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1 Le jeudi 17 juillet 2008
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 20.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous.
6 Veuillez citer l'affaire qui est au rôle, Monsieur le Greffier.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Madame et Messieurs les Juges.
8 Bonjour à tous. Affaire IT-06-90-T, le Procureur contre Ante Gotovina et
9 consorts.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
11 Une demande a été formulée aux fins d'obtenir des mesures de protection
12 afin d'assurer la protection du témoin que nous allons entendre. Est-ce que
13 les parties ont des questions supplémentaires ? Est-ce que c'est vous,
14 Monsieur Hedaraly, ou Monsieur Waespi qui va intervenir ?
15 M. HEDARALY : [interprétation] Ce sera moi.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez vu quels étaient les arguments
17 présentés par la Défense. Si vous avez des questions supplémentaires,
18 concentrez-les sur ces questions-là.
19 Pour ce faire, il faut que nous passions à huis clos partiel.
20 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes désormais à huis clos
21 partiel, Monsieur le Président.
22 [Audience à huis clos partiel]
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26 [Audience publique]
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.
28 Monsieur Hedaraly, êtes-vous prêt à commencer l'interrogatoire du témoin ?
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1 M. HEDARALY : [interprétation] Oui.
2 Interrogatoire principal par M. Hedaraly :
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez la parole.
4 M. HEDARALY : [interprétation]
5 Q. Témoin, je vais vous demander de décliner votre identité pour qu'elle
6 soit consignée au compte rendu au dossier.
7 R. Je m'appelle Marija Vecerina.
8 Q. Pourriez-vous dire aux Juges où vous habitez aujourd'hui ?
9 R. J'habite à Karakaj, près de Kladovo, dans un endroit collectif.
10 Q. Qu'est-ce que c'est comme établissement où vous habitez ?
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly, la Chambre n'insiste
12 pas pour obtenir des coordonnées qui ne sont pas nécessairement pertinentes
13 pour la déposition du témoin, à moins -- à vous de voir en quoi ça
14 risquerait d'être pertinent de savoir où elle habite.
15 M. KEHOE : [interprétation] Nous n'insistons pas non plus, Monsieur le
16 Président.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puisque le témoin semble avoir quelques
18 inquiétudes, nous n'insistons pas pour savoir exactement plus de choses que
19 ce qui nous est absolument nécessaire.
20 Mais s'il est important de savoir où elle habite aux fins de votre
21 interrogatoire --
22 M. HEDARALY : [interprétation] Est-ce que je peux en discuter avec mon co-
23 conseil ?
24 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
25 M. HEDARALY : [interprétation]
26 Q. Pourriez-vous décrire à la Chambre de façon générale quel est le lieu
27 où vous habitez, qui vit aussi dans ce lieu avec vous ?
28 R. Des réfugiés, des gens qui ont été chassés du Kosovo et de la Croatie.
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1 Mais il y aussi des gens de Bosnie.
2 Q. Peut-on afficher la pièce 5337. Pour la Greffière d'audience, ce sera
3 l'intercalaire 24. Ceux-ci viennent de la liste 65 ter.
4 Vous souvenez-vous avoir fourni une déclaration préalable au bureau du
5 Procureur le 16 octobre 2003 ?
6 R. Oui, je m'en souviens.
7 Q. Si on vous montre un document, et si vous y voyez votre signature en
8 fin de document, est-ce bien la déclaration que vous avez faite au bureau
9 du Procureur en 2003 ?
10 R. Oui.
11 M. HEDARALY : [interprétation] Peut-on afficher la pièce 5338 à l'écran.
12 C'est l'intercalaire 4 à Belgrade.
13 Q. Vous souvenez-vous avoir, le 11 juillet 2007, fourni une déclaration
14 supplémentaire qui apportait des éclaircissements, des précisions sur votre
15 première déclaration ?
16 R. Oui, je m'en souviens parfaitement.
17 Q. Et ce document qu'on vous montre maintenant, qui porte aussi votre
18 signature, c'est bien la déclaration supplémentaire que vous avez faite en
19 2007 ?
20 R. Oui, tout à fait.
21 Q. Est-ce que vous avez eu l'occasion d'examiner ces deux déclarations au
22 cours de la semaine qui vient de s'écouler; ce que je veux dire c'est est-
23 ce qu'on vous les a relues dans une langue que vous comprenez ?
24 R. Oui.
25 Q. Au paragraphe 4 de la première déclaration de 2003, on trouve une
26 référence, il est dit ceci : lorsque la guerre en ex-Yougoslavie a
27 commencé, mes enfants allaient toujours à l'école.
28 Et vous avez dit que vous vouliez apporter une correction à cette partie-là
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1 de votre déclaration; est-ce exact ?
2 R. Oui. Mon fils était à l'école secondaire, mais mes filles avaient déjà
3 fini l'école secondaire quand tout a commencé.
4 Q. Merci. Autre correction que vous vouliez apporter c'était au paragraphe
5 24 de cette même déclaration, vous dites que vos filles sont parties au
6 Canada. Quand est-ce qu'elles sont parties au Canada, vos filles ?
7 M. KEHOE : [interprétation] La déclaration dit 2003 et c'était bien, je
8 pense, la correction que voulait apporter le témoin.
9 M. HEDARALY : [interprétation] Excusez-moi.
10 Q. Témoin, je retire cette question.
11 R. Non, le 14 février 2001.
12 Q. C'est à ce moment-là qu'elles sont parties pour le Canada ?
13 R. Oui.
14 Q. Mis à part ces deux corrections, ces deux déclarations qui vous ont été
15 relues la semaine dernière, sont-elles le reflet fidèle de ce que vous avez
16 dit au bureau du Procureur au moment de ces entretiens ?
17 R. Oui.
18 Q. Ces déclarations que vous avez signées contiennent-elles les meilleurs
19 souvenirs que vous avez de ce qui s'est passé, mis à part ces deux
20 corrections que nous venons d'évoquer ?
21 R. Oui. Ce que j'ai dit c'est la vérité, il n'y avait rien à ajouter.
22 Q. Et si les mêmes questions vous étaient posées aujourd'hui, est-ce que
23 vous y répondriez aujourd'hui de la même façon ?
24 R. Oui.
25 M. HEDARALY : [interprétation] Les pièces 5337 et 5338 de la liste 65 ter
26 peuvent-elles être versées au dossier en application de l'article 92 ter.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si j'ai bien compris les arguments de la
28 Défense, il n'y a pas d'objection, n'est-ce pas ?
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1 Monsieur le Greffier, une cote.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le premier document 5337 deviendra la
3 pièce P652, quant au document 65 ter 5338 il deviendra le document P653.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les pièces P652 et P653 sont versées au
5 dossier.
6 M. HEDARALY : [interprétation] Je voudrais aussi demander le versement du
7 document 5339 qui est une annexe à la deuxième déclaration et qui explique
8 pourquoi il y a eu cette déclaration supplémentaire.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas d'objections.
10 M. KEHOE : [interprétation] Ce document dont le substitut demande le
11 versement, c'est une feuille volante. Le témoin ne l'a pas identifié comme
12 tel, donc nous nous opposons.
13 M. HEDARALY : [interprétation] Permettez-moi de répondre. Elle a dit qu'il
14 y avait quelque chose qui y ressemblait. A mon avis, c'est plutôt le poids
15 à la valeur probante à donner au document qui sera à discuter et pas sa
16 recevabilité.
17 M. KEHOE : [interprétation] Tout d'abord, on parle du document P480 MFI.
18 Personne n'a pu jusqu'à présent identifier ce document. Le témoin ne l'a
19 pas non plus reconnu. Si l'Accusation trouve quelqu'un qui pourra le
20 reconnaître, fort bien, mais pas pour le moment.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly.
22 M. HEDARALY : [interprétation] Le fait que le témoin n'a pas pu être sûr de
23 ce document, elle a dit cependant qu'il ressemblait beaucoup au tract
24 qu'elle avait vu, pour nous ceci suffit pour le déclarer recevable. La
25 valeur probante à donner au document --lorsqu'elle dira que c'était la même
26 chose, qu'apparemment c'était un tract de l'armée de la VRS qui leur disait
27 d'aller vers les Serbes, elle dit qu'elle avait vu ce tract et c'est bien
28 ce que dit ce tract-ci.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suppose que ce n'est pas vous qui
2 avez inventé ce document. Pouvez-vous nous dire tout ce que vous voulez à
3 propos de la raison pour laquelle vous avez présenté ce document au témoin
4 et d'où vient ce document pour vous ?
5 M. HEDARALY : [interprétation] Pour nous, c'est un tract envoyé par le
6 gouvernement croate.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous l'avez obtenu où ce document ?
8 M. HEDARALY : [interprétation] Je n'ai pas cette réponse au bout des
9 doigts. Je ne vais pas ici m'hasarder à faire des devinettes, des
10 supputations, je pourrais vérifier si vous le voulez.
11 [La Chambre de première instance se concerte]
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Kehoe.
13 M. KEHOE : [interprétation] Je me suis peut-être mal exprimé, c'est la
14 pièce P480 MFI et la pièce P652 c'est la première déclaration faite par le
15 témoin, elle a dit au paragraphe 10 qu'elle ne peut pas dire exactement ce
16 que ce tract contient, et qu'au cours de l'entretien auquel était présent
17 le conseil, au paragraphe 5 de la pièce 653, ce document est remontré au
18 témoin et elle répond qu'elle n'est pas sûre si c'est une copie du tract
19 qu'elle a vu. C'est bien possible, mais je ne suis pas sûre, dit-elle. Je
20 pense que celui que j'ai vu avait plus de mots qui étaient écrits dessus.
21 Mais qu'au fond ça reprend la même information.
22 Franchement, le témoin n'est pas à même de l'identifier. Le conseil peut
23 essayer de trouver un témoin qui lui identifiera ce document et on pourra
24 en parler plus tard. Mais ce témoin-ci n'a pas été en mesure d'identifier
25 le document.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes. Mais ce qu'elle dit ne pourra
27 être compris que si nous examinons ce document car elle dit que c'est un
28 document similaire même si ce n'est pas exactement le même.
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1 Nous n'allons pas trancher la question maintenant, Monsieur Hedaraly. Ce
2 document va recevoir une cote provisoire. La Chambre va attendre d'obtenir
3 de vous davantage d'informations quant aux modalités d'obtention.
4 M. KEHOE : [interprétation] Il a déjà reçu une cote provisoire.
5 C'est le document P480 MFI.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce document va conserver ce statut pour
7 le moment. Nous vous demandons de faire les recherches nécessaires,
8 Monsieur Hedaraly.
9 Poursuivez.
10 M. HEDARALY : [interprétation] Monsieur le Président, permettez-moi de lire
11 un bref résumé de ce que dit le témoin dans ses deux déclarations, il
12 serait peut-être utile que vous disiez au témoin pourquoi nous allons faire
13 cette lecture et de lui dire pourquoi ce qui s'y trouve dans ce résumé est
14 déjà versé au dossier.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Vecerina, M. Hedaraly va faire
16 lecture d'un court résumé qui synthétise ce que vous avez dit au bureau du
17 Procureur, ce que vous dites dans ces deux déclarations.
18 Pourquoi, c'est pour informer l'opinion publique de ce que contiennent ces
19 deux déclarations, si ce n'était pas fait, l'opinion publique ne saurait
20 pas du tout ce que vous avez dans le cadre de votre déposition. Attendez
21 qu'il ait fini de présenter le résumé, il aura peut-être d'autres questions
22 à vous poser.
23 Vous avez la parole, Monsieur Hedaraly.
24 M. HEDARALY : [interprétation] Merci.
25 Marija Vecerina est une citoyenne croate d'origine serbe qui a vécu toute
26 sa vie dans la municipalité d'Obrovac jusqu'au moment de l'opération
27 Tempête. Le 5 août 1995, elle a quitté les montagnes où elle se trouvait
28 avec sa famille, deux filles, un fils et deux autres parents. En route,
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1 elles ont trouvé deux jeunes hommes qui sont partis avec elle. Ils étaient
2 donc au nombre de huit dans la voiture. Il y avait cinq femmes et trois
3 hommes.
4 Au village d'Ocestovo, dans la municipalité de Knin, on a tiré sur la
5 voiture et plusieurs passagers dont le fils du témoin ont été blessés. Les
6 soldats de l'armée croate ont encerclé la voiture, ont forcé les passagers
7 à en descendre et à se coucher face contre terre sur la route. Ils les ont
8 fouillés et ont confisqué leurs effets personnels. Le groupe a été amené
9 dans la cave d'une maison proche.
10 Le lendemain matin, des soldats croates ont amené à la force du fusil
11 les cinq jeunes hommes et dont les trois jeunes hommes qui s'étaient
12 trouvés dans la voiture avec le témoin. Plusieurs minutes plus tard, elle a
13 entendu une rafale de coups de feu. Des années plus tard, Mme Vecerina a
14 appris que le corps de son fils avait été retrouvé dans le cimetière de
15 Knin.
16 Ce même jour, le 6 août, le groupe qui se trouvait encore dans la
17 cave, dont les cinq femmes qui faisaient partie de son groupe, ont été
18 amenées au camp des Nations Unies à Knin. Les policiers croates qui se
19 trouvaient à l'entrée leur ont dit d'aller à l'école secondaire de Knin.
20 Elle y a passé trois jours à cet endroit.
21 Le 9 août 1995, elle a été transportée à Zadar dans une petite installation
22 avant d'être transférée une fois de plus, cette fois-ci, dans une salle de
23 sport plus grande à Zadar. Toutes ces installations étaient surveillées par
24 des policiers.
25 Le 16 septembre 1995, le témoin est parti en direction de la Serbie dans un
26 convoi organisé qui est parti de Knin.
27 Ceci termine mon résumé, Monsieur le Président, Madame et Monsieur les
28 Juges.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Hedaraly.
2 M. HEDARALY : [interprétation] J'aimerais que le micro du témoin soit un
3 petit peu rapproché du témoin puisqu'on ne l'entend pas très bien. Merci.
4 Q. Madame Vecerina, je n'ai que quelques questions pour vous. Je veux tout
5 simplement préciser quelque chose de vos déclarations. Comme je l'ai déjà
6 lu dans le résumé, vous étiez au nombre de huit dans la voiture le 5 août;
7 donc en tout il y avait cinq femmes et trois hommes, n'est-ce pas ?
8 R. Oui.
9 Q. Parlons d'abord des cinq femmes, c'était vous, vos deux filles et vos
10 deux parentes.
11 Dans votre déclaration --
12 R. Oui.
13 Q. Dans votre déclaration, vous avez décrit comment vous étiez à l'école à
14 Knin, ensuite vous avez été emmenée à Zadar, puis en Serbie.
15 Ma question est la suivante : est-ce que vous, les cinq femmes, étiez tout
16 le temps ensemble pendant tous ces déplacements ?
17 R. Oui.
18 Q. Parlons maintenant de chacune de ces localités où vous vous êtes
19 trouvée.
20 Tout d'abord, s'agissant de l'école à Knin, vous avez dit dans votre
21 déclaration que les policiers gardaient l'école. Ma question est la
22 suivante : lorsque vous y étiez, pouviez-vous sortir de l'école ?
23 R. Non.
24 Q. Est-ce qu'on vous a expliqué pourquoi vous ne pouviez pas sortir ?
25 R. Ils nous gardaient. Nous n'étions pas libres, nous ne pouvions pas
26 partir.
27 Q. Parlons maintenant de Zadar.
28 Vous avez parlé de plusieurs endroits où vous étiez à Zadar, c'est au
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1 paragraphe 12 de la deuxième déclaration. D'abord, vous avez parlé d'une
2 petite salle de sport où vous avez passé deux jours, puis une plus grande
3 salle de sport où vous avez passé une vingtaine de jours, puis une
4 troisième salle de sport où vous avez passé une semaine, et vous avez dit
5 dans votre déclaration que toutes ces salles de sport étaient gardées par
6 la police.
7 Ma question est la même : aviez-vous l'autorisation de sortir ?
8 R. Oui.
9 Q. Dans quelles conditions vous aviez l'autorisation de sortir ?
10 R. Nous n'avions pas l'autorisation. Les policiers nous gardaient.
11 Q. Est-ce que quelqu'un avait l'autorisation de partir de ces
12 installations à Zadar ?
13 R. Uniquement les personnes qui avaient de la famille là-bas. Donc
14 certains sont allés rendre visite aux membres de leur famille.
15 Q. Est-ce qu'ils les ont ramenés chez eux en Krajina ou ils les ont
16 emmenés quelque part ailleurs, à l'extérieur, vers une autre localité ?
17 R. Ils les ont emmenées chez eux, et d'autres sont rentrés juste avant
18 qu'on ne parte.
19 Q. Et ceux qui sont rentrés, pourquoi sont-ils rentrés ?
20 R. Parce qu'ils voulaient partir, pour des raisons de sécurité.
21 Q. Et ma toute dernière question sur ce sujet, vous avez pris la décision
22 de partir en Serbie avec vos filles. Pourquoi avez-vous pris la décision de
23 partir en Serbie plutôt que de rentrer dans votre municipalité d'Obrovac,
24 chez vous ?
25 R. Parce que j'avais peur pour mes filles, et nous avons pris la décision
26 de partir.
27 M. HEDARALY : [interprétation] J'aimerais demander le versement au dossier
28 de trois documents directement, sans passer par le témoin. Il s'agit des
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1 documents de la liste 65 ter 5340, il s'agit de la liste des personnes qui
2 étaient à l'école primaire de Knin; puis 2585, il s'agit de la liste des
3 personnes qui ont été transférées de Knin à Zadar; puis 2825, liste des
4 personnes qui ont quitté Zadar pour aller en Serbie.
5 S'agissant des deux premières listes, le nom des cinq personnes mentionnées
6 dans sa déclaration y figurent. Mais s'agissant de la dernière liste, pour
7 une raison quelconque, le nom du témoin n'y figure pas, mais le nom des
8 quatre parentes y figurent. Et c'est pourquoi j'ai demandé au témoin si
9 elles étaient ensemble tout le temps.
10 Donc --
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a des objections ?
12 M. KEHOE : [interprétation] Il n'y a pas d'objection.
13 M. LE GREFFIER : [interprétation] 5340 deviendra la pièce P654; 2585
14 deviendra la pièce P655, et 2825 deviendra la pièce P656.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] P654, P655 et P656 sont versés au
16 dossier.
17 M. HEDARALY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
18 Q. Madame Vecerina, j'aimerais que l'on parle maintenant des trois hommes
19 qui étaient dans votre groupe.
20 C'était votre fils Stevo et deux jeunes hommes que vous avez trouvés sur la
21 route, Stevo Baljak et Mile Gnjatovic. Dans votre déclaration au paragraphe
22 14, vous mentionnez encore cinq personnes, dont trois étaient de votre
23 groupe, donc il y en a deux que j'ai déjà mentionnées, et puis il y avait
24 Djuro Macak et Momcilo Tisma.
25 Est-ce exact ?
26 R. Oui, c'est exact. Mile Gnjatovic, nous l'avons trouvé près de Zegari,
27 et il a emmené mon fils afin de trouver un véhicule. Ils y ont trouvé un
28 véhicule, c'était une Lada rouge, et nous avons tous pris cette voiture.
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1 Nous ne savions pas quel était le chemin qu'il fallait emprunter. Il
2 faisait déjà nuit et à ce moment-là nous avons rencontré les membres de
3 l'armée croate. Ils ont tiré sur nous et nous n'avions pas les lumières de
4 la voiture allumées à ce moment-là.
5 Nous nous sommes arrêtés à ce moment-là, les voitures nous ont encerclés.
6 Ils portaient des masques. Ils nous ont injuriés, ils nous ont dit, sortez
7 de la voiture, nous allons vous tuer tous. Ils nous ont dit, couchez vous,
8 nous allons vous tuer tous.
9 Ils nous ont fouillés, ils ont trouvé un peu d'argent qu'avait mon fils sur
10 lui, et mon fils a dit, prenez tout, mais ne me tuez pas.
11 Q. Merci. Lorsque ce groupe de cinq jeunes hommes a été emmené de la cave,
12 vous avez dit que quelques minutes plus tard, vous avez entendu une rafale
13 de tirs.
14 Avez-vous vu ce qui s'était passé ?
15 R. Non. Je suis partie avec eux pour voir cette voiture, et où ils
16 allaient être emmenés. On nous a dit que les soldats allaient être emmenés
17 en prison et les blessés à l'hôpital. Mais finalement, ils m'ont dit de
18 rentrer parce que je risquais d'être tuée. C'est ce que j'ai fait, je suis
19 rentrée dans la cave. Plusieurs minutes plus tard, j'ai entendu les tirs.
20 Quelques minutes plus tard, deux femmes ont été emmenées. L'une était
21 blessée à mon avis, et il y avait en fait un homme, aussi, et nous pensions
22 qu'ils avaient tiré sur la voiture, et ils nous ont dit que le chauffeur a
23 été tué dans la voiture, c'est cette femme blessée qui nous a dit que le
24 chauffeur a été tué dans la voiture.
25 Q. A part ces cinq jeunes hommes qui ont été emmenés, y compris votre
26 fils, est-ce qu'il y avait d'autres jeunes hommes dans la cave ?
27 R. Lorsqu'ils nous ont emmenés dans la cave, Momcilo Tisma et Djuro Macak
28 s'y trouvaient déjà. Donc il y avait deux jeunes hommes et il y avait
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1 plusieurs personnes âgées ainsi que d'autres femmes. Il y avait 13
2 personnes, 13 ou 14 personnes, je ne suis pas tout à fait sûre.
3 Q. Juste pour préciser les choses, outre les trois hommes qui étaient avec
4 vous et les deux que vous venez de mentionner, les cinq hommes, tous ont
5 été emmenés dehors, est-ce qu'il y avait d'autres jeunes hommes qui étaient
6 avec vous dans la cave mais qui n'étaient pas emmenés à l'extérieur ?
7 R. Non, il n'y avait pas d'autres jeunes hommes.
8 Q. Merci.
9 M. HEDARALY : [interprétation] J'aimerais également demander le versement
10 au dossier directement d'une vingtaine de documents qui sont relatifs à la
11 mort de ces cinq personnes. Il y a quatre documents pour chacune de ces
12 personnes, et je pourrais vous présenter toute la série. Ces corps ont été
13 inhumés par les autorités croates le 14 août 1995, et ensuite exhumés, et
14 l'autopsie a été menée. Il a été établi qu'on a tiré quatre personnes sur
15 la tête, et le cinquième a été tué au cou.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe.
17 M. KEHOE : [interprétation] Je n'ai pas d'objection à ce que ces documents
18 soient versés au dossier directement.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit plus ou moins sur quoi ces
20 documents portaient. En fait, je n'ai pas très bien compris de quoi il
21 s'agit.
22 M. HEDARALY : [interprétation] Non, le premier document est celui qui porte
23 sur le corps qui a été inhumé, tandis que les autres sont les rapports
24 d'autopsie qui sont liés au corps trouvés, et nous avons une liste qui
25 identifie les victimes, et donc qui indique que l'inhumation a été faite et
26 qui présente le rapport d'autopsie. C'est pourquoi il s'agit d'une série de
27 quatre documents pour chacune des cinq victimes.
28 M. KEHOE : [interprétation] J'ai examiné les documents et ce que le conseil
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1 a dit est exact.
2 [La Chambre de première instance se concerte]
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, je vous prie
4 d'attribuer la cote à ce document.
5 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly, M. le Greffier
7 va préparer une liste et il a déjà réservé 20 numéros. Il s'agit des
8 numéros P657 jusqu'à y compris 676.
9 M. HEDARALY : [interprétation] Il y a juste un problème dans certains cas,
10 certains documents sont identiques, donc il faudrait qu'il y ait deux cotes
11 de moins, parce que j'ai commis une erreur. Il devrait y avoir en fait 18
12 pièces.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc à partir 657 jusqu'à 674. Une fois
14 que nous aurons reçu cette liste les documents seront versés au dossier.
15 M. HEDARALY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, je n'ai plus
16 de questions.
17 Q. Merci, Madame Vecerina.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui va d'abord interroger le témoin ?
19 M. KEHOE : [interprétation] Ce sera moi au nom du général Gotovina.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Vecerina, Me Kehoe, qui défend
21 les intérêts de M. Gotovina, va vous interroger tout d'abord.
22 Maître Kehoe, vous avez la parole.
23 M. KEHOE : [interprétation] Oui, juste un instant.
24 Contre-interrogatoire par M. Kehoe :
25 Q. [interprétation] Bonjour, Madame Vecerina. Je voulais vous poser
26 plusieurs questions au sujet de votre déclaration de même qu'au sujet des
27 informations que vous avez fournies au Procureur lors de l'interrogatoire
28 principal. Si à un moment donné vous ne comprenez pas l'une des mes
Page 6725
1 questions, arrêtez-moi et j'essayerai de la reformuler. Vous m'avez compris
2 ?
3 R. Je ne peux que vous dire ce que je sais, et puis c'est à vous de me
4 poser des questions.
5 Q. Merci.
6 Madame Vecerina, revenons au 5 août 1995, d'après votre déclaration,
7 ce jour-là avec votre fille vous vous occupiez du bétail lorsque votre fils
8 Stevo est venu vous voir, n'est-ce pas ?
9 R. Oui, c'est exact.
10 Q. Et Stevo était membre de l'ARSK mais il était malade à ce moment-là,
11 n'est-ce pas ?
12 R. Oui. Il était malade depuis quelques jours parce qu'il avait un mal de
13 dents, donc il était malade.
14 Q. D'accord, et c'est lui qui est venu vous dire que Knin et probablement
15 Gracac étaient tombées. Est-ce que vous vous souvenez de l'avoir dit dans
16 la déclaration ? Au paragraphe 7, c'est P652.
17 R. Oui, c'est ce qui s'est produit. Oui, je m'en souviens.
18 Q. Oui. Est-ce que Stevo vous a dit comment il avait appris que Knin était
19 tombée, et probablement que la même chose s'était passée avec Gracac ?
20 R. Dans les montagnes, nous n'avions pas de radio. Nous ne pouvions pas
21 apprendre quoi que ce soit, et probablement que c'est en écoutant la radio
22 Knin qu'il a appris cette nouvelle.
23 Q. Lorsque Stevo est venu vous voir à l'endroit où vous étiez avec votre
24 fille, et il vous a dit à ce moment-là qu'il avait appris cette nouvelle en
25 écoutant la radio Knin, à savoir que Knin était tombée ?
26 R. Oui, il me semble que c'était comme ça.
27 Q. Votre fils Stevo vous l'a dit, n'est-ce pas ?
28 R. Oui.
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1 Q. Est-ce que Stevo vous a également dit que les habitants du village
2 étaient déjà partis ?
3 R. Il a dit tout le monde est en train de fuir et il faut que nous
4 partions nous aussi.
5 Q. Lorsque Stevo est venu vous voir, vous et votre fille, est-ce qu'il a
6 apporté des vêtements pour vous et votre fille pour que vous puissiez
7 partir tout de suite ?
8 R. Peut-être avait-il pris quelque chose pour lui-même, mais pour nous
9 deux, non. Nous n'avions sur nous que qu'est-ce qui se trouvait, en fait,
10 ce que nous avions dans les montagnes. C'est tout.
11 Q. Lorsque Stevo est venu vous voir, il est venu vous amener de cette
12 région, n'est-ce pas ?
13 R. Oui.
14 Q. Je pense que vous avez également dit que lorsqu'il était venu vous
15 chercher, il avait rencontré votre deuxième fille, Mira, et que vous êtes
16 tous partis ensemble, n'est-ce pas ?
17 R. Oui. Parce qu'elle est venue nous chercher et on a pris la route
18 principale et nous avons rencontré notre fille sur le chemin.
19 Q. Vous êtes partie de la région parce que Stevo est venu vous dire qu'il
20 fallait partir, n'est-ce pas ?
21 R. Oui. Nous avons entendu des tirs, mais cela s'était déjà produit
22 auparavant, mais nous ne savions pas exactement de quoi il s'agissait avant
23 qu'il ne soit venu nous voir.
24 Q. Est-ce que Stevo a décidé quelle était la direction qu'il fallait
25 prendre ? Est-ce que c'est lui qui a dit où il fallait aller ?
26 R. Nous allions en direction de Krupa via Golubic, et c'est là que nous
27 avons attrapé Stevan Gujko et nous allions vers Zegar. C'est là que nous
28 avons retrouvé Mile Gnjatovic, puis nous sommes partis dans la direction de
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1 Nadvode et Mile Gnjatovic a pris mon fils là. Il a dit : Allons voir si
2 nous pouvons trouver un moyen de transport. Il a dit : Il reste du
3 carburant peut-être, et ils ont trouvé une voiture abandonnée qui était là.
4 Ils nous ont attrapés. Nous avions déjà traversé Zegar lorsqu'ils nous ont
5 attrapés et c'est à ce moment-là que nous sommes montés, tous, dans la
6 voiture.
7 Q. Excusez-moi, je vais peut-être essayer de clarifier ma question, si
8 vous voulez me donner un instant.
9 Si on pourrait revenir un peu en arrière. Vous avez quitté la région,
10 le secteur parce que Stevo vous a dit de partir; c'est bien cela ?
11 R. Nous sommes partis parce qu'il nous a dit que Knin était tombée et
12 qu'il était nécessaire que nous nous échappions.
13 Q. La direction que vous suiviez, effectivement, pour Golubic en
14 direction de Krupa, c'était --
15 R. Golubic.
16 Q. Excusez-moi. Excusez ma prononciation. Golubic à Krupa, vous êtes allée
17 dans cette direction parce que -- est-ce que c'était la direction que Stevo
18 vous avait dit de prendre ?
19 R. C'était parce que nous pensions que les choses seraient plus sûres pour
20 nous là-bas, que peut-être ils n'avaient pas encore pris cet endroit. Mais
21 malheureusement, ils ont intercepté la voiture, et --
22 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi ce qu'a dit le témoin.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Les soldats -- il était vers 9 ou 10 heures du
24 soir, et ils ont commencé à nous tirer dessus à ce moment-là.
25 M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas
26 exactement comment régler cela, mais --
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais voir. Un instant.
28 Madame Vecerina, à un moment donné vous avez dit que : "Malheureusement,
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1 ils avaient intercepté la voiture," et vous avez ajouté quelque chose que
2 les interprètes n'ont pas entendu.
3 Pourriez-vous, s'il vous plaît, répéter ce que vous avez dit après :
4 "Malheureusement, ils ont intercepté la voiture."
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avons rencontré les soldats croates.
6 C'était une embuscade qu'ils avaient tendue à cet endroit, donc lorsque
7 nous sommes arrivés, ils ont commencé à tirer sur notre voiture.
8 Les soldats croates qui portaient des masques, ils nous ont demandé
9 où on allait. On nous a dit de sortir de la voiture et ils ont blessé mon
10 fils à la jambe, et également ma fille et une parente, Dragana. Elle a eu
11 une légère blessure à la tête. Ils nous ont dit : Sortez de la voiture,
12 nous allons vous tuer, tous. Nous sommes sortis de la voiture et nous
13 sommes restés allongés sur le sol pendant environ 15 à 20 minutes. Ils ont
14 fouillé nos poches, nos sacs, et ils les ont déchirés et ils ont trouvé un
15 peu d'argent dans la poche de mon fils. Celui-ci a dit : Prenez tout et ne
16 me tuez pas.
17 M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, si vous pouviez
18 clarifier un point, je crois que, ça je reprends de ce qui a été dit par M.
19 Misetic, elle a utilisé un mot qui a été traduit à la ligne 14 comme étant
20 des "masques." En fait, je crois qu'il s'agit de tenue de "camouflage."
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
22 Vous nous avez dit --
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ils étaient masqués. Leurs visages
24 étaient masqués. C'est exact.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais est-ce que par ailleurs ils avaient
26 d'une quelconque autre manière une tenue de camouflage ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas. Je pense de la peinture noire
28 qu'ils avaient sur le visage. C'est comme ça qu'ils avaient fait ce
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1 camouflage. Je ne sais pas exactement ce que c'était.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais en plus de la peinture, est-ce
3 qu'ils portaient des masques en tissu ou quoi que ce soit, ou est-ce que
4 c'était simplement que leur visage était noirci avec de la peinture ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était simplement de la peinture qu'ils
6 avaient sur le visage, noire.
7 M. KEHOE : [interprétation]
8 Q. Continuons de parler de ce qui s'est passé un petit peu. Vous avez dit,
9 vous avez parlé du fait que Stevan Beljak et Mile avaient été ramassés avec
10 vous, et je crois que vous avez répondu à certaines questions.
11 R. En fait, nous les avons rattrapés. Nous les avons rencontrés chemin
12 faisant.
13 Q. Je comprends. Vous aviez huit personnes dans la voiture. Lorsque cette
14 voiture roulait, vous avez noté au paragraphe 11 qu'on a tiré sur vos
15 pneus; c'est bien cela ?
16 R. Oui. On a tiré dans les pneus et c'est comme ça que mon fils a été
17 blessé. Ils tiraient sur les pneus pour nous arrêter.
18 Q. Mais juste en regardant votre déclaration, vous ne savez pas s'il
19 s'agissait de police militaire ou de police spéciale ou de soldats croates;
20 est-ce que vous le savez ?
21 R. Des soldats croates en uniforme de camouflage avec de la peinture sur
22 le visage, du noir sur le visage. Je ne sais pas si c'était des troupes
23 spéciales ou simplement des soldats ordinaires.
24 Q. Pour être un peu plus précis, et peut-être que ma dernière question
25 n'était pas bonne, si je pourrais, est-ce que vous avez vu s'il y avait des
26 insignes sur l'un quelconque de ces uniformes ? Est-ce qu'ils portaient des
27 insignes ?
28 R. Je ne crois pas en avoir vu sur leurs uniformes, et même si j'en avais
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1 vus, je n'aurais pas pu me rendre compte parce que j'étais en état de choc.
2 Q. Oui, je comprends, bien sûr.
3 Madame, après qu'on vous ait fait sortir de la voiture avec les sept
4 autres personnes, on vous a ensuite emmenées dans le sous-sol, dans la cave
5 de cet immeuble, n'est-ce pas ?
6 R. Oui, c'est exact, dans la cave, le sous-sol.
7 Q. Dans votre deuxième déclaration qui porte la cote P653, au paragraphe
8 7, vous dites : "La maison dans laquelle nous avons été emmenés était très
9 près de la route où on avait tiré sur notre voiture."
10 Est-ce que c'est bien cela ?
11 R. Oui, c'est juste.
12 Q. Quelle distance y avait-il approximativement entre la voiture et cette
13 cave; le savez-vous ?
14 R. Je ne sais pas exactement. Pas très loin. Peut-être, disons, 50 mètres.
15 Je ne suis pas sûre parce qu'il faisait sombre.
16 Q. Je comprends, je comprends.
17 Alors c'est le lendemain matin que les soldats sont descendus et ont
18 fait sortir ces cinq hommes; c'est bien cela ?
19 R. Oui, c'est exact. Ils sont venus vers 9 heures du matin, et ils ont dit
20 : Venez, les soldats vont aller à la prison militaire et les blessés seront
21 amenés à l'hôpital. Ils ont pris mon fils, Stevan Baljak, et je ne sais pas
22 si c'était Mile Gnjatovic ou Momcilo Tisma, ils l'ont emmené et je suis
23 allée avec eux voir - j'ai vu cette voiture et - comment ils allaient
24 placer mon fils blessé dans la voiture. Mais ils m'ont renvoyée. Ils m'ont
25 dit : Repartez, retournez là-bas, on s'en va vous tuer. Donc je suis
26 retournée dans le sous-sol et au bout d'un moment nous avons entendu des
27 coups de feu.
28 Peu de temps après, un homme et une femme sont entrés. La femme était
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1 blessée. Je ne peux pas dire exactement. Je crois qu'il y avait peut-être
2 deux femmes, mais dans l'état dans lequel j'étais, je ne peux pas vraiment
3 me rappeler. Ils ont simplement dit que le chauffeur, le conducteur avait
4 été tué.
5 Q. Madame Vecerina, juste pour en revenir à votre déclaration P652,
6 paragraphe 14, la dernière ligne, il est dit : "Les soldats ont dit que la
7 police militaire était arrivée pour régler la question."
8 Là encore, dans votre déclaration supplémentaire --
9 R. Oui. Il s'agit d'un véhicule, un véhicule de la police militaire est
10 venu, mais nous n'avons pas vu ce véhicule.
11 Q. Mais on vous a dit que le véhicule de la police militaire était venu
12 pour les emmener, n'est-ce pas ?
13 R. Oui. C'est ce qu'on nous a dit, à savoir qu'un véhicule de police
14 militaire était là, que les soldats seraient emmenés à la prison et que les
15 blessés seraient emmenés à l'hôpital.
16 Q. Je voudrais vous montrer --
17 M. KEHOE : [interprétation] Si je puis montrer au témoin la pièce 3384 de
18 la liste 65 ter. C'est le questionnaire que vous avez rempli pour les
19 recherches concernant les personnes portées disparues.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Mon Dieu, j'en ai rempli tellement.
21 M. KEHOE : [interprétation]
22 Q. Oui, je comprends. Je vous demande de bien vouloir nous aider.
23 Est-ce que vous pouvez lire cela, Madame, ou est-ce que vous
24 souhaitez que je le lise pour vous ? Est-ce que ce serait plus facile ?
25 Peut-être que je pourrais faire cela.
26 Si nous passons au paragraphe 9. Il s'agit d'un questionnaire pour la
27 recherche de personnes portées disparues, et cette personne qui est
28 mentionnée, c'est votre fils, Stevo Vecerina, et au paragraphe 9, vous
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1 écrivez qu'il se trouvait dans un groupe avec Mile Gnjatovic et une autre
2 personne, Stevo Baljak et sa mère. Le 6 août, vers 9 heures, la police a
3 emmené Stevo et quatre autres personnes.
4 Vous rappelez-vous avoir donné ces renseignements, avoir rempli ceci
5 pour le questionnaire de l'association des personnes recherchant -- pour
6 les familles des personnes disparues de Krajina ?
7 R. Oui.
8 M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais maintenant
9 demander que la pièce 3384 de la liste 65 ter soit versée au dossier.
10 M. HEDARALY : [interprétation] Pas d'objection.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.
12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ceci devient la pièce D694.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D694 est admise au dossier.
14 Veuillez poursuivre.
15 M. KEHOE : [interprétation]
16 Q. Maintenant Madame, vous avez dit, dans ce document, vous parlez de la
17 police, mais est-ce que vous vouliez dire la police militaire ?
18 R. Je suppose que c'est la police militaire, parce que c'est ce qu'ils ont
19 dit. Ils ont dit : La police militaire est ici pour vous prendre, vous
20 emmener.
21 Q. Incidemment, Madame, je sais que vous nous avez dit que vous
22 connaissiez trois des personnes, mais est-ce que vous connaissiez Djuro
23 Macak et Momcilo Tisma avant ce jour-là du 5 août ?
24 R. Non. Non, l'un d'entre eux était de la municipalité de Benkovac et
25 l'autre de la municipalité de Knin. Non, je ne les connaissais pas.
26 Q. Quand est-ce que vous avez, pour la première fois, entendu leurs noms ?
27 R. Nous avons appris leurs noms pendant qu'ils se trouvaient dans la cave.
28 Q. Alors lorsqu'ils ont fait sortir votre fils, je crois que vous nous
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1 avez dit que votre fils était blessé quand la voiture que vous conduisiez
2 avait essuyée des coups de feu.
3 Excusez-moi, vous avez dit quelque chose, Madame ? Excusez-moi.
4 M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je ne suis pas sûr que
5 le témoin ait dit quelque chose --
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois qu'elle a dit quelque chose,
7 mais ça n'a pas été interprété.
8 Lorsque Me Kehoe a commencé à vous poser cette question, à savoir que votre
9 fils avait été blessé, qu'avez-vous dit à ce moment-là ? Vous avez dit
10 quelques mots.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je voulais répondre, mais posez votre
12 question. Allez de l'avant et je répondrai, je vous donnerai ma réponse.
13 M. KEHOE : [interprétation]
14 Q. Bien.
15 Quand on a fait sortir votre fils, est-ce qu'on l'a fait sortir parce
16 qu'il avait été blessé, est-ce qu'on l'a mis sur une sorte de civière ?
17 R. Absolument pas. Pas de civière. Ils n'en avaient même pas. Ils avaient
18 dit qu'ils allaient l'emmener à l'hôpital. Alors que nous étions dans la
19 cave, ils ont dit que l'ambulance viendrait, mais en fait ça n'a pas eu
20 lieu.
21 Ils l'ont emmené entre eux, en l'encadrant, et l'ont aidé à sortir.
22 Je les ai suivis, je voulais voir, mais ils ne m'ont pas permis de le faire
23 et ils m'ont renvoyée.
24 Q. Madame Vecerina, avant qu'ils ne vous renvoient dans la cave, lorsque
25 vous étiez en haut au moment où vous avez vu les soldats qui -- enfin, ces
26 hommes qui emmenaient votre fils, est-ce que vous avez vu si d'autres
27 civils se trouvaient autour de la maison avant que vous retourniez dans la
28 cave ?
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1 R. Je n'en sache pas que j'ai vu quoi que ce soit.
2 Q. Maintenant --
3 R. Je n'ai rien vu.
4 Q. Madame, lorsque -- enfin, parlons un petit peu de cette rafale de coups
5 de feu dont vous avez parlé lors de l'interrogatoire de tout à l'heure.
6 Vous avez dit que vous aviez entendu des coups de feu. Est-ce que vous avez
7 entendu d'autres coups de feu après cette série de coups de feu ?
8 R. Nous avons entendu -- peu de temps après que je sois retournée à la
9 cave, nous avons entendu tirer, et peu de temps après, un homme et une
10 femme qui était blessée, qui avait des blessures est venue. Je ne sais pas
11 s'il y avait une autre femme avec eux. Je crois qu'ils m'ont dit qu'ils
12 étaient quatre dans la voiture, mais que le chauffeur avait été tué.
13 Q. Vous avez dit dans votre déclaration -- il s'agit de P652, paragraphe
14 16, que : "Immédiatement après que les soldats croates" -- après les coups
15 de feu, immédiatement après que les soldats croates aient emmené ces
16 personnes dans la cave.
17 Est-ce que c'est bien cela ?
18 R. Après cela, ils ont amené un homme et une femme. Je suis sûre que la
19 femme était blessée, mais je ne suis pas sûre qu'il y ait eu ou non une
20 autre femme. Tout ce que je sais c'est qu'ils ont dit que le conducteur
21 avait été tué. Je crois qu'ils avaient dit qu'ils étaient quatre en tout.
22 Q. Madame, dans la conversation que vous avez pu avoir avec ces personnes
23 qui sont venues dans la cave, vous avez compris que le coups de feu que
24 vous avez entendu, c'était que les soldats tiraient sur leur voiture; c'est
25 bien cela ?
26 R. Je ne sais pas. Nous étions dans la cave. Nous n'avons pu voir. Nous
27 avons seulement entendu le coups de feu et nous avons supposé qu'on avait
28 tiré sur un véhicule.
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1 Q. Mais est-ce qu'en fait ils vous ont dit qu'on avait tiré sur leur
2 véhicule ?
3 Je lis votre déclaration. Je cite : "Comme je l'ai appris de ces
4 personnes, les soldats avaient tiré sur le véhicule dans lequel se
5 trouvaient ces personnes en tuant un homme."
6 Donc est-ce que ces personnes vous ont dit que les soldats avaient
7 simplement tiré sur leur voiture ?
8 R. Oui.
9 Q. Donc les coups de feu que vous avez entendus dans la cave, vous avez
10 conclu que c'étaient les soldats qui tiraient sur leur voiture juste avant
11 qu'on ne les fasse descendre dans la cave; c'est bien cela ? Est-ce que
12 c'est bien cela, Madame ?
13 R. Oui, c'est ça. Il est vrai qu'on leur avait tiré dessus et que le
14 conducteur avait été tué, que la femme avait été blessée.
15 Q. A partir du moment où ces personnes sont entrées jusqu'au moment où,
16 d'après votre déclaration, je crois, on vous a dit d'aller sur la route et
17 de vous rendre à Knin, est-ce que d'autres personnes qui étaient détenues
18 ont quitté cette cave ?
19 R. De ceux qui restaient, nous sommes tous partis. Nous sommes tous
20 sortis. Les soldats nous ont dit qu'il n'y avait pas de véhicules pour nous
21 emmener. Ils nous ont dit : Vous devrez utiliser une charrette. Il y avait
22 là une charrette, une carriole qu'ils avaient prise. Ils ont dit : Vous
23 pouvez utiliser cela et vous serez emmené là-bas dans la charrette. C'est
24 comme ça que nous avons été envoyés à Knin, sans aucune escorte.
25 Nous avons rencontré un grand nombre de véhicules militaires et de
26 soldats croates là-bas, et les soldats nous mettaient en joue, pointaient
27 leurs fusils vers nous, mais nous continuions d'avancer vers Knin. Lorsque
28 nous sommes arrivés à Knin, c'est la police croate qui nous a interceptés.
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1 Ils nous ont interceptés là. Ils nous ont un peu provoqués
2 verbalement. Ils nous ont dit : Restez-là, on va vous tirer dessus. On va
3 vous tuer, tous.
4 Q. Madame, ce dont je parlais c'était juste le moment qui s'est écoulé
5 entre le fait qu'on a tiré sur cette voiture et que ces gens sont revenus
6 et le moment où vous êtes partie. Pendant ce laps de temps lorsque ce
7 groupe est resté sans bouger dans la cave, est-ce que quelqu'un du groupe
8 est parti ou est-ce qu'on a fait sortir quelqu'un de ce groupe ?
9 R. Non. Nous sommes tous partis ensemble. Les hommes -- ou les personnes
10 qui sont arrivées et qui sont entrées dans la cave, qui sont descendues
11 dans la cave, nous sommes tous partis ensemble vers Knin.
12 Q. Madame, lorsqu'on vous a fait sortie de la cave ce matin-là, combien de
13 temps approximativement après que votre fils et les quatre autres sont
14 sortis, qu'on a fait sortir, est-ce que vous-même et le reste du groupe
15 êtes sortis de cette cave, combien de temps après ?
16 R. Dans l'ensemble, peut-être une heure s'est écoulée, puis nous sommes
17 partis.
18 Q. Lorsqu'on vous a fait sortir de la cave, est-ce que vous avez vu ou
19 est-ce que vous avez observé que les soldats croates, s'il y avait d'autres
20 soldats de l'armée de la RSK qui étaient détenus lorsque vous êtes sortis
21 de la cave ? Avez-vous observé quelque chose de ce genre ?
22 R. Non.
23 Q. Mais lorsque vous êtes sortie de la cave avec votre groupe, Madame
24 Vecerina, vous n'avez pas vu de trace des cinq hommes qui avaient été
25 emmenés, qu'on avait fait sortir, les cinq hommes y compris votre fils,
26 qu'on avait fait sortir approximativement une heure plus tôt, n'est-ce pas
27 ?
28 R. Non, pas de trace d'eux.
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1 Q. Je sais que c'est difficile, Madame. Je sais que c'est très dur. Il
2 faut que je vous pose encore quelques questions à ce sujet.
3 Mais lorsque vous êtes sortie de la cave, vous n'avez rien vu indiquant
4 qu'on leur avait tiré dessus ou qu'ils avaient été tués par balle, n'est-ce
5 pas ?
6 R. Non, on n'a rien vu. Nous n'avons rien vu.
7 Q. Madame, au paragraphe 23 de votre déclaration, vous dites que vous ne
8 saviez pas, au paragraphe 23 de la déclaration, vous avez dit que vous ne
9 connaissiez pas un homme nommé Zdravko Buncic, et vous avez dit cela en
10 2003. Est-ce que vous avez rencontré M. Buncic ? Excusez-moi, Madame --
11 R. Rien.
12 M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que je peux avoir
13 un instant, s'il vous plaît.
14 [Le conseil de la Défense se concerte]
15 M. KEHOE : [interprétation]
16 Q. Madame, je vous remercie beaucoup de nous avoir donné votre temps, et
17 je vous remercie d'avoir bien voulu déposer.
18 M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas d'autres
19 questions pour le moment.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Kehoe.
21 Les autres membres de la Défense.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie aussi.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Mikulicic, pourriez-vous nous
24 dire de combien de temps vous aurez besoin, parce que nous sommes au moment
25 où d'habitude nous suspendons l'audience.
26 M. MIKULICIC : [interprétation] Peut-être faudrait-il mieux suspendre la
27 séance maintenant, et après ça j'aurais besoin, disons, d'environ 45
28 minutes.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
2 M. KAY : [interprétation] Je n'aurai pas de questions à poser, Monsieur le
3 Président.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas de questions pour la Défense de
5 Cermak.
6 Madame Vecerina, nous allons d'abord suspendre notre audience. Nous aurons
7 une interruption d'environ 25 minutes, et tout à l'heure, je pense que l'on
8 pourra conclure votre déposition lorsque nous aurons repris. Donc nous
9 souhaiterions vous revoir dans 25 minutes.
10 --- L'audience est suspendue à 15 heures 44.
11 --- L'audience est reprise à 16 heures 21.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous êtes prêt, Maître Mikulicic ?
13 M. MIKULICIC : [interprétation] Oui.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Vecerina, c'est maintenant Me
15 Mikulicic qui va vous poser des questions au nom de M. Markac.
16 Vous pouvez commencer, Maître.
17 M. MIKULICIC : [interprétation] Merci.
18 Contre-interrogatoire par M. Mikulicic :
19 Q. [interprétation] Bonjour, Madame Vecerina.
20 Permettez-moi de saisir cette occasion pour vous exprimer mes plus
21 vifs regrets après ce qui vous est arrivé.
22 R. Merci.
23 Q. J'aimerais vous poser quelques questions. J'essaierai d'être le plus
24 bref possible, et essayez de vous souvenir au mieux de ce que vous avez
25 vécu pour me répondre.
26 R. Oui, je vais vous dire tout ce que je sais, tout ce que j'ai vu.
27 Q. Madame, vous avez relaté les événements, que vous êtes allée là où se
28 trouvait la "Serbia", vous vous étiez dit que vous vouliez aller vers
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1 Krupa, vers Srb, et que Mile, votre fils, avait réussi à trouver une
2 voiture. Ce véhicule, les phares avant ne marchaient pas, c'est ça ?
3 R. C'est exact.
4 Q. Et il faisait nuit ?
5 R. Oui.
6 Q. Et vous ne connaissiez pas vraiment cette route sur laquelle vous vous
7 trouviez ?
8 R. Non, on ne connaissait pas cette route. Il faisait nuit, oui.
9 Q. Et en fait, vous avez raté la route que vous deviez prendre, c'est
10 comme ça que vous êtes arrivé dans ce village d'Ocestovo ?
11 R. Ça c'est vrai, oui. Parce qu'on ne savait pas par où aller. La nuit
12 était tombée et c'est comme ça qu'on a fini là.
13 Q. Madame Vecerina, savez-vous, par hasard, si les habitants de votre
14 village ou des villages avoisinants qui sont partis plus tôt, s'ils sont
15 partis eux aussi par la route qui passe par Ocestovo ou s'ils sont passés
16 par une autre route ? Est-ce que vous auriez des informations à ce propos ?
17 R. Je ne sais pas. Les gens sont partis du mieux qu'ils ont pu. Ils ont
18 pris tous les chemins possibles.
19 Q. Peu de temps avant qu'on ne commence à tirer sur la voiture dans
20 laquelle vous vous trouviez, est-ce que votre voiture se trouvait au sein
21 d'une colonne ou est-ce que vous étiez les seuls à vous trouver sur cette
22 route à ce moment-là ?
23 R. Je ne sais pas. On n'a vu personne. Je suppose qu'on était seuls parce
24 que c'était la nuit.
25 Q. Madame Vecerina, dans votre déclaration vous avez dit que votre fils et
26 Mile avaient emporté des fusils qu'ils avaient placés dans le coffre de la
27 voiture ?
28 R. Oui, c'est vrai.
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1 Q. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi ils avaient pris des fusils ?
2 R. Je ne sais pas pourquoi ni comment ils ont fait.
3 Q. Vous nous avez dit que vous avez passé un certain temps dans la cave de
4 cette maison après être sortie de la voiture et qu'on vous a ensuite amenée
5 à Knin, à cette école-là ?
6 R. Oui.
7 Q. Je vais vous demander ceci, vous avez dit que vous n'avez pas du tout
8 été escortée par les autorités croates pour aller à l'école; c'est ça ?
9 R. Non, pas jusqu'à l'école, mais jusqu'à Knin. Parce que l'école est un
10 peu plus éloignée. Il y avait des policiers qui nous attendaient là et ils
11 étaient nombreux, ils nous ont demandé où on allait et nous avons dit qu'on
12 allait à ce camp international à cette base. Ils nous ont dit, il n'y a pas
13 de camp, arrêtez-vous sinon on va tous vous tuer. Ils nous ont provoqué
14 puis ils nous ont dit d'aller à l'école secondaire de Knin.
15 Q. Lorsque vous êtes allée à Knin, vous n'étiez pas du tout escortée, vous
16 étiez seule. Je pense à la police ou aux soldats qui vous auraient
17 escortée, il n'y en avait pas ?
18 R. C'est vrai. On n'était escorté par personne.
19 Q. Vous avez dit que les policiers qui surveillaient le bâtiment dans
20 lequel vous étiez d'abord à Knin, puis à Zadar, qu'en fait, ils ont offert
21 l'occasion à ceux qui voulaient rester en Croatie de le faire, et les ont
22 laissés quitter l'endroit où vous étiez. Est-ce que vous, vous aviez la
23 possibilité d'aller quelque part ?
24 R. Non, non. Je n'avais pas de parents proches du tout.
25 Q. Madame Vecerina, pourriez-vous nous parler des biens que vous aviez à
26 Muskovci où vous habitiez avec vos deux filles et votre fils ? Est-ce que
27 vous aviez une maison ?
28 R. Oui, j'avais une maison, j'avais un terrain, du bétail, et l'été, de
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1 mai jusqu'en septembre ou octobre voire novembre, on habitait dans les
2 montagnes avec le bétail.
3 Q. Après que vous ayez quitté la Croatie pour aller dans un endroit qui
4 était encore la Yougoslavie, avez-vous demandé l'autorisation de rentrer en
5 Croatie et de vous voir restituer vos biens ?
6 R. Oui, on l'a demandé, mais ça n'a rien donné.
7 Q. Madame Vecerina, est-il exact de dire que les autorités croates vous
8 ont autorisé à rentrer en Croatie, que vous vous êtes même présentée en
9 Croatie en 1998 à la maison de Modric Lilja [phon] ?
10 R. Oui, c'est exact.
11 Q. Est-il exact de dire que vous avez également reçu une certaine
12 assistance de la part des autorités croates, je parle d'une assistance
13 financière ?
14 R. Oui, j'ai bien reçu quelque chose.
15 Q. Pourtant, vous avez décidé de rester en Serbie et de ne pas rentrer
16 dans votre village d'origine ?
17 R. Bien, après un certain temps quand ça n'a donné aucun résultat, je
18 n'étais pas sûre de vouloir rentrer.
19 Q. Merci des réponses que vous m'avez données, Madame. Je n'ai pas
20 d'autres questions à vous poser.
21 R. Je vous remercie, Monsieur.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kay. Même situation qu'avant ?
23 M. KAY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly.
25 M. HEDARALY : [interprétation] Je n'ai pas de questions, mais peut-être que
26 j'aurais des informations à propos du document P480.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Effectivement. Mais j'aimerais d'abord
28 savoir s'il y a d'autres questions que les Juges veulent poser au témoin.
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1 [La Chambre de première instance se concerte]
2 Questions de la Cour :
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Vecerina, j'aimerais vous poser
4 une question.
5 Vous avez dit que vous aviez quitté votre maison, qu'on vous avait
6 interpellé, que vous avez dormi dans une cave, puis qu'on vous a fait
7 sortir, qu'on vous a dit d'aller à Knin, puis vous nous avez relaté ce qui
8 s'est ensuite passé.
9 Est-ce qu'à un moment donné quand tout ceci s'est passé, vous vous
10 êtes demandé s'il était peut-être préférable de rentrer chez vous, que ce
11 soit au moment où vous étiez dans la cave ou plus tard à Knin ?
12 R. Je pense que je l'aurais fait, mais à cause de mes filles, pour
13 qu'elles soient en sécurité, elles n'étaient pas favorables à cette idée.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous me dire ceci : à quel
15 moment avez-vous envisagé de rentrer chez vous ?
16 R. En 1998, c'est la première fois que je suis rentrée, c'était au début
17 du mois de novembre, la première fois que je rentrais en Croatie.
18 Dans l'intervalle, j'avais tout essayé à Belgrade, j'avais été voir
19 toutes les organisations internationales, à la recherche.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Là vous parlez d'une période ultérieure.
21 Moi, j'aimerais que nous revenions au moment où on vous a donné
22 l'ordre de sortir de cette cave et d'aller à Knin. A ce moment-là, est-ce
23 que vous vous êtes dit que vous aviez le choix, le choix d'aller ailleurs
24 qu'à Knin ?
25 R. Non, on n'avait pas le choix. Les soldats étaient là. Ce qui veut dire
26 qu'on n'avait pas le choix, on devait faire ce qu'ils nous avaient donné
27 l'ordre de faire.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais si à ce moment-là vous aviez eu la
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1 possibilité de rentrer chez vous, de regagner votre maison, est-ce que vous
2 l'auriez éventuellement fait ?
3 R. Mais on n'a pas eu cette possibilité.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends bien, Madame. Si on vous
5 avait laissé ce choix, est-ce que vous seriez quand même allée à Knin ou
6 est-ce que vous auriez pris une autre direction ?
7 R. On n'avait pas le choix, il nous fallait faire ce qu'on nous avait
8 donné l'ordre de faire.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que ça veut dire si on ne vous
10 avait pas donné l'ordre d'aller à Knin vous auriez peut-être pris une autre
11 direction ?
12 R. Mais aller où ? Ils nous ont donné l'ordre d'aller à Knin. Les soldats
13 nous ont donné l'ordre d'aller à Knin.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Disons qu'on vous avait donné le choix
15 de rentrer chez vous, est-ce que vous l'auriez fait ou est-ce que vous
16 seriez allée à Knin ?
17 R. Si on avait eu la possibilité de rentrer, c'est ce qu'on aurait fait.
18 On serait rentré, mais on n'a pas eu une telle possibilité.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Plus tard vous avez quitté Knin pour
20 aller à Zadar, est-ce que vous aviez à ce moment-là aussi le sentiment de
21 ne pas avoir eu le choix, qu'il vous fallait faire ce qu'on vous disait de
22 faire, ou est-ce que vous vous êtes dite à ce moment-là que vous aviez
23 peut-être la possibilité d'opérer un choix ?
24 R. On n'a pas pensé à quoi que ce soit. Je pense que c'était un matin, le
25 8 ou le 9, ils sont venus et ils ont dit que les municipalités de Benkovac
26 et d'Obrovac devaient aller à Zadar. Un bus est venu, il nous a emmenés et
27 on est parti.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et vous avez quitté la Croatie. Est-ce
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1 qu'à ce moment-là vous vous êtes dit que vous aviez le choix, le choix de
2 rester en Croatie ou d'en partir ?
3 R. Ils nous ont posé la question. Ils nous ont vraiment demandé s'il y en
4 avait parmi nous qui voulaient rester, mais il n'y a que très peu de
5 personnes qui sont restées, certains l'ont fait mais ils n'étaient pas
6 nombreux.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je vous ai bien comprise,
8 Madame, est-ce que vous aviez le sentiment de ne pas avoir le choix
9 jusqu'au moment où vous étiez à Zadar, et qu'à Zadar vous avez eu la
10 possibilité de rentrer chez vous ou de quitter le pays ?
11 R. Oui. Dans le troisième endroit, lorsqu'on était tous rassemblés, on
12 était venus des endroits où on avait été placés et ils ont demandé s'il y
13 en avait parmi nous qui voulaient rester. Et il y en a quelques-uns, très
14 peu, qui ont décidé de rester.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez discuté avec les
16 personnes qui se trouvaient là à ce moment-là de la question de savoir
17 pourquoi vous avez, ou eux d'ailleurs auraient décidé de partir ou de
18 rester ?
19 R. Non, je ne sais pas, je ne leur ai pas parlé. C'est ce qu'ils ont dit,
20 ils ont dit qu'ils voulaient rester.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ai-je bien compris une de vos réponses
22 précédentes. Est-ce que vous avez discuté de cette question avec vos filles
23 ?
24 R. Non, elles n'étaient pas d'accord avec cette idée, alors que pouvais-je
25 faire ?
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vos filles n'avaient pas été avec
27 vous, s'il n'y avait eu que vous, est-ce que vous --
28 R. Non, elles n'étaient pas en faveur de cette idée.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, j'ai bien compris, mais si vos
2 filles n'avaient pas été avec vous, vous personnellement, comme ça
3 spontanément, sans penser à ce que vos filles préféraient, vous, que
4 préfériez-vous faire ? Vouliez-vous rester ou partir, si vous aviez été
5 seule, disons ?
6 R. Je serais peut-être restée, mais je ne l'ai pas fait à cause de mes
7 filles. Je suis partie avec elles.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous nous dire pourquoi vos
9 filles préféraient partir ?
10 R. C'est ce qu'elles voulaient faire, parce qu'elles avaient vécu tout ce
11 qu'elles avaient vécu.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qu'est-ce que vous voulez dire ? "Elles
13 ont vécu toutes ces choses" ? Vous parlez de la situation de guerre ou de
14 quelque chose de plus précis, par exemple, le fait que votre fils n'était
15 plus parmi vous ou est-ce qu'il y avait autre chose ?
16 R. Oui, c'est à ça que je pense exactement.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous voulez dire la guerre, la
18 disparition de votre fils ?
19 R. Oui.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
21 R. Mon fils a disparu, et puis mes filles s'étaient vues privées de leur
22 avenir.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une question vous avait été posée,
24 Madame, par Me Mikulicic, et vous lui avez répondu que vous aviez reçu
25 quelque chose de la part du gouvernement croate. Pourriez-vous nous dire
26 exactement ce que vous avez reçu, à quel moment vous avez reçu cette aide,
27 et pourquoi vous l'avez reçue ?
28 Qu'est-ce que vous avez reçu tout d'abord ?
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1 R. Voici comment ça s'est passé. En 1999 et en 2000, j'étais à la
2 recherche de mon fils. J'ai envoyé des messages au gouvernement, au
3 président à Knin. Je suis allée partout pendant cette période, et je
4 pensais que j'allais rentrer. Il y avait toujours un petit espoir qu'il
5 soit encore en vie et ceci jusqu'en 2003. Je voulais rentrer.
6 [La Chambre de première instance se concerte]
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Vecerina, je n'ai pas
8 d'autres questions à vous poser.
9 Est-ce que les questions posées par les Juges entraînent des
10 questions supplémentaires de la part des parties ?
11 M. KEHOE : [interprétation] Oui, quelques-unes.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Vecerina, Me Kehoe va vous poser
13 quelques questions supplémentaires.
14 M. KEHOE : [interprétation] Ce sera très peu.
15 Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Kehoe :
16 Q. [interprétation] Vous dites que lorsque vous étiez à Zadar, il y avait
17 des parents qui étaient venus chercher des gens, et que ces personnes
18 avaient été autorisées à partir. Pourquoi est-ce qu'elles avaient pu partir
19 ? Est-ce que ces parents s'étaient portés garants pour eux, en tant que
20 citoyens croates ?
21 R. C'est ça.
22 Q. Vous-même --
23 R. Tout à fait.
24 Q. Vous, Madame, est-ce que vous aviez des documents attestant de votre
25 citoyenneté croate à l'époque ?
26 R. Non, je n'avais pas de papiers, pas quand nous étions là.
27 Q. Est-ce que plus tard vous avez essayé d'obtenir des documents vous
28 donnant la citoyenneté croate ?
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1 R. J'ai essayé en 1989 -- non, non, en 1998. La première fois, je suis
2 allée au mois de novembre. Je ne sais plus quand exactement. Vers cette
3 époque.
4 Q. Où êtes-vous allée pour obtenir ces papiers ?
5 R. Je suis allée à Belgrade.
6 Q. Lorsque vous vous êtes trouvée à Knin ou à Zadar, est-ce que vous avez
7 essayé d'obtenir ces documents concernant la nationalité ?
8 R. Non. Personne ne nous en a parlé.
9 Q. Vous avez quitté votre village le 5, et vous vous dirigiez vers la
10 Bosnie pour aller ensuite en Serbie, n'est-ce pas ?
11 R. On allait vers Srb. En tout cas, c'est ce qu'on nous a dit de faire.
12 Mais on n'avait aucun moyen de transport. En route, on a réussi à trouver
13 un moyen de transport, malheureusement.
14 Q. Qui vous a dit d'aller à Srb ?
15 M. HEDARALY : [interprétation] Il se peut que j'aie omis quelque chose,
16 mais est-ce que c'est encore en rapport avec les questions posées par les
17 Juges ?
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe ?
19 M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, je l'avoue, je faisais un suivi
20 sur vos questions de choix.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais ça ne vous donne pas le droit
22 d'envisager tous les choix qu'elle avait.
23 M. KEHOE : [interprétation] Oui, je comprends parfaitement.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous d'autres questions ?
25 M. KEHOE : [interprétation] Non.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Vecerina, ainsi se termine votre
27 déposition dans ce prétoire. La Chambre de première instance est tout à
28 fait consciente du fait que pour vous il n'était pas difficile de vous
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1 rappeler ces événements et nous vous remercions d'être venue et d'avoir
2 répondu aux questions posées par l'Accusation, la Défense et la Chambre de
3 première instance.
4 Merci beaucoup et j'espère que vous rentrerez bientôt chez vous.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant, nous pouvons arrêter la
7 visioconférence avec Belgrade.
8 L'INTERPRÈTE : Correction : La Chambre comprend qu'il fut pénible au témoin
9 de se rappeler ces événements.
10 [Fin de la déposition du témoin par vidéoconférence]
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'après ce que j'ai compris, nous
12 n'avons pas de témoins pour aujourd'hui ni pour demain.
13 M. HEDARALY : [interprétation] Oui. Si vous voulez, je pourrais vous dire
14 quelque chose davantage au sujet de la pièce P480.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.
16 M. HEDARALY : [interprétation] C'est un document que le bureau du Procureur
17 a reçu suite à la demande d'assistance adressée au gouvernement croate.
18 C'est un document qui est annexé au rapport qui porte déjà la cote P484,
19 enregistré aux fins d'identification. Egalement, P480 et P484 ont été
20 présentés lors de la déposition de l'ambassadeur Galbraith, donc ce sont
21 les informations que nous avons reçues. Nous demandons son versement au
22 dossier sur la base de la déclaration du témoin. Même si elle ne l'a pas
23 identifié, cela fait partie -- cela se réfère à sa déposition.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe.
25 M. KEHOE : [interprétation] Le fait est qu'elle n'arrive toujours pas à le
26 reconnaître. Si cela était enregistré aux fins d'identification lorsque
27 l'ambassadeur Galbraith en a parlé, je ne me souviens pas de quoi il était
28 question, et si à cette époque-là vous ne l'avez pas versé au dossier mais
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1 simplement enregistré aux fins d'identification, j'aimerais qu'on revienne
2 à cette question.
3 Mais s'agissant de ce témoin d'aujourd'hui, je dois dire que nous
4 n'avons pas suffisamment de fondement pour le verser au dossier.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez vous mettre
6 ensemble pour voir dans quelle mesure vous accepteriez ce que nous venons
7 d'entendre au sujet de l'origine de ce document et voir si cela va
8 influencer votre position ?
9 M. KEHOE : [interprétation] Oui, bien sûr. C'est tout ce que je demande. Je
10 veux qu'on revienne, qu'on rediscute de cette question et peut-être que
11 nous pourrions ensemble trouver une solution.
12 Mais je ne veux pas tout simplement qu'on verse ce document au
13 dossier sur la base de ce que ce témoin vient de dire.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le document lui a été montré et elle en
15 a parlé, mais n'en parlons pas davantage. Vous aurez l'occasion d'en parler
16 avec le Procureur, s'agissant de la pièce P484 et P480. Nous avons
17 également l'occasion d'entendre davantage au sujet de ces deux pièces.
18 Est-ce que vous pourriez peut-être vous mettre d'accord avant les
19 congés judiciaires ?
20 M. KEHOE : [interprétation] Je pense que lundi serait la date à fixer.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. S'agissant des documents
22 enregistrés aux fins d'identification, j'aimerais que les parties se
23 préparent pour une longue liste de ce genre de documents que nous rend la
24 semaine prochaine. Parce qu'il se peut que nous ayons à parler des
25 documents qui seront versés directement, suite à des discussions que nous
26 avons lors de cette réunion consacrée à la présentation de documents
27 directement.
28 Mais avant de ce faire, j'aimerais présenter les motifs de la
Page 6752
1 décision de la Chambre portant sur la requête de l'Accusation pour entendre
2 la déposition du témoin par visioconférence et portant sur la requête aux
3 fins d'admettre la déclaration en application de l'article 92 ter en faveur
4 du Témoin 172, déposée le 8 juillet 2008.
5 La décision faisant droit à une partie de la requête portant sur la
6 déposition du Témoin 172 via visioconférence a été rendue le 10 juillet
7 2008. Je vous renvoie à la page du compte rendu d'audience 6 288. La
8 Chambre reporte une partie de sa décision portant sur la requête portant
9 sur la présentation de la déclaration du témoin en application de l'article
10 92 ter à un moment où le témoin fera sa déposition. Au départ, il était
11 prévu que le Témoin 172 dépose le 18 juillet 2008. Cependant, à la lumière
12 des événements récents, il est fort peu probable que le témoin dépose ce
13 jour, à savoir demain.
14 La Défense de Cermak et la Défense de Markac, dans leurs réponses du
15 9 et 10 juillet 2008 respectivement, ne se sont pas opposés à la requête.
16 Dans sa réponse du 10 juillet, la Défense de Gotovina ne s'est pas opposée
17 à la présentation de la déclaration en application de l'article 92 ter,
18 mais elle s'est opposée à ce que la déposition se fasse par
19 visioconférence.
20 Conformément à l'article 81 bis du Règlement de procédure et de
21 preuve du Tribunal, la Chambre peut, dans l'intérêt de la justice, ordonner
22 que les débats se tiennent par vidéoconférence. Comme il a été décidé par
23 cette Chambre, les conditions énoncées à l'article 81 bis sont réunies si
24 le témoin ne peut pas venir au Tribunal, si la déposition est d'une
25 importance telle pour la partie citant le témoin que celle-ci serait lésée,
26 si elle devait s'en passer et si le droit de l'accusé de confronter le
27 témoin est atteint.
28 Le Procureur fait valoir que le témoin ne peut pas venir à La Haye pour
Page 6753
1 déposer en raison de problèmes cardiaques. La Défense de Gotovina a répondu
2 en disant qu'il reste encore quatre à six mois à la présentation des moyens
3 à charge et que la Chambre devrait attendre pour voir si l'état de santé du
4 témoin est amélioré. D'après le certificat médical annexé à la requête de
5 l'Accusation, le Témoin 172 devrait éviter des situations de stress et le
6 voyage en avion. La Chambre, par conséquent, est convaincue que le témoin
7 ne peut pas venir au Tribunal.
8 Après avoir examiné la déclaration du témoin faite en 2007, la Chambre
9 accepte que la déposition est d'une telle importance qu'il serait injuste à
10 l'égard de l'Accusation de ne pas pouvoir le citer.
11 L'Accusation fait valoir que la déposition du Témoin 172 par
12 vidéoconférence ne porterait pas atteinte aux droits de l'accusé de
13 confronter le témoin. La Défense de Gotovina a répondu en disant que lors
14 d'une déposition récente, la Chambre a vu une déclaration selon laquelle le
15 témoin avait agi d'une certaine manière et qu'elle s'attendrait à ce que le
16 témoin le nie. La Défense a ajouté que la Chambre devrait avoir la
17 possibilité d'examiner la crédibilité du témoin en sa présence.
18 La Chambre conclut que l'hypothèse de la Défense de Gotovina qu'il y
19 aurait une contradiction entre la déposition du témoin et les éléments déjà
20 présentés à la Chambre est, d'une certaine mesure, d'ordre hypothétique.
21 Mais même si le témoin venait à contredire les éléments dont disposent déjà
22 la Chambre, compte tenu des circonstances et, notamment, l'état de santé du
23 témoin, la Chambre constate que l'objection de la Défense de Gotovina ne
24 justifie ni le report de la déposition du témoin ni la demande d'entendre
25 la déposition du témoin par vidéoconférence. La Défense de Gotovina aura
26 largement l'occasion de contre-interroger le témoin, y compris sur l'aspect
27 des éléments déjà mentionnés dans son objection. La Chambre, par
28 conséquent, conclut que le droit de la Défense de Gotovina de confronter le
Page 6754
1 témoin n'a pas été atteint.
2 Par ces motifs susmentionnés, la Chambre constate qu'il est dans l'intérêt
3 de la justice d'entendre la déposition du Témoin 172 par vidéoconférence
4 et, par conséquent, fait droit à la requête.
5 Tels sont les motifs de la décision de la Chambre de première instance
6 relatifs à la déposition du Témoin 172 par vidéoconférence.
7 Comme nous n'allons pas avoir une audition consacrée à la déposition d'un
8 témoin demain, vendredi le 18 juillet, à 2 heures et quart, nous aurons une
9 audience consacrée à une requête. Ça sera demain dans le prétoire numéro
10 III.
11 --- L'audience est levée à 16 heures 58 et reprendra le vendredi 18 juillet
12 2008, à 14 heures 15.
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