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Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 11 janvier 2007

2 [Audience publique]

3 [Déclaration liminaire de l'Accusation]

4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 27.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez citer le numéro de

7 l'affaire, Monsieur le Greffier d'audience.

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour. Il s'agit de l'affaire IT-98-

9 29/1-T, le Procureur contre Dragomir Milosevic.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Les parties peuvent-elles se

11 présenter.

12 M. WHITING : [interprétation] Oui, bonjour. Nous sommes nombreux

13 aujourd'hui ici. Sur ma gauche est M. Stefan Waespi. Derrière se trouve Mme

14 Carolyn Edgerton et sur ma droite est

15 Mme Maxine Marcus et M. Manoj Sachdeva. Notre commis d'audience est Mme

16 Jasmina Bosnjakovic. Je suis Alex Whiting.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

18 A la Défense.

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je suis

20 Branislav Tapuskovic, avocat de Belgrade. Je représente la Défense de

21 l'accusé Milosevic. Sur ma droite est ma collègue consoeur avocate de

22 Paris, qui est mon co-conseil. Sur ma gauche est Mme Ruzica Jovanovic, qui

23 est notre assistante juridique.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

25 Monsieur Whiting, nous allons maintenant entendre votre déclaration

26 liminaire.

27 M. WHITING : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vais lire

28 juste la première partie de la déclaration liminaire, et

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1 M. Stefan Waespi va présenter la plus grande partie de la suite.

2 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, chers collègues de la Défense,

3 il s'agit ici d'une affaire concernant la ville de Sarajevo et de sa

4 population qui était tenue sous le siège, bloquée pendant 44 mois, et au

5 moins 15 mois de ceci se sont déroulés sous la direction de l'accusé

6 Dragomir Milosevic. Il s'agit d'une affaire d'une ville qui était exposée à

7 une campagne militaire incessante de pilonnage et de tirs isolés contre la

8 population civile, effectués par une force militaire supérieure qui

9 encerclait la ville depuis les hauteurs. Il s'agit d'une affaire concernant

10 une ville dont la population était sans cesse terrorisée et exposée à une

11 campagne délibérée et adaptée de pilonnage et de tirs isolés dont le but

12 principal était d'intimider la population.

13 La campagne de pilonnage et de "sniping" était adoptée de manière à ce que

14 les tirs puissent être accrus ou décrus à des moments imprévisibles, ce qui

15 créait des conditions permettant à assujettir la population civile au

16 traumatisme psychologique sérieux. Car personne ne savait à quel endroit de

17 la ville il était sûr pour eux et les familles ou les amis de se déplacer.

18 Tous les jours, des activités civiles étaient dangereuses, des activités

19 civiles telles que le fait de faire du jardinage, faire ses courses et ce

20 genre de choses.

21 Il s'agit là d'une affaire dont l'accusé, le général Dragomir Milosevic,

22 qui était l'un des commandants militaires les plus élevés de la Republika

23 Srpska, la VRS, qui est arrivé au point culminant de sa carrière, lorsque

24 autour du mois d'août 1994, il a été nommé au poste du commandant du Corps

25 de Sarajevo Romanija, le RSK, celui qui encerclait la ville de Sarajevo

26 depuis 1992.

27 L'accusé était un officier de carrière, professionnel et bien formé et un

28 commandant militaire d'expérience, qui était formé dans le système bien

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1 organisé de la JNA, l'Armée fédérale de la Yougoslavie. Dans le cadre de sa

2 formation, l'accusé comme ses co-commandants et les membres de l'état-major

3 connaissait ses obligations en vertu des conventions de Genève et les lois

4 de la guerre. Comme peu d'autres personnes, d'ailleurs, l'accusé

5 connaissait bien non pas seulement la guerre de Bosnie, mais concrètement

6 parlant le siège de Sarajevo.

7 Au cours des premiers mois du siège en 1992, l'accusé est devenu le

8 commandant d'une des brigades qui faisaient partie du RSK et qui

9 encerclaient Sarajevo. Déjà à l'époque, il était proche du général Mladic,

10 Ratko Mladic, qui était commandant de la VRS, le commandant en chef, et

11 qui est devenu par la suite son supérieur hiérarchique direct. Ensuite, en

12 juillet 1993, l'accusé est devenu le chef d'état-major du commandant du RSK

13 à l'époque, le général Galic. Un peu plus tard, au bout d'un an, l'accusé a

14 pris la place du général Galic et est devenu lui-même le commandant du RSK.

15 Compte tenu de tout cela, l'accusé ne pouvait avoir aucune illusion au

16 sujet du type de campagne dont il a hérité au moment où il a pris les

17 fonctions en tant que commandant du RSK en août 1994.

18 L'accusé est resté le commandant des forces qui assiégeaient Sarajevo

19 à partir d'environ 10 août 1994 jusqu'en novembre 1995. Comme il est dit

20 dans l'acte d'accusation modifié, l'accusé était le commandant de jure et

21 de facto de la force professionnelle constituée d'environ 18 000 soldats et

22 officiers et d'autres unités affiliées de la VRS qui opéraient à Sarajevo

23 et d'un grand arsenal des armes. Pendant plus de 15 mois, l'accusé à

24 déployer cette force de soldats et d'armements militaires afin de mener une

25 campagne délibérée d'attaques contre les civils de Sarajevo et ses

26 alentours proches, une population d'environ 350 000 personnes, dans le but

27 d'intimider la population, ce qui a provoqué la mort de centaines de civils

28 et la mutilation de milliers d'autres. Il le faisait en appliquant les

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1 connaissances et l'expérience qu'il avait obtenues dans le cadre de ces

2 postes précédents autour de Sarajevo à partir de 1992.

3 Je vais maintenant parler brièvement du contexte historique de la

4 guerre de Bosnie-Herzégovine décrit dans l'acte d'accusation modifié. Il

5 s'agissait d'une guerre dont les origines se trouvent dans la

6 désintégration d'un Etat, celui de la Yougoslavie en 1994 et la création

7 d'un nouvel Etat, la Bosnie-Herzégovine. Les Serbes et les Croates de

8 Bosnie ont clairement indiqué qu'ils allaient avoir recours à un conflit

9 armé plutôt que d'accepter un statut minoritaire dans un Etat dominé par

10 les Musulmans.

11 Suite à un référendum tenu en février 1992, sponsorisé par les

12 Musulmans de Bosnie et soutenu dans une certaine mesure par les Croates de

13 Bosnie mais boycotté par les Serbes de Bosnie, la Bosnie-Herzégovine a

14 déclaré son indépendance en mars 1992. En anticipant ce résultat, le 9

15 janvier 1992, les dirigeants politiques des Serbes de Bosnie ont proclamé

16 une République serbe de Bosnie-Herzégovine qui a été connue par la suite

17 comme la Republika Srpska. Les hostilités ont escalé [phon] entre les

18 factions alignées à ces groupes, et un conflit armé a éclaté après que la

19 communauté internationale a reconnu la Bosnie-Herzégovine en tant qu'Etat

20 souverain le 7 avril 1992. Autour de cette date, la ville de Sarajevo a été

21 lourdement bombardée par l'artillerie, les chars et les mortiers de la JNA

22 déployés à des positions encerclant la ville et dominant la ville. Le 2 mai

23 1992, une grande attaque a été lancée par la JNA contre le centre de

24 Sarajevo, et après cela, la ville a été exposée aux activités de pilonnage

25 et de tirs isolés intenses.

26 Le 12 mai 1992, l'assemblée de la République serbe de

27 Bosnie-Herzégovine à Banja Luka a pris en considération un plan visant à

28 s'assurer que Sarajevo devienne la capitale politique de la République et a

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1 adopté des objectifs stratégiques parmi lesquels la division de Sarajevo

2 entre les parties serbes et musulmanes. Il a été compris que Sarajevo

3 devait être divisée ou rasée de la terre. Lors de la même réunion,

4 l'assemblée a créé la VRS en désignant le général Ratko Mladic en tant que

5 chef d'état-major. Le noyau de la VRS était constitué du 2e District

6 militaire de la JNA qui s'est retiré de la Bosnie-Herzégovine peu de temps

7 après, autour du 20 mai 1992. En tant qu'émanation de la JNA, l'une des

8 armées les plus professionnelles de l'Europe de l'Est, la VRS, a pu

9 s'appuyer dans une grande mesure sur les ressources et les expériences de

10 la JNA. Effectivement, la VRS a repris presque à la lettre la doctrine et

11 les règlements de la JNA.

12 Le 22 mai 1992, la Bosnie-Herzégovine a été admise aux Nations Unies

13 en tant qu'état membre. Le Conseil de sécurité a lancé un appel pour que

14 les forces étrangères se retirent, y compris la JNA, de son territoire. Ce

15 même jour, le général Mladic a donné l'ordre visant à former le RSK en tant

16 qu'un des corps d'armée constituant la VRS. Le RSK a été formé surtout à

17 base des éléments et matériels qui faisaient partie du 4e Corps de la JNA

18 dans la garnison, et le déploiement était à Sarajevo et autour de cette

19 ville auparavant. L'accusé, comme nous le savons, a pris le contrôle du RSK

20 en

21 août 1994.

22 Je vais maintenant parler un peu plus de la ville de Sarajevo elle-

23 même. Nous avons fourni à la Chambre de première instance un atlas

24 comportant un certain nombre de cartes que nous allons utiliser pendant le

25 procès. Comme vous le savez, Sarajevo était la capitale et la ville la plus

26 grande de la Bosnie-Herzégovine, qui symbolisait la diversité de la

27 République.

28 La ville est dominée par des montagnes escarpées. A l'est, se trouve

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1 la zone de Bascarsija et il y a un centre-ville dense qui constitue la

2 vieille ville résidentielle et commerciale et qui s'étend jusqu'aux

3 collines avoisinantes qui comportent certaines nouvelles municipalités et

4 parties résidentielles.

5 En 1990, la ville était constituée de dix municipalités dont six

6 étaient des communautés urbaines. D'autres, encore quatre, ont commencé à

7 faire partie de la ville à partir de 1977 mais se trouvaient dans la

8 périphérie. Cependant, elles ont subi une urbanisation mais ont continué à

9 comporter de vastes zones rurales et montagneuses.

10 Sarajevo était une ville résidentielle dans une grande mesure dans la

11 ville communale, pour reprendre l'expression de l'époque socialiste qui a

12 été remplacée par la suite par l'expression vie multiethnique était

13 florissante. Certainement en 1990, le centre urbanisé était mixte sur le

14 plan ethnique. Les membres de groupes ethniques différents se mélangeaient

15 tous les jours dans les affaires quotidiennes, et la vie communale des

16 habitants de Sarajevo est arrivée à son point culminant lors des Jeux

17 olympiques en 1994.

18 Le recensement de 1991 a indiqué que la ville et les alentours

19 immédiats de la ville avaient une population d'environ 525 980 habitants

20 dont la composition ethnique était comme suit : 49.3 Musulmans, 29,9

21 Serbes, 6,6 Croates, 10,7 Yougoslaves et 3,5 autres groupes ethniques.

22 Sarajevo s'élevait à 11 % de la population de Bosnie-Herzégovine.

23 Au fond, tous les habitants de Sarajevo qui déposeront devant vous,

24 vous diront que Sarajevo, jusqu'en 1992, était une ville florissante

25 multiethnique et un centre culturel et économique de l'ex-Yougoslavie qui

26 était toujours fière de sa tolérance et du respect de tous les habitants.

27 Les caractéristiques topographiques de la ville de Sarajevo ont rendu

28 Sarajevo extrêmement vulnérable au RSK, puisqu'en avril et mai 1992, le RSK

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1 avait déployé ses forces sur les élévations encerclant la ville de

2 Sarajevo, ce qui la mettait dans une position avantageuse par rapport à la

3 partie adverse, l'armée bosniaque dont je parlerai en utilisant le terme de

4 l'ABiH. La ville de Sarajevo est restée vulnérable aux bombardements depuis

5 les collines à la fois au nord et au sud secondant le siège.

6 J'ai déjà mentionné le début de la campagne de pilonnage et de tirs

7 embusqués qui a commencé en avril 1992. L'objectif de la République serbe

8 de Bosnie-Herzégovine par rapport à Sarajevo était clair en 1992, en mai

9 1992, conformément aux objectifs de division et de destruction énoncés. Cet

10 objectif a été répété et suivi d'effets. Le ministre de la santé de la

11 République serbe de la Bosnie-Herzégovine a dit la chose suivante : "Je

12 suis pour la destruction de l'hôpital de Kosevo pour que l'ennemi ne puisse

13 pas chercher d'aide médicale où que ce soit." Nous vous montrerons qu'il ne

14 s'agissait pas seulement de la lettre morte lorsqu'il a dit cela.

15 Nous pouvons assister à un rapport de l'expert de l'Accusation,

16 Robert Donia qui disait que: "Les Serbes de Bosnie et leurs leaders ont

17 utilisé leurs avantages militaires et géographiques afin de pilonner

18 Sarajevo périodiquement, afin d'endommager et détruire ces monuments

19 culturels et religieux et afin de priver la population civile de la

20 nourriture, de l'eau, de l'électricité, du gaz et des moyens de transport.

21 La population diminuée de la ville a commencé à dépendre de l'aide

22 humanitaire pour pouvoir subsister. La formation généralisée a été entachée

23 grâce aux efforts de la FORPRONU et à l'ingénuité des défenseurs de

24 Sarajevo."

25 Pendant trois ans et demi qui ont suivi, les deux armées qui se

26 confrontaient sont arrivées à une situation d'impasse, mis à part quelques

27 incidents isolés. Même si l'ABiH de Sarajevo avait les troupes quatre fois

28 supérieures en nombre par rapport au RSK, avec

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1 75 000 soldats qui défendaient la ville, le RSK avait l'avantage en armes,

2 et au début de l'année 1994 [comme interprété] avait encerclé la ville par

3 des mortiers, des chars, des obusiers et des canons antiaériens. L'accusé

4 commandait sept brigades d'infanterie, un bataillon de police militaire, un

5 régiment d'artillerie léger et un bataillon antichar, mis à part plusieurs

6 corps de commandement qu'il contrôlait. Le gouvernement de Bosnie qui avait

7 des forces qui défendaient Sarajevo, notamment le 1er Corps de l'ABiH

8 commandé par le général Vahid Karavelic, avait organisé ses forces selon

9 les brigades situées partout dans la ville de Sarajevo.

10 L'Accusation va montrer des éléments de preuve nombreux indiquant que

11 le RSK avait utilisé des tireurs embusqués entraînés, qui visaient la

12 population civile à Sarajevo depuis des distances éloignées. Un exemple

13 clair de cette utilisation des tireurs embusqués au sein du RSK est reflété

14 par une pièce à conviction que l'Accusation va verser au dossier, qui est

15 un ordre signé par l'accusé le 19 janvier 1995, lorsqu'il a organisé le

16 transport des instructeurs ou formateurs des tireurs embusqués qui devaient

17 être transportés jusqu'à la caserne militaire de Jahorina afin qu'ils

18 puissent commencer un autre travail. Juste avant cet ordre, le

19 15 janvier 1995, le commandant de la 3e Brigade d'infanterie de Sarajevo

20 avait envoyé une demande à l'accusé visant à assurer l'entraînement de ces

21 soldats en matière des tirs isolés. L'Accusation souhaite indiquer que le

22 terme "sniper" en anglais ne fait pas seulement référence à une personne

23 ayant un fusil à lunette, mais le fait de viser des individus depuis une

24 distance, depuis une position dissimulée ou partiellement dissimulée en

25 utilisant une arme à petit calibre, par exemple, un fusil ou fusil

26 mitraillette, autrement dit des fusils à tirs individuels ou multiples.

27 Mis à part cela, en avril 1995, le RSK a introduit dans son arsenal

28 des armes décrites comme des bombes aériennes modifiées qui avaient une

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1 puissance destructive énorme mais qui ne pouvaient pas être guidées, donc

2 n'étaient pas du tout précises. Ce qui a ajouté une nouvelle dimension à

3 l'état de terreur déjà existant auquel la population civile de Sarajevo

4 avait été soumise.

5 La campagne de pilonnage et de tirs embusqués qui avaient pour but de

6 répandre la terreur parmi la population, la campagne en vue d'infliger la

7 terreur et la peur au sein de la population de Sarajevo a été orchestrée

8 par l'accusé, par l'intermédiaire des bombardements et des tirs embusqués

9 simultanément. Les civils qui montaient à bord des tramways et allaient

10 dans le centre de Sarajevo risquaient leur vie ou risquaient d'être blessés

11 par des tireurs embusqués ou de petites armes à feu. C'était le cas pour

12 tous les civils qui vivaient à Sarajevo, au sud-ouest de la ville également

13 où des bombes aériennes modifiées ont été lancées. La campagne double de

14 bombardements et de tirs embusqués s'est répandue sur toute la ville.

15 Quelques régions, en raison de leur désavantage sur un plan topographique

16 et géographique, étaient davantage sujettes aux attaques que d'autres

17 telles que les quartiers résidentiels de Sredenik qui se trouvent au nord-

18 est de la ville qui a été une cible essentielle visée par les tireurs

19 embusqués tristement célèbres, lorsqu'ils étaient dans le nid de

20 mitrailleuses à "sharpstone" [imperceptible].

21 La programmation du bombardement et des tirs embusqués ne pouvait pas

22 être prévue à l'avance. Une semaine ne pouvait pas passer sans que les

23 civils fassent l'objet de ces tirs ou de ces pilonnages. Quelquefois, il y

24 avait des périodes d'intensité plus grandes, quelquefois il y avait des

25 murs d'attaque de bombes aériennes tels que cela a été le cas au cours de

26 l'été 1995. De façon générale, l'Accusation a l'intention de le prouver

27 avec de multiples illustrations et incidents à cet effet, qui se trouvent

28 dans les deux annexes à l'acte d'accusation portant sur le pilonnage et les

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1 bombardements. La campagne de bombardements et de tirs embusqués s'est

2 poursuivie pendant toute la période où l'accusé a été commandant, même

3 lorsque les frappes de l'OTAN sont intervenues et que la communauté

4 internationale a imposé une zone de d'exclusion aérienne en septembre 1995.

5 L'Accusation fera venir des témoins qui témoigneront et qui apporteront des

6 éléments de preuve documentaires à l'appui des attaques qui se sont

7 poursuivies.

8 Il est important d'insister là-dessus, Messieurs les Juges, car il

9 s'agit ici d'une affaire qui traite non pas d'opérations militaires

10 légitimes contre des cibles légitimes; il s'agit de prendre pour cibles des

11 civils par l'intermédiaire de tirs directs, délibérés et disproportionnés.

12 Pendant la période couverte par l'acte d'accusation - elle porte sur la

13 durée au cours de laquelle l'accusé était commandant de la RSK - au cours

14 de cette période, la RSK a lancé des attaques contre des objectifs

15 militaires légitimes sur les environs de Sarajevo. Ces attaques, néanmoins,

16 ne font pas partie des chefs d'accusation contre l'accusé quand bien même

17 ces attaques ont eu pour conséquence des pertes en vies humaines

18 proportionnelles ou par accident ou peut-être dues à la peur.

19 Les chefs d'accusation que l'on reproche à l'accusé sont les suivants

20 : il s'agit d'une campagne qui a été menée contre la population civile de

21 Sarajevo. Par cela, Messieurs les Juges, l'accusé a violé un des principes-

22 clés du droit international humanitaire, à savoir le principe de

23 distinction. Tout commandant militaire a le devoir d'établir la distinction

24 entre les cibles militaires et les cibles civiles. En d'autres termes, il

25 faut établir une distinction entre les soldats, les objectifs militaires

26 légitimes tels que des armements ou des quartiers généraux d'une part, ou

27 des civils et des objets civils d'autre part, tels que des appartements

28 entre autres. En tant que commandant en 1994 et 1995, l'accusé, le général

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1 Milosevic, savait et connaissait fort bien le principe essentiel de droit

2 humanitaire que je viens d'évoquer.

3 Qu'est-ce que l'on peut appeler des attaques indiscriminées,

4 délibérées ? Il s'agit d'attaques sans objet dans le sens où les obus ont

5 été lancés sur des quartiers résidentiels, sans pourtant prendre pour cible

6 un objet en particulier et sans tenir compte du fait que des pertes civiles

7 pouvaient en résulter, pertes importantes.

8 Est-ce que les civils ont été pris pour cibles ? Oui. Vous

9 constaterez qu'à la fin de ces déclarations liminaires, nous allons vous

10 montrer quelques images représentatives de Sarajevo où des civils ont été

11 exposés aux tirs des tireurs embusqués. Les victimes vont témoigner et

12 parler de leur propre expérience. De surcroît, le siège de Sarajevo a fait

13 l'objet d'observation de la part d'observateurs militaires internationaux

14 et d'observateurs civils qui pourront venir raconter ce qu'ils ont vu.

15 C'est l'aspect délibéré de cette terreur infligée à Sarajevo qui était

16 palpable aux yeux de ces témoins.

17 Peut-on imaginer que cet armement utilisé n'a pas été utilisé à des

18 fins et que les tireurs ont pu commettre des erreurs ? L'Accusation va

19 présenter des éléments de preuve par l'intermédiaire de témoins experts et

20 témoins de faits pour prouver que bien des mortiers sont a priori des armes

21 des tirs indirects, les tireurs de la RSK étaient en mesure de les déployer

22 de façon très précise pour atteindre leurs cibles. Un obus de mortier est

23 conçu plus particulièrement pour tuer et mutiler des gens. Les mortiers de

24 la RSK, qui encerclaient Sarajevo sur les hauteurs, sont restés dans les

25 mêmes positions pendant toute la durée du conflit, et des plaques de base

26 avaient été enterrées dans le sol de façon à ce qu'on puisse faire un

27 repérage des cibles. Au moment où l'accusé a repris le commandement, de

28 telles cibles devaient être atteintes et pouvaient être atteintes avec une

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1 très grande précision.

2 Bien sûr, la question de la précision s'applique encore moins

3 lorsqu'il s'agit des bombes aériennes modifiées. Comme nous allons le

4 montrer au cours de ce procès, nous allons entendre des témoins experts et

5 des témoins de faits, ces armes étaient si imprécises et sans système de

6 guidage que de les utiliser dans un environnement comme Sarajevo, c'est ce

7 qu'avance l'Accusation, est en soi illégal et le risque de pertes en vies

8 humaines civiles était très élevé.

9 Une indication claire de ce fait est que la RSK a pris pour cibles

10 des cibles civiles plutôt que des cibles militaires légitimes, ceci va être

11 prouvé et montré par l'Accusation dans les éléments de preuve qu'elle va

12 présenter, en indiquant que les installations militaires de défense de

13 Sarajevo n'ont pas été touchées. Par exemple, le quartier général du Corps

14 de l'ABiH, l'adversaire militaire de la RSK a été touché une seule fois

15 pendant toute la durée des conflits. L'endroit où se trouvait le quartier

16 général est bien connu à toute personne de Sarajevo et, en résumé,

17 l'objectif de la campagne militaire de la RSK n'était pas de tirer sur des

18 cibles militaires. Les civils constituaient la cible essentielle à Sarajevo

19 et les civils ont été pris pour cibles, parce que la RSK était en train de

20 mener une guerre psychologique contre les civils de façon à les obliger à

21 capituler.

22 Un témoin militaire international avec beaucoup d'expérience qui se

23 trouvait à Sarajevo au cours de l'été 1995, M. Fortin, viendra témoigner

24 devant vous sous peu. Dans sa déposition, il indiquera que les tirs

25 embusqués étaient une tactique militaire très efficace.

26 Lui pensait néanmoins que ces derniers ont été utilisés à Sarajevo

27 comme une tactique visant à semer la terreur, étant donné que les Serbes de

28 Bosnie n'avaient rien à gagner sur le plan militaire. Ils avaient plutôt

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1 beaucoup à perdre sur le plan politique.

2 En résumé, pourquoi une force militaire tire-t-elle des obus sur des

3 quartiers éminemment résidentiels à Sarajevo ne sachant absolument pas à

4 quel endroit les obus allaient atterrir et ne tenant absolument pas compte

5 du fait que des civils pouvaient être tués ou blessés à cause de cela ? La

6 raison est celle-ci; c'est parce que cela n'avait pas d'importance et ils

7 se souciaient peu de ce qu'ils touchaient. L'objectif essentiel de

8 l'attaque était de répandre la terreur parmi la population civile, et cet

9 objectif, je dois dire que la RSK, l'a réalisé. L'objectif fondamental de

10 la RSK au cours de sa campagne n'était pas se débarrasser de la population

11 civile, mais de répandre la terreur parmi eux en envoyant un message très

12 clair à la population civile de Sarajevo qui n'était plus en sécurité que

13 ce soit de jour ou de nuit.

14 Je vais reprendre cette réflexion, Messieurs les Juges. Je souhaite

15 maintenant consacrer quelques minutes, c'est la dernière partie de ma

16 déclaration liminaire aux victimes.

17 Quelle était la vie quotidienne à Sarajevo au moment au Dragomir

18 Milosevic assurait le commandement de la RSK ?

19 Les activités quotidiennes continuaient à se poursuivre mais

20 c'étaient des situations risquées où on risquait sa vie. Pendant les hivers

21 glacés de la guerre à Sarajevo, les habitants devaient faire un choix entre

22 mourir de froid dans leurs maisons ou prendre le risque de s'aventurer à

23 l'extérieur pour acheter du bois ou de l'eau. Se déplacer dans la ville à

24 la recherche d'un morceau de pain était quelque chose au cours de laquelle

25 on pouvait risquer sa vie. Les membres de la famille qui se déplaçaient

26 dans la ville de Sarajevo et dans les rues pour aller chercher de la

27 nourriture au quotidien, on ne savait jamais si ces gens-là allaient

28 revenir.

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1 L'Accusation va présenter des moyens de preuve émanant de survivants

2 de l'incident du marché de Markale le 28 août, qui est l'un des incidents

3 cités dans l'annexe numéro 23, la seconde fois que la place du marché a été

4 bombardée par la RSK, la première fois c'était le 5 février 1994 sous le

5 commandement du général Galic. A la fin des déclarations liminaires

6 d'aujourd'hui, nous allons vous montrer une séquence vidéo qui décrit bien

7 cette scène de carnage, la description et la panique qui s'en est ensuivie

8 ainsi que la terreur qui s'est répandue après cela.

9 L'Accusation va présenter des témoignages de plusieurs conducteurs de

10 tramways qui prenaient des risques quotidiens pour mener les civils de

11 Sarajevo à l'intérieur ou à l'extérieur de la ville. Il y a devant l'hôtel

12 Holiday Inn, à l'endroit où le tramway ralentissait, c'était une cible

13 tristement célèbre pour les tireurs de la RSK sous le commandement de

14 l'accusé. On voit même la trace au niveau des rails. L'Accusation fournira

15 un certain nombre d'éléments de preuve émanant de victimes civiles qui ont

16 fait l'objet de ces tirs sur les trams et des pilonnages. A la fin de la

17 journée aujourd'hui, à titre illustratif, Messieurs les Juges, nous allons

18 vous montrer une séquence vidéo de ces attaques contre les trams.

19 L'Accusation va également présenter dans la déposition de plusieurs

20 témoins qui ont été les victimes de bombes aériennes modifiées. Ces

21 derniers décriront l'horreur physique et la dévastation provoquée par ces

22 armes, y compris à très grande échelle l'étendue des dégâts. Vous allez

23 entendre parler d'un autre incident dû à une bombe aérienne modifiée, qui a

24 endommagé 11 maisons de façon très sérieuse provoquant nombre de blessés et

25 de morts parmi la population civile, et un autre incident où des bombes

26 aériennes modifiées ont complètement détruit trois étages d'un bâtiment,

27 provoquant énormément de dégâts et des dégâts à d'autres bâtiments dans le

28 voisinage. Encore une fois, il s'agit de pertes de civils, et ce chiffre

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1 est très élevé.

2 Vous allez également voir des civils qui se sont regroupés à des

3 interceptions dangereuses des routes, qui avaient le courage au risque de

4 leurs vies de sortir de chez eux, ce qui les exposaient, ils étaient pris

5 pour cibles par la RSK lorsqu'ils étaient dans leur ligne de mire. Certains

6 d'entre eux en ont été les victimes, d'autres ont réussi à s'échapper et à

7 se mettre en sécurité.

8 Lorsque les civils, y compris les personnes âgées, les femmes et les

9 enfants, ont fait l'objet de tirs par les tireurs d'élite de RSK ou qu'ils

10 ont été bombardés par les forces de la RSK, très souvent les sauveteurs ou

11 les autorités locales ne pouvaient pas parvenir jusqu'à eux pour les mettre

12 en sécurité. Ils ne pouvaient pas recevoir de soins médicaux, parce que les

13 tirs et le pilonnage étaient incessants et qu'on prenait toujours la

14 population pour cible, certains même qui avaient déjà été touchés, quand

15 bien même les sauveteurs étaient sur place.

16 L'Accusation va présenter la déposition de témoins et montrer des

17 séquences vidéo de ces tentatives faites par les sauveteurs. Les victimes

18 blessées qui ont fait l'objet des tirs de la RSK et leurs sauveteurs qui

19 ont été attaqués par les forces de la RSK placées sous le commandement de

20 l'accusé. Ceux qui ont réussi à arriver jusqu'à l'hôpital malgré les tirs

21 et les pilonnages incessants, ont reçu le traitement qu'ils pouvaient

22 recevoir à l'époque. Les différents étages de l'hôpital étaient encombrés

23 de civils blessés. Quelquefois, lorsque les victimes étaient enterrées, les

24 personnes qui allaient les enterrer le faisaient au risque de leurs vies,

25 devant leurs tombes ils étaient dans la ligne de mire des tireurs embusqués

26 de la RSK. Des civils ont été tués alors qu'ils assistaient aux

27 enterrements.

28 Messieurs les Juges, non seulement les victimes mais des civils de

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1 Sarajevo vont venir témoigner à propos de cette terreur qu'ils ont vécue au

2 quotidien. A l'appui de et pour corroborer le récit de témoins locaux, vous

3 entendrez le témoignage, avec des rapports à l'appui d'un certain nombre de

4 membres de la communauté internationale. A titre d'exemple, je vais vous en

5 citer un seul, un rapport daté du 8 juillet 1995 qui a été rédigé par un

6 témoin qui sera cité à la barre ici, David Harland. Il dit ce qui suit :

7 "Malgré la diminution des activités militaires autour de la ville, le

8 harcèlement de la population civile s'est poursuivi sans relâche. Les tirs

9 embusqués et les obus sont encore lancés d'une façon assez importante. Ceci

10 ne semble avoir aucune valeur militaire particulière, mais contribue

11 simplement à répandre une atmosphère de terreur au sein de la ville.

12 Presque aucun civil n'utilise maintenant la principale artère qui va d'est

13 en ouest dans la ville, qu'on appelle la 'rue des tireurs', à tel point que

14 le tireur qui avait l'habitude de travailler dans cette région semble

15 s'être installé ailleurs."

16 Messieurs les Juges, ceci en finit avec ma déclaration liminaire, du

17 moins le passage qui m'était dévolu. Maintenant, je vais donner la parole à

18 M. Waespi qui, lui, va parler plutôt de l'accusé et de l'acte d'accusation.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Whiting.

20 Monsieur Waespi vous avez la parole.

21 M. WAESPI : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, né

22 en Serbie en 1942, Dragomir Milosevic, l'accusé, en l'espèce, était un

23 officier d'état-major, commandant tout à fait compétent, et ce à tout

24 moment, et ce à tous ses postes, tous les postes qu'il a occupés au cours

25 de sa carrière très importante au sein de la JNA et de la VRS. Ses

26 promotions montrent bien que ses supérieurs appréciaient à la fois ses

27 compétences professionnelles et ses qualités de leader.

28 Comme il a été dit précédemment, il avait été officier de la JNA

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1 avant le conflit armé, et avait servi en tant que chef d'état-major de

2 régiment, puis chef d'état-major de brigade de la

3 49e Brigade motorisée à Lukavica au sein du 4e Corps, 2e District militaire.

4 Dès septembre 1990, il était commandant de la 216e Brigade de Montagne, et

5 ce, à nouveau au sein du 4e Corps, une brigade qui se trouvait à Han

6 Pijesak.

7 Avec la création de la Sarajevo Romanija Corps en mai 1992, la 216e

8 Brigade de Montagne a été rebaptisée 1ère Brigade d'infanterie de la

9 Romanija. L'accusé est resté commandant, est resté chef de cette brigade au

10 moins jusqu'au début de 1993. Ensuite, comme nous l'avons déjà entendu,

11 l'accusé est devenu chef d'état-major du Sarajevo Romanija Corps, du Corps

12 de la Romanija, le Sarajevo Romanija, à partir du 4 juillet 1993 jusqu'au

13 10 août 1994, quand il a été nommé commandant du Corps de Sarajevo

14 Romanija. Pour ses services, l'accusé, la même année que celle où il a pris

15 le commandant de la RSK, a reçu l'étoile de Karadjordjevic, de 1er Rang.

16 Vous allez entendre, au sein de toutes les dépositions, que l'Accusation

17 [comme interprété] était bel et bien un officier courageux et très

18 professionnel. Les témoins vont le décrire comme un commandant de métier,

19 qui se rendait souvent sur le terrain pour rendre visite à ses troupes,

20 pour savoir exactement ce qui se passait au niveau tactique et pour

21 remonter aussi le moral de ses troupes. Donc, l'accusé était tout à fait

22 respecté par ses soldats et ses ordres étaient correctement exécutés.

23 Les horreurs commises à Sarajevo étaient bien connues de Dragomir Milosevic

24 quand il a pris le poste de commandant de corps en août 1994. Comme cela a

25 été déjà dit, l'accusé n'avait non seulement déjà été commandant de la

26 brigade de la RSK, dont certains éléments étaient situés à Grbavica, de

27 façon tout à fait pratique, Grbavica qui est au passage une source bien

28 connue de tirs embusqués de la RSK. Donc, il a pris le commandement de

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1 cette brigade au début de 1992 quand les premiers obus ont commencé à

2 tomber sur Sarajevo. Mais en juillet 1993, l'accusé est devenu chef d'état-

3 major du général Galic, qui était à l'époque le commandant de la RSK.

4 Bien sûr, l'accusé n'est pas accusé de crimes qui ont été commis en

5 dehors de la période de référence de l'acte d'accusation et avant qu'il ait

6 pris en charge la RSK. Cela dit, les arguments de l'Accusation sont que le

7 fait que l'accusé jouait un rôle important en tant que chef d'état-major du

8 corps pendant plus d'un an, au cours duquel des crimes épouvantables ont

9 été commis, est tout à fait pertinent à l'espèce, tout comme le fait que

10 dès le premier jour de sa prise de fonction en tant que commandant du

11 corps, il a été averti de la campagne de terreur qui avait été menée par

12 son prédécesseur. En tant que numéro deux au sein de la structure de la RSK

13 et en tant que bras droit du commandant Galic, donc en tant que numéro deux

14 du commandant, l'accusé avait accès à toutes sortes d'informations

15 comprenant, par exemple, les détails quotidiens des mouvements et des

16 activités de la RSK. Sa signature apparaît quotidiennement sur les rapports

17 de combat, et ce, dès le 6 juillet 1993. A ce moment-là, il signait en tant

18 que commandant adjoint de la RSK.

19 Messieurs les Juges, dès que l'accusé a pris commandement, a pris le

20 commandement de la RSK, grâce à ses fonctions précédentes, il savait

21 parfaitement quelles étaient les questions militaires qui portaient sur le

22 théâtre de Sarajevo. Tout particulièrement, il connaissait les emplacements

23 importants des éléments du 1er Corps de l'ABiH, comme son QG, et connaissait

24 donc les cibles potentielles militaires. Il connaissait en détail l'arsenal

25 dont disposait la RSK. Il savait où se trouvaient les armes lourdes, il

26 savait comment et où acquérir des armes neuves. Il connaissait extrêmement

27 bien, puisque c'était son métier, il connaissait extrêmement bien les

28 emplacements des différentes brigades et bataillons de son corps. Il

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1 connaissait bien leurs commandants, leurs chefs, il les rencontrait

2 souvent. L'accusé connaissait aussi très bien l'emplacement des lignes de

3 confrontation. Il était au courant de tous les problèmes de logistique du

4 corps, il connaissait parfaitement la chaîne de commandement ainsi que la

5 procédure de "reporting" le long de cette chaîne de commandement. Donc,

6 grâce aux postes précédemment occupés au sein de la RSK par l'accusé, il

7 était parfaitement capable, il aurait été parfaitement capable de prendre

8 les mesures nécessaires pour se départir de la politique systématique de

9 pilonnage et de "sniping" de civils dont le but était de terroriser la

10 population. Il aurait pu le faire s'il l'avait voulu. Mais comme nous

11 allons le montrer, il n'a pas voulu le faire; au contraire, il a décidé de

12 pérenniser cette campagne.

13 En tant que commandant de la RSK, il était en charge des fonctions de

14 commandement et de contrôle - nous allons vous le montrer d'ailleurs - au

15 travers de différents dispositifs appliquant le personnel, les équipements,

16 les communications, les établissements, les procédures, et donc pouvait

17 planifier, diriger, coordonner et contrôler les forces qui étaient placées

18 sous son commandement. Il avait le commandement total de la RSK et de ses

19 unités subordonnées. Cette notion de commandement Suprême couvrait

20 absolument tous les aspects des opérations et de l'administration des

21 questions militaires. Dans le contexte de son commandement opérationnel, il

22 pouvait donner des missions à ses subordonnés, il pouvait déployer des

23 unités, conserver ou déléguer le contrôle tactique et opérationnel, et ce,

24 le cas échéant, dès qu'il en sentait le besoin. Je vous montrerai

25 d'ailleurs un exemple de ceci plus tard au cours de la journée. Etant en

26 charge de la procédure de "reporting" des opérations de combat, l'accusé

27 l'a possédé, l'élément essentiel dont a besoin tout commandant pour exercer

28 le commandement opérationnel, une connaissance parfaite de la situation

Page 278

1 tactique et opérationnelle. En tant que commandant de corps, l'accusé était

2 doté de toutes les prérogatives nécessaires pour exercicer [phon] de jure

3 et de facto son autorité et pour établir et maintenir le niveau de

4 discipline nécessaire à toute armée professionnelle.

5 Maintenant, quelle est la stratégie de l'Accusation ?

6 Tout d'abord, nous allons présenter nos arguments gardant à l'esprit

7 plusieurs paramètres qui ont été bel et bien pris en compte dans

8 l'élaboration de notre stratégie.

9 Tout d'abord, les charges pesant contre l'accusé. L'Accusation a accusé

10 Dragomir Milosevic d'une campagne de pilonnage et de "sniping," dont le but

11 essentiel était de terroriser la population civile. De part la nature même

12 de ces charges, crimes contre l'humanité, violation des droits et coutumes

13 de la guerre, l'Accusation doit démontrer à la Chambre au-delà de tout

14 doute raisonnable, non seulement les éléments spécifiques de chaque crime

15 allégué, mais aussi ce qu'on appelle les éléments communs à tous crimes de

16 guerre et à tous crimes contre l'humanité. Pour démontrer tout ceci, il

17 faut à la fois admettre les faits incriminés, il faut trouver des preuves

18 portant sur l'envergure même de ces crimes, et enfin, il faut trouver le

19 lien qui connecte ceci avec l'accusé pour arriver à prouver sa

20 responsabilité pénale individuelle au titre de ses crimes. Tout comme dans

21 l'affaire Galic, les éléments communs des crimes, donc la campagne, sera

22 démontrée en partie par l'utilisation d'incidents de pilonnage et de

23 "sniping," qui illustreront parfaitement la thèse.

24 Les arguments de l'Accusation devront, bien évidemment, comprendre des

25 éléments de preuve permettant de démontrer chacun de ces incidents de

26 pilonnage et de "sniping" choisis au-delà de tout doute raisonnable, mais

27 aussi comprendre des éléments de preuve démontrant la côté systématique de

28 la campagne de terreur menée par Dragomir Milosevic et ses subordonnés au

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1 sein de la RSK contre les civils de Sarajevo ainsi que les éléments de

2 preuve démontrant le rôle criminel joué par l'accusé dans l'exécution de

3 cette campagne.

4 Deuxième facteur dont l'Accusation doit prendre en compte, bien sûr, c'est

5 le besoin de resserrer nos arguments pour assurer un procès rapide, un

6 procès rapide qui protège, bien sûr, les intérêts de l'accusé.

7 Troisièmement, l'Accusation sait bien que de nombreux civils sont déjà

8 venus témoigner devant ce Tribunal de leurs souffrances endurées à

9 Sarajevo. Certains de ces témoins, qui ont déjà témoigné dans d'autres

10 affaires, pourraient fournir des éléments de preuve portant sur les charges

11 pesant contre Dragomir Milosevic dans l'acte d'accusation modifié.

12 L'Accusation remarque d'ailleurs qu'il est toujours difficile, et c'est

13 toujours un traumatisme pour les victimes de crimes de venir témoigner ici

14 en direct devant la Cour, et l'Accusation a pris en compte cet aspect des

15 faites dans son choix de témoins.

16 L'Accusation a donc essayé de trouver un équilibre entre tous ces facteurs

17 et tous ces paramètres dans l'élaboration de sa stratégie.

18 Pour traiter des éléments de preuve portant sur les faits incriminés tout

19 d'abord, l'Accusation va présenter les preuves de témoins des faits dont

20 des victimes, des témoins oculaires, des enquêteurs locaux, des personnels

21 internationaux présents lors de différents incidents bien précis, soit de

22 "sniping," soit de pilonnage. Cela dit, Monsieur le Président, vous le

23 savez, bien sûr, l'Accusation, se faisant, essayera d'appliquer les

24 mécanismes permis par le Règlement de ce Tribunal afin de réduire le temps

25 d'audience nécessaire. L'Accusation va donc chercher à verser l'essentiel

26 des éléments de preuve des témoins des faits en application de l'article 92

27 bis et 92 ter du Règlement, où les témoins, si vous le voulez, Messieurs

28 les Juges, peuvent venir ici dans le prétoire pour confirmer leurs

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1 déclarations et pour être contre-interrogés.

2 Comme ce Tribunal le sait, l'Accusation a déjà réduit le nombre

3 d'incidents de pilonnage qu'il a choisi de montrer de 23 à 15 uniquement.

4 Pour ce qui est des incidents de "sniping," l'Accusation a réduit le nombre

5 choisi de 20 à 12, le but étant, bien sûr, de réduire l'affaire, de

6 resserrer l'affaire et de réduire les heures passées dans le prétoire. Nous

7 sommes arrivés d'ailleurs à déjà réduire le temps nécessaire d'un tiers.

8 Ces incidents qui seront non seulement prouvés par le biais de

9 témoignages de témoins mais aussi par le biais de clips vidéo, de rapports

10 des Nations Unies, de rapports d'autres organisations internationales, par

11 des photographies, par la présentation des dossiers médicaux et par la

12 présentation des rapports d'enquêtes pénales. Certains témoins, du fait de

13 leur âge, de leur santé, doivent témoigner uniquement par vidéoconférence.

14 Mais ceci n'empêchera pas l'Accusation d'essayer de toujours réduire le

15 temps d'audience nécessaire pour les dépositions au travers de

16 l'utilisation de l'article 92 ter du Règlement. L'Accusation s'assurera

17 toujours que ces témoins peuvent être contre-interrogés par la Défense.

18 Schéma prouvant maintenant la nature systématique de la campagne, et

19 ce, pour satisfaire l'élément commun des crimes pesant contre l'accusé.

20 Ceci sera présenté au travers du témoignage des personnels internationaux,

21 surtout d'anciens observateurs militaires des Nations Unies, d'anciens

22 officiers de la FORPRONU, des journalistes, des enquêteurs, des policiers

23 locaux ainsi que des témoins experts. Ils fourniront tous des preuves au-

24 delà du nombre d'incidents choisis, et donc parleront d'autres éléments qui

25 n'ont pas été choisis, qui expliqueront et qui illustreront les nombreuses

26 attaques commises contre la population civile pendant la période de

27 référence de l'acte d'accusation modifié.

28 Enfin, l'Accusation va démontrer la responsabilité pénale

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1 individuelle de l'accusé. Les témoins vont témoigner par rapport au rôle

2 qu'a joué l'accusé dans l'exécution de la campagne de terreur contre les

3 civils. Ces témoins comprendront des individus qui ont travaillé de façon

4 très étroite avec l'accusé lors de la conduite de la campagne, des témoins

5 qui étaient présents à des moments où des actions étaient prises pour

6 poursuivre le côté systématique de la campagne ainsi que des personnels

7 internationaux, y compris des officiels de très haut niveau des Nations

8 Unies qui ont protesté directement auprès de l'accusé soit par écrit, soit

9 directement en tête-à-tête. L'Accusation va là aussi essayer de verser

10 l'essentiel de ces éléments de preuve au travers de l'article 92 ter pour

11 faire en sorte que sa cause soit présentée de la façon la plus efficace.

12 Avant de me pencher sur les chefs particuliers de l'acte d'accusation

13 amendé, j'aimerais vous expliquez un peu à quoi ressemble Sarajevo,

14 Sarajevo par rapport, bien sûr, aux charges pesant contre l'accusé.

15 Monsieur le Président, pour ce faire, vous savez que nous allons utiliser

16 un livre de photos dont vous a parlé mon collègue Alex Whiting hier. Ces

17 photos et ces cartes seront disponibles sur les écrans.

18 La première carte que vous voyez - c'est la carte numéro 2 d'ailleurs dans

19 le dossier qui vous a été donné - vous montre très exactement ce dont M.

20 Whiting a déjà parlé, c'est-à-dire la configuration de la ville et la

21 configuration et les emplacements des différentes municipalités. Il y a la

22 vieille ville au milieu, des hameaux et des villages qui se trouvent aux

23 alentours, y compris, bien sûr, Pale qui se trouve à l'est.

24 La deuxième carte maintenant porte sur les activités militaires de

25 l'accusé. M. Whiting vous a parlé de la VRS. A l'époque, en 1995, la VRS

26 était composée de six corps. L'un d'entre eux, le Corps de la RSK, était

27 dirigé par l'accusé, le Corps de Sarajevo Romanija. Vous le voyez

28 d'ailleurs sur cette carte qui est la carte numéro 4 de votre dossier. Vous

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1 voyez là la délimitation de la zone du Corps de Sarajevo Romanija. C'est

2 assez approximatif, certes, et je suis certain que le cas échéant nous

3 pourrons faire venir des témoins qui seront beaucoup plus précis.

4 Ensuite, la carte numéro 6, qui se trouve dans votre dossier et qui peut

5 être affichée à l'écran, bien sûr, est une carte de l'époque qui est une

6 carte de travail de l'ABiH, donc du 1er Corps de l'ABiH. Vous entendrez son

7 commandant, M. Karavelic, qui viendra expliquer ce qui figure sur cette

8 carte. C'est assez difficile à le voir, certes, mais c'est une carte où

9 l'on voit la configuration de la ville, la façon dont l'ABiH avait installé

10 ses propres brigades au sein de la ville. Sur cette carte on voit aussi les

11 lignes de confrontation.

12 La carte suivante est la carte 6. Je me suis trompé auparavant, je

13 vous ai présenté la carte de l'ABiH comme étant la carte numéro 6 alors que

14 c'était la carte numéro 5. Nous avons maintenant la carte numéro 6 qui est

15 la carte de la FORPRONU, nous en aurons plusieurs. D'ailleurs, il y aura

16 plusieurs officiers et soldats de la FORPRONU qui viendront témoigner. Il

17 s'agit d'une carte qu'ils ont eux-mêmes dessinée. Cela montre les lignes de

18 confrontation mais vues de leur point de vue. Cette carte date de juillet

19 1995 et montre la situation telle qu'elle était estimée et évaluée par la

20 FORPRONU en 1995.

21 Avec cette carte, je vais vous montrer certains emplacements

22 essentiels dont nous allons parler dès lundi. Je pense que vous connaissez

23 déjà un petit peu la zone de Sarajevo puisqu'on en a déjà parlé dans

24 d'autres affaires. Mais voici ce qui est essentiel.

25 Vous voyez qu'il y a maintenant une flèche sur l'écran, qui vous

26 montre l'aéroport de Butmir. Cela, c'est l'aéroport de Sarajevo. Deuxième

27 flèche, Lukavica. Il s'agit ici du QG de l'accusé. C'est le QG, le poste de

28 commandement et le bureau de l'accusé. Ensuite, la poste, les PTT, le long

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1 de cette longue route qui va d'est en ouest, le long de "Sniper Alley".

2 Tout le monde connaît l'immeuble des PTT puisqu'il s'agissait du QG des

3 observateurs militaires.

4 Ensuite, il y a le bâtiment de la télévision qui est là, aussi très

5 important, puisqu'il a été attaqué au cours de la guerre sur ordre de

6 l'accusé. Nous vous montrerons d'ailleurs un exemple de ce bâtiment de la

7 télévision.

8 Ensuite, la flèche suivante vous montre le Holiday Inn où de nombreux

9 journalistes étrangers étaient cantonnés au cours de la guerre. Plus tard

10 dans la journée vous en verrez une photo, parce que c'est un bâtiment que

11 l'on retrouve juste devant un emplacement où des tirs embusqués avaient

12 lieu sans cesse.

13 Ensuite, Stari Grad, c'est la vieille ville. Alex Whiting vous en a

14 déjà parlé. La flèche ici est plutôt en bas de Stari Grad, la vieille ville

15 se trouve au nord de la flèche.

16 Ensuite, vous avez Grbavica. Il s'agit presque d'une enclave qui est

17 au sud de la rivière, qui était tenue par le Corps de Sarajevo Romanija.

18 C'est un endroit extrêmement connu. On en parlera d'ailleurs de façon

19 répétée, car de nombreux tirs embusqués provenaient de cet endroit.

20 Maintenant, comment allons-nous présenter ces incidents à la fois de

21 pilonnage et de "sniping" ? Tout d'abord, je vais parler du "sniping,"

22 puisque ceci porte sur les chefs 2 à 4 de l'acte d'accusation amendé.

23 La nature des crimes individuels qui constituent l'élément de base de

24 l'acte d'accusation sont assez difficiles à évoquer dans une salle

25 d'audience. Pour ce qui est de "sniping", il s'agit de personnes sur qui on

26 tire directement. Les circonstances où le tueur est caché, l'utilisation de

27 tirs indirects signifie que ceux qui étaient présents sur place ne savent

28 pas d'où vient l'obus. Pour aider la Cour, l'Accusation a préparé des

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1 vidéos expliquant un petit peu à la fois les pilonnages et le "sniping".

2 S'agissant des incidents énumérés dans les annexes, incidents concernant

3 les tirs embusqués, au total il y en a 12, suite à l'ordre donné par la

4 Chambre demandant la réduction de leur nombre, si la victime a survécu et

5 peut déposer, la victime a été filmée sur les lieux et montre exactement de

6 quelle manière et où elle avait été touchée par balle. Cet exercice a été

7 entrepris en été 2006.

8 Cependant, si la victime a succombé à ses blessures, un témoin

9 oculaire apparaît sur la vidéo et montre au mieux de ses souvenirs où se

10 trouvait la victime au moment précis où elle a été touchée. Un triploïde

11 [phon] a été érigé à l'endroit exact de la position de la victime au moment

12 où il ou elle a été touchée. L'objectif de la caméra a été fixé à la

13 hauteur approximative du point d'entrée de la balle dans le corps de la

14 victime. Un photographe professionnel a ensuite pris les photos

15 correspondant à une vue depuis cette position, vue de 360 degrés, la

16 position correspondant à celle où la balle a pénétré le corps de la

17 victime.

18 Ces photographies ont par la suite été rassemblées en utilisant un

19 logiciel approprié pour permettre à la Chambre de première instance d'avoir

20 à sa disposition une image en continu de 360 degrés qui peut être visionnée

21 dans ce prétoire ou séparément en utilisant la souris de l'ordinateur qui

22 permet de naviguer dans toutes les directions, d'aller en haut et en bas,

23 d'élargir et de diminuer les cadres et de panoramiquer. Le conseil de la

24 Défense a été invité à assister au filmage de certains de ces incidents en

25 été de cette année.

26 Les incidents énumérés dans l'annexe ont été filmés d'une manière

27 semblable. Nous allons maintenant vous donner un exemple contenu dans la

28 première annexe de l'acte d'accusation modifié.

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1 "Le 18 novembre 1994, Dzenana Sokolovic, âgée de 31 ans, et son fils

2 Nermin Divovic, de 7 ans, ont essuyé des tirs alors qu'ils marchaient dans

3 la rue Zmaj od Bosne. Mme Sokolovic a reçu une balle dans l'abdomen. Cette

4 balle l'a traversée et a touché son fils à la tête, le blessant

5 mortellement. Ils venaient de Hrasno où ils s'étaient rendus la veille pour

6 chercher du bois de chauffage et rentraient chez eux." Fin de citation de

7 l'acte d'accusation.

8 Dzenana Sokolovic, en 1994, avait un fils de 7 ans et une fille

9 adolescente. Dzenana et ses enfants ne quittaient pratiquement pas leur

10 domicile entre 1992 et 1995, comme elle le dira au cours de sa déposition.

11 Ils avaient peur même d'ouvrir leur porte en raison du pilonnage et des

12 tirs isolés incessants qui visaient la population civile. Dzenana a fait

13 tout ce qu'elle pouvait afin de protéger sa famille de ces attaques

14 incessantes, mais à la fin son pire cauchemar s'est réalisé. Dzenana et ses

15 enfants n'avaient pratiquement rien à manger et vivaient dans une peur

16 permanente. Ils vivaient en anticipant une attaque contre eux à tout moment

17 de la journée. Le

18 18 novembre 1994, approximativement à 11 heures du matin, Dzenana est

19 sortie de chez elle afin de chercher du bois de chauffage. C'était une

20 période de cessez-le-feu et la famille Sokolovic avait besoin d'urgence du

21 bois afin de pouvoir s'assurer d'avoir le chauffage pendant le mois de

22 novembre froid.

23 Dzenana et ses enfants sont allés à la maison de sa belle-mère pour

24 chercher du bois de chauffage. En rentrant avec un tas de bois, Dzenana

25 avait son fils sur sa gauche et sa fille juste derrière eux. Tout d'un

26 coup, ils ont essuyé les tirs des forces du RSK placées sous le

27 commandement de l'accusé. Dzenana a entendu des coups de feu, elle a vu

28 d'autres civils autour d'elle, qui tombaient par terre, ensuite elle a

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1 ressenti une forte douleur dans son abdomen. Elle a remarqué également que

2 son fils est tombé par terre. Le personnel de la FORPRONU se trouvait aux

3 alentours, ils ont essayé de sauver Dzenana et ses enfants, mais ils ont

4 tous essuyé des tirs du RSK aussi.

5 Dzenana a finalement été précipitée à l'hôpital où elle a subi une

6 opération chirurgicale. C'est seulement par la suite, lorsqu'elle s'est

7 réveillée, qu'elle a appris que son fils est mort sur le champ; la balle

8 lui avait traversé le ventre et a pénétré la tête de son fils. Le fils de

9 Dzenana, Nermin a été enterré le 21 novembre 1994, alors que Dzenana était

10 encore à l'hôpital et n'a pu assister à l'enterrement de son fils.

11 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, par le biais de cet

12 exemple, je souhaite vous montrer de quelle manière l'Accusation a

13 l'intention de vous présenter cet incident lors du procès. Encore une fois,

14 une sélection des imprimés contenus dans le recueil de photos que nous vous

15 avons fourni aujourd'hui.

16 La première carte, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, est

17 une carte maîtresse numéro 7 dans votre recueil, mais il sera plus facile

18 si vous examinez l'écran pour la suivre, c'est une carte qui contient les

19 endroits qui sont marqués et qui concernent tous les incidents contenus

20 dans les annexes. L'Accusation va prouver au-delà de tout doute raisonnable

21 à la fois les incidents de pilonnage et les incidents de tirs isolés.

22 Si vous examinez de près cette carte, vous pourrez voir que les

23 incidents de tireurs embusqués sont marqués par des points rouges, et de

24 pilonnage par des points verts. Ceci couvre la région allant de Hrasno, en

25 bas à gauche jusqu'en haut à droite, c'est-à-dire la vieille ville de

26 Sarajevo. Ce qui illustre la campagne que l'Accusation va prouver.

27 Maintenant, si vous avez la technologie appropriée, vous pourrez

28 cliquer sur n'importe lequel de ces quatre encarts pour voir les incidents

Page 287

1 et les lieux des incidents de plus près. Nous allons, par exemple, cliquer

2 sur l'incident numéro 5. Pour ce faire, nous allons agrandir l'encart

3 numéro 3. Encore une fois, ici, vous avez cette carte dans votre recueil,

4 mais vous avez la carte aussi à l'écran. Vous pouvez voir des incidents

5 différents de tirs embusqués dans cette même zone. Il s'agit de la carte

6 numéro 10 dans votre recueil, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

7 Si vous examinez maintenant l'écran, vous pouvez voir deux

8 annotations rouges que nous avons ajoutées. Tout d'abord, il y a un cercle

9 rouge qui montre, Monsieur le Président, l'emplacement correspondant à

10 l'incident de tirs isolés, numéro 5, dans le cadre duquel Mme Sokolovic et

11 son fils ont essuyé les tirs, alors que la flèche indique la ligne de

12 confrontation, marquée par une ligne rose.

13 Encore une fois, je souhaite indiquer que s'agissant de cette

14 localité. Il y a eu plusieurs autres incidents de tirs isolés à cet

15 endroit. Vous pouvez voir les chiffres numéro 1, 6, 8, 13, 14 qui seront

16 tous prouvés de la même manière.

17 Monsieur le Président, je vous ai déjà expliqué de quelle manière nos

18 enquêteurs ont abordé les victimes et comment ils leur ont demandé de

19 montrer l'endroit exact où ils ont été touchés par balle. Je souhaite vous

20 montrer la séquence vidéo que nous avons filmée au cours de l'année

21 dernière avec Mme Sokolovic.

22 Veuillez nous faire visionner cette séquence vidéo, s'il vous plaît.

23 [Diffusion de cassette vidéo]

24 M. WAESPI : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

25 Juges, il s'agit d'un exemple de séquences vidéo qui ont été filmées, qui

26 concernent ces incidents de tirs embusqués. Il y a d'autres séquences

27 semblables concernant les incidents de pilonnage. Je souhaite simplement

28 compléter l'image en vous montrant ce que vous pouvez faire et ce que nous

Page 288

1 ferons à l'égard de ces incidents en utilisant les photos et certains

2 moyens technologiques. Maintenant, peut-être nous pouvons faire revenir en

3 arrière ce qui est montré dans cette séquence.

4 Vous verrez que la victime se tient devant l'hôtel Holiday Inn. A

5 droite, nous voyons le musée national, à gauche se trouve la faculté de

6 philosophie. La victime est tournée dans la direction de l'est. C'est ainsi

7 qu'elle se déplaçait, elle se dirigeait vers la vieille ville qui se trouve

8 à l'est. Cette photographie a été filmée depuis le nord dans la direction

9 du sud vers Grbavica. Vous verrez cela sur la carte. Il s'agit d'une route

10 qui s'appelle route Franje Racog qui contient de nombreux arbres. Vous

11 pouvez voir cela sur la photo.

12 Maintenant, nous pouvons voir un schéma qui est interactif -- la

13 carte qui est interactive.

14 S'agissant de chacun des incidents - vous pouvez cliquer l'endroit où

15 l'incident numéro 5 a eu lieu. Ici, Monsieur le Président, Messieurs les

16 Juges, vous pouvez voir à l'écran et aussi dans les photographies dont vous

17 disposez, vous pouvez voir un cercle rouge qui correspond à l'endroit où la

18 victime Sokolovic et d'autres victimes concernées par le même incident se

19 tenaient.

20 Ce qui est important pour vous de savoir, encore une fois, c'est un

21 fait qui va être souvent mentionné dans le procès qui va commencer lundi

22 prochain, c'est que le bâtiment jaune correspond à l'hôtel Holiday Inn.

23 Depuis l'hôtel Holiday Inn en allant vers le milieu de la photo, vous

24 pouvez voir la rue Franje Racog. C'est la photo que je vous ai montrée tout

25 à l'heure, la rue que je vous ai montrée tout à l'heure et les deux

26 bâtiments dont nous avons une meilleure photographie à vous présenter par

27 la suite, ce sont les bâtiments appelés le bâtiment Metaljka, qui est au

28 sud de la ligne de confrontation. Ce que je peux vous indiquer tout à

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1 l'heure, pour le moment, je vous donne seulement cet indice-là.

2 Si vous cliquez sur cet endroit, vous pouvez voir de nouveau à l'écran et

3 dans votre recueil de photos cette photographie correspondant à l'incident

4 de tirs isolés numéro 5, l'endroit exact où Dzenana Sokolovic et son fils

5 ont été touchés par balle. Le même système s'applique aux autres incidents

6 qui ont eu lieu au même endroit. Nous y voyons à gauche la faculté de

7 philosophie, à droite, le musée, et le bâtiment devant, dont vous ne voyez

8 que le toit est l'hôtel Holiday Inn.

9 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, nous pouvons de nouveau cliquer

10 le numéro 5, l'endroit où la victime a été touchée par balle, et ici vous

11 avez la vue panoramique qui n'est pas contenue dans votre recueil de

12 photos. Il s'agit d'une vue panoramique, filmée depuis l'endroit où la

13 victime se trouvait au moment où elle a été touchée par balle. Vous pouvez,

14 encore une fois, disposer de ce DVD, Monsieur le Président, Messieurs les

15 Juges, et nous allons faire une démonstration maintenant. Si nous utilisons

16 maintenant la souris de l'ordinateur, nous pouvons voir la vue en allant à

17 gauche, et si nous faisons une cliché sur image maintenant, nous allons

18 voir de nouveau l'hôtel Holiday Inn, un bâtiment jaune, et les deux

19 bâtiments Unis, célèbres à Sarajevo, dont de nombreux témoins parleront.

20 Puis, nous allons continuer. Maintenant, nous avons la direction d'abord le

21 nord. Ensuite, maintenant l'ouest. Nous avons de nouveau le musée, Monsieur

22 le Président, Messieurs les Juges. Ici, nous allons nous arrêter. Vous vous

23 souviendrez que c'est l'endroit où se tenait la victime pendant qu'elle

24 déposait. Encore une fois, c'est la route Franje Racog, dans la direction

25 de Grbavica.

26 Si l'on passe à la photo suivante maintenant. Vous pouvez voir encore une

27 fois les mêmes éléments. Je pense que maintenant, en utilisant les flèches,

28 nous pouvons vous montrer l'endroit où le témoin, Mme Sokolovic, se tenait.

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1 C'est la première flèche. La deuxième flèche que vous voyez, c'est la

2 source des tirs probables, à savoir le bâtiment Metaljka. Comme vous verrez

3 et entendrez pendant les dépositions devant ce Tribunal, bien sûr,

4 s'agissant des arbres, la situation était différente en novembre 1994, et

5 vous pourrez le voir peut-être dans notre dernière photo. Vous pouvez voir

6 de nouveau la photo depuis l'hôtel Holiday Inn. Peut-être nous pouvons

7 montrer les bâtiments avec des flèches. La première flèche indique en bas,

8 l'endroit où se trouvait la victime, et la deuxième flèche indique la

9 source probable des tirs. Nous avons également la ligne de confrontation

10 qui correspond à la rivière, qui pourrait peut-être être marquée

11 manuellement également. C'est ici que se trouve la rivière qui

12 correspondait également à la ligne de confrontation.

13 Nous pouvons avoir recours à la grande carte une dernière fois, si

14 possible.

15 Je pense que vous avez vu, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, la

16 manière dont l'Accusation entend présenter les incidents de tirs embusqués

17 et de pilonnage concernant chacun des incidents que nous souhaitons

18 prouver.

19 Je souhaite maintenant continuer en parlant du pilonnage, Monsieur le

20 Président, Messieurs les Juges. A ce stade, l'Accusation souhaite souligner

21 que la composante de pilonnage fait partie de la campagne générale des

22 attaques contre les civils avec les incidents de tireurs embusqués afin

23 d'intimider la population civile. Ceci n'est pas limité aux incidents

24 illustratifs énoncés dans la deuxième annexe de l'acte d'accusation

25 modifié, mais sera corroboré par des preuves plus générales d'attaques

26 délibérées, indiscriminées et disproportionnées contre les civils.

27 La campagne de pilonnage délibéré et indiscriminé contre la population

28 civile de Sarajevo a duré pendant environ un an et demi, et représente le

Page 291

1 fondement de la thèse de l'Accusation contre le général Dragomir Milosevic.

2 Les éléments de preuve montreront que les subordonnés de l'accusé, en

3 agissant conformément à ses connaissances et à ses ordres, ont effectué une

4 campagne de terreur sans fin et délibéré, campagne d'attaques contre les

5 civils, en mépris total de la nécessité militaire ou du principe de la

6 distinction, ce qui a eu pour résultat le meurtre ou la mutilation de plus

7 d'un millier de civils pendant la période de l'acte d'accusation. La

8 population civile était épuisée et démoralisée par le pilonnage incessant.

9 Leurs activités quotidiennes sont devenues des épreuves dangereuses à

10 effectuer seulement au prix d'un risque élevé pour la vie et le corps. Ont

11 été choisi comme cibles des endroits où se trouvaient des hôpitaux où

12 travaillaient les journalistes étrangers, des régions résidentielles au

13 sein de la ville et les civils des deux sexes et de tous les âges, y

14 compris les enfants et les personnes âgées appartenant à tous les groupes

15 ethniques et à tous les métiers étaient pris pour cibles.

16 L'Accusation va présenter les éléments de preuve s'agissant de chacun

17 de ces incidents pour montrer qu'il n'y avait pas de cible militaire à

18 proximité immédiate de l'objet du pilonnage, donc il n'y avait pas de

19 nécessité militaire. Personne n'était à l'abri des attaques d'artillerie et

20 de mortiers nulle part à Sarajevo. La population civile ne pouvait

21 s'estimer à l'abri nulle part.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Waespi, je pense que le

23 moment est importun pour procéder à une pause. Nous allons prendre une

24 pause de 20 minutes.

25 --- L'audience est suspendue à 15 heures 58.

26 --- L'audience est reprise à 16 heures 24.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur

28 Waespi.

Page 292

1 M. WAESPI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

2 Il n'y a pas d'exemple de la terreur absolue et de la destruction imposée

3 aux civils de Sarajevo plus explicite que les obus de mortier, les

4 incidents de tirs sur la place du marché le

5 28 août 1995. L'Accusation va montrer que lors de cette belle journée

6 d'été, la RSK a tiré un obus de mortier de 120-millimètres sur un marché

7 bondé et animé, vers midi en plein jour, tuant 43 civils et en blessant 75

8 autres. Le site du massacre se trouvait à l'opposé d'un autre lieu

9 semblable qui a fait l'objet d'une attaque d'obus de mortier, attaque

10 atroce menée par la RSK et qui s'est produite à l'extérieur du marché de

11 Markale le 5 février 1994. Markale II est maintenant devenu tristement

12 célèbre. C'était un incident non moins terrifiant et non moins destructeur

13 que celui que vous allez voir sur la séquence vidéo que je vais vous

14 montrer en fin de journée aujourd'hui, à la fin des déclarations

15 liminaires.

16 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, nous allons appeler des témoins

17 oculaires qui viendront témoigner à propos du carnage humain et de la

18 destruction qui a été décrite dans ces images et ces séquences vidéo. Je

19 vais également présenter des éléments de preuve qui montreront qu'à cette

20 époque-là il n'y avait pas de cible militaire au niveau de la place du

21 marché et que le nombre de personnes tuées et blessées était surtout des

22 civils. Il est important de noter que ceci a envoyé des ondes de choc dans

23 le monde entier. Le gouvernement et les Nations Unies ont été unanimes à

24 condamner immédiatement cet incident ainsi que les pertes en vies humaines

25 que cet incident a provoqué. En réalité, une fois que les enquêtes ont

26 établi que la RSK avait tiré plusieurs fois. Ceci a finalement été le

27 détonateur, et l'OTAN a demandé à pouvoir lancer des frappes aériennes sur

28 les positions militaires de la VRS à Pale et ailleurs.

Page 293

1 Messieurs les Juges, l'Accusation va citer à la barre des témoins experts

2 et des témoins de faits pour présenter des éléments de preuve qui

3 démontreront au-delà de tout doute raisonnable que les subordonnés de

4 l'accusé ont tiré des obus de 120-millimètres depuis la montagne de

5 Trebevic qui se situait sur les hauteurs au sud de la ville. Les

6 observateurs militaires des Nations Unies ainsi que des inspecteurs de

7 police locaux fourniront des détails sur les enquêtes en profondeur qui ont

8 été menées, établissant par là même l'angle de tir en descente et la

9 direction du tir. De façon encore plus importante, les observateurs

10 militaires des Nations Unies seront cités à la barre, parce que lorsqu'ils

11 étaient sur leur poste d'observation, ils ont pu établir de quelle

12 direction venaient les obus de mortier sur le territoire de l'ABiH. Ils

13 n'ont pas entendu de coups de feu d'obus de 120-millimètres à l'époque de

14 cette région-là. Le bruit provoqué par un tir est quelque chose qui aurait

15 dû être entendu par eux si ce tir provenait du territoire de l'ABiH. En

16 l'occurrence, Messieurs les Juges, il s'agissait d'une attaque délibérée

17 lancée par les membres de la RSK, ceci faisait partie d'une campagne de

18 terreur qui avait été orchestrée par l'accusé.

19 Si les attaques au mortier et à l'artillerie contre les civils n'étaient

20 pas suffisamment destructeur ou terrorisant, en avril 1995, pendant la

21 période où l'accusé était commandant, après une suite d'obus mortels et

22 d'attaques à l'artillerie dans la dernière partie de l'année 1994, la RSK,

23 sur l'ordre de l'accusé et d'après le mode opératoire de l'accusé, a

24 commencé à déployer et à lancer une arme plus sinistre appelée des bombes

25 aériennes modifiées. Ces armes avaient un très grand pouvoir destructeur,

26 Messieurs les Juges. Ces armes ont tué des civils en grand nombre et

27 provoqué des dégâts matériels très importants au niveau des bâtiments, des

28 maisons et des appartements. Leur déploiement a intensifié et déployé la

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1 terreur au sein de la population civile de Sarajevo.

2 L'Accusation va vous présenter par l'intermédiaire de témoins experts et de

3 témoins de faits des éléments de preuve émanant de la RSK, de l'ABiH et de

4 la police bosniaque qui démontreront que cette arme de fortune ne pouvait

5 pas être guidée. C'était un projectile qui avait été conçu pour être lancé

6 à partir d'un avion, mais qui, au lieu de cela, dans la plupart des cas,

7 était tiré à partir de l'arrière d'un véhicule équipé de roquettes. Un

8 membre du commandement du corps et de l'état-major du corps de l'accusé va

9 venir témoigner sur le manque de précision inhérente de ces bombes

10 aériennes modifiées. Ces bombes aériennes modifiées étaient incapables de

11 suivre un système de guidage. Dans ses moyens de preuve, dans ses moyens à

12 charge, l'Accusation va démontrer que même si l'intention n'avait pas été

13 de diriger ces armes contre des cibles militaires légitimes, ceci ne

14 pouvait pas être fait sans provoquer des pertes en vies humaines et des

15 pertes de civils très importantes, surtout compte tenu de l'environnement

16 et du contexte urbain dans une ville comme Sarajevo. Leur utilisation

17 quelle que soit la cible visée était contraire au droit international

18 humanitaire et illégale selon le principe de distinction qui aurait dû être

19 appliqué.

20 L'Accusation va présenter des éléments de preuve émanant du personnel de

21 l'ABiH, d'experts, de personnel de la RSK qui sont seuls en possession à la

22 RSK qui utilisaient ces bombes aériennes modifiées sur la ville de

23 Sarajevo.

24 A cet égard, l'Accusation présente et dit dans ses moyens que toutes

25 les fois que des bombes aériennes modifiées ont été utilisées ou ont

26 explosé dans la ville ou dans les quartiers de Hrasnica ou des quartiers

27 résidentiels ou à l'extérieur ou aux abords de la ville, au sud-ouest, les

28 tirs provenaient toujours des territoires détenus par la RSK qui était sous

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1 le contrôle effectif de l'accusé. Leur utilisation était connue de lui, ou

2 c'est lui qui avait donné directement l'ordre pour que ces dernières soient

3 utilisées.

4 A cet égard, l'Accusation fera venir des témoins experts pour montrer

5 que toutes les fois que ces bombes aériennes modifiées ont été lancées,

6 elles provoquaient ou faisaient un bruit qui était retentissant, qui

7 pouvait être intercepté très facilement. Si ces bombes avaient été tirées

8 depuis le territoire de l'ABiH et de leurs lignes de front, ceci n'aurait

9 pas pu être fait sans pour autant provoquer une réponse de la part des

10 observateurs des Nations Unies qui étaient là en très grand nombre ainsi

11 que d'autres représentants de la communauté internationale qui se

12 trouvaient dans la ville. Rien ne semble indiquer que ceci était le cas.

13 La campagne de pillage de l'accusé allait de ces bombes aériennes

14 modifiées, son système de guidage a commencé à proprement parler en avril

15 1995 et s'est intensifié au cours de l'été et des mois de mai, juin et

16 juillet 1995. Au cours de cette courte période, comme l'indiquent les

17 allégations à titre d'illustration dans l'acte d'accusation modifié, la RSK

18 a lancé des bombes aériennes modifiées à au moins 13 reprises, et ceci à

19 provoquer des pertes en vies humaines et a endommagé des bâtiments. Parmi

20 ces 13 incidents qui sont portés à l'annexe de l'acte d'accusation, quelque

21 104 pertes en vies humaines ont été provoquées par l'explosion de bombes

22 aériennes modifiées, avec des milliers d'autres personnes qui ont été

23 terrorisées à la suite de cela.

24 L'Accusation citera à la barre des témoins et des éléments de preuve

25 documentaires de l'époque qui montrent qu'au-delà de tout doute raisonnable

26 que l'accusé savait que des obus de mortier et des bombes aériennes

27 modifiées qui ne pouvaient pas être guidées étaient lancés contre des

28 cibles civiles. Des commandants haut gradés des Nations Unies et des

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1 représentants officiels, des civils viendront témoigner pour dire comment

2 ils ont transmis - sous une forme écrite ou verbalement - ils ont transmis

3 leurs protestations sans équivoque sur l'utilisation des bombes aériennes

4 et le pilonnage en général contre des cibles civiles. Un peu plus tard,

5 Messieurs les Juges, je vais vous montrer une telle protestation au moment

6 où le colonel Robert Meille de la FORPRONU a écrit à l'accusé le 1er juillet

7 1995, immédiatement après une attaque lancée par la RSK sur un bâtiment de

8 la télévision qui a tué une personne et qui en a blessé 28 autres.

9 Messieurs les Juges, je souhaite simplement vous faire remarquer que

10 cet incident, cette attaque de la tour de la télévision se trouve notre

11 annexe au point 15 dans l'acte d'accusation modifié. Dans cette lettre,

12 Messieurs les Juges, le colonel Meille a vigoureusement protesté contre une

13 attaque des tirs de mortier sur un quartier résidentiel d'Alapasino Polje,

14 qui a suivi une attaque contre le bâtiment des PTT, le quartier général de

15 la FORPRONU à Sarajevo. Dans cette protestation, le colonel Meille rappelle

16 à l'accusé et à ses subordonnés et je cite : "Ces obligations morales et

17 légales d'adhésion aux conventions de Genève..." citant plus

18 particulièrement l'article 85 du Protocole I des conventions de Genève en

19 ce qui concerne les attaques délibérées contre la population civile.

20 En réalité, l'accusé savait déjà ce que lui a rapporté le colonel

21 Meille. Sa connaissance venait de ses propres hommes comme ceci a pu être

22 mis en exergue dans, et je cite le titre "Rapport de situation sur le

23 terrain". Ceci a été rédigé par l'accusé et ce document est daté du 30 juin

24 1995, lorsque l'accusé fait l'éloge de l'héroïsme de ses unités et

25 mentionne plus particulièrement que lors d'un tel incident qui s'est

26 produit le 28 juin 1995, les unités de son artillerie ont tiré le bâtiment

27 de la télévision de la BiH. Messieurs les Juges, ceci est un exemple

28 éclatant de la connaissance dont disposait l'accusé sur l'activité de ses

Page 297

1 hommes, comme on peut s'y attendre de la part d'un commandant de corps.

2 L'Accusation va présenter ce document en temps utile.

3 L'Accusation va présenter des éléments de preuve pour indiquer que l'accusé

4 lui-même a donné l'ordre directement, que c'est lui qui a donné l'ordre de

5 se munir de ces bombes aériennes modifiées, de les déployer et de les

6 lancer. Ces armes lourdes étaient contrôlées à des échelons supérieurs. Il

7 est inconcevable de penser qu'une telle arme pouvait être lancée sans que

8 quelqu'un puisse en donner l'ordre, et c'était l'accusé, la structure de

9 commandement de la RSK, ou sans que l'accusé en ait connaissance.

10 Dans un exemple éclatant de ce type, l'accusé donne l'ordre de tirer

11 une bombe aérienne modifiée depuis Ilidza sur Hrasnica le

12 6 avril 1995. Ceci fait partie d'un des quatre documents que je vais vous

13 montrer dans quelques instants. Effectivement, Messieurs les Juges, le

14 lendemain, le 7 avril 1995, le lendemain du jour où l'accusé a donné

15 l'ordre, effectivement, une bombe aérienne modifiée a été tirée sur

16 Hrasnica, dans ce quartier résidentiel, tuant une personne et blessant

17 trois autres personnes, provoquant également des dégâts importants au

18 niveau du bâtiment.

19 Messieurs les Juges, il s'agit de l'incident qui se trouve référencer

20 dans nos annexes au numéro 6, pour lequel l'accusé est poursuivi dans

21 l'acte d'accusation au cours de ce procès. C'est un crime pour lequel

22 l'accusé a donné l'ordre directement puisqu'il était commandant du Corps de

23 la RSK. L'Accusation allègue que ceci a été tiré depuis le territoire

24 contrôlé par la RSK à Ilidza, la zone de responsabilité de la brigade

25 auquel l'accusé avait envoyé l'ordre le jour précédent.

26 Messieurs les Juges, j'aimerais maintenant vous montrer quatre documents -

27 j'ai parlé de cinq, mais nous n'allons nous en tenir qu'à quatre - pour que

28 vous puissiez avoir un aperçu des éléments de preuve que l'Accusation a

Page 298

1 l'intention de montrer au cours de ce procès. Tous ces documents seront

2 présentés par différents moyens, par des témoins viva voce ou peut-être des

3 documents fournis par les témoins eux-mêmes, comme on le dit quelquefois.

4 Je vais maintenant parler des premiers documents, les documents sur la

5 liste 65 ter et le document 1969. C'est un document qui est daté du 12 août

6 1994, dont l'auteur est l'accusé. Vous constaterez par vous-même à l'écran,

7 vous voyez ici l'original du document en B/C/S, un document de deux pages.

8 Je vais parcourir ce document avec vous, évoquer avec vous la version

9 anglaise.

10 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, il s'agit ici du troisième jour

11 après lequel l'accusé avait repris le commandement du corps. Il donne cet

12 ordre qui est particulièrement pertinent dans cette affaire. L'accusé

13 prépare au combat des unités triées sur le volet. La raison, Messieurs les

14 Juges, est évidente, comme vous pouvez le constater à partir du paragraphe

15 1 de cet ordre : Toute attaque de la zone encerclée des unités de l'ABiH

16 encerclée doit être empêchée.

17 L'élément important, Messieurs les Juges, concernant cet ordre est - ce qui

18 suit au paragraphe 1 - le fait que l'accusé a la responsabilité et assure

19 le commandement général des forces serbes de Bosnie autour de Sarajevo. Son

20 ordre est adressé non seulement à toutes les unités, à toutes les

21 véritables unités militaires de la RSK sur les positions de la région où

22 elles sont déployées autour de Sarajevo, mais également, je cite : "Les

23 unités du MUP et les personnes qui ont une obligation de travail." Ceci

24 concorde, Messieurs les Juges, avec la présentation des moyens de

25 l'Accusation telle que cela figure dans l'acte d'accusation modifié, à

26 savoir que l'accusé exerçait un contrôle effectif sur toutes les forces

27 serbes de Bosnie autour de Sarajevo.

28 Au paragraphe 5, de surcroît, Messieurs les Juges, ceci corrobore encore

Page 299

1 davantage ce point, lorsque l'accusé donne l'ordre de --

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Waespi, j'ai remarqué que

3 le but de donner cet ordre de préparation au combat était un ordre à titre

4 préventif, n'est-ce pas, mais vous citez un autre ordre pour une autre

5 raison ?

6 M. WAESPI : [interprétation] Oui, tout à fait. Je comprends bien. C'est

7 simplement pour démontrer que l'accusé pouvait, en réalité --

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

9 M. WAESPI : [interprétation] -- donner des ordres aux forces du MUP, quel

10 que soit l'objectif.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

12 M. WAESPI : [interprétation] Au paragraphe 5, Monsieur le Président, de

13 surcroît, ceci corrobore encore davantage ce point, car l'accusé donne

14 l'ordre qu'il y avait les unités de la RSK qui étaient engagées dans cette

15 opération, mais ainsi que le MUP, la police, qu'ils étaient être engagés

16 sur les ordres de la RSK. Monsieur le Président, il s'agit encore du même

17 argument que celui que j'ai présenté précédemment. Cela dit en passant, je

18 souhaite que vous remarquiez que l'accusé a donné l'ordre à ses

19 subordonnés. Il leur demande, et je cite : "De préparer leurs forces pour

20 qu'ils bloquent les unités des Nations Unies."

21 D'autres caractéristiques sont intéressantes au niveau de ce document,

22 quelque chose que je porte à votre attention, hormis le fait que ce

23 document parle d'un certain nombre d'unités placées sous le commandement

24 général de l'accusé.

25 Au paragraphe 7, ce paragraphe illustre un point déjà évoqué un peu plus

26 tôt, à savoir que le commandement de la RSK ménageait leurs ressources en

27 matière d'artillerie de façon peu dispendieuse et avait une marge de

28 manœuvre peu importante : "Il faut tirer d'après -- seulement lorsque les

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1 ordres sont donnés par le poste de commandement de Sarajevo Romanija."

2 Cet ordre au paragraphe 9 insiste également sur un point qui semble évident

3 lorsqu'on parle de doctrine militaire. Les rapports sur les mesures

4 entreprises et sur l'évolution de la situation dans les régions citées

5 doivent être faits de façon régulière et en cas exceptionnel."

6 Cet ordre indique que l'accusé gère son commandement à la manière dont il a

7 fait dans les 15 mois qui ont suivi et qui sont évoqués à l'acte

8 d'accusation : Un commandant de corps qui souhaite véritablement garder

9 tous ces hommes sous son contrôle. L'accusé a donné cet ordre le premier

10 jour, dès qu'il a assuré son poste de commandement.

11 Je souhaite maintenant parler de l'accord pour faire cesser les tirs

12 embusqués. Avec M. Harland, qui a pris part à la cérémonie, qui a signé le

13 document, cet homme sera notre premier témoin. Je souhaite maintenant vous

14 parler du document suivant qui se trouve sur la liste 65 ter, numéro 2105,

15 daté du 6 novembre 1995 [comme interprété], un document où on montre que

16 l'ordre a été donné par M. Mladic. Nous allons peut-être montrer la version

17 en B/C/S en premier.

18 Monsieur le Président, maintenant nous avons l'original. Il s'agit

19 d'un document qui s'adresse au commandant de la RSK, du commandement du

20 corps de l'accusé et est intitulé : "Opération de combat dans la zone

21 d'exclusion des armes lourdes." Ce qui signifie comme suit, donc je suggère

22 que vous le lisiez en entier, parce que je pense que c'est un ordre qui est

23 très important dans notre thèse. Voici ce que Mladic a écrit : "J'ai été

24 informé que les dirigeants des autorités locales serbes de Sarajevo ont

25 retrouvé le commandant du Corps de la RSK à Vogosca le 5 novembre 1994, et

26 ont adopté ensemble la décision de soumettre la FORPRONU à un blocus, de

27 capturer ces armes lourdes, donc armes lourdes sous contrôle de la

28 FORPRONU, et de les utiliser pour tirer sur des cibles civiles dans la

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1 ville de Sarajevo."

2 Mladic ensuite poursuit. Là, je cite à nouveau : "Gardant à l'esprit qu'une

3 décision de ce type pouvait avoir des effets extrêmement négatifs sur les

4 Serbes et que ces opérations de combat sont planifiées sans que je sois mis

5 au courant, j'ordonne ce qui suit…" et l'ordre a quatre points. Vous savez

6 que Mladic est le commandant de la VRS et le supérieur hiérarchique

7 immédiat de l'accusé.

8 Voici ce qu'il ordonne : "1. J'interdis toute activité visant à soumettre

9 la FORPRONU à un blocus et à saisir leurs armes lourdes sans que j'en ai

10 donné l'ordre spécifique ou l'approbation spécifique.

11 "2. J'interdis la planification et l'exécution de toute opération de combat

12 offensif sans approbation de l'état-major direct de l'armée de la Republika

13 Srpska, et j'interdis la mise en œuvre aussi de toute opération planifiée

14 sans accord obtenu de la part de cet état-major."

15 Troisièmement, qui est extrêmement important dans notre thèse : "J'interdis

16 tout tir depuis des armes de gros calibre visant des cibles civiles à

17 Sarajevo, tir sans mon approbation."

18 Quatrièmement, et je cite à nouveau : "Le commandant du Corps de la RSK et

19 ses subordonnés immédiats sont responsables devant moi de la mise en œuvre

20 de cet ordre. Le commandant de la RSK devra en informer ses subordonnés

21 immédiatement."

22 Messieurs les Juges, il s'agit quand même d'un document tout à fait

23 surprenant, car non seulement il montre que le commandement de la RSK était

24 bel et bien au courant du fait que des cibles civiles étaient visés dans

25 leur zone de responsabilité, mais ce document, en fait, est un aveu, l'aveu

26 que l'accusé, de concert avec les autorités locales, ont délibérément

27 décidé de cibler des civils. L'Accusation affirme qu'il s'agit d'une

28 décision faite par l'accusé et prise par l'accusé, étant donné qu'elle a

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1 une conséquence sur ses armes lourdes; et de ce fait elle n'aurait pas pu

2 émaner uniquement des autorités locales. Pour ce qui est des attaques

3 planifiées sur les civils, elles devaient être exécutées à l'aide d'armes

4 lourdes volées à la FORPRONU, FORPRONU dont la tâche et la mission étaient

5 justement d'éviter que l'on pilonne et que l'on ne tire sur des civils.

6 Passons maintenant au document suivant, toujours un document de la liste 65

7 ter, le 2279; en date du 6 avril 1995; l'auteur est toujours l'accusé

8 Dragomir Milosevic. C'est un document qui est envoyé à la Brigade

9 d'infanterie d'Ilidza, donc une des unités subordonnées de Dragomir

10 Milosevic. Je cite ce qui est écrit sur ce document : "Afin d'écraser

11 l'ennemi afin de les avertir une bonne fois pour toutes qu'ils n'ont qu'une

12 solution, c'est d'accepter nos conditions, j'ordonne ce qui suit :

13 "1. La Brigade d'Ilidza va immédiatement préparer un lanceur muni d'une

14 bombe aérienne et va transporter cette bombe pour procéder au lancement. La

15 cible la plus utile doit être choisie dans les quartiers de Hrasnica ou de

16 Sokolovic, car il s'agit des quartiers où l'on pourra infliger le plus

17 grand nombre de victimes et les plus sérieux dégâts matériels.

18 "Informez-moi personnellement de votre état de préparation pour savoir

19 quand cette mission peut être mise en œuvre."

20 Il s'agit d'un ordre qui émane du commandant du corps, l'accusé Dragomir

21 Milosevic.

22 Le document, d'ailleurs, parle de lui-même, puisque l'accusé ordonne à ses

23 subordonnés d'employer la pire des armes - une bombe aérienne modifiée - et

24 son but est d'infliger le plus grand nombre de victimes et de faire le plus

25 de dégâts possible.

26 Comme nous l'avons dit précédemment, l'Accusation fait valoir que les

27 bombes aériennes qui sont conçues pour être larguées depuis des aéronefs

28 ont été modifiées pour qu'elles puissent être lancées depuis le sol. Or,

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1 ces armes, Messieurs les Juges, ne possèdent pas de système de guidage,

2 donc on ne peut pas viser quoi que ce soit avec ces armes. De ce fait,

3 elles sont tout à fait inappropriées dans le cadre de zones urbaines

4 densément peuplées, alors que c'est justement sur ce type de cible que

5 l'accusé a ordonné que ses subordonnés les déploient; les quartiers de

6 Hrasnica et de Sokolovic, qui sont des quartiers résidentiels.

7 L'Accusation vous montrera des preuves de la dévastation qui a été commise

8 suite au largage de ces bombes sur les populations civiles de Sarajevo.

9 Maintenant, je voudrais conclure avec l'une des lettres de protestation qui

10 a été envoyée directement à l'accusé. Je les ai déjà abordées précédemment

11 d'ailleurs. C'est un document qui date du

12 30 juin 1995, qui a été écrit par la FORPRONU. On le voit d'ailleurs dans

13 l'en-tête. Le numéro 65 ter est le numéro 2 491. C'est un document qui a

14 été rédigé par le commandant de la FORPRONU à Sarajevo, le colonel Robert

15 Meille, qui était le militaire le plus haut gradé à Sarajevo travaillant

16 pour les Nations Unies à l'époque. Voilà ce qu'il dit à Dragomir Milosevic,

17 et je cite : "Le 28 et le

18 29 juin 1995, les forces serbes de Bosnie du RSK ont lancé plusieurs

19 attaques sur des cibles civiles dans la ville de Sarajevo, en utilisant des

20 bombes extrêmement puissantes ainsi que des tirs d'artillerie lourdes." La

21 liste nous donne trois différentes cibles qui ont été atteintes et qui se

22 trouvent toutes dans des zones résidentielles.

23 La lettre se poursuit, et je cite : "Cette escalade de tirs

24 irresponsables et irréfléchis s'est poursuivie dans la soirée du

25 29 juin quand trois projectiles à haute vélocité ont atteint le bâtiment

26 des PTT, qui sert de QG au commandant du secteur de Sarajevo."

27 Cela, il poursuit. Je cite toujours : "La gravité des événements des 48

28 heures passées m'oblige à vous rappeler, à vous et à vos officiers, de vos

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1 obligations morales et légales qui sont d'adhérer à la convention de Genève

2 ainsi que de vous rappeler quels étaient les accords et assurances qui ont

3 été donnés aux forces de maintien de la paix. Le Protocole I de la

4 convention de Genève stipule, particulièrement dans sa section 2, article

5 85, que toute attaque délibérée contre la population civile constitue une

6 violation grave de ladite convention, et que leurs auteurs sont

7 responsables pénalement devant une cour pénale internationale."

8 En conclusion, il est écrit ce qui suit, et je cite : "Je proteste

9 fermement contre ces bombardements exécutés sur vos ordres, et j'exige que

10 toutes les attaques directées [phon] soient contre la population civile ou

11 contre la FORPRONU cessent immédiatement."

12 Je n'ai pas de commentaire à faire là-dessus, Monsieur le Président. Je ne

13 peux que dire que cette lettre a été rédigée à la fois en anglais et en

14 B/C/S ou en serbe, langue que l'accusé comprend très, très bien.

15 Maintenant, parlons de quelques points portant sur les thèses de la

16 Défense. Nous n'avons reçu, certes, qu'un mémoire préalable au procès assez

17 bref, mais il y a quand même quelques points qui ont été soulevés et dont

18 j'aimerais parler.

19 Tout d'abord, l'Accusation souligne qu'à tout moment, la RSK et l'accusé se

20 devaient de respecter les principes bien connus de conduite des hostilités

21 et surtout ce soc inaliénable du droit humanitaire international qui

22 stipule qu'en aucun cas les civils ne doivent être l'objet d'attaque. Nous

23 avons justement vu une lettre du colonel Meille qui rappelle cela

24 d'ailleurs. Cette obligation, Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

25 n'est pas modifiée ou annulée si l'ABiH, en se défendant et en défendant

26 Sarajevo, aurait éventuellement perpétré de tels faits interdits, comme le

27 tir de mortiers ou d'artillerie lourde sur les Serbes de Bosnie au cours

28 desquels des civils auraient pu être atteints. Il ne s'agit pas ici de se

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1 défendre œil ou œil, dent pour dent. L'Accusation, au contraire, accepte

2 qu'en effet l'ABiH disposait de snippers et disposait de beaucoup d'armes

3 lourdes, surtout de mortiers. Il y avait, en fait, un conflit en cours à

4 Sarajevo, un véritable conflit légitime. Cela dit, l'Accusation va montrer

5 à l'aide de preuves que l'ABiH n'a jamais tiré d'obus depuis la ligne de

6 confrontation sur leur propre peuple, donc sur les personnes que l'ABiH

7 était censée défendre.

8 L'Accusation concède aussi que parfois l'ABiH a procédé à des tirs de

9 mortiers depuis l'enceinte de l'hôpital de Kosevo. Cela dit, Monsieur le

10 Président, Messieurs les Juges, ceci n'aurait autorisé en aucun cas

11 l'accusé de riposter en envoyant une pluie d'obus sur l'hôpital. En règle

12 générale, quand on utilise des hôpitaux pour exécuter des opérations

13 militaires, ces hôpitaux perdent leur protection qui leur est due au titre

14 du droit international, mais uniquement après que l'on en ait été notifiés

15 et après une période de temps suffisante pour cesser les activités

16 militaires. Une fois l'attaque terminée, l'hôpital reprend son statut et

17 redevient une cible civile. En ce qui concerne de toute façon l'hôpital de

18 Kosevo, c'est un grand hôpital où il y a beaucoup de bâtiments dans une

19 grande enceinte. Donc, si des mortiers mobiles auraient été éventuellement

20 utilisés depuis certains emplacements très limités de cet hôpital, ceci

21 n'aurait autorisé en aucun cas la RSK à pilonner la totalité de l'hôpital,

22 puisque dans cet hôpital tout en entier le risque d'infliger des pertes

23 civiles aurait largement dépassé tout avantage militaire éventuellement

24 obtenu.

25 Dans le mémoire préalable au procès de la Défense, l'accusé semble soulever

26 comme défense le fait qu'il aurait un alibi en déclarant que du 10 août

27 1995 jusqu'au 15 septembre 1995, 45 jours, il n'était pas présent sur le

28 théâtre de Sarajevo, mais se trouvait à Belgrade pour des traitements

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1 médicaux. Même si l'Accusation acceptait ces faits, nous ne voyons

2 absolument pas comment cela pourrait avoir des conséquences sur la

3 culpabilité de l'accusé. De plus, nous n'avons vu aucune preuve de cette

4 absence jusqu'à présent.

5 Cette affaire ne porte pas sur quelques crimes qui auraient été commis au

6 cours d'un mois, mais au cours d'une campagne de pilonnage et de tirs

7 embusqués délibérés qui s'est tenue pendant une période prolongée, au cours

8 de laquelle l'accusé a créé toutes les conditions nécessaires pour que ces

9 crimes soient commis en donnant directement l'ordre, comme nous l'avons vu

10 d'ailleurs, d'attaquer des civils et en oubliant d'agir ou de prendre des

11 mesures quand des crimes avaient été commis. Quand il aurait éventuellement

12 quitté le théâtre de Sarajevo pour aller à Belgrade, comme il l'allègue,

13 Sarajevo était devenue une zone de non-droit. Etant donné que l'accusé

14 avait permis à ses subordonnés de tirer et de pilonner les civils, tous

15 crimes commis au cours de son absence éventuelle, surtout l'attaque du

16 marché de Sarajevo du 28 août 1995, sont la conséquence directe, à la fois

17 de ses actions et aussi de son manque d'actions. Ensuite, quand l'accusé

18 est revenu, juste après les frappes de l'OTAN qui ont eu lieu suite à

19 l'attaque du marché, l'Accusation montrera que l'accusé n'a pris aucune

20 mesure pour enquêter sur ce qui s'était passé ou pour punir les auteurs

21 éventuels de ce crime.

22 L'Accusation avance que l'accusé est pénalement responsable

23 individuellement d'avoir ordonné et planifié les crimes qui sont contenus

24 dans l'acte d'accusation modifié. Il a mis en œuvre et a poursuivi la

25 campagne de bombardement et de tirs embusqués de civils dans le but de

26 terroriser les civils de Sarajevo.

27 L'Accusation fait valoir que l'accusé a hérité d'une stratégie

28 préexistante qui consistait en effet à délibérément tirer sur les civils et

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1 les pilonner. Certes, il a hérité de cette stratégie, mais elle ne fait que

2 croître et embellir sous les ordres du commandant Stanislav Galic et,

3 ensuite une fois qu'il a pris le poste de celui-ci, par l'accusé Dragomir

4 Milosevic.

5 Au cours du commandement de Stanislav Galic, nous savons que l'accusé

6 était commandant de brigade et chef d'état-major au sein de la RSK. En tant

7 que chef d'état-major l'Accusation va montrer que, par même de ce poste, il

8 était au courant de toutes les décisions et de toutes les questions portant

9 sur les opérations militaires et sur le commandement même du corps.

10 L'accusé, quand il a pris le commandement le 10 août 1994, connaissait

11 parfaitement la campagne délibérée qui était menée contre la population

12 civile.

13 Au travers des ordres directs qu'il a donnés au travers de la chaîne

14 de commandement de ce corps militaire discipliné et professionnel, l'accusé

15 a poursuivi la campagne d'attaques menée contre la population civile. Les

16 caractéristiques de la campagne ont été toujours les mêmes, mais avec

17 l'introduction des bombes aériennes modifiées au sein de l'arsenal de la

18 RSK, cette campagne est devenue encore plus destructive et encore plus

19 terrorisante.

20 L'Accusation présentera de nombreuses preuves documentaires

21 présentant des ordres donnés directement par l'accusé et portant sur

22 l'obtention, le déploiement et le lancement de ce type de bombes aériennes

23 modifiées qui prouveront, au-delà de tout doute raisonnable, que c'était

24 l'accusé qui était aux commandes pour ce qui de l'utilisation de ces armes.

25 Dans l'un de ces ordres d'ailleurs que nous allons vous montrer au cours de

26 ce procès, l'accusé ordonne que 50 bombes aériennes soient déployées.

27 L'Accusation montrera que l'accusé a bel et bien planifié le tir de

28 ces armes lourdes et ce type d'autres armes lourdes ainsi que le tir de

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1 petites armes dirigées contre des cibles civiles.

2 Même en l'absence d'autres ordres écrits dirigeant la campagne à l'encontre

3 des civils, il sera clair, sur la base des éléments de preuve, que la

4 campagne d'attaques contre les civils de Sarajevo s'est poursuivie même

5 quand l'accord interdisant les tirs embusqués et les protestations

6 nombreuses de la part de l'ONU et de la communauté internationale. Un

7 commandant militaire de l'ONU va être cité à la barre et déposera au sujet

8 du fait que pendant la période de six mois, il a protesté auprès des

9 commandants haut placés de la VRS et de l'accusé, 50 fois au sujet du

10 pilonnage et des tirs embusqués contre les civils. Les éléments de preuve

11 indiquant le caractère systématique et l'échelle de la campagne seront

12 évidents par le biais des dépositions des victimes qui ont survécu, des

13 observateurs de l'ONU et des témoins oculaires qui établiront de façon

14 indirecte les preuves que les civils ont été la cible délibérée et que

15 l'accusé exerçait le contrôle effectif de ces effectifs d'artillerie et

16 d'infanterie, en particulier les bombes aériennes modifiées.

17 L'Accusation prouvera que le fait de cibler des civils par le biais des

18 tirs embusqués et du pilonnage n'aurait pas pu se produire pendant une

19 période aussi prolongée de manière aussi systématique à moins que l'accusé

20 ne l'ait ordonné.

21 Comme nous l'avons déjà dit, l'Accusation versera au dossier les

22 éléments de preuve indiquant que l'accusé a été averti à de nombreuses

23 reprises au sujet des pertes civiles qui étaient le résultat des tirs

24 embusqués et du pilonnage. Toutefois, ceux-ci se sont poursuivis pendant

25 les 15 mois du mandat de l'accusé. L'accusé aurait pu prendre des mesures

26 visant à les empêcher ou à discipliner les soldats qui ont perpétré ces

27 actes. Cependant, il ne l'a pas fait, ce qui pousse à la seule conclusion

28 indiquant qu'il ordonnait directement cette campagne.

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1 Dragomir Milosevic avait le contrôle effectif, ceci sera prouvé de

2 manière incontestable. L'Accusation montrera qu'au moment où il a pris le

3 commandement du RSK, il a imposé une discipline de fer au sein du corps. Il

4 donnait des ordres à ses subordonnés afin qu'ils préparent des positions de

5 tir, afin qu'ils observent et surveillent les composantes de tirs, puis en

6 organisant des réunions régulières avec ses officiers de brigade. Il avait

7 la capacité matérielle lui permettant d'empêcher que les crimes soient

8 commis et afin de lancer des enquêtes et de punir les auteurs de crimes.

9 Les éléments de preuve vont être présentés pour indiquer qu'effectivement

10 il avait initié des mesures disciplinaires à l'encontre de ses soldats

11 lorsque un soldat s'est rendu coupable de désertion. Cependant, les

12 éléments de preuve seront présentés indiquant qu'il n'y a pas eu de

13 poursuite militaire du personnel responsable des crimes de guerre, des

14 meurtres et d'autres crimes contenus dans l'acte d'accusation modifié.

15 Pour conclure, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, en tant

16 que commandant de corps, le général Milosevic avait l'un des postes

17 militaires les plus responsables au sein de l'armée de la Republika Srpska.

18 Lorsqu'il a pris le commandement du RSK en

19 août 1994, il a hérité d'une campagne préexistante qui ciblait les civils,

20 ce qu'il savait en tant que chef d'état-major à l'époque. Pendant son

21 mandat de commandant de corps d'armée, l'accusé n'a non seulement pas

22 empêché la campagne d'attaques à l'encontre des civils, mais il a omis de

23 punir les auteurs de crimes. Au contraire, il a continué la campagne de

24 terreur à l'encontre de la ville de Sarajevo et de sa population.

25 Comme je l'ai déjà dit, Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

26 je souhaite conclure la déclaration liminaire de l'Accusation en vous

27 montrant quelques vidéos contemporaines. Je vais vous clarifier, comme je

28 l'ai déjà fait, la thèse de l'Accusation est que la campagne de pilonnage

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1 et de tirs embusqués à l'encontre de la population civile de Sarajevo est

2 une activité continue qui a commencé en été 1992 et qui s'est étalée sur

3 une période de plus de 44 mois jusqu'en hiver 1995. Par conséquent,

4 l'Accusation présentera les éléments de preuve portant sur l'ensemble de la

5 campagne, non pas seulement la période de l'acte d'accusation, ce qui

6 correspond au mandat de l'accusé de commandant du RSK. Effectivement, le

7 collage des séquences vidéo va précéder la période de l'acte d'accusation.

8 Les raisons sont triples.

9 Tout d'abord, la thèse de l'Accusation est que l'accusé avait hérité

10 d'une stratégie préexistante du pilonnage et des tirs embusqués à

11 l'encontre des civils délibérés. Deuxièmement, les caractéristiques de la

12 campagne, avant et pendant son mandat, sont au fond identiques.

13 Troisièmement, je souhaite que l'on place les actions de l'accusé dans leur

14 contexte historique approprié. Quatrièmement, en raison de ses positions

15 préalables, l'accusé était au courant de la campagne qu était en cours et

16 dont il avait hérité. Mais je répète, l'accusé est tenu pour responsable

17 seulement s'agissant de la période pendant laquelle il était le commandant

18 du RSK.

19 Ces séquences vidéo, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, vous

20 fourniront une impression en temps réel de la situation. Les premières

21 séquences vidéo datent de la période d'avant l'acte d'accusation. Cela

22 commence par les images de Sarajevo d'avant la guerre, ensuite nous avons

23 les images concernant le début de la campagne, période pendant laquelle

24 l'accusé détenait déjà des postes de responsabilité au sein du RSK. Vous

25 allez voir les positions avantageuses, fabuleuses des forces du RSK

26 dominant la ville de Sarajevo qui était à la merci des tireurs embusqués et

27 des canonniers. Toutes les séquences vidéo concernant la guerre vont vous

28 illustrer la manière dont la vie était affectée par les activités des

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1 tireurs embusqués et du pilonnage. Par exemple, vous verrez comment les

2 trams ont été touchés ou comment les enfants étaient victimes de la

3 terreur.

4 Puis, vous allez voir une séquence concernant le massacre de Markale

5 II qui a eu lieu le 28 août 1995, qui a coûté un nombre si élevé de vies

6 humaines. La dernière séquence vidéo concernera l'incident numéro 5 contenu

7 en annexe. Il s'agit du crime qui a eu lieu le 14 novembre 1994 devant le

8 musée de l'histoire naturelle. Cet incident est celui dont j'ai parlé en

9 détail déjà aujourd'hui, lorsque vous avez vu Mme Sokolovic qui parlait

10 avec les enquêteurs.

11 Maintenant, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, vous allez

12 voir à quoi la scène ressemblait le jour même de l'événement, quelques

13 secondes seulement après que l'enfant de 7 ans, Nermin, a été touché par

14 balle tirée par un tireur embusqué. L'Accusation souhaite attirer votre

15 attention notamment sur les efforts de sauvetage qui étaient en cours au

16 moment où la séquence a été filmée.

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Tapuskovic.

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Est-ce que je peux prendre la parole

20 momentanément. Je n'ai rien contre le visionnement de ces séquences vidéo,

21 mais il y a quelques jours nous avons eu une rencontre avec l'Accusation.

22 Elle m'a demandé d'accepter que l'on verse au dossier ces séquences vidéo

23 en tant que pièces à conviction. J'ai considéré que ceci n'était pas

24 acceptable en raison du fait qu'il s'agissait d'événements qui ont eu lieu

25 en 1992 et 1993. Je pense que s'agissant de ce film, avant que la Chambre

26 ne décide de le verser au dossier en tant que pièce à conviction, il ne

27 faudrait pas le montrer, notamment compte tenu du fait que l'Accusation

28 elle-même indique que l'accusé, Dragomir Milosevic, ne peut pas être tenu

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1 pour responsable de ce qui a précédé la période de l'acte d'accusation.

2 Malgré tout ce qui a été dit par l'Accusation, je considère qu'étant donné

3 que ces séquences n'ont pas été versées au dossier en tant que pièces à

4 conviction, il ne faudrait pas permettre à l'Accusation de les présenter

5 dans ce prétoire et je soulève une objection face à cela.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Waespi.

7 M. WAESPI : [interprétation] Oui. J'accepte ce commentaire, mais il s'agit

8 là d'une déclaration liminaire. Il ne s'agit pas d'éléments de preuve. Je

9 ne fais que présenter un squelette des éléments de preuve qui vont être

10 présentés par l'Accusation. J'ai fait référence à un certain nombre de

11 documents et à un certain nombre de séquences vidéo. Il ne s'agit que des

12 indices pour le moment. C'est seulement à partir de lundi, lorsque le

13 procès commencera, que l'on verra dans ce dossier des éléments de preuve.

14 Il ne s'agit pas maintenant des éléments de preuve.

15 Me Tapuskovic peut contester ces séquences vidéo au moment où l'on

16 souhaitera les verser au dossier par le biais des témoins. Il peut dire

17 qu'il ne s'agit pas des éléments précis, conformes à la vérité ou

18 pertinents. Il pourra le faire à ce moment-là, mais pour le moment ils

19 n'ont pas le statut d'éléments de preuve.

20 [La Chambre de première instance se concerte]

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, j'ai entendu

22 votre argument, mais d'après notre pratique nous permettons une certaine

23 latitude lors de la déclaration liminaire, lors de laquelle il est possible

24 de présenter les documents qui ne sont pas des pièces à conviction. Donc,

25 vous pouvez nous présenter la vidéo.

26 M. WAESPI : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

27 [Diffusion de la cassette vidéo]

28 M. WAESPI : [interprétation] Peut-être nous pourrions baisser les lumières

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1 dans ce prétoire pour mieux voir.

2 [Diffusion de la cassette vidéo]

3 M. WAESPI : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

4 l'Accusation est convaincue que lorsque tous les éléments de preuve seront

5 versés au dossier, la Chambre de première instance rendra le seul jugement

6 justifié par les éléments de preuve présentés, à savoir que l'accusé

7 Dragomir Milosevic est coupable au-delà de tout doute raisonnable de tous

8 les chefs contenus dans l'acte d'accusation.

9 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, ceci marque la fin de la

10 déclaration liminaire de l'Accusation. Merci.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur

12 Waespi.

13 Maître Tapuskovic, si j'ai bien compris, vous ne souhaitez pas faire

14 votre déclaration liminaire à présent. Pourriez-vous me confirmez cela ?

15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, je vous le confirme. Je

16 considère que nous allons faire cela seulement avant la phase de la

17 procédure pendant laquelle nous allons présenter les moyens à décharge. Je

18 souhaite vous annoncer également que l'accusé, Dragomir Milosevic ne

19 devrait pas avoir recours au droit prévu par le Règlement qui lui

20 permettrait éventuellement de faire une déclaration dans ce prétoire

21 aujourd'hui.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

23 Maître Tapuskovic, dans ce cas-là, je vais vous poser la question de savoir

24 quelle est votre position au sujet de la deuxième requête en vertu de

25 l'article 65 ter déposée par l'Accusation concernant le témoin qui est

26 prévu pour la semaine prochaine. Est-ce que vous vous en souvenez, nous en

27 avons parlé hier ? En fait, j'aurais dû dire la requête en vertu de

28 l'article 92 ter. Nous avons parlé de deux requêtes, mais le délai dans

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1 lequel vous devez répondre n'a pas encore expiré, or, ces témoins doivent

2 déposer dès le début de la semaine prochaine. S'agissant d'un témoin, vous

3 avez dit qu'il n'y a pas de problème. Je pense que vous avez dit

4 qu'aujourd'hui vous alliez nous faire savoir quelle était votre position

5 concernant le deuxième témoin.

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il s'agit du Témoin Fortin.

7 M. WAESPI : [interprétation] Je pense, Monsieur le Président, que

8 s'agissant du Témoin Fortin, Me Tapuskovic a dit qu'il était d'accord et

9 vous allez lui poser une question au sujet de M. David Harland.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Harland.

11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] La dernière fois, j'ai dit que je ne

12 m'opposais pas à ce que celui-ci soit interrogé. Si j'ai bien compris,

13 c'était le premier témoin, le premier témoin qui devait déposer, c'est le

14 Témoin 56, n'est-ce pas ?

15 M. WAESPI : [interprétation] Oui, c'est exact, mais la question concerne le

16 fait que récemment nous avons déposé une requête visant à ce que l'on verse

17 au dossier certaines parties de sa déposition dans l'affaire Slobodan

18 Milosevic conformément à l'article 92 ter. Notre interrogatoire principal

19 sera relativement bref et si la Défense est d'accord et si telle est la

20 décision prise par la Chambre de première instance, l'interrogatoire

21 principal sera effectivement bref. Si la requête est rejetée, nous devrons

22 l'interroger pendant assez longtemps. C'est cela la question. M. Harland

23 viendra déposer ici lundi. La question est de savoir si l'Accusation peut

24 l'interroger par le biais de l'article 92 ter.

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

26 Juges, je pense que la dernière fois il y a eu un malentendu ici, car hier

27 j'ai immédiatement répondu à la Chambre de première instance disant que je

28 suis absolument d'accord pour que cette déposition soit versée au dossier

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1 conformément à

2 l'article 92 ter. Visiblement, il y a un malentendu. J'ai dit que j'étais

3 d'accord, donc je ne sais pas.

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Maître Tapuskovic. J'aurais

5 dû me fier à mes souvenirs qui sont conformes à ce que vous venez de dire.

6 Très bien, dans ce cas-là, nous sommes prêts à commencer le travail lundi,

7 la semaine prochaine.

8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'ai pourtant une question de nature

9 procédurale, ou plutôt technique. La dernière fois, vous avez dit très

10 clairement que si nous avions des documents ou des éléments de preuve qui

11 excèdent 100 pages, que dans ce cas-là, nous devrions remettre tout ce qui

12 allait faire l'objet de notre interrogatoire ou contre-interrogatoire 72

13 heures en avance.

14 Justement, s'agissant de l'interrogatoire du témoin Harland, j'ai

15 deux documents, par exemple, ou deux points, deux éléments que je souhaite

16 verser au dossier. D'un côté, sa déposition de 1997, 1998 qui a fait

17 l'objet des questions et concernant lesquelles je n'aurai pas beaucoup de

18 questions, qui contient 25 pages. Puis, j'ai un autre document, un rapport

19 de la FORPRONU qui fait certainement partie de la liste des éléments de

20 preuve en vertu de l'article 65 ter qui contient 55 pages. Or, seules

21 quelques phrases m'intéressent. Compte tenu du fait que ceci fait partie

22 des éléments présentés par l'Accusation, conformément aux articles portant

23 sur la présentation des éléments de preuve, est-ce que cela veut dire que

24 si je me réfère à ces deux documents qui ont presque 100 pages, je ne peux

25 pratiquement utiliser d'autres documents ou est-ce que l'approche est

26 différente ? Excusez-moi, mais je ne connais pas très bien comment le

27 système électronique fonctionne. Car si tel est le cas, je suis

28 pratiquement totalement paralysé dans ce cas-là.

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1 [La Chambre de première instance se concerte]

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous êtes en mesure de

3 nous dire dès à présent quelles sont les pages auxquelles vous allez faire

4 référence, de manière concrète ?

5 L'INTERPRÈTE : Micro.

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Par exemple, Monsieur le Président,

7 s'agissant du témoin Harland, tout simplement, je souhaite lui poser un

8 certain nombre de questions au sujet des éléments concernant lesquels il a

9 déjà déposé et qui concernent les tireurs embusqués, et qui concernent

10 notamment l'accord qui a été mentionné par M. Waespi de l'Accusation tout à

11 l'heure. Il existait un accord qui a été signé. Lorsque le général

12 Milosevic a pris ses fonctions, au bout de trois jours, cet accord a été

13 signé. Je pense qu'il est très important pour la Chambre de première

14 instance que l'on traite de ce sujet par le biais de ce témoin qui en a

15 parlé et qui a beaucoup de connaissances à ce sujet, notamment en ce qui

16 concerne cet accord en date du 12 août, donc deux jours après que le

17 général Dragomir Milosevic a pris ses fonctions.

18 [La Chambre de première instance se concerte]

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien, Maître Tapuskovic. Vous

20 devriez nous le préciser d'ici demain et nous dire quelle partie du

21 document vous souhaitez citer.

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Whiting.

24 M. WHITING : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je dois dire que

25 d'après nous, le compte rendu n'est pas tout à fait clair à cet égard, à

26 savoir si l'accusé souhaite faire une déclaration ou non, car d'après ce

27 que j'ai entendu dans mes écouteurs, il n'allait pas user de ce droit. Au

28 niveau du compte rendu, on peut lire maintenant, l'accusé va user de ce

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1 droit. Je souhaite simplement éclaircir ce point.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il a répondu par l'affirmative. Je

3 crois qu'il y a une confusion entre le T et le W.

4 M. WHITING : [interprétation] Ceci me permet d'éclaircir ce point au niveau

5 du compte rendu.

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, si j'ai bien

7 compris le Règlement, il peut faire une déclaration à tout autre moment,

8 n'est-ce pas ou à aucun autre moment -- plutôt, simplement maintenant. S'il

9 ne fait pas usage de ce droit, il ne pourra pas faire usage de ce droit

10 ultérieurement. En principe, il n'a pas l'intention de faire usage de ce

11 droit du tout, ce droit qui lui revient conformément à ce Règlement.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je crois que maintenant les choses

13 sont claires.

14 Nous allons lever l'audience et reprendre lundi matin à

15 9 heures.

16 L'audience est levée.

17 --- L'audience est levée à 17 heures 37 et reprendra le lundi 15 janvier

18 2007, à 9 heures 00.

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