Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 17 février 2009

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 08.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour. Bonjour, notamment aux

  6   personnes qui ont fait preuve d'une grande générosité pour ce qui est de

  7   leur temps, et qui se sont mises à notre disposition avec si peu de

  8   préavis, ce qui nous permet donc de siéger ce matin.

  9   Je pense que nous allons faire entrer le témoin dans le prétoire.

 10   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 11   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour, Monsieur Ramadani.

 12   LE TÉMOIN : LUTFI RAMADANI [Reprise]

 13   [Le témoin répond par l'interprète]

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous rappelle que la déclaration

 16   solennelle que vous avez prononcée au début de votre déposition est

 17   toujours valable, Monsieur.

 18   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Me Djordjevic va reprendre son contre-

 19   interrogatoire.

 20   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 21   Contre-interrogatoire par M. Djordjevic : [Suite]

 22   Q.  [interprétation] Comme je l'ai promis dans le cadre de mon contre-

 23   interrogatoire, je dois dans un premier temps fournir des renseignements,

 24   ou une référence en tout cas, à propos des bulldozers. Il s'agit de

 25   l'affaire Milutinovic, et je souhaiterais que soit affichée la pièce P306,

 26   page 29. Pour ce qui est de la page du compte rendu d'audience, il s'agit

 27   de la page 4 311.

 28   Monsieur Ramadani, veuillez, je vous prie, étudier les lignes 4, 5 et

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  1   6 de ce compte rendu d'audience, qui est en anglais d'ailleurs. Il s'agit

  2   du compte rendu d'audience en anglais, mais ce qui m'intéresse, c'est que

  3   vous, vous avez dit :

  4   "Nous avons trouvé des chaussures calcinées et des manches,  quelques

  5   vêtements et rien d'autre," ensuite voilà ce que vous

  6   dites : "Les bulldozers avaient fonctionné auparavant." Et vous dites

  7   qu'ils avaient creusé.

  8   Je vous rappelle ce détail, parce que nous n'avons plus jamais

  9   entendu parler, si tant est vous avez fait référence à des bulldozers,

 10   parce qu'hier vous aviez dit que vous n'y aviez pas fait référence, mais si

 11   vous y avez fait référence, qui vous l'a relaté cela ?

 12   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djordjevic, ce que vous

 13   avez dit hier suggérait que le témoin avait parlé devant cette Chambre de

 14   bulldozers, mais moi, ce dont je me souviens, c'est qu'il n'a pas mentionné

 15   justement les bulldozers ici devant cette Chambre de première instance.

 16   Alors maintenant vous lui présentez ce qu'il a dit dans un procès

 17   précédent. Juste pour que tout soit bien clair, pour que nous comprenions

 18   tous bien qu'il y a quand même un certain glissement de votre part.

 19   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être que

 20   cela était compris de façon différente, mais le fait est qu'hier il n'a

 21   absolument pas mentionné les bulldozers. Je lui posais la question hier, le

 22   témoin hier a répondu en disant : "Je n'ai jamais mentionné de bulldozers."

 23   Voilà ce qu'il a dit en réponse à ma question. Et j'avais dit je reviendrai

 24   là-dessus lorsque je vais trouver la référence précise, la référence qui

 25   provient de l'affaire Milutinovic. Je vous ai maintenant fourni les lignes

 26   et les pages idoines. C'était mon intention également hier, mais peut-être

 27   que j'ai mal été compris.

 28   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous ai indiqué ce que j'avais

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  1   compris, parce qu'hier cela avait été placé dans le contexte de ce qui

  2   avait été dit ici devant cette Chambre de première instance.

  3   Je suppose que vous acceptez que le témoin en l'espèce n'a pas fait

  4   référence devant cette Chambre de première instance à des bulldozers, et

  5   c'est justement ce qu'il vous a dit à ce sujet.

  6   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Voilà ce que je lui ai

  7   demandé : Vous avez mentionné les bulldozers, vous les avez mentionné

  8   précédemment. Et c'est pour cela que j'ai posé la question, parce qu'en

  9   fait le témoin-là a répondu : "Non." J'ai dit : "Bien, écoutez, je vais

 10   trouver la référence," mais je n'ai pas pu la trouver hier. Vous voyez

 11   maintenant, pour ce qui est du compte rendu d'audience d'hier, pour ce qui

 12   est de ce que dit M. Ramadani, vous voyez ce que le compte rendu d'audience

 13   a dit.

 14   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djordjevic, permettez-moi une

 15   suggestion. Peut-être que vous pourriez mettre un terme à ce débat, parce

 16   qu'il est absolument clair comme de l'eau de roche, ce qui a été compris

 17   hier lorsque vous avez posé la question à propos des bulldozers mentionnés

 18   par le témoin. Alors il se peut que vous ayez quelque chose à dire à propos

 19   des bulldozers et que vous vouliez assurer le suivi par rapport à un procès

 20   précédent, mais ce n'est pas la peine de revenir à la charge tout le temps.

 21   Posez la question, si c'est ce que vous voulez faire.

 22   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président.

 23   Je m'excuse. Il se peut d'ailleurs que je me sois mal exprimé, mais j'ai

 24   peut-être fourni de mauvaises explications, que je me suis mal expliqué.

 25   Q.  Mais le fait est, Monsieur Ramadani, comme vous pouvez le voir dans

 26   l'affaire Milutinovic, lors de votre déposition, vous avez fait référence à

 27   des bulldozers. Donc qu'avez-vous à nous dire à ce sujet ? Je vous ai

 28   maintenant cité le compte rendu d'audience dans cette affaire, dans

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  1   l'affaire Milutinovic. Est-ce que vous pouvez nous dire ce que vous savez à

  2   ce sujet. Je vous en remercie.

  3   R.  Il y avait des traces de bulldozers ou de camions. Je n'ai pas

  4   mentionné les bulldozers, à proprement parler, parce que ces parpaings de

  5   béton, pour les enlever du site, vous ne pouvez pas le faire à la main. Il

  6   faut faire appel à des machines pour ce faire. Puis il y avait deux

  7   cratères. Nous avons trouvé deux cratères après la guerre. Donc comment

  8   est-ce qu'ils ont déplacé tout cela, je n'en sais rien, mais ma suggestion

  9   c'est qu'ils ont dû avoir besoin de bulldozers.

 10   Q.  Je vous remercie, Monsieur Ramadani. Merci. C'est beaucoup plus clair

 11   maintenant.

 12   Justement à propos de ce que vous avez dit hier, j'aimerais vous demander

 13   pourquoi est-ce qu'avant-hier vous n'avez jamais mentionné le fait que vous

 14   aviez également trouvé des corps qui avaient été ensuite identifiés, et les

 15   personnes qui voulaient trouver ces corps, et je suppose qu'il s'agissait

 16   des membres de la famille de ces personnes, les ont trouvés sur les berges

 17   de la rivière Drim. Je me demande pourquoi vous avez mentionné cela

 18   seulement hier, car je pense que cela a son importance. Vous n'avez jamais

 19   mentionné cette identification, le fait qu'ils ont été identifiés. Vous

 20   n'avez jamais mentionné cette identification, pas dans l'affaire Milosevic.

 21   Je m'excuse. J'aimerais vous donner une référence. Il s'agit de la page 18

 22   de la pièce D001. Je demanderais que cette pièce soit affichée à l'écran.

 23   Cela fait partie du compte rendu d'audience dans l'affaire Milosevic. Donc

 24   D001-4430, page 18.

 25   Voilà ce que vous dites :

 26   "Je ne sais pas ce qu'il est advenu de leurs corps. Tout ce que nous avons

 27   trouvé c'était des vêtements et des chaussures." Il s'agit de la ligne 21,

 28   jusqu'à la fin de cette page. Vous ne faites absolument pas référence à la

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  1   rivière Drim. Vous ne faites absolument pas référence à ce dont vous avez

  2   parlé hier. Alors quelle en est la raison ?

  3   R.  Bien sûr que j'ai mentionné la rivière Drini. Mais toutefois, ces

  4   restes ont été identifiés en 2007, me semble-t-il, ensuite ils ont été

  5   réenterrés.

  6   Q.  Corrigez-moi, Monsieur Ramadani, si je me trompe, mais j'avais cru

  7   comprendre que ces restes avaient été trouvés en 1999, d'après ce que vous

  8   avez dit hier, et qu'ils avaient été transférés à Pristina, et que c'est un

  9   expert qui l'avait fait. C'est ce que j'avais cru comprendre, en tout cas.

 10   R.   Ils ont été transférés à la morgue de Rahovac, puis à la morgue de

 11   Prishtina, puis ils nous ont été rendus en 2007. Certains des restes nous

 12   ont été rendus.

 13   Q.  Je vais vous poser une dernière question par rapport à ce que vous avez

 14   dit à propos de ce lieu du crime où toutes ces victimes avaient perdu leurs

 15   vies, ou la vie, et cetera. Voilà la question que j'aimerais vous poser

 16   maintenant : Est-ce qu'une liste officielle a jamais été dressée par les

 17   autorités officielles, autorités officielles établies au Kosovo ? Je fais

 18   référence à la mission internationale au Kosovo, la mission des Nations

 19   Unies. Pour ce qui est des crimes, j'entends. Est-ce qu'il y a une liste

 20   qui a été dressée, une liste de victimes ? Est-ce que cette liste a jamais

 21   été établie avec des détails, tels que leurs numéros d'identification

 22   personnels et d'autres coordonnées ?

 23   Vous avez, vous, compilé une liste de personnes qui ont perdu la vie.

 24   Vous nous l'avez dit hier. Il y avait M. Avdyli, ou plutôt M. Krasniqi qui

 25   vous a aidé pour ce faire. Est-ce que vous savez si ensuite une nouvelle

 26   liste a été dressée, liste qui reprenait les noms des personnes qui sont

 27   mortes à Mala Krusa le 26 mars 1999 ?

 28   R.  Nous avons dressé la liste, puis il y en a qui ont obtenu la

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  1   liste. Je n'étais pas là lorsqu'ils ont obtenu la liste, donc je ne sais

  2   pas quelles sont les autorités qui ont obtenu la liste. Lorsque j'ai

  3   compilé cette liste, je l'ai remise aux enquêteurs, mais pour ce qui est

  4   des autres autorités de la mission des Nations Unies au Kosova, par

  5   exemple, je ne sais pas qui est le représentant de cette mission des

  6   Nations Unies qui a obtenu la liste.

  7   Q.  Je vous remercie, Monsieur Ramadani. Je vais maintenant passer à la

  8   dernière question.

  9   Vous avez dit à plusieurs reprises, vous avez, par exemple, témoigné dans

 10   l'affaire Milutinovic, dans l'affaire Milosevic, et vous avez fait

 11   référence ou vous avez également fait des déclarations qui ont été données

 12   aux enquêteurs de ce Tribunal. Cela porte sur un accord qui a apparemment

 13   été conclu entre les Serbes et les Albanais. Vous faites référence

 14   d'ailleurs à trois noms de famille, à trois personnes pour les Serbes, puis

 15   pour votre camp, vous faites référence à feu Ismail Arifi. Toutefois, vous

 16   avez fait des dépositions différentes à propos de cet accord. C'est la

 17   raison pour laquelle je vais vous poser deux questions à ce sujet.

 18   Ma première question est comme suit : est-ce que vous savez si cet accord a

 19   été conclu, en fait ?

 20   R.  Je n'étais pas présent, et hier je vous avais dit que même si un accord

 21   a été conclu, les Serbes n'ont pas respecté l'accord, car ils ont tué, ils

 22   ont pilonné, ils ont incendié. Donc je n'étais pas présent. Je n'ai pas

 23   donc pu assister à la signature d'un accord. Mais si tant est que cet

 24   accord a été conclu, il n'a pas été respecté par les Serbes. Les Serbes,

 25   eux, n'ont pas véritablement eu de menaces des Albanais.

 26   Q.  Merci. Je vais maintenant demander à Mme l'Huissière d'afficher la page

 27   12 de la pièce D001-4430.

 28   Monsieur Ramadani, j'aimerais, dans un premier temps, attirer votre

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  1   attention sur les lignes 9, 10 et 11 de cette page. Voilà la réponse que

  2   vous avez fournie à la question qui vous était posée par l'accusé. Voilà ce

  3   que vous avez dit : "Ils ont conclu un accord…" Vous parlez au

  4   conditionnel. Que s'ils l'ont fait, ils ont fait un accord. "Je n'étais pas

  5   présent." J'aimerais savoir si quelqu'un vous a vraiment dit que cet accord

  6   avait été conclu, parce que vous dites qu'ils ont conclu un accord, ou est-

  7   ce que vous supposez, parce que vous parlez de cet accord, que cet accord a

  8   été conclu ? Est-ce que c'est une supposition de votre part ? Est-ce que

  9   quelqu'un vous a véritablement affirmé que cet accord avait été conclu ?

 10   Est-ce que vous pourriez, je vous prie, nous fournir une réponse succincte

 11   à ce sujet ?

 12   R.  Là, il s'agit d'ouï-dire. Comme je vous l'ai dit, je n'étais pas

 13   physiquement présent lors des pourparlers pour cet accord. Si cet accord a

 14   été conclu, je ne sais pas en vertu de quelles conditions il a été conclu.

 15   Si un accord a été conclu, de toute façon, il n'a pas été respecté par les

 16   Serbes.

 17   Q.  D'après ce que j'ai compris, vous avez ensuite expliqué que les Serbes

 18   s'étaient engagés à protéger les Albanais des forces serbes ou de toute

 19   autre personne au cas où un conflit viendrait éclater, puis vous dites

 20   maintenant que les Serbes n'ont pas respecté l'accord, qu'ils ont brûlé,

 21   qu'ils ont incendié, et cetera, et cetera. Toutefois, il y a une autre

 22   partie de votre déposition, puisque vous dites à un autre moment que

 23   l'accord qui avait été conclu était que les Albanais protégeraient les

 24   Serbes de l'UCK. Alors pourquoi est-ce que vous avez tenu ces propos, et

 25   qu'est-ce que vous entendiez lorsque vous avez dit cela ? C'est la question

 26   qui vous a été posée, et c'est la réponse que vous aviez apportée dans le

 27   cadre de votre déposition.

 28   R.  Ce n'est pas vrai. Ce que je dis maintenant est exactement ce que j'ai

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  1   dit alors. Je n'ai rien dit d'autre. J'ai tout simplement dit que je

  2   n'étais pas présent lors de la signature de l'accord, si tant est qu'il y a

  3   eu une conclusion pour cet accord. Je vous ai déjà dit que si un accord

  4   avait été conclu, les Serbes, de toute façon, ne l'ont pas respecté. Je ne

  5   suis pas informé de ce que vous me demandez maintenant.

  6   Q.  Mais Monsieur Ramadani, ma question était comme suit : Comment se fait-

  7   il que vous ayez affirmé qu'ils avaient conclu un accord à ce moment-là,

  8   mais comment se fait-il que maintenant vous dites que les Serbes n'ont pas

  9   respecté l'accord et qu'il n'y avait pas un accord, et que vous ne le

 10   saviez pas, mais si tel est le cas, dites-nous-le. Mais il y a un certain

 11   manque de logique. Je ne vais pas continuer à vous poser ces questions,

 12   parce que visiblement je n'obtiens pas de réponse à la question que je

 13   réitère.

 14   Mme NILSEN : [interprétation] Monsieur le Président, je m'excuse

 15   d'interrompre.

 16   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Nilsen.

 17   Mme NILSEN : [interprétation] Apparemment le conseil de la Défense fait

 18   référence aux déclarations du témoin des 18 et 20 juillet 1999. C'est dans

 19   le cadre de ces déclarations qu'il fait référence à cet accord allégué,

 20   c'est ce que le témoin a indiqué aujourd'hui, il dit qu'il s'agit

 21   d'éléments de preuve par ouï-dire.

 22   Il l'a dit à la page 3, je m'adresse à mon estimé confrère. Consultez

 23   cela, parce que là il n'est pas fait référence à un accord en vertu duquel

 24   les Albanais protégeraient les Serbes de l'UCK. En fait, le terme exact est

 25   qu'ils protégeraient les Serbes de l'UCK.

 26   M. DJORDJEVIC : [interprétation] J'aimerais rappeler à mon estimée consoeur

 27   que l'UCK c'est la même chose que ce qu'on appelle en anglais le "KLA" ou

 28   l'"OVK," c'est la même chose, si tu veux. Peut-être que vous n'avez pas

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  1   entendu ce que je disais, donc je répète, l'UCK c'est la même chose, c'est

  2   l'OVK et c'est le KLA, KLA. Donc le témoin, en fait, est en train de dire

  3   que les Albanais devaient protéger les Serbes de l'UCK, de la KLA ou de

  4   l'OVK. Je le répète, c'est la même chose. Dans le témoignage dans l'affaire

  5   Milutinovic il y a la référence à cette partie de la déposition du témoin.

  6   Il dit qu'il n'était pas présent. Ce n'est pas la question que je pose au

  7   témoin. Ce que je demande au témoin, c'est - bon, il a dit qu'il s'agissait

  8   d'ouï-dire, certes. Et j'aimerais savoir qui lui a indiqué, j'aimerais

  9   qu'il nous fournisse un peu plus de détails à propos de la personne qui a

 10   indiqué cela, peut-être que cette personne était présente. Manifestement,

 11   le témoin sait qu'il y avait un accord, mais je veux qu'il me dise de la

 12   part de qui il a entendu cela, puisqu'il a dit que les Serbes n'avaient pas

 13   respecté l'accord. Q.  Bien entendu, qu'on ne peut pas forcer les gens à

 14   parler des choses dont ils ne veulent pas parler, mais je ne veux

 15   absolument pas que l'ont tire des conclusions de ce qui vient d'être dit,

 16   il appartient à d'autres de le faire.

 17   Mais j'aimerais tout simplement que vous fournissiez une explication,

 18   Monsieur, pourquoi est-ce que vous avez mentionné l'UCK, pourquoi est-ce

 19   que vous avez mentionné cet accord ? Ni plus ni moins, ne répétez pas, de

 20   grâce, tout ce que vous avez déjà dit. J'ai bien compris que vous n'étiez

 21   pas présent, ça je le sais maintenant.

 22   R.  Je n'ai pas dit qu'un accord avait été conclu puisque je n'étais pas

 23   là, je n'étais pas physiquement sur place, je ne savais pas qu'il y avait

 24   un accord. Cela dit, même si on prend l'hypothèse qu'il y avait bel et bien

 25   un accord, je répète que cet accord n'a pas été respecté de toute façon,

 26   ils n'ont pas respecté l'accord. J'en suis sûr. Mais je n'étais pas là, je

 27   n'étais pas sur place et je ne peux donc pas confirmer si un accord a bel

 28   et bien été conclu. Il s'agit uniquement d'ouï-dire.

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  1   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Dans le procès Milosevic, Monsieur

  2   Ramadani, il semble qu'Ismail Arifi vous aurait dit qu'il y avait bel et

  3   bien un accord. Est-ce ce que nous devons comprendre de la déposition que

  4   vous avez faite dans le cadre de ce procès Milosevic ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'étais pas sur place, je n'étais pas

  6   présent lorsque cet accord a été conclu, si tant est qu'il ait été conclu.

  7   Mais j'en ai entendu parler de la part d'autres personnes. Mais quant à

  8   savoir si c'est vrai ou pas, je n'en sais rien. C'est pour ça que j'ai déjà

  9   dit précédemment que j'avais entendu parler d'un accord et rien de plus.

 10   Mais même s'il y avait eu un accord, il n'a pas été respecté par les

 11   Serbes.

 12   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie. Mais est-il correct

 13   de dire que vous avez entendu parler d'un accord qui aurait été signé entre

 14   les Serbes et les villageois albanais ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme j'ai dit, comme je l'ai déjà dit, j'ai

 16   entendu des rumeurs à ce propos. Je n'ai pas obtenu d'information directe.

 17   J'ai juste entendu des gens parler d'un accord, mais personnellement, je

 18   n'étais au courant de rien.

 19   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais vous avez entendu des rumeurs de

 20   la part de certaines personnes. Est-ce qu'Ismail Arifi serait une de ces

 21   personnes ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agissait de rumeurs que j'ai entendues,

 23   que j'ai entendues alors que des gens se parlaient entre eux. Donc je ne

 24   l'ai pas entendu directement de la bouche d'Arifi. Il y avait une

 25   conversation en cours lorsque nous étions près du ruisseau.

 26   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais les rumeurs qui couraient, que

 27   vous avez entendues, ces rumeurs étaient-elles qu'il y avait un accord

 28   selon lequel les Serbes allaient protéger la population albanaise et que

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  1   les Albanais allaient protéger les Serbes de l'UCK ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais absolument pas comment ils auraient

  3   pu protéger les Serbes de l'UCK, puisqu'il n'y avait pas présence de l'UCK

  4   sur place. Cela dit, les Serbes, de leur côté, étaient mobilisés. Ils

  5   étaient en uniforme. Ils avaient des armes, et c'est eux qui étaient du

  6   côté des plus forts. Mais comme je l'ai déjà dit, je n'étais pas impliqué

  7   dans tout cela. J'ai juste entendu des conversations, j'ai entendu cela de

  8   façon indirecte. Je n'ai rien entendu directement de M. Arifi, c'est

  9   uniquement du ouï-dire.

 10   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci. C'est du ouï-dire. Mais

 11   j'aimerais savoir si ce ouï-dire faisait valoir qu'un accord avait été

 12   signé principalement pour que les Serbes protègent les villageois albanais

 13   ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Certains disaient cela et d'autres disaient

 15   d'autres choses. Personnellement, je ne me suis pas du tout intéressé à

 16   toutes les conversations. Nous étions menacés par les Serbes à l'époque

 17   donc pour moi, ces conversations, je n'y accordais pas beaucoup

 18   d'importance. Les gens se parlaient entre eux de ce genre de chose et rien

 19   de plus.

 20   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bien. Mais donc, vous pour vous

 21   résumer, vous avez entendu de la part de certaines personnes qu'il y avait

 22   bel et bien un accord selon lequel les Serbes allaient protéger la

 23   population albanaise; c'est correct, c'est cela ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est cela. C'est ce qu'ils disaient.

 25   Mais de toute façon les Serbes n'ont pas respecté, n'ont pas tenu leur

 26   promesse et tout s'est effondré.

 27   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais avez-vous aussi entendu de la

 28   part de certaines personnes que l'accord stipulait que les Albanais

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  1   allaient protéger les Serbes des agissements de l'UCK ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je vous l'ai déjà dit, il n'y pas de

  3   fondement sur lequel baser ce type de promesse. Il n'y 'y avait aucune

  4   présence de l'UCK dans mon village. Je ne vois pas vraiment pourquoi ils

  5   promettraient de protéger les Serbes des agissements de l'UCK puisqu'il n'y

  6   avait pas d'UCK.

  7   Nous étions un village mixte avec différentes appartenances

  8   ethniques, donc il était impossible qu'il y ait une présence de l'UCK dans

  9   notre village. Donc il n'y avait aucun intérêt, il n'y avait aucune

 10   possibilité de faire ce type de promesse. Tout cela c'était des rumeurs et

 11   rien d'autre.

 12   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous comprenons bien ce que vous nous

 13   dites, vous ne comprenez pas pourquoi il y aurait un accord de ce type, ça,

 14   nous l'avons compris. Mais j'aimerais juste savoir si vous avez entendu

 15   dire qu'il y avait bel et bien eu un accord qui stipulait, entre autres,

 16   que les Albanais, la population albanaise allait protéger les Serbes des

 17   agissements de l'UCK. Est-ce que vous avez entendu des gens suggérer qu'un

 18   tel accord avait eu lieu ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai déjà dit, j'ai entendu quelques

 20   conversations. Je ne l'ai pas entendu directement de la bouche d'Ismail

 21   Arifi, je ne sais même pas qui parlait de tout cela. Ils parlaient tous, en

 22   fait, mais je n'ai obtenu aucune information directe de qui que ce soit à

 23   propos de tout cela.

 24   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Donc si je décrypte votre réponse,

 25   votre réponse est affirmative. Vous avez entendu des gens en parler, parler

 26   de cela; c'est bien cela ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, d'accord. Laissons les choses en état

 28   dans ce cas.

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  1   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] J'essaie juste de comprendre, Monsieur

  2   Ramadani. Nous essayons de comprendre exactement quels sont les ouï-dire

  3   que vous avez entendu à l'époque. Ce n'est pas parce que vous les avez

  4   entendus qu'on va se dire que ce que vous avez entendu était vrai, bien sûr

  5   que non, mais on veut juste savoir ce que vous avez entendu. Si vous avez

  6   bel et bien entendu quelque chose, et visiblement vous avez entendu

  7   certaines rumeurs à l'époque.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je vous ai dit et comme je vous répète,

  9   j'ai entendu ce type de conversations, mais je n'ai pas entendu ça

 10   directement de la bouche d'Ismail Arifi ou de qui que ce soit d'autre. Ce

 11   sont juste des conversations que j'ai entendues au passage, lorsque les

 12   gens étaient en train de parler de ce qui se passait. Moi, personnellement,

 13   ce qui m'inquiétais c'était ma sécurité, la sécurité de ma famille, les

 14   pilonnages avaient déjà commencé, et cetera, et cetera.

 15   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Je vous remercie.

 16   Monsieur Djordjevic, c'est à vous.

 17   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 18   Q.  Monsieur Krasniqi, quelle est la distance entre Prizren et votre

 19   village ?

 20   R.  Quinze kilomètres.

 21   Q.  J'attends l'interprétation.

 22   R.  Quatre kilomètres.

 23   Q.  Monsieur Krasniqi, quelle est la distance entre Orahovac et votre

 24   village ?

 25   R.  A peu près 12 kilomètres.

 26   Q.  Monsieur Ramadani, quelle est la distance entre Djakovica et votre

 27   village ?

 28   R.  Je ne pense pas que ces questions soient utiles. Il faudrait plutôt

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  1   parler du problème, du problème des femmes qui se retrouvaient seules sans

  2   leurs hommes, sans leurs enfants, les maisons --

  3   Q.  Monsieur Krasniqi, il faut que je vous interrompe.

  4   R.  Je m'appelle M. Ramadani.

  5   Q.  Ne faites pas de commentaire, s'il vous plaît. Je veux que vous

  6   répondiez à mes questions et rien de plus.

  7   Quelle est la distance entre votre village et Djakovica ?

  8   R.  Ecoutez, je n'ai pas mesuré la distance, possiblement près de 30

  9   kilomètres.

 10   Q.  Monsieur Ramadani, avez-vous entendu parler à l'époque au Kosovo, donc

 11   avant mars 1999, une organisation qui se serait appelée UCK ou ALK ou OVK

 12   ou KLA en anglais ? Enfin, en avez-vous entendu parler à l'époque ?

 13   R.  Ça ne m'intéressait pas, à savoir s'il y avait UCK ou pas, ça ne

 14   m'intéressait pas. Moi, j'étais un agriculteur. Ce qui m'intéressait

 15   c'était de m'occuper de ma famille et de subvenir à leurs besoins. L'UCK ne

 16   m'intéressait pas du tout.

 17   Q.  Monsieur Ramadani, vous conviendriez avec moi que vous avez habité dans

 18   cette région, que vous étiez avec des personnes de votre appartenance

 19   ethnique, mais aussi avec des Rom, avec des Roma, avec des Serbes et, bien

 20   sûr, vous vous inquiétiez pour votre propre sécurité, vous vouliez savoir

 21   ce qui se passait à l'extérieur de votre village. Mais il y avait quand

 22   même la télévision, ça existait, il y avait des médias, il y avait la

 23   presse, qu'elle soit serbe ou albanaise. Donc il y avait des informations

 24   quand même qui circulaient. J'aimerais savoir si vous avez entendu parler

 25   des enlèvements de Serbes avant mars 1999 ? Avez-vous entendu parler des

 26   meurtres et des corps qui ont été retrouvés au Kosovo ? Ou il s'agit peut-

 27   être de propagande serbe, je ne suis pas en train de dire que c'est de la

 28   propagande serbe, mais il n'empêche que la propagande serbe faisait part de

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  1   ce type d'agissement. Alors vous ne pouvez pas me dire que vous n'avez pas

  2   même pas entendu parler de tout ça et que peut-être que ça ne vous

  3   intéressait pas. Mais vous dites qu'il y avait des forces serbes qui

  4   étaient rentrées dans le pays. Bon, vous êtes agriculteur peut-être, mais

  5   vous saviez que les Serbes arrivaient. Pourtant vous êtes un fermier. Ça

  6   vous intéressait visiblement. Donc vous êtes un Albanais, vous êtes en

  7   train de me dire que vous ne savez pas que l'UCK existait. Vous êtes quand

  8   même patriote, vous êtes membre de la communauté ethnique albanaise, vous

  9   deviez bien le savoir quand même. Si vous me dites que vous n'étiez pas au

 10   courant, je prendrai votre réponse en tant que telle, mais j'aimerais quand

 11   même avoir votre réponse.

 12   R.  Il n'y avait aucune présence de l'UCK dans notre région. Si elle

 13   existait, c'était dans la région de la Drenica.

 14   Q.  Donc à l'époque il y avait présence quand même. Vous dites que c'est à

 15   Drenica. Vous avez entendu parler de combats autour de Djakovica entre

 16   l'UCK et les forces serbes, puis aussi des combats entre ces deux parties

 17   du côté de Prizren ?

 18   R.  Non, je n'en ai pas entendu parler. Je n'ai pas entendu parler de ces

 19   combats. J'ai vu des chars, j'ai vu des blindés transport de troupes qui se

 20   déplaçaient sur la grand-route. Mais je n'ai pas assisté à des combats,

 21   donc je ne peux pas du tout vous dire quoi que ce soit à ce propos.

 22   Q. Monsieur Ramadani, vous avez parlé de chars à de nombreuses reprises.

 23   Hier je voulais entendre parler du pilonnage et j'ai posé quelques

 24   questions à ce propos.

 25   M. DJORDJEVIC : [interprétation] J'aimerais maintenant demander au greffier

 26   d'afficher les versions anglaise et albanaise de la déclaration de ce

 27   témoin du 5 octobre 2001. Il s'agit de la pièce D001-4382, version anglaise

 28   et pour la version albanaise, la cote est D001-4392. Pouvons-nous avoir

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  1   cela à l'écran, s'il vous plaît.

  2   On vient de me dire que ceci a été versé au dossier sous la cote D29.

  3   Pourrions-nous, s'il vous plaît, avoir la page 3 à l'écran.

  4   Q.  Monsieur Ramadani, ici nous avons les deux versions. Je regardais la

  5   version en B/C/S qui semble identique à la version anglaise et albanaise.

  6   Pour ce qui est de la version B/C/S, il s'agit du paragraphe 8. Je cite :

  7   "On m'a demandé combien de véhicules de la VJ se trouvaient sur la route

  8   goudronnée qui était à l'extérieur de Kruse e Vogel…

  9   "Il y avait des lignes le long de la route goudronnée entre Djakovica

 10   et Prizren. Ils ont été déployés là pour la première fois le 25 mars 1999 à

 11   4 heures du matin. J'ai vu 30 à 40 véhicules garés sur cette route. Les

 12   véhicules que j'ai vus étaient une espèce de mélange. Il y avait des

 13   véhicules transport de troupes et des Praga. Ils n'étaient pas en

 14   camouflage. Les TBT, les véhicules transport de troupes étaient du bleu

 15   normal de la MUP, et les Praga avaient le vert habituel de la VJ. Sur les

 16   Praga il y avait une mitrailleuse et les canons. Sur les Praga on peut voir

 17   différents types d'armes montées. Les équipes des Praga étaient de la VJ.

 18   "Je ne sais pas qui était à bord des véhicules transport de troupes.

 19   J'imagine que c'était le MUP.

 20   "On m'a demandé si j'ai vu des chars T-55 qui auraient été cantonnés

 21   autour de Kruse e Vogel à l'époque.

 22   "Non.

 23   "On m'a demandé si j'ai vu des roquettes sur ces véhicules…" et vous

 24   avez répondu : "Non."

 25   "On m'a demandé quels véhicules ont été utilisés dans le cadre de

 26   l'attaque." Je ne vais pas continuer, parce que vous en avez parlé hier.

 27   Mais j'aimerais savoir si vous avez fait votre service national à un moment

 28   ou à un autre ?

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  1   R.  Oui. J'étais dans la marine.

  2   Q.  Donc vous avez fait votre service national dans le cadre de l'ancienne

  3   République fédérale socialiste de Yougoslavie, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui. J'étais dans la marine, et j'ai fait mon service national en 1966.

  5   Enfin, j'ai terminé en 1966.

  6   Q.  Vous conviendriez-vous avec moi que l'armée de l'époque  dans ce pays

  7   était l'une des armées les mieux équipées et les plus fortes de la région,

  8   n'est-ce pas ?

  9   R.  Je ne sais pas si c'était l'armée la plus sophistiquée. C'étaient les

 10   officiers qui étaient au courant de ça. Nous, nous n'étions que des hommes

 11   de rang, des soldats de base. Ce n'est pas à nous de savoir quelles étaient

 12   les armées modernes et quelles étaient les armées qui ne l'étaient pas.

 13   Ceux qui étaient bien entraînés, qui étaient formés, le savaient. Nous,

 14   nous n'étions que des hommes de base et rien de plus.

 15   Q.  Lorsque vous avez fait votre service national, avez-vous été promu ?

 16   Est-ce que vous êtes monté en grade ?

 17   R.  Non.

 18   Q.  J'imagine que vous avez fait votre service national et que vous avez

 19   reçu une instruction normale dans le cadre de votre service national,

 20   n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui, c'était à Pula.

 22   Q.  Pourriez-vous nous dire ce qu'est un char ? Parce que vous parlez

 23   toujours de chars. Mais lorsque vous parlez de "char," pourriez-vous nous

 24   dire ce que vous entendez par là ?

 25   R.  Un char est équipé d'un grand canon. Il peut y avoir des chenillettes,

 26   des chenilles. Mais il y a aussi des chars qui sont sur roues, donc ils

 27   roulent sur du goudron, mais il y a aussi des chars qui ont des chenilles.

 28   Je ne connais pas tout sur les chars, mais je sais qu'ils ont un grand

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  1   canon déjà, et les équipages de chars possèdent une dotation militaire bien

  2   précise. C'est tout ce que je sais sur les chars, en effet. Ceux qui ont

  3   fait l'académie militaire ont sans doute des connaissances plus étendues

  4   sur les chars. Mais moi je n'ai pas reçu ce type d'instructions.

  5   Q.  Vous dites qu'ils ont un long canon. C'est bien le canon qui les

  6   équipe; c'est cela ?

  7   R.  Oui.  Ils ont un long canon avec un fût très long.

  8   Q.  Ces chars dont vous nous parlez, s'agit-il des chars sur roues ou des

  9   chars sur chenilles ?

 10   R.  Ceux dont je parle étaient des chars à chenilles. Ceux que j'ai vus

 11   étaient à chenilles. Je ne sais pas quel est le nom exact de ce type

 12   d'engins.

 13   Q.  Je m'en doutais. Mais bon, vous avez une idée assez générale de ce

 14   qu'est un char, moi aussi d'ailleurs, parce que moi non plus je ne suis pas

 15   un expert en paramilitaire.

 16   Monsieur Ramadani, à l'époque, en 2001, lorsque vous avez fait votre

 17   déclaration, vous saviez à quoi ressemblait un char, en tout cas dans les

 18   grandes lignes. Donc il est vrai qu'ici on vous a parlé de T-55, et vous

 19   avez dit qu'il n'y avait aucun char. Pourquoi avez-vous répondu cela,

 20   puisque maintenant vous êtes en train de dire quelque chose totalement

 21   différent ? Vous dites qu'il y avait des Praga et des véhicules blindés

 22   transport de troupes. C'est ce que vous avez dit dans votre déclaration de

 23   2001, il y a presque huit ans.

 24   R.  Je n'ai pas la déclaration sous les yeux. Il y avait des chars. Il y

 25   avait des armes antiaériennes, ils avaient des canons. Je n'ai pas la

 26   déclaration avec moi, mais vous pouvez vous y référer pour voir ce que j'ai

 27   dit. S'il y a une erreur, c'est autre chose.

 28   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je peux peut-être vous prêter

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  1   assistance, Monsieur Ramadani. La déclaration à laquelle M. Djordjevic fait

  2   référence comprend un passage où il est écrit ce qui suit :

  3   "On m'a demandé si j'étais au courant que des chars T-55 auraient été

  4   cantonnés dans la région de Krusha e Vogel à l'époque." La réponse que vous

  5   avez donnée est non. Je pense que c'est de ce passage dont parle M.

  6   Djordjevic. Etiez-vous au courant qu'il y aurait eu des chars T-55

  7   cantonnés dans le village ? Et votre réponse était négative. En tout cas,

  8   c'est ce que nous avons dans la déclaration.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact, car il n'y avait pas de

 10   chars dans le village, à proprement parler. Cela c'est vrai. Les chars, ils

 11   étaient camouflés, et ils étaient positionnés quasiment à Krusha et Madhe.

 12   Il y avait des véhicules de transport de troupes, des Praga le long de la

 13   route principale. Il y avait des chars, également, mais ils étaient plus

 14   proches de notre village du côté de Krusha e Madhe. En fait, ma maison est

 15   dans le village, vous savez où elle est maintenant, et vous pouvez voir

 16   cette partie du village très bien depuis ma maison.

 17   M. DJORDJEVIC : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur Ramadani, vous avez dit que vous ne saviez pas ce qu'était un

 19   T-55. Vous nous avez dit que vous saviez ce qu'était un char, mais que vous

 20   ne saviez pas ce qu'était un T-55. Pouvons-nous convenir que dans votre

 21   déclaration du 5 octobre, déclaration qui est maintenant affichée à

 22   l'écran, lorsque vous dites il n'y a pas de chars, il n'y pas de chars T-

 23   55, qu'est-ce que vous vouliez dire par cela ? Qu'il n'y avait absolument

 24   pas de chars du tout; c'est cela ? Pouvons-nous nous mettre d'accord ?

 25   R.  Ce que je voulais dire et ce que j'entendais par cela c'est qu'il n'y

 26   avait pas de chars dans le village de Krusha e Vogel. A l'intérieur du

 27   village il n'y avait pas de chars.

 28   Q.  D'après votre déposition, il est absolument évident que les chars ne

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  1   pouvaient être que sur la route principale, sur la route goudronnée, parce

  2   que vous insistez, vous dites que l'armée n'a pas participé du tout à cela.

  3   Vous en convenez, n'est-ce pas ?

  4   R.  Non, l'armée y a participé, mais l'armée, elle était positionnée autour

  5   du village, à la périphérie du village, à l'extérieur, alors que la police,

  6   elle, était à l'intérieur du village. L'armée, les militaires, quant à eux,

  7   étaient positionnés près de la route principale qui relie Prizren à

  8   Gjakove. L'armée n'était pas à l'intérieur du village. Dans le village il

  9   n'y avait que des policiers.

 10   Q.  Mais ça c'est très clair, Monsieur Ramadani, mais lorsque vous parlez

 11   de chars, les chars, ils étaient utilisés par l'armée yougoslave, et comme

 12   vous l'avez dit, ces chars ne se trouvaient pas à l'intérieur du village,

 13   mais à l'extérieur du village. Donc cela ne porte pas polémique que de dire

 14   que l'on pouvait voir les chars et tout le matériel militaire à l'extérieur

 15   du village, sur la route goudronnée qui relie Djakovica à Prizren. On

 16   pouvait s'y attendre à cela. Mais lorsque vous dites qu'il n'y avait pas de

 17   chars, ils ne vous ont pas demandé s'il y avait des chars dans le village.

 18   Vous, vous avez dit qu'ils se trouvaient là où vous pouviez vous attendre à

 19   ce qu'il y ait une présence de chars sur la route. Vous avez fait référence

 20   à 30 à 40 véhicules qui se trouvaient sur la route goudronnée à l'extérieur

 21   du village. Vous avez dit que vous n'avez pas vu de chars là-bas. Pourquoi

 22   est-ce que vous l'avez dit, alors ? Parce que cela ne porte pas polémique,

 23   le fait qu'il n'y avait pas de chars à l'intérieur du village. C'est ce que

 24   vous avez dit, certes, mais ensuite vous nous dites que vous avez vu ces

 25   véhicules. Vous parlez des véhicules de la VJ, vous parlez d'une trentaine

 26   à une quarantaine de véhicules, vous dites qu'il n'y avait pas de chars.

 27   Pourquoi est-ce qu'à cette époque-là vous avez dit cela et maintenant vous

 28   dites quelque chose de différent ? Répondez, ensuite je n'aurai plus de

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  1   questions à vous poser.

  2   R.  La route principale qui relie Prizren à Gjakove, sur cette route se

  3   trouvaient positionnés les militaires avec leurs chars, avec leur matériel

  4   antiaérien, et cetera, et cetera. Ils ne se trouvaient pas dans le village.

  5   Cela, je l'ai toujours dit. J'ai toujours dit que dans le village il n'y

  6   avait pas de présence militaire, que seule la police était présente dans le

  7   village.

  8   Q.  Mais pourquoi, alors, est-ce que vous avez dit qu'il y avait des Praga

  9   et des véhicules blindés transport de troupes, ensuite lorsqu'on vous a

 10   posé une question précise à propos des chars T-55, vous avez dit qu'il n'y

 11   en avait pas alors que maintenant vous nous dites qu'il y en a ?

 12   R.  Je vais répéter une fois de plus ce que j'ai déjà dit : ils se

 13   trouvaient à l'extérieur du village et non pas à l'intérieur du village.

 14   Dans le village, il n'y avait pas de présence de militaires, il n'y avait

 15   pas de chars. Seule la police était présente dans le village.

 16   Q.  Ce que je vous demande c'est ce qui suit : lorsque l'enquêteur vous a

 17   posé une question directe, lorsqu'il vous a dit est-ce qu'il y avait des

 18   chars T-55, vous avez dit non. Bien entendu, que nous ne parlons pas de

 19   chars dans le village. Est-ce que vous pourriez, je vous prie, expliquer

 20   cela ?

 21   Mme NILSEN : [interprétation] Objection. Non, la situation n'est pas comme

 22   suit. Non, ce n'est pas que l'enquêteur a posé cette question. J'aimerais

 23   quand même attirer votre attention sur le compte rendu d'audience dans

 24   l'affaire Milutinovic, page numéro 63. D'ailleurs, cette page s'est déjà vu

 25   octroyer une cote P, la cote --

 26   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pour le moment, on pose une question

 27   au témoin à propos de sa déclaration du mois d'octobre.

 28   Mme NILSEN : [interprétation] Oui, je le sais.

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  1   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je ne pense pas qu'il soit judicieux

  2   que vous suggériez ce qui a été dit dans une autre affaire. Le témoin peut

  3   tout à fait présenter ses observations.

  4   Mme NILSEN : [interprétation] Oui, je le sais, cela, mais ce que je voulais

  5   dire, c'est qu'on a confronté ce témoin à la même chose --

  6   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je m'excuse de vous interrompre, mais

  7   il ne vous incombe pas de suggérer quoi que ce soit. Le témoin répondra aux

  8   questions. Si vous le souhaitez, vous pourrez revenir là-dessus, cela, dans

  9   le cadre des questions supplémentaires.

 10   Mme NILSEN : [interprétation] Je comprends tout à fait --

 11   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais vous m'avez entendu, oui ou non ?

 12   Je vous dis de ne pas poser cette question maintenant. Vous pourrez ensuite

 13   revenir là-dessus lors des questions supplémentaires et poser ces questions

 14   au témoin, si vous le souhaitez.

 15   Mme NILSEN : [interprétation] Bien. Merci.

 16   M. DJORDJEVIC : [interprétation]

 17   Q.  Monsieur Ramadani, je dois vous relire ce que vous avez déjà déclaré.

 18   Est-ce que vous pouvez, je vous prie, mettre vos lunettes, et vous avez

 19   votre propre déclaration affichée sur votre écran. Essayons d'aider la

 20   Chambre de première instance, et de nous aider nous-mêmes aussi d'ailleurs,

 21   pour préciser certaines choses, et je vous en remercie.

 22   Vous voyez, ils ont dans un premier temps été déployés. Là voilà ce qui est

 23   écrit. Vous dites : "Ils ont été déployés à 4 heures du matin, le 25 mars.

 24   J'ai vu 40 à 50 véhicules garés sur la route." Cela ne porte pas polémique.

 25   Sur la route à l'extérieur du village, la route qui relie Djakovica-

 26   Prizren. Vous êtes d'accord avec moi jusqu'à présent ? Très bien. Voilà ce

 27   que je lis, moi :

 28   "J'ai vu qu'il y avait des véhicules de blindés transport de troupes

Page 1168

  1   et les Praga. Ils n'étaient pas camouflés…" donc il ne s'agit pas de chars.

  2   Nous allons sauter trois paragraphes. Ensuite, voilà ce que vous

  3   dites :

  4   "On me demande si je savais s'il y avait des chars T-55 positionnés

  5   dans la zone de Krusa e Vogel à ce moment-là."

  6   Donc il ne s'agit même pas de la route, d'ailleurs, et vous répondez par la

  7   négative. Personne ne vous a demandé s'il y avait un char dans le village,

  8   personne ne vous l'a demandé s'il y avait même un char sur la route mais

  9   dans la zone de Mala Krusa, et vous dites non. Ensuite il y a quelques

 10   questions nous en avons parlé hier. Vous aviez dit qu'il n'y avait pas

 11   d'artillerie, qu'il n'y avait pas un seul char, qu'il n'y avait pas de

 12   roquettes. Ce que j'aimerais savoir, c'est ce que vous entendiez à cette

 13   époque-là, et ce que vous entendiez hier. Parce que vous faites référence à

 14   des chars, alors qu'en 2001, votre mémoire des événements était quand même

 15   beaucoup plus fraîche, puisque cette mémoire de ces événements si fâcheux.

 16   Vous avez dit qu'il n'y avait pas de chars, ça c'est un fait, vous l'avez

 17   dit. Donc est-ce que vous pourriez répondre, je ne vais pas vous poser

 18   d'autres questions, de toute façon je ne vais pas revenir là-dessus quelle

 19   que soit la réponse que vous me fournissez d'ailleurs maintenant.

 20   R.  On m'a posé une question à propos des chars dans mon village.

 21   L'Accusation m'a demandé s'il y avait des chars dans le village et je leur

 22   ai dit qu'il n'y avait pas de chars dans le village.

 23   Q.  Je m'excuse, Monsieur Ramadani, mais ce n'est pas vrai. Ils vous ont

 24   posé, de façon très courtoise d'ailleurs, une question. Ils vous ont

 25   demandé s'il y avait des chars dans la zone de Mala Krusa, il n'est même

 26   pas question de la route là. Vous répondez : "Non." Donc ce que vous dites

 27   maintenant ce n'est pas vrai.

 28   R.  Ce que je vous dis, c'est qu'ils m'ont demandé s'il y avait des chars

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  1   dans le village, s'il y avait une présence militaire dans le village. Je

  2   leur ai dit que dans le village il n'y avait pas de soldats, il n'y avait

  3   pas de chars, il n'y avait que des membres de la police. Ils m'ont posé des

  4   questions à propos du village. Il n'y a pas de question qui a été posée à

  5   propos de l'extérieur du village. L'armée, en fait, elle était cantonnée ou

  6   stationnée sur la route qui relie Prizren à Gjakove, et dans le village il

  7   n'y avait pas de présence militaire, et ça c'est ce que je leur ai dit.

  8   Q.  Monsieur Ramadani, cette signature que nous voyons au bas de la page,

  9   c'est votre signature ? Vous la voyez cette signature ? C'est la vôtre ?

 10   R.  Oui, oui.

 11   Q.  Bien. Je ne vais pas vous poser d'autres questions à ce sujet.

 12   M. DJORDJEVIC : [interprétation] J'aimerais demander à Mme l'Huissière,

 13   d'avoir l'amabilité de nous remontrer le document 99 de la liste 65 ter,

 14   car il s'agit d'une photographie aérienne de Mala Krusa et ce sera la fin

 15   de mon contre-interrogatoire. Donc il s'agit de la pièce 99 de la liste 65

 16   ter.

 17   Il s'agit d'une photographie aérienne de Mala Krusa. La voici. Bien.

 18   Q.  Monsieur Ramadani, est-ce que vous pourriez me dire si vous savez quand

 19   cette photographie a été prise ?

 20   R.  Non, je n'en sais rien. Enfin, ceci étant dit, je n'en sais rien. Mais

 21   enfin, à l'époque, là je vois des choses sur la photographie, des arbres,

 22   par exemple, qui n'existaient pas à l'époque.

 23   Q.  Monsieur Ramadani, est-ce que vous pouvez me dire si vous savez en

 24   quelle année cette photographie a été prise ? Est-ce que vous le savez ?

 25   R.  Non, je ne le sais pas, je ne peux pas vous le dire.

 26   Q.  Monsieur Ramadani, est-ce que vous pourriez nous indiquer où se

 27   trouvait la maison de vos voisins Rom. Vous nous avez dit qu'il y avait

 28   deux familles. En fait, la famille Gashi, par exemple. Est-ce que vous

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  1   pouvez nous indiquer où se trouvaient les maisons serbes sur cette photo ?

  2   R.  On ne peut pas voir la maison des Roma là sur cette photographie, ces

  3   maisons on ne peut pas les voir -- cette maison, plutôt, on ne peut pas la

  4   voir. Par contre, je peux vous dire où se trouvaient les maisons serbes.

  5   Est-ce que je dois vous indiquer où se trouvaient ces maisons, enfin, où se

  6   trouvent ces maisons.

  7   M. DJORDJEVIC : [interprétation] J'aimerais demander à Mme l'Huissière de

  8   bien vouloir aider le témoin. Est-ce qu'il pourrait nous indiquer où se

  9   trouvent les maisons serbes sur cette photo.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà, ça c'était la maison de Dimitrije

 11   Nikolic.

 12   M. DJORDJEVIC : [interprétation]

 13   Q.  Est-ce que vous pourriez mettre le chiffre 1. Est-ce que vous pouvez

 14   faire un cercle près de cette maison et mettez le chiffre 1.

 15   R.  Oui, oui, oui. Voilà, la maison de Dimitrije, elle était là, enfin ici.

 16   Et là c'était la maison de Miljenka. Ici la maison de Dusani, la maison de

 17   Seka, de Misic, Poshkits [phon].

 18   Là c'était la maison de Spiro. Là c'était la maison de Nikolic.

 19   Q.  Je ne vous ai pas vu faire une annotation près de la maison de Nikolic.

 20   R.  Il s'agit de Nikolic Dimitrije, Nikolic Dusani, Nikolic Milenko.

 21   Q.  Est-ce que vous pourriez, je vous prie, nous indiquer où se trouvent

 22   toutes ces maisons ?

 23   R.  Oui, oui, oui, voilà. Alors, Nikolic Milenki, Nikolic Dimitrije,

 24   Nikolic Dusani, voilà où se trouvent ces maisons. Nikolic Milos, Nikolic

 25   Seka, Nikolic Bosko, Jovca également.

 26   Q.  J'aimerais vous demander autre chose. La maison qui n'a pas de toit qui

 27   se trouve à l'extrême droite du champ, vers le sud, vous voyez de quelle

 28   maison je parle ? Est-ce que vous savez à qui appartient cette maison ?

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  1   Elle isolée là sur la droite.

  2   R.  Un petit moment, je vous prie. Cette maison c'était la maison de

  3   Petkovic.

  4   Q.  Voilà. Oui, oui, c'est cela, la maison de Petkovic.

  5   R.  Cette maison, elle a été brûlée. Donc la photographie elle a été prise

  6   par la suite. Voilà, voilà pour ce que vous m'avez demandé à propos des

  7   maisons. Ça c'était la maison de Djika.

  8   Q.  Merci, Monsieur Ramadani.

  9   Je dois vous dire que mon estimé confrère, M. Stamp, a dit au moment du

 10   versement au dossier de cette photographie qu'elle avait été prise pendant

 11   l'été 1999. Ecoutez, cela a été déclaré, je ne peux que l'accepter, je ne

 12   peux ni l'affirmer ni l'infirmer.

 13   Mais j'aimerais vous reposer une question à propos du reste des

 14   autres maisons. Est-ce qu'il s'agissait essentiellement de maisons

 15   albanaises ? Parce que  vous avez essentiellement indiqué où se trouvaient

 16   les maisons serbes.

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Vous dites que vous avez trouvé les cendres lorsque vous êtes rentré,

 19   revenu. Et comment est-ce que vous expliquez le fait que toutes ces maisons

 20   ont l'air en très bon état, qu'elles ont toutes un toit, et qu'elles n'ont

 21   pas l'air d'avoir été incendiées. En tout cas, à les voir, à en juger, on

 22   n'a pas l'impression qu'elles aient été incendiées. Vous nous avez montré

 23   des maisons serbes et là il n'y avait pas de toits.

 24   Alors, je ne vais pas vous poser des questions à propos des maisons

 25   serbes, mais j'aimerais -- écoutez, laissez-moi finir, Monsieur Ramadani.

 26   Vous avez dit que ces maisons avaient été réduites en cendres. C'est ce que

 27   vous avez dit littéralement, alors que nous voyons que les maisons sont

 28   absolument intactes, qu'il y a des arbres qui poussent, qu'il y a des toits

Page 1172

  1   sur les maisons. Est-ce que vous pourriez me fournir une explication à ce

  2   sujet ?

  3   R.  Ces maisons, elles ont été brûlées, ensuite elles ont été réparées.

  4   Cette maison-ci, c'était la maison de mon frère. Elle a été complètement

  5   incendiée, maintenant elle a été réparée. Cette photographie elle a été

  6   prise par la suite. Cette maison que je vous montre maintenant, elle a

  7   aussi été réparée par la suite. Voilà cette maison a été réparée également.

  8   Et c'est la même chose pour cette autre maison, elle a été détruite, puis

  9   par la suite elle a été réparée. Cette maison-ci a également été réparée

 10   par la suite, puis celle-ci également d'ailleurs.

 11   Et cette maison aussi elle a été également été reconstruite après

 12   avoir été complètement incendiée. Donc toutes les maisons qui ont été

 13   incendiées n'avaient pas de toit, ensuite elles ont été reconstruites.

 14   Cette photographie n'a pas été prise à ce moment-là, à cette époque,

 15   elle a été prise lorsque les maisons ont été reconstruites. Par exemple,

 16   cette maison-ci que je vous montre, elle a également été reconstruite par

 17   la suite. J'ai des dates pour les réparations de ces maisons, j'ai les

 18   documents avec moi. Cette maison, elle a été reconstruite, cette maison que

 19   je vous montre maintenant à l'écran, celle-ci également. Donc toutes ces

 20   maisons avaient été détruites, avaient été complètement réduites en

 21   cendres, ensuite elles ont été reconstruites par la suite, après la guerre.

 22   Q.  Je vous remercie, Monsieur Ramadani. Merci d'avoir répondu à toutes mes

 23   questions, et je vous en remercie vivement.

 24   M. DJORDJEVIC : [interprétation] J'aimerais maintenant demander à la

 25   Chambre de première instance de bien vouloir accepter le versement au

 26   dossier de cette photographie avec ses annotations.

 27   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djordjevic, j'ai un problème.

 28   Parce que vous avez commencé par demander au témoin d'indiquer où se

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  1   trouvaient les maisons serbes. Puis, il a répondu à vos questions, il a

  2   ensuite indiqué où se trouvaient des maisons qui avaient été incendiées,

  3   puis reconstruites. Donc maintenant nous avons les maisons serbes et les

  4   maisons albanaises pour lesquelles nous avons des annotations. C'est ce que

  5   vous vouliez, Maître ?

  6   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, par souci

  7   d'objectivité en tant que conseil de la Défense, je dois vous dire que je

  8   serais d'accord que le témoin utilise une couleur différente pour les

  9   maisons albanaises qui ont d'abord été incendiées, qui ensuite ont été

 10   reconstruites. Donc c'est ce qu'il a dit. Il a dit que ces maisons avaient

 11   été reconstruites après la guerre. Donc je suis d'accord, je pense que le

 12   témoin pourrait utiliser un pointeur ou un stylo de couleur différente. De

 13   toute façon, si tout cela a été versé au dossier ce serait clair.

 14   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] J'aimerais demander à Mme la Greffière

 15   de bien vouloir supprimer les annotations si elle n'y voit pas

 16   d'inconvénients. Voilà. Merci.

 17   Monsieur Ramadani, j'aimerais vous demander maintenant de mettre un cercle

 18   avec votre stylet, donc un cercle autour des maisons où résidaient des

 19   familles serbes en mars 1999.

 20   LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

 21   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie beaucoup. Je vais

 22   maintenant demander à Mme l'Huissière de vous donner un marqueur rouge. Et

 23   j'aimerais vous demander d'indiquer où se trouvent les maisons que vous

 24   pouvez voir, qui ont été dans un premier temps incendiées, réduites en

 25   cendres, puis par la suite reconstruites.

 26   LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

 27   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Je pense que nous avons un problème,

 28   Monsieur le Président.

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  1   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Non, pas pour l'instant.

  2   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Oui, oui, maintenant ça va.

  3   LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute] Il y en a eu qu'on ne peut pas très bien

  4   discerner, mais elle devrait être par là. Voilà. Là où je vous montre

  5   maintenant.

  6   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement au

  7   dossier de la pièce avec les annotations du témoin.

  8   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je dirais, aux fins du compte rendu

  9   d'audience, que le témoin a indiqué avec des cercles bleus les maisons des

 10   familles serbes et a indiqué à l'aide de cercles, ce qu'il n'a d'ailleurs

 11   pas terminé, les maisons qui ont été, d'après ses propos, incendiées, puis

 12   reconstruites.

 13   Je vous remercie beaucoup, Monsieur Ramadani.

 14   Nous allons maintenant demander le versement au dossier de cette

 15   photographie avec ces annotations.

 16   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce D30, Monsieur le

 17   Président.

 18   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Je pense que nous pourrions peut-être

 19   faire la pause maintenant avant que l'Accusation ne pose ses questions

 20   supplémentaires, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Djordjevic.

 22   Madame Nilsen, est-ce que vous pourriez nous indiquer quelle devrait être

 23   la durée de vos questions supplémentaires ?

 24   Mme NILSEN : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation n'a pas

 25   de questions supplémentaires à poser. Je souhaiterais juste que quelque

 26   chose soit précisé à propos de la photographie. La date est exacte. M.

 27   Stamp avait dit qu'elle avait été prise le 12 février 1999, il avait dit

 28   que c'était des enquêteurs du TPIY qui l'avaient prise. Alors je dois vous

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  1   dire que cela n'est pas exact, c'est une photographie qui a été prise le 6

  2   septembre 2001, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] S'il y a litige, il faudra peut-être

  4   que nous revenions sur cet élément de preuve. Pour le moment, nous

  5   indiquons que cette photographie montre des photographies [comme

  6   interprété] qui ont été incendiées, qui ont été ensuite reconstruites, et

  7   nous n'avons pas la date précisée. Si vous souhaitez poser des questions à

  8   propos de la date à laquelle la photographie a été prise, cela peut tout à

  9   fait être fait.

 10   Mme NILSEN : [interprétation] Je vous remercie.

 11   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous ai interrompu, Madame Nilsen

 12   lorsque vous avez voulu faire référence lors du contre-interrogatoire à des

 13   éléments de preuve apportés par le témoin. Je vous ai interrompu à ce

 14   moment-là, parce que cela aurait pu être considéré comme une façon de poser

 15   des questions directrices au témoin. Donc si vous souhaitez poursuivre le

 16   fil de cette pensée, vous pourriez le faire lors des questions

 17   supplémentaires.

 18   Mme NILSEN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président, mais

 19   je n'aurais pas de questions supplémentaire à poser. Je vous remercie.

 20   [La Chambre de première instance se concerte]

 21   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Ramadani, nous avons terminé

 22   avec votre déposition. La Chambre de première instance tient à vous

 23   remercier d'être venu nous aider. Nous savons que ça n'a pas été facile

 24   pour vous de venir à La Haye pour venir nous aider. Nous vous remercions et

 25   nous, bien sûr, prêterons attention à votre déposition ultérieurement,

 26   lorsque nous entendrons d'autres témoins qui parleront de la même chose.

 27   Donc maintenant vous pouvez sortir du prétoire, l'huissière va vous

 28   accompagner hors du prétoire et vous pouvez ainsi retourner à votre vie

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  1   normale.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

  3   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Pour ce qui est de la photo, du moment où

  4   la photo a été prise, bien sûr, on n'aura pas besoin du témoin pour parler

  5   de tout cela.

  6   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il faut quand même attendre, Monsieur

  7   Djordjevic, il peut rester dans le prétoire.

  8   M. DJORDJEVIC : [interprétation] J'ai quand même une certaine inquiétude

  9   que j'aimerais exprimer à ce propos.

 10   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Non, en fait ce n'est pas ce que j'ai

 11   dit. J'ai dit que vous pouvez attendre, Maître Djordjevic, le temps que

 12   permettions à M. Ramadani de quitter le prétoire.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 14   [Le témoin se retire]

 15   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djordjevic, vous avez la

 16   parole.

 17   M. DJORDJEVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 18   Donc au nom de la Défense, je tiens à exprimer toute l'inquiétude que nous

 19   avons à propos de la date à laquelle cette photographie aurait pu être

 20   prise. Mon éminente consoeur a dit certaines choses, et M. Stamp a dit

 21   d'autres choses, et de ce fait la Défense se demande vraiment à quelle date

 22   cette photographie a bien pu être prise. C'est absolument essentiel pour

 23   les parties en l'espèce. Donc j'aimerais que le bureau du Procureur nous

 24   présente des preuves supplémentaires permettant d'établir la date exacte à

 25   laquelle cette photographie a été prise, qui l'a prise, quel jour, quelles

 26   étaient les circonstances, et cetera, et cetera. Puisque tout cela semble

 27   maintenant être contesté.

 28   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La Chambre de première instance a déjà

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  1   déclaré que s'il y avait un problème à propos de la date à laquelle cette

  2   photographie a été prise. C'est à l'Accusation de nous fournir des preuves

  3   supplémentaires à ce propos. Pour l'instant, nous sommes d'accord sur une

  4   chose, il s'agit d'une photographie du village. Et nous savons uniquement

  5   que cette photographie a été prise après que des maisons aient été

  6   reconstruites. Quant à savoir la date exacte à laquelle cette photographie

  7   a été prise, la Chambre n'en sait rien.

  8   Mais peut-être les deux parties peuvent-elles en discuter pour se mettre

  9   d'accord sur une date, ou bien dans le cas contraire, ce sera à

 10   l'Accusation de fournir des preuves permettant d'établir la date exacte à

 11   laquelle cette photographie a été prise. Il faut que ceci résolu de toute

 12   façon. Nous sommes absolument d'accord avec vous, Maître Djordjevic, cela

 13   ne semble pas être une photo qui aurait été prise aux alentours de mars

 14   1999, en tout cas à première vue.

 15   La Chambre de première instance aimerait aborder un ou deux autres points

 16   portant sur ce que nous avons vécu jusqu'à présent avec les témoins et ce

 17   que nous nous apprêtons à vivre avec les témoins de la semaine. Les

 18   conseils doivent bien comprendre que pour l'avancement de ce procès, il

 19   nous faut travailler de façon efficace, ne pas perdre de temps. En effet,

 20   le Tribunal se doit de terminer ce procès le plus rapidement possible et le

 21   plus efficacement possible. C'est dans les intérêts de l'accusé d'ailleurs.

 22   Il a droit à un procès rapide.

 23   Ceci étant, la Chambre de première instance considère qu'il serait

 24   utile de mettre en place des procédures bien précises, identiques à celle

 25   qui a été appliquée dans l'affaire Milutinovic. Donc nous voudrions qu'il y

 26   ait maintenant un témoin de réserve qui se tienne prêt pour venir déposer

 27   au cas où le témoin prévu ne puisse pas se présenter du fait de maladie ou

 28   de circonstances extraordinaires, donc il faudrait un témoin de secours, si

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  1   je puis dire.

  2   Les conseils savent bien que, par exemple, un témoin est malade cette

  3   semaine, c'est quelque chose qui arrive, mais la Chambre aimerait que ceci

  4   n'arrive plus et qu'au cas où des circonstances de ce type se reproduisent,

  5   il nous faudrait un témoin de secours, si je puis dire, un témoin qui soit

  6   prêt à venir déposer au cas où, donc qui soit déjà à La Haye prêt à être

  7   appelé à la barre.

  8   L'Accusation donc doit être bien préparée, doit avoir ce témoin de

  9   réserve sous la main, si je puis dire, mais cela signifie aussi que la

 10   Défense doit être préparée, prête à contre-interroger ce témoin de secours

 11   au cas où, au pied levé. Ainsi, si il arrive une circonstance

 12   extraordinaire, une maladie ou bien des intempéries empêchant les

 13   déplacements, bien, nous aurions un témoin de secours. Et nous tenons

 14   vraiment à dire que la Chambre de première instance insiste sur ce fait,

 15   nous voulons avoir un témoin de réserve disponible, prêt à venir au pied

 16   levé déposer, et nous voulons que l'Accusation soit prête à interroger ce

 17   témoin et que le conseil de la Défense soit prêt à contre-interroger ce

 18   témoin de secours, ainsi on ne perdrait pas de temps. La Chambre de

 19   première instance tient à faire savoir qu'elle entend que cette procédure

 20   soit suivie à la fois par l'Accusation et la Défense, et que nous n'aurons

 21   pas besoin, certes, d'avoir recours souvent à ce témoin de réserve, mais il

 22   faut qu'il soit là au cas où.

 23   D'autre part, hier nous avons dit que demain nous entendrions le

 24   témoin prévu, non pas le témoin qui est malade mais l'autre, et dès

 25   vendredi matin 9 heures, il faudra que commence le contre-interrogatoire de

 26   ce témoin. C'est le programme prévu. Si ce témoin termine sa déposition

 27   vendredi, peut-être que le témoin qui est à l'heure actuelle malade

 28   pourrait venir dès vendredi, sinon il faudra le prévoir pour la semaine

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  1   prochaine.

  2   La Chambre de première instance tient à noter au compte rendu qu'elle

  3   est extrêmement reconnaissante surtout envers les interprètes qui ont pu se

  4   réorganiser dès hier soir pour que nous puissions en terminer avec le

  5   contre-interrogatoire du témoin qui vient de quitter le prétoire. Cela

  6   ainsi nous a permis de minimiser le temps que nous aurions pu perdre cette

  7   semaine.

  8   Nous allons maintenant pouvoir lever la séance si nous n'avons pas

  9   d'autres points de procédure à traiter, et nous reprendrons dès demain à 9

 10   heures pour entendre l'interrogatoire principal du témoin prévu.

 11    Donc à demain.

 12   --- L'audience est levée à 10 heures 39 et reprendra le mercredi 18 février

 13   2009 à 9 heures 00.

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