Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 3 juin 2013

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour à toutes les personnes

  6   présentes dans le prétoire.

  7   Monsieur le Greffier, veuillez citer le numéro de l'affaire.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges.

  9   Ceci est l'affaire le Procureur contre Goran Hadzic, numéro IT-04-75-T.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 11   Les présentations à présent.

 12   M. OLMSTED : [interprétation] Bonjour. M. Olmsted et Thomas Laugel, notre

 13   commis à l'affaire, pour l'Accusation.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 15   Et pour la Défense.

 16   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Pour la

 17   Défense de Goran Hadzic, Zoran Zivanovic et Christopher Gosnell. Merci

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 19   Faisons maintenant entrer le témoin.

 20   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges.

 23   Bonjour, Monsieur Hadzic. Bonjour, Messieurs les Conseils.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je suppose que vous déposerez en

 25   anglais.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Veuillez décliner votre identité et

 28   nous donner votre date de naissance.

 


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je me nomme Jakub Bijak. Je suis né le 5

  2   novembre 1977.

  3   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci beaucoup.

  4   Vous allez maintenant prononcer le texte d'une déclaration solennelle par

  5   laquelle les témoins s'engagent à dire la vérité. Et je dois vous avertir

  6   que ce faisant, vous vous exposez aux peines prévues en cas de parjure si

  7   jamais vous donniez des informations erronées à ce Tribunal.

  8   Et je vous prie maintenant de prononcer le texte de cette déclaration

  9   solennelle qui vous est remis.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 11   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 12   LE TÉMOIN : JAKUB BIJAK [Assermenté]

 13   [Le témoin répond par l'interprète]

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir.

 15   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Olmsted, à vous.

 17   M. OLMSTED : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 18   Interrogatoire principal par M. Olmsted : 

 19   Q.  [interprétation] Bonjour, Docteur Bijak.

 20   R.  Bonjour.

 21   Q.  Je dois vous rappeler, tout comme je dois me rappeler à moi-même, comme

 22   nous parlons tous les deux en anglais, la chose suivante : nous devons

 23   prendre garde à ce que nos voix ne se chevauchent pas, et ce, afin que les

 24   interprètes aient la possibilité d'interpréter nos propos en B/C/S.

 25   Ce matin, je voudrais que nous commencions par votre parcours professionnel

 26   et éducatif.

 27   Où travaillez-vous actuellement ?

 28   R.  Je suis chargé de cours à l'Université de Southampton, au Royaume-Uni.


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  1   Q.  Pendant combien de temps occupez-vous déjà ce poste ?

  2   R.  Depuis le mois de février 2009.

  3   Q.  Quel est le sujet de votre travail ?

  4   R.  Je travaille dans le domaine de la démographie et des statistiques

  5   sociales. Donc j'ai affaire avec l'évolution des populations, les

  6   conséquences de ces évolutions et leurs causes.

  7   Q.  Où travailliez-vous avant d'occuper ce poste ?

  8   R.  J'ai débuté ma carrière en 1999 à l'Institut néerlandais pour la

  9   recherche démographique où j'ai travaillé comme chercheur. Ensuite, je suis

 10   revenu en Pologne pour poursuivre mes études de master. Puis, j'ai occupé

 11   un poste au TPIY pendant deux ans au sein de la section de démographie,

 12   pendant un an en tant qu'assistant de recherche en démographie et en tant

 13   que démographe pendant un an. Ensuite, entre 2003 et le début de 2009,

 14   j'étais employé au Forum centre européen pour la recherche sur les

 15   migrations. C'était une "joint venture" entre une fondation suisse pour

 16   l'étude des migrations des populations et de l'environnement et un certain

 17   nombre d'autres organisations.

 18   Q.  Je voudrais que nous nous penchions d'abord sur le poste que vous avez

 19   occupé au Forum centre européen dont vous venez de parler. Quel était le

 20   sujet principal de vos travaux ?

 21   R.  Il s'agissait des migrations, notamment dans le contexte de l'évolution

 22   démographique.

 23   Q.  Et pendant que vous étiez employé par le bureau du Procureur au TPIY,

 24   sur quoi portaient vos travaux ?

 25   R.  Le sujet en était la reconstruction des conséquences démographiques des

 26   situations de crise pour les populations, tout d'abord en Bosnie pendant la

 27   première année de mes travaux ici, et ensuite en Croatie également pendant

 28   la deuxième année.


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  1   Q.  Je crois comprendre que vous détenez un master en méthodes

  2   quantitatives et systèmes d'information et un doctorat en économie. Quelle

  3   est la pertinence de ces diplômes pour votre travail ?

  4   R.  Tant mon diplôme de master que mon doctorat sont étroitement liés au

  5   domaine de la démographie. Aussi bien mon mémoire de master que ma thèse de

  6   doctorat étaient liés à ce domaine. Notamment, en master j'ai étudié la

  7   mortalité dans les pays développés, et ma thèse de doctorat s'est penchée

  8   sur la prévision des flux migratoires en Europe dans un contexte marqué par

  9   l'incertitude.

 10   M. OLMSTED : [interprétation] Pouvons-nous maintenant afficher le document

 11   2793 de la liste 65 ter, intercalaire numéro 16, à l'écran, s'il vous

 12   plaît.

 13   Q.  Monsieur le Témoin, pourriez-vous nous confirmer qu'il s'agit bien là

 14   de votre curriculum vitae ?

 15   R.  Oui, c'est mon CV actualisé jusqu'au début 2012.

 16   M. OLMSTED : [interprétation] Pouvons-nous passer à la page numéro 3.

 17   Q.  Trouvons-nous bien sur cette page un certain nombre de vos publications

 18   ?

 19   R.  Oui. C'est une page qui propose un certain nombre de mes publications,

 20   celles qui sont les plus pertinentes dans ce cas.

 21   Q.  Pourriez-vous nous dire ce qu'il en est des autres publications qui

 22   sont les vôtres dans le domaine de la démographie ?

 23   R.  Je suis l'auteur d'une monographie et je suis également l'auteur ou le

 24   coauteur de 30 articles ou chapitres de livre, ainsi que de 30 rapports et

 25   autres contributions dans le domaine.

 26   M. OLMSTED : [interprétation] Je voudrais demander le versement de ce

 27   document.

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Soit.


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  1   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document est versé sous la cote P2012.

  2   M. OLMSTED : [interprétation]

  3   Q.  Avez-vous déjà déposé en tant que témoin expert ?

  4   R.  Non.

  5   M. OLMSTED : [interprétation] Je voudrais que nous affichions le document

  6   2831 de la liste 65 ter à l'écran. C'est l'intercalaire numéro 1, s'il vous

  7   plaît.

  8   Q.  Nous trouvons affiché à l'écran un rapport d'expert intitulé :

  9   "Structure ethnique et déplacements de population à partir de zones

 10   touchées par la guerre en Croatie, avant la guerre et pendant la période

 11   s'étendant du 25 juin 1991 au 31 décembre 1993." S'agit-il de votre rapport

 12   d'expert ?

 13   R.  Oui. C'est le rapport dont je suis le coauteur avec Amie Kamanda et

 14   Sarah Lubman.

 15   Q.  Vous venez de dire que vous êtes le coauteur. Qu'en est-il de ces deux

 16   autre coauteurs, qui étaient-ils et quelle a été leur contribution ?

 17   R.  Aussi bien Amie que Sarah étaient des étudiantes dont j'encadrais le

 18   doctorat. Il s'agissait d'assistantes de recherche qui ont contribué à deux

 19   parties du rapport. Amie Kamanda a contribué à la partie numéro 3, Sarah

 20   Lubman a contribué à la partie numéro 5. De plus, elles ont également

 21   fourni des commentaires sur le rapport dans son ensemble. Cependant,

 22   j'assume l'entière responsabilité de ce rapport que j'ai signé.

 23   Q.  Donc vous avez directement encadré leurs travaux, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  De façon générale, quels étaient les objectifs principaux poursuivis

 26   lors de la rédaction de ce rapport ?

 27   R.  Eh bien, nous les trouvons dans le résumé et l'introduction. Il y avait

 28   deux objectifs principaux. Le premier consistait à étudier la composition


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  1   ethnique de la population dans les zones touchées de la guerre en Croatie

  2   sur la base du recensement de 1991. Le deuxième objectif consistait à

  3   étudier les déplacements en temps de guerre à partie des zones touchées par

  4   la guerre pendant la période s'étendant du 25 juin 1991 à la fin décembre

  5   1993.

  6   Q.  Quel est le territoire couvert par votre rapport ?

  7   R.  Dans ce rapport, nous avons appliqué la définition officielle du

  8   gouvernement croate quant à ce que sont les territoires touchés par la

  9   guerre ainsi que cela est défini dans la législation croate. Aux fins de

 10   cette étude en particulier et de l'espèce, nous avons exclu le territoire

 11   et l'arrière-pays de Dubrovnik comme était non pertinent. Nous nous sommes

 12   donc, en substance, penchés sur la composition ethnique de la population et

 13   sur les déplacements de population intervenus à partir des zones que l'on

 14   désigne comme la Krajina, la Slavonie occidentale et ainsi que la Slavonie

 15   orientale, le Srem occidental et la Baranja, auxquels je me référerai à

 16   partir de maintenant comme la Slavonie orientale.

 17   Q.  Vous parlez de la définition telle qu'elle existe dans la législation

 18   croate. Est-ce que cela signifie que vous n'avez étudié que certaines

 19   parties de municipalités en Croatie et non pas toujours les municipalités

 20   dans leur totalité ?

 21   R.  C'est exact. Dans le schéma numéro 1 figurant en page 6 du rapport,

 22   nous voyons qu'il y a des pointillés rouges qui indiquent les

 23   agglomérations, les localités, considérées comme ayant été touchées par la

 24   guerre aux termes de la législation croate.

 25   M. OLMSTED : [interprétation] Pouvons passer à cette page. Je crois que

 26   c'est la numéro 7 dans la pagination du prétoire électronique. Page 6 du

 27   rapport.

 28   Q.  Pourriez-vous, Monsieur le Témoin, nous dire quelle est la


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  1   correspondance entre ces zones touchées par la guerre et les districts

  2   autonomes serbes créés en 1991 et qui sont devenus la République serbe de

  3   Krajina ?

  4   R.  En nous fondant sur les informations disponibles auprès du bureau du

  5   Procureur, il apparaît que ces zones correspondent assez bien aux

  6   territoires des districts autonomes serbes tels qu'ils ont été proclamés,

  7   mais il n'y a pas nécessairement correspondance avec les territoires qui

  8   ont fini par être effectivement contrôlés par les Serbes au début de 1992.

  9   Q.  Vous pourriez peut-être préciser. Nous voyons qu'il y a des plages

 10   blanches dans le territoire indiqué sur le schéma, sur la carte. A quoi

 11   correspondent-elles ?

 12   R.  Les zones qui apparaissent en blanc sont les parties de territoires

 13   proclamés comme faisant partie des districts autonomes serbes qui, en

 14   réalité, n'ont jamais été directement touchées par le conflit. Elles ont

 15   été enregistrées comme secteurs faisant l'objet d'une prise en charge

 16   d'intérêt spécial pour l'Etat, ce qui est également un raccourci pour zones

 17   touchées par la guerre.

 18   Q.  Alors, dans la partie orientale, il y a un certain nombre de zones

 19   touchées par la guerre qui sortent des frontières de la SAO de Krajina,

 20   n'est-ce pas ? C'est la Slavonie occidentale, si je ne me trompe ?

 21   R.  En Slavonie occidentale, il y a un certain nombre de municipalités,

 22   d'agglomérations, qui n'étaient pas contrôlées par les Serbes mais qui sont

 23   malgré tout considérées par les autorités croates comme ayant été touchées

 24   par la guerre.

 25   Q.  Est-ce que vous savez s'il s'agissait peut-être d'agglomérations ou de

 26   localités qui étaient sous le contrôle du gouvernement croate ou dont ce

 27   dernier a repris le contrôle pendant le conflit ?

 28   R.  Oui, c'était bien le cas.


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  1   Q.  Dans votre rapport, vous dites qu'en 1991, il y avait 102 municipalités

  2   en Croatie, alors qu'en 1997, le nombre de ces municipalités avait augmenté

  3   pour atteindre 538. Pourriez-vous nous dire si ce changement dans le nombre

  4   de municipalités a eu la moindre conséquence sur votre analyse, et si oui,

  5   lesquelles ? Quelles conséquences ?

  6   R.  Il y a eu un redécoupage des municipalités introduit en 1992. Cela a

  7   permis de prendre en considération de façon plus fine la composition

  8   ethnique de la population et les déplacements intervenus depuis les zones

  9   touchées par la guerre. Les municipalités telles qu'elles étaient définies

 10   avant la guerre étaient assez vastes. Par conséquent, les tendances que

 11   nous avons pu observer en nous référant au découpage d'avant-guerre

 12   n'étaient pas claires, en fait. Elles étaient masquées, si vous voulez.

 13   Alors qu'avec le nouveau découpage, ces schémas -- ces tendances pouvaient

 14   être observées de façon plus claire.

 15   Q.  Donc, si vous vous intéressiez au découpage des municipalités tel qu'il

 16   existait en 1997, cela vous permettait d'étudier les données de façon plus

 17   détaillée ? Cela n'a rien changé aux chiffres en eux-mêmes ?

 18   R.  Non, cela n'a rien changé aux chiffres. C'était simplement une autre

 19   façon de les agréger.

 20   Q.  Voyons maintenant la figure numéro 5 de votre rapport.

 21   M. OLMSTED : [interprétation] Cela figure en page 16 de votre rapport. Page

 22   17 dans le prétoire électronique.

 23   Q.  Pendant que ceci s'affiche, est-ce que vous pourriez nous expliquer,

 24   Monsieur le Témoin, pourquoi vous avez choisi comme date de début le 25

 25   juin 1991 pour cette étude ?

 26   R.  Eh bien, c'était une partie des spécifications que j'avais reçues de la

 27   part du bureau du Procureur pour la rédaction de ce rapport. Cependant,

 28   pour vous donner peut-être une précision ou une confirmation à ce sujet,


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  1   voici ce que nous avons fait. Nous avons examiné les tendances que

  2   présentaient les déplacements de population en utilisant la base de données

  3   principale dont nous disposons - et j'en parlerai dans quelques instants -

  4   nous avons constaté qu'il y avait une évolution manifeste dans ces

  5   tendances à partir du 25 juin 1991 à peu près. Parce qu'avant cette date,

  6   la moyenne quotidienne de personnes déplacées à partir des zones touchées

  7   par la guerre était d'environ 60 personnes par jour. Alors qu'à partir du

  8   25 juin 1991, c'est-à-dire dans les six derniers jours de ce mois, cette

  9   moyenne a augmenté pour atteindre environ 500 personnes par jour. Donc,

 10   manifestement quelque chose d'important s'était produit vers la date du 25

 11   juin ou à cette date.

 12   Q.  Sur ce schéma, nous voyons qu'il y a un pic atteint le 15 juin ainsi

 13   que le 25 juin. Est-ce que vous pourriez nous en dire un peu plus à ce

 14   sujet ?

 15   R.  Il s'agit d'artéfacts statistiques, si vous voulez. C'est la

 16   conséquence des méthodes statistiques employées. Cela nous dit en fait

 17   qu'il manque des données pour les dates correspondantes, et ce qui se passe

 18   dans ce genre de situation, ces données sont déplacées et les chiffres

 19   correspondants sont déplacés vers le début du mois. Les pics apparaissent

 20   aux dates du 20, 15 et aussi du 10 juin, et indiquent une forme de biais de

 21   rappel en statistiques. Parce qu'à cause des difficultés rencontrées

 22   parfois pour se souvenir des dates précises, on assiste à une méthode qui

 23   consiste à prendre une approximation à la date la plus proche qui soit un

 24   multiple de cinq, donc le 5, le 10 ou le 15, et cela semble avoir été le

 25   cas.

 26   Q.  Donc, juste pour être très clair avec un exemple, si une personne

 27   déplacée avait eu un entretien en 1994, elle pouvait dire, par exemple :

 28   "J'ai été déplacée en juin, quelque part vers le début du mois de juin," et


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  1   il est très probable que cela ait été enregistré comme le 1er juin ?

  2   R.  Oui, c'est tout à fait crédible.

  3   Q.  Alors, aux fins de ce rapport, est-ce que vous êtes penché également

  4   sur les causes des déplacements ?

  5   R.  Je ne l'ai pas fait parce que ces informations n'avaient pas été mises

  6   à notre disposition dans toutes les sources que nous avons examinées.

  7   Q.  A ce stade, je crois qu'il serait bon que vous nous donniez peut-être

  8   une vue d'ensemble de votre rapport et de sa structure.

  9   R.  Comme indiqué dans l'introduction, ce rapport comprend six parties

 10   principales ainsi qu'un certain nombre d'annexes. Après un bref résumé, le

 11   rapport débute par une introduction qui introduit donc les objectifs,

 12   poursuivis par la terminologie employée ainsi que les secteurs ou les

 13   domaines couverts. Ensuite, la deuxième partie porte sur la composition

 14   ethnique des secteurs touchés par la guerre. Les parties numéros 3, 4 et 5

 15   concernent le deuxième objectif du rapport, à savoir l'analyse des

 16   déplacements. Et notamment, la partie numéro 3 se penche sur la

 17   bibliographie disponible sur ce sujet; la partie numéro 4 consiste en une

 18   analyse des données du bureau du gouvernement croate pour les personnes

 19   déplacées et les réfugiés; et la partie numéro 5 étant le cadre de l'étude

 20   à d'autres sources externes d'information, celles que nous avons réussi à

 21   obtenir en tout cas. Puis, la partie numéro 6 regroupe les principales

 22   conclusions du rapport. Elle est suivie d'une liste de références ainsi que

 23   de documents du TPIY, puis de six [comme interprété] annexes. La première

 24   annexe sur le découpage territorial du territoire étudié; l'annexe B porte

 25   sur les profils des municipalités touchées par la guerre et faisant l'objet

 26   de l'étude; l'annexe C concerne les caractéristiques des agglomérations,

 27   des localités, dans les zones touchées par la guerre; l'annexe D fournit

 28   des cartes synthétiques représentant le nouveau découpage municipal par


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  1   rapport à l'ancien; et l'annexe E fournit de brèves références

  2   bibliographiques pour chacun des trois côtes.

  3   Q.  Je voudrais passer rapidement à l'annexe C. Pourriez-vous nous dire

  4   comment vous avez procédé à une sélection de localités ou d'agglomérations

  5   ?

  6   R.  Aux fins de cette annexe, trois des agglomérations, Vukovar, Ilok et

  7   Erdut, ont été sélectionnées parce qu'elles faisaient l'objet d'une mention

  8   dans l'acte d'accusation. Les autres localités énumérées dans cette annexe

  9   étaient celles pour lesquelles nous avons constaté qu'il y avait eu un

 10   grand nombre de déplacements qui s'y étaient produits pendant la période

 11   couverte par notre étude. Nous avons établi à cette fin un seuil à 2 000

 12   personnes déplacées, donc nous avons sélectionné les localités dans

 13   lesquelles le nombre de personnes déplacées dépassait ce seuil.

 14   Q.  Je voudrais maintenant parler des sources de données statistiques sur

 15   lesquelles vous vous êtes appuyé dans votre analyse. Avant de faire cela,

 16   je vais vous demander de nous dire ce que les démographes utilisent en

 17   général pour obtenir des chiffres en matière de déplacements de population

 18   ?

 19   R.  Eh bien, normalement ce sont des recensements ou des registres de

 20   populations que nous utilisons, des registres d'état civil également, tous

 21   les registres portant sur les mouvements migratoires et tous les registres

 22   où l'on trouve consigné toute autre forme d'événement significatif, ainsi

 23   que des enquêtes de différentes sortes qui pourraient être pertinentes.

 24   Q.  Et quelles sources secondaires -- quelles sources académiques ou

 25   scientifiques secondaires utilisez-vous en général dans ce cadre ?

 26   R.  C'est là la plus grande partie de tout travail académique que

 27   d'examiner l'ensemble de la littérature disponible dans le domaine, non

 28   seulement ce qui a été déjà fait, mais il s'agit également de définir un


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  1   cadre précis pour sa propre étude.

  2   Q.  Et quels différents types de sources ont été à votre disposition dans

  3   le cadre de votre analyse ?

  4   R.  Pour le premier objectif du rapport, nous avons disposé de tableaux de

  5   données agrégées pour la population sur la base du recensement de 1991 tel

  6   que conduit en République de Croatie. Pour le deuxième objectif du rapport,

  7   nous avons identifié un certain nombre de sources publiques qui figurent

  8   dans la partie regroupant les références du rapport. Et ce qui est le plus

  9   important, c'est que nous avons pu examiner les données fournies au bureau

 10   du Procureur par les autorités croates suite à une demande du bureau du

 11   Procureur en 2003.

 12   Q.  Avez-vous également examiné des rapports d'entités internationales,

 13   telles que le HCR ?

 14   R.  Oui. Ces sources internationales constituent une très grande partie du

 15   chapitre 5 du rapport.

 16   Q.  Pourriez-vous nous dire quel a été le recensement suivant mené en

 17   Croatie après celui de 1991 ?

 18   R.  Il a été conduit en 2001.

 19   Q.  Pourquoi n'avez-vous pas utilisé ce recensement-là aux fins de votre

 20   étude ?

 21   R.  Il y avait à cela plusieurs raisons. Premièrement, la date du premier

 22   recensement effectué après la guerre était trop éloignée de la période

 23   couverte par l'étude pour nous fournir des informations pertinentes dans le

 24   cadre de notre travail. Deuxièmement, entre la fin de la période couverte

 25   par notre étude et le recensement suivant effectué en 2001, il y a

 26   également eu des mouvements de population très significatifs en Croatie,

 27   notamment après 1995, après l'opération Eclair et l'opération Tempête, et,

 28   de ce fait, toute déduction que nous aurions pu faire en nous basant sur le


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  1   recensement d'après-guerre était nulle et non avenue.

  2   Q.  Je voudrais maintenant me pencher sur chacune de ces sources.

  3   Premièrement, quand le recensement pour la Croatie a-t-il été achevé ?

  4   R.  La date du recensement était celle du 31 mars 1991. Mais évidemment, la

  5   date de référence était postérieure de peu lorsqu'on a demandé aux

  6   personnes qui faisaient partie de l'enquête de recensement de se rappeler

  7   de la situation telle qu'elle était au 31 mars 1991.

  8   Q.  Oui. Je crois que lorsqu'on lit au compte rendu 1911, en fait, il

  9   convient de lire 1991.

 10   R.  [aucune interprétation]

 11   Q.  [aucune interprétation]

 12   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète : Merci de ménager une pause entre les

 13   questions et les réponses.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, je n'ai pas entendu la question.

 15   M. OLMSTED : [interprétation]

 16   Q.  Serait-il exact de dire que le recensement s'est achevé avant le début

 17   du conflit en Croatie ?

 18   R.  Oui, en effet.

 19   Q.  Et qui a organisé ce recensement de population ?

 20   R.  C'était le Bureau des statistiques croate, qui relevait à l'époque de

 21   la République yougoslave de Croatie, et c'est ce bureau qui s'est occupé du

 22   recensement en 1991.

 23   Q.  Et qui faisait l'objet de l'étude dans le cadre de ce recensement.

 24   R.  En principe, le recensement devait concerner toute la population des

 25   résidents permanents en Croatie. Donc il s'agissait des personnes qui

 26   bénéficiaient du statut de résidents permanents sur le territoire de

 27   Croatie au moment où le recensement a été effectué.

 28   Q.  Et pourriez-vous nous dire de quelle façon le recensement a été fait ?


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  1   Quel type de procédure a été appliqué ?

  2   R.  Eh bien, les personnes qui se chargeaient du recensement allaient tout

  3   simplement d'une maison à l'autre et s'entretenaient avec les personnes qui

  4   habitaient dans ces maisons pour relever leurs caractéristiques sociales et

  5   démographiques, et sur la base de ces informations, ils remplissaient des

  6   formulaires qui par la suite ont fait l'objet d'un traitement informatique

  7   dans le bureau des statistiques de Zagreb.

  8   Q.  Je suis désolé. J'ai parlé beaucoup trop vite, et je n'attends pas que

  9   vous finissiez vos réponses. Mais je reprends donc ma question : quel type

 10   de données ont-elles été recueillies lors du recensement ?

 11   R.  Les caractéristiques démographiques principales, à savoir le sexe, la

 12   date de naissance, l'état civil, le nombre d'enfants pour les femmes, et

 13   quelques caractéristiques sociales et économiques supplémentaires

 14   concernant les individus et les foyers. Et aussi, on recueillait un certain

 15   nombre d'éléments concernant les propriétés agricoles pour les foyers qui

 16   s'occupaient de l'agriculture.

 17   Q.  Et est-ce que c'est le type de données qu'on recueille normalement dans

 18   le cadre des recensements qui sont faits dans le monde entier ?

 19   R.  Oui. C'était une procédure tout à fait typique, surtout en 1991.

 20   Evidemment, entre-temps, les sciences informatiques ont fait du progrès et

 21   nous avons avancé sur le plan technologique en matière de recensement, mais

 22   à l'époque c'était une procédure tout à fait classique.

 23   Q.  Et de quelle façon est-ce qu'on consignait les données relatives à

 24   l'appartenance ethnique lors du recensement ?

 25   R.  Eh bien, l'appartenance ethnique était quelque chose qui dépendait du

 26   choix de la personne avec laquelle on s'entretenait. Donc une personne

 27   pouvait se déclarer Croate, Serbe, Hongrois, Yougoslave, et aussi, on

 28   pouvait s'abstenir de déclarer son appartenance ethnique.


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  1   Q.  Et que se passait-il si une personne refusait de déclarer son

  2   appartenance ethnique ?

  3   R.  Rien du tout. On le notait, tout simplement.

  4   Q.  Vous dites que les réponses recueillies ont fait objet d'un traitement

  5   informatique. Est-ce que les autorités croates ont procédé à un contrôle de

  6   qualité ?

  7   M. GOSNELL : [interprétation] J'ai une objection à soulever, Monsieur le

  8   Président.

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Gosnell.

 10   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, je m'en suis abstenu

 11   jusqu'à présent, mais je pense qu'il est nécessaire d'établir le fondement

 12   sur la base duquel le témoin était capable de fournir réponse aux questions

 13   de ce type.

 14   M. OLMSTED : [interprétation] Bon, avant de commencer.

 15   Q.  Pourriez-vous nous dire quelle est la source de vos connaissances sur

 16   le recensement qui a été effectué en Croatie ?

 17   R.  Il existe une bibliographie à laquelle je fais référence dans mon

 18   rapport, et j'y cite, entre autres, le recensement qui a été effectué en

 19   1991. Par ailleurs, j'ai recueilli un certain nombre d'éléments grâce à

 20   l'étude que j'ai faite relative à un recensement effectué en Bosnie-

 21   Herzégovine pendant que je travaillais au TPIY. En 1991, les personnes qui

 22   ont effectué le recensement de population en Bosnie, aussi bien en Croatie,

 23   se pliaient aux règlements yougoslaves classiques relatifs au recensement.

 24   Q.  Et pendant que vous travailliez pour le bureau du Procureur au TPIY,

 25   est-ce que vous êtes allé en Croatie et est-ce que vous avez eu l'occasion

 26   de vous entretenir avec les responsables du recensement en 1991 ?

 27   R.  Oui, en effet. Nous sommes partis en mission, si mes souvenirs sont

 28   bons, au mois de juillet 2003, et nous avons passé une semaine et demie


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  1   dans les locaux du bureau de statistiques à Zagreb, et nous avons eu

  2   l'occasion de discuter avec les personnes qui avaient été responsables de

  3   la collecte des données au bureau des statistiques à l'époque. Et nous

  4   avons également eu l'occasion de procéder à une analyse de la documentation

  5   sur les lieux.

  6   Q.  Et sur la base des éléments d'information que vous avez recueillis,

  7   pourriez-vous nous dire quel type de contrôle de qualité était mis en place

  8   par les autorités croates lors du processus de la collecte des données ?

  9   R.  Je ne sais pas exactement quelles vérifications ont été effectuées dans

 10   le cadre du recensement fait en Croatie, mais il existait des procédures de

 11   contrôle classiques : par exemple, de vérifier si tout était cohérent sur

 12   le plan logique; de vérifier si la date de naissance pour un individu

 13   correspondait à la date de naissance qui avait été recueillie

 14   préalablement, par exemple; ou alors, de vérifier si le prénom d'une

 15   personne correspond à son sexe. Et puis, il y a d'autres types de

 16   vérifications de la cohérence générale qui concernent le contrôle des

 17   doublons. Donc les responsables des statistiques essaient de s'assurer

 18   qu'une personne n'est recensée qu'une seule fois, parce qu'il peut arriver

 19   que des personnes soient recensées deux fois au cours de la procédure. Par

 20   exemple, cela arrive avec les enfants des parents divorcés qui sont souvent

 21   enregistrés lors des entretiens avec la mère aussi bien qu'avec le père.

 22   Q.  Merci.

 23   M. OLMSTED : [interprétation] Peut-on afficher, s'il vous plaît, le

 24   document 851 de la liste 65 ter à l'écran.

 25   Et je signale que c'est le même document qui porte la cote P1776.

 26   Mais pour des raisons évidentes, je ne souhaite montrer au témoin que cet

 27   élément qui fait partie de cette pièce à conviction.

 28   Q.  D'abord, pourriez-vous nous dire si ceci est le recensement de


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  1   population en Croatie qui date de 1991 ?

  2   R.  Oui.

  3   M. OLMSTED : [interprétation] Nous allons nous pencher sur une page comme

  4   ça, au pied levé. Par exemple, la page 150.

  5   Q.  Les 200 premières pages de ce recensement comprennent surtout de

  6   différents tableaux. Pourriez-vous nous expliquer ce qui est représenté

  7   dans ces tableaux ?

  8   R.  Eh bien, ce tableau particulier concerne la répartition ethnique de la

  9   population en Croatie et les différents tableaux qui figurent dans ce

 10   document montrent quel est le nombre de personnes qui se sont déclarées

 11   appartenir à un groupe ethnique. Donc ce que nous voyons affiché à l'écran

 12   en ce moment est un tableau de ce type qui montre les données pour un

 13   certain nombre de municipalités, un certain nombre d'agglomérations.

 14   M. OLMSTED : [interprétation] Passons maintenant à la page 257 [comme

 15   interprété], s'il vous plaît.

 16   Q.  Suite aux tableaux, nous retrouvons dans ce document une série de

 17   cartes, et je vais vous montrer la carte qui montre la municipalité

 18   d'Osijek. Monsieur, pourriez-vous nous dire ce que représentent ces

 19   différents cercles de couleur que nous voyons sur la carte ?

 20   R.  Ces cercles montrent où se trouvaient les différentes agglomérations

 21   sur le territoire de la municipalité d'Osijek. Quant aux couleurs

 22   différentes, elles montrent quel groupe ethnique représentait la majorité

 23   dans une agglomération donnée, et les dimensions du cercle correspondent au

 24   nombre de personnes qui habitaient dans une agglomération donnée. Par

 25   exemple, nous voyons ici que la ville d'Osijek est décidément la ville la

 26   plus grande sur le territoire de cette municipalité.

 27   Q.  Et qu'en est-il des cercles qui sont vides, qui ont une plage vide au

 28   centre ?


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  1   R.  Les cercles solides, à la différence des cercles creux, représentent

  2   les différents types de majorité ethnique. Donc les cercles solides

  3   montrent que nous sommes en présence d'une majorité absolue, donc le groupe

  4   qui domine a une majorité supérieure à 50 %. Dans ce cas de figure

  5   particulier, la couleur rouge montre la population croate et la couleur

  6   bleue montre la population serbe. Tandis que les cercles creux, ou les

  7   disques vides, montrent les agglomérations où nous sommes en présence d'une

  8   majorité relative, donc le groupe ethnique dominant a une majorité qui est

  9   inférieure à 50 % des habitants.

 10   Q.  Et nous voyons une série de chiffres qui accompagnent cette carte. Est-

 11   ce que ces chiffres ont été établis lors du recensement ?

 12   R.  Oui, en effet. Tous les éléments d'information qui figurent dans ce

 13   document ont été recueillis lors du recensement effectué en 1991.

 14   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, je pense l'avoir évoqué

 15   dans un courriel de la semaine dernière, nous aimerions remplacer la

 16   version originale du recensement par celle-ci, qui porte la cote P1776,

 17   tout simplement parce que celle-ci comporte des cartes en couleur, et vous

 18   voyez que les couleurs sont pertinentes pour comprendre les cartes. Je peux

 19   soumettre une requête écrite ou alors, peut-être que cette requête orale

 20   suffira.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et est-ce que nous avons une version

 22   B/C/S du document P1776 ?

 23   M. OLMSTED : [interprétation] En fait, c'est un document parfaitement

 24   identique. La seule différence c'est que la version originale est en noir

 25   et en blanc.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.

 27   M. OLMSTED : [interprétation] Et nous n'avons pas repris le recensement

 28   dans sa totalité parce que je pense que sur la base du modèle qui est


Page 5228

  1   représenté ici, vous pouvez comprendre comment le document doit être lu. De

  2   toute manière, l'écriture est latine dans le document.

  3   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] La Défense a-t-elle des objections à

  4   soulever ?

  5   M. GOSNELL : [interprétation] Si l'Accusation affirme qu'il s'agit d'un

  6   seul et même document et que la seule différence se situe au niveau des

  7   couleurs, nous n'avons pas d'objection à soulever.

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Alors, nous allons procéder au

  9   remplacement du document.

 10   Monsieur le Greffier, est-ce que ce document aura la même cote ou est-ce

 11   que nous allons attribuer une nouvelle cote à cette nouvelle version ?

 12   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document 851 de la liste 65 ter se

 13   substituera au document existant et deviendra la pièce P1776. Merci.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 15   M. OLMSTED : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 16   Q.  Monsieur, maintenant j'aimerais que nous nous penchions sur la base de

 17   données qui a été mise sur pied en 1995 [comme interprété] par le bureau

 18   des personnes déplacées, des rapatriés et des réfugiés, qui relève du

 19   gouvernement croate et pour lequel nous allons utiliser le sigle ODPRR.

 20   Pourriez-vous nous dire qu'est-ce que c'est que cette base de données qui a

 21   été créée en 1994 ?

 22   R.  La base de données de 1994 a été mise en place grâce à une collecte de

 23   données concernant les personnes déplacées sur le territoire de Croatie, il

 24   s'agit de données que le gouvernement croate a pu recueillir à l'époque. Et

 25   c'est le premier ensemble de données globales qui a été recueilli par ce

 26   bureau des personnes déplacées et des réfugiés. Avant, les données

 27   concernant les réfugiés ont, bien sûr, été recueillies, mais l'ensemble des

 28   données qui a été recueilli en 1994 concerne pour la première fois la


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  1   totalité des personnes déplacées qui ont dû s'enregistrer et se faire

  2   confirmer par les autorités croates au niveau de leur statut. Et donc, pour

  3   la premier fois, tous les éléments d'information globaux concernant les

  4   personnes déplacées sont devenus disponibles sous un format électronique.

  5   Q.  Et pourriez-vous nous dire de quelle façon vous définissez les

  6   personnes déplacées dans le cadre de votre rapport ?

  7   R.  A la page 4 de notre rapport, nous définissons les personnes déplacées

  8   comme des personnes qui ont été officiellement reconnues en tant que tel

  9   par suite des activités liées à la guerre par les autorités nationales ou

 10   internationales interprétantes [comme interprété]. Donc c'est le terme

 11   général que nous utilisons. Et nous parlons de personnes déplacées, qu'il

 12   s'agisse de personnes déplacées internes ou de réfugiés, donc de personnes

 13   qui sont parties en dehors du pays.

 14   Q.  J'aimerais revenir sur votre dernière réponse. Vous dites que la base

 15   de données créée en 1994 comprend les personnes déplacées auxquelles le

 16   gouvernement a pu avoir accès. Est-ce que vous pourriez préciser votre

 17   réponse ? Est-ce que cela veut dire que dans les zones qui n'étaient pas

 18   sous le contrôle du gouvernement croate, ces personnes déplacées n'ont pas

 19   pu être recensées ?

 20   R.  Oui, en effet. La base de données ne concerne que les personnes

 21   déplacées qui se trouvaient à l'époque sur le territoire contrôlé par le

 22   gouvernement croate.

 23   Q.  Et est-ce que la base de données comprend aussi les réfugiés qui sont

 24   partis dans des pays tiers, la Serbie, la Bosnie, ou, par exemple,

 25   l'Allemagne, la Hongrie ou l'Autriche ?

 26   R.  Non.

 27   Q.  D'après vos connaissances relatives à cette base de données de 1994,

 28   est-ce que toutes les personnes qui se trouvaient sur le territoire


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  1   contrôlé par la Croatie, étaient-elles tenues de s'enregistrer auprès du

  2   ODPRR ?

  3   R.  Non, l'enregistrement n'était pas obligatoire. Un individu pouvait

  4   s'enregistrer, surtout si il ou elle visait à obtenir une aide de l'Etat.

  5   Mais, bien sûr, il était toujours possible pour une personne déplacée de ne

  6   pas dévoiler son statut et son identité aux autorités. Par exemple, si une

  7   personne habitait avec sa famille et n'avait pas besoin de se faire

  8   soutenir par l'Etat, elle pouvait très bien ne pas s'enregistrer en tant

  9   que personne déplacée.

 10   Q.  Et dans cette date de données qui a été créée par l'ODPRR, est-ce

 11   qu'une personne devait se trouver sur le territoire contrôlé par le

 12   gouvernement en 1994 ?

 13   R.  Si mes souvenirs sont bons, une personne était censée être soit une

 14   personne déplacée, soit une personne rapatriée en 1994, au moment où l'on a

 15   procédé à l'enregistrement; quoique les données relatives aux rapatriés

 16   n'aient été recueillies dans leur totalité que plus tard, lors d'un

 17   enregistrement postérieur qui a eu lieu en 1997.

 18   Q.  Nous allons y revenir dans quelques instants. Mais si je vous ai bien

 19   compris, si une personne a été déplacée avant 1994 et si cette personne a

 20   décidé de changer son lieu de résidence permanente pour s'enregistrer là où

 21   elle se trouvait en 1994, elle n'était plus recueillie dans la base de

 22   données de 1994 ?

 23   R.  Une personne était quand même enregistrée dans la base de données de

 24   1994 s'il s'agissait d'une personne qui bénéficiait du statut de personne

 25   déplacée. Dans le rapport, nous évoquons les situations où il était

 26   possible pour une personne de ne plus être une personne déplacée. Dans

 27   quelles circonstances cela était possible, vous en trouverez une

 28   description dans une note en bas de page, c'est la note en bas de page 14


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  1   qui figure à la page 15 du rapport. Donc, dans le cas de figure que nous

  2   étudions dans cette note, une personne déplacée n'était plus considérée

  3   comme telle si les autorités d'une municipalité ont conclu que cette

  4   personne pouvait revenir à son lieu de résidence permanente en toute

  5   sécurité. Par ailleurs, une personne pouvait décider de revenir à sa propre

  6   initiative ou une personne pouvait refuser toute aide du gouvernement,

  7   c'était deux autres possibilités aussi.

  8   Q.  Et dans des cas de figure de ce type, on ne recensait pas ces personnes

  9   comme des personnes déplacées dans la base de données de 1994 ?

 10   R.  Je crois que non.

 11   Q.  Et pourriez-vous nous dire à quel moment on a procédé à la collecte de

 12   données comprises dans la base de données créée en 1994 ?

 13   R.  La collecte de données a été faite en 1994.

 14   Q.  Et pourriez-vous nous dire sous quelle forme l'on a procédé à la

 15   collecte de données ?

 16   R.  Au départ, on s'est servi des formulaires imprimés qui par la suite ont

 17   été consignés sous forme électronique dans le cadre d'une base de données

 18   au bureau des personnes déplacées et des réfugiés à Zagreb.

 19   Q.  Et cette base de données de 1994 se limitait-elle aux personnes d'une

 20   seule appartenance ethnique ?

 21   R.  En principe, non.

 22   Q.  Et pourriez-vous nous dire de quelle façon on déterminait la date et le

 23   lieu où le déplacement s'est produit ?

 24   R.  Dans la base de données de 1994, la date et le lieu où le déplacement

 25   se sont produits étaient tout simplement indiqués par la personne

 26   concernée.

 27   Q.  Et sur la base des réunions que vous avez eues avec les représentants

 28   de autorités croates lorsque vous avez travaillé pour le bureau du


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  1   Procureur, est-ce que vous avez appris quelles mesures les autorités

  2   croates ont mises en œuvre pour s'assurer de l'exactitude des données

  3   recueillies dans la base de données de 

  4   1994 ?

  5   R.  Oui. Ils ont procédé à toute une série de contrôles de qualité, surtout

  6   ils ont éliminé les doublons de cette base de données de 1994 ainsi que des

  7   bases de données qui ont été créées à des dates postérieures.

  8   Q.  Et qu'est-ce qui motivait les autorités croates d'obtenir une base de

  9   données la plus précise possible ?

 10   R.  Je pense que leur motivation principale, c'était le fait que le

 11   processus d'enregistrement des personnes déplacées avait des conséquences

 12   financières pour le gouvernement croate. Les personnes enregistrées en tant

 13   que personnes déplacées pouvaient bénéficier de différentes formes

 14   d'assistance financière, et c'est pourquoi il était dans l'intérêt du

 15   gouvernement croate d'obtenir les chiffres précis.

 16   Q.  A quel moment cette base de données a-t-elle été remise entre les mains

 17   du bureau du Procureur ?

 18   R.  Si mes souvenirs sont bons, au mois de mai 2003.

 19   Q.  Et quelles mesures ont-elles été prises pour nettoyer les données, pour

 20   m'exprimer ainsi ?

 21   R.  Pour commencer, nous avons vérifié la comptabilité [comme interprété]

 22   croisée du point de vue des doublons, et nous avons réussi à relever une

 23   série de doublons que nous avons éliminés de cette base de données.

 24   Q.  Est-ce qu'on a procédé à une comparaison des entrées dans la base des

 25   données du ODPRR et du recensement effectué en 1991 ?

 26   R.  En partie. Nous avons procédé à une comparaison de plusieurs ensembles,

 27   y compris à la comparaison des ensembles - que j'évoquerai un peu plus tard

 28   - et qui concernent les personnes déplacées en Slavonie orientale en 1997


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  1   ainsi que les demandes de retour, mais nous n'avons pas procédé à une

  2   comparaison totale des ensembles de données recueillies en 1994 et 1997.

  3   Q.  Et pourriez-vous nous dire pour quelle raison vous n'avez pas procédé à

  4   ces comparaisons ?

  5   R.  Principalement parce que nous n'avions pas suffisamment de temps pour

  6   le faire pendant que nous étions en mission à Zagreb. Le processus de

  7   comparaison et de compatibilité croisée a été effectué aussi dans un

  8   environnement contrôlé pendant que nous étions à Zagreb pour protéger la

  9   vie privée des personnes étudiées, et c'est pourquoi nous n'avons pu

 10   comparer qu'un nombre limité d'ensembles de données. Nous avons mis

 11   l'accent sur les données de 1997 et sur les demandes de retour parce que,

 12   comme cela s'est avéré par la suite, il a été nécessaire de compléter ces

 13   données.

 14   Q.  Dans votre rapport, vous évoquez aussi une base de données de 1997 qui

 15   a été créée par l'ODPRR. Pourriez-vous nous dire de quelle base de données

 16   il s'agit et de quelle façon vous vous en êtes servi aux fins de votre

 17   analyse ?

 18   R.  Il s'agit d'une initiative qui a été prise par les autorités croates en

 19   1997 pour vérifier le nombre de personnes déplacées et de rapatriés et de

 20   réfugiés en Croatie. L'objectif visé était sans doute d'obtenir des

 21   éléments d'information fiables pour procéder au versement d'assistances

 22   gouvernementales. Il s'agit d'assistance financière octroyée par l'Etat.

 23   Q.  Et pour quelle raison est-ce que vous n'avez pas trouvé cette base de

 24   données fiable ?

 25   R.  Eh bien, il y a deux raisons différentes à cela qui se recoupent en

 26   partie. La première raison c'est que la base de données de 1997 se situe un

 27   an plus tard par rapport à la période étudiée. Ou plutôt, c'est que cette

 28   recherche a été effectuée presque quatre ans après la période étudiée. Et


Page 5235

  1   la deuxième raison c'est que cet ensemble de données est de taille plus

  2   petite que la base de données de 1994 parce qu'un grand nombre de personnes

  3   ont perdu leur statut de personne déplacée en 1994 et 1997 et, par

  4   conséquent, n'ont pas été comprises dans l'enregistrement de 1997.

  5   Q.  Et est-ce qu'il y a eu des recoupements importants entre les données de

  6   1994 et 1997 ?

  7   R.  Oui. En fait, on avait procédé aux comptabilités [comme interprété]

  8   croisées de ces deux bases de données au sein du personnes déplacées à

  9   Zagreb, et, en fait, le recoupement s'élevait à environ 80 %.

 10   Q.  Et quels sont les avantages que présente la base de données de 1994 du

 11   point de vue démographique ?

 12   R.  Eh bien, pour commencer, le rapport rédigé en 1994 concerne la période

 13   après la période étudiée dans le rapport. Et deuxièmement, aussi, la

 14   méthode qui a été mise en œuvre pour représenter les données est meilleure

 15   sur le plan analytique. Par exemple, les données concernant le déplacement

 16   de la population dans la base de données en 1994 comprennent tous les

 17   éléments fournis par les personnes interrogées, tandis que dans la base de

 18   données de 1997, le seul éléments qui y figure, c'est la date où la

 19   personne acquière le statut de personne déplacée pour la première fois,

 20   donc après la date effective où le déplacement a eu lieu.

 21   Q.  Et quels sont les inconvénients de la base de données de 1994 du point

 22   de vue démographique ?

 23   R.  L'inconvénient principal c'est que cette base de données ne concernant

 24   pas le territoire de Croatie dans sa totalité, mais seulement les

 25   territoires qui se trouvaient sous le contrôle du gouvernement croate

 26   pendant l'époque qui nous concerne. Par ailleurs, les réfugiés de Croatie

 27   ne sont pas compris dans cette base de données. Donc il y a une grande

 28   partie des personnes déplacées et de réfugiés qui n'ont pas été recensées


Page 5236

  1   dans cette base de données.

  2   Q.  Et qu'en est-il des données qui concernent les Serbes déplacés ?

  3   R.  Il existe un certain nombre de données relatives aux Serbes qui ont été

  4   déplacés dans cette base de données de 1994, mais ces éléments

  5   d'information sont plutôt peu nombreux. Les informations principales

  6   relatives aux Serbes déplacés dont je me sers dans ce rapport sont tirées

  7   de l'enregistrement des personnes déplacées qui a été effectué en 1997 en

  8   Slavonie orientale, et je me suis servi aussi des demandes de retour qui

  9   ont été déposées auprès des autorités croates.

 10   Q.  Nous allons revenir sur cette base de données dans quelques instants.

 11   Mais dites-nous, s'il vous plaît, pendant que vous travailliez pour le

 12   bureau du Procureur, est-ce que vous avez essayé d'obtenir des données

 13   relatives aux Serbes déplacées depuis 

 14   Belgrade ?

 15   R.  Oui, nous avons fait des tentatives de ce type. Nous avons déposé

 16   plusieurs requêtes d'assistance judiciaire auprès des autorités serbes,

 17   mais pendant que je travaillais pour le bureau du Procureur nous n'avons

 18   jamais reçu de réponse. Et d'après mes connaissances, même par la suite les

 19   autorités n'ont jamais fourni de réponse à nos requêtes.

 20   Q.  Et pour revenir à la base de données que vous venez d'évoquer, ces

 21   demandes de retour et cet enregistrement en Slavonie orientale, de quoi

 22   s'agit-il ?

 23   R.  En 1997, avant que la Slavonie orientale ne soit réintégrée dans le

 24   système administratif croate, on a procédé à un enregistrement des

 25   personnes déplacées sous les auspices des Nations Unies. Par ailleurs,

 26   simultanément, les personnes qui se trouvaient partout, y compris dans les

 27   zones qui n'étaient pas contrôlées par le gouvernement en Croatie, y

 28   compris la Slavonie orientale, y compris la Serbie et le Monténégro et la


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  1   Bosnie-Herzégovine, toutes ces personnes pouvaient déposer une demande de

  2   retour auprès des autorités croates si elles souhaitaient revenir en

  3   Croatie.

  4   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire dans quelle mesure les données qui

  5   figurent de cette base de données se recoupent avec les données relatives à

  6   1994 à 1997, ou, plus précisément, les bases de données de l'ODPRR ?

  7   R.  Normalement, il ne devrait pas y avoir de recoupement parce qu'il

  8   s'agissait de populations très différentes qui ont fait l'objet de ces

  9   enregistrements.

 10   Q.  Vous dites "normalement". Comment cela s'est passé en pratique ? De

 11   manière générale, dites-nous, est-ce que vous avez trouvé qu'il y avait des

 12   recoupements importants ?

 13   R.  Nous n'avons pas cherché les recoupements entre ces deux ensembles de

 14   données, parce que s'agissant des enregistrements de 1997 et des demandes

 15   de retour, on attendait encore ces données s'agissant des personnes qui

 16   auraient pu rentrer de Serbie. Cette partie du travail n'était pas encore

 17   terminée.

 18   Q. Vous avez également dit que l'une de vos sources était les rapports

 19   internationaux tels que les rapports du HCR. Dans quelle mesure vous vous

 20   êtes appuyé sur ces rapports aux fins de votre analyse ?

 21   R.  Nous nous sommes servis de ces rapports pour corroborer nos conclusions

 22   et pour comparer nos conclusions avec ce que nous avons trouvé dans les

 23   documents internationaux. Nous voulions nous servir des données des

 24   autorités internationales qui sont impartiales.

 25   Q.  Et s'agissant des informations secondaires, des rapports du

 26   gouvernement, des publications scientifiques ou académiques, dans quelle

 27   mesure vous vous êtes appuyé sur ces sources-là ?

 28   R.  Uniquement pour avoir des informations de contexte et pour comparer nos


Page 5238

  1   résultats avec ces résultats dans ces publications. Dans un grand nombre de

  2   cas, notamment lorsqu'il s'agit de publications scientifiques, il était

  3   évident que les auteurs avaient leur propre point de vue lorsqu'ils ont

  4   publié ces publications. Et nous n'avons pas traité ces sources de la même

  5   manière que les rapports ou les estimations du HCR, par exemple.

  6   Q.  Néanmoins, est-ce que ces sources avaient une certaine valeur pour les

  7   besoins de votre rapport ?

  8   R.  Oui, notamment en ce qui concerne la confirmation ou le fait de pouvoir

  9   corroborer nos conclusions.

 10   Q.  Passons maintenant aux conclusions qui figurent dans votre rapport.

 11   Sur la base de votre analyse de la base de données de l'ODPRR de 1994, vous

 12   avez déterminé que 182 995 personnes ont été déplacées entre le 25 juin

 13   1991 et le 31 décembre 1993 à partir des zones touchées par la guerre en

 14   Croatie et que plus de 97 % de ces personnes étaient des Croates et des

 15   non-Serbes, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui, c'est exact.

 17   Q.  De même, dans votre rapport, vous indiquez que ces 182 995 personnes

 18   est l'estimation minimale confirmée. Comment se fait-il ?

 19   R.  C'est principalement pour des raisons que j'ai déjà mentionnées. La

 20   collecte des données n'a eu lieu que dans les zones contrôlées par le

 21   gouvernement croate en Croatie. Et forcément, il a dû y avoir des personnes

 22   déplacées à l'extérieur de ces zones contrôlées par le gouvernement

 23   croates, et il devait y avoir des réfugiés dans d'autres pays. De même, il

 24   y avait des personnes qui ne s'étaient pas enregistrées en tant que

 25   personnes déplacées. Ce qui suggère que le chiffre réel est supérieur au

 26   chiffre cité dans notre rapport. Mais, bien sûr, nous ne pouvons pas savoir

 27   dans quelle mesure ce chiffre réel est supérieur au chiffre cité dans notre

 28   rapport, et c'est pourquoi nous présentons dans notre rapport l'estimation


Page 5239

  1   minimale. Et nous voulions dans notre rapport être plutôt prudents.

  2   Q.  Et comme nous en avons déjà parlé, il y avait des personnes qui avaient

  3   renoncé aux bénéfices en tant que personnes déplacées en 1994 et, par

  4   conséquent, elles ne pouvaient plus être calculées dans ce chiffre, n'est-

  5   ce pas ?

  6   R.  Oui. Il y avait également des déplacements de courte durée qui ont eu

  7   lieu en 1991 et qui n'ont pas été inclus dans la base de données de 1994.

  8   Q.  D'accord. Nous venons de mentionner -- ah, excusez-moi. Vous vouliez

  9   dire quelque chose ?

 10   R.  [aucune interprétation]

 11   Q.  Non. Vous avez mentionné trois réserves, trois nuances, que vous aviez

 12   par rapport à ces estimations minimales, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  S'agissant de la population d'avant la guerre, dans quelle des trois

 15   SAO en Croatie la proportion des personnes déplacées était la plus élevée ?

 16   M. OLMSTED : [interprétation] Passons maintenant à la page 19, et c'est à

 17   la page 20 dans le système du prétoire électronique. C'est le document 2831

 18   de la liste 65 ter.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était surtout le cas dans la Slavonie

 20   orientale, donc dans les municipalités de Beli Manastir, Osijek, Vukovar et

 21   Vinkovci, où le nombre de personnes déplacées en 1994 représentait 38,2 %

 22   de la population d'avant la guerre. Et en plus, s'agissant des demandes de

 23   retour et des enregistrements de 1997 en Slavonie orientale, il faut

 24   ajouter encore 1,6 %. S'agissant du nombre de personnes déplacés et

 25   s'agissant de la population d'avant la guerre, la Slavonie orientale était

 26   la région la plus touchée, où ces chiffres étaient les plus élevés.

 27   M. OLMSTED : [interprétation] Passons au tableau 3 qui figure à la page 16

 28   de votre rapport. Page 17 dans le système du prétoire électronique.


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  1   Q.  Vous y indiquez que la base de données de l'ODPRR indique que 76 226

  2   personnes déplacées à partir de la Slavonie orientale ou de du Srem et de

  3   la Slavonie occidentale ont été touchées.

  4   M. OLMSTED : [interprétation] Passons maintenant à la page suivante.

  5   Q.  Pourriez-vous nous dire quel était le pourcentage de ces personnes qui

  6   étaient des Croates ?

  7   R.  Il faut que je me réfère à mes notes.

  8   M. GOSNELL : [interprétation] Objection. Cela dépasse la portée du rapport

  9   parce que le témoin nous a dit qu'il n'avait pas mené des analyses

 10   s'agissant du nombre de Serbes déplacés dans cette zone.

 11   Parler de la proportion des personnes déplacées selon les différents

 12   groupes ethniques est une question à laquelle le témoin ne peut pas

 13   répondre.

 14   M. OLMSTED : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que la

 15   Défense a mal compris ma question. Ce n'est pas le nombre des non-Serbes

 16   qui m'intéresse ou d'un autre groupe ethnique. C'est le nombre de Croates

 17   qui m'intéresse, qui ont été déplacés par rapport au nombre total des

 18   Croates relevés par le recensement de 1991.

 19   M. GOSNELL : [interprétation] Peut-être que je ne comprends pas la

 20   question. Parce que la réponse devrait forcément être 100 %. Mais peut-être

 21   que je vous ai mal compris.

 22   M. OLMSTED : [interprétation] Je vais m'expliquer.

 23   Q.  Nous avons identifié le nombre de Croates déplacés -- mais, attendons

 24   un instant, nous avons le nombre total des personnes déplacées qui est

 25   76 226 personnes. Et si nous regardons à droite, nous voyons le chiffre de

 26   93,4 personnes étaient des Croates -- 93,4 % étaient des Croates. Cela se

 27   réfère aux trois SAO. J'aimerais savoir quel est le pourcentage des Croates

 28   s'agissant du SBSO, compte tenu des groupes ethniques qui étaient présents


Page 5241

  1   dans la SAO SBSO.

  2   M. OLMSTED : [interprétation] Et je pense que le témoin peut tout

  3   simplement faire un calcul mathématique. Il vaut mieux que ce soit le

  4   témoin qui le fasse plutôt que nous, les conseils.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je pourrais vous expliquer les

  6   questions et les réponses qui ont été apportées ?

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Allez-y.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Avant la guerre, en 1991, d'après ce

  9   recensement de 1991, s'agissant des zones touchées par la guerre en

 10   Slavonie orientale, il y avait 91 756 Croates d'après ce recensement. Sur

 11   ce chiffre total, 69 168 personnes sont retrouvées dans la base de données

 12   des personnes déplacées, ce qui représente 75,4 %. Ces chiffres ne sont pas

 13   explicitement mentionnés dans nos rapports, mais ces chiffres peuvent être

 14   déduits à partir des annexes en ajoutant les chiffres portant sur Beli

 15   Manastir, Vinkovci, Vukovar et Osijek également.

 16   Il y a également encore une analyse qui peut être menée, à savoir que l'on

 17   peut regarder le nombre de Croates déplacés à partir de cette zone par

 18   rapport au nombre total des personnes déplacées dans cette zone, ce qui

 19   représente 90,7 %.

 20   Et M. Gosnell a tout à fait raison de dire que cela n'indique pas la

 21   distribution ethnique réelle, mais cela indique uniquement quelle est la

 22   répartition entre les chiffres. Et cela se réfère uniquement à

 23   l'enregistrement de 1994. S'agissant de ces données s'agissant de la zone

 24   de Slavonie, plus de 90 % de ces personnes enregistrées étaient des

 25   Croates.

 26   M. OLMSTED : [interprétation]

 27   Q.  S'agissant du nombre total des personnes déplacées, il s'agissait de

 28   76 226 personnes, et à partir de la base de données de 1994, 90 % de ces


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  1   personnes étaient des Croates, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Et le deuxième pourcentage si on le compare au recensement de 1991,

  4   dans ce cas-là nous voyons que 75,4 % des Croates d'avant la guerre étaient

  5   déplacés, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, plus ou moins, c'est l'interprétation, mais avec une réserve : la

  7   composition de la population aurait pu changer entre le recensement et les

  8   bases de données [comme interprété] de déplacement. Des personnes auraient

  9   pu se déplacer pour une autre raison. Des enfants auraient pu naître ou des

 10   personnes auraient pu mourir. Il y a un grand nombre de choses qui auraient

 11   pu se passer. Mais de manière générale, c'est ainsi qu'il faut comprendre

 12   ces éléments.

 13   Q.  C'est une estimation minimale, n'est-ce pas, les 75,4 %, n'est-ce pas ?

 14   M. GOSNELL : [interprétation] C'est une question directrice.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, c'est le cas, Monsieur Olmsted.

 16   M. OLMSTED : [interprétation] D'accord. Je l'accepte.

 17   Passons au tableau 3, qui figure à la page 9 de votre rapport, page 10 de

 18   la version du prétoire électronique.

 19   Q.  Pourriez-vous nous dire ce qu'indique ce tableau s'agissant de la

 20   composition ethnique d'avant le conflit dans le SBSO par rapport à d'autres

 21   SAO ?

 22   R.  Les couleurs sur cette carte n'indiquent pas les municipalités dans

 23   leur intégralité, mais uniquement les agglomérations qui étaient touchées

 24   par la guerre à l'intérieur de ces municipalités. Et il semble que la

 25   Slavonie orientale, par rapport à d'autres régions, notamment s'agissant de

 26   la Krajina et de la Slavonie occidentale, donc la Slavonie orientale, dans

 27   un grand nombre de cas, était plus dominée par les Croates, même si leur

 28   majorité était relative, ainsi que par d'autres non-Serbes. Et je pense


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  1   notamment aux Hongrois, qui figurent en bas du tableau. C'est indiqué par

  2   la couleur verte. Cela montre les avantages de l'utilisation d'une nouvelle

  3   définition de la municipalité par rapport à l'ancienne parce que nous

  4   pouvons avoir une vision, une image plus précise.

  5   M. OLMSTED : [interprétation] Passons maintenant au tableau 8, qui figure à

  6   la page 20 de votre rapport, page 21 du prétoire électronique.

  7   Q.  Dites-nous, qu'est-ce que nous voyons sur ce tableau s'agissant du SAO

  8   SBSO par rapport à d'autres SAO ?

  9   R.  Ici, nous voyons le nombre de personnes déplacées à partir des

 10   agglomérations touchées par la guerre et sur la base des anciennes

 11   municipalités. Et le tableau au haut se réfère à la base de données de

 12   1994, alors que le tableau d'en bas se réfère à base de données

 13   d'enregistrement pour la Slavonie orientale de 1997 et les demandes de

 14   retour. Il faut indiquer que les échelles sont différentes et l'ampleur des

 15   déplacements est supérieure en haut par rapport au tableau inférieur, et la

 16   Slavonie orientale a été plus touchée par le nombre de personnes déplacées.

 17   Et la couleur brune la plus sombre se réfère aux municipalités où plus de

 18   10 000 personnes ont été déplacées, et les chiffres vont jusqu'à 32 000. La

 19   Slavonie orientale est la région où il y a eu le plus de déplacements par

 20   municipalité.

 21   Q.  Passons maintenant au tableau 6 de votre rapport.

 22   M. OLMSTED : [interprétation] C'est à la page 18 de votre rapport. Page 19

 23   du prétoire électronique.

 24   Q.  Vous avez également conclu que la majorité des 182 995 personnes

 25   déplacées, d'après la base de données de 1994, a été déplacée fin 1991 à

 26   partir de la Krajina et de la région SBSO. Est-ce que d'autres sources vous

 27   ont confirmé cette conclusion s'agissant de la date à laquelle le plus

 28   grand nombre de déplacements ont eu lieu ?


Page 5244

  1   R.  Oui. Les publications que nous avons consultées ainsi que les

  2   estimations indépendantes, telles que les estimations du HCR, semblent

  3   indiquer que l'année 1991 est la période pendant laquelle il y a eu le plus

  4   de déplacements à partir de ces zones.

  5   Q.  Et s'agissant des années 1992 et 1993, quelles sont les conclusions que

  6   vous avez tirées ?

  7   R.  Comme vous pouvez le voir à droite de ce tableau, les déplacements ont

  8   été inférieurs par rapport aux déplacements qui ont eu lieu en 1991, mais

  9   le tableau indique que les déplacements se sont poursuivis, mais avec une

 10   amplitude moins importante. Donc ces déplacements n'ont pas abouti en 1991.

 11   Les déplacements se sont poursuivis en 1992 et 1993 également.

 12   M. OLMSTED : [interprétation] Passons à la page 40 de votre rapport. Cela

 13   figure à l'annexe B. Je pense que c'est à l'annexe B -- la page B1. C'est

 14   le profil pour la municipalité de Beli Manastir.

 15   Je vous prie tout d'abord de regarder ce qui figure en base de cette page.

 16   Oui. Et passons à la page suivante. Je me suis trompé. Je croyais que

 17   c'était à la page 40 dans le système de prétoire électronique --

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] C'était à la page 38.

 19   M. OLMSTED : [interprétation] 38. Non. En fait, c'est à la page suivante.

 20   Pourriez-vous me dire à quelle page cela se trouve pour que je ne me trompe

 21   pas par la suite. Oui, c'est la page qui m'intéresse. C'est à la page 38 ?

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] C'est la page 40.

 23   M. OLMSTED : [interprétation] D'accord. C'est la page qui m'intéresse.

 24   Q.  Je vous prie de consulter ce qui figure en bas de cette page. Pourriez-

 25   vous me dire ce qui y figure ?

 26   R.  A la fin de cette page se trouve la liste des agglomérations touchées

 27   par la guerre dans la municipalité de Beli Manastir définie d'après la

 28   législation croate.


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  1   Q.  Donc ce sont des zones touchées par la guerre que vous avez analysées ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Et dites-nous, quelles sont les informations qui figurent dans les deux

  4   premiers tableaux ?

  5   R.  Dans le tableau en haut, nous voyons la composition ethnique de la

  6   population telle qu'elle est présentée dans le recensement de 1991, en

  7   faisait la distinction entre les groupes majeurs tels que les Croates, les

  8   Serbes, les Hongrois, les Musulmans, et puis il y avait une autre

  9   catégorie, "les autres", qui comporte toutes les catégories qui n'ont pas

 10   été définies, y compris les personnes qui n'ont pas voulu déclarer son

 11   appartenance ethnique. Et puis, vous avez le chiffre total des non-Serbes

 12   et puis le total pour la municipalité.

 13   S'agissant du deuxième panel, du deuxième tableau, vous voyez la

 14   répartition semblable s'agissant de la base de données de 1994 portant sur

 15   des personnes déplacées. Et nous voyons les mêmes groupes ethniques et le

 16   chiffre total à la fin.

 17   Q.  Et s'agissant des deux graphiques, qu'est-ce qu'ils indiquent ?

 18   R.  Ils indiquent les périodes pendant lesquelles les déplacements

 19   ont eu lieu et qui ont été enregistrées dans la base de données en 1994.

 20   Nous avons la première période couvrant la période du 25 juin 1991 jusqu'à

 21   la fin de l'année 1991, et puis nous avons la période restante sur le

 22   deuxième graphique.

 23   Q.  Vous avez également trouvé que 9 678 personnes supplémentaires ne

 24   figurent pas dans la base de données de 1994 et que ces personnes ont été

 25   enregistrées dans les demandes de retour de 1997 portant sur la Slavonie

 26   orientale. Quelle était l'appartenance ethnique de ces personnes, plus de 9

 27   000 personnes ?

 28   R.  S'agissant de ces personnes, un tiers étaient déclarées en tant


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  1   que Serbes et plus de 60 % étaient déclarées en tant qu'appartenance

  2   ethnique inconnue. Et pour déterminer qui étaient ces personnes, lorsque

  3   nous étions à Zagreb en mission en 2003, nous avons comparé ces données

  4   avec le recensement de 1991 afin d'avoir une ventilation par groupe

  5   ethnique. Et, au fond, pour la base de données de 1997 pour la Slavonie

  6   orientale s'agissant de leur demande de retour, nous avons trouvé qu'on

  7   pouvait comparer ces données et s'agissant d'appartenance ethnique qui

  8   n'était pas déclarées, 90 % de ces personnes étaient déclarées en tant que

  9   Serbes dans le recensement de 1991.

 10   Q.  Est-ce que vous avez une opinion pourquoi ces personnes déplacées

 11   qui figurent dans la base de données de 1997 étaient principalement des

 12   Serbes ?

 13   R.  Je ne suis pas un expert s'agissant des aspects militaires de la

 14   population déplacée, mais sur la base des données analysées, nous avons

 15   conclu que la majeure partie des Croates ont été déplacés dans la zone

 16   contrôlée par le gouvernement croate, tandis que les Serbes ont été

 17   déplacés dans les zones contrôlées par les Serbes en Croatie, y compris en

 18   Slavonie orientale.

 19   Q.  Et d'agissant de ces 9678 personnes déplacées, d'où venaient-

 20   elles ?

 21   R.  Elles venaient -- d'après les chiffres que j'ai analysés émanant

 22   de cette base de données, la moitié provenait de la Slavonie occidentale et

 23   un tiers provenait d'autres endroits de la Slavonie orientale, et encore 18

 24   % provenaient de la Krajina.

 25   Q.  Et quel était le pic de ces déplacements ?

 26   R.  S'agissant de la Slavonie occidentale, le pic a eu lieu de

 27   manière très visible en décembre 1991. Environ 1 500 personnes ont été

 28   déplacées. Et s'agissant de la Slavonie orientale, le pic a eu lieu en


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  1   décembre 1991 et en janvier 1992.

  2   M. GOSNELL : [interprétation] Pourriez-vous me dire quelle est la page à

  3   laquelle se réfère le témoin ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est à la page 19 du rapport.

  5   M. OLMSTED : [interprétation]

  6   Q.  Merci. Je pense que dans votre rapport vous dites également que

  7   s'agissant de la base de donnée de 1997, il y avait 111 811 personnes

  8   enregistrées. Dites-nous, quand est-ce que ces déplacements ont eu lieu

  9   dans la majeure partie ?

 10   R.  Ces déplacements ont notamment eu lieu en 1991 [comme interprété]

 11   pendant les opération Eclair et Tempête et, par conséquent, dépassent la

 12   portée de mon rapport.

 13   Q.  Il est l'heure de faire la pause bientôt, mais s'agissant du profil

 14   pour la municipalité de Beli Manastir -- en fait, nous ne le voyons plus --

 15   M. OLMSTED : [interprétation] Je vous prie de revenir à la page 40 de votre

 16   rapport.

 17   Q.  Où trouvons-nous les données correspondant aux demandes de retour de

 18   1997 et à la base des enregistrements pour la Slavonie orientale de la même

 19   année dans ce profil ?

 20   R.  On peut retrouver ces chiffres dans le petit tableau qui se trouve vers

 21   le milieu de la page avec un nombre total de 132 personnes, et nous

 22   trouvons juste en bas le graphique qui nous montre l'évolution dans le

 23   temps.

 24   M. OLMSTED : [interprétation] Je crois que c'est le moment de faire la

 25   pause, Messieurs les Juges.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] En effet.

 27   Monsieur le Témoin, c'est maintenant le moment de faire notre première

 28   pause. Nous reviendrons pour reprendre nos débats à 11 heures. Mme

 


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  1   l'Huissier va maintenant vous accompagner hors du prétoire. Je vous

  2   remercie.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  4   [Le témoin quitte la barre]

  5    M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'audience est suspendue.

  6   --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.

  7   --- L'audience est reprise à 11 heures 00.

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Pendant que nous attendons le retour

  9   du témoin, je voudrais rendre deux décisions orales. La première concerne

 10   la requête de l'Accusation demandant la substitution de la pièce P1984.1981

 11   par la traduction révisée qui a été déposée le 31 mai de ce même document.

 12   J'imagine qu'il n'y a pas d'objection.

 13   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Non, en effet, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.

 15   Il est donc fait droit à la requête, et le greffier prendra en temps voulu

 16   les mesures nécessaires.

 17   [Le témoin vient à la barre]

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Deuxième décision orale.

 19   Au sujet de la requête qui demandait la substitution de la pièce à

 20   conviction numéro 1410 -- excusez-moi, P1401 et P1402, pour lesquelles une

 21   traduction révisée a également été déposée le 31 mai.

 22   La Défense a-t-elle la même position ?

 23   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.

 25   Il est donc fait droit à la requête, et le greffier prendra en temps voulu

 26   les mesures nécessaires.

 27   L'INTERPRÈTE : Correction de la cabine française : Remplacez "la pièce

 28   P1984.1981" par "les pièces P1984 et 1981". 

 


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  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Olmsted, à vous.

  2   M. OLMSTED : [interprétation] Merci.

  3   Q.  Monsieur le Témoin, dans votre rapport, vous abordez également la façon

  4   dont d'autres sources gouvernementales, des sources comme des organisations

  5   internationales ou la littérature scientifique spécialisée, faisaient état

  6   de chiffres plus élevés quant au nombre total de personnes déplacées

  7   pendant la période s'étendant de 1991 à 1993 par rapport à vos propres

  8   chiffres issus de la base de données de 1994. Alors, outre les nuances que

  9   vous avez déjà faites, est-ce que vous pourriez nous dire s'il y a d'autres

 10   facteurs susceptibles d'expliquer ces écarts ?

 11   R.  Oui. Vous vous rappellerez que nous avons exclu le secteur de

 12   Dubrovnik, en premier lieu, de notre analyse et la partie sud du territoire

 13   de la Croatie. Ensuite, nous avons procédé à des contrôles de qualité

 14   supplémentaires afin d'éliminer des doublons dans notre jeu de données. De

 15   plus, la période que nous avons couverte se limitait également à celle

 16   courant à partir du 25 juin 1991.

 17   M. OLMSTED : [interprétation] Je voudrais que nous passions maintenant à la

 18   figure numéro 5, qui se trouve en page 26 de votre rapport, page 27 dans le

 19   système électronique.

 20   Q.  En examinant ce tableau, on voit que selon les données du ministère

 21   croate des Affaires publiques, le nombre de personnes déplacées a atteint

 22   un pic à la fin 1991, avec 550 000 personnes. Mais nous voyons qu'en 1994,

 23   le nombre de personnes qui se déclaraient elles-mêmes comme étant des

 24   personnes déplacées s'était réduit à un peu moins de 200 000. Ce chiffre

 25   semble être assez proche de celui que vous avez déduit de la base de

 26   l'ODPRR, à savoir près de 183 000 personnes déplacées qui s'étaient fait

 27   connaître en tant que personnes déplacées en 1994.

 28   Que cela vous suggère-t-il, la diminution observée au fil du temps ?


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  1   R.  Eh bien, tout d'abord, le fait que notre estimation et celle

  2   apparaissant dans le tableau numéro 5 soient proches n'a rien de surprenant

  3   puisque les données sous-jacentes qui ont été utilisées sont les mêmes,

  4   celles de l'ODPRR. Concernant la variation importante du nombre de

  5   personnes déplacées, premièrement, il semblerait que les statistiques en

  6   matière de personnes déplacées sont, avec le temps, devenues beaucoup plus

  7   précises. Les chiffres de 1991 ont manifestement été arrondis aux 10 000 ou

  8   même aux 50 000 les plus proches. C'est dont une estimation très grossière

  9   du nombre de personnes déplacées et qui incluait peut-être également toute

 10   une catégorie de personnes qui n'avaient été déplacées que pendant une

 11   brève période de temps et il peut s'y trouver également de très nombreux

 12   doublons. Et rien de tout cela n'a pu réellement être vérifié.

 13   Q.  Et qu'en est-il des augmentations ou des diminutions du nombre des

 14   personnes déplacées au cours du temps ?

 15   R.  Eh bien, si on examine le jeu de données de 1994, la base de données,

 16   on voit qu'il y avait clairement ce type de mouvements, et les chiffres les

 17   plus importants sont observés dans le deuxième semestre de 1991. Il y avait

 18   un afflux de personnes déplacées de 1992 à 1993 qui était à peu près

 19   continu, un afflux qui n'était pas négligeable.

 20   Q.  Je vois. Mais je vois que le nombre de personnes déplacées augmente,

 21   puis après, avec le temps, il diminue. Est-ce que cela reflète peut-être

 22   également le nombre de personnes qui se font connaître comme personnes

 23   déplacées avec le temps ?

 24   R.  C'est possible. Une autre possibilité concerne les retours. Et encore

 25   une autre : à la fin de 1994, l'enregistrement avait déjà commencé, donc

 26   les autorités croates étaient en possession d'une base de données qui était

 27   celle utilisée pour le rapport. Donc, à ce stade-là, les données avaient

 28   été enregistrées dans des systèmes informatiques et présentaient une bien


Page 5252

  1   meilleure qualité par rapport à l'estimation très élevée de 1991, par

  2   exemple.

  3   Q.  Nous voyons que pour 1992, le chiffre avancé est de 260 000 personnes

  4   déplacées à peu près. Dans quelle mesure pouvons-nous dire que ces chiffres

  5   étaient considérés comme reconnus par les différentes sources que vous avez

  6   consultées ?

  7   R.  Il semble y avoir eu un consensus vers la fin de 1992 quant au nombre

  8   de personnes déplacées en Croatie et consistant à dire que ces personnes

  9   déplacées se montaient à environ 260 000. C'est ce qui apparaît dans

 10   différents rapports et publications.

 11   Q.  Les statistiques officielles dans ce tableau concernant le nombre de

 12   réfugiés, est-ce que vous pourriez, à leur sujet, nous dire d'où elles

 13   venaient ?

 14   R.  Les chiffres apparaissant dans ce tableau proviennent des registres et

 15   des statistiques officielles des pays où les réfugiés concernés ont obtenu

 16   le droit d'asile. Donc on trouve une distinction entre d'un côté la Serbie-

 17   et-Monténégro, où la source était les statistiques officielles de la

 18   Serbie-et-Monténégro d'une part, et d'autre part, les statistiques d'autres

 19   pays hors ex-RFSY où l'on trouvait également des réfugiés et les

 20   statistiques correspondantes.

 21   Q.  Alors, concernant la période de 1991 à 1993, je voudrais examiner un

 22   certain nombre de rapports fournissant également des informations de nature

 23   statistique.

 24   M. OLMSTED : [interprétation] Le premier d'entre eux va nous amener à

 25   passer à huis clos partiel puisque ce document est confidentiel.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Passons à huis clos partiel, s'il

 27   vous plaît.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 


Page 5253

  1   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 5254-5258 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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  1   (expurgé)

  2   [Audience publique]

  3   M. OLMSTED : [interprétation] Peut-on afficher, s'il vous plaît, le

  4   document 5917 de la liste 65 ter, qui correspond à l'intercalaire 38. Et

  5   j'aimerais que nous passions à la page 2, s'il vous plaît.

  6   Q.  Nous voyons un tableau montrant le nombre de personnes déplacées en

  7   Croatie en date du 22 janvier 1992, et le chiffre total serait de 344 000

  8   [comme interprété]. Ce chiffre est comparable à celui que nous avons vu

  9   tout à l'heure; ai-je raison de l'affirmer ?

 10   R.  Oui. Vous semblez avoir raison.

 11   Q.  Et au-dessous du tableau, nous voyons que les données sont ventilées en

 12   fonction de l'âge et du sexe des personnes recensées. A examiner la nature

 13   de ces chiffres, pourriez-vous nous dire s'il s'agit des estimations ou

 14   d'un décompte définitif ?

 15   M. GOSNELL : [interprétation] Objection. Il n'y a pas de fondement pour

 16   cette question.

 17   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, le fondement pour ma

 18   question, c'est l'expertise de notre témoin dans le domaine de démographie.

 19   Il peut examiner des chiffres et nous présenter son point de vue pour

 20   savoir s'il s'agit tout simplement des estimations ou non.

 21   M. GOSNELL : [interprétation] Mais ce n'est pas le fondement pour poser une

 22   question. On ne peut pas tirer une telle conclusion juste à parcourir le

 23   rapport, même si on est expert.

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Eh bien, j'ai tendance à donner

 25   raison à la Défense, Monsieur Olmsted.

 26   M. OLMSTED : [interprétation] Alors, je passerai à une autre question.

 27   Q.  Sur la base des données qui datent de 1994 et qui figurent dans la base

 28   de données de l'ODPRR, quel est le pourcentage de femmes parmi les 183 000


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  1   personnes déplacées ? Je vous invite à vous pencher sur la page 16 de votre

  2   rapport. Il n'est pas nécessaire de l'afficher à l'écran.

  3   R.  Dans la base de données de 1994, de même que la base de données de 1997

  4   qui concerne la Slavonie orientale et les demandes de retour, le

  5   pourcentage de femmes est quelque peu supérieur au pourcentage des hommes,

  6   donc 48 % par rapport à 52 % des femmes, et ceci est en conformité avec les

  7   résultats globaux du recensement qui montre qu'il y a 48 % des hommes par

  8   rapport à 52 % des femmes.

  9   Q.  Sur la base de ce document, nous pouvons constater que les femmes entre

 10   16 [comme interprété] et 60 ans composent 22,4 % des personnes déplacées,

 11   alors que les hommes d'âge militaire ne constituent que 8,6 % des personnes

 12   déplacées. Pourriez-vous nous dire quels sont les facteurs qui expliquent

 13   la présence moindre des hommes d'âge militaire parmi les personnes

 14   déplacées entre 18 et 60 ans ?

 15   M. GOSNELL : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Le témoin

 16   est invité à se livrer à des conjectures. Il n'y a pas de contexte qui lui

 17   permet de tirer des conclusions et rien ne nous permet de conclure que le

 18   témoin dispose de ce type d'élément d'information.

 19   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, je demande tout

 20   simplement au témoin de nous fournir son opinion sur la base de son

 21   expertise, s'il le souhaite. Je ne l'invite pas à se livrer à des

 22   conjectures.

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que l'expert a eu l'occasion

 24   d'examiner ces chiffres, Monsieur Olmsted ?

 25   M. OLMSTED : [interprétation] L'expert a examiné tous les documents que je

 26   lui ai présentés à la veille de sa déposition, donc, oui, il a eu

 27   l'occasion d'étudier le document.

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous pouvez répondre, Monsieur le


Page 5261

  1   Témoin.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour ce qui est de cette question, ce que j'ai

  3   constaté en étudiant ce document, c'est qu'il y a un manque d'harmonie au

  4   niveau des sexes dans cette tranche d'âge qui va de 18 à 60 ans et qui

  5   n'est pas reproduite dans l'enregistrement de 1994. Et aussi, les données

  6   qui concernent la structure d'âge ne sont pas du tout comparables à celles

  7   que j'ai trouvées dans la base de données de 1994. Donc, sur la base de mon

  8   expertise, et sur la base de mon expertise seule, on peut relever un

  9   certain écart statistique par âge et par sexe au niveau de ce document par

 10   rapport à la base de données de 1994. Et ceci est valable surtout pour les

 11   hommes dont la tranche d'âge se situe entre 18 et 60 ans. Et, par ailleurs,

 12   aussi les enfants sont concernés par ces écarts statistiques aussi.

 13   M. OLMSTED : [interprétation]

 14   Q.  Et pourriez-vous être plus concret. Quels sont les écarts statistiques

 15   que vous avez repérés, pour que nous puissions mieux comprendre en quoi

 16   consistent les divergences par rapport à la base de données de 1994 ?

 17   R.  Dans le jeu de données de 1994 - et là, je vais consulter mes notes

 18   pour vous citer les chiffres exacts - un quart, 25,2 % de la population

 19   totale des personnes déplacées qui s'élève à 183 000, étaient constitués

 20   des enfants qui avaient moins de 18 ans, et ce pourcentage est

 21   manifestement inférieur à celui qui est rapporté dans le document affiché à

 22   l'écran. La population qui est en âge de travailler, donc qui a entre 18 et

 23   60 ans, constitue 55,2 % des personnes déplacées. Encore une fois, il

 24   s'agit d'un chiffre plus élevé que dans les statistiques que vous voyez

 25   affichées à l'écran.

 26   Pour la population dont la tranche d'âge se situe au-dessus de 60 ans, ces

 27   personnes sont définies comme des personnes âgées dans le document, et dans

 28   la base de données de 1994 on estime qu'elles constituent environ 16,5 %


Page 5262

  1   des personnes déplacées, ce qui est peut-être plus compatible avec les

  2   chiffres cités dans ce document. Et j'ajoute, par ailleurs, que dans la

  3   base de données de 1994, 3 % des entrées ne citent pas l'âge des personnes

  4   concernées, ou la date de naissance manque ou elle est erronée.

  5   Q.  Je ne vous invite pas à vous livrer à des conjectures, mais pourriez-

  6   vous nous dire quels sont les facteurs pouvant expliquer ces écarts

  7   [imperceptible], notamment pour ce qui est du nombre des hommes qui ont

  8   entre 18 et 60 ans ? Donnez-nous votre point de vue ou vos conclusions,

  9   s'il vous plaît.

 10   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, je veux soulever une

 11   objection. Ce n'est pas au témoin de décider s'il va se livrer à des

 12   conjectures ou non. Il est clair, à examiner ce rapport, que le témoin est

 13   invité à se livrer à des conjectures puisque la question concrète

 14   consistait à lui demander quelle est la raison, et cetera.

 15   Et, à mon avis, sa réponse doit certainement sortir du cadre de son

 16   expertise.

 17   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, au fond, c'est la

 18   question que j'ai posée au départ. C'était de demander au témoin s'il peut

 19   nous citer des facteurs qui ont pu avoir éventuellement une incidence.

 20   Evidemment, il n'a pas rédigé ce rapport, donc il ne peut pas nous citer la

 21   cause exacte de l'écart statistique entre les deux bases de données, mais

 22   comme il a déjà expliqué, il y a toute une série de facteurs qui peuvent

 23   avoir une incidence sur la divergence des données recensées.

 24   Tout ce que je demande au témoin, c'est de nous dire, s'il le peut, sur la

 25   base de son expertise, quels sont les facteurs qui ont pu avoir une

 26   incidence sur les écarts au niveau des chiffres qui sont repérés, notamment

 27   au niveau des hommes qui ont entre 18 et 60 ans.

 28   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] M. Bijak peut fournir son opinion


Page 5263

  1   d'expert sans se livrer à des conjectures.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce sera un peu difficile, Messieurs les Juges,

  3   mais je vais essayer.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Si c'est trop difficile, ne l'essayez

  5   pas.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que je peux dire avec certitude, c'est que

  7   le document qui est affiché à l'écran et qui date du début de l'année 1992,

  8   au moment où les activités militaires sont toujours en cours, même si le

  9   cessez-le-feu vient d'être signé -- mais toujours est-il qu'à l'époque, il

 10   existe toujours des tensions sur le plan militaire et il semblerait que les

 11   hommes d'âge militaire sont sous-représentés dans l'enregistrement par

 12   rapport à ce qu'on peut voir plus tard. Parce qu'il faut grader à l'esprit

 13   le fait que l'enregistrement postérieur a eu lieu en 1994. Donc, soit en

 14   1992, les hommes n'étaient pas susceptibles de s'enregistrer; ou alors, ils

 15   ont refusé de s'enregistrer à leur propre initiative. Mais il est

 16   impossible de vérifier si l'une ou l'autre hypothèse est vraie.

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 18   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, je souhaite demander le

 19   versement au dossier de ce document.

 20   M. GOSNELL : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Si le

 21   témoin ne s'est pas servi du document, alors le document ne fait pas partie

 22   de son expertise et de son rapport. Par ailleurs, le témoin a dit

 23   explicitement que les chiffres qui figurent ici sont en désaccord avec les

 24   chiffres qu'il a étudiés dans son rapport. Donc il n'y a pas de base pour

 25   admettre ce document au dossier.

 26   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, une série de témoins

 27   experts ont déjà déposé dans le cadre de cette affaire. Ils ont tous eu

 28   l'occasion d'examiner des documents qui ne figuraient pas leur rapport, de


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  1   les commenter, et il leur a été permis de le faire. Si les commentaires du

  2   témoin peuvent nous permettre d'élucider le document et s'ils peuvent être

  3   considérés comme utiles, nous pensons que le document doit être versé au

  4   dossier comme n'importe quel autre document présenté au témoin.

  5   Les documents dont il est question en ce moment, là, sont les documents

  6   émanant du HCR. Aucun doute n'a été émis quant à leur authenticité, et nous

  7   pensons, par conséquent, qu'ils peuvent être admis au dossier.

  8   M. GOSNELL : [interprétation] Permettez-moi, Monsieur le Président, de

  9   signaler que ceci n'est pas un document du HCR. Ceci est un document qui

 10   émane des autorités croates, donc nous mettons en question sa fiabilité. Et

 11   ceci, par ailleurs, constitue une autre base pour soulever une objection.

 12    Deuxièmement, Monsieur le Président, si des documents supplémentaires vont

 13   être versés au dossier par le biais de ce témoin parce qu'ils lui ont été

 14   présentés pendant la séance du récolement, nous aurions dû en être informés

 15   et cela aurait pu être fait facilement.

 16   Et finalement, Monsieur le Président, puisque ici on fait appel à des

 17   précédents, vous savez que nous avons déjà soulevé des objections quant à

 18   l'utilisation de documents qui ne sont pas cités dans le rapport ou qui ne

 19   concernent pas les sujets traités dans le rapport. Et c'est quelque chose

 20   qui est particulièrement important. Il ne s'agit pas de savoir si ce

 21   document figure dans une note en bas de page. L'essentiel c'est que le

 22   document semble sortir du cadre des sujets traités dans le rapport. Et, par

 23   ailleurs, la Défense n'a pas été prévenue de façon qui serait raisonnable.

 24   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, pour commencer, la

 25   Défense a bien raison de dire que ceci est un document émanant du

 26   gouvernement croate. Ceci dit, ceci concerne le poids que les Juges de la

 27   Chambre accorderont au document, et non pas son admissibilité ou son

 28   authenticité.

 


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  1   Quant au fait que nous n'avons pas averti la Défense de l'utilisation de ce

  2   document, Messieurs les Juges, ceci fait partie de documents

  3   supplémentaires qui sont cités dans notre note rédigée après la séance du

  4   récolement. Nous avons donc indiqué que le témoin commentera peut-être viva

  5   voce le document au cours de sa déposition. Et ceci a été communiqué le 22

  6   mai 2013.

  7   M. GOSNELL : [interprétation] Mais, Messieurs les Juges, nous ne savons pas

  8   quelle sera la teneur de ces commentaires au sujet de ce document, et je

  9   note notamment que cette teneur est différente par rapport à ce qui est

 10   cité dans le rapport.

 11   [La Chambre de première instance se concerte]

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'objection est retenue.

 13   M. OLMSTED : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche le document 5874

 14   de la liste 65 ter. Oui, excusez-moi, il faut que nous passions à huis clos

 15   partiel.

 16   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Passons à huis clos partiel.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

 18   le Président.

 19   [Audience à huis clos partiel]

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 27   [Audience publique]

 28   M. OLMSTED : [interprétation] Pour les besoins du compte rendu d'audience,

 


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  1   j'aimerais dire que le document 5875 de la liste 65 ter figure à

  2   l'intercalaire 23.

  3   Il s'agit d'un document émanant du HCR intitulé : "Les estimations du HCR

  4   portant sur les localités et zones d'où émanent les personnes déplacées."

  5   Et il porte la date du 1er mars 1992.

  6   Passons à la page 3.

  7   Q.  Monsieur le Témoin, j'aimerais attirer votre attention sur le deuxième

  8   tableau. Compte tenu de la date de ce rapport - il est un petit peu

  9   difficile, en fait, de voir - mais environ 38 % de toutes les personnes

 10   déplacées émanaient de la SBSO. Si l'on compare cela aux résultats de votre

 11   analyse portant sur la base de données de l'ODPRR de 1994 --

 12   R.  En dépit du fait que ces deux documents se réfèrent à des dates

 13   différentes, le pourcentage, plutôt, correspond à ce que j'ai utilisé dans

 14   mon analyse, à savoir qu'il s'agit de 38,2 % des personnes émanant de la

 15   région de Slavonie orientale. Cela figure en la page 19 de mon rapport, en

 16   bas de la page.

 17   Q.  Avez-vous également fourni un pourcentage portant sur les trois SAO,

 18   les trois districts ? Est-ce que vous avez fourni un pourcentage s'agissant

 19   des personnes déplacées là-bas ?

 20   R.  Excusez-moi, je n'ai pas très bien compris votre question. Pourriez-

 21   vous la reformuler, s'il vous plaît ?

 22   Q.  Oui. Je vais le faire d'une autre manière. Nous voyons dans ce tableau

 23   qu'il s'agit de la Slavonie orientale, Srem et Baranja. De l'autre côté,

 24   nous avons la Krajina du sud, la Krajina du nord, la Slavonie occidentale

 25   et ailleurs. Est-ce que vous avez fourni de tels chiffres s'agissant de la

 26   part de la SBSO par rapport à d'autres 

 27   SAO ?

 28   R.  Mon pourcentage se réfère uniquement à la Slavonie orientale par


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  1   rapport à la Slavonie occidentale et la région de Krajina, sans la partie

  2   "ailleurs". Cela pourrait se rapporter à la région de Dubrovnik, mais ce

  3   n'est qu'une conjecture de ma part.

  4   Q.  Je suis en train d'examiner votre rapport et je vois un chiffre de 41,7

  5   % quelque part dans votre rapport.

  6   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, objection. La question

  7   a déjà été posée deux fois et le témoin y a répondu deux fois. C'est à la

  8   page 19 du rapport.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, c'est ma faute. J'ai mal compris

 10   la question la première fois. Si vous me le permettez, j'aimerais bien

 11   apporter une réponse correcte, exacte.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Est-ce que vous avez une objection à

 13   cela, Maître Gosnell ?

 14   M. GOSNELL : [interprétation] Si vous souhaitez entendre la réponse pour la

 15   troisième fois.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce serait la deuxième fois.

 17   En fait, vous avez raison. Le pourcentage exact s'agissant de la part des

 18   personnes déplacées émanant de la Slavonie orientale est 41,7 %, ce qui est

 19   supérieur par rapport à ce qui figure à l'écran, à savoir les 38 %. Mais,

 20   bien sûr, cette différence est due au fait que j'ai calculé exclusivement

 21   le pourcentage des personnes émanant des trois régions, sans tenir compte

 22   de la partie "ailleurs" comme c'est indiqué dans ce tableau.

 23   M. OLMSTED : [interprétation]

 24   Q.  A la page 4 du rapport, c'est à la page suivante, nous voyons un

 25   histogramme qui montre le nombre de personnes déplacées en fonction de la

 26   région géographique de leur origine et de leur localité où ils se trouvent

 27   au moment de cette analyse. S'agissant de la Slavonie orientale, de Baranja

 28   et du Srem occidental, vous avez en fait fourni un chiffre qui est


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  1   supérieur à la population totale que vous avez fournie dans votre rapport

  2   pour la Slavonie orientale. Je pense que vous aviez annoncé le chiffre de

  3   995 427 [comme interprété] personnes. Pourriez-vous nous dire quelle est

  4   l'origine de cette différence ?

  5   R.  Il y a plusieurs explications possibles. Le recensement de 1991 portait

  6   sur la population précédente dans ces régions et des personnes qui étaient

  7   de manière formelle enregistrées en tant que résidents permanents là-bas.

  8   La deuxième possibilité est qu'il y a eu des changements, des mouvements de

  9   population entre le recensement de 1991 et la date de ce rapport. Il y a eu

 10   des enfants qui sont nés, des personnes ont pu mourir, des gens ont pu

 11   partir vivre ailleurs. Donc c'est pourquoi les chiffres ne correspondent

 12   pas forcément.

 13   Q.  Et s'agissant de la portée géographique, est-ce que cela peut être

 14   également un facteur à prendre en considération ?

 15   M. GOSNELL : [interprétation] Objection. Question directrice.

 16   M. OLMSTED : [interprétation] Nous avons un témoin expert. Je pense que je

 17   peux poser une telle question, à savoir si la portée géographique peut

 18   avoir une incidence.

 19   M. GOSNELL : [interprétation] Je pense que la meilleure manière de formuler

 20   cette question aurait été de dire : "Est-ce qu'il y a d'autres facteurs en

 21   temps de guerre qui auraient pu être pris en considération ?"

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je suis d'accord avec Me Gosnell.

 23   M. OLMSTED : [interprétation] D'accord. Je demande le versement au dossier

 24   de ce document, Monsieur le Président.

 25   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Enregistré aux fins d'identification

 26   et versé au dossier.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce serait la pièce P2015 en tant que

 28   document public. Merci.

 


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  1   M. OLMSTED : [interprétation] Pour consulter le document suivant, nous

  2   devons passer à huis clos partiel, s'il vous plaît.

  3   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, allez-y. Excusez-moi.

  4   M. LE GREFFIER : [aucune interprétation]

  5   [Audience à huis clos partiel]

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  1   (expurgé)

  2   (expurgé)

  3   (expurgé)

  4   (expurgé)

  5   (expurgé)

  6   (expurgé)

  7   (expurgé)

  8   (expurgé)

  9   (expurgé)

 10   [Audience publique]

 11   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 12   M. OLMSTED : [interprétation]

 13   Q.  J'aimerais maintenant vous montrer d'autres éléments de preuve portant

 14   sur les données relatives à la population et portant sur les différentes

 15   municipalités, agglomérations, et voir de quelle manière ces informations

 16   peuvent être comparées aux chiffres émanant de la base de données de

 17   l'ODPRR de 1994.

 18   M. OLMSTED : [interprétation] Le premier document porte la référence 1229

 19   de la liste 65 ter. C'est l'intercalaire 7.

 20   Q.  Ce que nous avons sous les yeux est une lettre de l'assemblée

 21   municipale de Slunj et adressée au gouvernement de la RSK, datée du 11 août

 22   1992. Voici ce qui m'intéresse. Nous nous trouvons au point numéro 2, qui

 23   dit :

 24   "De nombreux villages et hameaux ont été désertés en raison du départ de

 25   quelque 12 000 Croates sur un total de 18 600 [comme interprété] habitants

 26   dans cette municipalité."

 27   Alors, pourrions-nous maintenant revenir à votre rapport.

 28   M. OLMSTED : [interprétation] Numéro 2831 de la liste 65 ter, et notamment

 


Page 5274

  1   la page 29 de l'annexe B. Page numéro 68. Donc, page B-29.

  2   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire comment ces chiffres cadrent avec

  3   les données que vous avez collectées au sujet de la municipalité de Slunj ?

  4   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais élever une

  5   objection sur la base des deux dernières décisions rendues par les Juges,

  6   et je prétends que ces décisions sont tout aussi pertinentes et

  7   s'appliquent également à la recevabilité de ce document, si bien que je

  8   soulève une objection.

  9   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, Monsieur Olmsted.

 10   M. OLMSTED : [interprétation] Le but que je poursuis ici est de présenter

 11   les données figurant dans les annexes du rapport du témoin et de les

 12   comparer aux données figurant manifestement dans ce document afin de voir

 13   s'il y a une corrélation ou un lien entre les deux, ce qui nous permettrait

 14   d'obtenir des informations quant à l'exactitude ou non des données

 15   transmises à l'époque aux autorités.

 16   [La Chambre de première instance se concerte]

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur

 18   Olmsted, et passer à la suite.

 19   M. OLMSTED : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être que je

 20   devrais demander des instructions plus claires pour ne pas tomber dans le

 21   même travers au cours de l'heure suivante.

 22   Mon intention est d'examiner un certain nombre de documents figurant

 23   dans notre liste 65 ter. Le témoin a eu l'occasion de les examiner, la

 24   Défense a été informée de notre utilisation de ces documents ou de notre

 25   intention, en tout cas, de les présenter à ce témoin, et nous nous

 26   proposons de comparer les données figurant dans ces documents, qui eux-

 27   mêmes se trouvent dans notre liste 65 ter, avec les données qui figurent

 28   dans les annexes du rapport. Ces documents concernent des événements


Page 5275

  1   particuliers survenus dans une municipalité ou dans une agglomération

  2   donnée, et dans les annexes il peut se trouver tout comme il peut ne pas se

  3   trouver mention de l'événement concerné par ces données. Donc, parfois il

  4   s'agira simplement, par exemple, de voir ce que l'on trouve enregistré à un

  5   mois particulier afin de vérifier si les données du témoin le reflètent

  6   également.

  7   Alors, les Juges de la Chambre semblent ne pas considérer comme utile

  8   d'analyser ces documents ou ces événements pendant la période couverte par

  9   l'acte d'accusation. Si tel est le cas, je ne poursuivrai pas avec cet

 10   exercice, parce que je ne vois pas l'intérêt de remettre sur la table sans

 11   arrêt cette même question.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] En effet, nous ne considérons pas cet

 13   exercice comme très utile, Monsieur Olmsted. De plus, concernant cette

 14   question particulière que vous avez soulevée, à savoir la possibilité

 15   d'obtenir des éléments d'information quant au degré d'exactitude des

 16   informations qui parvenaient au gouvernement de la Krajina, ceci sort

 17   manifestement du champ du rapport de ce témoin, tout comme de son domaine

 18   d'expertise.

 19   M. OLMSTED : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être m'avez-vous

 20   mal compris, mais ce n'est certainement pas une question que j'avais

 21   l'intention de poser à ce témoin --

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Eh bien, c'est ce que j'ai compris.

 23   Et c'est ce que vous avez dit, Monsieur Olmsted.

 24   M. OLMSTED : [interprétation] Dans ce cas-là, je me suis mal exprimé.

 25   Excusez-moi. La finalité de la présentation de ces chiffres, des chiffres

 26   donnant les personnes déplacées dans ces différentes municipalités, est de

 27   nous convaincre de l'existence ou non d'un lien entre les chiffres en

 28   question et les données qui vous sont fournies dans les annexes du rapport.


Page 5276

  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et vous le faites afin de pouvoir

  2   verser ces documents au dossier. C'est là que le bât blesse.

  3   M. OLMSTED : [interprétation] Je comprends, Monsieur le Président. Je

  4   comprends ce qu'il en est de la recevabilité des documents, que vous avez

  5   décidé de ne pas les verser au dossier par le truchement de ce témoin. Mais

  6   la raison pour laquelle je soulève tout ceci est qu'à mon sens, il y a un

  7   bénéfice à procéder à cette comparaison. En établissant un lien entre le

  8   rapport du témoin et certains événements survenus pendant la période

  9   couverte par l'acte d'Accusation, je pense que cela nous apportera

 10   fondamentalement quelque chose. Alors, bien sûr, c'est quelque chose qui

 11   pourrait être fait par d'autres personnes plus tard ou des juristes, mais

 12   je crois qu'il serait opportun de profiter de la présence du témoin ici,

 13   aujourd'hui, afin qu'il puisse commenter l'existence d'un lien ou l'absence

 14   d'un lien entre deux jeux de données. En laissant de côté la question de

 15   l'admissibilité, je comprends bien que vous ne souhaitez pas verser au

 16   dossier par le truchement de ce témoin cette catégorie de documents,

 17   j'aimerais quand même demander aux Juges ce qu'ils pensent de cette façon

 18   de procéder en examinant les annexes et les données qui sont fournies dans

 19   le document et en procédant à ce type de comparaison. Alors, si les Juges

 20   de la Chambre considèrent que cela ne leur est pas utile, je passerai à

 21   quelque chose d'autre.

 22   [La Chambre de première instance se concerte]

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Veuillez passer à la suite, Monsieur

 24   Olmsted.

 25   M. OLMSTED : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges.

 26   Q.  Je voudrais que nous examinions l'une des annexes à votre rapport.

 27   M. OLMSTED : [interprétation] La page C-2, qui correspond à la page numéro

 28   80 de votre rapport, qui porte le numéro de pièce 65 ter 2831.


Page 5277

  1   Q.  Alors, il s'agit ici, non pas de la municipalité, mais de

  2   l'agglomération d'Ilok. Je crois que les deux premiers tableaux se passent

  3   de commentaires, tout comme les deux premiers graphes. Ce qui m'intéresse,

  4   c'est le tableau qui apparaît en milieu de page. Celui-ci nous donne les

  5   personnes déplacées comme pourcentage de la population. Est-ce que vous

  6   pourriez nous dire avec quelle réserve il convient de prendre ces données ?

  7   R.  Cela a déjà été évoqué précédemment. Les pourcentages qui figurent ici

  8   ne sont pas des taux de pourcentage à proprement parler au sens

  9   démographique puisqu'il s'agit ici d'établir ici un lien entre le nombre de

 10   personnes déplacées pendant toute cette période et le recensement. Or, il

 11   s'agit d'une période de temps donnée pendant laquelle toute une série

 12   d'événements peuvent s'être produits : les gens peuvent avoir quitté le

 13   pays, certains ont pu décéder, certains ont pu être portés disparus, des

 14   personnes ont pu naître. Donc cela introduit des écarts dans les chiffres.

 15   De plus, la population de 1991 est une population qui était définie comme

 16   celle ayant un droit de résidence permanent, enregistré comme tel, ce qui

 17   complexifie encore davantage les choses. C'est pourquoi il convient de

 18   prendre avec précaution ces taux de pourcentages en tant que représentatifs

 19   de la part de chaque groupe ethnique.

 20   Q.  Dans votre analyse, est-ce que vous avez été en mesure de prendre en

 21   considération des afflux particuliers de population, par exemple, des

 22   personnes arrivant dans telle ou telle municipalité ou telle agglomération

 23   où elles ne s'étaient pas trouvées auparavant ?

 24   R.  Eh bien, dans ce cas précis, puisque ces secteurs, ces zones étaient

 25   largement hors du contrôle du gouvernement croate, je n'ai pas eu accès aux

 26   informations correspondantes.

 27   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, la série de questions

 28   suivantes que j'ai prévue concerne les informations supplémentaires

 


Page 5278

  1   fournies par le témoin en même temps que les notes de récolement au sujet

  2   d'un certain nombre d'agglomérations précises. Si ces documents pouvaient

  3   être versés au dossier sous forme imprimée, sous forme papier, je crois

  4   pouvoir dire que je serais en mesure de conclure mon interrogatoire

  5   principal. En revanche, si je dois poser des questions au témoin viva voce,

  6   cela prendra davantage de temps pour que les informations correspondantes

  7   soient consignées au compte rendu.

  8   A ce stade, je voudrais demander que les données supplémentaires en

  9   question -- alors, je vérifie le numéro dans la liste 65 ter. Il s'agit du

 10   6441 dans la liste 65 ter. J'en demanderais donc à ce stade le versement au

 11   dossier.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

 13   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre permission,

 14   les Juges de la Chambre se souviendront qu'il y a eu un débat détaillé

 15   quant à la question de savoir si les ajouts ou les suppléments portant

 16   modification devaient ou non être versés au dossier. La Chambre a rendu une

 17   décision consistant à dire que ceci n'était pas approprié pour

 18   l'Accusation, qu'il n'était pas approprié de verser un rapport

 19   fondamentalement différent ou révisé, et nous affirmons que le même

 20   principe s'applique ici à ce qui est désigné comme les notes de récolement

 21   et la feuille d'information supplémentaire qui ont été fournis. Tout ceci

 22   aurait dû être présenté en même temps que le rapport d'expert du témoin en

 23   respectant la date butoir définie par le Président de la Chambre. A ce

 24   stade, ces éléments sortent du cadre du rapport tel que défini par le

 25   Président de la Chambre, et je soutiens que ni sous leur forme écrite, ni

 26   en posant des questions oralement, ces informations ne devraient être

 27   examinées par les Juges de la Chambre.

 28   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, ces données


Page 5279

  1   supplémentaires sont en fait incluses dans les données par municipalité.

  2   C'est simplement ici un travail auquel a participé le Dr Bijak pour

  3   décomposer ces différentes données municipalité par municipalité. Par

  4   exemple, à l'annexe numéro 4, pour la municipalité de Vukovar, on a des

  5   chiffres pour les différentes locales comprises dans cette municipalité,

  6   les différentes zones touchées par la guerre. Et le Dr Bijak a tout

  7   simplement examiné les différentes localités concernées par ces chiffres

  8   globaux et il a simplement décomposé, ventilé, en examinant les choses à

  9   une échelle plus réduite pour obtenir des données qui soient applicables à

 10   ces différents localités, agglomérations ou villages, villes, et tout ceci

 11   est pertinent en l'espèce compte tenu des éléments de preuve qui ont été

 12   présentés à ce stade.

 13   Les bases de données à partir desquelles ces informations ont été dérivées

 14   figurent dans nos listes en application de l'article 65 ter. Ceci est à la

 15   disposition de la Défense. Cela l'était dans le passé et continue à l'être.

 16   La Défense a tout à fait la possibilité d'extraire ces mêmes informations

 17   et ces mêmes données elle-même, avec notre assistance. Nous ne demandons

 18   pas le versement de l'ensemble de ces bases de données. Nous avons

 19   considéré qu'il était bien plus praticable de demander à ce témoin de

 20   procéder à cette ventilation des données globales d'une façon qui est

 21   pertinente et, à mon avis, intéressante au vu des éléments de preuve qui

 22   ont déjà été présentés en l'espèce. De plus, les informations

 23   supplémentaires en question nous aident à évaluer toute une série de

 24   documents qui n'étaient pas disponibles, ni pour l'Accusation, ni pour ce

 25   témoin à l'époque où il a rédigé son rapport. Je pense notamment à toute

 26   une série de documents que nous avons reçus et qui concernent la JNA, que

 27   nous avons reçus vers le milieu de l'été de l'année dernière et qui ont

 28   fini par être ajoutés à notre liste en application de l'article 65 ter. Je


Page 5280

  1   pense également à des articles tombant sous le régime de l'article 70 dont

  2   nous n'avons tout simplement pas reçu l'autorisation de les autoriser

  3   [comme interprété] jusqu'à récemment. Ils n'ont pas été à la disposition de

  4   ce témoin non plus afin qu'il puisse les inclure ou les examiner dans le

  5   cadre de son travail. C'est la raison pour laquelle nous avons procédé à la

  6   collecte de ces informations supplémentaires.

  7   Comme j'ai dit, la Défense dispose de ces mêmes informations. Elle a

  8   l'accès nécessaire à la base de données pour en confirmer l'exactitude, et

  9   nous serions tout à fait heureux d'apporter l'assistance nécessaire en la

 10   matière, mais nous souhaiterions demander le versement de ces données

 11   supplémentaires si possible sous forme écrite parce que cela nous permettra

 12   d'économiser beaucoup de temps, au moins à ce stade, par rapport à la

 13   solution consistant à présenter tout cela oralement.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Olmsted, peut-être que vous

 15   avez déjà répondu à cette question. Est-ce que ce document figure dans

 16   votre liste en application de l'article 65 ter ?

 17   M. OLMSTED : [interprétation] Nous avons répondu à un e-mail le week-end

 18   dernier. Nous n'avons pas demandé formellement l'autorisation de l'ajouter

 19   à la liste en application de l'article 65 ter, mais nous avons fourni ce

 20   document il y a deux ou trois semaines --

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.

 22   M. OLMSTED : [interprétation] -- en même temps que les notes de récolement.

 23   Et c'est sans doute une omission de notre part. Il y a effectivement ce

 24   processus en deux étapes consistant d'abord à en demander l'ajout et

 25   ensuite le versement.

 26   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et quel motif valable avez-vous pour

 27   en demander l'ajout ? Puisque c'est la condition préalable.

 28   M. OLMSTED : [interprétation] Oui. Le motif valable serait que ces


Page 5281

  1   informations ont acquis un caractère pertinent, et ce, de façon permanente,

  2   suite aux documents supplémentaires que nous n'avions pas reçus au moment

  3   où le témoin préparait son rapport. Ils n'ont été reçus qu'ultérieurement

  4   vers le milieu ou la fin de l'été de l'année dernière et ont été ajoutés à

  5   notre liste 65 ter à une phase plus tardive encore. Par conséquent, nous

  6   étions tout simplement dans l'incapacité de fournir ces documents au témoin

  7   pour qu'il les analyse également.

  8   Nous avons pu prendre nos dispositions pour que le témoin se rende à

  9   La Haye il y a quelques semaines et qu'il examine les données relatives à

 10   ces différentes agglomérations et localités. Ce n'est qu'il y a deux ou

 11   trois semaines qu'il a pu effectivement examiner ces données de façon à

 12   fournir des informations utiles.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

 14   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, au mieux que j'en sois

 15   informé, il n'y a absolument aucune source sur laquelle on se soit appuyé,

 16   que ce soit dans les notes de récolement ou dans cette feuille

 17   d'information supplémentaire, aucune source qui soit mentionnée, aucune

 18   référence. Je suis prêt à être corrigé si je me trompe.

 19   Mais compte tenu de cela, il n'y a absolument aucun motif valable

 20   pour que ces documents supplémentaires soient admis parce que le témoin,

 21   justement, ne s'est pas appuyé sur ces documents. Il s'agit d'informations

 22   supplémentaires, de deux documents supplémentaires.

 23   Deuxièmement, l'Accusation n'a même pas abordé la question-clé de savoir si

 24   nous avons été informés, si nous avons reçu la moindre information quant à

 25   l'expertise ou non de ce témoin par rapport à ce type de données, ses

 26   opinions, et c'est normalement la finalité de la déposition d'un expert que

 27   de nous les fournir, quelle en est la pertinence. Quelle est l'utilité

 28   d'utiliser l'article 94 bis ? Avons-nous été informés de tout cela ? Compte


Page 5282

  1   tenu du volume et de la complexité des sujets abordés, avons-nous été

  2   informés suffisamment tôt pour pouvoir l'étudier, pour pouvoir en prendre

  3   connaissance et prévoir un certain nombre de questions pertinentes ?

  4   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, je ne suis pas d'accord

  5   quant à la pertinence. Sa déposition se fonde sur l'analyse qu'il a faite

  6   de la base de données de l'ODPRR de 1994, et les données supplémentaires

  7   que nous proposons concernent un certain nombre de localités et de villages

  8   supplémentaires. Tout ceci est dans le cadre de son expertise et reste dans

  9   le cadre de ses conclusions générales. Cela nous permet tout simplement de

 10   nous concentrer, de regarder d'un peu plus près ce qu'il en est de

 11   localités particulières.

 12   Quant aux spécifications qui lui avaient été fournies pour son

 13   rapport à l'origine, nous avons sélectionné un certain nombre de localités

 14   en nous fondant sur l'acte d'accusation et les informations qui étaient

 15   disponibles à l'époque, mais de nouveaux éléments de preuve ont été obtenus

 16   d'autres sources et nous avons alors déterminé qu'il serait utile d'inclure

 17   dans l'analyse un certain nombre d'informations supplémentaires afin

 18   d'examiner ce qu'il en était dans ces localités ou agglomérations

 19   individuelles plutôt que de se contenter de données globales à l'échelon de

 20   la municipalité qui chapotait l'ensemble de ces localités. C'est simplement

 21   un processus qui a consisté à décomposer, à ventiler, ces différentes

 22   données afin que nous soyons en mesure de comparer des choses comparables.

 23   Lorsque nous nous penchons sur le document qui fournit les informations

 24   telles qu'elles apparaissent dans l'annexe C - c'est quelque chose en tout

 25   cas que la Défense pourrait examiner elle-même si elle le souhaite - c'est

 26   présenté de façon tout à fait exacte dans le document. On peut tout à fait

 27   vérifier par soi-même si cela est exact ou non. Et ce que j'espère, c'est

 28   que cela fournit des informations supplémentaires utiles. C'est cela et

 


Page 5283

  1   rien d'autre que nous cherchons à présenter.

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

  3   Monsieur le Témoin, nous allons faire notre seconde pause et nous

  4   reviendrons à 12 heures 05 -- non, excusez-moi, 13 heures 05. Mme

  5   l'Huissier va maintenant vous accompagner hors du prétoire.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  7   [Le témoin quitte la barre]

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Nous verrons ce qu'il convient de

  9   décider après la pause. Je vous remercie. L'audience est suspendue.

 10   --- L'audience est suspendue à 12 heures 22.

 11   --- L'audience est reprise à 12 heures 58.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Les Juges de la Chambre estiment que

 13   le bureau du Procureur n'a pas satisfait aux conditions préalables relevant

 14   de l'article 94 bis et n'a pas démontré de motif valable pour avoir soumis

 15   la documentation supplémentaire et sa requête d'ajouter les documents sur

 16   la liste 65 ter avec un retard considérable.

 17   [Le témoin vient à la barre]

 18   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Par conséquent, les Juges de la

 19   Chambre retiennent l'objection soulevée par Me Gosnell et ne permettront

 20   pas que des questions soient posées concernant ces documents.

 21   Monsieur Olmsted, vous avez la parole.

 22   M. OLMSTED : [interprétation]

 23   Q.  Monsieur le Témoin, il nous reste un sujet à étudier.

 24   M. OLMSTED : [interprétation] Passons, s'il vous plaît, à la page 12

 25   de votre rapport d'expert. Il s'agit du document 2831 de la liste 65 ter.

 26   Et il nous faut la page 13 dans le système du prétoire électronique.

 27   Q.  L'un des cas de figure particuliers que vous avez étudiés dans votre

 28   rapport concerne l'agglomération d'Ilok. Vous y énumérez les différentes


Page 5284

  1   sources que vous avez consultées, les ouvrages scientifiques qui citent le

  2   chiffre qui va de 5 000 à 8 000 personnes qui auraient été déplacées de ce

  3   village au mois d'octobre 1991, suite à la reddition des forces de la JNA.

  4   Et à la fin de votre analyse, vous tirez la conclusion suivante : compte

  5   tenu des données fournies par l'ODPRR dans sa base de données de 1994, les

  6   chiffres semblent présenter une surestimation du nombre de personnes

  7   déplacées en l'espèce. Pourriez-vous nous dire quelles données compilées

  8   dans la base de données de 1994 vous avez étudiées pour tirer cette

  9   conclusion particulière ?

 10   R.  J'ai pris en compte uniquement les données qui concernent

 11   l'agglomération d'Ilok.

 12   Q.  Donc vous n'avez pas étudié les déplacements qui se sont produits avant

 13   la fin du mois d'octobre dans les agglomérations environnantes ?

 14   R.  Non.

 15   M. OLMSTED : [interprétation] Je n'ai plus de questions à poser à ce

 16   témoin, Messieurs les Juges.

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 18   Maître Gosnell, contre-interrogatoire.

 19   M. GOSNELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   Contre-interrogatoire par M. Gosnell : 

 21   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Bijak.

 22   R.  Bonjour.

 23   Q.  J'ai une série de questions à vous poser aujourd'hui. Si vous ne

 24   comprenez pas l'une des questions que je vous pose, n'hésitez pas à me

 25   demander une précision et je reformulerai mes questions.

 26   R.  Merci.

 27   Q.  Passons maintenant à la page 8 de votre rapport, s'il vous plaît.

 28   M. GOSNELL : [interprétation] Le document est déjà affiché à l'écran. Donc

 


Page 5285

  1   il faut à présent afficher la page 9 dans le système du prétoire

  2   électronique.

  3   Q.  Alors, j'ai procédé à des additions au niveau du tableau numéro 1, et

  4   lorsque j'ai fait un calcul additionnant les colonnes où l'on indique le

  5   nombre de Croates et de Serbes, je suis arrivé au chiffre de 338 000 pour

  6   les Croates et environ 345 000 pour les Serbes. Et d'après mes calculs -

  7   même si je ne suis pas un expert en arithmétique, mais bon, il ne s'agit

  8   pas ici d'une opération particulièrement complexe - il semblerait que la

  9   population compte 

 10   44 % de Croates et 45 % des Serbes au total. Est-ce que ces chiffres vous

 11   paraissent précis ?

 12   R.  Oui. Les chiffres précis sont en fait cités à la page précédente du

 13   rapport. Donc il s'agit de 44,3 % pour la population croate et 45,2 % pour

 14   la population serbe.

 15   Q.  Merci. Et est-ce que vous avez un fondement qui vous permet à procéder

 16   à une ventilation par appartenance ethnique autrement qu'en fonction de ce

 17   qui a été indiqué dans les formulaires lors du recensement ?

 18   R.  Eh bien, s'il y a un groupe ethnique particulier qui vous intéresse,

 19   vous pouvez poser des questions, notamment au niveau des groupes qui sont

 20   représentés dans la région, en Slovénie orientale en particulier, et parmi

 21   laquelle on trouve des Slovaques ou des Lipaniens [phon], par exemple. Par

 22   ailleurs, il y a aussi une autre catégorie à part, la catégorie des

 23   Yougoslaves. Il s'agit des gens qui se sont déclarés comme Yougoslaves sur

 24   la base de leur citoyenneté plutôt que sur la base de leur appartenance

 25   ethnique. Et puis, il y a tout le groupe des personnes qui se sont

 26   abstenues de se déclarer et qui peuvent également présenter un intérêt.

 27   Q.  Savez-vous si les Serbes ethniques avaient justement tendance à se

 28   proclamer comme "Yougoslaves" dans la majorité des cas lors du recensement


Page 5286

  1   ?

  2   R.  Je pense que cette affirmation pose des problèmes, parce que si vous

  3   parlez de Serbes de par leur appartenance ethnique, cela présume que vous

  4   vous basez sur une définition d'appartenance ethnique autre que celle qui

  5   avait été utilisée lors du recensement. Et donc, il est nécessaire alors de

  6   s'écarter de la définition qui a été adoptée aux fins des statistiques et

  7   utilisée dans le recensement pour déterminer si quelqu'un est Serbe ou non.

  8   Lors du recensement, la population était libre de se déclarer comme elle le

  9   souhaitait.

 10   Q.  Vous avez raison de le soulever. Mais permettez-moi de vous poser ma

 11   question d'une façon un peu différente : est-ce que vous pensez que les

 12   gens qui auraient pu se déclarer comme Croates avaient l'habitude de se

 13   proclamer comme "Yougoslaves", ou alors, est-ce que c'est une situation qui

 14   ne survenait pas souvent ?

 15   R.  Eh bien, je pense qu'on peut dire la même chose que dans le cas de

 16   figure précédent. Si les gens se déclarent comme Yougoslaves auprès de

 17   l'agent chargé du recensement, c'est qu'ils ont choisi de le faire. Le

 18   problème ici, c'est que nous avons différentes définitions d'appartenance

 19   ethnique. La définition moderne peut différer par rapport à ce concept

 20   d'autoproclamation ou d'autodéclaration.

 21   M. GOSNELL : [interprétation] Revenons maintenant à la page précédente du

 22   rapport, s'il vous plaît. Et ce qui nous intéresse, c'est le passage qui

 23   suit le paragraphe 22 [comme interprété].

 24   Q.  Ici, Docteur Bijak, vous parlez de la composition ethnique d'avant la

 25   guerre dans les régions qui ont été touchées par la guerre en Croatie. Et

 26   il y a des chiffres ici qui me paraissent particulièrement intéressants,

 27   et, apparemment, vous les avez relevés aussi comme intéressants sur la base

 28   de ce que vous dites à la suite dans votre rapport. Je vais essayer de


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  1   présenter ces chiffres un peu différemment, pour me concentrer justement

  2   sur les points les plus intéressants. Vous dites que sur 1 447

  3   agglomérations touchées par la guerre, 61,2 %, donc 885, avaient une

  4   majorité serbe.

  5   Et puis, je passe maintenant au dernier paragraphe de cette page, où

  6   vous dites :

  7   Sur ces 885 villages serbes, "dans 625 cas de figure, les Serbes

  8   constituaient une majorité des résidents permanents supérieure à 90 %. Dans

  9   d'autres 189 [comme interprété] agglomérations, ils constituaient entre 75

 10   et 90 %" de la population.

 11   Et en même temps, vous dites qu'il y avait 527 villages où les

 12   Croates ont constitué la majorité. Dans 299 villages, ils avaient une

 13   majorité supérieure à 90 %, et dans 107 villages, ils avaient une majorité

 14   qui variait entre 75 et 90 %. Si, maintenant, nous essayons de ventiler ces

 15   chiffres - et je vais parler très lentement parce que je vais citer toute

 16   une série de chiffres - dans les villages serbes, 70 % des villages avaient

 17   une population serbe qui s'élevait à au moins 90 %, donc plus des deux

 18   tiers des villages serbes comptaient plus de 90 % d'habitants serbes, et

 19   dans 86 %, les habitants étaient serbes à au moins 75 %. Tandis que dans

 20   les villages croates, 56 % - c'est-à-dire plus que la moitié - comptaient

 21   au moins 90 % des Croates, et dans 76 % des villages croates, la population

 22   croate constituait au moins trois quarts de la population.

 23   Est-ce que j'ai bien expliqué ce qui figure dans les deux derniers

 24   paragraphes à la page 7 de votre rapport ?

 25   R.  Eh bien, je vais être obligé de vous croire sur parole lorsque vous

 26   présentez les pourcentages et faites vos calculs, mais, oui, les chiffres

 27   me paraissent fiables, au pied levé, comme ça.

 28   Q.  Et à la page suivante, vous dites qu'il peut s'agir en fait d'une


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  1   "polarisation ethnique". Alors, je ne sais pas de quelle façon on peut

  2   mesurer des catégories de ce type, mais pourquoi est-ce que vous dites que

  3   ces chiffres reflètent une certaine polarisation ethnique ?

  4   R.  On peut procéder à une analyse formelle et officielle d'une

  5   polarisation ethnique. On analyse un certain nombre d'indicateurs qui

  6   peuvent être appliqués dans ce cas de figure. Alors, ce que j'essaie de

  7   souligner dans mon rapport, c'est que les Croates aussi bien que les Serbes

  8   constituent une majorité perceptible dans la plupart des agglomérations.

  9   Donc, lorsque nous avons une municipalité qui a une population mixte, comme

 10   c'est le cas dans le schéma numéro 3 du rapport, lorsque vous étudiez le

 11   territoire de cette municipalité agglomération par agglomération, il

 12   devient perceptible que la plupart des agglomérations ont soit une majorité

 13   croate, soit une majorité serbe. Donc il y a des différences ethniques

 14   entre les différentes agglomérations qui sont distribuées de façon

 15   géographique.

 16   M. GOSNELL : [interprétation] Et pour faire suite à cette observation,

 17   j'aimerais que nous passions à la page 10 dans le système du prétoire

 18   électronique et pour nous pencher sur la carte qui figure en haut de la

 19   page.

 20   Q.  Puisque cette carte vous a déjà été présentée. Alors, d'après ce que

 21   vous venez de dire, en fait, le niveau de polarisation ethnique est

 22   dissimulé en quelque sorte par la façon dont vous représentez la Slavonie

 23   orientale ici, c'est-à-dire vous ne montrez que le découpage par

 24   municipalité plutôt que par agglomération ?

 25   R.  Eh bien, ces deux schémas montrent les agrégations au niveau municipal.

 26   Alors, bien sûr, il y a des différences entre l'ancien découpage des

 27   municipalités, donc des municipalités qui ont un territoire assez large, et

 28   le nouveau découpage des municipalités qui disposent d'un territoire


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  1   beaucoup plus restreint. Alors, lorsqu'il s'agit de l'ancien découpage des

  2   municipalités, lorsque nous examinons la Slavonie orientale, dans toutes

  3   les municipalités il n'existe qu'une majorité relative d'un groupe ethnique

  4   ou d'un autre; tandis que quand on étudie le nouveau découpage des

  5   municipalités, il devient plus facile de voir quel est le groupe ethnique

  6   qui domine --

  7   Q.  Permettez-moi de vous interrompre. Sur cette carte, la polarisation

  8   ethnique ne se reflète pas parce qu'on ne montre pas les agglomérations

  9   mais plutôt les municipalités --

 10   R.  Oui, ceci est exact. Je n'ai pas créé une carte qui montrerait des

 11   agglomérations. Et, par ailleurs, il aurait été très difficile de présenter

 12   sur une carte des détails aussi subtils compte tenu des éléments

 13   d'information que nous avions à notre disposition. Et c'est pourquoi j'ai

 14   décidé plutôt d'étudier quelques agglomérations en profondeur à titre

 15   d'exemples.

 16   Q.  Mais ce que j'essaie de souligner, c'est qu'il existe un contraste

 17   entre la carte qui nous présente la Krajina et celle qui nous présente la

 18   SBSO, et que cette différence est peut-être trop prononcée parce que vous

 19   n'avez pas procédé à un découpage au niveau des agglomérations ? Sur le

 20   plan de la polarisation ethnique, bien sûr.

 21   R.  Cela pourrait être le cas, mais pour pouvoir l'affirmer, il faudrait

 22   procéder à un examen plus poussé. C'est ce qui semble se dégager d'une

 23   première analyse, mais il est possible de se servir de la base de données

 24   pour procéder à des calculs, si les Juges de la Chambre le trouve utile.

 25   Q.  Et avez-vous analysé les données tirées des recensements de population

 26   qui précèdent celui de 1991 ?

 27   R.  Non. Pas aux fins de ce rapport particulier.

 28   Q.  Et avez-vous des éléments d'information qui nous permettraient de


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  1   comprendre si le niveau de polarisation ethnique était un phénomène déjà

  2   présent avant 1991, pendant de nombreuses années, pendant de nombreuses

  3   décennies, ou s'il s'agissait d'un phénomène plus récent ?

  4   R.  J'ignore la réponse à cette question. Mais, bien sûr, on peut le

  5   vérifier facilement en étudiant les recensements de population qui datent

  6   de 1981 et 1971.

  7   Q.  Et avez-vous étudié d'autres régions ou zones où on relève une

  8   polarisation ethnique de grande envergure et où un conflit armé est en

  9   cours pour voir de quelle façon cela pouvait influencer les mouvements

 10   migratoires ?

 11   R.  Oui. Pendant que je travaillais au TPIY, j'ai procédé à une analyse des

 12   données pour la Bosnie-Herzégovine -- et nous avons étudié les données à un

 13   niveau différent, notamment nous avons étudié la population dans les

 14   municipalités d'avant la guerre et d'après la guerre et dans le contexte du

 15   conflit, et nous avons comparé la structure ethnique de la population telle

 16   que rapportée dans le recensement de 1991 avec les registres de vote

 17   établis par l'OSCE en 1977-1978 [comme interprété]. Donc, oui, j'ai déjà eu

 18   l'occasion d'effectuer une étude de ce type.

 19   Q.  Etes-vous d'accord avec moi pour dire que la Bosnie était moins

 20   polarisée sur le plan ethnique et au niveau des résidents permanents

 21   d'après les données recensées en 1991 ?

 22   R.  Si mes souvenirs sont bons, la Bosnie d'avant la guerre était plus

 23   mixte sur le plan ethnique dans de nombreuses municipalités. Bon, une

 24   municipalité qui me vient à l'esprit comme ça, au pied levé, est celle de

 25   Prijedor, où la composition ethnique de la population d'avant la guerre

 26   était moitié de Serbes de Bosnie et moitié de Musulmans de Bosnie. Mais,

 27   bien sûr, pour tirer une conclusion définitive, il faudrait de nouveau

 28   réexaminer toutes les données en détail.


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  1   Q.  Eh bien, ce que vous venez de dire vaut pour un grand nombre

  2   d'agglomérations en Bosnie, n'est-ce pas ? Par exemple, Brcko, Sanski Most,

  3   Bratunac, si vous pouvez vous en souvenir, les chiffres dans ces

  4   municipalités montrent qu'un groupe ethnique ne dépassait jamais 75 % de la

  5   population, n'est-ce pas ?

  6   M. OLMSTED : [interprétation] Messieurs les Juges, j'ai une objection à

  7   soulever. Cette question sort du champ d'expertise de ce témoin et sort du

  8   cadre de son rapport. Il n'a pas procédé dans ce rapport à des comparaisons

  9   entre la Bosnie et la Croatie, ou la Croatie ou n'importe quel autre pays.

 10   Et lui citer des données et les noms de municipalités sans lui présenter la

 11   documentation pertinente pour qu'il puisse l'analyser n'est pas juste vis-

 12   à-vis du témoin et n'est pas utile aux Juges de la Chambre.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell, à vous.

 14   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, je cherche tout

 15   simplement à établir quel type de méthodologie a été appliquée pour que le

 16   témoin puisse arriver à ces conclusions et de quelle façon la méthodologie

 17   qui avait été adoptée par le témoin dans ses études précédentes dans les

 18   zones pour lesquelles il indique que la polarisation ethnique était

 19   présente avait une incidence sur son travail actuel. Et je pense que c'est

 20   une question parfaitement pertinente pour un contre-interrogatoire.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] L'objection est rejetée compte tenu

 22   de ce que Me Gosnell vient de dire.

 23   M. GOSNELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 24   Q.  Monsieur Bijak, votre réponse n'a pas été enregistrée dans le compte

 25   rendu d'audience. Est-ce que vous vous souvenez d'un grand nombre de

 26   municipalités où un groupe ethnique ne comptait pas plus de 75 % de la

 27   population ?

 28   R.  Malheureusement, je suis incapable de répondre à cette question sans


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  1   pouvoir examiner la documentation. Je vous présente mes excuses.

  2   Q.  Et avez-vous étudié d'autres régions où on a pu relever des mouvements

  3   migratoires suite à un conflit et où au départ la population était

  4   ethniquement polarisée ?

  5   R.  Non, je n'ai pas étudié des populations de types similaires dans un

  6   contexte similaire.

  7   Q.  Si nous sommes en présence d'une polarisation ethnique élevée au niveau

  8   des résidents permanents en temps de paix et de stabilité, peut-on

  9   s'attendre à ce que cette polarisation augmente en temps de guerre ou

 10   d'instabilité ?

 11   R.  Il est difficile de fournir une réponse à cette question sans connaître

 12   le contexte. Certes, c'est bien ce qui s'est produit en Bosnie. Pendant la

 13   guerre, la polarisation s'est exacerbée. Et je ne m'appuie pas pour ce dire

 14   uniquement sur les sources que j'ai pu consulter mais aussi sur les

 15   recherches que j'ai poursuivies moi-même.

 16   Q.  Vous ne pensez pas qu'il aurait été utile en préparant ce rapport de

 17   vous penchez sur d'autres régions où il y avait une polarisation ethnique

 18   très prononcée et d'analyser ce qui se passe quand il y a un passage d'un

 19   temps de paix à un temps où la guerre est de prévalence ?

 20   R.  Je pense que cela n'aurait pas forcément été utile dans le contexte de

 21   mon rapport. Je pense que cela aurait dépassé la portée de ma mission qui

 22   m'a été confiée. Et ces questions sont très spécifiques. Je voulais m'en

 23   tenir à une région très concrète et en parlant d'une période très limitée.

 24   J'avais un cahier de charges très limité, très concret. Il serait très

 25   difficile de comparer la situation en Croatie avec d'autres pays où la

 26   seule chose que ces pays ont en commun avec la Croatie est la présence d'un

 27   conflit et d'une population multiethnique. Donc je n'ai pas examiné

 28   d'autres études similaires, mais je pense que cela n'aurait pas été, de


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  1   toute façon, utile en l'espèce.

  2   Q.  Vous ne pensez pas qu'il aurait été utile d'analyser et de voir s'il y

  3   avait un schéma de tendance au déplacement dans les zones où il y avait une

  4   polarisation ethnique prononcée avant l'éclatement d'un conflit ? Vous ne

  5   pensez pas que ce type de rapport aurait été utile pour vous ?

  6   R.  Non, je ne pense pas que cela aurait été utile, notamment parce que

  7   dans un grand nombre de contextes auxquels j'ai pu penser où il y avait une

  8   polarisation ethnique qui était mise en question pendant un conflit, en

  9   fait, il y avait toujours un manque d'informations pertinentes à ma

 10   disposition. Et l'ex-Yougoslavie est plutôt unique où nous avions un

 11   recensement de population et nous avions des données d'enregistrement bien

 12   sûres, alors qu'il y a d'autres pays où il y a eu des changements ethniques

 13   mais où il n'était pas possible d'établir ces changements sur la base des

 14   données statistiques.

 15   Et, en l'espèce, j'avais un matériel -- des éléments d'information

 16   plutôt uniques à ma disposition et c'est pourquoi je voulais m'en servir,

 17   et non pas me demander si l'on pouvait établir des liens et faire des

 18   spéculations avec -- me lancer dans des conjectures en comparant cette

 19   situation avec des situations dans d'autres contextes.

 20   Q.  Mais en tant que démographe, vous n'auriez pas pu trouver d'autres

 21   informations, telles que les informations relatives à l'Irak ou à

 22   l'Afghanistan, où vous auriez pu déterminer s'il y avait une corrélation

 23   entre un grand degré de polarisation ethnique et les tendances migratoires

 24   en temps de conflit ?

 25   R.  Je pense que cela n'aurait pas pu être possible compte tenu du manque

 26   d'information. L'Afghanistan est connu parce qu'il n'y a pas d'informations

 27   statistiques, et même en ce qui concerne les estimations de population,

 28   vous pouvez avoir des erreurs qui vont jusqu'à 3 millions de personnes.


Page 5295

  1   S'agissant de l'Irak, c'est un cas de figure bien connu où il y a eu des

  2   analyses menées au sujet de la population kurde et où l'on ne pouvait pas

  3   se fier à des éléments de preuve aussi sûrs que les éléments que nous

  4   avions à notre disposition en ce qui concerne la Croatie. Donc, c'est une

  5   situation où les données qui étaient à notre disposition -- c'est une

  6   situation qui est tout à fait différente par rapport à ce qui se passait

  7   dans les deux cas précédents.

  8   Q.  Et s'agissant de l'Azerbaïdjan ?

  9   R.  Malheureusement, je n'ai pas suffisamment d'expertise en ce qui

 10   concerne l'Azerbaïdjan.

 11   Q.  Mais vous avez examiné le cas de figure de l'Irak et vous avez tiré la

 12   conclusion qu'il ne fallait pas faire la comparaison entre l'Irak et la

 13   Croatie.

 14   R.  [aucune interprétation]

 15   M. OLMSTED : [interprétation] Monsieur le Témoin [comme interprété], le

 16   témoin nous a expliqué pourquoi il n'avait pas analysé les autres pays.

 17   Maintenant, se lancer dans des questions portant sur d'autres pays, de

 18   toute façon, ce type de questions ne va pas nous aider dans nos travaux.

 19   M. GOSNELL : [interprétation] Je vais passer à une autre question.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Allez-y, Maître Gosnell.

 21   M. GOSNELL : [interprétation] Passons à la page 3 dans le système du

 22   prétoire électronique.

 23   Q.  Donc vous avez dit qu'il y avait deux objectifs. Le premier objectif

 24   est d'établir la composition ethnique d'avant la guerre dans les zones

 25   touchées par la guerre, et le deuxième objectif était de se pencher sur les

 26   déplacements de la population depuis les zones touchées par la guerre entre

 27   le 25 juin 1991 et le mois de décembre 1993. Ainsi, ai-je raison de dire

 28   que votre rapport ne porte pas sur les pourcentages de répartition ethnique


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  1   d'après la guerre dans toutes les zones touchées par la guerre ? N'est-ce

  2   pas ?

  3   R.  Oui, c'est exact, et j'ai expliqué pourquoi lors de l'interrogatoire

  4   principal. La source principale de mes informations était le recensement de

  5   2001 et je trouvais que ce recensement était trop éloigné par rapport à la

  6   période qui portait -- sur laquelle portait mon étude.

  7   Q.  Et vous dites que cette période est trop éloignée parce qu'en 2001, la

  8   plupart des personnes qui avaient été déplacées, du moins celles sur

  9   lesquelles porte votre rapport, étaient rentrées chez eux, sur leur place

 10   de résidence, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui, c'est une des raisons. Et la deuxième raison est que pendant la

 12   période intérim, pendant les opérations Eclair et Tempête, il y avait la

 13   population serbe qui était également déplacée. Donc tout cela avait une

 14   incidence de distorsion par rapport à la composition ethnique de la

 15   population dans ces zones.

 16   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire quel était le nombre de personnes

 17   déplacées qui étaient rentrées et qui ont été enregistrées lors du

 18   recensement de 2001 ?

 19   R.  Je ne pourrais pas vous avancer un chiffre. Je suppose que ces

 20   informations peuvent être obtenues de la part des autorités croates ou

 21   retrouvées quelque part dans un de leurs rapports. Mais je ne connais pas

 22   par cœur ce chiffre.

 23   Q.  Mais vous avez dit que vous aviez examiné les chiffres portant sur

 24   l'année 2001. Pourriez-vous nous dire approximativement quel était ce

 25   chiffre ?

 26   R.  J'ai examiné les chiffres portant sur l'année 2001, mais je ne pourrais

 27   pas vous donner une indication approximative du nombre des personnes qui

 28   sont rentrées parce qu'il y avait tant d'autres facteurs qui avaient agi


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  1   entre les deux périodes. Et il faudrait tenir compte du nombre de personnes

  2   nées, de personnes décédées, du nombre de réfugiés qui s'étaient installés

  3   dans d'autres pays. Donc tout cela exige une enquête à part entière qui

  4   devrait être menée.

  5   Q.  Et étant donné que vous n'avez pas tenu compte des chiffres relatifs à

  6   la composition ethnique après le conflit ou après le début du conflit, fait

  7   en sorte que ce rapport est différent par rapport aux rapports que vous

  8   avez soumis dans les affaires Milosevic ou Stanisic et Simatovic, n'est-ce

  9   pas ?

 10   R.  Oui. C'est une situation tout à fait différente, parce que dans ces

 11   rapports que vous avez mentionnés, nous avions des sources de données

 12   complètes et que nous avons obtenues peu de temps après la fin du conflit.

 13   C'était en 1997 et 1998. Donc c'était un ou deux ans après les accords de

 14   Dayton. Alors que, s'agissant du rapport en l'espèce, non seulement nous

 15   avions un recensement qui était bien ultérieur à l'époque qui nous

 16   intéresse, mais il y avait d'autres éléments -- d'autres choses qui

 17   s'étaient passées, le changement naturel de la population, et cetera.

 18   Q.  Mais cela représente une omission importante, n'est-ce pas, parce qu'un

 19   grand nombre de Serbes a quitté les zones que les Croates eux-mêmes avaient

 20   quittées, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui, c'est exact s'agissant de la période qui a fait l'objet de mon

 22   étude, parce que la plupart des Serbes ont quitté la région en 1995, et

 23   cela dépasse le cadre de mon rapport. Et j'aimerais bien avoir des

 24   informations qui portent sur la composition ethnique en 1994. Donc nous

 25   n'avions pas des informations avant l'opération Tempête et Enquête [comme

 26   interprété]. Et malheureusement, je n'ai pas de telles informations. Donc

 27   la seule chose que je pouvais faire était d'examiner les chiffres d'avant

 28   la guerre et les statistiques portant sur le déplacement de la population.


Page 5298

  1   Q.  [aucune interprétation]

  2   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell, un instant.

  3   Monsieur Bijak, je vous prie d'examiner ce qui figure à l'écran. Vous dites

  4   :

  5   "C'est exact s'agissant de la période…," et cetera.

  6   Est-ce que c'est ce que vous vouliez dire ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je voulais dire que mon étude était limitée

  8   sur la période de 1991 à 1993, et le déplacement des Serbes qui a eu lieu

  9   en 1995 est à l'extérieur de la portée de mon étude.

 10   M. GOSNELL : [interprétation] Dans le compte rendu d'audience, il est

 11   consigné que vous avez parlé des années 2001 à 2003, mais je pense que vous

 12   vouliez dire 1991 et 1993.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Bien sûr, il s'agit des années 1990. Je

 14   m'excuse.

 15   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Gosnell.

 16   M. GOSNELL : [interprétation]

 17   Q.  Monsieur Bijak, vous avez dit que la plupart des Serbes sont partis

 18   après 1995. Est-il exact qu'un très grand nombre de Serbes a quitté les

 19   zones de conflit avant 1995, dès 1991, 1992 et 1993 ?

 20   R.  Il y a des indications selon lesquelles les Serbes quittaient les zones

 21   touchées par le conflit déjà à l'époque, et cela figure dans mon rapport.

 22   Tout d'abord, je montre les chiffres portant sur l'enregistrement des

 23   données de 1997 en Slavonie orientale, et cela montre clairement que les

 24   Serbes quittaient les régions de la Slavonie occidentale. Et je suis tout à

 25   fait conscient du fait que ces chiffres sont des sous-estimations parce

 26   qu'il n'y a que des personnes qui s'étaient enregistrées en tant que

 27   personnes déplacées auprès des autorités croates qui ont été prises en

 28   compte.


Page 5299

  1   Nous pouvons passer à la page 26, section 5 --

  2   Q.  Je vais vous arrêter un instant.

  3   R.  [aucune interprétation]

  4   Q.  J'aimerais que nous nous arrêtions un instant au sujet des Serbes qui

  5   s'étaient enregistrés en tant que personnes déplacées auprès des autorités

  6   croates. Vous êtes d'accord avec moi pour dire qu'il s'agissait d'un très

  7   petit nombre de personnes qui s'étaient déclarées en tant que tel, n'est-ce

  8   pas ?

  9   R.  Oui. C'est ma conclusion de même. 

 10   Q.  Veuillez poursuivre.

 11   R.  Merci. A la page 26, au tableau 5, il y a un certain nombre

 12   d'informations portant sur les réfugiés en Serbie et au Monténégro, et

 13   certaines de ces personnes, on peut conclure qu'il s'agit des Serbes ou des

 14   membres de leur famille, et comme vous pouvez le voir, il s'agit de

 15   chiffres importants. Par conséquent, vous avez tout à fait raison de dire

 16   qu'il ne s'agissait pas seulement des Croates qui étaient expulsés.

 17   S'agissant de la base de données de 1994, il est important de souligner

 18   qu'il n'y a que des informations relatives aux Croates qui y figurent. Et,

 19   par conséquent, cette structure ethnique que l'on peut lire à partir de ces

 20   données ne représente pas tous les déplacements qui ont eu lieu dans cette

 21   zone et pendant cette période.

 22   Q.  J'aimerais voir si nous pouvons avoir une idée du nombre de Serbes qui

 23   sont partis en 1991 et 1992.

 24   M. GOSNELL : [interprétation] Tout d'abord, j'aimerais que nous examinions

 25   la pièce P2015. Cela figure à l'intercalaire 23. C'est un document qui

 26   n'est pas versé sous pli scellé.

 27   Il s'agit d'un rapport émanant du HCR qui porte la date du 1er mars

 28   1992.


Page 5300

  1   Passons maintenant à la page 4.

  2   Q.  Ici, l'on parle des groupes principaux déplacés. Sur ce graphe,

  3   on ne voit pas l'appartenance ethnique, mais nous voyons quelle est la

  4   région d'origine et quelle est la localité actuelle. Etes-vous d'accord

  5   pour dire que ceux qui allaient s'installer en Croatie étaient probablement

  6   des Croates, alors que ceux qui fuyaient et cherchaient le refuge en Serbie

  7   étaient probablement des Serbes, n'est-ce pas ?

  8   R.  Je peux parler de la Croatie parce que ces informations figurent

  9   dans la base de données de 1994, et comme vous le savez, la plupart de ceux

 10   qui étaient enregistrés étaient des Croates. S'agissant des personnes qui

 11   étaient parties en Serbie, je suppose qu'il s'agissait des Serbes, mais là

 12   je me lance dans des conjectures.

 13   Q.  Pourriez-vous nous dire quelque chose au sujet de la composition

 14   ethnique des personnes qui avaient trouvé refuge en Bosnie ?

 15   R.  Il m'est difficile de répondre. Je suppose que la réponse -- que

 16   tout dépend de la région où ces personnes ont trouvé refuge en Bosnie,

 17   s'agissait-il de la Republika Srpska ou de l'Herzégovine ou d'une région

 18   contrôlée par le gouvernement bosniaque ? Donc il m'est difficile de

 19   répondre à cette question.

 20   Q.  J'aimerais que nous examinions maintenant la Slavonie orientale,

 21   Baranja et le Srem occidental. S'agissant maintenant de la Slavonie

 22   occidentale, vous nous en avez parlé à part. Mais s'agissant de Baranja,

 23   Srem et Slavonie orientale, vous êtes d'accord avec moi pour dire qu'il n'y

 24   a pas d'autres subdivisions, n'est-ce pas ?

 25   R.  C'est exact.

 26   Q.  Donc nous ne pouvons pas dire d'où étaient parties ces personnes de

 27   manière plus précise ?

 28   R.  Non, pas à partir de ce graphe.


Page 5301

  1   Q.  Etes-vous d'accord avec moi pour dire que compte tenu d'autres

  2   informations auxquelles vous aviez accès, qu'il y avait un regroupement

  3   géographique quant à l'origine des réfugiés, qu'il s'agisse de Serbes ou de

  4   Croates ?

  5   R.  Je ne suis pas sûr d'avoir bien compris la question quant à cette

  6   notion de regroupement ou de recouvrement. Pourriez-vous préciser ?

  7   Q.  Oui, absolument. Ce que je veux dire, c'est que nous ne pouvons pas, en

  8   nous fondant sur cette information, ou même sur d'autres informations dont

  9   vous êtes au courant, que nous ne pouvons pas prendre pour argent comptant

 10   l'idée que les Serbes fuiraient exclusivement à partir de zones peuplées

 11   par des Serbes et les Croates auraient fui exclusivement de zones peuplées

 12   par des Croates. En fait, il y aurait très bien pu y avoir un flux de

 13   réfugiés des uns et des autres à partir du même secteur, n'est-ce pas ?

 14   R.  En théorie, c'est possible, mais à partir de l'analyse des données de

 15   1994, il apparaît que tous ceux qui ont fini par fuir en direction de

 16   territoires contrôlés par le gouvernement étaient constitués de Croates et

 17   d'autres non-Serbes. Quant aux Serbes qui fuyaient le territoire,

 18   malheureusement, je ne suis pas en position de vous répondre parce que je

 19   ne dispose pas des informations.

 20   Q.  [aucune interprétation]

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Un instant. Peut-être est-ce parce

 22   qu'il est déjà un peu tard, mais quelque chose dans ce document à l'écran

 23   m'interpelle et je ne comprends pas très bien. Il est intitulé : Principaux

 24   groupes de personnes déplacées par secteur d'origine et localisation

 25   actuelle. Je suppose qu'il s'agit là de deux critères géographiques, n'est-

 26   ce pas ? Comment retrouve-t-on ces deux critères dans l'histogramme ? Par

 27   exemple, la SBSO, est-ce le secteur d'origine ou est-ce la localisation

 28   actuelle des réfugiés ? Et si c'est l'un, où trouve-t-on figurer l'autre ?


Page 5302

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, il s'agit des barres de l'histogramme

  2   qui nous indiquent l'origine, donc la Slavonie orientale est un secteur

  3   d'origine.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bien.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] La Slavonie occidentale en est une autre.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, O.K.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais les différentes barres de l'histogramme

  8   concernent également les localisations des personnes, donc les doubles

  9   hachures indiquent ceux qui ont fui la SBSO vers la Serbie -- les hachures

 10   en forme d'accent grave, ceux qui ont fui vers la Croatie; en forme

 11   d'accent aigu, c'est ceux qui ont fui vers la Bosnie-Herzégovine, et

 12   cetera.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci. Je vous comprends.

 14   M. GOSNELL : [interprétation]

 15   Q.  Je crois qu'on vous a posé des questions à l'interrogatoire principal

 16   deux ou trois fois au sujet du nombre maximal de personnes déplacées. Tel

 17   que présenté dans votre rapport, il a été dit que ces réfugiés venaient de

 18   SBSO. Est-il exact également que c'est en Slavonie orientale qu'on a

 19   enregistré le plus grand nombre de personnes déplacées, indépendamment de

 20   l'appartenance ethnique ?

 21   R.  Je dois ici vous répondre avec une réserve, parce que selon mon

 22   rapport, le plus grand nombre de personnes déplacées provenait de Krajina,

 23   et ce, uniquement en des termes relatifs, par rapport à la taille de la

 24   population. C'est uniquement en termes relatifs que le nombre le plus

 25   important, la proportion la plus importante, vient de la Slavonie

 26   orientale. Ceci figure dans le tableau numéro 3 de la page 16, où le nombre

 27   total de personnes déplacées originaires de Krajina se monte à 92 000

 28   personnes, et celui originaire de la Slavonie orientale à 76 000.


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  1   Q.  Merci pour cette précision. Est-ce que vous seriez d'accord pour dire

  2   qu'en pourcentage de la population des Serbes et des Croates qui ont été

  3   déplacés à l'intérieur des frontières, en fait, que cette proportion est

  4   plutôt inférieure à celle des personnes déplacées dans les mêmes catégories

  5   que nous trouvons "ailleurs". Si nous nous penchons dans un premier temps

  6   sur ce qui est passé en Baranja, Slavonie, Srem occidental, dans les

  7   Krajina donc, que la proportion des Serbes et des Croates déplacés internes

  8   est significativement plus basse que dans les autres catégories ?

  9   R.  Pour y répondre précisément, il faudrait relire les chiffres de ce

 10   graphique et les séparer en fonction de la taille des populations

 11   concernées dans le tableau 1. Donc, si nous prenons le nombre de personnes

 12   qui sont allées en Serbie ainsi qu'il est indiqué ici, 70 000, et que nous

 13   le divisons par la population d'avant-guerre en Slavonie orientale, qui est

 14   inférieure, nous avons en fait 67 000. La même chose s'applique aux

 15   Croates, donc 130 000 divisé par la population d'avant-guerre de 91 000. Et

 16   donc, en procédant ainsi, dans la plupart des cas, et comme nous l'avons

 17   abordé à l'interrogatoire principal, les chiffres ont augmenté, ils sont

 18   plus importants que ne l'étaient les chiffres de la population d'avant-

 19   guerre, ce que l'on peut mettre sur le compte de différents problèmes

 20   rencontrés avec les chiffres en question. Il peut s'agir d'estimations

 21   grossières, il peut s'agir d'une absence de contrôle de qualité, de

 22   doublons, et cetera. Toute une série de raisons différentes. Il peut y

 23   avoir des mouvements enchaînés de population, donc toute une séquence de

 24   mouvements, il peut y avoir eu d'abord mouvement en Slavonie orientale,

 25   puis ensuite des personnes qui ont quitté ce territoire. Toutes sortes de

 26   problèmes possibles peuvent se présenter ici.

 27   La question se pose évidemment de savoir comment le secteur géographique

 28   est défini dans ce graphique. Cela aussi s'est présenté à l'interrogatoire


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  1   principal. Donc nous ne savons pas exactement ce qu'entendaient les auteurs

  2   de ce graphique lorsqu'ils se référaient à la SBSO.

  3   Q.  Eh bien, pour le moins, ce graphique n'était pas, n'est-ce pas, l'idée

  4   selon laquelle les déplacements des Croates auraient été plus prononcés en

  5   SBSO que où que ce soit ailleurs ? En fait, en pourcentage, les personnes

  6   déplacées telles qu'elles apparaissent sur ce graphique sont mêmes moins

  7   nombreuses ? Je parle du SBSO.

  8   R.  Je ne suis pas sûr de vous avoir bien compris. Avez-vous dit -- est-ce

  9   que la question était celle de savoir si le déplacement des Croates n'était

 10   pas particulièrement plus significatif en SBSO que n'importe où ailleurs ?

 11   Q.  En tant que pourcentage, oui, du nombre total des personnes déplacées.

 12   C'était bien ma question.

 13   R.  Eh bien, pour nous livrer à cet exercice, encore une fois, il faudrait

 14   ajouter les chiffres correspondant à chacune des barres pour chaque groupe

 15   de quatre barres dans l'histogramme afin de déterminer si, en Slavonie

 16   orientale, la part relative était inférieure. Cela pourrait être le cas ou

 17   non, mais en tout cas, demande à ce que l'on effectue des calculs assez

 18   simples pour le vérifier.

 19   Q.  En page 23 du compte rendu d'aujourd'hui, et je crois qu'à un autre

 20   moment vous l'avez fait aussi, vous avez indiqué, donc, que le gouvernement

 21   encourageait l'exactitude des chiffres rapportés concernant les personnes

 22   qui étaient des déplacés internes, parce que le gouvernement devait fournir

 23   des prestations, un soutien, payer des compensations. Ai-je raison

 24   d'interpréter ainsi votre déposition ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Du fait qu'il y avait ce soutien qui était apporté aux personnes

 27   déplacées, nous pouvons également en conclure que les candidats à ce statut

 28   de déplacés internes étaient également incités à soumettre de telles


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  1   demandes même si, en fait, il ne s'était pas agi de personnes déplacées ?

  2   R.  En théorie, c'est possible, mais j'aurais tendance à supposer que dans

  3   le cadre de l'enregistrement, une forme ou une autre de document ou de

  4   preuve était exigé d'eux, ou au moins une déclaration solennelle, pour

  5   confirmer que cette personne était bien une personne déplacée. Alors, le

  6   bureau des personnes déplacées ne se contentait pas simplement d'accepter

  7   l'enregistrement de quelqu'un sans procéder à la moindre vérification.

  8   C'est une chose que je n'ai pas étudiée plus en détail, mais en tout cas,

  9   ce serait là la procédure habituelle du point de vue de la compilation de

 10   statistiques.

 11   Q.  Combien de personnes se sont portées candidates à ce statut de déplacés

 12   internes, pour autant que vous le sachiez ? Je veux dire, combien d'entre

 13   elles qui se sont portées candidates ont été rejetées, ne se sont pas vues

 14   attribuer le statut en question, entre 1991 et 1993 ?

 15   R.  Je l'ignore.

 16   Q.  Est-ce que vous savez s'il y a des personnes dans cette configuration,

 17   si ce chiffre est positif ?

 18   R.  Je l'ignore. D'après ce que je sais quant à la façon dont le processus

 19   d'enregistrement a été mis en place, et je le sais suite à des échanges que

 20   j'ai eus avec des employés du bureau des personnes déplacées à Zagreb,

 21   lorsque j'y ai été en mission il y a dix ans, ils ont en fait appliqué des

 22   normes internationalement reconnues en matière de mise en place d'un

 23   processus d'enregistrement de cette nature. Ce qui signifie, à mon sens,

 24   qu'ils s'efforçaient de suivre ce type de recommandations et de procédures

 25   en matière d'enregistrement de personnes déplacées. Alors, quel était le

 26   taux de rejet, je l'ignore.

 27   Q.  Et vous ont-ils fait savoir que même une seule demande, une seule

 28   candidature, a été rejetée ?


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  1   R.  Je ne m'en souviens pas. Ni dans le sens positif, ni dans le sens

  2   négatif.

  3   [Le conseil de la Défense et l'Accusé se concertent]

  4   M. GOSNELL : [interprétation]

  5   Q.  Monsieur Bijak, vous vous êtes référé au 25 juin 1991 comme date où les

  6   déplacements ont commencé. Pour quelle raison avez-vous choisi cette date

  7   en particulier ?

  8   R.  Cette date est citée dans les termes de référence qui m'ont été fournis

  9   par le bureau du Procureur. Enfin, le raisonnement sous-jacent est le

 10   suivant : d'après la première définition de la portée de l'étude, j'étais

 11   censé étudier le mois de juin dans sa totalité, donc la période qui va du

 12   1er juin au 31 décembre 1993. Mais alors que ma recherche était déjà

 13   entamée au cours de l'année précédente, il a été décidé de raccourcir cette

 14   période et de n'entamer l'étude qu'à partir du 25 juin. Tout d'abord, il

 15   s'agissait de faire coïncider la période étudiée avec la période couverte

 16   par l'acte d'accusation. Et aussi il y a un fait qui est important à

 17   relever et qui figure dans le schéma numéro 5 à la page 16 du rapport, à

 18   savoir qu'on a pu relever une modification perceptible dans les schémas

 19   globaux du déplacement de la population vers cette date.

 20   Q.  Et pourriez-vous m'expliquer encore une fois pour quelle raison vous

 21   avez conclu qu'on peut relever une modification perceptible à cette date ?

 22   Quelles sont les données que vous avez prises en compte pour tirer cette

 23   conclusion ?

 24   R.  Eh bien, je me suis penché sur le jeu de données fourni par le bureau

 25   des personnes déplacées et des réfugiés de 1994. Donc, avant le 25 juin, le

 26   pourcentage quotidien de déplacement était huit fois inférieur que dans les

 27   six derniers jours du mois de juin. Donc il y a eu une modification

 28   perceptible dans les chemins globaux provisoires au niveau du déplacement,

 


Page 5307

  1   et ceci entraîne toutes les questions problématiques que j'ai déjà évoquées

  2   tout à l'heure, comme par exemple le fait d'avoir mal consigné certaines

  3   dates.

  4   Q.  Monsieur Bijak, merci beaucoup. Je n'ai plus de questions à vous poser.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci, Monsieur Gosnell.

  6   Avez-vous des questions supplémentaires à poser, Monsieur Olmsted ?

  7   M. OLMSTED : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

  8   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

  9   Monsieur Bijak, votre déposition vient de toucher à sa fin. Vous n'avez

 10   plus l'obligation de témoigner. Nous vous remercions d'être venu apporter

 11   votre assistance au Tribunal. Nous vous souhaitons un bon voyage de retour

 12   chez vous. Et l'huissière vous raccompagnera de la salle d'audience. Merci

 13   beaucoup.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci à vous, Messieurs les Juges.

 15   Et bon après-midi à tout le monde. Merci.

 16   [Le témoin se retire]

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Olmsted, à vous.

 18   M. OLMSTED : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   L'Accusation souhaite demander le versement au dossier du rapport d'expert.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le greffier n'a-t-il pas quelque

 21   chose à dire ? Non ?

 22   Maître Gosnell, à vous.

 23   M. GOSNELL : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'allons pas

 24   soulever d'objection au versement au dossier du rapport lui-même, mais

 25   quant aux documents qui figurent dans les notes en bas de page, notre

 26   approche sera la même que dans les cas de figure précédents.

 27   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Cela veut dire que nous allons

 28   obtenir des arguments par écrit à cet effet ?


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  1   M. GOSNELL : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. C'est ainsi que

  2   nous comptons procéder.

  3   M. LE JUGE DELVOIE : [aucune interprétation]

  4   [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je n'étais pas sûr si cela devait

  6   dire que l'admission au dossier du rapport lui-même devait elle aussi

  7   attendre. Quelle est la pratique que nous avons suivie jusqu'à présent ?

  8   M. OLMSTED : [interprétation] Je crois me ressouvenir que nous avons

  9   immédiatement admis au dossier le rapport lui-même. Et quant aux pièces

 10   associées, ou quel que soit le terme par lequel vous souhaitez les

 11   désigner, la décision a été adoptée par la suite.

 12   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] La seule chose qui me préoccupe à ce

 13   moment, c'est que nous soyons cohérents dans notre façon de procéder. Donc,

 14   quelle a été notre approche dans les cas de figure précédents ?

 15   M. GOSNELL : [interprétation] Eh bien, nous avons eu des consultations avec

 16   l'Accusation après la fin de la déposition du témoin précédent, M.

 17   Theunens, et trois jours plus tard le rapport a été admis au dossier en

 18   fonction de l'accord passé entre les parties.

 19   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui, mais c'était parce que vous ne

 20   saviez pas, au moment où on a demandé le versement du document, si vous

 21   alliez soulever une objection ou non. Ce que vous savez maintenant --

 22   enfin, vous n'allez pas soulever d'objection ?

 23   M. GOSNELL : [interprétation] En effet. Nous n'allons pas soulever

 24   d'objection et nous n'avons pas d'objection à soulever quant à l'admission

 25   au dossier de ce document pourvu que les mêmes conditions soient respectées

 26   que dans le cas de M. Theunens, à savoir que s'il y a des citations de

 27   documents dans le rapport, nous n'acceptons pas que ces documents soient

 28   automatiquement admis au dossier.


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  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien. Sous cette réserve, nous

  2   allons admettre au dossier le rapport.

  3   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P2016.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.

  5   L'audience est levée, s'il n'y a pas d'autres questions à soulever.

  6   --- L'audience est levée à 13 heures 58 et reprendra le mardi 4 juin 2013,

  7   à 9 heures 00.

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