Page 346
1 Le vendredi 19 octobre 2012
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.
5 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur le Greffier d'audience, si
6 vous voulez bien citer l'affaire.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. L'affaire
8 IT-04-75-T, le Procureur contre Goran Hadzic.
9 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. Bonjour à tout un chacun au
10 prétoire.
11 Si vous voulez bien décliner vos identités.
12 Monsieur Stringer.
13 M. STRINGER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.
14 Pour l'Accusation, avec Sarah Clanton et Uros Zigic, et notre commis
15 d'affaire, Thomas Laugel.
16 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
17 Pour la Défense, je vous prie.
18 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Pour la
19 Défense de Goran Hadzic, Zoran Zivanovic et Christopher Gosnell. Merci.
20 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
21 Nous attendons maintenant le témoin.
22 [Le témoin vient à la barre]
23 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Dzakula. Nous
24 allons poursuivre votre interrogatoire au principal par le Procureur, M.
25 Stringer. Je vous rappelle, Monsieur Dzakula, que vous relevez de la
26 déclaration solennelle que vous avez prononcée.
27 LE TÉMOIN : VELJKO DZAKULA [Reprise]
28 [Le témoin répond par l'interprète]
Page 347
1 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
2 Interrogatoire principal par M. Stringer : [Suite]
3 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Dzakula. Est-ce que vous m'entendez,
4 est-ce que vous me comprenez ?
5 R. Bonjour. Je vous entends bien et je vous comprends.
6 Q. Hier, lorsque nous avons levé la séance, nous parlions des trois
7 Régions autonomes serbes. Nous avons parlé du conflit, de la guerre en
8 Croatie, et nous avons parlé du plan Vance, ce qui nous a amené à la fin de
9 1991. Ce que j'aimerais maintenant faire c'est passé à 1992 et vous
10 demandez s'il y a eu modification quant à la structure, structure politique
11 des trois SAO en Croatie au début de 1992, si leur organisation était
12 différente ?
13 R. Oui. Début 1992, en février, et même le 26 février, il y a eu une
14 réunion de l'assemblée à Baranja, où la république serbe, la Krajina serbe
15 a été établie, et ceci comprenait trois régions : SAO de Baranja, le Srem
16 occidental, la SAO de la Krajina et de la SAO de la Krajina occidentale,
17 avec qui ils constituaient donc une seule république qui s'appelait la
18 Krajina serbe.
19 M. STRINGER : [interprétation] Si nous pouvions afficher le document 65 ter
20 809.
21 Q. Monsieur Dzakula, vous le voyez à l'écran devant vous. Peut-être que
22 nous pourrions faire un gros plan sur le document pour pouvoir le lire.
23 Reconnaissez-vous ce document, Monsieur Dzakula ?
24 R. Oui, effectivement, je reconnais.
25 Q. De quoi s'agit-il ?
26 R. Il s'agit de la gazette officielle de la République serbe de Krajina,
27 qui fait rapport de la décision de proclamer la constitution de cette
28 dernière.
Page 348
1 Q. J'attire votre attention au premier paragraphe situé sous le titre
2 "Décision de proclamer la constitution", et j'aimerais aborder une question
3 concernant les dates qui sont portées à ce document. Vous ne pourrez sans
4 doute pas le voir sur l'écran, si vous le pouvez, dites-le-moi. Il s'agit
5 du paragraphe qui dit : La constitution de la RSK qui a été adoptée à la
6 session de la Région autonome serbe de la Krajina le 19 février 1991. Et la
7 date 19 février y figure plusieurs fois dans ce document.
8 Vous souvenez-vous s'il s'agit là de la date effective à laquelle la RSK a
9 adopté la constitution ?
10 R. Non, la date est erronée.
11 Q. Bien. Ecartons ce sujet, je vais passer à la pièce suivante 65 ter
12 0995. Et, encore une fois, si nous pouvons agrandir le document, il y a
13 deux corrigendum qui s'y trouve, et j'aimerais attirer votre attention sur
14 le deuxième corrigendum.
15 Etes-vous en mesure de lire ce document tel qu'il vous est présenté devant
16 vous, Monsieur Dzakula ?
17 R. Oui, maintenant, je peux.
18 M. STRINGER : [interprétation] Il s'agit de l'onglet 27, j'aurais dû le
19 déclarer, Monsieur le Président. La constitution se trouve à l'onglet 26.
20 Q. Voyez-vous ici la référence au 19 février 1991, date que vous venez de
21 voir dans la constitution ?
22 R. Oui, je le vois.
23 Q. Bien. Alors maintenant, qu'apporte cette constitution ou plutôt ce
24 corrigendum ?
25 R. Le corrigendum déclare que la décision de promulguer la constitution de
26 la République serbe de Krajina ne devrait pas se trouver à la date du 19
27 février mais plutôt au 19 décembre 1991, et ce, en trois endroits. La
28 décision concernant la promulgation de la loi constitutionnelle et de sa
Page 349
1 mise en œuvre, au lieu de la date du 19 février 1991, la date devrait
2 également être le 19 février [comme interprété] 1991, ce qui signifie que
3 c'est une rectification de la date.
4 Q. Et donc ceci est dans le droit fil de ce dont vous vous souvenez quant
5 à la date à laquelle la constitution de la RSK a été adoptée la première
6 fois ?
7 R. En ce qui concerne l'adoption elle-même, j'en ai entendu parler dans
8 les médias, car la Slavonie occidentale n'a pas pris part à cette date
9 particulière à son assemblée. Nous y avons pris part le 26 février 1992,
10 mais il s'agissait de la promulgation. Je pense que c'était juste par écrit
11 et que les trois assemblées ne se sont pas réunies, en fait, à cette date,
12 car ce n'était pas possible.
13 Q. Bien.
14 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, nous allons revenir à
15 la constitution dans quelques instants, mais c'est là l'un des documents
16 convenus et nous allons verser au dossier 0809 dans le cadre de la
17 bibliothèque juridique.
18 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Uniquement ce document 0809 ?
19 M. STRINGER : [interprétation] Oui, eh bien --
20 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et le corrigendum également ?
21 M. STRINGER : [interprétation] Et le corrigendum également. C'était mon
22 intention…
23 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Admis et recevant la cote L.
24 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, le document 65 ter
25 809 recevra la cote L-3 et le document 65 ter 995 recevra la cote L-4.
26 Merci.
27 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
28 M. STRINGER : [interprétation]
Page 350
1 Q. Monsieur Dzakula, vous avez parlé du 26 février 1992, je crois, et pour
2 survol et introduction, puisque nous allons examiner ce document, pourriez-
3 vous dire aux Juges de la Chambre que s'est-il passé le 26 février 1992 ?
4 R. Le 26 février 1992, à Beli Manastir en Slavonie de l'est, ou plutôt à
5 Baranja, les trois assemblées se sont réunies : l'assemblée de la SAO de
6 Krajina, la SAO de la Slavonie occidentale et la SAO de Baranja et du Srem
7 occidental. Ce jour-là, la République serbe de Krajina a été constituée
8 avec une nouvelle constitution, ou plutôt des modifications à la
9 constitution. Et ce jour-là, le président de ladite république a été élu
10 ainsi que le président de l'assemblée de la République serbe de Krajina
11 ainsi que ses adjoints.
12 Q. Vous venez de parler des amendements de la constitution.
13 M. STRINGER : [interprétation] Pourrions-nous afficher la pièce 0954. Il va
14 falloir modifier la traduction puisque nous voyons maintenant la première
15 page, la page, en fait, qui correspond à l'original sur l'écran.
16 Q. Monsieur Dzakula, tout d'abord, est-ce que vous pouvez lire ce document
17 et nous dire de quoi il s'agit ?
18 R. Les caractères sont relativement petits, je ne peux les lire.
19 M. STRINGER : [interprétation] Peut-être que nous pourrions remettre au
20 témoin le classeur où se trouve ce document à l'onglet 28. Non, 30. Non,
21 28. Au classeur.
22 Q. Monsieur Dzakula, pendant qu'on sort ce document, il est également en
23 gros plan à l'écran.
24 R. Oui, je vous écoute. J'attends votre question.
25 Q. Que pouvez-vous nous dire de ce document ? De quoi s'agit-il ?
26 R. Il s'agit d'une décision sur la proclamation des amendements 1 à 6 à la
27 constitution de la République serbe de Krajina.
28 Q. J'attire votre attention à l'amendement numéro 1. On y voit :
Page 351
1 "Le territoire de la République serbe de Krajina comprendra les
2 régions serbes de Krajina, Slavonie, Baranja, Srem occidental et Slavonie
3 occidentale."
4 Le voyez-vous ?
5 R. Oui.
6 Q. Ma question est la suivante : hier, dans votre déposition, vous avez
7 décrit une division ou tout du moins une différence d'itinéraire entre
8 vous-même et M. Hadzic. La question étant : pourquoi avez-vous appuyé et
9 êtes-vous convenu de vous unir à la RSK à ce moment-là ?
10 R. Eh bien, le plan Vance prévoyait que des autorités locales seraient
11 acceptées dans la région où la guerre se déroulait. Et alors que M. Hadzic
12 avait adopté le plan Vance et d'autres, j'estimais que le moment était venu
13 peut-être de résoudre la question ensemble, car c'était tout à fait
14 impossible d'être séparé. Car selon l'accord envisagé dans le plan Vance,
15 la Yougoslavie avait la garantie de sa mise en œuvre et donc, à l'époque,
16 nous ne pouvions trouver un appui que dans la Yougoslavie de l'époque car
17 c'était ce que prévoyait le plan Vance.
18 Q. Passons maintenant à l'amendement 2. Le premier paragraphe :
19 "L'assemblée de la RSK nommera et relèvera de son poste le président
20 de la République et contrôlera ses travaux."
21 Savez-vous qui avait été nommé par l'assemblée pour être le président
22 de la république à l'époque ?
23 R. Ce jour-là, l'assemblée de la RSK a nommé ou élu Goran Hadzic à titre
24 de son président.
25 Q. A l'amendement 3, paragraphe 1, est-ce que M. Hadzic a proposé un
26 candidat au poste de premier ministre ?
27 R. Oui. Goran Hadzic, immédiatement après son élection, a nommé Zdravko
28 Zecevic en qualité de premier ministre du gouvernement de la RSK.
Page 352
1 M. STRINGER : [interprétation] L'Accusation verse le document 954, et peut-
2 être pour la bibliothèque juridique.
3 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
4 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Admis et marqué.
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document 65 ter 954 recevra la cote L-
6 5. Merci.
7 M. STRINGER : [interprétation] La pièce suivante est 65 ter 0951. Monsieur
8 le Président, il s'agit de l'onglet 30. L'intercalaire 30.
9 Q. Monsieur Dzakula, à ce document, j'aimerais attirer votre attention sur
10 le point 140.
11 R. Oui, je le vois. La décision quant à l'élection du premier ministre et
12 des ministres du gouvernement de la RSK.
13 Q. A quelle date ?
14 R. La date -- que je regarde. Le 26 février 1992.
15 Q. Et ainsi que vous l'avez déclaré, c'est ici que M. Zecevic a été élu
16 premier ministre.
17 R. Oui, M. Zecevic a été élu premier ministre ce jour-là.
18 Q. Et votre nom figure à l'article 2 en qualité de membre du gouvernement,
19 n'est-ce pas ?
20 R. Oui, effectivement, je suis en numéro 2.
21 Q. Aviez-vous un portefeuille ou un domaine particulier dont vous étiez
22 chargé ?
23 R. Par la suite, j'ai été nommé premier ministre adjoint chargé du
24 développement de l'économie, de la foresterie, car c'était mon métier.
25 Q. Et au début de votre déposition, vous avez indiqué que vous teniez un
26 poste au sein du gouvernement lui-même ?
27 R. Oui. J'ai déclaré que j'étais premier ministre adjoint chargé de la
28 foresterie.
Page 353
1 Q. J'aimerais que vous regardiez maintenant le nom de la personne qui se
2 trouve en numéro 4, Stevo Bogic. Qui était-il ?
3 R. Stevo Bogic était également un premier ministre adjoint de la Slavonie
4 orientale.
5 Q. Le connaissiez-vous avant que la RSK ne soit constituée ?
6 R. Non, je ne le connaissais pas auparavant. Je ne l'ai rencontré qu'à ce
7 moment-là.
8 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation aimerait
9 verser le 951 également à la bibliothèque juridique.
10 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, admis et marqué.
11 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, 65 ter 951 recevra
12 la cote numéro L-6.
13 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Si je puis, Monsieur Stringer --
14 M. STRINGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge.
15 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur le Témoin, en réponse à la
16 question de M. Stringer, vous avez décrit M. Bogic comme étant premier
17 ministre adjoint.
18 Et donc, j'ai deux questions. Combien de premiers ministres adjoints
19 existait-il ?
20 Et la deuxième question est de savoir si les personnes portant le titre de
21 premier ministre adjoint avaient un statut supérieur aux autres qui étaient
22 ministres.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, il y avait trois premiers
24 ministres adjoints : le premier était Jovo Kablar, le deuxième Stevo Bogic,
25 et le troisième était moi-même. J'étais chargé de la foresterie. Nous
26 n'avions pas de statut particulier. La raison en était que les trois SAO
27 Krajina étaient liées, donc l'idée était que les anciens premiers ministres
28 devaient conserver ce poste de premier ministre adjoint de leur SAO
Page 354
1 Krajina. Et donc, M. Hadzic était devenu le président, et au second rang il
2 y avait des premiers ministres adjoints. Nous n'avions pas de statut
3 particulier, tout particulièrement parce que j'étais chargé de la
4 foresterie. Et la politique et la sécurité étaient censées être beaucoup
5 plus importantes.
6 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.
7 Merci, Monsieur Stringer.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous en prie.
9 M. STRINGER : [aucune interprétation]
10 M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]
11 M. LE JUGE MINDUA : Au transcript, page 6, ligne -- page 6, ligne 20, vous
12 dites que M. Goran Hadzic, après avoir été élu --
13 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
14 M. STRINGER : [aucune interprétation]
15 M. LE JUGE MINDUA : Ça va maintenant ? O.K. Très bien.
16 Alors, Monsieur le Témoin Dzakula, vous avez dit - je me réfère au
17 transcript page 6, ligne 20 - qu'après avoir été élu président, M. Goran
18 Hadzic a nommé M. Zdravko Zecevic.
19 Bon, je voudrais qu'on me remette la pièce sur l'écran, s'il vous plaît,
20 Monsieur le Greffier, la pièce que vous avez enlevée tout à l'heure.
21 Voilà.
22 Et sur cette pièce, 65 ter 954, nous pouvons lire que l'assemblée a élu M.
23 Zdravko Zecevic comme premier ministre. Alors, la question que je me pose
24 est celle de savoir si l'assemblée élisait au poste de premier ministre la
25 personne nommée par le président; c'est bien ça ?
26 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
27 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.
28 Alors, si je continue dans le même ordre d'idée, tous les ministres
Page 355
1 qui sont ici sur la pièce 954, y compris vous-même, avez été nommés par le
2 président et élus par l'assemblée; c'est bien ça ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est effectivement ce que l'on voit sur le
4 document et c'est officiel. Mais avant la session de l'assemblée, nous nous
5 étions convenus qui serait le membre du gouvernement et de quelle SAO
6 Krajina. Donc, avant que l'assemblée ne se réunisse, avant qu'il n'y ait
7 vote, c'était déjà convenu de savoir qui serait le premier ministre, qui
8 seraient les premiers ministres adjoints et qui seraient les ministres
9 chargés de domaines particuliers. Et donc, le premier ministre, Zdravko
10 Zecevic, qui avait été élu, a lu officiellement lors de l'assemblée les
11 noms des membres du gouvernement, et ce, tout simplement pour la forme. Et
12 on y voit ici dans ce document que nous étions tous ministres bien qu'il y
13 avait une décision qu'il y aurait trois premiers ministres adjoints, alors
14 que les autres ne seraient que ministres.
15 M. LE JUGE MINDUA : [hors micro]
16 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Un autre détail, Monsieur Dzakula.
17 Vous avez déclaré qu'il y avait trois premiers adjoints, et vous avez
18 expliqué la raison, mais ensuite je vois quatre noms sur la liste, en haut
19 de la liste, sans aucune précision, et il y a Bosko Bozanic en quatrième.
20 Etait-il, lui aussi, premier ministre adjoint ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que non. Je n'ai pas gardé un
22 souvenir très précis de lui, mais il me semble que non. Qu'il était tout
23 simplement ministre.
24 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
25 Monsieur Stringer, à vous.
26 M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
27 Monsieur le Président, nous aimerions maintenant visionner un bref extrait
28 vidéo, et j'aimerais que le témoin le regarde. Et puis, nous poserons
Page 356
1 quelques questions. Ce qui intéresse l'Accusation n'est pas tellement ce
2 qu'on entend, mais plutôt ce qu'on voit. Et j'aimerais en fait que M.
3 Dzakula identifie un certain nombre de personnes par le biais de cette
4 vidéo.
5 Il s'agit du document 4945 -- en fait, non, je vous demande pardon. 4924.
6 Et notre cote à nous, c'est 3865.
7 [Diffusion de la cassette vidéo]
8 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
9 "La grande assemblée nationale de la SAO Slavonie, Baranja et Western
10 Srem a adopté une nouvelle constitution proclamant la République serbe de
11 Krajina. Ce nouvel Etat est composé de la SAO Krajina et de la SAO
12 Slavonie, Baranja et Srem occidental, et sa capitale est la ville de Knin."
13 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
14 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Me Zivanovic semble s'être levé.
15 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je vous demande pardon, Monsieur le
16 Président, mais je n'ai rien pu entendre.
17 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Moi, si.
18 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je ne pouvais pas suivre l'audio de cet
19 enregistrement vidéo.
20 M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]
21 M. STRINGER : [interprétation] Nous pouvons revoir la vidéo.
22 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Pouvons-nous revoir cet
23 enregistrement vidéo ?
24 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, s'il vous plaît, Monsieur le
25 Président.
26 [Diffusion de la cassette vidéo]
27 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
28 "La grande assemblée nationale de la SAO Slavonie, Baranja et Srem
Page 357
1 occidental a adopté une nouvelle constitution proclamant la République
2 serbe de Krajina. Ce nouvel Etat est composé de la SAO Krajina et de la SAO
3 Slavonie, Baranja et Srem occidental, et sa capitale est la ville de Knin."
4 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
5 M. STRINGER : [interprétation] La Défense a-t-elle pu suivre cette fois-ci
6 ?
7 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, merci.
8 M. STRINGER : [interprétation]
9 Q. Monsieur Dzakula, j'aimerais revenir sur le début de ce enregistrement
10 vidéo, puis nous allons l'examiner étape par étape en nous arrêtant en
11 route, et je vous poserai quelques questions.
12 [Diffusion de la cassette vidéo]
13 M. STRINGER : [interprétation] Très bien.
14 Q. La première question que je souhaite vous poser est la suivante :
15 reconnaissez-vous la pièce, la salle de conférence où ces personnes sont
16 réunies ?
17 R. Oui. C'est bien la salle où l'assemblée de la République serbe de
18 Krajina a siégé le 26 février 1992.
19 Q. Et où se trouvait cette salle de conférence ?
20 R. Eh bien, quelque part à Beli Manastir, dans le centre-ville. Je ne me
21 souviens plus du bâtiment où cette salle se trouvait.
22 Q. Très bien. Et dans cet arrêt sur image, reconnaissez-vous Goran Hadzic
23 ?
24 R. Oui. Il est assis au premier rang. Il touche son front de la main. Et
25 il porte l'uniforme, un uniforme vert.
26 [Diffusion de la cassette vidéo]
27 M. STRINGER : [interprétation]
28 Q. Reconnaissez-vous l'homme qui est assis à côté de Goran Hadzic ?
Page 358
1 R. Non, je ne connais pas cet homme qui est assis à ses côtés. En
2 revanche, je connais l'homme qui est assis derrière lui.
3 Q. Et qui est la personne assise derrière Goran Hadzic ? Et servez-vous,
4 s'il vous plaît, du stylet électronique pour nous montrer -- non.
5 Malheureusement, il n'est pas possible de se servir du stylet électronique.
6 Alors, dites-nous tout simplement qui est la personne que vous avez évoquée
7 tout à l'heure et où elle est assise par rapport à M. Hadzic ?
8 R. Immédiatement derrière M. Hadzic, il y a une personne aux cheveux noirs
9 qui porte une moustache et une barbe et qui plus ou moins regarde dans la
10 direction de la caméra.
11 Q. Et qui est cette personne ?
12 R. C'est Stevo Bogic, qui a été élu vice-premier ministre lors de cette
13 séance de l'assemblée.
14 Q. Avez-vous assisté à cette séance de l'assemblée au mois de février 1992
15 lorsque tous ces événements se sont produits ?
16 R. Oui, j'ai été parmi les présents. Je suis assis quelque part au dernier
17 rang.
18 M. STRINGER : [interprétation] Avec votre permission, je vais montrer
19 l'enregistrement pour une dernière fois.
20 [Diffusion de la cassette vidéo]
21 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, nous aimerions avoir
22 un arrêt sur image tiré de cet enregistrement vidéo qui montrera l'image de
23 M. Bogic. Je ne sais pas si le Greffe a des suggestions quant à la façon
24 dont il faut procéder pour isoler cet arrêt sur image. Peut-être que
25 pendant la pause nous pourrions trouver une solution technique et puis
26 demander au témoin d'apporter des indications sur la photo. Ce serait sans
27 doute la solution la plus simple.
28 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
Page 359
1 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Eh bien, si l'Accusation préparait
2 l'arrêt sur l'image et le remettre au Greffe, alors nous pouvons procéder
3 de la manière que vous avez suggérée.
4 M. STRINGER : [interprétation] Notre commis à l'affaire, M. Laugel, croit
5 être en mesure de préparer l'arrêt sur image.
6 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
7 M. STRINGER : [interprétation] Le document suivant porte la cote 946 sur la
8 liste 65 ter.
9 Q. Une fois le document affiché, nous allons vous demander, Monsieur
10 Dzakula, de bien vouloir vous concentrer sur le point numéro 139.
11 R. Oui, je suis en train d'examiner cet article.
12 Q. Et en quoi consiste cet article ? D'abord, dites-nous de quel document
13 il s'agit ?
14 R. Il s'agit d'une décision publiée dans la gazette officielle de la
15 République de Krajina serbe. La décision est signée par le président de
16 l'assemblée, Mile Paspalj. Et la décision qui figure à l'article 139 porte
17 sur l'élection du président de la République serbe de Krajina, et c'est
18 Goran Hadzic qui est élu président de la République serbe de Krajina. Et
19 cette décision a été adoptée lors de la première séance régulière de
20 l'assemblée de la République serbe de Krajina qui s'est tenue le 26 février
21 1992.
22 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
23 l'Accusation souhaite demander le versement au dossier du document 946
24 comme faisant partie de la bibliothèque juridique.
25 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le document est admis.
26 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce L-7. Merci.
27 M. STRINGER : [interprétation] Revenons maintenant à la constitution, le
28 document 809, et il serait peut-être plus facile d'avancer si nous
Page 360
1 remettions au témoin la version imprimée du document.
2 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le document se trouve à
3 l'intercalaire 26.
4 M. STRINGER : [interprétation]
5 Q. Monsieur Dzakula, voyez-vous la décision portant sur la promulgation de
6 la constitution de la RSK ?
7 R. Oui, je la vois. Je l'ai entre les mains.
8 Q. Il y a quelques instants, nous avons étudié le premier paragraphe qui
9 comportait une date erronée, le 19 février, et puis cette date a été
10 corrigée par la suite. Il s'agit plutôt du 19 décembre. Est-ce que vous le
11 voyez ?
12 R. L'exemplaire que j'ai entre les mains comporte toujours la date
13 erronée, le 19 février 1991.
14 Q. Très bien. D'après vos connaissances, qu'est-ce qui s'est passé le 19
15 décembre ? A quel moment la constitution de la RSK est-elle entrée en
16 vigueur ou à quel moment elle a été promulguée ? Quelle est l'importance de
17 ce 19 décembre ?
18 R. Eh bien, le 19 décembre est le même jour où la Croatie a déclaré son
19 indépendance par rapport à la Yougoslavie, et, par ailleurs, la
20 constitution de la République serbe de Krajina a été promulguée.
21 Q. Le document prête à confusion parce que les dates sont erronées. Mais
22 ici, il est indiqué que la constitution de la RSK a été adoptée par la SAO
23 Krajina le 19 décembre, normalement, si nous avions les bonnes dates. Et on
24 indique la même chose pour la SAO SBSO et pour la SAO de Slavonie
25 occidentale. Et puis, tenant compte de cette correction de dates, le
26 document semble indiquer que les trois SAO ont accepté la constitution de
27 la RSK le même jour, le 19 décembre 1991. Ceci est-il exact ?
28 R. Ceci n'est pas exact. Les trois assemblées ne se sont pas réunies le
Page 361
1 même jour. Je peux l'affirmer en tout cas pour l'assemblée de la Slavonie
2 occidentale, et si mes souvenirs sont bons, la même chose vaut pour
3 l'assemblée de la Slavonie, la Baranja et le Srem occidental.
4 Parce qu'à l'époque, il était question de démettre M. Milan Babic de ses
5 fonctions. M. Milan Babic était toujours actif sur le plan politique dans
6 la SAO Krajina. Et c'est à cause de ces discussions qu'il n'y a pas eu de
7 réunion conjointe des trois assemblées.
8 Q. Toujours est-il que les trois assemblées ont accepté la constitution
9 dans sa version amendée du mois de février, du 26 févier; ceci est-il exact
10 ?
11 R. Oui. Le 26 février 1992, les trois assemblées, celle de la SAO Krajina,
12 celle de la SAO SBSO et celle de la Slavonie occidentale, ont accepté la
13 constitution de la République serbe de Krajina.
14 Q. Veuillez vous pencher, s'il vous plaît, sur l'article 68 de ce
15 document, de la constitution. L'article 68 se trouve à la page 18 de la
16 version anglaise -- non. Excusez-moi, il se trouve plutôt à la page 19.
17 Avez-vous retrouvé cet article, Monsieur Dzakula ?
18 R. Oui, j'ai l'article 68 sous les yeux. Il concerne l'assemblée.
19 Q. Oui, l'article 68 concerne l'assemblée. La même chose, par ailleurs,
20 vaut pour les articles 69, 70 et les articles qui suivent. Ces articles
21 définissent-ils les devoirs et les obligations de l'assemblée de la RSK en
22 vertu de la nouvelle constitution ?
23 R. Oui, ces articles définissent le rôle et les fonctions de l'assemblée
24 de la RSK.
25 Q. Passons maintenant, s'il vous plaît, à l'article 78, qui se trouve à la
26 page 22 de la traduction anglaise. Ce document concerne-t-il l'autorité et
27 les fonctions exercées par le président de la république ?
28 R. Oui, exactement.
Page 362
1 Q. Et la même chose vaut pour les articles 79, 80, 81, 82 et les articles
2 suivants. Donc, c'est une partie de la constitution qui concerne le
3 président de la république.
4 R. Oui, exactement.
5 Q. Et puis, le rôle et les fonctions du gouvernement de la RSK sont
6 définis à partir de l'article 84, n'est-ce pas ? Veuillez afficher, s'il
7 vous plaît, l'article 84 qui se trouve à la page 26 de la traduction
8 anglaise.
9 R. Oui, tout à fait.
10 Q. Et puis, finalement, penchez-vous, s'il vous plaît, sur l'article 102,
11 qui se trouve à la page --
12 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stringer, pourquoi sommes-
13 nous en train de faire ceci ? Pourquoi est-il nécessaire que le témoin
14 confirme qu'il s'agit bien de la partie de la constitution où l'on définit
15 les fonctions du président ou de l'assemblée ? Nous pouvons le lire nous-
16 mêmes, n'est-ce pas ?
17 M. STRINGER : [interprétation] Oui. Mais je souhaitais poser au témoin
18 quelques questions plus concrètes concernant l'autorité et les fonctions du
19 président, et cetera.
20 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. Excusez-moi alors de vous
21 avoir interrompu.
22 M. STRINGER : [interprétation] En fait, l'article le plus pertinent est
23 celui que nous sommes sur le point d'examiner, et c'est l'article 102,
24 parce que dans quelques instants je souhaite aborder les relations qui
25 existent entre le président et les forces armées de la république.
26 Q. Voyez-vous l'article 102 qui définit les forces armées de la république
27 ?
28 R. Oui, je le vois.
Page 363
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 364
1 Q. La question qui se pose, Monsieur Dzakula, est la
2 suivante : en tant que premier ministre adjoint, ou le vice-premier
3 ministre, avez-vous eu des contacts avec Goran Hadzic au sujet des
4 relations qu'il entretenait avec les forces armées de la RSK ? Avez-vous
5 été en contact avec lui et avez-vous pu observer ses contacts avec les
6 forces armées ou les unités militaires de la RSK ?
7 R. Oui. Je me souviens d'un incident qui s'est produit au mois de janvier
8 1993. Après le 20 janvier.
9 Q. Pourriez-vous décrire cet incident aux Juges de la Chambre, s'il vous
10 plaît.
11 R. Le 19 ou le 20 janvier, l'armée croate a lancé une attaque contre
12 Maslenica, un village non loin de Knin. Quelques jours plus tard, notre
13 commandant de Slavonie occidentale a reçu l'ordre de faire bouger les chars
14 qui se trouvaient dans les dépôts conformément à l'accord passé avec les
15 forces de la FORPRONU et que ces chars devaient se diriger vers les
16 municipalités de Novska et de Gradiska.
17 Lorsque nous avons appris que cet ordre a été émis, nous avons parlé
18 avec le chef des affaires civiles de la FORPRONU --
19 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, veuillez ralentir
20 votre débit un petit peu pour faciliter la tâche des interprètes, et
21 notamment lorsque vous citez des noms ou des dates ou des sites, de manière
22 à ce que les interprètes puissent bien saisir toutes ces données
23 importantes.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, Messieurs les
25 Juges.
26 Donc, quelques jours après ce 20 janvier, il y a eu une réunion avec les
27 représentants de la FORPRONU, militaires et civils, et nous avons appris
28 qui avait émis cet ordre. Il s'agissait du général Novakovic, le commandant
Page 365
1 de l'armée de la RSK, et il a donné cet ordre à notre commandant de
2 Slavonie occidentale, Jovan Cubric. Alors, il exerçait les fonctions du
3 commandant en Slavonie occidentale officiellement, mais il ne portait pas
4 d'uniforme tous les jours. Donc, je lui ai demandé : Mais qu'est-ce qui se
5 passe ? Et il m'a répondu qu'il fallait attaquer Gradiska et Novska, deux
6 localités qui se trouvaient sous le contrôle de la République de Croatie.
7 M. STRINGER : [interprétation]
8 Q. Excusez-moi de vous interrompre, Monsieur le Témoin. Je crois que la
9 Défense a une objection à soulever.
10 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je souhaite soulever une objection quant à
11 cette série de questions parce que Novska et Gradiska sont des
12 municipalités qui ne font pas partie de l'acte d'accusation.
13 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stringer, qu'en dites-vous ?
14 M. STRINGER : [interprétation] Cette partie de la déposition du témoin est
15 pertinente pour montrer quelles étaient les relations que M. Hadzic
16 entretenait avec les forces armées de la RSK. Il est vrai que ces localités
17 concrètes ne sont pas englobées par -- en fait, il y a un désaccord. Parce
18 que maintenant nous parlons de l'année 1993. M. Hadzic est le président de
19 la République de Krajina serbe, qui comprend les trois SAO, donc je ne
20 pense pas que ceci sort du cadre de l'acte d'accusation pour cette période
21 donnée. S'il était question de l'année 1992, avant le moment où M. Hadzic a
22 été proclamé président de tous les territoires combinés des trois SAO,
23 alors l'objection serait peut-être pertinente. Mais ici, il s'agit de
24 l'année 1993. Hadzic est président de la RSK, il est commandant de toutes
25 les forces armées de la RSK en vertu de la constitution, et donc les
26 preuves relatives à son commandement et contrôle exercé sur ces forces
27 armées sont pertinentes du moment où l'on s'intéresse à ce qui se passe à
28 l'intérieur de la RSK.
Page 366
1 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous pouvez poursuivre.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Dois-je reprendre ma réponse ?
3 M. STRINGER : [interprétation]
4 Q. Oui, s'il vous plaît. Veuillez poursuivre.
5 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais ralentissez, Monsieur le Témoin.
6 Poursuivez, mais doucement.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ferai de mon mieux, Monsieur le Président,
8 Messieurs les Juges.
9 Alors, j'ai demandé au colonel Jovan Cubric, le commandant des forces
10 armées de la Slavonie occidentale, de passer un coup de fil au commandant
11 des forces armées de la République de Krajina serbe, M. Novakovic, pour en
12 discuter. Et c'est bien ce qui a été fait.
13 J'ai entamé une conversation avec M. Novakovic pour comprendre pourquoi il
14 avait émis un ordre de ce type. Et il m'a répondu en me disant : Mais qui
15 êtes-vous et quelle fonction exercez-vous ? Alors, je me suis présenté.
16 J'ai expliqué que je m'appelais Veljko Dzakula, que j'étais vice-président
17 du gouvernement de la Krajina serbe, à quoi il a répondu : Je n'ai rien à
18 discuter avec vous. Moi, j'ai mon commandant en chef, le président de la
19 République, Goran Hadzic, et moi, j'exécute les ordres qu'il me donne. Et
20 alors, il m'a raccroché au nez.
21 Alors, j'ai demandé à notre commandant de bien vouloir me mettre en contact
22 avec le président de la république. Je ne sais pas de quel moyen technique
23 il s'est servi pour y parvenir, mais j'ai bien eu M. Hadzic, le président
24 de la république, au téléphone. Et donc, nous avons entamé une
25 conversation. Je lui ai demandé pourquoi il avait émis un ordre de ce type
26 au général Novakovic, qui l'a ensuite fait suivre à notre commandant, et
27 pourquoi il avait ordonné une attaque de Novska et de Gradiska en se
28 servant de chars. Et il m'a répondu ceci : Nous étions encerclés par les
Page 367
1 forces oustachi qui devaient lancer une attaque d'une minute à l'autre.
2 A quoi j'ai répondu que j'avais déjà parlé avec notre commandant et
3 avec les représentants de la FORPRONU et qu'un tel danger n'existait point.
4 Et puis, à son tour, il a répondu : Si vous en êtes tout à fait sûr, alors
5 je vais retirer mon ordre. Et la même situation s'est reproduite à trois
6 reprises au cours de deux jours. Donc, il a redonné l'ordre au général
7 Novakovic, qui nous a redonné l'ordre de lancer une attaque contre Novska
8 et Gradiska le jour même. Nous avons réagi de la même façon que le jour
9 précédent, et Goran Hadzic a de nouveau retiré son ordre. Et finalement, on
10 nous a demandé de garantir par écrit que nous assumions la responsabilité
11 de toute attaque éventuelle de la République de Croatie contre le
12 territoire qui se trouvait sous notre contrôle. Donc, nous avons été
13 plusieurs à signer ce document, à assumer la responsabilité de la décision,
14 et nous l'avons fait passer par le biais de notre commandement au général
15 Novakovic et au président de la république, Goran Hadzic. Et nous l'avons
16 fait pour les rassurer, pour leur expliquer qu'aucun danger n'existait et
17 pour ne pas mettre en danger tout le plan Vance portant sur la
18 démilitarisation.
19 Et il faut dire que le général de la FORPRONU qui contrôlait le secteur
20 ouest nous a garanti par écrit qu'ils assureraient notre défense mais
21 qu'ils ne le feraient qu'à condition que nous n'utilisions pas d'armes
22 lourdes et de [inaudible] tout particulièrement parce que ce n'était que
23 sous ces conditions-là qu'ils pouvaient nous protéger en cas d'attaques
24 lancées par les forces croates. Si nous avons fait démarrer nos chars et
25 ouvert le feu --
26 Q. Excusez-moi, de vous interrompre, Monsieur le Témoin. Excusez-moi, mais
27 je pense que vous avez un peu dépassé la portée de la question. Alors je ne
28 sais pas si la Chambre ou la Défense d'ailleurs souhaite vous poser des
Page 368
1 questions à propos de la FORPRONU, ils le feront en temps utile. Mais je
2 regarde l'heure qui tourne et je pense que nous devons continuer.
3 Est-ce que vous savez où se trouvait Goran Hadzic au moment où vous lui
4 avez parlé, c'est ce que vous venez de décrire, vous lui avez parlé à
5 propos cet ordre d'attaquer ?
6 R. Alors, on m'a dit qu'ils avaient réussi à lui parler par téléphone à
7 Belgrade.
8 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons en fait
9 cette photographie, cette arrêt sur image, et je pense que nous pouvons
10 peut-être maintenant justement revenir là-dessus et en terminer avec cette
11 question.
12 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Fort bien.
13 M. STRINGER : [interprétation] Quel est le numéro ter -- alors c'est un
14 document où la photo a maintenant le numéro en application de la liste 65
15 ter 4924.2.
16 Q. Monsieur Dzakula, vous pouvez maintenant vous saisir de votre stylet,
17 et j'aimerais vous demander de bien vouloir faire un cercle autour de la
18 personne que vous avez mentionnée ou que vous avez reconnue comme étant M.
19 Bogic.
20 R. Voilà, c'est lui M. Stevo Bogic.
21 M. STRINGER : [interprétation] Est-ce que cette photographie annotée
22 pourrait maintenant avoir une cote, car l'Accusation souhaite demander le
23 versement au dossier de cette photographie.
24 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. La photographie sera retenue
25 comme élément de preuve.
26 M. STRINGER : [interprétation] En fait, ce n'est pas le clip vidéo mais
27 c'est la photographie, l'arrêt sur image dont nous souhaitons demander le
28 versement au dossier.
Page 369
1 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document 4924.2 de la liste 65 ter
2 annotée par le témoin dans le prétoire devient maintenant la pièce P35.
3 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.
4 M. STRINGER : [interprétation]
5 Q. Monsieur Dzakula, j'aimerais maintenant vous montrer un extrait vidéo
6 assez bref. Il s'agit du document 4945, document de la liste 65 ter.
7 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais à quel numéro d'onglet est-ce
8 que cela correspond -- je m'adresse au Greffier d'audience.
9 [Diffusion de la cassette vidéo]
10 M. STRINGER : [interprétation] Excusez-moi.
11 [Diffusion de la cassette vidéo]
12 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
13 "Goran Hadzic : Dieu soit avec vous, vous êtes des héros.
14 Le public : Que Dieu soit avec vous.
15 Goran Hadzic : Je vous souhaite la bienvenue au nom de tous les citoyens de
16 la République de la Krajina serbe, et permettez-moi de vous remercier pour
17 tout ce que vous avez fait pour nous. Vous êtes ici maintenant, vous êtes
18 les nouveaux héros, les nouveaux Obilics et Sindjelics, les nouveaux héros
19 dont les prouesses figureront dans le livre d'histoire du peuple serbe.
20 Vous et vos frères avez donné, avez sacrifié vos vies et vous serez
21 considérés comme des saints qui auront déversé leur sang pour la liberté du
22 peuple serbe. Grâce à cet acte que vous avez effectué, vous avez prouvé que
23 le peuple serbe ne s'agenouillera jamais devant quiconque, ne demandera
24 jamais pardon, et nous sommes en train de prouver à tous les intrigants du
25 monde entier que la République de la Krajina serbe ne sera jamais à vendre.
26 Aucun prix ne peut être attribué à notre liberté et, de toute façon, nous
27 ne la vendrons jamais pour quelque somme que ce soit. Nous nous trouvons
28 vraiment dans une situation très difficile, assiégés de toutes parts par
Page 370
1 nos ennemis, mais nous n'avons jamais été aussi unifiés et aussi décidés à
2 défendre notre liberté. Et ce qui est encore plus important ? C'est que
3 nous savons maintenant qui sont nos ennemis, et personne ne peut plus
4 leurrer le peuple serbe en parlant de 'fraternité et d'unité'. Tous les
5 citoyens de la RSK sont égaux et devront être considérés égaux
6 indépendamment de leur appartenance ethnique, mais il faut que le monde
7 entier sache qu'il s'agit maintenant de la RSK. Et ceux qui ne veulent pas
8 l'accepter peuvent quitter la RSK. Alors, je ne voudrais épuiser davantage
9 nos soldats sous ce soleil, dans cette chaleur. Je voudrais les remercier à
10 nouveau et annoncer publiquement pour la première fois que nous avons deux
11 nouveaux généraux de l'armée serbe, à savoir Borislav Djukic et Milan
12 Martic. Merci beaucoup."
13 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
14 M. STRINGER : [interprétation]
15 Q. Ma première question, Monsieur Dzakula, est comme suit, est-ce que
16 vous-même étiez présent à ce rassemblement dont nous venons de voir le
17 discours ?
18 R. Non, non, je n'étais pas présent.
19 Q. Est-ce que vous êtes en mesure de reconnaître les personnes ou de nous
20 dire qui est Milan Martic, puisque son nom a été prononcé lors de ce
21 discours.
22 R. Oui. Oui, il est mentionné effectivement, et on le voit, on le voit sur
23 la vidéo. Milan Martic était le ministre de l'intérieur, il s'occupait de
24 la police.
25 Q. Et qui est Borislav, ou plutôt, est-ce que vous reconnaissez Borislav
26 Djukic ?
27 R. Borislav Djukic était l'un de ses assistants.
28 Q. Il est indiqué dans cet extrait vidéo par M. Hadzic qu'il y a deux
Page 371
1 généraux de l'armée serbe. Vous vous souvenez de ce propos ?
2 R. Oui. Oui, oui, je m'en souviens. Boro Djukic et Milan Martic qui ont
3 été nommés généraux de l'armée de la RSK.
4 Q. Est-ce que vous savez qui les a nommés ?
5 R. Ils ont été nommés par le président de la République de la Krajina
6 serbe, à savoir par M. Goran Hadzic.
7 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation souhaite
8 demander le versement au dossier de cet extrait vidéo qui est, je vous le
9 rappelle, le document 4945 de la liste 65 ter.
10 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. Il sera versé au dossier et
11 retenu comme élément de preuve.
12 M. STRINGER : [interprétation] Ah, excusez-moi.
13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cet extrait vidéo se voit attribuer la
14 cote P36. Merci.
15 M. STRINGER : [interprétation] Je vais demander l'aide de M. l'huissier, et
16 je pense qu'il serait plus opportun de sortir du classeur le document
17 suivant, à savoir le document 961 de la liste 65 ter, qui correspond à
18 l'onglet 31.
19 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
20 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stringer, pour que tout soit
21 bien clair, le document suivant, l'extrait vidéo, en d'autres termes, est-
22 ce qu'il s'agit du document 4945 ou du document 4945.1 ?
23 M. STRINGER : [interprétation] Non, 4945.1.
24 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Alors, pour que tout soit bien clair au
26 compte rendu d'audience, le document 4945.1 devient maintenant la pièce
27 P36. Merci.
28 Q. Monsieur Dzakula, vous avez maintenant ce document; est-ce que vous
Page 372
1 pouvez nous dire ce dont il s'agit ? Est-ce que vous pouvez nous dire si
2 vous reconnaissez ce document ?
3 R. Oui, oui, je le reconnais. Il s'agit du procès-verbal de la séance ou
4 de la session tenue par la présidence de la RSFY --
5 L'INTERPRÈTE : Est-ce que le témoin pourrait répéter la date.
6 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Pouvez-vous répéter la date ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, la réunion a eu lieu le 2 mars 1992.
8 M. STRINGER : [interprétation]
9 Q. Et si vous prenez la première page, nous pouvons constater que vous
10 étiez présent, en compagnie de Hadzic, de M. Zecevic, de Milan Martic
11 également. Voyez la liste des personnes présentes; vous le voyez ?
12 R. Oui, oui, tout à fait.
13 Q. Voilà ce que je souhaiterais faire, alors il y a toute une
14 introduction, c'est le général Adzic qui fait référence à Travnik, par
15 exemple, et au fait que la guerre s'est propagée jusqu'en Bosnie-
16 Herzégovine donc. Nous allons donc passer, sauter cette partie, mais est-ce
17 que vous pourriez passer à la page 43 de votre version, page 31, pour la
18 version anglaise, s'il vous plaît.
19 R. J'ai trouvé ladite page.
20 Q. Donc là, nous voyons que M. Hadzic fait certaines observations en tant
21 que président de la RSK.
22 R. Oui, je le vois.
23 Q. J'aimerais en fait que nous nous intéressions à l'intervention de
24 l'orateur suivant, à savoir M. Milan Martic.
25 R. Oui, je l'ai trouvé.
26 Q. Dans le deuxième paragraphe, il fait référence à M. Milan Babic. Donc
27 cela ne m'intéresse pas, nous allons sauter ce paragraphe.
28 R. Oui, il y fait référence, effectivement.
Page 373
1 Q. Et au milieu de la page suivante en anglais, à savoir, c'est pour vous
2 le sixième paragraphe, à partir du haut.
3 Là, M. Hadzic dit qu'il faut retirer l'armée. Puis au paragraphe
4 suivant, il fait référence à "une transformation, la transformation qui est
5 sur le point d'avoir lieu."
6 Vous le voyez cela ?
7 R. Oui, je le vois.
8 Q. Donc nous allons ensuite nous intéresser à un autre paragraphe, et puis
9 donc je vous poserais mes questions. Donc dans le paragraphe suivant, M.
10 Martic dit ce qui suit :
11 "Par conséquent, je vous implore - et je pense qu'il y a quelques
12 obstacles, que les choses progressent lentement - je vous implore pour que
13 cette transformation soit accélérée, je pense à la transformation de la
14 police pour commencer, qui est censée demeurer une force tangible…"
15 Et puis il poursuit :
16 "Je vous implore pour que tout soit prêt avant l'arrivée des Nations Unies
17 - avant l'élément militaire des Nations Unies - pour que nous puissions
18 réagir rapidement."
19 Vous étiez présent à cette réunion, Monsieur Dzakula. Est-ce que vous
20 pourriez dire à la Chambre à quel type de transformation pensait M. Milan
21 Martic, qu'est-ce qu'il évoquait dans ce paragraphe?
22 R. Bien, Milan Martic parlait de la transformation de l'armée en police, à
23 savoir il pensait à une formation armée qui accueillerait les soldats des
24 Nations Unies. Il n'était pas particulièrement ravi du rythme des
25 événements, non seulement en matière d'équipement des unités et du rythme
26 auquel tout cela s'est passé.
27 Q. Alors, conformément au plan Vance, est-ce qu'il était prévu que l'armée
28 se transforme, devienne la police ?
Page 374
1 R. Non, non. Le plan Vance envisageait le désarmement de l'armée, le
2 départ de la JNA du territoire de la Krajina où il y avait la guerre, et
3 que la seule formation armée pouvait être la police - la police locale,
4 comme ils l'appelaient - police locale armée d'armes à canon court.
5 Q. Et au vu de ce que vous avez constaté et vu, est-ce que cela s'est
6 passé ? Est-ce que la JNA est effectivement partie, est-ce que la police
7 locale ne disposait que d'armes à canon court ?
8 R. La JNA est partie du territoire, elle est partie conformément à
9 l'accord avec -- elle est partie lorsque les troupes de la FORPRONU sont
10 arrivées. Toutefois, la police a conservé ces armes à canon lourd. Il n'y
11 avait que la police en Slavonie occidentale qui avait ces armes à canon
12 court; alors que dans les autres régions de la partie centrale, à savoir en
13 Slavonie, Baranja et Srem occidental, là, la police a continué à avoir ces
14 armes à canon lourd.
15 Q. Est-ce que vous pourriez passer à la page 61 de votre version du
16 procès-verbal et à la page 44 de la version anglaise. Alors, c'est le bas
17 de la page 44 qui m'intéresse avec l'intervention de M. Ilija Koncarevic.
18 Est-ce que vous la voyez ?
19 R. Oui, je vois cette intervention.
20 Q. Quelle était sa fonction à ce moment-là en RSK ?
21 R. Ilija Koncarevic était le président adjoint de l'assemblée de la RSK.
22 Q. Très bien. Et dans le deuxième paragraphe de son intervention, il
23 s'adresse à M. Mitrovic. Il dit :
24 "Nous avons véritablement cessé d'obtenir un soutien financier, c'est la
25 raison pour laquelle nous nous sommes adressés à l'assemblée de la RSFY. Et
26 nous avons demandé à ce que l'on utilise les mêmes méthodes de financement
27 pour Banja Luka et pour Monténégro. Donc nous vous serions extrêmement
28 reconnaissants de pouvoir mettre à notre disposition cet argent rapidement
Page 375
1 parce que nous n'avons absolument plus d'argent."
2 Monsieur Dzakula, en tant que vice-président ou premier ministre adjoint du
3 gouvernement de la RSK, est-ce que cela est une bonne description,
4 description exacte de la situation financière dans laquelle s'est trouvée
5 la RSK à l'époque ?
6 R. Oui, oui, il s'agit d'information tout à fait exacte. A l'époque, nous
7 étions absolument tributaires des fonds que nous recevions de la
8 Yougoslavie. Nous n'avions absolument aucune ressource au sein de la RSK à
9 l'époque.
10 Q. Est-ce que vous pourriez passer à la page 65 pour votre version, page
11 48 de la version anglaise. Donc, nous voyons que c'est M. Paspalj qui
12 s'adresse, et vous l'avez mentionné, Monsieur Dzakula, qui était-il ?
13 R. M. Milan Paspalj était le président de l'assemblée de la RSK.
14 Q. Bien. Et là, il s'agit de la page 65 pour votre version, et pour la
15 page 48 de la version anglaise, le début de la page. Voilà ce qu'il dit :
16 "Je souhaiterais tout simplement dire ou intervenir en sus de la discussion
17 qui a été dit par M. le Ministre Martic… parce que nous nous attendons à
18 obtenir de votre part toute aide possible, aide financière, aide
19 matérielle, notamment aide militaire, et tout autre aide nécessaire pour
20 faire en sorte de mettre sur -- parce que nous sommes en train, en fait,
21 d'utiliser des fonds privés."
22 Donc, j'aimerais à nouveau vous demander s'il s'agit d'une description
23 exacte de la situation financière, est-ce que la RSK était absolument
24 tributaire de la Serbie pour toute assistance financière et matérielle ?
25 R. Oui. Nous n'avions aucune ressource.
26 Q. Aux pages 67 à 71 de votre version, et cela commence à la page 49 de la
27 version anglaise, donc il s'agit de la page suivante, c'est vous qui vous
28 exprimez, Monsieur Dzakula. Et comme vous le dites, vous faites une
Page 376
1 première remarque, vous parlez du district serbe de la Slavonie occidentale
2 et vous ne parlez que de ce secteur serbe de la Slavonie occidentale. Vous
3 voyez cela ?
4 R. Oui, je le vois.
5 Q. Et vous dites :
6 "Nous avons commencé les pourparlers avec M. Goulding, pourparlers qui
7 devront se poursuivre."
8 Puis, vous dites "cela porte sur l'élargissement de la région." Pour cela,
9 nous devons avoir la page suivante de la version anglaise, page 50. Et là,
10 vous faites référence à plusieurs lieux. Vous dites que -- vous parlez de
11 l'élargissement, donc, du territoire. Et je pense que nous avons abordé
12 cela hier. Quels étaient vos objectifs, et je pense aux zones protégées par
13 le plan Vance et à leur place en Slavonie occidentale ?
14 R. Ecoutez, j'ai justement saisi cette occasion, puisque M. Jovic
15 dirigeait le comité de négociations avec les Nations Unies, pour essayer
16 une fois de plus d'élargir la zone de la FORPRONU pour y inclure les lieux
17 Pozega, Slatina, Donji Miholjac, par exemple, et Orahovica d'ailleurs,
18 parce qu'il y avait la guerre qui faisait rage, et là les réfugiés auraient
19 été protégés par les Nations Unies et les gens auraient pu y revenir.
20 M. STRINGER : [interprétation] Une correction pour le compte rendu
21 d'audience. Page 31, ligne 7, j'ai fait référence au "plan Vance-Owen". Or,
22 il s'agit d'une erreur de ma part, puisque je ne voulais parler que du
23 "plan Vance".
24 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
25 M. STRINGER : [interprétation]
26 Q. Monsieur Dzakula, est-ce que vous pouvez consulter la page 69 [comme
27 interprété] de votre version qui correspond à la page 68 [comme interprété]
28 de la version anglaise. Là, nous voyons que M. Zecevic prend la parole. Et
Page 377
1 il fait une déclaration. Il parle de
2 15 000 Croates de Benkovac. Vous voyez cette phrase ?
3 R. Oui, je la vois.
4 Q. Alors, je ne vais pas vous donner lecture de l'intégralité du
5 paragraphe, juste une partie. Bon, il dit qu'il panique : Je panique
6 lorsque je pense que 15 000 Croates vont revenir à Benkovac. Et puis, il
7 continue et dit :
8 "Le fait est que nous ne pouvons pas vivre ensemble et nous ne voulons plus
9 vivre avec eux."
10 Alors, cette déclaration qui porte sur les Croates de Benkovac, dans un
11 premier temps, j'aimerais savoir si vous partagiez le point de vue exprimé
12 par M. Zecevic ?
13 R. Non. Non, non, je ne partageais pas son avis, et de toute façon cela
14 était de notoriété publique.
15 Q. Alors, est-ce que le point de vue de M. Zecevic, à votre connaissance,
16 est-ce que d'autres personnes du gouvernement de la RSK partageaient ce
17 point de vue ?
18 R. La majorité des ministres partageaient le point de vue de M. Zecevic,
19 notamment lorsqu'ils devaient déclarer quel était ce point de vue en
20 public.
21 Q. Dans quelle mesure, si tel est le cas, est-ce que cette opinion reflète
22 en quelque sorte le point de vue et la politique officielle du gouvernement
23 de la RSK à propos du retour de la population non-serbe dans ces régions de
24 la RSK ?
25 R. Ecoutez, il s'agissait de la politique officielle, à savoir les non-
26 Serbes ne pouvaient pas revenir sur le territoire de la RSK. Et l'excuse
27 qui était constamment avancée était que les conditions pour ce retour
28 n'étaient pas encore remplies.
Page 378
1 Q. Est-ce que cette politique a eu un impact sur le retour des Serbes dans
2 les régions dont vous avez parlé et qui se situent en Slavonie occidentale
3 ?
4 R. Oui, certainement. Parce que -- enfin, tout à fait, plutôt, parce que
5 cette politique s'opposait au retour des Serbes dans des régions qui ne se
6 trouvaient pas, comme on le disait à l'époque, sous le contrôle serbe mais
7 qui étaient des zones placées sous l'administration de la police des
8 Nations Unies, et il y avait un contrôle militaire effectué par la partie
9 croate. Donc, le retour des Serbes dans ces régions n'était pas autorisé,
10 et, une fois de plus, l'excuse qui était avancée était que les conditions
11 n'étaient pas remplies.
12 Q. Alors, à ce moment-là - il s'agit du mois de mars 1992 - est-ce que
13 vous savez quel était le point de vue de M. Hadzic à ce sujet, à savoir le
14 retour des Croates et des Serbes qui reviendraient vivre ensemble dans ces
15 zones ?
16 R. Il n'était pas partisan ni du retour des Serbes, ni du retour des
17 Croates. Enfin, il n'était pas partisan, donc, de cette cohabitation
18 ensemble.
19 Q. Est-ce que vous avez jamais parlé de cette question avec M. Hadzic,
20 est-ce que vous avez jamais parlé de cette question du retour à ce moment-
21 là ?
22 R. Oui, oui. Je pense que nous en avons parlé à la fin du mois d'avril ou
23 au début du mois de mai 1992. Il y avait eu une séance du gouvernement qui
24 avait eu lieu en Slavonie orientale. A Erdut, me semble-t-il. Et là, M.
25 Hadzic m'a invité à parler avec lui. J'ai assisté à la séance du
26 gouvernement et je suis venu dans son bureau. Il était accompagné d'Arkan,
27 qui était parfaitement connu comme un belligérant et un guerrier notoire.
28 Or, il m'a salué assez brièvement et il m'a posé la question suivante :
Page 379
1 Veljko, est-ce qu'il est vrai que tu préconises la coexistence avec les
2 Croates ? Alors, je l'ai regardé et j'ai vu qu'Arkan me regardait d'une
3 façon très, très soutenue, et donc je lui ai dit que ce n'était pas vrai.
4 Il m'a reposé la question et il m'a dit : Mais tu sais, je te fais
5 confiance quel que soit ton point de vue. Et j'ai dit que non, que je ne
6 préconisais pas cela. Il m'a dit : Très bien. Et puis, je suis reparti
7 assister à la séance du gouvernement.
8 Q. Pourquoi est-ce que vous avez dit que vous ne préconisiez pas cela ?
9 R. Eh bien, la question elle-même était assez bizarre. Et en outre, en
10 présence d'Arkan, qui était cruel pour les êtres humains qui n'exprimaient
11 pas le royaume serbe tel qu'il l'entendait lui, je n'étais pas suffisamment
12 courageux pour confirmer mes convictions devant lui car j'avais peur des
13 conséquences, et par la suite je l'ai ressenti.
14 M. STRINGER : [interprétation] Dernière question avant la pause,
15 Monsieur le Président, si vous me le permettez.
16 Q. Une description très brève du site ou du lieu où cette
17 conversation s'est tenue. Vous avez dit son bureau. Où cela était-il ?
18 R. Dans un bâtiment avec des grands murs. Je pense que ça s'appelait le
19 château, ou un nom de ce genre, où nous tenions donc ces sessions. C'est un
20 ancien bâtiment qui avait une enceinte et qui était à l'époque une
21 exploitation agricole ou une coopérative agricole, quelque chose de ce
22 genre. Mais je ne l'avais pas vraiment remarqué pour la bonne raison que
23 j'étais assujetti à d'autres problèmes et préoccupations.
24 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, oui.
25 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, nous allons faire
26 une pause. Nous reviendrons à 11 heures. L'huissier va vous faire sortir.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
28 [Le témoin quitte le prétoire]
Page 380
1 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Nous prenons une pause.
2 --- L'audience est suspendue à 10 heures 32.
3 --- L'audience est reprise à 11 heures 00.
4 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stringer, on nous a dit que
5 vous vouliez soulever une question sur des documents avant que le témoin
6 arrive.
7 M. STRINGER : [interprétation] Désolé, désolé.
8 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ah, non, c'était la Défense. Désolé.
9 Désolé.
10 Monsieur Zivanovic, désolé.
11 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
12 J'aimerais présenter donc la question avant le début de mon contre-
13 interrogatoire. Je me suis adressé à M. Stringer en la matière. Alors,
14 quant à la liste de documents pour la Défense, un document 21. Pardon, est-
15 ce que nous pourrions passer à huis clos partiel.
16 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Huis clos partiel, je vous prie.
17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur
18 le Président.
19 [Audience à huis clos partiel]
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 (expurgé)
28 (expurgé)
Page 381
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 Pages 381-383 expurgées. Audience à huis clos partiel.
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 384
1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 (expurgé)
5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 [Audience publique]
8 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Si vous voulez bien faire venir le
9 témoin.
10 [La Chambre de première instance se concerte]
11 [Le témoin vient à la barre]
12 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stringer.
13 M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
14 Q. Monsieur Dzakula, avant la pause, nous nous penchions le compte rendu
15 de la réunion de la RSFY du 2 mars 1992. Mais le dernier point sur lequel
16 j'aimerais attirer votre attention, si vous voulez bien passer à la page 92
17 de votre document, page 68 de la version anglaise.
18 Si vous voulez bien encore une fois passer à la page 92 du compte rendu de
19 cette réunion.
20 Monsieur Dzakula, M. Hadzic prononce la déclaration suivante, et je crois
21 qu'il serait utile tout d'abord de voir ce à quoi il répond. Voici donc les
22 déclarations de Radovan Karadzic, donc qui précède celle de M. Hadzic. Vers
23 la fin du discours de M. Karadzic, il déclare :
24 "Il pense de passer l'initiative entre les mains des Croates, qu'ils sont
25 préparés à faire l'échange; 150 000 parcelles de l'armée terre à Vojvodina
26 pour 150 000 Serbes, qui vont être aux Croates de Vojvodina, qui iront en
27 Krajina. Ce sont des idées nébuleuses comme nous le voyons pour le restant
28 du monde, et il est très douteux si quelque chose de cette sorte serait
Page 385
1 faisable."
2 Et M. Hadzic répond :
3 "Il n'y a rien de nébuleux en la matière. Les Serbes de Zagreb devraient
4 être réimplantés, ainsi que de Belgrade, et donc c'est hors de question à
5 l'heure actuelle."
6 Est-ce que vous le voyez ?
7 R. Oui, je le vois.
8 Q. La question est donc, nous parlons en fait de la réimplantation des
9 Serbes aux lieux où ils vivaient en Slavonie occidentale et en RSK. Ici, M.
10 Hadzic parle donc de réimplanter les Serbes dans d'autres régions qui ne
11 sont pas dans la RSK. C'était également son point de vue, c'est-à-dire
12 faire venir des Serbes en RSK et venus de l'extérieur.
13 Q. Oui, c'était effectivement sa position. Il estimait que les Serbes de
14 Zagreb devraient se déplacer en Krajina.
15 Q. C'est tout ce que j'ai de ce procès-verbal.
16 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, le Procureur verse le
17 document 961 65 ter.
18 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.
19 M. LE GREFFIER : [interprétation] Qui reçoit la cote P37. Merci.
20 M. STRINGER : [interprétation]
21 Q. Avant de passer au document suivant, Monsieur Dzakula, je voulais vous
22 demander, nous avons parlé de différentes personnes qui se trouvaient dans
23 le gouvernement de la RSK ou qui étaient associées en 1992. Saviez-vous qui
24 était Milan Ilic ?
25 R. Je n'ai pas entendu le nom de famille. Je n'ai entendu que Milan.
26 Q. Ilic, Ilic.
27 R. Milan Ilic, là sur le moment, je ne me souviens de personne de ce nom.
28 Q. Très bien. La pièce suivante de la liste 65 ter est 1104, c'est-à-dire
Page 386
1 l'onglet 34.
2 M. STRINGER : [interprétation] En fait, Monsieur le Greffier, nous pouvons
3 rester sur le document qui se trouve sur l'écran, aucun d'entre eux n'est
4 aussi important que le procès-verbal que nous venons de voir.
5 Q. Voyez-vous le document 1104 à l'écran, Monsieur Dzakula ?
6 R. Oui, oui, je le vois.
7 Q. Avez-vous vu ce document préalablement ?
8 R. Oui.
9 Q. Du 18 mai 1992, une déclaration autorisant le retour des immigrants et
10 des personnes déplacées. Et ce document a-t-il été publié à la gazette
11 officielle, au journal officiel de la RSK ?
12 R. Oui, il y a publié au journal officiel de la RSK.
13 Q. J'aimerais attirer votre attention au paragraphe 2, donc le point 2, où
14 l'on parle de personnes qui ont pris part à la guerre civile qui s'est
15 tenue sur le territoire de ce qui est maintenant la République serbe de
16 Krajina, du 6 avril 1941 au 15 mai 1945, et qui n'ont pas enfreint les
17 réglementations internationales concernant les crimes de guerre, et qui
18 n'étaient pas dans les unités nommées NDH, c'est-à-dire de l'état
19 indépendant de Croatie, et cetera, et cetera. Et passons maintenant au
20 point 3 :
21 "Toutes les personnes auxquelles les dispositions de cette déclaration
22 s'appliquent peuvent revenir à toute partie du territoire de la RSK sans
23 aucune préconditions [phon] ni conséquences."
24 Et ceci se trouve au-dessus du nom de Mile Paspalj.
25 J'aimerais vous demander, cette référence à la Première Guerre
26 mondiale et des personnes auxquelles on se réfère, qui seraient couvertes
27 par cette disposition, de quoi s'agit-il ? Pourriez-vous nous dire de quoi
28 il s'agit ?
Page 387
1 R. Tout d'abord, il s'agissait de la Deuxième Guerre mondiale, et pas la
2 Première Guerre mondiale, parce que nous parlons de la période entre avril
3 1941 et mai 1945. Tout ceci a trait à des segments de la population croate
4 qui était implantée pendant la Deuxième Guerre mondiale par Ante Pavelic
5 sur le territoire de la Croatie, et qui viennent principalement de la
6 Slavonie occidentale et ont été réimplantés en Slavonie orientale. Tout
7 ceci a trait à leur personne car la majorité d'hommes étaient membres de
8 l'armée oustacha, et la présomption étant que ceci portait sur leur droit
9 au retour.
10 Q. Oui, je sais, je me suis trompé. J'ai parlé de la Première Guerre
11 mondiale. Mais j'aimerais élucider un point que vous avez précisé.
12 Il s'agissait de Croates, avez-vous dit -- enfin, tout du moins ce
13 que nous avons vu au compte rendu, et qui venaient de la Slavonie
14 occidentale principalement. Des Croates, je dis bien, de la Slavonie
15 occidentale qui étaient venus pendant la Deuxième Guerre mondiale ?
16 R. Non. Il s'agissait de Croates d'Herzégovine occidentale qui ont été
17 réimplantés en Slavonie orientale pendant le règne d'Ante Pavelic.
18 Q. Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre en gros où se trouve la
19 région de l'Herzégovine occidentale ?
20 R. Eh bien, c'est à proximité de Mostar et de Ljubuski, dans cette région-
21 là. C'est donc l'Herzégovine occidentale. Et à droite de Mostar, vers la
22 Serbie, c'est l'Herzégovine orientale.
23 Q. Et ceci est en Bosnie-Herzégovine ?
24 R. Oui, c'est en Bosnie-Herzégovine.
25 Q. Alors, qui étaient ceux qui seraient couverts par cette autorisation de
26 retour en toute partie de la RSK ?
27 R. Pour autant que je comprenne ce document, cela signifie les personnes
28 qui étaient Croates et qui ont déménagé dans la période 1941-1945, et je
Page 388
1 crois qu'ils ont déménagé ou ont quitté des maisons - je ne sais pas à qui
2 elles appartenaient - mais quoi qu'il en soit, il s'agissait de Croates, et
3 certains d'entre eux étant membres des forces oustachi ont sans doute été
4 récompensés en recevant des maisons dans cette région.
5 Q. Et ces Croates, donc, qui vivaient dans cette région de la RSK de la
6 Deuxième Guerre mondiale, quel devait être leur statut ou en quoi étaient-
7 ils touchés par cette déclaration ?
8 R. Eh bien, bon nombre d'entre eux auraient été touchés car ils ne
9 seraient pas en mesure de retourner dans leurs anciens lieux de domicile et
10 leurs maisons.
11 Q. Et ceci, donc, est l'autorisation du retour des émigrants et des
12 personnes déplacées qui résidaient sur le territoire de ce qui est
13 maintenant la RSK et qui ont été forcés à partir ou qui sont partis de
14 façon volontaire. Vous le voyez ? A l'article 1.
15 R. Oui.
16 Q. Et donc, qui sont ceux qui sont autorisés au retour sur ce territoire
17 de la RSK ?
18 R. Eh bien, il s'agit du domicile des populations croates qui vivaient
19 avec des Serbes, et ce, depuis des siècles. Ou peut-être des Serbes ou des
20 Hongrois ou d'autres réfugiés appartenant à d'autres groupes ethniques.
21 M. STRINGER : [interprétation] L'Accusation verse le document 1104 de la
22 liste 65 ter.
23 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.
24 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il recevra la cote P38. Merci.
25 M. STRINGER : [interprétation] Et maintenant, 65 ter 1035. A l'onglet 33.
26 Et nous allons regarder le point 134.
27 Q. Monsieur Dzakula, vous reconnaissez cette décision ? Vous l'avez vue
28 avant votre déposition aujourd'hui ?
Page 389
1 R. Oui, je l'ai vue, et je reconnais ce document.
2 Q. La déclaration sur le retour des réfugiés.
3 R. Oui.
4 Q. A l'article 2, on y prévoit que le secrétaire de l'Intérieur est chargé
5 des vérifications d'antécédents de ceux qui demandent le retour pour
6 confirmer que la personne a été directement ou indirectement impliquée dans
7 une unité ennemie ou nationaliste et au parti fasciste. La question est
8 donc : quels sont ces éléments, unités ennemies ou partis nationalistes ou
9 fascistes ? De quoi s'agit-il ?
10 R. Eh bien, ceci portait sans doute sur les membres de la ZNG, de l'armée
11 et de la police croate. En ce qui concerne les partis nationalistes ou
12 fascistes, cela signifie absolument le HDZ et autres … et d'autres partis
13 analogues opérant sur le territoire de la Croatie.
14 Q. Donc, cette législation, si quelqu'un était membre du parti HDZ, il
15 faudrait être identifié à cet effet, ou cela est identifié dans ce
16 processus pour décider de qui pouvait avoir droit au retour ?
17 R. Oui, tout à fait.
18 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Objection. Objection. Bien que le témoin
19 ait déjà répondu à cette question. Le témoin a déclaré à la ligne -- à la
20 ligne 7, page 43, qu'il est "probablement". Et je ne vois pas pourquoi on
21 lui pose une question d'interprétation et comment cela était mis en œuvre
22 s'il doute qu'il n'a pas la certitude, que ce soit de la façon dont il
23 l'explique ou dont il le décrit.
24 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stringer, qu'en dites-vous ?
25 M. STRINGER : [interprétation] Je suis bien d'accord avec le fait que le
26 témoin ait dit "probablement". Je peux peut-être aborder cette question
27 d'une façon différente.
28 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Allez-y, s'il vous plaît.
Page 390
1 M. STRINGER : [interprétation]
2 Q. Monsieur Dzakula, pourriez-vous me dire de façon générale si vous savez
3 de quelle façon ces dispositions devaient toucher la possibilité de la
4 population croate de revenir dans la région qui se trouvait dans les
5 frontières de la RSK ? Cette réglementation affectait-elle leur capacité de
6 revenir, le savez-vous ?
7 R. Oui, ils seraient très affectés. Parce que de nombreux croates ont été
8 soit membres du HDZ, soit ont fait partie des formations ou unités
9 militaires. Et, par conséquent, il n'y aurait que très peu de Croates qui
10 seraient en mesure de revenir conformément à cette législation.
11 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, nous souhaitons
12 demander le versement du document 1035 de la liste 65 ter. Peut-être
13 pourra-t-il faire partie de la bibliothèque juridique. C'est un document
14 publié dans le journal officiel de la RSK.
15 [La Chambre de première instance se concerte]
16 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le document est admis.
17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Messieurs les Juges, le document 1035
18 recevra la cote L-8. Merci.
19 [La Chambre de première instance se concerte]
20 M. STRINGER : [interprétation] Le document suivant porte la cote 314 sur la
21 liste 65 ter.
22 Q. Monsieur Dzakula, ce que vous avez sous les yeux est un article publié
23 dans la presse. Et plus précisément, dans le quotidien "Borba", au mois de
24 septembre 1991. Etes-vous capable de déchiffrer le texte tel qu'il est
25 présenté à l'écran ?
26 R. Mais je ne peux déchiffrer que le titre qui est imprimé en gros
27 caractères : Les frontières seront définies en fonction des forces. Et
28 puis, je peux lire le sous-titre : La capitale de la SAO, Vukovar,
Page 391
1 Virovitica et Moslavina sont le dernier point d'appui de la Région autonome
2 serbe. Et je peux déchiffrer : Les SAO n'auront de la place que pour les
3 Croates qui y habitent depuis toujours.
4 Q. Essayons d'agrandir le texte un petit peu, mais je crains que nous ne
5 perdions le document. Peut-être pourriez-vous consulter le document qui se
6 trouve dans le classeur à l'intercalaire 38. Intercalaire 38. Je vous
7 demande pardon à cause des difficultés que vous avez à déchiffrer le texte.
8 Nous voyons dans cet article un certain nombre de déclarations qui sont
9 attribuées à M. Hadzic et j'aimerais vous poser quelques questions là-
10 dessus. Au paragraphe 2, voici la citation qui est attribuée à M. Hadzic :
11 "La capitale de cette région c'est la ville de Vukovar, qui n'a pas encore
12 été libérée, mais nous espérons que sa libération aura lieu prochainement."
13 Voyez-vous cette citation ?
14 R. Oui.
15 Q. Donc, nous sommes revenus au mois de septembre 1991. Savez-vous si
16 c'était bien l'intention qu'on avait à l'époque, à savoir de faire de la
17 ville Vukovar la capitale de la SAO SBSO ?
18 R. Oui.
19 Q. Quelques lignes plus loin, on parle des ministres et de la conférence -
20 - des ministres qui ont été présents lors de la conférence de presse avec
21 M. Hadzic. On dit que la solution proposée à la partie croate était de
22 relocaliser la population.
23 "Les Serbes des régions non-serbes déménageraient sur le territoire
24 de la SAO, tandis que les représentants de la minorité croate
25 déménageraient depuis la SAO jusqu'en Croatie."
26 Le voyez-vous ?
27 R. Oui, je le vois.
28 Q. Eh bien, quelques minutes plus tôt, dans le dernier -- dans les minutes
Page 392
1 de la réunion organisée au niveau de la RSFY, nous avons vu que M. Hadzic a
2 fait référence à la population qui devait déménager de Zagreb. Vous en
3 souvenez-vous ?
4 R. Oui.
5 Q. Et ce que nous voyons dans cet article, les mots que nous y lisons,
6 est-ce qu'ils sont dans le droit fil du point de vue défendu par M. Hadzic,
7 d'après ce que vous avez pu voir et entendre, concernant les lieux où les
8 Serbes et les Croates devaient habiter ?
9 R. Oui, ces propos se situent dans le droit fil de sa façon générale de
10 penser.
11 Q. Et quelques paragraphes plus loin, nous pouvons lire une autre citation
12 attribuée à M. Hadzic, où l'on peut lire :
13 "Nous ne souhaitons pas seulement le retour des Serbes mais aussi des
14 Croates autochtones."
15 Qu'est-ce que est entendu par ce terme ? Parce que plus loin, il dit :
16 "Nous faisons une distinction entre les Serbes et les Croates autochtones
17 d'une part et les nouveaux arrivés de l'autre part."
18 Et il évoque le génocide dont les Serbes ont été victimes au cours de la
19 guerre précédente et évoque les colonisateurs qui seraient venus de
20 l'Herzégovine occidentale. Et donc, la question qui se pose est de savoir :
21 qui sont ces Croates autochtones évoqués par M. Hadzic ?
22 R. Les Croates autochtones sont les Croates qui ont cohabité avec les
23 Serbes dans cette zone pendant les siècles. Soit, les uns à côté les
24 autres. Souvent même habitant dans des villages mixtes, je parle de la
25 Région de la Slavonie orientale.
26 Q. Et ces déclarations sont-elles liées à la réglementation relative aux
27 réfugiés que nous avons pu étudier quelques instants plus tôt, la
28 législation relative aux réfugiés et aux immigrants ?
Page 393
1 R. Oui, ces propos sont liés à cette question-là.
2 Q. Très bien. Et puis, un peu plus loin dans le texte, nous pouvons lire :
3 "Mais de nombreux Croates sont devenus des colonisateurs après la guerre.
4 Vous ne voulez pas dire qu'ils étaient des Oustachi eux aussi ?"
5 Et M. Hadzic répond :
6 "Eh bien, leurs parents étaient des Oustachi … et, par ailleurs, je ne
7 souhaite pas engager une discussion sur ce point … un grand nombre de
8 Croates sont des gens d'orientation démocratique, je crains que vous m'ayez
9 mal compris. Je ne parle que des Croates extrémistes qui ont tout
10 commencé."
11 Ma question, Monsieur Dzakula, serait la suivante : d'après vos
12 expériences, d'après ce que vous avez vécu en Slavonie occidentale, le
13 déplacement de la population, s'agit-il là d'une idée qui a trait à la
14 Deuxième Guerre mondiale ?
15 R. Non. Cette idée ne m'est jamais venue.
16 Q. Et pensez-vous que c'est un objectif qu'il sera possible de réaliser ?
17 R. Non, c'est absolument impossible. Ce genre d'approche ne peut
18 qu'approfondir les divisions et qu'attiser la haine.
19 Q. Et puis, M. Hadzic poursuit. On lui pose la question suivante :
20 "Mais êtes-vous en train de suggérer que les crimes est quelque chose qu'on
21 porte dans ses gènes ?"
22 Et la réponse qu'il fournit est la suivante :
23 "Non. Mais le fait est que certains habitants croates ont bien quelque
24 chose dans leurs gènes, à savoir une haine effrénée des Serbes."
25 Alors, Monsieur Dzakula, c'est une question que je vous ai déjà posée hier,
26 elle porte sur les déclarations de ce type qui émanent des hommes
27 politiques haut placés. Quels étaient leurs effets sur la population ?
28 R. Eh bien, ce type de déclaration ne faisait qu'attiser la haine et
Page 394
1 qu'encourager la destruction et d'infiltrer la peur dans la population
2 serbe aussi bien que dans la population croate.
3 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
4 l'Accusation souhaite demander le versement au dossier du document 314 de
5 la liste 65 ter.
6 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le document est admis.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document est admis sous la cote P39.
8 Merci.
9 M. STRINGER : [interprétation] Notre document suivant est un enregistrement
10 vidéo qui porte la cote --
11 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Avant de poursuivre, Monsieur Stringer,
12 j'aimerais revenir sur ces derniers échanges que vous avez eus avec le
13 témoin. Je me suis aperçu que Me Zivanovic n'a pas soulevé d'objection
14 quant à la nature conjecturale de la réponse fournie par le témoin.
15 Mais moi, je souhaite demander une précision au témoin, pourquoi pensez-
16 vous, Monsieur le Témoin, que ce type de déclaration aurait cet effet sur
17 la population que vous venez de décrire ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, si vous isolez une partie de la
19 population et vous l'accusez de porter la haine ethnique dans ses gènes, ce
20 qui me semble impossible à prouver et même contre nature, dès ce moment,
21 vous insultez cette partie de population. Vous créez une peur auprès de la
22 population serbe vis-à-vis de cette partie de la population, tandis que les
23 Croates concernés se sentent coupables d'être accusés de porter la haine
24 contre les Serbes dans leurs gènes.
25 Donc certainement des déclarations de ce type ne peuvent qu'irriter
26 la population en général, notamment quand il s'agit des gens qui avaient
27 l'habitude de cohabiter.
28 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.
Page 395
1 M. STRINGER : [interprétation] Donc je signale pour le compte rendu
2 d'audience que notre document suivant est en fait un enregistrement vidéo
3 qui porte la cote 4872.1. C'est un extrait de l'enregistrement vidéo 4872.
4 [Diffusion de la cassette vidéo]
5 L'INTERPRÈTE : Les interprètes signalent qu'ils entendent très mal
6 l'enregistrement audio, la bande audio.
7 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
8 "La Région autonome de la Slavonie de Baranja et de Srem occidental ne fait
9 plus partie de la Croatie. La question de la frontière occidentale reste
10 ouverte, et le gouvernement de cette SAO souhaite trouver une façon
11 démocratique à ce problème tout en respectant la volonté de la population.
12 Goran Hadzic, le président de la Slavonie, de la Baranja et du Srem
13 occidental a dit ceci aux journalistes locaux et étrangers dans le centre
14 de presse internationale à Belgrade. Le ministre chargé des informations,
15 Ilija Petrovic, a rappelé que conformément à l'accord de Londres, les
16 frontières devaient aller le long de la ligne, Ilova-Moslavina-Virovitica,
17 et il a rappelé aussi quelle était la proposition du Conseil national, à
18 savoir que l'une des solutions possibles était de déplacer les populations
19 serbes et croates. Lorsque les journalistes lui ont posé la question de
20 savoir si les chars ont été amenés à Belgrade, Goran Hadzic a répondu :
21 Les chars appartiennent à la JNA, et je peux vous dire que dans les
22 frontières de la République de Croatie présente, la JNA n'est pas grand
23 péril, pas plus que la population serbe qui y habite. La JNA y va pour
24 libérer leurs collègues, les autres soldats.
25 Le journaliste : Plusieurs fois, on lui a posé la question de savoir
26 qui étaient les personnes invitées à revenir dans la région, et M. Hadzic a
27 souhaité que non seulement les Serbes reviennent mais aussi les Croates
28 autochtones. Le génocide contre la population serbe n'a pas été perpétré
Page 396
1 par les Croates autochtones mais par les colonisateurs, amenés par Ante
2 Pavelic de l'Herzégovine orientale, du Zagorje croate et d'Imotsko."
3 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]
4 M. STRINGER : [interprétation]
5 Q. Monsieur Dzakula, la question qui se pose ici concerne à cette
6 référence aux Croates autochtones qui s'opposent aux Croates qui seraient
7 venus de l'Herzégovine occidentale, d'Imotski, et des autres villages
8 énumérés. Est-ce qu'il s'agit de nouveau de ces mêmes Croates dont nous
9 avons parlé un peu plus tôt, des Croates qui ont été implantés dans cette
10 région pendant la Deuxième Guerre mondiale ?
11 R. Oui, précisément.
12 Q. Je comprends que vous ne venez pas de la Slavonie orientale, mais
13 savez-vous si les Croates, si un grand nombre de Croates qui vivaient dans
14 la région de SBSO en 1991/1992 avaient ses origines dans l'Herzégovine
15 occidentale ?
16 R. Oui, les Croates étaient venus en grand nombre en Slavonie orientale
17 depuis l'Herzégovine occidentale.
18 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, nous souhaitons
19 demander le versement au dossier de ce document qui porte la cote 4872.1.
20 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le document est admis.
21 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cette pièce recevra la cote P40. Merci.
22 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, notre document
23 suivant se trouve à l'intercalaire 37, il porte la cote 5203 sur la liste
24 65 ter.
25 Q. Monsieur Dzakula, la version originale de ce document est en anglais,
26 mais vous recevrez la traduction ou plutôt l'interprétation de ce document
27 en simultané. Avez-vous déjà eu l'occasion de voir ce document avant de
28 venir déposer aujourd'hui ?
Page 397
1 R. Oui, j'ai déjà pu le voir lors de la séance du récolement.
2 Q. Ceci est un télégramme adressé par M. Nambiar à M. Goulding. Il est
3 envoyé de Belgrade à New York, et l'objet du télégramme est une réunion qui
4 s'est tenue avec les autorités de la Krajina. Il est indiqué qu'une réunion
5 a eu lieu avec le président de la RSK, M. Hadzic, avec vous-même et avec le
6 ministre des Affaires étrangères, Vezovic [phon].
7 Alors ma première question : vous souvenez-vous de cette réunion qui est
8 évoquée dans le document ?
9 R. Oui, je me souviens de la réunion qui s'est tenue avec M. Nambiar.
10 Q. Au paragraphe 3, on expose la déclaration liminaire faite par M.
11 Hadzic. Celui-ci a dit que le gouvernement de la RSK avait l'intention de
12 respecter le plan Vance dans sa totalité ainsi que la Résolution du Conseil
13 de sécurité 762. Il a déclaré qu'il vient d'arriver du secteur est où il a
14 fait une inspection, et qu'il est satisfait de la situation générale, sauf
15 quelques cas isolés d'intimidation et d'expulsion qui, d'après lui, sont
16 commis par des criminels.
17 Alors, Monsieur Dzakula, quand on évoque ici le secteur est, à quelle
18 région pense-t-on exactement ?
19 R. On pense à l'ancienne SAO SBSO.
20 Q. Et compte tenu du fait que vous exerciez à l'époque les fonctions du
21 vice-président du gouvernement de la RSK, êtes-vous d'accord pour dire que
22 M. Hadzic avait bien réellement l'intention de respecter le plan Vance dans
23 sa totalité ?
24 R. C'est ce que M. Hadzic disait en public, mais en réalité il n'était pas
25 prêt à appliquer ce plan dans sa totalité.
26 Q. Et quels étaient les éléments du plan qu'il ne souhaitait pas appliquer
27 ?
28 R. Eh bien, pour commencer le processus de la démilitarisation qui
Page 398
1 constituait une précondition pour toutes les autres activités. Parce
2 qu'aucune partie de la Slavonie orientale ou de la Krajina n'a été
3 démilitarisée. Quant au retour des réfugiés, on disait à titre d'excuse que
4 les conditions n'étaient pas réunies pour assurer leur retour, mais le fait
5 est qu'on n'a investi aucun effort pour créer des conditions permettant le
6 retour des réfugiés.
7 Q. Au paragraphe 8 de ce document, M. Hadzic indique qu'il a donné des
8 instructions très rigoureuses de poursuivre au pénal les criminels qui
9 commettent des expulsions. Il évoque les cas d'expulsion qui concernent les
10 Serbes.
11 Alors, ma question serait la suivante. On parle ici du mois de
12 juillet 1992, vous et les autres membres du gouvernement de la RSK, étiez-
13 vous au courant de ce type d'incidents contigus où les Serbes et les
14 pressions contre les non-Serbes se poursuivaient ?
15 R. On en parlait surtout dans les médias croates dans lesquels on pouvait
16 voir les Croates qui partaient de la Slavonie orientale et de la Dalmatie
17 en disant qu'ils étaient soumis à des provocations, qu'ils étaient roués de
18 coups, que de façon générale ils subissaient des mauvais traitements.
19 Q. Mais ici, vous avez reçu l'information sur ce type d'incidents
20 directement d'un haut représentant des Nations Unies ?
21 R. Oui, précisément. C'est un sujet qui souvent était évoqué lors de nos
22 réunions communes.
23 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît, Monsieur
24 le Témoin.
25 Maître Zivanovic.
26 M. ZIVANOVIC : [interprétation] La question a été directrice.
27 M. STRINGER : [interprétation] Je vous demande pardon. Vous avez bien
28 raison. Je vais reformuler ma question.
Page 399
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 400
1 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Allez-y.
2 M. STRINGER : [interprétation]
3 Q. Monsieur Dzakula, lors des réunions que vous avez eues avec les
4 représentants de la communauté internationale, la question de crimes commis
5 contre les non-Serbes s'est-elle posée ?
6 R. Oui. Lors de mes discussions avec M. Nambiar et avec les autres
7 représentants de la communauté internationale et de l'ONU, il en a souvent
8 été question, parce que nous devions faire face au même type de problème
9 pour ce qui est de la population serbe. Et donc, lors de nos réunions, nous
10 évoquions les problèmes qui considéraient les Croates aussi bien que les
11 Serbes.
12 Q. Passons maintenant au paragraphe 10, s'il vous plaît. Nous y lisons
13 déclaration attribuée à M. Hadzic. Il dit : "Nous sommes prêts à accepter
14 tous les non-Serbes qui souhaitent revenir dans les zones protégées de
15 l'ONU, mais, en même temps, il faut comprendre que même si tous les Serbes
16 revenaient, les Serbes resteraient quand même une majorité."
17 Et puis, je lis le texte. Et là, M. Hadzic a indiqué que le retour des non-
18 Serbes en Slavonie orientale dépend du retour des non-Serbes en Slavonie
19 occidentale où de nombreuses maisons serbes ont été mises à feu et pillées.
20 Alors, Monsieur Dzakula, la question qui se pose est la suivante. Le
21 territoire de la SAO SBSO, s'agissait-il d'un territoire où la population
22 serbe était majoritaire, pour commencer ?
23 R. Non. La partie qui était contrôlée sur le plan militaire par les Serbes
24 n'avait pas une population qui était majoritairement serbe tout au début.
25 Q. Et au paragraphe suivant, c'est vous qui prenez la parole et vous
26 évoquez la question du secteur ouest et des villages serbes qui ne se
27 trouvent pas englobés par les zones de protection de l'ONU. Quel était le
28 sujet que vous souhaitiez aborder ici avec les représentants de l'ONU ? Sur
Page 401
1 quoi vouliez-vous attirer leur attention ?
2 R. M. Nambiar a été l'homme numéro 1 au sein de la FORPRONU et en charge
3 de la Yougoslavie et il me semblait important de lui faire savoir que le
4 plan Vance avait laissé de côté toute une partie de territoires serbes, de
5 municipalités, de villes serbes, d'où les Serbes ont été forcés de partir.
6 Et je lui ai dit qu'il était très importait d'intégrer ces villages-là dans
7 les zones protégées, peut-être dans les zones roses, pour que leur sécurité
8 puisse être garantie et pour que ces gens puissent revenir.
9 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite demander
10 le versement au dossier de ce document 5203.
11 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le document est admis.
12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P41. Merci.
13 M. STRINGER : [interprétation] Le document suivant porte la cote 5292 sur
14 la liste 65 ter.
15 Q. Monsieur Dzakula, nous avons un autre rapport de la FORPRONU. Le
16 rapport est adressé par M. Nambiar à M. Goulding et une copie est envoyée à
17 l'envoyé spécial Cyrus Vance en date du 13 novembre 1992. Il est question
18 ici d'une réunion que M. Nambiar a eu avec vous, à votre demande, et où il
19 a été question d'un programme d'inspection. Vous souvenez-vous de cette
20 réunion ?
21 R. Oui, je m'en souviens.
22 Q. Donc, vous évoquez ce programme d'inspection ou de déplacement sur les
23 lieux et vous soulignez qu'il était impossible de persuader les autorités
24 de Knin de la validité de son approche ou de votre approche, que vous étiez
25 incapable de persuader les autorités de Knin que votre approche était la
26 bonne et que vous étiez exposé à des pressions de plus en plus fortes.
27 R. Oui, je vois cette citation.
28 Q. Et est-ce bien la façon dont les choses se passaient réellement ?
Page 402
1 Etiez-vous soumis à une pression exercée sur vous par les autorités de Knin
2 ?
3 R. Oui, je me trouvais sous pression.
4 Q. Et puis, vous demandez que les frontières des zones protégées soient
5 contrôlées de plus près ainsi que les frontières des autres secteurs, pour
6 convaincre les autorités de Knin d'accepter le désarmement et la
7 démobilisation. Etait-ce bien là votre objectif à l'époque ?
8 R. Oui, c'était effectivement mon objectif et, d'ailleurs, cela a été
9 repris dans le plan Vance que nous avions tous adopté.
10 Q. Au paragraphe 2, vous insistez sur "les problèmes dans le secteur ouest
11 et le secteur est", et vous dites qu'il y a des liens entre ces deux
12 problèmes.
13 Et vous expliquez que :
14 "Le retour des non-Serbes dans les zones protégées par les Nations
15 Unies ne pourra se faire que conjointement et en parallèle avec le retour
16 des Serbes dans les zones croates."
17 Vous voyez cela ?
18 R. Oui.
19 Q. Alors, votre point de vue, est-ce qu'il était partagé par les autorités
20 de Knin, puisque c'est ainsi qu'il y ait fait référence ?
21 R. Les autorités de Knin ne partageaient pas ce point de vue à propos du
22 retour parce qu'ils persistaient à dire que les conditions permettant
23 d'autoriser ce retour n'étaient toujours pas remplies.
24 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation
25 souhaiterait demander le versement au dossier du document 5292.
26 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le document sera versé au dossier.
27 M. LE GREFFIER : [interprétation] Et cela deviendra la pièce P42. Merci.
28 M. STRINGER : [interprétation] J'aimerais maintenant demander l'affichage
Page 403
1 du document 5304.
2 Q. Monsieur Dzakula, voilà un autre télégramme de la FORPRONU, il s'agit
3 toujours d'un télégramme adressé à M. Goulding par M. Nambiar [comme
4 interprété]. Vous voyez que l'objet du télégramme est : Lettre de Dzakula.
5 En date du 4 décembre 1992. Est-ce que vous vous souvenez d'avoir envoyé
6 une lettre ? D'ailleurs, la lettre est en annexe au télégramme. Est-ce que
7 vous vous souvenez d'avoir envoyé une lettre à ce moment-là, à cette date-
8 là, à M. Goulding ?
9 R. Oui, je m'en souviens.
10 Q. Et quel était votre objectif lorsque vous avez envoyé cette lettre ?
11 Quelle est la raison qui vous a poussé à envoyer cette lettre ?
12 R. Je voulais attirer leur attention sur les problèmes qui prévalaient
13 dans le secteur ouest et au-delà du secteur ouest. Et lorsque je dis au-
14 delà, je dis au-delà des zones protégées par les Nations Unies. C'étaient
15 des zones qui ne bénéficiaient d'aucune protection, et là la population
16 pâtissait de beaucoup de problèmes.
17 Q. Nous avons cette lettre. Elle figure à la troisième page du document.
18 Et là, vous décrivez la situation de la population serbe dans certaines
19 régions de la Slavonie occidentale. Vous vous souvenez de cette lettre ?
20 R. Oui, je m'en souviens.
21 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation
22 souhaiterait demander le versement au dossier du document 5304.
23 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. Le document sera versé au
24 dossier.
25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ça deviendra la pièce P43, je vous prie.
26 M. STRINGER : [interprétation] Document suivant, il s'agit du document
27 5968.
28 Q. Est-ce que vous reconnaissez ce document, Monsieur
Page 404
1 Dzakula ?
2 R. Oui, oui.
3 Q. Vous voyez qu'il porte la date du 18 février 1993, il s'agit de
4 Daruvar. Je suis presque arrivé à la fin du temps qui m'a été imparti pour
5 l'interrogatoire principal, alors est-ce que vous pourriez nous dire en
6 quelques mots de quoi il s'agit. Et puis, nous sommes près de prendre la
7 pause également.
8 R. Cet accord fut signé à Doljani, dans la municipalité de Daruvar, entre
9 les représentants des autorités serbes et croates, et il s'agissait de
10 représentants de Daruvar, d'Okucani et d'autres lieux. Le but était en fait
11 d'élargir la mise en œuvre du plan de Vance --
12 L'INTERPRÈTE : Et les interprètes demandent au témoin d'avoir l'amabilité
13 de ralentir son rythme.
14 M. STRINGER : [interprétation]
15 Q. Monsieur Dzakula, excusez-moi, mais est-ce que vous pourriez essayer de
16 parler moins vite.
17 R. Je présente mes excuses aux interprètes et aux autres personnes
18 également. Je vous disais donc qu'il s'agit d'un geste de bonne volonté qui
19 était censé aboutir à la normalisation des relations entre les
20 représentants des autorités serbes et croates, et ce, afin de créer les
21 conditions préalables au retour des réfugiés. Bon, il est impossible
22 d'envisager un processus de retour sans que les représentants des autorités
23 locales et des pouvoirs locaux en parlent et commencent, en un mot, à
24 prendre des mesures préparatoires, et tout cela a été fait sous les
25 auspices des Nations Unies qui devaient superviser le processus et apporter
26 leur soutien au processus.
27 Q. Mais quelle était la portée géographique ou l'extension géographique du
28 territoire englobé par l'accord de Daruvar ?
Page 405
1 R. Eh bien, il y avait cinq municipalités qui étaient prises en compte,
2 donc une grande partie de la Slavonie occidentale, comme cela est indiqué
3 sur la carte.
4 Q. Et nous voyons votre nom figurant dans le document. Donc, il y a vous-
5 même ainsi que d'autres personnes de la Slavonie occidentale qui ont
6 participé à ces négociations ?
7 R. Oui. Les noms que vous voyez sont les noms des signataires à l'accord
8 de Daruvar.
9 M. STRINGER : [interprétation] Et, Monsieur le Président, je souhaiterais
10 vous indiquer que nous n'avons pas une copie signée du document original.
11 Q. Monsieur Dzakula, êtes-vous en mesure de nous dire si l'accord fut bel
12 et bien signé par les personnes dont les noms figurent en haut de ce
13 document ?
14 R. Oui. Toutes les personnes dont le nom figure sur le document ont signé
15 l'accord.
16 M. STRINGER : [interprétation] L'Accusation souhaiterait demander le
17 versement au dossier du document 5968.
18 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien.
19 M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela deviendra la pièce P44.
20 M. STRINGER : [interprétation] J'aimerais maintenant demander l'affichage
21 du document 5362, qui figure à l'onglet 44.
22 Q. Monsieur Dzakula, il s'agit d'un autre document de la FORPRONU et qui
23 est envoyé par un représentant de la FORPRONU répondant au nom de Wahlgren.
24 Le télégramme étant envoyé à M. Annan à New York, avec une copie envoyée à
25 M. Vance. Et nous avons également toute la correspondance qui est présentée
26 en annexe. En fait, l'un des télégrammes de la FORPRONU est présenté en
27 annexe. L'objet du télégramme est la séance parlementaire de la RSK à
28 Okucani le 20 avril 1993. Avez-vous eu la possibilité de consulter ce
Page 406
1 document avant votre déposition aujourd'hui ?
2 R. Oui, j'ai vu ce document lorsque je me suis préparé pour ma déposition.
3 Q. Et pour hâter un peu la procédure, je vous dirais que j'ai un document
4 papier, et peut-être que M. l'Huissier pourrait vous le remettre, ce
5 document, parce que je vois que le temps qui m'est imparti diminue.
6 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic.
7 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je souhaiterais
8 indiquer à la Chambre de première instance que nous n'avons pas reçu de
9 note de récolement à la suite de la séance de récolement entre l'Accusation
10 et le témoin, et il a mentionné à deux ou trois reprises qu'il avait pu
11 consulter certains documents pendant cette séance de récolement.
12 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, Monsieur Stringer.
13 M. STRINGER : [interprétation] Je vous dirais premièrement que le sujet en
14 question, l'accord de Daruvar, est englobé dans les notes de récolement.
15 Alors, non seulement nous en avons parlé avec le témoin, mais je pense que
16 l'information en question a été relayée à la Défense. Il faudrait que je
17 vérifie les notes de récolement qui datent maintenant d'il y a quelques
18 mois pour confirmer ce que j'avance.
19 [La Chambre de première instance se concerte]
20 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais Me Zivanovic vient de nous dire
21 qu'il n'avait pas reçu de notes de récolement --
22 M. STRINGER : [interprétation] Oui. Mais Me Zivanovic a reçu deux fois des
23 notes de récolement, qui sont assez exhaustives d'ailleurs, à propos de la
24 séance de récolement qui a eu lieu.
25 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, qu'en est-il ?
26 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Non, nous n'avons absolument rien reçu de
27 la sorte.
28 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Permettez-moi de vous présenter une
Page 407
1 suggestion : vous pourriez peut-être en parler tous les deux pendant la
2 pause et nous indiquer ensuite ce qu'il en est.
3 M. STRINGER : [interprétation] Bien sûr. Nous pourrons en discuter pendant
4 la pause. Mais avant la pause, je pourrais peut-être poser au témoin
5 quelques questions à propos des sujets abordés dans ce document… ou peut-
6 être que nous pouvons poursuivre ?
7 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] De quel document s'agit-il ?
8 M. STRINGER : [interprétation] Il s'agit du document de la FORPRONU, et
9 vous avez, en fait, en annexe le procès-verbal de la réunion d'Okucani.
10 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui. Mais pourquoi est-ce que vous
11 devriez poser des questions au témoin à propos de ce document ?
12 M. STRINGER : [interprétation] Il se peut que je n'aie pas très bien
13 compris mon confrère. Alors, il nous dit qu'il n'a pas de note de
14 récolement. Je ne sais pas s'il comprend, donc, qu'il s'agit d'un sujet qui
15 fait partie intégrante de l'interrogatoire principal. Mais il se peut que
16 je me méprenne à ce sujet.
17 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous
18 redonner le numéro du document, Monsieur Stringer, avant que je ne demande
19 à Me Zivanovic de répondre.
20 M. STRINGER : [interprétation] Il s'agit du document 5362, qui figure à
21 l'onglet 44.
22 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien.
23 Maître Zivanovic - excusez-moi - est-ce que cela vous pose problème
24 que l'on pose des questions au témoin au sujet de ce document maintenant ?
25 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
26 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui. Mais je vois maintenant que le
27 moment est venu de faire la pause. Donc, nous reviendrons sur ce document
28 après la pause.
Page 408
1 Et, Monsieur Stringer, quelle est votre estimation, je pense à la fin
2 de votre interrogatoire principal ? Qu'en pensez-vous ?
3 M. STRINGER : [interprétation] Nous sommes véritablement dans la toute
4 dernière phase de mon interrogatoire principal. Donc, il y a ce document
5 qui figure à l'écran, et j'ai deux autres documents à présenter. Et je vais
6 œuvrer rapidement, donc je pense que j'en aurai terminé en dix minutes.
7 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Fort bien. Je vous remercie.
8 Donc, Monsieur Dzakula, nous allons maintenant avoir la pause, et nous
9 allons revenir à 12 heures 45. M. l'Huissier va vous accompagner hors du
10 prétoire.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
12 [Le témoin quitte la barre]
13 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Nous faisons la pause.
14 --- L'audience est suspendue à 12 heures 16.
15 --- L'audience est reprise à 12 heures 47.
16 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic.
17 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je voudrais
18 apporter quelques précisions au sujet de mon intervention précédente à
19 propos des notes de récolement de l'Accusation.
20 M. Stringer m'a fourni deux exemplaires de séances de récolement. Elles ont
21 été communiquées à la Défense le 24 juillet et le 17 et le 20 septembre.
22 Toutefois, elles n'ont pas été communiquées de façon séparée, mais avec
23 tout un jeu de documents.
24 Et je me souviens du paragraphe 13 de votre ordonnance qui dispose
25 que les notes de récolement seront distribuées à la Chambre de première
26 instance, au Greffier, et à la partie adverse aussi rapidement que possible
27 après la fin des séances de récolement. Donc d'après ce que je crois
28 comprendre, cela doit être communiqué en tant que document séparé et non
Page 409
1 pas avec tout un lot d'autres documents.
2 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stringer.
3 M. STRINGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Excusez-moi,
4 juste pour préciser, il y a deux notes de récolement à la suite de deux
5 réunions qui ont eu lieu en juillet et en septembre de cette année. Les
6 deux notes de récolement ont été communiquées le 28 septembre. Certes, dans
7 le cadre de tout un jeu de documents, mais cela, c'était avant que nous
8 ayons reçu les consignes et directives de la Chambre eu égard à la mise à
9 disposition des séances de récolement. Et je regrette, bien entendu, que la
10 Défense ne les ait pas trouvées après qu'elles ont été communiquées en
11 septembre. Alors, bien entendu, nous avons une procédure à propos de la
12 communication des notes de récolement et, bien entendu, nous allons nous
13 entendre aux principes directeurs qui ont été énoncés.
14 Donc, nous présentons nos excuses et nous n'avons pas, en fait, repris ces
15 notes de récolement pour tenir compte des principes directeurs aux
16 consignes qui ont été émises il y a quelques semaines.
17 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Donc, nous pouvons considérer cela
18 comme un premier recueil peut-être.
19 M. STRINGER : [interprétation] Ecoutez -- oui, mais nous n'allons de toute
20 façon pas en faire une pratique de ce genre de chose.
21 Et de toute façon, il n'y a plus de notes de récolement -- enfin
22 toutes les notes de récolement maintenant datent d'après le mois de
23 septembre.
24 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais je pense qu'il y a un problème
25 de programmation également, n'est-ce pas, de calendrier.
26 M. STRINGER : [interprétation] Oui, parce que, bon, il est vrai, le conseil
27 avait indiqué qu'ils avaient l'intention d'utiliser toutes les six heures
28 pour le contre-interrogatoire de ce témoin. Et ils ont indiqué qu'ils
Page 410
1 souhaiteraient disposer de cinq heures pour le contre-interrogatoire du
2 témoin qui va suivre ce témoin-ci. Donc, cela en fait, dépasse de très,
3 très loin les deux heures qui sont normalement attribuées. Mais, bien
4 entendu, la Défense peut en parler à la Chambre. Enfin, je pense que
5 normalement, on envisage de doubler les heures accordées pour
6 l'interrogatoire.
7 Mais quoi qu'il en soit, si nous avons donc interrogé ce témoin pendant six
8 heures et peut-être qu'il y aura cinq heures pour le témoin suivant, nous
9 en sommes maintenant à quelques 11 heures d'audience, alors que nous
10 n'avons que huit heures disponibles ou prévues, en tout cas, pour la
11 semaine prochaine, avec lundi, mardi et l'heure qui nous reste aujourd'hui.
12 Donc, voilà, je soulève cette possibilité. Peut-être que la Chambre sera
13 encline à envisager des audiences prolongées la semaine prochaine, cela
14 nous permettra d'en terminer avec ce témoin et pour le témoin suivant, il y
15 aura l'interrogatoire, le contre-interrogatoire, mais je ne pense en fait
16 que cette personne puisse rentrer chez elle alors qu'elle aura prononcé la
17 déclaration solennelle et sera toujours tenue de la respecter pendant dix
18 jours, et puis ensuite pour revenir, donc je ne pense pas que ce soit une
19 méthode particulièrement heureuse.
20 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Nous allons entendre Me Zivanovic.
21 Que pensez-vous de ce qui vient d'être dit, donc vous avez demandé
22 quasiment le double de la durée pour le contre-interrogatoire de ce témoin.
23 Vous avez bien demandé cinq heures de contre-interrogatoire ?
24 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, c'est exact, Monsieur le Président.
25 Nous avons la déclaration consolidée du témoin, elle est extrêmement
26 volumineuse, aborde de nombreuses questions et fait référence à de nombreux
27 événements, de nombreux faits, de nombreuses personnes, et fait également
28 référence à de nombreux documents. Et c'est pour cela que nous estimons
Page 411
1 qu'une durée de cinq heures pour notre contre-interrogatoire est une durée
2 tout à fait appropriée.
3 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous
4 indiquer de façon approximative peut-être le nombre de documents que vous
5 allez présenter ?
6 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Non, pas maintenant, mais peut-être que,
7 bon, en temps voulu je pourrais effectivement vous le dire.
8 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Alors je vais procéder à un petit
9 calcul.
10 Donc, pour le contre-interrogatoire maintenant, nous avons six heures. Donc
11 une heure et demie pour votre interrogatoire du témoin suivant, Monsieur
12 Stringer; c'est cela ?
13 M. STRINGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
14 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le problème posé par les audiences
15 que l'on prolonge est qu'en fait nous aurions besoin de plus qu'une séance
16 supplémentaire. Nous avons besoin de combien, deux, trois, quatre, Monsieur
17 Stringer ?
18 M. STRINGER : [interprétation] Bon, en l'état actuel des choses, si la
19 Défense utile les six heures de contre-interrogatoire pour M. Dzakula, cela
20 nous amène à mardi, parce qu'il y a une heure -- bon, quatre heures lundi,
21 il nous reste une heure maintenant.
22 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui. Non. Je suis d'accord avec vous.
23 Mais si nous prolongeons l'audience -- supposons que nous avons une
24 audience qui dure toute la journée, supposons, il ne faut pas oublier que
25 les Juges doivent également avoir un certain temps pour leurs
26 délibérations, puis ils ont des dates butoir, entre autres. Donc je pense
27 que c'est quasiment impossible.
28 Si pour ce qui est de ce témoin le contre-interrogatoire nous amène jusqu'à
Page 412
1 mardi, eh bien, nous suggérons de ne pas convoquer le témoin suivant mardi.
2 Faites-le venir carrément la semaine d'après.
3 M. STRINGER : [interprétation] Oui, l'Accusation peut tout à fait accepter
4 cela. Mais je pense qu'il va falloir commencer à envisager l'annulation de
5 son vol, et cetera, et cetera. Et il pourrait tout à fait commencer le
6 lundi suivant, le 29.
7 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Alors pour que tout soit bien clair,
8 je pense que ce lundi-là nous siégeons l'après-midi. Est-ce bien exact ?
9 Est-ce que quelqu'un a un programme, un calendrier quelque part ?
10 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
11 M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]
12 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
13 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais nous ne siégeons pas ce lundi-
14 là. Nous siégeons le mardi. Le mardi après-midi.
15 M. STRINGER : [interprétation] Ecoutez, je suis en train de consulter le
16 calendrier qui figure sur TribuNet, alors l'affaire Hadzic va siéger donc
17 dans cette salle d'audience numéro I, lundi et mardi prochain, le 22 et 23,
18 à 9 heures --
19 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Non, non, je parlais de la semaine du
20 29. Je vous parlais de la semaine où vous allez faire venir M. Savic.
21 M. STRINGER : [interprétation] Peu importe qu'il s'agisse de lundi ou de
22 mardi, mais M. Savic sera prêt pour déposer dès le début de notre semaine
23 dans l'affaire Hadzic.
24 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.
25 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]
26 [La Chambre de première instance se concerte]
27 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et puis en dernier lieu, Maître
28 Zivanovic, la Chambre de première instance va faire droit à votre demande
Page 413
1 de cinq heures de contre-interrogatoire pour ce témoin-là.
2 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.
3 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que M. l'Huissier pourrait
4 faire entrer le témoin dans le prétoire, je vous prie.
5 [Le témoin vient à la barre]
6 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Si vous voulez bien continuer,
7 Monsieur Stringer.
8 M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
9 Q. Monsieur Dzakula, avant que nous ne continuions, j'aimerais revenir sur
10 un élément de votre déposition pour vous demander des éclaircissements.
11 Je regarde la page 32 du compte rendu d'aujourd'hui, ligne 13, et je vais
12 vous lire :
13 "Monsieur Dzakula, vous avez dans votre déposition déclaré" -- que fin
14 avril début mai 1992, "M. Hadzic m'a invité pour m'entretenir avec lui.
15 J'ai pris part à une réunion du gouvernement et je suis allé dans son
16 bureau. Il était accompagné d'Arkan, qui était connu comme belligérant. Il
17 m'a accueilli sèchement et m'a posé la question suivante : Collègue Veljko,
18 est-ce vrai que vous prônez la cohabitation avec les Croates ?"
19 Ma question, Monsieur Dzakula, est pourriez-vous me préciser qui vous a
20 posé cette question, prônez-vous la coexistence ? Etait-ce M. Hadzic ?
21 Parce que c'est quelque peu équivoque dans le compte rendu. Etait-ce M.
22 Hadzic ou était-ce Arkan qui vous a posé cette question ?
23 R. Cette question m'a été posée par M. Hadzic.
24 Q. Si on peut revenir maintenant au document dont nous parlions avant la
25 pause, 65 ter 5362, en pièce jointe. La FORPRONU envoie le compte rendu ou,
26 tout du moins, la session de la RSK à Okucani le 20 avril 1993. Vous l'avez
27 sous les yeux dans la version de votre langue.
28 R. Oui.
Page 414
1 Q. Et j'aimerais vous poser quelques questions en la matière. Tout
2 d'abord, étiez-vous présent à cette session de la RSK à
3 Okucani ?
4 R. C'était l'assemblée de la République serbe de Krajina. J'y étais
5 présent tant en qualité de premier ministre adjoint et de député du
6 parlement, député de l'assemblée populaire de la RSK.
7 Q. Très bien. Et au début de ce document, on y voit que plusieurs
8 visiteurs serbes de l'ex-Yougoslavie se trouvaient présents. Vous le voyez
9 ?
10 R. Oui, je le vois.
11 Q. Et l'on y voit également que M. Hadzic a été présenté comme président
12 de la RSK.
13 R. C'est cela.
14 Q. J'aimerais maintenant que vous portiez votre attention sur le point 4.
15 Au deuxième paragraphe de ce point 4 :
16 "Deux dirigeants serbes de haut rang de la Slavonie occidentale, en
17 l'occurrence M. Dzakula et l'ancien ministre de l'Information de la RSK, M.
18 Ecimovic, ont été relevés de toutes leurs fonctions politiques en raison de
19 leur signature d'un accord avec les Croates (l'accord Daruvar du 18 février
20 1993). Ils sont immédiatement sortis en claquant la porte du parlement."
21 Monsieur Dzakula, la première question : est-ce une déclaration exacte ?
22 Avez-vous été relevé de vos fonctions à ce moment-là ? Et ensuite, ceci
23 avait-il trait à l'accord de Daruvar ?
24 R. Nous avons été chassés de la session du parlement sans avoir la
25 possibilité de dire quoi que ce soit. On nous a dit que nous ne pouvions y
26 prendre part et que nous n'avions plus aucun droit en terme de politique,
27 de quelque façon que ce soit.
28 Q. Et pourquoi ? Pourquoi avez-vous été sommés de ne plus y prendre part
Page 415
1 et que vous ne pourriez prendre part à la politique de façon active ?
2 R. On nous l'a déclaré parce que nous avions signé l'accord de Daruvar,
3 qui était, ainsi qu'ils le disaient, un acte traître parce qu'il ne
4 pourrait pas y avoir de négociation ni de signature de documents avec les
5 Croates, et c'était leur objection principale selon laquelle ils nous ont
6 interdit toute activité.
7 Q. A trois paragraphes par la suite :
8 "Un délégué de Daruvar avait posé une question à M. Paspalj, une
9 question portant sur 200 000 deutsche marks qui auraient été remis à M.
10 Dzakula à titre de collaborateur pour la signature de l'accord de Daruvar.
11 Il a donc nommé M. Dzakula à titre de traître."
12 Monsieur Dzakula, avez-vous été averti d'allégations selon lesquelles vous
13 aviez reçu des fonds pour la signature de l'accord de Daruvar ?
14 R. J'ai entendu la chose par la suite, et aucune de ces questions n'a été
15 posée en ma présence à l'assemblée. Nous avons été, donc, nommés traîtres,
16 moi particulièrement. Et ceci s'est déroulé à l'époque.
17 Q. Est-ce cette allégation vraie, exacte, en disant que vous avez reçu 200
18 000 deutsche marks pour la chose ?
19 R. Non, aucun fondement de véracité. C'était simplement erroné.
20 M. STRINGER : [interprétation] L'Accusation verse le document 5362,
21 Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est cela.
23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote numéro P45. Merci.
24 M. STRINGER : [interprétation] La pièce suivante est de l'onglet 45. Le
25 document 1621 de la liste 65 ter.
26 Q. Monsieur Dzakula, reconnaissez-vous ce document ?
27 R. Oui.
28 Q. De quoi s'agit-il ?
Page 416
1 R. Il s'agit d'un décret sur la dissolution du conseil régional de la
2 région serbe de la Slavonie occidentale signé par le président de la
3 république, Goran Hadzic.
4 Q. Ceci est en date du 28 avril 1993. En étiez-vous averti à l'époque,
5 vers le moment où ce décret a été signé ?
6 R. Oui, j'en étais averti, de notre démission donc, de la résolution du
7 conseil et de la nomination de nouvelles personnes.
8 Q. En quelques phrases, s'il vous plaît, quel était le conseil régional
9 dont on parle ici et pourquoi cette dissolution a été exécutée ?
10 R. Le conseil régional, selon le statut, lorsque les amendements ont été
11 adoptés, n'était plus la SAO de Slavonie occidentale. L'autonomie n'était
12 plus soulignée parce qu'il n'était plus nécessaire que nous soyons
13 autonomes dans une république. Nous étions une région serbe. Nous avions
14 notre assemblée, un conseil régional qui était un mini gouvernement en
15 quelque sorte de la Slavonie occidentale. Alors que nous prenions des
16 décisions et que nos activités portaient sur la démilitarisation et la
17 normalisation des relations, il était trop irritant pour les autorités de
18 Knin. Elles s'élevaient contre la chose. Et il y avait l'assemblée de la
19 Slavonie occidentale qui a pris une décision que nous avions droit à la
20 négociation, à la signature des documents et de remettre tous ces documents
21 qui avaient été signés pour vérification à l'assemblée, et ils estimaient
22 que cette assemblée et le conseil régional devaient être également dissolus
23 parce qu'ils coopéraient de près avec nous et qu'ils mettaient en œuvre
24 notre politique. Donc, ils ont nommé deux nouvelles personnes qui ensuite
25 poursuivaient des politiques totalement différentes qui étaient celles de
26 la République serbe de Krajina.
27 Q. -- concernant des actions particulières ou accords qui ont été
28 contractés par ce conseil régional et qui ont mené à cette dissolution ?
Page 417
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 418
1 R. Eh bien, les signataires de l'accord de Daruvar étaient également
2 membres du conseil régional, ce qui suffisait au président de la république
3 et au premier ministre pour prendre cette décision.
4 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation verse le
5 document 1621 au dossier.
6 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote P46. Merci.
8 M. STRINGER : [interprétation] La pièce suivante est 1842 de la liste 65. A
9 l'onglet 47.
10 Q. Monsieur Dzakula, pouvez-vous lire ce document ? Le voyez-vous ?
11 R. Oui, je vois le document.
12 Q. Il s'agit du 18 octobre à Glina, en 1993. Il s'agit de la chambre du
13 comté de Glina adoptant une décision concernant les accusés Dzakula, Dusan
14 Ecimovic et Kulic : une prolongation de 30 jours. De quoi s'agit-il ?
15 Pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit ?
16 R. C'est l'un des documents d'une série que nous avons reçue dans la
17 prison de Glina du tribunal de première instance lorsque nous avons été
18 arrêtés le 21 septembre 1993 en raison de la signature de l'accord de
19 Daruvar et accusés du soupçon d'avoir été des espions et d'avoir travaillé
20 pour les Croates, que moi et mes collègues travaillions à la cessation de
21 la région de la RSK qui serait ensuite unie à la Croatie. C'était une des
22 décisions de nous mettre en garde à vue, de prolonger cette garde à vue,
23 alors que ces travaux se procédaient.
24 Q. Maintenant, passons à la page 2 de l'anglais, sous le titre de
25 l'explication, on y voit : Selon le code pénal du tribunal, les auteurs du
26 crime de la mise en danger de l'intégration territoriale, ils peuvent être
27 frappés de la condamnation la plus importante.
28 Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre précisément si c'est bien
Page 419
1 le crime qui vous avait été reproché et les conséquences potentielles ?
2 R. Eh bien, quant au crime qui m'était reproché, cette condamnation a été
3 envisagée, et c'est la raison pour laquelle c'était obligatoire. Je ne sais
4 pas jusqu'à quel point ceci était juridique, mais j'étais censé rester en
5 garde à vue tant que l'enquête n'était pas parachevée. Donc, la cour y
6 était obligée.
7 Q. Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre combien de temps vous avez
8 été retenu en garde à vue en relevant de ces accusations ?
9 R. Eh bien, j'ai été en prison à deux occasions, et, au total, 110 jours.
10 Q. Et qu'était-il advenu de ces crimes qui vous étaient reprochés ?
11 Qu'est-il devenu de ce dossier ?
12 R. On m'a relâché. Le juge d'instruction, Nikola Suznjevic, m'a relâché,
13 qui estimait qu'il n'était pas nécessaire que je sois en garde à vue. Il a
14 adopté une décision selon laquelle je devais rester sur le territoire de la
15 RSK et que l'enquête se poursuivrait. Il m'a déclaré lui-même qu'il ne
16 voyait aucune raison de ma détention en garde à vue et qu'il subissait des
17 pressions pour me poursuivre mais qu'il me relâcherait de prison et ensuite
18 qu'il se démettrait de son poste. Et c'était la position que nous soyons
19 sans doute tous les deux tués car j'étais considéré comme étant un ennemi,
20 et il serait quelqu'un qui m'appuierait dans ce sens.
21 Q. Selon vos connaissances, cette enquête a-t-elle abouti à des chefs
22 d'accusation officiels dans le cadre du système de la RSK découlant de
23 cette enquête ?
24 R. L'enquête n'a jamais été parachevée.
25 Q. Monsieur Dzakula, merci.
26 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, ceci met fin à
27 l'interrogatoire principal de l'Accusation.
28 Puis-je verser 1842, toutefois, avant que je ne l'oublie.
Page 420
1 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Certainement.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote P47. Merci.
3 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Contre-interrogatoire.
4 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président.
5 Contre-interrogatoire par M. Zivanovic :
6 Q. [interprétation] Bon après-midi, Monsieur Dzakula. Je me présente,
7 Zoran Zivanovic, et dans cette affaire, je suis le conseil de la Défense de
8 Goran Hadzic.
9 R. Bon après-midi. Je suis désolé, on m'a averti que je parle très vite,
10 et donc, maintenant, je suis l'interprétation sur l'écran et quand je vois
11 que l'interprète a terminé, à ce moment-là je réponds à la question. Ainsi,
12 je ne serai pas de nouveau grondé, mais je suis sûr que cela se reproduira.
13 Q. Je vais également prendre votre suggestion. Ce serait très utile
14 puisque nous parlons tous les deux la même langue.
15 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Pouvons-nous passer en huis clos partiel,
16 je vous prie.
17 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Passons en huis clos partiel.
18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
19 [Audience à huis clos partiel]
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 (expurgé)
28 (expurgé)
Page 421
1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 (expurgé)
5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 [Audience publique]
8 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
9 M. ZIVANOVIC : [hors micro]
10 L'INTERPRÈTE : La question est hors micro.
11 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Votre micro, je vous prie.
12 M. ZIVANOVIC : [interprétation]
13 Q. Monsieur Dzakula, vous êtes né en Croatie.
14 R. Oui.
15 Q. Et votre famille y vivait avant la Deuxième Guerre mondiale.
16 R. Oui, avant la Deuxième Guerre mondiale, toute ma famille y habitait.
17 Q. En m'appuyant sur les informations citées à huis clos partiel, j'ai été
18 en mesure de discerner que vos parents, enfants, ont été incarcérés dans un
19 camp oustachi pendant la Deuxième Guerre mondiale; est-ce exact ?
20 R. Oui. Mon père et ma mère ont été détenus dans des camps oustachi en
21 1942, c'est ce qu'on appelait les camps de Jasenovac.
22 Q. J'ai également vu que leurs proches avaient été tués pendant la
23 Deuxième Guerre mondiale; est-ce exact ?
24 R. Oui, c'est exact.
25 Q. Pourriez-vous me dire, je vous prie, jusqu'en 1991, vous habitiez et
26 vous travailliez en Croatie, n'est-ce pas ?
27 R. Oui, c'est exact.
28 Q. Vous fréquentiez nombre de Serbes qui habitaient en Croatie.
Page 422
1 R. Oui.
2 Q. Y avait-il des familles, telles que la vôtre, qui avaient vécu des
3 souffrances et traumatismes analogues aux vôtres pendant la Deuxième Guerre
4 mondiale ?
5 R. Oui, elles avaient vécu des événements analogues et tout aussi
6 traumatiques pendant la Deuxième Guerre mondiale.
7 Q. Ceci a-t-il influé sur l'affiliation politique des Serbes en Croatie,
8 ce qu'il les aurait menés à ne pas accepter la sécession de la Croatie et
9 de la Yougoslavie en 1990-1991 ?
10 R. Oui.
11 Q. Conviendriez-vous avec moi que ceci avait eu une incidence sur leur
12 orientation car, lors des premières élections multipartites, ils ont voté
13 pour le Parti communiste croate et le Parti du changement démocratique ?
14 R. Oui, je conviens de cette affirmation.
15 Q. Cela a aussi eu une incidence par la suite lorsque le Parti du
16 changement démocratique, le Parti communiste légal, n'a pas rempli leurs
17 attentes et, en conséquence, ils sont rentrés dans le Parti démocratique
18 serbe ?
19 R. Oui. Ceci a eu une incidence sur leur décision de rentrer dans le Parti
20 démocratique serbe.
21 Q. Hier, vous avez décrit différentes formes de discrimination à
22 l'encontre des Serbes en Croatie en 1991. Cela se trouve à la page 256,
23 mais vous ne pouvez la voir.
24 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Lignes 18 et 19.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai effectivement parlé de différentes
26 formes de discrimination à l'encontre des Serbes.
27 M. ZIVANOVIC : [interprétation]
28 Q. Vous n'avez donné aucun détail à cet égard. Toutefois, vous avez parlé
Page 423
1 longuement de la chose --
2 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Pouvons-nous passer à huis clos partiel.
3 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Passons à huis clos partiel.
4 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
5 [Audience à huis clos partiel]
6 (expurgé)
7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 (expurgé)
10 (expurgé)
11 (expurgé)
12 (expurgé)
13 (expurgé)
14 (expurgé)
15 (expurgé)
16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 (expurgé)
28 (expurgé)
Page 424
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 Page 424 expurgée. Audience à huis clos partiel.
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 425
1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 (expurgé)
5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 (expurgé)
10 (expurgé)
11 (expurgé)
12 (expurgé)
13 (expurgé)
14 (expurgé)
15 (expurgé)
16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 [Audience publique]
21 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
22 M. ZIVANOVIC : [interprétation]
23 Q. Vous avez parlé, évoqué également la question des barricades ou des
24 barrages. Pourriez-vous nous dire qui érigeait ces barrages dans les
25 villages et les localités serbes ? Pourquoi ces barrages étaient-ils érigés
26 ?
27 R. Les barrages routiers étaient érigés dans la ville de Knin pour
28 empêcher des nouvelles autorités croates d'envoyer des nouveaux membres de
Page 426
1 la police en changeant la composition ethnique des forces policières. Dans
2 d'autres régions, comme par exemple, la Banja, le Kordun, la Slavonie
3 occidentale, les gens érigeaient des barrages routiers parce qu'ils avaient
4 peur que l'histoire pourrait se répéter. Ils avaient peur que le passé ne
5 se répète, qu'ils ne soient encerclés par les forces croates pour être
6 exécutés par la suite. Et la peur qu'ils ressentaient était tellement
7 immense qu'ils préféraient prévenir la possibilité de tout élément de ce
8 type. C'était la façon de voir les choses qui prédominait chez les gens un
9 peu plus âgés qui constituaient la population majoritaire dans ces
10 localités serbes.
11 Q. Monsieur Dzakula, dites-moi s'il vous plaît -- bon, il est vrai que
12 nous en avons déjà parlé hier, mais j'aimerais que vous me fournissiez des
13 explications plus approfondies. Comment les Serbes ont-il réagi à
14 l'introduction du nouveau drapeau croate qui ressemblait à un échiquier et
15 qui a constitué le nouveau symbole de la police et de l'armée croate ?
16 R. Les Serbes ont réagi d'une façon impétueuse. Lorsqu'on a enlevé
17 l'étoile rouge pour la remplacer par l'échiquier, les Serbes ont réagi très
18 mal et la même chose s'est reproduite lorsque l'emblème de la police et de
19 l'armée a été remplacé. Les Serbes estimaient que cela annonçait le retour
20 de l'Etat croate indépendant de la Deuxième Guerre mondiale, parce que la
21 population serbe estimait que l'étoile était le symbole commun aux Serbes
22 et aux Croates de la lutte antifasciste, tandis que l'échiquier symbolisait
23 l'Etat fasciste croate pendant la Deuxième Guerre mondiale. Et par
24 conséquent, c'est quelque chose qui a été condamné par la population serbe.
25 Q. Et ceci était-il lié à la façon dont les différents champs de
26 l'échiquier étaient disposés ?
27 R. Oui. A l'époque de l'Etat indépendant croate, cet échiquier, comme on
28 appelait ce drapeau, commençait par un champ blanc qui était le symbole des
Page 427
1 Oustachis. Et lorsqu'on a proposé d'adopter ce drapeau comme le nouvel
2 emblème serbe, c'était la première proposition avancée. Et puis les
3 réactions ont été tellement négatives que finalement on a accepté de
4 prendre un champ rouge comme le premier champ et pour éviter
5 l'identification avec l'ancien symbole oustachi.
6 Q. Vous avez parlé hier d'un élément du programme général du Parti
7 démocratique serbe en Croatie qui concernait plus particulièrement
8 l'autonomie culturelle et politique des Serbes en Croatie. Pourriez-vous
9 nous expliquer en détail ce que nous devons entendre par là ?
10 R. Eh bien, nous souhaitions qu'à l'intérieur de la République de Croatie
11 nous puissions préserver notre identité, notre écriture, notre culture,
12 tout ce qui est inhérent à l'identité d'un peuple. Parce que nous nous
13 étions aperçus que l'écriture cyrillique n'avait pas le même statut que
14 l'écriture latine et nous pensions que le SDS devait, entre autres,
15 préserver tout ce qui nous identifiait comme faisant partie d'un seul et
16 même peuple.
17 Q. Y avait-il d'autres symboles culturels mis à part l'écriture latine ?
18 R. Eh bien, la langue, bien évidemment.
19 Q. D'après des informations que j'ai pu obtenir, vous avez fait partie
20 d'une certaine délégation au mois de mars 1991. Je parle d'une délégation
21 de Serbes de Croatie, et c'était une délégation qui est aller engager des
22 pourparlers avec le président croate à l'époque, M. Franjo Tudjman. Vous en
23 souvenez-vous ?
24 R. Oui, je m'en souviens.
25 Q. Et pourriez nous communiquer la teneur de ces pourparlers ou de ces
26 débats.
27 R. Ces entretiens ont eu lieu suite aux incidents de Pakrac le 2 mars,
28 lorsqu'il y a eu des actions armées et des escarmouches entre les policiers
Page 428
1 d'active et les policiers de réserve. Une quarantaine de policiers de
2 réserve d'appartenance ethnique serbe ont été arrêtés lors de cet incident.
3 Et puis, le comité régional du SDS ont décidé d'envoyer une délégation qui
4 comprenait cinq personnes, entre autres, Goran Hadzic, Dusan Ecimovic, moi-
5 même et puis d'autres personnes dont les noms m'échappent en ce moment.
6 Donc, nous avons décidé que cette délégation devait rencontrer le président
7 croate, devait en parler avec lui, insister pour que les personnes arrêtées
8 soient relâchées, et lors de cette réunion, nous avons évoqué justement
9 cette question de l'autonomie culturelle aussi bien que la question de la
10 sécurité de tous nos citoyens, de la façon dont on pouvait apaiser les
11 tensions, et cetera.
12 Q. Et le cinquième membre de cette délégation, n'était-ce pas par hasard
13 Vojislav Vuskovic [phon] ?
14 R. Oui. Exact. Cela fait longtemps que je ne l'ai pas vu, et du coup je
15 l'ai oublié quelque peu.
16 Q. Votre délégation a-t-elle avancé des demandes sur le plan de
17 l'autonomie culturelle ou politique ? Aviez-vous formulé des demandes, y
18 compris, par exemple, la mise en liberté de tout ce groupe qui venait
19 d'être arrêté ?
20 R. Oui. Ces demandes ont été formulées par M. Vojislav Vukcevic en notre
21 nom.
22 Q. Et vous souvenez-vous peut-être de ces demandes une par une, telles
23 qu'elles ont été formulées à l'époque ?
24 R. Eh bien, je pense que nous avons évoqué la question de l'écriture, de
25 la langue, mais je ne me souviens plus des détails. Je sais que les
26 événements qui venaient de se produire pesaient lourds. Et nous avions
27 toute une liste de demandes.
28 Q. Et vous souvenez-vous aussi par hasard s'il a été question du drapeau
Page 429
1 échiquier ?
2 R. Oui, cela faisait partie des sujets abordés.
3 Q. Et avez-vous parlé du fait qu'il était impossible d'acheter la presse
4 serbe imprimée en écriture cyrillique depuis la Serbie ?
5 R. Oui, c'est une autre question abordée.
6 Q. D'après mes informations, vous avez été accueillis très cordialement à
7 Zagreb. Je ne parle pas de vous personnellement, mais de toute cette
8 délégation serbe qui était venue à Zagreb.
9 R. Oui, nous avons été bien reçus. Je pense que les dirigeants de l'Etat
10 ont été inquiets par la situation telle qu'elle se présentait, et donc ils
11 ont accepté de nous écouter pour voir ce qu'on pouvait faire.
12 Q. Vous dites que les dirigeants d'Etat étaient inquiets par la situation
13 telle qu'elle se présentait. Faites-vous allusion à cet incident de Pakrac,
14 qui s'est produit la veille de la réunion ? Ou pensez-vous à autre chose ?
15 R. Oui, je pense très précisément à l'incident de Pakrac, parce que
16 c'était le premier conflit armé qui s'est produit sur le territoire croate.
17 Il a à la fois été inattendu et surprenant.
18 Q. Excusez-moi. Pour que tout soit bien clair dans le compte rendu
19 d'audience -- ah, non, une correction vient d'être apportée au compte
20 rendu, donc ce n'est plus la peine d'intervenir.
21 Donc, la délégation serbe avait soumis toute une liste de différentes
22 exigences, de différentes demandes. Vous souvenez-vous si on avait fait
23 droit à ces demandes en partie ou totalement ?
24 R. Les personnes arrêtées ont été, en effet, relâchées. Quant aux autres
25 questions que nous avons soulevées, aucune solution n'a été trouvée.
26 Q. Le président Tudjman vous a-t-il dit tout de suite qu'il était
27 impossible de faire droit à vos demandes ou a-t-il peut-être laissé la
28 porte ouverte aux pourparlers dans l'avenir ?
Page 430
1 R. Il n'a pas refusé catégoriquement notre défense. En fait, dans sa
2 réponse, il s'est penché très longuement sur l'histoire des relations entre
3 les Serbes et les Croates dans la région, et il a laissé la porte ouverte à
4 des négociations futures.
5 Q. Cette réunion a bénéficié de couverture médiatique très importante dans
6 les médias croates. Il en a été question à la télé ainsi que dans d'autres
7 médias. Seriez-vous d'accord avec ce constat?
8 R. Oui. Pour les médias, c'était la nouvelle la plus importante du jour.
9 Et de nombreuses personnes ont suivi avec attention ce que les médias
10 diffusaient sur ce point.
11 Q. Et tout ce qui a été présenté dans les médias, quelle impression cela
12 a-t-il produit auprès des Serbes de Croatie ? Au moins auprès des Serbes de
13 Croatie que vous fréquentiez ?
14 R. Un certain nombre de Serbes nous a condamnés pour être allés voir le
15 président Tudjman et lui parler. D'autres Serbes soutenaient notre geste
16 parce qu'il leur semblait très important de préserver le dialogue et de
17 chercher des solutions par le biais du dialogue.
18 Q. Lorsque vous dites qu'un certain nombre de Serbes s'opposaient à votre
19 geste et ne se prononçaient pas en faveur des pourparlers, quel était leur
20 raisonnement ? Quelles étaient les raisons qu'ils citaient pour justifier
21 leur position ?
22 R. Eh bien, les gens, tout simplement, n'étaient pas prêts à ouvrir un
23 dialogue. Lorsqu'ils ne se s'entendaient pas bien avec quelqu'un, ils
24 pensaient pour la plupart qu'il ne fallait plus discuter avec cette
25 personne. C'est quelque chose, d'ailleurs, que nous partagions avec les
26 Croates qui habitaient dans la région. Nous ne savions pas comment parler.
27 Nous n'avions pas de l'expérience dans ce type de relation.
28 Q. Et pourriez-vous nous dire quelle a été la position adoptée par les
Page 431
1 Croates ? Avez-vous eu l'occasion d'en discuter avec les Croates ?
2 L'opinion publique était-elle divisée comme c'était le cas dans l'opinion
3 publique serbe ou la situation était-elle différente ?
4 R. Les Croates étaient plus nombreux à soutenir le dialogue, parce que
5 leur point de vue était différent. Ils pensaient que du moment où nous
6 sommes en train de dialoguer avec les dirigeants de Croatie, cela veut dire
7 nécessairement que nous reconnaissons les organes officiels de la
8 République de Croatie, que nous les reconnaissons comme légitimes, et qu'on
9 trouvera bien une solution à tous les problèmes. Parce que les Croates se
10 rendaient bien compte qu'il y avait un autre courant parmi les Serbes et
11 qui refusait toute sorte de négociations.
12 Q. Dites-moi, s'il vous plaît, lorsque vous êtes allé à Zagreb pour
13 entamer ces pourparlers, les Serbes étaient-ils déjà en train de quitter un
14 certain nombre de régions croates, et vice versa, les Croates avaient-ils
15 déjà commencé à quitter les régions où les Serbes étaient en majorité ?
16 R. Oui, la population avait déjà commencé à déménager. Dans la zone de
17 Slavonski Brod, d'Osijek et Djakovo. Il y avait une série de villages qui
18 étaient concentrés dans cette zone, et moi, j'avais entendu dire que la
19 population serbe quittait ces villages-là, qu'elle partait de cette région.
20 Q. Et cela s'est produit en 1991, au cours des premiers mois de cette
21 année.
22 R. Mais ce mouvement a commencé dès le mois de mai 1991.
23 Q. Et compte tenu du fait que ces villages ne se trouvent pas loin de la
24 Slavonie occidentale où vous habitiez, savez-vous pourquoi les gens avaient
25 commencé à quitter les villages de cette région ?
26 R. D'après ce qu'on m'a dit, ils étaient victimes de provocations,
27 d'insultes et d'intimidation. Ils voulaient préserver leurs biens, ils
28 voulaient garder la vie sauve, et, par précaution, ils avaient décidé de
Page 432
1 quitter la région.
2 Q. Cela veut-il dire que leurs biens et leurs vies étaient déjà menacés à
3 l'époque ?
4 R. Oui, c'était le tout début des incidents de ce type.
5 Q. Et permettez-moi maintenant de vous poser une autre question qui
6 découle en fait de votre réponse précédente. Lorsque les gens se sentent
7 menacés, de façon générale ils s'adressent à la police pour recevoir de la
8 protection. Les habitants de ces villages serbes s'adressaient-ils aux
9 forces de police, aux forces régulières de police, pour que la police
10 garantisse leur sécurité ?
11 R. Eh bien, je crois que oui. Sur la base des expériences que j'ai vécues
12 par la suite, dans la municipalité de Pozega, les gens ont commencé à se
13 plaindre des menaces qu'on leur adressait au mois de juin ou au mois de
14 juillet. En fait, la police n'arrivait qu'une fois partis les gens qui
15 lançaient les provocations ou les intimidations. La police, par conséquent,
16 ne les appréhendait jamais et ne les retrouvait jamais par la suite.
17 Q. Mais les victimes ne pouvaient-elles pas identifier leurs agresseurs et
18 communiquer leur identité à la police ?
19 R. Il était difficile d'identifier les agresseurs parce que le plus
20 souvent ils portaient des cagoules et parce qu'ils arrivaient le plus
21 souvent tard dans la nuit, avec une cagoule.
22 Q. Et savez-vous si à cette époque quelqu'un était tenu responsable de ces
23 attaques lancées contre les Serbes qui habitaient dans les villages que
24 nous avons énumérés tout à l'heure ?
25 R. D'après mes connaissances, non.
26 Q. Et savez-vous -- ou, plutôt, étiez-vous en contact avec la police ?
27 Compte tenu de fait que vous faisiez déjà partie des dirigeants du SDS, à
28 ce titre étiez-vous en contact avec la police croate pour leur signaler ces
Page 433
1 incidents qui se produisaient sur le territoire contrôlé par la police
2 croate ?
3 R. Oui, je signalais chaque incident dont j'entendais parler, qu'on me
4 signalait et que j'apprenais.
5 Q. Et ces incidents étaient-ils nombreux ?
6 R. Oui, ils étaient nombreux. Et puis, à ce moment-là, les provocations et
7 les attaques lancées contre les habitants croates se multipliaient aussi.
8 Et c'est pourquoi nous avons commencé à insister sur le rétablissement de
9 la paix. Nous essayions de trouver un remède à cette situation qui
10 commençait à affecter aussi certaines familles croates.
11 Q. Vous dites que les gens se vengeaient. Donc, si je vous ai bien
12 compris, d'après ce que j'ai compris, moi, les incidents où la population
13 serbe était victime ne se produisaient pas dans les mêmes endroits où la
14 population croate était victime. Donc, ces incidents ne se produisaient pas
15 dans les mêmes localités; mais plutôt, les Serbes étaient attaqués dans
16 certaines localités et les Croates dans d'autres ?
17 R. Oui, c'est bien ce que j'ai voulu dire. Dans certains villages, les
18 Serbes étaient en minorité, et c'est alors eux qui ont été victimes de
19 provocations. Dans d'autres villages où les Croates étaient en minorité,
20 alors c'était leur tour de se voir provoqués et attaqués.
21 Q. Et dites-moi, s'il vous plaît, parmi vos collègues qui exerçaient des
22 fonctions au sein des autorités locales y avait-il quelqu'un qui était
23 chargé d'être en contact permanent avec la police et de tenir la police au
24 courant de tous ces événements ? J'imagine que ce n'était pas une tâche qui
25 vous revenait à vous, que c'était quelqu'un d'autre qui était chargé de
26 s'en acquitter dans le cadre de ses obligations de travail régulières ?
27 R. Eh bien, si vous me posez la question au sujet de ma région, de la
28 région où j'habitais, c'étaient les autorités locales qui s'en chargeaient,
Page 434
1 parce que le président du Comité exécutif était un Serbe et le président de
2 l'assemblée municipale était moitié Serbe, moitié Croate. Ce qui facilitait
3 le dialogue. Et, par ailleurs, la police est arrivée dans la région pour
4 essayer de calmer les tensions, d'apaiser la situation. Je parle de l'année
5 1991, entre avril et mai.
6 Et puis, les dirigeants du SDS avaient en plus leurs contacts et
7 organisaient des entretiens.
8 Q. Et j'imagine que la réponse que les autorités locales obtenaient de la
9 part de la police était semblable à celle que la police vous donnait à
10 vous.
11 R. Oui. Les réponses qu'ils recevaient étaient plus ou moins identiques.
12 Q. Merci.
13 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
14 mon contre-interrogatoire vient de toucher à sa fin pour aujourd'hui.
15 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Maître Zivanovic.
16 Monsieur le Témoin, nous allons lever la séance pour aujourd'hui et pour le
17 week-end, donc nous espérons vous revoir lundi matin à 9 heures, dans la
18 même salle d'audience.
19 Je suis tenu de vous rappeler que la déclaration solennelle que vous avez
20 prononcée est toujours en vigueur et que, par conséquent, vous n'avez pas
21 le droit de discuter de votre témoignage avec qui que ce soit, et surtout
22 pas avec les parties au procès.
23 Merci beaucoup. Maintenant vous pouvez sortir hors du prétoire.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. J'ai bien compris vos instructions,
25 Monsieur le Président.
26 [Le témoin quitte la barre]
27 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est levée.
28 --- L'audience est levée à 14 heures 00 et reprendra le lundi, 22 octobre
Page 435
1 2012, à 9 heures 00.
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28