Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 8 février 2007

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Docherty, lorsque nous nous

7 sommes arrêtés hier, j'ai dit que nous allions prendre une décision en ce

8 qui concerne les questions posées au témoin à propos de la

9 proportionnalité.

10 Pour rester cohérent avec la décision que nous avons prise précédemment par

11 rapport à un autre témoin, voici la décision de la Chambre. La Chambre a

12 décidé que l'on peut poser des questions de proportionnalité au témoin pour

13 la raison suivante : en fin de compte, quant à savoir si une réponse a été

14 disproportionnée et a représenté un geste d'autodéfense négatif, ce sera de

15 toute façon quelque chose que la Chambre devra décider en fin de compte.

16 Mais ce témoin a suffisamment d'expérience pour nous faire part de son

17 opinion en ce qui concerne la proportionnalité ou la "non-proportionnalité"

18 d'une réponse. Pour ce qui est en revanche de l'interprétation juridique de

19 ce concept, bien sûr cela relève de la Chambre et de la Chambre uniquement.

20 Vous avez la parole, maintenant.

21 LE TÉMOIN: DAVID FRASER [Reprise]

22 [Le témoin répond par l'interprète]

23 Interrogatoire principal par M. Docherty : [Suite]

24 Q. [interprétation] Bonjour, Général.

25 R. Bonjour.

26 Q. J'ai quelques questions à vous poser à propos des réponses des Serbes

27 de Bosnie à l'attaque portée contre la caserne de Lukavica, et ensuite

28 d'autres points, et ensuite j'en finirai.

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1 Hier, vous nous avez dit, vous nous avez parlé un petit peu de votre

2 expérience en tant qu'officier de carrière canadien à propos de

3 proportionnalité, et j'aimerais vous poser la question suivante. La riposte

4 des Serbes de Bosnie sur la caserne de Lukavica était-elle bel et bien une

5 riposte proportionnelle, c'est-à-dire, en anglais, "like-versus-like",

6 identique ?

7 R. Le tir indirect des Musulmans a eu pour réponse un tir indirect de la

8 part du côté serbe, mais ce n'était pas dirigé sur le QG.

9 Q. Pour reprendre cette idée de riposte identique "like-versus-like", est-

10 ce que cela veut dire, par exemple, quand on tire avec un fusil, on riposte

11 avec un fusil, quand on tire d'un char ou on riposte avec un char, et

12 cetera, ou alors si on se trouve quand même dans un endroit ouvert, est-ce

13 que l'on peut, sans violer, sans enfreindre ces principes, demander par

14 exemple une frappe aérienne pour répondre à une attaque par char ?

15 Pourriez-vous nous répondre et nous dire si ceci serait correct ou non ?

16 R. Si on a un char dans un champ ouvert, on pourrait tout à fait envisager

17 une frappe aérienne ou une frappe à l'aide d'un autre équipement pour

18 éliminer le tank, le char, parce qu'il s'agit d'une cible militaire. On

19 veut le détruire et on utilise ce qu'on a pour le détruire. De plus, on

20 peut ainsi éviter aussi ou minimiser les dégâts collatéraux.

21 Q. Pour ce qui est de la riposte à l'attaque, la réaction à l'attaque sur

22 la caserne de Lukavica, les Serbes de Bosnie ont-ils fait de leur mieux

23 pour minimiser les dommages collatéraux ?

24 R. Non. A mon avis, non.

25 Q. Pouvez-vous généraliser ? Puisque je crois que vous avez déposé en

26 disant qu'il y a de nombreuses fois où les forces des Serbes de Bosnie

27 réagissaient aux tirs, répondaient au tir de la ville des Musulmans de

28 Bosnie, pourriez-vous nous dire si les réactions et les ripostes des Serbes

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1 étaient généralement proportionnées ou non ? Si vous dites que vous pouvez

2 le faire, nous allons entrer dans les détails.

3 R. Oui.

4 Q. Très bien. Tout d'abord, pouvez-vous nous dire la proportion de

5 ripostes qui, à votre avis, était proportionnelle ?

6 R. En règle générale, je pense que la plupart des ripostes étaient

7 disproportionnées. La plupart des personnes avec qui je travaillais,

8 d'ailleurs, étaient du même avis et pensaient que si un Musulman -- que si

9 un Serbe était tué, on pouvait envisager qu'il y aurait environ 10

10 Musulmans qui seraient tués en riposte.

11 Q. Quand vous dites que la plupart des ripostes étaient disproportionnées,

12 en règle générale, quel était le modèle de disproportion utilisé ?

13 Pourriez-vous généraliser un petit peu ce que vous venez de dire ?

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Docherty, les dommages

15 collatéraux, êtes-vous en train de faire un parallèle entre dommages

16 collatéraux, dégâts collatéraux et ripostes proportionnelles ? Je ne pense

17 pas que ces deux concepts soient identiques. Une riposte peut être

18 parfaitement proportionnée tout en infligeant des dommages collatéraux.

19 J'ai l'impression que le critère permettant d'évaluer la proportionnalité

20 d'une riposte n'a pas nécessairement quoi que ce soit à voir avec les

21 dommages collatéraux éventuellement infligés.

22 M. DOCHERTY : [interprétation] J'utilise les dégâts collatéraux comme étant

23 la marque d'une riposte, et j'essais d'utiliser la méthodologie qui a été

24 employée par cette Chambre quand nous avons interrogé en principal le

25 général Nikolai, puisque c'était, il semblerait, le critère qui avait été

26 utilisé par le témoin pour évaluer la proportionnalité. Le général Fraser

27 vient de nous dire qu'il fallait faire attention et essayer de minimiser

28 les dégâts collatéraux. Il nous a dit qu'il allait prendre cela comme

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1 critère pour voir si une réponse était oui ou non proportionnelle.

2 Bien sûr, j'écoute bien ce que vous nous avez dit. Je sais bien que

3 c'est à vous en tant que Juge de décider en fin de compte et c'est à vous

4 peut-être d'évaluer les choses à votre façon.

5 Mais j'essaye de suivre ce que j'appellerais la méthode Nikolai,

6 c'est-à-dire je donne les critères au témoin et ensuite je demande au

7 témoin d'employer ces mêmes critères pour évaluer la réponse.

8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien, très bien. Mais ce

9 n'est pas la Chambre qui a décidé de cette méthode; c'est le général

10 Nikolai qui a employé cette méthode. Il semblerait, en effet, que notre

11 témoin en l'espèce, lui aussi, emploie cette même méthode.

12 M. DOCHERTY : [interprétation] Très bien. Je reprends.

13 Q. La question est la suivant. J'aimerais savoir si les réactions des

14 Serbes de Bosnie aux attaques des Musulmans étaient disproportionnées ou

15 si, en tout cas, la disproportionnalité de ces ripostes variait, oui ou

16 non.

17 R. J'ai remarqué que la riposte était disproportionnée. Ils ripostaient

18 toujours plus violement.

19 Q. Merci.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais c'est extrêmement général,

21 ce que vous nous dites. Cela ne nous apporte pas grand-chose. Je pense que

22 le témoin a besoin de nous dire de quelle manière c'était disproportionné.

23 Ensuite, c'est à la Chambre, bien sûr, de décider. Mais c'est lui qui a

24 l'expérience, c'est lui qui a la compétence, c'est lui qui est l'officier

25 de métier. S'il doit nous aider, il faut qu'il soit plus précis et il faut

26 qu'il soit plus empirique.

27 M. DOCHERTY : [interprétation]

28 Q. Dans votre dernière réponse, vous avez dit : "J'ai remarqué que la

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1 riposte des Serbes était disproportionnée." Vous avez ajouté : "Elle était

2 plus forte." Quand vous dites : "Elle était plus forte", pourriez-vous,

3 s'il vous plaît, nous donner des détails sur cela et, si possible, dans

4 votre réponse, nous donner des observations que vous avez faites lors de

5 votre mandat avec les Nations Unies à Sarajevo ?

6 R. Voici mon expérience. Pour ce qui est du sniping, si un civil serbe

7 était tué, on savait qu'il y aurait de nombreux Musulmans qui seraient tués

8 en riposte, et en règle générale, c'était 10 pour un.

9 Pour ce qui est de l'attaque sur la caserne de Lukavica, on a une

10 série de tirs de mortier venant des Musulmans, et l'artillerie qui a été

11 employée en riposte par les Serbes a été extrêmement importante, a duré un

12 bon moment, et c'était assez disproportionné.

13 M. DOCHERTY : [interprétation] Est-ce que cela vous suffit, Messieurs

14 les Juges ?

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Les Musulmans ont utilisé les tirs

16 de mortier dans leur attaque sur la caserne, et la réaction, la riposte a

17 été des tirs d'artillerie qui ont été très nourris et qui ont duré un bon

18 moment. C'est parce que c'est l'emploi de l'artillerie ou la durée des tirs

19 d'artillerie et le feu nourri des tirs d'artillerie qui, à votre avis, rend

20 cette riposte disproportionnée ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] L'attaque sur les casernes de Lukavica était

22 contre, d'abord, le QG du corps, et la réaction a été dirigée sur la ville

23 en entier. La riposte, à mon avis, ne visait pas une cible militaire. Je me

24 suis dit que si on aurait pu trouver où se trouvait le mortier, il aurait

25 fallu tirer sur les casernes, la caserne de Lukavica pour éliminer le

26 mortier. Cela aurait été à peu près correct, mais un tir d'artillerie sur

27 toute la ville pendant un bon moment, ce n'était qu'une seule salve ou une

28 seule rafale; c'étaient plusieurs rafales pendant assez longtemps. Quelle

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1 était la cible de tous ces tirs, je n'en n'ai aucune idée. On ne savait

2 pas. Cela semblait plutôt viser toute la ville. On a sorti quelques tirs de

3 la ville et il en est revenu énormément, en revanche.

4 A mon avis, je voudrais savoir d'abord quelle était la cible et je voudrais

5 savoir si c'était bel et bien -- et je ne pense pas que c'était

6 proportionné parce que c'était un barrage, un tir de barrage sur la ville

7 incessant.

8 [La Chambre de première instance se concerte]

9 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous demande un éclaircissement.

10 Votre première réponse aux questions qui vous ont été posées était la

11 suivante : c'était l'arme employée et la durée des tirs qui constituaient

12 la disproportion même de la réaction et de la riposte. Vous avez dit, si je

13 ne me trompe, que le fait qu'on ait employé l'artillerie pour répondre à

14 une attaque de mortier, c'était un élément; l'autre élément étant le fait

15 que cela a duré pendant plusieurs jours. Ensuite, pour répondre à la

16 question du Président, vous avez ajouté que c'était aussi la nature assez

17 aveugle de la riposte qui était un élément de disproportionnalité. Alors,

18 pourriez-vous nous dire ce qu'il en est ? Qu'est-ce qui caractérisait

19 vraiment la disproportionnalité ?

20 Est-ce que vous comprenez bien ma question ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, parfaitement.

22 C'est les deux, c'est entre les deux. En tant qu'officiers, nous savons que

23 nous devons prendre en compte un grand nombre de paramètres. La

24 proportionnalité n'est qu'un facteur qui doit être pris en compte en

25 association avec d'autres éléments et d'autres paramètres : la nécessité

26 militaire, le fait de savoir si oui ou non il s'agit d'une cible militaire

27 et les dégâts collatéraux. C'est une équation compliquée et il y a beaucoup

28 de paramètres.

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1 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Oui, oui, certes, mais il nous fait

2 avoir tous les paramètres de l'équation.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je répète pour être sûr que tout ceci est bien

4 clair.

5 Les Musulmans ont tiré sur une cible militaire, la caserne de Lukavica qui

6 était un QG.

7 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Est-ce qu'ils l'ont atteinte ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'était pas loin. A mon avis, je pense que

9 c'était une cible légitime, une cible militaire. Il y avait des civils,

10 certes, aux alentours, mais les munitions ont atteint les environs du QG,

11 puisque nous avons obtenu des rapports de la part des soldats français qui

12 étaient au QG et qui disaient qu'ils étaient attaqués par des mortiers qui

13 venaient de la ville. Ils étaient dans le coin, qui était une cible serbe

14 militaire, donc dans ce cas-là il n'y a pas grand-chose à dire puisque,

15 enfin, bien que les Musulmans ne tiraient pas sur les soldats français, ils

16 tiraient sur le QG serbe, donc il s'agit d'un tir militaire sur des

17 militaires. Tout va bien.

18 La réaction maintenant, la riposte qui a été notée n'a pas visé ce qui

19 selon nous était une cible militaire. Cela, c'est un critère qui,

20 visiblement, n'était pas satisfait. Ensuite, il ne semble pas que l'on ait

21 pris en compte l'éventualité de dégâts collatéraux. Troisièmement, bon, on

22 reçoit quatre munitions et on en envoie quatre, ce n'est pas du tout cela.

23 Il y a eu un tir extrêmement nourri qui a été renvoyé pendant très

24 longtemps. Là encore, de notre point de vue, cela nous a paru

25 disproportionné.

26 Les trois critères ne semblaient pas être satisfaits par rapport aux tirs

27 initiaux qui venaient des Musulmans; pas de cible militaire,

28 proportionnalité et prise en compte des dégâts collatéraux éventuels qui

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1 pourraient être infligés aux civils dans les environs.

2 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci. J'ai encore besoin d'un autre

3 éclaircissement. Voici mon autre question : les cibles militaires

4 bosniaques des Musulmans étaient-elles accessibles ? Est-ce qu'on pouvait

5 savoir où elles se trouvaient ? Etait-il possible de déterminer où elles

6 étaient et de les atteindre ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. Non. Les mortiers musulmans se

8 déplaçaient dans la ville, et il était extrêmement difficile pour les

9 Serbes de riposter sur eux parce qu'ils étaient mélangés avec les civils,

10 ils étaient positionnés dans des endroits civils. Ils le faisaient

11 évidemment délibérément parce que c'est très difficile en cas de riposte

12 dans ce cas-là de ne pas mettre en danger les civils.

13 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Oui, mais le fait que le côté

14 bosniaque était en train de se déplacer dans la ville avec ses mortiers

15 tout en tirant depuis ses mortiers, est-ce que cela a une conséquence sur

16 votre évaluation de la proportionnalité ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, parce qu'à cause de cela, en tant

18 que soldat, je sais bien que je n'aurais jamais pu riposter correctement.

19 J'aurais dû accepter les choses. Un, la cible était impossible à trouver;

20 deux, l'éventualité de dégâts collatéraux civils étaient énormes, donc je

21 n'aurais pas pu riposter. Cela m'aurait empêché de riposter.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pour répondre au Juge Harhoff, vous

23 venez de nous parler de trois critères, donc la cible militaire,

24 proportionnalité et prise en compte des dégâts collatéraux éventuels

25 infligés aux civils dans les environs. Alors, c'est un petit peu étrange.

26 Enfin, je ne comprends plus très bien. On parle de critères qui permettent

27 justement de déterminer la proportionnalité. Or la proportionnalité fait

28 partie d'un de ces paramètres, d'un de ces critères; c'est assez étrange.

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1 Vous avez trois critères. Je répète : cible militaire, proportionnalité et

2 prise en compte des dommages collatéraux éventuellement infligés. Alors ce

3 n'est pas très clair. Tout cela permet de déterminer la proportionnalité ?

4 Cela ne m'aide pas. La proportionnalité fait partie des éléments qui sont

5 censés déterminer cette même proportionnalité. A moins que vous parliez de

6 trois critères permettant de déterminer quelque chose d'autre que la

7 proportionnalité ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais vous donner un autre exemple pour la

9 proportionnalité. Admettons qu'il y a un sniper qui est dans une tour,

10 idéalement il faudrait utiliser un autre sniper pour l'abattre. C'est

11 l'idéal. Certains utiliseraient peut-être un char ou un avion pour tout

12 simplement détruire toute la tour, parce qu'on détruit la tour, mais on

13 abat le militaire, on abat le sniper dans ce cas-là, et le sniper est bel

14 et bien une cible militaire. Alors est-ce que c'est une réponse

15 proportionnelle ? Suite à ma formation, je pense que c'est disproportionné

16 parce qu'on n'a pas besoin de détruire une tour entière pour abattre un

17 sniper. Il y a d'autres façons de le faire. On peut bien plus efficacement

18 abattre ce sniper.

19 Mais c'est difficile, c'est un jugement qu'on doit faire, c'est une

20 décision à prendre. Il faut savoir comment appliquer ces trois critères

21 pour essayer d'employer un minimum de force pour arriver à son but en se

22 basant sur la cible militaire.

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais dans votre manuel du militaire,

24 y a-t-il quoi que ce soit à propos de la façon d'arriver à cette décision ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Sur la proportionnalité, vous voulez dire ?

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je vous l'ai expliqué, il faut essayer

28 de faire une réponse identique, c'est tout.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, mais je vous demande s'il n'y a

2 un pas un manuel. Il y a un manuel d'instructions des armées ou quelque

3 chose, toutes les armées en ont. J'essaie de savoir s'il y a un texte, donc

4 s'il y a un manuel de l'armée canadienne qui contiendrait un texte à propos

5 de la proportionnalité.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, cela existe.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

8 M. DOCHERTY : [interprétation]

9 Q. Mais pour être clair avant de passer à autre chose, quand vous parlez

10 de dégâts collatéraux, de qui parlons-nous en termes de personnes ? Qui

11 sont les victimes des dégâts collatéraux ?

12 R. Ce ne sont pas uniquement des personnes, ce sont aussi des endroits,

13 des bâtiments, des choses, des écoles par exemple, des églises, d'autres

14 emplacements qui sont des endroits sur lesquels on n'a pas le droit de

15 tirer. Il y a des règles à propos des endroits sur lesquels on a le droit

16 de tirer, sur lesquels on n'a pas le droit de tirer. Les dégâts

17 collatéraux, c'est un terme générique qui a différentes définitions, mais

18 la plupart du temps, on l'emploie pour parler des civils, donc des gens,

19 des civils.

20 Q. Nous allons quitter ce sujet, et je vais vous parler maintenant du

21 système de commandement et de contrôle du Corps de Sarajevo-Romanija, donc

22 les forces serbes de Bosnie pendant votre mandat à Sarajevo.

23 D'après vous -- non, je reprends. Hier, vous nous avez parlé d'un officier

24 qui s'appelait Indic et vous avez aussi parlé des dirigeants des Serbes à

25 Pale. Voici ma question. A votre avis, pendant votre mandat à Sarajevo, qui

26 commandait effectivement le SRK [phon] ? Pourriez-vous étayer votre

27 réponse ?

28 R. Le commandant de corps commandait bel et bien le corps et le

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1 contrôlait.

2 Q. Comment s'appelait-il lors de la fin de votre mandat ?

3 R. C'était le général Milosevic.

4 Q. Hier, nous avons évoqué le problème de protestations.

5 M. DOCHERTY : [interprétation] Je vais demander au greffier de nous

6 présenter la pièce 2065.

7 Monsieur le Président, pour le compte rendu d'audience, il s'agit des

8 éléments qui considèrent le deuxième incident des tirs, numéro 1.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez demandé au témoin de vous

10 dire qui, d'après lui, pendant son mandat, était le commandant effectif du

11 Corps Sarajevo-Romanija. Il a dit que c'était le général Milosevic qui

12 assurait le commandement, mais malgré cette affirmation, il ne nous a pas

13 donné des raisons pour dire cela.

14 M. DOCHERTY : [interprétation] C'est pour cela que je voudrais présenter ce

15 document, puisque j'ai basé ma question sur des documents, sur certains

16 documents.

17 Q. Mon Général, sur l'écran, vous allez voir une lettre. Reconnaissez-vous

18 ce document ?

19 R. Oui.

20 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire ce que c'est ?

21 R. C'est une lettre de protestation écrite par le général Rose, adressée

22 au Dr Karadzic, concernant certains incidents de tirs embusqués qui se sont

23 produits le 8 octobre à Sarajevo.

24 M. DOCHERTY : [interprétation] A nouveau, pour le compte rendu d'audience,

25 là il s'agit de l'incident impliquant les tireurs embusqués et qui a eu

26 lieu le 8 octobre 1994.

27 Q. Est-ce une lettre, le type de lettres dont vous avez témoigné quand

28 vous avez parlé de ces lettres de protestation, type que vous envoyiez ?

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1 R. Oui, effectivement.

2 Q. Cette lettre a une date. Quelle est la date qui figure sur la lettre ?

3 R. Le 9 octobre 1994.

4 Q. Est-ce qu'il y a une réunion qui s'en est suivie après cette lettre,

5 une réunion avec les dirigeants serbes ?

6 R. Je n'en suis pas sûr.

7 Q. Je vais vous montrer un document.

8 M. DOCHERTY : [interprétation] Je vais demander au greffier de placer sur

9 l'écran le document 2067, et il y a une page e-court de ce document. C'est

10 plus précisément le cinquième paragraphe de ce document. Mais je voudrais

11 tout d'abord que l'on voie la première page du document parce que je

12 voudrais que le témoin voie la date.

13 Q. Mon Général, sous vos yeux, il y a un document. Pourriez-vous nous dire

14 tout d'abord ce que c'est que ce document ?

15 R. C'est un résumé d'une réunion qui a eu lieu entre le général Mladic et

16 le général Rose à proximité de Pale. C'est comme cela que l'on résumait ces

17 réunions et qu'on faisait le compte rendu.

18 Q. Dans ce "résumé", il est dit : "Rose a rencontré Mladic à Pale."

19 Pour ceux qui ont du mal à lire la façon militaire d'écrire les dates

20 et les heures, est-ce que vous pouvez nous dire s'il y a une information

21 ici qui nous dit de quel jour il s'agit ?

22 R. Est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, agrandir un peu ce

23 document ? Parce que j'ai du mal à lire.

24 M. DOCHERTY : [interprétation] Monsieur le Greffier, pourriez-vous, s'il

25 vous plaît, agrandir cette portion ?

26 Q. Est-ce que c'est plus utile ?

27 R. Oui. C'est la date du 10 octobre.

28 M. DOCHERTY : [interprétation] Je voudrais donc vous demander de nous

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1 présenter la page 2 de e-court, donc c'est le cinquième paragraphe.

2 Q. Je vais vous laisser lire cela, je vais laisser tout le monde lire ce

3 paragraphe et je vais faire une petite pause.

4 Je vais continuer sur ce sujet. Le document indique que c'est le général

5 Rose qui parle de ce problème de tirs sur le tram. Il en parle avec des

6 dirigeants assez importants, très haut placés. Est-ce que vous pouvez nous

7 dire quels sont les genres d'incidents dont on parlait avec les dirigeants

8 de haut niveau ?

9 R. Les incidents impliquant les tireurs embusqués, c'était important pour

10 moi, pour le général Rose, et qui évoquaient ce problème avec les parties

11 belligérantes à cause de l'impact psychologique et que cela avait sur la

12 population. Aussi, après chaque incident, quand on commençait une

13 discussion importante à ce sujet, la situation était plus ou moins

14 contrôlable pendant un moment donné. Ensuite, il y a eu évidemment à

15 nouveau une montée de tension progressive. C'était une question qui était

16 très importante.

17 Q. Je vais vous montrer un autre document.

18 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Pourriez-vous demander au témoin de

19 nous parler plus en détail de cela ? La question de savoir si les incidents

20 impliquant les tireurs embusqués était toujours sur l'ordre du jour lors

21 des réunions auprès de la FORPRONU et les parties belligérantes, même le

22 côté bosniaque ?

23 M. DOCHERTY : [interprétation]

24 Q. Est-ce qu'on parlait de façon fréquente de ces incidents impliquant les

25 tireurs embusqués ? Avec quelle partie belligérante on parlait plus

26 fréquemment de tout cela ?

27 R. Nous parlions de tout cela, nous parlions de pilonnage, nous parlions

28 de tireurs embusqués, nous parlions de la liberté de circulation avec

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1 toutes les parties impliquées. Nous avons évoqué un grand nombre de

2 questions avec les deux côtés, mais c'est vrai que nous avons plus parlé

3 avec les Serbes qu'avec les Musulmans puisque les Musulmans étaient à

4 l'intérieur de Sarajevo, et c'étaient eux qui étaient visés. Ils étaient

5 encerclés, si vous voulez. La liberté de circulation les concernait

6 surtout. Ils ne l'avaient pas. C'est vrai qu'on est allé aussi les voir au

7 sujet des pilonnages, au sujet des différents incidents de tireurs

8 embusqués contre des tirs, par exemple, non militaires, des cibles non

9 militaires. Il y a eu des discussions extensives avec les deux parties,

10 mais surtout, je dirais, avec les Serbes.

11 Q. Je vais juste faire une question de suivi par rapport à la question

12 posée par les Juges. Est-ce que vous pouvez nous dire quel côté a fait

13 preuve de plus d'incidents, de plus de tirs sur les civils, s'agissant des

14 tireurs embusqués et les questions qui ont préoccupé les Nations Unies ?

15 R. C'est vrai que les Serbes ont été à l'origine de plus d'incidents que

16 les Musulmans, des incidents concernant les tireurs embusqués.

17 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] J'ai voulu juste voir avec ce témoin

18 si les incidents concernant les tireurs embusqués n'étaient pas une

19 question qui se posait à chaque fois, si c'était une question très

20 importante qui était à l'ordre du jour lors de toutes les réunions.

21 M. DOCHERTY : [interprétation] Cela probablement dépendait du type de

22 réunion, mais je pourrais effectivement poser quelques questions à ce

23 sujet.

24 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Allez-y.

25 M. DOCHERTY : [interprétation]

26 Q. Nous avons vu ces réunions avec le général Rose. Est-ce que vous

27 pourriez nous dire quelle était l'importance hiérarchique du général Rose

28 au sein des Nations Unies à l'époque ?

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1 R. C'était lui qui commandait toutes les troupes en Bosnie. C'était lui

2 qui était la personnalité clé. C'était lui qui commandait la FORPRONU. Le

3 fait que le général Rose évoque ces questions était plus important, c'était

4 très important, surtout quand il en parlait avec le général Mladic, le Dr

5 Karadzic, ou du côté musulman avec le président, le vice-président, le

6 premier ministre, les commandants des Corps d'armée, et cetera. Quand il

7 s'agissait des questions qui pouvaient déstabiliser la ville, son secteur,

8 le secteur Sarajevo, le général Rose était impliqué. Il participait aux

9 réunions pour essayer de calmer la situation et pour essayer d'influencer

10 ces dirigeants. Quand on parlait de la liberté de la situation, des tirs,

11 des pilonnages, et cetera, je pense que c'était très important pour nous de

12 protéger la --

13 Q. [aucune interprétation]

14 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

15 Mme ISAILOVIC : Vraiment, cela devient un petit peu impossible de suivre

16 parce que je tâche vraiment -- les interprètes en français, vraiment, ont

17 du mal à suivre ce rythme, et on a vraiment un décalage, plusieurs lignes.

18 Vraiment, cela devient un petit peu impossible. Si on peut ralentir un

19 petit peu le rythme pour que cela soit à peu près en même temps, les deux.

20 Merci.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Maître Isailovic. Je vais

22 demander aussi bien au témoin qu'au Procureur de ralentir leur débit pour

23 faciliter le travail des interprètes. Si vous ne vous rendez pas compte de

24 la vitesse à laquelle vous allez, essayez de suivre l'écran et aussi

25 d'observer une pause entre les questions et les réponses.

26 M. DOCHERTY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

27 Q. La réunion dont nous avons parlé il y a quelques instants, nous l'avons

28 examinée sur l'écran, est-ce que vous pouvez nous dire à quelle fréquence

Page 1816

1 de telles réunions ont eu lieu, de telles réunions de plus haut niveau ?

2 R. Pas très souvent. Cela se passait que quand la situation s'aggravait.

3 Q. Qu'en est-il du niveau du Corps d'armée, un niveau plus bas ? A quelle

4 fréquence il y a eu des réunions concernant les tireurs embusqués, les

5 pilonnages, la liberté de la circulation que l'on abordait avec différents

6 assistants militaires et à un niveau militaire moins élevé ?

7 R. Ces réunions étaient plus fréquentes que les réunions que tenait le

8 général Rose. Ce sont les commandants des bataillons qui discutaient avec

9 leurs confrères, avec les commandants de brigades, aussi. Ensuite, il y a

10 eu, à un niveau moins élevé, il y a eu un dialogue en continue. Mon

11 général, ensuite, parlait avec les commandants de Corps d'armée, et ceci

12 concernant les questions qu'il fallait vérifier et qu'il fallait contrôler.

13 Q. Merci.

14 M. DOCHERTY : [interprétation] Je vais demander le versement au dossier de

15 deux documents que je viens de présenter, les documents 2065 et 2067, la

16 lettre du général Rose au Dr Karadzic et le dernier document que nous avons

17 vu.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ils sont versés au dossier.

19 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le 65 ter 02065 sera versé en tant que

20 pièce P204, et le document 65 ter 2067 sera versé en tant que document

21 P205.

22 M. DOCHERTY : [interprétation] A présent, je voudrais aborder le document

23 65 ter 01973. Je pense que c'est un document qui figure déjà en tant

24 qu'élément de preuve du Procureur.

25 M. LE JUGE MINDUA : Avant d'aborder votre prochain sujet.

26 Général, vous avez dit que s'agissant du commandement du Corps Sarajevo, du

27 4e Corps à Sarajevo -- non, plutôt du Corps Sarajevo-Romanija, "Romanija

28 Corps", oui, voilà, que le général Milosevic était commandant,

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1 effectivement, qu'il avait les commandes. Mais en même temps, vous nous

2 faites part de réunions du lieutenant général Michael Rose avec le Dr

3 Karadzic ou avec le général Mladic.

4 A la suite de ces réunions ou pendant ces réunions, nous voyons le général

5 Mladic nier la réalité des tirs embusqués ou des pilonnages. Il me semble

6 donc que c'est qui a le commandement effectif des opérations. Comment vous

7 entendez expliquer cette situation ? D'un côté, nous avons le général

8 Mladic lui-même qui paraît aux commandes, et de l'autre le général

9 Milosevic qui a les commandes en même temps. Est-ce qu'il y a une

10 contradiction, ou pas ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne vois pas de contradiction. Vous avez un

12 commandant supérieur, c'est-à-dire le général Mladic, et vous avez vu ses

13 intentions, et le général Milosevic les suit et les respecte. Au niveau de

14 la chaîne de commandement, on donne les ordres, un supérieur donne les

15 ordres à la personne qu'il commande, et ensuite il s'agit de mettre en

16 œuvre ces ordres. Il s'agit là du système de commandement habituel.

17 Au niveau du Corps d'armée, ensuite nous allions par exemple voir le

18 commandant de Corps d'armée pour faire part de nos protestations par

19 rapport, par exemple, aux tireurs embusqués ou aux pilonnages, la liberté

20 de circulation, et cetera, et après cela la situation s'améliorait. Mais

21 parfois, la situation, les incidents étaient tellement nombreux que cela

22 n'était plus acceptable pour le général Rose, et ensuite il allait voir le

23 général Milosevic, c'est-à-dire ses supérieurs, le général Mladic, pour

24 dire qu'il fallait prendre le problème plus au sérieux et qu'il fallait

25 calmer, ralentir les incidents. Ce n'était pas inhabituel pour les deux

26 côtés pour dire qu'ils ne savaient pas ce qui s'est passé, que ce n'est pas

27 eux qui l'ont fait. Ensuite, ils se disputaient, ils voyaient, mais après

28 cela, après des arguments, les choses s'amélioraient, en général.

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1 Mais c'est vrai que Mladic était le chef. Il avait le commandement et

2 le contrôle significatif et important puisque c'est lui qui dirigeait les

3 opérations; pas seulement à Sarajevo, mais aussi pour le reste des

4 territoires. Sarajevo n'était qu'une petite boîte, une petite case, et le

5 général Milosevic était celui qui commandait cette case-là.

6 M. LE JUGE MINDUA : Voilà. J'attendais la traduction pour, évidemment, la

7 Défense, pour bien comprendre.

8 Mais lorsque vous dites que le général Milosevic était effectivement le

9 commandant, ma question est de savoir si, selon votre expérience militaire,

10 on peut avoir un commandant qui est pion, qui est commandant. Il a le

11 titre, mais il n'est pas commandant, en fait. Parce que quand vous dites

12 "il est effectivement commandant", est-ce qu'on peut envisager le cas d'un

13 général qui n'est pas effectivement commandant ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas sûr que ce soit aussi simple

15 que cela, parce que tous les commandants subordonnés se doivent de suivre

16 les ordres donnés par leurs supérieurs, ou, autrement dit, si un subordonné

17 a un problème avec les ordres donnés par son commandement supérieur, il

18 peut toujours quitter ses fonctions s'il ne peut pas le faire. Mais la

19 chaîne de commandement est telle qu'elle prévoit que les subordonnés

20 suivent les ordres donnés par leur commandement supérieur. Ils suivent les

21 intentions du commandement. C'est la hiérarchie. C'est comme cela que nous

22 fonctionnons. Je ne dirais pas qu'il s'agissait là d'un pion. Il s'agit

23 d'une chaîne de commandement. Il existe un dialogue. On parle avec son

24 supérieur pour lui demander comment on va implémenter les choses par

25 rapport à la situation telle qu'elle se présente sur le terrain. C'est

26 toute une structure.

27 Je ne suis pas sûr si j'ai répondu à la question que vous m'avez posée,

28 mais c'est comme cela que je vois les choses, au moins.

Page 1819

1 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup. Vous avez bien répondu à ma question.

2 Merci.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Juste une minute.

4 [La Chambre de première instance se concerte]

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez continuer.

6 M. DOCHERTY : [interprétation] Je me suis trompé de numéro de document. Le

7 numéro ter que j'ai donné n'était pas bon. Le numéro dont j'avais besoin,

8 en réalité, c'était le document 93 [comme interprété], et je vais demander

9 que l'on le montre, s'il vous plaît, sur les écrans.

10 Q. Général Fraser, est-ce que vous reconnaissez ce document qui est sur

11 l'écran ?

12 R. Oui, en effet.

13 Q. De quoi s'agit-il ?

14 R. C'est un accord portant sur la cessation des activités des tireurs

15 embusqués dans la région de Sarajevo.

16 Q. Qui a signé ce document, s'il vous plaît ?

17 R. Ce document est signé par le général Karavelic, qui était le commandant

18 du corps musulman; le général Mladic, qui était le commandant du corps

19 serbe; ainsi que par le général Rose.

20 M. DOCHERTY : [interprétation] Je voudrais demander au Greffier de nous

21 montrer la partie où se trouve la signature du général Rose. Q. Il y a une

22 date à côté de la signature du général Rose. Pourriez-vous nous indiquer

23 quelle est cette date ?

24 R. C'est la date du 14 août 1994. C'est aussi signé par Viktor Andreev,

25 qui était le conseiller du général Rose.

26 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire un peu, nous raconter un peu

27 l'historique de ce document, comment il s'est fait, et cetera ?

28 R. Je n'étais pas présent au moment où les négociations ont eu lieu, mais

Page 1820

1 ce document est le résultat d'une escalade des incidents impliquant les

2 tireurs embusqués à Sarajevo et autour de Sarajevo, et le général Rose a

3 fait des efforts, ce qu'il pouvait pour ramener la situation à un niveau

4 raisonnable et acceptable.

5 Q. Suite à la question posée au sujet du commandement et du contrôle, est-

6 ce que la signature qui figure sur ce document, à savoir les signatures des

7 généraux Karavelic, Mladic, qui sont les deux commandants de Corps d'armée,

8 est-ce que ceci vous amène à tirer des conclusions concernant la personne

9 qui pouvait contrôler les tireurs embusqués dans la région de Sarajevo ?

10 R. Après ces genres de réunions, la situation en général s'améliorait, ce

11 qui indiquait que les deux messieurs pouvaient contrôler leurs troupes,

12 leurs soldats, et qu'ils étaient en mesure de leur donner des ordres

13 demandant d'arrêter les incidents de tireurs embusqués.

14 Q. Est-ce que les Nations Unies ont étudié l'efficacité de cet accord

15 portant sur la cessation des activités de tireurs embusqués ?

16 R. Oui. Les Français ont tenus des statistiques quant aux incidents

17 impliquant les tireurs embusqués, et ils tenaient des statistiques aussi

18 quant aux victimes des deux côtés.

19 Q. Je vous prie de regarder cette étude, à présent.

20 M. DOCHERTY : [interprétation] Je vais demander au greffier de présenter

21 sur nos écrans le document e-court 2011, la page 4, s'il vous plaît.

22 Avant de parler de cela, je voudrais demander que l'on verse au dossier ce

23 document, le document qui comporte le numéro ter 1973. C'est un accord

24 portant sur la cessation des activités de tireurs embusqués en date du 14

25 août 1994.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

27 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P206.

28 M. DOCHERTY : [interprétation]

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1 Q. Sur l'écran qui se trouve devant vous, on voit un document. D'un côté,

2 du côté gauche, vous avez en marge toute une série de dates, puis ensuite

3 vous avez des chiffres qui correspondent à ces dates. Est-ce que vous

4 reconnaissez ce document ?

5 R. Oui.

6 Q. De quoi s'agit-il ?

7 R. C'est un résumé des personnes blessées ou tuées du côté serbe et

8 musulman pour la région de Sarajevo.

9 Q. C'est peut-être un document qui est un peu difficile à interpréter.

10 Pourriez-vous nous expliquer de quoi il s'agit, comment ce document est

11 organisé, et cetera ?

12 R. Ce que l'on faisait normalement, c'est qu'on énumérait, on faisait la

13 somme des incidents, tous les incidents qui se sont produits impliquant les

14 tireurs embusqués, qui a été blessé. D'un côté, vous avez les Musulmans,

15 combien de Musulmans ont été tués; ensuite les Serbes, combien de Serbes

16 ont été tués. Ensuite, on répertoriait toutes ces informations et on

17 utilisait ces informations pour discuter avec les factions belligérantes,

18 pour leur donner les données concrètes pour étayer les informations

19 concernant les incidents et nos discussions et pour réduire ou arrêter ces

20 incidents dont les victimes étaient des civils, les incidents impliquant

21 les tireurs embusqués.

22 Q. En ce qui concerne ces chiffres, on peut voir "les blessés de Bosnie-

23 Herzégovine". Enfin --

24 R. Oui.

25 Q. Deux questions à ce sujet. Tout d'abord, au lieu de voir les mois, on

26 voit les dates précises du côté gauche. On n'a pas l'impression que c'est

27 un tableau linéaire. Quand on voit les dates, est-ce que cela veut dire que

28 ces personnes ont été blessées ou tuées ces jours-là, à ces dates-là ?

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1 R. Oui.

2 Q. A peu près en haut du document, on voit juste quelques chiffres

3 simples, genre 29 juillet ou 5 août, ou pour le 19 août, on voit des

4 chiffres qui se présentent par dizaines. Est-ce que vous pouvez nous faire

5 part de quelques conclusions concernant l'efficacité de cet accord portant

6 sur l'arrêt des activités des tireurs embusqués à partir de ces

7 informations, les informations suivantes dans le tableau que vous avez sous

8 vos yeux ?

9 R. Avant, il y avait un problème grave, et après cet accord le problème

10 persiste.

11 Q. Les chiffres diminuent-ils ou augmentent-ils, ou sont-ils les mêmes que

12 ceux qui finalement ont donné naissance à cet accord ?

13 R. Juste après, je crois que les chiffres augmentent. Je crois qu'on voit

14 12, puis ensuite il y a un certain recul pour revenir au niveau qui

15 existait avant l'accord.

16 Q. Sur la base de ces informations, pouvez-vous tirer de quelconques

17 conclusions s'agissant de savoir si les commandants de corps qui ont signé

18 l'accord exerçaient un certain contrôle sur les tireurs embusqués dans le

19 secteur de Sarajevo ?

20 R. Je ne sais pas s'ils exerçaient un quelconque contrôle ou s'ils n'ont

21 pas donné suite à l'accord qu'ils ont signé, mais en tout cas il n'y a pas

22 eu d'effet. Sur la base des faits qui figurent dans ce document, il n'y a

23 pas eu d'effet qui a suivi la signature de cet accord.

24 Q. Bien. J'aimerais vous montrer un certain nombre d'autres documents.

25 M. DOCHERTY : [interprétation] Mais avant cela, Monsieur le Président,

26 j'aimerais demander le versement au dossier du document 2011, à savoir

27 l'étude relative à l'efficacité de l'accord.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce document est versé au dossier.

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1 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira du document P207, Messieurs

2 les Juges.

3 M. DOCHERTY : [interprétation] Monsieur le Greffier, je vous demanderais

4 maintenant de bien vouloir nous communiquer le document figurant sur la

5 liste 65 ter, document 1939.

6 Q. Général, je vais vous demander d'examiner ce document un instant et,

7 lorsque vous vous serez familiarisé avec le document, je poursuivrai mes

8 questions.

9 R. Oui.

10 Q. De quelle nature est ce document ? De quoi s'agit-il ?

11 R. Ce sont des instructions données à toutes les unités se trouvant au

12 sein du Corps Sarajevo-Romanija émanant du commandant adjoint indiquant

13 qu'il y a un problème, à savoir que les rapports qui sont rédigés ne sont

14 pas relus par les commandants et les instructions sont donc que les

15 commandants doivent s'impliquer personnellement dans la rédaction de ces

16 rapports de manière à ce que tous les rapports soient exécutés et que leur

17 teneur soit exacte.

18 Q. Vous parliez il y a un instant de la chaîne hiérarchique, de la

19 hiérarchie au sein des forces armées. Est-ce que ce document porte d'une

20 quelconque manière sur le rôle ou les limites -- pardon, excusez-moi. Je me

21 reprends. Est-ce que ce document a un quelconque rapport avec la chaîne de

22 commandement et le rapport qu'il peut y avoir entre des subordonnés et des

23 officiers supérieurs au sein d'une organisation militaire ?

24 R. Oui.

25 Q. Pourriez-vous nous en dire davantage ? Pourriez-vous nous dire quelle

26 lumière ceci jette sur cette discussion ?

27 R. Ce document me montre que le commandant adjoint du corps n'était pas

28 satisfait, soit parce que les subordonnés ne suivaient pas bien ses ordres,

Page 1824

1 soit par la manière dont les commandants essayaient de faire en sorte de

2 contrôler leurs soldats. Ce document est un ordre, en réalité, qui invite à

3 faire en sorte que la chaîne de commandement soit plus active dans le

4 respect du contrôle de la situation qui prévalait à l'époque, donc en

5 juillet 1994.

6 Q. Bien.

7 M. DOCHERTY : [interprétation] Mais tout d'abord, Monsieur le Président,

8 j'aimerais qu'on verse ce document au dossier.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est fait.

10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P208, Messieurs

11 les Juges.

12 M. DOCHERTY : [interprétation]

13 Q. J'aurais un dernier sujet à aborder avec vous, Général, mais avant cela

14 j'aimerais revenir en arrière et revenir à quelque chose que nous avons

15 évoqué il y a quelques instants. C'est la réponse apportée à l'attaque

16 contre la caserne de Lukavica. Vous avez parlé des critères applicables au

17 moment de riposte. Vous avez parlé du critère de la proportionnalité. Ce

18 critère, ce concept de la proportionnalité s'était notamment appliqué, et

19 vous l'avez pris comme exemple à cette attaque qui avait été menée contre

20 Lukavica.

21 J'aimerais savoir maintenant si vous avez été informé d'autres situations

22 ou des incidents. Des tirs musulmans à Sarajevo ont entraîné une riposte,

23 une réponse de la part des Serbes de Bosnie, qui, à votre avis, ne répond

24 pas aux critères que vous avez exposés, critères devant s'appliquer à

25 l'usage responsable de la force militaire ?

26 R. Je n'ai pas en tête d'incidents particuliers dont je pourrais vous

27 faire part à part l'impression générale dont je vous ai déjà parlé. Je ne

28 pourrais pas être plus précis que cela.

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1 Q. Mais quelle était votre impression générale ? Que voulez-vous dire par

2 là ?

3 R. Mon impression générale était que les Serbes contrôlaient tous les

4 mouvements et la situation. Dans la ville, ils utilisaient tous les moyens

5 qu'ils avaient à leur disposition pour contrôler les mouvements, pour

6 contrôler, disons, les aspects plus psychologiques qui influaient sur le

7 climat et qui régnaient dans la ville par l'usage de tireurs embusqués, par

8 le pilonnage, par mortiers principalement.

9 Q. Bien. Voici la dernière question que j'aimerais aborder avec vous, et

10 ensuite j'en aurai terminé de mon interrogatoire principal.

11 Avez-vous entendu parler de "bombes aériennes modifiées" pendant que vous

12 étiez à Sarajevo ?

13 R. Oui, en effet. C'est un terme qui est apparu juste à la fin de ma

14 période de service à Sarajevo.

15 Q. Qu'est-ce que c'est qu'une bombe aérienne modifiée ?

16 R. C'est une bombe qui est dotée d'un appareil de fortune, disons, qui est

17 placé sur celle-ci, qui peut en quelque sorte être un dispositif volant,

18 mais qui n'a pas de système de guidage. Vous le lancez, vous visez, bien

19 sûr, d'abord vous le lancez, et ensuite il est censé atterrir au moment où,

20 disons, il n'aura plus de carburant. C'est en réalité une bombe qui

21 fonctionne selon le concept d'aérodynamique. A ce moment-là, cette bombe

22 tombe. A mon avis, elle n'a aucune valeur militaire.

23 Q. Aviez-vous déjà entendu parler de cela avant d'être allé à Sarajevo ?

24 R. Non.

25 Q. Et depuis ?

26 R. Non plus.

27 Q. Vous êtes un officier militaire supérieur au sein de l'armée

28 canadienne. Vous avez suivi une formation sur le type d'arme appropriée en

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1 fonction du type de situation sur le terrain, n'est-ce pas ?

2 R. Oui.

3 Q. Au moment où vous avez été commandant, auriez-vous eu, à un moment

4 donné ou à un autre, l'occasion de dire : "Envoyez-moi des bombes aériennes

5 modifiées. J'en ai besoin." ?

6 R. Non.

7 Q. Avez-vous jamais vu de bombes aériennes modifiées dans la partie

8 musulmane de Bosnie des lignes de confrontation ?

9 R. Non.

10 Q. Avez-vous vu, jamais, du côté de Musulmans des lignes de confrontation,

11 que l'on lançait ce genre de bombes ?

12 R. Non.

13 Q. Après cette période passée à Sarajevo, avez-vous une opinion s'agissant

14 de l'effet qu'ont eu ces types de dispositifs sur le moral, sur la

15 psychologie de la population civile de la ville de Sarajevo ?

16 R. D'un point de vue psychologique, elles étaient terribles pour la

17 population. Il était difficile pour la population de savoir que ces

18 dispositifs existaient et si effectivement ils étaient tirés. Ma seule

19 expérience, c'est que cela risquait de provoquer des dégâts pour tout le

20 monde, y compris pour les Nations Unies.

21 Q. Quelle est la capacité explosive de l'une de ces pièces par opposition

22 par exemple à un tir de mortier ? Nous en avons parlé beaucoup; c'est la

23 raison pour laquelle je vous pose la question.

24 R. Elles sont plus grandes, beaucoup plus grande.

25 M. DOCHERTY : [interprétation] Je n'ai plus de questions, Monsieur le

26 Président.

27 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] J'aimerais que vous poursuiviez cet

28 ensemble de questions sur l'armement parce qu'il y a quelques jours, on

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1 nous a parlé d'une arme appelée M-84, une mitrailleuse, si j'ai bien

2 compris. J'aimerais pouvoir poser une question au témoin s'agissant de la

3 portée et de la précision de cette arme.

4 M. DOCHERTY : [interprétation]

5 Q. Général, connaissez-vous cette arme évoquée par le Juge Harhoff ? C'est

6 une M-84 ou peut-être une M-85, c'est une arme automatique.

7 R. Non. Je ne connais pas M-85.

8 Q. Qu'en est-il du M-84 ?

9 R. Non, ces chiffres ne me parlent pas du tout.

10 M. DOCHERTY : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Juge.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

12 Madame Isailovic, êtes-vous prête pour le contre-interrogatoire ?

13 Mme ISAILOVIC : Oui, Monsieur le Président, merci.

14 Contre-interrogatoire par Mme Isailovic :

15 Q. Bonjour, Monsieur le Témoin. Je suis Me Branislava Isailovic, avocat au

16 barreau de Paris, et je suis conseil de Défense de M. le Général Milosevic

17 qui est, comme vous le savez, accusé devant cette Chambre. Maintenant, on

18 va procéder. Vous connaissez déjà la procédure parce que vous témoignez

19 aussi dans la procédure contre le général Galic. A l'interrogatoire, en

20 contre-interrogatoire, on va aborder ensemble les questions dont on a parlé

21 tout à l'heure.

22 Mme ISAILOVIC : J'ai préparé plusieurs thèmes et, pour commencer, je

23 demande à mon assistante d'afficher sur l'écran la carte 65 ter 2927. C'est

24 le document qui a été accepté comme moyen de preuve de l'Accusation P194.

25 Q. En attendant l'affichage de cette carte, parce que cela va prendre un

26 moment, j'aurais aimé commencer par quelques questions qui concernent votre

27 carrière militaire, plutôt votre expérience que vous avez, requise à

28 Sarajevo.

Page 1829

1 Si vous pouvez, vous avez parlé dans votre déclaration que vous avez

2 donnée en 1997, si vous vous souvenez de cela, mais aussi hier, des

3 généraux pour lesquels vous avez travaillé. Vous vous souvenez de cela ? Je

4 pense aux généraux Soubirou et Gobillard.

5 R. Oui, je me souviens du général Soubirou et du général Gobillard,

6 effectivement.

7 Q. C'étaient des généraux de l'armée française, n'est-ce pas ?

8 R. Oui, c'était des généraux de l'armée française. Le général Soubirou,

9 c'était le commandant adjoint de la 6e Armée, Division de l'armée, et le

10 général Gobillard était le commandant de la 12e Division des Parachutistes

11 -- la 11e.

12 Q. C'était le secteur Sarajevo, et au niveau de la commande pour la

13 Bosnie-Herzégovine, c'étaient, il me semble toujours, les généraux

14 britanniques, n'est-ce pas ?

15 R. Oui, c'est exact. Le secteur Sarajevo faisait partie de Bosnie-

16 Herzégovine. La Bosnie-Herzégovine avait plusieurs secteurs. Le général

17 Rose était, au moment où je suis arrivé là-bas, le commandant, et ensuite

18 il a été remplacé par le général Rupert Smith.

19 Q. Il y avait des différences, disons, culturelles, de la culture

20 militaire entre, disons, deux groupes de généraux, n'est-ce pas ?

21 R. Oui, culturellement ils étaient différents puisque c'étaient des

22 Français et des Britanniques, mais ils avaient ce lien qui leur était

23 commun, à savoir qu'ils étaient des soldats professionnels, des officiers

24 de carrière.

25 Q. Notamment, votre rôle en tant qu'assistant militaire des généraux

26 Soubirou et Gobillard consistait aussi dans le -- pour faire, disons, une

27 traduction, entre guillemets, entre ces deux cultures, parce que vous-même

28 vous êtes canadien, et je crois comprendre que vous parlez couramment les

Page 1830

1 deux langues, anglais et français; ai-je raison ?

2 R. Ce serait un peu exagéré que de dire que je servais de lien entre ces

3 deux cultures. En réalité, ils pouvaient communiquer très bien entre eux.

4 Ils n'avaient pas besoin d'interprète. On n'avait pas besoin de cela.

5 Le général Soubirou parlait très bien l'anglais; le général Rose parlait

6 très bien le français. Le général Gobillard et le général Rupert Smith ne

7 parlaient pas aussi bien ces deux langues, mais ils étaient en mesure de

8 communiquer de façon efficace. J'étais là parce que je faisais partie de la

9 force de l'ONU en tant qu'adjoint militaire. C'est vrai qu'à l'époque je

10 parlais très bien français. Je dirais que maintenant je ne parle pas aussi

11 bien qu'à l'époque au bout de 10 ans.

12 Q. Mais ces différences entre les cultures militaires, justement est-ce

13 qu'en deux mots vous pouvez à peu près nous expliquer à quoi vous pensez

14 quand vous dites cela ? En quoi cela consiste, principalement ?

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] A-t-il dit vraiment qu'il existait

16 des différences culturelles ? Maître Isailovic, je ne suis pas sûr. Je ne

17 suis pas sûr qu'il fût tout à fait d'accord.

18 Mme ISAILOVIC : Non, non, non. Pas de différence culturelle ou militaire

19 entre culture militaire entre les deux. C'est dans la déclaration. On peut

20 l'afficher, mais, je pense, c'est à peu près à un endroit plus général.

21 Q. Mais si vous voulez, c'est dans votre déclaration que vous avez donnée

22 en 1997, on peut, si vous voulez, cette partie, parce que pour moi cette

23 partie était très intéressante.

24 Est-ce que vous préférez, Monsieur le Général, voir ce passage dans lequel

25 vous avez parlé de ces différences de culture militaire entre les généraux

26 français et les généraux britanniques ?

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Isailovic, si vous souhaitez

28 lui montrer cela, montrez-lui cela. Montrez-lui la portion de la

Page 1831

1 déclaration préalable.

2 Mme ISAILOVIC : Je vais réserver cette question pour après, parce que c'est

3 dommage de manquer là cette carte qui prend du temps à s'afficher.

4 Je demanderais à M. le Greffier d'agrandir un petit peu, juste un petit peu

5 la carte pour qu'on voie la totalité du haut de la carte. Agrandir, s'il

6 vous plaît, si on peut zoomer. Maintenant, oui, de là, oui, c'est bon.

7 Baissez un petit peu. Oui.

8 Q. Monsieur le Général, c'est la carte dont on a discuté hier. Vous vous

9 souvenez de cela ?

10 R. Oui, je m'en souviens.

11 Q. Maintenant, pour vous, vous êtes d'accord qu'on voit là plusieurs

12 marques faites déjà sur la carte. Par exemple, à l'intérieur de la ligne

13 bleue, on peut voir par exemple, et je cite, je pars du haut du gauche "111

14 vbbr". C'est la marque la plus grande. Est-ce que vous voyez cela ?

15 R. Oui, je la vois.

16 Q. Est-ce que vous êtes au courant avec le fait que cela représente les

17 zones de responsabilité des unités appartenant au 1er Corps de l'ABiH ?

18 R. C'est ce que la carte dit, et ceci correspond à la situation telle

19 qu'elle était sur le terrain.

20 Q. Est-ce qu'on peut se mettre d'accord qu'on voit là plusieurs marques ?

21 Il y a des marques qui sont un petit peu, des lettres un petit peu plus

22 grandes et des lettres un petit peu plus petites. Mais, de toute façon,

23 est-ce qu'on peut se mettre d'accord qu'elles couvrent tout le territoire à

24 l'entrée de la ligne bleue ?

25 R. Sur cette carte, on peut voir qu'il existe plusieurs unités, toute une

26 série d'unités qui couvrent l'intérieur et peut-être même l'entourage de la

27 ville de Sarajevo.

28 Q. Est-ce qu'on est d'accord que c'est la 12e Division du 1er Corps de

Page 1832

1 l'ABiH qui se situait à l'intérieur de la ligne bleue ?

2 R. Je ne vois pas où vous voyez exactement la 12e Division sur cette

3 carte. Je ne la vois pas. Est-ce que vous pouvez m'aider ?

4 Je vois des brigades, mais je ne vois pas de divisions.

5 Q. Monsieur le Général, ma question était plutôt : d'après vos souvenirs,

6 est-ce que vous vous souvenez qu'il y avait à l'époque une division qui

7 s'appelait 12e Division et dont le commandant était M., je pense, le

8 Général Fikret Prevljak ?

9 R. Je me souviens du 1er Corps musulman, Karavelic, sa brigade. Je me

10 souviens aussi du général Fikret, mais je ne me souviens pas que ce fût un

11 commandant de division. D'après mon meilleur souvenir, c'était un

12 commandant de brigade. Il était le commandant du mont Igman, du sud du

13 territoire qui était au sud de l'aéroport.

14 Q. Passons-en. De toute façon, vous avez dit que vous voyez ici

15 l'emplacement des brigades, à l'intérieur de la ligne bleue ?

16 R. Je peux lire sur la carte où se trouvent les brigades, mais,

17 personnellement, je ne m'occupais pas des brigades; je m'occupais surtout

18 des commandements des Corps d'armée et des quartiers généraux.

19 Q. Monsieur le Général, on va utiliser maintenant encore vos connaissances

20 en tant que militaire professionnel d'une longue expérience pour nous dire,

21 est-ce que l'emplacement de toutes ces brigades à l'intérieur de la ligne

22 bleue comprend aussi l'emplacement des objectifs militaires ? Je pense par

23 exemple au QG de toutes ces unités à l'intérieur de la ligne bleue.

24 R. Oui, effectivement.

25 Q. Est-ce que, d'après votre opinion, mais je connais à peu près la

26 réponse parce que vous avez parlé tout à l'heure de la caserne de Lukavica

27 qui était le QG de l'armée de la Republika Srpska, est-ce que toutes ces

28 installations représentent les objectifs militaires ?

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1 R. Oui. La caserne de Lukavica, je sais où c'était, et c'était une cible

2 militaire. Le QG des Musulmans était dans la ville. C'était une cible, mais

3 une cible complètement entourée des bâtiments civils. Il serait très, très

4 difficile de viser cette cible-là, et pendant la période où j'y étais, cela

5 n'a jamais été fait.

6 Q. Si on peut rester là dans la théorie. Vous dites là que, et vous prenez

7 l'exemple de Lukavica, c'était le QG et une cible militaire légitime qu'on

8 peut viser. Est-ce qu'on peut appliquer le même critère à n'importe quel

9 QG ?

10 R. Oui.

11 Q. Est-ce que le fait qu'on place un QG à l'intérieur des cibles civiles

12 supprime le caractère militaire de ce QG ?

13 R. Il n'annule pas la nature, les caractères militaires du quartier

14 général, mais ceci rend très difficile, voire impossible, toute activité

15 militaire contre ce QG.

16 Q. Si on continue maintenant, et on parle de la caserne de Lukavica, est-

17 ce que vous saviez que Lukavica était un quartier résidentiel de Sarajevo ?

18 R. Oui, je le savais. Oui.

19 Q. Est-ce que je peux poursuivre votre raisonnement et dire qu'on ne peut

20 pas se prononcer assez formellement sur le caractère militaire de ce QG qui

21 est placé, disons, à l'intérieur d'un quartier résidentiel ?

22 R. La caserne de Lukavica représente une cible légitime militaire. Je la

23 définirais comme cela. Le fait qu'elle se trouve dans un quartier

24 résidentiel est un élément important quand vous prenez en compte les dégâts

25 collatéraux. Mais comparé au quartier général musulman, là, la situation

26 était bien plus claire, mais pas moins difficile puisqu'il y avait quand

27 même la potentialité d'éventualité d'infliger des dégâts collatéraux aux

28 civils qui résidaient dans ce quartier autour de la caserne.

Page 1834

1 Q. Monsieur le Général, est-ce que je peux en conclure qu'il est très

2 difficile de mener les combats dans les quartiers urbains en général ?

3 R. Le combat dans les zones urbaines est extrêmement difficile pour toute

4 armée que ce soit. Les combats dans Sarajevo au cours de mon mandat étaient

5 extrêmement difficiles, et ce, pour les deux factions.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Isailovic, je vois qu'il est

7 l'heure de faire la pause, et nous allons lever la séance pour la pause.

8 --- L'audience est suspendue à 10 heures 32.

9 --- L'audience est reprise à 10 heures 51.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Isailovic, veuillez

11 poursuivre.

12 Mme ISAILOVIC : Merci, Monsieur le Président.

13 Q. Monsieur le Témoin, Monsieur le Général, on a terminé juste à l'instant

14 où vous avez dit que lutter à Sarajevo durant le temps ou la période où

15 vous étiez là-bas, c'était très, très particulièrement difficile pour les

16 deux parties belligérantes. On va poursuivre là-dessus. Je vous prie de

17 regarder encore une fois la carte qui est devant vous et de vous concentrer

18 sur l'emplacement des 105e Brigade, 152e et 115e.

19 Est-ce qu'on peut se mettre d'accord que les zones de responsabilité de ces

20 trois brigades se trouvent dans une partie de la ville particulièrement

21 peuplée, parce qu'on voit beaucoup de, disons, bâtiments qui représentent

22 cette couleur brunâtre, pardon, de la carte ?

23 R. Les zones où se trouvent les brigades, effectivement, recouvrent une

24 partie très densément peuplée de Sarajevo, mais cela dépend en réalité de

25 l'endroit où ils avaient véritablement déployé leurs soldats dans la zone

26 donnée, donc je ne peux pas être d'accord avec vous sur la base de ce

27 simple fait. C'est une zone effectivement tout à fait difficile, mais il y

28 a également des espaces ouverts.

Page 1835

1 Q. Est-ce que, Monsieur le Général, l'emplacement de ces brigades et des

2 QG de ces brigades comporte aussi l'emplacement d'autres installations

3 militaires qui, normalement, suivent le déploiement d'une unité militaire ?

4 R. Normalement, oui.

5 Q. Est-ce que vous avez eu ou vous avez acquis des connaissances là-dessus

6 durant votre séjour à Sarajevo en tant qu'assistant militaire de M.

7 Soubirou et M. Gobillard ?

8 R. Pourriez-vous être plus précis, s'il vous plaît ? Parce qu'en général

9 je n'avais pas affaire aux brigades et principalement au quartier général

10 des Corps d'armée.

11 Q. Bien sûr, Monsieur le Général, je faisais appel plutôt à vos

12 connaissances générales, et vous m'avez répondu par affirmative, et après

13 j'ai posé une question concernant concrètement Sarajevo à cette période où

14 vous étiez assistant militaire des généraux Soubirou et Gobillard. Si vous

15 ne le savez pas, donc vous pouvez me répondre par négative.

16 R. Je ne sais pas.

17 Q. Tout à l'heure quand on a abordé la question de la proportionnalité -

18 on a accepté de discuter avec vous de cette question importante parce que

19 vous avez une énorme expérience et des connaissances très importantes là-

20 dessus - vous avez dit il y a un instant que pour riposter quand on vous

21 attaque à partir d'un endroit qui est densément peuplé, c'est très

22 difficile. Ma question est : qu'est-ce qu'un commandant fait à ce moment-

23 là ?

24 R. Dans une situation telle que celle-ci, d'un point de vue hypothétique,

25 bien sûr, le commandant doit étudier la question de la nécessité militaire,

26 de la proportionnalité des dommages collatéraux, et dans certains cas le

27 commandant ne sera pas en mesure de riposter. D'ailleurs, nous n'avons pas

28 riposté à chaque fois que nous étions pris pour cible, parce que même si

Page 1836

1 nous avons été en mesure d'identifier une cible militaire du fait du

2 principe de la proportionnalité et des dommages collatéraux, nous n'avons

3 pas pu remplir les critères applicables et nous n'avons pas retourné le feu

4 en raison de l'endroit où nous étions parce que c'était difficile. Mais

5 nous avons émis des protestations à l'intention de la partie qui était

6 responsable de cela

7 Q. Monsieur le Général, est-ce que défendre le territoire que vous occupez

8 représente une nécessité militaire ?

9 R. Cela dépend du territoire que vous défendez. Dans le cas de Sarajevo et

10 les Musulmans qui défendaient la ville, oui.

11 "Défendre le territoire que l'on occupe, est-ce là une nécessité

12 militaire ?"; c'est bien la question ? Pour répondre brièvement, je dirais

13 oui. Mais pourquoi défendez-vous le territoire au départ ? Disons que je

14 tire cette conclusion de votre question; c'est cela ? Pourquoi défendre

15 Sarajevo; c'est cela ?

16 Q. Est-ce qu'on peut se mettre d'accord que c'est la nécessité militaire

17 pour les deux factions militaires qui sont en conflit ?

18 R. Pour vous donner une réponse brève, oui. Mais la situation dans

19 laquelle nous nous trouvions, et si je regarde cette carte, faisait

20 ressortir une différence. Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? Les Serbes

21 ont pris de l'avance et ils sont arrivés au point où ils ne pouvaient plus

22 prendre la ville, donc ils se sont arrêtés, et on avait deux forces qui

23 s'opposaient, la ville étant l'objectif, bien sûr, de cette opposition;

24 l'une la défendait et l'autre voulait l'obtenir.

25 Q. Est-ce que, si on regarde encore une fois la carte, on peut se mettre

26 d'accord que la ligne bleue représente, disons, le positionnement des

27 unités de l'ABiH, et la ligne rouge celui de l'armée de Republika Srpska ?

28 R. Oui.

Page 1837

1 Q. Est-ce que derrière la ligne rouge, d'après vos connaissances et

2 d'après vos souvenirs, il y avait des territoires peuplés aussi par des

3 civils ?

4 R. Oui.

5 Q. Est-ce que derrière cette ligne rouge, il y avait des installations,

6 des objectifs civils aussi ?

7 R. Je ne sais pas si je comprends bien "objectifs civils". Les civils, ce

8 ne sont pas des objectifs particulièrement. Vous pouvez reformuler la

9 question, peut-être ?

10 Q. Je pense aux cibles civiles, aux objectifs, donc j'utilise, si vous

11 voulez, le vocabulaire des protocoles sur la convention de Genève. Les

12 objectifs civils, donc je pense que c'est un mot qui décrit non seulement

13 les personnes, mais aussi les bâtiments qui ont une destination civile.

14 R. Si l'objectif est de prendre un bâtiment ou une ville, par exemple, le

15 commandant doit veiller à ce qu'il n'engage pas, dans le sens militaire du

16 terme, des non-combattants, à savoir des civils qui ne sont pas parties au

17 conflit.

18 Q. Est-ce que, Monsieur le Général, cela vaut pour tous les belligérants ?

19 R. Oui.

20 Q. Qu'est-ce que vous dites alors de l'emplacement de l'armée de la

21 Bosnie-Herzégovine, notamment de ses brigades que j'ai citées tout à

22 l'heure ?

23 R. Leur problème a été exacerbé par le fait que vous aviez un corps serbe

24 qui encerclait la ville; on le voit avec cette ligne rouge. Il défendait la

25 ville de l'avancée serbe. Pour ce faire, en réalité, ils se sont dispersés

26 parmi la population civile. Là encore, c'est une des caractéristiques de

27 ces actions de guerre menées en milieu urbain. C'est difficile à la fois

28 pour l'agresseur, en quelque sorte, et pour le défenseur.

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1 Q. En effet, Monsieur le Général, je ne suis pas du tout militaire, donc

2 je suis sans aucune expérience militaire même, mais parlons des avantages

3 militaires. Est-ce qu'au bout du compte, cela représente un avantage énorme

4 militaire de situer toutes les installations que vous avez et de les, si

5 vous voulez, répandre au milieu des objectifs civils ?

6 R. En un sens, c'est un avantage, parce qu'évidemment cela rend plus

7 difficile pour l'autre de prendre pour cible ces objectifs. Mais vous

8 exposez des civils à des risques plus importants, et c'est quelque chose

9 que les commandants doivent prendre en considération également. Il y a deux

10 éléments ici à prendre en considération. Il y a un avantage et un

11 inconvénient.

12 Q. Monsieur le Général, on peut parler aujourd'hui d'un commandant

13 raisonnable, d'un standard d'un commandant raisonnable. Ma question est la

14 suivante. Qu'est-ce qu'il fait ? Est-ce qu'il baisse les bras ou il

15 continue de défendre ses intérêts, c'est-à-dire de poursuivre ses

16 nécessités militaires ?

17 R. Un commandant raisonnable examinerait sans doute les risques encourus

18 par la population civile et essaierait de les atténuer de manière à éviter

19 que la population civile ne subisse des dommages lorsqu'il se trouve dans

20 un conflit avec une autre force militaire. Au cas où un commandant

21 militaire est confronté à un autre commandant militaire qui s'est disséminé

22 parmi la population civile, ceci rend sa tâche beaucoup plus difficile, et

23 comme je l'ai dit plus tôt, ceci, dans certains cas, l'empêcherait de

24 cibler la partie adverse du fait du potentiel de risques encourus par la

25 population civile.

26 Q. Merci, Monsieur le Général. Je comprends un petit mieux maintenant,

27 donc je suis tout à fait d'accord avec vous. Ce que vous dites lors de

28 votre contre-interrogatoire, je pense, le 5 juillet 2002, dans la procédure

Page 1840

1 contre le général Galic, sur la page 11 238.

2 Je vais le lire. Ce sont vos propres mots :

3 [interprétation] "Comment ciblez-vous quelqu'un qui est entouré de

4 civils ?" Vous avez répondu : "C'est le pire cauchemar pour un soldat."

5 R. Oui, je suis tout à fait d'accord. Oui, je l'ai dit.

6 Q. Maintenant, on va retourner sur notre carte. On va retourner et on va

7 regarder la carte, et vous avez dit tout à l'heure que la ligne rouge, on

8 voit d'après cette ligne rouge que Sarajevo a été encerclée; est-ce vrai ?

9 R. Oui, oui.

10 Q. Mais il y a toute une partie qui se situe à peu près au niveau où il

11 est marqué "102e Brigade", où se situe l'aéroport. Vous voyez cette

12 partie ?

13 R. Oui, oui, je la vois.

14 Q. La partie rouge, là, est coupée.

15 R. Oui, c'est exact.

16 Mme ISAILOVIC : Maintenant, je voudrais aimer avoir sur l'écran la partie -

17 - si vous pouvez juste pointer la partie de l'aéroport pour qu'on puisse

18 remonter un petit peu la carte et qu'on rende cela plus visible, s'il vous

19 plaît. Oui, c'est bon. On remonte encore un petit peu, juste un petit peu.

20 Q. Hier, Monsieur le Général, vous avez marqué plusieurs endroits à l'aide

21 de ce stylet électronique. Maintenant, vous êtes familier, je suppose, avec

22 cet exercice. Si on peut marquer tout d'abord l'aéroport.

23 R. [Le témoin s'exécute]

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Isailovic, excusez-moi un

25 instant. Tout à l'heure, vous avez dit au témoin que la ligne rouge était

26 coupée, et il l'a confirmé. J'aimerais savoir où cela se trouve exactement

27 sur la carte. On pourrait me le montrer ? C'est là que la ligne rouge est

28 coupée ?

Page 1841

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait revenir à l'endroit

2 où nous en étions à la carte tout à l'heure ?

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Alors, où est cette coupure

4 dans la ligne rouge ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Là, il y a un espace où il n'y a pas de ligne,

6 juste ici, à cet endroit. Vous voyez où est le numéro 155 ?

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non. Oui, cela y est, 155.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Là, vous voyez un espace où il n'y a pas de

9 ligne rouge. Il y a un espace entre les deux lignes.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais il y a en a plusieurs en

11 réalité, non ?

12 [La Chambre de première instance se concerte]

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Alors, qu'est-ce que cela veut dire,

14 cette rupture dans la ligne rouge ? Je vous le demande, Général, à vous.

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela montre où l'aéroport séparait en réalité

16 les deux factions belligérantes. Il y a là cet endroit où la ville n'était

17 pas complètement encerclée, c'est-à-dire qu'il y avait cet espace qui

18 restait. C'est là, par exemple, que les convois d'approvisionnement

19 parvenaient à la ville, qu'ils pouvaient aller et venir. C'est également

20 comme cela que les Musulmans entraient et sortaient dans la ville, par ce

21 tunnel qui passait sous l'aéroport, et utilisaient ce trou, en quelque

22 sorte, qui partait de cette annotation 155, et après un peu plus loin vers

23 la ville. C'est comme cela qu'ils entraient et sortaient.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci beaucoup.

25 Madame Isailovic, veuillez poursuivre.

26 Mme ISAILOVIC : Merci.

27 Q. Vous avez abordé vous-même la question de ce tunnel, donc je n'ai plus

28 besoin de vous poser cette question sur son existence. Est-ce que

Page 1842

1 maintenant vous pouvez reprendre l'exercice et entourer l'aéroport, s'il

2 vous plaît ?

3 R. [Le témoin s'exécute]

4 Q. Merci. Mettez, s'il vous plaît, une lettre "A". C'est simple, c'est

5 l'aéroport.

6 R. [Le témoin s'exécute]

7 Q. Maintenant, d'après vos connaissances et d'après vos souvenirs, où se

8 situaient l'entrée et la sortie de ce tunnel qui menait au-dessous de la

9 piste de l'aéroport ?

10 R. Je ne l'ai jamais vu. Enfin, on m'a dit où il se trouvait, où était

11 l'entrée, l'entrée par ici et la sortie par là, à peu près.

12 Q. Disons, des deux côtés, on peut les appeler entrée et sortie. Mais,

13 maintenant, est-ce vrai qu'après la sortie, disons, mais je parle de

14 l'emplacement qui se situe à l'ouest, c'est le territoire contrôlé par

15 l'ABiH ?

16 R. Oui, c'est exact.

17 Q. Monsieur le Général, militairement parlé, c'est une communication assez

18 importante entre les unités qui se trouvent à l'intérieur, disons, de la

19 ligne bleue dont on a parlé tout à l'heure et le territoire, là, qui est

20 couvert par la 104e Brigade et qui mène vers Igman. Ma question : c'est une

21 communication, militairement parlé, assez importante ?

22 R. Oui.

23 Q. D'après vos souvenirs - vous répondez par non si vous n'en avez pas -

24 le territoire après Igman, est-ce que cela a assuré une profondeur assez

25 importante aux unités du 1er Corps, c'est-à-dire de l'ABiH ?

26 R. Je ne suis pas tout à fait sûr d'avoir compris ce que vous voulez dire

27 par "profondeur".

28 Q. Je voudrais parler, donc c'est une expression militaire. Quand vous

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1 avez vos unités - maintenant, je vous donne des leçons, je suis

2 complètement nulle, je le sais, mais j'ai appris cela des manuels

3 militaires - vous êtes plus sûr quand, derrière vos dos, vous avez une

4 profondeur, un territoire assez large, donc c'est un avantage militaire,

5 d'une façon, d'assurer son dos.

6 R. Je pourrais de ce cas effectivement être d'accord avec l'utilisation de

7 ce terme, le terme de "profondeur", mais c'était aussi un cas particulier,

8 c'est-à-dire le cas de la route qui menait à Sarajevo et de Sarajevo. Là,

9 il ne s'agit pas de profondeur, mais il s'agit de route.

10 Q. Justement, parce que là il y avait une route appelée route d'Igman,

11 cette route a été contrôlée par les unités de l'ABiH; est-ce vrai ?

12 R. Oui, effectivement, et cette route était utilisée grandement par les

13 civils musulmans.

14 Q. Par les civils. Est-ce qu'elle était utilisée par les militaires de

15 l'ABiH ?

16 R. Oui, effectivement.

17 Q. Est-ce qu'on peut considérer alors cela comme une cible militaire

18 légitime ?

19 R. Oui, dans la mesure où vous ne tuez pas des civils.

20 Q. On va revenir sur ce problème de distinguer. Maintenant, je vous

21 demande, parce que c'est la même chose qui vous avait été demandée par --

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant.

23 [La Chambre de première instance se concerte]

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez y aller.

25 Mme ISAILOVIC : Merci, Monsieur le Président.

26 Q. On vous a demandé hier de montrer l'emplacement de Lukavica. S'il vous

27 plaît, si vous pouvez mettre un "L".

28 R. [Le témoin s'exécute]

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1 Q. Et --

2 R. Pourriez-vous agrandir, zoomer sur cette carte, s'il vous plaît ?

3 Q. Il faut garder tout d'abord, oui. On efface "L", s'il vous plaît, on

4 efface "L", oui mais on a effacé "A" aussi, donc vous reposez "A".

5 Mme ISAILOVIC : Monsieur le Président, j'aurais aimé garder cette carte

6 marquée en tant que moyen de preuve et je demande une cote.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. C'est versé au dossier.

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce D44, Monsieur le

9 Président.

10 Mme ISAILOVIC : Maintenant, il faut effacer tout pour pouvoir manipuler la

11 carte et agrandir un petit peu, mais juste un petit peu.

12 Q. Est-ce que vous voyez mieux maintenant où se situe Lukavica ?

13 R. Oui, je le vois.

14 Q. Pouvez-vous mettre un "L", s'il vous plaît ?

15 R. [Le témoin s'exécute]

16 Q. Maintenant, s'il vous plaît, de mettre un "I" sur Ilidza ?

17 R. [Le témoin s'exécute]

18 Q. Est-ce que vous étiez au courant que le Corps de Romanija, Sarajevo-

19 Romanija dont le commandant était général Milosevic, avait dans sa zone de

20 responsabilité les deux endroits, donc Lukavica et Ilidza ?

21 R. Oui, je le savais.

22 Q. Est-ce que, d'après vos connaissances à l'époque et d'après vos

23 souvenirs, les deux emplacements dont Ilidza et Lukavica communiquaient

24 entre eux ? Comment s'est passée la communication entre l'endroit "I" et

25 l'endroit "L" ?

26 R. Il y avait des moyens de communication entre les deux endroits. Comment

27 le faisaient-ils ? Je ne le sais pas.

28 Q. D'après vous, quelle est à peu près la distance entre les deux

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1 endroits ?

2 R. Je dirais entre 5 à 6 kilomètres.

3 Q. Maintenant, si vous pouvez retenir dans votre tête l'emplacement.

4 Mme ISAILOVIC : Parce que j'ai besoin maintenant de la carte originale, de

5 la carte où on voit plus de choses, donc où on voit plus de territoire.

6 Q. Si vous pouvez retenir "L" et "I", parce que cela va être très, très

7 petit.

8 Mme ISAILOVIC : Je vous demande maintenant la carte vierge. On ne garde

9 pas. Je vous prie d'agrandir, oui, donc un petit peu.

10 Q. Maintenant, si ce n'est pas trop difficile de trouver maintenant, de

11 mettre un "L" sur Lukavica et un "I" sur Ilidza, s'il vous plaît.

12 R. [Le témoin s'exécute]

13 Q. Si vous pouvez justement tirer une ligne droite entre les deux.

14 R. [Le témoin s'exécute]

15 Q. Est-ce que, d'après vos connaissances, les unités qui étaient la

16 responsabilité des zones d'Ilidza et de Lukavica pouvaient se déplacer sur

17 cette ligne droite ?

18 R. Je ne me souviens qu'ils le faisaient. C'est peu probable. Je ne me

19 souviens pas de quelle façon ils communiquaient entre les deux entités, les

20 deux endroits.

21 Q. Est-ce que les civils serbes circulaient sur cette ligne droite,

22 d'après vos connaissances ?

23 R. Je ne me souviens pas très bien de tout cela. C'est vrai qu'il y avait

24 des mouvements à travers l'aéroport qui étaient contrôlés par l'ONU, mais

25 je ne me souviens pas vraiment de tous les détails de cette circulation à

26 travers l'aéroport. Cela fait trop longtemps.

27 Q. Monsieur le Général, on a abordé avec un autre témoin ici, M. David

28 Harland - dont le nom vous dit quelque chose, je suppose, parce qu'il était

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1 en charge plutôt des questions humanitaires, il était plus au courant de

2 cela peut-être que vous - il nous a parlé d'une route utilisée par les

3 unités, mais aussi par les civils serbes qui sont restés sur le territoire

4 contrôlé par l'armée de Republika Srpska, qui menait du point "I" jusqu'au

5 point "L", tout autour de la ligne rouge représentée sur cette carte. Est-

6 ce que vous-même, vous n'avez jamais entendu parler de cette "route de

7 salut" ou "de vie", appelée comme cela par les Serbes ?

8 R. Je ne me souviens pas de cela.

9 Q. Est-ce que, si M. Harland a raison, une route de cette nature

10 représente une nécessité militaire qu'on doit défendre ?

11 R. Ceci serait effectivement une route importante pour l'armée serbe de

12 pouvoir l'emprunter. Je suis tout à fait d'accord là-dessus.

13 Q. Merci beaucoup.

14 Mme ISAILOVIC : Je demande à M. le Greffier une cote pour garder cette

15 carte.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La pièce est versée.

17 M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce D45, Monsieur le

18 Président.

19 Mme ISAILOVIC : Maintenant, je demande encore la carte vierge, s'il vous

20 plaît, et qu'on l'agrandisse bien sûr un petit peu pour tout le monde.

21 Q. Monsieur le Général, hier, avec M. le Procureur, vous avez discuté des

22 hauteurs, c'est-à-dire des monts qui se situaient sur cette carte, les uns

23 se trouvant sur le territoire contrôlé par l'ABiH, et les autres sur le

24 territoire contrôlé par l'armée de Republika Srpska. Est-ce que vous vous

25 souvenez de cela ?

26 R. Oui.

27 Q. On a discuté sur Debelo Brdo. Si vous pouvez justement placer une croix

28 sur l'emplacement de Debelo Brdo.

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1 R. [Le témoin s'exécute]

2 Q. Hier, vous avez parlé de l'emplacement, et j'appelle cela un

3 chevauchement entre les superpositionnements, plutôt, des unités des

4 parties belligérantes et de la FORPRONU. Est-ce que vous vous souvenez de

5 cela ?

6 R. Je me souviens que les Serbes étaient au sud et que les Musulmans

7 étaient au dessous, là où se trouvaient les positions de l'ONU.

8 Q. Dans le transcript d'hier, cela n'apparaît pas très clairement, et

9 c'est pour cela que je vous repose cette question. Est-ce que les Serbes

10 occupaient Debelo Brdo, ma première question, du tout ?

11 R. Non.

12 Q. Quand vous avez parlé d'une superposition des unités de l'armée de la

13 Republika Srpska, est-ce que vous avez pensé à un autre mont qui était

14 occupé par cette armée et qui se situait aux environs de Debelo Brdo ?

15 R. Je me souviens que c'est surtout l'ONU qui avait le meilleur morceau

16 là-bas puisqu'ils étaient tout en haut. Ensuite, les Musulmans étaient

17 juste au dessous et les Serbes étaient au pied de cette colline, la partie

18 sud. C'est un morceau de terre très important. Tout le monde le convoitait,

19 mais je pense que, franchement, c'est l'ONU qui avait le meilleur morceau

20 de terrain. Mais les deux côtés convoitaient cette colline, cette

21 élévation.

22 Q. Est-ce qu'on peut se mettre d'accord que - et j'espère qu'on aura

23 l'occasion tous ensemble de voir ce mont - la pente occupée par les unités

24 de l'ABiH et les hauteurs jusqu'aux unités de la FORPRONU donnent une

25 vision assez large et assez confortable de tout ce qui s'est passé à

26 Sarajevo, dans le centre-ville ? Vous avez parlé ici hier de "Sniper

27 Alley".

28 R. Oui, très bonne vision, de très loin.

Page 1848

1 Q. Revenons maintenant à ce mont occupé par les Serbes qui se situait près

2 de Debelo Brdo. Est-ce que vous vous souvenez de son nom ?

3 R. Non.

4 Q. Est-ce que cela vous rafraîchit un petit peu la mémoire si je vous dis

5 Zlatiste ?

6 R. Non, à nouveau, je ne m'en souviens pas. Je ne me souviens pas de ce

7 nom.

8 Q. Peu importe le nom. On peut le trouver ailleurs.

9 Est-ce que vous pouvez décrire la position géographique de ce mont

10 dont vous avez parlé hier par rapport à Debelo Brdo et qui était occupé par

11 les unités serbes ?

12 R. Ce dont je me souviens, ce sont des positions occupées par les Serbes.

13 C'est une crête à partir de laquelle on pouvait avoir une bonne vue sur la

14 ville. Elle allait le long de cette ligne rouge qui délimite les positions

15 serbes et qui est au sud, au sud vers l'est.

16 Q. Est-ce qu'on est d'accord que cela se situe encore plus loin du centre-

17 ville que Debelo Brdo ?

18 R. Oui, c'est exact.

19 Q. Est-ce que peut-être le nom Vidikovac vous dit plus ?

20 R. Ce sont des noms que je n'ai pas gardés dans ma mémoire. Je ne m'en

21 souviens pas.

22 Mme ISAILOVIC : Maintenant, je voudrais qu'on voie ensemble -- on ne va pas

23 garder alors cette carte, parce qu'on n'a pas montré grand-chose. La carte

24 vierge, si on peut agrandir la partie où est inscrit "101e Brigade".

25 Q. Maintenant, est-ce que maintenant, Monsieur le Général, vous situez là

26 le mont Mojmilo ? Parce qu'hier, vous avez mis une croix, et maintenant

27 j'aurais aimé - parce que ce mont, c'est en effet une crête assez longue -

28 de montrer par une ligne, Mojmilo.

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1 R. [Le témoin s'exécute]

2 Q. Est-ce que vous vous souvenez, quand vous vous étiez rendu à

3 Lukavica, qu'il y avait un mont qui surplombait Lukavica ?

4 R. Je ne me souviens pas.

5 Q. De toute façon, hier vous avez dit que, d'après vos connaissances,

6 Mojmilo, le mont Mojmilo, quelles que soient sa grandeur et sa longueur,

7 était occupé par les unités de l'ABiH ?

8 R. Contrôlé par les Bosniens, oui.

9 [La Chambre de première instance se concerte]

10 Mme ISAILOVIC : On ne garde pas non plus cette carte, cette marque. On va

11 vers la carte vierge. Je vous prie maintenant d'agrandir la partie où il

12 est marqué "105e Brigade".

13 Q. Monsieur le Général, hier on a parlé de Sedrenik. Est-ce que vous

14 souvenez de cela ? Est-ce que vous pouvez mettre un "X" sur Sedrenik ?

15 R. Si mes souvenirs sont exacts, c'est à peu près ici. Excusez-moi, c'est

16 ici.

17 Mme ISAILOVIC : Est-ce qu'on peut enlever la croix, la première croix, s'il

18 vous plaît ?

19 Q. Sur Sedrenik, à côté de la croix, mettez un "S", s'il vous plaît.

20 R. [Le témoin s'exécute]

21 Q. Est-ce que, d'après vos connaissances, le toponyme connu comme

22 Sharpstone/Spicasta Stijena était proche de Sedrenik ? Si vous pouvez le

23 montrer sur la carte, s'il vous plaît.

24 R. De mémoire, je dirais que c'est à peu près ici, au nord. Q. Est-ce que

25 vous pouvez mettre "S" -- non pas un "S", mais "S1". Cela représente

26 Spicasta Stijena, Sharpstone. Est-ce qu'on peut se mettre d'accord que cela

27 se situe à l'intérieur de la ligne bleue ?

28 R. D'après mon meilleur souvenir, oui.

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1 Q. De toute façon, dans cette partie de la ville, les lignes entre les

2 deux factions belligérantes étaient assez proches. Est-ce que vous êtes

3 d'accord avec moi ?

4 R. Oui, effectivement, c'est bien le cas.

5 Mme ISAILOVIC : Maintenant, Monsieur le Président, j'aurais aimé garder

6 cette carte marquée.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document sera versé en tant que pièce

9 D46.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que je peux vous demander que

11 signifie "bb", en minuscules ? Nous avons "bbr", signifiant brigade, mais

12 "bb", en minuscules, que cela veut-il dire ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Le bataillon. Dans la hiérarchie de

14 l'organisation de l'armée, vous avez un Corps d'armée, une brigade, un

15 bataillon, une compagnie, un peloton et ensuite une section.

16 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Mon Général, pour faire suite à la

17 question posée par le Président Juge Robinson, au milieu de la carte on

18 peut voir "105.BBR". Est-ce que cela veut dire que c'est l'emplacement de

19 la 105e Brigade bosnienne ? Est-ce que c'est son QG qui est là ? Est-ce que

20 le drapeau est pour cela ici ?

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous donne lecture de la carte. Cela veut

22 dire que c'est la zone de la 105e Brigade. Apparemment, il y avait un

23 certain nombre de bataillons qui sont placés aussi sur la carte. Le QG se

24 trouverait là où se trouve le drapeau. Mais d'après ce que je sais, je ne

25 peux pas vous dire où se trouvait chaque QG des bataillons des brigades

26 puisque nous ne les visitions pas.

27 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Est-ce que vous pouvez nous dire ce

28 que veulent dire les drapeaux, les doubles drapeaux ? Que veulent dire ces

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1 symboles ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne saurais vous répondre. Je dirais que les

3 drapeaux au niveau d'une zone réservée à un bataillon, que ceci

4 correspondrait au quartier général d'un bataillon. Si vous avez "2BB" et si

5 vous avez un drapeau là - je pense que c'est un 2, donc d'après moi, ce

6 serait le QG du bataillon - et à nouveau je ne suis pas sûr de la lecture

7 de ces cartes. Je ne sais pas comment l'interpréter, vraiment.

8 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie.

9 Mme ISAILOVIC :

10 Q. Monsieur le Général, juste pour en finir avec cette carte, qu'est-ce

11 que cela signifie ? Par exemple, on a deux symboles là où vous avez mis

12 "S". Cela ressemble à des armes lourdes, où ce n'est pas tourné vers la

13 ligne. Est-ce que dans votre armée vous utilisez ces symboles aussi ?

14 R. Nous utilisons des symboles similaires.

15 Q. Qu'est-ce qu'ils représentent les deux, là, disons, signes comme deux

16 flèches ?

17 R. Je dirais que le premier, celui qui est au-dessous, était un mortier,

18 et celui qui est au-dessus, ce serait un lance-roquettes, quelque chose

19 comme cela, un lance-mortiers.

20 [La Chambre de première instance se concerte]

21 Mme ISAILOVIC :

22 Q. Est-ce que si on met cela sur cette carte de travail en tant qu'un

23 commandant, est-ce que cela signifie l'emplacement de ces armes lourdes ?

24 R. En théorie, oui.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il y a une question qui se pose.

26 Cela n'a rien à voir avec la procédure, mais malheureusement nous devons

27 nous en occuper.

28 [La Chambre de première instance se concerte]

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez continuer.

2 Mme ISAILOVIC : Merci.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai voulu attirer

4 l'attention du Juge Harhoff. Ceci ne peut pas être une brigade bosnienne.

5 Cela ne peut être que la 105e Brigade de Montagne ou de Combat, donc en

6 aucun cas bosnienne. C'était juste un petit point d'explication pour le

7 Juge Harhoff, à savoir il s'agit de la 105e Brigade de Combat ou de

8 Montagne.

9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Maître Tapuskovic.

10 Monsieur Docherty.

11 M. DOCHERTY : [interprétation] Objection, puisque le conseil dépose. Il

12 appartient au témoin de répondre. Si le témoin sait de quoi il s'agit, je

13 veux bien.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez tout à fait raison.

15 Je veux entendre l'explication du témoin.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a une question que je dois vous poser

17 tout de même. Est-ce que je dois changer la date de mon départ cet après-

18 midi ? Parce que ceci a été réglé pour cet après-midi.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons parler de cela après la

20 pause.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

22 Mme ISAILOVIC :

23 Q. Avant que la Chambre ne commence à conférer entre eux, on a eu une

24 question très intéressante, parce qu'il s'agissait des emplacements d'un

25 mortier et d'un obusier. Je vous invite peut-être de lire ce qu'il a été

26 dit pour que je ne lise pas moi-même, les réponses de M. le Général, et je

27 vais poursuivre après.

28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, continuez.

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1 Mme ISAILOVIC :

2 Q. Monsieur le Général, maintenant, parce qu'on a placé une croix sur

3 Sedrenik, nous, ici, on a en parlé beaucoup les jours précédents, est-ce

4 qu'on peut se mettre d'accord qu'on a placé -- celui qui l'a placé, il l'a

5 marqué comme cela, ces armes lourdes trop près d'un quartier résidentiel,

6 d'après ce que vous avez appris dans vos écoles canadiennes ?

7 R. On ne peut pas en tirer cette conclusion juste en regardant les

8 symboles sur la carte. C'est un territoire très étendu. Puis, on dirait

9 aussi qu'il y a énormément d'étendues, d'endroits ouverts. Ce qu'il faut

10 vraiment, c'est voir véritablement ces endroits-là plutôt que d'essayer de

11 regarder la carte.

12 Q. Merci.

13 Mme ISAILOVIC : Maintenant, on a gardé, il me semble, cette carte. Si on

14 peut encore avoir la carte d'hier, s'il vous plaît. Maintenant, je vous

15 prie d'agrandir le plus la partie où est inscrit "111e vbbr."

16 Q. Monsieur le Général, hier le Procureur vous a posé la question sur le

17 mont Zuc; est-ce que vous vous souvenez de cela ?

18 R. Oui.

19 Q. D'après vos souvenirs, qui contrôlait ce mont ?

20 R. Les Musulmans.

21 Q. Est-ce que vous voyez là, encore, les symboles ? Est-ce que vous pouvez

22 nous dire, d'après vos connaissances militaires, qu'est-ce que cela peut

23 représenter ?

24 R. On dirait encore un obusier, une espèce d'obusier, qui est juste à côté

25 du "1 bb". On dirait aussi qu'il y a des mitrailleuses.

26 Q. Est-ce que sur cette même carte -- est-ce que vous pouvez déjà apposer

27 un "Z" sur Zuc ?

28 R. [Le témoin s'exécute]

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1 Q. Je vous ai demandé Zuc, pas par Hum.

2 R. [Le témoin s'exécute]

3 Q. Là où on a regardé les obusiers, est-ce que c'est cela que vous avez

4 reconnu comme Zuc, hier ?

5 R. Il me le semble.

6 Q. Si vous pouvez maintenant apposer "Zagreb" sur Zuc, parce que là il ne

7 se trouve pas sur Zuc.

8 R. [Le témoin s'exécute]

9 Q. Vous avez identifié un autre mont qui est le mont Hum; est-ce vrai ?

10 R. Tout à fait.

11 Q. Est-ce que vous pouvez remplacer ce "Z" par un "H", s'il vous plaît ?

12 R. [Le témoin s'exécute]

13 Q. Est-ce que vous vous souvenez qui contrôlait cette hauteur ?

14 R. Les Musulmans contrôlaient toute cette zone.

15 Q. Est-ce que vous êtes d'accord avec moi que toute zone entre "Z" et "H"

16 contient beaucoup de monts, beaucoup de hauteurs ?

17 R. C'est extrêmement escarpé. Il y a beaucoup de collines.

18 Q. Est-ce que toutes ces collines, tous ces monts - parce que Zuc et Hum,

19 d'après ce qu'on peut voir sur la carte c'est assez haut - tournaient vers

20 une partie qui n'est pas aussi haute, aussi montagneuse ? Je parle du

21 territoire contrôlé par l'armée de la Republika Srpska.

22 R. Je me souviens uniquement de ces deux endroits qui dominaient dans

23 cette zone. Mais je ne me souviens pas vraiment ce que surplombait

24 l'endroit qui était au nord-est. Il me semble que les positions serbes

25 étaient un peu plus basses, en effet, étaient en contrebas.

26 Q. Merci beaucoup.

27 Mme ISAILOVIC : Je demanderais aussi une cote pour cette carte marquée.

28 [La Chambre de première instance se concerte]

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, la pièce peut être versée.

2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D47.

3 Mme ISAILOVIC : Merci beaucoup.

4 Maintenant, on va passer sur un autre sujet, sur le sujet des tirs

5 embusqués, donc je demande à mon assistante d'afficher la photo marquée qui

6 représente le moyen de preuve accepté hier, P201.

7 Q. Vous vous souvenez, hier, vous avez parlé d'un nid de snipers que vous

8 avez eu l'occasion de visiter avec votre chef, je suppose le général

9 Gobillard à l'époque, donc au printemps 1995 ?

10 R. Oui, c'est exact.

11 Q. Est-ce que vous vous souvenez où se trouvait la ligne de --

12 Mme ISAILOVIC : Excusez-moi, on va attendre un petit peu.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donnez-nous une minute, s'il vous

14 plaît.

15 [La Chambre de première instance se concerte]

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre.

17 Mme ISAILOVIC : J'allume le micro, tout d'abord.

18 Q. On revient à cette photo. On s'est mis d'accord que cela représente un

19 nid de snipers, donc que vous avez visité avec le général Gobillard au

20 printemps 1995. Maintenant, est-ce que vous pourriez, Monsieur le Général,

21 nous montrer, si vous vous souvenez de cela, où se situait la ligne de

22 séparation entre le territoire contrôlé par l'ABiH et l'armée de Republika

23 Srpska, sur cette photo ?

24 R. La partie inférieure serait la partie occupée par l'ABiH, et la partie

25 supérieure de la photo, c'est la zone occupée par les Serbes. Je crois que

26 c'est une bonne manière de décrire les choses. La ligne rouge montre la

27 rivière, et au nord de la rivière, il y avait la Bosnie-Herzégovine,

28 l'ABiH, et de l'autre côté les Serbes.

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1 Q. La ligne, c'est Miljacka qui sépare les deux factions belligérantes.

2 Maintenant, les quatre tours qu'on voit, donc qui sont les plus proches de

3 nous, est-ce que vous les situez ? Parce que la ligne passe, en effet,

4 couvre les tours, donc coupe les tours aussi.

5 R. Oui, je vois les quatre bâtiments qui sont au nord de la rivière. Il y

6 a un petit derrière, mais ne regardez pas la ligne, évidemment, puisque la

7 ligne est censée marquer la rivière, le lit de la rivière.

8 Mme ISAILOVIC : Là, je vais poser la question à M. le Greffier. Est-ce

9 qu'il est possible, je pense, d'après les leçons qu'on a eues ici, la

10 formation, que c'est possible de marquer sur la même photo ?

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, est-ce que c'est possible ?

12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, c'est possible.

13 Mme ISAILOVIC : Je vous demanderais --

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Docherty.

15 M. DOCHERTY : [interprétation] Oui, mais est-ce que l'on aura sous sa forme

16 actuelle l'original ou en tout cas la photo marquée, puisque c'est aussi

17 une pièce de l'Accusation ?

18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Pour que tout soit clair, les parties ont

19 la possibilité soit de montrer l'image d'origine sans annotation et d'y

20 apporter des annotations et de la verser ainsi au dossier ou de faire appel

21 à une photo ou à un document déjà annoté et d'y ajouter des annotations. A

22 ce moment-là, le document sera alors enregistré avec les annotations

23 d'origine, plus les nouvelles.

24 M. DOCHERTY : [interprétation] Puisque c'est une pièce de l'Accusation, il

25 me semble que la Défense essaie de la modifier à ce stade. Il y a deux

26 éléments qui figurent sur cette photo pour l'instant, et j'aimerais que

27 l'on parte du début, parce que je crois que nous avons essayé de montrer

28 quelque chose en apportant ces deux annotations seulement, nous essayions

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1 d'indiquer quelque chose, et j'aimerais que cette pièce demeure en l'état.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Avez-vous compris, Madame

3 Isailovic ? L'idée, c'est de présenter votre propre pièce et de ne pas

4 utiliser celle de l'Accusation.

5 Mme ISAILOVIC : Oui, mais, d'après mon sens, à mon sens, l'intérêt --

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais d'un point de vue technique,

7 est-ce que c'est possible ? Est-ce qu'on peut avoir accès à la même pièce,

8 mais sans les annotations ?

9 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Les parties ont accès avec l'image

11 d'origine sans annotation en faisant référence à la cote de la pièce, si

12 elle a été versée au dossier, bien sûr.

13 Mme ISAILOVIC : C'est le numéro 65 ter 2819.

14 En attendant, juste une question technique au greffier. Est-ce qu'il est

15 possible d'utiliser deux couleurs différentes sur une même photo ?

16 M. DOCHERTY : [interprétation] C'est ce que j'allais suggérer. Si c'est

17 possible, la Défense pourra utiliser de l'encre bleue. Si tel était le cas,

18 cela ne me poserait aucun problème.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Alors c'est beaucoup de bruit pour

20 rien, n'est-ce pas ? Monsieur le Greffier, oui, effectivement, la Défense

21 peut se servir d'un crayon bleu, oui.

22 Mme ISAILOVIC : C'est tout l'intérêt de cet exercice.

23 Q. Je vous prie, Monsieur le Général, avec le crayon, le stylet bleu,

24 maintenant de tirer cette ligne, mais en évitant les tours, parce que les

25 tours, en effet, se situent de l'autre côté de Miljacka.

26 Mme ISAILOVIC : Entre-temps, mon assistante a fait publier la photo vierge.

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Sur laquelle vous voulez que je dessine ?

28 Mme ISAILOVIC : Ce n'est pas la même photo.

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1 Est-ce qu'on peut avoir, parce qu'on va continuer avec cette carte qui est

2 maintenant sur l'écran, mais est-ce qu'on peut avoir la carte marquée, et

3 on va continuer à la marquer à l'encre bleue, s'il vous plaît, donc P201 ?

4 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

5 Mme ISAILOVIC : Excusez-moi, Monsieur le Général. La technique n'est pas le

6 point fort.

7 Q. Maintenant, on a cette image, et je vous prie, avec un stylet bleu, de

8 redessiner près de cette ligne de séparation qui représente Miljacka en

9 évitant les tours.

10 R. [Le témoin s'exécute]

11 Q. Est-ce qu'on peut soumettre encore une fois que les tours restent sur

12 le territoire contrôlé par l'ABiH ?

13 R. Oui.

14 Q. Aussi, les tours font face au bâtiment de briques rouges que vous avez

15 marqué par une croix.

16 R. Oui, certains.

17 Q. Hier, on a parlé, on a profité de vos connaissances militaires

18 concernant l'utilisation de snipers dans la ville et en général. Tout

19 d'abord, j'aurais aimé que, pour notre utilisation d'aujourd'hui, on se

20 mette d'accord sur la notion de sniper, pour qu'on pense tous à la même

21 chose. Quand on dit "sniper", vous pensez à quoi exactement ?

22 R. Un homme, une personne en tout cas, un tireur très spécialisé avec de

23 très grandes compétences et qui sait se déplacer de manière très

24 intelligente sans se faire repérer et que ses cibles sont d'une valeur très

25 élevée. C'est pour cela qu'on veut pouvoir être en mesure de l'utiliser

26 pour, bien entendu, faire fruit de ses compétences.

27 Q. Maintenant, quand on parle de fusil sniper, est-ce que là aussi on peut

28 se mettre d'accord sur la notion qu'on utilise aujourd'hui, donc l'arme

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1 utilisée par ce militant de haute qualité ?

2 R. Normalement, oui, c'est cela.

3 Mme ISAILOVIC : Excusez-moi, il faut que je révise ma question, parce que

4 ce n'est pas cela du tout. Je vois.

5 Q. Tout ce qui m'intéresse, c'est la définition de ce "sniper rifle".

6 R. Les tireurs isolés choisissent leurs armes en fonction de la portée de

7 ces armes, bien sûr en fonction de la distance entre eux et la cible et de

8 l'objectif qui est le leur. La plupart ont des visées télescopiques et ils

9 peuvent utiliser des armes de différents calibres au moment, évidemment, où

10 ils savent ce qu'ils veulent faire; fort calibre pour des cibles qui se

11 situent à une distance plus importante, et peut-être des armes de plus

12 petit calibre lorsque des cibles sont plus proches et pour pouvoir la

13 transporter également facilement. Ils choisissent différents types d'armes

14 en fonction de ce qu'ils veulent faire.

15 Les Français, par exemple, avaient des armes de certains calibres, 0,5,

16 donc des armes très importantes en taille. Puis, je crois qu'ils avaient

17 d'autres types d'armes également de calibre 7,62 millimètres.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons faire la pause, Madame

19 Isailovic.

20 --- L'audience est suspendue à 12 heures 16.

21 --- L'audience est reprise à 12 heures 39.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez continuer.

23 Je voudrais dire aux parties que je ne suis pas content du progrès que l'on

24 fait en l'espèce. Nous avons fixé des limites en ce qui concerne les temps,

25 et il faudrait se plier aux évaluations qui sont prévues, les évaluations

26 par rapport au temps prévu pour les interrogatoires. Nous avons eu deux

27 heures de prévues pour ce témoin. Le principal a duré six heures 40

28 minutes, et les évaluations que nous avons faites pour la présentation des

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1 moyens en l'espèce ont été basées justement sur ces évaluations qui nous

2 sont données au cas par cas.

3 Je m'attends à ce qu'il y ait plus de rigueur, plus de discipline

4 quand il s'agit de se plier à ces contraintes. Je vais commencer en

5 m'adressant à la Défense puisque vous êtes debout, Maître Isailovic.

6 Essayez de faire un effort par rapport à votre contre-interrogatoire.

7 Mme ISAILOVIC : Monsieur le Président, je pense que le temps pour la

8 Défense est dicté un petit peu par le temps utilisé pour l'interrogatoire

9 en chef. Est-ce que j'aurai à peu près -- parce que moi, si vous voulez, en

10 fonction de se qui se passe dans l'interrogatoire principal, je prépare mon

11 contre-interrogatoire.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] D'une façon générale, Maître

13 Isailovic et Maître Tapuskovic, je dois dire que vous avez bénéficié de

14 plus de temps que le Procureur. J'ai demandé de compter le temps passé, et

15 cela montre que la Défense a passé plus de temps à contre-interroger que le

16 Procureur n'a passé à poser ses questions dans le cadre de l'interrogatoire

17 principal, et c'est un avantage bien clair.

18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Est-ce que je peux m'adresser à vous,

19 Monsieur le Président ?

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, allez-y.

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Un témoin était là, il a été interrogé par

22 le Procureur pendant trois jours. J'ai réussi à circonscrire mon

23 interrogatoire en un seul jour, alors que j'aurais pu passer trois journées

24 à l'interroger. Je me souviens très bien de ce cas précis. Le Procureur a

25 passé trois journées à interroger ce témoin; j'en ai passé une. Nous

26 faisons tous les efforts possibles et imaginables.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, je m'en souviens. J'ai inclus

28 ce cas dans ces exemples que j'ai donnés où j'ai parlé des six heures 45

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1 minutes passées pour l'interrogatoire principal.

2 Est-ce que vous pouvez nous dire combien de temps le Procureur a-t-il mis

3 pour interroger au principal ce témoin ?

4 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons recevoir cela, mais en

6 attendant, on va continuer. Vous allez aussi nous dire combien de temps a

7 passé Me Isailovic à interroger ce témoin, le témoin qui est ici.

8 Mme ISAILOVIC : Monsieur le Président, juste avant de commencer, je pense

9 que votre compte, là, du temps, peut-être peut s'expliquer par l'article 92

10 ter, parce que cet article du Règlement permet à l'Accusation d'introduire

11 comme déjà des preuves, les déclarations sur lesquelles il a mis un certain

12 temps. A mon sens, le temps qu'on utilise doit dépasser le temps octroyé au

13 Procureur pour les témoins qui sont introduits en vertu de l'article 92.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Tout à fait, tout à fait. Vous avez

15 tout à fait raison puisqu'ils utilisent les déclarations préalables, c'est

16 une façon plus brève, un modèle plus bref de présenter ses moyens. Je

17 prends en compte cela. Je vous dis cela parce que je ne me réfère pas

18 seulement à la Défense. Je ne veux pas être injuste. Mais un contre-

19 interrogatoire, pour qu'il soit valable, doit être concis et doit être au

20 point.

21 Mme ISAILOVIC : Merci, Monsieur le Président.

22 Q. Maintenant, à nous. On a cette photo devant nous, et je vous demande

23 maintenant de regarder le bâtiment sur lequel vous avez mis une croix et je

24 vous pose la question : est-ce que j'ai raison de dire que ce bâtiment se

25 trouve tout près de la ligne de confrontation entre les deux parties

26 belligérantes ?

27 R. Oui, c'est exact.

28 Q. Est-ce que, Monsieur le Général, dans les conditions urbaines, quand on

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1 mène une guerre au sein d'une ville, au sein d'un territoire, dans ce mont

2 peuplé et bâti, les bâtiments qui se trouvent sur les frontières

3 représentent à peu près la même chose que les tranchées sur un champ ?

4 R. Chacun de ces bâtiments sur cette image représente une tranchée, chaque

5 bâtiment.

6 Q. Est-ce qu'il est légitime pour la partie qui défend le territoire qui

7 se trouve derrière cette tranchée - imaginez ce bâtiment - de défendre son

8 territoire et d'utiliser, par exemple, ce bâtiment en tant qu'un endroit où

9 il place ses armes, ses positions ?

10 R. Dans ce cas particulier, oui.

11 Q. Maintenant, revenons à vos souvenirs sur ce nid de snipers. Vous avez

12 parlé des trous dans les murs; est-ce vrai ?

13 R. C'est exact, c'est exact. Il y avait des trous, des tout petits trous

14 qui perçaient les murs.

15 Q. Il y avait aussi des sacs de sable.

16 R. Oui, c'est exact.

17 Q. A votre sens, et d'après vos expériences militaires, à quoi servent ces

18 sacs de sable ?

19 R. Ils pourraient être utilisés pour une sorte de protection, pour

20 s'approcher des trous, ou ils pourraient être utilisés pour supporter les

21 autres armes, c'est-à-dire vous mettre dessus et mettre les armes dessus,

22 donc usages multiples.

23 Q. Est-ce que les trous que vous avez pu constater lors de votre visite

24 rendue avec le général Gobillard à ce bâtiment seraient les mêmes dans le

25 cas qu'on place les armes avec des mécanismes optiques ou sans mécanisme

26 optique ?

27 R. Oui. Un trou, c'est un trou. Vous pouvez faire percer ce que vous

28 voulez d'un trou avec ou sans viseur.

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1 Q. Est-ce que j'ai raison d'avancer qu'il n'y a pas de rapport de cause à

2 effet entre un trou et l'utilisation de sniper dans le sens qu'on l'a

3 défini aujourd'hui ?

4 R. Le fait qu'il y ait un trou ne veut pas indiquer forcément que c'est un

5 sniper qui va l'utiliser; ceci indique que c'est peut-être une position,

6 une position potentielle qui peut être utilisée comme une position de tir

7 et peut-être qu'on peut tirer à partir de ce trou.

8 Q. Un simple tireur qui est, disons, participant à une des unités de

9 l'armée de Republika Srpska, s'il voulait tirer par un simple fusil,

10 utiliserait les mêmes trous ?

11 R. Oui, effectivement.

12 Q. D'une autre manière présentée, l'existence de ces trous et de ces sacs

13 de sable n'implique pas forcément l'utilisation par des tireurs d'élite de

14 cet endroit ?

15 R. Ceci implique que quelqu'un sous-entend que quelqu'un a utilisé cet

16 endroit pour autre chose que ce à quoi cela était destiné au début, parce

17 qu'une meurtrière, si vous voulez, un trou, une meurtrière a une

18 utilisation militaire, c'est-à-dire qu'on peut l'utiliser pour tirer à

19 partir de cet endroit, et les sacs de sable sont habituellement utilisés

20 pour rendre ces tirs plus efficaces.

21 Q. Vous dites pour rendre ces tirs plus efficaces. Est-ce que vous pensez

22 là sur les tirs d'un fusil et/ou sur les tirs d'un sniper dans le sens

23 qu'on a utilisé aujourd'hui ?

24 R. Je ne fais pas beaucoup de différence entre un fusil et un fusil à

25 lunette, parce que l'effet est le même à partir du moment où vous tirez sur

26 les cibles. Les sacs de sable ou positions que j'ai vues auraient rendu la

27 tâche plus faisable, plus facile pour quelqu'un qui voudrait tirer sur une

28 cible.

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1 Q. Maintenant, tout à l'heure on a parlé que ces bâtiments qui se

2 trouvaient sur la ligne de confrontation. On peut les assimiler aux

3 tranchées sur un champ. Maintenant, je vais vous poser la question

4 concernant le tir, le tir lui-même et l'impact sur un objet sur lequel on

5 tire ou sur lequel ce tir s'est arrêté.

6 Est-ce qu'il y a des différences sur, par exemple, l'objet sur lequel on a

7 tiré ? Est-ce qu'il y a des différences entre le simple fusil et le fusil

8 avec le mécanisme optique ?

9 R. L'impact sur une cible -- si vous tirez sur un soldat, vous allez avoir

10 un certain impact. Si vous tirez sur un civil, l'impact sera différent.

11 Puisque là, il va y avoir un impact psychologique, si j'ai bien compris

12 votre question. Non ? Ce n'est pas cela. Bien.

13 Q. Je pensais à l'impact physique. La balle touche un objet ou, disons,

14 une personne, ce qui est tragique, mais bon, cela est arrivé. Est-ce qu'on

15 peut faire la différence et dire, se prononcer si c'est tiré avec un simple

16 fusil ou avec un fusil avec le mécanisme optique ?

17 R. Quand on examine l'impact d'un tir, vous pouvez déterminer quel est le

18 type de fusil utilisé. Vous ne pouvez pas dire si ce fusil a été muni d'une

19 lunette ou non, puisque c'est toujours le même fusil dans la plupart des

20 cas. C'est tout simplement que l'on vise, que l'on tire de façon plus

21 juste, plus précise. J'ai vu des soldats tirer pendant 26 années, et vous

22 avez des gens qui sont tout à fait capables de tirer avec précision avec un

23 fusil simple.

24 Q. Maintenant, si on revient sur notre photo, on voit les quatre tours qui

25 font face à la frontière, disons, qui est représentée par Miljacka. Est-ce

26 que ces tours auraient une position avantageuse par rapport aux unités qui

27 se trouvent en face et qui défendent le territoire de l'ABiH ?

28 R. Oui, ceci représenterait une position potentiellement intéressante pour

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1 l'autre côté.

2 Q. Par exemple - c'est une question qui fait appel à vos connaissances et

3 à votre expérience - s'il y avait une fusillade entre eux, disons les deux,

4 par exemple, entre les tours et les bâtiments qui se trouvent de l'autre

5 côté, est-ce qu'il pourrait arriver que les cibles civiles qui se trouvent

6 entre les deux soient touchées, mais par inadvertance ?

7 R. C'est possible, mais peu probable.

8 Q. Pourquoi vous dites cela, que c'est "peu probable" ?

9 R. Si l'on parle de tireurs embusqués, les tireurs embusqués sont des

10 tireurs professionnels très habiles. Ils vont prendre du temps pour cibler

11 la cible. S'il s'agit d'une cible militaire, il est peu probable qu'ils la

12 ratent. C'est pour cela qu'ils s'appellent des tireurs embusqués et c'est

13 pour cela qu'ils sont aussi bons. Même quelqu'un qui tire d'un fusil

14 simple, en général il va y avoir quand même une période de visée et avant

15 de tirer on va respecter, prendre en compte ces critères d'un tir. Comme

16 j'ai dit hier, j'ai vu des soldats même à Sarajevo, et je pense qu'il est

17 fort peu probable que l'on tire sur quelqu'un sans vouloir vraiment tirer

18 sur quelqu'un.

19 Q. Monsieur le Général, dans un espace comme-ci sur la photo, est-ce qu'il

20 y a une forte probabilité de ricocher ?

21 R. Les ricochets sont fort probables, oui.

22 Mme ISAILOVIC : Maintenant, je demande à mon assistante la photo numéro 65

23 ter 2819, s'il vous plaît.

24 Excusez-moi, je voudrais bien garder cette carte en tant que moyen de

25 preuve, et je demande à M. le Greffier une cote.

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, cette pièce est versée.

27 M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce à conviction D48.

28 Mme ISAILOVIC : Donc on peut passer maintenant à la photo suivante.

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1 Q. On va voir, Monsieur le Général, sur cette photo, une vue différente.

2 Mais je pense que vous êtes familier avec cela parce qu'on va voir, oui, le

3 secteur de l'hôtel Holiday Inn.

4 Maintenant, tout d'abord, est-ce que vous pouvez situer là aussi la ligne

5 de confrontation, de séparation entre les deux factions belligérantes, s'il

6 vous plaît ?

7 R. [Le témoin s'exécute]

8 Ceci suit la rivière. Je ne veux pas dessiner entre les bâtiments, mais

9 comme vous pouvez voir, cette ligne rouge va derrière le bâtiment qui est

10 là, donc la ligne suit la rivière.

11 Q. Maintenant, Monsieur le Général, est-ce que vous pouvez repérer là ce

12 que vous avez appelé hier l'"allée de snipers" ?

13 R. [Le témoin s'exécute]

14 Q. Est-ce qu'on peut se mettre d'accord qu'il y a entre cette allée et la

15 ligne de confrontation toute une bande assez bâtie du territoire contrôlé

16 par l'ABiH ?

17 R. Oui, c'est exact.

18 Q. Maintenant, est-ce que vous savez, les tours qui dominent, donc qui

19 sont un petit peu au fond, est-ce que vous êtes à même de les reconnaître

20 et de les nommer ?

21 R. Ces deux tours s'appelaient les tours Unis. Ici, c'est l'Holiday Inn,

22 et je ne me souviens pas du nom de cette tour-ci.

23 Q. Est-ce que vous vous souvenez du bâtiment de l'assemblée ?

24 R. Oui, il est ici.

25 Q. Cette tour qui est entre, disons, Holiday Inn et l'assemblée, est-ce

26 que vous savez, oui, est-ce que vous connaissez sa destination ?

27 R. Non, je ne m'en souviens pas.

28 Mme ISAILOVIC : Maintenant, pour l'instant je veux garder cette photo aussi

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1 marquée. Peut-être que je vais revenir, mais tout d'abord j'aurais aimé

2 présenter au témoin une partie de sa déclaration donnée en 1997.

3 Est-ce que je peux avoir une cote, s'il vous plaît ?

4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

5 M. LE GREFFIER : [interprétation] La pièce D49, Monsieur le Président.

6 Mme ISAILOVIC : Maintenant je demande à mon assistante qu'elle affiche la

7 pièce DD00-0522. On va à la page 11. Tout d'abord, peut-être la première

8 page.

9 Q. Monsieur le Témoin, là c'est la première page de votre déclaration.

10 Est-ce que vous vous souvenez du moment où vous avez donné cette

11 déclaration au bureau du Procureur de ce Tribunal ?

12 R. Oui.

13 Q. Vous reconnaissez votre signature ?

14 R. Oui.

15 Mme ISAILOVIC : Maintenant, si on peut aller à la page 11. Je m'excuse

16 parce qu'on a pas trouvé cette déclaration dans le e-court et on a scanné

17 mon exemplaire, donc ne tenez pas compte de cela. Maintenant, vous voyez,

18 j'ai mis le paragraphe 72.

19 Q. Est-ce que vous pouvez relire ? Justement, je vais vous poser quelques

20 questions.

21 R. C'est bon.

22 Q. On peut quitter la déclaration et revenir à la photo marquée qui est

23 maintenant D49.

24 Maintenant, Monsieur le Général, vous avez eu l'occasion de lire votre

25 déclaration. Est-ce que vous êtes toujours d'accord avec ce qui est inscrit

26 là-dedans ?

27 R. Oui.

28 Q. Maintenant, je vous prie de nous montrer les bâtiments que vous avez

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1 signalés dans votre déclaration comme les lieux utilisés par l'ABiH comme

2 des positions de snipers.

3 R. Comme j'ai dit dans la déclaration plus tôt, ils utilisaient le

4 bâtiment de l'assemblée ainsi que les tours Unis. Ce sont les rapports qui

5 nous sont parvenus.

6 Q. Est-ce que c'est possible techniquement de mettre maintenant des croix,

7 pardon, des cercles autour du "A" et "U" avec le stylet bleu, s'il vous

8 plaît ?

9 R. [Le témoin s'exécute]

10 Q. Monsieur le Général, est-ce qu'on peut se mettre d'accord que ces deux

11 bâtiments et la destination qu'ils ont eue pendant le conflit donnent une

12 position assez grande pour voir "l'allée de snipers" ? C'est le nom que

13 vous avez utilisé.

14 R. Oui, ce sont de bonnes positions.

15 Q. Par rapport, disons, aux civils ou au tramway qui passe, est-ce que ce

16 sont des bonnes positions pour tirer sur ces cibles ?

17 R. Peut-être, oui, cela se peut.

18 Q. Est-ce que les résultats de vos investigations pendant votre mandat que

19 vous avez effectué à Sarajevo ont montré qu'il y avait d'autres

20 emplacements de snipers le long de cette rue, Zmaja od Bosne, que vous avez

21 appelée "allée de snipers" ?

22 R. De quel côté est-ce qu'on parle ? Du côté nord de la rivière ou du côté

23 sud de la rivière ?

24 Q. Je parle du côté nord de la rivière.

25 R. Potentiellement, oui.

26 Q. Est-ce que vous pourriez peut-être vous souvenir de ces autres

27 endroits, emplacements ?

28 R. Chaque bâtiment. Mais cela dit, on n'avait pas vraiment d'information à

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1 ce propos. Je n'ai entendu parler que d'un seul cas où les Musulmans,

2 semble-t-il, étaient en train de tirer sur leur propre peuple. Je n'ai pas

3 entendu parler d'autres positions le long de "Sniper's Alley" qui auraient

4 pu être employées par les Musulmans pour tirer sur cette route-là, des

5 bâtiments, cela dit.

6 Q. De l'autre côté, vous ne pouvez pas exclure l'utilisation d'autres

7 bâtiments en tant que positions de snipers ?

8 R. Non.

9 Mme ISAILOVIC : Maintenant, je voudrais garder tout d'abord cette photo en

10 tant que preuve. Je demande une cote, s'il vous plaît.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La pièce sera admise.

12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D50.

13 Mme ISAILOVIC : Maintenant, je demande à mon assistante, qu'on voie sur

14 l'écran le document 65 ter 1904.

15 Non, non. Excusez-moi, je me suis trompée, donc 65 ter 1917.

16 Q. Vous vous souvenez, hier, M. le Procureur vous a montré ce document.

17 R. Oui, je me souviens de l'avoir vu.

18 Q. Est-ce que, Monsieur le Général, vous vous rappelez peut-être de la

19 date où on a commencé à parler de M. le Général Milosevic en tant que

20 commandant du Corps de Sarajevo-Romanija, à peu près ?

21 R. C'était au début de mon mandat. Je ne me souviens plus très bien de la

22 date. Mais je me souviens qu'il faisait aussi partie du corps avant cela,

23 d'ailleurs.

24 Q. Mais vous ne vous souvenez pas de la date où il a agi, entrant dans sa

25 fonction du commandant de ce corps ?

26 R. Non, pas exactement. C'était en mai ou juin. Je ne me souviens pas

27 exactement du moment.

28 Q. Est-ce qu'on peut se mettre d'accord que la date de ce document est le

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1 25 juin 1994 ?

2 R. Oui, tout à fait.

3 Q. Est-ce qu'on peut lire sur la première page - je vous invite donc à

4 lire et je vais vous poser la question - on constate que les activités de

5 snipers des deux côtés ont augmenté, et cela, dans la partie sud et ouest

6 de Sarajevo, ensuite Grbavica, Dobrinja [phon].

7 R. Tout à fait.

8 Q. Qu'on dit à la suite que le chiffre "average number" se situe autour de

9 10 par semaine, y inclus civils et militaires ?

10 R. C'est exactement ce qui est écrit, en effet.

11 Q. Que la situation est propre à escaler ?

12 R. Oui.

13 Q. La date de ce document est bien le 25 juin 1994 ?

14 Mme ISAILOVIC : Je demande maintenant la pièce 65 ter 1973.

15 C'est le document 1973, 65 ter, qui était admis comme "exhibit" du

16 Procureur 206. Le voilà. C'est le texte d'"Anti-Sniping Agreement".

17 Q. Je vous invite maintenant à lire la date de ce document.

18 R. Oui, c'est en date du 14 août 1994.

19 Q. S'il vous plaît, les signatures sur cet acte ?

20 R. Oui, c'est signé par Karavelic, Milosevic, Rose et Viktor Andreev en

21 date du 14 août 1994.

22 Q. Maintenant, je vais faire appel encore à vos connaissances lors de

23 votre séjour à Sarajevo, pour nous expliquer, parce que là il s'agit d'un

24 "agreement". Comme dans tous les actes, on utilise des notions pour le but

25 de cet acte et après en faisant l'interprétation de cet acte, de son

26 application, on a toujours recours à la notion que les parties

27 envisageaient en signant l'acte.

28 Ce qui m'intéresse dans cet acte : la notion exacte de "sniper".

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1 R. Enfin, c'est surtout des activités de "sniping", et non pas des

2 activités d'un "sniper". Ce n'est pas le tireur embusqué mais ce sont les

3 activités de tirs embusqués. C'est un petit peu différent.

4 Q. Est-ce que, Monsieur le Général, d'après vos souvenirs, on a voulu par

5 cet acte supprimer tous les tirs directs provenant des fusils ou uniquement

6 les tirs provenant de ces mêmes fusils, mais qui sont, en quelque sorte,

7 enrichis, disons, entre guillemets, par un mécanisme optique ?

8 R. L'intention de cet accord, c'était que les deux parties arrêtent de se

9 tirer dessus, de se tirer dessus en tirs embusqués, donc on prenait en

10 compte la fusil à lunette, mais cela ne prenait pas uniquement cela.

11 L'intention, c'est que l'on arrête de tirer -- pas sur les autres.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Docherty.

13 M. DOCHERTY : [interprétation] Je suis désolé d'arrêter, d'interrompre les

14 questions du général et Mme Isailovic. Je sais que le général Fraser aurait

15 vraiment voulu rentrer au Canada avant le week-end. Je ne sais pas si cela

16 va être possible, mais je tiens à dire à la Chambre dès maintenant que je

17 n'aurai pas de questions supplémentaires à poser au témoin. Je ne sais pas

18 du tout si le Juge Mindua doit se rendre à l'autre procès cet après-midi.

19 Je sais, en revanche, que ce prétoire sera vide cet après-midi, alors je ne

20 sais pas si on pourrait peut-être poursuivre. Ce serait quand même utile.

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Isailovic, combien de temps

22 vous faut-il encore ?

23 Mme ISAILOVIC : Monsieur le Président, là j'ai vraiment encore beaucoup de

24 choses à aborder avec ce témoin, pardon, qui, à mes yeux, est très, très

25 important pour la Chambre. Là, je me trouve dans une

26 situation peu commode, parce que maintenant, à l'instant où j'ai commencé

27 mon contre-interrogatoire, il faut que je le coupe pour -- et de toute

28 façon, je comprends tout à fait le souhait de M. le Général, alors que M.

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1 Docherty, quand même, peut-être il fallait penser avant, parce que j'aurais

2 raccourci et j'aurais, si vous voulez, ajusté mon contre-interrogatoire en

3 fonction de la durée de l'interrogatoire en chef.

4 Là, vraiment, on me met dans une situation peu commode. J'aurais aimé

5 vraiment être agréable à M. le Général, mais, de l'autre côté, pour moi

6 l'impératif c'est la défense des intérêts de mon client. Là, à l'occasion,

7 il se trouve à l'opposition, alors je préfère les intérêts de la défense de

8 M. le général Milosevic.

9 [La Chambre de première instance se concerte]

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Savez-vous quand le général devait

11 reprendre son avion ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je devais partir à 15 heures 30 cet après-

13 midi. C'est l'heure du départ de mon vol.

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous ne serez jamais arrivé à

15 l'heure à Shripol [phon]. Il est déjà 13 heures 30.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'en doutais.

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur, quel est le vol suivant ?

18 Quel est le vol suivant que vous pourriez prendre ?

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce sera demain. Demain, il faudrait que vos

20 équipes puissent me trouver une place à bord d'un autre avion, l'avion de

21 demain.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous êtes un temoin essentiel. Ce

23 que vous avez dit est très important pour la Défense.

24 Mais je tiens vraiment à savoir de combien de temps vous avez encore

25 besoin, Madame Isailovic, parce que je ne tiens pas à ce que vous pensiez

26 que vous pouvez poursuivre à l'infini. Cela n'est pas autorisé.

27 Mme ISAILOVIC : Non, non, pas du tout. J'aurais aimé utiliser le temps égal

28 à celui utilisé par le Procureur, peut-être diminué pour moi --

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous êtes bien déjà rendue au-delà.

2 Je ne pense pas que cela soit une référence pour l'instant que vous

3 puissiez utiliser. Je n'applique pas les horaires de façon mécanique. Je

4 demande, dites-nous juste de combien de temps vous avez encore besoin.

5 Mme ISAILOVIC : Monsieur le Président, il faut que je finisse maintenant

6 avec le sniping, quelques questions, un document et quelques questions

7 supplémentaires, et après j'ai voulu aborder encore deux thèmes. Mais,

8 c'est à vous à qui appartient la décision, donc je vais me conformer à

9 cela, mais je ne pense pas que j'ai utilisé plus de temps que le Procureur

10 pour ce témoin.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si, si. C'est le cas.

12 Mme ISAILOVIC : -- passe vite, alors.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Tout à fait, tout à fait, parce

14 qu'une heure 50 [comme interprété] d'interrogatoire principal, et quand on

15 est revenu cet après-midi on avait déjà plus d'une heure et 44 minutes, et

16 ensuite, quand on est revenu de la dernière pause.

17 Je ne pense pas que nous pourrons poursuivre après 13 heures 45, car

18 il me semble qu'une décision vient d'être prise pour que tout le personnel

19 du TPI puisse partir à 14 heures. Mais admettons que l'on puisse rester

20 encore une demi-heure, ce qui nous fera aller jusqu'à 14 heures 15. Je

21 pense que 14 heures 15, c'est la grande limite que je puisse vous accorder,

22 rien de plus.

23 Mme ISAILOVIC : Merci, Monsieur le Président.

24 Je demanderais maintenant à mon assistante qu'elle affiche le

25 document 65 ter 02011 --

26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Soyons clair, vous pouvez très bien

27 vous arrêter avant 14 heures 15, bien sûr, le cas échéant. C'est juste la

28 date butoir, l'heure de fin, c'est tout.

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1 Mme ISAILOVIC : J'ai compris.

2 Qu'on aille à la troisième page.

3 Q. Monsieur le Général, il s'agit du document que vous avez vu avec

4 le Procureur hier, d'une "évaluation des résultats". Cette évaluation a été

5 faite au 15 septembre 1994, on est bien d'accord, un mois après l'entrée en

6 vigueur de l'"Anti-Sniping Agreement" ?

7 R. [aucune interprétation]

8 Q. Maintenant, je vous invite à lire. Vous pouvez lire tout cela, donc

9 l'évaluation. Justement, il est inscrit dans le deuxième paragraphe que le

10 souhait, c'est de ramener le chiffre de tirs à zéro, et on donne quelques

11 raisons pour que cela se montre presque impossible. On parle dans la ligne

12 avant-dernière "provocation shots".

13 [interprétation] "Le problème, c'est qu'il y a maintenant de plus en

14 plus de victimes de balles perdues à cause des échanges de tir qui

15 augmentent sur la ligne de confrontation qui sont près des zones

16 résidentielles, près de zones habitées."

17 [en français] Est-ce qu'on est d'accord que ce problème de "lost bullets" a

18 existé tout le temps lors du conflit ?

19 R. Oui, effectivement, ceci était un problème.

20 Q. Maintenant, je vais passer rapidement à une autre question.

21 Justement, on a parlé hier des équipes "antisniping". Est-ce que vous

22 vous souvenez de cela ?

23 R. Oui.

24 Q. Dans votre déclaration -- peut-être on pourrait voir cette partie de

25 votre déclaration. C'est le document DD00-0522, page 14 et le paragraphe

26 94. Est-ce que, s'il vous plaît, vous pouvez lire rapidement ce passage ?

27 Vous parlez ici d'un problème, à mon sens, avec les enquêtes menées par

28 les OMNU. C'est cela parce qu'elles n'étaient pas très fiables pour votre

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1 secteur ?

2 R. Cela dépendait du pays auquel vous aviez affaire. En général, les

3 secteurs ne se faisaient pas confiances aux OMNU. En général, on faisait

4 appel à nos propres hommes.

5 Q. Est-ce qu'après toutes les informations, votre secteur établissait son

6 propre rapport sur un incident concret ?

7 R. Le secteur était assez rigoureux dans la préparation de rapports sur

8 tout ce qui faisait l'objet d'enquête. Les Français étaient très bons la

9 dedans. Ils rédigeaient beaucoup de rapports et ils les transmettaient aux

10 autorités compétentes.

11 Mme ISAILOVIC : Je voudrais maintenant voir le document DD00-0581. La

12 première page. J'ai voulu vous montrer justement le rapport sur une

13 investigation menée par le secteur et par les OMNU, mais on a encore --

14 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document que j'ai, sous la cote DD00-

15 0581, est un document de trois pages, mais les trois pages sont vides,

16 vierges.

17 Mme ISAILOVIC : Pourtant, on a fait le nécessaire pour l'avoir sur e-court.

18 Alors, on va passer au document DD00-0575. C'est un document en français.

19 Q. Est-ce que cela vous pose problème ?

20 R. Je vais le lire et je vais vous dire si c'est un problème ou pas.

21 Q. Ces deux documents, donc le premier qui n'est pas entré malheureusement

22 dans le système et l'autre allaient ensemble dans le sens que -- est-ce que

23 vous pouvez voir, justement nous indiquer la nature du document qu'on

24 voit ?

25 R. Il semble que ce soit la synthèse d'incident qui ait eu lieu le 4

26 septembre 1994. Sharpe semble être l'auteur de ce rapport. Il y a une

27 présentation chronologique de 10 heures 37 à 10 heures 45, semble-t-il,

28 faisant état de ce qui s'est passé avec deux tirs.

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1 Q. Est-ce qu'on est d'accord que là, les chiffres représentent le temps,

2 10 heures 37, 10 heures 40 ?

3 R. Oui, oui, c'est cela, c'est l'heure, effectivement, l'heure à laquelle

4 telle ou telle chose, ces choses qui sont d'ailleurs expliquées dans le

5 rapport se sont produites.

6 Mme ISAILOVIC : Maintenant, j'aurais aimé voir la page 2 du document.

7 Q. Juste à 19 heures 30, est-ce que vous êtes à même de lire cela ?

8 R. Oui, je crois qu'il est dit qu'ils ont eu des contacts avec l'officier

9 de liaison de l'ABiH, 105e Brigade, position occupée, après l'enquête, et

10 cetera.

11 Q. Le paragraphe suivant, il est signalé comme le lieu de provenance des

12 tirs ?

13 R. Oui, je pense que ce qu'il est dit ici, c'est qu'il y a eu une

14 mitrailleuse B-50 qui a tiré sur une position BSA située à Orlovac, en

15 93256256 [comme interprété]. C'est ce qui est dit, je crois.

16 Mme ISAILOVIC : Si on peut voir la troisième page.

17 Q. Est-ce que vous pouvez lire ce qui est arrivé à 15 heures ?

18 R. Peut-être que j'ai tort, mais ils ont identifié trois bâtiments, un

19 groupe de trois bâtiments à 200 mètres au nord. Ils ont identifié ces

20 endroits comme étant ce qu'ils pensaient être l'origine des tirs.

21 Q. Est-ce que ce nom Breka vous dit quelque chose, ou pas du tout ?

22 R. Non, rien.

23 Mme ISAILOVIC : Parce que malheureusement, le point serait un document

24 qu'on n'a pas essayé d'introduire dans le système, donc c'est cela la

25 technique. Je l'ai en "hard copy", mais bon, parce qu'on est un petit peu

26 court avec le temps.

27 Pour l'instant, je vais demander une cote pour ce document, s'il vous

28 plaît.

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Quel document, excusez-moi ?

3 Mme ISAILOVIC : Le document DD00-0575.

4 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ceci sera versé au dossier en tant que

5 pièce D51, Monsieur le Président.

6 Mme ISAILOVIC : Maintenant, une toute dernière question concernant les tirs

7 embusqués. On peut commencer déjà par affichage du document 65 ter 428. En

8 attendant, je vais vous poser quelques questions.

9 Q. Déjà, il m'intéresse, ce nom de la rue Zmaja od Bosne, "Sniper Alley".

10 Quand avez-vous entendu pour la première fois ce nom pour cette rue, cette

11 avenue, plutôt ?

12 R. Je l'ai entendu quand je suis arrivé sur le terrain. Ils m'ont montré

13 où se trouvait cette "allée de snipers".

14 Q. Quand vous dites "ils m'ont montré", qui vous a montré cela et qui vous

15 a donné ce nom, disons, populaire ?

16 R. Mon prédécesseur, Christian De Bergeron. J'ai fait le tour avec mon

17 patron, et c'est là que j'ai compris où j'étais et quel était le surnom de

18 cette avenue. Il s'agit de M. De Bergeron.

19 Q. Est-ce que peut-être il vous a parlé aussi de l'origine de ce nom qu'on

20 a entré dans la circulation ?

21 R. On a appelé comme cela à cause de toutes les activités de tireurs

22 embusqués qui se déroulaient sur cette allée. Mais je ne sais pas à quel

23 moment ce nom est entré dans l'usage. On ne me l'a jamais dit, on m'a juste

24 dit quel était le surnom donné à cette avenue.

25 Q. Mais pourtant, ce n'était pas, d'après la signification de "tireur

26 embusqué", ce n'est pas le seul endroit où on a utilisé ces tirs

27 embusqués ?

28 R. C'est exact, mais c'était l'endroit le plus mal fameux pour, justement,

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1 ces tireurs embusqués.

2 Q. Est-ce que vous connaissiez à l'époque une route alternative, disons, à

3 cette allée, qui était plus sûre ?

4 R. Il y avait d'autres routes que vous pouviez emprunter un petit peu plus

5 loin dans la ville. On pouvait détourner, contourner cette allée, mais

6 c'est le tram qui utilisait cette route, pas les gens. Nous avons mis pas

7 mal de sécurité autour de ces routes et nous avons essayé de limiter

8 l'utilisation de ces routes par les civils.

9 Q. Concernant l'utilisation de cette route par le tramway, il m'intéresse,

10 parce qu'on a vu pas mal d'incidents de tramway, ici devant cette Chambre.

11 Qui décidait de la mise en fonction du tramway dans certaines périodes ?

12 Est-ce que c'était votre secteur ?

13 R. Non, ce sont les autorités, c'étaient les Musulmans de Bosnie.

14 Q. Est-ce que, Monsieur le Général, vous connaissiez à l'époque peut-être

15 les mécanismes de la prise de décisions, et ils se sont peut-être

16 renseignés auprès du secteur pour juste faire évaluation concernant la

17 sûreté de circulation du tramway ?

18 R. Je ne me souviens pas qu'ils soient jamais venus nous voir pour nous

19 demander si on pouvait faire circuler les trams. Je me souviens en revanche

20 qu'ils faisaient leurs évaluations sur la base des différentes informations

21 et évaluations qu'ils faisaient. Ensuite, ils venaient se plaindre auprès

22 de nous s'il y avait trop, par exemple, d'activités de tireurs embusqués

23 contre les trams. Cela venait par le biais du ministre Muratovic ou par la

24 présidence ou par ses ministres, donc il y avait trois figures clés qui

25 décidaient de cela.

26 Q. On peut en conclure que c'est l'ABiH et le gouvernement de Bosnie-

27 Herzégovine qui étaient maîtres de ces décisions sur la mise en

28 fonctionnement du tramway ?

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1 R. Oui, c'est exact.

2 Q. Est-ce qu'on peut se mettre d'accord qu'ils étaient en même temps une

3 partie belligérante sur le même secteur ?

4 R. Oui, ils étaient une des trois parties qui ont participé, qui ont pris

5 part au conflit en Bosnie, oui, effectivement.

6 Mme ISAILOVIC : Maintenant, on peut passer sur le document qui nous a

7 occupé il y a un certain moment devant cette Chambre. Il est admis en tant

8 que le document de la Défense D41. Est-ce qu'on peut le voir sur l'écran un

9 petit peu agrandi ?

10 Q. Monsieur le Général, je vous prie de nous aider pour comprendre la

11 première page de ce document. Vous le voyez sur l'écran ? Excusez-moi.

12 R. C'est la situation, le rapport concernant la période allant du 27

13 février à partir de 001 alpha. Cela vient de la FORPRONU, du QG de la

14 FORPRONU, enfin, plutôt du commandement de la Bosnie-Herzégovine, et ceci

15 est adressé au général Rose et au QG à Zagreb, pour information dans tous

16 les secteurs. Ceci figure dans le cadre réservé aux destinataires.

17 C'est un modèle interne de mémo, et il y a apparemment trois points

18 clés sur lesquels on a tiré : l'aéroport; il y a quatre personnes qui ont

19 été blessées sur les trams suite aux tirs à Sarajevo; puis il y a un convoi

20 de l'ONU sur lequel on a tiré à Srebrenica. Ensuite, on parle de

21 l'évaluation générale de la situation. C'est un rapport de la situation.

22 Q. Ce qui m'intéresse maintenant : la technologie d'élaboration de ces

23 rapports. Vu qu'il y avait à Sarajevo le secteur, il y avait la commande de

24 Bosnie-Herzégovine et de l'OMNU, est-ce que tous les trois ont participé à

25 l'élaboration, c'est-à-dire est-ce que tous les trois fournissaient les

26 informations pour qu'on puisse établir le rapport pour ce jour ?

27 R. Tout le monde au sein du commandement était responsable de fournir les

28 informations pour l'utilisation de leurs QG superposés. Le cadre commandant

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1 à Zagreb a demandé le rapport concernant une certaine période de temps,

2 pour couvrir une certaine période de temps. Le général Rose et le général

3 Smith aussi devaient répondre aux demandes du commandant de la force, et

4 aussi je dois dire que mon QG devait aussi donner toutes les informations

5 nécessaires pour le commandant de la force et pour le commandant pour la

6 Bosnie-Herzégovine, le général Rose Smith.

7 C'était une pyramide, très grande pyramide où vous aviez toute une

8 série de rapports le long de cette pyramide allant vers les échelons

9 supérieurs par rapport à la situation qui prévalait certains jours.

10 Q. Le document concret, c'est un document de 23 pages. Si on peut avoir

11 votre aide pour justement comprendre la structure de ce document.

12 Si on peut aller à la page 2. On commence par une évaluation, et dans

13 le paragraphe 3, vous pouvez, on peut lire "faction activity", et par

14 exemple concernant ce tramway. On a à partir du chiffre 8. Est-ce que vous

15 pouvez lire ce passage, s'il vous plaît ?

16 R. "Huit fois, des tirs d'armes d'infanterie ont été tirés sur un tram à

17 proximité du Holiday Inn," ensuite, on donne la cote, "en blessant, quatre

18 personnes l'ont confirmé, quatre personnes. L'origine est évaluée et se

19 trouvait au niveau du pont de Vrbanja, les quartiers du bâtiment rouge," on

20 donne la cote, "où il y a eu un échange de feu entre deux factions en même

21 temps. Le service de tram s'est arrêté. On a proposé une reconnaissance au

22 niveau de la région de Krupa [phon], et cetera."

23 Q. On en termine avec ce tramway. Justement, il m'intéresse quand on cite

24 le secteur. Quand on dit par exemple "Vrbanja Bridge/red Building area" et

25 on donne des chiffres, qu'est-ce que cela représente dans ce rapport ?

26 R. Ces chiffres, ce sont les cotes, les coordonnées qui aident les

27 personnes à se retrouver dans la carte. Par exemple, vous avez les

28 coordonnés du pont de Vrbanja et de ce bâtiment rouge. Quand on les met

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1 côte à côte, on en arrive à un endroit précis sur la carte.

2 Q. Est-ce que ce numéro, ces chiffres "BP", par exemple 912589, est-ce que

3 cela nous permet de trouver, disons, un secteur ou un point précis sur la

4 carte ?

5 R. Oui, ceci peut aider à trouver un point très précis. Chaque carte a

6 dans les marges des références numériques, et vous vous référez tout

7 d'abord à ce qui correspond au niveau des différents axes. Ensuite, vous

8 essayez de trouver la coordonnée exacte, et c'est une coordonnée qui est

9 comportée de six chiffres et qui vous donne vraiment les points précis sur

10 le terrain pour vous aider à visualiser où s'est produit exactement

11 l'incident.

12 Q. Une chose. On peut se rendre compte dans ce rapport que cet événement,

13 cet incident qui s'est passé avec le tramway figure sur trois lieux

14 différents dans le même rapport.

15 Mme ISAILOVIC : On peut aller sur la page 9, s'il vous plaît.

16 Q. Là, après le titre, on a le paragraphe 2, secteur Sarajevo, et un,

17 deux, trois, quatre, quatrième paragraphe, est-ce que vous pouvez lire à

18 partir de "a tram travelling" ?

19 R. "Un tram qui voyageait entre BP 910593 et BP 905792 a fait l'objet d'un

20 tir, et le résultat a été un blessé civil confirmé et probablement trois

21 autres blessés. La victime confirmée a été blessée à la jambe. L'origine

22 des tirs se trouvait, d'après l'évaluation, au niveau du BP 907589. Le

23 service des trams s'est arrêté suite à cet incident. Pendant cette même

24 période, les deux parties ont participé aux échanges de tirs à 300 mètres

25 de là, dans la région du pont de Vrbanja, BP 912589. On a attribué ces

26 tirs," là, je ne vois pas ce que cela veut dire, CFV, "aux deux côtés, à

27 savoir BSA et BiH, pour tout l'incident."

28 Ensuite, on continue, à 9 heures 50 : "Plusieurs tirs de l'artillerie

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1 d'infanterie."

2 Q. Justement, on a voulu avoir votre aide pour ces "MG", "CFV", parce que

3 j'ai cru comprendre que "CFV" signifiait "cease-fire violation". Ai-je

4 raison ?

5 R. Oui, c'est cela. Oui, c'est une très bonne conclusion.

6 Q. Et MG ?

7 R. Je dirais que c'est une mitrailleuse.

8 Q. On précise dans le rapport aussi l'arme utilisée; c'est cela ?

9 R. Apparemment oui, quand on lit ce qui est écrit ici, oui, c'est la

10 conclusion à laquelle on peut arriver.

11 Q. Aussi, on dit ici :

12 [interprétation] On dit aussi "dans la région", enfin "les quartiers autour

13 du pont de Vrbanja."

14 [en français] Quand on dit comme cela, est-ce qu'on pense à un secteur plus

15 large que "Vrbanja bridge" ou on pense à "Vrbanja bridge" ?

16 R. En lisant ce rapport, je ne peux pas vous répondre. Il faudrait

17 vérifier les rapports d'un échelon inférieur pour voir s'il y a des

18 informations plus précises au niveau de ce rapport.

19 Q. Justement, parce que dans le même rapport on traite et on traite cela

20 aussi sur la page 23, oui, à la page 23. Là, par contre, on parle des OMNU,

21 le paragraphe H. Est-ce qu'on peut remonter jusqu'à -- oui. Paragraphe H.

22 Dans le même rapport, on traite le troisième point, ce même incident, et on

23 voit que c'est établi à partir des informations provenant des OMNU, et il y

24 a pas mal de différences entre ce qui était décrit sur la page 2 et la page

25 9. Les différences concernent par exemple le nombre de tirs. Est-ce que

26 vous êtes d'accord ?

27 R. Ce n'est pas inhabituel que lors d'un incident semblable, vous avez

28 différentes personnes qui font les rapports, et les informations ne sont

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1 pas forcément les mêmes. Vous devez jouer un peu au détective et essayer

2 d'assembler toutes ces pièces du puzzle.

3 Ce qui est clair, c'est qu'on a tiré sur le tram, une dame a été blessée au

4 niveau de la jambe, ensuite vous avez le nombre de tirs, mais vous savez,

5 c'est difficile parce que vous avez le rapport visuel des gens qui étaient

6 autour de là, qui se trouvaient dans le périmètre du tram, puis vous

7 comptez les trous dans le tram. Vous pouvez avoir des informations

8 différentes et vous devez assembler toutes ces informations.

9 Q. Dernière question concernant ce rapport, parce qu'on trouve information

10 sur un événement précis sur les trois lieux, est-ce que, d'après vos

11 connaissances, il y a une superposition, c'est-à-dire une partie du rapport

12 qui prévale sur les autres ? Parce que c'est assez, si vous voulez, cela

13 peut prêter à confusion pour celui qui lit ce rapport. On ne se rend pas

14 compte. Est-ce qu'il y a quand même une partie qui fait plus poids que les

15 autres ?

16 R. Non, puisque vous écrivez le rapport en général en mettant les choses

17 importantes, l'accent sur les choses importantes. Vous mettez des petits

18 tirets, et ensuite c'est sur cela qu'on attire l'attention des supérieurs

19 hiérarchiques. Ensuite, on va vous donner un aperçu général de la situation

20 pour la zone dont il est responsable, donc ce commandant qui envoie le

21 rapport, et dans ce cas, cela vient, cela considère la Bosnie-Herzégovine,

22 et ensuite on descend. A chaque fois, on va avoir plus de détails au fur et

23 à mesure quand on descend. Plus vous entrez dans le rapport, plus vous

24 allez recevoir des informations sur les bétails. Il y a toute une série de

25 rapports que vous allez recevoir qui ont servi pour élaborer ce rapport. Au

26 fur et à mesure que vous descendez, vous recevez plus de détails.

27 Si vous regardez la liste des destinataires, vous avez plein de gens qui

28 vont lire cela, et chacun pour sa propre utilisation, et on va arriver à

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1 une image globale, à une image globale qui va servir ici, donc par exemple

2 au général Rose. Mais l'importance de cela, c'est de faire ce qu'il importe

3 le plus rapidement possible. Parfois, cette information n'est pas complète,

4 parfois ce sont des informations compliquées qui ne sont pas parfaitement

5 exactes pour les jours --

6 Q. Globalement, de ce rapport, qu'il y avait un échange de feu et que le

7 tramway a été tiré dessus en conséquence de cet échange ? Est-ce que cela,

8 on peut le conclure de ce rapport globalement, sans entrer dans les

9 détails ?

10 R. Dans ce rapport, je peux aussi lire qu'en réalité, apparemment deux

11 choses se sont passées en même temps. Tout d'abord, il y a eu cet échange

12 au niveau du pont et en même temps il y avait aussi une espèce d'activité

13 de tireurs embusqués sur le tram. Je dirais que là, il s'agit de deux

14 incidents dont on fait part dans ce même paragraphe. C'est comme cela que

15 j'interprète cette information.

16 D'un côté, vous avez les tirs venant du pont de Vrbanja, et le tram a été

17 pris dans ces tirs, et aussi on a vraiment tiré sur le tram qui a été pris

18 pour cible par des tireurs embusqués. Là, il s'agit d'une autre activité,

19 d'une autre action qui est vraiment délibérée et précise. C'est ce que je

20 lis dans ce paragraphe.

21 Q. Est-ce que cela ressort de ce rapport, que c'est délibéré ?

22 R. Ce que je peux lire, c'est que d'après le paragraphe H, on peut lire

23 que le tram a fait l'objet des tirs des tireurs embusqués.

24 Q. Des deux autres paragraphes, est-ce qu'on peut être aussi sûr parce

25 qu'on traite de cet événement sur les trois lieux ?

26 R. Les deux autres paragraphes, on disait tout simplement qu'il y a eu des

27 combats au niveau du pont de Vrbanja, donc on ne dit pas que les impacts

28 sur les trams venaient de ces combats. Ensuite, on donne plus de détails,

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1 et d'après moi il y a deux choses qui se passent en même temps. En même

2 temps, vous avez les tirs, les combats à Vrbanja et les snipers qui tirent

3 sur les trams. C'est ce que je vois dans ce rapport.

4 Mme ISAILOVIC : Est-ce qu'on peut voir à nouveau la page 2 et le paragraphe

5 A, le paragraphe A, secteur Sarajevo ? Le paragraphe 3, pardon.

6 Q. Est-ce que vraiment cela ressort de ce rapport ?

7 R. Bien, à nouveau, après avoir lu plus en détail, je dirais à partir de

8 ce texte qu'il a pu y avoir des tirs, des combats au niveau du pont de

9 Vrbanja, et quelqu'un depuis ce pont, depuis ce quartier a peut-être ciblé,

10 tiré à partir d'un fusil à lunette sur le tram. C'est l'image à laquelle

11 j'arrive quand je superpose ces deux paragraphes, ces informations

12 différentes, si vous voulez.

13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] On vient de m'informer que l'affaire

14 Prlic va se tenir cet après-midi. Il y a beaucoup de confusion dans la

15 salle.

16 [La Chambre de première instance et le Juristes se concertent]

17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si tel est le cas, le Juge Mindua va

18 nous maudire; il ne va pas pouvoir bénéficier de la moindre pause de

19 déjeuner.

20 M. LE JUGE MINDUA : [hors micro]

21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Isailovic, vous avez encore

22 cinq minutes.

23 Mme ISAILOVIC : Je vais m'attirer les foudres de tout le monde aujourd'hui.

24 Juste la dernière question.

25 Je vous demande d'afficher un document DD00-0573.

26 Là, Monsieur le Président, c'est un commandement de la part du

27 commandant du 1er Corps de l'ABiH. Malheureusement, on n'a pas de traduction

28 en anglais, mais est-ce qu'il serait possible justement à l'aide des

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1 interprètes, j'ai besoin justement de deux phrases de ce commandement.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Est-ce que vous pouvez traduire

3 cela, s'il vous plaît ?

4 Mme ISAILOVIC : Justement, parce que vous avez parlé, et aujourd'hui aussi

5 on a affirmation de plusieurs personnalités, notamment M. Karavelic. Vous

6 êtes d'accord; il était le commandant du 1er Corps de l'ABiH. Là, je

7 voudrais aimer qu'on lise la phrase ou je vais la lire, donc le titre c'est

8 :

9 [interprétation] "La façon de traiter les forces de l'ONU. Vis-à-vis

10 les forces de l'ONU, il convient d'agir de façon suivante. Les unités qui

11 sont introduites dans la zone démilitarisée à travers la zone d'exclusion

12 de 20 kilomètres auprès des forces de la FORPRONU, doivent être exécutés

13 dans le plus grand secret, cachés et masqués, l'arrivée et le développement

14 de ces unités. Les unités qui provoquent qui mènent l'attaque à partir du

15 front dans la zone d'exclusion et dans la zone protégée par les Nations

16 Unies en vertu de l'accord en date du 13 août 1993 dans la phase de

17 l'arrivée, de la préparation et de l'action elle-même, doivent aussi

18 prendre les mesures de se rendre secrètes jusqu'au moment où les unités

19 arrivent --"

20 Q. Est-ce que vous pouvez lire la date inscrite sur ce document ? On peut

21 remonter un petit peu, c'est-à-dire baisser le document, baisser, baisser.

22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est la dernière question que vous

23 pouvez poser.

24 Mme ISAILOVIC :

25 Q. La date ?

26 R. Le 30 septembre 1994.

27 Q. Seulement, ma dernière question : est-ce que vous vous souvenez d'un

28 événement survenu le 6 octobre 1994 quand les unités de l'ABiH passant par

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1 la zone protégée ont massacré 19 membres d'une compagnie sanitaire

2 appartenant à l'armée de la Republika Srpska ?

3 R. Oui, je me souviens de cet incident, et la façon dont j'ai compris les

4 choses, c'est que ce n'était pas vraiment une unité sanitaire, c'était le

5 QG serbe, le QG sanitaire, et c'était une attaque très féroce. Je m'en

6 souviens.

7 Je me souviens que c'étaient les corps Serbes qui nous ont demandé de

8 trouver un individu, une dame qu'on n'avait pas retrouvée, donc nous sommes

9 revenus vers le général Karavelic pour lui demander s'il savait où se

10 trouvait cette personne pour laquelle on ne savait pas où elle était, et il

11 a dit qu'il ne savait pas où elle était.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

13 M. DOCHERTY : [interprétation] Non, je n'ai pas de questions

14 supplémentaires.

15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Général, ceci met fin à votre

16 déposition. Nous vous remercions énormément d'être venu et vous pouvez

17 maintenant quitter le prétoire.

18 Nous allons lever la séance.

19 --- L'audience est levée à 14 heures 17 et reprendra le lundi 12 février

20 2007, à 9 heures 00.

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