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1 Le lundi 23 juillet 2007
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Tapuskovic, ce matin, nous
6 allons entendre un témoin par conférence vidéo, n'est-ce pas ?
7 M. TAPUSKOVIC : [aucune interprétation]
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je suis désolé mais nous n'avons pas
9 cette traduction-là, l'anglais. Je n'ai pas de traduction vers l'anglais
10 donc je ne sais pas ce qui se passe.
11 L'INTERPRÈTE : L'interprète en anglais signale que le canal est rétabli.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien, alors Maître Tapuskovic,
13 je suis désolé de ce petit contretemps. Un peu trop de choses de gérer en
14 même temps, visiblement. Maintenant, vous pouvez y aller.
15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Tout d'abord, avant de commencer, j'ai
16 quelques informations à vous communiquer en ce qui concerne les cinq
17 prochains témoins qui vont être entendus d'ici jeudi. Je ne pense pas qu'il
18 n'y aura pas de problème pour cela. Mais je tiens à dire néanmoins, que
19 nous avons eu toujours au-dessus d'une coopération tout à fait excellente
20 de la part de la Section des Victimes et Témoins, coopération excellente
21 qui je suis sûr se poursuivra. Nous avons réussi à résoudre tous les petits
22 problèmes qui ont émergé au cours de ces derniers jours.
23 Le problème, par exemple, du témoin qui n'avait pas de passeport,
24 nous avons réussi à lui obtenir un passeport samedi. Il était censé venir
25 déposer vendredi. Le témoin T-57 aussi a créé quelques problèmes. Celui qui
26 a obtenu son passeport samedi, c'est le témoin T-25. Deux témoins que je
27 voulais interroger aujourd'hui devaient être ici le 21 juillet, samedi,
28 mais ils ne sont arrivés qu'hier soir, donc dimanche, après 21 heures.
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1 J'aurais voulu le récoler hier, mais je n'ai pas eu le temps de procéder à
2 la séance de récolement à cause de son arrivée trop tardive. Je n'ai rien
3 pu faire hier soir. En effet, il est interdit de procéder à un récolement
4 aussi tard après que le témoin ait voyagé dans la journée. Toujours est-il
5 que nous avons réussi à résoudre tous les problèmes, et je suis certain que
6 nous arriverons à entendre tous ces témoins d'ici jeudi. En revanche, pour
7 ce qui est d'aujourd'hui, après le témoin qui est sur la liste prévue pour
8 aujourd'hui, il n'y en a plus d'autre.
9 [La Chambre de première instance se concerte]
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, il semble que
11 les circonstances aient été contre vous, circonstances sur lesquelles vous
12 aviez fort peu de contrôle. De ce fait, les Juges comprennent bien dans
13 quelle position vous vous trouvez, mais nous voulons utiliser au mieux le
14 temps de prétoire. Il est quand même dommage que vous n'ayez pas de témoins
15 prévus après celui-ci. Mais je vous rappelle que notre dernière audience de
16 la semaine se tiendra jeudi puisqu'il n'y aura pas d'audience vendredi.
17 Cela dit, allons-y. Lançons la conférence vidéo en ce qui concerne le
18 témoin en l'espèce.
19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Cela dit, Messieurs les Juges, j'ai encore
20 une demande à faire. J'en ai déjà parlé à mon éminent confrère, M. Waespi.
21 Il ne s'agit pas d'un problème ayant trait au fait que nous n'ayons plus de
22 témoin après celui-ci pour aujourd'hui, mais de l'avis de la Défense, ce
23 témoin est essentiel. Nous avions demandé à obtenir une heure
24 d'interrogatoire pour chaque partie, MM. les Juges nous ont donné 30
25 minutes chacun, mais je tiens à vous dire que je vais avoir beaucoup de mal
26 à interroger ce témoin en seulement une demi-heure par vidéoconférence.
27 Nous allons redevoir regarder un clip vidéo qui durera cinq minutes. Il
28 faudra que nous versions certains documents. Nous devons poser des
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1 questions de contexte au témoin. Donc, je voulais savoir si nous pourrions
2 avoir un petit peu plus de temps en vidéoconférence. Je ne vous demande
3 absolument pas ça parce que nous n'avons pas de témoin après.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] De combien de temps avez-vous besoin
5 ?
6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Nous avons demandé une heure au départ,
7 donc si je pouvais avoir 30 minutes supplémentaires, ce serait parfait.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Je vois.
9 Madame Edgerton, êtes-vous d'accord, oui ou non ? Vous vous levez. Est-ce
10 pour contester ou pour confirmer ? Vous êtes d'accord ou non ?
11 Mme EDGERTON : [interprétation] Cela dit, je traiterai de ce témoin dans le
12 temps qui me sera imparti, mais je tiens à dire qu'une fois que le témoin
13 aura donné la déclaration solennelle, je soulèverai des objections à propos
14 de l'utilisation de la vidéo, ainsi que des objections à propos de
15 quelques-uns des documents.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Nous vous donnons une
17 heure, Maître Tapuskovic.
18 Il conviendrait maintenant que le témoin fasse la déclaration solennelle.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
20 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
21 LE TÉMOIN: MILOSAV GAGOVIC [Assermenté]
22 [Le témoin dépose par vidéoconférence]
23 [Le témoin répond par l'interprète]
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir.
25 Maître Tapuskovic, vous pouvez commencer à poser des questions.
26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci.
27 Interrogatoire principal par M. Tapuskovic :
28 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, bonjour.
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1 R. Bonjour, Maître Tapuskovic.
2 Q. Nous avons à être efficaces dans la mesure du possible, donc je vais
3 tout d'abord vous présenter à la Chambre de première instance. Me
4 comprenez-vous ?
5 R. Oui.
6 Q. Pourriez-vous nous donner votre nom, s'il vous plaît ?
7 R. Milosav Gagovic.
8 Q. Vous êtes né le 12 août 1938 ?
9 R. Oui. Est-ce que je parle trop vite ?
10 Q. Non, absolument pas. Vous êtes né à Pluzine au Monténégro ?
11 R. Oui.
12 Q. Vous êtes allé à l'école à Niksic au Monténégro en ce qui concerne
13 l'école primaire ?
14 R. Oui.
15 Q. Vous avez poursuivi vos études à Niksic en ce qui concerne l'école
16 secondaire ?
17 R. Oui.
18 Q. Vous avez obtenu un diplôme du lycée militaire de Sarajevo ?
19 R. Oui.
20 Q. Vous avez ensuite été à l'académie militaire de Belgrade où vous avez
21 étudié pendant quatre ans, ensuite vous avez obtenu votre diplôme ?
22 R. Oui.
23 Q. Vous avez été aussi diplômé de l'école d'état-major de Belgrade; il
24 s'agissait d'un cursus de deux ans ?
25 R. Oui.
26 Q. Vous êtes colonel à la retraite de la JNA, n'est-ce pas ?
27 R. Oui.
28 Q. A partir de 1968, vous avez travaillé et vous avez résidé à Sarajevo à
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1 l'école militaire; donc vous travailliez à l'école militaire et vous étiez
2 enseignant en ce qui concerne le service des armes ?
3 R. Oui.
4 Q. Lorsque la guerre a éclaté en Bosnie-Herzégovine, vous étiez adjoint du
5 commandement du 4e Corps en charge de la logistique ?
6 R. Oui.
7 Q. Le commandant du 4e Corps, votre commandant, était le général
8 Djurdjevac ?
9 R. Oui.
10 Q. Mon éminent confrère de l'Accusation va très certainement soulever des
11 objections à propos de la déposition de ce témoin puisqu'elle a bien
12 précisé qu'elle allait soulever des objections pendant votre témoignage,
13 donc il faut garder cela à l'esprit.
14 Mais, en attendant, Monsieur Gagovic, je pense que nous pouvons
15 poursuivre ce témoignage.
16 Q. Pourriez-vous brièvement nous parler de votre travail au sein de la JNA
17 lorsque le conflit a éclaté ? Déjà, pourriez-vous nous dire dans quelle
18 caserne vous étiez affecté ?
19 R. J'étais affecté au commandement du corps, comme vous l'avez dit,
20 j'étais commandant adjoint en charge de la logistique, j'occupais cette
21 fonction. Je faisais partie du collège du commandement du corps et, de ce
22 fait, je suis au courant de tout ce qui se passait au niveau du
23 commandement du 4e Corps.
24 Q. Merci. Le 10 mai, que s'est-il passé ?
25 R. Le 10 mai, j'ai été nommé représentant du commandant 4e Corps après que
26 le général Djurdjevac ait pris sa retraite.
27 Q. Merci, merci. Cela suffit je pense pour l'instant. Je vais poursuivre
28 en continuant à vous poser des questions. Monsieur Gagovic, vous venez de
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1 nous expliquer quel était votre travail. Pourriez-vous nous dire combien de
2 casernes il y avait à Sarajevo dans la zone de responsabilité du 4e Corps,
3 c'est-à-dire là où vous travailliez comme vous venez de nous le dire ?
4 R. Les casernes à Sarajevo se trouvaient à Lukavica sous le commandement
5 du 4e Corps. Les autres casernes, maréchal Tito, Jusuf Dzonlic, la caserne
6 de Jajce, la caserne Viktor Bujanj, la caserne Pazaric étaient des casernes
7 où étaient logées des unités appartenant à d'autres formations. Mais en ce
8 qui concerne la chaîne disciplinaire, ils étaient subordonnés au
9 commandement du 4e Corps, puisqu'il s'agissait du commandement le plus
10 élevé sur Sarajevo.
11 Q. Voici ma question suivante : Sarajevo était la capitale de Bosnie-
12 Herzégovine, Sarajevo possédait donc toutes ces casernes et j'imagine qu'il
13 y avait, bien entendu, des troupes qui étaient logées dans ces casernes.
14 Depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale jusqu'à l'époque qui nous
15 intéresse, donc dans les 40 ans qui se sont passés, la situation à Sarajevo
16 était-elle identique à ce qui se passait dans le reste de l'ex-Yougoslavie
17 ?
18 R. Oui, absolument, c'était absolument pareil.
19 Mme EDGERTON : [interprétation] S'il vous plaît --
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Une minute, Maître Tapuskovic, j'ai
21 une objection.
22 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, il me semble que cette question que
23 nous venons d'entendre est extrêmement directrice. Je veux qu'elle soit
24 reformulée.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez tout à fait raison, il
26 convient de la reformuler.
27 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
28 Q. Très bien, Monsieur Gagovic, pourriez-vous me dire, s'il vous plaît, la
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1 chose suivante : vous avez été affecté à Sarajevo depuis 1968 ?
2 R. Oui.
3 Q. En tant qu'officier ?
4 R. Oui.
5 Q. Depuis le moment où vous êtes arrivé à Sarajevo, donc en 1968 jusqu'à
6 l'époque qui nous intéresse, pourriez-vous nous dire s'il y a toujours eu
7 des troupes qui ont été logées dans les casernes ?
8 R. Oui. Il y avait des militaires qui étaient cantonnés à Sarajevo.
9 D'ailleurs, ces militaires bénéficiaient d'une très grande estime de tous.
10 Ils avaient contribué aux préparations du 14e Jeux d'hiver de Sarajevo. De
11 nombreux officiers avaient été récompensés par différences médailles de la
12 ville ou de la mairie. Ces militaires bénéficiaient vraiment d'une très
13 bonne opinion de la population.
14 Q. Très bien, mais est-ce que c'était la même chose dans tout le pays pour
15 ce qui est de l'armée ?
16 R. J'ai fais mon service en Slovénie et en Croatie, je suis allé à l'école
17 en Serbie, je suis né au Monténégro, j'ai servi en Bosnie-Herzégovine, j'ai
18 habité dans tout le pays et je peux vous dire que dans tout le pays l'armée
19 était toujours extrêmement bien vue.
20 Q. Très bien. Passons à 1991 puisque c'est à propos de cette année-là que
21 vous allez témoigner. En 1991 et au début de 1992, avez-vous appris ce qui
22 s'est passé en Slovénie et en Croatie par le truchement de votre chef de
23 commandement et au travers de votre poste ? Je voudrais savoir si vous avez
24 appris quoi que ce soit à propos de ce qui s'est passé en Slovénie et en
25 Croatie et ailleurs dans le pays, y compris en Bosnie-Herzégovine, mais pas
26 en ce qui concerne Sarajevo. Pouvez-vous nous dire --
27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Une minute. Ne répondez pas à la
28 question. Madame Edgerton, vous êtes debout, quelle est votre objection ?
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1 Mme EDGERTON : [interprétation] C'est un manque de pertinence qui fait
2 l'objet de mon objection.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, en effet. Quelle est la
4 pertinence de tout ceci, Maître Tapuskovic ?
5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je m'attendais à votre question. Je m'y
6 suis préparé. Tout d'abord, je tiens à faire référence au paragraphe 7 de
7 l'acte d'accusation, mais même au-delà d'ailleurs, j'aurais aimé appeler
8 beaucoup plus de témoins si j'avais contesté les faits convenus. Fait
9 convenu numéro 5, en juin 1991, le fait que la Slovénie et la Croatie ont
10 déclaré leur indépendance de la Yougoslavie, ensuite ont essayé d'obtenir
11 leur reconnaissance en tant qu'Etats souverains. Ceci a un impact sur la
12 Bosnie-Herzégovine. Il s'agit ici du paragraphe 5 du document portant sur
13 les faits convenus. On les trouve aussi dans le jugement au paragraphe 194.
14 Point 9 des faits admis qui peut être retrouvé au paragraphe 195 du
15 jugement, il est écrit ce qui suit : "Jusqu'à la fin de 1991, la JNA, donc
16 l'armée populaire de Yougoslavie, s'est retirée de la Slovénie et de la
17 Croatie et s'est dirigée vers des positions stratégiques en Bosnie-
18 Herzégovine."
19 Enfin, pour clarifier la chose totalement, je mentionnerai aussi le point
20 17 des faits convenus, au paragraphe qui correspond au paragraphe 196 du
21 jugement, où il est écrit : "En avril 1992, suite à la décision de la
22 présidence de Bosnie-Herzégovine, les unités loyales de la Défense
23 territoriale, avec les groupes paramilitaires des Croates de Bosnie, les
24 forces paramilitaires et les forces musulmanes ont été incorporées dans
25 l'armée de Bosnie-Herzégovine qui sera mentionnée par la suite dans le
26 texte comme étant l'armée de la BH." Voici la pertinence, c'est pour ceci
27 que ce témoin est pertinent. Il faut que je vous réfère à ces faits
28 convenus, ces faits établis qui sont essentiels pour comprendre ce qui
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1 s'est passé par la suite en Bosnie-Herzégovine.
2 Messieurs les Juges, je peux continuer à faire référence à d'autres
3 paragraphes qui sont tous mentionnés dans nos écritures, qui justifient
4 d'ailleurs la demande de citation du témoin que nous avons ici en l'espèce.
5 Il y a dix autres paragraphes qui confirment tout ceci, et tout ceci, bien
6 sûr, tout ceci a trait au paragraphe 7, aux faits établis qui sont
7 essentiels, et le témoin en espèce peut justement témoigner de ces faits.
8 [La Chambre de première instance se concerte]
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, il me semblait
10 que justement quand les faits sont admis, les faits sont convenus, il n'y a
11 pas besoin d'obtenir les dépositions à propos de ces faits étant donné que
12 les parties se sont mises d'accord sur ces faits ?
13 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Absolument pas. J'ai le droit de les
14 contester. C'est mon droit. Je dois contester ces faits, et par le biais de
15 ce témoin, je vais verser des documents au dossier qui justifient et qui
16 étayent tout ce qui a eu lieu pour ce qui est de la Slovanie et la Croatie.
17 Ces documents n'ont pas été employés jusqu'ici. Il s'agit ici
18 principalement du paragraphe 5 et du paragraphe 9, qui n'ont pas été
19 parfaitement reconnus dans le jugement Galic. En effet, les documents que
20 je dois présenter --
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous dites que vous devez contester
22 ces faits alors que vous avez vous-même convenu de ces faits avec l'autre
23 partie ?
24 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, pour comprendre le
25 contexte, il est écrit ici, il y a eu impact sur la Bosnie-Herzégovine,
26 ensuite, c'est le reste du texte. Je n'ai pas l'intention de contester
27 absolument chaque point, pour bien comprendre ce qui s'est passé, je dois
28 verser au dossier un certain nombre de documents qui illustrent
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1 parfaitement tout le problème. Il n'y a pas que ce point-là. Un grand
2 nombre d'autres faits ont vu le jour, c'est ces documents qui complètent la
3 scène et qui contestent de ce fait certains points qui ont déjà été
4 établis. Cela renforce certains points et cela remet en question d'autres
5 faits.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, bien sûr. Je comprends bien,
7 même si certains faits sont convenus, vous pouvez avoir envie de les
8 utiliser. Mais normalement, au départ, on se met d'accord sur certains
9 points, justement pour ne plus avoir à contester par la suite ces points.
10 Alors, Madame Edgerton, Me Tapuskovic nous dit qu'il est en train de
11 présenter tous ces éléments de preuve comme étant des preuves
12 contextuelles, des preuves qui permettent d'étayer le contexte qu'il
13 souhaite nous démontrer. Qu'en pensez-vous ?
14 Mme EDGERTON : [interprétation] Il dit peut-être cela en revanche dans son
15 argumentaire, avec tout le respect que je vous dois, Monsieur le Président,
16 il est plutôt en train de réutiliser les faits convenus. Par exemple, pour
17 ce qui est du fait convenu numéro 5, qui dit qu'en juin 1991 la Slovanie et
18 la Croatie ont déclaré l'indépendance de la Yougoslavie et ont essayé
19 d'obtenir reconnaissance en tant qu'Etat souverain, j'imagine qu'il est en
20 train d'essayer de contester le fait que la Slovanie et la Croatie ont bel
21 et bien déclaré leur indépendance de la Yougoslavie. Peut-être pourrait-il
22 clarifier sa position en matière de récusation.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais ce ne sont pas des faits
24 convenus ou des faits qui ont été admis dans le cadre d'autres procès,
25 "agreed" ou "adjudicated", en anglais ? Parce qu'il y a une différence.
26 Parce que vous avez, bien sûr, le droit de contester des faits convenus
27 dans le cadre d'autres procès. Qu'en est-il, Maître Tapuskovic ?
28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je traite de faits admis dans le cadre
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1 d'autres procès.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Lesquels ?
3 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] J'en ai énuméré certains. Le point 5, par
4 exemple, des faits admis dans le cadre d'autres procès, surtout vers la fin
5 de ce point 5, où il est écrit que tout ce qui a eu lieu en Slovanie a eu
6 un impact sur la Bosnie-Herzégovine. Ces documents, je peux vous en parler,
7 il y en a trois, ils traitent du fonctionnement de la présidence de la RSFY
8 à l'époque, qui était dirigée par Stipe Mesic. Dans ces documents, on voit
9 bien que certaines choses ont été annoncées, ensuite, ont été réalisées, et
10 qu'en Bosnie-Herzégovine, ils sont intervenus exactement de la même façon
11 qu'en Croatie et en Slovanie. Ces documents mentionnent bien tout cela, or
12 dans le jugement il n'y est pas fait référence. Mais ces documents
13 expliquent le contexte beaucoup plus large, mais de façon légale, puis il y
14 a aussi le problème de la transformation de la JNA.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Juste un instant, s'il vous plaît.
16 Dans le numéro 5 des faits admis dans le cadre d'autres procès, il est dit
17 que la Slovanie et la Croatie ont déclaré leur indépendance par rapport à
18 la RSFY en juin 1991. Pendant les mois qui ont suivis, ils ont essayé de
19 s'établir en tant qu'Etat souverain. Ce qui a eu une incidence sur la
20 Bosnie-Herzégovine.
21 Quel aspect de cela voudriez-vous contester par le biais de ce
22 témoignage ?
23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il y a beaucoup de choses qui
24 suivent après cela. Il y a beaucoup de faits qui sont énumérés ici. Je n'ai
25 pas l'intention de les lire. Je vous ai déjà dit que je peux énumérer
26 beaucoup d'autres faits, mais dans ces documents, dans une phrase courte,
27 il est dit : "Cela a eu une incidence sur la Bosnie-Herzégovine." Il y a
28 beaucoup de choses erronées dans cela qui n'ont pas été établies de façon
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1 correcte, et cela découle des documents dont j'ai l'intention de montrer au
2 témoin, parce qu'il en sait quelque chose.
3 Il y a beaucoup de faits qui ont été admis dans le cadre de d'autres
4 procès. Il y a également d'autres faits qui n'ont pas été admis et surtout
5 les faits qui montrent comment cela a eu une incidence sur la Bosnie-
6 Herzégovine, de tels faits n'ont pas été admis ici. Il y a beaucoup de
7 faits que je conteste en tant que conseil de la Défense, les documents que
8 j'ai l'intention de montrer au témoin pour les verser au dossier par le
9 biais de ce témoin, parce qu'il connaissait ces faits, contestent de
10 nombreux autres faits qui pourraient être utilisés contre l'accusé,
11 Dragomir Milosevic, dans cette affaire. Je devrais vous énumérer 20 ou 30
12 faits, mais je pense que ce n'est pas nécessaire si je vous explique le
13 contexte dans lequel ce témoin devrait témoigner et par rapport aux
14 documents dont il parlerait, peut-être, pour nous dire ce qu'il en est.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Juste un instant, s'il vous
16 plaît.
17 [La Chambre de première instance se concerte]
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons continuer de cette
19 façon, Maître Tapuskovic. Nous allons entendre vos propos par rapport au
20 témoignage de ce témoin par rapport aux éléments pour lesquels vous dites
21 quel contexte le numéro 5 dans les faits déjà admis dans le cadre d'autres
22 procès, ensuite nous allons procéder pas à pas, fait par fait.
23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Pour que la chose soit simple, je vous
24 prie de prêter attention sur le point 9 de ces admis dans le cadre d'autres
25 procès, où il est dit : "Jusqu'à la fin 1991, la JNA s'est retirée de
26 Slovanie et de Croatie et s'est dirigée vers les positions stratégiques en
27 Bosnie-Herzégovine." C'est peut-être un point-clé pour la Défense à
28 contester parce que cette armée s'est trouvée là-bas à partir de 1945
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1 jusqu'à l'éclatement du conflit et cette armée ne pouvait pas être retirée
2 dans la direction des positions stratégiques. C'est une chose qui est très
3 importante pour vous et le témoignage de ce témoin important, eu égard de
4 ces faits --
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En entendant le témoignage du
6 témoin, après quoi nous allons rendre notre décision pour ce qui est des
7 faits, c'est parfait pour ce qui est de l'admissibilité de ces faits.
8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
9 Q. Monsieur Gagovic --
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Puisque vous continuer ce type de
11 témoignage, vous devez nous dire quels sont les faits déjà jugés que vous
12 avez l'intention de compléter. Par exemple, vous avez mentionné le numéro
13 9, parmi les faits déjà jugés. Donc, il faut que vous mentionniez le fait
14 déjà jugé que vous contestez.
15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Ce sont les faits qui figurent aux points
16 5, 9 et 17. Mais avant tout, c'est le point 9. Puis-je continuer ?
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
19 Q. Monsieur Gagovic, d'où êtes vous arrivé au poste où vous étiez, et quel
20 était le nombre de membres de l'armée en 1968 ou en 1992 ? Le nombre de
21 membres de l'armée qui se trouvait là-bas. Pouvez-vous nous dire cela ?
22 Attendez un peu. Est-ce que vous êtes arrivé d'un autre endroit là-bas ou
23 vous y étiez en 1968 ? Avec qui vous étiez là-bas ?
24 R. En 1968, je suis arrivé à Sarajevo à l'école pour les officiers
25 d'infanterie de Rijeka, de Croatie. J'étais là-bas chef de compagnie et
26 j'ai été muté là-bas, à la chaire tactique au centre d'école militaire et
27 je suis resté à Sarajevo jusqu'en 1992. De temps à autres, je partais pour
28 suivre des formations à Belgrade, où j'ai suivi, par exemple, une formation
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1 des officiers d'état-major, après quoi je suis rentré pour travailler au
2 commandement du 7e District militaire à Sarajevo.
3 Q. Qui commandiez-vous ? Est-ce qu'il y avait des soldats là-bas ?
4 R. Je travaillais avec les élèves de l'école militaire secondaire. Il y
5 avait des soldats également qui servaient, après quoi j'ai été commandant
6 du régiment à Lukavica. Normalement, dans toutes les casernes il y avait
7 des soldats, il y avait des commandants et des chefs d'autres unités.
8 Q. Quel était à peu près le nombre de soldats dans un centre comme celui-
9 ci pendant toutes ces années ?
10 R. Il y en avait à peu près --
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Juste un instant.
12 Mme EDGERTON : [interprétation] Je ne soulève pas d'objection, mais
13 puisqu'il parle la même langue, Me Tapuskovic a parlé encore une fois avant
14 l'interprétation de la réponse en anglais. Il m'est difficile de suivre. Je
15 ne sais pas si cela représente un problème pour les autres dans le
16 prétoire.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, oui, c'est vrai.
18 S'il vous plaît, assurez à ce que vous ne chevauchez pas avec le témoin.
19 Maître Tapuskovic et Monsieur le Témoin, s'il vous plaît, ménagez une pause
20 entre les questions et les réponses.
21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
22 Q. Monsieur le Témoin, quel était le nombre de soldats dans de tels
23 centres, par exemple, à Sarajevo, qui faisaient leur service militaire ?
24 R. Il y en avait entre 3 000 et 4 000. Cela dépendait de chaque génération
25 qui sortait. Il y en avait qui était en année terminale de l'école
26 militaire.
27 Q. Est-ce que la motivation prévalait en Croatie, en Slovénie, en
28 Macédoine, en Monténégro, dans les écoles militaires et dans d'autres
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1 républiques de l'ancien Etat ?
2 R. Oui. Normalement, c'est ce que j'ai dit au début, à Rijeka, en
3 Slovénie, à Crnomelj, à Sarajevo. Partout, il y avait des unités de la JNA
4 de structures différentes, et d'organisations différentes ainsi que de
5 spécialisations différentes.
6 Q. Pouvez-vous dire aux Juges ce que vous avez appris par rapport à 1991
7 et 1992, pour ce qui est de la situation qui prévalait en Slovénie, en
8 Croatie et dans certaines parties de la Bosnie-Herzégovine ?
9 R. Je dirais qu'il s'agissait du démantèlement du système monopartite. En
10 1990, l'armée a été enfermée dans les casernes et ne s'occupait que de ses
11 propres questions. En 1991, nous avons appris une partie du peuple slovène,
12 la même situation, ou presque la même situation, était en Croatie et plus
13 tard en Bosnie Herzégovine. Donc, une partie du peuple slovène ne s'est pas
14 comportée de façon correcte envers les membres de la JNA. Par la
15 déclaration de l'indépendance de Slovénie en tant que république
16 indépendante, on peut dire que le blocus des casernes a commencé. Il n'y
17 avait plus d'électricité ou d'eau dans la caserne. Il n'y avait pas de
18 ligne téléphonique non plus. Il y avait des familles des supérieurs, dans
19 le cadre de la JNA, qui ont été maltraitées. Notre commandement supérieur
20 nous envoyait des informations du 1er District militaire, ainsi que de la
21 direction politique, ainsi qu'en s'entretenant directement avec nos
22 collègues qui servaient en Slovénie, à savoir en Croatie, et qui étaient
23 toujours avec nous au commandement de corps. Il y avait des Musulmans, des
24 Croates, des Slovènes et des Serbes, des membres de tout groupe ethnique.
25 Q. Merci.
26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton ?
27 Mme EDGERTON : [interprétation] Il faut que je vérifie que j'ai bien
28 compris. Ici, il ne s'agit pas du tout de Sarajevo, n'est-ce pas, il ne
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1 parle pas du tout de Sarajevo ?
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Témoin, de quoi
3 parlez-vous ? Est-ce que cela concerne Sarajevo ou autre chose ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne parle pas encore de la situation à
5 Sarajevo. Cette situation prévalait en 1992. Cette situation dont je parle
6 prévalait d'abord sur le territoire de la Slovénie, plus tard sur le
7 territoire de la Croatie. Seulement en 1992, cette situation prévalait à
8 Sarajevo, à savoir sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine.
9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
10 Q. Mme Edgerton a réagi avec raison. Elle a cherché une explication de
11 cela, mais vous avez parlé de tout cela, de ce que vous avez appris jusqu'à
12 un moment donné et qu'est-ce que vous avez appris par rapport au destin
13 réservé aux soldats de la JNA en Slovénie et en Croatie ?
14 R. La situation la plus difficile était quand nous avons appris que
15 certaines unités en Slovénie ont été attaquées avec des armes. Surtout des
16 unités se trouvant sur les frontières, ensuite des unités dans de petites
17 garnisons, et dans de grandes garnisons les casernes ont été bloquées et
18 les unités également. Il n'y avait pas d'électricité, d'eau dans les
19 casernes. Tout cela a fait que les membres de la JNA --
20 Q. Merci. Vous parlez de l'électricité et de l'eau. Est-ce qu'il y avait
21 des pertes ou des victimes ?
22 R. Il y avait des victimes. Je ne connais leur nombre exact, je pense plus
23 de 46.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Arrêtez-vous, s'il vous plaît.
25 Madame Edgerton ?
26 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, je viens de
27 parcourir les faits admis dans le cadre d'autres procès et il n'y a aucune
28 mention de témoignage qui pourrait avoir trait au blocus ou attaque sur les
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1 casernes en Slovénie et ce dont nous parlons maintenant. Donc, cela ne peut
2 pas concerner les faits déjà jugés et ce n'est pas pertinent.
3 [La Chambre de première instance se concerte]
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Tapuskovic ?
5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
6 Q. Pour que tout soit clair, dites-moi --
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, je vous invite à
8 répondre à l'objection soulevée par Mme Edgerton, après quoi je vais rendre
9 ma décision.
10 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] A la fin, il a dit, entre autres, que les
11 soldats ont été tués, et que 46 soldats ont été tués en Slovénie. Je
12 voulais lui poser des questions pour voir ce qui se passait en Bosnie-
13 Herzégovine au début de l'année 1992. Est-ce que les mêmes choses se sont
14 passées ou pas ? Je donc procède pas à pas dans mon travail. Je procède
15 ainsi et je ne pourrais pas lui demander tout de suite quel était le nombre
16 de soldats qui ont été tués à Sarajevo, s'il y en avait, et quel était le
17 lien de ce qui s'est passé à Sarajevo avec ce qui s'est passé en Slovénie ?
18 Je procède ainsi progressivement. Maintenant, je voudrais lui poser des
19 questions concernant les événements qui se sont passés à Sarajevo, pour
20 savoir si le témoin savait quelque chose. Est-ce que c'était la même chose
21 à ce qui s'est passé en Slovénie ? Est-ce que la même chose s'est passée
22 sur les rues de Sarajevo ? Monsieur le Président, je dois procéder comme
23 cela, pas à pas.
24 [La Chambre de première instance se concerte]
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Maintenant, s'il vous
26 plaît, posez des questions au témoin, des questions qui concernent
27 Sarajevo.
28 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
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1 Q. Monsieur Gagovic, dites-nous, s'il vous plaît, après tout ce qui s'est
2 passé et dont vous avez parlé, dites ce qui s'est passé à Sarajevo en mars,
3 en février, et surtout en avril 1992, et ce qui concerne l'armée en
4 particulier ?
5 R. A Sarajevo et en Bosnie-Herzégovine, le scénario qui s'est passé était
6 presque le même que celui en Slovénie et en Croatie. D'abord, il faut que
7 je dise que la JNA a conclu un accord avec le gouvernement de la Bosnie-
8 Herzégovine, selon lequel il fallait former la police mixte, la police
9 militaire et la police civile, qui contrôlerait tous les véhicules à moteur
10 et tout ce qui se déplaçait --
11 Q. Monsieur Gagovic, je vous prie de dire ce qui s'est passé en avril,
12 l'événement le plus important, lorsqu'il s'agit de l'armée et en mars
13 également. Les aspects politiques, nous les avons par écrit. En tant que
14 commandant, dites-nous ce que vous avez vécu avec les soldats en mars et en
15 avril ?
16 R. Je ne voulais que mettre un lien à l'accord qui a été appliqué jusqu'au
17 2 mai 1992. Les événements qui se sont produits et qui ont été causés par
18 les forces paramilitaires en Bosnie-Herzégovine et en Sarajevo en mars, il
19 n'y en avait pas. Mais le HVO de Croatie à Slavonski Brod, ils sont passés
20 sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine et de Neum vers Stolac [phon] en
21 Bosnie-Herzégovine, et certains groupes de forces paramilitaires les ont
22 rejoints. Par exemple, c'était à Gorazde, à Bijeljina.
23 Q. S'il vous plaît, Monsieur Gagovic, nous avons peu de temps. Dites-nous
24 ce qui s'est passé dans les rues de Sarajevo en mars et avril ? Répondez à
25 ma question de façon directe.
26 R. En mars et en avril, dans les rues de Sarajevo, il n'y avait pas de
27 conflits entre les forces paramilitaires de Bosnie-Herzégovine et la JNA.
28 En mars et en avril, il y avait des conflits avec les forces qui sont
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1 arrivées de la Croatie sur le territoire de Bosnie-Herzégovine. Dans la
2 ville même, certaines structures paramilitaires ont liquidé certains
3 citoyens d'appartenance ethnique serbe parmi lesquels se trouvaient Nikola
4 Gardovic, qui était un témoin de noces, Pedja Mocevic [phon], un sportif,
5 Pero Perovic, un policier, ensuite les frères Trifunovic, et cetera. En
6 mai, seulement, il y avait des conflits, si cela vous intéresse.
7 Q. Dites-nous ce qui s'est passé en mai ?
8 R. En mai, le 2 mai, j'ai dit qu'un accord a été conclu avec le MUP selon
9 lequel toutes les unités devaient annoncer leur déplacement, et ce jour-là
10 les unités d'intendance qui approvisionnaient en nourriture le district
11 militaire sont parties de la caserne Viktor Bubanj dans la direction de
12 Bistrica, où se trouve Bistrik, où se trouvait le bâtiment où se trouvait
13 le commandement du district militaire. A Skenderija, il est tombé dans une
14 embuscade des unités paramilitaires. En fait, c'était déjà des unités
15 militaires et en même temps la maison de l'armée a été attaquée. Les
16 casernes et l'hôpital militaire ont été bloqués et l'attaque a été menée
17 dans la direction de l'aéroport de Butmir.
18 Q. Merci. Maintenant, je veux qu'on diffuse une vidéo, mais il s'agit de
19 cinq minutes d'une vidéo qui dure 55 minutes au total, pour vous poser des
20 questions après ?
21 R. Oui.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton, vous nous avez
23 promis des objections ?
24 Mme EDGERTON : [interprétation] Absolument. Le Procureur a reçu cette vidéo
25 vendredi dernier, l'après-midi, à 5 heures [comme interprété] de l'après-
26 midi. La vidéo dure 55 minutes, et il n'y a pas un seul mot qui est traduit
27 en anglais. Nous avons reçu cela tard dans la soirée. Nous avons reçu
28 également des indications pour ce qui est du temps, des parties de la vidéo
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1 que le conseil de la Défense veut montrer au témoin. Donc, je dois admettre
2 que nous n'étions pas en mesure de visionner cette partie, et mon objection
3 est la suivante : il ne faut pas utiliser cette vidéo pour deux raisons. La
4 première raison est qu'elle a été annoncée très tard et ce n'était pas sur
5 la liste des pièces à conviction de la Défense, et également pour ce qui
6 est de la non-pertinence de cette vidéo par rapport à la responsabilité
7 individuelle criminelle de l'accusé dans cette affaire.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourriez-vous nous donner un
9 exemple, pour que nous puissions voir pourquoi ce n'est pas pertinent. Ou
10 bien nous pouvons quand même regarder cette vidéo ?
11 Mme EDGERTON : [interprétation] Nous pouvons faire les deux. Cela concerne
12 le meurtre d'un certain nombre des soldats de la JNA le 2 ou le 3 mai 1992
13 à Sarajevo. Mais sans traduction, je ne peux que deviner tout cela en se
14 basant sur les images qui défilent sous mes yeux.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous dites que cette
16 vidéo concerne le meurtre de soldats de la JNA en mai 1992 ? Maître
17 Tapuskovic -- c'est à Sarajevo.
18 Mme EDGERTON : [interprétation] Aux fins du compte rendu, Monsieur le
19 Président, nous ne contestons pas que cela se soit passé. Ça fait partie
20 des faits admis dans le cadre d'autres procès. Si vous m'accordez quelques
21 instants, je peux vous énumérer ces faits. Ce sont les numéros 29, 30, 31
22 et 32, et l'Accusation ne conteste aucunement qu'il y avait eu des soldats
23 de la JNA qui ont été tués dans le contexte des combats qui ont eu lieu ces
24 jours-là.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, concentrons-nous
26 maintenant sur les deux bases sur lesquelles l'objection est fondée.
27 D'abord, vous avez informé très tard l'Accusation de cette vidéo, ensuite,
28 il n'y a pas de traduction de la transcription de la vidéo, et la
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1 pertinence de la vidéo.
2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons
3 communiqué cela vendredi à l'Accusation. C'est peut-être le seul cas au
4 cours de tout ce procès que quelque chose soit communiqué dans un délai de
5 trois jours avant que la pièce à conviction ne soit présentée. Nous avons
6 parlé avec le Procureur vendredi, et je pense samedi. Leur objection était
7 la durée de la vidéo, à savoir 55 minutes, nous avons dit que de cette
8 vidéo de 55 minutes, seulement cinq minutes et 50 secondes seraient
9 projetées, et que nous leur enverrions la transcription de la vidéo. Nous
10 avons déjà communiqué au service de traduction la transcription qui fait à
11 peu près deux pages et demie, c'est un ordre. Il y a une réplique
12 d'introduction très brève concernant ce que dit le commentateur, et le
13 reste représente les ordres authentiques de ceux qui ont dit d'incendier
14 tout avant que la FORPRONU n'arrive sur place. Ce sont les documents
15 authentiques concernant l'événement du 2 mai, il y a peut-être quelque
16 chose qui s'est passé ces jours-là. Mais il s'agit de documents
17 authentiques, il y a également une bande audio et on peut entendre
18 certaines gens qui ordonnent d'incendier, de détruire tout avant que la
19 FORPRONU n'arrive sur place.
20 C'est un document qui mérite absolument votre attention, et mis à part ce
21 dont Mme Edgerton a parlé, à savoir le paragraphe 29 - il ne faut pas que
22 j'énumère les autres - où le 2 mai est mentionné, où M. Izetbegovic était à
23 Lisbonne pour les pourparlers et qu'une grande attaque a été menée contre
24 le centre de Sarajevo. Dans la vidéo, vous allez pouvoir voir qui a mené
25 cette attaque en s'appuyant sur les documents authentiques. Et je peux vous
26 citer d'autres paragraphes qui concernent cela, par exemple les paragraphes
27 27, 29 et 44. Il ne faut pas que je les lise ici. Je vous ai cité le
28 paragraphe 29.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Juste quelques instants, s'il vous
2 plaît. J'ai ici le paragraphe 29 des faits admis. Il est dit ici que le 2
3 mai 1992, une attaque majeure de la JNA a été menée sur le centre de
4 Sarajevo. Cela a eu lieu alors que le président Izetbegovic se trouvait à
5 Lisbonne pour des négociations. Vous voulez contester ceci en disant quoi
6 exactement ? Quoi ? Vous ne voulez pas réfuter ceci ?
7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Non, en fait, j'essaie de réfuter ceci
8 "une grande attaque a été lancée contre Sarajevo." Oui, mais par les
9 paramilitaires, et c'est ce qu'on peut voir sur la vidéo, et c'est ce qui
10 figure dans les documents. Mais il n'y a pas eu d'attaque lancée par la JNA
11 tel qu'on le suggère ici. Donc, au nom de la Défense, je souhaiterais
12 démontrer que l'attaque a été menée par les paramilitaires, et on peut très
13 bien voir comment les soldats ont été tués, et que l'on a incendié
14 Sarajevo, et on peut voir ce qui a été fait.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Et bien, c'est ce que vous réfutez
16 alors, n'est-ce pas ? C'est ce que vous réfutez en essayant de montrer que
17 l'attaque n'a pas été menée à bien par la JNA mais bien par les forces
18 paramilitaires, n'est-ce pas ? C'est ainsi que je comprends vos propos,
19 n'est-ce pas ? Vous dites, oui, il y a eu une attaque, effectivement, mais
20 cette dernière n'a pas été menée par la JNA, mais bien par les
21 paramilitaires. Cette séquence vidéo peut appuyer votre thèse, n'est-ce pas
22 ?
23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui. Entre autres.
24 [La Chambre de première instance se concerte]
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons entendre la séquence;
26 puisqu'il n'y a pas de traduction et comme le clip n'est pas très long,
27 nous allons écouter l'interprétation.
28 Est-ce que vous avez les transcripts ? Est-ce que vous avez quelque
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1 traduction que ce soit ?
2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] DD004360, les interprètes peuvent suivre
3 et interpréter, puisque c'est le transcript que nous avons pris de la
4 séquence vidéo. Nous avons transcrit la séquence vidéo. Et ce document se
5 trouve également sur le prétoire électronique.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] De quelle façon est-ce que les
7 interprètes pourront interpréter ceci ? Est-ce que vous aimeriez que le
8 document soit placé sur le rétroprojecteur simplement pour comprendre
9 comment -- question technique, peut-être.
10 Les interprètes l'ont déjà. Très bien, alors. Vous pouvez présenter la
11 séquence. Les interprètes ont le document en B/C/S. Très bien, donc ils
12 vont interpréter à partir du B/C/S. Madame Edgerton ?
13 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, pour ce qui est de
14 l'Accusation, d'entendre les arguments présentés par Me Tapuskovic et
15 d'apprendre plus que je ne l'aurais appris en examinant la séquence vidéo,
16 cela de nouveau renforce mon objection quant à la pertinence, et les
17 problèmes qui surgissent de ceci, s'agissant du fait que nous estimons
18 qu'il n'est pas juste envers l'Accusation d'entendre ou de visionner cette
19 séquence vidéo car nous n'avons pas eu suffisamment de temps pour nous
20 préparer.
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En fait, Me Tapuskovic a déjà établi
22 les bases selon lesquelles il souhaite nous présenter cette vidéo, il se
23 servirait de cette séquence vidéo pour réfuter le point admis numéro 29,
24 selon lequel on dit qu'une attaque de la JNA de grande envergure a été
25 menée contre le centre de Sarajevo. Et il dit que cette vidéo peut
26 démontrer que cette attaque n'avait pas été menée par la JNA, mais bien par
27 les groupes paramilitaires. Si la vidéo ne nous montre pas cela, nous
28 allons l'exclure des éléments de preuve. Pour ce qui est de cette
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1 communication tardive, je souhaiterais vous dire, Madame Edgerton, que je
2 vais m'assurer qu'aucun préjudice ne soit fait contre vous, je vais traiter
3 de ce problème en temps et lieu. Vous pouvez présenter la séquence. Nous
4 vous écoutons.
5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Le numéro est le DD00 -- voilà, c'est le
6 clip. Où est le son ?
7 [Diffusion de la cassette vidéo]
8 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
9 "En Bosnie-Herzégovine, depuis 1992 et plus loin, on a été exposés à
10 des pressions et des attaques par les paramilitaires. Ces paramilitaires,
11 même s'ils nient l'auto-organisation, étaient organisés par l'ABiH, c'est-
12 à-dire par le SDA comme étant le représentant le plus important du peuple
13 de Bosnie-Herzégovine. Dans Oslobodjenje de Sarajevo du 14 septembre 1992,
14 l'adjoint du ministre de la Défense de Bosnie-Herzégovine, Mole Bisic
15 [phon] a déclaré que déjà au mois de mai 1991, on a créé la Ligue
16 patriotique comme étant une organisation illégale dans laquelle on a
17 compris toutes les formations paramilitaires. Et dans le journal Nacional -
18 -"
19 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Arrêtez, je vous prie,
21 quelques instants. Maître Tapuskovic, il faut essayer d'établir des bases.
22 Qui parle d'abord, dites-nous ? Quand est-ce que cette séquence vidéo a été
23 tournée ? Et qui a tourné cette vidéo ?
24 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Cette vidéo a été tournée -- en fait c'est
25 la voix du commentateur, de la personne qui commente. On peut exclure la
26 voix si vous le souhaitez, il n'est absolument pas nécessaire d'entendre la
27 voix. Mais ce n'est pas quelque chose que nous pouvions enlever. Tout le
28 contenu sonore de cette séquence sont des ordres que quelqu'un donne,
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1 demandant de : "Incendier, de tuer et de prendre des démarches concrètes."
2 C'est un documentaire qui a été fait, je n'essaie pas de vous montrer tout
3 le film, je souhaite simplement montrer ce qui a été filmé le 2 mai à
4 Sarajevo lorsque les soldats ont été tués. Il y a eu un grand nombre de
5 soldats, donc ce sont des documentaires, ce sont des séquences
6 authentiques.
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais qui fait ce documentaire
8 ? Vous dites que le documentaire est authentique, mais qui en est l'auteur
9 ? Comment pouvons-nous savoir qui parle ? Comment pouvons-nous identifier
10 le commentateur ?
11 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] La voix vient de la personne qui commente
12 le film. Mais les voix qu'on entend telles que : "Tue, incendie" c'est une
13 voix inconnue que l'on entend sur cette séquence vidéo. C'est un film qui a
14 été tourné par le ministère de l'Intérieur de la Republika Srpska, c'est
15 l'équipe chargée de l'enquête et de documenter les crimes de guerre.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quand est-ce que ceci a été tourné;
17 le savez-vous ?
18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Ça été tourné le jour en question alors
19 que l'ensemble du film, la durée du film de 53 minutes contient des
20 déclarations de plusieurs autorités. Il y a Ganic qui donne des
21 déclarations, il y a des déclarations d'Izetbegovic ainsi que plusieurs
22 autres personnes. J'ai choisi en tant que conseil de la Défense que les
23 parties documentaires qui parlent par elles-mêmes. Je n'ai pas du tout
24 inclus de déclarations. Ce sont des éléments d'ordre documentaire qui ont
25 été faits par l'équipe chargée de mener des enquêtes sur les crimes de
26 guerre commis pour le ministère de l'Intérieur de la Republika Srpska. Tout
27 ceci a déjà été contenu par le ministère de l'Intérieur et c'est eux qui
28 m'ont communiqué d'ailleurs cette vidéo.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Nous allons entendre la
2 séquence vidéo et nous allons nous faire une évaluation par la suite. Je
3 vous prie, de poursuivre.
4 [Diffusion de la cassette vidéo]
5 L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine française précise qu'il n'y a pas
6 de texte pour cette séquence-ci, mais elle va faire de son mieux pour
7 essayer de voir ce qui est dit.
8 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
9 "Il semblerait qu'il y a quelqu'un derrière le bâtiment, il y a
10 quelqu'un sur le tramway, derrière, donc sous le premier tramway, il
11 semblerait qu'il y a encore quelqu'un là-bas près du bâtiment du syndicat
12 derrière la colonne.
13 OSA demande urgemment de lui envoyer des personnes avec des lance-roquettes
14 très rapidement, il nous faut des renforts. L'armée est bloquée dans la rue
15 Valter Peric tout près de l'hôtel Zagreb vers Skenderija, tout près du
16 Tribunal. La FORPRONU se dirige vers l'hôtel de Zagreb. La FORPRONU se
17 dirige vers l'hôtel Zagreb et ils vont arriver très bientôt pour
18 l'anéantir, l'anéantir avant qu'il n'arrive, avant que la FORPRONU n'arrive
19 à l'hôtel Zagreb. Ils sont quelque part là.
20 Il faut préparer, attendre le commandement, vous allez recevoir un ordre.
21 Pour l'instant, préparez-vous.
22 Message de Zagi pour toutes les unités, toutes les unités mobiles, il
23 faut anéantir l'ennemi, préparer tous les cocktails Molotov et tout
24 incendier. Je répète, tous les véhicules mobiles. Il faut anéantir l'ennemi
25 et préparer tous les cocktails Molotov, c'est un commandement de Zagi, un
26 ordre de Zagi.
27 Ils ont probablement emmenés comme des prisonniers de guerre les soldats.
28 Nous ne pouvons pas retrouver les soldats maintenant."
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1 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
2 Mme EDGERTON : [interprétation] Je suis vraiment désolée, j'ai vu le
3 général MacKenzie parler, mais je n'ai pas entendu l'interprétation.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Y a-t-il eu une traduction de ce que
5 cette personne disait ? Je ne l'ai pas identifiée du tout comme l'a fait
6 Mme Edgerton.
7 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Cela aurait été fort utile pour la
8 Défense, mais je n'ai pas voulu vous embêter avec ceci. En fait, cela n'a
9 été dit que pendant quelques secondes, mais je voulais que l'on passe
10 immédiatement sur ces soldats qui sont prisonniers. En fait l'essentiel
11 ici, c'est de voir ce qui s'est passé avec les soldats et de quelle façon
12 ces derniers ont été traités, quel est le traitement qu'on leur a accordé.
13 Mais c'est la fin du film, je n'ai plus beaucoup de séquences à vous
14 montrer.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous aimeriez en montrer
16 plus ? Qu'est-ce que vous avez dit ? Voyons ce que vous avez à nous
17 présenter.
18 [Diffusion de la cassette vidéo]
19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, voilà c'est
20 l'extrait vidéo que je voulais vous montrer. Vous avez vu à la fin, dès que
21 l'attaque s'est terminée, que tous les soldats ont été emmenés et ont été
22 placés en captivité. Comme ceci, sur leurs manches, vous pouviez voir qu'il
23 s'agissait d'unités paramilitaires. Vous avez très bien vu de quelle façon
24 ils ont été tirés ce jour-là, le 1er mai, et vous avez bien vu ce qui s'est
25 passé à Sarajevo ce jour-là. Vous avez vu qui a donné l'ordre que l'on
26 incendie cette ville. Vous avez entendu : Anéantir, tuer. On entend les
27 ordres donnés, mais nous ne pouvons pas savoir qui --
28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce qu'on peut savoir qui a donné
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1 ces ordres ? Nous avons entendu les voix. Nous n'avons entendu que des
2 voix, c'est un mystère. Nous devons vous croire sur parole, est-ce que
3 c'est cela ?
4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, il ne faut pas
5 nécessairement savoir -- enfin le document parle par lui-même. On peut très
6 bien voir qui tire depuis les fusils à lunette qui tirent depuis les
7 tromblons et qui tuent et qui incendient. Je veux dire que si un document
8 comme celui-ci peut-être contesté, dans ce sens-là, si vous ne voulez pas
9 vous servir de ce document en tant que document alors que ce document se
10 trouve déjà entre les mains des tribunaux compétents en Bosnie-Herzégovine,
11 il s'agit de documents officiels d'une partie de la Fédération de Bosnie-
12 Herzégovine. Ce document a déjà été versé au dossier contre les personnes
13 accusées. Il y a des personnes qui sont accusés devant les tribunaux. Il y
14 a environ 300 personnes en Bosnie-Herzégovine que l'on juge maintenant pour
15 ces activités.
16 C'est un document officiel de la Republika Srpska qui a été remis
17 entre les mains des tribunaux compétents. Je le répète, des procès sont
18 intentés contre ces personnes, les auteurs de ces crimes. Je ne peux pas
19 vous présenter tous les actes d'accusation. J'ai tous les noms et les
20 prénoms des personnes contre lesquels des actes d'accusation existent.
21 C'est un document qui parle par lui-même. Ce film est un document qui parle
22 par lui-même s'agissant des événements du 1er mai. On peut très bien savoir
23 ce qui s'est passé. Il serait fort utile d'écouter les 53 minutes de cette
24 vidéo, mais je n'ai pas voulu les demander, bien sûr.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Comment pouvons-nous savoir qui sont
26 les auteurs de ces crimes en examinant cette vidéo ? Vous savez, j'ai
27 besoin d'aide. Nous ne pouvons pas voir de qui il s'agit exactement.
28 Comment pouvons-nous savoir ?
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1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous voulez,
2 nous pouvons arrêter le film à certaines indications --
3 M. LE JUGE MINDUA : Vous savez très bien qu'en ce qui concerne justement
4 les films, les vidéos, les images, tout est possible. Il y a des choses
5 vraies, puis il y a des choses fabriquées. Il y a des montages et des
6 manipulations, et cetera. Devant cette Chambre, très souvent nous avons eu
7 aussi des extraits vidéo. Nous avons toujours demandé qui a tourné le film
8 et parfois nous avons eu ici devant nous les journalistes qui eux-mêmes ont
9 tourné les images pour nous expliquer où et quand ils ont tourné ces
10 images. Aujourd'hui, nous avons un extrait vidéo avec des soldats portant
11 des insignes de l'ABiH. Ce qui est très bien, mais qui a tourné ces images
12 ? Quand ? A quelle occasion ? Nous avons vu plusieurs images se succéder.
13 Est-ce que ce sont des montages de plusieurs années ou jours de différence
14 ou les événements se sont passés le même jour ? Jusque-là nous ne savons
15 pas.
16 Puisque vous dites que c'est un document qui émane du ministère de
17 l'Intérieur de la Republika Srpska, j'imagine que le ministère peut nous
18 donner l'identité de la personne ou de l'institution qui a tourné les
19 images avec ces soldats portant les insignes de l'ABiH. Comme cela la
20 Chambre sera édifiée, parce que voyez-vous lorsque ces images ont été
21 tournées au milieu des soldats de l'ABiH portant ces insignes, j'ai de la
22 peine à croire que c'est un soldat de la Republika Srpska qui s'est
23 installé au milieu d'eux en train de tourner et les soldats de l'ABiH
24 étaient consentants. Donc nous aimerions bien savoir qui a tourné les
25 images.
26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, effectivement nous
27 avons un témoin.
28 [La Chambre de première instance se concerte]
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1 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Un instant, Maître Tapuskovic. Nous
2 aimerions bien vous suivre et nous aimerions, bien sûr, suivre votre pensée
3 et votre façon de présenter vos arguments. Mais la raison pour laquelle
4 vous aimeriez nous montrer cette séquence vidéo est pour réfuter les faits
5 qui sont étalés au fait admis 29, ici on dit que le 2 mai 1992, une attaque
6 de la JNA de grande envergure a été lancée à Sarajevo. Vous nous dites que
7 ce n'était pas une attaque qui a été menée par la JNA, mais bien par les
8 forces paramilitaires associées à l'armée bosnienne, si je vous ai bien
9 compris.
10 Voici ma difficulté. Je ne peux pas conclure cette affirmation de par la
11 présentation de la vidéo, parce que je ne peux pas voir qui a lancé
12 l'attaque. Ce que j'ai vu sur cet extrait vidéo, j'ai vu des soldats qui
13 combattaient et, effectivement, ils portaient des insignes de forces
14 paramilitaires associées à l'armée bosnienne, mais je ne peux pas conclure
15 qu'il s'agissait de l'ABiH qui a mené cette attaque. Cela aurait bien pu
16 être la JNA qui aurait relancé l'attaque. J'ai vu des soldats combattre, et
17 à la fin, j'ai vu des prisonniers qui suggèrent, peut-être, que cette
18 bataille a été perdue par la JNA, que la JNA a perdu cette bataille, mais
19 je ne peux pas en être sûr. J'ai du mal à accepter ce que vous essayez de
20 prouver, de me démontrer.
21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, s'agissant de cet
22 événement du 2 mai, un très grand nombre de personnes ont parlé de ces
23 événements. C'est le jour, vous vous rappelez, quand la JNA essayait de
24 sortir d'une caserne. En fait, c'est ce qui est arrivé. Ce document est un
25 document que je vous ai présenté tel qu'il est. Vous pouvez, bien sûr,
26 poser la question quant à l'authenticité de ce document. Je ne sais pas
27 quelle sera votre décision, mais nous avions déjà vu des extraits de
28 l'attaque de Markale, nous avons vu des clips ou des photographies
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1 s'agissant des tirs qui ont eu lieu sur la présidence. Le Procureur a
2 montré un très grand nombre d'éléments de ce type, même si nous nous sommes
3 opposés à ces documents, car nous ne savions pas où les photos avaient été
4 prises, où les films ont été tournés.
5 Pour la première fois, nous vous montrons un document qui parle pour
6 lui-même. Nous ne voyons pas où on a tiré, enfin, on voit que l'on a tiré
7 depuis les coins de rue, on a incendié, on détruisait tout ce qui se
8 trouvait aux alentours. Un ordre a été reçu d'incendier tout. Vous avez vu
9 l'armée dans quel état elle se trouvait lorsqu'elle a été capturée. Les
10 images montrent très clairement, par elles-mêmes, de quelle façon la vie à
11 Sarajevo se déroulait, de quelle façon ces groupes paramilitaires
12 agissaient. Si vous voyez, par exemple, la personne qui tient un fusil à
13 lunette, vous verrez que cette personne arborait sur sa personne des
14 insignes dont les mots sont en turc.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Maître Tapuskovic.
16 [La Chambre de première instance se concerte]
17 LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce clip vidéo sera versé au
18 dossier. La Chambre jugera de l'importance ou du poids qui sera accordé à
19 cette séquence vidéo quant au contenu dû au clip vidéo. On va prendre une
20 pause maintenant.
21 --- L'audience est suspendue à 10 heures 29.
22 --- L'audience est reprise à 10 heures 52.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, c'est à vous,
24 mais la Chambre de première instance a appris que vous n'avez soulevé
25 d'objection à propos des faits admis dans le cadre d'autres procès portant
26 les numéros 1 à 53, ce qui, bien sûr, comprend les faits sur lesquels vous
27 venez d'attirer notre attention et sur lesquels porte la vidéo que nous
28 venons de voir. Je tiens à lire le passage portant sur les faits admis dans
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1 le cadre d'autres procès de la décision de la Chambre :
2 "Dans sa répons, la Défense avance que les faits proposés de 1 à 53
3 concernent le contexte général du conflit par rapport aux actes qui
4 auraient été commis par l'accusé, paragraphe 8 de la réponse, et se remet à
5 la décision de la Chambre de première instance pour ce qui est de ces faits
6 proposés, réponse page 3. La Défense fait remarquer ici qu'elle ne prend
7 pas position par rapport aux faits proposés 1 à 54, la Chambre de première
8 instance fait remarquer que dans son écriture, la Défense ne soulève aucune
9 objection par rapport au fait proposé 54. La Chambre de première instance
10 interprète donc la position de la Défense comme ne prenant position pour ce
11 qui est des faits 1 à 53."
12 Maître Tapuskovic, saviez-vous que vous n'aviez soulevé aucune objection
13 par rapport aux faits 1 à 53, qui comprennent bien celui que nous venons
14 d'entendre, c'est-à-dire les 29, 30, 31. Maître Tapuskovic, pour ce qui est
15 de la vidéo, par exemple, il me semble qu'elle porte plus spécifiquement
16 sur le fait 29. De ce fait, comment pouvez-vous nous présenter des éléments
17 de preuve dont le but avéré est de contester ce fait 29 ?
18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Pour ce qui est du fait 29, je ne peux pas
19 contester le fait que le 2 mai 1992 le président Izetbegovic était bel et
20 bien à Lisbonne, parti pour participer à des négociations, et qu'il y a eu
21 une grande attaque sur le centre de Sarajevo. Ce que je vous dis ici, c'est
22 que ce sont les paramilitaires qui ont lancé cette attaque. Je ne suis pas
23 en train de contester le fait qu'il y a eu une attaque sur Sarajevo, mais
24 je déclare catégoriquement que sur la base des éléments de preuve que j'ai
25 rassemblés, on ne peut plus dire que cette attaque a été lancée sans la
26 participation d'agents.
27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais c'est beaucoup plus simple.
28 Puisque vous n'avez soulevé aucune objection aux faits 1 à 53, qui
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1 comprennent bien sûr le fait 29 qui déclare qu'une attaque de la JNA de
2 grande envergure a eu lieu le 2 mai 1992 sur le centre de Sarajevo. Vous
3 n'avez pas soulevé d'objection. Maintenant, vous n'avez plus le droit de le
4 contester, c'est comme ça. Vous êtes assermenté, vous devez donc vous plier
5 au Règlement. Tous les éléments de preuve de ce fait qui ont été présentés
6 en relation avec ce point ne seront pas pris en compte par la Chambre de
7 première instance, et nous revenons sur notre décision d'admettre la vidéo.
8 Passez à autre chose, maintenant.
9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, il faut quand même
10 que je m'exprime à ce propos. La Défense est lésée par cette décision. A
11 mon avis, j'ai le droit de présenter les éléments de preuve qui expliquent
12 et qui portent sur les agissements des unités paramilitaires, puisque ce
13 sont les unités paramilitaires qui sont au cœur de tout ce qui s'est passé
14 dans Sarajevo, qui sont au cœur de ce conflit. Il y a toute une série
15 d'autres points qui sont pris en compte.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne vous écoute plus parce que je
17 ne considère pas que vous vous êtes conduit correctement. Vous êtes quand
18 même assermenté. Vous n'avez pas soulevé d'objection en temps et heure à
19 propos du fait 29. Et maintenant, c'est trop tard. Vous auriez dû prendre
20 une décision différente précédemment. Je ne veux plus vous entendre sur ce
21 point.
22 Passons à autre chose.
23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je ne suis pas
24 fonctionnaire de ce Tribunal, absolument pas. Je suis conseil de la Défense
25 de l'accusé Dragomir Milosevic. Alors je ne sais pas si on m'a correctement
26 interprété mon statut, mais j'essaie de faire mon travail du mieux que je
27 peux. Je ne suis pas fonctionnaire de ce Tribunal.
28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ici, tout avocat fait partie du
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1 Tribunal. Les deux parties sont concernées par ce Statut.
2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je dois maintenant me plier à votre
3 décision, je soumets une objection. C'est la première fois que l'on me
4 traite de cette sorte.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous vous avons entendu. Vous devez
6 passer à autre chose maintenant, parce que nous n'allons plus entendre quoi
7 que ce soit à propos du fait 29.
8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
9 Q. [aucune interprétation] --
10 M. LE JUGE MINDUA : Mais qu'est-ce qui se passe ? On n'entend plus
11 l'interprétation en français.
12 L'INTERPRÈTE : Je suis désolée. L'interprète avait oublié de remettre le
13 micro. Je suis désolée. L'interprète s'excuse et reprendra.
14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
15 Q. Les forces paramilitaires --
16 R. A partir du 15 avril, l'état-major de la Défense territoriale de la
17 Bosnie-Herzégovine a émis cet ordre, les unités paramilitaires ont cessé
18 d'exister. Dans cet ordre, ils ont demandé à ce que les unités
19 paramilitaires soient placées sous leur commandement. Donc à partir de ce
20 moment-là, les forces armées de la fédération de Bosnie-Herzégovine ont été
21 beaucoup plus actives, on le voit bien, compte tenu de ce qui s'est passé à
22 partir du 2 mai, la JNA, en tant que bras armé, n'était plus présente. Il
23 n'y avait plus d'unités armées de la JNA sur place. Il n'y avait plus que
24 l'unité logistique.
25 Q. Donc, avez-vous vu des sites de snipers ? Vous avez quand même vu ce
26 qui en était à propos des snipers et des paramilitaires --
27 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] -- j'espère qu'il ne s'agit pas d'un
28 fait admis dans le cadre d'un autre procès sur lequel vous n'avez pas
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1 soulevé d'objection.
2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai accepté
3 aucun fait admis dans le cadre d'autres procès, mis à part les faits
4 extrêmement généraux. Et même ces faits extrêmement généraux doivent être
5 expliqués, et on doit leur donner leur contexte. Il ne s'agit pas de faits
6 qui peuvent être admis sans aucune contestation. Ces faits ne sont pas
7 gravés dans le marbre. Parfois, certes, il y a certains points de ces faits
8 qui ne peuvent pas être contestés. Mais je considère que le contexte
9 général en tant que tel existe, certes, néanmoins ce n'est pas un contexte
10 qui est gravé dans le marbre. Je n'ai pas pris tous ces faits comme étant
11 admis dès le départ. Il contient quelques éléments qui doivent être
12 approfondis. Je ne peux pas contester le fait que deux et deux font quatre,
13 par exemple. Mais, je peux contester le fait que certains de ces faits ne
14 sont pas gravés dans le marbre et peuvent quand même faire l'objet de
15 contestations. Il n'existe pas de faits pour lesquels on ne saurait obtenir
16 des détails et qu'on ne saurait approfondir.
17 Cette attitude selon laquelle ces faits auraient fait l'objet d'un
18 accord dans le cadre d'un autre procès, du fait d'un jugement, ferait qu'il
19 serait soi-disant gravé dans le marbre, je ne l'accepte pas, parce que,
20 certes il vrai, par exemple, qu'Izetbegovic était bien à Lisbonne pour
21 participer à des négociations, ça je ne peux pas le contester. C'est vrai
22 qu'il y était. Mais le reste de ce qui est dit dans ce fait peut être
23 contesté, à mon avis. Si ces faits ne peuvent pas être contestés, dans ce
24 cas-là, je n'ai plus besoin de présenter quoi que ce soit. Les faits admis
25 dans le cadre d'un autre procès, les "adjudicated facts" ne peuvent pas
26 être considérés comme étant des faits qui ne peuvent plus être étudiés et
27 qui ne peuvent pas être remis en contexte. C'est contraire à toute logique.
28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, la procédure est
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1 très claire. Si vous n'étiez pas d'accord avec ces faits, nous n'aviez qu'à
2 le dire quand c'était encore le temps. Il y a toute sorte de faits que vous
3 avez contestés. Mais pour ce qui est de cette catégorie, donc les faits 1 à
4 53, vous n'avez soulevé aucune objection. Vous les avez acceptés en tant
5 que tels.
6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Dans ce cas, Monsieur le Président, je
7 pense qu'on ne s'est pas compris. Certes, ces faits sont plus ou moins
8 justes pour ce qui est peut-être des informations qu'ils contiennent, des
9 dates qu'ils contiennent. Ils ne peuvent pas être considérés comme quelque
10 chose qui ne souffre aucune contestation. Ce sont des faits qui peuvent
11 être approfondis, pour lesquels on peut enquêter, qui peuvent être élargis.
12 Tout fait peut faire l'objet d'une discussion. Tous ces documents, le
13 témoin dont nous avons parlé dans la conférence en ce moment, doivent être
14 pris en compte absolument. On ne peut pas les exclure uniquement parce qu'à
15 un moment j'ai soi-disant accepté des faits admis dans le cadre d'un autre
16 procès. On ne peut pas considérer qu'il y a des faits qui sont sacro-
17 saints, qu'on ne peut plus toucher et qui sont maintenant gravés dans le
18 marbre pour l'éternité.
19 Je ne tiens pas à contester la position prise par la Chambre, mais il
20 me semble, pour toutes ces raisons, qu'on ne peut dire qu'un contexte ne
21 peut pas être élargi, qu'on ne peut pas enquêter et élaborer à propos d'un
22 fait. C'est contraire aux intérêts de la justice, à mon avis. J'ai peut-
23 être tort, mais en tout cas, c'est ce que je pense. Dans ce film, par
24 exemple, cela illustre les activités des formations paramilitaires qui sont
25 mentionnées dans tout le jugement. Donc, je ne comprends pas pourquoi je
26 n'ai pas le droit de rentrer dans les détails à propos de certains faits,
27 même s'ils ont été considérés à un moment ou à un autre comme étant des
28 faits admis dans le cadre d'un autre procès.
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1 [La Chambre de première instance se concerte]
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez, bien entendu, poser des
3 questions à propos de 1992, puisque cela fait partie de votre Défense. Mais
4 le problème existe quand vous essayez de contester un fait que vous avez
5 admis par le passé. Ce qui est exactement le cas du fait numéro 29,
6 puisqu'il y a eu deux types de démarches en ce qui concerne la réaction aux
7 faits admis dans le cadre d'autres procès qui ont été présentés par
8 l'Accusation. Il y en a certains que vous avez acceptés, dont celui qui
9 pose problème en ce moment, et d'autres que vous n'avez pas acceptés.
10 Donc, pour ce qui est des faits que vous n'avez pas acceptés, vous
11 pouvez vous lancer dans toutes les discussions que vous voulez. A mon avis,
12 pour ce qui est des faits amenés dans le cadre d'un procès, que vous avez
13 acceptés, vous ne pouvez plus y revenir, c'est trop tard, vous avez
14 accepté. Le but même de ce principe des faits admis dans le cadre d'autres
15 procès, c'est justement d'accélérer les choses, pour avoir un procès qui
16 sera équitable, mais rapide, puisqu'il faut que le procès soit rapide
17 aussi. On ne peut sacrifier l'équité, certes, mais cela permet d'accélérer
18 les choses. Si on donne le droit à une partie de revenir sur des faits
19 qu'elle a admis par le passé, parce qu'ils étaient admis dans le cadre d'un
20 autre procès, dans ce cas, cela ne servira plus à rien, on ne pourra pas
21 être rapide. Vous pouvez, certes, bien sûr, présenter des éléments de
22 preuves qui ont trait à 1992, mais pas pour ce qui est du fait 29, car
23 celui-là a été admis dans le cadre d'un autre procès, et vous avez accepté
24 de l'admettre. C'est donc trop tard. Je ne vous permettrai pas de contester
25 ce fait 29, c'est trop tard. Cela dit, vous pouvez poursuivre sur 1992.
26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, puis-je
27 m'expliquer encore en ce qui concerne ce point ?
28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non. Vous devez maintenant
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1 passer à autre chose.
2 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Mais vous me mettez dans une
3 situation complètement impossible. Je ne peux pas poursuivre mon
4 interrogatoire. Je ne peux plus poursuivre. Vous savez très bien que le
5 problème des faits admis dans le cadre d'autres procès a été résolu il y a
6 peu de temps. J'ai travaillé depuis deux ans sur l'espèce sans prendre en
7 compte ces faits admis dans le cadre d'un autre procès. Ces points ont été
8 admis à l'ordre du jour la veille du procès, la veille du démarrage du
9 procès, et sont devenus maintenant un point de contestation. J'ai pensé
10 auparavant qu'il n'est un besoin de parler de la période avant 1994;
11 auparavant, nous ne pensions pas que c'était utile de revenir sur ces
12 faits, au titre des allégations qui étaient reprochées à l'accusé.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, poursuivez de
14 toute façon.
15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Comment puis-je poursuivre ? Il est venu
16 ici pour parler de 1992, puisque vous me dites que 1992 n'est pas
17 pertinent.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais parlez de 1992. Nous sommes
19 tout à fait d'accord avec vous pour que vous parliez de 1992. Vous avez
20 présenté des éléments de preuve à propos de 1992. L'Accusation a présenté
21 des éléments de preuve par rapport à 1992. Cela, vous avez le droit de le
22 faire. Mais, ce que vous n'avez pas le droit de faire, c'est contester un
23 fait, le fait 29, que vous avez déjà accepté. C'est tout. Il n'y a vraiment
24 rien de mystérieux à propos de tout cela. C'est même simple.
25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je ne sais plus quoi dire. Je préfère
26 presque me taire. Lorsque j'en viendrai à ma plaidoirie, je dirai tout ce
27 qui, à mon avis, doit être dit.
28 Q. Monsieur Gagovic, pouvez-vous me dire ce qui s'est passé au niveau de
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1 la JNA, à cette époque-là ?
2 R. Quand je regardais le clip vidéo qui avait été pris les 2 et 3 mai, je
3 peux dire que j'ai assisté à tout cela de mes yeux. Peut-être puis-je être
4 plus précis pour expliquer ce qui ne se voit peut-être pas dans la vidéo.
5 Le 2 mai, la JNA n'a attaqué personne, ni à Sarajevo, ni ailleurs sur le
6 territoire de l'ABiH.
7 Le 2 mai, Ejup Ganic, qui représentait Izetbegovic qui était à
8 l'étranger, a donné l'ordre de bloquer toutes les casernes de la ville de
9 Sarajevo, de bloquer l'hôpital militaire ainsi que le commandement du 2e
10 District militaire, et il a donné l'ordre d'avoir maintenant une attitude
11 extrêmement hostile envers les membres de la JNA. Cet ordre a été exécuté
12 par des unités subordonnées qui ont tout d'abord bloqué cette unité
13 logistique qui approvisionnait le 2e District militaire. Ils ont tendu
14 d'embuscade pour cette unité. Ils ont tiré sur l'unité ou détruit des
15 véhicules militaires et ont tué et blessé un certain nombre de soldats.
16 Simultanément, une autre attaque a eu lieu contre le centre de la
17 JNA, où ne se trouvaient que cinq personnes avec un lieutenant-colonel. Il
18 y avait cinq soldats et leur lieutenant-colonel. Ils ont résisté jusqu'à ce
19 que le lieutenant-colonel soit blessé. Il s'appelait Bozinovski. A ce
20 moment-là, ils ont arrêté de résister afin de pouvoir envoyer leur
21 supérieur à l'hôpital.
22 Q. Arrêtons-nous, parce que ceci n'est pas pertinent, mais pourriez-
23 vous nous dire, s'il vous plaît, la chose suivante : à ce moment-là, quel
24 était votre but exactement, sachant ce qui se passait au niveau des soldats
25 ?
26 R. Notre but, notre but unique, était d'évacuer les blessés, de leur
27 fournir une assistance médicale et d'évacuer aussi les morts.
28 Q. Merci. Je vous pose des questions pour que les choses
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1 s'accélèrent. Quel était votre plan, votre projet, pour ce qui est de
2 l'armée ?
3 R. Vous savez qu'il y avait un ordre demandant que l'armée soit
4 relogée ailleurs. Le président de la Bosnie-Herzégovine avait émis un ordre
5 visant à réinstaller la JNA au sein de la République fédérale de
6 Yougoslavie. L'état-major général, le 4 mai, a émis cet ordre demandant que
7 tous les membres de la JNA soient envoyés en République fédérale de
8 Yougoslavie et que les membres de la JNA qui venaient d'autres républiques
9 se retournent dans leurs propres républiques. Cet ordre devait être exécuté
10 dans les 15 jours.
11 Mais les unités de la Fédération de Bosnie-Herzégovine ont bloqué les
12 casernes et ont empêché les unités de la JNA de quitter ces casernes dans
13 le but de rentrer dans la république. De ce fait, un groupe d'officiers
14 supérieurs dirigé par le général Nedjo Boskovic et le colonel --
15 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi le nom.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] -- a commencé à négocier avec le gouvernement
17 bosniaque.
18 Le 10 mai, l'hôpital militaire a été libéré --
19 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
20 Q. Monsieur Gagovic, nous n'avons pas beaucoup de temps, donc une
21 question, s'il vous plaît. Nous reviendrons peut-être là-dessus un peu plus
22 tard. Vous nous avez dit ce que vous avez appris des rapports que vous
23 aviez reçus à propos des événements survenus en Croatie. J'aimerais que
24 nous voyions un document afin d'établir si ce que vous avez dit
25 précédemment est bel et bien la vérité. Il s'agit du document DD01586. Il
26 faudrait afficher la première page, s'il vous plaît. Regardez la première
27 page, s'il vous plaît.
28 R. Oui, je la vois. Je lis que les ordres que nous avons reçus de notre
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1 commandement supérieur étaient basés sur ce document qui venait justement
2 de la présidence.
3 Q. Merci. Pourriez-vous nous lire tout d'abord le titre et nous lire aussi
4 la liste des personnes qui ont participé ?
5 R. Je n'ai pas besoin de le lire. Je vais lire que tout le monde était là.
6 Mesic était là pour présider cette réunion de la présidence. Il y avait
7 aussi Drnovsek.
8 Q. Pouvez-vous nous le lire, s'il vous plaît, à haute voix, pour que nous
9 sachions de quoi ce document parle.
10 R. "Notes sténographiques de la 125e session de la présidence de la
11 République fédérale socialiste de Yougoslavie, le 12 juillet 1991, 10
12 heures 30 du matin. Etait présent : Stjepan Mesic, président de la
13 présidence."
14 Q. Merci. Pouvons-nous passer maintenant à la page 11 en B/C/S, qui est la
15 page 10 en anglais. Pourriez-vous regarder, s'il vous plaît, les orateurs
16 que l'on trouve à cette page.
17 R. Ante Markovic, Veljko Kadijevic, qui était secrétaire fédéral de la
18 Défense. C'est lui qui dirigeait la discussion à ce moment-là de la
19 réunion.
20 Q. Une minute. Vous avez parlé de Veljko Kadijevic. Pourriez-vous lire,
21 s'il vous plaît, à partir du passage où il est écrit : "Pertes en
22 Slovénie."
23 R. "Pertes en Slovénie, 44 morts et 154 blessés. Les endroits potentiels
24 que nous pourrions remarquer en Yougoslavie sont Knin Krajina, Slavonie,
25 Kordun, Lika. De nouvelles crises peuvent aussi éclater au Kosovo, Sandzak,
26 en Macédoine occidentale et en Herzégovine. Les formations armées qui ne
27 font pas partie des armes de l'armée --"
28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mme Edgerton est debout.
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1 Mme EDGERTON : [interprétation] Je suis désolée, mais au vu de la cote de
2 ce document, j'ai l'impression qu'il vient du bureau du Procureur. J'ai
3 deux arguments à présenter. Tout d'abord, je ne pense pas que ce témoin
4 puisse faire des commentaires sur ce document, puisqu'il n'était pas
5 présent à cette réunion à l'époque. Ce document manque totalement de
6 pertinence, étant donné qu'il est antérieur à la période de référence, et
7 bien antérieur. Cela dit, si Me Tapuskovic veut qu'on le verse au dossier
8 par le biais de ce témoin, je n'ai pas vraiment d'objection à propos de
9 l'authenticité de ce document, puisque je pense qu'il vient justement du
10 bureau du Procureur, mais nous voudrions quand même avoir une traduction
11 complète avant que l'on ne le verse.
12 [La Chambre de première instance se concerte]
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, que voulez-vous
14 établir en nous présentant ce document, s'il vous plaît ? Quel est votre
15 but ?
16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] tout d'abord, ce document est disponible
17 dans le système électronique du Tribunal. Tout le monde y a accès. Donc ce
18 témoin nous a dit que des informations ont été obtenues à partir de
19 Slovénie à propos des victimes de ce qui s'est passé en Slovénie. Ici, on
20 parle de 44 morts, résultat de ce qui s'était passé en Slovénie, on lit
21 aussi qu'il est prévu que la même chose puisse arriver dans d'autres
22 régions.
23 Après, ce document parle aussi des paramilitaires, des formations
24 armées qui ne font pas partie de l'armée en tant que telle. Or, ce témoin
25 allait justement en parler de tout cela; il allait nous donner les chiffres
26 sur l'envergure des formations paramilitaires. Il s'agit d'informations
27 qu'il avait reçues par le biais du commandement général, de l'état-major
28 général dirigé par le général Veljko Kadijevic. Si vous me permettez de
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1 poursuivre, vous allez voir comment tout cela s'est déroulé par la suite,
2 et comment les paramilitaires ont été transformés en force armée illégale.
3 Ce témoin peut vous expliquer quelles étaient les informations qu'il a
4 reçues par le biais de sa chaîne de commandement, et ces documents sont
5 fiables et sont étayés par le document que nous avons sous les yeux.
6 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il s'agit de 92, n'est-ce pas
7 ? De quelle période parlons-nous ?
8 Mme EDGERTON : [interprétation] Il s'agit d'un document qui date du
9 12 juillet 1991.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] 1991. Alors, quelle est la
11 relation entre ce document et la responsabilité pénale de l'accusé ? Quel
12 est le lien entre ce document et les charges qui pèsent contre l'accusé ?
13 Est-il bien judicieux de passer tout ce temps sur ce document ?
14 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Mais le contexte général est
15 important quand même. Ce qui est essentiel, c'est de savoir ce qui a amené
16 la tragédie dans ce pays. Les faits 1 à 53 sont importants après tout. On
17 ne peut pas questionner la pertinence d'un contexte général ? On ne peut
18 pas traiter les événements à partir uniquement du 8 août, en traitant
19 uniquement des allégations qui sont portées contre le général Milosevic,
20 parce que c'est impossible de savoir ce qui s'est passé si on ne revient
21 pas sur le contexte et sur ce qui s'est passé auparavant. Si on ne parlait
22 que des crimes reprochés au général Milosevic, ce serait simple pour la
23 Défense de ne s'occuper que de ces faits, puisque la plupart de ces faits
24 n'ont même pas été prouvés pour ce qui est des meurtres, et cetera. Je
25 serais ravi de me retrouver dans cette situation si je n'avais qu'à
26 défendre mon client contre les charges qui lui sont reprochées dans le
27 cadre d'une campagne --
28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton, vous avez entendu
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1 la réponse. Le conseil de la Défense nous dit que l'Accusation ayant
2 présenté des faits admis dans le cadre d'autres procès avant 1994 lui a
3 justement permis d'aborder tous les éléments contextuels portant sur la
4 période précédant 1994. Il est en train de nous dire que c'est lui qui
5 allait présenter ces points au départ.
6 Mme EDGERTON : [interprétation] Mais je suis en train de dire que je ne
7 voulais pas que ce témoin, enfin, que je ne considérais pas que ce témoin,
8 en l'espèce, qui n'a pas participé à cette réunion, puisse faire des
9 remarques sur ce document. Si M. Tapuskovic veut verser ce document depuis
10 son pupitre, non pas par le biais de ce témoin, je ne vois aucun souci. Je
11 n'ai aucune objection à propos de l'authenticité de ce document. Je ne la
12 conteste pas. J'ai uniquement soulevé une objection en pensant qu'il
13 n'était pas vraiment utile de rentrer dans les détails à propos de ce
14 document en passant par ce témoin-ci.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donc vous ne considérez pas que ce
16 document n'a pas de pertinence ?
17 Mme EDGERTON : [interprétation] J'ai dit qu'il est assez peu pertinent à
18 mon avis, parce qu'il n'a absolument rien à voir avec le conflit qui a
19 commencé en avril 1992 à Sarajevo. C'est quand même un document de
20 contexte, cela dit, mais à mon avis, on ne peut pas vraiment lui donner
21 beaucoup plus de poids que cela.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Nous allons donc admettre
23 ce document, et vous allez passer à autre chose. Il faudrait que ce
24 document reçoive une cote.
25 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce document recevra la cote D341.
26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
27 Q. Monsieur le Témoin, quelle était la position de l'état-major de l'armée
28 pour ce qui est des démarches de l'armée à venir pendant que l'armée était
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1 toujours sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine ?
2 R. La position de l'état-major général était la suivante, tous les
3 problèmes et toutes les questions devaient être résolus pacifiquement. Il
4 fallait tenir compte des vies des gens, à savoir des soldats et des
5 officiers, ensuite des civils et de leurs familles, il fallait avoir de la
6 patience, et une équipe de l'état-major général a été envoyée aux
7 négociations avec le gouvernement de la Bosnie-Herzégovine pour négocier
8 pour débloquer la caserne qui a été bloquée et pour le départ sur le
9 territoire de l'ex-Yougoslavie.
10 Q. Est-ce que l'armée avait des objectifs stratégiques, mis à part les
11 vies des gens ?
12 R. Rien d'autre, sinon l'armée ne se serait pas trouvée dans les casernes.
13 Q. Qu'est-ce qui s'est passé pour ce qui est des armes ?
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton.
15 Mme EDGERTON : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président, mais
16 peut-être pourrions-nous établir plus de base pour voir sur quoi s'appuie
17 le témoin quand il donne des commentaires sur les objectifs stratégiques de
18 la JNA, les positions du commandement supérieur et de l'état-major général.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Tapuskovic, jetez des
20 bases pour pouvoir poser des questions au témoin dans ce sens-là.
21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
22 Q. En tant que commandant adjoint chargé de la logistique, vous venez de
23 dire quelque chose pour ce qui est de la vie des soldats. Est-ce qu'au
24 moment où tout ce dont vous avez déjà parlé a commencé, vous aviez d'autres
25 objectifs que de sauver la vie de ces jeunes soldats et de les faire partir
26 de ces territoires ?
27 R. C'était notre seul objectif. Les dirigeants de la Bosnie-Herzégovine
28 sont au courant de cela.
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1 Q. Vous savez quel était l'ordre qui a été donné par Hasanefendic le 27
2 avril 1992 ?
3 R. Oui. Je le tenais entre mes mains. Il a donné un ordre. Je vais
4 interpréter une partie de cet ordre. Selon cet ordre, il fallait bloquer
5 toutes les casernes, toutes les structures militaires, il fallait les
6 désarmer, les emprisonner, les arrêter, et il fallait que peu de soldats
7 quittent le territoire de la Bosnie-Herzégovine vivants.
8 Q. Maintenant je vais vous lire, en fait, je vais vous montrer un
9 document, DD004321. Il s'agit de la page 4 dans la version en B/C/S et dans
10 la version anglaise, c'est la page numéro 4 dans la version en anglais.
11 Avant cela, dites-nous qui était Blagoje Adzic à l'époque ?
12 R. Blagoje Adzic, il faut d'abord que je voie le document, quel est ce
13 document.
14 Q. DD004321. Regardez la première page et lisez-là.
15 R. "Les notes sténographiques."
16 Q. Lisez-les, s'il vous plaît ?
17 R. Vous pensez à ce qu'il est dit ici : "Vous devez être au courant de
18 toute la circulation qui part --"
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton, allez-y.
20 Mme EDGERTON : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président, mais il
21 faut que vous sachiez que jusqu'à une heure et demie hier, ce document
22 n'était pas saisi dans le système de prétoire électronique. Je ne fais
23 d'objection pour ce qui est du document, mais il faut que je vous dise que
24 c'est pour la première fois que je suis en mesure de voir ce document.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic ?
26 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] On a donné ce document à l'employé qui est
27 parti pour Belgrade, vendredi. C'était dans le prétoire électronique
28 vendredi. Je ne sais pas ce que mon éminente collègue veut dire, mais à
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1 chaque fois, peut-être elle veut semer la confusion dans mon esprit.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne pense pas que cela soit son
3 objectif. Mais elle n'a pas soulevé d'objection. Continuez.
4 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
5 Q. Monsieur Gagovic, lisez cela, on vous a dit qu'une fois le document
6 affiché, vous deviez le lire.
7 R. Est-ce que c'est le document, c'est à la quatrième page, ici, est-ce
8 que c'est le document 02942723/GS ?
9 Q. Non.
10 R. Il s'agit ici de conclusions de la réunion de la présidence.
11 Q. Non, c'est 02942, -- non. C'est une erreur. Accordez-moi quelques
12 instants, s'il vous plaît. Ici, je vois sur l'écran, je vois le document
13 02942723. C'est le numéro du document, et c'est le document DD004321, la
14 première page, c'est les notes sténographiques de la réunion de la
15 présidence de la RSFY qui a été tenue le 2 mars 1992.
16 R. Oui, oui, je vois.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton.
18 M. TAPUSKOVIC : [aucune interprétation]
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'espère que vous n'avez pas
20 l'intention de semer la confusion dans l'esprit de Maître Tapuskovic.
21 Mme EDGERTON : [interprétation] Pas du tout. Cela ne serait jamais mon
22 objectif. Le document auquel mon collègue a fait référence, nous l'avons
23 reçu ce matin, et l'Accusation n'a pas reçu de traduction du document. Je
24 vous demande s'il existe la traduction du document.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, est-ce que le
26 document a été traduit ? Est-ce que c'est disponible ?
27 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] C'est à la page 4 de la version en
28 anglais. J'ai déjà dit cela. J'ai déjà indiqué la page dans la version en
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1 anglais. Mais je voulais qu'on se penche d'abord à la première page. Voilà.
2 Q. Est-ce que ce que vous voyez ici est le document 02942723 ?
3 R. 724. J'ai le document 02942724.
4 Q. C'est la deuxième page.
5 R. Oui, c'est la deuxième page. A la page couverture, c'est un autre
6 numéro.
7 Q. Pouvez-vous lire cela ?
8 R. Le 23.
9 Q. Oui.
10 R. "La présidence de la RSFY, strictement confidentiel, notes
11 sténographiques de la réunion de la présidence de la RSFY avec les
12 représentants de la Republika Srpska de Bosnie-Herzégovine."
13 Q. Merci.
14 R. "La réunion a eu lieu le 2 mars 1992."
15 Q. Maintenant, regardons la quatrième page en B/C/S et la quatrième page
16 en anglais également. Avant de regarder cette page, dites-moi qui était
17 Blagoje Adzic à l'époque ?
18 R. Il était chef de l'état-major général. Lorsque Kadijevic est parti, il
19 était secrétaire à la Défense nationale par intérim, au niveau fédéral.
20 Q. Est-ce que c'est ce que vous avez dit tout à l'heure, à savoir que le
21 problème dont vous avez parlé a été débattu lors de cette réunion ? Lisez
22 cela aux Juges.
23 R. "Vous devez savoir que toute la circulation qui ne relie pas la Krajina
24 avec --."
25 Q. [aucune interprétation]
26 R. C'est à la page 4, c'est ce que je vois à la page 4. 27, c'est les deux
27 chiffres, les derniers chiffres qui figurent en haut de la page.
28 Q. C'est la page 26 dans ma version.
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1 Mme EDGERTON : [aucune interprétation]
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est à la page 3, c'est 2942723.
4 Mme EDGERTON : [interprétation] Si mon éminent confrère veut verser ce
5 document, je n'ai pas d'objection là-dessus. Il a des difficultés pour ce
6 qui est des pages et du système électronique. Encore une fois, je n'ai pas
7 d'objection sur l'authenticité du document. Je ne vais pas proférer de
8 commentaire sur la pertinence du document, et je suis d'accord pour que
9 cela soit versé au dossier.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Si vous avez des commentaires
11 sur la pertinence, il faut que vous les présentiez.
12 Mme EDGERTON : [interprétation] Tant que le document qui parle du contexte
13 et de la transformation de la JNA en Bosnie-Herzégovine, ce document
14 pourrait avoir une certaine pertinence. Et rien de plus. Monsieur le
15 Président, je me suis levée pour essayer d'aider parce que j'ai vu qu'il a
16 des problèmes, mon collègue, Me Tapuskovic, avec le système électronique et
17 des pages.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le document sera versé au dossier.
19 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera le document portant la cote
20 D342, Monsieur le Président.
21 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Pourriez-vous répéter la date, s'il
22 vous plaît ?
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est la date du document ?
24 C'est pour la greffière d'audience.
25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Le 2 mars.
26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quelle est la date ?
27 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] C'est le 2 mars 1992.
28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.
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1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Puisque le document était déjà versé au
2 dossier en tant que pièce à conviction de la Défense. Alors, puisque le
3 témoin a déjà dit ce qu'il a dit, et puisqu'il a déjà lu dans le document.
4 Q. Je prie le témoin de ne dire qu'Adzic avait la position suivante :
5 "Quel sera le destin de l'armée dépendra de votre destin, et de ce que
6 vous allez faire là-bas. Tous ceux qui pensent qu'avec cette armée il est
7 possible de résoudre tous les problèmes, ils ont tort. Si une solution
8 politique n'est trouvée, vous aurez la guerre civile en Bosnie-Herzégovine
9 et le chaos général."
10 Est-ce que c'était la position dont vous avez parlé pour ce qui est
11 de l'armée à Sarajevo ?
12 R. Oui, cela reflète la position. Cela a été exprimé dans les ordres que
13 les unités subordonnées ont reçus.
14 Q. Dites-nous ce qui s'est passé pour ce qui est des casernes et des
15 entrepôts dans les casernes ?
16 R. Les casernes ont commencé -- cela a commencé le 10 mai. L'hôpital
17 militaire est parti, tous les biens mobiles et immobiles sont restés dans
18 le bâtiment de l'hôpital militaire. M. Mitterrand a fait l'intermédiaire
19 pour que l'hôpital reste à la disposition des civils. Dans la caserne du
20 maréchal Tito se trouvaient les étudiants de l'école militaire, tout
21 l'équipement est resté, les mortiers, les obusiers, les chars et toutes les
22 autres armes ainsi que l'équipement qui est nécessaire pour mener des
23 combats, c'est-à-dire une quantité de munitions également. Le 5 mai, ils
24 sont partis de Sarajevo, les derniers --
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Juste un instant, s'il vous plaît.
26 Madame Edgerton.
27 Mme EDGERTON : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président. Il n'y
28 a absolument aucun fondement pour ce que ce témoin dit dans son témoignage.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Témoin, quelles sont les
2 bases de ce que vous nous avez dit, de vos connaissances, pour ce qui est
3 des informations que vous venez de nous fournir ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai été commandant adjoint du 4e Corps. C'est
5 l'unité la plus ancienne dans la ville de Sarajevo. Le chef de l'état-major
6 général a résolu toutes les questions concernant les membres de la JNA à
7 Sarajevo et aux environs par mon biais. C'est comme cela que j'ai appris
8 tout cela et j'ai même publié un livre, un ouvrage, là-dessus.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Vous avez publié
10 un livre là-dessus ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Quel est le titre de ce livre ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] "Quand les vaincus vaincront."
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mes félicitations.
15 Maître Tapuskovic.
16 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
17 Q. Je ne voulais pas vous poser de questions sur ce livre. Dites-moi ce
18 qui s'est passé après le retrait des soldats des casernes pour ce qui est
19 des armes ?
20 R. Les armes lourdes restaient dans les casernes et les armes légères
21 partaient, à l'exception faite des étudiants dans la caserne maréchal Tito.
22 Q. Qui était parmi les derniers qui avaient quitté Sarajevo ? Est-ce que
23 cela à voir avec ces étudiants ?
24 R. Oui, parce qu'il y avait un problème pour ce qui est du départ des
25 étudiants, parce que les armes lourdes devaient rester entre les mains des
26 membres de la Fédération de Bosnie-Herzégovine et de la part de la
27 Republika Srpska. Les dirigeants des deux entités devaient s'accorder là-
28 dessus. C'était seulement le 3 juin que l'accord a été conclu. Les
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1 étudiants sont arrivés à Belgrade le 5 juin sans problème. Il n'y avait pas
2 de blessé. Mais tout l'équipement, les moyens techniques et de formation,
3 sont restés dans la caserne. Donc, ils sont sortis sans rien, en tant
4 qu'étudiants ou écoliers.
5 Q. Pour ce qui est des entrepôts, dites-nous où se trouvaient les
6 entrepôts ? Qui a pris les armes dans les entrepôts ?
7 R. Les petits entrepôts se trouvaient à Sarajevo même et aux environs. A
8 Faletici se trouvait l'entrepôt le plus grand. Les forces paramilitaires de
9 Bosnie-Herzégovine ont essayé de prendre les armes dans ces entrepôts.
10 Avant cela, de façon illégale, ils ont pris une petite quantité d'armes
11 dans ces entrepôts. Après quoi, la Défense territoriale de la Republika
12 Srpska et les forces de la Fédération de la Bosnie-Herzégovine -- donc il y
13 avait un conflit entre les deux forces, mais la majorité des armes se
14 trouvaient entre les mains de la Republika Srpska.
15 Les deux tiers des armes qui appartenaient à l'armée de la Fédération
16 devaient être acheminées de Pacevo [phon]. Le premier contingent était
17 arrivé, mais selon la FORPRONU et l'accord conclut avec M. MacKenzie et
18 McKow [phon], ces armes devaient être entreposées dans des installations du
19 bâtiment PTT à Sarajevo. Mais, le premier contingent est arrivé, après
20 cela, les forces paramilitaires se sont ruées sur les véhicules, sur les
21 voitures pour s'emparer de ces armes. La FORPRONU a décidé de ne plus
22 acheminer ces armes parce que tout le monde voulait une solution pacifique
23 de ce conflit et non pas de combat.
24 Q. Qui a retenu plus d'armes lourdes au moment où la JNA s'est retirée de
25 Bosnie-Herzégovine ?
26 R. En tout cas, le plus d'armes étaient restées dans les structures de
27 l'armée de la Republika Srpska, parce que les membres de l'armée qui
28 étaient Serbes répondaient à l'appel, à la mobilisation de la JNA, et ceux
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1 qui étaient Croates et Musulmans ne répondaient pas à cet appel lancé par
2 la JNA. Après que la JNA était partie, les Serbes du territoire de la
3 Bosnie-Herzégovine sont restés en Bosnie et les armes aussi, les armes
4 restaient entre leurs mains parce que personne ne les a désarmés.
5 Q. Merci. A la fin, voilà ma question suivante, pour la JNA dites-nous ce
6 qui importait, les armes ou les enfants de 18 ans ?
7 R. C'était les enfants, sinon l'armée aurait procédé à la résolution de ce
8 blocus de casernes par force.
9 Q. Je n'ai plus de questions. Merci.
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Maître Tapuskovic.
11 Madame Edgerton, vous avez la parole.
12 Mme EDGERTON : [interprétation] Est-ce que je pourrais avoir quelques
13 instants pour parler avec M. Waespi, Monsieur le Président ?
14 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président ?
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Tapuskovic ?
17 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il faut que j'ajoute une chose pour que
18 tout soit clair. Pour ce qui est des faits déjà admis dans le cadre
19 d'autres procès, nous n'avons pas contesté leur véridicité. Nous avons
20 contesté leur exactitude. Avec l'aide de ma collègue, je me suis rappelé
21 cela. Nous n'avons pas contesté leur pertinence, mais plutôt leur véracité
22 pendant tout le temps. C'est ce qui est écrit dans notre mémoire. C'est
23 l'essentiel de notre position, je pense que cela a été négligé dans votre
24 décision. Votre décision a été rendue. Dans notre mémoire, nous avons
25 contesté la pertinence des faits admis dans le cadre d'autres procès, mais
26 la Défense n'a pas contesté la pertinence des faits admis, mais plutôt la
27 véracité. Ce sont des notions différentes. Bien sûr, je n'ai pas eu assez
28 de temps pour mentionner cela, mais à chaque fois dans notre mémoire, nous
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1 avons noté cela. Nous avons contesté leur véracité.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, j'aimerais
3 pouvoir comprendre ce que vous venez de dire. Je n'ai jamais dit que vous
4 aviez contesté la pertinence des faits admis dans le cadre de notre procès.
5 J'ai tout simplement dit, et j'ai lu un passage de la décision rendue par
6 la Chambre de première instance, j'ai dit que vous n'avez pas contesté les
7 faits admis dans le cadre d'autres procès de 1 à 53. Dans la décision, il
8 est dit explicitement que vous vous êtes mis d'accord avec la décision de
9 la Chambre pour ce qui est des faits proposés.
10 Madame Edgerton ?
11 Je ne veux plus rien entendre sur cette question.
12 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
13 Contre-interrogatoire par Mme Edgerton :
14 Q. [interprétation] Monsieur, êtes-vous en mesure de m'entendre dans votre
15 langue maternelle ?
16 R. Oui.
17 Q. Je vais vous poser des questions concernant certaines choses dont vous
18 avez parlé aujourd'hui et je vais essayer d'être la plus brève possible.
19 Peut-être pourrions-nous commencer par les choses pour lesquelles
20 vous pensez que vous pourriez être d'accord avec moi. Par exemple, est-ce
21 que vous avez le grade de général ou de colonel ? Comment on s'adresse à
22 vous lorsqu'on vous aborde ?
23 R. J'ai le grade de colonel.
24 Q. Colonel, seriez-vous d'accord avec moi pour dire que puisque vous
25 étiez sur place à Sarajevo entre 1991 et 1992, que le 4e Corps de la JNA
26 était en effet le noyau de ce qu'est devenu plus tard le Corps de Romanija-
27 Sarajevo ?
28 R. En apparence, c'est ainsi. Il y a une raison simple pour cela; le Corps
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1 de Sarajevo, à savoir le 4e Corps, avait comme membres les recrues de
2 Sarajevo et des environs. A l'appel de la JNA, les membres de la population
3 serbe ont répondu. Les membres de la population musulmane et croate, non.
4 Les unités du Corps ont été à 90 % Serbes du territoire de la Bosnie-
5 Herzégovine. Après que les membres de la JNA étaient partis, et qui étaient
6 de l'ancienne Yougoslavie, dans le cadre du Corps, il y avait des Serbes
7 qui pouvaient bénéficier de leur liberté. Comme tous les membres de
8 l'ancienne JNA, les Musulmans pouvaient aller chez les leurs, les Croates
9 chez les leurs, toutes les unités qui ont été formées dans le cadre des
10 armées de l'ancienne république yougoslave avaient pour noyau les membres
11 de la JNA, à savoir de la Défense territoriale, qui étaient deux entités
12 des forces armées de l'ancienne Yougoslavie, la RSFY.
13 Q. Donc, vous seriez d'accord avec moi pour dire cela, pour ce qui est des
14 points essentiels ?
15 R. Je ne serais pas d'accord pour dire qu'il ne s'agissait que d'un corps
16 rebaptisé, parce que le Corps avait un nouveau commandement, une nouvelle
17 structure, de nouvelles unités, mais dans le Corps de Romanija-Sarajevo, il
18 y avait des membres qui, précédemment, étaient membres du 4e Corps de la
19 JNA.
20 Q. S'agissait-il de commandants, pour la plupart, Monsieur ?
21 R. S'agissant du 4e Corps d'armée, il y avait peu de commandants de grades
22 supérieurs. Il y avait plutôt des membres qui venaient d'autres unités, tel
23 le commandement de la Défense territoriale et les généraux, tel le général
24 Mladic.
25 Q. Monsieur, je vous demanderais de prendre l'un des classeurs que mon
26 confrère le greffier pourra vous remettre dans quelques instants. Il s'agit
27 du numéro 03460. L'intercalaire se trouve au milieu du classeur.
28 Mme EDGERTON : [interprétation] Je crois, si je ne m'abuse, qu'il y a un
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1 exemplaire pour les Juges de la Chambre. Le document se trouve sur le
2 prétoire électronique. Il n'y a qu'un exemplaire pour les Juges de la
3 Chambre, et pour ce qui est du document, il est affiché par le biais du
4 système du prétoire électronique. La cote en est le 03460. Ma collègue, Mme
5 Bosnjakovic, m'apprends qu'effectivement il y a un classeur pour tous les
6 Juges.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ma signature qui figure sur ce document,
8 mais un tel document, tel que je le vois ici, je ne l'ai jamais rédigé.
9 Mme EDGERTON : [interprétation]
10 Q. Je n'étais pas tout à fait certaine si vous étiez en mesure de voir le
11 document à l'écran également. Bien. Alors vous avez sous les yeux,
12 Monsieur, un document intitulé "commandement du 4e Corps d'armée,
13 strictement confidentiel, 17 mai 1992," et on peut lire :
14 "Sur la base du commandement du 2e ordre de la zone militaire en date du 14
15 mai, dans le but de changer les titres d'unités du 4e Corps d'armée, nous
16 vous proposons de nouvelles appellations pour les unités du 4e Corps
17 d'armée."
18 R. Oui, c'est tout à fait clair. Je le vois. C'est ma signature, mais je
19 n'ai jamais écrit ce document. On dirait ici que c'est moi qui aurais
20 rédigé ce document alors que ce n'est pas le cas. Le tampon et la
21 signature, oui, c'est bien moi, mais ce n'est certainement pas moi qui ai
22 rédigé ce texte. J'avais refusé moi-même d'être commandant de cette unité -
23 -
24 Q. Monsieur, un instant, je vous prie. Le Juge vous pose une question ou
25 aimerait obtenir une réponse à une question.
26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] J'essaie de voir si c'est bien le
27 document en question.
28 [La Chambre de première instance se concerte]
Page 8695
1 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
2 le document se trouve sur le prétoire électronique, mais vous pouvez
3 certainement avoir mon exemplaire. Je vous le remets avec plaisir.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez poursuivre, je vous prie.
5 Mme EDGERTON : [interprétation]
6 Q. Colonel, vous dites que ce document porte vos initiales au bas de la
7 page, mais ce n'est pas un document que vous auriez rédigé vous-même. Est-
8 ce qu'il faudrait comprendre que c'est un document qui a été rédigé par
9 l'un de vos officiers subordonnés ?
10 R. Non, non. Il ne s'agit pas de cela. Je n'ai jamais moi-même signé un
11 document comme celui-ci. Mais effectivement, je dois confirmer qu'il s'agit
12 bien de ma signature au bas du document.
13 Q. Colonel, je ne comprends pas tout à fait bien. Si vous n'avez pas signé
14 vous-même le document et que votre signature y figure, dites-vous que vous
15 contestez l'authenticité du document ? Ou ce document correspondrait aux
16 événements du 17 mai pour ce qui est de la restructuration du 4e Corps
17 d'armée ?
18 R. S'agissant du Corps de Romanija-Sarajevo, ce n'est qu'après le 20 mai
19 que l'on ait changé les noms d'unités, lorsque le corps d'armée a été
20 formé.
21 Q. [aucune interprétation]
22 R. Je n'ai pas, moi-même, pris part à la rédaction de ce document.
23 Q. Est-ce que vous contester la véracité ou la précision de ce document,
24 voire l'exactitude du document ?
25 R. Ce n'est pas mon document à moi. Ce n'est pas moi qui l'ai rédigé. Je
26 n'en suis pas l'auteur. Il est tout à fait possible que les noms de ces
27 unités correspondent à la réalité, mais je n'ai jamais été responsable de
28 quelque changement de noms que ce soit.
Page 8696
1 Q. Qu'est-ce qui vous permet de dire que c'est un faux ?
2 R. Parce qu'on a procédé à la création de la formation du 4e Corps
3 d'armée, c'est-à-dire qu'on a créé des formations analogues aux créations
4 du 4e Corps d'armée, alors que le 4e Corps d'armée a été démantelé le 20
5 mai. J'étais resté le représentant du commandant du 4e Corps, alors que mon
6 adjoint, il y avait un officier. Les seules personnes qui sont restées
7 derrière, c'était moi-même, l'adjoint, le chauffeur, mais d'autres
8 commandants et collègues ont procédé à la création du 4e Corps d'armée. Ils
9 se sont sans doute servis de membres qui figuraient ou qui faisaient partie
10 de ces autres unités du 4e Corps. Je m'en rappellerais certainement si
11 c'était moi qui l'avais rédigé.
12 Q. Vous voulez dire que vous vous rappelleriez de quoi exactement ?
13 R. Si c'est moi qui avais rédigé ce document, je m'en souviendrais.
14 Q. Mais n'est-ce pas votre signature qui figure au bas de la page,
15 Monsieur ?
16 R. Oui, mais ce n'est pas, vous savez, très difficile de transférer la
17 signature de quelqu'un et ensuite d'écrire n'importe quoi en haut. Ce n'est
18 pas très difficile. Le tampon existait également.
19 Q. Est-ce que vous êtes en train de nous dire que votre signature a été
20 fabriquée et que c'est un faux, qu'on a essayé de reproduire votre
21 signature ? Est-ce qu'on a imité votre signature ?
22 R. Ce n'est pas une signature falsifiée. Je ne crois pas que quelqu'un
23 aurait essayé de falsifier ma signature. C'est bien ma signature, mais le
24 contenu ne correspond pas à quelque chose que j'aurais rédigé. Il y a eu un
25 autre commandant qui était le commandant de cette unité. C'est sous lui que
26 l'on a restructuré le corps d'armée de cette façon-ci.
27 Q. Mais, Monsieur, vous avez déjà dit que vous aviez été nommé en tant que
28 responsable, c'est-à-dire que l'on vous a donné l'autorité de -- enfin
Page 8697
1 j'essaie de retrouver vos propos exacts, vous avez été nommé représentant
2 du commandant du corps d'armée à l'époque. Monsieur, si je vous disais que
3 votre successeur, le commandant du corps d'armée qui vous a suivi n'est
4 arrivé sur les lieux que deux jours après la rédaction de ce document, cela
5 vous mettait en position de pouvoir donner des directives aux éléments qui
6 restaient du 4e Corps d'armée et de leur donner des titres afin qu'ils
7 puissent mener, continuer d'exister en tant que nouveaux éléments du 4e
8 Corps d'armée.
9 R. A l'époque, mon commandement supérieur était le 1er District militaire.
10 Ce n'est qu'eux qui auraient pu me donner l'ordre de faire ceci. Mon ordre
11 était de faire en sorte que tous les membres du 4e Corps d'armée, tous les
12 citoyens de la RSFY, tous les soldats, les commandants et les citoyens
13 soient re-subordonnés pour être placés sous les ordres de la République
14 fédérale de Yougoslavie, alors que les membres de la Bosnie-Herzégovine et
15 des autres républiques devaient retourner dans leur propre république pour
16 faire partie de leur unité propre.
17 Q. Monsieur, vous avez déclaré ne pas avoir eu l'autorité de mener un tel
18 ordre, mais je vous soumets que vous aviez exactement la possibilité de
19 donner de tel ordre. Vous étiez le représentant du corps d'armée et vous
20 l'étiez jusqu'à ce que votre successeur n'arrive. Votre successeur n'était
21 pas encore arrivé sur les lieux.
22 R. Non. Je n'ai pas obtenu de successeur pour le 4e Corps d'armée, du
23 tout. C'est moi qui étais le commandant du 4e Corps d'armée de la JNA,
24 alors que le Corps de Romanija-Sarajevo avait été créé à l'extérieur du 4e
25 Corps d'armée. Mais, les membres du 4e Corps d'armée, et c'est tout à fait
26 logique, ces membres qui se trouvaient sur le territoire de Bosnie-
27 Herzégovine, ils faisaient partie de ce corps. Pour être plus clair, je
28 vais vous expliquer : le gouvernement de la Republika Srpska m'a offert
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1 d'être le commandant de ce 4e Corps d'armée et j'ai refusé. La Fédération
2 de Bosnie-Herzégovine m'a de même offert de devenir commandant de la
3 Défense territoriale de Bosnie-Herzégovine et j'ai refusé d'accéder à ce
4 poste. Je leur ai dit que c'était leur travail et que c'était eux qui
5 devaient s'occuper de ceci. J'ai donc proposé le général Mladic à ma place.
6 M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin, parce que le 17 mai 1992 vous étiez
7 sur les lieux, est-ce que vous reconnaissez au moins que les changements
8 dans les titres ou les intitulés des unités qui sont repris ici sur cette
9 feuille de papier s'étaient produit ? Est-ce que c'est le cas ou non ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Les unités du 4e Corps d'armée ont changé de
11 nom, c'est vrai. C'est vrai pour ce qui est des titres, mais pour ce qui
12 est des nouvelles unités nommées au sein du Corps de Romanija-Sarajevo, ça
13 je ne le sais pas. Je ne sais pas quels étaient les noms, comment est-ce
14 qu'on a nommé ces nouvelles unités ? Je ne peux pas vous dire. Pour ce qui
15 est des unités de la JNA, effectivement, les noms aussi correspondent.
16 M. LE JUGE MINDUA : Donc, vous étiez en fonction. Vous reconnaissez que les
17 changements qui sont repris ici ont eu lieu, mais vous dites que ce n'est
18 pas vous qui en êtes l'auteur; c'est bien ça ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela ne relevait pas de ma compétence. Je ne
20 peux pas donner l'ordre à quelqu'un et dire que je serais -- je ne peux pas
21 faire ceci moi-même, c'est-à-dire que si j'avais été le commandant de ce
22 corps d'armée, j'aurais peut-être rédigé ou signé un document comme celui-
23 ci, mais il s'agit d'unité. Les unités à gauche sont les unités du 4e Corps
24 d'armée dont j'ai été le commandant en tant que commandant adjoint, ou le
25 représentant du commandement, alors qu'à droite, ces d'autres unités
26 appartenant à une autre armée au Corps de Romanija-Sarajevo, et la RSK est
27 une unité de la Républika Srpska.
28 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.
Page 8699
1 Madame Edgerton.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Colonel, est-ce que vous aviez
3 l'habitude de signer plusieurs documents de façon quotidienne ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr, je signais un assez grand
5 nombre de documents, les documents qui étaient destinés à l'ABiH ou aux
6 unités dont j'assurais le commandement. Je signais des documents. Mais un
7 document comme celui-ci n'aurait pas pu parvenir à moi pour que je le
8 signe, et pour ce qui est du tampon du 4e Corps d'armée n'aurait pas pu
9 être apposé sur un tel document, puisque le commandement du Corps d'armée -
10 - il aurait fallu qu'il s'agisse d'une unité qui était --
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Je voulais vous
12 demander s'il était peut-être possible que, puisque vous avez signé un très
13 grand nombre d'ordres et de documents de façon quotidienne, il aurait peut-
14 être pu se passer que vous ayez signé effectivement un tel document, mais
15 que vous l'auriez oublié, puisque vous auriez signé un grand nombre de
16 documents de façon quotidienne ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'est pas possible. Puis-je parler --
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je n'ai pas entendu la réponse à ma
19 question. Oui.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Ma signature n'aurait fait aucun sens. Cela ne
21 faisait aucun sens de mettre ma signature sur un document pareil. Il aurait
22 fallu que le commandement d'un corps d'armée soit responsable. Le corps
23 supérieur, le corps qui donnait des ordres au RSK, c'était le commandement
24 de la Défense territoriale de la Republika Srpska. C'était eux qui
25 décidaient de l'organisation et de la resubordination de leurs unités.
26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Madame Edgerton.
27 Mme EDGERTON : [interprétation]
28 Q. Colonel, avez-vous signé ce document ou non ?
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1 R. Non.
2 Q. Est-ce que vous maintenez que ce document est un faux, qu'on a falsifié
3 votre signature ?
4 R. Oui.
5 Q. Si je vous disais, Colonel, que ce document a été donné au bureau du
6 Procureur, et qu'il a été communiqué par le conseil de la Défense du
7 général Galic, qui a un moment donné était le commandant du Corps Sarajevo-
8 Romanija, est-ce que cela changerait votre position, la position que vous
9 avez adoptée ou votre réponse quant à l'authenticité de ce document ?
10 R. Non, cela ne changerait absolument rien, puisque je n'avais pas
11 légalement la possibilité de décider. Je n'avais pas l'autorité juridique
12 de décider de ce genre de changement.
13 Q. Monsieur, ma question n'était pas de savoir si vous aviez juridiquement
14 le pouvoir de faire quelque changement que ce soit, mais je ne fais que
15 vous dire que ce document ne fait que rebaptiser les unités. Ma question
16 est de savoir si cela changerait votre position quant au fait que vous
17 pensiez qu'il s'agit d'un faux, si vous saviez que c'est un document qui a
18 été communiqué par le conseil de la Défense du général Galic ?
19 R. J'ai déjà dit qu'indépendamment de la personne qui ait communiquée ce
20 document, je m'en serais certainement souvenu. Mais je n'avais pas la
21 compétence de faire ceci. Je ne sais pas qui aurait accepté un ordre venant
22 de moi, personne n'aurait accepté un ordre venant de moi, afin que l'on
23 procède à la rebaptisation de ces unités.
24 Q. Merci, Colonel. Nous pouvons maintenant passer à un autre sujet.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien, mais après la pause, je vous
26 prie.
27 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
28 --- L'audience est suspendue à 12 heures 19.
Page 8701
1 --- L'audience est reprise à 12 heures 41.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton.
3 Mme EDGERTON : [interprétation] Je me demande si je peux verser ce document
4 au dossier.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.
6 Mme EDGERTON : [interprétation] Je suis désolée. Je vous répète, je
7 voudrais verser ce document, s'il vous plaît.
8 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Maître Tapuskovic.
9 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je soulève tout d'abord une objection
10 étant donné que le contenu de ce document doit être rapproché du paragraphe
11 3 de l'acte d'accusation. Nous devons tout d'abord vérifier quelles sont
12 les brigades qui sont sous le contrôle du SRK, et vous voyez que je n'ai
13 fait aucune mention des sapeurs de Pale, et cetera, et cetera. Donc, les
14 points 24, 45, 58 n'ont rien à voir avec ce qui a été écrit au paragraphe 3
15 de l'acte d'accusation. Ensuite, pour ce qui est de ce qu'a dit le témoin,
16 je voulais soulever une objection à propos du versement éventuel de ce
17 document que vous aviez déjà décidé.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Absolument pas. J'aimerais savoir ce
19 que veut Mme Edgerton.
20 Mme EDGERTON : [interprétation] Tout ceci a trait à la crédibilité du
21 témoin.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En effet, cela a trait à la
23 crédibilité du témoin, nous pouvons donc admettre le document à ce titre.
24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La pièce recevra la cote P912.
25 Mme EDGERTON : [interprétation]
26 Q. Maintenant, Colonel, pourriez-vous, s'il vous plaît, passer à un autre
27 document qui se trouve encore dans le dossier que vous avez sous les yeux,
28 le numéro 03244. Ce document est un ordre du colonel Tomislav Sipcic en
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1 date du 22 mai 1995, ordre envoyé au commandement de la 2e Brigade de
2 Romanija et portant sur des modifications d'organisation et de formation de
3 ce corps. Avez-vous vu le document ?
4 R. Oui, je l'ai sous les yeux.
5 Q. Vous nous avez dit que vous étiez commandant du corps par intérim, mais
6 que vous n'aviez pas l'autorité d'émettre ce type d'ordre portant sur la
7 formation et sur la consolidation d'un corps militaire, mais je vois que
8 dans cet ordre, le général Sipcic a justement procédé à ce type de chose.
9 Donc, voici ma question : ce que vous lisez dans le document correspond-il
10 à ce dont vous vous souvenez à l'époque ?
11 Mme EDGERTON : [interprétation] Messieurs les Juges, avez-vous besoin de
12 mon exemplaire ?
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est la deuxième fois que nous en
14 avons besoin et je remets en question quand même l'authenticité de ces
15 documents.
16 Mme EDGERTON : [interprétation] Il s'agit de la pièce 03244 dans le
17 dossier.
18 Q. Ce qui est écrit dans ce document, Monsieur le Témoin, à propos de la
19 transformation des unités militaires des Serbes de Bosnie et des unités de
20 la Défense territoriale des Serbes de Bosnie transformés en éléments du
21 Corps Romanija-Sarajevo; est-ce que ceci correspond avec ce dont vous vous
22 souvenez à l'époque ?
23 R. Je me souviens très bien du moment où le commandement du Corps de
24 Sarajevo-Romanija a été établi et je me souviens que c'était bel et bien le
25 colonel Tomas Sipcic qui dirigeait ce commandement. D'ailleurs, le
26 commandement de la Défense territoriale de la Republika Srpska qui était
27 son commandement supérieur lui a donné l'ordre d'établir ce Corps Sarajevo-
28 Romanija, de le créer, de l'établir. Une grande partie des membres des
Page 8703
1 forces armées qui étaient dans le 4e Corps de la JNA ont été transférés
2 dans ce nouveau corps puisque territorialement, si je puis dire, ils
3 dépendaient de la Bosnie-Herzégovine.
4 Donc ce commandement, le commandement du Corps de Sarajevo-Romanija ne se
5 trouvait pas dans le même bâtiment que moi à Lukavica. Si je me souviens
6 bien, ils étaient d'abord logés à Tvrdinic, puis ils sont passés ensuite à
7 Pale, ils ont déménagé dans un hôtel là-bas. Je ne me souviens plus très
8 bien du nom de cet endroit, Planinka ou quelque chose.
9 Q. Merci. J'en déduis qu'au vu de ce que vous vous souvenez, ce document
10 correspond bien à ce qui s'est passé à l'époque ?
11 R. Oui.
12 Q. Merci.
13 Mme EDGERTON : [interprétation] Messieurs les Juges, ce document a déjà été
14 versé au dossier sous la cote P770, si je me souviens bien.
15 Q. Maintenant, j'ai encore quelques questions à vous poser à propos de
16 votre carrière. Pour ce qui est du 4e Corps, quand vous dépendiez du 4e
17 Corps, vous nous avez dit que vous étiez commandant adjoint en charge de la
18 logistique; c'est bien cela ?
19 R. J'étais l'assistant du commandant en charge de la logistique.
20 Q. Très bien. Vous nous avez dit que du fait de votre poste, vous étiez au
21 courant de tout ce qui se passait au niveau du 4e Corps, les missions et
22 les activités de ce Corps ?
23 R. Oui.
24 Q. En mai 1992, vous avez été nommé représentant du commandant du corps
25 après que le général Djurdjevac soit parti à la retraite ?
26 R. Oui. Le 10 mai, plutôt le 11 d'ailleurs, puisque l'ordre officiel a été
27 écrit le 11 mai, il a été nommé à son nouveau poste et n'était plus
28 assistant au commandant en charge de la logistique.
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1 Q. A ce moment-là, vous avez emménagé dans la caserne de Lukavica, n'est-
2 ce pas ?
3 R. Oui. En effet, j'ai emménagé le 1er avril 1992 dans cette caserne de
4 Lukavica.
5 Q. Mais c'est quelque chose que vous avez fait délibérément de vous-même,
6 bien que le général Kukanjac, qui était commandant du 2e District
7 militaire, avait décidé qu'il ne fallait pas emménager vers cette caserne à
8 l'époque ?
9 R. Oui, c'est vrai.
10 Q. Quand vous étiez à la caserne de Lukavica, vous étiez le représentant
11 du commandant du Corps, c'était votre fonction ?
12 R. J'étais adjoint du commandant du corps, ensuite j'ai été commandant du
13 corps par intérim à partir du 10 mai.
14 Q. A partir du 10 mai, mais jusqu'à quand exactement ?
15 R. Jusqu'à ce que je me rende dans la République fédérale de Yougoslavie,
16 c'est-à-dire le 5 juin. Le 6 juin, j'ai envoyé ma demande de retraite, le 6
17 juin.
18 Q. Qu'est-ce que cela signifie pour ce qui est de votre fonction ? Vous
19 étiez, vous nous dites, commandant par intérim, pouvez-vous nous dire un
20 petit peu ce que vous deviez faire au jour le jour à ce titre ?
21 R. Je faisais tout ce que faisait un commandant du corps, mais je n'avais
22 pas de décret qui aurait justifié cette nomination et qui m'aurait fait, de
23 ce fait, devenir général. J'avais refusé ce type de nomination officielle.
24 Q. Donc vous agissiez en tant que commandant du corps, vous exécutiez
25 toutes les missions qui sont dévolues à ce type de fonction, pouvez-vous
26 nous dire comment vous étiez informé de ce qui se passait sur le terrain ?
27 R. J'étais en contact constant avec mes commandements subordonnés. Avec
28 Fikret Abdic, par exemple, qui était membre du président BH, avec le
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1 général MacKenzie, avec Doyle jusqu'au 7 mai jusqu'à ce qu'il reparte.
2 J'étais aussi en contact avec Efendic, Hasan Efendic, qui était le
3 commandant de l'état-major de l'ABiH et j'étais aussi en liaison avec les
4 dirigeants de la Republika Srpska.
5 Q. A qui faites-vous allusion en ce qui concerne ces derniers, s'il vous
6 plaît ?
7 R. Nous étions en communication avec Radovan Karadzic, le président à
8 l'époque de la Republika Srpska.
9 Q. Vous avez dit que vous étiez en contact constant avec vos commandements
10 subordonnés, est-ce que cela signifie que vous établissiez le contact par
11 téléphone, oui ou non ? Par téléphone, déjà ?
12 R. Uniquement par téléphone.
13 Q. Par télégramme ?
14 R. Pour ce qui est de MacKenzie, il venait souvent à mon bureau.
15 Q. Mais je parle des niveaux de commandements subordonnés, puisque vous
16 dites que vous étiez en contact permanent avec vos unités subordonnées.
17 J'aimerais savoir exactement comment se faisait la liaison entre vous et
18 eux, comment vous les contactiez et comment ils vous contactaient ?
19 R. On utilisait des équipements de transmission et de communication et
20 pour ceux qui se trouvaient dans les alentours de la caserne de Lukavica,
21 il y avait les briefings quotidiens.
22 Q. Pour ce qui est du contrôle militaire, on peut dire que vous contrôliez
23 complètement ce qui se passait à Sarajevo pendant toute la période où vous
24 avez été commandant de corps par intérim, n'est-ce pas ?
25 R. Oui, je contrôlais totalement les membres du 4e Corps, mais je n'avais
26 pas un contrôle parfait ou complet des troupes de Défense territoriale qui
27 avaient été établies le 12 mai par la Republika Srpska, la Republika Srpska
28 qui, à ce moment-là, essayait de créer sa propre armée.
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1 Q. Donc vous contrôliez les membres du 4e Corps, et ce, entièrement mais
2 vous aviez aussi un contrôle opérationnel sur les membres des forces de
3 police des Serbes de Bosnie.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Me Tapuskovic est debout.
5 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il nous a déjà donné sa réponse directe.
6 Il a dit qu'il ne contrôlait absolument pas les troupes de la Défense
7 territoriale de la Republika Srpska. On se répète ici. A la fin, certes, la
8 question était un petit peu nouvelle puisqu'on nous parlait des forces de
9 la police, mais le témoin a dit qu'il contrôlait l'armée populaire de la
10 Yougoslavie, mais qu'il ne contrôlait absolument pas la Défense
11 territoriale de la Republika Srpska.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Certes. Mais je considère que Mme
13 Edgerton est en train de nous poser une question complète. Il y a certes
14 une certaine répétition dans sa question, mais il y a aussi des parties
15 tout à fait nouvelles, donc elle a tout à fait le droit de les poser. Nous
16 laisserons tomber les parties répétitives, c'est tout.
17 Madame Edgerton, vous pouvez y aller.
18 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vous remercie.
19 Q. Donc vous avez le contrôle opérationnel des membres de la police des
20 Serbes de Bosnie, ainsi que des forces paramilitaires des Serbes de Bosnie
21 ?
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic.
23 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Je soulève une objection à propos de la
24 chose suivante : mon éminente consoeur de l'Accusation est en train de
25 présenter au témoin quelque chose auquel il a déjà répondu. Le témoin a
26 bien et bien dit qu'il n'avait aucun contrôle de ces forces. Maintenant,
27 Mme Edgerton est en train de dire : "Vous contrôliez ceci et vous
28 contrôliez la Défense territoriale," et cetera, et cetera. Or, il n'a
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1 jamais confirmé qu'il avait bel et bien le contrôle de la Défense
2 territoriale de la Republika Srpska.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, mais dans un système
4 contradictoire on a le droit de faire cela. On a le droit de présenter ses
5 arguments au témoin, que ce soit l'avis du témoin ou l'opinion du témoin ou
6 non. Je pense que c'est exactement l'exercice à laquelle s'emploie Mme
7 Edgerton. Elle a bien compris quels étaient les éléments de preuve que le
8 témoin nous a apportés, mais ses instructions, ses consignes sont de poser
9 cette question à propos du contrôle qu'elle considère qu'il avait. Elle a
10 le droit de poser cette question, et nous avons le droit d'entendre la
11 réponse.
12 Mme EDGERTON : [interprétation]
13 Q. Pour en terminer de cette question, Colonel, vous aviez donc un
14 contrôle opérationnel sur les membres de la police serbe de Bosnie, sur les
15 forces paramilitaires serbes et les forces paramilitaires des Serbes de
16 Bosnie qui participaient à certaines actions autour de Sarajevo à l'époque,
17 n'est-ce pas ?
18 R. Je n'avais aucun pouvoir sur la police de la République serbe. Je
19 n'avais aucun pouvoir sur les forces paramilitaires ou sur la Défense
20 territoriale de la République serbe. Je coopérais avec Stanisic, le
21 ministre de l'Intérieur quand il fallait faire quelque chose qui se
22 trouvait dans la zone de responsabilité du 4e Corps, tout comme je
23 coopérais avec le ministre Delic Mustafic, s'il fallait faire quelque chose
24 sur son territoire.
25 Q. J'ai parlé de subordination opérationnelle, mais vous, vous m'opposez
26 en fait une coordination opérationnelle. Vous étiez plutôt en charge d'une
27 coordination opérationnelle, mais pas de subordination ?
28 R. Coordination ou peut-être coopération, ce serait encore mieux, je
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1 pense.
2 Q. Mais pour ce qui est des forces paramilitaires serbes qui étaient très
3 actives autour de Sarajevo en 1992, pouvez-vous nous dire quels étaient
4 votre lien avec eux et votre degré de contrôle ?
5 R. Pour ce qui est des forces paramilitaires serbes et des Défenses
6 territoriales des municipalités, ils avaient leur propre commandement. Pour
7 ce qui des cellules de Crise nous étions en contact téléphonique avec eux,
8 puisque tout ceci avait lieu aussi sur la zone de responsabilité du 4e
9 Corps.
10 Q. Cette coordination opérationnelle avec les forces paramilitaires serbes
11 comprenait-elle aussi les Seseljevci qui étaient actifs à Grbavica et les
12 Arkanovci qui, eux, ont participé à des opérations à Ilidza en mai 1992 ?
13 R. Il n'y avait aucune coopération avec les hommes de Seselj et les hommes
14 d'Arkan. Je ne me souviens même pas que les hommes de Seselj aient été
15 présents dans la zone de Sarajevo, peut-être en mars ou en avril, c'est
16 vrai qu'il y avait un groupe à Grbavica à cette époque. Pour ce qui est des
17 hommes d'Arkan, il y avait juste des rapports à leur propos dans les médias
18 et rien de plus. Je n'ai pas connaissance de la présence d'Arkan ou de ses
19 hommes dans Sarajevo pendant que j'y étais.
20 Mme EDGERTON : [interprétation] Dans ce cas-là, pourrions-nous avoir une
21 conversation téléphonique interceptée, s'il vous plaît ? Le script de cette
22 conversation est le numéro 03316. C'est aussi téléchargé dans le système
23 électronique. Normalement vous devriez aussi l'avoir dans vos dossiers.
24 Pourrions-nous, s'il vous plaît maintenant entendre cette conversation
25 téléphonique interceptée. Je pense que Belgrade pourrait nous dire si, oui
26 ou non, ils l'entendent.
27 [Diffusion de la cassette audio]
28 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
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1 "Professeur Unkovic : Bonjour, bonjour, est-ce le colonel Gagovic ?
2 Colonel Gagovic : Oui.
3 Professeur Unkovic : Colonel, c'est le professeur Unkovic de la cellule de
4 Crise. Comment puis-je vous aider ?
5 Colonel Gagovic : J'ai besoin d'information.
6 Professeur Unkovic : Oui.
7 Colonel Gagovic : Information sur l'aéroport ? Y aura-t-il des négociations
8 comme cela aujourd'hui, des négociations sur l'aéroport ?
9 Professeur Unkovic : Oui, il y aura des négociations."
10 L'INTERPRÈTE : L'interprète ne peut pas interpréter parce qu'il n'y pas
11 d'interprétation vers l'anglais.
12 [Fin de la diffusion de la cassette audio]
13 Mme EDGERTON : [interprétation]
14 Q. Colonel, avez-vous reconnu votre voix dans cette conversation
15 téléphonique interceptée ?
16 R. Oui. J'ai en effet entendu ma voix et je me souviens d'ailleurs de
17 cette conversation.
18 Q. Vous avez aussi reconnu la voix de votre commandant en chef à l'époque,
19 le général Ratko Mladic, n'est-ce pas ?
20 R. Il n'était pas commandant en chef, mais était commandant par intérim du
21 2e District militaire, mais il était déjà chef de l'état-major de la
22 Republika Srpska. Pour ce qui est de l'aéroport -- M. LE JUGE ROBINSON :
23 [interprétation] La question était de savoir si vous aviez reconnu la voix
24 de Ratko Mladic ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
26 Mme EDGERTON : [interprétation]
27 Q. Avez-vous entendu le général Mladic dire à M. Unkovic de la cellule de
28 Crise de la municipalité serbe d'Ilidza, que ce qui était le plus important
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1 maintenant, c'est que les formations militaires, quelle que soit l'entité à
2 laquelle elles appartiennent doivent être mises sous le commandement du QG
3 du 4e Corps, donc à Gagovic ? Vous l'avez entendu ?
4 R. Oui, je l'ai entendu.
5 Q. Avez-vous entendu Ratko Mladic dire que vous deviez avoir sous votre
6 commandement toutes les formations militaires quelle que soit l'entité à
7 laquelle elles appartiennent. Voulez-vous modifier maintenant votre
8 position en ce qui concerne la nature du commandement que vous exerciez sur
9 les forces des Serbes et les forces des Serbes de Bosnie aux alentours de
10 Sarajevo à l'époque ?
11 R. Non. Je peux vous dire qu'il s'agissait d'un aéroport et l'armée
12 populaire de Yougoslavie assurait la sécurité de l'aéroport. Les unités de
13 la Défense territoriale de la municipalité d'Ilidza voulaient prendre le
14 commandement. Ici, le général Mladic a un double rôle puisqu'il est à la
15 fois le commandant de la 2e Armée de la JNA et le chef de l'état-major de
16 la Défense territoriale. Il voulait éviter et empêcher la Défense
17 territoriale de prendre quoi que ce soit et de ce fait, il leur donne
18 l'ordre de se mettre sous mon commandement. J'étais censé ensuite traiter
19 tous ces problèmes.
20 Q. Très bien. Mais vers la fin de la conversation, avez-vous entendu M.
21 Unkovic dire, nous avons ici des hommes d'Arkan. Il demande aussi au
22 général Mladic si ces hommes, d'Arkan donc, sont sous notre commandement ?
23 R. Oui, je l'ai entendu et on ne peut pas exclure le fait qu'il y avait
24 des hommes d'Arkan à Ilidza, puisque certains de ces groupes sont arrivés.
25 Pour que l'unité de ce type y arrive de façon organisée avec la complicité
26 du 4e Corps, cela ne serait pas possible, c'est impossible, je l'exclus
27 totalement, mais il y avait eu ce type de groupes et d'individus à peu près
28 partout à l'époque.
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1 Q. Mais Mladic poursuit pour dire : "Ils sont tous," et quand il dit "ils
2 sont tous sous notre commandement." Mladic l'a bel et bien dit. "Ils sont
3 tous," et il fait référence ici aux hommes d'Arkan. Voulez-vous, après
4 avoir entendu cela, modifier ce que vous avez dit précédemment ?
5 R. Non, je ne peux pas changer ce que j'ai dit. Ces forces faisaient
6 partie de la Défense territoriale de la municipalité d'Ilidza avec Unkovic.
7 Je n'ai pas demandé à Unkovic quelle était la structure de ses détachements
8 ou de brigades ou ce qu'il avait. Je n'ai pas demandé si c'était des hommes
9 qui venaient d'Ilidza ou si c'était des volontaires qui venaient
10 d'ailleurs. Je ne lui ai rien demandé à ce propos.
11 Q. Merci.
12 Mme EDGERTON : [interprétation] Pourrions-nous, s'il vous plaît, verser
13 cette pièce au dossier en tant que pièce de l'Accusation ?
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.
15 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cette pièce recevra la cote P913.
16 Mme EDGERTON : [interprétation]
17 Q. Passons à autre chose, maintenant. Vous avez dit lors de votre
18 témoignage, en répondant aux questions de Me Tapuskovic, que votre
19 occupation principale en mai 1992 était d'assurer la sécurité des jeunes
20 qui se trouvaient dans les casernes. Tout ce que vous vouliez c'était
21 arriver à faire sortir ces jeunes des casernes. Vous vous en souvenez,
22 n'est-ce pas ?
23 R. Oui.
24 Q. Cela dit, ce n'était pas votre seule préoccupation à l'époque. Vous
25 aviez autre chose de très important à faire. Vous l'avez dit vous-même et
26 vous l'avez dit dans cette conversation téléphonique interceptée. Vous
27 commandiez les forces des Serbes de Bosnie qui travaillaient à diviser
28 Sarajevo, n'est-ce pas ?
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1 R. Non, je n'étais pas le commandant là, parce que les forces serbes qui
2 essayaient de découper Sarajevo, ce n'étaient du fait des militaires.
3 C'étaient les politiques qui en étaient responsables. Les unités de la
4 Défense territoriales avaient été établies par des cellules de Crise dans
5 les zones où les Serbes étaient en majorité comme Lukavica, Rajlovac,
6 Zlatiste, et cetera, et cetera. Leur seul but était de protéger les foyers,
7 les vies des résidents sur place. Il n'y avait aucune intention, de leur
8 part en tout cas ou de la part de leurs dirigeants supérieurs ou de leurs
9 commandants, de s'occuper de Sarajevo. Quant à savoir ce que les politiques
10 à un niveau supérieur faisaient, cela je pense que je n'ai pas à en parler.
11 Q. Mais vous avez dit que vous étiez en coordination et en consultation
12 avec les dirigeants serbes de Bosnie. Quand je vous ai demandé un nom, vous
13 m'avez parlé de Radovan Karadzic. Le 12 mai 1992, les dirigeants des Serbes
14 de Bosnie ont promulgué leurs buts stratégiques pour les années à venir. Et
15 le but stratégique numéro 5 était la division de Sarajevo. Vous devez quand
16 même vous en souvenir ?
17 R. Oui, je me souviens de l'avoir lu dans la presse. Je me souviens
18 d'avoir lu dans la presse qu'ils se proposaient de découper Sarajevo selon
19 des entités ethniques, mais aucune mesure militaire n'a été prise pour
20 mettre en œuvre cette division.
21 Q. Si aucune mesure militaire n'a été prise pour mettre en œuvre cette
22 division, dans ce cas là comment allez-vous qualifier le bombardement qui a
23 eu lieu le 14 mai 1992 de la ville de Sarajevo, bombardement qui a été
24 tellement intense que la FORPRONU et d'autres organisations internationales
25 ont été obligées de se retirer de la ville.
26 R. Le bombardement de la ville de Sarajevo n'a pas eu lieu quand j'étais à
27 Lukavica, quand j'étais commandant en charge à Lukavica. Il y avait certes
28 des tirs de temps en temps ou tirs contre les formations ennemies, et quand
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1 la FORPRONU s'est retirée, elle s'est retirée parce que l'une des unités de
2 mortier de l'ABiH tirait exactement derrière le bâtiment de la faculté du
3 génie où la FORPRONU était cantonnée dans le quartier de Lukavica et dans
4 d'autres quartiers serbes de Sarajevo. On a averti la FORPRONU et dès le
5 premier jour ils ont quitté leurs positions, le deuxième jour nous avons dû
6 utiliser notre artillerie pour les déplacer parce qu'ils menaçaient notre
7 vie. Il n'y avait pas de bombardement de Sarajevo à l'époque. Dans
8 Sarajevo, il y avait 50 à 70 000 soldats qui tiraient sans cesse sur les
9 quartiers serbes.
10 Q. Mais vous venez de nous dire qu'il n'y a pas eu de bombardement de
11 Sarajevo lorsque vous commandiez depuis Lukavica. Or la FORPRONU et
12 d'autres officiels internationaux ont rencontré Slobodan Milosevic le 30
13 mai 1992 pour émettre une protestation officielle à propos de ce
14 bombardement de Sarajevo. S'il s'agissait d'officiels de Bosnie-Herzégovine
15 qui étaient responsables de ce bombardement, pensez-vous qu'ils auraient
16 vraiment été se plaindre auprès de Slobodan Milosevic ?
17 R. Je ne sais pas si les dirigeants de la Bosnie-Herzégovine se sont
18 adressés à Slobodan Milosevic, mais je sais que quotidiennement j'avais
19 contact avec la général MacKenzie. Toutes les actions qui ont été menées
20 sur le territoire de Sarajevo ont été résolues par Fikret Abdic, qui était
21 membre de la présidence de la BH, MacKenzie commandant de la FORPRONU, le
22 commandement du 4e Corps et le commandement de la Défense territoriale à la
23 tête de laquelle se trouvait Hasan Efendic. C'était ces personnes-là qui
24 ont participé à la résolution de cela.
25 Q. Monsieur, j'aimerais parler d'une autre conversation interceptée.
26 Mme EDGERTON : [interprétation] C'est dans le classeur, cela porte le
27 numéro 03160. Avec l'autorisation de la Chambre, c'est la transcription et
28 une courte vidéo. Après je serai en mesure d'en conclure avec mes
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1 questions, avec l'autorisation de la Chambre, c'est 03160. C'est la
2 conversation impliquant Biljana Plavsic, le 14 mai 1992.
3 [Diffusion de la cassette vidéo]
4 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
5 "Biljana Plavsic : Bonjour.
6 Radmila : Bonjour, c'est Radmila.
7 Biljana Plavsic : Bonjour. Comment allez-vous ?
8 Radmila : Ecoutez, oui, pouvez-vous faire quelque chose. Savez-vous comment
9 le bâtiment est pilonné.
10 Biljana Plavsic : Vous êtes pilonnés là ?
11 Radmila : Oui, c'est une catastrophe
12 Biljana Plavsic : Oui, c'est une catastrophe.
13 Radmila : Permettez-moi de vous dire, c'est l'horreur, oui.
14 Biljana Plavsic : Ils pilonnent depuis là-bas. Ils prennent leur revanche.
15 Vous comprenez c'est la guerre --
16 Radmila : -- n'est pas simple. Ils ont probablement une raison.
17 Mme Plavsic : Vous êtes dans le milieu de tout cela ?
18 Radmila : Oui, oui. Ils sont en train de nous écouter, nous ne
19 pouvons pas parler librement.
20 Mme Plavsic : Laissez-les nous écouter --
21 Radmila : Oui ? La ligne a été coupée.
22 Mme Plavsic : Biljana appelle Radmila encore une fois.
23 Radmila : Oui ? Allo ? Oui.
24 Mme Plavsic : C'est moi à nouveau. La ligne a été coupée.
25 Radmila : Oui, oui.
26 Mme Plavsic : Permettez-moi de vous de vous dire cela --
27 Radmila : Oui.
28 Mme Plavsic : Permettez-moi de vous dire, s'il vous plaît, est-ce
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1 qu'ils pilonnent vraiment les cibles civiles ?
2 Radmila : Je ne peux pas vous dire rien de plus."
3 [Fin de la diffusion de la cassette audio]
4 Mme EDGERTON : [interprétation]
5 Q. Vous avez dit, il y a quelques minutes, que Sarajevo n'a pas été
6 bombardé pendant que vous étiez à Lukavica. Je vous dis que le 14 mai 1992,
7 vous étiez à Lukavica et le bombardement a été très intense, et Biljana
8 Plavsic s'est plainte par rapport à cela. Après avoir entendu cela, est-ce
9 que vous voulez changer votre réponse par rapport au bombardement de
10 Sarajevo ?
11 R. Non. Voilà ma raison. De l'immeuble où habitait la mère de Biljana
12 Plavsic - Biljana Plavsic était allée voir sa mère - de cet immeuble, il y
13 avait des mitraillettes qui opéraient, et des tireurs d'élite de l'armée de
14 la Fédération de Bosnie-Herzégovine qui tiraient sur les positions de la
15 brigade de la Défense territoriale à Grbavica [comme interprété]. Plavsic
16 m'a appelé et je suis étonné de ne pas voir cela ici, dans cette
17 conversation interceptée. Ce n'était plus un bâtiment civil, c'était un
18 bâtiment militaire, parce qu'il y avait des tirs depuis ce bâtiment.
19 L'unité qui a tiré sur ce bâtiment n'est pas coupable pour cela. C'est
20 l'autre côté qui en est coupable, parce qu'il a transformé ce bâtiment
21 civil en bâtiment militaire. Il n'y a rien à inventer de plus par rapport
22 au droit international. Ils ont transformé les bâtiments civils en
23 bâtiments militaires, en cibles militaires.
24 Q. Ce n'est pas la réponse à ma question, Monsieur le Colonel, mais peut-
25 être que nous pourrions continuer.
26 En tant que commandant adjoint en charge de la logistique au sein du 4e
27 Corps, vous avez dit - et je le répète - que vous étiez au courant de tous
28 les travaux et toutes les activités du 4e Corps, et tant que commandant par
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1 intérim de ce qui deviendrait le Corps de Romanija-Sarajevo en l'absence du
2 général Djurdjevac, vous auriez dû avoir des connaissances détaillées --
3 R. C'est d'après vous.
4 Q. -- pour ce qui est de la quantité des munitions dont vos forces
5 disposaient, n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. Donc, vous auriez dû être au courant de la présence de dizaines, peut-
8 être plus, de mortiers et de pièces d'artillerie qui se trouvaient déployés
9 autour de la ville de Sarajevo et qui visaient le centre de la ville, et
10 tout cela sous le contrôle de vos forces, n'est-ce pas ?
11 R. Non. Ce n'était pas comme ça, pas tout à fait. Il y avait les unités et
12 les pièces du 4e Corps. Mais il y avait les unités dans la ville de
13 Sarajevo même, qui avaient également des pièces d'artillerie, des mortiers,
14 des --
15 Q. Monsieur le Colonel, je m'excuse, mais je ne vous ai pas posé de
16 question portant sur les armes se trouvant dans la ville. J'ai posé la
17 question concernant les mortiers et les pièces d'artillerie qui se
18 trouvaient déployées autour de la ville de Sarajevo et qui visaient le
19 centre de la ville. En fait, Monsieur, ils ont été là-bas, ils ont été vus
20 là-bas déjà au début d'octobre 1991. Et vous dites que vous n'étiez pas au
21 courant de cela ?
22 R. En octobre 1991, je ne crois qu'il y ait eu quelque chose là-bas, parce
23 qu'en décembre 1991, au commandement du corps, l'invité du corps est Alija
24 Izetbegovic. A la mi-décembre, il était chez nous pour nous informer de la
25 situation en Bosnie-Herzégovine. En même temps, il nous a informés du fait
26 qu'un référendum serait organisé portant sur l'indépendance de la Bosnie-
27 Herzégovine.
28 Q. Monsieur le Colonel ?
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1 R. Je m'excuse.
2 Q. Est-ce que vous dites que vous affirmez que vous ne saviez pas qu'ils
3 ont été là-bas en octobre 1991 ?
4 R. Qu'ils se trouvaient où ?
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Tapuskovic ?
6 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, s'il s'agit des
7 faits qu'on ne peut pas contester, je ne comprends pas pourquoi on pose
8 toutes ces questions. Parce que je ne pouvais pas poser de questions sur
9 ces faits déjà admis dans le cadre d'autres procès. Je ne comprends pas
10 comment Mme le Procureur puisse poser des questions portant sur les faits
11 déjà admis dans le cadre d'autres procès si tous ces faits ont été déjà
12 admis, jugés. C'est ce que l'Accusation a affirmé, pourquoi permettre à Mme
13 le Procureur de poser des questions portant sur les faits déjà admis dans
14 le cadre d'autres procès ?
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton, est-ce que cela
16 concerne les faits déjà admis dans le cadre d'autres procès ?
17 Mme EDGERTON : [interprétation] Cela concerne la crédibilité, Monsieur le
18 Président.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] La crédibilité. Bien, continuez.
20 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Il est facile de dire cela, que cela
21 concerne la crédibilité, mais en fait, cela concerne l'essence du problème.
22 Mais on lui a permis de poser des questions, donc je ne puis rien faire.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Continuez, Madame Edgerton.
24 Mme EDGERTON : [interprétation]
25 Q. Monsieur le Témoin, revenons à la question.
26 R. Oui.
27 Q. Quand avez-vous -- et vous avez dit que vous étiez au courant de toutes
28 les activités et de tout le travail du 4e Corps, vous étiez commandant par
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1 intérim par rapport à votre prédécesseur du Corps de Romanija-Sarajevo,
2 quand êtes-vous devenu conscient de la présence de pièces d'artillerie
3 lourde et de mortiers qui se trouvaient déployés sur les collines autour de
4 la ville de Sarajevo et qui visaient la ville ?
5 R. La présence des pièces d'artillerie autour de Sarajevo était visible au
6 moment où les unités de la JNA ont été retirées de Kiseljak et de Visoko. A
7 Lukavica, il existait déjà deux unités de la JNA. Quant à la Défense
8 territoriale, à l'époque nous n'avions rien à voir avec eux et nous
9 n'étions pas au courant de leurs activités. Les mortiers que vous avez
10 mentionnés, il s'agissait probablement des armes saisies par la police à la
11 ferme de volaille, et que quelqu'un voulait donc faire passer illégalement
12 de Pale à Ilidza. En octobre 1991, il n'y avait personne qui aurait pu
13 imaginer qu'un conflit éclaterait sur le territoire de Sarajevo et de
14 Bosnie-Herzégovine. Ce que nous avons fait, c'est d'empêcher les unités et
15 les formations paramilitaires de s'armer.
16 Q. Quand ces armes ont-elles été placées là-bas ?
17 R. Approximativement, je peux vous dire que c'était en avril -- je ne me
18 souviens pas de la date exacte. Je pense que ces unités ont été mutées de
19 Kiseljak et de Visoko sur le territoire de Pale et Lukavica. Ce sont les
20 unités de ce corps.
21 Q. Vous affirmez, Monsieur, que des centaines de mortiers et de pièces
22 d'artillerie qui étaient déployées autour de la ville de Sarajevo et dont
23 les canons visaient le centre de la ville ont été emmenés là-bas seulement
24 en avril 1992 ?
25 R. Oui.
26 Q. Quelles unités les ont emmenées là-bas ? En tant que commandant adjoint
27 de la logistique, vous devriez être au courant de cela ?
28 R. C'est le 4e Régiment d'artillerie et de Blindés du 4e Corps de la JNA.
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1 Q. Pour ce qui est de la 216e Brigade de Montagne, c'était aussi le cas de
2 cette brigade ?
3 R. Cette brigade était cantonnée à Han Pijesak, et seulement quand les
4 casernes ont été bloquées à Sarajevo, cette brigade a été emmenée sur le
5 territoire de Lukavica, et le général Milosevic l'a commandé, l'accusé dans
6 cette affaire.
7 Q. Vous n'avez pas répondu à ma question. La 216e Brigade de Montagne
8 était l'une des unités du 4e Corps responsable du déploiement de pièces
9 d'artillerie lourdes sur les positions autour de Sarajevo, n'est-ce pas ?
10 R. Non. Cette brigade de montagne, par son nom, on peut en conclure
11 qu'elle n'avait pas de pièces d'artillerie lourde. La seule pièce dont elle
12 disposait, c'était un mortier. Selon nos catégories dans l'armée, ce sont
13 les armes d'infanterie transportées sur les dos des chevaux. Cette brigade
14 est arrivée au mois de mai, au moment où les conflits ont commencé sur le
15 territoire de Sarajevo. Elle ne disposait que de mortiers de 120-
16 millimètres.
17 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, je propose que ce
18 document soit versé au dossier, le document qui est la conversation
19 interceptée avec Mme Plavsic.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
21 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce portant la cote P914.
22 Mme EDGERTON : [interprétation] Je n'ai plus de questions.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Des questions
24 supplémentaires, Maître Tapuskovic ?
25 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, j'ai quelques questions à poser.
26 Nouvel interrogatoire par M. Tapuskovic :
27 Q. [interprétation] A la question de Mme le Procureur, vous avez dit que
28 votre poste de commandement a été muté à Lukavica, ce que vous avez
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1 demandé. Pourquoi avez-vous fait cela ?
2 R. Le 1er avril 1992, parce que j'ai estimé que je n'étais pas en mesure de
3 faire exécuter mes ordres en étant à Bistrica. Je ne pouvais pas m'occuper
4 des approvisionnements.
5 Q. Est-ce qu'il y avait d'autres choses qui se sont passées ?
6 R. Les événements en mars à Sarajevo et dans les environs de Sarajevo, et
7 en avril, les forces paramilitaires, tout cela me disait que les unités se
8 trouvant dans la caserne à Bistrik allaient être bloquées, et que nous
9 serions entre les mains de notre adversaire.
10 Q. Lukavica même, Monsieur le Témoin, pour ce qui est de sa situation
11 géographique, pouvez-vous nous dire quelle est la situation géographique de
12 Lukavica par rapport à d'autres endroits ?
13 R. Cela se trouve au nord-est de Sarajevo. Ça fait partie de Sarajevo
14 même. C'est une banlieue de Sarajevo.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] S'il vous plaît, arrêtez.
16 Mme EDGERTON : [interprétation] Si on va parler de la situation
17 géographique de la caserne autour de Lukavica, ce n'est pas quelque chose
18 qui découle du contre-interrogatoire.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que c'est le cas, Maître
20 Tapuskovic ?
21 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, cela découle du contre-
22 interrogatoire, parce que mon éminente collègue n'a pas cessé de parler des
23 collines, en disant que la JNA se trouvait sur les collines, et je voulais
24 tirer cela au clair, pour voir d'abord où se trouve Lukavica et pour voir
25 si la JNA se trouvait sur les collines de Hum, de Zuc et sur d'autres
26 positions, parce que mon éminente collègue a mentionné les collines en
27 disant que sur les collines se trouvaient les positions de la JNA. C'est
28 pour cela que je voulais savoir où se trouve Lukavica, si c'est une
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1 colline, ce qui se trouvait sur les collines de Zuc, de Hum, et si sur ces
2 collines se trouvaient par hasard les unités de la JNA et de l'artillerie
3 de la JNA. J'ai voulu que le colonel nous dise cela.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Edgerton, vous dites que
5 votre contre-interrogatoire était plutôt centré autour d'une zone
6 géographique précise ?
7 Mme EDGERTON : [interprétation] Mes questions du contre-interrogatoire
8 avaient trait au moment où le témoin avait pris connaissance du fait que
9 des mortiers lourds étaient déployés autour de la ville de Sarajevo et sur
10 les collines de Sarajevo.
11 [La Chambre de première instance se concerte]
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Alors, posez votre question
13 directement; demandez au témoin s'il peut vous dire si Lukavica se trouvait
14 sur une colline ou dans la plaine.
15 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
16 Q. Monsieur le Témoin, répondez je vous prie à cette question posée par le
17 Président de la Chambre, est-ce que Lukavica se trouvait sur une colline ou
18 pourriez-vous peut-être nous expliquer quelle était la position
19 géographique de Lukavica ?
20 R. Lukavica se trouve sur la hauteur géographique de Marin Dvor, c'est-à-
21 dire à 530 mètres d'altitude. A Lukavica, vous avez Marin Dvor au centre de
22 Sarajevo. Il ne s'agit pas ici de collines. Deuxièmement, l'artillerie
23 n'est jamais placée sur les collines. Je ne sais pas quelle est la
24 terminologie que l'on emploie ici. Les unités d'artillerie du 4e Corps
25 d'armée ne se trouvaient pas sur les collines, mais autour de Pale les unes
26 et les autres, alors que l'unité de la 49e Brigade motorisée était à
27 Lukavica.
28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.
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1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
2 Q. Merci, Monsieur le Colonel.
3 R. Je vous en prie.
4 Q. Dites-moi également, puisque vous avez déjà parlé de la formation du
5 Corps de Sarajevo-Romanija, vous avez déjà répondu à une question posée par
6 le Procureur. Quant à cela, dites-nous, quels étaient les armes et les
7 officiers que le 1er Corps de l'ABiH avait placés sous son commandement ?
8 R. J'avais déjà donné des réponses auparavant, mais je vais maintenant --
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Arrêtez. Je vous prie d'arrêter,
10 Monsieur le Témoin. Encore une fois, est-ce que c'est la même objection ?
11 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais dire que
12 c'est tout à fait à l'extérieur de la période couverte, Monsieur le
13 Président.
14 [La Chambre de première instance se concerte]
15 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Cela ne recoupe pas effectivement
16 les questions posées par le Procureur lors du contre-interrogatoire. Je
17 vous prierai de passer à un autre sujet.
18 M. TAPUSKOVIC : [interprétation] Permettez-moi peut-être de reformuler la
19 question avec votre permission ? Pourrais-je peut-être reformuler ma
20 question ? J'ai peut-être posé une question suggestive.
21 Q. Le 1er Corps de l'ABiH était créé à partir de quoi ?
22 R. Tous les corps d'armée qui ont été créés sur le territoire de l'ex-
23 Yougoslavie ont été créés sur les bases de la RSFY, de la République
24 socialiste fédérative de Yougoslavie, soit de la JNA ou de la Défense
25 territoriale.
26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais cela non plus ne découle pas
27 d'une question posée par le Procureur. Je vous prie de passer à un autre
28 sujet.
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1 M. TAPUSKOVIC : [interprétation]
2 Q. Prenons, je vous prie, le document qui parle de -- ou plutôt, je vais
3 m'arrêter ici. Je n'ai plus de questions. Merci, Colonel.
4 R. Je vous remercie.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Colonel, cela met fin à votre
6 déposition. Nous vous remercions de votre collaboration, d'être venu là-bas
7 où vous êtes pour déposer, vous pouvez maintenant disposer.
8 [Fin de la déposition du témoin par vidéoconférence]
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Tapuskovic, comme vous nous
10 aviez informé un peu plus tôt, vous n'avez pas d'autres témoins, la Chambre
11 avait accepté votre explication, et comme c'est le cas, la séance sera
12 levée jusqu'à demain à 9 heures.
13 --- L'audience est levée à 13 heures 37 et reprendra le mardi 24 juillet
14 2007, à 9 heures 00.
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