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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL Affaire IT-95-13a-T
2 POUR L’EX-YOUGOSLAVIE
3 Lundi 2 Février 1998.
4 L’audience est ouverte à 9 heures 15.
5 M. le Président (interprétation). - Bonjour. Puis-je demander au
6 greffier d'introduire l'affaire, s'il vous plaît ?
7 M. le Greffier. - Il s'agit de l'affaire IT 95-13a-T, le
8 Procureur contre Slavko Dokmanovic.
9 M. le Président (interprétation). - Merci. Voulez-vous vous
10 présenter ?
11 M. Niemann (interprétation). - Bonjour. Je m'appelle
12 Maître Niemann. Je suis ici avec mes collègues, Maître Waespi,
13 Maître Williamson, Madame Sutherland et M. Bos.
14 M. Fila (interprétation) - Bonjour, Madame et Messieurs les
15 Juges. Je suis Toma Fila. Je suis assisté de Maîtres Lopicic et Petrovic
16 et je représente l'accusé, M. Dokmanovic.
17 M. le Président. (interprétation). - Puis-je demander à
18 M. Dokmanovic s'il m'entend ? Vous m'entendez ? Très bien.
19 Avant de faire comparaître le premier témoin, je voudrais faire
20 une suggestion. Je pense que nous devrions peut-être aborder certaines
21 questions d'intendance ou questions juridiques.
22 Tout d'abord, nous remercions le Procureur pour tous les
23 documents qu'il nous a soumis. Il s'agit notamment de la liste des
24 témoins. Il y a également deux autres documents qui portent sur l'accord
25 concernant l'évacuation d'Ilok.
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1 En ce qui concerne le premier de ces documents, nous avons
2 remarqué que le bureau du Procureur a ajouté à la liste des témoins la
3 durée approximative ou du moins son estimation de la comparution de chaque
4 témoin.
5 Je me demandais si cette estimation approximative de la durée de
6 chaque témoignage incluait le contre-interrogatoire. Je pense que c'est le
7 cas, étant donné les chiffres que vous avancez.
8 M. Williamson (interprétation). - Oui, comme vous l'avez dit, ce
9 sont des estimations très vagues. Mais nous pensons que cela inclurait à
10 la fois l'interrogatoire principal et le contre-interrogatoire.
11 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie. Nous nous
12 demandons également si nous pourrions essayer de réduire la durée de
13 l'interrogatoire de certains témoins qui semblent avoir une moindre
14 importance pour l'affaire qui nous occupe.
15 Nous voudrions suggérer certains points, notamment sur le cas de
16 sept témoins. Je me réfère notamment à la liste qui se trouve au verso du
17 document fourni par le Procureur, document confidentiel, soumis le
18 29 janvier. J'indiquerai simplement le numéro des témoins pour ne pas
19 qu'il y ait de confusion ou de communication malencontreuse des noms de
20 témoins protégés.
21 Nous suggérons les choses suivantes. Pourrions-nous réduire la
22 durée du témoignage du témoin 1 de deux heures et demie à deux heures ?
23 Pensez-vous que cela serait possible ?
24 Peut-être d'abord, vais-je passer en revue tous les témoins que
25 nos suggestions concernent. Ensuite, vous me direz si cela est possible à
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1 votre avis.
2 Pour le témoin n° 2, pouvons-nous diminuer son temps
3 d'interrogatoire de deux heures à une heure et demie ?
4 Pour le témoin n° 3, pouvons-nous passer de deux heures à une
5 heure ?
6 Pour le témoin n° 4, au lieu d'une heure et demie une heure ?
7 Témoin n° 6, au lieu de deux heures, une heure ?
8 Témoin n° 9, une heure au lieu de deux ?
9 Témoin n° 10, une heure au lieu de deux également ?
10 Bien sûr, je sais qu'il est difficile pour le bureau du
11 Procureur de nous faire des promesses, mais il s'agit simplement d'un
12 objectif que nous devrions essayer d’atteindre afin d'assurer la rapidité
13 du procès. C'est pour cette raison que je proposais que l’on fasse un
14 effort pour réduire la durée des interrogatoires, interrogatoire principal
15 et du contre-interrogatoire de ces sept témoins. Ainsi, nous pourrions
16 gagner quelque cinq heures et demie cette semaine et faire comparaître
17 peut-être trois autres témoins.
18 M. Niemann (interprétation). - Vous souhaitez que je réponde
19 Monsieur le Président ?
20 M. le Président (interprétation). - Oui, allez-y.
21 M. Niemann (interprétation). - Il est assez difficile de réduire
22 ces durées. Je vous assure que c'est en toute bonne foi que nous avons
23 fait ces estimations. Le premier témoin est important parce qu’il va
24 parler d'un grand spectre d'événements. Il va planter le décor en quelque
25 sorte et va nous amener vers différents événements qui se sont produits.
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1 Le témoin n° 10 ne viendra pas. Nous pourrons économiser deux
2 heures de toute façon. Nous pourrons sûrement en économiser largement
3 plus, parce que d'autres témoins ne viendront certainement pas.
4 J’ai demandé à Maître Williamson de parler à d'autres témoins.
5 Il semble que les témoins n'aborderont que des questions pertinentes. Nous
6 passerons les questions qui ne le sont pas. Vous nous avez déjà demandé de
7 faire cela. Nous ferons de notre mieux.
8 Nous avons quelque chose d'inhabituel. Nous avons essayer
9 d’estimer la durée du contre-interrogatoire, ce qui est un peu du domaine
10 de la présomption. Nous avons essayé de
11 vous donner une estimation globale de la durée dont nous aurons besoin.
12 Bien sûr, nous n'avons aucun moyen de contrôler la durée du contre-
13 interrogatoire.
14 M. Williamson (interprétation). - Comme vous l'avez dit
15 précédemment, Monsieur le Président, c'est une estimation très vague.
16 Nous pensons que certains des témoins qui figurent sur cette
17 liste ne seront pas interrogés aussi longtemps que nous l'avons indiqué.
18 Peut-être que d'autres le seront pendant une durée plus importante. Comme
19 l’a dit Maître Niemann, nous avons fait de notre mieux pour réduire le
20 plus possible les choses.
21 En fait, nous présentons une affaire très efficace et très
22 ciblée, même si nous nous en tenons à notre calendrier. Bien entendu,
23 notre calendrier et nos débats iront beaucoup plus vite que toute autre
24 affaire que connaît ce Tribunal.
25 D'autre part, quant aux témoins très spécifiques que vous venez
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1 de mentionner, les numéros 2, 3 et 4, ils vont tous parler des événements
2 à l'hôpital. Ils plantent le décor en quelque sorte qui permettra de
3 définir les événements qui ont suivi. Leurs témoignages sont donc
4 importants. Ils vont permettre d'établir d'autres éléments que nous devons
5 prouver, notamment la classification des victimes, la nature du conflit
6 armé. Ils aborderont certaines questions qui ont été rejetées par la
7 défense, c'est-à-dire des chefs d'accusation dont la défense dit qu'ils ne
8 sont pas valables.
9 Nous pensons donc qu'il est de notre obligation de prouver tous
10 les points que la défense a refusés dans le cadre de l'acte d'accusation.
11 Ils nous ont fourni une liste de tous les éléments qu'ils ont
12 rejetés. Il est de notre obligation de prouver que nous avons raison.
13 Puisque nous avons cette charge-là, nous allons faire de notre mieux pour
14 prouver ces différents points. Nous allons également essayer de raccourcir
15 les témoignages de ces témoins.
16 Le témoin n° 9 notamment, dont nous avions prévu un
17 interrogatoire de deux
18 heures, prendra peut-être plus de temps. Cette estimation a été fondée sur
19 la déclaration préliminaire que nous avions. Mais les témoins arrivent
20 ici, parfois, nous les voyons pour la première fois. Nous passons en revue
21 des documents, des vidéos qui sont en notre possession et nous nous
22 rendons compte qu'ils auront peut-être des questions à aborder auxquelles
23 nous n'avions pas pensé plus tôt.
24 Il y aura par exemple des vidéos dans le cas du témoin 9 dont
25 nous n'avions pas l'intention de demander le versement, mais ayant entendu
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1 ce que le témoin 9 avait à dire, peut-être devrons-nous le faire. Cela
2 aidera les Juges à avoir une meilleure image de la situation globale.
3 Excusez-moi, un instant s'il vous plaît.
4 M. Niemann (interprétation). - Il y a une possibilité,
5 Monsieur le Président. Si nous devons verser les déclarations liminaires,
6 cela pourrait peut-être réduire le temps, si la défense n'y voit pas
7 d'objection.
8 M. le Président (interprétation). - Cela concernerait combien de
9 témoins ?
10 M. Niemann (interprétation). - Nous pourrions verser toutes les
11 déclarations des témoins. Cela réduirait ainsi la durée des
12 interrogatoires, si cela ne pose pas de problème à la défense bien sûr.
13 M. le Président (interprétation) - Qu’en pense la défense ?
14 M. Fila (interprétation) - Madame et Messieurs les Juges, tout
15 d'abord en ce qui concerne les témoignages qui viennent d'être mentionnés
16 par le Procureur, il s'agit notamment de témoignages qui portent sur les
17 opérations de la JNA, l'hôpital, etc. Cela n'a pas de liens directs avec
18 Dokmanovic. Je ne sais pas s'il y aura un contre-interrogatoire. Si c'est
19 le cas, ce ne seront qu'une ou deux questions. Ce qui nous intéresse, ce
20 sont les témoins 12 et 13. J'aurai besoin de plus de temps pour ces
21 témoins en particulier.
22 D'autre part, la défense ne dit pas qu'il n'y avait pas de
23 conflit armé. Nous disons
24 qu'il n'y avait pas de conflit armé international. La défense ne dit pas
25 que l'hôpital n'a pas été détruit. La défense n'a aucune intention de
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1 défendre la JNA, mais simplement Slavko Dokmanovic. C'est pourquoi je
2 serai aussi concis que possible et je me concentrerai simplement et
3 exclusivement sur Slavko Dokmanovic qui n'était pas un officier d'active
4 ou de réserve, qui n'était pas du tout un officier de l'armée.
5 M. le Président (interprétation) - Puis-je vous demander votre
6 position sur la suggestion qui vient d'être faite par l'accusation, à
7 savoir que les déclarations liminaires de témoins pourraient être versées
8 au dossier, si vous n'avez pas d'objections bien sûr ? Qu’en pensez-vous ?
9 Les déclarations liminaires des témoins de l'accusation pourraient être
10 transmises aux Juges et considérées comme des éléments de preuve ?
11 M. Fila (interprétation) - Je préférerais entendre ces témoins,
12 si toutefois le bureau du Procureur pouvait être un peu plus précis. Dans
13 les déclarations, rien ne porte sur Dokmanovic. Elles ont été prises avant
14 que Dokmanovic ne soit mis en accusation. Par conséquent, nous devons
15 savoir s'il le connaît, s'ils ont des éléments sur lui, si ces éléments
16 sont positifs ou négatifs pour Dokmanovic. Toutes ces déclarations se
17 réfèrent à la JNA et aux officiers. A l'époque, Dokmanovic n'avait pas été
18 mis en accusation. C'était avant 1996.
19 M. le Président (interprétation) - Le bureau du Procureur disait
20 simplement que dans cette affaire, la production des déclarations
21 liminaires d'éléments de preuve ne disait pas que les témoins ne seraient
22 pas entendus par les Juges, mais simplement que nous pourrions nous
23 concentrer sur certaines questions particulières. Bien sûr, cela va sans
24 dire, tous les témoins comparaîtront.
25 M. Fila (interprétation) - Excusez-moi, Monsieur le Président,
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1 j’avais mal compris. Dans ce cas, je n'ai aucune objection. Je suis tout à
2 fait d'accord.
3 M. le Président (interprétation) - Merci.
4 M. Niemann (interprétation) - Je voudrais dire simplement,
5 Monsieur le Président,
6 que nous avons la même attitude vis-à-vis de cette question. Nous avançons
7 la proposition suivante, à savoir que les déclarations liminaires
8 pourraient être versées. Cela ne veut absolument pas dire que la défense
9 ou l'accusation pourrait verser des déclarations liminaires sans faire
10 comparaître les témoins. Evidemment, nous ferions objection si des
11 déclarations liminaires de la part de la défense étaient versées de cette
12 manière.
13 M. le Président (interprétation) - Merci.
14 Autre question, la dernière, elle a trait à la liste des
15 témoins. Je pense que les Juges n'ont pas reçu les déclarations de quatre
16 témoins, le témoin K et trois autres témoins. Je suppose que le Procureur
17 a déjà communiqué ces déclarations à la défense. Je me demandais si les
18 Juges pouvaient également recevoir une copie de ces quatre témoignages
19 M. Williamson (interprétation). - Je pense que la déclaration du
20 témoin K aurait dû vous être communiquée à vous et à la défense. Je pense
21 que la défense l’a reçue. Nous pourrions vérifier cela. En ce qui concerne
22 les autres témoins, pourriez-vous nous donner plus de précision sur leur
23 identité ?
24 M. le Président (interprétation). - Il s’agit de Vladimir Zajra,
25 Kadinka* et Dragan Zajra*. Ces témoins doivent comparaître en février.
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1 M. Williamson.(interprétation). - En ce qui concerne ces trois
2 témoins, nous n'avons pas reçu ou pris de déclaration de ces témoins et
3 nous ne pensons pas le faire. Ce sont des parents de personnes qui ont été
4 tuées à Ovcara. Leur témoignage sera bref. Mais nous pourrions
5 éventuellement préparer un résumé des différents points de leur témoignage
6 et vous les fournir avant leur comparution.
7 M. le Président (interprétation). - Merci. J'ai égalemetn une
8 liste de six témoins qui doivent comparaître en février et en mars. Mais
9 les juges n'ont pas reçu leur déclaration. Voulez-vous que je vous lise
10 les noms de ces témoins ?
11 M. Williamson (interprétation). - Oui, je crois que je vois de
12 quels témoins vous
13 parlez, Monsieur le Président.
14 Le premier témoin où il est indiqué février/mars c'est cela,
15 Monsieur le Président, puis un, deux, trois, quatre, et puis les quatre
16 témoins où il est indiqué qu'ils comparaîtront en février et mars. En tout
17 cas, c'est la date potentielle qui est indiquée, c'est cela ?
18 M. le Président (interprétation). - Oui, je crois, mais, peut-
19 être que pour accélérer les choses je pourrais donner une copie de ma
20 liste à la fois au bureau du Procureur et à la défense afin de vous donner
21 la liste des témoins dont nous n'avons pas les déclarations et pour y
22 apposer une durée approximative de témoignage.
23 Puis-je aborder un deuxième problème ? Là, je me tourne vers la
24 défense. Je voudrais savoir si la défense s'opposerait à ce que les deux
25 documents fournis par le bureau du Procureur sur l'évacuation d’Ilok
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1 soient versés au dossier de façon officielle : l'accord et l'ultimatum.
2 M. Fila (interprétation). - Monsieur le Président, je n'ai pas
3 reçu la déclaration du témoin K, tout comme vous. Je ne l'ai pas reçue non
4 plus. Première chose. Deuxième chose, en ce qui concerne ces deux
5 documents, et quelque vingt autres que j'ai reçus du bureau du Procureur
6 ce matin et qui devraient être considérés comme étant des pièces à
7 conviction, je suis tout à fait d'accord avec eux, et notamment avec ceux
8 qui m'ont été donnés par le bureau du Procureur ce matin. Ils peuvent être
9 considérés comme des pièces à conviction.
10 Je suis également d'accord pour que le bureau du Procureur nous
11 donne un résumé de ce que vont dire les témoins. Nous n'avons pas besoin
12 d'une déclaration en tant que telle.
13 M. le Président (interprétation). - Merci. Puis-je donc suggérer
14 la chose suivante ? Nous pouvons maintenant considérer comme officielles
15 ces pièces à conviction. Nous devons donc leur donner une cote. L'accord
16 qui se trouve dans le document versé par le bureau du Procureur le
17 29 janvier, c'est donc l’accord concernant l'évacuation d’Ilok, alors
18 quelle cote cela serait-il ?
19 M. le Greffier (interprétation). - Il s'agirait de la pièce de
20 l'accusation numéro 5.
21 M. le Président (interprétation). - Très bien. Pièce de
22 l'accusation numéro 5. Puis, il y a également l'ultimatum du
23 28 septembre 1991, dans le même document d'ailleurs. Alors, quelle serait
24 la cote de ce document ?
25 M. le Greffier (interprétation) - Il s'agirait de la pièce
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1 numéro 6.
2 M. le Président (interprétation). - La pièce numéro 6, très
3 bien. Merci.
4 Puis-je me tourner maintenant vers l'accusation et lui demander
5 si elle est d'accord sur les rapports météorologiques qui ont été versés
6 par la défense ?
7 M. Niemann (interprétation) - Oui, M. le Président.
8 M. le Président (interprétation). - Très bien, donc. Ceci peut
9 être considéré comme une pièce à conviction également.
10 M. le Greffier (interprétation). - Il s'agiraient de la pièce de
11 la défense n° 1.
12 M. le Président (interprétation). - Très bien, pièce de la
13 défense n° 1.
14 Je voudrais aborder quelques problèmes de moindre importance à
15 signaler néanmoins avant de faire entrer notre premier témoin. Je me
16 tourne vers les deux parties.
17 Je voudrais vous poser une question liée aux quarante cinq
18 témoins de la défense. Vous vous souvenez sans doute que, lors de notre
19 dernière audience, mention a été faite de ces quarante cinq témoins. J'ai
20 demandé aux deux parties si elles pouvaient se mettre d'accord sur les
21 déclarations de ces témoins. J'avais demandé aux conseils de la défense
22 que tous ces témoins soient entendus par le biais de dépositions. Ils ne
23 pouvaient pas tous se rendre au Tribunal. Nous avions donc proposé les
24 dépositions. A ce moment là, j'ai suggéré que les parties se consultent et
25 essaient de parvenir à un certain accord. Etes-vous parvenu à cet accord ?
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1 M. Niemann (interprétation). - Monsieur le Président, nous nous
2 sommes entrevus avec la défense. Mais, en fait, nous avons la même
3 position que la dernière fois. Je ne pense pas qu'il s'agisse vraiment de
4 dépositions, mais simplement d'interrogatoires du Bureau du Procureur
5 des témoins de la défense. Il faut simplement savoir s'il y a un aspect de
6 l'un ou l'autre des éléments de preuve sur lesquels nous pouvons nous
7 mettre d'accord, ce qui nous permettrait de ne pas appeler les témoins.
8 L’exercice de la déposition consiste à prendre des dépositions.
9 Il est extrêmement difficile et aussi coûteux de faire venir les témoins
10 devant ce Tribunal. Nous avons décidé de nous rendre à Belgrade,
11 d'interroger les quarante cinq témoins et de voir si nous pouvons nous
12 mettre d'accord sur certains points. Si c'est le cas, nous n'aurons aucune
13 objection à ce que leurs déclarations soient versées en tant que pièces à
14 conviction. Nous avons l'intention de faire de notre mieux afin d’y
15 parvenir avant la fin de la présentation des arguments du Bureau du
16 Procureur.
17 M. le Président (interprétation). - Merci. Le calendrier des
18 trois prochains mois d'audiences est le suivant, après certaines
19 modifications mineures. Nous allons pouvoir utiliser cette salle jusqu'à
20 mercredi prochain, donc huit jours pleins. Nous reprendrons nos travaux
21 du 16 au 20 mars, soit cinq jours pleins , du 20 au 29 avril, soit huit
22 jours pleins ; puis du 18 au 29 mai, soit dix jours pleins. Nous
23 essaierons d'obtenir quelques jours de plus afin de bénéficier d’une
24 semaine supplémentaire en avril ou en mai ; ce qui sera assez difficile vu
25 les limites logistiques actuelles.
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1 Avant d’appeler le premier témoin, résumons un point dont nous
2 avons parlé ce matin. Les déclarations des témoins pourraient être versées
3 comme pièces à conviction. Le Bureau du Procureur a souligné le fait,
4 qu'au fur et à mesure que les témoins viennent ici et qu'ils
5 comparaissent, il pourrait décider de verser la déclaration de ces témoins
6 afin que l'interrogatoire principal et le contre-interrogatoire puissent
7 se concentrer sur des points précis. Les Juges n'auront pas à aborder
8 certaines questions qui le seront dans la déclaration liminaire des
9 témoins. Verser la déclaration liminaire au dossier serait donc une
10 possibilité de verser cette déclaration liminaire au dossier et ce serait
11 le cas si le témoin venait comparaître. Est-ce exact ?
12 M. Niemann (interprétation). - Oui, nous pourrions faire
13 identifier la signature qui serait apposée sur le document. Bien sûr, cela
14 ne serait pas dans la langue du témoin. Il ne pourrait pas dire si c'est
15 sa propre déclaration.
16 Nous essaierions de verser la totalité de ces documents et non
17 pas simplement une partie de ce document reliée à ce que le témoin dirait
18 lors de son témoignage. Nous essaierions de verser la totalité de ces
19 déclarations, en faisant en sorte de les verser au dossier des pièces à
20 conviction. Ainsi nous limiterions la durée du témoignage des témoins et
21 nous pourrions essayer de laisser de côté, dans certains cas, les
22 questions introductives. Si ces questions sont couvertes dans le cadre de
23 la déclaration liminaire, nous passerions directement au coeur de la
24 déclaration et nous laisserions de côté toutes les questions
25 préliminaires.
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1 M. le Président (interprétation). - Vous parlez simplement des
2 témoins que vous avez l'intention de citer à la barre, n'est-ce pas ?
3 M. Niemann (interprétation). - Oui, effectivement.
4 M. le Président (interprétation). - Il ne s’agit pas de toutes
5 les déclarations qui ont été produites devant les Juges, n'est-ce pas ?
6 M. Niemann (interprétation). - Non, seulement des témoins qui
7 seront cités à comparaître.
8 M. le Président (interprétation). - Très bien. La défense n'a
9 pas d'objection ?
10 M. Fila (interprétation). - Non, au contraire. Je veux
11 simplement apporter mon concours à Me Niemann.
12 Toutes les déclarations ont déjà été traduites en serbo-croate.
13 Le témoin pourra identifier la traduction comme étant l'original. Je vous
14 ai apporté ce que vous m'aviez demandé, je voudrais simplement vous le
15 présenter pour que vous l'examiniez. Il s'agit de documents liés à
16 l'armée. Je vous ai également soumis la Constitution yougoslave de 1974
17 avec une traduction en anglais. J'en ai communiquée une copie à
18 Me Niemann.
19 M. le Président (interprétation). - Très bien.
20 M. Niemann (interprétation). - Nous n'avons pas de copie de ces
21 documents. Maître Fila, auriez vous une copie de ce document pour
22 l'accusation ?
23 M. Fila (interprétation). - Excusez-moi, je n'ai pas de copie
24 sous la main. Je voudrais simplement que vous l'examiniez et me disiez si
25 c'est le document que vous attendez ? Si c'est le cas, j'en transmettrai
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1 une copie à l'accusation. C'est pourquoi je ne présente qu'une seule copie
2 ce matin. Je m'excuse mais je voulais simplement vérifier si cela vous
3 convenait.
4 M. le Président (interprétation). - Nous regarderons au cours de
5 la pause et nous vous confirmerons cela.
6 Nous pouvons appeler le premier témoin.
7 M. Niemann (interprétation). - Avant, une question a été abordée
8 au cours de la dernière audience et demande une certaine clarification.
9 Vous avez demandé un mémorandum sur deux points : le conflit armé
10 international et le fait que les chefs d'accusation soient cumulatifs ou
11 alternatifs. Bien sûr, ce n'est pas encore une question qui se pose, mais
12 cela risque de le devenir. Je suppose que si vous nous avez demandé de
13 faire ce mémorandum, vous n'allez pas prendre de décision sur la question
14 avant qu'il ne soit terminé. Ce mémorandum sera un prolongement de ma
15 déclaration liminaire.
16 M. le Président (interprétation). - Vous demandez un
17 prolongement ? Que demandez-vous ?
18 M. Niemann (interprétation). - Non. Vous avez demandé un
19 mémorandum sur la question du conflit armé international et sur l'aspect
20 des chef d'accusation cumulatifs. Il n'y a pas de questions qui se posent
21 entre les parties en tant que telles. Nous sommes d'accord sur ce point.
22 Je voulais simplement clarifier la base. Il s'agit simplement d'un
23 prolongement de ma déclaration liminaire. Nous pensons pouvoir vous
24 fournir ce mémorandum à la fin de la semaine ou au début de l'autre.
25 M. le Président (interprétation). - Merci. Cela nous permettra
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1 de saisir mieux ces différentes questions.
2 Nous pouvons appeler le premier témoin.
3 M. Niemann (interprétation). - J'appelle à la barre
4 madame Bosanac.
5 (Le témoin est introduit dans la salle d'audience.)
6 M. le Président (interprétation). - Madame, s'il vous plaît,
7 veuillez lire votre déclaration solennelle et prêter serment.
8 Mme Bosanac (interprétation). - Je déclare solennellement que je
9 dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
10 M. le Président (interprétation). - Merci. Vous pouvez vous
11 asseoir.
12 M. Niemann (interprétation). - Etes-vous un médecin confirmé ?
13 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
14 M. Niemann (interprétation). - Etiez-vous directrice de
15 l'hôpital général de Vukovar ? Etes-vous toujours à ce poste ?
16 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
17 M. Niemann (interprétation). - Etiez-vous notamment directrice
18 de l'hôpital de Vukovar en 1991 ?
19 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
20 M. Niemann (interprétation). - Notamment au cours du second
21 semestre 1991 ?
22 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, j'ai été directrice du
23 24 juillet jusqu'au 20 novembre 1991.
24 M. Niemann (interprétation). - Docteur Bosanac, l'hôpital de
25 Vukovar a-t-il fait l'objet d'un pilonnage au cours du conflit qui a duré
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1 jusqu'au mois de novembre 1991 ?
2 Mme Bosanac (interprétation). - Oui. L'hôpital a été pilonné
3 plusieurs fois. En fait, il était quotidiennement pilonné.
4 M. Niemann (interprétation). - Pourriez-vous très brièvement
5 expliquer aux juges quelle était la nature des attaques lancées contre
6 l'hôpital ? Quels types d'armes étaient utilisés dans le cadre de ces
7 attaques ?
8 Mme Bosanac (interprétation). - C'est en août 1991 qu'a eu lieu
9 le premier pilonnage de l'hôpital. Le 15 août, un obus est tombé sur le
10 bâtiment administratif. Des obus sont également tombés sur l'hôpital même.
11 Les tirs provenaient de l'autre rive du Danube. C'est le toit de l'hôpital
12 qui était visé. Par conséquent, les salles d'opération ont dû être
13 transférées au sous-sol et être placées dans des abris antiatomiques.
14 Le 24 août, l'hôpital a fait l'objet d'un pilonnage aérien.
15 C'était la première fois que cela se passait. A partir du 14 septembre,
16 l'hôpital a fait l'objet de pilonnages quotidiens. Cette situation s'est
17 prolongée jusqu'au 17 novembre.
18 Pendant cette période, entre 60 et 200 projectiles de différents
19 types, qu'il s'agisse de bombes ou d'obus, ont été lâchés sur l'hôpital et
20 divers types d'armes ont été utilisés pour ce faire.
21 M. Niemann (interprétation). - C'est l'hôpital qui était
22 directement visé par ces tirs ?
23 Mme Bosanac (interprétation). - Les tirs provenaient de
24 positions tenues par l'armée populaire yougoslave, la JNA, qui était
25 postée sur l'autre rive du Danube, du côté de la Vojvodine. Ils venaient
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1 de la direction de Negoslavci et Borovo Selo. Vukovar a été encerclée
2 entièrement pendant trois mois. Il y avait des canons et des chars, au
3 centre de la ville, qui appartenaient à la JNA. Il y avait également des
4 avions de la JNA qui survolaient quotidiennement l'hôpital et qui le
5 pilonnaient. Ils pilonnaient également d'autres bâtiments qui se
6 trouvaient aux alentours de l'hôpital.
7 M. Niemann (interprétation). - Savez-vous pourquoi Vukovar était
8 attaquée par la JNA ?
9 Mme Bosanac (interprétation). - Pendant la guerre de 1991,
10 nombre de villes ont fait l'objet de telles attaques. Je n'en suis pas
11 absolument certaine, mais je crois que Vukovar était attaquée parce que la
12 JNA essayait de prendre le contrôle de la ville. C'est bien ce qui s'est
13 passé entre le 18 et le 20 novembre 1991.
14 M. Niemann (interprétation). - Avant cette attaque, Vukovar
15 avait-elle été la cible d'un certain nombre d'hostilités ou bien y avait-
16 il des difficultés au sein de la population de la ville ? Y avait-il eu
17 des hostilités ?
18 Mme Bosanac (interprétation). - J'ai travaillé dix-sept ans à
19 Vukovar en tant que médecin. C'est une petite ville qui se trouve au sud-
20 est de la Croatie, sur la rive droite du Danube. Avant la guerre, il y
21 avait 45 000 habitants à Vukovar. Dans toute la région, il y avait des
22 représentants des différents groupes ethniques. Lors des élections de
23 1991, il est apparu qu'il y avait 23 différents groupes ethniques qui
24 habitaient la région. Les Croates représentaient 42 % de la population,
25 les Serbes 38 %. Pour ce qui est des Yougoslaves, ils représentaient une
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1 proportion assez importante de la population, 12 % environ. Les
2 Yougoslaves étaient en fait des enfants de mariages mixtes. Ils se
3 décrivaient comme yougoslaves. Il y avait des représentants d'autres
4 groupes ethniques, les Rutènes, les Hongros, les Albanais, mais eux ne
5 représentaient qu'une part infime de la population. Il y avait un nombre
6 non négligeable de groupes ethniques représentés.
7 M. Niemann (interprétation). - Vous avez déclaré il y a un
8 instant que l'hôpital dont vous étiez directrice avait fait l'objet
9 d'attaques. Y avait-il des installations militaires ou des raisons qui
10 permettraient d'expliquer pourquoi l'hôpital a été attaqué ?
11 Mme Bosanac (interprétation). - Non, il n'y a jamais eu
12 d'installations militaires à proximité ou dans l'hôpital. Je crois que
13 l'hôpital a fait l'objet de plus d'attaques que d'autres parties de la
14 ville. En dépit des protestations véhémentes que j'ai élevées pour
15 défendre l'hôpital, en dépit du fait que j'ai vraiment protesté contre les
16 attaques dont il faisait l'objet, j'ai pu conclure qu'il faisait l'objet
17 d'attaques parce que dans l'hôpital tout le monde -la police, l'armée, la
18 population- recevait des soins. Il y avait des médecins, des infirmières
19 et toutes les personnes qui venaient à l'hôpital pouvaient être certaines
20 qu'elles allaient être aidées et recevoir des soins
21 si elles étaient blessées.
22 M. Niemann (interprétation). - L'hôpital portait-il des signes
23 distinctifs ? Y avait-il des signes particuliers qui indiquaient qu'il
24 s'agissait là d'un hôpital ?
25 Mme Bosanac (interprétation). - Oui. Sur le vieux bâtiment de
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1 l'hôpital, là où se trouvait le département pour les infections
2 pulmonaires, il y avait sur le toit une grande croix rouge. Comme il
3 n'était pas possible de monter sur le toit du nouveau bâtiment, sur la
4 pelouse devant le bâtiment, nous avons étalé un grand drap blanc portant
5 une croix rouge, un drap de 20 mètres. C'était quelque chose que l'on
6 pouvait voir très distinctement.
7 Malgré ces signes très clairs, des obus tombaient dans le jardin
8 de l'hôpital. Des bombes aériennes tombaient également.
9 M. Niemann (interprétation). - Le 24 août 1991, quatre soldats
10 de la JNA sont-ils arrivés à l'hôpital pour y être traités ?
11 Mme Bosanac (interprétation). - Oui. Un poste de contrôle de la
12 JNA se trouvait entre Borovo Selo et Goronja Sela, parce que des troupes
13 arrivaient dans la ville. Des chars transportant du personnel passaient
14 également par ce poste de contrôle. Il y avait des mines à cet endroit-là.
15 Quatre soldats ont donc été amenés à l'hôpital. Deux étaient
16 légèrement blessés, le troisième était gravement blessé, le quatrième
17 gravement brûlé du fait d'une explosion qui s'était produite. Ils sont
18 entrés à l'hôpital ce matin-là et ont reçu tous les soins nécessaires,
19 conformément à tous les principes d’éthique médicale.
20 M. Niemann (interprétation). - Un des capitaines de la JNA, le
21 capitaine Ristic, est-il venu vous voir et a demandé que ces quatre
22 soldats soient remis à la JNA ?
23 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, il m'a appelée au
24 téléphone. Il m'a demandé que les soldats soient ramenés aux casernes qui
25 se trouvaient dans la partie sud de la ville. Je m'y suis refusée. J'ai
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1 dit que c'était une mauvaise idée, qu’il était dangereux pour eux d'être
2 transportés. Certains d’entre eux étaient toujours sous perfusion. Ils
3 recevaient des soins tout à fait appropriés à l'hôpital et il n’était pas
4 bon pour eux qu'ils soient transférés et soignés dans les casernes.
5 M. Niemann (interprétation). - Au vu de l’avis médical que vous
6 avez donné, le capitaine Ristic a-t-il cependant insisté sur le fait que
7 ces soldats devaient être transférés de votre hôpital ? Est-ce que,
8 finalement, cela s'est produit ?
9 Mme Bosanac (interprétation). - Oui. Il a insisté. J'ai dit que
10 je ne pouvais pas le faire parce qu'il n'y avait aucune justification
11 médicale ou éthique qui puisse me permettre de procéder ainsi. Une demi-
12 heure plus tard, c'est le chef de la police qui m'a appelée. Il a demandé
13 que nous préparions le transfert des quatre soldats. Il a précisé que des
14 représentants de la JNA allaient venir et les emmener avec eux.
15 M. Niemann (interprétation). - Ces représentants de la JNA sont-
16 ils finalement arrivés à l'hôpital ?
17 Mme Bosanac (interprétation). - Oui. Peu de temps après, un
18 transporteur blindé est arrivé, est entré dans l'enceinte de l'hôpital. Je
19 suis sortie. Je ne pouvais pas leur parler parce qu'ils étaient à
20 l'intérieur même de ce blindé. J'ai donc frappé sur la carrosserie et la
21 tourelle s'est ouverte. Un officier est sorti. Je lui ai demandé pourquoi
22 ils étaient entrés dans l'enceinte de l'hôpital. Ils m'ont répondu qu'ils
23 étaient venus assurer le transfert des quatre soldats. Une camionnette
24 appartenant à la JNA est également entrée dans l'enceinte. Elle était
25 conduite par un chauffeur. Ils se sont garés juste devant l'entrée de
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1 l'hôpital et les soldats qui étaient légèrement blessés sont montés dans
2 la camionnette alors que ceux qui souffraient de blessures plus graves
3 étaient placés dans une ambulance. J'ai demandé au chauffeur où il les
4 emmenait. Il m'a dit qu'il n'en savait rien, qu'il ne faisait qu'obéir aux
5 ordres.
6 Un des soldats légèrement blessé venait de Vukovar. Il ne
7 voulait pas partir. Il voulait rester. Mais le chauffeur avait reçu des
8 ordres. Il fallait qu'il les emmène. C'est bien ce
9 qu'ils ont fait.
10 L’une de nos infirmières, Jenica Janko a accompagné l'ambulance.
11 Lorsqu'elle est revenue, elle a dit qu'elle avait vu énormément de gens
12 dans la caserne, des hélicoptères, des équipes de télévision. Tous ces
13 gens-là attendaient de pouvoir effectuer le transfert des soldats de
14 Vukovar à Belgrade.
15 M. Niemann (interprétation). - Savez-vous pourquoi il leur a
16 semblé nécessaire de venir à l'hôpital dans un blindé ? Est-ce que des
17 menaces quelconques étaient proférées à l'encontre de la JNA à moment-là ?
18 En avez-vous connaissance ?
19 Mme Bosanac (interprétation). - Non.
20 M. Niemann (interprétation). - Après que ces hommes ont été
21 transférés, le pilonnage de l'hôpital a-t-il continué ou au contraire a-t-
22 il cessé ?
23 Mme Bosanac (interprétation). - Non, le pilonnage a continué. En
24 fait, le premier raid aérien a eu lieu peu de temps après. Le pilonnage a
25 eu lieu sur une base quotidienne. De jour en jour, il devenait plus
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1 intense.
2 M. Niemann (interprétation). - Pouvez-vous penser à une raison
3 quelconque... ? Excusez-moi, je reformule ma question. Je retire cette
4 question.
5 Vous êtes-vous plainte à qui que ce soit du fait que votre
6 hôpital faisait l'objet de pilonnages ?
7 Mme Bosanac (interprétation). - Je me plaignais tous les jours
8 et parfois plusieurs fois par jour. Je me plaignais à de nombreuses
9 personnes.
10 M. Niemann (interprétation). - Pouvez-vous nous donner des
11 noms ? A qui vous plaigniez-vous ?
12 Mme Bosanac (interprétation). - Au début, je me suis plainte au
13 ministère de la Santé publique à Zagreb. Ensuite, je me suis plainte
14 auprès du quartier général de l'armée croate. Enfin, je me suis mise en
15 rapport avec le quartier général de Belgrade via Sarajevo. J'ai
16 demandé à parler au téléphone au Premier Ministre, Ante Markovic. Je n'ai
17 pas réussi à l’avoir au bout du fil. J'ai parlé à un certain adjoint
18 militaire du commandant de la JNA. Il ne me croyait pas. Il disait que
19 c'était impossible. Il disait qu'il était impensable que l'hôpital soit
20 pilonné.
21 Quand je me suis aperçu qu'il ne servait à rien de se plaindre à
22 qui que ce soit, que personne ne pouvait m'aider, j'ai essayé d'utiliser
23 les médias. Grâce aux médias de Slovénie, j’ai obtenu le numéro de fax de
24 la Croix-Rouge à Genève et le numéro de téléphone de l'UNICEF. J'ai
25 également obtenu les coordonnées d'autres hommes politiques importants à
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1 l'époque en Europe, par exemple M. Carlington, M. Genscher,
2 M. Van Den Broek.
3 Tous les jours, j'écrivais des lettres de protestation, des
4 lettres d'appel au secours. Je demandais de l'aide. J'envoyais ces lettres
5 au bureau croate de la mission européenne qui se trouvait à Zagreb. Je
6 leur demandais de faire parvenir ces lettres à leurs destinataires.
7 M. Niemann (interprétation). - Quand vous parlez de la mission
8 européenne, vous faites référence à l’ECMM, la mission d'observation de la
9 Communauté européenne ?
10 Mme Bosanac (interprétation). - Oui. A cette époque-là, à
11 l'hôtel et à Zagreb également, il y avait une mission d'observation de la
12 Communauté européenne, dirigée par Georges-Marie Chenu, qui était le
13 responsable de cette mission. Pendant le mois de novembre, pour autant que
14 je m'en souvienne, des négociations se sont ouvertes, qui visaient à
15 l'établissement d'un cessez-le-feu dans notre secteur.
16 M. Niemann (interprétation). - Revenons à ces lettres de
17 protestation que vous avez rédigées. Vous avez fait des appels
18 téléphoniques, mais vous avez également envoyé des fax, n'est-ce pas ?
19 Vous avez utilisé les télécopies ?
20 Mme Bosanac (interprétation). - Tous les jours, parfois même
21 deux fois par jour, je décrivais la situation qui prévalait dans l'hôpital
22 et dans la ville. J'envoyais des fax à la mission européenne. Je leur
23 demandais d’en faire une traduction en anglais et de les faire parvenir à
24 tous les membres de la mission européenne.
25 Le fax de l'hôpital ne fonctionnait plus, parce que le bâtiment
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1 administratif avait été touché. Tous les jours, j'allais soit au quartier
2 général de la défense de la ville, soit voir la police où le fax
3 fonctionnait. C'est ainsi que j'ai pu envoyer mes fax.
4 M. Niemann (interprétation). - Je vais maintenant vous soumettre
5 cet ensemble de documents. Je voudrais que vous les compulsiez, s'il vous
6 plaît.
7 Peut-être peut-on en communiquer un exemplaire à Maître Fila.
8 Peut-être en a-t-il déjà reçu un, mais pour pallier tout oubli de notre
9 part...
10 Docteur, considérons ces documents tous ensemble plutôt
11 qu'individuellement. Veuillez rapidement les feuilleter et nous dire si
12 vous pouvez les identifier, si vous les reconnaissez. Très rapidement,
13 s'il vous plaît, je crois que vous les avez déjà vus précédemment.
14 Mme Bosanac (interprétation). - Il s'agit de copies des fax que
15 j'ai rédigés et envoyés au bureau croate de la mission européenne entre le
16 20 octobre et le 15 ou 16 novembre. C'était une période critique
17 d'ailleurs, au cours de laquelle l'hôpital était pilonné quotidiennement.
18 En fait, il devait recevoir 100 projectiles en moyenne tous les jours.
19 M. Niemann (interprétation). - Votre signature apparaît-elle sur
20 un certain nombre de ces documents, notamment au-dessus ou en dessous de
21 l'endroit où votre nom est tapé à la machine ?
22 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, il s'agit de lettres que
23 j'ai rédigées moi-même ou que ma secrétaire a rédigées. Dans ce cas-là, je
24 ne faisais que les signer. Les documents étaient traduits en anglais. Ils
25 l’étaient dans le bureau croate de la mission européenne. J'envoyais
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1 également quelques messages par téléphone. Je leur demandais de les
2 transcrire par écrit et de les envoyer sous mon nom.
3 Tous les documents que j'ai envoyés ne figurent pas dans cet
4 ensemble que vous m'avez transmis. Pour la plupart, ils sont là.
5 M. Niemann (interprétation). - Je souhaite demander le versement
6 au dossier de ce
7 document. Quelle est la cote qu'il reçoit, s'il vous plaît ?
8 M. le Président (interprétation). - Quelle est la cote de ce
9 document ?
10 M. le Greffier. (interprétation). - C'est la pièce de
11 l'accusation n° 7.
12 M. Niemann (interprétation). - Docteur, avez-vous dû prendre des
13 mesures quelconques pour assurer la protection de vos patients vis-à-vis
14 de ces pilonnages et de ces obus qui tombaient sur l'hôpital ?
15 Mme Bosanac (interprétation). - Nous avons essayé de protéger
16 nos malades. Ceux qui se trouvaient dans l'état le plus critique étaient
17 placés dans l'abri antiaérien qui se trouvait au sous-sol. Il y avait une
18 unité de soins intensifs pour les blessés les plus graves. Après les
19 opérations chirurgicales, ces malades étaient emmenés dans cet abri
20 antiatomique, parce qu'aucun obus ne pouvait les atteindre s'ils se
21 trouvaient là. Nous avons installé une salle là et également une salle
22 d'accouchement pour les jeunes mères et leurs bébés. Des incubateurs ont
23 été placés dans cette salle. Il y avait également une pièce de taille plus
24 importante destinée au traitement post-traumatique des blessés, et puis
25 une pièce plus réduite où les enfants du personnel médical passaient la
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1 nuit, ainsi que les infirmières lorsqu'elles se reposaient.
2 Nous essayions d'utiliser les caves au maximum de leur
3 possibilité, mais elles n'étaient pas toujours très sûres. Parfois, dans
4 les caves des vieux bâtiments, les bombes frappaient tout de même,
5 tombaient tout de même. Quelques blessés ont été atteints par des éclats
6 d'obus. Il y avait tellement de blessés... C'était vraiment un problème.
7 Tous les jours, entre 16 et 92 personnes arrivaient à l'hôpital.
8 Au cours du mois de septembre, nous avons pu évacuer les blessés. Ils ont
9 pu quitter Vukovar. A partir du 1er octobre, il n'a plus été possible
10 d'évacuer qui que ce soit.
11 Il y avait de plus en plus de blessés. Après leur avoir
12 administré les premiers soins, nous les envoyions dans des abris civils.
13 Juste avant l'occupation de Vukovar, vers la fin du mois de novembre, le
14 nombre de personnes blessées a atteint 450. Il est bien certain que nous
15 ne
16 pouvions en abriter plus de 200.
17 M. Niemann (interprétation). - Vers le 4 octobre 1991, deux
18 bombes ne sont-elles pas tombées sur l'hôpital, l'une explosant
19 immédiatement, et l'autre traversant le bâtiment de l'hôpital ?
20 Mme Bosanac (interprétation). - Il s'agissait de deux bombes
21 aériennes qui sont tombées sur l'hôpital. Je me rappelle très bien de
22 l'explosion dans la salle d'opération chirurgicales au deuxième étage.
23 Tout l'hôpital, toute l'entrée de l'hôpital était remplie de poussière et
24 de gaz. Tout le monde était en proie à la panique. Les malades, les
25 blessés, le personnel, tout le monde était persuadé que l'hôpital allait
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1 flamber. Cela s'était déjà produit un certain nombre de fois. Ensuite,
2 quelqu'un a dit qu'une bombe était tombée directement sur l'abri.
3 Je suis arrivée devant l'entrée de l'abri. Cette bombe était
4 tombée en plein sur un lit où se trouvait un patient. C'était un homme âgé
5 qui s'appelait Pero Vukasin. J'ai entendu dire qu'il était toujours
6 vivant, qu'il vit à Vukovar. Cette bombe n'a pas explosé. Elle a
7 simplement enfoncé le toit de l'hôpital et tous les étages successifs de
8 l'hôpital. Elle est descendue jusqu'à l'endroit où se trouvait l'entrée de
9 l'abri. Ce patient a vraiment survécu miraculeusement. Il a eu de la
10 chance. La bombe est tombée à côté de ses pieds. Tous les autres ont eu
11 aussi beaucoup de chance car si cette bombe avait explosé, l'abri aurait
12 complètement explosé. Tout le monde aurait été tué.
13 M. Niemann (interprétation). - Docteur Bosanac, j'aimerais que
14 vous examiniez un certain nombre de photos, si vous le voulez bien. Des
15 copies de ces photos ont été communiqués aux juges. Je peux montrer ce
16 document au greffier. Cela s'appelle « Hôpital de Vukovar ». Peut-être
17 cela peut-il vous aider à retrouver ce document, Monsieur le greffier.
18 J'aimerais qu'il soit montré au témoin.
19 Monsieur l’huissier, veuillez placer le document sur le
20 rétroprojecteur.
21 Docteur Bosanac, j'aimerais, si vous le voulez bien, que vous placiez ces
22 photographies sur le rétroprojecteur qui se trouve à vos côtés. Nous
23 allons les regarder une par une. J'aimerais que vous nous décriviez ce que
24 l'on peut y voir. Indiquez-nous bien avec le pointeur ce dont vous parlez
25 pour que tout soit clair pour tout le monde.
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1 La photographie que vous voyez maintenant, que représente- t-
2 elle ? N'hésitez pas à utiliser le pointeur au fur et à mesure que vous
3 nous expliquez ce que vous voyez.
4 Mme Bosanac (interprétation). - C'est le bâtiment principal.
5 C'est le nouvel hôpital. Cette photo a été faite tout de suite après la
6 guerre, après les travaux de rénovation de l'hôpital.
7 M. Niemann (interprétation). - Donc, cela existe depuis 1991,
8 n'est-ce pas ?
9 Mme Bosanac (interprétation). - Oui. En 1992, l'hôpital a été
10 rénové, même s'il ne l'a pas été entièrement. Les autres bâtiments du
11 complexe de l'hôpital ont été rénovés eux aussi. Ici, le petit bâtiment,
12 ce sont les urgences. Un peu plus loin,.
13 M. Niemann (interprétation). - Je vais vous arrêter un instant
14 pour que cela apparaisse sur le transcripte. Vous avez montré l'hôpital
15 qui se trouve juste en face de l'hôpital principal, le petit bâtiment
16 long ?
17 Mme Bosanac (interprétation). - Oui. Ici, sur-le-champ, il y
18 avait un drapeau avec le signe de la Croix-Rouge indiquant qu'il
19 s'agissait des bâtiments de l'hôpital.
20 M. Niemann (interprétation). - Je vous arrête encore une fois
21 pour que cela apparaisse au transcripte. Ici, il s'agit de la partie
22 longue, verte, jusqu'à un bâtiment sans toit qui se trouve en face de
23 l'hôpital. Merci, Docteur, vous pouvez continuer.
24 Mme Bosanac (interprétation). - Ici, à gauche dans la cour,
25 vous voyez ce bâtiment qui a été démoli.
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1 M. Niemann (interprétation). - C'est à gauche de la
2 photographie.
3 Mme Bosanac (interprétation). - C'est le bâtiment qui abritait
4 le département pour
5 les maladies contagieuses et pulmonaires. Un grand signe de la Croix-Rouge
6 y figurait.
7 M. Niemann (interprétation). - Oui. Pourriez-vous regarder la
8 photographie suivante ?
9 Mme Bosanac (interprétation). - Sur cette photographie, au
10 centre, figure le bâtiment principal de l'hôpital. A droite, c'est
11 l'entrée où l'on accueillait les personnes blessées pendant la guerre. Le
12 département chirurgical se trouvait au deuxième étage. Le 15 août a eu
13 lieu le premier pilonnage. Les premiers tirs ont touché l'hôpital dans ce
14 département-là qui a donc été déplacé à l'étage inférieur et peu à près,
15 en raison des pilonnages, ce département a été déplacé en bas du bâtiment.
16 M. Niemann (interprétation). - Cela se trouve dans la partie
17 droite de l'immeuble.
18 Mme Bosanac (interprétation). - Ici, c'est l'accueil chirurgical
19 où se trouvaient les salles d'opération, où les opérations ont eu lieu.
20 Ensuite, on faisait aller les blessés dans l'abri. L'abri antiatomique qui
21 comportait quatre grandes pièces se trouvait dans ce bâtiment-là. Ces
22 pièces contenaient la nourriture, de même que tout ce qui était nécessaire
23 pour l'hygiène.
24 M. Niemann (interprétation). - L'endroit indiqué se trouve sur
25 la gauche de la photographie, derrière un grand arbre. Merci, Docteur.
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1 Maintenant, vous pouvez regarder la photographie suivante.
2 Mme Bosanac (interprétation). - Ici, on voit le bâtiment
3 principal de l'hôpital. Durant les trois mois pendant lesquels l'hôpital
4 était une cible constante des pilonnages, c'est dans cette partie
5 intérieure que tout le service médical se déroulait. Dans les pièces à
6 l'étage où auparavant les patients étaient logés, seules les infirmières y
7 dormaient, alors que dans la partie centrale de l'immeuble en bas, on
8 mettait les patients afin d'éviter qu'ils ne soient blessés.
9 Ici, à droite, un obus inflammable est tombé. Un incendie s'est
10 produit, mais nous avons réussi à l'éteindre. En 1991,...
11 M. Niemann (interprétation). - Je vous arrête. Ici, il s'agit
12 de la partie supérieure
13 droite de l'immeuble. Merci.
14 Pourriez-vous maintenant regarder la photographie suivante ?
15 Est-ce qu’ici, on voit encore une fois l'entrée par laquelle les blessés
16 étaient accueillis ?
17 Mme Bosanac (interprétation). - Maintenant ici, c'est l'autre
18 partie. C'est par ici que l'on faisait venir les blessés. On les laissait
19 là, la voiture qui les avait amenés partait par ici.
20 M. Niemann (interprétation). - Merci. Nous pouvons continuer.
21 Mme Bosanac (interprétation). - Ici, on voit l'autre côté de
22 l'hôpital. On conduisait les blessés par ici. On les laissait là et
23 ensuite leur escorte prenait ce chemin pour quitter le complexe de
24 l'hôpital.
25 Ici, nous voyons la pièce où se trouvait la chaudière, dans la
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1 cave. On voit ici aussi l'entrée de cette pièce et la personne qui
2 s'occupait de la chaudière, Ivan Raguz, se trouvait là. Il entrait par là.
3 Un obus est tombé exactement sur cet endroit-là, c'est-à-dire sur cette
4 entrée.
5 M. Niemann (interprétation). - Merci. Et la photographie
6 suivante ? Je pense que c'est une photographie semblable à l’une de celles
7 que nous avons déjà vues.
8 Mme Bosanac (interprétation). - Oui. Cela montre la partie où se
9 trouve l'entrée de l'hôpital.
10 M. Niemann (interprétation). - Et la photo suivante ?
11 Mme Bosanac (interprétation). - Ici, c'est l'entrée du couloir
12 qui se trouve entre le bâtiment nouveau et l'ancien bâtiment. Ici, se
13 trouve l'entrée de l'abri antiatomique qui est derrière ce mur. Le
14 personnel, les patients, les blessés, pouvaient y entrer en partant à la
15 fois du bâtiment nouveau et ancien.
16 Ici, les patients et les blessés étaient allongés dans les lits.
17 Ici, on fournissait également des services médicaux. Une fois, un obus est
18 tombé par terre. Cet obus a pénétré ce mur et a fait tomber une partie du
19 toit. Cette partie de toit est tombée sur un patient qui n'était pas un
20 blessé. C'était un malade qui était placé chez nous parce que sa famille
21 ne pouvait plus
22 s'occuper de lui. Il a été complètement couvert par les débris. Nous
23 pensions qu'il était mort, mais nous avons réussi à le faire sortir. Nous
24 avons constaté qu'il était vivant. Il est toujours vivant. En ce moment,
25 il reçoit des soins médicaux à Varazdkin.
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1 M. Niemann (interprétation). - Et la photographie suivante ?
2 Docteur, pendant que vous parlez, essayez, s'il vous plaît, de vous
3 approcher du micro.
4 Mme Bosanac (interprétation). - Cette photographie montre elle
5 aussi le même couloir entre les deux bâtiments, le bâtiment nouveau et
6 l'ancien, de même que l'entrée de l'abri antiatomique. Maintenant, ce
7 couloir est vide, mais en 1990, il était plein de blessés.
8 M. Niemann (interprétation). - La photo suivante.
9 Mme Bosanac (interprétation). - Cette photo montre le couloir,
10 l'entrée. Ici, se trouve l'entrée de la salle d'opération. Pendant
11 l'agression en 1991, cette salle, elle aussi, était utilisée comme salle
12 d'opération. Ici, nous voyons la porte qui menait vers mon bureau pendant
13 la guerre. C'est là que se trouvait mon bureau pendant la guerre.
14 M. Niemann (interprétation). - Et la photographie suivante ?
15 Mme Bosanac (interprétation). - Cela montre un des couloirs de
16 l'hôpital que nous utilisions comme une chambre pour les patients. Nous
17 mettions à l'intérieur les blessés en essayant de les mettre près des murs
18 pour les protéger des obus qui tombaient de façon incessante par les
19 fenêtres.
20 M. Niemann (interprétation). - La photo suivante.
21 Mme Bosanac (interprétation). - Ici, nous voyons l'entrée de
22 l'infirmerie chirurgicale et d'accueil. C'est par ici que l'on faisait
23 venir les blessés. La voiture continuait son chemin. Ici, nous voyons les
24 sacs qui couvraient les fenêtres derrière lesquelles les opérations
25 chirurgicales avaient lieu.
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1 M. Niemann (interprétation). - La photo suivante ?
2 Mme Bosanac (interprétation). - Ici, nous voyons l'entrée de
3 l'hôpital vue de la
4 rue, la rue Gunduliceva.
5 M. Niemann (interprétation). - Merci. Je verse ces photos au
6 dossier. Il s'agit de la pièce à conviction numéro P 8, je pense.
7 M. le Président (interprétation) - Le numéro 8 ?
8 M le Greffier (interprétation). - Oui, la pièce à conviction
9 de l'accusation numéro 8.
10 M. Niemann (interprétation). - Docteur, vous avez dit que les
11 négociations se poursuivaient à des niveaux différents afin d'atteindre
12 une sorte de cessez-le-feu et surtout afin d'arriver à l'arrêt des
13 attaques contre l'hôpital. Quand ces négociations ont-elles commencé ?
14 Vous en souvenez- vous ?
15 Mme Bosanac (interprétation). - Je m'en souviens. C'est par le
16 biais des communications téléphoniques avec le ministre de la Santé, le
17 professeur, docteur Andrija Hebrang que j'ai appris que les négociations
18 se déroulaient. Ces négociations se sont surtout intensifiées en début du
19 mois d'octobre lorsqu'on a organisé un convoi chargé d'évacuer les
20 blessés, organisé par Médecins sans Frontière.
21 Ce convoi devait arriver à Vukovar le 11 octobre pour apporter
22 des médicaments, des équipements à l'hôpital et faire sortir les premiers
23 cent blessés. Il devait ensuite revenir jusqu'à ce que tous les blessés
24 soient évacués. Le convoi a quitté Zagreb le 11 octobre, mais il a été
25 arrêté par la JNA dans la caserne. Il n'est pas arrivé jusqu'à l'hôpital.
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1 Un autre convoi a été organisé le 18 octobre. Il est arrivé jusqu'à
2 l'hôpital, mais il n'a pas apporté de médicaments, pas du tout. Il a
3 réussi à évacuer 105 blessés. Ce fut difficile ; la route entre Vukovar et
4 Vinkovci a duré treize heures. Entre-temps, un des blessés -qui avait été
5 touché par un obus- est mort.
6 Les négociations ont continué. Selon mes informations, l'hôpital
7 devait être évacué le 12 novembre. A Zagreb, un accord a été signé selon
8 lequel l'hôpital devait être neutralisé, l'évacuation devant commencer le
9 18 novembre, à 8 heures du matin. Cela devait être organisé
10 par la Croix-Rouge internationale et contrôlé par des observateurs
11 européens.
12 M. Niemann (interprétation). - Docteur, veuillez examiner
13 maintenant le document que je vous montre. Monsieur l’huissier, veuillez
14 communiquer une copie à la défense et aux Juges, s'il vous plaît. Encore
15 une fois, il s'agit d'un document que j'ai déjà communiqué à Me Fila.
16 M. le Président (interprétation). - Merci.
17 M. Niemann (interprétation). - Madame et Messieurs les Juges, je
18 m'excuse si la partie supérieure est peu lisible, mais c'est la seule
19 copie dont nous disposons.
20 Docteur, avez-vous déjà vu le document que vous avez sous les
21 yeux ?
22 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, je l'ai déjà vu. En effet,
23 j'ai consulté plusieurs fois le ministre de la Santé, Andrija Hebrang,
24 quant à savoir de quelle manière devaient être organisées la
25 neutralisation et l'évacuation de l'hôpital. J'ai vu ce document pour la
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1 première fois à mon arrivée, après l’échange à Zagreb.
2 M. Niemann (interprétation). - D'après vous, s'agit-il d’un
3 accord entre les parties concernant l'évacuation de l'hôpital de Vukovar ?
4 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, il s'agit de l'accord signé
5 du côté croate par le ministre de la Santé, le Dr Andrija Hebrang, du côté
6 de la JNA par Andrija Raseta et par George-Maria Chény, président des
7 observateurs européens.
8 M. Niemann (interprétation). - Reconnaissez-vous les signatures
9 en bas du document ?
10 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
11 M. Niemann (interprétation). - Pouvez-vous me dire quelles sont
12 les signatures que vous reconnaissez et où elles figurent ? Si vous
13 mettiez ce document sur le rétroprojecteur, cela nous faciliterait les
14 choses.
15 Mme Bosanac (interprétation). - Je reconnais cette signature,
16 c'est celle de notre
17 ministre, le Dr Hebrang.
18 M. Niemann (interprétation). - Docteur, nous ne le voyons pas
19 sur l'écran, veuillez déplacer un peu le document.
20 Mme Bosanac (interprétation). - Ici se trouve la signature de
21 notre ministre, le Dr Hebrang ; au milieu, la signature de M. Chény ; à
22 droite, celle du Général Raseta.
23 M. Niemann (interprétation). - Je suppose que vous connaissiez
24 la signature du ministre de la Santé de Croatie ?
25 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, j’en suis sûre, je
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1 reconnais cette signature. Concernant la signature du Général Raseta, on
2 m'a dit que c’était la sienne, je ne la connaissais pas auparavant.
3 Pendant qu'il menait ces négociations, je l'ai eu plusieurs fois au
4 téléphone entre le 16 et le 18 novembre.
5 Pour M. Chény, je sais que c'est sa signature. Après la guerre,
6 j'ai pu parler plusieurs fois avec lui. Il a été à Zagreb, après son
7 mandat au sein des observateurs européens, en tant qu'ambassadeur
8 français.
9 M. Niemann (interprétation). - Je demande le versement au
10 dossier de cette pièce à conviction.
11 M. le Président (interprétation). - Il s'agit de la pièce à
12 conviction n° 9 ?
13 M. le Greffier (interprétation). - Oui, Monsieur le Président,
14 c'est la pièce à conviction n° 9.
15 M. Niemann (interprétation). - Madame Bosanac, après cet accord
16 que vous venez d'identifier en tant que pièce à conviction n° 9, que
17 s'est-il passé ?
18 Mme Bosanac (interprétation). - Selon cet accord, le
19 18 novembre 1991, à 8 heures du matin, l'hôpital devait recevoir la visite
20 des représentants des observateurs européens et deux délégations de la
21 Croix-Rouge internationale.
22 Un véhicule devait passer, depuis Belgrade, par Ilok, et un
23 autre, venant de
24 Vojvodina, par la rivière Danube, selon l'information qui circulait. Le 18
25 au matin, rien ne s’est passé. C'était assez calme. On entendait
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1 seulement, par-ci par-là, quelques obus. En allant chercher de l'eau avec
2 mes employés, j'ai pu voir que l'on pilonnait la ville depuis des
3 positions assez lointaines tenues par les forces de la JNA. Nous
4 attendions. Rien ne s'est passé.
5 J’ai téléphoné au ministre qui m'a dit que les représentants de
6 la Croix-Rouge internationale avaient quitté Belgrade mais ne l'avaient
7 toujours pas contacté. Vers midi, ils ont appelé. C'était la première fois
8 que je recevais un appel des représentants des observateurs européens, ils
9 s'acheminaient vers Vukovar, ils étaient dans le village de Negoslavci,
10 mais ne pouvaient toujours arriver jusqu’à nous, l'Armée populaire
11 yougoslave les empêchant de le faire.
12 L'après-midi, j'ai à nouveau téléphoné au ministre Hebrang à
13 Zagreb, qui m'a dit qu'il avait eu l'information selon laquelle les
14 équipes de la Croix-Rouge internationale était à Vukovar, mais s'occupait
15 de la reddition des blessés, des civils, des soldats de l'armée croate, et
16 qu'elle ne pouvait s'occuper de l'hôpital que le lendemain. Nous nous
17 préparions à cela. Nous avions établi des listes et déterminé qui devait
18 aller où. Nous avions de nombreux blessés graves, nous les préparions pour
19 le transport. Nous effectuions les dernières préparations qui devaient
20 permettre l'évacuation dès le lendemain.
21 A ce moment-là, l'évacuation a été difficile et la situation
22 très complexe. Nous n'avions plus d'eau, plus de nourriture. La gangrène a
23 commencé à sévir. Les civils ont cherché à nous contacter pour nous
24 demander comment ils pouvaient être évacués et quitter la ville. Ces
25 journées ont été les plus difficiles.
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1 M. Niemann (interprétation). - Ces civils, qui venaient dans la
2 ville, étaient-ils armés ?
3 Mme Bosanac (interprétation). - Vous voulez parler des civils
4 qui venaient à l'hôpital ?
5 M. Niemann (interprétation). - Oui, c’est ce que je veux dire.
6 Mme Bosanac (interprétation). - Non, ils n’étaient pas armés.
7 M. Niemann (interprétation). - Des soldats étaient-ils armés au
8 sein de l'hôpital durant cette période, pour autant que vous le sachiez ?
9 Mme Bosanac (interprétation). - Durant cette période, le
10 commandement de la défense a constitué un groupe qui assurait la
11 protection de l'hôpital. Il se trouvait à l'extérieur de l'hôpital. Ils
12 étaient six par groupe. Mais au sein de l'hôpital, personne n'était armé.
13 Tous les blessés que l'on faisait venir à l'hôpital, près de l'entrée que
14 j'ai montré tout à l'heure, étaient complètement déshabillés. On enlevait
15 aussi leur équipement. Un inspecteur de la police, Branko Lukenda* était
16 chargé par la police seulement de cela, de dresser la liste des blessés,
17 de prendre leurs armes et de les apporter à la police.
18 M. Niemann (interprétation). - Vous-même, avez-vous établi une
19 politique pour empêcher que les armes entrent à l'hôpital ?
20 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, cela était complètement
21 interdit. Les personnes qui rendaient visite aux malades devaient laisser
22 leurs armes. Un officier gardait ces armes et après la visite ces
23 personnes pouvaient reprendre leurs armes et sortir.
24 M. Niemann (interprétation). - Docteur Bosanac, vous avez dit
25 que le 18 novembre était, selon l'accord, la date où l'évacuation devait
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1 avoir lieu. Puis vous avez dit que le jour même rien ne s'était passé.
2 Pouvez- vous nous dire ce qui s'est passé par la suite à propos de
3 l'évacuation proposée ?
4 Mme Bosanac (interprétation). - Le lendemain matin, personne
5 n'est arrivé encore une fois. J'ai téléphoné au ministre et il m'a dit que
6 les équipes de la Croix-Rouge internationale et des observateurs européens
7 étaient sur place, qu'ils attendaient eux-mêmes le début de l'évacuation.
8 Le ministre est allé en Slavonie pour attendre ce convoi. J'ai contacté
9 plusieurs personnes, y compris le ministre Granic*. J'ai appelé moi-même
10 le général Raseta à Zagreb. Je l'ai appelé plusieurs fois ce jour-là pour
11 lui demander ce qui se passait. Il m'a répondu que là
12 bas, sur place, je devais contacter M. Mrksic qui saurait me dire les
13 détails de l'organisation de l'évacuation. Je n'ai pas pu comprendre cela,
14 parce que je ne savais pas où ils se trouvaient, mais Raseta m'a dit que
15 je devais rester calme parce qu'eux allaient me trouver.
16 La dernière communication que j'ai eue avec Raseta a eu lieu
17 mardi matin. Il m'a dit que l'armée était arrivée jusqu'au pont et que la
18 Croix-Rouge internationale s'y trouvait certainement également. Je me suis
19 donc dirigé vers ce pont. J'étais accompagné de Marin Vidic qui était
20 chargé de l'évacuation des civils et d'une employée de l'hôpital qui
21 parlait anglais et qui devait assurer la traduction.
22 Nous sommes arrivés jusqu'au pont. Dans la rue Priljevo, entre
23 Vukovar et Borovo, nous avons vu beaucoup de camions avec beaucoup de
24 soldats différents qui faisaient entrer les civils dans ces camions. Je
25 suis arrivée jusqu'à un transporteur où se trouvaient des soldats qui ne
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1 ressemblaient pas du tout à des soldats, étant donné que leurs uniformes
2 étaient différents. Ils portaient des barbes, ils avaient l'air négligé.
3 Pour la première fois, j'ai eu peur. C'était la première fois
4 que je voyais de tels soldats. J'ai demandé à voir leur commandant. Ils
5 faisaient des commentaires du genre : "Etes-vous un Oustachi ?".
6 L'un s'est présenté comme étant leur commandant. Je lui ai posé
7 la question concernant la Croix-Rouge internationale. Il m'a répondu qu'il
8 ne savait pas, que sa zone de responsabilité s'arrêtait au pont et qu'il
9 ne voulait pas le traverser. Nous sommes revenus à l'hôpital et nous avons
10 attendu.
11 Vers midi et demi, un véhicule militaire est arrivé avec des
12 soldats. Ce véhicule est arrivé à l'hôpital. Je leur ai demandé s'ils
13 savaient où se trouvaient la délégation de la Croix-Rouge internationale.
14 L'un d'eux m'a dit qu'il avait vu une voiture d'une organisation
15 internationale à Negoslavci. Je lui ai demandé de m'amener à Negoslavci.
16 Je lui ai demandé où était Mrksic. Je lui ai demandé de m'amener à
17 Negoslavci pour organiser l'évacuation, ce qu'il a
18 accepté.
19 Je lui ai demandé également de faire en sorte que l'armée qui
20 l'avait accompagné assure la protection de l'hôpital. Tout le monde à
21 l'hôpital avait peur. De nombreux civils s'y étaient rendus. A ce moment,
22 il n'y avait toujours pas d'observateurs internationaux. Il leur a donc
23 dit de protéger l'hôpital.
24 J'ai pris le chemin de Negoslavci avec lui. On m'a amenée dans
25 une maison de civils où il était écrit "quartier général". Par la suite,
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1 j'ai appris que cette maison appartenait à Grujamicic* un avocat. A
2 l'intérieur, j'ai vu un officier qui s'est présenté comme étant
3 Mile Mrksic. J'ai dit que j'étais Vesna Bosanac de l'hôpital de Vukovar et
4 que je venais pour organiser l'évacuation.
5 M. Niemann (interprétation). - Excusez-moi de vous interrompre.
6 Vous avez mentionné le nom de Mrksic à plusieurs reprises. Quelle était sa
7 position, à votre connaissance, à l'époque ?
8 Mme Bosanac (interprétation). - A l'époque, j'avais entendu dire
9 par le général Raseta qu'il était chargé des opérations à Vukovar et qu'il
10 me contacterait pour me renseigner sur l'évacuation. Je lui ai parlé au
11 téléphone, une fois, de l'hôpital. Il s'était également présenté comme
12 étant de Vukovar. Je ne le connaissais pas avant ce coup de téléphone. En
13 fait, j'avais entendu parler de lui, mais je ne le connaissais pas
14 personnellement.
15 M. Niemann (interprétation). - Saviez-vous quel était son
16 grade ?
17 Mme Bosanac (interprétation). - Je ne connais pas bien les
18 grades. Je ne peux donc pas vous dire. Je ne sais pas quel était son
19 grade, mais par la suite, j'ai entendu dire qu'il était colonel.
20 M. Niemann (interprétation). - Avez-vous compris qu'il était lié
21 d'une quelconque manière ou associé à la JNA ?
22 Mme Bosanac (interprétation). - Oui. Il était commandant pour
23 cette zone. Raseta
24 m'a dit qu'il était la personne la plus hautement placée et chargée des
25 opérations à Vukovar et que c'était la personne qui nous aiderait du côté
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1 de la JNA et qui ferait respecter l'accord portant sur l'évacuation de
2 l'hôpital.
3 M. Niemann (interprétation). - Vous êtes donc allée à cet
4 endroit, cette maison d'un ancien avocat de la ville. Que s'est-il passé à
5 ce moment là ? Avez-vous rencontré le colonel Mrksic ?
6 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
7 M. Niemann (interprétation). - Que vous a-t-il dit ?
8 Mme Bosanac (interprétation). - Il m'a dit qu'il était en train
9 d'organiser l'évacuation, mais qu'il n'avait pas encore décidé quel
10 itinéraire ils allaient suivre, s'ils allaient passer par Sid ou Adasevci.
11 J'ai protesté parce qu'il était clairement dit dans l'accord que
12 l'évacuation suivrait jusqu'à Nustar en passant par plusieurs villages, là
13 où des ambulances et des bus attendaient de prendre en charge tous les
14 blessés, tous les personnels, toutes les personnes qui devaient être
15 évacuées.
16 J'ai dit que nous devions respecter les dispositions de
17 l'accord, mais il a répondu que ce serait très difficile, que c'était
18 facile pour Raseta de citer l'accord à Zagreb alors qu'il n'était pas sur
19 le terrain. J'ai cependant insisté sur le respect de cet accord parce que
20 nous avions eu des problèmes auparavant avec un convoi qui avait suivi
21 l'itinéraire. C'était le moyen le plus rapide d'évacuer les blessés et le
22 personnel de l'hôpital de Vukovar.
23 Finalement, nous nous sommes mis d'accord. Il a dit qu'il allait
24 suivre l'itinéraire tel qu'indiqué dans l'accord, mais il a cependant
25 ajouté que certaines positions, telles que Sid devaient être réglées. Il y
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1 avait des structures militaires près du village de Cerici*.
2 Et puis, le lendemain matin, le 20, il a dit que le convoi
3 suivrait l'itinéraire vers Nustar.
4 C'est donc la conversation que nous avons eue le 19 à
5 Negoslavci.
6 M. Niemann (interprétation). - Je suppose que vous n'aviez pas
7 le texte de l'accord à ce moment-là. Vous ne vous fondiez que sur ce que
8 l'on vous avait dit qui figurait dans l'accord, n'est-ce pas ?
9 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
10 M. Niemann (interprétation). - Que s'est-il passé alors ?
11 Mme Bosanac (interprétation). - Nous nous sommes mis d'accord
12 sur le fait que le lendemain à 8 heures l'évacuation débuterait. Je lui ai
13 demandé si je pourrais rencontrer des représentants de la Croix-Rouge ou
14 de la mission d'observation de la communauté européenne, qui m'avaient
15 appelée lundi de Negoslavci. Il m'a dit qu'il s'occupait à Velepromet de
16 dresser la liste de tous les civils. C'est la première fois que
17 j'entendais parler de cet endroit. J'ai protesté, j'ai dit qu'il devrait
18 venir le plus rapidement possible parce qu'il n'y avait plus ni eau ni
19 vivres dans l'hôpital.
20 J'y suis retournée. J'étais accompagnée du même officier et de
21 cette personne qui se chargeait de l'interprétation pour moi. Je suis
22 retournée à l'hôpital vers 3 heures le même jour. Là, j'ai vu que nous
23 avions reçu un peu d'eau et des boîtes d'aliments. J'ai vu les membres de
24 la police militaire qui gardaient l'entrée. J'ai vu également certains de
25 nos employés qui avaient rejoint les forces de réserve, qui s'étaient
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1 portés volontaires, qui traversaient l'hôpital, qui saluaient certaines
2 personnes. Le personnel et les blessés avaient très peur, parce que ces
3 réservistes de l'armée yougoslave commençaient à aller et venir dans
4 l'hôpital librement. Il n'y avait aucun représentant des observateurs
5 européens ou de la Croix-Rouge.
6 M. Niemann (interprétation). - Vous avez parlé de Negoslavci.
7 Elle se trouvait sous le contrôle de la JNA à ce moment-là, n'est-ce pas ?
8 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
9 M. Niemann (interprétation). - Vous avez parlé de Velepromet
10 également qui se trouvait sous le contrôle de la JNA, n'est-ce pas ?
11 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
12 M. Niemann (interprétation). - La zone entourant l'hôpital
13 venait de tomber sous le contrôle de la JNA, après s'être rendue ?
14 Mme Bosanac (interprétation). - Les environs de l'hôpital se
15 trouvaient sous le contrôle de la police croate et de la défense de la
16 ville. Mais au cours de cette semaine-là, nous avions remarqué que le
17 nombre de soldats diminuait, que les soldats étaient envoyés au front. En
18 fait, le centre de la ville n'avait plus de défense militaire. Et le
19 centre de la ville était en fait pratiquement contrôlé par la JNA.
20 Il n'y avait pas eu de conflit qui avait mené à cette situation.
21 Lorsque la JNA a pris possession du centre-ville, des environs
22 de l'hôpital où je me trouvais, c'était le mardi, le 19 au matin, alors
23 qu'au sud de la ville, à Misniza*, la JNA y est entrée le lundi, le 18.
24 C'est pourquoi des représentants de la Croix-Rouge et de la Mission
25 d'observation se trouvaient sur les lieux. Ils étaient coincés là-bas. Et
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1 c'est pour cela qu'ils ne sont pas parvenus au centre où se trouvait
2 l'hôpital.
3 M. Niemann (interprétation). - Et vous pensiez à ce moment-là,
4 en ce qui concerne les représentants de la Croix-Rouge et de la Mission
5 européenne, qu'ils ne pouvaient pas passer à cause de la JNA ? Ce n'est
6 pas qu'ils avaient à traiter d'autres questions ? C'est comme cela que
7 vous avez compris les choses et la raison pour laquelle ils ne pouvaient
8 pas arriver jusqu'à vous ?
9 Mme Bosanac (interprétation). - C'est ce qu'on m'a dit.
10 Personnellement, je pensais qu'ils ne venaient pas parce qu'ils n'avaient
11 pas pour mission d'aller aussi loin. S'ils avaient voulu venir au centre-
12 ville, ils auraient pu le faire, venir jusqu'à l'hôpital. J'étais sûre à
13 ce moment-là -et je le suis toujours- qu'au lieu de trois délégations
14 d'observateurs européens et deux de la Croix-Rouge, s'il y avait eu deux
15 ou trois cents équipes qui étaient venues dans le centre-ville et qu'elles
16 avaient décidé de rester sur place, elles auraient empêché l'Armée
17 yougoslave et les
18 unités paramilitaires de commettre les crimes qu'elles ont commis après la
19 fin des opérations militaires à Vukovar. Malheureusement, il y avait très
20 peu de ces équipes. Ils étaient manipulés par Sljivancanin, le Major
21 Sljivancanin, et d'autres personnes de l'armée. Nous avons vu
22 M. Cyrus Vance qui était à l'hôpital le 2. Nous lui avons montré
23 l'hôpital, avec tous les blessés et le personnel.
24 M. Niemann (interprétation). - Vous avez dit être revenue à
25 l'hôpital après avoir rencontré le colonel Mrksic. Vous avez vu qu'il y
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1 avait des soldats de réserve de la JNA qui se trouvaient autour de
2 l'hôpital. Les gens avaient très peur. Que s'est il passé ensuite ?
3 Mme Bosanac (interprétation). - Après cela, pour la première
4 fois, vers quatre à cinq heures de l'après-midi, j'ai vu le Major
5 Sljivancanin. Il est entré dans la cour principale de l'hôpital avec des
6 soldats. Il y avait Rajko Cancanin* également, qui était le représentant
7 de la Croix-Rouge locale. Elle s'occupait des civils à Vukovar. Elle a dit
8 que tout le monde était paniqué, en haut.
9 Ils ont commencé à emmener des civils qui avaient été emmenés à
10 l'hôpital les deux jours précédents. Ils ont commencé à séparer les hommes
11 des femmes. Donc je me suis rendue sur place parce qu'on les faisait
12 sortir de l'hôpital en utilisant l'autre porte, la porte opposée où
13 l'endroit où je me trouvais. Ils les chargeaient dans des camions. Ils les
14 faisaient sortir par la rue Golonvinceva*.
15 J'ai donc vu Sljivancanin à ce moment-là, donc je suis allée
16 vers lui. Je savais que c'était lui qui commandait. Je lui ai demandé où
17 il emmenait ces personnes. Parce que, d'abord... L'accord était que ces
18 blessés ou ces civils allaient être évacués le mercredi et que, à ce
19 moment-là, des bus viendraient chercher les civils. Cependant, après, il a
20 dit qu'il devait faire des listes de ces personnes et qu'ensuite on les
21 renverrait à l'hôpital. C'était mardi après-midi. C'est à ce moment-là
22 qu'ils ont commencé à faire sortir les civils de l'hôpital.
23 M. Niemann (interprétation). - Vous parlez de civils et
24 d'hommes. Vous parlez des
25 gens qui se trouvaient à l'hôpital, n'est-ce pas ?
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1 Mme Bosanac.(interprétation). - Je vous ai dit qu'il s'agissait
2 de personnes qui avaient commencé à venir à l'hôpital dès le lundi, parce
3 que l'évacuation de l'hôpital devait avoir lieu le lundi pour les civils,
4 les tirs s'étaient atténués. La ville n'était plus pilonnée. Donc en fait,
5 ils venaient, ils quittaient leurs abris, leurs caves, etc. Ils venaient
6 vers l'hôpital pour savoir quand ils allaient être évacués.
7 Pendant ces deux jours-là, lundi et mardi, dans le complexe de
8 l'hôpital, je ne sais pas combien de personnes il y avait, mais il y avait
9 presque 1 000 personnes. Ils étaient là avec leurs valises, avec des sacs
10 qu'ils utilisaient pour les courses, avec leurs femmes et leurs enfants.
11 Ils attendaient simplement leur évacuation.
12 M. Niemann (interprétation). - En ce qui concerne le Major
13 Sljivancanin, avez-vous vérifié ou essayé de déterminer à quelle
14 organisation il était lié ?
15 Mme Bosanac.(interprétation). - C'était également un officier de
16 l'Armée yougoslave. Je ne sais pas de quoi vous parlez vraiment. J'ai vu
17 qu'il avait un uniforme de camouflage, qu'il avait un béret comme ceux des
18 soldats.
19 M. Niemann (interprétation). - Que s'est-il passé par la suite ?
20 Mme Bosanac.(interprétation). - Ils ont emmené les civils.
21 L'hôpital se vidait peu à peu, même s'il y avait les civils qui se
22 trouvaient au premier étage et au rez-de-chaussée. A 7 heures, il faisait
23 déjà nuit. Un camion de la Croix-Rouge est venu. Le Major Sljivancanin
24 avait fait rentrer un homme grand, blond. Après, j'ai su que son nom était
25 Nikolas. Il est médecin. Il y avait également une femme qui faisait office
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1 d'interprète.
2 Ils sont donc venus à l'hôpital. Ils ont apporté de l'équipement
3 médical, des médicaments dans le camion. J'étais déjà déçue à ce moment-là
4 parce qu'ils n'étaient pas venus de la journée. J'ai dit à ce moment-là :
5 "Ce n'est plus des médicaments dont nous avons besoin mais d'une
6 évacuation". Nikolas a dit : "Je n'ai pas pu venir avant". Il a demandé à
7 ce moment
8 là si nous étions prêts à évacuer. Il a passé en revue l'hôpital. J'ai dit
9 que cela faisait deux jours que nous étions prêts. Nous avions dressé
10 toutes les listes nécessaires et toute personne blessée a reçu un petit
11 sac blanc, en plastique, où il y avait toute la description de sa maladie,
12 toutes ses affaires, tous ses documents.
13 A ce moment-là, j'étais extrêmement déçue de la Croix-Rouge, par
14 ce que ce M. Nikolas m'a demandé... En fait nous avions préparé tout cela.
15 Le Major Sljivancanin l'a donc fait rentrer et il a demandé s'il devait
16 être-là le lendemain, s'il devait venir. J'avais compris de la part du
17 ministère Hebrang que la Croix-Rouge neutraliserait en quelque sorte
18 l'hôpital et que, sous leur contrôle, l'évacuation pourrait avoir lieu.
19 Donc j'ai dit qu'il était non seulement nécessaire mais indispensable
20 qu'il soit là, en vertu de l'accord signé à Zagreb Il a dit qu'il
21 viendrait donc le lendemain matin, le mercredi.
22 M. Niemann (interprétation). - Et que s'est-il passé ensuite ?
23 Mme Bosanac.(interprétation). - Ensuite, ils sont partis. Ils
24 sont repartis. Je pense qu'ils sont allés passer la nuit à Belgrade.
25 Là encore, un officier est venu me chercher. Je ne connais pas
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1 son grade. Je ne m'y connais pas tellement. Il avait un uniforme vert
2 olive. Il était jeune. Il n'avait pas d'uniforme de camouflage. Il était
3 assez jeune. Il est venu à mon bureau et il m'a dit qu'il avait reçu des
4 ordres de m'emmener à Negoslavci.
5 Donc je me suis préparée. J'ai pensé que Mrksic me demandait de
6 venir à cause de l'évacuation, et qu'il était en train de l'organiser.
7 J'étais dans la voiture. Je suis allée à Negoslavci, je suis allée dans le
8 même bâtiment, dans la même salle, mais ce n'est plus Mrksic, c'était
9 Sljivancanin qui était assis. Il était petit, il portait un uniforme. Je
10 l'ai revu par la suite dans la prison de Mitrovica. Tout le monde
11 s'adressait à lui en disant capitaine. Mais je ne connais pas son nom.
12 J'étais surprise parce que je m'attendais à voir Mrksic. J'ai
13 demandé où il était. On
14 m'a répondu qu'il se trouvait ailleurs, qu'il avait une autre tâche à
15 remplir. Et on m'a demandé pourquoi je demandais, j'ai répondu : "Parce
16 que j'avais déjà parlé de cela avec lui". Alors c'est Sljivancanin qui a
17 commencé à me poser des questions : où était l'armée croate, où étaient
18 les policiers ?
19 M. Niemann (interprétation). - Pourriez-vous ralentir un peu
20 parce que les interprètes ont un peu de mal à vous suivre lorsque vous
21 parlez trop rapidement.
22 M. le Président (interprétation). - Monsieur Niemann, pensez-
23 vous qu'il est opportun de faire une pause maintenant ?
24 M. Niemann (interprétation). - Oui, bien sûr.
25 M. le Président (interprétation). - Eh bien? nous allons faire
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1 une pause de vingt minutes.
2 L’audience, suspendue à 11 heures 10, est reprise à
3 11 heures 35.
4 M. le Président (interprétation) - Maître Niemann, poursuivez.
5 M. Niemann (interprétation). - Docteur Bosanac, avant la pause
6 vous nous disiez que vous vous étiez rendue, ou que l’on vous avait amenée
7 à une réunion où vous aviez rencontré des officiers de la JNA et vous
8 aviez pensé à l'époque que vous alliez rencontrer le colonel Mrksic, mais
9 en fait, lorsque vous êtes arrivée sur les lieux, vous avez été surprise
10 car vous vous êtes rendue compte que M. Mrksic n’était pas là, mais que
11 c'était le Major Sljivancanin qui se trouvait à sa place.
12 Si nous reprenons à cet endroit de votre récit, que s'est-il
13 passé lorsque vous avez rencontré le Major Sljivancanin lorsqu'on vous a
14 amenée à cette réunion ?
15 Mme Bosanac (interprétation). - Le Major Sljivancanin m'a
16 demandé si je savais qui était Jastreb et où il se trouvait. J'ai dit que
17 je ne savais pas.
18 On m'a également demandé où se trouvaient les soldats croates.
19 J'ai dit que je ne savais pas, que je travaillais à l'hôpital et que je
20 préparais l'évacuation des blessés et du personnel de l'hôpital. J'ai vu
21 Jastreb et les soldats croates quelques jours auparavant lorsque
22 j'envoyais ou préparais un fax. C'était une personne très arrogante. Il
23 était en colère. Il a demandé qui avait tué ses petits garçons et que s'il
24 n'y avait pas d'armée sur place, ses petits garçons seraient venus à
25 Vukovar.
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1 J'ai dit que je n'étais pas soldat et que je n'avais amené
2 personne pour tuer des gens. J'ai dit que je m'occupais de l'hôpital, que
3 j'étais simplement chargée de gérer les affaires de l'hôpital.
4 Un capitaine m'a menacée. Il a dit qu'il avait enregistré toutes
5 les conversations et qu'il pourrait faire tout ce qui était nécessaire
6 pour me faire accuser. J'ai dit que cela ne m'inquiétait pas, que j'avais
7 parlé à de nombreuses personnes à Zagreb, notamment au ministre de la
8 Santé publique.
9 Ils ont fait monter la pression afin que je dise où se
10 trouvaient les soldats croates. J'ai dit que je ne savais pas qui était
11 parti et comment. J'ai simplement dit que les soldats croates blessés qui
12 étaient à l'hôpital, je les connaissais, que ce n'était un secret pour
13 personne. Nous avions des registres où leurs noms figuraient, que nous
14 soignions tous les blessés en suivant nos principes d’éthique médicale et
15 je ne me sentais absolument pas coupable de ce que j'avais fait.
16 On m'a posé des questions pendant environ une heure. Après, ils
17 m'ont dit que je devais passer la nuit sur place à Negoslavci. J’ai
18 demandé que l'on me ramène à l'hôpital, mais ils ont refusé. Un soldat m'a
19 escorté de cette maison jusqu'à l'école de Negoslavci. Là, j'ai vu qu'il y
20 avait une structure d'hôpital parce qu’il y avait des lits qui se
21 trouvaient dans toutes les salles de classe. Ils m'ont emmené dans une
22 salle où il y avait quatre lits. C'étaient les dortoirs.
23 Nous sommes entrés dans une grande salle, puis une petite. Je
24 m'y suis assise. J'y suis restée toute la nuit et à 6 heures du matin, le
25 même soldat est venu me chercher. Il m'a mise
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1 dans une jeep. Marin Vidic se trouvait déjà dans cette jeep. Il m'a
2 emmenée jusqu'à l'hôpital, à mon bureau, ou ce qu'on appelait la cellule
3 de crise de l'hôpital. Un soldat est venu directement. Il était armé. Il
4 avait un fusil. Il s'est assis à côté de moi. Il n'en a pas bougé. Il ne
5 me laissait pas répondre aux coups de téléphone, aux coups de fil. Je
6 n'avais pas le droit de passer de coups de téléphone non plus. Cela s'est
7 poursuivi jusqu'à 7 heures. Puis Sljivancanin m'a ordonné d'organiser une
8 réunion avec tous les médecins et le personnel médical.
9 C'est là que j'ai envoyé l'infirmière en chef pour organiser
10 cette réunion. Tout le monde est venu à la salle des plâtres, comme on
11 l'appelait avant la guerre. Il y avait donc Sljivancanin, cinq ou six
12 personnes en uniforme vert olive. Il a dit que c’étaient des médecins de
13 l'équipe militaire médicale ou de l'académie militaire médicale et qu'à ce
14 moment-là, l'hôpital était sous le contrôle de l'administration militaire
15 et que je n'avais pas mon mot à dire sur cette prise de contrôle.
16 Ils m'ont dit que je pouvais quitter les lieux. On m'a ramenée à
17 mon bureau, après d'autres personnes du personnel médical m’ont dit qu'ils
18 avaient suggéré que toutes les personnes qui voulaient rester et
19 travailler dans l'hôpital pourraient le faire et que les personnes qui ne
20 le souhaitaient pas pourraient partir.
21 M. Niemann (interprétation). - Cela s'est produit le 20
22 novembre 1991 ?
23 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, c'était le mercredi, le 20
24 novembre.
25 M. Niemann (interprétation). - Après que le Major Sljivancanin
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1 ait parlé à tout le personnel, que s'est il produit ? Vous avez été
2 ramenée à votre bureau et que s'est-il passé ?
3 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, j'ai passé quelque temps
4 dans mon bureau, puis un jeune homme, un officier, est venu, et Marin
5 Vidic était assis à côté de moi, il a dit qu'il avait des ordres, à savoir
6 de nous emmener et de nous faire participer à des négociations avec la
7 cellule de crise internationale avec la Croix-Rouge. Marin Vidic et moi-
8 même avons été emmenés avec une escorte à l'hôpital par un soldat. Il y
9 avait beaucoup de gens sur place,
10 beaucoup de personnel médical. Ils attendaient l'évacuation. L’une des
11 personnes qui travaillait avec moi m'a demandé : "Où allez-vous
12 Docteur ?". J'ai dit : "Je vais négocier l'évacuation, puis je reviens".
13 Ensuite, on nous a emmenés à la caserne sur la place du marché.
14 Il y avait un policier militaire qui devait rester avec nous. Personne ne
15 pouvait ni entrer ni sortir. Puis, ils ont dit qu'une demi-heure plus
16 tard, ils viendraient nous chercher. Nous sommes restés dans cette pièce,
17 mais personne n'est venu nous chercher pendant tout l'après-midi. Vers six
18 heures, ce jeune officier est venu. Il a dit que les ordres avaient
19 changé, que l'évacuation était en cours et que nous devions rester encore
20 plus longtemps.
21 On nous a emmenés dans une grande salle. C'était en fait les
22 dortoirs. La pièce était relativement vide. Je me suis assise sur un lit.
23 Marin Vidic sur un autre. Il y avait également un policier militaire qui
24 nous gardait. Vers dix heures du soir, ils sont venus me chercher, moi
25 seulement. Marin est resté. On m'a emmené, d'abord dans la cave, dans une
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1 pièce de la cave, où il y avait certains soldats de la JNA. Il y avait une
2 caméra également, une femme qui portait un uniforme.
3 Ils m'ont posé des questions, mon identité, quel était mon
4 métier, ma fonction, si je voulais faire une déclaration pour l'armée.
5 J'ai dit que oui. Donc, j'ai fait une déclaration brève sur les événements
6 de la guerre. Puis ils m'ont emmenée à la sortie. Un véhicule noir de
7 l'armée se trouvait là. Ils ont ouvert la porte arrière. Je suis rentrée
8 dans le véhicule. Il y avait le Dr Njavro en uniforme blanc et un
9 technicien que l'on avait envoyé de Zagreb afin de nous aider. Il
10 s'appelait Antaric*. Ils étaient tous dans ce véhicule. J'y suis rentrée.
11 Ils ont fermé la porte. C'était un véhicule de police. Puis, nous sommes
12 partis. Le Dr Njavro a dit qu'il avait passé toute la journée à l'hôpital
13 et que le soir ils l'avaient mis dans ce véhicule.
14 Au cours de ce trajet, j'ai vu par la petite fenêtre de l'avant
15 que nous suivions la route principale en direction de Belgrade. Nous
16 sommes arrivés à l'entrée d'une caserne. J'ai
17 frappé parce que je voulais me rendre aux toilettes et je voulais leur
18 demander où ils nous emmenaient. Mais ils n'ont pas ouvert la porte. Puis
19 j'ai vu qu'ils nous emmenaient à Mitrovica. Ils se sont d'abord arrêtés au
20 commissariat de police, puis à la prison à Sljenska Mitrovica. C'était un
21 jeudi, le 21, le matin.
22 M. Niemann (interprétation). - Au cours de cette période, savez
23 vous ce qui est arrivé aux patients de l’hôpital ? Où ont-ils été
24 emmenés ? Avez-vous observé un événement quelconque ou, parce que vous
25 étiez en quelque sorte arrêtée, vous n'avez rien vu ?
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1 Mme Bosanac (interprétation). - Non, je n'ai rien vu. J'ai
2 simplement entendu dire des choses par le Dr Njavro puisqu'il avait été à
3 l'hôpital, que tout le monde était emmené, le personnel médical, les
4 blessés. Seulement 50 personnes, les plus gravement blessées, étaient
5 restées sur place avec une infirmière et un technicien.
6 M. Niemann (interprétation). - Où se trouve Mitrovica ?
7 Mme Bosanac (interprétation). - Mitrovica est à peu près à
8 40 kilomètres de Vukovar, sur le territoire de la Yougoslavie, sur la
9 route qui mène à Belgrade.
10 M. Niemann (interprétation). - A quelle distance de Belgrade se
11 trouve cette ville ?
12 Mme Bosanac (interprétation). - Vukovar est à environ
13 150 kilomètres de Belgrade et Mitrovica à environ 110.
14 M. Niemann (interprétation). - Pendant combien de temps vous a-
15 t-on détenue à Mitrovica ?
16 Mme Bosanac (interprétation). - Ils m'ont gardée à Mitrovica
17 jusqu'au 11 décembre et ils m'ont posé des questions. J'ai rédigé une
18 déclaration, le colonel Branko -je ne sais pas quel était son dernier nom-
19 m'a interrogée. J'ai écrit une déclaration de 112 pages sur la situation
20 globale à Vukovar avant la guerre, au cours de la guerre, qui j'avais
21 rencontré, qui je connaissais. 112 pages de déclaration ! C'est ce que
22 j'ai rédigé à ce moment-là. Je n'ai même pas pu finir de l'écrire parce
23 qu'ils m'ont appelée afin de m'échanger le 11 décembre.
24 Ils ont dit qu'ils allaient m'échanger, mais ils ne m'ont pas
25 libérée sur le champ. Je suis restée dans une prison militaire à Belgrade
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1 pendant deux jours supplémentaires parce qu'ils voulaient décider si
2 j'allais être mise en accusation ou non. On m'a interrogée là-bas. Ils
3 m'ont même donné un avocat pour me défendre, mais ils ont décidé de ne pas
4 me mettre en accusation et ils m'ont autorisée à être échangée. J'ai été
5 échangée le 13 décembre 1991.
6 M. Niemann (interprétation). - Quels étaient les chefs
7 d'accusation qui auraient pu être retenus contre vous ? L'avez-vous jamais
8 su, jamais découvert ?
9 Mme Bosanac (interprétation). - On n'a jamais précisé quelle
10 était la nature des chefs d'accusation qui auraient pu être élevés contre
11 moi. Cela n'a jamais été le cas d'ailleurs. Mais au cours de
12 l'interrogatoire, ils m'avaient dit que j'allais être mise en accusation
13 du fait de ces fax et de ces lettres de protestation que j'avais écrits.
14 Je n'arrêtais pas de dire que c'était la JNA qui était l'agresseur, qui
15 tuait les gens, qui détruisait la ville, etc.
16 M. Niemann (interprétation). - Docteur Bosanac, avez-vous perdu
17 certains de vos proches, de vos parents, au cours du conflit à Vukovar?
18 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, j'ai perdu mon beau-père,
19 le père de mon mari. Il a lui aussi été emprisonné le 20 novembre. Il a
20 été emmené hors de l'hôpital avec les blessés, les membres du personnel et
21 il a été porté disparu jusqu'au mois de mai de cette année, date à
22 laquelle son corps a pu être identifié dans le charnier d'Ovcara. Et puis
23 le neveu de mon mari, Tomica, qui se trouvait également à l'hôpital et qui
24 avait été porté disparu. Puis également une infirmière qui a été gravement
25 blessée : ses reins, sa colonne vertébrale ont été gravement endommagés.
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1 Ce neveu était resté avec cette infirmière et il avait demandé à être
2 évacué en même temps qu'elle. Il demandait s'il pouvait rester avec elle
3 et j'avais demandé au Major Sljivancanin si les proches des blessés les
4 plus graves pouvaient rester avec eux. Il m'a dit que je le pouvais, mais
5 ce matin-là j'ai entendu dire par ma belle-mère qu'un soldat était entré
6 dans l'hôpital et qu'il avait dit que toutes les personnes capables de
7 marcher devaient sortir.
8 Tomica est sorti et toutes les personnes qui sont ensuite
9 sorties ont dû monter dans ces autobus qui sont finalement partis pour
10 Ovcara. Donc Tomica, qui était le neveu de mon mari, a également été
11 identifié parmi les corps retrouvés au charnier d'Ovcara.
12 M. Niemann (interprétation). - Docteur Bosanac, je voudrais
13 maintenant que vous jetiez un rapide coup d'oeil sur un enregistrement
14 vidéo assez bref qui va être diffusé sur l'écran qui se trouve sous vos
15 yeux. Cela ne dure que quelques secondes, donc pas longtemps, mais je vais
16 vous demander de nous indiquer un certain nombre de choses sur l'écran,
17 des choses que vous êtes capable d'identifier, de reconnaître.
18 Docteur, l'écran est juste sous vos yeux. Je vous demande
19 simplement de nous expliquer de quoi il s'agit, en indiquant ce qui se
20 passe au fur et à mesure que les images défilent. Si nous avons besoin de
21 revenir en arrière, il n'y a pas de problème parce que cela dure vraiment
22 très peu de temps.
23 Je vais maintenant demander à la cabine technique de diffuser
24 cette vidéo qui porte sur les événements de l'hôpital de Vukovar.
25 (Projection de la vidéo.)
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1 Mme Bosanac (interprétation). - Là, vous voyez le plafond, là où
2 la bombe a traversé le plafond.
3 M. Niemann (interprétation). - Ce trou que nous venons de voir,
4 c'est bien l'endroit par lequel la bombe est passée et est tombée près du
5 lit des malades, n'est-ce pas?
6 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
7 M. Niemann (interprétation). - Nous pouvons poursuivre la
8 diffusion.
9 Mme Bosanac (interprétation). - Voici des malades, des patients
10 qui étaient couchés dans les lits qui étaient installés dans tous les
11 couloirs de l'hôpital.
12 M. Niemann (interprétation). - Docteur, cette vidéo a bien été
13 prise au moment même où l'hôpital était l'objet d'attaques, n'est-ce pas ?
14 Mme Bosanac (interprétation). - En effet. Voici le Dr Njavro en
15 pleine opération. Il opère les blessés. Le 20 novembre, 180 blessés graves
16 ont été préparés pour l'évacuation de l'hôpital et 200 personnes, des
17 patients légèrement blessés, ont également été préparés pour l'évacuation,
18 parmi lesquels des membres des familles, ce qui représentait un total de
19 450 personnes.
20 Là, on voit les infirmières qui emmènent un bébé nouveau-né hors
21 de l'hôpital, mais là on se trouve dans l'abri. C'est l'une des chambres
22 qui faisait office d'unité de soins intensifs.
23 M. Niemann (interprétation). - Je crois que nous pouvons nous
24 arrêter là. Je vous remercie.
25 Docteur Bosanac, je vais maintenant vous demander, si vous le
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1 voulez bien, de regarder le document que je vais vous faire passer.
2 (Le document est remis au témoin.)
3 Vous rappelez-vous avoir donné un entretien à un enquêteur du
4 Tribunal pénal international les 19 et 20 juin 1995 et les 21 à 23 juillet
5 1995 ?
6 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, je me rappelle très bien de
7 cela.
8 M. Niemann (interprétation). - Etait-ce un entretien au cours
9 duquel un interprète aidait les intervenants à se faire comprendre ?
10 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
11 M. Niemann (interprétation). - Docteur, au cours de cet
12 entretien, vous a-t-on posé des questions ? Avez-vous répondu à ces
13 questions et la déclaration que vous avez faite a-t-elle été consignée en
14 anglais ?
15 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
16 M. Niemann (interprétation). - Docteur, suite à la
17 retranscription de cette déclaration, la teneur de ce document vous a-t-
18 elle été relue par une interprète ? Vous a-t-elle dit quelle était la
19 teneur de ce document précisément ?
20 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
21 M. Niemann (interprétation). - Après avoir écouté ce qu'elle
22 vous avait lu, lui avez-vous dit que tout ce qu'elle avait dit était
23 exact, pour autant que vous le sachiez ?
24 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
25 M. Niemann (interprétation). - Suite à cela, a-t-on demandé que
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1 vous apposiez votre signature au bas de chaque page de cette déclaration ?
2 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
3 M. Niemann (interprétation). - En regardant chacune des pages
4 qui constituent ce document, y voyez-vous votre signature ?
5 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
6 M. Niemann (interprétation). - Je demande que ce document soit
7 versé au dossier, mais qu'il soit sous scellés car il contient des
8 informations qui pourraient avoir des incidences sur d'autres témoins dans
9 cette affaire.
10 M. le Président (interprétation). - La défense a-t-elle une
11 objection à élever ?
12 M. Fila (interprétation). - Aucune objection. Merci, Monsieur le
13 Président.
14 M. le Greffier (interprétation). - Il s'agit de la pièce de
15 l'accusation n° 10.
16 M. Niemann (interprétation). - Je n'ai plus de question,
17 Monsieur le Président.
18 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie.
19 Maître Fila, vous avez la parole.
20 M. Fila (interprétation). - Monsieur le Président, je vous
21 remercie. Madame Bosanac, dans votre déclaration, vous citez le nom
22 d'Ivan Raguz et vous dites que cet homme a été tué dans la salle des
23 chaufferies, me semble-t-il. Savez-vous si le nom de son père était
24 Anton ?
25 Mme Bosanac (interprétation). - Je ne sais pas quel était le nom
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1 de son père, mais son nom à lui était Ivan Raguz.
2 M. Fila (interprétation). - Est-il né en 1955 à peu près ?
3 Mme Bosanac (interprétation). - C'est possible, mais je n'en
4 suis pas absolument certaine. Je ne sais pas en quelle année il est né.
5 M. Fila (interprétation). - Bien sûr, on ne peut pas s'attendre
6 à ce que vous soyez absolument certaine de sa date de naissance. J'attire
7 cependant l'attention de la Cour sur un point intéressant. Sur la liste
8 des personnes dont l'accusation déclare qu'elles ont été portées disparues
9 et qu'elles ont été tuées à Ovcara, ce nom apparaît : Ivan Raguz. Il
10 serait peut-être bon que l'accusation se penche sur la question et enquête
11 sur ce point parce que cet homme n'a pas pu se faire tuer deux fois.
12 Mme Bosanac (interprétation). - Mais vous savez Ivan Raguz est
13 un nom très répandu !
14 M. Fila (interprétation). - Ne réagissez pas ainsi, Madame, nous
15 savons très bien que beaucoup de gens portaient ce nom-là, mais aussi que
16 des tas de personnes ont été portées disparues des deux côtés. La chose
17 qui nous préoccupe et qu'elles ont été, de fait, portées disparues, c'est
18 ça qui est important. Quand êtes-vous devenue directeur de l'hôpital,
19 Madame ?
20 Mme Bosanac (interprétation). - Le 24 juillet 1991.
21 M. Fila (interprétation). - Pourquoi le directeur précédent a-t-
22 il quitté son poste ? Ou bien a-t-il été démis de ses fonctions ?
23 Mme Bosanac (interprétation). - Le Dr Popovic a donné sa
24 démission.
25 M. Fila (interprétation). - Etait-il Serbe ?
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1 Mme Bosanac (interprétation). - Non, il est du Monténégro.
2 M. Fila (interprétation). - Est-il finalement parti ou resté ?
3 Mme Bosanac (interprétation). - Il est resté.
4 M. Fila (interprétation). - Pourquoi a-t-il démissionné?
5 Mme Bosanac (interprétation). - C'est un peu difficile à dire,
6 c'est à lui qu'il faut
7 poser la question.
8 M. Fila (interprétation). - D'autres Serbes ont-ils été
9 remplacés, par exemple en ophtalmologie ?
10 Mme Bosanac (interprétation). - Non.
11 M. Fila (interprétation). - Qui était le directeur de l'unité
12 d'ophtalmologie ?
13 Mme Bosanac (interprétation). - Le Dr Mislenovic*.
14 M. Fila (interprétation). - De quel groupe ethnique était-il ?
15 Mme Bosanac (interprétation). - Il était serbe.
16 M. Fila (interprétation). - A-t-il été remplacé au cours
17 de 1991 ?
18 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, en effet, lorsque le
19 Dr Striber est devenu chef de l'unité. C'était toujours une spécialité. Je
20 peux continuer ma réponse ?
21 M. Fila (interprétation). - Je vous en prie. A-t-il été nommé en
22 mai ?
23 Mme Bosanac (interprétation). - Non, pas en mai.
24 M. Niemann (interprétation). - Monsieur le Président, Madame et
25 Messieurs les Juges, je vous en supplie, il serait bon qu'on attende
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1 l'interprétation des questions avant d'avoir la réponse. Sans cela, c'est
2 impossible à suivre, n'est-ce pas ?.
3 M. le Président (interprétation). - En effet. Maître Fila,
4 veuillez ralentir un petit peu votre rythme et la cadence des questions.
5 Attendez que l'interprétation soit terminée.
6 M. Fila (interprétation). - Ma question est la suivante... Je ne
7 dois peut-être pas dire de nom, donc je retire ma question.
8 Mme Bosanac (interprétation). - Il n'a pas été démis de ses
9 fonctions.
10 M. Fila (interprétation). - Mais, moi, je ne peux pas citer de
11 nom.
12 Mme Bosanac (interprétation). - Je comprends. Ce docteur a
13 quitté son poste de son propre gré. Il a été démis de ses fonctions parce
14 qu'il n'est pas venu au travail cinq jours de suite. Comme il n'y avait
15 personne d'autre, le Dr Striber, qui travaillait dans cette même unité, a
16 été nommé directeur effectif de l'unité.
17 M. Fila (interprétation). - J'ai promis de ne pas citer de noms,
18 donc je vous en supplie, Madame, ne donnez pas de noms non plus.
19 Ma prochaine question est celle-ci. Il y a une différence assez
20 légère mais je souhaite tout de même la soulever. Vous avez déclaré -c'est
21 ce qui apparaît dans votre déclaration- que le 15 août, le bâtiment
22 administratif a été frappé par un obus. Par la suite, vous avez dit que
23 cela a eu lieu le 7 août. Alors quand le bâtiment administratif de
24 l'hôpital a-t-il été frappé ?
25 Mme Bosanac (interprétation). - Je crois que c'est le 15 août,
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1 pour autant que je m'en souvienne. C'était un jour de vacances, un jour
2 férié, une fête religieuse. En fait, le 7 août c'est le jour où les
3 pilonnages de l'hôpital ont commencé, mais le bâtiment administratif a
4 bien été touché le 15 août.
5 M. Fila (interprétation). - Y avait-il une caserne de la JNA à
6 Vukovar?
7 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, en effet.
8 M. Fila (interprétation). - Même avant que cet événement ait eu
9 lieu?
10 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
11 M. Fila (interprétation). - Est-ce-que cette caserne était
12 encerclée ? L'approvisionnement de la caserne a-t-il été coupé ?
13 Mme Bosanac (interprétation). - Pas que j'en aie eu
14 connaissance.
15 M. Fila (interprétation). - Lorsque vous êtes allée à
16 Negoslavski, vous avez déclaré, à deux reprises, dans votre déclaration,
17 que vous aviez remarqué qu'il y avait des troupes importantes des deux
18 côtés de la route. Est-ce exact ?
19 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
20 M. Fila (interprétation). - Vous avez dit qu'on pouvait voir la
21 ligne de séparation depuis le toit de l'hôpital. Pouvez-vous nous dire qui
22 avait le contrôle de la route allant de Negoslavski à Vukovar? Je crois
23 qu'il s'agit d'un segment d'à peu près 10 kilomètres.
24 Mme Bosanac (interprétation). - Lorsque nous sommes partis,
25 le 19, vers midi, nous nous sommes dirigés vers Negoslavski. J'étais dans
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1 une voiture de la JNA. Dans la ville, j'ai vu des troupes de la JNA. J'ai
2 vu des soldats qui sortaient de la ville en direction de Negoslavski. Il y
3 avait des véhicules militaires, des véhicules de la JNA et des troupes de
4 la JNA. J'ai également aperçu nombre de civils et des forces
5 paramilitaires comme on les appelait.
6 Puis un des hommes, appartenant à ces troupes, est entré dans le
7 véhicule. Il était plein de haine. Il portait un couteau à la ceinture. A
8 Negoslavski, j'ai notamment vu beaucoup de véhicules transporteurs de
9 troupes qui appartenaient à la JNA.
10 M. Fila (interprétation). - Avez-vous vu qui avait l'autorité
11 civile, qui avait le contrôle des autorités civiles, à Vukovar tandis que
12 vous vous y trouviez ?
13 Mme Bosanac (interprétation). - Le plus haut représentant des
14 autorités civiles était M. Vidic. C'est lui qui était responsable de la
15 municipalité de Vukovar. Ce qui pouvait se passer derrière les lignes de
16 front de la JNA, je n'en sais rien.
17 M. Fila (interprétation). - Vous parlez de M. Marin Vidic qui
18 représentait les autorités croates, n'est-ce pas ?
19 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, en effet. Il représentait
20 les autorités croates à Vukovar.
21 M. Fila (interprétation). - Avez-vous rencontré un quelconque
22 représentant des autorités serbes ? Y avait-il des autorités serbes à
23 Vukovar à cette époque-là ?
24 Mme Bosanac (interprétation). - Non, je n'ai rencontré personne
25 et, que je sache, je ne crois pas qu'il y ait eu des représentants des
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1 autorités serbes.
2 M. Fila (interprétation). - Pendant la période qui nous
3 intéresse, qui avait l'autorité, qui était revêtu de l'autorité la plus
4 haute ? Etait-ce un contrôle militaire exercé par la JNA ou des civils qui
5 exerçaient l'autorité ?
6 Mme Bosanac (interprétation). - Pendant l'agression de Vukovar,
7 au cours de ces
8 trois mois de blocus, il y avait une cellule de crise, une cellule de
9 défense pour la municipalité. Le président était Marin Vidic. D'autres
10 personnes étaient chargées d'assurer l'approvisionnement, la défense
11 civile, le service des pompiers, etc. Moi, j'ai participé à un certain
12 nombre de réunions au nom de l'hôpital.
13 M. Fila (interprétation). - De l'autre côté, est-ce que l'armée
14 se trouvait là? Y avait-il des autorités civiles ?
15 Mme Bosanac (interprétation). - Je n'en sais rien.
16 M. Fila (interprétation). - Mais vous devez le savoir ! Est-ce
17 que vous avez vu des civils ?
18 Mme Bosanac (interprétation). - Non. Moi, j'avais des contacts
19 avec les autorités militaires le mardi et le mercredi. A ce moment-là, je
20 n'ai pas vu de civils. Je n'ai vu que des personnes en uniforme.
21 M. Fila (interprétation). - C'est précisément ma question.
22 Les 18, 19 et 20 ?
23 Mme Bosanac (interprétation). - Non, le 18, l'armée n'était pas
24 encore rentrée dans le secteur où je me trouvais.
25 M. Fila (interprétation). - Fort bien. Alors qu'en est-il pour
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1 le 19 et le 20 ? Et puis-je conclure de ce que vous nous avez dit qu'au
2 cours de ces trois jours et, d'une façon générale, pendant toute la
3 période durant laquelle vous envoyiez ces fax, vous n'avez pas entamé de
4 négociations avec un représentant quelconque des autorités serbes, vous
5 n'en avez entamées qu'avec la JNA, négociations portant sur le pilonnage,
6 sur l'évacuation ? Vous comprenez ma question ?
7 Mme Bosanac (interprétation). - Jamais, jamais à Vukovar, nous
8 n'avons établi une distinction entre les autorités serbes et croates. Au
9 sein de la cellule de crise, présidée par Marin Vidic, il y avait des
10 Serbes. Parmi les personnes qui ont été tuées, au moins un tiers étaient
11 des Serbes. La plupart sont restées sur place après l'entrée de la JNA.
12 Donc je n'admets
13 pas l'emploi de ces termes : autorités serbes.
14 M. Fila (interprétation). - C'est précisément l'objectif de ma
15 question. Des Serbes ont-ils quitté Vukovar avant le début de ces
16 événements ?
17 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, je le sais grâce à ce que
18 m'ont dit les membres du personnel de l'hôpital. Un certain nombre de
19 Serbes sont d'ailleurs partis de l'hôpital. Ils ne sont plus revenus
20 travailler à l'hôpital. Ils ont donc été renvoyés. Puis il y a des Croates
21 qui ne sont plus venus travailler et qui ont été renvoyés. Jusqu'à la fin
22 de la guerre, 320 membres du personnel de l'hôpital sont restés. Il
23 s'agissait de Croates, de Serbes et de représentants d'autres groupes
24 ethniques. Il ne s'agissait pas que des Serbes, des Serbes sont partis
25 mais des Croates également . Et tous ont été renvoyés, tous ceux qui sont
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1 partis ont été renvoyés. Ceux qui sont restés ont gardé leur poste, dans
2 le respect des principes d'éthique médicale.
3 M. Fila (interprétation). - Ma question porte sur la ville de
4 Vukovar en général, pas seulement sur l'hôpital.
5 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, je comprends. Nombre
6 d'habitants de la ville sont partis. Parmi les 45 000 habitants que
7 comptait la ville avant la guerre, 15 000 personnes sont parties, à la
8 fois des Croates, des Serbes et des Ruthènes. Mais les autres sont restées
9 parce qu'elles ne voulaient pas quitter leur ville, leur domicile, leurs
10 biens.
11 M. Fila (interprétation). - Lorsque le Major Sljivancanin est
12 arrivé, lorsque vous l'avez vu, vous a-t-il dit, au cours de cet entretien
13 que vous nous avez dit avoir eu avec lui, qui avait libéré la ville, qui
14 avait pris le contrôle de la ville, qui désormais avait autorité sur
15 l'hôpital ? Etait-ce la JNA ou bien quelqu'un d'autre ?
16 Mme Bosanac (interprétation). - Dans la déclaration qu'il a
17 faite le 20 à 7 heures, Sljivancanin a dit très clairement que c'était la
18 JNA qui avait libéré la ville et que l'Académie militaire médicale avait
19 pris le contrôle de l'hôpital.
20 M. Fila (interprétation). - Donc c'était lui qui était
21 responsable de l'hôpital ?
22 Mme Bosanac (interprétation). - Eh bien, oui, je le suppose.
23 M. Fila (interprétation). - Où se trouvait le commissariat de
24 police à vol d'oiseau de l'hôpital, à 50 mètres à peu près ?
25 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, juste dans l'îlot de
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1 maisons voisin. D'abord il y avait le Tribunal, ensuite le commissariat de
2 police.
3 Mme Bosanac (interprétation). - Y avait-il des tirs qui
4 provenaient du poste de police?
5 Mme Bosanac (interprétation). - Non, j'en suis certaine parce
6 que je m'y suis très souvent rendue pour envoyer des fax.
7 M. Fila (interprétation). - Fort bien. D'autres témoins pourront
8 confirmer ce que vous dîtes. J'essaie de faire aussi vite que possible,
9 Monsieur le Président.
10 Je souhaiterais savoir qui, le 20, était responsable de
11 l'hôpital ? Etait-ce le Major Sljivancanin ou quelqu'un d'autre?
12 Mme Bosanac (interprétation). - C'était le Major Sljivancanin.
13 M. Fila (interprétation). - Vous a-t-il dit quelles étaient les
14 responsabilités de Mrksic ? Vous a-t-il dit quelles étaient ses
15 responsabilités à lui ?
16 Mme Bosanac (interprétation). - Non.
17 M. Fila (interprétation). - Sljivancanin vous a-t-il dit s'il
18 était responsable de l'évacuation de l'hôpital ?
19 Mme Bosanac (interprétation). - Non.
20 M. Fila (interprétation). - Lorsque vous avez eu cet entretien,
21 vous avez indiqué qu'il avait dit : « Le témoin ».
22 Mme Bosanac (interprétation). - C'est ce que j'ai compris. Cet
23 ainsi que j'ai compris la chose. Mais votre question est à présent la
24 suivante : "A-t-il dit cela ?". Ce que je
25 vous dis, c'est ce qu'il a dit, à savoir que, moi, je n'étais plus
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1 compétente pour diriger l'hôpital. Une escorte composée de militaires est
2 venue et j'ai été emmenée à l'extérieur de l'hôpital.
3 M. Fila (interprétation). - Vous avez donc compris que c'était
4 lui qui était responsable de l'hôpital. C'est tout ce que je voulais
5 savoir. Tout au long de ces négociations... Je reformule ma question.
6 Connaissez-vous Dokmanovic?
7 Mme Bosanac (interprétation). - Je le connais de vue.
8 M. Fila (interprétation). - Vous le voyez dans cette salle ?
9 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
10 M. Fila (interprétation). - Vous l'avez vu dans un quelconque
11 endroit au cours de ces événements ?
12 Mme Bosanac (interprétation). - Non.
13 M. Fila (interprétation). - Quand je dis en un quelconque
14 endroit, je parle aussi bien de Negoslavski que de Vukovar ou d'un autre
15 endroit au cours de cette période critique.
16 Mme Bosanac (interprétation). - Non.
17 M. Fila (interprétation). - Vous avez dit quelque chose qui a
18 éveillé mon intérêt. Vous avez dit que des civils ont été emmenés hors de
19 l'hôpital également le 19. Qui les a emmenés à ce moment-là et que leur
20 est-il arrivé ?
21 Mme Bosanac (interprétation). - Au cours de l'après-midi, le
22 mardi, donc le 19, des civils ont été emmenés hors de l'hôpital. Ils ont
23 été emmenés à Velepromet. J'ai vu qu'on les emmenait hors de l'hôpital.
24 C'est la première fois que j'ai vu le Major Sljivancanin et je lui ai
25 d'ailleurs demandé où on les emmenait. Il m'a dit qu'on allait prendre
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1 leurs noms et les inscrire sur une liste. J'ai demandé pourquoi les
2 hommes, les femmes et les enfants étaient séparés en groupes distincts. Il
3 m'a répondu encore qu'on allait les inscrire sur des registres. Par la
4 suite, j'ai appris qu’on les avait emmenés à Velepromet.
5 M. Fila (interprétation). - Y a-t-il des personnes portées
6 disparues parmi les
7 personnes qui ont été emmenées ?
8 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, en effet, certaines d'entre
9 elles sont portées disparues.
10 M. Fila (interprétation). - Savez-vous si, parmi ces personnes,
11 certaines ont fini Ovcara ?
12 Mme Bosanac (interprétation). - Il est difficile de répondre à
13 cette question. Parmi les 200 corps qui ont été retrouvés à Ovcara, à ce
14 jour 108 ont été identifiés. Ces 108 corps étaient des corps de personnes
15 qui avaient été emmenées le 20 au matin. Nous ne savons pas si les corps
16 qui n'ont pas été identifiés sont les corps des personnes qui avaient été
17 emmenées le jour précédent, mais un certain nombre de personnes sont
18 toujours portées disparues, qui ont été emmenées le jour précédent, le 19
19 par conséquent.
20 M. Fila (interprétation). - Excusez-moi, je sais que c'est
21 particulièrement désagréable pour vous de parler de tout cela. J'essaie
22 d'être aussi succinct que possible. Vous avez déclaré que, sur le pont, un
23 officier vous avait dit où se trouvait la ligne de séparation. Vers le
24 pont, au-delà du pont, vers le point de Niroslav ?
25 Mme Bosanac (interprétation). - J'ai demandé à cet homme où je
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1 pouvais trouver le CICR parce que l'on m'avait dit qu'ils étaient arrivés
2 à peu près au pont et que, par la suite, ils allaient venir à l'hôpital,
3 mais il m'a répondu : "Moi, moi je ne vais pas au-delà du pont. C’est mon
4 devoir de rester au niveau du pont. D'autres de Belgrade se chargeront
5 d'aller au-delà".
6 M. Fila (interprétation). - Donc, votre impression, c'est que
7 l'armée avait le contrôle des deux côtés ?
8 Mme Bosanac (interprétation). - J'ai vu des soldats qui
9 n'avaient pas l'air d'appartenir à des troupes régulières, mais ce
10 n'étaient pas non plus des civils, cela dit. Ils portaient des uniformes
11 de réservistes, des uniformes assez disparates.
12 M. Fila (interprétation). - Y a-t-il eu, parmi vos patients, des
13 cas... Excusez-moi.
14 Parmi les gens qui sont arrivés à l'hôpital pendant cette période
15 critique, y a-t-il eu des gens qui étaient en bonne santé et qui,
16 pourtant, se sont fait mettre les jambes dans le plâtre ?
17 Mme Bosanac (interprétation). - On m'a posé plusieurs fois cette
18 question, mais vraiment je n'ai aucune information qui nous permettrait de
19 dire cela. Pour autant que je le sache, des personnes malades se sont fait
20 poser des plâtres pour que leurs membres soient immobilisés, mais je n'ai
21 connaissance d'aucun cas où une personne en pleine santé aurait demandé à
22 ce qu'on lui mettre les jambes dans le plâtre.
23 M. Fila (interprétation). - Vous avez déclaré que vous aviez
24 essayé d'entrer en contact avec le Premier ministre, Ante Markovic. C'est
25 bien un Croate, n'est-ce pas ?
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1 Mme Bosanac (interprétation). - Oui, je le crois. Je ne sais pas
2 exactement.
3 M. Fila (interprétation). - Est-ce que qui que ce soit était
4 Président de la RSFY à ce moment-là, quand Ante Markovic était le Premier
5 ministre ?
6 Mme Bosanac (interprétation). - Je crois qu'au moment de
7 l'agression de Vukovar, la présidence ne se réunissait plus.
8 M. Fila (interprétation). - Mais qui était le dernier Président
9 de la Présidence ? Stipe Mesic ?
10 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
11 M. Fila (interprétation). - Il était également croate, n’est-ce
12 pas ?
13 Mme Bosanac (interprétation). - Oui.
14 M. Fila (interprétation). - Je n’ai plus de question, Madame et
15 Messieurs les Juges.
16 M. le Président (interprétation). - Quant à moi, j’ai deux
17 questions à poser.
18 Docteur Bosanac, voici ma première question. Qui a dressé la
19 liste des divers civils et blessés de l'hôpital qui devaient faire partie
20 de l'évacuation ?
21 Mme Bosanac (interprétation). - La liste des personnes blessées
22 et malades qui devaient être évacuées a été rédigée par Mme Verica Graf
23 qui s'occupait de l'administration de
24 l'hôpital. Cette liste a été distribuée aux différentes infirmières dans
25 des départements différents. C'était la liste des patients de l'hôpital.
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1 Mais beaucoup de personnes, de patients de l'extérieur attendaient d'être
2 évacués également. C'étaient des personnes qui se rendaient à l'infirmerie
3 tous les jours. Leurs noms ne figuraient pas sur la liste. Ils avaient
4 leur dossier médical avec eux.
5 En ce qui concerne les civils qui devaient être évacués et dont
6 les noms figuraient sur les listes, c'étaient des représentants de la
7 Croix-Rouge internationale, M. Bilic et une autre personne enregistraient
8 leurs noms et transmettaient la liste à M. Marin Vidic qui s'occupait de
9 l'évacuation des personnes à l'extérieur de la ville.
10 M. le Président (interprétation). - Mais après, lorsque
11 l'hôpital est tombé sous le contrôle militaire, y a-t-il eu des listes ?
12 Ont-ils constitué des listes selon les groupes différents, les listes de
13 personnels et d’autres ?
14 Mme Bosanac (interprétation). - Pour autant que je le sache,
15 non.
16 M. le Président (interprétation). - Merci.
17 Ma seconde question concerne ceux dont vous parliez tout à
18 l'heure en disant : « des soldats en désordre ayant un air négligé ». Si
19 j'ai bien compris, des personnes que vous voyiez étaient armées, portaient
20 des uniformes mais n'appartenaient pas à la JNA. Pouvez-vous me dire de
21 quelle sorte de personnes il s'agissait ? Appartenaient-elles à un certain
22 groupe paramilitaire ? Etaient-elles sous le contrôle et le commandement
23 de la JNA ?
24 Mme Bosanac (interprétation). - J'ai vu plusieurs groupes de
25 personnes semblables. Par exemple, mardi après-midi, un tel groupe s'est
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1 rendu à l'hôpital avec le fils d'un de nos médecins, le Dr Ivankovic. J’ai
2 entendu qu'il s’appelait Belior Ljovi*, c'est-à-dire les aigles blancs.
3 J'ai vu plusieurs autres personnes quand j'allais à Negoslavci, qui ne
4 portaient pas d'uniforme. Ils étaient en civil. Ils avaient des barbes,
5 ils étaient sales. J'ai entendu qu'on les appelait "Chetnik". Je ne peux
6 pas dire de quelles personnes ni de quels groupes il s'agissait, mais vu
7 la situation dans son ensemble, je peux affirmer qu'effectivement, ils
8 étaient sous le
9 contrôle de la JNA.
10 M. le Président (interprétation). - Merci. Y a-t-il d'autres
11 questions ? Y a-t-il des objections à ce que le témoin se retire de
12 manière définitive ? Il n'y a pas d'objections ? Y a-t-il d'autres
13 questions de la part de l'accusation ?
14 Merci, Madame, merci Docteur Bosanac. Maintenant, vous pouvez
15 vous retirer.
16 (Le témoin quitte la salle d'audience.)
17 M. Niemann (interprétation). - Mon collègue, M. Williamson,
18 interrogera le prochain témoin.
19 Avant cela, je souhaiterais savoir s'il est possible que je me
20 retire à 12 h 45, M. Williamson continuera avec le prochain témoin.
21 Merci.
22 M. Williamson (interprétation). - Monsieur le Président, le
23 prochain témoin a demandé des mesures de protection. C'est une des
24 personnes qui a témoigné selon l'article 61.
25 Je souhaiterais dire une autre chose à ce propos. Monsieur Fila
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1 et moi-même avons discuté ce matin avec nos collègues et nous nous sommes
2 mis d'accord pour procéder de la même manière que cela se fait dans le
3 cadre du procès Blaskic et Aleksovski. C'est entre nous que nous
4 discuterons des mesures de protection. Si nous sommes d'accord, nous en
5 informerons le Tribunal. Pour le moment, nous ne prévoyons pas de témoin
6 anonyme dont l'identité ne sera pas dévoilée aux Conseils de la défense.
7 Cela dit, certains témoigneront sous pseudonymes.
8 Ici, il s'agit du Docteur Striber qui ne demande qu’à altérer
9 son image et sa voix. Avant cela, je demande que les rideaux soient
10 baissés.
11 Monsieur le Président, je ne sais pas si je peux dire quelque
12 chose. En ce qui concerne tous ces témoins, on a déjà essayé, on a déjà
13 testé la technique concernant l'altération de la voix ; cela devrait donc
14 être possible.
15 M. le Président (interprétation). - Si j'ai bien compris, il
16 nous faut une pause de
17 15 minutes afin de mettre en place tous les dispositifs techniques pour ce
18 faire.
19 La séance, suspendue à 12 h 20, est reprise à 12 heures 3
20 (Le témoin est introduit dans la salle d'audience.)
21 M. le Président (interprétation). - Bonjour, veuillez prêter
22 serment s'il vous plaît.
23 Le témoin (interprétation). - Je déclare solennellement que je
24 dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
25 M. le Président (interprétation). - Merci. Veuillez vous
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1 asseoir.
2 M. Williamson (interprétation). - Veuillez décliner vos nom et
3 prénom, s'il vous plaît.
4 Mme Striber (interprétation). - Je suis Neda Striber.
5 M. Williamson (interprétation). - Quel est votre métier ?
6 Mme Striber (interprétation). - Je suis médecin.
7 M. Williamson (interprétation). - Depuis combien de temps ?
8 Mme Striber (interprétation). - Depuis 1985.
9 M. Williamson (interprétation). - Etes-vous spécialiste en
10 quelque domaine ?
11 Mme Striber (interprétation). - Oui, je suis spécialiste en
12 ophtalmologie.
13 M. Williamson (interprétation). - En 1991, étiez-vous employée
14 de l'hôpital de Vukovar ?
15 Mme Striber (interprétation). - Oui, j'étais employée au
16 département d'ophtalmologie.
17 M. Williamson (interprétation). - Quelles étaient vos tâches au
18 sein de l'hôpital de Vukovar en 1991 ?
19 Mme Striber (interprétation). - En 1991, j'ai commencé ma
20 spécialisation au département d'ophtalmologie dans l'hôpital de Vukovar.
21 M. Williamson (interprétation). - Au début de 1991, la situation
22 était-elle relativement calme à Vukovar ?
23 Mme Striber (interprétation). - Oui, elle l'était.
24 M. Williamson (interprétation). - Quelle était la situation à
25 l'hôpital au début de l'année ?
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1 Mme Striber (interprétation). - Au début de l'année, l'hôpital
2 travaillait tout à fait normalement.
3 M. Williamson (interprétation). - L'ambiance à Vukovar a-t-elle
4 changé au printemps 1991 ?
5 Mme Striber (interprétation). - Je dirais plutôt que cela a
6 changé au mois de mai. C'est là que l'ambiance a considérablement changé
7 dans la ville.
8 M. Williamson (interprétation). - Y a-t-il eu un incident au
9 mois de mai qui a provoqué cette détérioration de la situation ?
10 Mme Striber (interprétation). - Un incident s'est produit le
11 2 mai, après le conflit et le meurtre de certains policiers dans
12 Borovo Selo.
13 M. Williamson (interprétation). - Y a-t-il eu une réaction dans
14 la ville provoquée par cet incident à Borovo Selo ?
15 Mme Striber (interprétation). - Je pense que l'on ressentait une
16 sorte de tension. Une ambiance désagréable régnait dans la ville.
17 M. Williamson (interprétation). - Cette tension-là s'est-elle
18 propagée dans l'hôpital et au sein du personnel qui y travaillait ?
19 Mme Striber (interprétation). - Il est difficile de parler de
20 cette tension. Peut-être l'ambiance qui régnait dans la ville a-t-elle
21 aussi influencé les personnes qui se sentaient mal à l'aise.
22 M. Williamson (interprétation). - Y a-t-il eu un effet de cela
23 sur le fonctionnement de l'hôpital ?
24 Mme Striber (interprétation). - L'hôpital devait continuer à
25 fonctionner, quelle que soit la situation extérieure.
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1 M. Williamson (interprétation). - A un moment, est-ce-que
2 certains membres du personnel ont quitté l'hôpital ?
3 Mme Striber (interprétation). - Après cette période-là, la
4 plupart des personnes ne venaient pas travailler. Le nombre du personnel
5 s'est réduit.
6 M. Williamson (interprétation). - En été, est-ce que les
7 tensions se sont accrues à Vukovar ?
8 Mme Striber (interprétation). - Oui, elles se sont accrues
9 surtout au mois d'août, lorsque l'attaque directe contre Vukovar a eu
10 lieu.
11 M. Williamson (interprétation). - Vous rappelez-vous de la date,
12 au mois d'août, quand cela a commencé ?
13 Mme Striber(interprétation). - Si je me souviens bien de la
14 date, il s'agissait du 25 août. C'était la date du premier pilonnage de
15 Vukovar.
16 M. Williamson (interprétation). - Au début de cette bataille,
17 davantage de personnes ont quitté cette ville, n'est-ce pas ?
18 Mme Striber (interprétation). - Oui.
19 M. Williamson (interprétation). - Ces personnes étaient-elles
20 forcées de quitter la ville ?
21 Mme Striber (interprétation). - Je pense que chacun faisait une
22 estimation personnelle quant à la question de savoir s'il fallait sortir
23 ou rester. Je n'avais pas l'impression que quelqu'un exerçait une pression
24 sur les gens. Ceux-ci prenaient leur propre décision quant à savoir s'ils
25 devaient rester ou partir.
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1 M. Williamson (interprétation). - Ceci valait à la fois pour les
2 Croates et pour les Serbes, n'est-ce pas?
3 Mme Striber (interprétation). - Oui.
4 M. Williamson (interprétation). - Vous avez choisi de rester,
5 n'est-ce pas ?
6 Mme Striber (interprétation). - Oui.
7 M. Williamson (interprétation). - Pourquoi ?
8 Mme Striber (interprétation). - Dans ces conditions-là, quand de
9 telles situations se produisent, il faut savoir que moi je suis médecin et
10 vu le serment que j'ai prêté et vu mes convictions morales, je dois rester
11 au travail et fournir aide et protection à ceux qui en ont besoin.
12 Par ailleurs, c'est la ville dans laquelle j'ai grandi, dans
13 laquelle j'ai vécu et j'ai trouvé normal d'y rester.
14 M. Williamson (interprétation). - Votre famille est-elle restée
15 sur place, elle aussi ?
16 Mme Striber (interprétation). - Mon père et ma mère sont restés
17 là pendant tout le temps du siège. En ce qui concerne mes enfants, vers la
18 fin août, je les ai fait sortir de la ville, alors que moi-même je
19 rentrais et y restais.
20 M. Williamson (interprétation). - Avez-vous eu l'impression que
21 la ville était tombée aux mains des Oustachis ?
22 Mme Striber (interprétation). - Non.
23 M. Williamson (interprétation). - Est-ce que vous avez entendu
24 de telles opinions exprimées par d'autres employés avec qui vous
25 travailliez ?
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1 Mme Striber.(interprétation). - Non.
2 M. Williamson (interprétation). - Il y avait à la fois des
3 patients et des membres du personnel serbes et croates, n'est-ce pas ?
4 Mme Striber.(interprétation). - Oui, mais nous ne nous divisions
5 jamais de la sorte. Il s'agissait d'un entourage très mixte où, avant
6 cette période, personne ne posait de question à personne concernant son
7 appartenance ethnique.
8 M. Williamson (interprétation). - Est-ce qu’il y a eu une
9 différence de traitement par rapport aux patients serbes à l'opposé des
10 patients croates ?
11 Mme Striber.(interprétation). - Jamais.
12 M. Williamson (interprétation). - Et qui attaquait la ville de
13 Vukovar à votre connaissance ?
14 Mme Striber (interprétation). - La JNA.
15 M. Williamson (interprétation). - Et vous ou les autres qui
16 travaillaient avec vous, est-ce que vous aviez l'impression que la JNA y
17 était pour vous libérer ?
18 Mme Striber (interprétation). - Ce n'était pas l'impression que
19 nous avions.
20 M. Williamson (interprétation). - Est-ce que vous aviez
21 l'impression d'avoir besoin d'être libérés par qui que ce soit ?
22 Mme Striber (interprétation). - Nous n'avions pas ce besoin et
23 nous n'avions pas appelé qui que ce soit à nous venir en aide, à nous
24 libérer.
25 M. Williamson (interprétation). - A quoi ressemblaient les
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1 conditions au sein de l'hôpital durant cette période ?
2 Mme Striber (interprétation). - Les conditions se modifiaient
3 tous les jours. Au début, il y avait un moindre nombre de patients, entre
4 dix et vingt. En ce qui concerne le personnel, il nous était possible de
5 leur fournir l'aide de manière adéquate.
6 Quant aux conditions, elles changeaient de jour en jour au fur
7 et à mesure que les combats progressaient, vu que le bâtiment de l'hôpital
8 était touché lui aussi, la situation devenait dangereuse à la fois pour
9 les patients et pour le personnel, donc il a fallu évacuer les services
10 des étages supérieurs vers les étages inférieurs et vers la fin tout se
11 passait en bas, dans les caves.
12 M. Williamson (interprétation). - Aviez-vous de l'électricité ?
13 Mme Striber (interprétation). - Pas pendant toute la période.
14 Vers la fin des combats, c'était complètement impossible. Nous avions des
15 générateurs pour fournir l'électricité aux parties les plus importantes de
16 l'hôpital, je veux parler des salles d'opération improvisées.
17 M. Williamson (interprétation). - Et l'eau courante ?
18 Mme Striber (interprétation). - De jour en jour, cette
19 situation-là devenait de plus en plus difficile aussi. Il y a eu de plus
20 en plus de pilonnages à la fois de l'hôpital et de la ville tout entière.
21 Nous n'avions plus d'eau courante, donc en ce qui concerne
22 l'approvisionnement en eau de l'hôpital, il était très difficile, on
23 faisait venir l'eau en camion, en citerne. Par la suite...
24 M. Williamson (interprétation). - Excusez moi, il semble qu'il y
25 a quelques problèmes techniques.
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1 Excusez moi, Docteur, veuillez poursuivre votre témoignage.
2 Mme Striber (interprétation). - En ce qui concerne
3 l'approvisionnement, cela a été possible seulement grâce aux efforts
4 énormes de personnes qui faisaient venir cette eau du Danube ou de puits
5 qui se trouvaient aux alentours.
6 M. Williamson (interprétation). - Vous avez dit que l'hôpital
7 avait été pilonné et que c'est pour cela que son fonctionnement est devenu
8 plus difficile. Ce pilonnage se produisait à quelle fréquence ?
9 Mme Striber (interprétation). - Sans arrêt.
10 M. Williamson (interprétation). - Pendant la journée, les
11 pilonnages continuaient ?
12 Mme Striber (interprétation). - Oui.
13 M. Williamson (interprétation). - Et pendant la nuit, il y a eu
14 des pilonnages aussi ?
15 Mme Striber.(interprétation). - Très souvent pendant la nuit
16 aussi.
17 M. Williamson (interprétation). - Vous avez dit qu'un nombre
18 plus important de patients est arrivé en raison des combats. Est-ce qu’il
19 a été plus difficile de s'occuper d'eux durant cette période ?
20 Mme Striber (interprétation). - C’est devenu plus difficile
21 parce que le personnel a décru et aussi parce qu'il était difficile de
22 loger un plus grand nombre de patients.
23 M. Williamson (interprétation). - Et vous, vous travailliez
24 pendant combien d'heures par jour ?
25 Mme Striber (interprétation). - Nous n'avions pas d’horaires,
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1 nous travaillions 24 heures sur 24.
2 M. Williamson (interprétation). - Et où habitiez vous ?
3 Mme Striber (interprétation). - Ensemble avec tout le personnel
4 et les patients, j'ai vécu au sous-sol de l'hôpital. Il s'agissait de la
5 vieille partie de l'hôpital. Quant à tout le personnel du département
6 d'ophtalmologie, nous étions tous dans une petite pièce d'environ
7 12 mètres carrés. Nous étions neuf à y vivre. C'était à la fois notre
8 chambre à coucher et notre salle d'opération.
9 M. Williamson (interprétation). - Et cela était le cas pendant
10 toute la période des combats ?
11 Mme Striber (interprétation). - Oui.
12 M. Williamson (interprétation). - Je souhaite vous montrer
13 maintenant la pièce à conviction numéro 11 et nous avons déjà communiqué
14 une copie de ce document à la défense. Veuillez placer cela sur le
15 rétroprojecteur s'il vous plaît, afin de nous faciliter les choses.
16 (Le document est placé sur le rétroprojecteur.)
17 Docteur Striber, pourriez-vous identifier ce document ?
18 Mme Striber (interprétation). - Ce document représente le plan
19 du sous-sol du nouveau bâtiment de l'hôpital, le couloir qui relie les
20 deux hôpitaux et ici, c'est l'abri.
21 M. Williamson (interprétation). - Et sur ce plan, est-ce que
22 vous voyez la partie où vous avez vécu et où se trouvaient vos bureaux ?
23 Mme Striber (interprétation). - Non, cela... On ne voit pas cela
24 ici. Cela se trouvait derrière cette ligne, dans cette partie-là.
25 M. Williamson (interprétation). - Est-ce que vous pouvez montrer
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1 au juge ce que tous ces petits rectangles noirs désignent ?
2 Mme Striber (interprétation). - Ces petits rectangles noirs, il
3 s'agit de la
4 représentation des lits d'hôpital et de la manière dont ils ont été
5 déployés dans cette partie du sous-sol.
6 M. Williamson (interprétation). - Et durant la période
7 ultérieure des combats, c'est cette partie-là qu'on utilisait pour y
8 mettre les patients. Est-ce exact ?
9 Mme Striber (interprétation). - Oui.
10 M. Williamson (interprétation). - Est-ce que vous savez combien
11 de personne sont mortes dans l'hôpital durant les combats ?
12 Mme Striber (interprétation). - Je sais que nous avions un
13 registre concernant le nombre de patients qui son morts durant toute la
14 période et vers la fin, je ne peux pas vous donner le chiffre exact, mais
15 je pense qu'environ six cents personnes sont mortes durant la période des
16 combats à l'hôpital.
17 M. Williamson (interprétation). - Il s'agirait ici d'une forte
18 augmentation du nombre de personnes mortes par rapport aux périodes de
19 fonctionnement normal de l'hôpital ?
20 Mme Striber (interprétation). - Le nombre est considérablement
21 supérieur.
22 M. Williamson (interprétation). - Que faisiez vous des corps des
23 personnes des personnes mortes ?
24 Mme Striber (interprétation). - Tant que cela a été possible,
25 nous les avons enterrés dans des cimetières locaux. Mais après, en raison
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1 des pilonnages, cela n'était plus possible et, vers la fin des hostilités,
2 nous faisions transporter les corps dans un bâtiment qui était en face de
3 l'hôpital. Les gens locaux appelait ce bâtiment stalle Stara Kapetanija.
4 M. Williamson (interprétation). - Vers la fin des combats, est-
5 ce que vous avez pu remarquer que de plus en plus d'habitants de la ville
6 se regroupaient au sein de l'hôpital ?
7 Mme Striber (interprétation). - Tout à fait. Vers la fin des
8 combats, des civils venaient de manière tout à fait spontanée à l'hôpital.
9 Il s'agissait d'un grand nombre de personnes.
10 M. Williamson (interprétation). - Est-ce que vous savez quelle
11 était la raison pour laquelle ils se regroupaient au sein de l'hôpital ?
12 Mme Striber (interprétation). - Certaines parties de la ville
13 étaient déjà pratiquement entièrement détruites. Je pense que ces
14 personnes avaient besoin de se sentir protégées, ils avaient l'impression
15 que l'hôpital était l'unique endroit où ils pouvaient trouver refuge, un
16 endroit qui symbolisait la protection et l'humanité.
17 M. Williamson (interprétation). - Ils cherchaient un abri par
18 rapport à qui ?
19 Mme Striber (interprétation). - Certainement pour se cacher des
20 obus.
21 M. Williamson (interprétation). - Quand est-ce que les
22 hostilités ont pris fin ?
23 Mme Striber (interprétation). - Il y a eu un silence soudain
24 vers le 18 novembre.
25 M. Williamson (interprétation). - Et les 18 et 19 novembre, est-
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1 ce qu’il y a eu de nouveaux patients qui sont arrivés à l'hôpital ?
2 Mme Striber (interprétation). - Non, il n'y a plus eu d'accueil
3 de patients, aucun nouveau patient ne s'est présenté.
4 M. Williamson (interprétation). - Quand avez-vous remarqué les
5 premiers soldats de la JNA qui sont arrivés à l'hôpital ?
6 Mme Striber (interprétation). - C'était le 19, tard dans
7 l'après-midi. A l'époque, je visitais mes patients et j'ai vu un groupe de
8 soldats qui faisait le tour de l'hôpital. Ils inspectaient le sous-sol et
9 ils s'étonnaient de voir qu'il était possible de fonctionner dans de
10 telles conditions.
11 M. Williamson (interprétation) - Est-ce que quelqu'un a résisté
12 aux forces de la JNA lorsqu'elles se sont rendues à l'hôpital ?
13 Mme Striber (interprétation) - Non.
14 M. Williamson (interprétation) - Le 19 novembre, le soir et
15 cette nuit-là, que se passait-il au sein de l'hôpital ?
16 Mme Striber (interprétation) - Je peux dire qu'une situation
17 chaotique régnait
18 dans l'hôpital. Nous nous attendions à être évacués, pourtant personne ne
19 pouvait nous donner quelque information précise et détaillée, ni nous dire
20 quand cela devait commencer ni de quelle manière cela devait se dérouler.
21 Nous nous attendions à être évacués, mais en même temps on sentait que la
22 situation était chaotique.
23 M. Williamson (interprétation) - Et où étiez-vous cette nuit,
24 entre le 19 et le 20 ?
25 Mme Striber (interprétation) - J'étais dans la partie ancienne
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1 de l'hôpital, dans mon bureau.
2 M. Williamson (interprétation) - Le 20 au matin, est-ce que vous
3 avez vu (expurgé), une infirmière, dans l'hôpital ?
4 Mme Striber (interprétation) - Oui, notre infirmière
5 principale est arrivée vers 7 heures du matin, portant une liste. Elle
6 était accompagnée d'une personne en uniforme. Elle a demandé qu'un des
7 patients quitte la pièce. La personne en uniforme l’a appelée
8 « collègue », donc je me suis dit qu'il s'agissait certainement d'un
9 médecin. Il a voulu que je lui dise de quelles blessures il s'agissait,
10 s'il s'agissait de blessures graves ou légères. Peu après cela, on nous a
11 dit qu'il fallait que tout le personnel de l'hôpital ait une réunion dans
12 la salle où l’on faisait les plâtres au sein de l'hôpital.
13 M. Williamson (interprétation) - Je vais vous demander
14 d'examiner encore une fois le plan de l'hôpital et de laisser cela sur le
15 rétroprojecteur.
16 Pouvez-vous indiquer où se trouvait la salle des plâtres ?
17 Mme Striber (interprétation) - Numéro 17.
18 M. Williamson (interprétation) - Donc, il s'agit de la pièce
19 tout à fait à droite, dans l'angle ?
20 Mme Striber (interprétation) - Oui.
21 M. Williamson (interprétation) - Est-ce que vous avez assisté à
22 cette réunion dans la salle des plâtres ?
23 Mme Striber (interprétation) - Oui.
24 M. Williamson (interprétation) - Et qui menait la réunion ?
25 Mme Striber (interprétation) - C'était le Major Sljivancanin
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1 qui s'est présenté lui-même.
2 M. Williamson (interprétation) - Et qu'est-ce que le Major
3 Sljivancanin vous a dit à vous tous ?
4 Mme Striber (interprétation) - Le Major Sljivancanin a eu une
5 réunion avec le personnel de l'hôpital. Il nous a expliqué la situation
6 concernant la libération de Vukovar. Il nous a expliqué que le personnel
7 médical ne devait pas s'inquiéter, être inquiet parce qu'il savait que
8 nous, en tant que personnel médical, nous avions l'obligation, le devoir
9 de nous acquitter de nos tâches quel que soit le camp auquel nous
10 appartenions, mais qu'à partir de maintenant, c’étaient eux qui
11 reprenaient le contrôle de l'hôpital, que Mme Bosanac n'était plus le
12 directeur et que c’étaient leurs personnes qui allaient prendre le
13 contrôle de l'hôpital dorénavant.
14 M. Williamson (interprétation) - Et pendant cette réunion, avez-
15 vous remarqué quelque chose qui se passait à l'extérieur ?
16 Mme Striber (interprétation) - J'étais près de la porte, je
17 suis sortie de la pièce. J'étais à environ 10 ou 20 mètres. J'ai vu un
18 groupe de patients qui arrivait de cette direction-là. Ils étaient
19 accompagnés de soldats. Dans ce groupe, j'ai reconnu certains de mes
20 patients. Ils se dirigeaient vers cette partie. Il s'agit de la sortie de
21 l'hôpital où d'habitude se trouvaient les ambulances quand ils faisaient
22 venir d'urgence des patients dans la partie chirurgicale.
23 M. Williamson (interprétation) - Je voudrais que l'on montre au
24 témoin la pièce à conviction numéro P 8. Il s'agit de photos de l'hôpital.
25 Excusez-moi, mais pour être plus précis, lorsque vous avez indiqué la
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1 sortie, est-ce que maintenant, pour le procès-verbal, vous pouvez nous
2 dire de quel chiffre cette sortie est annotée ?
3 Mme Striber (interprétation) - Il s'agit du numéro 12.
4 M. Williamson (interprétation) - - Maintenant, je souhaiterais
5 que vous examiniez la pièce à conviction de l'accusation numéro 8,
6 notamment la page 4, en partant de la fin du document. Veuillez placer
7 cela sur le rétroprojecteur et expliquer aux Juges de quoi il s'agit sur
8 cette photo.
9 Mme Striber (interprétation) - Sur cette photo, on voit le
10 sous-sol de l'hôpital, la salle des plâtres, c'est-à-dire une salle
11 d'opération improvisée. C'est l'endroit où nous avons eu la réunion avec
12 le Major Sljivancanin. C'est le couloir dans lequel je suis sortie. Ici,
13 c'est la partie où passaient les patients quand ils étaient amenés. Ici,
14 si on peut voir, c'est l'endroit où les patients sortaient.
15 M. Williamson (interprétation) - Donc la pièce dont la porte est
16 ouverte est la pièce dont vous avez parlé et que vous avez identifiée sur
17 votre plan, le plan du sous-sol de l'hôpital, comme étant la pièce 17,
18 n'est-ce pas ?
19 Mme Striber (interprétation) - Oui.
20 M. Williamson (interprétation) - Passons, si vous le voulez, à
21 la page suivante de cet album photos. Pouvez-vous dire ce que cette photo
22 représente ?
23 Mme Striber (interprétation). - Cette photographie représente la
24 sortie des urgences. C'est l'endroit où les ambulances s'arrêtent. Là,
25 c'est l’itinéraire qu'ils suivent pour arrivée à la salle d'opération.
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1 M. Williamson (interprétation). - Et s'agit-il de la porte
2 qu'ont pris les patients qui sont sortis le fameux matin du 20 novembre ?
3 Mme Striber (interprétation). - Oui, c'est la même.
4 M. Williamson (interprétation). - Pourriez-vous passer à la
5 photographie suivante, s'il vous plaît, et nous dire ce qu'elle
6 représente ?
7 Mme Striber (interprétation). - Il s'agit justement de la même
8 chose, mais de l'extérieur, c'est-à-dire l'entrée dans cette zone de
9 l'hôpital.
10 M. Williamson (interprétation). - Et il s'agit de l'entrée des
11 ambulances dont vous avez parlé précédemment, n'est-ce pas ?
12 Mme Striber (interprétation). - Oui, c'est cela.
13 M. le Président (interprétation). - Je crois que les interprètes
14 ont besoin d'une pause maintenant. Je me demande si maintenant nous
15 pourrions nous arrêter, lever l'audience jusqu'à 2 heures 30. Cela vous
16 convient-il ou avez-vous d'autres questions ?
17 M. Williamson (interprétation). Non, cela me convient. J'en ai
18 peut-être pour une quinzaine de minutes encore avant d'en terminer avec
19 mes questions, donc nous pourrions nous arrêter et reprendre à
20 2 heures 30.
21 M. le Président (interprétation). - Très bien. Donc nous levons
22 l'audience.
23 L’audience est suspendue à 13 h 05
24 L’audience est reprise à 14 heures 30.
25 M. le Président (interprétation) - Avant de poursuivre, nous
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1 voudrions dire qu’au cours de la pause-déjeuner, nous avons décidé de
2 traiter une question qui a été abordée ce matin et qui demande une
3 décision de notre part.
4 Nous voudrions vous lire la décision suivante.
5 En vertu de l’article 89 (C) du Règlement de procédure et de
6 preuves du Tribunal international par lequel une Chambre peut recevoir
7 tout élément de preuve pertinent qu’elle estime avoir valeur probante,
8 nous décidons la chose suivante.
9 Tout d’abord, les déclarations écrites peuvent être versées au
10 dossier après que le témoin ait été entendu par la Chambre de 1ère instance
11 pourvu qu’il n’y ait aucune opposition exprimée par la partie adverse.
12 Deuxièmement, toute déclaration ainsi versée pourra être
13 utilisée par la Chambre de 1ère instance en tant qu’élément de preuve
14 seulement pour traiter des questions qui, d’une part, n’ont pas été
15 mentionnées dans le témoignage et, d’autre part, qui n’ont pas fait
16 l’objet d’une opposition par la partie adverse.
17 Il s’agit là de notre décision. Je voudrais utiliser le temps
18 qui m’est donné pour attirer l’attention de la défense sur cette décision
19 pour faire en sorte que, chaque fois que des déclarations liminaires font
20 l’objet d’une demande de versement de la part du bureau du Procureur, il
21 n’y ait pas de points dans cette déclaration qui fassent l’objet d’une
22 opposition par la défense.
23 Je pense que cela étant dit, nous pouvons poursuivre.
24 M. Williamson (interprétation) - Monsieur le Président, très
25 brièvement, avant de revenir au témoignage de ce médecin, nous voudrions
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1 formuler une demande.
2 Nous demandons votre autorisation afin de désigner un enquêteur
3 qui pourrait
4 entendre des témoignages en vertu de l'article 90 (E) qui permet à un
5 enquêteur, qui pourrait venir témoigner par la suite au cours de nos
6 débats, d'observer ce qui se passe dans cette salle d'audience. Nous
7 voudrions nommer un enquêteur pour ce faire.
8 M. le Président (interprétation) - Avez-vous besoin d'une
9 décision immédiate ?
10 M. Williamson (interprétation) - Non. C'est quelque chose que
11 nous voudrions faire dès que possible. Faites comme cela vous semble le
12 plus opportun.
13 M. le Président (interprétation) - Très bien, peut-être plus
14 tard alors.
15 M. Williamson (interprétation) - Madame, lorsque nous avons
16 interrompu nos débats, vous disiez que vous avez vu que des patients
17 étaient transférés à l'extérieur de l'hôpital au moment où la réunion avec
18 M. Sljivancanin tirait sur sa fin.
19 Mme Striber (interprétation) - Pas après la fin de la réunion,
20 mais au cours de cette réunion, les gens ont été transférés.
21 M. Williamson (interprétation) - La façon dont ces personnes
22 étaient sorties de l'hôpital, pensez-vous que c'était une manière normale
23 de le faire ? Serait-ce la procédure normale suivie pour faire sortir des
24 patients ?
25 Mme Striber (interprétation) - Je ne pourrais pas parler de
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1 procédure normale pour faire sortir ces patients parce que, dans
2 l'hypothèse de l'évacuation de patients, des médecins ou du personnel
3 médical devraient en être informés, ils auraient su qu'une évacuation de
4 ce type devait avoir lieu.
5 M. Williamson (interprétation) - Cela se passait-il à un rythme,
6 à une vitesse normale ou, là aussi, les choses étaient-elles anormales ?
7 Mme Striber (interprétation) - Non. Cela semblait être rapide,
8 à la hâte.
9 M. Williamson (interprétation) - Qu'avez-vous pensé à ce moment-
10 là ? Comment avez-vous évalué les événements ?
11 Mme Striber (interprétation) - Pourriez-vous, s'il vous plaît,
12 expliquer un peu votre
13 question ?
14 M. Williamson (interprétation) - D'après ce que vous voyez à ce
15 moment-là et d'après la procédure utilisée pour faire sortir ces patients,
16 avez-vous tiré des conclusions sur les événements qui étaient en train de
17 se dérouler, ce qui était fait à ce moment-là ?
18 Mme Striber (interprétation) - A la lumière des faits, tout le
19 personnel médical à ce moment-là se trouvait à cette réunion, dans cette
20 pièce, avec le Major Sljivancanin comme je l’ai dit, les patients
21 sortaient, étaient accompagnés par l'armée. Ils n'étaient pas escortés par
22 le personnel médical comme on nous l'avait dit et comme cela aurait été
23 normal pour évacuer les personnes d'un hôpital. On avait l'impression, ce
24 n'était pas vraiment une impression, c'est une affirmation, que cela était
25 fait à la hâte. On les pressait de sortir de cet hôpital à ce moment-là.
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1 M. Williamson (interprétation) - Après la réunion, à la fin de
2 cette réunion, vous a-t-on demandé d'assister à une autre réunion ?
3 Mme Striber (interprétation) - Oui, après la première réunion,
4 les médecins ont reçu la demande de rencontrer le Dr Ivankovic. C'était
5 très bref. A ce moment-là, on nous a donné la possibilité de choisir. En
6 tant que médecin, nous pouvions ou rester ou bien partir à Zagreb ou à
7 Belgrade.
8 M. Williamson (interprétation) - A la fin de cette réunion avec
9 le docteur Ivankovic, avez-vous eu la possibilité d'aller vérifier la
10 santé ou l'état de vos patients ?
11 Mme Striber (interprétation) - Oui. Après cette réunion, je me
12 suis rendue dans l'unité de l'hôpital qui était la mienne pendant toute la
13 guerre. J'ai parcouru quelques couloirs, mais mes patients n'étaient plus
14 dans leur lit.
15 M. Williamson (interprétation) - Combien de patients traitiez-
16 vous ?
17 Mme Striber (interprétation) - Vingt-quatre.
18 M. Williamson (interprétation) - Combien de ces patients étaient
19 des hommes et combien des femmes, si vous vous en souvenez ?
20 Mme Striber (interprétation) - Il n'y avait que trois femmes.
21 M. Williamson (interprétation) - Lorsque vous êtes revenue les
22 voir, combien en restait-il ?
23 Mme Striber (interprétation) - Je n'en ai vu que deux, deux de
24 mes patientes femmes se trouvaient dans leur lit.
25 M. Williamson (interprétation) - Donc tous les autres hommes,
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1 c’est-à-dire les vingt-et-un hommes, et une femme avaient été emmenés,
2 n'est-ce pas ?
3 Mme Striber (interprétation) - Je ne les ai pas trouvés à ce
4 moment-là. En ce qui concerne ceux que j'ai vu emmener, je peux parler. En
5 ce qui concerne les autres, je ne peux rien dire.
6 M. Williamson (interprétation) - A un moment donné, aviez-vous
7 dressé une liste de vos patients ?
8 Mme Striber (interprétation) - La veille de l'évacuation ou de
9 l'annonce de l'évacuation, j'ai dressé une liste des patients. Il
10 s'agissait de patients qui souffraient de problèmes oto-rhino-
11 laryngologiques. Selon l'accord, ils devaient être transportés en même
12 temps que moi.
13 M. Williamson (interprétation) - A ce stade, je voudrais
14 montrer un document au témoin. Je crois qu'il s'agit de la pièce de
15 l'accusation n° 12.
16 Mme Striber (interprétation) - Oui, il s'agit bien de la liste.
17 M. Williamson (interprétation). - Et c'est la liste que vous
18 avez dressée de vos patients, n'est-ce pas ?
19 Mme Striber (interprétation). - Oui.
20 M. Williamson (interprétation). - Je voudrais notamment attirer
21 votre attention sur quelques témoins. Monsieur le Président, je peux vous
22 fournir une copie de ce document en croate.
23 Si vous me permettez, Madame et Messieurs les Juges, je peux
24 faire en sorte que le témoin passe en revue les différents noms et dire
25 rapidement quelles sont les indications qui figurent à côté de ces noms,
Page 401
1 quelles blessures, quelles raisons de l'hospitalisation, etc. Pourriez-
2 vous faire cela, docteur ?
3 M. le Président (interprétation). - Je ne pense pas que nous
4 devions passer en revue tous les noms, peut-être quelques-uns.
5 M. Williamson (interprétation). - Très bien, Monsieur le
6 Président. Je voudrais attirer votre attention sur un certain nombre
7 d'entre eux, M. Josip Bradaric notamment. Quelle était la nature de ses
8 blessures ? Pourriez-vous dire aux juges ce qui est dit de cette personne,
9 de quelles blessures elle souffrait, etc ?
10 Mme Striber (interprétation). - Il est dit qu'il a des blessures
11 au niveau de la membrane du tympan et du crâne, des problèmes d'yeux
12 également et des blessures au niveau de la main droite ou du bras droit.
13 M. Williamson (interprétation). - N'est-il pas exact que
14 certaines des blessures étaient vraies et que d'autres avaient été
15 ajoutées à cette liste ?
16 Mme Stribel (interprétation). - Oui, c'est exact.
17 M. Williamson (interprétation). - Quelles blessures figurant sur
18 cette liste n'étaient pas véritables et ont été rajoutées par la suite à
19 l'hôpital ?
20 Mme Striber (interprétation). - Il s'agit de lésions bilatérales
21 de la membrane de l'oreille. Cela a existé. La blessure au bras droit
22 existait également. Mais la lésion au niveau de l'oeil a été ajoutée. Ce
23 n'était qu'une toute petite lésion.
24 M. Williamson (interprétation). - Y avait-il une raison
25 particulière pour essayer d'aggraver artificiellement son état de santé,
Page 402
1 d'ajouter des blessures plus graves qu'elles ne l'étaient réellement ?
2 Mme Striber (interprétation). - Je vais essayer du mieux que je
3 peux d'expliquer
4 cela. Trois mois de guerre, trois mois que vous passez à l'hôpital. Vous
5 voyez tous les jours de plus en plus de personnes qui meurent autour de
6 vous. Vous vivez la mort de vos parents très proches, de femmes et
7 d'enfants. Une telle misère, une telle souffrance, une telle tristesse en
8 un seul endroit, c'est même très difficile à décrire avec des mots.
9 Vous êtes entouré de cela. Vous êtes un médecin, mais en même
10 temps vous êtes aussi un être humain et c'est extrêmement difficile à
11 supporter. Les combats arrivent à leur terme, vous voyez la fin de tout
12 cela, le silence s'établit. On dirait un silence de mauvais augure. On ne
13 sait pas à quoi s'attendre. A ce moment-là, vous n'êtes plus seulement un
14 médecin, vous êtes une vraie personne.
15 Quelqu'un vous regarde et vous supplie de l'aider. Ce sont mes
16 collègues, mes amis, des gens avec qui j'ai grandi et vécu. Outre le fait
17 que je suis un médecin, un être humain doit aider un autre être humain.
18 Vous avez donc une grande responsabilité à assumer. Quelqu'un met entre
19 vos mains la vie d'une personne qui lui est chère. Quelqu'un vous supplie
20 de sauver cette vie et vous, vous êtes juste un être humain qui veut en
21 aider un autre.
22 J'essaie de vous expliquer la situation que vous vivions à ce
23 moment-là. Je n'ai pas posé de questions, je n'ai pas demandé de raisons,
24 elles ne m'intéressaient pas à ce moment-là. J'ai juste dit : "Oui,
25 j'essaierai d'aider". Comprenez-moi bien, je n'étais qu'un être humain qui
Page 403
1 essayait d'apporter son aide à un autre. J'essayais, je le répète.
2 M. Williamson (interprétation). - Le fait que certaines
3 blessures aient été ajoutées ou falsifiées avait pour objectif de sauver
4 la vie de ces personnes, n'est-ce pas ?
5 Mme Striber (interprétation). - Oui, c'était le seul objectif.
6 M. Williamson (interprétation). -De qui fallait-il sauver ces
7 personnes ?
8 Mme Striber (interprétation). - Je ne sais pas... Je ne sais pas
9 si je peux vous expliquer, mais des personnes qui pilonnaient la ville
10 pendant ces trois mois et qui avaient provoqué déjà tant de morts.
11 M. Williamson (interprétation). - Et Josip Bradaric, la personne
12 dont nous avons parlé, a été emmené ce matin-là, n'est-ce pas ?
13 Mme Striber (interprétation). - Oui, effectivement il a été
14 emmené.
15 M. Williamson (interprétation). - Savez-vous si on l'a revu
16 vivant depuis ?
17 Mme Striber (interprétation). - Non, on ne l'a pas retrouvé.
18 M. Williamson (interprétation). - Parmi vos patients qui ont été
19 emmenés, savez-vous si l'un ou l'autre a été retrouvé et identifié
20 depuis ?
21 Mme Striber (interprétation). - Un grand nombre d'entre eux ont
22 été identifiés, malheureusement dans le charnier d'Ovcara.
23 M. Williamson (interprétation). - Après que les patients ont été
24 emmenés, tôt le matin du 20, qu'avez-vous fait pendant le reste de la
25 matinée ?
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1 Mme Striber (interprétation). - Pendant le reste de la matinée,
2 je suis allée à l'endroit où j'habitais. J'ai rassemblé mes affaires et je
3 suis sortie du complexe de l'hôpital. Pendant un certain temps, nous
4 voulions tous nous rendre en Croatie. Nous nous tenions devant la salle
5 d'urgence, c'est-à-dire à l'intérieur du complexe de l'hôpital,. Après un
6 certain temps, combien de temps je ne peux pas vous dire, je ne sais pas
7 si c'était une heure ou deux heures après, en tout cas c'est une période
8 où le temps s'arrête. Nous sommes rentrés devant l'ancien tribunal. Un bus
9 nous attendait et nous a fait quitter la ville.
10 M. Williamson (interprétation). - Alors que vous sortiez de
11 Vukovar, avez-vous pu observer ce qui était arrivé à la ville ces trois
12 derniers mois ?
13 Mme Striber (interprétation). - La ville avait une apparence
14 terrible. Elle ne ressemblait plus à notre ville. Certains bâtiments
15 étaient méconnaissables parce qu'ils avaient été extrêmement touchés. Il y
16 avait beaucoup de dégâts.
17 M. Williamson (interprétation). - Avez-vous pu voir des corps de
18 personnes qui avait été tuées ?
19 Mme Striber (interprétation). - Nous traversions la ville et, au
20 centre, nous avons vu certains cadavres sur le côté de la route.
21 M. Williamson (interprétation). - Et où vous a-t-on emmenés ? Où
22 ces bus vous ont-ils emmenés ?
23 Mme Striber (interprétation). - Nous avons traversé le centre-
24 ville en bus. Nous avons suivi la rue Radiceva, puis nous avons tourné
25 vers l’école Stiepan-Stupan*. Ensuite nous avons suivi la rue de Cenoz*
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1 vers le centre médical et les casernes. Après cela, nous devions aller à
2 Bogdanovci et Nustar. En fait, c'était l'itinéraire. Non, pardon,
3 l'itinéraire initial était de passer par Vinkoci. A un moment donné, les
4 bus se sont arrêtés et on nous a dit que le gouvernement croate ne
5 souhaitait pas nous recevoir. On nous a dirigé Nustar.
6 M. Williamson (interprétation). - A votre connaissance, qu'est-
7 il arrivé à la population croate qui vivait à Vukovar jusqu'en 1991 ?
8 Mme Striber (interprétation). - La plupart des hommes ont fini
9 dans des camps et un maigre pourcentage d'entre eux ont réussi à s'enfuir
10 et à aller où ils le souhaitaient.
11 M. Williamson (interprétation). - Et les femmes et les enfants
12 ont-ils eu la possibilité de rester sur place ?
13 Mme Striber (interprétation). - Je ne peux pas vous dire parce
14 que je ne serais pas précise.
15 M. Williamson (interprétation). - Je n'ai plus de questions.
16 M. le Président (interprétation). - Le conseil de la défense.
17 Mais, avant de commencer, puis-je vous rappeler, en guise d'avertissement,
18 de ne pas aller trop vite lorsque vous poserez les questions au témoin.
19 Pourriez-vous laisser un certain temps avant de poser vos questions pour
20 que nous ayons l'interprétation ?
21 M. Williamson (interprétation). - Simplement, une petite
22 question, Monsieur le Président. J'ai oublié de verser les pièces 11 et
23 12. Je voudrais donc en demander le versement,
24 c'est-à-dire les pièces de l'accusation 11, qui est un plan du sous-sol de
25 l'hôpital, et la pièce 12, qui est la liste que le témoin a préparée.
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1 M. le Président (interprétation). - Oui très bien. Merci.
2 M. Fila (interprétation). - Vous nous avez dit qu'on vous a
3 donné la possibilité de rester. Un quelconque médecin croate est-il resté
4 à l'hôpital ?
5 Mme Striber (interprétation). - Je crois que oui, mais je ne
6 peux pas en être complètement sûre. Mais je crois que oui.
7 M. Fila (interprétation). - Puis-je vous demander pourquoi vous
8 n'êtes pas restée ?
9 Mme Striber (interprétation). - Mon plus grand souhait était de
10 voir mes enfants que je n'avais pas vus depuis trois mois. C'était mon
11 seul souhait d'ailleurs.
12 M. Fila (interprétation). - Donc, il n'y avait pas d'autre
13 raison qui vous a poussée à partir, sauf votre désir de voir vos enfants
14 et, j'en suis sûr, votre mari ?
15 Mme Striber (interprétation). - A ce moment-là, oui. Après cela,
16 j'ai eu le temps d'y réfléchir.
17 M. Fila (interprétation). - Dans votre déclaration, il est dit
18 que des Serbes avaient abandonné leur position. Pourquoi ?
19 Mme Striber.(interprétation). - Que voulez-vous dire par
20 "position" ?
21 M. Fila (interprétation). - "Le chef du département
22 ophtlamologique était serbe, mais il est parti et d'autres Serbes ont fait
23 la même chose", je cite une phrase de votre déclaration.
24 Mme Striber (interprétation). - A mon avis, tous les gens ont
25 décidé en suivant leur avis, leur souhait, alors c'est à eux qu'il faut
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1 poser la question.
2 M. Fila (interprétation). - Oui, mais je vous pose la question à
3 vous. Avant l'incident à Borovo Selo en mai 1991, s'est il produit quoi
4 que ce soit ou, tout d'un coup, les Serbes ont-ils décidé de tuer
5 12 policiers parce qu'ils n'avaient rien de mieux à faire ?
6 Mme Striber (interprétation). - Vous savez, je n'ai jamais fait
7 de politique, je ne suis qu'un médecin. C'est assez difficile pour moi de
8 répondre à cette question.
9 M. Fila (interprétation). - Avez-vous entendu parler de Tomislav
10 Macek* ?
11 Mme Striber.(interprétation). - Oui.
12 M. Fila (interprétation). - Le connaissiez-vous ?
13 Mme Striber.(interprétation). - Non.
14 Fila (interprétation). - Avant le 2 mai 1991, y avait-il des
15 exercices qui étaient pratiqués avec des armes ?
16 Mme Striber (interprétation). - Je ne sais pas.
17 M. Fila (interprétation). - Comment avez-vous entendu parler de
18 l'incident de Borovo Selo, alors ?...
19 Savez-vous maintenant pourquoi le chef de l'unité
20 ophtalmologique est parti puisque vous travailliez avec lui ?
21 Mme Striber (interprétation). - Eh bien, je ne sais pas. Je
22 pense que lui seulement pourrait répondre à cette question.
23 M. Fila (interprétation). - Vous le lui avez demandé ?
24 Mme Striber (interprétation). - Je n'ai pas eu le temps de le
25 lui demander.
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1 M. Fila (interprétation). - Il est parti si rapidement ?
2 Mme Striber (interprétation). - Il n'a pas dit au revoir
3 lorsqu'il est parti.
4 M. Fila (interprétation). - Est-il normal de quitter un tel
5 poste sans dire au revoir ?
6 Mme Striber (interprétation). - Non, effectivement, ce n'est pas
7 normal.
8 M. Fila (interprétation). - Pensez-vous qu'il s'est senti
9 menacé ?
10 Mme Striber (interprétation). - Je pense qu'il n'avait personne
11 à craindre.
12 M. Fila (interprétation). - Je vous demande si vous pensez qu'il
13 se sentait menacé ?
14 Mme Striber (interprétation). - Je ne peux pas vous dire ce
15 qu'il éprouvait à ce
16 moment-là.
17 M. Fila (interprétation). - Peut-être savez-vous combien de
18 Serbes sont partis avant que vous ne partiez pour aller voir vos enfants ?
19 Mme Striber (interprétation). - Non.
20 M. Fila (interprétation). - Est-ce qu'il y en a un ou plusieurs
21 qui sont partis ?
22 Mme Striber (interprétation). - Oui, sans doute, mais je ne sais
23 pas combien.
24 M. Fila (interprétation). - Vous ne savez pas pourquoi non
25 plus ?
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1 Mme Striber (interprétation). - Non, effectivement.
2 M. Fila (interprétation). - Ces gens dont vous avez dit qu'ils
3 étaient en bonne santé et dont vous avez falsifié le dossier médical en
4 disant qu'ils étaient malades, s'agissait-il de personnes armées, de
5 combattants, ou s'agissait-il de femmes et d'enfants ?
6 Mme Striber (interprétation). - Je ne sais pas s'ils portaient
7 des armes, mais lorsqu'ils sont venus me voir, aucun n'avait d'arme sur
8 lui.
9 M. Fila (interprétation). - Vous savez qui sont les gens
10 jouissant de leur pleine capacité, en tant que médecin. Ce ne sont pas des
11 personnes âgées, ce ne sont pas des femmes, ce ne sont pas des enfants.
12 Mme Striber (interprétation). - Dans ce cas-là, vous devriez
13 m'expliquer ce que vous voulez dire par personnes en pleine capacité,
14 personnes en âge de combattre.
15 M. Fila (interprétation). - Eh bien, laissez-moi vous donner une
16 définition plus précise : des hommes entre 18 et 60 ans.
17 Mme Striber (interprétation). - Pourquoi seraient-ils tous des
18 personnes combattantes, des hommes combattants ?
19 M. Fila (interprétation). - Parce qu'ils sont, parfois, soumis à
20 la mobilisation. Je suis sûr que vous avez étudié la médecine dans des
21 conditions de guerre. Sur cette liste de personnes à qui vous avez apporté
22 votre assistance en ajoutant certaines blessures ou certains mots, parce
23 que c'est bien ce que vous avez dit dans votre déclaration, n'est-ce
24 pas ?...
25 Mme Striber (interprétation). - Mais, vous l'avez bien lue ?
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1 M. Fila (interprétation). - Excusez-moi, je parlais de
2 M. Bradaric, un policier. Il n'était pas blessé, mais vous avez ajouté des
3 blessures afin de le mettre dans vos registres, n'est-ce pas ?
4 Mme Striber (interprétation) - Oui, mais vous avez parlé de
5 coupures, de quoi parlez-vous ?
6 M. Williamson (interprétation) - Monsieur le Président,
7 Objection. Il donne cette citation hors contexte. En fait, la déclaration
8 explique clairement les choses.
9 M. le Président (interprétation) - Objection retenue. Pourriez-
10 vous passer à d'autres questions.
11 M. Fila (interprétation) - C'est une citation que je tire de la
12 déclaration.
13 M. le Président (interprétation) - Je me demandai si le témoin
14 avait une copie en serbo-croate de sa déclaration qu'elle a fait à
15 l'époque ?
16 M. Williamson (interprétation) - Elle n'en a pas, mais je serais
17 très heureux de lui en transmettre une si cela peut être d'une quelconque
18 utilité.
19 M. le Président (interprétation) - Oui, elle pourrait alors nous
20 lire le passage pertinent portant sur ce patient. La totalité du passage.
21 Mme Striber (interprétation) - Un instant, s'il vous plaît, que
22 je retrouve le passage. J'y suis. Excusez moi, vous attendez que je lise
23 tout le paragraphe ?
24 "Josip Bradaric, un policier, n'était pas blessé, mais nous lui
25 avons fait une coupure et nous l'avons recousu afin qu'il puisse
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1 s'intégrer au groupe de blessés. Il a été hospitalisé au mois de septembre
2 1991 avec comme problème des perforations du tympan.
3 Il a été appelé et emmené et il est maintenant porté disparu".
4 M. le Président (interprétation) - C'est bien ce que vous avez
5 déclaré lorsque vous
6 avez fait votre déclaration préliminaire aux enquêteurs ? Le passage que
7 vous venez de lire, c'est bien ce que vous avez dit ?
8 Mme Striber (interprétation) - Oui, absolument.
9 M. le Président (interprétation) - Maître Fila, poursuivez, je
10 vous en prie.
11 M. Fila (interprétation) - Est-il dans la coutume que des
12 médecins décident de couper les malades et de les recoudre par la suite ?
13 Est-ce que c'était une pratique courante pour vous ou est-ce une mesure
14 exceptionnelle que vous avez prise ?
15 Mme Striber (interprétation) - J'ai essayé de vous expliquer la
16 situation qui prévalait à ce moment-là, de vous faire comprendre les
17 circonstances et les caractéristiques exceptionnelles de cette situation.
18 M. Fila (interprétation) - Ma question est la suivante. Y a-t-
19 il eu d'autres cas semblables, d'autres cas où des personnes en bonne
20 santé ont été incisées pour pouvoir être intégrées dans la liste des
21 blessés, parmi les personnes auxquelles vous avez mis des plâtres ? Je
22 vais plutôt lire votre déclaration.
23 Mme Striber (interprétation) - Je n'ai pas mis de plâtre à qui
24 que ce soit.
25 M. Fila (interprétation) - Je lis : "Pour nombre d'entre eux,
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1 nous avons mis des plâtres et fait de fausses blessures afin qu'ils aient
2 l'air blessé". Ma question est la suivante : y a-t-il eu des cas où un
3 homme âgé ou une femme âgée où un enfant a reçu un plâtre ?
4 Mme Striber (interprétation) - Je ne peux pas le dire en toute
5 certitude.
6 M. Fila (interprétation) - Y a-t-il eu des cas d'hommes ou de
7 femmes âgés ou d'enfants qui ont reçu des coupures ?
8 Mme Striber (interprétation) - Non.
9 M. Fila (interprétation) - N’y avait-il pas des combattants qui
10 avaient peut-être la conscience un peu lourde ?
11 Mme Striber (interprétation) - Je ne sais pas, mais j’ai
12 l’impression que cela sort
13 complètement du contexte des questions normales.
14 M. Williamson (interprétation) - Oui. Opposition à la référence
15 faite ici. Comment ce témoin peut-il savoir si la personne blessée avait
16 la conscience tranquille ou pas ? Ces questions sont tendancieuses et j'y
17 fais opposition.
18 M. Fila (interprétation) - Mais peut-être que Madame le Docteur
19 sait si c’est une femme, un enfant ou un combattant que l'on essaie de
20 protéger ?
21 M. le Président (interprétation) - Je vais demander au conseil
22 de la défense de s'en tenir aux questions qui nous intéressent
23 directement, aux questions pertinentes.
24 M. Fila (interprétation) - Dans une partie de votre déclaration,
25 vous déclarez, je cite : "A ce moment-là, il était inévitable que le reste
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1 de la ville tombe sous l'attaque, que les soldats rendent leurs armes et
2 qu'ils s'habillent en civil. Nombre d'entre eux se sont couverts de
3 bandages ou de plâtres pour avoir l'air blessé".
4 Cela veut bien dire que vous saviez que ces personnes étaient
5 des soldats, n'est-ce pas, qui ont changé leurs uniformes pour des habits
6 civils ? Ils se sont mis des bandages, des plâtres ou on les leur a mis
7 pour qu'ils passent pour des blessés. Ce sont des mesures que vous avez
8 prises personnellement ?
9 Mme Striber (interprétation) - J'en ai entendu parler.
10 M. Fila (interprétation) - Non, vous avez dit que vous ne le
11 saviez pas, que vous en aviez entendu parler. C’est bien cela que vous
12 avez dit ? Que vous le saviez. Ce sont ces personnes-là sur lesquelles
13 vous avez fait des incisions, des points de suture ?
14 Mme Striber (interprétation) - Je ne sais pas si c'était un
15 combattant ou pas.
16 M. Fila (interprétation) - Mais je cite un passage de votre
17 déclaration, Madame, à la page 3, quatrième paragraphe à partir du haut.
18 Veuillez lire ce paragraphe aux juges, s'il vous plaît, parce
19 qu'il me semble que c'est exactement ainsi que la phrase commence.
20 Mme Striber (interprétation) - Je dis simplement que je ne sais
21 pas de qui il s'agit et que j'en ai entendu parler.
22 M. Fila (interprétation) - Veuillez, s'il vous plaît, lire, ce
23 que vous avez déclaré.
24 Mme Striber (interprétation) - Entendu.
25 "Etant donné que la chute du reste de la ville était inévitable,
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1 les soldats ont jeté leurs armes et ont échangé leurs uniformes contre des
2 habits civils. Nombre d'entre eux se sont mis des bandages ou des plâtres
3 pour avoir l'air de personnes blessées".
4 M. Fila (interprétation) - Je vous remercie. C'était là-dessus
5 que portait ma question. Nous allons poursuivre.
6 Mme Striber (interprétation) - Je vous en prie.
7 M. Fila (interprétation) - Monsieur le Président, il y a là une
8 liste de patients qui a été communiquée par le témoin. Elle figure dans
9 cette déclaration. Pour vous aider à la trouver, c'est la page 5 à partir
10 de la fin de votre déclaration.
11 Il s'agit d'une liste qui commence avec le nom Zvonimir Satra*.
12 L’avez-vous trouvée ?
13 Mme Striber (interprétation) - Oui.
14 M. Fila (interprétation) - Au numéro 3, il est dit : Bozidar
15 Zedec.
16 Mme Striber (interprétation) - Oui.
17 M. Fila (interprétation) - Membre du ZNG, il est dit qu'il est
18 porté disparu.
19 Mme Striber (interprétation) - "Segec".
20 M. Fila (interprétation) - Pardon, "Segec", ici on n'a pas la
21 lettre "s" dans l'alphabet utilisé. J’attire l'attention du juge que ce
22 nom "Segec" ne figure pas dans l'acte d'accusation dressé par le bureau du
23 Procureur.
24 Zoran Kovacevic, membre du ZNG. Vous me suivez ?
25 Mme Striber (interprétation) - Oui.
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1 M. Fila (interprétation) - Il a été blessé à l'oeil droit.
2 D'abord, il a été enregistré comme étant porté disparu. Ensuite, j'ai
3 entendu dire qu'il avait fait l’objet d'un échange. Cette personne figure
4 sur la liste des personnes qui ont été tuées. C’est ainsi que le Bureau du
5 Procureur fait figurer son nom. Savez-vous si cette personne est vivante
6 aujourd'hui ?
7 Mme Striber (interprétation) - Je n'en sais rien.
8 M. Fila (interprétation) - Donc vous ne savez pas que ce que
9 vous avez déclaré ici ?
10 Mme Striber (interprétation) - Je pense et...
11 M. Fila (interprétation) - Je vous interromps, cela n'a pas
12 d’importance.
13 Pour ce qui est de Vedran Galic, avez-vous des informations
14 quelconques portant sur cette personne ? C'est la personne qui est nommée
15 au numéro 10 de la liste.
16 Mme Striber (interprétation) - Oui, j'ai trouvé le nom auquel
17 vous vous référiez.
18 M. Fila (interprétation) - Savez-vous quoi que ce soit à propos
19 de cette personne ? Veuillez lire ce que vous avez dit à son propos.
20 Mme Striber (interprétation) - Aujourd'hui, je ne m'en rappelle
21 plus. Je ne sais pas. C'était une hypothèse que je faisais. Il n'est pas
22 marqué que je sais. Il est dit : "Je crois qu'il a quitté Vukovar dans le
23 convoi". Maintenant, je crois qu'aujourd'hui, il vit aux alentours de
24 Vukovar.
25 M. Fila (interprétation) - Je ne veux pas parler à votre place,
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1 Madame. Je lis simplement ce qui est écrit dans votre déclaration, ce que
2 vous avez dit.
3 Mme Striber (interprétation) - Oui.
4 M. Fila (interprétation) - Le numéro 22.
5 Mme Striber (interprétation) - Oui, 22.
6 M. Fila (interprétation) - Inja Petrovski *.Vous avez déclaré
7 que c'était une civile.
8 Mme Striber (interprétation) - Oui, une civile qui est morte
9 pendant le transport
10 sur la route de Zagreb.
11 M. Fila (interprétation) - C’est bien ce qui s'est passé ?
12 Mme Striber (interprétation) - C'est l'information que l'on m'a
13 donnée.
14 M. Fila (interprétation) - Je souhaite attirer l'attention des
15 juges sur le fait que cette personne est indiquée comme ayant été abattue
16 à Ovcara, tout comme les quatre autres personnes dont j'ai parlé.
17 Je vous remercie. Je n'ai plus de questions à poser.
18 M. le Président (interprétation) - Je vous remercie.
19 Maître Williamson, souhaitez-vous exercer votre droit de réplique ?
20 M. Williamson (interprétation) - Oui. Quelques questions
21 complémentaires.
22 Docteur, Maître Fila vous a posé des questions sur le chef
23 d'ophtalmologie, sur les conditions de son départ. Vous avez dit qu'il
24 était parti. D'autres médecins sont-ils restés à l'hôpital ?
25 Mme Striber (interprétation) - Oui. Ils sont restés.
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1 M. Williamson (interprétation) - Ils ont commencé à assumer
2 leurs tâches journalières comme d'habitude ?
3 Mme Striber (interprétation) - Oui, ils sont restés jusqu'à la
4 fin.
5 M. Williamson (interprétation) - Avez-vous eu connaissance de
6 mauvais traitements ou de choses désagréables qui seraient arrivées à ces
7 médecins qui sont restés sur place ?
8 Mme Striber (interprétation) - Non. D'ailleurs, ils travaillent
9 encore dans ce même hôpital.
10 M. Williamson (interprétation) - Maître Fila vous a posé une
11 question relative à la différence de traitement que recevaient les hommes,
12 les enfants et les combattants. Au moment où la JNA est entrée dans
13 l'hôpital, l'un de vos malades était-il en train de se battre ?
14 Mme Striber (interprétation) - Non, personne.
15 M. Williamson (interprétation) - Ont-ils commencé à combattre
16 les membres de la JNA ?
17 Mme Striber (interprétation) - A ce moment-là, personne ne se
18 battait.
19 M. Williamson (interprétation) - Etaient-ils armés ?
20 Mme Striber (interprétation) - Non.
21 M. Williamson (interprétation) - Les soldats de la JNA étaient-
22 ils armés ?
23 Mme Striber (interprétation) - Oui. Ils l'étaient.
24 M. Williamson (interprétation) - Il s'agit donc là de soldats
25 armés qui emmènent hors de l'hôpital des blessés non armés.
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1 M. May (interprétation) - (Hors micro).
2 M. Williamson (interprétation). - Dans le cadre du
3 contre-interrogatoire, on vous a demandé s'il était de pratique courante
4 pour des médecins de faire des coupures sur des malades qui n'étaient pas
5 en fait blessés. Est-il de pratique courante que des soldats emmènent des
6 blessés hors d'un hôpital ? Est-il de pratique courante que des soldats,
7 non seulement les emmènent mais les exécutent ?
8 Mme Striber (interprétation). - Avec votre autorisation...
9 M. Fila (interprétation). - Objection, Monsieur le Président, de
10 quoi parlons-nous ici ?
11 M. le Président (interprétation). - Objection retenue.
12 M. Williamson (interprétation). - Je n'ai plus de question à
13 poser, Monsieur le Président. Cependant j'aimerais demander le versement
14 au dossier de la déclaration du Dr Striber. Je vais poser quelques
15 questions relatives au versement au dossier de cette pièce.
16 Docteur, vous avez déjà dit, à propos de cette déclaration que
17 vous avez faite le 14 juin 1995... Ou plutôt ma question est la suivante :
18 vous rappelez-vous avoir fait cette
19 déclaration à cette date ?
20 Mme Striber (interprétation). - Oui, je m'en souviens.
21 M. Williamson (interprétation). - Je vais maintenant demander à
22 ce qu'un exemplaire en anglais de la déclaration soit montré au témoin.
23 Veuillez nous dire si vous reconnaissez votre signature sur ce document.
24 Je demande que cette pièce soit enregistrée sous la cote "pièce de
25 l'accusation 13".
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1 Mme Striber (interprétation). - Oui, c'est bien ma signature.
2 M. Williamson (interprétation). - C'est bien votre signature ?
3 Mme Striber (interprétation). - Oui.
4 M. Williamson (interprétation). - Monsieur le Président, je
5 demande donc le versement au dossier de cette pièce, la pièce de
6 l'accusation 13.
7 M. le Président (interprétation). - Y a-t-il des objections ?
8 Maître Fila ?
9 M. Fila (interprétation). - Aucune objection, Monsieur le
10 Président. Cela dit, objection à la façon dont l'accusation a procédé. On
11 aurait dû demander le versement au dossier avant que je ne commence mon
12 contre-interrogatoire. Les règles du jeu ne sont plus les mêmes pour la
13 défense puisque l'accusation a droit à des questions complémentaires. Si
14 cela continue, je vais abandonner mon droit au contre-interrogatoire.
15 Après mes questions, voilà que l'accusation pose toute une série de
16 nouvelles questions. Ce n'est pas juste.
17 Avec l'autorisation du Tribunal -que le Procureur ne se froisse
18 pas, cela n'a rien à voir avec tout cela- je voudrais soulever un point.
19 Ce plan du sous-sol de l'hôpital.. Je répète que cela n'a rien à voir avec
20 le sujet que je viens d'aborder, je ne vais pas lancer une polémique. Le
21 point 26 qui apparaît sur ce plan, de quoi s'agit-il exactement ?
22 Je peux poser cette question. Si l'accusation a une objection à
23 faire, je retire ma question. Pouvez-vous me dire quelle est la pièce qui
24 porte le n° 26 ?
25 M. le Président (interprétation). - Vous posez votre question au
Page 420
1 témoin ou à qui ?
2 M. Fila (interprétation). - Avec l'autorisation du Tribunal, je
3 voudrais soulever ce problème. Cela n'a pas été expliqué. Quelle est cette
4 pièce ? Que signifie ce n° 26 ? Tout cela est lié à la présence de la JNA
5 sur place. Peut-on répondre à la question ?
6 M. le Président (interprétation). - Si l'accusation n'a pas
7 d'opposition, je souhaiterais que le témoin réponde à la question.
8 M. Williamson (interprétation). - Parfait,
9 Monsieur le Président.
10 M. le Président (interprétation). - Madame, puis-je vous
11 demander de répondre à la question ?
12 M. Williamson (interprétation). - Je crois qu'elle n'est pas en
13 possession du document, Monsieur le Président.
14 Mme Striber (interprétation). - La pièce n° 26 ? Je vois. Je
15 vais essayer de répondre aussi bien que possible.
16 M. Fila (interprétation). - Ma question est simple. Pouvez-vous
17 nous dire ce qu'est cette pièce ? Il n'y a pas de lits dans cette pièce.
18 Il est marqué « réserve » ou « réservistes ». Je ne sais pas pourquoi il
19 n'y a pas de lits dans cette pièce. De quelle période parlons-nous ? Il
20 est indiqué « réservistes ». Subitement je ne comprends plus très bien où
21 nous en sommes, pourquoi cela nous intéresse.
22 Mme Striber (interprétation). - Tout d'abord, je précise que ce
23 n'est pas moi qui ai dessiné ce plan du sous-sol. Je ne peux donc pas dire
24 pourquoi les lits ne figurent pas ni pourquoi il est marqué
25 « réservistes ». Je ne comprends pas pourquoi c'est à moi qu'on pose cette
Page 421
1 question. Mais pour autant que je vous comprenne, je ne sais pas pourquoi
2 cela apparaît.
3 M. Fila (interprétation). - C'est précisément pour cela,
4 Monsieur le Président, que je pose la question. Je ne comprends pas. Cette
5 pièce 26, on voit bien que c'est une pièce, mais apparemment, sur le plan,
6 il n'y a pas de lits. Normalement, c'est une chambre de malades et il est
7 marqué « réservistes ». Les réservistes de la JNA ? Je ne sais pas. Qui
8 sont ces réservistes de
9 la JNA ? Tout cela est très confus.
10 Que veut dire cette pièce n° 26 ? Si on pouvait essayer
11 d'apporter un éclaircissement sur ce point, ce serait bien. Si on n'y
12 arrive pas, il revient à l'accusation de nous expliquer de quoi il s'agit.
13 Mme Striber (interprétation). - Pour autant que je sache, à
14 cette époque-là, il y avait des membres de la JNA qui étaient des malades
15 à l'hôpital, qui étaient traités, eux-aussi, à l'hôpital. Peut-être est-ce
16 ce dont il s'agit.
17 M. le Président (interprétation). - Nous essayons simplement de
18 savoir ce qui se trouvait dans la pièce 26. Pouvez-vous nous dire ce que
19 qui s'y trouvait ? A quelles fins cette pièce était-elle utilisée ? Vous
20 en souvenez-vous d'ailleurs ?
21 Mme Striber (interprétation). - Pour autant que je m'en
22 souvienne, on n'a pas indiqué les lits qui figuraient dans la pièce 26,
23 mais il y avait bien quelques malades qui étaient des membres de la JNA à
24 l'hôpital et qui se trouvaient dans certaines chambres. Je ne peux pas en
25 toute certitude affirmer que c'était dans cette pièce-là mais, ici, il est
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1 indiqué que c'était une pièce réservée aux réservistes de la JNA.
2 Je ne sais pas s'il s'agit là d'un point délicat, d'un point qui
3 pourrait porter à controverse, cette idée de réserviste. Je pense que
4 c'est là que se trouvaient les blessés de l'armée de la JNA.
5 M. le Président (interprétation). - Pour revenir à l'objection
6 soulevée par Me Fila, avec tout le respect que je vous dois, je dois vous
7 signaler, Monsieur, que vous avez mélangé deux problèmes. Tout d'abord le
8 problème suivant : est-ce que l'accusation a le droit de poser des
9 questions complémentaires au témoin ? Là, c'est un droit fondamental de
10 l'accusation, qui apparaît dans notre Règlement de procédure et de preuve.
11 Vous avez mélangé ce premier problème au problème suivant, c'est-à-dire le
12 moment où il est indiqué de demander le versement au dossier d'une
13 déclaration de témoin.
14 Vous nous dites que vous voudriez que la demande de versement au
15 dossier soit faite avant que vous ne commenciez votre
16 contre-interrogatoire. C'est bien ce que vous voulez ? Vous ne voulez pas
17 que ce soit fait après le contre-interrogatoire ? C'est bien ce que vous
18 avez dit, n'est-ce pas ?
19 M. Fila (interprétation). - Je ne nie pas à l'accusation le
20 droit de poser des questions complémentaires au témoin après mon
21 contre-interrogatoire. Mais si, au cours du droit de réplique,
22 l'accusation demande que la déclaration soit versée au dossier en tant
23 qu'élément de preuve, je ne peux plus par la suite poser de questions
24 relatives à cette déclaration parce que je n'y ai plus droit.
25 En conséquence, je considère que cette mesure est injuste. Voilà
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1 ce que je souhaite dire. Je ne nie en aucun cas le droit de l'accusation à
2 poser des questions dans le cadre de son droit de réplique. Bien sûr qu'il
3 y a droit ! Mais on ne peut pas me nier, à moi, le droit de poser au
4 témoin des questions relatives à la déclaration. Normalement, cette
5 déclaration est versée après mon contre-interrogatoire.
6 M. le Président (interprétation). - Vous avez le droit de faire
7 objection au fait que la déclaration du témoin soit versée au dossier
8 d'une façon générale, ou bien, si cette déclaration est effectivement
9 versée au dossier, vous demandez en fait que ce versement se fasse avant
10 le contre-interrogatoire et non pas après. C'est bien votre question ? Si
11 c'est le cas, nous prendrons une décision sur ce point plus tard.
12 M. Williamson (interprétation). - Monsieur le Président, très
13 brièvement je voudrais expliquer un certain nombre de choses. Il me semble
14 que Me Fila avait déjà posé des questions relatives à cette déclaration.
15 Le fait que celle-ci ait été versée au dossier après son contre-
16 interrogatoire n'affecte en rien sa capacité à poser des questions
17 relatives à la déclaration.
18 Deuxièmement, c'est un oubli de ma part de ne pas avoir demandé
19 le versement au dossier de cette déclaration au cours de l'interrogatoire
20 principal. C'est un simple oubli. Sans cet
21 oubli, je n'aurais pas demandé le versement plus tard.
22 M. le Président (interprétation). - Parfait. Y a-t-il objection
23 au fait que le témoin puisse se retirer de façon définitive ?
24 M. Fila (interprétation). - Monsieur le Président, étant donné
25 que le Procureur avait dit qu'il avait oublié de faire quelque chose, je
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1 retire tout ce que je viens de dire. Si c'est simplement un oubli, je
2 retire tout. Mais je veux qu'à l'avenir il demande le versement au dossier
3 de la déclaration en temps opportun, pendant l'interrogatoire principal.
4 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie,
5 Maître Fila. Y a-t-il objection à ce que le témoin se retire de façon
6 définitive ?
7 M. Williamson (interprétation). - Aucune objection.
8 M. le Président (interprétation). - Parfait. Madame, merci
9 infiniment d'être venue témoigner, vous pouvez vous retirer.
10 (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)
11 Tandis que le témoin se retire, je vais essayer de gagner du
12 temps en posant deux questions. La première est adressée à Me Fila. Vous
13 avez eu l'obligeance de nous communiquer ce matin un ensemble de documents
14 rédigés en serbo-croate. Parmi ces documents se trouve la loi sur la
15 défense nationale du 23 avril 1982, la loi sur le service militaire du
16 2 décembre 1985 et la loi amendée sur le service militaire votée le
17 26 avril 1991, qui est tirée du Journal officiel de la RSFY.
18 Bien sûr, nous vous remercions de nous avoir communiqués ces
19 documents, mais nous nous demandions s'il vous serait possible d'indiquer
20 à la fois aux Juges et au Procureur les dispositions pertinentes de ces
21 lois, celles qui nous intéressent directement, parce qu'il nous faut en
22 obtenir la traduction en anglais. Il serait vraiment inutile de faire
23 traduire l'intégralité de ces lois qui sont assez longues.
24 Ma seconde question est la suivante. Elle est d'ailleurs
25 relative à une loi dont nous
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1 avons également besoin. J'espérais que vous pourriez nous la fournir, à
2 savoir la loi portant sur les pouvoirs et les compétences des diverses
3 entités qui constituaient les municipalités en Croatie à l'époque.
4 Vous vous souvenez, nous vous avions demandé de nous fournir
5 cette loi. Notamment nous serions intéressés par les dispositions de la
6 loi qui portent sur les pouvoirs du Président de l'assemblée de la
7 municipalité. Je me demandais si vous pourriez nous faire parvenir cette
8 loi.
9 Avant de faire entrer le prochain témoin, j'en reviens à cette
10 liste de témoins que l'accusation nous a fournie au tout début. Lorsque
11 l'accusation a demandé au tribunal d'autoriser un enquêteur à superviser
12 ou à être présent pendant les audiences, avant que nous en discutions
13 pendant la pause entre nous et les Juges, je voudrais savoir d'abord s'il
14 y a objection de la part du conseil de la défense sur ce point. Avant de
15 nous prononcer sur la question, il faut que nous sachions ce que la
16 défense pense de cette requête. Nous voulons savoir si la défense a des
17 objections à élever.
18 M. Fila (interprétation). - Monsieur le Président, pourquoi
19 avons-nous besoin de cela ? Je ne comprends pas. Si on m'explique pourquoi
20 c'est nécessaire, je ne manquerai pas d'accepter cela.
21 M. Williamson (interprétation). - Dans l'article 90 (D) ou (E)
22 du Règlement, quelque chose permet cela. La raison est que les enquêteurs
23 ont participé à cette affaire depuis le tout début. Ils sont présents lors
24 de l'entretien des témoins et connaissent certains aspects de l'affaire
25 que tous les avocats qui s'occupent de l'affaire ne connaissent pas.
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1 Il est parfois utile d'avoir un enquêteur présent dans
2 l'audience et, au cas où une certaine question se pose, il pourrait être à
3 même de nous apporter des informations qui nous aideraient à bien mener
4 cette affaire.
5 Donc si Me Fila souhaite faire comparaître un enquêteur au cours
6 de l'audience, ou
7 s'il souhaite avoir un enquêteur présent au cours de l'audience, je suis
8 sûr que l'accusation n'aura aucune objection à faire.
9 M. Fila (interprétation). - Je voulais simplement une
10 explication pour comprendre ce qui se passait. Je dois dire que je suis
11 tout à fait d'accord avec cela. Il n'y a pas de problème.
12 M. le Président (interprétation). - Parfait, il n'y a donc pas
13 d'objection, nous nous prononcerons sur ce point par la suite.
14 M. Fila (interprétation). - Pour ce qui est des documents dont
15 vous avez parlé, vous avez reçu tous les documents relatifs aux lois
16 portant sur les services militaires en RSFY. C'est la raison pour laquelle
17 il y a deux lois qui figurent dans le document que je vous ai donné. Je
18 crois que rien ne manque. Je vous fais remarquer également que vous avez
19 dans cet ensemble de documents une loi qui traite de la municipalité de
20 Vukovar et qui explique très clairement quels sont les pouvoirs de la
21 municipalité et de l'assemblée municipale. Tout cela vous a été communiqué
22 le 15 décembre, avec l'ensemble de nos autres requêtes.
23 Vous disposez également de documents qui vous expliquent
24 l'organisation de l'ensemble de la municipalité. Mais il n'y a aucun
25 problème. Je peux, si vous voulez, vous indiquer les articles pertinents
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1 si vous me rendez les documents. Je peux faire un certain nombre
2 d'annotations sur les documents d'ici demain. Je vous les remettrai à ce
3 moment-là.
4 M. le Président (interprétation). - C'est parfait.
5 M. Fila (interprétation). - Je vous remercie Monsieur, je vais
6 le faire.
7 M. le Président (interprétation). - Je suggère maintenant que
8 nous appelions notre prochain témoin.
9 M. Williamson (interprétation). - C'est maître Waespi, mon
10 confrère, qui interrogera le témoin suivant.
11 M. le Président (interprétation). - Nous venons de décider qu'il
12 serait fait droit à votre requête, Monsieur le Procureur. Un enquêteur
13 pourra être présent au cours des audiences.
14 M. Williamson (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.
15 M. le Président (interprétation). - Bonjour. Le témoin pourrait-
16 il prêter serment, s'il vous plaît ?
17 Témoin (interprétation). - Je déclare solennellement que je
18 dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
19 M. le Président (interprétation). - Merci. Vous pouvez vous
20 asseoir.
21 M Waespi (interprétation). - Bonjour, Madame et Messieurs les
22 Juges. Ce témoin a demandé ce week-end que des mesures de protection
23 soient appliquées sur elle, par rapport à son image. Elle ne souhaite pas
24 qu'on montre son visage à l'extérieur de cette salle d'audience, mais elle
25 n'a pas demandé la modification de sa voix.
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1 Je demande également aux collègues de la défense de ne pas
2 utiliser son nom en s'adressant à elle. Comme vous le savez, son nom
3 figure dans les déclarations. Il n'a pas été effacé. Je vous demanderai de
4 bien vouloir ne pas utiliser son nom en lui parlant.
5 Bonjour, vous sentez-vous à l'aise ?
6 Témoin (interprétation). - Oui, merci.
7 M Waespi (interprétation). - Merci. Quel est votre métier ?
8 Témoin (interprétation). - En ce moment, je suis retraitée, mais
9 je suis infirmière de profession.
10 M Waespi (interprétation). - Merci. Pourriez-vous nous raconter
11 très brièvement quelle était votre formation et votre expérience de
12 travail ?
13 Témoin (interprétation). - J'ai terminé l'école supérieure
14 médicale et mon travail était celui d'infirmière principale d'un
15 département.
16 M Waespi (interprétation). - Infirmière principale de quel
17 hôpital ?
18 Témoin (interprétation). - De l'hôpital à Vukovar.
19 M Waespi (interprétation). - Vous avez travaillé à cette place
20 pendant combien de temps ?
21 Témoin (interprétation). - Trente ans.
22 M Waespi (interprétation). - Pouvez-vous nous décrire brièvement
23 de nouveau la situation et surtout les conditions de travail à l'hôpital
24 de Vukovar, au mois d'août, c'est-à-dire entre août et début novembre
25 1991 ?
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1 Témoin (interprétation). - Depuis la fin août, le travail de
2 l'hôpital se déroulait de manière tout à fait étrange, dans des conditions
3 improvisées. Nous devions mettre en place des pièces au sein de l'hôpital
4 qui devaient servir à la fois de salle d'opération et d'endroit où on
5 allait mettre les patients, au cas où la ville serait attaquée.
6 Dès la fin du mois, l'attaque et les pilonnages ont commencé.
7 Nous nous sommes déplacés au sous-sol et dans l'abri antiatomique. Nous
8 avons créé des réserves d'eau, de nourriture et de médicaments. Nous avons
9 continué à travailler à cet endroit jusqu'à fin novembre.
10 M Waespi (interprétation). - Vous avez mentionné que ces
11 attaques sont devenues plus fréquentes. L'hôpital était-il visé
12 directement ? Vous souvenez-vous d'incidents concrets ?
13 Témoin (interprétation). - L'hôpital était la cible quotidienne
14 des attaques. Ce dont nous nous souvenons le mieux, par exemple, c'est le
15 bombardement de l'hôpital. Cela s'est produit au début du mois d'octobre,
16 lorsqu'une grande bombe de 250 kilos est tombée sur l'hôpital et a pénétré
17 tous les étages. Heureusement, la bombe n'a pas explosé mais elle a abîmé
18 le bâtiment et réduit la région dans laquelle il nous était possible de
19 rester.
20 Les attaques ont continué et ont duré jusqu'à l'entrée des
21 forces de la JNA dans l'hôpital.
22 M Waespi (interprétation). - Merci. Est-ce qu'il y a eu des
23 positions à l'extérieur de l'hôpital où on assurait la défense, d'après
24 vos informations ?
25 Témoin (interprétation). - Autour de l'hôpital, il n'y avait pas
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1 de force qui résistait. De toute façon, les agresseurs se trouvaient trop
2 loin. Il était impossible de faire quoi que ce soit
3 pour défendre l'hôpital. Pour le défendre, il aurait fallu avoir des
4 canons, il aurait fallu avoir au moins des mitrailleuses. Pour nous, ce
5 n'était pas possible.
6 M Waespi (interprétation). - Où viviez-vous à l'époque ? A
7 l'hôpital ?
8 Témoin (interprétation). - La plupart du personnel vivaient dans
9 l'hôpital. Il y en avait très peu qui étaient capables de se rendre chez
10 eux, étant donné que leur maison était soit détruite soit quotidiennement
11 attaquée. Ce qui était le plus simple pour le fonctionnement, pour le
12 travail du personnel, c'était de faire en sorte que tout le monde reste
13 sur place. On sortait le moins possible étant donné qu'à la limite, il
14 était possible de sortir, mais on ne savait jamais si la personne pouvait
15 rentrer.
16 M. Waespi (interprétation). - Quels étaient vos horaires, si je
17 peux vous poser une question aussi sobre ?
18 Témoin (interprétation). - En ce qui concerne nos horaires à
19 tous, c'était selon le besoin : quelquefois, cela pouvait être 24 heures,
20 ou bien 48 heures d'affilée. Tout dépendait de l'intensité des attaques et
21 du nombre de blessés qui arrivaient à l'hôpital.
22 M. Waespi (interprétation). - Merci. Aux mois d'août et
23 septembre 1991, combien de patients se trouvaient au sein de l'hôpital ?
24 Témoin (interprétation). - Au début, il y avait un peu moins de
25 blessés, je veux parler du mois d'août et du début septembre. Souvent, les
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1 patients arrivaient, mais nous pouvions les évacuer vers Vinkovci. Les
2 patients qui arrivaient au jour le jour étaient évacués vers Vinkovci.
3 Mais, déjà, à partir de la fin septembre, il était impossible de les
4 évacuer à Vinkovci. Je peux dire que, jusqu'à la fin novembre, nous
5 recevions environ trente nouveaux blessés par jour. A la fin, nous avions,
6 au moment de la chute de Vukovar, 450 blessés.
7 M. Waespi (interprétation). - Quelle était l'appartenance
8 ethnique de ces patients ?
9 Témoin (interprétation). - Les patients étaient tous les
10 habitants de Vukovar qui sont restés. Il s'agissait de tous les groupes
11 ethniques qui y vivaient à l'époque, les Croates, les
12 Ruthènes, les Serbes, tous.
13 M. Waespi (interprétation). - Y avait-il des soldats parmi les
14 patients ? Il s'agissait, dans ce cas-là, de quels soldats ?
15 Témoin (interprétation). - Il y avait des personnes qui
16 défendaient la ville, des agresseurs et puis il y avait aussi quelques
17 blessés qui appartenaient à l'armée de l'agresseur.
18 M. Waespi (interprétation). - Quand vous dites "l'armée de
19 l'agresseur", je suppose que vous parlez de la JNA. Traitiez-vous les
20 soldats de la JNA d'une manière différente par rapport aux autres
21 patients ?
22 Témoin (interprétation). - Un patient est toujours et uniquement
23 un patient. Afin d'éviter toute objection, je pourrais même dire qu'ils
24 étaient mieux traités que les autres.
25 M. Waespi (interprétation). - Tout à l'heure, vous venez de dire
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1 qu'il n'y avait pas de position de défense près de l'hôpital. L'hôpital
2 lui-même a-t-il été défendu ?
3 Témoin (interprétation). - C'était la même situation pour
4 l'hôpital que pour la pour la ville toute entière. Ceux qui défendaient la
5 ville pensaient défendre l'hôpital aussi. Mais il n'y avait pas une
6 défense particulière pour l'hôpital lui-même.
7 M. Waespi (interprétation) - Y a-t-il eu des soldats dans
8 l'hôpital, qui étaient armés d'armes telles que des mitrailleuses ?
9 Témoin (interprétation) - Non, il n'y avait pas de soldats ni
10 d'armes de ce genre. L'hôpital était protégé par des personnes de sécurité
11 qui devaient empêcher quelqu'un de non voulu d'entrer. Mais ces
12 personnes-là étaient en uniforme, étaient des policiers mais n'étaient pas
13 armés.
14 M. Waespi (interprétation) - Y avait-il des indications selon
15 lesquelles il était clair qu'il s'agissait d'un hôpital ?
16 Témoin (interprétation) - Oui, c'était clair. Il y avait un
17 signe de la Croix-Rouge internationale sur le toit de l'hôpital et dans la
18 cour. Il était facile de voir clairement ces
19 indications de toutes les directions.
20 M. Waespi (interprétation) - Maintenant, je vais vous poser
21 quelques questions sur les derniers jours du siège de Vukovar. Est-il vrai
22 de dire que l'afflux de personnes vers l'hôpital représentait pour vous un
23 signe indiquant que Vukovar était sur le point de chuter ?
24 Témoin (interprétation) - Il n'était pas normal de voir mille ou
25 plus de mille civils arriver à l'hôpital en un seul jour. Il était clair
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1 que quelque chose se passait dans leurs abris. Nous avons supposé donc que
2 l'armée était déjà tout à fait près et ces personnes-là sont donc venues à
3 l'hôpital qui était quand même, même endommagé lui-même, moins endommagé
4 que la plupart des autres bâtiments de la ville.
5 M. Waespi (interprétation) - En novembre 1991, d'après vos
6 connaissances des hommes en uniformes sont-ils entrés à l'hôpital ?
7 Témoin (interprétation) - Il n'y avait que des personnes
8 blessées qui venaient à l'hôpital, mais personne ne venait à l'hôpital en
9 uniforme.
10 M. Waespi (interprétation) - Avez-vous entendu parler de la
11 situation où le fils d'un des médecins qui travaillait à l'hôpital est
12 entré dans l'hôpital ?
13 Témoin (interprétation) - Le fils du Dr Ivankovic est entré dans
14 l'hôpital lorsque nous avions déjà entendu que Vukovar était tombée. Je
15 pense qu'il s'agissait du 17 ou du 18 novembre. C'était plutôt le
16 18 novembre.
17 M. Waespi (interprétation) - De quoi avait l'air le fils de
18 M. Ivankovic ?
19 Témoin (interprétation) - Quand je l'ai vu, il portait un
20 uniforme de camouflage. Il était assis dans une pièce et il parlait avec
21 ses parents.
22 M. Waespi (interprétation) - Le 18 novembre, une évacuation
23 était-elle planifiée pour le lendemain ? Une liste a-t-elle été constituée
24 contenant les noms de toutes les personnes qui devaient être évacuées ?
25 Témoin (interprétation) - L'évacuation était planifiée pour le
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1 19. Le 18, on a dressé
2 des listes des blessés, des listes du personnel, selon l'endroit où ils
3 souhaitaient se rendre. Les blessés étaient énumérés en fonction de leur
4 blessure, de leur gravité pour leur fournir les transports et les soins
5 adéquats.
6 M. Waespi (interprétation) - Pouvez-vous nous dire qui a dressé
7 ces listes ?
8 Témoin (interprétation) - Ces listes ont été surtout dressées
9 par des médecins qui devaient estimer l'état des blessés et prévoir une
10 éventuelle évacuation, c'est-à-dire que, si la personne ne pouvait pas
11 être assise, il fallait prévoir pour cette personne-là un véhicule où elle
12 pourrait être allongée. C'est ainsi que l'on dressait ces listes-là.
13 M. Waespi (interprétation) - Une personne qui travaillait dans
14 vos services administratifs, dont le nom est Verica, a-t-elle participé
15 lorsque l'on constituait ces listes-là ?
16 Témoin (interprétation) - Elle participait dans la mesure où
17 elle recevait ces listes qui avaient déjà été dressées. Sa tâche était de
18 les taper à la machine et de les transmettre au Docteur Bosanac.
19 Waespi (interprétation) - Que s’est-il passé le 18 novembre ?
20 Cette évacuation planifiée a-t-elle eu lieu ?
21 Témoin (interprétation) - L'évacuation n'était pas planifiée
22 pour le 18 novembre mais pour le 19 novembre. Le 18 novembre, nous ne
23 faisions que préparer l'évacuation pour le lendemain. Mais l'évacuation
24 n'a pas été réalisée le 19 et c'est seulement le 19 au matin que nous
25 avons appris que l'ensemble de l'évacuation allait être reportée d'un
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1 jour.
2 Waespi (interprétation) - Le 20 novembre 1991, vers 7 heures du
3 matin, avez-vous reçu un appel du Docteur Kust ?
4 Témoin (interprétation) - Le 20 au matin, vers 7 heures du
5 matin, à l'endroit où j'étais et qui était connu du Dr Kust, anesthésiste,
6 il est venu en me disant qu'il fallait que je me rende à l'unité
7 chirurgicale ou m'attendait le Docteur Ivankovic. J'y suis allé et lui, il
8 m'attendait là-bas, avec un médecin en uniforme de la JNA.
9 M. Waespi (interprétation). - Par la suite, avez-vous appris
10 quel était le nom de ce médecin apparemment à la JNA ?
11 Témoin (interprétation). - Beaucoup, beaucoup plus tard, j'ai
12 appris, grâce au livre du Dr Njavro, que son nom était Ivezic.
13 M. Waespi (interprétation). - Des soldats avaient-ils le rôle de
14 gardes dans cette pièce ?
15 Témoin (interprétation). - Oui, le Dr Ivezic avait une liste
16 entre les mains et le Dr Ivankovic m'a dit que le Docteur souhaitait voir
17 les personnes dont les noms figuraient sur cette liste. Derrière moi, deux
18 soldats y étaient. Moi-même, le docteur et les deux soldats sommes allés
19 voir ces blessés qu'ils souhaitaient voir.
20 Le premier nom sur la liste était Josic Bradaric, qui était
21 l'époux d'une de nos infirmières. Nous sommes allés jusqu'à lui. Le
22 docteur a demandé qu'on lui montre la plaie pour qu'il puisse voir. Il a
23 donc demandé que l'on soulève les pansements. C'est ce que nous avons
24 fait. Il a pu effectivement constater l'état de sa blessure. Ensuite, nous
25 sommes allés voir d'autres blessés. Nous devions le faire très rapidement,
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1 parce que le docteur n'insistait pas vraiment pour voir tous les blessés,
2 il voulait surtout effectuer tout cela le plus rapidement possible. Après
3 cette visite, nous sommes rentrés dans la pièce.
4 M. Waespi (interprétation). - Pendant combien de temps ces
5 examens de patients ont-ils duré ?
6 Témoin (interprétation). - A mon avis, entre 15 et 20 minutes
7 environ.
8 M. Waespi (interprétation). - Merci.
9 Après, vous a-t-on demandé d’assister à une autre réunion ?
10 Témoin (interprétation). - Lorsque nous sommes rentrés à l'unité
11 chirurgicale, j'ai reçu un message. Je ne sais plus s'il s'agissait d'un
12 message du Dr Ivankovic ou de quelqu'un d'autre, mais le message était que
13 tout le personnel médical devait se regrouper dans la salle des
14 plâtres. Nous avons essayé d'informer tout le monde le plus rapidement
15 possible, mais l'hôpital est assez grand et nous devions nous y regrouper
16 avant 8 heures.
17 En même temps, nous avons entendu le message selon lequel tous
18 les patients qui pouvaient marcher devaient sortir dans la cour de
19 l'hôpital.
20 M. Waespi (interprétation). - Qui a mené cette réunion dont vous
21 venez de parler ?
22 Témoin (interprétation). - C’est Sljivancanin qui présidait à
23 cette réunion. Il nous a dit qu'il nous avait rassemblés pour nous dire
24 que l'évacuation du personnel médical allait se dérouler selon le plan,
25 que nous pouvions sortir conformément à l'accord qui était passé avec la
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1 JNA, que nous aurions donc des autocars à notre disposition qui nous
2 emmèneraient aux endroits que nous avions indiqués auparavant.
3 M. Waespi (interprétation). - Pouvez-vous nous dire à quoi
4 ressemblait M. Sljivancanin lorsque vous l'avez vu ce jour-là ?
5 Témoin (interprétation). - Sljivancanin est une personne
6 extrêmement grande. Nous le regardions d’en bas. Il était plus grand que
7 nous tous. Il nous a tenu un discours, je dirais « politique », disant que
8 la JNA, dans son attaque d'agresseur contre Vukovar, avait subi de
9 nombreuses victimes, que la guerre avait commencé mais qu'il allait tout
10 faire pour nous permettre de sortir. Il a ajouté qu'il ne le faisait pas
11 volontiers, mais qu'il avait donné sa promesse et qu'il allait le faire.
12 Après, le Dr Ivezic a parlé lui aussi. Il nous a informés que
13 Mme Bosanac n'était plus notre directeur d'hôpital et que c'était lui qui
14 reprenait le contrôle de l'hôpital désormais.
15 M. Waespi (interprétation). - Sljivancanin était-il en
16 uniforme ? Sljivancanin portait-il un uniforme ?
17 Témoin (interprétation). - Sljivancanin avait un uniforme de
18 camouflage. Le docteur avait un uniforme militaire de la JNA.
19 M. Waespi (interprétation). - Tout à l'heure, vous avez
20 mentionné que tout le
21 personnel et les docteurs avaient assisté à cette réunion. Pendant ce
22 temps-là, les blessés et les patients ont été amenés à l'extérieur. Est-ce
23 exact ?
24 Témoin (interprétation). - C'est exact. Pour nous, il n'était
25 pas possible de suivre tout ce qui se passait, qui sortait et qui les
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1 faisait sortir. Tous ceux qui pouvaient marcher sortaient, que ce soient
2 des femmes, des enfants ou d'autres personnes. C'est seulement le
3 personnel qui était dans la salle des plâtres. Eux, ils sortaient tous à
4 l'extérieur. D'après l'information que j'ai eue par la suite, à
5 l'extérieur on séparait les hommes et les femmes. Par exemple, une de nos
6 employées avait son mari qui était là. Elle a dû rester d'un côté et lui a
7 dû aller de l'autre côté. Ceux qui sont restés à l'intérieur de l'hôpital,
8 c'étaient tous les membres du personnel, ainsi que ceux qui ne pouvaient
9 pas marcher, donc les blessés graves.
10 Quant aux autres, nous ne savions pas où ils étaient emmenés,
11 dans quelle direction.
12 M. Waespi (interprétation). - Connaissiez-vous Maria Bucko ?
13 Témoin (interprétation). - Maria Bucko est une infirmière qui
14 travaillait dans l'hôpital avec nous, pendant tout le temps. Son mari y
15 était. Il était parmi nous pendant tout le siège de Vukovar. C'était le
16 cas de presque tous nos maris. Lorsqu'il est entré dans la salle des
17 plâtres, elle a vu que quelque chose de curieux se passait. Elle a demandé
18 à Sljivancanin où étaient nos maris. Là, il a répondu qu'il fallait
19 constituer une liste de tous nos maris.
20 Une autre infirmière, Marica Mokos, a dressé une telle liste.
21 Elle nous a demandé quels étaient les prénoms de nos maris. Nous avons
22 communiqué cette liste au Major Sljivancanin. Nous ne savions pas où cette
23 liste allait être envoyée. Nous n'avions aucune idée de l’endroit où
24 pouvaient être nos maris.
25 Après la réunion, nous avons pris nos affaires et nous avons
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1 attendu la suite de l'évacuation dans la cour.
2 M. Waespi (interprétation). - Pouvez-vous me dire combien de
3 noms figuraient sur cette liste ?
4 Témoin (interprétation). - Il pouvait y avoir peut-être 40 noms
5 sur cette liste, de toute façon entre 30 et 40 noms.
6 M. Waespi (interprétation). - Le nom de votre mari figurait-il
7 aussi sur cette liste ?
8 Témoin (interprétation). - Oui. Il y était.
9 M. Waespi (interprétation). - Est-ce vous-même qui avez mis son
10 nom sur la liste ?
11 Témoin (interprétation). - J'ai donné le nom et le prénom à la
12 personne qui dressait la liste, la personne qui m'avait demandé quel était
13 le nom de mon mari.
14 M. Waespi (interprétation). - Tout à l'heure, vous avez dit
15 qu'après cette réunion, vous étiez tous sortis de cette salle des plâtres
16 dans la cour où vous attendiez.
17 Témoin (interprétation). - Oui.
18 M. Waespi (interprétation). - Vous y avez attendu pendant
19 combien de temps ?
20 Témoin (interprétation). - Probablement jusqu'à environ
21 11 heures. Nous avons attendu. Il nous a été dit qu'il fallait attendre
22 les autobus, qu'il n'y en avait pas suffisamment et qu'il fallait donc les
23 attendre. Cependant, nous ne savions toujours pas où toutes ces personnes
24 étaient emmenées ni ce qui allait nous arriver par la suite.
25 Entre-temps, des ambulances de la JNA entraient dans l'hôpital.
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1 Ces ambulances allaient chercher les blessés qui étaient restés allongés
2 dans leur lit.
3 M Waespi (interprétation). - A un certain moment, un des maris
4 est-il rentré ? Son nez saignait ?
5 Témoin (interprétation). - A un moment, à environ 11 heures
6 peut-être, de la rue qui se trouvait dans le sens contraire, nous ne nous
7 attendions pas à ce que les autobus arrivent de cette direction-là, un des
8 mari est arrivé. Son nez saignait. Il nous a dit que nos maris étaient
9 dans cette rue-là.
10 Nous nous sommes dirigés dans cette direction. Nous voulions
11 voir et savoir ce qui leur était arrivé. Nous avons vu un autobus qui
12 était gardé par des gardes armés dans la rue.
13 M Waespi (interprétation). - Avez-vous vu votre mari dans cet
14 autobus ?
15 Témoin (interprétation). - Oui, j'ai vu mon mari parmi toutes
16 ces autres personnes. Je suis entrée par la force. J'ai dit au garde que
17 mon mari y était et que je souhaitais qu'il quitte l'autobus. Il m'a dit
18 de sortir et m'a dit qu'il ne pouvait pas le faire, qu'il ne pouvait pas
19 faire sortir mon mari. Je suis revenue à l'endroit où j'étais auparavant.
20 J'attendais. Des maris rentraient, d'autres restaient. Je suis retournée
21 jusqu'à l'autobus encore une fois et finalement ils l'ont relâché. Il
22 était l'un des derniers à avoir été relâché. D'après ce que j'ai appris
23 par la suite, ils ont pu sortir, sauf deux d'entre eux.
24 M Waespi (interprétation). - Vous êtes-vous approchée de
25 quelqu'un après ces premiers refus pour demander à la personne de relâcher
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1 votre mari ?
2 Témoin (interprétation). - J'ai demandé à Sljivancanin qui a
3 répondu : "Si jamais il est dans l'autobus, il sera relâché". Mais cela
4 n'a pas réussi. J'ai également demandé aux Serbes qui étaient sur place de
5 m'aider. Ils m'ont dit qu'ils ne pouvaient pas m'aider. Mais mon mari a
6 quand même réussi à sortir.
7 M Waespi (interprétation). - Vous avez dit il y a un instant que
8 la très grande majorité des époux avaient pu descendre des bus, à part
9 deux d'entre eux. Pourriez-vous nous donner le nom de ces deux personnes ?
10 Témoin (interprétation). - Il y avait notre assistant, Kust, qui
11 avait travaillé également avec Zeljko Jozo et Adaga Jozo. Nous n'avions
12 pas entendu parler de ces personnes.
13 M Waespi (interprétation). - Etes-vous alors montée dans un
14 autre bus qui a quitté les lieux ?
15 Témoin (interprétation). - Nos époux, qui avaient beaucoup de
16 mal à marcher -nous ne savions pas ce qui leur était arrivé, ils étaient
17 terrifiés, ils ne disaient rien- nous ont rejoints. Selon les
18 instructions, nous sommes allés attendre les bus qui devaient venir nous
19 chercher. Nous les avons attendus entre une heure et deux heures. Vers
20 une heure et demie, ils
21 sont arrivés.
22 M Waespi (interprétation). - Combien de bus sont-ils arrivés ?
23 Témoin (interprétation). - Quatre ou cinq. L'un d'entre eux
24 était prêt pour emmener les gens qui voulaient aller en Serbie. Il y avait
25 beaucoup de places, parce que seules certaines personnes sont montées dans
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1 ce bus. La plupart voulaient aller en Croatie. J'ai oublié de dire que
2 Sljivancanin, lors de son discours, avait déclaré que nous pouvions aller
3 en Croatie si nous le souhaitions, mais que la Croatie ne souhaitait pas
4 nous y accueillir. Cela nous a beaucoup surpris parce que nous étions sûrs
5 que notre peuple nous attendait là-bas.
6 M Waespi (interprétation). - Quel itinéraire le bus a-t-il
7 suivi ?
8 Témoin (interprétation). - Il est passé un peu en-dessous de
9 l'hôpital, près du Tribunal. C'est là que les bus étaient garés. Lorsque
10 nous y sommes montés, les bus sont passés dans le centre même, dans la rue
11 Radiceva, dans la direction de Negoslavci. Nous nous sommes arrêtés pour
12 la première fois vers le bâtiment de Velepromet. Je ne sais pas pourquoi
13 nous nous y sommes arrêtés.
14 M Waespi (interprétation). - Madame et Messieurs les Juges, je
15 vois qu'il est 16 heures. J'ai encore d'autres questions à poser. Peut-
16 être pourrions-nous faire la pause maintenant.
17 M. le Président (interprétation). - Très bien, nous ferons une
18 pause de 20 minutes.
19 L'audience, suspendue à 16 heures, est reprise à 16 heures 20.
20 M. le Président (interprétation). - Veuillez poursuivre.
21 M Waespi (interprétation). - Afin de clarifier un point, nous
22 allons transmettre ce morceau de papier qui porte le nom du témoin. Celui-
23 ci nous a demandé très récemment cette mesure de protection. Il s'agirait
24 d'un pseudonyme qui lui serait attribué. Puis-je demander à
25 l'huissier de donner ce morceau de papier au témoin, de lui demander si
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1 elle peut identifier son nom sans le lire.
2 Témoin (interprétation). - Oui, c'est mon nom.
3 M Waespi (interprétation). - Pourrait-on montrer ce morceau de
4 papier à la défense également, puis aux Juges ? Je voudrais ensuite
5 demander son versement au dossier sous la cote P14, sous scellés.
6 Par ailleurs, à partir de maintenant nous nous adresserons à ce
7 témoin sous le nom de témoin M comme Marija.
8 Merci. Juste avant l'interruption, vous avez dit que le bus
9 s'était arrêté à Velepromet.
10 Témoin M (interprétation). - Oui, c'est exact, ce bus s'est
11 arrêté à Velepromet, mais personne n'a demandé à descendre du bus.
12 Pourquoi nous sommes-nous arrêtés là, je ne sais pas.
13 M Waespi (interprétation). - Combien de temps êtes-vous restés à
14 Velepromet.
15 Témoin M (interprétation). - Pas très longtemps, peut-être 15 à
16 20 minutes. Ensuite, nous sommes allés vers Negoslavci. Entre temps, nous
17 avons pris la direction de l'usine Modatex. Nous pensions que nous allions
18 vers Bogdanovci parce que c'était la direction initiale. Nous pensions que
19 c'était cet itinéraire que nous suivrions pour être évacués, mais peu de
20 temps après, nous sommes retournés à nouveau en direction de Negoslavci.
21 M. Waespi (interprétation). - Donc vous vous trouviez à nouveau
22 sur la route entre Vukovar et Negoslavci, n’est-ce pas ?
23 Témoin M (interprétation). - Oui, c’est cela. Nous allions en
24 direction de Negoslavci. Nous nous sommes souvent arrêtés. Plusieurs
25 véhicules de la JNA nous ont doublés. Pourquoi nous nous arrêtions, nous
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1 ne le savions pas. Lorsqu’un convoi d'ambulances est passé à côté de nous,
2 nous avons compris que c’est ce que nous attendions. Nous attendions
3 les ambulances qui devaient passer devant nous. Puis, nous avons continué
4 sur Negoslavci.
5 M. Waespi (interprétation). - Outre ces ambulances, il n’y avait
6 pas beaucoup de circulation, n’est-ce pas ?
7 Témoin M (interprétation). - Allant dans notre direction, non.
8 Nous étions seuls. Mais il y avait des véhicules qui arrivaient dans
9 l'autre direction, des véhicules de la JNA. Lorsque la nuit est tombée,
10 nous avons vu que le véhicule qui se trouvait devant nous était un
11 véhicule militaire, et qu’à la fin de la colonne il y en avait également
12 un autre. Ces véhicules avaient leurs phares allumés.
13 M. Waespi (interprétation). - Lorsque vous êtes enfin arrivés à
14 Negoslavci, faisait-il déjà nuit ? Et est-ce à ce moment-là que vous vous
15 êtes rendu compte que les phares des véhicules étaient allumés ?
16 Témoin M (interprétation). - Nous nous en sommes seulement rendu
17 compte quand la nuit est tombée. Je pense qu'il était 4 à 5 heures du
18 soir.
19 M. Waespi (interprétation). - Quelle était l’état de cette
20 route, entre Vukovar et Negoslavci ? Etait-elle praticable ? Etait-il
21 facile d’y rouler avec un bus ?
22 Témoin M (interprétation). - Oui, il n'y avait aucun problème,
23 sauf ces arrêts qu'on ne nous a jamais expliqués. On roulait pendant
24 quelques kilomètres, puis on s'arrêtait, et puis on continuait, et on a
25 fini par arriver à Orolik.
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1 M. Waespi (interprétation). - Vous êtes donc arrivé à Orolik.
2 Donc, après Negoslavci, vous avez continué vers Orolik. Cette route était-
3 elle dans le même état ou bien y avait-il une différence ?
4 Témoin M (interprétation). - Non, elle était dans le même état.
5 Mais lorsque nous sommes arrivés à Orolik, nous avons pensé que nous
6 allions aller, à nouveau, vers Negoslavci mais, en fait, nous sommes allés
7 vers Sid. L’ensemble des bus allait vers Sid.
8 M. Waespi (interprétation). - Quelle était votre destination
9 finale ce jour-là ?
10 Témoin M (interprétation). - Nous ne le savions pas. Mais, après
11 un certain temps, nous nous sommes retrouvés à Sremska Mitrovica*. Nous ne
12 savions pas pourquoi on nous avait emmenés à cet endroit et, au centre de
13 Sremska Mitrovica* le bus s'est arrêté, nous avons pu en descendre. C'est
14 à ce moment-là que j'ai vu, pour la première fois, que des observateurs
15 européens nous avaient rejoints.
16 Ces observateurs nous ont dit de ne pas descendre du bus, nous
17 avons demandé où se trouvaient les autres personnes, celles qui avaient
18 quitté l'hôpital bien avant nous, nous pensions que nous les rejoindrions.
19 Cependant il n'y avait que nos bus qui se trouvaient sur les lieux. Ils
20 nous ont averti, ils nous dit que nous devrions dresser la liste des
21 personnes dont nous pensions qu'elles avaient été emmenées ailleurs.
22 Waespi.(interprétation). - Merci. Je voudrais maintenant
23 laisser de côté ces événements de novembre 1991. Un des enquêteurs de ce
24 bureau vous a interrogée les 19 et 20 juin 1995, c'est exact ?
25 Témoin M (interprétation). - Pourriez-vous répéter votre
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1 question ?
2 Waespi (interprétation). - Oui, bien sûr. Vous avez parlé à une
3 ou deux personnes du Tribunal Pénal International en juin 1995 ? Vous en
4 souvenez-vous ?
5 Témoin M (interprétation). - Oui. J'ai parlé avec ces personnes.
6 Waespi (interprétation). - Vous avez signé un document au terme
7 de votre interrogatoire qui reprenait le témoignage que vous aviez donné
8 au cours de cet interrogatoire, est-ce exact ?
9 Témoin M (interprétation). - Oui.
10 M. Waespi (interprétation). - Je voudrais maintenant que
11 l'huissier remette la version anglaise de cette déclaration au témoin et
12 que le témoin identifie, ou nous dise, si les signatures qui sont apposées
13 au bas de chaque page sont bien les siennes. Il s'agirait de la pièce de
14 l'accusation 15 enregistrée aux fins d'identification. Sans doute... Ah,
15 si, par la suite nous
16 obtenons la version croate. Vous souvenez-vous s'il s'agit de votre
17 signature sur toutes ces pages ?
18 Témoin M (interprétation). - Oui.
19 M. Waespi (interprétation). - Merci. Je voudrais demander le
20 versement de cette déclaration au dossier, Monsieur le Président.
21 le Président (interprétation). - Y a-t-il des oppositions de la
22 part de la défense ? Non, très bien. Ce serait le A, puisque le B serait
23 la version croate ?
24 M le Greffier (interprétation). - Non, la version originale qui
25 est la version anglaise serait la pièce 15 et sa traduction en serbo-
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1 croate serait la pièce 15/A.
2 M. le Président (interprétation). - Le 15/A, très bien.
3 M. Waespi (interprétation). - Merci, Monsieur le président, je
4 n'ai plus de questions.
5 M le Président (interprétation). - Merci. Maître Fila.
6 Fila (interprétation). - Madame et Messieurs les Juges, merci.
7 Témoin, vous étiez à l'hôpital. Savez-vous, puisque le docteur Bosanac a
8 déjà témoigné que, déjà le 19, certaines personnes ont été emmenées hors
9 de l'hôpital ?
10 Témoin M (interprétation). - Oui. Deux de nos techniciens
11 Marko Mandic*,Vudenic Vladco ,et Marko Vlara a également été emmené le 19
12 au soir.
13 M. Fila (interprétation). - Y a-t-il eu d'autres personnes qui
14 ont été portées disparues ?
15 Témoin M (interprétation). - Oui, Marko Mandic.
16 Fila (interprétation). - Y a-t-il des informations pouvant nous
17 renseigner sur leur sort ?
18 Témoin M (interprétation). - Je ne pourrais pas vous le dire.
19 M. Fila (interprétation). - En ce qui concerne Bradaric, vous
20 avez dit que le
21 docteur a défait son pansement, était-ce sur son bras ?
22 Témoin M (interprétation). - Je ne me rappelle pas si c'était le
23 bras droit ou le bras gauche. Nous avons enlevé le bandage et, bien sûr,
24 nous avons vu qu'il y avait une blessure.
25 M. Fila (interprétation). - Avez-vous fait cette blessure,
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1 provoqué cette blessure à l'hôpital ?
2 Témoin M (interprétation). - Comment peut-on causer une blessure
3 dans un hôpital ?
4 M. Fila (interprétation). - Le témoin précédent a dit que cette
5 blessure avait été faite à l'hôpital, que le médecin avait fait une
6 coupure à cette personne.
7 Témoin M (interprétation). - Je ne peux pas dire une telle
8 chose, je ne sais pas. La personne qui a défait ces pensements, en fait,
9 ce n'était même pas moi. Mais, on ne peut pas dire tout cela.
10 M. Fila (interprétation). - Vous dites qu'en fait vous ne pouvez
11 pas affirmer cela ?
12 Témoin M (interprétation). - Oui, je ne peux pas affirmer cela.
13 M. Fila (interprétation). - Parce que ?
14 Témoin M (interprétation). - Ou plutôt, je ne peux pas affirmer
15 cela parce que vous m'avez demandé comment c'était possible et je vous
16 explique ceci maintenant.
17 M. Fila (interprétation). - Donc, vous étiez présente lorsque
18 l'armée est entrée, la JNA ?.
19 Témoin M (interprétation). - Oui, dans certaines unités.
20 M. Fila (interprétation). - Des gens sont venus de Vukovar, avec
21 eux, Ivankovic, ce médecin. Vous en parlez dans votre déclaration. Est-ce
22 exact ?
23 Témoin M (interprétation). - La veille, le 19 dans l'après-midi.
24 Bogdankovic* est venu à l'hôpital, et il cherchait l'une de nos
25 infirmières. Puis il y a eu Sacha Maxinovic*, Dusko Cukovic*, je l'ai vu
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1 dans la cour.
2 M. Fila (interprétation). - Cela veut-il dire qu'ils auraient pu
3 montrer à la JNA où se trouvaient les choses à Vukovar. Comment, sinon,
4 auraient-ils pu savoir où se trouvait l'hôpital ?
5 Témoin M (interprétation) - Il s'agissait de personnes qui
6 travaillaient dans l'hôpital, Cukovic*, Bogdankovic* aussi, ils savaient
7 donc où se trouvait l'hôpital.
8 M. Fila (interprétation). - Savaient-ils à quoi ressemblait
9 Vukovar ?
10 Témoin M (interprétation) - Oui, sans doute.
11 M. Fila (interprétation). - Il n'y avait pas besoin qu'une
12 personne extérieure vienne leur montrer où se trouvait l'hôpital...
13 Témoin M (interprétation) - Je ne sais pas, je ne peux pas vous
14 le dire.
15 M. Fila (interprétation). - Avez-vous vu tout autre personne qui
16 leur montrait des choses, vous, de vos yeux ?
17 Témoin M (interprétation) - Non, je n'ai pas vu de personne
18 extérieure à Vukovar faisant cela.
19 M. Fila (interprétation). - J'ai quelques questions brèves sur
20 le 20. Pouvez-vous nous dire à quelle heure à peu près vous êtes arrivés à
21 Velepromet ?
22 Témoin M (interprétation) - Si nous avons quitté les lieux à peu
23 près vers 1 heure 30, eh bien je ne pense pas que nous aurions pu mettre
24 plus de temps, évidemment, c'est une approximation, peut-être 1 heure 30-
25 2 heures. En fait, nous avons dû y arriver pas plus tard qu'à 2 heures 30.
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1 M. Fila (interprétation). - Merci.
2 En fait, c'était donc en plein jour ?
3 Témoin M (interprétation). - Oui.
4 M. Fila (interprétation). - Quand la nuit est-elle tombée, le
5 crépuscule ?
6 Témoin M (interprétation). - Pas quand nous allions vers
7 Negoslavci, mais alors
8 que nous nous étions arrêtés. Je ne peux pas vous dire exactement combien
9 de temps nous avons passé devant Velepromet. Ensuite, nous avons pris un
10 itinéraire modifié. D’après mes souvenirs, c'était le crépuscule.
11 M. Fila (interprétation). - Lorsque vous êtes arrivés à
12 Negoslavci... Vous avez fini par y arriver ?
13 Témoin M (interprétation). - Oui. Il faut passer Negoslavci pour
14 arriver à Orolik.
15 M. Fila (interprétation). - Faisait-il nuit lorsque vous êtes
16 arrivés à Negoslavci ?
17 Témoin M (interprétation). - Je crois que c'était encore le
18 crépuscule. Oui, c’était encore le crépuscule.
19 M. Fila (interprétation). - Et à Orolik, c'était la nuit, n'est-
20 ce pas ? Pendant votre voyage, avez-vous vu l'armée ? Y avait-il des
21 barrages, des chars ?
22 Témoin M (interprétation). - Non. Il n’y avait pas de barrage
23 sur la route, mais nos bus s'arrêtaient. Ne me demandez pas dans quels
24 véhicules l'armée se trouvait. Il y avait des armes. Ils allaient dans la
25 direction opposée par rapport à nous. Ils allaient vers Negoslavci et
Page 451
1 Vukovar. Nous allions dans la direction opposée. C'est sans doute pour
2 cela que nous nous sommes arrêtés de temps en temps.
3 M. Fila (interprétation). - Tous les autres véhicules qui vous
4 suivaient s'arrêtaient également ?
5 Témoin M (interprétation). - Oui.
6 M. Fila (interprétation). - Pouvons-nous conclure que, au cours
7 de votre voyage de Velepromet à Negoslavci et Orolik, vous avez vu l'armée
8 de temps en temps ?
9 Témoin M (interprétation). - Oui.
10 M. Fila (interprétation). - Ne vous inquiétez pas ; c’était tout
11 ce qui m'intéressait. Merci.
12 J'ai un petit problème, mais une autre question encore et peut-
13 être pourrons-nous
14 traiter ce problème.
15 Si je devais vous montrer une vidéo de ces bus, pourriez-vous
16 nous dire s'il s'agissait de la date du 20 ?
17 Témoin M (interprétation). - Je ne sais pas si je pourrais vous
18 le dire en voyant la cassette mais je sais sûrement que c'était le 20.
19 M. Fila (interprétation). - Oui, je vous crois, mais
20 pourriez-vous, si nous vous montrions cette vidéo cassette, nous donner
21 des affirmations ? Avez-vous vu des vidéos ?
22 Témoin (interprétation). - Non.
23 M. Fila (interprétation). - Je n'ai plus de question,
24 Monsieur le Président.
25 M. le Président (interprétation). - Le Procureur veut-il exercer
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1 son droit de réplique ?
2 M. Waespi (interprétation). - Non.
3 Simplement, pour éclaircir ce point, cette déclaration a été
4 versée sous scellés, celle que nous venons de verser sous la cote P 15.
5 M. le Président (interprétation). - Merci.
6 Je n’aurai qu’une question. Vous avez mentionné -je parle au
7 témoin- Josip Bradaric. Vous l'avez vu. Etait-il un proche d'un membre du
8 personnel médical de l'hôpital ?
9 Témoin M (interprétation). - C'était l'époux d'une de nos
10 infirmières.
11 M. le Président (interprétation). - Merci.
12 Y a-t-il des objections à ce que le témoin soit définitivement
13 libéré ? Non ? Pas d’objection ? Je vous remercie de votre venue. Vous
14 pouvez vous retirer.
15 (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)
16 Je me tourne maintenant vers le Conseil de la défense. Vous
17 aviez dit que vous voudriez aborder une question d'ordre général.
18 Maître Fila, il y a quelques instants vous disiez
19 que vous aviez un problème. Voulez-vous maintenant nous l'exposer ?
20 M. Fila (interprétation). - Monsieur le Président, c'est une
21 question d’ordre général. La vidéo dont nous avons parlé lors de
22 l'audience à huis clos montre cela. Je voudrais poser la question
23 suivante : comment pouvons-nous déduire de cela... ? Vous savez de quelle
24 vidéo je parle, concernant l'alibi. Pourrait-elle nous dire s’il
25 s’agissait bien des bus dans lesquels elles se trouvait ? Je me demandais
Page 453
1 si elle pourrait faire cela, si nous pourrions faire cela, afin d'être
2 certains que c'est bien à ce moment-là que cette vidéo a été prise. Je
3 suggère donc que le Bureau du Procureur fasse cela en privé, si vous le
4 souhaitez ou s’il le souhaite. Je crois que ce serait utile.
5 M. Niemann (interprétation). - C'est une procédure très simple.
6 Nous pourrions le faire très facilement, éteindre les télévisions pour
7 certaines séquences. Si Maître Fila voulait effectivement montrer une
8 vidéo, il devrait demander une séance en huis clos partiel. Je crois que
9 la cabine technique peut le faire sans mettre en danger qui que ce soit.
10 M. le Président (interprétation). - Très bien. Maître Fila,
11 êtes-vous d'accord ?
12 M. Fila (interprétation). - Je suis tout à fait d'accord, mais
13 c’est le Bureau du Procureur qui a la vidéo. Je n’ai rien à montrer, c’est
14 cela le problème.
15 M. Niemann (interprétation). - Bien sûr, de toute façon nous la
16 mettrons à l'entière disposition de Maître Fila.
17 Monsieur Williamson vient d’indiquer et de me suggérer que si
18 M. Fila souhaite présenter cette vidéo à ce témoin qui vient de
19 comparaître, nous n'avons aucune objection à obtenir la vidéo et à
20 rappeler ce témoin afin que cela puisse être fait, si M. Fila souhaite le
21 faire.
22 M. le Président (interprétation). - Très bien. Maître Fila ?
23 M. Fila (interprétation). - Oui, très bien,
24 Monsieur le Président.
25 Il s'agit simplement de la fin de la cassette, 2 ou 3 minutes,
Page 454
1 si vous vous en souvenez. On y voit le départ des bus. Les 2 ou
2 3 dernières minutes, c'est tout, si vous êtes
3 d'accord.
4 M. le Président (interprétation). - Oui. Il y a juste une
5 question d'organisation. Combien de temps cela va-t-il prendre afin que
6 vous puissiez communiquer la cassette aux techniciens et passer en
7 audience à huis clos partiel ? Peut-être pourrions-nous prévoir cela pour
8 demain, et commencer le témoignage d'une nouvelle personne. Mais il
9 faudrait demander au témoin qui vient de quitter cette pièce de ne pas
10 partir définitivement.
11 M. Niemann (interprétation). - Oui. Je ne sais pas quelle est
12 l'organisation du voyage de ce témoin, mais je pense qu'il entend partir
13 demain matin tôt. Je crois qu'elle doit repartir en avion. Je pense que si
14 nous commençons avec notre témoin maintenant, avant la fin, à 17 h 15,
15 peut-être pourrions-nous consacrer 15 minutes à cela.
16 M. le Président (interprétation). - Oui, oui. Merci. Si cela
17 convient à Maître Fila...
18 M. Fila (interprétation). - Oui, je suis d'accord. Je serais
19 même d'accord si l'un des membres du Procureur montrait la vidéo au témoin
20 et pouvait nous dire quels sont ses commentaires.
21 M. le Président (interprétation). - C’est très aimable de votre
22 part, Maître Fila, mais nous ne pouvons pas agir de cette façon.
23 Nous allons continuer avec le témoin n° 4.
24 M. Williamson (interprétation). - Monsieur le Président, le
25 témoin suivant a demandé des mesures de protection totale, à savoir
Page 455
1 l’octroi d’un pseudonyme, l’altération des traits du visage et de la voix.
2 Je pense que de toute façon nous allons être obligés d'interrompre les
3 débats afin de mettre en place le dispositif d'altération de la voix.
4 Entre temps, nous pourrions peut-être faire descendre la
5 cassette vidéo et la montrer à ce témoin. Peut-être pourrions-nous
6 reporter le témoin suivant à demain et en finir avec le témoin afin de lui
7 montrer la cassette vidéo, si cela vous semble acceptable.
8 M. le Président (interprétation). - Nous devons prendre une
9 pause de 10 minutes,
10 est-ce cela ?
11 M. Williamson (interprétation). - Dès que nous aurons la
12 cassette, même 5 minutes. Ce sera très rapide.
13 M. le Président (interprétation). - Très bien
14 L'audience, suspendue à 16 h 47, est reprise à 16 h 55.
15 (Le témoin M est introduit dans le prétoire.)
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24 L'audience est levée à 17 heures 20.
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