Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL Affaire IT-95-13a-T

2 POUR L’EX-YOUGOSLAVIE

3 Mardi 17 Mars 1998

4 LE PROCUREUR

5 C/

6 SLAVKO DOKMANOVIC

7 L’audience est ouverte à 9 heures 05.

8 M. Président (interprétation). – Bonjour. Pouvez-vous introduire

9 l’affaire, s’il vous plaît.

10 M. le Greffier. - Il s’agit de l’affaire IT-95-13a-T, le

11 Procureur contre Slavko Dokmanovic.

12 M. le Président (interprétation). - Merci. Pouvez-vous vous

13 présenter, s’il vous plaît .

14 M. Niemann (interprétation). - Bonjour, Monsieur le Président.

15 Je m’appelle Grant Niemann. Je comparais avec mes collègues Me Williamson,

16 Me Vaspi et Me Sutherland au nom du Bureau du Procureur.

17 M. Président (interprétation). - Merci.

18 M. Fila (interprétation). – Bonjour Madame et Messieurs les

19 Juges. Je m’appelle Thomas Fila. Je représente l’accusé M. Dokmanovic. Je

20 suis accompagné aujourd’hui par M. Petrovic et Mlle Lopicic qui nous

21 rejoindra par la suite .

22 M. Président (interprétation). - Monsieur Dokmanovic,

23 m’entendez-vous ?

24 M. Dokmanovic (interprétation). - Oui, Monsieur le Président.

25 M. le Président (interprétation). - Merci. Avant d’appeler à la

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1 barre le nouveau témoin, puis-je demander aux parties si elles se sont

2 mises d'accord sur les admissions?

3 M. Niemann (interprétation). - Nous avons échangé des

4 propositions, mais nous en sommes toujours là et nous n'avons pas encore

5 conclu un accord mais nous n'en sommes pas loin.

6 M. Fila (interprétation). - J'ai reçu les propositions hier soir

7 à 7 heures. J'ai répondu à une partie d'entre elle et je travaille à la

8 réponse qui concerne le reste des admissions, je pense que nous

9 parviendrons à une réponse jeudi, à un accord en tout cas.

10 M. Président (interprétation). - Voulez-vous appelez le témoin,

11 s'il vous plaît.

12 M. Niemann (interprétation). - J'appelle Clyde Snow

13 (Le témoin est introduit dans la salle d’audience.)

14 M. le Président (interprétation). - Puis-je vous demander si

15 étant donné l'accord sur certains points ou sur certaines admissions par

16 Me Fila, incluses dans votre document déposé le 2 mars 97, et notamment

17 les admissions des points 7, 10, 11 et 12, vous allez vous limiter à des

18 questions liées à des points qui sont contestés afin de ne pas aborder des

19 questions qui ne posent pas problème ?

20 M. Niemann (interprétation). - Nous ne sommes pas parvenus à un

21 accord. Il y a effectivement eu une affectation sur certains points dans

22 une réponse que nous avons reçue ce matin et nous avons déposé un document

23 à 5/6 heures hier soir, ce document a inclus un accord sur les paragraphes

24 2 3 4 5 6 et 7.

25 Ce matin nous sommes revenus et la défense a posé de nouvelles

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1 questions. Je crois que les négociations restent en cours. Je ne peux pas

2 vous donner de réponse définitive. Mais les témoignages que nous

3 entendrons aujourd'hui n’aborderons pas à mon avis ces questions

4 d'admissions. Ce sera peut-être le cas parce que le Dr Snow n'est là que

5 pour aujourd'hui.

6 Ensuite, il sera absent.

7 M. Président (interprétation). - Très bien. Monsieur Snow,

8 voulez-vous prononcer la déclaration solennelle, vous lever et lire le

9 texte qui vous est proposé.

10 M. Snow (interprétation). - Je déclare solennellement que je

11 dirai la vérité toute la vérité et rien que la vérité.

12 M. Président (interprétation). - Je vous remercie, veuillez vous

13 asseoir.

14 M. Niemann (interprétation). – Professeur Snow, voulez-vous

15 décliner votre identité ?

16 M. Snow (interprétation). – Je m'appelle Clyde Collins Snow

17 M. Niemann (interprétation). - Etes-vous né à Fororforht au

18 Texas en 1928 ?

19 M. Snow (interprétation). - Oui, c'est exact.

20 M. Niemann (interprétation). - Vous avez un diplôme d’art de

21 l'institut militaire du Nouveau Mexique que vous avez obtenu en 47, n’est-

22 ce pas ?

23 M. Snow (interprétation). - Oui, et un diplôme de sciences.

24 M. Niemann (interprétation). - De l'université du Nouveau

25 Mexique en 1951 ?

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1 M. Snow (interprétation). - Oui. Effectivement.

2 M. Niemann (interprétation). - Une maîtrise de.sciences de

3 l’université du Texas en 1955 ?

4 M. Snow (interprétation). – Oui, effectivement.

5 M. Niemann (interprétation). - Un doctorat de philosophie de

6 l’université d’Arizona en 1967

7 M. Snow (interprétation). – Effectivement.

8 M. Niemann (interprétation). – Et un diplôme de science avec les

9 honneurs à l'école de justice criminelle en 93 ?

10 M. Snow (interprétation). - Oui, c'est exact.

11 M. Niemann (interprétation). - Ensuite vous avez suivi une

12 carrière dans l'administration de l’aviation fédérale des Etats unis.

13 Vous avez prolongé votre formation dans le domaine de la médecine légale

14 en identification de squelettes humains.

15 M. Snow (interprétation). - Oui.

16 M. Niemann (interprétation). - Et avez-vous été consultant dans

17 environ 3000 affaires impliquant l’identification et la détermination de

18 la cause de la mort en jugeant du squelette des victimes.

19 M. Snow (interprétation). - Oui.

20 M. Niemann (interprétation). - Certaines des affaires auxquelles

21 vous avez participées incluent-elles notamment l’accident du DC10

22 d’Américan Airlines, en 1979, à Chicago, qui a coûté la vie à 273

23 personnes ?

24 M. Snow (interprétation). - Oui. C'est exact.

25 M. Niemann (interprétation). - Vous avez également résolu le

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1 meurtre d'un serial killer , John Wayne*, notamment le cas des meurtres de

2 la Rivière Verte qui sont encore non résolus.

3 M. Snow (interprétation). - C'est exact.

4 M. Niemann (interprétation). – En 1985, à la demande de Simone

5 Weisseven* et de cet institut ,avez-vous présidé une équipe de médecins

6 légaux américains qui se sont rendus au Brésil afin d'identifier les

7 restes du criminel de guerre Joseph Mendele ?

8 M. Snow (interprétation). - C'est exact.

9 M. Niemann (interprétation). – Etes-vous allez en 84 sous le

10 parrainage de la société américaine pour le progrès de la science servir

11 en tant que consultant, pour une commission nationale, sur des personnes

12 disparues afin de déterminer ce qui était arrivé à des milliers de

13 personnes qui avaient été enlevées et tuées en Argentine par les Unités de

14 la Mort entre 1976 et 1983 ?

15 M. Snow (interprétation). - C'est exact.

16 M. Niemann (interprétation). - Avez-vous témoigné en tant que

17 témoin expert dans un procès qui a eu lieu et qui portait sur les

18 événements qui ont lieu au cours de la période de répression militaire ?

19 M. Snow (interprétation). - Oui.

20 M. Niemann (interprétation). - Avez-vous passé un tiers de votre

21 vie à travailler sur des missions similaires en Argentine, au Brésil, au

22 Chili et dans d’autres pays également ?

23 M. Snow (interprétation). - C’est exact.

24 M. Niemann (interprétation). - En 1992 avez–vous été délégué

25 américain à la commission des droits de l'homme des nations unies ?

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1 M. Snow (interprétation). - Oui.

2 M. Niemann (interprétation). - Avez-vous participé à certaines

3 missions des Nations Unies en ex-Yougoslavie afin de rassembler des

4 éléments de preuve de médecine légale qui devaient être utilisés par la

5 suite dans des procès pour le Tribunal de guerre nouvellement établi ?

6 M. Snow (interprétation). – Oui.

7 M. Niemann (interprétation). - Avez-vous notamment participé à

8 l'exhumation du charnier de Vukovar ?

9 M. Snow (interprétation). – Oui.

10 M. Niemann (interprétation). - Vous avez travaillé dans

11 différentes universités, six exactement, de 1970 à 1983.

12 M. Snow (interprétation). - C'est exact.

13 M. Niemann (interprétation). – Et vous avez aussi travaillé

14 quatorze fois en tant que conseil, de 1967 à 1997.

15 M. Snow (interprétation). - C'est exact.

16 M. Niemann (interprétation). - Etes-vous diplomate de

17 l'Association anthropologue et de médecine légale des Etats Unis ?

18 M. Snow (interprétation). - C’est exact.

19 M. Niemann (interprétation). - Etes-vous également membre de

20 l'Association de médecine légale américaine du Royaume-Uni, d’Irlande, de

21 Grande-Bretagne ?

22 M. Snow (interprétation). - C'est exact.

23 M. Niemann (interprétation). - Etes-vous également membre de

24 l'Association pour le progrès des sciences ?

25 M. Snow (interprétation). - Oui.

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1 M. Niemann (interprétation). - Etes-vous membre d'une

2 association anthropologie physique de l'association pour l'étude de la

3 biologie humaine ?

4 M. Snow (interprétation). – Oui.

5 M. Niemann (interprétation). - Avez-vous occupé différents

6 postes de 73 à 94 et obtenu des distinctions de 1970 à1993 ?

7 M. Snow (interprétation). - Oui.

8 M. Niemann (interprétation). - Avez-vous participé, organisé et

9 dirigé différentes études entre 82 et 92 ?

10 M. Snow (interprétation). - C’est exact.

11 M. Niemann (interprétation). - Avez-vous publié de nombreux

12 documents sur ce domaine ?

13 M. Snow (interprétation). - Oui.

14 M. Niemann (interprétation). - Voulez-vous maintenant examiner

15 le document que je vais vous montrer et me dire s'il s'agit bien d'un

16 curriculum vitae qui reflète votre carrière ?

17 M. Snow (interprétation). - Oui, effectivement. Il est en date

18 de mars 1998.

19 M. Niemann (interprétation). - Je demande le versement de ce

20 document, s’il vous

21 plaît.

22 M. le Greffier.(interprétation) - Il s'agit du document 93.

23 M. Niemann (interprétation). - Professeur, au cours de

24 l'année 1992, vous a-t-on demandé de participer à l'étude d'un charnier

25 potentiel dans la zone de Vukovar, en ex-Yougoslavie ?

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1 M. Snow (interprétation). - Oui.

2 M. Niemann (interprétation). - Pouvez-vous nous décrire les

3 circonstances de votre participation ? Comment avez-vous été amené à y

4 participer ?

5 M. Snow (interprétation). - Oui. Madame et Messieurs les Juges,

6 puis-je consulter mes notes pour faire cela ?

7 M. Niemann (interprétation). - Le témoin demande à pouvoir

8 consulter ses notes.

9 (Le Président acquiesce.)

10 M. Snow (interprétation). - Oui.

11 M. Niemann (interprétation). - Voulez-vous expliquer aux Juges

12 dans quelle circonstances vous avez été amené à participer à l'examen de

13 ce charnier présumé en ex-Yougoslavie ?

14 M. Snow (interprétation). - On m’a nommé en tant que membre de

15 la commission Mazowiecki. Il y avait un groupe de médecins légistes. Cette

16 commission a été formée par les Nations Unies et avait pour mission de

17 rassembler des éléments de preuve préliminaires, en quelque sorte, portant

18 sur des atrocités présumées qui auraient été commises à cette époque.

19 La tâche qui m'a été assignée personnellement était d'enquêter

20 sur certaines allégations d'atrocités, de tombes anonymes et de massacres

21 également. Et je devais également étudier des problèmes qui avaient trait

22 à mon domaine de spécialité.

23 M. Niemann (interprétation). - Quand vous a-t-on contacté pour

24 la première fois ?

25 M. Snow (interprétation). - Je crois que c'était à la fin du

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1 mois de septembre. On

2 m'a demandé de devenir membre de cette commission, cela se passait à

3 Genève, notre délégation est arrivée à Zagreb le 12 octobre 1992.

4 M. Niemann (interprétation). - Qu'avez-vous appris sur cette

5 question avant ou lorsque vous êtes arrivés à Zagreb ?

6 M. Snow (interprétation). - En ce qui concerne l'affaire en

7 elle-même, à Ovcara, nous l'avons appris un jour ou deux après être

8 arrivés. Avec M. Jack Guyger*, le président de la Commission des droits de

9 l'homme qui faisait également partie de la délégation, nous avons

10 rencontré Vice Kreclovic*, le Dr Kostovic* qui était à l'école de

11 médecine. Il était à l'époque le doyen de la faculté de médecine mais il

12 menait également une commission d'experts croates qui s'intéressaient à

13 l'identification et au rapatriement des personnes mortes au cours de la

14 guerre, au cours du conflit entre les Croates et les Serbes en 1991.

15 Il se trouvait donc dans son bureau et il nous a parlé d'un

16 certain nombre d'affaires, mais celle qui m'a semblé la plus intéressante

17 était une allégation portant sur quelque 200 personnes qui avaient disparu

18 de l'hôpital de Vukovar vers le 20 novembre 1991.

19 M. Niemann (interprétation). - Et lorsque cette affaire a attiré

20 votre attention particulièrement, qu'avez-vous fait ?

21 M. Snow (interprétation). - Je lui ai demandé de me donner plus

22 de détails. Il a déclaré que ces personnes avaient surtout été des

23 patients de l'hôpital, des blessés au cours du siège de Vukovar et que,

24 parmi ces personnes, il y avait également certains membres qui

25 travaillaient à l'hôpital, des hommes. Et qu'ils avaient été vus pour la

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1 dernière fois dans des bus qui les emmenaient hors de l'hôpital, le matin

2 de la chute de Vukovar, et qu'ils n'avaient jamais été retrouvés dans des

3 échanges de prisonniers qui avaient eu lieu entre les Croates et les

4 Serbes par la suite.

5 En me donnant certains détails, il m'a communiqué une carte

6 topographique de la zone de Vukovar que nous avons passée en revue. Il a

7 également dit qu'il y avait un témoin, que

8 vous avez appelé témoin B dans cette affaire, qui prétendait avoir survécu

9 à l’accident qui était arrivé à ce groupe, qu'il ne résidait plus à Zagreb

10 mais dans une autre ville proche de Zagreb. Je lui ai dit que j'aimerais

11 rencontrer cet homme et entendre son histoire, car cette histoire

12 m'intriguait et effectivement cette entrevue a été organisée.

13 Dans la soirée du 15 octobre, le témoin B est venue dans ma

14 chambre d'hôtel, l'hôtel Continental de Zagreb, chambre 1405, c'était vers

15 18 ou 19 heures. Avec moi, il y avait le Dr Keiger* et Lensy Cook* de la

16 Commission Mazowiecki. Il y avait également un homme qui s'appelait

17 Thomas Osavio, interprète.

18 Après les présentations et que nous nous soyons installés, j'ai

19 demandé au témoin B de me raconter son histoire du début jusqu'à la fin.

20 Je voulais qu'il me la raconte de façon continue et je voulais peut-être

21 revenir sur certains détails à la fin de son récit.

22 M. Niemann (interprétation). - Professeur Snow, vous avez dit

23 que vous avez pu consulter une carte topographique que vous avez obtenue

24 lorsque vous étiez à Zagreb. Voulez-vous consulter ce document

25 maintenant ? Est-ce bien un exemplaire de la carte que vous aviez à ce

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1 moment là ?

2 M. Snow (interprétation). - Oui, effectivement c'est un

3 exemplaire de cette carte. C'est une carte à l'échelle 1/25 millième

4 établi en 1973. Elle montre la zone entourant le petit village d'Ovcara?

5 une zone agricole. On voit aussi quelques kilomètres au sud et à l'ouest

6 de la ville de Vukovar.

7 M. Niemann (interprétation). - Vous avez dit que vous avez

8 demandé au témoin B de vous raconter cette histoire sans l'interrompre.

9 Vous souvenez-vous maintenant de ce qu’il vous a raconté ?

10 M. Snow (interprétation). - Oui, de façon générale. Il m'a dit

11 qu'il avait été légèrement blessé au cours du siège de Vukovar, qu'il

12 avait fait partie des forces de défense des forces croates et que, bien

13 qu'il n'ait pas été hospitalisé en tant que patient à l'époque, il est

14 allé à

15 l'hôpital ce matin-là parce qu'il avait entendu dire que les patients de

16 l'hôpital allaient être évacués et emmenés vers le territoire de la

17 Croatie.

18 Il était donc à l'hôpital à ce moment-là. Les forces serbes ont

19 organisé l'évacuation des hommes qui pouvaient encore marcher, ceux qui

20 étaient le moins blessés. Elles les ont emmenés vers un ensemble de bus

21 dans lesquels ils ont du monter, qui se trouvaient à l'arrière de

22 l'hôpital. Il est donc monté dans l'un de ces bus. Les bus se sont rendus

23 vers un poste militaire à la périphérie de Vukovar. Ils y sont restés

24 quelques heures et, par la suite, en fin d'après-midi ils ont été emmenés

25 au village d'Ovcara. Là, on les a fait descendre des bus et rentrer dans

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1 une grange ou dans un hangar pendant quelques heures encore. On les a

2 menacés, brutalisés parfois, c'était leurs geôliers qui les maltraitaient.

3 Puis, un peu après la tombée de la nuit, les geôliers ont

4 commencé à s'organiser ou à organiser les prisonniers, à constituer des

5 groupes d'environ 20 prisonniers chacun. Un camion s'est garé devant le

6 bâtiment. Ils ont fait monter un groupe d’hommes dans ce camion, 15 à

7 20 hommes. Ensuite 15 à 20 minutes plus tard, le camion revenait vide,

8 c'était toujours le même camion apparemment, c'est ce que se souvenait le

9 témoin en tout cas.

10 Puis, il faisait monter un autre groupe de prisonniers. Donc il

11 en a déduit d'après ce qu'il voyait que l'aller-retour prenait 15 à

12 20 minutes. Et d'après mes souvenirs, il pense être monté dans le

13 troisième ou quatrième camion.

14 Je dois souligner que je me rappelle de tout cela, mais cela

15 fait sept ans que cette histoire m'a été racontée et peut-être que mon

16 témoignage diffère quelque peu du sien. Vous devriez peut-être vous

17 référer à sa version plutôt qu'à la mienne, car c'était un événement

18 majeur pour lui.

19 Il est donc monté dans le troisième ou quatrième camion et il

20 était un peu réticent car il avait le sentiment que quelque chose de

21 négatif allait se produire. Il se trouvait vers l'arrière du camion quand

22 il est monté dedans, il a déclaré que le camion avait quitté Vukovar et

23 pris une route de campagne qui amenait à un autre village qui s'appelait

24 Grabovo* qui se trouve à peu près au sud-ouest d'Ovcara. Après environ un

25 kilomètre, le camion a pris à gauche dans un chemin de terre qui, sur la

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1 droite, était longée d'arbres et de l'autre côté d'un champ. Il a dit

2 qu'il avait sauté de l'arrière du camion, qu'il avait commencé à courir

3 sur la gauche et à traverser ce champ.

4 M. Niemann (interprétation). - Excusez-moi de vous interrompre

5 mais vous venez de dire que le camion avait Vukovar.

6 M. Snow (interprétation). - Excusez-moi, je parlais d'Ovcara.

7 M. Niemann (interprétation). - Merci, poursuivez. Vous en étiez

8 à l'endroit où vous dites qu'il avait sauté de l'arrière du camion.

9 M. Snow (interprétation). - Effectivement il a dit avoir sauté

10 du camion, il a commencé à se mettre à courir et je lui ai demandé s'il

11 avait vu quoi que ce soit, entendu quelque chose. Alors qu'il courait,

12 qu'il s'éloignait du camion dans la direction générale de Vukovar, il

13 avait entendu le camion s'arrêtait juste quelques instants, après qu’il

14 ait sauté de l'arrière du camion, et il avait entendu quelques coups

15 épars, quelques coups de feu.

16 Il avait le sentiment qu'éventuellement un autre prisonnier

17 avait tenté de s'échapper, mais cette fois cela aura été peut-être noté

18 par les geôliers et cette personne aura été empêché de suivre son trajet.

19 C'était son idée. C'est ainsi qu'il expliquait les quelques coups de feu

20 qu'il avait entendus.

21 Je lui ai demandé s'il avait entendu des cris, des pleurs, s'il

22 avait entendu davantage de coups de feu ou suffisamment que pour exécuter

23 toutes les personnes qui se trouvaient dans ce camion, il a dit non. Il a

24 dit qu'il courait si vite qu'il n'avait rien entendu, ni rien vu et que

25 finalement il avait réussi à atteindre Vukovar. Je crois que le lendemain

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1 matin il s'est rendu à la JNA pour être rapatrié par la suite.

2 M. Niemann (interprétation). - Lorsque qu'il vous a relaté cette

3 histoire, avez-vous

4 cette carte qui porte désormais la cote 94 ?

5 M. Snow (interprétation). - Oui.

6 M. Niemann (interprétation). - Est-ce que cette carte a été

7 annotée au cours de ce récit ?

8 M. Snow (interprétation). - Oui, alors que je lui parlais parce

9 que c’est un ingénieur, soit dit en passant, je crois que c'est un

10 ingénieur civil de formation. Donc il connaît bien la topographie et les

11 cartes topographiques.

12 Nous avons examiné la carte à mon hôtel et le seul endroit où sa

13 description correspondait au terrain, c'est un ravin qui parcourt la route

14 Ovcara-Grabovo qui se trouve environ à un kilomètre d'Ovcara.

15 M. Niemann (interprétation). - Un petit instant pour que nous

16 puissions montrer cette carte aux Juges, je demanderai à l'huissier de

17 nous aider à placer cette carte sur le rétroprojecteur près du Dr Snow, et

18 à la suite de cela, je poserai quelques questions.

19 M. Niemann (interprétation). - Voyons cette carte. Apparaît-elle

20 bien à l'écran ?

21 Apparemment, le rétroprojecteur ne veut pas marcher, il faudra

22 faire les choses autrement. Mais apparemment le texte apparaîtrait-il ? Le

23 voici, le voici... Docteur Snow, afin de nous aider, je vous demanderai de

24 nous indiquer où se trouve Ovcara sur la carte.

25 M. Snow (interprétation). - Voici le village même.

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1 M. Niemann (interprétation). - Et Grabovo?

2 M. Snow (interprétation). - Ici, un peu plus bas.

3 M. Niemann (interprétation). - Et ce ravin dont vous parliez ?

4 M. Snow (interprétation). - Ce ravin traverse la route qui va de

5 Ovcara à Grabovo, et c'est à cet endroit-ci, c’est cette partie que l'on

6 voit en vert sur la carte.

7 M. Niemann (interprétation). - Et ce cercle qui a été tracé

8 apparemment, qu'est-ce que c’est ?

9 M. Snow (interprétation). - C’est l'endroit où, après avoir

10 entendu le récit du témoin B, après avoir examiné le terrain, le relief,

11 nous nous sommes dit que ceci devait être l'endroit qu'il avait vu. Le

12 camion poursuivait sa route en cette direction, il y avait des champs à

13 gauche et des arbres à droite et c’est dans les champs qu'il avait pris la

14 fuite.

15 A cette époque-là, j'ai placé un petit point sur la carte. Mon

16 hypothèse et mon expérience me disaient que, dans ce genre d'affaire, ceci

17 pourrait être l’endroit où l'on placerait un charnier. Ce n'est pas que

18 mon expérience en matière de charniers qui m’aidait à déterminer cela,

19 mais j'ai grandi au Texas et en Oklahoma. Alors je sais que les rangers,

20 les fermiers en général, estiment que la tête d'un ravin tel que celui-ci

21 est un peu un terrain perdu pour un exploitant agricole. Donc si vous avez

22 une ferme, pour essayer de maîtriser, d'enrayer l'érosion des terrains et

23 des champs environnants, on pourrait s’imaginer effectivement qu'un

24 fermier veut utiliser un terrain peu arable pour y faire un charnier.

25 J'ai donc indiqué ce petit point tout près de la tête du ravin

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1 et j'ai tracé un cercle plus large en me disant que c'était peut-être

2 l'endroit où se trouvait le charnier, me disant que ce camion avait sans

3 doute été sur cette route pendant un certain après que le témoin B ait

4 sauté du camion et que ce camion s'était peut-être arrêté là pour

5 décharger les prisonniers. Si, effectivement, ils exécutaient ces

6 prisonniers, ils devaient l'avoir fait à cet endroit en général. Ai-je été

7 clair ?

8 M. Niemann (interprétation). - Oui, tout à fait. Est-ce que, à

9 entendre le témoin B, vous avez une idée plus ou moins générale de

10 l’endroit où, le long de ce ravin, il avait sauté du camion ?

11 M. Snow (interprétation). - Quand vous voyez la distance qu'il y

12 a de l’endroit où le ravin traverse la route et ce point, il y a

13 900 mètres. Ce qui veut dire, et je me souviens qu'il avait sauté 2 ou

14 300 mètres après que le camion se soit engagé sur ce terrain, que c'est là

15 qu'il avait sauté, donc cela le placerait ici à peu près. Mais rappelez

16 vous qu'il faisait nuit.

17 M. Niemann (interprétation). - Docteur Snow, vous vous êtes sans

18 doute trompé, vous avez parlé à un moment de 2 ou 300 kilomètres, vous

19 parliez évidemment de mètres ?

20 M. Snow (interprétation). - Tout à fait, excusez-moi.

21 M. Niemann (interprétation). - Après avoir eu cet entretien avec

22 le témoin B et indiquer ce point sur la carte, qu'avez-vous fait ensuite

23 par rapport à ce charnier présumé d'Ovcara ?

24 M. Snow (interprétation). - J’ai fait savoir aux membres de la

25 commission que j'avais quelques éléments. Je leur ai fait part du résultat

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1 de l'entretien. Ils m'ont demandé si j'étais prêt à aller sur place pour

2 étudier le relief avec plus de détails ?

3 M. Niemann (interprétation). - Aviez-vous déjà été à cet

4 endroit ?

5 M. Snow (interprétation). - Non, pas du tout.

6 M. Niemann (interprétation). - Que s'est il passé ?

7 M. Snow (interprétation). - Je suis allé avec quelques membres

8 de la commission à Belgrade. Nous sommes arrivés le 16 octobre en avion et

9 le lendemain je suis allé avec un chauffeur à Vukovar.

10 Sur place, j'ai pris contact avec les autorités des Nations

11 Unies, pas à Vukovar même mais à l'endroit qui faisait fonction d'état-

12 major ou de quartier-général. C'était au poste de Erduk. C'est là

13 d'ailleurs que j'ai rencontré un policier canadien des services du Royaume

14 unitaire, le sergent Lewy Mowen*. Il était cantonné depuis plusieurs mois

15 à cette base et il connaît assez bien la région. Je lui ai montré la carte

16 et nous nous sommes décidés à aller sur le terrain pour y jeter un coup

17 d'oeil.

18 Le lendemain matin, le 18, le sergent Mower* et moi même, ainsi

19 que Mme Blandina Nega*, une responsable civile au secteur Est qui avait

20 été constitué à l'époque, le Colonel Peters également, qui était le

21 commandant du Bataillon belge pour ce secteur Est et son adjudant je

22 pense, en tout cas l'un des membres de son personnel militaire. Nous

23 sommes tous

24 allés ensemble à cet endroit.

25 Il pleuvait dans la région donc nous avons garé nos véhicules le

Page 1398

1 long de la route principale, au pont où justement la route franchit ce

2 ravin, et nous nous sommes mis à marcher dans cette direction. Se faisant,

3 alors que nous traversions les champs boueux, Mme Nega et moi même nous

4 avions pris un certain retard par rapport aux autres membres. Le sergent

5 Mower* était à la tête du groupe. Il est arrivé vers la tête du ravin et

6 je lui ai demandé d'examiner, de regarder, d'être à la recherche de tout

7 ce qui pourrait dissimuler des caractères particulièrement frappants, et

8 s’il y avait des reliefs qui pouvaient nous aider. Nous étions peut-être à

9 200 mètres derrière le sergent Mower* au moment où il a commencé à crier

10 et à nous demander de nous approcher de lui. Ce que nous avons fait. Il se

11 trouvait juste à la tête du ravin à un endroit qui effectivement semblait

12 fournir quelques indications de sol qui aurait été perturbé.

13 M. Niemann (interprétation). - Etait-ce proche du cercle que

14 vous avez tracé ?

15 M. Snow (interprétation). - Oui, effectivement et c'est même

16 tout près, à quelques 20 ou 30 mètres du point que j’avais indiqué. Je

17 n'ai jamais pris de mesures exactes, mais nous étions assez près du point

18 que nous avions prévu

19 M. Niemann (interprétation). - Aviez-vous un appareil

20 photographique ?

21 M. Snow (interprétation). - Oui.

22 M. Niemann (interprétation). - Avez-vous pris plusieurs photos ?

23 M. Snow (interprétation). - Quelques-unes.

24 M. Niemann (interprétation). - Avez-vous ces photos ici, au

25 prétoire ?

Page 1399

1 M. Snow (interprétation). - Oui.

2 M. Niemann (interprétation). - Pour bien corroborer votre

3 témoignage, pourriez-vous faire référence à ces photos ou diapositives ?

4 M. Snow (interprétation). - Oui.

5 M. Niemann (interprétation). - Monsieur le Président, pourrions-

6 nous soumettre comme pièce ces diapositives ? Je demanderai d’en faire

7 copie pour que le témoin puisse reprendre les originaux après sa

8 déposition. Ainsi, nous pourrons faire des photographies des diapositives,

9 pour autant que ceci, bien sûr, convienne aux Juges.

10 (Les Juges manifestent leur accord.)

11 Je demande le versement de la carte que vous avez indiquée.

12 M. le Greffier.(interprétation) - Pièce 94.

13 M. Niemann (interprétation). - Vous avez parlé de ces

14 diapositives mais je vous demanderai d'examiner auparavant rapidement ce

15 document que je vais vous montrer par l’aide de l'huissier. Pourrez-vous

16 nous dire si ceci est le reflet fidèle de cet index des diapositives que

17 vous allez bientôt nous montrer ?

18 M. Snow (interprétation). - Oui, effectivement, c'est un

19 sommaire succinct de 28 diapositives indiquant pour chacune des entrées le

20 sujet général.

21 M. Niemann (interprétation). - Je demande le versement au

22 dossier de ces diapositives.

23 M. le Greffier.(interprétation) - Il s'agira de la pièce 95.

24 M. Niemann (interprétation). - Docteur Snow, au cours de votre

25 déposition, lorsque vous faites état d’une diapositive particulière, je

Page 1400

1 vous demanderai d’en citer le numéro indiqué dans le sommaire ou index qui

2 est devenu la pièce 95. Nous serons ainsi au courant de la diapositive

3 dont vous parlez.

4 Et si la Cour me le permet, je demanderai de verser l'ensemble

5 des diapositives comme étant une pièce, plutôt que de les identifier à

6 titre individuel, une par une. Ce serait peut-être une façon plus simple

7 et plus efficace, surtout pour le registre. Le greffe devrait sinon

8 identifier et donner une cote à chacune des diapositives.

9 Pour ce qui est de ces deux diapositives que vous avez prises,

10 je vous demande de

11 les décrire et de dire ce que vous avez vu lorsque vous êtes arrivés sur

12 ce site. Vous étiez à ce stade de la déposition, vous disiez que le

13 sergent Mower* était arrivé à un endroit, vous avait fait signe pour dire

14 qu'il avait trouvé quelque chose ?

15 M. Snow (interprétation). - Tout à fait. Allons-nous montrer ces

16 diapositives ?

17 M. Niemann (interprétation). - Effectivement, avec l'aide de

18 l'huissier, nous pourrions peut-être les mettre sur le rétroprojecteur.

19 J'espère qu'il y a un point de référence qui vous permettra de voir

20 effectivement les diapositives.

21 M. Snow (interprétation). - Je vais essayer de me souvenir du

22 numéro de chaque diapositive, mais si j'ai un petit écart de mémoire vous

23 pourrez sans doute m’aider. Je pense que c'est la diapositive numéro un.

24 M. Niemann (interprétation). - Il y a des petits problèmes de

25 rétroprojecteur apparemment aujourd'hui.

Page 1401

1 M. Snow (interprétation). - Je ne sais pas si votre écran est

2 très précis mais la photo n'a pas été mise au point.

3 M. le Président (interprétation). - Je crois que c'est la

4 meilleure photo que l'on puisse obtenir.

5 M. Niemann (interprétation). - Quelle est le numéro de cette

6 diapositive ?

7 M. Snow (interprétation). - Numéro un. Ceci vous montre le

8 sergent Mauer* qui est debout à cet endroit qui avait attiré son

9 attention, à cause de la terre retournée. Il est en train de regarder un

10 endroit où il y a pas mal de mauvaises herbes. Ces mauvaises herbes

11 semblent n'être vieilles que d'un an à peu près, il n'y a pas longtemps

12 qu'elles poussent là alors qu'il y a des petits arbustes dans les

13 environs, et eux sont plus âgés.

14 Il a donc entendu que nous arrivions et je vais vous montrer la

15 diapositive numéro 2. Est-il possible de mieux la placer ? Il est toujours

16 debout mais l'angle est quelque peu différent. Vous voyez qu'il y a une

17 petite clairière, il y a aussi des petites flaques qui se trouvent dans

18 cette

19 clairière. Il est manifeste et visible qu'effectivement, à cet endroit, la

20 terre a été retournée au cours des mois précédents, voir de l'année

21 précédente.

22 M. Niemann (interprétation). - C'est donc la diapositive

23 numéro 2 ?

24 M. Snow (interprétation). - Effectivement.

25 M. Niemann (interprétation). - Pourriez-vous nous expliquez

Page 1402

1 pourquoi cet endroit particulier a attiré votre attention ?

2 M. Snow (interprétation). - Oui. En règle générale, lorsque vous

3 avez un charnier, lorsque la terre a été retournée, il faut au moins

4 plusieurs années avant que la végétation des environs ne reprenne ce

5 terrain. C'est donc un repère, c'est un signe diagnostic de la présence

6 d'un charnier. C'est du moins un élément reconnaissant qu'il y a non

7 seulement la terre, la couche supérieure qui a été retournée, mais que la

8 végétation environnante a été perturbée également.

9 M. Niemann (interprétation). - Merci.

10 M. Snow (interprétation). - Nous nous sommes donc un peu avancés

11 sur cette surface. Le sergent Mower* avait quelques inquiétudes quant à

12 l'éventuelle présence de mines et insistait pour être le premier à avancer

13 sur ce terrain, suivi de moi même, du colonel Peters et du reste du

14 groupe.

15 Lorsque nous avons commencé à marcher, j'ai vu pratiquement tout

16 de suite qu'à la surface, ici, vous avez un crâne humain qui est en partie

17 exposé. Je ne sais pas si j'ai un petit pointeur qui peut vous montrer

18 mais c'est tout à fait au centre de la diapositive, juste un peu à gauche

19 du milieu vous avez les deux cavités oculaires.

20 M. Niemann (interprétation). - Est-ce cette photo a été prise

21 dans les conditions où vous avez trouvé ce terrain où avez-vous du

22 nettoyer un peu ?

23 M. Snow (interprétation). - Je n'ai pas fait du tout de

24 nettoyage c'est à peu près l'état dans lequel nous avons trouvé ce crâne,

25 pratiquement dans ces mêmes conditions.

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1 M. Niemann (interprétation). - Et ça c’est la diapositive

2 numéro 3 ?

3 M. Snow (interprétation). - Effectivement. Je vais vous montrer

4 la numéro 4. C'est un gros plan pour vous orienter disons ceci : vous

5 voyez le crâne lui même, vous avez la voûte crânienne, la partie du

6 cerveau qui est logée dans cette partie, qui se trouve au centre

7 supérieur ; plus à gauche vous voyez une cavité oculaire, le nez et une

8 partie des mâchoires, il y a même aussi quelques dents qui apparaissent,

9 ce qui veut dire que le crâne est tourné vers la gauche.

10 Même à ce stade une des choses qui m'a frappée c'est que tout à

11 fait au centre de la diapositive vous avez la partie gauche du crâne et

12 juste à l'arrière, ou derrière la cavité oculaire, vous avez un creux en

13 plus sombre, c'est effectivement un trou dans le crâne qui doit faire

14 quelque chose comme 2 centimètres carré si je me souviens. S'il y a une ou

15 deux fractures qui partent de la partie périphérique vers le centre du

16 crâne, à l’examen dans cette position je vois quelques lignes à la marge

17 du trou qui sont tout à fait caractéristiques des traces que laissent une

18 balle quand elle sort du crâne. Ceci présentait selon moi les

19 caractéristiques propres à une blessure de sortie. En d'autres termes, on

20 pourrait s'attendre de l'autre côté à avoir les traces laissées par

21 l'entrée de la balle dans le crâne et alors que la balle est ressortie

22 juste derrière la cavité oculaire, dans la tempe.

23 M. Niemann (interprétation). - Nous parlons ici de la

24 diapositive numéro 4 de la pièce 95, n’est-ce pas ?

25 M. Snow (interprétation). - Oui.

Page 1404

1 M. Niemann (interprétation). - Que s'est-il passé après que vous

2 ayez fait cette découverte ? Qu'avez-vous fait ?

3 M. Snow (interprétation). - Nous avons rebroussé chemin, nous

4 sommes retournés à l'endroit où nous avions trouvé tout de suite la terre

5 retournée. A environ 50 mètres de ce charnier, il y avait un petit ravin

6 tout proche du charnier, enfin, je dis charnier de cet endroit, non pas 50

7 mais 15 m, ce que j’interprète. Nous avons trouvé là un autre squelette,

8 pratiquement aussi à la surface. Les os avaient été comme déteints ou

9 blanchis par l'exposition

10 au soleil, c’est souvent le cas lorsqu’il y a exposition au soleil.

11 Certains des os avaient été endommagés par des animaux qui étaient venus

12 fouiner, des animaux prédateurs, par exemple des chats ou des chiens

13 sauvages mais de taille moyenne, des animaux de taille moyenne qui avaient

14 attaqué ces os. Il y avait aussi quelques traces de tissus.

15 Ce qui veut dire qu'à ce stade, nous avions la preuve de la

16 présence de deux personnes toutes proches de la surface de cet endroit.

17 Nous avons donc rebroussé chemin et, ce faisant, nous avons également

18 remarqué qu'il y avait certaines preuves de la présence dans les arbres

19 d'un côté du charnier de trous qui ressemblaient à des trous provoqués par

20 des balles ayant pénétré dans des petits arbres. Tout en faisant ce

21 chemin, j'ai également vu le signe de la présence peut-être d'une autre

22 personne. Il y avait l'omoplate, un os de l'omoplate qui était là, gisant

23 au sol. Ceci n'a pas duré plus de 15 ou 20 minutes, mais cela a suffi pour

24 me convaincre du fait que ce site méritait d'être davantage exploré.

25 Nous étions également vivement préoccupés d'assurer la sécurité

Page 1405

1 de ce charnier, de ce site, à ce moment-là. En effet, au fond du ravin,

2 alors que nous remontions, nous avons vu qu'il y avait quelques véhicules,

3 disons un tracteur avec une remorque, il y avait aussi quelques hommes qui

4 semblaient être en train de couper du bois dans la forêt. Et nous savions

5 que si ces personnes étaient témoins de nos activités, la rumeur se

6 répandrait rapidement, rumeur selon laquelle nous avions peut-être trouvé

7 ce charnier.

8 Nous avons donc quitté l'endroit, nous sommes retournés à Eldut*

9 et il se trouve que la région environnante d'Ovcara se trouvait sous la

10 compétence du bataillon russe et qu'apparemment les Belges, le bataillon

11 belge avait aussi une certaine responsabilité pour cette région du secteur

12 est. Les troupes du bataillon russe ont été dépêchées pour assurer la

13 sécurité du site.

14 M. Niemann (interprétation). - Permettez-moi de vous interrompre

15 un instant, Professeur Snow. Les parties de squelettes que vous avez pu

16 examiner sur les lieux, la première

17 fois que vous vous y êtes rendus, vous ont-elles permis de faire des

18 observations préliminaires ou autres quant à l'âge possible des personnes

19 qui s'y trouvaient ainsi qu’au sexe ?

20 M. Snow (interprétation). - En regardant ces éléments qui se

21 trouvaient presque à la surface, je pouvais dire qu'il s'agissait du

22 squelette d'un homme, sans doute d'un jeune homme adulte. Il semblait

23 qu'il y avait une blessure provoquée par une balle.

24 Suite à mon examen rapide du squelette qui se trouvait dans le

25 bois, c'était sans doute aussi un jeune homme adulte mais je n'ai pas eu

Page 1406

1 le temps de mener un examen très détaillé à ce moment-là. La sécurité des

2 lieux semblait être la mesure prioritaire à prendre à ce moment-là. Donc,

3 de retour Eldut* doute, nous avons expliqué que ce site devait être

4 considéré comme un site d'homicide et que, comme pour tout autre site où

5 un crime s’est produit, il fallait assurer la sécurité jusqu'à ce qu’une

6 enquête soit ouverte.

7 M. Niemann (interprétation). - Avant de passer à cela, vous avez

8 dit avoir examiné certains arbres qui se trouvaient derrière le charnier

9 pour voir s'il y avait certaines traces de balles et, effectivement, vous

10 en avez découvert. Pourquoi avez-vous concentré votre attention sur ce

11 lieu ?

12 M. Snow (interprétation). - Nous nous trouvions à cet endroit

13 parce que lorsque nous avons examiné ce charnier, nous avons trouvé ce

14 squelette qui se trouvait en surface et c'est ce qui a attiré notre

15 attention. Lorsque nous sommes retournés à cet endroit, nous avons regardé

16 certains des arbres qui se trouvaient autour et nous y avons vu certaines

17 traces de balle.

18 M. Niemann (interprétation). - Je suis désolé de vous avoir

19 interrompu, vous avez parlé de la sécurité qui devait être assurée lorsque

20 vous êtes retournés à Eldut*. Ensuite, que s'est-il passé ?

21 M. Snow (interprétation). - Tout d’abord il a été prévu que les

22 soldats russes il leur fallait quelque trois ou quatre heures pour

23 s'organiser, pour se rendent sur les lieux. Donc, entre temps, le

24 sergent Mower* a envoyé quelques-uns de ses hommes. Ils se sont installés

25 là-bas

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1 jusqu'à, je crois... Enfin, je me rappelle que la situation était un peu

2 confuse du côté russe. Les soldats russes avaient des problèmes pour

3 trouver le lieu. Je ne pense pas qu'ils soient arrivés avant 23 heures sur

4 les lieux. Là, ils ont remplacé les hommes du sergent Mauer*.

5 Une autre difficulté a surgi : nous sommes repartis là-bas le

6 lendemain matin pour examiner les lieux et les soldats russes étaient

7 partis. Il y avait eu un certain malentendu et ils pensaient que la

8 sécurité devrait être assurée pour la nuit seulement. Ils étaient partis

9 vers 10 heures du matin. Nous avons donc du rebrousser chemin et leur

10 expliquer que la sécurité devrait être assurée 24 heures sur 24 à partir

11 de ce moment là et jusqu'à la fin de l'enquête, quelque soit la durée de

12 cette enquête. On les a donc renvoyés sur le terrain et ils ont stationné

13 sur place de façon permanente. Ils ont mis certaines sentinelles et

14 chemins de frise autour du site.

15 M. Niemann (interprétation). - A votre connaissance, ces soldats

16 russes ont assuré la sécurité du site à partir de 1992 et jusqu'à la fin

17 de l'enquête ou en tout cas jusqu'à ce que l’ATNUSO prenne le relais,

18 c'est cela ?

19 M. Snow (interprétation). - Oui, c’est-à-dire en juillet 1996,

20 en juillet/août quelque chose comme ça.

21 M. Niemann (interprétation). - Après la visite du site en

22 octobre 1992, qu’avez-vous fait ?

23 M. Snow (interprétation). - La Commission Mazowiecki est

24 repartie à Genève et ils ont rédigé un rapport. En tant qu’annexes, les

25 découverts d’Ovcara ont été jointes à ce rapport.

Page 1408

1 Un mois plus tard environ, je suis retourné avec

2 M. Eric Stover*, qui était le directeur exécutif de la commission à ce

3 moment-là, le médecin pour les droits de l'homme, il travaillait en

4 collaboration avec la commission. Il y avait le Dr Beky Senders* qui avait

5 travaillé dans ce comité, avec qui j'avais travaillé au Guatemala et en

6 Argentine ; il travaillait à cette époque avec Amnisty International.

7 J'avais collaboré avec lui sur un certain nombre de projets et

8 d'enquêtes en Argentine. Je veux souligner que le Dr Bens* ne travaille

9 plus avec Amnisty International, il est maintenant avec la Cour

10 interaméricaine.

11 M. Niemann (interprétation). - Il s'agissait du 17 décembre ?

12 C'est-à-dire un mois après ?

13 M. Snow (interprétation). - Oui, environ un mois après, peut-

14 être un peu plus tard encore. Je suis retourné à Ovcara le 17 décembre.

15 Nous sommes repartis sur le site et j'ai quelques diapositives

16 supplémentaires que je pourrais vous montrer maintenant.

17 M. Niemann (interprétation). - Peut-être pourrions-nous tamiser

18 la lumière afin d’améliorer l’image. S’agit-il de la pièce numéro 5 de la

19 pièce 95 ?

20 M. Snow (interprétation). - Oui. C'est une vue aérienne du site.

21 Cette diapositive a en fait été prise un mois ou deux plus tard lorsque

22 nous nous sommes rendus pour la troisième fois sur le site. J'en parlerai

23 plus tard.

24 Mais cela montre bien la zone de cette tombe de Vukovar. A

25 gauche et au centre, on y voit un véhicule et une petite maison, une

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1 petite caravane qui était utilisée par les soldats russes. Le temps était

2 très difficile et il fallait s'abriter. Peut-être que vous voyez vers la

3 droite de la diapositive un grand arbre et autour les chemins de frise, et

4 dans cette zone nous trouvions les éléments qui nous intéressaient vers le

5 bas de la photo juste en dessous des installations assurant la sécurité.

6 M. Niemann (interprétation). - Je crois qu'il y a une date qui

7 figure sur ce document sur la pièce 95. Il est dit 17/19 décembre mais ce

8 n'est pas la bonne date n'est-ce pas ?

9 M. Snow (interprétation). - Eh bien, regardons sur notre

10 sommaire. Il est dit 17/19 décembre.

11 M. Niemann (interprétation). - Oui, mais je crois vous avez dit

12 que cette diapositive a été prise par la suite ?

13 M. Snow (interprétation). - Cette diapositive-là a été prise en

14 mars.

15 M. Niemann (interprétation). - De quelle année ?

16 M. Snow (interprétation). - De la même année, en 193. Ces

17 diapositives ne sont pas dans l'ordre chronologique car celle-ci

18 permettait de voir la topographie des lieux.

19 M. Niemann (interprétation). - Très bien, veuillez poursuivre

20 s'il vous plaît.

21 M. Snow (interprétation). - Je prends donc la diapositive

22 suivante, la numéro 6. Elle montre le groupe qui se trouvait là pour cette

23 opération de reconnaissance préliminaire en décembre. A gauche, nous

24 voyons le Dr Bens*. La femme que l'on voit et qui porte une veste verte

25 est le Becky Senders*. Puis, de profil plus ou moins, juste derrière moi

Page 1410

1 on voit l'un des officiers qui nous accompagnaient.

2 M. Niemann (interprétation). - Le charnier se trouve de l'autre

3 côté des barbelés, c’est ça ?

4 M. Snow (interprétation). - Oui, c'est cela.

5 M. Nieman (interprétation). - Il s'agit de la diapositive

6 numéro 6, n'est-ce pas ? Merci.

7 M. Snow (interprétation). - Il s'agit d'une photo prise du côté

8 du charnier. Elle est plus ou moins orientée vers le nord, on voit les

9 barbelés et le véhicule des soldats russes, pour leur tour de garde et,

10 derrière cela, on voit encore la cabane qui abritait les soldats russes.

11 M. Nieman (interprétation). - Il s'agit de la diapositive 7 de

12 la pièce 95 ?

13 M. Snow (interprétation). - C'est exact. On m'y voit, à gauche,

14 et le Dr Becky Sanders* au centre de la photo. Nous faisons face à la zone

15 du charnier, la zone où la terre a été retournée. On voit qu'il a plu et

16 qu'il y a une grande flaque d'eau boueuse devant nous. Nous avons donc dû

17 la vider en creusant des conduits et les conditions étaient donc

18 difficiles. Cela nous a pris un certain temps.

19 Je dois ajouter également que, outre les signes visuels qui

20 montraient que

21 la terre avait été retournée, il y avait d'autres signes olfactifs, une

22 odeur de décomposition que l'on associe très souvent à ce genre d'endroit.

23 Nous ressentions là qu'un animal avait été enterré à cet endroit. D'après

24 ce que nous voyons, d'après la surface du sol, avec des squelettes

25 humains, les corps qui avaient été enterrés devaient être des corps

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1 d'êtres humains.

2 M. Nieman (interprétation). - Il s'agit de la diapositive 8 de

3 la pièce 95.

4 M. Snow (interprétation). - Nous avons donc parcouru la zone

5 pour trouver tout signe nous indiquant la possibilité de perturbation,

6 retournement du sol. Nous avons regardé s'il y avait eu une quelconque

7 tentative de modifier ce charnier entre octobre, première date où nous

8 étions venus, et maintenant. Mais il n'y en n'avait pas eu. A une

9 exception près, là nous regardons le premier crâne que nous avons vu...

10 M. Nieman (interprétation). - Oui, il s'agit de la diapositive 9

11 de la pièce 95 ?

12 M. Snow (interprétation). - Ce crâne avait été nettoyé, essuyé

13 et replacé, repositionné. Cela m'intriguait et je me suis rendu compte que

14 l'officier médical britannique avait entendu parler de cette découverte

15 quelques jours après que nous soyons venus en octobre. Il avait décidé,

16 sur sa propre initiative, d'examiner brièvement le crâne qui avait été

17 découvert. Mais à part cela, c'était le seul signe qui nous indiquait que

18 quoi que ce soit avait été modifié dans ce charnier. L'unité russe avait

19 bien fait son travail, en gros.

20 Puis-je passer à la diapositive suivante ?

21 M. Nieman (interprétation). - Oui. Nous regardons donc la

22 diapositive 10 de la pièce 95.

23 M. Snow (interprétation). - Une fois que nous avons réussi à

24 retirer l'eau

25 de cette zone afin de pouvoir y travailler, nous avons commencé à

Page 1412

1 quadriller la zone comme nous l'aurions fait sur un site archéologique, en

2 posant des ficelles et des piquets, des jalons. Cela afin de définir, de

3 délimiter le périmètre global de la zone du charnier, de le quadriller.

4 Ceci nous permettrait d'affiner nos renseignements topographiques pour les

5 enquêtes, à l'avenir.

6 M. Nieman (interprétation). - Il s'agit de la diapositive 11 de

7 la pièce 95 ?

8 M. Snow (interprétation). - Oui. Voici le périmètre global du

9 charnier qui est maintenant délimité par une ficelle, comme un rectangle.

10 A l'époque, nous pensions que le charnier lui-même se trouvait dans ce

11 périmètre et qu'il faisait peut-être dix mètres de long sur sept mètres de

12 large.

13 M. Nieman (interprétation). - Avez-vous pu juger de la façon

14 dont ce charnier avait été creusé ?

15 M. Snow (interprétation). - J'avais l'impression, impression

16 partagée par le Dr Sanders* d'ailleurs, que ce charnier avec sa

17 régularité, rectangularité, avait sans doute été creusé par un bulldozer

18 ou un engin de ce type, un engin lourd. Généralement, les charniers qui

19 sont creusés par des pelles sont circulaires et leurs délimitations sont

20 moins précises que cela. En tout cas c'était notre impression à l'époque,

21 il y avait sans doute eu un engin qui avait creusé cette tombe.

22 M. Niemann (interprétation). - Merci. Passons à la diapositive

23 suivante.

24 M. Snow (interprétation). - Une fois que nous avions quadrillé

25 la zone et qu'elle délimitait le périmètre du charnier, notre tâche

Page 1413

1 suivante à été de passer à une opération d'exploration.

2 M. Niemann (interprétation). - Nous regardons donc la

3 diapositive 12 de la pièce 95.

4 M. Snow (interprétation). - Nous avions creusé une tranchée

5 d'exploration, nous n'avions pas eu le temps de procéder à une exhumation

6 totale car cela aurait pris beaucoup plus de temps et nous aurions eu

7 besoin de bras, mais nous voulions établir le fait qu'il s'agissait bien

8 d'un charnier contenant des corps humains en plus de ces 2 squelettes que

9 nous avions découvert à la surface. Nous avons creusé une tranchée d'un

10 mètre, qui faisait toute la largeur du charnier, peut-être 7 mètres comme

11 je l'ai déjà dit. Cette tranchée faisait donc à peu près la même longueur

12 que la largeur du charnier et à peu près un mètre de large. On y voit

13 d'ailleurs sur cette photo 2 lignes qui prolongent cette tranchée

14 d'exploration. Il y avait également des soldats du bataillon belge qui

15 étaient préoccupés par la présence éventuelle de mines ou d'objets piégés.

16 Il ont donc passé en revue la zone avec leur détecteur de mine, afin de

17 s'assurer que la zone était suffisamment sûre pour la creuser.

18 M. Niemann (interprétation). - Merci. Nous regardons maintenant

19 là diapositive 13 de la pièce 9.

20 M. Snow (interprétation). - Oui, effectivement. Une fois que

21 nous avions délimité le contour de cette tranchée nous avons commencé à

22 enlever la partie supérieure du sol. C'est un travail assez laborieux.

23 Mais les soldats du bataillon russe qui se trouvaient déjà là depuis

24 quelques mois, s'ennuyaient un peu. Ils ont donc montré un enthousiasme

25 extrême à nous aider et à nous permettre d'enlever la couche supérieure du

Page 1414

1 sol. Il faisait extrêmement froid ce jour là, et je crois qu'ils étaient

2 assez contents de se lancer dans une certaine activité physique. Nous

3 voyons sur cette photo ces soldats qui commencent à enlever la couche

4 supérieure du sol de la tranchée. Cela a changé d'un endroit à l'autre,

5 mais entre 10 et 20 centimètres en dessous de la surface nous avons

6 commencé à trouver des restes d'humains

7 M. Niemann (interprétation). - Nous regardons maintenant la

8 diapositive 14 de la pièce 95.

9 M. Snow (interprétation). - Comme je l'ai dit, nous ne voulions

10 pas retirer l'écorce

11 mais obtenir simplement une impression générale et essayer d'évaluer le

12 nombre de corps qui se trouvaient dans cette zone, et qu'il s'agissait

13 bien en fait de corps humains. Nous avons donc examiné cette tranchée peu

14 à peu, et avons commencé à mettre à jour des restes de corps humains. Par

15 exemple, cette personne ici, on voit une manche, c'est un bras droit, et

16 la main est encore un peu couverte de chair. Cet individu est plus ou

17 moins orienté dans la largeur de la tranchée.

18 M. Niemann (interprétation). - Au vu de ce que vous avez vu à ce

19 moment là et d'après votre expérience, avez-vous pu juger de la durée

20 pendant laquelle ce corps était resté là ?

21 M. Snow (interprétation). - D'après ce que j'ai pu en juger cela

22 pouvait aller de quelques mois à peut-être un an, 6 à 18 mois peut-être,

23 à peu près. Mais les conditions dans lesquelles se trouvaient les corps

24 que nous avons vus, correspondaient avec ce que l'on nous avait dit et à

25 ce que l'on nous avait raconté à propos des incidents d'Ovcara, que le

Page 1415

1 corps des personnes qui avaient été tuées avaient été placés dans ce

2 charnier vers le 20 novembre 1991.

3 M. Niemann (interprétation). - La diapositive suivante s’il vous

4 plaît.

5 M. Snow (interprétation). - Cette diapositive montre que la

6 tranchée et encore un peu plus profonde, et en fait c'est un peu la fin du

7 creusement de cette tranchée d'exploration, et dans cette zone d'environ

8 7 mètres, nous avons trouvé 9 corps, 9 personnes distinctes qui se

9 trouvaient dans différentes position, soit leur pied, soit leurs mains,

10 parfois leur corps tout entier se trouvait dans cette zone délimitée par

11 la tranchée.

12 M. Niemann (interprétation). - Nous regardons maintenant la

13 diapositive 15 de la pièce 95.

14 M. Snow (interprétation). - Nous avions trouvé ces deux corps à

15 la surface. Cela voulait dire qu'au moins onze personnes avaient été

16 enterrées dans cette zone et nous en attendions bien plus. Comme je l'ai

17 dit auparavant, nous n'avons pas retiré les corps, mais

18 simplement observé nos découvertes, chaque fois que nous mettions à jour

19 un nouveau corps dans cette tranchée. Lorsque nous en avons eu fini, nous

20 avons recouvert la tranchée du mieux que nous avons pu et nous avons mis

21 des feuilles en plastique sur les corps que nous avions mis à jour, afin

22 de les protéger de la terre que nous allions rejeter sur eux.

23 M. Niemann (interprétation). - Merci. Avez-vous dessiné un petit

24 schéma des lieux, lorsque vous y étiez, du charnier d'abord et ensuite de

25 la tranchée qui a été creusée ?

Page 1416

1 M. Snow (interprétation). - Oui. Je dois m'excuser pour la

2 mauvaise qualité de cette diapositive, je crois d'ailleurs qu'elle est à

3 l'envers.

4 C'est donc un schéma approximatif des lieux qui montre les

5 limites du charnier.

6 M. Niemann (interprétation). - Nous regardons la diapositive 16

7 de la pièce 95.

8 M. Snow (interprétation). - L'orientation de cette carte serait

9 vers la gauche. Cette tranchée va plus ou moins du nord vers le sud, pas

10 tout à fait mais presque. C'est cette tranchée que l'on voit au milieu,

11 cette bande horizontale.

12 M. Niemann (interprétation). - Excusez-moi de vous interrompre,

13 je crois que nous avons une copie papier de cette diapositive. Peut-être

14 pourrions-nous la mettre sur le rétroprojecteur et l'utiliser pour nous

15 indiquer ces différents éléments.

16 J'aimerais que cette pièce soit enregistrée aux fins

17 d'identification, car vous ne pouvez pas nous montrer des choses sur la

18 diapositive, elle est trop petite. Peut-être pouvez-vous utiliser cet

19 agrandissement de cette diapositive, à laquelle on pourrait attribuer le

20 prochain chiffre.

21 M. le Greffier. (interprétation). - Il s'agit de la cote 96.

22 M. Niemann (interprétation). - Je crois que c'est la page

23 suivante qui nous intéresse. Pourriez-vous utiliser le pointeur sur le

24 rétroprojecteur ? Vous pourriez maintenant nous citer les différentes

25 annotations.

Page 1417

1 M. Snow (interprétation). - Il s'agit de la tranchée

2 d'exploration, dans laquelle on

3 voit les corps ou les parties de corps qui ont été mis à jour lorsque nous

4 avons creusé cette tranchée. Par exemple, je crois que cet élément ici

5 correspond au bras que nous avons vu sur la diapositive.

6 M. Niemann (interprétation). - Nous regardons la pièce 96.

7 M. Snow (interprétation). - Oui. Cette ligne que l'on voit, ce

8 sont des espèces de failles dans le sol.

9 Lorsque les tombes sont creusées ainsi et recouvertes, on

10 commence, après un certain temps, à avoir un certain effondrement. On voit

11 des petites failles dans la terre qui suivent plus ou moins les limites du

12 charnier. Ces lignes représentent donc les fractures que nous voyons, que

13 nous avons vues à la surface.

14 M. Niemann (interprétation). - Veuillez nous indiquer cela sur

15 le rétroprojecteur.

16 M. Snow (interprétation). - Excusez-moi.

17 Il y a ici la tranchée. Nous voyons le bras droit ici. En haut,

18 il y a le squelette de l'individu dont nous avons vu le crâne la première

19 fois, ici, dans cette zone où les restes du deuxièmes individu ont été

20 découverts, un peu à droite du charnier en lui même. Même aujourd'hui, je

21 ne sais pas comment ce corps s'est retrouvé là. Peut-être a-t-il été

22 exécuté plus tard et son corps a-t-il été laissé là, alors que la tombe

23 était déjà refermée, ou est-il mort plus tard, comme nous l'avons vu dans

24 plusieurs autres endroits, lorsque les gens sont blessés, réussissent à

25 sortir de la tombe, à ramper un peu plus loin et vont mourir plus loin.

Page 1418

1 Peut-être même essaient-ils de s'enfuir.

2 Avez-vous d'autres questions sur cette carte ?

3 M. Niemann (interprétation). - Puisque nous avons cette copie

4 papier de l'autre croquis, peut-être pourriez-vous nous l'expliquer. Il

5 s'agit de la page n° 2 de la page 96, en fait de la première page de ce

6 document.

7 M. Snow (interprétation). - C'est un plan agrandi de l'endroit.

8 Le nord se trouve

9 dans cette direction à peu près, vers la droite; l'ouest est vers le haut.

10 Cette zone ouverte que nous avons vue, c'est l'endroit où il y a beaucoup

11 de végétation, des petits arbustes. C'est cette clairière, cette lisière

12 qui a attiré notre attention. On la voit de façon plus détaillée sur cette

13 carte. Voici la route qui est pratiquement parallèle. Vous avez une bande

14 d'arbres et le ravin. Cet endroit ici, au bout, c'est effectivement la

15 tête du ravin, l'extrémité ou l'une des extrémités du ravin. Tout autour,

16 vous avez des champs labourés, cultivés.

17 C'est donc un agrandissement qui vous montre exactement où nous

18 avons trouvé le premier squelette, ici, au bout de l'endroit où la terre

19 avait été retournée.

20 M. Niemann (interprétation). - On voit là "SSK1".

21 M. Snow (interprétation). - Oui.

22 M. Niemann (interprétation). - Et là, c’est un petit ravin qui

23 nous éloigne du charnier, très boisé. C'est là que nous avons vu les

24 restes du deuxième squelette, indiqué comme étant SSK2 ?

25 M. Snow (interprétation). - Oui.

Page 1419

1 M. Niemann (interprétation). - Pouvons-nous poursuivre l’examen

2 des diapositives ?

3 M. Snow (interprétation). - Ce sera le numéro...

4 M. Niemann (interprétation). - 17 ?

5 M. Snow (interprétation). - Numéro 17, vous avez raison.

6 M. Niemann (interprétation). - Diapo 17 de la pièce 95.

7 M. Snow (interprétation). - Excusez-moi de la piètre qualité de

8 cette diapositive, les conditions de luminosité n'étaient pas très bonnes.

9 Nous avons observé, entre autres, qu'à la surface du charnier lui-même et

10 surtout tout au long du pourtour, que des douilles avaient été utilisées.

11 Cela montre effectivement une de ces douilles. Vous avez la flèche qui

12 l’indique. La diapositive n’est pas très bonne, mais nous avons trouvé

13 plusieurs de ces douilles à cet endroit.

14 M. Niemann (interprétation). - C’est la diapositive 18 ?

15 M. Snow (interprétation). - Puisque nous n'en n'étions qu'à un

16 effort d'exploration à ce moment-là, nous ne voulions rassembler aucun des

17 éléments de preuve. Mais nous avons indiqué les endroits avec ces petits

18 drapeaux rouges, endroits où nous avons trouvé des douilles utilisées.

19 M. Niemann (interprétation). - Qui se trouvent à l'avant plan ?

20 M. Snow (interprétation). - Effectivement, et tout près du

21 pourtour du charnier.

22 M. Niemann (interprétation). - Je crois que nous sommes en train

23 d’examiner la photographie n° 18 de la pièce 95. Docteur Snow, ces

24 douilles de balles, à ce moment-là ou par la suite, les avez-vous

25 étudiées ? Avez-vous déterminé de quelles munitions il s’agissait ?

Page 1420

1 M. Snow (interprétation). - Je ne suis pas expert en balistique,

2 mais il semblait que la majorité des douilles que nous avons trouvées -et,

3 soit dit en passant, ce n'est pas tout ce que nous avons vu, mais nous

4 n'avons pu mettre de petits drapeaux qu’à ces douilles qui se trouvaient à

5 la surface, plus bas, par la suite, nous en avons trouvé beaucoup plus-

6 ont été utilisées par un AK47, c'est-à-dire un calibre tout à fait commun,

7 le type de balles que l'on utilise pour ce type d'arme.

8 M. Niemann (interprétation). - Merci. La photo suivante, 19 de

9 la pièce 95.

10 M. Snow (interprétation). - Ici, vous voyez des membres de la

11 FORPRONU du bataillon belge, ces mêmes personnes qui nous ont aidés à voir

12 s'il y avait des mines. Comme je vous le disais, quand vous allez à

13 l'extrémité la plus éloignée de cet endroit, si vous vous approchez de ce

14 ravin où nous avons trouvé le deuxième squelette, nous remarquons qu'il y

15 a beaucoup de traces de balles dans les arbres et arbustes. Sur ce petit

16 arbrisseau, ici, on voit le fait que la balle n'a fait que traverser une

17 branche. Mais il y a un pointeur qui montre le trou.

18 M. Niemann (interprétation). - C'est le point qui se trouve

19 juste au-dessus du ruban rouge, n'est-ce pas ?

20 M. Snow (interprétation). - Tout à fait. Nous avons constaté la

21 présence de plusieurs de ces trous. L'impression générale que nous avions

22 était que, quelqu’était la personne responsable de ces coups de feu, ayant

23 tiré ces balles, vous savez un AK47, a éjecté les douilles de 10 à

24 15 pieds vers la droite du tireur. La plupart de ces douilles que nous

25 avons trouvées sur le sol se trouvaient dans un coin du charnier qui était

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1 au sud-ouest. Il tirait en diagonale. La trajectoire était, de façon

2 prédominante, diagonale par rapport à la surface du charnier. Cela veut

3 dire que les tireurs se trouvaient sans doute à proximité du coin nord-

4 ouest et tiraient vers le coin sud-ouest.

5 J'espère avoir été très clair. Il serait peut-être plus facile

6 de revenir à la carte.

7 M. Niemann (interprétation). - Vous allez sans doute vouloir

8 examiner la carte 96. Effectivement, ce serait plus facile à l'aide du

9 pointeur. Nous examinons la page n° 2 de la pièce 96 où vous avez le

10 croquis, le schéma du charnier.

11 M. Snow (interprétation). - Voilà la direction générale du nord,

12 à gauche et nous avons trouvé un grand nombre de douilles ici, dans ce

13 coin, un peu en dehors de cette carte-ci. Les petits arbres qui avaient

14 été traversée de balles se trouvaient dans ce coin-ci, en haut à droite.

15 Nous nous sommes donc dit que les tireurs, puisque les douilles étaient

16 éjectées de l’AK47, à droite, se trouvaient dans ce coin-ci, le coin

17 inférieur gauche et tiraient sans doute de façon plus ou moins diagonale

18 par rapport à la surface du charnier dans cette direction-ci, du coin

19 inférieur gauche vers le coin supérieur droite.

20 M. Niemann (interprétation). - Diapo suivante, réponse n° 20,

21 question de la pièce 95.

22 M. Snow (interprétation). - Après avoir procédé au creusement de

23 la tranchée d'exploration, je suis revenu au squelette n° 1 et je l'ai

24 examiné avec un peu plus d'attention que cela n'avait été le cas lors de

25 cette première visite qui s’était faite en toute hâte quelques mois

Page 1422

1 auparavant. Voilà ce crâne, au centre de la diapo. Juste derrière la

2 cavité oculaire gauche, vous

3 voyez une autre perforation, un autre défaut carré (c’est la tempe gauche)

4 et quelques failles, quelques lignes de fractures qui partent de là et qui

5 irradient tout le crâne.

6 A l'examen plus détaillé de ce crâne, je me suis dit que nous

7 avions affaire à un jeune homme, au tout début de ses 20 ans. Il y avait

8 d'autres os du crâne, ou du squelette, mais nous n'avons pas pu les

9 examiner.

10 Je vous montre cette diapositive notamment parce qu'à la droite

11 du crâne, ou plutôt dans le crâne même, au niveau du haut de la tête, il y

12 a une petite blessure d'entrée circulaire. On a donc compris que la balle

13 a traversé le crâne de la droite vers la gauche.

14 M. Niemann (interprétation). - Diapositive suivante, numéro 20-

15 21 de la pièce 95.

16 M. Snow (interprétation). - Même si les conditions sur le

17 terrain étaient assez précaires et difficiles, nous avons exhumé ce...

18 Enfin, nous avions ce squelette qui était à la surface, nous l'avons

19 nettoyé et j'ai pris quelques mesures préliminaires. Par exemple, ici, je

20 suis en train de mesurer le fémur, ou un muscle de la cuisse et nous avons

21 pu ainsi délimiter quelle était la stature, la taille de cette personne

22 quand elle avait été vivante.

23 Nous avons fait ces autres observations notamment sur ces os et

24 sur d'autres os également. J'ai pu estimer l'âge de cette personne, sa

25 taille à partir des os que nous avons vus cette fois-là. J'ai pu dire s'il

Page 1423

1 était gaucher ou droitier et j'ai pu essayer de trouver d'autres signes de

2 traumatisme que l'on aurait pu voir ou qui avaient été produits au moment

3 de sa mort.

4 M. Niemann (interprétation). - Photo suivante, la numéro 22 de

5 la pièce 95.

6 M. Snow (interprétation). - S’agissant de ce squelette-ci, nous

7 avons pu trouver certains des restes de vêtements et quelques effets

8 personnels tels qu'un bijou ou deux. Cela ne se voit pas très bien ici,

9 mais vous avez un pointeur juste en dessous de cette carte que vous voyez

10 à l'écran qui pointe vers le centre pratiquement et qui indique une petite

11 chaîne en or que nous avons trouvée. Il y avait une espèce de plaque

12 carrée, de bon augure, un genre de petit porte-bonheur que l'on peut

13 trouver accroché à une chaîne et il y avait une inscription qui m'a

14 été traduite qui disait : « Dieu et la Croatie ».

15 M. Niemann (interprétation). - Pouvons-nous voir la prochaine

16 question, diapositive 23 de la pièce 95.

17 M. Snow (interprétation). - Voici un gros plan de ce que nous

18 avons trouvé . Vous voyez qu’il y a d'abord la croix à gauche, vous ai-je

19 dit que c'était une chaîne en or ? Je me suis trompé. C'était plutôt une

20 chaîne en argent ou en métal et vous avez donc la croix et ce petit carré,

21 ce porte-bonheur en or et, à droite, vous avez ce médaillon ou cette

22 médaille qui dit en croate : « Dieu et la Croatie ». A l'époque, il m'a

23 été dit que ce type de médailles était très courant, que souvent les gens,

24 la population et les forces croates portaient ce genre de médailles à

25 cette époque-là.

Page 1424

1 M. Niemann (interprétation). - Diapositive 24 de la pièce 95,

2 maintenant.

3 M. Snow (interprétation). - Il s'agit ici du squelette numéro 2.

4 On voit certains des os en rapport aussi avec le vêtement. Vous voyez

5 qu’il n'y a pas là tous les os : on voit l’humérus, un os du bras

6 supérieur, mais ici manifestement, vous voyez un os qui est diagonal par

7 rapport au centre, vous avez des animaux, des rongeurs qui sont venus

8 perturber ces ossements, qui les ont éparpillés. Mais vous avez toujours

9 le vêtement.

10 M. Niemann (interprétation). - La diapositive suivante 25 de la

11 pièce 95.

12 M. Snow (interprétation). - Etant donné les conditions, nous

13 avons essayé de voir ces ossements. Ici, je vous montre l'os pelvien. La

14 configuration et la forme générale nous permettent de déterminer que cette

15 personne était un homme. A partir de l'articulation entre ces deux os de

16 la hanche, il y a des indicateurs qui nous montrent que nous avons à faire

17 à ce jeune homme qui a 20 ans ou plus, entre 20 et 30 ans.

18 M. Niemann (interprétation). - Diapositive 26.

19 M. Snow (interprétation). - Nous en sommes à ce deuxième

20 squelette que nous avons trouvé en surface. Nous avons trouvé un vêtement

21 qui semblait être un petit pull, quelque

22 chose d'un peu plus gros qu'un tee-shirt, un gros tee-shirt en coton qui

23 portait une inscription. On y voyait le mot « Canadian ».

24 Je ne me souviens plus de ce qu'il y avait en petites lettres en

25 dessous. Mais nous avons trouvé ceci significatif. En effet, on nous avait

Page 1425

1 dit qu'au cours du siège de Vukovar, un envoi de vêtements avait été

2 réalisé à partir du Canada, et qu'il y avait surtout parmi les vêtements

3 des tee-shirts, des sweats où il y aurait une indication de la provenance

4 du Canada. On nous a dit que nombre des vêtements avait été envoyé aux

5 patients de l'hôpital. Donc c'était là un fil ténu, un lien ténu, mais qui

6 semblait indiquer que cette personne avait reçu un vêtement, qui avait été

7 donné par une organisation de secours humanitaires canadiens. Et aussi

8 dans l'une des poches d'un autre vêtement...

9 M. Niemann (interprétation). - Nous examinons la photo 27 de la

10 pièce 95.

11 M. Snow (interprétation). – Nous voyons ici une petite médaille

12 religieuse de l'Eglise catholique romaine trouvée dans le vêtement du

13 squelette n°2.

14 M. Niemann (interprétation). - Enfin la photo 28 de la pièce 95.

15 M. Snow (interprétation). - Après avoir terminé ce travail, nous

16 avons essayé de laisser l'endroit le plus possible dans l'état où nous

17 l'avions trouvé. Je vous l’ai déjà dit, nous avons recouvert la tranchée

18 que nous avions creusée, et aussi avant de prendre les squelettes n°1 et

19 n° 2. Après les avoir placés dans des sacs de plastique séparés, nous les

20 avons enterrés tout au bout de cette tranchée que nous avons indiquée pour

21 déterminer l'emplacement précis de l'enterrement.

22 Car si plusieurs mois, voire plusieurs années devaient s'écouler

23 avant que l'exhumation complète ait lieu, on risquait de voir ces

24 ossements éparpillés, volés. Il était préférable de les placer dans le

25 charnier de les mettre dans des sacs de plastique et puis de les placer

Page 1426

1 dans la tranchée de façon à les retrouver en bon état à la prochaine

2 occasion.

3 M. Niemann (interprétation). - Je vous remercie. Après

4 l'interruption Monsieur le

5 Président, je demanderai au Dr Snow de remettre les diapositives dans

6 l'ordre dans lequel elles ont été présentées. Est-ce que nous pouvons

7 avoir la pause maintenant Monsieur le Président ?

8 M. Président (interprétation). - Effectivement, pour 20

9 minutes.

10 La séance, suspendue à 10 heures 55, est reprise à 11 heures 15.

11 M. Niemann (interprétation). - Monsieur le Président, je demande

12 le versement de toutes les diapositives en une seule pièce, comme je l'ai

13 indiqué précédemment. Peut-être essaierai-je de les faire copier. Je

14 voudrais que vous nous donniez la cote suivante, Monsieur le Greffier,

15 s'il vous plaît.

16 M. le Greffier. (interprétation). - Les diapositives portent la

17 cote 95.

18 M. Niemann (interprétation). - Merci.

19 Professeur, après avoir été sur les lieux, en décembre 1992, y

20 êtes-vous retourné au cours d'une courte visite en mars 1993 ?

21 M. Snow (interprétation). - Oui, Monsieur.

22 M. Niemann (interprétation). - Avec qui y êtes-vous retourné à

23 ce moment-là ?

24 M. Snow (interprétation). - C'était après que l'enquête a été

25 faite sous l'égide de la commission d'experts. Nous avons rendu une courte

Page 1427

1 visite à cet endroit avec le Commandant Fenrick, un Canadien. Je ne sais

2 pas comment nous appellerions cela au Canada. C'était un officier de

3 l'armée canadienne. Nous étions également avec l'un de ses collègues, le

4 Capitaine ou le Major Carter*. Eric Stover* était à nouveau là, le

5 Directeur exécutif des médecins pour les droits de l'homme, et d'autres

6 personnes dont je ne me souviens pas du nom maintenant.

7 M. Niemann (interprétation). - Que veniez-vous chercher à ce

8 moment-là ?

9 M. Snow (interprétation). - Nous voulions simplement parcourir

10 le cite, le montre

11 au Commandant Fenrick et au Major Carter*. Je crois que c'était un major,

12 oui. Nous voulions leur montrer la topologie générale, la configuration

13 des lieux afin de nous familiariser avec l'aspect physique du lieu, de la

14 scène.

15 M. Niemann (interprétation). - Merci.

16 Par la suite, êtes-vous encore retourné sur les lieux ?

17 M. Snow (interprétation). - La dernière fois que je me suis

18 rendu sur les lieux, c'était en 1996. L'exhumation avait commencé en 1996

19 mais, en octobre 1993, nous avions constitué une équipe qui, à l'époque,

20 devait réaliser l'exhumation complète. Avant de véritablement commencer

21 ses travaux, cette équipe a dû se démanteler. Je ne faisais pas partie de

22 cette équipe à ce moment-là.

23 M. Niemann (interprétation). - C'était le Commandant Fenrick de

24 la commission des experts et M. Carter ?

25 M. Snow (interprétation). - Oui, et un certain nombre de

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1 scientifiques qui avaient été recrutés. Des personnes qui venaient de

2 Médecins pour les droits de l'homme.

3 M. Niemann (interprétation). - Vous n'y avez pas assisté, mais

4 vous étiez sur les lieux, à proximité, n'est-ce pas ?

5 M. Snow (interprétation). - Je me trouvais dans un endroit qui

6 s'appelait Pakrak Poljana* en Croatie, mais je ne suis pas tout à fait sûr

7 de la distance précise qui sépare ce lieu du cite d'Ovcara ? Mais c'était

8 dans le secteur Est.

9 M. Niemann (interprétation). - Savez-vous pourquoi le

10 Commandant Fenrick et son équipe n'ont pas réalisé l'exhumation ?

11 M. Snow (interprétation). - A ce moment-là, le travail de

12 l'équipe a été interrompu. Ils ont reçu des menaces de violence par

13 certains des résidents de la zone de Vukovar, par des gens du Conseil de

14 la ville -je ne sais pas à quel parti politique ils appartenaient-, mais

15 ils pensaient que les soldats des Nations unies qui assuraient notre

16 sécurité, étant donné les menaces reçues, ne pourraient pas garantir la

17 sécurité des scientifiques et le bon déroulement des travaux.

18 Donc, nous avons dû nous retirer à Pakracka Poljana. Le travail

19 que nous avions l'intention de réaliser à Vukovar ou à Ovcara a été

20 interrompu.

21 M. Niemann (interprétation). - Par la suite, avez-vous participé

22 à l'établissement d'une base de données ?

23 M. Snow (interprétation). - Oui, mais cela s'est fait bien plus

24 tard, en 1996, en automne 96, lorsque finalement nous avons pu mobiliser

25 toute une équipe de scientifiques et commencer véritablement l'exhumation

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1 des corps qui se trouvaient à Ovcara sous l'égide, sous la direction du

2 Tribunal et en coopération avec Médecin pour les droits de l'homme.

3 Au fur et à mesure que les corps étaient exhumés, ils étaient

4 emmenés à Zagreb où nous avions installé une morgue afin de les examiner

5 de façon détaillée par des pathologistes, par des spécialistes de ce

6 domaine, par des anthropologues également.

7 Le projet dans lequel je me suis lancé consistait à constituer

8 une base de données que nous pourrions utiliser afin de permettre une

9 meilleure identification des victimes. Mais, en fait, cette base de

10 données et les motifs de cette base de données remontent à notre première

11 visite. Lorsque j'étais membre de la commission Mazowiecki, lorsque

12 j'avais parlé au Dr Kostovic*, brièvement, j'avais rencontré certaines des

13 personnes qui travaillaient pour ce docteur, qui travaillaient au

14 rapatriement et à l'identification des dépouilles de personnes tuées au

15 cours du conflit entre les Serbes et les Croates. Je les avais aidées à

16 établir les premières bases de cette base de données.

17 A l'époque, ils avaient quelques éléments en plus d'une liste de

18 noms, peut

19 être des dates de naissance, des personnes qui avaient disparu ou étaient

20 portées disparues dans la zone à l'époque, dans la zone de Vukovar. Ces

21 noms venaient notamment de la Croix-Rouge croate, d'Amnesty International

22 et de la Commission internationale de la Croix-Rouge. Des noms se

23 retrouvaient dans différentes listes. Nous avons commencé par les

24 éliminer, ceux qui revenaient deux ou trois fois et nous avons fini, je

25 crois, avec trois cent trente noms à peu près qui, à cette époque,

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1 en 1992, étaient portés disparus.

2 Par la suite, lorsque nous avons fait d'autres visites, chaque

3 fois que je revenais sur les lieux, je passais un certain temps avec les

4 personnes qui travaillaient à cette base de données et je les ai aidées à

5 rassembler le type d'informations nécessaires afin de procéder à ces

6 identifications, c'est-à-dire le nom de ces personnes, mais également leur

7 âge et, à partir d'entretiens avec leur famille, les membres de leur

8 famille. Cela se faisait aussi à partir de leurs empreintes dentaires, de

9 leurs dossiers médicaux, de la description physique de ces personnes, de

10 leur taille et d'autres caractéristiques qui étaient suffisamment fiables.

11 Par exemple ; étaient-elles droitières ou gauchères, avaient-elles de

12 vieilles blessures telles que des fractures, des opérations ou autres

13 interventions médicales qui pourraient être retrouvées sur le squelette de

14 ces personnes : tout type d'information que nous pouvions recueillir sur

15 l'état de leurs dents ou tout détail intéressant cette base de données

16 ainsi que le type de blessure et, notamment, pour les patients de

17 l'hôpital, le type de blessure qu'ils avaient subie au court du siège de

18 Vukovar Car ces blessures, nous le pensions en tout cas, se verraient sur

19 les corps lorsque nous les examinerions ou peut-être avec des rayons X.

20 Nous voulions donc une description physique la plus complète

21 possible des personnes. Parallèlement, nous travaillions sur d'autres

22 aspects de la base de données. Par exemple, ce chiffre dont j'ai parlé de

23 330, chiffre que nous avons vu en 1992, a diminué peu à peu car nous

24 retrouvions peu à peu d'autres personnes. Certaines de ces personnes

25 étaient

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1 encore vivantes et avaient, étant donné la confusion de la situation .

2 Leur famille avait perdu toutes traces d'elles et les avait faites porter

3 disparues D'autres étaient effectivement mortes. Elles avaient été tuées

4 et enterrées ailleurs. Donc, nous avons pu diminuer le chiffre d’origine

5 et, grâce à cette base de données, nous avons constitué une matrice de

6 recherche qui nous permettait et qui permettait aux pathologues

7 travaillant à la morgue, d'obtenir une description des blessures qu'une

8 personne éventuelle avait subies, ou de révéler certains problèmes

9 cliniques tels que la pause d’une sonde pour des problèmes de prostate ou

10 une prothèse. Ceci permettait aux personnes, qui étaient chargées

11 d'examiner et d'identifier les corps, d'utiliser cette base de données et

12 d'obtenir un document qui définissait mieux cette personne. On pouvait

13 utiliser les dossiers médicaux qui relataient tous les événements

14 caractéristiques d’une personne avant sa mort et ceci permettait donc un

15 examen beaucoup plus détaillé, afin de déterminer le dossier qui

16 ressemblait le plus à la personne qui était en cours d'examen. Ceci

17 permettait de tenter d'identifier les personnes examinées. En d'autres

18 termes, nous pouvions avoir un certain niveau de confiance. Je dirai que

19 le degré de fiabilité était de 95% à peu près. En se fondant sur cette

20 description physique, on pouvait dire que les restes appartenaient à telle

21 ou telle personne. Et en faisant ces identifications temporaires, nous

22 voulions faciliter le processus qui allait être entamé, par la suite, de

23 faire une identification définitive grâce aux informations sur les dents

24 de la personne morte ou en utilisant les rayons X ou en procédant à

25 l'étude d'ADN.

Page 1432

1 M. Niemann (interprétation). - Ce processus d'identification

2 définitive est beaucoup plus lent ?

3 M. Snow (interprétation). - Oui, elle est beaucoup plus lente

4 et il faut également beaucoup de connaissances, d'expériences dans ce

5 domaine.

6 Par conséquent, certaines de ces identifications ont bien été

7 faites

8 M. Niemann (interprétation). - Dans cette procédure

9 d'identification provisoire, quel est le pourcentage à peu près de

10 certitude lorsque celle-ci est réalisée ?

11 M. Snow (interprétation). – Comme je l’ai dit environ 95%.

12 D’après ce que je vois du corps et par rapport à ce que les personnes de

13 sa famille m'en disent, je pense que l'on peut établir un pourcentage de

14 95% de probabilité ou plus, peut-être même 99, dans certains cas. Nous

15 pouvons dire : « le corps n° tant ou tant était la personne telle ou

16 telle ». Le 5 novembre 96, avant de quitter Zagreb nous avons pu

17 identifier 51 personnes grâce à ce système.

18 M. Niemann (interprétation). - Vous comparez donc cette base de

19 données portant les renseignements de la personne avant sa mort et les

20 restes des cadavres que vous découvrez, n'est-ce pas ? Cela constitue

21 l'identification provisoire ?

22 M. Snow (interprétation). - C’est exact.

23 M. Niemann (interprétation). - Vous savez bien sûr qu'il y a eu

24 une exhumation totale par la suite, par le Bureau du Procureur ?

25 M. Snow (interprétation). - Tout à fait. En fin de compte, deux

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1 cents corps ont été récupérés de ce charnier.

2 M. Niemann (interprétation). - A la suite de cette exhumation

3 complète réalisée par le Bureau du Procureur, les résultats ont-ils

4 correspondu aux prévisions initiales que vous aviez établies au début du

5 processus ?

6 M. Snow (interprétation). - Effectivement, il a été confirmé

7 qu'il s'agissait bien d'une fosse commune, d'un charnier. Et, à partir des

8 nombreux éléments de preuve recueillis, que ce soit des blessures pansées,

9 des vêtements de l'hôpital qui ont été retrouvés, nous avons pu déterminer

10 et confirmer le fait que la majorité de ces victimes avaient été

11 hospitalisées autour du moment de leur mort. Les éléments de preuve

12 étaient tout à fait persuasifs en la matière.

13 Il était clair que c'étaient des éléments que les pathologistes

14 devaient examiner, mais il y avait des preuves évidentes de blessures par

15 armes à feu, et souvent par plusieurs coups de feu, subies par ces

16 victimes. Cinquante et une identifications provisoires ont été réalisées

17 et toutes ces personnes étaient effectivement des personnes portées

18 disparues qui avaient été

19 reprises dans une liste de l'hôpital de Vukovar, personnes qu’on n’a plus

20 revues vivantes depuis le 20 novembre 1991, je crois.

21 M. Niemann (interprétation). - Je crois avoir demandé le

22 versement au dossier de toutes les pièces qui ont été montrées au Dr Snow.

23 Mais peut-être y a-t-il des questions relatives aux pièces dont j'ai

24 demandé le versement.

25 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie.

Page 1434

1 M. Fila (interprétation). - Je n'ai que quelques questions très

2 rapides à poser à ce témoin, monsieur le Président. Voici ma première

3 question. Pourquoi n’avez-vous pas commencé l'exhumation tout de suite,

4 lorsque vous avez découvert pour la première fois le charnier, vers la fin

5 de 1992 ?

6 M. Snow (interprétation). - Premièrement, , il faut compter

7 beaucoup de temps et de préparation avant d'entreprendre une exhumation

8 aussi importante. Nous avions un groupe de scientifiques, des spécialistes

9 non seulement en anthropologie, mais aussi en archéologie, pathologie,

10 médecine légale, et autres disciplines. De tels experts, vous ne les

11 trouvez pas dans des annuaires généraux. Il faut les chercher partout dans

12 le monde.

13 Par conséquent, en 1993, nous avions un groupe d'environ quinze

14 personnes composé des collègues du Guatemala, du Chili, d’Argentine, etc.

15 Il a fallu beaucoup de temps pour planifier toute l'opération.

16 M. Fila (interprétation). - Très bien. Vous avez dit avoir eu

17 des contacts aussi avec des experts, des collègues de Zagreb. Avez-vous

18 essayé de vous mettre en contact également avec certains experts de

19 Belgrade, de Yougoslavie, de la JNA éventuellement ? Certains ont-ils

20 assisté à votre opération, par exemple le Dr Stankovic* ?

21 M. Snow (interprétation). - Oui. Lors de notre étude, nous

22 avons été très clairs par rapport aux deux parties en conflit, à la fois

23 les Serbes et les Croates, indiquant que cette enquête allait être menée

24 par des scientifiques indépendants de part et d’autres.

25 A un certain moment, nous avons travaillé avec des Croates qui

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1 constituaient la base de données pour le dossier médical des personnes

2 avant la mort, mais nous ne leur avons pas permis, soit d'étudier le site,

3 ni les corps à la morgue. Nous avons dit aux deux parties, que leurs

4 représentants pouvaient être sur le site, qu'ils pouvaient se rendre à

5 Zagreb observer nos activités et poser des questions, mais qu'ils ne

6 pouvaient pas participer à l'enquête à Belgrade et à la morgue. Nous avons

7 été en contact avec un monsieur à peu près de mon âge, je ne me souviens

8 plus de son nom, mais il s'agit d'un pathologue connu et respecté, dont la

9 réputation est internationale. C'est un Serbe, il a été nommé par le côté

10 serbe comme représentant observateur serbe. Il s'est rendu à la morgue

11 tous les jours, il observait notre travail, nous posait des questions, et

12 nous essayions d'y répondre.

13 M. Fila (interprétation). - Puis-je savoir quel est le nom de ce

14 monsieur ?

15 M. Snow (interprétation). - J'essaie de me souvenir de son nom

16 mais je n'y réussis pas pour le moment.

17 M. Fila (interprétation). - Pas de problème. Vous êtes-vous

18 adressé à la JNA, aux autorités yougoslaves pour assurer la sécurité du

19 site pendant toute la période ?

20 M. Snow (interprétation). - Je l'ai fait moi même, enfin c'est-

21 à-dire que je ne l'ai pas fait moi même, étant donné que cela ne relevait

22 pas de mes fonctions, normalement la procédure était telle, qu'il fallait

23 s'adresser aux personnes qui participaient à la planification

24 administrative pour s'occuper de l'exhumation, et je peux dire qu'il y a

25 eu un certain degré de coopération du côté yougoslave.

Page 1436

1 M. Fila (interprétation). - Ma dernière question : je suppose

2 que vous avez la documentation complète concernant les 200 corps, les

3 200 personnes qui ont été tuées à Ovcara, avez-vous trouvé que certaines

4 de ces personnes avaient des plâtres sur des membres en bonne santé ?

5 M. Snow (interprétation). - Pendant la plus grande partie de

6 cette face de l'enquête,

7 j'ai été dans le centre où l'on constituait la base de données, et donc,

8 je n'avais pas d'informations relatives à ce sujet. Pour obtenir ce genre

9 d'information, il faudrait que vous vous adressiez aux pathologistes qui

10 ont mené les enquêtes, ils connaîtraient plus de détails.

11 M. Fila (interprétation). - Merci je n'ai plus de question.

12 M. Niemann (interprétation). - Je n'ai plus de question. Je

13 demande simplement le versement au dossier de la pièce à conviction n° 96

14 si cela n'a toujours pas été fait et s'il n'y a pas d'objection.

15 M. le Président (interprétation). - Si j'ai bien compris il n'y

16 a pas d'objection à ce que le témoin se retire de manière définitive

17 M Snow, merci d'être venu témoigner.

18 M. Snow (interprétation). - Merci de m'avoir écouté.

19 (Le témoin est reconduit hors de la salle d'audience.)

20 M. Williamson (interprétation). - Monsieur. le Président, notre

21 prochain témoin sera M. Fenrick, je viens de l'appeler il y a quelques

22 instants, il devrait être prêt à comparaître.

23 M. le Président (interprétation). - Bonjour, Monsieur Fenrick.

24 Je vous demanderai de prononcer la déclaration solennelle.

25 M. Fenrick (interprétation). - Je déclare solennellement que je

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1 dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

2 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie. Asseyez-

3 vous, Monsieur. Maître Williamson, allez-y.

4 M. Williamson (interprétation). - Monsieur Fenrick, où

5 travaillez-vous à l'heure actuelle ?

6 M. Fenrick (interprétation). - Je suis employé, à l'heure

7 actuelle, par le Bureau du Procureur dans ce même Tribunal.

8 M. Williamson (interprétation). - Est-ce la première fois que

9 vous travaillez pour les Nations Unies ?

10 M. Fenrick (interprétation). - C'est la deuxième fois.

11 Précédemment j'étais employé à temps partiel comme membre d'une commission

12 d'experts qui se penchait sur des crimes présumés en ex-Yougoslavie.

13 M. Williamson (interprétation). - Quelles étaient vos fonctions

14 et responsabilités particulières au sein de cette commission d'experts ?

15 M. Fenrick (interprétation). - En tant que membre de la

16 commission, j'avais pour tâche aussi d'être le rapporteur aux questions

17 juridiques et pour les investigations et enquêtes menées sur place.

18 M. Williamson (interprétation). - A ce titre, avez-vous joué un

19 certain rôle dans l'exhumation, qui avait été préparée, du charnier de

20 Vukovar ?

21 M. Fenrick (interprétation). - Effectivement, j'ai participé,

22 d'abord à titre modeste,

23 à la première décision déterminant l'exhumation, mais j'ai participé de

24 façon active à tous les points consécutifs, à toutes les étapes

25 consécutives.

Page 1438

1 M. Williamson (interprétation). - Savez-vous pourquoi on avait

2 choisi ce lieu précis pour une exhumation ?

3 M. Fenrick (interprétation). - On croyait que c'était le lieu où

4 un certain nombre de victimes croates venant de l'hôpital de Vukovar

5 avaient été enterrées.

6 M. Williamson (interprétation). - Dans l'exercice de ces

7 fonctions, saviez-vous qu'avant cette commission d'experts, d'autres

8 efforts avaient été entrepris pour mener cette exhumation ?

9 M. Fenrick (interprétation). - Apparemment, l'organisation des

10 Médecins pour les Droits de l'Homme avait fait plusieurs visites à ce lieu

11 pour savoir si... Je ne sais pas s'ils avaient fait plus qu'un premier

12 examen du lieu ni s'ils avaient l'intention d'exécuter toute l'exhumation.

13 M. Williamson (interprétation). - A ce propos, avez-vous eu

14 l'occasion d'étudier des documents, une correspondance envoyée par le

15 Conseil régional de Slovonia Branjen* à Larry Moore*, un officier de la

16 police civile à Vukovar ?

17 M. Fenrick (interprétation). - Oui.

18 M. Williamson (interprétation). - J'aimerais montrer un document

19 qui recevra la cote 97, n'est-ce pas ?

20 Reconnaissez-vous ce document, Monsieur Fenrick ?

21 M. Fenrick (interprétation). - Oui.

22 M. Williamson (interprétation). - Pourriez-vous nous dire

23 rapidement ce sur quoi porte ce document ?

24 M. Fenrick (interprétation). - Ce document a trait au charnier

25 présumé et à la volonté manifestée par le Dr Snow et d'autres membres de

Page 1439

1 l'organisation Médecins pour les droits de l'homme d'effectuer une

2 exhumation du site.

3 M. Williamson (interprétation). - Qui a signé ce document ?

4 M. Fenrick (interprétation). - Larry Moore*et, si je me souviens

5 bien...

6 M. Williamson (interprétation). - Excusez-moi. Veuillez examiner

7 la deuxième page : qui a signé ce document ?

8 M. Fenrick (interprétation). - Je vois. C'est Milan BiIlic,

9 Président du Conseil régional, qui a signé cette lettre.

10 M. Williamson (interprétation). - Savez-vous quelle était la

11 fonction occupée par ce Conseil régional de Slavonija Baranja et Srem

12 occidentale ?

13 M. Fenrick (interprétation). - Si j'ai bien compris, ce Conseil

14 régional s'opposait à l'exhumation.

15 M. Williamson (interprétation). - Cette opposition est-elle bien

16 consignée dans cette lettre ?

17 M. Fenrick (interprétation). - Oui.

18 M. Williamson (interprétation). - Après que cette première

19 tentative du Docteur Snow de mener une exhumation a été enrayée en 1992,

20 la commission d'experts a-t-elle fait de sérieux efforts pour exhumer ce

21 charnier ?

22 M. Fenrick (interprétation). - Oui, il y a eu plusieurs visites

23 sur les lieux mêmes, ainsi que dans d'autres parties de ce que l'on a

24 appelé la "République de Serbie Krajina".

25 M. Williamson (interprétation). - Pourriez-vous nous dire ce qui

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1 s'est passé au cours de ces tentatives en 1993 ?

2 M. Fenrick (interprétation). - Avec votre permission, j'aimerais

3 consulter la chronologie des événements qui a été réalisée sous ma

4 direction au moment des événements?

5 M. Williamson (interprétation). - Ceci convient-il aux Juges ?

6 (Assentiment des Juges.)

7 M. Fenrick (interprétation). - La première tentative a d'abord

8 consisté à faire

9 une mission de reconnaissance dans la région de Vukovar, en mars 1993.

10 Elle devrait servir à établir s’il était possible de réaliser une

11 exhumation et, auquel cas, quelles ressources seraient nécessaires et

12 quels contacts avec les autorités seraient nécessaires également.

13 En mars 1993, je suis allé dans la région de Vukovar, et plus

14 précisément au site d’Ovcara, accompagné du Dr Snow, ainsi que par

15 d’autres membres de l'organisation « Médecins pour les droits de

16 l'homme », ainsi qu’avec des membres de l'équipe militaire canadienne

17 constituée d'avocats et de militaires.

18 Au cours de cette visite de reconnaissance, nous avons été

19 détenus pendant peu de temps par les autorités parce que nous avions pris

20 des photos de la route menant de Vukovar à Ovcara. Nous avons rencontré

21 plusieurs membres des autorités locales, notamment le colonel Milanovic

22 qui s'est décrit comme étant le vice-ministre de la Défense de la

23 République de Serbie Krajina, telle qu’on l’appelait.

24 A cette époque, on nous a informés que si nous voulions mener

25 cette exhumation, il faudrait obtenir l'aval des autorités à Knin. Nous

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1 avons aussi compris qu'il fallait avoir des ressources considérables pour

2 réaliser cette exhumation. La Commission des experts se composait

3 essentiellement de professeurs de droit et de moi-même. Ce n'est pas

4 précisément le type de travail que nous avions l'habitude de faire dans le

5 passé, en cette capacité.

6 Il nous a fallu un certain temps pour recueillir les ressources

7 nécessaires à la bonne conduite de l'exhumation. Nous avons eu plusieurs

8 réunions avec les pouvoirs locaux pour obtenir l'autorisation de réaliser

9 cette exhumation.

10 A divers moments, au cours de cette période, je me suis rendu à

11 Belgrade où j'ai rencontré celui qui était alors le ministre des Affaires

12 étrangères de la République de Serbie Krajina, ou République de la Krajina

13 Serbe. Il m’a promis de soutenir nos efforts. Fin avril ou début mai, je

14 me suis rendu à Knin où j'ai rencontré notamment le Premier ministre de

15 cette République de Krajina Serbe, M. Bjegovic, qui m’a promis oralement

16 que nous pourrions

17 réaliser cette exhumation.

18 Plus tard, nous avons eu un échange de courrier entre la

19 Commission d'experts et l'administration de la République de la Krajina

20 Serbe. Nous avons eu alors l’autorisation de commencer les travaux débuts

21 septembre, date à laquelle je me suis rendu une fois de plus à Knin. Une

22 fois de plus, on m'a donné l'autorisation de procéder à l'exhumation.

23 Monsieur Bjegovic nous avait donné une lettre nous autorisant

24 officiellement à réaliser l'exhumation.

25 Peu à peu, nous avons rassemblé les ressources nécessaires à

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1 cette opération. Une fois toutes ces ressources en place à Zagreb, nous

2 étions alors à mi-octobre 1993, je me suis rendu une fois de plus à Knin

3 où nous avons discuté de questions connexes à l'exhumation pour savoir

4 comment procéder, qui doit participer, s’il fallait des observateurs par

5 exemple. Une fois encore, nous avons reçu l'autorisation écrite de

6 réaliser l'excavation à Ovcara.

7 Dans la semaine du 17 octobre 1993, nous avons envoyé les

8 personnes chargées de l'exhumation à Ovara. Mais dès que nous sommes

9 arrivés dans la région, on nous a dit très rapidement que nous n'avions en

10 fait pas d'autorisation pour mener l'excavation. Nous avons été forcés de

11 rester à notre camp principal pendant quelques jours. Nous avons fait un

12 premier travail de géomètres pour le terrain même. Puis, nous avons

13 rencontré une fois de plus M. Milanovic, le vice-ministre de la Défense.

14 Il nous a été dit qu'un décret avait été promulgué nous interdisant de

15 réaliser l'exhumation pendant la durée du conflit.

16 Les discussions assez prolongées ont été menées, mais il est

17 devenu manifeste que nous ne pouvions pas réaliser cette exhumation du

18 fait des menaces qui pesaient sur notre sécurité.

19 En dépit du degré de protection assurée par la FORPRONU dans les

20 autres secteurs occupés en Croatie, le secteur Est était celui où les

21 Croates étaient les plus puissants, le plus représentés. Je crois que les

22 membres de la FORPRONU étaient un peu plus réservés quant à l'aide qu'ils

23 étaient prêts à nous accorder dans ce secteur plutôt que dans d'autres.

24 Etant donné l'opposition manifestée par les Serbes de Croatie,

25 nous avons peu à peu, sur une période de quelques semaines, déployé les

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1 ressources que nous avions, nous les avons envoyées à Vukovar, à Ovcara,

2 au secteur Est.

3 M. Williamson (interprétation). - Etait-ce bien le secteur Est ?

4 M. Fenrick (interprétation). - Excusez-moi, c'était le secteur

5 Ouest, celui de Pakrack Poljana où nous avons mené l’exhumation d'un autre

6 charnier.

7 Après la mi-octobre, nous avons eu d'autres négociations avec

8 plusieurs autorités serbes de Croatie. Fin octobre, la personne qui était

9 alors présidente de la Commission, le professeur Basioni, la Commission

10 Mazowiecki est allé à Knin. On nous a dit que le problème était que le

11 « gouvernement » avait marqué son accord à l’exhumation, mais que cette

12 décision avait été annulée par le Conseil suprême de la Défense nationale.

13 A ce moment là, j'ai eu l'impression que des entités avaient été

14 créées expressément pour l'occasion et, indépendamment de ce qui avait été

15 approuvé par les gens de Knin, qu’il y aurait toujours des entités

16 « suprêmes » qui pourraient annuler les décisions prises par le

17 gouvernement.

18 A notre avis, la manifestation la plus cynique de manque de

19 coopération, c'est que peu de temps après octobre -si je me souviens bien,

20 c'est toujours en 1993 que ceci s'est passé-, au dernier moment, il était

21 physiquement possible de réaliser l'exhumation étant donné la période de

22 l'année. C'était le 10 novembre. Pourquoi ? Parce que c'était le moment où

23 la neige commençait à tomber.

24 Le 16 novembre plus exactement, je suis retourné dans la région

25 de Vukovar et plus précisément à Erdut où j’ai rencontré M. Hadzic qui, à

Page 1444

1 l'époque, était le Président de la République de la Krajina Serbe,

2 M. Niksic qui était le vice-président du Conseil régional, ainsi que le

3 colonel Milanovic qui était le ministre adjoint de la Défense dans cette

4 République de la Krajina Serbe. Lors de nos premières réunions dans la

5 région de Vukovar, l'homme fort était le

6 colonel Milanovic.

7 Mais le 16 novembre 1993, le Président Hadzic était à l'évidence

8 l'homme fort du moment. Il était tout à fait favorable à nos travaux. A

9 toutes fins pratiques, il a fait une déclaration disant que les autorités

10 de la République de la Krajina Serbe étaient prêtes à coopérer et à donner

11 toutes les autorisations nécessaires pour l'exhumation. Toutefois, ils se

12 sont souvenus que nous étions arrivés à la période des neiges et, dès

13 lors, que l'exhumation ne pourrait se réaliser que l'année suivante,

14 c'est-à-dire qu’elle commencerait en mars ou avril.

15 Le Président Hadzic a fait preuve d'une grande coopération. Le

16 seul problème était, comme le savait toutes les personnes présentes, que

17 la République de la Krajina Serbe avait prévu des élections en décembre

18 1993 et le Président Hadzic ne demandait pas sa réélection. La promesse

19 faite n'était donc qu'une promesse théorique, sur papier, puisque le

20 Président Hadzic ne demandait pas sa réélection. Sa déclaration nous

21 autorisant à exhumer au premier moment possible, en mars ou avril de

22 l'année suivante, cette promesse n'avait donc aucune valeur.

23 Effectivement, nous ne sommes pas retournés pour l'exhumation en

24 1994 ni pendant toute la durée de l'existence de cette commission

25 d'experts qui a terminé ses travaux en juin 1994.

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1 M. Williamson (interprétation). - Au cours de cette réunion

2 avec Hadzic, vous avez dit que Niksic était aussi présent. J'aimerais vous

3 montrer un document qui sera la pièce d'accusation n° 98. Pourriez-vous

4 dire ce qu’est ce document ?

5 M. Fenrick (interprétation). - Je me souviens parfaitement de ce

6 document.

7 M. Williamson (interprétation). - Que dit ce document ?

8 M. Fenrick (interprétation). - En substance, ce document indique

9 que le Parlement national de la République de Krajina Serbe refuse

10 d'autoriser les experts de la commission d'experts à mener une exhumation

11 du charnier d'Ovcara, tant qu'une solution politique au conflit ne sera

12 pas trouvée.

13 M. Williamson (interprétation). - J'aimerais demander le

14 versement au dossier de cette pièce 98.

15 Lorsque vous avez terminé de travailler avec cette commission

16 d'experts, avez-vous participé à l'élaboration du rapport final ?

17 M. Fenrick (interprétation). - Oui.

18 M. Williamson (interprétation). - Dans ce cadre, avez-vous

19 rédigé une partie consacrée aux tentatives menées pour réaliser

20 l'exhumation à Ovcara ?

21 M. Fenrick (interprétation). - Oui.

22 M. Williamson (interprétation). - J'aimerais montrer un document

23 portant la cote P99. Je demanderai au témoin s'il peut identifier ce

24 document.

25 M. Fenrick (interprétation). - Effectivement, c'est une section

Page 1446

1 du rapport que j'ai rédigé personnellement.

2 M. Williamson (interprétation). - Cette section, à quoi a-t-elle

3 trait ?

4 M. Fenrick (interprétation). - Aux enquêtes menées sur le

5 charnier d'Ovara, près de Vukovar.

6 M. Williamson (interprétation). - Quels sont les numéros de

7 paragraphes qui font partie de cette section que vous avez rédigée ?

8 M. Fenrick (interprétation). - 265 à 276.

9 M. Williamson (interprétation). - Je demande le versement de

10 cette pièce au dossier en tant que pièce de l’accusation n° 99.

11 M. le Président (interprétation). - Pas d'objections ?

12 Maître Fila ?

13 M. Williamson (interprétation). - Lorsque le mandat de cette

14 commission d'experts a expiré, avez-vous trouvé un emploi auprès du Bureau

15 du Procureur du TPI ?

16 M. Fenrick (interprétation). - Oui.

17 M. Williamson (interprétation). - Quand ceci s’est-il produit ?

18 M. Fenrick (interprétation). - Le 2 août 1994.

19 M. Williamson (interprétation). - A ce titre avez-vous participé

20 à des discussions qui portaient sur la possibilité qu'aurait le Tribunal

21 de commencer cette exhumation ?

22 M. Fenrick (interprétation). - Oui.

23 M. Williamson (interprétation). - Et à ce titre, avez-vous pris

24 connaissance d'une lettre envoyée par le procureur adjoint, M. Graham

25 Blewitt, envoyée à un représentant officiel de la République de la Krajina

Page 1447

1 Serbe, M. Uros Funduk ?

2 M. Fenrick (interprétation). - Oui.

3 M. Williamson (interprétation). - J'aimerais montrer un autre

4 document qui portera la cote P100.

5 Pourriez-vous nous dire ce qu’est ce document ?

6 M. Fenrick (interprétation). - Oui. Il a été envoyé par Graham

7 Blewitt, procureur-adjoint à M. Uros Funduk, responsable de

8 l'administration de la République de la Krajina Serbe, à Knin.

9 M. Williamson (interprétation). - Qu’est-il demandé dans cette

10 lettre ?

11 M. Fenrick (interprétation). - Que certains membres du Bureau du

12 Procureur aient l'autorisation de rendre visite à Knin pour discuter de

13 l'exhumation éventuelle des corps présumés enterrés à Ovcara.

14 M. Williamson (interprétation). - Etes-vous au courant d'une

15 réponse à cette lettre ?

16 M. Fenrick (interprétation). - Oui.

17 M. Williamson (interprétation). - J'aimerais vous montrer un

18 document qui portera la cote P101. Qui a signé ce document ?

19 M. Fenrick (interprétation). - Il s’agit d’une réponse adressée

20 par M. Uros Funduk au Bureau du Procureur.

21 M. Williamson (interprétation). - Quelles sont les indications

22 fournies par cette lettre, en réponse à la demande formulée par

23 M. Blewitt ?

24 M. Fenrick (interprétation). - L'attitude est résolument

25 négative. La lettre revient à dire qu’elle fait fi de la question et se

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1 contente de suggérer que nos communications avec la République dite de

2 Krajina Serbe soient menées de façon plus officielle.

3 M. Williamson (interprétation). - Je demanderai le versement de

4 ces deux derniers documents des pièces P100 et P101.

5 Les autorités serbes dans la région ont-elles jamais marqué leur

6 accord à l'exhumation ?

7 M. Fenrick (interprétation). - Non, ils n’ont jamais marqué leur

8 accord alors qu'ils avaient le contrôle de la région.

9 M. Williamson (interprétation). - A votre connaissance, y a-t-il

10 eu exhumation ?

11 M. Fenrick (interprétation). - Oui.

12 M. Williamson (interprétation). - Savez-vous comment ceci a été

13 fait sans la coopération des autorités serbes ?

14 M. Fenrick (interprétation). - Cela s'est fait beaucoup plus

15 tard au moment où le pouvoir était alors exercé par l’ATNUSO, l’autorité

16 transitoire des Nations Unies pour la Slavonie orientale.

17 M. Williamson (interprétation). - Je n'ai plus de questions à

18 poser. Je crois avoir demandé le versement au dossier de la pièce 97.

19 M. le Président (interprétation). - Maître Fila ?

20 M. Fila (interprétation). - Monsieur Fenrick, je n'ai qu'une

21 question à vous poser. Vous avez parlé des contacts que vous avez eus avec

22 les autorités serbes locales.

23 M. Fenrick (interprétation). - C'est exact.

24 M. Fila (interprétation). - De qui parlez-vous, lorsque vous

25 dites « autorités serbe

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1 locales » ? Vous parlez des autorités de la République de Krajina Serbe,

2 la République dite de la Krajina Serbe, ou bien parlez-vous du Président

3 de l'Assemblée municipale ?

4 M. Fenrick (interprétation). - A part la réunion de fin novembre

5 1990, je n'ai eu pour seul interlocuteur que le colonel Milanovic qui

6 représentait l'autorité de la soi-disant République.

7 M. Fila (interprétation). - De la Krajina Serbe ?

8 M. Fenrick (interprétation). - C’est exact.

9 M. Fila (interprétation). - Avez-vous eu quelque contact que ce

10 soit ? Savez-vous qui était le Président de la municipalité de Vukovar

11 pendant toute cette période de vos entretiens ?

12 M. Fenrick (interprétation). - Non, je ne le sais pas.

13 M. Fila (interprétation). - Avez-vous eu un contact avec

14 quelqu’un de la municipalité de Vukovar pour obtenir l’autorisation

15 d’exhumation ?

16 M. Fenrick (interprétation). - Pas directement, à ma

17 connaissance.

18 M. Fila (interprétation). - Je vous pose une question directe,

19 non ?

20 M. Williamson (interprétation). - Laissez le temps...

21 Objection, parce qu’il faut laisser le temps au témoin de

22 répondre.

23 M. le Président (interprétation). - Pouvez-vous reformuler votre

24 question ?

25 M. Fila (interprétation). - Je m’excuse, je n'ai pas compris la

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1 réponse. C'est pourquoi que j'ai réagi. Ma question était de savoir si

2 vous avez parlé à un niveau inférieur par rapport au niveau de la

3 République de la Krajina Serbe, c'est-à-dire avec un représentant, par

4 exemple, de la municipalité ?

5 M. Fenrick (interprétation). - Il y avait toujours plus de

6 personnes à la réunion. A toutes les réunions auxquelles j'ai participé,

7 mon interlocuteur principal a toujours été le colonel Milosevic jusqu'à la

8 réunion du 16 novembre, où mon interlocuteur était M. Hadzic.

9 M. Fila (interprétation). - Merci beaucoup. C'est tout.

10 M. le Président (interprétation). - Maître Williamson.

11 M. Williamson (interprétation). - Mais au moment où vous avez

12 été détenu par la police de Vukovar, avez-vous rencontré une délégation

13 dont on vous a dit qu'elle était une délégation de l'administration

14 locale ?

15 M. Fenrick (interprétation). - Oui, mais en toute franchise, il

16 m'a été impossible de les reconnaître. Je ne pourrais pas vous donner le

17 nom de ces personnes.

18 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie.

19 M. Fila (interprétation). - Je demande simplement quand c’était.

20 M. Fenrick (interprétation). - En mars 1993.

21 M. le Président (interprétation). - Il n'y a plus de questions ?

22 Je suppose donc qu'il n'y a pas d'objection à ce que le commentant Fenrick

23 puisse disposer. Je vous remercie d'être venu déposer devant nous, vous

24 pouvez disposer.

25 (Le témoin quitte la salle d’audience.)

Page 1451

1 Nous n'avons plus de témoin pour aujourd'hui ?

2 M. Williamson (interprétation). - C'est exact, Monsieur

3 le Président. Nous pensions vous diffuser une vidéo qui vous donne une

4 idée générale de l'exhumation d’Ovcara. Cela dure environ 30 minutes et,

5 pour autant que les admissions soient convenues avec la défense, se

6 terminera la séance des témoins que nous voulions citer pour l'exhumation.

7 Pour autant bien sûr... s'il n'y a pas d'accord, nous devrons appeler des

8 témoins supplémentaires, mais ceci devrait terminer notre présentation des

9 moyens de preuve pour l'exhumation. Je crois que la vidéo peut être

10 lancée.

11 M. le Président (interprétation). - Effectivement.

12 M. Fila (interprétation). - La défense... J’ai déclaré qu'elle

13 n'avait pas de contestation par rapport à cela. Je ne vois donc pas le

14 sens de cette question.

15 (Projection vidéo)

16 M. Niemann (interprétation). - Nous n'avons plus d’éléments de

17 preuve à présenter aujourd'hui, monsieur le Président. Notre prochain

18 témoin pourra comparaître jeudi matin.

19 M. le Président (interprétation). - Quelle devrait être la durée

20 de l'interrogatoire principal de ce témoin-là ?

21 M. Williamson (interprétation). - Ce sera assez long, monsieur

22 le Président, environ trois heures, voire davantage.

23 M. le Président (interprétation). - Autant commencer à

24 8 heures 30.

25 M. Fila (interprétation). - Je suppose qu'il s'agit du témoin

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1 dont le nom figure dans l'ordre du jour et pour lequel on a demandé la

2 séance à huis clos ? Je ne vais pas citer son nom publiquement, bien sûr.

3 M. Williamson (interprétation). - Tout à fait, mais ce sera une

4 audience publique.

5 M. Fila (interprétation). - Je souhaiterais attirer votre

6 attention sur un point. J'ai reçu la déclaration de ce témoin, rien n'y

7 apparait concernant Dokmanovic ou Vukovar ou l'année 1991 ou

8 novembre 1991. Cette déclaration n'a donc aucun rapport avec cette

9 affaire. Les éléments contenus dans cette déclaration concernent

10 uniquement la Bosnie Herzegovine. Je demande que l'on ait une déclaration

11 supplémentaire de ce témoin.

12 M. Williamson (interprétation). - Désolé de vous interrompre,

13 mais ne pourrait-on pas passer à huis clos pour cette discussion, car il y

14 a certaines questions relevant d'autres affaires qu'il serait préférable

15 d'aborder en audience à huis clos. Désolé de l'avoir interrompu.

16 M. le Président (interprétation). - Vous désirez que nous le

17 fassions aussitôt, sur-le-champ ?

18 M. Williamson (interprétation). - Comme vous le voulez, monsieur

19 le Président. Autant passer à huis clos

20 M. Fila (interprétation). - J'ai une demande s'il vous plaît,

21 monsieur le Président.

22 M. Williamson (interprétation). - Excusez-moi, il s'agirait

23 d'une audience à huis clos partiel plutôt que total.

24 M. Fila (interprétation). - Monsieur le Président, je peux peut-

25 être vous aider. Il n'est peut-être pas nécessaire de passer au huis clos

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1 partiel, je suggère que l'on prenne la déclaration de ce témoin

2 aujourd'hui ou demain pour que je puisse savoir à l'avance de quoi il

3 parlera.

4 M. le Président (interprétation). - Oui, merci maître Fila. Je

5 vois où vous voulez en venir, mais le Procureur vient de suggérer que nous

6 parlions de certains points en audience à huis clos.

7 M. Williamson (interprétation). - Ce serait plutôt une audience

8 en huis clos partiel, en ces circonstances.

9 M. le Président (interprétation). - Oui, vous savez cela ne

10 prend qu'une ou deux minutes pour passer en audience à huis clos partiel.

11 L’audience se poursuit à huis clos partiel.

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23 L’audience est suspendue à 13 heures 10.

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