des
19 véhicules recouverts de bâches. Nous avions établi la liste des survivants
20 qui se trouvaient dans le hangar en ce moment, et nous les avons amenés à
21 Pale, où nous les avons remis. Ordre nous avait été donnée de consigner par
22 écrit que ces personnes avaient été remises aux autorités à Pale. Je n'ai
23 effectivement pas ce document.
24 La deuxième décision que nous avons prise, adoptée le 13 mai 1992, portait
25 sur les volontaires, volontaires que nous estimions être la cause de la
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1 majorité de ces meurtres qui avaient été perpétrés dans le hangar. Nous
2 avons décidé d'expulser tous les volontaires de Bratunac. Décision
3 également avait été prise pour expulser Reljic, qui était responsable de la
4 séparation de la population et c'est lui qui les avait rassemblés dans une
5 zone donnée, ce qui leur avait permis de perpétrer ces massacres. Ces
6 décisions ont été appliquées en partie, mais non pas dans leur totalité,
7 parce que le lendemain, un nombre important de personnes avait été dirigé
8 par des extrémistes locaux et les événements qui se sont produits à
9 Bratunac sont de notoriété publique. Ils ont réussi à pénétrer dans le
10 bâtiment municipal et ont attaqué physiquement les membres de la cellule de
11 Crise.
12 J'ai donné ordre au service médical militaire de venir et de reconnaître
13 les corps dans le hangar. Je suis entré en contact avec Stankovic à
14 Belgrade et je lui ai demandé de m'envoyer une équipe d'experts pour nous
15 permettre d'identifier les corps et nous aider à les enterrer de façon
16 appropriée. Le lendemain ou au cours de la même journée, il est venu. Il a
17 regardé tous les corps et il a établi leur identité. Ils ont été marqués.
18 On les a mis dans des sacs en nylon, tel que le veut le règlement. Nous
19 leur avons ensuite attribué des numéros d'identité. Ils ont été enterrés
20 dans la fosse commune, en milieu de journée.
21 Nous avons également demandé à ce que des stalles soient trouvées, selon la
22 tradition musulmane. Mais ceci aurait pu être mal interprété par les
23 extrémistes. A ma connaissance, lorsque j'ai été arrêté, ces stalles se
24 trouvaient toujours dans l'entrepôt et n'ont jamais été utilisées. C'est
25 une explication au sens large que je vous donne, des événements que j'ai
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1 abordés lors du dernier entretien. Si vous avez des questions, je serai
2 tout à fait heureux de pouvoir y répondre.
3 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] D'après vous, en passant en revue
4 les différents événements, combien de personnes ont été tuées dans votre
5 municipalité entre le 8 et le 9 mai 1992 ?
6 R. Monsieur le Président, vous m'avez dit entre le 8 ? Est-ce que vous
7 voulez dire Glogova également ?
8 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Oui, tout à fait.
9 R. Monsieur le Président, j'ai accepté les faits tels qu'ils ont été
10 proposés par le bureau du Procureur, en ce qui concerne le nombre de
11 personnes tuées. Je dois dire qu'à l'époque, et aujourd'hui non plus, je
12 n'avais pas d'informations très précises sur le nombre de personnes qui
13 avaient été tuées. Je n'ai aucune raison de mettre en doute ce chiffre de
14 65 qui a été avancé par le bureau du Procureur. J'accepte ce fait. Pour ce
15 qui est des personnes qui ont été tuées dans le hangar, je dois dire qu'à
16 un moment donné, au cours de mon entretien, sans vérifier ceci auparavant,
17 j'ai donné un chiffre qui n'est pas exact. J'espère que le chiffre n'est
18 pas exact, car j'ai dit que 200 personnes environ avaient été tuées.
19 Lorsque je suis rentré à Bratunac, j'ai demandé à quelqu'un qu'il me donne
20 les renseignements nécessaires : une personne qui avait enterré les corps.
21 Cette personne s'appelait Aleksandar Tesic. C'était un militaire et il m'a
22 dit que ce nombre n'était pas exact et que, d'après ses renseignements, il
23 devait s'agir de 50 personnes environ qui avaient été tuées dans le hangar,
24 ce qui signifiait qu'il y a eu une centaine de personnes tuées au cours de
25 cette période.
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1 Je ne dis pas que ceci soit exact à 100 % car personnellement, je n'ai pas
2 lu le rapport.
3 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] C'est ma dernière question :
4 Pourriez-vous nous dire si, lors de la réunion à Pale le 10 et le 12 mai,
5 quelles étaient les intentions, lors de cette réunion à Pale, surtout pour
6 ce qui est du 12 mai.
7 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] En avez-vous parlé dans les
8 détails ? Y êtes-vous allé de votre plein gré, d'office, ou y avez-vous été
9 invité ? Qui a participé à cette réunion ? Et, encore une fois, je ne
10 souhaite pas répondre à votre place. Pourriez-vous, par conséquent, placer
11 ces événements dans le contexte et nous parler des deux réunions à Pale ?
12 R. Il doit y avoir une erreur au niveau du compte rendu d'audience, car je
13 n'ai évoqué qu'une seule réunion. C'est la réunion où j'ai précisé,
14 laquelle -- a peut-être eu lieu -- la réunion s'est peut-être tenue le 10
15 ou le 11 mai.
16 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Dans votre témoignage, à la page
17 21, daté du mois de novembre 2003, le 21 novembre 2003, au paragraphe 62,
18 vous évoquez les éléments suivants, je vous cite : "Le contact entre les
19 états, l'armée et les dirigeants politiques étaient tout à fait clair lors
20 de cette réunion à Pale, le 12 mai, lorsque j'ai fourni une explication
21 pour les événements de Glogova." Et, il y a quelques instants, vous avez
22 fourni une ébauche d'explications à propos de la réunion du 10 mai. Qu'en
23 est-il ? Y a-t-il eu une ou deux réunions ? C'est ce que nous pouvons
24 constater d'après le paragraphe 67 de votre témoignage, daté du mois de
25 novembre, n'est-ce pas ?
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1 R. Monsieur le Président, c'est quelque chose qui m'a échappé, je n'avais
2 pas l'intention de semer la confusion. Et nous n'avons tenu qu'une seule
3 réunion, et je suis sûr que cette réunion a eu -- s'est tenue le 10 mai. Je
4 ne peux pas établir un lien entre cette date et le 12 mai, ceci a dû
5 m'échapper. Et je vous prie, par conséquent, de tenir compte du fait que je
6 me trouvais à Pale, à Sarajevo, le 10 ou 20 [comme interprété], même peut-
7 être le 11 mai.
8 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] J'estime, par conséquent, qu'il n'y
9 avait qu'une seule réunion et vous avez fait une erreur lorsque vous avez
10 cité la date du 12 mai. Je vous prie, s'il vous plaît, de me dire si vous
11 vous y êtes rendu spontanément ou avez-vous été convoqué ? Et pouvez-vous
12 me fournir quelques explications sur cette réunion qui s'est tenue à Pale,
13 quelle que soit la date où cette réunion s'est tenue, le 10 ou le 11 [comme
14 interprété]. Quoi qu'il en soit, après les événements de Glogova et
15 Bratunac.
16 R. Oui, Monsieur le Président. J'ai commencé à aborder cette réunion. Il
17 me semble que j'ai reçu une invitation et on m'a demandé de me rendre à
18 Pale. On m'a dit qu'il y avait une réunion et on m'a demandé d'y
19 participer. J'ai été convoqué. Je me suis rendu à Pale --
20 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Pourriez-vous me donner des noms,
21 s'il vous plaît, plutôt que de dire "quelqu'un." Il s'agit d'un événement
22 tellement important que je suis tout à fait certain que vous vous souvenez
23 du nom de la personne qui vous a convié à cette réunion.
24 R. Monsieur le Président, dans la municipalité, j'en ai entendu parler,
25 mais je ne me souviens pas du nom en question. Ce que je peux dire c'est
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1 qu'il a pu s'agir du secrétaire de la municipalité qui m'a retransmis cette
2 invitation à l'un des bureaux du SDS. Le secrétariat qui se trouve -- la
3 secrétaire du bureau du SDS s'appelait Mme Mirjana Nikolic.
4 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Très bien. Je vous prie de
5 poursuivre. Que s'est-il passé à Pale ? Dans quel bâtiment la réunion
6 s'est-elle tenue et qui était -- qui a participé à cette réunion ?
7 R. Lorsque je me suis arrivé à Pale, la réunion avait déjà commencé. Je ne
8 me souviens pas du bâtiment en question. Je pense que la réunion avait dû
9 se tenir à l'Hôtel Panorama. C'est la première fois que je me suis rendu à
10 Pale, car lorsque nos dirigeants sont allés de Belgrade -- de Pale --
11 lorsque nos dirigeants sont allés de Sarajevo à Pale, je n'ai pas eu
12 l'occasion de m'y rendre précédemment.
13 La réunion s'est déroulée de la façon suivante : Il y avait les
14 présidents des cellules de Crise d'un très grand nombre de municipalités.
15 Je crois qu'il y avait environ 50 participants. Il y avait les présidents
16 des cellules de Crise de différentes municipalités. Et j'avais, par le
17 passé, vu ces hommes en uniforme. C'était quelque chose qui était -- que
18 nous appliquions à ce moment-là, les présidents des cellules de Crise
19 portaient l'uniforme. Personnellement, j'étais en habit de civil. La
20 réunion était présidée par M. Ostojic, M. Karadzic et M. Mladic. Et lorsque
21 je suis entré, j'en ai déduit que l'objectif de cette réunion consistait à
22 faire des -- à faire un rapport sur la situation au plan militaire, au plan
23 de sécurité. Il s'agissait de rassembler, pour ce faire, les différents
24 présidents des cellules de Crise.
25 J'ai écouté les différents orateurs [comme interprété] relater les
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1 événements dans leurs différentes municipalités et, ensuite, j'ai demandé à
2 pouvoir prendre la parole. Je souhaitais rencontrer le premier ministre
3 pour le tenir informé des événements qui s'étaient produits à Bratunac et
4 je souhaitais rentrer à temps à Bratunac, car c'était un voyage risqué et
5 peu sûr, puisqu'il y avait un nombre assez important de villages musulmans.
6 Ils ont accepté, ils m'ont donné la parole et je me suis avancé. Il y avait
7 une carte de la Bosnie-Herzégovine sur le mur. Sur cette carte, on pouvait
8 distinguer de façon très claire les différentes municipalités représentées
9 par les couleurs différentes. Il y avait des municipalités qui étaient
10 crayonnées en bleu dans la totalité.
11 Et je devais indiquer sur cette carte à quel endroit se situait ma propre
12 municipalité. Et je devais expliquer ce qu'il s'y passait en ce qui
13 concernait toutes les questions d'ordre militaire ou les questions de
14 sécurité. J'ai donc fait mon rapport. J'ai dit que nous avons attaqué le
15 village de Glogova. J'ai dit que le village avait été en grande partie
16 incendiée et j'ai dit que j'avais ordonné cette attaque. M. Ratko Mladic
17 m'a écouté. Et bien évidemment, M. Karadzic et M. Ostojic également. Et ils
18 ne m'ont pas posé de questions, mais m'ont demandé de leur montrer
19 exactement à quel endroit se situait Glogova. Je leur ai montré sur la
20 carte, je leur ai indiqué où se trouvait Glogova et la direction que nous
21 avions prise pour attaquer ce village.
22 Je ne me souviens pas de chaque détail, mais c'était la première fois de ma
23 vie où j'ai rencontré M. Mladic. Je ne savais quel rôle il jouait dans tout
24 ceci, sans doute parce que je n'étais pas présent lors du début de la
25 réunion. Je sais que 15 mai, M. Mladic a été nommé commandant des forces
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1 armées de la République
2 serbe de Bosnie-Herzégovine, et je pense que c'est la première fois qu'il a
3 rencontré les gens sur le terrain et qu'il était tenu informer de la
4 situation actuelle sur le terrain.
5 J'ai terminé mon rapport. Comme je vous l'ai dit, il y a eu des
6 applaudissements dans la salle après mon rapport. C'est un fait qui peut-
7 être confirmé par mon chauffeur, qui s'appelle Vidoje Radovic, qui était un
8 policier de Bratunac qui était à la réunion en même temps que moi. Je me
9 souviens du commentaire de M. Ostojic. Il a
10 dit : "Maintenant nous pouvons colorier Bratunac en bleu." J'ai expliqué ce
11 que cela signifiait. Cela signifiait que nous avions pris les contrôles de
12 Bratunac et que, par conséquent, les Serbes contrôlaient la ville. Les
13 forces serbes avaient pris le contrôle de la ville. Je supposais que
14 Bratunac pouvait ainsi faire partie de la République serbe de Bosnie-
15 Herzégovine. C'est ce que j'en ai conclu.
16 Après cette réunion, j'ai demandé à pouvoir partir. On m'a autorisé à
17 partir. Je suis allé voir M. Dzeric qui était un membre du gouvernement. Je
18 dois dire ceci dans l'intérêt de la vérité, à la différence des autres
19 personnes qui m'avaient applaudi, il était très en colère. Il m'a demandé
20 qui avait ordonné cette attaque. Je lui ai dit. Il était très en colère
21 parce que j'avais fait ceci. J'ai essayé de lui expliquer. Lorsque j'ai
22 quitté le bâtiment j'étais très inquiet. Ensuite, je suis retourné à
23 Bratunac. C'est ce que je peux vous dire à propos de cette réunion.
24 S'il y a d'autres questions que vous souhaiterez me poser, je suis disposé
25 à y répondre.
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1 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Il n'y a plus de questions de la
2 part des Juges.
3 Est-ce que l'équipe de la Défense souhaite poser des questions ?
4 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, la Défense n'a pas de
5 questions.
6 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] L'Accusation ?
7 M. HARMON : [interprétation] Oui, j'ai deux questions mais de courtes
8 questions. Je souhaite porter un éclaircissement sur ce qu'a dit M.
9 Deronjic.
10 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous en prie.
11 Questions de l'Accusation, M. Harmon :
12 Q. [interprétation] Vous avez parlé du président Karadzic, vous avez dit
13 la seule option qui l'aurait fait été d'intégrer ceci à la Grande Serbie,
14 et vous dites que c'est la première fois que vous avez entendu ce terme et
15 ensuite vous devez assister une réunion en présence de Zekic, Ostojic et
16 Slobodanka. Je souhaite vous poser la question suivante : Quel est le
17 prénom d'Ostojic ?
18 R. Velibor Ostojic. A ce moment-là, c'était le président adjoint du SDS.
19 Q. A la fin de votre témoignage à cette réunion qui s'est tenue à Pale le
20 10 où le 11, vous avez dit qu'il y avait un certain M. Ostojic qui a dit
21 que "l'on pouvait colorier Bratunac en bleu." S'agit-il du même Ostojic que
22 vous venez de mentionner, celui qui a participé à la réunion, ou plutôt au
23 début de la réunion ?
24 R. Oui, c'est exact, Monsieur Harmon. Il s'agit bien de la même personne.
25 M. HARMON : [interprétation] Je n'ai plus de questions.
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1 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie.
2 Ceci conclut votre témoignage et vous pouvez maintenant raccompagner le
3 témoin à l'endroit où il est en situation actuellement en tant qu'accusé.
4 [le témoin se retire ]
5 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Nous allons consacrer les quelques
6 minutes qui nous restent qui vont nous permettre d'éclaircir deux points
7 juridiques de moindre importance. Je pense que le paragraphe 14 de l'acte
8 d'accusation, il est précisé qu'il s'agit "d'une attaque généralisée et
9 systématique." Je crois que ceci remplace le paragraphe 5(b) -- remplace le
10 même paragraphe dans l'exposé des faits ?
11 M. HARMON : [interprétation] C'est exact.
12 M. ZECEVIC : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.
13 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] C'est quelque chose qui est très
14 contestée, qui ne peut être résolue par jurisprudence de ce Tribunal, à
15 savoir, si une personne peut à la fois coordonner et commettre un crime. Je
16 pense que ceci n'a pas d'incidence sur les conséquences en la matière. Par
17 conséquent, je souhaite demander à l'Accusation si vous envisagez la
18 possibilité de retirer le terme "ordonner" et simplement de laisser le
19 terme "ordonner et commettre" ou "ordonner et commis," de façon à pouvoir
20 éviter un débat sur le lien entre ordonner et commettre ? Je pense qu'il
21 n'y a pas lieu d'en parler maintenant.
22 M. HARMON : [interprétation] Je vous donnerais ma réponse demain matin ou
23 la prochaine fois, lorsque nous nous retrouverons selon les circonstances.
24 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Merci beaucoup.
25 Y-t-il d'autres questions d'ordre technique ?
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1 M. HARMON : [interprétation] Oui. Il y a certain nombre d'arguments où de
2 points que je souhaite faire valoir. Que de mon argumentation
3 d'aujourd'hui, je les ai fournis à la Greffière. Il s'agit d'un différent
4 nombre de documents. Il n'y a pas lieu, je crois, de les verser au dossier,
5 et de pour le remettre à la Défense. Je crois que c'est à vous de juger
6 s'il s'agit d'élément recevable ou non, je souhaite le porte à votre
7 attention. Je crois que je souhaite simplement les porter à leur attention.
8 Ce sera un sujet que je pourrais aborder demain matin.
9 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Très bien, et je vais vérifier tout
10 ceci de façon à pouvoir donner du temps.
11 M. HARMON : [interprétation] Demain matin, évidemment, nous pourrons donner
12 des cotes à ces différentes pièces, à supposer évidement qu'elles soient
13 considérées comme recevables.
14 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Très bien.
15 M. HARMON : [interprétation] Demain également nous devrions également
16 clarifier ce point entre la disparité entre la déclaration du mois de
17 novembre que vous avez. Je crois qu'il faut se mettre d'accord sur le
18 chiffre ici. Nous avons découvert que cela pourrait à l'origine du
19 problème.
20 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Oui, je pense que nous avons la
21 version anglaise corrigée et signée par M. Deronjic pas plus tard que
22 demain soir.
23 M. HARMON : [interprétation] Je laisse à mes collègues de la Défense le
24 soin de traiter cela. Je vous remercie.
25 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Puis-je vous demander, est-ce que
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1 dans cet ensemble de documents vous avez fourni une carte de la région ?
2 M. HARMON : [interprétation] La carte que -- effectivement nous avons une
3 carte qui doit certainement être la première pièce qui est versée au
4 dossier.
5 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je crois qu'il doit agir d'une vue
6 aérienne de Glogova.
7 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
8 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Vous voulez le faire immédiatement
9 si vous le souhaitez.
10 M. ZECEVIC : [interprétation] Oui.
11 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Nous avons encore une minute.¸
12 M. ZECEVIC : [interprétation] Très bien.
13 Il s'agit de la carte si Mme l'Huissière veut bien la prendre. C'est un
14 format que nous aurions souhaité réduire, mais nous n'avons pas réussi à le
15 faire à La Haye. Nous avons été un petit peu pris par le temps. C'était
16 très important pour nous d'avoir ce document. Nous souhaitons, par
17 conséquent, la verser au dossier en l'état.
18 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Puis-je demander à l'Accusation,
19 s'il vous plaît, êtes-vous disposé à présenter ce document ? Bien sûr, nous
20 devons au préalable le voir de façon à ce qu'il puisse être imprimé
21 correctement. Je souhaite que l'équipe de l'Accusation a les compétences
22 techniques pour cela. Je n'ai aucun doute que vous allez pouvoir gérer ce
23 problème là.
24 M. HARMON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, pour la
25 confiance que vous nous témoignez et notre capacité à gérer cette question
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1 d'ordre technique. Je vais certainement en parler avec mon équipe et nous
2 allons essayer de proposer un format plus adéquat. Je n'ai pas d'objection
3 à ce que ces documents soient versés au dossier.
4 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Regardons s'il vous plaît, Madame
5 la Greffière, pouvez-vous simplement jeter un œil, s'il vous plaît.
6 Cette carte porte sur quelle période, s'il vous plaît avant l'attaque
7 contre Glogova ?
8 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, cette vue aérienne a
9 été prise dans les années 1990, avant l'attaque. C'est une vue du village
10 avant l'attaque.
11 M. LE JUGE SCHOMBURG : [interprétation] Je vous remercie pour votre aide et
12 avec l'aide de l'Accusation nous allons avoir un format plus gérable. Je
13 souhaite remercier tout un chacun ainsi que les interprètes qui sont restés
14 avec nous jusqu'à 19 heures. Nous allons lever l'audience et reprendre
15 demain à 14 heures 15 dans ce même prétoire.
16 --- L'audience est levée à 19 heures 02 et reprendra le mercredi le 28
17 janvier 2004, à 14 heures 15.
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