Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 19 septembre 2008

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 06.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous. Je vous prie

  7   d'annoncer le numéro de l'affaire, Monsieur le Greffier.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour. Il s'agit de l'affaire IT-06-90-

  9   T, le Procureur contre Ante Gotovina et consorts.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 11   Avant de poursuivre, nous avons une requête pendante relative au témoin

 12   167, qui est censé commencer sa déposition lundi.

 13   Est-ce que la Chambre pourrait recevoir votre réponse aujourd'hui ?

 14   M. MISETIC : [interprétation] Nous sommes justement en train de la déposer.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et les autres avocats de la Défense ?

 16   M. MIKULICIC : [interprétation] Nous nous joignons à cette requête.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Maître Cayley.

 18   M. CAYLEY : [interprétation] Nous devons encore l'examiner mais nous allons

 19   la déposer aujourd'hui.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dzolic, comme hier, j'aimerais

 21   tout d'abord vous rappeler que vous êtes toujours tenu d'observer la

 22   déclaration solennelle faite au début de votre déposition.

 23   Maître Mikulicic, pouvez-vous poursuivre.

 24   M. MIKULICIC : [interprétation] Oui.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

 26   LE TÉMOIN: BOSKO DZOLIC [Reprise]

 27   [Le témoin répond par l'interprète]

 28   Contre-interrogatoire par M. Mikulicic : [Suite]

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  1   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Dzolic. Nous allons poursuivre là où

  2   nous nous sommes arrêtés hier. J'aimerais que l'on examine la pièce D567.

  3   M. MIKULICIC : [interprétation] J'aimerais que cette pièce soit affichée à

  4   l'écran.

  5   Q.  Monsieur Dzolic, il s'agit d'un document en date du 16 septembre 1995,

  6   le chef de l'administration, le général Mate Lausic, a préparé ce document

  7   à l'attention du chef de l'état-major de l'armée croate et du ministre de

  8   la Défense. Il s'agit de l'analyse portant sur l'utilisation de la police

  9   militaire des forces armées de la République de Croatie dans le cadre de

 10   l'opération Tempête.

 11   J'aimerais que nous examinions ensemble ce document et que vous nous

 12   disiez, est-ce que ce à quoi je veux vous référer correspond à votre

 13   compréhension des événements qui se sont déroulés lors de l'opération

 14   Tempête et immédiatement après.

 15   M. MIKULICIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche la

 16   deuxième page, s'il vous plaît.

 17   Q.  Hier, nous avons brièvement abordé la question des unités de la police

 18   militaire portant l'insigne AT, donc il s'agissait d'unités

 19   antiterroristes. Ces unités suivaient une formation particulière par

 20   rapport à d'autres unités de la police militaire, n'est-ce pas ?

 21   R.  Pourriez-vous répéter votre question, s'il vous plaît.

 22   Q.  Est-il vrai que les unités antiterroristes de la police militaire

 23   suivaient une formation distincte ?

 24   R.  Est-ce que vous parlez de l'opération Tempête ou de manière générale ?

 25   Q.  Je parle de la situation avant l'opération Tempête et de manière

 26   générale. Est-ce que dans le cadre de leur formation, tel que c'est

 27   mentionné au paragraphe 2, est-ce qu'il est dit qu'il fallait suivre une

 28   formation afin d'être préparé, afin de mener les opérations d'assaut,

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  1   traitement des prisonniers de guerre, et l'assainissement du terrain, et

  2   ainsi de suite ?

  3   R.  Je ne pourrais pas l'affirmer, mais après l'opération Tempête en 1996,

  4   j'étais au poste de chef d'une compagnie antiterroriste à Zagreb, et

  5   d'après mes souvenirs, la question d'une telle formation a été évoquée à

  6   l'époque. Mais je ne pourrais rien vous dire davantage.

  7   Q.  D'après vos souvenirs, les membres de ces unités antiterroristes de la

  8   police militaire, savez-vous qu'on les appelait les spécialistes

  9   militaires, familièrement on les appelait ainsi ?

 10   R.  Oui, c'est exact.

 11   M. MIKULICIC : [interprétation] Passons maintenant à la troisième page de

 12   ce document.

 13   Q.  Au point 3, sur la droite de l'écran, il est dit que les unités de la

 14   police militaire ont été utilisées au début des opérations d'assaut et lors

 15   de la libération des territoires occupés. Puis il est dit que les points de

 16   contrôle sont mis en place et ceci pendant la période de 4 heures à 6

 17   heures dès le 4 août, et qu'en tout 80 points de contrôle ont été mis en

 18   place au points d'entrée dans la zone couverte par les opérations d'assaut.

 19   Puis au deuxième paragraphe, à l'alinéa 2, il est dit que cette opération

 20   avait pour objectif d'empêcher l'entrée et la sortie non surveillée de la

 21   zone des opérations de combat et afin d'empêcher qu'on emporte le butin de

 22   guerre non contrôlé.

 23   Vous avez également dit que dès votre arrivée à Knin, vous avez mis en

 24   place quatre points de contrôle aux points d'entrées principaux de la vile

 25   de Knin.

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Si je ne m'abuse, votre activité était conforme à l'objectif général et

 28   de l'utilisation des forces de la police militaire, n'est-ce pas ?

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  1   R.  Pourriez-vous répéter, s'il vous plaît votre, question.

  2   Q.  Une fois que vous avez mis en place les points de contrôle aux points

  3   d'entrées à Knin, ce n'était pas quelque chose qui était le résultat de

  4   votre initiative privée, mais c'était conforme à la politique générale de

  5   l'utilisation de la police militaire, n'est-ce pas ?

  6   R.  C'est exact.

  7   Q.  Monsieur Dzolic, je vous prie d'examiner le dernier paragraphe de cette

  8   page, où il est fait état du ratissage et des fouilles à effectuer dans les

  9   villages, dans des villes plus importantes et dans des zones le long des

 10   axes principaux. Cela a été effectué dans les territoires libérés et ceci

 11   immédiatement après l'arrivée des unités de la HV de la part des membres

 12   des unités antiterroristes de la police militaire ainsi que de la part des

 13   membres de la police militaire générale.

 14   Est-ce que cela correspond à votre souvenir des événements de cette époque-

 15   là ?

 16   R.  Pour autant que je m'en souvienne, cela aurait dû se passer ainsi, mais

 17   cela dit, je ne sais pas où et dans quelles zones les unités

 18   antiterroristes de la police militaire avaient été utilisées.

 19   Q.  Merci.

 20   Passons maintenant à la quatrième page.

 21   Monsieur Dzolic, hier nous avons dit que dès la libération des territoires

 22   occupés, les unités de la police militaire s'étaient cantonnées dans les

 23   villes.

 24   Vous pouvez voir que le 72e Bataillon de la Police militaire à Split avait

 25   installé une de ses compagnies à Knin. C'était votre compagnie ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Vous pouvez voir également que le 71e Bataillon de la Police militaire

 28   à Rijeka a placé une section de la police militaire à Gracac et à Donji

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  1   Lapac. Nous en avons parlé hier.

  2   Ceci correspond à vos souvenirs de l'époque, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui, mais j'aimerais apporter une correction. Il est dit à Knin à 12

  4   heures le 5 août, la compagnie a été placée à Knin. Mais moi j'y suis

  5   arrivé vers 7 heures, 8 heures du soir.

  6   Q.  Mais c'était bien le 5 août, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  En bas de la page, vous pouvez voir qu'il est dit ces unités de la

  9   police militaire avaient pris sur elles l'exécution des missions confiées à

 10   la police militaire dans les zones qui venaient d'être libérées en

 11   coopération avec le ministère de l'Intérieur de la République de Croatie.

 12   Et les événements s'étaient déroulés de la sorte, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Passons maintenant à la page suivante. C'est la page 5.

 15   En haut de la page, il est mis en exergue que la police militaire, jusqu'à

 16   la date du 10 septembre 1995, a escorté et a traité les dossiers de 1 576

 17   personnes en coopération avec le service d'information et de sécurité du

 18   ministère et avec le ministère de la Défense et le ministère de l'Intérieur

 19   de la République de Croatie, et les rapports au pénal et les rapports

 20   spécialisés ont été envoyés aux organes judiciaires. Il est dit que 659

 21   personnes ont été remises et que cette opération avait été réalisée avec

 22   succès avec les unités de l'armée croate et du ministère de l'Intérieur.

 23   Je ne m'attends pas à ce que vous connaissiez le nombre précis de personnes

 24   qui avaient été inculpées devant les tribunaux, mais est-ce que cela

 25   correspond à vos souvenirs, c'est-à-dire que la police militaire en

 26   coopération avec la police civile avait mené à bien de telles missions;

 27   est-ce exact ?

 28   R.  Pour autant que je m'en souvienne, oui, mais s'agissant des incidents

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  1   plus particuliers et des affaires plus précises, je ne le sais pas.

  2   Q.  J'aimerais que l'on passe à la page suivante.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Mikulicic, j'aimerais poser une

  4   question au témoin.

  5   M. MIKULICIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les 659 personnes, comment dois-je

  7   comprendre ce chiffre ? Est-ce que c'étaient les membres de la HV ou bien

  8   c'étaient également les membres de la RSK ou des civils ? Comment dois-je

  9   comprendre ce chiffre de 659 personnes ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, si je vous ai bien

 11   compris, je ne sais pas si c'était le chiffre total portant sur les membres

 12   de la HV ou sur les membres des forces ennemies, s'il s'agit d'un chiffre

 13   total regroupant les deux côtés, je l'ignore, étant donné que je ne suis

 14   pas l'auteur de ce document.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 16   Veuillez poursuivre.

 17   M. MIKULICIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous aborderons

 18   cette question précise en examinant ce qui figure dans le document deux

 19   pages plus loin.

 20   Q.  Monsieur Dzolic, la police militaire procédait à sécuriser le convoi et

 21   le passage sans entrave des convois de citoyens et de militaires qui

 22   quittaient le territoire de ce qui était communément appelé la région de la

 23   République de la Krajina serbe, n'est-ce pas, après leur défaite ?

 24   R.  J'ignore cette information.

 25   Q.  J'attire votre attention au paragraphe 3.5. Cette page n'est plus

 26   affichée à l'écran. Il y est dit qu'au total il y avait 16 convois avec 1

 27   600 véhicules privés et ainsi de suite, et 1 436 tracteurs. Tous ces

 28   convois ont été protégés et escortés par la police militaire conformément à

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  1   ce document.

  2   Monsieur Dzolic, si vous n'êtes pas au courant de cela, cela veut dire que

  3   votre compagnie ne sécurisait pas le passage de réfugiés et des soldats

  4   serbes qui ont subi la défaite après leur retraite, n'est-ce pas ?

  5   R.  Pour autant que je m'en souvienne, nous ne fournissions pas de telles

  6   actions dans la zone de Knin, mais ici il s'agit du rapport du chef de

  7   l'administration de la police militaire qui porte sur toutes les unités de

  8   la police militaire couvrant le territoire total de la République de

  9   Croatie.

 10   Q.  Oui, je comprends. Merci.

 11   Nous pouvons maintenant examiner la page 6.

 12   Au paragraphe 4, il est dit l'utilisation des unités de la police militaire

 13   dans les actions de combat dans l'opération Tempête.

 14   Et au paragraphe 4.1, il est dit que la compagnie du 72e Bataillon de la

 15   Police militaire dans le cadre duquel se trouve la section antiterroriste

 16   et les membres de la police militaire générale ont participé à cette

 17   opération.

 18   Vous nous avez dit que vous n'aviez pas de connaissance au sujet de cette

 19   unité antiterroriste. Mais cette information, est-ce qu'elle vous rappelle

 20   que les spécialistes militaires avaient bel et bien participé aux

 21   opérations ?

 22   R.  Oui, mais ils n'étaient pas sur les territoires de la ville de Knin.

 23   Comme il est dit ici, par le biais des hélicoptères ayant été envoyés à

 24   Rovanska, je pense qu'ils avaient agi sur cet axe-là et ils étaient placés

 25   sous le commandement de M. Primorac.

 26   Q.  Merci. De même aux paragraphes 4.2, 4.3 et 4.4, il est fait état des

 27   actions antiterroristes du 71e Bataillon, 70e Bataillon et 67e Bataillon,

 28   donc ces unités avaient également participé aux opérations de combat.

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  1   Passons maintenant à la page 7.

  2   Monsieur Dzolic, s'agissant des points de contrôle, au paragraphe 6.1, il

  3   est dit qu'une fois que les opérations de combat avaient été terminées, la

  4   police militaire avait établi les points de contrôle le long de la

  5   frontière avec les territoires libres de la République de Bosnie-

  6   Herzégovine, et ceci en coopération avec le MUP.

  7   Savez-vous qu'il y avait de telles activités des unités de la police

  8   militaire, c'est-à-dire qu'elles assuraient la frontière dans les premiers

  9   jours après les opérations, donc la frontière qui sépare la République de

 10   Croatie et la République de Bosnie-Herzégovine ?

 11   R.  J'ignore cette information. Je ne me souviens pas de telles opérations.

 12   Q.  Au paragraphe 6.2, une fois encore l'unité antiterroriste de la police

 13   militaire est mentionnée, et il est dit qu'elle a été retirée des activités

 14   de combat et que cette unité, à partir du 13 août, procède en coopération

 15   avec le MUP et de manière indépendante également au ratissage des

 16   territoires nouvellement libérés de la République de Croatie.

 17   Ceci a été réalisé conformément à leur formation ayant pour but de

 18   les préparer à de telles activités.

 19   M. MIKULICIC : [interprétation] J'aimerais que l'on examine la page 8 où

 20   l'on fait état des enquêtes criminelles.

 21   Q.  Il est dit dans le second paragraphe que la police militaire

 22   criminelle, en coopération avec la police judiciaire du MUP, a traité 321

 23   dossiers au pénal, et il est précisé de quels crimes il s'agit.

 24   Il est fait état de 13 cas de meurtres; de 18 cas où des membres de la HV

 25   ont été tués; puis on parle de 191 cas d'incendie volontaire; 13 cas de

 26   placement de mines; et on parle de 86 autres cas de délits au pénal.

 27   Puis, il est dit que s'agissant de ces délits, au total 79 personnes

 28   étaient membres de la HV, tandis que 274 personnes étaient des civils.

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  1   Monsieur Dozlic, hier vous nous avez dit que lorsqu'un civil était

  2   appréhendé en train de commettre un crime et ceci de la part de la police

  3   militaire ou qu'il se préparait à commettre un acte ou qu'il commettait un

  4   tel acte avec un soldat, la police militaire pouvait traiter cette

  5   personne, l'appréhender et la transférer auprès de l'organe compétent,

  6   n'est-ce pas ?

  7   R.  C'est exact.

  8   Q.  Passons maintenant à la page 9, j'aimerais que l'on aborde mon dernier

  9   sujet d'aujourd'hui.

 10   Dans ce rapport du chef de l'administration de la police militaire, l'on

 11   fait état de mesures entreprises par la police militaire afin d'élever le

 12   niveau total de la sécurité sur le territoire nouvellement libéré de la

 13   République de Croatie. Et dans l'alinéa 2 du paragraphe 8, il est dit que

 14   ces mesures entreprises apportaient de certains résultats mais n'ont pas pu

 15   entièrement empêché la commission de tels actes, notamment le vol, des cas

 16   d'incendie volontaire, et même des cas individuels de meurtre.

 17   Et le 15 septembre 1995, à Plitvice, une réunion de travail s'est tenue

 18   entre les chefs des administrations de police du MUP et les chefs des

 19   unités de la police militaire afin de réaliser la coopération. Monsieur

 20   Dozlic, savez-vous qu'il y avait une telle réunion le 15 septembre 1995 à

 21   Plitvice ?

 22   R.  Je ne m'en souviens pas aujourd'hui. Je ne pourrais pas affirmer que

 23   j'en avais entendu parler ni que je n'en avais pas entendu parler.

 24   M. MIKULICIC : [interprétation] Cela a déjà été établi et déterminé dans le

 25   document D595, il s'agit de cette réunion de Plitvice.

 26   Q.  Monsieur Dozlic --

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Mikulicic, sur cette page, le

 28   deuxième paragraphe qui correspond au numéro 8, en tout cas la traduction

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  1   est comme suit : "Les mesures ont donné certains résultats mais n'ont pas

  2   entièrement empêché la commission de crimes ou de délits."

  3   Je ne sais pas ce qu'il a entendu par cela, mais je suppose que ce qui est

  4   indiqué c'est que "cela n'a pas entièrement prévenu la commission de

  5   crimes."

  6   M. MIKULICIC : [interprétation] Oui, c'est la traduction exacte.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

  8   M. MIKULICIC : [interprétation]

  9   Q.  Monsieur Dozlic, étant donné que vous ne savez rien à propos de cette

 10   réunion, je ne voudrais surtout pas abuser de votre temps davantage, et je

 11   n'ai plus de questions à poser.

 12   R.  [aucune interprétation]

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Mikulicic.

 14   Monsieur Dozlic, Me Misetic, conseil de M. Gotovina, va maintenant vous

 15   poser des questions dans le cadre de son contre-interrogatoire.

 16   Contre-interrogatoire par M. Misetic : 

 17   Q.  [interprétation] Monsieur Dozlic, bonjour.

 18   R.  Bonjour.

 19   Q.  Dans votre déclaration de l'année 2004 au paragraphe 31, des questions

 20   vous ont été posées par le bureau du Procureur à propos d'une cassette

 21   vidéo relative à une réunion qui a été convoquée par le général Gotovina le

 22   6 août, et vous en avez entendu parler dans la presse.

 23   J'aimerais dans un premier temps vous montrer cette cassette vidéo, ensuite

 24   je vais vous poser quelques questions. J'aimerais vous demander de vouloir

 25   accorder une attention toute particulière aux visages des personnes

 26   présentes à cette réunion, parce que je vais vous demander si vous serez en

 27   mesure d'identifier le plus grand nombre de personnes possible qui étaient

 28   présentes à cette réunion.

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  1   M. MISETIC : [interprétation] Je dirai à l'intention de la Chambre qu'il

  2   s'agissait d'une réunion du général Gotovina avec des officiers militaires,

  3   réunion qui a eu lieu à 11 heures le matin du 6 août dans une salle de

  4   conférence en haut de la forteresse de Knin.

  5   Il s'agit de la pièce 1D26-0045. Lors de la déclaration liminaire nous vous

  6   avons montré cela. Il y a des traductions qui ont été données aux

  7   interprètes. Je pense qu'il serait utile que la Chambre entende le ton

  8   utilisé et si la Chambre le souhaite, je ne sais pas, si la Chambre veut

  9   entendre le ton, les inflexions, l'intonation, nous pouvons tout à fait le

 10   faire.

 11   [Diffusion de la cassette vidéo]

 12   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] "D'abord, il y a des missions qui ont été

 13   données à tout le monde pendant la nuit, et je vous demande maintenant

 14   d'être responsables. Général Lausic, les services de sécurité, est-ce que

 15   tout cela a été relayé ? Alojza [phon], d'abord il y a les affaires

 16   politiques, est-ce qu'elles ont fait leur boulot ?

 17   Non, elles ne l'ont pas fait.

 18   Ceko, tu étais présent à la réunion. Dzelic était là aussi et on lui a

 19   confié des missions. Tu étais à la réunion. Qu'est-ce que t'as fait la nuit

 20   dernière ? Où est-ce qu'il était ? Est-ce que le préfet a été contacté ?

 21   Est-ce que vous avez vérifié si le préfet a été contacté ? Est-ce que la

 22   protection civile a été contactée ? Où sont les sapeurs pompiers.

 23   On leur a demandé de venir.

 24   Vous leur avez demandé, mais où est-ce qu'ils sont maintenant ? Vous

 25   vous rendez compte que tout doit être prêt pour 5 heures cet après-midi.

 26   Tout. Il a été si difficile de trouver une seule croix. Une croix je vous

 27   ai demandé seulement. Skoric, elle est où la croix ?

 28   Nous n'avons pas eu en trouver. Elle devrait arriver.

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  1   Vous êtes des putains d'imbéciles. Vous n'avez même pas pu trouver

  2   une seule croix. Si vous vous arrêtiez à Sinj, vous auriez pu demander au

  3   moine de l'élise et il vous aurait donné une croix, il vous en aurait donné

  4   des dizaines. Vous êtes des idiots, des incompétents. Vous êtes assez bons

  5   pour poser devant les caméras, pour être photographiés sur tous les écrans,

  6   pour ça vous êtes très bons pour le faire, très compétents. Juste un

  7   exemple : vous n'avez même pas été fichus de récupérer une seule croix.

  8   Alors je n'ai même pas commencé à dire ce que j'ai vu, moi, dans la ville.

  9   C'est véritablement une disgrâce, une catastrophe, des barbares, des

 10   vandales. Voilà, il y en a qui se paient avec le butin de guerre et qui

 11   font la guerre pour récupérer le butin de guerre.

 12   Les commandants des unités de Sinj à Knin, avec l'aide du génie, ils

 13   ont aujourd'hui pour mission de déblayer toute la route, tout, les

 14   véhicules, la poussière. Jetez-moi tout ça, nettoyez-moi tout ça. Nettoyez.

 15   L'armée ne doit pas être vue dans les rues. La police militaire ne doit pas

 16   se déplacer en groupe mais doit être déployée à tous les postes de

 17   contrôle. Ils ont une carte de la ville telle que cela a été planifié et

 18   ils doivent systématiquement ériger des postes de contrôle et assurer le

 19   contrôle de la ville. Les commandants de la police militaire patrouillent.

 20   Les véhicules de patrouille patrouillent la ville. La coopération avec les

 21   autorités civiles doit être établie jusqu'à ce que le général Cermak, qui

 22   vient juste d'arriver ce matin, puisse assurer ces opérations et

 23   véritablement maîtriser et contrôler la situation. Et jusqu'à ce moment-là,

 24   s'il est tout seul d'ici à 5 heures cet après-midi, rien ne sera prêt et

 25   c'est encore le chaos qui va régner. C'est une véritable catastrophe. Vous

 26   vous rendez compte que le premier ministre va arriver, les ministres --

 27   transport et tout le monde. Ils vont tous arriver aujourd'hui, ils vont

 28   entrer dans une ville où l'armée croate est passée, une ville où les

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  1   autorités civiles n'ont pas assuré encore le contrôle. Mais qui est-ce que

  2   vous essayez de couvrir de honte ? C'est vous que vous allez de couvrir de

  3   honte et tous ceux qui soient placés sous votre commandement, c'est d'eux

  4   que vous êtes responsable. Toutes ces personnes qui sont décédées, toutes

  5   ces personnes qui ont donné leur vie pour vous, vous n'avez absolument

  6   aucun respect. Toutes ces personnes qui sont mortes pour la cause de Knin,

  7   depuis Dinara, pendant l'hiver, en octobre dernier, sans mentionner les

  8   opérations récentes et le nombre de personnes qui sont mortes, qui ont

  9   péri, qui sont encore dans les hôpitaux au jour d'aujourd'hui, qui ont été

 10   mutilées à vie. Et vous, vous vous comportez comme cela, et vous vous

 11   appelez des commandants à la sécurité, mais quelle sécurité ? La sécurité,

 12   ça doit être organisé, il faut assurer le contrôle de la situation. La

 13   police militaire, elle doit obéir, il y a des gens qui doivent exécuter les

 14   tâches, les missions, les techniciens. Il y a les gardes, ceux qui assurent

 15   la garde du camp des forces armées, qui garantissent la mise en œuvre sur

 16   le terrain. Vous avez le département des affaires politiques. Par exemple,

 17   moi, je n'ai pas vu d'affiches dans les rues. Il n'y a même pas de drapeaux

 18   qui flottent sur les bâtiments, sur les installations, rien. Mais où est-ce

 19   que tout cela --

 20   Mais on est en train de le faire, Général, au moment où vous parlez.

 21   Vous êtes en train de le faire. Mais il est 11 heures 30, depuis ce

 22   matin, depuis 4 heures, vous auriez dû être en train de le faire. Vous

 23   auriez dû vous atteler à la tâche toute la nuit. Il y a un hélicoptère qui

 24   est à votre disposition, tout est à votre disposition pour assurer la plus

 25   grande efficacité. Vous ne savez même pas comment utiliser tout cela. Si

 26   vous ne savez pas comment cela fonctionne, si vous ne savez pas faire votre

 27   boulot, vous ne savez pas le faire. On a l'impression qu'on vous a traînés

 28   ici. Mais enfin, il faudrait quand même, je ne sais pas, allez rejoindre

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  1   l'infanterie sur le champ de bataille. Vous finirez par dire moi, j'ai été

  2   un combattant. C'est pas vrai, de la merde, vous avez été des combattants.

  3   Chaque jour est une nouvelle journée pour un combattant et tous les jours

  4   les combattants doivent se prouver."

  5   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

  6   M. MISETIC : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur Dzolic, avez-vous reconnu certains des visages autour de la

  8   table de réunion ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Est-ce que vous pourriez me dire qui vous avez pu reconnaître à cette

 11   réunion ?

 12   R.  Ce sont des généraux maintenant. Je ne sais pas s'ils étaient généraux

 13   à l'époque, mais il y avait le commandant de la brigade de -- M. Korade; M.

 14   Krsticevic; M. Royce, me semble-t-il. Ensuite, il y avait le général

 15   Blaskic, et puis là de l'autre côté, il me semble que c'est le ministre, le

 16   ministre du conseil croate. De l'autre côté, j'ai vu mon commandant, le

 17   colonel Budimir, puis M. Cermak. J'ai vu également d'autres personnes mais

 18   je ne sais pas exactement quels sont leurs noms maintenant, mais ce sont

 19   des gens dont je connais le visage.

 20   Q.  Le général Krsticevic, quelle unité commandait-il ?

 21   R.  La 4e Brigade des Gardes.

 22   Q.  Vous avez mentionné votre commandant, Budimir, vous avez dit qu'il

 23   était présent. J'aimerais que nous repassions un extrait à 3 minutes 56.

 24   J'aimerais vous demander si vous reconnaissez à qui s'adresse le général

 25   Gotovina et si vous êtes en mesure de nous dire qu'il s'adresse au colonel

 26   Budimir. Je vais vous montrer cet extrait. Je vais vous poser quelques

 27   questions à propos des propos du général Gotovina sur l'extrait que je vais

 28   vous repasser maintenant.

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  1   [Diffusion de la cassette vidéo]

  2   M. MISETIC : [interprétation]

  3   Q.  Sur cet extrait de la vidéo, est-ce que vous êtes en mesure de voir à

  4   qui s'adresse le général Gotovina ?

  5   R.  Il parle probablement au commandant de la police militaire.

  6   Q.  Qui est M. Budimir, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui, c'est exact.

  8   Q.  Vous, en tant que policier militaire, lorsque vous entendez le général

  9   Gotovina dire : La police militaire, ce sont eux qui doivent veiller à ce

 10   que soit respecté le code des forces armées et ils doivent garantir sa mise

 11   en application sur le terrain; qu'est-ce que cela signifie pour vous ?

 12   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, objection. Je ne

 13   sais pas comment l'on peut demander au témoin de se livrer à des

 14   conjectures --

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On ne lui demande pas de se livrer à des

 16   conjectures. On lui demande comment il comprend ce qui a été dit. Il se

 17   peut qu'il s'agisse d'une formule qui était utilisée, mais nous allons

 18   entendre ce que le témoin a à nous dire.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que vous pourriez répéter la question.

 20   Je ne sais pas très bien ce que je suis censé dire.

 21   M. MISETIC : [interprétation]

 22   Q.  Dans la vidéo, le général Gotovina s'adresse à M. Budimir et lui dit :

 23   La police militaire doit obéir, la police militaire doit veiller à exécuter

 24   le code des forces armées, c'est elle qui est le garant de sa mise en

 25   application sur le terrain.

 26   Alors vous, en tant que policier militaire, comment est-ce que vous

 27   comprenez ces propos ?

 28   R.  A mon avis, d'après ce que je comprends de ces propos, cela signifie

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  1   que je dois exécuter toutes mes missions en tant que policier militaire, et

  2   ce, conformément aux dispositions juridiques qui stipulent ce que je dois

  3   faire, à savoir je dois accomplir toutes les missions qui s'inscrivent dans

  4   le cadre du règlement de la police militaire. Ce qui signifie que je suis

  5   censé exécuter mes missions honnêtement, avec un très grand degré de

  6   professionnalisme.

  7   Q.  Mais est-ce que vous aviez compris que parmi vos missions vous deviez

  8   faire en sorte que l'ordre règne parmi les membres de la HV ?

  9   R.  Oui, c'est exact.

 10   Q.  Dans votre déclaration de l'année 2004, une fois de plus, toujours au

 11   paragraphe 31, vous dites que ce jour-là, le 6, le colonel Budimir vous a

 12   parlé : "Le colonel Budimir m'a parlé et a insisté sur le fait que nous

 13   devions intensifier notre travail et que nous devions travailler de façon

 14   très professionnelle et que nous devions essayer de régler nos problèmes de

 15   façon constructive."

 16   Est-ce que vous vous souvenez si le commandant Budimir vous a donné ces

 17   instructions pendant l'après-midi du 6 août ou plus tard, cette même

 18   journée ?

 19   R.  D'après ce dont je me souviens, cela s'est passé avant que les

 20   officiers supérieurs des forces armées n'arrivent.

 21   Pour savoir quand cela s'est passé, est-ce qu'il s'agissait de midi, de 13

 22   heures, de 14 heures, je ne peux plus vous le dire avec certitude. Mais

 23   cela s'est passé avant l'arrivée du commandant suprême.

 24   M. MISETIC : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement au

 25   dossier de cette pièce.

 26   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président,

 27   mais nous avons le même extrait vidéo, pièce de la liste 65 ter 3780 et on

 28   me dit que c'est une version plus longue peut-être. Nous souhaiterions

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  1   pouvoir comparer cela pendant la pause et je vous informerai exactement si

  2   notre version est plus longue.

  3   M. MISETIC : [interprétation] Il se peut que la vidéo soit plus longue,

  4   Monsieur le Président, mais nous n'avons pas repris la version brute de la

  5   vidéo.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si les parties versent au dossier une

  7   partie d'un livre ou un extrait d'une vidéo, et si l'autre partie pense

  8   qu'il est plus judicieux de placer cela dans le juste contexte en

  9   fournissant l'intégralité, en règle générale, c'est ainsi que les choses

 10   sont faites. Ensuite on verse cela au dossier et nous pouvons verser cela

 11   au dossier dans le juste contexte.

 12   Si c'est ce que vous souhaitez faire, Madame Mahindaratne.

 13   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je

 14   souhaiterais avoir un peu plus de temps pendant la pause. Je leur ai déjà

 15   demandé de comparer ce que nous venons de voir avec notre partie de la

 16   vidéo.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, pas de problèmes. Alors

 18   nous allons réserver une cote pour ce film.

 19   Monsieur le Greffier.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela deviendra la pièce D792, enregistrée

 21   aux fins d'identification.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D792 est enregistrée aux fins

 23   d'identification.

 24   Madame Mahindaratne, vous reviendrez là-dessus et nous verrons si vous

 25   souhaitez que la vidéo plus longue soit versée au dossier, ensuite nous

 26   attribuerons cette cote D mais à la version plus longue de la vidéo.

 27   Poursuivez.

 28   M. MISETIC : [interprétation] Merci.

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  1   Q.  Monsieur Dzolic, des questions vous ont été posées à propos de Grahovo,

  2   et ce, dans vos deux déclarations. Il s'agissait d'événements qui s'étaient

  3   déroulés à Grahovo avant l'opération Tempête.

  4   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, il semblerait qu'il y

  5   ait un problème pour la traduction de la pièce P71, il s'agit du registre

  6   ou du journal du district militaire de Split. En fait, c'est à la Chambre

  7   que je m'adresse et non pas à M. le Greffier, il y a une partie qui n'a pas

  8   été traduite. Nous avons mis dans le système la traduction de la partie qui

  9   n'avait pas été traduite, ensuite nous avons envoyé un courriel ce matin au

 10   bureau du Procureur pour qu'il puisse vérifier cela et pour qu'il puisse

 11   apporter les corrections, mais nous convenons qu'il y a un morceau qui

 12   manque et qu'il faudrait insérer la version exacte plutôt en tant que P71.

 13   Mais pour le moment, Monsieur le Greffier, je souhaiterais que la pièce

 14   1D52-0022 soit affichée à l'écran. Il s'agit de la traduction anglaise.

 15   Voilà.

 16   Q.  Il s'agit d'une réunion qui a eu lieu le 1er août, et il s'agit du

 17   journal du district militaire de Split. Je ne vais pas vous donner lecture

 18   de l'intégralité du texte mais je commence par le milieu : "Le plus grand

 19   problème pour le Groupe opérationnel nord est le manque de discipline, et

 20   c'est la raison pour laquelle nous avons donné l'ordre aux commandants

 21   d'unité d'y accorder une attention toute particulière et d'empêcher de

 22   façon très stricte les activités de pillage et d'incendies."

 23   Cela a été dit lors d'une réunion du 1er août, et j'aimerais maintenant,

 24   Monsieur le Greffier, que la pièce 2916 de la liste 65 ter soit affichée.

 25   Il s'agit d'un ordre du général Gotovina qui date du 3 août, et dans cet

 26   ordre le général Gotovina indique qu'il donne l'ordre au général de brigade

 27   Rahim Ademi, il est nommé de façon provisoire commandant du Groupe

 28   opérationnel nord et exécutera cette mission en plus de la mission qui lui

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  1   revient de par sa fonction.

  2   Vous avez également le commandant sortant du Groupe opérationnel nord,

  3   colonel Slaven Zdilar qui doit reprendre ses fonctions et faire office de

  4   chef d'infanterie en exercice du commandement de la Zone de Split.

  5   J'aimerais savoir, Monsieur Dzolic, si vous saviez que le général Gotovina

  6   avait remplacé la veille de l'opération Tempête le commandant du Groupe

  7   opérationnel nord ?

  8   R.  Je ne me souviens pas avoir été informé de ceci. Mais ce que je sais

  9   c'est que la veille de l'opération Tempête, le général Ademi assurait le

 10   commandement du groupe opérationnel.

 11   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, je souhaiterais

 12   demander le versement au dossier de la pièce 2196 de la liste 65 ter.

 13   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Pas d'objection.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur le Greffier.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela devient la pièce D793.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D793 est versée au dossier.

 17   M. MISETIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 18   Q.  Certains de mes confrères de la Défense vous ont déjà posé des

 19   questions à propos des ordres de M. Lausic, donc je ne vais pas répéter

 20   ceci. Toutefois, il y a quelques questions que je souhaiterais vous poser

 21   car je pense que vous pourrez y répondre.

 22   M. MISETIC : [interprétation] Je souhaiterais que le document suivant soit

 23   affiché, document 1D52-0023.

 24   Q.  Vous voyez qu'il s'agit de notes d'une réunion qui a eu lieu à Zagreb

 25   le 3 août, réunion où se trouvaient des représentants du MUP et des

 26   représentants de l'administration de la Police militaire et de

 27   l'administration du SIS : "Le but étant de coordonner les actions du MUP et

 28   la police militaire ainsi que le SIS, donc il s'agit de coordonner les

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  1   actions du MUP, de la police militaire, du SIS, lors de la préparation et

  2   lors des activités offensives planifiées par la HV au cours de la période à

  3   venir."

  4   Il est indiqué qui était présent dans un premier temps à cette réunion.

  5   M. MISETIC : [interprétation] Je souhaiterais, Monsieur le Greffier, que la

  6   page 3 soit affichée, je vous prie. C'est le bas de la page 2 de la version

  7   en B/C/S qui m'intéresse.

  8   Q.  Alors vous voyez qu'il y a un paragraphe au milieu de la version

  9   anglaise qui correspond au paragraphe qui se trouve en bas de la version en

 10   B/C/S, vous avez les propos du général de division Mate Lausic. Il a dit au

 11   paragraphe 2, donc il prend note des problèmes de l'opération Eclair et à

 12   propos de ces problèmes, voilà ce qu'il dit : "Manque de coordination pour

 13   ce qui est de la dynamique et de la répartition des forces au vu des

 14   conditions bien précises qui prévalaient sur le terrain qui a réduit

 15   l'efficacité et a créé de façon superflue l'illusion suivant laquelle le

 16   nombre de membres engagés n'était pas suffisant. Il a également insisté sur

 17   le fait qu'il avait maintenant donné l'autorisation aux officiers de l'UVP,

 18   il s'agit des officiers de l'administration de la police militaire, de

 19   remplacer les commandants des unités de l'UVP sur le terrain au cas où ils

 20   venaient à remarquer des problèmes dans leur travail."

 21   Monsieur Dzolic, lorsque M. Juric est arrivé sur le terrain, étiez-vous

 22   informé du fait que M. Juric avait reçu cette autorisation du général

 23   Lausic pour remplacer les commandants du 72e Bataillon de la Police

 24   militaire sur le terrain s'il venait à remarquer des problèmes et des

 25   irrégularités dans leur travail ?

 26   R.  Non, je ne le savais pas. Je ne me souviens pas avoir été informé de ce

 27   genre de chose.

 28   M. MISETIC : [interprétation] Je souhaiterais que le document 1D52-0023

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  1   soit versé au dossier.

  2   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Pas d'objection.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela deviendra la pièce D794

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D794 est versée au dossier.

  6   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, je souhaiterais que la

  7   pièce D269 soit affichée.

  8   Q.  Monsieur Dozlic, vous verrez sur la première page de ce document qu'il

  9   s'agit d'un ordre émis par le général Lausic qui était destiné à différents

 10   bataillons de la police militaire, notamment le 72e Bataillon de la Police

 11   militaire. Il s'agit d'un ordre qui a été émis et qui porte sur le travail

 12   effectué par la police militaire, sur la coopération entre la police

 13   militaire et la police civile, sur le travail mené à bien à la fois par le

 14   police militaire et la police civile et sur les obligations de la police

 15   militaire vis-à-vis des membres détenus des formations paramilitaires et

 16   des formations parapolices.

 17   Ensuite vous avez le fait qu'il est indiqué que c'est un ordre qui est émis

 18   après la réunion que je viens de vous indiquer dans le journal de bord que

 19   nous venons d'examiner, il s'agit de mettre en application l'accord qui a

 20   été conclu à cette réunion entre le MUP, les chefs du MUP, et les chefs de

 21   l'administration à la police militaire. Par cet ordre, le général Lausic

 22   indique.

 23   Je souhaiterais que l'on passe à la deuxième page de la version anglaise.

 24   Vous voyez que vous avez au paragraphe 1.1 l'ordre qui est donné qui

 25   consiste à ériger des postes de contrôle.

 26   1.2, suivre la progression de la RH OS, il s'agit des forces armées de la

 27   République de Croatie dans les territoires libérés, et ce, grâce à des

 28   patrouilles mixtes, il s'agit également d'assurer le maintien de l'ordre

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  1   public, de faire en sorte d'assurer la circulation pour les besoins de la

  2   HV et de prendre en considération l'isolement et l'évacuation des civils,

  3   et ce, pour leur sécurité.

  4   Nous allons nous arrêter là et j'aimerais vous poser une question. Est-ce

  5   que vous vous souvenez avoir reçu un exemplaire de cet ordre du général

  6   Lausic, ou est-ce qu'un ordre semblable vous a été relayé soit de la part

  7   du général Juric ou soit de la part du colonel Budimir ?

  8   R.  Si je me souviens bien, je n'ai jamais reçu un ordre écrit m'étant

  9   destiné.

 10   Q.  Comment est-ce que vous avez compris cet ordre d'isolement et

 11   d'évacuation des civils afin d'assurer leur sécurité ? Dans quel contexte

 12   est-ce qu'il eut été possible d'isoler et d'évacuer des civils pour assurer

 13   leur sécurité ?

 14   R.  Je les aurais installés dans des endroits déterminés. S'agissant de

 15   cette question d'isolement des civils et des soldats, je me suis vu

 16   distribuer des missions bien spécifiques. Je ne sais plus si c'était le

 17   colonel Budimir ou le commandant Juric qui m'avait demandé d'escorter

 18   toutes ces personnes jusqu'au lycée, je crois que c'était le lycée de la

 19   ville de Knin. En tout cas, je me souviens très bien d'une cour très vaste

 20   de cette école où l'on a regroupé toutes ces personnes.

 21   Q.  Ceci a-t-il été fait pour garantir leur sécurité, parce que quelle

 22   aurait pu être la raison pour laquelle on vous a demandé d'escorter des

 23   civils jusqu'à une école de Knin ?

 24   R.  Afin d'empêcher des personnes que j'appellerais éventuellement des

 25   criminels ou en tout cas des délinquants, je ne sais pas très bien comment

 26   les appeler, donc afin d'empêcher de telles personnes de commettre des

 27   actes qui auraient pu ensuite être portées à la responsabilité de l'armée

 28   croate.

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  1   Q.  Passons au point 1.3.

  2   "Dans les lieux habités, recourir à des patrouilles conjointes pour

  3   garantir le respect du droit et de l'ordre ainsi que tous les éléments

  4   énumérés au point 1.2. Le MUP de la République de Croatie prend à son

  5   compte la sécurité des bâtiments les plus importants dans les villes

  6   libérées, et c'est la police militaire qui lui apportera l'aide

  7   nécessaire."

  8   Vous avez dit dans votre déposition que vous aviez créé des postes de

  9   contrôle à Knin. Vous rappelez-vous si la création de ces postes, ou

 10   plutôt, je vais reformuler.

 11   Qui vous a donné l'ordre de créer des postes de contrôle à Knin ?

 12   R.  Cet ordre m'a été transmis, si je me souviens bien, par le colonel

 13   Budimir avant mon départ de Rujani, en direction de Knin.

 14   Q.  Le point 1.6 se lit comme suit : "Créer des pelotons de la police

 15   militaire dans les centres du MUP de la République Croatie dans les zones

 16   libérées, ainsi que des sous-postes de police militaire dont les effectifs

 17   devraient être ceux d'un détachement de l'unité de police dans les grandes

 18   zones urbanisées aussi longtemps que l'armée croate y est stationnée."

 19   Vous avez créé une formation dont les effectifs étaient égaux à un escadron

 20   ou à un peloton à Knin, n'est-ce pas ?

 21   R.  C'est exact.

 22   Q.  Qui vous a transmis l'ordre de déployer un nombre d'hommes à Knin qui

 23   serait supérieur à la force d'un peloton ?

 24   R.  Je ne savais pas qu'il fallait qu'il y ait uniquement un peloton en

 25   ville. La seule chose que je savais c'est ce que m'a dit mon commandant,

 26   Budimir, à savoir que je devrais chercher Gotovina et créer une unité de la

 27   police militaire à cet endroit. J'ai reçu des moyens qui étaient ceux d'un

 28   commandant de compagnie, donc je ne suis pas au courant qu'il ait été

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  1   décidé de créer un peloton et non une compagnie, comme ceci est dit ici.

  2   Q.  D'accord. Passons à la page suivante en anglais, paragraphe 4, je parle

  3   des paragraphes numérotés.

  4   Le général Lausic donne l'ordre aux commandants des unités de police

  5   militaire d'informer tous les niveaux hiérarchiques des unités de la police

  6   militaire et tous les membres de la police militaire de l'existence de cet

  7   ordre pendant la nuit et de veiller à sa bonne application.

  8   Encore une fois, je pense que vous avez déjà répondu à cette question, mais

  9   je vous la pose une nouvelle fois, vous rappelez-vous avoir été informé à

 10   Sajkovici le 3 août quant à l'existence de cet ordre du général Lausic ?

 11   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, cette question a

 12   été déjà posée et a reçu réponse.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourquoi est-ce que vous posez une

 14   nouvelle fois la question puisque vous dites vous-même qu'elle a déjà reçu

 15   réponse de la bouche du témoin, Maître Misetic ?

 16   M. MISETIC : [interprétation] J'ai demandé précisément dans ma deuxième

 17   question quel était le temps et l'heure où il a peut-être été informé de

 18   l'existence de cet ordre, donc la question était moins générale.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Si vous ajoutez quelque chose à une

 20   question antérieure, le témoin peut y répondre.

 21   M. MISETIC : [interprétation] Sajkovici. Je vais lui poser une autre

 22   question.

 23   Q.  Dans la soirée du 3, avant l'opération Tempête, est-ce que vous avez

 24   assisté à une réunion d'information à Rujani ou à Sajkovici ?

 25   R.  Si je me souviens bien, juste avant l'opération Tempête, j'ai assisté à

 26   une réunion qui a été dirigée par le commandant du bataillon.

 27   Q.  Où a eu lieu cette réunion ?

 28   R.  Je crois me souvenir qu'elle s'est déroulée à Rujani ou à Sajkovici,

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  1   mais je tendrais plutôt à dire que c'était à Rujani, c'est-à-dire à

  2   l'endroit où se trouvait le lieu de séjour du commandant de bataillon.

  3   Q.  Vous rappelez-vous ce qui a été dit à cette réunion de Rujani le 3 août

  4   ?

  5   R.  C'est durant cette réunion que j'ai fait la connaissance -- ou plutôt

  6   que l'on m'a appris l'existence d'un ordre relatif au début de l'opération

  7   Tempête. Ce n'est pas cet ordre-ci dont on m'a donné lecture, mais on m'a

  8   donné lecture d'un ordre qui, je crois, provenait du général Gotovina et

  9   qui évoquait un passage à l'action.

 10   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, je tiens à faire

 11   consigner au compte rendu d'audience que le témoin n'a pas dit que cela se

 12   passait le 3 août, mais juste avant. Or, Me Misetic a évoqué la date du 3

 13   août dans sa question. Pour le compte rendu d'audience.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Mahindaratne, n'est-il pas exact

 15   que ceci concerne ce que nous trouvons au paragraphe 18 de la déclaration

 16   de 2004 du témoin dans lequel l'élément de preuve présenté évoque la date

 17   du 3 août.

 18   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Toutes mes excuses, Monsieur le

 19   Président.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez procéder, Maître Misetic.

 21   M. MISETIC : [interprétation] Je demande l'affichage sur les écrans du

 22   document 1D52-0019.

 23   Q.  C'est un ordre qui provient du général Lausic. Avant-hier, si je ne me

 24   trompe, au cours de l'interrogatoire principal et s'agissant d'une autre

 25   déclaration préalable, on vous a posé des questions au sujet du fait que le

 26   commandant Juric vous a transmis des ordres, et on vous a parlé plus

 27   précisément d'un ordre qui concernait la sécurité d'un bâtiment de Golubic.

 28   Vous vous rappelez cela ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  J'aimerais que vous jetiez un coup d'œil à cet ordre qui est un ordre

  3   provenant du général Lausic destiné, entre autres, au 72e Poste de la

  4   Police militaire dans son poste de commandement avancé, et de façon plus

  5   précise, envoyé à l'attention du commandant Ivan Juric. Et dans l'ordre du

  6   7 août, au point 2, nous lisons : "Evaluer une méthode permettant de

  7   garantir physiquement la sécurité de toutes les installations d'entreposage

  8   et de créer la sécurité physique des bâtiments susmentionnés à partir de 0

  9   heures et jusqu'à 24 heures."

 10   Vous rappelez-vous avoir reçu ce genre d'ordre du commandant Juric, et je

 11   vous demande de faire appel à votre mémoire pour nous dire si cet ordre

 12   concerne la sécurité du bâtiment de Golubic ?

 13   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] C'est une question composite, Monsieur

 14   le Président. Il y a deux questions en une seule.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous reformuler et diviser la

 16   question.

 17   M. MISETIC : [interprétation] Absolument, Monsieur le Président.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez.

 19   M. MISETIC : [interprétation]

 20   Q.  Je vous demande de faire appel à votre mémoire et de nous dire si cet

 21   ordre concerne le bâtiment de Golubic ?

 22   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Fondement, Monsieur le Président, pour

 23   cette question. On ne peut pas comprendre vu la façon dont la question est

 24   posée, puisqu'il est question de concerner le bâtiment de Golubic, si on

 25   demande au témoin s'il était informé de l'existence de l'ordre ou s'il a

 26   reçu l'ordre.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 28   Maître Misetic.

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  1   M. MISETIC : [interprétation] Le témoin a dit dans sa déposition qu'il

  2   avait reçu un ordre de son commandant, et je lui demande de relire cet

  3   ordre. Il est policier militaire dans une hiérarchie déterminée. Je lui

  4   demande si cet ordre concerne ce qu'il a déjà dit dans sa déposition quant

  5   à ses tâches.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le témoin peut répondre à la question.

  7   Veuillez la lui reposer, Maître Misetic.

  8   M. MISETIC : [interprétation]

  9   Q.  Monsieur Dzolic, vous avez dit hier dans votre déposition, ou avant-

 10   hier, je ne m'en souviens plus très bien, que vous aviez reçu un ordre du

 11   commandant Juric vous demandant de garantir la sécurité de Golubic.

 12   Est-ce que vous vous rappelez avoir dit cela ?

 13   R.  Je m'en souviens. L'ordre reçu par moi était un ordre verbal.

 14   Q.  Mais en relisant cet ordre du général Lausic au commandant Juric,

 15   pouvez-vous nous dire si le document que vous avez actuellement sous les

 16   yeux, qui est le texte de cet ordre, a un rapport avec l'ordre verbal que

 17   vous avez reçu du commandant Juric ?

 18   R.  Je suppose qu'il y a un rapport. C'est une suite logique. Le

 19   commandant, qui était le commandant Juric, a reçu un ordre et sur la base

 20   de l'ordre reçu par lui, il en transmet un à mon intention.

 21   M. MISETIC : [interprétation] J'ai demandé l'enregistrement de cet élément

 22   de preuve et j'en demande maintenant le versement au dossier.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Mahindaratne.

 24   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je n'ai pas d'objection, Monsieur le

 25   Président.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ceci devient la

 28   pièce D795.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D795 est admise au dossier.

  2   Monsieur Dzolic, dans votre dernière réponse vous disiez que c'était

  3   logique. Est-ce uniquement parce que c'est logique que vous avez répondu

  4   comme vous l'avez fait ou est-ce que vous avez des informations plus

  5   précises ? Est-ce qu'une référence a éventuellement été faite à cet ordre

  6   lorsque vous en avez reçu d'autres par la suite ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Si je me souviens bien, le commandant Juric

  8   n'a évoqué aucun ordre. Il est arrivé dans la soirée et il m'a dit ou même

  9   ordonné d'affecter un certain nombre d'hommes de mon unité avec lesquels je

 10   devais me rendre à l'entrepôt de Golubic, donc il m'a dit de les emmener

 11   avec moi pour assurer et garantir la sécurité de l'entrepôt de Golubic.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc le lien entre l'ordre qui lui a été

 13   donné et l'ordre qui vous a été donné, hormis le fait que cela semble

 14   logique, et je ne le conteste pas, semble mince. J'aimerais savoir dans

 15   quelles conditions ce qui vous semble logique a été constaté par vous, soit

 16   parce que vous l'auriez entendu, soit parce que vous l'auriez vu, mais en

 17   tant que fait.

 18   Veuillez poursuivre, Maître Misetic.

 19   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   Q.  Monsieur Dzolic, je vais maintenant vous soumettre une série de

 21   rapports adressés par le commandant Juric au général Lausic. Pour gagner du

 22   temps, je vais vous montrer trois rapports l'un après l'autre, après quoi

 23   je vous interrogerai à leur sujet.

 24   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, premier rapport, pièce

 25   D732, je vous prie.

 26   Q.  Ce document est un rapport du commandant Juric datant du 9 août qui est

 27   adressé au chef de la direction de la police militaire, le général de

 28   division Mate Lausic, et il rend compte de l'exécution de diverses missions

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  1   attribuées à la police militaire dans le secteur nord à 16 heures le 9

  2   août.

  3   Au paragraphe 1, nous lisons : "Un certain nombre d'ustensiles ont été

  4   confisqués et des reçus ont été fournis en échange."

  5   Au deuxième paragraphe, dans la dernière phrase -- deuxième ligne nous

  6   lisons : "Il est permis de dire que la situation à Benkovac et Obrovac est

  7   actuellement maîtrisé, hormis pour quelques rares cas de confiscation

  8   d'objets en général confisqués de toute façon aux postes de contrôle."

  9   Je vous demande de passer à la page suivante : "Le poste de la police

 10   militaire de Sinj rend compte du fait qu'un tracteur a été confisqué au

 11   lieutenant Grgic et qu'il a été transféré à pied à Vrlika pour emploi par

 12   la direction. Un engin agricole de marque Progres et une machine agricole

 13   de marque Agria ont été confisqués à leur propriétaire privé."

 14   Vous remarquerez que le rapport ne semble pas avoir été copié pour envoi à

 15   qui que ce soit d'autres et qu'il est adressé directement au général de

 16   division, M. Lausic.

 17   M. MISETIC : [interprétation] Passons au rapport suivant, Monsieur le

 18   Greffier, pièce D733.

 19   Q.  C'est à nouveau un rapport du commandant Ivan Juric adressé directement

 20   à la direction de la police militaire et plus particulièrement à

 21   l'attention de son chef. Pas de copie adressé à d'autres destinataires. Et

 22   là encore, il s'agit d'un rapport concernant l'exécution d'un certain

 23   nombre de missions confiées à la police militaire dans le secteur nord.

 24   Au point 2 de ce texte, nous lisons qu'il faut protéger le monastère de

 25   Kistanje. Et nous lisons plus loin : "Aucune infraction à la loi et à

 26   l'ordre n'a été enregistrée dans la période faisant l'objet de ces

 27   constatations."

 28   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, passons maintenant au

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  1   troisième rapport, pièce D211.

  2   Q.  Nous sommes maintenant à la date du 12 août et je vous renvoie

  3   maintenant à la veille. J'avais oublié de vous soumettre ce rapport. Nous

  4   sommes de nouveau cette fois-ci avec ce texte à la date du 12 août. Le

  5   commandant Juric rend compte directement au chef de la direction de la

  6   police militaire. Aucune copie destinée à un autre destinataire, et nous

  7   lisons au paragraphe 4 : "Au sein de la section criminelle de la police

  8   militaire, il n'a été fait état d'aucun crime."

  9   Et au point 5 : "La police militaire n'a arrêté ou interpellé personne."

 10   J'aimerais maintenant que nous nous penchions sur la pièce D734, qui

 11   concerne la journée de la veille.

 12   Paragraphe 4, là encore nous voyons que le commandant Juric rend compte

 13   directement au chef de la direction de la police militaire. Il n'a pas de

 14   copie destinée à un autre destinataire. Nous lisons au paragraphe 4 : "Au

 15   sein de la section de la police militaire chargée des enquêtes criminelles,

 16   les auteurs de crimes ou d'appropriation illégale de biens privés dans les

 17   secteurs libérés sont interrogés au quotidien."

 18   Je vous ai montré quatre documents, Monsieur Dozlic.

 19   Ma question vous est adressée car vous étiez présent à Knin dans cette

 20   période. Vous rappelez-vous avoir apporté votre aide au commandant Juric

 21   pour établir ces rapports quotidiens concernant le travail de la police

 22   militaire ?

 23   R.  Je ne me rappelle pas l'avoir aidé pour rédiger les rapports

 24   quotidiens. Néanmoins, il est possible qu'eu égard à ce qui se passait au

 25   sein de la formation dont j'étais responsable, c'est-à-dire de ma

 26   compagnie, je lui aie soumis au quotidien un certain nombre de données

 27   destinées à être intégrées à ce genre de rapport.

 28   Q.  Est-ce que vous adressiez des rapports quotidiens au commandant Juric ?

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  1   R.  Je ne m'en souviens pas avec une totale certitude, mais je crois que

  2   c'était la façon dont le travail était censé s'effectuer, c'est-à-dire que

  3   j'étais censé lui transmettre des données journalières quant au travail

  4   effectué par nous.

  5   Q.  Savez-vous si une section chargée des enquêtes criminelles au sein de

  6   la police militaire soumettait des rapports au commandant Juric au

  7   quotidien ?

  8   R.  Je ne suis pas au courant.

  9   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, je demande l'affichage

 10   de la pièce D595.

 11   Q.  Il est question dans ce document de la rencontre dont Me Mikulicic a

 12   parlé son contre-interrogatoire -- ou plutôt, excusez-moi, c'est le procès-

 13   verbal de la réunion qui a eu lieu à Plitvice en présence des représentants

 14   du MUP et de la police militaire le 15 septembre 1995 à 11 heures du matin.

 15   M. MISETIC : [interprétation] Page 5 de la version anglaise, je vous prie.

 16   Q.  Je sais que vous avez assisté à cette réunion, mais il y a une prise de

 17   parole qui s'est faite durant cette réunion que j'aimerais vous soumettre

 18   pour voir si elle correspond à ce que vous savez de la situation.

 19   M. MISETIC : [interprétation] Cela se trouve en page 3 de la version

 20   croate, en bas de page.

 21   Q.  Nous lisons -- je rappelle que les participants à la réunion sont

 22   énumérés à la première page du document, il s'agit de membres du MUP de la

 23   République de Croatie et de membres de la direction de la police militaire.

 24   Le général Lausic, d'après ce procès-verbal, aurait dit : "Les membres du

 25   MUP et de la police militaire sont les éléments porteurs de la police de

 26   l'Etat et les seuls responsables de la mise en œuvre de celle-ci sont

 27   présents à la réunion. L'objectif est clair : défendre la population et les

 28   biens et créer une situation positive du point de vue de la sécurité dans

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  1   toute la zone de la République de Croatie."

  2   Cette déclaration selon laquelle "les membres du MUP et de la police

  3   militaire sont les seuls porteurs de la politique de l'Etat et les seuls

  4   responsables de sa mise en œuvre sont présents à cette réunion" est-ce que

  5   d'après vous, Monsieur Dzolic, le MUP et la police militaire travaillaient

  6   de concert avec les instances officielles de la République de Croatie et

  7   assuraient conjointement la responsabilité de la protection des personnes

  8   et des biens ainsi que la création d'une situation positive du point de vue

  9   de la sécurité sur tout le territoire de Croatie ?

 10   R.  Pourriez-vous, je vous prie, me répéter votre question.

 11   Q.  Qui était responsable de la sécurité dans la région, était-ce le MUP et

 12   la police militaire ?

 13   R.  Ceci est exact.

 14   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, je demande l'affichage

 15   de la pièce 1D52-0016.

 16   Q.  Monsieur Dzolic, ce document n'était adressé à vous. Mais on vous a

 17   posé un certain nombre de questions relatives à la nature des opérations au

 18   quotidien, des missions attribuées, et cetera.

 19   Ce document répond au document émis par le général Gotovina le 12 avril

 20   1995 et adressé au commandant de la garnison.

 21   M. MISETIC : [interprétation] Je tiens à faire savoir à la Chambre que nous

 22   recherchons toujours la requête originale émanant du commandant de la

 23   garnison adressée au général Gotovina que nous n'avons pas encore pu

 24   localiser. Mais en tout cas, ce document-ci, c'est la réponse à celui que

 25   nous recherchons et il en ressort que le commandant de la garnison a,

 26   semble-t-il, demandé le déploiement de la police militaire, et que le

 27   général Gotovina répond au point 1 de ce texte : "Selon le règlement de la

 28   police militaire, les unités de police militaire ne sont pas destinées à

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  1   accomplir des missions telles que celle qui est décrite ci-dessus."

  2   Au point 2 : "L'emploi et le déploiement d'unités de police militaire pour

  3   des missions d'une durée prolongée correspondant à ce qui est décrit dans

  4   la requête du commandant de la garnison de Vrgorac sont décidés et agréés

  5   par la direction de la police militaire, c'est-à-dire par le chef de la

  6   direction de la police militaire à Zagreb."

  7   Je sais que vous étiez commandant de compagnie. Mais est-ce que vous avez

  8   eu connaissance du fait qu'un déploiement assez long de la police militaire

  9   ne pouvait être décidé que par la direction de la police militaire ?

 10   R.  Si je me souviens bien, chaque fois qu'il était question d'un

 11   déplacement aussi long que celui qui est évoqué ici, c'est la direction de

 12   la police militaire qui était responsable. Le commandant d'un bataillon de

 13   police militaire pouvait également à son niveau hiérarchique transférer une

 14   formation déterminée, mais ne pouvait sans doute le faire qu'après avoir

 15   reçu l'autorisation et l'agrément du chef de la direction de la police

 16   militaire.

 17   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le

 18   versement au dossier de ce document.

 19   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Pas d'objection.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ce document

 22   devient la pièce D796.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D796 est admise en tant que

 24   pièce à conviction.

 25   M. MISETIC : [interprétation]

 26   Q.  Monsieur Dzolic, je vous remercie d'être venu témoigner. Je n'ai plus

 27   de questions à vous poser.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Misetic.

Page 9099

  1   La Défense de M. Cermak, a-t-elle encore --

  2   M. CAYLEY : [interprétation] Excusez-moi, je ne vous comprends pas,

  3   Monsieur le Président, a-t-elle encore quoi.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] N'a plus de questions.

  5   M. CAYLEY : [interprétation] Non, nous n'avons plus de questions.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voulais simplement vérifier auprès de

  7   vous car de ce point de vue les choses peuvent changer rapidement.

  8   Nous allons donc faire la pause.

  9   Madame Mahindaratne, vous avez indiqué hier que vous auriez besoin d'un

 10   certain temps pour des questions supplémentaires. Est-ce que votre

 11   estimation s'est modifiée ? Hier, vous avez donné une estimation, est-ce

 12   qu'elle est toujours valable ?

 13   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Pas de changement, Monsieur le

 14   Président.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous faisons la pause.

 16   --- L'audience est suspendue à 10 heures 34.

 17   --- L'audience est reprise à 11 heures 05.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Madame

 19   Mahindaratne.

 20   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Avant de poursuivre, s'agissant de la

 21   séquence vidéo, nous avons en fait une séquence qui est plus longue. Nous

 22   avons deux cassettes portant sur la même réunion, et nous avons un

 23   enregistrement qui commence bien avant l'enregistrement montré par Me

 24   Misetic. Ensuite, nous avons toute la réunion et une partie qui suit, donc

 25   après la réunion.

 26   S'agissant de la deuxième bande, nous avons également une partie qui

 27   ne figure pas dans la séquence montrée. Donc je demande le versement au

 28   dossier des deux bandes pour avoir autant d'enregistrements que possible.

Page 9100

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic.

  2   M. MISETIC : [interprétation] Bien sûr, l'Accusation peut demander le

  3   versement au dossier des pièces qu'elle souhaite. J'ai regardé la partie où

  4   ils disent qu'il y a des parties qui ne figurent pas, et apparemment le

  5   général Gotovina aurait dit que la police militaire devait -- et cetera.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous souhaitez que les deux parties

  7   soient versées.

  8   M. MISETIC : [interprétation] Cette partie qui m'intéresse, où le général

  9   Gotovina s'en prend au commandant du bataillon de la police militaire,

 10   n'apparaît pas dans la version que souhaite présenter au dossier

 11   l'Accusation.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais remplacer la version plus longue ne

 13   serait certainement pas dans l'intérêt de la Défense, Madame Mahindaratne.

 14   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Justement le contraire --

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais n'entrons pas dans le débat. Vous

 16   souhaitez demander le versement au dossier de la version plus longue. La

 17   Défense souhaite que la version plus courte soit versée au dossier.

 18   Je propose que les parties se rencontrent et que pour l'instant la

 19   séquence qui a reçu la cote provisoire -- je souhaite que les parties se

 20   mettent d'accord au sujet de la version qui doit être finalement versée au

 21   dossier parce que nous avons une version qui a déjà reçu une cote

 22   provisoire.

 23   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je parlerai

 24   avec l'Accusation.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est cela.

 26   Pour une raison ou une autre, mon écran où  je veux voir les pièces à

 27   conviction est bleuâtre et je préférerais qu'il soit blanc.

 28   Il semblerait qu'il y ait un problème technique mais qui pourra être

Page 9101

  1   résolu.

  2   Veuillez poursuivre.

  3   Nouvel interrogatoire par Mme Mahindaratne : 

  4   Q.  [interprétation] Monsieur Dzolic, vous avez dit hier que le 20 août

  5   2008, lorsque vous avez rencontré les représentants du bureau du Procureur,

  6   vous avez examiné votre déclaration de 2004 et vous avez apporté un certain

  7   nombre de modifications à cette déclaration. En fait, entre autres, le 20

  8   août 2008 vous avez apporté une modification au paragraphe 37 de votre

  9   première déclaration. J'aimerais lire la modification que vous avez

 10   apportée, il s'agit du paragraphe 15 de votre déclaration de 2008 --

 11   M. CAYLEY : [interprétation] Excusez-moi, mais je pense qu'il vaudrait

 12   mieux que le témoin ait à sa disposition les deux versions de sa

 13   déclaration, la première et la deuxième en B/C/S, pour qu'il puisse

 14   comprendre de quoi nous parlons.

 15   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Excusez-moi, je pensais que le témoin

 16   l'avait sous les yeux.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne peux pas le voir. Je demande à Mme

 18   l'Huissière de présenter les deux déclarations, celle de 2004 et celle de

 19   2008.

 20   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 21   Q.  Monsieur Dzolic, je vous prie d'examiner votre déclaration de 2008,

 22   plus précisément le paragraphe 15. Il s'agit de la correction que vous avez

 23   apportée au paragraphe 37, le 20 août 1995. Vous dites : "Au paragraphe 37,

 24   j'ai dit que le général Cermak m'avait été présenté en tant que général et

 25   commissaire du gouvernement. J'aimerais le modifier pour dire qu'il m'a été

 26   présenté en tant que général et commandant de la garnison de Knin."

 27   Ça c'est la correction que vous avez apportée au paragraphe 37 de votre

 28   déclaration de 2004 lorsque vous en avez parlé le 20 août 2008, n'est-ce

Page 9102

  1   pas ?

  2   Monsieur Dzolic, mercredi dernier avant de venir déposer dans le prétoire,

  3   dites-nous à quelle heure vous êtes arrivé au Tribunal ?

  4   R.  Une vingtaine de minutes avant le début de l'audience, ou peut-être une

  5   demi-heure.

  6   Q.  Et à ce moment-là on vous a donné les deux déclarations afin que vous

  7   puissiez les lire, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  En entrant dans le prétoire, vous avez informé la Chambre que vous

 10   n'avez pas eu l'occasion de lire votre déclaration de 2008 et que vous

 11   souhaitiez la lire avant de confirmer quelle était véridique ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Hier, Me Kay vous a demandé si vous acceptiez que la teneur du

 14   paragraphe 37 de votre déclaration de 2004 et pour être précise, je vais

 15   donner lecture de ce paragraphe.

 16   Vous avez dit au paragraphe 37 : "J'ai compris que j'étais toujours placé

 17   sous le commandement du colonel Budimir mais que j'étais également placé

 18   sous le commandement du général Cermak et je devais obéir à tout ordre que

 19   le général Cermak me donnait."

 20   Hier vous avez dit que cela n'était pas vrai --

 21   M. CAYLEY : [interprétation] J'aimerais que Mme Mahindaratne répète les

 22   propos du témoin tenus hier parce que là elle n'a fait que relire ce qui

 23   est consigné dans sa déclaration, et je pense qu'il faudrait présenter au

 24   témoin les questions posées par mon confrère, Me Kay, et les réponses

 25   apportées par le témoin.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vous prie de le faire.

 27   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] J'attire votre attention à la page du

 28   compte rendu d'audience 9 503 jusqu'à 9 507 [comme interprété].

Page 9103

  1   Q.  Monsieur Dzolic, voici la question telle qu'elle était posée :

  2   "Est-ce que ce sont vos propos, est-ce ce que vous avez dit : 'J'ai

  3   compris que j'étais toujours placé sous le commandement du colonel Budimir,

  4   mais j'étais également placé sous le commandement du général Cermak et je

  5   devais obéir à tout ordre confié par le général Cermak' ?"

  6   Et vous avez dit : "Non --

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous devez préciser quels sont les

  8   propos du témoin et quelle était la question, et votre réponse était : "Je

  9   ne pense pas que c'était la manière dont je l'avais dit."

 10   Veuillez poursuivre.

 11   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Ensuite on vous a posé encore une

 12   question, par Me Kay. Il vous a demandé : "Est-ce que cette déclaration est

 13   fausse ?"

 14   Et il se réfère à ce paragraphe.

 15   Et vous avez dit : "En partie, oui."

 16   Ensuite passons à la page 9 037, une fois encore on vous a posé la question

 17   suivante : "Est-il erroné comme il est consigné ici que j'étais également

 18   placé sous le commandement du général Cermak et que je devais obéir à tout

 19   ordre donné par le général Cermak."

 20   Me Kay a relu une fois encore une partie de votre déclaration de 2004.

 21   Et vous avez dit : "Cette déclaration n'est pas exacte."

 22   Me Kay vous a ensuite demandé : "Est-il faux que vous étiez placé sous le

 23   commandement du général Cermak ?"

 24   Et votre réponse a été : "Je n'étais pas placé sous le commandement du

 25   général Cermak, j'étais placé sous le commandant du colonel Budimir."

 26   Et Me Kay vous a demandé : "Est-il erroné de dire que vous deviez obéir à

 27   tout ordre donné par le général Cermak ?"

 28   Et votre réponse est : "Oui, c'est exact."

Page 9104

  1   Monsieur Dzolic, que s'est-il passé depuis la matinée du mercredi et hier,

  2   comment se fait-il que vous ayez changé d'avis au sujet de ce que vous avez

  3   déclaré au paragraphe 37 de votre déclaration de 2004; et comment se fait-

  4   il que nous ayez dit que ce qui était consigné n'était pas vrai ? Qu'est-ce

  5   qui vous a fait changer d'avis ?

  6   R.  Monsieur le Président, en relisant ma déclaration de 2008, pour gagner

  7   du temps et j'étais également nerveux parce que je devais déposer devant ce

  8   Tribunal, j'ai commis une erreur, en fait, je n'ai pas remarqué cette

  9   phrase telle qu'elle était formulée dans ma déclaration, et par conséquent,

 10   je ne m'étais pas rendu compte que mes propos étaient mal cités. En me

 11   préparant à la déposition, je n'ai pas eu l'occasion de lire dans son

 12   intégralité ma déclaration de 2008.

 13   Q.  Monsieur Dzolic, je ne parle pas de votre déclaration de 2008, mais de

 14   votre déclaration de 2004. Je me réfère au passage que M. Kay vous a lu de

 15   votre déclaration de 2004, et le 20 août de cette année, vous avez apporté

 16   plusieurs corrections à votre déclaration de 2004, notamment par rapport au

 17   paragraphe 37. Mais vous n'avez jamais jamais soulevé le fait que cette

 18   déclaration selon laquelle vous ne deviez pas obéir aux ordres, et cetera.

 19   M. CAYLEY : [interprétation] Objection. Je demanderais au témoin d'enlever

 20   ses écouteurs.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez le faire, Monsieur Dzolic.

 22   Maître Cayley.

 23   M. CAYLEY : [interprétation] Ma consoeur doit faire très attention

 24   s'agissant de la manière dont elle le présente au témoin. Nous savons que

 25   la version originale de la déclaration a subi bien des modifications lors

 26   de la séance de récolement. Il se peut que le témoin ait dit, en fait, que

 27   lorsqu'il a relu les corrections apportées au paragraphe 37, qu'il n'avait

 28   pas remarqué que cette deuxième partie du paragraphe 37 n'avait pas été

Page 9105

  1   changée.

  2   Je ne veux pas interpréter les propos du témoin, mais ce qui est sûr, c'est

  3   qu'il y avait bien des erreurs dans sa déclaration écrite.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous savez il y a d'autres

  5   explications possibles, et Mme Mahindaratne fera certainement attention,

  6   mais elle a le droit d'examiner ce problème entièrement.

  7   Veuillez poursuivre, Madame Mahindaratne.

  8   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Merci.

  9   Q.  Monsieur Dzolic, ma question est la suivante, vous avez apporté une

 10   correction au paragraphe 37 le 20 août 2008. Comment se fait-il que vous

 11   n'ayez pas corrigé cette partie-là aussi ?

 12   R.  Je n'arrive pas à me souvenir pourquoi je ne l'avais pas remarqué à

 13   l'époque, mais en examinant ce paragraphe, je n'avais pas prêté beaucoup

 14   d'attention à la deuxième partie de ce paragraphe.

 15   Q.  Monsieur Dzolic, lors de la séance de récolement, vous avez dit que

 16   vous lisiez lentement et que vous avez relu votre déclaration de 2004 avec

 17   beaucoup d'attention. Comment se fait-il que vous ayez corrigé une phrase

 18   dans le même paragraphe et pas une autre qui figure dans ce même paragraphe

 19   ? Comment se fait-il que vous l'ayez omis ?

 20   R.  J'ai commis une erreur, j'ai omis de le faire. Je ne sais pas comment

 21   vous l'expliquer. Mais à l'époque je ne l'avais pas remarqué. J'ai corrigé

 22   ce qui avait attiré mon attention à l'époque, mais à l'époque je n'avais

 23   pas remarqué cette partie-là.

 24   Q.  On vous a posé un certain nombre de questions au sujet des comptes

 25   rendus à M. Cermak.

 26   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche maintenant

 27   la pièce P886. En anglais, c'est la page 7 453. C'est 7 453, page 8; et en

 28   B/C/S, c'est à la page 11.

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  1   Q.  Monsieur Dzolic, j'aimerais attirer votre attention sur l'annotation

  2   apportée à 13 heures 05. On fait référence à une patrouille qui a reçu

  3   l'ordre de se présenter au général Cermak.

  4   Pourriez-vous nous dire pourquoi les patrouilles de police militaire

  5   rendaient compte à Cermak ?

  6   M. CAYLEY : [interprétation] Objection. Il n'est pas dit qu'une patrouille

  7   de police militaire devait rendre compte au général Cermak.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Lisons ce qui est écrit tel que c'est

  9   écrit.

 10   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Oui, excusez-moi, je vais vous donner

 11   lecture de ce qui y figure. Il est dit : "Information  provient" - il y a

 12   une partie illisible, mais on dirait que c'est le MUP, vous pourrez me

 13   corriger si je m'abuse -- à deux personnes au service de permanence et

 14   quelqu'un devrait également rendre compte, "Mosor 1 doit rendre compte à

 15   Cermak."

 16   Pourriez-vous nous expliquer qui est Mosor 1 ?

 17   R.  Mosor 1 est probablement le code utilisé à la radio se référant au chef

 18   de cette compagnie.

 19   Q.  Quelle compagnie ?

 20   R.  Si c'est le registre de la 7e Compagnie, dans ce cas-là il s'agit du

 21   chef de cette compagnie.

 22   Q.  Vous parlez de la compagnie mixte de Knin, n'est-ce pas, lorsque vous

 23   parlez de la 7e Compagnie ?

 24   M. CAYLEY : [interprétation] Excusez-moi, mais je pense que nous avons un

 25   problème de traduction --

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Toutes les questions de traduction

 27   doivent être réglées lorsque le témoin n'écoute pas.

 28   Je vous prie d'enlever les écouteurs, Monsieur le Témoin.

Page 9107

  1   M. CAYLEY : [interprétation] Mon collègue qui parle croate m'a dit que

  2   "javni" peut être compris en anglais en tant que rendre compte mais

  3   également appeler, cela présente une différence importante.

  4   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Nous présenterons une version corrigée

  5   de la traduction, mais à ce moment-là --

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je sais que les interprètes n'ont pas la

  7   tâche de faire la révision des traductions. Mais --

  8   Les deux significations du mot "javni" telles que présentées par Me

  9   Cayley, est-ce que les interprètes peuvent nous confirmer que ce mot peut

 10   avoir deux significations ? Non, je ne leur demande pas de faire la

 11   révision de la traduction, mais simplement de nous dire si effectivement

 12   une interprétation a été choisie et que l'autre aurait pu être choisie

 13   également.

 14   L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine anglaise le confirme.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Mahindaratne, pourriez-vous

 16   maintenant poser une fois encore la question au témoin et dire que Mosor 1

 17   devait appeler ou contacter le général Cermak.

 18   Veuillez poursuivre.

 19   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous prie de remettre les écouteurs. 

 21   Nous étions en train d'aborder un problème de traduction.

 22   Veuillez poursuivre, Madame Mahindaratne.

 23   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 24   Q.  Lorsque vous avez parlé de la 7e Compagnie, vous avez pensé à la

 25   compagnie mixte, n'est-ce pas ? Je n'ai pas entendu votre réponse à la

 26   question que je vous ai posée.

 27   R.  Oui, c'est la compagnie mixte. Mais je vois qu'il s'agit de la date du

 28   19 août, et d'après mes souvenirs, après mon départ, cette compagnie avait

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  1   reçu son numéro et Luka Orsulic était son commandant. Elle n'était plus

  2   appelée la compagnie mixte, mais c'était la 7e Compagnie.

  3   Q.  Pourriez-vous nous dire pourquoi Mosor 1 doit contacter ou se présenter

  4   au général Cermak à 13 heures 05 ?

  5   R.  Monsieur le Président, c'est la question que vous devriez poser au chef

  6   de cette compagnie et au général Cermak, s'il se souvient pourquoi il avait

  7   demandé à ce chef de compagnie de le contacter.

  8   Je ne vois pas pourquoi il pouvait lui demander de le contacter, et je

  9   n'aimerais pas me livrer à des conjectures.

 10   Q.  Merci. Passons à un autre sujet.

 11   Je vous prie d'examiner le paragraphe 11 de votre déclaration de 2008, et

 12   en fait hier on vous a posé un grand nombre de questions au sujet du

 13   commandant Juric. Voici ce que vous nous avez dit le 20 août 2008 au sujet

 14   du commandant Juric après avoir examiné la déclaration de 2008 pendant la

 15   pause, et vous avez confirmé que c'était exact.

 16   Vous avez dit : "J'ai parlé du commandant Ivan Juric. Même aujourd'hui, je

 17   ne sais pas quelle était sa fonction précise. Il semble qu'il avait une

 18   fonction de commandant et de coordinateur. D'après la structure de

 19   l'organisation, Budimir était mon supérieur, bien que je pense avoir vu un

 20   ordre qui stipulait que toutes les unités de la police militaire devaient

 21   être mises à la disposition du commandant Juric."

 22   En d'autres termes, vous dites que vous ne savez pas quel était son rôle

 23   véritable.

 24   Alors j'aimerais savoir ce qui s'est passé, quels documents vous ont été

 25   présentés, je pense à cette déclaration, vous avez confirmé qu'elle était

 26   exacte et hier vous avez accepté la suggestion présentée par Me Kay qui

 27   vous avait indiqué que le commandant Juric était le commandant de la police

 28   militaire --

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Mahindaratne.

  2   Mme MAHINDARATNE : [aucune interprétation]

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors il semblerait que le problème est

  4   le même. C'est la façon dont vous présentez les éléments de preuve qui est

  5   contestée par la Défense. Par conséquent, si vous lisez littéralement la

  6   déposition --

  7   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] C'est ce que je vais faire, Monsieur le

  8   Président. En fait, j'étais en train de lire parce que j'ai consigné

  9   exactement les notes. Mais je vais lire le compte rendu d'audience pour

 10   qu'il n'y ait pas de contentieux.

 11   M. CAYLEY : [interprétation] Peut-être que le témoin devrait à nouveau ôter

 12   ses écouteurs parce que je sais que nous sommes tous d'accord pour ce qui

 13   est de la nature de ce type de question, et je vais être très bref.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pouvez ôter vos

 15   écouteurs.

 16   M. CAYLEY : [interprétation] Je vais être très bref pour que nous puissions

 17   passer à autre chose.

 18   Mme Mahindaratne sait pertinemment pourquoi le témoin a dit certaines

 19   choses à propos de certains documents, certains documents lui ont été

 20   présentés, ces documents lui permettant de comprendre les choses clairement

 21   pour qu'il ne se méprenne pas à propos des questions qui lui étaient posées

 22   par Me Kay, Me Kay lui a proposé un certain nombre de documents et il a

 23   répondu après avoir consulté lesdits documents.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien entendu, cela soulève le problème

 25   de l'interprétation des documents.

 26   Par conséquent, si Mme Mahindaratne pose au témoin certaines questions,

 27   elle peut le faire après lui avoir montré certains documents.

 28   M. CAYLEY : [interprétation] Très bien.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela ne pose pas de problème, mais elle

  2   n'a pas besoin de représenter ces documents, elle peut juste poser les

  3   questions compte tenu de ce qu'il a déjà dit.

  4   M. CAYLEY : [interprétation] Je vous remercie.

  5   M. MISETIC : [interprétation] Et pour ce qui est de la Défense de Gotovina,

  6   je dirais que nous ne pensons pas que l'on puisse contester ce qui se

  7   trouve dans la déclaration, il dit qu'il semblait avoir à la fois un rôle

  8   de commandant et un rôle de coordinateur, donc il ne faut pas indiquer au

  9   témoin que ce qu'il a dit n'est pas conforme ou n'est pas logique puisque

 10   dans la déclaration il a dit qu'il lui semblait que le commandant Juric

 11   avait à la fois un rôle de commandant et un rôle de coordinateur. Donc je

 12   pense qu'il faudrait peut-être formuler les questions à son intention de

 13   façon un peu plus juste.

 14   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Il dit très clairement que même

 15   aujourd'hui il ne sait toujours pas quel était exactement le rôle du

 16   commandant Juric. Moi, ma question est comme suit, sur la base de quels

 17   documents se permet-il maintenant d'accepter la suggestion présentée par la

 18   Défense de telle sorte qu'il sera discrédité.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, je ne pense pas qu'il est

 20   discrédité. Bien entendu, si vous dites j'ai telle impression et que cela

 21   est tout à fait différente de ce que quelqu'un sait, cela peut poser

 22   problème. On a l'impression qu'il tire des conclusions mais sans pour

 23   autant avoir des connaissances à propos de ces conclusions. Donc essayez

 24   d'être aussi neutre que faire se peut, demandez-lui des précisions, des

 25   explications, mais ne formulez pas trop de suggestions lorsque vous lui

 26   posez vos questions, parce que cela serait de le diriger.

 27   M. MISETIC : [interprétation] Je veux dire par souci d'équité à l'égard du

 28   témoin, qu'il a indiqué lors de sa déposition qu'il avait reçu des ordres.

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  1   Il a précisé qu'il y avait au moins un ordre qui émanait du commandant

  2   Juric, donc en fait il est d'avis que Juric le commandait.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Mahindaratne.

  4   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je vais formuler ma question

  5   conformément aux consignes qui m'ont été données par le Président.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Faites donc.

  7   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

  8   Q.  Monsieur, hier vous avez marqué votre accord avec la suggestion avancée

  9   par la Défense, et pour reprendre les propos exacts, la suggestion était

 10   comme suit : "Convenez-vous qu'il" - il étant le commandant Juric -

 11   "convenez-vous qu'il était le commandant de la police militaire dans les

 12   zones de responsabilité du 72e et 73e Bataillon à l'époque ?"

 13   Et vous avez répondu oui.

 14   Donc vous avez marqué votre accord avec cette suggestion. Alors que

 15   préalablement vous aviez informé le bureau du Procureur que vous n'étiez

 16   pas absolument sûr du rôle véritable qu'il avait. Alors, est-ce que vous

 17   pourriez avoir l'amabilité d'expliquer aux Juges de la Chambre comment se

 18   fait-il que vous ayez accepté la suggestion présentée hier dans le prétoire

 19   alors que le 20 août, vous aviez indiqué que vous ne connaissiez toujours

 20   pas le rôle exact du commandant Juric ?

 21   M. MISETIC : [interprétation] Je reviens à la même objection. Je pense

 22   qu'il faut qu'elle lui présente le paragraphe 11 si elle va le paraphraser.

 23   M. CAYLEY : [interprétation] Je reprends à mon compte ce qui vient d'être

 24   dit par Me Misetic.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Mahindaratne, est-ce que vous

 26   pourriez alors montrer le paragraphe ou l'extrait du paragraphe en

 27   question.

 28   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

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  1   Q.  Monsieur Dzolic, pourriez-vous, je vous prie, lire le paragraphe 11 de

  2   votre déclaration de l'année 2008. Vous pouvez le faire ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Voilà ce que vous dites : "Je fais référence au commandant Ivan Juric.

  5   Même aujourd'hui, je ne sais toujours pas quel était son rôle véritable."

  6   Est-ce exact ?

  7   R.  C'est exact.

  8   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je vais passer à autre chose, Monsieur

  9   le Président.

 10   M. MISETIC : [interprétation] Pour qu'il n'y ait pas d'autre polémique plus

 11   tard lorsqu'on lira le compte rendu d'audience, je ne sais pas à quoi il

 12   répond oui. Elle lui a posé la question, elle lui a demandé si c'est ce qui

 13   était bien écrit, mais peut-être qu'il répond oui à cela.

 14   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 15   Q.  Lorsque vous dites c'est exact, est-ce que vous voulez dire que vous

 16   répondez par l'affirmative à ce qui était écrit dans le paragraphe, c'est à

 17   propos de cela que vous dites oui, ou est-ce que vous m'indiquez, lorsque

 18   vous dites c'est exact, vous voulez dire qu'il est exact que vous ne savez

 19   pas quel était le rôle véritable du commandant Ivan Juric ?

 20   R.  Je faisais référence à ce qui est écrit dans le paragraphe 11. J'ai dit

 21   qu'il était exact que ces mots figurent dans le paragraphe.

 22   Q.  Et vous êtes d'accord avec cette déclaration qui est la vôtre

 23   d'ailleurs ?

 24   R.  J'ai fait cette déclaration dans un certain contexte, parce que je ne

 25   savais pas quel était le rôle du commandant Juric qui était le plus

 26   important, il avait un rôle sur le terrain et c'était bien entendu son rôle

 27   de commandant, et il avait également ce rôle de coordinateur, et je ne

 28   savais pas quel était le rôle le plus important.

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  1   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je vais passer à autre chose, Monsieur

  2   le Président.

  3   Q.  Vous nous avez indiqué que vous receviez vos ordres du colonel Budimir,

  4   et au paragraphe 35 de la déclaration de l'an 2008, et j'aimerais, Monsieur

  5   Dozlic, que vous preniez le paragraphe 35. Voilà ce que vous dites : "Tous

  6   mes ordres émanant du commandant du bataillon, le colonel Budimir,

  7   m'étaient donnés oralement. Je ne me souviens pas qu'il m'ait jamais

  8   informé du fait qu'un ordre avait été donné par le général Gotovina, et ce,

  9   afin de prévenir des crimes et délits ou de mener à bien des enquêtes. Je

 10   souhaiterais ajouter que le colonel Budimir avait suffisamment d'autorité

 11   et qu'il n'avait pas besoin d'utiliser le nom du général Gotovina pour que

 12   les choses soient faites."

 13   Lorsque le colonel Budimir vous donnait des ordres oralement, est-ce qu'il

 14   vous a jamais informé du fait qu'il donnait ces ordres en fonction des

 15   ordres qui avaient été donnés par le général Gotovina ?

 16   R.  Vous pourriez répéter la question, je vous prie.

 17   Q.  Vous nous dites que tous les ordres que vous receviez venaient du

 18   commandant du bataillon. Est-ce qu'il vous a jamais dit qui lui donnait ces

 19   ordres --

 20   M. MISETIC : [interprétation] Objection car vous avez dénaturé la teneur du

 21   paragraphe 35.

 22   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je m'excuse. Je vais relire ce passage.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie, oui.

 24   Mme MAHINDARATNE : [interprétation]

 25   Q.  Monsieur Dozlic, vous dites : "Tous mes ordres provenaient de mon

 26   commandant de bataillon, le colonel Budimir, qui me donnait ces ordres par

 27   voie orale."

 28   J'aimerais savoir ce qui suit : lorsque le colonel Budimir vous donnait ces

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  1   ordres par voie orale, est-ce qu'il vous a jamais dit qu'il recevait ces

  2   ordres de telle et de telle personne de son commandant. Est-ce qu'il vous a

  3   jamais dit en vous donnant un ordre de qui lui avait reçu cet ordre ?

  4   R.  Non. Il ne me l'a pas dit. Il ne me disait pas s'il s'agissait d'ordres

  5   émanant du chef de l'administration ou du général Gotovina. Et d'ailleurs

  6   je ne lui ai jamais posé la question, je ne lui ai jamais demandé cette

  7   information, et je ne pensais pas d'ailleurs que cela était nécessaire, mon

  8   commandant de bataillon me confiait une certaine mission, c'est tout.

  9   Q.  Avez-vous jamais vu des ordres écrits donnés par M. Gotovina à M.

 10   Budimir ?

 11   R.  Non, je n'en ai jamais vu.

 12   Q.  Vous avez vu ici dans ce prétoire de nombreux documents, de nombreux

 13   ordres émanant du général Lausic. Avez-vous vu à l'époque des ordres écrits

 14   émis par le général Lausic à l'intention du colonel Budimir ?

 15   R.  Vous voulez parler de la durée du procès ou vous parlez de mon travail

 16   à Knin ?

 17   Q.  Non, non, lorsque vous vous trouviez à Knin dans le cadre de cette

 18   mission.

 19   R.  Non, non. Je n'ai jamais vu un seul ordre émis par le général Gotovina,

 20   ou plutôt, par le général Lausic à l'intention du commandant du bataillon,

 21   je n'ai jamais vu cela pendant que je me trouvais dans la ville de Knin.

 22   Q.  Avez-vous jamais refusé un ordre ou une demande ou une invitation,

 23   j'utilise toute la gamme des mots, avez-vous jamais refusé cela, ordre qui

 24   vous aurait été donné par le général Cermak ?

 25   R.  Est-ce que vous pourriez préciser votre question ?

 26   Q.  Pendant l'opération Tempête et après l'opération Tempête, lorsque vous

 27   vous trouviez à Knin, est-ce que vous avez jamais --

 28   M. CAYLEY : [interprétation] Objection, car c'est une question qui est

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  1   beaucoup trop générique. Il faut être beaucoup plus précis que cela. De

  2   quelle invitation s'agit-il ? Nous ne pouvons pas parler de généralités de

  3   la sorte. Me Kay a abordé ces choses-là hier. Soyons un peu plus précis et

  4   mentionnons une invitation précise.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Cayley, je m'interrogeais de la

  6   même façon que vous. Apparemment, le témoin n'a pas compris la question. Je

  7   vais me permettre de lui poser cette question.

  8   Monsieur, hier, de nombreuses questions vous ont été posées et il vous a

  9   été demandé comment vous envisagiez votre fonction par rapport au général

 10   Cermak. Des ordres vous ont été montrés, il s'agissait d'ordres signés par

 11   le général Cermak, et vous avez fini par expliquer, au vu du paragraphe 37

 12   de votre déclaration de l'année 2004, que vous pensiez que vous n'étiez pas

 13   obligé d'obéir à tous les ordres. Vous avez indiqué que vous les

 14   considériez comme des invitations. Vous avez corrigé votre déclaration là

 15   où il est indiqué il m'a invité à me rendre là-bas, donc vous nous avez

 16   fourni quand même un certain nombre de détails à ce sujet.

 17   Est-ce que vous avez jamais pris connaissance d'une invitation ou d'un

 18   ordre, ou je ne sais pas comment vous appellerez cela, avez-vous jamais eu

 19   connaissance d'une invitation qui vous a été faite et que vous avez à

 20   dessein et de façon délibérée décidé de ne pas suivre ou de ne pas

 21   accepter. Donc je pense aux réunions que vous avez eues avec M. Cermak,

 22   est-ce que vous vous souvenez d'un cas, par exemple, où il vous aurait

 23   demandé ou suggéré ou il vous aurait donné l'ordre de faire telle et telle

 24   chose, mais vous n'auriez pas obtempéré pour telle et telle raison ?

 25   Est-ce que vous vous souvenez de ce genre de cas ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, pour autant que je m'en

 27   souvienne, il y a eu une mission, c'était le général Cermak qui était à

 28   l'origine de cela, et il m'avait été suggéré dans le cadre de cette mission

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  1   d'assurer la sécurité d'un endroit, d'un site. Je ne me souviens plus du

  2   nom de ce site. Ce que je sais, pour autant que mes souvenirs soient

  3   exacts, c'est qu'à l'époque j'ai dit au général Cermak que je ne pouvais

  4   pas effectuer cette mission parce que je n'avais pas suffisamment d'hommes

  5   pour pouvoir effectuer cette mission, et j'avais présenté une suggestion,

  6   j'avais dit que dans la mesure du possible, c'est une mission qu'il aurait

  7   fallu confier à la police civile pour qu'elle l'effectue.

  8   Je ne peux pas vous dire combien d'autres cas semblables se sont présentés.

  9   Ce que je sais, c'est que ce genre de situation s'est produit.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous nous dites que vous vous ne vous

 11   souvenez pas du site en question.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agissait d'un immeuble civil. Je ne sais

 13   plus, il s'agissait peut-être d'une usine ou d'un bureau de poste, ou

 14   quelque chose de ce goût-là, mais je ne me souviens pas exactement de quel

 15   type d'immeuble il s'agissait.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dois-je comprendre que vous avez estimé

 17   qu'il était impossible de faire ce que l'on vous avait demandé de faire ?

 18   Est-ce que c'est bien ainsi que je dois comprendre votre réponse ? Vous lui

 19   avez indiqué quelle était la situation à ce moment-là ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit : "Ce genre de cas s'est

 22   présenté." Pourriez-vous être un peu plus précis. Combien de cas, si vous

 23   pouvez être un peu plus précis, parce que vous savez que cela s'est passé.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je ne m'en souviens pas, Monsieur le

 25   Président. Lorsque vous m'avez posé la question, je me suis souvenu de ce

 26   cas d'espèce pour ce qui est de savoir s'il y a eu d'autres situations où

 27   le général Cermak m'a demandé d'exécuter certaines choses que je n'aurais

 28   pas faites.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Mahindaratne, pouvez-vous

  2   poursuivre.

  3   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Je dirai aux fins du compte rendu

  4   d'audience que l'incident auquel il a fait référence figure au paragraphe

  5   37 de sa déclaration de l'année 2004, P875.

  6   Q.  J'ai une toute dernière question à vous poser, Monsieur Dzolic. Nous

  7   avons entendu certains moyens de preuve à propos des missions qui étaient

  8   exécutées au poste de contrôle. Nous en avons parlé hier et même

  9   aujourd'hui, et Me Misetic vous a montré certains documents.

 10   Hier Me Kay vous a montré vos ordres quotidiens, c'est par ces ordres

 11   que vous envoyiez des patrouilles de la police militaire et que des postes

 12   de contrôle étaient érigés ou vous envoyiez des personnes pour assurer la

 13   relève à ces postes de contrôle. Quelle était la mission principale des

 14   patrouilles de la police militaire, qu'est-ce qu'elles étaient censées

 15   faire lorsqu'elles patrouillaient la zone en question ?

 16   R.  Pour autant que je m'en souvienne, dans la ville de Knin, voilà quelles

 17   étaient les missions des patrouilles : elles devaient se rendre auprès des

 18   postes de contrôle afin de vérifier si tout fonctionnait bien; elles

 19   devaient également superviser la situation en ville; et en fonction de

 20   leurs pouvoirs, elles devaient prendre des mesures lorsqu'il y avait, par

 21   exemple, infraction à la discipline ou des délits qui étaient commis. Et il

 22   faut également savoir que les patrouilles de la police militaire pouvaient

 23   être envoyées par l'officier de permanence vers un certain lieu si

 24   l'officier de permanence en question avait des informations suivant

 25   lesquelles il y avait quelque chose qui se passait à cet endroit-là.

 26   Q.  Est-ce que vous pourriez également nous dire quelle était la mission du

 27   poste de contrôle ?

 28   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Ce sera d'ailleurs ma dernière

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  1   question.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans la mesure où mes souvenirs sont exacts,

  3   je dirais que les missions des hommes de ma compagnie qui se trouvaient au

  4   poste de contrôle étaient les missions qui étaient stipulées par les règles

  5   de service de la police militaire, à savoir il fallait qu'ils supervisent

  6   et surveillent les entrées et les sorties de la ville de Knin. En d'autres

  7   termes, il s'agissait de contrôler la circulation. Il fallait également

  8   qu'ils prennent des mesures conformément aux pouvoirs qui leur étaient

  9   conférés.

 10   Q.  Est-ce que vous pourriez être un peu plus précis ? Qu'entendez-vous par

 11   cette dernière phrase, vous avez dit qu'il fallait qu'ils "prennent des

 12   mesures conformément aux pouvoirs qui leur étaient conférés".

 13   Quels étaient ces pouvoirs et quelles mesures pouvaient-ils prendre

 14   surtout ?

 15   R.  Si, par exemple, au barrage du poste de contrôle ils arrêtaient un

 16   véhicule et qu'ils se rendaient compte que ce véhicule était utilisé pour

 17   transporter des objets ou du matériel dont on pouvait supposer qu'il avait

 18   été volé, la personne devait être détenue au barrage du poste de contrôle

 19   jusqu'à l'arrivée de la patrouille de la police militaire, à qui alors on

 20   remettait le suspect en question, et si un mandat d'arrestation avait été

 21   délivré pour une personne, par exemple, ou si du matériel était trouvé au

 22   poste de contrôle, ils étaient autorisés à confisquer le véhicule en

 23   question ou à confisquer l'objet ou le matériel qui était recherché.

 24   J'espère que j'ai maintenant précisé ma réponse.

 25   Q.  Oui, tout à fait, Monsieur Dzolic. Je vous remercie d'avoir répondu à

 26   mes questions. Je n'ai plus de questions à poser.

 27   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Monsieur le Président, je

 28   m'excuse car j'ai dépassé le temps que j'avais estimé.

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  1   [La Chambre de première instance se concerte]

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mme le Juge Gwaunza souhaiterait vous

  3   poser quelques questions.

  4   Questions de la Cour : 

  5   Mme LE JUGE GWAUNZA : [interprétation] Oui, Monsieur Dzolic.

  6   J'aimerais vous demander de bien vouloir consulter votre déclaration de

  7   l'année 2004, c'est le paragraphe 9 qui m'intéresse plus particulièrement.

  8   Dans ce paragraphe, ce sont vos propos, il est indiqué : "Si un policier

  9   militaire voyait qu'un crime avait été commis par un civil, il était alors

 10   tenu de contacter la police civile, et il était tenu de livrer le civil en

 11   question à la police civile."

 12   J'aimerais vous poser la question suivante : au cas où la police civile

 13   voyait des soldats commettre des crimes, savez-vous ce qui se passait dans

 14   ce genre de situation ?

 15   R.  Pour autant que je m'en souvienne, et cela s'inscrit également dans ce

 16   que je comprends à propos du statut d'une personne autorisée et habilitée,

 17   il faut savoir qu'un policier civil doit agir en prenant en considération

 18   les pouvoirs dont il dispose, ce qui fait qu'il y a toute une procédure à

 19   suivre, vous avez la police militaire qui doit être informée, ensuite

 20   l'auteur du crime en question doit être livré aux militaires, s'il s'agit,

 21   bien entendu, d'un militaire croate.

 22   Mme LE JUGE GWAUNZA : [interprétation] Je vous remercie. J'aimerais vous

 23   poser une autre question à propos du paragraphe 23 de la même déclaration.

 24   Non, je m'excuse, il s'agit du paragraphe 24 de la même déclaration.

 25   Dans ce paragraphe, voilà ce que vous mentionnez : "Nous devions monter la

 26   garde auprès du cimetière afin de protéger les personnes qui inhumaient les

 27   corps."

 28   Pourquoi est-ce qu'il était écrit que ceux qui montaient la garde

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  1   auprès du cimetière devaient monter la garde auprès des corps ?

  2   R.  Je pense que j'ai déjà répondu à une question semblable qui m'avait été

  3   posée par le Procureur. Mais je pense qu'il va falloir que je réitère mes

  4   propos.

  5   Voilà ce qui s'est passé, il s'agissait d'une situation bien précise,

  6   en d'autres termes, nous avons reçu des renseignements indiquant qu'une

  7   personne inconnue avait tiré dans la direction de soldats qui étaient en

  8   train de procéder à des exhumations dans ce cimetière. C'est la raison pour

  9   laquelle il a été décidé d'envisager une sécurité à cet endroit-là pour que

 10   les personnes qui faisaient ce travail puissent continuer, sans autres

 11   obstacles, à faire leur travail.

 12   Mme LE JUGE GWAUNZA : [interprétation] Je vous remercie. J'aimerais vous

 13   poser une toute dernière question qui porte cette fois-ci sur le paragraphe

 14   22 de votre déclaration de l'année 2008. Au paragraphe 22, vous apportez

 15   une précision qui porte sur le paragraphe 61 de votre déclaration de

 16   l'année 2004.

 17   Au milieu de ce paragraphe voilà ce qui est indiqué : "Après avoir

 18   arrêté les véhicules, l'autorité du commandant de la brigade a été obtenue

 19   rétrospectivement pour permettre le transport de ces biens."

 20   Je pense que vous faites référence à ce qui s'était passé aux postes de

 21   contrôle.

 22   J'aimerais savoir, que se passait-il au cas où l'on refusait

 23   l'autorité du commandant de la brigade, que se passait-il alors ?

 24   R.  Monsieur le Président, dans une situation de ce genre, l'action que

 25   j'ai déjà expliquée lorsque j'ai parlé de ce que faisaient les responsables

 26   des postes de contrôle aurait été entreprise.

 27   La personne concernée resterait sur les lieux, on appellerait une

 28   patrouille, après quoi la personne concernée et le véhicule partiraient

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  1   pour l'unité de police militaire. Les équipements seraient confisqués. La

  2   personne serait remise entre les mains des policiers de la police

  3   criminelle, et d'autres actions seraient prises dans le respect des

  4   procédures légales.

  5   Mme LE JUGE GWAUNZA : [interprétation] Je vous remercie. J'ai dit que

  6   c'était ma dernière question, j'en aurai tout de même encore une à poser,

  7   mais celle-ci sera effectivement la dernière.

  8   Dans votre déclaration de 2008 au paragraphe 23, vers la fin du paragraphe,

  9   vous dites : "Selon la gravité du délit et la valeur des biens volés,

 10   l'auteur des actes pouvait être adressé au procureur militaire à moins que

 11   le problème ne soit traité en tant que petite délinquance."

 12   J'aimerais savoir ce qui pouvait être considéré comme petite délinquance.

 13   R.  Madame le Juge, si je me souviens bien, un acte de petite délinquance

 14   ou simple infraction existait dès lors que la valeur du bien volé

 15   n'excédait pas une somme fixée par la loi.

 16   Pour autant que je le sache à l'époque, la somme limite était de 1

 17   000 kunas. Je ne saurais vous dire quel était le taux de change à l'époque.

 18   Mais en tout cas, si le bien volé n'était pas évalué à plus de 1 000 kunas,

 19   l'acte était considéré comme une simple infraction. Au-delà de cette

 20   valeur, il s'agissait d'un délit et la responsabilité pénale de l'auteur

 21   était impliquée.

 22   C'est ce que je voulais dire lorsque j'ai parlé de différence.

 23   Mme LE JUGE GWAUNZA : [interprétation] Je vous remercie pour ces réponses.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je pourrais poser une

 25   question supplémentaire.

 26   A l'époque, combien y avait-il de marks allemands dans une kuna ?

 27   R.  Monsieur le Président, vraiment je ne saurais vous le dire avec

 28   précision aujourd'hui. Est-ce que c'était 150, je ne sais pas très bien. Je

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  1   ne me souviens pas exactement. Je ne me souviens pas exactement de la

  2   valeur de cette somme en deutsche marks à l'époque.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

  4   M. le Juge Kinis a une ou plusieurs questions à vous poser.

  5   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Je vous renvoie à votre déclaration de

  6   2004, paragraphes 61, 62, 63, qui a déjà fait l'objet de certaines

  7   questions posées par Mme le Juge Gwaunza. Mais pour ma part, j'aimerais y

  8   revenir de façon un peu différente.

  9   Que savez-vous d'ordres éventuels par lesquels des commandants de brigade

 10   pourraient autoriser des personnes à commettre des actes illégaux eu égard

 11   à des biens matériels, et pourriez-vous justifier d'où viennent vos

 12   connaissances à ce sujet ?

 13   Est-ce que vous auriez reçu des consignes écrites, comment est-ce que

 14   vous le saviez ?

 15   R.  Monsieur le Juge, je pense que lorsque j'ai fait la déclaration que

 16   j'ai faite devant les représentants du bureau du Procureur, j'ai abordé ce

 17   point. J'ai dit en effet qu'il est advenu un ou deux cas où nous avons

 18   intercepté une colonne de l'armée croate au moment où se produisaient des

 19   relèves d'équipes sur le terrain.

 20   Nous avons remarqué dans ces colonnes un certain nombre d'objets dont il

 21   était permis de penser qu'ils avaient été volés, qu'ils étaient le produit

 22   d'un vol. A ce moment-là, j'ai pris contact avec mes supérieurs, car à

 23   l'intérieur des véhicules arrêtés, en tout cas c'est ce qu'a prétendu le

 24   chef de la colonne, les personnes à bord de ces véhicules auraient été

 25   autorisées à emporter ces objets avec elles.

 26   Alors j'ai cherché conseil pour savoir ce qu'il convenait de faire étant

 27   donné le problème. On m'a dit que si le commandant de la brigade déclarait

 28   par écrit qu'il n'y avait pas dans ces véhicules la moindre propriété de

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  1   l'armée ou le moindre objet susceptible de répondre à des besoins de

  2   l'armée, la colonne devait être autorisée à franchir le poste de contrôle.

  3   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Quel est le supérieur qui vous a

  4   transmis directement cet ordre ?

  5   R.  Je ne me souviens plus si j'ai demandé l'agrément ou des conseils du

  6   colonel Budimir ou du commandant Juric. Je ne sais pas si contact a été

  7   pris avec le commandant de l'unité concernée et si c'est lui qui a décidé

  8   ou défini ce qu'il convenait de faire.

  9   A l'heure actuelle, je ne saurais vous le dire.

 10   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Et je peux en arriver à ma question

 11   suivante : dans la première annexe qui concerne en particulier les routes

 12   régissant les déplacements dans la zone de responsabilité de la police

 13   militaire de la République de Croatie, article 10, en particulier de ce

 14   texte.

 15   Je rappelle que vous êtes policier, vous êtes quelqu'un qui a

 16   certaines connaissances juridiques. Je ne sais pas si vous êtes

 17   particulièrement versé en matière de différence entre le droit public et le

 18   droit privé, mais ma question est la suivante : en terme de respect de la

 19   loi et de l'ordre public, est-ce que, d'ailleurs, au fait, vous savez,

 20   n'est-ce pas, que vous avez obligation de respecter la loi ?

 21   R.  Oui, je dois respecter la loi.

 22   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Vous devez respecter la loi.

 23   Pouvez-vous, je vous prie, me dire quelles sont les consignes que vous

 24   receviez de votre supérieur que vous reconnaissiez comme l'expression d'une

 25   loi à l'époque, donc d'une loi que la police avait devoir de respecter ?

 26   R.  La police était tenue de respecter la législation en vigueur.

 27   Toutefois, avec votre autorisation, Monsieur le Juge, pourrais-je expliquer

 28   de quoi il retourne exactement dans ce cas particulier, lorsque ces

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  1   agréments ont été accordés.

  2   Moi-même, et probablement également mes supérieurs, pensions que si un

  3   commandant de brigade avait signé un texte autorisant le passage de tels

  4   matériels, il était probable que ces matériels étaient exclus des biens

  5   appartenant à l'armée ou utilisables par l'armée dans la ville de Knin.

  6   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Mais pourriez-vous, je vous prie, me

  7   donner l'intitulé ou la dénomination d'une loi qui régirait votre activité.

  8   Car je n'ai pas en tête le nom d'un seul pays où un commandant pourrait, en

  9   émettant ordre, remplacer une loi. Vous êtes policier, vous savez très bien

 10   ce qu'est la loi.

 11   R.  Je comprends la différence entre la loi et un ordre.

 12   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] C'est ce que je voulais vous demander

 13   dans mes questions.

 14   R.  Pourriez-vous répéter votre question ?

 15   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Pourriez-vous me donner la dénomination

 16   ou le titre ou l'intitulé d'une loi régissant vos activités

 17   professionnelles à l'époque.

 18   R.  Je ne saurais vous donner la dénomination exacte de la loi.

 19   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Pourquoi ?

 20   R.  Je ne me souviens pas de cette dénomination. Je ne sais pas si sa

 21   dénomination est loi de procédure pénale ou code pénal.

 22   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Le code pénal comporte des articles de

 23   droit pénal qui pourraient être remplacés par des commandants d'armée, par

 24   d'autres dispositions venant de commandants d'une armée.

 25   R.  Je ne dis pas que ces articles de loi ont été suspendus par un ordre

 26   émanant de mon commandant. En l'espèce, je ne suis pas en train de dire

 27   qu'il y a eu la moindre violation de la loi.

 28   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Mais je ne comprends pas. Est-ce qu'il

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  1   y a eu ou est-ce qu'il n'y a pas eu violation de la loi d'après ce que vous

  2   en pensiez à l'époque ?

  3   R.  A l'époque, d'après moi, il n'y a pas eu violation de la loi.

  4   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] D'accord.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai quelques questions également à vous

  6   poser.

  7   Vous venez d'expliquer, en répondant à une question de Mme le Juge Gwaunza,

  8   que vous avez assuré le 6 août la sécurité du cimetière parce que des

  9   soldats y pratiquaient une exhumation et on avait tiré sur ces soldats. Je

 10   ne sais pas s'il y a un problème d'interprétation, mais je voudrais être

 11   sûr d'avoir bien compris. En tout cas, c'est ce qui est consigné au compte

 12   rendu d'audience en face de moi en anglais.

 13   R.  Monsieur le Président, je n'ai pas dit que la police militaire assurait

 14   la sécurité des soldats à ce moment-là. Ce n'était pas la police militaire,

 15   c'étaient des membres de la protection civile qui avaient été chargés

 16   d'incinérer des cadavres.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Donc ils étaient en train

 18   d'incinérer des cadavres et ont essuyé des tirs.

 19   Mais avez-vous envoyé une patrouille au cimetière ou est-ce que l'on

 20   pouvait s'attendre à ce que vous y envoyiez une petite équipe ? Parce que

 21   je comprends que vous puissiez assurer la sécurité du cimetière pendant

 22   plus d'un jour. Mais vous avez dit "jusqu'à ce que la police civile prenne

 23   le relais."

 24   R.  Je ne me souviens pas avoir dit que la police civile avait repris le

 25   relais dans le cadre de ce travail en particulier. Maintenant, pendant

 26   combien de jours nous avons assuré cette sécurité, je ne saurais vous le

 27   dire avec certitude. Je pense que cela a duré un jour, deux jours, peut-

 28   être trois.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais qu'est-ce qui fait que cet

  2   incident vous a été relaté, le fait que quelqu'un ait tiré sur des hommes

  3   en train de procéder à des incinérations au cimetière ?

  4   R.  Ce sont les responsables de ce travail qui nous ont transmis

  5   l'information en nous disant qu'ils avaient essuyé des tirs; et c'est en

  6   fonction de ce renseignement que nous avons pris des mesures de sécurité.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Est-ce que vous avez un souvenir

  8   très net de ce qui s'est passé le matin du 6 où l'après-midi ou le soir de

  9   la journée du 6 ?

 10   R.  Monsieur le Président, je ne me souviens pas exactement du moment où

 11   cela s'est passé.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous intégré cette mission, je veux

 13   parler du fait que vous avez assuré la sécurité au cimetière, dans vos

 14   ordres journaliers du 7, du 8 ou du 9 ?

 15   R.  Je ne m'en souviens pas. Mais il est possible que ceci ait figuré par

 16   écrit dans un ordre écrit. Si cela figure par écrit dans un ordre écrit, il

 17   est probable que j'aie assigné une personne à cette tâche particulière pour

 18   ce jour-là.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous avez assigné une personne ou

 20   plusieurs personnes ?

 21   R.  Je ne saurais vous dire exactement si j'ai assigné une personne ou

 22   peut-être deux ou trois, mais en tout cas il est certain qu'il n'y en a pas

 23   eu davantage.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous vérifier dans vos rapports

 25   journaliers pour voir s'il est fait mention de cette mission ? Je parle de

 26   la pièce D787.

 27   Monsieur le Greffier, peut-être pourrait-on donner à voir au témoin la page

 28   4 d'un total de 79 pages que comporte ce document, page 4 et suivantes de

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  1   la version originale. Peut-être le cas échéant, d'imprimer ce texte pour le

  2   témoin si c'est possible.

  3   R.  Monsieur le Président, je regarde ce que j'ai en face de moi à l'écran

  4   et je ne vois pas mention de cela. Ce que je vois c'est une mention de

  5   poste de contrôle.

  6   J'aimerais que l'on fasse défiler le texte.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, nous voyons là un texte concernant

  8   d'autres journées.

  9   Peut-être trouverons-nous cela dans les quatre ou cinq pages suivantes.

 10   R.  Il n'y a pas eu défilement du texte sur mon écran.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. On va vous fournir un exemplaire

 12   papier.

 13   Pourriez-vous trouver mention de cette mission particulière dans le texte

 14   écrit ?

 15   R.  Monsieur le Président, s'agissant de la journée du 6, je ne vois aucune

 16   mention de cette mission.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous trouvez une mention de

 18   cette mission pour les journées des 7 ou 8 ?

 19   Monsieur le Greffier, les journées des 7 et 8 vont jusqu'à la page 10 de ce

 20   document qui en comporte un total de 79.

 21   R.  Monsieur le Président, je ne vois aucune mention écrite de cette

 22   mission dans les termes très précis qui la définissaient. Je veux parler

 23   d'assurer la sécurité du cimetière. Les mots "assurer la sécurité du

 24   cimetière" ne figurent pas dans cette partie du texte.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie. J'aimerais maintenant

 26   vous renvoyer au paragraphe 32 de votre déclaration de 2004.

 27   Je vous invite à lire ce texte. On voit des chiffres dans ce paragraphe.

 28   Puisqu'on trouve d'abord mention du fait que des policiers militaires

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  1   supplémentaires sont arrivés, et vous citez le chiffre de 70 à 80 hommes.

  2   Un peu plus loin dans le paragraphe nous lisons: "Ceci a amené nos

  3   effectifs de la police militaire à un total de 140 à 150 hommes très

  4   expérimentés à Knin."

  5   Est-ce que ces 140 à 150 hommes étaient tous sous votre commandement ou

  6   est-ce que ces effectifs sont ceux de la compagnie conjointe qui aurait eu

  7   au total 140 à 150 hommes ? Est-ce que j'ai mal interprété votre

  8   déclaration écrite ?

  9   R.  Monsieur le Président, si l'on intègre les forces avec lesquelles nous

 10   sommes entrés dans Knin, auxquelles on ajoute les forces supplémentaires

 11   qui sont arrivées, le total constitue les effectifs de la compagnie

 12   conjointe ou combinée.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ces effectifs étaient présents le 6 et

 14   les jours suivants, jusqu'à votre départ le 12, n'est-ce pas ?

 15   R.  C'est exact. Ils sont restés sur place après mon départ.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Maintenant, je me penche sur

 17   l'ordre journalier, je vois qu'un certain nombre de missions sont

 18   attribuées à un certain nombre de personnes, nombre qui est bien inférieur

 19   à 140 ou 150. Par exemple, pour la journée du 9 août, je trouve mention de

 20   missions assignées à 61 personnes au total, en tout cas, à en juger par les

 21   personnes dont les noms sont consignés par écrit. Peut-être n'avez-vous pas

 22   sous les yeux les éléments concernant la journée du 9, mais pour ma part,

 23   j'ai compté le nombre de noms figurant dans les listes les plus courtes.

 24   Je vous prierais de vous référer à la journée du 9, et je demande

 25   l'affichage des éléments concernant cette journée sur les écrans.

 26   R.  On peut afficher tout cela sur les écrans, mais je ne crois pas qu'il y

 27   ait de différence entre les ordres des jours précédents et ceux de cette

 28   journée-ci.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais on voit des chiffres qui

  2   n'atteignent pas un total de 140 à 150, mais plutôt un total d'environ 70,

  3   ou 80, ou 60.

  4   R.  Monsieur le Président, s'agissant du poste de contrôle de Drnis que je

  5   vois mentionné dans ce document, trois équipes de quatre hommes, cela fait

  6   12 au total. 34, 46, 48, 50, 60.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous regardez les éléments relatifs à la

  8   journée du 9 ? Quelle est la journée dont vous relisez les éléments ?

  9   R.  Je lis le tableau relatif à la journée du 7 août.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les chiffres ne sont pas les mêmes pour

 11   toutes les journées, j'en conviens. Je n'avais pas au départ regardé les

 12   éléments relatifs à la journée du 7. Mais si vous dites que le total est de

 13   140 à 150…

 14   Il est possible que j'aie quelque difficulté à me retrouver dans ce

 15   document original. Vous, vous êtes en train de lire les éléments du 7. Moi,

 16   je lisais les éléments du 9, en réalité, mais peut-être que vous n'avez pas

 17   les chiffres du 9 sous les yeux.

 18   Je m'explique : est-ce que toutes les missions assignées aux hommes étaient

 19   consignées par écrit dans ces listes ou est-ce qu'il y avait des missions

 20   qui étaient assignées à certains hommes et dont il n'est pas fait mention

 21   dans ces listes ?

 22   R.  Monsieur le Président, les hommes qui n'ont pas leurs noms consignés

 23   par écrit dans ces listes étaient normalement mis à disposition, c'est-à-

 24   dire en repos. Donc c'est à partir des noms des hommes qui figurent dans

 25   les listes que nous avons ici qu'ont été tirés les noms des hommes affectés

 26   à la sécurité du cimetière, et parmi les noms de ceux qui sont écrits ici,

 27   on pouvait affecter à ces hommes des tâches de distribution de courrier, de

 28   transport d'un objet ou quelque tâche que ce soit.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que les hommes étaient au repos

  2   ou est-ce qu'ils étaient distribués sur diverses missions ? Est-ce ce que

  3   vous dites dans votre déposition : certains parmi mes hommes ne

  4   bénéficiaient pas simplement d'un moment de repos dans la journée, mais

  5   n'étaient pas affectés à une tâche quelconque ce jour-là. Est-ce qu'il y en

  6   aurait eu qui aurait eu un jour de permission ?

  7   R.  Ma déclaration consiste à dire que les hommes, dont les noms ne

  8   figurent pas sur la liste que nous avons ici, n'étaient pas activement

  9   engagés mais restaient à disposition néanmoins, donc ils étaient sur place

 10   au sein de leur unité, et il y a aussi certains hommes qui pouvaient être

 11   affectés à d'autres tâches.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que cela signifie que cet ordre

 13   journalier ne reprend pas l'ensemble des activités menées à bien par la

 14   compagnie conjointe ?

 15   R.  Je ne saurais l'affirmer avec une quelconque certitude. Les noms des

 16   personnes assignées à une mission devraient figurer ici sur cette liste.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Passons à un autre sujet, Monsieur

 18   Dzolic.

 19   Rapidement, je crois que votre déposition a consisté à dire que vous aviez

 20   escorté des civils jusqu'à l'école de Knin afin d'assurer leur protection.

 21   R.  C'est exact. C'est exact.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et vous avez dit - quels noms pourrais-

 23   je donner à ces personnes lorsque vous avez parlé de criminels ou de

 24   délinquants - en tout cas, c'est que j'ai en mémoire, quelle pouvait être

 25   la menace provenant de telles personnes.

 26   Quels criminels aviez-vous à l'esprit ? Vous souhaitiez protéger ces

 27   civils contre quoi ? Auriez-vous éventuellement reçu des renseignements

 28   quant à des criminels qui circulaient dans la région et menaçaient des

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  1   civils ?

  2   R.  Monsieur le Président, je n'ai pas reçu de tels renseignements. J'avais

  3   un ordre dans lequel il était écrit que ces personnes devaient être

  4   emmenées jusqu'au centre de regroupement. Il est probable que le commandant

  5   Lausic, lorsqu'il a donné de telles consignes, l'a fait parce qu'il avait

  6   une expérience de certains actes commis dans la période antérieure. Je

  7   pense principalement à l'opération Eclair. C'était à titre préventif, de

  8   façon à ce que quelque chose qui s'était déjà passé ne se reproduise pas,

  9   que ces personnes ont été regroupées dans des centres de regroupement.

 10   D'ailleurs, on ne les a pas regroupés là uniquement pour en prendre soin,

 11   mais pour enregistrer leurs éléments d'identité, et si je me souviens bien,

 12   pour leur délivrer une carte d'identité officielle de la République de

 13   Croatie, ce genre de choses.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je viens d'entendre de nombreuses

 15   explications de votre bouche. Ces personnes ont-elles été emmenées dans ces

 16   lieux pour être protégées contre des délinquants ou criminels compte tenu

 17   de certains événements vécus précédemment, ou ont-elles été emmenées dans

 18   ces lieux pour se voir délivrer des papiers d'identité ? Vous avez dit :

 19   peut-être l'ordre reçu par moi se fondait-il sur -- mais est-ce que vous

 20   savez sur quoi exactement il se fondait ou est-ce que vous êtes en train de

 21   proférer des conjectures ?

 22   R.  Monsieur le Président, je ne sais pas sur quoi s'appuyait l'ordre en

 23   question. Il est probable -- apparemment je me livrais à des conjectures

 24   lorsque j'ai dit que je pensais que cet ordre pouvait reposer sur la

 25   volonté de leur délivrer des papiers d'identité.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Est-ce que vous avez été informé

 27   que des papiers d'identité auraient été délivrés aux personnes qui se

 28   trouvaient dans l'enceinte de l'école ? Est-ce que cette action a été

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  1   organisée dans ce lieu ? Est-ce que vous en avez eu connaissance ?

  2   R.  Je n'ai aucune connaissance à ce sujet. Je ne saurais rien affirmer sur

  3   ce point. Simplement de mémoire, j'ai dit que je me souvenais que de tels

  4   papiers auraient pu être délivrés.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je vais maintenant aborder un autre

  6   sujet qui sera sans doute le dernier que j'aborderai dans mes questions.

  7   Des questions vous ont été posées par rapport à votre déclaration de 2004

  8   où vous parlez de butin de guerre. Au paragraphe 61, vous parlez du fait

  9   que des soldats s'appropriaient des appareils électriques tels que

 10   fourneaux électriques, télévisions, réfrigérateurs contenus dans les

 11   camions qui se présentaient au poste de contrôle.

 12   Au paragraphe 63 de votre déclaration, vous parlez de butin de guerre ayant

 13   appartenu à l'armée de l'ennemi. J'aimerais obtenir quelques précisions de

 14   votre part au sujet de ce que vous pensez de tout cela. Considérez-vous que

 15   des fourneaux électriques, des téléviseurs, des réfrigérateurs sont des

 16   objets qu'il est légal de transporter lorsqu'on se présente à un poste de

 17   contrôle ?

 18   R.  Monsieur le Président, je ne considérais pas qu'il était légal de faire

 19   franchir de tels objets à un poste de contrôle, mais étant donné qu'il ne

 20   se trouvait à bord de ces camions qu'un ou deux téléviseurs, cela ne m'a

 21   pas conduit à penser qu'ils auraient été volés à des civils. Ces

 22   téléviseurs auraient pu être des objets appartenant à l'armée. C'est de ce

 23   point de vue que j'ai apprécié la situation. Dès lors que l'on pouvait

 24   penser à des objets appartenant à une armée, ils auraient pu appartenir à

 25   l'armée ennemie.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous jamais procédé à une enquête

 27   pour savoir si ces téléviseurs provenaient des installations appartenant à

 28   l'armée ?

Page 9135

  1   R.  Je ne me souviens pas qu'il y ait eu une telle enquête. Parce que si un

  2   commandant avait signé un document disant que ces équipements appartenaient

  3   à l'armée, je considérais que c'était tout à fait régulier.

  4   J'ai déjà dit que si un commandant remarquait que son soldat manquait à la

  5   discipline, dans ce cas-là il devait entreprendre certaines mesures

  6   conformément aux règlements relatifs à la discipline militaire.

  7   Si le commandant, de par sa signature, garantissait que c'était

  8   régulier, je considérais que c'était en règle, je considérais qu'il ne

  9   s'agissait pas de la commission d'une infraction.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais au paragraphe 61, vous avez dit :

 11   "En tant que policier, je n'étais pas d'accord avec cela."

 12   Et là, vous dites que ces autorités étaient signées -- en fait, qu'on

 13   accorde à ce que ces biens soient transportés. Vous avez dit : "En tant que

 14   policier, je n'étais pas d'accord avec tout cela, même si je concède qu'il

 15   valait mieux emporter ces biens plutôt que de les détruire ou de les

 16   laisser brûler, ce qui se produisait."

 17   J'essaie de comprendre maintenant votre déposition. D'une part, vous dites

 18   qu'il y avait des téléviseurs qui appartenaient à l'armée. J'imagine que la

 19   même chose vaut pour, par exemple, d'autres biens tels que des

 20   réfrigérateurs ou fours. Mais vous ne pensez pas que cela pouvait également

 21   faire partie du butin de guerre, que cela aurait pu appartenir à l'ennemi

 22   et que, par conséquent, les forces croates auraient pu le prendre

 23   légalement. Pourquoi n'avez-vous pas dit -- et qu'il valait mieux peut-être

 24   les emporter plutôt que de les laisser être détruits ou brûlés, parce qu'il

 25   me semble que cela ne correspond pas à votre définition du butin de guerre

 26   et comment il fallait traiter les biens emportés des installations

 27   militaires.

 28   R.  D'après mes souvenirs, Monsieur le Président, lorsque je disais que je

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  1   n'étais pas d'accord avec ces actes, je pense que cela avait trait à la

  2   question de savoir si, de manière générale, j'étais d'accord avec les actes

  3   de vol commis de la sorte.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Vous pensiez que c'était un vol.

  5   R.  Je considérais qu'il s'agissait d'un acte de vol si les équipements

  6   avaient appartenu aux civils. Et là, je ne savais pas que cela a été

  7   emporté des installations civiles, mais je pensais qu'il s'agissait

  8   d'équipement emporté des installations militaires.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une fois encore, pourquoi avez-vous dit

 10   que vous n'étiez pas d'accord avec le fait qu'un responsable l'avait

 11   approuvé par sa signature ? Parce que c'est justement ce à quoi on

 12   s'attendrait s'agissant des biens militaires. Je suis surpris que vous

 13   n'ayez pas dit, que vous ayez considéré cela comme un acte illégal.

 14   R.  Monsieur le Président, je suis d'accord que si les équipements étaient

 15   emportés des installations militaires, oui; mais je ne peux pas affirmer

 16   que les enquêteurs, lorsqu'ils m'ont posé cette question à laquelle j'ai

 17   dit que je n'étais pas d'accord, m'avaient demandé si j'étais en désaccord

 18   avec le fait qu'on emportait des biens appartenant à l'armée.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 20   Oui. Est-ce qu'il y a des questions supplémentaires pour le témoin, Madame

 21   Mahindaratne, sur la base des questions posées par la Chambre ?

 22   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Juste une question.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic.

 24   M. MISETIC : [interprétation] Plusieurs questions.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas-là, il vaut mieux permettre

 26   au Juge Kinis de poser la question avant la pause.

 27   Vous avez la parole.

 28   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Hier, lors du contre-interrogatoire, Me

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  1   Kay vous a présenté deux ordres émis par le général Cermak.

  2   Dans l'un de ces ordres, il était dit qu'il fallait procéder à l'inspection

  3   de tous les convois de l'ONURC, y compris les hélicoptères.

  4   Ma question est très simple. Avez-vous exécuté cet ordre ? Et si c'était le

  5   cas, quelles étaient les missions exécutées à cette fin ?

  6    R.  Monsieur le Président, je ne sais pas s'il était question des

  7   inspections ou de sécuriser les hélicoptères militaires. Parce que nous ne

  8   pouvions pas procéder à l'inspection de l'ONURC et nous ne l'avons jamais

  9   fait.

 10   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Malheureusement, je ne pourrais pas

 11   vous citer le numéro de la cote, mais --

 12   M. CAYLEY : [interprétation] Il s'agit de P512.

 13   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Merci. J'aimerais que cette pièce soit

 14   affichée à l'écran, s'il vous plaît.

 15   Au premier paragraphe, il est dit que les hélicoptères de l'ONURC doivent

 16   être inspectés avant tout vol, et l'inspection doit être menée à bien par

 17   la police militaire. C'est ça, ma première question.

 18   R.  Monsieur le Juge, nous ne procédions à aucun contrôle s'agissant des

 19   membres de l'ONURC, si ce n'est de fournir la sécurité lors des

 20   atterrissages et décollages. Je ne me souviens pas que nous ayons exécuté

 21   cet ordre.

 22   M. LE JUGE KINIS : [interprétation] Cela veut dire que vous n'avez pas obéi

 23   à cet ordre, vous, en tant que soldat ?

 24   R.  Oui, on pourrait le dire. Je ne me souviens pas que cet ordre ait été

 25   exécuté.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Encore une question avant la pause.

 27    Lorsque vous dites que vous assuriez la sécurité lors des décollages et

 28   atterrissages, est-ce qu'il y avait une équipe spéciale qui s'en chargeait

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  1   ou on vous appelait par téléphone et on vous disait, voilà, il y a un

  2   hélicoptère qui va décoller maintenant dans dix minutes. Comment cela se

  3   passait-il ?

  4   R.  Je ne m'en souviens pas, probablement qu'on nous annonçait qu'il y

  5   aurait un atterrissage ou un décollage et une patrouille devait être

  6   envoyée, un officier, un membre des forces se voyait confier la mission

  7   d'assurer la sécurité.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

  9   Nous allons reprendre à 13 heures 10.

 10   --- L'audience est suspendue à 12 heures 49.

 11   --- L'audience est reprise à 13 heures 16.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre a été informée que le nom des

 13   cellules c'est effectivement les cellules de détention, parce que

 14   s'agissant de M. Markac, on ne pouvait pas ouvrir la porte.

 15   Apparemment, Maître Cayley, il n'y a pas de problème à ce qu'on

 16   procède --

 17   M. CAYLEY : [interprétation] Me Mikulicic.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, pardon, Maître Mikulicic.

 19   M. MIKULICIC : [interprétation] Oui, nous n'avons pas d'objection.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. 

 21   Les parties auront l'occasion de poser des questions au témoin. Mais

 22   la Chambre de première instance n'a pas abordé de nouveaux sujets, c'est

 23   pourquoi je n'enjoins pas aux parties de commencer toute une nouvelle série

 24   de questions, mais uniquement de soulever les sujets abordées par la

 25   Chambre.

 26   Madame Mahindaratne, peut-être que vous devriez commencer tout

 27   d'abord, ensuite la Défense aura l'occasion de poser les questions.

 28   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Oui.

Page 9140

  1   Nouvel interrogatoire supplémentaire par Mme Mahindaratne : 

  2   Q.  [interprétation] Monsieur Dzolic, en répondant à une question de la

  3   Chambre portant sur des mesures prises pour protéger les civils, je parle

  4   de la situation où vous deviez emmener les civils à l'école de Knin, vous

  5   avez dit la chose suivante. En fait, vous vous êtes livré à des

  6   conjectures, et vous avez dit : "C'était probablement le commandant Lausic

  7   qui avait émis des directives sur la base de son expérience précédente et

  8   de ces actions précédentes."

  9   Ensuite vous avez dit : "Je parle notamment de l'opération Eclair."

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Mahindaratne, dans l'une des

 11   réponses, comme vous l'avez déjà expliqué, le témoin a dit qu'il s'agissait

 12   de conjectures. Faut-il maintenant qu'on examine le contexte de ces

 13   conjectures ou --

 14   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Non. Je voulais poser une question qui

 15   se rapporte à la question de suivi.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Le témoin a dit qu'il s'agissait

 17   d'une spéculation de savoir si cela était inspiré par les actions réalisées

 18   lors de l'opération Eclair. Nous n'encourageons pas d'aborder ce thème.

 19   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Dans ce cas-là, je n'ai plus de

 20   questions.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 22   Maître Misetic

 23   M. MISETIC : [interprétation]

 24   Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Misetic : 

 25   Q.  [interprétation] Monsieur Dzolic, en répondant à une question que je

 26   vous ai posée tout à l'heure, lorsque je vous ai demandé qui était présent

 27   à la réunion dont nous avons vu l'enregistrement vidéo, il a été dit qu'il

 28   s'agissait du ministre du conseil croate, et je pense que vous vouliez dire

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  1   qu'il s'agissait du ministre du Conseil de défense croate --

  2   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Il ne s'agit pas de questions qui

  3   proviennent --

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je suis d'accord qu'elles ne

  5   découlent pas des questions posées, et si Me Misetic avait suivi à la

  6   lettre mes instructions, il aurait demandé ma permission de poser cette

  7   question, mais il est tellement évident qu'il y a des choses qui ne sont

  8   pas consignées au compte rendu d'audience exactement, nous essayons tout

  9   simplement maintenant d'éviter les erreurs, et je suis d'accord avec vous

 10   que Me Misetic aurait dû demander l'autorisation, mais si j'étais à sa

 11   place, je ne l'aurais pas demandée parce que c'est tellement évident que

 12   personne ne pourrait se plaindre à cause de ça.

 13   Veuillez poursuivre, Maître Misetic.

 14   M. MISETIC : [interprétation] Excusez-moi, je voulais tout simplement qu'on

 15   précise qu'il ne s'agissait pas du ministre de la Défense croate mais

 16   plutôt de quelqu'un d'autre.

 17   Q.  En répondant aux questions posées par la Chambre -- en fait, je

 18   souhaite dire qu'en l'espèce nous avons des éléments de preuve qui

 19   indiquent que dans la ville de Knin, l'ARSK avait trois casernes

 20   militaires, la caserne du nord, la caserne de Senjak et la caserne du sud.

 21   Deux écoles servaient à cantonner les soldats de l'ARSK, et le QG de

 22   l'armée de l'ARSK se trouvait au poste de police, ainsi que le service des

 23   renseignements de la Republika Srpska Krajina, et par la suite, le vieil

 24   hôpital de Knin était utilisé pour héberger les officiers de l'ARSK.

 25   Ma question est la suivante. A un point de contrôle, après l'opération

 26   Tempête, en tant que membre de la police militaire, comment pouviez-vous

 27   déterminer si un lit ou un réfrigérateur ou un four ou un téléviseur avait

 28   été emporté d'une de ces installations plutôt que d'un appartement privé ?

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  1   Comment pouviez-vous faire cette distinction à un point de contrôle ?

  2   R.  Nous ne pouvions pas faire cette distinction.

  3   Q.  Est-il vrai que la seule chose que vous pouviez faire était de faire

  4   confiance à la certification apportée par le commandant de l'unité dans

  5   laquelle il était dit d'où provenaient ces équipements, et qu'ainsi vous

  6   pouviez permettre à ce que ces biens soient emportés et qu'ils traversent

  7   le point de contrôle ?

  8   R.  C'est ce que j'ai essayé d'expliquer aux Juges. Je ne sais pas si j'y

  9   ai réussi et si j'ai été suffisamment précis. Il semblerait que non. Je ne

 10   voulais pas semer la confusion.

 11   Q.  Je vous comprends. S'agissant de certains paragraphes de vos

 12   déclarations, lorsque vous appeliez le commandant de l'unité qui était de

 13   fonction à un point de contrôle, le faisiez-vous pour obtenir des

 14   informations pour savoir d'où provenaient ces biens, s'ils provenaient

 15   d'une des installations que je viens de vous énumérer ou d'un appartement

 16   privé ?

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que nous parlons du 61 ?

 18   M. MISETIC : [interprétation] En tant que base de quoi ?

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En tant que base pour --

 20   M. MISETIC : [interprétation] Nous n'avons pas de base pour d'autres

 21   éléments factuels.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais il est dit que dans les deux cas,

 23   il y avait une autorisation signée et que le passage était autorisé.

 24   Le rôle du témoin dans ce sens était factuel ou faut-il qu'il nous dise ce

 25   que ses hommes lui avaient dit. Si nous parlons du 61.

 26   M. MISETIC : [interprétation] Oui, nous parlons du 61, ainsi que du

 27   paragraphe 22 de la déclaration de 2008.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

Page 9143

  1   M. MISETIC : [interprétation] C'est la clarification du paragraphe 61 --

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

  3   M. MISETIC : [interprétation] Il dit : "Le paragraphe 61 de 2004 --

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

  5   M. MISETIC : [interprétation] -- m'a donné l'impression que des biens, des

  6   équipements personnels avaient été transportés à bord de cars et camions

  7   militaires" --

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je comprends. Juste un instant,

  9   s'il vous plaît.

 10   Je fais essentiellement référence à la page 73, ligne 3. Je vais

 11   vérifier à nouveau. Lorsque vous avez appelé.

 12   M. MISETIC : [interprétation] Je pense que c'était en réponse à une

 13   question posée par les Juges. Peut-être que je me trompe, mais il me semble

 14   que c'était en réponse à l'une des questions. On lui avait demandé s'il

 15   avait contacté le commandant de l'unité.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'était juste cela que je voulais dire.

 17   Poursuivez.

 18   M. MISETIC : [interprétation] Vous voulez que je vérifie avant que je

 19   poursuive --

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous le souhaitez, oui.

 21   [Le conseil de la Défense se concerte]

 22   M. MISETIC : [interprétation] Je vais essayer d'accélérer un peu tout cela.

 23   Q.  Est-ce que vous avez contacté le commandant de l'unité pour obtenir sa

 24   permission ?

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pourriez peut-être commencer par

 26   lui demander s'il était présent au poste de contrôle, car c'est cela en

 27   fait qui me chagrine.

 28   M. MISETIC : [interprétation] Très bien.

Page 9144

  1   Q.  Est-ce que vous étiez, vous, à ce poste de contrôle ?

  2   R.  Non, je n'y étais pas.

  3   Q.  Comment se fait-il que vous avez appris ce qui se passait au poste de

  4   contrôle ?

  5   R.  Les hommes qui se trouvaient au poste de contrôle m'ont informé et

  6   m'ont indiqué ce qui se passait au barrage du poste de contrôle.

  7   Q.  Est-ce qu'ils vous ont dit qu'ils avaient pris contact avec le

  8   commandant de l'unité ?

  9   R.  Non. Ils ne m'ont pas dit qu'ils avaient contacté le commandant de

 10   l'unité, mais ils m'ont contacté, moi, et j'ai pris contact avec mon

 11   supérieur. Et eux, ont pris contact avec le commandant de cette unité.

 12   Q.  Donc vous avez eu cette conversation avec votre supérieur, et il

 13   y a eu une conversation entre votre supérieur et le commandant de cette

 14   unité, mais vous, vous ne savez pas comment il avait été établi que ces

 15   biens provenaient de l'un des bâtiments militaires de Knin, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui, c'est exact.

 17   Q.  Au paragraphe 22 de votre déclaration de l'année 2008,  vous précisez

 18   et vous dites que cela ne s'est passé que quelques fois.

 19   Est-ce que vous pourriez être un peu plus précis ? Qu'est-ce que vous

 20   entendez par quelques fois ?

 21   Mme MAHINDARATNE : [interprétation] Objection. Il n'a pas dit que cela

 22   s'était passé quelques fois. Ce qu'il a dit, c'est qu'une ou deux fois il y

 23   avait un convoi militaire. Il ne dit pas que cela s'est passé une ou deux

 24   fois seulement, il dit ce qui s'est passé par contre, il décrit la

 25   situation pour un ou deux cas.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic.

 27   Reformulez, Maître Misetic.

 28   M. MISETIC : [interprétation] Bien.

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  1   Q.  Est-ce que cela s'est passé seulement une ou deux fois ? C'est ce que

  2   vous entendez, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Combien de fois est-ce que cela s'est passé précisément, qu'entendez-

  5   vous par quelques fois ou une ou deux fois ?

  6   R.  Deux fois.

  7   Q.  Deux fois, bien. Est-ce que vous vous souvenez de quelle brigade il

  8   s'agissait ?

  9   R.  Non, je ne m'en souviens pas, Monsieur le Président.

 10   Q.  Nous avons entendu des dépositions en l'espèce à propos de postes de

 11   télévision. Voilà la question que je dois vous poser. Vous êtes au poste de

 12   contrôle, mais comment est-ce que vous savez d'où provient la télévision ?

 13   R.  Moi, je ne savais pas d'où venait ce poste de télévision.

 14   Q.  Je pense que vous avez dit -- ou plutôt non, je me reprends.

 15   Les objets confisqués aux postes de contrôle étaient finalement

 16   placés à la caserne de Senjak, n'est-ce pas ?

 17   R.  C'est exact.

 18   Q.  Est-ce que vous vous souvenez que la caserne de Senjak était la caserne

 19   logistique de l'armée de l'ARSK avant que l'armée croate ne l'investisse ?

 20   R.  Je ne m'en souviens pas, mais il y avait des dépôts dans cette caserne,

 21   et dans ces dépôts il y avait eu du matériel militaire et des rations pour

 22   autant que je m'en souvienne.

 23   M. MISETIC : [interprétation] Je souhaiterais, Monsieur le Greffier, que

 24   l'on affiche la pièce D734, je vous prie. Page suivante, je vous prie.

 25   Q.  Il s'agit d'un document du 11 août. Il s'agit d'un rapport du

 26   commandant Juric destiné au général Lausic.

 27   Au paragraphe numéro 4, le 11 août, le commandant Juric indique : "Pour le

 28   service de la police criminelle militaire, les auteurs de crimes

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  1   (détournement de biens des zones libérées), les dossiers de ces personnes

  2   sont traités tous les jours."

  3   Nous avons parlé de deux incidents à propos d'un convoi que l'on avait

  4   autorisé à passer. Au vu de votre expérience acquise à ces postes de

  5   contrôle, est-ce qu'il y avait des gens qui étaient détenus et qui ensuite

  6   étaient livrés à la police criminelle pour détournement de propriété ?

  7   R.  Je ne m'en souviens pas.

  8   Q.  Je vous ai montré un peu plus tôt ce matin un document, et si

  9   nécessaire je peux vous le montrer à nouveau, il s'agit d'un rapport de M.

 10   Juric où il est question d'un tracteur Ursus qui a été reçu d'un

 11   lieutenant. Il s'agissait dans ce cas de biens qui avaient été saisis, il

 12   est également question d'une machine de meunerie.

 13   Si ces objets ont été saisis, c'est la police militaire qui les a

 14   saisis et confisqués au poste de contrôle, n'est-ce pas ?

 15   R.  Je ne peux pas répondre à cela, parce que le colonel Jenjic avait sa

 16   propre zone de responsabilité.

 17   L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète de la cabine anglaise: Il

 18   s'agissait du capitaine Jenjic.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc je ne sais pas véritablement comment cela

 20   s'est passé.

 21   M. MISETIC : [interprétation] 

 22   Q.  Nous allons maintenant parler des civils à Knin. Est-ce qu'à Knin la

 23   police militaire a contraint des personnes à quitter leurs foyers et les a

 24   conduites à l'école ?

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je m'interroge dans quelle mesure à ce

 26   que cela -- pourquoi est-ce que vous posez ce genre de questions.

 27   M. MISETIC : [interprétation] Oui, il y a toute une série de questions qui

 28   ont été posées à propos des civils qui avaient été conduits à l'école, donc

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  1   je demande pourquoi.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais il ne s'agit pas de savoir

  3   s'ils avaient été contraints par la force ou non. Le témoin s'est contenté

  4   de répondre lorsqu'on lui a demandé pourquoi. On a parlé de la raison mais

  5   on n'a pas parlé des méthodes usitées.

  6   M. MISETIC : [interprétation] Oui, mais ce sont les méthodes qui sont peut-

  7   être pertinentes pour comprendre la raison.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous auriez pu poser cette question à ce

  9   moment-là. Bien entendu que tout peut déclencher un nouvel élément. Vous

 10   pouvez effectivement construire une filière comme ça, mais il ne faut pas

 11   oublier les connaissances du témoin, c'est la seule chose à propos de

 12   laquelle on a posé des questions et rien d'autre.

 13   M. MISETIC : [interprétation] Oui, mais il faisait partie de la police

 14   militaire à Knin --

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne vous dis pas que le témoin n'en

 16   avait pas connaissance. Mais puisqu'on en est aux questions déclenchées par

 17   les questions supplémentaires, c'est l'étape dans laquelle nous nous

 18   trouvons maintenant.

 19   Poursuivez.

 20   M. MISETIC : [interprétation] Bien. Merci.

 21   Q.  Nous allons revenir aux postes de contrôle, et ce sera ma dernière

 22   question. J'aimerais savoir la chose suivante. Lorsque la police militaire

 23   avait autorisé un convoi à passer après avoir obtenu et reçu une

 24   autorisation de la part du commandant militaire, est-ce que cela signifiait

 25   pour vous que le commandant avait de ce fait certifié que ces biens et ces

 26   objets n'avaient pas été pris à des particuliers ?

 27   R.  D'après ce que je comprenais, oui. Ce serait exact.

 28   Q.  Est-ce que c'est la raison pour laquelle vous avez dit à la Chambre de

Page 9148

  1   première instance que vous ne pensiez qu'un crime avait été commis de toute

  2   façon ?

  3   R.  Oui, c'est exact.

  4   M. MISETIC : [interprétation] Je n'ai plus de questions à vous poser.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qu'en est-il des autres membres de la

  6   Défense.

  7   M. CAYLEY : [interprétation] Je n'ai pas de questions à poser.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Mikulicic.

  9   M. MIKULICIC : [interprétation] Je n'ai pas de questions non plus.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

 11   Premièrement, Monsieur Markac, je suis très heureux de voir que votre

 12   cellule ne vous a pas retenu pendant le reste de la journée. Car c'est fort

 13   fâcheux que vous n'ayez pas pu quitter cette cellule, donc, la Chambre est

 14   particulièrement ravie de vous revoir ici.

 15   Et…

 16   [La Chambre de première instance se concerte]

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Apparemment, les Juges n'ont pas

 18   d'autres questions à vous poser à la suite des questions supplémentaires,

 19   Monsieur Dzolic, donc vous êtes arrivé au terme de votre déposition. Je

 20   vous remercie d'être venu à La Haye, d'avoir répondu aux questions qui vont

 21   ont été posées par les parties et par les Juges. Je vous souhaite un bon

 22   retour chez vous.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 24   [Le témoin se retire] 

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons prévu de siéger cet après-

 26   midi. Alors je ne pense pas qu'il soit particulièrement judicieux de

 27   convoquer le témoin maintenant pour les sept minutes qui nous restent. Donc

 28   il y a deux solutions qui s'offrent à nous. Soit nous poursuivons jusqu'à

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  1   14 heures et nous commencerons un peu plus tard et non pas à 14 heures 30,

  2   mais ce n'est peut-être pas une très bonne idée parce que nous prendrons la

  3   pause déjeuner beaucoup trop tard.

  4   Donc je vous suggère une pause un peu prématurée et nous reprendrons

  5   exactement dans 52 minutes, à savoir à 14 heures 30.

  6   Monsieur Hedaraly, vous aviez besoin d'une heure, d'après ce que j'ai

  7   compris, c'est cela ou un peu moins ?

  8   M. HEDARALY : [interprétation] Oui, oui, Monsieur le Président. Je suis

  9   assez sûr de pouvoir terminer l'interrogatoire principal en beaucoup moins

 10   de temps, entre 30 et 40 minutes. En tout cas, je m'efforcerai de le faire.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qu'en est-il des équipes de la Défense,

 12   vous pensez pouvoir terminer cet après-midi ?

 13   M. KEHOE : [interprétation] Oui, je pense que c'est moi qui vais poser

 14   l'essentiel des questions pour le contre-interrogatoire. Je sais que mes

 15   autres confrères n'ont pas beaucoup de questions à poser à ce témoin.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Alors nous allons toutefois

 17   essayer de terminer pendant la deuxième séance de cet après-midi.

 18   Nous allons faire une pause et reprendre à 14 heures 30.

 19   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 13 heures 40.

 20   --- L'audience est reprise à 14 heures 34.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon après-midi.

 22   Monsieur le Greffier, nous sommes en séance de suivi, ce qui veut

 23   dire qu'il n'est pas nécessaire de citer de nouveau le numéro de l'affaire

 24   car nous l'avons déjà fait ce matin.

 25   Monsieur Hedaraly, êtes-vous prêt à appeler votre témoin suivant à la barre

 26   ?

 27   M. HEDARALY : [interprétation] Oui.

 28   Nous appelons à la barre M. Lennart Leschly.

Page 9150

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame l'Huissière, veuillez faire

  2   entrer le témoin.

  3   Si j'ai bien compris, vous n'avez pas demandé des mesures de protection

  4   pour ce témoin. Est-ce que dans l'intervalle toutes les parties ont

  5   présenté les arguments en application de l'article 92 ter, est-ce que je

  6   comprends qu'il n'y a pas d'objection à ce que la déclaration préalable du

  7   6 février et les annexes soient versées ?

  8   M. KAY : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 10   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Leschly.

 12   Vous allez bientôt entamer votre audition mais le Règlement exige tout

 13   d'abord que vous fassiez une déclaration solennelle dont le texte va vous

 14   être remis par Mme l'Huissière.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 16   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 17   LE TÉMOIN: LENNART LESCHLY [Assermenté]

 18   [Le témoin répond par l'interprète]

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur. Veuillez

 20   vous asseoir.

 21   Monsieur Leschly, l'anglais n'est pas votre langue maternelle ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si à un moment donné vous avez peine à

 24   comprendre une question ou à trouver le mot juste, dites-le-moi.

 25   C'est d'abord M. Hedaraly, qui représente le bureau du Procureur, qui va

 26   vous interroger.

 27   Vous pouvez commencer, Monsieur Hedaraly.

 28   M. HEDARALY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

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  1   Interrogatoire principal par M. Hedaraly : 

  2   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Leschly. Veuillez décliner votre

  3   identité aux fins du dossier de l'instance.

  4   R.  Lennart Leschly.

  5   Q.  Que faites-vous aujourd'hui ?

  6   R.  Je suis à la retraite. J'ai fait carrière dans l'armée danoise, mais

  7   pendant 22 ans je n'ai pas travaillé au service de l'armée.

  8   Q.  Quand avez-vous pris votre retraite ?

  9   R.  En 2003, à mon 60e anniversaire.

 10   M. HEDARALY : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait présenter le document

 11   de la liste 65 ter 5433 à l'écran. Je vais demander à Mme l'Huissière de

 12   soumettre au témoin une copie sur support papier ainsi que des rapports

 13   qu'a préparés ce témoin.

 14   Q.  Etes-vous d'abord en mesure de confirmer que le document se trouvant à

 15   l'écran est le même que celui qui se trouve à l'intercalaire numéro 1 des

 16   documents qui viennent de vous être remis ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Vous souvenez-vous avoir fourni une déclaration préalable au bureau du

 19   Procureur le 6 février 2008 ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Cette déclaration que vous avez sous les yeux est-elle celle du 6

 22   février ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Je me suis trompé. J'ai dit 6 février 2008, ça devrait être 2007.

 25   R.  Effectivement.

 26   Q.  Avez-vous eu l'occasion de relire cette déclaration hier ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Est-ce qu'elle est le reflet fidèle de ce que vous avez dit aux

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  1   représentants du bureau du Procureur lorsque vous les avez rencontrés le 6

  2   février ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Le contenu de cette déclaration est-il fidèle aux souvenirs que vous

  5   avez et aux connaissances que vous avez ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Si les mêmes questions vous étaient reposées aujourd'hui, les mêmes que

  8   celles qui vous ont été posées le 6 février 2007, est-ce que vous y

  9   donneriez les mêmes réponses ?

 10   R.  Oui.

 11   M. HEDARALY : [interprétation] Je demande le versement du document de la

 12   liste 65 ter 5433 en application de l'article 92 ter.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a pas d'objection. Ce sera quelle

 14   cote, Monsieur le Greffier ?

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P888.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette pièce est versée au dossier.

 17   M. HEDARALY : [interprétation] Je demande également le versement des six

 18   rapports hebdomadaires préparés par le témoin qui portent sur les

 19   événements survenus en août et en septembre dont il fait mention dans sa

 20   déclaration. Je vais d'abord les aborder un à un.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 22   M. HEDARALY : [interprétation] C'est d'abord le rapport hebdomadaire du 13

 23   août 1995, il s'agit du numéro 4074 de la liste 65 ter.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le suivant sera quel document, Monsieur

 25   Hedaraly ?

 26   M. HEDARALY : [interprétation] Ce sera le document 4110 de la liste 65 ter,

 27   le rapport hebdomadaire du 20 août 1995.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le suivant ?

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  1   M. HEDARALY : [interprétation] Le rapport hebdomadaire du 27 août, qui

  2   porte le numéro 4155.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ensuite ?

  4   M. HEDARALY : [interprétation] Le prochain document ce sera le rapport

  5   hebdomadaire du 17 septembre 1995, numéro 4248.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ensuite ?

  7   M. HEDARALY : [interprétation] C'est le rapport hebdomadaire du 24

  8   septembre qui porte le numéro 2124.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et le dernier document ?

 10   M. HEDARALY : [interprétation] Ce sera le document 4269, le rapport

 11   hebdomadaire du 1er octobre 1995.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons recevoir quels numéros pour

 13   ces documents ?

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] P889 jusqu'à la pièce 894, y compris.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ces pièces allant de la cote P889 à la

 16   cote P894 sont versées au dossier.

 17   Poursuivez, Monsieur Hedaraly.

 18   M. HEDARALY : [interprétation] Merci. 

 19   J'aimerais maintenant donner lecture d'un bref résumé des éléments

 20   contenus dans la déclaration du témoin de façon à informer l'opinion

 21   publique, le public se trouvant dans le prétoire, de ce qui vient d'être

 22   versé au dossier.

 23   "Lennart Leschly était observateur de terrain pour la MOCE, la Mission

 24   d'observation de la Communauté européenne à Knin, à Split, à Zadar aussi,

 25   de septembre 1993 jusqu'au mois d'avril 1994. A partir du mois d'octobre

 26   1994 jusqu'au mois de janvier 1995, il a travaillé dans le service

 27   d'information du bureau de Croatie avant de devenir chargé des liaisons des

 28   Nations Unies pour la MOCE en février 1995.

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  1   "Le 6 juillet 1995, il a été nommé chef du centre régional de la MOCE à

  2   Zagreb. M. Leschly a reçu plusieurs rapports de situation en provenance des

  3   différentes équipes de la MOCE, dont celle qui était passée à Knin après

  4   l'opération Tempête.

  5   "Partant des renseignements contenus dans ces rapports, il a établi

  6   des résumés hebdomadaires portant sur la situation politique, humanitaire,

  7   militaire, économique et sur la situation de l'infrastructure en Croatie,

  8   documents qui étaient envoyés au QG de la MOCE à Zagreb, et partant de

  9   Zagreb dans les différentes capitales européennes. En sa qualité de chef du

 10   centre régional de la MOCE à Zagreb, il a rencontré plusieurs chefs civils

 11   et militaires dans la Krajina, dont le général Ante Gotovina, qu'il a

 12   rencontré à Knin en septembre 1995."

 13   J'ai ainsi terminé la lecture du résumé, Monsieur le Président.

 14   Q.  Monsieur Leschly, pourriez-vous en quelques mots expliquer aux Juges

 15   comment se présentait la structure de compte rendu, comment cela allait

 16   d'un échelon à un autre, par exemple des équipes au centre et au QG ?

 17   R.  Le point de départ ce sont les équipes qui sont sur le terrain, qui

 18   procèdent à des réunions et font rapport des conclusions que ces équipes

 19   tirent en matière de faits, mais aussi pour faire part de leurs

 20   impressions. Ces rapports sont envoyés à un centre de coordination qu'on

 21   appelle CC. En règle générale, vous avez deux, trois, quatre équipes qui

 22   font partie d'un centre de coordination. Ce centre de coordination envoie à

 23   son tour un rapport au centre régional. Celui-ci rassemble les informations

 24   contenues dans les rapports des équipes et les rapports des centres de

 25   coordination. Tous ces rapports sont acheminés au service des informations

 26   ou des renseignements au QG. C'est là que je travaillais au bureau de

 27   Croatie, et il y avait bien sûr un bureau pour la Bosnie. C'est là que sont

 28   rassemblés tous les rapports qu'on utilise pour établir un rapport

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  1   quotidien qui est envoyé au ministère des Affaires étrangères des pays de

  2   l'Union européenne.

  3   Q.  Ces équipes qui établissaient ces rapports dans l'ancien secteur sud,

  4   elles faisaient partie de quel centre de coordination ou de quel centre

  5   régional ?

  6   R.  Il faut faire une différence entre la situation qui a prévalu fin août

  7   1995 et celle d'après. Avant la fin du mois d'août 1995, le centre régional

  8   du secteur sud se trouvait à Knin, il faisait rapport directement au QG. A

  9   cet égard, c'était une espèce de collègue du centre régional de Zagreb. Ce

 10   qui veut dire que ce n'est que vers le 1er septembre que le centre régional

 11   de Knin m'a envoyé ses rapports.

 12   Q.  Vous dites que ces équipes envoyaient directement leurs rapports au

 13   centre régional de Knin. Auparavant, vous avez dit que les rapports étaient

 14   envoyés à un centre de coordination. Etait-ce donc une exception ici ?

 15   R.  Oui, effectivement, c'était une exception. Pour le secteur sud, à

 16   l'intérieur de l'ARSK, il n'y avait que trois équipes qui rendaient compte

 17   directement au centre régional de Knin, surtout en raison de la

 18   configuration du terrain. C'était plus pratique, on partageait pratiquement

 19   les mêmes lieux.

 20   De l'autre côté de la ligne de front à l'époque, il y avait des

 21   équipes à Split, à Zadar et à Gospic. Ces trois équipes rendaient compte au

 22   centre de coordination de Zadar.

 23   Q.  Vous dites qu'il y avait une différence entre la situation avant la fin

 24   août et la situation après la fin, alors quelle était la situation après la

 25   fin août ?

 26   R.  Le centre régional de Knin a été fermé, aujourd'hui même je ne me

 27   souviens plus exactement de la séquence des événements au cours de ces

 28   quelques semaines. A un moment donné, le RC Knin, ils s'appelaient toujours

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  1   "RC Knin", même s'il se trouvait à Zadar, mais il a fini par devenir un

  2   centre de coordination de Split qui rendait compte au centre régional de

  3   Zagreb. Ça n'avait aucun sens d'avoir un centre régional dans l'ARSK qui

  4   n'existait plus.

  5   Q.  Ce CC de Split rendait compte à vous, c'est cela alors ?

  6   R.  Oui.

  7   M. HEDARALY : [interprétation] Monsieur le Greffier, pouvez-vous afficher

  8   la pièce P889.

  9   Q.  Il s'agit de votre rapport hebdomadaire du 13 août 1995, c'est celui

 10   qui se trouve au deuxième intercalaire de votre liasse de documents. Tout

 11   le monde va pouvoir voir le document dans un instant.

 12   J'ai une question à vous poser à propos de ce résumé, première partie, on

 13   dit : 

 14   "L'exécution croate de l'opération Tempête a donné exactement le

 15   résultat que recherchait le pays : une terre, un pays sans personne. Ceci

 16   montre qu'effectivement la HV était comme toutes les autres armées des

 17   Balkans quand il s'agit de pillage inutile, de brutalité inutile, et de

 18   créer le plus grand nettoyage ethnique volontaire individuel qui se soit

 19   produit pendant tous les conflits des Balkans."

 20   J'attends un instant pour que les interprètes aient terminé la traduction

 21   de ce texte écrit.

 22   Voici ma première question : vous dites dans ce texte que c'est un

 23   nettoyage ethnique "volontaire" ?

 24   R.  Je l'avoue, quand je regarde ce texte aujourd'hui, ce n'est pas peut-

 25   être le mot le plus jute. Quand je disais volontaire à l'époque, ça voulait

 26   dire que c'était sans qu'il y ait vraiment de combat véritable. On pourrait

 27   arguer du fait que quand on dit "volontaire", c'est quelque chose que vous

 28   faites sans que quelqu'un vous le demande. Je suis sûr que la population

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  1   civile ne voulait pas partir de l'endroit où elle se trouvait. Là, je

  2   reconnais que le mot volontaire n'est pas le mieux que j'aurais pu choisir

  3   mais c'était effectivement un nettoyage ethnique sans qu'il y ait eu de

  4   combat majeur.

  5   Q.  Vous dites "sans qu'il y ait eu vraiment de combat", de la part de qui

  6   ?

  7   M. KAY : [interprétation] Objection, question directrice. Il ne faudrait

  8   pas souffler la réponse au témoin.

  9   M. HEDARALY : [interprétation] J'ai simplement tiré au clair la réponse

 10   fournie par ce témoin.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le problème c'est qu'en l'absence de

 12   combat, il est difficile de savoir qui ne s'est pas opposé. Mais vous

 13   pourriez peut-être demander quels étaient les protagonistes de ces

 14   événements.

 15   M. HEDARALY : [interprétation]

 16   Q.  Qui est-ce qui n'a pas vraiment opposé de véritable résistance ou de

 17   combat ?

 18   R.  Je parle de l'armée de la RSK. Peut-être qu'on s'était attendu à

 19   davantage de combats. Je ne sais plus quand c'est exactement auparavant, si

 20   c'était en juillet ou en juin. Il y avait eu une revue des troupes dans le

 21   secteur nord, et d'après les observations effectuées par un de nos

 22   observateurs, il semblait qu'il y avait eu un renfort de troupes au sein de

 23   la RSK. Partant de ces observations, c'était quelque chose de tout à fait

 24   remarquable que de voir qu'il y avait eu si peu de résistance.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, est-ce qu'on n'avait pas

 26   justifié cette question dans le résumé écrit ?

 27   M. KEHOE : [interprétation] Il faudra demander au témoin ce qu'il veut

 28   dire, il ne faudrait pas déjà lui souffler la façon dont il devrait

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  1   répondre à la question.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais est-ce que cette orientation n'est

  3   pas déjà donnée dans le résumé écrit ?

  4   M. KEHOE : [interprétation] Tout dépend de la version des faits dont on

  5   parle. Je suppose ici qu'on ne parle pas simplement de la déclaration

  6   écrite du témoin.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes, mais si un indice a déjà été

  8   fourni par le témoin, pour ce qui est de la question suivante c'est plutôt

  9   une question de suivi davantage qu'une question directrice.

 10   M. KEHOE : [interprétation] Regardons la question précise. Quand on dit

 11   "sans qu'il n'y ait véritablement de combat", ça ne se trouve pas dans la

 12   déclaration écrite si on l'examine.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivons. Ne perdons pas davantage de

 14   temps sur la question.

 15   M. HEDARALY : [interprétation]

 16   Q.  Fin de page pour ce rapport, quatre ou cinq dernières lignes en bas de

 17   page, je vais vous les lire pour être bien sûr que je ne déforme rien de ce

 18   qui est écrit ici suite à ce que le Président a dit. 

 19   "A l'époque, il était devenu tout à fait apparent que les méthodes

 20   utilisées par la HV étaient aussi déplorables que celles de la BSA, en

 21   anglais c'est l'armée des Serbes de Bosnie, les Etats-Unis, avec un timing

 22   parfait, avaient donné des images du terrain qui avait été récemment tourné

 23   dans la zone de Srebrenica, ce qui avait un peu écarté de la une des

 24   journaux ce qui se passait en Croatie."

 25   Voici ce que j'aimerais vous demander : est-ce que vous faites l'équation

 26   entre ce qui s'était passé à Srebrenica et ce qui s'est passé dans la

 27   Krajina ?

 28   R.  Non, non, pas du tout, loin de là. Mais à l'époque, si je me souviens

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  1   bien, vous savez tout ça s'est passé il y a 13 ans. Il y avait une

  2   différence que je trouvais intéressante entre ce que disait la presse

  3   internationale des atrocités commises par un camp dans ces conflits et par

  4   ce que faisait l'autre. Bien sûr, vous avez tout à fait raison, Srebrenica,

  5   nous le savons aujourd'hui, c'est dans une catégorie tout à fait à part, ça

  6   n'a rien de comparable avec ce qui s'est passé en RSK.

  7   Q.  Mais qu'est-ce qui était tellement intéressant au niveau de la

  8   couverture médiatique ?

  9   R.  Vous savez, lundi, je vais avoir 65 ans, ma mémoire n'est plus

 10   tellement brillante. Mais je me souviens qu'il y avait un reportage de la

 11   CNN qui affirmait qu'il y avait eu des observateurs européens, nous, en

 12   d'autres termes, qui avaient dit qu'il y avait quelque chose, mais après ça

 13   a été tout à fait rejeté. C'était dans la zone croate. Après, on a eu, pour

 14   de bonnes raisons, des reportages très, très poussés et très détaillés de

 15   ce qui s'était passé à Srebrenica, mais vraiment c'était une comparaison,

 16   une façon de mettre les deux choses sur le même niveau que je trouve

 17   intéressante.

 18   Q.  Prenons la troisième page de votre rapport. Le premier paragraphe

 19   complet, on parle ici de 200 000 Serbes de Krajina. Vous dites que ces

 20   personnes ont quitté la zone. Est-ce que ce chiffre vaut pour les deux

 21   secteurs, nord et sud ?

 22   R.  Oui. Si je me souviens bien, en arrivant en 1993, le chiffre qu'on

 23   donnait généralement pour établir la population en Krajina c'était 400 000,

 24   mais beaucoup de gens étaient partis au cours de cette période déjà. Le

 25   chiffre qu'on donnait en août 1995 c'était 200 000, non pas qu'on ait pu

 26   vraiment faire le décompte précis du nombre d'habitants, mais c'était le

 27   chiffre qu'on donnait en général.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Permettez-moi de poser une question au

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  1   témoin, Monsieur Hedaraly. Vous dites que le chiffre qu'on mentionnait

  2   généralement pour indiquer quelle était la population de la Krajina c'était

  3   400 000, et qu'il était passé à 200 000. Vous parlez de la totalité de la

  4   population en mentionnant ce chiffre ou est-ce qu'on parle des Serbes de

  5   Krajina ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je parle des Serbes de la Krajina.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien.

  8   M. HEDARALY : [interprétation] Examinons la pièce 890, c'est le rapport

  9   hebdomadaire du 20 qui se trouve à l'intercalaire 890. Second paragraphe

 10   sous la rubrique "situation politique", je vois les deux premières lignes.

 11   "Pendant toute la durée du conflit dans les Balkans, la création d'une

 12   Grande-Serbie a été présentée par les Croates et les Musulmans comme étant

 13   le mal ultime. Maintenant il semblerait tout aussi pertinent de parler de

 14   la création d'une Grande-Croatie."

 15   Q.  Vous parlez ici de "Grande-Croatie", que vouliez-vous dire exactement ?

 16   R.  Il se peut qu'ici aussi les mots n'aient pas été choisis au mieux quand

 17   on dit Grande-Serbie, mais au sein des frontières géographiques de la

 18   Croatie géographique, qui n'étaient manifestement pas arrivées pendant que

 19   la Krajina existait, peut-être qu'il faudrait dire la Croatie même.

 20   Q.  Qu'en est-il de la composition de la Croatie ?

 21   R.  La composition, dites-vous, je ne vous comprends pas trop bien.

 22   Q.  Je parle de la composition démographique de la Croatie.

 23   R.  Je vous l'ai déjà dit, j'ai toujours eu l'impression que la Croatie ne

 24   tenait pas véritablement à avoir une minorité serbe à l'intérieur de ses

 25   frontières.

 26   Q.  Est-ce que c'est cette impression qui explique que vous aviez utilisé

 27   le terme de "Grande-Croatie" ?

 28   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi. Je veux qu'on s'en tienne aux

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  1   faits. Les impressions et tout ça, non. Les faits, s'il vous plaît.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pourriez demander au témoin,

  3   Monsieur Hedaraly, sur quelle source il s'appuie pour tenir de tels propos.

  4   M. HEDARALY : [interprétation]

  5   Q.  Veuillez, Monsieur le Témoin, expliquer à la Chambre ce qui était à

  6   l'origine de cette impression telle qu'elle se manifeste dans ce rapport

  7   hebdomadaire ?

  8   R.  J'essaie de me rappeler ce qu'il en est, mais ça ne donne rien du tout.

  9   Je suis désolé, je ne sais pas. Je ne peux pas vous donner de réponse

 10   particulière.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez plutôt donner

 12   une réponse d'ordre général ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans ce genre de mission, on parle à beaucoup

 14   de gens, on a des discussions, la chose a sans doute été mentionnée à un

 15   moment donné. Mais je ne sais pas par qui. Mais ces deux mots, ces deux

 16   expressions se ressemblent, Grande-Serbie, Grande-Croatie. Je fais des

 17   efforts désespérés pour me souvenir de ce qu'il en est. Mais ce que

 18   Milosevic n'est pas parvenu à faire, il semble que Tudjman soit parvenu à

 19   le faire.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a peut-être une confusion ici,

 21   Monsieur Hedaraly. Vous avez demandé au témoin sur quoi reposait

 22   l'impression qui était la sienne selon laquelle la Croatie n'avait pas très

 23   envie d'avoir une minorité serbe dans ses frontières.

 24   Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous dire sur quoi repose cette

 25   impression, est-ce que ça repose sur quelque chose de précis ou sur quelque

 26   chose de moins précis ?

 27   Veuillez répondre, s'il vous plaît.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Pendant toute la durée de mon séjour, en tant

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  1   qu'observateur dans le secteur sud à Split et à Zadar, il m'est apparu

  2   clairement que, d'une part, les Serbes ne voulaient pas faire partie de la

  3   Croatie et, d'autre part, la Croatie n'était pas très chaude pour avoir des

  4   Serbes sur son territoire, dans ses frontières. C'est quelque chose qui se

  5   manifestait de manière générale et qui transparaissait dans toutes les

  6   réunions que nous avons eues avec beaucoup de monde.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous êtes en train de confirmer, de

  8   répéter, si l'on peut dire, l'impression qui est la vôtre. Or, la question

  9   qui vous a été posée portait sur les sources. Vous me parlez de réunions.

 10   Des réunions avec qui ? Qu'est-ce qui a été dit au cours de ces réunions ?

 11   Est-ce que vous vous en souvenez ? Est-ce que vous vous souvenez de ce qui

 12   a été dit lors de ces réunions ou est-ce que vous vous souvenez plutôt

 13   d'une façon générale de ce qui a pu être dit, par je ne sais pas, moi, des

 14   ambassadeurs, des représentants officiels de la Croatie, des représentants

 15   de la Bosnie. Voilà où veut en venir M. Hedaraly dans sa question, et voilà

 16   des éléments qui pourraient se révéler utiles pour la Chambre.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je vous l'ai déjà dit, je suis incapable

 18   de m'en souvenir.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Hedaraly.

 20   M. HEDARALY : [interprétation]

 21   Q.  Je vais passer maintenant à une réunion que vous relatez dans votre

 22   déclaration, c'est une réunion que vous avez eue avec M. Gotovina. D'abord,

 23   veuillez expliquer à la Chambre dans quelles circonstances a eu lieu cette

 24   réunion qu'il a organisée, comment elle a été organisée, et cetera ?

 25   R.  On parle de quoi --

 26   Q.  D'une réunion qui a eu lieu en septembre. Je vous demande simplement si

 27   vous vous souvenez des circonstances dans lesquelles cette réunion a eu

 28   lieu ?

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  1   R.  Au moment de la fermeture du centre régional de Knin et où le centre

  2   régional de Zagreb a pris le relais, il est apparu tout à fait normal que

  3   moi-même, en tant que chef de ce centre régional, je me rende dans cette

  4   zone qui faisait maintenant partie de ma zone de responsabilité, il

  5   paraissait normal que j'aille rencontrer les personnalités de cette zone.

  6   Q.  Et dans le cadre de cette visite, pouvez-vous nous dire qui vous avez

  7   rencontré ?

  8   R.  J'ai rencontré le chef de la police de Gospic, un "zupan" à Zadar. Vous

  9   vous souvenez beaucoup mieux des noms que moi sans doute. Oui, Norac.

 10   M. KEHOE : [interprétation] On peut aider le témoin à s'en souvenir. Il

 11   s'agit de la pièce P893, rapport du témoin du 24 septembre 1995, pièce 65

 12   ter 2124, intercalaire 5 du classeur.

 13   M. HEDARALY : [interprétation] Oui. Je voulais d'abord poser des questions

 14   au témoin avant de lui montrer son rapport. Je voulais voir ce dont il se

 15   souvenait -- mais procédons ainsi.

 16   Q.  Vous parlez du "zupan" de Zadar, qu'est-ce que ça veut dire ça ?

 17   Qu'est-ce que c'est ? Quel est le poste de cette personne ?

 18   R.  Un "zupan", c'est quelqu'un qui est à la tête d'une "zupanje". On

 19   pourrait traduire ça par le mot de "comté".

 20   Q.  Maintenant parlons de cette rencontre avec M. Gotovina. Pouvez-vous

 21   décrire l'atmosphère dans laquelle elle s'est déroulée cette réunion ? Est-

 22   ce que c'était une réunion qui se déroulait dans une atmosphère informelle

 23   ou pas ?

 24   R.  Il y a eu une réunion, et je dois dire de manière générale que ces

 25   réunions se déroulaient généralement dans un climat très décontracté, les

 26   gens étaient sympathiques, courtois, mais dès qu'on abordait des questions

 27   un petit peu plus délicates, il pouvait arriver que la température descende

 28   nettement dans la pièce. Mais on s'efforçait toujours de faire preuve de

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  1   politesse. Nous étions des diplomates, n'est-ce pas, si bien que tout ce

  2   que nous cherchions c'était de susciter une atmosphère positive dans ces

  3   réunions avec les gens que nous rencontrions. Voilà ce que nous

  4   recherchions.

  5   Q.  Au cours de cette série de réunions qui ont eu lieu pendant ces

  6   journées-là avec différents représentants de la société civile, pouvez-vous

  7   nous dire quel était l'objectif que vous recherchiez  -- pourquoi aviez-

  8   vous décidé de vous entretenir avec ces personnes ?

  9   R.  L'objectif, c'était de prendre connaissance de la nouvelle situation

 10   qui se présentait maintenant, de voir quel était le point de vue de ces

 11   personnes pour revenir à l'objectif premier de notre mission qui était que

 12   les gouvernements européens soient aussi bien informés que possible de ce

 13   qui se passait dans l'ex-Yougoslavie.

 14   Q.  Quels étaient les thèmes que vous abordiez généralement lors de ces

 15   réunions ?

 16   R.  La nature de la situation; est-ce qu'il y avait des éléments nouveaux;

 17   est-ce qu'il pouvait y avoir eu des rencontres; là, je vous parle de

 18   manière générale. Je ne me souviens pas dans le détail de ces réunions.

 19   Qu'est-ce qu'ils attendaient de l'avenir aussi, voilà une question qui se

 20   posait. Est-ce qu'il y avait eu des changements dont ils souhaitaient que

 21   l'Europe fut informée.

 22   Q.  J'aimerais maintenant qu'on parle plus particulièrement de la réunion

 23   que vous avez eue avec M. Gotovina. Comment a commencé cette réunion ?

 24   Quelles ont été les questions qui ont été abordées en tout premier lieu, si

 25   vous vous en souvenez ?

 26   R.  Non, j'imagine qu'on s'est salués, mais je ne me souviens pas. Je ne me

 27   souviens pas de propos particuliers qui auraient été tenus au début de

 28   cette réunion.

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  1   Q.  Veuillez, s'il vous plaît, consulter le rapport dont la référence vous

  2   a été donnée il y a quelques instants par Me Kehoe, pièce P893, deuxième

  3   page, paragraphe du bas. Vous dites dans votre rapport :

  4   "Lorsque le général Gotovina, commandant du district de Split, a

  5   répondu à la question de savoir s'il partageait l'opinion du "zupan" de

  6   Zadar au sujet de la nécessité de proclamer l'état d'urgence pour éviter

  7   les meurtres, les pillages et les incendies, et cetera, la seule chose

  8   qu'il a eu à dire c'est : 'Quels meurtres ?' Ensuite, il s'est lancé dans

  9   une vive critique de la communauté internationale", et cetera.

 10   Première question que je souhaiterais vous poser à ce sujet. Vous souvenez-

 11   vous de cette partie de votre entretien ?

 12   R.  Là, bien entendu, je lis ce que j'ai écrit peu de temps après la

 13   réunion, donc je me souviens un peu de ce qui s'est passé, mais si vous me

 14   demandez de dire ce que les gens ont dit en particulier, les propos précis

 15   qui ont été tenus, là non, je dois demander le joker. Mais il est

 16   indéniable que lorsque la question s'est posée de savoir pourquoi toutes

 17   ces choses avaient lieu, j'ai eu l'impression à ce moment-là que le général

 18   Gotovina n'a pas reconnu la réalité de ces meurtres, parce que quand il a

 19   dit "meurtres", en fait il parlait de tous les agissements qui avaient été

 20   constatés à l'époque, incendies, et cetera.

 21   Q.  Je voudrais m'assurer qu'il n'y a pas de problème linguistique ou

 22   de traduction -- 

 23   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi. Vous parlez de problème de

 24   traduction, mais là nous avons un témoin qui parle anglais, donc je pense

 25   pas qu'il puisse y avoir de problème de traduction avec un témoin qui parle

 26   anglais.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Attendez, Maître Kehoe, parce que ce

 28   qu'a dit M. Hedaraly, c'est : "Je veux être sûr que ce n'est pas une

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  1   question de traduction ou une question d'ordre linguistique." J'imagine

  2   qu'il a fait un petit lapsus quand il a parlé de traduction. Donc s'il y a

  3   un problème linguistique qui se pose, Monsieur Hedaraly, vous avez

  4   plusieurs façons de procéder qui s'offrent à vous. Premièrement, vous

  5   pouvez reposer la question au témoin, parce que vous n'êtes pas trop sûr

  6   qu'il ait tout à fait bien compris ce que vous lui demandiez; ça c'est une

  7   chose. Mais si vous voulez évoquer précisément le problème linguistique qui

  8   se pose, à ce moment-là, il faut faire sortir le témoin.

  9   M. KEHOE : [interprétation] Ce que je remarque, c'est que le témoin n'a pas

 10   soulevé de problème de ce type.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly, poursuivons.

 12   M. HEDARALY : [interprétation] Je veux préciser une réponse du témoin, je

 13   suis en train d'interroger le témoin au principal, j'ai le droit de le

 14   faire si je pense que le témoin n'a pas répondu de façon suffisamment

 15   claire.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vais vous permettre de

 17   continuer.

 18   M. HEDARALY : [interprétation]

 19   Q.  Qu'est-ce que vous vouliez dire quand vous avez dit -- maintenant il

 20   faut que je fasse défiler le texte du compte rendu vers le haut. Qu'est-ce

 21   que vous avez voulu dire quand vous avez dit : "Le général Gotovina ne

 22   reconnaissait pas la réalité des meurtres ou des pillages ou des incendies

 23   ?"

 24   R.  Ce que je voulais dire, c'est que quand on en a parlé, il n'a pas dit :

 25   Oui, effectivement, nous sommes à l'origine de ces agissements, meurtres,

 26   incendies et pillages. Il a parlé comme si ça n'avait pas existé. Et

 27   maintenant quand je regarde ce que j'ai dit à ce moment-là, ce que je veux

 28   dire quand j'avais écrit qu'il avait dit "Quels meurtres", en fait ça

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  1   recouvrait, je pense, la totalité des agissements, pillages, meurtres et

  2   incendies.

  3   Q.  Ensuite dans votre rapport, vous continuez à relater la réunion en

  4   disant :

  5   "Les jeunes nations ont tendance à être très nationalistes et qu'au

  6   fil du temps le secteur est deviendrait sans doute plus libéral."

  7   Qu'est-ce que ça veut dire, ça ?

  8   R.  Ça m'a peut-être frappé, parce qu'il faut dire que j'ai habité cinq ans

  9   à Singapour dans les années 1980, donc j'ai une certaine expérience dans la

 10   naissance des nations, si vous voulez. Et là, c'est justement un concept

 11   qui était souvent évoqué, ce qu'il faut faire quand une nation surgit,

 12   quand une nation naît. Moi, je viens d'un pays où nous avons une monarchie

 13   qui dirige le pays depuis un millénaire. Et ce que j'ai remarqué dans ces

 14   jeunes nations, c'est qu'on fait beaucoup d'efforts pour construire la

 15   nation, pour quelle marque nettement son pli.

 16   Et quand j'ai parlé du secteur est, ça me rappelle des discussions très

 17   courantes qui avaient lieu à cette époque, il y avait les secteurs ouest,

 18   nord, et sud en août et mai, et le secteur est. On se posait beaucoup de

 19   questions à ce sujet -- en fait, ce qu'il disait peut-être, c'est : "On en

 20   n'était pas encore tout à fait arrivé à ce qu'on recherchait puisque le

 21   secteur est n'était pas encore incorporé, et une fois que ce serait le cas,

 22   on aurait peut-être relâcher un petit peu les efforts de construction de la

 23   nation." Voilà. Je pense que c'est ce que je voulais dire là.

 24   Q.  Qu'est-ce que vous voulez dire quand vous parlez de ces "efforts pour

 25   construire la nation" ?

 26   R.  J'ai parlé de "liberal", en anglais, c'est-à-dire de relâcher les

 27   efforts, et peut-être qu'au début ils ne pouvaient pas se permettre d'être

 28   aussi flexibles. Et là on est en train de parler des impressions suscitées

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  1   par certains propos.

  2   Q.  Précisons une chose. Vous dites dans votre rapport "une  fois que le

  3   secteur est sera à nous, il serait plus souple", c'est ce que M. Gotovina a

  4   dit ?

  5   R.  J'imagine que c'est le cas, mais ça fait longtemps que tout cela s'est

  6   passé. Il faut savoir que dans ces réunions on espère toujours que les

  7   interprètes sont des vrais professionnels parce que je ne pouvais pas

  8   entendre directement les participants. J'avais besoin de passer par les

  9   interprètes.

 10   Q.  Qu'est-ce que ça voulait dire pour vous ce mot de "liberal", flexible,

 11   et cetera ?

 12   R.  Je pense que c'était quelqu'un qui était plus coulant, qui permettait,

 13   qui autorisait des choses qu'il n'aurait pas autrement autorisées.

 14   Q.  Vous souvenez-vous des autres participants à cette réunion ?

 15   R.  Il y avait l'adjoint du chef du centre de coordination de la MOCE, un

 16   Italien, dont je ne me souviens plus du nom; puis il y en a un autre, un

 17   observateur, Marker-Hansen, je me souviens de lui et de son nom parce qu'il

 18   était Danois.

 19   M. HEDARALY : [interprétation] J'aimerais que s'affiche à l'écran la pièce

 20   3419 sur la liste 65 ter.

 21   Q.  Vous n'avez pas de copie papier de ce document. Il va falloir que vous

 22   consultiez votre écran. Premièrement, veuillez nous dire ce dont il s'agit

 23   ici ?

 24   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, mais je crois que l'Accusation a

 25   communiqué ce document sans expurger le nom des auteurs du document, comme

 26   c'est fait ici. Je parle de la pièce 3419 sur la liste 65 ter.

 27   M. HEDARALY : [interprétation] Je pense qu'il y a une erreur, à ce moment-

 28   là, parce que la MOCE nous a permis d'utiliser ces documents uniquement à

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  1   la condition que nous les expurgions de la manière que vous pouvez voir

  2   ici.

  3   Q.  Monsieur le Témoin, veuillez dire aux Juges si vous reconnaissez ce

  4   document. De quoi s'agit-il ?

  5   R.  Oui, je reconnais ce document. C'est un document que j'ai vu hier. J'ai

  6   sans doute eu ce document sous les yeux en 1995.

  7   Q.  De quoi s'agit-il ? Veuillez le dire aux Juges, s'il vous plaît.

  8   R.  Il s'agit du rapport d'une équipe d'observateurs. L'équipe s'appelait

  9   "Kilo 1" et "Kilo K", c'est pour Knin. Leur rapport a été envoyé au centre

 10   de coordination, à l'époque il était à Split, et le rapport est également

 11   envoyé pour information au RC, au centre régional de Zagreb, ainsi qu'aux

 12   équipes de Zadar, Gospic, Bihac, Karlovac, Velika Kladusa, aux observateurs

 13   militaires des Nations Unies, au HCR des Nations Unies.

 14   Q.  Au point 2, "Situation militaire", on voit que le général Gotovina a

 15   rencontré HRC, DHCC et TL K1.

 16   R.  HRC c'était moi. Le DHCC c'était l'adjoint du chef du centre de

 17   coordination de Split, je ne me souviens pas de son nom. C'est un Italien.

 18   Ce doit être quelque part. Puis il y avait TL, chef d'équipe de l'équipe

 19   Kilo 1, Stig Marker-Hansen.

 20   Q.  Au deuxième paragraphe de cette rubrique, au numéro 2 :

 21   "Interrogé au sujet des activités de pillage, d'incendies criminels

 22   et de harcèlement qui se poursuivent, le général a dit que selon lui,

 23   c'était à la police de maîtriser la situation et que la Croatie était

 24   encore une nation dotée d'une constitution et où l'on faisait respecter

 25   l'état de droit. Toute personne commettant des crimes ferait l'objet de

 26   poursuites. Cependant, une guerre est toujours suivie de catastrophes et

 27   maintenant nous avons repris en main la situation."

 28   Ensuite, on peut lire, ça m'intéresse ce passage :

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  1   "Le général n'a pas d'objection à ce que les Serbes vivent en

  2   Croatie, mais il considère que c'est humain de haïr un ennemi qui a brûlé,

  3   pillé, qui a chassé votre famille. La guerre ne pourra pas prendre fin

  4   grâce seulement aux belles paroles d'une organisation internationale. Seule

  5   une armée croate puissante sera en mesure de le faire."

  6   Est-ce que ceci cadre avec ce dont vous vous souvenez de cette réunion ?

  7   R.  Oui. Même si nous ne rédigions pas tout à fait de la même manière,

  8   c'est ce que j'ai ressenti aussi quand j'ai dit qu'il était trop tôt pour

  9   faire preuve de souplesse. Je pense que ça va dans le sens de ce qui est

 10   dit ici "seule une armée croate puissante sera en mesure de le faire, pour

 11   prendre les choses en main."

 12   Q.  Merci, Monsieur Leschly.

 13   Je n'ai plus de questions à vous poser.

 14   M. KEHOE : [interprétation] Je ne sais pas si vous allez demander le

 15   versement au dossier de cette dernière pièce.

 16   M. HEDARALY : [interprétation] Oui, effectivement. Merci, Me Kehoe. Je

 17   souhaiterais demander le versement au dossier de la pièce 3419 [comme

 18   interprété].

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, ça vous donne d'ailleurs

 20   l'occasion de me dire si vous avez des objections ou pas.

 21   M. KEHOE : [interprétation] Non, moi-même j'allais demander son versement

 22   si M. Hedaraly ne l'avait pas fait. Je pensais qu'il allait le faire parce

 23   que ce document figure sur la liste 65 ter.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cette pièce portera la cote P895.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce P895 est versée au dossier en

 27   l'espèce.

 28   Monsieur Leschly, vous allez maintenant être contre-interrogé par Me Kehoe,

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  1   qui est l'avocat de M. Gotovina.

  2   Je vous donne la parole, Maître Kehoe.

  3   M. KEHOE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   Contre-interrogatoire par M. Kehoe : 

  5   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Leschly. Monsieur Leschly,

  6   j'aimerais vous présenter un organigramme de la MOCE. J'aimerais vous

  7   demander de vous pencher sur ce document pour me dire s'il y a des erreurs

  8   qui s'y sont glissées.

  9   Il s'agit de la pièce 1D 530007.

 10   Monsieur Leschly, nous avons ici un organigramme que nous avons préparé à

 11   partir des documents de la MOCE sur lesquels nous avons travaillé, et ceci,

 12   bien entendu, précède la réorganisation dont vous avez parlé au cours de

 13   votre interrogatoire principal. J'aimerais vous demander de jeter un coup

 14   d'œil à ce document et de nous dire en toute franchise si cet organigramme

 15   est exact et si ces personnes, effectivement, sont à la place qu'elles

 16   occupaient.

 17   R.  Oui. Celles dont je me souviens des noms, oui, mais les autres, je ne

 18   sais pas trop.

 19   Q.  A l'époque, le chef de la MOCE c'était M. Sanchez Rau ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Enfin, non. Je vais poser la question autrement. Est-ce qu'il y a quoi

 22   que ce soit qui vous choque, qui vous gêne dans cet organigramme, quelque

 23   chose qui soit faux ?

 24   R.  Non.

 25   Q.  On va passer à la page suivante, et ce que nous avons fait à la page 2

 26   de ce document, et je le répète entre parenthèses, ça précède la

 27   réorganisation, et nous avons ici le RC de Zagreb et le RC de Knin, centre

 28   régional de Knin, centre régional de Zagreb. Est-ce que ça correspond à

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  1   l'organigramme tel qu'il se présentait à l'époque ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Monsieur Leschly, dans le cadre de vos fonctions, vous étiez à la tête,

  4   je le rappelle, du centre régional de Zagreb, vous étiez également à la

  5   tête de la délégation danoise, la Dan-Del, n'est-ce pas ?

  6   R.  Non, pas vraiment. On n'appelait pas ça comme ça.

  7   Q.  La délégation danoise ?

  8   R.  Oui, la délégation danoise. J'étais chef de cette délégation.

  9   Q.  C'est parce que j'ai vu la chose abrégée avec l'expression suivante,

 10   Dan-Del, mais bon, peu importe. A Topusko, nous avons un certain Jensen,

 11   n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Il faisait partie de la délégation danoise à Topusko, et Topusko ça se

 14   trouvait dans la RSK, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Il me semble que si on regarde, par exemple, la personne qui se

 17   trouvait à Knin, on voit qu'il y avait Soren Liborius, qui relevait de M.

 18   Augarde.

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Vous souvenez-vous de ce dernier ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Est-ce que vous aviez des contacts avec lui pendant cette période même

 23   où vous étiez à la tête du RC de Zagreb alors que M. Augarde était chef du

 24   RC de Knin ?

 25   R.  Comme vous pouvez le constater ici, on était collègue. Lui, il

 26   s'occupait de son RC et moi du mien. A l'époque, on rendait compte tous

 27   deux au QG. Ensuite, quand ils ont fermé Knin, toute l'organisation a été

 28   remodelée.

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  1   Q.  Pendant qu'il était à la tête du centre régional de Knin, est-ce que

  2   vous avez eu des contacts avec M. Augarde alors que vous-même étiez à la

  3   tête du RC de Zagreb ?

  4   R.  Qu'est-ce que vous voulez dire par "consultation"; vous voulez dire

  5   qu'on comparait nos impressions, nos notes, et cetera, avant de produire

  6   nos rapports, parce que si c'est le sens de votre question, je dirais non.

  7   Nos rapports, nos comptes rendus, on les faisait nous-mêmes avant des les

  8   envoyer au QG, et on se rencontrait aussi au QG.

  9   Q.  Non, je parle de discussions que vous auriez eues avec M. Augarde de la

 10   situation ?

 11   R.  Non, on ne s'est pas rencontré très souvent parce qu'on travaillait

 12   chacun sur notre propre secteur. C'est de ça qu'on s'occupait.

 13   Q.  A l'échelon inférieur au vôtre, on voit les différents centres de

 14   coordination. Il y a M. Jensen par exemple, à Topusko. Vous vous appuyez

 15   beaucoup sur ces hommes, ces hommes qui travaillaient aux centres de

 16   coordination. Vous aviez besoin d'eux, vous étiez tributaire d'eux pour vos

 17   informations ?

 18   R.  Oui, oui, c'étaient nos yeux sur le terrain, si vous voulez.

 19   Q.  On va passer au tableau suivant, cet organigramme qui représente, je

 20   crois du moins, la situation telle qu'elle existait après les changements

 21   qui ont eu lieu au sein de la MOCE.

 22   Encore une fois même question, Monsieur Leschly, veuillez jeter un coup

 23   d'œil à cet organigramme. Essayez de nous dire s'il y a quoi que ce soit

 24   qui ne corresponde pas à la réalité dans cet organigramme ?

 25   R.  Au mieux de mes souvenirs, je ne serais plus en mesure de rédiger cela

 26   aujourd'hui. Mais je dois vous dire que tel que cela m'apparaît, je n'y

 27   vois pas d'erreur. 

 28   Q.  Très bien.

Page 9176

  1   M. KEHOE : [interprétation] Nous allons demander le versement de la pièce

  2   1D 530007.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly.

  4   M. HEDARALY : [interprétation] Le témoin ne peut pas dire que c'est erroné,

  5   mais de toute évidence ses souvenirs ne lui permettent pas d'authentifier

  6   cet organigramme. Donc par précaution, il me semble que nous n'avons pas

  7   véritablement de fondement. Nous ne savons pas ce qui a été utilisé pour

  8   réaliser cet organigramme. Le témoin peut confirmer certains éléments de

  9   l'organisation, mais aussi après l'avoir examiné pendant une demi-minute ou

 10   une minute, il a dit je ne suis pas certain, je ne m'en souviens pas. Je ne

 11   sais pas si c'est exact ou non.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Votre objection porte sur l'admission ou

 13   sur le poids ?

 14   M. HEDARALY : [interprétation] Sur l'authenticité de ce document.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A moins que vous contestiez l'auteur et

 16   l'origine du document, la question que je me pose est la suivante : est-ce

 17   que l'on conteste l'origine du document, est-ce que vous objectez ?

 18   M. HEDARALY : [interprétation] Non, à ce moment-là, je pense que c'est

 19   plutôt la question du poids qui se pose.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faut savoir exactement de quoi on

 21   parle lorsqu'on parle d'authenticité. L'authenticité peut signifier que

 22   vous remettez en cause le versement de la pièce. Dites-nous exactement ce

 23   que vous entendez par là ?

 24   M. HEDARALY : [interprétation] Mais il s'agit plus précisément de ce que le

 25   témoin a dit au sujet du document. Ce sont les propos du témoin qui donnent

 26   toute la valeur au document.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais le témoin a dit que sur la base de

 28   ce dont il se souvenait, il ne voyait pas d'inexactitude dans le document.

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  1   Donc c'est plutôt le poids que vous contestez. Vous remettez en cause le

  2   poids du document. Mais à partir de ce moment-là, il revient à la Chambre

  3   de voir la décision qu'elle prendra à son tour le moment voulu.

  4   M. KEHOE : [interprétation] De manière conjointe, la Défense souhaiterait

  5   véritablement que des modifications soient apportées s'il est nécessaire

  6   pour que ce document soit tout à fait exact.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous pourriez facilement vous

  8   mettre d'accord entre vous sans que l'on perde du temps à faire cela dans

  9   le prétoire.

 10   M. HEDARALY : [interprétation] C'est la première fois que je vois le

 11   document.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, je ne vous reproche rien. Mais il

 13   s'agit là d'un cas typique où je m'attendrais à ce que les parties se

 14   mettent d'accord, qu'elles voient ce qui en est avant de présenter le

 15   document au témoin.

 16   Allez-y, je vous en prie, Monsieur le Greffier d'audience.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D797.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D797 est versée au dossier.

 19   M. KEHOE : [interprétation]

 20   Q.  Je voudrais à présent que l'on parle de rapports. A l'image de

 21   l'Accusation, je voudrais me pencher sur votre premier rapport en date du

 22   13 septembre. Vous évoquez la situation eu égard à l'opération Tempête --

 23   excusez-moi, c'est le 13 août. Vous rédigez un rapport pour la période qui

 24   va du 6 au 12 août et vous évoquez l'exemple le plus important de nettoyage

 25   ethnique volontaire qui se serait produit pendant la guerre des Balkans.

 26   J'aimerais savoir pourquoi vous parlez d'intentionnel, de "volontaire".

 27   Monsieur, avant de rédiger cela, saviez-vous quelle était la situation qui

 28   a prévalu en Slavonie occidentale, est-ce que vous savez qu'il y a eu une

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  1   opération qui a été menée, l'opération Eclair ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Je voudrais vous présenter un document, c'est la pièce D60. C'est un

  4   rapport des Nations Unies qui porte la date du 5 juillet 1995. Je voudrais

  5   la page 8, s'il vous plaît, du document, sous le chapitre "Réfugiés".

  6   Vous vous rappelez, n'est-ce pas, l'opération Eclair, elle s'est déroulée

  7   au mois de mai 1995, vous vous en souvenez ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Je vais vous donner lecture de ce qui est rédigé ici, ce que vous dites

 10   en juillet 1995 : 

 11   "Pendant les deux premières journées de l'opération militaire,

 12   jusqu'à 10 000 personnes se sont enfuies de la zone tenue par les Serbes en

 13   Slavonie occidentale, et surtout de la zone d'Okucani qui se situe de

 14   l'autre côté du pont sur la rivière Sava lorsqu'on s'engage vers la Bosnie-

 15   Herzégovine du nord. Les autorités de la RSK avaient précédemment organisé

 16   des exercices à l'évacuation. Il y a des rapports disant que parmi les

 17   réfugiés, il y en a eu qui avaient été forcés à partir contre leur gré." 

 18    S'il vous plaît, avant que l'on examine la suite, s'agissant de ces

 19   exercices d'évacuation, est-ce que vous êtes au courant de cela ?

 20   R.  Non.

 21   Q.  Vous n'avez appris aucun élément d'information là-dessus pendant que

 22   vous y étiez ?

 23   R.  Non, ceci ne semble me rappeler rien aujourd'hui. Il y avait pas mal de

 24   rapports, je vois celui-ci pour la première fois maintenant. Je suppose que

 25   ça avait lieu.

 26   Q.  Oublions pour l'instant ce rapport. Est-ce que vous vous souvenez

 27   d'avoir appris à l'époque --

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Attendez, nous allons demander quelque

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  1   chose avant cela. Vous examinez le rapport et vous nous dites, "ça a dû se

  2   produire", et en même temps vous nous affirmez, "je n'en sais rien". Est-ce

  3   que vous voulez dire dans le cadre de votre déposition qu'effectivement

  4   cela a dû se produire et que vous acceptez les informations que vous voyez

  5   dans ce rapport ou est-ce que vous voulez vous fonder sur d'autres sources

  6   d'information dans votre déposition ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas véritablement mené d'activité

  8   importante dans cette zone, donc je ne peux ni le confirmer ni l'infirmer

  9   ce rapport. Je suppose que --

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites dans la mesure où cela figure

 11   dans le rapport.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Mais je n'ai pas véritablement d'avis là-

 13   dessus, puisque je n'ai pas véritablement pris part à tout cela.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie, Maître Kehoe, vous avez

 15   la parole.

 16   M. KEHOE : [interprétation]

 17   Q.  Pour l'instant, oublions ce rapport. Est-ce que vous avez jamais reçu

 18   des éléments vous permettant de savoir que la RSK menait à bien en Slavonie

 19   occidentale des exercices d'évacuation réguliers ?

 20   R.  Non, cela me semble nouveau.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il me semble que le témoin vous a

 22   répondu.

 23   M. KEHOE : [interprétation] Mais j'essayais de faire abstraction du rapport

 24   --

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais vous avez un rapport qui

 26   évoque ces exercices d'évacuation. Par la suite vous posez la question au

 27   témoin, qui vous répond par la négative, ensuite vous vérifiez : est-ce

 28   qu'il avait d'autres sources d'information. Et puis vous dites : "Laissons

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  1   le rapport de côté."

  2   M. KEHOE : [interprétation] Mais j'essaie de tirer au clair sur quoi se

  3   fonde le rapport --

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais --

  5   M. KEHOE : [interprétation] J'essaie de mettre de côté le rapport et

  6   j'essaie de lui poser la question sur les exercices d'évacuation.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous vous répétez. Qu'il s'agisse

  8   d'un interrogatoire principal ou d'un contre-interrogatoire, ceci nous fait

  9   perdre du temps.

 10   Allez-y. Vous avez la parole.

 11   M. KEHOE : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur Leschly, est-ce que vous étiez au courant d'une initiative

 13   lancée par les Nations Unies intitulée "Passage en toute sécurité", où les

 14   Nations Unies ont apporté leur concours aux Serbes pour quitter la zone de

 15   Slavonie occidentale ?

 16   R.  Non.

 17   Q.  Je vais vous soumettre quelque chose à présent, c'est une vidéo, la

 18   vidéo D136, et nous allons parler de la Krajina telle qu'elle se présentait

 19   en juillet 1995.

 20   [Diffusion de la cassette vidéo]

 21   M. KEHOE : [interprétation] Arrêtez, s'il vous plaît.

 22   Q.  Monsieur Leschly, pendant que vous étiez en mission à Zagreb, et je

 23   vous soumets que ceci a été versé au dossier, donc c'est ce que nous avons

 24   au compte rendu d'audience, à savoir qu'il y a eu des exercices

 25   d'évacuation qui ont été menés par la RSK, est-ce que vous saviez que la

 26   RSK a mis sur pied ces exercices d'évacuation avant l'opération Tempête ?

 27   R.  [aucune interprétation]

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly.

Page 9181

  1   M. HEDARALY : [interprétation] Mais il a répondu à la question.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, le témoin a répondu à la question.

  3   Poursuivez, Maître Kehoe.

  4   M. KEHOE : [interprétation] Prenons la pièce D138.

  5   Q.  Monsieur, c'est un rapport qui porte la date du 31 juillet 1995. Est-ce

  6   que vous pouvez agrandir, s'il vous plaît. Ce rapport porte sur des

  7   préparatifs menés aux fins d'une évacuation. Est-ce que vous pouvez, s'il

  8   vous plaît, examiner le milieu de la page, la ligne commence par "spécial"

  9   --

 10   R.  "Il convient de souligner en particulier" ?

 11   Q.  "On a particulièrement insisté sur la mise à l'abri et des actions qui

 12   sont des mesures préparatoires précédant une évacuation. Tous les

 13   commissaires ont mené à bien leurs missions et les rapports provenant des

 14   communautés locales ont été présentés au QG de la protection civile. La

 15   liste des personnes qui doivent être évacuées a été mise à jour. Le

 16   carburant a été distribué", et cetera.

 17   Le personnel que vous aviez dans vos centres régionaux dans la Krajina,

 18   est-ce que parmi eux qui que ce soit vous a parlé de ces contacts avec

 19   l'administration de la RSK, disant que ces préparatifs, le fait de dresser

 20   des listes, de vérifier l'état du carburant, de la vérification de l'état

 21   des véhicules, est-ce qu'ils vous ont dit que ceci a eu lieu même avant

 22   l'opération Tempête, avant que celle-ci ne commence ?

 23   R.  D'après mes souvenirs, non, -- enfin, aujourd'hui je ne m'en souviens

 24   pas -- ceci ne semble pas correspondre aux impressions que j'avais. Mais

 25   oui, il y a eu nécessairement des rapports que je n'ai pas remarqués à

 26   l'époque, mais ce n'était pas quelque chose de très important.

 27   Vous m'avez cité Ben Jensen, et lui, il a parlé d'un défilé militaire

 28   et il pensait que ceci en fait contredisait ce que nous pensions à

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  1   l'époque, à savoir que la RSK était capable d'opposer une résistance. Donc,

  2   comme je l'ai déjà expliqué aujourd'hui, il était question du terme "de son

  3   propre gré". Je ne pense pas que ce soit le bon terme. Il n'y avait pas

  4   véritablement de défense militaire.

  5   Q.  Monsieur Leschly, aujourd'hui dans le cadre de votre déposition, vous

  6   nous affirmez que vous ne saviez rien des préparatifs à l'évacuation qui

  7   ont été menés à bien par la RSK et qui ont précédé l'opération Tempête ?

  8   R.  Je n'irais pas jusqu'à exclure que ceci aurait été mentionné à un

  9   endroit ou à un autre, mais si vous voulez que je vous confirme ou non que

 10   j'étais au courant des exercices d'évacuation, probablement je vous dirais

 11   "non" aujourd'hui.

 12   Q.  Si vous pouviez maintenant vous pencher sur la pièce D137,  le jour où

 13   l'opération Tempête a été lancée, nous avons ici le document qui est

 14   l'ordre d'évacuation qui a été signé par Milan Martic, c'est l'ordre

 15   portant évacuation à 16 heures 45 en date du 4 août. Le président Martic au

 16   point 1 parle du plan d'évacuation; point 2, il dit que c'est conformément

 17   aux axes d'évacuation déjà préparés, est-ce que vous étiez au courant de

 18   cela ?

 19   R.  Non.

 20   Q.  Monsieur Leschly, vous ne vous en souvenez pas ou votre personnel basé

 21   à Knin ne vous en a-t-il pas informé ?

 22   R.  Je ne me souviens pas d'avoir été informé de cela. Je sais bien sûr

 23   qu'il y a eu des civils qui sont partis, et comme à chaque fois que

 24   quelqu'un se met en mouvement, on essaie de faire cela de manière

 25   organisée. Mais qu'il y ait eu des documents attestant de cela, c'est

 26   quelque chose que je ne pense pas avoir eu l'occasion de voir.

 27   Q.  Mais très précisément, je vous ai demandé si votre personnel à Knin

 28   vous a dit que les autorités de la RSK avaient annoncé à la population

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  1   civile de procéder à l'évacuation conformément au plan d'évacuation qui

  2   avait été établi au préalable ?

  3   M. HEDARALY : [interprétation] Mais si le témoin dit qu'il n'était pas au

  4   courant, s'il ne se souvient pas.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout d'abord, Maître Kehoe, c'est la

  6   deuxième fois que vous posez votre question, et nous voyons que le témoin

  7   essaie au mieux de se rappeler quelque chose qui pourrait lui permettre de

  8   répondre.

  9   M. KEHOE : [interprétation] Je vais aller de l'avant.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous ne lui avez jamais apporté des

 11   éléments supplémentaires qui lui auraient permis de se rappeler.

 12   M. KEHOE : [interprétation] Je vais poursuivre.

 13   Q.  Dans le secteur nord, vous vous souvenez que la RSK ait demandé

 14   l'assistance des Nations Unies pour procéder à l'évacuation de la

 15   population civile ?

 16   R.  [aucune interprétation]

 17   L'INTERPRÈTE : Le témoin semble répondre par la négative.

 18   M. KEHOE : [interprétation] Je vais demander le versement d'un document

 19   directement, c'est possible ?

 20   Q.  Vous avez rédigé ce rapport -- et je parle de la pièce P89 [comme

 21   interprété]. Vous avez rédigé ce rapport au sujet de ce nettoyage ethnique

 22   délibéré, mais dans l'introduction à ce rapport, vous n'avez pas évoqué le

 23   fait que vous aviez à l'esprit l'armée qui procédait à ce nettoyage ?

 24   R.  Je ne vous ai pas très bien compris.

 25   Q.  Vous nous avez parlé aujourd'hui de ce "nettoyage ethnique

 26   intentionnel" -- c'est au paragraphe 14. Vous parliez du "retrait précoce

 27   de l'armée". C'est ce que vous avez dit ?

 28   R.  Non. Je ne voulais pas dire cela. Il n'y avait pas véritablement de

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  1   combat, il n'y avait pas de véritable affrontement, et il y avait ce défilé

  2   militaire qui s'était placé un mois auparavant. Finalement les combats

  3   intenses n'ont pas éclaté.

  4   Une des choses intéressantes au sujet début août, et je dois dire que

  5   j'étais en permission lorsque l'opération Tempête a été lancée, donc pour

  6   ce qui est des rapports du 4 et du 5 août, normalement ils seraient arrivés

  7   à Zagreb pendant que j'étais en déplacement, j'étais au Danemark. Je

  8   n'étais pas nécessairement au Danemark mais c'est possible que j'y aie été

  9   à ce moment-là. Il se peut qu'il y ait eu des rapports qui ont été

 10   présentés pendant que j'étais absent. Si je me souviens bien, je suis

 11   revenu le 9 ou le 10. Normalement il y a peut-être des choses au sujet

 12   desquelles j'ai dû m'informer quand je suis revenu.

 13   Q.  Qui a été nettoyé ethniquement volontairement ?

 14   R.  Personne ne souhaite faire l'objet de ça.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous parlons maintenant de

 16   l'appartenance ethnique, de ceux qui ont été nettoyés.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Qu'est-ce que c'est ce terme, l'appartenance

 18   ethnique ? Vous voulez dire l'appartenance à un groupe ethnique ?

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, l'appartenance de ceux qui, semble-

 20   t-il, d'après vos dires, ont été délibérément nettoyés.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] J'essaie de retirer ce terme et c'est pour la

 22   quatrième fois lorsque l'on parle de la population civile. Je voudrais

 23   retirer ce terme, parce que je ne pense pas que ce terme soit bien choisi.

 24   Il n'y a pas eu de conflit important, et il n'y a véritablement eu de

 25   résistance opposée. Et puis le chiffre que nous avons vu, 200 000, je ne

 26   sais pas, mais c'est un chiffre que nous avons souvent entendu.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y, Maître Kehoe.

 28   M. KEHOE : [interprétation]

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  1   Q.  Monsieur Leschly, dans votre déclaration, si vous voulez bien,

  2   paragraphe 14 de la pièce P888. Dans la dernière ligne de ce paragraphe,

  3   vous dites que le terme "délibéré" concerne le retrait précoce de l'ARSK."

  4   Vous le voyez ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Alors --

  7   M. HEDARALY : [interprétation] Je voudrais m'assurer que le témoin l'a bien

  8   sous les yeux, puisque ce n'est pas à l'écran.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vois que ça vient d'être écrit là.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez votre déclaration ? Sinon,

 11   nous pouvons vous la faire remettre pour que vous puissiez prendre

 12   connaissance du paragraphe 14.

 13   Oui, tout à fait, c'est votre déclaration, du moins d'après ce que je vois

 14   à distance. Prenez, s'il vous plaît, la page 3.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, maintenant. Oui, très bien.

 16   Oui, eu égard aux militaires. Oui, ce n'était certainement pas la

 17   population qui est concernée par ce terme. De notre point de vue à ce

 18   moment-là, les militaires n'ont pas véritablement opposé une résistance

 19   très convaincante. Peut-être que certains ne seraient pas d'accord avec

 20   cela, mais c'est l'impression que nous avons eue.

 21    M. KEHOE : [interprétation]

 22   Q.  C'est la déclaration que vous avez rédigée à l'époque, et je vous

 23   demande, par conséquent, s'agissant de ce nettoyage ethnique, est-ce que

 24   vous parlez des civils serbes, des militaires, ou des deux ?

 25   M. HEDARALY : [interprétation] Excusez-moi, mais il me semble que le témoin

 26   a répondu.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On est revenu sur cela à plusieurs

 28   reprises. Je ne sais pas quelle serait la meilleure façon de procéder.

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  1   Monsieur Leschly, nous aimerions tous pouvoir comprendre ce que vous dites

  2   dans le paragraphe 14. Cette déclaration offre plusieurs aspects.

  3   Vous parlez du plus grand nettoyage ethnique délibéré qui se soit

  4   produit et vous dites : "Je fais référence à cela eu égard aux militaires."

  5   Là, il y a deux questions. Il y a le nettoyage ethnique délibéré, cela se

  6   réfère aux personnes qui ont quitté une zone. Et lorsque vous parlez du

  7   nettoyage ethnique, est-ce que vous aviez à l'esprit la population civile,

  8   ou est-ce qu'à ce moment-là vous pensiez aux militaires, ou est-ce que vous

  9   pensiez aux deux ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pensais surtout aux civils. C'est la raison

 11   pour laquelle le "délibéré" doit être retiré, parce que dans mon esprit

 12   ceci avait à voir avec les militaires. A l'époque j'occupais un poste

 13   civil, à la différence de mes collègues, je m'occupais très peu des aspects

 14   militaires.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si je vous ai bien compris, vous avez

 16   employé le terme "délibéré" avant tout - corrigez-moi, si je me trompe -

 17   avant tout pour faire état du fait que les individus qui quittaient la zone

 18   n'étaient pas forcés de le faire du fait des opérations militaires, et que

 19   dans la mesure où c'était de cette manière-là que cela s'est produit, c'est

 20   de leur propre chef qu'ils sont partis, ce n'était pas de leur propre chef

 21   qu'ils souhaitaient partir, comme vous nous l'avez dit précédemment.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc c'est ce que vous dites au

 24   paragraphe 14 ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous souhaitez préciser --

 27   M. KEHOE : [interprétation]

 28   Q.  Donc lorsque vous parlez de "délibéré", cela se réfère à l'armée et le

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  1   "nettoyage ethnique" de la population civile.

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Donc les civils ne sont pas partis parce qu'ils étaient forcés à

  4   partir, ils sont partis parce que l'armée partait ?

  5   R.  Parce que la situation l'a dicté.

  6   Q.  Nous allons continuer d'examiner la suite de votre rapport. Il y a un

  7   commentaire dans ce rapport, deuxième ligne, plus exactement : 

  8   "L'exécution par les Croates de l'opération Tempête a donné au pays

  9   exactement ce qu'il recherchait, à savoir une terre sans population."

 10   Ces mots, c'est M. Jensen qui vous les a donnés sous forme de

 11   commentaire ?

 12   R.  C'est bien possible. Je ne peux pas répondre par l'affirmative, mais je

 13   dirais que c'est une possibilité que je ne peux pas exclure, car je le

 14   connais, c'est bien quelque chose qu'il aurait pu dire.

 15   Q.  Savez-vous si M. Jensen tient ces mots de Milan Martic ?

 16   R.  Ça non, je ne sais pas.

 17   Q.  Vous ne savez pas ?

 18   R.  Non. Je n'en ai aucun souvenir.

 19   Q.  Vous en avez parlé au paragraphe 12 de votre déclaration préalable, que

 20   nous allons, si vous le voulez bien, examiner ensemble. Vous dites ceci :

 21   "Quand j'ai dit que le pays voulait des terres sans leur population,

 22   c'était basé sur ce que j'avais lu, ce que j'avais entendu dire, et aussi

 23   sur ce que j'ai vécu plus tard en Croatie…"

 24   Vous avez écrit ce rapport le 13 août 1995. A ce moment-là, vous ne vous

 25   étiez pas rendu dans le secteur sud depuis l'opération Tempête ?

 26   R.  Non.

 27   Q.  Si je lis bien ce que vous avez écrit, ce commentaire que vous formulez

 28   le 13 août lorsque vous dites que la Croatie voulait des terres sans leur

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  1   population, il est écrit avant que vous n'en ayez fait vous-même

  2   l'expérience plus tard, c'est bien exact, n'est-ce pas ?

  3   R.  Je ne sais pas si je vous ai bien compris.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si j'essaie de comprendre la question

  5   qui vous est posée, c'est Me Kehoe qui vous demande cela et il va me

  6   corriger si je fais une mauvaise lecture de sa question, au moment où vous

  7   avez écrit ce commentaire, lorsque vous faites référence à une expérience

  8   vécue plus tard, ça veut dire qu'à ce moment-là vous n'avez pas encore vécu

  9   ces événements ?

 10   M. KEHOE : [interprétation] Tout à fait.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant, c'est l'obscurité la plus

 12   profonde qui règne dans mon esprit. Maître Kehoe, essayez de poser les

 13   questions de façon à ce que le témoin et les Juges comprennent.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me souviens plus exactement aujourd'hui

 15   où j'étais, mais je n'exclus pas la possibilité que j'ai déjà été dans le

 16   secteur nord à mon retour du Danemark. C'est une possibilité que je ne veux

 17   pas exclure.

 18   M. KEHOE : [interprétation]

 19   Q.  Mais le fait est que vous avez écrit cela au paragraphe 12, cette

 20   déclaration se base sur l'expérience que vous avez acquise après avoir

 21   écrit ces mots. N'est-ce pas ce que vous dites dans votre déclaration

 22   préalable, au paragraphe 12 de votre déclaration ?

 23   R.  Mais ça vient du mois de février 2007 cette déclaration.

 24   Q.  Je comprends, Monsieur le Témoin, mais relisez cette première phrase.

 25   R.  On dit aussi effectivement plus tard ce que j'ai vécu comme expérience.

 26   Mais après -- c'est un peu comme le terme que j'avais mal utilisé

 27   quand j'avais dit "voluntary", ici, ce que j'ai vu personnellement ce ne

 28   sont pas des actions parce qu'en général les observateurs de la MOCE

Page 9190

  1   étaient tenus à l'écart s'il y avait des actions militaires en cours, donc

  2   ici, il est erroné de formuler le texte comme je l'ai fait, parce que

  3   l'observation de l'expérience que j'ai faite moi-même, c'est lorsque nous

  4   avons vu les maisons qui avaient été incendiées, le bétail, tout ça, mais

  5   je n'étais pas du tout sur les actions militaires lorsqu'elles se sont

  6   produites.

  7   Q.  Vous dites aussi que ceci s'appuie sur ce que vous avez entendu dire.

  8   Est-ce que ce que vous avez entendu dire ne vient pas en partie de M.

  9   Jensen ?

 10   R.  C'est bien possible. Je ne l'exclus pas.

 11   Q.  Peut-on afficher la pièce 1D 410149, déclaration recueillie par le

 12   bureau du Procureur versée dans le procès Milosevic, et c'est la

 13   déclaration d'un Slobodan Lazarevic.

 14   M. KEHOE : [interprétation] Nous demandons le versement provisoire de ce

 15   document en application de l'article 92 bis, une fois que nous aurons

 16   obtenu la certification requise pour le 92 bis.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que c'est 92 bis ou 92 ter ?

 18   M. KEHOE : [interprétation] Nous allons déposer une requête à cet effet. Ça

 19   devrait être en application du 92 bis, parce que M. Lazarevic ne parle pas

 20   de façon précise de l'un des accusés, ce qui veut dire qu'ici, nous

 21   répondons aux critères imposés par le 92 ter.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly, vous ne vous opposez

 23   pas à ce que cette déclaration soit présentée par Me Kehoe ?

 24   M. HEDARALY : [interprétation] Tant que la procédure est respectée, si on

 25   parle d'abord du sujet au témoin.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui. Mais je ne sais toujours pas

 27   ce que vous voulez demander au témoin, Maître Kehoe, je ne sais pas si vous

 28   voulez présenter un élément de cette déclaration au témoin que vous n'avez

Page 9191

  1   pas encore présenté au témoin, il faut d'abord le faire. Mais peut-être que

  2   vous avez déjà abordé le sujet de façon exhaustive.

  3   M. KEHOE : [interprétation] Non, pas du tout.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Présentez le sujet au témoin, et en cas

  5   de besoin, il faudra peut-être présenter la déclaration de M. Lazarevic au

  6   témoin.

  7   M. HEDARALY : [interprétation] Pour que la procédure soit pertinente, il

  8   faudrait dire qu'il y a une déclaration préalable qu'on veut montrer au

  9   témoin, il faudrait le préciser. Sinon, c'est assez inutile.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais ce qui est fait est fait. Le mal

 11   est fait, et maintenant, Me Kehoe est invité à soumettre le sujet au témoin

 12   avant de présenter une déclaration quel que soit ce témoin.

 13   M. KEHOE : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur le Témoin, nous avons dit que M. Jensen était allé à Topusko,

 15   nous avons vu ça dans l'organigramme, et que ce bureau se trouvait dans

 16   l'ARSK, n'est-ce pas ? Est-ce que M. Jensen a collaboré avec les autorités

 17   serbes ?

 18   R.  Je ne pense pas. Ça ne fait pas l'ombre d'un doute, il a passé beaucoup

 19   de temps avec les autorités serbes, mais quand on dit "collaborateur", ça

 20   veut dire qu'on demande à quelqu'un de faire quelque chose pour vous. Je

 21   pense que c'était un des Danois qui était le plus favorable aux Serbes,

 22   d'ailleurs, il n'en faisait pas un secret, il ne le dissimulait pas. Mais

 23   de là à dire qu'il a collaboré directement, ça, je n'oserais pas le dire.

 24   Q.  Est-ce que vous saviez que M. Jensen montrait ses rapports aux

 25   représentants officiels de la RSK avant de les envoyer à Zagreb ?

 26   R.  Non, ça je ne le sais pas.

 27   Q.  Est-ce que vous connaissez l'interprète qu'il utilisait ? Elle

 28   s'appelle Tanja Zoric.

Page 9192

  1   R.  Ça ne me dit rien ce nom. Il est bien possible que j'aie rencontrée

  2   cette dame, bien sûr.

  3   Q.  Mais vous ne vous souvenez pas du tout d'elle ?

  4   R.  Non.

  5   Q.  Savez-vous si la RSK a donné une petite amie à M. Jensen ?

  6   Quand je dis la RSK je devrais dire le service du renseignement ?

  7   R.  Non.

  8   Q.  Savez-vous si la RSK ou le service du renseignement serbe opérait au

  9   sein de la MOCE pour faire obstruction au travail que devait faire la MOCE

 10   ?

 11   R.  Non.

 12   Q.  Je voudrais vous montrer la déclaration faite par M. Lazarevic pour

 13   voir si ceci permet d'éclairer tel ou tel point.

 14   Prenons, si vous le voulez bien, la dixième page du document.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois l'heure qu'il est. Maître Kehoe,

 16   je ne voulais pas interrompre votre dernière série de questions, mais si

 17   maintenant nous procédons à l'examen de documents, il est sans doute

 18   préférable de faire une pause auparavant.

 19   Nous reprendrons à 16 heures 30.  

 20   --- L'audience est suspendue à 16 heures 10.

 21   --- L'audience est reprise à 16 heures 32.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, la Chambre de première

 23   instance a demandé ce à quoi elle s'attendait de votre part, car nous ne

 24   savons pas du tout -- enfin, j'exagère quand je dis que nous ne savons pas

 25   "du tout" ce qu'il y a dans la déclaration de M. Lazarevic, ce que nous

 26   voudrions éviter, c'est une situation dans laquelle nous allons soumettre

 27   au témoin l'avis éventuel qu'ont des tierces personnes sur certains. Un

 28   exemple, si ce témoin ne connaît pas du tout les faits sur lesquels l'autre

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  1   personne s'est appuyée pour tirer telle ou telle conclusion, pour se former

  2   un avis, ce n'est pas très utile. Alors, attachez-vous surtout à préciser

  3   les faits qui se trouvent peut-être dans cette déclaration plutôt qu'aux

  4   conclusions, vérifiez d'abord si ces éléments factuels sont connus du

  5   témoin ici présent, et dans l'affirmative, s'il les a pris en compte dans

  6   la réflexion qui est à la base de la réponse précédente qu'il a fournie, en

  7   effet, il était tout à fait clair en ce qui concerne M. Jensen. S'il vous

  8   plaît, concentrez-vous sur des faits plutôt que sur des conclusions tirées

  9   par autrui sur ces faits, des faits que ne connaît peut-être pas du tout le

 10   témoin. Vérifiez d'abord ces faits.

 11   M. KEHOE : [interprétation] Tout à fait.

 12   Q.  Vous nous avez dit, Monsieur Leschly, que M. Jensen était très pro-

 13   Serbe. Pourquoi avez-vous tiré cette conclusion ? Qu'est-ce qui vous a fait

 14   penser qu'il était très pro-Serbe ?

 15   R.  C'est ce qu'il a dit.

 16   Q.  Qu'est-ce qu'il a dit exactement ?

 17   R.  Ça, je ne sais pas exactement.

 18   Q.  Non. Je retire le mot "exactement" de ma question.

 19   R.  Je ne sais pas. On a dit beaucoup de choses il y a 13 ans. Je ne me

 20   souviens pas de chacun des mots prononcés, mais ce n'était pas un secret,

 21   il n'a jamais dissimulé le fait qu'à son avis, la RSK, était quelque chose

 22   de tout à fait O.K. et qu'il faudrait pouvoir maintenir. Il avait commencé

 23   dans le secteur est, c'est là que s'était trouvé son premier poste. Quant à

 24   savoir les mots précis qu'il a prononcés, je ne sais pas.

 25   Q.  Mais votre impression générale, lorsque vous lui avez parlé, c'est

 26   qu'il était très favorable à la position adoptée par les Serbes de Krajina

 27   ?

 28   R.  Oui.

Page 9194

  1   Q.  Je ne veux pas ici revenir sur des choses déjà examinées, mais vous

  2   avez dit, n'est-ce pas, à propos de son interprète, que vous ne connaissiez

  3   pas Tanja Zoric ?

  4   R.  C'est-à-dire que je sais que je l'ai rencontrée, car quand je l'ai vu,

  5   quand on s'est rencontrés, il était souvent avec son interprète, et nous

  6   tous aussi d'ailleurs --

  7   Q.  Est-ce que vous saviez, c'est ce que je vous ai demandé, si le service

  8   de Renseignements de la RSK avait fourni une petite amie à M. Jensen, je

  9   vais aller un peu plus loin, est-ce que vous savez si M. Jensen avait une

 10   petite amie Serbe répondant au prénom de Jelena ?

 11   R.  Non, je ne sais pas.

 12   Q.  Pendant que M. Jensen se trouvait à Topusko, est-ce que vous savez que

 13   la RSK lui avait donné une maison et assuré une surveillance policière,

 14   donc ça ressemblait à une mini-ambassade danoise ?

 15   R.  Non, je ne savais pas. Il a réussi à garder ceci sous le sceau du

 16   secret, puisqu'il est policier, il doit savoir comment s'y prendre.

 17   Q.  A faire quoi ?

 18   R.  Je ne sais pas, veiller à ce que ne soit connu à l'extérieur que ce qui

 19   lui semble convenable à lui.

 20   Q.  Si M. Lazarevic a dit au bureau du Procureur que M. Jensen avait

 21   coutume de rédiger des rapports pour la MOCE mais qu'il les montrait

 22   d'abord à la RSK pour voir si celle-ci était d'accord avec ce qu'il disait

 23   dans ses rapports, c'est quelque chose qu'il vous aurait caché ?

 24   R.  Je suppose que oui, parce que je n'en ai pas entendu parler jusqu'à

 25   présent.

 26   M. KEHOE : [interprétation] Compte tenu de ce que vous nous avez dit

 27   auparavant, je voudrais mettre en exergue à l'intention des Juges certains

 28   passages de cette déclaration de M. Lazarevic.

Page 9195

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous voulez mettre ceci en exergue,

  2   attendons que vous ayez déposé la requête en application de l'article 92

  3   bis. Nous verrons à ce moment-là ce que cette déclaration contient. Et

  4   l'Accusation nous aura dit si à son avis cela est recevable sans qu'il y

  5   ait contre-interrogatoire, et vous pourrez tout à fait souligner ces

  6   passages plus tard à notre intention.

  7   Poursuivez.

  8   M. KEHOE : [interprétation]

  9   Q.  Une dernière chose à propos de M. Jensen. Après qu'il ait quitté la

 10   Krajina, il est allé au bureau la MOCE en Bosnie, est-ce que vous savez

 11   qu'il avait emmené Mme Zoric en Bosnie, alors qu'auparavant elle se

 12   trouvait au bureau de Topusko ? Est-ce que vous saviez cela ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  Une dernière chose à propos de M. Jensen. Vous avez eu des

 15   conversations avec M. Jensen. Est-ce qu'il vous a dit qu'il avait obtenu

 16   les plans de l'opération Tempête et qu'il les avait fournis à la RSK ?

 17   R.  Non, sûrement pas.

 18   M. KEHOE : [interprétation] Nous allons revenir à ce sujet dans un instant.

 19   [Le conseil de la Défense se concerte]

 20   M. KEHOE : [interprétation]

 21   Q.  Il y avait aussi M. Liborius de la délégation danoise sur lequel

 22   vous vous appuyez ?

 23   R.  Oui, mais je ne voudrais que vous disiez que je m'appuyais plus sur mes

 24   compatriotes que sur d'autres observateurs de la mission. Je ne serais pas

 25   inconditionnellement favorable à un compatriote, bien sûr, on avait

 26   l'avantage de parler la même langue, mais j'espère que j'ai eu le même

 27   comportement face à tous.

 28   Q.  Nous avons le rapport qui porte la cote 889, premier paragraphe. Une

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  1   question préliminaire : ce sont des rapports hebdomadaires, ce sont des

  2   évaluations qui avaient quelle vocation ?

  3   R.  C'est quelque chose dont j'ai hérité, les centres régionaux devaient

  4   faire des synthèses hebdomadaires. Ça ne s'inscrivait pas nécessairement

  5   dans la procédure habituelle où vous aviez un rapport de l'équipe au CC, du

  6   CC au CR, et puis ça allait aux rapports quotidiens, non, parce que ce qui

  7   quittait la mission c'était le rapport journalier. Mais c'est une tradition

  8   qui s'est transmise et on utilisait ceci pour en faire un rapport spécial

  9   éventuellement, si on estimait que c'était nécessaire.

 10   Q.  C'est destiné à donner un instantané de ce qui s'est passé au cours de

 11   la semaine au QG, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Dans ce premier paragraphe, vous vous plaigniez d'une chose, vous dites

 14   que les Serbes se sont servis de leur drapeau et d'une devise particulière.

 15   Vous voyez ça dans la pièce 889 ?

 16   R.  Je pense que vous avez un autre numéro.

 17   Q.  Je parle de la pièce P889, votre rapport du 13 août.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le 889 est une cote d'une pièce à

 19   conviction.

 20   M. KEHOE : [interprétation] Oui, c'est P889.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous ne pouvez pas attendre du témoin

 22   qu'il se souvienne de chacune des cotes du dossier.

 23   M. KEHOE : [interprétation]

 24   Q.  Oui, c'est votre rapport du 13 août.

 25   M. HEDARALY : [interprétation] C'est le deuxième intercalaire.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous parlez du document 026056 [comme

 27   interprété] ?

 28   M. KEHOE : [interprétation]

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  1   Q.  Exactement. Vous vous plaigniez de l'utilisation d'une certaine devise,

  2   du drapeau, vous voyez ce passage ?

  3   R.  Oui. Quelle est votre question ?

  4   Q.  Est-ce que ce sont d'autres griefs relayés par M. Jensen pour faire

  5   part de ce dont se plaignent les Serbes de Krajina ?

  6   R.  Non, ça c'est quelque chose de plus général que j'ai trouvé dès le

  7   début. Mon premier poste était à Knin, alors vous pouvez imaginer d'où je

  8   tiens ceci. Ce sont des Serbes de Krajina qui me l'ont dit.

  9   Q.  Quand ?

 10   R.  En 1993.

 11   Q.  Et ici nous sommes en 1995 ?

 12   R.  Oui. C'était quelque chose de récurent, d'incessant. C'était quelque

 13   chose de normal, qui n'était pas lié à tel ou tel mot, telle ou telle

 14   réunion.

 15   Q.  Est-ce que ce n'est pas ce dont ce servait la propagande serbe pour se

 16   plaindre ?

 17   R.  Quand on a la guerre, on a la propagande des deux côtés.

 18   Q.  Les Serbes de Krajina se plaignaient que la République de Croatie était

 19   un Etat fasciste, n'est-ce pas ?

 20   R.  Une des choses qui m'a très fort frappé quand je suis arrivé, c'est

 21   qu'on m'avait dit : "On a la cruauté des Croates par rapport aux Serbes."

 22   J'ai demandé : "Ça s'est passé quand ? La semaine dernière ?" Et on m'a

 23   répondu : "Non, non, en 1941."

 24   Q.  Parlons de la Deuxième Guerre mondiale.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître, je n'ai toujours pas trouvé le

 26   passage où il est question des drapeaux.

 27   M. KEHOE : [interprétation] C'est le résumé du 13 août. Vous voyez sous la

 28   rubrique "Situation politique".

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, maintenant j'ai trouvé le passage.

  2   Merci.

  3   M. KEHOE : [interprétation]

  4   Q.  C'est sans doute le quatrième intercalaire qui va nous intéresser

  5   maintenant, c'est votre résumé du 27 août 1995.

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Avant-dernier paragraphe qui concerne la semaine du 26 août 1995, vous

  8   voyez on parle d'un "voyage en train" ?

  9   R.  Oui, celui-là. Oui, j'ai été malmené à cause de ces questions.

 10    Q.  "Le président Tudjman a fait des discours à plusieurs arrêts pour

 11   arriver à Knin. Son triomphe télévisé et ses discours ont malheureusement

 12   fait le silence linguistique sur les rappels que ceci inspirait de

 13   quelqu'un d'autre qui était arrivé à Paris en 1940."

 14   Ce "quelqu'un d'autre qui était arrivé à Paris en 1940", c'était Adolf

 15   Hitler, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Ici vous faites l'équation entre Franjo Tudjman et Adolf Hitler, n'est-

 18   ce pas ?

 19   R.  Oui, et vous savez, j'ai été mis à mal pour cette mention ici comme

 20   pour l'autre, et j'ai dû présenter des excuses à des interprètes croates

 21   des plus gentils. Je suis parfaitement conscient du fait que c'est quelque

 22   chose que je n'aurais pas dû écrire, mais c'était effectivement un voyage

 23   triomphal. Mais cette image, ce n'est peut-être pas la métaphore la plus

 24   diplomatique que j'aurais pu utiliser, je suis d'accord avec vous.

 25   Q.  Vous êtes d'accord avec moi pour dire que Hitler quand il entrait dans

 26   Paris en 1940, il ne traversait pas des territoires qui faisaient partie de

 27   l'Allemagne ?

 28   R.  Non, pas du tout.

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  1   M. KEHOE : [interprétation] Prenons la pièce D741, c'est le carnet de notes

  2   de M. Liborius. Et plus précisément, nous allons examiner la page 18.

  3   Q.  Je vous le disais, ce sont les notes prises par M. Liborius, à la page

  4   18 de son carnet. Deuxième paragraphe, qui concerne ici aussi le 26 août.

  5   Il parle du train de la liberté du président Tudjman. Tudjman a promis

  6   qu'il allait ouvrir une voie ferrée en passant par Knin pour aller de

  7   Zagreb à Split, et il a tenu parole. Il parle comme le père de la patrie et

  8   il fait un discours de 12 minutes avec des résultats extraordinaires avec

  9   souvent une voix très particulière, et cette voix rappelle celle d'un autre

 10   chef d'état d'il y a environ 50 ans. Ici, je ne veux pas citer de noms." 

 11   Q.  Monsieur Leschly, vous et M. Liborius, est-ce que vous parliez du

 12   discours fait par le président Tudjman et est-ce que vous disiez de lui

 13   qu'il ressemblait à Adolf Hitler ?

 14   R.  Je sais que quand on s'est rencontré on a beaucoup bavardé. Mais dire

 15   aujourd'hui, oui, à ce moment-là on a parlé exactement de ça et on a fait

 16   cette comparaison, je ne sais pas. Mais que ceci ait surgi au détour d'une

 17   conversation, c'est tout à fait possible. Je ne dirais pas le contraire.

 18   Q.  Mais vous parlez encore du président Tudjman ailleurs dans votre

 19   première déclaration, plus exactement au paragraphe 17. Je parle de la

 20   déclaration fournie au bureau du Procureur. Vous avez cette déclaration

 21   sous le premier intercalaire.

 22   R.  Paragraphe 17 ?

 23   Q.  Paragraphe 17, dernière phrase.

 24   R.  "Oui. C'était mon impression…" ?

 25   Q.  Oui. "C'était mon impression que Tudjman n'était pas favorable à une

 26   solution négociée."

 27   R.  Oui, mais est-ce que là il n'était pas question d'un défilé militaire

 28   qui était destiné à montrer la capacité, la puissance militaire qui se

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  1   manifestait, le désir de trouver une solution militaire à la question.

  2   Q.  Vous avez rencontré le président Tudjman ?

  3   R.  Non.

  4   Q.  Vous connaissiez le plan Vance ?

  5   R.  Oui, je ne pourrais pas vous citer d'extrait de ce plan, mais je le

  6   connaissais.

  7   Q.  Le président Tudjman, est-ce qu'il a négocié le plan Vance ?

  8   R.  C'est une question que vous me posez ?

  9   Q.  Il y a eu plusieurs plans de paix qui ont été présentés en ex-

 10   Yougoslavie et je voudrais savoir si le président Tudjman a participé aux

 11   négociations concernant la totalité de ces plans ?

 12   R.  Je l'ignore.

 13   Q.  Connaissez-vous le plan Z4 ?

 14   R.  Z4, enfin, je ne le connais pas vraiment mais ça me dit quelque chose,

 15   "Z4".

 16   Q.  Est-ce que la chose suivante vous dit quelque chose, c'est que dans le

 17   cadre des négociations du plan Z4, il était notamment question d'octroyer

 18   une plus grande autonomie aux Serbes de la Krajina en Serbie.

 19   R.  Je vous crois sur parole, mais je ne m'en souviens pas. Moi, ce n'était

 20   pas mon niveau d'intervention.

 21   Q.  Précisons la chose. Dans le plan Z4, il était question des Serbes de

 22   Krajina en Croatie, n'est-ce pas ?

 23   R.  Il ne faut pas poser la question à moi, je ne connais pas ce plan. Je

 24   sais qu'il existait, qu'il s'appelait comme ça, mais je ne sais pas de quoi

 25   il retournait véritablement.

 26   Q.  Revenons à votre rapport du 13, en haut de la page 2, intercalaire 2 de

 27   votre classeur, pièce P889. Vous dites qu'il y a eu un nettoyage ethnique

 28   massif, considérable. Est-ce que vous voyez ce passage ?

Page 9202

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Quel est la base d'un tel nettoyage ethnique ?

  3   R.  La base ?

  4   Q.  Ces gens, ils étaient partis, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Comment est-ce qu'on fait pour nettoyer une zone où il n'y a plus

  7   personne ?

  8   R.  Mais il y a le mot ultérieur ici qui est mentionné. Oui, c'est bizarre,

  9   effectivement. Oui, vous avez raison, effectivement. Ils sont partis au

 10   moment des événements et pas après.

 11   Q.  Ce rapport date du 13, vous l'avez rédigé à cette date. J'aimerais vous

 12   présenter un document qui porte la cote 1D 530001. Il s'agit d'un document

 13   de la MOCE portant la date du 15 août 1995, deux jours après la rédaction

 14   de votre propre rapport.

 15   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur les Juges,

 16   voilà une question que nous avons soulevée par écrit précédemment et qui

 17   est la suivante, nous avons ici un document de la MOCE, et je répète une

 18   fois encore ce que nous avons indiqué par écrit, à savoir que nous avons

 19   une objection quant aux expurgations qui ont été apportées à ces documents

 20   par la MOCE.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois qu'une requête a été déposée à

 22   cet effet, elle est donc au dossier.

 23   M. KEHOE : [interprétation] Oui. Et vous avez accordé --

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'est pas utile d'acter pour le

 25   compte rendu les décisions de la Chambre.

 26   Continuez.

 27   M. KEHOE : [interprétation]

 28   Q.  Ce document, c'est le rapport de M. Rau, c'est le format qu'il adoptait

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  1   généralement pour préparer ces rapports ?

  2   R.  Je l'ignore. Ce qu'on peut voir c'est 15/08/95 --

  3   Q.  J'aimerais qu'on voie le haut de la page. C'est un rapport qui émane de

  4   la MOCE ?

  5   R.  Oui, c'est peut-être le format de ses rapports. Ça dépendait peut-être

  6   des présidences successives.

  7   Q.  Mais est-ce que c'est là le format habituel des rapports de M. Rau, on

  8   sait qu'il était chef de mission à Zagreb ?

  9   R.  Très franchement, je n'en sais rien du tout.

 10   Q.  J'aimerais qu'on affiche la troisième page de ce document. Le premier

 11   paragraphe entier ici sur cette page concerne le départ des Serbes :

 12   "Leur départ semble définitif. Les autorités de la Krajina, et en

 13   particulier le président Martic, ont encouragé leurs concitoyens à partir

 14   en insistant sur le fait que 'les Croates voulaient le territoire mais sans

 15   la population qui s'y trouve.'"

 16   Je m'intéresse ici à ce qui est cité dans ce document, ce que je viens de

 17   lire. Je me rappelle ce que vous avez dit dans votre déclaration. Vous avez

 18   dit que les Croates voulaient un territoire, une terre sans personne

 19   dessus, sans la population. Est-ce que cette information vous la tenez de

 20   M. Martic ?

 21   R.  Je n'en sais rien. C'est une phrase qui circulait à l'époque, c'était

 22   quelque chose qui circulait. Je ne sais pas qui est à l'origine de cette

 23   déclaration. Je n'en ai aucune idée. Vous, vous semblez avoir une petite

 24   idée, mais vous avez les rapports en question, mais moi, je ne me rappelle

 25   pas d'une source précise, de quelqu'un de précis qui aurait tenu ces propos

 26   particuliers.

 27   Q.  On conclut dans ce rapport que les Serbes de la Krajina ont encouragé

 28   leurs concitoyens à s'en aller. Or, ceci est contraire aux informations que

Page 9204

  1   vous envoyiez deux jours auparavant à votre QG, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui. C'est effectivement ce qui semble être le cas.

  3   Q.  Essayons de bien comprendre la situation, récapitulons les faits. On

  4   commence par votre rapport. Vous êtes fâché, vous êtes perturbé à l'époque

  5   parce que vous pensez que les Croates attendaient que l'attention de la

  6   communauté internationale se focalise sur Srebrenica pour lancer

  7   l'opération Tempête ?

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Procureur.

  9   M. HEDARALY : [interprétation] On est en train de déformer les propos du

 10   témoin.

 11   M. KEHOE : [interprétation] On va tout de suite examiner le rapport.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.

 13   M. KEHOE : [interprétation]

 14   Q.  Il s'agit du document qui se trouve à l'intercalaire 2, c'est le

 15   document et le rapport en date du 13 août, avant-dernier paragraphe au

 16   milieu :

 17   "La Croatie a attendu que ses amis étrangers…"

 18   Je m'arrête ici dans ma lecture. Qui sont ces amis étrangers ?

 19   R.  Pendant que j'étais sur place, il était manifeste que les deux pays qui

 20   soutenaient la Croatie, c'étaient les Etats-Unis d'Amérique et l'Allemagne.

 21   Q.  Ils ont attendu que leurs amis étrangers les aient aidés à mettre sur

 22   pied en un "laps de temps remarquablement court et en dépit de l'embargo

 23   sur les armes, une machine de guerre propre à s'imposer. Le timing du

 24   président Tudjman était parfait. Partout dans le monde les médias ne

 25   parlaient que des atrocités commises par les Serbes en Bosnie, si bien que

 26   c'était presque amusant d'observer la manière dont les médias

 27   internationaux se laissaient embarquer, lorsqu'il est apparu clairement

 28   qu'il n'y avait plus qu'une seule armée dans les Balkans capable de

Page 9205

  1   commettre des brutalités tout à fait superflues. Au moment où il était

  2   devenu manifeste que les méthodes de la HV étaient aussi déplorables que

  3   celles de l'armée des Serbes de Bosnie, les Etats-Unis, avec un timing

  4   parfait, ont publié des photographies qui montraient que la terre avait été

  5   récemment remuée à Srebrenica si bien que tout ce qui concernait la Croatie

  6   a été repoussé au second plan dans les médias."

  7   Monsieur le Témoin, à cette époque-là, il y avait eu Srebrenica,

  8   l'opération Tempête était terminée, et vous avez là un rapport qui vient de

  9   la MOCE et qui indique que le président Martic encourage les Serbes à

 10   partir. Vous et M. Liborius ainsi que d'autres décidez d'aller enquêter,

 11   décidez de trouver des éléments à l'appui de votre thèse concernant le

 12   nettoyage ethnique, n'est-ce pas exact ?

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Procureur.

 14   M. HEDARALY : [interprétation] On a déformé ici les faits parce que le

 15   rapport de la MOCE date du 15, c'est-à-dire après le rapport du témoin. Je

 16   pense que les questions qui sont posées ici sont des questions qui ont un

 17   caractère argumentatif. Poser des questions sur les faits c'est tout à fait

 18   acceptable, mais se lancer dans un débat, dans une discussion avec le

 19   témoin, ça n'a pas lieu d'être. Reprendre les faits donnés par le témoin,

 20   ça c'est acceptable. Mais l'accuser de s'être livré à telle ou telle

 21   activité, ça ce n'est pas possible.

 22   M. KEHOE : [interprétation] Je n'ai pas dit qu'ils avaient inventé quoi que

 23   ce soit.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pardon.

 25   M. KEHOE : [interprétation] Je n'ai pas dit qu'ils avaient inventé quoi que

 26   ce soit. Il a dit ce qu'il avait vu, et cetera.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous lui avez dit "vous et M. Liborius

 28   avez décidé", et cetera, et cetera, donc c'est ambigu. Essayons d'aller à

Page 9206

  1   l'essentiel. Les rapports, on le sait très bien, ne se limitent pas aux

  2   faits, comme nous l'a expliqué le témoin au début de son intervention, ces

  3   rapports contiennent aussi bien des faits que des impressions, donc on ne

  4   peut pas exclure qu'il parle de ces impressions et qu'on lui pose des

  5   questions à ce sujet pendant sa déposition.

  6   Parallèlement, je suis tout à fait d'accord avec le Procureur à croire

  7   qu'effectivement on ne doit pas se limiter aux faits, il faut limiter le

  8   caractère provocateur des questions.

  9   M. KEHOE : [interprétation] Tout à fait. Je demanderais le versement au

 10   dossier de la pièce que je viens de présenter, rapport de la MOCE du 15

 11   août 1995.

 12   M. HEDARALY : [interprétation] Pas d'objection.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Monsieur le Greffier.

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D798.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce est versée au dossier.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Pièce D741, page 13, journal de M. Liborius.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ne vous inquiétez pas, Monsieur le

 18   Témoin, le document en question va bientôt s'afficher.

 19   M. KEHOE : [interprétation]

 20   Q.  Je m'intéresse au haut de la page. Je viens de vous lire un rapport qui

 21   date du 15. Là nous sommes le 16 août :

 22   "Aujourd'hui, premier contact avec UMN."

 23   Qu'est-ce que ça veut dire ?

 24   R.  C'est le ministère danois des Affaires étrangères.

 25   Q.  "Mais bon Dieu, qu'est-ce qui se passe au niveau de la présidence

 26   espagnole." 

 27   A l'époque, Javier Solana était président de la MOCE, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui.

Page 9207

  1   Q.  Je crois que le chef de mission à Zagreb, M. Sanchez Rau, était

  2   également espagnol, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  "Mette et moi sommes d'accord sur le fait que je lui envoie 36 pages de

  5   documents qui présentent une image plus nuancée de la situation."

  6   Mette, c'est Mette Neilsen, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Elle est Danoise, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Maintenant elle est ambassadrice du Danemark en Serbie, n'est-ce pas ?

 11   R.  Je l'ignore. Je n'ai pas suivi la carrière de ces personnes.

 12   Q.  Quelle est la dernière fois que vous avez parlé à M. Liborius ?

 13   R.  Quand je suis parti en septembre 1996.

 14   Q.  Au paragraphe suivant : 

 15   "Maintenant, j'ai l'impression que je suis loin de Knin, loin de

 16   l'endroit où ont lieu véritablement les événements. Je parle de cette

 17   situation avec le HRC…"

 18   Le HRC, c'est vous, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  "Je fais une suggestion, à savoir que j'aille rapidement à Knin pour

 21   accentuer notre action à cet endroit."

 22   Monsieur le Témoin, vous avez parlé avec M. Liborius, après la

 23   publication du rapport de la MOCE dans lequel il était dit que Martic

 24   encourageait ses concitoyens à s'en aller, est-ce que vous lui avez dit --

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Procureur.

 26   M. HEDARALY : [interprétation] Me Kehoe peut terminer sa question. Je

 27   souhaite simplement présenter une objection.

 28   M. KEHOE : [interprétation]

Page 9208

  1   Q.  Est-ce que vous lui avez dit qu'il fallait qu'il aille sur le terrain

  2   pour trouver des éléments indiquant l'existence du nettoyage ethnique dans

  3   le secteur sud ?

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Procureur.

  5   M. HEDARALY : [interprétation] Il faut déjà qu'il donne les éléments

  6   justifiant cette question. Est-ce que cette réunion a eu lieu, par exemple,

  7   est-ce qu'il s'en souvient ? Ça ne suffit pas de lui montrer le journal de

  8   quelqu'un. Nous, nous ferions la même chose si nous lui présentions la

  9   déclaration d'un tiers. Il faut lui demander s'il se souvient de la réunion

 10   avant de lui présenter des éléments sur ce qui aurait eu lieu au cours de

 11   cette réunion.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'il est question d'une réunion, il est

 13   tout à fait acceptable de demander au témoin ce qui s'est passé au cours de

 14   cette réunion, de lui poser des questions à ce sujet. Comme ça on peut

 15   arriver à savoir pratiquement immédiatement s'il se souvient de cette

 16   réunion. Il nous le dira tout de suite.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais je ne vais pas imposer aux parties

 19   l'obligation de fournir la preuve d'éléments qui sont déjà au dossier. Tout

 20   dépend du témoin auquel on a affaire.

 21   Maître Kehoe.

 22   M. KEHOE : [interprétation]

 23   Q.  Est-ce que vous avez parlé à M. Liborius de la question, est-ce que

 24   vous lui avez dit d'aller voir en RSK quelles étaient les conséquences,

 25   l'impact de l'opération Tempête et ce qui pourrait étayer les allégations

 26   de nettoyage ethnique ?

 27   R.  Je ne me souviens pas.

 28   Q.  Mais vous vous souvenez en revanche d'avoir parlé à M. Liborius après

Page 9209

  1   réception du rapport du 15 août que nous vous avons présenté ?

  2   R.  Non. Quand il était à Zagreb, on se parlait plusieurs fois pendant la

  3   journée, mais on se parlait au téléphone. On n'avait pas des réunions. On

  4   avait des contacts normaux entre deux observateurs.

  5   Q.  Ça va un peu plus loin quand même, vous étiez à la tête de la

  6   délégation danoise, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Et M. Liborius --

  9   R.  Il a pris ma place. Il m'a succédé. Il travaillait au ministère des

 10   Affaires étrangères. Il jouissait d'une réputation bien meilleure que la

 11   mienne. Moi, j'étais un vieil officier de réserve alors que lui c'était un

 12   esprit acéré. Il écrivait des rapports brillants. On avait chacun un rôle

 13   très différent en fonction de nos aptitudes personnelles.

 14   Q.  Comme c'était lui qui savait écrire des rapports très fins, très

 15   travaillés, est-ce que vous lui avez dit d'aller sur le terrain et de

 16   préparer un rapport au sujet de l'impact de l'opération Tempête ?

 17   R.  Non.

 18   Q.  J'aimerais vous présenter la pièce P815. C'est un rapport de M.

 19   Liborius du 26 août où il est question des conséquences de l'opération

 20   Tempête en RSK. Vous souvenez-vous de ce rapport ?

 21   R.  Oui, je suis sûr de l'avoir vu, mais si vous me demandez de vous dire

 22   exactement ce qu'il renferme, je ne pourrais pas vous répondre, je ne peux

 23   vous donner aucun détail.

 24   Q.  Si on examine le contenu de ce rapport, vous ne vous souviendrez de

 25   rien; c'est ce que vous dites ?

 26   R.  Non, il est possible que je reconnaisse certains éléments.

 27   Q.  Dans ces conditions, nous allons passer en revue ce document. On va

 28   commencer par la quatrième page. Page suivante, s'il vous plaît.

Page 9210

  1   Examinons ce rapport où on voit une liste de villages. Vous verrez en haut

  2   de la page qu'il est question d'incendies, de destructions qui  ont été

  3   observées par la MOCE dans la partie sud du secteur sud.

  4   Vous souvenez-vous avoir passé en revue cette liste de villages

  5   détruits ?

  6   R.  Non, pas vraiment. Pas dans le détail.

  7   Q.  Vous n'avez aucun élément à ce sujet, aucune connaissance à ce sujet.

  8   Vous étiez chef du centre régional de la MOCE, c'était le 26 août, et à la

  9   lumière de tous ces éléments, regardez ce dont il est question ici au sujet

 10   de Gradac. Dans le bas de la page :

 11   "Visite à 12 heures 45, maisons incendiées, désertées."

 12   Est-ce que ça vous a permis de conclure immédiatement que c'était un

 13   village serbe qui était incendié ?

 14   R.  Oui, à ce moment-là, sans doute oui, parce que la date qui est indiquée

 15   ici c'est celle du 9 août 1995.

 16   Q.  Pendant cette période - je rappelle que vous dites ne pas vous souvenir

 17   de ce rapport - donc j'imagine que vous ne vous savez pas qu'au cours du

 18   recensement de 1991 il est apparu qu'il y avait à Gradac 96 % de Croates.

 19   Vous étiez à la tête du centre régional de la MOCE, est-ce que vous vous

 20   attendiez à ce niveau de détail dans ce genre de rapport pour que vous,

 21   supérieur hiérarchique, puissiez comprendre l'étendue des dégâts constatés

 22   dans le secteur sud ainsi que l'identité de ceux qui étaient à l'origine de

 23   ces dégâts ?

 24   R.  Je ne sais pas. Il faudrait que je relise peut-être la question.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, la question qui vient de vous être

 26   posée est assez compliquée.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ce n'est pas une question à laquelle on

 28   puisse répondre par oui ou par non.

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  1   M. KEHOE : [interprétation] Je vais reformuler.

  2   Q.  Nous avons le village de Gradac, il y en a plusieurs sur cette page,

  3   mais on a le village de Gradac, et le recensement de 1991 a montré que

  4   c'était un village croate à 96 %. Or, vous avez dit qu'en lisant ce rapport

  5   vous seriez arrivé à la conclusion que c'était un village serbe.

  6   R.  Il faut dire que Gradac c'est un des premiers endroits où je me suis

  7   rendu en tant qu'observateur, et il était manifeste qu'il y avait beaucoup

  8   de maisons incendiées, des maisons qui avaient brûlées quatre ans

  9   auparavant, non, plutôt deux ans auparavant, au cours de l'année 1993. Mais

 10   en août 1995, quand vous aviez des maisons incendiées, c'étaient très

 11   probablement des maisons croates à Gradac, parce que comme vous l'avez

 12   rappelé, c'était une localité où l'immense majorité de la population était

 13   croate, mais il y a eu quelques Serbes.

 14   Q.  On peut en conclure que vous auriez conclu vous-même que c'étaient les

 15   Croates qui incendiaient leurs propres maisons ?

 16   R.  Non, ce n'est pas ce que j'ai dit.

 17   Q.  Parlons maintenant, si c'est possible, de la rencontre que vous avez

 18   eue au cours de cette réunion avec le général Gotovina. Normalement, ce

 19   document se trouve à l'intercalaire 6, Monsieur.

 20   R.  Oui.

 21   Q.  C'est la pièce P893, je le précise pour le compte rendu.

 22   A la première page du rapport, vous évoquez une réunion avec le "zupan", et

 23   ce qui m'intéresse c'est la fin de ce passage. Vous expliquez dans ce

 24   rapport :

 25   "La réputation de la Croatie est mise à mal à cause des mesures de

 26   nettoyage ethnique mises en œuvre par la Croatie avec ou sans l'approbation

 27   des autorités en place. Zupan a nettement regretté, sans aucune réserve

 28   d'ailleurs, que rien de plus n'ait été fait pour rétablir l'ordre en

Page 9212

  1   proclamant l'état d'urgence dans les zones nouvellement libérées,

  2   regrettant même que la loi martiale n'ait pas été décrétée."

  3   Le "zupan" vous dit qu'on a commis une erreur en ne déclarant pas la loi

  4   martiale ou en ne proclamant pas l'état d'urgence ?

  5   R.  Tout ce que je peux vous dire 13 ans après cette réunion, c'est

  6   qu'apparemment il avait des regrets. Je ne dirais pas comme vous, et

  7   j'essaie de trouver le terme que vous avez utilisé, qu'il a reconnu qu'il

  8   avait fait une erreur. Non. J'ignore quel terme il a utilisé précisément.

  9   Là, j'ai écrit qu'il avait eu des regrets, ce n'est pas pareil que le fait

 10   de reconnaître qu'on a commis une erreur. Il était sans doute un petit peu

 11   désolé. C'est sans doute pour ça que j'ai présenté les choses comme je l'ai

 12   fait dans mon rapport.

 13   Q.  Il regrettait la chose ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Quand il y a loi martiale, ça veut dire que l'armée prend le contrôle

 16   de la zone concernée, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui, je crois que ça dépend suivant les pays. Je ne suis pas juriste,

 18   vous savez.

 19   Q.  En revanche, ce que vous savez c'est qu'à partir du 6 août 1995, les

 20   institutions civiles ont pris le relais dans le secteur sud en tout cas ?

 21   R.  C'est possible, je n'en sais rien.

 22   Q.  Quand vous avez pris vos fonctions en septembre 1995 en tant que chef

 23   du centre régional de Zagreb, est-ce que vous avez été informé du moment où

 24   la République de Croatie -- où les autorités civiles avaient pris le

 25   contrôle du secteur sud ?

 26   R.  Là, je suis complètement perdu. C'est le 6 juillet que je suis entré en

 27   poste.

 28   Q.  Vous êtes entré en fonction et vous êtes devenu le chef du centre

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  1   régional de Zagreb en appliquant le plan de réorganisation et à partir de

  2   ce moment-là le secteur sud s'est trouvé sous votre commandement ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  A ce moment-là, avez-vous appris que c'est à partir du 6 août que

  5   l'ordre constitutionnel croate a commencé à être appliqué et que les

  6   pouvoirs croates sont entrés en fonction ?

  7   R.  Je suppose qu'on me l'a dit.

  8   Q.  Mais vous ne vous en souvenez pas ?

  9   R.  Non.

 10   Q.  Parlons maintenant de votre conversation avec le général Gotovina. Dans

 11   ce rapport -- je ne voudrais pas faire d'erreur de chiffre.

 12   Vous dites dans ce rapport : "Le général Gotovina s'est vu poser la

 13   question qui était de savoir s'il partageait le point du "zupan" portant

 14   sur les meurtres et les incendies, mais la seule remarque qu'il ait faite,

 15   c'était que la communauté internationale n'avait pas le droit de gifler

 16   ainsi la Croatie."

 17   Parlons maintenant de la pièce P895, c'est le rapport en date du 20

 18   septembre 1995.

 19   Dans ce rapport, M. Leschly, au paragraphe 2, il est fait état d'un

 20   certain nombre de sujets qui ont fait l'objet de discussion, entre autres,

 21   la possibilité de la MOCE pour mener à bien des patrouilles du côté

 22   bosniaque de la frontière. Et puis, je vous cite le texte :

 23   "Jusqu'à présent ceci n'est pas possible, le général nous a promis de

 24   nous dire à partir de quel moment ça le sera.

 25   "Lorsqu'on lui a posé des questions sur des pillages, des

 26   harcèlements et des incendies qui étaient toujours en cours, l'opinion du

 27   général a été que la police devait prendre en main la situation…"

 28   Le général Gotovina, dans cette conversation que vous avez eue avec lui le

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  1   20 septembre, est-ce qu'il vous a dit que la police devait contrôler la

  2   situation ?

  3   R.  A en juger d'après ce que dit Stig Marker-Hansen, effectivement, il me

  4   l'a dit, mais maintenant si vous me posez la question si je m'en souviens,

  5   non, je ne m'en souviens pas, et je ne pourrais pas me souvenir des phrases

  6   qui ont été prononcées pendant une réunion qui s'est déroulée il y a 13

  7   ans.

  8   Q.  Est-ce que vous avez une raison de remettre en question ce qu'écrit

  9   Stig Marker-Hansen lorsqu'il dit que la police devait contrôler la

 10   situation ?

 11   R.  Non, je suppose que oui, c'est tout à fait ça --

 12   Q.  Vous seriez d'accord avec moi que ceci ne figure pas dans votre

 13   rapport.

 14   R.  C'est vrai, c'est vrai.

 15   Q.  Mais le 24 septembre 1995, vous avez rédigé votre rapport et vous avez

 16   dit que c'était la seule remarque proférée par le général Gotovina; ce

 17   n'était pas exact ?

 18   R.  Il semblerait que vous avez raison.

 19   Q.  En fait, ce n'est pas toute la vérité concernant le déroulement de

 20   cette réunion ?

 21   R.  Non, apparemment ce n'est pas ça.

 22   Q.  Par la suite, il dit :

 23   "La Croatie est toujours une nation qui a une constitution, c'est un

 24   Etat de droit. Et toute personne qui commet des crimes sera poursuivie pour

 25   cela."

 26   Il a dit cela également, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Donc, vous seriez d'accord avec moi pour admettre que ceci ne figure

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  1   pas dans votre rapport non plus.

  2   R.  Oui.

  3   Q.  M. Hansen, dans son rapport, écrit également la chose suivante. Il dit

  4   :

  5   "Des catastrophes se produisent toujours dans une situation de

  6   guerre, et que maintenant les choses ont été prises en main, que le général

  7   ne voit pas d'objection à ce que les Serbes vivent en Croatie."

  8   R.  Vous savez, une réunion qui a duré 45 minutes et que vous résumez en

  9   quelques lignes, je suppose que je n'ai pas tout repris.

 10   Q.  Oui, très bien, mais vous avez eu une réunion le 20 septembre 1995, et

 11   le 24 vous avez rédigé un rapport à l'issue de cette réunion et la seule

 12   chose que vous consignez dans ce rapport, c'est que le général Gotovina ait

 13   prononcé une seule remarque --

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, ça fait plusieurs fois que

 15   vous reprenez la même chose. Dans la déclaration préalable du témoin, le

 16   témoin a dit que sa seule observation était en réponse à ce qui a été dit

 17   par le témoin apparemment, puis il poursuit -- en se référant à de nombreux

 18   propos que M. Gotovina aurait prononcés à ce moment-là. Donc jusqu'à

 19   présent ce que vous pouvez en déduire, c'est que ceci ne semble pas

 20   refléter exactement la déposition du témoin.

 21   Allez-y.

 22   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

 23   Q.  Sans rentrer là-dedans, ce que vous dites dans votre rapport au sujet

 24   de ce que le général Gotovina a dit eu égard à la zone contrôlée par la

 25   police et le fait que la Croatie était un Etat de droit, et que dans cet

 26   Etat ceux qui perpétraient des crimes allaient être poursuivis pour cela,

 27   ceci n'est pas repris dans votre rapport ?

 28   R.  C'est exact.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois que vous souhaitez mettre en

  2   exergue certains points, mais nous n'allons pas reprendre les mêmes

  3   questions alors que les réponses sont tout à fait claires. Elles sont

  4   limpides. C'est clair que ceci ne figurait pas dans son rapport. Et vous

  5   souhaitez faire comprendre aux Juges qu'il s'agit de points très

  6   importants.

  7   M. KEHOE : [interprétation] Mais c'est très important.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais la Chambre s'en aperçoit. Elle n'a

  9   pas besoin que l'on répète deux ou trois fois les mêmes choses pour que

 10   l'on comprenne à quel point c'est important.

 11   M. KEHOE : [interprétation] Oui, je vais aller de l'avant. C'est le

 12   Règlement qui nous permet de soumettre cela au témoin.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais ça m'inquiète un petit peu que vous

 14   ayez dit cela, que vous ayez évoqué les droits que vous confère le

 15   Règlement, alors que je venais de vous dire que vous n'aviez pas à répéter

 16   les questions juste pour souligner certains points, puisque le Règlement ne

 17   dit pas que vous devriez nous présenter des éléments redondants.

 18   Prenez la parole, s'il vous plaît, maintenant.

 19   M. KEHOE : [interprétation] La pièce 65 ter 4254.

 20   Q.  Monsieur Leschly, vous avez ici un rapport sur les activités

 21   d'observation quotidienne de la MOCE. Est-ce que vous connaissez ce type de

 22   rapport ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Page 2, s'il vous plaît, l'avant-dernier paragraphe en bas de la page

 25   2. Excusez-moi, il me semble que ce n'est pas le document qui s'affiche, 65

 26   ter 2448. Je vous présente mes excuses. Je n'ai pas bien lu le numéro du

 27   document. 

 28   Q.  Donc nous avons là un rapport d'observation journalier qui porte la

Page 9218

  1   date du 21 septembre pour les activités qui se sont déroulées le 20

  2   septembre. Page 2, s'il vous plaît. En fait, c'est un rapport du 21

  3   septembre et il concerne les activités du 20 septembre. Deuxième page,

  4   l'avant-dernier paragraphe, il est fait état d'une conversation avec le

  5   général Gotovina, qui est le commandant de la zone opérationnelle de Split.

  6   "Le général Gotovina a dit à la MOCE que les pillages, les incendies et les

  7   harcèlements doivent s'interrompre, qu'on doit y mettre fin, et que c'est

  8   la police qui doit le faire, puis qu'il voyait une haine envers l'ennemi

  9   qui a pillé, incendié et chassé des familles comme quelque chose de

 10   naturel, comme une réaction humaine tout à fait naturelle."

 11   M. KEHOE : [interprétation] Monsieur le Président, je vais demander le

 12   versement au dossier de la pièce 2448.

 13   M. HEDARALY : [interprétation] Mais quelle est la question qui a été posée

 14   au témoin au sujet de ce rapport ? Sinon, je ne souhaite pas soulever

 15   d'objection.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Je vais le faire par la suite.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il ne semble pas y avoir d'objection,

 18   même si d'habitude on pose d'abord une question et on demande le versement

 19   par la suite.

 20   Monsieur le Greffier.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P799.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce P799 est versée au dossier.

 23   M. KEHOE : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur Leschly, nous avons maintenant abordé la question de plusieurs

 25   rapports rédigés par M. Hansen. Dans ces rapports, on ne trouve rien

 26   concernant la question des meurtres ou des interrogations portant sur des

 27   meurtres qui, d'après vous, c'était un sujet qui a été abordé par le

 28   général Gotovina. Est-ce que vous pourriez nous expliquer cela ?

Page 9219

  1   R.  Tous les rapports ne peuvent pas être absolument exhaustifs. Non, je

  2   n'ai pas d'explications, je ne sais pas vous dire pourquoi.

  3   Q.  Le commentaire formulé par le général Gotovina que l'on trouve dans ce

  4   rapport lorsqu'il dit qu'il parle de cette haine de l'ennemi qui a pillé,

  5   expulsé, incendié, vous avez compris qu'il y avait une volonté de vengeance

  6   qui provenait de ces gens qui avaient été persécutés dans la Krajina par

  7   les Serbes, n'est-ce pas ?

  8   R.  Ce n'est pas moi l'auteur de ce rapport, c'est M. Hansen.

  9   Oui, de la manière dont cela est formulé ici, oui c'est le mot qui nous

 10   vient à l'esprit, à savoir le mot "vengeance", et je pense que c'est ainsi

 11   que l'on peut commenter cela.

 12   Q.  Que ce soit exact ou non, de la manière où vous avez compris ce qui

 13   s'est déroulé dans la Krajina, c'était de la "vengeance", n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Nous avons dit que dans le rapport de M. Hansen pas plus que dans le

 16   rapport du QG de la MOCE du 21 septembre, qu'on n'y trouve rien sur les

 17   meurtres. Alors, Monsieur, était-ce simplement une conversation avec le

 18   général Gotovina, une conversation où on a évoqué les pillages, les

 19   incendies, les harcèlements ?

 20   R.  Lorsque s'est couché sur papier, lorsqu'on trouve cela dans le rapport

 21   plusieurs jours avant les événements, je supposerais que ça été dit,

 22   puisque je ne pense pas que j'aurais rédigé quelque chose qui était de

 23   toute évidence erronée. Mais bien sûr, nous dépendons aussi des

 24   interprètes, s'ils font leur travail de telle sorte qu'il n'y a même pas

 25   une légère nuance, déformation des propos.

 26   Q.  Oui, Monsieur, mais vous savez ce que vous avez rédigé --

 27   R.  Oui.

 28   Q.  - dans votre rapport, ce n'est pas toute la vérité ? Vous avez hoché la

Page 9220

  1   tête.

  2   R.  Oui, j'ai dit oui.

  3   Q.  Je vais appeler votre attention sur -- il ne s'agit pas seulement de

  4   votre rapport maintenant, mais au dernier point de la pièce P823 du 20

  5   septembre, non le 24 septembre :

  6   "Les nouvelles nations sont naturellement très prônes au nationalisme dans

  7   un premier stade" - et comme il l'a dit - "à partir du moment où le secteur

  8   est aura été ramené à la maison, deviendra plus libéral mais il est trop

  9   tôt pour cela maintenant."

 10   Passons maintenant au paragraphe 44 de votre déclaration préalable. Prenons

 11   la deuxième phrase.

 12   "Dans le contexte de notre conversation, j'ai compris que la déclaration

 13   faite par le général Gotovina, lorsqu'il a évoqué le secteur est,

 14   signifiait qu'à partir du moment où le secteur est aurait été capturé, lui,

 15   il deviendrait plutôt un commandant en temps de paix et qu'il serait moins

 16   rigoureux dans sa conduite à l'encontre de la communauté serbe.

 17   "A mon sens, c'était une manière de reconnaître de façon indirecte que les

 18   pillages et les destructions des biens serbes étaient autorisés, qu'on a

 19   accepté que cela se poursuive."

 20   Alors compte tenu du fait que le général Gotovina vous avait dit que la

 21   police avait le contrôle dans la zone et que la Croatie était un Etat de

 22   droit et que les criminels seraient poursuivis et sanctionnés, qu'est-ce

 23   qui vous a permis d'arriver à la conclusion qu'en fait c'est de manière

 24   indirecte qu'il reconnaissait par là que les pillages et la destruction de

 25   biens serbes pouvaient se poursuivre d'après lui ? Alors qu'est-ce qui vous

 26   a permis, quels faits auriez-vous appris qui vous a permis d'arriver à

 27   cette conclusion ?

 28   R.  Tout d'abord, vous évoquez ce qui a été dit au sujet de la politique

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  1   menée par l'Etat croate. Alors, l'un des problèmes principaux qui se

  2   posaient c'est la discordance qu'il y avait entre les instances officielles

  3   croates sur ce qu'ils voulaient dire et ce qu'il se faisait sur le terrain,

  4   donc il y avait une très grande différence. Il y avait des intimidations

  5   sur le plan administratif, et cetera, nous avons vu cela mentionner

  6   ailleurs donc.

  7   Voyons au paragraphe 44, il a été question du secteur est, et j'en ai déjà

  8   parlé aujourd'hui. On se posait la question du secteur est-ce à ce moment-

  9   là, puisque ce n'était pas encore placé sous le contrôle croate. Lorsque le

 10   général Gotovina a dit à ce moment-là qu'à partir du moment où cela aurait

 11   été fait, où l'Etat croate aura pu retrouver le contrôle sur le secteur

 12   est, qu'il serait moins strict, il avait la sensation que c'était encore

 13   l'état de guerre qui régnait, que ce n'était pas encore un état de paix en

 14   bonne et due forme, tout n'était pas encore terminé, donc il fallait qu'il

 15   soit strict. En fait, ce qui se passait sur le terrain c'est que les

 16   pillages et la destruction des biens étaient encore en train de se dérouler

 17   malgré tout ce qu'en disaient les autorités croates ou ce qu'ils

 18   prétendaient.

 19   Q.  D'après vous, c'était une forme de reconnaissance tacite du général

 20   Gotovina de cela ?

 21   R.  Oui, c'est comme ça que je semble avoir interprété à l'époque.

 22   Q.  Que c'était une reconnaissance tacite de cette situation ?

 23   R.  Oui, d'après ce que je vois, c'est comme ça que je l'ai compris.

 24   Q.  M. Liborius vous en avait parlé de cette reconnaissance tacite ?

 25   R.  Non, je ne pense pas.

 26   Q.  Est-ce que vous accepteriez si je vous soumettais une proposition, à

 27   savoir que lorsque vous formulez ce commentaire au sujet de la

 28   reconnaissance tacite par le général Gotovina du fait que le pillage et la

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  1   destruction des biens serbes est autorisé, que la poursuite de cela est

  2   autorisé, est-ce que vous accepteriez que ceci contredit directement le

  3   rapport de M. Stig Marker-Hansen qui, lorsqu'il reprend la conversation

  4   avec le général Gotovina, lorsque le général Gotovina dit d'après lui que

  5   les criminels seraient poursuivis ?

  6   R.  Oui, mais il y a une discordance entre ce qui disait durant ces mois-là

  7   et ce que se produisait véritablement.

  8   Q.  Sur la base de ce qu'il a dit, vous êtes arrivé à la conclusion que

  9   c'est lui qui a reconnu que le pillage et les incendies pouvaient se

 10   poursuivre en l'espace de cette conversation, il vous a dit qu'on allait

 11   poursuivre les criminels --

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kehoe, là encore, il me semble

 13   que je n'ai pas été suffisamment clair lorsque j'ai parlé de la répétition

 14   et du fait qu'il faut s'arrêter lorsqu'on a épuisé un sujet.

 15   Poursuivez, s'il vous plaît.

 16   M. KEHOE : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions.

 17   Monsieur Leschly, je vous remercie.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Kehoe.

 19   D'autres Défenseurs ?

 20   M. CAYLEY : [interprétation] Je n'ai pas de questions à poser.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Mikulicic.

 22   M. MIKULICIC : [interprétation] Je n'ai pas de questions à poser.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly, est-ce que vous allez

 24   poser des questions supplémentaires ?

 25   M. HEDARALY : [interprétation] Oui, très brièvement.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie.

 27   Nouvel interrogatoire par M. Hedaraly : 

 28   Q.  [interprétation] Avant la réorganisation de la MOCE, fin août, est-ce

Page 9223

  1   que vous avez reçu des rapports de la MOCE de Knin au QG de la MOCE ?

  2   R.  Non, je ne les recevais automatiquement. Il y avait des voies séparées.

  3   Je pouvais les consulter si je voulais.

  4   M. HEDARALY : [interprétation] La pièce P830, s'il vous plaît.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, on n'a pas envoyé cela par une filière.

  6   M. HEDARALY : [interprétation]

  7   Q.  Vous avez un rapport qui s'affiche à l'écran, il porte la date du 10

  8   août. La teneur ne m'intéresse pas pour le moment, c'est le haut du

  9   document qui m'intéresse. C'est le centre régional de Knin qui envoie cela

 10   au QG ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Vous dites dans la ligne "Information," que c'est envoyé également au

 13   centre régional de Zagreb ?

 14   R.  Oui, tout à fait. Je pense qu'à certain moment on le faisait.

 15   Q.  Pour vos rapports hebdomadaires, à ce moment-là vous vous basiez sur

 16   tous les rapports que vous aviez reçus au cours de la semaine qui précédait

 17   ?

 18   R.  Bien entendu, avant tout nos propres rapports, mais aussi les rapports

 19   de Knin, mais normalement, on ne prenait pas en compte les rapports venus

 20   de Bosnie.

 21   Q.  Me Kehoe vous a posé plusieurs fois une question qu'il aime bien posé -

 22   -

 23   M. KEHOE : [interprétation] Objection.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly, s'il vous plaît,

 25   retenez-vous, ne faites pas de commentaire. Même si vous n'aviez pas

 26   soulevé d'objection, je serais intervenu.

 27   M. HEDARALY : [interprétation]

 28   Q.  Plusieurs fois Me Kehoe vous a demandé si votre rapport comportait

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  1   toute la vérité. Monsieur Leschly, avez-vous jamais mentionné quelque chose

  2   dans votre rapport alors que vous saviez que c'était faux ?

  3   R.  Non, pas du tout. Lorsque je savais que quelque chose n'était pas vrai,

  4   je ne le mentionnais pas.

  5   Q.  Lorsque vous avez dit qu'il n'y avait pas toute la vérité,

  6   qu'entendiez-vous par là ?

  7   R.  La réunion lorsqu'elle dure une heure et lorsque vous en faites un

  8   résumé, vous faites un choix, et vous omettez certainement des choses.

  9   C'est dans la nature de la rédaction des rapports. Bien entendu, on peut

 10   espérer que les parties essentielles sont dedans, mais cela relève de

 11   l'appréciation discrétionnaire de tout un chacun.

 12   Q.  Je vous remercie, je n'ai pas d'autres questions.

 13   Questions de la Cour : 

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Leschly, je souhaite vous poser

 15   une question, à savoir il me semble que vous avez employé le terme - un

 16   instant, je vais retrouver ça - "pillages, incendies, et meurtres." Dans

 17   les documents, nous avons vu la série de termes pillages, incendies, et

 18   harcèlement, ou intimidation. Est-ce que maintenant vous doutez des termes

 19   que vous avez employés, à savoir si c'était pillages, incendies, pillages,

 20   et meurtres ? Puisque avant il a été dit qu'avec les interprètes on ne peut

 21   jamais être certain avec les traducteurs, mais dans votre déclaration nous

 22   lisons que vous lui avez posé la question qui est de savoir si il

 23   partageait l'opinion de "zupan" de Zadar, à savoir qu'il était nécessaire

 24   de proclamer un état d'urgence afin d'éviter les meurtres, les pillages, et

 25   les incendies.

 26   R.  Je ne peux pas aujourd'hui vous citer quoi que ce soit à l'appui de ce

 27   que j'avais rédigé à l'époque. Je pense que si je l'ai rédigé trois ou

 28   quatre jours après l'événement, j'imagine que c'est effectivement ce qui

Page 9225

  1   avait été dit.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, tout à fait. Je voulais éviter

  3   qu'il y ait tout doute là-dessus.

  4   Est-ce que la question que je viens de poser suscite d'autres questions,

  5   des questions supplémentaires de la part des Défenseurs ?

  6   M. KEHOE : [interprétation] Une précision éventuellement suite à votre

  7   question, Monsieur le Juge.

  8   Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Kehoe : 

  9   Q.  [interprétation] Monsieur Leschly, page 17, ligne 15.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le compte rendu d'audience d'aujourd'hui

 11   ?

 12   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Leschly, vous ne pouvez pas

 14   naviguer dans le compte rendu d'audience.

 15   M. KEHOE : [interprétation]

 16   Q.  Vous venez de dire dans le cadre de votre déposition de cet après-midi

 17   que :

 18   "C'était tout à fait clair à partir du moment où cela a été dit, à savoir

 19   pourquoi ces choses s'étaient produites, j'ai nécessairement pensé à

 20   l'époque que le général Gotovina n'acceptait pas les meurtres et les

 21   pillages et les incendies. Je pense que les "meurtres" englobent toutes ces

 22   activités."

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly.

 24   M. HEDARALY : [interprétation] "Ces atrocités" ici, mais nous n'avons pour

 25   le moment qu'un projet de compte rendu.

 26   M. KEHOE : [interprétation] Il est écrit "activités".

 27   Monsieur le Juge, au sujet de ce qui est dit ici et ce qu'on lit dans le

 28   compte rendu d'audience, l'on voit qu'il ne s'agit pas uniquement de

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  1   meurtre, et dans votre question, vous vous focalisez sur des meurtres avant

  2   tout, tandis que le témoin, dans le cadre de sa déposition parle

  3   pratiquement de tous les meurtres qui sont englobés dans ce commentaire, le

  4   commentaire qu'il a fait.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poser la question au témoin, si vous le

  6   souhaitez.

  7   M. KEHOE : [interprétation]

  8   Q.  Lorsque vous parlez du général Gotovina qui pose la question de crimes,

  9   de quels crimes parlez-vous ?

 10   R.  Si j'ai écrit qu'il a utilisé "ces meurtres" je suppose effectivement

 11   c'est ce qu'il a dit. Mais cela ne signifie pas nécessairement qu'il a

 12   reconnu que cela avait lieu. Cela comprenait quasiment tout ce de quoi vous

 13   parlez.

 14   Q.  Ce que vous dites au sujet du crime, n'est-ce pas, c'est ça que vous

 15   dites, Monsieur ?

 16   R.  Non. Cette réponse, je suis pratiquement certain qu'il ait dit cela

 17   parce qu'autrement je ne l'aurais pas écrit. Donc je pense que cela englobe

 18   tous les termes que nous employons, et je pense qu'il a rejeté ce

 19   comportement, cette conduite.

 20   Q.  Il dit en même temps, an même temps où il dit qu'il faut poursuivre les

 21   criminels.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais Maître Kehoe, vous ne pouvez pas

 23   recommencer maintenant à contre-interroger le témoin. Vous aviez demandé

 24   une précision, vous l'avez fait, je pense suffisamment, et vous auriez même

 25   pu le faire en amont, puisque M. Hedaraly était exactement sur la même

 26   longueur d'onde que vous lorsqu'il a dit que c'était une question de

 27   linguistique, et lorsqu'il a posé sa question, lorsqu'il a demandé s'il

 28   avait bien compris. Donc, par conséquent, je pense que vous avez épuisé la

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  1   question de précision.

  2   J'aimerais savoir s'il y a d'autres questions que les équipes de la Défense

  3   souhaitent poser ?

  4   Sinon, Monsieur Leschly, vous avez terminé de témoigner devant ce Tribunal.

  5   Nous nous félicitons que vous ayez la possibilité de rentrer chez vous

  6   définitivement, que vous n'avez pas besoin de revenir encore une fois ici.

  7   Je vous souhaite de bien rentrer chez vous et je vous remercie d'être venu

  8   déposer à La Haye.

  9   Nous allons lever l'audience et nous reprendrons lundi le 22 septembre à 14

 10   heures 15, dans le prétoire numéro I.

 11   --- L'audience est levée à 17 heures 53 et reprendra le lundi 22 septembre

 12   2008, à 14 heures 15.

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