Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 19 juin 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous dans le prétoire et

  6   bonjour également à tous ceux qui nous apportent leur concours à

  7   l'extérieur du prétoire.

  8   Monsieur le Greffier, pourriez-vous citer le numéro de l'affaire, je vous

  9   prie.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, bonjour

 11   Madame, Messieurs les Juges. Bonjour tout le monde dans le prétoire et hors

 12   du prétoire. Il s'agit de l'affaire IT-06-90-T, le Procureur contre Ante

 13   Gotovina et consorts.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.

 15   Peut-on passer à huis clos partiel.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, nous sommes

 17   à huis clos partiel.

 18   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Page 18894 expurgée. Audience à huis clos partiel.

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 13   [Audience publique]

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier.

 15   [Le témoin vient à la barre]

 16   LE TÉMOIN: MILE MRKSIC [Reprise]

 17   [Le témoin répond par l'interprète]

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mrksic, m'entendez-vous dans

 19   une langue que vous comprenez ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je vous entends.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mrksic, je tiens à vous

 22   rappeler la déclaration solennelle que vous avez prononcée au début de

 23   votre déposition qui est toujours en vigueur; déclaration selon laquelle

 24   vous vous engagez à dire la vérité, toute la vérité, et rien que la vérité.

 25   Je tiens également à vous faire savoir que la Chambre a discuté du temps

 26   dont vous disposiez encore pour votre audition. Il est fort possible que

 27   votre interrogatoire se termine avant l'arrivée de votre famille.

 28   Toutefois, cela dépend beaucoup de vous. Ceci n'est pas de la part de la

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  1   Chambre une invitation qui vous est adressée de dire toute la vérité, mais

  2   c'est certainement une invitation que l'on vous adresse de vous concentrer

  3   sur les questions précises qui vous sont posées. Encore une fois, si Me

  4   Misetic souhaite des détails complémentaires, il vous le fera certainement

  5   savoir dans de nouvelles questions. Donc répondez brièvement aux questions

  6   qui vous sont posées.

  7   Maître Misetic, vous pouvez poursuivre.

  8   M. MISETIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  9   Interrogatoire principal par M. Misetic : [suite]

 10   Q.  [interprétation] Bonjour, Mon Général.

 11   R.  Bonjour. Puis-je dire quelques mots en préambule de ma déposition

 12   aujourd'hui, car je vous considère comme mon avocat. C'est vous qui m'avez

 13   engagé.

 14   Je ne suis pas très satisfait de la façon dont la presse a rendu compte la

 15   nuit dernière des événements survenus ici notamment à la télévision, je

 16   sais que vous coopérez avec eux, que vous leur fournissez des

 17   renseignements. Si vous donnez des renseignements qu'ils diffusent tard la

 18   nuit, je ne considère pas que vous êtes un conseil qui m'est favorable.

 19   Alors de quoi je suis en train de parler exactement ?

 20   Toutes mes excuses, mais ça sera très court je vous assure. Je compenserai

 21   le temps perdu maintenant en fournissant des réponses brèves plus tard.

 22   Qu'est-ce qu'ils ont dit ? Ils ont dit que je provoquais sans cesse des

 23   pilonnages contre moi, première chose. Et deuxième chose, que j'ai décrété

 24   l'état de guerre et que j'ai assassiné mon propre peuple. Je pense que

 25   cette télévision était au niveau des années 1990. Je pensais que nous

 26   avions tout de même progressé depuis cette époque-là et que quelqu'un avait

 27   assumé les conséquences de tout cela. Je ne sais pas s'il est permis de

 28   décrire les événements de cette façon. Nous en Serbie, nous avons engagé

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  1   des poursuites contre certains journalistes.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mrksic, votre témoignage est

  3   public, ce qui signifie qu'il n'est pas nécessaire de donner à qui que ce

  4   soit des renseignements au sujet de votre déposition puisqu'elle est

  5   entièrement dans le domaine public. Ça c'est une chose.

  6   Deuxième chose, la façon dont les journalistes interprètent votre

  7   déposition leur appartient exclusivement. Si l'image qu'ils donnent est

  8   déformée, quoi qu'il en soit, je n'ai aucune raison de penser que c'est Me

  9   Misetic qui est à l'origine d'une telle déformation. Maître Misetic, je ne

 10   crois pas me tromper en disant que vous n'êtes pas l'auteur des

 11   commentaires diffusés par la télévision.

 12   M. MISETIC : [interprétation] C'est exact.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Effectivement, c'est ce que je pensais.

 14   En dehors de cela, Monsieur Mrksic, la liberté de la presse l'autorise à

 15   commenter tout ce qui fait partie du domaine public et même éventuellement

 16   à présenter des points de vue déformés. Il n'est pas convenable de

 17   poursuivre en justice un journaliste pour ce qu'il dit, je suis d'avis

 18   personnellement qu'il ne convient pas de poursuivre des journalistes pour

 19   de tels faits. Mais nous savons bien tous, après avoir passé de nombreuses

 20   années dans cette institution, que la presse rend compte parfois très

 21   fidèlement de ce qui s'est passé et d'autre fois que sa restitution des

 22   faits peut être déformée d'une façon ou d'une autre.

 23   Maître Misetic, vous pouvez poursuivre.

 24   M. MISETIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 25   Monsieur le Greffier, je demande l'affichage de la pièce D389.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis heureux de savoir que Me Misetic n'est

 27   pas à l'origine de tout cela. Donc je lui présente mes excuses pour les

 28   doutes que j'ai nourris. Vous n'étiez pas responsable, je vous remercie.

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  1   M. MISETIC : [interprétation] Je vous remercie.

  2   Q.  Si vous regardez sur l'écran, Mon Général, vous y trouverez un rapport

  3   qui est le document que nous examinions à la fin de l'audience hier. C'est

  4   un document dont l'auteur est M. Knezevic. Vous vous rappellerez que dans

  5   ce rapport qui date du 4 août, il est indiqué que les premières frappes ont

  6   commencé et on a la liste des bâtiments visés. Hier vous avez indiqué --

  7   R.  Frappe au sens de pilonnage, n'est-ce pas, je ne voudrais pas que

  8   quelqu'un comprenne les choses autrement. Il s'agit de pilonnage, n'est-ce

  9   pas, le mot "strike" anglais signifiant pilonnage dans ce cas.

 10   Q.  Je ne pense pas que quiconque ici ait pu confondre en pensant qu'il

 11   s'agissait de grève dans une entreprise. Non, pas du tout.

 12   R.  Très bien.

 13   Q.  Alors vous avez dit hier que ce qui est indiqué dans ce document

 14   correspondait aux renseignements que vous receviez à l'époque des faits.

 15   Pourrions-nous passer maintenant à la pièce D1256.

 16   Est-ce que vous avez communiqué durant la journée du 4 avec M. Knezevic

 17   directement ?

 18   R.  M. Knezevic était membre de l'état-major principal. Je communiquais

 19   avec lui. Nous avons communiqué jusqu'à 13 heures ou 16 heures à peu près

 20   avec les commandants de corps d'armée. Et les commandants de corps nous on

 21   dit les mêmes choses, à savoir qu'il était étonnant à leurs yeux que ce ne

 22   soit pas le front qui soit pilonné, mais des bombardements à l'intérieur du

 23   front, en profondeur. Et j'ai reçu les mêmes renseignements des services de

 24   renseignement.

 25   Q.  J'aimerais que nous passions à la page 2 de la version anglaise de ce

 26   document. Il s'agit d'une conversation interceptée, conversation

 27   téléphonique, Mon Général. Et en page 2 de la version anglaise, qui est

 28   toujours la page 1 de la version B/C/S, nous voyons que c'est M. Knezevic

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  1   qui parle à 7 heures du matin le 4 avec un interlocuteur non identifié. Il

  2   discute à 7 heures du matin du fait que le secteur qui les environne est

  3   pilonné; je cite :

  4   "Question : Est-ce que vous avez subi des pertes ?

  5   "Réponse : Je ne sais pas. Je ne peux pas vous le dire pour le moment.

  6   "Réponse : Oui, oui, il y en a un qui est mort. Vous me posez la question.

  7   "Question : Non, pas encore.

  8   "Réponse : Ah bon. Pour le moment, nous n'avons subi aucune perte, mais en

  9   ville il y en a probablement. Manifestement, le point central était la

 10   caserne et le palais présidentiel. Il y a eu de très nombreuses frappes, je

 11   ne sais pas combien de missiles ont été tirées. Cela a duré 25 à 30

 12   minutes."

 13   Est-ce que ceci correspond avec votre façon de voir quel était le point

 14   principal que visaient l'artillerie et les roquettes dans ce premier tir de

 15   barrage ?

 16   R.  Maître Misetic, c'était des frappes d'artillerie tout à fait

 17   particulière, et cela m'a beaucoup intéressé; en ma qualité de général,

 18   nous n'avions pas de système de ce genre qui nous permettait à l'aide d'un

 19   premier tir de frapper une cible de taille aussi réduite en plein centre-

 20   ville. Il faut dans ce cas utiliser des systèmes de 52 ou de 50. Vous n'en

 21   avez peut-être pas discuté avec votre client. Mais enfin, le tir en

 22   question était particulièrement précis, il n'y a eu qu'une seule frappe et

 23   elle a atteint sa cible, alors que les autres frappes ont été disséminées

 24   un peu partout en ville.

 25   Et il s'agissait de tirs de roquette. Moi, je m'étonne de voir que vous

 26   recherchez des carnets parlant de tirs d'artillerie, alors qu'il s'est agi

 27   principalement de tirs de roquette. Il y a eu deux, trois tirs d'artillerie

 28   qui, à mon avis, n'avaient pas la possibilité de nuire grandement aux

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  1   forces du HVO ou de l'armée de Croatie. J'en doute beaucoup.

  2   Et durant ces frappes, un soldat a été tué et les véhicules qui se

  3   trouvaient dans le parc ont été rendus inutilisables, parce que leurs pneus

  4   ont été endommagés. Nous, nous avons été très surpris, nous ne comprenions

  5   pas comment un tir initiale pouvait être aussi précis, parce que vous savez

  6   comment ça se passe, on tire un tir de réglage, ensuite on en reçoit un en

  7   retour et on règle le tir, et cetera.

  8   Q.  Je me permets de vous arrêter ici. Mais divisons les choses en deux.

  9   Vous parlez d'abord de ce tir initial; donc vous parlez bien de la première

 10   demi-heure --

 11   R.  Oui.

 12   Q.  -- c'est-à-dire des tirs de réglage, n'est-ce pas, du premier tir de

 13   barrage ?

 14   R.  C'était un tir de canon. On ne s'en est même pas rendu compte tant

 15   qu'on n'est pas arrivé au point qui était visé.

 16   Q.  Non, je vous parle du temps en ce moment, de l'heure. Cette première

 17   frappe dont vous dites qu'elle a été très précise, qu'elle a visé une cible

 18   de très petite taille, vous vous demandez comment un tir de ce genre a pu

 19   être aussi précis. Est-ce que ce tir a eu lieu pendant la première demi-

 20   heure ?

 21   R.  Non, mais ça n'a pas duré une demi-heure. Ça a duré toute la journée et

 22   toute la nuit. Mais le premier tir qui nous a pris par surprise; après, ils

 23   ont tiré en masse à l'aide de roquette de 107 et de 109, je crois que la

 24   majorité c'était des 107-millimètres. Ce tir-là, je ne m'en suis pas rendu

 25   compte. Moi, j'étais dans une maison où j'étais hébergé, et ce sont des

 26   roquettes des VBR qui tiraient sur cette maison. Je n'ai pas vu que le

 27   commandement était visé, mais ensuite on m'a dit que dès que les actions

 28   ont commencé à 6 heures du matin, le premier tir a touché sa cible. Et

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  1   depuis le troisième étage où j'étais, j'étais en très bonne position pour

  2   voir toute la ville; donc en ma qualité d'expert, j'ai observé ce qui se

  3   passait, je me suis demandé combien de batteries étaient utilisées, quelle

  4   quantité de munition était impliquée, qui est-ce qui pouvait posséder des

  5   quantités pareilles de munition, parce que les roquettes en question ne

  6   tombent pas d'en haut; elles entrent par les fenêtres des maisons comme des

  7   petites mouches et elles créent la panique parmi la population. Moi,

  8   j'étais au troisième étage de ma maison et j'ai dû me protéger avec un

  9   meuble pour ne pas être touché par la fenêtre.

 10   Et ça m'a paru bizarre qu'on vise un lieu habité avec de telles armes, cela

 11   m'a étonné de voir que le commandant continuait à viser des cibles de cette

 12   nature avec des tirs aussi précis. Si cela s'était poursuivi avec la même

 13   précision qu'au début, nous n'aurions pas pu rester au poste de

 14   commandement. Moi, ça m'a paru bizarre, je n'ai enquêté dans le détail que

 15   par la suite. Mais enfin --

 16   Q.  En dehors du commandement, le front de Crvena Zemlja, quels étaient les

 17   éléments, les effectifs sous vos ordres qui tenaient ce front de Crvena

 18   Zemlja ?

 19   R.  C'était des éléments du Corps de Knin, ce qu'on avait pu retiré du

 20   front avant qui ne subissait pas d'attaque. L'objectif était de montrer

 21   qu'il y avait tout de même quelqu'un pour encaisser les coups. Mais les

 22   hommes qui tenaient ce front n'avaient rien, ils n'avaient pas d'engins

 23   lourds, ils n'avaient pas de mines, ils n'avaient pas de puissance de feu

 24   suffisante, rien.

 25   Q.  Est-ce que les forces de police régulière de la RSK, c'est-à-dire le

 26   MUP, tenaient le front sur le mont Dinara ?

 27   R.  Oui, vos commandants le savent. A Grabena, c'est la frontière avec la

 28   Republika Srpska, j'ai inspecté leurs positions de tir là-haut. C'était des

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  1   postes d'observation et depuis là-haut, on voyait les effectifs arriver à

  2   Livanjsko Polje en passant par Grahavsko Polje. Il y a même des pièces

  3   d'artillerie qui sont passées par là. Je crois me rappeler qu'un autobus a

  4   été touché, je ne sais pas exactement. Enfin moi, je suis allé sur place

  5   là-haut, j'ai observé ce qui se passait et j'ai vu que nous en étions à la

  6   limite de nos forces et que nous ne pouvions opposer aucune défense

  7   sérieuse. J'ai même appelé le président pour lui conseiller de venir voir

  8   ce qui se passait là en hélicoptère.

  9   Q.  Mon Général, voici ma question --

 10   M. MISETIC : [interprétation] Je demande l'affichage du document 65 ter

 11   numéro 1D1055.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais une précision au sujet de la

 13   dernière réponse du témoin.

 14   Monsieur Mrksic, vous avez dit que le tir était si précis qu'il n'y a eu

 15   qu'un seul tir qui a atteint sa cible, et que toutes les autres frappes ont

 16   été disséminées un peu partout en ville. Lorsque vous parlez des autres

 17   frappes disséminées un peu partout en ville, est-ce que vous pensiez aux

 18   tirs qui ont fait suite au premier tir qui vous a pris par surprise ?

 19   Pourriez-vous en d'autres termes préciser exactement ce que vous entendez

 20   par les autres frappes que vous opposez apparemment au tir qui a touché

 21   votre poste de commandement ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, ce n'est pas qu'un tir

 23   a visé un poste de commandement et qu'ensuite il y a une attente avant que

 24   les autres frappes ne soient lancées. Mais le premier tir a été si précis

 25   qu'il était différent des frappes qui ont touchée les autres lieux en

 26   ville. Il y avait quatre batteries de roquette VBR qui n'ont cessé de tirer

 27   et qui ont tenu la ville sous leur coupe de façon permanente. Mais il y

 28   avait une certaine distance entre ces lieux et le poste de commandement et

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  1   j'ai dû, lorsque j'ai voulu franchir cette distance, me mettre à l'abri au

  2   moins quatre ou cinq fois dans un bâtiment qui se trouvait là; et la

  3   population a fait la même chose, c'est-à-dire que les gens fuyaient à

  4   moitié nus, les femmes, les enfants; les enfants qui pleuraient, parce que

  5   le bruit des tirs les effrayait. Et moi, je me suis rendu compte que

  6   c'était dû surtout au fait que ce bruit était terrible, c'était le vrai

  7   bruit des roquettes VBR. Les enfants mettaient les mains sur les oreilles

  8   pour se protéger. Les femmes se demandaient ce qui se passait, tout le

  9   monde cherchait une cave pour se mettre à l'abri.

 10   Quand je suis arrivé sur les lieux, j'ai vu ce qui s'était passé.

 11   J'ai interrogé les gens qui se trouvaient là et ils m'ont dit : le premier

 12   tir a eu lieu, il nous a touchés et ensuite il n'y en a pas eu de deuxième.

 13   Il a fallu qu'on évacue, qu'on cherche des véhicules encore

 14   utilisables pour déménager le poste de commandement jusqu'au poste de

 15   réserve. C'est là qu'un soldat qui était de garde à l'endroit où étaient

 16   garés les véhicules a été tué.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître Misetic.

 18   M. MISETIC : [interprétation]

 19   Q.  Mon Général, est-ce que la caserne du nord a été frappée dans le cadre

 20   de cette attaque d'artillerie ?

 21   R.  Elle a été touchée parce que le tir était aussi précis que celui qui a

 22   visé le poste de commandement et la gare ferroviaire. Ils ont aussi essayé

 23   de toucher le palais présidentiel. Je ne connais pas les détails à ce

 24   sujet, parce que Martic est immédiatement venu me rejoindre. Donc nous

 25   n'avons pas pu voir ce qui s'est passé par la suite, mais les trois

 26   premiers tirs qui étaient dus à des obusiers ou à des obus de canon guidés

 27   à distance, ces tirs ont été particulièrement précis. J'ai entendu dire que

 28   des systèmes techniques de ce genre n'existaient qu'à l'OTAN. Donc

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  1   c'étaient des tirs qui pouvaient être précis sans tir de réglage préalable.

  2   Ça, ce n'est possible qu'avec les systèmes les plus évolués. Je ne crois

  3   pas que le commandant disposait de tels équipements.

  4   Q.  Donc si j'ai bien compris ce que vous avez dit, vous dites que la

  5   caserne du nord, donc votre commandement également et le palais

  6   présidentiel ont été visés avec une grande précision.

  7   R.  Seulement --

  8   Q.  Permettez-moi de poursuivre. Voici ma question : est-ce que vous avez

  9   reçu des renseignements vous indiquant que des soldats auraient été tués à

 10   la caserne de Senjak dans le secteur nord par la première frappe ?

 11   R.  Je ne me rappelle pas. Il est probable que quelques hommes aient été

 12   tués par ce premier tir. Moi, je suis simplement au courant du soldat qui

 13   se trouvait devant le commandement et qui a été tué. Je sais que plus tard

 14   dans la journée, un colonel s'est suicidé parce qu'il ne pouvait tout

 15   simplement plus supporter nerveusement toute cette situation, ce bruit. Il

 16   y a des officiers qui n'avaient jamais combattu, donc c'était leur première

 17   expérience de guerre.   

 18   Q.  Savez-vous si la caserne de Senjak a également été visée par la

 19   première frappe ?

 20   R.  Je ne sais pas. La caserne qui abritait la FORPRONU n'a pas été

 21   touchée. Je ne sais pas quel était son nom. Moi, cela faisait seulement

 22   deux mois que j'étais là, je n'avais pas eu le temps d'inspecter toutes les

 23   casernes.

 24   Q.  Je vais vous poser ma question d'une façon différente. Le colonel

 25   Bjelanovic était responsable de la logistique. Vous savez où il était basé

 26   ?

 27   R.  Oui. Je suis allé lui rendre visite une fois. Il a tout fait avant

 28   l'agression pour réaliser la dispersion, parce que des tunnels ont été

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  1   construits sur les routes et la Republika Srpska par la suite est parvenue

  2   à évacuer pas mal de choses grâce à ces tunnels. Dans les entrepôts, il

  3   restait avant tout des explosifs et peut-être aussi d'autres produits parce

  4   que j'avais donné l'ordre de ne rien détruire, étant donné que toute

  5   destruction pouvait nuire à l'armée de la Republika Srpska. Je pensais que

  6   tout pouvait être utile à un moment ou à un autre pendant la guerre.

  7   D'ailleurs, ceci s'est avéré par la suite.

  8   Q.  Comment auriez-vous pu transporter les explosifs et autres produits qui

  9   se trouvaient dans les entrepôts si vous aviez besoin de les déménager sur

 10   le mont Dinara ? Comment est-ce que vous auriez fait pour assurer le

 11   transport de ces équipements ?

 12   M. RUSSO : [interprétation] Pourrait-on nous préciser de quels entrepôts il

 13   est question en particulier ? Je demande une précision quant à la nature et

 14   à l'identité de ces entrepôts.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une seconde, Monsieur le Témoin. Vous

 16   avez parlé d'explosifs et de matériel qui étaient restés dans les

 17   entrepôts. Donc la question est simple: où étaient ces entrepôts ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils étaient dans la vallée de la Zrmanja. Ces

 19   messieurs du commandement le savent. C'étaient des entrepôts très vastes,

 20   énormes.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais essayer d'être encore plus

 22   simple dans ma question. Je ne vous interrogeais pas sur la taille de ces

 23   entrepôts mais sur l'endroit où ils se trouvaient. Vous avez répondu en

 24   disant la vallée de la Zrmanja. Y avait-il des entrepôts à Knin ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, c'était à Knin, il y avait des

 26   équipements mobiles.

 27   Monsieur le Président, quand on parle d'entrepôts, on parle de dépôts

 28   d'armes de l'armée qui sont très importants. Si on avait mis en action un

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  1   de ces dépôts, la moitié de Knin aurait pu être détruite. Ça aurait fait un

  2   tremblement de terre. Mais comme nous n'avons pas détruit les routes, les

  3   tunnels, ni quoi que ce soit d'autre, nous n'avons pas détruit ces

  4   entrepôts non plus. Nous n'avions pas besoin d'ailleurs de ces explosifs.

  5   Nous avons emporté ce dont nous avions besoin sur le front. C'est tout.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que la question suivante que

  7   vous a posée Me Misetic consistait à vous demander par quel moyen les

  8   équipements qui se trouvaient dans les entrepôts étaient transportés

  9   jusqu'au mont Dinara, et à partir de quels entrepôts.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Vers les monts Dinara, nous n'avons emporté

 11   que ce qu'un soldat peut transporter sur lui. Nous n'avions pas besoin

 12   d'explosifs là-haut. Nous n'avions pas de poudre, nous n'avions pas de

 13   détonateurs, donc nous n'en avions pas besoin. Le soldat, il lui fallait

 14   une journée pour atteindre l'endroit où il allait là-haut sur la montagne,

 15   c'était en altitude, et puis ce n'était pas notre territoire. Donc nous

 16   n'avons pas emporté les explosifs là-haut.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Je vais vous demander d'écouter

 18   avec beaucoup d'attention la question suivante, c'est une question bien

 19   centrée qui vous est posée. Je vous demanderais de donner une réponse bien

 20   précise.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 22   M. MISETIC : [interprétation]

 23   Q.  Général, le 4 août, vous avez reçu une demande pour des munitions

 24   supplémentaires et en fait, vous-même vous aviez envoyé une demande et une

 25   requête à M. Perisic à Belgrade pour vous envoyer plus de munitions,

 26   d'explosifs, et cetera. Est-ce exact ?

 27   R.  Je ne m'en souviens pas. Il est possible que les gens de la logistique

 28   aient demandé quelque chose. Néanmoins, le réapprovisionnement en munitions

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  1   s'est produit 15 jours à un mois avant l'agression, mais nous n'avons pris

  2   que les munitions excédentaires par rapport au contingent normal et qui

  3   était payé par le gouvernement.

  4   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu la dernière partie de la

  5   réponse du témoin.

  6   M. MISETIC : [interprétation]

  7   Q.  Pouvez-vous, Général, répéter la dernière partie de votre réponse.

  8   R.  Autant que je m'en souvienne aujourd'hui, nous avions des munitions à

  9   Ceketovac [phon] je pense, près de Dvor. Dans ce dépôt et également à Knin,

 10   il y avait des munitions des réserves de corps, et nous avions également

 11   des munitions pour plusieurs jours de combat. Est-ce qu'il y a eu un

 12   télégramme d'envoyé dans ce sens ou si quelqu'un a envoyé un tel

 13   télégramme, je ne m'en souviens pas aujourd'hui. Mais voyez-vous, lorsque

 14   les moments sont durs, tout le monde appelle et demande des munitions.

 15   Q.  Général --

 16   R.  Le problème est que nous avions des munitions d'artillerie.

 17   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, si vous pouviez

 18   maintenant nous montrer la pièce D161, s'il vous plaît.

 19   Q.  Pouvez-vous nous dire, pendant que l'on affiche cette pièce, qu'est-ce

 20   qu'il y avait à Golubic ?

 21   R.  C'était justement là la question. C'était un grand dépôt pour

 22   l'ancienne JNA pour toute la région entre Split et le plateau de Dalmatie.

 23   C'était le dépôt principal à Golubici. Il y avait également une base

 24   policière à Golubici, je suppose.

 25   Q.  Comment est-ce que vous avez transféré ces munitions de Golubic vers

 26   les unités, en utilisant quel moyen de transport ?

 27   R.  Les munitions ont été transportées en partant de ces dépôts. Je ne sais

 28   pas d'ailleurs ce que vous entendez par "munitions". Entendez-vous par là

Page 18908

  1   les munitions qui étaient dans les dépôts, dans les dépôts fixes, sur les

  2   plateaux et les collines ? Ces munitions avaient été sorties des dépôts

  3   deux semaines avant l'agression. Elles n'étaient plus dans les dépôts. Ce

  4   qui restait dans les dépôts c'était des choses dont nous n'avions pas

  5   forcément besoin; des explosifs, et peut-être également des mines

  6   antichars, et cetera. Après tout, vous savez très bien ce que nous y avons

  7   trouvé. Pour ce qui est des munitions, toutes avaient déjà été sorties. En

  8   allant vers la vallée en direction de Srb et Golubici, il y avait quelques

  9   tunnels et l'on pouvait utiliser des véhicules de transport de la Republika

 10   Srpska pour passer à travers cette région et y apporter les munitions dont

 11   nous avions besoin. C'est ce que l'on appelle la dispersion. La dispersion

 12   se fait dès que l'on déclare un état de guerre. C'est normal; c'est ce à

 13   quoi se prépare toute armée pour sa défense.

 14   M. MISETIC : [interprétation] Si vous pouvez passer à la page 5 de cette

 15   pièce, s'il vous plaît.

 16   Q.  Il s'agit du journal de M. Bijalovic du 4 août --

 17   R.  Tiskovac, oui.

 18   Q.  Nous allons afficher la bonne page, qui est la page 7 en version B/C/S.

 19   Voici son journal du 4 août. Il est votre responsable de la logistique. Il

 20   dit, au milieu de ce premier -- en fait, il dit :

 21   "L'attaque a commencé à 5 heures. A 5 heures 30, j'étais personnellement au

 22   centre opérationnel de l'état-major principal de la SVK où, avec le

 23   commandement du corps, j'ai pris en main la situation dans les unités. Le

 24   système de soutien logistique était en place dans les unités de la SVK. Les

 25   premières demandes des unités sont arrivées aux alentours de 11 heures en

 26   provenance du commandant adjoint du 7e Corps sur le plan de la logistique

 27   concernant le réapprovisionnement en munitions d'artillerie, ce qui a été

 28   approuvé par le commandant lui-même à la suggestion du chef d'artillerie."

Page 18909

  1   Si nous descendons un petit peu plus loin dans ce texte :

  2   "A 11 heures 25, j'ai donné un ordre à mon assistant pour envoyer des

  3   véhicules de la 75e Base logistique vers Golubici --"

  4   R.  Non, logistique, et non pas infanterie. La logistique ou l'arrière.

  5   Q.  Je lis la version anglaise.

  6   R.  Alors la traduction n'est pas exacte.

  7   Q.  "Envoyer les véhicules de la 75e Base logistique vers le dépôt de

  8   Golubici pour charger les obus de 120-millimètres et les 60.82

  9   "A midi, les munitions d'artillerie ont été envoyées à la demande du

 10   commandement du 21e Corps."

 11   M. MISETIC : [interprétation] Si nous tournons la page.

 12   Q.  Avant de vous pencher sur le paragraphe suivant, Général, est-ce que,

 13   partant de cela, cela rafraîchit votre mémoire et vous permet de voir que

 14   l'ARSK obtenait ce qui ressemble à de l'artillerie --

 15   R.  Merci, merci. Cela effectivement rafraîchit ma mémoire.

 16   Q.  Donc vous utilisiez des véhicules pour transporter cette artillerie de

 17   Golubici vers d'autres endroits; est-ce exact ?

 18   R.  Il s'agissait là du réapprovisionnement du 39e Corps, qui était le plus

 19   proche et qui était déployé autour des positions aux alentours de Golubici,

 20   il s'agit donc du 39e Corps. Pour ce qui est du 21e, le Corps de Kordun, il

 21   n'est pas venu à Golubici pour obtenir des munitions. Ils avaient leurs

 22   propres munitions. Ils ne pouvaient avoir accès à ce dépôt de munitions

 23   sans l'approbation du commandant.

 24   Q.  Le commandant adjoint du 7e Corps à la logistique, où est-ce qu'il

 25   déployait ses munitions d'artillerie ?

 26   R.  Il déployait les unités qui avaient des munitions et qui s'étaient

 27   engagées devant l'ennemi. La plupart des combats se déroulaient sur les

 28   pentes du mont Dinara. Vous ne nous avez même pas attaquer par en dessous.

Page 18910

  1   Vous nous avez juste titillés un peu. Il y avait simplement quelques unités

  2   de la Garde nationale qui étaient sur place, je pense, parce que la

  3   première fois les commandants étaient sur la ligne de front, et c'est là où

  4   la plupart des munitions avaient été déployées. Les plus grandes dépenses

  5   de munitions se sont faites là.

  6   Q.  Bien. C'était là ma question : comment est-ce que vous avez obtenu ces

  7   munitions -- ces véhicules, comme il est dit ici, de Golubic vers la ligne

  8   de front du 7e Corps, comment est-ce que les munitions étaient acheminées

  9   de Golubic à la ligne de front ?

 10   R.  Je comprends maintenant ce que vous essayez de me demander. Golubici

 11   n'était pas visé. Il s'agissait simplement d'un dépôt. C'était notre

 12   intention de tirer ou de viser Golubic. Knin était ciblée. Ils y sont allés

 13   pour se réapprovisionner. Ils ont suivi l'itinéraire le long de la route,

 14   et il y avait des soldats le long de cette route, des soldats de Grahovo.

 15   Q.  Quelle route -- quel itinéraire avez-vous pris de Golubic vers les

 16   positions sur le mont Dinara ?

 17   R.  Nous aurions pris la route du mont Dinara vers Grahovo. Il n'y avait

 18   personne à la gauche du mont Dinara, si vous entendez par Dinara le mont

 19   Dinara. Il avait déjà été pris avant cette attaque. Personne n'avait même

 20   essayé de défendre ce secteur. Il y avait simplement des hommes de la

 21   FORPRONU qui se plaignaient d'avoir été pilonnés par des mortiers et j'ai

 22   demandé la permission de pouvoir leur tirer dessus.

 23   Q.  Regardons cette page, celle qui apparaît à l'écran maintenant. Il est

 24   dit :

 25   "A 16 heures 20, je," et "je" faisant référence à M. Bjelanovic, "je suis

 26   allé vers le poste du commandement arrière, les casernes de Senjak, et j'ai

 27   eu une réunion très brève avec les officiers supérieurs et je les ai

 28   déployés."

Page 18911

  1   R.  Vous ne lisez pas cela correctement. Ce qui est dit ici c'est que les

  2   Serbo-croates ou des Croates étaient présents, Milanovic était également là

  3   pendant tout ce temps, et si vous le lisez à partir du 1820 -- permettez-

  4   moi de regarder cela de plus près. Oui, c'est exact.

  5   Q.  Est-ce que vous étiez au courant du fait que les officiers de la

  6   logistique tenaient une réunion à 16 heures 20 dans les casernes de Senjak,

  7   et il me semble qu'il s'agit de ce lieu qui se trouve de l'autre côté de

  8   l'usine de Tvik ?

  9   R.  Oui, oui, il est à la caserne du nord.

 10   Q.  Non.

 11   R.  Bien, bien, vous connaissez cela probablement mieux que je ne le

 12   connais moi.

 13   Q.  Je suis surpris d'entendre cela, Général. Est-ce que vous êtes au

 14   courant du fait qu'il existait des casernes militaires --

 15   R.  Je n'ai pas eu le temps de faire un tour des casernes. Je vous ai dit

 16   ce que j'ai fait. J'avais des questions importantes à régler.

 17   Q.  Général, nous pouvons arrêter cette discussion --

 18   R.  Oui, oui, nous pouvons, effectivement.

 19   Q.  Discussion terminée. Si vous ne saviez pas qu'il y avait des casernes

 20   de l'autre côté de l'usine Tvik, êtes-vous sûr à ce moment-là que

 21   l'artillerie qui arrivait et qui tirait ne tirait pas sur des objectifs

 22   militaires, si vous n'avez pas eu le temps de faire le tour de la ville et

 23   de voir où ils se trouvaient tous ?

 24   R.  J'étais dans les casernes où se trouvait le commandement du corps du

 25   Corps de Dalmatie. Il s'agissait des casernes du nord, et c'est là où je me

 26   trouvais. Il y avait également des casernes où il y avait une sorte de

 27   base, et Bjelanovic s'y trouvait. Il y avait ensuite une autre caserne où

 28   se trouvaient les membres de la FORPRONU. Il y avait également le

Page 18912

  1   commandement. Est-ce qu'il y avait d'autres casernes ou des prisons ou

  2   quelque chose de similaire, ça je n'en avais aucune idée. Croyez-moi, je

  3   n'y suis pas resté très longtemps. Et même pendant le peu de temps que j'y

  4   ai passé, j'ai passé beaucoup plus de temps à l'extérieur de Knin que dans

  5   Knin même. Et qu'il y ait eu cette réunion, oui, je pense que Bjelanovic a

  6   probablement tenu cette réunion et ordonné certaines missions.

  7   Q.  Bien. Nous pouvons peut-être avancer, Général. C'est parfait.

  8   Si nous pouvions maintenant regarder le document 1D1055 du 65 ter, s'il

  9   vous plaît.

 10   Vous souvenez-vous après l'opération Tempête du 9 août que le général

 11   Kovacevic ait envoyé un rapport à l'état-major général de la SVK concernant

 12   l'opération Tempête ?

 13   R.  Il n'était pas le seul à l'avoir fait. Tout le monde a envoyé un

 14   rapport pour qu'une analyse puisse être faite et que l'on comprenne ce qui

 15   nous était arrivé, pourquoi cela s'était produit, comment cela avait pu se

 16   produire, et cetera. Donc il y avait toute cette étude qui a été faite à

 17   Banja Luka.

 18   Q.  Bien, si vous le permettez --

 19   R.  Ce que j'aimerais savoir c'est qu'il s'agit là probablement d'un

 20   document qui a été fourni par le gouvernement serbe au gouvernement croate

 21   qui ensuite vous l'a remis. Bien, je ne pense pas que ce soit pertinent.

 22   Bien, je vois, c'est le Procureur.

 23   Q.  Oui. Si cela vous facilite les choses, avec votre permission, Monsieur

 24   le Président, je voudrais lui remettre une copie papier.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pas de problème.

 26   Monsieur Russo.

 27   M. RUSSO : [interprétation] Je ne regardais pas, mais j'ai entendu qu'il a

 28   indiqué que le Procureur vous l'a remis. Je veux dire --

Page 18913

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ne passons pas de temps sur des

  2   questions qui ne semblent pas être pertinentes. Que le témoin ait pensé,

  3   que se soit demandé d'où venaient ces documents n'est pas vraiment

  4   particulièrement important ici, je dirais, à moins qu'il n'y ait des

  5   raisons particulières de le penser.

  6   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mrksic, la question qui vous a

  8   été posée était de savoir si vous êtes au courant d'un rapport qui a été

  9   envoyé par - voyons voir - c'était le général Kovacevic, qui a envoyé un

 10   rapport le 9. M. Misetic ne s'intéresse pas et ne souhaite pas savoir si

 11   d'autres rapports ont été envoyés, si des rapports étaient envoyés

 12   fréquemment. Ce qu'il souhaite simplement c'est savoir si vous avez un

 13   souvenir de ce rapport envoyé par le général Kovacevic le 9 août.

 14   Avez-vous souvenir de cela ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai aucun souvenir de ce rapport en

 16   particulier, mais je n'ai pas eu l'occasion de le lire. Je ne sais pas de

 17   quoi il parle réellement. Je vois qu'il n'y a pas de signature. La façon

 18   dont cela fonctionnait, c'est que le général qui était le chef de

 19   l'administration au sein de l'état-major général n'aurait pas envoyé un

 20   document comme celui-ci. Néanmoins, je ne me souviens pas d'un tel

 21   document.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, c'est exactement la réponse que

 23   l'on attendait à la question, et tous les autres commentaires autour sont

 24   des commentaires qui ne vous sont pas demandés pour l'instant.

 25   Vous pouvez poursuivre, Monsieur Misetic.

 26   M. MISETIC : [interprétation] Si nous tournons la page et que nous

 27   regardons le bas de la page dans la version anglaise, paragraphe 5, nous

 28   pouvons poursuivre à partir de là.

Page 18914

  1   Q.  Si vous pouviez regarder ce paragraphe 5. Le général Kovacevic indique

  2   que le 4 août, à 5 heures, les forces Oustachi ont commencé les

  3   préparations et les opérations d'offensive sur l'ensemble de la ligne de

  4   front du 7e Corps, et que cette artillerie a fonctionné de façon active et

  5   permanente jusqu'à 20 heures 30.

  6   Si vous pouviez tourner la page, vous verrez que cela continue en disant :

  7   "Déjà vers 10 heures le 4 août, les forces du bataillon de police qui

  8   tenaient des positions sur le mont Dinara ont commencé à faire retraite de

  9   façon organisée, ce qui a entraîné la retraite du reste des unités du 7e

 10   Corps. Bien que ce 7e Corps a essayé de maintenir ces positions sur le mont

 11   Dinara, en raison de l'absence suffisante de tranchées et de la pression

 12   terrible sur les soldats qui n'en avaient pas l'habitude et qui était

 13   imposée par l'artillerie Oustachi, les positions dominantes ont été

 14   abandonnées et seules certaines parties de ces unités ont occupé de façon

 15   désorganisée des positions non préparées en profondeur …"

 16   Est-ce que cela rafraîchit votre mémoire quant au rôle joué par le

 17   bataillon de police sur des positions du mont Dinara ?

 18   R.  Ce sont là les forces dont j'ai parlé auparavant lorsque j'ai dit que

 19   j'avais utilisé un hélicoptère pour m'y rendre et voir ces forces. J'y suis

 20   allé avec le président Martic puisqu'il s'agissait de ses forces, et j'y

 21   suis allé pour rendre visite à ses troupes. Et ceci m'aide à me souvenir

 22   que c'est un ordre que j'avais entendu oralement de la bouche du général

 23   Kovacevic. Oui, maintenant cela rafraîchit ma mémoire et je me souviens

 24   effectivement du problème.

 25   Q.  Pouvons-nous passer au paragraphe suivant, le paragraphe 6 -- non, je

 26   m'excuse. Est-ce que nous pourrions revenir au paragraphe 5. Concernant ce

 27   dont nous parlions hier, dans la dernière phrase de ce paragraphe 5, le

 28   général Kovacevic dit que :

Page 18915

  1   "En même temps, les forces Oustachi ont exercé une pression très importante

  2   sur les unités du 15e Corps sur le mont Velebit, et de ce fait il y avait

  3   un danger très important les 5 et 6 août à Knin et à Gracac, et les

  4   Oustacha auraient pu encercler le 7e Corps, ce qui aurait pu avoir des

  5   conséquences catastrophiques."

  6   R.  C'est exact.

  7   Q.  C'est ce que vous avez dit hier concernant Otric --

  8   R.  Oui, oui, c'est tout à fait cela. Ces éléments des forces que j'avais

  9   ramenés du Corps spécial de Bruvno -- quel était le nom ? Oui, c'est bien à

 10   cela que l'on faisait référence. C'est bien le nom, Bruvno.

 11   M. MISETIC : [interprétation] Bien. Monsieur le Président, si l'on pouvait

 12   donner une cote à ce document et le verser au dossier.

 13   M. RUSSO : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, cela va devenir le

 16   document D1516.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et il est versé au dossier.

 18   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, si nous pouvions avoir

 19   maintenant la pièce D828, s'il vous plaît.

 20   Q.  Il s'agit du rapport du commandant Uzelac qui était commandant à

 21   Benkovac; est-ce exact ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Bien, en bas de la page 1 en version anglaise, il y a un paragraphe qui

 24   dit :

 25   "Il y a environ 80 obus qui ont été tirés sur la ville de Benkovac."

 26   Est-ce que vous vous en souvenez ? Voyez-vous cela ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Et il est dit :

Page 18916

  1   "Environ 80 obus ont été tirés sur la ville de Benkovac jusqu'à 8 heures,

  2   et environ 100 obus ont été tirés sur la ligne avant des défenses de la

  3   brigade. Nos forces n'ont pas tiré."

  4   Et si vous passez à la page suivante, vous verrez :

  5   "Nous n'avons pas enregistré de perte humaine, personne n'a été tué ou

  6   blessé dans la ville ni dans les unités jusqu'à 8 heures le 4 août 1995."

  7   Est-ce que ces informations concernant le pilonnage de Benkovac sont

  8   cohérentes avec les informations auxquelles vous avez fait référence

  9   concernant la matinée du 4 août ?

 10   R.  Bien, j'ai reçu des informations des commandants de corps, voyez-vous.

 11   Et je n'avais aucun contact avec des commandants de brigade. S'ils

 12   informaient ou faisaient rapport à leurs commandants de corps, je n'avais

 13   aucune raison d'en douter.

 14   Mais je voudrais pouvoir regarder l'intégralité de ce document, car je n'en

 15   vois que la première page.

 16   Q.  Bien. Nous y reviendrons dans quelques instants.

 17   R.  Bien, vous me laisserez le lire un peu plus tard. Très bien.

 18   Q.  Bien. Je voudrais maintenant vous poser une question particulière là-

 19   dessus. Le matin du 4 août à 8 heures du matin, est-ce que vos informations

 20   vous permettaient de savoir que bien que Benkovac ait été pilonnée, il n'y

 21   avait pas de personne blessée ni tuée à Benkovac ?

 22   R.  Je ne disposais pas de cette information particulière, mais j'avais eu

 23   l'information selon laquelle toutes les villes avaient été pilonnées :

 24   Benkovac, Drnis, Vojnic, Vrgin Most, Korenica, Glina. Je veux dire par là

 25   que les opérations ou l'action avait commencé non pas sur la ligne de front

 26   mais en profondeur, à l'intérieur du secteur; et même Vrgin Most qui avait

 27   été pilonnée à des distances de très loin, et nous avions tous été pris par

 28   surprise parce que nous ne savions pas qu'ils avaient l'artillerie

Page 18917

  1   nécessaire pour atteindre ce secteur.

  2   Q.  Il y a une phrase que je vais vous lire dans les rapports, disant que

  3   100 obus ont été tirés sur la ligne avant des défenses de brigade; et vous

  4   nous avez dit que le matin du 4 août, à 8 heures du matin, vous ne saviez

  5   pas que vos forces sur les lignes de front avaient fait l'objet de tirs

  6   d'artillerie dans la 92e Brigade motorisée ?

  7   R.  Je ne sais pas pourquoi cette 92e Brigade motorisée devait m'envoyer un

  8   rapport à l'état-major principal. C'est illogique. Je n'avais rien à voir

  9   avec ces rapports. Ce n'est pas ainsi que cela fonctionnait. Peut-être que

 10   c'était le cas comme cela est dit dans ce document, mais il n'y a aucune

 11   logique là pour que ceci me soit envoyé. Il avait son propre commandant de

 12   corps. J'ai essayé de remettre les choses dans l'ordre, voyez-vous, on ne

 13   pouvait pas juste demander au commandant d'agir comme on le souhaitait.

 14   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, si nous pouvions avoir

 15   maintenant le document du 65 ter le 1D1048, s'il vous plaît. Si nous allons

 16   tout en haut du texte pour que vous puissiez voir la date.

 17    Monsieur le Greffier, pouvons-nous passer à la page 17 de ce document,

 18   dans la version original en B/C/S.

 19   Q.  Bien. Vous voyez la date tout à fait en haut à gauche de ce document.

 20   R.  Le 4 août.

 21   Q.  Est-ce votre signature et votre sceau à cet endroit-là ?

 22   R.  Oui, c'est bien ma signature. Ma signature est très simple, donc je ne

 23   vois pas où est le problème.

 24   Q.  Le 4 août, il semble que vous ayez envoyé une demande au chef de

 25   l'état-major général de l'armée yougoslave, en demandant donc un

 26   réapprovisionnement en munitions, et vous avez une liste de tout ce que

 27   vous avez demandé le 4 août. Est-ce que vous vous souvenez avoir demandé à

 28   l'armée yougoslave toutes ces munitions supplémentaires ?

Page 18918

  1   R.  Je ne me souviens pas, franchement. C'était une question relativement

  2   peu importante pour moi. C'était une question d'ordre technique, parce que

  3   c'était les gens de la logistique qui faisaient ces demandes; et bien sûr,

  4   c'était normal qu'ils fassent une liste détaillée de tous les différents

  5   éléments qu'ils avaient demandés. Et peut-être étant donné que les combats

  6   avaient déjà commencé, c'était peut-être à moi qu'on a demandé de signer.

  7   Mais sinon, normalement ce n'était pas à moi de signer, c'était Bjelanovic

  8   qui signait ça. Alors pourquoi je l'ai signé, est-ce que c'est vraiment moi

  9   qui l'ai signé ? Je ne me souviens pas, et bien entendu c'est tout à fait

 10   normal de se réapprovisionner en matériel et en munitions.

 11   Q.  Est-ce que, par exemple, vous avez demandé 27 roquettes, par exemple,

 12   des obus M-55, T-34, d'autres types d'artillerie ?

 13   R.  27, ce ne sont pas des Orkan, ce sont des roquettes Oganj. Les rapports

 14   montrent qu'ils ont utilisé ces munitions-là pour tirer sur nous à Knin.

 15   Q.  Je ne sais pas ce que vous avez entendu. Moi, j'ai dit Oganj 83. Oganj.

 16   R.  Peut-être c'est une erreur d'interprétation.

 17   Q.  Dans la région de Knin, où était déployée votre artillerie ?

 18   R.  L'artillerie de l'état-major principal était déployée dans la région de

 19   Slunj, vers Petrova Gora de façon à pouvoir ouvrir le feu. Ce n'était pas à

 20   Knin même. A Knin, il y avait l'artillerie du corps d'armée.

 21   Q.  Je suis désolé. Je parlais du 7e Corps de Knin. Où se trouvait déployée

 22   l'artillerie du 7e Corps de Knin ?

 23   R.  Lorsque nous nous sommes aperçus que nous étions vraiment menacés,

 24   vraiment en danger, alors on l'a orienté vers Zadar et vers Split pour

 25   protéger ces axes-là. Lorsque la situation s'est modifiée, nous avons alors

 26   déplacé une partie de l'artillerie et cette artillerie-là a ouvert le feu.

 27   Lorsque les forces ensuite sont arrivées, lorsque Grahovo a pu être conquis

 28   aussi, nous avons ouvert le feu à Grahovsko, et aussi Polje et aussi des

Page 18919

  1   positions un petit peu plus basses. C'était des obus, il y en avait très

  2   peu en fait. Nous n'avons pas réussi à les retirer ensuite. Vous les avez

  3   capturés à cet endroit-là.

  4   Q.  Où se trouve Kninsko Polje; est-ce que vous pouvez expliquer à la Cour

  5   ?

  6   R.  Je crois que c'est quelque part sous Crvena Zemlja, donc c'était tout à

  7   fait à notre portée. Nous avons donc sorti quelques pièces là pour pouvoir

  8   ouvrir le feu et pour pouvoir soutenir les forces qui défendaient justement

  9   cette position. Mais tout cela avait été fait avant l'attaque, avant le 4

 10   août. Tout cela, on s'en était occupé avant, les combats n'ont pas commencé

 11   avant le 4 août. En fait, je crois qu'il y avait un bus qui avait sauté sur

 12   une mine.

 13   Q.  Mais le 4, le 4 août même si les combats avaient commencé avant le 4 ou

 14   le 4 même, est-ce que ces positions de Kninsko Polje pouvaient retourner le

 15   tir d'artillerie ? Est-ce qu'ils répondaient aux tirs d'artillerie des

 16   positions croates ?

 17   R.  Je crois que cette artillerie avait été amenée là effectivement au fur

 18   et à mesure que les unités se déplaçaient. Cette artillerie a été placée

 19   vers Otric. Donc là, elle ne pouvait pas être capturée. Si quelque chose a

 20   été capturé, je n'en sais rien. C'est au niveau du corps d'armée; et là,

 21   moi, je ne pouvais pas interférer dans ces affaires-là.

 22   Q.  Mon Général, pourquoi aviez-vous besoin de réapprovisionner

 23   l'artillerie si vous ne vous en serviez pas ?

 24   R.  Mais le réapprovisionnement de l'artillerie était nécessaire parce que

 25   l'artillerie avait été utilisée bien avant, en juillet, lorsque l'action

 26   Sabre avait été réalisée en Bosnie occidentale, et ça avait commencé par

 27   Polje. Parce qu'à partir de ce moment-là, j'avais déjà dû aider la

 28   Republika Srpska avec une compagnie ou deux et avec des munitions. Donc les

Page 18920

  1   munitions avaient déjà été utilisées, dépensées à cet endroit-là, donc

  2   j'avais besoin de réapprovisionnement pour pouvoir vraiment répondre à la

  3   situation de guerre dans laquelle nous nous trouvions.

  4   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vais demander à ce

  5   que cette pièce soit marquée et qu'elle soit versée au dossier. Il s'agit

  6   donc d'une partie d'un document 65 ter plus important. Donc nous allons

  7   prendre la page que j'ai utilisée pour le moment. Nous allons la

  8   télécharger.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais c'est un petit peu perturbant ce

 10   document, parce que le document original est beaucoup plus important,

 11   beaucoup plus long que la traduction.

 12   M. MISETIC : [interprétation] Oui.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois par exemple que cette page dont

 14   nous parlons apparaît apparemment deux fois dans des formats différents.

 15   Une fois en cyrillique avec à peu près le même contenu, mais aussi une fois

 16   de façon manuscrite, et puis une autre fois encore en alphabet latin. Donc

 17   tout cela est un petit peu perturbant.

 18   M. MISETIC : [interprétation] Il y a des documents; en fait, ce sont des

 19   documents originaux avec une estimation, une analyse qui avait été

 20   préparée. Donc ce que vous voyez ici en alphabet latin, c'est une partie

 21   simplement de ce qui était une analyse faite de ces documents. C'est

 22   pourquoi j'ai survolé le document original. En fait, il s'agissait d'annexe

 23   au document principal. Je ne veux pas le document principal. Je veux

 24   simplement l'annexe originale et sa traduction.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais néanmoins 11 pages de

 26   traduction et 21 pages d'original, forcément, ça pose quelque problème. Et

 27   si ici nous nous limitons à ce que nous avons à l'écran actuellement, de

 28   façon à essayer de trouver des moyens techniques.

Page 18921

  1   Monsieur le Greffier, c'était donc page 17 dans le prétoire électronique,

  2   dans la version originale. Quelle était la page ? Je crois la page 5, c'est

  3   cela.

  4   Monsieur Russo.

  5   M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais avoir

  6   l'occasion de déterminer quelque chose. Je ne veux pas m'opposer à ce que

  7   cette page soit versée au dossier. Je veux juste que l'on demande d'ajouter

  8   d'autres pages de cette pièce.

  9   M. MISETIC : [interprétation] C'est également mon intention d'utiliser

 10   d'autres pages mais de ne pas les utiliser toutes à la suite.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour le moment, page 17 en B/C/S, page 5

 12   en anglais où la traduction en anglais reflète également les notes

 13   manuscrites de la page 17.

 14   Monsieur le Greffier, tenons-nous-en à cette page bien particulière.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agira donc de

 16   la page D1517.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D1517 est donc versé au dossier.

 18   Ensuite, pouvez-vous vous assurer que cette pièce est ensuite divisée

 19   ?

 20   M. MISETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 21   Q.  Alors était-ce l'habitude pour l'armée yougoslave de vous

 22   approvisionner en munitions ?

 23   R.  Au sein de la République de Krajina serbe, nous avions notre propre

 24   production de mortiers 120-millimètres à Lika, à Licki Osijek, mais ce

 25   n'était pas suffisant. Donc nous étions obligés aussi de nous

 26   approvisionner ailleurs. C'est essentiellement le ministère de la Défense

 27   qui nous apportait des ressources financières nécessaires de façon à ce que

 28   nous puissions recevoir ces équipements. Maintenant, en ce qui concerne

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  1   l'armée yougoslave, c'est vrai qu'elle mettait à notre disposition les

  2   installations de production, et donc nous aidait ainsi à nous

  3   réapprovisionner. Sinon nous n'aurions jamais pu survivre, ça ne fait là

  4   aucun secret. Nous n'aurions jamais pu survivre sans le réapprovisionnement

  5   en munitions ni sans des ressources financières provenant de la République

  6   de Croatie.

  7   Q.  Maintenant, si nous pouvons passer à la page 7 du même document qui se

  8   trouve à l'écran.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Page 7 en anglais ?

 10   M. MISETIC : [interprétation] Oui, donc ça deviendrait le deuxième document

 11   en B/C/S.

 12   Q.  Il s'agit d'un rapport de votre part à 16 heures, le 4 août, adressé à

 13   l'état-major général de l'armée yougoslave, deuxième administration. Vous

 14   rappelez-vous avoir envoyé ce rapport à 16 heures, ce jour-là ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Pouvez-vous nous dire pourquoi en plein milieu d'opération de combat,

 17   vous envoyez un rapport au chef d'état-major de l'armée yougoslave ?

 18   R.  Nous ne lui avons pas envoyé le rapport parce que nous voulions qu'il

 19   nous apporte une assistance, mais nous voulions qu'il soit au courant de la

 20   situation. Nous voulions donc que la direction politique de la Serbie soit

 21   au courant de la situation, soit au courant de ce qui se passait

 22   réellement. Et ils furent surpris. Ils n'auraient pas dû être surpris. Mais

 23   ils ont tous prétendu qu'ils étaient surpris par la situation.

 24   Q.  Passons au paragraphe 2 de votre rapport en question. A 16 heures, vous

 25   avez dit la chose suivante et je cite :

 26   "Nos forces étaient prêtes pour le début de l'agression. Malgré les

 27   activités inconsidérées qui ont été réalisées sur toutes les villes, le

 28   travail des commandements à tous les niveaux a été caractérisé par un grand

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  1   calme."

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Je continue à citer :

  4   "Toutes les attaques ont pu être arrêtées."

  5   Si nous poursuivons la phrase, deux phrases plus loin, et je cite : 

  6   "Au cours des dix premières heures de combat, la défense a été soutenue

  7   avec succès par notre aviation et notre artillerie."

  8   Maintenant, est-ce que c'est là une description précise à l'époque où vous

  9   avez rédigé ce rapport, donc est-ce vrai que vous étiez en train de

 10   défendre les positions avec à la fois l'aviation et l'artillerie ?

 11   R.  Pour l'aviation, je ne me souviens pas s'il y avait eu un pilonnage

 12   quelconque ou si l'aviation avait été basée de nouveau en raison du danger

 13   qu'elle présentait du fait qu'elle était à la portée de l'artillerie

 14   croate, donc il a fallu la transférer vers Banja Luka.

 15   L'aviation qui avait déjà engagé des actions avant le début de l'agression

 16   et cela avait été fait à la demande de la FORPRONU et de l'OTAN.

 17   Mais très franchement, j'avais interdit que l'aviation ouvre le feu sur

 18   Krk, sur les dépôts de carburant, et sur les entrepôts stratégiques de la

 19   Croatie, parce que je pensais que cela serait considéré comme des pures

 20   représailles, et je ne voulais pas faire cela parce que j'étais bien sûr

 21   guidé par les principes du droit humanitaire international. Ce qu'ils

 22   avaient fait, je veux dire l'aviation, ils l'avaient fait avant le 4 août.

 23   Je n'ai pas laissé ouvrir le feu sur les positions. Je les ai envoyés en

 24   Bosnie.

 25   Q.  C'est là l'une de vos réponses --

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, vous avez fait allusion

 27   à 16 heures deux fois, alors que le sceau tout à fait en bas de la page

 28   indique "15 heures."

Page 18924

  1   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je demande à Maître Misetic --

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne vois pas ce que j'ai signé.

  4   M. MISETIC : [interprétation] Je regarde le premier --

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a un sceau : "Reçu à 15 heures," un

  6   timbre, si vous voulez, un tampon, "Reçu à 15 heures."

  7   M. MISETIC : [interprétation] Oui. Je me suis trompé avec le rapport

  8   suivant, le rapport opérationnel de 16 heures.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc il faut que ce document soit

 10   corrigé au procès-verbal. Ce document avait été reçu à 15 heures.

 11   Maintenant vous pouvez poursuivre.

 12   M. MISETIC : [interprétation] Je suis désolé. Nous allons arriver à 16

 13   heures avec le document suivant.

 14   Q.  Mais là, il est 15 heures, et si nous passons -- je vais vous le

 15   redemander. Ce que je voulais vous demander, Mon Général, c'est aussi de

 16   vous rappeler de bien vous concentrer sur ma question, parce que vous avez

 17   peut-être d'autres choses à dire avec des réponses qui peuvent être plus ou

 18   moins longues. Mais ma question est très simple. Elle est la suivante :

 19   vous avez répondu à la partie de ma question concernant l'aviation.

 20   Maintenant, je vous repose la même question concernant l'artillerie. Est-ce

 21   que vous défendiez les positions avec l'artillerie ?

 22   R.  Oui, mais uniquement contre ceux qui nous mettaient en danger, les

 23   forces que nous pouvions voir, que nous pouvions observer. C'est moi qui

 24   donnais les instructions.

 25   Q.  Passons au paragraphe suivant :

 26   "Les activités de l'artillerie sur les villes ont engendré de grandes

 27   destructions et de grands dégâts."

 28   Qu'est-ce que vous entendiez par ces grandes destructions ? Quelle ville

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  1   avait été grandement détruite ?

  2   R.  C'est probablement une expression que quelqu'un a utilisée dans le

  3   rapport. Vous savez comment ça se passe. Lorsqu'on rédige un rapport, on a

  4   toujours tendance à peut-être un petit peu exagérer les choses. Tout ce que

  5   l'on m'avait dit c'était que toutes les localités, tous les différents

  6   quartiers de la ville avaient été pilonnés. Cela était peu probable, plutôt

  7   que d'avoir tiré sur les villages où il n'y avait pas de combattants. Il y

  8   avait eu quelques destructions dans le sens où certains toits s'étaient

  9   écroulés, certains bâtiments avaient été touchés, je ne sais pas.

 10   Q.  Donc nous avons vu le rapport du général Kovacevic, et est-ce que vous

 11   remettez en question le rapport du général Kovacevic selon lequel les

 12   forces du 7e Corps sur le mont Dinara étaient soumises à des tirs

 13   d'artillerie intenses sur la ligne de front ?

 14   R.  Non, non, je ne remets pas ça en question. En fait, je l'ai observé

 15   d'ailleurs personnellement, je l'ai vu de mes yeux.

 16   Q.  Alors si nous passons au paragraphe suivant, et là c'est

 17   particulièrement ce qui m'intéresse. Vous avez dit, comme le Président l'a

 18   mentionné, à 15 heures, d'après le tampon sur ce document, je cite :

 19   "L'ennemi mène une attaque intense depuis Grahovo sur Dinara" --

 20   R.  Je ne vois pas cela.

 21   Q.  Non, c'est au paragraphe qui commence par : "A 11 heures…" Donc c'est

 22   le paragraphe dans votre version où il est dit : "Vers 14 heures 30…"

 23   Est-ce que vous voyez ce paragraphe juste au-dessus de l'autre paragraphe,

 24   au-dessus de la partie 3 ?

 25   R.  Au-dessus de la décision ? Oui, je le vois. Oui, c'est là le danger,

 26   oui, oui.

 27   Q.  Donc à un moment entre 14 heures 30 et 15 heures, vous avez envoyé un

 28   rapport à Belgrade disant qu'il y avait maintenant une brèche à Crvena

Page 18926

  1   Zemlja et que cette brèche plaçait la défense de Knin en danger; c'est bien

  2   exact ?

  3   R.  Oui.

  4   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vais diviser ces

  5   documents comme je l'ai fait avec le document précédent, donc je voudrais

  6   marquer ces pages pour qu'elles constituent une pièce séparée et les verser

  7   au dossier.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo.

  9   M. RUSSO : [interprétation] Je n'ai aucune objection, Monsieur le

 10   Président.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux voir la dernière page ?

 13   Vous ne me montrez jamais la dernière page. Vous me montrez toujours la

 14   première, mais ce n'est pas le document dans son intégralité. Je voudrais

 15   voir ce que j'ai signé, si ce n'est pas trop compliqué pour le technicien

 16   de me montrer.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que l'on peut montrer l'original

 18   au témoin, la deuxième page.

 19   M. MISETIC : [interprétation] Oui, la page suivante, s'il vous plaît.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Cela aussi, il faut le lire, je cite :

 21   "Nous estimons que toutes les mesures nécessaires doivent être prises de

 22   toute urgence pour arrêter l'agression croate."

 23   Donc la guerre n'était pas notre objectif. Notre objectif était vraiment

 24   une solution pacifique de la situation, parce que --

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Général Mrksic, la question qui vous a

 26   été posée était de savoir si vous pouviez, sur la deuxième page, voir si

 27   c'était bien vous qui aviez signé ce document --

 28   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

Page 18927

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On ne vous a pas demandé de commenter ce

  2   document. Si cela a une pertinence quelconque, M. Russo peut éventuellement

  3   vous poser des questions, ou un autre conseil de la Défense.

  4   Poursuivez, s'il vous plaît, Maître Misetic.

  5   M. MISETIC : [interprétation] Oui. Monsieur le Président, je ne crois pas

  6   que nous ayons un numéro. Mais juste pour le procès-verbal, ces pages sont

  7   --

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez raison, je --

  9   M. MISETIC : [interprétation] Les pages sont --

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 11   M. MISETIC : [interprétation] Pour le procès-verbal, Monsieur le Président,

 12   il s'agit des pages 18 et 19 de la version B/C/S et pages 7 et 8 de la

 13   version anglaise.

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ces documents vont devenir la pièce

 15   D1518.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette pièce est donc versée au dossier.

 17   M. MISETIC : [interprétation] Si nous pouvons maintenant passer aux pages

 18   suivantes.

 19   Q.  Il s'agit d'un rapport là encore du lieutenant-colonel Knezevic, et qui

 20   envoie un rapport à l'administration de l'état-major avec une heure précise

 21   opérationnelle de 16 heures, et sur le tampon, on voit : "Reçu à 16 heures

 22   45."

 23   Alors, ce qui m'intéresse ici c'est que dans ce rapport, au troisième

 24   paragraphe, il explique que sur l'axe Grahovo-Crvena Zemlja-Knin :

 25   "Les Oustachi ont réussi à reprendre les sommets dominants et les

 26   conditions sont tout à fait favorables pour continuer leurs activités et

 27   arriver dans le voisinage immédiat de Knin."

 28   Est-ce que vous vous rappelez si à environ 16 heures ce jour-là, la

Page 18928

  1   situation était telle que l'armée croate avait avancé et avait pris des

  2   positions qui étaient maintenant favorables pour elle pour pouvoir avancer

  3   sur Knin; est-ce exact ?

  4   R.  Oui, c'est exact, et le MUP s'est retiré. Ils ont eu peur. Ils ont

  5   évité un affrontement direct. Ils auraient pu, mais ils ont préféré éviter.

  6   Les forces auraient pu entrer dans Knin juste après le retrait si elles

  7   avaient voulu.

  8   Q.  Il dit également la chose suivante, et je cite :

  9   "Ils ont réussi à environ 15 heures à reprendre la crête de Mali Alan sur

 10   le mont Velebit et ont mis en danger les appareils de transmission de la

 11   télévision de Celavac."

 12   Correct ?

 13   R.  Oui, c'est correct.

 14   Q.  Et est-ce correct, en termes de temps, c'est aux alentours de 15 heures

 15   qu'il y a eu cette percée du côté de Velebit vers Gospic ?

 16   R.  Oui, effectivement, toutes les communications ont été coupées puisque

 17   toutes les lignes de transmission étaient rompues. Je n'ai donc eu aucune

 18   communication du tout avec le commandant du corps, si ce n'est les choses

 19   que je leur avais envoyées lors de l'étape de préparation. Mais je crois

 20   que le relais de transmission avait été pilonné par les avions de l'OTAN.

 21   Q.  Mais je voudrais m'assurer que vous avez bien répondu à ma question.

 22   Est-il exact, comme il est dit ici, qu'à environ 15 heures l'armée croate

 23   avait réalisé une percée à Mali Alan et menaçait Gracac ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Est-il correct, sur la base de ce que vous avez déposé hier, qu'à

 26   partir de 16 heures le 4 août, à partir de cette percée sur la position de

 27   Crvena Zemlja et à partir de ce côté-là, du côté de Mali Alan, était-il

 28   possible que cet encerclement qui vous menaçait puisse se réaliser ?

Page 18929

  1   R.  Oui, tout à fait, et d'un point de vue réaliste c'était un très grand

  2   risque. C'était le danger essentiel pour toute cette région de la Dalmatie,

  3   parce qu'elle aurait été complètement coupée et pourrait rester à

  4   l'intérieur de la Croatie, ce qui aurait été très bien sauf pour le fait

  5   que c'était un danger parce que les personnes se seraient retrouvées

  6   encerclées et tuées au main des différentes unités paramilitaires et

  7   autres.

  8   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président je demande que les

  9   pages 20 et 21 -- non, je suis désolé, page 20 de la version B/C/S et pages

 10   9 et 10 de la version anglaise soient marquées pour identification et

 11   versées au dossier.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo.

 13   M. RUSSO : [interprétation] Aucune objection, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, ces deux pages.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ces deux pages

 16   deviennent la pièce D1519.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et cette pièce est versée au dossier.

 18   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, pouvons-nous avoir

 19   maintenant la pièce D927 à l'écran, s'il vous plaît.

 20   Q.  Mon Général, vous souvenez-vous qu'en fin d'après-midi, aux alentours

 21   de 16 heures, est-ce que vous vous souvenez avoir été au téléphone avec

 22   Milan Babic à Belgrade ? Est-ce que vous vous souvenez donc que vous et M.

 23   Martic ayez été au téléphone avec M. Babic à Belgrade ?

 24   R.  Oui, je m'en souviens. Les communications fonctionnaient encore à ce

 25   moment-là.

 26   Q.  Est-ce que vous pouvez vous rappelez de ce dont vous avez discuté lors

 27   de cette conversation téléphonique ?

 28   R.  Je vais vous expliquer. Ce n'est pas moi qui parlais. C'était le

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  1   président de la république qui parlait au premier ministre. Il disait au

  2   premier ministre d'aller là-bas, d'aller voir pour être sûr que tout se

  3   passe bien, que tout était en ordre, que l'on puisse éviter la guerre. Il

  4   disait qu'il fallait aller parler aux gens de l'ambassade américaine,

  5   signer tous les différents plans, le plan Z-4 et tous les autres pour

  6   éviter à tout prix la guerre.

  7   Donc lorsque nous avions fini, l'état-major principal du commandement

  8   Suprême, où il y avait tous les ministres, le président de l'assemblée, le

  9   ministre de l'Intérieur, et ça c'était dans la salle de conférence de

 10   l'état-major général, nous en sommes arrivés à une estimation de la

 11   situation. Vous pouvez voir que même aussi sur la base de ces documents, il

 12   y avait toujours ce danger des forces qui pouvaient pénétrer par Crvena

 13   Zemlja dans Knin si elles le voulaient. Il y avait toujours ce risque de

 14   coupure de la ligne à Otric, ce qui risquait de couper complètement toute

 15   la Dalmatie, parce qu'il n'y avait personne qui attaquait de là-haut. Donc

 16   il fallait absolument prendre une décision politique. Nous n'étions pas en

 17   mesure de prendre cette décision nous-mêmes. Il nous fallait consulter tous

 18   les membres du Conseil suprême de la Défense.

 19   Q.  Mais regardons à l'écran et voyons les détails qui sont indiqués ici.

 20   Là encore, il s'agit d'un enregistrement de cette conversation

 21   téléphonique, et il est dit que -- c'est vous qui commencez avec M. Babic,

 22   et je cite -- il y a M. Babic, le général Mrksic, vous-même et Milan. Le

 23   numéro 1, c'est M. Babic; le numéro 2, c'est vous. Le numéro 1 dit :

 24   "C'est comme cela : j'ai parlé --"

 25   Je ne sais pas si cela va vous rafraîchir la mémoire. Ensuite, il est dit

 26   M. Martic -- vous n'avez pas encore eu l'occasion de le lire ?

 27   R.  Non, je suis en train de regarder le document, mais ce n'est pas Mile

 28   Mrksic; ce n'est pas du tout le style de Mile Mrksic. Ce n'est absolument

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  1   pas la façon dont je m'exprime. Je ne suis pas un homme à utiliser ce genre

  2   de termes. La personne qui vous a préparé ce document s'est trompée. Non,

  3   je ne suis pas un officier de garde.

  4   Q.  Général --

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit que c'était le numéro 1,

  6   le numéro 1 c'était M. Babic. Où est-ce qu'on trouve cela --

  7   M. MISETIC : [interprétation] Un certain Milan, Monsieur le Président.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un certain Milan.

  9   M. MISETIC : [interprétation] Oui.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Vous dites que c'est M. Babic,

 11   mais ça, il faut encore le prouver, il faut encore l'établir. Il ne faut

 12   pas le présenter au témoin de cette façon.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Martic.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le document ne doit pas apparaître de

 15   cette façon-là.

 16   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, ça va être difficile

 17   de garder tout cela bien en ordre.

 18   Q.  Mais essayons de suivre cela.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Domazet, y a-t-il un problème ?

 20   M. DOMAZET : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 21   J'ai juste une petite intervention à faire. Dans le procès-verbal, en

 22   page 11 : "Je ne suis pas un officier de garde." M. Mrksic a dit, en

 23   réalité : "Je suis," ou, "j'étais un officer de garde," non pas, "je ne

 24   suis pas."

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous ne connaissez pas tout à fait le

 26   règlement qui s'applique dans ce Tribunal, mais si vous pensez que le

 27   procès-verbal ou la traduction donne quelque chose qui n'est pas exactement

 28   précis ou qui n'est pas exact, alors vous n'êtes pas censé donner votre

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  1   opinion sur ce que devrait être exactement la traduction, mais vous pouvez

  2   poser la question et demander si peut-être c'est un problème de traduction.

  3   A ce moment-là, le témoin pourra répéter sa réponse, et si c'est une

  4   question de transcription, nous pourrons voir à ce moment-là de quelle page

  5   il s'agit pour voir s'il y a une imprécision. C'est cette procédure-là que

  6   nous suivons dans ce prétoire. Nous ne remplaçons pas ce que nous pensons

  7   être mauvais par ce que nous pensons être bon. C'est comme cela que ça se

  8   fait.

  9   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 11   M. MISETIC : [interprétation] Ma suggestion c'est que nous fassions une

 12   petite pause, et je donnerai au témoin --

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De façon à ce que le témoin puisse lire

 14   le document pendant la pause ?

 15   M. MISETIC : [interprétation] Oui.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mrksic, nous avons un petit peu

 17   de travail à vous faire faire.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous allez avoir cette version écrite du

 20   procès-verbal de cette conversation téléphonique enregistrée, et je vous

 21   demanderais de bien vouloir la lire pendant la pause.

 22   Nous allons donc avoir une petite pause et nous reprendrons à 11 heures.

 23   --- L'audience est suspendue à 10 heures 35.

 24   --- L'audience est reprise à 11 heures 05.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, vous pouvez reprendre.

 26   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 27   Q.  Général Mrksic, avez-vous eu le temps de relire la transcription de la

 28   conversation téléphonique interceptée dont nous parlions tout à l'heure ?

Page 18933

  1   R.  Je l'ai lue.

  2   Q.  Ce qui m'intéresse ce n'est pas l'aspect littéral du texte, je ne vous

  3   demande pas de me dire que chaque mot est exact. Mais avant d'en venir là,

  4   j'aimerais que vous nous disiez s'il y a eu une conversation avec M. Babic

  5   et si elle avait un rapport avec la décision relative à l'évacuation. Donc

  6   après un examen rapide du texte destiné simplement à vous rafraîchir la

  7   mémoire, est-ce que vous pouvez dire aux Juges de la Chambre quel était

  8   l'objet de la discussion avec M. Babic avant la décision d'émettre un ordre

  9   d'évacuation ?

 10   R.  Ce que je voudrais vous dire d'abord, c'est que si je me souviens bien,

 11   je n'ai pas parlé à M. Babic car c'était un devoir qui incombait à M.

 12   Martic, le président de l'Etat. Lorsque je participais à une conversation

 13   téléphonique, on ne me désignait jamais sous le prénom de Milan. On me

 14   désignait sous le prénom de Mile, on m'appelait Mile Mrksic. Et même après

 15   avoir relu le texte de cette écoute téléphonique, je répète que personne ne

 16   s'adressait à moi en m'appelant "Milan". Notamment dans le cadre d'une

 17   conversation de cette nature avec le premier ministre de l'époque,

 18   d'ailleurs je ne le connaissais même pas. Mais je sais qu'une conversation

 19   téléphonique a eu lieu, en tout cas, c'est ce qu'on m'a dit, une

 20   conversation téléphonique, parce que le besoin existait de consulter le

 21   président qui était membre du commandement Suprême pour savoir ce qu'il

 22   convenait de faire à l'avenir.

 23   Q.  Et on vous a dit que l'objet de la discussion avec M. Babic était quoi

 24   exactement ?

 25   R.  Le président de la république a déclaré qu'il avait consulté M. Babic

 26   et qu'ils s'étaient entendus, ou en tout cas, qu'une proposition officielle

 27   avait été faite qui reprenait l'avis de l'état-major selon lequel les gens

 28   ne devraient pas être laissés seuls à la merci de ce qui risquait

Page 18934

  1   d'arriver, qu'il fallait les évacuer de la Krajina vers Srb. Il n'était pas

  2   question d'abandonner le territoire de la Republika Srpska. Nous appelions

  3   ça une mesure tactique, nous savions bien que puisque notre armée n'était

  4   pas une armée professionnelle, elle serait confrontée à des problèmes dès

  5   lors que la population se mettrait en mouvement. Et par la suite une

  6   décision a été émise qui était sans doute signée par le président, je ne

  7   sais pas exactement qui a signé cette décision.

  8   Q.  Vous rappelez vous -- ou plutôt, excusez-moi. S'agissant du compte

  9   rendu d'audience, il est possible que quelques détails aient échappée à la

 10   consignation au compte rendu de la part des interprètes. Vous avez dit que

 11   la population ne devait pas être laissée seule face à elle-même. Qu'est-ce

 12   qui suscitait la crainte, quel était le motif à l'origine de cette idée ?

 13   R.  Je vais vous dire franchement, la crainte était de nature historique --

 14   Q.  Non, non. Je crois qu'en fait vous avez déjà répondu à cela, mais je

 15   vais reformuler ma question. Cette décision a-t-elle été prise en raison de

 16   l'existence d'un risque d'encerclement ?

 17   R.  Cette décision a été rendue en raison du risque d'encerclement et du

 18   fait que nous n'étions pas sûr qu'en cas d'encerclement, ils allaient se

 19   conduire bien vis-à-vis de la population, donc nous souhaitions ne pas en

 20   arriver à une situation où certains voudraient savoir qui est coupable de

 21   quoi et nous souhaitions que chacun puisse rester dans sa maison et

 22   continuer de vivre sa vie.

 23   Q.  Et eu égard à la Slavonie occidentale, c'était quoi la crainte ?

 24   R.  La population avait peur, d'abord de la puissance qui avait été

 25   manifestée par l'Etat de Croatie vis-à-vis de la Slavonie occidentale au

 26   moment des événements de Slavonie occidentale et la population avait peur

 27   que des événements puissent faire des victimes comme c'était déjà arrivé

 28   là-bas. Parce que les gens qui n'avaient pas voulu partir, les gens qui

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  1   n'avaient pas voulu évacué vers des endroits plus sûr, les forces dont

  2   disposait la République de Croatie à l'époque n'avaient même pas le pouvoir

  3   d'exercer un contrôle sur leurs propres effectifs, et dans des situations

  4   de ce genre, il y a toujours des extrémistes qui vont faire du mal à la

  5   population, ça existe de tous les côtés. Donc la population avait peur

  6   évidemment. Et il y a eu des victimes, alors imaginez si tout le monde

  7   était resté, combien il y aurait eu de victimes ? Là les victimes étaient

  8   uniquement les vieillards et les plus miséreux qui n'avaient pas de moyens

  9   de transport pour partir.

 10   Q.  Vous rappelez-vous si vous auriez été informé du fait que M. Babic,

 11   durant cette conversation téléphonique, a annoncé si oui ou non vous

 12   pouviez attendre de l'aide de la part de M. Galbraith ou de la communauté

 13   internationale en général ?

 14   R.  Je crois qu'il a eu un contact avec Martic. Et d'après ce que je peux

 15   lire dans ce texte, il a été dit qu'il était impossible de s'attendre à une

 16   aide quelconque, que les événements avaient démarré et que plus rien ne

 17   pourrait les arrêter. Nous n'avons pas pu les arrêter à Genève. M. Cervenko

 18   n'a pas voulu discuter avec moi, donc cela a fait comprendre clairement

 19   tout de suite que la décision avait été prise, décision selon laquelle il

 20   n'y avait pas moyen d'arrêter les choses qui avaient démarré. Or, nous

 21   notre intérêt c'était d'arrêter tout cela. Et je crois que le président

 22   Milosevic et tous les autres ont été trompés à ce moment-là.

 23   Q.  Cette conversation téléphonique est censée avoir eu lieu à 16 heures

 24   30.

 25   J'aimerais maintenant que l'on affiche la pièce D137 sur les écrans.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, est-ce que ce numéro

 27   vient du code qui est inscrit en haut de la page, qui se termine par "1630"

 28   ? Mais je ne crois pas que l'on nous ait dit quelle était la signification

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  1   de ce code --

  2   M. MISETIC : [interprétation] Je crois que c'est l'heure, Monsieur le

  3   Président, et que ce n'est pas contesté.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Si ce n'est pas contesté…

  5   M. MISETIC : [interprétation]

  6   Q.  Mon Général, ceci est un document qui a été versé au dossier, c'est un

  7   ordre d'évacuation émanant de M. Martic. Vous rappelez-vous avoir déjà eu

  8   ce document sous les yeux ?

  9   R.  Ce document je le vois pour la première fois aujourd'hui, mais je suis

 10   au courant du fait que ce document a été émis. Je ne l'ai pas lu à

 11   l'époque, mais je sais qu'il a été élaboré sur la base de ce que pensait le

 12   Conseil suprême de la Défense. Peut-être qu'il a été transmis à l'état-

 13   major, c'est vraisemblable, mais comme je faisais partie de cette instance,

 14   il n'était pas nécessaire de me le montrer spécialement. Et maintenant je

 15   vois que c'est un ordre très court qui se divise en trois points.

 16   Q.  D'abord, est-ce que vous pourriez regarder la mention de l'heure en

 17   haut à gauche, est-ce que cela correspond à ce dont vous vous souvenez, à

 18   savoir que cet ordre a été émis à 16 heures 45, c'est-à-dire un peu de

 19   temps après la conversation interceptée à laquelle participait M. Babic ?

 20   R.  Oui, vous voyez que ce document a commencé à circuler à 17 heures 20,

 21   c'est écrit en bas. Il faut tout de même un certain temps pour rédiger ce

 22   document, le dactylographier et le transmettre, et cetera. Donc bien sûr

 23   cela s'est passé après la réunion, l'entretien en question.

 24   Q.  Dans ces conditions, pourriez-vous nous expliquer pourquoi l'état-major

 25   principal était dans l'obligation de certifier cet ordre ?

 26   R.  Parce que le président de la république est commandant suprême de

 27   l'armée et qu'il participait aux réunions de l'état-major principal à nos

 28   côtés. Il était le chef. Il participait aux réunions de l'état-major

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  1   principal et c'était lui qui était à l'origine de toutes les décisions.

  2   Bien sûr, en temps de guerre, il n'avait plus de fonction particulière au

  3   sein de la présidence. Son action se situait à l'état-major. Je ne sais pas

  4   d'ailleurs s'il n'était pas accompagné par d'autres membres de la

  5   présidence dans son action au sein de l'état-major principal. A ses côtés,

  6   il y avait le MUP, il y en avait d'autres aussi.

  7   Q.  D'accord. Page 44, ligne 21 du compte rendu d'audience, c'était une

  8   réponse de votre part, et vous avez dit que ce document a été distribué

  9   uniquement à 17 heures 20. Pouvez-vous nous dire à qui il a été transmis ?

 10   R.  Ce rapport a été envoyé aux instances concernées, à savoir les brigades

 11   dont on voit les noms en bas, le Corps de Knin ou de Benkovac, le Corps de

 12   Drnis, le Corps de Dalmatie, Benkovac, Obrovac, Drnis; ça, ce sont les

 13   brigades, et Obrovac. Il n'avait aucun rapport avec Kordun. Donc il a été

 14   adressé aux unités qui risquaient d'être coupées du reste des troupes et

 15   encerclées.

 16   Q.  Donc si je vous comprends bien, cet ordre a suivi la voie hiérarchique

 17   vers les unités subalternes ?

 18   R.  Techniquement, je ne sais pas comment ça s'est passé. Ce sont les

 19   estafettes qui sont responsables de cela. Je ne sais pas si c'était adressé

 20   aux instances municipales ou si c'est à partir du ministère que ce document

 21   a été envoyé. Sur le plan technologique, je ne sais pas. Je ne suis pas

 22   spécialiste. Comment les autorités civiles ont réagi, comment elles ont agi

 23   ensuite.

 24   Q.  Je vais vous poser la question suivante : savez-vous qui est Drago

 25   Kovacevic ?

 26   R.  C'était le président de la municipalité de Knin, si je ne me trompe.

 27   Q.  Oui.

 28   R.  Si je me souviens bien, parce que vous savez, ça fait longtemps.

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  1   Q.  Vous rappelez-vous si M. Kovacevic a assisté à la réunion qui a donné

  2   lieu à l'émission de l'ordre d'évacuation ?

  3   R.  Je crois que ça aurait été une bonne chose s'il avait participé à cette

  4   réunion, parce qu'il fallait qu'il y ait coopération avec son corps

  5   d'armée, enfin, avec les hommes qui faisaient partie de son corps d'armée.

  6   Mais je ne me rappelle pas. Je ne peux pas me rappeler tous les détails.

  7   D'ailleurs, j'ai passé très peu de temps là-bas, donc je ne connaissais pas

  8   tous ces hommes. Je ne les connaissais pas bien.

  9   Q.  Général Mrksic, vous rappelez-vous si vous êtes arrivé dans cette

 10   réunion et si vous avez dit que les personnes évacuées devaient être

 11   dirigées vers Petrovac et Banja Luka ?

 12   R.  Non. Pourquoi est-ce que j'aurais changé un ordre venant du

 13   commandement Suprême ? Je n'étais pas habilité à le faire. Et pourquoi est-

 14   ce que je l'aurais fait ?

 15   Q.  Bon. Je vais vous montrer les images d'une vidéo après quoi je vous

 16   demanderais vos commentaires.

 17   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, il s'agit de la pièce

 18   D326.

 19   [Diffusion de la cassette vidéo]

 20   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 21   "Les colonnes de réfugiés passaient par là, et le 4 août 1995 vers 17

 22   heures, les autorités civiles et militaires se sont regroupées chez Martic,

 23   et Martic était en uniforme. Il y avait un grand cendrier devant lui et

 24   plusieurs paquets de cigarettes vides sur la table. Alors ils ont dit :

 25   bonjour, bonjour, pourquoi est-ce que tu m'as appelé ? Et il a dit : je

 26   t'ai appelé parce que j'ai décidé d'évacuer la ville. Nous étions censé

 27   prendre des mesures pour faire déménager la population civile, j'insiste

 28   sur ce mot, la population civile de la Dalmatie septentrionale; c'est-à-

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  1   dire des municipalités de Benkovac, Obrovac, Knin et Drnis de la

  2   municipalité de Gracac et de Lika.

  3   "Pour moi, ce n'était pas un choc. J'ai constaté que c'était une mesure

  4   assez raisonnable. A ce moment-là, nous avons émis l'ordre. C'est Kosta

  5   Novakovic qui a émis cet ordre. A ce moment-là, nous avons écrit dans

  6   l'ordre que le but était d'évacuer la population civile vers Knin, Otric ou

  7   Srb ou Lapac; il fallait que dans ce secteur, les gens soient déménagés. A

  8   ce moment-là, Mrksic a réagi en disant : mais comment Srb, il faut aller

  9   plus loin que Srb, vers Petrovac, plus loin, vers Petrovac et Banja Luka. A

 10   ce moment-là, il a montré un peu de réserve et il a dit que si les civils

 11   étaient déplacés, cela poserait un problème aux lignes militaires. Il a dit

 12   si les civils s'en vont, ils seront suivis par l'armée qui va évacuer aussi

 13   et cela nous posera toute sorte de problème.

 14   "Toutefois, dans la soirée, quand il est arrivé - parce qu'avant il

 15   était à l'étage, je parle de Mrksic - il m'a dit sur les marches d'escalier

 16   qu'apparemment la population avait reçu l'ordre d'évacuation. Je lui ai dit

 17   : Mon Général, l'armée est en train de tomber en pièces, alors comment est-

 18   ce qu'on peut évacuer et ce, sur la base d'un ordre ? Il a dit : non, ce

 19   n'est pas notre décision, c'est le Conseil suprême de Défense qui a pris

 20   cette décision. A ce moment-là, quelqu'un a demandé à Martic ou bien c'est

 21   Martic lui-même qui a demandé un contact avec Slobo. Il n'a pas parlé de

 22   Srb. Il a obtenu Brane Crncic [phon] au téléphone qui l'a rassuré. Sans

 23   doute qu'il n'a pas pu atteindre Slobo, alors il a obtenu Sencevic qui lui

 24   a dit que Slobo ne voulait pas se mêler de cette affaire, qu'il ne

 25   prendrait aucune mesure. C'est la première fois à ce moment-là, que j'ai

 26   entendu Martic insulter Slobo, et cetera, et cetera."

 27   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 28   M. MISETIC : [interprétation]

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  1   Q.  Monsieur Mrksic --

  2   R.  Oui.

  3   Q.  -- j'aimerais vous donner la possibilité de commenter les propos de M.

  4   Kovacevic. Est-ce qu'effectivement, vous avez dit qu'il fallait évacuer

  5   plus loin que les localités mentionnées dans l'ordre, qu'il fallait aller

  6   jusqu'à Petrovac et Banja Luka ?

  7   R.  Ce que raconte M. Kovacevic, moi, je ne l'ai même pas vu et je ne suis

  8   même pas allé à l'endroit où il était avec Martic, avec tous ces cendriers

  9   pleins. Et ce que dit Kosta, ce qu'il parle au sujet de la coopération,

 10   nous le savions, et cela c'est exact, c'est ce qui a été dit. Mais que

 11   j'aurais dit qu'il fallait évacuer plus loin encore, ça, je ne pouvais pas

 12   le dire et ce n'était pas dans l'esprit de la mission qui m'avait été

 13   confiée par le président Milosevic lorsqu'il m'a envoyé en Krajina. Et

 14   personne ne me l'a ordonné. Maintenant, est-ce qu'il existe des petits

 15   jeux, est-ce qu'il voudrait m'imputer quelque chose que j'aurais dit, ça,

 16   c'est autre chose. Mais moi, je n'ai pas donné cet ordre. D'accord, allez-

 17   y.

 18   Q.  J'aimerais maintenant vous montrer trois autres documents. Je vous les

 19   montrerai l'un après l'autre pour ne pas perdre de temps. C'est après que

 20   vous aurez vu ces trois documents que je vous donnerai la parole pour

 21   quelques commentaires. D'accord ?

 22   Alors, j'aimerais que nous passions d'abord à la pièce D182.

 23   Vous aurez la possibilité de commenter, mais plus tard de façon détaillée.

 24   Pour le moment, je vous demande simplement de répondre par "oui" ou par

 25   "non", s'il vous plaît. Est-ce que vous saviez qu'une réunion s'est tenue à

 26   18 heures, en présence du commandement de l'ONURC et de la FORPRONU, à leur

 27   siège ? Est-ce que vous êtes au courant de cela ? Simplement "oui" ou "non"

 28   pour le moment, vous aurez la possibilité de commenter plus en détail plus

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  1   tard.

  2   R.  C'est possible, mais je n'en ai pas le souvenir. Si je n'en ai pas le

  3   souvenir, c'est peut-être dû au fait que je n'ai pas assisté à cette

  4   réunion. Je ne sais pas. Parce que c'était la crise, la situation était

  5   très difficile sur le plan psychologique; qui est avec qui, qui soutient

  6   qui ?

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mrksic, vous nous avez dit que

  8   vous ne vous en souveniez pas et que vous pensiez que puisque vous n'aviez

  9   pas de souvenir, cela signifiait que vous n'étiez pas à la réunion. Cela

 10   suffit.

 11   M. MISETIC : [interprétation]

 12   Q.  Est-ce que vous vous rappelez que lors de la réunion où l'évacuation a

 13   été discutée en présence du conseil de la Défense, est-ce que le commandant

 14   de l'ONURC aurait dû être contacté pour apporter son concours à cette

 15   évacuation après la décision ? Est-ce que vous vous rappelez cela ?

 16   R.  Ça, c'était la mission de Kosta Novakovic parce que c'est lui qui

 17   assurait la liaison, moi je ne sais pas, je ne peux pas me souvenir de

 18   cela, je ne peux pas. C'est vraisemblable parce que nous demandions le

 19   concours de tout le monde.

 20   Q.  Je vais vous montrer maintenant les trois documents que j'ai annoncés

 21   tout à l'heure, et ensuite vous aurez la possibilité de commenter.

 22   Alors, le premier est un rapport de l'ONURC je crois, si je ne me trompe,

 23   qui est envoyé à 19 heures 45. Ne prêtez pas attention à la date, car en

 24   l'espèce tout le monde est d'accord pour dire que la date devrait être

 25   celle du 4 août 1995. Alors, concentrez-vous sur le deuxième paragraphe où

 26   nous lisons, je cite :

 27   "Les autorités de la RSK ont demandé l'aide des Nations Unies pour

 28   organiser et fournir les moyens de transport nécessaires à une évacuation

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  1   de ce genre. Les calculs initiaux de la RSK démontrent que les Nations

  2   Unies devront fournir à ces réfugiés pour assurer leur transport à peu près

  3   70 000 litres de carburant et 450 camions. La RSK propose un itinéraire

  4   principal partant de Knin, passant par Padjane, Otric, Srb, Martin Brod,

  5   Petrovac, Banja Luka."

  6   Passons maintenant à la pièce D337. Page 2, paragraphe 4.

  7   D337, Monsieur Mrksic, c'est un document qui est un rapport de Yasushi

  8   Akashi adressé à Kofi Annan en date du 14 août 1995. Au paragraphe 4, dans

  9   la première phrase, il dit, je cite :

 10   "Nous avons été informés par le responsable des affaires civiles du secteur

 11   sud que les dirigeants de Knin avaient demandé l'aide du HCR et de l'UNPF

 12   pour évacuer 32 000 civils à peu près de Benkovac, Obrovac, Gracac et Knin

 13   dans la direction de Petrovac et Banja Luka en Bosnie-Herzégovine."

 14   Enfin, je vais vous montrer le document 65 ter numéro 172, il s'agit des

 15   notes personnelles d'un homme qui s'appelle Drago Vujatovic; il a pris des

 16   notes à la main lors d'une réunion organisée avec le commandement de

 17   l'ONURC.

 18   En anglais, c'est la page 16 qui m'intéresse et dont je demande

 19   l'affichage. Le bas de la page, s'il vous plaît.

 20   Il remarque que la réunion commence à 17 heures 40. Kosta Novakovic est

 21   présent, K. Milan, K. Drago sont présents également. Et ensuite, nous

 22   lisons : "Alain Forand, Mrksic, Mile, et Trbulin, Milan." Page suivante de

 23   la version anglaise sur les écrans, je vous prie. Non, non, pardon, pardon,

 24   je ne crois pas qu'on vous ait montré la page correspondante dans la

 25   version originale. Il s'agit de la page 129 en B/C/S. Voilà.

 26   Au milieu de la page, vous voyez, ce sont des notes manuscrites; et en

 27   anglais, je demande maintenant l'affichage de la page suivante. Voilà, elle

 28   est affichée déjà. Alors, il écrit à la main :

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  1   "EV. Knin-Benkovac-Obrovac-Drnis-Gracac-Otric-Srb-Lapac, défendre…"

  2   Puis, nous voyons la phrase :

  3   "…Galbraith est invité par Tudjman."

  4   Puis ensuite, nous lisons :

  5   "Martin Brod est plus loin jusqu'à Banja Luka. Allez jusqu'au bout."

  6   Un peu plus bas dans la page, je demande que l'on fasse défiler vers le bas

  7   la page en B/C/S sur les écrans. Donc il note :

  8   "Martin Brod-Petrovac-Banja Luka," puis : "Carburant." Puis une répartition

  9   avec le chiffre de 15 000 et un total de 32 000. Vous vous rappelez que M.

 10   Akashi avait parlé lui aussi de 32 000 personnes qu'il fallait déménager

 11   hors de cette région.

 12   D'abord, je vous demande si ce document vous rafraîchit la mémoire ? Est-ce

 13   que vous avez assisté à cette réunion ?

 14   R.  C'est la première fois que je vois ce document. D'après ce que j'ai en

 15   mémoire, si je me souviens bien, quand les délégations des Nations Unies

 16   sont arrivées, quand il y a eu des réunions avec Akashi, je n'ai jamais

 17   participé à la moindre réunion avec les commandants locaux en présence des

 18   représentants des Nations Unies. Ce document, c'est la première fois de ma

 19   vie que je le vois. Je ne peux pas vous aider sur ce point. La seule chose

 20   que je peux faire, c'est confirmer ce qui a pu être signé au nom du

 21   président.

 22   Q.  Avez-vous la moindre explication permettant de comprendre pourquoi les

 23   représentants de la RSK, durant une réunion qui a duré apparemment moins

 24   d'une heure après que M. Martic ait émis l'ordre d'évacuation, pourquoi ils

 25   seraient allés à cette réunion pour dire qu'il fallait continuer

 26   l'évacuation jusqu'à Petrovac ou Banja Luka ?

 27   M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Président, objection. Ceci appelle

 28   des spéculations de la part du témoin quant à ce que pouvaient penser des

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  1   tiers.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Parfois, vous savez, les tiers -- enfin,

  3   peut-être pourriez-vous, Maître Misetic, demander au témoin s'il a reçu des

  4   renseignements qui pourraient permettre d'éclairer les motivations nourries

  5   par des tiers.

  6   M. MISETIC : [interprétation]

  7   Q.  Est-ce que vous auriez --

  8   R.  Non. Je n'ai pas assisté à cette réunion. Mais si je me mets dans la

  9   peau d'un paysan ou d'un simple citoyen, dès qu'il peut obtenir quelque

 10   chose, il va trouver un moyen d'obtenir davantage. Au lieu de demander du

 11   carburant pour faire 50 kilomètres, s'il peut obtenir du carburant pour en

 12   faire 70, il demandera du carburant pour faire 70 kilomètres. C'est dans

 13   l'âme humaine. Ce n'est pas un problème qui dépend de moi ou de qui que ce

 14   soit d'autre.

 15   Ce qui est un fait c'est qu'en raison des événements, la population devait

 16   évacuer ce territoire. Ce territoire était finalement devenu trop petit

 17   pour le très grand nombre de personnes qui y étaient hébergées. Et

 18   s'ajoutait à cela le risque de mourir.

 19   La question qu'il faut se poser c'est pourquoi cette évacuation a du

 20   être décidée et pas comment elle a été mise en œuvre.

 21   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demande

 22   l'enregistrement du document 65 ter numéro 172 ainsi que son versement au

 23   dossier.

 24   M. RUSSO : [interprétation] Pas d'objection.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ceci devient la

 27   pièce D1520.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D1520 est admise au dossier.

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  1   M. MISETIC : [interprétation]

  2   Q.  Général Mrksic, vous souvenez-vous avoir eu une réunion avec vos

  3   subalternes à 20 heures le 4 août à l'état-major principal ?

  4   R.  Je me souviens d'une réunion, oui, une réunion destinée à régler les

  5   problèmes de nature militaire. Mais vous devriez me rappelez l'objet de la

  6   réunion, ce qui a été discuté.

  7   Q.  Je voudrais vous montrer deux rapports que vous avez vus auparavant,

  8   mais cela permettra de rafraîchir votre mémoire.

  9   Il s'agit du document D1516.

 10   Il s'agit du rapport du général Kovacevic du 9 août que vous avez vu

 11   un petit peu plus tôt dans la matinée. Si vous regardez la page 2 de la

 12   version anglaise il s'agit du paragraphe 6.

 13   Bien, le général Kovacevic indique dans son rapport :

 14   "Le 4 août à 20 heures, le commandant de la SVK a émis un ordre pour

 15   renforcer la défense de Knin en prenant un bataillon d'infanterie de la 75e

 16   Brigade motorisée, alors que les autres unités devraient restées sur leurs

 17   positions actuelles pour défendre les lieux tout en organisant également

 18   une défense défensive sur la ligne…"

 19   Et il continue ensuite en décrivant cette ligne. Et il dit :

 20   "Le 4 août, le gouvernement de la RSK a publié une déclaration publique en

 21   appelant l'ensemble de la population dans les régions concernées à évacuer,

 22   ce qui engendrait un chaos dans les unités et dans la dispersion des unités

 23   parce que les soldats ont commencé à partir pour rentrer chez eux et aider

 24   leurs familles à évacuer."

 25   Si nous pouvions passer maintenant au document D828. Et je voudrais

 26   maintenant vous montrer le rapport de M. Uzelac de la 92e Brigade motorisé.

 27   Si nous pouvions regarder la page 2 de la version B/C/S qui correspond à la

 28   page 3 de la version anglaise. Est-ce qu'on pourrait redescendre à 19

Page 18947

  1   heures là où on commence à parler de -- où le paragraphe commence par 19

  2   heures :

  3   "A 19 heures, nous avons reçu instruction des autorités stipulant qu'il

  4   était nécessaire d'évacuer la population civile. Nous avons transféré cet

  5   ordre aux personnes chargées de l'évacuation.

  6   A 19 heures 05 je suis parti pour l'état-major principal à Knin. Au KM à 20

  7   heures avec la présence du commandant de brigade et le commandement du

  8   Grand état-major et le commandant du 7e Corps que je rencontrais pour la

  9   première fois, et nous avons été informé par le commandant général Mrksic

 10   de la situation en RSK dans la région de Kordun, Banja, Lika, et en

 11   particulier le secteur de responsabilité du 7e Corps, que la situation

 12   était extrêmement complexe et que la Brigade Vrlika faisait l'objet

 13   d'attaques et que les Oustachi dans la 2e Brigade d'infanterie avaient pris

 14   Cista Mala et Cista Velika. Les autorités ne fonctionnaient pas, et cetera.

 15   Il a ordonné que le secteur de responsabilité du corps…"

 16   Et je vous demanderais de passer à la page suivante, s'il vous plaît, en

 17   version anglaise :

 18   "…que le secteur de responsabilité des brigades soit limité et de garder à

 19   l'esprit la situation dans son ensemble.

 20   "J'ai réagi et mis en garde le commandant en lui disant que la 92e Brigade

 21   motorisée tenait ses positions, qu'il y avait eu des combats, mais qu'il

 22   n'y avait pas eu de succès du côté des Oustachi dans mon secteur et que

 23   j'étais prêt à riposter à toute attaque. Et je lui ai dit qu'aucun civil

 24   n'avait été évacué de Benkovac. Et j'ai proposé que tous les commandants

 25   poursuivent l'évacuation des civils de leur secteur et que les

 26   commandements continuent d'empêcher l'avancé des Oustachi en direction de

 27   Vrlika et Knin."

 28   Et si vous pouvez passer à la page suivante, s'il vous plaît :

Page 18948

  1   "A 23 heures au KM de la 92e Brigade motorisé à Bilanje, j'ai présenté à

  2   tout un chacun la situation en RSK, en particulier au 7e Corps et je leur

  3   ai demandé leurs suggestions. Nous étions particulièrement choqués par ce

  4   qui se passait. Il y avait eu des centaines d'attaques sur la zone de

  5   responsabilité de la brigade et nous n'avions pas peur des Oustachi.

  6   "J'ai donné ordre aux unités de défendre les secteurs de défense, de

  7   prendre des actions à l'égard des Oustachi dans certaines directions afin

  8   de mettre en place des activités, d'empêcher les infiltrations et de

  9   permettre le retrait des civils par rapport à la ligne de front."

 10   Général, est-ce que cela rafraîchit votre mémoire concernant ce qui s'est

 11   passé lors de cette réunion à 20 heures ?

 12   R.  Oui, oui, je me souviens qu'il a été question de ce genre de choses.

 13   Est-ce que ça été dit exactement comme ça, je ne sais pas, mais en tout cas

 14   c'est ce qui a été discuté avec les commandants du 7e Corps de Dalmatie.

 15   Parce que si la population partait, pourquoi est-ce qu'ils auraient dû

 16   tenir un front aussi vaste plutôt que de défendre le front qu'ils tenaient

 17   déjà pour que la population puisse partir ? Bien sûr, il y a eu des

 18   malentendus et des commentaires de ce genre.

 19   Q.  Pourquoi pensiez-vous qu'il était nécessaire de réduire le front ?

 20   R.  Je pense qu'il fallait rétrécir le front parce qu'il n'y avait personne

 21   là-bas sur ces positions. S'ils rentraient dans Knin, ils pouvaient sortir

 22   de Knin par le haut et tomber sur le dos des soldats sans défense. Qui est-

 23   ce qui défendrait la population si la population était en train de partir ?

 24   Il fallait éviter que les forces ennemis tombent sur le dos des soldats,

 25   voilà pourquoi il fallait agir ainsi. Et le problème qui s'est posé c'est

 26   que les commandants ont eu un peu de mal à comprendre tout cela parce que

 27   eux avait été préparés mentalement à creuser des tranchées, ils étaient

 28   prêts à subir une attaque et à défendre leurs positions. Mais l'attaque

Page 18949

  1   venait du territoire de la Republika Srpska et c'est ça qui a créé toute

  2   cette problématique.

  3   Nous, nous savions à l'avance que si la population prenait la route et que

  4   les soldats restaient, cela poserait un problème parce que les soldats ne

  5   voulaient pas rester, ils voulaient partir avec leur femme et leurs

  6   familles et leurs enfants. Ça devait poser un problème nous le savions bien

  7   tous.

  8   Mais les décideurs politiques ou le décideur politique a décidé que cela

  9   devait se passer ainsi; s'il avait été décidé de se battre jusqu'au dernier

 10   souffle en étant encerclés, j'aurais exécuté cet ordre.

 11   Q.  Peut-on dire, en se fondant sur votre dernière réponse, que ce qui se

 12   produisait c'est que ceux-ci arrivaient à maintenir leurs lignes,

 13   néanmoins, vous aviez peur d'être attaqués par derrière en raison de la

 14   pénétration de la HV à Knin et à Mali Alan ?

 15   R.  C'est ça, parce que tenir les lignes, avec les lignes anciennes du côté

 16   de Benkovac-Drnis, ça n'avait aucun sens si on pouvait être attaqué de dos.

 17   Il fallait créer un front qui pouvait empêcher toute percée de la part de

 18   ces forces du côté d'Otric et du côté de - comment c'est déjà, là où la

 19   population a été installée.

 20   Nous étions une population armée, notre devoir n'était pas de défendre le

 21   territoire mais de défendre la population, notre devoir était d'empêcher

 22   que la population périsse.

 23   Q.  Vous souvenez-vous de discussion concernant Bulina Strana à cette

 24   réunion à 20 heures ?

 25   R.  Vous parlez sans doute de la sortie de Knin, quand vous dites Bulina

 26   Strana. Parce que moi j'ai oublié un peu les noms des lieux dits. Oui, ça a

 27   été discuté. C'était un objectif-clé parce que si eux arrivaient dans Knin,

 28   ils pourraient y faire ce qu'ils voulaient, mais il fallait les empêcher de

Page 18950

  1   poursuivre leur route et d'aller plus haut, si c'est ça que vous avez à

  2   l'esprit.

  3   Q.  C'est ce que je voulais dire. Et si vous pouviez expliquer à la Cour ce

  4   que vous entendez sur le plan géographique. Bulina Strana, qu'est-ce que

  5   Bulina Strana par rapport à Knin ?

  6   R.  Je n'ai pas de carte. La route monte, la route qui va vers Otric

  7   c'était un endroit tout à fait capital. C'était un poste de commandement,

  8   le poste de commandement du Corps de Knin, le président de l'Etat a passé

  9   quelque temps à cet endroit quand il a eu besoin de se reposer, et cetera.

 10   M. MISETIC : [aucune interprétation]

 11   Q.  [aucune interprétation]

 12   R.  Ne me posez pas cette question, je n'ai pas de carte. Je ne me rappelle

 13   pas maintenant le nom de chaque lieu dit; qu'est-ce qui se trouvait en

 14   hauteur; Petrova Gora, les monts Dinara, et cetera. Qu'est-ce qui était en

 15   hauteur, qu'est-ce qui était en bas, il faudrait que j'aie une carte sous

 16   les yeux.

 17   Q.  D'accord. Nous en reparlerons --

 18   R.  Si j'ai ordonné à des forces de se rendre à cet endroit, ça veut dire

 19   que c'était un endroit important.

 20   Q.  D'accord. Je pense que vous avez abordé le sujet dans votre réponse…

 21   A la page 56, ligne 23, vous avez dit que :

 22   "Bulina Strana était l'élément important qui les empêchait de monter, est-

 23   ce que c'est bien ce que vous avez dit."

 24   Est-ce que vous pourriez expliquer ce qu'il en est ?

 25   R.  Non, où est-ce que c'est écrit, s'il vous plaît, dites-moi où cela est

 26   écrit que je lise le texte à l'écran ?

 27   Q.  Ceci figure sur le compte rendu d'audience et à une partie de votre

 28   réponse à ma question il y a quelques instants vous avez dit une partie de

Page 18951

  1   l'importance de Bulina Strana, et qu'en fait "il s'agissait d'un lieu-clé

  2   qui les empêchait," cela veut dire la HV, "de monter."

  3   R.  Il faudrait que je regarde une carte. Si c'est au-dessus de Knin, si

  4   c'est l'endroit où mène la route qui va vers Otric et si c'est l'endroit où

  5   mène la voie ferroviaire, la route qui va vers Lika, alors c'est ça.

  6   Q.  Oui.

  7   R.  Oui, alors c'est là qu'il fallait assurer la défense principale pour

  8   empêcher que la population ne soit victime des combats. Si c'est ça que

  9   vous avez à l'esprit, oui, je vous dis que c'est bien ça.

 10   Q.  Je pense que ce serait peut-être plus facile --

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, la réponse du témoin

 12   indique qu'il n'avait aucune certitude concernant les noms et il semblerait

 13   que cela paraît au 56, ligne 23. Et ensuite il a continué et nous en avons

 14   parlé et qu'en même temps il ne savait plus ce que signifiaient ces noms.

 15   Donc ça ne serait peut-être pas tout à fait exact à l'heure actuelle et

 16   précis dans sa réponse. Il ne sait pas exactement ce qui s'est passé à

 17   Bulina Strana.

 18   M. MISETIC : [interprétation] Je vais lui montrer un document différent,

 19   Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

 21   M. MISETIC : [interprétation]

 22   Q.  Avant d'en arriver là, je voudrais vous montrer maintenant un autre

 23   document sur l'évacuation. Il s'agit du document 1D1057 de la liste 65 ter.

 24   Q.  Il s'agit du rapport, Général Mrksic, du commandant du 15e Corps de la

 25   Lika, le Corps de la Lika, Stevo Sevo. Et je voudrais juste vous demander

 26   de passer à la page 3 en anglais, la partie qui se lit : "Le 4 août 1995

 27   aux alentours de 23 heures 30…"

 28   Et le document se lit :

Page 18952

  1   "Aux alentours de 23 heures 30, le chef de l'état-major de l'armée de

  2   la Krajina serbe a personnellement donné l'ordre de commencer et d'entamer

  3   l'évacuation générale de la population dans le secteur de responsabilité du

  4   corps."

  5   Est-ce que vous vous souvenez avoir personnellement donné un tel

  6   ordre ?

  7   R.  Non. Le chef de l'état-major principal ? Je n'ai pas donné un ordre de

  8   cette nature. Il s'agit d'un message qui venait de mon état-major de

  9   Loncar, qui avait un fils au sein de ce corps d'armée et il était allé

 10   inspecter et voir quelle était la situation là-bas pour décider si sur sa

 11   propre initiative il pouvait faire quelque chose. Mais un ordre comme

 12   celui-là, je ne l'ai pas donné. Et tout ce que vous voyez là a été mis sur

 13   le papier plus tard à Banja Luka, quand il s'était bien rendu compte des

 14   événements qui avaient eu lieu, et ils se sont mis à écrire n'importe quoi.

 15   Q.  Mais, Général, je pense que ma question à vous était la suivante :

 16   l'ordre d'évacuation de M. Martic ne couvrait pas Lika, n'englobait pas

 17   Lika; est-ce exact ?

 18   R.  En effet, en effet. Et tout ce qui a été fait, toutes les autres qui

 19   ont été faites; c'était un usage abusif, il y a eu un usage abusif de mon

 20   nom ou du sien.

 21   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demanderais à ce

 22   qu'une cote soit attribuée à ce document et à ce qu'il soit versé au

 23   dossier.

 24   M. RUSSO : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.

 25   Mais je voudrais simplement modifier le procès-verbal d'audience concernant

 26   ce qui a été dit, à savoir que l'évacuation ne couvrait pas, n'englobait

 27   pas Lika.

 28   M. MISETIC : [interprétation] Il a confirmé cela dans sa réponse, n'est-ce

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  1   pas ?

  2   M. RUSSO : [interprétation] Je pense que ce document montré au témoin, la

  3   pièce D137 indique des parties de Lika.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question a été posée au témoin. La

  5   question a reçu une réponse de la part du témoin. Que cela soit cohérent

  6   avec d'autres pièces à conviction, nous allons devoir nous pencher sur ce

  7   point lorsque nous regarderons d'autres documents dans leur intégralité.

  8   Monsieur le Greffier.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, cela deviendra le

 10   document D1521.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et ce document est versé au dossier.

 12   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, si nous pouvions

 13   maintenant avoir la pièce D713 sur l'écran, s'il vous plaît.

 14   Q.  Maintenant, Général Mrksic, vous souvenez-vous qu'à Radio Belgrade le

 15   soir du 4 août, il y ait eu un rapport à Radio Belgrade concernant la

 16   situation à Knin ?

 17   R.  Ce n'est pas mon habitude de faire des déclarations à la radio ou à la

 18   télévision. Je n'ai pas le souvenir de cela. Peut-être que quelqu'un m'a

 19   interviewé ou que j'ai simplement discuté avec quelqu'un et que ce

 20   quelqu'un a enregistré l'entretien et l'a ensuite diffusé à la télévision.

 21   Mais, personnellement, je n'ai pas le souvenir d'avoir fait la moindre

 22   déclaration, ou d'avoir entendu la moindre déclaration de ma part, d'avoir

 23   entendu dire par quiconque que j'aurais parlé à la radio ou à la télé.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que vous avez répondu à la

 25   question.

 26   Veuillez poursuivre, Maître Misetic.

 27   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 28   Q.  Bien entendu, il s'agit là d'une version de ceci, et ceci figure dans

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  1   les archives du résumé des radios diffusions mondiales de BBC. Et la

  2   source, c'est à la quatrième ligne, se lit : "La Radio Belgrade serbe en

  3   serbo-croate, à 20 heures GMT," à savoir 22 heures d'Europe centrale, "Le 4

  4   août 1995." Et le deuxième paragraphe -- je vais vous montrer une

  5   différente version de ce document pour que vous puissiez suivre, et le

  6   texte se lit :

  7   "Une conversation téléphonique avec le général Mrksic, commandant de

  8   l'armée de la Krajina serbe à Knin…"

  9   Et si je pouvais vous montrer une autre pièce, un autre document de la même

 10   interview.

 11   Monsieur le Greffier, il s'agit de la pièce D106, s'il vous plaît.

 12   Le texte vous cite comme ayant dit :

 13   "A l'heure actuelle, toutes les activités de combat dans la région de Knin

 14   ont cessé. Knin est dans l'obscurité et l'évacuation de la population se

 15   poursuit. Les forces ennemies sont arrivées à 4 ou 6 kilomètres de la ville

 16   de Knin."

 17   Puis il y a cette question; et là, vous êtes cité à nouveau :

 18   "Nous gardons le contact; nos forces se sont retirées sur les positions

 19   permettant une défense directe de Knin. Les autres unités arrivent encore à

 20   tenir leurs positions."

 21   Et ensuite la réponse suivante se lit :

 22   "La HV dans la direction de Grahovo vers Knin, avérée réussie. Elles

 23   avaient enregistré quelques succès à Velebit, et réussi à conquérir et à

 24   prendre Mali Alan. Et par la suite, elles ont réussi en partie, notamment,

 25   à Banija."

 26   Et si nous descendons encore quelques lignes plus bas, il est dit :

 27   "Il y a un danger de partager des parties de la Krajina. A l'heure

 28   actuelle, nous avons entamé l'évacuation de la population de la Dalmatie

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  1   pour les empêcher d'être capturées, parce que Knin et les communications

  2   qui permettent d'aller vers Knin sont en danger. Et une défense persistante

  3   permettra de créer les conditions nécessaires pour que cette tâche soit

  4   menée à bien. Si la VRS réussit à imposer une pression aux forces qui

  5   attaquent en direction de Grahovo et Knin, nous devrions pouvoir stabiliser

  6   la défense et passer à la contre-attaque."

  7   Est-ce que cela rafraîchit votre mémoire, vous souvenez-vous avoir fait

  8   cette déclaration sur Radio Belgrade dans la soirée du 4 ?

  9   R.  Je crois que nous avions des difficultés à communiquer dans la soirée

 10   pour des raisons techniques parce que le répéteur avait été détruit. En

 11   tout cas, je répète que je n'avais jamais l'habitude de donner des

 12   déclarations pour la télévision ou la radio à Belgrade. Peut-être que j'ai

 13   parlé avec quelqu'un que je ne savais pas qu'il représentait une radio ou

 14   une télévision. Mais en tout cas, ce n'est pas moi qui ai établi la liaison

 15   technique parce que c'était impossible. Mais ce qui est dit ici correspond

 16   à peu près aux déclarations des commandants de corps d'armée. Moi, je ne

 17   peux pas aujourd'hui vous dire les choses avec une totale exactitude sur la

 18   base de mes souvenirs, est-ce que je l'ai fait, est-ce que je ne l'ai pas

 19   fait. Vous savez, pour moi, ça c'est un document. J'aimerais que vous me

 20   montriez d'autres documents établis sur la base de ce qui s'est passé à la

 21   télévision ou à la radio à l'époque. Moi, en tout cas, ce n'était pas mon

 22   habitude, je n'aimais pas qu'on me prenne en photos, je n'aimais pas être

 23   mis en avant.

 24   Q.  Bien. Je voudrais maintenant vous poser une autre question. Est-ce que

 25   vous avez parlé avec Frenki Simatovic dans la soirée du 4 août par

 26   téléphone ?

 27   R.  Non, Frenki Simatovic, je ne l'ai pas vu pendant l'opération menée en

 28   Bosnie occidentale, je n'ai pas parlé avec lui au téléphone, et lui n'avait

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  1   pas non plus l'habitude de m'appeler.

  2   Q.  Est-ce que vous avez parlé à Jovica Stanisic dans la soirée du 4 août ?

  3   R.  Je n'ai pas eu de conversation avec Jovica Stanisic à cause du problème

  4   des moyens de communication, mais un télégramme est arrivé qui disait qu'il

  5   fallait tenir encore quelques jours et que la communauté internationale

  6   allait changer d'avis et se lancer dans le sauvetage du peuple serbe de

  7   Krajina. Enfin, c'était le sens du télégramme, je ne me rappelle pas les

  8   mots exacts, si c'est à cela que vous pensez. Peut-être que vous l'avez ce

  9   télégramme, je ne sais pas. C'était des encouragements, des encouragements,

 10   mais je n'ai pas eu de contact direct avec lui, je n'ai pas parlé avec lui,

 11   je n'ai pas entendu sa voix, et lui n'a pas entendu la mienne, parce qu'il

 12   était impossible de communiquer avec le président Milosevic, il était

 13   impossible de communiquer avec Martic; les moyens de communication étaient

 14   détruits. Et je sais seulement que ce télégramme est arrivé, et qui disait

 15   : Tenez bon et quelque chose de bon va se produire; ce qui est normal. Si

 16   j'avais été à Belgrade avec des gens dans la même situation que moi à Knin,

 17   j'aurais fait la même chose.

 18   Q.  Pouvez-vous nous dire pourquoi M. Jovica Stanisic vous enverrait un

 19   télégramme et vous donnerait des conseils pour tenir bon ?

 20   R.  Je ne sais pas pourquoi. C'était sans doute le résultat d'une position

 21   politique prise en Serbie au sommet de l'Etat, peut-être au niveau du

 22   président et des structures supérieures de l'Etat, décision selon laquelle

 23   il fallait continuer à tenir sous la pression pendant quelques jours et

 24   qu'ensuite, la communauté internationale allait changer d'avis par rapport

 25   à l'agression due à la Croatie et qu'un terme serait mis à tout cela et que

 26   l'on rechercherait une solution pacifique, dans le cadre de ce qui avait

 27   été proposé dans le plan Z-4, dans le plan d'armement conjoint, dans le

 28   plan de je ne sais plus tout ce qui a été proposé pour renforcer la

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  1   population. Je ne sais pas pourquoi, c'est à lui qu'il faut poser la

  2   question et pas à moi. Mais ce que je vous ai dit s'agissant de ces

  3   motivations, ce sont mes suppositions.

  4   Q.  Quel était le nom réel de la personne qui était appelée par le surnom

  5   ou le pseudo "Medo" et qui était un associé de Jovica Stanisic ?

  6   R.  Bien, on l'appelait "Medo" sans doute parce qu'il était un petit peu

  7   rond. Alors, on l'appelait tous "Medo". De toute façon, ces hommes ne

  8   communiquaient jamais entre eux en s'appelant par leurs prénoms.

  9   Q.  Pouvez-vous expliquer à la Cour quel a pu être le rôle de Medo, qui

 10   était-il par rapport à Jovica Stanisic ?

 11   R.  Je ne sais pas, je ne sais pas, c'était un homme qui était aux côtés de

 12   Jovica Stanisic. Maintenant, quelles étaient ses fonctions, ce qu'il

 13   faisait ? Je ne sais pas. Où il se trouvait physiquement ? Je ne l'ai

 14   jamais su. Je ne pouvais pas poser la question non plus. Il est

 15   vraisemblable qu'il menait à bien des petites actions à eux, je ne sais

 16   pas.

 17   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, pouvons-nous avoir la

 18   pièce D441, à l'écran, s'il vous plaît.

 19   Q.  Il s'agit d'un rapport dont je sais que vous ne l'avez jamais vu. C'est

 20   un rapport du gouvernement croate. Si vous le regardez bien, c'est un

 21   rapport daté du 1er août, secteur des forces spéciales de police. Il dit :

 22   "Une section des Bérets rouges, des soldats du capitaine Dragan, du centre

 23   d'entraînement des forces spéciales, est arrivée dans le secteur de Gracac.

 24   "Et un projet, un plan a été mis en place pour évacuer la population

 25   civile de la région de Gracac vers Srb, de la Republika Srpska."

 26   Maintenant --

 27   R.  Je ne me rappelle pas. Je sais qu'à Bruska, il y avait une espèce

 28   de centre, un centre dirigé par le capitaine Dragan à Bruska. Dans la

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  1   pratique, c'était un centre destiné aux hommes de la reconnaissance.

  2   C'était des responsables de la reconnaissance, ils utilisaient un GPS et ce

  3   genre de matériel technique. Ils entraînaient les responsables de la

  4   reconnaissance et ils portaient les uniformes normaux de la République

  5   serbe de Krajina. Ils ne s'appelaient pas les Bérets rouges, et ce que je

  6   vois ici dans ce document, c'est la première fois que je le vois. Moi, je

  7   ne suis absolument pas au courant. Qu'est-ce que c'est ça, Bartele,

  8   Bartele, un camp à l'ONURC ? Non. A mon époque, quand je suis allé là-bas

  9   pour mettre de l'ordre, je crois me rappeler qu'il y en a pas mal parmi eux

 10   qui sont partis. Ils ne voulaient plus être sous mes ordres.

 11   Il y a eu désarmement. Quand même je veux continuer, j'ai désarmé

 12   certains de ces hommes. J'ai décidé qu'ils n'avaient plus le droit

 13   d'utiliser des véhicules de la FORPRONU. Ceux qui allaient manger et boire

 14   gratis dans certains endroits, j'ai rétabli l'ordre, il fallait qu'ils

 15   restent sur le front.

 16   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, pouvons-nous avoir la

 17   pièce D948.

 18   Q.  Bien, Mon Général, je vais vous lire des passages de ce qui est en fait

 19   une conversation téléphonique qui a été interceptée, le 4 août à 21 heures

 20   58. Dans la première partie de cette conversation, il est question de

 21   Zezelj. Pouvez-vous nous dire qui est Zezelj ?

 22   R.  Je ne sais pas, c'est la première fois que je l'entends. Zezelj,

 23   c'était un général, un certain moment, le commandant de la garde, natif de

 24   la Lika.

 25   Q.  Pouvons-nous descendre maintenant sur l'écran pour aller jusqu'à la

 26   ligne où il est dit :

 27   "M : Et, où est Mile ?

 28   "G : Il est ici.

Page 18959

  1   "M : Alors passe-le-moi."

  2   Ensuite, au fil de la conversation, il parle au général Miletic à qui il

  3   s'adresse en l'appelant Mrkso.

  4   Ensuite : "G : Bonjour, Medo."

  5   Et ensuite, la conversation continue. Si on descend, on voit que G dit :

  6   "G : Le reste, étant donné les batailles, le reste va bien. Il y a eu des

  7   choses qui se sont passées à Velebit. Mais vous, vous vous êtes bien

  8   débrouillés les gars. Il y a un de vos types qui a été blessé."

  9   Et ensuite, M répond :

 10   "Oui, je sais, il y en a eu même deux. D'accord" - là il manque le verbe -

 11   "Je te vois dans 24 heures."

 12   Puis G Dit :

 13   "G : Oui, c'est fini ici. Le secteur de Knin est en train d'être vidé et on

 14   réorganise les déplacements, les transferts.

 15   "M : Alors, vous pouvez aller à la ville ?"

 16   "G : Oui, nous allons défendre Knin demain et après demain, et de

 17   toute façon, nous pouvons. "

 18   Alors, tout d'abord, pouvez-vous nous dire si la personne que vous

 19   appelez Medo avait envoyé ses propres forces dans le secteur de Velebit le

 20   4 août ?

 21   R.  Je ne sais même pas quels étaient les effectifs qu'il avait sous

 22   ses ordres et je ne sais pas quelle était sa mission. D'ailleurs, ce Medo

 23   n'aurait pas pu parler en ces termes avec moi. Si le langage sur le plan de

 24   la hiérarchie militaire avait été convenable, peut-être que j'aurais pu

 25   croire dans la véracité de ce document.

 26   Q.  Poursuivons --

 27   R.  Ça n'a aucun sens, tout ça. "Mrkso", "Mrkso" personne ne m'a

 28   jamais appelé Mrkso.

Page 18960

  1   Q.  Mon Général, sur une ligne de front en combat, par exemple,

  2   pendant un combat, est-ce que vous utiliseriez toujours votre nom en

  3   entier, le titre aussi en entier, si vous parliez au téléphone ?

  4   R.  J'ai un pseudo militaire secret. Les commandants le savent bien

  5   en temps de guerre. En temps de paix, on utilise son nom et son grade. Je

  6   m'appelais Lasta, Lastrep, une montagne, Zemlja, tous les commandants sont

  7   au courant de cela, ils le savent.

  8   Q.  En d'autres termes, donc vous êtes d'accord, dans une situation

  9   de guerre vous n'avez pas utilisé votre propre nom lors d'une communication

 10   téléphonique ?

 11   R.  Mais j'avais ma dénomination. Celui qui parle avec moi au téléphone,

 12   connaît ma voix. Je n'ai pas besoin de me présenter, dans ce cas-là. Ici,

 13   on voit, commandant Mrkso.

 14   Q.  Ensuite, il est dit :

 15   "G : Knin est en train d'être vidé et on organise le transfert."

 16   Et ensuite, votre ami dit :

 17   "Pouvez-vous aller à la ville ?"

 18   Et ensuite vous dites :

 19   "Un ami X et autres personnes ont participé à la conversation. "

 20   R.  X, c'est ça ?

 21   Q.  Oui. X dit :

 22   "La situation n'est pas aussi mauvaise qu'elle en a l'air. Ils n'ont rien

 23   fait.

 24   Ensuite G dit :

 25   "Nous allons nous battre demain. Quels sont les effectifs, quelles sont les

 26   forces exactes…"

 27   Nous pouvons tourner la page, s'il vous plaît, dans la version anglaise.

 28   Et ensuite X dit :

Page 18961

  1   "Oui, on ne peut pas faire autrement. Il faut terminer, il faut qu'ils

  2   terminent le boulot rapidement. Le problème c'est à Gracac, dans la

  3   vallée."

  4   Et G dit la chose suivante :

  5   "G : Je sais, je les ai envoyés là-bas, et ensuite la ligne s'est rompue et

  6   j'ai envoyé des unités là-bas."

  7   Et X dit :

  8   "Crvena Zemlja, ce ne sont que des collines, des pentes et ils ne peuvent

  9   vous atteindre. "

 10   "G : Mais qu'est-ce que vous voulez dire par ils ne peuvent nous

 11   atteindre ? Ils sont là, ils observent Knin depuis là-haut."

 12   Et ensuite, la conversation se poursuit un petit peu plus loin de la

 13   façon suivante, X dit :

 14   "Ne les attendez pas là-bas, ne les attendez pas là-bas à Mrkso. Il faut

 15   garder Gracac."

 16   Bien. Alors, parlons en termes généraux si vous le voulez bien. Le 4 au

 17   soir, pourquoi était-il important pour vous de tenir Gracac ?

 18   R.  J'ai déjà expliqué cela hier ou avant-hier, je ne sais plus. Gracac est

 19   tombée, ce qui implique l'ouverture du passage vers Srb, il était possible

 20   à partir de là de couper complètement toutes les forces de leur base. Mais

 21   la conversation que vous venez de me montrer, enfin -- on en parlera plus

 22   tard.

 23   Q.  Si vous aviez tenu Gracac, si vous aviez été en mesure de défendre

 24   Gracac et d'empêcher les forces de la HV d'entrer dans Gracac, alors est-ce

 25   que vous auriez eu l'intention à ce moment-là de défendre Knin ?

 26   R.  Mais je crois que Gracac est tombée aussi.

 27   Q.  Mais je voudrais que nous revenions à la soirée du 4 août. Vous faites

 28   tout pour empêcher la HV d'entrer dans Gracac. Et ma question est la

Page 18962

  1   suivante : si vous aviez pu tenir Gracac, comment auriez-vous ensuite

  2   défendu Knin?

  3   R.  Knin, nous n'avions pas le moyen de la défendre, d'empêcher qu'ils n'y

  4   pénètrent. Mais nous avions les moyens de les empêcher d'aller au-delà de

  5   Knin, c'était ça l'objectif, et c'est pour cela que le 7e Corps d'armée, le

  6   Corps de Dalmatie, ne devait pas être encerclé. C'était ça l'objet des

  7   questions que vous m'avez posées au sujet des positions que nous avons

  8   décidé de tenir. Notre objectif c'était d'empêcher d'arriver dans une

  9   situation où les forces adverses pouvaient entrer dans notre dos, dans la

 10   localité de Srb.

 11   Vous voyez, tout ça c'est très compliqué. Avec la chute de Grahovo, tout

 12   est devenu très, très compliqué, et toute l'opération de défense est

 13   devenue insensée.

 14   Q.  Pouvons-nous tourner la page en anglais, s'il vous plaît. Et vous voyez

 15   une ligne où G aurait dit :

 16   "Toutes les ressources de transmission de communication ne fonctionnent

 17   plus. Ils ont tout fermé. Je n'ai plus rien, ni téléphone, ni radio, ni

 18   télévision, ni rien."

 19   Donc, je voudrais vous poser une question d'ordre général. Est-ce que tous

 20   les moyens de communication étaient effectivement rompus le 4 août?

 21   M. RUSSO : [interprétation] Je voudrais juste faire une objection quant à

 22   la façon dont cette pièce est utilisée.

 23   On ne demande pas au témoin s'il est d'accord avec ce qui est dans

 24   cette pièce. Je crois qu'il faut demander au témoin s'il a connaissance de

 25   cette conversation ou pas.

 26   M. MISETIC : [aucune interprétation]

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette question lui a été posée, et

 28   il a fait un commentaire plutôt que de répondre directement à la question,

Page 18963

  1   c'est ce qui fait que la situation est un petit peu ambiguë. Je crois que

  2   ce qu'a fait Me Misetic, c'est de poser des questions sur des aspects qui

  3   sont également discutés dans la conversation.

  4   Et en même temps, Maître Misetic, je vous encourage à traiter de ces

  5   questions sans lire de trop grandes parties de la conversation.

  6   M. MISETIC : [interprétation] D'accord, Monsieur le Président. La Chambre

  7   doit pouvoir évaluer la valeur probante sur la base --

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais la Chambre le fait toujours.

  9   Donc il va sans dire que la Chambre le fera.

 10   M. MISETIC : [interprétation] Oui, mais ce que je suis en train de dire,

 11   c'est dans la mesure où d'une façon générale un témoin dit que des choses

 12   ont été discutées et correspondent ou non à ses souvenirs, cela permet

 13   d'accroître, d'augmenter la valeur probante d'un document.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez aussi lui poser la question

 15   de savoir -- des questions sans faire allusion d'abord à la conversation, à

 16   la télévision, par exemple.

 17   Alors je vous demanderais de poursuivre.

 18   M. MISETIC : [interprétation] Et aussi, Monsieur le Président,

 19   l'authenticité de ce document n'est pas remise en question.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo.

 21   M. RUSSO : [interprétation] Je ne crois pas que ce soit là la question,

 22   Monsieur le Président.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais en même temps, ce n'est pas

 24   totalement étranger à cela. Si vous pouviez considérer que cela est une

 25   conversation entre plusieurs personnes, et alors --

 26   M. RUSSO : [interprétation] Monsieur le Président, Il n'y a pas eu de

 27   témoignage précédent sur qui a participé à cette conversation.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que c'est une question quant au

Page 18964

  1   contenu de ces documents, à savoir s'il y a des indices sur qui sont les

  2   personnes en question. Donc il faut être plus explicite et, par exemple, la

  3   réponse pourrait être : Il est inimaginable que quelqu'un ait pu s'adresser

  4   à moi de telle ou telle façon. Donc cela pourrait, en d'autres termes, être

  5   des questions qui sont posées de façon plus factuelles pour que le témoin

  6   puisse expliquer quelle a été sa participation à telle ou telle

  7   conversation telle qu'elle est représentée dans ces pièces.

  8   M. MISETIC : [interprétation] Bon. Je vais reprendre ces conversations,

  9   mais je voudrais poser la question suivante.

 10   Q.  Mon Général, en dehors de Frenki Simatovic, est-ce que vous connaissez

 11   d'autres personnes qui se prénomment Frenki ?

 12   R.  Non, ce document, moi je ne peux pas admettre que j'ai participé à

 13   cette conversation téléphonique, parce que ce qui est écrit ici est

 14   totalement étranger à moi.

 15   Q.  Continuons. Je voudrais vous poser la question suivante. En dehors de

 16   Jovica Stanisic, en 1995, est-ce que vous connaissiez quelqu'un qui se

 17   prénommait Jovica et qui avait un poste d'autorité en Yougoslavie, en

 18   Republika Srpska, ou en République de Krajina Srpska ?

 19   R.  Quelqu'un qui aurait de l'importance, un autre qui aurait de

 20   l'importance et qui avant le même prénom, non, je n'en ai pas connu. Si ça

 21   avait été quelqu'un d'important pour moi, je crois que ce serait resté

 22   inscrit dans ma mémoire.

 23   Vous m'avez posé des questions au sujet de l'électricité. Ça, vous

 24   avez renoncé à ces questions ?

 25   Q.  Parfois mes collègues arrivent de me détourner de la question

 26   principale à laquelle je voulais faire allusion. Donc revenons à cette

 27   question-là, et pouvez-vous me dire quand quel état se trouvait les moyens

 28   de communication le 4 août ?

Page 18965

  1   R.  A cause des tirs de l'aviation à partir des bateaux, et ça les généraux

  2   le savent, à cause du brouillage électronique des communications, à cause

  3   de la vétusté du matériel dont je disposais, à partir de 14 heures à peu

  4   près, je n'ai eu absolument aucune possibilité d'utiliser un moyen de

  5   transmission quelconque, à part les communications virtuelles, comme à

  6   l'époque des partisans. La télévision était coupée, il n'y avait pas

  7   d'électricité. Il y avait un nouvel émetteur de télévision, la télévision

  8   était la même, mais les images et les émissions étaient différentes, et moi

  9   on a proclamé ma mort. Ma mère a annoncé la nouvelle de ma mort et m'a

 10   pleuré.

 11   Q.  Je voudrais vous poser une question. Dans le cadre des transmissions,

 12   est-ce que les transmissions passaient donc par les PTT ?

 13   R.  Non, les PTT ne fonctionnaient pas. Il n'y avait que ces deux lignes,

 14   si vous vous en souvenez, qui se trouvaient le long des rails de chemin de

 15   fer, seulement ces deux lignes fonctionnaient encore. C'était le système le

 16   plus moderne qui avait été mis en place chez nous avec des lignes

 17   enterrées, des lignes aériennes, des moyens électroniques dissimulés très

 18   particuliers pour le temps de guerre, qui étaient destinés à semer la

 19   panique.

 20   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, pouvons-nous prendre la

 21   pièce D1463, s'il vous plaît.

 22   Q.  Vous souvenez-vous avoir reçu la promesse que 200 hommes, ou en tout

 23   cas avez-vous reçu une promesse de voir l'arrivée de 200 hommes de la DB

 24   serbe arrivés à Knin le 5 août ?

 25   R.  Maître Misetic, si deux brigades étaient arrivées, cela aurait été

 26   insuffisant. Alors 200 hommes des services de Sûreté de l'Etat serbe, enfin

 27   ça peut peut-être tromper des enfants en bas âge, comme quand on leur donne

 28   des bonbons. Ce sont des petits jeux ridicules, non, non.

Page 18966

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A savoir si cela vous aurait aidé, c'est

  2   une autre question. Mais la question qui vous a été posée était tout

  3   simplement la suivante, si vous vous souveniez avoir reçu cette promesse de

  4   recevoir l'aide de 200 hommes de la DB serbe qui auraient pu venir à Knin;

  5   ça, c'était la promesse qui vous a été faite. Est-ce que cette promesse

  6   vous a été faite, oui ou non, est-ce que vous en souvenez ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, à moi, non.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Passons à la question suivante.

  9   M. MISETIC : [interprétation]

 10   Q.  Vous souvenez-vous d'une conversation où il aurait pu y avoir M. Martic

 11   au téléphone avec M. Stanisic où ils se seraient plaints du comportement de

 12   M. Milosevic ?

 13   R.  Ça, je ne suis pas en mesure de le commenter. Je sais qu'il était

 14   furieux contre le président Milosevic, je parle de Martic. Maintenant avec

 15   qui il a discuté, ça, je ne pouvais pas lui poser la question, nous

 16   n'étions pas assis l'un à côté de l'autre en permanence pour que je puisse

 17   lui demander avec qui il parlait au téléphone. Est-ce peut-être à lui

 18   quelqu'un aurait promis l'arrivée de ces 200 hommes, je ne sais pas. Moi,

 19   en tout cas, personne ne me l'a promis. Je trouve que c'est une proposition

 20   qui manque totalement de sérieux.

 21   Q.  Hier, vous nous avez parlé du 11e Corps de la Slavonie orientale, et

 22   vous nous avez dit que ce corps n'avait jamais procédé à des attaques en

 23   dehors de la Slavonie orientale. Et, dans la conversation qui était sur

 24   l'écran, M dit la chose suivante :

 25   "M : Rien sans un ultimatum. Est-ce que ceux du 11e Corps sont partis ? Je

 26   ne le crois pas. Est-ce qu'il les a arrêtés ?

 27   Et J répond :

 28   "J : Ils travailleront demain.

Page 18967

  1   M ensuite répond :

  2   "Est-ce qu'ils ont fait ça ? Franchement, je ne me rappelle de rien. Il les

  3   a arrêtés aussi, il m'a menti comme la dernière fois."

  4   Alors est-ce que vous vous souvenez d'une conversation téléphonique où M.

  5   Martic aurait dit que quelqu'un avait empêché le 11e Corps d'attaquer en

  6   provenance de la Slavonie orientale ?

  7   R.  Non, non, pas à l'extérieur de la Slavonie orientale, mais dans la

  8   Slavonie orientale. Fondamentalement, et ça je dois m'expliquer sur ce

  9   point.

 10   Quand j'ai accepté la mission qui m'a été confiée à Karadjordjevo  --

 11   Q.  L'heure avance.

 12   R.  Mais c'est fondamental, ce corps d'armée, Mrgud et le commandant du

 13   corps devaient travailler à la préparation des forces et à la préparation

 14   de la population pour qu'ils parviennent à survivre. Et moi, on m'avait dit

 15   : On va t'envoyer là-bas pour faire la même chose. Ces corps d'armée ne

 16   seront pas déployés, ne seront pas engagés dans les combats, et tu pourras

 17   t'en servir en cas de besoin. C'est une question qu'il faut poser à Franjo

 18   et à Milosevic.

 19   Q.  Nous ne pouvons pas leur poser ces questions.

 20   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que nous

 21   allons maintenant avoir une pause pour que chacun ait la possibilité. Dans

 22   cette conversation, si nous prenons la page en anglais, et si nous nous

 23   arrêtons juste au milieu de la page, il y a une référence à la chose

 24   suivante où MRK dit :

 25   "MRK : Personne ne s'attendait à ce qu'ils attaquent la ville. Je n'ai pas

 26   attaqué Zagreb. Les salauds. C'est pourquoi je frapperai demain."

 27   LE TÉMOIN : [aucune interprétation] 

 28   M. MISETIC : [aucune interprétation]

Page 18968

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Misetic, je ne vous ai pas

  2   encore pas posé de question.

  3   M. MISETIC : [interprétation] Je vous avais dit, Monsieur le Président, que

  4   je vous informerai de toute question à discuter avant la pause.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, merci. Mais si nous voulons y

  6   réfléchir pendant la pause, nous n'avons pas accès au système du prétoire

  7   électronique. Donc j'essaie de voir exactement à quoi nous faisons

  8   allusion.

  9   M. MISETIC : [interprétation] Il s'agit d'une conversation interceptée qui

 10   a été versée au dossier, et d'après la Défense, c'est donc la conversation

 11   à 23 heures 10 entre MM. Martic, Mrksic, et Jovica Stanisic.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et donc laissez-moi jeter un coup d'œil.

 13   Donc le numéro de la pièce c'était dans une série --

 14   M. MISETIC : [interprétation] Il s'agit de la pièce D1463.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] 1463.

 16   M. MISETIC : [interprétation] Et après la pause, je voudrais également

 17   aborder la pièce D930, reprendre la pièce D930, qui est en fait le journal

 18   du général Mrksic.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avec des pages bien particulières ?

 20   M. MISETIC : [interprétation] Oui, à partir de la page 9.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour le D930…

 22   M. MISETIC : [interprétation] Oui.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et la pièce D1463, quelle est la

 24   longueur de la pièce ? Il semble que ce soit toute une série, non, ce n'est

 25   que deux pages. Donc s'il y a la possibilité d'avoir une version écrite que

 26   l'on puisse me donner pendant la pause, comme ça, je pourrais le lire parce

 27   que nous n'avons pas accès au système électronique. Donc je demande au

 28   greffier de me donner des versions écrites.

Page 18969

  1   Nous allons maintenant avoir une pause, et nous reprendrons à 12 heures 55.

  2   [Le témoin quitte la barre]

  3   --- L'audience est suspendue à 12 heures 36.

  4   --- L'audience est reprise à 12 heures 58.

  5   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Misetic, vous espériez pouvoir

  7   terminer aujourd'hui. Pensez-vous que ce sera possible ?

  8   M. MISETIC : [interprétation] Je ferai de mon mieux pour que cela soit

  9   terminé aujourd'hui à 1 heure 45, Monsieur le Président.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 11   [Le témoin vient à la barre]

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Maître Misetic.

 13   M. MISETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 14   Q.  Général Mrksic, je voudrais maintenant vous montrer la pièce D930; il

 15   s'agit de la page 10 de la version anglaise, et de la page 9 de la version

 16   B/C/S. Je voudrais vous montrer cet extrait d'un livre rédigé par Marko

 17   Vrcelj. Vous souvenez-vous de qui il s'agissait ?

 18   R.  C'était le chef de l'artillerie.

 19   Q.  Oui. Au milieu de la page 9 de la version B/C/S, et en bas de la page

 20   10 de la version anglaise - un petit peu plus bas, s'il vous plaît - il est

 21   dit :

 22   "Dans l'après-midi, lorsque le commandant de l'Orkan m'a parlé pour

 23   terminer les tâches qui lui avaient été ordonnées, il m'a donné l'ordre de

 24   m'apprêter à tirer sur les cibles militaires…"

 25   Si nous pouvions passer à la page suivante de la version anglais, s'il vous

 26   plaît :

 27   "…à Zagreb et à Dubo Selo, et les tirs devaient commencer à 7 heures le

 28   lendemain matin."

Page 18970

  1   Et ensuite, si nous descendons jusqu'au troisième paragraphe -- si l'on

  2   pouvait tourner la page en anglais, s'il vous plaît. Pourrait-on tourner la

  3   page en anglais, s'il vous plaît.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a, me semble-t-il, beaucoup

  5   d'erreurs. Vous avez commencé par dire qu'il s'agissait de la page 10 en

  6   anglais, puis vous avez commencé à lire à partir du bas de la page 9. Puis

  7   vous avez demandé de passer à la page 10, et maintenant je pense que

  8   lorsqu'on était sur le point de le faire, on a cru comprendre qu'il fallait

  9   de toute façon passer à la page suivante. Je pense qu'en fait nous devrions

 10   être sur la page 10 de la version anglaise, en haut de la page; est-ce

 11   exact, Maître Misetic ?

 12   M. MISETIC : [interprétation] Je vois la page 11 sur le prétoire

 13   électronique.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je suis en train de regarder le bas

 15   de la page -- ce que vous avez commencé à lire se trouve en bas de la page

 16   9, dans le document tel qu'il est paginé. Et si l'on pouvait maintenant

 17   revenir une page en arrière, je pense que nous serions là où nous aurions

 18   dû être.

 19   M. MISETIC : [interprétation] Oui. Mais je vois la page 11 sur le prétoire

 20   électronique.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que ce n'est pas vrai que vous

 22   avez commencé à lire ce que nous voyons maintenant en bas : "Dans l'après-

 23   midi, lorsque le commandement de l'Orkan," et cetera, vous êtes passé

 24   ensuite à la page suivante, qui est -- nous y voici. Je pense que c'est la

 25   bonne page.

 26   M. MISETIC : [interprétation] Oui.

 27   Q.  "Nous sommes allés en direction de Srb vers 3 heures du matin."

 28   Ensuite le texte se poursuit en disant :

Page 18971

  1   "En regardant les colonnes de gens qui quittaient leurs maisons pour aller

  2   vers l'inconnu, sachant que le commandement de l'Orkan avait reçu mission

  3   de tirer à Zagreb, je suis allé vers le commandant pour lui dire de ne pas

  4   tirer sur Zagreb. S'il devait tirer des obus sur Zagreb, les Oustachi

  5   auraient utilisé leur propre force aérienne et auraient mutilé des

  6   personnes innocentes. C'est la raison pour laquelle je me suis dépêché pour

  7   essayer de trouver le commandant avant 6 heures du matin, pour que nous

  8   puissions empêcher de telle catastrophe en attendant."

  9   Nous pouvons peut-être essayer de descendre le long de la version B/C/S.

 10   Et maintenant, Général Mrksic, j'aimerais vous montrer une vidéo qui

 11   concerne justement le pilonnage de Zagreb et la décision de pilonner

 12   Zagreb.

 13   Je pense qu'il s'agit de cette vidéo de 12 minutes, Monsieur le Président,

 14   et je poserai ensuite d'autres questions supplémentaires sur cette vidéo.

 15   Mais des transcripts ont été donnés aux interprètes, et nous allons nous

 16   arrêter pour permettre à la traduction de suivre.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout particulièrement si quelqu'un doit

 18   suivre la traduction, et que cela n'est pas écrit. S'il n'y a pas de sous-

 19   titres, par exemple, en français, nous ne les trouvons pratiquement jamais

 20   --

 21   M. MISETIC : [interprétation] Général, il s'agit là de la vidéo de

 22   l'entretien avec M. Martic qui remonte à l'automne de 1995. Il s'agit de la

 23   pièce D929. Et, Général, si vous voulez écouter, et une fois cela fait,

 24   j'aurai toute une série de questions à vous poser.

 25   [Diffusion de la cassette vidéo]

 26   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 27   "Ce premier jour, le 4 août, vous étiez présent vous-même au moment où Knin

 28   a été bombardée en même temps que d'autres endroits. Les Croates n'ont

Page 18972

  1   remporté aucun succès important en dehors des déplacements effectués sur

  2   les monts Dinara, à Mali Alan et à Velebit. Tout le reste s'est déroulé à

  3   peu près comme prévu, et si l'on tient compte du fait que les Croates

  4   étaient à Zagreb ce jour-là, notamment dans les abris, et qu'ils

  5   s'attendaient à une réaction par pilonnage à leur encontre, nous avons

  6   conclu qu'il n'était pas nécessaire de bombarder Zagreb dans ces premiers

  7   moments. Ce qui est très intéressant malgré tout, c'est que j'ai reçu cinq

  8   coups de téléphone ce jour-là de Milan Babic à partir du cabinet de

  9   Milosevic dans un seul but qui était de proposer que je ne bombarde pas

 10   Zagreb. J'ai pris cela de façon erronée. J'ai dit que personne n'avait

 11   l'autorité en Serbie, mais aucun représentant officiel de Belgrade ne m'a

 12   contacté; et par la suite, j'ai rencontré la même équipe et on m'a toujours

 13   dit de ne pas pilonner Zagreb.

 14   "Dans la soirée, à 19 heures 30, il y avait les nouvelles à la

 15   télévision de Croatie. Nous avions un générateur qui produisait de

 16   l'électricité au QG, et les Croates ont annoncé la fin des frappes

 17   aériennes à Zagreb parce que des généraux à eux - Tolj, je crois qu'il

 18   s'appelait -- avaient dit que tous les citoyens pouvaient sortir de leurs

 19   abris à Zagreb parce que les Serbes, en principe, n'avaient pas une portée

 20   nécessaire pour atteindre Zagreb. Par la suite, j'ai envoyé au général

 21   Mrksic l'ordre de bombarder Zagreb avec tous les moyens dont il disposait

 22   et avec toutes les munitions que nous avions."

 23   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 24   M. MISETIC : [interprétation]

 25   Q.  Général, nous allons faire une pause juste là, et je voudrais vous

 26   poser une question. Nous allons ensuite reprendre la vidéo. Mais dans la

 27   mesure où c'est là la question, est-ce que vous vous souvenez d'une

 28   conversation dans la soirée du 4 avec M. Martic lorsqu'il vous a donné

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  1   l'ordre de bombarder Zagreb ?

  2   R.  M. le président Martic, voyant ce qui se passait à Knin, ne cessait de

  3   dire : pourquoi est-ce que nous ne répliquerions pas contre Zagreb ? Moi,

  4   ça, je ne pouvais pas l'accepter. J'ai dit que je voulais que tout se fasse

  5   dans l'ordre; et malgré tout, j'ai donné l'ordre à l'artillerie de battre

  6   en retraite rapidement, de ne pas aller sur les positions de tir, parce que

  7   ça, c'aurait été un danger supplémentaire. A mon avis, ça aurait été lâche.

  8   Celui qui est faible ne sait plus quoi faire et puis tout d'un coup, il se

  9   met à tirer sur les cibles civiles. Ça, ce sont des cibles qui ne peuvent

 10   pas être prises en considération. Je voulais que le plan de guerre soit

 11   respecté, et ça, ça avait été modifié dans le plan de guerre.

 12   Q.  Je souhaiterais vous poser la question suivante : savez-vous pourquoi

 13   M. Vrcelj a donné l'ordre de pilonner Zagreb ?

 14   R.  Vrcelj, c'était un acte automatique, voyez-vous. Si vous n'avez pas de

 15   moyen de communication, vous fonctionnez automatiquement. Ils l'ont fait à

 16   partir des positions qu'ils occupaient. Ils ont pris la route pour se

 17   rendre sur les positions de tir, et à ce moment-là, j'ai envoyé un message

 18   leur disant qu'il ne fallait pas qu'ils aillent sur ces positions de tir

 19   pour se mettre à tirer sur des cibles à Zagreb. Une des raisons de tout

 20   cela qui m'a motivé, c'est que c'est interdit au terme des conventions de

 21   Genève, parce qu'à Zagreb, c'était des cibles civiles. Moi, j'étais attaqué

 22   par des brigades à partir des monts Dinara. Je n'étais pas attaqué à partir

 23   de Zagreb.

 24   M. MISETIC : [interprétation] Nous allons maintenant regarder le reste de

 25   la vidéo.

 26   [Diffusion de la cassette vidéo]

 27   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 28   "Malheureusement, mon ordre n'a rien donné, mais les choses sont

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  1   devenues encore plus intéressantes. Ils ont remplacé le commandant du Corps

  2   de Kordun, le colonel Veljko Bosanac, dans mon dos, par crainte que je

  3   m'adresse directement à lui pour lui donner l'ordre d'une telle attaque,

  4   parce qu'il disposait de certains atouts là-bas. Ils l'ont remplacé à son

  5   poste et ont nommé un nouveau type de façon à ce que l'ordre ne puisse pas

  6   être exécuté; et malheureusement, pas un seul obus n'est tombé sur Zagreb,

  7   même si nous avions des millions de raisons de tirer. Et puis, c'est le

  8   pire des scénarii qui s'est déroulé à ce moment-là. Pendant une brève

  9   absence de ma part, un ordre écrit quelques mois précédemment à Belgrade a

 10   été émis qui exigeait une action conforme aux ordres de retrait de l'armée,

 11   et je n'en ai jamais eu connaissance."

 12   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais tout ça, ça n'a absolument aucun sens.

 14   Ça, c'était à Banja Luka.

 15   [Diffusion de la cassette vidéo]

 16   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 17   "Le journaliste : Ce malheureux jour du 4 août, quel a été le dernier

 18   ordre que vous avez donné en tant que commandement Suprême ?

 19   "Milan Martic : "Mon dernier ordre, c'est ce que je viens de dire, l'ordre

 20   de bombarder Zagreb aux environs de 19 heures 30, quand j'ai vu ce que les

 21   Croates étaient en train d'annoncer à la télévision. Mais avant cela,

 22   j'avais pris une décision. Malheureusement, je n'avais personne à consulter

 23   au sujet de cette décision. A 17 heures, j'avais pris la décision de

 24   retirer la population civile des villes où elle était sans cesse pilonnée,

 25   telles que Knin, Benkovac, Obrovac. Et l'ordre disait clairement que la

 26   population qui ne combattait pas devait se retirer vers des villages qui

 27   n'étaient pas pilonnés en allant au plus loin, à Srb et à Lapac, qui se

 28   trouvaient dans la Krajina mais pas dans la Sumadija. J'ai donné cet ordre

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  1   pour une seule et unique raison, et c'était parce que je me souvenais de la

  2   Slavonie occidentale et des souffrances énormes vécues par les civils à cet

  3   endroit lorsque j'ai été attaqué même par le régime serbe et par tous ceux

  4   qui avaient une politique différente de la mienne. Ça c'était une erreur.

  5   J'ai dit que je ne reproduirais pas cette erreur et que je voulais que tout

  6   le monde se retire, mais que tous ceux qui étaient capables de porter les

  7   armes à mes côtés devaient saisir un fusil dans leurs mains et combattre

  8   pour la défense de la Krajina.

  9   "J'ai dit que je n'avais personne à consulter à ce sujet et j'ai donné cet

 10   ordre, cet ordre existe jusqu'à aujourd'hui; il est sur moi. Même si par la

 11   suite, de nombreuses tentatives ont été faites pour manipuler la réalité

 12   des faits, mais c'est l'ordre qui pratiquement est la clé de tout. J'ai

 13   donné cet ordre de retrait de l'armée qui, plus tard, s'est avéré erroné

 14   parce que le même soir, j'ai proposé au général Mrksic de lancer une

 15   contre-attaque vers le mont Dinara, que j'ai personnellement dirigée, parce

 16   que je connaissais bien --"

 17   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 18   M. MISETIC : [interprétation]

 19   Q.  Général, vous souvenez-vous des discussions avec M. Mrksic la soirée du

 20   4, lorsque la contre-attaque a été lancée sur les forces croates ?

 21   R.  Cette interview, elle a eu lieu à Banja Luka. Vous savez comment ça se

 22   passe. Quand tout est fini, il faut trouver un coupable.

 23   Pourquoi est-ce que vous montrez ces images ? Ce n'est pas la peine.

 24   Quelles forces peuvent avoir de telles images ? Il y a le texte de la

 25   décision du conseil suprême de la Défense. C'est comme si on voulait me

 26   considérer comme coupable.

 27   [Diffusion de la cassette vidéo]

 28   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

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  1   "Je n'étais pas au courant de ce fameux ordre de retrait de l'armée,

  2   et je n'aurais pas pu le prévoir en me fondant sur le fait que les Croates

  3   n'avaient remporté aucun succès important jusqu'à ce moment-là. Je croyais

  4   que le lendemain serait meilleur pour nous, que les choses se dérouleraient

  5   davantage à notre avantage, et c'est sans doute ce qui se serait passé.

  6   "Mon absence du QG, qui a duré quelque deux heures, a suffi au général

  7   Mrksic pour qu'il rassemble tous ses commandants de corps d'armée qu'il

  8   avait nommés entre-temps à leurs postes où il avait placé de nouveaux

  9   hommes, et pour qu'il leur dise d'agir conformément à ce nouvel ordre qui

 10   avait été établi par Milosevic quelques mois précédemment. Il a suffi que

 11   je m'absente pendant un temps aussi court pour que ce nouvel ordre soit

 12   émis. Mon retour au QG d'où j'étais allé pour remettre en fonctionnement

 13   Radio Knin - parce que c'était une fausse Radio Knin qui émettait depuis

 14   quelque temps et qui trompait la population - quand je suis revenu au QG,

 15   j'ai été confronté avec cette situation bizarre. Tout le monde était en

 16   train de chuchoter des choses, les colonels, les généraux, et cetera, que

 17   je ne pouvais pas entendre. Mais j'ai cru que les questions débattues

 18   étaient mineures et qu'elles avaient un rapport avec des aspects techniques

 19   du commandement, et je me suis dit : Bon, ce n'est pas un problème, ce

 20   n'est rien de grave.

 21   "Plus tard dans la soirée, aux environs de minuit, j'ai demandé à me

 22   reposer un peu parce que je n'avais pas dormi depuis deux jours. Mais j'ai

 23   immédiatement reçu un appel téléphonique de M. Karadzic, de Krajisnik, les

 24   lignes fonctionnaient encore. Ils avaient besoin de me dire quelque chose,

 25   de me faire des propositions, donc je n'ai pas pu dormir. C'est la première

 26   fois à ce moment-là que Mile Mrksic m'a proposé de prendre en compte les

 27   conditions du commandement qui, à vrai dire, étaient impossibles à exercer,

 28   le commandement à partir de Knin, et qu'il fallait aller à Srb. J'ai dit

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  1   que c'était hors de question. Qu'est-ce que cela voulait dire Srb ? C'était

  2   hors de question, cela n'était acceptable sous aucune condition.

  3   "Après un certain temps, après une demi-heure de chuchotage avec des

  4   colonels, ils ont proposé que nous sortions à Padjene, qui est un lieu-dit

  5   surplombant Knin. Il y avait là un poste de commandement extraordinaire, au

  6   sens que le commandement normal n'était plus possible à tenir à l'endroit

  7   où il se trouvait, et que des tactiques devaient être mises en œuvre pour

  8   tromper les Croates."

  9   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 10   M. MISETIC : [interprétation]

 11   Q.  Général Mrksic, y avait-il une décision au départ d'évacuer ou de

 12   déménager le commandement le 4 août ?

 13   R.  Padjene, c'était le poste de commandement avancé du 7e Corps, c'est-à-

 14   dire du Corps de Dalmatie. A partir de Padjene, il était possible d'exercer

 15   le commandement sur Knin et sur les différents lieux dont nous avons déjà

 16   parlé, afin d'empêcher que les forces Croates puissent avancer jusqu'à Srb.

 17   Dans l'espace en question, le président a fait son apparition, et il est

 18   resté là pour se reposer. Moi, je ne pouvais pas attendre qu'il ait fini de

 19   dormir. J'avais mon travail à faire, parce que je devais mettre en place le

 20   système, voir comment il fonctionnerait à partir de Srb, le commandement.

 21   Et à Srb, le poste de commandement de Konacari [phon] a été déménagé

 22   aussi, ce qui est tout à fait conforme à toutes les tactiques des règles de

 23   commandement.

 24   Quant à ce qui s'est passé après la chute de Banja Luka, je préfère

 25   ne pas commenter ce qu'a dit le président dans cette période, pour être

 26   correct à son égard.

 27   [Diffusion de la cassette vidéo]

 28   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

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  1   "J'ai cédé à ce moment-là et j'ai dit que si vous allez à Padjene

  2   tout va bien. Ils ne pouvaient pas attendre, ils ont rassemblé leurs

  3   affaires, et je ne sais pas ce qu'ils avaient démonté avant au QG. En tout

  4   cas, moi je suis parti, je suis resté avec mes hommes jusqu'à 3 ou 4 heures

  5   du matin à peu près, et nous sommes partis pour Padjene, où je les ai

  6   retrouvés. D'abord, je me suis rendu compte que ce n'était pas un poste de

  7   commandement, contrairement à ce qu'on m'avait dit, c'était une espèce de

  8   système de transmission qui se trouvait là, mais pas du tout ce à quoi je

  9   m'attendrais. Mais je me suis dit, bon, je suppose qu'ils vont tout mettre

 10   en place. Ils avaient de bons officiers spécialistes des transmissions, et

 11   que les choses allaient s'améliorer. A ce moment-là, j'ai demandé à partir

 12   et à me reposer un peu, et ils m'ont immédiatement fourni une espèce de

 13   lit. Mes hommes, qui m'avaient accompagné, se sont reposés aussi un peu

 14   jusqu'à à peu près 5 heures du matin, et nous nous sommes réveillés à 8

 15   heures du matin à peu près. Il y avait des pilonnages en cours, mais cela

 16   ne m'a pas dérangé, c'était un samedi, oui, mais c'était bizarre que

 17   personne ne crie quoi que ce soit -- et tout d'un coup nous avons sursauté,

 18   et nous avons vu qu'il n'y avait aucun commandement à cet endroit. Ils

 19   avaient simplement abandonné la position sans me réveiller, ce qui est

 20   vraiment honteux.

 21   "Pendant quelques temps, nous sommes restés dans les environs de Padjene et

 22   à peu près à 10 heures du matin, je suis allé chercher le commandant, et

 23   c'est seulement à ce moment-là que je me suis rendu compte de ce que je

 24   n'avais pas prévu, à savoir que j'avais rencontré une unité qui se trouvait

 25   à Zitnic, et dans les rangs desquels se trouvait probablement des hommes de

 26   Padjene et de Kravlja Draga, comme nous les appelions. J'ai demandé à ces

 27   hommes où ils allaient, et ils m'ont dit avoir reçu l'ordre de se retirer.

 28   Quels ordres de retrait, leur ai-je dit. Rebroussez chemin. L'ordre de

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  1   retrait n'est pas valable. J'ai rencontré leur commandant, le colonel

  2   Davidovic, et je lui ai demandé : Mais mon gars, à quoi ça ressemble,

  3   qu'est-ce que ça veut dire ? Les soldats l'ont entouré, ils l'ont défendu,

  4   ils ont dit il ne faut rien lui reprocher, il a reçu un ordre. Il se

  5   comportait comme un condamné.

  6   "Au sommet d'Otric, j'ai eu besoin de quelques heures pour faire ma percée.

  7   J'ai rencontré une brigade qui venait des monts Dinara. Maintenant, on ne

  8   peut qu'émettre des supputations de ce qu'ils ont fait quand ils sont

  9   partis, et c'est là que j'ai rencontré notre colonel Radic, qui s'arrachait

 10   les cheveux, qui disait : Ne me demande rien, ne me demande pas quoi que ce

 11   soit, et cetera. J'ai vu que la situation était bizarre. Je me suis dis :

 12   Mais où est Mrksic ? Il a répondu qu'il était à Srb. Ils m'ont dit qu'ils

 13   avaient tous pris la fuite vers Srb. J'ai eu besoin de quelques heures

 14   aussi pour comprendre à partir de Srpski Klanac ce qui s'est passé. Je ne

 15   pouvais pas faire de percée. Je suis allé à Srb à pied pour les rencontrer

 16   simplement, pour trouver le fameux QG qui n'avait pas de commandement. Ils

 17   n'avaient pas de téléphone. J'ai vu que tout était pratiquement perdu. J'ai

 18   dit à Mile ce que tout cela signifiait. J'ai dit : Mile, mais qu'est-ce que

 19   ça signifie tout ça ? Est-ce que vous avez une police militaire à votre

 20   disposition ? Arrêtez ces hommes, je vais leur parler. J'ai vu qu'il n'a

 21   pas fait la moindre tentative. Il a dit : Mais vous savez, nous le ferons à

 22   Petrovac."

 23   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 24   M. MISETIC : [interprétation]

 25   Q.  Général Mrksic, je voudrais vous poser la question suivante. Le 5 août

 26   lorsque vous étiez à Srb, est-ce que vous disiez déjà à M. Martic que vous

 27   aviez commencé à arrêter des gens une fois arrivé à Petrovac ?

 28   R.  Non, non. Tout ça maintenant, je ne vais pas faire le moindre

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  1   commentaire sur qui il fallait rejeter la responsabilité. Moi, cette

  2   culpabilité, je la porte de façon permanente. C'est la raison pour laquelle

  3   je vous remercie de m'avoir fait témoigner.

  4   Q.  Je ne vais pas vous montrer le reste de la vidéo parce que je veux

  5   terminer aujourd'hui, mais je voudrais vous demander la chose suivante :

  6   dans la vidéo, il est dit que vous lui avez dit le 5 que vous commenceriez

  7   à arrêter les gens une fois que vous arriveriez à Petrovac. Est-ce que

  8   c'était donc votre intention le 5 de rester à Srb et de continuer à monter

  9   une défense contre les forces de la HV ?

 10   R.  Vous savez que le 4 dans la soirée, j'ai distribué des missions aux

 11   brigades du Corps de Knin en leur donnant leurs lieux de déploiement. Je

 12   leur ai dis ce qu'il fallait faire pour empêcher une arrivée des autres

 13   depuis Gracac, et j'ai dit qu'il y avait encore l'espoir de trouver une

 14   solution politique, que c'était sur les positions qui se trouvaient là

 15   qu'il fallait combattre.

 16   Et que dès le lendemain, selon moi, il fallait envoyer un hélicoptère

 17   à partir de la Republika Srpska, c'est ce qui s'est fait. L'hélicoptère est

 18   arrivé à Srb, et on m'a emmené à Pale où se trouvait Mladic, qui m'a dit :

 19   Il est urgent que vos hommes se battent à Banija et à Kordun. Donc j'ai

 20   transféré le théâtre des opérations là-bas.

 21   Q.  Mon Général, voici l'ordre dont nous avons parlé hier.

 22   Vous avez donc émis un ordre le 5 août visant à continuer à

 23   constituer une ligne de défense; c'est bien cela ?

 24   R.  Oui, oui.

 25   Q.  Passons donc à la page 2 de la version anglaise, c'est la partie qui

 26   commence juste sous le titre "Ordres." 

 27   En fait, le 5, à nouveau, vous avez essayé d'établir une nouvelle ligne de

 28   front contre les forces de la HV qui avançaient; c'est bien cela, comme on

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  1   le voit au paragraphe 1 ?

  2   R.  Oui, c'est ça.

  3   Q.  Etiez-vous à Srb le 6 ?

  4   R.  Non. Le 6, on m'a évacué, on m'a fait sortir, on m'a extrait de Srb.

  5   J'ai passé la nuit au nouveau poste de commandement, au poste de

  6   commandement avancé.

  7   Après quoi, je suis parti à Ostrelj à bord de l'hélicoptère, et j'ai

  8   poursuivi immédiatement ma route vers Bosanski Novi.

  9   Q.  Maintenant, par le paragraphe 1 dans l'ordre, vous dites :

 10   "Nous avons parlé d'un endroit du nom de Novi Grad." Vous dites que vous

 11   avez parlé de Bulina Strana et d'une unité qui devait être envoyée à Bulina

 12   Strana pour assurer la défense de Knin.

 13   Est-ce que cela vous rappelle quelque chose, est-ce que vous savez ce

 14   qu'est Bulina Strana ?

 15   R.  Mais c'était où, ça ? C'était au-dessus de Knin, en surplomb de Knin,

 16   les toutes petites routes enlacées qui sortent, qui partent de Knin. Mais

 17   ça, ce n'est qu'une supposition de ma part parce que je n'ai pas de carte

 18   sous les yeux.

 19   Q.  Lorsque vous avez quitté Srb le 6, est-ce que vous aviez l'intention de

 20   continuer à résister aux forces de l'armée croate qui avançaient vers Srb ?   

 21   R.  L'idée c'était de rester là, de nous immobiliser et de poser une

 22   résistance, parce que nous pensions que quelque chose devait se passer du

 23   côté de la communauté internationale, que la communauté internationale

 24   n'allait sans doute pas supporter et autoriser un exode de la population

 25   serbe de la République de Croatie vers la République de Serbie et vers la

 26   Bosnie-Herzégovine. Nous nous attendions à des évolutions, et c'est la

 27   raison pour laquelle j'ai demandé à l'hélicoptère de Mladic de venir me

 28   chercher après avoir appris ce qui s'était passé à Banija et à Kordun pour

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  1   que je puisse aller sur ces secteurs de Banija et Kordun.

  2   Q.  Mon Général, je voudrais vous poser la question suivante, pourquoi le 6

  3   août ne vous êtes-vous pas rendu ou n'avez-vous pas proposé de vous rendre

  4   à l'armée croate ?

  5   R.  Mais pourquoi est-ce que j'aurais proposé de me rendre, puisque j'avais

  6   proposé avant de régler les problèmes en l'absence de toute guerre ? Mais

  7   ma proposition a été refusée par l'armée croate et la police croate. On a

  8   tout signé, nous, le plan Z-4 à Genève, j'étais censé me rendre aux

  9   négociations de paix de Genève. J'avais prévu un document préparatoire.

 10   Ceux qui ont tenu à ce que ça se passe comme ça, c'est à eux de répondre de

 11   ça. Moi, je n'avais pas besoin de la guerre.

 12   Q.  Mon Général, vous savez que Cedo Bulat, qui était donc dans le secteur

 13   nord, c'était rendu au général Stipetic.

 14   R.  Oui, oui.

 15   Q.  Et donc, à l'issue de cette reddition, en raison de cette reddition à

 16   l'armée croate, il a donc pu quitter cet encerclement avec son équipement

 17   et tout le reste, c'est bien cela ?

 18   R.  Non, c'est pas ça. C'est simplement, la seule chose qu'on lui a

 19   permise, c'est de faire sortir ses hommes sans armes. Ils ont dû tout

 20   remettre, tous les moyens techniques. L'armée croate – vous, vous vouliez

 21   obtenir des chars et toutes sortes d'autres armes lourdes mais ça, vous ne

 22   l'avez pas reçu parce que moi j'avais tout fait retirer avant.

 23   Q.  Pouvez-vous répéter votre dernière phrase, votre toute dernière phrase,

 24   s'il vous plaît.

 25   R.  La reddition du Corps de Kordun a eu lieu parce que grâce à l'aviation,

 26   ce corps a été isolé, et le corps en question a été contraint de se battre

 27   pour sortir de l'encerclement, ce qui aurait provoqué des pertes

 28   importantes parmi la population. En raison de cela, le commandement du

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  1   Corps de Kordun a décidé de se rendre.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On vous a demandé de répéter votre

  3   dernière phrase, mais apparemment vous nous donnez des informations

  4   supplémentaires. Pouvez-vous attendre, s'il vous plaît, la question

  5   suivante pour cela ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je ne sais plus ce que j'ai dit.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Misetic va vous poser une autre

  8   question.

  9   M. MISETIC : [interprétation]

 10   Q.  Ma question est la suivante : pourquoi vous nous avez dit ce qu'avait

 11   fait le Corps de Kordun ? Puisqu'ils étaient encerclés, puisqu'il y aurait

 12   eu des victimes chez les civils, alors le commandement du corps a décidé de

 13   se rendre.

 14   R.  C'est ça.

 15   Q.  Bien. Alors ma question que je vous pose est la suivante : pourquoi,

 16   sur l'ensemble du territoire, vous, vous étiez le commandant pour

 17   l'ensemble du territoire de la Krajina, pourquoi au moment où vous vous

 18   êtes rendu compte que vous ne pouviez plus assurer la défense, pourquoi

 19   est-ce que vous ne vous êtes pas rendu, tout comme Cedo Bulat l'avait fait

 20   pour éviter, pour reprendre vos termes, d'importantes victimes ?

 21   R.  Parce que les autres corps d'armée n'ont pas été placés dans une

 22   situation les obligeant à se rendre. Comment est-ce qu'un soldat peut se

 23   rendre s'il n'est pas dans une situation où il est privé de toute issue.

 24   Cedo Bulat n'avait plus d'issues. Mais M. Tudjman a envoyé un homme qui

 25   connaissait personnellement Cedo Bulat, c'était un officier, un général de

 26   la JNA qui présentait toutes les garanties, il y avait donc entre eux un

 27   rapport de confiance, et des garanties ont été données selon lesquelles la

 28   population civile n'allait pas souffrir si Cedo Bulat se rendait et que ses

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  1   hommes pourraient s'extraire de là.

  2   Q.  Donc la seule façon pour vous de vous rendre, cela aurait été si vous

  3   aviez été complètement encerclés ? Ce n'est seulement que dans ce cas-là ?

  4   R.  Mais oui, mais bien sûr. C'est cela que vous ne m'avez pas autorisé à

  5   raconter quand je voulais dire quelles sont les modifications que j'ai

  6   apportées dans la formation et l'entraînement des hommes. Si un corps

  7   d'armée est encerclé, alors chacun peut, dans son âme et conscience,

  8   décider de la meilleure solution pour la population. Et nous avons décidé

  9   que tout le corps d'armée risquait de vivre le même sort que celui de

 10   Kordun, mais nous voulions qu'il n'y ait pas de vengeance contre la

 11   population civile, qu'il n'y ait pas d'assassinats, et cetera. Mais vous,

 12   vous n'avez pas pris des territoires. Vous avez poursuivi votre route. Ce

 13   que vous avez décidé de faire, c'est terroriser la population et forcer la

 14   population à fuir et lentement la pousser par derrière pour qu'elle s'en

 15   aille.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense, Monsieur le Témoin, que vous

 17   avez plus que répondu à la question.

 18   Monsieur Misetic, vous pouvez poursuivre.

 19   M. MISETIC : [interprétation]

 20   Q.  Donc, après l'opération Tempête, Mon Général, vous avez été critiqué;

 21   c'est bien exact ?

 22   R.  Oui, on me dit encore aujourd'hui que c'est moi le coupable. Je

 23   voudrais dire en quelques mots ce que j'ai vécu.

 24   Je ne pouvais plus entrer en République de Serbie. Mon entrée était

 25   interdite. J'y suis entré deux mois plus tard en franchissant la Drina. On

 26   m'a enfermé à domicile, et cela fait des années que ça dure. Et à la fin,

 27   j'ai été obligé de travailler au marché de primeurs.

 28   Q.  J'essaie d'aller le plus vite possible pour que nous puissions terminer

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  1   avec vous aujourd'hui. Alors, Mon Général.

  2   M. MISETIC : [interprétation] D'abord, je voudrais avoir le document 65 ter

  3   1D1043, s'il vous plaît, Monsieur le Greffier.

  4   Q.  Et je voudrais vous montrer toute une série de documents. M. MISETIC :

  5   [interprétation] Je vais essayer d'accélérer un petit peu pour que nous

  6   puissions vraiment terminer aujourd'hui, Monsieur le Président.

  7   Q.  Je ne vais pas vous demander d'apporter des commentaires sur chacun des

  8   documents mais plutôt sur l'ensemble, lorsque vous les aurez tous vus.

  9   R.  Mais c'est quoi ce document, moi, je l'ai oublié celui-là.

 10   Q.  Ceci est censé être un rapport ou une communication de votre part

 11   adressé au chef d'état-major général de l'armée yougoslave le 18 août. Au

 12   point 6, il est dit que vous transmettez la décision de la présidence, à

 13   savoir point 1, organiser. Et puis ensuite au point 6 :

 14   "Organiser la visite de conscrits militaires aux centres de réfugiés,

 15   afin d'établir des listes et de rassembler un certain nombre de

 16   volontaires.

 17   "Date limite, 1er septembre 1995, date à laquelle un rapport devra

 18   être présenté."

 19   Ensuite, numéro 12, je crois qu'il y a une erreur de traduction,

 20   Général, mais :

 21   "Donc à ce moment-là, un bataillon de volontaires de la VRS a été constitué

 22   depuis la Slavonie occidentale qui, avec les autres volontaires, a

 23   constitué donc un ensemble d'unités situées sur le mont Kozarac, à Benkovac

 24   plus particulièrement. Après la constitution de ce corps, son entraînement

 25   et sa préparation, les volontaires devront reprendre une partie du champ de

 26   bataille à la frontière de la RSK, et de cette façon contribuer à la

 27   défense de la VRS."

 28   Monsieur le Président, j'aimerais pour des raisons de rapidité verser ce

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  1   document au dossier.

  2   M. RUSSO : [interprétation] Pas d'objection.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit

  5   maintenant de la pièce D1522.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Versé au dossier.

  7   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, je voudrais maintenant

  8   le document 65 ter 1D1046, s'il vous plaît.

  9   Q.  Donc il s'agit d'un document, encore une fois, qui est censé être une

 10   communication de votre part au chef de l'état-major général de l'armée

 11   yougoslave. 

 12   R.  Attendez un peu, qu'est-ce que c'est ça.

 13   Q.  Il semble que recherchez la chose suivante, il est dit :

 14   "Afin de nous permettre de résoudre les problèmes au sein de l'autorité de

 15   l'état-major général de l'armée de la Krajina serbe, vous devez fournir

 16   l'aide suivante…"

 17   Et au point 4 :

 18   "Le chef de l'état-major général et le commandement des unités de la SVK

 19   sont situés dans la RSK, où ils se consacrent essentiellement à

 20   l'entraînement des unités, et à faire en sorte qu'elles puissent composer

 21   la VRS. "

 22   Voilà, j'aimerais que ce document donc soit versé au dossier, Monsieur le

 23   Président.

 24   M. RUSSO : [interprétation] Pas d'objection.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agira

 27   maintenant donc de la pièce D1523.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce est donc versée au dossier.

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  1   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Greffier, pouvons-nous maintenant

  2   avoir la pièce D416, s'il vous plaît.

  3   Q.  Il s'agit d'une directive provenant de M. Martic, le 2 septembre ou le

  4   4 septembre, dans laquelle il évoque donc -- c'est une directive sous la

  5   formation de l'Armée de libération de la RSK, et donc de ses activités dans

  6   les opérations de combat sur le territoire de la Republika Srpska et la

  7   RSK.

  8   M. MISETIC : [interprétation] Je voudrais maintenant passer au document 65

  9   ter 1D1047, s'il vous plaît, Monsieur le Greffier.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et vous souhaitiez verser la pièce

 11   précédente au dossier ?

 12   M. MISETIC : [interprétation] Elle l'est déjà.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement.

 14   M. MISETIC : [interprétation]

 15   Q.  Donc il s'agit d'un ordre émis par M. Martic, le 4, et puis ensuite il

 16   y a un tampon en haut à gauche selon lequel ce serait un ordre qui aurait

 17   été émis par vous. "Le 7 septembre 1995", pour la constitution donc de

 18   l'Armée de libération pour la République de Krajina serbe et son

 19   intégration dans les opérations de combat sur les territoires de la RS et

 20   la RSK.

 21   Et si vous regardez le paragraphe 2, il est dit que :

 22   "L'Armée de libération de la RSK est organisée en brigades de

 23   libération, brigades de libération constituées de volontaires et d'unités

 24   spéciales.

 25   "Les unités spéciales sont, elles, organisées en groupes et en

 26   escadrons."

 27   Alors, Général Mrksic, est-ce que vous vous souvenez avoir émis cet

 28   ordre pour la constitution de cette Armée de libération de la RSK en

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  1   septembre 1995 ?

  2   R.  Non, moi, je n'ai rien à dire au sujet de ce document. Nous avions

  3   perdu et nous souhaitions nous organiser à nouveau pour retourner dans nos

  4   régions. Nous n'étions pas venus là de notre volonté personnelle, nous

  5   étions venus là parce que nous avions été chassés. Nous étions prêts à

  6   agir, y compris dans le cadre d'actes de sabotage ou de reconnaissance.

  7   Mais vous savez ce que c'est. Vous êtes réfugié quelque part, le

  8   gouvernement du pays où vous êtes réfugiés pose des questions au

  9   gouvernement d'un autre pays, et moi, je ne savais même pas, le président

 10   ne le savait d'ailleurs pas non plus qu'il était interdit de mobiliser des

 11   réfugiés.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La question était simple, Monsieur le

 13   Témoin. Vous souvenez-vous avoir donné cet ordre, et votre réponse

 14   apparemment est "oui."

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, je m'en souviens, oui.

 16   M. MISETIC : [interprétation]

 17   Q.  Au cas où il y aurait un problème d'interprétation, quel est le type

 18   d'unités ? Vous avez dit : "Nous étions même préparés, nous étions même

 19   prêts à passer à ou à changer…"

 20   R.  Des unités de reconnaissance qui seraient allées chercher des

 21   renseignements sur le territoire de la République serbe de Krajina, parce

 22   que c'était notre territoire. Bien entendu, avec l'aide de la Republika

 23   Srpska, parce qu'une attaque se préparait contre la Republika Srpska,

 24   contre Prijedor, Banja Luka, et cetera. Mais ça, c'était prendre ses désirs

 25   pour des réalités simplement.

 26   Q.  Savez-vous s'il y avait des camps organisés pour rapporter de Serbie

 27   des hommes de la Krajina qui pourraient aussi être réentraînés et déployés

 28   dans des unités telles que celles-ci ?

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  1   R.  Oui, oui, oui. Il y en avait un à Bijeljina et il y en avait un pas

  2   loin de Banja Luka - comment ça s'appelle - le champ de tir à Manjaca. Mais

  3   les gens ont refusé d'accepter cette proposition et de prendre les armes,

  4   et donc tout est tombé à l'eau. Parce que selon les conventions de Genève,

  5   personne n'a le droit de contraindre quelqu'un à prendre les armes s'il ne

  6   le souhaite pas, donc tout est tombé à l'eau.

  7   Q.  Y avait-il un camp en Slavonie orientale ?

  8   R.  Moi, en Slavonie occidentale, je n'avais pas le droit de m'en mêler et

  9   je ne m'en suis pas mêlé. Ils ne m'ont même pas autorisé à pénétrer en

 10   Serbie.

 11   M. MISETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je demande que ce

 12   document reçoive une cote et qu'il soit versé au dossier.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Russo.

 14   M. RUSSO : [interprétation] Pas d'objection.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de la pièce D1524, Monsieur le

 17   Président.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et cette pièce est versée au dossier.

 19   M. MISETIC : [interprétation] Mon Général, merci beaucoup. J'en ai terminé

 20   avec mon interrogatoire.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie de m'avoir convoqué pour

 22   témoigner.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mrksic, nous allons maintenant

 24   nous arrêter pour aujourd'hui et nous aimerions vous revoir lundi à 9

 25   heures. Je suis pratiquement certain que nous arriverons à mettre un terme

 26   à votre témoignage en temps voulu. Me Misetic a parfaitement bien respecté

 27   le temps qu'il avait mentionné au départ, et je suppose que les autres

 28   parties feront de même, ce qui pourra vous permettre de satisfaire vos

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  1   souhaits personnels concernant la semaine prochaine.

  2   Monsieur Mrksic, encore une fois je tiens à vous donner les instructions

  3   suivantes : vous ne devez parler à personne du fond de votre témoignage.

  4   Vous pouvez parler du temps qu'il fait, de votre santé, très bien, pas de

  5   problème, mais pas du fond de votre témoignage, de toutes les questions de

  6   fond.

  7   Je demanderais maintenant à ce que vous soyez escorté pour sortir de ce

  8   prétoire.

  9   [Le témoin quitte la barre]

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais maintenant faire part d'une

 11   décision très rapidement. C'est une décision concernant l'admission de la

 12   pièce P2539.

 13   Le 9 juillet 2009, l'Accusation a versé la pièce P2539, avec un extrait

 14   concernant le témoin Zuzul. Cet extrait provient d'un article de presse

 15   selon lequel le témoin avait, le 24 juillet 1997, en tant qu'ambassadeur de

 16   la Croatie auprès des Etats-Unis, avait annoncé la résistance de la Croatie

 17   à l'égard des ordres par ce Tribunal de produire des documents impliquant

 18   le président Tudjman dans la guerre de Bosnie. Le témoin a apporté des

 19   commentaires devant le Tribunal sur cet extrait. Tout cela peut être

 20   constaté dans les pages du procès-verbal, 18 374 et 18 380.

 21   La Chambre admet le document P2539 comme pièce, parce que cette pièce

 22   permet de placer le contexte dans lequel les commentaires du témoin ont été

 23   faits sur cet article qui pourrait sinon être difficile à comprendre s'il

 24   n'y avait pas cette pièce P2539. La Chambre se rend parfaitement compte

 25   qu'il s'agit d'une déclaration basée sur ouï-dire. La Chambre tient à

 26   insister sur le fait que l'admission de cette pièce n'indique en aucun cas

 27   le poids que la Chambre pourrait accorder à cet article.

 28   Cela donc conclut la décision de la Chambre concernant l'admission de cette

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  1   pièce 2539.

  2   L'audience est maintenant levée et nous reprendrons lundi matin.

  3   --- L'audience est levée à 13 heures 51 et reprendra le lundi 22 juin 2009,

  4   à 9 heures.

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