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1 Le mercredi 27 janvier 2010
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.
5 [Le témoin vient à la barre]
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour, Monsieur Jovanovic.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.
8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bien entendu, la déclaration
9 solennelle que vous avez prononcée s'applique toujours.
10 Monsieur Stamp, vous avez la parole.
11 M. STAMP : [interprétation] Bonjour.
12 LE TÉMOIN : ZIVADIN JOVANOVIC [Reprise]
13 [Le témoin répond par l'interprète]
14 Contre-interrogatoire par M. Stamp : [Suite]
15 Q. [interprétation] Vous avez indiqué hier que vous n'aviez pas assisté
16 aux pourparlers qui ont eu lieu à Rambouillet. Avez-vous assisté aux
17 négociations qui ont eu lieu ultérieurement à Paris au mois de mars ?
18 R. Non.
19 Q. Quelle serait votre évaluation de ces deux négociations, donc elle se
20 fonderait sur les rapports que vous avez reçus de la part de la délégation
21 de la Serbie et de la RFY, soit M. Sainovic et le Pr Markovic; serait-ce
22 exact ?
23 R. Non.
24 Q. Alors, de qui avez-vous obtenu des informations quant au déroulement de
25 ces deux réunions?
26 R. J'ai personnellement rédigé une analyse de tous les textes qui ont
27 découlé des réunions de Rambouillet et de Paris. J'ai lu ces textes dans
28 leur version originale en anglais, et ainsi, j'ai pu me faire une idée du
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1 processus. Par ailleurs, comme vous le savez, j'étais aidé par une grande
2 équipe de diplomates et de personnel technique qui suivait régulièrement
3 toutes les activités à Rambouillet et Paris, et par le truchement de
4 l'ambassade à Paris, ils m'informaient au quotidien ou presque au quotidien
5 sur le déroulement des négociations.
6 Q. Je vois. Avez-vous reçu des rapports de la part du Pr Markovic et de M.
7 Sainovic ?
8 R. Non, je ne me souviens pas qu'ils aient informé le ministère des
9 résultats et du déroulement des réunions à Rambouillet et à Paris, mais je
10 n'étais que ministre, et au sein du gouvernement, M. Sainovic était vice-
11 président du gouvernement fédéral, alors que M. Markovic était le vice-
12 président du gouvernement serbe.
13 Q. Pourrions-nous brièvement examiner le document P398, je pense qu'il
14 s'agit de la bonne cote, ou plutôt 1151, pardon. Vous verrez ce document
15 apparaître à l'écran.
16 R. Pardon. Est-ce que j'ai ce document dans mon classeur également ?
17 Q. Je ne crois pas.
18 R. Alors, est-ce que ce classeur m'est encore utile ?
19 Q. C'est possible.
20 R. Je suis désolé. Je vous pose les questions parce que je trouve qu'il
21 n'est pas forcément facile de lire ce qu'il y a à l'écran, et je trouve
22 qu'il est beaucoup plus facile de lire un exemplaire papier, car je ne vois
23 pas très bien ce qu'il y a à l'écran.
24 M. STAMP : [interprétation] Je suis désolé, mes excuses à la Greffière. Il
25 s'agit en fait de la pièce P1513.
26 Q. Et malheureusement, Monsieur Jovanovic, je n'ai pas d'exemplaire
27 papier, mais il ne s'agit que d'une page, et je demanderais à la régie de
28 l'afficher en gros plan, si possible. Je crois que le document est assez
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1 limpide. Il s'agit d'une lettre datée du 26 mars, rédigée par l'ancien
2 Procureur de ce Tribunal, Mme Louise Arbour, il est question de
3 l'intervention de l'OTAN, la lettre date des premiers jours de cette
4 intervention, c'est une lettre adressée au président Milosevic. Je vais
5 vous demander d'examiner la lettre, de la lire en diagonale.
6 R. Oui.
7 Q. Il me semble que cette lettre aurait été transmise par les voies
8 diplomatiques. Vous souvenez-vous d'avoir vu cette lettre lorsqu'elle a été
9 envoyée ou aux alentours de ce moment-là ?
10 R. Non, je ne me souviens pas de cette lettre. Puis-je vous rappeler,
11 Monsieur le Procureur, qu'il s'agit, là encore, d'une question qui relève
12 des relations entre la République fédérale de Yougoslavie et le bureau du
13 Procureur du TPIY. A l'époque, dans le cadre du système juridique, les
14 relations entre la Yougoslavie et le Tribunal de La Haye relevaient
15 exclusivement de la compétence du ministère de la Justice, ministère
16 fédéral de la Justice. Le ministère des Affaires étrangères n'a aucune
17 compétence en la matière, même aujourd'hui. Ces questions relèvent du
18 Conseil national chargé de la coopération avec le Tribunal, même organe de
19 ce type. Ainsi, à l'époque où cette lettre a été écrite, et aujourd'hui
20 même, les relations entre la Serbie et le Tribunal n'ont jamais relevé de
21 la compétence du ministère des Affaires étrangères.
22 En ce qui concerne cette compétence, à l'époque lorsque j'étais ministre et
23 aujourd'hui encore, ces compétences sont explicitement stipulées par la loi
24 sur les Affaires étrangères toujours en vigueur.
25 Q. Dans le cadre de vos réunions avec les dirigeants de la RFY et la
26 Serbie, avez-vous parlé de cette lettre ou avez-vous eu connaissance de
27 discussions portant sur la teneur de cette lettre ou les graves
28 préoccupations exprimées par la Procureure à l'époque ?
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1 R. Non, je ne m'en souviens pas. Je ne me souviens pas que l'on ait
2 discuté de la teneur de cette lettre à quelque réunion que ce soit à
3 laquelle j'aurais assisté. Comme je l'ai déjà dit, des questions de ce type
4 relevaient soit de la compétence exclusive du ministère de la Justice, et
5 il y a de nombreux documents étatiques qui en attestent, y compris la
6 correspondance entre le ministère de la Justice et le bureau du Procureur,
7 ainsi que d'autres institutions des Nations Unies.
8 Q. J'aimerais préciser une chose. M. Vlajko Stojiljkovic, le ministre de
9 la Justice -- non, pardon, plutôt le ministre du MUP, donc, le ministre de
10 l'Intérieur, était également un dirigeant du parti, comme vous-même, n'est-
11 ce pas ?
12 R. Non. M. Vlajko Stojiljkovic fut peut-être un temps membre des
13 principaux dirigeants du parti SPS, mais je n'en ai pas connaissance.
14 Pendant de longues années, j'ai été diplomate à l'étranger, donc je n'étais
15 pas dans le pays. Mais pendant la période où j'étais vice-président du
16 parti, responsable des relations internationales, je ne me souviens pas que
17 M. Stojiljkovic ait eu de hautes fonctions. Il est possible qu'il ait été
18 membre d'un comité qui comptait plus de 350 membres.
19 Q. En 1999, avez-vous participé à des réunions auxquelles M. Stojiljkovic
20 assistait également ?
21 R. Je suis désolé, mais c'est une question très vague. Est-ce que vous
22 entendez par là -- enfin, il y a 365 jours dans l'année, donc est-ce que
23 vous pourriez être un peu plus explicite. Je relèverais qu'en règle
24 générale, M. Stojiljkovic, en tant que ministre de l'Intérieur et, moi-
25 même, en tant que ministre fédéral des Affaires étrangères de la RFY, nous
26 nous rencontrions très rarement et nous assistions encore plus rarement aux
27 mêmes réunions. D'ailleurs, nos fonctions étaient à des échelons
28 différents. Il occupait une fonction républicaine, et j'étais moi-même
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1 membre du gouvernement fédéral.
2 Q. Très bien. Par conséquent, puisque vous croisiez rarement M.
3 Stojiljkovic, j'imagine que vous vous souviendriez si vous avez assisté
4 avec lui à d'autres réunions. Mais, je serai plus précis. Parlons
5 uniquement de réunions qui traitaient de la situation au Kosovo. Donc, à
6 quelque niveau que ce soit, fédéral ou républicain, vous souvenez-vous
7 d'avoir assisté à des réunions auxquelles participait M. Stojiljkovic,
8 réunions portant sur le Kosovo ?
9 R. Je ne me souviens pas d'une réunion de ce type.
10 Q. Très bien. Je passe à autre chose. M. Jovanovic, vous souvenez-vous
11 d'avoir rencontré le commissaire aux droits de l'homme des Nations Unies,
12 Mary Robinson, en 1999, pendant la guerre ?
13 R. Je suis désolé, Messieurs les Juges, mais il ne semble pas approprié
14 que je vois pour la première fois des documents comme celui que nous venons
15 de voir, que je n'ai jamais eu l'occasion de voir avant ce jour. Et
16 maintenant, on nous annonce un autre document que je n'ai jamais vu. Par
17 exemple, le dernier document, bien qu'il ne soit pas très long, aurait
18 nécessité que je puisse me familiariser avec le document un peu plus tôt,
19 afin que mon témoignage puisse être utile.
20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.
21 Poursuivez, Monsieur Stamp.
22 M. STAMP : [interprétation] Merci.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai assisté à plusieurs réunions avec
24 Mme Robinson. Je ne me souviens pas du nombre précis, mais il y a en tout
25 cas deux réunions. Je me souviens de l'une de celles-ci. Au siège des
26 Nations Unies à New York, nous avions assisté ensemble à un petit déjeuner
27 de travail.
28 M. STAMP : [interprétation]
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1 Q. Et à quand cela remonte-t-il ?
2 R. Je crois que cela a eu lieu au mois de septembre. Je ne suis pas sûr
3 maintenant si c'était en 1998 ou 1999, parce qu'en septembre 1998 et en
4 septembre 1999, je me suis rendu aux Nations Unies et je l'ai rencontrée
5 dans le cadre de l'une des réunions de l'assemblée générale. Nous avons
6 pris le petit déjeuner ensemble. Et il est vrai qu'elle a également visité
7 Belgrade.
8 Q. Oui, c'est en fait à cela que je voulais en venir. A-t-elle visité
9 Belgrade au mois de mai 1999 ?
10 R. Si je me souviens bien, oui.
11 Q. Et vous a-t-elle dit qu'en sa qualité de haut-commissaire aux droits de
12 l'homme des Nations Unies, elle avait reçu des rapports selon lesquels une
13 campagne de nettoyage ethnique était en cours - pour reprendre le terme
14 communément utilisé à l'époque - une campagne de nettoyage ethnique menée à
15 l'encontre des Albanais du Kosovo, au Kosovo ?
16 R. Je ne me souviens pas de toutes les questions dont nous avons discuté
17 avec le moindre détail.
18 Q. Très bien.
19 M. STAMP : [interprétation] Pourrions-nous voir le document sur la liste 65
20 ter 06019.
21 Il s'agit d'un communiqué de presse du Haut-commissariat aux droits
22 de l'homme en date du 13 mai 1999. J'imagine que je n'ai pas besoin d'en
23 donner lecture pour le compte rendu.
24 Q. Monsieur Jovanovic, est-ce que vous voudriez bien lire les quatre
25 premiers paragraphes ?
26 R. Je ne vois que deux paragraphes à l'écran.
27 Q. Très bien. Quand vous aurez fini de les lire, nous ferons dérouler le
28 texte vers le bas.
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1 R. Voilà, j'ai lu les deux premiers paragraphes.
2 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà, j'ai lu le texte.
4 M. STAMP : [interprétation]
5 Q. Merci. Tout d'abord, vous souvenez-vous que lorsqu'elle a visité
6 Belgrade, elle vous a rencontré et que vous avez discuté avec elle ?
7 R. C'était une période de guerre. De telles visites étaient nombreuses. En
8 effet, oui, elle est venue chez nous, mais je ne me souviens pas de la date
9 exacte. Mais en effet, nous avons eu des discussions à Belgrade. Je vois
10 qu'il s'agit d'un communiqué de presse. Je suis sûr que le ministère
11 fédéral des Affaires étrangères de Yougoslavie avait publié son propre
12 communiqué de presse à l'époque, mais je ne l'ai pas sur moi, donc mon
13 propre communiqué de presse, si je puis m'exprimer ainsi.
14 Q. Selon le communiqué de presse du Haut-commissariat aux droits de
15 l'homme, elle s'est plainte auprès de vous d'avoir entendu des récits de la
16 part de centaines de réfugiés albanais du Kosovo concernant une campagne de
17 nettoyage ethnique menée par l'armée, la police et les forces
18 paramilitaires. Vous en souvenez-vous ? Vous souvenez-vous qu'elle vous ait
19 parlé de cela ?
20 R. Non, je ne me souviens pas d'une telle évaluation.
21 Q. Est-ce que vous vous souvenez de quoi que ce soit qu'elle vous ait dit
22 concernant les réfugiés albanais du Kosovo ? Après tout, elle était tout de
23 même haut-commissaire aux droits de l'homme.
24 R. Oui, c'est vrai, mais malheureusement je dois avouer que je ne me
25 souviens pas de la plupart des questions dont nous aurions discuté, si ce
26 n'est -- en principe le haut-commissaire aux droits de l'homme
27 s'intéressait à la situation en matière de droits de l'homme partout en
28 Yougoslavie, y compris au Kosovo. Mais je ne me souviens maintenant d'aucun
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1 détail concernant les questions ou interventions qu'elle aurait faites qui
2 ressembleraient à la déclaration qu'elle a prononcée lors de la conférence
3 de presse à Belgrade.
4 Q. Vous souvenez-vous d'avoir eu la moindre discussion avec elle sur
5 quelque question que ce soit se rapportant aux droits de l'homme ?
6 R. Aujourd'hui, 11 ans plus tard, tout ce que je peux vous dire c'est que
7 lors de notre réunion nous avons parlé des droits de l'homme, mais je ne
8 saurais être plus précis quant aux questions explicites qui ont été
9 discutées, ni d'ailleurs les propos tenus par Mme Robinson, que ce soit en
10 discutant avec moi ou lors de la conférence de presse. Je ne m'en souviens
11 tout simplement pas.
12 Q. Mais là, il s'agit d'une citation de Mme Robinson dont je vais vous
13 donner lecture. Elle a dit :
14 "Il faut que justice soit faite. Je suis résolue à ce que les
15 responsabilités soient attribuées et que l'impunité soit empêchée. Les
16 similitudes entre le Kosovo et la Bosnie ne devraient pas s'étendre au fait
17 que des présumés criminels de guerre soient encore en liberté même après
18 qu'un accord ait été conclu."
19 Vous vous souvenez certainement de cette déclaration, Monsieur Jovanovic ?
20 R. Mais je ne suis pas obligé de m'en souvenir, Monsieur le Procureur.
21 Comme je vous l'ai déjà indiqué, je ne m'en souviens pas. Par ailleurs, il
22 s'agit d'une déclaration faite par Mme Robinson lors d'une conférence de
23 presse, ce ne sont pas les propos qu'elle m'a adressés personnellement.
24 Alors, vraiment je n'ai gardé aucun souvenir de la publication de ce
25 document. Je peux déclarer que je suis d'accord avec Mme Robinson et avec
26 la déclaration qu'elle avait faite lors de cette conférence de presse selon
27 laquelle justice doit être faite. Oui, la justice doit être faite. Je suis
28 bien d'accord avec ces propos proférés par Mme Robinson lors de la
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1 conférence de presse.
2 Q. Quels que soient les propos que Mme Robinson vous a tenus concernant
3 l'état des droits de l'homme au Kosovo -- j'ai bien compris que vous ne
4 vous souvenez pas des paroles qu'elle vous a adressées, mais j'imagine que
5 vous avez transféré ses propos au département du gouvernement pertinent, à
6 savoir le MUP et le département de la Défense ?
7 R. Oui, bien évidemment. Chaque fois que j'avais des rencontres avec les
8 représentants étrangers, et notamment avec un représentant aussi haut des
9 Nations Unies, je soumettais des rapports au gouvernement fédéral, puis
10 c'était au gouvernement fédéral de décider à qui il transmettrait des
11 éléments d'information, et c'était au gouvernement de donner des consignes
12 quant à la manière d'approcher la chose. Alors, ce texte je le vois pour la
13 première fois. Je n'ai pas eu le temps de vérifier quelles sont les mesures
14 qui avaient été prises par mon ministère vis-à-vis du gouvernement fédéral.
15 Mais ce que je puis affirmer avec certitude, c'est qu'un rapport a été
16 rédigé sur le sujet et, conformément à la pratique habituelle, ce rapport a
17 été remis au gouvernement fédéral et aux institutions pertinentes pour
18 étudier l'affaire.
19 Q. Merci, Monsieur Jovanovic.
20 M. STAMP : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les
21 Juges. Je n'ai plus de question à poser à ce témoin.
22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Stamp.
23 M. STAMP : [interprétation] Mais avant de terminer, Messieurs les Juges, ce
24 document peut-il être versé au dossier.
25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.
26 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, ce sera la pièce
27 P01519.
28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djurdjic, vous avez la parole.
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1 M. DJURDJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Avant de
2 procéder à mon interrogatoire supplémentaire, mes questions
3 supplémentaires, j'aimerais soulever une objection quant à la remise des
4 documents une fois l'interrogatoire principal du témoin commencé. Nous
5 avons reçu six ou sept documents différents hier, un document, je ne l'ai
6 reçu qu'avant-hier pendant l'interrogatoire principal. Je pense qu'il
7 s'agit de cette lettre de Mme Louise Arbour. Donc, j'aimerais que l'on
8 mette fin à ces agissements du Procureur, avant que cela ne devienne une
9 pratique courante.
10 M. STAMP : [interprétation] Je suis désolé. Nous avons eu un problème dans
11 notre système de recherche la semaine dernière, et c'est la raison pour
12 laquelle nous avons à faire face à une telle situation. Ce ne sera pas une
13 pratique habituelle de notre part, mais tout simplement, nous n'avons pas
14 pu retrouver les documents pertinents jusqu'au dernier moment. Dès que nous
15 les avons trouvés, nous les avons communiqués à la Défense.
16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Stamp. Vous comprenez
17 que l'efficacité du procès et la véracité des propos proférés par le témoin
18 sur un document donné, tout ceci peut être mis en cause si le témoin n'a
19 pas pris connaissance du document avant de l'étudier. Donc, le procès se
20 déroulera mieux si le témoin a eu l'occasion d'étudier les documents sur
21 lesquels il doit se prononcer avant de déposer sur le sujet.
22 Maître Djurdjic, vous avez la parole.
23 M. DJURDJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
24 Nouvel interrogatoire par M. Djurdjic :
25 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Jovanovic.
26 R. Bonjour.
27 Q. Vous avez déjà fourni une réponse à cette question, mais je vais vous
28 la reposer. Le MUP, c'est-à-dire le ministère fédéral des Affaires
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1 extérieurs, a-t-il jamais reçu ce document ou tout autre communiqué de
2 presse de la part du haut-commissaire de l'ONU ?
3 R. Le ministère ne reçoit pas ce type de documents. Ces documents sont
4 destinés aux médias. Et puis, il faut dire que le ministère reçoit des
5 tonnes de documents, et le ministre n'étudie que les documents qui lui sont
6 adressés personnellement.
7 Q. Monsieur Jovanovic, il faut dire que les propos énoncés dans cette
8 lettre sont très graves, il s'agit des accusations portant sur des
9 violations graves des droits de l'homme au Kosovo. N'était-il pas habituel
10 dans les sphères diplomatiques d'envoyer une note officielle au ministre
11 des Affaires étrangères lorsqu'il s'agit d'affaires aussi graves ?
12 R. Oui. Cela aurait été conforme à la procédure habituelle, comme nous
13 avons déjà pu le voir avec la lettre rédigée par Mme Louise Arbour.
14 Q. Pendant l'agression contre la République fédérale de Yougoslavie à la
15 République de Serbie en 1999, avez-vous reçu une note officielle portant
16 sur les violations des droits de l'homme au Kosovo-Metohija et des crimes
17 qui auraient été commis par la RFY et Serbie ?
18 R. Non. Nous n'avons reçu aucune note de protestation, aucune note
19 officielle, aucun document quel qu'il soit.
20 Q. Merci. Est-il possible que Mme Robinson vous fasse part de telles
21 accusations lors d'une conversation et que vous n'en ayez pas gardé
22 souvenir ?
23 R. D'après ce texte, il est clair qu'il s'agit des déclarations faites par
24 Mme Robinson lors d'une conférence de presse. Lors des entretiens qui ont
25 eu lieu entre des hauts représentants du gouvernement et de la communauté
26 internationale, il est très rare de rencontrer des termes aussi graves que
27 ceux qui sont utilisés dans le communiqué de presse que nous venons de
28 voir.
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1 Q. Merci. Si de tels propos avaient été proférés lors des entretiens que
2 vous avez eus, auriez-vous réagi ?
3 R. Evidemment. Il s'agit avant tout d'un dialogue. Je tiens à vous
4 rappeler le point suivant, le gouvernement fédéral et le gouvernement de la
5 République de Serbie ont effectué des analyses. Ces analyses ont montré que
6 l'organisation terroriste, l'UCK, forçait les citoyens d'ethnicité
7 albanaise d'abandonner leurs villages. Ceci avait pour but de créer dans le
8 public l'illusion d'une catastrophe humanitaire en vue de justifier
9 l'agression perpétrée par l'OTAN. Ceci, bien évidemment, ne veut pas dire
10 que des crimes isolés n'ont pas été commis par des individus provenant de
11 toutes les parties, et cela ne veut pas dire que c'est l'Etat qui
12 s'engageait en faveur d'une politique d'expulsion, de nettoyage ethnique ou
13 de violence à grande échelle, comme nous venons de le lire dans ce texte.
14 Q. Merci. Monsieur Jovanovic, hier, à la page 51, lignes 1 à 3 du compte
15 rendu d'audience, M. Stamp vous a présenté un extrait de votre déposition
16 dans l'affaire Milutinovic. Vous y déclarez que M. Kertes vous avait donné
17 de l'argent destiné en partie à la reconstruction des locaux diplomatiques.
18 C'est ce que vous aviez déclaré dans l'affaire Milutinovic. Pouvez-vous me
19 dire si l'ambassade de Chine a fait partie des locaux diplomatiques ?
20 R. Oui.
21 Q. Et pouvez-vous nous dire pourquoi les Chinois avaient dépensé plus de
22 466 000 marks allemands pour reconstruire leur bâtiment ?
23 R. Le gouvernement fédéral leur avait alloué un bâtiment pour qu'ils
24 puissent y installer leur consulat. Lors des bombardements, ce bâtiment a
25 été détruit. Pour qu'il puisse être utilisé, il a fallu faire des
26 investissements importants. Le gouvernement fédéral était incapable de
27 couvrir ces frais, puisque le budget fédéral souffrait d'un déficit grave.
28 Des négociations ont été entamées avec la partie chinoise, il a été convenu
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1 que les Chinois devaient reconstruire leurs locaux en se servant de leurs
2 propres moyens financiers, tandis que le gouvernement yougoslave devait
3 compenser l'argent investi sur une longue période, et cela, en abandonnant
4 l'idée de toucher des loyers.
5 Une fois cet accord passé, pour que l'ambassade chinoise puisse partir des
6 locaux, une somme de 475 marks allemands a été payée à la partie chinoise.
7 Q. Et lorsque vous avez parlé des frais à couvrir au niveau des locaux
8 diplomatiques, vous avez parlé d'un consulat, à quel consulat avez-vous
9 pensé au juste ?
10 R. J'ai pensé au consulat de l'ambassade de Chine à Belgrade.
11 Q. Merci, Monsieur Jovanovic.
12 M. DJURDJIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je n'ai plus d'autres
13 questions à poser à ce témoin.
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci à vous.
15 Questions de la Cour :
16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] J'aimerais revenir sur cette dernière
17 question, Monsieur Jovanovic. Etes-vous en train de nous dire que le
18 gouvernement fédéral assurait les locaux pour les missions diplomatiques
19 étrangères à Belgrade ?
20 R. Oui, Messieurs les Juges, et cela, de deux façons différentes : soit le
21 gouvernement offrait ses locaux soit il les louait. Quelle solution serait
22 adaptée, ça été une décision qui a été prise sur la base du principe de la
23 réciprocité ou selon les besoins.
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Et était-ce la manière habituelle de
25 procéder au niveau du gouvernement fédéral vis-à-vis des missions
26 diplomatiques étrangères ?
27 R. Oui, Monsieur le Juge. Conformément à la convention régissant les
28 rapports diplomatiques et conformément aux pratiques diplomatiques en
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1 vigueur, il est tout à fait habituel d'assurer les locaux où des missions
2 diplomatiques étrangères puissent avoir leur siège, ceci est fait sur la
3 base de réciprocité. Si un pays offre à un autre pays des locaux pour y
4 héberger sa mission diplomatique, il est clair que l'autre pays fera la
5 même chose. Evidemment, cette règle n'est pas toujours appliquée
6 absolument, tout dépend des rapports mutuels existants, et tout dépend de
7 différents systèmes juridiques. Mais c'est effectivement la pratique
8 courante dans la plus grande partie du monde. Et si jamais des relations ne
9 permettent pas d'offrir en cadeau des locaux, alors, cette question est
10 résolue en les louant.
11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.
12 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je souhaite enchaîner avec la
13 question suivante. Pourquoi cet argent a-t-il été remis en liquide ?
14 R. La République fédérale de Yougoslavie faisait l'objet de sanctions
15 pendant une période prolongée, c'est pourquoi le système des échanges ne
16 fonctionnait pas sur le plan international. En fait, cela voulait dire
17 qu'il était impossible de transférer des moyens financiers via les banques,
18 via des comptes bancaires, comme cela se fait habituellement. Pendant cette
19 période des sanctions, le corps diplomatique yougoslave fonctionnait de
20 façon suivante, on apportait physiquement, en liquide, des fonds financiers
21 nécessaires. Et vous pouvez vous imaginer de la complexité de cette
22 opération, si je vous dis que la Yougoslavie avait des missions
23 diplomatiques dans 178 pays, qu'elle avait plus de 100 ambassades et de
24 consulats à travers le monde entier. Et à chacune de ces missions
25 diplomatiques, il fallait remettre de l'argent en liquide pour assurer son
26 fonctionnement.
27 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci infiniment.
28 M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Je souhaite que vous vous concentriez
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1 sur la partie de votre déposition du 25 janvier pendant l'interrogatoire
2 principal. Le conseil de la Défense vous a posé une question concrète, à
3 savoir je cite :
4 "Les mesures prises au Kosovo-Metohija étaient-elles dirigées à l'encontre
5 des personnes qui ne se livraient pas à des activités terroristes, quelle
6 que soit leur appartenance ethnique ?"
7 Vous souvenez-vous de cette question qui vous a été posée ?
8 R. Monsieur le Juge, les mesures entreprises par le gouvernement visaient,
9 avant tout, les terroristes. En fait, elles visaient exclusivement les
10 terroristes et les individus qui recouraient à la violence pour réaliser
11 leurs objectifs politiques. Les mesures gouvernementales ne visaient pas la
12 population civile.
13 M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] C'est quelque chose que je souhaitais
14 éclaircir puisque votre réponse était :
15 "Bien sûr."
16 Donc, j'imagine que vous vouliez dire "bien sûr que non."
17 R. Monsieur le Juge, je vous suis très reconnaissant d'avoir soulevé cette
18 question. Soit je ne me suis pas exprimé d'une manière tout à fait claire,
19 soit mes propos n'ont pas été consignés dans le compte rendu d'audience
20 fidèlement. En tout cas, il est clair que les mesures gouvernementales ne
21 visaient pas la population civile, mais plutôt des éléments et des
22 organisations qui se servaient de terrorisme, de violence, en vue de
23 réaliser leurs objectifs politiques.
24 M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Merci. Et c'est quelque chose que vous
25 pouvez confirmez, vous dites que c'est un fait ?
26 R. Je confirme que c'était bien la politique promue par le gouvernement
27 fédéral yougoslave, gouvernement au sein duquel j'ai exercé la fonction du
28 ministre des Affaires étrangères. La politique du gouvernement fédéral
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1 ainsi que la politique de la République de Serbie consistaient à assurer, à
2 quelque prix que ce soit, une solution pacifique et de compromis,
3 respectant toutes les résolutions adoptées par le Conseil de sécurité de
4 l'ONU, respectant le document final d'Helsinki, et respectant les principes
5 de l'intégrité et de la souveraineté territoriale. En ce sens, ce n'est pas
6 la Yougoslavie qui refusait d'accepter une solution politique lors des
7 négociations qui se sont tenues à Rambouillet et à Paris. Ce qui était
8 inacceptable pour la Yougoslavie et la Serbie, c'était la sécession d'une
9 partie de son territoire, à savoir le Kosovo-Metohija. Et c'était là que
10 gisait le problème.
11 M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Merci. Et juste une autre question que
12 je souhaite éclaircir avec vous. Lors de votre déposition, en répondant à
13 une question posée par le conseil de la Défense, vous avez mentionné la
14 minorité ethnique albanaise.
15 R. Oui, Monsieur le Juge.
16 M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Oui, merci. Très bien. Mais les
17 Albanais ont-ils toujours représenté une minorité ?
18 R. Les Albanais ont toujours représenté une minorité en dehors de leur
19 pays principal, l'Albanie. En tant que minorité ethnique, les Albanais
20 habitent en Serbie et en Macédoine. Donc, par rapport à la population
21 totale de Macédoniens, le nombre d'Albanais est beaucoup plus élevé en
22 Serbie, puis, les Albanais habitant en Serbie, ils habitent également au
23 Monténégro, dans ces trois pays ils représentent une minorité ethnique, et
24 pourquoi ? Parce que conformément à la convention du Conseil de l'Europe
25 portant sur les droits des minorités ethniques, on distingue des pays
26 d'origine et des pays où une population représente une minorité ethnique.
27 Ce sont des termes qui sont communément admis, y compris dans le Conseil de
28 l'Europe pour ce qui est de la définition des minorités ethniques. Il faut
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1 dire, Messieurs les Juges, qu'il y a certainement plus d'un million
2 d'Albanais au Kosovo. Aucun recensement n'a été effectué récemment, donc le
3 chiffre exact n'est pas connu. Mais malgré leur nombre élevé au Kosovo, ils
4 représentent une minorité ethnique sur le plan de la Serbie. L'Albanie est
5 le seul pays où les Albanais ne représentent pas une minorité ethnique.
6 Dans tous les pays limitrophes, les Albanais sont une minorité ethnique, et
7 conformément à la Convention du Conseil de l'Europe, ils bénéficient de
8 toute une série de droits concernant leur culture, leur langue, leur
9 identité. Mais nulle part et jamais les droits d'une minorité ethnique
10 n'impliquent pas la possibilité d'une sécession --
11 M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] D'accord.
12 R. -- uniquement le droit de l'autodétermination.
13 M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Merci.
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.
15 Monsieur Jovanovic, vous serez content d'apprendre que votre
16 interrogatoire touche à sa fin. Les Juges de la Chambre vous remercient
17 d'avoir apporté votre concours au déroulement de ce procès, et vous pouvez
18 désormais reprendre votre cours de vie habituel. L'huissière vous
19 accompagnera et vous aidera à quitter la salle d'audience.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges.
21 [Le témoin se retire]
22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Djurdjic.
23 M. DJURDJIC : [interprétation] Messieurs les Juges, notre témoin est prêt,
24 mais il me semblait bon de faire une pause d'abord puis de reprendre le
25 travail. Si vous le préférez, nous pouvons immédiatement amorcer
26 l'interrogatoire du témoin suivant. Mais c'est Me Popovic qui
27 l'interrogera.
28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il reste encore une demi-heure avant
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1 la pause habituelle. Donc il me semble préférable de convoquer le témoin.
2 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour, Monsieur.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Veuillez lire à voix haute le document
6 qui vient de vous être remis.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
8 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
9 LE TÉMOIN : RADOMIR GOJOVIC [Assermenté]
10 [Le témoin répond par l'interprète]
11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir.
12 Je pense que c'est Me Popovic qui va vous interroger.
13 Interrogatoire principal par M. Popovic :
14 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Gojovic.
15 R. Bonjour.
16 Q. Monsieur Gojovic, avant de démarrer mon interrogatoire en chef, je
17 voudrais vous rappeler, étant donné que nous parlons la même langue, une
18 fois que vous aurez entendu ma question, faites une petite pause, de
19 manière à ce que les interprètes puissent terminer l'interprétation de la
20 question avant de commencer l'interprétation de votre réponse.
21 Pouvez-vous nous décliner votre nom, s'il vous plaît.
22 R. Je m'appelle Radomir Gojovic.
23 Q. Pouvez-vous nous dire votre date et lieu de naissance.
24 R. Je suis né le 1er février 1943 dans le village de Sekiraca dans la
25 municipalité de Kursumlija, en République de Serbie.
26 Q. Merci beaucoup. Monsieur Gojovic, avez-vous déposé devant ce Tribunal
27 dans l'affaire Milutinovic en date du 2 et 3 octobre --
28 R. Oui.
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1 Q. -- en 2007 ? Au cours de votre séance de récolement, avez-vous eu
2 l'occasion de relire votre déposition dans l'affaire Milutinovic ?
3 R. Oui.
4 Q. Si j'ai bien compris, vous souhaiteriez porter certaines corrections et
5 expliquer, voire clarifier certaines de vos réponses qui figurent dans le
6 procès-verbal de votre déposition dans l'affaire Milutinovic. Je voudrais
7 vous permettre de faire cela. Pour aider la Chambre et mes chers confrères,
8 je voudrais rappeler que dans le procès-verbal de Milutinovic à la page 16
9 764, ligne 25, et à la page 16 765, lignes 1 à 4, ce que l'on y trouve
10 c'est la question posée par le Juge Président Nosworthy concernant le fait
11 de savoir s'il y avait une obligation pour les citoyens de rendre compte
12 d'un crime et la réponse du témoin à cette question.
13 Je vous donne aujourd'hui l'occasion de clarifier la réponse que vous avez
14 donnée à cette époque et de nous le dire aujourd'hui devant la Chambre.
15 R. Un malentendu s'est produit, et j'ai négligé de mentionner quelque
16 chose, et je voudrais ajouter un point afin de préciser ma déposition.
17 Chaque citoyen, lorsqu'il apprend qu'un crime a été commis, crime notamment
18 qui relève d'une peine de mort, doit le déclarer; à défaut, il peut
19 encourir une peine de trois ans de prison. C'est un texte de loi fédéral
20 qui s'applique aux officiers de la police militaire, et cetera. Donc une
21 personne, un officiel qui apprend ex officio qu'un crime aurait été commis
22 qui entraînerait une peine de plus de cinq ans de prison, s'il ne le fait
23 pas, s'il ne le dit pas, lui-même peut subir une peine de trois ans de
24 prison. Ce qui signifie que tous les officiers militaires, dans l'exécution
25 de leur devoir, relèvent de ce qualificatif de personne officielle. J'ai
26 négligé de mentionner ce dispositif puisque nous parlions du droit qui
27 s'applique aux officiers militaires et qui réglemente la question de ces
28 relations et obligations. Je crois maintenant l'avoir clarifié.
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1 Q. Merci. Après avoir clarifié ce point, diriez-vous que vous donneriez la
2 même réponse aux questions qui vous ont été posées dans l'affaire
3 Milutinovic, est-ce que vous donneriez aujourd'hui la même réponse ?
4 R. Oui. Il n'y avait pas d'autres raisons que je dise autre chose à
5 l'époque par rapport à ce que j'ai dit à l'époque.
6 Q. Merci beaucoup, Monsieur Gojovic.
7 M. POPOVIC : [interprétation] Je propose de verser cette pièce 65 ter 1664
8 au dossier. Il s'agit du procès-verbal de la déposition de ce témoin dans
9 l'affaire Milutinovic.
10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons verser ce document.
11 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce D00496.
12 M. POPOVIC : [interprétation] Je vais maintenant donner lecture d'un résumé
13 de la déclaration de témoin de M. Gojovic.
14 Le témoin est un avocat qui a passé plus de 40 ans au sein de l'armée
15 yougoslave, avant de prendre sa retraite avec le grade de major en 2001. Au
16 cours de sa carrière professionnelle, il a été juge militaire au tribunal
17 de Belgrade du 1er janvier 1994 au 16 avril 1999. A cette date, il a été
18 nommé chef de l'administration juridique du QG de l'armée yougoslave. Il va
19 maintenant donc déposer concernant les efforts qu'il a déployés afin
20 d'améliorer le système juridique militaire, entre autres, qui relevait de
21 sa fonction en y apportant le soutien logistique nécessaire au système de
22 justice militaire, et qui comprenait également l'inclusion au sein du
23 personnel professionnel du système judiciaire militaire de la République
24 fédérale de Yougoslavie nécessaire pour contribuer au bon fonctionnement du
25 système de justice militaire et l'exécution de ses obligations et devoirs.
26 Le témoin va nous parler de la procédure criminelle en passant de la
27 découverte d'un crime jusqu'à la condamnation et le jugement. Il va déposer
28 sur les documents qui étaient diffusés à l'ensemble des militaires, à tous
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1 les membres de l'armée yougoslave et de la formation des membres de
2 l'armée, plus particulièrement tout ce qui a trait au respect des lois et
3 règlements et conventions internationales concernant la conduite pendant
4 une époque de guerre et tout ce qui a trait au respect du droit humanitaire
5 international. Il va parler de l'autonomie, de l'indépendance des organes
6 du système judiciaire militaire vis-à-vis des autres organes, départements,
7 et services du QG de l'armée yougoslave.
8 Au cours de sa déposition, il va analyser certains rapports d'information,
9 des résumés, des vues d'ensemble qui ont été élaborés pour être utilisés
10 par l'armée yougoslave et le QG et qui contenaient des rapports sur les
11 crimes qui ont été perpétrés par des membres de l'armée yougoslave au
12 Kosovo. Il va nous parler du nombre de rapports sur ces crimes, les
13 enquêtes menées, le nombre d'actes d'accusation, et le nombre de jugements
14 qui ont été portés.
15 Il va analyser l'ensemble des ordres publiés par le QG de l'armée
16 yougoslave, qu'il a lui-même rédigés, qui comprenaient la nécessité de
17 détecter les actes criminels et qui soulignaient l'obligation de l'ensemble
18 des membres de l'armée yougoslave de respecter le droit humanitaire
19 international. Il nous parlera de son expérience personnelle, de ce qui
20 s'est produit lorsque des actes criminels ont été décelés et faisaient
21 l'objet de rapports. Il parlera des enquêtes et de ce qui s'est produit
22 pour ouvrir des enquêtes criminelles et des procès.
23 Merci beaucoup. Voilà donc un résumé de la déposition de ce témoin.
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci beaucoup, Maître Popovic.
25 M. POPOVIC : [interprétation]
26 Q. Monsieur Gojovic, avez-vous été membre de l'armée yougoslave, et
27 jusqu'à quelle date, s'il vous plaît ?
28 R. J'ai été membre de l'armée du peuple yougoslave. J'ai été officier à
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1 partir de juillet 1961; ensuite j'ai été membre de l'armée yougoslave
2 jusqu'au 1er avril 2001, moment où j'ai pris ma retraite. Auparavant, j'ai
3 fait mes études à l'école militaire de 1959 à 1961, et j'en suis diplômé.
4 Q. Merci. Pouvez-vous nous dire, lorsque vous avez pris votre retraite,
5 quel était votre grade ?
6 R. J'étais général au sein du département juridique, "major-general" en
7 anglais.
8 Q. Pouvez-vous nous rappeler quelle était votre formation ?
9 R. Tout d'abord, j'ai fait mes études à l'école militaire où j'ai eu mon
10 diplôme, puis j'avais fait une école secondaire et des études juridiques à
11 Sarajevo. J'ai passé le barreau et j'ai passé l'examen pour devenir major,
12 et j'ai passé l'entièreté de ma carrière au sein du système juridique
13 militaire. J'ai obtenu un diplôme de master à Belgrade en droit pénal à
14 l'école de droit de Belgrade.
15 Q. Pouvez-vous, s'il vous plaît, ralentir un petit peu lorsque vous donnez
16 vos réponses.
17 Pouvez-vous nous expliquer quels postes vous avez occupés au sein de la JNA
18 et de la VJ au sein de votre carrière ?
19 R. Je suis resté à cette école militaire, j'étais commandant et
20 j'enseignais au sein de l'école. J'ai été commandant de peloton jusqu'en
21 1971. Ensuite j'ai été promu au grade de lieutenant au sein du département
22 juridique, et ensuite j'ai occupé un poste au sein du tribunal militaire de
23 Sarajevo. Après cette formation et après avoir passé le barreau, j'ai été
24 nommé député procureur militaire ou adjoint au procureur militaire à
25 Sarajevo. J'ai passé quatre ans à ce poste. Ensuite j'ai été juge
26 d'instruction au sein du tribunal militaire de Sarajevo pour quatre ans.
27 Ensuite j'ai été adjoint à l'ombudsman militaire pendant cinq ans --
28 L'INTERPRÈTE : L'interprète demande que le témoin répète la fin de sa
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1 réponse.
2 M. POPOVIC : [interprétation]
3 Q. Pourriez-vous répéter la fin de votre réponse --
4 R. Le secrétaire du tribunal disciplinaire militaire et député du
5 procureur public au sein du commandement de la 7e Armée de Sarajevo.
6 Ensuite j'ai été président d'une chambre au sein d'un tribunal militaire à
7 Sarajevo; ensuite, adjoint au procureur militaire à Sarajevo, pendant deux
8 ans. Et pendant encore trois ans, j'étais procureur militaire à Sarajevo;
9 puis, adjoint au procureur général militaire de la JNA, pendant deux ans.
10 Ensuite, président du tribunal militaire à Belgrade, du 1er janvier 1994
11 jusqu'au 16 avril 1999, c'est-à-dire plus de quatre ans. Puis, j'ai été
12 chef du département juridique du QG, du 16 avril 1999, et ensuite, chef du
13 département juridique du ministère de la Défense de la République fédérale
14 de Yougoslavie.
15 Voilà l'ensemble des postes que j'ai occupés au sein de la profession
16 juridique en passant de clerc jusqu'au responsable au sein de ce système.
17 Q. Merci beaucoup. Après votre départ à la retraite en 2001, avez-vous
18 occupé des tâches quelconques ou est-ce que vous avez été impliqué avec la
19 VJ, le QG ou au sein du ministère de la Défense ?
20 R. Oui. Après mon départ à la retraite, il y avait à l'époque besoin de
21 coopération entre le ministère de la Défense et le QG de la VJ avec ce
22 Tribunal. Et il y a eu des requêtes qui ont été formulées concernant
23 l'envoi de documents et des questions de cet ordre. Et pour cela, en
24 coopération avec l'état-major principal, le ministère de la Défense a mis
25 en place une commission qui s'appelait Commission pour la coopération avec
26 le Tribunal de La Haye. Et on m'a demandé d'accepter le poste d'adjoint au
27 président de cette commission, en tant qu'expert, quelqu'un de la
28 profession qui pouvait ainsi faciliter le travail de la commission. Cette
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1 commission a fonctionné pendant trois ans. Par la suite, une autre
2 commission a été mise en place avec d'autres membres.
3 Q. Vous nous avez dit quelles étaient les tâches de cette commission. Si
4 vous vous en souvenez, brièvement, combien y avait-il de membres au sein de
5 cette commission, et pouvez-vous nous donner quelques noms, si vous vous en
6 souvenez ? Brièvement. Si ce n'est pas possible, nous passerons à autre
7 chose.
8 R. D'après ce dont je me souviens, il y avait sept membres permanents au
9 sein de la commission. Le président était un général en exercice, le
10 lieutenant général Terzic, Zlatoje Terzic, qui était à la tête du secteur
11 de l'entraînement militaire. J'étais son adjoint. Puis, il y avait des
12 représentants de chaque secteur du ministère ou de l'état-major principal;
13 autrement dit six ou sept membres. J'étais le seul qui était à la retraite.
14 Il y avait le lieutenant général Geza Farkas qui était également à la
15 retraite. Les autres étaient en exercice, à des grades différents.
16 Q. Merci beaucoup. Nous allons revenir maintenant à l'année 1999. Si je
17 vous ai bien compris, en date du 16 avril 1999, vous avez été nommé chef de
18 l'administration juridique au sein de l'état-major de l'armée de
19 Yougoslavie ?
20 R. Oui. C'est l'administration juridique au sein de l'état-major. Il y a
21 une différence, si vous parlez de ce qui est "au sein de l'état-major" ou
22 "rattaché à l'état-major". Si c'est au sein de l'état-major, ça en fait
23 partie. Si c'est quelque chose de rattaché, c'est un organe indépendant,
24 mais qui a néanmoins un lien avec l'état-major.
25 Q. Combien de temps êtes-vous resté à ce poste ?
26 R. Jusqu'à la mi-2000, puis je suis devenu le responsable de
27 l'administration juridique au sein du ministère de la Défense puisque ces
28 deux administrations avaient fusionné. C'était afin d'atteindre une
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1 meilleure efficacité.
2 Q. Pouvez-vous expliquer un peu plus en avant quel est le rôle et la
3 fonction de l'administration juridique au sein de l'armée de Yougoslavie à
4 l'époque où vous avez occupé ce poste ?
5 R. La tâche principale consistait à être un organe professionnel qui
6 s'occupait de questions juridiques conformément aux besoins de l'état-
7 major; essentiellement, il fallait s'assurer le fonctionnement des
8 tribunaux militaires et des procureurs militaires pendant la guerre.
9 Q. Lorsque vous avez pris vos fonctions en date du 16 avril 1999, quelles
10 étaient les tâches qu'on vous a confiées et quelle était la situation
11 concernant le tribunal militaire et le bureau du procureur militaire ?
12 Quelle était la situation que vous avez trouvée lorsque vous avez pris
13 votre poste ?
14 R. Auparavant, avant de répondre, je voudrais dire qu'étant donné la
15 déclaration de l'état de guerre en date du 24 mars 1999 et conformément au
16 plan, les tribunaux militaires et les procureurs militaires ont été activés
17 en temps de guerre. C'est une fonction qui n'existe pas en temps de paix.
18 En temps de guerre, la structure et l'organisation sont assez différentes.
19 Donc, les mettre en exercice en quelque sorte, c'était la première fois que
20 cela s'était produit depuis la Deuxième Guerre mondiale. Donc, il y avait
21 un manque d'expérience et de connaissance concernant la manière dont ces
22 tribunaux fonctionneraient dans la pratique. Evidemment, il y avait la
23 théorie, mais il y a un écart entre la théorie et la pratique, notamment
24 lorsqu'un pays est en état de guerre. J'étais président du tribunal
25 militaire de la 1ère Armée. Donc, en date du 16 avril, quelques jours avant,
26 nous étions en train d'organiser les tribunaux, de les mettre en place,
27 afin qu'ils puissent fonctionner. Et il s'agissait donc de 23 ou 24
28 nouveaux tribunaux qui se mettaient en place. Il y avait aussi les
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1 procureurs militaires. Les premières difficultés et les premiers écarts
2 entre la théorie et la pratique se sont fait remarquer. Nous en avons pris
3 note, bien sûr. Donc, il fallait quelqu'un qui possédait suffisamment
4 d'expérience et de connaissances dans la profession qui puisse réorganiser
5 tout cela pour que l'environnement soit plus favorable. Mes supérieurs
6 estimaient que puisque j'étais un des rares juristes qui avait occupé
7 l'ensemble des fonctions de procureur, de président de chambres. J'ai
8 travaillé aussi au sein des commandements à l'extérieur des tribunaux, j'ai
9 travaillé dans des tribunaux de hauts niveaux. Donc ils estimaient que
10 j'avais beaucoup d'expérience professionnelle, et c'est pourquoi ils m'ont
11 nommé pour améliorer à la fois l'organisation et le fonctionnement de ces
12 tribunaux. C'est un sujet assez complexe. C'est assez clair ici même, dans
13 tous tribunaux, il y a des besoins de soutien logistique pour que l'on
14 puisse satisfaire à tous les besoins, tous les besoins spécifiques, et
15 parfois, assez considérables.
16 Donc, voyez-vous, c'est pour cela que mes supérieurs m'ont nommé à ce
17 poste.
18 Q. Si je vous ai bien compris, vous nous avez donné une réponse très
19 complète. Je vais essayer de résumer en disant que vous, en tant que
20 professionnel expérimenté, vous avez été nommé pour mettre en place les
21 différents organes juridiques ?
22 R. Oui, les organes juridiques et militaires.
23 Q. Lorsqu'on parle de l'administration judiciaire, quelle est la relation
24 entre l'administration militaire au sein de l'état-major par rapport aux
25 tribunaux militaires et le bureau du Procureur militaire ?
26 R. J'ai mentionné tout à l'heure que l'administration juridique représente
27 un organe professionnel au sein de l'état-major, et les procureurs
28 militaires sont indépendants et autonomes dans leur travail.
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1 L'administration juridique est un lien, si vous voulez, entre l'organe
2 professionnel et l'état-major, qui est responsable de la découverte et
3 d'organiser les procès des auteurs de crimes devant les tribunaux
4 militaires. J'étais, en quelque sorte, le lien qui permettait la
5 communication entre ces organes, puisque à la tête, il y avait un service
6 professionnel de l'état-major, et l'administration juridique se voit
7 confier l'ensemble des tâches qui portent sur l'organisation et la mise en
8 place de tribunaux militaires en temps de guerre au sein des états-majors
9 et des unités. Il s'agit donc d'une unité qui apportait un personnel
10 logistique et un soutien professionnel.
11 Q. Merci. Encore un point sur ce sujet. Je voudrais revenir un instant sur
12 le temps de paix. Comment est-ce que le tribunal militaire était organisé
13 en temps de paix ?
14 R. Les tribunaux militaires sont organisés de manière totalement
15 différente. A l'époque, il y avait trois tribunaux militaires, trois
16 bureaux du Procureur, une première instance, et puis, la cour suprême
17 militaire et le procureur suprême militaire, en deuxième instance. Le
18 tribunal militaire se trouvait à Belgrade, c'est là qu'il y avait son
19 siège, et les autres bureaux du Procureur à un niveau inférieur étaient
20 également à Belgrade. Tous étaient à Belgrade, tous les niveaux. Puis, il y
21 avait un tribunal à un niveau inférieur à Nis et à Podgorica, ainsi que des
22 procureurs qui étaient nommés selon le principe territorial.
23 En temps de guerre, ce n'est pas ce principe territorial qui
24 s'applique, mais sur la base du principe du personnel. C'est-à-dire qu'ils
25 étaient attachés aux commandements d'unités. Ils n'étaient là que pour
26 poursuivre les membres de tel ou tel commandement. C'est pourquoi nous en
27 avions beaucoup plus. Nous en avions 21 en première instance, et il y avait
28 une cour suprême militaire avec quatre divisions. Je peux vous en parler
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1 plus en avant plus tard. Voilà la différence essentielle. Par ailleurs, en
2 temps de paix, les tribunaux de première instance sont compétents pour
3 poursuivre au pénal les auteurs d'actes criminels, conformément à un
4 principe territorial.
5 Q. Merci. Vous avez expliqué quelles étaient les compétences réelles et
6 théoriques de ces tribunaux en temps de paix. Qu'est-ce qui a changé au
7 moment où l'état de guerre a été proclamé ?
8 R. Une fois l'état de guerre proclamé, les circonstances sont devenues
9 beaucoup plus complexes et difficiles. L'organisation des organes
10 juridiques ou judicaires militaires est prévue pour répondre à ces
11 circonstances nouvelles est complexe, à savoir les tribunaux militaires
12 sont rattachés à un commandement d'unités données, de manière à convenir à
13 toutes les unités qui participent à la guerre. Ainsi, des tribunaux ont été
14 établis auprès des commandements d'unités de la 1ère, 2e, et 3e Armées; puis
15 auprès du commandement de la marine de guerre; auprès du commandement des
16 forces aériennes; auprès du commandement des corps militaires; et auprès du
17 commandement d'une division qui constituait une unité indépendante. Voilà
18 ce qui concerne des unités opérationnelles. Puis, les tribunaux avaient été
19 rattachés aux commandements de districts militaires. Finalement, un
20 tribunal militaire suprême a été mis sur pied; il comprenait quatre
21 départements différents. Son siège se trouvait à Belgrade. Les quatre
22 départements avaient leurs sièges auprès des commandements de différentes
23 armées. La même chose valait d'ailleurs pour le procureur militaire, le
24 procureur militaire suprême avait son siège à Belgrade, et les procureurs
25 militaires de première instance étaient rattachés aux commandements de
26 différentes armées. Bon, maintenant, nous pouvons discuter en détail quel
27 était le nombre de corps d'armée, quel était le nombre, et quels étaient
28 les noms des districts militaires, mais toujours est-il que tous les
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1 systèmes de tribunaux militaires ont été adaptés aux circonstances qui
2 prévalaient en temps de guerre.
3 Q. Vous avez parlé un peu de chiffres, vous avez dit qu'en temps de paix,
4 il existait trois tribunaux militaires. Quel était leur nombre en temps de
5 guerre ?
6 R. En temps de guerre, il existait 20 ou 21 tribunaux militaires. Il y en
7 avait 20 de première instance et un tribunal militaire suprême avec son
8 bureau de Procureur qui s'occupait des différentes affaires en deuxième
9 instance.
10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le moment vous semble-t-il bon pour
11 faire une pause, Monsieur Popovic ?
12 M. POPOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aurais une question
13 encore à poser pour en finir avec ce sujet.
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Posez votre question, s'il vous plaît.
15 M. POPOVIC : [interprétation]
16 Q. Mon Général, je souhaite que nous éclaircissions un point. Lorsque vous
17 expliquiez le fonctionnement des tribunaux militaires, vous vous servez du
18 terme "auprès du commandement". Alors, j'aimerais que vous me précisiez ce
19 que cette expression signifie au juste. Cela signifie-t-il que le tribunal
20 donné se trouve sous le commandement du QG auprès duquel il fonctionne, ou
21 cela veut-il dire autre chose ?
22 R. Ces tribunaux sont entièrement indépendants de l'exercice de leurs
23 fonctions. Quand je dis qu'ils se trouvent auprès des QG, ceci veut dire
24 tout simplement que le QG donné a l'obligation d'assurer toutes les
25 conditions nécessaires au fonctionnement de ce tribunal. Le commandement a
26 le devoir de satisfaire à tous les besoins du tribunal donné, à savoir les
27 locaux, l'hébergement, la sécurité, la protection. Donc, c'est uniquement
28 dans ce sens-là que le tribunal est attaché au QG d'une unité militaire.
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1 Tandis qu'en temps de guerre, les tribunaux relèvent directement du
2 ministère de la Défense, et en temps de guerre, les tribunaux dépendent des
3 commandements donnés sur le plan uniquement technique et logistique. Donc,
4 les QG ont l'obligation d'assurer leur hébergement, de résoudre tous les
5 problèmes logistiques et d'assurer les locaux, puisqu'il n'existe aucune
6 autre instance qui serait à même d'assurer toutes ces conditions préalables
7 au fonctionnement des tribunaux. Mais il ne faut pas comprendre que le
8 tribunal fait partie du commandement du QG ou qu'il est soit subordonné au
9 commandement. Tout au contraire, il est indépendant dans son
10 fonctionnement.
11 Q. Merci, Monsieur.
12 M. POPOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je pense que le moment
13 est venu de faire la pause.
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Popovic.
15 Il est nécessaire de faire une pause technique d'une demi-heure pour
16 remplacer les bandes. Nous reprenons la séance à 11 heures 05. Pendant la
17 pause, l'huissier vous aidera.
18 [Le témoin quitte la barre]
19 --- L'audience est suspendue à 10 heures 36.
20 --- L'audience est reprise à 11 heures 08.
21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Popovic, vous avez la parole.
22 M. POPOVIC : [interprétation] Merci.
23 Q. Mon Général, j'aimerais vous poser quelques autres questions portant
24 sur l'indépendance de tribunaux militaires. Vous avez déjà expliqué comment
25 a fonctionné la mise sur pied de tribunaux militaires rattachés au QG une
26 fois l'état de guerre proclamé. Expliquez-moi maintenant quel était le
27 rapport mutuel entretenu entre l'état-major général et les tribunaux
28 militaires ?
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1 R. Il s'agit d'une même relation que celle que nous avons décrite
2 précédemment. Le tribunal militaire suprême et le procureur militaire
3 suprême avaient le même siège que l'état-major général. Mais, autrement
4 dit, les tribunaux fonctionnaient et le procureur fonctionnait
5 indépendamment. Donc, aucun contact direct n'était établi quant à leurs
6 compétences. Le seul contact portait sur des questions logistiques que j'ai
7 abordées tout à l'heure. Donc, dans la prise de leurs décisions, les
8 tribunaux étaient indépendants et autonomes. Leur seule obligation était
9 celle d'appliquer les lois en vigueur conformément à la constitution.
10 Q. Merci. Je souhaite tout simplement confirmer ce que vous venez de dire
11 et de le préciser. Les commandants militaires pouvaient-ils influencer de
12 quelque façon que ce soit le fonctionnement des tribunaux militaires; et au
13 vu de notre expérience, de telles situations se produisaient-elles ?
14 R. Les compétences des commandants militaires sont stipulées par la loi et
15 par les règlements en vigueur, il n'existe pas une seule loi, un seul
16 règlement qui autorise les commandants militaires d'influencer le
17 fonctionnement de tribunaux ou de procureurs militaires. L'obligation qui
18 leur incombe, c'est de porter une plainte au pénal à l'encontre d'individus
19 qui auraient commis des crimes, et à la demande du procureur, ils peuvent
20 également chercher des preuves, des éléments de preuve documentaires. C'est
21 là que leur travail touche à leurs fins. Il n'existe aucune possibilité
22 prévue par la loi pour qu'ils exercent leur influence sur le travail des
23 tribunaux. Ils pouvaient éventuellement exprimer des souhaits ou formuler
24 des requêtes pour accélérer une procédure donnée; mais c'est tout ce qu'ils
25 pouvaient faire.
26 Q. Merci. Votre réponse semble porter davantage sur les textes juridiques
27 en vigueur. Mais en 1999, vous travailliez dans le domaine des tribunaux et
28 de procureurs militaires, avez-vous jamais pu observer qu'un officier
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1 militaire exerce une influence ou déploie des efforts pour exercer une
2 influence sur les tribunaux ou les procureurs militaires ?
3 R. J'ai travaillé pendant plus de 30 ans dans le système judiciaire
4 militaire, et je n'ai jamais pu voir un exemple semblable, ceci vaut
5 également pour la période pendant la guerre. Un seul cas de figure que j'ai
6 pu relever s'est produit dans le tribunal militaire de Sarajevo. Une
7 plainte au pénal avait été portée contre un certain nombre de recrues qui
8 n'avaient pas répondu à l'appel de mobilisation, et pour le prévenir, il
9 avait ordonné qu'il fallait prendre des mesures adéquates dès que possible.
10 Dans la lettre qu'il avait rédigée et qu'il a envoyée au tribunal
11 militaire, il indiquait que cette question devait être résolue dès que
12 possible. Puis, le président de la cour suprême militaire a déclaré que de
13 tels actes devaient être prévenus, et la chose a été faite. Mais c'est un
14 exemple que je cite à titre d'illustration. C'est un exemple pratiquement
15 caricatural, mais c'est le seul cas de figure que je puisse relever dans ma
16 carrière qui a duré pendant plus de 30 ans.
17 Q. Dans un des documents qui sera affiché par la suite, je pense que cette
18 affaire est mentionnée --
19 R. Oui, cette affaire est relevée dans l'analyse générale qui a été
20 élaborée pour voir comment fonctionnaient les tribunaux militaires pendant
21 la guerre.
22 Q. Merci. J'aimerais maintenant vous poser la question suivante : en tant
23 que chef de l'administration juridique au sein de l'état-major général de
24 la VJ, avez-vous essayé d'exercer une influence quelconque sur les
25 tribunaux ou les procureurs militaires pendant la guerre ?
26 R. Non, jamais je n'ai exercé aucune influence sur eux. Ma tâche
27 consistait à assurer les conditions préalables pour qu'ils puissent exercer
28 leurs fonctions sans subir d'entraves. J'étais leur collègue, il me
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1 revenait de leur apporter mon concours et de leur offrir mon soutien, et
2 non pas d'exercer une influence sur eux. Et c'est la raison pour laquelle
3 je ne l'ai jamais fait. Les juges et les procureurs militaires doivent
4 bénéficier de leur libre arbitre. C'est d'ailleurs ce qui représente la
5 difficulté de leurs tâches. Et cela vaut pour tous les procureurs et pour
6 tous les juges, en général.
7 Q. Merci. Revenons sur le mois d'avril en 1999. Vous avez pris vos
8 nouvelles fonctions. Avez-vous repéré l'existence d'un certain nombre de
9 problèmes et, si oui, quels sont les problèmes auxquels vous avez dû faire
10 face au moment où vous avez commencé à exercer les fonctions du chef de
11 l'administration juridique au sein de l'état-major général de l'armée
12 yougoslave ?
13 R. Mon expérience me disait que la première chose à faire, quand on assume
14 une nouvelle fonction dans un environnement nouveau, c'était d'abord de
15 scruter la situation qui prévalait dans l'institution donnée. J'avais une
16 longue expérience professionnelle, je savais quelles étaient les
17 obligations et les compétences de chaque procureur et de chaque tribunal en
18 particulier. Je me suis aperçu rapidement d'un certain nombre de
19 manquements. C'est l'organisation surtout qui laissait à désirer. Puis, des
20 choses pouvaient être améliorées sur le plan professionnel. Alors, quand je
21 parle de l'"organisation", il existait effectivement un schéma
22 organisationnel, mais la question se posait de savoir comment créer des
23 conditions préalables au fonctionnement des tribunaux. Et c'est la personne
24 qui savait avec précision ce que faisait les tribunaux dans les différentes
25 étapes de leur travail qui pouvait régler cette question.
26 D'autre part, sur le plan professionnel, j'ai remarqué un certain
27 écart entre la théorie et la pratique. En vertu de la loi, pour exercer un
28 rôle, pour exercer les fonctions d'un juge militaire, il fallait remplir un
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1 certain nombre de conditions. Il fallait avoir fait des études de droit, il
2 fallait avoir travaillé au sein d'un tribunal, et il fallait avoir le grade
3 d'officier. Donc, lorsqu'un juge militaire était nommé en temps de guerre,
4 il fallait que ces conditions soient réunies. Mais ce qui n'était pas pris
5 en compte, c'est l'expérience qu'une personne pouvait avoir dans le travail
6 avec les tribunaux. Donc, il arrivait parfois que nous avions un juriste
7 qui avait passé le barreau et qui avait été nommé juge, alors qu'il
8 s'agissait d'une personne qui avait été directeur dans une entreprise et
9 n'a jamais rien eu à voir avec des tribunaux. Il est clair qu'une telle
10 personne ne pouvait pas s'acquitter de ses fonctions parfaitement. Il est
11 impossible d'apprendre son métier pendant la guerre.
12 Donc, tout ce schéma avait été préparé au préalable, avant que la
13 guerre n'éclate, et ces critères importants n'étaient pas pris en compte.
14 Donc, c'est quelque chose que j'ai pris sur moi de revoir. J'ai demandé que
15 des juges qui avaient déjà travaillé dans le civil soient nommés aux postes
16 de juges militaires. Il s'agissait des personnes qui avaient une longue
17 expérience dans les questions juridiques. Et pour régler le problème, pour
18 trouver une solution au fait qu'ils n'avaient pas de grade militaire, je
19 proposais qu'il soit promu sur-le-champ. C'est ainsi que nous avons pu
20 nommer aux postes de juge des professionnels qui avaient l'expérience
21 requise et qui étaient à même de s'acquitter de leurs fonctions comme il le
22 fallait. Ceci est indispensable, d'autant plus que les conditions de
23 travail étaient effectivement très difficiles.
24 Puis, il y avait toute une série de questions techniques qui se posaient,
25 au niveau des sténotypistes, au niveau de la logistique, au niveau du
26 matériel technique. Toute une série de questions était à régler, tout
27 simplement parce que les organes qui avaient la compétence pour régler ces
28 questions n'avaient pas l'expérience requise pour le faire. J'ai donc pris
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1 sur moi de régler tous ces problèmes. Et je dois dire que l'état-major
2 général ainsi que tous les commandements à un échelon plus bas ont montré
3 un grand degré de compréhension à mon égard. Tout le monde m'a assisté dans
4 mes efforts. Nous avons donc pu obtenir des sténotypistes très capables,
5 sur le plan physique et intellectuel et professionnel, afin de mener nos
6 travaux à bien.
7 Q. Au vu de ce que vous venez de nous dire, je constate que de façon
8 générale, il est difficile de parler de l'efficacité, de la rapidité dans
9 le travail en temps de guerre; or la rapidité du fonctionnement est d'une
10 importance essentielle dans le travail d'un tribunal militaire. Donc, avez-
11 vous pu régler tous les problèmes auxquels vous avez dû faire face avec une
12 efficacité et une rapidité satisfaisantes ?
13 R. Une fois que je me suis aperçu de tous ces problèmes et de toutes ces
14 difficultés, pendant quelques jours j'ai pris contact directement avec les
15 juges des tribunaux militaires, avec les procureurs militaires, avec le
16 personnel qui se trouvait sur le terrain, j'ai fait le tour des locaux sur
17 le terrain, et j'ai immédiatement lancé des propositions pour trouver des
18 solutions. Donc, dès que je m'apercevais d'un problème, je lançais une
19 proposition le lendemain. C'est au cours de la nuit que nous élaborions des
20 solutions à prévoir. Donc le problème était présenté à tout le monde à 19
21 heures, et dès le lendemain, une solution était trouvée. Par le truchement
22 du ministère de la Justice, j'ai pu contacter le personnel qui se trouvait
23 sur le terrain, et j'ai immédiatement entrepris toutes les mesures
24 nécessaires pour promouvoir les personnes qu'il fallait nommer à un poste
25 de juge militaire. La même chose, la même procédure a été appliquée pour ce
26 qui est de toutes les difficultés. Par exemple, les tribunaux militaires ne
27 disposaient pas de personnel de sécurité, et c'est quelque chose que nous
28 avons assuré. Vous savez, surtout en temps de guerre, il est nécessaire
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1 d'assurer la sécurité aux tribunaux. La même chose allait pour les prisons
2 militaires où des individus étaient placés en détention.
3 Donc c'est ainsi que nous réglions les problèmes. J'avançais des
4 propositions à l'adresse de l'état-major général sous un délai de 24
5 heures, après avoir relevé un problème. Quant aux tribunaux et aux
6 procureurs, ils passaient quatre à cinq heures par jour à dormir; tout le
7 reste du temps, ils se dévouaient à leurs travaux.
8 Q. Merci de cette réponse exhaustive. Pour conclure, dites-nous
9 brièvement, estimez-vous que l'état-major général vous a fourni toute
10 l'assistance qu'il a pu au moment donné ?
11 R. Oui, absolument.
12 Q. Merci. Nous avons déjà abordé le sujet de l'indépendance des tribunaux.
13 Pour ce qui vous concerne, avez-vous exercé vos fonctions indépendamment ?
14 Avez-vous adopté vos décisions indépendamment ? Avez-vous soumis vos
15 rapports concernant le fonctionnement des tribunaux et des procureurs
16 militaires indépendamment et sans subir d'entraves ?
17 R. Tout ce qui relevait de mes compétences, c'est moi qui le faisais,
18 c'est moi qui adoptais toutes les décisions nécessaires, sans que personne
19 d'autre ne s'y mêle. Pour ce qui est des décisions qui devaient être prises
20 par l'état-major général, mes propositions étaient acceptées sans réserve
21 aucune. Evidemment, moi, je m'efforçais de fournir des propositions qui
22 seraient justes, efficaces, adéquates. J'avais suffisamment de compétence
23 professionnelle et d'expérience professionnelle pour ne pas avancer de
24 proposition difficile à réaliser. Chaque officier supérieur s'en apercevait
25 facilement, et c'est pourquoi ils faisaient de leur mieux pour apporter
26 leur concours à la réalisation de mes projets, dès que possible.
27 Q. Général, pendant que vous exerciez les fonctions du chef du service
28 juridique, estimez-vous que les tribunaux militaires, les procureurs
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1 militaires, et de façon générale, le système judiciaire militaire,
2 fonctionnaient conformément à leurs compétences prévues par la loi ?
3 R. Au vu des circonstances qui prévalaient à l'époque, le système
4 judiciaire militaire a vraiment effectué son travail d'une manière tout à
5 fait satisfaisante. Malgré toutes les difficultés objectives, tout ce qui a
6 pu être fait a été fait, tout ce qui relevait de leur responsabilité a été
7 fait par les autorités compétentes. Donc, je pense que ces organes méritent
8 une note très élevée pour le travail effectué.
9 Q. Merci. J'aimerais que nous nous penchions sur des questions un peu plus
10 concrètes désormais, questions qui nous intéressent tous, dans cette salle
11 d'audience, et plus précisément, j'aimerais savoir de quelle manière le
12 système juridique serbe et yougoslave traitait des actes criminels commis à
13 l'encontre de la population civile et quelle était l'attitude affichée vis-
14 à-vis des conventions et des règlements internationaux. Je pense notamment
15 à la loi internationale portant sur la guerre. Donc, je vous pose cette
16 question pour savoir ce que les lois et les règlements de la Serbie et de
17 la République fédérale de Yougoslavie prévoyaient dans ces cas de figure.
18 R. Tout état doit avoir un système judiciaire ordonné. La République
19 fédérale de Yougoslavie qui était un état neuf, qui s'est créé à la suite
20 de l'ancien état, RSFY, donc s'est mis en place et s'est vu obligé de
21 respecter le droit international humanitaire. Cette question est traitée
22 dans la constitution. Je crois que c'est l'article 16 de la constitution de
23 la République fédérale de Yougoslavie qui indique que tous les accords
24 internationaux qui sont ratifiés et publiés conformément à la constitution,
25 ainsi que l'ensemble des lois et règlements internationaux font partie
26 intégrante du droit interne du pays. C'est une disposition de la
27 constitution, un article de la constitution qui porte sur ce sujet qui est
28 également couvert par la convention de Genève, et c'est un des préceptes de
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1 l'ordre juridique de la République fédérale de Yougoslavie. Autrement dit,
2 le code pénal consacre la section 16 à cette question qui prévoit la
3 punition de ces crimes qui sont définis dans le droit humanitaire
4 international, y compris le génocide, les crimes de guerre à l'encontre de
5 civils, à l'encontre de prisonniers de guerre, de blessés, et cetera. Tous
6 ces crimes sont prévus et les peines sont définies. Je crois que c'est à
7 l'article 19 dans le droit de la défense qui indique, les membres de
8 l'armée de la Yougoslavie qui participent au combat doivent, ont le devoir
9 de respecter le droit international de la guerre, ainsi que d'autres lois
10 et conventions concernant les prisonniers, les blessés et la protection des
11 populations civiles. Donc, sur la base de l'ensemble de ces textes
12 juridiques qui portent sur ce sujet, on y ajoute quelques instructions à
13 l'intention des membres de l'armée, y compris le soldat de base jusqu'au
14 plus haut commandement, et ces textes, ces règlements expliquent comment
15 chaque individu qui participe au combat doit se comporter, et le fait
16 qu'ils doivent respecter ces normes internationales. Et dans le cas
17 contraire, ils subissent la peine prévue par la loi. C'est exactement pour
18 cela que le tribunal militaire a été créé au niveau de chaque unité. Ceci a
19 été mis en pratique et tient compte de tous les aspects, que ce soit
20 l'organisation ou les normes en vigueur, les aspects opérationnels. Tout
21 ceci permettait le bon fonctionnement et le respect du droit international.
22 Q. Merci. Nous avons entendu parler du cadre législatif qui a été mis en
23 place pour la mise en œuvre du droit international, le droit humanitaire
24 international. Pouvez-vous nous dire si au cours de votre travail, si vous
25 avez été impliqué dans des enquêtes vis-à-vis d'officiers militaires
26 concernant la commission de certains crimes et la présentation
27 d'informations sur ces questions ?
28 R. Je voudrais souligner un aspect du point de vue du cadre législatif de
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1 ce qui était en vigueur au niveau de l'état-major, un résumé du droit
2 humanitaire international a été élaboré concernant les dispositifs et les
3 règles de la guerre à l'intention de chaque membre de la VJ aux différents
4 niveaux, que ce soit les combattants, les officiers, à tous les niveaux; et
5 ce texte leur expliquait comment ils devaient se conduire. Nous avions
6 également des collèges de guerre qui organisaient des formations sur ces
7 questions ainsi qu'au niveau des commandements et des unités. Donc, en
8 fait, votre question suggère la chose suivante : à part les règlements et
9 les instructions, les aide-mémoire, les brochures qui étaient aux
10 commandements des unités, j'ai produit moi-même un pense-bête qui
11 comprenait l'ensemble de la procédure judiciaire dans sa pratique, en
12 commençant par l'obligation d'un officier militaire, s'il a connaissance
13 d'un acte criminel qui aurait été perpétré par ses subordonnés, jusqu'au
14 fonctionnement du tribunal militaire. J'ai résumé l'ensemble des
15 obligations des officiers; de l'enquête et de la détection des actes, y
16 compris les agissements de la police militaire; qui doit recevoir les
17 rapports; que fait le procureur militaire, par exemple, que fait le
18 tribunal militaire, puis la procédure elle-même jusqu'à l'appel. Tout cela
19 était contenu dans une brochure qui pouvait être utilisée par les
20 intéressés, et cela comprenait la manière de traiter l'auteur présumé de
21 tel ou tel acte pénal, la manière de collecter les éléments de preuve, la
22 procédure, comment traiter un détenu, et cetera. Tout un chacun devait
23 avoir cette brochure par-devers lui de manière à ne pas se poser des
24 questions de savoir ce qu'il devait ou ne devait pas faire. C'est pour cela
25 que j'ai élaboré cette brochure comprenant un résumé de l'ensemble du
26 système procédural.
27 Q. Merci. Mon Général, j'aimerais maintenant examiner quelques documents,
28 pour ce faire je vais vous remettre un classeur.
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1 M. POPOVIC : [interprétation] Je demander pour ce faire l'aide de
2 l'huissière. C'est ainsi que nous fonctionnons, en général. Nous vous
3 donnons un classeur avec les documents, et ensuite il n'y a aucune
4 annotation, si ce n'est que chaque document est séparé par des
5 intercalaires.
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.
7 M. POPOVIC : [interprétation]
8 Q. Mon Général, à chaque fois je vais vous indiquer quel est le document
9 qui s'affichera sur le prétoire électronique, je vous donnerai le numéro de
10 l'intercalaire qui vous permet de trouver le document. J'aimerais demander
11 la pièce D011-0912. C'est l'intercalaire numéro 2 dans votre classeur.
12 C'est un document intitulé : "Règlements concernant l'application du droit
13 international de la guerre par les forces armées de la RSFY."
14 Mon Général, tout d'abord, est-ce que vous connaissez ce document ?
15 R. Oui, oui, je le connais.
16 Q. Avant de vous poser des questions sur son contenu, j'aimerais regarder
17 tout en bas de la page. On voit, et dans la version serbe et dans la
18 version anglaise, si l'on descend tout en bas, on voit l'année 1988. Ce
19 texte du règlement du droit international de la guerre dans les forces
20 armées de la RSFY était en vigueur en 1999, n'est-ce pas ?
21 R. Oui, en effet.
22 Q. Pouvez-vous nous dire davantage de ce document. C'est un document très
23 volumineux. Nous n'allons pas l'examiner en détail. Que pouvez-vous nous
24 dire brièvement de ce document ?
25 R. C'est un gros volume qui contient l'essentiel du droit humanitaire
26 international et du droit de la guerre ainsi que les droits et coutumes de
27 la guerre qui relèvent des conventions et traités internationaux, c'est
28 détaillé tout en étant extrêmement convivial. Ce texte comprend des
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1 instructions élaborées par le secrétariat fédéral pour la Défense nationale
2 suite à un ordre qui a été publié par le président de la RSFY. C'est ainsi
3 que ce texte a été élaboré conformément à cet ordre. Cette version a été
4 adaptée au droit interne. C'est un texte qui existait auparavant. Cela
5 s'appliquait toujours, mais il y avait quelques articles différents qui
6 avaient changé. On y trouve le contenu de la convention de Genève et du
7 droit humanitaire international, cet aspect n'avait pas changé puisqu'il
8 n'y avait pas eu l'adoption de nouvelles conventions qui venaient modifier
9 les conventions précédentes. Donc le texte était en vigueur, et ce volume a
10 été utilisé dans les stages de formation et dans les collèges de guerre et
11 les écoles militaires, et c'est un texte qui était en vigueur au sein de la
12 VJ, et ce texte faisait partie également du droit interne de la République
13 socialiste de Yougoslavie, ainsi qu'aujourd'hui en Yougoslavie et en
14 Serbie.
15 Q. Merci.
16 M. POPOVIC : [interprétation] Je souhaite verser ce document au dossier.
17 M. LE JUGE PARKER : [aucune interprétation]
18 Mme GOPALAN : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que cette
19 pièce existe déjà, et je crois que c'est la pièce P1342, document de
20 l'Accusation. On peut peut-être vérifier afin d'éviter de l'avoir deux fois
21 dans le dossier.
22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci beaucoup.
23 Nous allons laisser cela de côté, Maître Popovic, afin de voir si c'est en
24 effet le cas. Vous pouvez peut-être regarder cela à la prochaine pause.
25 M. POPOVIC : [interprétation] En effet, Monsieur le Président. Je vous
26 remercie. Je remercie ma chère consoeur. Nous allons vérifier quelles sont
27 les pièces déjà versées au dossier. Merci.
28 Passons maintenant à la pièce D011-1132.
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1 Q. C'est l'intercalaire numéro 3.
2 M. POPOVIC : [interprétation] Merci.
3 Q. A l'écran vous pouvez voir ce document qui s'intitule : "Règles de
4 conduite pour les soldats." Pouvez-vous nous dire si vous connaissez ce
5 document, tout d'abord, et ensuite, ce que vous pourrez nous en dire
6 brièvement, c'est-à-dire ce qu'il représente, à qui il est destiné, et
7 comment il était utilisé.
8 R. Je connais ce document. L'état-major du commandement suprême l'a
9 élaboré, et ce texte comporte les règles les plus importantes en matière de
10 combattants. Le terme "combattant" est utilisé en droit international.
11 C'est un texte qui a été remis à chaque soldat, il comprend un résumé des
12 devoirs du soldat et des règles de conduite au cours du combat. Les règles
13 de combat : on ne se bat que contre les soldats, on attaque que des cibles
14 militaires, comment on traitait les civils, et cetera. Tout cela découle
15 des règles de conduite.
16 Puis, vous avez le traitement des soldats ennemis, quels traitements
17 leur réserver, les traitements des prisonniers de guerre et le traitement
18 des civils, conformément au droit humanitaire international. On y voit
19 quatre pages à l'écran. C'est un petit volume de poche, imprimé sur des
20 feuillets plastifiés, c'est-à-dire qu'il résistait à l'eau et à l'humidité,
21 et chaque soldat recevait un exemplaire dès leur conscription. Ça faisait
22 partie de leur kit d'arrivée, avec le casque, le fusil, et une trousse de
23 premiers soins, et ce règlement qui faisaient partie du matériel donné à
24 chaque soldat. Tous les soldats connaissaient ce document et ils en avaient
25 un exemplaire dans la poche, conformément à ce qui a été présenté dans le
26 document précédent, ainsi que conformément au cadre législatif dont nous
27 avons déjà parlé.
28 Q. Est-ce que c'est en fait un abrégé du comportement du bon soldat ?
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1 R. Oui. Un résumé des règles de conduite pendant le combat, et chaque
2 soldat pouvait lire le texte et se conduire conformément à ce texte.
3 Q. Merci.
4 M. POPOVIC : [interprétation] Je voudrais verser ce document au dossier.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] J'ai l'impression qu'il s'agit d'une
6 version datant de 2005, Maître Popovic. Y a-t-il eu des changements entre
7 la période qui nous concerne, c'est-à-dire 1999 et 2005 ?
8 M. POPOVIC : [interprétation] Je peux poser la question au témoin.
9 Q. Mon Général, pouvez-vous nous dire si en 1999 ce document intitulé "Les
10 règles de conduite pour les soldats", est-ce que le contenu était le même à
11 l'époque ?
12 R. Oui, c'était un texte identique. Ça été élaboré pour les soldats à
13 l'époque, ce n'est pas nouveau. Ça été toujours fait de la sorte, et le
14 seul changement était de l'ordre de la technologie d'impression, où on l'a
15 fait imprimé sur papier plastifié, et chaque soldat avait un exemplaire
16 dans sa trousse ou dans sa poche. C'était donné dès la conscription, dès
17 que les soldats étaient convoqués en 1999.
18 Q. Merci beaucoup.
19 M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais demander le versement de cette
20 pièce au dossier.
21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] En effet, nous le recevons.
22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, c'est la pièce
23 D00497.
24 M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais maintenant appeler la pièce D011-
25 1137.
26 Q. C'est l'intercalaire numéro 4, Mon Général. En Serbe, c'est le D011-
27 1145, et puis la version anglaise -- oui, ça y est, elle est arrivée. C'est
28 donc, en B/C/S, D011-1145. Merci beaucoup.
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1 Mon Général, vous voyez ici un document intitulé : "Manuel pour les membres
2 de la VJ engagés dans les zones affectées par le sabotage et des activités
3 terroristes".
4 Tout d'abord, connaissez-vous ce document ?
5 R. Oui, je le connais.
6 Q. Merci. Pouvez-vous me dire quelle est la nature de ce document et
7 pourquoi il a été préparé, produit ?
8 R. Ce manuel, ce document est une version élargie du document précédent,
9 quelque peu modifié. Il a été utilisé en 1998 et remis aux soldats,
10 puisqu'à l'époque dans la zone du Kosovo-Metohija, le conflit armé s'était
11 éclaté avant qu'il n'y ait sabotage et activités terroristes. C'est en fait
12 le terme juridique pour ces activités. Il y avait également des unités,
13 formations paramilitaires illégales qui s'engageaient dans des activités
14 terroristes. C'était un phénomène qui s'étendait et, en raison de cela,
15 l'état-major a publié un manuel pour les soldats sur ce thème. Nous avions
16 à l'époque des unités de l'armée régulière, des soldats qui faisaient leur
17 service national sans réservistes, sans conscrits. Et il s'agit donc d'un
18 volume, d'un texte qui donne une vue d'ensemble de la manière dont il faut
19 se comporter, puisque les méthodes de travail des groupes de sabotage et
20 des groupes terroristes qui se trouvaient dispersés à travers le territoire
21 organisaient des embuscades, et c'était beaucoup plus complexe, la
22 situation était plus complexe que dans laquelle ces jeunes soldats se sont
23 trouvés, donc, nous leur avons donné quelques instructions, quelques règles
24 de conduite. Vous voyez que plutôt que de parler de prisonniers de guerre,
25 nous parlons de personnes arrêtées, puisque cela découle de la définition
26 d'insurgence [phon] armée. Mais nous souhaitions qu'ils soient traités
27 conformément au cadre juridique applicable aux combattants, aux combattants
28 qui sont engagés dans un conflit armé interne. C'est pourquoi nous avons
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1 utilisé ces vocables dans la zone de Kosovo-Metohija. D'ailleurs, nous
2 avions modifié cela en raison des besoins de l'époque. Vous savez, nous
3 n'avions pas proclamé un état de guerre, nous avions déclaré un état
4 d'urgence, et ce texte, ces instructions étaient nécessaires pour les
5 soldats impliqués dans des activités vis-à-vis des groupes d'insurgents
6 [phon], et voilà donc l'objectif de ce manuel élaboré pour les membres de
7 la VJ à l'époque.
8 Q. Lorsque l'on parle de la période, pourriez-vous être un peu plus
9 précis. On constate que le document porte la date de juillet 1998; est-ce
10 que c'est correct ? Est-ce que cela s'applique encore à la période 1999
11 également ?
12 R. Le texte s'applique en 1998 jusqu'à la déclaration de l'état de guerre
13 le 24 mars 1999. Une fois que l'état de guerre a été déclaré, la deuxième
14 partie prend effet, et ceux qui l'avaient déjà l'ont gardée. En fait, ces
15 documents se complètent; ils ne s'excluent pas mutuellement.
16 Q. Merci beaucoup.
17 M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais demander le versement de ce
18 document au dossier, s'il vous plaît.
19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.
20 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit de la
21 pièce D00498.
22 M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais maintenant la pièce D011-1155.
23 Q. C'est derrière l'intercalaire numéro 5, Mon Général. Il s'agit d'une
24 pièce que nous n'avons pas en langue anglaise, uniquement en serbe pour le
25 moment. La traduction est en cours d'élaboration. Je ne vais pas y passer
26 beaucoup de temps.
27 M. POPOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit d'un résumé
28 de la convention de Genève en date du 12 août 1949 ainsi que le protocole
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1 additionnel. Je vais tout simplement parcourir rapidement le document.
2 Q. Mon Général, connaissez-vous ce document, et brièvement pourriez-vous
3 nous dire quel est son contenu même si son titre est relativement clair,
4 pouvez-vous nous dire à qui est destiné ce document ?
5 R. Oui, je connais ce document. C'est un document qui se trouvait dans
6 tous les commandements et toutes les unités depuis la mise en place de la
7 JNA. C'est un texte qui a été remis au goût du jour en collaboration avec
8 le Comité international de la Croix-Rouge au cours d'un séminaire organisé
9 sur le protocole en 1996 ou 1997. C'est à ce moment-là que le résumé a été
10 rédigé. C'est un texte qui existait auparavant et avait été distribué
11 auprès de tous les commandements d'unités, dans les bibliothèques ainsi que
12 dans l'équipement de l'unité. Il s'agit de la convention de Genève de 1949
13 en date du 12 août 1949, ainsi que les protocoles additionnels. C'est
14 quelque chose que la République socialiste de Yougoslavie à l'époque avait
15 déjà, et l'armée de Yougoslavie de l'époque l'avait également. L'ensemble
16 des parties connaissait l'existence de cette convention. Ces conventions
17 sont devenues particulièrement importantes une fois proclamé l'état de
18 guerre.
19 Q. Merci.
20 M. POPOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je demande que ce
21 document soit enregistré aux fins d'identification, et nous remettrons la
22 traduction dès que possible.
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le document est admis, et vous pouvez
24 rajouter la traduction à cette pièce une fois terminée.
25 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, ce sera la pièce
26 D00499.
27 M. POPOVIC : [interprétation] Merci.
28 Je souhaite que l'on affiche le document D011-1170, s'il vous plaît.
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1 Q. Ce document se trouve à l'intercalaire 6 dans votre classeur, Général.
2 La page que je souhaite afficher en version B/C/S est D011-1184, qui
3 correspond en version anglaise à la page D011-1186. Merci. Général, le
4 document que nous voyons ici porte le titre "Les bases du droit de guerre",
5 résumé destiné aux officiers supérieurs, règlements sur le comportement à
6 adopter dans le combat. Pouvez-vous nous dire si vous connaissez ce
7 document, quel est ce document, et à qui il est destiné ?
8 R. Oui, j'ai déjà pu prendre connaissance de ce document. Il existe depuis
9 longtemps en plusieurs versions différentes. Ce que nous avons ici c'est
10 une version mise à jour en coopération avec le Comité international de la
11 Croix-Rouge, suite à une série de formations qui ont été données sur le
12 sujet. Ce que nous avons ici est un résumé destiné aux officiers supérieurs
13 concernant le comportement à adopter dans le combat. Avant, nous avons vu
14 le document qui se rapportait aux soldats et aux commandants d'unités, et
15 ce document-ci se rapporte aux officiers supérieurs. Chaque officier
16 supérieur devait posséder un exemplaire de ce document dans son matériel de
17 guerre. Vous n'êtes pas sans savoir que chaque combattant dispose d'un
18 complet de guerre, d'un équipement, et d'une série de documents qu'il doit
19 avoir à sa disposition. Il ne s'agissait pas seulement pour cet officier de
20 se rafraîchir la mémoire en consultant ce document, mais aussi de le
21 rappeler aux soldats pendant les formations organisées pendant la guerre.
22 Il s'agissait pour lui de rappeler constamment aux soldats qui assurent
23 leurs obligations, de s'assurer que les soldats connaissent en profondeur
24 tous ces règlements et toutes ces instructions.
25 Alors, le résumé que nous avons ici est un peu plus détaillé que celui qui
26 est destiné aux soldats. Mais il s'agit tout de même d'un petit livret,
27 d'une édition de poche, si bien que l'officier pouvait l'avoir sur lui tout
28 le temps plutôt que de le laisser au poste de commandement.
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1 Q. Merci.
2 R. Donc il n'y a rien de neuf dans ce texte. Ce type de texte avait déjà
3 été préparé par le passé pour tous les officiers supérieurs de la JNA. Tout
4 simplement il s'agit d'une édition mise à jour.
5 M. POPOVIC : [interprétation] Merci. Je demande le versement au dossier de
6 ce document.
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, il s'agit de la
9 pièce D00500.
10 M. POPOVIC : [interprétation] Merci.
11 Q. Peut-on afficher à présent le document D011-1202, qui correspond au
12 document à l'intercalaire 8 dans votre classeur, Monsieur. Vous pouvez le
13 constater, il s'agit du journal officiel de la République fédérale de
14 Yougoslavie du 13 février 1998. Il s'agit d'un décret portant sur
15 l'organisation et le travail du procureur militaire une fois proclamé
16 l'état de guerre. Deux questions à vous poser : d'abord, avez-vous déjà
17 pris connaissance de ce décret; et deuxièmement, ce décret était-il en
18 vigueur au cours de l'année 1999 après la proclamation de l'état de guerre
19 ?
20 R. Oui. J'ai déjà pris connaissance de ce décret. Le décret a été adopté
21 par le gouvernement fédéral. Il stipule quels seront l'organisation et le
22 fonctionnement du procureur militaire pendant la guerre. C'est en
23 s'appuyant sur ce décret que le bureau du procureur a été réorganisé; nous
24 en avons déjà parlé au début de la déposition. Le décret lui-même est basé
25 sur la Loi portant sur les procureurs militaires. Donc cette loi, dans ce
26 décret, a été adoptée aux conditions qui prévalaient en temps de guerre. Il
27 s'agissait, tout simplement, d'adopter la loi pour qu'elle puisse être
28 appliquée en temps de guerre. Et c'est effectivement ce qui a été fait. Ce
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1 décret a été appliqué pendant l'état de guerre en 1999.
2 M. POPOVIC : [interprétation] Je souhaite que l'on affiche la page
3 suivante, en version B/C/S. C'est la page D011-1204 en version B/C/S qui
4 correspond à la page D011-1208 en version anglaise.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Souhaitez-vous verser ce décret au
6 dossier ?
7 M. POPOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, il s'agit du même
8 document. Donc je souhaite que nous nous penchions sur un autre chapitre de
9 ce même document; puis, je demanderai son versement au dossier, parce qu'en
10 effet, il s'agit d'un seul document, d'une seule édition du journal
11 officiel. Et cette édition du journal officiel contient deux documents
12 distincts : le décret portant sur le tribunal militaire, puis le règlement
13 des tribunaux militaires en état de guerre. Donc mon idée, c'était de
14 demander le versement de ce document en entier, mais évidemment, je vais me
15 conformer à votre point de vue.
16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous pouvez poursuivre comme bon il
17 vous semble.
18 M. POPOVIC : [interprétation] Très bien.
19 Q. Monsieur, ce que nous avons ici, c'est le règlement portant sur le
20 travail des tribunaux militaires une fois proclamé l'état de guerre. J'ai
21 deux questions à vous poser concernant ce règlement. Première question :
22 avez-vous déjà pris connaissance de ce règlement; deuxième question, ce
23 règlement était-il en vigueur pendant l'année 1999 ?
24 R. J'ai déjà pris connaissance de ce règlement portant sur le travail de
25 tribunaux militaires pendant l'état de guerre. C'est à partir de ce
26 règlement que la réorganisation des tribunaux militaires a eu lieu une fois
27 proclamé l'état de guerre. Donc, ce règlement a représenté le document de
28 base pour mettre sur pied, organiser, et assurer le fonctionnement des
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1 tribunaux militaires après la proclamation de l'état de guerre ou, plus
2 précisément, depuis le jour où l'état de guerre a été proclamé jusqu'au
3 jour où il a été aboli. Et par ailleurs, ce règlement prévoit comment les
4 choses doivent se dérouler une fois abolis les tribunaux militaires.
5 Q. Merci.
6 M. POPOVIC : [interprétation] Je souhaite demander le versement au dossier
7 de ce document, s'il vous plaît.
8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le document est admis.
9 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, ce sera la pièce
10 D00501.
11 M. POPOVIC : [interprétation] Peut-on afficher le document D011-1219, s'il
12 vous plaît.
13 Q. Le document se trouve à l'intercalaire 10 dans votre classeur, Général.
14 Merci. Le document que nous avons sous nos yeux est le journal officiel de
15 la République fédérale de Yougoslavie du 4 avril 1999. En bas de la page 1,
16 en version B/C/S, vous pouvez voir un décret concernant l'application de la
17 Loi portant sur la procédure pénale pendant l'état de guerre. Général, la
18 question que je souhaite vous poser est la suivante : d'abord, avez-vous
19 déjà pris connaissance de ce décret et, si oui, pour quelle raison ce
20 décret a-t-il été adopté ? Plus précisément, quelles sont les modifications
21 apportées par rapport à la Loi portant sur la procédure pénale en temps de
22 paix ?
23 R. J'ai déjà pris connaissance de ce décret concernant l'application de la
24 Loi portant sur la procédure pénale en temps de guerre. Je signale qu'il
25 s'agit d'un décret qui représente un équivalent de la loi. Ce décret permet
26 de modifier légèrement la procédure pénale pour assurer une meilleure
27 efficacité des tribunaux. Le décret s'appliquait à tous les tribunaux, y
28 compris les tribunaux militaires. L'essentiel de ces modifications consiste
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1 à réduire les délais fixés pour la durée du procès en vue d'améliorer
2 l'efficacité. Donc, tous les délais qui pouvaient être réduits ont été
3 réduits. Ça, c'est une des modifications essentielles. Puis, une nouveauté
4 a été introduite dans la procédure pénale, conformément à la loi portant
5 sur la procédure pénale. C'est le juge d'instruction qui s'occupe de
6 l'enquête, tandis que selon les termes de ce décret, le procureur peut, lui
7 aussi, diligenter une enquête, comme ceci est une pratique courante dans
8 d'autres pays, et par ce décret, nous venons d'introduire cette possibilité
9 dans notre système législatif et judiciaire. Et puis, quelques autres
10 modifications ont été apportées, mais elles ne sont pas particulièrement
11 importantes et ne méritent pas d'être discutées ici. Donc, le délai pour
12 loger un appel a été modifié, il est devenu possible de soulever un acte
13 d'accusation sur des crimes qui impliquent une peine de dix ans, parce que
14 normalement, un procureur devait obtenir l'aval des juges de la chambre
15 avant de pouvoir soulever un acte d'accusation pour un crime qui requiert
16 plus de cinq ans de prison, et la procédure vient d'être abolie par ce
17 décret. Mais de façon générale, l'objectif visé c'est d'améliorer
18 l'efficacité dans le fonctionnement des tribunaux en temps de guerre.
19 Voilà. C'est ça le point essentiel.
20 Q. Merci.
21 M. POPOVIC : [interprétation] Je souhaite demander le versement au dossier
22 de ce document, s'il vous plaît.
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.
24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, ce sera la pièce
25 D00502.
26 M. POPOVIC : [interprétation] Peut-on afficher à présent le document D011-
27 1226.
28 Q. Le document se trouve à l'intercalaire 11 dans votre classeur, Général.
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1 Le document que vous avez sous les yeux est un exemplaire du journal
2 official militaire du 20 mars 1999. Nous avons ici la Loi portant sur les
3 procureurs militaires. Ce qui m'intéresse, c'est de savoir si cette loi a
4 été en vigueur en 1998 et 1999. Je vous le demande parce que nous avons vu
5 qu'un décret a été adopté concernant le travail du procureur militaire dans
6 les temps de guerre. Donc, j'aimerais d'abord que vous me fournissiez une
7 réponse à cette question, puis je souhaite entendre vos observations sur
8 cette loi.
9 R. Oui. J'ai déjà pris connaissance de cette Loi portant sur les
10 procureurs militaires. La loi régit l'organisation et le fonctionnement des
11 compétences du procureur militaire. La loi était en vigueur et elle a été
12 appliquée en 1999 en temps de guerre. Quant aux décrets que nous avons vus
13 précédemment et qui ont permis d'apporter un certain nombre de
14 modifications, ces décrets ne font que compléter cette loi de base. Donc,
15 les compétences principales découlent de cette loi-ci, alors que les
16 décrets apportent un certain nombre de modifications prévoyant des
17 compétences plus larges pour le procureur militaire en vue d'assurer sa
18 plus grande efficacité.
19 Autrement dit, cette loi n'a pas été annulée; au contraire, elle a été
20 appliquée et représentait la base juridique pour le travail effectué par
21 les procureurs militaires en temps de guerre.
22 Q. Merci.
23 M. POPOVIC : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce
24 document.
25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.
26 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Juge, ce sera la pièce
27 D00503.
28 M. POPOVIC : [interprétation] Je souhaite que l'on affiche le document
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1 D011-1241.
2 Q. Ce document se trouve à l'intercalaire 12 dans votre classeur, Mon
3 Général. Général, vous avez déjà décrit le rôle que vous avez joué en tant
4 que chef du département juridique au sein de l'état-major général de la VJ.
5 Vous avez expliqué à quels problèmes vous avez du faire face et de quelle
6 façon vous avez essayé de les résoudre une fois que vous avez assumé vos
7 fonctions. Alors, ce que nous avons ici, c'est un aperçu du nombre de
8 postes prévus au sein des organes judiciaires militaires. J'aimerais savoir
9 tout d'abord si vous avez déjà pris connaissance de ce document;
10 deuxièmement, qui a rédigé ce document; et troisièmement, je souhaite que
11 vous nous expliquiez le rapport entre le nombre de postes prévus par le
12 schéma organisationnel par rapport à toutes les promotions qui ont eu lieu
13 et par rapport à tous les problèmes auxquels vous avez du faire face auprès
14 du personnel et que vous avez décrits au début de votre déposition. Ma
15 question est peut-être un peu trop longue et complexe.
16 R. Non, non, j'ai compris votre question. Ce que nous avons ici, c'est un
17 aperçu du nombre de postes prévus en temps de guerre dans les organes
18 militaires judiciaires. C'est moi qui ai rédigé ce document. Ou si je ne
19 l'ai pas rédigé, c'est moi qui l'ai corrigé, tout au moins. On voit ici
20 quels sont les tribunaux qui ont été mis sur pied en temps de guerre. Donc,
21 les colonnes sont suivantes : numéro, nom du commandement, et ici donc,
22 vous avez le nom du corps d'armée, par exemple, le corps d'armée de Novi
23 Sad. Puis dans la colonne suivante, le nombre de juges. Donc, un juge, cela
24 veut dire, un plus cinq, cela veut dire un juge et cinq juges adjoints.
25 Puis, nous avons le nombre de procureurs; un procureur plus trois adjoints.
26 Et donc, dans la colonne "nom du commandement", nous avons l'énumération
27 des différents corps d'armée, la division de Drina, le corps de Kragujevac,
28 le corps de Belgrade, le corps de Podgorica, le corps d'Uzice, le corps de
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1 Nis, là, nous voyons donc que le nombre de juges est supérieur et, cela,
2 effectivement, répond aux besoins, puisque tout simplement, les juges
3 avaient davantage d'obligations à remplir dans cette région. Et puis
4 finalement, il y a le tribunal attaché au corps de Pristina; un juge plus
5 sept juges adjoints. Les juges sont les plus nombreux ici, parce que,
6 effectivement, au vu des combats qui se déroulent sur le terrain, ils
7 avaient davantage de travail à faire.
8 Voilà, ce sont les tribunaux de première instance rattachés aux
9 commandements militaires. Puis, en deuxième lieu, nous en avons les
10 commandements militaires rattachés aux districts militaires. Les districts
11 militaires énumérés ici sont ceux de Belgrade, de Novi Sad, de Kragujevac,
12 de Podgorica, d'Uzice, de Nis, et de Pristina. Le nombre de juges est
13 pareil pour tous les districts, un plus cinq. Quant au nombre de
14 procureurs, ils varient légèrement un plus cinq, un plus quatre.
15 Puis, finalement, en troisième lieu, nous avons les tribunaux rattachés aux
16 armées, à la 1ère, à la 2e, et à la 3e armée, puis aux forces aériennes et à
17 la défense antiaérienne, et puis, finalement, les juges rattachés à la
18 marine de guerre. Quant au nombre de juges, ils sont au nombre de un plus
19 cinq.Il y a un point que je souhaite éclaircir afin d'éviter tout
20 malentendu. Les tribunaux rattachés aux commandements d'armée sont
21 compétents uniquement pour les membres de l'armée, et non pas pour les
22 unités subordonnées à l'armée. C'est pourquoi nous pouvons voir que le plus
23 petit nombre de postes est prévu pour le commandement des armées, parce
24 qu'un QG de l'armée comporte un plus petit nombre de membres que toutes ces
25 autres unités énumérées ici.
26 Alors, j'explique tout simplement que les tribunaux énumérés ici sont
27 les tribunaux de première instance. Quant au tribunal de deuxième instance,
28 c'est le tribunal militaire suprême qui avait ces départements rattachés au
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1 commandement des armées, des trois armées.
2 Q. Merci.
3 M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais que nous passions aux pages
4 suivantes 1245 en version B/C/S et 1249 en version anglaise.
5 Q. Général, nous voyons un certain nombre d'éléments d'information
6 manuscrits qui figurent à cette page. Pouvez-vous nous dire qui a rédigé ce
7 texte, et si vous pouvez répondre à cette question, expliquez-nous la
8 signification des éléments d'information qui sont notés ici, à savoir
9 nombre du personnel, juges dans le jury, et si cela est possible, veuillez
10 établir un lien entre ce qui est écrit et ce dont vous avez parlé au début
11 de votre déposition.
12 R. Oui, j'ai déjà pris connaissance de ce document. Il s'agit d'un résumé
13 de tous les aperçus précédents, et c'est moi qui ai rédigé ce texte à la
14 main pour se faire une idée générale. Donc, nous avons ici le nombre total
15 de juges, 155; le nombre total de procureurs, 92; ce qui fait, au total,
16 247 personnes. Alors, pourquoi j'ai additionné ici les juges aux
17 procureurs, bien qu'il s'agisse de deux organismes différents, il
18 s'agissait tout simplement de savoir quel était le nombre total de
19 professionnels, qui avaient fait leurs études de droit, qui avaient passé
20 le barreau, et qui avait de l'expérience dans le domaine judiciaire. C'est
21 la raison pour laquelle j'ai additionné les juges et les procureurs, pour
22 arriver à un chiffre assez impressionnant. Puis, le point suivant concerne
23 les juges qui font partie des jurés. Donc, en temps de guerre, comme en
24 temps de paix, mis à part les juges professionnels, chaque fois qu'un
25 procès est déclenché pour un acte criminel, nous avons aussi des jurés qui
26 sont des juges non professionnels. Leur nombre doit être toujours impair,
27 et le nombre des jurés doit dépasser dès lors le nombre de juges
28 professionnels. Donc, après avoir fait le calcul, j'ai constaté que 125
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1 personnes étaient prévues pour exercer les fonctions de jurés. Ces jurés
2 sont des officiers ou des sous-officiers. Cela dépend de la personne
3 accusée. Si l'accusé est un sous-officier, alors les jurés doivent être des
4 sous-officiers. Si l'accusé est un officier, alors les jurés sont, eux
5 aussi, officiers. Puis, en troisième lieu, j'ai noté le nombre de sous-
6 lieutenants de réserve promus, ils sont 125 au total. Cela se rapporte aux
7 promotions du personnel qualifié qui a été promu sur-le-champ, pour
8 satisfaire à un besoin en temps de guerre, donc 125 personnes qui n'avaient
9 pas le grade d'officier de réserve ont été promus pour remplir les
10 conditions prévues pour pouvoir exercer les fonctions du juge ou du
11 procureur militaire. En temps de paix, l'armée yougoslave ne comptait pas
12 un nombre aussi important d'officiers juristes, expérimentés, pour pouvoir
13 provenir aux besoins en temps de guerre.
14 Q. Merci.
15 M. POPOVIC : [interprétation] Je souhaite demander le versement au dossier
16 de ce document.
17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Avez-vous l'intention de demander le
18 versement au dossier du document précédent ?
19 M. POPOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, tout ceci fait partie
20 d'un seul et même document. Ce document a trois pages -- non, pardon, ce
21 document compte quatre pages. Nous avons examiné les pages 1, 2 et 4.
22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Le document est admis.
23 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, il s'agit de la
24 pièce D00504.
25 M. POPOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, le moment me semble
26 opportun pour faire la pause, d'autant plus que je compte aborder un tout
27 autre sujet.
28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Nous allons faire une
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1 deuxième pause maintenant, et nous reprenons nos travaux à 13 heures.
2 [Le témoin quitte la barre]
3 --- L'audience est suspendue à 12 heures 30.
4 --- L'audience est reprise à 13 heures 03.
5 M. POPOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, Monsieur le Président,
6 je voudrais profiter de ces quelques instants, en attendant l'arrivée du
7 témoin, pour vous dire que ma chère consoeur Gopalan avait raison, et que
8 le document que je souhaitais tout à l'heure verser existe déjà sous la
9 cote P1342. Donc, il n'est pas nécessaire de redemander le versement de
10 cette pièce au dossier.
11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci beaucoup à vous, ainsi que Mme
12 Gopalan, d'avoir attiré notre attention sur ce fait.
13 [Le témoin vient à la barre]
14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître Popovic.
15 M. POPOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
16 Q. Mon Général, j'ai l'obligation de vous poser la question suivante. Nous
17 parlions de tribunaux militaires, de procureurs militaires, et cetera.
18 Pouvez-vous nous dire quelle était la situation en matière de conseil de la
19 défense en 1999 après la déclaration de l'état de guerre ? Est-ce que tous
20 ceux qui étaient l'objet d'un acte d'accusation avaient la possibilité de
21 se faire défendre, y compris un conseil qui leur serait proposé par le
22 tribunal s'ils n'avaient pas les moyens d'en engager un conseil ?
23 R. En ce qui concerne la défense, elle fait partie intégrante d'un système
24 judiciaire, qu'il soit militaire ou civil, ou en temps de guerre ou de
25 paix. Voilà comment nous avons résolu la situation. En coopération avec le
26 président de la cour suprême militaire, j'ai demandé à chaque barreau de
27 chaque région, de chaque chambre régionale, de nous fournir une liste
28 d'avocats qui seraient disponibles à chaque tribunal, de manière à ce qu'on
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1 puisse les contacter, le moment venu, si on avait un suspect ou un accusé
2 qui avait besoin de conseils de la défense. Autrement dit, chaque tribunal
3 avait un nombre suffisant de conseils de défense qui étaient engagés, et
4 pour eux, c'était une tâche prioritaire. Autrement dit, il n'y avait pas de
5 problème en la matière. Evidemment, chaque accusé pouvait choisir, parmi
6 une liste, de donner pouvoir ou de choisir tel ou tel conseil de la
7 Défense.
8 M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais la pièce D011-1617, s'il vous
9 plaît.
10 Q. C'est derrière l'intercalaire 13, Mon Général. Vous voyez, à l'écran,
11 une lettre de couverture, elle se réfère à des directives concernant les
12 directives en matière d'opérations, de procédures, d'autorisations, et de
13 la responsabilité judiciaire militaire, et d'autres organes concernant la
14 détection des crimes, leurs auteurs, et le déroulement des procédures
15 judiciaires.
16 Est-ce que vous connaissez ce document, Mon Général, le document
17 étant daté du 22 mai 1999 ?
18 R. Je connais ce document qui est le document de base qui permet à
19 l'adjoint au chef d'état-major, qui envoyait le document aux différents
20 destinataires, conformément à ce qui est indiqué en haut du document, et
21 une instruction avait été publiée disant que ces directives devaient être
22 diffusées et que les officiers devaient se familiariser avec ces
23 directives.
24 Q. Merci. Je pense que vous avez parlé brièvement de ce document déjà dans
25 votre déposition, mais dites-moi : pourquoi avoir rédigé un tel document,
26 et qui l'a rédigé ?
27 R. Je l'ai fait moi-même. Je l'ai écrit. Etant donné ma longue expérience
28 professionnelle au cours de ma carrière, j'avais l'habitude d'informer tous
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1 ceux qui avaient certains devoirs par rapport à la procédure pénale, tous
2 ceux qui devaient s'acquitter de telle ou telle tâche, j'avais l'habitude
3 de les informer, et je présentais un résumé de différentes autorisations,
4 procurations, et devoirs, lorsqu'un acte pénal, un acte criminel est
5 perpétré par un officier. Par exemple, cela comprend tous les aspects de la
6 procédure pénale. Donc, un texte comme ceci comprend différents aspects du
7 droit militaire, les tribunaux, et cetera.
8 Q. Merci. Avant d'aborder le contenu du document, permettez-moi de vous
9 poser la question suivante : vous nous avez dit que ces directives devaient
10 être diffusées à tous les membres de la VJ, et c'est indiqué dans la lettre
11 de couverture. Pouvez-vous nous dire comment cela se faisait, comment un
12 tel document serait-il diffusé aux unités, et comment est-ce que les unités
13 et les membres des unités en prenaient connaissance ?
14 R. Les unités prennent connaissance du document de la manière suivante :
15 il y avait une lettre de couverture signée par l'adjoint du chef d'état-
16 major, avec toute la ligne de commandement qui s'ensuivait, et c'était
17 envoyé aux commandants des unités. Lorsqu'ils recevaient le texte, ils
18 reproduisaient le texte en nombre suffisant, et ensuite, ils l'envoyaient
19 avec la même lettre de couverture, ce qui représentait une tâche à
20 effectuer, aux officiers, aux sous-officiers, ainsi qu'aux soldats, de
21 manière à ce que tous soient informés du contenu du document, ils suivaient
22 ainsi la procédure, parce que les officiers sont en contact quotidien avec
23 les différentes unités qui leur sont subordonnées. Et c'était une des
24 nombreuses tâches qu'ils devaient accomplir.
25 Q. Merci.
26 M. POPOVIC : [interprétation] Passons à la page suivante de ce document, si
27 vous voulez bien, dans les deux versions linguistiques, B/C/S et anglais.
28 Q. Mon Général, j'aimerais regarder de plus près certains passages de ce
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1 document. Au point 1, il y a une tête de chapitre, "Officier militaire
2 supérieur", suivi par un petit a, "Mesures à prendre", et ensuite, on peut
3 lire :
4 "Si un crime a été commis au sein de l'unité, l'officier militaire
5 supérieur prendra les mesures nécessaires afin d'éviter que l'auteur de ce
6 crime puisse s'échapper ou que le crime soit caché, de manière à ce que la
7 procédure rentre en effet."
8 Est-ce que ces instructions comprennent les détails de la manière dont on
9 devait poursuivre un tel crime et ce qu'il fallait faire des auteurs ?
10 R. Oui, bien sûr, c'est une des instructions de base que l'on donne à tout
11 officier, non seulement en temps de guerre, mais en temps de paix
12 également. Ce sont des libellés juridiques que l'on trouve dans les textes
13 et lois militaires et les règlements qui définissent la responsabilité d'un
14 officier militaire à chaque fois qu'un crime est commis, et si un tel crime
15 est prévu au texte comme étant un des crimes qui donne lieu à poursuite,
16 c'est la responsabilité de l'officier de s'en charger. Puisqu'il sait
17 quelque chose qui se produit chez lui, en quelque sorte, l'officier
18 supérieur est responsable. Donc, il doit prendre ces mesures puisque c'est
19 lui l'officier supérieur qui a responsabilité de l'unité entière.
20 Q. Merci. Je ne voudrais pas être répétitif, mais si un tel rapport n'est
21 pas publié, est-ce que l'on peut lancer des procédures ?
22 R. En l'absence d'un rapport, le procureur militaire peut apprendre
23 l'existence d'un acte criminel autrement et peut lancer une enquête; il
24 peut faire appel au détachement de sécurité militaire, des unités de police
25 militaire qui s'appliquent leurs propres méthodes, si l'officier
26 responsable, l'officier supérieur responsable ne fait pas le nécessaire, ne
27 fait pas le rapport qu'il est censé élaborer, ces autres organes prennent
28 les mesures en fonction de leurs procédures, notamment lorsque des crimes
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1 sont commis la nuit, par exemple. Le texte qui est écrit ici s'applique aux
2 actes criminels perpétrés en public. Mais pour toutes ces infractions, tous
3 ces crimes, il faut élaborer un rapport.
4 Q. Merci.
5 M. POPOVIC : [interprétation] Passons à la page suivante, en version B/C/S
6 et anglais, s'il vous plaît.
7 Q. Général, d'après vos connaissances, a-t-on jamais remis une plainte au
8 pénal au procureur militaire sans que celui-ci entreprenne des mesures
9 nécessaires, des actions adéquates ?
10 R. Je dispose de connaissances approfondies quant au nombre de plaintes au
11 pénal soumises au procureur militaire, ces documents sont répertoriés dans
12 des formulaires. Ils sont archivés. Et chaque procureur militaire a
13 l'obligation, en vertu de la loi, d'entamer une procédure adéquate
14 conformément à ses compétences. Si un procureur militaire n'entame pas une
15 procédure, alors il va à l'encontre de l'entier dispositif juridique. En
16 temps de guerre, je sais que les procureurs militaires ont fait tout ce
17 qu'ils ont pu. Ils ont réagi à toutes les plaintes au pénal qui ont été
18 enregistrées, archivées. Des mesures nécessaires ont été entreprises en vue
19 de procéder à la collecte des éléments de preuve et de documents par le
20 biais des organes de la police, d'une part, et d'autre part, une requête
21 pour lancer l'enquête était remise au juge d'instruction. Celui-ci
22 diligentait immédiatement une enquête, en coopération avec le Procureur.
23 Donc, pas une seule plainte au pénal n'a été mise de côté, la procédure a
24 toujours été entamée. Evidemment, il était toujours possible que l'affaire
25 ne soit pas résolue, s'il est impossible de recueillir des éléments de
26 preuve nécessaires.
27 Q. Dans un des documents qui vous a été montré auparavant, vous avez
28 signalé qu'un grand nombre de juges - on ne parle pas de juges militaires
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1 mais de juges civils - ont été engagés au sein de tribunaux militaires et
2 au sein du système judiciaire militaire. Ce document que nous avons sous
3 les yeux, ce type de document était-il destiné justement à ce type de
4 personnes, aux juges qui avaient assumé les fonctions de procureur ou de
5 juge militaire ?
6 R. Evidemment, ces orientations ont été rédigées en tenant compte de
7 l'expérience qu'un militaire supérieur pouvait avoir quant à la manière
8 dont il fallait soumettre une plainte au pénal, diligenter une enquête,
9 entamer une procédure. Puis, les compétences des procureurs militaires sont
10 définies, et finalement, les compétences des tribunaux eux-mêmes. Alors, on
11 peut se demander est-il vraiment nécessaire de fournir des orientations aux
12 juges et aux procureurs puisqu'il s'agit de professionnels. Là, il est vrai
13 qu'il s'agit de professionnels. Un grand nombre de personnes qui ont été
14 nommées au poste de juge ou de procureur militaire n'avaient aucune
15 expérience de l'hiérarchie militaire. Ils ne savaient pas exactement quelle
16 place ils occupaient dans le schéma organisationnel de l'armée, et ces
17 orientations devaient leur permettre d'avoir un aperçu général de la
18 structure organisationnelle de l'armée, et ceci devait leur faciliter la
19 tâche dans leur contact et leur communication avec d'autres organes. Donc,
20 tout simplement, il s'agissait de leur faciliter le travail. Ils n'étaient
21 plus obligés de feuilleter toute une série de lois différentes, mais
22 plutôt, ils avaient tout réuni dans ces orientations. Puis, par ailleurs,
23 ces orientations étaient accompagnées d'un schéma qui représentait la
24 structure organisationnelle de l'armée, pour qu'ils puissent s'y retrouver
25 plus facilement. Tout ceci visait à faciliter le travail et à assurer son
26 efficacité.
27 Q. Merci.
28 M. POPOVIC : [interprétation] Je souhaite demander le versement au dossier
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1 de ce document.
2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Avant d'émettre le document au
3 dossier, vous pourriez peut-être, Général, éclaircir un point qui
4 m'intéresse.
5 Imaginez qu'il existe une plainte au pénal ou un indice montrant qu'il y a
6 eu un vol et que ce vol a été perpétré par un membre de l'armée, pendant
7 que l'armée s'acquittait de ses missions. En vertu des textes législatifs
8 existant, est-ce l'armée qui devait s'occuper de cette affaire, ou était-ce
9 plutôt un tribunal civil ordinaire qui était compétent pour cette affaire
10 et pour diligenter une enquête ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Si une infraction de ce type était commise par
12 un membre de l'armée, c'était uniquement au procureur militaire d'entamer
13 la procédure et au tribunal militaire de se prononcer sur l'affaire. Si
14 toutefois l'auteur de l'infraction était un civil qui ne faisait pas partie
15 intégrante de l'armée, alors, ce sont les tribunaux civils qui étaient
16 compétents. Evidemment, si un officier militaire s'aperçoit d'un tel cas de
17 figure, il pouvait en informer les organes du MUP ou le procureur compétent
18 pour que celui-ci entame la procédure adéquate. En conclusion, le tribunal
19 militaire avait de compétence uniquement pour ce qui est du personnel
20 militaire. Si, toutefois, un civil et un militaire commettent un crime
21 comme co-auteur, à ce moment-là, le tribunal militaire pouvait être
22 compétent. Ce cas de figure ne survenait que rarement, mais évidemment,
23 cela pouvait se produire de temps en temps.
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci. Et dans ce contexte, les
25 membres du ministère de l'Intérieur, du MUP, étaient-ils considérés comme
26 des civils ou comme des militaires ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Les membres du ministère de l'Intérieur
28 relevaient des tribunaux civils et non pas des tribunaux militaires. Ils
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1 n'étaient pas considérés comme militaires. Malgré le fait qu'ils pouvaient
2 être rattachés aux unités militaires et prendre part aux activités
3 militaires, ce sont des tribunaux civils dont ils relevaient.
4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci. Et la situation que vous venez
5 de décrire, était-elle valable quel que soit le crime ou l'infraction
6 commis ? Donc, les tribunaux n'étaient compétents que pour juger dans les
7 affaires où des militaires étaient impliqués ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] En vertu de la Loi portant sur les tribunaux
9 militaires, les compétences des tribunaux militaires sont définies par
10 rapport aux types d'infractions ou de crimes commis par un civil. Il
11 s'agit, de façon générale, d'infractions ou de crimes dirigés à l'encontre
12 d'installations militaires, à l'encontre du personnel militaire. Je pense,
13 par exemple, à une attaque lancée contre un militaire qui est en train
14 d'exercer ses fonctions. Donc ce sont les seuls cas où les tribunaux
15 militaires sont compétents. Quelques autres exemples, tentative de saboter
16 la puissance militaire, espionnage dirigé contre des installations ou
17 contre le personnel militaire. Donc la loi répertorie toutes les
18 infractions, tous les crimes qui relèvent des tribunaux militaires quel que
19 soit l'auteur de cette infraction ou de ce crime, mais leur nombre est très
20 limité.
21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Dans des cas de figure plus habituels,
22 où allègue-t-on un membre des forces armées a commis un crime, c'est dans
23 ce cas de figure concret, le tribunal militaire qui est compétent, cela
24 valait-il pour toutes les infractions et pour tous les crimes ou seulement
25 pour un certain type de crime ou d'infraction ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Quel que soit le type de crime ou d'infraction
27 commis par un militaire, seuls les tribunaux militaires sont compétents,
28 tant que l'individu impliqué est militaire. Il arrivait souvent qu'une fois
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1 l'état de guerre terminé, un grand nombre d'individus n'étaient plus
2 militaires. Par conséquent, si l'acte d'accusation n'est pas entré en
3 vigueur au moment où cet individu avait toujours le statut militaire, il ne
4 relevait plus de la compétence des tribunaux militaires. Dans ce cas de
5 figure, l'affaire était remise entre les mains des procureurs et des
6 tribunaux civils, mis à part les situations que nous venons d'énumérer où
7 il s'agit d'actes criminels dirigés contre l'armée. Et cela ne valait pas
8 non plus pour des procédures qui étaient déjà entamées au moment où cet
9 individu avait le statut de militaire.
10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci de cette explication.
11 Nous admettons les orientations dans le dossier.
12 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Juge, ce sera la pièce
13 D00505.
14 M. POPOVIC : [interprétation] Question, Messieurs les Juges. J'ai suivi
15 l'interprétation des propos du témoin en réponse à votre question, et je
16 crains que la traduction n'ait pas été à 100 % exacte. Donc je vais passer
17 en revue toutes les étapes d'une procédure pour que tout soit parfaitement
18 clair qui est habilité, à quel moment, à faire quoi.
19 Q. Nous parlons des tribunaux civils, bien que des poursuites aient été
20 engagées devant un tribunal militaire. Alors commençons déjà par le moment
21 auquel une poursuite ou une procédure est-elle engagée conformément aux
22 règles en vigueur au sein de la RSFY à l'époque, donc la Loi sur la
23 procédure pénale en vigueur dans la République fédérale de Yougoslavie.
24 R. Tout procureur habilité, qu'il soit militaire ou civil, engagerait une
25 procédure pénale, si cela relevait de son domaine de responsabilité, sur la
26 base d'une plainte pénale qui lui aurait été transmise. Il pouvait s'agir
27 d'un individu, d'un organe de l'intérieur, les organes de la police
28 militaire ou tout autre institution. Donc ce sont les voies officielles. Si
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1 aucune plainte n'avait été portée, mais que le procureur avait connaissance
2 d'une infraction, il lui incombait d'engager une procédure et de réunir les
3 éléments de preuve afin de pouvoir engager une procédure.
4 Q. Merci. Je vous demande d'être aussi explicite que possible afin de
5 préciser le déroulement de la procédure. Une fois qu'une plainte pénale
6 avait été reçue, quelles mesures devaient être prises par les organes
7 compétents ?
8 R. Lorsque le procureur est saisi d'un document décrivant la nature des
9 accusations et précisant le fait que l'auteur de l'infraction était connu
10 ou non, la personne qui porte plainte ou soumet ce rapport était obligée de
11 présenter à l'appui des éléments de preuve dont elle disposait ou qu'elle
12 avait obtenus ou indiquer au moins où l'on pouvait trouver de tels éléments
13 de preuve. Et sur cette base, le procureur prenait une décision, décidait
14 s'il y avait ou non suffisamment de motifs pour justifier une inculpation.
15 S'il s'agissait d'une infraction mineure pour laquelle la peine prévue
16 n'allait que jusqu'à cinq ans en temps de paix, ou en temps de guerre
17 jusqu'à dix ans, alors le procureur mettait en accusation ou élaborait un
18 acte d'accusation concernant une infraction précise et un auteur précis.
19 S'il n'y avait pas suffisamment d'éléments de preuve, le procureur
20 demandait plutôt une instruction et transmettait cette requête à un juge
21 d'instruction qui, en fonction de ses compétences bien plus larges,
22 s'occuperait de réunir des éléments de preuve et de mener une enquête. Il
23 pouvait aller sur le terrain effectuer une enquête sur les lieux et compter
24 sur l'appui d'experts pour l'aider dans son travail. Et là encore, il
25 incombait à ces autres experts de fournir au juge d'instruction tous les
26 éléments de preuve disponibles. Une fois que le juge avait reçu ces
27 documents et éléments et une fois qu'il estimait qu'il y avait suffisamment
28 d'éléments réunis pour permettre au procureur de prendre une décision, il
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1 s'en référait encore une fois au procureur afin que celui-ci décide ou non
2 de rendre une inculpation et décidait si oui ou non il y avait suffisamment
3 d'éléments de preuve pour établir que telle personne avait commis telle
4 infraction.
5 Q. Très bien. J'aimerais d'abord savoir quel est le délai prévu par la loi
6 sur la procédure pénale, délai imparti au juge d'instruction pour mener à
7 bien son enquête ?
8 R. En temps de paix, il s'agit d'un délai de six mois; en temps de guerre,
9 le délai est bien plus court. Mais évidemment, certaines enquêtes,
10 certaines instructions ne peuvent pas être menées à bien dans un délai
11 aussi court. Mais exceptionnellement, il peut arriver qu'un juge puisse
12 réunir les éléments de preuve nécessaires dans le délai imparti, à moins
13 que l'enquête ne soit particulièrement complexe, et donc le juge n'arrive
14 pas à en venir à bout dans le délai imparti.
15 Q. Entre le moment où le procureur formule une requête portant sur une
16 enquête ou une instruction jusqu'à ce que cette instruction soit achevée -
17 vous avez parlé d'un délai de six mois - l'auteur du crime qui était membre
18 de l'armée yougoslave à l'époque où il avait commis l'infraction, pendant
19 cette période il n'était plus membre de l'armée de Yougoslavie, dès lors
20 quel tribunal était compétent pour statuer sur une infraction commise
21 pendant la guerre ?
22 R. Si la procédure pénale ne pouvait pas être achevée devant le tribunal
23 militaire, que ce soit pendant l'instruction ou la phase du jugement, ou
24 alors si l'acte d'accusation n'entrait pas en vigueur, l'affaire était dès
25 lors transmise au tribunal compétent qui avait la compétence territoriale,
26 la compétence territoriale locale. Dans un cas précis, le cas où la guerre
27 était terminée, la plupart des infractions commises pendant la période
28 concernée l'ont été au Kosovo-Metohija, et pour cette période, les
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1 tribunaux compétents pour le Kosovo-Metohija ont été transférés à d'autres
2 territoires, les affaires ainsi ont été remises à d'autres juges en
3 fonction de l'endroit où l'infraction avait été commise. Et si ce n'était
4 pas possible, la Loi sur la procédure pénale prévoit la possibilité
5 d'engager une procédure selon le critère du lieu de résidence permanent de
6 l'auteur dans la mesure où on le connaît. Malheureusement, bon nombre
7 d'infractions avaient été commises par des auteurs dont le lieu de
8 résidence était inconnu. Qu'il s'agisse d'un tribunal militaire ou civil,
9 le tribunal devait tout de même continuer à réunir des moyens de preuve
10 jusqu'à ce que l'auteur de l'infraction ne soit identifié ou jusqu'à ce
11 qu'il y ait prescription pour l'infraction en question.
12 Q. Merci.
13 M. POPOVIC : [interprétation] J'espère que nous avons pu ainsi décrire avec
14 précision le déroulement de la procédure.
15 J'aimerais maintenant passer à une question assez vaste. Mais bon, je vais
16 commencer à tout le moins.
17 Pourrions-nous voir le document D011-1274.
18 Q. Mon Général, vous trouverez cela à l'intercalaire 15 dans votre
19 classeur. Mon Général, vous voyez là des informations concernant le travail
20 des organes judiciaires, leurs tâches en temps de guerre. Très brièvement,
21 connaissez-vous déjà ce document, et savez-vous qui en est l'auteur ?
22 R. Oui, je connais ce document. D'ailleurs, je l'ai moi-même rédigé en
23 fait. Il s'agit des tâches incombant aux organes judiciaires en temps de
24 guerre.
25 Q. Avant d'analyser ce document, j'aurais une question. Je vois que la
26 version en anglais, en haut à droite, l'on peut lire le 12 septembre 1999.
27 Mon Général, quand ce document a-t-il été rédigé ? J'aimerais examiner la
28 dernière page en B/C/S, la page 1 279 et 1 285, en anglais. Voilà, nous
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1 voyons la bonne page. Nous pouvons voir qu'il s'agit du 12 mai 1992. Est-ce
2 bien la date à laquelle ce document a été rédigé ?
3 R. Oui, en effet, c'est bien la date. J'ai consigné ces informations le 12
4 mai 1992, et là, il y a une erreur. Lorsque ce document a été remis à
5 l'Accusation, il y a eu une erreur de numérotation. J'avais déjà relevé
6 cette erreur dans l'affaire Milutinovic et demandé qu'elle soit rectifiée.
7 Je crois que c'est à ce moment-là que l'erreur a été rectifiée. Il s'agit
8 bien d'information datant du 12 mai 1999.
9 Q. Merci. J'aimerais maintenant que l'on voie de nouveau la première page
10 du document, 1 275 en B/C/S, et 1 281 en anglais. Mon Général, analysons le
11 premier paragraphe où il est question de formation, au milieu du
12 paragraphe, une phrase que l'on lit comme :
13 "En tout, 24 tribunaux militaires et bureaux des procureurs militaires ont
14 été mis sur pied dans les districts militaires, les commandements des corps
15 et les commandements des groupes stratégiques. Un décret prononcé par le
16 président de la RSFY a nommé 88 procureurs, 149 juges et 421 jurés, alors
17 que 245 avocats ont été promus au rang d'officiers de réserve dans les
18 services juridiques."
19 Si je ne m'abuse, il s'agit d'information déjà mentionnée par vous
20 dans un document antérieur et simplement résumée ici ?
21 R. Oui, c'est tout à fait exact. Toutes ces informations ont été
22 consignées le 12 mai, donc cela représente la situation le 12 mai. Mais les
23 chiffres ici sont quelque peu différents parce que les choses ont encore
24 évolué après cette date, et ces informations que j'ai consignées après
25 avoir fait le tour de tous les tribunaux et bureaux de procureurs qui
26 existaient, ces 20 tribunaux de base et bureaux du procureur, les
27 départements aussi au sein des commandements, des districts de l'armée, je
28 les ai visités. J'ai également été voir la cour suprême et le bureau du
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1 procureur. Je m'y suis rendu physiquement pour réunir ces informations
2 concernant leur méthode de travail. Et sur la base de ce que j'ai pu
3 observer et les rapports que j'ai reçus de leur part, j'ai rédigé ce
4 document et consigné ces informations concernant la situation et les tâches
5 des organes judiciaires. Mon objectif était de fournir au personnel
6 militaire toutes les informations essentielles dont il me semblait qu'ils
7 devaient être informés.
8 Q. J'aimerais maintenant vous demander à qui cette information était-elle
9 destinée ? Je ne crois pas que cela ressort de manière suffisamment
10 explicite de votre réponse.
11 R. Ces informations étaient principalement destinées aux membres du
12 commandement Suprême afin qu'ils soient renseignés, puisqu'ils suivaient de
13 près la situation et souhaitaient mieux la connaître. Donc il s'agit là
14 d'un aperçu. Certains extraits de ces informations ont été communiqués par
15 le biais d'autres rapports à leurs subordonnés au sein de la 2e Armée et de
16 la 3e Armée, ainsi que la marine. J'avais en effet donné un bref aperçu de
17 chacune de ces sections et chacun de ces tribunaux. Par ailleurs, bien
18 entendu, j'ai aussi proposé un certain nombre de mesures qu'il aurait
19 convenu de prendre.
20 Q. Pourrions-nous maintenant passer à la page suivante en B/C/S et en
21 anglais.
22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Popovic, je crains que nous
23 n'ayons plus de temps aujourd'hui. Pouvez-vous attendre jusqu'à demain ?
24 M. POPOVIC : [interprétation] Tout à fait.
25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il nous faut lever la séance afin de
26 libérer la salle d'audience pour une autre affaire. Nous nous retrouverons
27 demain matin à 9 heures.
28 --- L'audience est levée à 13 heures 47 et reprendra le jeudi 28 janvier
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1 2010, à 9 heures 00.
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