Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 4712

  1   Le mercredi 15 mai 2013

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes à

  6   l'intérieur et en dehors du prétoire.

  7   Monsieur le Greffier, pouvez-vous citer l'affaire.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges.

  9   Il s'agit de l'affaire IT-04-75-T, le Procureur contre Goran Hadzic.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 11   Présentation des parties, l'Accusation d'abord.

 12   M. STRINGER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Douglas

 13   Stringer, Lisa Biersay, Thomas Laugel, et Ivana Martinovic pour

 14   l'Accusation.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 16   Et pour la Défense. Maître Zivanovic.

 17   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Bonjour. Pour la Défense, nous avons Goran

 18   Hadzic, Zoran Zivanovic, et Christopher Gosnell. Merci.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci beaucoup.

 20   Faisons entrer le témoin dans le prétoire, s'il vous plaît.

 21   [Le témoin vient à la barre]

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Stoparic.

 23   Seulement vous rappeler que vous êtes toujours sous serment.

 24   Madame Biersay, continuez.

 25   Mme BIERSAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

 26   LE TÉMOIN : GORAN STOPARIC [Reprise]

 27   [Le témoin répond par l'interprète]

 28   Interrogatoire principal par Mme Biersay : [Suite]

 


Page 4713

  1   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Stoparic.

  2   R.  Bonjour.

  3   Q.  Hier, nous avons discuté du bâtiment où vous vous étiez rendu pour vous

  4   inscrire en tant que volontaire de la Défense territoriale de la SBSO.

  5   Et j'aimerais revenir sur ce sujet ce matin. Et j'aimerais que vous

  6   décriviez aux Juges de la Chambre plus précisément les personnes que vous

  7   avez vues et que vous avez reconnues le jour où vous êtes allé vous

  8   inscrire.

  9   R.  Alors, il y avait un homme dans ce bureau, je suppose que c'était la

 10   personne en charge, cette personne m'a donné un certificat. Il s'appelait

 11   Filipovic. Il y avait d'autres personnes là-bas, des femmes en uniforme qui

 12   préparaient du café. Mais cet homme, Filipovic, pour moi, était le numéro

 13   un. Lorsque je suis arrivé, je lui ai montré ma carte d'identité, il m'a

 14   répondu qu'il n'avait pas besoin de ma carte d'identité, mais que je devais

 15   lui présenter mon carnet de service militaire. Je ne l'avais pas sur moi,

 16   donc je suis rentré à la maison pour le chercher, et il m'a dit que la JNA

 17   ne permettait aux personnes qui avaient des missions en temps de guerre

 18   dans leur carnet militaire de s'inscrire. Alors, je n'en avais pas, je

 19   n'avais pas de mission de guerre, donc j'ai pu m'inscrire. Ensuite, je me

 20   suis rendu dans l'autre bâtiment qui était le siège de la Défense

 21   territoriale en temps de paix. Là, j'ai reçu mon uniforme, ainsi qu'une

 22   arme, dans une zone qui s'appelle Sid Vasariste.

 23   Q.  Alors, revenons un petit peu en arrière. Est-ce que vous vous souvenez

 24   ce que M. Filipovic portait au moment où vous étiez dans son bureau ?

 25   R.  Je l'ai revu par la suite, et à chaque fois que je l'ai vu, même à la

 26   télévision, il portait une chemise de rouge. Je me souviens de lui portant

 27   une chemise rouge.

 28   Q.  Vous l'avez décrit comme étant le numéro un. Est-ce que vous avez


Page 4714

  1   reconnu d'autres personnes qui faisaient partie du gouvernement de la SBSO

  2   ?

  3   R.  Je connaissais toutes ces personnes. Elles venaient de la région. Je ne

  4   connaissais pas Filipovic personnellement, mais je connaissais d'autres

  5   personnes, de Tovarnik ou des environs. Alors, de la municipalité. L'homme

  6   qui faisait partie du gouvernement s'appelait Grahovac. Et je l'ai vu

  7   plusieurs fois aussi.

  8   Mme BIERSAY : [interprétation] Passons à l'onglet 18, s'il vous plaît. Il

  9   s'agit du document 443 de la liste 65 ter, daté du 18 octobre 1991. Ce

 10   document a déjà été utilisé avec le témoin qui a déposé avant M. Stoparic.

 11   Q.  Monsieur, j'aimerais que vous vous concentriez sur le coin supérieur

 12   droit de ce document. On y reprend des lieux et une date. Est-ce que vous

 13   voyez ce morceau-là du document ?

 14    R.  Oui.

 15   C'est probablement le document ou le certificat qui a été rédigé à Sid le

 16   18 octobre 1991, district serbe de Slavonie, Baranja et Srem occidental.

 17   Q.  En bas du document, on voit les inscriptions "for the chief" en

 18   anglais, "pour le chef", signature Dusan Filipovic.

 19   R.  Oui, je le vois.

 20   Q.  Alors, j'aimerais que vous vous concentriez sur le milieu du document.

 21   A présent, on dit :

 22   "La partie restante de l'unité est enregistrée auprès du commandant de

 23   l'unité.

 24   "Le commandant Milan Lancuzanin est responsable des activités de l'unité."

 25   Est-ce que vous connaissez cet homme, Milan Lancuzanin ? On parle aussi du

 26   détachement de Leva Supoderica.

 27   R.  Oui, c'était mon commandant à l'époque. Milan Lancuzanin, alias Kameni.

 28   Q.  Merci.


Page 4715

  1   Mme BIERSAY : [interprétation] J'aimerais que l'on admette le document 443

  2   de la liste 65 ter, s'il vous plaît.

  3   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je ne sais pas comment le greffier va

  5   le faire, mais ce document, vous nous avez dit, faisait partie de la

  6   déposition de M. Theunens.

  7   Mme BIERSAY : [interprétation] Oui, exactement. J'ai dit qu'il avait été

  8   utilisé pour ce témoin. Comme pour M. Theunens, lorsqu'on a utilisé des

  9   documents séparément, nous les avons admis séparément également, si le

 10   témoin a pu apporter des éléments de preuve. Donc, je pense que nous

 11   pouvons l'admettre dans ce cas-ci, séparément, de la liasse de documents.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] Eh bien, nous lui attribuons la cote

 14   P1727. Merci.

 15   Mme BIERSAY : [interprétation] Merci.

 16   Q.  Vous nous avez dit que vous avez reçu votre arme -- désolée, de votre

 17   uniforme, vous avez reçu votre uniforme de la Défense territoriale en temps

 18   de paix. Est-ce que je vous ai bien compris lorsque vous avez dit cela ?

 19   R.  Non. J'ai dit cela mais, en fait, je voudrais dire que dans ce bâtiment

 20   dans la commune locale de Sid, il y avait des bureaux qui dataient d'avant

 21   la guerre de la Défense territoriale, et c'est de là que nous avons reçus

 22   nos uniformes, les anciens uniformes, l'ancien modèle. Donc nous les

 23   appelions SNB. Ça veut dire uniforme gris olivâtre.

 24   Q.  Et quelle Défense territoriale est-ce lorsque vous parlez des bureaux

 25   qui dataient d'avant la guerre ? Est-ce que c'est la Défense territoriale

 26   de la SBSO ou une autre Défense territoriale ?

 27   R.  C'est probablement la Défense territoriale yougoslave ou la Défense

 28   territoriale de la République de Serbie. Je ne sais pas comment les choses


Page 4716

  1   étaient divisées à l'époque. Mais pour moi, c'était la TO, la Défense

  2   territoriale.

  3   Q.  Lorsque vous avez reçu votre arme, quelles forces étaient présentes ?

  4   R.  L'armée populaire yougoslave. Il y avait un sous-officier qui

  5   distribuait des armes, il les prenait dans une caisse qui se trouvait dans

  6   un camion. Ces armes avaient été stockées là. Alors nous avons dû les

  7   nettoyer d'abord. Ensuite, près du dépôt, une unité a été constituée avec à

  8   sa tête Zeljko Krnjajic. Et moi j'ai reçu les armes là-bas, on devait les

  9   tester pour voir si elles fonctionnaient bien.

 10   Donc c'était l'armée populaire yougoslave qui nous a donné ces armes.

 11   Q.  Dans votre déclaration, vous nous avez dit que vous vous étiez rendus

 12   ensuite à Tovarnik. Est-ce que vous pourriez nous décrire le convoi qui est

 13   parti de Sid et qui est allé vers Tovarnik, convoi de volontaires ?

 14   R.  Nous ne sommes pas allés à Tovarnik dans un convoi de véhicules. A mi-

 15   chemin, nous sommes descendus du Pinzgauer et nous nous sommes déployés en

 16   colonne : un homme, un véhicule, un homme, un véhicule. Et au fur et à

 17   mesure que nous nous approchions de Tovarnik, nous avons reçu des grenades

 18   à main. Et les tirs ont commencé à ce moment-là.

 19   Q.  Quand vous dites à mi-chemin, qu'entendez-vous par là ? A mi-chemin de

 20   quoi ? A mi-chemin du voyage allant de Sid à Tovarnik ou autre chose ?

 21   R.  Sid et Tovarnik sont des endroits très proches l'un de l'autre. Du

 22   centre du village, je voyais la place principale de Tovarnik, qui se trouve

 23   à 5 ou 6 kilomètres. Donc, à mi-chemin se trouve la frontière entre la

 24   Serbie et le territoire de Tovarnik, qui était croate. Donc nous nous

 25   trouvions là à la frontière, et c'est là que nous nous sommes déployés en

 26   tirailleurs.

 27   Q.  Alors vous dites que de Sid vous pouviez voir la place principale de

 28   Tovarnik. Est-ce qu'il y a des points bien précis que vous pouviez


Page 4717

  1   reconnaître de Sid ?

  2   R.  On voyait le clocher de l'église. Tout village a une église, et en

  3   fonction de l'appartenance ethnique, on peut reconnaître le lieu de culte.

  4   Donc je voyais le clocher de l'église, c'est pour cela que je vous dis que

  5   nous n'étions pas loin.

  6   Q.  Alors, lorsque vous êtes allé de Sid à Tovarnik, est-ce que vous

  7   portiez votre arme ?

  8   R.  J'avais un fusil automatique, un couteau qui m'avait été donné en même

  9   temps que l'arme, des munitions et un masque à gaz, je suppose, aussi. Et

 10   les grenades à main nous ont été données lorsque nous nous sommes approchés

 11   du village de Tovarnik, avant que les tirs ne commencent.

 12   Un sous-officier de la Brigade motorisée royale nous a distribué ces

 13   grenades à main.

 14   Q.  Alors, lorsque vous dites "NCO", sous-officier, qu'est-ce que vous

 15   voulez dire, Monsieur Stoparic ?

 16   R.  Je n'ai pas dit NCO, j'ai dit officier. NCO veut dire sous-officier,

 17   "non-commissioned officer" en anglais, jusqu'au grade d'adjudant. Et les

 18   lieutenants et les seconds sont déjà des officiers. Alors, moi je parlais

 19   de la personne qui travaille au sein de l'armée et qui a un niveau

 20   d'instruction de niveau moyen, ça, c'est un NCO, un sous-officier. Ceux qui

 21   ont reçu une instruction de niveau plus élevée, qui ont des diplômes, sont

 22   des officiers.

 23   Q.  Lorsque vous avez participé à la prise de Tovarnik en septembre 1991,

 24   qui étaient les commandants de compagnie de la Défense territoriale de la

 25   SBSO ?

 26   R.  Alors je peux vous parler de celui de ma compagnie, Zeljko Krnjajic. Je

 27   ne connais pas les commandants des autres unités.

 28   Dans cette région, même des gens du cru d'appartenance ethnique serbe nous


Page 4718

  1   ont rejoints là. Le premier jour, ils ont reçu des armes ou en avaient

  2   déjà. Donc c'est un petit peu flou. Je connais mon unité et je sais que le

  3   commandant était Krnjajic et son adjoint était --

  4   L'INTERPRÈTE : Nom inaudible pour l'interprète.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Mon commandant de section était quelqu'un de

  6   Novi Sad. Je crois qu'il s'appelait Sasa de son prénom.

  7   Mme BIERSAY : [interprétation]

  8   Q.  Qui vous donnait des ordres dans votre unité lorsque vous étiez à

  9   Tovarnik ?

 10   R.  C'est Krnjajic qui me donnait les ordres. Ou --

 11   L'INTERPRÈTE : Une autre personne qui n'a pas été entendue par

 12   l'interprète.

 13   Mme BIERSAY : [interprétation] Affichons à présent le document 5977 de la

 14   liste 65 ter.

 15   Q.  Vous ne devez pas le regarder, mais vous avez décrit que vous aviez vu

 16   beaucoup de dépouilles de civils croates dans les rues de Tovarnik. Ma

 17   question est la suivante : comment saviez-vous que ces personnes étaient

 18   des Croates ?

 19   R.  J'ai aussi vu une femme serbe. Je savais que c'était une Serbe parce

 20   que c'était la grand-mère d'un ami à moi à Sid. Et je savais que c'étaient

 21   des Croates -- quand je dis "je savais", je veux dire je suppose que

 22   c'étaient des Croates parce que le village était, grosso modo, à 50/50

 23   habité par des Serbes et des Croates, et je supposais que si ces dépouilles

 24   étaient serbes, leurs familles auraient retiré les corps déjà, les auraient

 25   enlevés. Et donc, vu que ces dépouilles étaient encore là, je me suis dit

 26   que c'étaient des Croates. Et il y en avait deux ou trois en uniforme parmi

 27   les dépouilles. Ils portaient des uniformes de la police ou de l'armée

 28   croate.


Page 4719

  1   Q.  Où se trouvaient la plupart des corps que vous avez vus ?

  2   R.  Vous n'avez jamais fait la guerre, donc vous ne le savez pas, mais on

  3   est passés par des cours. J'ai vu certains corps dans les cours de ces

  4   maisons. Et puis, le lendemain, j'ai vu plusieurs dépouilles dans les

  5   stations à essence, et la police militaire les gardait.

  6   Q.  Savez-vous quand ou comment ces civils ont été tués ?

  7   R.  Je ne sais pas. Mais lors de la première journée des opérations de

  8   combat, il n'y avait pas de dépouilles. Nous étions passés à côté de la

  9   station à essence, mais le lendemain lorsque nous sommes repassés devant

 10   cette station à essence, les corps s'y trouvaient.

 11   Q.  Est-ce que vous avez eu des informations sur ce qu'il était arrivé à

 12   ces personnes, à ces corps que vous avez vus, si vous en avez vu ?

 13   R.  Eh bien, quelqu'un les a tués, les a exécutés. Je n'en sais rien. Peut-

 14   être que les soldats les avaient retirés de leurs jardins et de leurs

 15   cours, mais je ne crois pas. Ils auraient été embarqués dans des camions si

 16   on les avait retirés des jardins et des cours. Mais ils se trouvaient juste

 17   là, par terre.

 18   Q.  Alors j'aimerais passer à présent du sujet de Tovarnik à Vukovar.

 19   Monsieur Stoparic, quand êtes-vous arrivé à Vukovar avant que Vukovar ne

 20   tombe ?

 21   R.  Je suis arrivé en septembre du camp de Lipovaca et je suis resté

 22   jusqu'à la fin. Je ne sais pas combien de temps cela a duré.

 23   En tout cas, j'ai reçu une paie pour deux mois. Je ne peux pas vous

 24   dire exactement combien de temps j'ai passé là-bas, je ne le sais pas.

 25   Peut-être que l'on m'a trop payé, mais ce serait cinq ou six jours de trop.

 26   Mais plus ou mois deux mois. Je suis resté là-bas plus ou moins deux mois.

 27   J'ai reçu un certificat que j'ai reçu à Velepromet. J'étais membre de

 28   Leva Supoderica, donc le certificat reprenait la période que j'avais passée


Page 4720

  1   à Vukovar. Mais un adjudant m'a pris ce certificat lorsqu'il m'a payé, donc

  2   je ne sais pas exactement combien de jours je suis resté.

  3   Q.  Et où vous a-t-on payé ?

  4   R.  A Belgrade, à Topcider. C'est la caserne de la Brigade de la

  5   Garde.

  6   Q.  Monsieur Stoparic, pourriez-vous énumérer pour les Juges de la

  7   Chambre les forces qui étaient présentes à Vukovar lorsque vous y étiez,

  8   celles que vous connaissiez ?

  9   R.  Oui, je peux vous dire celles que je connaissais. Donc il y avait nous,

 10   l'unité de Leva Supoderica. La Brigade des Gardes. Dans notre secteur se

 11   trouvait également la Défense territoriale. J'utiliserai l'abréviation TO.

 12   Je ne vais pas dire à chaque fois Défense territoriale de Slavonie, Baranja

 13   et Srem occidental. Quand je parle de TO, c'est cela que j'entends. Donc il

 14   y avait deux commandants là-bas. L'un d'entre eux était Stanko Vujanovic,

 15   et l'autre Miroljub. Il y avait l'unité d'Arkan et probablement le Corps de

 16   Novi Sad. Pour les autres, je ne sais pas. Il y avait peut-être des

 17   réservistes aussi, des groupes de volontaires, mais je ne connais pas leurs

 18   noms et je ne me suis pas mêlé à eux.

 19   Q.  Alors, lorsque vous dites "de notre côté" et puis "de l'autre côté",

 20   qu'entendez-vous par "notre côté" ?

 21   R.  Je suis arrivé à Vukovar depuis Negoslavci. Petrova Gora. Il y avait

 22   d'autres axes, tels que Sotin. Je pense que les opérations à Vukovar ont

 23   été divisées en opérations nord et sud. Moi je me trouvais du côté sud, et

 24   je suppose que ces groupes qui se trouvaient au nord travaillaient de

 25   l'autre côté de la ville. Nous, les Leva Supoderica, étions à Petrovo Brdo,

 26   par exemple, et à Srpsko Naselje.

 27   Mme BIERSAY : [interprétation] Peut-on afficher l'onglet numéro 8, le

 28   document 6317 de la liste 65 ter. Il s'agit d'une carte Google de la zone


Page 4721

  1   de Vukovar qui a été élaborée l'année dernière.

  2   Q.  Alors j'aimerais vous demander, Monsieur Stoparic, d'identifier

  3   certains emplacements des forces que vous venez de nous décrire.

  4   R.  Oui, mais je ne pourrais pas vous assurer à 100 % de la précision de

  5   ces emplacements. Je vous donnerai grosso modo l'emplacement de mon unité.

  6   Q.  Un instant, Monsieur Stoparic.

  7   Est-ce que vous voyez clairement les différents endroits que vous

  8   connaissez --

  9   R.  Oui.

 10   Q.  -- d'un point de vue général ? Donc, par exemple, vous nous avez parlé

 11   du nord et du sud. Est-ce que vous pourriez tracer une ligne séparant ces

 12   deux sections ?

 13   R.  Oui, je vais tracer une ligne de séparation vous montrant la partie de

 14   la ville où je ne me suis pas rendu. Elle serait plus ou moins là.

 15   Q.  Et de quel côté vous trouviez-vous -- donc, pour le sud ?

 16   R.  Je peux vous montrer où se trouvait notre QG et où nous avons passé la

 17   nuit lorsque nous étions au repos. Alors, Nova Ulica se trouve ici, la rue

 18   Nova, donc on était par ici, et nous nous trouvions dans les maisons des

 19   environs. Deux maisons étaient utilisées comme QG et un petit dépôt, et une

 20   autre était le QG du commandement.

 21   Q.  Pourriez-vous entourer les points que vous venez de tracer et mettre le

 22   chiffre 1 à côté pour que nous puissions suivre les annotations par la

 23   suite.

 24   R.  [Le témoin s'exécute]

 25   Q.  Les maisons sont là. Et vous avez décrit Vujanovic comme étant un

 26   commandant. Où se trouvait-il principalement ?

 27   R.  Je ne peux pas vous dire exactement où il était basé. Je ne le sais

 28   pas. Mais je sais où se trouvaient ses hommes, où ils étaient déployés. Je


Page 4722

  1   peux vous le montrer. Je sais où ils tenaient les lignes.

  2   Q.  Alors, oui, montrez-le-nous, s'il vous plaît, et faites une annotation.

  3   R.  Ici est la rue Prvomajska. C'est de là à ici qu'ils avaient leur ligne.

  4   Ils se trouvaient, par conséquent, dans ce secteur.

  5   Q.  J'aimerais que vous passiez au numéro 2 à côté du cercle que vous venez

  6   de tracer.

  7   R.  [Le témoin s'exécute]

  8   Q.  Leva Supoderica, est-ce que ça se trouve être un lieu dans le voisinage

  9   de Vukovar ?

 10   R.  Pour autant que je sache, il y avait là-bas Leva et Desna Supoderica.

 11   Ce sont des parties de la ville, comme Petrova Gora, Centar, Mitnica,

 12   Olajnica. Alors ça se trouvait sur notre gauche, cela. Du moins, je le

 13   pense.

 14   Q.  Est-ce que vous pouvez décrire pour les Juges de la Chambre -- ou,

 15   plutôt, je vais d'abord vous demander si vous avez déjà eu l'occasion

 16   d'aller voir ce quartier de Petrova Gora ?

 17   R.  C'est par cette partie-là que je suis venu dans la rue. Tout ça se

 18   trouve être Petrova Gora, en réalité. C'étaient des maisons qui étaient en

 19   bon état. Elles n'ont pas été détruites, ces maisons. On pouvait y habiter.

 20   Il n'y avait pas de fuites d'eau. Je pense que tout ce coin-là s'appelait

 21   Petrova Gora.

 22   Q.  Et savez-vous nous dire quel était le groupe ethnique qui l'emportait

 23   dans ce quartier de Petrova Gora ?

 24   R.  Je ne sais pas trop parce que la ville était très mélangée. Je crois

 25   que dans Petrova Gora, il y avait une majorité serbe. C'est ce que je

 26   crois, mais vous ne devez pas me prendre au mot. La ville était composée de

 27   Croates, Serbes, Slovaques, Ruthènes, Hongrois. Je pense que les Serbes

 28   dans ce coin-là étaient probablement majoritaires du point de vue des


Page 4723

  1   pourcentages.

  2   Q.  Et savez-vous sur cette carte nous dire où est-ce que les effectifs de

  3   la TO de la SBSO s'étaient placés ?

  4   R.  Eh bien, selon les opérations, ils se trouvaient à côté de nous autres.

  5   Ils faisaient quelque chose; nous, on faisait autre chose. Enfin, je ne

  6   sais pas à quoi vous voulez en venir. Je vous ai montré qu'à un moment

  7   donné, la ligne de front se trouvait à tel endroit. Après, ça s'est

  8   déplacé, bien sûr. Mais ce que j'ai tracé à présent, c'est la situation de

  9   la semaine qui a suivi notre arrivée. Ça, c'est la rue Prvomajska, la rue

 10   du 1er mai. Et c'est là qu'il y avait cette ligne de front. Là, on ne

 11   l'indique pas sur la carte, ce n'est pas écrit, mais je crois que c'est

 12   bien cela.

 13   Q.  Est-ce que vous pouvez décrire pour les Juges de la Chambre, la

 14   structure du déploiement au combat aux fins d'opérations à conduire.

 15   R.  Eh bien, c'est organisé comme tout autre armée. On était répartis ou

 16   subdivisés en compagnies, détachements, pelotons. Quand il y avait une

 17   action à réaliser, on se concertait, l'armée nous disait quels étaient ses

 18   plannings. C'était le capitaine Zirovic ou le capitaine Radic qui venait

 19   nous voir. Ils apportaient des cartes de vues aériennes topographiques avec

 20   des noms de codes pour la façon de communiquer au niveau des transmissions,

 21   parce qu'il ne fallait pas parler sans codage, et ils disaient quand est-ce

 22   et à quel endroit on procéderait à des préparatifs à l'artillerie, par où

 23   on était censés arrivés. Et eux, se trouvaient sur la gauche, mais on

 24   faisait une seule ligne de front. On constituait une ligne.

 25   Q.  Quand vous dites "nous", vous parlez du détachement de Leva Supoderica

 26   encore, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui. Sous le commandement d Kameni. Je parle du détachement de Leva

 28   Supoderica, en effet. Et pour autant que je sache, à titre officiel, nous


Page 4724

  1   étions des volontaires de la Brigade de la Garde. La TO, c'était la TO.

  2   Eux, ils avaient des liens avec la JNA. Mais eux, c'était la TO. La plupart

  3   d'entre nous dans Leva Supoderica, c'étaient des gens qui n'étaient pas

  4   originaires de ces lieux; on était venus de Serbie. Mais le commandant,

  5   notre commandant était de Vukovar. Mais il y avait aussi des gens qui

  6   étaient venus des villages environnants, des gens qui étaient de la ville

  7   même. Et bon nombre d'entre eux étaient de la région.

  8   Q.  S'agissant de ce capitaine Radic, est-ce que vous pouvez nous dire de

  9   quelle unité ou brigade il faisait partie ?

 10   R.  Lui était officier de la Brigade de la Garde. Je ne sais pas si c'était

 11   la 1ère Brigade de la Garde. Enfin, moi, je vais parler en termes simples,

 12   je dirai Brigade de la Garde. Il était officier, et il me semble qu'à

 13   l'époque son grade était celui de capitaine.

 14   Q.  Monsieur Stoparic, dans votre déclaration, vous avez décrit Stanko

 15   Vujanovic et Miroljub Vujovic, j'ai remarqué que lorsque vous parlez, vous

 16   parlez de Stanko et de Miroljub; ai-je bien raison de croire que quand vous

 17   parlez de ces prénoms-là, vous parlez de ces deux individus ?

 18   R.  En effet.

 19   Q.  Mais je ne le fais pas pour vous, Monsieur Stoparic, mais pour les

 20   besoins du compte rendu d'audience. Alors, quand vous dites Stanko

 21   Vujanovic et Miroljub Vujovic, c'est ce qu'il convient d'entendre. Je l'ai

 22   dit pour le compte rendu d'audience.

 23   Lorsque vous avez eu ces réunions avec Stanko Vujanovic et Miroljub

 24   Vujovic, est-ce qu'ils étaient toujours là ? Sont-ils arrivés à l'heure ?

 25   R.  Stanko était là plus souvent; Miroljub, lui, il avait toujours du

 26   retard. Des fois, il ne venait même pas. Stanko, lui, venait plus souvent.

 27   Et je crois que là où se trouvait notre QG se trouvait sa maison privée,

 28   enfin l'une des maisons pas loin de là. Et donc lui était présent très


Page 4725

  1   souvent. L'autre était en retard. Et à chaque fois qu'on convenait de

  2   lancer une attaque, il arrivait en retard; je ne sais pas pourquoi.

  3   J'imagine qu'il partait d'abord vers son QG, parce que aussi, ils avaient

  4   leur QG à eux. Parce que, voyez-vous, la TO -- enfin, dans la guerre, c'est

  5   la JNA qui joue le rôle principal; ensuite la police et la TO. La TO de la

  6   SBSO, ils avaient un gouvernement de la région, ils devaient probablement

  7   répondre de leurs faits et gestes auprès du gouvernement. Allez savoir ce

  8   qu'ils faisaient. Je crois que c'est ainsi que les choses se passaient.

  9   Q.  Je voudrais à présent attirer votre attention sur le jour où vous avez

 10   été officier de service, de permanence, au poste de commandement de Leva

 11   Supoderica. Est-ce que vous vous souvenez de cette matinée-là ?

 12   R.  Oui. Ce jour, ce soir-là il y a eu l'événement d'Ovcara.

 13   Q.  Et pendant que vous étiez à ce poste de commandement, est-ce que vous

 14   vous souvenez d'avoir reçu des appels téléphoniques urgents dans la matinée

 15   ?

 16   R.  Eh bien, voyez-vous, notre commandant et bon nombre d'officiers, des

 17   chefs de compagnie sont partis à Belgrade. Ils n'étaient pas là. Ils ne se

 18   trouvaient pas à Vukovar du tout. Ils allaient voir Seselj essentiellement

 19   au Parti radical. Alors, Miroljub a appelé pour demander après Kameni. Il a

 20   appelé plusieurs fois. Ensuite, nous, on lui a donné le téléphone, le

 21   numéro de téléphone où se trouvait Kameni, et ils se sont probablement

 22   parlés, mais il ne nous a plus rappelés. Parce que dans nos QG, nous avions

 23   des téléphones de campagne, ça fonctionne par manivelle à induction, et des

 24   Motorola.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Nous avons encore cette carte annotée

 26   sur l'écran. Est-ce que ceci vous convient ?

 27   Mme BIERSAY : [interprétation] Pour le moment, oui. On pourrait peut-être

 28   aller de l'avant et la verser au dossier, puis y revenir en cas de besoin.


Page 4726

  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. Monsieur le Greffier.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P1728.

  3   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

  4   Mme BIERSAY : [interprétation]

  5   Q.  Quand avez-vous vu Kameni ce jour-là ?

  6   R.  Le soir lorsqu'il est rentré. Avant cela, on s'est parlés. J'étais de

  7   permanence jour et nuit, et comme il avait emmené tous les officiers avec,

  8   je n'avais personne pour me remplacer. J'ai essayé à plusieurs reprises de

  9   le contacter, il n'était pas accessible. Une fois j'ai réussi et il m'a dit

 10   : Reste encore un peu en attendant que quelqu'un ne vienne te remplacer. Et

 11   c'est le soir qu'ils sont venus, lui, Kinez, Mare, Djo, Ceca. Enfin moi, je

 12   parle des surnoms de ces chefs ou des commandants que nous avions. Je vous

 13   dirais par la suite les noms. Il y en a certains que j'ai oubliés entre-

 14   temps.

 15   Mais il y en a un qui a demandé qu'on donne les effectifs, c'est-à-

 16   dire les effectifs numériques, et je suis allé dans les différents

 17   pelotons, sections, pour voir combien ils étaient en nombre, et je suis

 18   revenu avec les chiffres. Kameni a dit : Je ne m'intéresse pas à ceux qui

 19   sont absents pour des raisons justifiées, ceux qui sont allés voir des

 20   membres de leurs familles. Il voulait savoir quelles étaient les absences

 21   injustifiées. J'en ai eu un ou deux de ce genre-là, et c'était la seule

 22   chose qui l'intéressait.

 23   Q.  Monsieur Stoparic, vous avez dit ces surnoms très vite quand vous avez

 24   parlé des gens qui étaient en compagnie de Kameni. J'aimerais que vous

 25   répétiez une fois de plus, mais je vous demande d'aller plus lentement pour

 26   qu'on puisse les consigner.

 27   R.  Fort bien. Kameni, c'est Milan Lancuzanin, le commandant. Il est venu

 28   avec lui le chef de la 1ère Compagnie. On l'appelait Kinez. Il s'appelle


Page 4727

  1   Milojevic, Predrag. Le 2e chef de Compagnie, son nom je l'ai oublié. On

  2   l'appelait Ceca. Un autre chef dont j'ai oublié le nom, on lui avait donné

  3   le surnom de Mare. Un troisième chef s'appelait Mali Djo, petit Joe. Je

  4   connaissais leurs noms, mais il se peut que ces noms me reviennent par la

  5   suite. Nous, on s'appelait par nos surnoms et c'est ce qu'on retient le

  6   mieux, en fait.

  7   Q.  Et ce surnom Kinez, ça veut dire quoi ?

  8   R.  Kinez, ça veut dire le Chinois. C'est ainsi qu'on l'appelait. Il

  9   ressemblait un peu à un Chinois. Il avait des yeux légèrement bridés.

 10   Q.  J'aimerais attirer votre attention sur ce que je voudrais que vous

 11   voyez avec nous, et à cet effet j'aimerais qu'on nous affiche l'onglet

 12   numéro 1 de votre déclaration, la pièce 65 ter 5977. En version anglaise,

 13   ça devrait être la page 8, paragraphe 36.

 14   L'INTERPRÈTE : Micro pour Mme Biersay, s'il vous plaît.

 15   Mme BIERSAY : [interprétation] Merci de me l'avoir rappelé.

 16   Q.  Alors, il y a une phrase qui dit :

 17   "Ils sont revenus vers midi."

 18   Voyez-vous cette phrase-là, Monsieur ? Et vous parlez de Kameni, qui a dit

 19   à Kinez et Djordjevic. Et quand vous dites ils sont revenus vers midi, où

 20   est-ce qu'ils sont revenus, dites-nous ?

 21   R.  Probablement à Vukovar parce qu'il m'a appelé. Ils ne pouvaient pas me

 22   contacter depuis Belgrade avec sa Motorola. Enfin non, je vous dis

 23   n'importe quoi. C'est moi qui l'ai appelé plusieurs fois, et une fois il a

 24   répondu à l'appel.

 25   Q.  Donc si je vous ai bien compris, ils sont rentrés vers midi dans le

 26   secteur de Vukovar, et c'est là que vous estimez que vous avez pu établir

 27   le contact par Motorola ?

 28   R.  Mais pas tous. Kameni, le commandant, le chef. Je les ai vus


Page 4728

  1   personnellement le soir, lorsqu'ils sont venus tous ensemble au QG.

  2   Q.  Et comment en êtes-vous à considérer que c'est bien le moment dans le

  3   temps où ils sont rentrés au QG ?

  4   R.  Bien, voyez-vous, on était au mois de novembre. Il faisait nuit vers 5

  5   heures, déjà. Je n'ai pas très bien compris votre question. Alors partant

  6   de quoi est-ce que j'affirme qu'ils sont venus le soir ? C'est bien cela

  7   que vous avez demandé ? Parce qu'il faisait nuit. Les lumières étaient

  8   allumées.

  9   Q.  Donc vous vous souvenez du moment --

 10   R.  C'est ce que j'ai gardé en mémoire. Je ne sais pas quoi vous dire

 11   d'autre. C'est ainsi que je me souviens de cela.

 12   Q.  Alors, vous avez commencé par répondre à la question en disant que

 13   c'était le jour des exécutions d'Ovcara. Alors, quand avez-vous appris

 14   qu'il y a eu des exécutions à Ovcara ?

 15   R.  A ce moment-là, je ne le savais pas. Enfin, sur le coup je ne le savais

 16   pas. J'ai demandé à Kameni : Que se passe-t-il ? Pourquoi as-tu besoin des

 17   effectifs numériques ? Et il m'a dit : Il s'est passé quelque chose qui

 18   n'était pas censé se passer. Au bout de quelques heures, la rumeur a couru

 19   pour ce qui est d'exécutions à grande échelle, et je ne savais pas où, mais

 20   ce n'est qu'au matin que j'ai appris que c'était à Ovcara.

 21   Q.  Monsieur Stoparic --

 22   R.  Excusez-moi, excusez-moi, un soldat à moi me l'a dit - j'étais son chef

 23   de peloton - il m'a dit qu'il était à Ovcara et qu'il a égorgé au couteau.

 24   Je ne l'ai pas cru, bien sûr. Mais de nos jours il est condamné à 20 ans de

 25   prison à Belgrade. Donc il n'a pas menti, il a dit la vérité.

 26   Q.  Comment s'appelle-t-il, celui-là ?

 27   R.  Soskic, Djordje. Il faisait partie de mon peloton. J'étais son chef de

 28   peloton.


Page 4729

  1   Q.  Est-ce qu'il y a eu un moment en 2002 ou 2003 où vous avez rencontré

  2   Kameni, Ceca et Kinez ?

  3   R.  Enfin Kameni, je n'ai pas eu à le rencontrer de façon particulière. On

  4   se rencontrait tous les jours. On vivait dans la même ville. Mais oui, il a

  5   eu plusieurs AVC. Il est devenu invalide. Il m'appelait, moi, ou quelqu'un

  6   de sa famille pour aller quelque part. Il avait peur de conduire tout seul.

  7   Il fallait que quelqu'un y aille avec lui. J'allais souvent avec lui quand

  8   il y avait des choses privées à effectuer, et puis après, quand on a

  9   commencé à faire courir la rumeur d'un procès imminent pour lui en Serbie,

 10   on s'est vus deux ou trois fois. Enfin moi, ça ne me concernait pas. Je

 11   n'étais pas à Ovcara. Mais eux, ils se concertaient au sujet de ce qu'il

 12   fallait dire en cas d'arrestation par la police. Kinez, lui, a été soumis à

 13   un détecteur de mensonge, et ils ont voulu se concerter pour raconter la

 14   même chose. Mais dans tout ce qu'ils ont pu faire comme concertation, il y

 15   avait 60 % de vérité, de toute manière. S'agissant maintenant de ce qui

 16   s'est passé à Ovcara même, je ne sais pas trop quelle est la vérité. Je

 17   n'ai rien vu, moi.

 18   Q.  Est-ce que Kameni avait un point de vue, du moins d'après ce qu'il a

 19   dit, pour ce qui est du moment où il est arrivé au poste de commandement ?

 20   R.  Je ne me souviens pas exactement à présent comment il avait formulé la

 21   chose. Ils sont probablement venus un peu plus tôt au poste de

 22   commandement. Ils étaient à Ovcara, ils ont dû voir ce qui se passait.

 23   Kameni avait voulu sauver un voisin. Miroljub ne l'a pas laissé faire. Et

 24   Kameni aurait dit à ses hommes, prétendument : On s'en va d'ici, nous

 25   n'avons que faire ici. C'est ce qu'il a dit.

 26   Je ne peux pas démentir ni confirmer, je n'étais pas là-bas. Je vous ai dit

 27   quand est-ce qu'il est arrivé au QG. Le soir était déjà tombé. Dans la

 28   journée, on s'était parlés, ça c'est vrai. De là, à savoir ce qui s'est


Page 4730

  1   passé là-bas au juste, je ne puis que supposer et je peux me référer aux

  2   jugements rendus à Belgrade. Ils ont tous été condamnés à des peines, sauf

  3   l'un d'entre eux qui a été acquitté. Le dénommé Mare a été acquitté, je

  4   pense.

  5   Mme BIERSAY : [aucune interprétation]

  6   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

  7   Mme BIERSAY : [interprétation] A présent, j'aimerais vous passer un clip.

  8   Ça se trouve à l'intercalaire 95, il s'agit de la pièce 65 ter 4885.1. Et

  9   nous allons la passer sans le son, sans l'audio.

 10   Et une fois qu'on aura vu des parties de ce clip, je vous montrerai des

 11   arrêts sur image pour vous demandez, Monsieur Stoparic, si vous pouvez

 12   reconnaître les gens.

 13   Q.  Alors, Monsieur Stoparic, on passera le clip, et je vous poserai mes

 14   questions à la fin.

 15   [Diffusion de la cassette vidéo]

 16   Mme BIERSAY : [interprétation] Oui, pause, s'il vous plaît.

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Zivanovic.

 18   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Excusez-moi. Je ne sais pas pourquoi ce

 19   clip nous est passé sans audio. Il y a un enregistrement audio.

 20   Mme BIERSAY : [interprétation] Oui. Ce n'est pas la teneur qui nous

 21   intéresse. C'est pour identifier les différentes personnes. Et je crois que

 22   les interprètes disposent des transcriptions qui leur ont été distribuées,

 23   mais moi, je ne poserai pas de questions au sujet de l'enregistrement

 24   audio.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Voyons cela.

 26   [Diffusion de la cassette vidéo]

 27   Mme BIERSAY : [interprétation]

 28   Q.  J'aimerais que nous parlions de la toute dernière des images qu'on a


Page 4731

  1   vue.

  2   Mme BIERSAY : [interprétation] Et pour le compte rendu, je dirais que ça va

  3   de 2 heures, 49 minutes, 21 secondes, à 2 heures, 49 minutes, 37 secondes;

  4   et puis ensuite, il y a 02 heures, 52 minutes et 25 secondes, jusqu'à 02

  5   heures, 59 minutes et 37 secondes.

  6   Q.  Alors je vais demander à ce qu'on fasse un arrêt sur image pour vous

  7   demander si vous reconnaissez certaines personnes, et je sais que c'est le

  8   cas, on va en parler à l'instant.

  9   [Diffusion de la cassette vidéo]

 10   Mme BIERSAY : [interprétation]

 11   Q.  Est-ce que vous connaissez, Monsieur Stoparic, la personne à 02 heures,

 12   59 minutes et 45 secondes ?

 13   R.  Oui. C'est l'homme dont je vous ai parlé qui s'était vanté de ce qu'il

 14   avait fait. Soskic, Djordje. J'étais son chef de peloton. Il est originaire

 15   de la ville de Krusevac.

 16   Q.  Mais que porte-t-il, au fait, parce qu'il y a deux hommes sur l'arrêt

 17   de l'image ?

 18   R.  Il y a un autre civil. Il avait pris un blouson dans une maison. On

 19   appelait ce type de blouson un "spit-fire". Il faisait froid, vous savez,

 20   c'était le mois de novembre.

 21   Alors c'est un soldat, mais il porte un blouson civil.

 22   Mme BIERSAY : [interprétation] Nous demanderions pour le moment un

 23   versement au dossier de cette image qui est le 65 ter 4885.1.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Par mesure de précaution, laquelle

 25   des deux personnes a été identifiée par le témoin ? Ce n'est pas une chose

 26   qui découle clairement de sa réponse.

 27   Mme BIERSAY : [interprétation] Je vais parler de la chose à la pièce

 28   suivante, qui sera la pièce 4885.2.


Page 4732

  1   J'ai demandé un arrêt sur image parce que l'image est meilleure --

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais le témoin, je suis sûr, sait de

  3   qui nous parlons. Est-ce qu'il dit que c'est l'homme qui porte des

  4   vêtements civils ou l'autre ?

  5   Mme BIERSAY : [interprétation]

  6   Q.  Monsieur Stoparic, l'homme que vous avez nommé par son nom, se trouve-

  7   il à droite ou à gauche de la photo ?

  8   R.  C'est l'individu qui se trouve à droite et qui porte un casque.

  9   Q.  Et c'était l'homme qui était placé sous vos ordres et qui était allé à

 10   Ovcara ?

 11   R.  Soskic, Djordje, surnommé Georges.

 12   Mme BIERSAY : [interprétation] Nous demandons le versement au dossier de

 13   cette pièce de la liste 65 ter 4885 [comme interprété].

 14   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Biersay, avec ou sans la

 16   transcription ? Parce que ce numéro 65 ter dispose des deux.

 17   Mme BIERSAY : [interprétation] Sans la transcription.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P1729.

 20   Mme BIERSAY : [interprétation] Bien. Passons maintenant au numéro 4885.2 de

 21   la liste 65 ter.

 22   Q.  Monsieur Stoparic, je vous demande de vous reporter à la première page

 23   de cette pièce, et plus particulièrement à gauche, l'homme que l'on voit

 24   dans le coin à gauche, est-ce que vous le reconnaissez ?

 25   R.  Oui. C'est Predrag Miljevic, que l'on appelait également Kinez, qui

 26   était le commandant de la 1ère Compagnie de l'unité de Leva Supoderica.

 27   Vous voyez pourquoi on l'appelait le "chinois", il a les yeux bridés.

 28   Q.  Est-ce que vous pourriez prendre le stylet électronique et entourer


Page 4733

  1   cette personne, dont vous venez de donner la description.

  2   R.  [Le témoin s'exécute]

  3   Mme BIERSAY : [interprétation] Nous avons d'autres pages encore, mais pour

  4   que cette annotation soit claire, je devrais demander le versement au

  5   dossier de cette pièce maintenant, si ça fonctionne sur le plan

  6   technologique; autrement, je pourrais attendre jusqu'à la fin.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Biersay, je me demande si est-

  8   ce qu'on n'ajoute pas des documents sans que ce soit justifié. Il n'y a

  9   qu'une seule personne à gauche de cette photo. Donc, à quoi servirait cette

 10   annotation ?

 11   Mme BIERSAY : [interprétation] Bien, si la Chambre estime que ce n'est pas

 12   utile, je peux tout aussi bien passer à la pièce suivante.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je ne pense pas que ce soit utile.

 14   Mme BIERSAY : [interprétation] Bien. Nous passons alors à la deuxième page

 15   de cette même pièce.

 16   Q.  Est-ce que vous reconnaissez quelqu'un sur cet arrêt sur image ?

 17   R.  Oui, en effet. La personne tout à fait à gauche est l'homme qui

 18   s'appelle également Ceca, qui était commandant également dans l'unité de

 19   Leva Supoderica.

 20   Mme BIERSAY : [interprétation] Bon, je pense que la Chambre comprend bien

 21   de qui il s'agit.

 22   Nous pouvons passer à la page suivante.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux parler ?

 24   Mme BIERSAY : [interprétation]

 25   Q.  Oui.

 26   R.  Tout à fait à droite, on retrouve également Ceca, la même personne que

 27   l'on retrouvait sur la photo avant. A gauche, c'est Milan Lancuzanin, que

 28   l'on appelait Kameni, avec des lunettes de soleil.


Page 4734

  1   Q.  Il s'agit donc bien de lunettes de soleil ?

  2   R.  Oui. Il s'agit de Milan Lancuzanin, surnommé Kameni. Et puis, l'autre

  3   homme est celui porte le surnom de Ceca.

  4   Mme BIERSAY : [interprétation] Page suivante.

  5   Q.  Est-ce que vous reconnaissez quelqu'un sur cet arrêt sur image ?

  6   R.  Il s'agit de Topola. Je ne sais pas quel est son vrai nom. La personne

  7   portant un chapeau et qui met la main sur la tête d'un enfant, c'est

  8   Topola. Il est en haut, au milieu de la photo.

  9   Q.  Est-ce que l'on peut passer à la page suivante. Je sais que ce n'est

 10   pas très clair. Est-ce que vous reconnaissez quoi que ce soit sur cette

 11   photo ?

 12   R.  Oui. C'est Djordje Soskic.

 13   Q.  Merci, Monsieur Stoparic.

 14   Mme BIERSAY : [interprétation] Nous aimerions maintenant demander le

 15   versement au dossier du document 4885.2 de la liste 65 ter.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Peut-on lui donner une cote.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P1730. Merci.

 18   Mme BIERSAY : [interprétation]

 19   Q.  J'ai une question de précision à vous demander, Monsieur le Témoin.

 20   Auparavant, vous avez expliqué qu'il y avait des réunions, des briefings

 21   avec le capitaine Radic, et je vais vous relire. Vous disiez que :

 22   "La TO n'est pas l'acteur principal pendant la guerre; c'est la JNA. Et la

 23   TO avait également des responsabilités vis-à-vis du district, et qui sait

 24   ce qu'ils devaient faire."

 25   Lorsque vous disiez "envers le district", qu'entendiez-vous par là ?

 26   R.  Lorsque je dis qui sait ce qu'ils devaient faire, je voudrais dire, en

 27   fait, Dieu sait quelles étaient leurs obligations. Alors, en ce qui

 28   concerne le district, eh bien, à l'époque ils avaient formé un district


Page 4735

  1   autonome, qui disposait de son propre gouvernement, son état-major de

  2   crise. En fait, c'est ça que je voulais dire. Ils participaient à la

  3   guerre, et c'est à partir que des forces de la Défense territoriale que la

  4   force de police a ensuite été créée, et l'armée de la Krajina. Donc, la TO

  5   était vraiment à la base.

  6   Mme BIERSAY : [interprétation] Je passe maintenant à l'onglet 99, liste 65

  7   ter 4809.7. Pour l'heure, il s'agit de 00 à 3 minutes, 39 secondes. Je vous

  8   demande que l'on voie ce clip vidéo.

  9   Q.  Et à un moment donné, je vais vous demander de reconnaître l'endroit de

 10   cette prise de vue.

 11   [Diffusion de la cassette vidéo]

 12   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 13   "Il s'agit de la première session du gouvernement dans la région serbe

 14   concernant la conclusion de la normalisation de la situation. L'une des

 15   conclusions, c'est que les prisonniers qui avaient du sang sur les mains,

 16   ne peuvent quitter le territoire de la SBSO. Ils ne peuvent pas se rendre

 17   en Serbie…"

 18   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 19   Mme BIERSAY : [interprétation] Bien. Je vais vous demander tout d'abord de

 20   faire un arrêt sur image.

 21   Q.  Est-ce que vous reconnaissez l'endroit, l'arrière-plan de cette image ?

 22   R.  Il s'agit da ma ville, de Sid. Il s'agit du bâtiment municipal. Et à

 23   côté, il y a le poste de police.

 24   Sauf le nom de la rue a changé, je crois qu'il s'agit de Sava Sumanovic ou

 25   Karadjordjevo. Je ne sais plus, il y a longtemps que je n'y suis plus allé,

 26   mais on est au centre-ville de Sid.

 27   Q.  Est-ce que vous reconnaissez l'uniforme militaire que l'on voie sur

 28   cette image ?


Page 4736

  1   R.  Oui. En effet, il s'agit de l'uniforme de la TO de la SBSO. Ce sont les

  2   uniformes verts. Je me souviens fort bien du moment où ils ont distribué

  3   ces uniformes.

  4   Mme BIERSAY : [interprétation] Je vous demanderais de faire tourner la

  5   vidéo.

  6   [Diffusion de la cassette vidéo]

  7   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  8   "Journaliste : …car la Serbie est un Etat qui n'est pas en guerre. Et les

  9   troupes qui ont aidé dans leur capture ne sont pas de véritables soldats;

 10   ce sont des paramilitaires. Et notre peuple de cette région qui a été

 11   reconnu peut les passer en justice. C'est la cour d'appel, c'est peut-être

 12   au niveau yougoslave, au niveau fédéral, mais en tout cas, pour les procès

 13   en première instance, ils se passeront ici devant nos autorités. Et c'est

 14   un accord avec les autorités militaires qu'ils vont rester dans nos camps

 15   ici autour de Vukovar, vu qu'un groupe a déjà été amené à Sremska

 16   Mitrovica. Ces personnes peuvent être rendues, si on peut les appeler

 17   personnes humaines d'ailleurs, mais c'est là qu'ils seront poursuivis. Et

 18   comment estimez-vous le nombre de ces personnes, des paramilitaires ? Il y

 19   a différents chiffres, de 200 qui se sont rendus à deux nuits, à 1 000

 20   aujourd'hui, de quels chiffres parle-t-on alors exactement ?

 21   Hadzic : Je crois qu'on est près de 3 000, 3000, même s'il y en a encore

 22   beaucoup qui se cachent parmi les civils. Toutefois, il y a beaucoup de

 23   gens honnêtes. Notre tâche essentielle est de tout instruire et de veiller

 24   à ce que les personnes qui sont innocentes ne soient pas poursuivies. Il

 25   vaut mieux laisser un coupable en liberté que de poursuivre des gens qui

 26   sont innocents. La police et tout le monde poursuivra à empêcher la

 27   poursuite de gens innocents.

 28   En ce qui concerne l'état de droit à Vukovar ?


Page 4737

  1   Eh bien, aujourd'hui nous sommes au tout début. Nous préparons cet

  2   événement. Mais malheureusement, j'étais un peu trop optimiste. Je pensais

  3   que Vukovar n'avait pas été tant détruite. Aujourd'hui, lorsque je l'ai vu,

  4   je pense que les mots ne peuvent pas décrire ce qui se passe. Il n'y a pas

  5   une maison qui tienne encore debout. Il y a des cadavres encore dans la

  6   rue. Donc notre ministère de la Santé et les services de santé devront

  7   ramasser tous les cadavres pour éviter toute contagion, et puis nous

  8   devrons recommencer à reprendre nos vies. Les gens qui se sont rendus

  9   coupables de ces combats sont des gens de Petrova Gora. Sans ceux-là, notre

 10   combat pour Vukovar aura été perdu. Et je saisis cette occasion pour les

 11   remercier de ce qu'ils ont fait. Nous prévoyons notre prochaine réunion

 12   pour demain avec un groupe de ministres et des représentants de ces

 13   personnes afin de retrouver tous les corps et de rétablir la discipline

 14   militaire. Nous espérons que les autorités civiles pourront reprendre le

 15   flambeau.

 16   Est-ce que ça veut dire que vous alliez enlever vos uniformes,

 17   Monsieur ?

 18   Hadzic : Eh bien, je suis le représentant le peuple serbe, élu par

 19   les Serbes. Le peuple serbe m'a nommé, et s'il pense que les frontières

 20   conviennent pour le moment, bien sûr, j'enlèverai mon uniforme. Mais je

 21   pense personnellement que je devrais le garder encore sur les épaules

 22   quelque temps."

 23   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 24   Mme BIERSAY : [interprétation]

 25   Q.  Monsieur Stoparic, on a parlé des gens de Petrova Gora dans ce clip. De

 26   qui pensez-vous qu'il s'agissait ?

 27   R.  Il l'a dit, la TO de Petrova Gora.

 28   Mme BIERSAY : [interprétation] Nous souhaiterions maintenant que cette


Page 4738

  1   vidéo soit marquée aux fins d'identification. Je crois qu'elle ne figurait

  2   pas dans la liasse de vidéos qui avait été reçue par le Greffe jusqu'à

  3   présent.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est pour cela que vous demandez

  5   qu'on la marque aux fins d'identification ?

  6   Mme BIERSAY : [interprétation] Oui, en effet.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P1731, marquée aux fins

  9   d'identification.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [micro] Merci.

 11   Mme BIERSAY : [interprétation]

 12   Q.  Pourriez-vous dire à la Chambre si Leva Supoderica avait un lien avec

 13   certains partis politiques ?

 14   R.  Lorsque j'étais juste arrivé, je ne le savais pas. Mais Kameni, lorsque

 15   nous étions rassemblés, nous a dit, même s'il y avait également un autre

 16   officier qui était présent. Je ne savais pas très bien qui était le

 17   véritable commandant autour des deux premiers jours. Il y avait donc un

 18   autre officier, Zoran Paripovic, surnommé Tito. Donc ces deux personnes

 19   étaient les personnages centraux, et ils nous ont dit que l'essentiel des

 20   hommes avaient été envoyés par le Parti radical serbe de Serbie. Mais je

 21   n'en faisais pas partie personnellement. Mais je me suis rendu compte à ce

 22   moment-là que le Parti radical serbe s'était organisé en groupes TO, et

 23   ensuite j'ai fait partie dans une unité de volontaires de ce type qui

 24   existaient dans d'autres zones de la Yougoslavie.

 25   Q.  Je voudrais maintenant vous reporter à l'onglet 93, liste 65 ter

 26   4760.1.

 27   [Diffusion de la cassette vidéo]

 28   Mme BIERSAY : [interprétation] Quelques instants, Monsieur le Président, je


Page 4739

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 4740

  1   vous prie.

  2   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

  3   Mme BIERSAY : [interprétation]

  4   Q.  Avant de passer cette vidéo, je voudrais vous poser quelques questions

  5   en vous demandant qui coordonnait l'organisation des volontaires du SRS et

  6   qui était envoyé dans les autres zones ? Qui était responsable de cela ?

  7   R.  Voyez-vous, au QG du parti à Belgrade, il y avait un état-major de

  8   Crise pendant la guerre. C'est dans cet état-major de Crise qu'il y avait

  9   Zoran Drazilovic et M. Petkovic. M. Petkovic était le chef de l'état-major

 10   de Crise, je pense, et c'est lui qui coordonnait les TO. Il organisait les

 11   volontaires.

 12   Q.  Pourriez-vous expliquer devant la Chambre comment ils se déplaçaient de

 13   Belgrade vers leurs lieux de déploiement ?

 14   R.  Tout d'abord, on se rendait à Belgrade, à l'état-major de Crise,

 15   ensuite on vous créait un dossier, c'est-à-dire si vous étiez nouveau. Ils

 16   prenaient note de votre identité, de toutes vos coordonnées, vos

 17   caractéristiques physiques, tatouages, taches de naissance, et cetera. Et à

 18   partir de là, vous alliez à Bubanj Potok, qui est une caserne près de

 19   Belgrade, et c'est là que nous suivions un court entraînement. Nous

 20   recevions nos équipements et nos armes. Et puis, de là - je suis parti deux

 21   fois de ce même endroit - on se rendait à l'aéroport, et puis jusqu'à

 22   l'aéroport de Banja Luka, Bihac. Enfin, c'est comme ça qu'on se déplaçait.

 23   Quelquefois aussi les déplacements vers l'Herzégovine se faisaient en car.

 24   Q.  Bien. Onglet 93, donc la pièce 4760.1 de la liste 65 ter. J'ai

 25   l'intention de vous montrer cette petite vidéo, et vers la fin je

 26   m'arrêterai et je vous demanderai si vous reconnaissez des personnes.

 27   [Diffusion de la cassette vidéo]

 28   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]


Page 4741

  1   "Eh bien, bonne chance. Peut-être qu'un bon médiateur dans ce conflit

  2   serait, si pas Arkan, en tout cas le Dr Vojislav Seselj, président du SDS.

  3   Il n'est pas encore arrivé à Mostar, mais aujourd'hui il était sur le mont

  4   Romanija.

  5   Le journaliste : Le premier jour du référendum, le Dr Vojislav Seselj, le

  6   Vojvoda chetnik serbe en Republika Srpska, était arrivé. Dès qu'il est

  7   arrivé, il a traversé la Drina, il est allé voir nos défenseurs sur le

  8   front. Ensuite, il est allé à Knezina, un village et un monastère en

  9   Romanija serbe libre, et il y a également eu serment des nouveaux Vojvoda

 10   serbes.

 11   Un nom inconnu : Numéro d'ordre 124. C'est le seul Vojvoda chetnik qui

 12   s'engage dans le combat actuel pour la libération du peuple serbe, fidèle à

 13   la tradition des Chetniks serbes, et pour grandes réalisations, exploits de

 14   guerre, héros reconnu par les commandants chetniks, je prononce…

 15   Le journaliste : Romanija, une montagne qui ne parle pas à ses ennemis, se

 16   réjouit de la prise de serment de 18 nouveaux Vojvoda, et serment qui n'a

 17   pas été violé depuis 50 ans.

 18   Le Vojvoda : Je jure fidélité au Voïvodat chetnik serbe…"

 19   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 20   Mme BIERSAY : [interprétation]

 21   Q.  Petite pause ici, Monsieur Stoparic. Je vous renvoie à ce que vous

 22   aviez dit au paragraphe 5, vous avez indiqué qu'il y avait 19 Vojvoda du

 23   SRS et vous avez expliqué ce qu'il fallait faire pour devenir un Vojvoda,

 24   il fallait que vous ayez 500 volontaires sous vos ordres. Est-ce que ceci

 25   correspond à la proclamation ou le serment des Vojvoda que vous avez décrit

 26   au paragraphe 5 de votre déclaration?

 27   R.  J'ai entendu ce chiffre, 500, de la bouche de Kameni quand lui-même est

 28   devenu un Vojvoda. Il disait qu'il fallait avoir au moins 500 volontaires


Page 4742

  1   auxquels il pouvait faire appel à tout moment. Mais Seselj n'a pas donné ce

  2   titre uniquement à des commandants. Parfois à des politiciens, parfois à

  3   des gens de l'état-major de Crise, y compris Ljubisa Petkovic et le

  4   président actuel de la Serbie, Tomislav Nikolic. Tous les gens qui avaient

  5   ce titre n'avaient pas fait la guerre. Certains n'auraient pas survécu à

  6   deux minutes de combat.

  7   Et selon Seselj, ils méritaient ce titre à d'autres titres. Et sur la

  8   photo, d'ailleurs, on voit Kameni.

  9   Q.  Vous parlez de cliché à 1 minute, 27 secondes. Mais où se trouve Kameni

 10   sur cette image ?

 11   R.  Au centre. C'est lui qui tient le cierge plus bas que les autres

 12   hommes. Avec des cheveux clairs. Pas celui avec des cheveux foncés, celui

 13   avec les cheveux plus clairs.

 14   Q.  Est-ce qu'il a été nommé Vojvoda avant ou après Vukovar ?

 15   R.  Pas avant Vukovar. Non, non, non. Personne n'avait eu ce titre avant.

 16   C'était après. Et d'abord, il fallait qu'ils méritent cet honneur.

 17   Mme BIERSAY : [interprétation] Est-ce que l'on peut poursuivre le film.

 18   [Diffusion de la cassette vidéo]

 19   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 20   "Seselj : Je m'engage devant Dieu et Saint-Sava.

 21   L'homme répète la chose.

 22   Seselj : Que je combattrai avec toute ma puissance pour la liberté du

 23   peuple serbe.

 24   Le Vojvoda répète le serment.

 25   Seselj : Et la restauration d'un Etat serbe unifié dans les Balkans qui

 26   reprendra tous les territoires serbes.

 27   Le Vojvoda répète le serment.

 28   Seselj : Que Dieu me vienne en aide.


Page 4743

  1   Amen.

  2   Le prêtre : Bonne chance et que Dieu vous prête vie.

  3   Le journaliste : On peut savoir qu'effectivement ce sera le cas. Ce

  4   titre de Vojvoda a été donné à différents héros : Zdravko Abramovic;

  5   Branislav Vakic; Srecko Radovanovic; Slavko Crnic; Nedeljko Vidakovic --

  6   Cele; Milika Dacevic, Ceko; Tomislav Nikolic; Milan Lancuzanin, Kameni;

  7   Zoran Drazinovic, Cica; Jovo Ostojic; Ljubisa Petkovic; Todor Lazic; Mirko

  8   Blagojevic; Dragan Cvetkovic; et Branislav Gavrilovic, Brne."

  9   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 10   Mme BIERSAY : [interprétation]

 11   Q.  A part Kameni, avez-vous reconnu d'autres personnes dans cette vidéo ?

 12   R.  Oui, beaucoup. A part Seselj, Drazilovic, Petkovic, Nikolic -- enfin,

 13   ça, c'est ceux dont je connais le nom. Le Vojvoda Manda, puis il y avait

 14   des gens de Sarajevo. Je les ai pratiquement tous reconnus. Simplement, je

 15   ne peux pas vous donner leurs noms pour l'instant. Peut-être que ce sont

 16   des gens que j'ai revus dans différents théâtres de guerre. D'autres sont

 17   passés souvent à la télévision. Blagojevic était là. Mirko de Bijeljina.

 18   Puis Branislav Lakic de Nis. J'en ai reconnu beaucoup. Mais ils portaient

 19   de longues barbes à l'époque et ils se ressemblent un peu sur ces photos.

 20   Q.  Et en ce qui concerne les opérations de Vukovar, quelles sont les

 21   personnes que vous avez reconnues ayant participé à cette opération ?

 22   R.  Kameni. Enfin, il y avait pas mal de Vojvoda qui ont dit avoir été à

 23   Vukovar. Peut-être. Mais pas dans mon secteur. Même le Vojvoda de Nis était

 24   également à Vukovar. Mais parmi tous ces radicaux, Kameni était le

 25   personnage principal à mes yeux. Il était mon commandant, mais il était

 26   également, je trouve, un homme bien, en ce qui me concerne en tout cas. Je

 27   le connaissais mieux.

 28   Q.  Bien.


Page 4744

  1   Mme BIERSAY : [interprétation] Nous demandons maintenant de verser au

  2   dossier la pièce 4760.1 de la liste 65 ter.

  3   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. C'est reçu et marqué aux fins

  4   d'identification.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce P1732.

  6   Mme BIERSAY : [interprétation] Je vois l'heure.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Madame Biersay.

  8   Monsieur Stoparic, ceci est le moment où nous prenons notre première pause

  9   et nous reprendrons à 11 heures. L'huissière va vous escorter, vous

 10   accompagner hors du prétoire.

 11   [Le témoin quitte la barre]

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est levée.

 13   --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

 14   --- L'audience est reprise à 11 heures 00.

 15   Mme BIERSAY : [interprétation] Messieurs les Juges, en attendant que le

 16   témoin nous rejoigne, j'ai cru comprendre que le Greffe a reçu à présent le

 17   CD contenant la séquence vidéo de la pièce ayant reçu une cote provisoire,

 18   pièce 1731, donc je pense que nous pouvons lui attribuer une cote à

 19   présent.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Eh bien, ce sera donc la pièce 1731,

 21   n'est-ce pas, Monsieur le Greffier.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui.

 23   Mme BIERSAY : [interprétation] C'est exact.

 24   [Le témoin vient à la barre]

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Veuillez continuer, Madame

 26   Biersay.

 27   Mme BIERSAY : [interprétation] Merci.

 28   Q.  Monsieur Stoparic, j'espère prendre environ 20 minutes pour mes


Page 4745

  1   questions. Je vais parler brièvement de Velepromet, et ensuite je passerai

  2   au sujet des Skorpions, et je vous montrerai une séquence vidéo pour

  3   terminer. Voilà ce que je prévois de faire.

  4   Dans votre déclaration de 2003 au paragraphe 38, vous dites que vous n'avez

  5   pas entendu parler d'une réunion qui a eu lieu à Velepromet à laquelle

  6   Goran Hadzic a participé. Ma question est la suivante : est-ce que vous

  7   avez eu l'occasion de voir des personnes liées au gouvernement de SBSO à

  8   Velepromet, en général ?

  9   M. ZIVANOVIC : [interprétation] La question est vague.

 10   Mme BIERSAY : [interprétation] Voyons d'abord si le témoin a compris ma

 11   question, puis si nécessaire j'apporterai des éclaircissements.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je pense que si vous étiez plus

 13   précise, la question deviendrait directrice.

 14   Donc continuez.

 15   Mme BIERSAY : [interprétation]

 16   Q.  Donc, Monsieur Stoparic, est-ce que vous avez reçu des représentants de

 17   la SBSO et du gouvernement de SBSO à Velepromet ?

 18   R.  Les commandants de la Défense territoriale et autres. Mais pour les

 19   représentants officiels du gouvernement, je ne les connaissais pas tous.

 20   J'aurais reconnu Goran Hadzic si je l'avais vu. Filipovic, Grahovac aussi,

 21   et un autre homme que j'aurais reconnu, j'ai oublié son nom maintenant.

 22   Je me suis rendu à Velepromet pour obtenir des cigarettes, des

 23   autorisations de circulation dans les zones de combat actives, et aussi des

 24   autorisations de quitter Vukovar, mais je ne souviens vraiment pas avoir vu

 25   ces personnes-là.

 26   Q.  Y avait-il un bureau du gouvernement de la SBSO à Velepromet ?

 27   R.  Pendant la guerre, je ne sais pas. Il y avait des entrepôts là-bas. Des

 28   soldats, la TO. Probablement une administration civile, également. Mais à


Page 4746

  1   savoir s'il y avait un gouvernement ou une administration au niveau de la

  2   ville, je dirais qu'il y avait plusieurs personnes. Il y avait même une

  3   cuisine. Une sorte d'administration, oui, mais je ne pourrais pas vous dire

  4   à quel niveau elle était. Alors, je parle de la période couvrant les

  5   activités de combat. Je ne peux pas vous en dire davantage pour après.

  6   Q.  Merci, Monsieur Stoparic. Alors, j'aimerais passer maintenant à la

  7   période que vous avez passée à Djeletovci avec les Skorpions. Est-ce que

  8   vous pourriez décrire aux Juges de la Chambre très brièvement à quelle

  9   force armée appartenait les Skorpions ? Je sais que l'historique est

 10   complexe, mais si vous pourriez résumer les choses.

 11   R.  D'un point de vue officiel, les Skorpions faisaient partie de l'armée

 12   de la République de Krajina serbe. Le commandant était le général

 13   Loncarevic. Il y avait également des forces de sécurité de Serbie qui sont

 14   arrivées. Un entraînement avait lieu là-bas. Il y avait des structures de

 15   sûreté, la police, et nous collaborions également avec l'industrie

 16   pétrolière de Krajina. Un jour j'ai reçu une enveloppe de leur part

 17   contenant des marks allemands, puis de l'argent est allé à Belgrade en

 18   dinars yougoslaves, et j'ai aussi reçu de l'argent d'une source tierce, le

 19   commandant. Parfois, il me donnait du pétrole, parfois des marks allemands.

 20   C'était compliqué.

 21   Alors, la mission principale à la base de Djeletovci était de tenir nos

 22   positions. Le fleuve Bosut formait une frontière naturelle entre la région

 23   de l'époque de SBSO et le reste de Croatie, et nous protégions le terminal

 24   pétrolier qui se trouvait là-bas. Nos missions secondaires consistaient à

 25   notre mouvement vers la Bosnie-Herzégovine. Mais après le démantèlement des

 26   Skorpions, nous nous sommes réunis à nouveau et nous sommes allés au Kosovo

 27   même.

 28   Q.  Alors j'aimerais attirer votre attention sur le paragraphe 72 de votre


Page 4747

  1   déclaration, où vous nous parlez des Tigres étant basés à Erdut. Les Bérets

  2   rouges et la JSO, quant à eux, se trouvaient à Ilok, et les Skorpions se

  3   trouvaient à Djeletovci. Qui était responsable des Tigres ?

  4   R.  Arkan. La JSO se trouvait à Ilok, dans une cave à vins vers Sid, qui

  5   s'appelait Pajzos, qui se trouvait sur la frontière entre la Serbie et la

  6   Croatie. Pajzos se trouvait sur la frontière, donc une partie de Pajzos

  7   était en Serbie et une autre partie en Croatie.

  8   Q.  Monsieur Stoparic, pourriez-vous répéter la dernière partie de votre

  9   réponse pour que cela soit consigné au compte rendu.

 10   Vous parliez de Pajzos étant partiellement en Serbie et partiellement

 11   en Croatie, car Pajzos se trouvait sur la frontière.

 12   R.  C'est là que se trouvaient les membres de la JSO. Ils s'appelaient JSO

 13   à ce moment-là, mais ils ont changé de nom plusieurs fois. Leur commandant

 14   était Frenki Simatovic, et ils dépendaient directement de l'administration

 15   de la Sûreté d'Etat. Ils faisaient partie de la Sûreté d'Etat.

 16   Q.  Au paragraphe 72, vous nous dites également :

 17   "Nous étions tous directement le long de la frontière avec la Serbie."

 18   Pourquoi est-ce que le déploiement s'était concentré le long de la

 19   frontière avec la Serbie ?

 20   R.  En fait, ce n'est pas moi qui ai observé cela. Je l'ai entendu dire

 21   d'autres personnes. Je dirais que c'est parce qu'on peut toujours commencer

 22   une action, partir et revenir rapidement. Leurs actions n'étaient

 23   probablement pas publiques.

 24   Q.  Vous dites "partir et revenir rapidement", que voulez-vous dire par là

 25   ?

 26   R.  Parce qu'on ne pouvait pas dire que l'unité appartenait à la SBSO. Ils

 27   se trouvaient en Serbie, et officiellement elle ne prenait pas part aux

 28   activités de guerre. Voilà pourquoi ils se trouvaient le long de la


Page 4748

  1   frontière.

  2   Ilok est une ville de Croatie, et de l'autre côté du fleuve se trouve Backa

  3   Palanka en Serbie. Et les Skorpions sont allés un petit peu plus en

  4   profondeur là-bas.

  5   Q.  Monsieur Stoparic, est-ce que vous avez rencontré Milan Martic ?

  6   R.  Oui, deux fois. A deux moments différents. Je l'ai rencontré une

  7   première fois lorsqu'il est venu nous rendre visite. Nous étions dans une

  8   base improvisée près de Gospic. Et la deuxième fois, c'était près de Livno,

  9   dans un village. Près du mont Dinara, dans cette région. C'est là que je

 10   l'ai vu pour la deuxième fois.

 11   Q.  Merci. J'aimerais à présent passer une séquence vidéo et vous demander

 12   si vous reconnaissez les intervenants. Alors, je passe à l'onglet 98, qui

 13   porte le numéro 4990.2 de la liste 65 ter. Et j'aimerais que l'on passe la

 14   partie allant de 1 heure, 1 minute, 1 seconde, à 1 heure, 2 minutes et 52

 15   secondes.

 16   [Diffusion de la cassette vidéo]

 17   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 18   Mme BIERSAY : [interprétation] Nous avons donné un compte rendu de cette

 19   vidéo et je voudrais confirmer avec les interprètes qu'ils ont bien reçu ce

 20   compte rendu.

 21   L'INTERPRÈTE : Les interprètes de la cabine anglaise disent qu'ils viennent

 22   de le trouver.

 23   Mme BIERSAY : [interprétation] Alors je demanderais de repasser cette

 24   vidéo, s'il vous plaît.

 25   [Diffusion de la cassette vidéo]

 26   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 27   "-- des questions concrètes : est-ce qu'Arkan est venu à la session

 28   du gouvernement où il a été question du ministre de la Défense ? -- sont-


Page 4749

  1   ils venus ? Qui l'a fait venir ? Est-ce qu'ils sont venus pour se battre ou

  2   est-ce que c'est pour établir l'ordre public ?

  3   "Réponse : C'est plusieurs questions, mais je vais répondre. Il y a eu

  4   Arkan de présent à la session du gouvernement, en effet. Et avant le début

  5   de la séance, j'ai demandé à ce qu'à cette session il n'y ait que les

  6   ministres à débattre de questions importantes, et le président du

  7   gouvernement, le premier ministre m'a dit que M. Raznjatovic est membre du

  8   gouvernement. Alors j'ai demandé est-ce qu'il était chargé de l'Intérieur

  9   ou de la Défense. On a plaisanté un peu. Il a dit : Lui il est conseiller

 10   spécial du président Hadzic. Et ça a été confirmé par le premier ministre

 11   Hadzic. Il a donc confirmé qu'il avait le droit d'être présent à la

 12   session. Il ne me restait rien d'autre que de tomber d'accord. Et pour ce

 13   qui est des unités des volontaires, ils sont tous les bienvenus dans la

 14   RSK, ils n'ont qu'à se battre -- tenu de leur importance --"

 15   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 16   L'INTERPRÈTE : Interrompu.

 17   Mme BIERSAY : [interprétation]

 18   Q.  Et l'image qui est à l'écran, Monsieur Stoparic, est-ce que ce visage

 19   vous est familier ? Est-ce que vous reconnaissez cet homme ?

 20   R.  C'est M. Milan Martic.

 21   Mme BIERSAY : [interprétation] J'aimerais demander l'admission du document

 22   4990.2 [comme interprété] de la liste 65 ter.

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic.

 24   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je soulève une objection car il n'y a pas

 25   de lien qui ait été établi entre la déclaration de M. Martic et les

 26   éléments de preuve apportés par le témoin. Et nous pensons que reconnaître

 27   l'homme ne suffit pas pour admettre le document.

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Biersay.


Page 4750

  1   Mme BIERSAY : [interprétation] Bien, nous estimons que le témoin a parlé

  2   des Tigres d'Arkan lorsqu'il se trouvait à Djeletovci en 1993. Et ici, nous

  3   voyons Milan Martic, un homme qu'il a reconnu et qu'il a rencontré, et qui

  4   nous parle du lien qui existe entre Goran Hadzic et Arkan. Donc, nous

  5   pensons que cela est directement pertinent et directement lié aux sujets

  6   couverts par sa déclaration.

  7   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Mais il n'y a pas de lien qui ait été

  8   établi entre les éléments de preuve apportés par ce témoin et la

  9   déclaration sur les relations qui existaient entre Goran Hadzic et Milan

 10   Martic, en tout cas dans la vidéo.

 11   [La Chambre de première instance se concerte]

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Objection accordée.

 13   Madame Biersay, vous devrez verser cette pièce par l'intermédiaire d'un

 14   autre témoin.

 15   Mme BIERSAY : [interprétation] Je vous comprends, Monsieur le Juge. Merci.

 16   Q.  Monsieur Stoparic, de 1991 à 1997, vous avez fait partie des

 17   différentes forces armées de l'ex-Yougoslavie. Dans votre expérience de

 18   guerre, quelle serait la pondération de Vukovar ?

 19   R.  Eh bien, ce n'est pas un secret. Ça a été la première vraie expérience.

 20   Tovarnik était ma première action, mais la pondération ne serait pas la

 21   même. Vukovar était bien pire. Lorsque je suis allé en Bosnie, et que les

 22   commandants locaux ont appris que j'étais un vétéran du théâtre de guerre

 23   de Vukovar, ils m'ont tous traité avec un grand respect. Vukovar était bien

 24   pire. Même au Kosovo, pendant les bombardements de l'OTAN, je n'ai pas eu

 25   l'impression que cela pouvait être comparable à Vukovar. En tout cas, c'est

 26   mon impression.

 27   Mme BIERSAY : [interprétation] L'Accusation aimerait verser le document

 28   5977 de la liste 65 ter, la déclaration de 2003, ainsi que le document


Page 4751

  1   5976, qui est l'addendum.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, Monsieur Zivanovic.

  3   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je soulève une

  4   objection parce que cette déclaration n'est pas complète --

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Laquelle, la première ?

  6   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, la première.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien.

  8   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Avec la cote 5977. En effet, le témoin a

  9   apporté des ajouts à sa déclaration le 10 décembre 2003. Il a apporté de

 10   nombreuses corrections, de nombreux éclaircissements sur cette déclaration,

 11   et 20 paragraphes, environ, ont été corrigés.

 12   Et l'Accusation n'a pas abordé cela. Dans notre onglet, l'onglet de la

 13   Défense, c'est l'onglet numéro 4. Je n'ai que la version expurgée de ces

 14   ajouts, et je ne sais pas si le témoin a signé ces ajouts…

 15   Mme BIERSAY : [interprétation] Alors pour le premier point sur les

 16   corrections et les ajouts, le témoin est revenu sur toutes les corrections

 17   dans le document 5976 de la liste 65 ter, qui ont été versées ensemble dans

 18   l'affaire Stanisic et Simatovic, sans verser les documents que Me Zivanovic

 19   a abordés. Cela n'a pas été signé par le témoin, d'après notre dossier, et

 20   il a apporté de nouvelles corrections à la déclaration dans ce prétoire.

 21   Est-ce qu'il y a d'autres sujets qui ont été abordés dans les déclarations

 22   ultérieures ? Oui. Mais, en fait, nous n'essayons pas d'obtenir ces

 23   éléments d'information supplémentaires. Sa déclaration, pour nous, est

 24   fidèle et précise, et il l'a décrite à la Chambre de première instance lors

 25   de sa déposition. L'ajout a également été abordé, mais il provenait de

 26   l'affaire Stanisic et Simatovic.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Alors, le reste semble être des

 28   sujets qui seront éventuellement abordés lors du contre-interrogatoire.

 


Page 4752

  1   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, je les utiliserai.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Alors, nous admettons le document.

  3   Quelle serait sa cote ?

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] La déclaration 5977 de la liste 65 ter

  5   reçoit la cote P1733.

  6   Et l'addendum, 5976 de la liste 65 ter reçoit la cote P1734.

  7   Mme BIERSAY : [interprétation] Ceci conclut mon interrogatoire principal,

  8   Messieurs les Juges.

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Madame Biersay.

 10   Maître Zivanovic, lorsque vous utiliserez les corrections ou l'autre

 11   déclaration, j'aimerais vous rappeler à cet égard que la Chambre n'a pas

 12   pour habitude d'admettre d'autres déclarations. Donc, si vous l'utilisez,

 13   vous devrez en donner lecture pour que cela soit consigné au compte rendu.

 14   Donc les questions que vous poserez devront reprendre ce qui se trouve dans

 15   les corrections, vous devrez poser directement la question au témoin et il

 16   répondra.

 17   Veuillez continuer.

 18   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. Je suivrai vos

 19   instructions.

 20   Contre-interrogatoire par M. Zivanovic : 

 21   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Stoparic. Je m'appelle Zoran

 22   Zivanovic. Je suis le conseil de la Défense de M. Hadzic dans ce procès.

 23   Je vais commencer par la partie que nous venons d'évoquer. Un document de

 24   l'Accusation daté du 10 décembre 2003, intitulé annexe à votre déclaration

 25   du 21 au 24 décembre -- novembre 2003. C'est le document portant la

 26   référence 1D322.

 27   Je n'ai que la version anglaise. Je ne sais pas s'il y a eu traduction.

 28   Alors, j'aimerais vous poser la question suivante : vous souvenez-vous


Page 4753

  1   qu'en décembre 2003 -- vous souvenez-vous avoir parlé à des représentants

  2   du bureau du Procureur au sujet de la déclaration que vous aviez donnée du

  3   21 au 24 novembre 2003, et avez-vous eu l'occasion de la relire ?

  4   Vous souvenez-vous avoir parlé aux représentants du bureau du Procureur et

  5   avez-vous eu l'occasion de corriger ou d'éclaircir certains éléments de

  6   votre déclaration ?

  7   R.  Je ne me souviens pas de toutes les conversations bien précisément,

  8   mais si vous descendez dans la page, je pourrais voir le nom des enquêteurs

  9   et vous répondre. Je pense que cela me rafraîchira la mémoire de pouvoir

 10   voir le nom des enquêteurs sur le document.

 11   Q.  Gerry Sexton et Dorian Barag sont les noms repris. Est-ce que vous vous

 12   souvenez de ces personnes et de cet entretien ? Je ne vais pas vous poser

 13   des questions sur tous les paragraphes. Je vais me contenter d'aborder

 14   certains points qui sont intéressants pour nous et qui portent sur votre

 15   déclaration.

 16   Alors, tout d'abord, ce qui m'intéresse, ce sont les corrections apportées

 17   au paragraphe 4. Je vais vous en donner lecture en anglais et vous

 18   entendrez la traduction --

 19   L'INTERPRÈTE : Les voix se sont chevauchées et les interprètes n'ont pas

 20   entendu le début de la lecture.

 21   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

 22   Q.  "-- exactement lorsque le bureau de la TO de SBSO à Sid a été ouvert,

 23   mais je suis sûr que cela a eu lieu après mai 1991 et les événements de

 24   Borovo Selo."

 25   Mme BIERSAY : [hors micro]

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est probablement ma faute, Madame

 27   Biersay.

 28   Mme BIERSAY : [interprétation] Ah, ce micro semble fonctionner.


Page 4754

  1   Alors je me suis levée pour vous informer que j'ai une version en B/C/S de

  2   ce document, et il s'agit en fait d'un mémo interne, c'est la raison pour

  3   laquelle il y a eu expurgation. Il ne s'agissait pas d'une déclaration du

  4   témoin revue par le témoin. Ce document avait été rédigé à des fins

  5   internes.

  6   Je serais heureuse d'en donner une copie à Me Zivanovic ou au témoin, si

  7   cela peut les aider à comprendre le document dans leur langue maternelle.

  8   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, cela nous aiderait grandement.

  9   Mme BIERSAY : [interprétation] Alors, peut-être que nous pouvons la donner

 10   au témoin.

 11   Je crois que c'est bien ce document-là, c'est en B/C/S - je ne comprends

 12   pas cette langue - mais je pense que c'est le bon document.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Paragraphe 4, avez-vous dit ?

 14   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

 15   Q.  Oui.

 16   R.  Vous voulez que je vous explique ce que j'ai fait ?

 17   Q.  En d'autres termes, puisque ça diffère du paragraphe 4 de votre

 18   déclaration, parce que je pense que là-bas vous avez dit que ce bureau

 19   avait été ouvert au mois de mai 1991.

 20   Et là, vous avez dit que ça s'est fait après les événements du mois

 21   de mai, donc ça pourrait être un autre mois. C'est ce que je voulais vous

 22   demander.

 23   R.  Ça pourrait être le cas. J'ai appris qu'il y avait ce bureau, et j'en

 24   suis convaincu, après le mois de mai seulement. C'est là la divergence. Je

 25   ne connais pas la date exacte. Je l'ai appris après le mois de mai. Ça peut

 26   être le mois de juin, le mois de juillet. Voilà.

 27   Q.  Au paragraphe 6 de votre déclaration, vous expliquez justement ce que

 28   vous avez évoqué, pas dans le document qu'on vient de vous donner, mais au


Page 4755

  1   paragraphe 6 de votre déclaration. Il s'agit de la pièce 5997 de

  2   l'Accusation.

  3   Ce qui m'intéresse ici -- puisque vous avez expliqué qu'on vous avait

  4   demandé votre livret militaire et on vous a demandé si vous aviez eu une

  5   affectation de prévue pour le temps de guerre et qu'on ne vous aurait pas

  6   accepté dans ce cas-là pour faire de vous un volontaire; est-ce bien exact

  7   ?

  8   R.  Oui, c'est exact.

  9   Q.  Est-ce que vous pouvez me dire partant de quoi vous savez cela ?

 10   Comment savez-vous que vous n'auriez pas été accepté comme volontaire ?

 11   Est-ce qu'ils vous l'ont dit ?

 12   R.  Je suis venu au bureau. Je n'avais pas pris mon livret militaire mais

 13   ma carte d'identité, et on m'a fait revenir sur mes pas pour apporter mon

 14   livret militaire. Et cet homme-là m'a dit que la JNA, l'armée populaire

 15   yougoslave, ne savait pas quand est-ce que je pourrais être convoqué en

 16   tant que réserviste. Si j'avais eu une affectation pour le cas de guerre,

 17   ils pouvaient fort bien me convoquer, m'appeler sous les drapeaux, et donc

 18   ils n'avaient pas le droit de m'engager comme volontaire. Et quand ils ont

 19   vu que je n'étais pas prévu dans les effectifs de réserve, on m'avait

 20   accepté pour faire partie des volontaires.

 21   Q.  Autre chose. Partant de votre expérience et de celle des autres que

 22   vous aviez eu l'occasion de connaître, était-ce là un préalable ou une

 23   condition nécessaire pour faire de vous un volontaire, c'est-à-dire d'avoir

 24   fait votre service militaire auparavant ?

 25   R.  A l'époque, dans la TO de la SAO SBSO, je vais vous expliquer les

 26   choses comme elles étaient faites.

 27   Ils étaient tout à fait professionnels dans leur approche. Ils ont demandé

 28   le livret militaire pour respecter les dispositions légales. Après, ils ne


Page 4756

  1   demandaient plus rien. Lorsqu'on faisait partie des volontaires de Seselj,

  2   on ne demandait pas si on avait fait notre service militaire ou si on

  3   l'avait fait en partie. Vous savez comment les choses évoluaient. Mais là

  4   où il y avait ce Filipovic, lui avait demandé à ce que ce soit confirmé. Si

  5   on avait eu une affectation pour temps de guerre, on ne pouvait pas être

  6   volontaire parce qu'on ne savait pas quand est-ce qu'on pourrait être

  7   convoqué par l'armée. Et moi je n'avais pas eu d'affectation militaire pour

  8   un cas de guerre éventuel.

  9   Q.  En d'autres termes, quand vous nous dites qu'ultérieurement ils ont

 10   commencé à accepter le tout-venant, c'est-à-dire même ceux qui n'avaient

 11   pas fait leur service militaire, ça s'est fait ultérieurement, en 1992 et

 12   plus tard ?

 13   R.  Oui, mais pas dans cette région. Après la chute de Vukovar, il n'y a

 14   plus eu de guerre là-bas, exception faite de la Slavonie occidentale. Mais

 15   moi je ne suis pas allé là-bas. Je ne sais pas. Mais par la suite, il n'y a

 16   pas eu de contrôle d'effectué. Mais moi j'ai dû rentrer chez moi pour aller

 17   chercher mon livret militaire.

 18   Q.  Je vais vous demander à présent de vous pencher sur ce que vous avez

 19   déclaré au paragraphe 7. C'est la même déclaration, paragraphe 7 cette

 20   fois-ci, où il est dit que votre statut de volontaire a duré une semaine,

 21   et qu'après cela vous avez été convoqué par l'armée, par la JNA. Et vous

 22   étiez censé vous présenter dans les rangs de la 1ère Brigade de la Garde.

 23   Vous avez dit que c'était non pas la Brigade de la Garde, mais celle de

 24   Kraljevo.

 25   R.  Non, ce n'est pas ce que j'ai rectifié.

 26   Q.  Excusez-moi. J'ai peut-être mal compris. Veuillez expliquer, s'il vous

 27   plaît.

 28   R.  Oui. Excusez-moi. Vous voulez que je réponde ?


Page 4757

  1   Q.  Oui. Attendez un peu la fin de l'interprétation.

  2   R.  J'ai parlé d'une semaine, mais il se peut que cela ait fait dix jours.

  3   Mais j'ai dit une semaine. Pendant que j'étais membre de la TO de la SAO

  4   SBSO, le commandant en chef, c'était cette Brigade de Kraljevo. Alors

  5   Tovarnik, Ilaca et Djeletovci. Ensuite, on nous a ramenés à Lipovaca, où on

  6   avait commencé à constituer une unité pour être envoyés à Vukovar. Et ce M.

  7   Grahovac est à ce moment-là venu à nous. Oui, je pense que c'était lui. Il

  8   nous a dit que cette Brigade de Kraljevo ne serait plus là, mais que

  9   c'était celle de Belgrade qui allait venir ici, une Brigade de la Garde. Et

 10   ceux qui voulaient continuer à faire la guerre seraient désormais sous

 11   l'autorité de la Brigade de la Garde venue de Belgrade. On a consigné sur

 12   une liste nos noms et on a dit qu'on serait convoqués. C'est ainsi que j'ai

 13   été à Vukovar. Après la guerre, effectivement, il y a eu cette convocation

 14   qui a été apportée par le service d'estafette. J'ai fait partie de cette

 15   unité de Leva Supoderica sous le commandement de la 1ère Brigade de la

 16   Garde. Autrement, on aurait été considérés comme étant des simples

 17   réservistes de la Brigade de la Garde.

 18   Q.  Je vais vous demander de tirer quelque chose au clair. Quand vous avez

 19   dit que votre statut de volontaire n'a duré rien qu'une semaine, quelle est

 20   la période que vous prenez en considération ? Est-ce le moment où vous vous

 21   êtes porté volontaire au niveau de la TO de Sid et la semaine qui a suivi

 22   ou est-ce que vous prenez une période tout à fait autre ?

 23   R.  Je me suis référé à la date où on est allé à Tovarnik pour enchaîner

 24   sur Djeletovci. Donc c'est trois jours après ma présentation et une

 25   obtention d'armes. Pendant les quelques premiers jours, on avait constitué

 26   des pelotons. On a nettoyé les armes qui nous ont été données. Donc j'étais

 27   dans une espèce de baraquement temporaire à Sid. Je n'ai pas compté ces

 28   jours-là. Alors j'ai compté à partir du moment où on a été à Tovarnik pour


Page 4758

  1   aller à Djeletovci. C'est la semaine en question.

  2   Q.  Pendant cette période de temps, lorsqu'il y a eu cette action de

  3   conduite au niveau de Tovarnik, parlant de ces journées-là, vous, votre

  4   unité, vous avez été subordonnés à cette Brigade de Kraljevo, n'est-ce pas

  5   ?

  6   R.  Je crois que c'était une Brigade motorisée de Kraljevo. Il devait y

  7   avoir un numéro devant son appellation, mais je ne m'en souviens pas.

  8   Oui, c'est le cas. C'étaient leurs officiers à eux qui avaient été chargés

  9   du commandement.

 10   Q.  Mais c'était une unité de la JNA, en fait ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Je vous pose la question parce qu'en page 6 il y a eu une petite erreur

 13   de faite. Vous avez dit, non pas Kraljevacka, mais Kraljevska. Ce qui veut

 14   dire, non pas Brigade de Kraljevo, mais "Brigade royale".

 15   Dites-moi maintenant : avant que de partir pour Vukovar, vous avez été

 16   convoqué officiellement par la JNA et vous étiez censé vous présenter dans

 17   les rangs de cette Brigade de la Garde, n'est-ce pas ?

 18   R.  Je ne me souviens pas de la date. J'étais déjà à Vukovar. Mais après la

 19   bataille de Vukovar, quand je suis rentré à la maison, mon frère m'a montré

 20   le papier qui était arrivé à la maison. Moi j'avais signé une espèce

 21   d'imprimé, parce que Grahovac avait demandé qu'on signe un imprimé. Il nous

 22   a donc dit : Vous n'êtes pas de la chair à canon. Vous êtes là à titre

 23   juridiquement justifié. Vous savez, les volontaires et les réservistes ont

 24   le même statut. Mais les statuts, les droits et les obligations des uns et

 25   des autres sont les mêmes.

 26   Q.  Et, en fait, c'est ce que vous nous avez dit dans l'avenant à votre

 27   déclaration. Là, nous allons revenir au 1D322 à cet effet. C'est le papier

 28   qu'on vous a donné tout à l'heure en langue serbe. On dit que vous avez été


Page 4759

  1   convoqué par un service d'estafette. Cette convocation ou appel sous les

  2   drapeaux, vous l'avez obtenu via service d'estafette.

  3   Est-ce que vous pouvez en prendre lecture, je vous prie ?

  4   R.  Quel paragraphe ?

  5   Q.  Paragraphe 7.

  6   R.  Ici on dit par la poste.

  7   Q.  Ici on dit service d'estafette.

  8   R.  Oui, dans Sid et dans les autres grandes villes, il y a un service de

  9   distribution par estafette. Ce n'est pas confié à la poste, parce que ce

 10   n'est pas tout à fait fiable.

 11   Q.  Alors vous nous avez dit que vous avez eu les mêmes droits et

 12   obligations que tous les autres réservistes de la JNA, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui. Et mon salaire a été versé par la JNA pour la période temps que

 14   j'y ai passée.

 15   Q.  Je crois que vous avez indiqué qui vous a donné ce salaire. Je crois

 16   que vous aviez parlé de la caserne de la 1ère Brigade de la Garde. Il me

 17   semble que c'est évoqué au point 23, dernier paragraphe. Et là, vous nommez

 18   même l'officier qui vous a distribué vos salaires. Dernier paragraphe. Le

 19   paragraphe 23 a plusieurs alinéas. C'est le dernier des alinéas de ce

 20   paragraphe.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, Madame Biersay.

 22   Mme BIERSAY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 23   Je me suis levée parce que je suis quelque peu perdue s'agissant du

 24   document dont on est en train de parler. Parce que vous dites paragraphe

 25   23, Maître Zivanovic, mais quel des documents ?

 26   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Le 1D322.

 27   Mme BIERSAY : [interprétation] Donc, maintenant c'est le mémorandum, le

 28   mémo ?


Page 4760

  1   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui.

  2   Mme BIERSAY : [interprétation] Mais ça nous aiderait peut-être pour ce qui

  3   est de la référence parce qu'il serait utile de l'avoir au compte rendu

  4   afin de retrouver le passage dont vous parlez. Merci.

  5   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, fort bien.

  6   Q.  Vous vous souvenez de ce nom ?

  7   R.  C'est le capitaine Zirojevic, je m'en souviens. Il y avait cette espèce

  8   de guérite au niveau de la caserne. J'ai demandé à le voir et on m'a emmené

  9   chez un adjudant, dont le nom m'échappe. J'ai donné une attestation qui m'a

 10   été délivrée à Velepromet, et cet homme-là m'a payé mon dû.

 11   Q.  Dans votre déclaration, vous avez indiqué qu'à l'occasion de votre

 12   arrivée parmi les volontaires on vous a donné un vieil uniforme de la JNA.

 13   Est-ce que ça différait des uniformes des réservistes ? Veuillez nous le

 14   dire.

 15   R.  Comment expliquer ? Le vieil uniforme, c'est connu, c'est très chaud

 16   comme uniforme. Les réservistes avaient des uniformes qui avaient la même

 17   couleur, la même coupe, mais un tissu différent. Et c'était l'uniforme

 18   officiel de la JNA. Il n'y avait pas encore les uniformes de camouflage à

 19   faire leur apparition. Mais moi, à Velepromet, on m'a donné un uniforme de

 20   camouflage composé de deux éléments, du haut et du bas, avec un béret

 21   également.

 22   Q.  Puisque vous vous êtes porté volontaire, ce qui m'intéresserait c'était

 23   de savoir si on pouvait distinguer -- au vu des deux uniformes, est-ce

 24   qu'on pouvait faire la distinction pour dire un tel fait partie des

 25   réservistes et un tel autre fait partie des volontaires ?

 26   R.  Non. On était comme des œufs de Pâques, Monsieur. On portait ce qu'on

 27   avait. Et vous savez de quoi avait l'air l'uniforme de la JNA, parce que

 28   bon nombre de personnes avaient des uniformes chez eux en tant que


Page 4761

  1   réservistes ou membres de la protection civile.

  2   Q.  Dans votre déclaration, vous évoquez -- et là aujourd'hui vous avez

  3   également évoqué ces deux noms. Vous avez d'abord parlé de Slobodan

  4   Grahovac. On vous a montré un document -- bon, éventuellement, je me

  5   propose de vous le montrer à nouveau tout à l'heure.

  6   Mais ce qui m'intéresse, c'est, me semble-t-il, l'indication apportée par

  7   vous au terme de laquelle il avait quelque chose à voir avec le

  8   gouvernement de la SAO SBSO. Est-ce que vous avez eu à en connaître en

  9   personne ou est-ce que vous l'avez ouï dire ?

 10   R.  Non. Sur ce document, il y a la signature de Filipovic, pas de

 11   Grahovac, si mes souvenirs sont bons. J'ai mentionné au bureau Filipovic,

 12   Dusan, me semble-t-il qu'il s'appelait de son prénom. Je ne suis pas trop

 13   sûr. Mais c'est un homme que j'avais déjà vu à la télévision à Sid encore.

 14   Il était quelque chose ou quelqu'un dans ce gouvernement. Je ne sais pas

 15   trop ce qu'il faisait. Il se peut que je me trompe. Etait-il ministre ou

 16   autre chose, mais il était quelque chose. Et peut-être qu'il est devenu

 17   quelque chose et que j'ai confondu.

 18   Q.  Je vous pose justement la question. Ça se trouve au paragraphe 19 de

 19   votre déclaration. Bien que vous ayez procédé à des rectifications

 20   ultérieures s'agissant du mémo dont j'ai parlé. Je vous pose cette question

 21   parce que d'après nos renseignements, Slobodan Grahovac n'avait exercé

 22   aucune fonction au niveau du gouvernement de la SAO de la SBSO et encore

 23   moins une fonction de ministre, ni là, ni dans la République de la Krajina

 24   serbe. C'est pourquoi je vous pose la question, parce que dans ce

 25   paragraphe 19 du mémorandum, le document que vous avez sous les yeux, vous

 26   avez dit qu'on vous l'avait présenté comme étant le ministre de la Défense

 27   de la SAO de Krajina.

 28   Alors ma question est celle-ci : est-ce que vous vous souvenez qui est-ce


Page 4762

  1   qui vous l'a présenté en tant que ministre de la Défense ?

  2   R.  Je me souviens bien du visage de Grahovac. Il portait cet uniforme tout

  3   neuf et il avait dans ses mains une arme Heckler. C'était la première fois

  4   que je voyais cette arme. Il y avait deux instructeurs, l'un était venu de

  5   Backa Palanka, et l'autre on l'appelait Djani. Ils l'ont présenté. Il était

  6   venu en voiture. Après la guerre, ce dénommé Grahovac a travaillé pour les

  7   douanes ou pour la Sûreté de l'Etat, et il m'arrivait, par exemple, de le

  8   voir à la télévision pour un reportage relatif à un accident de

  9   circulation. Mais si vous me dites qu'il n'a jamais été ministre, moi je

 10   veux bien vous croire, mais c'est ce qu'on m'a dit. C'est ce que j'ai cru

 11   comprendre, du moins. Et j'ai même compris qu'il était ministre de la

 12   Défense. Mais ce n'est pas forcément exact.

 13   Q.  Je vais maintenant vous demander de vous pencher sur une pièce à

 14   conviction de l'Accusation, P1727. C'est le document où figure la signature

 15   du dénommé Filipovic. Je vois qu'il a signé pour le directeur. Alors,

 16   était-il directeur lui-même ou était-ce quelqu'un d'autre, là aussi on a

 17   quelques renseignements.

 18   Mais moi, ce qui m'intéresse, c'est -- j'aimerais qu'on relève un peu la

 19   version en B/C/S. C'est la date qui m'intéresse, le 18 octobre 1991. On

 20   voit un cachet à gauche. Est-ce que vous pouvez me dire ce que signifie

 21   l'inscription OP et STO. STO, on sait à peu près qu'il s'agit du QG de la

 22   Défense territoriale. Mais qu'est-ce que veut dire le OP ?

 23   R.  Opérationnel, peut-être… je ne sais pas.

 24   Q.  Si vous ne savez pas, ce n'est pas grave. Je vous pose cette question

 25   parce que, partant de la totalité des informations mises à notre

 26   disposition, on sait qu'il y a ce qui est convenu d'appeler ce QG de la TO

 27   de Vukovar, et on sait qu'il y a eu un QG qui était à Vukovar et dont vous

 28   avez parlé. Vujovic, Vujanovic. Et nous avons même des informations disant


Page 4763

  1   que le commandant de la TO avant était un dénommé Dusan Jaksic. Je voulais

  2   seulement voir si l'on pouvait tirer au clair : ces deux éléments-là,

  3   était-ce deux QG distincts ou était-ce un QG principal et un QG secondaire

  4   ? Mais enfin, si vous ne savez pas, dites-le-nous.

  5   R.  Il fallait forcément qu'il y ait un QG municipal de la ville de Vukovar

  6   et il est certain qu'il existait un QG pour la région toute entière, mais

  7   je ne sais pas comment ils étaient liés l'un à l'autre. Est-ce qu'ils

  8   coopéraient ou pas, je l'ignore.

  9   Q.  Je vais à présent demander au greffier de nous descendre un peu la

 10   version en B/C/S, et même en anglais. Il y a un nom qui y figure, et

 11   j'aimerais que vous m'indiquiez si vous êtes à même de lire le nom ?

 12   R.  Ceprnja, Marko.

 13   Q.  Justement.

 14   R.  J'ai entendu parler de ce nom.

 15   Q.  Saviez-vous qu'avant la guerre, il avait travaillé pour la TO de

 16   Vukovar ?

 17   R.  Non.

 18   Q.  Vous ne le savez donc pas.

 19   R.  Mais ce nom, j'ai eu l'occasion de l'entendre prononcé au théâtre de

 20   combat. Je crois qu'il venait, qu'il nous apportait du matériel. Il nous

 21   apportait des cigarettes, des sous-vêtements. C'est un nom qui me dit

 22   quelque chose.

 23   Q.  Laissez-moi vous demander ceci : quand avez-vous fait la connaissance

 24   de Milan Lancuzanin ?

 25   R.  C'est là-bas, lorsqu'on s'est alignés. Une fois arrivé de Lipovaca sur

 26   les lieux, lui et ce Ubi Paripovic, c'est là que je les ai vus pour la

 27   première fois. Mais je sais qu'il avait été à Tovarnik aussi, seulement je

 28   ne l'ai pas gardé en mémoire.


Page 4764

  1   Q.  Alors ça, ça se passe à Vukovar. Vous avez fait sa connaissance à

  2   Vukovar ?

  3   R.  Exact.

  4   Q.  Je vois que par la suite il vous a contacté souvent parce qu'il était

  5   tombé malade et il vous appelait pour lui donner un coup de main. Donc j'ai

  6   l'impression que vous vous êtes rapprochés l'un de l'autre, vous étiez

  7   devenus assez bons camarades.

  8   R.  Mais c'est moi qui lui ai construit sa maison.

  9   Q.  Après la guerre, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui. Oui, après la guerre dans notre région à nous. Ultérieurement, il

 11   y a la guerre au Kosovo. Mais c'est dans les années 2000, à peu près.

 12   Q.  Mais est-ce que vous saviez que jusqu'à la guerre il avait résidé à

 13   Vukovar ?

 14   R.  Bien sûr. Je connaissais son père et son frère. Je suis allé à sa

 15   maison dans Vukovar, à Leva Supoderica. Je suis même allé chez son père,

 16   dans une localité non loin de Novi Sad. Je connais toute sa famille. Je

 17   connais sa femme et je connais la famille de sa femme.

 18   Q.  Alors probablement savez-vous que lors du début de la guerre, lui et sa

 19   famille ont fui Vukovar pour aller en Serbie.

 20   R.  Oui, bien sûr. Il retournait à Vukovar comme moi je retournais à

 21   Tovarnik.

 22   Q.  Il retournait en tant que volontaire, n'est-ce pas ?

 23   R.  TO ou volontaire, peu importe. Les forces armées, de toute façon.

 24   Qu'était-il au juste, je ne le sais.

 25   Q.  Mais vous nous avez dit que vous saviez qu'il avait été à Tovarnik et

 26   dans les opérations dans les environs de Tovarnik, mais que là, vous ne le

 27   connaissiez pas encore, n'est-ce pas ?

 28   R.  C'est cela.


Page 4765

  1   Q.  Est-ce que vous savez nous dire quand est-ce qu'il est retourné à

  2   Vukovar, quand est-ce qu'il est venu à Vukovar ?

  3   R.  Je l'ai trouvé à Vukovar une fois arrivé moi-même. Je ne sais pas vous

  4   dire quand est-ce que lui est arrivé. Il me l'a peut-être dit à un moment

  5   donné, mais je ne l'ai pas gardé en mémoire. Toujours est-il qu'il était à

  6   Vukovar déjà avant moi.

  7   Q.  Je vous pose la question car, d'après les informations dont je dispose,

  8   c'est à la date qui figure sur cette attestation, le 18 octobre, qu'il est

  9   arrivé à Vukovar.

 10   R.  Cela se peut. Mais je n'en suis pas trop convaincu … il se peut qu'il

 11   soit arrivé avant.

 12   Q.  Bon. Toujours est-il que vous ne connaissez pas la date exacte, et on

 13   n'ira pas plus loin.

 14   R.  Non.

 15   Q.  Vous avez dit qu'on vous a nommé chef du 1er Peloton dans cette unité

 16   de Leva Supoderica. Vous avez aussi dit que le 20 novembre, vous avez été

 17   de permanence au commandement, au QG. Moi, ce que je voudrais savoir

 18   maintenant c'est, d'abord, de nous dire si ces permanences étaient

 19   habituelles au niveau de cette unité de Leva Supoderica ?

 20   R.  C'était obligatoire, les permanences. Lorsque le commandant était là-

 21   bas, il avait des hommes qui le faisaient, d'habitude. Et moi, comme

 22   j'étais à la tête d'un peloton, moi, ma mission c'était d'aller dans les

 23   actions de nettoyage. Donc moi, des fois, je faisais monter la garde autour

 24   d'installations nous appartenant, mais il fallait toujours une permanence.

 25   Il y avait le système de transmission là-bas. Si Radic et Zirojevic

 26   venaient, ils allaient là-bas. Il fallait forcément qu'il y ait toujours

 27   quelqu'un pour contacter le commandant si celui-ci était allé inspecter les

 28   lignes de front. C'était normal.


Page 4766

  1   Q.  Et la règle voulait que cela soit un supérieur, ce n'était jamais un

  2   simple soldat, un troufion, mais c'était un chef de peloton ou de compagnie

  3   ?

  4   R.  Oui. Et d'habitude, c'étaient les gens de Vukovar, parce qu'ils

  5   connaissaient tous les noms des gens autour. Et moi, je ne les connaissais

  6   pas tous, mais eux connaissaient le terrain et les gens. Moi, je n'ai été

  7   de permanence que cette fois-là, parce que les autres n'étaient pas là.

  8   Q.  Est-ce que cela veut dire qu'avant cela vous n'avez jamais assuré de

  9   permanence ?

 10   R.  Oui. Des fois, la nuit, au QG, quand on savait qu'il n'y aurait pas

 11   d'action à conduire, et quand on me sollicitait, oui, mais ce n'était pas

 12   chose habituelle que de me désigner pour être de permanence. J'ai gardé

 13   ceci en mémoire parce que je suis resté très longtemps à le faire.

 14   Q.  Je vais revenir à ceci tout à l'heure. Moi, ce qui m'intéresse c'est de

 15   savoir, en principe, je ne parle pas de la date concrète, la date de

 16   l'événement d'Ovcara, mais en principe, quand vous êtes de permanence, que

 17   faisiez-vous ? Quelle était votre mission ? Qu'étiez-vous censé faire ?

 18   R.  D'abord, ne pas laisser n'importe qui entrer. Quand on venait avec une

 19   demande, on demandait des cigarettes, des munitions, on n'est pas censés à

 20   chaque fois saisir le commandant. On va à l'entrepôt, on donne des

 21   munitions, des Zolja, les Zolja étant des roquettes, ou alors si quelqu'un

 22   avait trop bu, on était chargés de résoudre le problème aussi. Ce sont des

 23   tâches habituelles au niveau d'un QG. On ne décide de rien du tout. Voilà.

 24   Et les inconnus qui arrivaient, on était censés leur demander qui ils

 25   étaient et où ils allaient. C'est une espèce de service de garde. C'est un

 26   peu le rôle d'une sentinelle.

 27   Q.  Vous aviez également des moyens de communication à votre disposition,

 28   vous aviez un Motorola et des téléphones par induction.


Page 4767

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 4768

  1   R.  Oui, en effet. Nous avions également des génératrices, nous avions des

  2   téléviseurs qui fonctionnaient sur batterie parce que l'endroit où nous

  3   nous trouvions était sans électricité.

  4   Q.  Alors ce téléphone par induction, est-ce que c'était une ligne fixe ?

  5   R.  Oui, oui. Oui, en effet. Il fallait poser des câbles du point A au

  6   point B. Voilà comment ça fonctionnait. Mais ce n'était pas de très bonnes

  7   lignes téléphoniques parce que les câbles peuvent être sectionnés.

  8   Q.  Mais c'est sans doute le plus sûr.

  9   R.  Non. Je crois que ce sont les estafettes qui sont les plus sûres.

 10   Enfin, c'est le matériel dont disposait la JNA à l'époque.

 11   Q.  Je voudrais vous poser cette question : lorsque vous étiez de

 12   permanence, est-ce que vous communiquiez avec d'autres unités, des unités

 13   de la JNA ou d'autres unités dans le secteur ?

 14   R.  Il y avait deux documents. L'un était une liste de codes. Donc lorsque

 15   vous vouliez établir des communications, on utilisait ces noms de code et

 16   les gens comprenaient. Ce n'était pas une très longue liste de codes.

 17   Enfin, il y avait ces codes. C'étaient des communications par ligne

 18   téléphonique.

 19   Q.  Je voudrais vous poser encore une question : l'officier de permanence

 20   prenait-il des notes des événements au tour de sa garde ?

 21   R.  Non. On tenait au courant le commandant verbalement, on lui disait s'il

 22   y avait eu un incident, et s'il n'y avait rien à signaler, on ne faisait

 23   rien.

 24   Il faut savoir que nous ne sommes pas devenus officiers en ayant été

 25   diplômés par une académie militaire. On n'avait pas beaucoup de paperasse.

 26   Nous étions presque officiers autoproclamés, si vous voulez. L'armée a

 27   reconnu mon rang en fin de compte, mais lorsque j'ai servi dans l'armée, je

 28   n'ai pas suivi de formation d'officier de réserve.


Page 4769

  1   Q.  Et ces permanences duraient combien de temps ?

  2   R.  C'étaient des tours de permanence soit de jour, soit de nuit. Ce jour-

  3   là, Kameni était parti ainsi que tous les officiers de haut rang et on m'a

  4   dit, bien voilà, c'est moi qui serais de permanence. Il y avait encore

  5   d'autres commandants qui étaient là. Je ne sais pas pourquoi ce n'est pas à

  6   eux qu'on s'est adressés.

  7   Q.  Donc, grosso modo, une permanence durait de 12 à 24 heures ?

  8   R.  Oui, une permanence habituelle, en effet.

  9   Q.  Je vous pose cette question parce que beaucoup de choses peuvent se

 10   produire en 12 heures, donc c'est sans doute plus commode de consigner les

 11   choses dans un registre parce qu'on risque d'oublier des choses à rapporter

 12   au commandant.

 13   R.  Eh bien, quand quelqu'un téléphonait ou venait, on le notait. En tout

 14   cas, quand il ne s'agissait pas de communications à titre personnel. Quand

 15   quelqu'un téléphonait et que le commandant était sorti, oui, et je dois

 16   vous dire que Kameni n'était pas un homme qui s'autoproclamait à ses

 17   fonctions. C'était un homme courageux. Et on n'utilisait pas les Motorola

 18   parce qu'on pouvait intercepter les communications. Et donc, le cas

 19   échéant, nous allions parler à quelqu'un entre quat'z'yeux, si vous voulez.

 20   Mais nous n'utilisions pas beaucoup ces moyens de communication parce que

 21   c'étaient des hommes de combat.

 22   Q.  Est-ce qu'au cours de ces permanences vous communiquiez avec d'autres

 23   unités, tels les autres groupes d'attaque de la JNA ?

 24   R.  Je ne sais pas, enfin, je ne connais pas tout ce qu'implique le fait

 25   d'être officier de permanence. C'est un peu par hasard que je m'y suis

 26   retrouvé. J'étais là le mauvais jour, en quelque sorte, et je n'étais pas

 27   au courant d'Ovcara. Je n'en ai entendu parler que plus tard.

 28   Il y avait un homme qui s'appelait Slobodan Katic, et lorsqu'il était


Page 4770

  1   présent, c'était lui qui s'occupait des communications, donc nous savions à

  2   ce moment-là qui faisait quoi et où.

  3   Q.  Encore une question, si vous voulez bien : ce Slobodan Katic, quel

  4   était son poste dans l'unité ?

  5   R.  Il était un genre d'officier mais il n'avait pas de subordonnés, donc

  6   il n'avait pas de peloton. Il était, si vous voulez, l'assistant du

  7   commandant. C'était un radical de Belgrade, très actif au sein du Parti

  8   radical, et donc, c'était un point de contact avec le parti. Lorsque j'ai

  9   rejoint l'unité, je ne savais rien de tout cela, je n'avais rien à voir

 10   avec un parti politique. C'est un petit peu plus tard qu'ils ont commencé à

 11   distribuer des bulletins d'adhésion au parti, et Katic était, si vous

 12   voulez, un représentant politique, et il était l'ami de Kameni. Est-ce que

 13   c'était une amitié qui durait depuis longtemps, je n'en sais rien. Mais en

 14   tout cas, quand ils étaient là, ils se fréquentaient beaucoup.

 15   Q.  Alors, passons aux précisions que vous avez données concernant

 16   Tovarnik. Vous avez dit que vous avez vu beaucoup de cadavres à Tovarnik,

 17   dans les rues ou dans les jardins, dans les courettes, et que vous

 18   supposiez qu'il s'agissait de Croates puisqu'on ne les avait pas ensevelis.

 19   Alors, peut-être qu'à cause des combats, même s'il s'était agi de cadavres

 20   serbes, on n'aurait pas pu les ensevelir à cause des combats ?

 21   R.  Oui, je savais qu'une femme, en tout cas, était serbe. Alors, peut-être

 22   qu'il y a eu aussi quelques Serbes parmi les cadavres que j'ai vus, mais en

 23   tout cas, ceux que j'ai vus sur le tarmac n'étaient pas des cadavres

 24   serbes. La police militaire les gardait. Et j'ai vu également des

 25   assassinats, je les ai vus de mes yeux vus, et je savais qu'il ne

 26   s'agissait pas de Serbes. Il y avait un homme qui s'appelait Mate. Il a été

 27   tué par Zeljko Krnjajic. Et puis, sa femme, tuée par Predrag. Et l'un des

 28   deux est en train d'être jugé et l'autre est toujours en liberté. Ils ont


Page 4771

  1   tué de leurs propres mains ce couple.

  2   Q.  C'est dans votre déclaration.

  3   R.  Oui, c'est bien comme ça que les choses se sont produites.

  4   Q.  Vous disiez également que la police militaire gardait un certain nombre

  5   de corps croates près du poste d'essence. Pourquoi pensez-vous qu'il

  6   s'agissait de cadavres croates ?

  7   R.  C'était le deuxième jour. Tous les Serbes qui s'étaient enfuis étaient

  8   revenus entre-temps. Et si ces corps avaient été serbes, leurs familles

  9   seraient venues les chercher. Nous n'avons rien trouvé, personne, à Ilaca

 10   non plus. Tout le monde s'était enfui. On ne retrouvait personne. Et nous

 11   n'avons pas dû combattre, sauf peut-être les préparations à coups

 12   d'artillerie avant d'arriver. Donc, c'est ça que je pense, je pense qu'il

 13   s'agissait de Croates, ou, en tout cas, de non-Serbes, éventuellement d'une

 14   autre origine ethnique. Parce que si ça avait été quelqu'un dont la famille

 15   était aux alentours, celle-ci serait venue les chercher.

 16   Q.  Je vous pose cette question parce que les autres corps n'ont pas été

 17   gardés par la police militaire. Est-ce que vous avez envisagé que la police

 18   militaire gardait des dépouilles serbes avant qu'on vienne les chercher ?

 19   R.  Oui, je comprends ce que vous voulez dire. C'est une éventualité si ce

 20   n'est que le premier jour, lorsque je suis allé au même endroit, il n'y

 21   avait pas de cadavres, et puis c'est le lendemain qu'il n'y avait plus un

 22   seul soldat croate dans la région qui aurait pu abattre des Serbes. Alors,

 23   peut-être qu'il s'agissait de victimes d'un crime de droit commun. On ne

 24   sait pas. C'était le chaos complet, c'était l'anarchie.

 25   Q.  Mais aviez-vous l'impression que la police militaire gardait ces

 26   cadavres pour préserver le site à des fins d'investigation judiciaire ?

 27   R.  Oui, c'est possible, c'est une hypothèse tout à fait réaliste.

 28   Q.  Encore une question avant la pause, si vous le voulez 


Page 4772

  1   bien : est-ce que vous savez ce que Zeljko Krnjajic faisait avant la guerre

  2   ?

  3   R.  Avant la guerre ? Je n'en sais rien. Mais après la guerre, il était

  4   officier de police à Sid. Il a même servi au Kosovo en tant que policier.

  5   Mais avant la guerre, je ne sais pas. J'avais des contacts avec lui et je

  6   bavardais avec lui parce qu'il a également acheté une maison dans la

  7   municipalité à Sid, dans un village aux alentours. Je le voyais temps en

  8   temps quand il était mon commandant, mais il n'a jamais dit ce qu'il

  9   faisait avant la guerre. Et je crois qu'il vient de Lovas à l'origine.

 10   Q.  Est-ce que vous avez entendu qu'il était policier même avant la guerre

 11   ?

 12   R.  Non. Après cette petite guerre à Tovarnik, il est devenu le commandant

 13   de police parce qu'on avait formé une force de police et une administration

 14   civile juste après. Et s'il avait été policier auparavant, avant la guerre,

 15   et qu'il a eu un diplôme de l'académie police -- bon, si c'est le cas, je

 16   comprends pourquoi il a été nommé commandant de police.

 17   Il y a une chose en tout cas qui est certaine, il était à Borovo Selo le 2

 18   mai, selon ses propres paroles d'ailleurs.

 19   Q.  Moi, mes informations disent exactement le contraire. Peut-être qu'il a

 20   tenu de tels propos…

 21   R.  Peut-être, mais c'est ce qu'il nous a dit. Parce qu'il portait un

 22   uniforme de camouflage lorsque nous étions à Sid et que nous recevions des

 23   armes, et lui et Vojkapic étaient les seuls qui avaient de l'expérience, et

 24   cette expérience était forcément à Borovo Selo. Il a dit qu'il était à

 25   Borovo Selo en personne, à moins qu'il ne faisait pas partie de la Légion

 26   étrangère.

 27   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je crois que c'est le moment de la pause.

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] En effet, Maître Zivanovic.


Page 4773

  1   Nous allons prendre une pause jusqu'à midi 45, Monsieur le Témoin.

  2   L'huissière va vous accompagner hors du prétoire.

  3   [Le témoin quitte la barre]

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est levée.

  5   --- L'audience est suspendue à 12 heures 16.

  6   --- L'audience est reprise à 12 heures 45.

  7   [Le témoin vient à la barre]

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, vous pouvez

  9   poursuivre.

 10   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Président.

 11   Q.  Monsieur le Témoin, lorsque vous parliez de la Défense territoriale de

 12   la SBSO, est-ce que vous saviez qui était le commandant de cette Défense

 13   territoriale à l'époque où vous vous trouviez à Vukovar ?

 14   R.  Je ne sais pas. Mais j'ai entendu plus tard que c'était le général

 15   Badza.

 16   Q.  Vous parlez Radovan Stojicic, dont le surnom était Badza ?

 17   R.  Oui, en effet.

 18   Q.  Est-ce que vous savez à peu près où il travaillait, quelles étaient ses

 19   autres occupations à l'époque, de quelles structures il provenait ?

 20   R.  Il faisait partie des unités spéciales de la sécurité de l'Etat de la

 21   République de Serbie, ce qu'on appelait le SAJ à l'époque. Je ne connais

 22   pas tout son curriculum vitae, mais en tout cas à une certaine époque il y

 23   était. Je ne sais pas le reste. J'ai entendu parler de cet homme pour la

 24   première fois au moment où il y a eu une grève dans des mines et qu'il est

 25   parti s'en occuper avec son unité spéciale.

 26   Q.  Lorsque vous parliez de Slobodan Grahovac, vous aviez dit que pour

 27   autant que vous vous en souveniez, il était également membre de la police.

 28   Est-ce que vous parliez de la police de la République de Serbie ?


Page 4774

  1   R.  Après la guerre à Vukovar, oui, oui, c'est ce que j'ai entendu. Ou

  2   peut-être que je l'ai entendu à la radio ou à la télé. Je ne sais plus si

  3   c'était la police ou la sécurité de l'Etat. Je ne sais plus. Ou peut-être

  4   que c'était aux douanes. Enfin, je ne sais plus très bien où il a travaillé

  5   ensuite.

  6   Q.  Bon, soyons clair : est-ce que vous parlez de la Serbie ou de la

  7   République de la Krajina serbe, là où il aurait travaillé à la police ou à

  8   la sécurité de l'Etat ou au service des douanes ?

  9   R.  Mais la Serbie faisait encore partie de l'Etat fédéral, avec le

 10   Monténégro. Voilà ce que je veux dire.

 11   Q.  Donc vous ne parlez pas de la Krajina ?

 12   R.  Non.

 13   Q.  Je vous interroge là-dessus parce que nous disposons d'information --

 14   M. ZIVANOVIC : [interprétation] En anglais, lignes 16 à 19, Grahovac était

 15   le chef d'état-major de la Défense territoriale.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas. Ce dont je me souviens, c'est

 17   qu'il était un ministre de quelque chose, mais je ne sais plus trop. Vous

 18   savez, après, on ne sait pas si c'est un mensonge ou la vérité que l'on

 19   vous raconte.

 20   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

 21   Q.  Peut-être qu'il vous a été présenté comme cela, mais à tort. Nous

 22   n'avons pas des informations comme quoi il avait été ministre de

 23   gouvernement.

 24   R.  Il ne s'est pas présenté en tant que tel, à ce titre. C'est d'autres

 25   qui disaient qu'il était ministre.

 26   Q.  Monsieur Stoparic, vous avez dit qu'avant d'entrer dans le prétoire,

 27   vous aviez pris connaissance de la déclaration que vous avez sous les yeux,

 28   numéro 5977, accompagnée de son avenant, 5976. Et vous avez dit que pour


Page 4775

  1   autant que vous vous en souveniez, tout cela était véridique, et c'est ce

  2   que le Procureur vous a demandé. Maintenant, je voudrais que vous vous

  3   reportiez au paragraphe 36 de votre déclaration. Vous allez en voir la

  4   version en B/C/S à l'écran.

  5   Alors, ce que nous lisons ici, c'est exactement ce que vous aviez dit

  6   dans votre déclaration, c'est-à-dire que personnellement vous n'étiez pas à

  7   Ovcara mais que vous connaissez certains détails des tueries qui s'y sont

  8   produites et que ce jour-là, Kameni, Ceca, Kinez et Djo s'étaient rendus à

  9   l'état-major de guerre du Parti radical serbe à Belgrade. Et vous dites que

 10   :

 11   "Ils sont revenus vers midi."

 12   Et aujourd'hui, vous avez dit qu'ils étaient rentrés le soir, qu'il

 13   faisait déjà noir. Etant donné qu'hier, comme vous nous l'avez dit, vous

 14   aviez lu votre déclaration et que vous la confirmiez, et votre déposition

 15   d'aujourd'hui est différente sur ce point, alors j'aimerais savoir si vous

 16   pouvez nous expliquer de quoi il s'agit.

 17   R.  J'ai dit, ils sont revenus "vers midi". Oui, ça ne doit pas être

 18   corrigé. C'était peut-être 13 heures. Je ne sais pas si c'était vraiment

 19   midi ou 13 heures. Mais j'ai parlé à Kameni sur la Motorola.

 20   Q.  En d'autres termes, c'est vers midi ou 13 heures que vous lui avez

 21   parlé. Vous lui avez parlé en personne ou pas ?

 22   R.  Non, je lui ai parlé. Il m'a demandé -- en fait, il a dit : Je sais que

 23   ça fait longtemps que vous êtes là, mais restez encore quelque temps. Puis

 24   ils sont revenus dans la soirée.

 25   Q.  Dans votre déclaration, vous voyez, dans la phrase qui suit, vous dites

 26   :

 27   "J'étais l'officier de permanence. Lorsque Kameni et les autres sont

 28   revenus de Belgrade, j'ai pu observer qu'ils étaient très nerveux…"


Page 4776

  1   Et je voudrais savoir, si vous ne les aviez pas vus plutôt vers midi, au

  2   moment où ils étaient revenus, comment avez-vous pu relever qu'ils étaient

  3   un peu inquiets ou plutôt inquiets ?

  4   R.  Vous voyez, je leur ai parlé vers midi, puis quand il est revenu, le

  5   soir, selon moi, il revenait de Belgrade.

  6   Q.  Est-ce qu'en fait vous voulez dire qu'ils étaient déjà inquiets à

  7   l'époque ? Et ils sont tous revenus en même temps, les quatre, ou seulement

  8   Kameni ?

  9   R.  Tous les quatre. Et je voyais qu'ils étaient inquiets, préoccupés. Il a

 10   demandé assez brusquement que nous établissions nos effectifs. Nous avons

 11   combattu ensemble. Et je voyais bien qu'il était inquiet.

 12   Q.  Dans la phrase suivante, vous dites :

 13   "Kameni a dit qu'ils allaient chercher Miroljub."

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Alors, quand est-ce qu'il est allé chercher Miroljub ? Ce soir-là ou

 16   plus tôt, à midi ?

 17   R.  J'essaie de citer Kameni, citer ce qu'il m'a dit lorsqu'il m'a assigné

 18   mes tâches, à savoir établir les effectifs. Il m'a dit : Tu ne dois pas

 19   aller chercher Miroljub toi-même. J'irai moi-même.

 20   Et à partir du moment où nous nous sommes parlés sur la Motorola jusqu'au

 21   moment de leur retour, je ne sais pas ce qui s'est passé entre-temps. Et

 22   puis, plus tard, il s'est avéré que Miroljub était avec eux. Alors je ne

 23   sais pas très bien pourquoi il devait aller chercher Miroljub. Il était

 24   apparemment furieux contre Miroljub.

 25   Q.  Alors, essayez de m'expliquer pourquoi il vous a dit : Ne va pas

 26   chercher Miroljub. Pourquoi est-ce que vous, vous étiez censé aller

 27   chercher Miroljub ? Enfin, c'est ce que je vois ici dans le compte rendu

 28   d'audience.


Page 4777

  1   R.  Il ne m'a pas dit ça. Il m'a dit que eux iraient chercher Miroljub.

  2   Q.  Vous a-t-il dit pourquoi ?

  3   R.  Sans doute que oui, mais j'étais déjà parti pour établir les effectifs.

  4   Eux sont restés. Et quand je suis revenu, il y avait beaucoup plus de

  5   monde. Et je lui ai demandé : Qu'est-ce qui se passe ? Pourquoi tant

  6   d'agitation ? Et il m'a dit : Il y a quelque chose qui est en train de se

  7   passer qui ne devrait pas se passer. Il n'a pas dit que quelque chose s'est

  8   produit. Il m'a dit : Quelque chose est en train de se passer qui ne

  9   devrait pas se passer. Et le lendemain, c'était clair.

 10   Q.  Je pense que ce que vous dites ici est très important. Dans la phrase

 11   suivante, vous dites que lorsqu'ils sont partis à Ovcara pour chercher

 12   Miroljub, ils y sont restés pendant deux à trois heures et demie, et

 13   lorsqu'ils sont revenus au commandement, ils m'ont donné ordre d'aller

 14   rapidement à notre unité pour savoir où chacun se trouvait. Alors, selon

 15   votre déclaration, l'on en déduit qu'ils sont allés à Ovcara, qu'ils y sont

 16   restés deux à trois heures et demie puis qu'ils sont revenus, et que c'est

 17   à ce moment-là que Kameni vous a donné l'ordre de vous renseigner sur le

 18   lieu où se trouvent les membres de votre unité ?

 19   R.  Kameni m'a dit lui-même qu'ils avaient été à Ovcara quelque temps.

 20   C'est certainement vrai. Je ne pense pas qu'il ait eu des raisons de

 21   mentir. Et après Ovcara, ils sont allés au QG. Ça aussi c'est vrai. Alors,

 22   à savoir s'ils sont allés revoir Miroljub, je ne sais pas. Ils ont dit

 23   qu'ils le feraient.

 24   Peut-être que j'ai mélangé les événements lorsque j'ai fait ma déclaration.

 25   Quelques fois je me suis basé sur ma mémoire, et quelques fois j'ai répété

 26   ce qu'il avait été convenu de dire à Zemun au cas où on nous posait des

 27   questions sur Ovcara.

 28   Q.  Donc, pour résumer, ce que nous voyons au paragraphe 36 est


Page 4778

  1   partiellement faux ?

  2   R.  Je l'ai expliqué. Lorsque je me suis exprimé, j'ai consolidé les deux

  3   versions en une seule. Voilà pourquoi il y a eu un problème, et ce problème

  4   se pose non seulement avec vous maintenant mais aussi avec le bureau du

  5   Procureur. Il fallait éclaircir certaines zones d'ombre avec le bureau du

  6   Procureur.

  7   Q.  Vous savez que vous êtes en train de déposer sous serment. Est-ce que

  8   Kameni est allé chercher Miroljub, comme vous le dites dans votre

  9   déclaration, aux alentours de midi lorsqu'il est arrivé, qu'il est resté

 10   deux heures ou deux heures et demie et vous a donné cet ordre ? Ou plutôt,

 11   est-il parti chercher Miroljub le soir, et Vujovic aussi ?

 12   R.  Quand je l'ai vu le soir, il m'a dit qu'il allait partir chercher

 13   Miroljub. Et avant cela, il était là aussi. Je ne sais pas s'il est

 14   vraiment parti là-bas le soir. Et, franchement, je lui ai demandé cela

 15   après la guerre, et il m'a répondu : Oui, j'ai vu des choses, mais je n'ai

 16   tué personne, et je suis parti.

 17   Q.  Je comprendrais cela si vous y étiez aux alentours de midi ou pendant

 18   ces deux heures ou deux heures et demie où il est resté. Rien ne se passait

 19   de ce genre. Mais lorsqu'il y était le soir, la situation était plutôt

 20   différente. Voilà pourquoi je vous pose la question de savoir s'il y est

 21   allé aux environs de midi, comme vous le dites dans votre déclaration, ou

 22   s'il est allé le soir -- qu'il est arrivé le soir et qu'après il est allé

 23   le chercher ?

 24   R.  Alors la vérité, c'est que nous avons discuté vers midi ou 13 heures,

 25   et ensuite il est venu le soir. Par soir, j'entends qu'il faisait nuit. Il

 26   pouvait être 17 heures ou 18 heures; on était en hiver. Et il m'a ordonné

 27   de dénombrer les effectifs et il m'a dit qu'il allait chercher Miroljub.

 28   S'il l'a fait ou pas, je ne sais pas. Il m'a dit ensuite qu'il ne l'avait


Page 4779

  1   pas fait.

  2   Quand il y est allé, je ne sais pas. Peut-être que c'était une manigance

  3   pour me tromper aussi. J'ai trouvé ça assez suspicieux qu'il m'ordonne

  4   d'aller dénombrer les effectifs, parce que c'était la première fois que

  5   nous étions à Vukovar.

  6   Q.  En d'autres mots, cette partie de votre déclaration où vous nous dites

  7   que Kameni était arrivé vers midi avec les trois membres de votre unité

  8   n'est pas vraie ?

  9   R.  J'ai dit qu'il était arrivé à Vukovar vers midi parce que nous avons

 10   parlé via nos lignes de communication, et je l'ai vu en personne le soir.

 11   Pour autant que je m'en souvienne. Aux réunions qu'on a eues, on nous

 12   disait ce qu'il fallait dire, et cetera. Ça m'a perturbé aussi. Donc,

 13   j'étais un peu perdu.

 14   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Pouvons-nous afficher la pièce 5979, s'il

 15   vous plaît.

 16   Q.  Est-ce que vous reconnaissez ce texte ?

 17   R.  C'est mon écriture. Oui, je le reconnais.

 18   Q.  Pouvez-vous nous dire quand ce document a été rédigé ? Car il n'est pas

 19   daté.

 20   R.  En 2004, je pense. Ou 2005 peut-être. Je ne suis pas sûr.

 21   Q.  Vous parlez de la réunion que vous avez tenue avec Kameni et trois

 22   autres anciens membres de cette unité. Combien de temps s'est écoulé après

 23   cette réunion pour que vous écriviez ce document ? Est-ce que vous pouvez

 24   nous répondre ?

 25   R.  Je dirais que plus d'un an s'est écoulé entre la réunion et ce

 26   document. Non, pas vraiment. Peut-être deux ans même.

 27   Q.  Est-ce que quelqu'un vous a demandé de rédiger cette déclaration ?

 28   R.  Un enquêteur me l'a demandé, je pense. Je peux vous donner son nom si


Page 4780

  1   nécessaire. Paolo Pastore.

  2   Q.  Regardons à présent cette déclaration de plus près. Commençons par le

  3   premier paragraphe.

  4   On nous dit qu'avant le début de l'enquête en Serbie, vous avez rencontré

  5   Milan Lancuzanin, qui vous a invité à rencontrer Ceca et Kinez. Comment les

  6   gens pouvaient savoir qu'une enquête aurait lieu en Serbie sur cet

  7   événement ? Parce que 12 ans ou plus s'étaient écoulés.

  8   R.  Je ne sais pas, mais Kameni le savait. Peut-être qu'il l'avait appris

  9   de quelqu'un des services de sûreté. Lorsque nous nous sommes rendus à ces

 10   entretiens, je ne savais pas quoi leur dire ou leur dire que faire parce

 11   que je n'étais pas là avec eux. Mais ensuite, six mois environ plus tard,

 12   on a emmené des gens. Je savais que Kinez était venu à Sid après son

 13   entretien à Belgrade et il a dû passer par un détecteur de mensonges.

 14   Q.  Combien de fois vous êtes-vous rencontrés pour parler de cela ?

 15   R.  Alors nous sommes allés à Mitrovica, chez Ceca, ensuite à Ruma, chez

 16   Kinez, et ensuite nous avons discuté dans un café près de la gare

 17   ferroviaire. Ensuite, nous sommes allés à Belgrade tous ensemble et nous

 18   avons rencontré Djo. Il y avait aussi un avocat et d'autres personnes que

 19   je ne connaissais pas. Il y avait un homme qui était à la TO à ce moment-

 20   là. On le surnommait Djani. En fait, c'était soit lui, soit quelqu'un de sa

 21   famille, parce que Djani a vécu à l'étranger un certain temps.

 22   Et ensuite, Kinez est venu nous voir. Je vous ai dit que j'avais fait

 23   partie de ceux qui avaient construit la maison de Kameni, et nous venions

 24   de terminer quelques travaux. Ça, je m'en souviens. Il avait dû déjà aller

 25   au poste de police pour se faire interroger et passer au détecteur de

 26   mensonges. Kameni a ensuite été convoqué. A Sid, il y avait des inspecteurs

 27   qui étaient venus pour le voir. Et à l'époque, Kameni était également

 28   interviewé par des enquêteurs du TPIY.


Page 4781

  1   Q.  Kameni a été interrogé par des enquêteurs du TPIY. Est-ce que c'est lui

  2   qui vous a dit cela ou est-ce que vous l'avez entendu de la bouche

  3   d'enquêteurs du Tribunal ?

  4   R.  Non, non. Je l'ai moi-même escorté lorsqu'il y est allé, et un avocat

  5   l'accompagnait parce qu'il était suspect. Et quand il est revenu de

  6   Belgrade, je pense qu'il m'a même dit que l'entretien avait été filmé.

  7   Personne ne me l'a dit ici. C'est lui qui me l'a dit.

  8   Q.  Donc vous vous êtes rencontrés une fois lorsque Kameni vous a dit qu'il

  9   y aurait une enquête. Ensuite, vous vous êtes rencontrés encore une fois à

 10   Belgrade où ce Djani était présent, et puis vous avez encore rencontré une

 11   fois Kinez, lorsqu'il est passé par le détecteur de mensonges, et encore

 12   une fois plus tard, lorsque Kameni avait été convoqué pour un entretien

 13   avec les enquêteurs du TPIY. Donc, ça fait quatre fois au total ?

 14   R.  Non, non. J'ai rencontré Kameni tous les jours. Presque tous les jours.

 15   Q.  Alors je vais me concentrer sur ces quatre reprises, et pas sur vos

 16   réunions quotidiennes avec Kameni.

 17   Est-ce que vous avez parlé des événements à Ovcara à chacune de ces quatre

 18   reprises ? Est-ce que vous vous êtes consultés pour savoir ce que vous

 19   devriez dire une fois que commencerait l'enquête ?

 20   R.  Lorsque Kameni est allé à l'entretien avec les enquêteurs, nous n'en

 21   avons pas parlé. Mais à part cela, oui, nous en avons parlé. Nous avons

 22   parlé à Sljivancanin. Nous l'avons même appelé depuis le café. On avait une

 23   espèce de code qui avait été mis en place. On l'appelait, on laissait

 24   sonner trois fois, et ensuite il décrochait le téléphone. Il n'avait pas

 25   encore été arrêté. Nous aimions bien cet homme; je parle de Sljivancanin.

 26   Le bureau du Procureur m'a dit un jour qu'ils voulaient que je dépose dans

 27   son procès, mais j'ai refusé. Et puis, ils n'ont pas insisté. Ils

 28   n'auraient pas pu me forcer à déposer.


Page 4782

  1   Q.  Lorsque vous avez parlé d'Ovcara, était-il nécessaire de communiquer

  2   avec Sljivancanin ?

  3   R.  Je ne lui ai pas parlé. Ils lui ont parlé au téléphone. Mais lorsqu'ils

  4   l'ont fait, ils se sont contentés de dire bonjour. Ils n'ont pas parlé de

  5   questions graves; tout le monde avait très peur d'être sur écoute.

  6   Q.  Savez-vous pourquoi ils ont voulu entrer en contact avec lui plutôt

  7   qu'avec d'autres officiers ?

  8   R.  Ceca et Kameni l'aimaient bien et aimaient avoir des contacts avec lui

  9   dans la mesure sur possible, avant sa mise en accusation. Ils avaient de

 10   bonnes relations avec lui. Je ne pense pas qu'ils se fréquentaient à cause

 11   d'Ovcara. Je crois qu'ils se fréquentaient de toute façon.

 12   Q.  Pourquoi ont-ils arrêté ?

 13   R.  Eh bien, à cause de la prison. Sljivancanin était ici, et eux aussi

 14   avaient été arrêtés. Certains ont été condamnés, d'autres acquittés. Kameni

 15   avait été condamné à 20 ans, qui a ensuite été réduit à cinq ans. Et

 16   l'homme âgé de mon peloton, je vous l'ai montré sur la photo, lui aussi, il

 17   a pris 20 ans. Et tout ça pour Ovcara. Peut-être qu'ils se fréquentent à

 18   nouveau maintenant. Parce que Kameni et Sljivancanin sont libres

 19   maintenant.

 20   Q.  Savez-vous pourquoi vous utilisiez ce système codé où vous laissiez

 21   sonner trois fois seulement avant qu'il ne réponde ?

 22   R.  C'est Ceca qui savait cela. Kameni n'avait pas le numéro. Ils

 23   cherchaient Sljivancanin. Et nos services n'étaient pas les seuls qui le

 24   cherchaient. Il y avait aussi des services étrangers qui le cherchaient.

 25   Nous avions tout particulièrement peur de chasseurs de têtes. Vous savez,

 26   il avait tout et n'importe quoi dans les Balkans, et il a été arrêté, au

 27   bout du compte. Il se cachait, en fait.

 28   Q.  Donc ça s'est passé avant qu'il ne soit arrêté, n'est-ce pas ?


Page 4783

  1   R.  Oui, avant. Pas beaucoup de temps avant, mais quand ça a commencé avec

  2   les arrestations et avec les crimes de guerre poursuivis.

  3   Q.  Vous nous avez dit que le Procureur de ce Tribunal-ci vous a demandé de

  4   témoigner dans l'affaire de Veselin Sljivancanin et vous l'avez refusé.

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire pourquoi vous avez refusé ?

  7   R.  A l'époque, on me préparait déjà pour un procès, il se peut que ce soit

  8   Seselj, je ne sais pas trop, puis il est venu cette équipe du Procureur qui

  9   travaillait sur l'affaire de Sljivancanin. J'ai refusé, et je n'ai pas

 10   donné de raison. Je savais que s'ils le voulaient, ils pouvaient demander

 11   au Tribunal une injonction à comparaître, et j'aurais dû venir ou alors

 12   j'aurais été exposé à des sanctions, mais ils n'ont pas insisté. Ils ont

 13   probablement estimé que peu importait. Mais je n'ai pas été abrupt. J'ai

 14   dit que, si possible, je préfèrerais ne pas participer à ce procès.

 15   Q.  Je sais que vous avez déjà témoigné devant ce Tribunal dans un certain

 16   nombre d'affaires.

 17   R.  Vous devez le remarquer aussi que je l'ai fait en audience publique.

 18   J'ai insisté pour que ce soit ainsi.

 19   Q.  Oui, c'est bien exact, mais j'allais vous demander pourquoi vous n'avez

 20   précisément pas souhaité témoigner dans l'affaire Sljivancanin, à la

 21   différence de la totalité des autres affaires où vous avez bel et bien

 22   témoigné ?

 23   R.  C'est quelque peu personnel. Je respecte plus cet homme-là que tous les

 24   autres. Je pense que lui aussi a été une victime des événements et des

 25   circonstances. Bien qu'il ait été condamné par ce Tribunal, moi j'ai le

 26   droit de penser ce que je pense. Il était beaucoup plus humain, cet

 27   individu. Et je précise que je ne suis pas son ami. Je ne suis même pas sa

 28   connaissance. Des fois, vous savez, vous pensez telle chose d'un homme et


Page 4784

  1   telle autre d'un autre.

  2   Mais s'ils avaient insisté et vraiment voulu, ils auraient trouvé le

  3   moyen de me faire témoigner dans cette affaire. Ils auraient rendu une

  4   injonction à comparaître, vous connaissez la procédure, ou alors j'aurais

  5   peut-être pu faire quelques mois de prison pour outrage au tribunal. Mais

  6   dans son cas de figure, j'aurais même accepté de m'exposer à ce type de

  7   choses.

  8   Q.  En d'autres termes, vous auriez préféré être condamné pour outrage au

  9   tribunal que de témoigner dans l'affaire Sljivancanin ?

 10   R.  Oui. Mais par la suite, j'aurais quand même témoigné dans tous les

 11   autres procès. C'est une question de principe. Comme c'est une question de

 12   principe pour moi de ne pas témoigner à huis clos ou huis clos partiel.

 13   Pour moi, c'est un principe. Moi je respecte les victimes, des victimes de

 14   viol, des victimes autres. Alors, si quelqu'un qui est un initié qui vient

 15   témoigner, il faut qu'il le fasse publiquement, que tout le monde

 16   l'entende. Autrement, on serait tous jugés.

 17   Q.  Dans votre témoignage éventuel dans l'affaire Sljivancanin, vous avez

 18   peut-être pensé que vous auriez de la sorte aidé le bureau du Procureur à

 19   le condamner ?

 20   R.  Ce n'est pas en ces termes-là que je résumerais ma réflexion. Je ne

 21   voulais pas y participer. Je ne voulais prendre part à rien du tout en

 22   corrélation avec cet homme. Je ne voulais pas que mon nom vienne à figurer

 23   dans un exposé des motifs pour le jugement rendu. S'ils avaient eu les

 24   moyens de me contraindre, j'aurais peut-être dû le faire. Mais moi, cet

 25   homme-là, je le voyais de façon autre. Mais personnellement, je n'ai jamais

 26   fait sa connaissance. Je l'ai vu sur les théâtres de combat, mais nous

 27   n'avons jamais eu d'échanges de propos. C'est peut-être l'influence du fait

 28   d'avoir côtoyé Kameni, cela se peut, oui. Mais toujours est-il que c'est


Page 4785

  1   ainsi que je vois les choses.

  2   Q.  Bon. Mais est-ce que vous ne vous êtes pas dit que votre témoignage

  3   éventuel dans cette affaire-là, étant donné que vous avez une haute opinion

  4   au sujet de Veselin Sljivancanin, peut-être auriez-vous pu penser que votre

  5   témoignage l'aurait aidé ? Il se peut que les Juges du Tribunal aient pu

  6   avoir une image meilleure de sa personnalité, de ce qui s'est passé là-bas

  7   ?

  8   R.  Oui. Mais ils ne m'ont pas contacté. Et si j'ai bien compris, les deux

  9   parties sont libres dans leur choix de contacter telle ou telle autre

 10   personne pour les témoignages.

 11   Q.  Vous voulez dire, la Défense ne vous a pas contacté ?

 12   R.  Je ne le sais.

 13   Q.  Mais en votre qualité de témoin, vous auriez pu dire des choses bien,

 14   positives, en tant que témoin de l'Accusation, parce que le Procureur ne

 15   vous a pas obligé à dire des choses négatives à l'égard de Sljivancanin.

 16   R.  Non. Mais ils écoutent ce que vous racontez. Il n'y a pas

 17   d'instruction. J'imagine que dans la Défense il n'y a pas d'instruction non

 18   plus. Mais moi je n'ai pas voulu prendre part du côté de l'Accusation dans

 19   ce procès. J'aurais probablement refusé de témoigner pour la Défense aussi.

 20   Je ne voulais pas y participer tout simplement. Parce que si j'avais

 21   participé à la Défense, j'aurais considéré que ce serait un peu changer de

 22   chapeau. J'ai préféré être neutre. J'ai considéré que je n'étais pas

 23   véritablement un expert ou un témoin de nature à vraiment l'aider, pas plus

 24   qu'à déterminer sa culpabilité. Je suis tout simplement participant aux

 25   événements.

 26   J'ai peut-être raconté les choses de façon un peu confuse, mais j'ai

 27   été confus moi-même. Les éléments prêtaient à confusion aussi. On était

 28   dans le trouble.


Page 4786

  1   Q.  Est-ce que vous avez témoigné dans un procès lié à Vukovar à Belgrade

  2   même ?

  3   R.  Non. Vous voulez dire pour le procès de Kameni ? Non.

  4   Q.  Mais est-ce qu'on vous a demandé en tant que témoin là-bas ?

  5   R.  Vous savez, je suis déjà sorti de la Serbie. J'ai quitté celle-ci. Ce

  6   n'est pas un secret. J'ai été au Département des Témoins et Victimes de ce

  7   Tribunal pour une délocalisation, pour aller vivre ailleurs. J'ai témoigné

  8   à Belgrade deux fois, mais c'était au sujet non pas de la Slavonie mais du

  9   Kosovo et de Sarajevo, c'est-à-dire Trnovo, et j'ai témoigné sans mesure de

 10   protection. Ils avaient un système des mesures de protection. Mais j'ai

 11   témoigné par vidéoconférence, et c'était le procès contre les Skorpions.

 12   Q.  Est-ce que vous avez témoigné dans l'affaire liée à Lovas ?

 13   R.  Non. J'ai été moi-même à Lovas avant la guerre. Les gens qui vivent à

 14   Sid et dans cette partie-là de la Krajina savent très bien qu'il y avait

 15   là-bas un point de vente qui était dirigé par un dénommé Dule, et là on

 16   pouvait acheter des électroménagers à des conditions avantageuses. J'y suis

 17   allé plusieurs fois. Je suis allé à Lovas alors que rien n'avait commencé,

 18   mais je suis allé et je suis revenu. Pendant la guerre, je ne suis jamais

 19   allé à Lovas.

 20   Q.  Ici, en page 1 de votre déclaration, vers le bas de la page, et je

 21   précise qu'en version anglaise c'est la page 2 - voilà - vous dites que

 22   Milan Lancuzanin, la fois où vous vous êtes vus à la gare ferroviaire de

 23   Ruma, a commencé son entretien avec vous en parlant d'Ovcara qui ferait

 24   l'objet d'un procès en Serbie et que le général Vasiljevic a été témoigner

 25   de façon montée à La Haye pour que la culpabilité soit transférée vers la

 26   Défense territoriale de Vukovar et Leva Supoderica, le tout pour défendre

 27   Sljivancanin et prouver la non-implication de Sljivancanin dans cette

 28   affaire.


Page 4787

  1   R.  Ce ne sont pas mes propos. J'ai essayé de relater ce que lui m'a dit.

  2   Q.  Est-ce que vous pouvez tirer un peu les choses au clair pour moi :

  3   comment avez-vous compris ce que Kameni vous a dit cette fois-là, en disant

  4   que le témoignage du général Vasiljevic est un coup monté à La Haye ?

  5   R.  Je sais, bien entendu, qui est le général Vasiljevic. Il était le

  6   directeur des services de contre-renseignement. Et bon nombre de ces

  7   participants à la guerre, à la mention faite de son nom, réagissent avec

  8   dégoût. Je ne sais pas pourquoi. Ne me posez pas cette question. J'ai suivi

  9   son témoignage dans l'affaire Milosevic. J'ai voulu suivre cela via

 10   internet. Vous savez, ces théories de complot, ça circule un peu partout.

 11   Je n'ai pas une opinion bien définie. Je peux penser que les choses se sont

 12   passées ainsi ou pas. Mais je pensais ce que Kameni pensait. Nous sommes

 13   tous convaincus là-bas de l'innocence de Sljivancanin en tout état de

 14   cause, et j'en suis moi-même convaincu. En dépit de la condamnation

 15   prononcée, j'ai le droit de penser ce que je pense.

 16   Q.  Je ne veux absolument pas mettre en doute vos opinions. Mais partant de

 17   la façon dont vous avez rédigé vous-même les choses, il découlerait une

 18   chose, à savoir que Vasiljevic -- enfin, son témoignage est un coup monté à

 19   La Haye pour faire porter le chapeau à la TO de Vukovar et prouver la non-

 20   implication de Sljivancanin.

 21   Moi, ce que je veux dire par là, pourquoi est-ce que j'ai re-cité vos

 22   propos, parce que si c'est un coup monté, si c'est monté de toutes pièces,

 23   on peut penser qu'il n'a pas témoigné de façon conforme à la vérité mais

 24   qu'il avait pour intention la présentation de la culpabilité des uns et la

 25   non-culpabilité des autres ?

 26   R.  Voyez-vous, nous avons considéré que l'Etat de Serbie et de Yougoslavie

 27   allait tout faire pour qu'aucun des officiers ne soit jugé. Et il en va de

 28   même pour ce qui est des gens de la Défense territoriale du cru. Et je


Page 4788

  1   pense qu'il y avait eu un tel souhait. Vasiljevic avait pu le faire. Un

  2   espion, c'est toujours un espion. Mais ça, c'est une opinion formulée par

  3   Kameni que je n'ai fait que relater d'après mes souvenirs. Moi aussi,

  4   j'avais pensé que ça avait plutôt l'air d'une théorie du complot.

  5   Q.  Eh bien, dans la continuation de cette même phrase, vous indiquez qu'il

  6   a même cité - là nous sommes en train de parler de Kameni aussi - qu'il a

  7   indiqué que les procès qui se déroulaient en Serbie allaient se conformer à

  8   ce type d'opinion. Alors, est-ce que j'ai bien compris que c'était une

  9   espèce de prémonition pour ce qui était de la façon dont allait se dérouler

 10   le procès relatif à Ovcara en Serbie ? Et moi, ce qui m'intéresse aussi,

 11   c'est de savoir si vous avez suivi le procès d'Ovcara qui s'est déroulé en

 12   Serbie ?

 13   R.  Partant de ce que les médias ont publié, oui, je l'ai suivi. Parce que

 14   là-bas il y avait beaucoup de gens que j'ai connus. Alors, de là à savoir

 15   s'ils allaient se conformer à ce type d'idée -- ce que je voulais dire,

 16   c'est que des personnalités marginales allaient finir par être condamnées.

 17   D'autres appellent cela des exécutants menu fretin, les grosses légumes,

 18   rien. Et c'est ce que Kameni a dit, quelque chose dans ce sens. Il avait

 19   ainsi redouté ce type de chose parce qu'il pensait de soi-même qu'il était

 20   aussi du menu fretin.

 21   Q.  Un peu plus loin, il est dit :

 22   "S'il venait à être prouvé, chose dont je ne doute pas, que les crimes ont

 23   été commis par les membres de la TO et les volontaires sans que la JNA le

 24   sache, cela libèrera Sljivancanin de toute sorte de culpabilité. Il a dit

 25   que l'Etat serbe avait pour objectif de faire en sorte que ne soient

 26   condamnés pour ce crime que des personnalités anonymes, et non pas des

 27   officiers, afin que la Troïka de Vukovar - Mrksic, Radic et Sljivancanin -

 28   ne soit pas condamnée ou qualifiée d'impliquée, et dans ce cas-là l'Etat


Page 4789

  1   serbe serait censé reconnaître son implication dans le conflit, ce qui

  2   aurait pour conséquence des réparations énormes en matière de réparations

  3   de guerre pour la République de Croatie. Et il a expliqué que nos petits-

  4   enfants vont naître comme des personnes endettées vis-à-vis de la Croatie."

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Est-ce qu'à l'époque où il a parlé de tout cela, vous vous êtes fait

  7   l'impression qu'il avait obtenu ce type d'information de quelque part ?

  8   R.  Il en savait, en tout état de cause, plus que moi. Parce que parler de

  9   ce genre de chose --

 10   Et j'ai peut-être rajouté quelques mots à moi quand j'ai re-raconté

 11   ce qu'il m'a raconté. J'ai essayé d'utiliser mes mots à moi. Je n'avais pas

 12   de dictaphone sur moi pour enregistrer tout ce qu'il disait. Mais en

 13   substance, ce qu'il a dit, c'est cela. Et pour moi, ça avait semblé être

 14   logique, du point de vue de ces réparations de guerre et du reste. Et, au

 15   final, nous avons un procès de ce genre devant la Cour internationale de

 16   justice.

 17   Q.  J'aimerais que vous expliquiez la phrase entre parenthèses. Vous dites

 18   :

 19   "Lors de mon entretien avec les inspecteurs chargés du cas d'Ovcara, j'ai

 20   eu l'impression qu'ils savaient jusqu'au moindre détail de quelle façon ce

 21   crime avait été commis. J'ai compris la chose partant des questions qui

 22   m'ont été posées. Ils m'ont décrit exactement des individus que je

 23   connaissais et le rôle qui a été le leur dans tout ceci. Et s'agissant de

 24   certains individus, ils ont également mentionné des crimes autres commis en

 25   Bosnie. Donc ils ont collecté ces informations dès la perpétration des

 26   crimes et ils ont mis cela quelque part ad acta dans des archives pour

 27   pouvoir les sortir au bout de tant d'années."

 28   Alors, ça, est-ce que c'est votre commentaire à vous ?


Page 4790

  1   R.  Oui. Voyez-vous, à Belgrade, après un procès qui s'est tenu là-bas --

  2   enfin, je n'avais pas vu d'enquêteurs du Tribunal de La Haye, jamais de ma

  3   vie jusque-là, et le juge m'avait accordé un mois de mesures de protection,

  4   mais ils n'avaient pas disposé d'unité de police adéquate. J'ai été escorté

  5   par des policiers chargés d'enquêter au sujet de crimes de guerre. Ils

  6   m'ont emmené dans un hôtel, et ceux-là ont discuté de la sorte avec moi. Je

  7   suis en train de vous raconter ce qu'il m'avait semblé être le cas.

  8   Ils connaissaient tous les détails, ils connaissaient les moindres choses,

  9   que je ne savais pas moi-même. Et j'ai rédigé ce que j'ai conclu suite à

 10   l'entretien que j'ai eu avec ces deux policiers qui, eux, étaient chargés

 11   de me protéger. Et au final, c'est eux qui m'ont fait venir ici à La Haye,

 12   qui m'ont accompagné et escorté jusqu'à La Haye en avion.

 13   Et eux, ce qui les intéressait, c'était Ovcara, Soskic et tout le reste.

 14   Ils savaient même quand est-ce que je suis allé chez lui à Krusevac pour la

 15   fête du saint patron de sa famille. Même ça, ils le savaient. Voilà

 16   pourquoi j'ai rédigé ce que j'ai dit de la sorte.

 17   Q.  A la page suivante en anglais, je vois que ces trois personnes ont

 18   proposé une version adonnée des faits comme s'ils faisaient l'objet d'une

 19   instruction de la part d'une juridiction serbe ou du Tribunal.

 20   Et vous ajoutez que Kinez a souligné le fait qu'il valait mieux de

 21   dire la vérité, mais Ceca n'était pas d'accord. Ceca a dit : Kinez, la

 22   vérité, c'est ce que nous convenons de dire à présent. Et Ceca a insisté

 23   pour éviter à tout prix toute implication de la JNA en insistant sur le

 24   fait qu'ils n'ont vu que des uniformes de la TO de Vukovar sur place.

 25   R.  Oui, c'est ce que Ceca a dit. Bien que les uniformes de la JNA ne

 26   veulent pas dire grand-chose, puisque les membres de la TO portaient les

 27   mêmes uniformes. Les volontaires.

 28   Q.   Est-ce que ceci est conforme à ce que Kameni avait dit auparavant, à


Page 4791

  1   savoir que toute responsabilité des membres de la JNA devait être évitée de

  2   sorte qu'il n'y ait pas de conséquences néfastes pour la Serbie en matière

  3   de dommages de guerre ?

  4   R.  Kameni n'aimait pas ce scénario selon lequel, s'il était condamné, il

  5   ne faudrait pas que la Serbie ait à payer des dommages. Mais il était

  6   convaincu que ça se produirait de la sorte.

  7   Q.  Quelle est la différence entre ce que Kinez avait dit, c'est-à-dire il

  8   fallait dire la vérité, et ce que Ceca avait dit indiquant que personne ne

  9   devait parler de la participation de la 

 10   JNA ?

 11   R.  Ni Ceca ni Kinez n'ont présenté leur vérité en ma présence puisque moi

 12   je ne sais pas quelle est cette vérité. Ceca a dit à plusieurs reprises :

 13   Il ne faut pas impliquer Stoparic parce qu'il n'était pas là. Bon, je n'ai

 14   même pas pensé à partir, ça aurait été ridicule. Mais personne d'eux n'a

 15   jamais dit qu'ils avaient tué qui que ce soit, même cette fois-là.

 16   Q.  Vous nous dites que cette thèse concernant les uniformes de la TO de

 17   Vukovar avait été une thèse acceptée par les trois. Est-ce que vous savez

 18   s'ils ont répété cela au cours du procès ?

 19   R.  Je n'en sais rien. Lorsque je suis allé au procès de M. Seselj, il a

 20   évoqué ce procès à un moment donné. Mais le compte rendu d'audience, hélas,

 21   je ne peux pas y avoir accès. Peut-être qu'on peut retrouver ça, c'est sur

 22   le site public, mais moi je n'ai jamais fait la recherche. Je pense que

 23   Kameni a adopté cette ligne de défense telle qu'il l'avait indiquée à

 24   l'époque.

 25   Q.  A la page suivante, vous nous dites quelle fut la conclusion -- donc ce

 26   sur quoi ils se sont mis d'accord. Vous dites qu'ils se trouvaient à une

 27   réunion au QG du SRS et que Miroljub leur avait demandé de rentrer

 28   d'urgence à Vukovar. Qu'ils étaient arrivés l'après-midi, lit-on ici, et


Page 4792

  1   qu'ils ont cherché Miroljub et qu'ils l'ont retrouvé à Ovcara. Que Kameni a

  2   essayé d'enlever l'un des prisonniers mais -- et lorsque les tueries ont

  3   commencé, Kameni a donné l'ordre de partir de là immédiatement - et je veux

  4   dire là l'ordre donné aux membres de votre unité - et Miroljub a essayé de

  5   l'en empêcher. Et que c'était ce sur quoi ils s'étaient mis d'accord et

  6   s'étaient mis d'accord sur leur récit en cas d'interrogatoire principal.

  7   Alors, suite à ce que nous lisons ici, qu'est-ce qui n'est pas exact là-

  8   dedans ?

  9   R.  Les événements d'Ovcara, ce que Miroljub a dit à Kameni, et le fait

 10   qu'ils aient sauvé ce voisin, je n'ai aucun moyen de savoir si c'est vrai

 11   ou pas. Il est vrai qu'ils venaient de Belgrade, que je leur ai parlé par

 12   téléphone et qu'ils sont revenus le soir.

 13   Tout le reste, à l'exception de ces faits-là, sont des éléments dont je

 14   n'ai pas connaissance.

 15   Il s'agit essentiellement des propos de Kameni. C'est ce que Kameni a dit,

 16   et donc tout le monde devait dire la même chose.

 17   Q.  A la page suivante, on explique les choses, et vous avez d'ailleurs

 18   ajouté une astérisque, ou des astérisques plus exactement, et au niveau de

 19   la deuxième astérisque, vous dites que c'est la raison pour laquelle ils se

 20   sont mis d'accord sur cette version des faits. Ils disent qu'ils n'ont

 21   trouvé qu membres de la TO à Ovcara et que c'était l'idée de Ceca et que

 22   cet élément a été inséré dans le récit.

 23   R.  Oui, Ceca a insisté là-dessus. Je ne peux que me livrer à des

 24   conjectures quant à ses motivations.

 25   Q.  Quand vous dites que c'était l'idée de Ceca, pour moi, ça m'a plutôt

 26   l'air de ne pas être le reflet fidèle de se qui s'est produit en réalité ?

 27   R.  Lorsqu'on regarde ces photos, j'ai reconnu Ceca. Il portait un uniforme

 28   de la JNA. C'était peut-être là l'une de ses raisons ou de ses motifs. Je


Page 4793

  1   ne peux que faire des hypothèses.

  2   Regardez la photo et vous verrez qu'il portait un nouvel uniforme de

  3   camouflage de la JNA. Tout le monde ne portait pas un tel uniforme à

  4   l'époque. Et donc, c'est lui qui a insisté pour que l'on tienne ce type de

  5   propos.

  6   Q.  Prenons l'astérisque suivant.

  7   "S'agissant de la façon dont les hommes ont été enlevés des

  8   véhicules, ils sont convenus de dire que si quelqu'un devait leur poser la

  9   question du type de véhicule dont il s'agissait, ils devaient dire des

 10   tracteurs et des remorques de tracteurs, sans faire état de véhicules de la

 11   JNA."

 12   R.  En effet. 

 13   Q.  C'était ce qu'ils étaient convenus de dire.

 14   R.  Oui. Tout ce qui relevait de la JNA, c'était l'idée de Ceca. Je ne sais

 15   pas pourquoi il a insisté sur la JNA à ce point.

 16   Q.  Vous savez, sans doute - en tout cas, si vous avez suivi le procès de

 17   Vukovar - qu'on a beaucoup insisté sur des tracteurs et des remorques de

 18   tracteurs.

 19   R.  Oui, j'ai suivi ça par le biais des médias et les médias n'ont pas

 20   couvert tous les détails, donc au procès, oui, ils ont parlé de tracteurs.

 21   Q.  Je vous pose cette question parce que vous nous dites avoir suivi le

 22   procès Ovcara à Belgrade, et probablement le procès Ovcara devant ce

 23   Tribunal, on a pratiquement toujours dit que les victimes avaient été

 24   emmenées dans des remorques de tracteurs. Vous aurez, sans doute, pu le

 25   relever.

 26   R.  Je ne me souviens pas. J'avais peu de moyens techniques me permettant

 27   de suivre ce procès. Je ne sais pas exactement quand j'ai rédigé cela.

 28   Peut-être que le procès avait déjà commencé. Ou peut-être que l'enquête


Page 4794

  1   était encore en cours. Je ne sais pas exactement.

  2   Q.  Merci, Monsieur Stoparic.

  3   M. ZIVANOVIC : [interprétation] J'ai terminé mon contre-interrogatoire.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Biersay.

  5   Mme BIERSAY : [interprétation] Nous n'avons pas de questions

  6   supplémentaires pour le moment.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien.

  8   [La Chambre de première instance se concerte]

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stoparic, voilà qui marque

 10   la fin de votre déposition devant le Tribunal. Nous vous remercions d'être

 11   venu à La Haye pour éclairer le Tribunal. Vous pouvez disposer en tant que

 12   témoin. L'huissière va vous escorter en dehors du prétoire, et nous vous

 13   souhaitons un excellent voyage de retour dans vos foyers.

 14   [Le témoin se retire]

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est levée.

 16   --- L'audience est levée à 13 heures 57 et reprendra le jeudi 16 mai

 17   2013, à 9 heures 00.

 18  

 19  

 20  

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28