Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 15 février 2010

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 17.

  5   [Le témoin vient à la barre]

  6   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour.

  7   Veuillez, je vous prie, nous donner lecture de la déclaration solennelle

  8   qui vous est montrée maintenant.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 10   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 11   LE TÉMOIN : MILOS DOSAN [Assermenté]

 12   [Le témoin répond par l'interprète]

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous en prie, veuillez prendre

 14   place.

 15   Me Popovic a quelques questions à vous poser.

 16   M. POPOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 17   Interrogatoire principal par M. Popovic : 

 18   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur.

 19   R.  Bonjour.

 20   Q.  Monsieur Dosan, avant que je ne vous pose des questions, j'aimerais

 21   vous demander, étant donné que nous parlons la même langue, je vous

 22   demanderais d'avoir l'amabilité de bien vouloir ménager des temps d'arrêt

 23   entre les questions et les réponses pour que les interprètes puissent faire

 24   leur travail. Je vous demanderais également de bien vouloir ne pas parler

 25   trop vite, pour que les interprètes puissent faire leur métier.

 26   Est-ce que vous pourriez décliner votre nom et prénom, je vous prie.

 27   R.  Milos Dosan.

 28   Q.  Quelle est votre date de naissance et votre lieu de naissance ?

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  1   R.  Je suis né le 28 février 1949 à Bistrica, dans la municipalité de Zepce

  2   en Bosnie-Herzégovine.

  3   Q.  Avez-vous jamais témoigné devant ce Tribunal le 19, 20, 25 et 26

  4   octobre 2005 dans l'affaire Milosevic ?

  5   R.  Oui, oui, tout à fait.

  6   Q.  Et pendant la séance de récolement qui a précédé votre déposition

  7   d'aujourd'hui, avez-vous eu la possibilité de lire tout ce que vous aviez

  8   déclaré lors de cette déposition précédente ?

  9   R.  Oui, oui, j'ai eu cette possibilité.

 10   Q.  Et si je devais vous poser les mêmes questions aujourd'hui, est-ce que

 11   vous fourniriez les mêmes réponses ?

 12   R.  Oui, tout à fait.

 13   Q.  Je vous remercie, Monsieur Dosan.

 14   M. POPOVIC : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement au

 15   dossier du compte rendu d'audience de la déposition de M. Dosan, qui figure

 16   sous la cote 65 ter 1662. Il y a également une version sous pli scellé,

 17   D011-2350.

 18   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons d'abord

 19   verser au dossier le compte rendu d'audience sous pli scellé.

 20   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cela deviendra la pièce D00683.

 21   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Puis la version expurgée.

 22   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ceci deviendra la pièce D00684.

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.

 24   M. POPOVIC : [interprétation] Je vais vous donner lecture du résumé pour M.

 25   Milos Dosan. Pendant la période en question, à savoir la période comprise

 26   entre le 15 juillet 1998 et la fin de la guerre en 1999, le témoin a

 27   commandé la 52e Brigade de roquettes d'artillerie de la défense

 28   antiaérienne de l'armée de Yougoslavie, et parallèlement, il commandait la

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  1   garnison de Djakovica. Pendant cette déposition, le témoin va nous

  2   expliquer quelles étaient ses responsabilités en tant que commandant de

  3   brigade, et il nous expliquera quelles étaient ses responsabilités en tant

  4   que commandant de garnison, et ce, en 1998 et 1999. Il nous parlera

  5   également de sa participation lors de réunions qui ont été organisées pour

  6   assurer la protection de la ville de Djakovica, et à ces réunions étaient

  7   présents des représentants du MUP et des autorités civiles.

  8   Le témoin nous expliquera les combats menés à bien par son unité, les

  9   tâches de son unité, et ce, dans la zone du Kosovo-Metohija. Il nous

 10   parlera de la zone de responsabilité de son unité, des armes qu'ils avaient

 11   à leur disposition, et du fait que son unité était engagée, ou a combattu

 12   ou a assuré la défense antiaérienne du Kosovo-Metohija. Il nous parlera de

 13   ses contacts avec les vérificateurs de l'OSCE ainsi que des inspections

 14   d'armes effectuées par les vérificateurs dans son unité.

 15   Le témoin nous parlera également des actes de terrorisme commis par l'UCK

 16   en 1998 et 1999. Il parlera des attaques quasiment quotidiennes de la part

 17   de ces forces terroristes, notamment contre les villages qui se trouvaient

 18   le long de la route qui reliait Djakovica à Decani, ainsi qu'à Djakovica à

 19   proprement parler. Il nous fournira également une explication des missions

 20   bien précises, des tâches, des objectifs et des combats de sa brigade, et

 21   ce, pendant l'année 1999.

 22   Le témoin confirmera que son unité ne s'est jamais vu attribuer de

 23   tâches qui auraient exigé de leur part une expulsion de la population

 24   civile. D'ailleurs, il n'a jamais mise en œuvre ce type de tâches. Il nous

 25   parlera des activités de son unité, il nous indiquera comment ils ont

 26   fourni des logements, comment ils se sont occupés de la population civile,

 27   et comment ils ont apporté des soins à la population civile.

 28   Le témoin fera également état des mesures qui ont été prises afin de

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  1   s'acquitter de toutes les obligations nécessaires conformément aux droits

  2   de la guerre ou aux droits internationaux humanitaires ainsi que les

  3   mesures qui ont été prises à l'encontre des membres de l'armée de

  4   Yougoslavie qui avaient enfreint ces règles.

  5   Le témoin fera également référence au 24 mars comme étant le premier

  6   jour du bombardement, date qui est également citée dans l'acte

  7   d'accusation. Il parlera du fait que la mosquée et la bibliothèque de

  8   Djakovica ont été touchées. Il nous parlera du mois d'avril 1999 et du fait

  9   qu'il n'était absolument pas au courant d'événements qui se seraient

 10   déroulés dans la localité de Cerim et qu'il n'y a absolument aucun indice

 11   indiquant que des membres de la VJ avaient participé à ces crimes, et qu'il

 12   n'avait pas non plus d'indices indiquant que les membres du MUP avait

 13   participé à ces crimes.

 14   Le témoin fera également référence au 14 avril 1999, le massacre qui

 15   s'est produit lorsque la colonne de réfugiés se déplaçait vers Meja et

 16   qu'elle a été touchée par l'aviation le 20 avril 1999. Il fera également

 17   référence au 20 avril 1999 ainsi qu'au nombre de victimes parmi les civils

 18   dans le camp de réfugiés, nombre de sévices provoqués par l'agression de

 19   l'OTAN.

 20   Le témoin relatera les événements ou fera référence aux événements

 21   des 27 et 28 avril 1999. Il s'agit de dates qui figurent à l'acte

 22   d'accusation et qui correspondent aux journées des opérations menées à bien

 23   à Korenica et Meja. Il indiquera comment une partie de son unité était

 24   engagée précisément au niveau de la ligne du blocus afin d'empêcher les

 25   terroristes de l'UCK d'approcher la ville de Djakovica, et à leur retour,

 26   au retour de cette unité, il a été informé qu'il n'avait pas eu de contact

 27   avec les terroristes. Il confirmera qu'il n'a pas reçu d'information ou de

 28   rapport relatif à des crimes qui auraient été commis lors de cette

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  1   opération.

  2   Pendant sa déposition, le témoin fera également des observations à

  3   propos de la déclaration Nike Peraj, et nous précisera les décalages, les

  4   inexactitudes et mensonges évidents qui figurent dans la déclaration de ce

  5   témoin. Etant donné que le témoin a été déployé à Djakovica, il pourra

  6   témoigner à propos des événements qui se sont déroulés pendant cette

  7   période, pendant la période pertinente à l'acte d'accusation dans cette

  8   ville, notamment pour ce qui est des événements qui ont un lien direct avec

  9   la campagne de l'OTAN.

 10   J'en ai terminé avec le résumé de la déposition de M. Dosan.

 11   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Avant que vous ne poursuiviez, Maître

 12   Popovic, je dois vous dire qu'il y a quelque chose qui m'inquiète un tant

 13   soit peu. Je crains que cela n'ait les mêmes conséquences que dans le cas

 14   des témoins précédents. Vous avez versé au dossier, en demandant notre

 15   aval, les éléments de preuve présentés par ce témoin, mais qui figurent

 16   dans un compte rendu d'audience qui est plutôt volumineux. Ensuite, vous

 17   avez présenté un résumé de ce qui avait été dit par ce témoin, et je pense

 18   que vous avez l'intention en fait de poser des questions directrices au

 19   témoin lors de l'interrogatoire principal, et je suppose que vous avez

 20   prévu de lui poser des questions directrices et méticuleuses.

 21   Mais le fait est que lorsque vous présentez un compte rendu

 22   d'audience dans lequel se trouvent des moyens de preuve, vous avez non

 23   besoin de procéder à un interrogatoire principal détaillé. L'interrogatoire

 24   principal ne sert que pour mettre en exergue certains éléments essentiels

 25   ou pour corriger certains malentendus ou certaines erreurs.

 26   Cela fait maintenant quatre semaines que nous entendons la

 27   présentation des moyens à décharge, et la semaine dernière, nous avions

 28   attiré votre attention sur ce fait, nous réitérons cela maintenant. Car je

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  1   pense que ce n'est pas faire un usage intelligent de notre temps, car vous

  2   allez avoir un témoin qui va passer des heures, puisque vous avez estimé

  3   l'interrogatoire à quatre heures, qui va passer quatre heures, disais-je,

  4   pour se pencher sur des éléments qui figurent déjà dans compte rendu

  5   d'audience. Alors bien entendu, nous voulons donner une certain marge de

  6   manœuvre à la Défense, certes, mais nous devons quand même vous demander de

  7   faire preuve d'une plus grande discipline pour ce qui est de l'utilisation

  8   de votre temps, de telle sorte que nous puissions nous concentrer sur les

  9   éléments essentiels et les éléments qui ont une pertinence importante lors

 10   de l'interrogatoire principal, notamment lorsque le principal élément de

 11   preuve du témoin est reçu sous forme d'un compte rendu d'audience.

 12   Donc ne l'oubliez pas, ne l'oubliez pas pour ce témoin, et ne

 13   l'oubliez pas non plus pour les témoins suivants.

 14   M. POPOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Quoi

 15   qu'il en soit, la Défense ne va pas perdre de vue cela. Mais j'ai dit au

 16   début de l'audience d'aujourd'hui que le témoin avait témoigné pendant cinq

 17   jours dans l'affaire Milosevic, et nous n'allons absolument pas nous

 18   rapprocher de cet horaire. Nous allons utiliser beaucoup moins de temps.

 19   Nous allons poser des questions au témoin de façon tout à fait différente à

 20   la façon dont les questions lui avaient été posées dans l'affaire

 21   Milosevic. Il y a un certain nombre de documents également qui seront

 22   présentés au témoin pendant sa déposition. Ainsi, nous allons essayer

 23   d'expliquer certains faits à la Chambre, nous espérons en fait que vous le

 24   comprendrez, cela. Et nous allons, bien entendu, essayer d'obtempérer à vos

 25   consignes pleinement.

 26   Q.  Monsieur Dosan, jusqu'à quand étiez-vous membre de la VJ, si tant est

 27   que vous ayez été membre de la VJ ?

 28   R.  Oui, oui, j'ai été membre de la VJ à partir du 12 septembre 1970

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  1   jusqu'au 31 décembre 2001.

  2   Q.  Je vous remercie. Le 31 décembre 2001, est-ce que c'est la date à

  3   laquelle vous êtes parti à la retraite ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Et quel était votre grade à ce moment-là ?

  6   R.  J'étais général de division.

  7   Q.  Brièvement, Monsieur, pourriez-vous nous expliquer quels ont été vos

  8   grades au sein de la VJ et précédemment au sein de la JNA ?

  9   R.  Oui, tout à fait. J'ai été commandant de section, commandant de

 10   batterie, commandant de bataillon d'artillerie, commandant de régiment, ou

 11   plutôt commandant de bataillon de régiment de roquettes. J'ai été ensuite

 12   commandant de la défense antiaérienne, ou plutôt commandant de la brigade

 13   antiaérienne ou de la défense. J'ai également été commandant des unités de

 14   roquettes auprès de l'état-major général de l'armée de la Yougoslavie, chef

 15   de la commission pour le contrôle de la mise en œuvre du protocole relatif

 16   au contrôle des armements, conformément à la Résolution numéro 1244 du

 17   Conseil de sécurité.

 18   Q.  Pourriez-vous répétez, je vous prie, Général, la dernière partie de

 19   votre réponse.

 20   R.  J'étais chef de la commission dont l'objectif était de contrôler la

 21   mise en œuvre du contrôle des armements conformément à la Résolution 1244

 22   du Conseil de sécurité. Et après cela, j'ai été chef de l'inspection du

 23   service militaire, du service des appelés au sein de l'état-major général

 24   de l'armée de Yougoslavie.

 25   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous pourriez nous dire quelles ont été

 26   vos fonctions au sein de la VJ en 1998 et 1999 ?

 27   R.  Pendant le premier semestre de l'année 1998, j'ai été inspecteur des

 28   unités de requête, et ce, auprès de l'état-major général de l'armée de

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  1   Yougoslavie. Pendant le second semestre de l'année 1998 et pendant le

  2   premier semestre de l'année 1999, j'étais commandant de la brigade de

  3   défense antiaérienne, il s'agissait de la 52e Brigade de défense

  4   antiaérienne de roquettes d'artillerie à Djakovica, et j'étais également le

  5   commandant de la garnison de Djakovica.

  6   Q.  Merci. En tant que commandant de la 52e Brigade de roquettes

  7   d'artillerie, quelles ont été vos fonctions de base et vos compétences au

  8   sein de la brigade lorsque vous êtes arrivé en 1998 ?

  9   R.  La tâche de la brigade antiaérienne était de combattre toutes cibles

 10   ennemies qui entraient dans notre espace aérien, c'était donc ma fonction

 11   de base en tant que commandant et la fonction de mon unité.

 12   Q.  Je vous remercie. Vous avez dit que vous commandiez à la fois la

 13   brigade et la garnison. Est-ce que vous pourriez nous expliquer la

 14   différence entre ces deux rôles qui ont été les vôtres ?

 15   R.  Oui. En fait, ma fonction de base c'était la fonction de commandant des

 16   brigades. Pour ce qui était de ma fonction de commandant de garnison, il

 17   s'agissait d'une tâche complémentaire ou auxiliaire, qui était une tâche

 18   supplémentaire en plus de toutes mes tâches classiques au sein de la

 19   brigade.

 20   La fonction d'un commandant de brigade passe par l'utilisation efficace de

 21   la brigade, le fait que l'on essaie de provoquer le plus de pertes

 22   possibles lorsque l'ennemi pénètre dans l'espace aérien, et ce, avec un

 23   nombre de victimes moins important pour notre unité, pour notre équipement,

 24   matériel, et notre personnel. Le rôle du commandant de la garnison consiste

 25   à fournir des ordres, faire en sorte que l'ordre et la discipline règne au

 26   sein de la garnison et consiste également à faire en sorte qu'il y ait un

 27   bon fonctionnement au sein de la garnison.

 28   Q.  Alors, très brièvement, est-ce que vous pourriez nous dire s'il y avait

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  1   une différence dans la façon dont vous avez exécuté vos fonctions en temps

  2   de paix et en temps de guerre par la suite ?

  3   R.  Je dirais en fait que théoriquement, ces rôles et ces tâches devraient

  4   être les mêmes. Toutefois, étant donné que les circonstances en temps de

  5   guerre ont changées, ont été modifiées, ces rôles étaient différents par

  6   rapport aux rôles que nous avions en temps de paix. Il y avait une certaine

  7   différence dans la façon dont un commandant de garnison se comporte en

  8   temps de paix et en temps de guerre.

  9   Q.  Je vous remercie, Général. Dites-nous, quelle était la situation qui

 10   prévalait dans la ville de Djakovica ainsi que dans les environs de cette

 11   ville en 1998, ou plus précisément en juillet 1998 lorsque vous êtes arrivé

 12   à Djakovica ?

 13   R.  Je suis arrivé à Djakovica pendant la première quinzaine du mois de

 14   juillet, et je vais vous expliquer comment se présentait la situation. Pour

 15   ce qui est des quatre accès routiers qui arrivaient donc de Pristina à

 16   Djakovica, ils étaient complètement bloqués, enfin trois étaient

 17   entièrement bloqués, entravés. Ce qui signifie que le Metohija était

 18   complètement coupé du Kosovo. Alors moi, je suis arrivé en empruntant la

 19   seule voie accessible à ce moment-là, qui était la route ou l'itinéraire le

 20   plus long, et il a fallu fournir également la sécurité. Ce qui signifie que

 21   je suis arrivé avec un convoi militaire qui devait être gardé parce qu'il

 22   essuyait des attaques constantes de la part des forces terroristes siptar.

 23   Pour ce qui est de la situation dans la ville de Djakovica à

 24   proprement parler, l'unité que je commandais, que je devais commander,

 25   avait déjà essuyé des pertes. Il y avait un sergent du corps médical qui

 26   avait été enlevé et un soldat d'ailleurs qui avait déjà été tué. La

 27   situation était difficile, et cela pouvait être perçu car il y avait très

 28   peu d'approvisionnement qui arrivait à la population, parce que la ville

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  1   avait été complètement coupée. Ce qui fait que tous les biens qui étaient

  2   nécessaires à la vie normale n'existaient pas, ne se trouvaient plus là.

  3   Pour ce qui est de la liberté de déplacement, il n'y en avait

  4   quasiment pas. Je dirais que les gens, ou plutôt les femmes et les enfants,

  5   faisaient la queue devant les magasins. Les hommes ne sortaient que lorsque

  6   des indemnités leur étaient payées, pour ceux qui recevaient des retraites

  7   ou d'autres subsides sociaux. Ils étaient en fait distribués régulièrement

  8   et personne ne pouvait aller percevoir une indemnité au nom de quelqu'un

  9   d'autre. Donc voilà, voilà quelle était la situation qui prévalait lorsque

 10   je suis arrivé en ville.

 11   Q.  Mais lorsque vous parlez de liberté de mouvement ou de déplacement,

 12   dites-moi je vous prie, pourquoi est-ce qu'en quelque sorte cette liberté

 13   de mouvement, de déplacement, était ce que vous venez de nous décrire ?

 14   R.  Ecoutez, voilà ce que je peux vous fournir comme description. Les

 15   femmes se déplaçaient en ville, alors qu'on ne voyait quasiment pas

 16   d'hommes dans la rue. La plupart des hommes faisaient partie des unités

 17   terroristes de l'UCK, et ceux qui n'en faisaient pas partie étaient, en

 18   fait c'est ce que je suppose, étaient ou avaient peur en fait d'être

 19   mobilisés, ils avaient peut-être peur du fait de la propagande qui était

 20   colportée, donc tout simplement, on ne les voyait pas dans la rue.

 21   Q.  Alors juste en guise de précision, lorsque vous parlez de crainte de

 22   mobilisation, qu'est-ce que vous entendez, ils avaient peur d'être mobilisé

 23   par qui ?

 24   R.  Par les terroristes. Ils arrivaient dans les villages, ils entraient

 25   chez les gens et ils mobilisaient par la force des hommes en âge de porter

 26   les armes. Et d'ailleurs, ils allaient même jusqu'à leur vendre des armes.

 27   Ce qui signifie que les gens achetait leur propre fusil et ensuite

 28   ralliaient différentes unités.

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  1   Q.  Je vous remercie, Général. Mais dites-nous si votre unité a participé à

  2   des opérations sur le terrain en 1998 après votre arrivée à Djakovica ?

  3   R.  Oui. Toutefois, il ne s'agissait pas véritablement d'opérations. Une

  4   opération, c'est un concept très, très vaste, très générique, et qui

  5   signifie en fait que des unités très larges sont partie prenante. Il

  6   s'agissait d'actions individuelles qui étaient une façon de prêter main-

  7   forte à d'autres unités, donc il y avait toujours des unités militaires qui

  8   avaient reçu des ordres du commandement Suprême.

  9   Q.  Donc quel était le rôle de votre unité pendant ces actions justement,

 10   et quelle était votre attitude en tant que commandant de brigade vis-à-vis

 11   de la partie ou des éléments de cette unité qui avaient participé à ces

 12   actions ?

 13   R.  Ecoutez, il y a des parties de mon unité qui ont été envoyées auprès

 14   d'unités qui avaient effectué des actions après avoir reçu des ordres de la

 15   part du commandant du corps ou de la part du poste de commandement avancé

 16   du commandement qui se trouvait à Djakovica. A partir de ce moment-là, mon

 17   unité a été commandée par la personne qui dirigeait l'action. Jusqu'à ce

 18   que mes soldats aient retourné à leur unité originale, ils n'étaient pas

 19   placés sous mon commandement.

 20   Q.  Merci, Général. Au cours de l'année 1998, en exerçant vos fonctions du

 21   commandant de la garnison, avez-vous assisté à des réunions organisées avec

 22   les représentants des autorités civiles et du MUP à Djakovica ?

 23   R.  Oui. Il faut dire que les organes des autorités civiles fonctionnaient

 24   de façon tout à fait normale. Il y avait le président de la municipalité,

 25   le conseil exécutif municipal, et tous ces organes fonctionnaient

 26   normalement. De temps en temps, pour trouver une solution à des problèmes

 27   très concrets, j'organisais des réunions avec le président de la

 28   municipalité, avec le maire, et avec le chef du SUP à Djakovica. Ces

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  1   réunions n'avaient pas un caractère régulier, et elles étaient tenues de

  2   temps en temps, et pour trouver une solution à des problèmes ponctuels.

  3   Q.  De quoi était-il question lors de ces réunions ?

  4   R.  Lors de ces réunions, il était question des problèmes ponctuels qui

  5   survenaient dans la ville. Je vais vous citer un exemple. J'en ai gardé un

  6   souvenir très précis. Un certain nombre de problèmes ont surgi quant à

  7   l'approvisionnement en eau de la ville de Djakovica, alors nous avons pris

  8   les réservistes qui avaient été mobilisés par l'unité et nous les avons

  9   laissés partir pour qu'ils puissent résoudre le problème avec cette

 10   hydrocentrale qui ne fonctionnait plus.

 11   Puis, les Siptar s'étaient retirés de tous les postes qu'ils occupaient

 12   dans la ville et les boulangeries n'étaient plus ouvertes. Alors, pour

 13   assurer l'approvisionnement en pain normal, nous avons sélectionné les

 14   membres de nos unités qui avaient autrefois été boulangers pour qu'ils

 15   puissent assurer ces services-là. Donc voilà, c'est le type de problème

 16   dont il était question lors de ces réunions.

 17   Q.  S'agissait-il de problèmes qui touchaient toute la population de la

 18   ville de Djakovica ?

 19   R.  Mais évidemment. Tous les problèmes que nous avions, nous les avions en

 20   commun. La vie qui se menait dans la ville de Djakovica était pareille pour

 21   tout le monde, qu'il s'agisse de la population civile, de militaires, de

 22   policiers, nous partagions tous un même destin. Nous vivions de la même

 23   façon dans la ville.

 24   Q.  Merci. Au cours des mois de juillet et d'août 1998, un grand nombre

 25   d'individus provenant des villages environnants se sont rendus à Djakovica

 26   en tant que personnes déplacées. Le savez-vous ?

 27   R.  Je ne le sais pas, puisque je n'étais pas là au mois de juillet. Il est

 28   possible qu'il y ait eu des déplacements, mais je n'ai pas de connaissance

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  1   précise sur ce point.

  2   Q.  Merci. Juste aux fins du compte rendu d'audience, à quel moment êtes-

  3   vous arrivé à Djakovica ?

  4   R.  Je suis arrivé le 9 juillet à Djakovica, et j'ai assumé mes fonctions

  5   officiellement le 15 juillet 1998.

  6   Q.  Merci. Pour accélérer la procédure, je vais passer à la deuxième partie

  7   de l'année 1998. Au mois d'octobre 1998, un accord a été conclu prévoyant

  8   le retour des unités de l'armée de la VJ dans les casernes, le savez-vous,

  9   et avez-vous pris des mesures conformes à cet accord ?

 10   R.  Oui, je suis au courant de la signature de cet accord, et nous avons

 11   reçu l'ordre de prendre des mesures qui seraient conformes à l'esprit de

 12   cet accord.

 13   Q.  Merci. Une requête : lorsque je vous pose une question, attendez un

 14   moment avant de fournir votre réponse, s'il vous plaît.

 15   R.  Très bien.

 16   Q.  A partir du mois d'octobre 1998 jusqu'à la fin de l'année 1998, le

 17   nombre de vos effectifs a-t-il été augmenté ?

 18   R.  Non, aucune augmentation n'a eu lieu.

 19   Q.  Merci. Général, sur le territoire du Kosovo-Metohija, vers la fin de

 20   l'année 1998, une mission de vérificateurs de l'OSCE a été déployée. Le

 21   saviez-vous et aviez-vous des contacts avec cette mission ?

 22   R.  Oui. J'ai eu des contacts avec eux. Malheureusement, le premier contact

 23   a été établi à cause d'un événement malheureux, un de mes soldats a trouvé

 24   la mort dans la gorge de Dulje. Il s'appelait Dejan Arizanovic. Il a trouvé

 25   la mort au mois de novembre 1998. Lorsqu'il est mort, les vérificateurs

 26   n'étaient éloignés que de 200 mètres. Une attaque avait été lancée contre

 27   notre convoi militaire, qui était chargé de nous approvisionner, et c'est

 28   alors que cinq de mes soldats ont été blessés. Mais au moment où ils

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  1   pénétraient dans cette gorge, ils avaient rencontré les vérificateurs qui

  2   se tenaient à une distance de 200 ou de 300 mètres.

  3   Q.  Merci. De façon générale, savez-vous quelle était la tâche confiée aux

  4   représentants de l'OSCE sur le territoire du Kosovo-Metohija ?

  5   R.  Oui, je le sais. Leur tâche consistait à surveiller la mise en œuvre

  6   des dispositions prévues par l'accord susmentionné. Plus précisément, ils

  7   devaient surveiller le cessez-le-feu, le repli des unités de l'armée

  8   yougoslave dans les casernes, le regroupement des armes lourdes dans les

  9   casernes, donc toutes les dispositions de l'accord. En même temps, ils

 10   étaient responsables de la sécurité. Ils devaient surveiller le cessez-le-

 11   feu et s'assurer que des attaques ne soient plus lancées à l'encontre de

 12   l'armée, de la police, des civils, et cetera.

 13   Q.  Merci. Les vérificateurs vous rendaient-ils visite, puisque vous étiez

 14   commandant de la garnison à Djakovica, pour effectuer une surveillance,

 15   pour effectuer des inspections ?

 16   R.  Oui, les vérificateurs se sont rendus dans mon unité. Ceci s'est passé

 17   le 16 novembre 1998. J'ai fait leur connaissance, et j'ai discuté avec eux.

 18   Ils ont vérifié les armes que nous avions.

 19   Q.  Général, quel type d'armes a fait l'objet de vérification ?

 20   R.  C'étaient uniquement les lance-roquettes et les systèmes de roquettes

 21   Strela 1 et Strela 2 qui ont fait l'objet de vérification. Strela en B/C/S

 22   signifiant "Flash" [phon] en français.

 23   Q.  Quelle était la finalité des systèmes de roquettes qu'ils inspectaient

 24   ? A quoi sert ce type d'arme ?

 25   R.  Il s'agit des armes destinées à la défense antiaérienne. Ces armes sont

 26   utilisées pour frapper des cibles qui volent à une hauteur assez basse et

 27   ne dépassant pas 3 à 400 mètres.

 28   Q.  Ce type d'armes pouvaient-il être utilisés contre des cibles qui se

Page 11345

  1   trouvaient sur terre, des cibles terrestres ?

  2   R.  Non. Ce type d'arme ne peut en aucun cas être utilisé contre des cibles

  3   terrestres.

  4   M. POPOVIC : [interprétation] Je vois que ma question a été intégrée à

  5   votre réponse dans la compte rendu d'audience -- non, non, correction,

  6   l'erreur a été corrigée.

  7   Q.  Général, les membres de l'UCK avaient-ils à ce moment-là des aéronefs,

  8   à savoir des avions ou des hélicoptères pour qu'il soit nécessaire de

  9   vérifier l'utilisation des armes antiaériennes ?

 10   R.  Non. D'après nos connaissances, l'UCK n'avait pas à sa disposition des

 11   aéronefs ou des hélicoptères.

 12   Q.  Alors pour quelles raisons inspectait-on ce type d'arme; le savez-vous

 13   ?

 14   R.  Il est bien facile de déduire la réponse. A l'époque, on planifiait

 15   déjà l'agression de l'OTAN et ils avaient dès ce moment l'intention de se

 16   servir de leurs forces aériennes. Autrement, pourquoi auraient-ils procédé

 17   à des vérifications de ce type d'armes ? Ce qui faisait l'objet de la

 18   vérification, c'était uniquement les armes qui pouvaient, en cas

 19   d'agression, causer des pertes auprès des forces aériennes de l'ennemi.

 20   Q.  Puisque nous parlons des armes, Général, aviez-vous au sein de votre

 21   brigade des canons antiaériens de calibre 30 millimètres ?

 22   R.  Oui, au sein de chaque division il y avait une batterie de canons

 23   antiaériens de 30 millimètres. On appelait ce type de canon Pragas, de

 24   façon courante.

 25   M. POPOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 26   avant de poursuivre l'audition du témoin, j'aimerais que l'on affiche à

 27   l'écran le document D001-3170. Si toutefois l'Accusation ne soulève pas

 28   d'objection, je signale que ce document ne figure pas sur la liste 65 ter

Page 11346

  1   de la Défense. Toutefois, nous l'avons cité dans notre note informative.

  2   Nous avons signalé que nous pourrions éventuellement nous servir de ce

  3   document, et le document explique la manière dont on pouvait se servir d'un

  4   canon antiaérien, calibre 30 millimètres. Donc, nous aimerions entendre

  5   très brièvement les observations du général. Deux pages de ce document sont

  6   pertinentes, à nos yeux uniquement, et si nos confrères de l'Accusation ne

  7   soulèvent pas d'objection, nous aimerions l'étudier avec le témoin.

  8   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Kravetz.

  9   Mme KRAVETZ : [interprétation] Pas d'objection à soulever.

 10   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Popovic, vous pouvez vous

 11   pencher sur ce document.

 12   M. POPOVIC : [interprétation] Très bien. Nous allons le faire très

 13   brièvement. J'aimerais que l'on affiche la page 3 106 en B/C/S. Je signale

 14   que cette page n'a pas été traduite vers l'anglais. Nous avons demandé la

 15   traduction du document qui se trouve dans les services de traduction

 16   actuellement. Une seule phrase m'intéresse dans ce document. Elle figure au

 17   paragraphe 85.

 18   Q.  Il est indiqué :

 19   "Le canon antiaérien 30/2 millimètres est placé sur un véhicule de combat

 20   blindé. Son objectif c'est de frapper les cibles qui se trouvent dans

 21   l'espace aérien et, si nécessaire, des cibles qui se trouvent sur la terre

 22   et sur l'eau."

 23   Général, est-ce bien la manière dont vous voyez la chose ?

 24   R.  Oui, c'est bien ce qui est indiqué dans le document.

 25   Q.  Merci.

 26   M. POPOVIC : [interprétation] Passons maintenant brièvement à la page D001-

 27   3234 en version B/C/S, ainsi que D001-3279 en version anglaise. Mais avant

 28   de le faire, je me demande s'il est possible de remettre le classeur de la

Page 11347

  1   Défense au témoin. Si la Chambre le permet, ceci facilitera l'étude des

  2   documents au témoin.

  3   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.

  4   M. POPOVIC : [interprétation] Merci.

  5   Q.  Général, j'aimerais que vous vous penchiez sur le point 439 :

  6   "Pour défendre des positions, le canon peut être utilisé pour frapper

  7   des cibles mobiles ou immobiles qui se trouvent sur terre et éventuellement

  8   sur l'eau."

  9   J'aimerais savoir si c'est une définition précise des canons que vous

 10   aviez à votre disposition ?

 11   R.  Oui, c'est bien la règle en vigueur, et je signale qu'elle est

 12   d'ailleurs toujours en vigueur aujourd'hui.

 13   Q.  Merci.

 14   M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais maintenant vous poser quelques

 15   questions portant sur ce type d'arme, mais j'aimerais que le document soit

 16   d'abord enregistré aux fins d'identification. Je ne peux pas demander son

 17   versement au dossier puisque nous n'avons toujours pas reçu la traduction

 18   de la page que je viens de montrer au témoin.

 19   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le document sera enregistré aux fins

 20   d'identification.

 21   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, ce sera la pièce

 22   D00686. Messieurs les Juges, j'aimerais corrigé les numéros qui ont été

 23   cités à la page 2, lignes 20 et 23. A la place de la cote D00683, la cote

 24   devait être D00684 sous pli scellé, puis à la place de D00884 [comme

 25   interprété], nous devrions avoir la cote D00685. Merci, Messieurs les

 26   Juges.

 27   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

 28   M. POPOVIC : [interprétation] Merci.

Page 11348

  1   Q.  Général, les vérificateurs posaient-ils des questions concernant ce

  2   type d'arme ?

  3   R.  Non. Ce type d'arme ne les intéressait pas du tout. Ils n'ont pas posé

  4   de questions au sujet de ces armes et ils n'ont pas souhaité les voir.

  5   Q.  Dans le règlement qui vient de vous être montré, il est indiqué que ce

  6   type d'arme peut être utilisé à la rencontre des cibles qui se trouvent sur

  7   terre. Dans quelles circonstances recourt-on à l'utilisation de ce type

  8   d'arme et quels sont ses avantages par rapport à d'autres qui en ont de

  9   grand calibre ?

 10   R.  Comme il est indiqué dans le texte, ce type d'arme peut être utilisé

 11   contre des cibles fortifiées qui se trouvent sur terre ou éventuellement

 12   sur l'eau. Ces armes sont toujours utilisées dans de telles situations.

 13   Chaque fois que mon unité se voyait confier la tâche de participer à une

 14   action, elle se faisait toujours accompagner d'un canon Praga ou d'un

 15   véhicule militaire blindé 20/3 millimètres pour soutenir les activités de

 16   l'unité. Ces armes étaient utilisées à l'encontre des cibles fortifiées,

 17   des casemates, des fortifications depuis lesquelles les terroristes

 18   engageaient leurs actions.

 19   Q.  Merci. Si l'on compare ce type d'arme à un mortier de calibre 60

 20   millimètres, 80 millimètres, si on compare à un autre type de canon, je me

 21   demande si l'utilisation de ce type d'arme peut, à l'encontre des cibles

 22   qui figurent sur terre, constituer un recours à la force excessive ?

 23   R.  Non, pas du tout. L'utilisation de ce type d'arme avait justement pour

 24   objectif d'endiguer le recours excessif à la force. Parce qu'il s'agit d'un

 25   mécanisme fort précis, il n'y a pas d'éclatement qui est entraîné

 26   généralement par l'utilisation d'autres types d'artillerie. Et puisque son

 27   calibre est plus petit, le niveau de destruction provoqué est moindre par

 28   rapport aux dégâts provoqués par d'autres types d'artillerie utilisés pour

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  1   offrir un soutien aux unités pour détruire des positions fortifiées. Donc,

  2   ce type d'armes était utilisé justement avec l'intention de provoquer le

  3   moins de dégâts.

  4   Q.  Merci. Mais puisque vous dites que certains éléments de vos unités ont

  5   participé à des actions - on parle toujours de l'année 1998 - de quel type

  6   d'actions s'agissait-il ? S'agissait-il d'actions offensives ou défensives

  7   ?

  8   R.  Il s'agissait d'actions engagées exclusivement avec le but de protéger

  9   nos unités et de lever le blocus le long des axes routiers. Je précise, les

 10   barrages élevés sur les axes routiers menaçaient nos unités, et notamment

 11   nos postes frontaliers. Il nous était impossible de les approvisionner en

 12   nourriture, en eau, en carburant, en munitions. Donc, leur fonctionnement

 13   logistique était entièrement bloqué.

 14   Et ce n'est que dans de telles situations que certains éléments de nos

 15   unités participaient à ces actions. Ces actions étaient toujours courtes.

 16   Elles ne prenaient jamais plus de deux ou trois jours, tout dépendait des

 17   effectifs des terroristes et de la manière dont ils s'étaient fortifiés le

 18   long des axes routiers. Et il faut dire que malheureusement, toute cette

 19   zone était difficile d'accès, et il était fort difficile d'organiser sa

 20   défense puisqu'il s'agissait d'une région montagneuse où il était difficile

 21   d'accéder, et le seul moyen de fournir des approvisionnements, c'était de

 22   passer par de petites routes, petits sentiers qui traversaient la montagne

 23   et qui, le plus souvent, étaient bloqués par les terroristes.

 24   Q.  Merci. Et quel était le nombre d'actions auquel vos unités ont pris

 25   part pendant cette période ?

 26   R.  D'après mes souvenirs, il s'agissait de deux ou trois, peut-être quatre

 27   actions différentes. Je ne me souviens plus du chiffre exact.

 28   Q.  Merci. Général, un certain nombre d'événements se sont déroulés dans la

Page 11350

  1   ville de Djakovica et dans les alentours. Selon l'acte d'accusation, ces

  2   événements se seraient déroulés au cours de l'année 1999, entre le 24 mars

  3   et le 20 mai, et ces événements sont reprochés à Vlastimir Djordjevic.

  4   Alors, j'aimerais que nous nous concentrions à présent sur ces événements-

  5   là.

  6   Dites-moi d'abord, en temps de guerre, avez-vous rédigé un journal de

  7   guerre, je pense à vous personnellement ou à une autre personne au sein de

  8   votre unité qui s'est vue confier cette mission ?

  9   R.  Oui, nous avions un journal de guerre qui était tenu au sein de la

 10   brigade.

 11   Q.  Dites-nous ce que c'est qu'un journal de guerre, quel est le type

 12   d'événements qui sont consignés dans ce journal ?

 13   R.  Chaque unité est tenue de tenir un journal de guerre en temps de

 14   guerre. Tous les événements importants sont consignés dans ce journal. Je

 15   pense aux événements qui ont un impact sur l'unité et qui reflètent la

 16   situation qui prévaut au sein de l'unité. Je pense avant tout aux

 17   événements qui ont un certain poids, par exemple, quelles ont été les

 18   pertes subies par l'unité, quels ont été les succès, les réussites de

 19   l'unité, les tâches confiées, à la méthode de l'exécution de ces tâches, le

 20   niveau de réussite, les missions dévolues aux officiers supérieurs, tout ce

 21   qui constitue la trame des activités au sein de l'unité.

 22   Q.  Merci.

 23   M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche le document P958

 24   à l'écran. Le document figure à l'intercalaire 2 dans votre classeur,

 25   Général.

 26   Donc, ce qu'il nous faut, c'est le document P958. Oui, c'est bien le

 27   document affiché à l'écran.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Donnez-moi une seconde pour que je puisse me

Page 11351

  1   retrouver dans mon classeur.

  2   M. POPOVIC : [interprétation]

  3   Q.  S'agit-il bien du journal de guerre ?

  4   R.  Oui, ceci est notre journal de guerre.

  5   Q.  Merci. Passons immédiatement à la page 4 dans les deux versions

  6   linguistiques. Je pense que les pages pertinentes ont été isolées dans

  7   votre classeur pour que vous puissiez vous débrouiller plus facilement. La

  8   date qui nous intéresse est le 24 mars.

  9   R.  Oui, très bien.

 10   Q.  Ce qui nous intéresse, ce sont les rubriques de 9 à 16. Donc,

 11   j'aimerais que vous vous penchiez sur ces rubriques-là. Pour commencer,

 12   cette page du journal concernait les événements qui se sont déroulés le 24

 13   mars 1999 ?

 14   R.  Oui, c'est exact.

 15   Q.  Merci. On voit que l'alarme a été sonnée à 18 heures ?

 16   R.  C'est exact.

 17   Q.  A 20 heures, une attaque aérienne a été lancée contre des cibles sur

 18   terre ?

 19   R.  Exact.

 20   Q.  La deuxième batterie de la défense antiaérienne a ouvert le feu depuis

 21   Cabrat contre deux cibles en l'air. Dites-moi où se trouve Cabrat ?

 22   R.  Cabrat est une commune qui surmonte le village même de Djakovica. Elle

 23   s'élève derrière la vieille ville de Djakovica. Au pied de cette colline se

 24   trouve la rue Katolicka de Djakovica, et c'est l'ancien centre-ville, c'est

 25   la vieille ville.

 26   Q.  Où vous trouviez-vous au moment où l'alerte aérienne a été signalée ?

 27   R.  Je me trouvais sur la colline de Cabrat. C'est là que nous avons posté

 28   notre unité. Nous avions nos détecteurs de cibles aériennes qui étaient

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  1   postés sur cette colline, et cette colline offrait des conditions

  2   favorables à la défense aérienne et à la surveillance de l'espace aérien.

  3   Et moi, je me trouvais sur cette colline dans un abri.

  4   Q.  Merci, Général. Juste pour établir la chronologie des événements, vous

  5   dites qu'à 21 heures 45, un groupe d'avions est parti d'Italie vers la RFY,

  6   et puis, à la rubrique 15, nous voyons qu'il est zéro heures 45 minutes.

  7   Donc là, il s'agit déjà du 25 mars ?

  8   R.  Exact.

  9   Q.  Et puis, nous voyons une autre alerte aérienne qui est signalée. Donc,

 10   ce sont les événements que vous avez consignés dans le journal de guerre

 11   pour les 24 et 25 mars. Ai-je raison de l'affirmer ?

 12   R.  Oui.

 13   M. POPOVIC : [interprétation] Je demanderais que l'on affiche à l'écran la

 14   pièce D006-4300.

 15   Q.  Dans votre classeur, ce document est identifié à l'intercalaire 3.

 16   Voilà, c'est bien ce document, effectivement. Général, ici on parle d'une

 17   commission pour la coopération avec une équipe d'experts. Nous voyons votre

 18   nom, votre adresse et la date, qui est celle du 28 novembre 1999, et ce qui

 19   s'est déroulé le 24 mars le 1999, c'est une déclaration. Pourriez-vous nous

 20   dire de quoi s'agit-il, quel est ce type de déclaration et à qui l'avez-

 21   vous donné ?

 22   R.  C'est une déclaration que j'ai donnée à la Commission chargée de la

 23   coopération avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie. Il

 24   s'agit d'une équipe d'experts, on l'appelait ainsi donc, et ils m'ont

 25   demandé, après la publication du livre qui a été publié par le Fonds du

 26   droit humanitaire, le livre est intitulé, "Le Kosovo tel que vu, tel que

 27   dit", dans ce livre on mentionne la ville de Djakovica, et étant donné que

 28   j'étais déjà à la retraite à l'époque, on m'a demandé, on m'a plutôt

Page 11353

  1   ordonné, si vous voulez, de venir et de leur donner ma version des faits

  2   sur ces événements en question qui sont décrits dans le livre.

  3   Q.  Très bien, merci. Mon Général, vous en parlez, vous parlez de cet

  4   événement ici. Donc dites-moi effectivement si le 24 mars, effectivement,

  5   il y avait une attaque aérienne sur ces installations et s'il y avait une

  6   attaque aérienne, s'il y avait eu des frappes aériennes sur l'ensemble de

  7   la ville de Djakovica ?

  8   R.  Oui, il y a eu une frappe aérienne sur la ville même de Djakovica et

  9   sur la caserne ou les casernes de Djakovica.

 10   Q.  Très bien, merci. Dans le premier paragraphe de ce document, vous dites

 11   :

 12   "Ces premières frappes aériennes de l'aviation de l'OTAN pendant qu'elles

 13   ont eu lieu, j'étais à Cabrat avec d'autres soldats du bataillon de

 14   commandement."

 15   J'aimerais savoir si effectivement c'est de cela que vous avez parlé un peu

 16   plus tôt ?

 17   R.  Oui, effectivement. Donc les premières frappes aériennes qui ont eu

 18   lieu de l'OTAN, pendant ces frappes, j'étais à Cabrat. Il y avait également

 19   une équipe du commandement, de la division du commandement, elle suit

 20   toujours le commandement. Et depuis cette colline, j'ai pu entendre les

 21   activités, mais je n'ai pas pu voir depuis mon abri où les frappes ont eu

 22   lieu exactement, mais je pouvais néanmoins les entendre.

 23   Q.  Très bien. Au premier paragraphe, vous dites :

 24   "Et lorsque je suis sorti de l'abri, j'ai vu qu'il y avait un incendie dans

 25   la rue Katolicka, et j'ai entendu des sirènes de pompiers. Etant donné que

 26   j'étais sur une colline et qu'il faisait nuit, je n'ai pas pu conclure

 27   quelle était l'origine de l'incendie dans la rue Katolicka, de la rue

 28   catholique, mais j'ai conclu qu'il s'agissait de suite d'un incendie qui

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  1   s'est avéré à la suite des frappes aériennes de l'OTAN."

  2   Pouvez-vous nous expliquer un petit peu plus tout ceci ?

  3   R.  Oui. Après les premières explosions, détonations, je suis sorti de

  4   l'abri, j'ai vu, et étant donné que ma position se trouvait au-dessus de la

  5   rue Katolicka, la rue catholique, j'ai vu qu'elle était à la proie de

  6   flammes. Et je peux vous dire que la construction dans cette rue, il

  7   s'agissait plutôt de vieux bâtiments très jolis, faits en bois, dans un

  8   style - je ne sais pas comment décrire ce style - mais ce sont de vieux

  9   bâtiments, mais construits en bois, et ils étaient tous très proches les

 10   uns des autres, donc il était presque impossible d'en empêcher que le feu

 11   ne se propage. Mais depuis mon point de mire, depuis la colline où j'étais,

 12   j'ai vu que la rue était en flammes, et j'ai entendu des sirènes de

 13   pompiers, et j'ai vu que les pompiers essayaient d'éteindre le feu. Voilà,

 14   c'est ce que j'ai pu voir pendant cette première nuit.

 15   Quelques jours plus tard, j'ai eu l'occasion de passer par cette rue, étant

 16   donné que notre caserne Devet Jugovica, notre caserne se trouvait très près

 17   de la rue Katolicka, la rue catholique, en fait c'était à la fin de la rue,

 18   et puis on avait aussi dirigé des frappes aériennes sur la caserne. Elle

 19   était en grande partie détruite, de sorte que lorsque je suis arrivé là,

 20   j'ai vu quelle était l'ampleur de la destruction de la rue Katolicka, et

 21   effectivement, je dois dire qu'elle était dans un état piteux. Il était

 22   presque triste de voir l'état dans lequel se trouvait cette rue.

 23   Q.  Merci beaucoup, Monsieur le Général. Est-ce que vous avez su par la

 24   suite qu'est-ce qui a provoqué cet incendie dans la rue Katolicka en date

 25   du 24 mars ?

 26   R.  Non. Personnellement non, puisque je n'ai pas pu voir depuis l'endroit

 27   où je me trouvais. Mais le commandant Zlatko, qui était mon supérieur

 28   subordonné, qui était en fait déployé à cet endroit-là justement, à la

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  1   caserne Devet Jugovica, puisque les unités chargées des arrières se

  2   trouvaient là, il a affirmé avoir vu qu'une roquette est tombée à cet

  3   endroit-là et que c'est ceci qui a causé cet incendie.

  4   Q.  Très bien, merci. Pourriez-vous nous dire, vous-même, alors que vous

  5   vous trouviez sur le mont Cabrat, est-ce que vous avez pu voir quelle était

  6   la partie de la ville qui était ciblée par ces frappes aériennes de l'OTAN

  7   ?

  8   R.  Je peux vous dire qu'il y avait des frappes aériennes tous les jours

  9   sur Djakovica, mais si l'on parle de la première nuit, j'ai entendu trois

 10   détonations. Je n'ai pas pu moi-même voir où ces roquettes sont tombées, si

 11   elles sont tombées, mais effectivement j'ai vu que la rue était en flammes,

 12   et par la suite, j'ai appris que la caserne Devet Jugovica avait également

 13   été atteinte, à savoir l'installation ou le bâtiment de la police qui se

 14   trouvait à l'intérieur de son enceinte, à l'intérieur de ce bâtiment.

 15   Q.  Très bien, merci. A la fin de votre déclaration, vous dites, je cite :

 16   "J'affirme que mon unité et moi-même n'avons personnellement aucun lien

 17   avec la destruction supposée de cette partie-là de la ville de Djakovica ni

 18   de la destruction de ce bâtiment dévoué à la religion. Nous n'avons pas non

 19   plus d'information que les unités ou que certaines parties de ces effectifs

 20   de la RFY de la Serbie aient pris part à ces destructions."

 21   Et vous concluez surtout que ce sont les frappes aériennes de l'OTAN qui

 22   aient contribué à la destruction de cette partie-là de la ville de

 23   Djakovica. J'aimerais savoir si effectivement c'est ce que vous avez

 24   remarqué, si c'est ce que vous aviez vu ce jour-là, et si c'est de cela

 25   dont vous nous parlez lorsque vous parlez de cet événement ?

 26   R.  Oui, effectivement, et je répète ce que j'ai dit, mon unité et moi-

 27   même, ni moi personnellement, ni des membres de mon unité, ni aucune des

 28   unités de la RSFY aient pris part à ce crime, car effectivement il s'agit

Page 11356

  1   de crime. Je peux vous affirmer que cet incendie s'est produit à la suite

  2   des frappes aériennes de l'OTAN.

  3   Q.  Merci bien.

  4   M. POPOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demanderais que

  5   cette pièce soit versée au dossier.

  6   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Fort bien.

  7   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

  8   Juges, il s'agira de la pièce P00687 [comme interprété].

  9   M. POPOVIC : [interprétation] Merci bien. J'aimerais maintenant que l'on

 10   affiche la pièce D006-4304.

 11   Q.  Mon Général, dans votre classeur, ce document se trouve à l'onglet 4.

 12   Mon Général, ici nous pouvons voir qu'il s'agit d'un ordre qui est le

 13   vôtre, et il est écrit : Commandement du 52e ARBR, Brigade d'artillerie

 14   PVO, défense antiaérienne. J'aimerais vous demander de faire un commentaire

 15   du point 4. On peut lire à la deuxième ligne : Après les premières frappes,

 16   les priorités du commandement du commandant sont, au point 2, d'empêcher

 17   que la panique ne s'installe, que les gens ne désertent et d'empêcher les

 18   activités criminelles. Est-ce que vous pourriez nous expliquer de quoi il

 19   s'agissait.

 20   R.  Mes soldats et moi-même avions rencontré pour la première fois les

 21   frappes aériennes. On s'attendait à ce que la panique s'installe chez les

 22   membres de l'unité, et que dans un tel système dans lequel il est beaucoup

 23   plus difficile d'effectuer un commandement, qu'il pouvait s'avérer que

 24   certaines choses se passent et qui ne sont pas très bonnes pour l'unité.

 25   C'est la raison pour laquelle j'ai donné cet ordre que j'ai envoyé à tous

 26   mes soldats, aux commandants des autres unités leur expliquant de quelle

 27   façon ils devaient se comporter dans cette situation.

 28   Etant donné que partout et tout le temps après des opérations de

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  1   combat, et les activités des frappes aériennes de l'OTAN étaient une

  2   opération de combat, il arrive très souvent que des effets incontrôlés,

  3   indésirés [phon] s'installent, j'avais défendu strictement que l'idée des

  4   activités qui serait contraire au droit international humanitaire,

  5   s'agissant des activités dans la ville, ces activités, ces frappes

  6   aériennes détruisaient très souvent des vitrines de la ville, le verre

  7   éclatait et ainsi de suite, donc un très grand nombre de marchandises se

  8   sont retrouvées dans la rue. Donc, j'ai voulu faire attention, je voulais

  9   insister pour qu'il n'y ait pas de pillage, pour qu'il n'y ait pas

 10   d'activité criminelle et que les gens ne s'adonnent pas à ce type

 11   d'activité.

 12   Q.  Est-ce que c'était votre attitude que vous aviez pendant toute la durée

 13   des frappes aériennes de l'OTAN ? Est-ce que vous avez maintenu cette

 14   attitude ?

 15   R.  Oui, c'était mon attitude à moi, c'était l'attitude également de tous

 16   les autres commandants de corps d'armée ainsi que tous mes collègues. Nous

 17   étions formés de cette façon-là, nous étions éduqués de cette façon-là,

 18   nous avons notre honneur de soldat, notre honneur d'officier, que nous

 19   devions toujours appliquer dans toutes les circonstances, partout et tout

 20   le temps.

 21   Q.  Merci bien, Mon Général. Pourriez-vous, je vous prie, prendre

 22   connaissance du point 9, pour ne pas que je donne lecture de l'ensemble du

 23   paragraphe. Est-ce que votre réponse à trait à ceci, se réfère à cela ?

 24   R.  [aucune interprétation]

 25   Q.  Vous n'êtes pas obligé de le lire à haute voix, mais lisez-le dans

 26   votre for intérieur, et par la suite vous nous ferez un commentaire, je

 27   vous prie.

 28   R.  C'est justement ce que j'ai dit tout à l'heure. Il était nécessaire

Page 11358

  1   d'abord de donner aux officiers commandant les unités et à tous leurs

  2   subordonnés, il était très important que ces derniers montrent que

  3   c'étaient des combattants qui démontrent leur honneur d'officier de

  4   carrière. Chez nous, le soldat a toujours été synonyme d'honneur. Donc,

  5   j'ai fait appel à cet honneur de soldat, cet honneur militaire, pour ne pas

  6   qu'il y ait relâchement de ces qualités morales et pour que l'on maintienne

  7   son honneur de soldat.

  8   Q.  Très bien. Merci.

  9   M. POPOVIC : [interprétation] Je demanderais que ce document soit versé au

 10   dossier.

 11   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 12   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La pièce sera versée au dossier. Mais

 13   on m'a indiqué que la traduction en anglais porte la date du 26 mars, alors

 14   que l'original semblait avoir été fait le 24. Non, c'est l'inverse.

 15   M. POPOVIC : [interprétation] Oui, effectivement, c'est tout à fait

 16   possible la date qui figure sur le document, dans la version serbe, est

 17   celle du 26 mars. Oui, effectivement, vous avez tout à fait raison. Dans la

 18   traduction, nous pouvons lire la fate du 24 mars. Mais nous allons demander

 19   au témoin d'essayer d'expliquer ceci.

 20   Q.  Quelle est la date, Mon Général ?

 21   R.  La date qui figure dans ce document est la date du 26 mars 1999.

 22   C'était le lendemain des frappes. C'est la date indiquant le lendemain des

 23   frappes aériennes.

 24   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, cette pièce

 25   portera la cote D00688.

 26   M. POPOVIC : [interprétation] Merci. J'aimerais que l'on revienne

 27   brièvement de nouveau au document P958, et j'aimerais que l'on analyse la

 28   page. En B/C/S, c'est la page 8 -- ou plutôt, excusez-moi, non, il s'agira

Page 11359

  1   de la page 11 du document du 31 mars.

  2   Q.  Mon Général, un document du 31 mars 1999. Je voudrais attirer votre

  3   attention sur le point 2.3 dans votre classeur.

  4   R.  Oui, je l'ai trouvé.

  5   Q.  Voilà, justement c'est le 31 mars 1999 dans votre journal. Dans la

  6   première partie, vous dites, s'agissant du radar qui était atteint et

  7   détruit, les soldats suivants ont été tués, il s'agit de Ivanovic Zoran et

  8   de Slavkovic [phon] Djordje. Lorsque je parle du fait que c'est vous qui

  9   ayez écrit ceci, je pense plutôt à votre unité, et il s'agit de l'unité à

 10  la tête de laquelle vous vous trouviez. Si nous prenons la page du 1er avril

 11   1999, ici vous parlez des soldats Cimbaljevic et Ivanovic. Je vous

 12   demanderais seulement de jeter un coup d'œil sur ce document. Je ne vous

 13   demande pas de faire de commentaires.

 14   M. POPOVIC : [interprétation] Maintenant, j'aimerais que l'on examine

 15   ensemble la pièce D006-4309.

 16   Q.  Mon Général, dans votre journal, vous ne parlez pas d'événements

 17   inhabituels qui se seraient déroulés le 31 mars et le 1er avril. Nous

 18   pouvons voir de nouveau que ce document est adressé à la Commission pour la

 19   coopération avec le TPIY et à son unité d'experts, et le 1er avril 1999,

 20   vous avez donné une déclaration à Milos Dosan. De quoi s'agit-il ? Pouvez-

 21   vous nous expliquer ce que c'est ?

 22   R.  J'ai expliqué tout à l'heure que tous les événements, il s'agit de la

 23   même commission à qui j'ai donné ma déclaration précédente également. Tous

 24   les événements qui étaient liés à Djakovica et tous les événements qui

 25   étaient mentionnés dans le livre en question, j'avais pour obligation de

 26   donner ma propre version des faits à cette commission. Ils m'ont demandé de

 27   faire une déclaration, de décrire, d'après ma mémoire, puisque nous

 28   n'avions pas de documents à notre disposition, de leur dire ce qui s'est

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  1   passé, comment les choses se sont déroulées et de donner ma version des

  2   faits concernant l'événement qui est mentionné dans le livre. C'est ainsi

  3   que j'ai fait ma déclaration à cette commission.

  4   Q.  Mon Général, on vous a posé des questions concernant le hameau de Cerim

  5   - vous en avez parlé - et j'aimerais que l'on affiche la page suivante dans

  6   les deux versions. Vous dites :

  7   "Je suis passé par cet hameau personnellement et je n'ai remarqué

  8   aucune activité dans le quartier de Cerim, qui se trouve non loin de

  9   l'endroit où nos soldats ont péri. D'après la déclaration du commandant de

 10   la 3e Division, le commandant Dusko Vukasinovic, dont l'une des sections se

 11   trouvait à l'installation Vinarski Podrum, non loin du quartier ou du

 12   hameau de Cerim, ils n'ont pas déclaré avoir vu ou entendu aucune activité

 13   qui pourrait leur faire croire qu'il s'agissait d'activités menées par

 14   l'armée yougoslave ou la police."

 15   Pouvez-vous nous expliquer, s'il vous plaît, un peu plus en profondeur ce

 16   que vous voulez dire ici ?

 17   R.  Oui, j'ai décrit les événements qui étaient liés à la mort de mes

 18   soldats, car l'endroit où mes soldats ont été tués à côté du radar,

 19   l'endroit s'appelle Lum-Bunar, et se trouve, d'une certaine façon, non loin

 20   du hameau de Cerim. La nuit précédente, la nuit où nous avons essayé

 21   d'extraire nos soldats, de sauver nos soldats, j'ai passé par ce hameau et

 22   je n'ai rien remarqué. Mais il faut dire qu'à ce moment-là il n'y avait

 23   plus d'électricité dans la ville de Djakovica. Il faisait très noir. Il

 24   faisait nuit. Il n'y avait plus d'électricité. J'avais une unité qui se

 25   trouvait dans une installation et qui s'appelait Vinarski Podrum, et qui, à

 26   vol d'oiseau, se trouvait de Cerim à 400 ou 300 mètres, si vous voulez. Le

 27   commandant de cette unité m'a informé que nos soldats ne se trouvaient, de

 28   toute façon, jamais sans commandant, et que le commandant ni les soldats ne

Page 11361

  1   lui ont pas parlé d'avoir remarqué des activités s'étant déroulées dans le

  2   hameau de Cerim. Pour ces raisons-là, je n'ai absolument aucune

  3   connaissance, et je ne sais pas pourquoi et comment les faits sont décrits

  4   dans ce livre du fond en question, et c'est la raison pour laquelle je fais

  5   cette affirmation et j'ai écrit ceci : que ni moi ni d'autres membres de

  6   mon unité aient eu quelque connaissance que ce soit du crime commis à

  7   Cerim. Nous n'avons pas non plus d'information à savoir qui aurait commis

  8   ces crimes allégués.

  9   Q.  Mon Général, je voulais savoir si à ce moment-là et au cours de cette

 10   période-là vous aviez des connaissances, quelque connaissance que ce soit,

 11   que des crimes avaient été commis à cet endroit-là ?

 12   R.  Non.

 13  Q.  Merci beaucoup. Ici, je vois que vous parlez du 31 mars et du 1er avril.

 14   Si l'on vous posait des questions concernant des événements qui se seraient

 15   déroulés dans la nuit entre le 1er et le 2 avril, est-ce que quelque chose

 16   aurait changé, est-ce que votre déclaration aurait changé ? Est-ce que vous

 17   aviez quelque connaissance que ce soit des événements qui s'étaient

 18   déroulés dans la nuit du 1er au 2 avril ?

 19   R.  Non, rien n'aurait changé, puisque les soldats en question qui se

 20   trouvaient dans le Vinarski Podrum, dans cette cave, ils s'y sont trouvés

 21   pendant un mois. Effectivement, j'étais passé par là la veille, mais les

 22   soldats se trouvaient constamment cantonnés à cet endroit-là. Ils s'étaient

 23   déplacés de leur caserne et s'étaient cantonnés à cet endroit-là. C'est la

 24   raison pour laquelle je maintiens mon affirmation et ce que j'ai dit un peu

 25   plus tôt, et je sais que le commandant de cette unité également affirme ne

 26   pas avoir su, ne pas avoir appris ce qui s'était réellement passé.

 27   Q.  S'agissant des frappes aériennes de l'OTAN sur les installations

 28   militaires et civiles dans la ville, à quoi ressemblait la vie à Djakovica

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  1   ?

  2   R.  Comme je l'ai dit, l'aviation se déroulait tous les jours dans la

  3   ville. Il y avait beaucoup d'installations, beaucoup de bâtiments qui

  4   avaient déjà été détruits, il y avait énormément de vitres de vitrines qui

  5   avaient explosé à la suite des détonations. Il y avait également des

  6   bâtiments qui étaient incendiés, il y avait des bâtiments qui avaient été

  7   détruits, des installations militaires également étaient détruites, mais il

  8   y avait un très grand nombre de bâtiments civils qui avaient également été

  9   détruits. Il n'y avait presque plus aucune station d'essence. Elles avaient

 10   été également prises pour cibles. Je dois dire que sur la ville de

 11   Djakovica, il y a eu des frappes aériennes de façon constante,

 12   principalement sur la ville de Djakovica.

 13   Q.  Merci. Vous avez parlé de la rue Katolicka, vous nous avez expliqué

 14   comment les anciennes maisons étaient construites et quelles pouvaient être

 15   les conséquences d'une seule roquette qui était lancée. Quelles ont été les

 16   conséquences des bombardements de l'OTAN sur d'autres quartiers de la ville

 17   ?

 18   R.  Ecoutez, je suis resté dans la ville de Djakovica pendant l'essentiel

 19   de cette période, donc je peux vous dire qu'ils ont utilisé des catégories

 20   bien précises d'armes pour des cibles bien précises. Par exemple, il y a

 21   avait une station d'essence Stella qui a été touchée. Au moment où elle a

 22   été touchée, les réservoirs qui se trouvaient sous terre ont commencé à

 23   exploser dans toute la ville, comme autant des boîtes de conserve, en fait

 24   ça je ne l'ai pas vus, mais je suis allé voir par la suite comment une

 25   unité de production de tabac qui s'appelait Virginia, et qui avait cinq

 26   étages, avait été littéralement détruite par une bombe, et ce, depuis le

 27   toit jusqu'au rez-de-chaussée, même s'il y avait entre chaque étage des

 28   parquets de béton qui étaient extrêmement épais, ils avaient quasiment deux

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  1   mètres d'épaisseur chacun, mais ils utilisaient donc différents types

  2   d'armes, et pour ce qui était des attaques contre les unités antiaériennes,

  3   ils utilisaient essentiellement des missiles téléguidés.

  4   Lorsqu'ils ciblaient certains bâtiments, ils utilisaient également

  5   des missiles de croisière, qui avaient une puissance destructrice

  6   extrêmement importante, mais qui avait également des bombes qui étaient

  7   plus ou moins grandes. Ils ont également utilisé des bombes à

  8   fragmentation, notamment les bombes à fragmentation que l'on utilise et qui

  9   anéantisse complètement le circuit électrique. Donc ils ont utilisé tous

 10   les types d'armes qu'ils avaient à leur disposition.

 11   M. POPOVIC : [interprétation] Avant la pause, je souhaiterais demander le

 12   versement au dossier de ce document.

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, cela sera fait.

 14   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce D00689, Monsieur le

 15   Président.

 16   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous reprendrons l'audience à 16

 17   heures 15.

 18   [Le témoin quitte la barre]

 19   --- L'audience est suspendue à 15 heures 48.

 20   --- L'audience est reprise à 16 heures 17.

 21   [Le témoin vient à la barre]

 22   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Popovic.

 23   M. POPOVIC : [interprétation] Merci.

 24   Q.  Pourrions-nous, je vous prie, afficher la pièce D006-4313, qui

 25   correspond à l'intercalaire 6 de votre classeur, Général.

 26   Donc, nous voyons qu'il s'agit d'un ordre qui porte la date du 2 avril

 27   1999. C'est un de vos ordres, et alors, je ne vais pas donner lecture de

 28   l'intégralité de l'ordre. Il y est question de droit international

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  1   humanitaire et du respect de ce droit international humanitaire. Est-ce que

  2   vous pourriez, je vous prie, nous dire rapidement ce que vous avez à nous

  3   dire à propos de tout ce document, notamment les paragraphes 2, 3 et 4, et

  4   dites-nous pourquoi est-ce que vous insistiez, en fait, là-dessus ?

  5   R.  Oui, effectivement, il s'agit d'un de mes ordres, et par cet ordre, je

  6   donnais l'ordre pour qu'à tout moment et quelles que soient les

  7   circonstances, les dispositions du droit international de la guerre doivent

  8   être respectées. J'indique que toutes les unités doivent respecter le droit

  9   international humanitaire, et qu'il était également de leurs devoirs de

 10   donner des informations s'ils se rendaient compte que quelqu'un ne

 11   respectait pas les dispositions du droit international humanitaire.

 12   Donc, j'indique dans ce document que tous les auteurs éventuels seront

 13   punis. A savoir, si quelqu'un commet un acte qui va à l'encontre du droit

 14   humanitaire international, il devait être sanctionné. J'avais également

 15   donné des consignes aux organes de sécurité car, dans ce cas d'espèce, les

 16   organes de sécurité devaient transférer l'auteur dudit crime devant un

 17   tribunal militaire. Et je dis également que tous les membres de la brigade

 18   doivent être informés de cet ordre. Et plus particulièrement, je demande

 19   aux commandants des unités et aux commandants des unités subordonnées de ne

 20   pas perdre cela de vue et de prendre des mesures en cas de non-respect du

 21   droit international humanitaire.

 22   Q.  Merci, Général. Est-ce qu'il y a, par exemple, des documents dont

 23   disposaient les membres de l'armée de Yougoslavie qui les exhortaient à

 24   respecter le droit humanitaire international ?

 25   R.  Oui, bien sûr. Tous les membres de l'unité, à commencer par moi-même

 26   jusqu'au tout dernier maillon de la brigade, avaient des instructions qui

 27   étaient accompagnées d'extraits bien précis qui décrivaient des situations

 28   dans lesquelles ils auraient pu se trouver en cas de guerre. Donc, c'était

Page 11365

  1   en fait quelque chose qui avait la taille d'une poche. C'était un petit

  2   livret plastifié que l'on pouvait mettre dans sa poche facilement, et comme

  3   ils étaient plastifiés, ils ne craignaient pas, par exemple, la pluie, même

  4   lorsque votre uniforme était mouillé. Donc en fait, fondamentalement, ils

  5   ne pouvaient absolument pas être détruits.

  6   Donc, par conséquent, personne n'aurait pu dire qu'ils n'étaient absolument

  7   pas informés des dispositions du droit humanitaire international et du

  8   respect de ce droit.

  9   Q.  Je vous remercie.

 10   M. POPOVIC : [interprétation] Et je souhaiterais demander le versement au

 11   dossier de ce document.

 12   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, ce document sera versé au

 13   dossier.

 14   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce D00690, Monsieur le

 15   Président.

 16   M. POPOVIC : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir le document

 17   D006-4315 à l'écran, je vous prie.

 18   Q.  Il s'agit du document qui se trouve à l'intercalaire 7 de votre

 19   classeur, Général. Donc, nous voyons qu'il s'agit d'un document du

 20   commandement de la 52e Brigade. Nous voyons que la date est la date du 6

 21   avril 1999. Le premier paragraphe est comme suit :

 22   "Forces placées sous le commandement de la brigade et déploiement en cas de

 23   combat."

 24   Et au numéro 2, vous voyez qu'il est question des "unités attachées et

 25   rattachées ou rattachées et resubordonnées."

 26   Est-ce que vous pourriez peut-être nous expliquer le sens de ces deux

 27   paragraphes, 1 et 2 ?

 28   R.  Oui, tout à fait. Alors, nous voyons qu'il est question des forces qui

Page 11366

  1   sont placées sous le commandement de la brigade et qui étaient déployées

  2   dans la zone.

  3   L'INTERPRÈTE : L'interprète demande à Me Popovic d'avoir l'amabilité

  4   débrancher son micro.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc, il est indiqué, par exemple, que le 1er

  6   Bataillon de la compagnie se trouve à Skivjane, et puis vous savez qu'il y

  7   en a un autre qui se trouve au poste frontalier de Vojinovic. Alors là, il

  8   s'agit en fait des éléments qui se trouvaient sous mon commandement, et

  9   c'étaient les officiers de ma brigade qui commandaient ces unités. Pour ce

 10   qui est du deuxième paragraphe, il s'agit d'unités qui avaient été

 11   rattachées et resubordonnées à d'autres unités, et ce, pour prêter main-

 12   forte dans le cadre de telles ou telles activités.

 13   En fait, toutes les unités avaient pour devoir ou devaient se protéger

 14   contre les attaques aériennes. Donc, ces unités qui avaient été rattachées

 15   ou resubordonnées à d'autres unités avaient été déployées pour justement

 16   apporter un renfort à d'autres unités et il s'agissait de défense

 17   antiaérienne, parce que ces autres unités, elles n'avaient pas été formées

 18   et équipées pour cibler des appareils ou des avions. Voilà ce que montre,

 19   en fait, ce récapitulatif. Par exemple, il est indiqué qu'une batterie du

 20   3e Bataillon d'artillerie se trouvait dans la zone de Zub, il y en a un

 21   autre qui se trouvait dans la zone du commandement du Corps de Pristina,

 22   puis il y avait la 549e Brigade motorisée, donc lorsque cela était

 23   nécessaire, ces unités étaient ainsi utilisées.

 24   Q.  Merci. Dites-moi, Général, sous quel commandement étaient placées ces

 25   unités rattachées et resubordonnées ?

 26   R.  Lorsqu'il est question de "resubordination" justement, on comprend

 27   aisément qu'il s'agissait d'unités qui étaient commandées par l'officier

 28   qui commandait l'unité auprès de laquelle cette partie de ma brigade avait

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  1   été rattachée et resubordonnée. En d'autres termes, cette unité était

  2   utilisée sur la base d'ordres qui étaient donnés par l'officier qui

  3   commandait l'unité auprès de laquelle les éléments de mon unité avaient été

  4   rattachés, et il n'agissait que sur ordre de cet officier chargé du

  5   commandement.

  6   M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais demander le versement au dossier

  7   de ce document.

  8   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce D00691.

 10   M. POPOVIC : [interprétation]

 11   Q.  Général, étant donné que nous parlons du 6 avril et de la période qui a

 12   suivi le 6 avril, est-ce que vous pourriez me dire s'il y a eu une

 13   offensive importante de la part des forces terroristes pendant cette

 14   période dans la zone de Kosare, en face de l'autre côté de la frontière

 15   albanaise ? Donc, c'était à Morina et Kosare.

 16    R.  Oui, le 7 avril, dans la zone du poste frontalier de Kosare, il y a eu

 17   un grand groupe de terroristes albanais qui provenaient de la république

 18   d'Albanie qui avait un appui d'artillerie de gros calibre, appui qui leur

 19   était donné par l'armée de la république d'Albanie. Ils avaient également

 20   un appui feu qui leur était apporté par les forces de l'OTAN. Je dirais que

 21   Nikola Popovic, qui était un des soldats de mon unité, a été tué pendant

 22   cette attaque. Le lieutenant Misic a également été blessé. Je vous parle de

 23   mon unité, mais ce fut une attaque qui a eu lieu sur une zone assez large

 24   et qui a représenté un danger grave, à savoir s'ils s'étaient emparés de

 25   certains points, de certains lieux du pays, de certaines élévations, cela

 26   aurait pu représenter un grave danger.

 27   Puis en fait, on avait l'impression que c'était déjà quasiment la

 28   deuxième phase de l'agression. Il s'agit d'une invasion terrestre.

Page 11368

  1   L'agression, elle, avait commencé le 23 mars, mais c'était une agression

  2   aérienne, mais là il y avait véritablement ce danger qui se profilait à

  3   l'horizon, danger d'attaques terrestres, et en fait il s'agissait d'une

  4   attaque terrestre. C'est exactement de cela qu'il s'agissait.

  5   Q.  Merci.

  6   M. POPOVIC : [interprétation] Est-ce que nous pourrions voir le document

  7   D006-4318, je vous prie.

  8   Q.  Cela correspond à l'intercalaire 8 de votre classeur.

  9   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 10   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je n'ai pas l'impression que cela

 11   existe dans le prétoire électronique.

 12   M. POPOVIC : [interprétation] C'est le numéro D006-4318. C'est la cote que

 13   j'ai, moi, en tout cas. Une petite seconde pour vérifier cela. Entre-temps,

 14   je vais, de toute façon, passer au document suivant, puis nous reviendrons

 15   sur ce document dont je devrai demander l'affichage.

 16   Est-ce que nous pourrions avoir le document D006-4320.

 17   Q.  Il s'agit de l'intercalaire 9 de votre classeur, Général. M. POPOVIC :

 18   [interprétation] Nous avons le document ? Oui, il me semble que c'est le

 19   bon document.

 20   Q.  Il s'agit d'un de vos ordres qui porte la date du 10 avril 1999. Au

 21   paragraphe premier, vous faites référence à l'utilisation de ressources de

 22   combat inhumaines. Est-ce que vous pourriez lire ceci et nous dire ce que

 23   vous entendiez exactement et que savez-vous de l'utilisation de ce type de

 24   matériel ou d'équipement sur le territoire du Kosovo ?

 25   R.  Oui, oui, il s'agit d'un de mes ordres qui régule ce type de situation,

 26   et voila ce que je dis au premier paragraphe :

 27   "Les commandants d'unité prendront toutes les mesures nécessaires

 28   afin de protéger les unités, qu'elles soient en déplacement ou relogées, ou

Page 11369

  1   qu'elles soient dans des secteurs de combat pour y protéger des appareils

  2   ennemis qui opèrent à partir de l'espace aérien et qui utilisent les toutes

  3   dernières armes inhumaines."

  4   Il faut savoir que pendant l'agression de l'OTAN, nous nous déplacions tout

  5   le temps et nous étions relogés, recantonnés tout le temps. Les unités

  6   devaient être déplacées tout le temps parce que le danger c'était qu'on

  7   soit complètement anéantis si on passait trop de temps dans une zone bien

  8   précise. C'est pour cela que j'ai donné cet ordre. Notamment parce que des

  9   armes inhumaines avaient déjà été utilisées. Je fais essentiellement

 10   référence aux bombes à fragmentation, mais également à des munitions qui

 11   contiennent de l'uranium appauvri.

 12   Vous pouvez voir qu'il s'agit d'un ordre du 10 avril, ce qui signifie

 13   que juste après cette date, une tentative a été faite pour lancer une

 14   attaque terrestre, les frappes aériennes de l'OTAN ont subi une

 15   intensification et ils ont utilisé toutes les ressources dont ils

 16   disposaient afin d'apporter leur soutien à l'arrivée des terroristes en

 17   provenance d'Albanie.

 18   Q.  Merci, Général. Qu'en est-il du paragraphe 4 de cet ordre, est-ce que

 19   vous pourriez nous l'expliquer rapidement. Il est question des personnes

 20   non armées, femmes, enfants, personnes âgées et autres qui se trouvent dans

 21   le secteur de déploiement du combat de l'unité doivent être traités de

 22   façon humaine et conformément aux principes des dispositions du droit

 23   international de la guerre ?

 24   R.  Bien évidemment. J'ai donné ce type d'ordres, mais également le

 25   commandant de mon corps me donnait également ce type d'ordres, et il y

 26   était question des principes et des dispositions du droit international de

 27   la guerre qui étaient répétés, et je dirais qu'il n'y a quasiment pas un

 28   seul ordre où on ne fait pas une référence à cela, où l'on ne met pas en

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  1   garde, on n'avertit pas les troupes. Parce qu'il faut savoir que les unités

  2   changeaient, il y avait un roulement, il y avait des arrivées de nouveaux

  3   soldats, de nouveaux officiers constamment, donc ce type d'ordres n'était

  4   absolument pas superflu. Je pense que ce type d'ordres, que ce genre de

  5   dispositions faisait partie intégrante de tous les ordres.

  6   Q.  Merci.

  7   M. POPOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais

  8   demander le versement au dossier de ce document.

  9   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, cela sera fait.

 10   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce D00692.

 11   M. POPOVIC : [interprétation] Merci. On vient de me dire que le document

 12   précédent a été localisé. Il s'agit du document D006-4318, qui correspond à

 13   votre intercalaire 8, Général, et le document peut maintenant être affiché

 14   à l'écran. Voilà, c'est exactement ce document-ci.

 15   Q.  Il s'agit d'un autre ordre que vous avez donné, Général, ordre qui

 16   porte la date du 10 avril 1999, et au premier paragraphe vous dites que

 17   tous les auteurs d'infractions criminels seront immédiatement escortés

 18   auprès d'un juge d'instruction compétent du tribunal militaire du

 19   commandement du Corps de Pristina, et ce, avec un rapport d'une enquête

 20   judiciaire. Vous dites au numéro 2 que les mesures précisées au paragraphe

 21   premier de cet ordre seront également prises à l'encontre de conscrits et

 22   de volontaires dans l'armée. Au paragraphe 3, vous indiquez que tous les

 23   effectifs de l'unité doivent être informés des mesures qui seront prises

 24   contre les auteurs de ce type d'infractions et délits.

 25   Qu'avez-vous à nous dire à ce sujet, à propos de ce document, brièvement ?

 26   R.  Cela reprend tout à fait la quintessence de mes autres ordres, car

 27   j'indique qu'un rapport d'enquête judiciaire doit être établi et que tous

 28   les auteurs d'infractions et de crimes et de délits doivent être

Page 11371

  1   immédiatement présentés devant un juge d'instruction du tribunal militaire.

  2   Je donne également l'ordre aux chefs de la sécurité, notamment de la police

  3   militaire, qui sont habilités à appréhender les membres d'unités en cas de

  4   crimes, je leur donne l'ordre de le faire sans aucune hésitation.

  5   Pour ce qui est du paragraphe 2, j'indique que cet ordre est

  6   également valable pour les conscrits et les volontaires. J'avais également

  7   donné l'ordre que des rapports devront être présentés au commandement à

  8   propos des mesures prises, mais également que toutes les autres unités

  9   devront en être informées, et ce, afin d'agir de façon préventive. Disons,

 10   par exemple, qu'il y avait un cas individuel d'infraction ou de violation

 11   du droit humanitaire international qui concernait une unité, par le

 12   truchement de cet ordre, je donne l'ordre d'informer les autres unités, et

 13   ce, grâce à notre service de sécurité, pour que justement l'attention soit

 14   attirée sur le fait que des cas semblables ne devront pas se produire dans

 15   d'autres unités, et cela doit être fait par les commandants responsables.

 16   J'indique également que les commandants des unités seront tenus

 17   responsables de la mise en œuvre de cet ordre, et quant à moi-même, j'étais

 18   responsable vis-à-vis du commandant du corps.

 19   Q.  Je vous remercie.

 20   M. POPOVIC : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement au

 21   dossier de ce document.

 22   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bien.

 23   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cela deviendra la pièce D00693.

 24   M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais demander l'affichage du document

 25   D006-4333.

 26   Q.  Il s'agit du document qui se trouve à l'intercalaire 10 de votre

 27   classeur. Il s'agit d'un ordre du 13 avril 1999, et cela concerne le

 28   commandement du Corps de Pristina et du fait que des mesures doivent être

Page 11372

  1   prises pour défendre la RFY.

  2   M. POPOVIC : [interprétation] Est-ce que la page 2 du document pourrait

  3   être affichée dans les deux langues, je vous prie.

  4   Q.  Général, veuillez consulter le paragraphe 6, je vous prie.

  5   R.  Oui. Il s'agit d'un ordre du commandant du Corps de Pristina.

  6   Q.  Un petit moment, je vous prie. J'ai l'impression que ce n'est pas le

  7   document dont j'avais demandé l'affichage.

  8   M. POPOVIC : [interprétation] Document D006-4333. Non, je m'excuse. En

  9   fait, il s'agit du document D006-4323. Le 4333 sera le document suivant

 10   dont je demanderai l'affichage. C'est le bon document : Commandement du

 11   Corps de Pristina. Page 2 pour les deux versions.

 12   Q.  Général, veuillez regarder ce paragraphe 6. J'aimerais que vous nous

 13   présentiez vos observations de façon très brève. Quel ordre est donné par

 14   le commandement du Corps de Pristina ?

 15   R.  Oui, effectivement, c'était un ordre donné par le commandant du Corps

 16   de Pristina destiné à tous les commandants et à toutes les unités

 17   subordonnés. Il insiste pour qu'il y ait une amélioration de la discipline,

 18   pour que le comportement des soldats soit un comportement digne de soldats,

 19   et ce, afin de prévenir de mauvais comportements de la part de personnes,

 20   des pillages, et cetera, et cetera, tout en maintenant la réputation de

 21   l'armée grâce au comportement des soldats.

 22   Il faut savoir que nos commandants, et le général Lazarevic était mon

 23   commandant, avaient donné cet ordre pour que je le relaye à mes

 24   subordonnés. Nous insistions toujours sur l'ordre, la discipline, un

 25   comportement honorable, et le fait qu'il ne fallait pas utiliser de façon

 26   superflue la force. Nous insistions pour que toutes les vertus ou toutes

 27   les qualités de l'armée qui va combattre soient respectées, non seulement

 28   pour que cette armée puisse exister, mais pour que sa réputation puisse

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  1   également exister.

  2   M. POPOVIC : [interprétation] Page suivante dans les deux langues.

  3   Q.  Vous voyez qu'au alinéa 2 du paragraphe 15, il est indiqué : "Procéder

  4   à une analyse -- analyser la réaction des formations de réserve et proposer

  5   des mesures." J'aimerais, dans un premier temps, que vous nous indiquez

  6   s'il y avait des réservistes au sein de votre unité. J'aimerais savoir par

  7   quel moyen ils étaient arrivés, comment, quels étaient les documents qui

  8   les accompagnaient. Est-ce que vous pourriez nous parler de tous les

  9   aspects utiles, à savoir à propos des réservistes et des volontaires.

 10   R.  Pour vous dire la vérité, j'avais des volontaires dans mon unité. Mais

 11   je pense qu'il va falloir d'abord, dans un premier temps, que nous nous

 12   mettions d'accord sur la définition du terme "volontaire".

 13   Q.  Excusez-moi. La question que je vous ai posée ne concernait pas les

 14   soldats de réserve, mais uniquement les volontaires. J'aimerais que dans

 15   votre réponse, vous vous concentriez exclusivement sur les volontaires.

 16   R.  Les volontaires sont des hommes qui n'avaient pas reçu un appel de

 17   mobilisation ou qui n'ont pas été mobilisés, mais inspirés par le

 18   patriotisme, ils se sont présentés auprès des unités de l'armée yougoslave.

 19   Par exemple, j'avais des volontaires au sein de mon unité. Ils provenaient

 20   du commandement du Corps de Pristina. Ils étaient toujours amenés sur place

 21   par un officier supérieur. Donc, il ne s'agissait pas d'individus

 22   éparpillés. Ils étaient amenés en groupe par un officier supérieur du Corps

 23   de Pristina, et ils arrivaient accompagnés d'une documentation complète

 24   avec leurs livrets militaires, où il était indiqué quelles étaient les

 25   branches de l'armée au sein desquelles ils avaient servi et toutes les

 26   autres données pertinentes, et c'est en fonction de ces données qu'ils

 27   étaient déployés.

 28   Une fois intégrés au sein de l'unité, nous leur délivrions des armes et ils

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  1   étaient déployés en fonction de la branche de l'armée au sein de laquelle

  2   ils avaient servi. Si, par exemple, à l'époque où il avait fait son service

  3   militaire, un soldat travaillait dans les transmissions, nous le déployions

  4   à ce même poste. Si, en revanche, il travaillait dans l'artillerie, il

  5   était de nouveau déployé dans une unité d'artillerie. S'il s'agissait d'un

  6   infirmier, nous le déployions dans les urgences.

  7   Mais toujours est-il que lors du déploiement de ces soldats, et quel

  8   que soit leur nombre, ils n'étaient jamais déployés tous ensemble. En fait,

  9   le nombre de volontaires ne devait pas dépasser le tiers des effectifs au

 10   sein d'une unité, et ils se trouvaient toujours sous le commandement d'une

 11   unité d'active.

 12   Il arrivait qu'une unité intègre un certain nombre d'individus qui,

 13   d'après nous, n'étaient pas de même à s'acquitter de leurs tâches, d'autant

 14   plus que notre unité était celle de la défense antiaérienne, il fallait

 15   avoir une très bonne vue et il fallait être en très bonne forme physique à

 16   cause des délogements qui survenaient très souvent. Par conséquent, les

 17   volontaires qui ne pouvaient pas être engagés au sein de notre service,

 18   nous les faisions revenir auprès du commandement du Corps de Pristina pour

 19   qu'ils soient déployés ailleurs.

 20   Donc, j'avais des volontaires au sein de mon unité. Du moment où ils

 21   avaient été intégrés à l'unité, ils ne se distinguaient plus des autres

 22   soldats. Entre nous, nous nous servions du terme "volontaires" pour les

 23   désigner parce qu'ils étaient venus de leur propre gré pour servir au sein

 24   de l'unité, et ils l'avaient fait avec honneur, à la différence de quelques

 25   autres individus qui s'étaient enfuis du pays pour éviter d'être mobilisés.

 26   Q.  Aviez-vous des règles en vigueur définissant le nombre de volontaires

 27   qui pouvaient servir au sein d'une unité donnée ?

 28   R.  Je viens de l'indiquer, le nombre de volontaires ne devait pas dépasser

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  1   le tiers des effectifs au sein d'une unité. Par exemple, si nous avons 30

  2   soldats au sein d'une section, le nombre de volontaires dans cette section

  3   ne devait pas dépasser dix soldats. Ceci était défini avec beaucoup de

  4   rigueur et de précision. Donc, ils n'étaient jamais regroupés tous

  5   ensemble, et ils n'étaient jamais commandés par l'un des volontaires. Au

  6   contraire, ils étaient toujours subordonnés à nos officiers supérieurs

  7   réguliers d'active.

  8   M. POPOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, merci, et Messieurs

  9   les Juges, je souhaite demander le versement au dossier de ce document.

 10   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Fort bien.

 11   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, ce sera la pièce

 12   D00694.

 13   M. POPOVIC : [interprétation] Merci. Passons maintenant au document D006-

 14   4333.

 15   Q.  Général, le document figure à l'intercalaire 11 dans votre classeur. Il

 16   s'agit d'un ordre que vous avez émis le 13 avril 1999. J'aimerais que vous

 17   vous concentriez sur le paragraphe 3, et plus particulièrement par la

 18   phrase :

 19   "Prendre des mesures énergiques pour prévenir la consommation

 20   d'alcool, les cas de désertion, refus de se conformer aux ordres émis, et

 21   puis accorder la plus grande attention à tout ce qui concerne l'apparence

 22   personnelle des soldats, leur comportement et le faire en établissant des

 23   contacts directs avec les soldats."

 24   R.  Voilà ce que je peux dire, c'est que nous avons tout fait pour

 25   renforcer la discipline et maintenir l'ordre. Evidemment, il est toujours

 26   interdit de consommer de l'alcool dans une armée, puisque les hommes sont

 27   armés et exposés à un stress constant.

 28   Et ici dans la partie du texte où il est question de leur apparence

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  1   physique, de la présentation, il arrivait dans la ville de Djakovica à

  2   l'époque où la poste fonctionnait toujours, il arrivait que des hommes

  3   viennent des postes frontaliers pour passer un coup de téléphone, pour

  4   faire signe à leur famille, et parmi ces hommes, il y en avait quelques-uns

  5   qui ne se présentaient pas comme un militaire devrait le faire. Leurs

  6   uniformes étaient sales, leurs cheveux n'étaient pas coupés, ils n'étaient

  7   pas rasés, et ceci était compréhensible au vu des circonstances dans

  8   lesquelles ils vivaient, mais ceci ressortait et frappait l'œil, et l'image

  9   projetée n'était pas très bonne. Ceci était particulièrement prononcé chez

 10   les soldats de réserve. Eux aussi, évidemment, étaient des soldats, mais

 11   parmi eux, il y avait des personnes âgées qui n'avaient pas vraiment une

 12   bonne apparence dans leur uniforme, de toute façon, et au vu des

 13   circonstances, c'est parce qu'ils avaient passé une certaine période du

 14   temps dans la zone de Kosare, ils s'étaient laissés aller.

 15   Pour ce qui est des enseignes qu'ils devaient arborer, seules les

 16   enseignes officielles de l'armée yougoslave étaient permises.

 17   Q.  Merci, Général. Lorsqu'il est question des enseignes, savez-vous s'il y

 18   a eu des membres d'unités paramilitaires sur le territoire du Kosovo-

 19   Metohija entre 1998 et 1999 ?

 20   R.  La plupart de mon temps, je l'ai passé à Djakovica. Cependant, je me

 21   suis souvent déplacé ailleurs pour faire le tour des unités sous mon

 22   commandement, et celles-ci étaient déployées depuis Pec, puis à Kijevo,

 23   Pristina, Gnijlane. Nulle part je n'ai pu relever la présence d'unités

 24   paramilitaires. La seule unité paramilitaire active dans la région était

 25   l'armée terroriste de l'UCK. Mais je dois avouer que je n'en ai jamais vu

 26   un seul membre de mes propres yeux. Sur la base des rapports reçus des

 27   officiers qui m'étaient subordonnés et à la base de ce que j'ai pu voir

 28   comme témoin oculaire, je n'ai jamais relevé la présence d'une unité

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  1   paramilitaire quelconque.

  2   Q.  Merci.

  3   M. POPOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je souhaite demander le

  4   versement au dossier de ce document.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.

  6   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, ce sera la pièce

  7   D00695.

  8   M. POPOVIC : [interprétation] Merci. Passons maintenant au document D006-

  9   2363.

 10   Q.  Le document correspond à l'intercalaire 12 dans votre classeur,

 11   Général.

 12   M. POPOVIC : [interprétation] D006-2363, s'il vous plaît.

 13   Q.  C'est un rapport de combat émanant de votre commandement et envoyé au

 14   commandement du Corps de Pristina, la date est le 14 avril 1999. Rubrique

 15   1, paragraphe 2, je lis :

 16   "L'ennemi n'a pas engagé des activités visant les installations de la

 17   brigade, mais à proximité du poste où étaient déployées nos unités, village

 18   de Ripaj et Madanaj et le pont de Terzijski, ils ont causé un véritable

 19   massacre."

 20   Alors, Général, que pouvez-vous nous dire sur ce document, quelles sont les

 21   connaissances immédiates dont vous disposez sur ce sujet ?

 22   R.  Oui, je me souviens de cet événement et on pourrait pratiquement dire

 23   que j'en ai été témoin oculaire. Ceci s'est produit dans le village Meja,

 24   les avions de l'OTAN ont frappé une colonne de réfugiés, de civils de

 25   souche albanaise. Deux aéronefs ont frappé cette colonne de réfugiés, et en

 26   suivant l'ordre du commandant du Corps de Pristina, j'ai été envoyé sur les

 27   lieux pour voir ce qu'on pouvait y faire. En même temps, j'ai donné l'ordre

 28   au chef de notre service médical d'envoyer une ambulance depuis la garnison

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  1   pour voir s'il était possible de fournir une assistance médicale aux

  2   blessés.

  3   Je suis arrivé sur les lieux une heure après la fin des frappes de

  4   l'OTAN, et je dois dire que j'ai retrouvé un spectacle horrible. Les

  5   cadavres fumaient encore. On voyait des parties de tracteur éparpillées

  6   partout. Des hommes avaient été brûlés, leurs cadavres éparpillés. Une

  7   situation extrêmement pénible. Cependant ce que j'ai immédiatement relevé,

  8   c'était le point suivant, à la tête de cette colonne se trouvait un

  9   monsieur, un homme âgé, il devait avoir environ 75 ans, d'une apparence

 10   très comme il faut. Et au moment où je suis arrivé, je lui ai posé la

 11   question, mais que s'est-il passé, il m'a expliqué qu'il avait vu deux

 12   avions, qu'il avait entendu des détonations, il me l'a montré en

 13   gesticulant, et il n'avait plus rien à ajouter.

 14   Alors, qu'est-ce qui est intéressant dans tout ceci. Dans la ville de

 15   Djakovica, nous n'avions pas de télévision, nous n'avions pas d'équipement

 16   pour pouvoir enregistrer cet événement. Donc une équipe était arrivée sur

 17   les lieux depuis Prizren. Et moi je me tenais toujours auprès de ce

 18   vieillard, nous étions ensemble. Au moment où l'équipe de télévision est

 19   arrivée, il s'est soudainement métamorphosé. J'ai été stupéfait de voir

 20   comment soudainement il a courbé son dos pour donner l'impression que

 21   c'était un pauvre homme affligé, il a commencé à s'exprimer en serbe d'une

 22   manière erronée, et puis lorsque les journalistes lui ont posé la question

 23   de savoir ce qui s'était passé, il a expliqué qu'il avait entendu une

 24   détonation, mais il ne savait pas s'il s'agissait vraiment d'avion ou d'une

 25   mine qui aurait explosé, et s'il s'agissait effectivement d'avion, de

 26   frappes aériennes, alors il ne pouvait pas dire à qui appartenaient ces

 27   avions.

 28   Donc sous mes yeux, je voyais une métamorphose incroyable. Il avait

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  1   complètement modifié son comportement, comme s'il s'agissait d'un rôle

  2   qu'il avait pratiqué depuis longtemps. Et j'ai décrit déjà cet événement

  3   dans le livre que j'ai publié, mais je vous assure que c'est de la vérité

  4   pure.

  5   Nous avons envoyé une équipe à nous sur les lieux, nous n'avons pas pu

  6   faire grand-chose. Par la suite, nous avons reçu un rapport émanant de

  7   l'hôpital de Djakovica indiquant le nombre de personnes qui ont trouvé la

  8   mort, la plupart d'entre eux étaient des femmes et des enfants, très peu

  9   d'hommes figuraient sur cette liste. L'impression que j'ai eue, c'est que

 10   le seul homme dans cette colonne, que c'était le vieillard, ce monsieur âgé

 11   dont je vous ai parlé. Donc voilà, c'est quelque chose que j'ai vu de mes

 12   propres yeux. Je ne sais pas si j'ai vraiment pu faire revivre cette scène

 13   sous vos yeux, mais c'est une scène dont je ne préfère ne pas me souvenir

 14   tous les jours, c'est quelque chose que je préfère oublier.

 15   Q.  Merci, Général.

 16   M. POPOVIC : [interprétation] Je souhaite demander le versement au dossier

 17   de ce document.

 18   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.

 19   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, ce sera la pièce

 20   D00696.

 21   M. POPOVIC : [interprétation] Merci. Je souhaite demander l'affichage du

 22   document D006-4336.

 23   Q.  Le document figure à l'intercalaire 13 dans votre classeur, Général. Le

 24   document que nous avons sous les yeux est un rapport de combat régulier du

 25   commandement du Corps de Pristina, la date est le 16 avril 1999. J'aimerais

 26   que vous vous concentriez sur le chapitre 1, paragraphe 3 :

 27   "Entre 7 heures 50 et 8 heures 10 le 16 avril, l'ennemi a jeté des

 28   pamphlets de propagande sur nos unités."

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  1   Pouvez-vous nous dire de quelles connaissances vous disposez à ce sujet,

  2   s'il vous plaît ?

  3   R.  Oui, ces pamphlets ont fait leur apparition pour la première fois le 16

  4   avril. S'ils avaient été jetés plus tôt, nous l'aurions signalisé plus tôt

  5   dans le rapport. Une immense quantité de ces pamphlets avait été jetée

  6   depuis les avions, on pouvait les trouver partout, partout dans la ville,

  7   mais portés par le vent, ces pamphlets arrivaient un peu partout. Les

  8   pamphlets étaient imprimés sur un papier de bonne qualité, donc ils

  9   résistaient bien à la pluie, à la rosée, au soleil.

 10   Quant à leur contenu il variait d'un pamphlet à l'autre. Ainsi, l'un des

 11   pamphlets répertoriait les commandants qui, affirmait-on, suivaient

 12   constamment la situation. Puis d'autres pamphlets invitaient les soldats à

 13   déserter. Puis un certain nombre de pamphlets auraient pu faire peur à qui

 14   que ce soit, ces pamphlets avaient fait leur apparition deux ou trois jours

 15   après le début de la campagne aérienne. Des bombardiers stratégiques B-52

 16   avaient été utilisés dans cette campagne, on sait qu'ils peuvent porter

 17   plusieurs tonnes de bombes.

 18   Et l'un de ces pamphlets montrait l'image d'un bombardier jetant toute une

 19   pluie de bombes, et il est indiqué que ces bombes seront utilisées tant que

 20   la police et l'armée n'auraient été chassées depuis le territoire du

 21   Kosovo-Metohija. Evidemment, moi j'ai vu ces avions lorsqu'ils étaient

 22   actifs, plutôt je les ai vu survoler le poste où j'ai été cantonné. Il

 23   s'agit d'avion qui ressemble à des avions "jumbos", et le seul fait de les

 24   regarder infligeait la peur. Il n'était même pas nécessaire qu'ils jettent

 25   des bombes. D'autres avions avaient été utilisés également, mais ceux-ci

 26   étaient les plus frappants.

 27   Q.  Merci, Général.

 28   M. POPOVIC : [interprétation] Je souhaite demander le versement au dossier

Page 11381

  1   de ce document.

  2   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.

  3   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, ce sera la pièce

  4   D00697.

  5   M. POPOVIC : [interprétation]

  6   Q.  Général, puisque nous parlons de ces pamphlets, j'aimerais que le

  7   document D006-2513 soit affiché à l'écran, le document qui correspond à

  8   l'intercalaire 14 dans votre classeur, Général. Alors, le document que vous

  9   avez sous les yeux est un pamphlet. J'aimerais savoir si vous avez déjà

 10   pris connaissance de ce pamphlet et si vous savez quelle est sa teneur ?

 11   Avez-vous eu l'occasion de le voir de vos propres yeux ?

 12   R.  Oui, j'ai déjà pris connaissance de ce document, mais il ne faisait pas

 13   partie des pamphlets qui étaient jetés depuis les avions. Ce pamphlet a été

 14   imprimé sur une feuille de papier rouge, lettres noires sur fond rouge.

 15   Evidemment, je ne maîtrise pas l'albanais, mais mes officiers supérieurs me

 16   l'ont traduit, et la plupart de mes soldats qui provenaient du territoire

 17   du Kosovo-Metohija maîtrisaient la langue siptar.

 18   Ils m'ont expliqué que dans ce pamphlet on décrivait la situation

 19   prévalente. Il a été destiné avant tout ou exclusivement à la population

 20   albanaise. A cette population, il est expliqué ici que l'UCK ne saurait les

 21   protéger. La population est invitée, encouragée à quitter provisoirement le

 22   territoire du Kosovo-Metohija. Et un certain nombre d'axes routiers sont

 23   recommandés, plus précisément, on insiste pour qu'ils se rendent en Albanie

 24   et en Macédoine. Puis, en bas de la page, il est indiqué que cet

 25   encouragement leur est adressé par le président de la république, Ibrahim

 26   Rugova.

 27   M. POPOVIC : [interprétation] Merci, Général. Messieurs les Juges, je

 28   souhaite demander le versement au dossier de ce document.

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  1   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le témoin a indiqué que ce document

  2   n'était pas jeté depuis les avions, mais il n'a pas expliqué de quelle

  3   manière il est tombé sur ce document.

  4   M. POPOVIC : [interprétation] Nous allons nous en assurer dès maintenant.

  5   Q.  Général, vous avez entendu la question du Juge. Expliquez-nous, s'il

  6   vous plaît, de quelle manière vous avez pris possession de ce document.

  7   R.  Nous avions reçu un certain nombre d'instructions et d'ordres. Tout

  8   membre d'unité qui tombait sur un pamphlet était tenu de remettre celui-ci

  9   à son officier supérieur. Ce pamphlet avait été trouvé, parce qu'ils

 10   avaient été disséminés à travers la ville. Donc l'un de nos soldats les

 11   avait trouvés dans la ville même de Djakovica et les avait rapportés au

 12   commandement de la brigade. Donc le document avait été apporté par un

 13   officier supérieur cantonné dans le village de Djakovica. Je crois qu'il

 14   provenait de l'un de nos bataillons.

 15   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci. Le document est admis.

 16   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, ce sera la pièce

 17   D00698.

 18   M. POPOVIC : [interprétation] Merci. Passons maintenant au document D006-

 19   4371. Le document figure à l'intercalaire 15, Général, dans votre classeur.

 20   Q.  Général, nous voyons qu'il s'agit d'un ordre émis par vous. Mais dans

 21   l'intitulé, il est indiqué "Commandement de garnison." Assurer la sécurité

 22   de la population civile. Le document est du 17 avril 1999. Puis, au

 23   paragraphe 1, vous indiquez :

 24   "Toutes les unités dépendant de la garnison de Djakovica ou de sa zone de

 25   responsabilité prendront des mesures visant à s'occuper de la population

 26   civile."

 27   Alors, Général, je ne vais pas donner lecture du reste de ce paragraphe.

 28   J'aimerais que vous le lisiez en votre for intérieur pour nous indiquer par

Page 11383

  1   la suite quelles étaient les mesures prises pour s'occuper de la population

  2   civile et pour mettre en œuvre toutes les autres mesures répertoriées dans

  3   ce paragraphe 1.

  4   R.  Oui. C'est un ordre que j'ai donné en tant que commandant de la

  5   garnison. Donc un certain nombre d'ordres avaient été émis par moi, parce

  6   que j'étais commandant de la brigade, puis j'en ai émis d'autres en tant

  7   que commandant de la garnison. Comme je l'ai déjà expliqué, mon rôle du

  8   commandant de la garnison consistait à assurer l'ordre et la paix dans la

  9   ville, d'assurer le déroulement normal de la vie quotidienne pour toute la

 10   population au sein de la ville, de coordonner avec les représentants des

 11   autorités civiles puisque tous les organes fonctionnaient, de coordonner

 12   les activités avec les organes du MUP et de s'occuper de la population

 13   civile, surtout pour lui faciliter la vie, parce que la situation devenait

 14   de plus en plus complexe de jour en jour.

 15   La raison en était surtout les frappes aériennes quotidiennes. Un

 16   grand nombre d'installations avaient été détruites. Mais la population

 17   elle-même faisait l'objet de frappes aériennes. Ceci était surtout le cas

 18   suite aux lignes qui avaient frappé la colonne de réfugiés albanais. Le

 19   danger planait que la population fasse l'objet des activités de l'OTAN. Les

 20   avions engageaient leurs activités alors qu'ils allaient à une grande

 21   hauteur et ne pouvaient pas précisément distinguer leurs cibles. C'est

 22   pourquoi il est important de coopérer avec les organes du MUP et les

 23   autorités civiles, d'organiser les réunions avec ceux-ci pour trouver une

 24   solution à des problèmes existants. Par exemple, il fallait assurer

 25   l'approvisionnement en eau, l'approvisionnement en pain, en électricité. Et

 26   c'était l'armée, le plus souvent, qui mettait à disposition un certain

 27   nombre de ses effectifs, par exemple, des mécaniciens qui pouvaient réparer

 28   un dispositif ou des boulangers qui pouvaient préparer du pain. Donc nous

Page 11384

  1   libérions tous les hommes qui pouvaient résoudre des problèmes, et il

  2   s'agissait pour nous d'empêcher une catastrophe totale.

  3   Donc c'était là l'objectif visé par cet ordre. Par ailleurs, l'ordre

  4   indique qu'il est nécessaire de tenir compte du nombre de la population

  5   civile ou de la façon dont les personnes circulaient et, tout ceci, pour

  6   pouvoir leur aider. En tout cas, l'objectif visé par cet ordre est d'ordre

  7   humanitaire. Il s'agissait de faciliter la vie à la population civile, et

  8   comme nous aussi nous habitions dans ces villes, évidemment nous agissions

  9   également dans notre intérêt.

 10   Q.  Merci, Mon Général. Ce que j'aimerais maintenant vous demander, ce qui

 11   m'intéresse particulièrement est de vous demander à combien de reprises les

 12   réunions du commandement de la garnison avaient-elles lieu et si, lors de

 13   ces réunions, et là je pense plutôt aux discussions avec les membres du

 14   ministère de l'Intérieur, est-ce que vous avez, au cours de ces réunions,

 15   discuté des activités sur le terrain ou des activités antiterroristes ?

 16   R.  Nous nous réunissions seulement s'il était absolument nécessaire. Donc

 17   il ne s'agissait pas de réunions régulières. Nous nous réunissions dans des

 18   situations extraordinaires, lorsqu'il fallait décider très rapidement de

 19   choses urgentes pour ce qui est de la défense de la ville. Et nous, puisque

 20   nous faisions partie de la défense antiaérienne, nous devions mener une

 21   défense constante contre les frappes, et donc nous n'avions pas le temps,

 22   en fait, de nous réunir et de mener de longues réunions. Nous nous

 23   réunissions pour résoudre un problème concret, et par la suite nous

 24   repartions vaquer à nos obligations. De toute façon, pour des raisons de

 25   sécurité non plus, nous ne pouvions pas nous rencontrer. Il est certain

 26   qu'on aurait certainement fait l'objet d'attaques si on savait qu'il y

 27   avait une réunion avec le chef du SUP, le président de la municipalité et

 28   le commandant de brigade. Il y avait des personnes dans la ville, des

Page 11385

  1   Albanais, qui auraient très facilement pu dévoiler l'endroit où nous nous

  2   réunions.

  3   Q.  Très bien. J'aimerais maintenant vous demander autre chose. Lors des

  4   discussions que vous aviez avec les représentants du ministère de

  5   l'Intérieur, s'agissant des réunions que vous nous avez décrites il y a

  6   quelques instants, est-ce qu'il a été sujet d'actions ou de campagnes

  7   terrestres, des actions terrestres en tant qu'activités antiterroristes ?

  8   R.  Non. Nous ne mêlions pas des activités d'autres. Comme je vous disais,

  9   nos réunions étaient très courtes, et nous nous réunissions plutôt pour

 10   résoudre des problèmes concrets au sein de la garnison. Je ne les informais

 11   pas de nos actions, je ne leur demandais pas de me parler de leurs actions

 12   non plus. J'avais également l'impression que le chef du SUP était informé

 13   de ces actions antiterroristes. Je n'avais pas le temps non plus de leur

 14   poser des questions. J'avais mes propres obligations à l'intérieur de la

 15   brigade. Lorsque nous nous rencontrions, c'était pour résoudre des

 16   problèmes très rapide. Très souvent, nous n'avions même pas le temps de

 17   nous asseoir autour d'une table. Nous discutions du problème debout.

 18   Q.  Si je vous ai bien compris, c'étaient des questions d'ordre logistique

 19   qui étaient abordées lors de ces réunions s'agissant des habitants de la

 20   ville de Djakovica, n'est-ce pas ?

 21   R.  Nous parlions de problèmes que la municipalité ne pouvait pas résoudre.

 22   Comme je vous ai dit, les organes des autorités civiles fonctionnaient.

 23   Mais pour ce qui est des problèmes qu'ils ne pouvaient pas résoudre, c'est

 24   nous qui devions les résoudre, et tout ceci était lié à la réparation des

 25   systèmes électriques ou autres. Ces personnes se trouvaient à l'intérieur

 26   de nos unités et personne ne pouvait libérer, par exemple, un homme d'une

 27   unité pour le laisser partir réparer ce problème, ce bris. Donc c'était le

 28   président de la municipalité qui pouvait nous poser cette question, et nous

Page 11386

  1   répondions à leur demande et nous essayions de leur venir en aide de cette

  2   façon-là.

  3   Q.  Fort bien. Vous nous avez parlé de la façon dont vous traitiez la

  4   population civile. Maintenant, j'aimerais savoir si, s'agissant du début

  5   des frappes aériennes de l'OTAN le 24 mars, donc depuis le début, est-ce

  6   que vous aviez remarqué que la population civile se déplaçait; et si oui,

  7   de quoi s'agit-il, quel était ce déplacement, quelle était l'ampleur du

  8   déplacement, quel était le nombre de personnes qui se déplaçaient et

  9   quelles étaient les raisons pour ce mouvement ?

 10   R.  Oui, il y avait des mouvements, effectivement, et ceci correspondait

 11   avec le début des frappes aériennes de l'OTAN, effectivement. Il y avait un

 12   mouvement constant qui se déroulait de façon quotidienne. Il s'agissait de

 13   groupes qui étaient composés de 200 à 300 personnes, des fois, il y en

 14   avait moins -- mais le groupe le plus nombreux que j'ai pu voir était

 15   composé d'environ 300 à 350 personnes. Je ne les ai pas réellement

 16   comptées, mais ces personnes se rassemblaient à un endroit, et par la suite

 17   ils poursuivaient leur chemin, ils allaient ailleurs. Mais effectivement,

 18   oui, il y avait vraiment un mouvement de population.

 19   Et je pourrais ajouter ceci, par ailleurs, c'est que l'intensité du

 20   mouvement des civils correspondait d'une certaine façon avec

 21   l'intensification des frappes aériennes de l'OTAN. Il est certain qu'au

 22   début il y en avait peut-être moins, mais vers la fin -- enfin, les gens

 23   n'ont pas commencé à se déplacer au début, mais peut-être vers la

 24   cinquième, sixième ou dixième journée des frappes, lorsque l'aviation avait

 25   déjà commencé à larguer de plus grandes bombes, plus particulièrement

 26   lorsqu'on a su que les munitions en uranium appauvri étaient jetées sur la

 27   ville, effectivement, les gens ont commencé à se déplacer. Donc ces

 28   nouvelles nous arrivaient. Et les personnes se rassemblaient donc, et elles

Page 11387

  1   quittaient la ville soit à pied, soit à l'aide de tracteurs ou de divers

  2   moyens de transport, dépendamment de ce que les gens pouvaient trouver

  3   comme moyens de déplacement.

  4   M. POPOVIC : [interprétation] Merci. Monsieur le Président, je demanderais

  5   que cette pièce soit versée au dossier, s'il vous plaît.

  6   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bien.

  7   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agira de la

  8   pièce D00699.

  9   M. POPOVIC : [interprétation] Très bien. Merci. Je demanderais que la pièce

 10   D006-4340 soit affichée à l'écran.

 11   Q.  Et chez vous, Mon Général, il s'agit de l'intercalaire 16 dans votre

 12   classeur. En date du 17 avril 1999, nous pouvons voir qu'il s'agit ici d'un

 13   rapport d'un délit qui a été commis. J'aimerais savoir, Mon Général, si

 14   vous pouvez nous dire de quoi il s'agit, si vous avez déjà pris

 15   connaissance auparavant de ce rapport ?

 16   R.  Oui, oui, je sais de quoi il s'agit. C'est une plainte qui a été

 17   présentée au pénal à l'encontre de trois soldats de mon unité qui avaient

 18   tenté de violer deux femmes albanaises tout près du village de Crmljanje.

 19   Et lorsque j'ai appris ceci, j'ai envoyé des organes de la police militaire

 20   qui les ont arrêtés et qui les ont sur-le-champ remis entre les mains du

 21   procureur militaire de Pristina. Donc il s'agit de cela.

 22   Q.  Très bien.

 23   M. POPOVIC : [interprétation] Je demanderais que ce document soit versé au

 24   dossier, Monsieur le Président.

 25   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bien.

 26   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce D00700, Monsieur

 27   le Président, Messieurs les Juges.

 28   M. POPOVIC : [interprétation] Merci. Je demanderais maintenant que l'on

Page 11388

  1   affiche la pièce D006-4376.

  2   Q.  Et cela correspond dans votre classeur à l'intercalaire 17. Mesures

  3   prises contre les auteurs d'un crime. Donc c'est ce document-là qui date du

  4   18 avril 1999.

  5   R.  Oui. Lorsque j'ai appris que cet événement se serait déroulé, j'ai

  6   informé le commandement du corps d'armée de cet événement afin que ces

  7   derniers sachent de quoi il s'agit pour pouvoir disposer de ces

  8   informations, et que ces derniers devaient aussi informer les autres unités

  9   qui se trouvaient sur le territoire du Kosovo-Metohija pour que ce type

 10   d'actes ne se reproduise au sein de leurs unités.

 11   Q.  Très bien. Merci.

 12   M. POPOVIC : [interprétation] Je demanderais que cette pièce soit versée au

 13   dossier.

 14   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Fort bien.

 15   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

 16   Juges, il s'agira de la pièce D00701.

 17   M. POPOVIC : [interprétation]

 18   Q.  Mon Général, à partir où vous avez remis ces deux personnes entre les

 19   mains des organes compétents, est-ce que vous vous êtes enquis pour savoir

 20   ce qui leur est arrivé, et est-ce que vous aviez d'autres rapports ou liens

 21   avec ces derniers ?

 22   R.  Non. A partir du moment où ces personnes avaient été remises entre les

 23   mains du procureur militaire, ma compétence s'arrêtait à ce moment-là, et

 24   je n'ai pas eu le temps ni l'obligation de m'enquérir de leur sort. Ces

 25   personnes ont comparu devant un tribunal, donc c'est la loi qui s'est

 26   occupée de les juger. Je n'ai pas eu le temps de me renseigner sur ce qui

 27   leur est arrivé, mais franchement, pour vous dire la vérité, je n'ai pas

 28   essayé de voir ce qui était arrivé à des personnes qui avaient tenté de

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  1   commettre un crime. J'ai toujours été d'avis que tout crime doit être puni

  2   de toute façon.

  3   M. POPOVIC : [interprétation] Très bien. Je demanderais maintenant que la

  4   pièce D011-3280 soit affichée à l'écran. Mais avant de visionner ce

  5   document, de voir ce document à l'écran, je devrais vous dire qu'il ne

  6   figure pas sur la liste 65 ter de la Défense. Ce document a été communiqué

  7   à nos confrères de l'Accusation, mais permettez-moi de vérifier quelque

  8   chose, est-ce que nous avons demandé le versement au dossier du document

  9   précédent ? Oui, voilà. Donc, nous avons communiqué ce document, il s'agit

 10   d'un rapport de combat que le témoin a signé, et si nos éminents confrères

 11   de l'Accusation ne lèvent pas d'objection, j'aimerais que ce document soit

 12   montré au témoin.

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.

 14   M. POPOVIC : [interprétation] Je remercie mon éminente consoeur.

 15   Q.  Mon Général, il s'agit d'un rapport de combat régulier datant du 21

 16   avril 1999 que vous envoyez au commandement du Corps de Pristina et, au

 17   point 1, à l'avant-dernière phrase, nous pouvons voir :

 18   "Les criminels ont attaqué les réfugiés du centre de Maja, au village de

 19   Bistrazin, dans le secteur donc du village de Bistrazin, où il n'y a pas

 20   d'installations militaires ni d'unités militaires. Ils ont, en tout, tiré

 21   53 projectiles (sous AB et RZ), d'une force destructrice énorme, et ils ont

 22   détruit tout le quartier."

 23   Avant de vous demander de me donner votre commentaire, j'aimerais que vous

 24   vous penchiez sur le paragraphe 2. Le nombre total des victimes est de 6,

 25   et 32 personnes étaient blessées, 18 d'entre eux étaient restés à

 26   l'hôpital. Il y avait également un enfant qui avait été blessé et qui est

 27   resté à l'hôpital grièvement blessé. A la suite de cette attaque sur le

 28   centre des réfugiés du village de Maja, est-ce que vous pouvez nous

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  1   expliquer de quoi il s'agit ?

  2   R.  Oui, les réfugiés du centre de Maja, c'est un centre qui se trouve tout

  3   près du village de Bistrazin, il s'agissait, en fait, d'une ferme et ces

  4   personnes, c'étaient des Serbes qui provenaient de la Republika Srpska, de

  5   la Krajina, et c'est sur eux que l'aviation avait tiré. Et s'agissant du

  6   hameau du quartier, tout était détruit, il n'y a pas eu de survivant. Et

  7   cet endroit ne se trouve pas très loin du pont de Bistrazin. Nous avions

  8   une de nos unités qui gardait, qui montait la garde à côté du pont de

  9   Bistrazin, faisant en sorte que ce pont ne soit détruit. Donc, il s'agit de

 10   ce hameau-là, et plus tard, nous avons appris à quoi ressemblait la

 11   situation et combien il y avait de blessés et de morts. Il n'est rien resté

 12   du hameau qui avait été complètement détruit, il n'y a pas eu de survivant

 13   non plus.

 14   Q.  Très bien.

 15   M. POPOVIC : [interprétation] Je demanderais que ce document soit versé au

 16   dossier.

 17   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.

 18   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, cette pièce

 19   portera la cote D00702.

 20   M. POPOVIC : [interprétation] Merci. Je voudrais qu'on affiche à l'écran la

 21   pièce D006-4383.

 22   Q.  Ce qui correspond à l'intercalaire 20 de votre classeur, Mon Général.

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Popovic, n'oubliez pas qu'il

 24   nous faudra prendre une pause. Alors, si vous le souhaitez, nous pouvons

 25   aborder ceci après la pause.

 26   M. POPOVIC : [interprétation] Je croyais qu'il me restait encore 15 minutes

 27   avant la pause.

 28   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous aimeriez avoir encore 15 minutes.

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  1   Très bien. Puisque c'est vous qui me le demandez, vous l'aurez. Voilà, je

  2   vous l'accorde.

  3   M. POPOVIC : [interprétation] Merci.

  4   Q.  Voilà, il s'agit d'une pièce qui est maintenant affichée. En date du 23

  5   avril 1999, Mon Général, on a procédé à un contrôle de la radioactivité

  6   dans certains éléments. J'aimerais vous demander de lire rapidement ce

  7   document et de nous faire quelques commentaires. Il s'agissait, donc, là

  8   d'aide humanitaire contaminée, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui, voici un rapport qui émane de mon unité envoyé au commandement du

 10   Corps de Pristina. J'avais, au sein de mon unité, le chef chargé de la

 11   protection atomique, biologique et chimique. C'était un expert chargé de

 12   procéder au contrôle de la contamination radioactive. Et je dois vous dire

 13   qu'après chacune des attaques de l'aviation de l'OTAN, et ce, en prenant de

 14   grands risques, nous nous rendions sur le terrain pour vérifier s'il y

 15   avait une radiation radioactive, une contamination radioactive. Donc, ce

 16   qui est intéressant ici, c'est de voir que ce dernier informe le

 17   commandement du corps d'armée qu'en date du 23 avril 1999, dans la région

 18   du village d'Osek Hilja qui se trouve à 3 kilomètres au nord de Djakovica,

 19   dans une cave, on a trouvé une certaine quantité de farine, environ dix

 20   tonnes de farine qui avaient été acheminées en tant qu'aide humanitaire par

 21   le biais d'une organisation humanitaire appelée Majka Tereza (Mère

 22   Thérésa), à la population albanaise, population ethnique minoritaire

 23   albanaise, et à l'aide d'un détecteur de radiation DRM 3, on a trouvé qu'il

 24   y avait présence de contamination radioactive de 1 "microgrey" par heure.

 25   Par la suite, on a su que trois tonnes avaient été acheminées à une

 26   boulangerie et on a retiré, par la suite, cette farine; cette farine a été

 27   retirée de la circulation et par la suite, on a enterré tout ceci, toute

 28   cette farine, à un endroit qui était enfoui et ce terrain a été identifié

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  1   visiblement par un panneau."

  2   M. POPOVIC : [interprétation] Très bien. J'aimerais que ce document soit

  3   versé au dossier.

  4   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je suis vraiment navré, mais je ne

  5   vois pas de lien avec notre affaire en l'espèce, Maître Popovic. Un

  6   acheminement de farine avec une contamination par radioactivité, farine

  7   radioactive qui provenait d'une organisation humanitaire, je ne vois

  8   vraiment pas de lien. En quoi cela est-il pertinent avec notre affaire en

  9   l'espèce ?

 10   M. POPOVIC : [interprétation] Je vais essayer de préciser tout ceci avec le

 11   témoin, mais il y a plusieurs aspects que je voudrais aborder.

 12   Q.  D'abord, Mon Général, est-ce que vous pouvez nous dire quelle est la

 13   raison pour laquelle cette farine trouvée était, en fait, contaminée,

 14   premièrement ? Deuxièmement, est-ce que vous avez entrepris toutes les

 15   mesures nécessaires pour aviser la population civile qui était peut-être,

 16   ou qui se serait trouvée à utiliser des produits de cette farine contaminée

 17   ?

 18   R.  A la demande du président de la municipalité auquel certaines personnes

 19   avaient formulé des plaintes, nous avions nous-même envoyé notre chef du

 20   ABHO. C'était l'une des tâches qui dépendait du commandant de garnison. Le

 21   président de la municipalité avait demandé que la farine soit vérifiée, car

 22   certaines personnes, certains habitants de la ville s'étaient plaints du

 23   fait qu'ils avaient certains problèmes qui s'étaient manifestés après avoir

 24   mangé du pain.

 25   Donc, nous avions informé notre chef chargé de la détection de

 26   contamination et il m'a informé de cela. Je n'étais pas dans cette maison

 27   en question, mais j'ai reçu le rapport de l'organe en question qui était

 28   compétent et qui avait toutes les compétences nécessaires pour vérifier ce

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  1   type de contamination, y compris l'équipement nécessaire, et c'est la

  2   raison pour laquelle nous avons retiré -- en fait, pas nous, mais la farine

  3   a été retirée de la distribution et a été enfouie dans un trou. Et je dois

  4   vous dire qu'il y avait un Albanais, un Siptar qui travaillait dans la

  5   direction de la municipalité, et c'était le directeur chargé de la propreté

  6   de la ville de Djakovica. Donc, il a certainement connaissance de ce qui

  7   est arrivé avec cette farine. Il pourrait vous informer de cela si vous le

  8   lui demandiez.

  9   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Cette pièce ne sera pas versée au

 10   dossier, Maître Popovic.

 11   M. POPOVIC : [interprétation] Fort bien. A ce moment-là, je demanderais

 12   qu'on voie à l'écran la pièce de l'Accusation D006-4292.

 13   Q.  Mon Général, dans votre classeur, cela correspond à l'intercalaire 21.

 14   Nous voyons de nouveau que vous aviez fait "Une déclaration à la commission

 15   chargée de la collaboration avec une équipe d'experts s'agissant des

 16   activités de l'unité les 27 et 28 avril 1999." Vous nous avez déjà donné

 17   les raisons pour lesquelles vous aviez donné des déclarations

 18   préalablement. J'aimerais savoir si c'étaient les mêmes raisons qui vous

 19   ont poussé à faire cette déclaration aussi ?

 20   R.  Oui, les raisons étaient absolument identiques, à savoir qu'il

 21   s'agissait d'un événement qui est décrit dans le livre que j'ai mentionné

 22   plus tôt, et ce, à la suite également d'une demande de la Commission

 23   chargée de la coopération avec le Tribunal pénal international et l'équipe

 24   d'experts. Donc, les raisons étaient les mêmes.

 25   Q.  Merci. Dans cette déclaration, vous dites -- ou plutôt, vous parlez des

 26   dates, des 27 et 28 avril, et vous parlez d'une action qui a été menée dans

 27   la région élargie de la ville de Djakovica. Au point 1, vous dites :

 28   "En faisant ceci, les forces terroristes siptar auraient créé les

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  1   conditions nécessaires pour recevoir les forces de l'OTAN sur le terrain.

  2   Et les villages ci-haut mentionnés -- les villages mentionnés, qui

  3   faisaient l'objet d'attaques constantes contre le MUP et la JNA et la VJ."

  4   J'aimerais savoir s'ils ont également ciblé les citoyens albanais qui

  5   avaient refusé de quitter leurs hameaux. S'agit-il de cela ?

  6   R.  Oui, il s'agit d'une action appelée l'action Reka. C'est une action

  7   antiterroriste qui s'est déroulée dans la vallée de Caragojsta, comme ils

  8   l'appellent. Cet endroit se trouve tout près de Kosare. Et c'est là que se

  9   trouvaient les forces terroristes siptar. Donc, si jamais ils avaient eu

 10   une -- si on aurait vaincu à cet endroit-là, Kosare, il y a eu des combats

 11   très intenses qui se sont menés tout près de Kosare avec l'appui de

 12   l'aviation, et si jamais ils étaient couronnés de succès, les forces de

 13   Kosare auraient pu trouver le chemin le plus court pour aller, donc, de

 14   Kosare à la vallée de Caragojsta, et c'est de là que provenaient les

 15   communications, que les communications allaient en direction de Pec,

 16   Djakovica, Klina. Donc, il s'agissait d'un endroit très propice à ce type

 17   d'activités, et surtout parce qu'en plus, il se trouvait derrière nos

 18   unités.

 19   Et grâce aux activités à ce centre, puisqu'en fait il s'agit d'une

 20   zone boisée, il était très difficile de passer par là, et ces derniers

 21   contrôlaient toutes les routes qui sortaient sur Karul [phon] et Kosare, de

 22   sorte que nos unités se sont trouvées dans la position où elles ne

 23   pouvaient plus être visionnées. D'une certaine façon, nos unités étaient

 24   encerclées. C'est pour cette raison que le commandement du corps d'armée ou

 25   du commandement du poste de commandement avancé a donné cette décision

 26   selon laquelle il fallait procéder -- enfin, il fallait neutraliser les

 27   forces siptar terroristes dans la zone en question pour protéger les

 28   arrières de nos unités.

Page 11395

  1   Dans le cadre de cette action-là, j'ai déployé une plus petite --

  2   toute une section de mon unité, et c'est ceci que j'ai mentionné à la

  3   commission d'experts.

  4   Mme KRAVETZ : [interprétation] Monsieur le Président, je ne voudrais pas

  5   interrompre mon éminent confrère, mais je regarde le compte rendu

  6   d'audience, page 61, ligne 11. Je crois qu'il y a une date qui est

  7   incorrecte. On voit 27 et 28 mars, alors que je crois que le document qui

  8   se trouve sous nos yeux parle du mois d'avril 1999.

  9   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce que le mois d'avril est la

 10   bonne date ? Est-ce que c'est le bon mois ?

 11   M. POPOVIC : [interprétation] Oui, absolument. Vous avez tout à fait

 12   raison, Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Je vais changer la date,

 14   moi aussi, dans mes notes.

 15   M. POPOVIC : [interprétation]

 16   Q.  Très rapidement, pour mettre fin  à la lecture de ce document, Mon

 17   Général, vous dites qu'une partie de votre unité a pris part à cette

 18   activité. Et à la page 2, vous dites - je parle de la page 2 dans les deux

 19   langues - vous dites :

 20   "Le chef qui avait commandé l'unité m'a informé qu'il n'avait aucun contact

 21   avec les terroristes et qu'il n'avait ni entendu ni vu que des activités se

 22   déroulaient dans la vallée de la rivière Trava."

 23   Donc, j'aimerais savoir, lorsque vous avez envoyé ceci, elle était sous

 24   quel commandement, lorsque vous avez envoyé ces effectifs, ils étaient

 25   placés sous quel commandement et qui vous a donné cette information ? Quel

 26   était le commandant qui vous a transmis cette information, quand et où ?

 27   R.  A partir du moment où l'unité a été déployée à effectuer la tâche ou la

 28   mission qui lui était confiée, à savoir de procéder au blocus du terrain,

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  1   cette partie de l'unité était placée sous le commandement du chef ou du

  2   commandant qui commandait cette action. Maintenant, s'agissant de la

  3   brigade, le chef ou le commandant qui commandait à ma partie de l'unité,

  4   c'était le commandant Zlatko Odak qui m'avait informé que l'unité, au cours

  5   de ces deux journées, n'a pas eu de contact avec les terroristes, qu'il n'y

  6   a pas eu d'activités, que personne n'a ouvert le feu sur eux, et eux non

  7   plus n'ont pas ouvert de feu sur personne.

  8   Donc, il n'y a eu aucun contact avec les terroristes. Je dois vous dire que

  9   moi, je suis allé inspecter cette unité le 27. J'ai vu où ils étaient

 10   cantonnés. Il s'agit de l'orée d'un bois qui est assez boisée. C'est une

 11   forêt, et j'accepte ce qu'il a dit, qu'il ne pouvait voir aucune activité

 12   ni déceler aucune activité. Effectivement, c'était le cas.

 13   Q.  Très bien. Merci. Le dernier paragraphe de ce document se lit comme

 14   suit :

 15   "A la suite d'un entretien avec les participants de cette action, et à la

 16   suite de ce que j'ai su personnellement et de ce qui a été dit auparavant,

 17   j'affirme que ni moi ni les membres de mon unité n'aient pris part à aucun

 18   crime allégué, et je n'ai aucune connaissance que d'autres unités aient pu

 19   participer à des crimes allégués."

 20   Est-ce que c'est ce que vous maintenez aujourd'hui ?

 21   R.  Oui, tout à fait. C'est ce que mon officier m'a indiqué, ainsi que les

 22   autres participants, et je ne disposais d'aucune autre information. Cela

 23   est tout à fait crédible, à mon avis.

 24   Q.  Merci.

 25   M. POPOVIC : [interprétation] Nous reprendrons le fil de cette discussion

 26   après la pause, et avant la pause, en fait, je souhaiterais demander le

 27   versement au dossier de ce document.

 28   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le document sera versé au dossier.

Page 11397

  1   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce D00703.

  2   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] J'aimerais mentionner le fait suivant

  3   pour vous aider dans vos préparatifs. Nous allons essayer, en cas

  4   d'audience l'après-midi, de faire la deuxième pause non pas à 17 heures 45

  5   mais à 17 heures 30. Nous allons reprendre à 18 heures 18.

  6   [Le témoin quitte la barre]

  7   --- L'audience est suspendue à 17 heures 48.

  8   --- L'audience est reprise à 18 heures 18.

  9   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] En attendant que le témoin arrive dans

 10   la salle, j'aimerais dire à propos de la pièce D609, qui correspond au

 11   compte rendu d'audience, que ce document sera versé au dossier sous pli

 12   scellé tel que cela avait été indiqué par le conseil à la fin de la semaine

 13   dernière, et nous verserons également au dossier une copie expurgée qui

 14   fera partie de la même pièce.

 15   [Le témoin vient à la barre]

 16   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ou plutôt, cette version expurgée sera

 17   une pièce séparée pour quand même faciliter les choses pour le représentant

 18   du Greffe.

 19   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La version expurgée se verra octroyer

 20   la cote D609.1.

 21   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Popovic, je vous en prie.

 22   M. POPOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 23   J'aimerais que nous revenions sur la pièce P958.

 24   Q.  Général, vous pourrez suivre cela sur l'écran, ou si cela est trop

 25   difficile, cela correspond à l'intercalaire 2.7. C'est votre journal de

 26   bord. Je pense que c'est tout au début du classeur.

 27   M. POPOVIC : [interprétation] Page 37 en version B/C/S, et 33 en version

 28   anglaise. Je voudrais corriger ce qui me semble être des erreurs de

Page 11398

  1   traduction que nous avons remarquées lorsque nous nous sommes préparés lors

  2   de la séance de récolement.

  3   Q.  Si je ne m'abuse, la date c'est la date du 27 avril 1999. Nous voyons

  4   que l'heure est 8 heures. Est-ce que vous l'avez trouvé, le document 2.7

  5   dans votre classeur ? Vous l'avez trouvé ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Je pense que c'est 8 heures. C'est un peu difficile à voir. Il est

  8   indiqué que l'opération de nettoyage Reka a commencé avec la participation,

  9   et cetera, et cetera. Vous voyez cela ? Est-ce que vous pourriez nous

 10   donner lecture de la phrase suivante.

 11   R.  L'action se déroule comme prévue et la cadence est celle qui avait été

 12   prévue au départ.

 13   Q.  Et la phrase suivante ?

 14   R.  Etant donné que le commandant est absent (au 2e et 4e SARD PVO) et le

 15   chef -- donc il s'agit de l'action Reka, n'est-ce pas ?

 16   Q.  Oui, c'est ce qui correspond aux parenthèses.

 17   R.  Du fait de l'absence du commandant et du chef de l'état-major, les

 18   organes de commandement ont commencé l'opération Reka comme prévue par le

 19   plan.

 20   Q.  Vous voyez que dans la traduction anglaise, cette phrase a été traduite

 21   de façon tout à fait différente. Qu'est-ce que vous pouvez nous dire à

 22   propos de la dernière phrase, quand il est question du "chef d'état-major

 23   de l'action Reka," puis ensuite vous voyez que c'est tout à fait différent,

 24   où il est dit: "Les organes de commandement ont commencé comme prévus."

 25   Est-ce que cela avait quoi que ce soit à voir avec l'action Reka ?

 26   R.  Non, pas la dernière partie de cette phrase, car en fait ce que nous

 27   disions tout simplement c'était que les organes de commandement ont

 28   commencé leur travail à l'endroit où nous avions l'habitude de nous réunir

Page 11399

  1   tous les matins, donc au poste de commandement. Cette réunion était

  2   toujours censée être présidée par le commandant ou le chef d'état-major qui

  3   faisait également office de commandant adjoint. Etant donné que nous étions

  4   tous les deux absents, je me trouvais auprès du 2e et du 4e Bataillon, il y

  5   avait un qui était à Pristina et l'autre qui était à Gnjilane, et le chef

  6   d'état-major était absent parce qu'il participait justement à l'action

  7   Reka, les membres du commandement ont continué à travailler en notre

  8   absence. Ils se sont livrés à leurs activités même si nous étions absents.

  9   Q.  Merci.

 10   M. POPOVIC : [interprétation] Je pense que cela a permis de corriger

 11   l'erreur de traduction de la page 33.

 12   Mme KRAVETZ : [interprétation] Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Madame Kravetz.

 14   Mme KRAVETZ : [interprétation] Peut-être qu'il serait plus utile de

 15   demander au témoin de nous donner lecture de l'ensemble de ce paragraphe.

 16   Je ne sais pas si tout est clair pour vous, Messieurs les Juges.

 17   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce que cela pourrait être fait, je

 18   vous prie.

 19   M. POPOVIC : [interprétation]

 20   Q.  Général, est-ce que vous pourriez, je vous prie, nous donner lecture de

 21   l'ensemble du paragraphe et n'oubliez pas de mentionner les parenthèses

 22   pour que tout soit clair.

 23   R.  Oui, mais ce n'est pas très lisible. Voilà ce qui est dit :

 24   "L'opération de nettoyage de Reka des forces terroristes siptar a commencé

 25  avec la participation du premier SARD PVO MUB, 1ère Section de fusil avec la

 26   compagnie de commandement," -- puis après, je ne vois plus très bien -- "et

 27   avec la 2e Section de fusil du bataillon de commandement. L'action se

 28   déroule comme prévue et le rythme de l'action est comme prévu. Du fait de

Page 11400

  1   l'absence du commandant (au 2e et 4e SARD PVO) et du chef d'état-major

  2   (action Reka), ce qui signifiait que l'état-major participait à l'action

  3   Reka, les organes de commandement ont continué leur travail comme prévu, ce

  4   qui signifie qu'ils ont continué leurs séances d'information ou

  5   d'instruction militaire telles qu'elles avaient été planifiées et prévues."

  6   Q.  Je vous remercie. Je pense que cela est clair maintenant. Général, à 11

  7   heures - voyez ce qui correspond à 11 heures - il est indiqué :

  8   "Le commandant de la brigade a participé à une cérémonie de remise de

  9   décorations de l'Ordre de la galanterie au commandement du Corps de

 10   Pristina."

 11   C'est exact, cela ?

 12   R.  Oui, oui, tout à fait. Ce jour-là, à 11 heures, je me trouvais au

 13   commandement du Corps de Pristina pour participer ou assister à une

 14   cérémonie de remise de décorations, et lors de cette cérémonie, des

 15   décorations de l'Ordre de la galanterie ont été remises.

 16   M. POPOVIC : [interprétation] Merci. Nous pouvons voir à l'écran la pièce

 17   D006-4391. J'aimerais demander à Mme l'Huissière d'aider M. Dosan à apposer

 18   des annotations sur la carte que nous allons voir.

 19   Q.  Cela correspond à votre intercalaire 22, Général. Et vous allez le

 20   voir, vous allez voir ce document apparaître à l'écran.

 21   M. POPOVIC : [interprétation] Je m'excuse, je m'excuse. La cote du document

 22   est 4291, mais le fait est que c'est bien de cette carte-ci dont il s'agit.

 23   Q.  Alors, Général, peut-être qu'il vous sera plus facile de regarder

 24   l'écran. La carte est plus facile à voir.

 25   R.  Oui. Est-ce que vous pourriez peut-être l'agrandir un peu, cette carte

 26   ?

 27   Q.  Je vais vous demander de nous indiquer, à l'aide de votre stylet, les

 28   positions qui avaient été détenues par vos unités lors de l'action Reka.

Page 11401

  1   R.  Ecoutez, je vais voir -- voilà. Voilà, cela correspond à la zone.

  2   Q.  Bien. Est-ce que vous pourriez mettre la lettre A à côté de cette

  3   ligne.

  4   R.  [Le témoin s'exécute]

  5   Q.  Je vous remercie. Comment s'appelait la zone où se trouvait votre unité

  6   ?

  7   R.  Il s'agissait de la ferme avicole, parce qu'il y avait une ferme

  8   avicole à cet endroit, et c'était l'endroit sur la colline Cabrat où nous

  9   étions.

 10   Q.  Donc, toute cette zone s'appelait Cabrat, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui, oui. Cabrat, c'est une colline assez importante. Son point

 12   culminant se trouve juste au-dessus de la ville de Djakovica.

 13   Q.  Mais est-ce que vous avez inspecté vos unités qui se trouvaient sur ces

 14   positions ?

 15   R.  Oui. Oui, oui. Je suis allé les voir.

 16   Q.  Est-ce que vous pourriez, je vous prie, nous dire à nouveau qui

 17   commandait les éléments de votre brigade qui bloquaient le secteur pendant

 18   l'action Reka ?

 19   R.  Les forces de ma brigade étaient commandées par le commandant Zlatko

 20   Odak.

 21   Q.  Je vous remercie. Est-ce que le chef d'état-major a participé à cette

 22   action, comme cela a été consigné dans le journal de guerre ?

 23   R.  Oui, oui, le chef d'état-major a également participé, mais il y a pris

 24   part uniquement en tant qu'officier supérieur. Donc, si la personne qui

 25   commandait l'action lui en donne ordre, il pouvait simplement prêter main-

 26   forte au commandant Odak. Donc, ce n'est pas lui qui commandait l'action,

 27   il y a simplement participé.

 28   Q.  Merci. Qui commandait cette action dans sa totalité ? Aviez-vous un

Page 11402

  1   impact quel qu'il soit sur les actions entreprises par vos unités pendant

  2   cette opération ?

  3   R.  Non. C'est le commandement qui se trouvait au poste de commandement

  4   avancé du Corps de Pristina qui commandait cette action. Il s'agissait plus

  5   précisément du colonel Milan Kotor, représentant du Corps de Pristina.

  6   Q.  Merci. Quel type de rapport avez-vous reçu après le retour de votre

  7   unité ? Ça, c'est mon premier point. Deuxièmement, est-ce que le commandant

  8   qui faisait partie de vos subordonnés et qui a pris part à cette action,

  9   est-ce qu'il a été tenu de vous soumettre un rapport ?

 10   R.  Un subordonné est toujours tenu de soumettre un rapport à ses

 11   supérieurs. Une fois accompli sa mission, qui concernait le blocus apposé,

 12   il m'a soumis un rapport précisant s'ils avaient été engagés, quelles

 13   pertes ils avaient subies, combien de munitions avaient été utilisées.

 14   Bref, il m'a soumis un rapport qui comprenait tous les éléments habituels

 15   me permettant de me faire une idée de la manière dont cette mission avait

 16   été accomplie. Je précise que c'est une décision qui avait été définie par

 17   mes supérieurs.

 18   Q.  Merci. Pouvez-vous nous fournir une réponse directe, en quoi consistait

 19   ce rapport fourni par le commandant Odak après son retour de mission ?

 20   R.  Ce rapport concernait mon unité. Il y était précisé que la mission

 21   avait été accomplie, qu'ils n'avaient pas été engagés dans des activités de

 22   combat, qu'ils n'avaient pas relevé quoi que ce soit qui montrerait qu'un

 23   certain type d'événements se déroulaient, que l'unité est revenue à son

 24   poste et qu'il n'y avait rien de particulier à préciser. En d'autres mots,

 25   l'unité est revenue à son poste telle qu'elle était partie, sans avoir dû

 26   faire face à des problèmes quels qu'ils soient, sans avoir subi de pertes,

 27   sans avoir de membres blessés et sans avoir établi un contact avec les

 28   terroristes. Aucun contact n'a eu lieu entre l'unité et les terroristes, si

Page 11403

  1   bien qu'il n'y avait rien de particulier à relever.

  2   Q.  Merci, Général. Je ne sais pas si la carte que nous avons est très

  3   utile pour ce faire, mais pourriez-vous me préciser quels étaient les axes

  4   le long desquels les terroristes étaient actifs lorsqu'ils attaquaient

  5   depuis l'Albanie jusqu'à la vallée de Caragojsta ? Pouvez-vous le préciser

  6   en vous servant de cette carte ou faut-il attendre d'en montrer une autre ?

  7   R.  Si la frontière se trouve ici, les terroristes siptar agissaient à

  8   partir de cette direction-là. En cas d'action plus importante, c'est ici

  9   qu'ils se réunissaient, dans cette vallée, et elle était très commode pour

 10   ce faire et très importante aux yeux des terroristes parce qu'ils pouvaient

 11   s'y rassembler et parce que les transmissions fonctionnaient bien à partir

 12   de ce site.

 13   Q.  Pouvez-vous marquer les flèches en vous servant du chiffre 2 ?

 14   R.  Très bien.

 15   Q.  Et vous pouvez poursuivre.

 16   R.  A partir de ce point, les routes mènent à Prizren, Pec, Racak,

 17   Pristina. Donc, c'était le site le plus favorable pour les terroristes dans

 18   le sens où il favorisait les attaques contre nos unités. C'était, en fait,

 19   une sorte de base permettant de lancer des attaques et entreprendre des

 20   actions. Les routes se séparent en trois branches différentes à partir de

 21   ce point et il aurait été pratiquement impossible d'arrêter les forces

 22   terroristes si elles réussissaient à percer en groupes plus importants

 23   depuis Kosare, et c'est la raison pour laquelle l'armée avait planifié

 24   cette action. Il s'agissait d'assurer son arrière-train.

 25   Par ailleurs, cette zone permettait de menacer les axes

 26   d'approvisionnement en direction de Kosare, si bien que la survie même de

 27   mes unités qui s'y trouvaient était menacée, et c'est pour cette raison-là

 28   que cette action a été prévue.

Page 11404

  1   Q.  Auriez-vous la gentillesse de bien vouloir indiquer quels étaient ces

  2   axes d'approvisionnement et d'apposer le chiffre 3 à côté.

  3   R.  Il s'agit des mêmes axes qui pouvaient servir aux terroristes pour

  4   arriver sur le site.

  5   M. POPOVIC : [interprétation] Merci. Messieurs les Juges, je demande le

  6   versement au dossier de ce document.

  7   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Auriez-vous la gentillesse de m'aider.

  8   Cette carte fait-elle partie du journal de guerre ou s'agit-il d'un autre

  9   document, d'un document à part ?

 10   M. POPOVIC : [interprétation] C'est un document à part. Mais posons la

 11   question au général, lui-même.

 12   Q.  Général, cette carte, faisait-elle partie du journal de guerre ou

 13   s'agit-il plutôt d'un document à part ? En fait, avez-vous déjà pris

 14   connaissance de cette carte au préalable ?

 15   R.  Cette carte est une représentation graphique qui devait étayer les

 16   affirmations que j'avais présentées dans ma déclaration présentée à

 17   l'équipe d'experts chargée de la coopération avec le TPIY. Donc, cette

 18   carte faisait partie intégrante de la déclaration préalable dont j'ai donné

 19   lecture tout à l'heure.

 20   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La carte sera admise au dossier.

 21   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, ce sera la pièce

 22   D00704.

 23   M. POPOVIC : [interprétation] Merci. Peut-on m'afficher à l'écran le

 24   document D006-4297.

 25   Q.  Le document figure à l'intercalaire 23 dans votre classeur, Général.

 26   Mais pendant que nous attendons l'affichage du document, dites-moi, quelle

 27   était la composition ethnique de votre brigade au cours des années 1998 et

 28   1999 ?

Page 11405

  1   R.  D'après mes souvenirs, il en était à peu près ainsi, je vais commencer

  2   par le commandement de la brigade : mon assistant chargé de la logistique,

  3   c'était le lieutenant Aleksandar Angelovski, il était Macédonien.

  4   L'assistant chargé du renseignement et de la morale, c'était le commandant

  5   Zdravko Vinter, Slovène. Le chef de l'organe de sécurité était né à

  6   Djakovica, mais il était d'origine slovène. Le chef des transmissions au

  7   sein du QG de la brigade, c'était le sous-lieutenant Dragan Ilic, Croate.

  8   L'officier qui opérait au sein de l'état-major, c'était le capitaine de

  9   première classe Nike Peraj, Albanais, Siptar. La dactylographe dans le

 10   bureau chargé des affaires générales, c'était Mme Bilajuzare Berisa,

 11   Albanaise. Voilà ce qu'il en est du QG de la brigade. Pour ce qui est du

 12   bataillon, au sein du 1er Bataillon, le rôle du commandant était assumé par

 13   le sous-lieutenant Josip Sabo, Hongrois. Son adjoint, c'était le commandant

 14   Josko Ugljesevic, Croate. Le commandant du bataillon du QG était Velimir

 15   Maricic, Croate. Pour ce qui est du bataillon de la logistique, il était

 16   commandé par Ramiz Pejcinovic; initialement, il était l'adjoint du

 17   commandant, pour être promu commandant au cours de la guerre. Donc, il

 18   s'agissait de Ramiz Pejcinovic, Musulman. Voilà ce qu'il en est au niveau

 19   des officiers. Et parmi des sous-officiers, il y avait également des

 20   individus de souches différentes, mais pour la plupart quand même, ils

 21   étaient Serbes, les soldats et les sous-officiers.

 22   Q.  Merci. Et le document que nous voyons à l'écran est du 6 avril 1999. Il

 23   figure à l'intercalaire 23 dans votre classeur. Au paragraphe 5, il est

 24   indiqué :

 25   "Le contrôle de l'aptitude au combat des sentinelles devant le commandement

 26   dans le QG de la brigade, entre 11 et 13 heures, sera effectué par le

 27   commandant Nike Peraj, qui émettra personnellement un rapport quant au

 28   niveau d'aptitude des sentinelles."

Page 11406

  1   Monsieur, le commandant Peraj, fonctionnait-il au sein de votre unité et

  2   quelles étaient les missions qui lui étaient dévolues ?

  3   R.  Le capitaine Nike Peraj était un membre de mon unité. Il opérait au

  4   sein de l'état-major. C'était le numéro 3 au sein de l'état-major, ce qui

  5   est correspondait au rang qu'il avait, capitaine de première classe. Sa

  6   mission constituait à vérifier les sentinelles, la garde qui était montée.

  7   Donc, il s'agissait de vérifier si les relèves se déroulaient bien et si la

  8   garde montée avait un bon niveau d'aptitude.

  9   M. POPOVIC : [interprétation] Merci. Messieurs les Juges, je demande le

 10   versement au dossier de ce document.

 11   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.

 12   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Messieurs les Juges, ce sera la pièce

 13   D00705.

 14   M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche à l'écran le

 15   document P313. Il figure à l'intercalaire 25 dans votre classeur.

 16   Q.  Général, le témoin Nike Peraj a déposé devant le Tribunal. Il a fait de

 17   nombreuses déclarations, et celle que je vais vous présenter est la

 18   dernière en date. Je souhaite vous la montrer parce qu'il y est question du

 19   travail que vous avez effectué, et des références personnelles qui vous

 20   concernent ont été faites. J'aimerais que vous limitiez vos observations

 21   dans la mesure du possible parce que le texte est assez volumineux.

 22   Pour commencer, passons à la page suivante de ce document et penchez-

 23   vous sur le paragraphe 6. Il est indiqué :

 24   "Le colonel Dosan a été commandant de la 52e Brigade d'artillerie. Le

 25   colonel Milan Dosan était responsable également des réservistes du MUP," --

 26   puis, il est indiqué -- "l'état-major du corps de la VJ recevait ses ordres

 27   de la part du ministère de la Défense avec le siège à Belgrade."

 28   Pourriez-vous commenter brièvement ce paragraphe ?

Page 11407

  1   R.  Dans ce paragraphe, je dirais que la seule chose qui est exacte, c'est

  2   la première phrase, à savoir que c'est moi qui étais commandant de la 52e

  3   Brigade d'artillerie de lance-roquettes. Tout le reste qui figure dans ce

  4   paragraphe est soit partiellement erroné ou tout à fait inexact.

  5   Q.  Merci.

  6   M. POPOVIC : [interprétation] Passons à la page suivante, paragraphe 9.

  7   Q.  Je lis : Sur le territoire des municipalités de Djakovica, de Prizren

  8   et de Pec, entre 13 et 14 000 soldats et policiers ont été déployés. J'ai

  9   entendu mes collègues dire que 150 000 soldats et policiers ont été

 10   déployés sur le territoire du Kosovo. Veuillez nous livrer brièvement vos

 11   observations.

 12   R.  Ceci n'est pas vrai. Tout simplement, le nombre d'effectifs n'était pas

 13   aussi élevé. Par ailleurs, il n'aurait pas pu apprendre, lui, quel était le

 14   nombre d'exact d'effectifs. Tout ce qu'il pouvait savoir avec précision,

 15   c'est le nombre des effectifs au sein de notre brigade. Pour ce qui est du

 16   reste, ces données ne se trouvaient pas à sa portée. Mais il est clair

 17   qu'il n'y avait pas autant de soldats et de policiers déployés.

 18   Q.  Merci.

 19   M. POPOVIC : [interprétation] Passons maintenant au paragraphe 20 qui

 20   figure à la page suivante.

 21   Q.  Général, au paragraphe 20, il est question de nombreux volontaires

 22   provenant, pour la plupart, de Russie, je lis :

 23   "Nous avons pris note de leur identité et nous les avons envoyés à Kosare

 24   puisque le commandant Milos Dosan a refusé leur demande de rester dans la

 25   région de Djakovica. Il a dit qu'il ne leur permettrait pas de se livrer à

 26   des pillages. Ils étaient payés par la Défense territoriale de la

 27   municipalité, et en revanche, c'était le ministère de la Défense qui

 28   finançait les unités de la Défense territoriale."

Page 11408

  1   Pourriez-vous nous commenter brièvement ce paragraphe ?

  2   R.  Ce n'est pas du tout exact, il n'y avait pas neuf Russes et il n'est

  3   pas non plus vrai que je les ai reçus ou que je les ai renvoyés sur le

  4   front près de Kosare, ce n'est pas vrai du tout. Tout ce qui est vrai,

  5   c'est que nous avions réellement un volontaire qui était médecin et qui

  6   travaillait au dispensaire de la garnison. Il était Russe, cela est vrai.

  7   Donc, lui, il faisait son travail et il était à la clinique de la garnison.

  8   Mais pour le reste, ce n'est pas vrai, je ne les ai pas suivis. Je n'ai

  9   jamais mentionné quoi que ce soit concernant ce pillage. De toute façon, il

 10   est certain que j'interdisais toujours le pillage. Ce qu'il est dit ici

 11   n'est vraiment pas du tout la vérité.

 12   Q.  Très bien, merci. Maintenant, j'aimerais passer au paragraphe 21 où on

 13   dit :

 14   "Micunovic rencontrait également Dosan sous le commandement duquel il y

 15   avait également le maire Momcilo Stanojevic, et les membres du groupe de

 16   Frenki étaient également placés sous le commandement de l'unité de Frenki,

 17   et qu'à un moment donné, ils étaient des réservistes de la VJ placés sous

 18   les ordres de Micunovic, avant de se joindre au groupe des hommes de

 19   Frenki."

 20   Pouvez-vous nous expliquer ceci ?

 21   R.  Micunovic était subordonné au commandant de la section militaire de

 22   Pec. Je ne l'ai pas vu avec le maire de Djakovica, et s'agissant des hommes

 23   de Frenki, du groupe de Frenki, c'est quelque chose de complètement -- dont

 24   je ne connais absolument rien. Je n'ai ni vu, ni -- je ne sais pas, non

 25   plus, qui sont ces hommes de Frenki. Je ne sais pas du tout ce qu'il veut

 26   dire par là. Il est néanmoins tout à fait clair que ceci est une invention

 27   de toutes pièces et que c'est un mensonge.

 28   Q.  Au paragraphe 23, on mentionne la brigade de la VRS et on dit que la

Page 11409

  1   brigade de la RS provenant -- enfin, de la RS avait été déployée à Rezina.

  2   Cette brigade est arrivée à Djakovica à la fin du mois de février. Ils

  3   disposaient de chars T-55 et ils disposaient d'une artillerie antiaérienne.

  4   Pourriez-vous nous faire un commentaire ?

  5   R.  Il n'y avait absolument aucune possibilité que ces derniers proviennent

  6   de la Republika Srpska premièrement. Deuxièmement, l'endroit Rezina, c'est

  7   une élévation au-dessus de Djakovica qui est complètement dénudée. Si on

  8   avait placé un si grand nombre de chars à cet endroit-là, il n'aurait pas

  9   pu être possible de se déplacer entre eux. Troisièmement, qui aurait pu

 10   placer des chars à cet endroit-là ? Aucune personne sensée, munie de bon

 11   sens, n'aurait placé ces chars à cet endroit-là, à savoir il faut également

 12   se demander la question si la Republika Srpska disposait d'un si grand

 13   nombre de chars et si elle avait également une brigade de blindés de toute

 14   façon. Donc, c'est une invention de toutes pièces. Tout cela, c'est

 15   illogique. C'est illogique.

 16   Q.  Très bien, Mon Général, je suis vraiment désolée de vous interrompre,

 17   il y a un si grand nombre d'éléments que je voudrais vous montrer dans

 18   cette déclaration. C'est la raison pour laquelle je vous interromps. Au

 19   paragraphe 25, on dit :

 20   "Les soldats de la Republika Srpska avaient les mêmes uniformes et les

 21   mêmes équipements que les soldats de la VJ. Mon unité leur donnait le

 22   soutien logistique, et j'ai personnellement vu que les membres de la

 23   brigade de la RS se réunissaient dans le bureau de Dosan."

 24   R.  C'est tout à fait faux. Je n'ai rien d'autre à dire que de dire que

 25   c'est complètement faux. Cette brigade ne se trouvait pas là et puisqu'il

 26   n'y avait pas de brigade, il n'y avait pas de réunion, nous ne pouvions pas

 27   leur assurer quoi que ce soit. S'agissant de mon bureau, je ne tenais

 28   absolument aucune réunion avec personne à partir du 24 mars. Donc, c'est

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  1   complètement insensé de dire cela. Je ne sais même pas comment expliquer

  2   cette affirmation, mais ce qui m'inquiète ici, c'est que cet homme

  3   autrefois avait travaillé au sein de la brigade blindée où il y avait des

  4   chars, il travaillait à Pristina, et je ne peux pas comprendre comment cela

  5   se fait-il qu'il puisse dire des choses pareilles sans connaître sa

  6   matière. Je me demande de quelle façon est-ce qu'il aurait pu devenir un

  7   capitaine de première classe à 50 ans, car soit il est menteur, soit il ne

  8   connaît absolument pas sa profession. C'est la raison pour laquelle j'étais

  9   particulièrement déçu par cette déclaration.

 10   Q.  Très bien. Pouvez-vous jeter un coup d'œil au paragraphe 28. Ici, on

 11   peut lire que :

 12   "Pour recueillir toutes les informations et tous les rapports provenant de

 13   dirigeants sur le territoire de Djakovica, Branko Kotur était responsable,

 14   il provenait du corps de la VJ. Le colonel Kotur envoyait ses informations

 15   au chef de l'état-major de l'armée yougoslave à Nis, au général de brigade

 16   Dusan Samardzic."

 17   Un commentaire, s'il vous plaît.

 18   R.  C'est une phrase qui est truffée de mensonges. D'abord, il n'y a pas de

 19   colonel Milan Kotur, il y a un colonel qui s'appelle Milan Kotur. C'est un

 20   homme qui travaillait dans l'infanterie, il ne recueillait aucune

 21   information. Deuxièmement, ici, on peut dire : 

 22        "Le QG de l'état-major de l'armée yougoslave envoyait des informations

 23   à Dusan Samardzic, qui était un colonel à Nis."

 24   Dusan Samardzic n'a jamais été le commandant de l'armée, c'était le

 25   général Pavkovic qui tenait se rôle. Donc, ce dernier n'avait pas pu avoir

 26   -- il aurait été, de toute façon, étrange qu'un officier d'un grade

 27   inférieur soumette des rapports à un commandant supérieur mis en second,

 28   c'est vraiment incorrect.

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  1   Q.  Est-ce que vous aviez dit, pour le compte rendu d'audience, qu'il y a

  2   un très grand nombre de mensonges ? Est-ce que c'est bien ce que vous avez

  3   dit ?

  4   R.  Il y a tellement de mensonges ici que c'est incroyable, c'est ce que

  5   j'ai dit.

  6   Q.  Merci beaucoup. Je vous demanderais maintenant de prendre connaissance

  7   du paragraphe 37. Le chef de la section militaire à Djakovica était

  8   Micunovic, appelé Dragan, à l'époque, il -- à l'époque, s'agissant de la

  9   Défense territoriale, il ne tenait qu'une fonction administrative. Pendant

 10   la guerre, il était commandant opérationnel de la Défense territoriale pour

 11   la municipalité de Djakovica. Micunovic rendait rapport à Dosan et au maire

 12   Stanojevic. Un commentaire s'il vous plaît.

 13   R.  Encore une fois, c'est la même chose. D'abord, à Djakovica, il n'y

 14   avait absolument pas de section militaire. Djakovica n'avait pas de section

 15   militaire, et ce dernier n'était pas le chef d'une section militaire.

 16   Pendant un certain temps, il était le commandant du détachement

 17   territorial, il était subordonné au commandant de la section militaire qui

 18   se trouvait à Pec. Donc, il ne m'était pas subordonné à moi, il n'était pas

 19   subordonné à moi, et il n'aurait jamais pu être subordonné au président de

 20   la municipalité. Les unités d'une armée ne peuvent pas être subordonnées à

 21   des civils à ce niveau-là. Donc, c'est truffé de mensonges, je veux dire,

 22   c'est complètement faux. Voilà, je vais le dire ouvertement, c'est un

 23   mensonge.

 24   Q.  Merci beaucoup. Mon Général, je vous demanderais maintenant de prendre

 25   connaissance du paragraphe 43 dans lequel on peut lire, dans la dernière

 26   phrase :

 27   "Dosan a demandé une reprise d'arrêter d'empêcher les gens de boire, mais

 28   cela n'était pas possible puisque les personnes à l'hôtel étaient armées et

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  1   étaient en état d'ébriété tout le temps."

  2   R.  Non, les gens n'étaient pas en état d'ébriété. On ne servait pas

  3   d'alcool à l'hôtel Bastrik [phon], à Djakovica. Mais même si cela avait été

  4   le cas, je ne l'aurais pas envoyé, lui. Il n'aurait pas été correct

  5   d'envoyer un Albanais, de l'exposer au danger. Donc, c'est complètement

  6   faux. Il n'y a aucun élément de ceci qui correspondrait à la vérité.

  7   J'étais contre tout ce qui avait trait à l'intoxication, j'étais contre le

  8   pillage.

  9   Q.  Très bien. Paragraphe 45 -- 47, encore une fois, dernière phrase, vous

 10   dites que les réunions ont eu lieu à des endroits différents : commandement

 11   du MUP, de la VJ ou dans le bâtiment de la municipalité, toujours dans la

 12   cave, pour des raisons de sécurité. Vous dites que vous aviez conduit le

 13   commandant des ARBR à plusieurs reprises, que vous emmenez à plusieurs

 14   reprises, vous avez conduit à plusieurs reprises aux réunions qui se sont

 15   déroulées entre le MUP et la VJ.

 16   R.  Non, c'est tout à fait illogique. Un capitaine de première classe

 17   n'aurait pas conduit un colonel. C'est absolument faux. J'ai dit que des

 18   réunions avaient lieu de temps en temps, et dans cette phase-ci de la

 19   guerre, beaucoup moins, de toute façon, et les réunions ne se sont pas

 20   déroulées ni au commandement du MUP ni au commandement de l'armée

 21   yougoslave. Donc, ceci est faux. C'est une déclaration qui est fausse. Il

 22   ne m'a pas conduit, ne m'a pas emmené, n'a pas servi de chauffeur, il ne

 23   m'a jamais emmené à cet endroit-là et les réunions ne se sont jamais

 24   déroulées à cet endroit-là non plus.

 25   Q.  Merci, Mon Général. Veuillez, je vous prie, prendre connaissance du

 26   paragraphe 50, où on peut lire :

 27   "Dosan a appelé une fois alors que j'étais en réunion et il m'a dit que

 28   s'agissant de l'unité qui se trouvait tout près de Ljug Bunar, au nord-est

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  1   de Djakovica, qu'il fallait transférer ce dernier à Djakovica, et il a

  2   fallu que je transmette cette information au QG opérationnel, au ARBR, au

  3   commandant Zdravko. Cette unité faisait partie du ARBR de Dosan."

  4   Encore une fois, un commentaire ?

  5   R.  Non, ce n'est pas une façon habituelle de procéder. De toute façon,

  6   pour des raisons de sécurité, il n'est jamais possible de donner d'ordres

  7   par téléphone, à savoir où une unité serait déployée. Je ne lui aurais

  8   jamais donné cet ordre, de toute façon, pas à lui. J'aurais donné un ordre

  9   au commandant de l'unité qui était censée être déployée. Voilà la procédure

 10   habituelle. Moi, je donnais des ordres aux commandants et ces derniers

 11   recevaient des ordres de moi. S'agissant des ordres venant d'une troisième

 12   main, d'une certaine façon indirecte, comme c'est écrit ici, vous parlez de

 13   Vinter Zdravko, mais ce dernier n'était pas le commandant de l'état-major,

 14   et il n'était pas non plus un commandant opérationnel. C'était un de mes

 15   assistants chargés de la formation et du moral. Donc, il n'aurait jamais pu

 16   donner quelque ordre que ce soit en mon nom à quelque commandant que ce

 17   soit. Ceci serait une violation complète et totale de la subordination, une

 18   violation de la chaîne de commandement également. Donc, ceci est un tissu

 19   de mensonges.

 20   Q.  Paragraphe suivant. Le paragraphe 51, voilà ce qu'il y est dit :

 21   "Une fois, j'ai dû séparer Dosan et Micunovic, après une réunion, parce

 22   qu'ils se disputaient. Je ne sais d'ailleurs pas sur quoi portait leur

 23   dispute. Lors de la même occasion, Dosan est venu dans la voiture avec moi

 24   et il a dit que Kovacevic et Micunovic faisaient des choses qu'ils

 25   n'avaient pas le droit de faire et il pointait un doigt accusateur vers la

 26   VJ. L'unité de réserve de la VJ de Micunovic avait tué huit civils dans le

 27   village de Deva à la fin du mois de mars 1999."

 28   J'aimerais d'abord savoir si l'unité de Micunovic faisait partie de la

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  1   réserve de la VJ, et j'aimerais savoir ce que vous pensez de ce qui est

  2   écrit là ?

  3   R.  Il s'agissait d'une unité territoriale qui avait sa propre tâche et qui

  4   avait sa propre chaîne de commandement, tout comme n'importe quelle unité,

  5   d'ailleurs. Je parle de l'unité de Micunovic. Mais par ailleurs, tout cela

  6   est faux. Pourquoi est-ce que j'aurais une altercation avec Micunovic ?

  7   Pourquoi, en tant que commandant de garnison -- pourquoi, en tant que

  8   colonel, j'aurais une altercation avec lui et pourquoi est-ce qu'il nous

  9   aurait séparés ? Je ne suis absolument pas -- ce n'est absolument pas le

 10   genre de choses que je fais. Et puis, de toute façon, ce n'est pas ainsi

 11   que les gens se comportent au sein de l'armée. Et il ne faut pas oublier la

 12   subordination. Et puis, il dit : Micunovic faisait des choses qui n'étaient

 13   pas autorisées. Si j'avais su que Kovacevic et Micunovic faisaient des

 14   choses qui n'étaient pas autorisées, j'en aurais immédiatement informé mon

 15   commandant. Je n'en aurais pas parlé avec mes subordonnés. Ce n'est pas la

 16   façon idoine de se comporter. Ce n'est pas ainsi qu'on se comporte. Ce

 17   n'est absolument pas ce qu'il faut faire, du point de vue de la moralité.

 18   Ce n'est pas ainsi qu'une armée fonctionne, d'ailleurs, non plus. Ce n'est

 19   tout simplement pas vrai, et -- écoutez, je suis tenté de vous dire qu'il

 20   ne savait tout simplement pas ce qu'il disait lorsqu'il a dit tout cela.

 21   M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais présenter au témoin plusieurs

 22   autres paragraphes.

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ecoutez, cela ne pourra pas être fait

 24   ce soir.

 25   M. POPOVIC : [interprétation] Oui, oui. C'est pour cela que je pense qu'il

 26   faudrait peut-être laisser tout cela jusqu'à demain. Le temps imparti est

 27   écoulé et demain, je vais faire un effort pour terminer l'interrogatoire

 28   principal aussi rapidement que faire se peut.

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  1   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons maintenant lever

  2   l'audience, et nous reprendrons demain, à 14 heures 15.

  3   --- L'audience est levée à 19 heures 07 et reprendra le mardi 16 février

  4   2010, à 14 heures 15.

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