Page 12448
1 Le lundi 8 mars 2010
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 17.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour.
6 En attendant de faire entrer le témoin, je vous signale que vendredi,
7 juste avant la fin de nos travaux, la Défense a demandé le versement au
8 dossier d'un aperçu portant sur les infractions, et la Chambre de première
9 instance considère qu'on devrait verser au dossier uniquement les parties
10 dont le témoin nous a parlé. Ces parties ont été effectivement présentées
11 au témoin pendant sa déposition. Donc, nous allons verser chacune de ces
12 parties en tant que pièce, et nous n'allons pas verser au dossier d'autres
13 parties de cet aperçu, compte tenu de la déposition faite. Etant donné que
14 cela ne représente qu'une petite partie de ce document, la Chambre ordonne
15 à la Défense de préparer un document comportant uniquement les résumés
16 présentés au témoin. Et une fois que cela aura été vérifié par
17 l'Accusation, la Chambre versera ce document en tant que pièce à
18 conviction, et j'imagine que cela devrait être fait pendant la semaine.
19 Il nous reste encore deux questions de procédure. Le 22 février,
20 l'Accusation a demandé autorisation de verser au dossier une page qui
21 manquait de la pièce P1029. Il s'agit du livre bleu de l'OSCE, et la
22 Chambre fait droit à la demande et à partir de maintenant, cette page fera
23 partie de cette pièce à conviction. Le même jour, l'Accusation a indiqué
24 qu'elle avait reçu la traduction officielle d'un document enregistré aux
25 fins d'indentification en tant que pièce P1532. La Chambre fait droit à la
26 demande aux fins de verser au dossier ce document, et le document qui était
27 jusqu'à présent enregistré aux fins d'identification deviendra pièce à
28 conviction à part entière.
Page 12449
1 Est-ce que le témoin est disponible ?
2 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous prie de donner lecture
6 de la déclaration solennelle qui vous est remise.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai
8 la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
9 LE TÉMOIN : BRANKO MLADENOVIC [Assermenté]
10 [Le témoin répond par l'interprète]
11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, veuillez vous asseoir.
12 Me Popovic va vous interroger.
13 Maître Popovic, vous avez la parole.
14 M. POPOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
15 Interrogatoire principal par M. Popovic :
16 Q. [Interprétation] Bonjour, Monsieur Mladenovic.
17 R. Bonjour.
18 Q. Avant de commencer mon interrogatoire, je vous signale qu'étant
19 donné que nous parlons la même langue, je vous prie de faire une pause
20 avant de répondre à la question posée pour que les interprètes puissent
21 faire leur travail, et je vous prie de parler lentement pour que les
22 interprètes puissent traduire correctement vos propos.
23 Tout d'abord, comment vous vous appelez.
24 R. Je m'appelle Branko Mladenovic.
25 Q. Merci. Quelle est votre date de naissance et où est-ce que vous êtes né
26 ?
27 R. Je suis né à Urosevac le 22 août 1968.
28 Q. Monsieur Mladenovic, est-ce que vous avez été membre du ministère de
Page 12450
1 l'Intérieur, et est-ce que vous êtes toujours membre de ce ministère ?
2 R. Oui, j'étais membre du ministère de l'Intérieur de la République de
3 Serbie à partir de l'année 1988, et je suis toujours membre de ce même
4 ministère.
5 Q. Merci. Pourriez-vous nous dire brièvement quelles étaient les fonctions
6 que vous avez occupées au sein du ministère jusqu'à aujourd'hui.
7 R. Après avoir terminé mes études à Vucitrn à l'école secondaire de la
8 police, j'ai commencé à travailler à Prizren en tant que policier au poste,
9 donc de police de Prizren. Ensuite, en 1989 j'ai été muté au poste de
10 police d'Urosevac où j'ai travaillé en tant que policier. Puis pendant un
11 certain temps, j'ai été chargé du secteur au sein du poste de police
12 d'Urosevac, et pendant peu de temps j'ai travaillé en tant qu'adjoint du
13 chef du service de permanence, et par la suite j'étais chef de ce même
14 service au poste de police d'Urosevac. Entre 1993 et 1996, j'ai travaillé
15 en tant qu'inspecteur au sein de la police criminelle et j'ai travaillé
16 dans le domaine de la lutte contre le trafic de stupéfiants. Et à partir de
17 1996, j'ai travaillé en tant qu'assistant du commandant du poste de police
18 d'Urosevac, donc de 1996 à 1998.
19 A partir du 1er juin 1998 jusqu'à la fin de l'année 1999, j'ai
20 travaillé en tant que chef du poste de police de Stimlje. Après que les
21 secrétariats du Kosovo ont été transférés depuis le Kosovo vers la Serbie,
22 j'ai travaillé au sein de l'administration de la police à Smederevo. En
23 2001, j'occupais le poste d'adjoint du commandant de la gendarmerie à
24 Belgrade, et à partir de 2002 jusqu'en 2006, j'ai travaillé en tant
25 qu'inspecteur chargé de crimes de sang et crimes sexuels à Smederevo. A
26 partir de 2006 jusqu'à aujourd'hui, je travaille en tant que chef du
27 département chargé de la lutte contre la traite d'hommes et chargé des
28 affaires relatives aux résidents étrangers. Donc c'est le poste que
Page 12451
1 j'occupe à l'heure actuelle.
2 Q. D'accord, Monsieur Mladenovic, mes questions vont surtout porter sur
3 les années 1998 et 1999. Vous nous avez expliqué quelles étaient les
4 fonctions que vous aviez à l'époque. Et lorsque nous parlons du poste de
5 police de Stimlje, pourriez-vous nous dire quels étaient les territoires
6 dont relevaient votre poste de police à partir du 1er juin 1998, donc à
7 partir du moment où vous avez pris les fonctions de chef du poste de police
8 de Stimlje ?
9 R. Le poste de police de Stimlje englobe les territoires de la
10 municipalité de Stimlje, avec les villages environnants, Muzicane,
11 Vojnovci, Davidovci, Rasince, Gornje et Donje Godance, village de Petrovic,
12 village de Petrastica, Duga, Karacica, et Zborce, puis le village de
13 Crnoljevo, le village Rance, Racak, Malo Poljce, et Petrovo.
14 Q. Merci. Quelles étaient vos responsabilités en tant que chef du poste de
15 police de Stimlje ?
16 R. En tant que chef du poste de police de Stimlje, j'avais les
17 responsabilités conformément à la Loi portant sur les affaires intérieures,
18 à savoir la protection et la sécurité des hommes et de leurs biens,
19 découverte d'actes illicites, puis appréhension d'auteurs de ces crimes,
20 puis les affaires portant sur le trafic de la circulation à Stimlje,
21 protection de l'ordre public, protection des biens et de certaines
22 personnes, puis fournir de l'aide aux victimes publiques, et tout ce qui
23 concernait les tâches administratives telles que délivrance de passeports,
24 pièces d'identité, plaques d'immatriculation, permis de conduire.
25 Q. Merci. Qui était votre supérieur hiérarchique en 1998 et 1999 ? Et
26 lorsque nous parlons des années 1998 et 1999, nous parlons toujours de la
27 période à partir du moment où vous avez pris les fonctions de chef du poste
28 de police à Stimlje.
Page 12452
1 R. En 1998 et 1999, mon supérieur hiérarchique immédiat était Radomir
2 Mitic, le chef du département de la police et Bogoljub Janicevic, le chef
3 du SUP d'Urosevac.
4 Q. Est-ce que c'était la personne à qui vous donnez des ordres portant sur
5 votre travail à l'époque ?
6 R. J'aimerais vous l'expliquer. S'agissant de toutes les affaires que je
7 viens de vous énumérer, toutes ces affaires m'incombaient d'après la loi,
8 et tous les policiers, moi y compris, nous avions la responsabilité d'agir
9 conformément à la loi et conformément au règlement portant sur le travail
10 de la police. Bien sûr que les ordres émanaient de mon supérieur
11 hiérarchique immédiat, à savoir le chef du SUP
12 Janicevic, et le chef du département de la police, M. Radomir Mitic.
13 Q. Merci, Monsieur. Lorsque nous parlons du poste de police de Stimlje et
14 des années 1998 et 1999, pourriez-vous nous dire quelle était la situation
15 sécuritaire en 1998 et peu de temps avant le début des frappes aériennes en
16 1999 ?
17 R. En 1998, la situation politique déjà avant était très mauvaise et dans
18 la municipalité de Stimlje, cette situation était très difficile et
19 mauvaise, et ce, surtout parce qu'au début de l'année 1998, le terrorisme a
20 commencé à battre de son plain-pied et certains groupes terroristes ont
21 commencé à fonctionner à l'époque, et ces groupes ont eu comme bastion
22 certains villages environnants qui se trouvaient dans cette zone forestière
23 et montagneuse, et c'était un territoire où il nous était difficile de
24 procéder au contrôle. Il s'agit de villages Petrastica, Zborce, Duga et
25 Karacica. Puis le village de Crnolojevo, Rance, Racak, Malo Poljce, et
26 Petrovo. Les terroristes albanais en 1998 ont formé leurs états-majors au
27 sein de ces villages et ont forcé les civils à prendre des armes, à
28 préparer les tranchées utilisées pour mener les attaques contre la police
Page 12453
1 et les organes du MUP. Etant donné que la situation était si mauvaise, le
2 poste de police ne pouvait pas fournir de l'aide et de l'assistance aux
3 civils, ainsi que de la protection, parce que chaque fois que les membres
4 d'une patrouille essayaient d'entrer dans l'un de ces villages, il faisait
5 l'objet d'attaques lancées par les terroristes albanais.
6 Plusieurs membres de la police ont trouvé la mort pendant cette
7 période. Autrement dit, au mois de juin 1998, l'axe de communication
8 Pristina-Prizren qui traversait Crnoljevo a fait l'objet d'un blocage.
9 Autrement dit, les terroristes albanais avaient le contrôle sur cette route
10 et plusieurs dizaines de civils d'origine ethnique serbe ainsi que d'autres
11 citoyens appartenant à d'autres ethnies ont été enlevés. Il s'agissait de
12 civils qui ne soutenaient pas leur cause.
13 Q. Merci.
14 R. Permettez-moi de finir.
15 Q. Oui, veuillez poursuivre.
16 R. Compte tenu de la situation s'agissant de ces villages où les
17 terroristes s'étaient implantés, les civils albanais ont commencé à partir,
18 à chercher refuge à Stimlje, puis à Urosevac, Pristina, Lipljan, villes qui
19 étaient sous le contrôle de la police. Ensuite, la police a mené une action
20 organisée par l'état-major chargé de la lutte contre le terrorisme à
21 Prizren, et ces bastions ont été détruits et la population civile, jusqu'au
22 12 juin 1999, c'est-à-dire jusqu'au moment où nous avons cessé d'avoir le
23 contrôle de cette région, la population civile n'est plus jamais retournée
24 dans ces villages.
25 Q. Merci, Monsieur. Nous allons parler plus en détail de ces événements,
26 mais ce qui m'intéresse maintenant est de nous préciser quel était le rôle
27 joué par cette route Prizren-Pristina, et dites-nous si cette route
28 traversait Stimlje ?
Page 12454
1 R. Cette route était très importante parce qu'elle reliait la capitale du
2 Kosovo, Pristina, avec le Metohija, Prizren-Pec-Djakovica, et cette route
3 traversait Stimlje, Crnoljevo, puis les gorges de Crnoljevo, puis en allant
4 jusqu'à Dulje et Suva Reka et Prizren. C'était la route principale, mais il
5 y avait une autre route qui traversait Urosevac, Prevalce, Brezovica, qui
6 allait jusqu'à Prizren. Donc, l'axe en question était très important pour
7 la population civile du Kosovo-Metohija.
8 Q. Merci, Monsieur. Pour le besoin du compte rendu d'audience, dites-moi,
9 lorsque vous avez parlé de la situation prévalente à l'époque, est-ce que
10 vous avez parlé de la situation telle qu'elle était sur le territoire dont
11 relevait le poste de police de Stimlje ?
12 R. Oui. Je vous ai dit à quel point la situation était difficile sur les
13 territoires dont relevait le poste de police de Stimlje, étant donné que la
14 municipalité de Stimlje est limitrophe avec Drenica, qui était le bastion
15 majeur des terroristes albanais. Etant donné qu'il s'agit d'une zone où il
16 y a beaucoup de forêts, les terroristes se sont servis de cette
17 configuration du terrain pour se cacher là-bas, et la population civile a
18 demandé des organes d'Etat et du poste de police de Stimlje qu'on les
19 protège.
20 Q. Merci. J'ai posé cette question compte tenu de ce qui figure au compte
21 rendu d'audience, page 5, ligne 23. Vous avez parlé de la situation à
22 l'époque, et je voulais que vous le précisiez.
23 Maintenant, Monsieur, je vais vous montrer un certain nombre de documents
24 et je vous demanderais de nous livrer vos observations à ce sujet.
25 M. POPOVIC : [interprétation] Nous allons utiliser, une fois encore, un
26 intercalaire préparé pour le témoin.
27 Q. Chaque fois que je citerai un document, je vous dirai où se trouve ce
28 document dans votre dossier, Monsieur le Témoin.
Page 12455
1 M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche maintenant la
2 pièce P357.
3 Q. Cela figure à l'intercalaire 1 chez vous. Il s'agit du règlement
4 portant sur le travail du ministère de l'Intérieur en date du 31 décembre
5 1997, et c'est l'article 4, paragraphe 31, qui m'intéresse. C'est à la page
6 8 en B/C/S, et je pense que c'est également à la même page en anglais, ou à
7 la page 6.
8 R. C'est un règlement --
9 Q. Attendez juste un instant que le document soit affiché. C'est l'article
10 4, paragraphe 31 qui m'intéresse. Donc, la page en anglais n'est pas la
11 bonne. C'est deux pages avant celle qui est affichée. En B/C/S, nous avons
12 la bonne page.
13 En attendant que cette page soit affichée -- voilà, nous avons la bonne
14 page en anglais également.
15 Monsieur Mladenovic, est-ce que vous connaissez ce document ?
16 R. Oui, je le connais. Ce document traite de l'organisation interne du
17 ministère de l'Intérieur à partir de l'année 1997, à l'article 4 --
18 Q. Oui, paragraphe 31.
19 R. Oui, paragraphe 31. L'on dit que Urosevac est organisé en tant que
20 secrétariat chargé de la zone des municipalités Kacanik, Stimlje, et
21 Strpce. Au point 31, il est dit à Urosevac, au département de l'Intérieur,
22 s'agissant de la municipalité de Kacanik, et des postes de police pour les
23 municipalités de Stimlje et Strpce.
24 R. Oui.
25 Q. Merci. Donc, l'article 4 définit l'organisation interne des
26 secrétariats à Urosevac ?
27 R. Oui, et l'on définit les missions confiées au poste de police de
28 Stimlje, autrement dit, à tous les postes de police, y compris le poste de
Page 12456
1 police de Stimlje.
2 Q. Merci. Je vous prie maintenant d'examiner l'article 48 de ce règlement.
3 R. L'article 48 ?
4 Q. Ceci devrait figurer à la page 36 en version anglaise, ou à la page 39.
5 R. L'article 48 de ce règlement définit le rôle exercé par les postes de
6 police, à savoir un poste de police doit assurer le bien-être des personnes
7 et de leurs avoirs sur le territoire de la municipalité où ce poste exerce
8 ses responsabilités. Ils appréhendent les auteurs d'infractions pénales et
9 procèdent à leur arrestation --
10 Q. Monsieur Mladenovic, ce n'est pas la peine de donner lecture de cet
11 article dans sa totalité. Nous l'avons affiché à l'écran. J'aimerais tout
12 simplement entendre vos observations sur le sujet. S'agit-il bien des
13 tâches qui vous ont été confiées dans le poste de police de Stimlje ?
14 R. Oui. C'étaient les tâches de base exécutées par le poste de police de
15 Stimlje. Cela faisait partie de nos missions habituelles.
16 Q. Merci. J'aimerais maintenant que nous nous penchions sur la dernière
17 phrase qui figure dans cet article. Je lis :
18 "Le poste de police peut comprendre des sections de police…"
19 Etait-ce le cas avec votre poste de police ?
20 R. Le poste de police de Stimlje n'englobait pas des sections de police,
21 mais après 1999, une fois signé l'accord entre Milosevic et Holbrooke, une
22 section de police provisoire a été mise sur pied dans le village de
23 Crnoljevo. Cette section avait pour tâche de sécuriser l'axe routier qui
24 allait de Pristina à Stimlje, en passant par Crnoljevo, Suva Reka et
25 Prizren.
26 Q. Merci, Monsieur Mladenovic. Les missions que vous exécutiez dans le
27 cadre de vos travaux dans le poste de police représentaient-ils des tâches
28 habituelles dévolues aux membres de l'intérieur ?
Page 12457
1 R. Oui, effectivement. Le poste de police cantonné à Stimlje ne
2 s'acquittait que des missions qui avaient été déjà prévues par le règlement
3 interne et par les lois en vigueur. Les membres de la police cantonnés dans
4 le poste de police de Stimlje n'ont jamais exécuté aucune autre tâche.
5 Donc, il s'agissait des missions habituelles qui découlaient des lois et
6 des règlements en vigueur.
7 Q. Je souhaite apporter une précision à votre réponse. Le poste de police
8 de Stimlje, ou plutôt, les membres de ce poste de police ont-ils pris part
9 à l'exécution des missions spéciales en matière de sécurité sur le
10 territoire du Kosovo-Metohija ?
11 R. Non. C'est l'état-major du MUP et les PJP qui s'en chargeaient. Nous
12 n'avons jamais pris part à l'exécution de ce type de missions.
13 Q. Merci. C'est un autre sujet que nous allons aborder en détail par la
14 suite, donc je préfère ne pas l'approfondir en ce moment. Mais j'aimerais
15 que vous nous expliquiez, avant tout, quelle était la composition ethnique
16 au sein de votre poste de police.
17 R. La composition ethnique était mixte. Des représentants des Albanais,
18 des Serbes, et des Rom ont coexisté au sein de ce poste de police.
19 Q. Pourriez-vous nous citer quelques noms d'Albanais qui travaillaient
20 dans votre poste de police ?
21 R. Bekim Komorani [phon] --
22 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi les autres noms prononcés par le
23 témoin.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oroni Nazmi [phon], Hysen, puis je ne me
25 souviens plus des autres.
26 M. POPOVIC : [interprétation]
27 Q. Merci. Monsieur Mladenovic, très succinctement, s'il vous plaît, les
28 élèves albanais fréquentaient-ils les écoles publiques à Stimlje; et si
Page 12458
1 oui, comment le savez-vous ?
2 R. Outre le poste de police -- ou plutôt, à côté du poste de police de
3 Stimlje se trouvait l'école primaire. Un grand nombre d'élèves de la ville
4 de Stimlje elle-même et des villages environnants fréquentaient cette
5 école. L'école a fonctionné jusqu'au début des bombardements le 24 mars
6 1999.
7 Q. Merci. Les représentants de la minorité albanaise travaillaient-ils
8 dans des entreprises publiques et dans les institutions publiques dans le
9 village de Stimlje ?
10 R. Les Albanais travaillaient au sein des institutions de l'Etat. Ils
11 étaient représentés dans toutes les autres organisations publiques. Il est
12 vrai que leur nombre a été inférieur à celui des années 1990, mais ils
13 occupaient les mêmes postes que les représentants de la population serbe.
14 Suite aux événements qui se sont produits en 1998 et 1999, un certain
15 nombre a fait l'objet de menaces lancées par des terroristes albanais.
16 C'est la raison pour laquelle un certain nombre d'Albanais de souche ont
17 démissionné et n'ont plus travaillé dans les institutions d'Etat.
18 Q. Merci. Pourriez-vous nous dire combien de membres comptait votre poste
19 de police ?
20 R. Cent quarante, tout compris; donc, les agents de police d'active et les
21 policiers de réserve.
22 Q. Et de quelle manière les travaux étaient-ils organisés au sein de votre
23 poste de police ?
24 R. Nous avons énuméré tout à l'heure toute une série de missions à
25 accomplir. Pour ce faire, nous organisions des patrouilles et nous
26 travaillions au niveau des secteurs, donc toutes les tâches étaient
27 exécutées en suivant cette méthode.
28 Q. Merci. Tout à l'heure vous avez cité le nombre d'agents de police
Page 12459
1 d'active et de réserve. Votre poste de police comptait-il des policiers de
2 réserve ?
3 R. Oui. Le poste de police de Stimlje comptait des agents de police de
4 réserve. Il était au nombre de 70 environ, et puis nous avions 68 membres
5 du poste d'active.
6 Q. Merci. Qui a émis l'ordre permettant d'engager les policiers de réserve
7 au sein de votre poste de police ?
8 R. Tous les policiers de réserve ne peuvent être convoqués que sur un
9 ordre émanant du ministre lui-même. La même chose valait pour le poste de
10 police de Stimlje, c'est de cette manière-là que les policiers de réserve
11 ont été engagés.
12 Q. Merci. Mais quand on parle du nombre des effectifs nécessaires pour
13 faire fonctionner le poste de police de Stimlje, comment fait-on pour fixer
14 le nombre des effectifs nécessaires, et quel était le rôle que vous avez
15 assumé lors de cette évaluation ?
16 R. Je crois qu'il existe un règlement qui régit cette question, mais je
17 pense que de façon générale, la proportion est de un à un, en d'autres
18 mots, il y a un policier de réserve pour un policier d'active.
19 Q. Merci. Est-ce qu'il existe un rapport d'interdépendance entre le nombre
20 de policiers de réserve et la situation en matière de sécurité sur le
21 terrain, par exemple, dans le cadre du territoire couvert par votre poste
22 de police ?
23 R. Tout à fait. En fonction de la situation en matière de sécurité en
24 fonction d'éventuels problèmes, nous avons demandé qu'un certain nombre de
25 membres de réserve soit engagé. Nous avons envoyé cette demande au
26 département de la police et au SUP
27 évaluation, et puis j'imagine que c'est à la base de cette évaluation
28 qu'ils ont demandé l'autorisation de ce faire de la part du ministre. Une
Page 12460
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
12 versions anglaise et française
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 12461
1 fois l'ordre donné par le ministre, les policiers de réserve ont été
2 engagés. Tout ceci fonctionnait par le truchement du département de la
3 police, il y avait un officier dans ce département qui se chargeait des
4 policiers de réserve. Donc, toutes ces procédures passaient par le
5 département de la police et l'officier qui était chargé des questions de
6 réserve. Au niveau du poste de police, tout ce que nous pouvions faire
7 c'est de faire savoir quels étaient les problèmes en matière de sécurité
8 pour demander une autorisation visant à engager des policiers de réserve
9 pour que nous puissions nous acquitter de nos missions sécuritaires.
10 Q. Vous venez d'évoquer des missions sécuritaires, de quelles missions
11 s'agit-il au juste ?
12 R. Il s'agit des missions habituelles que nous exécutons au quotidien et
13 qui sont prévues par les lois en vigueur.
14 Q. Merci.
15 R. Si vous souhaitez que je les énumère de nouveau --
16 Q. Ceci n'est pas nécessaire. Mais ce qui m'intéresse de savoir, c'est le
17 point suivant. Lorsque les policiers de réserve prenaient part à
18 l'exécution de ces missions habituelles, étiez-vous organisés d'une manière
19 particulière ?
20 R. Les policiers de réserve ne pouvaient pas s'acquitter de ces missions
21 de façon indépendante. Il est nécessaire que les policiers de réserve
22 soient combinés avec les policiers d'active, et on le faisait de façon
23 suivante. Chaque fois qu'on mettait sur pied une patrouille, le chef de
24 cette patrouille était un policier d'active et le policier de réserve
25 fonctionnait sous ses ordres. C'est le policier d'active qui était habilité
26 à prendre toutes les décisions pertinentes. On ne se servait des policiers
27 de réserve qu'à titre d'assistants, donc leur rôle consistait à fournir de
28 l'assistance aux policiers d'active.
Page 12462
1 Q. Merci. Qu'est-ce que c'est qu'une section de police de réserve, le
2 savez-vous; et si vous le savez, de quelle manière ces sections étaient-
3 elles organisées ?
4 R. Je sais ce que représente une section de police de réserve. Ces
5 sections ont également été mises sur pied en 1998 et 1999. Il nous était
6 impossible de défendre tous les villages menacés par les terroristes
7 albanais. C'est pourquoi un certain nombre des policiers de réserve qui
8 résidaient dans ce village ont reçu des armes, et ils montaient la garde de
9 leurs maisons et de leurs villages. C'était le rôle qui leur a été confié
10 pendant cette période, et ils assumaient ces fonctions tant qu'ils
11 n'étaient pas engagés au sein des unités d'active, soit militaires soit
12 policières. Donc ces personnes protégeaient, sécurisaient leurs maisons et
13 leurs villages, et ces sections de police comptaient des Serbes aussi bien
14 que des Albanais. Tout ceci était organisé par des départements de police
15 et par le truchement de l'officier chargé des policiers de réserve. Ces
16 sections de police de réserve avaient des postes radio qui leur
17 permettaient de soumettre des rapports directs si des problèmes survenaient
18 dans leurs villages, et cela leur permettait aussi de demander notre
19 assistance. Nous avions ces types de sections dans les villages de
20 Muzicane, Rasince, dans le village de Gornje et Donje Godance, dans le
21 village de Petrovic, et peut-être dans quelques autres villages dont les
22 noms m'échappent.
23 Q. Merci. Une précision qu'il faut apporter aux fins du compte rendu
24 d'audience. Donc je signale que ma question ainsi que votre réponse ne
25 portaient pas sur les postes de police de réserve, mais des sections de
26 police de réserve ?
27 R. Exactement. Donc il s'agissait des sections de police qui n'avaient pas
28 leurs locaux, qui n'avaient pas leurs sièges, qu'il s'agissait tout
Page 12463
1 simplement des villageois qui restaient chez eux et qui sécurisaient leurs
2 maisons. Donc, ils s'organisaient pour protéger leurs villages et leurs
3 biens. Et de telles sections de police habitaient dans les villages que je
4 viens d'énumérer, le village Muzicane, le village de Gornje et Donje
5 Godance, le village de Petrovic. La nuit, nos patrouilles de police se
6 déplaçaient dans ces villages pour surveiller la situation. Et voilà, c'est
7 ainsi que nous avons réglé les problèmes dans les villages.
8 Q. Les personnes qui faisaient parties des sections de police de réserve,
9 existait-il un déploiement pour le temps de guerre qui était prévu pour
10 eux, et que se passait-il s'ils étaient convoqués pour rejoindre les rangs
11 de l'armée ?
12 R. Tous ces individus avaient fait leur service militaire et leur
13 déploiement en temps de guerre était prévu. Ils étaient tous des membres de
14 réserve soit au sein de la police soit au sein de l'armée. Donc leur
15 déploiement en temps de guerre était prévu, et en cas de leur engagement,
16 ils étaient obligés de se conformer à leur déploiement planifié à l'avance.
17 Q. Merci. J'aimerais que vous nous donniez une précision, vous dites qu'il
18 y avait des représentants d'Albanais qui faisaient partie de ces sections
19 de police de réserve et qui en tant que tel recevaient des armes. Pourriez-
20 vous nous préciser qui étaient ces personnes et pourquoi rejoignaient-elles
21 les rangs de ces sections de police ?
22 R. Il s'agissait surtout de la population civile qui habitait dans ces
23 villages. Il s'agissait d'Albanais qui étaient loyaux aux autorités, qui
24 étaient très travailleurs, et qui craignaient pour la sécurité de leurs
25 familles, et comme ils faisaient partie de l'armée ou de la police réserve,
26 ils ont reçu des armes, de même que tous les autres policiers et militaires
27 de réserve. Leurs noms, à présent, m'échappent; je me souviens de la
28 famille de Qerem, ils étaient pratiquement tous les membres de ces sections
Page 12464
1 de police. Puis, il y avait aussi la famille -- une autre famille, mais je
2 ne saurais me rappeler tous les noms. Je n'avais pas composé une liste à
3 l'époque, cela ne faisait pas partie de mes tâches. C'est l'officier au
4 sein du département de la police qui était chargé de s'occuper de la police
5 de réserve en général, et de ces sections de police de réserve en
6 particulier, qui avait dressé cette liste.
7 Q. Merci, Monsieur Mladenovic.
8 M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche le
9 document P257.
10 Q. Il figure à l'intercalaire 2 de votre classeur. Pendant que nous
11 attendons l'affichage de ce document, j'aimerais vous poser quelques
12 questions de nature générale. Pour commencer, au sein de votre de police
13 aviez-vous des membres des PJP ?
14 R. Oui. Mon poste de police comprenait 11 membres des PJP en
15 uniforme.
16 Q. Merci. Pourriez-vous me préciser de quelle compagnie relevaient
17 ces PJP qui se trouvaient au poste de police de Stimlje ?
18 R. Je ne saurais l'affirmer avec certitude, mais je pense qu'il
19 s'agissait de la 6e Compagnie 124e Brigade d'intervention. Donc, il s'agit
20 de la compagnie d'Urosevac. Donc, ils faisaient partie de cette compagnie
21 cantonnée à Urosevac, et cette compagnie-là, à son tour, était intégrée à
22 124e Bridage d'intervention.
23 Q. Avant de nous pencher sur la 124e Bridage d'intervention, dites-
24 moi si au cours de votre carrière professionnelle, vous avez à un moment
25 donné été membre des PJP ?
26 R. Oui. J'ai été membre des PJP en 1993 et 1994.
27 Q. En votre qualité de membre des PJP, des missions spéciales vous
28 ont-elles été confiées en 1993 et 1994; et si oui, de quelles missions
Page 12465
1 s'agissait-il exactement ?
2 R. Oui. J'ai été déployé dans le cadre des PJP pour disperser les
3 manifestations organisées à Belgrade. Je pense que j'ai pris part à ces
4 activités à deux reprises.
5 Q. Très bien. Et lorsque vous étiez engagé à disperser les manifestations
6 organisées à Belgrade, qui se trouvait à la tête de votre unité transférée
7 d'Urosevac ?
8 R. Je ne saurais me rappeler avec certitude, beaucoup de temps s'est
9 écoulé depuis, mais je pense que de tout temps, nous avons eu un état-
10 major, et c'est cet état-major qui commandait aux unités PJP. Cet état-
11 major avait son siège à Belgrade, et je ne me souviens plus du nom du
12 commandant.
13 Q. Merci. Ceci n'est pas d'une importance cruciale. De toute manière, tout
14 ceci s'est produit il y a très longtemps. Mais dites-moi, les unités PJP
15 couvraient-elles le territoire de la République de Serbie dans sa totalité
16 ?
17 R. Oui, les unités PJP couvraient le territoire de la République de Serbie
18 dans sa totalité. Elles étaient censées être déployées en fonction des
19 problèmes en matière de sécurité là où un problème surgissait, et ces
20 unités relèvent directement du ministre.
21 Q. Oui, nous allons voir un document justement qui traite de ce sujet.
22 Mais avant d'y passer, dites-moi, les unités PJP représentent-elles des
23 unités régulières, policières, ou il s'agit des unités engagées de façon
24 improviste ?
25 R. Les unités PJP ne font pas partie des unités régulières de la police.
26 Elles ne sont déployées qu'en fonction des besoins.
27 Q. Merci. D'après vos connaissances, au cours des années 1996, 1997, 1998,
28 1999, les unités PJP ont-elles été déployées sur le territoire de la
Page 12466
1 république de Serbie; et si oui, pourquoi ?
2 R. Je ne saurais me rappeler avec précision de toutes les localités où ces
3 unités ont été déployées. Je pense qu'en 1996, les unités PJP servaient à
4 assurer la sécurité personnelle d'un certain nombre d'individus. Elles
5 étaient utilisées pour briser les manifestations, et puis, elles ont été à
6 Belgrade et à Novi Sad, et puis au Kosovo. En 1998 et 1999, elles ont été
7 utilisées pour juguler les activités terroristes sur le territoire du
8 Kosovo-Metohija.
9 Q. Merci. Maintenant, j'aimerais que vous vous penchiez sur le document
10 affiché à l'écran. Il s'agit d'une décision portant sur la formation de la
11 124e Brigade d'intervention des PJP. Alors, la question que je souhaite
12 vous poser est la suivante : Les PJP qui se trouvaient au poste de police
13 de Stimlje faisaient-ils partie de la 124e Brigade d'intervention ?
14 R. Oui, c'est ce que je viens d'indiquer il y a quelques instants. Je ne
15 pense pas que ce soit indiqué dans le document, mais je pense qu'ils
16 relevaient de la 6e Compagnie au sein de la 124e Brigade d'intervention.
17 Q. Merci. Je relève une erreur dans le compte rendu d'audience. Donc, ma
18 question portait sur la 124e Brigade d'intervention des PJP.
19 Monsieur Mladenovic, lorsqu'on ne leur confiait pas des missions
20 relatives aux unités PJP, quelles étaient les tâches qui leur étaient
21 dévolues ?
22 R. Lorsque les PJP n'étaient pas déployées, ils s'acquittaient de leurs
23 missions régulières aux postes de police. Ces missions pouvaient être
24 différentes. Les PJP de mon poste de police pouvaient être des chefs de
25 service de permanence, des chefs des secteurs de sécurité, et ils pouvaient
26 travailler tout simplement comme des agents de police.
27 Q. Merci, Monsieur Mladenovic. Ce qui me concerne, ce sont concrètement
28 les PJP qui se trouvaient au poste de police de Stimlje. De quelle manière
Page 12467
1 procédiez-vous à leur rassemblement, qui émettait l'ordre pour ce faire, et
2 où étaient-ils déployés depuis votre poste de police ?
3 R. Je n'ai jamais reçu un ordre écrit portant sur leur déploiement. Cela
4 fonctionnait toujours par le biais du SUP
5 Le plus souvent, les choses se passaient ainsi : Mon supérieur direct, le
6 chef du département de la police, m'en informait, généralement par
7 téléphone. Il me disait à quel moment et où les membres des PJP devaient se
8 tenir en alerte, à quel moment il fallait vérifier leur aptitude au combat,
9 et où ils devaient se rassembler pour que des missions leur soient
10 confiées. Une fois qu'ils se rendaient dans les locaux donnés, ils
11 exécutaient les tâches par leurs commandants, les commandants PJP.
12 Q. Quel était le nom du commandant de votre unité PJP dans le poste de
13 police de Stimlje ?
14 R. La compagnie était cantonnée à Urosevac, et son commandant, c'était
15 Milan Lecic.
16 Q. Merci. Lorsque l'administration de la police vous donnait l'ordre --
17 R. C'est le département de la police.
18 Q. Oui, le département de la police. Une fois reçu l'ordre du département
19 de la police, que deviez-vous faire pour que les PJP soient mises en état
20 d'aptitude au combat ?
21 R. Ma tâche consistait dans les aspects logistiques. Nous étions censés
22 les appeler, les inspecter eu égard à leur équipement et armes, et les
23 transporter vers le lieu où ils étaient censés faire rapport pour effectuer
24 leurs tâches. Ni plus ni moins.
25 Q. Merci. A partir du moment où les membres des PJP de votre poste de
26 police étaient envoyés de la façon dont vous l'avez décrite, quel était
27 leur lien avec vous par la suite, en capacité du commandant du poste de
28 police de Stimlje ?
Page 12468
1 R. A partir du moment où ils faisaient rapport aux PJP, ils n'avaient plus
2 aucun lien avec moi ou notre poste de police. A partir de ce moment-là, je
3 n'étais plus leur supérieur hiérarchique, et je ne recevais plus de leurs
4 rapports concernant leurs engagements, et je ne pouvais, d'ailleurs, leur
5 poser aucune question à cet égard. Tout ce qui avait trait avec la
6 discipline, la responsabilité pénale, et cetera, était transféré au chef du
7 SUP. Je recevais des informations, néanmoins, car en conformité avec les
8 instructions sur les registres des postes de police, nous avions un
9 registre de responsabilité de nos salariés au poste de police. C'est la
10 raison pour laquelle je recevais des informations selon lesquelles des
11 procédures disciplinaires avaient été entamées contre tel ou tel membre du
12 poste de police, ou pour une infraction mineure, mais rien qui n'avait à
13 voir avec leurs tâches particulières.
14 Q. Ma question est la suivante : Avez-vous reçu des informations
15 concernant les opérations antiterroristes ou d'autres actions menées par
16 les membres des PJP de votre poste de police ?
17 R. Non, je n'ai reçu aucune information de la sorte. Ils n'étaient pas
18 obligés de me faire rapport concernant leurs actions et les opérations
19 qu'ils menaient.
20 Q. Monsieur Mladenovic, comme vous nous l'avez déjà expliqué, une fois que
21 vous aviez envoyé les membres des PJP sur le terrain, est-ce que vous
22 envoyiez des rapports à l'administration de police ?
23 R. Non. Etant donné qu'on m'a donné ces ordres par voie orale, après avoir
24 envoyé les membres des PJP vers leurs opérations, j'en informais mon
25 supérieur par téléphone. A l'époque, il s'agissait de Radomir Mitic.
26 Q. Très brièvement, à propos de quoi l'informiez-vous ?
27 R. Dans les termes les plus brefs, en conformité avec son ordre, les
28 membres de la police ont été envoyés selon les instructions avec des
Page 12469
1 équipements et armes à Urosevac. C'est là qu'ils se retrouvaient le plus
2 souvent, et c'est là qu'ils menaient leurs opérations. C'était tout. Les
3 tâches étaient menées telles qu'indiquées dans les instructions.
4 Q. Merci. Etant donné ce que vous venez de nous dire, qui commandait les
5 forces des PJP sur le territoire du Kosovo pendant l'année 1999 ?
6 R. Sur le territoire du Kosovo, les forces PJP étaient commandées par
7 l'état-major des forces du MUP combattant le terrorisme, qui avaient leur
8 siège à Pristina.
9 Q. Comment savez-vous cela ?
10 R. Du chef du SUP, Bogoljub Janicevic. Nous tenions des réunions
11 régulières du collégium, et j'y assistais le lundi, parfois deux ou trois
12 par semaine, selon la situation sécuritaire et les problèmes à résoudre. A
13 une de ces réunions, le chef nous a informés que le ministre avait mis sur
14 pied un état-major à Pristina pour lutter contre le terrorisme, et que le
15 commandant de cet état-major était le général de brigade, Sreten Lukic. Cet
16 état-major faisait rapport directement au ministre pour toutes ces
17 activités. Ils étaient subordonnés au ministre qui avait contrôle direct du
18 problème de sécurité le plus important qui prévalait au Kosovo à l'époque.
19 Qui plus est, toutes les unités de police étaient subordonnées à cet état-
20 major, cet état-major chargé de lutter contre le terrorisme au Kosovo-
21 Metohija, et qui était basé à Pristina.
22 Q. Monsieur le Témoin, faisiez-vous visite à vos PJP une fois qu'ils
23 avaient quitté votre base, comme vous nous l'avez expliqué ?
24 R. Non. Ils n'étaient pas de mon ressort de rendre visite à ces unités, et
25 il nous était parfaitement interdit de nous immiscer dans leurs travaux,
26 c'est-à-dire qu'à partir du moment où ils étaient lancés dans une opération
27 PJP, nous n'avions plus aucune obligation à leur encontre.
28 Q. Merci. Vous a-t-on donné des ordres qui impliquaient des tâches de
Page 12470
1 sécurité particulières ? Là, je fais référence à vous et votre poste de
2 police, je ne fais pas référence aux PJP.
3 R. Nous n'avons jamais reçu de tels ordres. Nos missions étaient de mener
4 les tâches prescrites par la loi. J'y ai fait référence il y a un instant,
5 et je le répèterai s'il est nécessaire. Notre devoir était limité à cela.
6 En fait, il y avait ordre selon lequel aucun membre de police qui n'est pas
7 membre des PJP devrait s'impliquer dans les missions de PJP et nous exposer
8 à des risques qui n'étaient pas des risques inhérents aux dangers des
9 tâches menées en dehors des missions de police ordinaires. Il n'était pas
10 de notre devoir de mener ce type de missions qui n'était pas spécifié dans
11 le règlement.
12 M. POPOVIC : [interprétation] Pièce D131, s'il vous plaît.
13 Q. Il s'agit de l'intercalaire numéro 3 dans votre classeur.
14 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Popovic, on m'indique que ce
16 document est sous pli scellé.
17 M. POPOVIC : [interprétation] Je pars de l'hypothèse que vos sources ont
18 raison. Ce document a été versé au dossier lorsqu'un témoin protégé
19 témoignait. Ainsi, je propose --
20 M. LE JUGE PARKER : [aucune interprétation]
21 M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais demander à ce que nous passions en
22 huis clos partiel.
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je crois qu'on peut afficher le
24 document à l'intérieur de cette salle d'audience sans que nous soyons
25 obligés de passer en huis clos. Ainsi, je propose que l'on poursuive sur
26 cette base.
27 M. POPOVIC : [interprétation] Merci.
28 Q. Monsieur Mladenovic, je vous demande maintenant d'examiner cette note
Page 12471
1 officielle datée du 28 septembre 1998. Pourriez-vous nous dire brièvement
2 de quoi il s'agit. Etant donné que ce document est sous pli scellé, merci
3 de ne pas faire référence aux noms que vous verrez dans ce document.
4 R. Il s'agit d'une note officielle. Il s'agit d'un document normalisé qui
5 était envoyé par un officier de police ayant mené une mission officielle
6 selon l'autorité qui lui a été octroyée. Il est dit ici qu'un certain
7 nombre de personnes ont été menées en garde à vue au poste de police de
8 Stimlje. Ces mêmes personnes en garde à vue ont été remises au département
9 de la police criminelle du SUP Urosevac. C'était la procédure lorsque des
10 citoyens étaient amenés au poste. Il y avait donc des traces de cela au
11 poste de police, des personnes étaient amenées au poste et ensuite ce
12 qu'elles advenaient. Un exemplaire accompagnait les personnes vers le SUP
13 d'Urosevac. Il s'agissait probablement de personnes qui étaient des
14 terroristes.
15 Q. Merci. Je vais maintenant vous demander de lire en silence l'auteur de
16 cette note officielle et de me dire oui ou non quant à savoir si vous
17 connaissez cette personne ?
18 R. Oui, je la connais. Il s'agit d'un officier de police appartenant à mon
19 poste de police. A l'époque, poste de police de Stimlje.
20 Q. Merci.
21 M. POPOVIC : [interprétation] Pouvons-nous maintenant afficher la pièce
22 P1041.
23 Q. Il s'agit de l'intercalaire 4 dans votre classeur.
24 R. Il s'agit d'un document --
25 Q. Pardonnez-moi. Je vais vous poser des questions. La date est le 21
26 octobre 1998. Ministère de l'Intérieur, état-major du ministère. De quel
27 état-major s'agit-il dans l'intitulé de ce document, Monsieur Mladenovic,
28 le savez-vous ?
Page 12472
1 R. Il s'agit de l'état-major mis sur pied à Pristina, l'état-major chargé
2 de la lutte contre le terrorisme. Je pars de l'hypothèse qu'il s'agit de
3 l'état-major basé à Pristina, car c'était le seul état-major qui existait
4 dans ce lieu.
5 Q. Merci. Au premier paragraphe, il est dit que : "Afin de mettre en œuvre
6 des tâches cohérentes émanant de l'accord sur l'OSCE, il est nécessaire
7 d'entreprendre ce qui suit…"
8 Connaissez-vous cet accord ?
9 R. Evidemment que je connais cet accord. Il s'agit de l'accord Holbrooke-
10 Milosevic. Cet accord permet aux vérificateurs de l'OSCE de vérifier tout
11 ce qui se passait au Kosovo à l'époque. Sur la base de cet accord, les
12 vérificateurs étaient déployés de par le territoire du Kosovo. Sur le
13 territoire de la municipalité de Stimlje, me semble qu'il y en avait neuf,
14 y compris leur commandant, Tommy Olofsson [phon] de Suède. C'est avec lui
15 que j'étais la plupart du temps en contact. En conformité avec cet accord,
16 je pourrais vous donner d'autres commentaires de ma part.
17 Q. Procédons par étape. Tout d'abord, avez-vous eu connaissance de cette
18 note à l'époque où elle a été envoyée ?
19 R. Oui, j'en ai eu connaissance. Tous les secrétariats l'ont reçue, ainsi
20 que tous les postes de police, car il s'agissait des tâches que nous
21 devions accomplir.
22 Q. Merci. Pourriez-vous maintenant, à l'alinéa (a) et les paragraphes 1, 2
23 et 3, pouvez-vous lire en silence et pouvez-vous nous dire ce
24 qu'envisageait cette note ?
25 R. Comme vous le voyez dans ce document, les membres de la mission étaient
26 couverts par l'immunité diplomatique et étaient autorisés à se déplacer
27 librement, habiter sur le territoire, et il était de notre devoir de leur
28 fournir assistance dans la mission qui leur avait été confiée sur la base
Page 12473
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
12 versions anglaise et française
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 12474
1 de l'accord. Il est dit également en détail quelles sont les obligations
2 des postes de police. A la demande des membres des missions, ces postes
3 étaient obligés de fournir toutes informations demandées par les membres
4 des missions. Il est également indiquer des niveaux. Ils étaient organisés
5 selon la même hiérarchie que nous; commandant, commandant adjoint, et
6 cetera. Donc, les contacts devaient se faire de façon identique à notre
7 organisation; commandant avec commandant, commandant adjoint avec
8 commandant adjoint, et cetera. Si la personne homologue n'était pas
9 présente, le niveau inférieur devait fournir les informations requises. A
10 la page 2 --
11 Q. Merci. Passons à la page 2 de ce document. Alinéa (b), rapport et
12 information. De quel rapport s'agissait-il, quelle information envoyée ?
13 R. Il s'agit de la suite du même document. Il s'agit des obligations du
14 côté organisation -- unité organisationnelle, à savoir poste de police,
15 dans mon cas. Concernant l'établissement de rapports et information sur les
16 provocations, attaques, mouvements, et cetera, nous, dans les postes de
17 police, n'avions pas de tels mouvements. Ainsi, tout n'était pas lié à
18 nous, mais ce document a été rédigé pour les secrétariats dans leur
19 ensemble. Il y a également une partie qui porte sur la resubordination qui
20 était décrite dans le détail.
21 Q. Merci. Point 2, actions menées par la police.
22 R. Il ne s'agissait pas du poste de police de Stimlje, ne s'appliquait pas
23 au poste de police de Stimlje. Cette note circulaire a été envoyée à tous
24 les secrétariats. Ainsi, nous faisions tous rapport dans nos propres
25 domaines de travail, et la police à Stimlje ne participait pas à ce type
26 d'actions et, donc, ne faisait pas rapport à ce propos.
27 Q. Merci, soyons précis. Lorsque vous dites "tous les secrétariats", que
28 voulez-vous dire ?
Page 12475
1 R. Je veux dire tous les secrétariats, au nombre de sept, sur le
2 territoire de Kosovo-Metohija : Mitrovica, Pristina, Pec, Prizren,
3 Urosevac, Gnjilane, et Djakovica.
4 Q. Merci. Monsieur Mladenovic, savez-vous que la route de Prizren qui
5 traverse Suva Reka et se rend à Pristina faisait partie de l'accord, et
6 rendre cet axe routier sûr avait été prévu par l'accord Clark-Naumann, tel
7 qu'il était connu. Cet axe routier était nommé en particulier comme étant
8 un axe qui devait être contrôlé par les forces de sécurité de la Serbie ?
9 R. Oui, je le sais. On m'en a informé à l'une des réunions qui se tenaient
10 régulièrement avec le chef du secrétariat du SUP
11 vu cet accord dans le détail. Mais à la réunion, on nous a dit que selon
12 cet accord, l'axe routier devait être contrôlé par les forces de police, à
13 savoir un escadron temporaire de la police a été formé pour protéger cette
14 route, et des forces militaires devaient également la protéger. Il me
15 semble que cela était indiqué clairement dans l'accord. Le nombre d'hommes
16 composant ces unités est également fixé.
17 Q. Etant donné que vous n'avez pas vu cet accord, je ne vais pas vous le
18 montrer maintenant, mais vous saviez que les unités de la VJ étaient
19 impliquées dans la protection de cet axe routier ?
20 R. Oui.
21 Q. Et apporter sécurité à cette route par la police, est-ce que cela
22 impliquait votre poste de police pour une partie de la route, et comment
23 procédiez-vous ?
24 R. Nous avions des postes de suivi de Stimlje à Belince, Crnoljevo, le
25 long de la route, et pas sur la route elle-même, mais perchés sur les
26 collines, et jusqu'à Dulje et la gorge de Crnoljevo. Etant donné qu'il
27 s'agissait d'un morceau de route relativement long, et que nous n'avions
28 pas les hommes pour mener cette tâche, il avait été décidé au niveau du SUP
Page 12476
1 d'Urosevac et probablement à un niveau plus élevé, qu'une compagnie serait
2 mise sur pied par le SUP d'Urosevac et qu'elle serait composée d'officiers
3 de police d'active et de réserve, et que chaque poste de police, Stimlje,
4 Strpce, Kacanik et Urosevac, fournirait un peloton chacun afin de former
5 cette compagnie. Cette compagnie serait déployée de Stimlje jusqu'à
6 Sumarevo Kucica et jusqu'à l'extérieur de Crnoljevo, alors que la compagnie
7 de Gnjilane, qui était composée d'officiers de police de réserve et
8 d'active, était déployée de Sumarevo Kucica et jusqu'à Dulje, mais pas sur
9 la route elle-même, sur les collines surplombant la route. Pour
10 l'essentiel, nous avons pris nos positions dans les tranchées qui avaient
11 été creusées par les terroristes albanais lorsqu'ils souhaitaient entraver
12 cette route. Nos unités se situaient dans des postes d'observation afin de
13 sécuriser cet axe routier. Il s'agissait là de la seule mission pour cet
14 escadron temporaire de police, et il y avait également la police de la
15 circulation qui contrôlait l'axe routier dans son ensemble.
16 Q. Merci. Lorsque vous parliez d'apporter des éléments de sécurité et des
17 postes d'observation qui se situaient là, faisiez-vous référence aux
18 devoirs de police réguliers qui faisaient partie de la sécurité publique ?
19 R. Oui, il s'agissait là de devoirs réguliers ou ordinaires et qui étaient
20 menés par des unités régulières. Il ne s'agissait pas de membres des PJP ou
21 ils ne participaient pas à des opérations de combat. Leur seule tâche était
22 d'être déployés sur les emplacements indiqués dans l'accord, et les
23 vérificateurs l'ont suivi; ils étaient présents avec nous jusqu'au début
24 des frappes aériennes.
25 Q. Merci, Monsieur Mladenovic.
26 M. POPOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, la pièce D136 a
27 également été versée sous pli scellé. Il s'agit du document daté du 6
28 novembre 1998. Je crois qu'il en va de même que pour le document précédent.
Page 12477
1 Il contient quelques informations -- enfin, j'aimerais plutôt poser
2 quelques questions brièvement afin de susciter des informations sur son
3 contenu. Mais le moment est quasiment venu de faire une pause.
4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons maintenant marquer une
5 pause, et reprendre à 16 heures 15. A ce moment-là, le document sera
6 affiché sur le prétoire électronique, et non pas à l'extérieur de cette
7 salle d'audience. Merci.
8 --- L'audience est suspendue à 15 heures 44.
9 --- L'audience est reprise à 16 heures 17.
10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Popovic.
11 M. POPOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
12 J'aimerais que l'on affiche maintenant la pièce D132. C'est un document
13 sous pli scellé, et c'est pourquoi je demande que l'on affiche le document
14 uniquement pour nos propres besoins, qu'il ne soit pas diffusé à
15 l'extérieur de la salle d'audience.
16 Q. Monsieur Mladenovic, cela figure à l'intercalaire 6 dans votre dossier.
17 C'est un document en date du 6 novembre 1998, intitulé note officielle
18 portant sur les informations relatives à l'organisation des terroristes
19 dans le village de Racak. J'aimerais que vous preniez connaissance de ces
20 informations et que vous me disiez si à l'époque, effectivement, vous
21 disposiez de ces éléments d'information s'agissant du village de Racak.
22 R. "Le 6 novembre 1998, par un ami, j'ai appris que le long de la route
23 entre les villages de Racak et de Petrovo, sur la droite, on voit que les
24 terroristes siptar creusent les tranchées, organisent les bunkers et
25 coupent le bois pour construire les bunkers."
26 Il s'agit d'une information opérationnelle soumise par un membre du
27 poste de police de Stimlje, et cela illustre bien ce qui se passait à
28 l'époque. C'est au mois de novembre 1998, les terroristes albanais dans ces
Page 12478
1 villages organisaient des fortifications et ont utilisé le bois pour
2 construire les casemates et fournissaient de la résistance face aux organes
3 d'Etat. Ces terroristes procédaient aux attaques contre tous ceux qui
4 circulaient le long de ces axes routiers. C'est juste l'un des documents
5 qui, à l'époque, a été présenté par les membres de police.
6 Q. Merci.
7 M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche maintenant le
8 document D133. D'après mes informations, ce document n'est pas sous pli
9 scellé.
10 Q. Cela figure à l'intercalaire 7, en date du 10 novembre 1998. Je vous
11 prie d'examiner le premier paragraphe. Vous pouvez le lire en silence, et
12 je vous prie de nous livrer vos observations à ce sujet. Dites-nous, est-ce
13 que cela correspond aux informations dont vous disposiez portant sur les
14 événements survenus au village de Racak à l'époque ?
15 R. C'est un document émanant du SUP d'Urosevac et transféré à l'état-major
16 pour le Kosovo-Metohija à Pristina. Il est dit dans ce document que dans
17 les villages environnant Racak et dans les villages autour de Stimlje, la
18 population civile quitte ces villages parce qu'elle a peur.
19 Q. Je vous prie d'examiner la deuxième phrase dans le premier paragraphe,
20 où il est dit :
21 "Les membres de l'UCK se sont rendus au village de Racak et ont ordonné aux
22 villageois de quitter le village parce qu'eux allaient s'y installer en
23 plus grand nombre."
24 R. Oui. De tels ordres étaient communiqués dans tous les villages où ils
25 s'implantaient et organisaient leurs bastions. Bien sûr la population
26 civile les fuyait parce qu'ils craignaient les confrontations entre eux,
27 donc l'UCK et la police.
28 Q. Merci.
Page 12479
1 M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche maintenant le
2 document 1187 de la liste 65 ter de la Défense. C'est le document D008-
3 5625. Oui, c'est le bon document.
4 Q. Monsieur Mladenovic, cela figure à l'intercalaire 8 chez vous. C'est
5 une déclaration le 22 novembre 1998. Je vous prie d'examiner le deuxième
6 paragraphe, de le lire en silence et de nous livrer vos observations à ce
7 sujet. Mais avant de ce faire, dites-nous, je vous prie, d'examiner quelles
8 sont les personnes autorisées qui figurent, Jasovic, et cetera. Est-ce que
9 vous les connaissez, Jasovic et Sparavalo ?
10 R. Cette déclaration qui a été recueillie par des personnes -- je ne sais
11 pas s'il faut que je mentionne leur nom ?
12 Q. Oui, oui, allez-y.
13 R. Recueillie de Mustafa Metush. C'est un originaire de Racak,
14 municipalité Stimlje. Cette déclaration a été recueillie au département de
15 la police criminelle par Dragan Jasovic et Momcilo Sparavalo, inspecteurs
16 du département de la police criminelle à Urosevac. Mustafa Metush dit
17 qu'Isak Musliu, connu en tant que Qerqiz, a convoqué une réunion dans la
18 mosquée et il a demandé que les villageois donnent 200 deutsche marks pour
19 l'achat d'armes. C'était ainsi que dans tous les villages ils rassemblaient
20 les fonds et ainsi achetaient les armes. Tous les villageois devaient
21 participer à l'organisation de casemates et lorsqu'on creusait les
22 tranchées. Si quelqu'un n'avait pas d'argent, on devait leur donner de la
23 farine, ou de l'essence, et cetera. Certains villageois qui disposaient des
24 pelleteuses ou d'autres choses devaient creuser les tranchées, organiser
25 les routes. Il y avait une route qui allait de Rance vers Jezerce,
26 construite par l'UCK, grâce à l'aide des villageois. On en a beaucoup parlé
27 à l'époque, parce que les gens vivaient dans des conditions difficiles et
28 devaient même se priver pour leurs besoins. Bien sûr si quelqu'un refusait
Page 12480
1 d'obéir, il devait subir les conséquences.
2 Q. Merci. Je vous prie d'examiner l'avant-dernier paragraphe de cette
3 déclaration. Je vous prie de le lire en silence. Nous pouvons le lire, nous
4 aussi, pour nous-mêmes, et je vous prie de nous dire est-ce que cela
5 correspond aux informations dont vous disposiez ?
6 R. Oui, ce qui figure ici est exact. Je suppose que c'est exact parce
7 qu'un grand nombre de maisons à l'époque étaient abandonnées parce que les
8 villageois craignaient les confrontations entre les terroristes et la
9 police. Ces maisons abandonnées, qui n'étaient pas placées sur la
10 protection du poste de police, faisaient l'objet d'attaques criminelles et
11 se livraient au pillage. Ici, il est dit qu'on a volé les biens dans ces
12 maisons abandonnées. Il n'est pas dit qui l'a fait, mais je suppose que
13 c'étaient les membres de ces groupes dont je vous ai parlé. Donc, cela
14 arrivait, effectivement.
15 Q. Nous pouvons voir dans l'avant-dernier paragraphe, on mentionne un
16 certain Mehmet Cazimi et Idriz Mehmeti, et qu'ils habitent sur la colline
17 qui est supérieure par rapport aux foyers ci-mentionnés.
18 R. Oui, c'est exact.
19 M. POPOVIC : [interprétation] On demande le versement au dossier de ce
20 document.
21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, il sera versé au dossier.
22 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D00818.
23 M. POPOVIC : [interprétation] Merci.
24 J'aimerais qu'on affiche maintenant la pièce D135.
25 Q. Chez vous, cela figure à l'intercalaire 10, Monsieur Mladenovic.
26 M. POPOVIC : [interprétation] On vient de me dire que ce document n'est pas
27 sous pli scellé.
28 Q. Il n'est pas très lisible. Le document porte la date du 18 décembre
Page 12481
1 1998, et il est dit que :
2 "Depuis le village de Racak, plusieurs rafales courtes ont été
3 ouvertes vers le poste de police de Stimlje. Les membres de la police n'ont
4 pas répondu à cette attaque."
5 Il est dit que le rapport a été présenté par Svetomir Bocic, sergent
6 Bocic. De quoi s'agit-il ?
7 R. C'est probablement une dépêche envoyée depuis le service de permanence
8 du SUP d'Urosevac vers l'état-major, et son signataire est Svetomir Bocic.
9 Il était chef d'équipe au sein du service de permanence à Urosevac. Je me
10 souviens de cet événement. L'attaque a été lancée depuis le village de
11 Racak. A l'époque dans ce village, plusieurs groupes terroristes étaient
12 cantonnés, et nous avions des membres qui défendaient le poste de police
13 devant le bâtiment du SUP et ces membres ont été attaqués. L'attaque a été
14 enregistrée, mais nous n'avons pas répondu à cette attaque. Je pense qu'on
15 en a parlé par la suite avec les membres de la Mission de vérification.
16 Donc, c'était une dépêche qui était envoyée à l'état-major portant sur les
17 événements survenus au cours de la journée. Cela découle de l'information
18 précédente portant sur le système de rapport.
19 Q. Je pense qu'on ne voit pas très bien ce document, donc c'est ce que
20 vous supposez ?
21 R. Oui, mais nous ne voyons pas de tampons ici.
22 Q. Merci.
23 M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche maintenant le
24 document D136.
25 Q. Cela figure à l'intercalaire 11. Je vous prie d'examiner la deuxième
26 page de ce document pour nous dire si, effectivement, vous êtes auteur de
27 ce document.
28 R. Oui, c'est ma signature qui y figure.
Page 12482
1 Q. Merci. Donc c'est un rapport portant sur le contact avec les membres de
2 la mission de l'OSCE en date du 21 décembre 1998. Je vous prie de nous
3 expliquer brièvement de quelle manière vous avez pris contact avec les
4 membres de la mission de l'OSCE ?
5 R. A partir du moment où les membres de cette mission étaient venus sur
6 les lieux, dès qu'ils étaient venus sur le territoire de la municipalité de
7 Stimlje, nous sommes convenus à quel moment et comment nous allions nous
8 rencontrer. Au début, c'était pratiquement tous les jours, et après, à
9 cause de nos obligations, nous sommes convenus que ça allait être tous les
10 lundis et vendredis, et qu'on pouvait avoir d'autres réunions si jamais il
11 y avait une circonstance extraordinaire, si l'ordre public était violé, par
12 exemple.
13 Q. Merci. J'aimerais que vous apportiez quelques commentaires émanant de
14 ce rapport. Mais tout d'abord, dites-nous, à qui était adressé ce rapport ?
15 R. En tant que personne autorisée, j'avais l'obligation de fournir un
16 rapport au chef du département de la police portant sur tout contact avec
17 les membres de cette mission, et donc je rédigeais un rapport qui était
18 envoyé au SUP d'Urosevac qui, par la suite, l'a envoyé, je suppose, à
19 l'état-major.
20 Q. Merci. Voilà, tout a été consigné au compte rendu d'audience.
21 Mais dans le premier paragraphe, il est dit "sans qu'il soit annoncé au
22 préalable." Pourriez-vous apporter quelque commentaire ?
23 R. Oui, c'est exact. Conformément à notre accord, ils n'avaient pas
24 l'obligation de prévenir avant de venir nous voir ou s'ils souhaitaient
25 s'informer au sujet d'un événement. Ils pouvaient venir à tout moment de la
26 journée ou de la nuit, entrer dans nos locaux du poste de police et
27 s'informer au sujet de ce qui les intéressait. Donc ici, il est dit que sur
28 leur demande, sans prévenir au préalable, donc c'est ainsi qu'ils étaient
Page 12483
1 venus, nous avons eu un entretien.
2 Q. Merci. Je vous prie de commenter ce qui m'intéresse, et cela figure au
3 milieu du paragraphe qui commence par le mot "également". Mais ce n'est pas
4 la peine de le lire à haute voix. Je vous prie de le lire en votre for
5 intérieur. Et ici, l'on parle du fait que toutes les ethnies dans la
6 municipalité de Stimlje, que leur sécurité était compromise à cause des
7 activités des terroristes ?
8 R. Oui. Ici, l'on fait état de trois villages, de Racak, Petrovo et
9 Crnoljevo, et on dit qu'à partir de ces villages, on lance des attaques
10 contre la police, et nous leur avons fourni cette information pour qu'eux
11 transmettent cette information à leurs supérieurs, à leur base.
12 Q. Merci. Et la dernière phrase de ce premier paragraphe, lisez-la en
13 silence. Vous parlez de deux attaques, l'une du 17 et l'autre du 20
14 décembre, l'une à partir du village de Racak, et l'autre depuis Crnoljevo.
15 Et dites-nous, est-ce que ce paragraphe, cette phrase reflète la situation
16 telle qu'elle était à l'époque ?
17 R. Oui. Elle reflète bien la situation telle qu'elle était à l'époque, et
18 il est dit ici que l'attaque a été lancée contre les forces de sécurité en
19 profondeur et que l'autre attaque a été contre un poste de contrôle établi
20 par la police pour protéger la ville. Donc, c'étaient les deux attaques
21 armées qui ont été enregistrées, et nous avons fourni ces informations aux
22 vérificateurs. Nous n'avons pas répondu à ces attaques, et aucune mesure
23 n'a été prise. A la deuxième page, on dit qu'il y a eu une explosion à 50
24 mètres par rapport au poste de contrôle. Donc, c'est probablement un obus
25 qui a été lancé d'un lance-roquettes portatif.
26 Q. J'imagine que vous avez dit "mètres", "50 mètres", n'est-ce pas ?
27 R. Oui.
28 M. POPOVIC : [interprétation] Passons maintenant à la pièce D007-0120.
Page 12484
1 Q. Et cela figure à l'intercalaire 12. Il s'agit d'une plainte au pénal en
2 date du 3 janvier 1999, où il est dit que le 2 janvier 1999, à Stimlje, à
3 l'entrée d'une maison de famille, Gashi Enver a été tué par les membres
4 d'un groupe terroriste. Dites-nous, quelles étaient les informations dont
5 vous disposiez portant sur cet événement ? Est-ce que vous vous souvenez
6 déjà de cet événement ?
7 R. Oui, je me souviens de cet événement. Cet événement a eu lieu pendant
8 les fêtes pour le Nouvel an en 1999. Et d'après nos informations, les
9 terroristes albanais ont tiré contre Gashi Enver parce qu'il était loyal et
10 voulaient le tuer. Et Enver Gashi était un mécanicien, il avait une
11 boutique en face de sa maison, et il réparait parfois même nos propres
12 véhicules officiels. C'était un homme très correct, et nous supposons que
13 c'est la raison pour laquelle ils l'ont tué. Toute personne qui a collaboré
14 avec la police et s'agissant d'Albanais a eu le même sort.
15 Et DS à signer ce rapport, c'est Dostan Sabani qui l'a signé. Il a
16 travaillé dans le département chargé de crimes de sang, et le rapport a été
17 présenté, envoyé au procureur de district à Pristina.
18 Q. Merci. Pourriez-vous répéter le nom de cet inspecteur.
19 R. Dostan Sabani.
20 Q. Lentement, s'il vous plaît, pour que ce soit consigné.
21 R. Dostan Sabani. Il était inspecteur chargé de crimes de sang et de
22 crimes sexuels au sein du SUP à Urosevac.
23 Q. Merci.
24 M. POPOVIC : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce
25 document.
26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ce sera versé au dossier.
27 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce D00819.
28 M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche maintenant le
Page 12485
1 document D137.
2 Q. Et cela figure à l'intercalaire 13, Monsieur le Témoin. Je vous prie
3 d'examiner la deuxième page de ce document. Dites-nous si vous êtes auteur
4 de ce document.
5 R. Oui, c'est ma signature, et je suis auteur de ce document.
6 Q. Merci. Revenons à la première page. Donc, c'est le 4 janvier 1999,
7 rapport portant sur le contact réalisé avec les membres de la Mission de
8 vérification de l'OSCE. Je vous prie d'examiner le deuxième paragraphe.
9 Nous avons une phrase qui commence par les mots suivants :
10 "Au moment où les vérificateurs de la mission de l'OSCE ont demandé d'avoir
11 une réunion avec moi. Ibish Qari était présent à ce moment-là", et ainsi de
12 suite. Pourriez-vous prendre connaissance de ce qui figure dans ce
13 paragraphe, et dites-nous de quoi il s'agit ?
14 R. Il s'agit d'un document qui fait partie des rapports qui étaient
15 généralement envoyés au SUP d'Urosevac. Les vérificateurs de l'OSCE
16 s'étaient rendus chez moi sans préavis pour discuter d'un autre incident.
17 Mais Ibish Qari se trouvait à ce moment-là dans mon bureau. C'est une
18 personne qui est née en 1937, vous le voyez dans ce document, donc c'était
19 une personne âgée. Il allait dans le village de Racak ou alors celui de
20 Petrovo pour rendre visite à sa fille qui était mariée. En se rendant à
21 Petrovo près du village de Maho Poljce, qui précède celui de Petrovo, il a
22 été enlevé par les membres de l'UCK terroriste. Et nous avons même appris
23 que la personne qui l'avait enlevé était Sadik Mujota, accompagné de ses
24 fils. En tout cas, ces individus l'ont enlevé, ils l'ont emprisonné dans
25 une étable où il a été gardé pendant dix jours, et une fois par jour
26 seulement on lui donnait à manger et à boire. Il a réussi finalement à
27 s'enfuir, et puis il est venu au poste de police pour porter plainte. Donc
28 j'étais en train d'en discuter avec lui dans mon bureau au moment où les
Page 12486
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
12 versions anglaise et française
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 12487
1 vérificateurs de l'OSCE sont arrivés, si bien qu'ils ont eu l'occasion se
2 s'assurer de tous ces faits de leurs propres yeux. Je n'ai plus rien à
3 ajouter au sujet de cet incident.
4 Q. Merci. Dans le dernier paragraphe, vous indiquez avoir informé les
5 vérificateurs de l'OSCE de plusieurs attaques lancées par les terroristes ?
6 R. Oui, oui. Il est indiqué ici que les inspecteurs de la section de la
7 police criminelle d'Urosevac étaient présents à ce moment-là. Donc, ils
8 étaient présents au moment où nous entendions le témoin, et la même chose
9 valait pour les vérificateurs de l'OSCE, ils étaient présents eux aussi.
10 Q. Merci, Monsieur Mladenovic. Veuillez examiner, s'il vous plaît, à la
11 page suivante de ce document.
12 Oui, nous attendons juste l'affichage de cette partie du document. Donc
13 vous dites que M. Qari avait porté plainte à cause de cet enlèvement au
14 poste de police de Stimlje et qu'il a demandé la protection du MUP vis-à-
15 vis des bandes terroristes qui l'avaient enlevé, il a demandé qu'il soit
16 protégé contre les bandes terroristes qui l'avaient enlevé, ceux-ci par
17 ailleurs l'avaient menacé de ne pas porter plainte auprès de la police
18 parce que sinon il sera tué.
19 Donc, pourriez-vous nous livrer vos observations sur ce point ?
20 R. C'est exactement comme ça que les choses se sont passées. Donc il ne
21 s'agissait pas tout simplement pour lui de porter plainte officiellement;
22 l'homme est venu chez nous pour demander notre protection. Donc il a été
23 enlevé, il a été tenu en captivité, on l'a menacé de tuer les membres de sa
24 famille. Donc sa fille était mariée, elle vivait dans le village de Petrovo
25 ou alors celui de Racak, je ne sais plus. Ça doit être indiqué ici quelque
26 part dans cette plainte au pénal. Et c'est la raison pour laquelle il avait
27 demandé aux agents de police de le protéger.
28 Donc sa maison se trouvait à Stimlje. Si bien que nous venions
Page 12488
1 régulièrement lui rendre visite. Et tant qu'il est resté à Stimlje, sa
2 maison a été sécurité, mais du moment où il commençait à circuler vers
3 Petrovo et Racak, la situation était telle que cela présentait des risques.
4 Nous lui avons conseillé de ne pas se diriger dans cette direction, et nous
5 avons aidé sa famille en assurant la sécurité de sa maison pendant son
6 séjour dans Stimlje.
7 Q. Merci, Monsieur Mladenovic. J'aimerais que vous examiniez le document
8 14 dans votre classeur.
9 M. POPOVIC : [interprétation] C'est la pièce D139.
10 Q. Monsieur Mladenovic, le document que nous avons sous les yeux est un
11 rapport sur les observations et les contacts établis avec les membres de la
12 mission de l'OSCE du 10 janvier 1999. Alors on relève une attaque
13 terroriste à l'encontre des membres du poste de police de Stimlje. Les
14 vérificateurs de l'OSCE auraient appris quel était le nom du policier
15 blessé alors que celui-ci a été transféré à Pristina. Vous souvenez-vous de
16 cet incident ?
17 R. Oui. Je m'en souviens. Et j'aimerais dire quelques mots au sujet de ce
18 rapport. Le rapport est signé par Sasa Draskovic. A l'époque, il occupait
19 le poste de l'assistant du chef au poste de police d'Urosevac. Quant à
20 Svetislav Przic, c'était un agent de police qui travaillait au poste de
21 police de Stimlje. Il a reçu des blessures mortelles dans le village de
22 Slivovo en revenant chez lui. Il était accompagné par l'assistant du chef,
23 Nenad Mitrovic, et par Miroslav Zivic. Donc tous les trois se trouvaient à
24 bord d'un véhicule et se déplaçaient en direction de Stimlje. Et puis,
25 lorsqu'ils se sont approchés de leur maison dans le village de Slivovo, qui
26 suit le village de Kosare, une embuscade leur a été tendue, des tirs ont
27 été lancés contre le véhicule, et il a reçu des blessures qui se sont
28 avérées mortelles. Et j'aimerais dire encore quelques mots, s'il vous
Page 12489
1 plaît.
2 Q. Non, nous allons revenir sur ce document qui est abordé avec plus de
3 détail dans le document suivant. Peut-on afficher la pièce D138, s'il vous
4 plaît, c'est le document 15 dans votre classeur, Monsieur. Attendons
5 l'affichage du document. Oui, voilà, c'est bien le document qu'il nous
6 faut. Passons immédiatement à la page 2, plainte au pénal, et vous pouvez
7 poursuivre votre exposé, parce que justement, cet incident est abordé dans
8 le document, dans cette plainte au pénal.
9 R. Exact. Il s'agit d'une plainte au pénal déposée par le SUP
10 une fois terminée l'enquête sur les lieux, et dresser le constat. Et puis
11 je reprends mon propos de tout à l'heure. Cette plainte au pénal montre que
12 dès le moment où nous avons appris qu'une patrouille de police a été
13 attaquée, les vérificateurs de l'OSCE ont demandé de se rendre sur les
14 lieux pour vérifier ces dires. Et M. Draskovic a permis aux vérificateurs
15 de le faire et il a assuré toutes les conditions nécessaires pour qu'ils se
16 rendent sur les lieux, puis une fois terminée toutes les étapes de
17 l'enquête, cette plainte au pénal a été déposée.
18 Q. Passons à la page suivante du même document, s'il vous plaît. C'est un
19 procès-verbal ou plutôt c'est un constat dressé sur les lieux.
20 R. Oui, exactement.
21 Q. Dans le premier paragraphe il est indiqué, la scène du crime est un
22 cimetière musulman qui se trouve près de l'axe routier Urosevac, et à la
23 gauche de cette route en direction de Stimlje. Alors pourriez-vous nous
24 préciser quel est l'endroit exact où cet incident s'est produit ? S'agit-il
25 de la partie de la route qui mène vers Racak ou vers Urosevac ?
26 R. L'inspecteur qui est venu d'Urosevac, il prend comme point de repère la
27 route qui va d'Urosevac à Stimlje, et le village de Slivnik [phon] se
28 trouve le long de cet axe routier. Puis sur la gauche, en prenant la ville
Page 12490
1 d'Urosevac comme point de repère, le cimetière musulman s'y trouve. Le
2 cimetière se trouve juste à côté de la route, à l'abri d'un bosquet. Par
3 ailleurs, ma maison natale se trouve dans un village qui n'est pas loin de
4 la ville d'Urosevac, donc j'ai souvent fait le trajet le long de cette
5 route. Voilà, c'est tout ce que j'ai à dire à ce sujet.
6 Q. Merci.
7 M. POPOVIC : [interprétation] Passons maintenant à la pièce D140.
8 Q. C'est le document 16 dans votre classeur. Le document ne compte qu'une
9 seule page. C'est un rapport que vous avez rédigé et signé ?
10 R. Oui, c'est un rapport que j'ai soumis.
11 Q. Il concerne les contacts que vous avez eus avec les vérificateurs de
12 l'OSCE. Il porte la date du 11 janvier 1999. Veuillez lire en votre for
13 intérieur le premier paragraphe, puis j'aimerais entendre vos observations
14 sur le sujet. Ce qui m'intéresse, tout particulièrement, ce sont les propos
15 émanant des vérificateurs. Ceci affirme que la situation avait été paisible
16 sur les territoires de Stimlje auparavant, alors que maintenant, elle est
17 devenue tendue. J'aimerais que vous nous disiez pourquoi la situation est
18 devenue aussi tendue.
19 R. C'est l'observation à laquelle ils se sont livrés, eux. Ils affirment
20 que la zone de Racak avait été paisible alors que maintenant les relations
21 sont tendues. Je leur ai expliqué que la situation n'avait jamais été
22 paisible. Comment peut-elle être décrite comme paisible si tous les
23 villages des alentours avaient été abandonnés à cause des activités des
24 terroristes ? Il ne restait que quelques individus qui étaient restés là
25 pour garder leurs maisons. Mais toutes les femmes et tous les enfants
26 avaient quitté leurs maisons dès le début des incidents, donc la plupart
27 des maisons dans les villages de Petrovo, de Karacica, de Crnoljevo et
28 d'une série d'autres villages qui se trouvaient au pied d'une colline
Page 12491
1 avaient été abandonnées. C'est la qu'on trouvait justement les bastions de
2 cette organisation terroriste. Donc, dans ce texte, je leur explique que
3 leurs propos sont inexacts, qu'un grand nombre de personnes ont été
4 enlevées, que les attaques arrivent toujours de la même direction, les
5 terroristes albanais descendent des collines pour s'attaquer aux civils
6 innocents et à leurs villages. Donc voilà, c'est la teneur de ce document.
7 Une fois notre entretien terminé, j'ai fait suivre ce rapport à mes
8 supérieurs, conformément aux instructions que j'avais reçues.
9 Q. Vous dites que les femmes et les enfants des villages de Petrovo, Malo
10 Poljce, Racak, et cetera, avaient quitté leurs villages. Où tous ces gens
11 étaient-ils partis ?
12 R. A cette époque-là, ils n'allaient pas trop loin. Ils se rassemblaient
13 tous dans le village de Stimlje, parce qu'on nous ne réussissions pas à
14 sécuriser le territoire entier de la municipalité de Stimlje. En revanche,
15 la ville était bien protégée, elle. Donc la plupart d'entre eux sont venus
16 s'installer chez leurs parents, pour la plupart dans le village de Stimlje,
17 puis sinon, à Urosevac ou à Lipljan. Mais il arrivait que quelques-uns
18 parmi eux rentrent pour voir dans quel état était leur maison, puis ils
19 étaient enlevés ou tués. Mais la plupart des familles envoyaient leurs
20 femmes et leurs enfants dans les villes où la protection de la police était
21 plus prononcée, était plus ferme. Pour la plupart, ils se sont hébergés à
22 Stimlje, puis une partie d'entre eux sont allés à Urosevac, à Lipljan et à
23 Suva Reka. Voilà. C'est tout ce que je peux vous dire.
24 Q. Merci, Monsieur Mladenovic. Passons maintenant aux incidents qui se
25 sont produits dans le village de Racak. Savez-vous quelque chose sur les
26 événements qui se sont déroulés le 15 janvier 1999 dans le village de
27 Racak, ou, pour suivre le fil chronologique, que se passait-il à l'époque,
28 et vous, personnellement, où étiez-vous, que faisiez-vous ?
Page 12492
1 R. Le 15 janvier 1999, à 6 heures du matin, je me trouvais au SUP
2 d'Urosevac. J'étais venu chercher une compagnie d'une section de police
3 provisoire mise sur pied à Crnoljevo, et il fallait assurer la relève de
4 mes hommes qui se trouvaient déjà dans ce village de Crnoljevo. Les membres
5 de la compagnie étaient censés se réunir dans le SUP
6 Q. Merci. Donc, vous venez d'évoquer une section de police provisoire ?
7 R. Exactement. Dans cette section de police provisoire, nous prenions
8 relève toutes les deux semaines. Les chefs des postes de police dans
9 Stimlje, Strpce et Kacanik et Urosevac, assumaient les fonctions du
10 commandant tour à tour, et la même chose valait pour les effectifs, pour le
11 personnel. Nous avions la tâche de réunir nos effectifs, de nous rendre
12 dans cette section provisoire pour prendre la relève. Ce matin-là, j'étais
13 censé partir à 6 heures du matin pour prendre mes positions avant 6 ou 7
14 heures, et pour assumer nos fonctions dans le village. Mais il nous a été
15 impossible de partir au moment prévu ce jour-là. Un officier donné m'a
16 informé que la police chargée de la circulation au sein du SUP
17 avait bloqué l'axe routier qui allait d'Urosevac en passant par Stimlje
18 jusqu'à Crnoljevo. Un blocus a été mis sur pied près du village de Kosare.
19 Par conséquent, la compagnie ne pouvait pas partir avant que le blocus ne
20 soit levé. A ce moment-là, je ne savais pas du tout de quoi il s'agissait.
21 Q. Précisons quelques détails avant de poursuivre. Vous dites que vous en
22 avez été informé par un officier du poste de police. C'est du moins ce qui
23 a été consigné dans le compte rendu d'audience. Pourriez-vous nous dire qui
24 était cet officier. Vous n'êtes pas obligé de citer son nom et prénom, mais
25 dites-nous simplement quel était le poste qu'il occupait ?
26 R. Il s'agissait de Milivoj Nedeljkovic, un officier dans le département
27 de la police. Il était chargé de suivre la légalité des travaux effectués
28 par la police.
Page 12493
1 Q. Aviez-vous des éléments d'information quelconque concernant l'action
2 qui était en cours, saviez-vous pourquoi la route avait été bloquée ?
3 R. Je n'avais absolument aucun élément d'information à ce sujet. Personne
4 ne m'en avait informé.
5 Q. Et puis, que s'est-il passé par la suite ?
6 R. La compagnie toute entière est restée sur place, puis le même officier
7 nous a rappelés pour dire que nous pouvions partir pour prendre notre
8 relève. Alors, nous sommes partis. Je me trouvais à la tête de cette
9 compagnie. Je pense qu'il était entre 8 et 10 heures à ce moment-là. Quand
10 je suis arrivé au poste de contrôle, j'ai vu un grand nombre de voitures
11 qui attendaient pour passer. C'était pour la plupart des véhicules civils.
12 Je pense que nous avons perdu un peu de temps en attendant. Finalement, le
13 blocus a été levé de cet axe routier. A partir de ce moment, tous les
14 véhicules ont pu circuler dans les deux sens. A bord de voiture, je suis
15 arrivé à Stimlje, je m'y suis arrêté pendant environ une demi-heure, parce
16 que j'étais censé prendre une partie d'équipement à Stimlje. Il s'agissait
17 de l'équipement qui était nécessaire, justement, aux membres qui
18 provenaient de Stimlje. C'était notamment des ustensiles de cuisine, des
19 choses dont nous avions besoin sur le terrain.
20 Puis, je suis entré dans le poste de police à Stimlje, et j'ai
21 retrouvé dans mon bureau le chef du SUP, M. Bugoljub Janicevic, et M.
22 Radomir Mitic, qui était le chef du département de police. Nous nous sommes
23 salués, puis M. Janicevic m'a dit très brièvement que l'unité PJP commandée
24 par l'état-major chargé de la suppression du terrorisme de Pristina était
25 en train de mener une opération visant à détruire les bastions terroristes,
26 mais nous, dans notre poste de police, nous n'étions censés avoir rien à
27 faire avec eux et nous étions censés poursuivre nos activités habituelles.
28 J'y suis resté encore pendant quelque temps, accompagné de mes
Page 12494
1 assistants qui sont restés au poste de police, Zoran Djordjevic et
2 Aleksandar Simic. Je leur ai donné des consignes très succinctement. Je
3 leur ai indiqué que la relève qui venait de terminer son travail devait
4 rester à l'état d'alerte tant que cette action n'aura pas été terminée,
5 parce que les unités PJP auraient peut-être besoin d'un soutien logistique.
6 Q. Un instant, s'il vous plaît. Vous avez évoqué une aide logistique à
7 fournir éventuellement, mais quel est le type de soutien ou d'assistance
8 logistique qui pourrait être fourni par le poste de police à Stimlje ?
9 R. Rien de particulier. Nous avions un service médical, en fait nous en
10 avions deux, au cas où il serait nécessaire de transporter les blessés vers
11 l'hôpital. C'est à ce type d'activité que j'ai pensé. Pour ce qui est du
12 reste, ils avaient leur logistique à eux et ils tenaient tout sous leur
13 commandement, donc il n'y avait rien de particulier à faire de notre part.
14 Il s'agissait tout simplement de rester alerte si jamais il fallait assurer
15 le transport des blessés ou éventuellement dresser un constat des lieux.
16 Puis, vers 9 heures, je suis parti du poste de police de Stimlje et
17 il ne se passait rien d'inhabituel. On entendait des tirs dans les collines
18 qui entouraient les villages de Racak et de Petrovo. Nous avons poursuivi
19 notre chemin. Nous avons pris la relève, et je suis resté dans le village
20 de Crnoljevo jusqu'au 20, puis je ne suis revenu qu'à Stimlje le 20, et
21 ceci, pour des raisons personnelles.
22 Q. Merci, Monsieur Mladenovic. J'aimerais revenir sur quelques détails
23 afin d'apporter des précisions, puisque cela est important à mes yeux.
24 Dites-moi, au moment où vous êtes arrivé dans le poste de police de
25 Stimlje, avez-vous remarqué la présence des unités PJP qui ne provenaient
26 pas de votre poste de police à Stimlje ? Avez-vous vu d'autres membres des
27 unités PJP ?
28 R. Je n'ai relevé rien de particulier. Tout se passait comme d'habitude
Page 12495
1 dans le poste de police de Stimlje. La seule chose exceptionnelle, c'était
2 la présence du chef du SUP, M. Bugoljub Janicevic, et du chef du
3 département de police, Radomir Mitic.
4 Q. Lorsque vous êtes entré dans votre bureau pour y trouver le chef du
5 département de police et le chef du SUP
6 quelqu'un d'autre ?
7 R. Non. Mes deux assistants, MM. Simic et Djordjevic, se tenaient devant
8 mon bureau. Dans le bureau même, il n'y avait que MM. Janicevic et Mitic.
9 Il n'y avait personne d'autre.
10 Q. Merci. Dans les locaux du poste de police de Stimlje ou dans ses
11 alentours, avez-vous vu M. Vlastimir Djordjevic ?
12 R. Non, je ne l'ai vu nulle part.
13 Q. Veuillez répéter à quel moment vous êtes arrivés au poste de police et
14 à quel moment vous êtes partis, et pendant combien de temps vous y êtes
15 restés.
16 R. Je ne saurais vous citer l'heure exacte, mais je pense que nous sommes
17 partis d'Urosevac vers 8 heures et demie. Combien de temps nous fallait-il
18 pour nous rendre à Stimlje, disons une demi-heure au maximum. Nous sommes
19 restés à Stimlje une demi-heure au maximum. Donc, au plus tard, j'étais
20 censé arriver vers 9 heures et demie, 10 heures du matin. C'est à peu près
21 vers cette heure-ci, mais je ne m'en souviens pas avec exactitude.
22 Q. Merci. Vos subordonnés, vous avez évoqué votre assistant, M.
23 Djordjevic, vous avez indiqué qu'il se trouvait dans votre bureau ce jour-
24 là. Lui ou un autre de vos subordonnés, vous ont-ils informés d'avoir vu M.
25 Vlastimir Djordjevic à Stimlje ?
26 R. Personne ne m'a informé de l'arrivée ou de la présence du général
27 Djordjevic à Stimlje le 15 janvier. Le chef du département de police et le
28 chef du SUP étaient présents dans mon bureau, et j'en ai été informé par
Page 12496
1 mes assistants. Quand je suis venu le 20, pour des raisons personnelles,
2 mes assistants m'ont informé que le général Djordjevic était arrivé le 18,
3 trois jours après cet incident. Au cours de ces trois jours, du 15 jusqu'au
4 18, des PJP avaient mené des luttes ardues avec les bastions terroristes,
5 et à cause de tous ces problèmes, il a été impossible de mener une enquête
6 sur les lieux. Ils ont essayé de dresser un constat des lieux le 15 et ils
7 n'ont réussi à le faire que le 18.
8 C'est alors que le général Djordjevic est arrivé, et il a confié
9 cette mission personnellement à Radomir Mitic, le chef du département de
10 police. L'un des assistants était censé mener cette enquête en compagnie
11 des membres de sécurité, puisqu'ils provenaient du poste de police de
12 Stimlje; mais le général Djordjevic avait ordonné que ce soit le chef du
13 département de police qui mène une enquête sur les lieux. C'est ce que j'ai
14 appris directement de mes assistants.
15 Par ailleurs, ils m'ont fait savoir qu'au cours des combats menés,
16 depuis une localité qui se trouve entre Petrovo et Malo Poljce, et qu'on
17 appelle la colline rouge, qu'on avait tiré depuis cet endroit sur le poste
18 de police. Je pense qu'une documentation appropriée a été élaborée et que
19 des photos ont été prises, ce qui permet de démontrer combien de tirs
20 avaient frappé le poste de police de Stimlje.
21 Ils m'ont remis un rapport sur ce point. Voilà, c'est tout ce que je
22 peux vous dire. Je ne sais pas ce qui pourrait vous intéresser de plus.
23 L'arme dont ils s'étaient servis était une Browning.
24 Q. Avant le 20, comme vous l'avez indiqué, saviez-vous qui a mené
25 l'opération Stimlje ou comment cela avait été organisé ?
26 R. Comme je vous l'ai dit il y a un instant, j'ai reçu quelques
27 informations du chef du SUP le jour où je suis arrivé au poste de police,
28 où je me suis arrêté brièvement le 15 selon lesquelles une opération de
Page 12497
1 police était menée par des membres du PJP. Je ne sais pas lesquels, et je
2 ne connaissais leur nombre. Je savais seulement que des membres du PJP
3 menaient une opération sous le commandement de l'état-major luttant contre
4 le terrorisme à Pristina, et lui-même sous le commandement du général
5 Sreten Lukic. C'est ce que m'a dit mon assistant lorsque je suis rentré au
6 poste de police le 20.
7 Q. Très bien. J'aimerais faire référence au 20 maintenant. Lorsque vous
8 êtes arrivé le 20, vous a-t-on donné des informations selon lesquelles
9 cette opération avait été caractérisée comme étant un massacre de civils et
10 les vérificateurs faisaient des déclarations dans ce sens ?
11 R. Les déclarations effectivement indiquaient qu'il s'agissait là d'un
12 massacre, que des civils avaient été exécutés. Voilà le genre d'information
13 que l'on faisait circuler. Il y avait même une radio dans la zone détenue
14 par l'UCK opérée de quelque part aux alentours de Drenica, entre 15 et 17
15 heures, et ils diffusaient l'information selon laquelle la police serbe
16 avait menée un massacre contre des civils; ce qui n'a jamais été prouvé
17 évidemment. Car ces combattants qui s'appellent, l'UCK, selon leurs dires,
18 c'est-à-dire l'Armée de libération du Kosovo, à savoir une organisation
19 terroriste albanaise qui menait des combats dans cette zone à ce moment-là.
20 Plus tard, lorsqu'une enquête sur place a été menée, des médecins légistes
21 finlandais et des médecins légistes à nous ont confirmé qu'il s'agissait
22 non pas de civils mais des membres de l'UCK, de Racak, un commandant qui
23 s'appelait Sadik Mujota. Nous savions tous cela. C'est un homme qui avait
24 rejoint l'Armée de libération du Kosovo, comme ils s'appelaient eux-mêmes,
25 et il avait affirmé qu'il ne s'arrêterait pas tant qu'il n'avait pas pu
26 rentrer dans le poste de police et bu un café. Ce sont ses mots que je cite
27 et son camp se trouvait près du poste de police de Racak. Il avait
28 l'intention de placer Stimlje dans son ensemble sous son contrôle et celui
Page 12498
1 de ses unités terroristes, ce qui n'a pas pu être le cas puisque son groupe
2 a été écrasé à ce moment-là.
3 Il a été tué, si je me souviens exactement, ainsi que ses fils dont je ne
4 me souviens plus du nom, sa fille également, et deux de ses frères
5 également. Auparavant, des renseignements nous avaient été donnés, nous
6 avions le nom de tous ceux qui ont été tués, et qui appartenaient tous à
7 son organisation. Pour l'essentiel, ils provenaient des villages de Racak,
8 Petrovo, Malo Poljce, et d'autres village et villes au Kosovo, Vitina, il
9 me semble, en autres.
10 Q. Merci. Après ces incidents et les renseignements qu'on vous avait
11 donnés, lorsque vous êtes rentré de votre tour de garde de Crnoljevo.
12 R. Je suis rentré de Crnoljevo au bout de 15 jours, probablement le 30
13 janvier.
14 Q. Merci. Avez-vous connaissance de l'inhumation des personnes qui avaient
15 perdu la vie au cours de l'opération Racak, l'enterrement qui aurait dû
16 avoir lieu ?
17 R. Oui, au bout d'un moment, j'étais de retour au poste de police de
18 Stimlje, et nous avons à nouveau rencontré des problèmes. Les problèmes
19 concernaient les corps réclamés par les familles. Il me semble que c'était
20 autour du 10 février 1999, après autopsie des corps. Les corps ont été
21 transportés à Stimlje et, Danica Marinkovic, le juge d'instruction a
22 escorté le convoi, ceci avait été organisé avec les vérificateurs de l'OSCE
23 et les familles albanaises. J'ai été informé directement par Boguljub
24 Janicevic, le chef du SUP, je ne me souviens plus de l'heure exacte, mais
25 il s'agissait de l'heure d'hiver, après 16 heures, et il avait déjà au
26 poste de police un prêtre musulman de Stimlje. Une mosquée se trouvait au
27 centre de la ville, et c'est là qu'a eu lieu le service religieux. Il y
28 avait présent le président de la Ligue démocratique du Kosovo, il était
Page 12499
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
12 versions anglaise et française
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 12500
1 président de cette organisation à Stimlje. Ils sont tous venus au service
2 ainsi que les vérificateurs, au nombre de huit ou neuf. Donc les corps ont
3 été apportés, des équipes de télévision sont arrivées ainsi que les
4 vérificateurs. Les vérificateurs nous ont demandé, ont posé des questions
5 embarrassantes quant à savoir si nous interviendrions si des membres de
6 l'Armée de libération du Kosovo arrivaient avec les familles. Ces personnes
7 provenaient de Racak et de Petrovo, et j'ai répondu par l'affirmative, car
8 nous, la police, estimions qu'il s'agissait là de membres d'une
9 organisation terroriste, et ainsi, nous tenterions de les arrêter.
10 Toutefois, il nous a indiqué que nous devions retirer toutes les
11 patrouilles de police afin que les familles puissent récupérer les corps,
12 et c'est là que le problème s'est posé.
13 Je ne connais pas l'homme en personne, mais le colonel Mijatovic de l'état-
14 major de Pristina leur avait dit qu'ils pouvaient inhumer les corps à Cesta
15 près de Racak. Et c'est là en fait qu'ils avaient été tués. Etant donné
16 qu'il n'y avait pas de cimetières ou d'emplacements religieux où l'on
17 pouvait inhumer ces corps, je dis que ce n'était pas possible, on ne peut
18 pas autorisé l'enterrement de personnes où ils sont morts, qu'il fallait
19 octroyer des permis. Les permis étaient émis par les autorités municipales,
20 et c'est là que le problème s'est posé. Un des vérificateurs a dit :
21 "Comment donner les corps aux familles alors qu'elles ne sont là pour les
22 récupérer ?" Et c'est à ce moment-là qu'il a accusé Danica d'avoir manipulé
23 les corps. Elle a apporté les corps à Stimlje, et le juge d'instruction a
24 décidé de ramener les corps à Pristina et elle a informé les familles
25 qu'elles pouvaient venir à la chapelle de l'hôpital de Pristina pour les
26 récupérer. Voilà ce que j'en sais pour ce qui s'est passé le 10 à Stimlje.
27 Le lendemain, si vous souhaitez que je continue --
28 Q. L'enterrement a-t-il eu lieu ?
Page 12501
1 R. Oui, l'enterrement a eu lieu. Les jours suivants, les familles
2 albanaises ont organisé l'enterrement elles-mêmes. Je ne sais pas très bien
3 comment. En tout état de cause, nous avons été informés qu'ils sont venus
4 récupérer les corps de leur côté et qu'ils allaient les enterrer à la
5 mosquée de Racak. Le même jour, vers 10 heures ou 11 heures, les corps ont
6 été transportés par la route en traversant Stimlje, car cette route menait
7 au centre de Racak. Les corps ont été amenés tout d'abord à la mosquée, et
8 c'est là qu'il y a eu cette couverture médiatique. Il y avait également
9 présents des vérificateurs. Les habitants de ces villages ont peut-être
10 reçu des ordres à cet effet ou peut-être qu'ils avaient un véritable
11 souhait de participer à l'enterrement. Quoi qu'il en soit, un nombre
12 important de personnes s'est regroupé à Racak pour l'enterrement, et c'est
13 là que nous avons pu constater que les corps ont été enterrés comme des
14 soldats avec des drapeaux albanais qui entouraient les cercueils, ce qui
15 n'est pas la coutume lorsque vous enterrez une personne albanaise.
16 Après l'enterrement, nous avons pu observer qu'il y avait des
17 personnes présentes en tenue d'uniforme, des personnes armées qui étaient
18 membres de ce qu'ils appellent l'Armée de libération du Kosovo, une
19 organisation terroriste. Ils ont participé à l'enterrement en grand nombre,
20 et par la suite ont kidnappé environ 50 Albanais dans la foule. Parmi eux,
21 deux frères d'officiers de police de réserve de la famille Olluri, du
22 village de Petrovici, et certains autres Albanais.
23 Q. Merci. Je vais maintenant vous poser quelques questions et vous montrer
24 d'autres documents, mais il me semble qu'on est à peu près au moment de
25 faire une pause.
26 M. POPOVIC : [interprétation] Je demande à la Chambre de première instance,
27 allons-nous marquer une pause ?
28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, je crois que le moment est venu
Page 12502
1 de faire notre deuxième pause, et nous reprendrons dans une demi-heure.
2 --- L'audience est suspendue à 17 heures 28.
3 --- L'audience est reprise à 18 heures 00.
4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Asseyez-vous, Monsieur le Témoin.
5 Monsieur Popovic, à vous.
6 M. POPOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
7 Pourrions-nous afficher le document D150 à l'écran, s'il vous plaît.
8 Q. Il s'agit de votre intercalaire 17. Monsieur le Témoin, il s'agit d'un
9 rapport concernant des Albanais kidnappés par des terroristes à
10 l'enterrement au village de Racak, et daté du 12 février 1999. Pourriez-
11 vous examiner rapidement ce rapport et nous dire, s'il vous plaît, si les
12 informations contenues dans le rapport concordent avec les informations que
13 vous avez concernant cet événement.
14 R. Oui. Effectivement, cela concerne cette période. Le 12 février,
15 plusieurs Albanais ont été kidnappés. Ils assistaient à l'enterrement.
16 Rexhep et Muhamed Olluri étaient membres des forces de police de réserve.
17 Ils ont été kidnappés à cette occasion. Il s'agissait de citoyens loyaux.
18 Q. Paragraphe 2, nous voyons un autre nom.
19 R. Oui, il s'agit Zeqiri Basri qui a fait rapport au poste de police
20 Stimlje selon lequel le 11 février, au cours de l'enterrement à Racak, des
21 terroristes ont kidnappé son cousin Zeqir Hyseni, qui avait à peu près 50
22 ans et ancien employé de la prison du district de Pristina. Il était venu à
23 Racak avec sa femme Hysnia, dans une Zastava 101 bleue, un véhicule de
24 passagers. Nous avons insisté auprès de l'OSCE afin qu'ils prennent toutes
25 les mesures pour libérer ces personnes.
26 Le même jour, nous avons indiqué à tous les représentants chargés des
27 vérifications qui étaient présents à Stimlje. Ils ont promis de faire tout
28 ce qu'ils pouvaient afin de libérer ces citoyens.
Page 12503
1 Q. Pourrions-nous avoir un autre document afin d'éclaircir cela.
2 M. POPOVIC : [interprétation] Pourriez-vous afficher le document D010-0785.
3 Q. Il s'agit-là de l'intercalaire 18.
4 C'est un rapport daté du 12 février 1999. Pourriez-vous lire en
5 silence les contenus de ce rapport et nous dire s'il s'agit de ce à quoi
6 vous avez fait référence.
7 R. Oui, il s'agit d'un document qui a été rédigé par le commandant du
8 poste de police le lendemain; cette personne s'appelle Zoran Djordjevic.
9 Elle était en contact avec certains membres de la mission de l'OSCE qui
10 était à Stimlje, qui sont venus au poste de police et lui ont dit qu'ils
11 ont vu le commandant promettre de revenir avec des informations cet après-
12 midi-là. Entre-temps, ils se sont rendus au village de Petrovo où ils ont
13 parlé aux terroristes qui ont promis que les personnes seraient libérées
14 dans un délai de deux heures. Il s'agissait des personnes qui avaient été
15 enlevées la veille. Les personnes en question étaient Mehmet et Rexhep
16 Olluri, et ils ont promis de libérer ces personnes dans un délai de deux
17 heures. Ils avaient appris que ces personnes avaient été enlevées ce matin-
18 là, au poste de police de Stimlje. Il s'agissait de Mehmet et Rexhep Olluri
19 et Hysen Zeqiri. Ils souhaitaient savoir s'il y avait d'autres personnes
20 qui avaient été enlevées ou si nous disposions d'informations concernant
21 d'autres personnes qui avaient été enlevées. Voilà. Et ce document fait
22 suite au document précédent. Les vérificateurs ont été informés; le
23 lendemain, ils se sont rendus au poste de police. Je n'étais pas présent.
24 Le commandant adjoint était présent. Il est indiqué qu'ils étaient présents
25 entre 18 heures 10 et 18 heures 15. Ils n'étaient présents que pendant un
26 bref moment. Ces personnes ont été enlevées le 11 et ont été retenues
27 jusqu'au 12; vers 20 heures, le 12, ils ont été libérés.
28 Q. Nous allons voir d'autres documents qui vont dans ce sens.
Page 12504
1 M. POPOVIC : [interprétation] J'aimerais d'abord verser cette pièce au
2 dossier, Messieurs les Juges.
3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame la Greffière.
4 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce portant la cote
5 D00820.
6 M. POPOVIC : [interprétation] Pourrions-nous afficher à l'écran la pièce
7 D010-0788.
8 Q. Il s'agit de l'intercalaire 19. Nous voyons que ce rapport est daté du
9 13 février 1999. Pourriez-vous lire en silence ce rapport, et nous dire
10 rapidement si les informations correspondent aux informations dont vous
11 disposiez.
12 R. C'est exact. Il s'agit d'un autre rapport rédigé au poste de police de
13 Stimlje. Il s'agit là du jour suivant, suivant le document que nous avons
14 vu précédemment, rédigé le 13 février, rédigé par M. Mitrovic, commandant
15 adjoint du poste de police. Ce rapport a été rédigé à 18 heures 10, suivant
16 sa réunion avec les vérificateurs qui lui ont dit que grâce aux
17 négociations qu'ils avaient menées avec les terroristes, ils avaient réussi
18 à libérer les personnes mentionnées ici, Taib Zeqiri, Jakup Ibali et Jemer
19 Xherimi. Plusieurs personnes ont été enlevées. Ils ont tenté de les faire
20 tous libérer. Nous avons vu dans le document précédent il était fait
21 référence à ces trois personnes et trois personnes supplémentaires ont été
22 libérées par la suite par l'Armée de libération du Kosovo.
23 Q. Merci.
24 M. POPOVIC : [interprétation] Je demande au Président de verser ce document
25 au dossier.
26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le document est admis.
27 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de la pièce D00821.
28 M. POPOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais passer à
Page 12505
1 une question complètement différente qui concerne certaines affirmations
2 que je souhaitais soumettre au témoin concernant la déposition de K-86
3 devant cette Chambre de première instance. A cette fin, j'aimerais citer
4 certaines parties du compte rendu d'audience, et j'aimerais demander au
5 témoin de commenter l'essentiel de ce compte rendu. L'audience a été fait à
6 huis clos partiel, et j'aimerais que nous procédions comme auparavant.
7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous passons à huis clos partiel.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
9 [Audience à huis clos partiel]
11 (expurgé)
12 (expurgé)
13 (expurgé)
14 (expurgé)
15 (expurgé)
16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 (expurgé)
28 (expurgé)
Page 12506
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 Pages 12506-12523 expurgées. Audience à huis clos partiel.
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 12524
1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 (expurgé)
5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 (expurgé)
10 (expurgé)
11 [Audience publique]
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons, à présent, lever la
13 séance. Nous reprenons nos travaux demain à 14 heures 15.
14 Monsieur le Témoin, l'Huissier va vous aider à vous débrouiller pendant que
15 nous levons la séance.
16 --- L'audience est levée à 19 heures 05 et reprendra le mardi 9 mars 2010,
17 à 14 heures 15.
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28