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1 Le mercredi 27 mai 2009
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.
5 [Le témoin vient à la barre]
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La déclaration que vous avez lue
9 indiquant que vous allez dire la vérité s'applique encore aujourd'hui.
10 Monsieur Djordjevic.
11 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Avant de
12 continuer le contre-interrogatoire, je demanderais que le plan qui a été
13 dessiné par le témoin soit affiché à l'écran. Il s'agit de la pièce P828.
14 Merci.
15 LE TÉMOIN : BAJRAM BUCALIU [Reprise]
16 [Le témoin répond par l'interprète]
17 Contre-interrogatoire par M. Djordjevic : [Suite]
18 Q. [interprétation] Monsieur Bucaliu, vous avez parlé d'un prêtre musulman
19 dans votre déclaration. Vous avez dit qu'il s'appelait Rifat Neziraj.
20 Dites-moi, s'il vous plaît, cet homme est-il vivant ?
21 R. Oui.
22 Q. Où est-ce qu'il vit et travaille à présent ?
23 R. Maintenant c'est un homme assez âgé, il ne travaille plus. Il vit dans
24 le vieux village.
25 Q. Dites-nous, s'il vous plaît, lorsqu'il vous a informé au sujet du
26 meurtre de la famille Zeka : de Habib et de Faruk. Est-ce qu'il vous a dit
27 quand quelles circonstances il avait appris cela ?
28 R. Il est venu dans ma maison, il m'a trouvé dans la cour, il avait l'air
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1 très inquiet. Je lui ai demandé ce qui n'allait pas et il a dit : Bajram,
2 ils ont tué Emin et ses deux fils. J'ai dit : Peut-être ce n'est pas vrai,
3 les autres ne devraient pas entendre parler de cela, ils vont être pris de
4 panique. Ne le répète pas, peut-être que ce n'est pas vrai. Mais il a dit
5 si, si.
6 En fait, Hodja vivait derrière la famille de Zeka. Il a dit qu'il venait de
7 là et que tout était vrai. Je lui ai demandé s'il avait dit cela à
8 quelqu'un d'autre et il a dit : Oui, j'ai dit cela à un autre voisin.
9 J'ai essayé de cacher cela afin d'éviter qu'une panique s'empare des gens,
10 mais la nouvelle a circulé très vite. Comme je l'ai déjà dit, vers 1 heure
11 les gens ont commencé à se regrouper par peur. Et c'est ainsi que les
12 choses se sont déroulées.
13 Q. Dites-moi, est-ce que vous avez l'impression que Rifat était témoin
14 oculaire, ou bien vous ne pouvez rien dire à ce sujet à présent ?
15 R. Non, il n'était pas témoin oculaire du meurtre, mais il était à
16 proximité de la famille de Zeka. Il avait parlé avec les membres de sa
17 famille et c'étaient eux qui lui avaient dit que le meurtre avait eu lieu
18 la veille, et ainsi de suite.
19 Q. Je vous remercie. Nous avons ici votre croquis, mais pas le dernier qui
20 a été versé au dossier, celui où vous aviez marqué les maisons avec la
21 lettre A et B, les maisons de la famille Zeka. Il s'agit de P127, je pense.
22 Peut-on afficher cela.
23 M. DJORDJEVIC : [interprétation] S'il vous plaît, est-ce que vous pourriez
24 agrandir la pièce marquée comme D127 et pas le deuxième croquis.
25 Q. Monsieur Bucaliu, dites-nous, s'il vous plaît, Emin et ses deux fils,
26 Habib et Faruk, je crois que vous avez qu'ils s'appelaient. C'était la
27 famille Zeka. Vous avez expliqué qu'ils vivaient dans deux maisons. Ils
28 vivaient dans laquelle des deux maisons, Emin et ses deux fils, Faruk et
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1 Habib, ou plutôt devant quelle maison est-ce que ceci a eu lieu ?
2 R. Emin et ses deux fils vivaient à l'endroit marqué par la lettre B,
3 alors que le meurtre a eu lieu de l'autre côté, car les familles s'étaient
4 regroupées. Car comme je l'ai dit, les familles se regroupaient afin de se
5 soutenir et par peur aussi. Donc le meurtre a eu lieu auprès de la maison
6 d'un voisin, quelqu'un qui s'appelait Halit.
7 Q. Quel était le nom de famille de Halit ?
8 R. Si je ne me trompe, son nom de famille était Fazliu. Je ne suis pas
9 tout à fait sûr, mais je pense que c'était Fazliu.
10 Q. Est-ce que vous pourriez inscrire l'endroit où se trouvait sa maison
11 sur ce croquis et marquer cela avec la lettre C.
12 R. C'était approximativement ici, entre les deux familles Zeka en face de
13 la route entre les deux enceintes familiales.
14 Q. C'est là que les gens s'étaient regroupés en réalité ? Etes-vous
15 d'accord avec moi pour dire cela ?
16 R. Oui, ils sont allés à la maison de Halit. Comme il m'a dit, il y avait
17 environ 30 personnes qui s'étaient regroupées là-bas.
18 Q. Monsieur Bucaliu, dites-moi, s'il vous plaît, est-ce que vous avez
19 entendu parler des conditions dans lesquelles le meurtre a eu lieu ? Nous
20 vous entendu dire que ceci avait été commis par trois paramilitaires, mais
21 est-ce que vous avez entendu quelque chose de plus au sujet des
22 circonstances, puisqu'il y avait un grand nombre de témoins sur place. Est-
23 ce qu'ils vous ont dit quelque chose ?
24 R. Oui, j'ai entendu parler de cela des survivants de ce meurtre. Des
25 autres fils d'Emin qui sont vivants encore aujourd'hui, puis le chef de la
26 famille Halit qui était présent lui aussi.
27 Ils m'ont dit qu'à 8 heures moins 05, lorsqu'il y a eu une coupure
28 d'électricité, trois paramilitaires sont entrés et comme les gens étaient
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1 assis, ils ont reçu l'ordre de s'agenouiller et il n'y a pas eu d'autre
2 avertissement. Donc sans avertissement, ces hommes-là ont commencé à tirer
3 des coups de pistolet.
4 Emin et ses deux fils ont dit que la personne avait l'intention de
5 continuer les exécutions, mais à ce stade-là, quelqu'un qui s'appelait Mile
6 est entré et il a dit : Arrêtez maintenant. Vous avez tué tout le monde ?
7 C'est ainsi que ça s'est arrêté.
8 L'un des fils d'Emin a levé sa tête pour voir ce qui se passait. A ce
9 moment-là, on l'a frappé avec une crosse de fusil automatique et il s'est
10 évanoui. Ça s'est passé devant sa mère. Cependant, il a pu survivre.
11 Les trois autres, ceux qui ont été tués, sont restés derrière, mais
12 ils sont rentrés au bout d'une demi-heure et l'ordre a été donné à la
13 famille d'écarter les cadavres et on leur a dit de nettoyer cet endroit
14 afin que personne ne puisse apprendre ce qui s'était passé là-bas. Et à ce
15 jour, ces trois cadavres n'ont toujours pas été retrouvés. Personne ne sait
16 où ils sont.
17 Q. Je ne vous ai pas très bien compris. Qui a enlevé ces trois cadavres ?
18 R. Les auteurs du crime ont enlevé les cadavres.
19 Q. Dites-moi, s'il vous plaît, qui vivait dans la maison marquée par la
20 lettre B ?
21 R. C'était Emin et ses fils, de même que d'autres membres de sa famille la
22 plus proche vivaient dans la maison marquée par la lettre B.
23 Q. Oui, vous avez dit qu'ils ont vécu dans la maison B. Et qui vivait dans
24 la maison A ?
25 R. S'agissant de la maison marquée par la lettre A, il y avait des Zeka,
26 des cousins d'Emin, Hasan et son fils, de même qu'Aslan avec sa femme et
27 ses enfants. Ils avaient tous le nom de famille de Zeka et ils étaient tous
28 des membres de la famille d'Emin.
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1 Q. Est-ce que Hasan et Safete et la femme de Hasan, Fatime vivaient dans
2 cette maison ? S'agit-il des mêmes personnes que celles au sujet desquelles
3 vous avez dit qu'elles étaient portées disparues, et que par la suite elles
4 ont été retrouvées massacrées ? S'agit-il bien de ces personnes-là ?
5 R. Oui, j'ai fait référence à eux. Il y avait quatre personnes qui ont été
6 enlevées par les mêmes forces paramilitaires, après le meurtre. Donc ils
7 sont partis après le meurtre, ils ont pris Hasan et Aslan et leurs épouses;
8 ils les ont enlevés. Après la guerre, deux mois environ après la fin de la
9 guerre, je ne suis pas sûr de la date, ils ont été massacrés et mutilés
10 dans le quartier de Prelez, là où se trouvait le quartier général des
11 forces militaires. Les cadavres ont été retrouvés dans une fosse septique,
12 mutilés.
13 Q. Vous faites référence à Hasan, Aslan et leurs femmes; est-ce exact ?
14 R. Oui, c'est exact.
15 Q. Juste pour clarifier quelque chose. Qu'est-il arrivé à Safete ?
16 R. Safete était l'épouse d'Aslan.
17 Q. J'avais l'impression que vous aviez mentionné ce prénom, lorsque vous
18 avez parlé d'un des fils de cet homme appelé Safete, mais peut-être j'ai
19 mal compris quelque chose.
20 Est-ce que vous avez vu personnellement le meurtre d'un quelconque membre
21 de la famille Zeka ?
22 R. Non, je n'ai pas vu le meurtre de ces trois membres de mes propres
23 yeux, mais encore aujourd'hui, vivent les personnes qui ont été des témoins
24 oculaires.
25 Q. Dites-moi, puisque vous mentionnez les témoins oculaires, vous avez dit
26 qu'il y avait Halit Fazliu autour de la maison où les gens s'étaient
27 regroupés. Est-ce que vous pouvez me citer d'autres noms de cette trentaine
28 de personnes qui s'étaient regroupées à cet emplacement ?
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1 R. L'un d'eux était Halid, le propriétaire de la maison, avec toute sa
2 famille, tous les membres de sa famille. Je ne sais pas quel était leur
3 nombre. Je sais qu'en ce moment il vit en Grande-Bretagne. Mais toute sa
4 famille était là-bas. Ensuite nous avions l'épouse d'Emin, la mère de ses
5 fils, puis le frère d'Emin qui vit encore aujourd'hui, puis un grand nombre
6 d'autres membres de la famille qui sont vivants encore aujourd'hui, les
7 enfants de Hasan et Aslan.
8 Q. Monsieur Bucaliu, j'ai compris de quoi vous avez parlé, mais ma
9 question portait sur d'autres noms de personnes mis à part Halid. Donc noms
10 et prénoms de ces personnes.
11 R. Je ne sais pas quoi dire, parce que la famille de Halid Fazliu est
12 partie de cet endroit il y a dix ans environ. Ils ne vivent plus là-bas.
13 J'ai dit que c'était sa femme, ses fils. Puis les fils d'Emin, puis les
14 fils aussi de Hasan et d'Aslan.
15 R. Nous avons compris cela. Si vous ne connaissez pas leurs noms, c'est
16 tout à fait acceptable. Simplement déclinez. Je voulais juste avoir au
17 moins un seul nom, un prénom d'un des fils de la famille Zeka qui vit
18 encore là-bas ou le prénom de l'épouse, si vous le savez.
19 R. Excusez-moi. Bien sûr que je connais les prénoms mais ça m'échappe en
20 ce moment. Mais si jamais ça me revient, je vais le dire.
21 Q. Merci, Monsieur Bucaliu.
22 Dites-moi, comment, ou plutôt, dans quelles circonstances cela s'est
23 produit, que tous les citoyens du village se regroupent au même moment et
24 partent au même moment vers Urosevac ?
25 R. Comme je l'ai déjà dit, après que les gens ont appris qu'Emin et ses
26 deux fils avaient été tués, les gens se sont vraiment inquiétés. Et mis à
27 part les tortures et l'intimidation de la part des forces militaires,
28 maintenant il y avait les meurtres aussi, donc il n'y avait rien d'autre à
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1 faire que de quitter les maisons, que de fuir.
2 Et comme je l'ai déjà dit, ma propre maison était au milieu du
3 village, autrement dit, c'est là que les gens se sont regroupés. Mais moi,
4 j'ai vu que les gens se sont regroupés spontanément sur un champ, juste
5 devant. Et à ce moment-là, même feue ma femme a dit : Bajram, qu'est-ce
6 qu'on attend ? A ce moment-là, j'ai dit : "Prends les enfants et va
7 rejoindre les autres. Je ne pouvais pas laisser seule ma mère qui était
8 âgée, donc j'ai décidé de rester. Je suis resté pendant un certain temps
9 avec ma mère, alors que ma femme et mes enfants se sont joints à la foule
10 et ils ont poursuivi leur chemin dans la vallée.
11 Tout ceci s'est déroulé de manière instinctive, dans un laps de temps
12 extrêmement bref. Tout le monde du village a décidé de quitter sa maison.
13 Je suis resté pendant encore une demi-heure environ, mais ma mère m'a mis
14 sous la pression en disant : Mon cher fils, pars, s'il te plaît, car sinon
15 ils vont te tuer s'ils te trouvent sur place. J'ai hésité et j'ai fini par
16 prendre un vélo et je suis allé rejoindre ma famille.
17 Q. Lorsque vous avez dit à votre femme et à vos enfants de partir et de se
18 joindre aux autres, j'ai compris que c'était votre décision et vous nous
19 avez énoncé les raisons. Mais dites-nous, lorsque les gens du village sont
20 partis en même temps, ça devait se faire d'une manière organisée. Tout le
21 monde ne pouvait pas avoir tout d'un coup la même idée dans la tête, l'idée
22 d'aller vers Urosevac. Donc qui a organisé cela ? Qui a décidé de cela, car
23 le tout impliquait environ 600 habitants du village ?
24 R. J'ai déjà dit que je ne sais pas qui aurait pu organiser cela. Je reste
25 convaincu que personne ne l'a fait. Je suis assez sûr que c'est la peur qui
26 a poussé les gens à faire cela. La nouvelle même du meurtre a suffi pour
27 que tout le monde prenne la décision de partir pour sauver sa vie et la vie
28 de ses enfants. Je ne pense pas que ceci ait été décidé par quelqu'un. Je
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1 pense que c'est l'instinct des gens qui les a poussés à se regrouper et à
2 fuir.
3 Q. Monsieur Bucaliu, vous nous avez dit au cours de votre témoignage, vous
4 nous avez décrit les événements commis par les forces serbes avant cet
5 événement, pas simplement dans votre village mais partout au Kosovo. Vous
6 avez dit avoir regardé les émissions étrangères à la télévision, entendu
7 différents témoignages et entendu des membres de l'UCK parler à la
8 télévision. Où est-ce que les villageois ont eu l'idée qu'ils seraient plus
9 en sécurité à Urosevac que dans leur propre village ? Où est-ce qu'ils ont
10 trouvé cette idée qu'ils seraient mieux et plus en sécurité ailleurs ?
11 R. Très sincèrement, nous pensions que notre village était l'un des plus
12 sûrs, car on avait énormément de voisins qui étaient des Serbes. On avait
13 parlé avec nos voisins serbes qui nous avaient rassurés que rien n'allait
14 nous arriver. Restez ici, il va rien vous arriver. C'est exactement ce que
15 nous pensions. En réalité, deux de mes cousins de Ferizaj sont venus et ont
16 séjourné dans mon village avant que ces forces militaires ne rentrent. Ils
17 y sont restés quatre ou cinq jours, toujours en pensant que notre village
18 était plus sûr à cause de la population qui était mélangée. Nous pensions
19 que c'était un endroit sûr. Et c'est pour cela que je n'ai pas abandonné
20 notre village.
21 Mais après ce qui s'est passé, il n'y avait plus d'autre alternative,
22 il fallait quitter le village. Il n'y avait aucune autre possibilité, en
23 direction de Ferizaj.
24 Je savais qu'il y avait des trains qui s'y rendaient, bien que
25 certaines personnes n'auraient pas pu prendre le train et d'autres
26 personnes qui sont restées à Ferizaj et le voisinage. Mais la majorité de
27 ces personnes, comme je l'ai dit tout à l'heure, la majorité du village a
28 pu monter dans ces trains et quitter Ferizaj et le Kosova.
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1 Q. Oui, vous l'avez dit, en effet. Je veux savoir, quant à moi, pourquoi
2 vous avez pensé qu'Urosevac était plus sûr que votre propre village ou que
3 n'importe quel autre endroit au Kosovo d'ailleurs ?
4 R. En réalité, à ce stade-là, on n'identifiait pas des endroits plus sûrs.
5 C'est simplement que les gens, par instinct, quittaient leur village. Ce
6 que nous pensions, par contre, c'était que si nous devions fuir notre
7 village, et nous avions déjà fait des préparatifs avec nos tracteurs, et
8 cetera, nous avions comme projet de quitter nos maisons et se rendre soit
9 en Macédoine, soit en Albanie. Les villages de Biba et Sojeve, tout proches
10 du nôtre, avaient déjà été vidés à ce stade-là par les forces en question,
11 donc nous étions pleinement préparés.
12 Q. Je le comprends très bien, mais encore une fois, vous avez quitté le
13 village de votre propre gré. Vous ne l'avez pas fait selon des ordres que
14 vous auriez reçu d'une unité quelconque serbe, qu'elle soit régulière ou
15 paramilitaire ou des volontaires ou quoi que ce soit. Vous avez dit que
16 vous avez, d'instinct, décidé de partir. Il est très difficile pour moi de
17 croire que 600 personnes ont quitté de cette façon-là, spontanément, sans
18 aucune organisation.
19 Donc je vous repose la question, et dites-le-moi, les forces serbes, quelle
20 que soit leur nature, vous ont-elles fait quitter votre village ou vous
21 ont-elles donné un ordre direct ? Je ne parle pas nécessairement sous la
22 forme d'incidents, de meurtres, et cetera, car la même chose s'est produite
23 à travers le Kosovo.
24 R. Non. Non. On n'a reçu aucun ordre visant à nous faire quitter le
25 village. Bien au contraire. Ces forces nous avaient dit de ne pas quitter
26 le village. Ils nous ont dit de rester sur place avec eux pour le cas où
27 Clinton a décidé d'utiliser son infanterie au Kosova. Ils ont dit qu'on
28 pourrait servir pour les protéger de ces forces d'infanterie. Donc c'était
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1 tout à fait le contraire. Ils nous ont dit : Vous, vous n'avez pas le droit
2 de partir. Vous devez rester ici avec nous.
3 Q. Si c'est le cas, s'il y a eu ces meurtres qui avaient déjà commencé,
4 que vous avez décrits, comment avez-vous pu quitter le village alors que
5 vous aviez reçu cet ordre des paramilitaires serbes qui vous l'interdisait
6 ?
7 R. Franchement, il est étonnant, en effet. Certaines personnes sont
8 restées dans le village. Moi personnellement je pensais que ces forces
9 allaient capturer ces personnes. Et j'ai été assez étonné de voir qu'en
10 fait ces personnes n'ont pas été remarquées par ces forces. Il y a une
11 vallée, il y a des prés autour de ma maison, comme je l'ai déjà dis, donc
12 je ne sais pas exactement comment cela a pu se produire, à savoir que les
13 forces n'ont pas remarqué que certaines personnes sont restées.
14 Et quand je suis passé devant la maison où se trouvaient ces forces en
15 vélo, j'avais pensé qu'ils allaient m'arrêter et capturé par eux. Je suis
16 passé à côté avec le vélo. Le portail était ouvert. Je voyais les forces
17 qui étaient là à l'intérieur de la cour de cette maison et ils buvaient. Je
18 ne peux pas vous dire s'ils m'ont vu ou pas, peut-être qu'ils ont décidé de
19 ne pas m'arrêter. Mais en tout cas, je suis passé devant, je les ai vus, et
20 j'ai continué en direction de ma maison.
21 Q. Cela ne vous faisait pas peur de faire partir votre femme et vos
22 enfants étant donné les circonstances ? Qu'est-ce qui vous a fait décider
23 d'obliger votre femme et vos enfants à partir alors que vous tous vous êtes
24 restés sur place et alliez peut-être être arrêtés et Dieu sait quoi d'autre
25 d'ailleurs ?
26 R. Je vous ai déjà dit que tout s'est produit très rapidement. Ma femme,
27 dès qu'elle a vu qu'il y avait des gens qui se rassemblaient et voulaient
28 fuir, elle m'a dit : Qu'est-ce qu'on attend ? Et c'est à ce moment-là que
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1 je lui ai dit : Vas-y, prépare les enfants et rejoins la foule. Je ne
2 pouvais pas personnellement laisser ma mère âgée et malade, donc je lui ai
3 dit : Pars avec les enfants, et si Dieu le veut nous nous reverrons. Tout
4 c'est produit très rapidement. On n'avait pas le temps de réfléchir. C'est
5 ça la réalité qui prévalait à l'époque.
6 Q. Mais néanmoins, je ne comprends pas très bien les motifs qui ont fait
7 que tout le monde s'est trouvé dans cette situation, mais je ne vais pas
8 m'attarder là-dessus.
9 Dites-moi par contre, combien de personnes ont quitté le village à ce
10 moment-là et combien d'entre eux sont restés ?
11 R. Comme je l'ai dit, environ 500 ou 600 personnes ont quitté le village
12 ce jour-là. Entre deux et trois familles qui vivaient près du QG des forces
13 chetniks sont restées au village. Je ne sais pas pourquoi ils n'ont pas
14 quitté le village, est-ce que c'était à cause des forces ou, mais en tout
15 cas tous les autres ont quitté le village.
16 Q. Combien de personnes sont restées sur place environ, si vous le savez ?
17 R. Comme je l'ai déjà dit, en dehors des familles serbes qui sont restées
18 au village, eux, ils n'ont pas quitté le village, ils y sont restés. Il y
19 avait trois ou quatre familles albanaises qui vivaient à côté du QG des
20 forces. Environ 30 à 40 personnes sans doute en tout.
21 Q. Y compris les Serbes, ou exclusivement des Albanais ? Trente ou 40
22 Albanais ? Je veux connaître les chiffres pour ce qui concerne l'ethnicité
23 albanaise, les gens qui sont restés au village de cette ethnicité.
24 R. Comme je l'ai dit, trois ou quatre familles albanaises sont restées au
25 village, ce qui faisait un total de 30 ou 40 personnes.
26 Q. Merci. Je comprends maintenant. Monsieur Bucaliu, connaissiez-vous des
27 membres des paramilitaires qui se trouvaient au village ? Je vous parle de
28 la période à partir du 2 avril. Vous parliez de l'armée régulière et par la
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1 suite les personnes qui se sont présentées comme des paramilitaires y sont
2 apparues à la suite. Est-ce que vous connaissiez certaines de ces personnes
3 ? Est-ce qu'ils venaient d'Urosevac ou d'autres villages proches ? Est-ce
4 que vous avez pu reconnaître qui que ce soit parmi ces hommes ?
5 R. Non, personnellement, je ne connaissais aucun d'entre eux. C'étaient
6 des visages que je ne connaissais pas. Eux-mêmes, ils ont déclaré qu'ils
7 venaient de Sombor et Vojvodina. C'étaient des paramilitaires --
8 Q. Oui, nous l'avons déjà entendu, ne perdons pas de temps. C'est quelque
9 chose que nous savons déjà. Vous avez dit qu'environ
10 1 000 Albanais vivaient au village avant 1999. Combien d'Albanais de souche
11 vivent actuellement à Staro Selo ? Est-ce que ce chiffre est le même, plus
12 élevé ? Moins élevé ?
13 R. Il n'y a pas eu de recensement, donc je ne peux vous donner qu'une
14 estimation. Certaines familles sont parties, d'autres se sont rétablies.
15 Donc le chiffre est à peu près le même, 1 000.
16 Q. Merci. Maintenant, puisqu'il s'agit de votre village, vous avez dit que
17 les Serbes et les Monténégrins ne sont pas revenus à Staro Selo, qu'ils n'y
18 sont plus. Est-ce que vous en connaissez la raison ? Est-ce que vos voisins
19 anciens vous ont jamais contacté ?
20 R. Oui, quand je suis revenu après la guerre, je n'ai plus vu mes voisins
21 serbes, ils étaient déjà partis. Puis j'étais revenu le 6 juillet au
22 Kosova, c'était assez tard. Je sais qu'ils sont partis dans différents
23 endroits. J'ai eu certains contacts avec eux. On s'appelle au téléphone.
24 Ils m'ont dit que la raison pour laquelle ils ne veulent pas revenir, c'est
25 qu'ils ne se sentent pas à l'aise.
26 Q. Et pour ce qui est de leurs maisons, est-ce que celles-ci ont été
27 endommagées ? Est-ce qu'elles ont fait l'objet de pillages ou est-ce
28 qu'elles sont restées fermées et pas touchées ?
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1 R. A l'exception d'une seule maison, celle qui était à côté de la mienne,
2 toutes les autres maisons ont été démolies, endommagées.
3 Q. Cela s'est produit après le mois de juin 1999, n'est-ce
4 pas ?
5 R. Oui, en effet. C'est ce que j'ai entendu, en tout cas. Quand je suis
6 rentré dans mon village, les familles serbes n'étaient plus sur place. J'ai
7 appris que leurs maisons ont été démolies après le 12 juin 1999.
8 Q. Monsieur Bucaliu, lorsqu'il s'agit de ces forces paramilitaires, ces
9 volontaires, si on peut dire, le Mouvement chetnik-serbe, les radicaux,
10 vous avez dit qu'ils étaient présents dans votre village, et qu'en même
11 temps il y avait des chars vert olive. Mais dans votre déclaration
12 supplémentaire faite au mois d'août 2006 devant le Tribunal, vous avez dit
13 que vous ne vous rappelez pas d'avoir jamais dit, au cours de votre
14 déclaration de 1999, que vous aviez vu des chars.
15 J'ai relu le compte rendu d'audience des autres affaires et je n'ai
16 pas remarqué si l'un de mes collègues vous a déjà posé des questions à ce
17 sujet, mais j'aimerais bien obtenir quelques explications de votre part à
18 ce sujet.
19 R. Je suis désolé, mais je n'ai pas bien compris ce que vous avez dit.
20 Comme je l'ai dit hier, j'entends deux voix. Parfois j'ai du mal à vous
21 comprendre.
22 Q. Je vous comprends tout à fait, car j'ai exactement le même problème
23 parfois. Je vais essayer de parler plus lentement. Je disais qu'à propos
24 des paramilitaires, en 1999, vous avez dit qu'en même temps qu'ils étaient
25 là, il y avait également des chars verts. Mais dans votre déclaration
26 supplémentaire de 2006, vous dites que vous ne vous souvenez pas d'avoir
27 parlé de chars ni de leur présence dans le village en même temps qu'étaient
28 présents les paramilitaires.
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1 Donc la question que je vous pose maintenant, c'est qu'est-ce qui est
2 exact, ce que vous avez dit en 2006, ou bien que des chars étaient
3 effectivement présents en même temps que les paramilitaires ? Laquelle des
4 deux affirmations est exacte ?
5 R. Ce que je dis, c'est que les paramilitaires n'avaient pas de chars.
6 J'ai entendu qu'il y avait des chars dans le voisinage de Prelez, là où il
7 y avait le QG. Les chars avaient été cachés. Il est vrai qu'après la
8 guerre, nous avons découvert des chars qui avaient été détruits dans le
9 voisinage de Prelez. Les paramilitaires du village, quant à eux, n'avaient
10 pas de chars. Ils utilisaient des véhicules civils, mais ils n'avaient pas,
11 quant à eux, des chars. Mais il est vrai de dire qu'il y avait des chars
12 présents dans le voisinage de Prelez.
13 Q. Vous avez effectivement parlé de chars lorsque vous avez parlé de
14 l'armée régulière serbe, au moment où elle a pris le contrôle du village.
15 Nous en avions déjà parlé. Maintenant nous avons une vision tout à fait
16 claire : les paramilitaires n'avaient aucun char, ils n'en utilisaient pas.
17 Autre question : qui est la personne que vous appelez le capitaine Sima ?
18 De qui s'agit-il ?
19 R. Le capitaine Sima, à mon avis, c'était un membre de l'armée régulière.
20 Il était caserné au QG dans le quartier de Prelez. Je pense qu'il y avait
21 des forces régulières qui étaient casernées. D'ailleurs, d'après son
22 apparence, je pense que Sima ressemblait à une personne qui faisait partie
23 des forces régulières, un officier des forces militaires régulières.
24 Q. Oui, c'est exactement ainsi que vous l'avez décrit. Est-ce qu'il y a eu
25 quelque chose associé avec lui qu'on pourrait appeler un désagrément ?
26 Vous-même ou quelqu'un d'autre de votre village ?
27 R. Non. Personnellement, je n'ai pas eu de problèmes avec lui et je n'ai
28 jamais entendu que qui que ce soit d'autre ait eu des problèmes avec lui.
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1 Q. Dites-moi, qui est Musa, ce Musulman qui avait une réputation très
2 établie ?
3 R. Musa et Mila étaient des membres des forces paramilitaires et ils
4 s'appelaient les leaders de ces forces. Je pense que Musa était un
5 pseudonyme que cette personne utilisait. Il avait une apparence affreuse.
6 Il disait qu'il était un boucher qui aimait abattre les gens, alors que
7 Mila était plus mince que Musa. Ensemble, ils se déplaçaient dans le
8 village en disant qu'ils étaient les leaders du groupe paramilitaire.
9 Q. Avez-vous entendu du fait que Musa aurait tué quelqu'un en l'égorgeant
10 dans le village ou quelque chose de ce type ?
11 R. Non, je n'ai rien entendu de ce type, mais je l'ai par contre vu en
12 train d'abattre des animaux de mes propres yeux.
13 Q. Je vous parlais des gens. Vous avez dit qu'il abattait et il faisait le
14 découpage d'un taureau de manière très professionnelle et c'était sans
15 doute un boucher.
16 Ce capitaine, vous avez dit qu'il avait intercepté ces trois hommes à
17 l'extérieur de la maison de Halit, dans l'espace qui se trouve entre les
18 trois maisons. Il les a arrêtés pour les empêcher de faire ce qu'ils
19 allaient faire. Vous avez dit qu'il était présent à ce moment-là. Puis vous
20 établissez un lien entre lui et le fait qu'Assan et sa femme, de même la
21 troisième personne dont le nom m'échappe maintenant, que l'on a trouvés
22 plus tard près de Prelez, mutilés. Vous établissez un lien avec Mile et
23 cela. Est-ce que vous avez des connaissances spécifiques quant au rôle
24 qu'aurait joué Mile dans la liquidation de la famille Zeka ?
25 R. Non, je n'ai pas de connaissance spécifique quant à l'implication de
26 Mile. Les survivants qui étaient présents, lorsque tout ceci s'est produit,
27 m'ont dit qu'ils avaient reconnu Mile, c'est-à-dire qu'au bout d'un certain
28 temps, Mile est rentré et a dit aux autres : Arrêtez de faire ceci, vous
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1 voulez tous les tuer ? Donc d'une certaine manière, c'est Mile qui a sauvé
2 la vie de ceux qui ont survécu.
3 Q. Merci. Les choses sont beaucoup plus claires pour moi maintenant. Vous
4 avez également dit que des jeunes hommes étaient en train de creuser des
5 tranchées sous les ordres des paramilitaires. Vous avez dit que cela avait
6 un lien avec les préparatifs en prévision de l'attaque terrienne de l'OTAN.
7 Vous avez dit que cela s'est produit quand les paramilitaires sont arrivés
8 au départ au village.
9 Est-ce que les paramilitaires sont arrivés à plusieurs reprises dans les
10 villages ? Sont-ils rentrés, puis partis, et cetera, à plusieurs reprises ?
11 Je vous parle de paragraphe 9 à 12, de votre déclaration de 1999. Quand
12 vous dites, "quand les militaires sont arrivés pour la première fois," est-
13 ce que vous voulez dire par là qu'il y a eu des arrivées ultérieures ?
14 R. Je ne sais pas comment je l'ai dit. Je n'ai pas dit quand ils sont
15 venus pour la première fois. Ils y étaient tout le temps. Ils sont arrivés
16 le 5 avril et ils y sont restés tout le long, jusqu'au moment où nous
17 sommes partis. Peut-être qu'il y a eu un malentendu. Peut-être ce que j'ai
18 dit, c'est "la première fois que je les ai vus." Mais je peux vous dire que
19 les forces étaient présentes constamment, depuis le 5 avril quand ils sont
20 arrivés jusqu'au moment où nous sommes partis.
21 Q. Voilà, Monsieur Bucaliu, tout est parfaitement clair maintenant.
22 Au paragraphe 18 de votre déclaration de 1999, vous avez dit à propos des
23 policiers serbes qu'ils ont amené des familles serbes à Urosevac, qu'ils
24 les ont escortées. Est-ce que vous savez d'où venaient ces familles ? C'est
25 ma première question. Je parle des familles serbes qui ont quitté Urosevac.
26 R. Ce que j'ai dit, c'est ceci : lorsque j'ai essayé de monter dans le
27 train de façon à quitter Ferizaj, j'ai ouvert la portière de la voiture et
28 le policier m'a demandé : Qu'est-ce que vous faites ? Je lui ai dit je
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1 voulais monter. Il m'a dit d'attendre et à ce moment-là, j'ai vu des
2 familles serbes qui descendaient du train. Il y avait des hommes, des
3 femmes, des enfants. Je ne savais pas d'où ils venaient. Je ne les
4 connaissais pas. Après qu'ils soient descendus du train, nous avons été
5 autorisés à ce moment-là seulement à y monter.
6 Q. Je pense que ceci est tout à fait normal. Il est nécessaire que les
7 gens puissent descendre avant que d'autres puissent entrer.
8 Maintenant, dites-moi, s'il vous plaît, pourquoi la police les escortait,
9 les accompagnait ?
10 R. Je ne suis pas en mesure de vous dire cela. La police se trouvait à
11 bord lorsque nous avons poursuivi vers Hani i Elezit. Ils étaient avec nous
12 sur le train.
13 Q. Monsieur Bucaliu, quand vous êtes parvenus à la frontière de la
14 Macédoine - et je vous parle là du 16, à savoir le jour où vous avez réussi
15 à passer en Macédoine, à savoir le 16 avril - est-ce qu'on vous a demandé
16 vos pièces d'identité ou passeports ou autres documents ? Est-ce que vous
17 avez dû présenter ces documents à l'époque ? Est-ce que les autorités
18 serbes vous ont demandé cela ? Je parle là de la police, parce que c'est la
19 police qui est chargée de vérifier les documents des gens lorsqu'ils
20 passent la frontière. Mais il est tout aussi possible que d'autres aient pu
21 vous demander cela, je ne sais pas, des paramilitaires, par exemple, ou des
22 gens de l'armée.
23 R. Non, personne ne nous a demandé de présenter des documents quels qu'ils
24 soient lorsque l'on a traversé la frontière pour entrer en Macédoine.
25 Q. Je n'ai pas d'autres questions à vous poser à ce sujet, parce que vous
26 avez dit que personne ne vous a confisqué de documents.
27 Maintenant vous dites que lorsque vous êtes parvenus à la frontière, vous
28 êtes entrés en Macédoine, et étant donné le fait que le 15 vous n'aviez pas
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1 réussi à entrer en Macédoine, votre collègue Vule, qui était employé des
2 chemins de fer et qui était votre ami, vous a dit que vous ne pourriez pas
3 entrer en Macédoine ce jour-là, parce que les autorités macédoniennes ne
4 vous auraient pas laissé entrer.
5 Maintenant, dites-moi, s'il vous plaît, le lendemain, quand vous avez
6 effectivement réussi à traverser la frontière et d'entrer en Macédoine,
7 est-ce qu'on vous a dit, est-ce qu'on vous a donné une explication
8 quelconque, les raisons pour lesquelles on vous avait empêché d'entrer la
9 veille ? Je me réfère maintenant à un renseignement quelconque que vous
10 pourriez avoir reçu des autorités macédoniennes compétentes.
11 R. Non, nous n'avons d'ailleurs pas demandé pourquoi nous n'étions pas
12 autorisés à passer la veille. Nous ne voyions tout simplement pas quel
13 était le type d'argument raisonnable. Donc je ne sais pas pourquoi nous
14 avons été acceptés et pourquoi on ne l'a pas été, de sorte que je n'ai pas
15 de renseignement complémentaire à ce sujet.
16 Q. Ça suffit ainsi. Je vous remercie. Monsieur Bucaliu, nous avons entendu
17 que vous avez dit que trois familles albanaises étaient restées à Staro
18 Selo. Est-ce que votre mère était restée au village ? Votre mère qui était
19 malade.
20 R. J'explique ça dans ma déclaration, mais si c'est nécessaire, je peux
21 vous dire comment ma mère a réussi à partir. Elle n'est pas restée. Après
22 une certaine heure, après 5 heures du soir, elle a réussi à fuir le
23 village. A ce moment-là, mon père n'était pas rentré. Toutefois, après
24 avoir quitté le village, j'ai rencontré mon père à l'entrée de Ferizaj. Je
25 lui ai dit ce qui s'était passé. Je lui ai dit que ma mère m'avait supplié
26 de lui dire de revenir et de rester avec elle, parce qu'elle ne pouvait pas
27 marcher et sortir. Mais mon père, sans tenir compte de la difficulté, avait
28 voulu rester avec sa compagne de toute une vie. Donc il est retourné là-bas
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1 et il est resté au village.
2 J'ai dit à mon père d'aller faire le siège de son ami pour les
3 transporter dans son véhicule et les amener du village peut-être pour leur
4 dire qu'elle était malade et avait besoin de voir des médecins. C'est ce
5 que mon père a fait. Il est allé voir le voisin, la porte à côté, et lui a
6 demandé trois ou quatre fois, mais son voisin lui a dit : Je t'en prie,
7 laisse-moi, ne me demande pas ça, je ne peux pas, je pourrais moi-même être
8 tué si je le faisais. Donc il n'a rien fait.
9 Dans l'intervalle, mon frère, ainsi que 25 autres personnes qui
10 étaient en train de creuser ces tranchées, sont revenus après 17 heures et
11 ont été à ce moment-là autorisés par les forces à le faire. Donc mon frère
12 a réussi à rentrer à la maison. Et quand nous avons vu qu'il n'y avait
13 personne, sauf ma mère, il s'est renseigné pour savoir ce qui s'était
14 passé. Il a demandé, ma mère lui a expliqué, et à ce moment-là il y avait
15 un autre de mes oncles qui était présent ainsi que Hodja, qui était un imam
16 et sa femme, ainsi qu'une autre dame âgée qui était handicapée, ne pouvait
17 pas marcher. Donc en tout il y avait six personnes qui étaient présentes et
18 il n'y avait pas d'autre choix possible.
19 Mais mon frère Fadil a reçu l'ordre de mon père de démarrer le
20 tracteur, et c'est ce qu'ils ont fait; ils ont monté sur le tracteur et ils
21 ont pu dans la soirée emmener ma mère, mon frère, ma mère --mon père,
22 excusez-moi, pour quitter le village. Donc ils ont été en mesure de
23 s'enfuir avec le tracteur. C'est ça que j'ai entendu dire. Je ne les ai pas
24 rencontrés.
25 Q. Mais certainement vous leur avez parlé. Personne ne les a arrêtés, ne
26 les a empêchés de quitter le village. Même, comme vous le dites, s'il y
27 avait des paramilitaires et qui ont dit que personne ne pouvait quitter le
28 village, parce qu'ils avaient besoin d'eux comme bouclier lorsque les
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1 fantassins de l'OTAN arriveraient, mais ont les a laissés passés sur un
2 tracteur; c'est bien cela ?
3 R. Oui, c'est exactement ce qui s'est passé. Il est vrai que même à ce
4 stade personne ne les a arrêtés ou empêchés de passer.
5 Q. Bien, c'est clair. Dites-moi, ceux qui sont restés au village, est-ce
6 qu'ils ont survécu ? Est-ce que quelque chose leur est arrivé ? Quel a été
7 leur sort ?
8 R. A l'exception des deux qui avaient été enlevés, Hasan, Aslan, et leurs
9 femmes, ainsi que l'un de mes voisins Fehmi et sa femme, dont j'ai dit que
10 les quatre membres de la famille Zeka avaient été trouvés massacrés dans le
11 voisinage de Prelez. Et sa femme qui vivait près de mon voisin serbe et qui
12 avait promis qu'il veillerait sur eux si nous étions là, rien n'allait leur
13 arriver, ainsi de suite, mais nous les avons trouvés qui avaient brûlé dans
14 leur maison, c'est là que nous avons trouvé des morceaux de squelette, des
15 os calcinés dans la maison. Et je parle là de Fehmi et de sa femme.
16 Q. Je vous ai posé une question concernant les personnes qui étaient
17 restées au village après votre départ. Lorsque j'ai dit "vos" je voulais
18 dire pour l'ensemble du village, le village dans son ensemble. Quand au
19 total, bien, il y avait trois familles. Est-ce qu'une quelconque a dû subir
20 quelque mal après votre départ ? Je vous pose simplement une question
21 concernant ceux qui sont restés, je ne pose pas de questions concernant la
22 famille Zeka sur laquelle nous avons entendu tout ce qu'il fallait et cet
23 autre homme et sa femme dont vous nous avez parlé également.
24 Je vous pose simplement des questions concernant les personnes qui sont
25 restées après votre départ. Et pour autant que j'ai pu comprendre, il y
26 avait ces familles qui vivaient dans la partie du village appelé Prelez et
27 qui, apparemment, étaient très proches de ces forces paramilitaires serbes.
28 R. Je vais vous répéter qu'après que nous soyons partis, Fehmi était très
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1 âgé, ainsi que sa femme, sont restés. Les autres aussi sont restés ce jour-
2 là. A l'exception de Fehmi et sa femme, les quatre Zeka faisaient également
3 partie de ce groupe qui est resté. Nous avons trouvé Fehmi et sa femme qui
4 avaient donc été brûlés, qui étaient morts dans leur propre maison. C'était
5 trois ou quatre mois après la guerre, lorsque nous sommes revenus, donc il
6 ne restait que les corps calcinés de ces personnes qu'on a trouvés là.
7 Q. A part les restes calcinés, les restes de Fehmi et sa femme, savez-vous
8 quelque chose d'autre concernant la façon dont ils ont trouvé la mort ?
9 Est-ce que vous avez entendu dire quoi que ce soit ? Parce qu'il est clair
10 que vous n'étiez pas présent à ce moment-là.
11 R. Non, il est vrai effectivement que nous n'étions pas présents, mais
12 tout ce que j'ai dit c'est que nous avions trouvé les restes calcinés. J'ai
13 demandé à mon voisin qui se trouvait tout près sur ce qui c'était passé, il
14 a décliné, il a dit : Ils ont incendié la maison, mais je ne sais pas ce
15 qui s'est passé. Même Momir a refusé de me dire ce qui s'était passé. Qu'il
16 le sache ou non, ça je ne le sais pas moi-même.
17 Q. Momir c'est votre voisin serbe, n'est-ce pas. Je comprends qu'il s'agit
18 de son prénom. Est-ce que vous savez son nom de
19 famille ?
20 R. Oui, Momcilo Perovcevic.
21 L'INTERPRÈTE : L'interprète se reprend, Tepavcevic.
22 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, répéter clairement le nom, Monsieur
23 Bucaliu, les interprètes n'ont pas bien entendu.
24 R. Oui. Tepavcevic, Momcilo.
25 Q. Merci. Monsieur Bucaliu, dans votre déclaration du 29 août 2001, qui
26 porte également la date du 31 août 2001 - et c'est votre deuxième
27 déclaration - au paragraphe 2 vous dites que vous vous attendiez à ce qui
28 est des vengeances. Pourquoi vous attendiez-vous à des vengeances ? Ou plus
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1 exactement, qui s'attendait à ce qu'il y ait des vengeances et pourquoi ?
2 Pourquoi avez-vous pensé qu'il y aurait vengeance ? Qu'est-ce que vous
3 aviez à l'esprit lorsque vous avez dit cela ?
4 R. Ce n'est pas vraiment que je m'y attendais. En fait, ça a eu lieu. Nous
5 attendions à ce qu'il y ait une force de vengeance qui aurait lieu, parce
6 que nous savions que les forces serbes n'étaient pas en mesure de résister
7 à une attaque de l'OTAN et comme résultat de cela se vengeraient sur nous.
8 Immédiatement après les frappes aériennes de l'OTAN, les tirs ont commencé
9 en utilisant les Praga et ceci a été dès la première heure après le
10 bombardement de l'OTAN, après que les bombes de l'OTAN aient commencé à
11 tomber. Donc nous avons eu l'occasion d'avoir l'expérience de la vengeance
12 des militaires serbes et des forces paramilitaires serbes, et ceci a eu
13 lieu la première nuit, de sorte qu'ils ont commencé à se venger lors de la
14 toute première attaque.
15 Q. Bien. Donc ils ont été attaqués par l'OTAN. Mais alors, pourquoi vous ?
16 Pourquoi vous ?
17 R. C'est parce que nous étions les plus faibles. Nous étions sur le
18 terrain, nous nous trouvions sur place. Les forces de l'OTAN tiraient en
19 altitude. Et même bien que les Serbes utilisassent leurs armes
20 antiaériennes, ils ne pouvaient rien contre eux. Donc ils ont commencé à
21 tirer sur nous dans le jardin. Ils avaient coutume de dire souvent :
22 Laissez les gardes en haut venir jusqu'à vous, venir vous sauver. Par cela,
23 ils voulaient parler de l'OTAN, des soldats de l'OTAN.
24 Q. Bien. Alors, vous êtes des Albanais. Il y a des Serbes et il y a
25 également d'autres groupes ethniques qui vivent en Serbie, des Slovaques,
26 des Egyptiens, et ainsi de suite. Pourquoi est-ce qu'ils se vengeraient
27 contre vous, Albanais, et non pas d'autres, s'ils étaient attaqués par la
28 plus grande puissance militaire du monde ? Pourquoi se retourner contre les
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1 Albanais ? Est-ce que les Albanais auraient fait quelque chose de mal ?
2 Qu'est-ce qui se passait, en fait ? Qu'est-ce qui amenait les Serbes à se
3 venger précisément contre les Albanais, en tant que vengeance ? Parce que
4 normalement, une vengeance s'exerce contre la personne qui vous a fait
5 quelque chose. Donc est-ce que vous pourriez expliquer cela.
6 R. Je n'affirme pas ici qu'il s'agissait uniquement des Albanais qui
7 auraient subi des violences de la part des forces serbes. Il y en avait
8 d'autres aussi. Certainement des Rom, des Musulmans de Bosnie, et il y
9 avait tout un groupe parmi eux qui ont souffert, de sorte que je n'affirme
10 pas ici que c'était seulement des Albanais qui ont eu à souffrir.
11 Q. Bien. C'est clair. Merci. Monsieur Bucaliu, seriez-vous d'accord avec
12 moi, vous avez parlé du 24 mars lorsque ont commencé les bombardements, et
13 vous avez dit qu'Ilic vous a dit à la gare de ne pas venir au travail. Plus
14 exactement, vous êtes allé au travail et on vous a dit de rentrer chez
15 vous. Apparemment, la même chose s'est passée pour tous les autres
16 employés.
17 Est-ce que vous seriez d'accord avec moi qu'en plus des employés albanais
18 qui avaient commencé le 24 mars, lorsque les bombardements de l'OTAN ont
19 commencé, un grand nombre d'employés - je ne suis pas en train de me
20 référer aux employés du chemin de fer et à Urosevac, je me réfère aux
21 employés qui travaillaient à d'autres institutions et ainsi de suite, en
22 raison de l'état de guerre qui avait été déclaré immédiatement, ils ont
23 immédiatement quitté leurs postes précédents et avaient reçu des missions.
24 Donc je me réfère maintenant aux hommes et à ces autres missions qui
25 avaient quelque chose à voir avec la situation d'urgence dans l'Etat,
26 l'état de guerre et le fait que la plupart d'entre eux recevaient des
27 missions ou des nominations soit à la police, soit dans l'armée, la Défense
28 territoriale ou la protection civile. Ceci s'appliquait pas seulement aux
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1 Albanais mais aux Serbes et à tout le monde. Donc pas seulement les Serbes,
2 mais tous ceux que vous avez mentionnés, les Musulmans de Bosnie, les
3 Musulmans, les Egyptiens, les Rom ?
4 R. J'ai dit que nous avions été forcés de quitter nos emplois. Ils
5 n'avaient pas donné d'autres tâches, pas à la Défense territoriale ou ce
6 que vous avez mentionné, parce qu'on ne faisait pas confiance aux Albanais.
7 Je ne pense pas qu'il y avait d'autres Albanais qui faisaient partie de la
8 Défense civile ou territoriale. On nous a tout simplement dit de quitter
9 notre travail. Mais peut-être qu'ils ne nous faisaient même pas confiance
10 pour nous laisser continuer dans notre travail. C'est exactement ce que le
11 chef de cette gare, Zika, m'a dit. Il a dit que les Albanais ne pouvaient
12 plus continuer à travailler. Vous pouviez vous présenter chez votre
13 employeur, mais vous ne seriez pas autorisé à continuer de travailler.
14 Q. Nous sommes d'accord que la guerre avait commencé, n'est-ce pas ?
15 R. Oui, on peut dire cela. Si on dit que les bombardements aériens ont
16 commencé, ça a commencé, on peut évidemment conclure que la guerre elle-
17 même avait commencé.
18 Q. Revenons à ce que je vous avais demandé un peu plus tôt, pourquoi est-
19 ce qu'ils n'avaient pas confiance dans les Albanais à ce moment-là ? Je ne
20 me réfère pas à la période qui se situe dix ans avant cela ou 20 ans avant
21 cela. Pourquoi est-ce qu'ils faisaient pas confiance aux Albanais à ce
22 moment-là ? Quelle était la raison ? Quand vous dites qu'ils ne leur
23 faisaient pas confiance, vous êtes probablement en train de vous référer
24 aux Serbes. Ce sont les Serbes qui sont "ils," n'est-ce pas ?
25 R. J'ai dit cela plus tôt, les relations entre les Albanais et les Serbes
26 avaient commencé à devenir de plus en plus froides à partir de 1990. Au
27 début de 1990, alors que des amendements constitutionnels étaient
28 introduits de force, c'est-à-dire la constitution du Kosova, les réactions
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1 ont commencé à se figer et on pouvait le remarquer parmi les voisins, parmi
2 les collègues, et ainsi de suite.
3 Q. Monsieur Bucaliu, vous avez dit que vous travaillez aux chemins de fer
4 jusqu'à maintenant, vous avez probablement repris votre travail là lorsque
5 vous êtes revenu en juillet 1999, je suppose, et vous vivez près de votre
6 travail. Mais vous avez également dit quelque chose d'important et je
7 voudrais y revenir. Apparemment vous avez commencé à travailler en 1987, et
8 vous avez progressé jusqu'au jour où vous avez rencontré Zika lorsque
9 l'OTAN a commencé à bombarder, et ils vous ont dit, à partir de ce jour-là,
10 qu'il n'était plus nécessaire que vous reveniez travailler.
11 Alors, Monsieur Bucaliu, dans votre déclaration de 1999 et juste aussi
12 maintenant, vous dites que les relations avaient été interrompues entre les
13 Serbes et les Albanais, vous avez ensuite expliqué ceci en invoquant des
14 modifications constitutionnelles. Alors maintenant, est-ce que j'aurais
15 raison si je disais qu'au moins trois quarts des employées des chemins de
16 fer ou des voies ferrées étaient d'origine ethnique albanaise jusqu'en 1999
17 ? Aurais-je raison de dire cela ? Vous avez mentionné des chiffres, et
18 maintenant je voudrais que l'on parle en fractions, j veux dire, j'ai
19 mentionné trois quarts.
20 R. Ça pourrait être vrai, ça pourrait être exact pour approximativement ce
21 chiffre des trois quarts ou d'un tiers ou de trois quarts, ça pourrait être
22 vrai. C'est approximativement. Donc trois quarts étaient des Albanais, je
23 pense que oui.
24 Q. Monsieur Bucaliu, en commençant en 1990 et à partir de cela, vous avez
25 dit que les relations s'étaient détériorées, et je vois qu'à ce moment-là
26 encore la majorité des employés étaient des Albanais. Est-ce que vous-même
27 et vos collègues albanais avez dû signer une sorte de déclaration de
28 loyauté affirmant votre loyauté à l'égard de l'Etat de Serbie de façon à
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1 conserver les emplois ?
2 R. Non, moi et mes collègues n'avons pas eu à signer de document de
3 loyauté et nous avons conservé nos emplois. On nous a demandé de le signer.
4 Nous ne l'avons pas signé, nous n'avons pas été forcés à le signer, mais il
5 y a eu d'autres personnes toutefois à qui on a demandé de le signer, qui
6 ont refusé de le faire et qui ont perdu leur emploi.
7 Q. Ceux qui travaillaient aux chemins de fer ?
8 R. Oui, oui. Au niveau du directorat, parce que la direction principale
9 des chemins de fer du Kosova se trouvait à Fushe Kosova, où il y avait un
10 grand nombre de personnes qui étaient employées. Donc à la direction
11 centrale, il y avait - il se pourrait que je me trompe, parce qu'il y a
12 beaucoup de temps qui a passé depuis - mais je crois qu'il y a eu 130
13 personnes qui ont refusé de signer les documents pour l'Etat de Serbie et
14 que ces 130 personnes ont perdu leur emploi.
15 Q. Alors puis-je conclure que vous avez signé une telle déclaration et
16 que vous avez conservé votre emploi. Si c'était au niveau de --
17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ça n'est pas ce qu'il a dit, Monsieur
18 Djordjevic. Il a dit qu'on lui avait demandé de signer, mais qu'il n'avait
19 pas été forcé à le faire et qu'on ne l'avait pas licencié de son emploi,
20 mais que d'autres, à un niveau hiérarchique plus élevé, au niveau de la
21 direction, avaient été obligés de quitter leur emploi.
22 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je crois qu'il y a
23 eu un problème d'interprétation. Je vais devoir répéter ma question.
24 Q. Monsieur Bucaliu, aurais-je raison de dire qu'au niveau de la direction
25 ou au niveau des gestionnaires des chemins de fer du Kosovo, une demande
26 est venue de là pour que les employés albanais signent une telle
27 déclaration ?
28 R. Il est vrai que cette demande a été présentée, pas seulement au niveau
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1 de la direction, mais ça a été demandé à chaque employé des chemins de fer.
2 Donc chacun d'entre nous s'est vu demander de signer une déclaration de
3 loyauté à l'égard de l'Etat de la Serbie. Mais des petites gares, le long
4 du chemin de fer, n'ont pas signé et nous n'avons pas subi de conséquences,
5 tout au moins dans le secteur de Ferizaj. Personne n'a perdu son emploi à
6 la suite du fait qu'il n'aurait pas voulu signer cette déclaration.
7 Toutefois, au niveau de la direction, il y avait 130 personnes ou davantage
8 qui ont perdu leur emploi en raison du fait qu'ils ont refusé de signer
9 cette déclaration.
10 Q. Lorsque vous dites "au niveau de la direction," vous parlez de Kosovo
11 Polje seulement ou aussi d'autres villes ?
12 R. Non, seulement à Kosova Polje à Fushe Kosova, car la direction s'y
13 trouvait.
14 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite
15 maintenant arrêter mon contre-interrogatoire en raison de la pause et je
16 souhaite demander le versement au dossier du plan que le témoin a annoté de
17 manière supplémentaire, car maintenant il a ajouté la lettre C sur ce plan.
18 Et j'en aurais encore pour environ une demi-heure après.
19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ça sera admis.
20 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D00128.
21 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Merci.
22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pendant que l'on est en train de
23 corriger, à la page 15, ligne 17, apparemment il est écrit au compte rendu
24 d'audience, en anglais, "family tree group." Or, il faudrait que ce soit
25 "paramilitary group."
26 Maître Djordjevic, nous avons fait preuve de beaucoup de patience au cours
27 de votre contre-interrogatoire. Nous avons permis des questions qui
28 concernent très peu les questions qui nous concernent dans cette affaire.
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1 Ceci a duré pendant assez longtemps et nous vous suggérons de terminer en
2 un quart d'heure au maximum après la pause. Si nous souhaitons maintenir un
3 rythme raisonnable dans ce procès, j'espère que vous réalisez que la raison
4 en est principalement votre client. Il serait possible de permettre à ce
5 que ce procès se prolonge pendant un an et demi ou deux ans ou bien ça peut
6 se terminer plus rapidement. Nous essayons de faire en sorte que ça se
7 termine aussi rapidement que possible en permettant à votre client d'avoir
8 une défense appropriée. Mais nous avons besoin des conseils pour ce faire,
9 de leur coopération et les questions doivent être plus limitées aux
10 questions vraiment importantes.
11 J'ai mentionné cela plusieurs fois. Je pense que nous devrons commencer à
12 insister beaucoup plus concernant les limites dans le temps, à moins que
13 les conseils ne deviennent beaucoup plus disciplinés dans leurs questions.
14 Nous allons maintenant prendre notre pause et reprendre le travail à 11
15 heures 05.
16 --- L'audience est suspendue à 10 heures 34.
17 [Le témoin quitte la barre]
18 --- L'audience est reprise à 11 heures 10.
19 [Le témoin vient à la barre]
20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Djordjevic.
21 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vais
22 essayer de respecter les limites du temps, car moi aussi personnellement je
23 considère que c'est dans l'intérêt de notre client, mais bien sûr, pas au-
24 delà de ce qui garantit les droits à une défense appropriée.
25 Q. Monsieur Bucaliu, dites-moi, quel était le niveau d'éducation des
26 employés aux chemins de fer d'Urosevac ?
27 R. Je ne sais pas quoi dire, mais d'habitude les personnes appropriées
28 avaient des postes appropriés. Si certains postes demandaient un niveau
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1 plus élevé d'éducation, bien sûr, ils recrutaient la personne appropriée.
2 Q. C'était justement le sens de ma question, puisque vous avez dit que les
3 Serbes étaient au poste de direction. Est-ce qu'il y avait des Albanais qui
4 avaient fini le deuxième ou le troisième cycle universitaire à Urosevac ?
5 R. Oui, il y avait ce genre de personnes à Ferizaj. Afin de devenir un
6 responsable ou directeur, il fallait simplement passer par une formation
7 spécialisée, c'était le cas de moi-même et de mes collègues.
8 Q. Merci. Vous avez mentionné l'année 1990 en tant qu'année critique
9 lorsque les relations entre les Serbes et les Albanais se sont détériorées.
10 Monsieur Bucaliu, est-ce que la raison en était l'adoption de la
11 constitution de la République de Serbie en 1990 ?
12 R. Oui, c'était l'une des raisons. Les amendements de la constitution
13 étaient l'une des raisons supplémentaires pour lesquelles les relations se
14 sont refroidies. En raison de cela et suite à cela, certains droits dont
15 nous bénéficions avant 1990 nous ont été enlevés.
16 Q. Je ne vais pas vous reprocher vos erreurs, car vous n'êtes pas un
17 juriste, mais en réalité ceci avait eu lieu bien avant 1990.
18 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Maintenant, je souhaite demander à la
19 Chambre de première instance de verser au dossier l'ensemble du document
20 correspondant à la constitution de la Serbie de 1990. C'est un document
21 dont le numéro 65 ter est 1021.
22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il sera admis.
23 M. LE GREFFIER : [interprétation] La cote sera D00129, Monsieur le
24 Président.
25 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, pour nous permettre
26 de comprendre ce qui s'est passé et ce dont le témoin est en train de
27 parler, nous devons revenir en 1974, à savoir à la constitution de cette
28 année selon laquelle les Albanais avaient des droits bien plus élevés et
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1 c'est ce dont le témoin vient de parler. Bien sûr, ceci fera l'objet des
2 délibérations de cette Chambre de première instance et c'est la raison pour
3 laquelle je souhaite que l'on verse au dossier la constitution fédérale
4 aussi de 1974. Et le numéro 65 ter est 1048.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ce sera admis.
6 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Merci.
7 Q. Monsieur Bucaliu, je souhaite vous demander --
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] La cote sera D00130.
9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.
10 M. DJORDJEVIC : [interprétation]
11 Q. Monsieur Bucaliu, est-ce que vous avez appris dans la pratique quelles
12 étaient les dispositions de la constitution de
13 1974 ?
14 R. Non, personnellement, je ne connaissais pas l'ensemble de la
15 constitution, mais le Kosova avait sa propre constitution. Je parle de
16 celle-là et non pas de la constitution de la Serbie et de la Yougoslavie.
17 Bien sûr, pour ce qui est de certains de mes droits personnels, j'ai été
18 informé. Mais moi, je parlais des modifications apportées à la constitution
19 du Kosova. Je ne parlais pas des amendements à la constitution de la Serbie
20 car je ne les connais pas.
21 Q. Je ne souhaite pas entrer dans un débat de ce genre avec vous puisque
22 vous n'êtes pas spécialiste en la matière.
23 Mais je vais vous demander si vous savez qu'en vertu de la
24 constitution de la République de Serbie, il a été stipulé que la langue
25 officielle était la langue serbo-croate et que les écritures étaient
26 l'écriture romaine et cyrillique, et que dans des républiques différentes,
27 les populations appartenant aux groupes ethniques différents. Les minorités
28 pouvaient utiliser leurs propres langues et écritures et que leurs langues
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1 étaient égales par rapport aux autres, quelle que soit leur appartenance
2 ethnique, que les minorités avaient le droit d'utiliser leur propre langue,
3 culture, écriture et bénéficiaient d'autres droits. Est-ce que vous savez
4 quelque chose au sujet de ces dispositions, lorsque vous dites qu'elles ont
5 donné lieu à un refroidissement des relations ? Il s'agit des dispositions
6 8, 32 et 40 de la constitution de 1990.
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djordjevic, nous avons devant
8 nous un témoin qui ne prétend pas du tout être un expert en la matière du
9 droit ou droit constitutionnel ou d'être un expert en matière des affaires
10 politiques. Il est venu ici pour vous dire qu'il est simplement un employé
11 des chemins de fer. Vos questions ne sont utiles pour personne.
12 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pose ces
13 questions en raison de ce que le témoin a déclaré dans ses déclarations de
14 1999 et 2001, lorsqu'il a dit qu'il n'était pas autorisé à utiliser sa
15 propre langue, et il a dit que les Albanais devaient même payer une amende
16 de 30 à 50 % pour l'utilisation de leur propre langue, de la langue
17 albanaise. C'est la raison pour laquelle je lui demande s'il a jamais été
18 sanctionné en raison de cela, et c'est pour cela que je lui pose cette
19 question.
20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ça va beaucoup trop loin. Si vous
21 voulez qu'il vous dise si oui ou non il a dû payer une amende, bien sûr,
22 c'est une question pratique. Mais si vous entrez dans un débat sur la
23 légalité et le droit constitutionnel, c'est autre chose par rapport à la
24 question de savoir si une amende a dû être payée ou pas.
25 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Non, non.
26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il vous reste encore trois ou quatre
27 minutes, donc utilisez-les. Passez à autre chose.
28 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Le témoin a parlé des relations qui se
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1 sont détériorées entre les Serbes et les Albanais à partir de l'année 1990.
2 Q. Ma question est de savoir si le témoin a jamais fait l'objet de mesures
3 disciplinaires à son encontre, dans le cadre de son entreprise, les chemins
4 de fer, en raison du fait qu'il a utilisé la langue albanaise ? Est-ce
5 qu'il a jamais été sanctionné en raison de cela ?
6 R. Non, je n'ai pas été sanctionné moi-même. Mais le fait est que certains
7 de mes collègues se sont vu déduire un pourcentage de leur salaire en
8 raison du fait qu'ils utilisaient leur langue maternelle à leur lieu de
9 travail.
10 Q. Merci. Vous avez dit que le chef de la gare, Zika, a appelé les gares
11 routières lorsqu'il n'y avait plus de place dans les trains le 15 et le 16,
12 lorsque vous avez souhaité partir la première fois, donc le 15. Comment
13 est-ce que vous savez que Zika a appelé les autocars ?
14 R. J'ai souvent été présent à la gare ferroviaire, et j'étais présent
15 lorsqu'il a contacté la police ou les gares routières afin que le transport
16 des gens soit organisé, pas seulement par les bus, mais aussi les camions.
17 Q. Comment le savez-vous, pour ce qui est de la date du 15, c'est ça ma
18 question. Est-ce que vous l'avez vu ? Est-ce que vous l'avez entendu ?
19 R. Non. Le 15, je ne l'ai pas entendu.
20 Q. Monsieur Bucaliu, voici mon avant-dernière question. Au paragraphe 17
21 de votre déclaration, vous dites que lorsque vous avez enfin pu partir vers
22 la Macédoine, qu'un cordon de la police a été constitué et que, par
23 conséquent, vous avez pu seulement marcher sur les rails en allant vers la
24 frontière. Mais ce n'est pas ce que vous dites dans votre déclaration de
25 1999. Vous ne mentionnez pas de cordon, mais vous dites qu'il y avait une
26 dizaine de policiers qui vous auraient escortés à la frontière et qui vous
27 ont dit de suivre les rails en raison du fait que la zone avait été minée.
28 Puis vous dites aussi qu'il y avait des soldats de l'armée régulière autour
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1 qui proféraient des commentaires à votre sujet. Laquelle des deux versions
2 est vraie; un cordon de la police ou les soldats de l'armée régulière qui
3 criaient des remarques différentes à votre égard ?
4 R. Je ne me souviens pas avoir dit qu'il y avait un cordon de la police.
5 Mais il y avait des officiers, des soldats de l'armée lorsque le train
6 s'est arrêté, lorsqu'on nous a demandé de sortir, de descendre du train,
7 c'est la vérité. Lorsqu'on nous a dit de sortir du train, je ne vais pas me
8 répéter, mais il y avait à la fois les policiers et les soldats. Je ne
9 pense pas avoir dit qu'il y avait un cordon de la police.
10 Q. Je fais référence au paragraphe 17 dans votre déclaration de 2001,
11 lorsque vous le dites, mais vous venez de l'expliquer, donc inutile de
12 passer plus de temps à ce sujet-là.
13 Je vais maintenant aborder ma dernière question qui concerne le
14 journal qui a été tenu, le journal qui a été versé au dossier dans cette
15 affaire. Le 24 mars 1999, les bombardements de la Serbie ont commencé, et
16 jusqu'au 29 mars aucun train n'a passé. Est-ce que vous êtes d'accord avec
17 moi pour dire cela ? Est-ce que vous le savez ?
18 R. Je n'ai pas le journal, le registre devant moi. S'il n'y a aucune
19 inscription dans le registre allant dans ce sens alors c'est vrai, aucun
20 train n'est passé.
21 Q. Dites-moi, le jour où vous êtes parti pour la première fois, il a été
22 inscrit que seul deux trains ont circulé. Le premier, celui que vous aviez
23 pris, est parti à 8 heures 18 minutes, et ceci correspond à ce que vous
24 avez déclaré, et ce train est rentré dans l'après-midi, puisque vous n'avez
25 pas traversé la frontière. Le 16, il y avait deux trains encore une fois,
26 et le train qui est parti jusqu'au Djeneral Jankovic dans lequel il y avait
27 3 000 personnes et dix policiers serbes, comme vous le dites, il est venu
28 au moment que vous avez indiqué. Mais j'ai une question à vous poser, et
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1 c'est ma dernière question : est-ce qu'il était habituel que même en temps
2 de paix les policiers escortent un train ? En temps qu'employé de chemin de
3 fer, vous le savez certainement.
4 R. Oui, c'est exact, il est exact de dire que de temps en temps, pas
5 toujours - et là je parle de trains locaux qui circulaient à travers le
6 Kosova - donc il y avait des instances lorsque les policiers étaient
7 présents dans le train, mais pas toujours. C'était à des occasions très
8 rares. Et on parle d'un ou deux policiers.
9 M. DJORDJEVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai terminé mon
10 contre-interrogatoire. Merci du temps que vous m'aviez accordé. A l'avenir,
11 je vais m'évertuer à ce que les questions posées soient aussi pertinentes
12 que possible.
13 Monsieur Bucaliu, merci de vos réponses, car je pense que ceci va
14 contribuer encore plus au constat de la vérité.
15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci beaucoup, Maître Djordjevic.
16 Madame D'Ascoli, questions supplémentaires ?
17 Mme D'ASCOLI : [interprétation] Très brièvement, Monsieur le Président.
18 Nouvel interrogatoire par Mme D'Ascoli :
19 Q. [interprétation] Monsieur Bucaliu, mon collègue de la Défense vous a
20 posé des questions concernant les Serbes et le fait qu'ils avaient quitté
21 le village, et si oui ou non quand vous êtes revenu au village ils étaient
22 encore là et ce qui est advenu de leurs maisons. Et vous avez dit qu'après
23 le mois de juin vous êtes revenu au village, leurs maisons avaient été
24 démolies.
25 Lorsque vous êtes revenu à Staro Selo, est-ce que vous avez pu voir ce qui
26 était arrivé aux maisons des Serbes dans votre village, si vous l'avez
27 remarqué ? Dans quel état avez-vous trouvé ces maisons.
28 R. Tout à l'heure, j'ai expliqué que lorsque je suis revenu, à l'exception
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1 d'une seule maison qui était des Serbes, toutes les autres maisons ont été
2 démolies.
3 Q. Donc lorsque vous êtes revenu, ces maisons avaient déjà été démolies ?
4 R. Oui, en effet.
5 Q. Car j'avais compris qu'elles avaient été démolies après. Et votre
6 propre maison, dans quel état était-elle ?
7 R. Ma maison et les maisons de mes frères et de beaucoup de mes voisins
8 avaient été complètement réduites en cendres. Rien n'était intact. Et ceci
9 était vrai en ce qui concerne une quarantaine de maisons du village.
10 Q. Qu'en est-il de ces 40 maisons, est-ce qu'elles appartenaient à vos
11 voisins, ou à qui, éventuellement ?
12 R. Je vous parle des maisons qui appartenaient à des Albanais. J'ai
13 expliqué que les maisons des Serbes avaient également été démolies, mais là
14 je parle des maisons d'Albanais qui ont été incendiées par les forces
15 serbes. Pour ce qui est des maisons serbes, je pense que probablement ce
16 sont des Albanais qui les ont détruites.
17 Mme D'ASCOLI : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Bucaliu.
18 Monsieur le Président, je n'ai pas d'autres questions.
19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame D'Ascoli, merci.
20 Monsieur Bucaliu, vous serez content d'apprendre que nous en avons terminé
21 avec votre témoignage. On voudrait vous remercier de vous être rendu ici à
22 La Haye et de l'assistance que vous nous avez donnée. Vous pouvez
23 maintenant, bien évidemment, retourner à vos activités normales. L'huissier
24 va vous accompagner pour sortir du prétoire.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci à tous, Messieurs les Juges. Je n'ai pas
26 pu rentrer dans le détail d'un certain aspect. Il y avait un certain nombre
27 de choses qui n'étaient pas claires dans les comptes rendus d'audience
28 d'autres affaires, quant à pourquoi un train était oui ou non arrêté. Si
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1 vous souhaitez avoir davantage de détails, je peux vous les fournir, si
2 vous le souhaitez. Sinon, je vais en rester là.
3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci de votre proposition, mais je
4 pense que nous avons maintenant les renseignements qui nous fallaient.
5 Maintenant, l'huissier va vous accompagner.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci encore une fois, alors.
7 [Le témoin se retire]
8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Djurdjic, je vous vois.
9 M. DJURDJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Etant donné
10 que ce témoin a quitté le prétoire, je voudrais vous demander des
11 explications. Le témoin qui est à venir bénéficie de mesures de protection.
12 En effet, nous serons en audience à huis clos, sans doute. Moi, je dois
13 présenter à ce témoin la déclaration d'un autre témoin protégé qui avait
14 témoigné à huis clos.
15 Donc je veux des instructions, comment le faire de la meilleure façon
16 possible. Est-ce que je dois mentionner la position, le poste du témoin
17 protégé précédent ? Si je parle de son poste et ses fonctions, tout le
18 monde va le reconnaître malgré le fait que nous sommes à huis clos, ou
19 dois-je en parler simplement en utilisant sont pseudonyme ? Il s'agit de
20 certaines déclarations, enfin, de certaines contradictions entre les
21 déclarations de ces deux témoins protégés.
22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Avez-vous une déclaration ou une
23 transcription concernant cet autre témoin que nous allons avoir ici ? Donc
24 vous allez lui présenter au moins un document sans doute ?
25 M. DJURDJIC : [interprétation] Je peux simplement commencer par une
26 question disant un autre témoin a dit ceci ou cela ou je peux lui montrer
27 une partie du compte rendu d'audience, puisque je l'ai dans la liste de
28 documents que je souhaite utiliser. Mais je ne vais pas le faire si cela va
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1 à l'encontre des règles de procédure, ou peut-être pourriez-vous me donner
2 des instructions.
3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Cela est une question de degré et de
4 nécessité. Si vous pouvez faire votre contre-interrogatoire efficacement
5 sans identifier un témoin protégé vis-à-vis du témoin que nous allons
6 entendre, il faut le faire. Donc vous pouvez lui dire : Je voudrais que
7 vous fassiez un commentaire sur une déposition faite par quelqu'un d'autre
8 dans cette affaire ou dans une autre affaire, et cette personne a dit
9 telle, telle et telle chose et vous citez, vous le citez. En général, ce
10 sera suffisant.
11 Si pour une raison quelconque cela ne fonctionne pas, on pourra en effet
12 peut-être devoir prendre des mesures de procédure un peu particulières.
13 Mais peut-être pouvez-vous commencer en procédant de la sorte.
14 M. DJURDJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] M. Stamp, je crois.
16 M. STAMP : [interprétation] Oui. Il s'agit du témoin K-86, mais il faut
17 passer à huis clos et --
18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bien, si le témoin est présent, nous
19 allons le faire. Nous allons passer à huis clos et vous-même, Monsieur
20 Stamp, vous allez prendre place.
21 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos.
22 [Audience à huis clos]
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19 --- L'audience est levée à 13 heures 43 et reprendra le jeudi 28 mai 2009,
20 à 9 heures 00.
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