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1 Le vendredi 29 mai 2009
2 [
3 [Audience publique]
4 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
5 [L'accusé Markac est absent]
6 --- L'audience est ouverte à 9 heures 11.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On vous présente nos excuses pour ce
8 retard tardif, on avait quelques questions pratiques dont on voulait
9 s'occuper.
10 Monsieur le Greffier, veuillez citer l'affaire, s'il vous plaît.
11 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour à
12 toutes les personnes présentes dans ce prétoire. Il s'agit de l'affaire IT-
13 06-90-T, le Procureur contre Ante Gotovina et consorts.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais tout d'abord traiter de
15 quelques questions de procédure. Hier soir, c'était assez tard, Monsieur
16 Mikulicic, il y a eu une demande de la part de la Défense Markac demandant
17 que M. Markac ne vienne pas aujourd'hui dans le prétoire pour des raisons
18 personnelles. Nous avons accordé ce droit à M. Markac qui donc n'est pas
19 présent aujourd'hui.
20 Les parties, on leur a demandé de se mettre d'accord sur la pertinence et
21 le volume des éléments à verser en vertu de l'article 92 ter.
22 Monsieur Misetic, est-ce qu'un accord a été fait à ce sujet ?
23 M. HEDARALY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
24 M. MISETIC : [interprétation] C'est notre témoin, donc laissez-moi en
25 premier --
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Misetic.
27 M. MISETIC : [interprétation] Nous, nous sommes d'accord que la Défense
28 Gotovina va verser la déclaration préalable en tant que document 92 ter.
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1 Nous allons aussi verser les extraits du procès Milosevic, de sa déposition
2 dans son procès, et nous allons envoyer un e-mail aux parties sous sa forme
3 PDF pour que ceci soit plus facile à lire. Et il s'agit là de 30 à 40
4 pages.
5 Il y a un point de désaccord, à savoir que nous sommes inquiets du
6 fait qu'avec l'attestation 92 ter, bien, dans cette mesure-là nous
7 demandons aussi à verser le transcript en entier de l'affaire Milosevic
8 pour mettre en contexte sa déposition, car il y a eu des corrections au
9 compte rendu d'audience, et maintenant en versant tout ceci au dossier, ces
10 corrections vont pouvoir être prises en compte.
11 C'est pour cette raison que j'ai demandé que l'on ajoute le compte
12 rendu d'audience de l'affaire Milosevic, qui soit clarifie, soit contredit
13 quelques éléments se trouvant dans la déclaration 92 bis de ce témoin.
14 Parce qu'on ne voudrait pas que le témoin soit récusé en quelque sorte par
15 ce qui est écrit dans ce transcript de l'affaire Milosevic.
16 C'est pour cela que nous avons demandé de verser l'intégralité de ce
17 compte rendu. Le Procureur n'était pas d'accord là-dessus, donc nous
18 souhaitons tout de même réserver le droit d'ajouter cela dans le versement
19 au dossier en vertu de l'article 92 ter.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Hedaraly.
21 M. HEDARALY : [interprétation] Effectivement, Monsieur le Président, hier
22 nous avons discuté avec la Défense Gotovina, ils étaient d'accord de verser
23 36 pages du transcript de l'affaire Milosevic. Je ne les ai pas lues,
24 puisque M. Misetic avait à l'époque proposé de les envoyer par e-mail.
25 Normalement il s'agissait de 36 pages.
26 En ce qui concerne ce dernier point qui a été soulevé par M. Misetic, bien,
27 nous considérons qu'à partir du moment où le témoin a certifié que ce
28 qu'il a dit dans l'affaire Milosevic correspond à la vérité, bien, ceci
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1 s'applique au compte rendu en entier de cette déposition. Et nous pouvons
2 donc verser uniquement des portions de ce compte rendu, ce qui nous évite
3 toute récusation éventuelle ou des difficultés.
4 Moi, j'ai dit à M. Misetic je n'ai rien [inaudible] question pratique, mais
5 je lui ai dit quel était mon point de vue. Je n'ai pas vraiment compris
6 quel était son problème. Mais ceci ne nous pose pas de problème, ceci ne me
7 pose pas de problème que le témoin dans sa déclaration couvre l'intégralité
8 du compte rendu d'audience de l'affaire Milosevic et que certaines
9 positions[comme interprété] de ce compte rendu soient versées avec 92 ter.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, cette attestation va couvrir un
11 champ plus large que ce qui va figurer au compte rendu d'audience --
12 M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, --
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- donc nous allons en accepter tout
14 cela.
15 Attendez que je vérifie.
16 Il semblerait que si l'on ne dit rien d'autre à ce sujet, que tout va
17 bien se passer, et si ce n'est pas le cas, bien, on va vous aider pour vous
18 remettre sur le droit chemin.
19 M. MISETIC : [interprétation] Cela ne me pose pas de problème. J'ai voulu
20 tout simplement m'assurer que vous étiez d'accord avec cela. Donc si vous
21 acceptez la procédure telle quelle, bien, je l'accepte bien évidemment.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, à partir du moment où le témoin
23 s'engage à dire la vérité, toute la vérité, et rien que la vérité, et ceci
24 s'applique à tout, bien, il n'y a pas de problème. Je pense que ceci ne
25 viole le droit de qui que ce soit. C'est ce que je pense à première vue.
26 M. MISETIC : [interprétation] Je vous remercie.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Donc là, nous avons un accord
28 qui est couché au compte rendu d'audience.
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1 Nous allons entendre quelles sont les pages, donc 36 pages apparemment, si
2 j'ai bien compris.
3 Et maintenant, le prochain point à l'ordre du jour, à savoir Monsieur
4 Waespi, votre argument par rapport au sauf-conduit qui est demandé pour le
5 témoin AG-20.
6 M. WAESPI : [interprétation] Cela ne me pose pas de problème, pas au bureau
7 du Procureur, en tout cas.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Bien, nous allons vous
9 communiquer notre décision en temps voulu. Nous avons déjà entendu les
10 autres équipes de la Défense qui ont renoncé à leur droit de répondre à
11 cette requête.
12 Maintenant, Monsieur Mikulicic, c'est à vous de commencer votre propos
13 liminaire.
14 M. MIKULICIC : [interprétation] Je vous remercie.
15 Bonjour, Monsieur le Président, bonjour à toutes les personnes ici
16 présentes. Je voudrais tout d'abord m'excuser de vous avoir informé très
17 tardivement de la demande formulée par mon client. Je vous remercie de
18 l'avoir prise en compte.
19 Monsieur le Président, avec votre permission, je vais parler en croate,
20 c'est ma langue maternelle, et je pense que je m'exprimerai mieux en
21 parlant croate. Je vous remercie.
22 Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, dans l'acte d'accusation
23 qui a été dressé à son encontre, mon client a été mis en accusation par le
24 Procureur en tant qu'auteur présumé des actes criminels les plus graves, et
25 notamment cinq chefs, crimes contre l'humanité relevant de l'article 5 du
26 Statut du Tribunal; et dans quatre chefs, infraction grave aux droits et
27 coutumes de la guerre relevant de l'article 3 du Statut du Tribunal.
28 Mon client est également accusé avec d'autres coaccusés d'avoir participé
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1 dans le cadre de la commission des crimes qui lui sont imputés à une
2 entreprise criminelle commune, aux côtés de plusieurs coauteurs dont
3 certains sont identifiés par leurs noms, mais d'autres sont désignés dans
4 l'acte d'accusation par les termes personnes connues et inconnues. Je dois
5 dire que depuis 35 ans que je pratique le droit, c'est la première fois que
6 je vois des accusations formulées de la sorte. C'est la première fois que
7 je trouve de telles désignations dans un acte d'accusation. Mais il n'est
8 jamais trop tard pour apprendre. Même si la tâche de la Défense est rendue
9 un peu plus ardue s'agissant de préparer, exposer de façon convaincante et
10 raisonnable la thèse qui lui permettra de contrer celle du Procureur
11 puisqu'on lui oppose une collaboration avec des personnes inconnues, la
12 Défense montrera dans la suite des débats qu'une collaboration de ce genre
13 n'a tout simplement jamais existé. Elle le fera sans prétendre de découvrir
14 le nom de ces coauteurs inconnus, car nous affirmons tout simplement qu'ils
15 n'existent pas.
16 Le général Markac est une personne de haute valeur morale, un professionnel
17 consciencieux, un mari et un père investi, un membre respectable de la
18 communauté. C'est quelqu'un dont la réputation est sans tache sur le plan
19 personnel et professionnel, une personne dénouée du moindre préjugé
20 politique, religieux, racial ou autre, qui eut pu servir de catalyseur ou
21 de mobile à un présumé comportement criminel. J'affirme de la façon la plus
22 ferme qui soit que le client n'a commis acte criminel. Nous le démontrerons
23 pendant la présentation de nos moyens de preuve à décharge devant les Juges
24 de cette Chambre.
25 La Défense montrera que les charges retenues dans l'acte d'accusation
26 ne reposent sur aucun élément de preuve pertinent ou véritable et que la
27 norme de droit selon laquelle un doute raisonnable doit exister pour qu'une
28 personne puisse être condamnée au titre de sa responsabilité pénale
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1 individuelle n'a pas été respectée à l'issue de la procédure menée jusqu'à
2 présent devant cette Chambre.
3 Dans son acte d'accusation, le Procureur englobe toutes les charges
4 retenues contre l'accusé dans l'expression fourre-tout d'entreprise
5 criminelle commune. Cette façon de structurer son acte d'accusation place
6 le Procureur dans une position privilégiée apparemment puisqu'il n'a plus
7 besoin de se fatiguer, pour ainsi dire, à apporter la preuve de l'existence
8 d'un lien entre l'acte criminel et l'action de l'accusé. Cette approche
9 large avait une raison très simple d'après la Défense; le manque de moyens
10 de preuve pertinents qui indiquerait qu'il existe un lien entre l'accusé et
11 les actes qui auraient été perpétrés et leurs auteurs.
12 L'ex-Yougoslavie socialiste avait une façon assez comparable de
13 structurer ces actes d'accusation quand il s'agissait de poursuivre les
14 dissidents politiques. En effet, ces actes d'accusation débutaient par un
15 préambule dans lequel était décrite l'intention criminelle de l'accusé,
16 désireux de détruire le système des valeurs socialistes, puis détaillait
17 dans la suite du texte de cet acte d'accusation la série d'événements qui
18 aurait résulté de l'intention criminelle que l'accusé était censé avoir
19 nourri dès le départ.
20 Il va de soi que la désintégration de l'ex-Yougoslavie a fait
21 disparaître de telles normes et une telle pratique en droit pénal. Le
22 nouveau système pénal entré en vigueur après la désintégration de l'ex-
23 Yougoslavie et adopté par les pays qui en découlent, ils ont adopté des
24 têtes législatives à un système judiciaire conforme à la doctrine la plus
25 évoluée, qui s'applique dans le monde entier, le système judiciaire
26 démocratique. Car il s'agit d'insister sur la responsabilité pénale
27 individuelle sans présomption de culpabilité. Il s'agit uniquement
28 d'établir une responsabilité pénale établie de façon objective.
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1 Je suis sûr que les Juges de la Chambre de première instance vont
2 utiliser les mêmes critères. C'est pour cela que je suis convaincu que ces
3 incriminations qui se trouvent dans l'acte d'accusation portant sur la
4 participation à entreprise criminelle commune, qui sont exprimées
5 globalement, tout simplement ne correspondent ni aux faits ni aux tendances
6 de l'évolution du droit pénal contemporain et de la jurisprudence.
7 Au cours de la présentation de nos moyens de preuve, nous allons démontrer
8 qu'il n'est pas possible et qu'il est complètement erroné de faire des
9 conclusions sur les motifs du comportement de l'accusé en fondant la
10 conclusion portant sur l'existence du mens rea uniquement sur les
11 conséquences, ou plutôt, sur le fait qu'en réalité, pendant la période
12 concernée, sur le territoire concerné par l'acte d'accusation, il y a eu
13 davantage de crimes de commis. Nous exposerons tous les efforts déployés
14 par l'Etat et l'administration croate pour prévenir, juger et sanctionner
15 les auteurs de ces actes criminels.
16 Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, pour examiner la
17 responsabilité pénale individuelle d'une personne, il importe aux yeux de
18 la Défense d'accorder une attention particulière au contexte historique et
19 sociologique dans lequel a évoqué cet auteur présumé d'acte criminel et
20 dans lequel les crimes ont été commis. La Défense montrera que l'Etat de
21 Croatie a bien pris en compte le contexte général qui sous-tendait les
22 événements de l'époque. Elle montrera que cet Etat a déployé d'énormes
23 efforts pour avoir créer un nouveau système judiciaire dans le territoire
24 nouvellement libéré et qu'une telle démarche de la part de l'Etat croate ne
25 peut en aucun cas être considérée comme ayant été motivée par la volonté de
26 mettre en pratique le prétendu plan criminel auquel le général Markac est
27 censé avoir participé d'après l'acte d'accusation.
28 La Défense montrera que dans la période qui intéresse la Chambre,
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1 l'Etat de Croatie a consenti des efforts énormes sur le plan financier et
2 en matière d'organisation, alors même que la guerre lui imposait une
3 situation économique particulièrement dégradée. Ceci a été provoqué par les
4 actions de l'ex-JNA et les rebelles serbes. Je vais vous donner un exemple
5 qui date de 1999. La Croatie a enregistré un déficit de 236,4 milliards de
6 kuna, soit près de 32 milliards d'euros, correspondant aux dommages de
7 guerre. L'Etat croate a financièrement subvenu aux besoins d'un très grand
8 nombre de personnes déplacées et de réfugiés, de sorte qu'il a dû prendre
9 en charge au début de l'année 1992 sur le territoire libre de la République
10 de Croatie, plus de 500 personnes déplacées et réfugiées. Par la suite ce
11 nombre a même atteint 750 000 personnes déplacées et réfugiées.
12 Selon le recensement de 1991, la Croatie avait une population de 4,5
13 millions de personnes. Ceci illustre l'importance proportionnelle d'un tel
14 afflux de réfugiés et de personnes déplacées par rapport à l'ensemble de la
15 population. Tout cela s'est passé à un moment où 26,5 % du territoire de la
16 République de Croatie était occupé alors que celle-ci déployait d'immenses
17 efforts pour créer et équiper ses forces militaires et policières en dépit
18 du blocus strict décrété par la communauté internationale sur les
19 approvisionnements en équipement militaire et en armes. De surcroît, tout
20 cela s'est passé au moment où la République de Croatie s'efforçait de
21 mettre en place un gouvernement dans le territoire qui avait été
22 internationalement reconnu comme le sien. Etant membre de l'ONU, la
23 République de Croatie devait, en vertu du droit international, créer un
24 système judiciaire national propre dans le territoire internationalement
25 reconnu comme le sien. Elle devait aussi, sur ce territoire national, faire
26 respecter les droits, l'ordre public, la paix et instaurer les conditions
27 d'existence égales pour tous ses citoyens, comme pour tous les
28 ressortissants d'autres pays résidant sur son territoire.
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1 La Défense va donc montrer qu'à l'occasion de la libération des territoires
2 occupés de la République de Croatie, ses forces armées ont agi au nom et
3 avec l'autorisation de cet Etat souverain internationalement reconnu.
4 Dans les territoires libérés, la République Croatie, où la population
5 locale serbe avait créé, au mépris de la constitution, se qui ressemblait
6 fort à un Etat, un quasi Etat. La République de Croatie a mis en place son
7 propre ordre constitutionnel sur ce territoire, son propre système
8 judiciaire national et international en respectant le droit international.
9 Ce système englobait tous les droits et devoirs décrits dans la
10 constitution de la République croate, ainsi que dans les textes
11 internationaux adoptés et ratifiés par elle. Comme elle a déjà annoncé, la
12 Défense montrera que, ce faisant, la République de Croatie a respecté le
13 principe de proportionnalité prévu par les droits international et
14 national, eu égard à l'engagement des forces armées en cas d'urgence. Ce
15 qui prouve les faits qu'elle n'a pas recouru à la force dans les
16 territoires où les dirigeants de ce qui est convenu d'appeler la République
17 serbe de la Krajina ont accepté une réintégration pacifique qui s'est
18 achevée à la fin de l'année 1997.
19 La Défense décrira les efforts diplomatiques qui ont été déployés par la
20 République de Croatie afin de ramener pacifiquement les territoires occupés
21 dans le cadre étatique et judiciaire créés par elle. Dans certain cas, là
22 où les dirigeants serbes locaux ont fait preuve de raison et de réalisme,
23 la réintégration s'est effectuée grâce à des accords pacifiques. Mais dans
24 d'autres endroits, il a fallu recourir à l'action de l'armée et de la
25 police en raison de l'échec de tous les pourparlers provoqués par
26 l'attitude déraisonnable, irréaliste des autorités locales serbes. En bref,
27 la Défense montrera que la République de Croatie s'est efforcée de
28 réintégrer les territoires occupés sans recourir à la force en s'appuyant
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1 sur la nouvelle législation mise en œuvre, en dépit du fait que
2 l'artillerie de la Republika serbe de Krajina, de façon quotidienne et non
3 sélective, pilonnait les villes croates par rapport à la portée de son
4 artillerie; à savoir Osijek, Slavonski Brod, Nova Gradiska, Sisak,
5 Karlovac, Ogulin, Gospic, Otocac, Sibenik, Zadar, Dubrovnik, et même la
6 capitale, Zagreb.
7 De nombreux civils ont été tués. Des dégâts matériels ont été énormes,
8 dégâts économiques également. Le Procureur est parfaitement au courant de
9 cela, et là je fais référence à l'affaire Martic qui a été jugée par cette
10 Institution. Mais en dépit de ce pilonnage, les citoyens croates n'ont pas
11 quitté leurs foyers en dépit de ce pilonnage à grande échelle. La
12 République de Croatie avait voté une nouvelle loi constitutionnelle dès la
13 mi-1992 en changeant la constitution. Cette loi définissait les droits
14 humains et les libertés dont jouissait la population, mais aussi les droits
15 des minorités ethniques présentes sur son territoire. Selon ces
16 dispositions, on a créé deux zones distinctes avec un statut d'autonomie
17 particulier; il s'agissait du district de Knin et de Glina, majoritairement
18 peuplé de Serbes. Ainsi les citoyens serbes du cru se voyaient octroyer une
19 certaine forme d'autonomie et de souveraineté au sein de la République de
20 Croatie. Les dirigeants serbes locaux ont rejeté cette initiative, tout
21 comme ils ont rejeté le plan Z-4 proposé par la communauté internationale,
22 ce plan qui octroyait ce qu'il est convenu d'appeler la République serbe de
23 Krajina, nombre d'attributs d'un Etat et une souveraineté importante,
24 notamment une administration, un drapeau, une devise, une police qui lui
25 sera propre.
26 Dans le même ordre d'idées, la Défense montrera quelles sont les
27 décisions qui ont été prises par la République de Croatie sur le plan
28 judiciaire vis-à-vis de ceux qui ont participé à la rébellion armée des
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1 Serbes locaux contre l'Etat croate et ses lois. La Défense présentera la
2 Loi d'amnistie de 1992 qui a été prolongée par la Loi de l'annulation de
3 toute poursuite judiciaire votée en 1995. Conformément à ces deux lois, la
4 justice de la République de Croatie ne peut poursuivre que les auteurs qui
5 auraient commis des crimes de guerre, ce qui constituera un devoir pour
6 tout Etat respectueux du droit pénal international. Mais personne d'autre,
7 comme par exemple les insurgés serbes locaux, les membres de l'ancienne
8 armée du peuple yougoslave, et tous ceux qui auraient pris des armes contre
9 la République de Croatie et qui auraient commis des crimes dans le cadre du
10 droit pénal de la République de Croatie. Ils se verraient tous dans une
11 situation où il serait impossible de poursuivre une action à l'encontre de
12 ces personnes.
13 De même, la Défense montrera que la République de Croatie a aussi déployé
14 des efforts importants pour réintégrer les territoires occupés dans le
15 giron de l'Etat croate. Fin 1994, un plan économique a été signé avec la
16 République serbe de Krajina pour convaincre les dirigeants des insurgés
17 serbes de la nécessité d'une réintégration pacifique et éviter le recours à
18 la force armée par les forces armées croates.
19 La Défense exposera ces faits aux Juges de la Chambre en leur soumettant de
20 nombreux documents et témoignages qui attesteront de l'inexistence d'une
21 quelconque entreprise criminelle commune de la part des plus hautes
22 instances administratives de l'Etat croate, comme cela est indiqué dans
23 l'acte d'accusation, et que l'accusé n'est pas pénalement responsable
24 d'avoir participé à ces entreprises criminelles.
25 L'une des bases fondamentales de cet acte d'accusation est la campagne
26 orchestrée visant à faire partir la population serbe pendant et après
27 l'opération Tempête. C'est là un fait incontestable, Messieurs et Madame le
28 Juge, que les ressortissants serbes qui peuplaient majoritairement le
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1 territoire de ce qu'il est convenu d'appeler la République serbe de
2 Krajina, ont quitté le territoire en laissant derrière eux leurs
3 habitations et leurs biens. Le Procureur affirme que l'exode des Serbes est
4 la conséquence d'un comportement criminel des autorités croates et des
5 accusés ayant participé à cette politique.
6 Néanmoins, ce même Procureur cite dans l'acte d'accusation dressé contre
7 Milan Martic - et je fais là référence au paragraphe 85 - qui indique que
8 Milan Martic lui-même, en 1991, lui avait en personne rapporté que la
9 population serbe se disait prête et désireuse de ne plus vivre en Croatie,
10 et que les Serbes de Krajina souhaitaient vivre dans un Etat qu'ils
11 partageraient avec d'autres serbes. En outre, dans ce même acte
12 d'accusation au paragraphe 94, le Procureur cite une lettre envoyée par
13 Milan Babic à la conférence de paix de La Haye le 5 septembre 1991, dans
14 laquelle il était dit que la population serbe de Krajina avait décidé
15 d'exercer sa souveraineté dans un Etat où résideraient également d'autres
16 Serbes des Balkans. A l'évidence, ceci concernait un plan visant à
17 instaurer une Grande-Serbie, et non un Etat croate souverain. Il est clair
18 que la thèse défendue par le Procureur selon laquelle le gouvernement
19 croate serait responsable du départ des Serbes de la Krajina n'est tout
20 simplement pas exacte et ne correspond pas à la réalité des faits. Bien que
21 le Procureur soit clairement conscient de la réalité et du mécanisme qui
22 ont provoqué le départ des Serbes, il aurait donc dû être possible pour les
23 parties de conclure un accord sur ces faits. Mais en l'absence d'un tel
24 accord, la Défense montrera et démontrera au cours du procès que le départ
25 massif de la population serbe du territoire croate occupé de façon
26 temporaire était le résultat de l'idéologie politique défendue par les
27 autorités de la Krajina, et que ce départ avait été préparé méticuleusement
28 et avait été organisé soigneusement, car c'était une option politique dans
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1 l'hypothèse d'une réintégration des territoires de Krajina dans l'Etat de
2 la République de Croatie.
3 Nous démontrerons également que les plans d'évacuation de la population
4 existaient déjà en 1993. Et cette option politique des autorités de Krajina
5 constituait une illustration concrète du fait que les dirigeants serbes
6 avaient largement adopté l'idéologie politique défendue par le régime
7 dirigé par Slobodan Milosevic, qui était le premier à avoir formulé et
8 appliqué l'idéologie politique serbe stipulant "tous les Serbes dans un
9 seul et même Etat."
10 Les responsables politiques serbes ont adopté le même comportement vis-à-
11 vis de la population serbe en Croatie pendant la réintégration pacifique de
12 la région de Podunavlje et pendant la réintégration du territoire de
13 Sarajevo et autour de Sarajevo et pendant la réintégration du territoire du
14 Kosovo par la suite. Dans tous ces cas, soit sous l'effet d'une action de
15 la communauté internationale ou suite à des pourparlers et des négociations
16 bilatérales ou même à une intervention de l'armée ou de la police, en
17 d'autres termes, lorsque les entités quasi étatiques créées par les Serbes
18 ont été démantelées, le résultat a toujours été un exode organisé de la
19 population serbe lorsque l'option politique avait échoué, à savoir la
20 création d'une entité serbe dans un Etat dit indépendant et ayant toutes
21 les caractéristiques d'un Etat soit une entité serbe indépendante promise à
22 une intégration future au sein d'une Grande-Serbie. Il y a toujours eu un
23 exode massif de ces populations.
24 Et la Défense démontrera également que les dirigeants serbes de
25 Krajina, tout au long de la période de l'occupation et de la mise en place
26 d'un gouvernement illégale, n'ont cessé d'endoctriner la population en
27 affirmant que le gouvernement croate était de nature oustachi et
28 génocidaire, instillant ainsi chez les Serbes de la Krajina un sentiment de
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1 crainte et d'anxiété à l'égard du gouvernement croate, ainsi qu'un
2 sentiment de haine à l'égard de tous les Serbes de la Krajina dans le cadre
3 de la propagande menée par les autorités.
4 Dans un climat de peur et de haine, comme celui qui régnait et qui
5 était imposé aux Serbes de la Krajina par la propagande de leur
6 gouvernement, le succès remporté par l'action de l'armée et de la police
7 croate était vécu comme un danger direct pour la vie et l'existence de la
8 population. Ceci a été particulièrement vrai pour tous ceux qui avaient
9 commis des crimes contre les membres de la minorité croate en Krajina.
10 Après l'opération Tempête, en septembre 1995, un grand nombre de
11 Croates ont été expulsés de la République de Bosnie-Herzégovine et la
12 République de Croatie a été obligée de loger provisoirement ces personnes
13 expulsées dans les foyers, les maisons des Serbes de Krajina qui les
14 avaient abandonnées parce qu'il n'y avait pas d'autres logements
15 disponibles.
16 La Défense montrera à travers des exemples, qu'en juillet 1995, sur
17 le territoire de la République de Croatie, il y avait 385 000 personnes et
18 réfugiés.
19 Madame, Monsieur les Juges, Monsieur le Président, dans le cadre d'un
20 argument supplémentaire qui sera avancé par la Défense concernant
21 l'expulsion préméditée de la population serbe du territoire de la Krajina
22 par le gouvernement croate, elle montrera que la population serbe qui
23 s'était enfuie pendant et avant l'opération Tempête, a commencé à retourner
24 dans ses foyers une fois l'action terminée. Tout d'abord sur un plan
25 individuel, puis de façon organisée, et tout ceci avec le consentement des
26 autorités croates qui avaient remis à ceux qui revenaient dans le
27 territoire les documents croates nécessaires, et ce, dans le cadre d'un
28 effort organisé.
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1 Le retour de la population serbe dans les territoires de Krajina est
2 un processus continu qui ne pourrait et qui ne pouvait être achevé aussi
3 rapidement qu'avait été organisé leur départ de la Krajina. Ce processus de
4 retour est une question particulièrement complexe qui n'est pas uniquement
5 de la compétence des autorités croates, mais qui est tout d'abord et avant
6 tout une question d'accord interEtat et une action commune coordonnée par
7 les Républiques de Croatie, de Bosnie-Herzégovine et de Serbie dans les
8 territoires desquels la population qui s'était enfuie avait trouvé un
9 refuge temporaire en raison des opérations de guerre sur le territoire de
10 l'ancienne Yougoslavie, ce refuge temporaire s'était souvent transformé en
11 refuge permanent.
12 La Défense montrera et prouvera les efforts des autorités croates
13 pour permettre et encourager le retour des réfugiés et démontrera également
14 qu'en l'an 2000, près de 245 000 réfugiés étaient retournés sur le
15 territoire de la République de Croatie, parmi lesquels 122 500 Serbes ou
16 réfugiés d'origine serbe qui s'étaient enfuis suite aux opérations Tempête
17 et Flash. Ces faits que la Défense démontrera devant la Cour confirmeront
18 la thèse selon laquelle il n'y avait pas d'intention de la part des
19 autorités croates d'expulser de façon permanente des citoyens d'origine
20 serbe de la République de Croatie. Parce que si ce que stipule l'Accusation
21 avait été correct, alors les autorités croates n'auraient certainement pas
22 permis sur le plan législatif ou logistique le retour d'un nombre aussi
23 important de Serbes dans les foyers et les habitations qu'ils avaient
24 abandonnées un petit peu plus tôt en République de Croatie.
25 Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, le général Markac, au
26 cours de la période couverte par l'acte d'accusation, était commandant des
27 forces conjointes de la police spéciale de la République de Croatie et du
28 ministère de l'Intérieur qui avait été mis en place pour participer à
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1 l'opération Tempête. La Défense démontrera que le rôle de la police
2 spéciale dans l'opération Tempête avait un objectif bien particulier en
3 conformité avec les compétences et la formation spéciale qu'avaient suivi
4 les membres de la police spéciale. Le rôle des forces spéciales et de la
5 police spéciale et des militaires était défini par l'état-major principal
6 des forces armées de la RH auquel étaient subordonnées de façon ad hoc des
7 forces spéciales du ministère de l'Intérieur avec la probation et moyennant
8 un accord entre les ministres de l'Intérieur et de la Défense de la
9 République de Croatie. Une telle solution concernant le rôle joué par la
10 police spéciale a été mise en place par le commandant en chef des forces
11 armées de la RH, le président Tudjman lui-même.
12 Les forces spéciales avaient pour tâche de s'avancer et de s'engager
13 dans des combats dans les terrains montagneux les plus durs sur le mont
14 Velebit, là où l'ennemi ne s'attendait pas à une attaque. La Défense
15 démontrera que les forces spéciales avaient pour tâche de s'engager dans
16 des activités de combat et d'avancer le long d'axes clairement définis sans
17 avoir à mettre en place un ordre public dans le territoire libéré grâce à
18 leurs actions. La Défense démontrera qu'après la libération des territoires
19 préalablement occupés, les autorités croates, dans un laps de temps court,
20 ont mis en place leur propre administration en créant une administration de
21 la police et --
22 La Défense démontrera également que les forces spéciales avaient
23 certaines tâches à accomplir dans le cadre des combats, et la tâche
24 d'avancer le long de ces axes prédéfinis, et que les commandants des
25 districts militaires de l'armée croate n'avaient aucun pouvoir et ne
26 pouvaient émettre d'ordre à l'attention des membres de la police spéciale,
27 qui ne recevaient leurs ordres que du chef de l'état-major principal de
28 l'armée croate, et cet état-major commandait l'opération Tempête.
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1 La Défense démontrera que le général Markac n'a pas participé à la
2 planification de l'opération Tempête, l'opération militaire Tempête, au
3 sein de l'état-major principal et que, de ce fait, il n'a pas participé à
4 la planification de l'utilisation d'une artillerie stratégique de la HV ni
5 à l'identification de cibles d'artillerie dans les lignes arrières de
6 l'ennemi. De la même façon, la Défense démontrera que le soutien de
7 l'artillerie aux forces de police spéciale le long de l'axe de combat des
8 forces conjointes avait également été ordonné par le chef de l'état-major
9 principal de l'armée croate, en conformité avec des cibles d'artillerie
10 stratégiques qui avaient été identifiées au préalable et/ou l'artillerie a
11 apporté son soutien à la demande ad hoc des commandants des forces de
12 police spéciale. L'utilisation de l'artillerie d'infanterie - et c'était là
13 un élément de la police spéciale contre des points ennemis de résistance au
14 cours du combat - était décidée de façon autonome par les commandants de la
15 police spéciale sur leur axe de combat et leur axe d'avancement.
16 La Défense démontrera qu'il n'y avait pas d'utilisation
17 disproportionnée ou indiscriminée de l'artillerie tout au long des
18 opérations de combat ni dans la préparation de l'exécution de l'opération
19 Tempête. Au cours des préparatifs de cette opération, l'artillerie a été
20 utilisée contre des cibles militaires préalablement identifiées en partant
21 d'informations et de renseignements concernant le déploiement ennemi et les
22 forces ennemies. Au cours du combat lui-même, des tirs d'artillerie ont été
23 tirés contre des points de résistance ennemie en conformité avec des
24 informations que les tireurs avaient reçues des personnes sur le terrain ou
25 de commandants situés dans des axes d'attaque spécifiques.
26 Nous montrerons devant cette Cour que la quantité de munitions
27 utilisées pendant l'opération Tempête était considérablement inférieure à
28 ce qui est normalement utilisé par les armées membres de l'alliance de
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1 l'OTAN ou ce qui était utilisé par l'ancienne JNA ou par les armées membres
2 de l'ancien pacte de Varsovie. L'Accusation, stipulant que les tirs
3 d'artillerie des forces militaires et des forces de la police croate
4 avaient été utilisés de façon indiscriminée pour intimider la population
5 civile, n'est pas cohérente avec les faits et n'est tout simplement pas
6 exacte. La population civile de Krajina n'a jamais été la cible de
7 l'opération militaire ni de l'artillerie.
8 La Défense démontrera lors de la présentation de ses moyens que les
9 forces conjointes de la police spéciale ont avancé très rapidement en
10 neutralisant la résistance ennemie, et qu'en quatre jours seulement, elles
11 ont atteint la frontière de la République de Croatie et de la République de
12 Bosnie-Herzégovine. C'est là la tâche qui leur avait été allouée sur ordre
13 du responsable de l'état-major principal de la République de Croatie.
14 Dans ce court laps de temps, les forces conjointes de la police
15 spéciale ont parcouru, essentiellement à pied, une longue route à travers
16 des terrains montagneux difficiles en utilisant de façon sporadique des
17 véhicules légers pour le transport de personnes et d'équipement. Après être
18 arrivées à la frontière de Bosnie-Herzégovine dans la région de Kulen
19 Vakuf, les forces spéciales, membres des forces conjointes de la police
20 spéciale de la République de Croatie, c'est-à-dire le MUP, ont reçu des
21 ordres du chef de l'état-major de se retirer à leurs unités originales.
22 A la suite de leur retrait, les forces spéciales ont reçu une nouvelle
23 mission par le chef de l'état-major, à savoir de ratisser le terrain dans
24 la région de Petrova Gora, région qui se trouve au-delà de l'étendue
25 géographique couverte par l'acte d'accusation. Ce n'est que le 21 août
26 1995, de nouveau à la suite des ordres donnés par le chef de l'état-major
27 de l'armée croate, les forces spéciales sont retournées en Krajina avec
28 pour mission de ratisser le terrain afin de neutraliser les mines et
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1 explosifs qui étaient restés derrière, les dépôts de munitions ennemis,
2 mission consistant à neutraliser également les champs de mines et de
3 trouver et d'appréhender les terroristes, à savoir les membres armés qui
4 sont restés derrière, les rebelles serbes.
5 La Défense prouvera également que, dans la période entre le 8 août jusqu'au
6 21 août 1995, les membres des forces conjointes de la police spéciale
7 n'étaient physiquement pas présentes sur le territoire de Krajina, donc
8 n'auraient pas pu commettre des crimes pour lesquels mon client est accusé,
9 conformément à la théorie de la responsabilité de commandement.
10 L'acte d'accusation prétend qu'au cours de la période qu'elle couvre, de
11 juillet à septembre 1995, pour être plus précis, le 30 septembre 1995, sur
12 le territoire couvert par l'acte d'accusation, il existait un conflit armé.
13 La Défense démontrera que cette affirmation n'est pas basée sur les faits
14 ni sur la loi et il est donc absolument impossible de trouver les accusés
15 coupables en vertu des articles 3 et 5 du statut de ce Tribunal.
16 La Défense démontrera les faits pertinents suivants : l'opération Tempête a
17 débuté le 4 août 1995 et a duré 82 heures. Déjà au cours des deux premiers
18 jours de l'opération, les dirigeants militaires et politiques de Krajina,
19 ainsi que l'ensemble des forces armées de la République serbe de Krajina,
20 la police et l'armée, s'étaient retirés, avaient quitté le territoire de
21 Krajina de la République de Croatie et étaient passés sur le territoire de
22 Bosnie-Herzégovine et, plus tard, en Serbie.
23 Sur le territoire de la Krajina, que de tout petits groupes de rebelles
24 serbes du cru et de volontaires étaient restés sur place, des volontaires
25 qui étaient venus du territoire de Serbie et de Bosnie-Herzégovine, et ces
26 groupes sont allés se cacher dans les montagnes et les forêts. Ces derniers
27 résistaient de temps en temps aux autorités de la République de Croatie en
28 menant des attaques terroristes. Sur la base de ces faits, la Défense
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1 jettera d'abord le fondement juridique pour prouver sa thèse qu'à un
2 certain moment donné après l'opération Tempête, c'est-à-dire après le 8
3 août 1993, sur le territoire couvert par l'acte d'accusation, il n'y avait
4 pas de conflit armé, mais plutôt il existait un état de tension interne, ce
5 qui est une catégorie factuelle et juridique qui, clairement, implique un
6 niveau inférieur d'activités armées qui ne correspondent pas à la catégorie
7 de conflit armé. Une telle situation juridique et factuelle tombe très
8 clairement sous la juridiction claire des cours croates et ne tombe pas
9 sous la juridiction des tribunaux internationaux.
10 La Défense prouvera, en évoquant les sources du droit pénal international
11 et la loi coutumier, que dans ce cas-ci il n'est pas possible d'appliquer
12 les dispositions de l'article 3 et de l'article 5 du statut du Tribunal,
13 lorsqu'il s'agit de prouver la responsabilité pénale de l'accusé qui,
14 factuellement, porte sur les crimes commis après le 8 août 1995. Puisque
15 d'après la Défense, il existait un Etat juridique de "debellatio," c'est-à-
16 dire la cessation des hostilités avait déjà lieu. Notamment, la
17 jurisprudence démontre très clairement que la définition juridique d'un
18 conflit armé de cette catégorie, de la catégorie de conflit armé, exige
19 cumulativement deux éléments factuels, notamment l'intensité du conflit et
20 un niveau d'organisation des participants dans le cadre de ce conflit. La
21 Défense démontrera qu'après la fin de l'opération Tempête, l'intensité du
22 conflit existant entre les militaires croates et les autorités de police et
23 des éléments des rebelles serbes était mineure.
24 La Défense prouvera également qu'à la suite du départ de l'ensemble
25 des dirigeants politiques et militaires des Serbes rebelles de la Krajina,
26 la structure de commandement et de l'organisation des forces armées des
27 Serbes de la Krajina rebelles n'existait simplement plus.
28 Pour ce qui est des chefs d'accusation concernant l'omission alléguée de
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1 prévenir ou de punir les auteurs de crimes, la Défense démontrera que le
2 général Markac a pris toutes les mesures nécessaires qu'un commandant
3 raisonnable était en mesure de prendre afin d'obtenir les informations sur
4 tout comportement illicite de ses subordonnés. Au contraire. Il n'existe
5 absolument aucune information prouvant qu'une quelconque entité de la
6 communauté internationale, telle le CRO des Nations Unies, le UNCIVPOL, le
7 HCMM ou quelque autre entité domestique, soit la police criminelle, le SIS,
8 le service de la sécurité du ministre de la Défense, le service chargé de
9 la protection de l'ordre constitutionnel ou du procureur militaire ou
10 civil. En d'autres mots, aucun de ces organes mentionnés ci-haut n'a jamais
11 donné quelque rapport que ce soit ou quelque information que ce soit au
12 général Markac, à savoir que les membres des forces conjointes de la police
13 spéciale de l'unité antiterroriste de Lucko s'étaient livrés à des actes
14 criminels et que le général Markac n'ait pas pris des mesures nécessaires
15 ou qu'il ait omis d'exécuter son travail en tant que commandant. La Défense
16 démontrera que le général Markac n'a jamais essayé de dissimuler de façon
17 illicite quelque comportement illégal de ses unités subordonnées et n'a
18 jamais essayé d'influencer quelque organe d'enquête ou de juridiction.
19 La Défense démontrera également que le général Markac, en tant que
20 commandant des forces conjointes, n'avait aucune autorité et n'avait pas
21 non plus la mission de mener des enquêtes contre les auteurs de crimes et
22 que cette tâche et cette autorité tombaient sous la juridiction de la
23 police de l'intérieur enquêtant sur les crimes et de la police militaire du
24 ministère de la Défense de la République de Croatie et tombaient également
25 sous la juridiction des procureurs civils et militaires. La seule
26 obligation qu'avait mon client était d'informer les autorités compétentes
27 du gouvernement croate si les crimes avaient été commis ou d'être satisfait
28 au-delà de tout doute raisonnable que ces organes avaient été informés du
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1 comportement illicite de membres des forces conjointes de la police
2 spéciale ou de l'unité antiterroriste Lucko, qui était une unité qui, par
3 de sa création, avait été assignée en tant que partie intégrante du secteur
4 de la police spéciale du MUP de la République de Croatie.
5 Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, eu égard au
6 contexte factuel et juridique que la Défense présentera, nous croyons de
7 façon très réaliste que la Chambre de première instance sera satisfaite du
8 fait que mon client est innocent et rendra une décision juste acquittant le
9 général Markac de toute culpabilité ou de toute responsabilité.
10 Je vous remercie.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Mikulicic.
12 Je souhaiterais dire, non pas au nom de la Chambre, mais je souhaiterais
13 simplement vous faire une observation personnelle. Je voudrais réitérer
14 quelques préoccupations que j'avais hier, à savoir préoccupations sur des
15 éléments de preuve qui seront présentés pour ce qui est de la période entre
16 1991 et 1995.
17 Pour vous donner un exemple, à la page 9, à la ligne 23 et plus loin, vous
18 avez dit : "La Défense démontrera qu'en libérant les territoires occupés,
19 les forces armées de la République de Croatie a agi au nom et sous
20 l'autorité d'un Etat souverain ayant une identité internationale
21 juridique."
22 Je n'ai personnellement jamais eu l'impression que ceci était contesté.
23 Mais je me tourne maintenant vers l'Accusation pour voir si l'Accusation
24 est d'avis que s'agissant de l'opération Tempête, lorsqu'on parle de
25 territoires occupés et que ces derniers avaient été repris militairement,
26 que les forces armées de la République de Croatie n'avaient pas seulement
27 agi au nom d'un Etat sans une identité internationale juridique. Je n'ai
28 jamais eu cette impression.
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1 Me trompais-je ?
2 M. HEDARALY : [interprétation] Non, Monsieur le Président, vous avez tout à
3 fait raison.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
5 Donc, Monsieur Mikulicic, vous venez de nous dire que vous allez
6 présenter des éléments de preuve qui ne sont incontestés. Hier et
7 aujourd'hui, il a été question de la source des faits qui ont été présentés
8 dans l'affaire Martic. Je ne sais pas maintenant si la Défense se penchera
9 sur ceci, les événements qui se sont déroulés entre 1991 et 1994 pourraient
10 avoir une prédominance, mais il est certain que la Chambre pourrait penser
11 que vous pourriez accepter proprio motu certains éléments qui ont été
12 décidés dans l'affaire Martic.
13 Donc je me concentre sur ceci. Je ne vais pas dire que jusqu'à maintenant
14 la Chambre n'avait pas connaissance du fait que la destruction des villages
15 croates et que les meurtres tels que décrits dans le jugement Martic, la
16 Chambre n'a jamais obtenu l'impression que ce n'était pas pertinent pour ce
17 qui est de la présentation des moyens à décharge. Mais il semblerait qu'on
18 accorderait une importance particulière à ceci. Il faudrait savoir de
19 quelle façon il faut procéder de la façon la plus efficace lorsqu'il
20 s'agira d'établir les faits qui se sont déroulés au cours de cette période,
21 indépendamment, en fait, si ces faits avaient été expliqués, à savoir ce
22 qui s'est passé avant ou après, mais simplement pour commencer au moins
23 avec les faits.
24 De plus j'ai une question à vous poser, Maître Mikulicic. Je fais référence
25 à la page 13 du compte rendu d'audience. A la ligne 21, vous avez dit :
26 "Même si l'Accusation elle-même a clairement connaissance des mécanismes et
27 du départ des Serbes et que les faits pourraient être stipulés par le biais
28 d'un accord entre les parties, en l'absence d'un tel accord, la Défense
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1 démontrera et prouvera dans le cadre du procès qu'il y a eu un départ de
2 grande envergure de la population serbe du territoire croate temporairement
3 occupé et que ceci était un résultat d'une idéologie politique des
4 autorités de la Krajina, et le départ en question avait été méticuleusement
5 préparé et organisé en tant qu'option politique dans l'événement le
6 territoire de la Krajina serait réintégré dans la République de Croatie."
7 Je ne parle pas du fait que c'est une phrase qui prend sept lignes. Je ne
8 vais pas faire de commentaire là-dessus. Elle est bien structurée,
9 effectivement. Je ne dis pas que ce n'est pas une question importante,
10 parce que je sais que la Défense Markac commencera à présenter des éléments
11 de preuve là-dessus, mais le début de cette phrase, "Même si l'Accusation
12 est très clairement au courant des motifs et des mécanismes," c'est comme
13 si on disait qu'ils ne voulaient pas être d'accord pour quelque chose pour
14 lequel eux-mêmes savent que c'est la vérité. Donc je ne sais pas si vous
15 vouliez simplement exprimer le fait qu'un accord ne pouvait être fait sur
16 ce point-là.
17 Est-ce que c'est simplement une différente opinion, ou bien est-ce
18 que vous vouliez simplement parler de mauvaise foi ?
19 M. MIKULICIC : [interprétation] Non, c'est la différence d'opinion,
20 Monsieur le Président. En fait c'est un désaccord entre nous. L'affirmation
21 que j'ai faite selon laquelle l'Accusation est au courant de la situation
22 découle de l'affaire Martic et de la position prise par l'Accusation dans
23 l'affaire Martic.
24 Donc c'est plutôt une conclusion qui est la mienne qu'un résultat d'un
25 accord mutuel.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous dites que c'est plus qu'un
27 désaccord.
28 M. MIKULICIC : [interprétation] Oui.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est aussi ce que vous avez, c'est
2 aussi l'impression que vous en avez eue lors de la présentation des moyens
3 à charge dans l'affaire Martic.
4 M. MIKULICIC : [interprétation] Oui, c'est exact.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Misetic.
6 M. MISETIC : [interprétation] Nous voulions également vous dire que nous
7 avons ajouté sur notre liste 65 ter le mémoire préalable au procès de
8 l'Accusation et les mémoires en clôture dans ces autres affaires. Je
9 voulais simplement vous dire que nous avons pris les mémoires préalables au
10 procès de l'affaire Martic en tant que faits déjà adjugés. Donc nous ne
11 pouvions pas nous mettre d'accord sur les faits qui avaient déjà -- enfin,
12 qui étaient allégués dans le mémoire préalable au procès. Et comme le
13 disait Me Mikulicic, il y avait une politique délibérée par l'entreprise
14 criminelle commune de Martic d'instaurer parmi la population la peur. Donc
15 nous étions d'accord pour dire qu'en fait, simplement pour préciser le
16 compte rendu d'audience où la Chambre de première instance, plus tard, doit
17 employer ces pièces. C'est la raison pour laquelle nous nous sommes servis
18 de ces pièces, donc nous avons ajouté ces pièces sur la liste 65 ter.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. C'est une question, c'est
20 très valable comme opinion, effectivement. Donc la Chambre de première
21 instance estime qu'il n'est pas nécessaire de présenter ou de prouver des
22 faits qui peuvent déjà être établis ou sur lesquels vous pouvez vous mettre
23 d'accord, des faits qui ont déjà été adjugés sans entendre nécessairement
24 ces éléments de preuve. Il n'est pas nécessaire de procéder de façon
25 répétitive. Nous ne voulons pas dire que nous ne voulons pas entendre des
26 éléments de preuve présentés, mais nous voulons simplement en arriver aux
27 faits le plus rapidement possible. Et nous aimerions entendre de quelle
28 façon ces faits sont interprétés par les parties, de quelle façon ces faits
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1 sont abordés par les parties, quelle est l'opinion des parties sur ces
2 faits, effectivement, lorsqu'il s'agit de questions qui se trouvent au cœur
3 de ce procès, bien sûr.
4 Je fais une observation similaire, je n'ai pas passé beaucoup de temps là-
5 dessus encore, mais si Maître Mikulicic, par exemple, vous voulez établir
6 qu'il y avait un accord économique auquel on était parvenu avec la RSK en
7 1994, je ne sais pas si ceci est contesté, mais la signification de ceci
8 peut être différente, en fait. Effectivement, j'ai entendu beaucoup de
9 choses pour lesquelles j'ai été assez étonné de savoir qu'il y ait pu y
10 avoir un accord à moins qu'il n'y ait des questions particulières portant
11 sur cet accord précis, disons. Mais s'il était possible de se mettre
12 d'accord, à ce moment-là, la Chambre pourrait évaluer ces éléments de fait
13 lorsqu'on parle, par exemple, d'un élément, en fait, sachant très bien
14 qu'un élément pour la Défense est tout à fait différent pour l'Accusation.
15 Mais cela dit, je ne crois pas qu'il serait bien difficile d'établir, d'en
16 arriver à un accord. Et je suis convaincu que les parties pourraient se
17 mettre d'accord sur plusieurs points, par exemple. Par exemple, nous
18 pourrions dire que nous avons remarqué qu'un accord existait sur ceci, ceci
19 et cela, donc l'Accusation pourrait donner son aval, vous pourriez donc
20 essayer de vous mettre d'accord sur ceci.
21 Voici, c'étaient de brèves observations de ma part visant à essayer de
22 donner des instructions, en fait, essayant de dire à la Défense de se
23 concentrer sur les choses qui sont vraiment contestées afin de nous
24 permettre à nous de nous concentrer sur les choses qui sont réellement
25 importantes, qui sont des faits, donc de nous concentrer sur les questions
26 factuelles, et vous pourriez vous mettre d'accord sur les faits qui ne sont
27 pas contestés.
28 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]
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1 M. HEDARALY : [interprétation] Monsieur le Président, c'est la salle
2 d'audience numéro I, mardi, le 2 juin.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voulais simplement vérifier si
4 c'était exact. Alors vous avez certainement compris, n'est-ce pas, ma
5 demande, ma supplique selon laquelle je vous demande d'employer de façon
6 efficace le temps dans cette salle d'audience. Je voulais simplement
7 vérifier si tout est conforme.
8 Vous avez tout à fait raison, Monsieur Hedaraly. S'il n'y aucune question
9 de procédure à soulever maintenant, nous allons lever l'audience et nous
10 reprendrons nos travaux mardi le 2 juin, à 9 heures du matin dans la salle
11 d'audience numéro I.
12 --- L'audience est levée à 10 heures 41 et reprendra le mardi 2 juin 2009,
13 à 9 heures 00.
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