Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 1er février 2007

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 17.

6 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Quelques questions d'ordre

7 administratif avant que vous ne commenciez votre contre-interrogatoire,

8 Maître Tapuskovic. La première question vous concerne, donc vous pouvez

9 vous lever. Elle concerne la conversation que vous nous aviez demandé de

10 présenter comme éléments de preuve, et nous sommes en train d'envisager la

11 possibilité de la marquer aux fins d'identification avec une cote

12 provisoire. Etant donné que ceci n'était pas très clair, s'agit-il d'une

13 note ou d'une transcription, s'il vous plaît ?

14 Soyez bref, s'il vous plaît, pas de long discours. Simplement, donnez-moi

15 l'information, s'il vous plaît.

16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, il s'agit là d'une

17 conversation qui a été enregistrée dans le bureau du général Smith. Le

18 général Nicolai a été interrogé sur cette question. Il y a certains

19 éléments de cette conversation que Nikolai a confirmés. La seule chose pour

20 laquelle nous n'avons pas de certitude, c'est qui a organisé cette

21 conversation.

22 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] S'agit-il d'une transcription, d'une

23 note ? Sous quelle forme cela se présente-t-il ? Une lettre ?

24 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Cela a été traduit. Nous avons reçu la

25 traduction et cela était censé être une conversation qui a été menée dans

26 le bureau de M. Smith. Après la déposition de

27 M. Nicolai, il y a quelque chose dont nous n'étions pas sûrs, car ceci

28 s'est passé avec l'assistance d'un interprète. On ne sait pas si c'est le

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1 général Smith lui-même ou M. Nicolai. En tout cas, c'est quelque chose qui

2 s'est déroulé dans le bureau du général Smith.

3 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Merci.

4 [La Chambre de première instance se concerte]

5 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Je sais que M. Docherty n'est pas ici

6 dans le prétoire cet après-midi, mais il n'y a pas de préjudice subi. Nous

7 allons le marquer aux fins d'identification.

8 La deuxième question que je souhaite aborder, c'est celle des points

9 d'accord. Cette question a été soulevée lors de la Conférence de mise en

10 état le 10 janvier. Au cours de cette Conférence de mise en état, on a

11 demandé aux parties - et c'est moi-même qui l'aurais demandé - de se

12 rencontrer pour débattre de ces questions et de revenir vers la Chambre de

13 première instance d'ici le vendredi

14 19 janvier. Nous sommes aujourd'hui le 1er février. Nous n'avons eu aucun

15 rapport de part et d'autre. Donc, Maître Tapuskovic et l'Accusation, vous

16 devriez vous réunir et nous informer avant mercredi prochain de la semaine

17 prochaine et de nous tenir au courant, s'il vous plaît, de tout ceci.

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je puis vous dire que nous nous sommes

19 rencontrés. Nous avons reçu une nouvelle proposition. Un certain nombre de

20 points d'accord que nous pouvons examiner ensemble avant le délai fixé par

21 la Chambre. Compte tenu de tous les éléments de preuve qui nous ont été

22 présentés au cours de ce procès, il y a un certain nombre de problèmes qui

23 surgissent. Je pense que nous pourrons nous mettre d'accord sur bon nombre

24 de ces points d'accord qui ont été proposés.

25 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Je vous remercie.

26 La question suivante est une question de calendrier. Demain, vendredi, nous

27 siégerons comme cela a été prévu, mais en début de semaine prochaine, la

28 Chambre de première instance va rendre une ordonnance pour préciser comment

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1 le vendredi va être affecté. Quelquefois, nous allons siéger pendant toute

2 la journée du vendredi, quelquefois, le vendredi, nous siégerons qu'une

3 partie de la journée, la moitié de la journée, et certains vendredis, nous

4 ne siégerons pas du tout. Cette ordonnance sera rendue en début de semaine

5 prochaine.

6 La dernière question que je souhaite aborder concerne la déposition

7 du témoin lors de l'interrogatoire principal du témoin. Je m'adresse à vous

8 maintenant, directement, Témoin.

9 LE TÉMOIN: TÉMOIN W-138 [Reprise]

10 [Le témoin répond par l'interprète]

11 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Vous souvenez-vous que je vous

12 ai demandé comment vous étiez en mesure de savoir à partir des trous que

13 vous avez vus de déterminer la provenance des tirs, et vous avez répondu en

14 disant que vous pouviez faire cela en tendant une corde ou un fil d'un

15 point à un autre. Je vous ai posé une autre question à la suite de cela. Je

16 vous ai demandé ce qu'il y avait de particulier par rapport à un trou qui

17 est dû par une balle. Qu'est-ce qui est spécifique ou particulier dans ce

18 cas, un trou qui a été fait par une balle. Qu'est-ce que cela a de

19 particulier. Comment se fait-il qu'à partir de là vous êtes en mesure de

20 connaître la provenance du tir de la balle en question ?

21 Pour ce qui est de la déposition que vous avez faite - et vous avez parlé

22 de l'utilisation d'une corde ou d'un fil d'un point à un autre - je

23 souhaite simplement que vous concentriez votre attention sur le trou en

24 question, s'il y a des traces ou quelque chose qui serait dû à l'impact,

25 qui vous permettrait de connaître la provenance de la balle.

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je voudrais vous demander un détail. Au début,

27 vous m'avez demandé de parler des dégâts dus au projectile, ensuite vous

28 avez parlé de balle. Je vais d'abord parler du projectile.

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1 Dans les constatations que j'ai faites, j'ai vu les dégâts causés par le

2 projectile qui a frappé une façade du bâtiment. Au moment où ce projectile

3 a frappé la façade du bâtiment, je savais exactement quelle était la

4 façade, si c'était la façade nord, sud, est ou ouest. Donc, je savais dans

5 quelle façade le projectile avait frappé.

6 Ensuite, nous avons examiné les dégâts au niveau du trou. Le projectile a

7 traversé le mur et il a provoqué des dégâts à l'intérieur. Même chose pour

8 la balle, mais la balle n'a pas provoqué d'explosion. Elle a causé une

9 ouverture de petite taille, ensuite cette même balle a provoqué un trou à

10 un autre endroit à l'intérieur et on a trouvé de la poudre. Le seul dégât

11 c'était le trou d'entrée.

12 On voit très bien à l'œil nu les traces qui sont provoquées par

13 l'explosion du projectile après son contact avec le mur. Si le mur est du

14 côté est, il ne serait pas logique de penser que le projectile venait du

15 côté opposé, c'est-à-dire du côté ouest.

16 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Monsieur le Témoin, je vous posais

17 une question à propos du trou en tant que tel et qui a été creusé par une

18 balle. Est-ce qu'il y avait quelque chose à propos de ce trou qui, dans son

19 aspect, vous permettrait de comprendre d'où venait la balle, puisqu'il y

20 aurait un point d'impact ou quelque chose.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] La bâche en plastique se déchire et il y a des

22 rebords qui se créent à l'intérieur, ce qui indique que la balle est venue

23 de l'extérieur et a pénétré à l'intérieur.

24 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Autrement dit, la bâche est déchirée

25 en deux. Y a-t-il autre chose qui vous permettrait et qui vous donnerait un

26 indice et qui vous permettrait de comprendre d'où venait la balle ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, rien d'autre. C'est la chose que j'ai

28 constatée.

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1 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Très bien.

2 L'INTERPRÈTE : Il n'a pas été question de rebords dans l'interprétation

3 anglaise.

4 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, si je puis me

5 permettre d'interrompre - et ce n'est peut-être pas le meilleur moment -

6 mais je voudrais revenir sur deux questions évoquées par vous, Monsieur le

7 Président, au sujet de questions administratives.

8 La première, c'est une autre question dont nous avons discuté à la

9 Conférence préalable au procès, à savoir les conversations interceptées, et

10 vous avez insisté auprès de l'Accusation pour qu'elle essaie de trouver un

11 accord au sujet de l'authenticité avec certains témoins.

12 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Laissez-moi terminer d'abord.

13 M. WHITING : [interprétation] Excusez-moi --

14 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] M. le Juge Harhoff voudrait poser une

15 question.

16 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci.

17 Témoin, au cours de votre déposition hier, vous avez également, dans votre

18 déposition, parlé de certains incidents dus à des tirs embusqués. Vous avez

19 cité le fait qu'il y a eu le pilonnage d'un bus et qu'une maison a fait

20 l'objet de tirs embusqués.

21 Voici ma question : Au cours de votre enquête, avez-vous été en

22 mesure de déterminer quel type de projectiles avaient été tirés contre

23 l'autobus et le bâtiment; et plus précisément, s'agit-il de grenades de

24 mortier ou de bombes aériennes modifiées que vous avez évoquées au début de

25 votre témoignage ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque j'ai procédé à mon enquête, il y a eu

27 des cas où j'ai trouvé des restes d'obus de mortier, à savoir les parties

28 de l'obus qui n'explosent pas mais qui restent sur place. Dans ces cas-là,

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1 j'ai pu déterminer avec certitude qu'il s'agissait d'un obus de mortier.

2 Lorsqu'il s'agit d'autres projectiles, c'est-à-dire, par exemple, de

3 balles ou de projectiles venant de mitrailleuses antiaériennes, dans ce

4 cas-là, ce qui se passe c'est que lorsque la balle se fragmente, elle se

5 fragmente et je recueille ces fragments, je les envoie pour analyse. Dans

6 ce cas, je peux déterminer qu'il s'agit de fragments de balle et pas d'obus

7 de mortier.

8 Si l'on avait des projectiles modifiés, ils venaient de lance-

9 roquettes que j'ai vus moi aussi et que j'ai déterminé comme des

10 projectiles modifiés, ce qui a été confirmé par le rapport d'expert, et je

11 les ai envoyés ensuite à l'analyse.

12 Hier, j'ai parlé de la différence que je sais reconnaître entre tel

13 ou tel projectile, une balle et d'autres projectiles. Ce que je constate,

14 ce sont les constatations qui sont transmises à l'inspecteur, mais cela ne

15 signifie pas que tout est exact quant à l'expert. Il a établi son rapport

16 10 à 15 jours plus tard, et il est arrivé dans plusieurs cas que je dise,

17 "qu'il s'agissait d'un obus de mortier de calibre 120, alors que l'obus de

18 mortier était de calibre 82-millimètres." Les victimes ont été tuées par

19 les éclats de ces obus, et c'est l'expert ensuite qui a déterminé le

20 calibre exact, à savoir 120 ou 82-millimètres.

21 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci, Témoin. J'apprécie votre

22 réponse. Néanmoins, ma question était un peu plus précise. Je souhaitais

23 savoir si au cours de votre enquête vous étiez en mesure de déterminer quel

24 type de bombes avait explosé lorsque vous avez évoqué les incidents qui se

25 sont déroulés au numéro 5 de la rue Geteova, numéro 12 de la rue Geteova,

26 et je crois également à bord de l'autocar. Est-ce que vous êtes en mesure,

27 et si vous le pouvez, pouvez-vous expliquer aux Juges de la Chambre quel

28 type d'obus ou de bombe a touché ces trois cibles.

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans le cas du numéro 5 de la rue

2 Geteova, le projectile était une bombe aérienne modifiée. Quant au numéro

3 12 de la rue Geteova, qui a subi un incident avant celui du numéro 5, c'est

4 un projectile modifié qui a explosé sur l'asphalte, sur l'asphalte non loin

5 du bâtiment. Dans l'incident du numéro 5, le projectile a frappé le mur et

6 il y a eu fragmentation du projectile dont certains éclats ont été

7 retrouvés dans l'autobus.

8 Donc, il ne s'agissait pas d'une balle tirée par un fusil, mais des

9 éclats d'un projectile qui s'était fragmenté. D'après moi, il est très

10 probable qu'il s'agissait d'un projectile tiré par une mitrailleuse

11 antiaérienne. J'ai soumis ces éléments pour analyse et l'expert a

12 probablement rédigé ses conclusions à ce sujet dans son rapport en disant

13 que les fragments avaient touché le bus.

14 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci.

15 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Monsieur Whiting.

16 M. WHITING : [interprétation] Pardonnez-moi si j'essaie d'aller trop vite.

17 Vous nous aviez posé des questions à propos des conversations

18 téléphoniques interceptées lors de la Conférence de mise en état. Nous

19 avons remis toutes ces conversations à la Défense et nous leur avons

20 demandé quelles étaient les conversations sur lesquelles ils étaient

21 d'accord avec nous et quelles sont les conversations qu'ils contestent.

22 Lorsqu'un des témoins est venu témoigner, c'est ce qui a été fait. Peut-

23 être que vous pourriez fixer un délai pour ces conversations téléphoniques

24 interceptées.

25 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Nous allons fixer le même délai,

26 c'est-à-dire le délai sera mercredi de la semaine prochaine. Nous attendons

27 un rapport sur la question des conversations téléphoniques interceptées.

28 M. WHITING : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

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1 D'après ce que vous avez dit, Messieurs les Juges, je crois que nous allons

2 siéger demain comme prévu. Savez-vous, Messieurs les Juges, ce qu'il en est

3 de la semaine prochaine, le vendredi

4 9 février ? C'est pour pouvoir organiser la venue du témoin. Est-ce que

5 vous avez l'intention de siéger vendredi prochain ou non ?

6 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Nous vous le ferons savoir demain à

7 propos de la journée d'audience de vendredi prochain.

8 Maître Tapuskovic, vous allez maintenant commencer le contre-interrogatoire

9 du témoin. L'Accusation a eu six heures environ, six heures et 40 minutes,

10 d'après mes calculs, pour l'interrogatoire principal. Bien évidemment, vous

11 n'êtes pas obligé de consacrer ce même temps à votre contre-interrogatoire.

12 Pour éviter que l'Accusation ne se lève à toutes les cinq minutes en disant

13 que vous ne citez pas correctement les éléments de preuve, je propose que

14 vous vérifiiez, avant de poser votre question, vous vérifiiez directement

15 avec le témoin de l'exactitude de tout ceci. Bien sûr, c'est à vous

16 d'organiser votre contre-interrogatoire comme vous jugez utile. C'est

17 encore une fois une attitude pragmatique qui est la mienne, car nous

18 essayons, évidemment toujours, de prendre en compte le facteur temps dans

19 ce procès.

20 Veuillez commencer votre contre-interrogatoire.

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je vais répondre à

22 ceci brièvement.

23 J'espère que l'Accusation ne devra pas soulever d'objection pendant

24 mon contre-interrogatoire, étant donné que nous avons déployé des efforts

25 extraordinaires. Je pense qu'ils ne seront absolument pas obligés de se

26 lever.

27 Lorsque je fais référence au compte rendu, je le cite directement. Je

28 l'ai recopié. A ce moment-là, je citerai des exemples précis.

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1 Je dois dire que j'ai fait un effort herculéen. Je sais que je peux

2 utiliser six heures, mais je vais essayer de consacrer une demi-journée

3 seulement à mon contre-interrogatoire. En revanche, si cela dure un peu

4 longtemps je devrai évidemment prolonger un petit peu mon contre-

5 interrogatoire. Je vais faire beaucoup d'efforts pour me conformer à ce que

6 vous m'ayez demandé, et de faire, autrement dit d'essayer de terminer à la

7 fin de la deuxième séance de cette après-midi.

8 Une autre question que je souhaitais vous poser. A la fin de mon contre-

9 interrogatoire, je pense qu'il me restera beaucoup de temps. J'espère

10 néanmoins pouvoir terminer mon contre-interrogatoire aujourd'hui, d'après

11 mes calculs en tout cas. Je souhaite avoir quelques minutes pour que je

12 puisse vous exposer un problème bien précis. Je ne souhaite pas l'aborder

13 maintenant, mais si vous voulez bien m'accorder quelques minutes à la fin

14 de mon contre-interrogatoire pour que je puisse aborder cette question.

15 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Je vous en prie, poursuivez.

16 L'Accusation, je suis sûr, est tout à fait satisfaite à l'idée de ne pas

17 devoir se lever trop souvent. C'est par conséquent un gain d'énergie.

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Mon dossier que j'ai constitué pour ce

19 témoin est ce que j'ai ici devant moi. Ce n'est pas davantage. Je ne vais

20 poser que des questions qui sont importantes pour mon client, bien sûr. Je

21 vais également aborder les questions qui permettront aux Juges de la

22 Chambre de mieux comprendre la situation eu égard à l'acte d'accusation.

23 La première question que je vais poser est une question qui a été

24 posée il y a un moment.

25 Contre-interrogatoire par M. Tapuskovic :

26 Q. [interprétation] Témoin, il y a un moment, on vous a demandé

27 quels obus avaient été utilisés pour toucher certaines cibles.

28 Pourriez-vous me dire quels obus ont été utilisés pour tirer sur le

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1 bâtiment de la télévision ?

2 R. Oui, je suis tout à fait en mesure de répondre à cette question. Le

3 bâtiment de télévision a été touché par un projectile modifié.

4 Q. Merci. Toute première question, qu'en est-il des pièces d'artillerie,

5 des armes aériennes, de mitrailleuses et de tirs embusqués ? Vous n'avez

6 pas véritablement des connaissances à ce sujet. Vous n'êtes pas expert en

7 la matière, je crois, au sujet des calibres et des mortiers non plus. Vous

8 ne savez pas quels sont les types d'armes qui ont été utilisés dans ce

9 conflit. Vous n'êtes pas un expert dans ce domaine-là, n'est-ce pas ? Est-

10 ce juste, ce que je dis ? Est-ce que vous dites l'inverse ? Vous dites au

11 contraire que vous savez beaucoup de choses sur les types d'armes qui ont

12 été utilisés ?

13 R. Tout d'abord, il n'est pas exact de dire que je ne sais rien au sujet

14 de cela. Il n'est pas exact de dire non plus que je sais beaucoup de

15 choses. Je suis en mesure d'analyser les traces qui sont dues à un certain

16 type de projectiles. Je suis en mesure de reconnaître les projectiles

17 derrière les traces que je retrouve à certains endroits. Mon rôle consiste

18 à consigner ces traces, à les indiquer, à les photographier, à dessiner un

19 croquis de ces mêmes traces et de les envoyer au laboratoire.

20 J'ai reçu une formation en balistique. J'ai suivi ceci et ce cours de

21 formation me permet d'identifier les raisons d'une explosion et quelle est

22 la provenance d'un projectile, à savoir s'il est tiré à partir d'un fusil

23 ou d'une autre arme.

24 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Pardonnez-moi à l'avance, ne m'en veuillez

25 pas, Messieurs les Juges.

26 Q. En même temps, c'est comme si vous me disiez que vous avez suivi un

27 cours de couture et que vous n'avez pas jamais pu préparer un costume

28 décent. N'est-ce pas la même chose ? Est-ce que vous n'avez jamais tiré une

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1 bombe aérienne vous-même ?

2 R. Dieu merci, non.

3 Q. Merci beaucoup. Nous allons aborder ceci un peu plus tard. Est-ce que

4 vous pouvez confirmer qu'en tant que membre de --

5 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Monsieur Sachdeva.

6 M. SACHDEVA : [interprétation] Je remarque simplement que le conseil de la

7 Défense laisse son micro allumé lorsque le témoin parle. Ceci provoque une

8 distorsion de la voix. C'est tout.

9 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Oui, je sais que les micros sont très

10 sensibles. Ceci arrive un certain nombre de fois, effectivement.

11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Malheureusement, je suis une personne

12 âgée. Cela pourra se reproduire. Je vais faire de mon mieux. Vous êtes

13 d'accord avec moi.

14 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Il s'agit d'une question très

15 importante, puisque cela a trait aux mesures de protection qui ont été

16 accordées au témoin. Je propose que votre assistant, qui se trouve à votre

17 droite, fasse attention et éteigne votre micro lorsque vous ne prenez pas

18 la parole.

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Très bien. Ceci est fort utile.

20 Q. Témoin, pouvez-vous confirmer qu'en tant que membre de la police, la

21 police faisait partie des unités de combat, parce que quelquefois vous

22 faisiez partie de ces opérations menées par l'ABiH. S'agit-il de quelque

23 chose d'exact ?

24 R. Je menais des enquêtes sur les lieux suite à des incidents.

25 Q. Pourriez-vous me dire si vous étiez au courant des préparatifs d'une

26 offensive qui, finalement, a été lancée le 15 et

27 16 juin 1995 ? Etiez-vous au courant de cela ? Est-ce bien à ce moment-là

28 que cela a commencé ?

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1 R. Non, je ne sais rien à ce sujet.

2 Q. Qu'en est-il de toutes ces bombes, de tous ces incidents dont vous avez

3 parlé pendant trois jours ? Tout ceci, n'est-il pas arrivé au cours des

4 mois d'été de l'année 1995 ?

5 R. Oui, j'ai donné des dates hier. Tout ceci figure dans mes différents

6 rapports. Oui, c'est vrai.

7 Q. N'y avait-il pas des affrontements continus au cours de ces mois-là

8 entre l'ABiH et l'armée de la Republika Srpska ?

9 R. Très honnêtement, je n'étais pas au courant de ce type d'opération.

10 Toute personne qui allait au quartier général ou sur le front était au

11 courant. Moi-même, j'étais au poste de police et j'étais responsable des

12 enquêtes sur site. Honnêtement, je ne sais rien d'autre.

13 Q. Merci beaucoup. En tant que policier, vous êtes un expert en matière

14 d'enquêtes sur site. Votre domaine d'expertise, c'est les mortiers et

15 autres types d'armes. Vous avez participé à ces enquêtes ainsi que d'autres

16 membres de votre équipe, et ce, uniquement avec d'autres membres de la

17 police ?

18 R. Non, il n'y avait pas seulement des membres de la police. Il y avait

19 également un juge d'instruction. C'est lui qui dirigeait l'enquête.

20 Q. Le juge d'instruction vous accompagnait-il lorsque cette fillette de 10

21 ans a été tuée et qui a souvent été évoquée ici ? Etiez-vous là ?

22 R. Croyez-moi, je ne me souviens pas exactement qui faisait partie de

23 l'équipe. J'ai mené un nombre important d'enquêtes. Dans tous les rapports

24 vous trouverez les personnes qui étaient membres de cette équipe d'enquête

25 officielle, que ce soit dirigé par le juge d'instruction ou que cette

26 enquête soit dirigée par un inspecteur, ce qui était tout à fait autorisé

27 par la loi, que ce soit organisé par le KDZ ou les centres de sécurité

28 publique. Tout ceci est consigné dans les rapports. De toute façon, je ne

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1 me souviens pas de cette fillette qui a été tuée.

2 Q. Cela m'intéresse beaucoup. Nous avons écouté les propos de l'Accusation

3 pendant trois jours. Je n'ai vu aucun document signé de la main d'un juge

4 d'instruction. Comment cela est-il possible ?

5 R. Ce n'était pas de mon ressort de signer ces documents. Je confirmais

6 simplement qu'il s'agissait de documents conformes qui étaient des

7 documents du CSB et qui émanaient du ministère de l'Intérieur. Je ne sais

8 pas pourquoi qu'aucun document n'a été signé par un juge d'instruction. Je

9 confirme simplement les documents qui sont les miens. Je confirme leur

10 authenticité et leur format.

11 Q. J'entends bien. Je comprends que des soldats et que des officiers de

12 haut rang ne sont pas venus sur les lieux car on n'aurait pu leur tirer

13 dessus. Comment se fait-il qu'il n'y ait pas un seul expert militaire,

14 quelqu'un qui aurait une connaissance très détaillée des types d'armes

15 utilisés ? Comment se fait-il qu'aucun membre de l'armée n'ait participé à

16 ces enquêtes ? Je n'ai jamais vu un seul rapport qui était préparé par un

17 expert militaire sur l'utilisation des armes, depuis que vous témoignez,

18 depuis trois jours.

19 R. Je pense que c'est une question que vous devriez poser au juge

20 d'instruction directement. Je sais que j'ai été nommé par un juge

21 d'instruction et que les autres membres de l'équipe étaient suffisamment

22 qualifiés de toute façon. A savoir s'il y avait des experts militaires qui

23 faisaient partie de l'équipe pour déterminer quel type d'armes avait été

24 utilisé, je ne le sais pas.

25 Q. Merci. Etant donné l'expérience que vous avez et que vous avez acquise

26 au fil des ans - vous avez commencé en 1993 jusqu'en 1995 - voici ma

27 question : en 1995, ce qui m'intéresse plus particulièrement, c'est la date

28 du 28 août 1995. Je souhaite vous parler de l'incident de Markale 2. Avez-

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1 vous pris part à cette enquête en tant qu'officier de police ?

2 R. Non.

3 Q. Pas une seule ?

4 R. Vous m'avez parlé d'un incident particulier et je vous ai dit non.

5 Q. Maintenant, je vous pose une question à propos de l'incident qui s'est

6 déroulé à Markale 1 ?

7 R. Non, je n'ai pas mené cette enquête.

8 Q. Hier, on vous a interrogé sur le document qui figure sur la liste des

9 documents 65 ter, c'est le numéro 000139, à la page 1. Je ne peux pas vous

10 montrer ce document, mais vous souvenez-vous du rapport dans lequel vous

11 évoquez une bombe sur laquelle étaient représentés un swastika et l'aigle

12 nazi ?

13 R. Oui, je me souviens de cette photographie que j'ai prise.

14 Q. Ma question suivante - peut-être que nous devrions passer à huis clos

15 partiel pour cette question, mais avant de poser cette question-là, je veux

16 vous poser une autre question.

17 Vous avez poursuivi en disant - et l'Accusation n'a pas lu ceci, qui

18 se lit comme suit :

19 "Un aigle nazi et un swastika ont également été découverts."

20 Vous avez trouvé ceci l'aigle nazi et la croix gammée. Vous avez dit que

21 ceci est une grenade qui datait sans doute de la Deuxième Guerre mondiale.

22 Vous avez pris une photo de cela. Il y avait le numéro de série sur la

23 grenade en question.

24 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Maintenant, c'est mon microphone qui

25 ne marche pas.

26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Cela marche maintenant, la lumière est

27 allumée. Je vais reposer ma question. Je ne sais pas si le témoin m'a

28 entendu.

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1 Q. La bombe sur laquelle il y avait un aigle nazi, une croix gammée et un

2 numéro de série, vous avez dit que cette grenade était une grenade qui

3 remontait à la Deuxième Guerre mondiale, c'était un obus.

4 R. Sous la légende de la photographie, j'ai tout inscrit. J'ai dit qu'il y

5 avait tous ces détails, le symbole avec les ailes, j'ai dit qu'il y avait

6 un numéro de série et j'ai dit qu'il y avait une croix gammée. Je n'ai pas

7 la photographie sous les yeux, mais j'ai précisé que ceci datait sans doute

8 de la Deuxième Guerre mondiale. C'est la légende qui figure sur la

9 photographie.

10 Q. Oui, c'est vous qui avez pris la photo, j'entends bien. Je n'ai pas pu

11 retrouver cette photographie dans le dossier pour voir de quoi il

12 s'agissait.

13 R. Ceci fait partie de mon classeur de photos, des photos que j'ai prises

14 lors des pilonnages du quartier de Pavle Goranin. Il y a dix obus qui ont

15 atterri dans ce quartier-là ainsi qu'un projectile modifié. C'est

16 l'incident dont je parle.

17 Q. Je parle également du même incident. Il y a eu des combats intenses ce

18 jour-là. Y a-t-il eu des combats de la part de l'ABiH ce jour-là ?

19 R. J'étais au poste de police qui est tout proche. C'est ce que j'ai

20 indiqué hier. Ces obus, y compris cet obus qui n'avait pas explosé, ces

21 obus sont tombés sur le quartier dans la cour de récréation. Ils ont touché

22 la façade des bâtiments et un des bâtiments résidentiels a été touché. Je

23 m'en souviens très bien. J'étais là, j'ai entendu la déflagration. Je sais

24 que la journée était calme. J'étais très stressé ce jour-là. A savoir s'il

25 y a eu des combats ailleurs, je ne le sais pas. Je sais simplement qu'il

26 n'y a pas eu d'opération à partir de cet endroit-là.

27 Q. En tant qu'expert de tout ce que vous venez d'expliquer, comment

28 pourriez-vous expliquer qu'un tel obus soit utilisé ? D'après vous, il date

Page 1360

1 du la Deuxième Guerre mondiale. Est-ce que vous laissez entendre que c'est

2 un obus qui a été tiré par un lance-roquettes ?

3 R. C'est des obus d'artillerie qui, à mon avis, ont été tirés par un

4 canon. Ce sont des obus qui pèsent très lourds. Je vois mal comment ils

5 auraient pu être lancés par des lance-roquettes. Deux obus n'ont pas

6 explosé. On les a retrouvés. On a vu tous les signes distinctifs sur ces

7 obus. Un troisième obus a été tiré et il a touché la façade d'une maison.

8 Les dégâts étaient si importants qu'on n'aurait pas pu penser qu'il a été

9 tiré par un lance-roquettes. Le deuxième obus qui n'a pas explosé, il a

10 ricoché pour sa part.

11 Q. Vous dites que l'armée avait des canons qui dataient de la Deuxième

12 Guerre mondiale ?

13 R. Non, ce n'est pas ce que je dis. Je dis simplement que ces obus avaient

14 des marques distinctives et des symboles sur leur surface. Je n'ai pas dit

15 que ces canons dataient de la Deuxième Guerre mondiale.

16 Q. Quelle est l'arme qui aurait pu être utilisée pour lancer ces

17 projectiles pour qu'ils atteignent des lieux particuliers ? Est-ce que vous

18 pouvez l'expliquer ?

19 R. Le calibre des munitions est probablement le même. Ces munitions ont

20 sans doute été produites il y a très longtemps. J'ai simplement écrit dans

21 les documents ce que j'ai vu de ce projectile.

22 Q. Puisque Belgrade et toute la Serbie ont été bombardées pendant la

23 Seconde guerre mondiale et qu'il y a eu pas mal de bombes qui n'ont pas

24 explosé, est-ce que vous laissez entendre que cette bombe avait été

25 rapportée d'un endroit en Serbie pour être tirée à partir d'un canon à

26 Sarajevo ?

27 R. La seule chose que je dis, c'est que sur le lieu de l'explosion j'ai

28 trouvé ce projectile. J'ai décrit ce que j'ai vu à la surface de ce

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1 projectile. Cela m'a étonné. J'avais pour devoir de photographier ce que

2 j'ai vu. J'ai décrit tout cela dans mon rapport. Voilà ce que j'ai fait. Je

3 ne veux rien suggérer. La seule chose que je fais, c'est de dire exactement

4 ce que j'ai vu, photographié et trouvé, et c'est tout. Je ne suggère rien

5 en particulier.

6 Q. Pourriez-vous répondre à la question que je vais formuler de la façon

7 suivante : la photographie qui se trouve dans votre documentation et que je

8 n'ai pas retrouvée - malheureusement, cette photographie a été publiée dans

9 les médias de Sarajevo à l'époque et publiée également un peu partout dans

10 le monde grâce à votre rapport ?

11 R. C'est la première fois que j'entends parler de cela. Je n'étais pas au

12 courant.

13 Q. Est-ce que c'est cela qui a servi de base à des affirmations souvent

14 entendues selon lesquelles une telle bombe ne pouvait être lancée que par

15 des nazis venant de Serbie ?

16 R. Croyez-moi, je n'en sais rien et je ne vais pas entrer dans ce genre de

17 chose. J'ai fait mon travail de façon professionnelle. J'ai pris des

18 photographies. Je n'ai fait aucune suggestion. J'ai trouvé des numéros de

19 série sur ces obus. J'y ai vu à la surface de l'obus l'aigle et la croix

20 gammée nazie, mais je ne vais pas m'occuper de présumer de l'origine, du

21 lieu d'origine de ces obus, éventuellement.

22 Q. J'ai une suggestion à vous faire parce que j'ai des preuves. Vous avez

23 placé ce projectile sur place. Vous l'avez amené sur les lieux et vous

24 l'avez utilisé à des fins de propagande, car sur la base de la présence de

25 cet obus sur les lieux, il a été écrit un peu partout, dans de nombreux

26 journaux, que les Serbes se comportaient comme les nazis en utilisant des

27 bombes de la Seconde Guerre mondiale. Il était absolument impossible que

28 cette bombe vienne des positions de l'armée de la Republika Srpska. Pouvez-

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1 vous répondre à cela ?

2 R. Oui, je peux. Il n'y a aucune raison qui justifie que vous m'accusiez

3 d'avoir placé cette bombe à cet endroit. Vous n'avez aucune preuve de ce

4 que vous dites. Dans la documentation photographique, il y a une

5 photographie qui montre que ce projectile a ricoché sur l'asphalte pour

6 frapper la façade d'un immeuble. Vous retrouverez sans doute des témoins

7 oculaires qui vous diront que la façade de leurs maisons a été touchée et

8 qu'ils ont entendu le bruit de l'explosion.

9 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Témoin, je me permets de vous

10 interrompre. Je vous demande de répondre directement à la question, car des

11 accusations très graves ont été portées à l'instant contre vous, et il faut

12 que vous y répondiez. Cette accusation consiste à dire que c'est vous qui

13 avez placé le projectile sur les lieux. Veuillez répondre directement à

14 cela, je vous prie.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Ce n'est pas moi

16 qui ai placé le projectile sur les lieux. Je suis arrivé sur les lieux et

17 j'ai photographié le projectile qui se trouvait à cet endroit.

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci beaucoup.

19 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Un instant, je vous prie.

20 M. LE JUGE MINDUA : [interprétation] Excusez-moi, Maître Tapuskovic.

21 [en français] Témoin, juste une question qui me vient à l'esprit

22 pendant que l'avocat de la Défense vous pose des questions sur cette bombe

23 avec des insignes nazis.

24 Est-ce que, d'après votre expérience, vous pouvez nous dire l'âge de

25 la bombe, cette bombe -- les insignes qui étaient là sur la bombe avaient

26 été placés là par le fabriquant ou par les usagers ? Parce qu'il arrive

27 parfois que les pilotes militaires ou le militaire puisse dessiner sur les

28 bombes qu'ils utilisent.

Page 1363

1 Donc, ma question : est-ce que la bombe, ou l'âge de la bombe est-

2 elle une bombe de la Deuxième Guerre mondiale ? Est-ce que les insignes

3 avaient été placés par le fabriquant ou par les utilisateurs, si insignes

4 il y avait ? Merci.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je dois dire que lorsque j'ai vu ce

6 projectile, cette bombe, je n'avais jamais rien vu de tel jusqu'à ce jour-

7 là. J'ai remarqué que ces symboles étaient gravés avec une machine dans le

8 projectile. Ce n'était pas quelque chose qui a été fait à la main; ces

9 symboles, notamment l'aigle et la croix gammée étaient gravés à l'aide

10 d'une machine. Aucun des symboles n'était fait à la main. D'ailleurs, j'ai

11 envoyé le projectile pour analyse afin de confirmer tout cela. C'était la

12 première fois que je voyais un projectile de ce genre.

13 M. LE JUGE MINDUA : Merci.

14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, hier, à un certain

15 moment durant la déposition de ce témoin, vous lui avez demandé de

16 s'expliquer sur ce qu'il avait dit. Je cite : "C'est nous qui l'avons

17 fait." Vous lui avez demandé de répondre à la question que vous lui avez

18 posée en lui demandant qu'est-ce que cela veut dire, "Nous l'avons fait."

19 Le témoin a répondu en disant que c'étaient eux qui avaient réalisé

20 l'enquête.

21 Q. C'est bien cela, Monsieur le Témoin ?

22 R. Je ne sais pas exactement de quoi vous parler. "Nous l'avons fait,"

23 cela veut dire - parce que si le Président m'a demandé si c'étaient nous

24 qui avions mené l'enquête, cela veut dire que nous avons mené l'enquête.

25 C'était toujours nous qui faisions les constatations sur place.

26 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Oui, je me souviens très bien.

27 Monsieur le Témoin, vous répondez souvent en disant, "Nous avons fait cela,

28 nous avons fait ceci." Et je vous ai demandé de préciser à qui se

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1 rapportait ce "nous ?" Vous avez répondu qu'il s'agissait de l'équipe.

2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vais demander que l'on soumette au

3 témoin le document DD00-377, qui est la déclaration préalable que le témoin

4 a faite le 11 mars 1997. J'aimerais que ce document soit soumis au témoin.

5 C'est la page 2 qui m'intéresse.

6 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Monsieur Sachdeva est debout.

7 M. SACHDEVA : [interprétation] Je demanderais que nous passions à huis clos

8 partiel si ce document doit être soumis au témoin.

9 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Oui. Si le nom du témoin figure dans

10 cette déclaration, il faut que nous passions à huis clos partiel. Puisque

11 c'est la déclaration du témoin, je suppose que son nom y figure. Donc,

12 passons à huis clos partiel.

13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

14 le Président.

15 [Audience à huis clos partiel]

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16 [Audience publique]

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

18 Q. Mes questions porteront sur l'incident relatif au bâtiment de la

19 télévision. Au cinquième paragraphe, si vous voulez bien, vous dites, je

20 cite : "Cet incident a eu lieu à 150 mètres seulement du poste de police où

21 je me trouvais." Ceci est-il exact ?

22 R. Oui, je vois cette phrase dans le texte. Vous me demandez si quelque

23 chose est vrai. Que me demandez-vous exactement ?

24 Q. Je vous demande s'il est vrai que votre poste de police se trouvait à

25 150 mètres du bâtiment de la télévision ?

26 R. Non.

27 Q. Vous dites que : "L'incident a eu lieu à 150 mètres du poste de

28 police."

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1 R. Je parlais de l'incident qui a été décrit dans le paragraphe précédent.

2 Q. Dans un paragraphe ultérieur sur cette page, il est également fait

3 référence à l'incident relatif au bâtiment de la télévision, n'est-ce pas ?

4 Nous n'avons trouvé aucune mention de lance-roquettes ou de traces de

5 roquette. Y a-t-il une possibilité que le projectile ait été lancé sans

6 lance-roquettes ?

7 R. Nous avons trouvé des traces sur le toit. Ce ne sont pas des traces de

8 lance-roquettes, mais des traces de roquettes. Nous n'avons pas trouvé le

9 moteur qui a servi à propulser la roquette. Vous avez vu les photographies

10 et vous avez vu les conséquences physiques de l'explosion. Les experts ont

11 confirmé cela, et sur la base des indices, des fragments d'indices

12 restants, ils se sont prononcés. Je n'ai rien trouvé d'autre que ce que

13 j'ai photographié dans ma documentation de photographies.

14 Q. En d'autres termes, nous pouvons dire que personne n'a jamais trouvé

15 les moteurs propulseurs de ces roquettes. Il est impossible d'expliquer

16 comment cette bombe a pu atteindre le bâtiment de la télévision dans ces

17 conditions. Pouvez-vous vous expliquer sur ce point ?

18 R. Je ne peux rien dire d'autre que ce que j'ai dit. Ce n'est pas moi qui

19 ai trouvé ces indices. L'enquête a duré plusieurs jours suite à une

20 décision du juge d'instruction, et j'ai photographié les indices découverts

21 par moi sur place, qui ont été mentionnés dans mon rapport en fin de

22 compte.

23 Q. Monsieur le Témoin, ce que je vous affirme, c'est la chose suivante :

24 c'est vous qui avez placé cette roquette sur les lieux, à moins que ce ne

25 soit un autre membre de votre équipe. Tout ceci était un coup monté, et

26 votre objectif était de vous moquer de la justice, de ridiculiser la

27 justice. Je vous dis cela. Je vous dis que vous avez abusé de votre

28 pouvoir, et que personnellement, à moins que ce soit un autre membre de

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1 votre équipe, vous avez apporté cet objet sur les lieux. Pouvez-vous

2 répondre à cette question ?

3 R. La réponse est non, ce n'est pas ce que j'ai fait.

4 Q. Je vais vous soumettre maintenant un autre document.

5 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Vous avez répondu par la négative en

6 disant que vous n'aviez pas agi de la sorte, mais la question portait

7 également sur la possibilité qu'un autre membre de votre équipe ait fait ce

8 qui vient d'être dit. Pouvez-vous répondre également à cela ? Est-ce qu'un

9 autre membre de votre équipe a fait ce qui vient d'être dit ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, aucun d'entre nous ne l'a fait.

11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai un document

12 qui est un document particulièrement fiable pour un tribunal comme celui où

13 nous travaillons en ce moment, car c'est un document qui vient des

14 observateurs militaires des Nations Unies. Ce document affirme très

15 clairement l'origine de cette bombe aérienne, et de ceux qui l'ont tirée.

16 Nous avons des exemplaires en nombre suffisant pour toutes les personnes

17 intéressées dans ce prétoire. Et je voudrais que ce document soit soumis au

18 témoin après distribution à chacun, car il montre bien que c'est le témoin

19 en personne, à moins que ce ne soit un membre de son équipe, qui a tiré une

20 bombe sur le bâtiment de la télévision de Sarajevo.

21 Version B/C/S, la voici. J'ai reçu ce document il y a déjà pas mal de

22 temps. Je m'apprêtais à l'utiliser plus tard, mais je crois que les Juges

23 de la Chambre devraient prendre connaissance de ce document dès maintenant.

24 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Voyons si je vous ai bien compris.

25 Vous affirmez disposer d'un document émanant des observateurs des Nations

26 Unies, qui prouve que le tir a été réalisé par le témoin en personne ou par

27 un membre de son équipe; c'est bien ce que vous dites ?

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui.

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1 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Montrez ce document aux Juges ainsi

2 qu'aux membres de l'Accusation.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] L'Accusation est très au courant de ce

4 document, et ceci, depuis longtemps.

5 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Je vais prendre quelques instants

6 pour le lire.

7 [La Chambre de première instance se concerte]

8 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Que souhaitez-vous faire avec ce

9 document, Maître Tapuskovic ?

10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je souhaite donner lecture d'un passage de

11 ce texte à l'intention de la télévision où il est dit que le projectile qui

12 a touché le bâtiment de la télévision provenait des lignes de l'ABiH, qu'il

13 a volé à basse altitude et qu'il s'est passé ensuite ce qui s'est passé, et

14 que par la suite le témoin a accouru pour faire les constatations sur les

15 lieux dans un but bien précis, c'est-à-dire, le but de démonter que le

16 projectile venait des lignes serbes. Alors que --

17 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Vous voulez soumettre ce qui est dit

18 dans ce document au témoin; c'est bien cela ?

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Bien sûr.

20 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Allez-y.

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

22 Q. Honorable Témoin, vous avez ici un document qui émane du QG des

23 observateurs militaires des Nations Unies; vous le voyez à l'écran ?

24 L'INTERPRÈTE : Réponse inaudible du témoin.

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

26 Q. Ce document provient du QG des observateurs militaires des Nations Unis

27 dans le secteur de Sarajevo; est-ce que c'est exact ?

28 R. Je suis en train de lire.

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1 Q. On lit la date de juin 1995, n'est-ce pas ?

2 R. Oui, je la vois. Je suis en train de lire.

3 Q. On lit un peu plus loin le nom du capitaine Hanson, officier chargé des

4 opérations. Est-ce que vous voyez cette mention ?

5 R. Oui.

6 Q. On lit un peu plus loin : "Approuvé par le capitaine de deuxième classe

7 Allan, commandant de département. Est-ce que vous voyez cela ?

8 R. Oui.

9 Q. Puis, un peu plus loin, nous lisons au niveau de l'"Objet" du document

10 : "Rapport spécial au sujet de l'impact d'un projectile sur le bâtiment de

11 la télévision." Vous voyez cette mention ?

12 R. Oui.

13 Q. Passons au paragraphe suivant. Je cite :

14 "20092 IOB juin, un observateur militaire des Nations Unies est arrivé au

15 bâtiment des PTT, a garé son véhicule dans la zone inférieure du bâtiment,

16 la zone réservée au parking et a observé ce qui suit." Est-ce que vous

17 voyez ce passage ?

18 R. Oui.

19 Q. Ensuite, je cite : "Il a entendu et vu un projectile qui passait par-

20 dessus le parking et la rue située à la cote," telle et telle. "Cet

21 endroit se trouve sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine, à 1 800

22 mètres environ des lignes les plus proches." Est-ce que vous voyez de

23 passage ?

24 R. Oui.

25 Q. Je poursuis la citation : "De la poussière a été observée ainsi qu'un

26 projectile volant à basse altitude en direction du bâtiment de la

27 télévision." Est-ce que vous voyez cela ?

28 R. Oui.

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1 Q. Ensuite, je cite : "Le projectile avait une trajectoire à basse

2 altitude, et son trajet était en ligne droite depuis le point de tir

3 jusqu'à sa cible qu'il a touché, à savoir le bâtiment de la télévision dans

4 sa façade nord, face au bâtiment du Bataillon britannique." Vous voyez ce

5 passage ?

6 R. Oui.

7 Q. Est-ce que c'est bien ce qui est dit dans ce document ?

8 R. Oui.

9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

10 Juges, je n'ai pas besoin d'en lire davantage. Ce document évoque d'autres

11 points qui sont intéressants également, mais je m'arrêterai là.

12 Q. Monsieur le Témoin, après avoir relu ce document, est-ce que vous dites

13 oui ou non, que c'est vous ou les membres de votre équipe qui ont monté de

14 toutes pièces, toute cette affaire ?

15 R. Non, nous n'avons pas monté de toutes pièces cette affaire.

16 Q. Est-ce que vous avez obtenu un ordre pour vous rendre sur place le plus

17 rapidement possible afin d'enquêter sur les lieux, comme vous l'avez dit

18 aux Juges hier ?

19 R. Non, je ne suis allé nulle part à toute vitesse. J'ai attendu l'arrivée

20 des autres membres de l'équipe d'enquête pour que nous nous dirigions vers

21 les lieux, et c'est seulement au moment de leur arrivée que nous sommes

22 partis pour les lieux de l'explosion.

23 Q. Mais, n'est-il pas vrai que les images dues aux photographies prises

24 par vous ont été montrées par des télévisions du monde entier et,

25 notamment, à la population de Sarajevo de façon à ce qu'il soit question

26 d'un autre crime commis par les Serbes, puisqu'il s'agissait d'un bâtiment

27 réservé aux médias ?

28 R. Je n'ai rien fait de ce genre. J'ai eu beaucoup de travail ce jour-là.

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1 J'ai mené une enquête sur les lieux. Je n'ai pas la moindre idée de ce que

2 les journalistes ont pu écrire dans le monde entier, dans leurs articles

3 par la suite. Tout ce que je sais, c'est que les journalistes s'intéressent

4 parfois assez à ce qui se passe dans un bâtiment de la télévision.

5 Mais, vous avez fait cela de façon systématique, et je suppose que les

6 journalistes font également leur travail comme je fais le mien.

7 Q. Peut-être est-ce la raison pour laquelle l'OTAN a pris plus tard le

8 bâtiment de la télévision pour cible à Belgrade.

9 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Maître Tapuskovic, pas de

10 commentaires.

11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

12 Q. Monsieur le Témoin, je me vois tenu de vous dire ce qui suit.

13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je suis heureusement ici aujourd'hui pour

14 faire face au témoin et je dis au témoin face à face qu'il a menti

15 aujourd'hui.

16 R. Je n'ai pas menti. Il y a des photographies qui prouvent mes dires.

17 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Je vois que M.Sachdeva est debout.

18 M. SACHDEVA : [interprétation] Je dois faire objection à la dernière

19 question. Il me semble que le conseil a soumis au témoin un document qu'il

20 a sorti d'un propos introductif en disant que lui-même ou des membres de

21 son équipe avaient tiré cet obus. Comme vous pouvez le constater, Monsieur

22 le Président, Messieurs les Juges, et comme le sait très bien le conseil de

23 la Défense, rien de ce qui est écrit dans ce document ne permet de

24 déterminer qui a tiré cet obus et, encore moins, s'il s'agissait du témoin

25 ou d'un membre de son équipe.

26 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Mais, le conseil de la Défense dit

27 que le témoin a menti sur la base de ce qui figure dans ce document. Il me

28 semble qu'il déclare au témoin que sa déposition ne correspond pas à la

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1 réalité, et je crois qu'il est tout à fait en droit de le faire.

2 M. SACHDEVA : [interprétation] Je suis d'accord avec cela, bien sûr, mais

3 ce que je dirais c'est que dans le rapport du témoin et dans ce qu'il a

4 relaté au cours de sa déposition, ainsi que dans le schéma qu'il a dessiné,

5 il est possible de déterminer la direction du tir. Quand j'ai commencé

6 l'interrogatoire principal, le témoin a dit très clairement qu'il n'était

7 pas en mesure de déterminer le lieu d'origine exact du tir, mais uniquement

8 la direction générale. Il n'a jamais dit de quel endroit particulier

9 provenait cet obus.

10 Donc, à mon avis, il n'est pas acceptable que le conseil de la

11 Défense l'accuse de mentir sur ce point,

12 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Très bien.

13 Maître Tapuskovic, demandez au témoin [comme interprété] des

14 éclaircissements. Quand vous dites que le témoin ment, sur quel point

15 particulier de sa déposition porte votre accusation ?

16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Etant donné le document que nous venons de

17 voir et tout ce que le témoin nous a montré de son travail sur place au

18 cours de son enquête, je suis persuadé que c'est lui-même, en personne, ou

19 quelqu'un qui lui était proche - et je le démontrerais plus tard au cours

20 de contre-interrogatoire, que c'est le témoin ou un de ses proches qui a

21 monté toute cette affaire de toutes pièces - je crois que le témoin ou

22 quelqu'un qui était tout près de lui à ce moment-là a tiré ce projectile

23 pour ensuite imputer la responsabilité à la partie serbe, et je maintiens

24 ma déclaration.

25 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Vous l'avez déjà dit au témoin, il a

26 répondu par la négative, donc avançons.

27 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

28 Q. Je n'affirme pas simplement que vous avez fait ce que j'ai déjà dit,

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1 mais vous avez, d'après moi, fait quelque chose d'encore plus grave, car le

2 cadavre d'un de vos camarades qui a été tué, je ne sais pas à quel endroit

3 il a été tué durant les combats, je suis très chagriné face à la mort de

4 qui que ce soit.

5 Mais j'affirme que ce cadavre de votre camarade, vous l'avez

6 transporté sans doute avec l'aide de quelqu'un d'autre, parce que tout seul

7 vous n'auriez pas pu le faire. Vous l'avez transporté jusqu'à la cour

8 intérieure du bâtiment de la télévision, là où a été photographié le

9 cadavre que vous avez montré. Est-ce que c'est vous qui avez agi ainsi ou

10 pas ?

11 R. Je n'ai pas fait cela.

12 Q. Mais la toute petite quantité de sang qui a été découverte sur les

13 lieux où la victime aurait été touchée, est-ce que c'est vous qui avez

14 placé cette tache de sang à cet endroit ?

15 R. Cette tache de sang, je l'ai découverte sur les lieux. J'ai

16 photographié cette tache, j'ai inscrit un numéro sur la photographie à côté

17 de la tache et je l'ai incluse dans mon rapport.

18 Q. Ce n'est pas une marre de sang. Quand quelqu'un meurt, il saigne

19 beaucoup plus que cela. J'affirme que ce n'est pas le sang de la personne

20 qui est morte, mais que c'est vous qui avez apporté ce sang sur les lieux ?

21 R. Je n'ai pas apporté ce sang sur les lieux.

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai encore un

23 document à soumettre au témoin. Je vous demande un instant pour retrouver

24 exactement le document qui m'intéresse.

25 Est-ce que je peux m'asseoir un instant, Monsieur le Président, pour

26 consulter le document ?

27 [La Chambre de première instance se concerte]

28 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître

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1 Tapuskovic.

2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

3 Q. Vous avez affirmé que vous l'aviez transporté à l'intérieur du

4 bâtiment.

5 R. Je ne me rappelle pas avoir dit que c'est moi qui l'avais transporté à

6 l'intérieur du bâtiment, et d'ailleurs, je ne l'ai pas transporté, ce

7 cadavre.

8 Q. Merci.

9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je ne vais pas insister, mais maintenant,

10 nous allons procéder de la même façon avec un autre document que je

11 voudrais soumettre au témoin, à savoir sa déclaration préalable du 24 avril

12 2006. Je demanderais que le témoin la lise rapidement pour ne pas perdre de

13 temps.

14 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Monsieur le Procureur, y a-t-il

15 besoin de précautions particulières eu égard aux mesures de protection ?

16 M. SACHDEVA : [interprétation] Si le conseil a l'intention de montrer la

17 première page ou une page où figure le nom du témoin, je pense que pour

18 cette partie de l'interrogatoire il faudrait passer à huis clos partiel, à

19 moins que, si j'ai bien compris, les images ne soient pas diffusées sur les

20 écrans du public, auquel cas il n'y a pas de problème.

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Est-ce que le témoin confirme que

22 c'est lui qui a signé ce document ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Le document que j'avais il y a un instant sur

24 mon bureau ?

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui.

26 Est-ce que nous sommes à huis clos partiel ou en audience publique ?

27 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Nous sommes en audience publique.

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il faut que la deuxième page soit montrée

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1 au témoin. Elle est déjà sur les écrans. Je ne vais poser de questions

2 qu'au sujet d'un passage particulier.

3 Q. Monsieur, regardez ce document, quatrième paragraphe. Je cite : "Au

4 moins un policier a été tué par l'explosion de la bombe à côté du bâtiment

5 de la télévision le 28 juin 1995, alors qu'il a couru vers l'endroit où

6 était tombé ce projectile avant d'exploser."

7 Quand on a un projectile qui vole lentement, que tout le monde peut voir

8 pendant son vol, comment est-il possible que le policier ait couru

9 précisément jusqu'à l'endroit où la bombe devait tomber ? Est-ce que vous

10 pouvez l'expliquer ?

11 R. Je peux l'expliquer. J'ai fait cette déclaration préalable en 2006,

12 c'est-à-dire, 11 ans après les faits. Après la fin des constatations sur

13 les lieux, ce fait a donné lieu a pas mal de débats. L'homme dont il est

14 question ici, je n'ai appris qu'il était policier que plus tard. Je ne le

15 savais pas à ce moment-là. Il se trouvait à l'endroit où était garé un

16 autobus. D'ailleurs, on voit des photographies qui montrent cet autobus

17 détruit sur le parking, du côté nord de la cour intérieure du bâtiment de

18 la télévision.

19 Dans cette déclaration préalable, il est bien dit que le policier se

20 trouvait avant l'explosion du projectile à côté de l'autobus. Lorsque le

21 projectile a frappé le mur d'en face, le policier a traversé la cour

22 intérieure en courant pour se diriger vers les marches d'escalier. C'est à

23 ce moment-là que le projectile a explosé et à voir les traces dues aux

24 éclats que l'explosion a laissé dans son dos. Il est permis de conclure que

25 l'explosion s'est produite dans son dos, mais dans la déclaration, dans la

26 déposition, il est bien dit qu'au moment de l'explosion il se trouvait à

27 côté de l'autobus, que son corps a été découvert sur les marches d'escalier

28 et qu'ensuite il a été transféré à l'intérieur du bâtiment où il a été

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1 photographié.

2 Q. Monsieur le Témoin, vous dites quelque chose complètement différent de

3 ce que vous avez dit hier. Vous n'avez pas parlé d'un policier que vous

4 auriez vu. Vous n'avez pas dit l'avoir vu courir vers l'endroit où la bombe

5 allait atterrir. Donc, vous nous dites, vous nous racontez d'histoire

6 complètement différente aujourd'hui, et je dois vous affirmer encore une

7 fois : vous mentez.

8 R. J'ai dit il y a une minute que cette déclaration préalable, je l'avais

9 donnée en 2006, c'est-à-dire, 11 ans après l'incident. Il n'est que

10 raisonnable de s'attendre à ce que des discussions et des rumeurs qui ont

11 eu lieu au poste de police aient été entendues et que la profession de cet

12 homme en tant que policier n'ait été connue que plus tard. C'est la raison

13 pour laquelle j'ai dit que c'est un policier qui a été tué, et c'est à

14 cette personne que je faisais référence.

15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je dois dire que je

16 crois que cette affaire a été montée de toutes pièces parce qu'elle

17 concernait le bâtiment de la télévision qui peut avoir une grande influence

18 sur l'opinion et que le témoin ou des amis à lui ont fait tout ce qui a été

19 décrit, c'est-à-dire que non seulement ils ont commis un crime de guerre,

20 premier point, mais que, deuxièmement, ils ont fait obstruction à la

21 justice et trompé les Juges de la Chambre.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas exact.

23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

24 Q. Je vous remercie. Compte tenu de ce que vous avez fait, j'affirme, et

25 détrompez-moi si vous en avez la possibilité, j'affirme que vous êtes

26 entièrement au courant de la façon dont les choses ont été montées de

27 toutes pièces à Markale, Markale 1 et Markale 2 ?

28 R. Je vous ai dit que je n'avais pas enquêté sur les incidents de Markale

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1 1, pas plus que de Markale 2.

2 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Monsieur Sachdeva.

3 M. SACHDEVA : [interprétation] Il me paraît, Monsieur le Président, que le

4 conseil de la Défense est en train de témoigner à partir de l'endroit où il

5 se trouve dans le prétoire. S'agissant de Markale, quel argument a-t-il

6 pour dire ce qu'il dit ?

7 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] A mon avis, il présente la thèse de

8 la Défense. Il est tout à fait en droit de le faire aujourd'hui. Il est

9 même tenu de le faire. Il a des instructions de son client. Il présentera

10 des éléments de preuve et s'il ne le fait pas, tout ce qu'il dit tombera à

11 l'eau. Il a pour devoir de présenter sa thèse.

12 Veuillez poursuivre.

13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, quand M. Nikolai a

14 été interrogé, répondant aux questions de l'Accusation, il a dit que ce qui

15 était en cause, c'étaient des bombes à fragmentation. Il a bien utilisé ce

16 terme de "à fragmentation." Je peux vous dire que de l'endroit d'où je

17 viens, tout le monde connaît le sens de ce terme.

18 Q. Est-ce que le témoin pourrait s'expliquer sur le sens de ce terme ? Des

19 bombes à fragmentation "pourries" --

20 R. "Pourri," cela veut dire que c'est comparable à un cochon, à une truie.

21 Q. Est-ce que cela ne veut pas dire que ces bombes n'ont pour but que de

22 créer de la saleté, sans nuire à la vie de quiconque ?

23 R. Je n'ai pas d'expérience des cochons ou des truies.

24 Q. Ce n'est pas non plus ce que je vous ai dit. Je vous le redemande une

25 deuxième fois. Est-ce que c'est vous qui avez placé sur les lieux les

26 cadavres de personnes qui ont été tuées à un autre endroit afin de

27 démontrer que de telles bombes pouvaient encore tuer ?

28 R. Non, c'est inexact.

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1 Q. Merci. Pour déterminer toute l'étendue de ce que vous êtes capable de

2 faire, je vais maintenant parler d'un autre incident dont il a beaucoup été

3 question ici, à savoir la tragédie atroce des conditions dans lesquelles

4 une petite fille a été tuée.

5 Etant donné que vous êtes un enquêteur de police très expérimenté, voyons

6 un petit peu comment vous avez effectué votre enquête. Je n'ai pas d'autre

7 choix que celui-ci, mais malheureusement je dois quand même vous montrer

8 cette photo. On est encore en train de dire que c'est une victime de

9 l'agression serbe, mais j'aimerais que l'on puisse quand même voir à

10 l'écran ces deux photos. Ce sont deux photos horribles qui représentent le

11 destin horrible d'une petite fille.

12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il s'agit de la pièce P125 à la page 4, je

13 crois que c'est le numéro 15, page 5.

14 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Nous les avons déjà vues. C'est

15 l'Accusation qui nous les a montrées.

16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, c'est pour cela que je vous dis

17 qu'elles ont déjà été versées.

18 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Mettez-les à l'écran, mais uniquement

19 30 secondes et pas plus.

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Cinq secondes suffira largement. Il n'y a

21 pas besoin de les avoir sous les yeux longtemps. Je veux poser mes

22 questions une fois qu'on les aura vues.

23 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Allez-y.

24 Ce n'est pas les bonnes photos, je crois.

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'ai la cote sous les yeux, P125. Les

26 voici, les photos arrivent, cela suffit. Je pense qu'on peut ne plus les

27 afficher parce que moi aussi, j'ai beaucoup de mal à regarder ces images.

28 Q. Témoin, vous avez dit que vous avez pris ces photos à la morgue.

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1 R. Hier, j'ai dit que ce n'est pas moi qui avais pris ces deux photos.

2 Q. Vous avez bel et bien dit que ces photos avaient été prises à la

3 morgue ?

4 R. J'ai dit que ce n'est pas moi qui ai pris ces photos, et j'ai en effet

5 dit qu'elles avaient été prises à la morgue.

6 Q. C'est bien ce que j'avais compris. Y a-t-il un canapé à la morgue ? Il

7 y aurait un canapé à la morgue. Je pense que cela prouve que cette photo a

8 été prise en fait dans un appartement ?

9 R. Si je me souviens bien, ce n'est pas du tout un canapé ou un sofa.

10 C'est une table en marbre ou en béton où l'on dissèque les cadavres. C'est

11 une vue qui est prise de haut en plongée. On voit cette table en béton qui

12 est utilisée pour table de dissection.

13 Q. C'était de mon erreur, mais bon.

14 Qu'en est-il de ces photos absolument épouvantables ? Elles ont quand

15 même été montrées au monde entier ce jour-là et le jour suivant ? Elles ont

16 été reprises par toutes les stations de télé du monde entier en disant bien

17 que cet enfant avait été victime de l'agression serbe.

18 R. Je ne suis pas au courant de cela.

19 Q. J'ai vu les images moi-même à l'époque. J'étais vraiment ébranlé par le

20 fait que je faisais partie de cette nation. La réaction a été extrêmement

21 forte de la part des organisations non gouvernementales en Serbie, qui nous

22 ont dit de nous mettre à genoux pour faire pénitence. Vous vous souvenez

23 quand même qu'on nous a dit qu'il fallait que nous fassions pénitence pour

24 des péchés qui avaient été commis par quelqu'un d'autre qui n'appartenait

25 pas à notre propre nation ?

26 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, je considère qu'il y

27 a des commentaires ici. Les commentaires ne sont pas permis quand même.

28 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] En effet, on ne permet pas les

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1 commentaires. Je pense que c'est une question qui vient d'être posée.

2 Maître Tapuskovic, pourriez-vous nous dire exactement la teneur de votre

3 question ?

4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

5 Q. Ma question était la suivante : Je voulais savoir si le témoin a vu à

6 la télévision et a lu dans les journaux aussi, qu'en Serbie, on nous

7 demandait sans cesse de faire pénitence, de battre notre coulpe, comme

8 aurait dû le faire tous ceux qui étaient impliqués dans le conflit ? Je

9 voulais savoir s'il a bel et bien lu cela en Serbie à l'époque ou s'il la

10 vu ? Sinon, qu'il me dise.

11 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Avez-vous lu cela dans les journaux ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

13 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Je pense qu'il faut que nous faisions

14 la pause maintenant. Nous levons la séance pour une pause de 20 minutes.

15 --- L'audience est suspendue à 15 heures 47.

16 --- L'audience est reprise à 16 heures 08.

17 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Monsieur Tapuskovic, vous pouvez

18 reprendre.

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je n'arrivais pas très bien à trouver les

20 documents précédemment, et j'ai oublié de demander qu'on les verse au

21 dossier en tant que pièces de la Défense. C'est le D00-0319, la déclaration

22 du témoin, et le document DD00-0377 pour ces deux-là --

23 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Il s'agit des deux déclarations que

24 vous avez montrées au témoin ?

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui.

26 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Pourquoi voulez-vous les verser au

27 dossier étant donné que le témoin n'a absolument rien confirmé de ce qui se

28 trouvait dans ces déclarations ? Vous avez avancé vos arguments, certes.

Page 1383

1 Mais le témoin n'a pas accepté quoi que ce soit que vous ayez dit. Il n'a

2 absolument jamais répondu par l'affirmative à ce que vous avez avancé. En

3 ce qui nous concerne, ces documents ne devraient pas être versés au

4 dossier. Il faut attendre que vous présentiez vous-même vos moyens. Peut-

5 être que vous pourrez les présenter par le biais d'autres témoins de

6 l'Accusation où la procédure sera telle que vous pouvez les verser au

7 dossier.

8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, il a nié ses

9 propres déclarations. A un moment ou à un autre, il a dû mentir puisqu'il a

10 nié ce qu'il avait écrit dans ses propres déclarations. Il a nié. Il a dit

11 que ce n'était pas vrai, qu'il n'avait jamais dit cela. Donc, c'est quand

12 même une preuve.

13 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Oui, mais on ne parle pas ici de ces

14 déclarations. Là, vous parlez plutôt de documents des Nations Unies. C'est

15 de cela que vous parlez ?

16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Absolument pas. J'aimerais au moins que

17 l'on marque cette documentation de façon provisoire pour identification. Il

18 faudrait que ces documents reçoivent une cote provisoire pour

19 identification. Je vous parle de ces deux déclarations.

20 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Je ne vous comprends pas bien.

21 J'avais cru comprendre que vous parliez du document qui émanait des

22 observateurs militaires des Nations Unies puisque vous avez demandé au

23 témoin de le lire, ensuite vous avez posé certaines questions. Ce document-

24 là, vous voulez qu'on lui donne une cote provisoire pour identification.

25 C'est bien cela ?

26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Tout à fait.

27 [La Chambre de première instance se concerte]

28 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Bien, ce document va recevoir une

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1 cote provisoire pour identification.

2 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Les documents des Nations Unies recevront

4 une cote provisoire qui sera D31 pour identification.

5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Quant aux déclarations, le DD00-319 et le

6 DD00-0377, il faudrait que ces deux documents soient versés au dossier.

7 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Monsieur Sachdeva.

8 M. SACHDEVA : [interprétation] Je tiens à soulever une objection à propos

9 du versement au dossier de ces deux déclarations.

10 Tout d'abord, le conseil vient de dire qu'il avait nié des éléments

11 qui figuraient dans cette déclaration. Or, je considère que ce n'est pas

12 vrai.

13 Ensuite, le conseil a présenté des commentaires au témoin, le témoin

14 qui est sous serment. Il est tout à fait correct pour le conseil de

15 confronter le témoin avec ce qu'il a écrit dans sa déclaration. Ces

16 déclarations, à notre avis, ne devraient pas être versées au dossier.

17 [La Chambre de première instance se concerte]

18 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Nous ne vous suivrons pas,

19 Monsieur Sachdeva. Il s'agit des déclarations du témoin. C'est aux Juges de

20 décider de leurs sorts. Nous considérons qu'elles peuvent être versées au

21 dossier.

22 Monsieur le Greffier, nous aimerions avoir une cote.

23 M. LE GREFFIER : [interprétation] La déclaration du témoin du 11 mars 1997

24 va recevoir la cote D32, et la deuxième déclaration est du 24 avril 2006,

25 et c'est la D33.

26 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Bien sûr.

27 M. SACHDEVA : [interprétation] Je voudrais que ces déclarations soient sous

28 pli scellé.

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1 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Oui, sous pli scellé.

2 M. SACHDEVA : [interprétation] Oui.

3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bien sûr, Monsieur le Président.

4 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Oui, merci.

5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, j'avais un certain

6 nombre de questions que j'avais prévues de poser.

7 Q. Cela dit, Témoin, s'il vous plaît, acceptez-vous le fait que la

8 fillette a été tuée par un fragment d'une bombe aérienne qui est passée à

9 travers d'un mur et qui est rentré dans la pièce où se trouvait cette

10 petite fille. C'est ce que vous dites ?

11 R. C'est ce qui écrit dans le rapport. La petite était dans son berceau,

12 dans son lit d'enfant dans un appartement. Je ne l'ai pas photographiée

13 pour les raisons que je vous ai expliquées.

14 Q. Ma question était claire. C'est vous qui avez fait l'enquête sur place.

15 Or, dans votre rapport il est écrit que la bombe est passée au travers du

16 mur en tuant au passage cette petite fille qui était à l'intérieur de

17 l'appartement. C'est bien ce qui est écrit ?

18 R. J'ai en effet le jour, j'ai écrit cela dans mon rapport après avoir

19 terminé l'inspection sur site, le même jour.

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Pourrait-on montrer au témoin la pièce

21 P124. Il s'agit d'une photographie montrant l'état du mur du bâtiment en

22 question. Si possible, pourrions-nous faire un zoom sur la photographie

23 pour voir exactement l'impact qu'aurait laissé cette bombe aérienne et les

24 traces de l'impact qu'aurait laissé cette bombe aérienne ? Pourriez-vous,

25 s'il vous plaît, faire un zoom juste sur l'impact.

26 Q. Vous dites que la bombe a passé au travers du mur ?

27 R. Dans mon rapport, j'ai écrit qu'une petite fille avait été tuée par le

28 projectile. Ce n'est pas la bombe en entier qui est passée à travers du

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1 mur; c'est un fragment de la bombe qui a traversé le mur.

2 Q. Pour éviter tout malentendu, je dois vous lire, Monsieur le Témoin, ce

3 que vous avez dit exactement le 13 janvier, ici même. Il s'agit de la page

4 1213, et les lignes 21 à 25. Je vous cite :

5 "Je suis arrivé avec l'équipe sur place, et j'ai inspecté la scène.

6 J'ai vu des éléments de preuve que nous disposions. J'ai marqué tous ces

7 fragments, toutes ces pièces, tous ces éléments avec des numéros. J'ai

8 photographié les preuves."

9 Vous dites ensuite que vous avez fait un dossier photographique à la

10 fois de la scène et des environs, et vous avez fait un croquis de la scène,

11 donc un croquis provisoire. Il s'agissait aussi d'un rapport provisoire, et

12 vous avez rédigé ensuite une version finale de votre rapport quand vous

13 êtes rentré au poste de police; c'est bien cela vous avez dit, en tout cas,

14 il y a deux ou trois jours ?

15 R. Oui, tout à fait.

16 Q. Est-il vrai qu'à la page 1 236, lignes 5 à 13, l'Accusation vous a posé

17 des questions à ce propos, et vous avez répondu que vous aviez fait une

18 inspection sur site habituelle, de routine, vous avez pris les photos de

19 routine, comme d'habitude, mais que les victimes de cet incident avaient

20 été photographiées par d'autres membres de l'équipe; c'est bien cela ?

21 R. J'ai dit qu'il n'y avait pas de victime à photographier sur la scène.

22 Après approbation de nos supérieurs, la victime de cet incident a été

23 photographiée ultérieurement à la morgue.

24 Q. Vous étiez les premiers à arriver sur la scène, mais vous n'êtes pas

25 entré dans la pièce où, selon vous, cette petite fille aurait trouvé la

26 mort. Vous n'avez même pas essayé de rentrer dans cette pièce, de voir quoi

27 que ce soit ou de voir ce qui s'était passé. Vous avez préféré faire un

28 croquis des environs et de la scène et c'est tout ?

Page 1387

1 R. A ce moment-là, je ne savais absolument pas qu'il aurait pu me faire

2 croire que quelqu'un avait été tué. Je ne savais rien à ce propos. C'est ce

3 que j'ai dit. Quand je suis arrivé sur la scène, je n'en savais rien.

4 Q. C'est un événement absolument épouvantable et vous n'en saviez rien.

5 Vous avez passé tellement de temps à faire votre petit dessin, à dessiner,

6 mais vous ne vous êtes jamais rendu compte qu'il y avait une petite fille

7 qui était morte ?

8 R. Oui, tout à fait, c'était comme cela. En fait, je ne le savais pas à

9 l'époque.

10 Q. Très bien. Mais ensuite, voici ce que vous dites, et je cite toujours

11 les mêmes références :

12 "En l'espèce, voici ce que mes supérieurs avaient décidé de faire".

13 J'aimerais savoir s'ils vous avaient demandé de ne pas vous rendre dans la

14 pièce ?

15 R. Non. Vous ne me comprenez pas. J'ai dit que mes supérieurs s'étaient

16 mis d'accord sur une chose, et voici ce quoi ils s'étaient mis d'accord -

17 c'est quelque chose qui n'avait rien à voir, en fait - ils étaient d'accord

18 pour que je quitte cet endroit et que je me rende à la morgue pour éviter

19 que je risque ma vie. Puisque Sarajevo était pilonnée, les obus pleuvaient,

20 et quelqu'un d'autre a fait le travail à ma place. Du coup, notre supérieur

21 nous a envoyés ailleurs juste pour réduire qu'on n'a pas trop à se

22 déplacer.

23 C'est un de mes collègues qui a été à la morgue après avoir reçu

24 ordre de ses supérieurs. Je ne parle pas de son supérieur à lui, je parle

25 de leurs supérieurs entre eux. Son supérieur et mon supérieur s'étaient mis

26 d'accord pour que ce soit lui qui aille prendre la photo et pas moi. Comme

27 cela, je n'aurai pas à me déplacer, ce qui était dangereux. On dépensait

28 moins d'essence, aussi. On n'avait même pas besoin d'utiliser les

Page 1388

1 véhicules. C'est pour cela que c'est mon collègue qui s'est rendu à la

2 morgue. Quand je vous dis que mes supérieurs s'étaient mis d'accord,

3 c'était là-dessus qu'ils se sont mis d'accord. Cela n'avait absolument rien

4 à voir avec l'enquête sur site.

5 Q. Ce qui vous intéressait c'était plutôt d'économiser de l'essence; c'est

6 cela ?

7 R. Non, absolument pas. Je voulais plutôt sauver ma peau, c'est tout.

8 Q. Très bien. Une fois qu'il a été établi que cet enfant avait bien été

9 tué, quelqu'un a-t-il été envoyé dans l'appartement pour faire un croquis

10 de l'appartement pour savoir ce qui c'était passé, pour voir un petit peu à

11 quoi ressemblait le trou dans le mur qui avait été fait par cette arme ?

12 C'était quand même assez essentiel en matière d'enquête sur site. Quand il

13 y a un mort, il faut quand même procéder de la sorte, quelle que soit la

14 personne qui ait trouvé la mort, encore plus d'ailleurs quand c'est une

15 petite fille de dix ans ?

16 R. Je ne suis pas allé parce que personne ne m'a dit d'y aller. On ne m'a

17 pas donné l'ordre d'y aller.

18 Q. Pourquoi est-ce que personne ne vous a donné cet ordre ?

19 R. Je ne sais pas. Je pense qu'il n'y avait plus personne dans

20 l'appartement.

21 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Monsieur le Témoin, avant de vous

22 rendre sur scène, qu'attendiez-vous exactement avant de vous rendre sur la

23 scène ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout ce qu'on m'a dit c'est qu'une espèce de

25 projectile avait explosé et qu'il y avait eu des blessés. Je ne savais pas

26 qui avait été blessé, je ne savais pas combien il y avait de blessés ou de

27 victimes. Je ne savais absolument pas qu'il y avait d'ailleurs eu un mort.

28 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Combien de temps s'est écoulé entre

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1 le moment où on vous a donné cette information et le moment où vous êtes

2 arrivé sur la scène ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne m'en souviens pas vraiment, mais je sais

4 qu'on attendait nos collègues du centre de sécurité qui étaient au centre-

5 ville. Une fois qu'ils sont arrivés, on est tous partis ensemble. Jusque-

6 là, la police était là-bas pour assurer la sécurité de la scène dans la

7 mesure du possible, bien sûr.

8 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Mais donnez-moi un ordre d'idée de

9 savoir combien de temps s'est écoulé avant que vous n'arriviez sur la scène

10 de l'incident ? Une demi-heure ? Une heure ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que l'heure à laquelle nous sommes

12 arrivés est consignée dans le rapport. De toute façon, il s'est écoulé au

13 moins une heure.

14 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Mais quand vous êtes sur la scène de

15 l'incident, vous répondez à Me Tapuskovic que vous êtes allé dans la rue,

16 que vous avez commencé à mettre ou à faire des annotations, des marquages

17 sur la rue, et cetera, dans la rue, sur l'asphalte. Mais vous n'êtes pas

18 rentré dans les appartements pour essayer de savoir s'il y avait eu des

19 blessés ou des victimes ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'étais pas seul, parce que je ne fais pas

21 d'enquête seul. La procédure n'était pas de rentrer dans les maisons pour

22 poser des questions aux témoins. J'avais un collègue qui était chargé de

23 cela. J'étais là pour photographier la scène de l'incident, pour inspecter

24 l'endroit où il y avait eu explosion. C'est cela que j'ai fait. Je n'avais

25 pas à rentrer dans les maisons pour poser des questions.

26 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Mais vos collègues, alors -- il y a

27 certains de vos collègues qui sont rentrés dans les maisons, dans les

28 appartements pour poser des questions ?

Page 1390

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Oui, et je pense qu'ils ont rédigé leurs

2 propres rapports, ensuite.

3 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Témoin, s'il vous plaît, pour

4 reprendre un petit peu ce que le Président vient de vous poser comme

5 questions, pourriez-vous nous dire si ce trou, ce trou que l'on voit dans

6 le mur sur votre photo, le trou traverse le mur entier ? On n'arrive pas

7 très bien à voir. Moi, aussi, j'aurais cru que dans cette photo on devrait

8 voir si le trou traverse tout le mur ou pas, mais on ne voit pas. Pourriez-

9 vous nous dire si ce trou que vous avez marqué sur la photographie était un

10 trou qui traverse entièrement le mur ou si le trou ne perfore pas

11 entièrement la paroi ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Franchement, je ne sais pas.

13 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie.

14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

15 Q. Monsieur le Témoin, comment se fait-il que vous ne sachiez pas ?

16 Comment pouvez-vous l'expliquer ? Vous n'êtes pas allé voir près du mur

17 pour regarder dans le trou s'il traversait, et s'il y avait quelqu'un dont

18 la vie était en danger ou je ne sais pas ?

19 R. Quand je suis arrivé, je suis allé à l'endroit de l'explosion. On ne

20 m'avait pas parlé de victimes. J'ai trouvé des traces de sang à l'extérieur

21 du bâtiment, mais on ne m'avait pas dit quoi que ce soit à propos de

22 victimes à l'intérieur du bâtiment. Plus tard, mes collègues m'ont dit

23 qu'en effet il y avait eu des victimes. Il y a un rapport officiel à ce

24 propos, mais j'ai fait les photos que vous voyez telles qu'elles sont.

25 Q. Ce n'était pas la question que je vous ai posée. Nous avons vu votre

26 croquis. L'Accusation a passé près d'une heure sur ce croquis. Ce que je

27 vous demande, Monsieur le Témoin, c'est si vous ne vous êtes pas approché

28 de ce mur pour regarder ce trou, pour voir si le trou était traversant ou

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1 non ? C'est bizarre de ne pas l'avoir fait ?

2 R. Je n'ai absolument pas vérifié cela. Tout ce que je sais, c'est qu'il y

3 avait des dégâts qui avaient été provoqués par l'impact d'un projectile.

4 Q. Non. Non. On vous a demandé de mentir, et vous mentez à nouveau; c'est

5 bien cela ?

6 R. Non, absolument pas.

7 Q. Pourriez-vous expliquer aux Juges pourquoi, dans un incident aussi

8 épouvantable où une petite fille de dix ans a trouvé la mort, comment se

9 fait-il que personne ne s'est rendu à l'intérieur de cet appartement pour

10 voir s'il y avait du sang ou quoi que ce soit, mais surtout pour s'enquérir

11 de savoir si le projectile avait traversé tout le mur ? Vous n'avez pas du

12 tout cette information. Vous n'en savez rien. C'est pour cela que vous

13 inventez tout.

14 R. Quel que soit --

15 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Maître Tapuskovic, je souhaite

16 simplement vous rappeler que le témoin a dit que certains de ses collègues

17 étaient rentrés dans l'immeuble, donc il n'est pas exact de dire que

18 personne n'est entré dans le bâtiment. Ce n'est en tout cas pas la

19 déposition du témoin.

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] C'est sans doute une erreur commise par

21 moi.

22 Q. Quand bien même ils sont rentrés dans le bâtiment et qu'ils sont

23 rentrés dans l'appartement, comment se fait-il alors que vous n'ayez pas de

24 photographies de cela ? D'accord, l'enfant a été enlevé. Mais il n'y a

25 aucune photo qui montre qu'il y avait beaucoup de sang. Il a dû y avoir

26 beaucoup de sang lorsque cet enfant était en train de mourir. Aucun membre

27 de votre équipe n'a pris des photos sur les lieux. Vous ne nous avez pas

28 montré des traces de sang. Et de surcroît, ce qui est encore plus

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1 important, vous n'avez pas pris de photo de l'intérieur. Pourquoi ?

2 Pourquoi personne n'a-t-il fait cela ?

3 R. Je vous dis que mes collègues sont entrés dans l'immeuble. Je n'ai pas

4 dit qu'ils sont entrés dans l'appartement. Je ne sais pas et je n'avais pas

5 d'éléments d'information à ce moment-là sur le mort d'un enfant, et eux

6 sans doute non plus.

7 En me fondant sur des éléments d'information que j'ai eus par la suite, et

8 en sachant que cette petite fille avait été tuée, ils ont préparé leur

9 rapport en tenant compte de cela. Je ne savais même pas que j'étais censé y

10 aller. Je ne savais même pas qu'il y avait un mort à cet endroit-là. C'est

11 une information qui nous a été rapportée par la suite. Pourquoi mes

12 collègues sont entrés, je ne sais pas s'ils cherchaient des personnes qui

13 étaient dans l'appartement. En ce qui me concerne, je ne suis pas allé à

14 l'intérieur de l'appartement pour prendre des photos. C'est ce que j'ai dit

15 hier.

16 Q. Mais la photographie de cette fillette a été diffusée dans le monde

17 entier afin de montrer les atrocités commises par des criminels serbes,

18 n'est-ce pas ?

19 R. Je ne sais rien à ce sujet.

20 Q. En outre, vous n'avez pas fait tout cela tout seul. Vous obéissiez

21 simplement aux ordres de vos supérieurs, n'est-ce pas ? Ensuite, c'est eux

22 qui ont tout organisé afin d'établir un lien entre cet enfant mort et une

23 bombe aérienne, n'est-ce pas ?

24 R. J'ai fait mon travail, comme je l'ai dit, et je l'ai expliqué.

25 Q. En dessinant vos croquis, vous avez accepté d'être manipulé et d'être

26 l'instrument de quelqu'un. C'est la question que je vous soumets. Oui ou

27 non ?

28 R. C'est vous qui l'affirmez sans poser de question. Vous me posez la

Page 1393

1 question maintenant directement ?

2 Comme je vous l'ai dit au début de ma déposition, mon travail

3 consistait à dessiner des croquis et à recueillir des preuves physiques. Ce

4 n'était pas à moi d'affirmer quoi que ce soit. Ma tâche consistait à

5 enregistrer simplement ce que j'ai vu sur les lieux en question.

6 Q. Je vous dis qu'on vous a donné l'ordre de faire ce que vous avez fait.

7 Vous saviez pertinemment bien ce que vous avez vu; vous avez vu que la

8 bombe n'a pas traversé le mur. Vous saviez pertinemment bien, comme toute

9 autre personne du reste, que cette fillette avait été tuée. Mais peut-être

10 que cette fillette avait été tuée à un autre endroit, peut-être par un obus

11 serbe, mais peut-être par un obus de l'ABiH. Cette petite fille a été

12 utilisée pour prouver un crime, étant donné que les auteurs n'ont pas été

13 retrouvés. Cette bombe, connue sous le nom de "sow," ne pouvait, comme son

14 nom l'indique, baptiser "truie", faire autant de dégâts que l'animal

15 portant le même nom ?

16 R. Je vous ai dit que mon travail consistait simplement à aller sur les

17 lieux. Vous avez dit que quelqu'un m'y a contraint, on j'ai mené mon

18 enquête. J'ai reçu des éléments d'information, et c'était au juge

19 d'instruction d'organiser une équipe. Personne ne m'a manipulé. Personne ne

20 m'a dit de faire ceci ou cela. Personne ne m'a demandé de photographier

21 ceci ou cela. J'ai simplement tout indiqué à l'aide de chiffres que j'ai

22 marqués au sol, comme je vous l'ai dit, par rapport à ce que j'ai trouvé

23 sur les lieux lorsque je suis arrivé à cet endroit-là.

24 M. LE JUGE MINDUA : Maître Tapuskovic, évidemment la procédure de ce

25 Tribunal est mixte, "common law" et "civil law", droit romano-germanique et

26 droit anglo-saxon, si on peut ainsi dire.

27 Ce que vous faites est acceptable mais, quant à moi, je pense que le

28 témoin est sous serment. Il est policier chargé de recherche. Quand il

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1 apprend qu'il y a un crime qui est commis, il fait son travail. Il va voir.

2 Vous, en tant qu'avocat de la Défense, vous avez le droit de contester

3 évidemment ses conclusions, mais quand vous dites qu'il a menti, qu'il a

4 été envoyé par ces autorités pour dresser quelque sorte de faux procès-

5 verbaux, pour une idéologie, vous avez le droit de faire vos affirmations,

6 mais il faut les démontrer.

7 Si je regarde le transcript et ce que j'ai entendu jusque-là, vous répétez

8 souvent qu'il a menti, qu'il a travaillé pour une idéologie. Mais je n'ai

9 pas encore vu le commencement de preuves pour soutenir qu'il a travaillé

10 sous ordres et pour les besoins d'une idéologie.

11 Lui, en tant que policier, il fait ses recherches. Il est tout à fait

12 possible que les corps qu'il a inspectés aient été placés par je ne sais

13 quelle force. Peut-être qu'il ne le savait pas. Il est sous serment. Alors,

14 il faut le démontrer. Mais pas si vous le répétez seulement, je pense qu'on

15 n'avance pas beaucoup. Je tenais quand même à faire cette remarque parce

16 que le témoin est sous serment.

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, ce que je voulais

18 entendre de lui, c'est une explication pour des choses évidentes,

19 explication qu'il n'a pas réussi à me fournir. Je maintiens toujours que la

20 bombe qui a touché le bâtiment de la télévision et cet incident-ci

21 également, qu'il s'agissait là de quelque chose qui a été fabriqué de

22 toutes pièces, et ceci peut être prouvé aisément.

23 J'ai assisté à un procès en tant qu'amicus curiae, ami de la Chambre,

24 et le Président de cette Chambre m'a précisé que je devais poser des

25 questions directement au témoin si je conteste la crédibilité du témoin. Je

26 devais clairement indiquer quelle était ma position.

27 Au fil des ans, j'ai appris devant ce Tribunal qu'il m'est très

28 difficile de dire à quelqu'un qu'il ment. On m'a fait toujours fait sortir

Page 1395

1 du prétoire en Sombor lorsque je disais directement au témoin qu'il

2 mentait. Si on me refuse cette possibilité et si je ne peux pas devant

3 cette Chambre ou devant ce Tribunal pour lequel je travaille depuis deux

4 ans, je ne peux pas lui dire qu'il ment, j'estime que ce témoin ne devait

5 pas être en droit de quitter le prétoire car il entrave la justice. Ceci

6 est un délit grave. La manipulation est également un délit grave qui, peut-

7 être puni dans le monde entier.

8 Au cours de l'interrogatoire, et je crois qu'il me semble que je vais

9 prolonger mon contre-interrogatoire, au cours de l'interrogatoire, il a

10 menti tellement souvent que je vais vous le démontrer. Il m'est très

11 difficile d'utiliser ce terme, mais je l'utilise néanmoins, et je vais

12 simplement dire que c'était un menteur. Je souhaite que vous me fassiez

13 confiance, Messieurs les Juges, sur ce point.

14 M. LE JUGE MINDUA : Je pense qu'on se comprend. Mon souci, c'est seulement

15 d'avoir la démonstration de ce que vous dites. Les affirmations seules ne

16 suffisent pas. C'est tout ce que je voulais rappeler.

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Peut-être que je devrais tout simplement

18 me rasseoir dans ce cas. Il me semble que je n'ai pas posé de questions

19 pertinentes. Peut-être que je devrais me rasseoir si vous estimez que ma

20 seule intention c'est d'appeler ce témoin à dire que c'est un menteur, et

21 il ment. Je puis vous l'affirmer. Je vais le répéter autant que cela

22 s'avère nécessaire. C'est que j'ai appris devant cette Chambre. Je pense

23 que c'est une chose excellente. Lorsque quelqu'un ne dit pas la vérité, je

24 crois que c'est une excellente chose que de pouvoir lui dire qu'il ment et

25 qu'il ne dit pas la vérité.

26 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] En réalité, au niveau du compte

27 rendu, la dernière déclaration n'est pas de moi. En fait, les derniers

28 propos sont ceux du Juge Mindua.

Page 1396

1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être que vous

2 n'avez pas lu. En tout cas, je sais ce que j'ai dit.

3 Il est vrai que ce genre de mise en scène a provoqué l'intervention

4 de la communauté internationale et je ne souhaite pas ici faire un procès

5 politique.

6 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Ecoutez, ne perdez pas votre temps.

7 Si vous n'avez pas d'autres questions à poser dans le cadre de votre

8 contre-interrogatoire, finissez-en.

9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'ai dit que j'allais utiliser la moitié

10 du temps de l'Accusation. Je vais omettre de poser un certain nombre de

11 questions que j'avais l'intention de poser à l'origine. Alors, je ne vais

12 pas poser de questions qui ne sont pas pertinentes et qui ne vont pas être

13 utiles pour les Juges de la Chambre.

14 Je souhaite maintenant demander l'affiche d'un document, s'il vous plaît.

15 Je vais, tout d'abord, clore ceci.

16 Avant de passer à cette autre question, mais en réalité le sujet est

17 le même et concerne la déclaration qu'il a donnée il y a un certain nombre

18 d'années, et qui va constituer l'ossature du reste de mon contre-

19 interrogatoire.

20 Q. Mais avant d'aborder cette question-là, Témoin, après ce que nous avons

21 entendu, l'ABiH ou la police de l'ABiH disposait également de ces bombes

22 aériennes, n'est-ce pas, qu'on appelait "truie" ?

23 R. Je ne sais pas.

24 Q. Ils disposaient de véritables bombes aériennes, n'est-ce pas ?

25 R. Je ne sais pas.

26 Q. Etes-vous au courant d'une réunion entre la présidence de la Bosnie-

27 Herzégovine et le commandement Suprême ? Je vais en parler le moment venu.

28 C'est une conversation entre Izetbegovic et Silajdzic, qui rivalisaient

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1 entre eux. Izetbegovic se vantait à l'époque, car il disait que cette

2 offensive était en cours et que l'armée avait fabriqué 800 bombes.

3 Etant donné que l'acte d'accusation affirme que l'armée de la

4 Republika Srpska était la seule d'armée qui disposait de ces bombes,

5 j'essaie de vous poser cette question-ci. Etes-vous au courant de cela ?

6 R. Non, je ne suis pas au courant de cela.

7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Maintenant, je vais vous soumettre un

8 document que j'ai dans la main qui est en cours de traduction. J'avais

9 demandé une traduction urgente, mais je ne l'ai pas reçue encore. Le numéro

10 est le D00-0403. Ce document ne comporte pas de signature. Il est en B/C/S.

11 Veuillez l'afficher à l'écran, s'il vous plaît.

12 Passons à la première page. Il s'agit d'un document qui est daté du

13 12 août 1994. Deux jours avant cette date, le général Dragomir Milosevic a

14 repris le commandement du Corps de Sarajevo-Romanija.

15 Q. Si vous pouvez lire ce document sur votre écran, vous constaterez

16 qu'il s'agit d'un document de l'armée signé par le brigadier Enver

17 Hadzihasanovic, le général de brigade. Il est précisé ici que ce document a

18 été reçu dans les dossiers de l'ABiH et certifié par l'ABiH. Cette lettre

19 indique que de très grandes quantités d'armes ont été envoyées au 1er Corps.

20 Je vais vous lire une ou deux choses dans cette lettre pour savoir si

21 vous savez quelque chose à ce propos. Si vous ne savez rien, dites-le-nous.

22 Veuillez répondre en quelques mots, s'il vous plaît. De préférence,

23 répondez par oui ou par non.

24 Est-ce que vous m'avez compris, Monsieur ?

25 R. Oui.

26 Q. "Strictement confidentiel, le succès considérable de l'ABiH, au cours

27 des deux derniers mois."

28 Voyez-vous ce passage-là ? C'est au tout début, en haut.

Page 1398

1 R. Oui, oui, je le vois, c'est juste en dessous de la date.

2 Q. Ensuite, le texte se poursuit en disant :

3 "Afin de présenter ces résultats" et cetera, je ne vais pas tout

4 lire, "les territoires qui avaient été libérés", et cetera. Si vous

5 regardez ici le point 2 :

6 "D'après les éléments d'information dont nous disposons, 300 soldats

7 ont été tués par les Chetniks."

8 Est-ce que vous pouvez lire cela ?

9 R. Non.

10 Q. C'est le deuxième point.

11 R. Ce n'est pas ce qu'on peut lire ici.

12 Q. Qu'est-ce qu'on peut y lire ?

13 R. C'est différent, vous avez dit qu'ils ont été tués par des Chetniks

14 mais je ne vois pas ce terme-là dans le texte.

15 Q. "SCA" c'est quoi, qu'est-ce que cela signifie ?

16 L'INTERPRÈTE : Conseil de la Défense, veuillez allumer votre micro. Maître

17 Tapuskovic, s'il vous plaît.

18 R. On peut y lire 305, c'est armée, soldats.

19 Q. Ce qui signifie que l'ABiH avait tué 305 soldats ?

20 R. Je ne sais pas si je suis autorisé à lire ce document. C'est la

21 première fois que je le vois. Il ne me dit rien.

22 Q. La raison pour laquelle je pose la question, c'est celle-ci : une très

23 grande quantité de munitions a été saisie, a été envoyée au 1er Corps; est-

24 ce exact ? On dit que ceci a été envoyé au 1er Corps. Est-ce que vous lisez

25 cela ?

26 R. "Le 1er Corps, nous vous envoyons ce qui suit."

27 Q. C'est exact. Ensuite, s'ensuit une liste d'armes qui ont été envoyées.

28 La question que je vous pose concerne le premier point, le char T34,

Page 1399

1 ensuite "roquettes Majlutka", et lanceur de roquettes Majlutka. Voyez-vous

2 cela ?

3 R. Oui.

4 Q. Est-ce que cela signifie de l'ABiH disposait également d'armes ? Vous

5 avez dit qu'ils ne disposaient de bombes aériennes, mais il semble qu'ils

6 disposaient de roquettes et de lance-roquettes pour les roquettes

7 Majlutka ?

8 R. Ecoutez, je lis ce que j'ai sous les yeux.

9 Q. Regardez ce qu'ils ont envoyé au 1er Corps. On peut lire roquettes

10 Majlutka ainsi que le lanceur de roquettes Majlutka.

11 R. Oui, c'est ce que dit ce document.

12 Q. Vous retrouverez cela ailleurs également. Pourriez-vous me dire, en

13 vous fondant sur ce document, est-il exact de dire que l'ABiH disposait de

14 certaines roquettes, bien que c'était des roquettes guidées par câble. Ceci

15 est daté du 12 août, l'ABiH disposait de roquettes et de lanceurs. Je vous

16 pose cette question parce que l'acte d'accusation précise que ce n'est que

17 l'armée de la Republika Srpska qui disposait de ce genre de matériel

18 militaire.

19 R. Je ne sais rien à ce sujet.

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Le document DD00-0403, est-ce que ce

21 document peut être marqué aux fins d'identification, s'il vous plaît ? Ce

22 document doit encore être traduit.

23 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Il n'est pas traduit.

24 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Non. Je crois que nous n'aurons pas plus

25 de cent pages de traduction par mois.

26 [La Chambre de première instance se concerte]

27 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Nous allons le marquer aux fins

28 d'identification.

Page 1400

1 M. LE GREFFIER : [interprétation] La cote provisoire est le D34, Messieurs

2 les Juges.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je vais devoir citer

4 le numéro de référence pour les versions anglaise et B/C/S. Ceci est une

5 tâche difficile pour moi, je vais essayer d'être aussi précis que possible.

6 J'ai ici une déclaration du témoin qui est celle du 15 novembre 1995,

7 le numéro DD00-0440. Il s'agit là d'un document qui a été préparé avant la

8 fin de la guerre ou peut-être que la guerre était terminée. Non, je ne

9 crois pas. Dragomir Milosevic est mis en accusation pour tous les crimes

10 qui ont été commis jusqu'au 21 novembre.

11 Je souhaite notamment que le témoin confirme ceci. A-t-il fait cette

12 déclaration correspondant au numéro DD00-0440 ensuite, je pourrai

13 l'interroger à huis clos partiel.

14 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Monsieur Sachdeva.

15 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaitais

16 simplement m'assurer que rien n'est diffusé.

17 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Le greffier m'assure que rien n'est

18 diffusé à l'extérieur.

19 M. SACHDEVA : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

21 Q. Je souhaite tout simplement que le témoin confirme ceci, c'est un

22 document qu'il a signé. Est-ce qu'il a fait une déclaration le 15 novembre

23 1995 ?

24 R. Oui, je l'ai signée et j'ai fait cette déclaration.

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Si la page n'est pas diffusée à

26 l'extérieur du prétoire, je souhaite maintenant voir afficher la page 2,

27 mais je souhaite revenir en audience publique.

28 Q. Vous voyez votre déclaration, n'est-ce pas ?

Page 1401

1 R. Oui.

2 Q. Si vous regardez la première page, la toute première phrase, vous dites

3 avoir terminé un cours de formation spéciale en technologie ou en

4 criminalistique. Ensuite, vous dites voir reçu une formation de mécanicien.

5 R. Oui.

6 Q. Après cela, vous avez travaillé de façon indépendante jusqu'au mois de

7 novembre 1993; est-ce exact ?

8 R. Oui.

9 Q. "En fait, je m'occupais de toutes sortes de crimes, y compris des

10 infractions dans les propriétés, des meurtres et d'autres types de crimes

11 plus graves liés au génocide."

12 R. Oui.

13 Q. On parle d'enquêtes liées au génocide, on peut regarder l'anglais, il y

14 a peut-être la version serbe. Déjà en 1993, vous faisiez des enquêtes ayant

15 trait aux génocides.

16 R. Il y avait un service spécial qui avait été créé au sein du centre de

17 sécurité publique, et ce service s'appelait le service chargé des questions

18 de génocide. Pour ce qui est des tirs embusqués et toutes les autres

19 incidents sur lesquels j'ai enquêtés, nous utilisions simplement le nom

20 générique de génocide.

21 Q. Si vous regardez la phrase suivante, vous n'avez travaillé que dans la

22 région de Sarajevo, n'est-ce pas ?

23 R. Oui.

24 Q. Ensuite, vous avez travaillé sur 350 affaires différentes, 352 en --

25 352 étaient liées au génocide.

26 Quel type de génocide avait été commis en 1993 ? Quels sont ces

27 dossiers sur lesquels vous avez travaillé, parce que vous parlez de

28 génocide ? Savez-vous exactement ce que le terme signifie ?

Page 1402

1 R. J'ai travaillé sur 350 affaires différentes et dossiers différents, y

2 compris des incidents liés au cambriolage et ce genre de chose. Cinquante-

3 deux dossiers, lorsque nous sommes allés sur les lieux du crime, et lorsque

4 ceci avait trait à des incidents de tir embusqué et de pilonnage, ceci déjà

5 en 1992.

6 Q. Ceci était fait conformément à l'ordre donné par vos supérieurs, encore

7 une fois ? Parce qu'en 1993, le gouvernement de la BiH avait déjà des

8 dossiers sur les criminels. C'est pour cela que vous deviez faire cela ?

9 R. Non, je n'avais rien à voir avec cela. C'est à partir de 1995, et à ce

10 moment-là il y avait beaucoup de choses qui avaient été faites déjà. Il y

11 avait beaucoup de gens qui avaient été tués et des gens qui avaient été

12 déplacés. C'est ce qui est dans la déclaration, déjà en 1995. Personne ne

13 m'a forcé la main de dire quoi que ce soit.

14 Q. Vous avez passé beaucoup de temps sur vos enquêtes lorsqu'il y avait

15 des victimes, et vous ne teniez pas compte du fait qu'il y avait la guerre.

16 Est-ce que j'ai bien compris ? Ce n'était pas simplement les victimes liées

17 aux bombes ? Ce n'est pas simplement les victimes de la guerre. Vous étiez

18 occupé également à enquêter sur toutes sortes de choses, lorsqu'il y avait

19 des homicides, des meurtres, ce genre de chose, n'est-ce pas, des homicides

20 involontaires, ce genre de chose ?

21 R. Oui. Il y avait 350 dossiers sur lesquels je me suis penché.

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] S'il vous plaît, je souhaite maintenant

23 présenter un article du journal, la page de couverture qui est apparue sur

24 tous nos écrans. C'est un journal qui est publié à Belgrade -- non, c'est

25 un journal bosniaque, daté de l'été dernier. Si nous pouvons afficher ce

26 document à l'écran, s'il vous plaît. C'est la DD00-0438. C'est la page de

27 couverture du journal.

28 Q. C'est un journal bosniaque qui s'intitule "La Bosnie libre," quelle que

Page 1403

1 soit l'appellation que vous souhaitez le donner. Je ne fais pas de

2 distinction. Vous voyez bien ce qu'on peut y lire ?

3 L'INTERPRÈTE : Slobodna Bosna est le nom du journal. Par conséquent,

4 citation faite par Me Tapuskovic évoque la situation terrible vécue par les

5 Serbes.

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

7 Q. Vous savez très bien de quoi parle ce journal à cet endroit ? Je sais

8 que c'était une réalité. Est-ce que vous avez enquêté au sujet de ce qui

9 s'est passé dans la rivière ?

10 R. J'ai mené des enquêtes sur place. Je n'ai pas mené l'enquête à la

11 rivière. Je ne me rappelle pas un seul cadavre qui a été jeté dans la

12 rivière. Toutes mes enquêtes sur les lieux dans toute cette période ont

13 fait l'objet de rapports, et vous pouvez trouver ces rapports dans les

14 locaux officiels du canton de Sarajevo. Cela n'est pas un secret. Vous

15 pouvez les compulser. Tout cela figure noir sur blanc dans des documents,

16 tout ce qui concerne les crimes ayant fait l'objet d'une enquête de ma

17 part, car il y a toutes sortes de noms qu'on trouve dans ces rapports, y

18 compris des noms de Serbes. Le journal dont vous parlez n'est pas un

19 journal des Musulmans de Bosnie; c'est un journal de Bosnie, si vous voyez

20 la différence.

21 Q. Ce n'est pas un journal serbe, c'est un journal bosnien. Il est écrit

22 ici que ce journal va montrer des "photographies choquantes concernant des

23 atrocités et des meurtres." C'est ce qui est écrit. Il y en a eu beaucoup

24 plus qui ont eu lieu dans la réalité que ce qui est montré dans cet

25 exemplaire du journal, dans ce numéro. Il y a eu au moins 850 cas qui n'ont

26 pas fait l'objet de contestation, n'est-ce pas ?

27 Est-ce que vous étiez responsable d'une enquête dans ce genre de

28 chose ? Est-ce que vous avez enquêté au sujet d'un seul meurtre comparable

Page 1404

1 à celui dont il est question ici ? Est-ce que vous avez des informations

2 avérées à ce sujet, puisque vous êtes enquêteur criminel ?

3 R. J'étais technicien de police scientifique. J'ai travaillé sur 350

4 affaires en enquêtant sur les lieux au moment des faits. Il y a des

5 rapports qui le montrent. Toutes les dates sont inscrites dans ces

6 rapports. Je ne sais pas aujourd'hui ce que je peux vous donner comme

7 détail. Je n'avais rien à voir avec le sort terrible vécu par les Serbes de

8 Sarajevo dont parle cette une.

9 J'ai procédé à un certain nombre d'enquêtes. Vous m'interrogez sur des

10 points particuliers. Je ne me rappelle pas les noms en ce moment. Vous avez

11 dit que le journal était un journal des Musulmans de Bosnie, et c'est à

12 cela que j'ai fait objection, parce que pour moi ce n'est pas un journal

13 des Musulmans de Bosnie, mais un journal de Bosnie.

14 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Les interprètes ont demandé à trois

15 reprises que vous ralentissiez votre débit ou ménagez une pause entre les

16 questions et les réponses, car vous vous chevauchez. Donc, veuillez mener

17 cette pause, je vous prie.

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

19 Q. Monsieur le Témoin, il est écrit ici dans cette copie du journal que

20 j'ai entre les mains, que c'est un journal des Musulmans de Bosnie, oui ou

21 non ?

22 R. C'est un journal qui est publié en Bosnie-Herzégovine. Ce n'est pas un

23 journal publié par les Musulmans de Bosnie.

24 Q. Pour autant que je le sache, les Serbes parlent de la Republika Srpska,

25 et n'utilisent pas les expressions utilisées ici. Enfin, cela n'a pas

26 d'importance. Est-ce que vous avez eu ce journal entre les mains, oui ou

27 non ?

28 R. Non. C'est la première que je jette les yeux sur ce journal.

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1 Normalement, je ne lis pas ce genre de presse, si c'est cela que vous me

2 demandez.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vérifie, parce que je ne vais pas citer

4 l'intégralité du texte. Parlons des tireurs embusqués, pour nous concentrer

5 sur l'essentiel.

6 Q. Vous avez parlé des tirs provenant de tireurs embusqués. Il en est

7 question ici dans le document que vous avez en ce moment sous les yeux --

8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Non. Il faut que je redemande l'affichage

9 du document qui m'intéresse. DD00-0440, car celui qui est sur les écrans

10 actuellement n'est pas celui qui m'intéresse maintenant.

11 Version anglaise, page 4, premier paragraphe. Page 6 de la version en

12 B/C/S, deuxième paragraphe. Voilà, vous l'avez maintenant à l'écran devant

13 vous.

14 Q. Est-ce que vous voyez ce deuxième paragraphe dans la version en B/C/S ?

15 Vous avez parlé des tireurs embusqués hier, et vous avez expliqué un

16 certain nombre de choses à ce sujet hier. Je vais simplement vous poser des

17 questions qui viennent en complément des questions qui vous ont été posées

18 par les Juges de la Chambre. Vous avez dit, et vous êtes expert de la

19 question, je cite :

20 "Une enquête concernant un tireur embusqué suit le cours classique d'une

21 enquête relative à un meurtre, et lorsque je parle de tireur embusqué, je

22 parle de quelqu'un qui utilise une arme à feu équipée d'une lunette

23 optique. Bien entendu, quand je commençais l'enquête, je ne savais pas si

24 le tireur avait utilisé, oui ou non, un fusil à lunette."

25 Qu'en est-il de la majorité des cas où vous êtes intervenu en tant

26 qu'enquêteur ? Est-ce que vous ne pensiez pas dans la majorité des cas au

27 départ qu'un fusil à lunette avait été utilisé ?

28 R. C'est écrit dans ma déclaration préalable. Je ne savais jamais, en tout

Page 1406

1 cas, je ne partais jamais du principe qu'un fusil à lunette avait été

2 utilisé, car je ne savais pas si c'était le cas. Cela ne pouvait pas être

3 déterminé à partir des marques laissées par les balles, et je n'avais

4 jamais entre les mains l'arme utilisée.

5 Quant aux tireurs embusqués, tous les endroits de la ville où il

6 agissait étaient bien connus. L'expression utilisée était : "Tir dû à un

7 tireur embusqué : Attention. Accès interdit." Bien entendu, on ne voyait

8 pas à la distance à laquelle on se trouvait l'arme qui avait été utilisée,

9 est-ce que c'était un fusil à lunette ou pas.

10 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Vous devez poser des questions

11 directes, Maître Tapuskovic, en évitant des introductions aussi longues.

12 Passez directement à la question.

13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je voulais entendre si le témoin pouvait

14 confirmer ce qui est écrit dans sa déclaration préalable. C'était ma

15 première question.

16 Q. Ce que vous avez dit au sujet de l'utilisation de fusil à lunette, est-

17 il exact ou pas ?

18 R. Un tireur embusqué utilise un fusil à lunette.

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais

20 maintenant soumettre au témoin le document numéro 738 dans les documents 65

21 ter, page 3. Dans cette page, on voit le nom du témoin --

22 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Montrez au témoin ce que vous voulez

23 lui montrer.

24 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

25 Q. Ce document est un rapport, Monsieur le Témoin, à la rédaction duquel

26 vous avez travaillé, et il vous a été montré hier par l'Accusation. Il y

27 est question d'un tir dû à un tireur embusqué et vous avez parlé d'une

28 bâche en plastique qui fermait une fenêtre.

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1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vais d'abord vous demander de

2 déterminer la nature de ce document. Après quoi, nous pourrons passer à

3 huis clos partiel. Monsieur le Président, à huis clos partiel, le témoin

4 pourra lire le passage que je veux lui soumettre, si cela vous convient que

5 nous précédions ainsi, Monsieur le Président.

6 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Le document est-il affiché sur les

7 écrans ?

8 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

9 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Les images apparaissant sur les

10 écrans ne devront pas être diffusées en direction du public.

11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il est question dans ce document --

12 car je pense que cette femme a été tuée. Je crois pouvoir dire qu'il s'agit

13 du décès de Semka Kozadra, dont nous avons longuement parlé hier. Je

14 voudrais soumettre ce document au témoin.

15 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Qu'est-ce que vous souhaitez

16 soumettre au témoin exactement ?

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je voudrais confronter le témoin avec ce

18 qu'il a dit au sujet des bâches en plastique en disant qu'elles

19 protégeaient les fenêtres de l'immeuble où un certain nombre de femmes ont

20 été blessées et une femme a même été tuée.

21 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Allez-y. Allez-y. Allez au but.

22 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Voilà, Monsieur le Président, lorsque

23 Semka Kozadra a été tuée le 3 mars 1995. Au milieu du paragraphe, il est

24 écrit ce que je cite :

25 "Lors de l'enquête sur place" - et c'est le témoin qui a réalisé

26 cette enquête - "il a été établi que la balle avait traversé la couverture

27 qui se trouvait sur le balcon, puis la bâche." Le mot "deke" [phon], qui

28 concerne le balcon, dans notre langue cela veut dire "couverture." Donc, il

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1 n'est pas question d'une feuille de plastique.

2 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Maître Tapuskovic, posez la question

3 que vous souhaitez poser au témoin.

4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

5 Q. Ma question c'est : est-ce que c'était une couverture qui fermait la

6 fenêtre ou pas ?

7 R. Sur la fenêtre, il y avait une couverture et une feuille de plastique.

8 Je l'ai déjà expliqué hier.

9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je peux poursuivre, Monsieur le

10 Président ?

11 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Oui.

12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

13 Q. Maintenant, nous avons un autre document qui vous a été soumis hier par

14 le Procureur. Il s'agit du numéro 738 dans le document 65 ter. C'est la

15 page 5 et la page 6 qui m'intéressent.

16 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Quelle utilisation avez-vous fait du

17 dernier document ? Je ne vois pas très bien en quoi il y a un rapport entre

18 le document que vous avez soumis au témoin et la question que vous lui avez

19 posée ?

20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Si le témoin a dit que la fenêtre était

21 couverte par un "deke", c'est-à-dire une couverture, alors, rien ne pouvait

22 traverser et pénétrer dans l'appartement, car on ne pouvait pas voir ce qui

23 se passait à l'intérieur de l'appartement. Il y avait une feuille de

24 plastique, mais également une couverture très épaisse qui empêchait que

25 l'on voie ce qui se passait ou ce qu'il y avait dans l'appartement, donc

26 rien n'a pu pénétrer dans l'appartement.

27 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Mais vous n'avez posé aucune

28 question. C'est vous qui faites des affirmations en vous fondant sur ce que

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1 vous avez lu dans le document. Pour ma part, je ne vois pas très bien

2 quelle est la question que vous avez posée au témoin. Vous n'en êtes pas

3 arrivé à l'heure des plaidoiries, Maître.

4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pose mal mes

5 questions, parce que c'est le témoin qui, lors de son enquête sur les

6 lieux, a constaté que la fenêtre était recouverte d'un "deke," dans notre

7 langue, et c'est lui qui a dit que la balle avait traversé la couverture.

8 J'ai demandé si ce que le témoin déclare dans sa déclaration préalable est

9 exacte ou pas ? Est-ce que c'est une couverture qui fermait la fenêtre ? Je

10 ne sais pas ce qui est écrit dans vos traductions en anglais. S'il y a une

11 erreur dans la traduction anglaise c'est inacceptable, car dans le texte

12 original en serbe, ce qui est écrit ce n'est pas que la fenêtre était

13 couverte d'une feuille de plastique. Oui, il y avait une feuille de

14 plastique, mais avant la feuille de plastique, devant la feuille de

15 plastique, il y avait une couverture.

16 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Oui, Monsieur le Témoin.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans le rapport il n'est pas dit que c'est la

18 fenêtre qui était protégée par une couverture, parce qu'avant la fenêtre il

19 y avait un balcon et c'est le balcon qui était protégé. La rambarde du

20 balcon était protégée par une couverture, puis il y avait la fenêtre qui

21 était couverte par une feuille de plastique. La fenêtre au niveau du balcon

22 était destinée à empêcher que l'on puisse voir ce qu'il y avait dans

23 l'appartement, car elle ne laissait pas passer la lumière, et la fenêtre

24 était recouverte d'une bâche en plastique. La balle a traversé d'abord le

25 balcon, ensuite la feuille de plastique recouvrant la fenêtre pour aller se

26 ficher dans la salle de bain. La femme n'a d'ailleurs pas été tuée; elle

27 n'a été que blessée. Tout cela est décrit très clairement dans le texte où

28 il est dit très clairement que la balle a d'abord traversé la couverture

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1 sur le balcon, et cetera, et cetera.

2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

3 Q. Le balcon était entièrement recouvert d'une couverture, mais cette

4 couverture fermait le balcon pour empêcher que quiconque puisse voir ce qui

5 se passait à l'intérieur.

6 R. Je ne sais pas ce que vous êtes en train de dire. Je ne vois pas sur la

7 base de quoi vous êtes arrivé à cette supposition.

8 Q. Vous dites ici que le balcon était entièrement recouvert d'une

9 couverture et que personne ne voyait rien de l'extérieur.

10 R. Non, ce n'est pas ce que j'ai dit.

11 Q. Qu'est-ce qui est exact, alors ?

12 R. La couverture était destinée à empêcher que l'on voie ce qui se passait

13 dans l'appartement, mais la couverture ne recouvrait pas la partie

14 supérieure qui laissait passer la lumière. Elle ne bouchait la vue que du

15 côté de Dobrinja 4 à partir d'où la balle est arrivée.

16 Q. Vous maintenez que le tireur embusqué a visé précisément la couverture;

17 c'est bien ce que vous êtes en train d'affirmer ?

18 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Quelle est votre réponse à cette

19 question ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] J'attendais la fin de l'interprétation pour ne

21 pas chevaucher.

22 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Excusez-moi.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] La balle a transpercé la couverture d'abord,

24 puis la bâche en plastique. Je ne saurais affirmer que la femme qui a été

25 touchée a été visée délibérément. Mais l'appartement dans lequel se

26 trouvait cette femme a été visé délibérément. Je n'ai pas dit que cette

27 femme avait été touchée délibérément, mais la fenêtre qui se trouvait

28 derrière le balcon protégé par la couverture, cette fenêtre a été visée

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1 délibérément, et derrière la fenêtre, se trouvait cette femme qui a été

2 atteinte.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

4 Q. Merci de vos explications. Parlons maintenant du document 65 ter numéro

5 738, pages 5 et 6. Dans ce document, il est toujours question de cette

6 malheureuse femme, Semka Kozadra. Je vais vous lire un passage de ce texte

7 en vous demandant de confirmer si c'est bien ce que vous avez dit.

8 Voilà, le texte s'affiche à l'écran. Je cite ce qu'on peut lire dans votre

9 rapport, je cite :

10 "Le 3 mars 1995, aux environs de 7 heures 45, dans l'appartement situé au

11 rez-de-chaussée du numéro 6 de la rue Emila Zola, Semka Kozadra a été

12 blessée. Elle a été blessée parce qu'une balle perdue, donc balle perdue de

13 calibre 7,62-millimètres a traversé la couverture qui servait d'écran au

14 niveau du balcon."

15 Ensuite, vous donnez d'autres détails. Alors, je vous demande si ce qui est

16 écrit ici est exact, à savoir que cette balle perdue est venue de quelque

17 part ? Est-ce que ce qui est écrit dans votre rapport est exact ?

18 R. Oui. La balle est arrivée, et j'ai noté son parcours dans mon rapport.

19 Q. C'était une balle perdue. Vous êtes immédiatement arrivé à la

20 conclusion que c'était une balle perdue, parce qu'il y avait la couverture,

21 et cetera, et cetera, et la cible visée ne l'était pas délibérément ?

22 R. Ce n'était pas à moi qu'il appartenait de déterminer si cela avait été

23 fait délibérément ou pas, mais j'ai dit que la couverture masquait ce qui

24 avait derrière à la vue.

25 Q. Dans la dernière phrase, vous dites que : "Cette balle venait de la

26 direction de Dobrinja 4, qui était sous le contrôle de l'agresseur." N'est-

27 ce pas ?

28 R. Oui.

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1 Q. On a une balle perdue, et Dobrinja, qui est cœur de Sarajevo, dans le

2 quartier où habitait aussi bien des Serbes que des Musulmans. Comment est-

3 ce que vous pouvez déterminer que c'est à partir des positions de

4 l'agresseur que cette balle provenait ? Qu'il s'agisse de Dobrinja 1, 2, 3

5 ou 4, cela n'a pas d'importance. Dobrinja c'est Dobrinja. C'est le même

6 quartier. Comment cette balle perdue, d'après vous, a pu provenir des

7 positions de l'agresseur, comme vous le dites ?

8 R. J'ai fait les constatations sur place. J'ai pu constater que la balle

9 était passée par la fenêtre de la pièce dont j'ai parlé. C'était dans le

10 quartier Dobrinja 4 qui, à l'époque, était sous le contrôle de l'armée de

11 la Republika Srpska.

12 Q. Il y avait aussi les positions de l'armée de la Republika Srpska à cet

13 endroit, puisque les deux se partageaient des positions situées au même

14 endroit.

15 R. Je n'en sais rien. Je sais que l'armée de la Republika Srpska avait ses

16 positions à cet endroit. J'ai habité à Dobrinja 4. J'ai été expulsé de ce

17 quartier, donc je connais très bien le quartier.

18 Q. Vous savez très bien qu'il y avait à peine 10 à 15 mètres séparant les

19 positions des uns et des autres, sans parler des endroits où les positions

20 étaient pratiquement accolées, les positions de l'armée de la Republika

21 Srpska et l'ABiH ?

22 R. J'ai dit, eu égard aux positions respectives des uns et des autres,

23 qu'elles faisaient probablement chacune le tour de la ville. J'ai dit que

24 la balle venait de Dobrinja 4. Je n'ai pas précisé le lieu exact d'où le

25 tir avait été effectué.

26 Q. Est-ce qu'il s'agissait des positions de l'ABiH ? Est-ce que ce n'était

27 pas tout à fait possible qu'elle soit venue des positions de l'ABiH, comme

28 il était possible qu'elle soit venue des positions de l'armée de Republika

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1 Srpska.

2 R. Le bâtiment était sur le front même. Je ne pense pas qu'il y avait des

3 tranchées, donc le bâtiment était pratiquement sur la ligne de front.

4 Q. Il est vrai aussi que le front traversait un grand nombre de bâtiments,

5 qu'il y avait pas mal d'immeubles, dont un côté se trouvait du côté des

6 positions de l'armée de Republika Srpska et l'autre côté se trouvait du

7 côté des positions de l'ABiH ?

8 R. Oui, c'est exact. Certains quartiers étaient divisés en deux. La

9 situation était ce qu'elle était. Malheureusement, cette femme n'avait pas

10 d'autres possibilités que de résider là où elle habitait.

11 Q. Pour finir sur ce sujet des tireurs embusqués, j'aimerais revenir sur

12 un autre document dont vous avez parlé hier. La femme dont le prénom est

13 Zinata et qui, elle, a été tuée.

14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Tout à l'heure, j'ai fait une erreur

15 lorsque j'ai dit qu'elle n'avait été que blessée. L'incident s'est produit

16 le 3 mars. Le document est le document 738, dans les documents 65 ter, et

17 ce qui m'intéresse c'est la page 13.

18 Q. Nous en avons parlé hier déjà. Vous voyez le passage ? Je vais vous

19 lire l'avant-dernier paragraphe, je cite :

20 "Je tiens à signaler que ce même jour, c'est-à-dire le 3 mars, à

21 l'heure indiquée, on a constaté que dans les autres appartements également

22 des balles avaient pénétré à l'intérieur des appartements dans les étages

23 supérieurs, mais dans ces cas-là il n'y a pas eu de blessés."

24 C'est bien ce qui est écrit ?

25 R. Oui.

26 Q. Il s'agit de bâtiment qui était traversé par la ligne de front ?

27 R. Ce n'est pas écrit quelle est la situation exacte du bâtiment.

28 Q. Je vous pose la question. Est-ce que ce bâtiment était l'un de ceux qui

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1 étaient traversés par le front ?

2 R. Oui, oui, c'est ce bâtiment. C'est le même que tout à l'heure.

3 Q. Un peu plus loin, je cite : "Le bâtiment dans lequel nous habitons est

4 pour partie tourné vers Dobrinja 4 qui était sous le contrôle de

5 l'agresseur."

6 Un peu plus loin, nous trouvons le passage suivant, je cite : "Dans

7 les pièces qui regardent vers ce quartier, en général, on n'habite pas."

8 R. Exact. Je peux dire que ce qui est écrit correspond à ce que vous avez

9 lu, mais je ne peux pas dire si quelqu'un habitait ou pas dans ces pièces.

10 Q. Je vous soumets ce passage précisément, parce qu'il y avait des pièces

11 qui faisaient face au front et que les gens avaient peur en permanence. Les

12 gens avaient peur de recevoir une balle partant du front, une balle perdue,

13 par exemple; est-ce que ceci est exact ?

14 R. J'ai fait les constatations d'usage et j'ai constaté qu'une femme avait

15 été blessée à l'intérieur de son appartement. Ma tâche consistait à rédiger

16 un document en disant de quelle direction venait la balle, et en disant

17 s'il y avait eu des morts ou des blessés. Bien entendu il y avait des

18 victimes. Les gens étaient tués par des balles perdues, sans que ces

19 personnes aient été visées délibérément. Les tirs faisaient rage un peu

20 partout.

21 Q. C'est exactement ce que je voulais vous demander. Toutes ces personnes

22 qui ont été tuées dans des zones contrôlées par l'ABiH ont été présentées

23 comme des victimes d'incidents impliquant des tireurs embusqués, ce qui

24 implique qu'elles étaient visées délibérément par des fusils à lunette ou

25 d'autres armes, mais en tout cas que c'était délibéré. Ceci est-il exact ou

26 pas ?

27 R. Ce n'est pas exact. Il y a des gens qui ont été tués par des balles

28 perdues. On le sait bien. On l'a constaté. On a pris des photographies dans

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1 les différents endroits où des gens ont été tués par des tireurs embusqués

2 quand ils traversaient la rue en courant. J'ai eu l'occasion à de

3 nombreuses reprises de voir ce genre de situation. D'ailleurs, moi-même

4 j'ai couru pour traverser des rues très souvent, et on voyait bien dans

5 cette foule qui traversait les rues en courant qui portait un uniforme et

6 qui n'en portait pas.

7 Q. D'après les documents que je possède, des documents que je soumettrai

8 aux Juges, vous savez très bien que l'ABiH tirait parfois 10 à 15 000

9 balles en une seule journée. Est-ce que vous êtes au courant ? Vous devez

10 l'être certainement. D'ailleurs, c'était le cas, bien entendu, aussi du

11 côté serbe. Est-ce que vous êtes au courant ?

12 R. C'était la guerre. On tirait. Je ne saurais vous dire le nombre exact

13 de balles qui étaient tirées par les uns et les autres.

14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

15 Juges, je pourrais en terminer en 10 à 15 minutes. Mais je vous serais

16 reconnaissant de décréter une pause maintenant. Il me reste que 10 à 15

17 minutes pour en finir.

18 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Nous suspendons 20 minutes.

19 --- L'audience est suspendue à 17 heures 32.

20 --- L'audience est reprise à 17 heures 50.

21 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Maître Tapuskovic, veuillez

22 poursuivre, s'il vous plaît.

23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie de m'avoir permis de

24 profiter d'une pause. En effet, au départ j'avais l'intention de verser ces

25 documents au dossier. Tout d'abord, le DD00-0440; il s'agit de la

26 déclaration du 15 novembre 1995 du présent témoin, ainsi que la page du

27 titre de "Slobodna Bosna," "Bosnie libre," DD00-438. Ensuite, la pièce de

28 la liste 65 ter 738, les pages 3 et 13.

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1 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] A l'avenir, s'il vous plaît, je

2 préférerais que vous traitiez des problèmes de versement au dossier juste

3 après avoir évoqué les documents quand ils sont encore frais dans notre

4 mémoire plutôt que de faire cela ultérieurement.

5 [La Chambre de première instance se concerte]

6 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Poursuivons. Nous allons admettre

7 cette déclaration du 15 novembre, déclaration du témoin.

8 Que sont exactement les deux autres documents dont vous venez de nous

9 parler, s'il vous plaît, Monsieur Tapuskovic ?

10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je peux vous montrer les autres documents.

11 Le premier c'est le DD00-438. C'est la page titre du magazine "Slobodna

12 Bosna," qui parle - enfin, je n'ai pas envie de le répéter. Je préfère ne

13 pas le répéter. Je vais vous donner tout le magazine une fois traduit, le

14 cas échéant lorsque ce sera nécessaire. Pour l'instant, je pense que ce

15 n'est pas encore nécessaire d'avoir la totalité du magazine.

16 [La Chambre de première instance se concerte]

17 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Ce magazine n'a aucun lien avec

18 ce témoin. Il n'y a pas de lien qui a été établi. Donc, il n'y a pas de

19 fondement permettant de verser ce document au dossier.

20 Qu'en est-il de la troisième référence dont vous nous avez parlé ?

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il s'agit de deux documents qui sont

22 contenus dans la pièce 738 de la liste 65 ter. Pour le premier document il

23 s'agit de la page 3, pour le deuxième document il s'agit de la page 13. Ce

24 sont des documents qui évoquent les incidents de tireurs embusqués pour

25 lesquels le témoin a participé aux enquêtes.

26 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Quelle est la source de ces

27 documents, s'il vous plaît ?

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Ce sont des documents dans la liste 65 ter

Page 1418

1 sous la cote 738.

2 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Pourrions-nous les afficher à

3 l'écran, s'il vous plaît.

4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il s'agit des deux documents qui décrivent

5 la couverture, la balle perdue, et cetera, et cetera. Ce sont ces deux

6 documents-là.

7 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] D'où viennent-ils ?

8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] De la liasse 738 qui figure dans la liste

9 65 ter.

10 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Non, ce n'est pas exactement ce que

11 je demande. Qui est l'auteur de ces documents ? Qui les a rédigés ? A qui

12 appartiennent-ils ? S'agit-il du rapport du poste de sécurité publique de

13 Novi Grad ou police criminelle, et cetera; c'est bien cela ? Vous dites

14 non.

15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Non, non. Cela donne le nom du témoin et

16 cela dit qu'il y était impliqué. C'est ce qui est écrit là. C'est ce que je

17 vois en haut du document. On voit que le témoin a participé à l'enquête.

18 Pour ce qui est du deuxième document, il y a eu enquête qui a été menée par

19 ce témoin, et ce sont des rapports qu'il a rédigés suite à ses enquêtes sur

20 place.

21 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, j'avais cru

22 comprendre que les documents qui sont présentés par le biais de ce témoin

23 ont déjà été versés au dossier au cours de mon interrogatoire principal. De

24 toute façon, quel que soit le cas, le premier doit être versé sous pli

25 scellé puisque le nom du témoin y figure.

26 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Ce document a déjà été versé lors de

27 votre interrogatoire principal. Enfin, c'est ce que vous êtes en train de

28 dire, Maître Sachdeva ?

Page 1419

1 Est-ce que le greffier pourrait nous aider pour tirer tout cela au

2 clair.

3 M. SACHDEVA : [interprétation] Si j'ai bien compris, le document que je

4 vois à l'écran en ce moment a déjà été versé. D'ailleurs, le document qu'il

5 a signé de sa main a aussi été versé.

6 [La Chambre de première instance se concerte]

7 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

8 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Sachdeva, pouvez-vous nous

9 donner exactement quelle est la cote en P qui a été attribuée au deuxième

10 document dont on parle, donc le rapport officiel venant du commissariat de

11 Novi Sad ou du poste de sécurité de Novi Grad ?

12 M. SACHDEVA : [interprétation] Oui, je peux vous aider.

13 Le premier document, celui qui a été rédigé par le témoin était la

14 pièce P150 sous pli scellé. Pour ce qui est du deuxième document, c'est le

15 document P151 sous pli scellé aussi.

16 [La Chambre de première instance se concerte]

17 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Très bien. C'est un exercice

18 administratif. Nous n'allons pas perdre notre temps à cela en ce moment. Le

19 Procureur nous a dit que cela avait été versé. Le greffier, de toute façon,

20 va s'en occuper et va voir ce qu'il en est. Une fois que nous saurons ce

21 qui est advenu de ces documents, le greffier nous en fera part.

22 M. LE GREFFIER : [interprétation] La déclaration du témoin en date du 15

23 novembre 1995 portera la cote D35 et sera versée au dossier sous pli

24 scellé.

25 [La Chambre de première instance se concerte]

26 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

27 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Avançons.

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, avant d'aborder le

Page 1420

1 dernier sujet de mon contre-interrogatoire, j'ai quand même une petite

2 chose que j'aimerais montrer au témoin. Il s'agit de l'autocar dont il a

3 parlé hier.

4 Q. Vous vous souvenez de l'autocar dont vous avez parlé hier et des éclats

5 de verre ?

6 R. Oui, je m'en souviens.

7 Q. Ai-je raison si je dis que vous avez fait l'enquête sur site sans la

8 présence de l'autocar ? Et d'ailleurs sans la présence des blessés non plus

9 qui avaient emmenés ailleurs. Tout ce qui vous restait sur place,

10 finalement, c'était les éclats de verre et rien d'autre ?

11 R. J'ai fait une enquête sur les lieux à deux endroits; tout d'abord là où

12 se trouvait l'autocar, ensuite aussi là où l'autocar avait été atteint.

13 Q. Donc, vous avez fait enquête. Vous avez fait l'enquête sans que

14 l'autocar soit là physiquement. Vous avez fait votre enquête en vous basant

15 uniquement sur les éclats de verre que vous avez retrouvés sur les lieux ?

16 R. Oui, j'ai fait l'enquête sur site dans le quartier où le bus avait été

17 atteint, et c'est vrai que le bus n'y était plus. Donc, on a fait l'enquête

18 sans le bus.

19 Q. Je pose ma question pour la troisième fois : vous avez enquêté

20 uniquement sur les éclats de verre qui étaient sur place et rien d'autre ?

21 R. On a trouvé des échardes, des éclats de verre. On y est allé parce que

22 les témoins nous ont dit qu'il fallait qu'on y aille, parce qu'ils nous ont

23 dit que c'était là que l'autocar avait été atteint.

24 Q. Sur la base de ces éclats de verre, vous en avez conclu d'où venait

25 l'origine du projectile ?

26 R. Oui, entre autres.

27 Q. Je vous remercie. Autre chose maintenant. Savez-vous où se trouve

28 Mojmilo ? C'est une crête très longue, qui fait 3 kilomètres de long et qui

Page 1421

1 surplombe Sarajevo, qui surplombe toute la ville.

2 R. Oui, je sais exactement où se trouve cette colline, enfin cette crête.

3 Q. Est-ce qu'elle fait bien 3 kilomètres de long ?

4 R. Oui, c'est assez long. Je ne sais pas si c'est vraiment

5 3 kilomètres, mais c'est long.

6 Q. Mettons deux kilomètres et demi. Il est vrai que pendant toute la

7 guerre cette crête a été contrôlée par l'ABiH ?

8 R. Le côté qui était en face d'Alipasino Polje, dans ce quartier-là, était

9 en effet contrôlé par l'ABiH.

10 Q. Mais il y avait certaines parties de Mojmilo qui étaient aux mains de

11 la Republika Srpska. En tout cas, c'est ce que vous êtes en train de nous

12 dire ?

13 R. Oui. Le côté qui regardait Lukavica et Trebevic était détenu par

14 l'armée de la Republika Srpska.

15 Q. Je vous remercie. Qu'en est-il du pied de cette colline, de cette

16 crête ?

17 R. De quel côté parlez-vous; le côté nord ou le côté sud ?

18 Q. Les deux. Le côté qui regardait les positions serbes et le côté qui

19 regardait les positions de l'ABiH. L'armée de la Republika Srpska se

20 trouvait au pied de Mojmilo, n'est-ce pas ?

21 R. Ils étaient côté ouest.

22 Q. Ce n'est pas ma question. Je vous ai demandé s'ils étaient au pied de

23 la colline. Ils étaient au pied de la colline, ils n'étaient pas en

24 hauteur, tout en haut de la crête ? Ils étaient au pied de la colline.

25 R. Tout ce que je puis vous dire, c'est que je n'étais pas censé y aller.

26 Je n'étais pas autorisé à y aller. Je ne sais pas du tout si c'était en

27 haut ou en bas ou au milieu. Je n'en sais rien. Tout ce que je sais, je

28 sais que de ce côté-là de Mojmilo, là je pouvais me promener sans être

Page 1422

1 attaqué.

2 Q. Donc, vous êtes en train de nous dire que tout en haut dans la colline,

3 d'une façon ou d'une autre, il y avait des positions de la Republika

4 Srpska. Avaient-ils des positions là-haut, tout là-haut sur la crête ?

5 R. Je n'en sais rien. Je n'y allais pas, je ne m'y aventurais pas. Tout ce

6 que je sais, c'est que j'avais le droit de me promener tranquillement, il

7 n'y avait pas de tirs qui venaient du côté sud, donc du côté qui regardait

8 Alipasino Polje. C'est plus facile de se repérer, si je vous parle du nord,

9 du sud, enfin des points cardinaux. Si vous dites "le pied de la colline,"

10 pour moi cela ne veut absolument rien dire. Cela peut être n'importe quel

11 des points cardinaux.

12 Q. Bien. Disons que c'était près du haut de cette colline depuis le -- il

13 y avait, en fait, un contrôle de l'ABiH qui était en haut de cette colline,

14 et c'est pour cela que vous étiez tranquille et qu'on ne vous tirait jamais

15 dessus. Alors que de l'autre côté, il y avait des positions serbes qui

16 regardaient Lukavica. C'est une crête, comme je vous l'ai dit, qui fait 3

17 kilomètres de long et qui surplombe Sarajevo.

18 R. Oui, je vous ai dit que le côté qui regardait Alipasino Polje ou le

19 nord était contrôlé par l'ABiH, alors que de l'autre côté c'était sous le

20 contrôle de l'armée de la Republika Srpska. Je ne sais pas exactement où se

21 trouvaient leurs positions. Je n'y allais jamais, je ne m'y aventurais pas.

22 Q. Très bien. Merci. L'explication est assez claire, très claire

23 d'ailleurs. Je vous remercie.

24 Parlez-nous de l'autocar, de cet autocar qui se trouvait dans la zone

25 de responsabilité de l'ABiH. Se trouvait-il au pied de cette colline

26 exactement, au pied de cette colline qui était sous le contrôle de l'ABiH

27 et qui était dans un quartier qui faisait partie de sa zone de

28 responsabilité ?

Page 1423

1 R. Non, il allait vers l'ouest, vers Dobrinja. Donc, il était près du

2 village olympique de Mojmilo. Il a été atteint avant d'atteindre le village

3 olympique d'ailleurs, à une intersection entre Mojmilo B et Mojmilo C,

4 c'est-à-dire l'intersection de ces deux rues, la Transverse nord et Safeta

5 Hadzica. Cela c'est le nom deux rues. C'est encore en pente là. C'est vrai

6 que c'est un peu le pied d'une colline, parce que c'est encore un endroit

7 qui est en pente.

8 Q. Très bien. Je n'ai plus grand-chose à vous demander, mais je tiens à

9 vous poser une question quand même. L'hôtel Zagreb qui était déjà un hôtel

10 avant la guerre, au cours de la guerre, cet endroit est devenu - en tout

11 cas, il y avait beaucoup de policiers dans ce coin-là ?

12 R. Cela je n'en sais rien, je n'en savais rien.

13 Q. Très bien. Qu'en est-il de l'hôtel Belgrade qui était aussi dans une

14 position centrale ? Je crois que l'administration de la police se trouvait

15 là. Vous pouvez quand même le dire cela, vous devriez le savoir quand

16 même ?

17 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas vraiment si c'était un bâtiment de la

18 police. Si cela avait été le cas, je l'aurais su, j'en suis certain,

19 d'ailleurs je l'aurais su.

20 Q. Très bien. Très bien. J'imagine que vous pouvez au moins me dire alors

21 où se trouvait le QG de la police en temps de guerre à Sarajevo, puisque

22 c'était ni à l'hôtel de Zagreb ni à l'hôtel Belgrade. Dites-moi où il se

23 trouvait.

24 R. Le bâtiment de la MUP et les services de Sécurité, ils se trouvaient --

25 c'est le bâtiment du centre de service de Sécurité et le bâtiment du MUP.

26 C'était cela les bâtiments de la police. Pour ce qui est des postes de

27 police, ils étaient exactement où ils avaient toujours été; un peu partout.

28 Q. Il y en avait beaucoup dans la ville. Il y avait une présence policière

Page 1424

1 forte qui était armée. Ils avaient au moins des pistolets, n'est-ce pas ?

2 R. Je sais qu'il y avait le centre de service de la Sécurité, je sais

3 aussi qu'il y avait aussi le MUP. Il y avait le poste de police de Novi

4 Grad, d'Ilidza qui se trouvait à Hrastica. Je n'ai jamais fait d'enquête

5 sur le site là-bas, parce que c'était un autre de mes collègues qui s'en

6 occupait. Donc, il y avait tous les postes de police dont je vous ai parlé,

7 c'est ceux-là que je connaissais.

8 Q. Très bien. Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous dire combien de postes

9 de police il y avait environ dans Sarajevo ?

10 R. Je vous ai donné les noms de ceux que je connaissais à l'époque. Je ne

11 sais pas s'il y en avait d'autres qui ont été utilisés à l'époque. Je vous

12 ai dit tout ce que je savais. Centar, Bijeljina, Novo Sarajevo, Novi Grad,

13 c'est ce dont je me souviens. C'est ceux où j'ai surtout fait des enquêtes

14 sur site ainsi que Stari Grad. Non, je ne sais pas s'il y en avait

15 d'autres.

16 Q. Qu'en est-il de Marin Dvor ? Parce qu'en espèce on en parlait plus

17 souvent de Marin Dvor. C'est un endroit qui est près de la plus haute tour

18 de votre côté. Quelle est la distance entre Marin Dvor et ces deux gratte-

19 ciels, les deux grandes tours ?

20 R. Il y a en effet un poste de police Marin Dvor, et il n'y a que la rue

21 Trscanska, qui fait environ 15 mètres de large, qui sépare les tours de ce

22 poste de police. On devra ajouter aux 15 mètres de la rue les trottoirs.

23 Cela nous donne à peu près 15 mètres, voire même plus, mais à peine.

24 Q. J'imagine que vous savez que c'est depuis ces grandes tours, qui sont

25 quand même presque des gratte-ciels, que les tireurs embusqués tiraient sur

26 leurs propres citoyens; vous le saviez ?

27 R. Enfin, je n'en savais rien. Je ne connais pas cela. Je n'en ai aucune

28 connaissance de cela.

Page 1425

1 Q. Je pense que vous saviez que les tireurs embusqués utilisaient quand

2 même ces emplacements pour viser des positions qui étaient détenues à

3 l'époque par l'armée de Republika Srpska. Vous le saviez ?

4 R. Non, je ne le savais pas non plus.

5 Q. Ces deux tours étaient souvent visées par les Serbes aussi, n'est-ce

6 pas, ces deux tours ?

7 R. Tout ce que je sais, c'est que ces deux tours ont été pilonnées plus ou

8 moins et qu'il n'y avait plus du tout de vitres, par exemple.

9 Q. Savez-vous - là je parle de police - savez-vous que depuis ces nids de

10 snipers, qu'il y a eu plus de victimes civiles de l'autre côté, l'autre

11 côté qui, à l'époque, étaient tenues par l'armée de Republika Srpska. Vous

12 le saviez ?

13 R. Non.

14 Q. Vous ne saviez pas que ces deux tours étaient visées exactement pour

15 cette raison, entre autres ?

16 R. Non, je n'étais pas au courant de tout cela.

17 Q. Savez-vous qu'entre 15 000 et 20 000 policiers étaient armés avec

18 pistolets, fusils, mortiers, et cetera ?

19 R. Je savais que la police était armée. Je sais qu'ils avaient des

20 pistolets, certains avaient des mitrailleuses, mais je n'ai jamais entendu

21 parler de police équipée de mortiers.

22 Q. Etant donné qu'il y avait autant de policiers en arme, savez-vous qu'à

23 aucun moment, le 1er Corps a toujours été consulté d'au moins 60 000

24 soldats ? La 12e Division, rien qu'elle, avait déjà 5 000 soldats armés,

25 surtout au cours de la période de référence en espèce.

26 R. Je ne sais pas grand-chose à propos de tous ces chiffres et de tous ces

27 faits.

28 Q. Très bien. J'ai encore quelques questions à vous poser, toujours sur

Page 1426

1 ces fameuses collines qui surplombent Sarajevo.

2 L'acte d'accusation allègue que les Serbes ont occupé les "hills" qui

3 entouraient Sarajevo et qui n'ont jamais rien fait depuis ces collines, mis

4 à part viser les civils sans aucune raison. Etes-vous d'accord avec cela,

5 les Serbes auraient été sur les collines tout autour de Sarajevo, et leur

6 seul but était de tirer sur le civil qui se promenait, un enfant, une

7 femme, quelqu'un qui est parti chercher de l'eau, quelqu'un qui va chercher

8 des légumes pour essayer de se nourrir ? Cela était le seul objectif de

9 l'armée serbe, c'était de viser ces gens, ces Serbes qui tenaient toutes

10 les crêtes autour de Sarajevo ?

11 R. Vous voulez mon opinion. Je vais vous la donner. Je pense, en effet,

12 que c'était le cas. Voici pourquoi : j'ai été coincé dans Sarajevo pendant

13 toute la guerre. Je ne pouvais pas vivre normalement. Je ne pouvais pas

14 quitter Sarajevo. J'étais toujours menacé. J'aurais pu être tué. J'ai eu

15 beaucoup de chance, mais tout le monde, on était tous dans le même bateau.

16 J'étais, en tout cas, assiégé dans Sarajevo. La ville était encerclée,

17 assiégée.

18 Q. Vous étiez un officier de police, vous travailliez sur des affaires les

19 plus essentielles, à mon avis. Un docteur, un médecin pouvait quitter

20 Sarajevo n'importe quand en utilisant le tunnel; vous auriez pu le faire.

21 Vous alors, comment de fois vous avez emprunté le tunnel qui se trouvait

22 sous l'aéroport de Butmir, ou alors, peut-être vous ne l'avez jamais

23 emprunté.

24 R. Je l'ai utilisé une fois, je l'ai emprunté pour partir, pour aller

25 chercher de la nourriture, pour qu'on puisse survivre. J'ai demandé une

26 permission, on m'a donné dix jours de permission. J'ai emprunté le tunnel,

27 parce que c'était la seule façon de sortir de la ville. C'était la seule

28 issue pour sortir et de se retrouver de l'autre côté. Je ne sais pas

Page 1427

1 exactement de quelle distance il s'agissait. On pouvait revenir avec des

2 vivres. Parfois cela durait juste quelques jours. C'est la seule fois que

3 j'ai emprunté ce tunnel, c'était la seule issue. Tout le monde n'avait pas

4 le droit en plus d'utiliser ce tunnel, d'emprunter ce tunnel. On était

5 beaucoup quand même dans Sarajevo, il n'y avait qu'un tunnel. En plus on ne

6 pouvait pas marcher droit dans le tunnel, il fallait marcher pratiquement

7 accroupi.

8 Q. Oui, je le sais. Je sais très bien à quoi cela ressemblait en 1993.

9 Vers la fin 1994 et pendant tout 1995 il y avait quand même des rails qui

10 ont été posés sous le tunnel. On a pu utiliser ces rails qui avaient été

11 posés dans le tunnel, parce qu'il y avait des petits véhicules qui étaient

12 ajustés sur les rails et qui permettaient ainsi d'approvisionner la ville,

13 approvisionner la ville en vivres ou quoi que ce soit. Le tunnel était

14 toujours continuellement emprunté par l'ABiH pour quitter Sarajevo et pour

15 aller ailleurs, n'est-ce pas ?

16 R. Oui, oui. C'est vrai, il y avait des rails qui ont été posés dans le

17 tunnel. Je m'en souviens. Je m'en souviens quand je suis passé dans le

18 tunnel. Il n'y avait pas que moi, il y avait des convois entiers de gens

19 qui essayaient de passer dans un sens ou dans l'autre, tous ceux qui

20 avaient eu le droit de partir. On n'avait pas le droit de prendre le tunnel

21 comme cela et de décider : Tiens, on va prendre le tunnel. Non, il fallait

22 demander la permission d'emprunter le tunnel. Je ne sais pas vraiment qui

23 l'a fait, qui a emprunté le tunnel. Quand je l'ai emprunté qu'une seule

24 fois, je n'étais pas en service. Or, je ne me souviens pas avoir vu des

25 médecins ou des ingénieurs ou des militaires dans le tunnel. Donc, je ne

26 peux pas répondre à votre question.

27 Q. Les 40 000 Serbes ne pouvaient pas utiliser ce tunnel, ne pouvaient pas

28 emprunter ce tunnel à moins d'avoir payé énormément d'argent, n'est-ce pas

Page 1428

1 ? Certaines personnes ont en effet payé énormément d'argent pour emprunter

2 le tunnel et ont été tuées quand ils sont sortis de l'autre côté, n'est-ce

3 pas ? Comment répondez-vous à cela en tant qu'enquêteur ?

4 R. Je peux vous le dire. Pendant tout mon service, pendant toute la

5 guerre, nous avions plusieurs multi ethnies. Il y avait des Serbes qui

6 travaillaient avec nous, ils empruntaient le tunnel et ils revenaient très

7 vivants. Je n'ai jamais vu aucun qui se soit fait tuer uniquement parce que

8 leurs noms étaient de la consonance serbe.

9 Je n'ai jamais entendu parler d'un seul cas ou quelqu'un aurait utilisé le

10 tunnel, emprunté le tunnel et se serait fait tuer à la sortie uniquement

11 parce qu'il était Serbe. Il y avait beaucoup de Serbes à Sarajevo. Ils ont

12 poursuivi et ils ont continué à vivre comme ils ont pu. Je sais qu'il y en

13 avait beaucoup. J'en connais beaucoup qui n'ont jamais quitté Sarajevo

14 pendant la guerre, et je peux vous dire qu'aucun d'entre eux n'a été

15 maltraité. J'ai parlé à nombreuses de ces personnes. Nous avons été dans

16 les abris ensemble. On essayait quand même de survivre tous ensemble.

17 Q. Puisque vous dites que vous avez beaucoup d'amis parmi les

18 Serbes, pourriez-vous me citer le nom d'un Serbe qui a réussi à quitter

19 Sarajevo pour revenir après y être exposé à la salve de balles ? Répondez

20 simplement à cette question.

21 (expurgé)

22 (expurgé)

23 [La Chambre de première instance se concerte]

24 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

25 Q. Vous ne savez pas que des bataillons entiers allaient sur

26 d'autres fronts, comme le mont Igman et d'autres champs de bataille, par

27 d'autres parties de la Bosnie-Herzégovine ?

28 R. Je ne sais rien à ce sujet. Le tunnel avait été creusé, mais je

Page 1429

1 ne sais rien à propos de ce type d'événement-là.

2 Q. Vous avez évoqué Mojmilo.

3 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je souhaite une précision,

4 peut-être que vous pourriez reposer la question au témoin ? Je n'ai pas

5 compris si le tunnel avait utilisé quelquefois également par des Serbes qui

6 souhaitaient quitter Sarajevo pour y revenir après. Pourriez-vous poser

7 cette question, s'il vous plaît.

8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

9 Q. Y a-t-il eu un seul Serbe, un policier serbe, par exemple, un de vos

10 collègues. Est-ce qu'il y avait des femmes, des enfants, des citoyens

11 ordinaires qui ne soient pas des policiers ni des soldats ? Bien sûr qu'il

12 y avait des Serbes à Sarajevo, qui étaient soldats ou policiers. Mais ce

13 que je souhaite savoir de vous, c'est s'il y a une femme ou un enfant qui a

14 réussi à quitter Sarajevo pour y revenir à l'endroit où la femme ou

15 l'enfant en question aurait pu être tué ?

16 R. Je vous ai cité en exemple le nom de cet homme qui est sorti et qui est

17 revenu. C'était un Serbe. Pour ce qui est des femmes et des enfants, je ne

18 sais pas. Je n'en ai pas vu car je n'étais pas là.

19 Q. C'est précisément la question que je vous pose. Savez-vous si un

20 citoyen ordinaire, femme ou enfant, a pu quitter et revenir à moins de

21 payer évidemment une somme importante d'argent. S'il devait verser une

22 somme importante, pourquoi reviendrait-il à Sarajevo dans ce cas ?

23 R. Je ne sais pas. Je ne sais rien à propos d'argent qui aurait été versé.

24 Je vous ai dit que je n'étais pas là. Je ne sais pas qui est sorti. Je n'ai

25 pas suivi cela, et j'ai répondu à votre question en répondant que je ne

26 savais pas.

27 Q. Fort bien. Je n'ai pas besoin d'insister sur ce point. Nous allons

28 présenter les éléments de preuve supplémentaire comme du reste le fera

Page 1430

1 l'Accusation.

2 Que savez-vous à propos de la colline de Mojmilo, qui est à

3 745 mètres, et qui avait établi ses positions sur cette colline ?

4 S'agissait-il de la position de l'ABiH qui contrôlait toute la zone de

5 Grbavica et le cimetière juif, et cetera ?

6 R. C'est une colline qui surplombe Sarajevo. C'est là qu'il y avait le

7 front. Je ne suis monté jamais là-haut. Je ne sais pas.

8 Q. Vous dites qu'il y avait également des soldats de l'armée de la

9 Republika Srpska sur cette colline. C'est ce que vous prétendez ?

10 R. Je ne prétends rien du tout. C'était une des collines qui surplombe

11 Sarajevo. Lorsque je me suis promené autour de Sarajevo, je devais faire

12 attention à ces collines. Mais je ne sais pas où étaient ces positions.

13 Mme ISAILOVIC : -- et on ne parle du tout de --

14 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Qu'est-ce qui se passe, parce qu'il y

15 a --

16 Mme ISAILOVIC : -- parce que ce n'est pas Mojmilo, ligne 10 -- ligne 11,

17 mais Debelo Brdo.

18 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Je vois. Donc, à la ligne 11,

19 lorsqu'on a évoqué Mojmilo, cela devrait être Debelo Brdo. C'est cela ?

20 C'est cela, Maître Tapuskovic ?

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, tout à fait. En fait, je ne suis pas

22 le compte rendu en anglais et je ne parle l'anglais. Je n'ai pas le temps

23 de regarder l'écran. J'ai posé une question à propos du Mojmilo. C'est là

24 où j'ai terminé ma question. Maintenant, je pose une question à propos de

25 Debelo Brdo qui est un point qui surplombe la ville de Sarajevo.

26 Q. Vous dites que c'est là qu'il y avait les positions de l'armée de la

27 Republika Srpska.

28 R. Non, je ne dis pas cela. J'ai dit que je ne savais pas. Je ne suis

Page 1431

1 jamais monté là-haut, donc je ne sais pas qui était là.

2 Q. Est-il exact de dire que Debelo Brdo est un endroit qui surplombe Marin

3 Dvor et le cimetière juif ?

4 R. Oui, effectivement, vous dominez la ville depuis cet endroit.

5 Q. Etes-vous au courant des allégations qui figurent dans l'acte

6 d'accusation, à savoir que des tirs embusqués étaient en provenance du

7 cimetière juif, alors que ce cimetière se trouve au pied de Debelo Brdo ?

8 Pourriez-vous faire un commentaire à cet égard, s'il vous plaît ?

9 R. La ville de Sarajevo se trouve au pied de Debelo Brdo. La ville se

10 trouve dans la vallée, et le quartier juif se trouve sur les flancs de

11 cette colline.

12 Q. Merci. Colina Kapa, à 940 mètres. Cela se trouve à l'ouest de Debelo

13 Brdo. Trebevic est un peu plus élevé que Colina Kapa, 30 mètres plus haut,

14 peut-être. Les positions de l'ABiH étaient à Colina Kapa.

15 R. Je ne sais pas.

16 Q. J'ai du mal à vous croire, étant donné votre métier, mais bon, je vais

17 accepter ce que vous venez de dire.

18 J'ai encore quelques questions à vous poser, ensuite j'en aurais

19 terminé. Si nous nous dirigeons vers le nord, la zone de responsabilité de

20 l'ABiH --

21 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Est-ce que vous dites que vous ne

22 connaissiez pas les positions tenues par l'ABiH dans et autour de

23 Sarajevo ? C'est ce que vous dites dans votre déposition ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact. Je ne sais pas exactement où

25 étaient ces positions, parce que je ne m'y suis jamais rendu.

26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vais reformuler

27 ma question.

28 Q. Colina Kapa, Debelo Brdo et Mojmilo, ces trois collines étaient-elles

Page 1432

1 placées sous la responsabilité ou dans la zone de responsabilité de

2 l'ABiH ? Ces collines surplombent la ville et le centre de la ville de

3 Sarajevo; oui ou non ?

4 R. Je ne sais pas. Je ne suis pas allé à ces endroits-là, et je ne peux

5 pas connaître les positions de l'ABiH ou de la Republika Srpska. Je sais

6 que ces collines encerclent la ville de Sarajevo, mais je ne sais pas où

7 étaient ces positions en question.

8 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Votre métier, est-ce qu'il serait

9 exact de dire que vous travaillez pour les services de Sécurité ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je travaillais pour le centre des services de

11 Sécurité, mais je travaillais en ville. Je ne suis jamais allé sur le

12 front. Ce nom, CSB, centre des services de Sécurité, signifie en réalité

13 police. C'est une appellation qui date un petit peu. C'était lorsque la

14 police faisait partie des services de Sûreté de l'Etat, mais moi-même, j'ai

15 passé tout mon temps en ville et je ne me suis pas rendu sur ces positions.

16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

17 Q. Je vais vous reposer ma question de façon très simple. Je ne vous

18 demande pas si l'ABiH avait ses positions à cet endroit-là. Je vous demande

19 maintenant de me donner une explication géographique. Debelo Brdo, Colina

20 Kapa et Mojmilo, ces endroits étaient-ils dans la zone de responsabilité de

21 l'ABiH ?

22 R. Honnêtement, je ne sais pas.

23 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Je crois que cette question est

24 épuisée maintenant. Vous avez épuisé cette question.

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'ai une question encore.

26 M. LE JUGE MINDUA : Dans vos fonctions, est-ce que vous aviez une

27 uniforme ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Les techniciens de la police scientifique se

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1 rendent sur les lieux en vêtements civils, mais à cette époque-là, on avait

2 remis à toute personne qui travaillait pour les centres de sécurité

3 publique des uniformes, car nous n'avions pas de vêtements. Nos vêtements

4 étaient usagés et déchirés. On nous a remis des uniformes et nous n'étions

5 pas obligés de les porter.

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

7 Q. Vous êtes né à Sarajevo ?

8 R. Oui, je suis né à Sarajevo.

9 Q. En fond, vous n'êtes jamais allé à Colina Kapa, à Mojmilo et Debelo

10 Brdo ? Vous n'êtes jamais allé à ces endroits-là ?

11 R. Oui, bien sûr que si.

12 Q. Ces trois collines surplombent-elles bien Sarajevo de ce côté-là, si on

13 ne tient pas cas de Trebevic ? Trebevic est un peu plus en hauteur et plus

14 élevé que Colina Kapa ?

15 R. Comme je vous l'ai dit, ces collines entourent Sarajevo, et Sarajevo se

16 trouve dans la vallée.

17 Q. Fort bien.

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'ai épuisé cette question, Monsieur le

19 Président.

20 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Témoin, je souhaitais savoir quelque

21 chose : vous saviez où étaient les positions serbes ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Pour ce qui est de cette question ayant

23 trait aux collines, je ne sais pas. Je sais qu'ils étaient à Nedzarici. Je

24 ne peux pas exactement dire dans quelle maison. Je sais qu'ils ont encerclé

25 Sarajevo, mais où se trouvait ce cercle, je ne sais pas. Si c'était à deux,

26 trois ou quatre kilomètres, je ne sais pas. Je ne me suis jamais rendu sur

27 aucune position de part ou d'autre. Je sais simplement que Sarajevo a été

28 encerclé de toutes parts.

Page 1434

1 [La Chambre de première instance se concerte]

2 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Vous nous avez donné une pléthore de

3 témoignages sur les balles et les tirs et les mortiers qui venaient des

4 positions serbes, qui venaient de cette direction-là, qui provenaient des

5 positions serbes ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, effectivement. Mais, si vous voyez

7 Sarajevo qui était encerclé, tous les tirs venaient de cette position-là.

8 Je n'ai pas dit qu'ils venaient de cet endroit-là plus précisément, mais de

9 ce cercle où se trouvaient les soldats serbes. Je ne vous ai pas donné de

10 point d'origine exact.

11 Il y avait deux cercles autour de la ville de Sarajevo, et j'ai dit

12 qu'ils venaient de l'endroit où se trouvaient les soldats serbes. Ils

13 étaient là en réalité, parce que Sarajevo était encerclée.

14 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Quoi qu'il en soit, vous dites dans

15 votre déposition que vous ne savez pas où se trouvaient les positions de

16 l'ABiH dans et autour de Sarajevo, quand bien même vous étiez un membre des

17 services de Sécurité ou forces de Sécurité.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais membre de la police judiciaire, et

19 s'il y avait d'autres services à cet endroit-là, je n'en faisais pas

20 partie. Je faisais partie de la police judiciaire, et je relevais de la

21 police judiciaire, et je faisais ce que j'avais à faire.

22 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] J'ai utilisé le terme "forces de

23 sécurité" pour couvrir les deux, à la fois l'armée et la police.

24 Maître Tapuskovic.

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de

26 questions à propos de la partie sud, mais j'ai encore quelques questions à

27 poser sur la partie nord. Donc, je souhaite demander au témoin la question

28 suivante :

Page 1435

1 Q. Sait-il que la colline de Zuc est à 850 mètres, qu'elle est du côté

2 nord, que la colline d'Orlic est à 876 mètres, et qu'il y a d'autres

3 collines que je ne peux pas citer maintenant, toutes ces collines se

4 trouvent au nord. Le témoin sait-il que les détachements de l'ABiH

5 détenaient des positions sur toutes ces collines ?

6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Le compte rendu n'a pas inscrit le mot

7 "Zuc," qui est à 850 mètres, et Orlic est à 876 mètres. Comme je l'ai dit,

8 il y a d'autres collines qui se trouvent au nord à la même hauteur,

9 environ. Il y a environ cinq collines.

10 Q. Savez-vous que des membres de l'ABiH se trouvaient sur ces collines ?

11 R. Oui, je sais cela.

12 Q. Sokolje; Brijesce Brdo, à l'ouest; Svabino Brdo est à 700 mètres, 689

13 pour être très précis.

14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Les noms n'ont pas été consignés.

15 Q. Sokolje; Brijesce Brdo; Svabino Brdo, à 689. Encore une fois, nous

16 n'avons pas les noms. Je dois répéter. Je vais le faire lentement. Sokolje,

17 quartier de Sokolje, ou plutôt colline Sokolje; colline de Brijesce;

18 Svabino, la colline de Svabino à 689 mètres. D'un côté, ces collines

19 surplombent Rajlovac, du côté serbe, et de l'autre côté ces collines

20 surplombent tout le champ de Sarajevo, qui est le cœur de Sarajevo.

21 Savez-vous que ces positions étaient à l'époque détenues par l'ABiH ?

22 R. Brijesce Brdo, je suis au courant. Il y a une localité avec des

23 maisons particulières. Sokojle n'est pas une colline, mais un quartier près

24 de Brijesce et en face de Rajlovac. Je sais également que ceci se trouve

25 dans le quartier de Novi Grad. C'est là que j'ai mené une enquête lorsque

26 le quartier près de Brijesce Brdo était pilonné.

27 Q. Un peu plus bas se trouve Igman, n'est-ce pas ? A l'époque de

28 Milosevic, lorsqu'il était commandant, la plus grande colline autour de

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1 Sarajevo était tenue en réalité par l'ABiH, n'est-ce pas ?

2 R. Je ne sais pas. Le mont Igman est une montagne très vaste. Je ne sais

3 pas s'il était sous le contrôle de l'ABiH, ou en tout cas, je ne sais pas

4 quelles sont les parties de l'armée de la Republika Srpska qui contrôlaient

5 tel ou tel secteur du mont Igman qui se trouve à l'ouest. Je n'ai pas la

6 moindre idée.

7 Q. Suis-je en droit ce conclure en vous posant la question suivante : si

8 le mont Trebevic qui est tout près de Sarajevo - à 800 mètres d'altitude

9 environ - et était sous le contrôle de l'armée de la Republika Srpska, et

10 que Colina Kapa de l'autre côté était le seul endroit qui dominait Sarajevo

11 et qui était sous le contrôle -- si le mont Trebevic, au-dessus de Colina

12 Kapa, était sous le contrôle de l'armée de la Republika Srpska et que

13 toutes les autres collines surplombant Sarajevo étaient sous le contrôle de

14 l'ABiH, est-ce qu'on peut dire les choses comme cela, qu'elles couvraient

15 tout le périmètre ?

16 R. Je ne suis pas sûr de ce que vous dites. Je vous ai dit que je ne

17 connaissais pas l'emplacement des positions.

18 Q. Merci beaucoup. Ce que je viens de dire sera établi durant la suite du

19 procès. Mais vous nous avez déjà donné suffisamment d'éléments de

20 confirmation.

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

22 Juges, je vous remercie de m'avoir accordé un délai supplémentaire pour mon

23 contre-interrogatoire.

24 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Questions supplémentaires, Monsieur

25 Sachdeva ?

26 M. SACHDEVA : [interprétation] Quelques-unes, Monsieur le Président.

27 Nouvel interrogatoire par M. Sachdeva :

28 Q. [interprétation] Témoin 138, pour que tout soit clair, le centre de

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1 sécurité publique était-il une institution militaire ou une institution

2 civile ?

3 R. Il s'agit du centre des services de Sécurité. Vous avez utilisé une

4 autre expression, centre des services de Sécurité. J'étais policier civil,

5 policier en civil. Je le suis toujours, aujourd'hui. Je ne porte pas

6 d'uniforme. J'étais chargé de tâches qui incombent aux policiers en civil.

7 Il y avait des hommes en uniforme qui faisaient partie de la police en

8 uniforme et qui portaient des armes. Ils étaient équipés d'un revolver et,

9 pour certains d'entre eux, de fusils automatiques à cette époque-là.

10 Q. Lorsque vous parlez de "la police en uniforme," cet uniforme, d'après

11 vous, c'était un uniforme de combat ou un uniforme de policier ? Un

12 uniforme de soldat ou de policier ? Quelle était la couleur de cet

13 uniforme ?

14 R. Au début, ces hommes portaient l'uniforme classique des policiers. Plus

15 tard, comme je l'ai dit d'ailleurs dans ma déposition, nous avons reçu un

16 autre uniforme, puisque les uniformes manquaient. Moi aussi, j'ai reçu un

17 uniforme que je n'avais pas pour obligation de porter tout le temps.

18 J'avais la liberté de m'habiller en civil ou de porter un uniforme selon

19 mon choix personnel. Chaque jour, j'avais le choix de porter l'un ou

20 l'autre.

21 Q. Le conseil de la Défense, au début de son contre-interrogatoire, vous a

22 dit, page 12, ligne 5 du compte rendu d'audience, que pendant que vous

23 étiez dans la police, celle-ci avait mené des opérations de combat pour le

24 compte de l'ABiH. Voilà la question que je voudrais vous poser : depuis

25 votre entrée dans la police, à savoir le 1er janvier et jusqu'à la fin de la

26 guerre, est-ce que vous avez mené des opérations de combat pour l'ABiH ?

27 R. Non.

28 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

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1 j'aimerais soumettre un document au Témoin 138, document qui semble émaner

2 de l'accusé. Je dispose d'exemplaires en anglais et en B/C/S pour la

3 Défense et pour la Chambre.

4 Le document pourrait, peut-être, être placé sur le rétroprojecteur.

5 Pour l'instant, cela va. Ce n'est pas nécessaire.

6 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez un document entre les mains en

7 ce moment ?

8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, s'il vous plaît.

9 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Oui, Maître Tapuskovic.

10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Dans les questions supplémentaires, est-il

11 autorisé de présenter au témoin un document que la Défense n'a pas vu

12 avant ? Est-ce que c'est acceptable, parce que j'aurais eu beaucoup de

13 questions à poser au sujet de ce document durant le contre-interrogatoire.

14 Mais en l'ayant examiné en détail au préalable. Car si on procède comme on

15 le fait présentement, je ne comprends pas très bien.

16 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Vous auriez dû demander si les

17 questions qui seront abordées par l'Accusation découlent du contre-

18 interrogatoire.

19 Pour ma part, Monsieur Sachdeva, je vous pose cette question.

20 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, les questions que je

21 vais poser découlent de ce qu'affirme le conseil de la Défense, à savoir

22 que la tour la télévision, enfin l'incident qui a concerné la tour de la

23 télévision était dû par l'ABiH. Le document que j'ai l'intention de

24 soumettre au témoin figure sur la liste des pièces à conviction. Par

25 conséquent, le conseil de la Défense a eu connaissance de ce document déjà

26 depuis pas mal de temps.

27 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Vous pouvez poursuivre.

28 M. SACHDEVA : [interprétation]

Page 1439

1 Q. Témoin 138, est-ce que vous avez un document entre les mains ?

2 R. Oui.

3 Q. En haut du document, est-ce qu'on lit les mots suivants : "SRK/Corps de

4 Sarajevo-Romanija IKM/poste de commandement avancé." Est-ce que ce document

5 porte la date du 30 juin 1995 ?

6 R. Oui. On lit les mots commandement du Corps de Sarajevo-Romanija et

7 poste de commandement avancé, ainsi que les chiffres que vous avez cités.

8 Je vois tout cela.

9 Q. Si vous passez maintenant à la fin du document, en page 2, est-ce que

10 vous voyez à la fin du texte les mots suivants "Commandant, général de

11 division Dragomir Milosevic." ?

12 R. Oui.

13 Q. Très bien. A présent, j'aimerais que vous reveniez à la première page,

14 et à la moitié de la page, à moins que ce ne soit au trois quart de la

15 page, on trouve un paragraphe qui commence par les mots suivants, je cite :

16 "Les soldats serbes font preuve d'un héroïsme sans précédent."

17 Est-ce que vous voyez cette phrase ?

18 R. Oui, j'ai trouvé le passage.

19 Q. Je vais poursuivre la lecture, je cite :

20 "Les soldats serbes font preuve d'un héroïsme sans précédent, en ne

21 laissant pas l'ennemi s'approcher de leurs amis et de leurs familles."

22 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas le texte, ils ne peuvent

23 interpréter à cette vitesse.

24 M. SACHDEVA : [interprétation]

25 Q. "Suite à une offense d'artillerie réplique, elles ont un jour frappé le

26 centre de la radiotélévision qui est un média important pour le peuple

27 serbe."

28 Est-ce que vous voyez ce paragraphe ?

Page 1440

1 R. Oui. Je lisais en même temps que j'écoutais.

2 Q. Voici ma question. La référence qui est faite ici à la tour de la

3 radiotélévision au centre de la radiotélévision, est-ce que c'est bien le

4 bâtiment où vous vous êtes rendu le 28 juin 1995 pour enquêter au sujet

5 d'une attaque suite à laquelle un projectile aurait frappé ce bâtiment ?

6 R. A Sarajevo, il n'y avait qu'un bâtiment de la radiotélévision Bosnie-

7 Herzégovine, et c'était bien ce bâtiment-là.

8 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

9 je demande le versement au dossier de ce document.

10 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Oui.

11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président.

12 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Maître Tapuskovic.

13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je n'ai pas besoin de répondre à cela,

14 mais si je vois bien ce qui figure dans ce document on y voit nulle part la

15 signature du général Dragomir Milosevic. On y voit que ces nom et prénom.

16 Et je tiens beaucoup à ce que ce document devienne une pièce à conviction

17 car il est très parlant.

18 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Ce que vous venez de dire n'empêchera

19 pas son admission. Cela ne concerne que le poids que les Juges accorderont

20 à ce document.

21 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ce document

22 constituera la pièce P152.

23 M. SACHDEVA : [interprétation] Je n'ai plus de questions, Monsieur le

24 Président.

25 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Merci, Monsieur Sachdeva.

26 Monsieur le Témoin, ceci met un terme à votre déposition. Je vous remercie

27 d'avoir témoigné, vous pouvez maintenant vous retirer.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

Page 1441

1 [Le témoin se retire]

2 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

3 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Maître Tapuskovic.

4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je ne veux pas abuser de votre temps, et

5 je ne sais pas si je vais pouvoir m'expliquer de façon très claire, mais

6 j'ai demandé avant le début du contre-interrogatoire aujourd'hui de pouvoir

7 traiter devant vous d'une question qui n'a pas grand-chose à voir avec les

8 questions dont traitent la Chambre d'habitude.

9 Il s'agit des conditions de travail de la Défense, car je suis dans

10 l'impossibilité de faire quelque chose qui a un rapport avec ce que

11 j'évoquais lorsque je vous ai demandé de rendre une décision qui

12 contraindrait le gouvernement de Bosnie-Herzégovine de faire quelque chose

13 qui n'a pas encore été fait.

14 Est-ce que je peux m'exprimer sur ce sujet maintenant?

15 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Oui. Mais si c'est un sujet qui

16 exigerait de vous une requête écrite, il serait peut-être préférable que

17 vous présentiez votre requête par écrit.

18 Enfin, entendons ce que vous avez à dire rapidement.

19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président, ceci n'est pas

20 de votre ressort, c'est quelque chose que j'aurais dû régler avec le Greffe

21 du tribunal, mais j'ai eu à faire face à un manque total de compréhension.

22 Il est question de documents que je dois utiliser, il doit absolument les

23 utiliser, ils sont très précieux pour la Défense. J'ai demandé à pouvoir me

24 rendre à Belgrade pendant deux jours pour prendre possession de ces

25 documents qui sont en très grand nombre. C'est toute une caisse. Donc, je

26 ne vois pas d'autres moyens de les rapporter sauf en les rapportant moi-

27 même. Si j'allais à Belgrade dans les conditions acceptées par le Greffe,

28 je perdrais trois jours d'indemnité et je ne tiens absolument pas à avoir

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1 des indemnités.

2 Croyez-moi, d'ailleurs le Greffe économiserait 300 ou 400 euros parce

3 qu'il ne me paierait pas d'indemnités, mais je demande la possibilité de me

4 rendre à Belgrade de façon à pouvoir prendre possession personnellement de

5 tous ces documents qui sont très importants pour moi, car je tiens à les

6 soumettre à la Chambre. J'attends ces documents depuis des mois.

7 On m'a dit qu'ils étaient prêts vendredi, et maintenant, le Greffe me

8 pose des problèmes. Donc, si les choses sont réellement ainsi, car je veux

9 être tout à fait honnête, je souhaite aller chercher ces documents moi-

10 même, et le Greffe me pose des problèmes pour le remboursement d'un billet

11 d'avion.

12 Cela supprime toute possibilité de travail de la Défense. Finalement,

13 vous savez, je peux payer moi-même ce billet d'avion, je suis tout à fait

14 prêt à le faire. Mais enfin, je n'ai pas envie de m'expliquer. C'est une

15 situation vraiment pitoyable. J'ai dû passer des heures ce matin à

16 m'expliquer avec le Greffe à ce sujet. Si les économies se font de cette

17 façon, alors je ne sais vraiment plus à quoi sert ce Tribunal, car à

18 Belgrade on ne cesse de dire que nous, les avocats, nous --

19 L'INTERPRÈTE : Phrase non terminée.

20 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Maître Tapuskovic, les questions

21 relatives au per diem ont à être réglées entre les conseils de la Défense

22 et le Greffe. Normalement, les Chambre de première instance ne s'en mêlent

23 pas, à moins qu'un problème se pose du point de vue de l'équité d'un

24 procès. Donc, je pense que vous devriez chercher d'abord à trouver une

25 solution au problème dans le cadre d'échanges entre vous et le Greffe. La

26 Chambre de première instance refuse de se mêler de cette question pour le

27 moment.

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Ce que je viens de vous dire nuit au

Page 1443

1 travail de la Défense, car dans les conditions acceptées pour le moment, je

2 ne peux entrer en possession de ce document que dans dix à 15 jours, et

3 donc --

4 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Pourquoi est-ce que vous ne payera

5 pas vous-même ces 400 Euros pour ensuite en demander le remboursement au

6 Greffe, et voir si cela fonctionne ?

7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je le ferais, mais -- je vais le faire,

8 c'est sûr. Je pensais le faire demain.

9 M. LE JUGE ROBINSON: [interprétation] Ce n'est pas une solution qui vous

10 est proposée par la Chambre. C'est simplement une démarche stratégique que

11 vous pourriez suivre.

12 Nous allons suspendre maintenant, Maître Tapuskovic, car la Chambre ne peut

13 rien faire de plus à ce sujet pour le moment.

14 Nous reprendrons nos travaux demain à 9 heures.

15 --- L'audience est levée à 19 heures 02 et reprendra le vendredi 2

16 février 2007, à 9 heures 00.

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