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1 Le mardi 13 février 2007
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 16.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Tapuskovic, il me semble
6 que vous avez quelque chose à nous dire, donc nous sommes tout ouïe.
7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je crois que c'est
8 quelque chose que je devrais traiter, mais à huis clos partiel.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Nous allons demander un
10 huis clos partiel.
11 Monsieur Waespi, tout d'abord, vous avez quelque chose à nous dire ?
12 [Audience à huis clos partiel]
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14 [Audience publique]
15 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir, Monsieur
17 le Témoin.
18 Monsieur Sachdeva, vous pouvez poursuivre votre interrogatoire
19 principal.
20 LE TÉMOIN : THOMAS KNUSTAD [Reprise]
21 [Le témoin répond par l'interprète]
22 M. SACHDEVA : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur les Juges.
23 Interrogatoire principal par M. Sachdeva : [Suite]
24 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Knustad.
25 R. Bonjour.
26 Q. Hier, nous nous sommes quittés quand vous veniez de nous dire que vous
27 étiez arrivé à Sarajevo en juin 1995, et que vous aviez été posté et muté
28 avec le secteur des OMNU de Sarajevo, donc sur le secteur de Sarajevo. Vous
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1 nous aviez dit que vous aviez reçu une formation à Zagreb avant de vous
2 rendre à Sarajevo.
3 Pourriez-vous nous dire exactement quel type de formation il
4 s'agissait ?
5 R. Il s'agissait principalement tout d'abord de problèmes administratifs,
6 vérifier un petit peu ce qui se passait au niveau du QG dans la situation
7 générale. On m'a aussi donné quelques cours sur l'analyse des cratères et
8 sur les impacts, donc quelques cours sur l'analyse des cratères et
9 l'analyse des impacts.
10 Q. Combien de temps a duré ce cours, enfin cette formation ?
11 R. Environ six jours.
12 Q. Passons maintenant à Sarajevo, s'il vous plaît. Dites-nous, s'il vous
13 plaît, combien d'équipes d'OMNU se trouvaient à Sarajevo quand vous êtes
14 arrivé ?
15 R. Il y avait quatre équipes d'OMNU à Sarajevo, chacune comprenant dix
16 observateurs militaires venant de différents pays. Il y avait aussi le QG
17 des OMNU qui se trouvait dans le bureau des PTT à Sarajevo. Donc, en tout,
18 cela faisait à peu près 60 [comme interprété] observateurs militaires. Il y
19 avait aussi une dans la partie est, quatre à l'est [comme interprété]; deux
20 au milieu et un à l'ouest, un à l'ouest près de l'aéroport.
21 Q. Quelle était l'équipe pour laquelle vous travailliez ?
22 R. J'étais à l'est de Sarajevo, Kilowatt Charlie Un. Donc, nous étions
23 basés à Sedrenik. Notre zone de responsabilité était Stari Grad, l'est de
24 Stari Grad vers la présidence, puis aussi vers ce qui est maintenant
25 l'ambassade américaine.
26 Q. Quand vous dites Stari Grad, c'est la vieille ville ?
27 R. Oui, c'était une partie de la vieille ville.
28 Q. Combien y avait-il d'OMNU dans votre équipe ?
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1 R. La plupart du temps il y avait environ dix, mais en tout, il y avait
2 toujours au moins un OMNU qui était en permission à tout moment.
3 Q. Qui était le directeur de votre équipe ?
4 R. Quand je suis arrivé, il s'agissait du lieutenant-colonel néerlandais
5 Harry Konings.
6 Q. Au sein de votre équipe, y avait-il des postes d'observation dans votre
7 zone de responsabilité ?
8 R. Oui. Nous avions un poste d'observation qui se trouvait au sud de la
9 partie sud de la ville, au sud de Bistrik, donc à Colina Kapa en fait, très
10 spécifiquement. C'était notre équipe qui était posté 24 heures sur 24 dans
11 ce poste d'observation.
12 Q. Je vais vous demander de nous indiquer les positions. Cela se qui se
13 trouve sur une carte. Vous parlez du poste d'observation. Est-ce qu'on
14 avait peut-être une abréviation pour les postes d'observation ?
15 R. Veuillez répéter, s'il vous plaît.
16 Q. Est-ce qu'on pouvait dire autre chose que "poste d'observation" quand
17 vous vous y trouviez ?
18 R. Non, non. On ne peut pas dire cela beaucoup plus court. On devait
19 l'occuper 24 heures sur 24. Il y avait un roulement toutes les 48 heures.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pense qu'il est en train de vous
21 demander s'il y avait un autre mot que l'on pouvait employer pour noter ces
22 "postes d'observation."
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. C'était OP1. C'est comme cela qu'on
24 l'appelait en jargon militaire.
25 M. SACHDEVA : [interprétation] Je vous remercie d'être venu à ma rescousse.
26 Q. Cette équipe basée à Sedrenik, pouvez-vous nous dire quel était son
27 nom ?
28 R. C'était Kilowatt Charlie 1, KC1, c'était dans la zone de Sedrenik.
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1 Q. Le poste d'observation de Colina Kapa, comment s'appelait-il ?
2 R. C'était l'OP1.
3 Q. Quand vous êtes arrivé à Sarajevo, y avait-il des observateurs
4 militaires des Nations Unies en Republika Srpska ?
5 R. Non. A l'époque, il n'y en avait pas en Republika Srpska. C'était parce
6 que les Nations Unies avaient retiré tous leurs observateurs militaires des
7 territoires détenus par les Serbes après la crise des otages qui a eu lieu
8 en mai 1995.
9 Q. En tant qu'OMNU dans votre équipe, pourriez-vous nous dire exactement
10 quelles étaient vos tâches quotidiennes ?
11 R. Le but principal des OMNU et la raison d'être de ces OMNU était de
12 surveiller le cessez-le-feu. A ce moment-là, il n'y avait pas de véritables
13 cessez-le-feu en cours, en tout cas, pas sur le secteur Sarajevo. Donc,
14 notre tâche principale d'observateurs militaires était d'observer,
15 d'enquêter et de faire des rapports sur ce qui se passait. Etant la
16 situation qui prévalait à Sarajevo, nous passions beaucoup de temps à faire
17 des enquêtes sur des incidents à la fois de pilonnages et de tirs
18 embusqués.
19 Q. Généralement, en règle générale, dans vos travaux, les OMNU doivent-ils
20 suivre des principes ou des normes essentielles ?
21 R. Le principe de base, c'est qu'il fallait rester impartial à 100 %. Pour
22 un officier professionnel, ce n'est pas si difficile à accomplir, même si à
23 cette époque-là nous étions postés du côté du gouvernement de Bosnie-
24 Herzégovine en tant qu'OMNU.
25 Q. L'attention que vous portiez à vos enquêtes dépendait-elle de
26 l'appartenance ethnique des victimes ?
27 R. A Sarajevo en 1995 et même avant cela, il y avait toujours toutes les
28 ethnicités qui habitaient à Sarajevo, à la fois des Musulmans, des
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1 Orthodoxes serbes, des Catholiques croates. J'étais à Sarajevo de juin 1995
2 à décembre 1995. A mes souvenirs, les gens de Sarajevo se considéraient
3 plutôt comme des Sarajeviens, ils n'étaient pas très préoccupés par leur
4 appartenance ethnique. Disons que ce n'était pas vraiment leur priorité.
5 Q. Lors de votre enquête, vous ne vous intéressiez pas au fait que les
6 victimes étaient Serbes, Croates ou Musulmanes ?
7 R. Non, non. Pour ce qui est des enquêtes de routine ce n'est pas
8 important. Nous devions confirmer qu'il y avait bien des victimes. On a
9 rapidement appris à identifier les différentes confessions par les prénoms
10 et les noms. C'était facile de savoir qu'il s'agissait d'un Serbe, d'un
11 Croate ou d'un Musulman qui venait d'être atteint.
12 Q. Lors de vos enquêtes, deviez-vous aussi - enfin, là je parle des
13 pilonnages - deviez-vous aussi déterminer la direction des tirs ?
14 R. La direction des tirs était sans doute l'un des aspects les plus
15 importants de notre rôle d'enquêteurs. On se basait sur notre formation et
16 sur l'analyse des cratères principalement, puisque le cratère causé par un
17 impact d'obus d'artillerie ou par un obus de mortier est bien spécifique et
18 permet de déterminer avec une certitude assez forte d'où venait le tir.
19 Q. Vous avez parlé de mortiers. Savez-vous ce qu'est une bombe aérienne
20 modifiée ?
21 R. Oui, je sais. Je le sais, en effet. Le secteur Sarajevo nous avait
22 briefé à ce propos. Il s'agit d'une bombe qui, normalement, devrait être
23 larguée depuis un aéronef. Mais ici, dans ces cas-là, les Serbes de Bosnie
24 avaient modifié ces bombes en leur ajoutant un système de propulsion pour
25 pouvoir les lancer depuis le sol.
26 Q. Vous connaissez l'artillerie, puisque vous avez été formé en tant
27 qu'artilleur. Pouvez-vous nous dire quelle est la fiabilité de ces bombes
28 aériennes modifiées ?
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1 R. Elles ne sont pas pressées du tout parce qu'il n'y a pas système de
2 guidage. Donc, on peut juste les envoyer dans une direction, puis c'est
3 tout. Je ne vois pas vraiment quel pourrait être le but militaire de
4 l'emploi de ce type d'armes. De plus, elles volent très lentement, elles
5 font beaucoup de bruit, le vol est extrêmement bruyant, donc se fait
6 remarquer.
7 Q. Pourriez-vous nous donner un ordre d'idée en ce qui concerne le rayon
8 d'impact d'une de ces bombes aériennes modifiées ?
9 R. C'est difficile à estimer, parce qu'il y a, disons, des systèmes
10 bricolés, si je puis dire. A l'impact, je pense que l'impact, on a au moins
11 -- qu'on ne peut pas avoir une précision de moins de 1 kilomètre pour ce
12 qui est du diamètre de l'impact.
13 Q. Y avait-il un terme ou un mot, un nom que ces OMNU avaient donné à ces
14 bombes modifiées pendant que vous étiez à Sarajevo ?
15 R. Je ne m'en souviens pas, je ne me souviens pas qu'on les appelées d'un
16 nom bien spécial.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est leur autonomie de vol ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout dépend du système de propulsion qui y
19 avait été attaché. A notre connaissance, à l'époque, on pensait qu'elles ne
20 pouvaient pas avoir plus de 7 000 à 8 000 mètres d'autonomie de vol, rien
21 de plus. De plus, ce n'était pas du tout précis. C'est plutôt une arme qui
22 crée la terreur, ce n'est pas une arme qui ait la moindre utilité militaire
23 ou but militaire. En tout cas, c'est mon avis en tant qu'officier.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez dit qu'elles étaient très
25 lentes dans leur déplacement ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'en ai vu une moi-même. J'ai vu une de
27 ces bombes aériennes modifiées qui avait été tirée depuis Sharpstone. Cela
28 c'était à quelques centaines de mètres de notre base. On a pu voir déjà la
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1 première partie du vol, mais on n'a pas vu l'impact, on a vu que le début
2 du vol.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pouvez-vous nous dire à quelle
4 vitesse, à votre avis, allait cette bombe ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est difficile à déterminer; beaucoup plus
6 lentement, en tout cas, qu'un obus de mortier de 120-millimètres. Je ne
7 peux pas être beaucoup plus précis à part que c'était beaucoup plus lent.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.
9 M. LE JUGE MINDUA : Juste pour, dans la foulée de la question du Président.
10 Parce que beaucoup de témoins experts nous ont parlé de cette bombe
11 aérienne modifiée, et vous-même, vous dites que la vitesse n'était pas très
12 grande. Quel était le système de propulsion ? Etait-elle propulsée par une
13 roquette ou par un drone ? Ou quel système avaient-ils pour justement
14 transporter, faire voler cette bombe ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Le système de propulsion était une roquette,
16 enfin une fusée, une fusée qui était attachée à la bombe directement. Je
17 n'ai pas beaucoup de détails là-dessus, puis on les mettait sur une rampe
18 de lancement, sur un système de lancement pour pouvoir les faire partir en
19 l'air.
20 M. LE JUGE MINDUA : Merci.
21 M. SACHDEVA : [interprétation]
22 Q. Monsieur Knustad, suite à votre réponse que vous nous avez déjà donnée
23 et aussi à l'expérience que vous avez accumulée au cours de votre carrière,
24 pourriez-vous nous dire quelque chose à propos d'utilisation de ces bombes
25 dans une zone urbaine comme Sarajevo ? Etait-ce approprié ou non ?
26 R. Là, je resterai très en retrait en vous disant que ce n'était pas du
27 tout une arme appropriée, parce que déjà c'est une arme qui n'a aucun but
28 militaire direct. Toutes forces déployées autour de Sarajevo étaient
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1 certaines de savoir que ce type d'armes allait provoquer des dommages
2 collatéraux importants, avec énormément de civils qui allaient trouver la
3 mort suite à l'impact de ces bombes.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Que voulez-vous dire quand vous nous
5 dites qu'il s'agissait d'une arme qui n'avait pas de but militaire bien
6 précis, bien direct ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Normalement, il y a une cible bien précise
8 quand on tire avec un mortier ou avec un obusier. On vise quelque chose que
9 l'on veut détruire, alors que l'imprécision même de ces bombes aériennes
10 modifiées faisait que c'était une arme qui pouvait, à la rigueur, tomber
11 dans une zone, et rien de plus.
12 C'était une zone peuplée de civils, avec des maisons qui étaient très
13 proches les unes des autres, dans une zone urbaine très dense. Là, il était
14 évident que l'utilisation de ce type d'armes allait provoquer énormément de
15 destruction, allait infliger des dégâts, allait faire des victimes aussi
16 civiles et détruire des infrastructures en plus.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donc, il n'y avait pas de but
18 militaire correct - enfin, là j'en rajoute un peu. J'essaie de parfaire ce
19 que vous nous avez dit. Nous avons bien compris, en tout cas, le sens de
20 votre réponse.
21 M. SACHDEVA : [interprétation] Puis-je poursuivre ?
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
23 M. SACHDEVA : [interprétation]
24 Q. Pour ce qui est de ces armes, bombes aériennes modifiées et des
25 mortiers, pourriez-vous dire à la Chambre de première instance environ à
26 combien d'incidents vous avez participé en tant qu'enquêteur ?
27 R. Un nombre assez important. Puisque quand je suis arrivé au secteur
28 Sarajevo le 21 juin 1995, chaque jour il y avait plus de 100 impacts dans
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1 la ville et aux environs, venant de tirs d'artillerie, venant de tirs de
2 mortier et de roquettes lancées aussi. Quatre équipes d'OMNU ne suffisaient
3 pas pour enquêter sur tous ces impacts. Il fallait d'abord établir une
4 liste de priorités. Il y avait donc les priorités essentielles; cela,
5 c'étaient les impacts où il y a des victimes. C'était sur celles-là que
6 l'on se rendait en priorité.
7 Q. Pour reprendre le nombre d'incidents sur lesquels vous auriez enquêté
8 avec votre équipe - nous allons parler uniquement de cela - pouvez-vous
9 nous dire quelle était la nature des cibles sur lesquelles vous avez fait
10 vos enquêtes ?
11 R. Au premier abord, on avait vraiment l'impression que c'était très
12 aléatoire. Cela dit, après avoir passé quelque temps en ville, avoir un peu
13 compris comment fonctionnait la chose et avoir mieux compris les enquêtes,
14 c'était évident que certaines des zones qui étaient ciblées étaient des
15 zones où les gens se rassemblaient. Par exemple, les endroits où on pouvait
16 aller chercher de la nourriture, se ravitailler, les endroits où on pouvait
17 trouver de l'eau, les endroits où il y avait peut-être des goulets
18 d'étranglement où les gens étaient obligés de passer pour se rendre quelque
19 part. Il y a aussi eu beaucoup d'enquêtes dans des parcs, dans les
20 cimetières et de nombreuses enquêtes qui ont lieu autour de l'hôpital de
21 Kosovo.
22 Q. Je vais maintenant passer à un incident bien spécifique. Tout d'abord,
23 vous souvenez-vous que quelque chose se soit passé le 28 août 1995 ?
24 R. Oui, je m'en souviens. Je me souviens bien ce qui s'est passé le 28
25 août 1995.
26 Q. Où s'est passé cet incident ?
27 R. Il s'agissait d'un impact dans la zone du Markale au milieu de la
28 vieille ville de Sarajevo et c'était dans notre zone de responsabilité.
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1 Q. Où étiez-vous ce jour-là ?
2 R. Le 28 août, j'ai pris mon poste à l'OP1 vers 9 heures du matin. C'était
3 une belle matinée, claire, pas trop de vent, il faisait beau. J'étais en
4 service avec un autre de mes collègues OMNU qui étaient à l'OP1.
5 Q. Qui était ce collègue ?
6 R. Il s'agissait du commandant Paul Conway, c'est un Irlandais.
7 Q. Y avait-il quelqu'un d'autre à part vous deux ?
8 R. Il y avait aussi une interprète, puisque nous avions toujours une
9 interprète ou un interprète avec nous; 24 heures sur 24 à l'OP, on avait
10 toujours des interprètes avec nous quand on patrouillait dans la ville.
11 Q. Vous avez pris votre poste à l'OP1. Quel était votre tour de garde,
12 quelle était la durée de votre tour de garde ?
13 R. Quarante-huit heures normalement. Il fallait que l'on relève les deux
14 autres ONMU qui avaient fait les 48 heures précédentes.
15 Q. Précédemment, vous nous avez dit que l'OP1 se trouvait à Colina Kapa.
16 Vous vous en souvenez ?
17 R. Oui.
18 Q. Quel type de vue aviez-vous sur la ville, surtout de la vieille ville,
19 depuis cet endroit-là ?
20 R. Si on parle en termes militaires, c'est l'endroit idéal où mettre un
21 poste d'observation. Parce que cela surplombe toute la vieille ville. Vous
22 voyez absolument tout. Vous voyez les lignes de front au nord de la ville.
23 On voyait aussi toutes les rues, les maisons, on voyait tout ce qui se
24 passait dans la ville, surtout vers Bascarsija, Skenderija et la partie
25 même occidentale de la ville.
26 Q. Vous êtes arrivé là vers 9 heures du matin le 28. A ce moment-là, avez-
27 vous vu quoi que ce soit ce jour-là ?
28 R. Le 28, depuis quelques jours, le pilonnage s'était un peu calmé. Je ne
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1 dis pas que c'était très tranquille, mais on entendait certes des bruits,
2 mais c'était plutôt des bruits d'activités en ville.
3 Q. Pendant que vous étiez au poste d'observation, avez-vous vu que quelque
4 chose se passait en ville ?
5 R. Vers 11 heures, si je me souviens bien, la première fois, j'ai vu une
6 colonne de fumée qui s'est levée du quartier que j'ai immédiatement
7 identifié comme étant la zone du marché Markale qui se trouve à 2 000
8 mètres de distance par rapport au poste d'observation. Cinq, six secondes
9 après cela, j'ai pu entendre l'impact dans cette zone, et j'ai compris cela
10 par rapport à la colonne de fumée qui s'élevait de cet endroit.
11 Q. Eclaircissons le terme que vous avez utilisé. Qu'est-ce que cela veut
12 dire le mot que vous avez utilisé, la "colonne de fumée" ?
13 R. La colonne de fumée c'est une quantité de fumée qui se développe après
14 l'impact de, par exemple, un obus de mortier ou un autre obus d'artillerie.
15 Il s'agit d'une colonne de fumée qui est de couleur grise qui tourne vers
16 noire.
17 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, je m'excuse, mais je
18 prie mes éminents collègues de se consulter à voix basse parce que parfois
19 cela me dérange.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, j'entends cela. Madame
21 Isailovic et Monsieur Tapuskovic, est-ce que vous avez entendu cela ? Il
22 semble que vous chuchotez en menant une campagne contre le Procureur.
23 M. SACHDEVA : [aucune interprétation]
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il n'y a pas lieu d'expliquer quoi
25 que ce soit. Parlez doucement, s'il vous plaît, Maître Tapuskovic, parce
26 que sinon, c'est un signe du non-respect envers le Procureur.
27 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je ne comprends pas anglais
28 malheureusement, cela ne me facilite pas le travail. J'ai demandé à ma
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1 collègue de m'expliquer parce que je n'ai pas compris cela; si d'abord il a
2 entendu le son et vu la fumée et d'abord a vu la fumée et entendu le son de
3 l'impact. C'est pour cela que j'ai demandé à ma collègue de m'expliquer
4 cela.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais faites cela en la
6 consultant à voix basse.
7 Vous pouvez continuer, Monsieur Sachdeva.
8 M. SACHDEVA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
9 Q. Permettez-moi de vous poser une question par rapport à ce que vous avez
10 vu et entendu. Quel était l'ordre de ce que vous avez vu et entendu ?
11 R. Comme j'ai déjà dit, la position du poste d'observation était telle
12 qu'il se trouvait à 2 000 mètres de distance par rapport à la zone où se
13 trouvait le marché. J'ai pu d'abord voir une colonne de fumée, et après,
14 compte tenu du fait que la vitesse du son c'est 300 mètres par seconde,
15 cela a pris approximativement cinq ou six secondes avant que je n'aie pu
16 entendre l'impact, et après j'ai vu la colonne de fumée.
17 Q. Est-ce que votre collègue, M. Conway, a pu voir la même chose que
18 vous ?
19 R. En fait, Paul Conway se trouvait seul au poste d'observation, et
20 j'observais cela en me trouvant devant la maison qui nous servait de base
21 pour notre OP. On a eu une très bonne vue sur la ville. Je savais cela,
22 parce que j'ai eu plus d'expérience en tant qu'observateur militaire que
23 Paul Conway. Immédiatement après que j'ai pu voir la colonne de fumée et
24 entendu le son de l'impact, je me suis déplacé approximativement à 150
25 mètres du poste d'observation où Paul Conway se trouvait pour qu'il me
26 confirme s'il avait entendu et vu la même chose. Il m'a confirmé cela.
27 Q. Après qu'il a été établi que vous aviez vu vous deux la même chose et
28 entendu la même chose, est-ce que vous avez fait un rapport là dessus ?
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1 R. Oui. D'abord, on avait un registre sur place au poste d'observation,
2 ensuite on a fait rapport par la radio directement au QG des observateurs
3 militaires des Nations Unies au PTT "building," et c'était la procédure
4 habituelle pour cette sorte d'impact.
5 Q. Qui a fait rapport au QG ?
6 R. Paul Conway a envoyé ce rapport au QG par la radio.
7 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais qu'on
8 montre au témoin la pièce à conviction 2623 concernant l'article 65 ter, et
9 j'aimerais qu'on montre la page numéro 11 de ce document.
10 Q. Monsieur Knustad, voyez-vous le document devant vous sur l'écran ?
11 R. Oui.
12 Q. A gauche, voyez-vous que votre poste d'observation est mentionné ?
13 R. Oui. A la première ligne où il est dit le groupe qui a opéré durant la
14 journée du 28 novembre a fait un rapport par rapport au poste d'observation
15 OP1.
16 Q. Voyez-vous où il est mentionné la 150e Brigade de l'ABiH ?
17 R. Oui. C'est une information additionnelle qui a été mise par le QG de
18 l'OMNU pour décrire de façon précise où était l'impact. Cela se rapporte au
19 QG de l'ABiH et à la 150e Brigade qu'on a utilisés comme étant le point de
20 référence dans notre rapport envoyé au QG de l'OMNU.
21 Q. Est-ce que par rapport à ce point de référence on peut en conclure que
22 la cible était le QG de la 150e Brigade ?
23 R. Non, cela ne veut pas dire cela. Nous ne pouvons pas deviner ce qui
24 était la cible de cet impact. Tout simplement, cela représente un nom qui
25 concerne un endroit connu, et c'est une sorte de description d'un point
26 figurant sur la carte.
27 Q. Auparavant, vous avez dit que le chef de votre équipe était M. Konings.
28 R. Oui.
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1 Q. Est-ce qu'il a été impliqué dans l'enquête pour ce qui est de cet
2 incident ?
3 R. Compte tenu du fait que j'ai entendu la communication à la radio et que
4 le chef de mon équipe avait également l'émetteur-transmetteur, c'est comme
5 cela que j'ai appris qu'il a été chargé de l'enquête sur place.
6 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais qu'on
7 montre maintenant le document conformément à l'article 65 ter qui porte le
8 numéro 891, et en particulier les pages 37 à 42. Les trois premières pages
9 de ce document ont été admises en tant que pièces à conviction du Procureur
10 P0085. Je dis cela parce que cela pourrait vous aider peut-être.
11 Est-ce qu'on peut afficher la troisième page du document. C'est le tableau
12 que j'aimerais qui soit affiché sur le moniteur. Est-ce qu'on peut le
13 déplacer un peu plus sur l'écran pour que le tableau soit parfaitement
14 visible.
15 Q. Monsieur Knustad, voyez-vous le tableau sur le moniteur ?
16 R. Oui.
17 Q. Le titre c'est "L'analyse du cratère." Dans la première colonne du
18 tableau, pouvez-vous nous dire ce qui est mentionné dans cette première
19 colonne du tableau ?
20 R. La première colonne du tableau, à quelle heure l'enquête a eu lieu.
21 Q. Lorsque vous dites qu'une enquête a eu lieu, vous référez-vous à
22 l'enquête au marché Markale ?
23 R. Oui. Je pense à cette enquête menée au marché Markale. Il s'agit de la
24 même analyse de l'impact que j'ai pu observer depuis le poste d'observation
25 OP1.
26 Q. Dans la quatrième colonne à gauche, voyez-vous où il est écrit
27 "bearing" ?
28 R. Oui, cela veut dire "gisement" en français.
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1 Q. Voyez-vous les chiffres ?
2 R. Oui. Il est écrit 170 degrés plus/minus 5 degrés.
3 Q. Qu'est-ce que cela veut dire ?
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Tapuskovic.
5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je n'ai pas compris tout simplement si le
6 témoin même a travaillé sur ce document. Est-ce que ce document est le
7 résultat de l'enquête qu'il a menée ? Est-ce que M. le Procureur pourrait
8 tirer cela au clair, à savoir si le témoin a été impliqué dans cette
9 enquête ?
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Sachdeva, posez la
11 question au témoin.
12 M. SACHDEVA : [interprétation]
13 Q. Monsieur Knustad, avez-vous rédigé ce document ?
14 R. Je n'ai pas rédigé ce document, le document même, mais ce document
15 provient de l'équipe des observateurs militaires des Nations Unies dont je
16 faisais partie. Nous avons effectué nos tâches en tant qu'une équipe, mais
17 évidemment le rapport a été rédigé par le lieutenant-colonel Konings, qui
18 était sur place, qui était également un observateur militaire, et qui se
19 trouvait sur le site de l'impact.
20 Q. Je vous ai posé la question par rapport à cette indication "170 degrés
21 plus/minus 100 degrés."
22 R. Cela concerne l'azimut, -- pour déterminer la direction d'où l'impact
23 est venu, le projectile est venu. Ils ont pu en conclure que le feu a été
24 ouvert sous l'angle de 170 degrés.
25 Q. Pouvez-vous indiquer cela sur la carte en utilisant l'indicateur, en
26 utilisant les rapporteurs. Etes-vous en mesure de faire cela ?
27 R. Oui.
28 M. SACHDEVA : [interprétation] J'ai suffisamment de copies pour tout le
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1 monde, pour le témoin, pour les Juges.
2 [La Chambre de première instance se concerte]
3 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Sachdeva, s'agit-il d'un
5 témoin 92 ter ?
6 M. SACHDEVA : [interprétation] Non, absolument pas. C'est un témoin viva
7 voce, mais je pense en avoir terminé assez rapidement, dans les 15 minutes
8 qui suivent.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Merci.
10 M. SACHDEVA : [interprétation]
11 Q. Monsieur Knustad, tout d'abord, sur cette carte, pourriez-vous nous
12 marquer l'emplacement d'OP1, pour que nous sachions où OP1 se trouvait.
13 R. [Le témoin s'exécute]
14 Q. Pouvez-vous mettre à côté au marqueur les lettres OP et le chiffre 1.
15 R. [Le témoin s'exécute]
16 Q. Pourriez-vous maintenant nous marquer --
17 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur le substitut Procureur,
18 pourriez-vous peut-être faire en sorte pour qu'il y ait moins de lumière
19 sur le rétroprojecteur, en effet, comme il y a trop de lumière, on a
20 énormément de mal à voir quoi que ce soit sur les écrans.
21 C'est mieux, merci.
22 M. SACHDEVA : [interprétation]
23 Q. Pourriez-vous nous dire où se trouvaient les lignes de confrontation
24 par rapport à cette position où vous vous trouviez ?
25 R. Je sais que la partie avancée de la ligne de confrontation de l'ABiH
26 était à environ 200 mètres sud de l'OP1; ensuite, il y avait bien sûr un
27 espèce de no man's land, et lors des briefings on nous a dit que la ligne
28 des Serbes de Bosnie se trouvait à environ 1 500 mètres au sud de l'OP1,
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1 directement au sud de l'OP1.
2 Q. Pourriez-vous marquer sur la carte la position de la ligne de
3 confrontation de l'ABiH ?
4 R. [Le témoin s'exécute]
5 Q. Si je ne m'abuse, tout ce qui est au sud de cette ligne que vous venez
6 de décrire était territoire de la VRS ?
7 R. Oui, tout à fait.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic.
9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Compte tenu du fait que le témoin a déjà
10 dit que les positions de l'armée de la Republika Srpska se trouvaient par
11 rapport à cette ligne, si j'ai bien compris, à 1 800 mètres, est-ce vrai ?
12 Est-ce qu'il pourrait indiquer dans quelle direction cette ligne
13 s'étendait parce qu'il a dit que les positions de l'armée de la Republika
14 Srpska se trouvaient à 1 500 ou 1 800 mètres par rapport à ces autres
15 positions. Est-ce qu'il pourrait indiquer par une flèche dans quelle
16 direction se trouvaient ces positions ?
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais souvenez-vous, ce n'est pas
18 encore à votre tour. Vous aurez tout latitude de le faire lors du contre-
19 interrogatoire.
20 Cela dit, si cela peut aider les Juges de la Chambre, je pense que le
21 témoin pourrait en effet s'exécuter. Donc, après considération, le
22 Président autorise le témoin à décider cette ligne, à indiquer cette ligne.
23 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Sachdeva, vous pouvez
25 poursuivre.
26 Mais je tiens à dire pour le compte rendu que le témoin avait parlé
27 de 1 500 mètres, et non de 1 800 mètres, n'est-ce pas ?
28 M. SACHDEVA : [interprétation] Tout à fait. C'était bien 1 500 mètres, et
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1 il avait dit qu'il s'agissait d'une ligne qui se trouvait à 1 500 mètres au
2 sud de OP1.
3 Q. Pour être bien clair, Monsieur le Témoin, pourriez-vous mettre la
4 légende à côté de cette ligne, celle du haut, "ABiH", et celle du bas
5 "VRS" ?
6 R. [Le témoin s'exécute]
7 Q. Maintenant, avec un stylo peut-être plus précis, pourriez-vous prendre
8 un rapporteur et une règle -- mais avant, il faudrait aussi que vous nous
9 indiquiez où se trouvait le marché Markale.
10 R. [Le témoin s'exécute]
11 J'ai mis une croix à la place du marché.
12 Q. Merci. Maintenant, à l'aide du rapporteur et d'une règle, pourriez-vous
13 tout d'abord nous indiquer cette direction 170 degrés, plus ou moins 5
14 degrés ?
15 R. [Le témoin s'exécute]
16 Q. Merci. Maintenant, pour ma nouvelle série de questions, j'ai plusieurs
17 questions à vous poser. Dans votre carrière, pourriez-vous nous dire
18 combien de fois vous avez entendu un tir de mortier ?
19 R. Comme je vous l'ai dit hier, dans la marine, j'étais artilleur,
20 artilleur à l'artillerie côtière. Je connais bien l'artillerie.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Tapuskovic, vous avez
22 quelque chose à nous dire ?
23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je ne sais pas si
24 cela va vous servir à quoi que ce soit, mais pourquoi ne dessine-t-il pas
25 aussi une ligne depuis Markale jusqu'à son point d'observation ? Je ne vois
26 pas du tout à quoi sert cette ligne qu'il a dessinée. Il faudrait faire
27 plutôt une ligne entre l'OP1 et le Markale, c'est à cela que servirait la
28 carte, non ?
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1 [La Chambre de première instance se concerte]
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, vous pourrez
3 demander lors du contre-interrogatoire au témoin d'effectuer cette
4 opération, mais lors de votre contre-interrogatoire uniquement.
5 M. SACHDEVA : [interprétation]
6 Q. Monsieur Knustad, vous nous disiez que vous avez fait carrière dans
7 l'artillerie de marine.
8 R. Oui, je connais bien les impacts. Au cours de mon service, j'ai relevé
9 nombreux impacts en tant qu'officier d'artillerie dans l'artillerie
10 côtière. Une partie du métier d'artillerie côtier implique les mortiers. Il
11 est très difficile de déterminer le nombre exact de tirs de mortier
12 auxquels j'ai assisté, mais mettons que j'ai assisté, vu, observé et
13 entendu beaucoup plus de tirs de mortier qu'une centaine, surtout pour ce
14 qui est des 80-millimètres. Avant 1995, j'avais été exposé à plus d'une
15 centaine de ce type de mortier.
16 Q. Qu'en est-il des mortiers de 120-millimètres ?
17 R. Nous n'avions pas de mortiers de 120 dans notre marine norvégienne.
18 Cela dit, malheureusement, j'ai vu au cours de mon service à Sarajevo un
19 grand nombre de ces impacts de mortiers de 120.
20 Q. Le bruit d'un mortier de 120 entre le lancer de tir, est-ce que cela
21 fait plus de bruit qu'un mortier de 81-millimètres ?
22 R. Un 120-millimètres, cela fait plus de bruit, mais un bruit plus doux
23 quand même qu'un 80-millimètres. Donc le 80 a un bruit aigu, alors que le
24 120 a un bruit plus sourd.
25 Q. Quand vous dites que le bruit est plus fort, que signifie ?
26 R. Il y a plus de décibels avec un 120-millimètres qu'avec un 81-
27 millimètres, en tout cas, quand ils sont tirés. D'après mon expérience, je
28 vous dirais qu'il est plus facile d'entendre le tir d'un mortier de 120 sur
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1 une longue distance que d'entendre le tir d'un mortier de 81.
2 Q. Quelle est la distance maximum dont on peut se trouver d'un mortier
3 pour l'entendre quand on le tir ?
4 R. J'ai été dans toute sorte de distances, à deux mètres derrière le
5 mortier jusqu'à cinq, six kilomètres de distance d'un mortier. Alors tout
6 dépend des conditions météo, du vent et d'autres paramètres. Mais un
7 mortier de 120, normalement, on peut l'entendre au moins à quatre ou cinq
8 kilomètres de distance. Bien sûr, cela dépend des conditions que j'ai
9 énoncées ci-dessus.
10 Q. Ce jour-là, le jour où vous avez vu cette colonne de fumée, de là où
11 vous étiez, avez-vous entendu un mortier qui aurait été tiré depuis les
12 lignes de confrontation ?
13 R. Je n'ai entendu aucun tir de mortier avant de voir cette colonne de
14 fumée et d'avoir entendu l'impact, l'impact sur le marché.
15 Q. Mais si ce mortier avait été tiré depuis la ligne de confrontation dans
16 la direction de tir que vous nous avez indiquée sur la carte, depuis votre
17 position, auriez-vous entendu ce mortier ?
18 R. Si cela avait été un mortier de 120, je l'aurais entendu, cela, c'est
19 certain. J'aurais entendu s'il avait été tiré depuis les lignes de
20 confrontation, surtout vu la direction de tir que je vous ai indiquée sur
21 la carte.
22 Q. Mais derrière votre position OP1 dans le territoire tenu la VRS,
23 comment est le relief ? Est-ce que c'est plat, est-ce que c'est une
24 colline ?
25 R. OP1 est sur une pente descendante qui descend vers la ville, avec une
26 colline derrière, qui est un peu au sud. Sur la carte, on le voit. Il y a
27 une crête en haut de cette élévation, et derrière tout cela, cela redescend
28 à nouveau vers les territoires tenus par les Serbes.
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1 Q. Si le mortier avait été tiré depuis l'arrière des lignes de la VRS,
2 l'auriez-vous entendu, auriez-vous entendu le tir ?
3 R. Oui, il se pourrait vraiment qu'un mortier ait été tiré depuis
4 l'arrière, juste derrière les lignes de la VRS, et j'aurais pu ne pas les
5 entendre étant donné le relief et étant donné le déplacement du son,
6 puisque le son se serait déplacé derrière une colline, derrière moi, et
7 j'aurais pu très bien ne rien entendre.
8 Q. Autrement dit, vous pouvez exclure la possibilité que ce mortier a été
9 lancé depuis les lignes de confrontation avec un tel vol ?
10 R. J'exclue totalement la possibilité que ce mortier ait été tiré depuis
11 le territoire de l'ABiH. Je tiens à rajouter qu'en tant qu'observateurs
12 militaires, nous savions qu'il y avait certaines hypothèses et certaines
13 spéculations selon lesquelles les forces de la VRS tiraient sur leur propre
14 peuple depuis leur ligne de confrontation, donc cette théorie du complot,
15 de la conspiration était bien connue. Nous le savions bien. On faisait très
16 attention à ce type d'allégation quand on était en service, on faisait
17 extrêmement attention à tout cela.
18 Q. Nous allons y venir dans un moment. Mais je vous ai demandé si vous
19 pouviez exclure la possibilité que ceci ait été tiré de l'intérieur des
20 lignes de confrontation. Est-ce que vous pouvez penser que cela ait été
21 tiré hors de la ligne de confrontation, c'est-à-dire en territoire tenu par
22 la VRS ?
23 R. Je ne peux pas exclure sur le fait qu'il ait été tiré des territoires
24 tenus par la VRS, principalement à cause de relief, de la configuration du
25 terrain comme je l'ai expliqué. Parce que dans ce cas-là, on aurait tiré de
26 derrière une colline, vers la colline où je me trouvais.
27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous avez expliqué
28 pourquoi - je ne sais pas si j'ai très bien compris - pourquoi vous pouvez
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1 exclure ou non la possibilité qu'on ait tiré au mortier de l'intérieur du
2 territoire ABiH ?
3 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais faire
4 valoir qu'il l'a dit, compte tenu du fait qu'il aurait été en mesure de
5 l'entendre si on avait tiré de cet endroit-là.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] N'est-ce pas ainsi ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme vous pouvez le voir sur la carte, il n'y
8 a qu'un de distance entre le poste où je me trouvais et OP1 vers l'ouest,
9 et l'angle que j'ai dessiné, donc ceci croise la ligne de front de l'ABiH.
10 Donc, dans cette courte distance, je peux dire que si j'avais entendu tirer
11 un mortier de l'intérieur de ce secteur, de ma position, vu l'angle
12 indiqué, ceci donnait la direction du tir.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.
14 M. SACHDEVA : [interprétation]
15 Q. Monsieur Kunstad, vous avez fait une réponse il y a un instant
16 concernant la conspiration que les Bosniens faisaient. Est-ce que pendant
17 votre séjour à Sarajevo vous êtes arrivé à une conclusion ou est-ce qu'il y
18 a eu une enquête officielle à ce sujet ?
19 R. Il y a eu un grand nombre d'enquêtes et, personnellement, j'ai fait une
20 grande partie de ces investigations à l'intérieur de la ligne de
21 confrontation, et nous n'avons jamais été en mesure de déterminer qu'une
22 quelconque de ces enquêtes que nous avons faites concernait un impact
23 résultant d'un tir de l'intérieur de la ligne de confrontation.
24 Q. Le fait que vous n'ayez pas entendu un tir au mortier de l'intérieur de
25 la ligne de confrontation, est-ce que cela a été relié, est-ce que cela a
26 été transmis aux personnes qui faisaient ces investigations sur l'incident
27 de Markale ?
28 R. Oui. J'ai rendu compte de cela à mon chef d'équipe, le colonel Konings,
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1 le jour suivant l'incident, le 29 août. Je lui ai rendu compte de cela
2 parce que je savais que ce serait un renseignement absolument vital pour
3 l'ensemble des renseignements couvrant cet incident. J'ai dit à mon chef
4 d'équipe, le colonel Konings, que je n'avais pas entendu de tirs de mortier
5 sortant de la ligne de confrontation, tirés dans la ligne de confrontation.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais la réponse que vous avez faite
7 tout à l'heure au bureau du Procureur, à l'Accusation, est-ce que c'était
8 limité à des enquêtes auxquelles vous avez personnellement pris part ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Ceci à la fois pour les enquêtes auxquelles
10 j'ai procédé personnellement ainsi que des enquêtes auxquelles mon équipe
11 et d'autres observateurs de l'équipe ont effectué. Pendant la période où
12 j'étais là avec mon équipe à Sarajevo, nous avons même été en mesure de
13 déterminer que tout mortier ou pièce d'artillerie a été tiré en fait de
14 l'intérieur de la ligne de confrontation au cours de ces enquêtes.
15 M. SACHDEVA : [interprétation]
16 Q. Monsieur Kunstad, d'après votre réponse, là vous venez de dire le fait
17 que vous n'aviez pas entendu tirer au mortier de l'intérieur de la ligne de
18 confrontation, et vous avez rendu compte au colonel Konings, pourriez-vous,
19 s'il vous plaît, revenir à ce qui est présenté sur le e-court, à l'écran,
20 et on irait deux pages plus loin de ce qui est présenté pour le moment.
21 Voyez-vous la page à l'écran maintenant ?
22 R. Oui, je vois une page concertant une réunion concernant le point 4.
23 Q. Pourriez-vous aller un peu plus loin là où il y a un 2 à côté. Est-ce
24 que vous voyez cela ?
25 R. Oui.
26 Q. Vous voyez la lettre A ?
27 R. Oui.
28 Q. Pourriez-vous lire ce paragraphe, s'il vous plaît ?
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1 R. "Dans le cadre temporel des tirs pour l'équipe qui travaillait à OP1,
2 dans le cadre temporel des cinq impacts observés par les observateurs
3 militaires de l'ONU du groupe OP1," je n'arrive pas à lire les deux mots
4 suivants, "je vois qu'aucun tir vers l'extérieur, aucun tir de mortier vers
5 l'extérieur ni du territoire de l'armée de Bosnie,"
6 Q. Je crois que cela dit "secteur général".
7 R. Oui, le secteur général, "la colline Kapa non pas de l'armée serbe de
8 Bosnie dans le territoire."
9 Q. Est-ce que ceci reflète bien le rapport que vous avez fait au colonel
10 Konings ?
11 R. Oui. Ni moi-même ni Paul Conway n'avons entendu de tirs de mortier
12 sortant de la zone.
13 Q. C'est exact ce que vous avez dit là, c'est ce que vous avez dit dans
14 votre compte rendu : "Nous n'avons pas entendu de tirs sortant de la zone."
15 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, pourrais-je demander
16 combien de temps j'ai pris ?
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il est bon de voir que vous faites
18 attention à l'heure.
19 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, vous avez raison pour
20 l'interrogatoire principal.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.
22 Maître Tapuskovic, bien sûr, vous allez avoir le même temps que celui qui
23 avait été donné au bureau du Procureur, à l'Accusation, à savoir une heure.
24 Mais si vous avez besoin de temps supplémentaire, vous pouvez le demander.
25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je déciderai sur ce point, si j'ai lieu de
26 demander ou pas un peu plus tard. Je crois que j'aurais probablement besoin
27 d'un peu plus de temps étant donné l'interrogatoire principal. Mais si vous
28 voulez bien m'accordez un instant.
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1 Contre-interrogatoire par M. Tapuskovic :
2 Q. [interprétation] Nous allons bientôt avoir la suspension de séance, et
3 j'aurai à ce moment-là la possibilité de me préparer pendant cette
4 suspension de séance.
5 J'ai plusieurs questions à poser, mais, pour commencer, je vous remercie,
6 Monsieur le Président, Messieurs les Juges.
7 Vraiment, je ne suis pas très bon avec le matériel technique.
8 Monsieur le Témoin, pourriez-vous, s'il vous plaît, expliquer certains
9 points qui ont fait l'objet de l'interrogatoire principal. Soyez bien
10 assuré que je ne vais pas mentionner de théorie de conspiration ou de
11 complot; je vais vous demander de respecter le principe fondamental de
12 mathématique pour ce qui est des autres sciences qui sont pertinentes pour
13 les événements à Sarajevo. Je n'ai jamais envisagé de théorie de la
14 conspiration, mais je vous demanderais dans vos réponses d'être guidé par
15 les principes scientifiques de base et fondamentaux.
16 Vous avez dit que vous aviez achevé votre formation à Zagreb au cours de
17 six jours; est-ce exact ?
18 R. J'ai dit cela et c'est exact, mais ceci est en plus des trois semaines
19 de formation d'observateur militaire auxquelles j'ai assisté en Finlande
20 pendant le printemps et l'hiver 1995.
21 Q. Vous avez également dit qu'à la veille de votre départ, votre
22 spécialité c'étaient les cratères. C'est exact ? Je veux parler du mois de
23 juin 1995.
24 R. Le quartier général des observateurs de l'ONU à Zagreb était très
25 conscient du nombre d'impacts qui avaient à Sarajevo et d'autres parties de
26 la ville, et c'est la raison pour laquelle ils ont considéré qu'il était
27 important que nous ayons un recyclage de nos connaissances pour ce qui est
28 du comportement des cratères et de savoir comment on pouvait déterminer
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1 quel était le processus, pour déterminer de quelle direction on avait tiré
2 avec une pièce, quel type d'arme avait été utilisé sur la base des
3 fragments que l'on trouvait à l'endroit de l'impact, au lieu de l'impact.
4 Q. Je vous remercie. Il y a un moment vous avez dit que vous aviez pris
5 vos fonctions à Sarajevo en croyant fermement que vous alliez accomplir
6 votre travail d'une façon particulièrement impartiale, tout à fait
7 impartiale. C'est bien cela, ce que vous avez dit ?
8 R. Oui. L'impartialité est fondamentale. C'est la base du comportement
9 d'un observateur militaire; et comme je l'ai dit, le but principal était en
10 fait d'observer un cessez-le-feu. Mais en l'occurrence, il n'y avait pas de
11 cessez-le-feu à observer, en tout état de cause, en tant qu'officier
12 professionnel de métier, nous devions évidemment strictement respecter la
13 règle de l'impartialité.
14 Q. D'après ce que j'ai compris, vous êtes arrivé au beau milieu de
15 l'offensive lancée par l'ABiH contre l'armée de la Republika Srpska.
16 Pendant plusieurs jours, peut-être, dix jours même, vous n'avez pas pu
17 quitter vos locaux, quitter l'endroit où vous étiez et remplir vos
18 fonctions ? Est-ce bien cela ?
19 R. C'est exact. En fait, nous avons eu un itinéraire très difficile en
20 voiture, de Split à Sarajevo, où nous avons été retenus dans un secteur qui
21 se trouve au sud-ouest de Sarajevo. Et dû à la nécessité, pour notre propre
22 sécurité, de nous mettre à couvert parce qu'il y avait beaucoup de combats
23 qui se déroulaient entre les forces armées de Bosnie et les forces serbes
24 entre le secteur qui était intercalé entre nous-mêmes et Sarajevo.
25 Q. Ce n'était pas la question que je voulais vous poser. Je vous ai
26 demandé autre chose, et je souhaiterais que vous répondiez à cette
27 question. Quand vous êtes arrivé à Sarajevo, vous avez été incapable de
28 remplir vos fonctions pendant plusieurs jours à cause de l'offensive très
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1 violente qui faisait rage à ce moment-là entre les deux parties
2 combattantes ?
3 R. Non, ce n'est pas exact. Je suis arrivé à Sarajevo le 21 juillet, et
4 nous sommes arrivés d'Igman, du mont Igman avec l'appui du Bataillon
5 français qui nous protégeait pour pouvoir descendre d'Igman pour arriver au
6 secteur de Sarajevo.
7 Q. Bien. Compte tenu du fait que vous êtes arrivé au moment où il y avait
8 des combats en cours et que votre objectif était d'analyser des cratères,
9 avez-vous tout au long de votre séjour à Sarajevo examiner des cratères
10 causés par la partie de Bosnie-Herzégovine pour prouver votre
11 impartialité ou est-ce que vous êtes seulement allé dans le secteur tenu
12 par la Republika Srpska, l'armée de la Republika Srpska, pour y examiner
13 les cratères qui s'y trouvaient ?
14 R. Nous n'avions pas à prouver notre impartialité. Mais comme je l'ai dit,
15 nous devions d'abord assurer nos priorités et voir de quelle façon on
16 pourrait procéder aux investigations concernant les points d'impact. Tous
17 ces impacts se trouvaient à l'intérieur de la ligne de confrontation sur le
18 territoire tenu par l'ABiH -- j'ai mentionné plus tôt qu'en tant
19 qu'observateurs militaires, nous n'étions pas autorisé à aller dans le
20 territoire tenu par les Serbes de Bosnie.
21 Q. Au cours des premières journées de votre séjour à Sarajevo, je n'ai pas
22 pour le moment la possibilité de vous montrer un document parce qu'il est
23 dans une langue que vous ne comprenez pas, mais il a pour auteur quelqu'un
24 en Bosnie-Herzégovine. Au moment où vous êtes arrivé, est-ce que vous avez
25 entendu dire qu'il y avait eu jusqu'à 100 000 balles tirées par l'ABiH, et
26 je ne suis pas en train d'exagérer.
27 Je voudrais savoir -- en temps utile on montrera le document à la
28 Chambre de première instance. Je voudrais simplement savoir si vous avez
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1 entendu cela du côté de l'ABiH, s'il arrivait que du côté de Sarajevo, vous
2 ayez pu entendre jusqu'à 100 000 coups de feu tirés dans les secteurs tenus
3 par la Republika Srpska ?
4 R. Je n'ai pas de commentaires à faire sur le nombre de balles tirées. A
5 l'évidence, il est impossible de compter 100 000 coups de feu, mais ce que
6 je peux confirmer, c'est qu'il y avait des combats en cours le long de la
7 ligne de front autour de Sarajevo. Cela je peux le confirmer, mais pas le
8 nombre de coups de feu.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais avez-vous entendu tirer,
10 peu importe de savoir le nombre de coups tirés, mais est-ce que vous avez
11 entendu du tout des coups de feu tirés du côté musulman de Bosnie ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait des coups de feu d'armes légères
13 des deux côtés. Lorsque nous allions dormir, on entendait tirer des armes
14 légères. Cela nous réveillait. C'était des armes légères. C'était
15 continuellement des armes légères qui tiraient dans l'ensemble du secteur
16 qui se trouvait autour de la base de notre équipe à Sedrenik.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.
18 [La Chambre de première instance se concerte]
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître.
20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
21 Juges, je ne sais pas quelle sera votre décision, ce que vous déciderez,
22 mais utilisons ces quelques minutes que nous avons encore avant la
23 suspension de la séance. La carte que je vous ai montrée en audience à huis
24 clos partiel, hier, sera utilisée par la Défense pour chacun des témoins,
25 sauf pour les témoins qui ont été victimes. Je vous demande la permission
26 d'utiliser cette carte dont j'ai fait tenir copie déjà au bureau du
27 Procureur.
28 Avec votre permission, je voudrais savoir si je peux poser plusieurs
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1 questions à ce témoin-ci par rapport à la carte en question ? Je suis sûr
2 que cela c'est admissible, j'ai remis la carte aujourd'hui. Hier je n'ai
3 pas pu le faire parce que je n'avais pas de copie disponible.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vais juste les sortir, je vais les
6 prendre maintenant.
7 [La Chambre de première instance se concerte]
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pour commencer, Monsieur Sachdeva,
9 qui a demandé la parole.
10 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, je vous présente mes
11 excuses, mais pendant que l'on est en train de préparer cette présentation,
12 j'ai en fait oublié par inadvertance de présenter la carte que le témoin
13 avait marquée lors de mon interrogatoire principal.
14 Est-ce que je pourrais la présenter comme pièce à conviction ?
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, elle sera versée au dossier.
16 M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce à conviction P209,
17 Monsieur le Président.
18 M. SACHDEVA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, avec l'aide des
20 interprètes, je vais parler lentement et passer tout ceci en revue.
21 Tout en haut, il est dit que : "La décision du commandant de la SRK," vous
22 voyez cela ?
23 Q. Est-ce que vous pouvez voir cela ? Vous avez entendu l'interprétation
24 de ce que je disais, Monsieur le Témoin ?
25 R. Non. Pourriez-vous, s'il vous plaît, répéter ce que vous venez de dire.
26 Q. En haut de la carte, vous voyez : "La décision prise par le commandant
27 du SRK".
28 R. Je comprends.
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1 Q. Mais cela vous ne pouvez pas le confirmer, bien entendu.
2 Ensuite du côté droit on voit, ou plus exactement à ma droite on voit :
3 "Secret militaire, strictement confidentiel." Vous voyez cela du côté
4 droit ?
5 R. Je vois qu'il y a un certain nombre de mots en cyrilliques, mais je ne
6 suis pas un expert, je ne suis pas en mesure de le dire.
7 Q. Oui, mais les interprètes vous l'ont traduit ce texte pour vous ?
8 R. Bien.
9 Q. Alors, on voit en bas : "Le commandant est le général de division
10 Dragomir Milosevic." Est-ce que vous êtes d'accord avec cela, maintenant
11 que les interprètes ont traduit pour vous et en vous disant ce que cela
12 veut dire ?
13 R. Oui.
14 L'INTERPRÈTE : Les interprètes précisent qu'ils ne peuvent absolument pas
15 voir ce que désigne Me Tapuskovic en même temps qu'il parle.
16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
17 Q. Alors, maintenant attendez, il est dit du côté gauche, à gauche, que :
18 "Le commandant, le général de Corps d'armée ou plus exactement le colonel
19 général Ratko Mladic confirme cette décision."
20 R. Je comprends assez de lettres cyrilliques pour voir ce que cela dit,
21 oui.
22 L'INTERPRÈTE : --correction de l'interprètes. "J'approuve".
23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
24 Q. Je vais vous poser cette question, à savoir qu'après que vous êtes
25 arrivé à Sarajevo, ceci vous le verrez après la suspension de séance, vous
26 dites que vous avez eu à vous occuper des lignes de confrontation entre
27 Sarajevo et le Corps de Romanija et l'ABiH et que vous deviez les marquer.
28 Est-ce que c'est cela que vous faisiez ?
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1 R. Je ne comprends pas ce que vous voulez dire par "les marquer."
2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
3 Juges, je crois que le moment est venu de suspendre la séance. Je vais
4 essayer de préciser ma question après la suspension de séance.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, parce que moi non plus je ne la
6 comprends pas. Peut-être qu'il faudra trouver un autre, une autre façon de
7 traduire ce qui en anglais a été interprété comme "mark them off" ou "les
8 marquer."
9 Nous allons suspendre l'audience pour 20 minutes.
10 --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.
11 --- L'audience est reprise à 16 heures 06.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous attendons un technicien de la
13 cabine audiovisuelle, mais j'ai décidé de ne plus attendre.
14 J'ai deux décisions à vous rendre. Tout d'abord, pour ce qui est des
15 deux requêtes déposées le 23 et le 24 janvier par l'Accusation en ce qui
16 concerne le versement au dossier de trois déclarations écrites pour les
17 témoins : W19, W28 et W136. La Défense ne remet pas en question
18 l'admissibilité de ces déclarations au titre de l'article 92 ter, mais
19 soulève une objection parce qu'il considère qu'il n'y aura pas assez de
20 temps pour son contre-interrogatoire de ce témoin. La Chambre de première
21 instance leur donnera un temps raisonnable pour le contre-interrogatoire,
22 en se basant sur un certain nombre de facteurs, c'est-à-dire la longueur de
23 l'interrogatoire principal, la longueur des déclarations 92 ter, et leur
24 importance en l'espèce. La Chambre de première instance fait droit à la
25 requête de l'Accusation et verse au dossier les déclarations des témoins
26 W19, W28 et W136, sous réserve que les critères de l'article 92 ter soient
27 bel et bien remplis.
28 Ensuite, je me réfère à la requête de l'Accusation déposée le 5 février
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1 2007, en application de l'article 92 ter. Ceci porte sur le témoin John
2 Jordan, qui devrait témoigner en ce prétoire lundi, le 19 février. La
3 réponse de la Défense est attendue le 19 février 2007, et la Chambre de
4 première instance aimerait savoir de la part de la Défense si elle sera,
5 oui ou non, en position de donner sa réponse d'ici jeudi le 15 février,
6 donc donner sa réponse à cette requête. Pourriez-vous nous dire quelle est
7 votre position, s'il vous plaît ?
8 Car le cas échéant, nous rendrions notre décision le 16 février.
9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'est le témoin à
10 qui ma collègue posera des questions, et elle va vous expliquer cela.
11 Mme ISAILOVIC : Rapidement, Monsieur le Président. On prend ce que vous
12 avez dit concernant les --
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Reprendre, s'il vous plaît.
14 Mme ISAILOVIC : Donc nous, on prend en compte votre décision rendue tout à
15 l'heure. Concernant le témoignage de M. John Jordan en vertu de l'article
16 92 ter, la Défense n'a pas d'objection à faire en ce qui nous concerne
17 donc, c'est bon.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.
19 Nous pourrons poursuivre maintenant le contre-interrogatoire du témoin qui
20 se trouve dans le prétoire.
21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
22 Juges. J'ai réussi à consulter ma collègue pendant la pause, et j'ai pu
23 choisir les choses qui sont les plus importantes pour mener de façon la
24 plus efficace mon contre-interrogatoire.
25 Maintenant, j'aimerais d'abord demander au témoin, Monsieur le Président,
26 parce que compte tenu de tous les documents que j'ai reçus de la part du
27 Procureur, on m'a communiqué deux cartes. Je pense que le Procureur dispose
28 de suffisamment de copies de ces cartes, parce qu'on ne peut pas vraiment
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1 les afficher grâce au logiciel de prétoire électronique, et il faut qu'on
2 montre ces cartes comme cela dans le prétoire. Est-ce que ces cartes
3 peuvent être distribuées à la Chambre pour que je puisse poser des
4 questions au témoin concernant ces cartes, parce qu'on m'a communiqué ces
5 cartes justement par rapport à son témoignage.
6 M. SACHDEVA : [interprétation] J'ai des exemplaires avec moi.
7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
8 Q. Monsieur le Témoin, pour ce qui est de ces photos aériennes, vous
9 connaissez bien cela. Est-ce que vous avez pris cela d'à bord d'un
10 hélicoptère ou d'un autre aéronef ? Pouvez-vous expliquer cela aux Juges ?
11 R. Ce n'est pas moi qui aie donné ces photos. Donc, je ne peux pas
12 répondre à votre question.
13 Q. A part cette photo aérienne, est-ce que vous avez vu les photos
14 aériennes qui sont un peu plus larges, qui montrent le centre-ville et pas
15 d'autres quartiers ? Savez-vous s'il y a d'autres photos aériennes qui
16 montrent d'autres quartiers, qui montrent d'autres quartiers et non
17 seulement le centre de la ville de Sarajevo ?
18 R. Je n'ai pas d'autres photos. Mais les cartes utilisées par les
19 observateurs militaires sont au un cinquante millième, et couvrent non
20 seulement la ville de Sarajevo, mais toutes les zones environnantes aussi.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La question est de savoir si vous
22 aviez pris l'autre photo, qui prendrait en compte non seulement Sarajevo
23 mais aussi ses environs.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Personnellement, non, je n'ai pris aucune
25 de ces photos.
26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
27 Juges, je devrais poser des questions au Procureur par rapport à ces photos
28 aériennes, à savoir si le Procureur dispose d'autres photos aériennes qui
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1 sont plus larges. Si oui, le Procureur aurait dû me communiquer ces autres
2 photos aériennes, et non seulement la photo aérienne qui ne représente que
3 le centre de Sarajevo. Le Procureur devrait répondre à ma question par
4 rapport à cela.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Avez-vous une carte qui montrerait
6 Sarajevo est ses environs de façon moins détaillée ?
7 M. SACHDEVA : [interprétation] Oui, je l'ai, et je l'ai donné au conseil il
8 y a deux ou trois jours. Il s'agit, en fait, d'un extrait agrandi d'une
9 carte complète de Sarajevo que j'ai donnée au conseil sous le format A3. Je
10 voulais l'utiliser, mais pour être efficace j'ai décidé de ne le pas faire.
11 Cela dit, le conseil a trois ou quatre exemplaires de cette carte.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Allons-y, Monsieur
13 Tapuskovic.
14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
15 Juges, c'est justement ce que je voulais demander, vous montrer cette autre
16 photo aérienne, parce que ses dimensions sont beaucoup plus petites. Est-ce
17 qu'ils peuvent montrer cette autre photo aérienne de Sarajevo plus petite
18 qu'on m'a communiquée, qui montre plus ? Je suis sûr qu'il y a une autre
19 photo aérienne meilleure que cette autre plus petite. Est-ce que le
20 Procureur peut montrer cette autre photo aérienne pour que je puisse poser
21 des questions au témoin par rapport à cette photo aérienne ?
22 [La Chambre de première instance se concerte]
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Tapuskovic, que voulez-vous
24 exactement ? Mes collègues et moi ne vous comprenons pas très bien. Où
25 voulez-vous en venir ?
26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il y aura une autre occasion pour faire
27 cela peut-être, mais je pense que sur cette petite photo aérienne, on peut
28 voir plus. Mais il est difficile de se repérer sur ces photos aériennes, et
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1 la Défense ne dispose pas de ces photos aériennes. Si je disposais de cette
2 autre photo aérienne, je pourrais poser des questions au témoin.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Avez-vous une carte plus
4 petite, mais dans un format plus grand, Monsieur Sachdeva ?
5 M. SACHDEVA : [interprétation] Ecoutez, Monsieur le Président, ce que tient
6 le conseil entre les mains est la carte complète de Sarajevo, et c'est de
7 cette carte que nous avons pris cet extrait. Le conseil m'a demandé la
8 carte, je lui ai donnée. Je ne l'ai pas utilisé lors de mon interrogatoire
9 principal. Si le conseil compte l'utiliser au cours de contre-
10 interrogatoire, il aurait peut-être dû faire quelques copies, à mon avis.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien, très bien. Alors, passons
12 à autre chose. Poursuivons.
13 Il a donné tout ce qu'il avait.
14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je devrais expliquer cela par écrit aux
15 Juges. Je ne veux pas maintenant faire paraître plus de temps là-dessus, je
16 pense qu'après le témoignage du témoin, je devrais expliquer ce point par
17 écrit et adresser à la Chambre. Je peux poursuivre ?
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Procédez de la sorte, et
19 commencez votre contre-interrogatoire, s'il vous plaît.
20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
21 Q. [interprétation] Monsieur Knustad, vous étiez à une formation à Zagreb,
22 et en fin de compte, il s'agissait de votre domaine. Pouvez-vous me
23 répondre un obus de 120-millimètres a quel poids ? Je me suis renseigné
24 auprès de divers experts, généraux pour la plupart d'entre eux, et je
25 dispose de l'information selon laquelle cet obus pèse deux kilos et demi.
26 Est-ce que c'est vrai, d'abord ?
27 R. Non, pas du tout. Cela pèse bien plus lourd, bien plus que deux kilos
28 et demi. Il y a des spécifications. Si vous parlez d'un obus de 120-
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1 millimètres ou alors si vous parlez d'un obus d'artillerie de 120-
2 millimètres, c'est un peu différent. Cela dit, les deux pèsent plus de deux
3 kilos et demi.
4 Q. Donc on m'a traduit "kilomètres", mais c'est plutôt en kilogrammes.
5 Donc un obus mortier de 120-millimètres pèse combien ?
6 R. Je ne peux vous donner qu'une estimation, mais un obus de mortier, un
7 obus de 120 de mortier, pèserait entre 20 et 30 kilos.
8 Q. Est-ce que j'ai bien compris ? Vous avez dit entre 20 et 30
9 kilogrammes ? C'est ce qu'on a traduit.
10 R. Tout à fait. C'est bien cela.
11 Q. Savez-vous que ces obus, à ce poids que vous avez indiqué, pourraient
12 être captés par les radars, au moins qu'il s'agit de radars de meilleure
13 qualité, que déjà au-dessus de dix mètres de la surface, captent tout ce
14 qui passe par l'air. Est-ce que vous êtes au courant de cela ?
15 R. En général, en tant qu'officier, je sais qu'il existe des équipements
16 qui peuvent suivre les obus d'artillerie en vol. Cela, je le sais.
17 Q. Pour ce qui est de dix mètres au-dessus de la surface du sol ?
18 R. Je n'ai pas en tête les spécificités des radars, car cela ne rentre pas
19 dans mes compétences. Au cours de mon service à Sarajevo, je n'ai pas eu à
20 traiter de cela.
21 Q. Savez-vous que les unités du Royaume-Uni et les unités des Pays-Bas,
22 ainsi que d'autres unités, avaient des radars de très bonne qualité à
23 l'époque où cet incident tragique a eu lieu à Markale le 28 août ? Est-ce
24 que vous savez cela, compte tenu que vous étiez membre de l'équipe qui a
25 mené une enquête là-dessus ?
26 R. Oui, je sais que les forces britanniques --
27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] M. Sachdeva est debout.
28 M. SACHDEVA : [interprétation] Juste un petit éclaircissement que je
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1 demande, s'il vous plaît. Le témoin n'a pas dit qu'il était membre de
2 l'équipe qui avait fait l'enquête sur ce malheureux incident du 28 août.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En effet. Vous avez raison d'avoir
4 attiré notre attention sur ce point.
5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je pense qu'il a dit cela et je pense
6 qu'il a dit qu'il était membre de l'équipe qui a analysé cet incident. Le
7 document a été montré, pour lequel il a dit que c'était lui qui a, entre
8 autres, rédigé ce document.
9 Q. N'est-ce pas ?
10 R. Il est vrai que je faisais partie d'une équipe d'observateurs
11 militaires qui a effectué l'enquête le 28 août au marché, mais mon poste se
12 trouvait à l'OP1.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci de cet éclaircissement.
14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
15 Q. Monsieur le Témoin, pouvez-vous dire qu'il est presque impossible,
16 compte tenu des appareils qui se trouvaient au-dessus de Sarajevo, autour
17 de Sarajevo à une distance considérable, de ne pas capter le son produit
18 par n'importe quel autre projectile qui survolait la ville ? Etiez-vous au
19 courant de cela ?
20 R. Non, non. J'ai entendu un très grand nombre de projectiles de mortier
21 et d'artillerie au cours de ma carrière, donc s'il y avait eu des tirs
22 sortants venant de la zone depuis mon poste d'observation, je l'aurais
23 entendu, et là, je fais référence bien sûr à l'incident du 28 août.
24 Q. Je vous ai posé une question qui portait sur une autre chose. Les
25 appareils, pour capter le son des projectiles sortants et entrants, aucun
26 de ces appareils qui fonctionnaient de cette façon n'a enregistré l'arrivée
27 de cet obus. Etiez-vous au courant de cela ou pas ?
28 R. Ecoutez, j'étais observateur militaire. Je n'avais pas accès à d'autres
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1 équipements, à part mes yeux, mes oreilles et mes jumelles. C'est tout ce
2 que j'avais. Je ne peux pas faire de commentaires sur d'autres systèmes qui
3 auraient pu exister.
4 Q. Si vous avez participé au travail d'observation en quelque sorte, ce
5 jour-là où cet incident tragique a eu lieu, avez-vous appris qu'aucun de
6 ces appareils n'a enregistré le son de cet obus ?
7 R. Je n'étais pas au courant de cette information.
8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je prie M. le Greffier d'audience que le
9 document DD00-0510 - il s'agit de la déclaration de M. Knustad du 21 mai
10 2006 - soit affichée. J'ai décidé de lui poser certaines questions par
11 rapport à cette déclaration, peu de questions, d'ailleurs. Il s'agit de la
12 déclaration faite le 21 mai 1999. DD00-0510.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Affichez-le. Il faut que cette pièce
14 soit affichée, s'il vous plaît.
15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
16 Q. J'aimerais que le témoin se penche sur le quatrième paragraphe de la
17 page numéro 3 dans la version en anglais. Cela commence par les mots : "Le
18 28 août 1995."
19 R. Je vois le passage.
20 Q. Je ne lirai pas tout, mais je vais lire une phrase au milieu du
21 paragraphe, c'est ce que vous avez déjà dit : "A ce moment-là j'ai entendu
22 l'impact d'un projectile quelque part dans la ville, et sur la base de mon
23 expérience, j'en ai conclu qu'il s'agissait d'un obus du mortier."
24 Est-ce que c'est exact ce qui est écrit ?
25 R. Ceci est exact.
26 Q. Paragraphe suivant, vous dites : "J'ai entendu un seul impact, et je
27 sais que l'obus n'est pas passé près de notre poste d'observation sinon je
28 l'aurai entendu. Egalement, je peux dire que je l'aurai entendu si l'obus
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1 avait été lancé de l'enceinte encerclé par les lignes de confrontation,
2 parce que tout ce territoire autour des lignes de confrontation était
3 contrôlé par les Serbes."
4 Est-ce vrai ?
5 R. Oui, c'est en effet ce que j'ai dit. Je n'ai pas entendu le moindre tir
6 de mortier sortant depuis ma ligne de confrontation.
7 Q. Finalement, au dernier paragraphe, vous dites la chose suivante : "Paul
8 et moi, nous avons rédigé le rapport sur l'incident de l'OMNU dans lequel
9 on a expliqué en détail ce que nous avons vu. Par la suite, on a informé
10 sur l'incident l'officier de permanence au QG de l'OMNU ou pour le secteur
11 de Sarajevo. C'est par là que j'ai fini de m'occuper de cet incident compte
12 tenu du fait qu'on ne m'a pas convoqué à participer à l'enquête de l'impact
13 sur place."
14 Est-ce vrai que vous n'étiez pas impliqué par la suite dans cette
15 enquête pour ce qui est de l'analyse du site de l'impact, comme cela figure
16 dans ce paragraphe ?
17 R. En fait, ici on parle de l'incident qui a eu lieu ce jour-là. La
18 signification de cette dernière phrase est que je n'ai pas été convoqué sur
19 site, je n'ai pas eu à descendre du poste d'observation OP1 pour me rendre
20 sur site pour participer à l'enquête sur site.
21 Q. Monsieur le Témoin, on peut en conclure que vous avez vu la colonne de
22 fumée s'élevant vers le ciel, l'impact de l'obus, et que sur cela vous avez
23 informé la personne compétente en utilisant les communications radio.
24 R. Oui, c'est en effet ce qui est consigné dans nos rapports. C'est ce que
25 j'ai dit précédemment aussi. J'ai d'abord vu la fumée, ensuite j'ai entendu
26 l'impact, et j'ai été en mesure de confirmer où se trouvait l'impact.
27 Ensuite j'ai fait rapport selon les procédures, j'en ai rendu compte selon
28 les procédures au QG des OMNU et je l'ai aussi consigné dans le carnet de
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1 bord, comme cela est indiqué dans ma déclaration.
2 Q. Je vous remercie. Pour ne plus se pencher à cette déclaration,
3 j'aimerais qu'on affiche sur le moniteur la page du même document. Il
4 s'agit de votre déclaration.
5 Voyez-vous cela sur le moniteur ? C'est la page 2.
6 Vous parlez d'abord de Sedrenik, comme vous avez déjà parlé aujourd'hui.
7 Vous avez déjà dit que depuis Sedrenik on peut voir toute la ville
8 comme sur -- Très bien, on a une vue parfaite sur la ville parce que ce
9 poste se trouvait sur une colline.
10 R. Je n'ai pas tout à fait dit cela, non. J'ai dit cela pour ce qui est de
11 l'OP1 et non pas pour la base de notre équipe qui se trouvait à Sedrenik.
12 Sedrenik est de l'autre côté de la ville, elle est du côté nord de la
13 vielle ville. C'était à OP1 que je parlais, d'une visibilité exceptionnelle
14 sur toute la ville, parce qu'on voyait extrêmement bien toute la partie sud
15 de la vieille ville, mais ce, depuis OP1.
16 Q. Oui, j'ai fait une erreur. Mais depuis cet endroit, on peut voir bien
17 la ville et on peut facilement contrôler et surveiller tous les points dans
18 la ville ?
19 R. Vous vous référez ici à l'OP1, à Colina Kapa, ou à la base de l'équipe
20 qui se trouvait à Sedrenik ?
21 Q. Je vais vous poser des questions concernant Colina Kapa. Non, cet
22 endroit où vous vous trouviez, l'endroit que vous avez indiqué sur la carte
23 tout à l'heure.
24 R. Ecoutez, sur la carte, j'ai montré Colina Kapa et notre poste
25 d'observation, OP1, je crois que c'est assez clair. Sur la carte on voit
26 Colina Kapa, mais absolument rien à propos de Sedrenik. Je ne comprends pas
27 du tout votre question, Maître Tapuskovic.
28 Q. J'ai commis une erreur à nouveau, mais disons Colina Kapa. C'est
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1 l'altitude 942 mètres; est-ce exact ?
2 R. Oui. La ville de Sarajevo, elle, se trouve à une altitude d'environ 600
3 mètres au-dessus du niveau de la mer.
4 Q. Et Colina Kapa se trouve à une altitude de 940 mètres par rapport au
5 niveau de la mer.
6 R. Tout à fait, tout à fait. Cela, 940 mètres, c'est quand on est tout en
7 haut de Colina Kapa; mais comme je vous l'ai déjà dit, l'OP se trouvait un
8 peu en contrebas, au nord du sommet, en contrebas sur le nord dans la pente
9 qui descendait vers la ville.
10 Q. Est-ce qu'on peut dire que Colina Kapa est ce sommet de 940 mètres qui
11 fait partie de la montagne de Trebevic est contrôlé par l'ABiH ?
12 R. Oui, tout à fait. C'était sous le contrôle de l'ABiH, comme je l'ai
13 déjà dit. La ligne de front de l'ABiH était environ 150 à 200 mètres au sud
14 de OP1.
15 Q. De cet endroit, Sarajevo pouvait être vue parfaitement. Beaucoup de
16 témoins qui ont témoigné ici disaient la même chose, on pouvait de ce
17 point-là voir tous les sites dans la ville.
18 R. Tout à fait. On a une vue magnifique, une vue exceptionnelle sur la
19 vieille ville principalement depuis cet OP. D'un point de vue militaire, ce
20 n'était pas par hasard que le point d'observation des Nations Unies était
21 placé à cet endroit-là.
22 Q. Mais un peu plus en contrebas par rapport aux positions de l'ABiH ?
23 R. C'est en contrebas.
24 Q. Merci. Voilà, maintenant est-ce que vous pouvez vous pencher au
25 paragraphe 5, et je vais poser des questions concernant cette carte-là.
26 Vous avez dit que Kevin Curtis du Tribunal international m'a montré la
27 carte de la zone de Sarajevo en deux parties, maintenant pour lire la
28 suite, il est dit que : "Sur ces cartes, j'ai inscrit en utilisant le
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1 feutre vert, la ligne de confrontation à l'époque."
2 Pouvez-vous nous montrer quelle était la ligne de confrontation que
3 vous avez inscrite sur la carte à l'époque, après être arrivé à Sarajevo
4 vers la fin de la guerre ? Pouvez-vous nous indiquer sur cette carte ici
5 quelle ligne de confrontation vous avez inscrite à l'époque ? Pouvez-vous
6 montrer quelle ligne de confrontation vous avez inscrit à l'époque sur
7 cette autre carte ?
8 R. La ligne de confrontation que nous avions sur les cartes que nous
9 utilisions lors de notre mission en tant qu'observateurs militaires montre
10 le milieu, ce qui se trouve exactement entre la ligne de confrontation qui
11 sépare l'ABiH et l'armée des Serbes. Comme je l'ai dit, il y a un "no man's
12 land" entre les deux armées. Et nous, en ce qui nous concerne, on
13 délimitait la ligne de confrontation exactement au milieu du "no man's
14 land."
15 Q. S'il vous plaît, indiquez cette ligne sur la carte. Indiquez-là, s'il
16 vous plaît. C'est tout.
17 R. [Le témoin s'exécute]
18 Q. Montrez-nous où se trouve Colina Kapa. Colina Kapa se trouve à
19 l'intérieur de la zone de responsabilité. La ligne bleue représente quoi ?
20 R. Je pense que la ligne bleue représente le territoire détenu par l'ABiH,
21 en tout cas, la ligne la plus avancée. Si j'ai bien compris, la ligne
22 pointillée en bleu c'est la ligne de front de l'ABiH, et la ligne en
23 pointillé rouge montre la ligne de front de l'armée de la Republika Srpska.
24 Q. Pouvez-vous nous montrer approximativement l'endroit où vous avez
25 indiqué Colina Kapa. Montrez à peu près où se trouve cet endroit, ce site.
26 R. Oui.
27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Sachdeva.
28 M. SACHDEVA : [interprétation] Pour suivre le débat plus aisément, serait-
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1 il possible que l'on pointe la caméra sur la carte quand le témoin montre
2 quelque chose sur la carte, sinon c'est difficile.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que la caméra peut être
4 pointée sur la carte pour que nous voyions aisément de quoi il s'agit.
5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
6 Q. Vous avez dit que Colina Kapa se trouvait à l'intérieur de la zone de
7 responsabilité de l'ABiH. Montrez-nous si cela se trouvait dans la zone de
8 responsabilité de l'ABiH, et si la ligne bleue délimitait la zone de
9 responsabilité de l'ABiH, Colina Kapa devrait être derrière cette ligne
10 bleue. C'est ce que vous avez indiqué tout à l'heure; est-ce vrai ?
11 R. Je ne peux pas valider l'exactitude de cette carte. Je ne sais pas à
12 quelle date les choses ont changé. Mais je sais que la station terminale du
13 tramway qui allait à Colina Kapa se trouvait dans le territoire détenu par
14 les Serbes de Bosnie. C'était à l'est de nos positions sur Colina Kapa.
15 Q. Je vous ai posé des questions concernant le sommet de Colina Kapa. Vous
16 avez dit que le sommet de Colina Kapa et votre poste se trouvaient sur le
17 territoire qui représentait la zone de responsabilité de l'ABiH; est-ce
18 vrai ?
19 R. Ce que j'en savais, en tout cas, c'est que l'ABiH était en haut de
20 Colina Kapa et que l'armée des Serbes de Bosnie était plus au sud, était
21 au-delà, donc au sud. Voilà.
22 Q. Vous êtes arrivé au mois de juin à Sarajevo, seulement au mois de juin.
23 Savez-vous s'il y avait eu d'autres lignes de confrontation ou zones de
24 confrontation pour ce qui est de l'ABiH ? Pouvez-vous nous dire ces lignes
25 rouges et bleues représentent ? Avez-vous appris la signification de ces
26 lignes pendant votre séjour à Sarajevo ?
27 R. Je sais extrêmement bien à quoi correspondent les lignes bleues et
28 rouges sur cette carte. Je viens d'ailleurs de vous le dire. Sur nos
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1 propres cartes que nous employions dans le cadre de notre mission d'OMNU,
2 il n'y avait qu'une ligne qui indiquait le milieu entre ces deux lignes de
3 confrontation.
4 Q. Pouvez-vous me répondre si les lignes bleues représentaient les
5 positions de l'ABiH et les lignes rouges représentaient les positions de
6 l'armée de la Republika Srpska ?
7 R. Oui, c'est correct. Tel que je le vois sur la carte, c'est correct.
8 Q. Tout à l'heure, vous avez parlé beaucoup des bombes aériennes. Il n'est
9 pas nécessaire de répéter certaines choses là-dessus. Vous avez dit que ces
10 bombes donc, leur vitesse n'était pas très grande. Les gens qui les
11 voyaient arriver, auraient-ils pu, pas mal de secondes ou de temps exprimé
12 en secondes, peut-être une minute ou deux, pour trouver abri, pour se
13 sauver, parce que ces bombes survolaient de façon lente ?
14 R. Non. Cela aurait été impossible. On pouvait les voir quand elles ne
15 passaient pas loin et quand elles venaient d'être lancées. Après, on
16 pouvait les voir en vol passer, mettons, quand elles étaient à quelque
17 centaines de mètres. On pouvait les voir si elles étaient dans les 400 à
18 500 [comme interprété] mètres de rayon, mais en vol.
19 Q. Si une bombe était lancée des positions de l'armée de la Republika
20 Srpska, cela veut dire à 2 ou 3 kilomètres, ces bombes auraient pu être
21 repérées de façon facile parce qu'elles produisent beaucoup de bruit, elles
22 survolent lentement et les gens pouvaient trouver abri facilement par
23 rapport à ces bombes aériennes; oui ou non ?
24 R. Non, non. Non, ce n'était pas possible. J'en ai vu une moi-même. J'ai
25 vu une de ces armes tirées depuis Sharpstone. J'ai vu la préparation. On
26 l'a vu de Sedrenik, l'équipe qui était à Sedrenik. On a vu la préparation
27 du lancement depuis Sharpstone, et on a vu le tir vers le centre-ville.
28 Q. Vous admettez la possibilité que de Sharpstone ou Spicasta Stijena ces
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1 bombes pouvaient être lancées de la part de l'ABiH. Donc, vous n'admettez
2 pas cela, cette possibilité, que cela aurait pu être lancé des positions de
3 l'ABiH depuis ce site, Spicasta Stijena ou Sharpstone ?
4 R. Ici on parle des bombes aériennes tirées depuis Sharpstone ? C'est de
5 cela qu'on parle ou est-ce qu'on parle d'autres choses qui auraient pu être
6 tirées depuis un endroit proche d'OP1 ? Pourriez-vous préciser, s'il vous
7 plaît.
8 Q. Non. Ma question est la suivante : vous connaissez bien ces truies,
9 donc ces bombes aériennes modifiées. Compte tenu du fait que vous les
10 connaissez bien et que vous les avez vues, est-ce que vous admettez la
11 possibilité que ces bombes auraient pu être lancées de Sharpstone des
12 positions de l'ABiH ?
13 R. Oui. J'exclus cette possibilité complètement. J'ai assisté à cela de
14 mes propres yeux, je l'ai vu de mes propres yeux. Il était extrêmement
15 facile de savoir où se trouvaient les lignes de confrontation dans les
16 environs de Sharpstone. On voyait très bien les positions des snipers
17 serbes à Sharpstone. On savait que c'était le territoire des Serbes de
18 Bosnie. Il s'assurait toujours d'ailleurs que leur drapeau flotte bien en
19 haut de Sharpstone.
20 Q. Savez-vous si, à propos du document que j'ai montré à un autre témoin,
21 mais je suppose que vous auriez pu en avoir connaissance, parce qu'il
22 s'agit du document de la FORPRONU que constamment, la FORPRONU a demandé à
23 ce qu'on installe un poste d'observation à Spicasta Stijena à Sharpstone et
24 que l'ABiH ne voulait jamais accepter cela. Est-ce que vous étiez au
25 courant de cela ?
26 R. Non. Non, je ne suis pas du tout au courant de tout cela.
27 Q. Vous affirmez catégoriquement que l'ABiH n'a jamais lancé une telle
28 bombe aérienne modifiée pendant que vous étiez à Sarajevo ?
Page 2030
1 R. Je ne peux pas être catégorique. Je me réfère à ce que j'ai vu et ce
2 dont j'ai rendu compte, et j'ai bel et bien déclaré que je n'avais vu aucun
3 mortier ou autre arme tiré par les forces du gouvernement de Bosnie-
4 Herzégovine depuis leur propre ligne de confrontation. De plus, je sais que
5 l'ABiH n'avait pas beaucoup d'armes lourdes à sa disposition.
6 Q. Vous affirmez cela de façon catégorique ?
7 R. Tout à fait.
8 Q. Merci.
9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Pour ne pas m'occuper plus longtemps de
10 cela, que DD00-510, que ce document soit versé au dossier en tant que pièce
11 à conviction.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.
13 M. LE GREFFIER : [interprétation] La cote sera la D57, Monsieur le
14 Président.
15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
16 Juges, j'aimerais que ce document de la FORPRONU qui a été déjà présenté
17 dans le prétoire et que je n'ai pas cité en entier - donc j'ai encore deux
18 documents à présenter lors de mon contre-interrogatoire. Je dois présenter
19 ce document en question en entier au témoin. Il s'agit DD00-463, le
20 document qui a été présenté en tant que D31. Il s'agit d'un rapport du QG
21 du OMNU pour le secteur de Sarajevo et concerne l'événement du 28 juin
22 1995, et de ce qui s'est passé par rapport au bâtiment de la télévision de
23 Sarajevo.
24 Est-ce que je peux --
25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document sous la cote DD00-0463 ne
26 correspond pas à la pièce D31. Le document que j'ai sous la cote D31 est
27 bien différent. Il faudrait que le conseil se penche sur ce problème pour
28 le résoudre.
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1 [La Chambre de première instance se concerte]
2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Donc DD00-463, c'est le numéro du document
3 dont j'ai parlé, parce que je l'ai mis sur ma liste des pièces à
4 conviction.
5 Q. Monsieur le Témoin, le voyez-vous sur l'écran ? Je voudrais présenter
6 le document entier. Le QG de l'OMNU, secteur de Sarajevo, a envoyé ce
7 document à l'heure indiquée au mois de juin 1995 - il ne faut pas que je
8 lise cela - préparé par le capitaine T. Hansen, officier chargé des
9 opérations, et aval donné par M. Alan, commandant adjoint. Est-ce que j'ai
10 correctement lu cela ?
11 R. Oui, oui. Tout à fait. Le commandant adjoint des observateurs
12 militaires. Ce n'est pas la FORPRONU, c'est autre chose.
13 Q. Je m'excuse. Je n'ai jamais été soldat. Même j'ai été dispensé du
14 service militaire.
15 Donc, informer le QG de l'OMNU. Objet, le rapport spécial sur
16 l'impact sur le bâtiment de la télévision du 28 juin 1995.
17 Voyez-vous cela ?
18 R. Oui, très bien.
19 Q. Ensuite : "En juin, un observateur militaire qui, après être arrivé au
20 PTT "building" a garé sa voiture dans la partie inférieure du parking, a pu
21 remarquer la chose suivante."
22 Est-ce exact ? Est-ce que c'est ce qui figure dans cette partie du
23 rapport ?
24 R. Oui. Je n'avais pas encore vu ce rapport. C'est la première fois que je
25 le vois.
26 Q. Je vous prie de me répondre par un oui ou par un non. Il n'est pas
27 nécessaire d'expliquer quoi que ce soit si cela figure ici.
28 Il a entendu, il a vu le projectile sortant survolant le parking et la rue
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1 avec les coordonnées suivantes. L'endroit se trouve sur le territoire de
2 BiH, approximativement à 1 800 mètres par rapport à la plus proche ligne de
3 cessez-le-feu.
4 R. En effet, c'est ce qui est écrit.
5 Q. Il a vu le projectile et la poussière en survolant l'espace et en se
6 dirigeant vers le bâtiment de la télévision.
7 Oui ou non ?
8 R. Oui.
9 Q. Le projectile s'est déplacé directement vers la cible dans la direction
10 du nord dans la partie du bâtiment où se trouvait Cymbelline, un radar de
11 production britannique qui se trouvait dans le bâtiment. Ai-je bien lu
12 cela ?
13 R. C'est bien ce qui est écrit.
14 Q. Le projectile était très large, plus de 20 centimètres, long de 60 et
15 plus, sur 7 mètres et plus; est-ce vrai ?
16 R. Oui.
17 Q. On ne pouvait pas voir la fumée pendant que le projectile survolait
18 très bas, à une vitesse faible.
19 R. Oui. C'est bien ce qui est écrit sur ce rapport.
20 Q. L'explosion s'est produite plusieurs secondes après l'impact et
21 l'explosion avait l'air d'être très forte.
22 R. C'est ce qui est écrit.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Tapuskovic, ce rapport a
24 été préparé par quelqu'un d'autre. Tout ce que le témoin peut faire, c'est
25 confirmé qu'il lit bien la même chose que vous.
26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
27 Juges, je vais proposer ce document au versement au dossier. Un autre
28 observateur a vu quelque chose d'autre qui complèterait cela. Mais cela
Page 2033
1 n'est pas important.
2 Cela a été décrit dans l'acte d'accusation, il y avait des témoins qui ont
3 témoigné en disant que c'était une truie, une bombe aérienne modifiée qui a
4 touché le bâtiment de la télévision.
5 Q. Après tout cela, j'aimerais savoir si le témoin nie toujours que l'ABiH
6 avait des rampes de lancement à partir desquelles elle pouvait lancer un
7 projectile de ce type, c'est-à-dire une bombe aérienne modifiée ou le
8 témoin maintient toujours ce qu'il a dit ou c'est pour savoir si le témoin
9 nie catégoriquement cette possibilité. C'est ma question.
10 R. Je ne peux que confirmer et maintenir ce que j'ai vu et entendu. Je
11 déclare et j'ai déclaré que je n'ai jamais vu aucun projectile tiré d'armes
12 lourdes depuis l'intérieur des lignes de confrontation.
13 Q. Vous avez vu le projectile qui est venu de Sharpstone et à propos
14 duquel vous affirmez catégoriquement que c'était l'ABiH qui a lancé cela,
15 et les positions des deux armées se trouvaient à cet endroit-là ? Est-ce
16 que vous excluez toujours la possibilité que ce projectile de Sharpstone a
17 été lancé par l'armée de la Republika Srpska ?
18 R. Oui. Je l'exclus complètement, parce que nous savions bien où étaient
19 les lignes de confrontation dans les environs de Sharpstone. Je l'ai vu de
20 mes propres yeux. L'armée des Serbes de Bosnie détenait le territoire qui
21 se trouvait tout en haut de Sharpstone. L'ABiH était en contrebas, plutôt
22 sur la colline qui était en contrebas, qui était au sud-ouest de
23 Sharpstone.
24 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Maintenant, je prie qu'on affiche - j'ai
25 encore deux documents à présenter, après quoi je vais en finir avec mon
26 contre-interrogatoire. Le document DD00-0506, j'aimerais qu'on l'affiche
27 sur l'écran. Il s'agit d'une information, en fait, d'une conversation
28 téléphonique --
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Une minute, Monsieur Tapuskovic.
2 M. LE JUGE MINDUA : Maître Tapuskovic, juste pour ma propre compréhension,
3 le rapport que vous venez de lire, qui avait été établi par un autre
4 témoin, selon vous, ce rapport signifie très bien qu'une bombe aérienne
5 avait été tirée par l'ABiH à l'intérieur même de ce bâtiment, de cet
6 immeuble. C'est cela votre compréhension ?
7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Vous vous souvenez bien que ce document je
8 l'ai présenté à témoin protégé, et vous vous souvenez bien que j'ai affirmé
9 cela à l'époque. Non, ce projectile a été lancé à une distance de plusieurs
10 centaines de mètres par rapport au bâtiment de la télévision. C'est ce qui
11 est écrit dans ce document. Je ne veux pas aller plus en détail dans ce
12 document.
13 Je ne parle pas de ce qui s'est passé dans le bâtiment de la
14 télévision, je peux même affirmer que dans le bâtiment de la télévision se
15 trouvait déjà cet appareil qui a provoqué cette explosion. Parce que du
16 rapport on peut voir que l'explosion s'est produite un peu plus tard, et
17 l'explosion qui s'est produite et qui n'a tué personne, qui n'a blessé
18 personne au bâtiment de la télévision, excepté un cadavre qui a été tué à
19 un autre endroit. J'affirme que le projectile a été lancé à une distance
20 déterminée et qu'il a fait trois ricochets avant d'être explosé. Donc, le
21 projectile ne s'est pas trouvé dans le bâtiment même, mais le projectile a
22 été lancé d'un autre endroit. Un officier de la FORPRONU a vu cela.
23 M. LE JUGE MINDUA : Vous voulez donc que le témoin puisse confirmer cette
24 approche, cette compréhension ? C'est cela votre problème pour l'instant ?
25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Juge, non. Je n'affirme
26 que l'ABiH disposait des "truies," "krnaca" en B/C/S, de ces bombes
27 aériennes modifiées, donc disposait des mêmes bombes modifiées, aériennes
28 modifiées. Et ce que l'ABiH a fait, a présenté comme quelque chose qui a
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1 été fait par l'armée de la Republika Srpska, et j'espère que je vais
2 prouver cela durant cette affaire. Ma question au témoin était la suivante
3 : est-ce qu'il exclut la possibilité que l'ABiH a lancé ce type de bombe.
4 Je lui demande de me répondre à cette question après lui avoir présenté
5 tout cela.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vais essayer clarifier un peu les
7 choses, s'il vous plaît.
8 Vous êtes en train de nous dire que l'ABiH n'a jamais lancé de bombe
9 aérienne appelée "truie," ou alors est-ce que vous êtes en train de nous
10 dire que vous n'avez jamais assisté à un tir de ce type qui aurait été fait
11 par l'ABiH ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je déclare que je n'ai jamais assisté à
13 cela. Je ne sais pas si ces armes ont été employées ou non. Je ne peux pas
14 être catégorique quant à dire si oui ou non ces armes ont jamais été
15 employées par l'ABiH, mais je ne l'ai jamais vu en tout cas.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Avez-vous jamais entendu parler de
17 rapport faisant état de tirs de type effectués par l'ABiH ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, cela non plus je n'en ai jamais entendu
19 parler.
20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Ma dernière question par rapport à cela
21 est la suivante : s'il n'avait pas entendu parler de cela, aujourd'hui il a
22 entendu cela. Est-ce qu'il maintient toujours de façon catégorique que
23 cette truie, ce projectile lancé de Sharpstone a été lancé de la part de
24 l'armée de la Republika Srpska, est-ce qu'il est catégorique par rapport à
25 cela après avoir entendu ce rapport.
26 Q. Est-ce que vous maintenez votre affirmation en excluant absolument la
27 possibilité que l'ABiH aurait pu utiliser ce type de projectiles ?
28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Sachdeva.
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1 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin a déjà
2 répondu à sa question, puisque cela fait référence à la suggestion que
3 l'ABiH aurait tiré ce projectile. Alors, je ne sais pas si ceci a trait à
4 l'incident de Sharpstone ou non. Il faudrait peut-être le clarifier. Mais
5 je fais valoir que je pense que le témoin a déjà répondu à la question.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'aimerais quand même entendre la
7 réponse à la question.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous savions très bien de l'emplacement des
9 lignes de confrontation à Sharpstone et dans les environs. Nous savions que
10 pour ce qui est de Sharpstone, tout en haut, il y avait le territoire tenu
11 par les Serbes de Bosnie. J'ai déclaré que j'ai vu une bombe aérienne
12 modifiée lancée depuis cette position.
13 Je n'ai fait état que de ce que j'ai vu et ce que j'ai entendu. J'ai
14 aussi déclaré que j'avais vu le drapeau des Serbes de Bosnie flotter en
15 haut de cette colline de Sharpstone.
16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il n'est pas nécessaire de poser plus de
17 questions là-dessus. Le témoin a dit ce qu'il avait à dire et c'est à la
18 Chambre de se pencher sur cela. Je m'excuse.
19 [La Chambre de première instance se concerte]
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic.
21 Dites-moi d'abord, Monsieur Sachdeva, ce rapport qui a été montré au
22 témoin et qui a été uniquement marqué pour être identifié, vous le savez,
23 n'est-ce pas, que ce rapport a reçu une cote provisoire.
24 M. SACHDEVA : [interprétation] Oui, oui, je le sais. Je le sais.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. C'est le D31. L'Accusation a-t-
26 elle l'intention de citer la personne qui a rédigé ce rapport à
27 comparaître, donc l'officier qui aurait rédigé ce rapport va-t-il déposer
28 devant nous ?
Page 2037
1 M. SACHDEVA : [interprétation] La personne qui a rédigé ce rapport n'est
2 pas à l'heure actuelle sur la liste des témoins de l'Accusation.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Dans ce cas, j'imagine que la
4 Défense va très certainement citer cette personne. Si personne ne souhaite
5 l'appeler - laissez-moi terminer - si personne ne compte citer cette
6 personne, dans ce cas-là, j'en ferai une affaire personnelle. Je demanderai
7 à ce que cette personne vienne déposer en tant que témoin de la Chambre,
8 car il faut absolument que nous allions au fond des choses.
9 M. SACHDEVA : [interprétation] Je tiens à dire qu'il était sur notre liste
10 des témoins de l'Accusation. Après avoir étudié les archives militaires à
11 Banja Luka, vous avez identifié le document qui a été versé au travers du
12 témoin 138 - il s'agit d'un document du Corps d'armée à Sarajevo où il
13 était déclaré visiblement que -- où l'accusé avait déclaré qu'il avait bel
14 et bien atteint le bâtiment de la télévision, de ne pas nous servir de ce
15 document-là.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.
17 Vous avez complété votre contre-interrogatoire, Maître Tapuskovic ?
18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'ai encore deux documents à présenter,
19 encore quelques questions à poser au témoin. Je fais de mon mieux pour être
20 le plus bref possible.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître
22 Tapuskovic.
23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Si j'ai bien compris, ce document est le
24 document D31, n'est-ce pas ? C'est le numéro aux fins d'identification du
25 document.
26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne sais plus du tout à quel
27 document vous faites allusion, mais le document D31 a une cote provisoire
28 pour identification.
Page 2038
1 M. LE GREFFIER : [interprétation] Tout à fait. Ce document DD00-363 [comme
2 interprété] a reçu une cote provisoire pour identification, le D31, le 1er
3 février. Pour être plus clair, ce document n'est pas versé au dossier, il
4 n'a reçu qu'une cote provisoire.
5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Le Procureur m'a communiqué une
6 information, ou plutôt un rapport concernant M. Knustad du
7 2 octobre 2003. Il s'agit du document qui, de notre côté, a reçu le numéro
8 DD00-0506. Comme ce document est affiché sur l'écran, je vais poser des
9 questions au témoin pour ce qui est du paragraphe où il est question de
10 l'impact.
11 Q. Où il est dit que, je cite : "Knustad se trouvait à l'endroit indiqué
12 avec l'officier qu'il a déjà mentionné. Ils ont comparé leurs observations
13 et sont arrivés à la même conclusion, à savoir que l'obus de mortier est
14 tombé sur la zone de Markale et qu'aucun d'entre eux n'a entendu le bruit
15 du projectile lancé du territoire qu'il pouvait voir et qui pouvait
16 entendre le bruit de projectile."
17 M. Paul Conway, militaire de l'armée d'Irlande, n'a pas pu entendre
18 le bruit du projectile. Est-ce qu'on peut dire cela ainsi ?
19 R. Oui.
20 Q. Est-il vrai qu'aucun d'entre vous deux n'a entendu le bruit de encore
21 quatre ou cinq obus et vous n'avez pas non plus vu ces projectiles ni leurs
22 impacts ?
23 R. Si nous avions entendu, vu ou observé un autre impact ou d'autres
24 impacts, nous en aurions rendu compte. Dans ce cas-là, nous avons observé
25 et nous avons entendu un seul impact.
26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Le document DD00-0506, j'aimerais que ce
27 document soit versé au dossier également.
28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
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1 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera versé en tant que pièce à
2 conviction portant la cote D58, Monsieur le Président.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Sachdeva, vous avez la
4 parole.
5 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, aux fins de
6 clarification, le conseil de la Défense avance, semble-t-il, que ce rapport
7 n'a pas été communiqué, mais la version en anglais a été communiquée le 26
8 janvier [comme interprété] et dans la version en B/C/S, la version en B/C/S
9 a été communiquée à la Défense le
10 6 février. J'aimerais que cela soit consigné au compte rendu.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.
12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il est possible que j'ai commis cette
13 erreur, mais c'est ce document-là.
14 Oui, j'ai commis une erreur, mais je pense que c'est compréhensible.
15 En fait, je ne comprends pas de quoi il s'agit ici.
16 Puis-je poursuivre ?
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous en prie.
18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je voudrais qu'on montre au témoin une
19 autre pièce à conviction qui a été versée au dossier il y a assez
20 longtemps, l'une des plus importantes pour Markale. Il s'agit de DD00-010.
21 C'est un rapport du 28 août adressé par le général Janvier aux autorités,
22 aux représentants compétents du Corps de l'ONU ainsi qu'au secrétaire
23 général, M. Kofi Annan lui-même. Le Corps de maintien de la paix de l'ONU.
24 Pourrions-nous voir, s'il vous plaît, la page numéro 3 du texte
25 anglais ? Le secteur de Sarajevo de la FORPRONU, donc FORPRONU, secteur de
26 Sarajevo.
27 Q. Le témoin pourrait-il, s'il vous plaît, donner lecture de ce passage de
28 façon à ce que les questions que je vais lui poser par la suite ne le
Page 2040
1 prenne pas par surprise. Jusqu'à la fin de ce premier paragraphe.
2 Est-ce que vous l'avez lu ?
3 R. Oui.
4 Q. C'est le rapport du 28, dès le premier jour, jour 1, il dit : "En ce
5 qui concerne les obus de mortier. Définition déposition de tir pour les
6 obus de mortier difficiles, impossibles à déterminer le niveau de charge
7 utilisé pour les projectiles."
8 Pouvez-vous confirmer que ceci est effectivement difficile ?
9 R. Oui, c'est bien le cas. Ceci est bien d'ailleurs dans le sens de ma
10 déclaration. Nous pouvons seulement indiquer de quelle direction cela
11 arrivait, et c'est-à-dire il est difficile de dire à quelle distance. Mais
12 dans ce cas-ci, comme je l'ai déjà dit, rien n'a été tiré alors que nous
13 observions de l'intérieur de la ligne de confrontation et dans le secteur
14 que j'ai dessiné sur la carte.
15 Q. Vous n'avez ni entendu ni vu cela ? Vous n'avez, je veux dire, rien
16 entendu ou rien vu de ce que vous avez décrit ?
17 R. Non. J'ai déclaré ce que j'ai vu et ce que j'ai entendu et j'ai déjà
18 déclaré, un seul impact.
19 Q. J'attendais d'avoir l'occasion de pouvoir vous poser cette question. Un
20 peu plus bas, il est dit que : "Pour la plus grande partie, dans Ilidza,
21 Butmir, Dobrinja, la concentration maximale d'impacts a été observée dans
22 le secteur de Debelo Brdo et Grbavica. Un échange de tirs d'obus a eu lieu
23 en ville dans l'après-midi du 28 août, la plupart du côté BSA, et ce
24 pilonnage a fini par un autre tir de cinq roquettes vers le centre-ville
25 dans la soirée. Un incident impliquant la sécurité de personnel de l'ONU a
26 été relaté."
27 Alors, ma question est : comment avez-vous pu rendre compte de tirs
28 de mortiers ? Alors, vous suivez les coups qui entraient et qui sortaient,
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1 et vous suiviez l'ensemble, et vous n'avez pas enregistré tout ce qui s'est
2 passé la matinée du même jour ?
3 R. Je ne peux parler que de ce que j'ai vu ce matin-là, je ne comprends
4 pas. J'ai déjà indiqué ce fait, et je peux simplement déclarer ce que j'ai
5 observé et ce que j'ai entendu. Excusez-moi. Mais je n'ai pas compris votre
6 question.
7 Q. Comment est-il possible que tous ces obus étaient soudain à la fois
8 entendus et vus et aient produits leurs effets épouvantables des deux
9 côtés, alors que d'après ce que l'on a su de cette matinée n'a jamais été
10 vus ni entendus ? Ma question est : est-il possible que ces explosions
11 aient été provoquées dans ces cinq endroits, et que vous ayez pu entendre
12 uniquement le son des explosions, le bruit des explosions, et rien
13 d'autre ? C'est cela, la question que je vous pose.
14 R. Ceci serait de la spéculation de ma part, donc je ne peux pas répondre
15 à cette question.
16 Q. L'un des officiers d'un certain grade de l'OTAN a dit qu'il s'était
17 posé la question de la possibilité que l'ABiH abuse leurs propres soldats.
18 Je ne parle pas de conspiration ici ou de complot, mais cette possibilité a
19 aussi été prise en considération par l'un des officiers de l'OTAN. Que
20 pouvez-vous dire à cela ?
21 R. Avec tout le respect que je dois au général Janvier, je ne peux ni
22 confirmer ni affirmer cette déclaration, parce que je m'en tiens très
23 strictement à ce que je me rappelle, à ce que j'ai observé, et à ce que
24 j'ai relaté. Je veux m'y tenir.
25 Q. Je ne comprends pas pourquoi vous mentionnez le général Janvier. Peut-
26 être qu'il a évoqué cette possibilité aussi, mais ce que j'évoquais c'était
27 qu'un témoin que nous avons entendu à quelques temps ici, M. Nikolai, a
28 évoqué l'hypothèse que ceci aurait pu avoir été le fait de l'ABiH, au
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1 détriment de leur propre population.
2 R. Quelle est la question ?
3 Q. Est-ce que vous avez entendu parler de cette idée, de cette possibilité
4 en pensant à votre personnel ?
5 R. J'ai déjà répondu à cette question, mais je peux répéter ma réponse, la
6 répéter, c'est-à-dire que c'était la question de savoir si on était
7 conscient du fait qu'il y aurait des hypothèses ou des spéculations selon
8 lesquelles les coups de feu auraient pu être tirés par l'armée du
9 gouvernement de la Bosnie à l'intérieur de la ligne de confrontation. Nous
10 avons été prévenus de cette possibilité, et on s'en est également entretenu
11 lors de nos réunions avec les membres de l'armée du gouvernement de la
12 Bosnie confrontés à ce fait. Mais si vous vous en souvenez au cours de mon
13 service à Sarajevo, pendant mon temps de présence, je n'ai jamais été en
14 mesure de déterminer ou de confirmer que quoi que ce soit ait été tiré de
15 l'intérieur de la ligne de confrontation par l'armée du gouvernement de la
16 Bosnie qui ait pu avoir un impact à l'intérieur de la ligne de
17 confrontation.
18 Q. Pas même pour les tireurs isolés qui ont tiré sur leurs propres gens ?
19 Vous n'avez pas entendu quoi que ce soit à ce sujet ?
20 R. Nous avons entendu des spéculations à ce sujet aussi, donc c'est un
21 fait de plus au courant duquel nous étions, dont nous étions conscients.
22 Mais ceci touche à nouveau à la question de l'impartialité. Nous avons
23 rendu compte, et nous devions rendre compte de ce que nous observions. Vous
24 n'avez jamais confirmé qu'il y ait eu des tirs d'un tireur isolé vers une
25 cible à l'intérieur de la ligne de confrontation, et qui aient été tirés
26 par un soldat du gouvernement de la Bosnie, l'armée de la Bosnie.
27 Q. Vous n'avez jamais entendu que des rapports de la FORPRONU parlent de
28 cette question ?
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1 R. Non. Non, pas cela non plus.
2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aurais davantage
3 de questions à poser, mais je vais m'en tenir là. Je vous remercie
4 beaucoup.
5 Q. Merci, Monsieur le Témoin. Ceci conclu mon contre-interrogatoire.
6 Questions de la Cour :
7 M. LE JUGE MINDUA : Pour continuez sur la ligne -- sur la question de Me
8 Tapuskovic. Je voudrais faire appel à votre expérience militaire, parce que
9 vous avez dessiné sur cette carte que je garde encore avec moi.
10 Malheureusement, on ne peut pas la mettre sur le système ELMO. Mais vous
11 aviez dessiné l'impact de l'obus de mortier sur le marché de Markale, et la
12 direction d'où provenait cet obus. Vous avez aussi montré votre poste OP1.
13 Je pose la question, effectivement, parce que Me Tapuskovic vous dit
14 que le même jour vous avez entendu beaucoup d'autres détonations et
15 explosions, si j'ai bien compris, mais cet obus qui est arrivé sur le
16 marché, vous ne l'avez pas entendu ni vu.Alors, par rapport à votre
17 emplacement, selon votre expérience, est-ce qu'il peut ce faire que cet
18 obus passe sans qu'il soit vu ni entendu ? Tenant compte de sa direction et
19 du point d'impact, sur le point strictement militaire, est-ce que c'est
20 possible ou c'est envisageable ou pas ?
21 R. Je ne suis pas tout à fait sûr de comprendre la question de savoir s'il
22 était possible de le voir pendant son trajet. Mais je ne peux que me
23 référer au fait que j'ai observé quelque chose que j'ai identifié comme une
24 explosion, une détonation, de quelque chose qui arrivait à l'intérieur et
25 que j'ai vu, j'ai entendu le bruit de l'impact. Mais dépendamment de cela,
26 bien sûr, il y avait bien d'autres coups de feu qui entraient dans le
27 secteur et qui avaient un impact dans la ville pendant cette journée ainsi
28 que pendant d'autres jours.
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1 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup, Merci.
2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions à poser, je
3 voudrais simplement dire ceci : moi-même, je n'ai pas présenté de
4 prétentions, d'affirmations. Je ne me suis seulement référé à ce qui a été
5 dit dans le rapport adressé à Kofi Annan selon lequel des obus ont détoné
6 tout au long de l'après-midi et qu'il y a eu un échange de tirs d'obus des
7 deux côtés, et c'est ce document que je voulais utiliser devant la Chambre
8 de première instance.
9 M. LE JUGE MINDUA : Je voulais me renseigner auprès du témoin ce qu'il
10 pensait de cette situation.
11 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Knustad, j'ai deux questions
12 à vous poser, l'une a trait à votre enquête sur l'incident de Markale, et
13 l'autre question qui a trait de façon plus générale aux lignes de
14 confrontation.
15 Ma première question est la suivante : avez-vous utilisé vos compétences en
16 matière de cratères de façon à déterminer que l'obus qui avait frappé ce
17 jour-là, le 28 août, provenait de cette direction de 170 degrés ?
18 R. Le chef de notre équipe était celui qui procédait à l'analyse des
19 cratères et de l'investigation du point d'impact, de sorte que ma
20 contribution est ce que j'ai observé de ma position en OP1.
21 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie beaucoup. Donc vous-
22 même, vous n'avez pas vous-même analysé les cratères correspondant à l'obus
23 qui est tombé dans le secteur de Markale ce jour-là ?
24 R. Non, effectivement je ne l'ai pas fait, c'est exact.
25 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie. Ceci répond
26 pleinement à ma première question.
27 Ma deuxième question est ensuite en ce qui concerne les lignes de
28 confrontation, parce que nous avons entendu au cours de l'audience, pendant
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1 les débats jusqu'à présent, un certain nombre de témoins qui ont déposé
2 concernant le fait que ces lignes de confrontation étaient visibles. Ma
3 question, la question que je vous pose exactement celle-ci : si vous
4 arriviez à un ligne de confrontation, étiez-vous capable de la voir, est-ce
5 qu'il y avait les tranchées qui avaient été creusées ou est-ce qu'il y
6 avait des soldats ou des postes de combat le long de la ligne de
7 confrontation, enfin, comment était-il possible de voir une démarcation qui
8 indiquait qu'il y avait ligne de confrontation avec un tel degré de
9 précision que ce que nous voyons sur la carte comme nous l'avons vu sur
10 d'autres ?
11 R. Cela variait en fait selon les différentes parties de la ville. Dans
12 certains quartiers, vous pouviez en fait voir quelles étaient les positions
13 avancées des deux côtés, tandis que dans d'autres secteurs --
14 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Excusez-moi. Mais comment pouviez-
15 vous voir cela ?
16 R. Par exemple, nous pouvions voir, depuis le poste OP1, l'artillerie
17 serbe, les positions de l'artillerie serbe sur la colline, sur la partie
18 située le plus à l'est, la plus orientale de la ville. Nous avons observé
19 ces positions d'artillerie tous les jours avec des jumelles depuis notre
20 poste d'observation. Je ne peux pas maintenant me rappeler le nom de cette
21 colline, mais c'est celle qui se trouve le plus à l'est, c'est-à-dire le
22 plus à l'est au-dessus de la vallée, c'était la partie la plus orientale de
23 Sarajevo. Cela c'était un exemple.
24 Dans d'autres endroits, c'était beaucoup moins clair et les lignes de
25 confrontation pouvaient être plus proches, la défense était plus proche, en
26 particulier dans la zone d'Usban [phon], comme Grbavica. Il est très
27 difficile de donner une réponse précise à cela. La seule chose que je peux
28 dire, c'est que c'était différent selon les différents endroits de
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1 l'encerclement de la ville.
2 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Oui, et quelle pouvait être la plus
3 grande proximité des lignes de confrontation des autres, bon, ceci
4 dépendant de la carte, mais pour moi il n'est toujours pas clair comment il
5 était possible de déterminer exactement où passait les lignes de front et
6 les lignes de confrontation.
7 R. Lorsque j'utilise Sharpstone comme un exemple, puisque je connais très
8 bien ce secteur et que c'était très proche de la base de notre équipe, et
9 dans ce secteur, cela représentait disons, moins de 200 mètres pour ce qui
10 était des soldats du gouvernement de Bosnie par rapport aux soldats de
11 l'armée serbe, et c'était très clair. Tandis que dans d'autres secteurs,
12 dans d'autres quartiers, ils se trouvaient plus éloignés les uns des
13 autres.
14 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie.
15 [La Chambre de première instance se concerte]
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Knustad, la carte que nous
17 regardons et qui se trouve derrière vous et qui, je suppose sera présentée
18 pour versement au dossier comme élément de preuve, est-ce qu'elle reflète
19 de façon exacte les lignes de confrontation ?
20 R. Je peux pas me prononcer sur son exactitude, parce qu'un grand nombre
21 de ces secteurs, je n'y suis pas allé en personne lorsque la confrontation
22 se déroulait de cette manière. Mais d'après mes meilleurs souvenirs, elle
23 s'adapte bien au tableau, à l'image que j'avais de la ligne de
24 confrontation, tout particulièrement encerclant Sarajevo à l'époque où je
25 me trouvais dans le secteur.
26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pour la plus grande partie,
27 j'observe que la ligne est continue et il n'y a pas de rupture de la ligne.
28 Est-ce que ceci veut dire qu'il y avait des soldats sur l'intégralité de ce
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1 qui est représenté par ces lignes ? Est-ce que vous comprenez ce que je
2 veux dire ?
3 R. Oui, je comprends ce que vous dites. Mais je ne serais pas en mesure de
4 vous donner une réponse sur ce point, parce que je ne suis pas
5 personnellement allé dans les tranchées des deux côtés, que je sois passé
6 par les tranchées des deux côtés.
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pense que nous pourrons peut-être
8 en entendre davantage par d'autres témoins.
9 Maître Tapuskovic, y a-t-il des éléments de preuve ?
10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai oublié
11 effectivement de présenter ceci pour versement au dossier comme élément de
12 preuve. Mais je voudrais vous dire ceci : lorsque l'on en viendra à des
13 témoins qui sont victimes, ce seront les seuls pour lesquels je ne
14 présenterai pas la carte. M. Knustad, bien entendu, lui-même, ne peut
15 parler en ce sens, parce qu'il est arrivé à Sarajevo seulement au cours du
16 mois de juin 1995. Toutefois, ceux qui se trouvaient sur la ligne de front
17 et également autour de Sarajevo, et à Sarajevo, seront capables de
18 s'exprimer au sujet de cette carte. Je la présenterai à chacun des témoins
19 qui ne sont pas des témoins victimes.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons
21 admettre cette carte qui peut être versée au dossier comme élément de
22 preuve et --
23 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Pendant que nous faisons cela,
24 pourrais-je demander au conseil, Maître Tapuskovic, si cette carte comporte
25 une date ? Quand est-ce que cette carte a été dessinée ou établie ou plus
26 exactement, les lignes qui sont représentées sur cette carte, quand ont-
27 elles été tracées ?
28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
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1 Juges, j'ai une autre carte analogue à celle-ci que je vais sous peu
2 présenter aux fins de versement au dossier et qui porte la date du 7
3 juillet, pendant la période du général Galic. Cette carte, ici, c'est la
4 carte qui date de l'époque où Dragomir Milosevic avait pris sa position à
5 partir du 10 août jusqu'à la fin de la période prise en considération par
6 l'acte d'accusation, et que vous pouvez voir ici et qui comporte, indiqué,
7 l'approbation du général Mladic.
8 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie.
9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
10 Juges, c'est une carte militaire d'état-major de grand format et en couleur
11 et qui va être versée au dossier sous la pièce à conviction D59.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Y a-t-il des questions
13 supplémentaires de l'Accusation ?
14 M. SACHDEVA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Mais je me
15 demandais si on ne pouvait pas justement suspendre la séance, puisque
16 l'heure est venue.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons suspendre la séance
18 maintenant.
19 --- L'audience est suspendue à 17 heures 40.
20 --- L'audience est reprise à 18 heures 04.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Sachdeva, vous pouvez
22 commencer vos questions supplémentaires.
23 M. SACHDEVA : [interprétation] Je n'en ai pas pour longtemps. Je vous
24 remercie.
25 Nouvel interrogatoire par M. Sachdeva :
26 Q. [interprétation] Monsieur Knustad, j'ai juste qu'une seule question à
27 vous poser pour éclaircir la question que vous a posée M. le Juge Mindua,
28 il y a une minute avant la pause. Si un projectile avait été tiré depuis la
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1 ligne de confrontation, le long de la trajectoire de vol que vous avez
2 indiqué sur la carte, l'auriez-vous entendu ?
3 R. Oui, oui. Je l'aurais entendu.
4 Q. Ce jour-là à cette époque-là, avez-vous entendu le moindre tir depuis
5 l'intérieur des lignes de confrontation ?
6 R. A ce moment-là, je n'ai entendu aucun tir lancé depuis l'intérieur des
7 lignes de confrontation.
8 M. SACHDEVA : [interprétation] J'en ai terminé avec mes questions
9 supplémentaires.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Knustad. Vous avez
11 terminé avec votre déposition. Nous vous remercions d'avoir déposé en ce
12 Tribunal, et vous pouvez maintenant rentrer chez vous.
13 M. SACHDEVA : [interprétation] Le témoin suivant sera interrogé par Mme
14 Edgerton. Puis-je quitter le prétoire ?
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien sûr.
16 [Le témoin se retire]
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pouvez-vous appeler le témoin
18 suivant ?
19 Mme EDGERTON : [interprétation] Je pensais que mon collègue était parti
20 chercher le témoin. Ce sera M. Agovic qui va témoigner en rapport à
21 l'incident de tirs embusqués numéro 14, qui a eu lieu le 3 mars 1995. Il
22 s'agit d'un témoin 92 ter.
23 Si cela peut économiser du temps en vous donnant le premier numéro 65 ter
24 dont nous allons avoir besoin, il va s'agir de la pièce 2894.
25 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le témoin pourrait-il faire la
27 déclaration solennelle.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
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1 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
2 LE TÉMOIN: AZEM AGOVIC [Assermenté]
3 [Le témoin répond par l'interprète]
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir, Monsieur
5 le Témoin.
6 Madame Edgerton, vous avez la parole.
7 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vous remercie.
8 Interrogatoire principal par Mme Edgerton :
9 Q. [interprétation] Témoin, pourriez-vous, s'il vous plaît, nous donner
10 votre nom pour le compte rendu ?
11 R. Azem Agovic.
12 Q. Quel est votre métier, à l'heure actuelle, s'il vous plaît, Monsieur
13 Agovic ?
14 R. Je suis architecte.
15 Q. Merci.
16 Mme EDGERTON : [interprétation] J'aimerais, si possible, que l'on mette à
17 l'écran la pièce PT2894. Il s'agit d'une déclaration en date du 21 novembre
18 1995. Pourrions-nous l'avoir à l'écran devant le témoin ?
19 Q. Monsieur Agovic, pourriez-vous regarder, s'il vous plaît, ce document
20 qui est à l'écran et nous dire si, avant de venir déposer ici, vous avez eu
21 l'occasion de relire ce document ?
22 R. Oui.
23 Q. Pour ce qui est du document anglais, qui est à gauche de l'écran, est-
24 ce que vous reconnaissez votre signature apposée sur ce document ?
25 R. Oui.
26 Q. Vous souvenez-vous si ce document vous a été relu dans votre propre
27 langue avant que vous ne le signiez ?
28 R. Oui.
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1 Mme EDGERTON : [interprétation] Pourrions-nous maintenant passer au
2 document suivant, qui est le document 2895, PT 2895. Il s'agit d'une autre
3 déclaration en date du 21 avril 2006.
4 Q. Monsieur Agovic, avez-vous eu l'occasion de relire ce document aussi
5 avant de venir déposer ici ?
6 R. Oui.
7 Q. Pour ce qui est du document en version anglaise, qui se trouve à gauche
8 de l'écran, est-ce que vous reconnaissez votre signature ?
9 R. Oui.
10 Q. Vous souvenez-vous si ce document vous a été relu dans votre propre
11 langue avant que vous ne le signiez ?
12 R. Oui.
13 Q. Merci.
14 Mme EDGERTON : [interprétation] Si nous pouvions maintenant passer à un
15 dernier numéro PT, le 00739, à la page 10 de ce document, s'il vous plaît.
16 Si nous pouvions passer à la page 10 de ce document, s'il vous plaît, la
17 page à l'écran est notre page 10 dans le prétoire électronique.
18 Mme EDGERTON : [interprétation] Peut-être pourrions-nous descendre un peu,
19 enfin passer plutôt à la page précédente pour essayer de retrouver celle
20 qui nous intéresse. Afin de gagner du temps, je pense que nous pouvons nous
21 passer de ce document, ce n'était pas très important. Nous allons passer à
22 autre chose.
23 Q. Monsieur Agovic, laissons tomber le document qui est à l'écran devant
24 vous et parlons plutôt des déclarations que vous avez faites au bureau du
25 Procureur en 1995 et en 2006. Ces deux documents représentent-ils la
26 réflexion fidèle de ce qui vous est bel et bien arrivé le 3 mars 1995 ?
27 R. Oui.
28 Q. Avez-vous quoi que ce soit à y ajouter ou à y enlever ou avez-vous des
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1 corrections à apporter à ces deux documents ?
2 R. Non.
3 Mme EDGERTON : [interprétation] Messieurs les Juges, les pièces 2894 et
4 2895 pourraient-elles être versées au dossier ?
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
6 M. LE GREFFIER : [interprétation] La pièce 2894 va devenir la pièce P210,
7 et la pièce 2895 deviendra la pièce P211.
8 Mme EDGERTON : [interprétation]
9 Q. Je n'ai que quelques questions très brèves à vous poser pour ce qui est
10 des informations qui sont portées dans ces deux documents. Est-ce que vous
11 vous souvenez du temps qu'il faisait le jour où on vous a tiré dessus ?
12 R. Il y avait du soleil, il faisait beau.
13 Q. Quand vous étiez dans le tram, avez-vous entendu des activités
14 militaires de quel type que ce soit dans les environs alors que vous étiez
15 à bord de ce tram ?
16 R. Ce jour-là ainsi que pendant tout un mois précédent, il n'y avait pas
17 d'activités. On pouvait même entendre le gazouillement des oiseaux. C'était
18 calme.
19 Q. Dans votre déclaration, particulièrement la déclaration de 1995, vous
20 avez dit que le train, le tram dans lequel vous étiez allé vers Bascarsija,
21 en faisant face à l'arrière du tram. Pourriez-vous nous dire, à l'endroit
22 où vous étiez assis, quel était le quartier de Sarajevo qui était à votre
23 gauche ?
24 R. A ma gauche se trouvait le quartier de Grbavica. J'étais tourné vers
25 Ilidza.
26 Q. Quelle était la couleur de vos vêtements ce jour-là ?
27 R. C'est un veston que je portais, que je porte aujourd'hui. Donc, il y a
28 12 ans je portais le même veston -- plutôt une veste. Donc je portais la
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1 même veste qu'aujourd'hui.
2 Mme EDGERTON : [interprétation] Ceci terminera l'interrogatoire principal,
3 Messieurs les Juges. Je n'ai pas de questions supplémentaires.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.
5 Passons au contre-interrogatoire.
6 Contre-interrogatoire par M. Tapuskovic :
7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
8 Juges, Monsieur le Témoin, je suis le conseil de Défense de Dragomir
9 Milosevic. Je vais essayer de tirer au clair quelques points concernant vos
10 déclarations.
11 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, oui je suis prêt à aborder mon
12 contre-interrogatoire mais j'ai entendu une nouvelle information tout à
13 l'heure, à savoir que M. Agovic portait la même veste qu'aujourd'hui,
14 portait la même veste à l'époque où il a été blessé. Je n'étais pas au
15 courant de cela, je ne l'ai appris qu'aujourd'hui. Est-ce qu'il pourrait
16 nous montrer où la balle qui l'a touché est entrée et sortie ? Est-ce qu'on
17 peut voir les traces sur sa veste ? Je dois lui demander de nous expliquer
18 cela, parce que sur la veste, je suppose qu'on peut voir les deux trous par
19 l'impact d'entrée et de sortie parce qu'il a été blessé à la hanche.
20 Q. Est-ce que le témoin pourrait nous montrer ces deux trous sur sa
21 veste ?
22 R. Est-ce que je peux être debout pour vous montrer cela ? On peut voir
23 ici le trou par où la balle est entrée et on peut voir de l'autre côté le
24 trou de sortie de la balle. On peut voir ici par où la balle est entrée, le
25 trou par lequel la balle est entrée et elle est sortie de l'autre côté.
26 S'il est nécessaire, je peux vous montrer les trous d'entrée et de sortie
27 de la balle sur mon corps.
28 Q. La police qui a mené l'enquête --
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pense que ce n'est pas
2 nécessaire. Le témoin nous a bien montré où la balle est rentrée par sa
3 veste et où la balle est rentrée aussi dans son corps.
4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
5 Q. La police qui a mené l'enquête n'avait-elle pas retenu la veste en tant
6 que pièce à conviction pour montrer soit aux tribunaux ou aux juridictions
7 nationales ou à une autre juridiction ? Comment expliquez-vous le fait que
8 la police n'a pas utilisé cela ou n'a pas pris les photos des objets au
9 moment où vous avez fait votre déclaration parce que la police vous a posé
10 des questions. Est-ce que la police a pris les photos de votre veste à ce
11 moment-là ? Est-ce qu'il y a des photographies prises à l'époque au moment
12 où on a établi que vous avez été touché par la balle ?
13 R. La police n'a pas pris de photos ni de la veste ni de moi-même. J'ai
14 été blessé, je me trouvais aux soins intensifs à l'hôpital. La police n'a
15 pu faire cela.
16 Q. Je dois dire que je souhaiterais presque ne plus poser de questions.
17 Non, je n'ai plus de questions à poser.
18 [La Chambre de première instance se concerte]
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien, c'est à vous de voir.
20 Madame Edgerton, avez-vous des questions supplémentaires ?
21 M. LE JUGE MINDUA : Madame le Procureur, évidemment notre problème à nous,
22 la Chambre, c'est d'établir ou pas la réalité des blessures, donc du tir,
23 et l'origine, les responsables. J'admire votre façon concise de présenter
24 le cas. Mais malheureusement, je ne sais pas si mes collègues ont le
25 rapport médical en ce qui concerne la blessure du témoin.
26 Je ne sais pas pour l'instant, nous n'arrivons pas à avoir des
27 éléments pour établir, à part évidemment la présence physique du témoin, la
28 blessure, puis l'origine du tir qui se serait produit alors que l'intéressé
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1 était dans le tramway. Peut-être vous avez voulu gagner du temps, mais
2 c'est ce qui peut-être empêche aussi l'avocat de la Défense de continuer le
3 contre-interrogatoire.
4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges
5 --
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, laissez la parole
7 à Mme Edgerton d'abord.
8 Mme EDGERTON : [interprétation] Si cela peut vous aider pour savoir quelles
9 étaient les blessures de ce témoin, nous avons des rapports médicaux qui
10 sont disponibles. Ils sont disponibles. Mais dans ses deux déclarations, le
11 témoin a bien indiqué que le tir était rentré par la hanche gauche et avait
12 traversé son corps, alors qu'il était en train d'être assis dans le tram
13 avec son côté gauche en face de Grbavica. Donc, si cela peut vous faciliter
14 la tâche, nous vous donnerons les dossiers médicaux concernant ce témoin.
15 Ils sont disponibles.
16 [La Chambre de première instance se concerte]
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Avez-vous les rapports médicaux avec
18 vous, Madame Edgerton ?
19 Mme EDGERTON : [interprétation] Vous pouvez les avoir demain matin,
20 première heure.
21 Mme ISAILOVIC : Excusez-moi. Juste peut-être pour aider. Parce qu'on a eu
22 déjà deux témoins concernant cet incident, donc on a déjà introduit cette
23 preuve. Le rapport policier, oui, dans lequel on a la documentation
24 médicale aussi.
25 Mme EDGERTON : [interprétation] Je remercie ma consoeur,
26 Mme Isailovic. C'est tout à fait vrai. Merci beaucoup, Madame Isailovic. Si
27 cela peut vous aider, pour clarifier les choses, nous pourrions traiter
28 très concisément ce point demain matin et indiquer jusqu'à présent quels
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1 sont les documents qui ont été versés au dossier. Bien sûr, il y a aussi
2 référence aux déclarations de témoin qui ont été versées en tant que
3 pièces, et vous montrez quels sont les paragraphes, les passages qui
4 indiquent d'où vient le tir, où il traversait à Sarajevo, et cetera.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous êtes en train de nous dire
6 qu'il faudra voir à nouveau ce témoin demain matin.
7 Mme EDGERTON : [interprétation] De toute façon il sera là. Il ne peut pas
8 repartir chez lui avant demain après-midi. Malheureusement, nous siégeons
9 l'après-midi. J'avais pensé qu'il pourrait attraper le vol de l'après-midi,
10 mais cela ne va pas aller puisque nous siégeons l'après-midi. Voici ma
11 suggestion : nous allons retrouver tous ces documents d'ici demain avec mes
12 collègues. Nous allons en traiter rapidement, et nous allons voir avec mes
13 collègues s'il convient de faire revenir le témoin ou pas demain.
14 Je n'ai plus de questions à poser à ce témoin, étant donné tout ce
15 qui a été versé au dossier jusqu'à présent en l'espèce pour ce qui est de
16 cet incident-ci, à propos des origines des tirs et à propos de cet
17 incident.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est toutes les preuves que vous
19 allez nous présenter ?
20 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, avec le dossier médical dont a besoin
21 le Juge Mindua.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic.
23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
24 Juges, je n'ai aucune intention de calculer. J'ai été surpris de voir que
25 ma collègue n'a posé des questions que pendant deux minutes. C'est son
26 droit à elle. J'ai le droit de poser des questions pendant une heure. C'est
27 mon droit. L'interrogatoire principal a pris fin. Mon contre-
28 interrogatoire, j'en ai terminé avec ceci.
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1 Je poserai d'autres questions si la Chambre en décidait ainsi. La
2 Chambre applique toujours le Règlement, et ici, je ne veux pas faire perdre
3 le temps de la Chambre ni le mien. J'ai le droit à cela en tant que conseil
4 de la Défense.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Merci.
6 [La Chambre de première instance se concerte]
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons laisser partir le
8 témoin.
9 Monsieur Agovic, votre déposition est terminée. Nous vous remercions d'être
10 venu déposer ici dans ce Tribunal et vous pouvez rentrer chez vous.
11 [Le témoin se retire]
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Passons au témoin suivant.
13 M. WHITING : [interprétation] Nous allons maintenant entendre M. Bogdan
14 Vidovic.
15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
16 Juges.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Tapuskovic.
18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Si le témoin suivant dure également trois
19 minutes, je demanderai votre autorisation à partir pour aller chercher chez
20 moi pour prendre les documents nécessaires pour fins --
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous menons la procédure ici
22 conformément à l'article 92 bis et à l'article 92 ter. Donc la fin de ces
23 deux articles, c'est d'avoir un procès expéditif ou accélérer la procédure.
24 En aucun cas le témoignage au titre de 92 bis ou ter, donc le témoin ne
25 devrait pas être ici pour plus de
26 20 minutes.
27 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Est-ce que mon assistante pourrait aller
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1 dans la pièce réservée au conseil de la Défense pour m'apporter des
2 documents ?
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci.
5 M. WHITING : [interprétation] Si cela peut aider mon confrère, il ne s'agit
6 pas d'un témoin 92 ter. Je pense que mon interrogatoire va durer au moins
7 toute la journée, enfin jusqu'à la fin de la journée. Je ne pense pas que
8 le contre-interrogatoire de
9 Me Tapuskovic puisse commencer aujourd'hui.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne vous invite pas à faire
11 traîner les choses en longueur.
12 M. WHITING : [interprétation] Certes, certes, mais je me prépare, s'il vous
13 plaît.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le témoin peut-il faire sa
15 déclaration.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
17 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
18 LE TÉMOIN: BOGDAN VIDOVIC [Assermenté]
19 [Le témoin répond par l'interprète]
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir.
21 Maintenant, Monsieur Whiting, vous pouvez procéder à l'interrogatoire
22 principal.
23 Interrogatoire principal par M. Whiting :
24 Q. [interprétation] Bonjour, le Témoin. Pourriez-vous, s'il vous plaît,
25 nous donner votre nom pour le compte rendu.
26 R. Bonsoir. Je m'appelle Vidovic Bogdan.
27 Q. Pourrais-je demander, s'il vous plaît, à l'Huissier de baisser le
28 rétroprojecteur car il m'empêche de voir le témoin.
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1 Monsieur, quelle est votre date de naissance, s'il vous plaît.
2 R. Le 27 mai 1972.
3 Q. Avez-vous un emploi à l'heure actuelle ?
4 R. Je suis employé du MUP du canton de Sarajevo pour ce qui est de la
5 police scientifique et technique.
6 Q. Quand avez-vous rejoint les rangs de la police, s'il vous plaît ?
7 R. En décembre, en 1992.
8 Q. Quand vous avez rejoint la police, à cette époque-là, portait-elle ce
9 nom ou avait-elle un nom différent à l'époque ?
10 R. Cela s'appelait à l'époque le centre de service de Sécurité. Il
11 s'agissait du même département, à savoir de la police scientifique et
12 technique. Donc, c'était l'abréviation KDZ, c'est-à-dire le Département de
13 la police scientifique et technique.
14 Q. Quand vous avez rejoint les rangs de cette entité, pourriez-vous nous
15 dire quel grade vous aviez, quel poste plutôt ?
16 R. J'ai travaillé en tant que technicien de ce département de la police
17 scientifique.
18 Q. Quelle formation vous avez reçue ?
19 R. Nous avions une formation de six mois qui englobait la formation de
20 base, par exemple, pour ce qui est des empreintes digitales, ensuite le
21 lieu du crime, prise des photos sur le lieu du crime, ensuite certains
22 cours de biologie, de chimie, de balistique. Il s'agissait pour la plupart
23 des matières liées à la médecine légale.
24 Q. Après cette formation de six mois, avez-vous aussi été formé, si je
25 puis dire, sur le tas, pendant que vous travailliez ?
26 R. Lorsqu'on a commencé à aller sur les lieux du crime, au début, c'était
27 avec nos collègues plus expérimentés qu'on y allait, qui nous
28 transmettaient leurs connaissances plus larges pour ce qui est du repérage
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1 des traces sur le lieu du crime et sur - oui, sur le lieu du crime.
2 Q. Après avoir commencé à travailler - ce serait après votre formation, -
3 il s'agirait donc de l'année 1993, n'est-ce pas - vous avez pris vos
4 fonctions officielles et vous avez commencé vraiment à travailler en 1993 ?
5 R. Oui. C'était vers la fin du mois d'août 1993. C'est à cette époque-là
6 où j'ai commencé à travailler en tant que technicien de la police
7 scientifique, après avoir obtenu le diplôme à la fin de cette formation.
8 Q. Avez-vous eu l'occasion d'enquêter sur des incidents de pilonnage et
9 des incidents dus à des tireurs embusqués ?
10 R. Oui. Pendant cette période-là, quand j'ai commencé à travailler, à
11 savoir pendant la guerre en Bosnie, je suis allé sur le site de pilonnage
12 et les sites où il y avait des impacts de tireurs embusqués.
13 Q. Avez-vous continué à vivre et à travailler à Sarajevo dans la période
14 allant de 1992 jusqu'en 1995 ?
15 R. Oui. Pendant toute la guerre en Bosnie, j'étais à Sarajevo au même
16 poste. Et après la guerre, j'ai fait la même chose.
17 Q. Quand vous vous rendiez sur une scène où il y avait eu pilonnage ou
18 tirs embusqués, pourriez-vous dire exactement quelle était votre routine et
19 quelles étaient les opérations que vous deviez faire ?
20 R. Mes tâches concrètes sur le lieu de crime étaient de trouver des
21 indices sur lieu de l'infraction. Ensuite, la prise des photographies,
22 ensuite conservation des traces trouvées pour faire d'éventuelles
23 expertises, par la suite.
24 Q. Rédigiez-vous des rapports sur ces enquêtes sur site ?
25 R. Après chaque incident, on rédigeait un rapport et on prenait des
26 photos. On dessinait des croquis du site, si cela était possible.
27 Q. En ce qui concerne le volume, enfin le nombre d'incidents des tirs
28 embusqués et des pilonnages, pourriez-vous nous dire quelle était
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1 l'intensité de ces types d'incidents dans la période allant de 1992 à août
2 1994, par rapport à la période allant d'août 1994 à novembre 1995 ?
3 R. Il n'y a pas beaucoup de différence par rapport au niveau de pilonnage,
4 degré de pilonnage. Je pense que c'était au cours de 1995 que le pilonnage
5 était le plus intense, surtout en été 1995.
6 Bien que je ne sais pas maintenant. Bien que tout ce temps-là, le pilonnage
7 ait été intense, mais je pense qu'au printemps et à l'été 1995, le
8 pilonnage était le plus intense.
9 Q. Qu'en est-il des tireurs embusqués ? Y a-t-il toujours eu autant de
10 tirs embusqués pendant toute la période ou y a-t-il eu des périodes qui
11 étaient bien pires au niveau des tirs embusqués que d'autres ?
12 R. Pendant tout ce temps-là, il y avait des incidents liés aux tirs de
13 tireurs embusqués, et pour ce qui est de la période entre le mois d'août --
14 je m'excuse, au printemps et la fin du printemps 1995, je pense que cette
15 période-là était la plus dure pour les habitants de Sarajevo pour ce qui
16 est des tirs de tireurs embusqués.
17 Q. Où viviez-vous ? Où habitiez-vous, à Sarajevo ?
18 R. J'habitais et j'habite toujours au centre de la ville, dans la rue
19 Radiceva.
20 Q. En octobre 1992, est-ce que vous viviez là-bas avec votre père ?
21 R. Oui.
22 Q. Est-ce que quelque chose lui est arrivé en octobre 1992 ?
23 R. Oui. Le 6 octobre 1992, il s'est fait tué, c'était un obus qui a
24 provoqué cela.
25 Q. Où se trouvait-il lorsque ceci a eu lieu ?
26 R. A quelque 20 à 50 mètres par rapport à notre appartement.
27 Q. Que faisait-il à ce moment-là, au moment où il a été tué ?
28 R. Il rentrait chez lui parce qu'il est allé chercher de l'eau auprès
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1 d'une citerne qui était garée à proximité de notre appartement.
2 Q. Quel était son âge quand il est décédé ?
3 R. Il avait 56 ans.
4 Q. Pourriez-vous nous dire, approximativement, combien d'obus sont tombés
5 dans votre rue, sur votre rue au cours de la guerre ?
6 R. Seulement autour de mon immeuble, tout près de mon appartement, en
7 fait, une cinquantaine d'obus étaient tombés, peut-être plus, mais à peu
8 près une cinquantaine d'obus. C'est le nombre que j'ai réussi à donc
9 compter.
10 Q. Et ceci, c'était -- ou lorsque vous parlez de ces cinquante obus, est-
11 ce que ceci porte sur l'ensemble de la période de la guerre de 1992 à
12 1995 ?
13 R. Oui.
14 Q. Y avait-il une installation ou des immeubles ou des locaux militaires
15 près de votre rue ?
16 R. A la proximité de mon immeuble se trouvait le centre de service de
17 sécurité, où je travaillais. Aujourd'hui, c'est le MUP du canton de
18 Sarajevo.
19 Q. Y avait-il des périodes pendant lesquelles des membres de la police
20 combattaient dans des activités militaires, prenaient part à des combats
21 militaires ?
22 R. Cela arrivait au début de la guerre en 1992. Je ne me souviens pas de
23 l'époque où cela a cessé, je pense que c'était en 1993, en fait, jusqu'à la
24 formation de l'ABiH pendant la guerre. Après cela, ils ont fait ce qu'ils
25 ont fait, enfin jusqu'à la fin de la guerre, leurs tâches régulières.
26 Q. Après que cela se soit passé, vous dites que ceci s'est passé en 1993,
27 est-ce que les obus ont continué à tomber dans votre rue ?
28 R. Oui.
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1 Q. A votre connaissance, y a-t-il eu un quartier quelconque de Sarajevo
2 dans lequel les tirs de tireurs isolés ou embusqués constituaient un plus
3 grand problème que dans d'autres quartiers ?
4 R. On ne peut pas dire qu'il y avait un quartier particulier qui a été
5 exposé à ses tirs, excepté le quartier de Marindvor, qui était pendant tout
6 ce temps-là sans cesse sous les tirs de tireurs embusqués, et un carrefour
7 à Sarajevo, qui se trouve à 150 ou 200 mètres du quartier de Marindvor, et
8 le quartier de Marindvor était donc constamment sous les tirs de tireurs
9 embusqués.
10 Q. Savez-vous d'où provenaient ces coups de feu constants de tireurs
11 isolés ?
12 R. Cela provenait des positions qui, selon les informations que j'ai eues,
13 ont été tenues par l'armée de la Republika Srpska.
14 Q. Savez-vous où elles étaient situées, ces positions ?
15 R. Quant à Marindvor, ces positions se trouvaient dans la partie de la vie
16 qui s'appelle Grbavica.
17 Q. Avez-vous su ou appris précisément si certains quartiers ou endroits
18 comportaient des tireurs isolés dont on savait que des tireurs isolés
19 avaient tiré depuis Grbavica ?
20 R. Il y avait un bâtiment qui s'appelait Metalka, ensuite les tours
21 militaires, c'est-à-dire dans lesquelles habitaient les militaires à
22 Grbavica, et depuis les toits de ces tours, tiraient les tireurs isolés.
23 Q. Pourriez-vous dire aux membres de la Chambre de première instance
24 comment vous avez appris cela ? Comment avez-vous eu ces renseignements ?
25 Comment vous sont-ils parvenus pour ce qui est du lieu dont les tirs de
26 tireurs provenaient ?
27 R. C'était par le biais de témoins oculaires qui ont été victimes de ces
28 tirs et selon mon expérience personnelle, parce que je devais être
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1 extrêmement prudent en passant par ces endroits. On pouvait entendre le
2 bruit de ces tirs qui provenaient de la direction de ces tours.
3 Q. Ces renseignements, seriez-vous en mesure de nous dire si ce sont des
4 renseignements qui étaient connus uniquement de la police, comme vous-même,
5 ou est-ce que c'était dans le domaine commun ? Est-ce que c'était de
6 notoriété publique ?
7 R. C'était les choses dont tous les habitants de Sarajevo étaient au
8 courant.
9 Q. Y a-t-il eu des mesures qui aient été prises pour se protéger contre
10 les tirs de tireurs isolés ?
11 R. Oui. Sur ces carrefours, on posait des conteneurs en métal, de grands
12 conteneurs en métal, qui étaient censés protéger les passants, parce qu'il
13 n'y avait pas d'autres chemins à emprunter pour se déplacer d'une partie de
14 la ville jusqu'à une autre partie.
15 Q. Ces conteneurs faisaient-ils face aux positions serbes ou aux positions
16 de l'armée de Bosnie ?
17 R. Ces conteneurs se trouvaient au carrefour. Ils protégeaient les civils
18 qui passaient par là et ils faisaient face du côté opposition aux Serbes.
19 Q. Est-ce que c'était efficace ?
20 R. Parfois oui, parfois non. Il arrivait parfois qu'il y avait des coups
21 de feu, et que des balles transperçaient ces conteneurs et touchaient une
22 personne. Parfois, ils tiraient au-dessus de ces conteneurs en métal et les
23 passants, les piétons étaient plus ou moins en sûreté en se déplaçant
24 derrière ces conteneurs.
25 Q. Je voudrais vous poser des questions concernant vos enquêtes ou
26 investigations sur des cas de tireurs isolés. Seriez-vous en mesure de nous
27 dire approximativement combien d'affaires de tirs isolés vous avez eu à
28 examiner ? Vous avez fait des investigations au cours de la guerre. Est-ce
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1 que c'est quelque chose que vous pouvez nous dire ?
2 R. Il y avait un certain nombre de ces cas, mais je ne peux pas vous dire
3 le nombre exact. Il y en avait peut-être une vingtaine de cas sur lesquels
4 j'ai enquêté, compte tenu du fait qu'il y avait d'autres collègues qui ont
5 travaillé eux aussi sur les mêmes cas.
6 Q. Combien de ces cas se sont-ils produits après le mois d'août 1994
7 approximativement ?
8 R. Après le mois d'août 1994, je ne saurais vous dire le nombre exact.
9 Mais je pense que j'ai travaillé sur cinq -- entre cinq et dix cas, mais je
10 n'en suis pas sûr.
11 Q. Au cours de la période qui va d'août 1994 jusqu'à novembre 1995, avez-
12 vous eu l'occasion d'enquêter sur des questions de tireurs isolés tirant
13 sur des trams, des tramways ?
14 R. Oui. Oui, j'ai travaillé également sur ces enquêtes.
15 Q. A cette occasion, est-ce que vous avez été en mesure de déterminer
16 quelle était la direction de provenance des tirs ?
17 R. Si le tram était sur les rails au moment de l'incident, on pouvait le
18 déterminer sur place. Si le tram quittait le site où il y a eu l'impact,
19 sur la base de la direction de son déplacement et sur les dépositions de
20 témoins, on déterminait la direction d'où provenait le tir. Dans le plupart
21 des cas, on tirait sur les trams de la direction de Grbavica et du
22 cimetière juif qui se trouve au-dessus du quartier de Grbavica.
23 Q. Avez-vous eu l'occasion d'enquêter sur un incident de tir isolé lequel
24 vous avez pu déterminer que la provenance du tir était depuis des forces
25 armées de Bosnie ?
26 R. Non, jamais.
27 Q. Avez-vous eu l'occasion -- je repose la question en ce qui concerne les
28 tirs d'obus, même si je vais poser d'autres questions concernant les tirs
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1 d'obus. Est-ce que vous n'avez jamais eu l'occasion lorsque vous faisiez
2 vos enquêtes d'enquêter sur un incident concernant un tir d'obus dans
3 lequel vous avez pu déterminer que la direction de provenance du tir était
4 des forces armées de Bosnie ?
5 R. Non.
6 Q. Passons maintenant aux incidents de tirs d'obus.
7 Seriez-vous en mesure d'estimer en ce qui concerne la période allant d'août
8 1994 à novembre 1995 combien d'incidents de tirs d'obus ont fait l'objet
9 d'enquêtes de votre part ?
10 R. Beaucoup. Il y en avait beaucoup. Je ne peux pas vous donner le
11 chiffre, même approximatif. Parfois en une journée on avait entre six et
12 sept enquêtes pour ce qui est des incidents de pilonnage.
13 Q. Y a-t-il eu un mois, un mois particulier pendant lequel il y a eu
14 davantage d'enquêtes concernant des tirs d'obus plutôt que d'autres,
15 d'après vos souvenirs ?
16 R. Je pense que pendant l'été 1995, il y avait le plus d'enquêtes sur des
17 incidents de pilonnage.
18 Q. Est-ce que c'était à ces occasions-là que vous aviez parfois six ou
19 sept enquêtes à faire sur les lieux ? Est-ce que c'était aussi au cours de
20 l'été 1995 ?
21 R. Oui. C'était pendant cette période-là, mais même avant on pouvait avoir
22 le même nombre d'enquêtes.
23 Q. Lorsque vous nous parlez de l'été 1995, seriez-vous en mesure d'être
24 plus précis et nous dire de quel mois il s'agissait, à quel mois vous
25 pensez ?
26 R. Les mois de juillet et d'août.
27 Q. Maintenant, en ce qui concerne les incidents de tirs d'obus et de tirs
28 de tireurs isolés, pourriez-vous nous dire encore une fois, en restant
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1 concentré sur la période d'août 1994 à novembre 1995, pourriez-vous nous
2 dire approximativement quel était le pourcentage des victimes ?
3 R. Je ne peux pas parler de pourcentage pour ce qui est de ces incidents,
4 mais il y avait beaucoup de tels incidents.
5 Q. Seriez-vous en mesure de dire que c'était dans la plupart des cas ou
6 dans certains des cas ? Est-ce que vous pourriez nous donner une idée ?
7 R. Je ne sais pas. On peut dire qu'il y avait 50 % et 50 %.
8 Q. D'après vos souvenirs, y a-t-il jamais eu une circonstance dans
9 laquelle la victime d'un incident de tir isolé ou de tir d'obus sur lequel
10 vous avez enquêté portait sur un soldat en uniforme ? Vous rappelez-vous
11 quelque chose à ce sujet ?
12 R. Peut-être y avait-il des victimes qui portaient des uniformes, mais
13 savoir s'ils étaient civils ou militaires à ce moment-là, je ne sais pas.
14 Mais dans la plupart des cas, les victimes étaient des civils. Il y avait
15 peut-être des personnes qui, par hasard, se trouvaient au moment du
16 pilonnage dans la rue et qui portaient l'uniforme. Mais à l'époque, les
17 gens se débrouillaient pour ce qui est des vêtements, ils portaient
18 n'importe quoi.
19 Q. Lorsque vous dites que "dans la plupart des cas les victimes étaient
20 des civils", est-ce que dans la plupart de ces cas, les civils en question
21 portaient des vêtements civils ?
22 R. Oui.
23 Q. Avez-vous jamais enquêté sur le pilonnage par obus d'un emplacement
24 militaire ?
25 R. Non.
26 Q. Est-ce que votre équipe, l'équipe qui enquêtait avec vous, s'est-elle
27 jamais trouvée sous le feu alors que vous procédiez à une enquête ?
28 R. A plusieurs reprises, oui, mais dans la plupart des cas, ils tiraient
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1 de tous les sens et on n'était jamais sûr au moment de l'enquête si les
2 tirs arrêteraient ou pas.
3 Q. Est-ce que vous vous rappelez des circonstances particulières dans
4 lesquelles vous avez été pris pour cible au cours d'une enquête?
5 R. Oui. C'était quand un obus est tombé sur l'hôtel Holiday Inn. Nous
6 sommes montés au toit du restaurant National, qui fait partie de l'hôtel
7 Holiday Inn, pour collecter des indices qu'on pouvait trouver sur place, et
8 à ce moment-là, le tireur embusqué nous a pris pour cibles, mais
9 heureusement personne n'a été touché.
10 Q. Quand ceci s'est-il passé ?
11 R. C'était, je pense, en automne 1994.
12 Q. Ma toute dernière question avant que nous ne levions la séance pour la
13 soirée. Est-ce que vous avez été en mesure de dire d'où venait le tir
14 isolé ?
15 R. Oui, ils nous tiraient dessus de la partie de la ville qui s'appelle
16 Grbavica.
17 Q. Je vous remercie.
18 M. WHITING : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que peut-être
19 que c'est le moment qui convient pour lever la séance.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, c'est bien le cas. Nous allons
21 lever la séance jusqu'à demain après-midi 14 heures 15.
22 La séance est levée.
23 --- L'audience est levée à 19 heures 00 et reprendra le mercredi 14 février
24 2007, à 14 heures 15.
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