Affaire n o IT-01-47-PT

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE II

Composée comme suit :
M. le Juge Wolfgang Schomburg, Président

Mme le Juge Florence Ndepele Mwachande Mumba
M. le Juge Carmel Agius

Assistée de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le : 30 septembre 2003

LE PROCUREUR

C/

ENVER HADZIHASANOVIC
AMIR KUBURA

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DÉCISION RELATIVE À LA REQUÊTE D’AMIR KUBURA AUX FINS DE CERTIFICATION DE L’APPEL DE LA DÉCISION RELATIVE À LA FORME DE L’ACTE D’ACCUSATION RENDUE PAR LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE LE 17 SEPTEMBRE 2003

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Le Bureau du Procureur :

M. Ekkehard Withopf
M. David Re

Les Conseils de la Défense :

Mme Edina Residovic et M. Stéphane Bourgon pour Enver Hadzihasanovic
MM. Fahrudin Ibrisimovic et Rodney Dixon pour Amir Kubura

 

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE II (la « Chambre de première instance ») du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le « Tribunal »),

VU la Requête d’Amir Kubura aux fins de certification de l’appel de la Décision relative à la forme de l’acte d’accusation rendue par la Chambre de première instance le 17 septembre 2003 (Application of Amir Kubura for Certification of the Trial Chamber’s Decision on Form of Indictment of 17 September 2003) (« la Requête »),

VU la « Décision relative à la forme de l’acte d’accusation » déposée par la Chambre de première instance le 17 septembre 2003, par laquelle elle a, entre autres, en application de l’article 50 du Règlement de procédure et de preuve (le « Règlement »), autorisé l’Accusation à modifier l’acte d’accusation de manière à mettre en cause la responsabilité de l’accusé Kubura (« l’accusé ») en application de l’article 7 3) du Statut du Tribunal pour les crimes qui auraient été commis à Miletici,

ATTENDU que, dans sa Requête, l’accusé demande, en application de l’article 72 B) du Règlement, que la Chambre de première instance certifie l’appel de la Décision, en particulier s’agissant de la question de savoir si le critère appliqué par la Chambre pour pouvoir introduire de nouveaux chefs d’accusation est correct et si la Chambre de première instance a commis une erreur en concluant que les éléments de preuve de l’Accusation étaient suffisants pour étayer les nouvelles accusations,

ATTENDU que l’article 72 B) du Règlement dispose que les décisions relatives aux exceptions préjudicielles ne pourront pas faire l’objet d’un appel interlocutoire, à l’exclusion « des cas où la Chambre de première instance a certifié l’appel, après avoir vérifié que la décision touche une question susceptible de compromettre sensiblement l’équité et la rapidité du procès, ou son issue, et que son règlement immédiat par la Chambre d’appel pourrait concrètement faire progresser la procédure »,

ATTENDU que rien ne prouve que l’Accusation demande des modifications de manière arbitraire,

ATTENDU que, contrairement à ce qu’affirme la Défense, le critère n’est pas l’existence possible d’un préjudice causé à l’accusé,

ATTENDU que, comme il est dit dans la Décision, il est sans intérêt d’établir quand l’Accusation est entrée en possession des éléments de preuve, la véritable question étant celle de savoir si la modification causera un préjudice injuste à l’accusé1,

VU la conclusion de la Chambre de première instance en l’espèce selon laquelle rien ne permet de penser que la modification causera un préjudice injuste à l’accusé, celui-ci bénéficiant d’un délai suffisant pour préparer sa défense face aux nouvelles accusations,

ATTENDU que la Défense n’est pas fondée à attendre de la Chambre d’appel qu’elle s’oppose à l’exercice par la Chambre de première instance de son pouvoir discrétionnaire de déterminer si les nouvelles accusations sont suffisamment étayées,

ATTENDU qu’une telle décision est comparable à une décision relative à la confirmation d’un acte d’accusation, laquelle ne peut faire l’objet d’un appel,

ATTENDU que la Chambre de première instance a déjà émis l’avis que les pièces jointes à l’acte d’accusation présentées par le Procureur suffisent à étayer les nouvelles accusations et permettent donc à la Défense de préparer sa cause2,

ATTENDU qu’en toute hypothèse, la question de savoir si le Procureur aura gain de cause s’agissant de ces allégations est à trancher au procès,

ATTENDU que, dans sa Requête, l’accusé n’a soulevé, à propos de la Décision, aucune question satisfaisant aux conditions posées à l’article 72 B) du Règlement,

PAR CES MOTIFS,

REJETTE la Requête.

Fait en français et en anglais, la version en anglais faisant foi.

Le 30 septembre 2003
La Haye (Pays-Bas)

Le Président de la Chambre de première instance
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Wolfgang Schomburg

[Sceau du Tribunal]


1. Décision Brdjanin et Talic relative à la forme du nouvel acte d’accusation modifié, par. 50 ; Le Procureur c/ Naletilic et Martinovic, « Décision relative à l’opposition de Vinko Martinovic et à l’exception préjudicielle de Mladen Naletilic concernant l’acte d’accusation modifié », affaire n° IT-98-34-PT, 14 février 2001, p. 4 à 7.
Voir, entre autres, Le Procureur c/ Mrksic, « Décision relative à l’exception préjudicielle pour vices de forme de l’acte d’accusation », affaire n° IT-95-13/1-PT, 19 juin 2003, par. 22 à 24.