Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 4 juin 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 06.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde.

  7   Monsieur le Greffier, veuillez citer l'affaire.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour à

  9   toutes les personnes présentes dans ce prétoire. Il s'agit de l'affaire IT-

 10   06-90-T, le Procureur contre Ante Gotovina et consorts.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 12   Madame Skare Ozbolt, je voudrais vous rappeler que la déclaration

 13   solennelle que vous avez donnée hier au début de votre déposition est

 14   toujours de vigueur.

 15   Il semblerait que nous ayons des problèmes techniques.

 16   En attendant, nous pouvons poursuivre, n'est-ce pas ?

 17   Donc, Monsieur Kehoe, êtes-vous prêt à poursuivre l'interrogatoire

 18   principal ?

 19   M. KEHOE : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.

 21   M. KEHOE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 22   LE TÉMOIN: VESNA SKARE OZBOLT [Reprise]

 23   [Le témoin répond par l'interprète]

 24   Interrogatoire principal par M. Kehoe [suite] : 

 25   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame Ozbolt.

 26   R.  Bonjour.

 27   Q.  Hier, nous avons terminé alors que vous parliez de votre travail dans

 28   le secteur sud où vous avez essayé d'encourager les Serbes de la Krajina

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  1   serbe à rester.

  2   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je suis désolée. Je pense que ce n'est pas

  3   exactement la même… Ce n'était pas ça la tenue de la déposition. Il

  4   s'agissait des gens qui se trouvaient dans la base.

  5   M. KEHOE : [interprétation]  C'est tout simplement pour introduire le sujet

  6   que je posais une question un peu directrice.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Posez la question suivante, s'il vous

  8   plaît.

  9   M. KEHOE : [interprétation]

 10   Q.  Madame Ozbolt, je voudrais vous montrer plusieurs formulaires et c'est

 11   quelque chose qui fait partie de la feuille avec les informations

 12   supplémentaires.

 13   M. KEHOE : [interprétation] Il s'agit donc d'un document du Procureur,

 14   P5767 [comme interprété].

 15   Q.  C'est le premier document que je voudrais vous montrer.

 16   Veuillez examiner ce document et moi je vais vous montrer une autre version

 17   de ce document. C'est le document P57. Ensuite, je voudrais vous poser une

 18   question au sujet de ces deux documents.

 19   Tout d'abord, est-ce que ce document vous dit quoi que ce soit ? Est-ce que

 20   vous le connaissez ?

 21   R.  Je dois dire que non.

 22   Q.  Très bien. On va regarder le document P57.

 23   Qu'en est-il de ce document, Madame ?

 24   R.  Là encore, ce document n'évoque rien dans ma mémoire.

 25   Q.  Vous souvenez-vous des documents où les Serbes de la Krajina qui ont

 26   quitté la Krajina ont signé des documents disant qu'ils souhaitaient

 27   effectivement quitter la République de Croatie ?

 28   R.  A l'époque où moi j'étais dans la base, vous voulez dire ?

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  1   Q.  Oui.

  2   R.  Oui, c'est vrai qu'il leur est arrivé de signer des formulaires qui

  3   leur ont été fournis par l'ONU. Mais cela ne m'intéressait pas

  4   particulièrement, puisque là où nous nous sommes entretenus avec ces gens

  5   se trouvaient les membres de l'ONU. Et donc la procédure était telle qu'ils

  6   discutaient tout d'abord avec eux, ensuite avec moi-même, ensuite avec

  7   l'adjoint du ministre Penic, ensuite à nouveau avec les membres de l'ONU.

  8   De sorte que les décisions qu'ils avaient prises à la fin, c'étaient

  9   des décisions qu'ils avaient prises de façon autonome et ils ont signé sans

 10   doute un document semblable à celui-ci. Cela étant dit, ce document

 11   concrètement je ne m'en souviens pas.

 12   Q.  Très bien. Est-ce que vous, vous avez discuté avec les personnels de

 13   l'ONU pour savoir pourquoi des documents similaires à celui-ci étaient

 14   signés par les personnes qui souhaitaient quitter la Croatie ?

 15   R.  Non. Sans doute que l'ONU voulait avoir des garanties en quelque sorte,

 16   puisqu'ils partaient accompagnés de l'ONU.

 17   Q.  Hier, vous avez parlé de la Slavonie occidentale. Est-ce que vous savez

 18   si en Slavonie occidentale, l'ONU ou d'autres organisations ont utilisé des

 19   formes similaires à celle-ci ?

 20   R.  Je pense qu'ils avaient leurs façons d'enregistrer les gens qui

 21   souhaitaient quitter la Croatie et qui se sont adressés à l'ONU pour le

 22   faire. Ils se sont adressés aux forces du maintien de la paix.

 23   Q.  On va changer de sujet. Et à présent, je voudrais parler avec vous de

 24   quelques points que vous avez évoqués brièvement hier, au préambule de

 25   votre déposition. Et si je ne m'abuse, hier vous avez dit qu'il y avait 500

 26   000 réfugiés croates qui étaient déplacés à l'intérieur de la Croatie et

 27   300 000 réfugiés, ce qui représentait à peu près 800 000 personnes à la

 28   charge du gouvernement croate. Et quand on parle de ces 800 000 personnes,

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  1   est-ce que vous pouvez nous dire où est-ce qu'elles ont été hébergées ?

  2   R.  On faisait tant bien que mal pour les héberger. La plupart d'entre eux

  3   étaient hébergés sur la côte, dans les hôtels.

  4   Et une partie de ces réfugiés était hébergée aussi dans des hôtels à

  5   l'intérieur de la Croatie, dans des hôtels, évidemment, parce qu'on n'avait

  6   pas où d'autre les mettre, ou bien parfois dans des foyers ou dans des

  7   hôtels, voilà. C'est à peu près tout. C'est là qu'on hébergeait les gens

  8   qui étaient obligés de quitter leurs foyers. Et ils ont été hébergés de

  9   cette façon-là depuis 1991.

 10   Q.  Et ces individus qui étaient forcés de quitter leurs foyers, quand vous

 11   parlez de ces gens, est-ce que vous parlez entre autres aussi des Croates

 12   qui ont été obligés de quitter la Krajina ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Pourriez-vous expliquer aux Juges qu'elle était la charge pour les

 15   autorités croates que représentaient ces 800 000 personnes, à savoir 500

 16   000 personnes déplacées et 300 000 réfugiés, donc quelle était la charge

 17   financière autre pour le gouvernement croate que représentait toute cette

 18   quantité de gens ?

 19   R.  Tout d'abord, quand on parle de 300 000 personnes, ce sont des réfugiés

 20   de Bosnie-Herzégovine, c'est cela les réfugiés. Les 500 000 personnes, ce

 21   sont les personnes qui se sont déplacées à l'intérieur de la Croatie.

 22   Ils ont été hébergés avec les moyens de fortune, partout où on pouvait les

 23   mettre, dans les hôtels qui étaient de toute façon disponibles, parce qu'on

 24   ne savait pas où d'autre les mettre puisqu'ils arrivaient quotidiennement

 25   en fuyant la terreur et les attaques et en apportant uniquement les denrées

 26   de première nécessité.

 27   De sorte que les réfugiés arrivaient à Zagreb de façon quotidienne

 28   par autocars, en colonne, de toutes les façons possibles et imaginables. Et

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  1   la seule chose que l'on pouvait faire en 1991, c'était de les héberger dans

  2   les hôtels. C'est tout ce que l'on pouvait faire. Les réfugiés qui avaient

  3   leurs familles qui pouvaient les héberger, ils étaient hébergés auprès de

  4   leurs familles, mais la plupart se sont adressés au gouvernement et ils ont

  5   demandé à être hébergés par le gouvernement.

  6   Et cela représentait une charge énorme pour le gouvernement parce que la

  7   Croatie avait mis à la disposition de ces gens toutes ses installations

  8   touristiques et on pouvait mettre une croix sur le tourisme. Donc il n'y

  9   avait pas de revenu de tourisme non plus durant cette période.

 10   Evidemment, c'était des gens qui n'avaient pas de boulot. Il fallait aussi

 11   leur donner des moyens financiers et pendant toutes ces années, cela

 12   représentait une charge financière énorme pour l'Etat de Croatie et le

 13   budget croate.

 14   Q.  On va pour l'instant parler de ces Croates qui ont été chassés de la

 15   Krajina. Les Juges ont entendu parler de cela, ils ont entendu dire que des

 16   nombreuses maisons de Croates dans la Krajina ont été détruites entre 1991

 17   et 1995. Vous, vous avez parlé de cette politique de la réintégration

 18   paisible où il s'agissait de faire revenir ces Croates déplacés dans les

 19   zones d'où ils avaient été chassés.

 20   Pendant cette période cependant, il s'agissait de faire revenir ces gens

 21   dans leurs foyers, or leurs maisons, leurs foyers avaient été détruits,

 22   n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui. On essayait de le faire. C'était l'objectif. On essayait de

 24   rétablir l'équilibre, les proportions ethniques telles qu'elles existaient

 25   avant le début de la guerre.

 26   Q.  Après l'opération Tempête, vous et les autres --

 27   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Monsieur le Président, vous voulez faire

 28   passer un message --

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  1   M. KEHOE : [interprétation] Ecoutez, je suis en train de poser une

  2   question, je n'ai pas de message.

  3   Mme GUSTAFSON : [aucune interprétation]

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Calmez-vous, Monsieur Kehoe.

  5   La première fois que Mme Gustafson est intervenue, je l'ai laissé faire,

  6   mais c'est vrai que vous n'avez pas reproduit à juste titre ce que le

  7   témoin a dit.

  8   M. KEHOE : [aucune interprétation]

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et effectivement, c'était pour diriger

 10   le témoin comme vous l'avez dit, mais en même temps vous n'avez pas

 11   vraiment dit à juste titre ce que le témoin a dit.

 12   Moi je l'ai laissé, mais Mme Gustafson, je suis sûr, va uniquement faire

 13   les remarques quand c'est extrêmement nécessaire.

 14   Vous pouvez poursuivre.

 15   M. KEHOE : [interprétation]

 16   Q.  Madame Ozbolt, est-ce que vous et d'autres membres du bureau du

 17   président, et là je parle de la période d'après l'opération Tempête, est-ce

 18   que vous avez entendu parler de pillages et des incendies volontaires qui

 19   se produisaient dans la Krajina ?

 20   R.  Oui. C'est vrai, on recevait de telles informations.

 21   Q.  Comment avez-vous réagi à ces informations après avoir entendu cela ?

 22   R.  Evidemment, je n'étais pas contente. J'avais honte de ce qui se passe.

 23   Pas seulement que j'avais honte moi-même personnellement, mais on demandait

 24   que les auteurs soient trouvés et qu'ils soient aussi punis.

 25   Q.  Est-ce que vous ou les personnes avec lesquelles vous vous êtes

 26   entretenue dans le bureau du président, est-ce que vous vous attendiez à ce

 27   genre de comportement ?

 28   R.  Je dois dire qu'un tel comportement, nous, on ne s'attendait pas à

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  1   cela. Nous avons mené à bien cette opération Eclair qui était une opération

  2   très bien organisée où de tels incidents ne se sont pas produits. Je dois

  3   dire que personne au sein du gouvernement ne s'attendait à ce que se

  4   produise ce qui s'est produit après l'opération Tempête.

  5   J'en ai parlé avec le président. Il était assez perturbé, en colère à cause

  6   de cela. A un moment donné, il m'a même dit qu'il s'agissait là d'une

  7   diversion, d'un sabotage, parce que lui, il faisait en sorte - c'était une

  8   promesse qu'il a faite à tout le monde - et il faisait en sorte que cette

  9   opération se termine rapidement et qu'ensuite on poursuive les efforts de

 10   réintégration.

 11   Et donc je peux dire que là il s'agissait d'un comportement complètement

 12   inattendu, on était horrifié par ce qui se passait et cela a marqué à

 13   jamais tous les efforts de la Croatie et de son gouvernement.

 14   Q.  Madame Ozbolt, à l'époque où vous travailliez comme chef adjoint du

 15   cabinet du président, est-ce que vous avez vu le président Tudjman agir de

 16   sorte à ce que vous puissiez en tirer la conclusion qu'il avait pour plan

 17   de procéder à des incendies, des pillages, et cetera, après l'opération

 18   Tempête dans la Krajina ?

 19   R.  Non.

 20   Q.  Mais quand cela s'est produit, ces pillages et ces incendies des

 21   maisons des Serbes, est-ce que cela a rendu plus difficile l'hébergement

 22   des personnes déplacées croates et qui auraient voulu éventuellement

 23   retourner dans la Krajina ?

 24   Mme GUSTAFSON : [interprétation] A nouveau, je voudrais demander que l'on

 25   pose ces questions sans diriger le témoin.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kehoe, est-ce que c'était une

 27   question directrice ?

 28   M. KEHOE : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation]  Monsieur Kehoe, posez la question

  2   autrement et posez-la sans diriger le témoin.

  3   M. KEHOE : [interprétation]

  4   Q.  Est-ce ces pillages et ces incendies ont rendu les plans du

  5   gouvernement de Croatie qui visait à une réintégration pacifique plus

  6   compliqués ?

  7   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je suis désolée, mais c'est une question

  8   directrice.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Kehoe, c'est vrai.

 10   Vous pouviez demander tout simplement quelle était la conséquence de ce qui

 11   s'est passé là-bas par rapport à la mise en œuvre de la politique du

 12   gouvernement.

 13   M. KEHOE : [interprétation] Très bien.

 14   Q.  Quelle était la conséquence de ces activités, à savoir pillages et

 15   incendies, sur la mise en place de la politique de réintégration ?

 16   R.  Les conséquences étaient mauvaises. Personne au sein du gouvernement

 17   n'aurait pu être d'accord avec des incendies de maisons, avec les pillages

 18   des maisons. Comment voulez-vous accepter cela ? Le président s'est

 19   entretenu avec les ambassadeurs des pays du Groupe de contact ainsi que le

 20   ministre des Affaires étrangères et le ministre des Affaires intérieures.

 21   Enfin, personne de cette politique ne s'attendait à ce que se produise ce

 22   qui s'est produit.

 23   Je dois dire que tous ceux qui représentaient les autorités et le

 24   gouvernement du pays, ils étaient tous complètement choqués, personne n'a

 25   essayé de défendre les auteurs de ces crimes et ont demandé à ce qu'ils

 26   soient traduits devant la justice. Je pense qu'à peu près 2 000 personnes

 27   ont fait l'objet de telles poursuites au cours des différentes périodes

 28   pour ces actes, les actes commis à l'époque.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les interprètes n'ont pas entendu le

  2   chiffre que vous venez de prononcer.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] 2 000.

  4   M. KEHOE : [interprétation]

  5   Q.  Madame Ozbolt, quelles conséquences ont eu ces pillages et ces

  6   incendies sur l'hébergement des Croates qui étaient déplacés ?

  7   R.  C'était complètement stupide que d'incendier ces maisons parce qu'on

  8   n'avait pas suffisamment d'hébergement pour tous ces gens qui devaient

  9   retourner chez eux, et on n'en avait pas parce que les maisons étaient

 10   incendiées.

 11   De toute façon, cela avait créé à l'époque une situation d'insécurité, une

 12   situation chaotique, ne parlons même pas de la honte à laquelle on avait

 13   tous été exposés à l'époque.

 14   Q.  Pourriez-vous nous expliquer quelles étaient les difficultés que

 15   représentait cela éventuellement pour la République de Croatie sur le plan

 16   international ?

 17   R.  Quand on a planifié l'opération Tempête, là je dis que jusqu'au bout on

 18   a essayé de trouver une solution politique à la crise. Mais puisque le

 19   gouvernement de Martic n'était pas prêt à apprêter cette solution

 20   politique, on a lancé cette opération militaire en ayant l'intention de la

 21   terminer très rapidement, et on voulait ensuite le plus rapidement possible

 22   normaliser la vie dans cette région. C'était le plan du gouvernement.

 23   Donc il ne s'agissait pas de piller, d'incendier après l'opération, puisque

 24   cela ne faisait aucun sens de le faire.

 25   Q.  Voici la question que j'aimerais vous poser, les difficultés que ceci a

 26   représentées pour la République de Croatie au niveau politique ou

 27   international, quelles étaient-elles ?

 28   R.  Évidemment, il y a eu des difficultés, l'impact a été négatif puisque

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  1   personne ne pouvait accepter ces actes de pillage et d'incendie.

  2   Q.  Bien. Nous avons parlé de la question de la destruction de biens,

  3   j'aimerais aborder avec vous un dernier aspect de cette question, je parle

  4   notamment de la confiscation temporaire de biens.

  5   Vous connaissez la loi de la République de Croatie qui existe dans ce

  6   domaine, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Cette loi autorisait-elle véritablement le gouvernement croate à

  9   confisquer les biens abandonnés par les Serbes qui avaient quitté la

 10   Krajina ? Cette loi l'autorisait-il à le faire ?

 11   R.  Souvent, les représentants du gouvernement et du ministère chargé de la

 12   reconstruction et du développement devaient expliquer que la loi ne

 13   permettait pas la confiscation de biens parce que la loi croate protège les

 14   biens et propriétés privés.

 15   Suite à l'opération Tempête, comme pour l'opération Eclair, certaines

 16   personnes ont décidé de quitter la République de Croatie, et ce faisant, on

 17   laissé sur place les biens qui leur appartenaient, pour veiller à ce que

 18   ces lieux ne restent pas vides, désertés, et qu'il y ait pillages ou

 19   incendies. Sachant que nous étions confrontés à un grand nombre de réfugiés

 20   qu'il n'a plus été possible d'héberger dans des hôtels, le gouvernement a

 21   promulgué cette loi de nature temporaire, provisoire - et je souligne bien

 22   cet élément - une loi donc permettant de placer les réfugiés à titre

 23   temporaire dans ces habitations abandonnées. Les réfugiés qui se sont vu

 24   attribuer ce genre de logement provisoire venaient surtout de Bosnie-

 25   Herzégovine, bien que certains venaient également de Croatie, cet

 26   hébergement était prévu jusqu'au moment où leurs habitations seraient

 27   reconstruites ou jusqu'au moment où les réfugiés de Bosnie-Herzégovine

 28   seraient en mesure de rentrer chez eux en Bosnie-Herzégovine.

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  1   Q.  Cette loi prévoyait-elle que les Serbes vendent leurs propriétés, leurs

  2   biens, au gouvernement croate ?

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson.

  4   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Objection, il s'agit encore une fois d'une

  5   question directrice.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] N'est-ce pas effectivement une question

  7   directrice, Monsieur Kehoe. Vous dites, Fallait-il vendre ou non, pourriez-

  8   vous poser la question d'une autre manière, y avait-il certaines exigences

  9   particulières si vous deviez vendre, et cetera.

 10   M. KEHOE : [interprétation] Bien sûr.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez.

 12   M. KEHOE : [interprétation] 

 13   Q.  Alors y avait-il des exigences particulières eu égard à la vente de ces

 14   habitations ?

 15   R.  Vous parlez d'exigences, de "conditions particulières". Il n'y avait

 16   pas d'exigences particulières, c'était une possibilité qui était donnée à

 17   ceux qui ne souhaitaient pas rentrer en Croatie, ils pouvaient vendre leurs

 18   biens, sur le marché libre ou bien au gouvernement de Croatie.

 19   En accord avec des représentants de la communauté internationale, un

 20   organisme a été mis en place chargé de la vente des biens immobiliers,

 21   organisme qui vendait ou achetait ces biens, ou plus précisément qui

 22   rachetait ces biens.

 23   Un tel organisme a également été mis en place en Bosnie-Herzégovine

 24   et me semble-t-il également en Serbie. Il s'adressait à toutes ces

 25   personnes qui ne souhaitaient plus revenir là où elles avaient vécu

 26   auparavant. Le gouvernement de la République de Croatie a ainsi acheté un

 27   assez grand nombre d'habitations contre de l'argent.

 28   M. KEHOE : [interprétation] Donnez-moi un instant, s'il vous plaît,

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  1   Monsieur le Président.

  2   [Le conseil de la Défense se concerte]

  3   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

  4   M. KEHOE : [interprétation] Je n'ai plus de questions à poser à ce

  5   témoin.

  6   Merci, Madame.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Maître Kehoe.

  8   Monsieur Kay, avez-vous des questions ?

  9   M. KAY : [interprétation] Oui, en effet.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Ozbolt, Me Kay va maintenant vous

 11   poser un certain nombre de questions. M. Kay représente M. Cermak.

 12   M. KAY : [interprétation] Merci.

 13   Contre-interrogatoire par M. Kay : 

 14   Q.  [interprétation] Madame Ozbolt --

 15   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre, Monsieur

 16   le Président. Je voulais simplement vous faire part d'un certain nombre de

 17   problèmes techniques que nous rencontrons à l'heure actuelle. Notre système

 18   ne fonctionne plus, nous ne sommes pas en mesure de voir s'afficher les

 19   documents utilisés dans le cadre du contre-interrogatoire.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Si vous avez besoin de

 21   l'assistance des techniciens, faites-le savoir au greffe de façon à ce que

 22   les techniciens puissent venir vous prêter main-forte.

 23   Monsieur Kay, vous n'êtes pas gêné par le manque de ressources

 24   informatiques, quant à vous, n'est-ce pas ?

 25   M. KAY : [interprétation] Non. C'est sans doute plus un avantage qu'un

 26   inconvénient pour moi.

 27   Q.  Madame Ozbolt, nous savons que l'opération Tempête a commencé le 4 août

 28   1995. Quand avez-vous appris pour la première fois que cette opération

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  1   militaire allait avoir lieu ?

  2   R.  Votre question n'est pas simple et elle exige une réponse très précise

  3   de ma part. Pendant toute cette période-là, je faisais partie de cette

  4   ligne de communication qui existait et nous savions qu'une opération allait

  5   se produire si les négociations à Genève échouaient.

  6   Alors si vous me demandez si j'étais au courant, oui, je le confirme.

  7   Q.  Bien. Et à un moment donné, n'est-ce pas, l'information vous est

  8   parvenue, l'information selon laquelle l'opération militaire allait se

  9   dérouler. Etait-ce la veille, le 4 août, quelque chose de cet acabit ?

 10   R.  Oui, quelque chose de cet acabit.

 11   Q.  Et suis-je en droit d'affirmer que certains plans concernant l'armée,

 12   le ministère de l'Intérieur, d'autres instances du gouvernement, que les

 13   plans donc ont commencé à être concrétisés véritablement à partir de cette

 14   date ?

 15   R.  Probablement, même si je n'étais pas informée personnellement de ces

 16   plans.

 17   Q.  S'agissant de M. Cermak, pourrait-on dire qu'avant le 4 août et avant

 18   le début de l'opération Tempête, son nom n'était absolument pas apparu dans

 19   ces informations qui avaient circulé à propos de l'opération, et que lui-

 20   même n'y avait pas pris part d'une quelconque manière à cette transmission

 21   d'informations ?

 22   R.  Non. Il n'a jamais été mentionné. Il était homme d'affaires à l'époque

 23   et il s'intéressait à son activité d'homme d'affaires.

 24   Q.  Vous avez dit qu'à l'époque, il était homme d'affaires. Serait-il exact

 25   de dire que pendant quelques années, il n'avait pas pris part à la vie

 26   politique ?

 27   R.  Je crois que la dernière fonction politique qu'il avait exercée était

 28   celle de ministre de l'énergie et de l'industrie. Il a donc été membre du

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  1   gouvernement chargé de l'énergie, de l'industrie, de la construction

  2   navale, je crois. Et c'était plus ou moins en 1993, je pense.

  3   Q.  Merci. Nous savons qu'il a été nommé le 5 août par le président Tudjman

  4   aux fonctions de commandant de garnison à Knin. Quand avez-vous entendu

  5   dire pour la première fois que l'on envisageait de nommer le général Cermak

  6   à un poste à Knin ?

  7   R.  En gros, à la même période. Comme je l'ai déjà indiqué, l'idée était de

  8   conclure le plus rapidement possible l'opération militaire et de rétablir

  9   le système de communications, de redonner vie à toute la zone.

 10   Le président recherchait le candidat idéal à ces fonctions. Il cherchait un

 11   homme d'affaires, un chef d'entreprise qui aurait les capacités de faire

 12   tout ceci en assez peu de temps et son choix s'est porté sur Cermak.

 13   Q.  Serait-il exact d'affirmer qu'à cette époque, on a jugé qu'il serait

 14   bon de faire quelque chose dans le secteur de Knin, en cas de libération,

 15   pour permettre réintégration et reconstruction au sein de la Croatie ?

 16   R.  Je crois avoir indiqué hier que le gouvernement croate a jugé que la

 17   situation économique était désastreuse, ce qui était le cas.

 18   Le règlement de la situation militaire était donc une condition sine qua

 19   non, mais il fallait la régler le plus rapidement possible, de manière à

 20   redynamiser l'économie et la vie publique en général. Mais il y avait

 21   beaucoup à faire puisque le chaos le plus total régnait dans la RSK. La

 22   seule structure qui fonctionnait à l'époque à ce moment-là c'était l'armée.

 23   Le système scolaire, le système de santé, l'économie, quasiment

 24   inexistante, ne fonctionnaient plus du tout.

 25   La partie méridionale de la Croatie était coupée du reste du pays, ce qui

 26   posait de graves difficultés au niveau économique.

 27   Le troisième problème était lié à la présence des réfugiés, et dans les

 28   circonstances le gouvernement ne parvenait plus à subvenir à leurs besoins.

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  1   Tout ceci appelait une action rapide pour redynamiser et insuffler un

  2   nouveau souffle au pays dans son ensemble. C'était l'objet de tout ceci.

  3   Q.  Savait-on que depuis 1991, au moment où la RSK s'est constituée à Knin

  4   et dans le secteur environnant, il n'y avait pas eu d'investissement,

  5   aucune action de développement, aucune avancée dans la qualité de vie dans

  6   le quotidien ?

  7   R.  Tout à fait. Personne ne voulait investir dans une zone touchée par la

  8   guerre, une zone représentant un risque élevé. La Croatie était vue comme

  9   zone de guerre. C'était un vrai problème. Il n'y avait plus de touristes,

 10   il n'y avait plus d'investisseurs en Croatie.

 11   Q.  Nous savons que le représentant du gouvernement à Knin s'appelait M.

 12   Petar Pasic. Connaissez-vous ce nom et savez-vous quelle position il

 13   occupait ?

 14   R.  Oui. Le gouvernement avait le pouvoir effectivement de nommer des

 15   représentants dans ces zones chargés de rester en contact permanent avec le

 16   gouvernement et d'assurer l'exécution de toutes les décisions prises par ce

 17   dernier tout en s'occupant de toute tâche revenant à de tels représentants.

 18   Q.  L'une des tâches confiées à ces représentants du gouvernement était-

 19   elle de redynamiser l'économie de la zone, d'assurer le fonctionnement de

 20   la ville et de veiller à la normalisation des conditions de vie à Knin ?

 21   Etait-ce là l'une des fonctions, l'une des responsabilités de cette

 22   personne ?

 23   R.  Oui. Effectivement, c'était là l'une de ses responsabilités; même si

 24   les problèmes à Knin dépassaient de loin ce qu'aurait pu faire Pasic en

 25   tant que représentant du gouvernement dans le cadre de ses fonctions.

 26   Q.  Serait-il exact de dire que l'un des objectifs poursuivis en envoyant

 27   M. Cermak à Knin était que celui-ci aide M. Pasic dans son travail ?

 28   R.  M. Pasic était représentant officiel du gouvernement. M. Cermak avait

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  1   été ministre, il était général à la retraite, et c'était un homme

  2   d'affaires. Il était extrêmement doué en matière d'organisation.

  3   Alors l'idée poursuivie en envoyant Cermak à Knin était de stimuler la

  4   reconstruction, le retour à une économie plus solide, la remise en place du

  5   système de communications, et de manière générale, l'idée était de parvenir

  6   à une normalisation de la vie sur place.

  7   Permettez-moi de poursuivre. Nous avons rencontré une situation semblable

  8   en Slavonie occidentale où, en plus du représentant officiel de l'Etat,

  9   d'autres personnes ont été nommées aux fonctions de coordonnateur, en

 10   quelque sorte, des personnes susceptibles d'aider dans le processus de

 11   normalisation. On a fait de même pour Knin.

 12   Toutefois, il était impossible de retirer les personnes qui se trouvaient

 13   en Slavonie occidentale et de les envoyer vers le sud parce qu'il restait

 14   beaucoup de travail à faire en Slavonie occidentale. Par conséquent, le

 15   choix s'est porté sur Cermak.

 16   Q.  Est-il exact qu'on le considérait également comme un expert en matière

 17   de logistique, en matière d'organisation dans le cadre de projets, du fait

 18   de son expérience de ministre, une fonction qu'il a exercée entre 1991 et

 19   1993 ?

 20   R.  Comme je l'ai dit, ses qualités d'organisateur étaient connues.

 21   Puisqu'il s'était occupé d'un portefeuille lié de près à l'économie,

 22   c'était le candidat idéal. Il venait également de l'armée où il avait eu le

 23   grade de général, et pour dire les choses simplement, il avait un ensemble

 24   de qualités qui correspondaient bien aux besoins.

 25   Q.  Serait-il exact de dire qu'en le nommant, le président Tudjman n'avait

 26   absolument pas l'intention de faire de M. Cermak le commandant de la police

 27   civile dans la région ?

 28   R.  Si le président Tudjman voulait nommer un commandant de la police

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  1   civile, il l'aurait fait. L'idée véritablement c'était de nommer une

  2   personne susceptible de ramener la vie à la normale.

  3   L'intention n'était absolument pas de mettre en place un quelconque

  4   régime militaire compte tenu notamment de la situation délicate qui régnait

  5   sur place et compte tenu du fait que le message transmis à la population

  6   était que l'on souhaite qu'elle reste là où elle se trouvait et qu'elle

  7   soit intégrée dans le système croate. La nomination d'un militaire ou d'un

  8   policier quel qu'il soit aurait été perçue comme un acte de contrainte ou

  9   d'oppression, ce qui n'était pas l'objectif.

 10   Q.  Serait-il alors exact d'affirmer que le président Tudjman n'a pas

 11   envoyé M. Cermak sur place afin qu'il prenne les rênes d'un régime

 12   militaire dans le secteur ?

 13   R.  Oui. Effectivement, ce n'était pas l'objectif qu'il poursuivait; vous

 14   avez raison.

 15   Q.  Nous avons entendu un certain nombre d'éléments dans cette affaire

 16   selon lesquels la communauté internationale était basée dans un camp des

 17   forces de maintien de la paix des Nations Unies à Knin, et qu'au moment de

 18   la libération de Knin, une grande partie de la population serbe et croate

 19   s'y était rassemblée.

 20   Cet événement a-t-il posé, à votre connaissance, des problèmes à la lumière

 21   du plan et de la stratégie envisagés par le gouvernement ou par le

 22   président en réalité ?

 23   R.  Pourriez-vous être plus précis dans votre question. Pourriez-vous dire

 24   exactement à quel problème ou difficulté vous pensez. Il y avait plusieurs

 25   centaines de personnes dans ce camp qui y avaient trouvé refuge. Les

 26   Nations Unies ont sollicité notre aide pour résoudre la situation, aide que

 27   nous avons apportée.

 28   C'est la première fois que je me rendais à Knin. Le général Cermak était

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  1   présent. Je pense que nous sommes allés au camp ensemble. Je suis restée

  2   sur place, lui, il est parti; peut-être qu'il est revenu par la suite, je

  3   ne sais plus. Nous avons résolu de toute façon le problème posé par la

  4   situation.

  5   Q.  Vous nous avez dit que le travail de M. Cermak visait à normaliser la

  6   vie. Est-ce qu'il s'est vu aussi confier la mission de servir d'officier de

  7   liaison pour le gouvernement croate avec le commandant de l'opération de la

  8   restauration de confiance de l'ONU ainsi qu'avec les autres personnalités

  9   relevant de la communauté internationale ?

 10   R.  Je ne saurais définir sa mission parce que malheureusement, la mission

 11   qui lui a été confiée par le président, c'est quelque chose qui n'existe

 12   nulle part dans le monde, c'est unique.

 13   Et si vous me demandez quels étaient ses pouvoirs, il était un peu un

 14   cobaye, un chevalier sans patrie, sans terre. Il était coordinateur et on

 15   ne savait pas exactement où il devait agir, sur quel territoire.

 16   Tout simplement, quand vous me posez des questions au sujet de la

 17   communication avec les représentants de l'ONURC, il était obligé de

 18   communiquer avec eux, qu'il s'agisse d'une mission ou non. Il était obligé

 19   de s'en occuper parce que tous les jours ils venaient le voir pour lui

 20   exposer leurs problèmes.

 21   Q.  Est-ce que l'on a jamais prévu que la base de l'ONURC à Knin devienne

 22   un problème pour le plan que l'on avait par rapport à ce qui allait se

 23   passer à Knin ?

 24   R.  Pourriez-vous m'expliquer la question parce que je ne l'ai pas

 25   comprise.

 26   Q.  Pendant ces journées du 4 et 5 août, est-ce qu'on peut dire que les

 27   relations avec l'ONURC et les gens dans le camp étaient quelque chose qui

 28   pouvait créer un problème, comme un problème entre l'ONU et la Croatie ?

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  1   R.  Non. Le problème a surgi lorsque l'ONU a dit que ces personnes avaient

  2   refusé de quitter le camp et que ceci leur créait un problème logistique.

  3   Q.  Est-ce qu'on pourrait dire que du côté croate, du côté du gouvernement

  4   croate et de ses organisations, qu'ils considéraient que ce territoire

  5   était leur territoire souverain, qu'ils avaient libéré, et qui leur avait

  6   appartenu --

  7   R.  Oui.

  8   Q.  --et que les membres de la communauté internationale qui étaient sur

  9   leur territoire n'avaient pas les mêmes pouvoirs que ceux qu'ils avaient eu

 10   précédemment, ni le même rôle ?

 11   R.  Les pouvoirs de l'ONU ont continué à être les mêmes. Cependant, la

 12   Croatie avait établi son autorité et l'ONU était là pour aider la Croatie à

 13   ce faire.

 14   Voici comment j'appellerais cela : il y a quelque chose qu'il fallait faire

 15   et qui relevait de l'ingérence de la compétence de la FORPRONU ou par la

 16   suite, de l'ONU, c'est le gouvernement lui-même qui l'a atteint. Je vous

 17   rappelle que le but des missions de paix de l'ONU n'était pas seulement

 18   d'arrêter la guerre, mais aussi de réaliser une démilitarisation et de

 19   rétablir la vie normale, à faire revenir les réfugiés et travailler à la

 20   revitalisation du territoire de la région. C'était les ingérences de l'ONU

 21   conformément aux résolutions de l'ONU.

 22   Puisque ceci n'a pas eu lieu, la Croatie a introduit sa propre autorité,

 23   mais l'ONU est restée sur place afin d'aider à ce que les choses

 24   s'établissent de manière appropriée.

 25   Q.  Peut-on maintenant examiner une pièce à conviction. Il s'agit de la

 26   pièce D28. Et c'est un accord qui a été signé entre M. Akashi et M. Sarinic

 27   le 6 août 1995.

 28   M. KAY : [interprétation] Peut-on montrer cela à l'écran.

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  1   Q.  Est-ce que vous voyez cela, Madame Ozbolt ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Est-ce que c'est un document que vous connaissez ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Saviez-vous qu'à l'époque c'était M. Sarinic et M. Akashi qui l'avaient

  6   signé ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Nous pouvons voir quels sont les termes de l'accord. Par rapport à ces

  9   questions-là en particulier, nous savons qu'en vertu du paragraphe 3, il

 10   existe une section où, "La Croatie encourage tous ces habitants précédents

 11   de la République de Croatie…qui souhaitent y rester de manière paisible

 12   dans les zones dans lesquelles l'autorité croate est exercée."

 13   Et que la Croatie permettrait toutes les garanties de la sécurité et le

 14   départ de ceux qui ne souhaitent pas rester, à l'exception de ceux qui

 15   avaient commis des violations du droit pénal international. Ensuite, la

 16   Croatie permettrait à l'ONURC et aux autres organisations d'assister et de

 17   coordonner les départs de la région.

 18   Est-ce que vous pourriez nous donner un peu de contexte général en ce qui

 19   concerne ce document et notamment ce paragraphe en particulier ?

 20   R.  Tout ceux qui souhaitaient quitter la Croatie dont l'organisation est

 21   sous la surveillance de l'ONURC les contactaient. Je suppose que la

 22   personne remplissait le formulaire tel qu'on l'avait vu et accompagnée par

 23   eux quittait la Croatie.

 24   Q.  En faisant cet accord, M. Sarinic et M. Akashi, est-ce que tous les

 25   deux savaient à l'époque que --

 26   M. KAY : [interprétation] Excusez-moi.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson.

 28   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je demanderais simplement que l'on pose le

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  1   fondement concernant les connaissances de l'état d'esprit de M. Sarinic et

  2   M. Akashi à l'époque.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Kay, est-ce que vous pouvez

  4   donner suite à cette suggestion ?

  5   M. KAY : [interprétation] Oui, et je l'accepte --

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez.

  7   M. KAY : [interprétation]

  8   Q.  Est-ce que vous savez -- enfin, vous avez déjà répondu. Mais je vais

  9   reposer la question.

 10   Est-ce que vous savez pourquoi ce paragraphe a été inséré dans l'accord par

 11   les deux parties ?

 12   R.  Car justement une partie venait de ce camp, celui dont nous avons parlé

 13   tout à l'heure, et ils souhaitaient quitter la Croatie.

 14   Q.  Cet accord s'applique --

 15   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je ne pense pas qu'un fondement ait ainsi

 16   été posé.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'avons pas entendu la question qui

 18   fait suite, donc…

 19   M. KAY : [interprétation] Je dois dire que je ne vois pas pourquoi ces

 20   objections sont faites, car visiblement il s'agit ici d'une question-clé

 21   dans l'affaire et ceci implique le départ anticipé des personnes du

 22   territoire croate conformément à ce qui a été envisagé par M. Akashi au nom

 23   de l'ONU. Nous savons qu'il était le représentant spécial du secrétaire

 24   général, et d'autre part M. Sarinic qui était le conseiller du président

 25   Tudjman et qui était à la tête de son bureau.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre vos questions.

 27   M. KAY : [interprétation] Merci.

 28   Q.  Nous voyons que ce document porte sur le secteur nord et le secteur

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  1   sud. Mais combien d'information y avait-il à l'époque, information que

  2   vous-même vous connaissiez au sujet du nombre de personnes qui souhaitaient

  3   quitter la Croatie à cette époque-là ?

  4   R.  Je dois avouer que je ne savais pas quel était le nombre de personnes

  5   qui souhaitaient quitter la Croatie.

  6   Akashi était chez nous dans notre bureau et nous a dit qu'il y avait un

  7   certain nombre de personnes qui ne souhaitaient pas vivre en Croatie. A ce

  8   moment-là, il a été convenu de faire en sorte que leur départ soit

  9   coordonné avec l'ONU. C'est la raison pour laquelle cette disposition était

 10   insérée dans l'accord.

 11   Q.  Merci. La question de ceux qui avaient commis les crimes, est-ce que

 12   vous pourriez informer la Chambre au sujet de ce que vous saviez concernant

 13   cette question et pourquoi ceci a été introduit dans cet accord ?

 14   R.  Cet accord comporte aussi une formulation portant sur ceux qui

 15   pouvaient quitter le territoire, tout ceux qui le souhaitaient, qui

 16   expriment leur souhait de ce faire, sauf ceux qui avaient commis des

 17   violations du droit pénal international, autrement dit, ceux qui avaient

 18   commis des crimes de guerre.

 19   Q.  Savez-vous quelles préparations le gouvernement croate était en train

 20   d'effectuer à l'époque afin de traiter de ce genre de suspects ou de

 21   personnes accusées des crimes de guerre, à leur avis quelle était la partie

 22   de la population qui souhaitait quitter la Croatie ? Est-ce que vous savez

 23   quelles étaient les mesures prises afin de traiter de cette question ? La

 24   Chambre de première instance connaît le contexte concernant les événements

 25   qui se sont déroulés en 1991 et par la suite, de manière générale.

 26   R.  Ceux qui avaient commis les crimes sur le territoire du secteur sud et

 27   nord, leurs noms étaient connus. Il y avait des témoins qui sont des

 28   personnes qui avaient été expulsées de la région ou qui avaient fui, et ces

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  1   personnes ont déposé à ce sujet devant des tribunaux. Des procédures

  2   judiciaires ont été menées à l'encontre de ces personnes considérées comme

  3   auteurs de crimes de guerre. Quant à leurs noms, les événements, et les

  4   témoins étaient connus par les tribunaux, et les tribunaux les

  5   recherchaient. Justement en raison de cela, compte tenu que soit ils

  6   étaient sur des avis de recherche, soit une procédure était déjà lancée

  7   contre eux, soit leur procès s'était terminé par contumace, donc les phases

  8   de la procédure différaient, justement en raison de cela, cette formulation

  9   a été introduite, qu'il fallait faire venir ces personnes devant un

 10   tribunal.

 11   Q.  Donc est-ce qu'à l'époque c'était une question qui relevait du

 12   ministère de la Justice ?

 13   R.  Le ministère de la Justice n'a fait que transmettre les demandes qui

 14   venaient soit du bureau du procureur de l'Etat, soit directement du

 15   tribunal et transmettait à l'époque ces requêtes à l'ONURC.

 16   Q.  Donc il y avait une liste de suspects; est-ce exact ? Personnes dont

 17   les noms avaient été donnés au système judiciaire croate. Est-ce que la

 18   situation à l'époque ressemblait à cela ?

 19   R.  Oui. Le ministère de la Justice avait la liste des noms recherchés par

 20   la justice.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kay, permettez-moi de demander

 22   une clarification auprès du témoin.

 23   M. KAY : [interprétation] Oui.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez parlé des personnes qui ont

 25   été jugées par contumace, des personnes condamnées. Et lorsque Me Kay vous

 26   a posé une question qui faisait suite à cela, il vous a demandé s'il y

 27   avait une liste de suspects. Bien sûr, il y avait les suspects par

 28   opposition aux personnes condamnées.

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  1   Et vous avez dit, "Le ministère de la Justice avait une liste de personnes

  2   qui ont été recherchées par la justice ou les organes judiciaires."

  3   Donc ça peut être les deux, je suppose, les accusés et ceux qui ont déjà

  4   été condamnés.

  5   Est-ce que vous pouvez nous dire quel est le nombre de personnes qui ont

  6   été condamnées des crimes de guerre ? Si j'ai bien compris, la plupart

  7   d'entre eux étaient jugés par contumace. Mais est-ce que vous pourriez nous

  8   donner une idée du nombre de personnes qui ont déjà fait l'objet de procès

  9   pour ces crimes ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai déjà dit, les listes du

 11   ministère étaient des listes de personnes qui à des moments différents de

 12   la procédure judiciaire, étaient recherchées. Ceux qui avaient fait l'objet

 13   d'une condamnation ayant force de la loi avaient la possibilité, compte

 14   tenu du fait qu'ils avaient été jugés par contumace, de voir leur procédure

 15   renouvelée.

 16   Je ne me souviens pas exactement de leur nombre, maintenant, pour ce qui

 17   est de cette partie-là, combien de condamnations ayant force de la loi

 18   existaient, mais je dirais une quarantaine. Je ne saurais vous dire le

 19   nombre exact.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] 40.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Environ 40.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] 40 concernant seulement la Krajina ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, seulement la Krajina.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

 25   Quelle était la longueur de la liste de ceux qui étaient soupçonnés, donc

 26   recherchés par les organes chargés des poursuites judiciaires?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] La liste des suspects était assez longue et

 28   portait sur l'ensemble du pays. Les listes comportaient plus de 400 noms de

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  1   personnes qui étaient recherchées en raison des suspicions selon lesquelles

  2   elles avaient commis des crimes.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Crimes ou crimes de guerre ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Crimes.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Car l'exception porte sur le droit pénal

  6   international. Et bien sûr, ça veut dire non pas tous les crimes.

  7   Je vais poser ma question de manière plus précise. Est-ce que ceci incluait

  8   aussi le fait d'être membre d'une force armée qui était une force armée

  9   illégale ? Autrement dit, la force qui occupait le territoire de la Croatie

 10   ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Ceci ne portait pas sur la participation

 12   à un soulèvement armé ni le fait de posséder des armes, car à quatre

 13   reprises au cours de cette période, une amnistie portant sur ces faits

 14   avait été proclamée.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 16   M. KAY : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être nous pouvons

 17   apporter une correction. Il s'agissait de 4 000 et non pas de 400.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Dans ce cas-là, j'ai mal

 19   compris.

 20   M. KAY : [interprétation] C'était une erreur de traduction, d'après ce

 21   qu'on m'a dit.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit 4 000, donc une longue

 23   liste de suspects ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons corriger le compte rendu

 26   d'audience.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je reviens à ma question. Vous avez dit

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  1   les crimes et non pas nécessairement les crimes de guerre. Est-ce que -- je

  2   vous ai demandé s'il s'agissait de crimes ou crimes de guerre, et vous avez

  3   répondu crimes.

  4   Est-ce que vous savez combien d'entre eux ont été soupçonnés d'avoir commis

  5   des crimes de guerre ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Vraiment, je ne sais pas quel est le nombre

  7   exact. Cette liste de plus de 4 000 personnes portait aussi sur les

  8   personnes qui avaient perpétré des meurtres, qui ne se qualifiaient pas en

  9   tant que crimes de guerre. Donc ce chiffre n'englobait pas des délits ou

 10   des violations de moindre importance, mais vraiment les soupçons portant

 11   sur des crimes ou délits graves. Quant à la question de savoir quel est le

 12   nombre de personnes parmi eux qui ont été effectivement accusées des crimes

 13   de guerre, il m'est difficile de dire cela.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci de ces réponses.

 15   Poursuivez, Maître Kay.

 16   M. KAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 17   Peut-on maintenant examiner un document, pièce à conviction P388. Il s'agit

 18   d'une lettre du 8 août 1995 envoyée par le général Cermak au général

 19   Forand, donc deux jours après l'accord Akashi/Sarinic. Si on peut examiner

 20   cette lettre.

 21   Q.  Le général Cermak demandait une liste de réfugiés dans le camp afin de

 22   pouvoir traiter de leurs problèmes et afin de s'assurer que des permissions

 23   étaient délivrées à tous ceux qui souhaitaient quitter le camp et continuer

 24   à vivre dans la région de Knin.

 25   Simplement en examinant cela, est-ce qu'il y avait une question liée au

 26   fait que ces personnes qui avaient été au sein de la RSK [comme interprété]

 27   et qui maintenant étaient placées sous la souveraineté croate devaient

 28   avoir une espèce de pièce d'identification et s'enregistrer en tant que

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  1   nationaux croates, s'ils souhaitaient devenir citoyens croates, s'ils

  2   souhaitaient être citoyens croates ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Dans la lettre il est dit, nous allons fournir les conditions d'une vie

  5   normale pour eux avec l'ONURC, nous allons établir une liste des femmes,

  6   enfants et personnes âgées de plus de 60 ans qui peuvent quitter le camp

  7   sans entrave, et s'ils ne souhaitent pas rentrer dans les zones libérées,

  8   mais s'ils souhaitent être transportés en Bosnie et en Serbie, nous allons

  9   assurer cela aussi.

 10   Ensuite le paragraphe suivant : Il est nécessaire de faire une liste des

 11   personnes âgées de 18 à 60 ans qui doivent faire l'objet d'un entretien

 12   mené par les représentants de la police civile de la République de Croatie

 13   en coopération avec vos gens. Ils auront accès aux soins médicaux, accès à

 14   la Croix-Rouge et autres organisations humanitaires. Tous ceux qui n'ont

 15   pas commis de crime à l'encontre de la République de Croatie seront permis

 16   de rentrer à Knin, alors que ceux qui ne souhaitent pas cela se verront

 17   assurer le transport en Bosnie ou en Serbie. Ceux détenus seront remis aux

 18   autorités judiciaires de la République de Croatie. Est-ce que vous pourriez

 19   immédiatement me remettre cette liste afin de nous permettre de régler les

 20   problèmes survenus ensemble.

 21   Ayant vu cette lettre, tout d'abord, est-ce que vous l'avez déjà vue cette

 22   lettre ?

 23   R.  Je suppose que oui, c'est possible.

 24   Q.  Bien.

 25   R.  Excusez-moi, mais beaucoup de temps s'est écoulé depuis.

 26   Q.  Simplement, il s'agit des questions traitées dans la lettre.

 27   R.  Oui, c'était le contexte.

 28   Q.  Oui. Et si l'on examine ce paragraphe portant sur les listes des hommes

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  1   concernant lesquels le général Cermak a dit qu'ils devaient faire l'objet

  2   d'un entretien mené par la police civile et par les représentants de la

  3   communauté internationale, ensuite la question liée aux crimes

  4   éventuellement commis de quelqu'un parmi eux; cette lettre écrite par le

  5   général Cermak, est-ce que vous savez si c'était une mesure prise par lui

  6   au nom du ministère de la Justice, pour ce qui est de cette question ?

  7   R.  Je suppose que le ministère de la Justice lui a demandé cela, que le

  8   ministère lui a demandé d'agir ainsi compte tenu du fait que le ministère

  9   de la Justice avait les noms recherchés par les organes judiciaires, par

 10   les tribunaux.

 11   Q.  Est-ce qu'alors la Croatie voulait résoudre ce problème rapidement,

 12   donc le problème concernant des personnes qui pourraient se trouver dans la

 13   base de l'ONU et qui auraient peut-être commis des crimes ou qui étaient

 14   suspectées de les avoir commis ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Vous vous êtes occupé de cela avec l'adjoint du ministère de la

 17   Justice, M. Tomislav Penic; est-ce exact ?

 18   R.  Je n'ai pas compris, excusez-moi. Oui, oui.

 19   C'est vrai que je n'ai pas beaucoup discuté avec M. Penic à ce sujet. Dans

 20   le bureau du président, nous avons rencontré ce problème à partir du moment

 21   où M. Akashi a attiré notre attention là-dessus. A savoir que c'est une

 22   question brûlante qu'on n'arrive pas à résoudre, et donc c'est là qu'on a

 23   commencé à participer à la résolution de ce problème. On a fourni nos

 24   efforts à nous aussi. Donc après tout cela, moi j'y suis allée dans la base

 25   avec M. Penic et nous avons eu des entretiens avec les familles de ces gens

 26   et on leur a fourni toutes les garanties.

 27   Q.  On va en parler par la suite, mais j'ai encore une petite question

 28   avant la pause, Monsieur le Président.

Page 18112

  1   Est-ce que M. Penic s'est occupé de ce problème avant vous au nom du

  2   ministre de la Justice, mais comme le problème devenait de plus en plus

  3   grave, le problème qu'il y avait entre le gouvernement croate et l'ONU,

  4   vous, en tant que représentante du bureau du président, vous êtes

  5   intervenue, n'est-ce pas ?

  6   R.  [aucune interprétation]

  7   M. KAY : [interprétation] Je pense que le moment est opportun pour prendre

  8   une pause.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous nous dire de combien de

 10   temps vous avez encore besoin.

 11   M. KAY : [interprétation] Deux heures, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Deux heures.

 13   Monsieur Mikulicic.

 14   M. MIKULICIC : [interprétation] Moi j'aurais besoin d'un quart d'heure,

 15   Monsieur le Président, pas plus.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson.

 17   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Quatre à cinq heures, Monsieur le

 18   Président.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais noter tout cela.

 20   Nous allons reprendre nos travaux à 11 heures.

 21   --- L'audience est suspendue à 10 heures 35.

 22   --- L'audience est reprise à 11 heures 07.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons réfléchi au temps que vous

 24   avez demandé. Nous pensons qu'il devrait être possible de terminer la

 25   déposition de ce témoin cette semaine.

 26   Pour cela, Monsieur Kay, vous allez bénéficier de toute la session

 27   prochaine, même si elle se prolonge un peu.

 28   Ensuite, Monsieur Mikulicic, vous avez votre quart d'heure.

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  1   M. MIKULICIC : [interprétation] Excusez-moi d'interrompre. Entre-temps j'ai

  2   réfléchi et je n'aurai pas de questions. Donc je donne aux autres Défenses

  3   le quart d'heure que j'ai demandé.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kay, alors je vous propose de

  5   travailler un petit peu plus longtemps, mais pas plus qu'une heure 45

  6   minutes.

  7   Vous, Madame, vous allez avoir deux sessions demain, donc trois heures et

  8   demie à peu près. Ensuite nous allons avoir une troisième session de

  9   travail pour les questions des Juges et les questions additionnelles.

 10   Donc c'est notre emploi du temps, et je voudrais que vous compreniez,

 11   Madame, que nous nous attendons à ce que tout ceci soit terminé demain à 1

 12   heure 45.

 13   M. KAY : [interprétation] Je vérifie l'heure pour voir si je peux aller

 14   plus vite, si je peux gagner à la course.

 15   Je vais oublier quelques documents, je ne vais pas les présenter.

 16   Maintenant, je vais demander qu'on présente la pièce 65 ter 1D2614.

 17   Q.  C'est un document en anglais, mais je pense que nous allons pouvoir le

 18   lire puisque je pense que vous allez reconnaître ce document.

 19   Donc ce n'est pas quelque chose qui a été traduit vers la langue croate.

 20   Nous savons très bien que ce n'est pas la langue officielle du Tribunal.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si les accusés sont d'accord et si les

 22   autres Défenses sont d'accord pour avoir ce document uniquement en anglais,

 23   ceci ne nous pose pas de problème.

 24   M. KEHOE : [interprétation] Nous sommes tout à fait d'accord.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 26   M. MIKULICIC : [interprétation] Nous aussi.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 28   Vous pouvez poursuivre.

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  1   M. KAY : [interprétation]

  2   Q.  Reconnaissez-vous ce document, Madame ? C'est un document qui vous a

  3   été adressé le 2 septembre 1995 ?

  4   R.  Oui, je reconnais ce document.

  5   Q.  On voit des annotations manuscrites. Est-ce bien votre écriture ?

  6   R.  Non, non, pas du tout.

  7   Q.  Est-ce que vous savez qui a écrit cela ?

  8   R.  Je n'en ai aucune idée.

  9   Q.  Si l'on examine le contenu de la lettre, on voit que c'est une lettre

 10   qui émane de M. Harston qui travaille aux Nations Unies, il s'était

 11   entretenu avec vous la veille, et apparemment il recommande qu'un accord

 12   soit passé par rapport aux personnes déplacées qui se trouvent dans la base

 13   de l'ONU. Il dit qu'il faudrait fournir les actes d'accusation et les

 14   documents s'y afférant concernant les 62 personnes concernées, et qu'il

 15   faudrait discuter cas par cas ces individus. Ensuite, la base de l'ONU sera

 16   prête à livrer aux autorités croates ces personnes, et ensuite on a toutes

 17   les conditions qui sont énumérées. En bas on voit un "O.K." à côté de

 18   chacune de ces conditions manuscrites.

 19   M. KAY : [interprétation] Là je vais vous demander de tourner la page. Pour

 20   pouvoir faire en sorte que ces individus soient identifiés correctement, et

 21   s'il y a un désaccord sur les conditions, il faudrait communiquer cela au

 22   Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie. Ensuite, on voit qu'on

 23   propose un départ immédiat pour les 62 personnes énumérées.

 24   Q.  Tout d'abord, en examinant cette lettre qui vient de M. Harston,

 25   pourriez-vous nous dire si la façon dont il a traité la question au nom de

 26   l'ONU, si cette façon vous a posé des problèmes quand on parle du

 27   gouvernement de Croatie, est-ce que les Croates avaient un problème avec

 28   cette façon de faire ?

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  1   R.  Je pense qu'il existe aussi la réponse que j'ai envoyée à M. Harston,

  2   la réponse envoyée à sa lettre.

  3   Q.  Oui, effectivement. Est-ce que vous voulez qu'on la regarde ?

  4   R.  Ça ne serait pas mal de la regarder, oui.

  5   Q.  Très bien.

  6   M. KAY : [interprétation] Je vais demander que ceci soit versé au dossier.

  7   Nous avons une autre version sans les annotations. Vous allez vous rappeler

  8   peut-être qu'hier nous avons eu le même problème avec le même type de

  9   document.

 10   Cela étant dit, ce qui est écrit à la main peut aussi apporter des éléments

 11   d'information.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais si on ne sait pas qui a écrit

 13   cela, je ne vois pas en quoi cela peut nous aider parce qu'il peut y en

 14   avoir qui sont d'accord avec cela, d'autres non.

 15   Mais qu'est-ce que cela ajoute en termes de connaissances ? Parce que moi

 16   j'ai l'impression plutôt que cela porte à confusion.

 17   M. KAY : [interprétation] Cela montre que ceci posait problème au

 18   gouvernement de Croatie, c'est-à-dire que les exigences des Nations Unies

 19   posaient problème. Parce que vous savez que le côté croate n'était pas

 20   d'accord, critiquait la justice internationale parce qu'il ne comprenait

 21   pas le système croate, le système de fonctionnement.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc c'est quelque chose qui vient du

 23   gouvernement croate, n'est-ce pas d'ailleurs ?

 24   M. KAY : [interprétation] Oui.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Parce que si c'est bien cela, on peut

 26   éventuellement accepter votre proposition aussi.

 27   M. KAY : [interprétation] Ecoutez, je n'en suis pas sûr. Mais moi c'est

 28   quelque chose que j'ai reçu par la déclaration de M. Harston qui nous a été

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  1   communiquée en l'espèce.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, est-ce que vous avez

  3   quoi que ce soit à ajouter à ce sujet ? Est-ce que cela vous pose problème

  4   ?

  5   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Non, pas du tout.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors…

  7   [La Chambre de première instance se concerte]

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, je vais vous

  9   demander de nous accorder une cote pour ce document.

 10   Il y a beaucoup trop de micros d'ouverts.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ceci deviendra la pièce D1479.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous aimerions savoir d'où vient ce

 13   document, où est-ce que ceci a été trouvé exactement.

 14   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je vais vérifier cela.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 16   Veuillez procéder.

 17   M. KAY : [interprétation] Merci.

 18   Q.  Maintenant, votre lettre, Madame Ozbolt, la pièce D634 en date du 4

 19   septembre 1995. C'est vous qui l'avez écrite, cette lettre, et ceci

 20   concerne ce projet d'accord avec l'ONURC. Ce projet vous a été envoyé, et

 21   on y voit des informations qui viennent du Pr Vukas et l'adjoint du

 22   ministre au niveau du ministère des Affaires étrangères, au sujet de ce

 23   projet d'accord de l'ONURC. On vous a envoyé cette consultation.

 24   Est-ce que vous avez reçu ce document ?

 25   R.  Oui, oui, je l'ai reçu. Je le reconnais, d'ailleurs. Il est

 26   authentique.

 27   Q.  Merci.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kay, puis-je vous aider ?

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  1   M. KAY : [interprétation] Oui.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois que les interprètes avaient du

  3   mal avec SOFA. SOFA, que je sache, correspond à l'accord sur le statut des

  4   forces armées.

  5   M. KAY : [interprétation] Je vous remercie.

  6   Q.  Vous ne vous êtes pas seulement occupée du système de la loi croate

  7   opposé à d'autres formes de lois, même si vous vous êtes occupée de la

  8   question de validité du droit international quand il s'agit de votre

  9   obligation de traiter avec ces gens ?

 10   R.  Oui, bien sûr. J'ai dit que nous allions respecter toutes les

 11   dispositions du droit international. Mais je dois dire que malheureusement

 12   nous avions un problème. M. Harston venait d'arriver. Il ne comprenait pas

 13   les circonstances alors qu'il était compétent de cela, et cela nous a posé

 14   problème, pas seulement à notre niveau, mais aussi au niveau du quartier

 15   général de M. Akashi. Je pense qu'à cause de cela, parce qu'il ne

 16   connaissait pas la situation, toute cette procédure a duré plus longtemps

 17   que ceci ne devait être le cas.

 18   Q.  Il y avait une autre lettre qui vous a été envoyée le 9 septembre.

 19   C'est la pièce D637. Je vais examiner cela. Mais nous allons, pour aller

 20   plus vite, en même temps regarder la lettre que vous avez écrite. Les Juges

 21   ont déjà vu certains de ces documents. Donc maintenant, je vais demander

 22   qu'on regarde votre lettre, lettre D637 [comme interprété], qui a été

 23   écrite le 11 septembre.

 24   R.  C'est exact.

 25   Q.  Vous faites référence à une lettre écrite le 9 septembre. A nouveau, il

 26   s'agit là du protocole qu'il s'agit de mettre en œuvre entre les autorités

 27   croates et l'ONU, quand il s'agit de ces gens que la justice croate voulait

 28   examiner.

Page 18119

  1     On peut voir au niveau du troisième paragraphe une explication,

  2   l'explication concernant les actes d'accusation et les décisions portant

  3   sur les enquêtes, et ensuite ce qu'on dit au sujet des actes d'accusation.

  4   On dit qu'on les fera uniquement après qu'une enquête soit faite. Ensuite,

  5   on peut voir ce que l'on trouve dans le reste de la lettre.

  6   M. KAY : [interprétation] Est-ce qu'on peut voir la deuxième page pour que

  7   les Juges puissent à nouveau, eux aussi, examiner ce document.

  8   Q.  Est-ce que l'on peut dire que là il s'agit d'un conflit de deux

  9   cultures juridiques que l'on voit ici, entre vous et M. Harston, ou plutôt,

 10   le système qu'il représente ?

 11   R.  Oui, c'est exactement comme ça qu'on pourrait le décrire. C'est

 12   vraiment une différence de cultures juridiques, mais ce problème se posait

 13   simplement avec M. Harston. Parce que les autres personnes de son équipe,

 14   de l'équipe de M. Akashi, donc du département juridique, m'ont aidée

 15   justement pour convaincre M. Harston quelle était véritablement la

 16   connotation, l'interprétation du code pénal croate et de la procédure

 17   pénale.

 18   Q.  Merci.

 19   M. KAY : [interprétation] Maintenant, je vais vous demander d'examiner un

 20   autre document, 2D15-0001.

 21   Q.  Là, c'est une lettre qui vient de M. Penic. Vous nous avez parlé de ce

 22   monsieur. Il travaille pour le ministère de la Justice. Une lettre vous a

 23   été envoyée le 11 septembre 1995. Si l'on examine tout d'abord la première

 24   page, nous allons voir le message où on peut lire :

 25   "Vesna, j'ai compris que c'est quelque chose qui est important. Si t'as

 26   besoin de plus d'informations, appelle-moi."

 27   M. KAY : [interprétation] Maintenant, on va regarder la deuxième page.

 28   Q.  Là, il fait référence à un référendum de l'ONU en date du 9 septembre

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  1   1995. C'est la pièce 637; on n'a pas besoin de l'examiner.

  2   On y trouve aussi une explication du système qu'il s'agissait de mettre en

  3   œuvre dans le cadre du système judiciaire croate, quand on parle des

  4   enquêtes concernant les 35 personnes suspectes.

  5   Est-ce que vous reconnaissez ce document ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Ensuite, la page suivante, c'est la troisième page.

  8   M. KAY : [interprétation] Pour que tout le monde puisse voir la page, je

  9   demanderais qu'elle soit placée sur l'écran.

 10   Q.  A nouveau, c'est un document qui a été signé par M. Penic.

 11   Est-ce que ce document constitue une explication de ce que l'on demandait

 12   pour que tout ceci corresponde au système judiciaire croate, la façon dont

 13   il fonctionnait ?

 14   R.  Oui.

 15   M. KAY : [interprétation] Je vais demander que ceci soit versé au dossier.

 16   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Pas d'objection.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ceci deviendra la

 19   pièce D1480.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui vient d'être versée au dossier.

 21   M. KAY : [interprétation]

 22   Q.  Par rapport à ce qui s'est passé, tout ceci se déroulait au niveau du

 23   gouvernement à Zagreb, donc c'est le gouvernement qui traitait de cela

 24   directement avec le QG de l'ONU, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui, c'est exact.

 26   Q.  Par rapport à la participation de M. Cermak, et puisque nous avons

 27   entendu d'autres éléments de preuve, lui, il discutait de cela avec le

 28   général Forand. Est-il exact de dire qu'il était là en tant que quelqu'un

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  1   qui transmettait les messages au nom du gouvernement croate ?

  2   R.  Oui. C'était une sorte de coordinateur. Toutes ces informations

  3   transmises à l'ONURC, au général Forand, le général Forand et l'ONURC

  4   recevaient ces informations de M. Cermak, oui.

  5   Q.  Finalement, cette question a été résolue, ensuite il y a eu une

  6   procédure qui a été mise en place pour faire en sorte que ces personnes,

  7   ces accusés puissent être traités dans le cadre du système judiciaire pénal

  8   croate.

  9   Est-ce qu'il y avait d'autres représentants du gouvernement croate

 10   qui ont participé à cela ? Par exemple M. Slobodan Lang, est-ce que vous

 11   savez qui c'était ? Est-ce que vous pouvez nous dire s'il a participé ou

 12   non à ce processus ?

 13   R.  Oui. Slobodan Lang était le conseiller du président chargé des

 14   questions humanitaires. Très souvent, il se rendait sur le territoire où il

 15   s'agissait de défendre les droits de l'homme. Il m'a accompagnée souvent

 16   lors de ces déplacements. Pendant l'automne, et surtout l'hiver 1995 et qui

 17   allait sur 1996, a-t-il séjourné en tant que conseiller du président dans

 18   la région pour analyser la situation, pour en informer le gouvernement, et

 19   là, évidemment, sur toutes les questions relatives aux droits de l'homme.

 20   Il a aussi entrepris l'action Sauvons la vie. C'est une action qui visait à

 21   aider les personnes âgées, handicapées, qui vivaient dans les coins

 22   reculés, dans les montagnes de Knin et de Glina et il fallait leur apporter

 23   du bois de chauffage, de la nourriture, des médicaments.

 24   Q.  Merci.

 25   M. KAY : [interprétation] Pouvons-nous maintenant examiner un autre

 26   document.

 27   Excusez-moi, un instant, Monsieur le Président, je vérifie si j'ai fait mes

 28   devoirs.

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  1   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Dans l'intervalle, je peux vous dire que

  2   M. Harston a communiqué la pièce D1469 [comme interprété] en mars 2000.

  3   M. KAY : [interprétation] Merci.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci de cette information, Madame

  5   Gustafson.

  6   M. KAY : [interprétation] Merci beaucoup.

  7   Examinons maintenant un document, le document 2D15-0043.

  8   Q.  Il s'agit d'une lettre qui porte la date du 22 septembre 1995, adressée

  9   à M. Pitkanen, chargé des affaires politiques et humanitaires pour l'ONURC

 10   Zagreb. C'est une réponse du ministère de la Justice à la demande de

 11   l'ONURC de suivi des procédures judiciaires. Reconnaissez-vous que ce

 12   document a bien été envoyé par vous ? Ce document était envoyé à M.

 13   Pitkanen ?

 14   R.  Oui, je le confirme.

 15   Q.  Merci.

 16   M. KAY : [interprétation] Examinons la deuxième page.

 17   Q.  On voit ce que M. Penic a écrit le 21 septembre et ce qui vous a été

 18   envoyé à propos de la surveillance des procédures judiciaires par l'ONURC.

 19   On y lit également l'explication qu'il donne ici.

 20   Serait-il exact de dire que vous-même avez été utilisée ici comme

 21   vecteur en quelque sorte, comme liaison dans ce domaine-ci entre le

 22   ministère de la Justice et l'ONURC ?

 23   R.  Oui, oui.

 24   Q.  Merci.

 25   R.  Tout à fait.

 26   M. KAY : [interprétation] Je demanderais à ce que l'on verse au dossier ce

 27   document, Monsieur le Président.

 28   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Pas d'objection.

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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D1481.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce document est donc versé au dossier.

  4   M. KAY : [interprétation] J'aimerais que nous examinions maintenant D15-

  5   0049.

  6   Q.  Voici un autre document de M. Penic qui vous est adressé à vous. On

  7   aperçoit la date du 16 octobre 1995 sur la feuille d'envoi de la télécopie.

  8   Alors c'est en fait un document qui porte la date du 2 octobre 1995. Ceci

  9   apparaît en deuxième page. Il a pour objet toujours le suivi, la

 10   surveillance des procédures judiciaires. Nous voyons la teneur de cette

 11   lettre qui porte sur cette question.

 12   Si l'on examine la deuxième page, on constate que M. Penic a envoyé ce

 13   courrier, et l'on voit ce qu'il dit sur la demande de coopération et de

 14   collaboration.

 15   Reconnaissez-vous ce document ? Est-ce bien un document qui vous a été

 16   envoyé par M. Penic ?

 17   R.  C'est exact, oui. Nous nous sommes félicités de cette initiative de

 18   l'ONURC consistant à suivre les procédures judiciaires. Nous avons pensé

 19   que c'était là une très bonne idée. Les procès étaient à caractère public,

 20   et il était tout à fait positif que les observateurs suivent les procès en

 21   général, les procès se tenant devant les tribunaux.

 22   Toute l'initiative est passée par mon bureau et par le ministère de la

 23   Justice, puisque aucun des représentants de la communauté internationale

 24   n'était en mesure de communiquer directement avec l'appareil judiciaire

 25   croate. Il se trouvait donc que le ministère de la Justice a envoyé un

 26   courrier au président de la Cour suprême ainsi qu'aux présidents des

 27   tribunaux saisis de ces différentes affaires.

 28   Q.  Examinons la troisième page du document dans le système du prétoire

Page 18124

  1   électronique où l'on trouve une note de M. Penic dans ce sens. Je présente

  2   cette page sans avoir de question particulière à poser au témoin. Je

  3   souhaitais simplement à ce que les Juges de la Chambre puissent examiner

  4   cette partie du document de façon à ce que tout ceci soit placé dans le

  5   contexte.

  6   M. KAY : [interprétation] Je demanderais le versement au dossier de ce

  7   document.

  8   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Pas d'objection.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D1482.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kay, cette possibilité de

 12   suivi, de surveillance, je crois qu'on en parlait dans un document, mais on

 13   l'a examiné rapidement.

 14   Cette possibilité de suivi et de surveillance s'appliquait-elle

 15   seulement aux procès publics ou bien existait-elle également pour les

 16   procès non publics ?

 17   Peut-être que vous pourriez répondre, Madame, et nous le dire.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Les audiences ont été suivies indépendamment

 19   de la décision de la cour s'agissant de leur caractère public ou non.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc il était également possible de

 21   suivre les audiences même si elles n'étaient pas publiques ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout à fait.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 24   Monsieur Kay, poursuivez.

 25   M. KAY : [interprétation] Merci.

 26   Q.  C'est tout ce que je souhaite vous demander sur ce thème. Merci

 27   beaucoup.

 28   J'aimerais maintenant en venir à un certain nombre de questions que

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  1   j'aimerais vous poser sur M. Ivkanec, un policier. Examinons un document à

  2   cette fin, le document 2D15-0063.

  3   M. KAY : [interprétation] Monsieur le Président, vous trouverez une

  4   référence à ceci au paragraphe 3 de la déclaration 65 ter du témoin et au

  5   paragraphe 10 pour la référence de la Cour.

  6   Donc 2D15-0063.

  7   Q.  C'est un document qui porte la date du 17 septembre 1992. Il s'agit de

  8   la décision du ministre de l'Intérieur, M. Jarnjak, de nommer à titre

  9   temporaire M. Ivkanec au sein de l'administration de police de Bjelovar et

 10   au poste de commandant du poste de police de Pakrac. Vous voyez que la

 11   nomination a pris effet le 18 septembre 1992.

 12   Est-il exact qu'au moment de l'opération Eclair, M. Ivkanec faisait partie

 13   du ministère de l'Intérieur, il y occupait le poste de policier et de

 14   commandant du poste de police de Pakrac ?

 15   R.  C'est la première fois que je vois cette décision. C'est un document

 16   interne émis par le ministère de l'Intérieur. Je ne peux que dire que c'est

 17   sans doute ce qui s'est passé puisque cette décision a l'air tout à fait

 18   authentique.

 19   A ma connaissance, après l'opération Eclair, M. Ivkanec a été chargé

 20   de ramener la sécurité dans la zone de la Slavonie orientale. Dans mon

 21   souvenir, c'était la personne idéale puisqu'il avait de bons rapports avec

 22   les représentants des Serbes, Veljko Dzakula, notamment, à l'époque, mais

 23   aussi avant l'opération Eclair.

 24   Q.  Merci.

 25   M. KAY : [interprétation] Je demanderais le versement au dossier de ce

 26   document, Monsieur le Président.

 27   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Pas d'objection.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

Page 18127

  1   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D1483.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce document est versé au dossier.

  3   M. KAY : [interprétation] On me dit que c'est la Slavonie occidentale dont

  4   il devrait être question au compte rendu et non pas la Slavonie orientale ?

  5   LE TÉMOIN : [aucune interprétation] 

  6   M. KAY : [interprétation] J'allais en parler de toute façon dans le cadre

  7   de la question que je m'apprêtais à poser au témoin. J'aimerais que nous

  8   examinions maintenant le document 2D15-0061.

  9   Vous nous l'avez dit, ce n'est que bien plus tard que vous avez traité de

 10   la Slavonie orientale --

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] En effet.

 12   M. KAY : [interprétation] 

 13   Q.  -- que 1999.

 14   Bien. Parlons de ce document, le document 2D15-0061. Il porte la date

 15   du 6 mai 1995.

 16   Pouvez-vous nous dire quand l'opération Eclair a débuté et quand elle

 17   a pris fin, pour commencer ?

 18   R.  L'opération Eclair a débuté le 1er janvier à 5 heures du matin.

 19   Q.  Janvier ou mai ?

 20   R.  Le 1er mai.

 21   Q.  On voit que ce document porte la date du 6 mai 1995. C'est un document

 22   signé par le représentant colonel général Cervenko. Examinez le document

 23   dans le détail. Il est envoyé au district militaire de Bjelovar, et voici

 24   ce qu'on y lit : "En vue d'organiser et de coordonner les activités, afin

 25   d'assurer l'hébergement des prisonniers du secteur de Slavonie occidentale

 26   et de fouiller le terrain et de veiller à de bonnes conditions de vie pour

 27   les civils, la cellule de coordination est établie et constituée par le

 28   président de la République de Croatie et est constituée des personnalités

Page 18128

  1   suivantes : d'abord, le général de brigade Mate Lausic pour le travail et

  2   les activités et les responsabilités de la police militaire; ensuite, Josko

  3   Moric, adjoint du ministre de l'Intérieur pour les activités et tâches

  4   relevant du personnel et des unités du ministère de l'Intérieur; et Ivan

  5   Majdak, au nom du gouvernement chargé des activité et tâches relevant de la

  6   compétence du gouvernement, en vue des activités et de la coordination de

  7   planification et de la réalisation des tâches des commandements et unités

  8   de l'armée croate, et en coopération avec les unités du MUP, la protection

  9   civile et la police militaire dans la zone de la Slavonie occidentale, au

 10   nom de l'état-major principal de la HV; je nomme par la présente le général

 11   de brigade Luka Dzanko commandant du district militaire de Bjelovar, la

 12   personne susmentionnée est tenue de mettre en oeuvre les mesures

 13   réglementées et ordonnées et d'assurer la réalisation des activités en

 14   matière de coopération et participation avec d'autres parties dans la zone

 15   de la Slavonie occidentale."

 16   D'abord, avez-vous déjà vu ce document ?

 17   R.  Non. Je ne l'ai jamais vu. Mais je connais la teneur de la décision et

 18   je sais que ces personnes ont effectivement reçu pour mission d'accomplir

 19   les fonctions qui sont évoquées ici. Mais je n'avais jamais vu ce document,

 20   non.

 21   Q.  Est-il exact que ce document précise, après l'opération Flash, que la

 22   cellule de coordination est chargée des activités de la police militaire en

 23   la personne du général Lausic.

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Et pour ce qui est des tâches et activités relevant de la police

 26   civile, encore une fois, la responsabilité en est confiée à un membre de

 27   cette cellule, c'est-à-dire Josko Moric ?

 28   R.  Oui.

Page 18129

  1   Q.  Et le Dr Majdak -- enfin, je dis docteur, mais Ivan Majdak était bien

  2   médecin, n'est-ce pas ?

  3   R.  En effet.

  4   Q.  Bien, le Dr Majdak. Pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre ce qu'il

  5   faisait exactement à l'époque, en mai 1995 ?

  6   R.  En gros, on pourrait voir les responsabilités d'Ivan Majdak comme

  7   quelque chose de semblable à ce qu'était censé faire Cermak. Ivan Majdak

  8   était conseiller auprès du président de la république en 1990 et 1991. Il

  9   était expert en économie et ensuite, il est devenu ministre de

 10   l'Agriculture au sein du gouvernement de la Croatie. A l'époque, lorsqu'il

 11   a pris les fonctions qui sont évoquées ici, il était aussi chef

 12   d'entreprise et homme d'affaires, je crois.

 13   Q.  Toujours sur le Dr Majdak, était-il de facto le supérieur de M. Pasic,

 14   le représentant officiel du gouvernement à cet endroit ? Les informations

 15   qui remontaient de M. Pasic passaient-elles par lui ?

 16   R.  Il n'a pas été nommé représentant du gouvernement. Il y a une grosse

 17   différence, ici. Il était coordinateur chargé des affaires économiques. Il

 18   s'agissait entre autres de normaliser les conditions de vie, quelque chose

 19   de semblable à ce qu'était censé faire M. Cermak à Knin.

 20   Q.  Merci beaucoup.

 21   M. KAY : [interprétation] Monsieur le Président, je demanderais le

 22   versement au dossier de ce document.

 23   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Pas d'objection.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce D1484.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce document est admis au dossier.

 27   M. KAY : [interprétation]

 28   Q.  J'en reviens maintenant à Knin, après cet instantané, en quelque sorte,

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  1   que nous avons tâché de tirer de la Slavonie occidentale.

  2   M. KAY : [interprétation] J'aimerais que l'on examine le document P515.

  3   Q.  C'est un document qui porte la date du 3 août 1995. Un compte rendu de

  4   l'administration de la police militaire qui date d'avant l'opération

  5   Tempête, compte rendu d'une réunion entre les responsables de

  6   l'administration de la police militaire du MUP et du SIS, donc nous sommes

  7   le 3 août; une réunion qui a porté sur l'harmonisation du travail de la

  8   police militaire, du MUP et du SIS, dans le cadre de la préparation et de

  9   l'exécution d'offensives planifiées de l'armée croate au cours de la

 10   période suivante, à venir.

 11   On voit qui y étaient présents : M. Moric, ministre adjoint et M. Djurica,

 12   chef de la police.

 13   Je regarde ce nom, est-il exact qu'il soit devenu par la suite principal

 14   coordonnateur pour les questions de police civile dans Knin et dans la

 15   région après la libération de Knin ?

 16   R.  Je crois que oui. Même si je dois bien avouer que je n'avais plus rien

 17   à voir avec ce qui concernait Knin, puisqu'à ce moment-là je m'occupais de

 18   la Slavonie orientale. Je ne peux donc pas vous dire précisément quelle

 19   était la situation à l'époque.

 20   Q.  Mais si l'on examine ce document, on constate qu'il a trait à la

 21   coordination entre la police militaire et la police civile. Si l'on examine

 22   la deuxième page de ce texte.

 23   Comme on le voit, on trouve une liste des personnes présentes. La Chambre

 24   reconnaît un certain nombre de ces noms que l'on a déjà trouvés dans

 25   d'autres documents. Mais l'on voit que M. Moric a déclaré la séance

 26   ouverte. Il a évoqué un point-clé, à savoir que :

 27   "Lors de la réunion d'hier," c'est-à-dire la réunion de la veille du 2

 28   août, "entre le ministre de la Défense et le ministre de l'Intérieur, des

Page 18131

  1   principes fondamentaux ont été confirmés aux fins du fonctionnement de la

  2   police militaire et de la police civile en temps de guerre, principes

  3   reposant sur les expériences connues en Slavonie occidentale."

  4   Lui et le général Lausic étaient tout à fait conscients de certaines

  5   expériences négatives au cours des opérations menées en Slavonie

  6   occidentale, et l'idée était donc d'éliminer les problèmes et les

  7   difficultés constatés à l'époque et de veiller à la pleine coopération et

  8   exécution des tâches dans leurs domaines d'activités.

  9   A la page suivante, on lit que le MUP a entrepris des préparatifs

 10   structurels et de d'autres natures en vue des tâches à accomplir, qu'ils

 11   avaient soulevé un certain nombre de questions auprès de l'administration

 12   de la police, qu'ils avaient remarqué en Slavonie occidentale les problèmes

 13   liés aux activités de membres irréguliers des troupes, des personnes qui

 14   n'avaient pas participé aux opérations de combat étaient apparues près des

 15   lignes de front en uniformes de la HV.

 16   Allant de maison en maison et rendant la justice, entre guillemets,

 17   il parle de l'utilisation abusive d'uniformes du MUP, et M. Moric dit qu'il

 18   déploiera des forces dans le territoire libéré en fonction des besoins au

 19   moment voulu.

 20   M. KAY : [interprétation] Je passe à la page 4. Je ne vais pas en donner

 21   lecture dans son intégralité. Mais si vous suivez ce que l'on y lit, vous

 22   verrez que le général de brigade Biskic, qui est le chef adjoint de

 23   l'administration de la police militaire - donc c'est l'adjoint de M. Lausic

 24   - énumère un certain nombre de tâches à accomplir avant le début des

 25   opérations de combat, au moment des opérations de combat, et à l'issue de

 26   celles-ci, il parle des tâches qu'il conviendra d'accomplir.

 27   En page 5, le général Lausic évoque un certain nombre d'expériences

 28   négatives au cours de l'opération Eclair concernant la police militaire, un

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  1   manque de vigueur, une incapacité à s'adapter, et cetera.

  2   Et en page 6, on trouve le compte rendu de la discussion sur l'arrivée dans

  3   le secteur d'un certain nombre de personnes. M. Moric évoque les

  4   préparatifs en vue de l'installation de points d'entrée et de sortie à la

  5   périphérie de certaines villes et il propose que lui-même et le général

  6   Lausic se réunissent chaque jour, échangent des informations, résolvent les

  7   problèmes. Et il dit lui-même avoir remarqué le problème posé par un

  8   certain manque de vigueur dans les actions entreprises par la police. Et il

  9   parle également de l'évaluation du travail accompli par la police

 10   militaire, par la police civile. Il n'est pas nécessaire de passer en revue

 11   le reste du document. Toutefois, je vous invite à examiner la page 8. Vous

 12   trouverez le compte rendu de l'administration de la police militaire qui

 13   était envoyé à M. Moric, M. Djurica, M. Nad, responsable du SIS.

 14   Et si je peux indiquer à la Chambre, afin d'économiser le temps, que cette

 15   information est contenue dans la pièce D41. Vous vous souviendrez que je

 16   l'ai présentée au témoin de l'Accusation, M. Flynn, et à ce moment-là, j'ai

 17   présenté le procès-verbal de la police civile concernant cette réunion,

 18   c'est identique. Donc je ne propose pas de traiter des deux questions à la

 19   fois, car nous perdrions le temps.

 20   Q.  Est-ce que vous avez compris, Madame Ozbolt, que dans une autre pièce à

 21   conviction il existe un procès-verbal concernant la même question ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Est-ce qu'il serait exact de dire que la police militaire et la police

 24   civile se préparaient pour l'opération Tempête et la question de savoir

 25   comment traiter des questions de la sécurité et du contrôle de la loi et de

 26   l'ordre ?

 27   R.  Oui, on peut dire ça comme ça.

 28   Q.  Je souhaite que l'on passe maintenant à la pièce P493, pour voir le

Page 18133

  1   document.

  2   La date est le 3 août, et il est envoyé aux directions de la police par M.

  3   Moric. L'ordre est donné de coopérer avec la police militaire.

  4   Vous pouvez voir le type de tâches ordonnées.

  5   Encore une fois, il s'agissait ici d'un exemple d'une planification de la

  6   coordination du travail de la police militaire et civile; est-ce exact ?

  7   R.  Oui. C'est la première fois que je vois ce document, mais

  8   effectivement, c'était ça l'intention, oui.

  9   Q.  Et cette Chambre de première instance a pris connaissance d'autres

 10   ordres qui ont été donnés.

 11   Pour ce qui est de la Slavonie occidentale, nous avons examiné le premier

 12   document qui montrait que suite à l'ordre donné par le président, M. Moric

 13   et M. Lausic, du comité de coordination avec le Dr Majdak, ils avaient les

 14   mêmes responsabilités par rapport à l'opération Tempête, n'est-ce pas exact

 15   ? Il s'agit de la coopération telle qu'on la voit en train de se dérouler

 16   ici.

 17   R.  C'est exact.

 18   Q.  Est-ce qu'il est exact de dire qu'il n'y a pas d'ordre équivalent

 19   concernant l'opération Tempête que nous avons vu sur le document en date du

 20   6 mai, qui porterait sur la structure de la coopération et de la

 21   coordination de la part du président ou du chef d'état-major ?

 22   R.  Oui, effectivement, il n'y a pas eu de tel document.

 23   Q.  Merci.

 24   M. KAY : [interprétation] Monsieur le Président, compte tenu des

 25   contraintes au niveau du temps, je considère que compte tenu des réponses

 26   du témoin, je peux renoncer à montrer un grand nombre de documents portant

 27   sur la coordination entre M. Lausic et M. Moric à partir du 3 août et par

 28   la suite, après la réunion à Plitvice.

Page 18134

  1   Je ne sais pas si la Chambre accepte cela, ou si la Chambre préfère que je

  2   présente tous ces documents. Tous les documents en question ont été versés

  3   au dossier. Donc je n'introduirais rien, je pourrais simplement lire les

  4   numéros de pièces à conviction, et si ça peut aider la Chambre, montrer des

  5   questions qui sont pertinentes.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Kay, bien sûr, cette Chambre ne

  7   sait pas quelles sont les questions que vous allez poser au témoin par

  8   rapport à ces documents. Si vous allez simplement lui demander si elle

  9   connaissait les documents, ou si c'est conforme à ses souvenirs, ceci

 10   n'ajoute pas beaucoup d'information, et je pense que -- je vais consulter

 11   mes collègues.

 12   [La Chambre de première instance se concerte]

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous avez des questions précises,

 14   plus que simplement le fait d'attirer l'attention du témoin à ces

 15   documents, afin de voir si elle a des opinions à ce sujet, bien sûr, la

 16   Chambre aimerait les entendre. Mais si c'est simplement pour dire que ce

 17   sont des documents pertinents dans ce contexte, nous pouvons en rester là.

 18   S'il y a un quelconque document où vous avez des doutes, vous pourriez

 19   simplement mentionner la nature du document et demander au témoin si elle a

 20   des connaissances en la matière, connaissances qui ajouteraient quelque

 21   chose à ce qui existe déjà dans le document.

 22   Bien sûr, la Chambre devine quelles seraient vos questions. Par conséquent,

 23   si vous considérez que le contenu du document est extrêmement important et

 24   si vous ne vous attendez pas à ce que le témoin ajoutera beaucoup à cela,

 25   la Chambre de première instance n'a pas de problème à accepter votre

 26   suggestion.

 27   M. KAY : [interprétation] C'est ce que nous allons faire. Je vais soumettre

 28   une liste des documents. Je ne vais pas les lire car ce serait probablement

Page 18135

  1   très ennuyeux. Si vous êtes d'accord, le juriste de la Chambre pourra

  2   recevoir la référence du paragraphe qui est pertinent.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites que vous allez d'abord

  4   soumettre une liste qui les décrira, sans entrer dans le contenu ?

  5   M. KAY : [interprétation] Oui.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et, Madame Ozbolt, si, s'agissant d'un

  7   document, vous souhaitez ajouter quelque chose, veuillez l'indiquer à Me

  8   Kay pour qu'il s'interrompe.

  9   Poursuivez, Maître Kay.

 10   M. KAY : [interprétation]

 11   Q.  Je vais en parler en termes très larges, Madame Ozbolt, donc on ne va

 12   pas entrer dans tous les détails des documents.

 13   Est-ce que vous étiez au courant de tous les ordres donnés par M.

 14   Moric concernant la sécurité dans la région, et la prévention des crimes

 15   dans la région, ordres qu'il aurait donnés à la direction de la police afin

 16   de mettre un terme aux crimes ?

 17   R.  Je n'ai pas vu les ordres écrits. Mais par rapport aux rapports

 18   que l'on recevait portant sur les activités du ministère de la Justice, je

 19   savais que de tels ordres avaient été donnés, mais je n'avais pas vu un tel

 20   document, car c'est un document interne du ministère.

 21   Q.  Exactement. Justement, je m'attendrais à une telle réponse si j'allais

 22   examiner de près tous les documents.

 23   Par rapport à la police militaire et par rapport aux lois générales,

 24   est-ce que vous saviez que par rapport à la police militaire, il avait

 25   donné également des ordres concernant la sécurité et la prévention de la

 26   criminalité aux bataillons de la police militaire régulièrement en août et

 27   septembre ?

 28   R.  Je peux vous donner la même réponse. Seulement sur la base de

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  1   l'information que nous avions reçue, je n'avais pas vu leurs ordres

  2   internes, et je n'étais pas censée les voir.

  3   Q.  Saviez-vous qu'en réalité, les deux coordonnaient ces mesures ensemble,

  4   à l'égard des crimes commis, et qu'ils souhaitaient que leurs forces

  5   cessent cela ?

  6   R.  Je suppose qu'ils ont coordonné leurs activités. Je dois avouer que je

  7   n'avais pas de communications directes ni avec l'un ni avec l'autre à ce

  8   sujet-là, car comme je vous l'ai déjà dit, je menais d'autres types de

  9   discussions et de négociations à cette époque-là concernant l'accord

 10   d'Erdut.

 11   Q.  Merci beaucoup. Je souhaite que l'on passe maintenant au dernier

 12   document de cette série concernant ce sujet-là. Il s'agit du document D595.

 13   Il s'agit là d'un compte rendu d'une réunion tenue le 15 septembre 1995. Ce

 14   document émane de la direction de la police militaire. C'est une réunion de

 15   coordination avec les représentants du MUP de la part de la direction de la

 16   police militaire, tenue à Plitvice le 15 septembre - et c'est un document

 17   que la Chambre connaît - où les chefs de la direction de la police ont

 18   soumis un rapport lors de cette réunion avec la direction de la police

 19   militaire au sujet de ce qui se passait dans la région, et les commandants

 20   de la police militaire ont fait de même.

 21   Tout d'abord, saviez-vous qu'une telle réunion de coordination avait eu

 22   lieu entre l'administration de la police militaire et le ministère de

 23   l'Intérieur pour ce qui est des problèmes liés à la loi et l'ordre qu'ils

 24   rencontraient ?

 25   R.  Non, pas moi personnellement. Peut-être quelqu'un d'autre dans le

 26   cabinet du président.

 27   Q.  Oui. En Slavonie occidentale, est-ce qu'il y avait une coordination

 28   semblable qui se déroulait après l'opération Eclair entre M. Moric et M.

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  1   Lausic ?

  2   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Excusez-moi, mais je n'ai pas compris la

  3   question. Peut-être que je suis la seule.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'habitude, l'on essaie de voir si le

  5   témoin a compris la question.

  6   Avez-vous compris la question ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je dois avouer, pas entièrement.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, Maître Kay, ceci constitue une

  9   raison suffisante pour que vous la reformuliez.

 10   M. KAY : [interprétation] Merci.

 11   Q.  Lorsque nous avons examiné la pièce à conviction D1484, en date du 6

 12   mai 1995, et le président a formé un état-major de coordination avec le

 13   général de brigade Lausic, M. Moric, Dr Majdak, et vous avez décrit la

 14   Slavonie occidentale comme une situation à laquelle vous avez participé, la

 15   réunion que nous voyons et qui s'est déroulée le 15 septembre, après

 16   l'opération Tempête, entre le MUP et la police militaire. S'agissait-il là

 17   d'un acte semblable de coordination semblable à vos expériences en Slavonie

 18   occidentale ?

 19   R.  Je vais être tout à fait précise. J'étais active pour ce qui était de

 20   la Slavonie occidentale jusqu'au début de l'action Eclair. Et après cela,

 21   j'ai été informée de la situation sur le terrain, je recevais des

 22   informations. Cet organe de coordination que vous avez mentionné et qui

 23   était créé pour la Slavonie occidentale, a partiellement été recréé,

 24   s'agissant de la région de Knin. Et ces deux hommes ont définitivement

 25   coopéré, ce qui ressort visiblement de la conclusion indiquant qu'ils

 26   voulaient corriger leurs erreurs ou leurs omissions commises en Slavonie

 27   occidentale, afin que la même chose ne se reproduise dans les secteurs sud

 28   et nord.

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  1   Je répète, je ne sais pas ce qui s'est passé par la suite, car vraiment

  2   déjà à ce moment-là, nous menions des négociations intenses concernant

  3   l'accord d'Erdut qui a été signé deux mois plus tard. Par conséquent, je ne

  4   suivais plus ce qui se passait dans cette région-là.

  5   Q.  Merci. Vous avez répondu à cette question. Maintenant, nous allons

  6   traiter de certaines questions de moindre importance.

  7   Vous avez travaillé au bureau du président, et qui était votre supérieur

  8   immédiat ? C'était M. Sarinic ?

  9   R.  C'était le président.

 10   Q.  Bien. Au cours de cette période après l'opération Tempête, avez-vous

 11   travaillé dans le bureau du président de manière régulière ? Est-ce que

 12   vous y étiez au jour le jour ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Etiez-vous au courant des appels téléphoniques passés par le général

 15   Cermak au cabinet du président ?

 16   R.  Ça dépend qui il appelait. S'il appelait le président, je n'étais pas

 17   forcément au courant.

 18   Q.  Est-ce que vous savez s'il avait appelé M. Sarinic ?

 19   R.  Je suppose que je le savais.

 20   Q.  Est-ce qu'il téléphonait au cabinet du président, pour autant que vous

 21   le sachiez, afin de l'informer de ce qui se passait à Knin et aux alentours

 22   d'après les informations qu'il avait reçues ?

 23   R.  Je suppose qu'il l'appelait et qu'il lui parlait. Je crois que je lui

 24   ai parlé justement au sujet de cette affaire concernant les Serbes dans le

 25   camp de l'ONURC.

 26   Q.  Nous allons laisser de côté pour le moment votre conversation avec lui,

 27   car nous traiterons de cela tout à l'heure. Par rapport aux problèmes et à

 28   la criminalité qui existaient dans la région sur le territoire libéré, est-

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  1   ce que vous savez si M. Cermak lui avait téléphoné pour l'en informer ?

  2   R.  Je n'ai pas de connaissance concernant la question de savoir quand il

  3   l'avait appelé ou à qui il avait parlé, mais probablement, effectivement,

  4   il les avait informés de cela.

  5   Q.  Et par rapport au fait que vous avez traité des personnes recherchées

  6   pour un interrogatoire et dans le cadre d'une procédure judiciaire pénale

  7   en Croatie, est-ce qu'il apprenait de votre part ce qui se passait et

  8   comment les choses allaient se développer ?

  9   R.  Pour autant que je le sache, je pense que je l'ai informé de nos

 10   conversations avec M. Akashi et son équipe à Zagreb. Donc M. Cermak était

 11   surtout en contact avec le général Forand de l'ONU. Par conséquent, je

 12   suppose que le général Forand avait ses propres lignes de communication

 13   vis-à-vis d'Akashi et des représentants de l'ONU à Zagreb.

 14   Et nous, on communiquait suivant l'autre ligne avec le général Cermak et

 15   nous l'avons informé de ce qui était en préparation sur tout ce qui avait

 16   fait l'objet de nos discussions avec M. Akashi.

 17   Q.  Saviez-vous à l'époque que le général Cermak condamnait les crimes qui

 18   étaient commis, il les condamnait publiquement ?

 19   R.  Il était à la télévision tous les jours et il présentait ses positions

 20   tous les jours.

 21   Q.  Et quelles étaient ses positions ?

 22   R.  Ces condamnations. Il avait demandé que des enquêtes soient lancées.

 23   Mais je pense que c'était dans ce contexte-là que ses positions étaient

 24   manifestées. Mais il m'est difficile de me rappeler de tout.

 25   Q.  Il a été dit devant ce Tribunal qu'il faisait partie d'un plan visant à

 26   expulser les Serbes de la région et visant à provoquer leur départ. Est-ce

 27   qu'il vous est présenté en tant qu'homme qui agissait ainsi ?

 28   R.  Non, absolument pas. Tout d'abord, il n'y a pas eu de plan d'expulsion

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  1   de qui que ce soit, et deuxièmement, le général Cermak est une personne

  2   extrêmement tolérante. Je ne pense pas qu'il aurait montré une quelconque

  3   intolérance vis-à-vis de qui que ce soit. Moi personnellement, je ne le

  4   connais pas en tant que tel.

  5   Q.  Par rapport à un commentaire contenu dans votre déclaration selon

  6   lequel il vous a dit, "Je suis ici à cause de vous parce que vous m'avez

  7   persuadé à accepter ce travail," est-ce que ceci constitue un scénario

  8   exact de ce qui s'est passé; ou bien est-ce que c'est quelque chose qu'il

  9   vous a dit dans un autre contexte ?

 10   R.  Ecoutez. J'ai été ministre de la Justice de fin 2003 jusqu'au début

 11   2006. Et en tant que ministre de la Justice, ministre du ressort chargé de

 12   la justice et du système judiciaire, j'ai rendu visite ici à La Haye à M.

 13   Cermak et à M. Markac. Et c'était sa première réaction lorsqu'il m'a vu.

 14   Pour moi, cette réaction a été compréhensible car vraiment il a été sorti

 15   du contexte d'un homme d'affaires et de ses propres plans, et tout

 16   simplement, il a été transféré à Knin pour que ce soit là qu'il montre

 17   toutes ses capacités professionnelles et organisationnelles. Et vraiment,

 18   l'on ne s'attendait pas à un tel développement de la situation.

 19   Q.  Est-ce qu'il disait que c'est vous qui l'aviez persuadé ou bien que le

 20   bureau dont vous étiez membre l'a fait ?

 21   R.  Le bureau dans lequel on travaillait, il y avait Sarinic et moi, c'est

 22   nous qui avons constitué ce bureau. Tout simplement de ce point de vue, on

 23   dirait qu'on l'a enlevé de quelque chose et on l'a transféré ailleurs,

 24   alors qu'il ne savait pas où il allait. Tout comme nous, nous ne pouvions

 25   pas supposer que de telles choses allaient se dérouler.

 26   [Le conseil de la Défense se concerte]

 27   M. KAY : [interprétation] Monsieur le Président, je suis content de vous

 28   dire que je suis allé plus vite que prévu, que j'ai gagné ma course contre

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  1   l'heure et donc j'ai terminé mon interrogatoire.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

  3   Monsieur Mikulicic, vous n'avez pas de questions.

  4   M. MIKULICIC : [interprétation] Parfaitement, Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout d'abord, nous allons prendre une

  6   pause et ensuite, Madame le Procureur, vous allez pouvoir commencer votre

  7   contre-interrogatoire.

  8   Donc nous allons prendre une pause et reprendre nos travaux à 12 h 50.

  9   --- L'audience est suspendue à 12 heures 32.

 10   --- L'audience est reprise à 13 heures 01.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, avant de vous donner

 12   la parole, je voudrais vous poser une question Madame Ozbolt, et je

 13   voudrais avoir sur l'écran la pièce D1481. C'est la deuxième page du

 14   document qui nous intéresse, s'il vous plaît.

 15   Je vous ai posé la question au sujet de ces sessions d'audience publiques,

 16   mais je dois dire que je suis étonné que vous ayez donné votre accord pour

 17   la présence des représentants de l'ONURC aux audiences qui étaient faites

 18   par rapport au cadre juridique de la République de Croatie. Et dans la

 19   lettre ont dit : 

 20   "Nous sommes d'accord pour que l'on observe les procédures préalables

 21   au procès ainsi que les enquêtes concernant les personnes présumées

 22   coupables de graves crimes de terrorisme ou de crimes de guerre."

 23   Donc est-ce qu'il s'agit des audiences publiques vraiment ? Parce que je

 24   suis vraiment étonné, parce que normalement les procédures préalables au

 25   procès n'ont pas un caractère public. Et donc je suis assez étonné par ce

 26   que je vois ici.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Les audiences publiques sont publiques.

 28   En ce qui concerne les audiences en cour devant les juges

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  1   d'instruction, il faut demander son accord pour être présent au moment des

  2   audiences.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc tout le monde pouvait assister à

  4   ces audiences publiques, les représentants de l'ONURC aussi. Et si les

  5   audiences n'étaient pas publiques, on n'avait pas le droit d'assister à ces

  6   audiences automatiquement, là je parle des représentants de l'ONURC.

  7   Est-ce que j'ai bien compris ce que vous avez dit ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Le ministère de la Justice avait fait suivre

  9   au juge qui préside les audiences la requête de l'ONURC demandant à

 10   observer le procès. Ensuite, après avoir reçu l'approbation du juge qui

 11   préside le procès, les représentants de l'ONURC avaient tout à fait le

 12   droit d'assister à ces audiences.

 13   Et moi j'ai écris cette lettre pour leur confirmer cela, peut-être

 14   qu'elle n'est pas très bien écrite, mais on peut dire qu'ensuite, à chaque

 15   fois que les représentants de l'ONURC voulaient assister à des audiences,

 16   on leur a accordé ce droit, quel que soit la phase du procès. Le problème

 17   ne s'est jamais posé.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous nous dire combien il y a

 19   eu de requêtes correspondant à cette question ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas exactement combien il y en a

 21   eu, mais en tout cas toutes les requêtes ont été acceptées. Il y a eu donc

 22   les suivis des audiences même à l'époque où moi j'ai été ministre de la

 23   Justice. On le fait encore au jour d'aujourd'hui, les représentants de la

 24   communauté internationale suivent les audiences, les procès concernant les

 25   criminels de guerre et les crimes de guerre qui se déroulent en Croatie.

 26   Donc je ne saurais vous donner les nombres exacts, mais on donne

 27   systématiquement accès aux audiences à ces observateurs.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Là vous ne parlez pas seulement de

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  1   l'époque où vous étiez le ministre de la Justice, mais vous parlez aussi de

  2   ce qui se passe encore au jour d'aujourd'hui en Croatie ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais je parle aussi de l'époque où j'ai

  4   été moi-même ministre de la Justice.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ensuite, j'ai examiné cette lettre que

  6   vous a envoyée M. Tomislav Penic. Est-ce que je vous ai bien compris, est-

  7   ce que toutes les personnes qui faisaient l'objet d'une enquête et qui se

  8   trouvaient dans la base de l'ONURC, est-ce que toutes ces personnes ont

  9   fait l'objet des actes d'accusation, des chefs qui auraient une peine de

 10   minimum dix années d'emprisonnement; ou bien est-ce qu'il y avait des gens

 11   dans cette base qui ont fait l'objet des enquêtes dont les crimes n'étaient

 12   pas aussi lourds ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi je pense que c'était les crimes qui

 14   auraient eu les peines qui dépassaient dix années d'emprisonnement. Je

 15   pense que c'était bien le cas.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc tous.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je pense que oui. Je pense que oui.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous le pensez, vous le croyez. Donc

 19   c'est votre mémoire, vous pensez qu'il n'y avait pas de personnes qui aient

 20   été accusées de crimes qui étaient d'une moindre importance --

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense qu'on a insisté que l'on poursuive

 22   les personnes pour lesquelles on pensait qu'ils avaient commis des crimes

 23   sanctionnés par plus que dix années de réclusion criminelle.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc là il y avait un avocat commis

 25   d'office pour toutes ces personnes, n'est-ce pas ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis je me suis posé la question par

 28   rapport au document D1480 où l'on peut lire :

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  1   "Si l'accusé ne peut pas parler, ne peut pas se défendre, ou est

  2   malentendant," donc là on voit s'il est mort, mais en fait on veut dire

  3   malentendant, n'est-ce pas ? La différence en anglais c'est "death and

  4   deaf". Mais il faudrait tout de même vérifier l'original, parce que je

  5   serais surpris que ce soit vraiment écrit comme ça dans la langue

  6   originale.

  7   Mais à présent, Madame Gustafson, vous pouvez commencer votre contre-

  8   interrogatoire.

  9   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Merci.

 10   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 11   Contre-interrogatoire par Mme Gustafson : 

 12   Q.  [interprétation] Je vais commencer en vous posant quelques questions

 13   plus précises par rapport à votre déposition d'hier, vous avez parlé de vos

 14   rapports avec le président Tudjman, des contacts que vous avez eus avec lui

 15   et à quel point vous avez été proches.

 16   Aujourd'hui vous avez dit en répondant à une question posée par M. Kay, que

 17   si M. Cermak appelait M. Tudjman, que vous ne seriez pas forcément au

 18   courant de cela. Alors est-ce que cela est arrivé souvent que les gens

 19   appellent directement le président sans que les membres du cabinet en

 20   soient informés et sans savoir de quoi ils parlent ?

 21   R.  Mon bureau était au même étage que le bureau du président, de sorte que

 22   nos bureaux étaient près. Mais le président avait son cabinet, son chef de

 23   cabinet, sa secrétaire, son personnel, des professionnels, et eux ils

 24   étaient au courant de tous les appels. De sorte que moi je n'avais

 25   absolument pas besoin de savoir ce qu'il faisait à chaque moment, ni moi ni

 26   d'autres conseillers qui travaillaient pour lui. Il y avait des gens qui

 27   étaient très près du président, mais ils n'étaient pas au courant forcément

 28   de tous les coups de fil passés au président.

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  1   Q.  Merci. D'une façon semblable, on peut dire que le président Tudjman se

  2   rencontrait souvent en tête-à-tête avec ses conseillers proches, M.

  3   Sarinic, M. Radic, M. Susak; est-ce exact ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Le président Tudjman ne vous faisait pas forcément rapport de ses

  6   réunions, des réunions qu'il avait avec ses collaborateurs très proches,

  7   n'est-ce pas ?

  8   R.  Bien sûr que non.

  9   Q.  Quand vous dites "bien sûr que non," qu'est-ce que vous voulez dire par

 10   là ?

 11   R.  Voyez-vous, moi le matin je rencontrais le président, c'était une

 12   réunion d'information par rapport à la situation, je l'informais donc de la

 13   situation; ensuite on se rencontrait pendant la journée si j'avais besoin

 14   de quelque chose ou s'il m'appelait, et on se rencontrait aussi tous

 15   pendant le déjeuner de travail; et à ce moment-là on échangeait les

 16   informations, on coordonnait nos activités.

 17   Q.  A cet égard, il me semble que vous avez dit qu'au départ vos activités

 18   avaient surtout à voir avec le domaine des relations publiques, et ensuite

 19   avec les négociations avec la RSK et avec les Nations Unies. C'était bien

 20   là votre domaine d'activités ?

 21   M. KEHOE : [interprétation] A quel moment, parce qu'elle n'a pas fait que

 22   cela.

 23   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Relations publiques je crois entre 1991 et

 24   1994, puis ensuite elle est devenue représentante dans les négociations

 25   avec la RSK et les Nations Unies.

 26   Q.  A partir de cette date-là jusqu'en 1995, toute l'année, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Il est donc exact de dire que vous n'aviez rien à voir avec le

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  1   fonctionnement de l'armée croate, n'est-ce pas ?

  2   R.  C'est tout à fait exact.

  3   Q.  Et vous ne preniez pas part à la planification ou à l'exécution

  4   d'opérations militaires, n'est-ce pas ?

  5   R.  Non.

  6   Q.  Et vous n'étiez pas présente lors des réunions militaires au cours

  7   desquelles ce genre d'opération était planifié ?

  8   R.  Non.

  9   Q.  Les Juges de la Chambre ont entendu un certain nombre d'informations

 10   relatives à une réunion de planification de l'opération Tempête à la fin du

 11   mois juillet. Vous n'y étiez pas présente ?

 12   R.  A la réunion qui s'est tenue où exactement ?

 13   Q.  C'est une réunion qui a eu lieu le 31 juillet.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, le témoin a demandé où

 15   cette réunion s'est tenue et je suppose que vous parlez de Brioni. La

 16   réunion du 31 juillet. Je crois que c'est cela que voulait savoir le

 17   témoin, sur l'île de Brioni donc.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'étais pas présente à cette réunion.

 19   Mme GUSTAFSON : [interprétation]

 20   Q.  Vous ne savez pas ce dont il a été question lors de cette réunion,

 21   quels ont été les plans qui ont été établis à cette occasion ?

 22   R.  Je n'en sais rien, non.

 23   Q.  J'aimerais passer à autre chose, c'est-à-dire à la loi sur

 24   l'utilisation et l'administration temporaire de biens, c'est-à-dire

 25   d'habitations.

 26   Vous avez déposé un peu plus tôt aujourd'hui sur cette loi. Je crois vous

 27   avoir entendu dire que c'était là une mesure temporaire et vous avez

 28   vraiment insisté sur le mot "temporaire". Il s'agissait de faire face à la

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  1   situation d'hébergement des réfugiés qui était un gros problème à l'époque

  2   ?

  3   R.  Tout à fait, c'est exact.

  4   Q.  Mais, Madame Ozbolt, cette loi adoptée et promulguée par les dirigeants

  5   croates, y compris le président Tudjman, n'avait-elle pas pour objet de

  6   confisquer de manière permanente les habitations serbes et d'y installer

  7   des Croates dans la zone de la Krajina ?

  8   R.  Voici ce que je vais vous dire. L'intention n'était pas de confisquer

  9   ces habitations. L'intention était, et je crois l'avoir déjà dit de manière

 10   tout à fait claire, de permettre aux Serbes qui ne souhaitent plus vivre en

 11   Croatie et qui avaient pris cette décision de leur plein gré, de vendre

 12   leurs maisons sur le marché à qui bon leur semblait, ou bien au

 13   gouvernement croate qui, à l'époque, se portait acquéreur de ce genre de

 14   maisons. C'est dans ce contexte-là que cette loi a été adoptée, ce qui ne

 15   correspond pas à la teneur de votre question. A cette fin, je l'ai dit,

 16   l'organisme dont j'ai parlé plus tôt, chargé de la vente de biens

 17   immobiliers, a été créé et rattaché au gouvernement de la République de

 18   Croatie.

 19   Q.  Vous n'avez pas connaissance de la moindre déclaration émanant des

 20   dirigeants selon laquelle cette loi n'était pas une mesure provisoire, mais

 21   l'expression d'un souhait d'installer de manière tout à fait permanente des

 22   Croates dans les habitations qui appartenaient autrefois à des Serbes.

 23   C'est bien ce que vous dites ?

 24   R.  Pouvez-vous citer en guise d'exemple une déclaration d'une teneur

 25   différente à ce que moi j'avance ? Seules les habitations appartenant à des

 26   personnes ayant exprimé le vœu de les vendre ont été rachetées par le

 27   gouvernement de la République de Croatie. Une demande devait être

 28   communiquée, la valeur des habitations devait être évaluée, un prix devait

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  1   ensuite être négocié et enfin, le vendeur devait toucher la somme

  2   correspondante.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Ozbolt, la question qui vous a

  4   été posée par Mme Gustafson est la suivante : êtes-vous en train de dire

  5   que vous n'avez pas connaissance de toute déclaration quelle qu'elle soit

  6   suggérant un caractère permanent de cette loi ou de cette mesure ?

  7   Et vous avez commencé votre réponse en lui demandant de bien vouloir

  8   citer en guise d'exemple une déclaration qui dirait ceci.

  9   Il s'agit en réalité d'une contre-question. Je vous invite à ne pas

 10   répondre aux questions en posant vous-même des questions à Mme Gustafson.

 11   Ne l'oubliez pas.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

 13   Tout un tas de déclarations ont été faites. Je ne sais pas exactement

 14   ce dont parle la représentante du bureau du Procureur dans sa question,

 15   mais je sais en tout cas quelle était la teneur de cette loi.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais sa question était de savoir si vous

 17   aviez connaissance de toute déclaration émanant des dirigeants.

 18   Alors si vous avez connaissance de ce genre de déclaration, répondez

 19   par l'affirmative, en cas contraire, répondez par la négative.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas le souvenir de déclaration de ce

 21   genre.

 22   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Merci. J'aimerais que l'on affiche à

 23   l'écran la pièce P462.

 24   Q.  Madame Ozbolt, il s'agit du compte rendu du procès-verbal d'une réunion

 25   du 11 août 1995. Vous voyez sur la première page votre nom parmi les

 26   participants. On y voit également celui du président et les autres

 27   participants à la réunion.

 28   Vous souvenez-vous avoir participé le 11 août à cette réunion avec

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  1   les autres ?

  2   R.  Si mon nom figure dans la liste, je suppose que j'y étais, oui.

  3   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Examinons la page 14 en anglais et 24 en

  4   B/C/S. C'est la page d'avant en B/C/S, excusez-moi. C'est la page encore

  5   d'avant.

  6   Q.  Bien. J'aimerais attirer votre attention sur la déclaration de M. Radic

  7   :

  8   "Monsieur le Président : Peut-être quelque chose en rapport avec la

  9   question que vous avez évoquée au début, la question des maisons serbes,

 10   entre guillemets, nous n'y avons pas touchée, nous nous sommes contentés de

 11   la laisser de côté.

 12   "La Loi relative aux biens immobiliers fait l'objet d'une procédure

 13   devant le Parlement. Toutefois, seule la première lecture a été effectuée

 14   et le processus ne s'est pas fait dans la douceur. Je pense que nous

 15   devrions, mais je ne sais vraiment pas comment, résoudre cette question

 16   urgemment."

 17   Vous souvenez-vous que M. Radic a soulevé cette question lors de cette

 18   réunion ?

 19   R.  Je dois dire que non. Ça fait longtemps, mais c'est sans doute ce qu'il

 20   a dit. Je ne remets pas en question cette déclaration.

 21   Q.  Très bien.

 22   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Passons à la page suivante -- ou plutôt, à

 23   la page qui suit la page suivante, en tout cas, en anglais. Mais il faut

 24   avancer de trois pages dans la version B/C/S, je crois.

 25   Q.  M. Valentic, premier ministre, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Il dit ce qui suit :

 28   "Monsieur le Président : Dans cette loi, il est important que les

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  1   nôtres jouissent de sécurité et qu'ils ne peuvent pas être jetés dehors, à

  2   mon avis, c'est important, le libellé parce que personne n'emménagera s'ils

  3   peuvent être expulsés d'ici un an. La question est de savoir sous quelle

  4   forme il conviendrait au mieux d'y intégrer cette idée fondamentale."

  5   M. Valentic exprime ici le point de vue selon lequel il devrait y avoir

  6   transfert permanent et que personne ne puisse être éventuellement amené à

  7   devoir quitter ses habitations un an après l'emménagement, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Et regardez ce que répond M. Radic. Voici ce qu'il dit :

 10   "Rien n'est plus important que cela. Rien n'est plus important en Croatie

 11   aujourd'hui que cela, parce que des gens arrivent, des Croates. Et je ne

 12   sais pas. Nous n'avons pas de rapport sur cette question, mais je ne sais

 13   pas si vous savez que Vojnic ne comptait que 51 habitants autrefois.

 14   Aujourd'hui, c'est une ville de 15 000 habitants. Demain, on pourra en

 15   rajouter 15 000. En plus, Lapac compte 14 habitants, 14 Croates. Donji

 16   Lapac, 14 habitants. (C'est plus que le nombre de maisons.) Je suis

 17   d'accord. Mais d'un point de vue stratégique, c'est si important, et c'est

 18   dans une telle position que nous devons réparer les maisons, Gojko, et y

 19   mettre des Croates, compte tenu de la position du lieu."

 20   Alors, Donji Lapac, avant la guerre, était peuplé à 99 % de Serbes, n'est-

 21   ce pas ?

 22   R.  Presque.

 23   Q.  Et Vojnic, 90 %?

 24   R.  Oui, c'est exact.

 25   Q.  Et ces municipalités sont dans la partie centrale de la Croatie; est-ce

 26   exact ? Là où c'est le plus étroit ?

 27   R.  Etroit géographiquement parlant ?

 28   Q.  C'est exact.

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Et lorsque M. Radic dit :

  3   "Il est nécessaire d'installer les Croates là-bas. Telle est la

  4   position de l'endroit." Il fait référence à la géographie de cette

  5   municipalité, à leur position géographique, n'est-ce pas ?

  6   R.  Je suppose que oui.

  7   Q.  Peut-on aller un peu plus loin et voir ce que le président dit

  8   immédiatement après M. Radic. Donc M. Tudjman :

  9   "Je suis plus radical. Si quelqu'un a quitté le pays et n'apparaît

 10   pas là-bas, je ne sais pas, au bout d'un mois ou trois mois, et cetera,

 11   ceci sera pris en considération. Il faut penser de la formulation, des

 12   possessions d'Etat, et cetera. Nous venons de sortir de la guerre, et

 13   cetera. Il faudrait le définir ainsi."

 14   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Passons maintenant à la page suivante en

 15   anglais et aussi en B/C/S, avec le nouvel intervenant.

 16   M. Valentic dit :

 17   "Pas trois mois. Trois mois, c'est trop long car…

 18   "Le président : D'accord. Un mois, alors.

 19   "M. Radic : Dans ce cas-là, nous devons le faire par le biais d'un décret

 20   gouvernemental et nous ne pouvons pas attendre."

 21   Et un peu plus loin, encore une fois, M. Radic :

 22   "Car le délai de trois mois a déjà expiré pour Okucani et c'est la zone

 23   dans laquelle nous devons être capables de faire venir les gens déjà."

 24   Q.  Okucani est une zone qui a été reprise dans le cadre de l'opération

 25   Eclair, n'est-ce pas ?

 26   R.  C'est exact.

 27   Q.  Et lorsque M. Radic fait référence au délai de trois mois qui expire

 28   déjà là-bas, là, il veut dire que trois mois se sont écoulés depuis

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  1   l'opération Eclair, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui. Probablement c'est le cas.

  3   Q.  Et si l'on continue. Le président Tudjman dit :

  4   "Oui, bien sûr, les gens viennent et je ne sais pas qui dit, Rebic ou

  5   quelqu'un qu'ils vont être placés dans les camps. (Les camps sont hors de

  6   question.)"

  7   M. Susak dit :

  8   "Président, un millier vient de Banja Luka."

  9   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Ensuite, passons à la page suivante.

 10   Le président dit :

 11   "Les camps sont hors de question. Par conséquent, nous devons voir

 12   pour cela."

 13   M. Radic dit :

 14   "Nous avons de bonnes maisons, des maisons intactes. Pour qui les

 15   garderons-nous ?"

 16   Un peu plus loin dans la page, Vladimir Seks dit :

 17   "Président, nous avons inséré cela dans la loi pour une deuxième

 18   lecture, mais les gens qui s'installent dans une maison ont une sécurité de

 19   propriétaire. Ils ne veulent pas une utilisation temporaire. Ils doivent

 20   investir, procéder aux réparations, mettre les choses en ordre. Ils veulent

 21   posséder cela."

 22   Le président :

 23   "Eh bien, c'est clair. C'est dans notre intérêt aussi…"

 24   Q.  Madame Ozbolt, est-ce que ceci vous rafraîchit la mémoire, ce procès-

 25   verbal de la réunion au sujet des intentions des dirigeants visant à

 26   réinstaller de manière permanente les Croates dans les maisons abandonnées

 27   par les Serbes qui avaient quitté la région suite aux opérations Eclair et

 28   Tempête ?

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  1   R.  Il s'agit là de 1995, période pendant laquelle la Croatie, s'agissant

  2   des réfugiés et des personnes déplacées, se trouvait déjà à genoux.

  3   Après l'opération Tempête, cette région dont vous avez parlé était

  4   entièrement vide. De Banja Luka, il y avait sans cesse un flux de personnes

  5   expulsées qui arrivaient en Croatie. Il n'était plus possible de trouver un

  6   hébergement pour ces personnes et il n'y avait pas de capacité permettant

  7   cela. La seule manière était de les installer dans des maisons, maisons

  8   abandonnées. Cette discussion, je suppose qu'elle s'est déroulée ainsi et

  9   il y a eu des opinions différentes et des propositions différentes.

 10   Cependant, le résultat final est tel que la Loi portant sur une reprise

 11   provisoire des possessions a été adoptée, et cette agence a été créée pour

 12   ceux qui souhaitaient vendre leur maison. C'est ainsi qu'en réalité le

 13   gouvernement trouvait une solution à la question de la propriété s'agissant

 14   de ceux qui s'étaient provisoirement installés dans ces maisons-là.

 15   Q.  Nous allons examiner cela tout à l'heure. Mais je souhaite simplement

 16   que l'on revienne à une partie de votre réponse, qui concernait le fait que

 17   ce territoire était vide et que la Croatie était à genoux en raison de son

 18   problème de réfugiés.

 19   Il ne s'agissait pas là seulement des réfugiés, n'est-ce pas ?

 20   L'intention du président Tudjman était de remplir ces territoires vides de

 21   Croates ?

 22   M. KEHOE : [interprétation] Excusez-moi, mais il y a deux questions. Peut-

 23   on poser les questions une à une ?

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson.

 25   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Voici la question : l'intention du

 26   président Tudjman était de remplir ces territoires vides avec des Croates.

 27   Cette question n'a pas de sens si je ne parle pas des réfugiés.

 28   Q.  Donc ce n'était pas les réfugiés, le problème, mais le problème était

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  1   lié au fait qu'il avait l'intention de remplir ces espaces avec des

  2   Croates, n'est-ce pas, c'était du point de vue du président Tudjman ?

  3   R.  La question contestée concernait la question de savoir où placer les

  4   Croates qui arrivaient de Bosnie-Herzégovine, et notamment de la région de

  5   Banja Luka. Ils laissaient leurs maisons derrière eux, là-bas. Une partie

  6   de ces maisons a servi justement pour y installer ces gens-là. Les

  7   intentions n'étaient pas de les installer de manière permanente, mais de

  8   les héberger là-bas de manière temporaire, en attendant que les conditions

  9   se réunissent permettant leur retour à la région de Banja Luka.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, une seule observation.

 11   Lorsque nous parlons des intentions, vous avez présenté un document au

 12   témoin qui concerne une certaine discussion. J'ai l'impression que quant à

 13   l'intention à un certain moment ou l'intention exprimée à un certain

 14   moment, qu'il y a toujours une confusion, car -- corrigez-moi si je me

 15   trompe, Madame Skare Ozbolt, mais ce qui ressort de cette discussion est

 16   une chose, puis une autre chose concerne ce qui s'est passé ensuite.

 17   Peut-on toujours faire la distinction entre ce dont on parle, car

 18   apparemment Mme Gustafson pose des questions concernant ce que l'on a vu en

 19   train de se passer, ou ce que l'on a lu comme ayant eu lieu pendant cette

 20   réunion, alors que vos réponses, apparemment, concernent la question de

 21   savoir ce qui a été exprimé ou ce qui n'a pas été exprimé lors de cette

 22   réunion et le résultat final.

 23   Nous allons essayer de garder les choses aussi claires que possible. Si Mme

 24   Gustafson pose des questions au sujet de la réunion, voyons ce que la

 25   réunion nous dira. Si Mme Gustafson pose des questions au sujet d'autres

 26   éléments ou d'autres réunions, il faut clairement définir ce dont il est

 27   question.

 28   Poursuivez, Madame Gustafson.

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  1   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   Peut-on maintenant voir la pièce P463; page 3 en anglais et 6 en B/C/S.

  3   Si on peut passer à la page 1 pour commencer, pour que le témoin puisse

  4   voir la page de garde.

  5   Q.  Madame Skare Ozbolt, il s'agit là d'un procès-verbal d'une réunion qui

  6   a eu lieu le 22 août, donc deux [comme interprété] jours après celui que

  7   l'on a examiné, réunion entre M. Radic et le président Tudjman.

  8   Est-ce que vous avez des connaissances concernant cette réunion en

  9   particulier ?

 10   R.  Non.

 11   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Peut-on passer maintenant à la page 3 en

 12   anglais et la page 6 en B/C/S.

 13   En bas de la page 3 en anglais, et je pense que c'est au milieu de la page

 14   en B/C/S …

 15   Peut-on montrer la partie inférieure en anglais.

 16   Q.  Nous voyons que M. Radic dit -- excusez-moi, le Dr Radic dit :

 17   "Ceci a été largement ruiné. Vous êtes allé dans la région principale

 18   seulement, mais Drnis est la deuxième ville la plus grande à la frontière

 19   de la Croatie. D'abord Vukovar, ensuite Drnis, 25 000 personnes là-bas. Il

 20   y avait seulement un millier de Serbes là-bas. Je parle de la ville et

 21   aussi du village. Tout a été détruit autour."

 22   M. KEHOE : [interprétation] Peut-on passer à la page suivante.

 23   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Excusez-moi, en anglais.

 24   Sur les 25 000, peut-être 5 000 peuvent rentrer et 20 000 ne peuvent pas.

 25   C'est la situation à Drnis.

 26   Dans le dernier paragraphe, il dit :

 27   "Donc à mon avis, un tiers des 120 000 resteront incertains, et en ce qui

 28   concerne les deux tiers des 120 qui restent."

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  1   Et dans la dernière phrase, il dit :

  2   "Cependant, notre but est d'enlever leur statut de réfugiés. Le problème le

  3   plus gros concerne le fait de faire venir les gens là-bas. Je me suis assis

  4   et j'ai analysé cela un peu …"

  5   Ensuite, le président dit --

  6   Si on peut passer un peu plus vers le bas en B/C/S.

  7   Q.  "Jure, en ce qui concerne ces retours, nous, en tant que Croatie,

  8   devrions inviter les gens à revenir et payer leur voyage de l'Argentine, de

  9   l'Australie, et cetera."

 10   Peut-on passer à la page suivante en B/C/S.

 11   "Nous devrions organiser des vols charter ou des bateaux et leur dire

 12   qu'ils peuvent choisir, leur donner des maisons, leur donner la terre, même

 13   faire un sondage pour savoir ce qui les intéresse. Nous devons leur offrir

 14   une telle possibilité, mais c'est l'Etat qui devrait payer pour cela."

 15   Le Dr Radic dit :

 16   "Ça nous coûtera rien ?"

 17   Le président dit :

 18   "Ça voudrait dire un millier de personnes et ils entreraient

 19   dans les maisons serbes, et ainsi de suite."

 20   Le Dr Radic dit :

 21   "C'est exact, c'est exact. Cet espace est vide."

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Gustafson, je vois que vous êtes

 23   en train de lire maintenant le paragraphe suivant. M. Kay a gagné la

 24   bataille contre l'heure, mais apparemment ce n'est pas votre cas.

 25   Mme GUSTAFSON : [interprétation] J'allais m'arrêter là et poser une

 26   question.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Faites-le, s'il vous plaît, et ensuite

 28   nous allons lever l'audience.

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  1   Mme GUSTAFSON : [interprétation]

  2   Q.  Madame Skare Ozbolt, cette réunion reflète le souhait du président

  3   Tudjman de remplir ces espaces vides avec des Croates, n'est-ce pas ?

  4   R.  Il reflète la situation dans laquelle il faut remplir les espaces

  5   vides, car si ça reste vide, c'est stratégiquement dangereux. Car il n'y a

  6   pas de gens là-bas, c'est une région très étroite en face de la Republika

  7   Srpska, il est possible que les biens et les propriétés soient détruits,

  8   que les gens y fassent irruption et il fallait absolument installer les

  9   gens là-bas.

 10   Compte tenu du fait que ces espaces étaient vides, les maisons étaient

 11   vides, et qu'il y avait des réfugiés partout, d'après eux, c'était la seule

 12   solution possible.

 13   Lorsque le président avait parlé de cette idée de peuplement des gens

 14   vivant en Argentine ou ailleurs dans le monde, je suppose qu'il pensait

 15   alors à ce qui a eu lieu par la suite, à savoir que les gens étaient

 16   installés dans des maisons occupées. Mais cette idée concernant le

 17   peuplement avec des gens, des Croates qui vivaient à travers le monde, n'a

 18   jamais été mise en œuvre.

 19   Q.  Merci.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous devons lever l'audience, Madame

 21   Ozbolt.

 22   Nous allons reprendre notre travail demain, vendredi, le 5 juin, à 9

 23   heures, dans ce même prétoire.

 24   J'ai oublié de vous donner les mêmes instructions qu'hier, à savoir vous ne

 25   devez parler avec qui que ce soit au sujet de votre déposition --

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas-là, nous levons l'audience.

 28   --- L'audience est levée à 13 heures 51 et reprendra le vendredi 5 juin

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  1   2009, à 9 heures 00.

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