Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 10 juillet 2007

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Sachdeva, vous pouvez

7 continuer.

8 M. SACHDEVA : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je vous

9 remercie.

10 LE TÉMOIN : BORISLAV KOVACEVIC [Reprise]

11 [Le témoin répond par l'interprète]

12 Contre-interrogatoire par M. Sachdeva : [Suite]

13 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Kovacevic. Je suppose que vous vous

14 êtes reposé pendant la nuit ?

15 R. Bonjour. Oui.

16 Q. Avant de continuer à vous poser des questions, je voudrais confirmer

17 encore une fois qu'en novembre 1994, vous êtes passé de la Brigade d'Ilijas

18 à la Brigade de Romanija; est-ce vrai ?

19 R. Oui.

20 Q. Pourquoi êtes-vous passé d'une brigade à l'autre ?

21 R. Toute ma compagnie est passée à la 1re Brigade de Romanija au sein du

22 1er Bataillon. C'est le commandement qui en a décidé. La zone de combat

23 était restée la même.

24 Q. Je suppose que vous êtes resté au sein de cette brigade jusqu'à la fin

25 du conflit ?

26 R. Oui.

27 Q. Si j'ai bien compris, la zone de responsabilité de la Brigade de

28 Romanija était étendue approximativement au sud-est de Sarajevo; en

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1 d'autres termes, vers Pale. Est-ce vrai ?

2 R. Le 1er Bataillon de la 1re Brigade de Romanija avec la Brigade d'Ilijas

3 avait dans sa zone de responsabilité le plateau de Nisici.

4 Q. Très bien. C'est ce que je voulais vous demander, parce qu'hier vous

5 avez dit, vous avez témoigné que vous étiez -- en fait, vous avez parlé des

6 activités de combat le 15 juin 1995 à Nisici. J'ai compris que la zone de

7 responsabilité de la Brigade d'Ilijas était différente par rapport à la

8 zone de responsabilité de la Brigade de Romanija. Donc, je suppose que

9 lorsque vous avez témoigné de l'attaque à Nisici le 15 juin 1995, que vous

10 étiez là-bas, n'est-ce pas ?

11 R. Oui, c'est vrai.

12 Q. Mais vous étiez sous le commandement de M. Lizdek, Vlado Lizdek, qui

13 était commandant de la 1re Brigade de Romanija; est-ce vrai ?

14 R. Oui. Vlado Lizdek était le commandant de la brigade, et le commandant

15 du 1er Bataillon était Dragan Tupajic.

16 Q. Je vous remercie pour cette précision.

17 Maintenant, hier vous avez dit à la Chambre que Dragan Josipovic,

18 commandant de la Brigade d'Ilijas, venait dans les tranchées. Vous

19 souvenez-vous d'avoir dit cela à la Chambre ?

20 R. Tous les commandants venaient sur les positions dans les tranchées pour

21 voir les combattants.

22 Q. Je suppose qu'il vous a parlé pour voir quelle était la situation, le

23 moral des soldats, la quantité de munitions à la disposition des

24 combattants et également pour voir quelles étaient les activités de combat

25 qui ont eu lieu. Est-ce qu'on peut être d'accord pour dire cela ?

26 R. Oui.

27 Q. Hier, vous avez également dit à la Chambre, lorsque je vous ai posé des

28 questions sur les cibles que le commandement a définies, vous avez dit à la

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1 Chambre que les commandants de brigades et de bataillons définissaient les

2 cibles et les transmettaient à leurs subordonnés. Vous souvenez-vous

3 d'avoir dit cela à la Chambre hier ?

4 R. Je ne sais pas si j'ai dit cela de cette façon.

5 Q. Bien. Il est vrai, n'est-ce pas, que dans le cadre de la brigade et sur

6 les échelons inférieurs dans la chaîne de commandement, que les cibles

7 diverses ont été identifiées en tant que cibles des activités de combat et

8 que ces cibles ont été transmises aux personnes qui devaient viser ces

9 cibles ? Seriez-vous d'accord pour dire cela ?

10 R. Hier, j'ai dit, et je répète aujourd'hui, que nous ne procédions pas

11 aux attaques. Ce que nous faisions, c'était de nous défendre uniquement.

12 Q. Je ne parle pas, lorsque je pose cette question, je ne vous pose pas

13 cette question pour savoir s'il s'agissait d'une attaque ou d'une option

14 défensive. Vous seriez d'accord pour dire que même dans des actions

15 défensives, des cibles auraient été déterminées, identifiées, n'est-ce pas

16 ?

17 R. Oui.

18 Q. Hier, j'ai commencé à parler de la ville de Breza. Vous souvenez-vous

19 de cela ?

20 R. Oui.

21 Q. J'ai compris qu'à Breza, il y avait un marché qui fonctionnait pendant

22 le conflit. C'était un marché ouvert. Est-ce que vous en savez quelque

23 chose ?

24 R. Je ne sais pas si le marché était ouvert. Avant la guerre, il y avait

25 un marché, mais durant la guerre, cela a été contrôlé par l'ABiH. Je ne me

26 suis pas rendu là-bas pendant la guerre; je ne peux pas vous dire si le

27 marché fonctionnait ou pas.

28 Q. Est-ce que vous savez qu'un cimetière à Zupca existait ? Est-ce que

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1 vous en savez quelque chose ? J'ai compris que cela se trouvait dans la

2 zone de responsabilité de l'armée bosniaque, mais indépendamment de cela,

3 pouvez-vous me dire si vous savez que ce cimetière existait ?

4 R. J'ai entendu parler de l'endroit qui s'appelait Zupca, mais je ne me

5 suis pas rendu là-bas.

6 Q. Pendant que vous étiez membre de la Brigade d'Ilijas, est-ce que Dragan

7 Josipovic, commandant de la brigade, par le biais de ses commandants de

8 bataillon et votre commandant de bataillon, vous a donné l'ordre d'ouvrir

9 le feu sur le marché à Breza et sur un cortège allant dans la direction du

10 cimetière de Zupca ?

11 R. Non, jamais. C'est impossible.

12 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce qu'on peut

13 passer à huis clos partiel ?

14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Témoin, vous avez dit

15 que c'était impossible, qu'il était impossible qu'un tel ordre soit donné,

16 ce type d'ordre. Voudriez-vous expliquer cela, s'il vous plaît ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y a aucune logique dans le fait que

18 quelqu'un aurait tiré sur un cortège funèbre. Je n'y crois pas. Aucun homme

19 n'aurait pu ordonner cela.

20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est quelque chose que vous ne

21 pouvez pas comprendre, ou bien vous comprenez, mais vous ne pouvez pas

22 imaginer ou concevoir cela. Est-ce que c'est ce que vous avez voulu dire ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'est impossible.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons passer à huis clos

25 partiel.

26 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

27 partiel.

28 [Audience à huis clos partiel]

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12 [Audience publique]

13 M. SACHDEVA : [interprétation]

14 Q. Monsieur le Témoin, je suis désolé pour ce retard. Il arrive que des

15 questions de procédure se posent et nous devons en débattre la teneur.

16 Maintenant nous allons reprendre ce que vous disiez il y a quelques

17 instants demain.

18 Mais d'abord, je voudrais vous demander si vous seriez d'accord avec

19 moi pour dire que la taille de la Brigade d'Ilijas était dans les 1 500 à 1

20 700 combattants.

21 R. J'ignore le chiffre exact, mais c'est à peu près cela, effectivement.

22 Q. Lorsqu'en novembre 1994 vous avez rejoint les rangs de la Brigade de

23 Romanija, vous avez été soldat d'infanterie dans les tranchées, n'est-ce

24 pas ?

25 R. Oui.

26 Q. Et vous aviez des fusils automatiques et semi-automatiques à votre

27 disposition ?

28 R. Oui.

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1 Q. Suis-je en droit de dire que la Brigade de Romanija était composée du

2 Bataillon Jahorina ?

3 R. Je crois que oui. C'était le 1er Bataillon de la 1re Brigade de

4 Romanija qui se trouvait sur le plateau de Nisici.

5 Q. Les Bataillons de Podgara, Sokolac et Hresa faisaient partie de la

6 Brigade de Romanija ?

7 R. J'ignore exactement les noms, mais oui, j'ai l'impression qu'ils

8 faisaient tous partie de la Brigade de Romanija.

9 Q. Lorsque vous avez rejoint les rangs de la Brigade de Romanija en 1994,

10 est-ce que vous étiez encore cantonné à Nisici ou bien est-ce que vous vous

11 trouviez dans la partie sud-est de Sarajevo ?

12 R. Non, pendant toute la durée du conflit, j'étais déployé sur le plateau

13 de Nisici.

14 Q. Alors que vous avez changé de brigade, vous ne vous êtes jamais

15 vraiment déplacé physiquement ?

16 R. Oui, puisque j'ai dit tout à l'heure que le 1er Bataillon de la 1re

17 Brigade de Romanija avec la Brigade d'Ilijas tenait le plateau de Nisici.

18 Q. S'agissant des deux brigades, la Brigade d'Ilijas et la Brigade de

19 Romanija, nous avons parlé d'un certain nombre de bataillons. Si je ne

20 m'abuse, il y avait également, au sein des deux brigades, des unités de la

21 police militaire ?

22 R. En fait, non. Je n'ai aucune connaissance de la police militaire.

23 Q. Vous ne savez pas si les brigades avaient des sections de police

24 militaire au sein de ces formations ?

25 R. Peut-être, oui, effectivement, des membres de la police militaire qui

26 faisaient partie d'une section, mais nous n'avions pas suffisamment de

27 soldats pour que certains fassent partie de la police militaire. Tout le

28 monde était dans la même tranchée.

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1 Q. Très bien. Donc, j'imagine qu'au sein de la brigade d'Ilijas et de la

2 Brigade de Romanija, il y avait des sections de police militaire, non pas

3 des sections d'une taille de bataillon, mais il y avait une formation ?

4 R. Il y avait une partie de la police militaire qui devait s'occuper de

5 l'ordre public, mais je ne sais pas combien il y avait de personnes.

6 Q. Et bien, laissons de côté ces derniers. Les personnes qui étaient

7 chargées des activités relatives à la police militaire avaient-elles pour

8 mission de mener des enquêtes concernant les désertions et les crimes

9 commis par les soldats ?

10 R. J'imagine que oui.

11 Q. Et donc, par exemple, le commandant de brigade Dragan Josipovic ou

12 Vlado Lizdek, est-ce que si ces derniers prenaient connaissance des crimes

13 commis par les soldats ou des désertions par les soldats, ces derniers

14 devaient donc informer la police militaire pour mener des enquêtes, n'est-

15 ce pas ?

16 R. Oui.

17 Q. Lorsque je vous parle de crimes, il s'agit notamment de toute personne

18 ou soldat qui aurait pu connaître des crimes de guerre ou qui aurait pu

19 cibler des civils, n'est-ce pas ?

20 R. Oui.

21 Q. Puis-je conclure de votre réponse que vous êtes au courant d'enquêtes

22 qui ont été effectuées concernant des soldats qui ont commis des crimes de

23 guerre et qui auraient pu cibler des civils ? C'est bien cela qui s'est

24 produit ?

25 R. Non.

26 Q. Vous nous dites que ça ne s'est pas produit. Vous n'êtes pas au courant

27 d'enquêtes de ce type ?

28 R. Je sais que ça ne s'est pas produit dans la zone de responsabilité qui

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1 était la nôtre, mais je ne sais pas si ça s'est produit éventuellement à

2 d'autres endroits.

3 Q. Donc, lorsque vous dites que vous ne savez pas que ça s'est

4 éventuellement produit dans d'autres endroits, est-ce que je peux vous

5 suggérer que dans des zones où vous n'étiez pas présent dans votre brigade,

6 mais que dans des zones où vous n'étiez pas présent, il est possible que

7 des soldats aient ciblé des civils ou aient pu commettre des crimes de

8 guerre ?

9 R. Non, je n'ai jamais entendu parler de ça. Je ne pense pas.

10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, le témoin a dit de

11 manière précise que là où il se trouvait, rien de tel ne n'est pas produit.

12 Il a répondu, et M. Sachdeva a ensuite répété cette question. Si la réponse

13 est catégorique, pourquoi insister sur la même question ?

14 M. SACHDEVA : [interprétation] Avec votre permission, je n'ai pas répété la

15 question. Le témoin m'a dit que dans sa zone de responsabilité, il n'a pas

16 entendu parler de cela. Je lui ai demandé de d'autres zones sous la

17 responsabilité de la brigade, et il a répondu ensuite à cette question.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Tapuskovic. Ce n'était

19 pas une véritable répétition de la question.

20 Alors, maintenant, il faut avancer, parce que nous avons quand même

21 passé pas mal de temps à des questions de procédure et je n'estime pas que

22 ceci constitue une question fondamentale.

23 Monsieur Sachdeva, vous verrez, je vous prie, à ne pas répéter vos

24 questions. Ne vous acharnez pas, en d'autres termes, n'insistez pas sur le

25 même point.

26 Et quant à vous, Monsieur Tapuskovic, veuillez ne pas vous lever à

27 tout instant.

28 M. SACHDEVA : [interprétation] Oui. Bien sûr, Monsieur le Président. Alors,

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1 j'avance.

2 Q. Monsieur le Témoin, vous aviez dit hier dans votre déposition qu'il y

3 avait des observateurs au sein de la Brigade d'Ilijas. Vous souvenez-vous

4 avoir dit cela ?

5 R. Tout au long des lignes de séparation, nous avions des observateurs,

6 des gens qui assuraient la surveillance. C'est tout à fait normal.

7 Q. Mais ça s'applique également à la Brigade de Romanija ?

8 R. En effet.

9 Q. Alors, disons ceci. Ça ressemblait un petit peu à une espèce d'équipes

10 de reconnaissance. C'est un petit peu de cela qu'il s'agit, en quelque

11 sorte ?

12 R. Il s'agissait donc d'observateurs dans les tranchées. S'il y avait

13 trois hommes dans la tranchée, un de ceux-ci était constamment en train de

14 surveiller, d'observer ce qui se passait, au cas où il fallait faire quoi

15 que ce soit.

16 Q. Donc, cette personne qui surveillait constamment ce qui se passait, et

17 bien, si cette personne voyait un char ou le mouvement de soldats sur le

18 territoire ennemi, cette information serait ensuite communiquée au

19 commandant de la section du bataillon; c'est cela, n'est-ce pas ?

20 R. Oui, en effet.

21 Q. En ce qui concerne la Brigade Romanija et donc le temps que vous y avez

22 passé à partir de novembre 1994, je vous ai dit que le commandant était M.

23 Lizdek, et vous l'avez confirmé. Il est resté commandant jusqu'à la fin de

24 la guerre, n'est-ce pas ?

25 R. Oui.

26 Q. Dans le bataillon de la Brigade Romanija, je suppose qu'il y avait des

27 compagnies également dans ce bataillon ?

28 R. Oui, un bataillon composé de compagnies.

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1 Q. Les membres de cette compagnie tels que vous, d'ailleurs, recevaient

2 des fusils semi-automatiques ou automatiques, n'est-ce pas ?

3 R. Oui.

4 Q. On peut dire également que dans ces compagnies, il y avait deux ou

5 trois personnes qui recevaient des fusils à lunette, n'est-ce pas ?

6 R. Non, nous n'avions pas de tireurs d'élite dans ces actions de combat

7 sous la zone de responsabilité qui était la mienne.

8 Q. Il y avait des personnes qui portaient des fusils qui pouvaient tirer

9 des balles de 7,09, n'est-ce pas, ou 7,62 ?

10 R. Toutes les armes automatiques ou semi-automatiques que nous utilisions

11 utilisaient des munitions de 7,62.

12 Q. Vous aviez dit -- enfin, plus exactement, je vous demandais ceci : si,

13 lorsque vous étiez dans les tranchées, que ce soit à la Brigade Ilijas ou

14 Romanija, lorsque vous voyiez un soldat en territoire ennemi, vous tiriez

15 sur ce soldat, n'est-ce pas ?

16 R. Pas avant qu'il ne nous ait tiré dessus avant.

17 Q. Il y avait effectivement un conflit entre votre armée et l'ABiH, n'est-

18 ce pas ?

19 R. Oui, bien sûr, je sais ça.

20 Q. Vous savez aussi que l'ABiH et RSK, s'ils pouvaient prendre un soldat

21 de l'armée ennemie, cela aurait été effectivement tout de même un avantage

22 pour eux.

23 R. Oui, oui, lors d'actions d'offensive.

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Sachdeva, je voudrais

25 informer la Défense que l'Accusation vient de fournir le compte rendu non

26 expurgé de la déposition du Témoin AD et je vois, d'ailleurs, Mme Isailovic

27 indiquer qu'elle l'a bien reçu. Elle opine, n'est-ce pas ?

28 Madame Isailovic, est-ce que vous pouvez nous le dire oralement ?

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1 Mme ISAILOVIC : Monsieur le Président, on a reçu la copie du compte rendu,

2 donc je vais vérifier si c'est vraiment cela.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

4 Alors, poursuivons.

5 M. SACHDEVA : [interprétation]

6 Q. Monsieur le Témoin, vous vous rappelez de ma dernière question ?

7 R. Oui.

8 Q. Pouvez-vous répéter votre réponse ? Vous avez dit oui, n'est-ce pas ?

9 R. Oui, oui, je me souviens de votre question.

10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle était votre réponse à la

11 question ? L'interprète n'avait pas entendu votre réponse à la question,

12 Monsieur le Témoin.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit qu'il y avait -- dans le cadre

14 d'actions offensives, nous nous en prenions effectivement aux forces

15 ennemies.

16 M. SACHDEVA : [interprétation]

17 Q. Monsieur le Témoin, cela veut dire abattre un membre de l'armée

18 opposée, et c'est toujours un avantage pour votre armée. Vous bien d'accord

19 avec cette idée ?

20 R. Oui.

21 Q. Si je vous suis bien, ce que vous dites à la Cour, c'est que si vous

22 voyez un membre de l'ABiH et que vous le voyez par vos lunettes, que vous

23 ne prendriez pas votre fusil et vous ne viseriez pas cette personne ? C'est

24 cela que vous êtes en train de nous dire ?

25 R. Oui, vous m'avez posé la question sur les observateurs. Et bien, je

26 peux vous confirmer que nous nous voyions tous les jours. Ils nous voyaient

27 et nous les voyions. Si ça se présentait comme vous l'avez dit, et bien on

28 n'arrêterait pas de se tirer dessus.

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1 Q. Je ne crois pas que cela répond à ma question.

2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Tapuskovic.

4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je dois réagir et je devrai réagir à

5 chaque fois qu'une question est répétée. Il a clairement répondu il y a

6 quelques instants qu'ils ne tiraient pas sauf après le début d'une action

7 offensive; en d'autres termes, avant que l'autre côté ne tire. Sans ça, il

8 disait qu'autrement ils seraient en train de se tirer dessus tout le temps,

9 s'ils tiraient à chaque fois qu'ils se voyaient. Parce qu'ils se voyaient à

10 bien des occasions au cours de la journée. Il a déjà eu l'occasion de

11 l'expliquer.

12 M. SACHDEVA : [interprétation] Ecoutez, d'abord, je n'ai pas vraiment

13 commencé ma question, donc je pense que Me Tapuskovic s'est un peu levé

14 trop tôt. Je pense que c'est une forme tout à fait acceptable de contre-

15 interrogatoire. Le témoin répond à une question, j'essaie d'aller un petit

16 peu plus loin, j'essaie de voir aussi quel est son niveau de crédibilité.

17 Si vous estimez qu'il a répondu, très bien, j'avancerai, mais il ne me

18 semble pas qu'il s'agisse d'une manière incorrecte de procéder de ma part.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Tapuskovic, dans un contre-

20 interrogatoire, et c'est normal d'aller un petit peu plus loin, de tester

21 le témoin. La même question peut être posée de manière différente, la même

22 question peut être abordée sous différents angles. Je suis d'accord

23 cependant que si une question a été posée et que réponse a été fournie de

24 manière non équivoque, il ne faut pas reposer la même question.

25 Alors, avançons, s'il vous plaît.

26 M. SACHDEVA : [interprétation] Bien.

27 Q. Alors, je vais essayer de comprendre votre réponse, Monsieur le Témoin.

28 Vous nous dites, ce n'est pas une répétition, j'essaie de juste bien

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1 comprendre ce que vous nous dites. Vous dites que même lorsque vous aviez

2 vu une personne là-bas, sauf si cette personne vous tirait dessus, vous ne

3 lui tiriez pas dessus. C'est cela que vous êtes en train de nous dire,

4 n'est-ce pas ?

5 R. Oui, précisément.

6 Q. Avez-vous jamais tiré sur des hommes en âge d'armes âgés entre 20 et 60

7 ans ?

8 R. Oui, au cours d'une offensive. Je ne sais pas quel âge ils auraient pu

9 avoir. Oui, peut-être entre 20 et 60 ans. Oui, effectivement, il y a eu des

10 coups de feu, bien sûr.

11 Q. Donc, vous dites que vous avez pu tirer sur des hommes âgés entre 20 et

12 60 ans ?

13 R. J'ai dit oui, dans le cas d'une offensive, que j'aurais pu le faire et

14 je l'ai fait.

15 Q. Indépendamment qu'ils portent des vêtements civils ou militaires,

16 n'est-ce pas ?

17 R. Il n'y avait pas de civils, je l'ai dit hier, dans cette zone d'action.

18 Nous étions dans des postes de défensive, nous défendions nos positions.

19 Nous n'avions pas l'intention d'avancer, donc si on nous tirait dessus, si

20 on était attaqués, et bien nous répondions.

21 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je maintenant

22 passer à des questions qui relèvent de la question du Témoin AD -- non,

23 excusez-moi, vous avez dit que c'était pour demain, n'est-ce pas, c'est ça

24 ?

25 Q. Monsieur le Témoin, lorsque vous étiez dans les Brigades Ilijas et

26 Romanija, dans cette affaire nous avons entendu beaucoup d'éléments de

27 preuve qui indiquent un surplus d'obusiers et de mortiers, d'armes

28 d'infanterie, et que la RSK avait également déployé des bombes aériennes

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1 modifiées. Avez-vous entendu parler de cela ?

2 R. Non, j'en n'ai jamais entendu parler.

3 Q. Vous avez entendu parler de l'existence de ces bombes aériennes

4 modifiées ?

5 R. Jamais.

6 Q. Vous savez ce qu'est une bombe aérienne modifiée, n'est-ce pas ?

7 R. Non.

8 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, un petit moment

9 d'aparté, si vous le voulez bien.

10 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Tapuskovic.

12 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Pour profiter de cette petite pause,

13 Monsieur le Président Robinson, je pense qu'il y a eu une discussion avant,

14 mais étant donné le temps imparti à ce témoin et le temps consacré par

15 l'Accusation à ce témoin, il me semble que son temps de parole est épuisé.

16 Donc, j'aimerais savoir si le Procureur aura l'occasion de continuer à

17 interroger ce témoin.

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous êtes en train de

19 dire que je devrais mettre un terme au contre-interrogatoire de

20 l'Accusation ? C'est ça que vous dites ?

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Non, je ne le demande pas. Je ne dis pas

22 cela. Je demande simplement que l'on fasse attention également au temps

23 consacré. Alors, peu importe que j'aie passé moins de temps avec ce témoin

24 que je n'aurais le droit, qu'on en avait le droit, et le Procureur en a le

25 droit également, mais je m'attends à ce que vous preniez une décision sur

26 la question.

27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Sachdeva, il est vrai qu'il

28 faut que nous regardions l'horloge. Je le fais. Il y a une quinzaine de

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1 minutes, on m'a indiqué qu'il vous restait cinq minutes, mais ça n'incluait

2 pas évidemment toutes les questions procédurales.

3 Alors, de combien de temps avez-vous encore besoin ?

4 M. SACHDEVA : [interprétation] Je crois que je vais encore poser une

5 question ou deux, et puis il faudra encore que je pose des questions

6 évidemment concernant la déposition du Témoin AD.

7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, tout à fait.

8 Poursuivez.

9 M. SACHDEVA : [interprétation]

10 Q. Monsieur le Témoin, alors encore une fois, pouvez-vous confirmer que

11 vous avez passé toute la guerre à Nisici, n'est-ce pas ?

12 R. Oui.

13 Q. Comme nous l'avons dit tout à l'heure et hier, Nisici, c'est à une

14 vingtaine de kilomètres du centre de Sarajevo, n'est-ce pas ?

15 R. Oui.

16 Q. Pendant que vous étiez dans les Brigades de Romanija et d'Ilijas, vous

17 ne saviez pas, vous ne pouviez pas savoir quels étaient les mouvements

18 militaires dans toutes les parties de la brigade parce que vous, vous étiez

19 limité ou vous étiez posté uniquement à Nisici, n'est-ce pas ?

20 R. Oui, oui, j'étais sur le plateau de Nisici.

21 Q. Donc, lorsque vous avez parlé dans votre déposition, votre déposition

22 principale, en réponse à M. Tapuskovic, du retrait des armes, vous ne

23 saviez pas l'ampleur de ce retrait des armes dans la zone complète sous la

24 responsabilité de la Brigade Ilijas ou Romanija, n'est-ce pas ?

25 R. Tout ce que je sais, c'est que jusqu'en 1994, nous avions un char.

26 Ensuite, nous avons eu cinq chars et il y avait des mortiers et des

27 obusiers nombreux et davantage encore jusqu'en 1994. Je ne connais pas

28 vraiment le nombre précis.

Page 7942

1 Q. Oui, oui, j'entends bien. Mais ce que je vous demande, c'est que vous

2 ne connaissiez pas l'ampleur du retrait des armes dans la zone de

3 responsabilité des Brigades Ilijas et Romanija et dans le Corps de

4 Romanija-Sarajevo; vous ne connaissez que ce qui concerne les armes amenées

5 à Nisici, n'est-ce pas ?

6 R. Oui, en effet, ça c'est correct. J'ai dit qu'il y en avait beaucoup

7 plus que ce qui existait à l'époque.

8 M. SACHDEVA : [interprétation] Voilà la fin de mes questions pour le moment

9 jusqu'à demain.

10 M. LE JUGE MINDUA : J'ai voulu attendre évidemment que le Procureur termine

11 son contre-interrogatoire avant que j'intervienne. C'est par rapport à

12 votre déposition d'hier. Si nous allons à la page 69, ligne 22, vous aviez

13 déclaré qu'à la mi-août, après l'arrivée du général Milosevic, la situation

14 militaire de votre côté, bien entendu, s'est stabilisée. Vos positions ont

15 été renforcées, notamment à Vares, suite notamment à l'arrivée ou à la

16 possession d'un bon nombre de pièces d'artillerie.

17 Alors, vous-même, comme combattant dans les tranchées sous le général Galic

18 aussi bien que sous le général Milosevic, vous avec donc de l'expérience au

19 sujet de ces deux époques. Et quand vous dites que vos positions se sont

20 renforcées et que votre situation s'est stabilisée, il m'arrive à l'esprit

21 une question que je pourrais vous poser.

22 A quoi attribuez-vous le renforcement de vos positions ou la

23 stabilisation de votre situation militaire ? Je m'hasarde à imaginer des

24 réponses. Evidemment, vous allez me corriger. Est-ce que c'est dû aux

25 qualités militaires du général Milosevic commandant le corps, ou bien à

26 l'arrivée de nouvelles armes d'artillerie ou à toute autre raison ou tout

27 autre facteur ? Est-ce que vous avez une réponse sur ma préoccupation ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

Page 7943

1 Je peux vous répondre et vous indiquer que la situation à la mi-août

2 s'était stabilisée et que nous avions consolidé nos lignes, alors je ne

3 sais pas si je vous ai bien entendu ou peut-être que ça n'a pas été bien

4 interprété pour les parties concernant Vares. Non, ces parties-là sont

5 tombées, et les combattants sont venus nous rejoindre, et les civils ont

6 été renvoyés à Ilijas. Et grâce à ces combattants-là, les lignes ont été

7 plus courtes. Certaines parties sont tombées sous l'ABiH, puis il y avait

8 les armes qui étaient arrivées. Je ne pense pas que ça ait quoi que ce soit

9 à faire avec le général Milosevic. C'était la guerre, simplement. Nous

10 avons nos enfants derrière nous. Il fallait fortifier nos positions. C'est

11 ça qui nous a sauvé le 15 juin 1995.

12 M. LE JUGE MINDUA : Vous avez parlé des armes qui sont arrivées. Vous

13 pouvez expliciter un tout petit peu ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je vous ai indiqué que plusieurs chars

15 étaient arrivés. Jusqu'à ce moment-là, je n'avais vu en fait qu'un seul

16 char. Ensuite, il y en avait cinq, et j'ai vu qu'il y avait davantage

17 d'obusiers, plus de mortiers. Voilà ce que j'ai pu en tout cas constater.

18 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup, Monsieur le Témoin.

19 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

20 M. TAPUSKOVIC : [aucune interprétation]

21 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

22 M. SACHDEVA : [aucune interprétation]

23 M. LE JUGE HARHOFF : [aucune interprétation]

24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelles autres questions auriez-vous

25 à poser concernant le Témoin AD, que vous connaissiez déjà ?

26 M. SACHDEVA : [interprétation] Comme je vous l'ai dit, il y a -- enfin, si

27 on parle d'éléments de preuve, est-ce qu'on peut passer à huis clos partiel

28 ?

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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Huis clos partiel.

2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

3 [Audience à huis clos partiel]

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20 [Audience publique]

21 M. SACHDEVA : [interprétation]

22 Q. Monsieur, il y a quelque temps, nous avons parlé du marché à Breza.

23 Vous vous souvenez de cela ?

24 R. Oui.

25 Q. Est-il vrai qu'il s'agissait d'un marché en plein air ?

26 R. J'ai dit que pendant la guerre, je ne me suis pas rendu à Breza. Je ne

27 pouvais pas me rendre à Breza pour voir s'il s'agissait d'un marché en

28 plein air ou pas, parce que Breza était sous le contrôle de l'ABiH.

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1 Q. Mais lorsqu'il n'y avait pas de guerre, cela n'était pas entre les

2 mains de l'ABiH ?

3 R. Il s'agissait de notre belle Yougoslavie. A l'époque, je passais par ce

4 marché. Il s'agissait d'un marché tout simple avec des "stands".

5 Q. Donc, vous vous êtes quand même rendu à ce marché avant la guerre ?

6 R. Non, mais je passais par Breza et je savais qu'il y avait un marché.

7 Dans toutes les petites villes en Bosnie-Herzégovine, il y a un marché.

8 Q. Vous savez qu'il y avait un marché, un marché en plein air, n'est-ce

9 pas ? Maintenant, je parle de la période avant la guerre.

10 R. Oui.

11 Q. Si j'ai bien compris, à ce marché, on pouvait acheter des fruits, des

12 légumes, n'est-ce pas ?

13 R. Oui, c'est ce qu'on vend à nos marchés.

14 Q. Et dites-moi si j'ai raison pour dire que les habitants de Breza

15 étaient au nombre de 4 000 ?

16 R. Je ne suis pas sûr quel était le nombre d'habitants à Breza ?

17 Q. Mais Breza, c'était une ville, n'est-ce pas ? Ce n'était pas un

18 village.

19 R. Oui, Breza était une ville minière, mais je ne sais pas quel était le

20 nombre d'habitants de Breza.

21 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je demander à ce

22 qu'on passe à huis clos partiel ?

23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons passer à huis clos

24 partiel.

25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

26 partiel.

27 [Audience à huis clos partiel]

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15 [Audience publique]

16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

17 Q. Pouvez-vous répondre à ma question ?

18 R. Oui, justement, je vais répondre à votre question. Nous avons eu des

19 renforts autour du village de Vares, ensuite la ligne de défense a été

20 raccourcie. Nous avons eu des renforts en termes d'effectifs. Il y a

21 probablement eu des changements au sein du corps de ma compagnie, qui a été

22 subordonnée à la 1re Brigade de Romanija.

23 Q. Merci.

24 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je n'ai plus d'autres questions.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Témoin, votre témoignage

26 n'est pas terminé. Vous allez devoir revenir demain matin pour déposer

27 demain matin.

28 Entre-temps, vous ne devez pas parler de la teneur de votre

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1 témoignage à personne. Est-ce que vous comprenez cette consigne ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez maintenant disposer.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

5 [Le témoin quitte la barre]

6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, votre

7 prochain témoin sera qui ?

8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Le prochain témoin est le témoin T-37. Il

9 bénéficie des mesures de protection, notamment de la déformation des traits

10 du visage, et il bénéficie également d'un pseudonyme. Il s'agit du témoin

11 T-37.

12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que le témoin pourrait

13 prononcer une déclaration solennelle ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

15 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

16 LE TÉMOIN : TÉMOIN T-37 [Assermenté]

17 [Le témoin répond par l'interprète]

18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir, je

19 vous prie.

20 Vous pouvez commencer, Maître Tapuskovic.

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

22 Juges, je souhaiterais d'abord demander que l'on montre le document suivant

23 au témoin. Il s'agit du document DD00-3982, afin qu'il puisse l'identifier,

24 et par la suite je demanderais que l'on passe à huis clos partiel.

25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez demander au témoin

26 si le nom qui figure sur le document est bien son nom, mais il ne doit pas

27 le lire à haute voix.

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui. Nous n'avons pas demandé au témoin

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1 précédent de le faire, mais je vais maintenant poser cette question au

2 témoin.

3 Interrogatoire principal par M. Tapuskovic :

4 Q. Monsieur le Témoin, est-ce bien votre nom, le nom qui figure sur cette

5 feuille ?

6 R. Oui.

7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je demanderais que cette feuille soit

8 également montrée au bureau du Procureur ainsi qu'au Président et aux Juges

9 de la Chambre.

10 Je demanderais que ce document soit versé au dossier sous pli scellé.

11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce document sera versé en tant que pièce

13 D291 sous pli scellé, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je demanderais que l'on passe à huis clos

15 partiel, je vous prie, afin d'identifier le témoin.

16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Huis clos partiel, s'il vous plaît.

17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

18 Juges, nous sommes à huis clos partiel.

19 [Audience à huis clos partiel]

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13 [Audience publique]

14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Maintenant, alors je vais passer à un

15 autre sujet.

16 Q. Est-ce que vous pouvez expliquer aux Juges les deux lignes que vous

17 voyez sur la carte, la rouge et la jaune ? Comment est-ce que cela se

18 présentait sur le terrain concrètement ? Quelle distance séparait les

19 tranchées dans certains endroits ?

20 R. Vu que j'ai pu voir ça de mes yeux, la ligne jaune représente la

21 position de l'ABiH. Et à partir du 8 décembre, elle se trouvait à toutes

22 les altitudes 850, 830 et 750. Nous étions en dessous de ces positions, et

23 quelquefois, selon la configuration du terrain, nous étions quelquefois à

24 50 mètres de distance. A certains endroits, quelquefois on était même plus

25 proches, les lignes n'étaient qu'à 30 mètres les unes des autres.

26 Q. Et quelle était la situation, en moyenne ?

27 R. En moyenne, on était à une trentaine de mètres de distance.

28 Q. Est-ce que vous voulez bien expliquer à MM. les Juges la chose suivante

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1 ? De quoi disposez-vous en terme d'armes lorsque vous vous trouviez dans

2 les tranchées ?

3 R. Nous avions des armes d'infanterie, des fusils automatiques et semi-

4 automatiques lorsque nous nous trouvions dans les tranchées, parce qu'on ne

5 pouvait utiliser rien d'autre là puisque la ligne de front était tellement

6 proche, l'on ne pouvait utiliser rien d'autre si ce n'est des armes

7 d'infanterie.

8 Q. Lorsque le conflit a éclaté et que les lignes ont été établies, il

9 s'agit donc des lignes dont nous parlons, est-ce que vous avez pu

10 remarquer, dans votre zone de responsabilité ou celle de la brigade,

11 d'autres armes ? Vous avez dit ce dont vous disposiez dans les tranchées.

12 Nous parlons maintenant de la zone de responsabilité de votre brigade. Est-

13 ce qu'il y avait d'autres armes qui s'y trouvaient, autres que des armes

14 d'infanterie, à l'époque ?

15 R. Lorsque l'intensité des combats a augmenté à partir du 10 juin jusqu'au

16 8 décembre, nous avons été exposés à des attaques tous les jours et nous

17 avions le soutien pour nos combattants des mortiers de petit calibre de 60

18 et de 82 millimètres. Voilà donc les armes que nous utilisions et que nous

19 tirions.

20 Q. Est-ce que vous avez participé à d'autres actions autres que d'être

21 dans les tranchées, et vu la situation, est-ce que vous étiez en mesure de

22 participer à d'autres actions ?

23 R. Non, je n'ai participé à aucune autre action. Je ne suis allé nulle

24 part. J'avais un espèce de plan, un espèce de programme ou d'horaire, si

25 vous voulez, qui expliquait quand j'allais être dans les tranchées par

26 équipe. Après deux à cinq jours, je rentrais à la maison pendant quelques

27 jours, je passais du temps avec ma famille, je prenais un bain et puis je

28 retournais. Mais je ne me suis rendu nulle part à partir des tranchées.

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1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] On va prendre une pause.

2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, nous prenons la pause.

3 --- L'audience est suspendue à 12 heures 20.

4 --- L'audience est reprise à 12 heures 43.

5 M. LE JUGE MINDUA : Comme vous pouvez le constater, le Juge présidant est

6 empêché. La Chambre en application de l'article 15 bis, tenant compte de

7 l'intérêt de la justice, est d'avis qu'elle peut continuer à siéger

8 valablement. Nous allons continuer notre procédure.

9 La parole est à Me Tapuskovic.

10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

11 Q. Monsieur le Témoin, vous avez dit tout à l'heure, pendant qu'on vous

12 posait des questions, vous nous avez dit ce que vous avez vu depuis les

13 positions où se trouvait votre bataillon et vous-même. Mis à part la

14 colline de Zuc sur laquelle vous viviez autrefois, avez-vous vu des sites à

15 gauche et à droite des positions et des tranchées où vous vous trouviez ?

16 R. Depuis nos tranchées, depuis notre ligne de front, nous ne pouvions pas

17 voir d'autres parties de la ville de Sarajevo, nous ne pouvions rien voir.

18 Q. Ce n'était pas ma question. Vous avez vu la colline de Zuc, et par

19 rapport à d'autres élévations, à la proximité de la colline de Zuc, est-ce

20 que vous les avez vues ? Est-ce que vous avez pu les voir ?

21 R. Non, nous ne pouvions rien voir. Tout ce que nous pouvions voir,

22 c'étaient les positions de l'ABiH.

23 Q. Vous avez parlé de la colline de Zuc. Est-ce qu'il y avait d'autres

24 élévations, d'autres collines à gauche et à droite depuis -- par rapport à

25 vos positions ?

26 R. A gauche et à droite, il y avait également des positions, des lignes.

27 Il y avait nos lignes de front.

28 Q. Tout à l'heure, vous avez montré la colline de Sokolje.

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1 R. Oui.

2 Q. Et vous avez vu la photographie. Qui se trouvait sur la colline de

3 Sokolje ? Qui avait des positions sur la colline de Sokolje ? Est-ce que

4 vous avez pu voir la colline de Sokolje depuis vos tranchées ?

5 R. Depuis nos tranchées, nous ne pouvions pas voir la colline de Sokolje,

6 parce que nos tranchées se trouvaient en dessous de la colline de Sokolje.

7 Q. Pouvez-vous dire quelque chose sur les armes lourdes ? Quel était le

8 sort des armes lourdes en 1994 ? Pouvez-vous nous préciser quand en 1994

9 cela s'est passé ?

10 R. Quant aux armes lourdes en 1994, un accord a été conclu selon lequel

11 toutes les armes lourdes utilisées par l'armée de la Republika Srpska

12 devaient être déplacées en dehors de la zone, d'un diamètre de 20

13 kilomètres autour de Sarajevo.

14 Q. Merci. Plus tard, avez-vous eu le soutien d'artillerie lourde au moment

15 où il y avait des activités militaires ?

16 R. Lorsque les armes lourdes ont été déplacées en dehors de la zone de 20

17 kilomètres à l'extérieur de Sarajevo, il n'y avait pas d'activités

18 militaires majeures. La population, par contre, était en panique parce que

19 les armes lourdes ont été retirées. Il y avait une pression exercée sur la

20 population pour empêcher une offensive musulmane, et la population a eu

21 peur.

22 M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin, vous vous rappelez au courant de

23 quel mois, quel mois, les armes lourdes ont été déplacées ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas me souvenir exactement, mais

25 c'était, je pense, au printemps 1994, mais je ne me souviens pas

26 exactement, parce que j'étais un simple soldat dans les tranchées. Je

27 n'avais pas eu de contact avec tout ça. Je ne connais pas les dates et je

28 ne peux pas vous donner des informations plus précises.

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1 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.

2 Monsieur Tapuskovic.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

4 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous savez quand le général Dragomir

5 Milosevic a été nommé au poste du commandant du Corps Romanija-Sarajevo ?

6 R. Je pense que M. Dragomir Milosevic a été nommé au poste de commandant

7 du corps au début d'août 1994.

8 Q. A partir de ce moment-là, étant donné l'endroit où vous vous trouviez,

9 à savoir à proximité de Vogosca dans vos tranchées, sur vos positions,

10 pouvez-vous dire quelles étaient les activités militaires à l'époque ?

11 Pouvez-vous les décrire ?

12 R. Après cela, l'intensité des combats a diminué. Il y avait peut-être -

13 je ne sais pas comment les appeler - des offensives ou des combats loin de

14 Sarajevo, mais sur nos positions, il n'y avait pas de combat de grande

15 intensité jusqu'au 15 juin 1995. C'est là où une grande offensive a été

16 lancée.

17 Q. Pendant toute cette période-là, à partir du mois d'août jusqu'au mois

18 de juin, la situation est restée la même sur ces positions; c'est ce que

19 vous avez dit, à partir de l'août 1994, c'est ce que vous avez dit. Et

20 jusqu'à quel mois en 1995 ? Vous avez dit au mois de juin ?

21 R. Jusqu'au 15 juin, jusqu'au début du mois de juin ou plutôt jusqu'à la

22 mi-juin.

23 Q. Si j'ai bien compris, toute cette période, pendant toute cette période

24 à la proximité de Vogosca, la situation est restée la même ?

25 R. Oui, mis à part des provocations mineures, mais cela n'a pas eu

26 beaucoup d'importance.

27 Q. Pouvez-vous me dire ce qui s'est passé le 15 juin ? Pouvez-vous décrire

28 ce qui s'est passé le 15 juin ?

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1 R. Le 15 juin, tôt dans la matinée, une grande offensive violente des

2 forces musulmanes, c'est-à-dire de l'ABiH, a été lancée sur tout -- sur le

3 front où nous étions, c'est-à-dire à Sarajevo, et cela a duré pendant 15

4 jours. Après ces 15 jours, l'intensité n'a pas diminué, mais cela a

5 commencé à diminuer vers la fin du mois de juillet, au moment où

6 l'offensive a pris fin.

7 Q. Dites-nous, qu'en est-il de la population et des combattants dans la

8 région ?

9 R. Beaucoup de combattants ont été tués, ainsi que les -- beaucoup de

10 civils, parce qu'ils ont tiré sur les routes utilisées par l'armée de la

11 Republika Srpska. S'il le faut, si vous me le permettez, je dirais que l'un

12 de mes voisins, une personne âgée, a été tuée, Zikovic Savo. Il a été tué

13 devant sa maison parce qu'un obus est tombé devant sa maison. Il y avait

14 des soldats, des combattants et des civils qui ont été tués.

15 Q. Merci.

16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je n'ai plus de questions pour ce témoin

17 pour ce qui est de l'interrogatoire principal.

18 M. LE JUGE MINDUA : Très bien.

19 Le Procureur pour le contre-interrogatoire.

20 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas de

21 questions pour ce témoin.

22 M. LE JUGE MINDUA : Très bien.

23 J'imagine que dans ce cas, évidemment, il n'y a pas de questions pour "re-

24 examination" ?

25 Donc, Monsieur le Témoin, on vous remercie d'être venu ici pour apporter

26 votre témoignage pour cette œuvre de justice. Il ne nous reste donc qu'à

27 vous souhaiter bon retour chez vous, et tous nos vœux vous accompagnent.

28 Merci beaucoup.

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1 Vous pouvez quitter la salle.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

3 [Le témoin se retire]

4 M. LE JUGE MINDUA : Maître Tapuskovic, le prochain témoin, s'il vous plaît.

5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Le témoin suivant est le Témoin T-26, qui

6 n'a pas de mesures de protection. Mon assistante est sortie pour voir si le

7 témoin est là. Je pense que oui.

8 M. LE JUGE MINDUA : Le témoin précédent a pris moins de temps que prévu. Et

9 bien, on va attendre quelques minutes pour savoir quelle est la suite.

10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Ce témoin, Monsieur le Juge Mindua,

11 témoignera brièvement selon notre programme, et nous allons en finir avec

12 ce témoin dans à peu près une heure, une demi-heure, ce qui a été prévu.

13 Mais peut-être que nous aurons besoin de quelques minutes de plus à cause

14 de cette pause.

15 Maintenant, il s'agit de Kosovic Kosta, T-26.

16 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

17 M. LE JUGE MINDUA : Bonjour, Monsieur le Témoin. Je voudrais vérifier

18 si vous comprenez bien dans votre langue ce que je suis en train de vous

19 dire. Si c'est le cas, vous dites : "Oui, je comprends." Très bien.

20 Alors, conformément à la procédure, je vais vous demander de faire la

21 déclaration solennelle.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai

23 la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

24 LE TÉMOIN : KOSTA KOSOVIC [Assermenté]

25 [Le témoin répond par l'interprète]

26 M. LE JUGE MINDUA : Très bien. Merci beaucoup. Vous pouvez vous asseoir.

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

28 M. LE JUGE MINDUA : Encore une fois, selon les juridictions parce qu'il y a

Page 7986

1 des juridictions où le Juge présidant procède aux questions sur l'identité

2 du témoin, mais conformément à notre procédure ici, je vais demander à la

3 Défense qui a appelé le témoin à la barre de procéder à cet exercice.

4 Maître Tapuskovic, vous avez la parole. Je note que le témoin n'a pas de

5 mesures de protection spéciales. Si c'est le cas, je demande au greffe de

6 lever le rideau.

7 Maître Tapuskovic, vous avez la parole.

8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge.

9 Interrogatoire principal par M. Tapuskovic :

10 Q. [interprétation] Et je prie maintenant le Témoin T-26 de se présenter,

11 de dire son nom et son prénom, s'il vous plaît, Monsieur le Témoin.

12 R. Je m'appelle Kosta Kosovic.

13 Q. Merci. Monsieur le Témoin, vous êtes né le 19 août 1933 ?

14 R. Oui.

15 Q. Mais, s'il vous plaît, attendez à ce que ma question soit affichée sur

16 l'écran et consignée au compte rendu pour répondre à cette question.

17 Vous êtes né à Gacko, en Bosnie-Herzégovine ?

18 R. Oui.

19 Q. Vous avez fini l'école primaire et le lycée à Gacko ?

20 R. Oui.

21 Q. Attendez à chaque fois que ma question soit finie. Lorsque vous voyez

22 le curseur s'arrêter sur l'écran, vous pouvez répondre à ma question.

23 Vous avez fini la faculté de droit à Sarajevo ?

24 R. Oui.

25 Q. Jusqu'en 1986, vous avez travaillé à la police à Sarajevo ?

26 R. Oui.

27 Q. Monsieur le Témoin, pour qu'il n'y ait pas de problème au cours de

28 l'interrogatoire, ne répondez pas jusqu'à ce que le curseur ne s'arrête sur

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1 l'écran, le curseur qui indique que ma phrase est finie, après quoi vous

2 pouvez répondre à ma question.

3 Maintenant, je continue mes questions. La même année, vous avez pris la

4 retraite, n'est-ce pas ?

5 R. Oui.

6 Q. Quand le conflit à Sarajevo a commencé, vous aviez 59 ans ?

7 R. Oui.

8 Q. Vous avez vécu dans la partie de Sarajevo qui s'appelle Alipasino Polje

9 à la place de Zavnobih, au numéro 30, au 7e étage ?

10 R. Oui.

11 Q. Maintenant, je voudrais vous montrer une photographie. Sur cette

12 photographie, vous allez montrer approximativement l'emplacement du

13 bâtiment à Alipasino Polje où vous viviez au début du conflit.

14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je prie qu'on affiche sur les écrans la

15 carte 2872 de la liste 65 ter, 2862.

16 Q. Monsieur le Témoin, pouvez-vous nous dire où se trouvait

17 approximativement le bâtiment, l'immeuble où vous viviez cette année-là et

18 surtout au moment où le conflit a éclaté ? Pouvez-vous indiquer cela en

19 utilisant le stylet que M. l'Huissier va vous remettre ?

20 R. J'ai vécu dans la soi-disant phase B de Alipasino Polje. Dans cette

21 phase B d'Alpacino Polje se trouve une place qui s'appelle Trzano Bija

22 [phon] ou la place de Zavnobih, et cette phase B d'Alipasino Polje se

23 trouve derrière cette rangée d'immeubles.

24 Q. Dessinez un cercle, s'il vous plaît. Tracez un cercle autour de ces

25 immeubles. Faites-le, s'il vous plaît.

26 R. Sur ces immeubles, et ma maison ou mon immeuble se trouve derrière ces

27 immeubles. Cela se trouverait derrière ces immeubles.

28 Q. Apposez la lettre K à l'intérieur du cercle que vous avez tracé.

Page 7988

1 R. [Le témoin s'exécute]

2 Q. Et la ligne que vous avez tracée, indiquez cette ligne par la lettre S.

3 R. [Le témoin s'exécute]

4 Q. Merci. Maintenant, je vous prie d'expliquer à la Chambre, de dire à la

5 Chambre ce qui s'est passé au début de 1994 dans le quartier où vous avez

6 vécu.

7 R. Après -- avant la guerre, j'avais beaucoup de problèmes de santé et

8 j'ai passé à l'hôpital trois mois. Lorsque j'ai été admis à l'hôpital, la

9 situation était normale. Trois mois après, j'ai été surpris par la

10 situation à Sarajevo. J'étais surpris parce qu'il y avait --

11 Q. S'il vous plaît, arrêtez-là, et avant de continuer, dites-nous quand

12 vous êtes sorti de l'hôpital. Vous avez dit que vous étiez à l'hôpital

13 pendant trois mois.

14 R. Je suis sorti de l'hôpital --

15 Q. Attendez d'abord à ce que j'aie fini ma question pour répondre. Allez-

16 y, maintenant vous pouvez répondre à ma question.

17 Q. Je suis sorti de l'hôpital vers la fin du mois de mars 1992, et dans ma

18 ville, j'ai pu voir une situation désagréable. Il y avait beaucoup de

19 membres de l'armée, mais pas de l'armée qui existait avant la guerre. Il

20 s'agissait des Bérets verts, des policiers en uniformes noirs, des membres

21 de la Ligue des Patriotes.

22 Les policiers et les membres de l'armée n'étaient pas accessibles.

23 J'ai essayé de les aborder, mais ils se comportaient de façon désagréable.

24 Q. Ce qui m'intéresse, c'est de savoir ce que vous avez vu dans votre

25 immeuble à Alipasino Polje, dans le quartier où vous avez vécu, dans

26 l'immeuble où vous avez vécu.

27 R. A partir du moment où je suis sorti de l'hôpital jusqu'à cette

28 question, une période de temps s'est écoulée, et j'ai eu beaucoup de

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1 surprises dans mon immeuble. Un jour, on a rassemblé tous les locataires

2 dans le couloir au rez-de-chaussée. Il s'agissait d'un rassemblement

3 apparemment normal, habituel, des locataires de l'immeuble pour résoudre

4 des problèmes. Un nombre plus petit de locataires s'est rassemblé. Ils

5 étaient Serbes. Il n'y avait pas de Musulmans parmi ces locataires. Il n'y

6 avait pas de Croates non plus parmi eux. J'ai demandé à un homme qui a

7 organisé ce rassemblement, qui s'appelle Jasmin Erovic [phon], ce que cela

8 représentait. J'ai demandé où les autres étaient. Il m'a répondu : "Les

9 autres, on n'a pas besoin d'eux. Nous n'avons besoin que des Serbes." Je

10 n'ai rien répondu à cela. Ensuite, il a continué à parler, à nous dire que

11 dans nos maisons, dans nos appartements --

12 Q. Monsieur le Témoin, nous n'avons pas assez de temps pour parler de tous

13 ces détails.

14 Dites-nous ce qui s'est passé après cette réunion, ce qui s'est passé

15 par rapport à vous et aux gens qui étaient à la réunion.

16 R. Je voudrais dire ce que la personne qui présidait la réunion a dit. Il

17 a dit que rien qui n'est serbe ne devrait être présent dans des

18 appartements ou dans d'autres locaux dans l'immeuble. Moi, j'ai demandé à

19 quoi il a pensé. Il a dit : tous les objets de valeur, les livres, les

20 œuvres d'art. Il a pensé aux livres en cyrillique et aux œuvres d'art.

21 C'est ce qu'il a dit.

22 Q. Monsieur le Témoin, je comprends que vous avez besoin de nous dire

23 cela, mais moi je pense qu'il faut parler des choses qui sont importantes

24 pour le travail de ce Tribunal. Il faut que vous parliez de ces choses-là.

25 Dites-nous ce qui s'est passé après cette réunion -- que vous êtes venu ?

26 R. Tous les hommes serbes ont été réunis pour être amenés en prison. Il ne

27 s'agissait pas de prisons dans le sens propre du terme; il s'agissait des

28 caves, des immeubles où se trouvaient ces prisons. Il n'y avait pas

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1 d'installations nécessaires pour avoir les conditions normales de vie.

2 Pendant toute la nuit, les gens ont été amenés et les autres étaient

3 partis.

4 Ils ont commencé à nous torturer, à proférer des injures, des

5 insultes. Il y avait des bagarres, des policiers.

6 Parmi des policiers, il y avait des personnes qui ne se comportaient

7 pas de façon correcte. J'ai reçu des coups, beaucoup de coups, et à cause

8 de ça je tombais souvent sur le sol en béton, qui était froid. Par cette

9 cave, il y avait des tuyaux de canalisation qui passaient par la cave. De

10 ces tuyaux, il y avait des gouttes d'eau qui coulaient sans cesse. Ça a

11 duré 31 jours.

12 Q. Dites-moi Monsieur, ce que vous avez vécu est bien triste, mais est-ce

13 qu'il y a eu des cas plus sérieux, plus graves ?

14 R. Oui, certainement. C'est une longue histoire que je pourrais vous

15 raconter pendant des journées, non pas pendant des heures. Mais il y avait

16 un incident qui pourrait peut-être intéresser le Tribunal. Il est entré

17 tout d'un coup un homme qui a commencé à pleurer dans cette cave. Il a

18 commencé à pleurer, donc je lui ai montré mes ecchymoses et les ecchymoses

19 que j'avais au visage et au corps et je lui ai dit : ne pleure pas, tout

20 ceci sera terminé bientôt. Donc, il m'a dit : mais on va me tuer. Je ne

21 l'ai pas cru. J'ai essayé de le consoler, mais malheureusement, c'était la

22 vérité. Le chef de cette prison, qui s'appelle Dzananovic Senad, est entré

23 dans la cave, et sur les mains il portait des mitaines blanches, ou plutôt,

24 il portait des espèces de bandages aux mains. Cela lui permettait de battre

25 les gens. Donc, il a appelé Novica Draskovic et il a dit : viens ici,

26 Novica. Ensuite, il l'a battu jusqu'à la mort, et il est mort devant lui.

27 Il l'a passé à tabac, et cet homme est mort devant Dzananovic.

28 Q. Merci. Est-ce que vous pourriez nous dire ce qui s'est passé exactement

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1 aux autres personnes et ce que vous avez vécu ? Est-ce qu'il y avait

2 plusieurs autres personnes ?

3 R. Oui. Nous étions environ 25, de 23 à 25 personnes, je ne sais pas

4 exactement, et chacun d'entre nous devait subir ce genre de traitement.

5 Mais heureusement, nous ne sommes pas tous morts. Moi-même, une fois et

6 pendant toute une nuit, j'avais été passé à tabac jusqu'à ce que je ne

7 perde connaissance.

8 Q. Merci. Je crois que cela donne une bonne image de ce qui s'est passé

9 aux Juges de cette Chambre.

10 Mais comment est-ce que vous avez réussi à vous en tirer sain et

11 sauf, si vous voulez, en fait, vivant, plutôt ?

12 R. Je ne le sais pas moi-même. Je ne sais pas comment j'ai fini par --

13 comment j'ai réussi à sortir de là. Je sais seulement qu'ils avaient

14 planifié de me tuer, mais ils ne m'ont pas tué ce soir-là, ce jour-là,

15 parce que soit la veille ou dans la soirée -- en fait, ils disaient aux

16 gens : je vais te tuer demain. Donc, la veille, ils informaient les

17 personnes qu'ils allaient les tuer. Moi, on m'appelait "le vieux chien

18 errant", et c'est justement un des gardiens qui m'a dit : toi, vieux chien

19 errant, demain tu seras fusillé. Et moi, je savais ce que ça veut dire.

20 Ce qui est arrivé, c'est que je m'attendais à ce que --

21 M. LE JUGE MINDUA : Monsieur Sachdeva.

22 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge,

23 pour ce qui est de ce témoin, je ne sais pas si son récit est pertinent

24 pour ce qui est des chefs d'accusation qui passent contre cet accusé dans

25 ce procès.

26 M. LE JUGE MINDUA : Maître Tapuskovic, qu'est-ce que vous pensez de cette

27 objection ?

28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui. Alors, ce que je pourrais dire

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1 maintenant, c'est que je vais répéter ce que j'ai déjà dit l'autre jour,

2 c'est que ce témoin va passer rapidement en revue ses points. Il va très

3 rapidement commencer à nous parler des points pertinents. J'estimais qu'il

4 était intéressant que le témoin nous parle de cette terreur que les

5 habitants de Sarajevo subissaient depuis le début de la guerre. Donc, je

6 voulais que le témoin nous dépeigne une toile de fond pour nous expliquer

7 comment les choses se sont déroulées.

8 Le témoin nous parlera très bientôt très rapidement du sujet pertinent. Je

9 vais essayer de l'expliquer également, il n'y a pas longtemps, quand le

10 médecin qui est venu témoigner nous avait raconté ses souffrances, donc je

11 vais très rapidement aborder le sujet, le sujet pertinent, mais je voulais

12 que le témoin nous parle de ce qu'il a vécu pendant qu'il a était en

13 prison.

14 M. LE JUGE MINDUA : Très bien. Nous considérons donc que c'est une sorte

15 d'introduction et que maintenant vous allez passer aux points pertinents

16 liés directement à l'acte d'accusation.

17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

18 Q. Monsieur le Témoin, vous nous avez parlé de ces incidents, mais

19 j'aimerais savoir de quelle façon est-ce que vous avez fait pour sortir de

20 cette cave. Par la suite, je vais vous poser d'autres questions.

21 R. Je crois que j'ai réussi à sortir -- excusez-moi, est-ce que je peux

22 poursuivre ?

23 Je crois que je suis sorti grâce à la FORPRONU. La FORPRONU avait eu

24 connaissance de toutes les personnes qui étaient dans cette cave, et c'est

25 ainsi que j'ai été libéré, que je suis sorti.

26 Q. Que s'est-il passé ensuite pendant les six ou sept mois qui ont suivi ?

27 R. Lorsque je suis arrivé à la maison -- mais je dois, Maître, de vous

28 parler d'une période très difficile qui était une période de torture, si

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1 vous voulez.

2 Mais lorsque je suis rentré à la maison, j'étais en garde-à-vue, si

3 vous voulez. Je n'avais pas le droit de sortir. Il y avait une garde qui

4 était devant ma porte, au septième étage, et qui faisait en sorte qu'on ne

5 puisse pas sortir du bâtiment.

6 Q. Très bien. Donc, au cours de ces huit mois, qu'est-ce que vous avez pu

7 remarquer dans les rues en regardant par les fenêtres de votre appartement,

8 je ne sais pas si vous arriviez à sortir de temps en temps, mais qu'est-ce

9 que vous avez pu remarquer quant aux activités de combat, quant au

10 déplacement des personnes, et cetera ?

11 R. Et bien, ce qui m'a étonné d'abord le plus, c'était que l'on entendait

12 le canon, les bruits de canon, des détonations de canon sous les fenêtres,

13 tout près de l'entrée, à l'entrée même en fait du bâtiment. Et c'est là que

14 j'ai remarqué qu'on avait monté un canon sur un camion. Je ne sais pas de

15 quel type de canon il s'agissait, je ne m'y connais pas très bien, mais il

16 y avait un vrai canon avec des roues, avec des tubes, avec des tuyaux, et

17 tout ça, c'était monté sur ce camion. Il y avait des servants aussi, et ce

18 canon arrivait à se déplacer d'une place à l'autre très souvent. Et par

19 exemple, on pouvait l'entendre tirer cinq à 10 obus devant ma maison, et

20 ensuite le camion démarrait et partait ailleurs pour transporter le canon

21 ailleurs. Et ensuite, on pouvait entendre ce même bruit provenant d'un

22 endroit qui n'est pas éloigné, et ainsi de suite.

23 Q. Et est-ce qu'il y avait une riposte de votre côté ?

24 R. Oui.

25 Q. Pourriez-vous nous expliquer à quoi ressemblait cette riposte ?

26 R. C'était aussi des armes de ce type. Je ne sais pas si c'étaient tous

27 des canons, mais il y avait des obus qui tombaient autour des maisons.

28 C'était un quartier résidentiel. Les obus tombaient autour des maisons,

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1 mais il arrivait que des obus ne tombent sur les maisons aussi. Et du

2 septième étage de mon bâtiment, depuis le balcon, j'ai pu observer toute

3 une suite de bâtiments que l'on aperçoit sur cette photo.

4 Q. Excusez-moi un instant, je vous prie. On a perdu les indications sur la

5 photographie. Je ne sais pas si elles ont été sauvegardées.

6 M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Greffier, où sont passées les indications ?

7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge,

8 malheureusement nous avons perdu les annotations apportées par le témoin,

9 donc je demanderais au conseil de la Défense s'il voudrait demander au

10 témoin de faire d'autres annotations.

11 M. LE JUGE MINDUA : Maître Tapuskovic, je crois qu'il faut de nouveau

12 demander au témoin de préciser, de marquer la photographie.

13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

14 Q. En fait, Monsieur, ce que vous avez dessiné tout à l'heure, je vous

15 demanderais de refaire les mêmes annotations.

16 R. [Le témoin s'exécute]

17 Q. Très bien, merci beaucoup. Est-ce que vous pourriez expliquer aux Juges

18 de la Chambre où était situé ou caché ce canon ? Vous avez dit que c'était

19 à l'entrée de votre immeuble; où était-ce exactement ?

20 R. C'était entre mon bâtiment à moi, à l'adresse numéro 30, et ensuite il

21 y avait un autre bâtiment qui y était rattaché. Il y a un très grand espace

22 d'une hauteur de 4 mètres. C'est comme une sorte de couloir entre les

23 bâtiments qui était conçu et qui permettait aux passants de passer, et

24 c'est là qu'était situé ce canon, et c'est depuis cet endroit-là, cet

25 endroit légèrement caché qu'était situé ce canon. Donc, ici, sur cette

26 photo, vous voyez tous ces bâtiments.

27 Q. Veuillez, je vous prie, nous l'indiquer à l'aide d'une flèche.

28 R. [Le témoin s'exécute]

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1 Le canon était situé derrière ces bâtiments. Je ne sais pas comment

2 vous l'expliquer. Il y a un espace libre de 50 mètres derrière, et c'est de

3 là que le canon tirait sur le village de Nedzarici où il y avait l'armée

4 serbe jusqu'à Ilidza. C'était une région principalement habitée par des

5 Serbes.

6 Q. Est-ce qu'il vous est arrivé de remarquer d'autres activités, outre les

7 activités de ce canon qui se déplaçait et qui causait certaines réactions

8 chez certaines personnes ? Est-ce que vous avez remarqué si l'on a tiré

9 depuis d'autres armes ?

10 Attendez, je vous prie. Ne répondez pas avant la fin de ma question.

11 R. Je suis vraiment désolé, excusez-moi.

12 J'avais remarqué de façon systématique que sous ces bâtiments, très

13 tôt le matin, il y avait un rassemblement. Donc, même avant que le jour ne

14 se lève complètement, c'étaient des tireurs embusqués, il y avait même

15 peut-être de cinq à 10, entre cinq, sept et 10, dépendamment de la journée.

16 Donc, ces tireurs embusqués se rassemblaient là, et j'imagine que c'est à

17 ce moment-là qu'on leur donnait leur mission, et eux ils étaient à ce

18 moment-là, depuis cet endroit-là ils étaient déployés sur les lignes.

19 Q. Lorsque vous parlez des lignes, ils allaient où exactement ?

20 R. Et bien, ils se rendaient le long de cette ligne, derrière ces

21 bâtiments ou bien depuis les bâtiments, si vous voulez. Toujours est-il

22 qu'ils étaient toujours cachés, dissimulés. Je n'ai jamais vu ces tireurs

23 embusqués tirer parce qu'ils se cachaient de tous et ils étaient

24 particulièrement efficaces. J'avais même eu l'occasion d'entendre des cris,

25 des hurlements lorsqu'ils arrivaient à toucher une cible.

26 Q. Pendant que vous étiez dans la zone de responsabilité de Bosnie-

27 Herzégovine et eu égard à ce que vous avez vécu dans la cave, est-ce que

28 vous avez dû répondre devant une institution de l'ABiH ou devant des

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1 autorités ? Est-ce que l'on vous a interrogé dans cette partie-là de

2 Sarajevo qui était sous le contrôle de l'ABiH ?

3 R. Oui, en février 1994, j'ai reçu un appel officiel m'invitant à me

4 présenter au tribunal militaire de l'ABiH, et ce, à la caserne de Viktor

5 Bubanj. Les personnes qui étaient présentes avaient arrêté les malfaiteurs,

6 Dzananovic, Kimun, Ramiz et ainsi de suite. Lorsque je suis entré au

7 tribunal, le juge, après avoir pris mon identité, il m'a demandé si je

8 reconnaissais ces trois personnes, et moi, à ce moment-là, j'ai répondu en

9 disant la vérité. J'ai dit : je connais les trois personnes, voici

10 Dzananovic Senad, je reconnais Adnan Gadza, appelé Kimun, et la troisième

11 personne, c'est Ramiz Luta [phon].

12 Le juge m'a ensuite demandé ce que je pouvais lui dire sur eux. Dès

13 que je les ai aperçus, j'ai perdu ma paix intérieure, mais j'ai réussi à me

14 calmer et à dire ce qui était la vérité. Et donc j'ai dit : ces deux

15 personnes, Dzananovic et Adnan Gadza [phon], pendant les 31 jours que j'ai

16 passés dans cette cave, ils m'ont battu tous les jours. Ils m'ont passé à

17 tabac tous les jours, non pas moi seulement, mais les autres personnes

18 aussi.

19 Q. Très bien. Merci.

20 M. LE JUGE MINDUA : Je constate que sur la feuille que j'ai,

21 l'interrogatoire principal devrait prendre 30 minutes. Vous avez déjà

22 consommé 28. Théoriquement, il vous en reste deux. Alors, je voudrais

23 savoir combien de temps il vous faut pour terminer avec votre

24 interrogatoire principal en ce qui concerne ce témoin.

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Et bien, justement, je voudrais demander

26 au témoin, enfin, j'avais terminé avec cette série de questions. Je voulais

27 savoir -- je voulais lui poser deux ou trois questions, à savoir ce qui a

28 été fait à la suite de sa déclaration auprès de ce tribunal et ce qu'il a

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1 fait lorsqu'il est parti de ce territoire. En fait, je suis tout près de la

2 fin, mais étant donné que le premier témoin avait terminé un peu plus tôt,

3 je pensais vous demander de m'accorder encore quelques minutes. Mais je

4 vais essayer de m'efforcer pour terminer plus rapidement.

5 M. LE JUGE MINDUA : Allez-y.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Puisque j'avais indiqué les deux premières

7 personnes comme étant des meurtriers et des bandits, il y a eu un procès

8 intenté contre eux. Mais pour Ramiz, il est vrai qu'il ne m'a jamais battu

9 et il n'a pas non plus passé à tabac d'autres personnes, donc je n'ai rien

10 dit sur lui. Je ne pouvais pas dire quoi que ce soit. Les deux autres ont

11 été jugés et on les a jugées comme étant des personnes non aptes, et ils

12 ont purgé une peine d'un mois. Ils ont été relâchés ensuite et ils sont

13 aujourd'hui en liberté.

14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]

15 Q. Est-ce que vous les avez revus par la suite ?

16 R. Kimun, je l'ai revu; Dzananovic, je ne l'ai pas revu, parce qu'il ne se

17 déplace pas trop fréquemment dans la ville de Sarajevo. Mais Kimun, dès

18 qu'il m'a vu dans la rue, il a immédiatement viré, pris un autre virage et

19 s'est caché dans une maison. En fait, il est parti rapidement.

20 Q. Merci.

21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge,

22 malheureusement c'était mon erreur, et tout ce que le témoin a dit, cela

23 n'a pas pu être consigné au compte rendu d'audience. Je ne sais pas si on

24 pourrait demander au témoin de répéter ce qui s'est passé après que l'on

25 ait jugé ces personnes. Il dit qu'ils ont été jugés non aptes et qu'ils ont

26 été libérés.

27 Q. Que s'est-il passé ensuite ?

28 R. Ils ont continué leurs mauvaises actions et ils ont continué à faire ce

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1 qu'ils avaient fait à moi et à d'autres personnes, mais ils sont simplement

2 en liberté.

3 Q. Merci. Et quand avez-vous réussi à quitter le territoire qui était

4 placé sous le contrôle de la Bosnie-Herzégovine ?

5 R. Je suis parti le 28 mai 1994.

6 Q. Et pour ce qui est de ce que vous avez dit devant le tribunal de

7 l'ABiH, est-ce que vous avez pu répéter le même témoignage devant d'autres

8 organes se trouvant sur le territoire qui était sous le contrôle de la RSK,

9 c'est-à-dire Republika Srpska ?

10 R. Oui.

11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge,

12 je souhaiterais montrer un document au témoin. Je vais en terminer à ce

13 moment-là. C'est le document DD00-4173. C'est un document de l'Accusation.

14 M. LE JUGE MINDUA : Je constate que votre photographie n'est pas admise.

15 Vous ne demandez pas l'admission de cette pièce ?

16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, oui, tout à fait. Je vous remercie

17 énormément, Monsieur le Président. En fait, je demande que le document soit

18 versé au dossier en tant que pièce de la Défense. J'ai oublié de le

19 demander avant de passer à un autre document. Effectivement, pourrait-on

20 demander le versement au dossier de cette photographie en tant que pièce de

21 la Défense ? Et comme je l'ai déjà dit, il s'agissait d'une photo 65 ter.

22 M. LE JUGE MINDUA : Permise. Monsieur le Greffier, faites votre office.

23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, cette photographie

24 a été versée au dossier sous la cote D294.

25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je demanderais que l'on montre au témoin

26 le document DD00-4173. C'est un document que j'ai reçu de l'Accusation et

27 qui est traduit en anglais.

28 Et je demanderais seulement que le témoin nous confirme quelques

Page 8000

1 points qui ont trait à lui dans ce document et j'en terminerai par la

2 suite.

3 M. LE JUGE MINDUA : Nous attendons toujours le document DD00-4173.

4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] C'est un document du 65 ter, ou alors,

5 excusez-moi, je crois que je me trompe. C'est bien la cote que j'ai

6 précisée.

7 M. LE JUGE MINDUA : Monsieur Sachdeva.

8 M. SACHDEVA : [interprétation] Peut-être puis-je vous aider ? C'est le

9 numéro 003404, le numéro du 65 ter. En tout cas, c'est ce que je vois, moi,

10 sur mon e-court.

11 M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Greffier ?

12 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

13 M. LE JUGE MINDUA : Premièrement, nous avons la pièce sur l'e-court, Maître

14 Tapuskovic.

15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci.

16 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que ce document vous concerne ? Est-ce que

17 vous pouvez y jeter un coup d'œil et est-ce que vous pourrez vous

18 intéresser plus particulièrement au paragraphe 4 qui reprend quelque chose

19 que vous auriez dit ? Vous pouvez nous dire qui a rédigé ce document,

20 regarder la date et nous dire si ça vous concerne ?

21 R. Oui, en effet, ça a été rédigé le 29 mai 1994. Une fois que j'avais

22 quitté la partie musulmane de Sarajevo, je me suis rendu dans la partie

23 serbe, alors je vous prie de m'excuser, mais il m'est assez difficile de

24 lire ce document : "Le Corps de Romanija-Sarajevo," je vois "Service de

25 renseignement," la sécurité.

26 Bon, j'ai vraiment du mal à lire, je dois vous avouer.

27 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Et est-ce qu'on pourrait agrandir le

28 quatrième paragraphe.

Page 8001

1 Q. S'agit-il d'une description d'événements dans la prison dont vous avez

2 parlé ?

3 R. Oui, tout à fait.

4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je ne pense pas qu'il

5 soit utile de donner lecture pour le compte rendu d'audience, mais ceci ne

6 fait que corroborer la déposition du témoin concernant la période qu'il a

7 passée en détention dans cette cave. Je voulais verser cette pièce au

8 dossier et je voudrais ainsi conclure mon interrogatoire principal.

9 M. LE JUGE MINDUA : Vous parlez précisément de quel paragraphe ? Mais il

10 est trop court.

11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Vu que le témoin a du mal à lire, avec

12 votre permission, je souhaiterais, si vous le voulez bien, lire cette

13 partie. Il n'y a en fait que quelques phrases.

14 M. LE JUGE MINDUA : Le texte anglais, oui.

15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il s'agit du quatrième paragraphe où on

16 dit : "La source", et c'est M. Kosovic, "a été témoin de la commission de

17 crime de Dzananovic avec Milenko Visnjevac qui est à Ilidza (Kosovic nous a

18 fait produire une déclaration écrite après qu'il ait récupéré). Il aurait

19 tué une centaine de Serbes avec Adnan Gadza." Ce qui est important, c'est

20 la partie mentionnée par le témoin concernant le meurtre de Draskovic. Ce

21 document en parle, qu'il parle bien de M. Draskovic dans le paragraphe

22 précédent.

23 Le témoin confirme donc qu'il s'agit de la déclaration qu'il a faite

24 le 28 mai 1994, et il l'a répété devant les juges au cours de cette

25 procédure effectuée dans cette partie de Sarajevo sous le contrôle de

26 l'ABiH.

27 Je voulais également verser ceci au dossier en tant que pièce de la

28 Défense.

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1 M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Greffier, [inaudible]

2 M. LE GREFFIER : [interprétation] D295.

3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'ai plus

4 de questions.

5 M. LE JUGE MINDUA : Merci, Maître Tapuskovic.

6 La parole est au Procureur pour le contre-interrogatoire. Je constate qu'il

7 nous reste cinq minutes, mais nous pouvons en tirer profit.

8 M. SACHDEVA : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président.

9 Contre-interrogatoire par M. Sachdeva :

10 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Kosovic.

11 R. Bonjour.

12 Q. Je m'appelle Me Sachdeva, je suis conseil à l'Accusation et je voudrais

13 vous poser quelques questions aujourd'hui.

14 Puis-je faire confirmer, pour commencer, que vous avez quitté

15 Alipasino Polje, donc vous avez quitté le territoire controlé par l'ABiH le

16 28 mai 1994 ?

17 R. C'est exact.

18 Q. Après cette date, vous n'êtes plus revenu à Alipasino Polje, n'est-ce

19 pas ?

20 R. Oui. Pas pendant la guerre, mais seulement après la fin de la guerre

21 suis-je revenu sur place.

22 Q. A partir du 28 mai 1994 jusqu'à la fin du conflit en 1995, vous n'êtes

23 pas dès lors en mesure de pouvoir savoir ce qui s'est déroulé à Alipasino

24 Polje, n'est-ce pas ?

25 R. Effectivement.

26 Q. Je voudrais revenir à cette photographie que vous avez annotée tout à

27 l'heure.

28 M. SACHDEVA : [interprétation] Est-ce que cette pièce de la Défense 294

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1 pourrait nous être présentée à nouveau ?

2 Q. Vous voyez cette photographie projetée sur votre écran, n'est-ce

3 pas ?

4 R. Oui, effectivement.

5 Q. Cette zone de bâtiments à appartements, là où se trouvait votre

6 appartement, la zone que vous avez indiquée au cours de la période où vous

7 étiez là, c'était des civils qui habitaient dans ces appartements, n'est-ce

8 pas ?

9 R. Oui, en effet.

10 Q. En d'autres termes, nous parlons de femmes, d'enfants, de personnes

11 âgées; c'est ça, n'est-ce pas ?

12 R. Oui, oui, tout à fait.

13 Q. Vous avez tracé cette ligne rouge. Vous la voyez, n'est-ce pas,

14 Monsieur ?

15 R. Oui, je la vois.

16 Q. Mais sur cette photographie, si vous regardez en dessous de cette ligne

17 rouge, vous voyez alors un autre groupe d'immeubles à appartement. Est-ce

18 que vous voyez de quoi je parle ?

19 R. Oui, en effet.

20 Q. L'on peut dire également que dans ces blocs d'appartements habitaient

21 également des civils, n'est-ce pas ?

22 R. Oui, tout à fait.

23 Q. Peut-être pourrais-je vous demander d'annoter ou d'indiquer ces

24 immeubles à appartements, si vous le voulez bien.

25 M. SACHDEVA : [interprétation] Est-ce que l'huissier peut aider le témoin ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous parlez de quels appartements ?

27 Ceux-là ?

28 M. SACHDEVA : [interprétation]

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1 Q. Vous voyez où est la ligne rouge, n'est-ce pas ?

2 R. Oui.

3 Q. Vous voyez qu'en dessous de la ligne, il y a quatre blocs

4 d'appartements. Vous les voyez à gauche, deux à gauche et deux à droite.

5 Est-ce que vous les voyez ?

6 R. Oui.

7 Q. Pouvez-vous encercler ces tours d'appartements ? Ce serait très gentil

8 à vous.

9 R. [Le témoin s'exécute]

10 Q. Merci.

11 Alors --

12 M. SACHDEVA : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être est-il

13 l'heure de prendre la pause ? Est-ce que -- enfin, je voudrais aussi verser

14 au dossier cette photographie.

15 M. LE JUGE MINDUA : Je pense qu'il vaut mieux, sinon les marques vont

16 disparaître. Elle est admise.

17 Monsieur le Greffier.

18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, P812.

19 M. LE JUGE MINDUA : Je vous remercie.

20 Alors, je constate qu'il est 13 heures 45. Il est l'heure d'ajourner

21 l'audience, et je prie toutes les parties de revenir demain à 9 heures.

22 L'audience est ajournée.

23 --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le mercredi 11 juillet

24 2007, à 9 heures 00.

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