Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 29 mai 2013

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde dans le

  6   prétoire et autour du prétoire.

  7   Monsieur le Greffier d'audience, s'il vous plaît, citez le numéro de

  8   l'affaire.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

 10   les Juges. Il s'agit de l'affaire IT-04-75-T, le Procureur contre Goran

 11   Hadzic.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 13   Est-ce que les parties peuvent se présenter, d'abord l'Accusation.

 14   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

 15   les Juges. Bonjour à tout le monde dans le prétoire. Alex Demirdjian pour

 16   l'Accusation, avec Indah Susanti, notre commise à l'affaire, ainsi qu'Ivana

 17   Martinovic, notre stagiaire.

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 19   Et pour la Défense.

 20   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Bonjour. Pour la Défense de M. Goran

 21   Hadzic, Zoran Zivanovic et Christopher Gosnell.

 22   Merci.

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 24   Il faut que j'informe les parties, et il faut que cela soit consigné au

 25   compte rendu également, qu'à 10 heures le Juge Mindua dois quitter la salle

 26   d'audience puisqu'il faut que --

 27   On peut faire entrer le témoin.

 28   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Monsieur le Président, il y a quelques

 


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  1   questions préliminaires que j'aimerais soulever.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui.

  3   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] D'abord, M. Stringer a fait circuler un e-

  4   mail concernant le document qui a été marqué aux fins d'identification avec

  5   le Témoin Chris Neil [comme interprété]. Et le titre manquait. Et nous

  6   demandons que cette cote soit levée, la cote aux fins d'identification,

  7   pour que le document reçoive une cote ordinaire, habituelle.

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] La Défense a des objections à

  9   soulever ?

 10   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Non.

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 12   Donc la cote aux fins d'identification sera levée. Merci.

 13   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Pour ce qui est de votre décision du 29

 14   janvier concernant le témoin suivant. La décision GH-110, Milorad Vojnovic,

 15   au paragraphe 8, vous avez dit que 13 documents ont été versés au dossier

 16   en tant que documents publics, mais dans le prétoire électronique il est

 17   dit qu'il s'agit de documents confidentiels, et vous avez demandé au bureau

 18   du Procureur de s'occuper de cela. Nous pouvons informer les parties que

 19   ces documents ne sont pas des documents confidentiels, et cela a été

 20   corrigé dans le prétoire électronique. C'est tout par rapport à cette

 21   décision.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 23   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Nous avons communiqué l'information hier

 24   aux parties pour ce qui est des documents 92 ter pour le témoin suivant.

 25   Nous avons trouvé deux documents qui avaient déjà été versés au dossier

 26   sous les numéros 65 ter. Ce sont des doublons. Il s'agit des documents 638

 27   et 639 [comme interprété], ils ont été retirés de ce recueil de documents.

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.


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  1   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] C'était tout.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic.

  3   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je propose que le

  4   témoin suivant soit informé par la Chambre de première instance concernant

  5   la teneur de l'article 90(E) de notre Règlement de procédure et de preuve.

  6   Vu la nature de sa déposition et quelques autres éléments qui pourraient

  7   être liés à sa déposition, et compte tenu également des conséquences que

  8   cela pourrait avoir pour lui.

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Demirdjian.

 10   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] C'est la première fois que j'entends cela.

 11   Le témoin peut refuser de déposer et la Chambre de première instance, selon

 12   les dispositions du Règlement, peut l'obliger à déposer. Et peut-être qu'il

 13   vaut mieux attendre, puisqu'on ne sait pas si le témoin refusera de

 14   répondre à des questions.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, Monsieur Gosnell.

 16   M. GOSNELL : [interprétation] Je serai bref, Monsieur le Président. J'ai

 17   consulté Me Zivanovic avant d'être venu au Tribunal. C'est une sorte de

 18   routine, ce sorte d'avertissement, et puisque cela n'est pas arrivé,

 19   toujours pas dans cette affaire, il vaut mieux peut-être attendre avant de

 20   l'avertir qu'il peut s'incriminer en donnant des réponses à certaines

 21   questions. En fait, il faut mieux peut-être l'avertir déjà, que cela soit

 22   clair.

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Si l'Accusation pense que -- d'après

 24   l'avis du bureau du Procureur, il n'y a pas de risque, et vous dites que le

 25   risque existe, est-ce qu'il faut que j'en déduise qu'il y aura le contre-

 26   interrogatoire ? Est-ce qu'il faut le mettre en garde avant le début du

 27   contre-interrogatoire ?

 28   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, je pense qu'il faut le


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  1   mettre en garde avant le début de l'interrogatoire principal puisque des

  2   problèmes pourraient surgir concernant d'autres témoins. Puisque dans la

  3   déclaration 92 ter, il y a des éléments qui peuvent incriminer le témoin.

  4   Puisqu'il était présent pendant la commission des crimes. Et dans les

  5   déclarations 92 ter, il y a des éléments qui pourraient l'incriminer.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

  7   [La Chambre de première instance se concerte]

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maintenant on peut faire entrer le

  9   témoin dans le prétoire.

 10   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai vérifié

 11   brièvement pour ce qui est d'autres affaires. Cette mise en garde n'a

 12   jamais été prononcée concernant d'autres témoins. Donc ce n'était pas la

 13   pratique pour ce qui est de ce témoin concernant deux affaires dans

 14   lesquelles il avait déjà témoigné, et il a déjà témoigné dans l'affaire

 15   Mrksic et dans l'affaire Seselj.

 16   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. D'abord,

 18   dites-moi si vous pouvez m'entendre dans une langue que vous comprenez ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 21   Juste un instant, s'il vous plaît.

 22   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [hors micro]

 24   [interprétation] Excusez-moi.

 25   Monsieur le Témoin, pouvez-vous nous dire votre nom et votre date de

 26   naissance.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Milorad Vojnovic. Je suis

 28   né le 15 octobre 1945 au village de Gorica, municipalité de Sipovo, la

 


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  1   République serbe.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. Vous allez prononcer la

  3   déclaration solennelle par laquelle tout témoin dit qu'il dira la vérité.

  4   Après cela, si vous fournissez des informations erronées, vous pourrez être

  5   accusé de faux témoignage. Pouvez-vous maintenant lire la déclaration

  6   solennelle, s'il vous plaît.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  8   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  9   LE TÉMOIN : MILORAD VOJNOVIC [Assermenté]

 10   [Le témoin répond par l'interprète]

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. Vous pouvez vous asseoir.

 12   Monsieur Vojnovic, permettez-moi de vous dire également que si une réponse

 13   à n'importe quelle des questions pourrait vous incriminer, si vous pensez

 14   que cela pourrait vous incriminer, vous avez le droit de le dire et de

 15   refuser de répondre à de telles questions. Si vous faites cela, la Chambre

 16   décidera si cela est justifié ou pas. La Chambre peut accepter votre refus

 17   ou peut vous obliger à répondre à de telles questions. Est-ce que vous avez

 18   compris cela ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 21   Monsieur Demirdjian, vous avez la parole.

 22   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 23   Interrogatoire principal par M. Demirdjian : 

 24   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Vojnovic.

 25   R.  Bonjour.

 26   Q.  Monsieur le Témoin, est-ce vrai que vous êtes colonel de la JNA à la

 27   retraite ?

 28   R.  Oui, je suis colonel de la JNA à la retraite.


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  1   Q.  Est-ce vrai que vous avez fait des déclarations et que vous avez

  2   témoigné dans d'autres affaires concernant les événements qui ont eu lieu

  3   en Slavonie orientale vers la fin de 1991 et début de l'année 1992 ?

  4   R.  Oui, j'ai déposé à deux reprises.

  5   Q.  Pour être plus précis, dites-nous s'il est vrai que vous avez témoigné

  6   dans les affaires Mrksic et Seselj ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  En décembre 2012, vous avez rencontré les représentants du bureau du

  9   Procureur et vous avez signé une nouvelle déclaration, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui, c'est vrai.

 11   Q.  Et cette déclaration contient des extraits de vos déclarations

 12   précédentes ainsi que de vos dépositions précédentes, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui.

 14   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Peut-on maintenant afficher le document 65

 15   ter 6374.

 16   Q.  Monsieur Vojnovic, dans quelques instants vous allez voir un document

 17   affiché à l'écran qui se trouve à droite devant vous.

 18   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci.

 19   Q.  Colonel, est-ce que vous voyez ce document à l'écran devant vous ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Pouvez-vous nous dire ce que représente ce document ?

 22   R.  C'est la déclaration du Témoin Vojnovic, Milorad. Le nom du père, de la

 23   mère, la nationalité, la religion, les langues que je parle, profession, ma

 24   profession précédente, les dates de l'entretien, quelles personnes ont

 25   participé à l'entretien, l'interprète, les noms d'autres personnes

 26   présentes à l'entretien.

 27   Q.  Merci. Est-ce que vous voyez votre signature en bas de la page affichée

 28   à l'écran ?


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  1   R.  Oui.

  2   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] La déclaration du 11 et du 12 décembre

  3   2012.

  4   Passons à la page suivante. La page numéro 2 du même document. Regardez le

  5   bas de la page.

  6   Q.  Colonel, est-ce que vous voyez vos initiales en bas de cette page ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Est-ce vrai que vous avez apposé vos initiales sur chaque page de cette

  9   déclaration ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Merci.

 12   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Passons maintenant à la dernière page.

 13   Q.  En haut de cette page, dites-nous si votre signature figure en haut de

 14   cette page et en dessous de la certification du témoin ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Merci. Colonel Vojnovic, est-ce que vous avez eu l'occasion d'examiner

 17   votre déclaration hier ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Est-ce vrai que vous avez remarqué quelques erreurs mineures que vous

 20   voudriez clarifier ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Bien. Nous allons procéder à des corrections maintenant.

 23   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] D'abord, en page 3 en anglais et en B/C/S.

 24   Et, s'il vous plaît, il faut agrandir le paragraphe numéro 5. Merci.

 25   Q.  Est-ce que vous voyez, vers la fin du paragraphe, que vous êtes parti à

 26   la retraite le 1er janvier 2001 ? C'est à ce niveau-là que vous avez voulu

 27   apporter une correction ?

 28   R.  Oui. Je suis parti à la retraite le 1er janvier 2002.


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  1   Q.  Merci pour cette clarification.

  2   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Passons maintenant à la page 4 dans les

  3   deux versions. Il faut agrandir le paragraphe numéro 8. Merci.

  4   Q.  Dans ce paragraphe 8, vous parlez du journal de guerre de la Brigade

  5   motorisée de la Garde, et je pense que vous avez voulu attirer notre

  6   attention sur les termes utilisés ici par rapport à la Brigade motorisée de

  7   la Garde. Pouvez-vous clarifier cela ?

  8   R.  "Le journal de guerre de la Brigade motorisée" concerne mon unité, la

  9   80e Brigade motorisée, et le journal de guerre de la Brigade de la Garde

 10   est quelque chose de différent. Et ce journal de guerre de la Brigade de la

 11   Garde, auquel je n'avais pas accès à l'époque, concerne ma brigade, en

 12   fait.

 13   Q.  Lorsque vous avez témoigné dans l'affaire Seselj en 2008, est-ce qu'à

 14   l'époque vous aviez accès au journal de guerre de cette Brigade motorisée

 15   de la Garde ?

 16   R.  Non.

 17   Q.  Est-ce que vous avez eu l'occasion de l'examiner hier ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Maintenant, concernant le terme qu'on voit dans la version en B/C/S,

 20   "la Brigade motorisée de la Garde," est-ce que c'est le terme qui est

 21   habituellement utilisé pour désigner ce qu'on connaît sous l'abréviation

 22   "gmtbr", l'unité de M. Mrksic ?

 23   R.  Ce n'est pas correctement consigné. Il manque une lettre devant cette

 24   abréviation. Il s'agit de la Brigade motorisée de la Garde.

 25   Q.  Cela veut dire que dans la version en B/C/S le terme n'est pas

 26   correctement consigné. Dans la version en anglais, nous avons un autre

 27   terme. Dans votre langue, dites-nous de quelle brigade il s'agit ?

 28   R.  De "la Brigade motorisée de la Garde." Et pour ce qui est de ma


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  1   brigade, elle s'appelle la 80e Brigade motorisée.

  2   Q.  Bien.

  3   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Passons maintenant à la page 20 dans la

  4   version en anglais, et c'est la page 21 dans la version en B/C/S.

  5   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète : En langue serbe, c'est "gardiska

  6   motorizovana brigada" [phon] pour la "Brigade motorisée de la Garde."

  7   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Regardons donc la page 20 en anglais et la

  8   page 21 en B/C/S. Il faut afficher le paragraphe numéro 52.

  9   Q.  Je pense qu'au niveau de ce paragraphe, vous avez demandé qu'une

 10   correction soit apportée concernant la deuxième phrase, où il est dit :

 11   "Je ne me souviens pas d'avoir donné des ordres précis à mes

 12   officiers qui étaient restés là-bas avant de me rendre à la réunion avec

 13   Mrksic".

 14   Pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit dans ce paragraphe ?

 15   R.  A l'époque où j'étais là-bas, il n'y avait aucun de mes officiers et de

 16   mes commandants présents sur place. Et plus tard, un capitaine est arrivé.

 17   Je pense qu'il s'appelle Vukic. Je l'ai averti, je lui ai montré un homme

 18   qui se trouvait dans le hangar. C'était le commandant Vukasinovic qui était

 19   l'officier le plus grand. Je lui ai dit : "Est-ce que tu vois cet officier

 20   qui est le plus grand ?" Et il m'a dit : "Oui." Je lui ai dit : "C'est le

 21   commandant Vukasinovic, et il faut que tu t'adresses à lui pour lui

 22   demander s'il a besoin d'une aide." Et Vukic m'a dit plus tard qu'il s'est

 23   adressé à Vukasinovic à une occasion pour lui demander s'il avait besoin de

 24   l'aide et il lui a répondu que non. Après une demi-heure à peu près de

 25   cela, mais je ne suis pas tout à fait certain, Vukic s'est adressé à

 26   nouveau au commandant Vukasinovic pour lui demander s'il avait besoin de

 27   l'aide. Il a répondu que non. Et l'autre a demandé s'il pouvait partir.

 28   Vukasinovic a dit qu'ils étaient libres de partir et qu'ils pouvaient


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  1   partir.

  2   J'ai déjà parlé de cela auparavant. J'ai parlé de la réunion avec le

  3   capitaine militaire Vukic, mais je ne sais pas pourquoi cela n'a pas été

  4   correctement consigné dans cette déclaration. Concernant mes dépositions

  5   antérieures, je peux vous dire que j'ai parlé de cela.

  6   Q.  Merci pour cette clarification. Nous allons parler de ces événements

  7   plus tard.

  8   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Maintenant, passons à la page 22 dans la

  9   version en B/C/S de votre déclaration. C'est la page 21 dans la version en

 10   anglais. Il faut agrandir le paragraphe 55.

 11   Q.  Colonel, je pense que vous avez fait un commentaire concernant la

 12   première phrase dans ce paragraphe, où vous avez dit : "… Dragi

 13   Vukosavljevic m'a dit que la situation était complexe." Je pense que ce

 14   terme "complexe" vous a gêné.

 15   R.  Il a dit que la situation était difficile. Ça n'a pas été bien traduit

 16   en B/C/S. Dans le hangar, la situation était difficile. Mais le terme

 17   "zamrsena" en B/C/S, pour décrire la situation, n'est pas un terme

 18   approprié. Pour décrire cette situation, je pense qu'il vaut mieux dire que

 19   la situation était difficile.

 20   Q.  Bien. Quel serait le terme approprié en B/C/S ?

 21   R.  La situation était "vague", en quelque sorte, "difficile". On ne savait

 22   pas dans quelle direction les événements se produiraient puisque la

 23   situation était difficile.

 24   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Passons à la page 23 en anglais. Et en

 25   B/C/S, c'est la page 24.

 26   Q.  Dans ce paragraphe, vous parlez de votre rencontre avec Kameni. Vous

 27   avez dit qu'après les événements qui se sont produits à Ovcara, des groupes

 28   ont été formés, des groupes qui étaient en charge de ramasser des armes qui


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  1   ne fonctionnaient pas. Vous avez voulu apporter une correction à ce niveau-

  2   là.

  3   R.  Il ne s'agissait pas des armes qui ne fonctionnaient plus. Il

  4   s'agissait des armes qui étaient "abandonnées" ou qui étaient

  5   "endommagées".

  6   Q.  Une dernière correction, au paragraphe 89.

  7   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] En page 32 dans les deux versions.

  8   Q.  Ici, on voit que le colonel Milan Belic est mentionné, de la 1ère

  9   Brigade des Prolétaires. Vous avez voulu corriger quelque chose ici.

 10   R.  Non, il n'était pas de cette Brigade des Prolétaires de la Garde. Il a

 11   été général. Il y avait général Milan Delic de la 1ère Brigade des

 12   Prolétaires de la Garde, de la 1ère Brigade mécanisée des Prolétaires de la

 13   Garde. Et colonel Belic, Milan était dans la brigade qui était déployée à

 14   Ilok. Ici, le nom de sa brigade n'est pas mentionné. Il s'agit ici de la

 15   1ère Brigade des Prolétaires de la Garde mécanisée.

 16   Q.  Bien. A l'époque, connaissiez-vous le colonel Belic ?

 17   R.  Je l'ai vu une fois à Ilok. Je ne le connais pas très bien, donc je ne

 18   peux rien vous dire sur lui. Je ne sais pas où il a servi. Je l'ai vu une

 19   fois à Ilok. Je savais qu'il était commandant là-bas, qu'il avait des

 20   tâches à accomplir. Je savais qu'il organisait la vie et le travail à Ilok

 21   après ces opérations en 1991.

 22   Q.  Bien.

 23   Colonel Vojnovic, merci d'avoir apporté ces corrections. Mis à part ces

 24   corrections, dites-nous si cette déclaration est exacte d'après vous ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Si je vous posais les mêmes questions aujourd'hui dans cette salle

 27   d'audience, est-ce que vos réponses seraient les mêmes ?

 28   R.  Oui.


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  1   Q.  Merci.

  2   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Monsieur le Président, maintenant

  3   j'aimerais que le document 65 ter 6374 soit versé au dossier, c'est la

  4   déclaration consolidée, ainsi que les pièces connexes.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Cela sera versé au dossier. Une cote

  6   sera accordée.

  7   Maître Zivanovic.

  8   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Excusez-moi, je ne soulève pas d'objection

  9   au versement de cette déclaration consolidée, mais je soulève des

 10   objections concernant certaines des pièces qui sont dans le recueil des

 11   pièces conformément à l'article 92 ter. J'ai beaucoup d'objections

 12   concernant ces pièces et j'aimerais demander à la Chambre de première

 13   instance de m'accorder un peu de temps pour que je puisse vous parler en

 14   détail de ces objections.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Demirdjian.

 16   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] C'est la première fois que nous entendons

 17   parler de cela. Je pense que c'est quelque chose qui est du ressort du

 18   contre-interrogatoire. Enfin, je ne sais pas. Mais je pense que, comme

 19   d'habitude, l'ensemble des documents en application de l'article 92 ter

 20   devraient être versés au dossier, et ensuite cela est du ressort du contre-

 21   interrogatoire.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, Maître Zivanovic.

 23   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Très brièvement, je vous dirais que parmi

 24   ces documents, nombreux sont ceux qui n'ont absolument aucun lien avec la

 25   déclaration du témoin. Par exemple, il y a de nombreux documents qui seront

 26   montrés pour la première fois au témoin. Le témoin n'est pas l'auteur des

 27   documents. Ce sont des documents qui n'avaient absolument rien à voir avec

 28   ni lui, ni son unité. Et, en ce sens, d'où mon objection -- d'où


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  1   l'objection que je soulève quant au versement au dossier de ces documents.

  2   Et je vous donnerais des précisions pour chacun des documents en question.

  3   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Excusez-moi. Ce n'est pas le moment

  4   opportun pour traiter de ce genre de chose. La Chambre de première instance

  5   a déjà indiqué que les documents qui sont présentés en annexe avec la

  6   déclaration sont tout à fait pertinents et ils peuvent être versés au

  7   dossier. Certes, si Me Zivanovic a quoi que ce soit à dire à propos de la

  8   teneur du document, il peut en parler lors du contre-interrogatoire et,

  9   d'ailleurs, poser des questions au témoin à ce sujet. Mais le témoin a déjà

 10   indiqué que pour autant qu'il s'en souvienne, ce qui figure dans la

 11   déclaration est exact. Vous avez les observations qui sont faites à propos

 12   de chaque document. Donc il s'est engagé, en ce sens qu'il a fait des

 13   observations au sujet des documents dans ladite déclaration. Donc je pense

 14   que, comme je l'ai déjà dit, ces documents font partie du jeu de documents.

 15   [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

 16   [La Chambre de première instance se concerte]

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Nous allons essayer de prendre et de

 18   rendre une décision après la première pause. Je vous remercie.

 19   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   Mais je ne pense pas que des objections aient été soulevées à propos de la

 21   déclaration, donc elle peut être versée au dossier.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est tout à fait exact.

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document 6374 de la liste 65 ter

 24   deviendra le document P1981.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 26   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci.

 27   Q.  Colonel, comme je vous l'ai indiqué, nous allons maintenant vous poser

 28   quelques questions supplémentaires à propos des sujets qui figurent dans


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  1   votre déclaration. Etant donné que votre déclaration a été versée au

  2   dossier, nous n'allons pas donc aborder cela dans tous les détails. Mais je

  3   vais vous poser des questions très précises. Vous me comprenez ?

  4   R.  Oui, tout à fait.

  5   Q.  Alors, dans un premier temps, pour redonner le contexte, est-ce que

  6   vous diriez que votre unité, la 80e Brigade motorisée, est arrivée lors de

  7   ce que je qualifierais la dernière phase des opérations de Vukovar; est-ce

  8   exact ?

  9   R.  Oui. C'était quasiment à la fin des opérations de Vukovar, c'est à ce

 10   moment-là que l'unité est arrivée dans cette zone. Et je pense qu'une

 11   partie de mon unité était arrivée vers le 6 ou le 7 dans cette zone.

 12   Q.  Et pour que tout soit bien clair, vous nous parlez du 6 et du 7, mais

 13   de quel mois s'agit-il ?

 14   R.  Non, non, non. Non, non, non. C'était le mois de novembre, bien sûr.

 15   Q.  Merci. Alors, dans cette affaire il s'agit d'un fait jugé qui fait

 16   l'objet du fait jugé numéro 108, donc il a été considéré comme jugé et

 17   admis que votre unité était placée sous le commandement de Mile Mrksic;

 18   est-ce bien exact ?

 19   R.  Oui. La majorité, ou plutôt, toute la brigade se trouvait sous son

 20   commandement. Moi j'étais son subordonné.

 21   Q.  Il y a un autre fait jugé en l'espèce - qui est le fait jugé 109, et je

 22   le dis aux fins du compte rendu d'audience - que votre chef d'état-major

 23   était Rade Danilovic et que votre chef de la sécurité était Drago

 24   Vukosavljevic.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic.

 26   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, une petite précision. Alors j'entends

 27   qu'il s'agit d'un "fait jugé". Est-ce qu'il s'agit d'un fait déjà jugé ou

 28   est-ce qu'il s'agit d'un autre fait ?


Page 5078

  1   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] J'avais, pour le témoin, dit "fait déjà

  2   admis". Mais il s'agit bel et bien d'un fait déjà jugé, certes.

  3   Q.  Donc, est-ce que vous pouvez confirmer, Colonel, que les deux noms de

  4   famille que je viens de mentionner, à savoir le nom de M. Danilovic et le

  5   nom de M. Vukosavljevic, est-ce que ces deux personnes faisaient partie de

  6   votre état-major ?

  7   R.  Oui, oui, tout à fait. Rade Danilovic était chef d'état-major. Quant à

  8   M. Vukosavljevic, il était le chef de la sécurité.

  9   Q.  Pour ce qui et de M. Vukosavljevic, est-ce que vous pourriez me dire

 10   qui était son supérieur ? Auprès de qui présentait-il ses rapports ?

 11   R.  Alors, du point de vue professionnel, il présentait des rapports à

 12   l'organe de sécurité du Groupe opérationnel sud.

 13   Q.  Fort bien. Est-ce que vous pourriez expliquer aux Juges de la Chambre

 14   comment se présentait la structure de votre brigade ? En d'autres termes,

 15   quels étaient les soldats qui se trouvaient dans votre brigade ?

 16   R.  Au sein de ma brigade, je n'avais que quelques membres ou quelques

 17   soldats d'active. Essentiellement, il s'agissait de réservistes. Par la

 18   suite, il y a eu des officiers d'active. Ces officiers d'active se sont vus

 19   attribuer le commandement des unités, mais la majorité de la brigade

 20   faisait partie des forces de réserve.

 21   Q.  Et comment est-ce qu'on peut comparer votre brigade à la brigade qui

 22   était commandée par M. Mile Mrksic, à savoir la Brigade des Gardes

 23   motorisée ?

 24   R.  Oui, il est difficile d'établir une comparaison. Car l'autre brigade

 25   disposait d'un grand nombre de membres d'active, ils avaient d'ailleurs

 26   même été renforcés par des officiers qui venaient, par exemple, de

 27   Belgrade; alors que nous, nous étions une brigade essentiellement composée

 28   de réservistes et d'officiers de réserve.


Page 5079

  1   Q.  [aucune interprétation]

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Un petit moment, je vous prie.

  3   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Oui, oui.

  4   [La Chambre de première instance se concerte]

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Demirdjian.

  6   Poursuivez, je vous en prie.

  7   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges.

  8   Q.  Colonel Vojnovic, j'allais vous demander si votre brigade disposait ou

  9   avait en son sein des membres de l'unité de la police militaire ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Et quel en était l'effectif ?

 12   R.  Bien, écoutez, cette unité était une compagnie. Il y avait deux

 13   sections de la police militaire et une section des transports. L'une de ces

 14   sections de la police militaire était subordonnée à la Brigade des Gardes -

 15   - ou avait été préalablement subordonnée à la Brigade des Gardes. Donc je

 16   dirais qu'il y avait une trentaine de personnes au sein de cette compagnie.

 17   Nous n'avions pas un effectif à 100 % parce qu'il y a une des sections qui

 18   a dû rallier une autre unité, ce qui fait que nous nous sommes retrouvés

 19   avec une section pour le transport et une section de police militaire.

 20   Q.  Et qu'en est-il de la Brigade des Gardes motorisée ? Est-ce qu'ils

 21   avaient une unité de la police militaire ?

 22   R.  Oui. Oui, oui, ils en avaient. Ils avaient une unité de la police

 23   militaire beaucoup plus large. Bon, je ne sais pas s'il y en avait une ou

 24   deux, en fait, mais le fait est qu'ils avaient au moins une unité de la

 25   police militaire. C'était une unité beaucoup plus nombreuse. Enfin, ils

 26   étaient beaucoup plus nombreux au sein de cette unité et ils étaient mieux

 27   équipés que les unités dont nous disposions.

 28   Q.  Lorsque vous nous dites que vous, vous aviez une compagnie, est-ce que


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  1   vous saviez quel était le niveau de l'unité de la police militaire de la

  2   Brigade des Gardes motorisée ?

  3   R.  Je n'en sais rien. Je n'en sais rien. Mais elle était beaucoup mieux

  4   équipée, elle avait beaucoup plus de membres, et je pense également au

  5   matériel dont ils disposaient, aux compétences qui étaient les leurs au

  6   niveau professionnel, et cetera. Vous savez, les formations n'étaient pas

  7   égales au sein de toutes les unités, car la Brigade des Gardes avait des

  8   unités de la police militaire qui étaient plus compétentes, et il

  9   s'agissait en fait d'une unité d'élite qui était non seulement mieux

 10   équipée, mais mieux formée.

 11   Q.  Au paragraphe 12 de votre déclaration, vous indiquez que vos unités

 12   n'ont pas participé directement aux opérations de combat mais étaient

 13   plutôt là pour assurer le contrôle des zones libérées. Et vous expliquez,

 14   toutefois, que certaines de vos unités ou certaines des unités qui vous

 15   avaient été resubordonnées étaient utilisées par d'autres brigades dans le

 16   cadre des combats. Est-ce que vous pourriez étoffer un peu votre propos et

 17   expliquer aux Juges de la Chambre comment est-ce que cela fonctionnait,

 18   donc, lorsque votre unité est arrivée à Vukovar ? Quand est-ce qu'elle est

 19   arrivée ? A quoi avez-vous été affecté ?

 20   R.  Il y a une tâche qui avait été confiée à mon unité, à savoir contrôler

 21   la zone, le territoire, pour faire en sorte qu'il y ait une certaine

 22   sécurité pour la population, et puis il y avait également tout l'appui

 23   logistique, lorsque cela était possible, bien entendu, pour la population.

 24   Il y a des éléments qui avaient été resubordonnés à la Brigade des Gardes

 25   et qui ont probablement participé à des opérations de combat, mais nous ne

 26   les commandions pas et ils ne nous ont pas été subordonnés avant la fin des

 27   opérations à Vukovar. C'est à ce moment-là, en fait, qu'ils sont revenus au

 28   sein de notre unité.


Page 5081

  1   Q.  Colonel Vojnovic, est-ce que vous connaissiez -- est-ce que vous avez

  2   lu ou est-ce que vous connaissiez la teneur du journal de guerre de votre

  3   brigade ?

  4   R.  Oui, tout à fait.

  5   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Est-ce que nous pourrions montrer le

  6   document 556 de la liste 65 ter, qui figure à l'onglet 46 et qui fait

  7   partie du jeu de documents en application de l'article 92 ter. Donc, page 2

  8   pour les deux versions, donc pour la version anglaise et la version B/C/S.

  9   Q.  Merci. Alors, dans les deux versions, vous voyez en haut les deux mots

 10   journal de guerre, 80e mtbr, donc 80e Brigade motorisée, 9 novembre 1991 à

 11   19 novembre 1991. Vous voyez tout cela ?

 12   R.  Oui, oui. Oui, oui, je le vois clairement. Mais pour ce qui est de la

 13   partie manuscrite, ce n'est pas très, très clair. Mais d'après mes

 14   souvenirs, je sais que le 2e Bataillon motorisé était allé à Tovarnik. Et

 15   le 2e Bataillon, et cela est valable pour le Bataillon PVO tout comme le

 16   105e Bataillon, ils sont allés à Tovarnik.

 17   Q.  Alors, vous voyez, il est question de 1er mtb, 2e mtb. A quoi

 18   correspondent les initiales "mtb" ?

 19   R.  Il s'agit du bataillon motorisé.

 20   Q.  Alors je remarque qu'il y a une erreur dans la version anglaise, parce

 21   qu'il est question de "brigade motorisée". Nous allons corriger cette

 22   erreur et remplacer cela par "bataillon motorisé". Est-ce que vous êtes en

 23   mesure de constater quel fut le déploiement pour le 2e Bataillon motorisé ?

 24   Est-ce que vous souhaitez que nous agrandissions un peu le texte ?

 25   R.  Oui, oui, ce ne serait pas de refus.

 26   Q.  Vous voyez maintenant ?

 27   R.  Oui, oui. Il a été déployé pour assurer la sécurité du village de

 28   Tovarnik, il s'agit du 2e Bataillon motorisé. Quant au 1er Bataillon


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  1   motorisé, le 1er mtb, il a été engagé auprès de la 1ère Brigade motorisée,

  2   mais aucun de ces bataillons ne nous était subordonné à l'époque.

  3   Q.  Donc le 1er et le 2e Bataillons sont affectés à la tâche de la

  4   sécurité. C'est ce que vous nous aviez dit un peu plus tôt, lorsque vous

  5   nous avez parlé des affectations de vos bataillons ?

  6   R.  Oui, c'est exact.

  7   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire, et surtout dire aux Juges de la

  8   Chambre de première instance, qui a écrit ces textes dans le journal de

  9   guerre ?

 10   R.  Ecoutez, au vu de mon expérience, en règle générale, c'était un organe

 11   chargé des opérations, ou un organe opérationnel, mais je vois qu'un

 12   capitaine de réserve était la personne qui a essentiellement tenu ce

 13   journal. Je ne me souviens plus de son nom. Je pense qu'il était soit de

 14   Raca, soit de Topola. C'était un ingénieur. C'était quelqu'un bien. C'était

 15   un officier de réserve. Il a tenu ce journal de façon tout à fait

 16   responsable et dans la mesure de ses moyens.

 17   Q.  Et nous voyons qu'entre le 9 et le 19 novembre 1991, puisqu'il s'agit

 18   de la date de cette page, alors où est-ce que se trouvait ce journal de

 19   bord ?

 20   R.  Il se trouvait au QG du commandement de la brigade.

 21   Q.  Au paragraphe 12, vous nous dites que votre commandement, ou le QG de

 22   votre commandement, se trouvait à Negoslavci, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui, c'est exact.

 24   Q.  J'aimerais vous demander de nous indiquer où cela se trouve sur une

 25   photographie aérienne.

 26   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] J'aimerais que le document de la liste 65

 27   ter 6282, qui se trouve à l'onglet 63, soit affiché.

 28   Q.  Dans un petit moment, Colonel, je vais vous demander de nous indiquer


Page 5083

  1   sur cette photographie aérienne qui va apparaître sur votre écran, de nous

  2   indiquer où se trouve ce village, avec l'aide de Mme l'Huissière.

  3   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Alors, est-ce que nous pourrions agrandir

  4   un peu, je vous prie.

  5   Q.  Colonel, est-ce qu'on vous a donné la possibilité de consulter cette

  6   photographie aérienne avant que vous n'entriez dans le prétoire ?

  7   R.  Non. Non, non. Mon poste de commandement, lorsque je suis arrivé à

  8   Negoslavci, m'avait été donné par le colonel Mrksic. Il se trouvait à la

  9   gauche en direction de Vukovar. C'était la dernière maison. Donc, environ

 10   ici. Donc c'est la dernière maison ou peut-être l'avant-dernière maison, si

 11   mes souvenirs sont exacts, lorsque l'on se tourne vers la direction de

 12   Vukovar.

 13   Q.  Mme l'Huissière va vous remettre un stylet, qui vous permettra

 14   d'inscrire ce que vous voulez inscrire directement sur l'écran.

 15   R.  Voilà, je pense que c'est ici que se trouvait cette maison. Voilà.

 16   Quelque part par là. C'était la dernière maison sur la gauche lorsque l'on

 17   regarde vers Vukovar. Je n'ai pas utilisé le stylet à bon escient, mais

 18   bon, c'est une maison qui se trouvait sur la gauche. C'était une maison

 19   abandonnée. Il y avait une grande pièce à l'intérieur, et c'est là que nous

 20   étions basés.

 21   Q.  Est-ce que vous pourriez écrire le chiffre 80 à côté du point que vous

 22   venez d'apposer sur la carte.

 23   R.  [Le témoin s'exécute]

 24   Q.  Fort bien. Et est-ce que vous pourriez nous indiquer de façon

 25   approximative où se trouvait le poste de commandement du Groupe

 26   opérationnel sud à Negoslavci ?

 27   R.  Je pense que le poste de commandement du Groupe opérationnel sud se

 28   trouvait un peu au-delà de ce carrefour. Un peu vers le bas, peut-être au


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  1   niveau du deuxième.

  2   Q.  Est-ce que vous pourriez écrire les lettres OG.

  3   R.  [Le témoin s'exécute]

  4   Q.  Et est-ce que cela se situait sur la rue principale ou sur une rue

  5   latérale ?

  6   R.  Non, non, c'était sur la rue principale, tout comme mon poste de

  7   commandement. Donc mon poste de commandement était plus près de Vukovar, à

  8   quelque 3 ou 4 kilomètres. Et il y a en fait la même distance entre

  9   Negoslavci et Vukovar.

 10   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire quelle était la distance entre les

 11   deux postes de commandement, donc le poste de commandement du Groupe

 12   opérationnel sud et le poste de commandement de la 80e Brigade motorisée ?

 13   R.  Je n'ai pas compris votre question.

 14   Q.  Excusez-moi. Je vais la reformuler. Est-ce que vous pourriez nous dire

 15   quelle était la distance entre votre poste de commandement, donc le poste

 16   de commandement de la 80e Brigade motorisée, et le poste de commandement du

 17   Groupe opérationnel sud ?

 18   R.  Je pense qu'il n'y avait pas plus de 500 mètres entre les deux postes,

 19   300, 400, 500 mètres, grand maximum. Donc les deux se trouvaient sur la rue

 20   principale, mais le poste de commandement du Groupe opérationnel sud se

 21   trouvait dans une zone qui était un peu plus urbaine, dans une maison qui

 22   était en meilleur état. Ce qui fait que, bon, les conditions étaient un peu

 23   meilleures pour l'ensemble de ce commandement.

 24   Q.  Fort bien. Ce matin nous allons parler des événements à Ovcara, mais

 25   étant donné que nous avons cette photographie aérienne sur nos écrans, est-

 26   ce que vous êtes en mesure de nous indiquer où se trouve Ovcara ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Alors je sais que 20 années se sont écoulées depuis, mais est-ce que


Page 5085

  1   vous pourriez nous dire approximativement quelle était la distance entre

  2   Ovcara et le poste de commandement du Groupe opérationnel sud ?

  3   R.  Ecoutez, cela ne dépassait pas 2 kilomètres.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je souhaiterais qu'il soit indiqué au

  5   compte rendu d'audience que M. le Juge Mindua a quitté le prétoire et que

  6   nous siégeons en application de l'article 15 bis. Merci.

  7   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je vous remercie.

  8   Q.  Etes-vous en mesure de nous dire ou de nous montrer sur cette

  9   photographie quel est l'itinéraire que vous avez emprunté pour aller

 10   d'Ovcara jusqu'au poste de commandement du groupe opérationnel l'après-midi

 11   du 20 novembre ? Bon, ce n'est pas la peine d'être d'une précision absolue.

 12   Parce que je sais que l'image n'est pas très précise, la photographie

 13   aérienne.

 14   R.  Alors, voilà, il y a une route qui relie le poste de commandement du

 15   groupe opérationnel vers Ovcara. Puis, sur la partie supérieure, il y a une

 16   route qui part de Sotin et qui va jusqu'à Ovcara, en passant vers le haut

 17   donc. Donc vous pouvez aller à Ovcara à partir de deux ou trois directions.

 18   Depuis Negoslavci, et alors vous allez ensuite vers Vukovar, Jakubovaci. Il

 19   y a également des chemins de terre qui ne sont pas indiqués sur cette

 20   photographie, mais ils étaient là, et ces chemins de terre, en fait, ils

 21   vont vers Jakubovaci.

 22   Q.  Oui.

 23   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement au

 24   dossier de cette photographie aérienne.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Cela sera fait.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P1982.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 28   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]


Page 5086

  1   Q.  Colonel, nous allons maintenant aborder un autre sujet. Car au

  2   paragraphe 7 de votre déclaration, vous parlez de la question des

  3   volontaires et vous indiquez que les volontaires n'étaient pas subordonnés

  4   à votre brigade. Toutefois, vous indiquez que des personnes venant de la

  5   Serbie, et vous donnez la zone de Sumadija, vous dites que ces personnes

  6   ont dû partir quelques jours après parce que ce qui les intéressait

  7   essentiellement, c'était le pillage. Alors j'aimerais que vous expliquiez

  8   aux Juges de la Chambre, dans un premier temps, comment vous avez été

  9   informé de la présence de ces personnes dans cette zone ?

 10   R.  Oui. Jusqu'à ce moment-là il n'y avait pas de volontaires au sein de ma

 11   brigade, mais après la libération de Vukovar il y a des groupes non

 12   officiels qui sont arrivés ici et là afin de prêter main-forte ou de

 13   fournir une assistance, une aide, aux habitants de Vukovar pour, par

 14   exemple, réparer certaines choses. Mais leur intention n'était pas de

 15   rallier l'unité et de se placer sous le contrôle de cette unité. Ce qui les

 16   intéressait, c'était d'obtenir ce qu'ils pouvaient obtenir et de piller.

 17   Moi je ne peux pas vous dire exactement d'où venaient ces groupes, mais ils

 18   venaient essentiellement de Sumadija, et il y avait sept à huit personnes

 19   dans chaque groupe. Mon commandant m'avait dit que nous devrions nous

 20   attendre à l'arrivée de ces groupes. Et lorsqu'ils sont arrivés, nous avons

 21   réquisitionné un autocar et nous les avons renvoyés dans un premier temps à

 22   Sremska Mitrovica, puis ensuite aux endroits d'où ils venaient. En fait,

 23   nous ne les avons pas renvoyés. Nous nous sommes contentés de mettre à leur

 24   disposition un moyen de transport et puis ils sont repartis tout seuls.

 25   Q.  Fort bien. J'aimerais maintenant passer à la période qui correspond à

 26   la chute de Vukovar. Il s'agit du paragraphe 31 de votre déclaration. Et

 27   vous expliquez que lors de la chute de Vukovar, votre brigade a participé à

 28   l'évacuation de certains groupes de la zone, et vous mentionnez un groupe


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  1   qui était dirigé par Filip Karaula. Est-ce que vous vous en souvenez de

  2   cela ?

  3   R.  Oui. Il s'agissait d'un groupe de forces armées croates, les HDZ. Il y

  4   avait environ un effectif d'une centaine de personnes. Ils se sont battus

  5   férocement contre nos forces à Mitnica et ont fini par se rendre. Cette

  6   unité avait à sa tête, je pense, quelqu'un qui s'appelait Filip, mais son

  7   nom de famille était Karaula. Donc cette unité comportait un effectif d'une

  8   centaine d'hommes. Nous étions là pour nous occuper de ce groupe, et

  9   j'avais donc affecté des officiers à cette tâche jusqu'au jour suivant,

 10   lorsqu'ils ont été transférés à Sremska Mitrovica dans une sorte de prison.

 11   Et il n'y a pas eu de problèmes. Nous n'avons eu aucun problème avec ces

 12   personnes que nous avons remises là où elles devaient aller.

 13   Q.  Merci. J'aimerais vous poser maintenant quelques questions sur cet

 14   événement. Tout d'abord, qui vous a informé ou vous a attribué cette tâche,

 15   donc, de vous occuper de ce groupe mené par Karaula ?

 16   R.  Je ne sais pas qui nous avait confié cette tâche, mais c'est une tâche

 17   qui nous a été confiée. Nous étions supposés assurer la sécurité de ce

 18   groupe et l'escorter à Sremska Mitrovica. Je n'étais pas au QG lorsque cet

 19   ordre nous a été donné, mais j'ai accepté le commandement de ces

 20   opérations. Et je n'ai pas remis cet ordre en question. Nous avons

 21   simplement effectué ce travail de manière professionnelle en tant que

 22   soldats, en nous assurant qu'il n'y aurait pas d'incident lors du transfert

 23   de ce groupe.

 24   Q.  Avant d'aller à Sremska Mitrovica -- est-ce que ce groupe est allé

 25   directement à Sremska Mitrovica ?

 26   R.  Oui. Les soldats ont été transportés directement à Sremska Mitrovica,

 27   et la sécurité de ce groupe a été assurée par Vezmarovic. Il était à la

 28   tête du peloton de la police militaire dans mon unité. Il y avait également


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  1   d'autres CO de ma brigade, mais j'avoue que je ne me souviens pas de leurs

  2   noms. Il y avait également des officiers commandants, mais je ne sais pas.

  3   En réalité, je ne me souviens pas de leurs noms.

  4   Q.  Bien. Pour ce qui est de ce point, j'aimerais maintenant que vous

  5   jetiez un œil sur le journal de guerre de votre brigade. Et les pages

  6   manuscrites, j'espère que cela sera suffisamment clair pour que nous

  7   puissions faire des commentaires.

  8   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Il s'agit à nouveau du document 556 de la

  9   liste 65 ter, à l'onglet 46. Je vous demanderais d'aller à la page 14 dans

 10   les deux versions, anglaise et B/C/S. Pour ce qui est de la version

 11   anglaise, cela se trouve en bas de la page; alors que pour la version

 12   B/C/S, cela se trouve vers le milieu de la page de cet onglet 14. Oui.

 13   Merci. Merci. Est-ce que nous pourrions nous décaler légèrement vers le

 14   droit, s'il vous plaît. Surtout à l'attention du témoin.

 15   Q.  Colonel, est-ce que vous voyez cette petite note tout à fait à droite

 16   de la page ?

 17   R.  Oui. Oui, oui. Mais ce n'est pas lisible.

 18   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait zoomer sur cette

 19   note. Encore un peu plus -- oui, tout à fait. Encore un tout petit peu.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 21   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 22   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire ce qu'indique cette note?

 23   R.  Eh bien, si j'arrive à lire correctement, il est dit : "Vukic" -- non,

 24   pardon, "Vukovar a été libérée. A 12 heures, les combats se sont arrêtés."

 25   Q.  Merci.

 26   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Nous pouvons afficher donc le document

 27   normalement maintenant. Et je vous demanderais de repasser à la page 14,

 28   vers la ligne 10.


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  1   Q.  Vous voyez, donc, il y a quelque chose ici sur le côté gauche où nous

  2   voyons une date. Dans la version B/C/S, on parle du 17 [comme interprété]

  3   novembre. Il s'agit donc de la ligne 1 410. Est-ce que vous voyez donc ce

  4   qui figure à cette ligne 1 410 ?

  5   R.  Oui. Je vois le chiffre, mais je ne peux pas vraiment le lire.

  6   Q.  Bien.

  7   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait zoomer un petit

  8   peu plus là-dessus.

  9   Q.  Est-ce que vous pouvez maintenant voir la phrase qui commence par :

 10   "Tous les officiers de la brigade et certains des soldats," et cetera, "ont

 11   reçu l'ordre de se mettre en formation," et cetera.

 12   Est-ce que vous voyez cette phrase ?

 13   R.  Non, je ne peux pas vraiment la lire.

 14   Q.  Est-ce que vous voyez l'heure sur votre écran ?

 15   R.  Oui, oui, 14 heures 10. Je vois maintenant, oui.

 16   Q.  Est-ce que vous voyez maintenant la phrase qui dit :

 17   "Tous sont allés à la ferme Ovcara à Vukovar pour y établir et installer un

 18   camp pour recevoir les prisonniers, les membres de la ZNG et du MUP croate

 19   du secteur de Mitnica."

 20   Est-ce que vous voyez cela ?

 21   R.  Non, je ne peux pas réellement le voir.

 22   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait zoomer sur le

 23   centre de cette page.

 24   Q.  Juste à côté de 1410. Là, ce paragraphe. Il y a un paragraphe de cinq

 25   lignes.

 26   R.  Oui. Oui, je le vois. Oui, un ordre nous a été donné pour que tous les

 27   officiers de brigade se mettent en rang et que la 1ère Compagnie -- et le

 28   1er Peloton de Police militaire -- en fait, oui, je sais ce qui s'est


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  1   passé. Cet ordre nous est arrivé. Les officiers se sont rendus là, se sont

  2   mis en rang à Ovcara, et on leur a confié la tâche d'assurer la sécurité

  3   des prisonniers venant de Mitnica, donc pour assurer leur sécurité et pour

  4   les remettre à Sremska Mitrovica. C'est probablement ce qui est dit, mais

  5   je ne peux pas réellement lire. Et cela, je l'ai déjà expliqué, ce qui

  6   concerne le groupe. Il s'agissait de Filip Karaula et de son unité. Et ils

  7   se sont battus à Mitnica.

  8   Q.  Bien. Maintenant il vaudrait mieux que nous faisions appel à votre

  9   mémoire dans cette affaire. Est-ce que vous vous souvenez de la raison pour

 10   laquelle le hangar d'Ovcara a été choisi -- pardon, pas le hangar, mais la

 11   ferme d'Ovcara a été choisie ?

 12   R.  Eh bien, je pense que c'était le seul endroit dans la région qui

 13   convenait au logement des prisonniers. Nous savions qu'ils n'y resteraient

 14   pas longtemps. C'était un endroit isolé. C'était un hangar avec un toit, et

 15   c'était vraiment le seul endroit où l'on pouvait mettre un nombre important

 16   de prisonniers.

 17   Q.  Très bien. Nous allons maintenant passer aux événements de -- en fait,

 18   avant de faire cela, vous nous avez dit que vous n'aviez pas de problèmes

 19   avec ce groupe, le groupe de Karaula ?

 20   R.  Non. Une fois que nous avons pris les choses en main, il n'y a pas eu

 21   de problèmes. Ils se sont très bien comportés. On leur a dit de ne rien

 22   faire, de ne pas essayer de faire quoi que ce soit, et que s'ils essayaient

 23   de faire quoi que ce soit, les conséquences seraient terribles. Ils n'ont

 24   pas essayé de résister, ni d'offrir de résistance ou de fuir. Et le

 25   commandant de l'unité, Filip Karaula, a été mis au courant de tout cela.

 26   Donc ces personnes ont acquiescé. Ils n'ont pas été battus non plus. Ces

 27   personnes ont passé la nuit dans le hangar, et le lendemain dans la soirée

 28   ils ont été déplacés à Sremska Mitrovica.


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  1   Q.  Merci. Est-ce que vous savez exactement où ces personnes ont été

  2   transférées à Sremska Mitrovica ?

  3   R.  Non. Je ne sais pas s'ils ont été envoyés en prison directement ou dans

  4   des casernes. Je sais simplement qu'ils ont été emmenés à Sremska

  5   Mitrovica. Et j'ai entendu par la suite qu'ils avaient été mis en prison,

  6   mais je n'ai pas vérifié la véracité de cela.

  7   Q.  Très bine. Donc nous allons maintenant passer aux événements du 20

  8   novembre. Dans votre déclaration, aux paragraphes 36 et suivants, vous

  9   expliquez les événements dans le détail. Et vous expliquez au paragraphe 37

 10   que lorsque vous êtes arrivé à Ovcara ce jour-là, vous avez vu des gens

 11   descendre des cars et être battus et frappés. A ce moment-là, qui était

 12   chargé et avait la responsabilité du village d'Ovcara ?

 13   R.  J'étais à Sotin. Je rendais visite à une unité qui faisait partie de ma

 14   brigade, et j'y ai passé un certain temps avec les hommes. Je ne me

 15   souviens pas exactement à quelle heure, mais je sais qu'il faisait encore

 16   jour lorsque je me suis dirigé vers le poste de commandement. Et, en route,

 17   m'est venue l'idée d'aller à Ovcara pour aller rendre visite au commandant

 18   du bataillon d'artillerie légère de l'artillerie antiaérienne, le capitaine

 19   Marcek. Et lorsque je suis arrivé au poste de commandement, il est venu me

 20   voir pour me rendre compte. Et j'ai vu d'un seul coup arriver des cars qui

 21   se sont dirigés vers le hangar d'Ovcara. Je ne savais pas exactement d'où

 22   venaient ces cars, qui les conduisait. Nous n'étions pas au courant de

 23   cela. Et je n'ai pas attendu que Marcek termine son rapport, je me suis

 24   dirigé vers ce hangar pour voir ce qui se passait. J'ai vu deux ou trois

 25   cars qui étaient stationnés à cet endroit. Certains cars commençaient déjà

 26   à partir. J'ai vu des gens descendre des cars. Je ne savais pas de qui il

 27   s'agissait, si c'étaient des prisonniers ou pas. Et ensuite, devant ce

 28   hangar il y avait une dizaine ou une quinzaine de soldats, pour la plupart


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  1   venant de la Défense territoriale, qui étaient donc en rang. Oui, la

  2   Défense territoriale. Et les hommes, donc, devaient courir et ils devaient

  3   passer une double haie et étaient frappés, et ces hommes se connaissaient.

  4   Ils connaissaient le nom des autres. J'ai essayé de protéger ces hommes

  5   comme je le pouvais. J'ai essayé de les défendre, d'empêcher qu'on ne les

  6   frappe, si c'étaient des prisonniers. Mais certaines de ces personnes

  7   disaient : "Mais pourquoi est-ce que vous faites cela ? Ce ne sont pas vos

  8   prisonniers. Vous n'avez rien à voir avez eux. Ce sont des prisonniers."

  9   Mais indépendamment de cette situation désagréable, j'ai vraiment essayé de

 10   protéger ces hommes dans la mesure du possible et je me suis exposé

 11   également à certaines choses désagréables. Marcek est également venu me

 12   rejoindre à ce moment-là. Il m'attendait et il a fini par me rejoindre et

 13   est venu m'aider.

 14   Et, en fin de compte, ces hommes sont entrés dans le hangar. Je les y ai

 15   suivis. J'ai vu qu'il y avait un groupe important de soldats. Enfin,

 16   soldats, ce que je veux dire, ce sont des prisonniers. Certains portaient

 17   un uniforme militaire; d'autres, des uniformes militaires ou une partie

 18   d'uniforme militaire; ou certains portaient des vêtements d'hôpitaux, des

 19   bottes militaires. Enfin, il y avait toutes sortes de vêtements et

 20   d'uniformes. Je ne pouvais pas réellement les identifier. Il y avait une

 21   corde, et dans le hangar ils ont été séparés en groupe. Et il y avait des

 22   machines d'un côté du hangar. Il s'agissait probablement d'un hangar pour

 23   produits agricoles. Donc nous étions là. J'ai observé la situation et j'ai

 24   vu qu'il y avait une trentaine ou une quarantaine de membres de la Défense

 25   territoriale, et j'ai remarqué deux d'entre eux, essentiellement, qui

 26   semblaient être des hommes très énergiques, qui avaient un air de

 27   commandant. Et c'était la première fois que je voyais Stanko Vujanovic, et

 28   l'un d'entre eux était Miomir Vujo. Et ensuite, j'ai appris qu'ils étaient


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  1   responsables dans ce lieu.

  2   Q.  Je vais vous arrêter une seconde parce que vous nous avez donné là

  3   beaucoup d'informations et je voudrais que l'on reprenne cela point par

  4   point. Au départ, donc, je vous avais demander à qui incombait la

  5   responsabilité de cette ferme Ovcara, et vous avez m'avez dit il y a un

  6   instant que vous étiez venu rendre visite à Jan Marcek qui était basé là.

  7   Pourriez-vous préciser un petit peu son domaine de responsabilité ?

  8   R.  Oui. Laissez-moi expliquer. Laissez-moi tout d'abord terminer ma

  9   réponse, et ensuite je vous parlerai du domaine de responsabilité.

 10   Marcek m'a rejoint et a pu y mettre un certain ordre. Je suis entré

 11   dans le hangar et j'ai parlé au major Vukasinovic, qui était là debout au

 12   milieu. Il était très grand, entouré par un groupe d'hommes. Je ne pourrais

 13   pas vous dire de qui il s'agissait, mais ils portaient des uniformes de la

 14   JNA. Je lui ai demandé qui étaient ces personnes, d'où elles venaient, et

 15   il m'a répondu qu'il s'agissait des prisonniers venant de l'hôpital. Et

 16   c'était la première fois que j'entendais parler de cela. Je l'ai donc vu

 17   là.

 18   Et entre-temps, je ne sais pas comment les choses se sont faites, mais mon

 19   capitaine, le capitaine Vukic, m'a rejoint. Je pense que quelqu'un lui

 20   avait probablement dit ce qui se passait. C'était un capitaine de réserve.

 21   Il est venu avec une escadre de cinq ou six personnes. Quelqu'un lui a dit

 22   que j'étais en danger, et donc on les a envoyés me retrouver. Et j'étais

 23   sur le point de partir, parce que je devais me rendre à une réunion

 24   d'information avec M. Mrksic, et j'ai donc vu le capitaine Vukic. Je lui ai

 25   montré du doigt le major Vukasinovic et je lui ai dit de s'adresser à lui

 26   s'il avait besoin d'aide, parce que la situation semblait réellement

 27   complexe. Les choses n'étaient pas claires. Et Vukic m'a dit par la suite

 28   qu'il avait pris contact avec le major Vukasinovic en lui demandant : "Est-


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  1   ce que vous avez besoin d'aide ? Parce que mon commandant m'a demandé de

  2   prendre contact avec vous." Il a répondu : "Non. Vous pouvez partir. Vous

  3   pouvez vous en aller." Il n'est pas parti, mais il a observé la situation

  4   dans le hangar pendant une heure. Et puis, il est revenu vers le major

  5   Vukasinovic une heure plus tard pour lui demander à nouveau s'il avait

  6   besoin d'aide. Et le major Vukasinovic lui a dit : "Non, je n'ai pas besoin

  7   d'aide du tout. Vous êtes tout à fait libre de vous en aller."

  8   Maintenant, pour ce qui est du domaine de responsabilité, Marcek était là

  9   au poste de commandement parce que les postes de commandement avaient déjà

 10   été attribués. Cela faisait partie de son secteur. Et c'était également un

 11   domaine de responsabilité de ma brigade, en partie. Mais tous les postes de

 12   commandement qui étaient là -- dans la mesure où il n'y avait pas de

 13   résistance organisée, il n'y avait pas de lutte puisque Vukovar avait été

 14   libérée, ce qui a pu se passer, c'est qu'il y ait eu des raids de commando,

 15   et des gens étaient encore au poste de commandement pour garder ces axes et

 16   pour défendre la région contre ces raids de commando.

 17   Il n'y avait pas de civils, sauf peut-être pour quelques-uns qui

 18   étaient dans les coopératives. Mais permettez-moi d'expliquer une chose :

 19   l'attribution des domaines de responsabilité était très claire. Mon

 20   supérieur me donnait des responsabilités. Ce n'est que mon officier

 21   supérieur qui pouvait entrer dans mon domaine de responsabilité sans avoir

 22   à me demander l'autorisation. Il pouvait faire ce qu'il voulait parce qu'il

 23   était mon supérieur et qu'il assumait la responsabilité de ceci. Tous les

 24   autres officiers, tous les autres personnels, conformément aux règles de

 25   service, devaient me rendre compte. Et ensuite, nous devions coordonner nos

 26   opérations pour éviter des incidents et des tirs ennemis, et cetera.

 27   Donc, dans ce cas, la personne à qui était attribuée la responsabilité de

 28   la région se donnait également le droit d'entrer dans ce domaine de


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  1   responsabilité sans mon approbation. Et il pouvait ensuite faire cela sans

  2   me le demander parce que je ne pouvais pas l'autoriser ou lui interdire

  3   d'entrer dans ce domaine de responsabilité, puisque mon domaine de

  4   responsabilité faisait partie du domaine de responsabilité de l'opération

  5   Groupe sud. Nous avons donc sécurisé la région, contrôlé et assuré le suivi

  6   de ces régions et de ces lieux particuliers.

  7   Q.  Et vous indiquiez que le major Vukasinovic était dans le hangar, et

  8   dans votre déclaration vous précisez qu'il faisait partie de la Brigade des

  9   Gardes - il s'agit du paragraphe 46 - et il était donc major. Est-ce que

 10   vous pouvez nous dire et dire à la Cour quel était le statut des opérations

 11   du Groupe sud ce jour-là ?

 12   R.  Il s'agissait du groupe le plus important et le commandant de ce Groupe

 13   opérationnel sud et de toutes les unités de la région qui étaient supposées

 14   lui être subordonnées. Il émettait également des ordres à l'attention des

 15   unités en spécifiant les activités qu'elles devaient mener.

 16   Et pour ce qui est du major Vukasinovic, il était également l'adjoint

 17   au chef de la sécurité du Groupe opérationnel sud, et il était également

 18   avec le major Sljivancanin.

 19   Q.  Très bien. Vous nous avez donné deux noms un petit peu plus tôt au

 20   paragraphe 42 de votre déclaration. Et vous avez également dit que

 21   Vukasinovic en particulier semblait être le commandant en chef. Pourriez-

 22   vous nous dire comment vous en êtes arrivé à cette conclusion ?

 23   R.  Je les ai vus, tous les deux. C'était la première fois que je les

 24   voyais. Leur langage corporel, leur façon de bouger, leur manière et leur

 25   comportement agressif, le fait que tous deux étaient armés -- je ne peux

 26   pas réellement dire qu'ils aient donné des ordres, mais ils se sont parlé,

 27   ont parlé à d'autres soldats, et j'ai pu constater que les autres membres

 28   de la Défense territoriale qui étaient sur place leur obéissaient. Stanko


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  1   était réellement très grand. Il portait une casquette et parcourait le

  2   hangar. Miroljub était plus petit, portait un pull gris et il donnait des

  3   ordres. Je ne peux pas réellement vous dire de quel type d'ordres il

  4   s'agissait. Je n'ai pas vraiment fait très attention. Je ne pouvais pas

  5   entendre, mais il semblait qu'ils étaient responsables et que les autres

  6   leur obéissaient. C'était là ma conclusion. Et il s'est avéré finalement

  7   qu'ils avaient quelques unités à Leva Supoderica, et ceci a été confirmé

  8   par le Tribunal et par la cour à Belgrade.

  9   Q.  Et avant que nous ne fassions la pause, je voudrais en terminer sur ce

 10   point. Vous avez dit un petit peu plus tard, dans le paragraphe 61 de votre

 11   déclaration, qu'avant que la Brigade des Gardes motorisée ne partent à

 12   Belgrade, vous avez eu une réunion avec --

 13   L'INTERPRÈTE : Un nom que l'interprète n'a pas saisi.

 14   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 15   Q.  -- et il vous a présenté à Vujanovic et à Vujovic. Et je voudrais

 16   maintenant vous demander de dire à la Cour si, après avoir été présenté à

 17   ces personnes, vous avez eu l'occasion de revoir Vujovic et Vujanovic ?

 18   R.  Avant qu'ils ne partent, il y avait une pièce à Velepromet - et je ne

 19   peux pas vous dire de quel genre de pièce il s'agissait - mais il y a eu

 20   une réunion avec quelques membres de la Défense territoriale. Il y avait

 21   une trentaine ou une quarantaine de personnes présentes dans cette salle.

 22   Et je ne sais pas pourquoi j'étais là, mais on m'avait dit que je devais y

 23   être. J'y ai vu Sljivancanin, également Stanko et quelqu'un d'autre et

 24   d'autres personnes dont je ne me souviens pas réellement, mais Sljivancanin

 25   leur a dit qui j'étais, pourquoi j'étais là, et que je serais le commandant

 26   de la ville. C'est là où pour la première fois je les ai vus. Je ne les ai

 27   pas rencontrés très souvent. Miroljub est venu au poste de commandement une

 28   ou deux fois pour prendre quelques dispositions, il y avait certaines

 


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  1   choses qui demandaient une solution, mais ils ne sont pas venus là très

  2   souvent. Ils avaient leur propre QG où ils pouvaient se retrouver. C'était

  3   une zone qui s'appelait Holivud. C'était une zone résidentielle, un

  4   quartier résidentiel. Un très beau quartier. Et c'est là qu'ils se

  5   retrouvaient. Et lorsque la Brigade des Gardes est partie, j'ai rencontré

  6   Kameni à plusieurs reprises. Il est venu au commandement de la brigade de

  7   son propre chef, mais les autres ne sont pas réellement venus.

  8   Q.  Bien.

  9   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je remarque l'heure, Messieurs les Juges.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Monsieur Demirdjian.

 11   Monsieur le Témoin, c'est là notre première pause. Nous reprendrons à 11

 12   heures. L'huissière d'audience va vous aider à sortir du prétoire. Merci

 13   beaucoup.

 14   [Le témoin quitte la barre]

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est suspendue.

 16   --- L'audience est suspendue à 10 heures 28.

 17   --- L'audience est reprise à 11 heures 02.

 18   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Monsieur le Président, pendant la pause,

 19   j'ai vérifié la collection de documents 92 ter pour ce témoin, et nous

 20   avons un message électronique qui nous a été envoyé par la Défense le 4

 21   janvier où il est dit qu'ils n'allaient pas prendre position par rapport à

 22   cette collection de documents.

 23   Encore une fois, donc, cela veut dire que par rapport à l'article 92

 24   ter, enfin, que cela ne s'applique pas.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Demirdjian, il y a quelque

 26   chose qu'on peut lire dans la décision du 28 janvier concernant le

 27   versement au dossier des déclarations et des pièces qui sont pertinentes,

 28   qui peuvent avoir une valeur probante et qui peuvent être versées au

 


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  1   dossier conformément à l'article 92(C) et 92 ter. Et si les conditions

  2   énoncées dans ces deux articles sont réunies, on peut verser les documents

  3   et on peut leur accorder des cotes. Je suppose que le greffe va faire

  4   circuler le mémorandum concernant ces cotes.

  5   Merci.

  6   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  7   [Le témoin vient à la barre]

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Continuez, Monsieur Demirdjian.

  9   M. DEMIRDJIAN : [interprétation]

 10   Q.  Colonel, j'aimerais maintenant continuer à parler du sujet qu'on

 11   abordait avant la pause, à savoir du fait que Miroljub Vujovic vous a été

 12   présenté encore une fois par le commandant Sljivancanin après la chute de

 13   Vukovar. Après les événements qui se sont produits à Ovcara, comment

 14   décririez-vous votre rapport avec Miroljub Vujovic?

 15   R.  Miroljub Vujovic était un homme énergique et dynamique. Il était

 16   apprécié par ses collègues. Il voulait faire tout concernant la création

 17   des autorités, du district militaire. Il promettait des choses, mais il ne

 18   tenait pas ses promesses. A deux ou trois occasions je lui ai parlé

 19   concernant l'aide qu'il pouvait me fournir pour me donner un certain nombre

 20   de ses combattants pour ce qui est de l'assainissement des rues dans la

 21   ville, pour nettoyer les rues, et cetera. Il a dit qu'un certain nombre de

 22   ses soldats allaient venir, mais ils ne sont jamais venus. Donc j'ai vu que

 23   je ne pouvais pas compter sur lui et sur son aide. Il ne tenait pas ses

 24   promesses, surtout les promesses qu'il m'avait données à moi. Et c'était

 25   surtout au début que cela se passait ainsi.

 26   Q.  Merci. Maintenant j'aimerais qu'on parle d'un autre sujet, à savoir des

 27   rapports qui ont été envoyés après votre départ d'Ovcara le 20 novembre.

 28   Vous avez parlé de cela au paragraphe 54 de votre déclaration. Vous avez


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  1   dit que vous avez fait un rapport à Mrksic concernant le fait que les

  2   prisonniers ont été malmenés puisque vous avez vu ça en personne, et Mrksic

  3   a dit : "Il ne faut pas que vous parliez de cela." Lorsque vous avez parlé

  4   à Mrksic de la situation, est-ce qu'il y avait d'autres officiers présents

  5   ou est-ce que vous étiez seuls ?

  6   R.  Lorsque je suis arrivé au commandement du Groupe opérationnel sud, il y

  7   avait une salle où on tenait des réunions, et ce jour-là la salle était

  8   pleine. Et tout le monde qui s'y trouvait était debout. Moi je me suis

  9   présenté et je me suis excusé d'avoir été en retard. J'ai dit que la

 10   situation n'était pas claire, je ne savais pas comment on traitait les

 11   prisonniers. Je ne pouvais pas, à l'époque, savoir s'il s'agissait des

 12   blessés de l'hôpital ou des soldats, des combattants. Ils ont été battus,

 13   insultés, poussés, humiliés, et cetera, donc tous ces actes incorrects ont

 14   été faits. Il m'a répondu à tout cela : "Il ne faut pas que tu me parles de

 15   cela." Moi j'ai été surpris de cette réaction, de sa réponse. J'ai pensé

 16   que lui, il ne m'a pas compris, il n'a pas compris ce qui se passait là-

 17   bas, qu'il n'était pas au courant de ces actes.

 18   La réunion s'est terminée et nous sommes sortis devant le bâtiment, et

 19   encore une fois je lui ai parlé en lui disant : "Colonel, qu'est-ce qui se

 20   passe ? Quelle est la situation ?" Il m'a répondu : "Mais qu'est-ce que tu

 21   fais là-bas ?" Et à ce moment-là, j'ai compris que je ne devais pas y être.

 22   Cette action s'est déroulée sans moi. Je n'ai pas commandé cette action. Il

 23   n'y avait pas de mes officiers là-bas. Je n'ai pas été engagé lors de cette

 24   action. Je suis passé par cette région par hasard. Si cela ne s'était pas

 25   produit, peut-être que je ne me serais pas trouvé dans une telle situation.

 26   Je pense qu'il m'a dit cela avec de bonnes intentions, quand il m'a

 27   dit que je ne devais pas y être et que je ne devais pas discuter de cette

 28   situation puisque je ne la connaissais pas. Après cela, il y avait d'autres


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  1   histoires qui ont circulé. Mais pour ce qui est de ces actions, tous les

  2   officiers n'étaient pas au courant de ces actions. Certains officiers

  3   n'étaient effectivement pas au courant de ces actions.

  4   Q.  Vous nous avez déjà dit lors de votre déposition que la Brigade

  5   motorisée de la Garde était mieux équipée et avait de meilleurs effectifs.

  6   Pouvez-vous nous dire quelque chose de plus là-dessus, concernant cette

  7   unité de Mrksic ce jour-là ?

  8   R.  Je ne peux pas vous dire exactement quels étaient les tâches de

  9   la Brigade de la Garde sur d'autres axes et dans d'autres secteurs. Mais

 10   dans la zone où se trouvait le hangar à Ovcara, j'ai pu voir un certain

 11   nombre d'officiers de la Brigade de la Garde. Il y avait le chef d'état-

 12   major, il y avait son adjoint, l'adjoint de Mrksic, et il y avait des

 13   officiers chargés de la sécurité. J'ai vu Vukasinovic -- Vukasinovic, je ne

 14   l'ai pas vu, mais j'ai entendu qu'il y était, ainsi que le capitaine

 15   Karanfilov [phon], qui faisait partie de l'organe de la sécurité de l'état-

 16   major de la Brigade de la Garde.

 17   Q.  Maintenant je vais passer à un autre sujet, Colonel Vojnovic, il

 18   s'agit de la création du commandement de la ville. Vous en parlez au

 19   paragraphe 22 et aux paragraphes qui suivent dans votre déclaration. Vous

 20   avez dit qu'après la chute de Vukovar et les événements que vous venez de

 21   décrire, que vous avez été nommé commandant du commandement de la ville, et

 22   vous avez dit que vous aviez reçu l'ordre d'établir le commandement local

 23   de la ville dans votre zone. Vous avez dit qu'il s'agissait d'un ordre oral

 24   de Milan Mrksic, n'est-ce pas ?

 25   R.  Il est vrai qu'avant leur départ, à l'avant-dernier rapport au

 26   commandement à Negoslavci, lors de ce briefing, Mrksic a dit que la 80e

 27   Brigade acceptait les tâches et les missions du Groupe opérationnel sud

 28   pour cette zone-là et que j'ai été nommé commandant du commandement de la


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  1   ville de Vukovar et de Borovo Naselje. Je n'ai pas vu cet ordre écrit, mais

  2   probablement que cet ordre était arrivé par la suite. Et toutes les

  3   fonctions et toutes les tâches du Groupe opérationnel sud et de la Brigade

  4   de la Garde ont été reprises par notre brigade.

  5   L'ordre est arrivé par la suite par le biais du district militaire et par

  6   le commandement du Groupe opérationnel sud jusqu'à ma brigade, et je suis

  7   fier des officiers et des soldats de la brigade puisqu'ils ont beaucoup

  8   contribué à ce que la situation se calme sur le front et à Vukovar, parce

  9   qu'ils se sont comportés de façon consciencieuse bien qu'il y ait eu une

 10   centaine de blessés. Donc c'était une sorte de digression.

 11   Mais j'ai voulu dire que les postes de commandement ont été établis à

 12   l'époque et notre tâche était d'établir des postes de commandement dans des

 13   villages où cela était possible et où il y avait des habitants. Certains

 14   postes de commandement ont été établis par le biais de mon ordre concernant

 15   les villages de Negoslavci, Jakubovac, d'Ovcara, également le village de

 16   Sotin, le village de Pinjaci [phon] et ainsi que d'autres villages. Je

 17   n'arrive pas à me souvenir des noms de tous ces villages. Nous, nous avons

 18   établi les postes de commandement dans ces villages. Il y avait des

 19   officiers à ces postes de commandement qui étaient en mesure d'assurer le

 20   contrôle de cette zone et d'éviter des incursions des groupes de sabotage

 21   et terroristes.

 22   Ces postes de commandement ainsi que leurs commandants ont reçu des

 23   instructions oralement ou par écrit -- je n'arrive pas à me souvenir de

 24   tout cela. Leurs tâches étaient d'assurer la sécurité des bâtiments

 25   importants dans ces villages, par exemple, les systèmes d'approvisionnement

 26   en eau, les systèmes d'approvisionnement en électricité, les

 27   transformateurs, et ainsi que de créer des patrouilles, de monter la garde

 28   dans ces villages, d'organiser le travail dans ces villages également et


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  1   d'établir l'ordre également, d'éviter que des pillages soient faits dans

  2   les villages, des vols de l'équipement, et cetera.

  3   Q.  Au paragraphe 12 de votre déclaration, vous avez mentionné un rapport

  4   que vous avez signé.

  5   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Il serait peut-être mieux d'afficher à

  6   l'écran le document 731 65 ter, à l'intercalaire 24. Merci.

  7   Q.  Il s'agit du document du 29 novembre, nous voyons le tampon du

  8   commandement de la 80e Brigade. A l'époque, Colonel, pouvez-vous nous dire

  9   à quel commandement a été subordonnée la 24e [comme interprété] Brigade

 10   Motorisée le 29 novembre ?

 11   R.  Nous étions subordonnés au commandement du 1er District militaire. Dans

 12   cette zone, notre brigade était la plus grande brigade après le départ de

 13   la Brigade de la Garde. Nous étions subordonnés directement au commandement

 14   du 1er District militaire pendant cette période de temps-là. Je ne peux pas

 15   dire pendant combien de temps cela a duré, mais cela a duré à peu près un

 16   mois ou quelques jours de plus. Mais cela n'est pas important à présent.

 17   Ce qui est important est de dire qu'après cela, nous avons été réintégrés à

 18   la 1ère Division mécanisée de la Garde commandée par le général Mico Delic

 19   --

 20   Q.  Colonel, les interprètes ont demandé que vous ralentissiez votre débit

 21   un peu pour pouvoir vous suivre. Ils vous demandent également de répéter

 22   votre dernière phrase, je pense que vous avez dit -- vous avez dit :

 23   "Je pense que ce n'est pas important à présent."

 24   Après quoi, vous avez mentionné le nom d'une unité et de son commandant.

 25   Pouvez-vous répéter cette partie de votre réponse.

 26   R.  Oui. J'ai dit que nous étions au début, vers la date du 29 et après le

 27   29, là-bas en tant qu'unité qui était subordonnée -- pendant un mois après

 28   le 29 novembre, qui était subordonnée directement au commandement du 1er


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  1   District militaire. Après cette période de temps-là, mais je sais pas

  2   exactement de quelle date, nous étions resubordonnés à la 1ère Division des

  3   Prolétaires mécanisée de la Garde dont le commandant était le général Mico

  4   Delic.

  5   Q.  Merci d'avoir répété cette partie de votre réponse. Dans ce document,

  6   on peut voir le titre : "L'état de moral de combat dans les unités de la

  7   80e Brigade motorisée." Regardez le premier paragraphe qui commence par les

  8   mots : "Après la libération de Vukovar…"

  9   R.  Oui, je vois ce paragraphe :

 10   "Après la libération de Vukovar, le commandement de la brigade a reçu pour

 11   mission d'agir en tant que commandement de la ville et d'assurer les

 12   conditions de vie et de travail et la création des autorités civiles,

 13   d'établissements médicaux, et d'éviter des pillages et d'autres infractions

 14   pénales."

 15   Cela a été fait pour que le commandement de la 80e Brigade puisse s'occuper

 16   des choses prioritaires, à savoir pour que la brigade puisse assurer la

 17   sécurité dans sa zone de responsabilité, d'assurer le contrôle de cette

 18   zone-là, pour qu'elle puisse s'occuper de l'entraînement des soldats et des

 19   officiers qui faisaient partie de l'unité en accomplissant ses tâches de

 20   combat, et c'est ainsi que le commandement de la ville pouvait reprendre

 21   certaines des fonctions de la brigade.

 22   Et c'est pour cela que le poste de commandement a été établi pour la

 23   ville, et ce poste de commandement ne faisait pas partie de la brigade et

 24   ne se trouvait pas dans la caserne de Vukovar. Le poste de commandement

 25   pour la ville se trouvait à un autre endroit. Je ne peux pas vous citer le

 26   nom de cet endroit, mais je me suis rendu à cet endroit. Toutes les unités

 27   se trouvant au poste de commandement, la compagnie de la police qui a été

 28   créée ainsi que certaines autres unités qui étaient restées là-bas, étaient


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  1   placées sous le commandement de la 80e Brigade motorisée. Pour ce qui est

  2   du commandement de la ville, le commandement de la ville pouvait

  3   s'acquitter d'autres tâches avec notre assistance et notre autorisation,

  4   puisqu'ils venaient nous faire rapport quotidiennement pour nous dire ce

  5   qui avait été fait, et cetera.

  6   Q.  Maintenant, il y a quelques instants, vous nous avez dit que le poste

  7   de commandement pour la ville était détaché du commandement de la brigade.

  8   Pourriez-vous nous expliquer à quoi ressemblait ce poste de commandement ?

  9   Quels étaient les effectifs se trouvant au poste de commandement ? Qui

 10   donnait des ordres ?

 11   R.  Le commandement de la ville était séparé du commandement de la brigade.

 12   Il se trouvait dans un quartier de la ville de Vukovar qui se trouve, je

 13   pense, à l'entrée de Vukovar de la direction de Negoslavci. Cela se

 14   trouvait dans une maison. Et je vais vous dire aussi que cette maison se

 15   trouvait près de la maison d'une chanteuse, de notre chanteuse en Serbie.

 16   Goran connaît cela mieux que moi. Elle chante des chansons populaires en

 17   Serbie. Sa sœur s'appelle Goca. Donc il y avait dans ce poste de

 18   commandement deux officiers, un véhicule et deux soldats pour la sécurité.

 19   Ce poste de commandement coordonnait les activités dans des villages, avec

 20   d'autres postes de commandement dans les villages, et ils se sont occupés

 21   de l'organisation de la vie dans ces villages. Et ce commandement de la

 22   ville existait jusqu'à mon départ de Vukovar le 28 février.

 23   Q.  Vous nous avez dit que dans cette maison il y a deux ou trois officiers

 24   qui y étaient cantonnés. C'était tout ? C'était la composition du

 25   commandement de la ville ?

 26   R.  Oui. Il n'y avait pas plus d'officiers ni de soldats. Ils n'étaient

 27   même pas de notre formation, de notre unité. Ils ont été envoyés par le

 28   commandement du 1er District militaire par un ordre, mais ils étaient


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  1   subordonnés à notre commandement, au commandement de notre brigade.

  2   Q.  Revenons au deuxième paragraphe. Au deuxième paragraphe, il y a une

  3   phrase où il est dit que le commandement de la ville s'occupe des

  4   conditions de la survie et de l'établissement des autorités civiles, des

  5   autorités judiciaires, des établissements médicaux ou des entreprises, et

  6   cetera. Pouvez-vous nous dire et dire à la Chambre quelle était la

  7   situation au moment où vous êtes devenu le commandant de la ville, quelle

  8   était la situation par rapport au fonctionnement des autorités civiles ?

  9   R.  Lorsque je suis devenu le commandant de la ville, à ce moment-là il n'y

 10   avait pas d'autre organe qui fonctionnait. Il n'y avait pas d'organe qui

 11   pouvait apporter de l'aide aux citoyens. Et à l'époque, l'administration

 12   militaire fonctionnait, et tout passait par le biais de cette

 13   administration et par le commandement de la brigade. Le commandement de la

 14   brigade n'avait pas l'intention d'y rester et de s'occuper de

 15   l'administration militaire. Le commandement de la brigade voulait que les

 16   institutions civiles soient établies le plus tôt possible pour que le

 17   gouvernement civil commence à fonctionner à Vukovar.

 18   Et je me souviens, mais je ne sais pas à quelle date c'était exactement, je

 19   me souviens que j'ai reçu des instructions de quelqu'un comment

 20   s'organiser, et nous avons convoqué une réunion à Velepromet. Lors de cette

 21   réunion, nous avons discuté de la formation des autorités civiles pour la

 22   ville de Vukovar. Rajko Bibic -- je ne pense pas que son prénom soit Rajko,

 23   mais on l'appelait comme cela. Rajko était, si cela est vrai, directeur

 24   d'une coopérative agricole. Il était instruit, l'un des hommes les plus

 25   instruits dans la ville. J'ai eu une réunion avec lui. Et dans ces

 26   autorités, il devait y avoir entre 15 et 16 membres.

 27   Moi j'ai voulu que les membres des autorités soient des combattants

 28   également ainsi que d'autres personnes formées pour faire partie des


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  1   autorités civiles. On a dressé une liste de 15 ou 16 noms et j'ai montré

  2   cette liste à Rajko. Sur cette liste il y avait les noms de deux hommes

  3   pour lesquels il m'a dit qu'ils ne devaient pas être mentionnés ou dont les

  4   noms ne devaient pas être prononcés à voix haute puisqu'il y aurait des

  5   réactions d'autres personnes présentes à la réunion, qui étaient au nombre

  6   de 50 ou 60. Et c'est pour cela que j'ai donné cette liste à lui et c'est

  7   lui qui a lu les noms qui figuraient sur cette liste. Concernant ces deux

  8   noms à côté desquels il y avait le point d'interrogation, je ne sais pas

  9   s'il les a lu ou omis de les lire, mais lors de cette réunion le

 10   gouvernement a été formé, ou plutôt, le conseil exécutif. On a décidé de

 11   former ces organes. Rajko Bibic a continué à travailler là-dessus.

 12   Et je pense que le premier président de la municipalité était le Dr Visic,

 13   je ne me souviens pas de son prénom. Je peux vous dire que dans ces locaux

 14   les organes de la municipalité pouvaient commencer à travailler de façon

 15   organisée. Je ne me suis pas mêlé à leurs activités, mais je me rendais là-

 16   bas pour demander s'ils avaient besoin de quoi que cela soit.

 17   Ils ont fonctionné à partir de ce moment-là. Certaines personnes qui

 18   travaillaient, par exemple, à Vuteks ont été élues directeurs. Pour Borovo

 19   Naselje, Markovic a été élu. Mais avant cela, j'ai émis un ordre en tant

 20   que commandant de l'administration militaire après avoir consulté des gens

 21   qui connaissaient tous ces problèmes, j'ai nommé certaines personnes à ces

 22   postes. Par exemple, Radan Jovica, il a été nommé direction de Vuteks;

 23   Santic Dragan, il a été nommé directeur de Borovo. Et ensuite, il y avait

 24   d'autres entreprises également.

 25   Mais un autre ordre est arrivé. Cela a été, en fait, diffusé à la

 26   télévision, le contenu de cet ordre selon lequel le directeur de Borovo

 27   devait être Markovic. A l'époque, il était adjoint du directeur peut-être.

 28   Et c'est comme cela que tout a commencé à fonctionner. Après cela, ils se


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  1   rendaient davantage dans des villages et dans des postes de commandement.

  2   Mais les postes de commandement ont commencé à ne plus fonctionner comme

  3   avant puisque les autorités ont été établies dans des villages, les

  4   autorités civiles et ainsi que des coopératives. Pendant que

  5   l'administration militaire fonctionnait, nous avons essayé de faire quelque

  6   chose sur ce plan. Nous avons réparé le système d'approvisionnement en eau.

  7   Nous avons également organisé une soupe populaire dans la caserne deux fois

  8   par jour. Une ligne routière a commencé à fonctionner de Vukovar à

  9   Belgrade.

 10   Mais il y avait des problèmes, et c'était normal. Il y avait même de

 11   grands problèmes. Et quotidiennement, on voyait des établissements de

 12   commerce qui commençaient à être ouverts. On a continué à nettoyer la

 13   ville, à s'occuper de l'équipement des installations urbaines et de

 14   l'équipement de la caserne également.

 15   Q.  Colonel Vojnovic, pourrais-je -- bon, vous venez de nous fournir une

 16   explication à propos des autorités civiles. Dans votre rapport, vous faites

 17   une référence aux autorités judiciaires. Est-ce que vous pourriez

 18   brièvement indiquer aux Juges de la Chambre quelle était la situation

 19   lorsque vous avez assumé le commandement de la ville ?

 20   R.  Lorsque je suis arrivé à ce poste de commandement, on ne m'avait pas

 21   parlé du système judiciaire ou du pouvoir judicaire, parce que de toute

 22   façon cela n'existait pas au sein de la Brigade. Alors il y avait certaines

 23   questions d'ordre politique, certaines questions d'ordre judiciaire, et ça,

 24   c'était l'organe chargé de la morale qui s'en occupait. Mais pour ce qui

 25   est d'enquêtes de système judiciaire organisé, à proprement parler, cela

 26   n'existait pas à ce moment-là, et cela n'existait pas d'ailleurs pendant

 27   toute la période où j'étais à Vukovar au sein du commandement de la

 28   brigade.


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  1   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Alors, regardez la dernière page dans les

  2   deux versions. Page 2 [comme interprété] de la version anglaise et page 3

  3   [comme interprété] de la version en B/C/S. Le bas, donc, de cette page.

  4   Q.  Il s'agit bien d'un rapport que vous avez rédigé, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui, oui. Oui, il s'agit effectivement de ma signature. Oui, oui. Le

  6   commandement de la brigade et le commandement du bataillon, en fait, nous

  7   avaient donné l'ordre. Ces deux commandements avaient donné l'ordre aux

  8   soldats de ne pas déplacer et de ne pas partir de leurs positions. Ils ne

  9   pouvaient pas quitter leurs positions sans l'aval et l'approbation en bonne

 10   et due forme, et puis il avait été dit que certaines unités allaient être

 11   désintégrées après 45 jours.

 12   Alors, si en tant que commandant j'avais des problèmes à ce sujet, je sais

 13   qu'un ordre était communiqué ou qu'un communiqué était émis par le

 14   commandement du 1er District militaire, parce qu'il y avait en fait un

 15   roulement tous les 45 jours pour les soldats.

 16   Q.  Ecoutez -- excusez-moi, je n'ai pas voulu vous interrompre, mais

 17   j'aimerais vous demander de bien vous concentrer sur la question. Donc vous

 18   avez bien confirmé qu'il s'agissait d'un rapport que vous avez rédigé,

 19   n'est-ce pas ? C'est tout ce que je vous demandais en fait.

 20   Donc, excusez-moi de vous avoir interrompu, mais il faudrait que vous

 21   concentriez sur les témoins [comme interprété]. Donc nous avons établi il y

 22   a quelques minutes de cela, et vous le mentionnez d'ailleurs dans votre

 23   rapport, qu'après que les commandements de la ville aient été établis à

 24   Vukovar, il y a d'autres villages qui ont suivi, et là il y a eu

 25   établissement de commandements de la ville. Au paragraphe 22, voilà ce que

 26   vous dites exactement :

 27   "Ma mission s'arrêtait à partir du moment où les représentants du

 28   gouvernement local étaient élus."


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  1   Est-ce que vous pourriez expliquer aux Juges comment, à votre

  2   connaissance, ont été établies ces autorités civiles dans votre zone de

  3   responsabilité ?

  4   R.  Ecoutez, je ne peux pas être très précis quant à la date exacte

  5   ou quand aux dates exactes. Mais à partir du moment où il y avait un

  6   gouvernement qui était en place, et là je parle du conseil exécutif et du

  7   gouvernement à Vukovar, ils se sont de plus en plus acquittés de leurs

  8   fonctions. Alors, bien entendu, nous leur avons prêté main-forte dans la

  9   mesure où nous pouvions, mais nous nous concentrions davantage sur les

 10   tâches militaires, telles que la réparation du matériel et des armes dans

 11   cette zone, par exemple, et la formation. Bon, je ne me souviens pas quand

 12   est-ce que cela s'est passé. Il y a eu une certaine période de temps qui

 13   s'est écoulé. Puis ensuite, à un moment donné, il y a certaines choses qui

 14   ont commencé à fonctionner, d'autres ont fonctionné un peu plus tard. Donc

 15   il y a eu une certaine période au cours de laquelle le gouvernement n'avait

 16   même pas de local, de lieu. Donc ils ne disposaient pas des conditions de

 17   base. Donc ils ne pouvaient pas faire leur travail. Il y avait en quelque

 18   sorte un rôle consultatif, des orientations qui leur étaient données. Je ne

 19   me souviens pas quand est-ce que cela s'est passé, en décembre. Enfin, à la

 20   fin du mois de décembre ou au début du mois de janvier.

 21   Q.  Et quand est-ce que la 80e Brigade motorisée a quitté Vukovar ?

 22   R.  La 80e Brigade a quitté Vukovar le 13 janvier, mais certains des

 23   officiers et certains représentants du commandement sont restés. Moi je

 24   suis parti de la zone avec toutes ces unités à Kragujevac. Je suis retourné

 25   à Vukovar sept jours plus tard pour présenter un rapport à propos de ce que

 26   j'avais fait en tant que commandant de la ville.

 27   Q.  Au paragraphe 26 de votre déclaration, vous expliquez que lorsque

 28   vous étiez commandant de la ville, vous n'avez eu aucun contact avec le


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  1   gouvernement de la Région autonome du SBSO, et vous considériez en fait que

  2   cela n'était pas une situation normale. Est-ce que vous pourriez nous

  3   expliquer pourquoi vous pensiez cela ?

  4   R.  Moi je n'étais pas en contact avec le gouvernement. Je ne sais

  5   pas comment il a été constitué à l'époque. Tout ce que je sais, c'est qu'il

  6   y avait des problèmes assez importants et que dans la zone de Vukovar il y

  7   avait beaucoup de choses qui devaient être gérées et traitées. Mais

  8   personnellement, je n'ai pas été en contact avec eux. Et je vous dirais

  9   qu'à un moment donné - je ne sais pas quand est-ce que cela s'est passé -

 10   Rajko Bibic m'a dit qu'il avait assisté à une réunion quelque part et qu'il

 11   avait présenté son point de vue à propos de la façon dont certaines choses

 12   devraient être faites. Moi je n'avais pas de détails. Je ne me souviens pas

 13   ce qu'il a dit. Mais je sais qu'il s'y est rendu, là-bas.

 14   Q.  Et puis, un peu plus loin dans votre déclaration, vous faites

 15   référence à un rapport qui a été rédigé par le colonel Milan Ilok [comme

 16   interprété], le commandant de la ville. Paragraphe 89 de votre déclaration.

 17   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Donc il s'agit de l'onglet 32 et de

 18   la pièce P371. Et je pense qu'il serait peut-être utile de l'afficher. Fort

 19   bien.

 20   Q.  Colonel, vous voyez qu'il s'agit d'un rapport du mois de décembre

 21   du commandement de la ville Ilok, et vous voyez qu'il est indiqué que la

 22   JNA n'est pas particulièrement satisfaite de ce que fait le gouvernement,

 23   parce que le gouvernement a nommé des personnes qui sont, non pas

 24   instruites, mais qui sont plutôt loyales, qui leur sont loyales. Est-ce que

 25   vous pourriez nous dire comment est-ce que l'on pouvait comparer cette

 26   situation à Ilok à la situation qui prévalait dans votre zone ?

 27   R.  Alors, si l'on veut établir la comparaison avec Vukovar, je dirais

 28   qu'Ilok était une bourgade beaucoup plus petite, donc c'était beaucoup plus


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  1   facile de faire son travail et d'établir le contrôle, et pourtant, ils ont

  2   eu des problèmes qui étaient très semblables ou très analogues à ceux que

  3   nous avions. Nos problèmes étaient beaucoup plus importants parce que

  4   Vukovar était, en quelque sorte, l'épicentre de cette zone. Tous les

  5   regards étaient portés sur Vukovar. On en parlait dans les médias. Vukovar

  6   se trouvait au centre de l'attention. Mais le fait est que dans la zone de

  7   Vukovar, les gens qui étaient arrivés là venaient de différents secteurs.

  8   Il y avait non seulement les détachements de la Défense territoriale, mais

  9   il y avait également des volontaires. Il y avait des commandants qui

 10   n'étaient redevables devant personne, et si vous aviez quatre ou cinq

 11   soldats, eh bien, vous vous appeliez commandant, et puis on voyait ce genre

 12   de personne se déplacer dans la ville, suivie par ses soldats qui

 13   l'appelait effectivement commandant. Il était très difficile de coordonner

 14   tout cela, d'autant plus que nous ne connaissions pas ces personnes, donc

 15   il était difficile de travailler avec elles.

 16   Moi j'ai fini par faire la connaissance des personnes qui dirigeaient cela,

 17   Stanko, Miroljub, Kameni et d'autres, mais il y en avait certains que

 18   personne ne connaissait. Il y avait des gens, par exemple, qui entraient

 19   dans une maison, qui établissaient leur QG avec une poignée de soldats, et

 20   personne ne savait comment ils opéraient, comment ils fonctionnaient,

 21   comment ils travaillaient les uns avec les autres, donc c'était un problème

 22   important à Vukovar. Qui était moins important à Ilok, mais qui existait.

 23   Les gens se déplaçaient de maison en maison, ils prenaient certaines

 24   choses. Ils le faisaient un peu à la chaîne, en fait. Il y en avait

 25   certains qui prenaient certaines choses, d'autres qui attendaient d'entrer

 26   dans la maison puis qui prenaient d'autres choses qui restaient. Bon, ça

 27   prenait un certain temps, tout cela, et il fallait parler à ces personnes.

 28   Bon, il fallait essayer d'exercer un commandement afin de rétablir, de


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  1   restaurer un certain ordre. Mais ça, ça faisait partie d'un processus

  2   normal. Et le même genre d'événement s'est produit à Ilok.

  3   Q.  J'aimerais maintenant aborder mon dernier sujet, le départ de la

  4   Brigade motorisée des Gardes en novembre. Vous y faites référence au

  5   paragraphe 78 de votre déclaration. Vous dites que la 80e  Brigade

  6   motorisée de la Garde est partie vers le 25 novembre - et cela correspond à

  7   un fait jugé dans notre affaire en l'espèce, c'est le fait numéro 112 - à

  8   savoir, à partir du moment où la 80e Brigade motorisée quitte Vukovar, le

  9   Groupe opérationnel sud cesse d'exister. Est-ce que cela est véridique ?

 10   Est-ce que cela correspond aux faits ?

 11   R.  Lorsque le groupe opérationnel, ou plutôt, la Brigade des Gardes s'est

 12   retirée de cette zone, je pense que cela s'est passé entre le 25 et le 27,

 13   le Groupe opérationnel sud a cessé d'exister. Le commandant de la 80e

 14   Brigade motorisée a assumé toutes les fonctions et tous les devoirs qui

 15   avaient été exercés par le Groupe opérationnel sud dans cette zone, et ce,

 16   jusqu'à la rivière Vuka, parce que -- donc cela faisait partie de la zone

 17   de responsabilité du Groupe opérationnel sud. Et il faut savoir qu'au nord

 18   par rapport à notre position, donc en aval par rapport à la Vuka, il y

 19   avait le 12e Corps, le Corps de Novi Sad.

 20   Q.  Et vous expliquez également au paragraphe 69 de votre déclaration

 21   qu'avant son départ de Vukovar, Mile Mrksic vous a demandé de trouver un

 22   logement pour une équipe d'enquêteurs qui venaient mener à bien une enquête

 23   à propos des événements qui s'étaient déroulés à Ovcara. Alors, dans un

 24   premier temps, est-ce que vous avez reçu un ordre écrit ou un ordre oral de

 25   la part de M. Mrksic ?

 26   R.  M. Mrksic m'a donné cet ordre lors d'une réunion, une réunion de

 27   briefing, qui s'était tenue à son poste de commandement à Negoslavci. Il

 28   m'a dit de préparer une pièce, parce qu'il y avait une équipe d'enquêteurs,


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  1   de juges et d'avocats qui allait arriver, que cette équipe allait passer un

  2   certain temps là-bas et que cette équipe allait mener une enquête sur les

  3   événements qui s'étaient déroulés dans cette zone. Bon, l'accent étant

  4   évidemment mis sur ce qui s'était passé à Ovcara. Moi je ne disposais pas

  5   de pièce ou de salle que j'aurais pu mettre à leur disposition. J'ai trouvé

  6   une salle de classe dans le bâtiment où se trouvait le commandement, et

  7   donc j'ai procédé à certains préparatifs dans la mesure du possible au vu

  8   de la situation, mais l'équipe d'enquêteurs ne m'est jamais arrivée, n'est

  9   jamais venue me trouver non plus. Et par la suite, je pense qu'il y a eu un

 10   ordre écrit qui m'était destiné, et il m'était dit en fait dans cet ordre

 11   de préparer cela pour eux, et cela confirmait donc l'ordre que Mile Mrksic

 12   m'avait donné. Le fait est qu'ils ne sont jamais venus. Enfin, en tout cas,

 13   ils ne sont jamais venus me trouver. Il se peut qu'ils soient venus, mais

 14   nous, nous ne les avons jamais vus en tout cas, ils ne sont jamais venus

 15   nous trouver pour que nous les aidions. Ah oui, puis maintenant je me

 16   souviens. Alors il y avait toutes ces personnes qui étaient censées venir;

 17   moi je n'ai vu que le médecin légiste. Il était à l'époque capitaine

 18   première classe puis par la suite il a été promu général, c'était le Dr

 19   Stankovic. Et je l'ai aidé autant que faire se peut à Ciglana, c'est là

 20   qu'il a effectué les autopsies sur les corps, mais moi je ne lui ai pas

 21   posé de questions. Je ne sais pas s'il était accompagné de quelqu'un.

 22   Enfin, c'est la seule personne que j'ai vue.

 23   Q.  Vous pourriez nous préciser où se trouve Ciglana.

 24   R.  Ciglana, c'est un bâtiment en brique. Ou plutôt, c'est une briqueterie.

 25   C'est là où des briques et des matériaux de construction sont fabriqués.

 26   D'ailleurs, je ne suis même pas sûr qu'il s'agissait de la briqueterie de

 27   Ciglana. Mais c'est là que je l'ai attendu. Je pense que c'est là que cela

 28   s'est passé.

 


Page 5115

  1   Q.  Colonel Vojnovic, j'en ai terminé.

  2   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je n'ai plus de questions à poser dans le

  3   cadre de mon interrogatoire.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

  5   Maître Zivanovic.

  6   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Avant que je ne commence mon contre-

  7   interrogatoire -- ah, oui. Non, non, non, tout est réglé au niveau du

  8   compte rendu d'audience.

  9   Contre-interrogatoire par M. Zivanovic : 

 10   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Vojnovic. Je suis Me Zivanovic et je

 11   représente M. Hadzic au cours de ce procès.

 12   R.  Bonjour, Maître.

 13   Q.  Monsieur Vojnovic, dans un premier temps, je souhaiterais vous demander

 14   de préciser certaines choses, si vous le pouvez. Donc j'ai étudié votre

 15   déclaration, notamment le paragraphe 4, et je vois que vous êtes un

 16   militaire de métier, que vous êtes particulièrement instruit. Au paragraphe

 17   5, vous nous donnez quelques précisions quant à votre parcours au niveau

 18   d'éducation. Alors, est-ce que vous pourriez préciser certains termes

 19   militaires que vous avez utilisés lors de votre déposition et dans votre

 20   déclaration qui a été versée au dossier.

 21   Dans un premier temps, j'aimerais que vous nous expliquiez le terme de

 22   "resubordination". Qu'est-ce que cela signifie, et quelles sont les

 23   conséquences d'une "resubordination" ? Et quelles sont les différences

 24   entre une "subordination" et une "resubordination" ?

 25   R.  Je pense que c'est juste une formule, une façon de s'exprimer. La

 26   subordination -- plutôt, pour subordonner une unité. Je vais vous donner un

 27   exemple. Mon commandement était subordonné au commandement du Groupe

 28   opérationnel sud ou un élément de ma brigade. Mais dans certains cas, ce


Page 5116

  1   n'est pas toute l'unité ou ce n'est pas tout le bataillon ou ce n'était pas

  2   les deux bataillons. Donc ce n'est pas l'unité entière, c'est juste un

  3   bataillon ou deux bataillons qui peuvent être resubordonnés. Donc il n'y a

  4   pas véritablement de grande différence entre ces deux termes. Il n'y a pas

  5   de différence fondamentale. Donc cela ne devrait pas vous induire en

  6   erreur.

  7   Q.  Alors, est-ce que je pourrais donc dire ceci : avant que vous

  8   n'arriviez dans la zone de Vukovar, je pense que votre brigade était

  9   subordonnée à une unité différente, n'est-ce pas ?

 10   R.  Non. Avant mon arrivée, non. Mais à partir du moment où je suis arrivé

 11   dans la zone de Vukovar, là, elle a été subordonnée au Groupe opérationnel

 12   sud.

 13   Q.  Donc, avant votre arrivée dans la zone de Vukovar, votre unité n'était

 14   subordonnée à personne, donc ?

 15   R.  Avant notre arrivée dans la zone de Vukovar, elle faisait partie du

 16   Corps de Kragujevac.

 17   Q.  En d'autres termes, elle était subordonnée au Corps de Kragujevac,

 18   alors ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Donc, est-ce que nous pouvons dire que la resubordination est un acte

 21   par lequel vous obtenez un nouveau commandement supérieur - laissez-moi

 22   terminer - donc, lorsqu'il y a resubordination, vous avez un nouveau

 23   commandement supérieur, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui. Oui, c'est ce que l'on pourrait dire. Vous pouvez, effectivement,

 25   interpréter les choses de cette façon. Parce que jusqu'à notre arrivée à

 26   Vukovar, jusqu'au moment où nous avons fait partie du Groupe opérationnel

 27   sud, nous étions subordonnés au commandement du Corps de Kragujevac.

 28   Q.  Nous avons étudié différents documents, et vous les avez d'ailleurs


Page 5117

  1   examinés vous-même, et je pense notamment au journal de guerre de votre

  2   unité et de la Brigade motorisée de la Garde. Vous avez également examiné

  3   le registre opérationnel de votre unité, et voilà la question que

  4   j'aimerais vous poser : j'aimerais en fait que vous nous expliquiez ou que

  5   vous nous indiquiez le type de renseignements qui sont inclus dans un

  6   journal de guerre ?

  7   R.  Alors, dans un journal de guerre, vous trouvez les missions

  8   fondamentales ou importantes de la journée, par exemple, tout mouvement

  9   d'unité, tout transfert d'unité, tout événement sortant du lot, tout

 10   événement peu commun, tout événement ou tout incident, s'il y a eu des

 11   victimes, des personnes blessées, des personnes décédées, des accidents de

 12   la circulation routière, des entraînements, des exercices d'entraînement -

 13   des exercices de tir, par exemple - et tout autre renseignement qui ont

 14   leur importance pour l'unité. Toute séance de briefing, d'information - non

 15   pas au niveau de la compagnie, par exemple - mais probablement au niveau de

 16   la brigade, toutes les réunions qui ont eu lieu au niveau du bataillon.

 17   Q.  Mais est-ce que dans un journal de guerre vous avez des renseignements

 18   qui précisent les opérations de combat les plus importantes effectuées au

 19   cours de la journée ?

 20   R.  Oui, absolument.

 21   Q.  L'Accusation vous a montré le journal de guerre de la Brigade motorisée

 22   de la Garde. Il s'agit du document 357 de la liste des documents de

 23   l'Accusation. Et je souhaiterais que nous nous y intéressions parce que je

 24   voudrais vous demander quelques précisions à ce sujet.

 25   Vous savez que votre unité tenait également un journal de guerre. Est-ce

 26   que vous pourriez nous dire quels sont ces noms que nous voyons ici, que

 27   nous voyons sur la couverture ou la première page du journal de guerre ?

 28   Vous les voyez, n'est-ce pas ?


Page 5118

  1   R.  Oui. Le commandant Gojkovic, qui faisait partie du Groupe opérationnel

  2   sud, et le commandant Trifunovic. Ces deux personnes avaient pour tâche de

  3   tenir le journal de guerre. Par exemple, s'il y en avait un qui était

  4   absent, c'était l'autre qui tenait le journal.

  5   Q.  Fort bien. Est-ce que la deuxième page de ce journal de guerre pourrait

  6   être affichée. Ici, juste au début, vous voyez la date, l'heure d'envoi --

  7   quand le journal de bord a commencé à être tenu.

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Et je vois qu'il y a quatre colonnes. Donc la première colonne est la

 10   colonne qui correspond au lieu, à la date et à l'heure.

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Pourriez-vous préciser quelque chose à mon attention : est-ce qu'il

 13   s'agit du lieu, de la date et de l'heure de l'événement qui est mentionné ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  La deuxième colonne est intitulée "Description de l'événement."

 16   R.  Oui.

 17   Q.  La troisième colonne vous donne le nom de la personne qui a écrit,

 18   donc, à propos de l'événement. Là, je vois que nous avons le nom du

 19   commandant Trifunovic.

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Donc c'est lui qui a rédigé cette information. Et la quatrième colonne

 22   est intitulée "Observations", donc il s'agit de la personne qui a été

 23   notifiée au sujet de l'événement. Là, vous voyez il est indiqué chef

 24   d'état-major, par exemple.

 25   R.  Oui, c'est exact.

 26   Q.  Donc nous n'allons pas nous intéresser à toutes les dates de ce journal

 27   de guerre, mais est-ce que c'est un modèle habituel pour ce type de journal

 28   de guerre ?


Page 5119

  1   R.  Oui, oui. C'est le format standard, universel, qui était utilisé par

  2   toutes les unités au niveau tactique, ainsi que du bas vers le haut, à

  3   partir de la brigade, et du haut vers le bas.

  4   Q.  Et il me semble que cela est régi par les consignes du commandement de

  5   l'état-major ?

  6   R.  Oui, oui. Cela était adopté en fait par eux.

  7   Q.  Merci. Et outre ceci, nous voyons un document qui est appelé journal

  8   opérationnel. Malheureusement, nous n'avons pas pu obtenir ce journal de la

  9   Brigade de la Garde, mais nous avons eu la possibilité de pouvoir examiner

 10   le journal opérationnel de votre brigade. Je vais vous dire ce qui

 11   m'intéresse pour le moment. Ce n'est pas la peine que je vous montre le

 12   journal opérationnel, mais j'aimerais que vous nous expliquiez la

 13   différence entre un journal opérationnel et un journal de guerre. Quel est

 14   le type de renseignements que l'on consigne dans un de ces journaux et dans

 15   l'autre, et vice versa ?

 16   R.  Le journal opérationnel contient l'ensemble des activités d'une unité

 17   et dans une région, et cela concerne une journée complète. Il n'y a pas de

 18   différence importante entre celui-ci et le journal de guerre, si ce n'est

 19   que celui-ci met plus l'accent sur les activités de combat et les résultats

 20   de ces activités de combat. Le journal opérationnel est donc rédigé par des

 21   unités de haut niveau, à partir du corps et plus haut.

 22   Q.  Si je ne me trompe pas, votre brigade tenait également un journal

 23   opérationnel ?

 24   R.  Oui, oui.

 25   Q.  Eh bien, cela signifie que la brigade également --

 26   R.  J'ai dit qu'il s'agissait d'un format standard qui avait été adopté et

 27   appliqué à partir du niveau de la brigade et plus haut.

 28   Q.  Et pour ce qui est du format de ce journal opérationnel -- après tout,


Page 5120

  1   nous pouvons peut-être le regarder.

  2   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Il s'agit donc du document 557 de la liste

  3   de l'Accusation.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y a pas de différence.

  5   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

  6   Q.  Regardons-le quand même. Est-ce que nous pourrions agrandir un petit

  7   peu le texte pour que vous puissiez mieux voir. Vous pouvez voir en haut,

  8   là où il y a la date, que ce journal appartient à untel et qu'il commence à

  9   la date du 9 novembre 1991 jusqu'au 14 janvier.

 10   Je pense que le 9 janvier [comme interprété] est le jour où cette unité est

 11   arrivée à Vukovar ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Et le 14 janvier est la date où ils ont quitté Vukovar ?

 14   R.  Oui. Mais je ne suis pas sûr que nous soyons repartis le 13 ou le 14.

 15   Mais ceci, c'était avant le nouvel an serbe. Et vous savez de quoi il

 16   s'agit.

 17   Q.  Eh bien, ce serait alors le 13 janvier. Mais aux fins de mon

 18   interrogatoire, la date n'est pas réellement pertinente.

 19   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Pourrions-nous maintenant, s'il vous plaît,

 20   agrandir la version serbe de façon à ce que vous puissiez le lire plus

 21   facilement.

 22   Q.  Là encore, nous avons le lieu, l'heure. La colonne suivante c'est le

 23   "contenu", ensuite nous avons dans la colonne d'après la signature du

 24   bénéficiaire, puis une colonne "remarques". J'ai l'impression que toutes

 25   ces colonnes sont similaires à ce que l'on trouve dans le journal de guerre

 26   ?

 27   R.  Oui. J'ai dit qu'il s'agissait d'un format standard et que nous avons

 28   les mêmes colonnes. Tout dépend qui tenait le journal. Donc il y a là des


Page 5121

  1   chiffres, et la seule différence se situe au niveau des chiffres.

  2   Q.  Bien. Je voudrais maintenant vous poser une autre question concernant

  3   un autre document, disons que cela nous a donné quelques informations et

  4   quelques déclarations. D'après nos informations, les officiers de la JNA

  5   avaient leur propre livre de notes dans lequel ils notaient certains

  6   événements et certaines données. Est-ce que vous pourriez nous confirmer

  7   cela ?

  8   R.  Oui, je peux vous le confirmer. Ils avaient donc leur carnet de notes

  9   officiel, certifié avec un cachet au dos de ce livre de notes, et dans

 10   lequel ils inscrivaient des tâches importantes.

 11   Q.  Lorsque vous dites qu'il était certifié avec un cachet, vous voulez

 12   dire qu'il s'agissait du cachet de leur unité ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Si je ne me trompe pas, les pages de ces carnets de notes portaient un

 15   numéro à l'avance, et je pense qu'il y avait donc une centaine de pages

 16   numérotées ?

 17   R.  Eh bien, les carnets de notes étaient différents et chaque page était

 18   numérotée. Et l'instance qui tenait ce carnet de notes apposait sa

 19   signature et un tampon.

 20   Q.  Et est-ce qu'ils indiquaient le nombre de pages ?

 21   R.  Oui, oui. Comme je l'ai dit, il pouvait y avoir des pages de 1 à 200.

 22   C'est à ce moment-là que ce carnet de notes contenait 200 pages, et ils

 23   apposaient leur tampon, ce qui permettait des vérifications ultérieures.

 24   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, me dire si vous-même, vous teniez un

 25   tel carnet de notes ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Et pouvez-vous nous dire ce que vous inscriviez dans ce carnet de notes

 28   ?


Page 5122

  1   R.  Eh bien, toutes les activités qui se produisaient au sein de l'unité,

  2   en commençant par les tâches qui étaient attribuées aux subordonnés, les

  3   personnes présentes à certaines réunions, les problèmes qu'il fallait

  4   résoudre ou qu'il fallait résoudre en coordination avec d'autres personnes.

  5   En fait, tout ce qui était pertinent et qui concernant l'unité de quelque

  6   façon que ce soit.

  7   Q.  Est-ce que, par exemple, vous notiez les tâches attribuées par un

  8   officier à ses subordonnés ?

  9   R.  Oui. Mais peut-être pas toujours de manière très détaillée. Par

 10   exemple, je disais qu'untel ou untel devrait effectuer telle ou telle tâche

 11   sans entrer dans les détails plus particuliers.

 12   Q.  Et je suppose que ce carnet de notes contenait également les ordres qui

 13   vous étaient donnés par vos supérieurs ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Pourriez-vous me dire une chose : qu'est-il arrivé à votre carnet de

 16   notes ? Est-ce que vous l'avez toujours ou se trouve-t-il ailleurs ?

 17   R.  Ça, je ne peux pas vous le dire. Honnêtement, je ne sais pas. Eh bien,

 18   il y a beaucoup de choses. Vous prenez un carnet de notes, vous l'oubliez

 19   quelque part, vous en prenez un autre. Mais en fait, à partir du moment où

 20   vous commencez à tenir un carnet de notes, vous devez le rendre. Ce n'était

 21   en général pas un gros problème. Soit ce carnet de notes était détruit ou,

 22   simplement, vous ne le rendiez jamais.

 23   Q.  Merci. Mais en règle générale, une fois que ce carnet de notes avait

 24   été rempli, il fallait qu'il soit rendu au commandement qui vous l'avait

 25   donné, et ensuite vous en obteniez un autre, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Lorsque vous avez dit que quelquefois vous laissiez ce carnet de notes

 28   ailleurs ou que vous le perdiez, est-ce que cela signifie que la personne


Page 5123

  1   qui avait perdu ou qui ne retrouvait plus son carnet était supposée vous en

  2   rendre compte ? Et je parle là de subordonnés, bien entendu.

  3   R.  Oui, c'est tout à fait cela.

  4   Q.  Est-ce que vous vous êtes retrouvé déjà dans ce genre situation à

  5   l'époque ? Et j'entends par là, à cette période-là.

  6   R.  Non, je ne me suis jamais retrouvé dans une telle situation.

  7   Q.  Et vous n'avez jamais perdu votre propre carnet de notes ?

  8   R.  Non, je ne sais tout simplement pas où il se trouve.

  9   Q.  Vous souvenez-vous si vous l'avez rendu ?

 10   R.  Je ne peux pas être sûr à 100 %, mais si vous rendez un carnet de

 11   notes, il y a alors une commission qui se réunit et qui le brûle. Si nous

 12   parlons de grandes unités, il se peut qu'il y ait un ou plusieurs carnets

 13   de notes. S'il y a beaucoup d'officiers, alors ceux-ci ne sont pas

 14   archivés. Il y a à nouveau cette commission qui s'est réunie et qui détruit

 15   ces carnets de notes.

 16   Q.  Peut-être que vous savez qui a mis en place cette commission - par

 17   exemple, si vous aviez reçu un certain nombre d'officiers subordonnés - qui

 18   avait créé cette commission qui allait donc détruire ou brûler ces carnets

 19   de notes ?

 20   R.  Eh bien, en général, cela était fait par le chef d'état-major ou

 21   l'officier des opérations. C'est-à-dire, la personne qui travaillait dans

 22   un bureau, qui apposait un tampon sur ces documents qui ensuite étaient

 23   rassemblés et brûlés.

 24   Q.  Pouvez-vous me dire quand est-ce que cette procédure était appliquée ?

 25   Est-ce que cela se faisait immédiatement après la remise des carnets de

 26   notes une fois qu'ils avaient été rendus ou est-ce qu'ils étaient gardés

 27   pendant un certain temps ?

 28   R.  Eh bien, ils ne brûlaient pas les carnets de notes individuellement


Page 5124

  1   chaque fois que l'un était rendu. Ils attendaient quelquefois un an ou deux

  2   pour rassembler tous les carnets de notes qui avaient été rendus.

  3   Q.  Vous souvenez-vous si ces carnets de notes tenus par les officiers de

  4   vos unités ont été brûlés ?

  5   R.  Non.

  6   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que le

  7   moment est venu de faire une pause.

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Maître Zivanovic.

  9   Colonel Vojnovic, le moment est venu de faire une deuxième pause. Et nous

 10   reprendrons à 12 heures 45. L'huissière va vous conduire hors du prétoire.

 11   Merci beaucoup.

 12   [Le témoin quitte la barre]

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est suspendue.

 14   --- L'audience est suspendue à 12 heures 14.

 15   --- L'audience est reprise à 12 heures 48.

 16   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Pendant que le "witness" [comme

 17   interprété] n'est pas encore entré dans le prétoire, je voudrais simplement

 18   indiquer que Douglas Stringer a rejoint les rangs de l'Accusation.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien. Et je voudrais également dire

 20   qu'il faut indiquer au compte rendu d'audience que le Juge Mindua est

 21   également de retour parmi nous. Merci.

 22   [Le témoin vient à la barre]

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zivanovic, veuillez

 24   poursuivre.

 25   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 26   Q.  Monsieur Vojnovic, je vais maintenant vous montrer un carnet de notes

 27   de travail que nous avons en notre possession, et je vais vous demander de

 28   bien vouloir regarder certaines parties de ce carnet de notes.


Page 5125

  1   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Il s'agit de la pièce à conviction 27 sur

  2   notre liste, ou plutôt, la pièce portant la cote 503.

  3   Q.  Si on retourne ce carnet, on pourra voir la première page, la page de

  4   couverture. Est-ce à cela que ressemblait le carnet de notes opérationnel,

  5   si l'on regarde la dernière page et la première page ?

  6   R.  Oui, c'est exact.

  7   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Est-ce que nous pourrions maintenant

  8   regarder la dernière page.

  9   Q.  Il y a là une clause concernant le nombre de pages, et l'on peut lire :

 10   "Ce carnet de notes de travail contient 100 (cela est écrit en toutes

 11   lettres, 100 pages numérotées de 1 à 200) pages, et cela fait partie de la

 12   liste des carnets de notes écrits puis le chiffre," et nous avons également

 13   la signature de l'officier.

 14   Ma question est de savoir : est-ce que c'est le type de clause que l'on

 15   trouvait normalement imprimée à la fin de chacun de ces carnets de notes ?

 16   R.  Oui. C'est le carnet de notes standard que possédaient tous les

 17   officiers. Certains sont plus grands, d'autres plus petits, mais c'est ce

 18   que l'on retrouve écrit dans chacun d'entre eux.

 19   Q.  Si nous regardons la page 2 de ce carnet de notes.

 20   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait l'afficher sur

 21   l'écran, s'il vous plaît.

 22   Q.  Nous pouvons voir qu'il y a quelques blancs, comme par exemple pour le

 23   numéro de référence, le niveau de confidentialité et le type de

 24   confidentialité. Et nous avons également le nom de l'utilisateur, Dragan

 25   Vezmanovic. Est-ce que vous pourriez nous confirmer que c'était un

 26   commandant d'une compagnie de police militaire dans votre unité, n'est-ce

 27   pas ?

 28   R.  Oui.


Page 5126

  1   Q.  Vous avez vu à la dernière page qu'il n'y a pas de numéro de référence

  2   pour ce carnet de notes, ni de tampon de l'unité, ni de signature de

  3   l'officier, c'est-à-dire l'officier qui a émis ce carnet de notes. Et vous

  4   voyez également que les mêmes informations manquent à la première page.

  5   Pourriez-vous me dire comment se fait-il que dans ce cas particulier, le

  6   commandant de la compagnie de police militaire avait un carnet de notes qui

  7   n'avait pas été vérifié ni certifié comme il faut ?

  8   R.  Je ne peux pas expliquer cela. Toutes ces informations auraient dû y

  9   figurer, y compris le numéro, et toutes ces cases blanches auraient dû être

 10   renseignées correctement. Et notamment, dans la mesure où c'est un officier

 11   de réserve, lorsqu'il a rejoint l'unité, il a reçu ce carnet de notes qui

 12   lui a été remis dans le bureau qui l'a émis, et qu'il n'a pas rempli ces

 13   cases restées vierges. Je dis simplement que toutes ces cases auraient dû

 14   être renseignées avec les informations appropriées.

 15   Q.  Est-il possible que ce carnet de notes ait été rempli et que ces

 16   mentions ne soient apposées que par la suite ?

 17   R.  Eh bien, normalement, c'est un carnet qui est tenu au jour le jour, et

 18   on remplit les pages les unes après les autres. Il se peut qu'il y ait eu

 19   quelques mentions et notations faites à l'avance, mais l'expérience m'amène

 20   à dire que chaque jour, lorsque je venais travailler, j'inscrivais une date

 21   et ensuite je mentionnais les choses concernant cette journée. Donc il

 22   aurait dû suivre la même procédure. Vous pouvez par la suite rajouter

 23   quelque chose. Mais c'est néanmoins un carnet qui aurait dû être tenu au

 24   quotidien, au jour le jour, et chaque chose devait être renseignée au

 25   quotidien.

 26   Q.  Peut-être que je n'ai pas été suffisamment clair lorsque j'ai posé une

 27   question. Est-il possible qu'au lieu d'utiliser ce carnet de notes

 28   certifié, qui était rempli puis détruit, est-il possible qu'il y ait eu un


Page 5127

  1   autre carnet de notes ? Quand je dis "après", j'entends par là, après les

  2   événements à Ovcara --

  3   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Un instant.

  4   M. ZIVANOVIC : [aucune interprétation]

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

  6   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Je pense que cette question appelle à

  7   spéculation. Je ne suis pas sûr que le témoin puisse répondre à cette

  8   question.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas dire si cela est possible ou

 10   pas. Ça ne devrait pas être possible. Si toutes les annotations sont faites

 11   de manière séquentielle sur les pages, peut-être que l'on pourrait trouver

 12   un autre carnet de notes où d'autres tâches sont entrées et annotées pour

 13   chaque date.

 14   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

 15   Q.  Si vous regardez du côté gauche de l'écran, je vois, moi, un calendrier

 16   et je vois que les années figurant ici sont les années 1978, 1979, 1980 et

 17   1981; en d'autres termes, cela signifie que ce carnet date d'au moins dix

 18   ans avant les événements dont nous parlons ?

 19   R.  Oui. Eh bien, en fait, c'est ainsi que les choses sont faites en

 20   général. Cette année-là, un grand nombre de carnets de notes sont achetés,

 21   beaucoup ne sont pas utilisés, et ils sont ensuite dans les stocks. Il y a

 22   des stocks importants, et on ne peut pas en acheter de nouveaux tant que

 23   l'on n'a pas épuisé les stocks. C'est ainsi que les choses se font.

 24   Q.  Est-ce que vous aviez un carnet de notes comme celui-ci, avec ces dates

 25   ou, en tous les cas, un calendrier concernant ces dates ?

 26   R.  Eh bien, je ne peux pas réellement vous dire ce qu'il en était. Je suis

 27   sûr que nous n'avions pas le calendrier de l'année. Ce qu'il fallait faire,

 28   c'était simplement entrer la date exacte et partir de là.


Page 5128

  1   Q.  Dans votre déclaration et dans le cadre de votre déposition, vous avez

  2   fait mention du terme "zone de responsabilité". J'aimerais que vous

  3   puissiez définir ce dont il s'agit.

  4   R.  Eh bien, c'est là un exemple de comportement irresponsable, parce qu'il

  5   est évident que cette personne n'a pas rendu ce carnet de notes. C'est une

  6   infraction mineure. Il était supposé rendre ce carnet de notes à son

  7   supérieur parce que, comme je vous l'ai déjà dit, une fois le carnet

  8   rempli, il faut le rendre. Ou peut-être que c'est une infraction majeure

  9   qui implique qu'il y a une autre tâche, peut-être, qui n'a pas été

 10   effectuée.

 11   Q.  Je ne suis pas sûr que vous m'ayez entendu. Ce que je vous ai demandé,

 12   c'est qu'est-ce qu'une zone de responsabilité ? Que signifie ce terme ?

 13   R.  Ah oui, oui, d'accord. Je vois. Je comprends. Cela veut dire que toute

 14   unité dans une situation donnée sur le front est responsable pour une

 15   étendue où il y a quatre points indiqués qui représentent sa zone de

 16   responsabilité. Dans cette zone de responsabilité, l'unité en question doit

 17   résoudre des problèmes qui surgissent lors des activités de combat ou

 18   exécuter des tâches dans cette zone de responsabilité. Cette zone est la

 19   zone de responsabilité des brigades ou des unités plus importantes. Pour ce

 20   qui est de bataillons et d'autres unités plus petites, il s'agit de

 21   secteurs et non pas de zones de responsabilité.

 22   Q.  Pouvez-vous me dire s'il y a des dispositions ou des réglementations

 23   qui régissent la sécurisation d'une zone de responsabilité d'une unité ?

 24   Comment assurer la sécurité de cette zone de responsabilité ?

 25   R.  Cela incombe au commandement et son commandant. La zone de

 26   responsabilité est une zone qui est sécurisée par le déploiement des

 27   membres de l'unité, par des patrouilles, par des éclaireurs qui sont

 28   envoyés sur le terrain, dans le cadre de la zone de responsabilité, et


Page 5129

  1   cetera.

  2   Q.  Pouvez-vous me dire quelle était la zone de responsabilité de votre

  3   unité, et cela, pendant la période après la chute ou la libération de

  4   Vukovar, après le 18 novembre 1991 ?

  5   R.  Je ne peux pas énumérer tous ces sites par cœur. Cela est indiqué sur

  6   les cartes où on peut voir les décisions prises par le commandant. Cela est

  7   indiqué sur ces cartes au feutre, on peut voir des postes de commandement,

  8   on peut voir des commandements supérieurs, des commandements subordonnés,

  9   on peut voir également des unités voisines. Tout cela, c'est indiqué sur

 10   ces cartes.

 11   Q.  Pouvez-vous me dire si dans le cadre de la zone de responsabilité de

 12   votre brigade, de la 80e Brigade, se trouvait, entre autres sites, Ovcara ?

 13   R.  Je n'ai pas compris votre question.

 14   Q.  Dans la zone de responsabilité de la 80e Brigade motorisée se trouvait

 15   Ovcara; est-ce que c'était le cas ?

 16   R.  Oui. Oui, Ovcara se trouvait dans le cadre de cette zone de

 17   responsabilité. Mais plus tard, cette zone de responsabilité n'était plus

 18   ma zone de responsabilité, puisque c'est le supérieur hiérarchique qui

 19   attribue une zone de responsabilité à un commandant. Et d'après les

 20   règlements qui étaient en vigueur à l'époque, une zone de responsabilité

 21   qui est attribuée à un commandant ne peut pas être pénétrée de qui que ce

 22   soit sans autorisation du commandement supérieur, à savoir du supérieur

 23   hiérarchique direct qui a attribué cette zone de responsabilité. Dans ce

 24   cas-là, c'était le commandant du Groupe opérationnel sud. Lui, il peut

 25   entrer dans n'importe quelle zone de responsabilité ou n'importe quel

 26   secteur de responsabilité, et c'était son droit. De mon côté, je ne pouvais

 27   rien faire contre cela.

 28   Q.  Il faut tirer ce point au clair. On vous a dit que cette zone de


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  1   responsabilité vous a été attribuée et ensuite vous a été retirée.

  2   R.  Oui. Au moment où ils sont entrés, par exemple, dans le secteur du

  3   hangar et d'Ovcara, ils sont arrivés avec leurs commandants, leurs soldats,

  4   ils ont occupé ce site. Et c'était leur zone de responsabilité dont ils

  5   étaient responsables. Ils ont assumé la responsabilité par rapport à

  6   l'exécution des tâches qui leur ont été confiées, et les risques aussi.

  7   Q.  Il faut également jeter un peu plus de lumière sur certains éléments

  8   que vous avez mentionnés. Vous avez dit que le commandant ou le supérieur

  9   hiérarchique qui vous a attribué cette zone de responsabilité peut pénétrer

 10   dans cette zone à n'importe lequel moment sans autorisation de qui que ce

 11   soit d'autre.

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Si j'ai bien compris, le commandant ne s'est pas du tout rendu dans

 14   cette zone de responsabilité. C'était d'autres personnes qui ont pénétré

 15   dans cette zone.

 16   R.  Mais il y avait ses organes, l'organe chargé de la sécurité, son

 17   adjoint chargé du moral et d'autres officiers de l'état-major. Cela ne veut

 18   pas dire que lui-même, il n'était pas responsable de l'entrée de ces autres

 19   personnes dans cette zone de responsabilité.

 20   Q.  Est-ce que vous voulez nous dire qu'en fait, dans cette zone de

 21   responsabilité pouvaient entrer n'importe quel officier ou membre du

 22   commandement supérieur sans vous en informer ?

 23   R.  Non. Seulement les officiers plus haut placés pouvaient se rendre dans

 24   cette zone de responsabilité. Parce qu'une partie du commandement du Groupe

 25   opérationnel sud se trouvait là-bas et une partie de mon commandement

 26   supérieur avec des officiers responsables pour cela. Il y avait des organes

 27   chargés de la sécurité, il y avait des adjoints du commandant, il y avait

 28   le chef de l'état-major, et cetera.


Page 5131

  1   Q.  Pour qu'il n'y ait pas confusion, pouvez-vous nous citer leurs noms ?

  2   R.  Il y avait le chef de l'état-major, à l'époque il était lieutenant-

  3   colonel et après il est devenu colonel, Miodrag Panic; ensuite le chef de

  4   l'organe chargé de la sécurité -- en fait, son adjoint que j'ai vu était

  5   Vukasinovic Ljubisa, il était commandant, commandant Ljubisa Vukasinovic;

  6   ensuite, il y avait un autre officier, il était colonel, il était chargé du

  7   moral, je n'ai pas entendu son nom, mais j'ai appris par la suite qu'il y

  8   était aussi. Je suis rentré avec un officier qui était colonel. Je suppose

  9   que c'était lui, mais je ne suis pas tout à fait certain. Plus tard, il y

 10   avait -- mais je ne l'ai pas vu, il y avait le capitaine de première classe

 11   Karanfilov, et il y avait d'autres personnes là-bas, mais je ne me souviens

 12   pas de leurs noms. Les personnes dont les noms j'ai énumérés étaient

 13   certainement là-bas.

 14   Q.  Pouvez-vous répéter le nom du capitaine de première classe.

 15   R.  Karanfilov, c'était son nom de famille. Et je ne connais pas son

 16   prénom.

 17   Q.  Pouvez-vous me dire, au moment où vous avez vu ces officiers, vous avez

 18   vu également beaucoup de civils là-bas, n'est-ce pas ? Si vous avez pensé

 19   que ces officiers pouvaient entrer dans votre zone de responsabilité, je

 20   comprends cela, mais pourquoi avez-vous permis aux civils d'entrer dans

 21   votre zone de responsabilité ? Vous avez dit qu'il y avait des personnes

 22   armées qui n'étaient pas membres du Groupe opérationnel sud, à savoir les

 23   membres de votre commandement supérieur, et qui sont eux aussi entrés dans

 24   la zone de responsabilité de votre brigade.

 25   R.  Par rapport à toute cette opération, c'était certains officiers qui

 26   dirigeaient l'opération, des officiers du Groupe opérationnel sud, les

 27   officiers les plus responsables. Et je ne devais rien leur demander puisque

 28   de par leur grade ils étaient au même niveau que moi. Ils sont arrivés avec


Page 5132

  1   ces personnes. Mais moi je ne connaissais pas ces personnes. J'ai dit qu'il

  2   y avait des personnes qui étaient habillées de façons variées, il y avait

  3   certains éléments d'uniformes militaires, des blouses du personnel médical,

  4   il y en avait qui portait des bottes militaires, et cetera.

  5   Q.  Lorsque vous nous avez dit que vous aviez vu des civils, je n'ai pas

  6   fait référence à des personnes capturées. J'ai fait référence à des civils

  7   pour lesquels vous avez dit qu'ils semaient le désordre, qu'ils vous ont

  8   attaqués vous-même et aussi qu'ils ont malmené des prisonniers.

  9   R.  Non --

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, Monsieur Demirdjian.

 11   M. DEMIRDJIAN : [interprétation] Est-ce qu'on peut obtenir la référence où

 12   le témoin a dit qu'il y avait des civils là-bas ? Je ne me souviens pas

 13   l'avoir entendu dire le mot "civils" par rapport aux personnes qui

 14   n'étaient pas membres de la JNA et qui étaient présentes au moment où il

 15   est arrivé.

 16   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, il a dit cela. Mais je vais tirer ce

 17   point au clair avec le témoin.

 18   Q.  Vous avez vu, Monsieur le Témoin, des gens qui malmenaient des

 19   prisonniers. Vous avez décrit dans votre déclaration comment ces

 20   prisonniers ont dû passer par une double haie. Vous avez décrit la

 21   situation qui régnait dans le hangar. Pouvez-vous nous dire maintenant

 22   d'après vous, et là je vous pose la question concernant les personnes qui

 23   ont pris part à ces actions dans le hangar, est-ce que vous les avez

 24   considérées comme étant les membres de l'unité qui appartenait au Groupe

 25   opérationnel sud ?

 26   R.  Je n'ai pas vu les officiers du Groupe opérationnel sud avant d'avoir

 27   pénétré dans le hangar. Devant le hangar, les personnes qui faisaient

 28   partie de cette double haie avaient des uniformes de la Défense


Page 5133

  1   territoriale. Et des civils descendaient des autocars et passaient par

  2   cette double haie pour entrer dans le hangar. C'est ces civils-là que j'ai

  3   vus. Et j'ai déjà dit que ces civils, eux aussi, portaient des éléments de

  4   différents vêtements, des vêtements militaires et des vêtements civils. Il

  5   y avait plusieurs combinaisons de différentes parties vestimentaires.

  6   Q.  Est-ce que vous avez pensé qu'il s'agissait de civils ou des membres

  7   des unités qui étaient arrivés avec les officiers que vous avez vus sur

  8   place ?

  9   R.  Je n'ai pas considéré ces personnes comme étant des civils. C'étaient

 10   des hommes armés en uniforme qui se trouvaient à l'entrée du hangar. Mais

 11   je ne sais pas avec qui et comment ces personnes sont arrivées là-bas. Mais

 12   ils étaient là-bas.

 13   Q.  C'est pour cela que je vais vous poser la question suivante. En tant

 14   que commandant de la zone de responsabilité dans laquelle ces personnes

 15   sont entrées, et vous les avez vues faire ces choses-là, est-ce que vous

 16   avez pris des mesures pour que ces personnes s'éloignent de cette zone de

 17   responsabilité puisque vous ne saviez à quelle unité ils appartenaient ?

 18   Oui, ils portaient des uniformes, mais cela ne voulait rien dire, vous ne

 19   saviez pas à quelles unités ils appartenaient.

 20   R.  D'abord, j'ai pris des mesures pour que les prisonniers ne soient plus

 21   malmenés ni battus, et j'ai pris des mesures pour que ces prisonniers

 22   soient protégés. Je me suis protégé moi-même aussi, ainsi que ces deux

 23   soldats. C'était vers la fin, lorsqu'ils ont commencé à partir. Je suis

 24   entré dans le hangar et j'ai vu l'officier du Groupe opérationnel sud qui

 25   avait un haut grade et s'occupait de la sécurité. Je lui ai posé la

 26   question pour savoir qui étaient les personnes qui entraient dans le

 27   hangar. Il m'a dit : "Ce sont les gens de l'hôpital." Et moi, après cela,

 28   je ne pouvais rien faire d'autre. Mais moi, ma tâche n'était pas de lui


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  1   poser des questions. Je ne savais pas quelle était leur mission et je ne

  2   savais pas de quelle direction ils étaient arrivés.

  3   Il y avait d'autres officiers avec lui ainsi que leur chef d'état-major. Je

  4   ne l'ai pas vu dans le hangar, il était devant le hangar. Un autre adjoint,

  5   s'il était adjoint, du chef d'état-major se trouvait également à

  6   l'extérieur du hangar et observait tout cela. J'ai essayé de protéger ces

  7   gens, ces prisonniers, en risquant ma propre vie. J'ai pensé qu'il fallait

  8   procéder ainsi et c'est ce que j'ai fait.

  9   Q.  L'officier que vous avez vu dans le hangar s'appelle Vukasinovic,

 10   n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Et quel était son grade ?

 13   R.  Il avait le grade de commandant à l'époque.

 14   Q.  Et il était subordonné, je pense, au commandant Sljivancanin ?

 15   R.  Oui, je pense qu'il était subordonné au commandant Sljivancanin. Il

 16   faisait partie de l'organe chargé de la sécurité du Groupe opérationnel

 17   sud.

 18   Q.  Et vous ne savez pas qui était le chef de cet organe chargé de la

 19   sécurité du Groupe opérationnel sud ?

 20   R.  C'était le commandant Sljivancanin à l'époque.

 21   Q.  Vous lui avez posé la question pour savoir de quelle direction étaient

 22   arrivés ces gens, et je suppose que vous avez fait référence aux

 23   prisonniers, mais est-ce que vous avez parlé d'autre chose avec Vukasinovic

 24   ?

 25   R.  Non.

 26   Q.  Est-ce que vous lui avez posé la question pour savoir qui étaient les

 27   gens qui frappaient les prisonniers ?

 28   R.  Non. Il était à l'intérieur du hangar. Je ne sais pas s'il a vu ou pas


Page 5135

  1   ça et je ne sais pas à partir de quel moment il était à l'intérieur du

  2   hangar. Mais la plupart des personnes se trouvaient à l'intérieur du hangar

  3   lorsque je suis arrivé sur place et lorsque je l'ai vu. Il y avait peut-

  4   être deux autres autocars qui étaient arrivés. Et les gens sont descendus.

  5   Un autre, en même temps, partait. Les personnes qui sont descendus de ces

  6   deux autocars ont dû également passer par cette double haie, et lorsque

  7   tout était fini, je suis entré dans le hangar. La première fois, j'ai vu un

  8   groupe de soldats, un groupe de prisonniers. Je vous ai déjà décrit comment

  9   ils étaient habillés. Puis, il y en a eu qui étaient en groupes isolés et

 10   ils se parlaient entre eux. J'ai vu Vukasinovic, et c'est à ce moment-là

 11   que je lui ai posé la question, et il m'a répondu ce qu'il m'a répondu. Je

 12   vous ai déjà dit cela. Et moi j'étais content de le voir sur place, parce

 13   que je pensais qu'il savait quelle était sa tâche. Donc je ne lui ai pas

 14   posé d'autres questions, hormis la question que j'ai posée pour savoir de

 15   quelle direction ou de quelle ville provenaient ces personnes.

 16   Q.  Je vous demanderais de préciser la réponse que vous venez de

 17   m'apporter. Vous nous avez dit qu'il se trouvait à l'intérieur et que vous

 18   ne savez pas si les prisonniers étaient en train d'être roués de coups ou

 19   non.

 20   R.  Je n'en sais rien. Je ne lui ai pas posé la question. Je lui ai

 21   seulement demandé d'où venaient ces personnes. Je n'ai pas prononcé le

 22   terme de "prisonniers" parce que je ne savais pas quelle était la

 23   définition des personnes qui se trouvaient là. Je lui ai juste demandé qui

 24   étaient ces personnes, et il m'a dit : "Ce sont les prisonniers de

 25   l'hôpital." Et c'était la première fois que je voyais ces gens, ces

 26   prisonniers qui avaient été maltraités.

 27   Q.  Alors, voilà ce qui m'intéresse : pourquoi est-ce que vous ne lui avez

 28   pas relaté ce que vous, vous aviez vu ? Vous, vous avez vu comment ces


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  1   personnes avaient subi des sévices, avaient été rouées de coups par des

  2   gens qui portaient des uniformes incomplets. Pourquoi est-ce que vous ne

  3   l'en avez pas informé? Pourquoi est-ce que vous ne lui avez pas demandé :

  4   "Mais qui sont ces personnes qui sont en train de rouer de coups ces gens

  5   qui se trouvent à l'extérieur du hangar ?"

  6   R.  Non, je ne lui ai pas posé de questions. J'en ai simplement informé mon

  7   commandant. Lorsque je suis arrivé, mes soldats sont entrés dans le hangar.

  8   Je suis parti et je suis allé voir mon commandant, je lui ai relaté ce que

  9   j'avais vu. Et je lui ai dit que ces gens étaient en train d'être roués de

 10   coups, qu'ils subissaient des sévices, et cetera, et cetera, au moment où

 11   ils entraient dans le hangar. Et il y avait quelque 10 à 15 mètres avant

 12   qu'ils n'atteignent la porte, et ils les rouaient de coups avec tout ce qui

 13   leur tombait sous la main. Ils leur donnaient des coups de pied, ils leur

 14   donnaient des coups de poing, ils leur assénaient des coups avec des

 15   crosses de fusil, et cetera.

 16   Q.  Alors, pourquoi est-ce que vous n'avez pas raconté à Vukasinovic quoi

 17   que ce soit à ce sujet ?

 18   R.  [aucune interprétation]

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Ecoutez, est-ce que vous pourriez, je

 20   vous prie, Maître Zivanovic, ne pas commencer à lui poser des questions

 21   lorsque le témoin n'a pas terminé et, de préférence, marquer un temps

 22   d'arrêt de quelques secondes pour que les interprètes puissent suivre vos

 23   propos. Merci.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous en prie, poursuivez.

 26   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

 27   Q.  Aujourd'hui vous nous avez dit que vous-même et Vukasinovic, vous vous

 28   trouviez à l'intérieur du hangar et que vous avez vu un groupe de personnes


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  1   qui avaient des uniformes M77, des uniformes militaires. Qu'est-ce que vous

  2   pouvez nous dire à propos de ces uniformes militaires, ces uniformes M77 ?

  3   Qu'est-ce que cela signifie, un uniforme M77 ?

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Avant que vous ne répondiez à cette

  5   question --

  6   M. ZIVANOVIC : [aucune interprétation]

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Lorsque j'ai pris la parole, j'ai

  8   interrompu le témoin, et il avait répondu -- ou il avait commencé à

  9   répondre à la question précédente que vous lui avez posée, donc pourquoi

 10   est-ce qu'il n'a relaté quoi que ce soit à Vukasinovic à propos de ce qui

 11   se passait à l'extérieur. Le témoin avait commencé à répondre en disant :

 12   "Eh bien, je ne vais pas nier le fait que je ne lui ai jamais posé la

 13   question…"

 14   Puis ensuite je l'ai interrompu.

 15   Donc, peut-être que vous pourriez compléter votre réponse, et nous dire ce

 16   que vous aviez l'intention de nous dire.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Ce que je voulais dire, c'est que je

 18   n'étais pas sûr de lui avoir dit que les soldats qui se trouvaient à

 19   l'extérieur étaient en train de subir des sévices. Je n'en suis pas sûr.

 20   Mais bon, ceci étant dit, je ne crois pas qu'au vu des circonstances

 21   j'aurais omis de lui mentionner ceci. Et de toute façon, par ailleurs, je

 22   suis sûr qu'il était au courant. De toute façon, son chef d'état-major se

 23   trouvait à l'extérieur du hangar et je ne l'ai vu que par la suite.

 24   M. ZIVANOVIC : [interprétation]

 25   Q.  Vous dites que vous n'étiez pas sûr de lui avoir dit que les soldats

 26   qui se trouvaient à l'extérieur du hangar avaient fait l'objet de sévices.

 27   Est-ce que c'est ce que vous vouliez dire ? Je sais que c'est ce que vous

 28   avez dit en serbe -- enfin, c'est en tout cas comme cela que ça été


Page 5138

  1   interprété.

  2   R.  Non, non, pas les soldats. Les gens qui sortaient des autocars. Les

  3   prisonniers.

  4   Q.  Eh bien, si vous n'en êtes pas sûr, est-ce que vous lui avez posé la

  5   question et vous ne vous souvenez probablement pas de la réponse qu'il vous

  6   a faite, si tant est que vous lui avez posé la question ?

  7   R.  Ecoutez, je n'en ai pas parlé pendant très longtemps avec lui. Je lui

  8   ai tout simple demandé : "Qui sont ces personnes ? D'où viennent-elles ?"

  9   Voilà littéralement ce que je lui ai demandé. Et il m'a répondu : "Ce sont

 10   les gens de l'hôpital." Je suis resté pendant un petit moment là-bas puis

 11   je suis allé au poste de commandement du Groupe opérationnel sud où j'ai

 12   informé mon supérieur de ce que j'avais vu là-bas.

 13   Q.  Alors, voilà ce que j'aimerais savoir : est-ce que vous n'étiez pas

 14   intéressé, est-ce que vous ne souhaitiez pas savoir pourquoi les

 15   prisonniers étaient roués de coups ? Pourquoi est-ce que vous ne leur avez

 16   pas demandé pourquoi ils agissaient de la sorte ?

 17   R.  J'ai dit que j'avais pu constater qu'ils se connaissaient, qu'ils

 18   s'adressaient les uns aux autres en utilisant leurs noms, leurs prénoms, et

 19   que même lorsqu'ils s'adressaient les uns aux autres, ils faisaient usage

 20   de termes particulièrement péjoratifs. Et c'est à ce moment-là que j'ai vu

 21   Vukasinovic qui était à l'intérieur. Je lui ai dit qu'il y a des là-bas qui

 22   n'ont aucun insigne, qui n'ont pas de couvre-chefs. Voilà, je me suis rendu

 23   compte en fait que -- voilà, que c'était tout, que je n'avais pu rien

 24   d'autre à faire. Et c'est ainsi que j'ai décidé d'aller présenter mon

 25   rapport à mon commandant. Et c'est à ce moment-là qu'il m'a dit ce qu'il

 26   m'a dit.

 27   Q.  Entre autres, vous avez dit que vous aviez vu Vukasinovic entouré par

 28   un groupe de personnes qui étaient revêtues de l'uniforme M77. Est-ce que


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  1   vous pourriez nous expliquer ce que cela signifie, un uniforme M77 ?

  2   R.  C'était un nouveau type d'uniforme qui avait, en fait, été introduit à

  3   l'époque. Il était différent de l'ancien uniforme. Si vous vous en

  4   souvenez, il avait été conçu en 1977 pour l'armée yougoslave populaire.

  5   Donc, pour les officiers, c'était un uniforme de travail. Pour les soldats

  6   ordinaires, c'était un uniforme d'apparat. Et puis ensuite, cela est devenu

  7   l'uniforme qu'ils portaient tous les jours, l'uniforme classique.

  8   Q.  Alors le numéro 77 fait référence à l'année, l'année de confection de

  9   l'uniforme ?

 10   R.  Oui, oui, c'est ce que je pense. Il en va de même pour les armes, 48

 11   c'est fabriqué en 48. Vous avez des M-53 et d'autres types d'armes

 12   d'ailleurs.

 13   Q.  Alors j'aimerais maintenant faire référence à votre déclaration, ou

 14   plutôt, à votre témoignage dans l'affaire Mrksic le 15 mai 2006.

 15   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Document 4628, qui correspond au numéro 22

 16   sur notre liste. Page 22, je vous prie. Et puis, cela se poursuit jusqu'à

 17   la page 23 dans le système e-court. Ligne 22.

 18   Q.  Je vais vous en donner lecture en anglais et vous allez écouter

 19   l'interprétation. Voilà votre réponse :

 20   "J'ai vu un groupe autour de Vukasinovic. Ils portaient l'uniforme

 21   standard. Il s'agissait de militaires. Je ne sais pas qui ils étaient. Ils

 22   portaient l'uniforme réglementaire, mais la plupart n'avaient pas de

 23   couvre-chefs, et je ne connaissais pas ces personnes. Ils portaient tous

 24   notre uniforme militaire M-77.

 25   "Question : Est-ce que vous pourriez nous expliquer à quoi ressemble un

 26   uniforme M-77, sans pour autant nous donner par le menu ce à quoi il

 27   ressemble ?

 28   "Réponse : C'était l'uniforme réglementaire à l'époque pour l'armée


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  1   populaire yougoslave. Il s'agissait en fait d'une chemise et de pantalons

  2   couleur vert olive. Il y avait des brodequins et il y avait le couvre-chef

  3   -- la casquette, qu'on appelait la casquette de Tito à l'époque, ainsi

  4   qu'un coupe-vent. Voilà ce que portaient tous les officiers supérieurs, et

  5   ces officiers-là portaient ces vêtements."

  6   Vous vous souvenez d'avoir dit cela lors de votre déposition ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Est-ce que vous pouvez confirmer que tout cela est exact ?

  9   R.  Oui, je le peux.

 10   Q.  Lorsque vous êtes arrivé à Ovcara, dans les environs du hangar, je

 11   pense que vous avez vu un ou deux autocars et vous avez vu les prisonniers

 12   qui descendaient des autocars, n'est-ce pas ? Vous pouvez confirmer cela ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Hormis ces autocars, est-ce que vous avez vu d'autres véhicules ?

 15   R.  J'ai vu une voiture, une voiture Renault 4. Elle était garée de côté à

 16   une certaine distance. Et puis, à côté de cette voiture se trouvait un

 17   officier. Il était mince, il était pas tellement grand. Il avait le grade

 18   de colonel. Je me suis approché de lui et je lui ai demandé ce qui se

 19   passait. Je lui ai demandé s'il pouvait nous aider pour que l'on rétablisse

 20   un certain ordre. Il ne m'a pas répondu. Il s'est contenté d'entrer dans sa

 21   voiture et il est parti. Je ne connaissais pas son nom.

 22   Q.  Mais il avait un grade qui était supérieur au votre, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Et à l'époque, vous étiez lieutenant-colonel ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Alors je sais qu'il existe une règle dans l'armée, chez les militaires,

 27   cela fait partie des règles de service : si un officier s'approche ou

 28   s'adresse à un officier dont le grade est supérieur, l'officier qui est


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  1   moins gradé doit se présenter. Est-ce que c'est ce que vous avez fait ?

  2   Est-ce que vous vous êtes présenté, est-ce que vous lui avez indiqué quel

  3   était votre rôle, est-ce que vous lui avez dit qu'il s'agissait de votre

  4   zone de responsabilité ?

  5   R.  Non, je ne me suis pas présenté, mais je l'ai salué comme saluent les

  6   militaires et je lui ai demandé ce qui se passait. Maintenant, pour ce qui

  7   est de savoir s'il m'a reconnu et s'il a reconnu mon grade, je n'en sais

  8   rien. Mais en tout cas, c'était la première fois que je le voyais.

  9   Q.  Mais est-ce que vous ne l'avez jamais vu ailleurs par la suite ?

 10   R.  Non.

 11   Q.  Mais je ne fais pas seulement référence à Vukovar lorsque je dis "par

 12   la suite".

 13   R.  Non, non, non. J'ai lu des rapports, j'ai suivi ce qui se passait, j'ai

 14   suivi les procès. Je pense qu'un nom avait été mentionné, mais je ne sais

 15   pas quel était son nom.

 16   Q.  Est-ce que vous vous souvenez quel fut le nom mentionné ?

 17   R.  Non, je ne peux pas véritablement m'en souvenir. Ecoutez, je l'ai

 18   vraiment au bout de la langue, mais je ne me souviens pas de son nom

 19   maintenant.

 20   Q.  Et -- bon, à l'époque, vous aviez 46 ans, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire si cette personne, cet homme, était

 23   plus âgé que vous, plus jeune, est-ce qu'il avait plus ou moins le même âge

 24   que vous ? Est-ce que vous pourriez nous donner une idée à ce sujet.

 25   R.  Je pense qu'il était plus haut gradé que moi et je pense qu'il était

 26   plus âgé que moi également.

 27   Q.  Et il est parti. Après, donc, ce que vous lui avez dit, il est parti.

 28   Il est parti dans cette Renault, n'est-ce pas ?


Page 5142

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Et vous ne vous souvenez plus de la couleur de la voiture ? Vous vous

  3   en souvenez, par hasard ?

  4   R.  Ecoutez, je ne sais pas si elle était rouge ou peut-être verte.

  5   Q.  Mais est-ce que vous avez pu voir s'il était seul ou s'il y avait un

  6   autre soldat qui l'accompagnait ?

  7   R.  Non. Moi je l'ai vu debout tout seul. Bon, il se peut qu'il y ait eu

  8   quelqu'un d'autre qui se trouvait à quelques pas derrière lui. Mais bon, en

  9   tout cas, je n'ai vu personne. Il était probablement accompagné par

 10   quelqu'un. Je ne sais pas si c'est lui qui conduisait la voiture. Il était

 11   probablement là-bas avec quelqu'un d'autre.

 12   Q.  Pourriez-vous me dire, je vous prie, si vous avez vu des véhicules

 13   militaires à cet endroit ? Des véhicules tout-terrain, par exemple, des

 14   Pinzgauer ou d'autres véhicules militaires, des véhicules de marque Puch,

 15   par exemple ?

 16   R.  Non, non, non, je n'ai pas vu d'autres véhicules là-bas. Je n'ai vu que

 17   les autocars.

 18   Q.  Je vous pose cette question parce que vous avez vu, outre ce colonel,

 19   des officiers. Vous nous avez dit que vous ne les aviez pas vus, mais que

 20   vous saviez qu'ils étaient présents sur les lieux. Donc je suppose qu'ils

 21   étaient arrivés en voiture ou dans un véhicule. Alors je ne suppose pas

 22   qu'ils étaient arrivés à bord des mêmes autocars qui avaient conduit les

 23   prisonniers là-bas. Donc je me demande, je m'interroge pour savoir si vous

 24   auriez peut-être vu des véhicules qui auraient peut-être été utilisés pour

 25   les emmener à cet endroit et pour qu'ils en partent ?

 26   R.  Ecoutez, j'étais probablement beaucoup trop préoccupé à propos des

 27   personnes, donc je n'ai pas véritablement accordé une grande attention aux

 28   véhicules. Mais le fait est qu'ils ont dû arriver là-bas d'un moyen ou d'un


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  1   autre.

  2   Q.  Donc, est-ce que nous pouvons conclure que lorsque vous étiez là-bas

  3   devant le hangar à l'extérieur et à l'intérieur du bâtiment -- parce que

  4   d'après ce que j'ai compris de vos propos, vous n'avez pas demandé au

  5   colonel et au commandant Vukasinovic : "Que faites-vous ici dans ma zone de

  6   responsabilité ? Qui sont ces personnes ? Pourquoi est-ce que vous les avez

  7   emmenées ici ?"

  8   R.  Non, je n'ai rien dit de la sorte. Je savais qui était Vukasinovic, je

  9   savais à quelle unité il appartenait. Il y avait d'autres officiers qui

 10   faisaient partie de son commandement qui étaient des officiers supérieurs,

 11   qui avaient un grade supérieur au mien et au sien également. Donc je

 12   supposais qu'ils avaient une mission, mais je ne savais pas quelle était

 13   cette mission.

 14   Q.  Lorsque vous dites d'autres officiers, vous faites référence à Panic ?

 15   R.  Panic, le chef d'état-major, Karanfilov. Il se peut qu'il y en ait eu

 16   d'autres, bien que je ne les aie pas vus, parce que je n'essayais pas

 17   véritablement de voir qui étaient les officiers qui étaient présents là-

 18   bas.

 19   Q.  Dans votre déclaration, vous avez dit qu'outre le fait que vous aviez à

 20   passer entre cette double haie, que vous avez vu que les prisonniers -- et

 21   que l'on prenait les documents d'identité des prisonniers.

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Est-ce que vous avez vu où on mettait les documents ?

 24   R.  Je pense qu'il y avait une sorte de sac ou de valise, enfin, quelque

 25   chose comme cela, où les documents étaient placés. C'était un sac à

 26   l'ancienne. Un peu comme un sac de voyage.

 27   Q.  Eh bien, en tant qu'officier d'expérience, comment est-ce que vous avez

 28   interprété ce fait, le fait que les documents d'identité de ces personnes


Page 5144

  1   aient été pris ? Etait-ce là la procédure habituelle ? Etait-ce ainsi que

  2   l'on traitait toujours les prisonniers ? Ou était-ce simplement aller à

  3   l'encontre des règles ?

  4   R.  Eh bien, je pensais que les documents seraient utilisés pour faire une

  5   liste permettant d'indiquer l'identité des personnes, simplement pour

  6   inscrire les mentions les concernant, et que ces documents seraient rendus

  7   simplement à d'autres personnes qui pourraient vérifier leur identité.

  8   C'est ainsi que l'on aurait dû procéder.

  9   Q.  En d'autres termes vous n'avez pas trouvé cela inhabituel ?

 10   R.  Non, non. Le fait que les documents de ces personnes aient été saisis ?

 11   Non. Je pensais que c'était la raison pour laquelle, d'ailleurs, ces

 12   documents étaient saisis.

 13   Q.  Dans votre déclaration, vous avez dit que le jour avant, si je ne

 14   m'abuse, un groupe de prisonniers a également été emmené à Ovcara et que

 15   vous avez été chargé de la sécurité de ce groupe, et que vos effectifs de

 16   la 80e Brigade étaient chargés de leur sécurité, que les gardes étaient

 17   pour la plupart des officiers, et que le jour suivant ce groupe a été

 18   transféré à Sremska Mitrovica ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Pourriez-vous me dire si l'on a également saisi les pièces d'identité

 21   de ces prisonniers ?

 22   R.  Je ne sais pas. Je suis entré dans le hangar alors qu'ils s'étaient

 23   déjà mis en rang, une liste avait déjà été dressée, et ils ont été emmenés

 24   une fois que l'on a vérifié leur identité par rapport à cette liste.

 25   Q.  Est-ce que vous savez qui a dressé cette liste ?

 26   R.  Vous parlez du groupe qui a été emmené à Mitrovica ?

 27   Q.  Oui.

 28   R.  Eh bien, je ne sais pas qui a dressé cette liste. Ils ont été amenés


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  1   là. On m'a dit qui était le commandant - et je vous ai déjà parlé de cela à

  2   plusieurs reprises - il s'agissait de Filip Karaula. On lui a dit comment

  3   se comporter. On lui a dit combien il y en avait. Je ne sais pas si c'est

  4   lui qui a dressé la liste. Mais tout ce que nous avions à faire, c'était de

  5   les recevoir, si je peux parler ainsi, pour assurer leur sécurité. Et le

  6   lendemain matin, nous les avons emmenés à Sremska Mitrovica.

  7   Q.  Est-ce que cela signifie que vous ne saviez pas à quel moment cette

  8   liste a été dressée ? Lorsqu'ils sont arrivés là ou au moment où ils sont

  9   arrivés ?

 10   R.  Je ne sais pas si c'est au moment où ils sont arrivés dans le secteur

 11   ou quand ils se sont rendus. Je ne sais pas.

 12   Q.  En tout état de cause, vous ne savez pas si vous ou un autre officier

 13   de la 80e Brigade a émis les ordres disant que les pièces d'identité de ces

 14   prisonniers devaient être saisies ?

 15   R.  Non.

 16   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Pourrions-nous maintenant regarder le

 17   carnet de notes, il s'agit du 503. Il s'agit de la page 14 de ce carnet de

 18   notes ou de ce carnet opérationnel. En fait, il s'agit même de la page 15,

 19   je pense. Page 27 -- et la cote ERN se termine par 1291. Oui, à la page

 20   suivante. Oui, celle-ci. Non, excusez-moi. Je me suis peut-être trompé. Je

 21   n'ai peut-être pas la bonne liste. Je pense qu'il nous faudrait la liste

 22   qui se trouve à la page 302.

 23   Q.  C'est là le carnet opérationnel dont nous avons parlé, et là je parle

 24   de la pagination du carnet de notes lui-même, donc de la page 49 à - un

 25   instant - la page 65, vous avez une liste qui comporte les noms d'un grand

 26   nombre de personnes. Et il semblerait qu'il s'agisse là des prisonniers

 27   dont vous nous parliez, ceux qui sont allés à Ovcara le jour suivant.

 28   Pourriez-vous me dire -- en fait, je vois que vous avez le prénom, le nom,


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  1   le nom du père et l'année de naissance de chaque prisonnier, et j'aimerais

  2   savoir si vous saviez ou si vous aviez été informé du moment où cette liste

  3   a été dressée ?

  4   R.  Non. Je savais simplement que ces personnes ont été transportées là où

  5   elles devaient être transportées, que tout s'est bien passé, qu'il n'y a

  6   pas eu de plaintes et que ceci a probablement été fait par Vezmarovic, qui,

  7   en fait, assurait leur sécurité et qui a mentionné ces noms dans le carnet

  8   de notes parce qu'il devait connaître l'identité des personnes qu'il était

  9   chargé de remettre.

 10   Q.  Est-ce qu'il vous a rendu compte des faits en vous disant qu'il a

 11   établi une telle liste ?

 12   R.  Non.

 13   Q.  Est-ce que vous avez posé la question ?

 14   R.  Non. Ce que je voulais savoir, c'est si tout s'était bien passé. Et

 15   lorsqu'il est revenu, il m'a dit que tout allait bien et qu'il a pu

 16   remettre le même nombre de personnes qu'il avait escortées jusque-là.

 17   Q.  Pourriez-vous me dire qui lui a remis les prisonniers ou a remis les

 18   prisonniers à votre unité ?

 19   R.  Eh bien, ces prisonniers nous ont été remis par un membre du Groupe

 20   opérationnel sud. Ce groupe de prisonniers avait été amené au hangar par le

 21   colonel Nebojsa Pavkovic, qui était chargé de leur sécurité. Il était

 22   colonel à l'époque. Il les a amenés là et a dit à Filip Karaula : "Il vous

 23   incombe maintenant de vous occuper de ces personnes et de faire ce qu'ils

 24   vous demandent." Et ensuite, Pavkovic est parti.

 25   Q.  Est-ce que vous avez vu en fait Nebojsa Pavkovic à ce moment-là ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Et pourriez-vous nous dire de quoi vous avez parlé à ce moment-là ?

 28   R.  Nous n'avons pas parlé de quoi que ce soit.


Page 5147

  1   Q.  Et comment est-ce que cette remise de prisonniers s'est faite si vous

  2   n'avez pas parlé de quoi que ce soit ?

  3   R.  Eh bien, en fait, ces gens ont été amenés dans le hangar. Je ne sais

  4   pas comment nous avons été avisés du fait que nous devions nous rendre là-

  5   bas et prendre les prisonniers qui étaient dans le hangar. Je ne sais pas

  6   qui les avait amenés là jusqu'à ce que j'aie vu Pavkovic. C'était la

  7   première fois. Et c'est en fait la seule chose qu'il a dite à leur

  8   commandant et il est parti. Il ne m'a même pas dit bonjour.

  9   Q.  Et est-ce que quelqu'un faisant partie de son escorte a parlé de cela

 10   avec un des officiers de votre unité; par exemple, de la compagnie de la

 11   police militaire ou des instances de sécurité ?

 12   R.  Eh bien, non, je ne sais pas. Je ne peux pas réellement vous dire. Je

 13   suis arrivé là le soir. Ces personnes étaient déjà en rang dans le hangar,

 14   debout contre le mur. Ensuite, on les a autorisées à s'asseoir, à fumer une

 15   cigarette.

 16   Q.  La raison pour laquelle je vous pose cette question, c'est parce que

 17   vous avez dit que Vezmarovic vous a dit qu'il avait remis le même nombre de

 18   prisonniers que celui qui lui avait été confié, donc il faut que cela soit

 19   noté quelque part ?

 20   R.  Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit que Vezmarovic avait remis

 21   les personnes, qu'il était revenu et qu'ensuite il avait dit que tout

 22   s'était bien passé. Et ce carnet de notes, qui lui appartient probablement,

 23   je ne sais pas, mais je peux voir que là il a dressé une liste.

 24   Q.  Bien. Peut-être que je vous avais mal compris ou peut-être y a-t-il eu

 25   autre chose, mais je ne vais pas chercher à voir ce qu'il en était. Est-ce

 26   que Vezmarovic vous a dit comment est-ce que cette remise s'est faite, s'il

 27   les a simplement laissés là-bas à Mitrovica et qu'il est simplement parti

 28   ou s'il y a eu des documents à remplir?


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  1   R.  Eh bien, il est juste revenu et a rendu compte au commandant de la

  2   brigade, en disant qu'il avait remis les prisonniers et qu'il n'y a pas eu

  3   de problèmes. Cela a été noté, et c'est tout. Il a simplement dit qu'il

  4   avait amené et remis le même nombre de personnes que celui qui lui avait

  5   été confié.

  6   Q.  Donc, en fait, il vous a dit qu'il avait remis --

  7   R.  Non, non, il ne l'a pas fait. Non. J'ai appris ce chiffre par la suite.

  8   Je ne sais pas qui me l'a dit ou comment j'ai appris cela, mais lui ne m'a

  9   donné de chiffre exact. Il a simplement dit que tout s'était bien passé et

 10   qu'il avait remis le même nombre de personnes que celui qui lui avait été

 11   confié. Donc je ne sais pas s'il était accompagné par d'autres officiers,

 12   mais en tant qu'officier de la police militaire, il lui incombait, il était

 13   de son devoir de le faire.

 14   Q.  Vous n'avez demandé aucun document prouvant que cela avait réellement

 15   été fait ?

 16   R.  Non. Cela suffisait d'en faire mention dans le journal de guerre, et il

 17   a été confirmé lors du briefing que Vezmarovic avait remis ces personnes.

 18   Vezmarovic a rédigé un rapport dans la soirée.

 19   Q.  Nous n'allons pas maintenant parler de ces prisonniers, mais des

 20   prisonniers qui ont été amenés là le 20 novembre. Une fois que vous avez

 21   quitté le hangar, vous êtes allé assister à une réunion d'information avec

 22   Mrksic, et vous avez dit qu'entre autres -- en fait, tout d'abord, il a dit

 23   que vous ne devriez pas lui parler de cela du tout. Et par la suite, il a

 24   dit -- il vous a demandé qui vous a envoyé et pourquoi vous y étiez allé;

 25   est-ce exact ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Est-ce que vous lui avez dit que vous y étiez allé parce que cela

 28   faisait partie de votre zone de responsabilité et que lui-même le savait


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  1   parfaitement puisque c'est une zone qu'il vous avait attribuée ?

  2   R.  Non, parce que ce n'était pas là la raison pour laquelle je m'y étais

  3   rendu. Je me suis rendu là-bas de Sotin, depuis ma propre unité, parce que

  4   je voulais rendre visite à un commandant de bataillon d'artillerie qui

  5   était là-bas à son poste de commandement au village d'Ovcara. Donc c'était

  6   la seule raison.

  7   Q.  Oui, c'est ainsi que je l'avais compris. Mais je suppose que vous êtes

  8   allé voir les autocars au hangar justement pour voir ce qui se passait et

  9   que vous n'auriez probablement pas suivi chacun de ces autocars de toute

 10   façon, mais vous l'avez fait parce que c'était votre zone de responsabilité

 11   ?

 12   R.  A l'époque, j'étais vraiment extrêmement étonné de voir ces autocars

 13   parce que je ne savais pas pourquoi ils étaient là. Et je voulais savoir

 14   qui étaient ces personnes, et j'ai vu les choses que j'ai en fait décrites.

 15   Je suis désolé --

 16   Q.  Oui, continuez, s'il vous plaît.

 17   R.  Si j'étais allé dans une autre direction, si j'étais allé directement à

 18   Vukovar depuis Sotin, je n'aurais pas vu cela. J'en aurais entendu parler

 19   le lendemain seulement, ou même peut-être quelques jours plus tard, mais

 20   j'avais un peu de temps devant moi et je voulais rendre visite à ce

 21   commandant parce que je voulais avoir autant d'information que possible

 22   pour la réunion d'information avec Mrksic et également pour lui rendre

 23   compte, et je lui ai rendu compte de ce que j'ai vu.

 24   Q.  Vous savez ce que je trouve vraiment de bizarre ? Je trouve bizarre

 25   réellement que Mrksic vous ait demandé ce que vous faisiez à Ovcara alors

 26   qu'il savait pertinemment qu'Ovcara faisait partie de votre zone de

 27   responsabilité et que, d'une certaine façon, il n'était que naturel pour

 28   vous de faire le tour de votre zone de responsabilité et de garder l'œil


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  1   sur ce qui se passait.

  2   R.  Ce qui lui a paru bizarre, c'était le fait que je n'étais pas au

  3   courant des événements qui se déroulaient. Mes officiers ne savaient pas

  4   que ceci devait se produire à cet endroit et que cette tâche devait être

  5   menée de manière organisée en impliquant aussi peu de personnel que

  6   possible. Seules quelques personnes étaient supposées le savoir, c'est-à-

  7   dire celles qui étaient impliquées, et cela devait donc rester un secret

  8   pour les autres, y compris pour moi, et c'est la raison pour laquelle il

  9   m'a demandé cela.

 10   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que le

 11   moment est venu de faire la pause.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Effectivement, Maître Zivanovic.

 13   Colonel, nous arrivons au terme de notre audience d'aujourd'hui. Nous nous

 14   reverrons demain matin à 9 heures. Vous n'êtes pas pour autant libéré en

 15   tant que témoin. Ce qui implique que pendant ce temps-là, pendant que vous

 16   êtes toujours ici en votre qualité de témoin, vous n'êtes pas autorisé à

 17   discuter de votre déposition avec qui que ce soit et vous ne pouvez pas

 18   parler à l'une quelconque des parties. Est-ce bien clair ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci beaucoup. L'huissière va vous

 21   accompagner hors du prétoire.

 22   [Le témoin quitte la barre]

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Stringer.

 24   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, bonjour.

 25   Pour que la Chambre ne soit pas étonnée demain, vous vous souviendrez peut-

 26   être que le témoin qui dépose maintenant a été changé lorsqu'il y a eu des

 27   difficultés à trouver les autorisations nécessaires pour le témoin qui

 28   était prévu au départ, le résultat en étant que le témoin actuel aura fini

 


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  1   sa déposition demain et qu'il n'y a pas d'autre témoin. Donc nous n'avons

  2   personne d'autre cette semaine simplement parce que nous avons dû faire

  3   venir ce témoin plus tôt que prévu. Je voulais simplement que les Juges le

  4   sachent pour que cela ne soit pas une surprise pour vous demain.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Monsieur Stringer. Cela n'est

  6   peut-être pas quelque chose de trop gênant, parce que demain il y a la

  7   visite du président allemand au Tribunal, ce qui nous donnera peut-être un

  8   peu plus de temps. Merci beaucoup pour cette information.

  9   M. STRINGER : [interprétation] Je devrais probablement ajouter que le

 10   problème rencontré et qui a empêché le témoin prévu de venir n'a toujours

 11   pas été résolu, et que nous essayons de faire en sorte que ce problème soit

 12   résolu et peut-être également d'identifier d'autres témoins éventuels qui

 13   pourraient venir à la place de ce témoin. Mais dans la mesure où je suis en

 14   train de faire mon mea culpa, c'était peut-être simplement pour que les

 15   choses soient claires pour les Juges.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci beaucoup.

 17   L'audience est levée.

 18   --- L'audience est levée à 14 heures 03 et reprendra le jeudi 30 mai

 19   2013, à 9 heures 00.

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