Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 2 décembre 2003

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : [microphone non activé]

6 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Affaire IT-01-47-T, le Procureur contre

7 Enver Hadzihasanovic et Amir Kubura.

8 L'INTERPRÈTE : Votre micro, Monsieur le Président, merci.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais donc demander à l'Accusation de se

10 présenter.

11 M. WITHOPF : [interprétation] Bonjour Madame et Messieurs les Juges.

12 Bonjour à la Défense. Nous avons pour l'Accusation aujourd'hui à ma droite,

13 M. David Re, M. Daryl Mundis se trouve derrière, et notre assistante

14 s'appelle Kimberly Fleming, moi-même, je m'appelle Ekkehard Withopf.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Je vais donc demander à la Défense de se

16 présenter.

17 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

18 Monsieur les Juges. Je suis Edina Residovic. Je suis le conseil du général

19 Hadzihasanovic. Mon co-conseil, M. Stéphane Bourgon, avocat de Montréal.

20 Nous sommes assistés de Mirna Milanovic. Je vous remercie.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Nous poursuivons.

22 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Fahrudin

23 Ibrisimovic, M. Rodney Dixon, et notre assistant, M. Nermin Mulalic,

24 assistant juridique.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je vous remercie. Je vais donc demander aux

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1 accusés de se lever. Et donc demander à M. Hadzihasanovic de se présenter

2 et de décliner son nom, son prénom et sa date de naissance.

3 L'ACCUSÉ HADZIHASANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Mesdames,

4 Messieurs les Juges. Je suis Enver Hadzihasanovic, né le 7 juillet 1950 à

5 Zvornik. Je vis à Sarajevo, rue Trampina numéro 6. Je suis le général de

6 l'armée de la Fédération de Bosnie-Herzégovine, retraité depuis l'an 2000.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie. M. Kubura.

8 L'ACCUSÉ KUBURA : [interprétation] Monsieur le Président, Mesdames,

9 Messieurs les Juges. Je suis Amir Kubura, né le 4 mars 1964, dans la

10 municipalité de Kakanj en Bosnie-Herzégovine. Je suis l'officier de l'armée

11 de la Fédération. Je vis au numéro 22 de la rue Topalosmana de Sarajevo.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie. Vous pouvez vous asseoir.

13 Bien, je vais donc d'abord m'adresser aux deux accusés avant de donner la

14 parole à M. le Procureur. Concernant les accusés donc, je vous indique qui

15 va y avoir donc des propos liminaires qui vont être présentés par M. le

16 Procureur. Si vous le souhaitez après, vous pouvez faire une déclaration.

17 Cette déclaration ne pourra faire l'objet d'aucune question. Pour la suite

18 du procès, pour la présentation des éléments de preuve de l'Accusation, le

19 Procureur va être amené à citer à la barre ses moyens de preuves et

20 principalement donc des témoins. Les témoins vont être donc interrogés

21 d'abord par le Procureur, qui fera donc l'interrogatoire principal, et la

22 Défense pourra procéder au contre-interrogatoire. Le Procureur pouvant, le

23 cas échéant, poser des questions supplémentaires.

24 Le contre-interrogatoire est soumit au contrôle des Juges qui composent

25 donc cette Chambre. Le contre-interrogatoire doit se limiter aux sujets

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1 abordés par l'interrogatoire principal, aux questions qui peuvent avoir une

2 incidence sur la crédibilité des témoins et aux questions qui doivent être

3 pertinentes par rapport à la présentation des moyens de preuves de la

4 partie qui procède au contre-interrogatoire. Et c'est seulement avec

5 l'autorisation des Juges que d'autres questions peuvent être éventuellement

6 abordées.

7 Lorsque le Procureur aura terminé la présentation de ces moyens de preuves,

8 et nous pensons que ça se fera aux alentours du mois de juin de l'année

9 prochaine. Les accusés pourront s'ils le souhaitent soumettrent une requête

10 aux fins d'acquittement, ceci est prévu par l'Article 98 bis du règlement

11 de procédures et de preuve. Dans cette hypothèse, la Chambre pourrait à ce

12 stade si elle estime -- si la Chambre estime qu'il y a suffisamment

13 d'éléments de preuve allant dans le sens d'acquittement, prononcé donc

14 l'acquittement. Dans l'autre hypothèse, ça sera la présentation des

15 éléments de preuve par la Défense, dans ce cadre vous serez autorisé une

16 déclaration liminaire si vous le souhaitez. Vous pourrez citer à la barre

17 des témoins et à présenter des moyens de preuve. Vous pouvez également si

18 vous nous le demandez comparaître en tant que témoin dans le cadre de votre

19 défense.

20 Tous les témoins qui seront cité par la Défense et vous-même si vous voulez

21 témoigner, seront à ce moment-là soumis à un contre-interrogatoire de la

22 part du Procureur. Après cette phase, on arrivera donc à la phase dite de

23 la présentation des éléments de preuve en réfutation ou en réplique, le

24 Procureur pourra citer éventuellement à la barre des témoins en réfutation

25 des arguments qui auront été présentés par la Défense. L'accusé doit être

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1 autorisé à appeler des témoins à la barre en réplique. Par ailleurs la

2 Chambre pourra aussi citer à la barre des témoins si elle estime que c'est

3 nécessaire.

4 Après donc cette phase, nous arriverons aux réquisitoires et aux

5 plaidoiries. Les parties devront conformément au règlement de procédures et

6 de preuves présenter leurs arguments par écrit sous la forme de mémoire.

7 Les Juges de la Chambre entendront donc le réquisitoire du Procureur et les

8 arguments des accusés. Et ensuite ça sera la phase de la délibération des

9 Juges et le jugement sera prononcé en audience publique à une date décidée

10 par les Juges

11 Bon, cette procédure que je viens de synthétiser est prévue par le

12 règlement de procédures et de preuves en ces Articles 84 et suivant. Bon,

13 je pense que ce règlement vous l'avez à votre disposition et vous avez pu

14 consulter donc les articles concernant la phase du procès.

15 Je vais donc donner la parole à l'Accusation pour sa déclaration liminaire

16 étant précisé que vendredi dernier, la Chambre avait invité les parties à

17 se rapprocher afin de progresser dans les points d'accord ou de désaccord

18 sur les points de fait et de droit. Je pense qu'aujourd'hui ou demain, nous

19 serons en possession d'un document écrit concrétisant donc les réunions que

20 vous avez les uns et les autres obtenues notamment hier.

21 Je vais donc maintenant donner la parole à l'Accusation pour sa déclaration

22 liminaire.

23 [Déclaration liminaire de l'Accusation]

24 M. WITHOPF : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, ce procès est

25 le procès de la responsabilité du supérieur hiérarchique. Ce procès

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1 concerne la responsabilité pénale des deux accusés, Enver Hadzihasanovic et

2 Amir Kubura. Pour le général Hadzihasanovic et le colonel Kubura, pour

3 n'avoir pas pris les mesures nécessaires pour punir des crimes, des crimes

4 de guerre commis par leurs subordonnés. C'est le premier procès se

5 consacrant exclusivement à la responsabilité du supérieur hiérarchique dans

6 l'histoire de ce Tribunal. C'est le premier procès de commandants

7 militaires accusés de responsabilité pénal uniquement à partir de la

8 conduite de leurs subordonnés. Et c'est un procès qui montre le revers de

9 la médaille pour ce qui est d'un bon nombre de procès déjà jugés par ce

10 Tribunal, les procès les plus important en l'occurrence sont celui du

11 Procureur contre Blaskic et le Procureur contre Kordic et Cerkez. En tant

12 que tel, ce procès intentait à Enver Hadzihasanovic et Amir Kubura

13 démontrent que toutes les parties au conflit qui s'est produit en ex-

14 Yougoslavie, même s'il s'est déroulé dans différentes régions et à des

15 échelles différents ont commis des infractions grave au droit international

16 humanitaire qui relève de la compétence du présent Tribunal.

17 Le 3 mars 2000, Madame et Messieurs les Juges, le Juge Jorda qui était

18 alors président du Tribunal avait déjà prévu ceci au moment où il rendait

19 le jugement dans l'affaire Blaskic. Voici ce qu'il a dit, je le cite :

20 "La Chambre de première instance a tenu compte de la possibilité qu'il y a

21 eu des crimes commis par les forces musulmanes." Il a poursuivi en disant

22 ceci : "La Chambre de première instance estime qu'elle a reçu des moyens de

23 preuve attestant du fait que des atrocités ont été commises contre les

24 civils croates et que les auteurs de ces crimes doivent être poursuivis."

25 Ce procès est le procès des commandants des soldats qui ont commis

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1 certaines de ces atrocités, ce procès nous permettra de mieux comprendre ce

2 qui s'est passé en Bosnie centrale en 1993. Les éléments de preuve que nous

3 allons apporter montreront que l'autre versant [sic] des crimes de guerre

4 poursuivi dans les affaires Blaskic, Kordic, Cerkez et Kupreskic. Ce procès

5 et les moyens de preuve que nous allons apporter montrera [sic] que les

6 crimes de guerre ont été commis par les deux parties au conflit qui s'est

7 déroulé en Bosnie centrale et ce procès donnera au monde une idée plus

8 complète, une vision plus approfondie de la guerre de Bosnie.

9 Permettez-moi d'évoquer rapidement la situation militaire et la situation

10 politique qui prévalaient en Bosnie centrale. Situation qui a entraîné le

11 conflit opposant l'armée du gouvernement de Bosnie-Herzégovine l'ABiH et le

12 conseil de Défense croate, le HVO. Le contexte de ce conflit, les raisons

13 qu'ils expliquent, l'évolution militaire et politique au cours de ce

14 conflit ont déjà fait l'objet de plusieurs procès dans ce Tribunal. Ces

15 faits ont donc déjà été examinés à plusieurs reprises dans des jugements

16 rendus par le présent Tribunal. Ces faits sont connus, sont notoires, je

17 vais les résumés rapidement.

18 L'ex-Yougoslavie se composait de six républiques et de deux régions

19 autonomes. En fin des années 80, début des années 90, se sont produits des

20 événements sociaux et politiques qui ont abouti à la désintégration de cet

21 état, quatre de ces républiques, à savoir, la Croatie, la Bosnie-

22 Herzégovine, la Slovénie et la Macédoine, ont déclaré leur indépendance.

23 Suite à ces déclarations d'indépendance, il y eu des guerres horribles et

24 sanglantes, surtout en Croatie et en Bosnie-herzégovine. Parlons de la

25 guerre de Bosnie-Herzégovine, les parties à ce conflit étaient

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1 généralement, sans l'être exclusivement, divisées à partir de ce clivage

2 ethnique. Les Serbes de Bosnie, soutenus par l'armée yougoslave, la JNA,

3 ont essayé de créer une entité indépendante connue sous le nom de Republika

4 Srpska. S'ils sont opposés les Musulmans de Bosnie et les Croates de

5 Bosnie, ces deux groupes étaient au départ sous la tutelle du gouvernement

6 central de Sarajevo. Alors que les Serbes de Bosnie ont réussi des

7 conquêtes territoriales importantes et se sont emparés de larges portions

8 du pays, l'alliance qui existait au départ entre les Croates et les

9 Musulmans de Bosnie contre l'offensive serbe s'est désintégrée en Bosnie

10 centrale, éclata alors une guerre dans la guerre, la guerre croate ou

11 musulmane. De ce fait, en janvier 1993 et mars 1994, l'armée de Bosnie-

12 Herzégovine d'un côté et le HVO, soutenu par l'armée de République de

13 Croatie et la HV de l'autre côté, se sont engagés dans un conflit armé en

14 Bosnie centrale. Ce conflit armé s'est poursuivi pendant toute la période

15 couverte par le présent acte accusation. Cette guerre et les crimes de

16 guerre, commis par les effectifs de l'armée de Bosnie-Herzégovine

17 subordonnée aux deux accusés, font l'objet de l'acte d'accusation.

18 Permettez-moi d'évoquer la structure de commandement prévalant au sein du

19 3e Corps d'armée de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Pour vous aider, Madame

20 et Monsieur les Juges, nous allons vous présenter plusieurs cartes qui vous

21 donneront une idée des lieux géographiques où furent commis les crimes par

22 les subordonnés des deux accusés. Il y a eu un décret présidentiel, le 18

23 août 1992, qui a divisé l'armée de Bosnie-Herzégovine en cinq zones

24 militaires de responsabilité connues sous le nom de corps ou corps d'armée.

25 Ces cinq zones de responsabilité sont précisées sur la première carte que

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1 nous allons vous montrer maintenant. Vous avez le 3e Corps d'armée, qui

2 représente des parties importantes, vous les voyez sur cette carte de

3 Bosnie centrale. Vous voyez qu'il est situé, ce 3e Corps entre le 5e à

4 l'ouest et le 2e Corps à l'est, et sa zone de responsabilité, c'est la

5 Bosnie centrale au nord de Sarajevo.

6 Etant donné que les Serbes de Bosnie avaient occupé des parties importantes

7 de cette zone de responsabilité au plan géographique, surtout au nord, vous

8 le voyez ici d'après le tracé de la ligne de confrontation, repris sur

9 cette carte, le QG temporaire du 3e Corps se trouvait installé à Zenica. Il

10 a été à Zenica pendant toute la durée ou toute la période couverte par

11 l'acte d'accusation. Cette zone de responsabilité du 3e Corps se trouvant

12 sous le contrôle de la Bosnie-Herzégovine, vous le voyez sur cette carte

13 suivante aussi, la carte numéro 3, couvrait plusieurs municipalités, dont

14 les municipalités dans lesquelles les subordonnés des deux accusés ont

15 commis des crimes. Il y avait, parmi ces municipalités, celle Bugojno,

16 Travnik, Zenica, Kakanj et Vares. Ces municipalités, vous les voyez sur la

17 carte que vous avez sous les yeux.

18 A partir du 14 novembre 1992, l'accusé Hadzihasanovic, le général

19 Hadzihasanovic commandait le 3e Corps d'armée. Au moment où il a pris le

20 commandement du corps, il servait dans la JNA depuis déjà plus de 20 ans.

21 Il avait terminé l'académie de l'armée de terre de Belgrade puis l'école

22 des officiers de l'état major à Belgrade. Il avait été affecté à

23 différents postes de commandement dans la JNA, et c'est en 1993 que

24 l'accusé Hadzihasanovic était effectivement un commandant chevronné. Nous

25 voulons d'ores et déjà attirer votre attention, Madame et Messieurs les

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1 Juges, sur le fait que l'accusé Hadzihasanovic, avait été pendant longtemps

2 officier de la police militaire de la JNA et quant à ses qualités, il avait

3 énormément d'expérience s'agissant de la nécessité de prévenir et de punir

4 des crimes, dont les crimes de la nature de ceux qui font l'objet de cet

5 acte d'accusation.

6 Parlons maintenant de l'accusé Kubura. A partir du 1er avril 1993, il a

7 d'abord été commandant adjoint jusqu'au 20 juillet 1993, et à partir du 21

8 juillet 1993, il fut nommé commandant, commandant de la 7e Brigade

9 musulmane de montagne. A l'instar de l'accusé Hadzihasanovic, l'accusé

10 Kubura, au moment où il prend ses fonctions de commandement, est un

11 officier militaire de carrière chevronné dans les rangs de la JNA.

12 En 1992, il avait déjà été nommé à une fonction de commandement au sein de

13 l'armée de Bosnie-Herzégovine, tout d'abord, en tant que commandant adjoint

14 d'un détachement à Kakanj. Par la suite, il est devenu commandant d'un

15 bataillon de montagne dans la même zone. Au moment où l'accusé Kubura

16 assumait son poste de commandement en qualité de commandant adjoint de la

17 7e Brigade musulmane de montagne, cette brigade, il la connaissait déjà

18 très bien. Pourquoi, parce que dès le 11 décembre 1992 il avait été nommé

19 chef d'état major adjoint pour ce qui est des opérations et des

20 instructions. Ce n'est que quelques semaines plus tard, le 1er janvier 1993,

21 qu'il est nommé chef d'état major, poste qu'il a occupé jusqu'au moment où

22 il a été nommé commandant adjoint de le 7e Brigade musulmane de montagne.

23 L'expert militaire cité à la barre par l'Accusation, le Dr Reinhardt,

24 général de l'OTAN à la retraite, qui a aussi été commandant de la KFOR au

25 Kosovo a examiné, consulté des centaines, véritablement des centaines

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1 d'ordres de communication et des rapports émanant du 3e Corps d'armée et

2 ceci pendant la période couverte par l'acte d'accusation. Son avis

3 d'expert, c'est qu'il existait des filières très claires et efficaces de

4 subordination au sein du 3e Corps entre le commandant de ce corps et les

5 commandants subordonnés comme Kubura. Son avis d'expert, c'est que l'accusé

6 Hadzihasanovic a exercé un contrôle effectif sur ses subordonnées dont

7 l'accusé Kubura et que l'accusé Kubura, pour sa part, a exercé un contrôle

8 effectif sur ses subordonnées au sein de la 7e Brigade musulmane de

9 montagne.

10 Je voudrais me pencher maintenant sur l'acte d'accusation en tant que tel.

11 Au cours de la période allant de janvier 1993 à janvier 1994, les soldats

12 du 3e Corps de la BH ont commis de nombreuses violations des lois et

13 coutumes de la guerre dont des infractions à l'Article commun 3 des

14 conventions de Genève de 1949. Vous trouvez dans l'acte d'accusation sept

15 chefs d'accusation qui tous concernent des violations des lois ou coutumes

16 de la guerre. Les infractions à la base de ces chefs d'accusation, il y en

17 a plus que 20, reprennent l'assassinat, le traitement cruel, la destruction

18 sans motif de villes, cités ou villages que ne justifient pas la nécessité

19 militaire, le pillage, la destruction ou l'endommagement délibéré

20 d'édifices consacrés à la religion. Les victimes de ces crimes furent

21 surtout des Croates de Bosnie, aussi bien des soldats du HVO que de civils,

22 mais il y a eu aussi, dans une moindre mesure, des victimes serbes de

23 Bosnie.

24 Le chef d'accusation d'endommagement délibéré d'édifices consacrés à la

25 religion ne concerne que l'accusé Hadzihasanovic. De surcroît, il y a

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1 certains crimes présumés qui se seraient commis dans des lieux précis, qui

2 sont repris au chef d'accusation 1, s'agissant de Dusina, et ne s'applique

3 qu'à l'accusé Hadzihasanovic. Les crimes de guerre allégués reprennent

4 trois cas d'exécution ou d'assassinat assimilables à un massacre. Des

5 crimes, à savoir le traitement cruel et de nouveau des assassinats, commis

6 dans 12 lieux de détention situés dans quatre municipalités. Les crimes de

7 pillage et de destruction sans motif de six villes et villages, situés dans

8 trois municipalités. Et l'endommagement délibéré de deux églises, le

9 monastère de Guca Gora et une église de Travnik.

10 Madame et Messieurs les Juges, nous allons maintenant vous montrer la carte

11 suivante qui vous indique les lieux où furent commis tous ces crimes. Vous

12 le voyez, les subordonnés des deux accusés ont commis des crimes dans

13 divers secteurs de la zone de responsabilité du 3e Corps. L'élément le plus

14 saillant, c'est la région de la vallée de Bila, qui se trouve entre les

15 villes de Travnik et Zenica -- à l'ouest et Zenica à l'est. Vous retrouvez

16 sur cette carte beaucoup de noms de villages. Vous avez Maline, Bikosi,

17 Mehurici, Miletici et Orosac, dans cette zone que je viens de mentionner.

18 Et vous trouvez, au sud-ouest de Zenica, Vezina [phon]. Ces lieux sont

19 devenus synonymes de crimes brutaux. Crimes de brutalité qui sont le fait

20 de l'armée de Bosnie-Herzégovine, crimes de brutalité commis par les

21 soldats du 3e Corps de l'armée de Bosnie-Herzégovine, soldats qui étaient

22 subordonnés aux deux accusés.

23 Les soldats du 3e Corps de l'armée de Bosnie-Herzégovine ont également

24 commis des crimes dans des villes plus grandes. A Bugojno, dans la

25 municipalité de Kakanj, à Vares, vous le voyez sur la carte, qui se trouve

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1 dans la partie de l'est de la responsabilité -- de la zone de

2 responsabilité du 3e Corps; et aussi surtout à Zenica. Zenica, c'est là

3 qu'était installé le QG des deux accusés. Ils se sont déroulés

4 littéralement sous les yeux des accusés.

5 Madame, Messieurs les Juges, je me pencherai à présent sur les exécutions

6 et les massacres qui ont été commis par les subordonnés des deux accusés.

7 Nous allons vous présenter une nouvelle carte où vous verrez les sites où

8 ces crimes ont été commis. Vous voyez ici Dusina, au sud de Zenica. Et

9 comme je l'ai déjà mentionné, vous verrez aussi Miletici, au nord-est de

10 Zenica ainsi que Maline et Bikosi. Grâce à cette carte, vous voyez, Madame,

11 Messieurs les Juges, les distances qui séparent les sites où les crimes ont

12 été commis, et Zenica, l'endroit où les deux accusés étaient stationnés. Et

13 ces distances sont petites : 11 kilomètres entre Zenica et Dusina; 15

14 kilomètres de Zenica et Miletici; et pas beaucoup plus, 16 kilomètres entre

15 Maline et Bikosi et Zenica.

16 Le premier, Madame, Messieurs les Juges, concerne l'exécution d'un civil,

17 un Serbe de Bosnie, et cinq soldats du HVO qui se sont rendus le 26 janvier

18 1993 à Dusina. Ce crime concerne l'assassinat d'un soldat du HVO qui, lui,

19 s'est rendu aussi plus tard, le même jour, dans la même zone. Afin de mieux

20 comprendre et pour mieux s'orienter, nous allons vous présenter à présent

21 deux premières photographies. Alors, la première photographie, Madame,

22 Messieurs les Juges, nous montre le hameau de Dusina. Donc les quelques

23 maisons qui constituent ce hameau, en bas, sur la photo, vous pouvez voir

24 une maison blanche, une sorte de maison blanche avec un garage. Et devant

25 cette maison, ont été tuées ces victimes.

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1 Que s'est-il passé ? Les soldats du 3e Corps de l'armée de Bosnie-

2 Herzégovine, subordonnés à l'accusé Hadzihasanovic, ont aligné huit hommes

3 sur la route et ils en ont abattus six sur les huit. Tôt dans la matinée du

4 26 janvier 1993, et ce, agissant de les ordres de l'accusé Hadzihasanovic,

5 les soldats du 3e Corps ont attaqué plusieurs villages dans le secteur de

6 la vallée de Lasva y compris Dusina. Les soldats du HVO, agissant sous le

7 commandement de leur commandant local, Zvonko Rajic, se sont vite rendus en

8 force du 3e Corps qui ont lancé l'attaque. Ils ont été détenus pendant un

9 moment, mais vers 15 heures du même jour, 10 heures après leur reddition,

10 les soldats du 3e Corps ont ordonné à huit d'entre eux de sortir et ils les

11 ont alignés sur la route à l'endroit qui se situe devant la maison qui a un

12 garage. Vous avez cette photographie à l'écran à présent, qui vous montre

13 en gros -- de près, le site de l'exécution.

14 Alors, les soldats du 3e Corps ont abattu six de ces huit hommes, et ont

15 tué ainsi Vojislav Stanisic, Niko Kegelj, Stipo Kegelj, Vinko Kegelj, Pero

16 Ljubicic, et Augustin Rados. Madame, Messieurs les Juges, vous aurez

17 l'occasion d'entendre l'un des deux survivants. Dans son témoignage, il

18 décrira les détails du crime, les détails qui ne vous permettront pas

19 d'arriver à une autre conclusion que celle que ces meurtres ne peuvent être

20 décrits autrement qu'en tant qu'une exécution brutale et cynique.

21 Ce n'étaient pas les seuls meurtres commis par les subordonnés de l'accusé

22 Hadzihasanovic ce même jour. Madame, Messieurs les Juges, les moyens de

23 preuve vous montreront que ni Sheriff Petkovic, le commandant de la 7e

24 Brigade de montagne musulmane ou plutôt de son deuxième bataillon et en

25 tant que tel, subordonné à l'accusé Hadzihasanovic, a tué le commandant du

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1 HVO local qui s'était rendu Zvonko Rajic, en tirant à bout portant

2 plusieurs balles d'une arme automatique. Vous aurez l'occasion d'entendre

3 les témoins décrire les circonstances terribles de ce meurtre, un autre

4 meurtre au moins aussi brutal et cynique que l'exécution des six hommes que

5 je viens de mentionner.

6 Les victimes de ces meurtres ont été apportées à la morgue de Zenica. Nous

7 nous proposons de vous présenter à présent un certain nombre d'images qui

8 ont prises d'une vidéo et qui montrent les victimes de ces meurtres ainsi

9 que les blessures par balles et autres atrocités qui leur ont été infligées

10 par les subordonnés de l'accusé.

11 Les photographies montrent les six personnes tuées : Vojislav Stanisic,

12 Niko Kegelj, Stipo Kegelj, Pero Ljubicic, ainsi Augustin Rados. Madame,

13 Messieurs les Juges, vous pouvez voir les blessures par balles qui ont

14 provoqué la mort des accusés. Vous les voyez à ces images.

15 Madame, Messieurs les Juges, le deuxième crime concerne le meurtre de

16 quatre soldats du HVO qui se sont rendus le 24 avril 1993 à Miletici, entre

17 la soirée du 24 avril 1993 et la matinée du lendemain. Les soldats du 3e

18 Corps, subordonnés aux deux accusés ont sélectionné quatre soldats du HVO

19 capturés, ils les ont tout d'abord mutilés et par la suite ils en ont tué

20 brutalement quatre. Encore une fois, nous allons vous présenter quelques

21 photos. Premièrement, une photographie aérienne qui nous montre le village

22 de Miletici.

23 Le 24 avril 1993, dans la soirée, des soldats de la 7e Brigade de montagne

24 musulmane sont arrivés à Miletici. Lorsqu'ils sont arrivés les villageois

25 s'étaient réunis pour se protéger dans deux maisons. Dans l'une de ces

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1 maisons, un soldat du HVO a tiré sur un soldat du 3e Corps et il a touché

2 par la suite les subordonnés de l'accusé, ont attaqué la maison, ils ont

3 fait sortir les villageois, ils leur ont attaché, ligoté les mains et ils

4 les ont escortés au village de Mehurici à quelques deux kilomètres de

5 distance. Les soldats du 3e Corps ont sélectionné quatre hommes, quatre

6 Croates de ce groupe et je cite leur nom : Franjo Pavlovic, Tihomir

7 Pavlovic, Vlado Pavlovic, et Anto Petrovic, et ils les ont retenus

8 derrière. Vous aurez l'occasion d'entendre les témoignages des villageois

9 qui sont revenus durant la nuit et le lendemain matin. Ils vous décriront

10 la scène atroce qu'ils ont vue, dont ils ont été témoins. Ils ont trouvé

11 les quatre jeunes croates assassinés dans l'une des maisons. Ils ont été

12 tués par les subordonnés de l'accusé, des deux accusés. Non seulement, ils

13 les avaient été tués mais de toute évidence ils avaient été mutilés. Leurs

14 corps portaient les traces de blessures au niveau du cœur et de la gorge.

15 Vous voyez à présent à l'écran la maison où ces victimes ont été tuées. La

16 photo suivante nous montre la maison dans laquelle ils ont été retrouvés.

17 Les photographies suivantes nous montreront les quatre victimes. Encore une

18 fois, vous voyez les blessures que portent les corps des quatre jeunes

19 hommes croates dont j'ai cité les noms, Franjo Pavlovic, Tihomir Pavlovic,

20 Vlado Pavlovic, et Anto Petrovic.

21 Le troisième crime de meurtre concerne le massacre qui a été perpétré, un

22 massacre d'environ 30 Croates de Bosnie des civils ainsi que des soldats du

23 HVO qui s'étaient rendus le 8 juin 1993 près du hameau de Bikosi, qui se

24 situe à une faible distance du village de Maline. Le 8 juin 1993, les

25 soldats du 3e Corps ont attaqué Maline. Après la reddition des villageois

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1 et les soldats du HVO qui avaient défendu le village, ils les ont forcés, à

2 savoir, ils ont forcé plusieurs centaines de Croates de Bosnie à marcher

3 jusqu'à Mehurici. En chemin, les soldats du 3e Corps ont sélectionné un

4 petit groupe qu'ils ont dirigé vers Bikosi. Et très vite, ils ont été

5 rejoints par un autre groupe de Croates blessés, sous l'escorte des soldats

6 du 3e Corps, ce groupe nouvellement constitué à continuer de se déplacer

7 vers Mehurici. Près du hameau de Bikosi, un prisonnier a commencé à crier.

8 Les soldats du 3e Corps, encore une fois je précise, il s'agit de soldats

9 du 3e Corps, qui ont été subordonnés aux deux accusés, ont par la suite

10 tiré des coups de feux sur le groupe en se servant de fusils automatiques à

11 bout portant et ils ont exécuté au moins 24 civils et soldats croates dont

12 les noms figurent à l'acte d'accusation. Madame, Messieurs les Juges,

13 quatre victimes ont réussi à s'enfuir après avoir été grièvement blessées.

14 Leurs blessures constituent les suites d'un traitement cruel en tant que

15 violation des lois et des coutumes de la guerre.

16 A la photo suivante, vous allez voir le lieu du massacre qui se situe à

17 gauche par rapport à la route que nous voyons. Madame, Messieurs les Juges,

18 les subordonnés des deux accusés ont commis d'autres crimes. A présent, je

19 me propose d'évoquer les crimes qui ont été commis dans des centres de

20 détention. Le 3e Corps de l'armée de Bosnie-Herzégovine, tout au long de la

21 période qui est recouverte par l'acte d'accusation, a géré un grand nombre

22 de centres de détention dans leurs zones de responsabilité. Il y en avait

23 qui étaient de plus au moins grande taille et qui étaient parsemés sur

24 toute la zone de responsabilité du 3e Corps d'armée. Ce n'était pas une

25 zone très vaste.

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1 Alors vous allez voir les sites des 12 centres de détention où les crimes

2 allégués dans l'acte d'accusation ont été commis. Alors vous voyez Bugojno,

3 à l'ouest où six des 12 centres de détention étaient situés. Et puis Kakanj

4 au sud est par rapport à Zenica, le QG des deux accusés, puis vous avez

5 aussi la zone entre Travnik et Zenica encore une fois. Une zone dans j'ai

6 déjà parlé, Mehurici, Orasac, il y avait là des centres de détention dans

7 la municipalité de Travnik. Et il y avait également un centre de détention

8 à Zenica. Les distances apparaissent également sur la carte et encore une

9 fois, nous pouvons voir que ce ne sont pas de grandes distances. Cela va de

10 13 à 40 kilomètres, donc de l'entour de 20 kilomètres en moyenne. Et

11 s'agissant de l'école de musique de Zenica en particulier, les crimes ont

12 été commis prêt de la porte d'entrée, du portail du QG où était stationné

13 les commandants des auteurs de crimes, à savoir, les deux accusés.

14 La 7e Brigade musulmane de montagne, agissant au sein du 3e Corps d'armée de

15 Bosnie-Herzégovine à Zenica. s'est servie de l'école de musique de Zenica,

16 qui n'était pas loin du QG de la 7e Brigade musulmane, très près du QG du 3e

17 Corps et du QG de sa police militaire. Alors la carte suivante, nous allons

18 voir, vous aidera. Elle vous montrera que l'école de musique de Zenica

19 n'était située qu'à un kilomètre du QG du 3e Corps du général

20 Hadzihasanovic, et cela vous montre aussi que le QG de l'accusé Kubura

21 n'était qu'à deux kilomètres environ de l'école de musique de Zenica.

22 L'école de musique de Zenica, en tant que telle, vous apparaîtra sur les

23 deux photos que nous allons voir à présent.

24 Alors la première photographie vous montre l'école de musique de Zenica, le

25 bâtiment de cette école, nous voyons évidemment de l'extérieur, il s'agit

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1 d'un bâtiment qui est situé dans l'une des rues principales de Zenica,

2 autrement dit, c'est au cœur de la ville.

3 La deuxième photo quant à elle, vous montre la pièce donc qui est située

4 dans ce bâtiment où les détenus ont été enfermés, certains pendant des

5 jours, d'autres durant des semaines, voir des mois. Les conditions qui

6 prévalaient au sein de cette école de musique de Zenica étaient très

7 mauvaises. Il y avait jusqu'à 50 prisonniers qui ont été forcés à utiliser

8 un sceau pour faire leurs besoins, et ils n'avaient pas la possibilité de

9 se laver, ils n'avaient pas l'autorisation de se laver. Et les quantités de

10 nourriture qu'ils recevaient été à peine suffisantes pour survivre. Et vous

11 entendrez la déposition d'un témoin qui vous dira qu'il a perdu 22 kilos en

12 50 jours et un autre qui en a perdu 31 en 58 jours. Mais ce qui est pire,

13 ce qui est considérablement pire, c'est que dans ce bâtiment, dans cette

14 pièce et dans d'autres pièces de l'école de musique de Zenica, et bien les

15 subordonnés des deux accusés ont systématiquement molesté les prisonniers

16 par des passages à tabac réguliers et brutaux et ce, en se servant d'un

17 grand nombre d'armes et d'outils différents. Alors ils se sont servis, dans

18 leurs actes de brutalité, de crosses de fusils, de bâtons de bois, de

19 manches, de matraques, de coups de poings, de douves, de bottes, de câbles

20 de téléphone. Et ces passages à tabac se produisaient tous les jours. Donc

21 ils se sont produits tous les jours, et ce de manière brutale.

22 Vous allez entendre les témoignages des victimes, les anciens détenus qui

23 déposeront disant que toutes les nuits littéralement, chaque nuit des

24 gardiens sélectionnaient, faisaient sortir des prisonniers pour ce qu'ils

25 appelaient des cours de chant. Il ne s'agira que d'une description cynique

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1 de quelque chose qui n'était rien d'autre que de passages à tabac brutaux.

2 Les bruits, les cris des victimes de ces passages à tabac, d'appels à

3 l'aide pouvaient être entendu au cœur -- au centre de Zenica, chaque nuit.

4 Vous allez entendre une victime qui vous décrira comment elle a été battue

5 par -- avec des bâtons, des pieds de chaises et des matraques pendant

6 plusieurs heures avant d'avoir été enfermée, avant d'être enfermée dans une

7 petite pièce qui était surpeuplée. Il y avait 48 autres prisonniers là-

8 dedans.

9 Vous entendrez une autre victime qui vous dira comment elle a été battue

10 avec des matraques de caoutchouc pendant qu'on lui a ligoté les mains dans

11 le dos. Et vous entendrez une autre victime disant comment elle a été

12 passée à tabac avec des manches de pelle, qu'il a été -- qu'on lui a asséné

13 des coups de pied à la poitrine jusqu'à ce qu'il perde la conscience. Et

14 vous entendrez une autre victime disant comment elle a été battue avec des

15 matraques et des manches de bois et des coups de poings jusqu'à ce qu'elle

16 perde conscience. On lui a dit qu'il fallait qu'il recueille son sang et le

17 sang qui s'égouttait -- qui coulait de sa tête et on l'a menacé de mort

18 s'il y avait des gouttes de sang qui touchaient le sol. Et vous entendrez

19 une victime qui vous décrira comment on l'a battue à la figure, les

20 épaules, à la nuque avec des matraques de police. Et il a supplié qu'on lui

21 donne de l'eau; un garde l'a pris, l'a emmené au point d'eau et pendant

22 qu'il essayait de boire, le garde l'a cogné à la nuque et le témoin a

23 heurté de son visage, le robinet et il s'est blessé, il s'est ouvert la

24 peau sous l'œil gauche et le nez, et il a perdu la conscience. Les gardes

25 l'ont arrosé d'eau, et ils lui ont donné des coups de pied pendant qu'il

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1 gisait par terre.

2 Il y avait des abus systématique à l'encontre des prisonniers de l'école de

3 musique de Zenica et cela de manière inévitable à provoquer des morts, des

4 prisonniers ont succombé à leurs blessures. Alors la victime Jozo Maracic

5 était un soldat blessé du HVO. Le 18 juin 1993 il est mort après des

6 passages à tabac répétés, commis par des subordonnés des deux accusés. Ce

7 jour, au début de la soirée, des gardes l'ont pris, l'ont emmené dans le

8 sous-sol, une pièce que vous avez vu à la photo et les prisonniers, les

9 autres prisonniers ont pu entendre des bruits atroces d'un passage à tabac

10 brutal. Et lorsque les gardes l'ont ramené, il ne respirait plus, il était

11 mort.

12 L'école de musique de Zenica n'était pas le seul centre de détention où les

13 subordonnés des deux accusés ont soumis à des mauvais traitements et ce, de

14 manière systématique, les détenus. Il y en avait beaucoup d'autres,

15 plusieurs se situaient dans la municipalité de Travnik. Dans la

16 municipalité de Travnik, la 17e Brigade de montagne de Krajina a utilisé

17 les casernes de l'ex JNA, la 306e Brigade de montagne a utilisé l'école

18 primaire de Mehurici et la forge de Mehurici Les Moudjahiddines donc ils

19 ont agit au sein du 3e Corps de l'armée de Bosnie-Herzégovine, le groupe

20 opérationnel de Bosanska Krajina ont utilisé le camp Orasac. Donc nous

21 allons voir des photos qui nous aideront et la première photo nous montrera

22 l'ex-caserne de la JNA. Il s'agit d'une grande caserne située dans la ville

23 de Travnik. C'était le QG du groupe opérationnel du 3e Corps, le groupe

24 opérationnel de Bosanska Krajina.

25 Nous voyons ici plusieurs des pièces de cette caserne, alors les petites

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1 pièces, cellules dont vous voyez l'entrée ici. Vous verrez aussi à la photo

2 suivante, l'une de ces petites pièces comme les témoins vous déposeront,

3 c'était le bureau de Mehmed Alagic qui était subordonné à l'époque à

4 l'accusé Hadzihasanovic qui était le commandant du groupe opérationnel.

5 Alors à l'intérieur et à l'extérieur de ces cellules, les subordonnés de

6 l'accusé Hadzihasanovic ont été -- ont systématiquement battu des détenus

7 et ce de manière régulière avec des manches de pelle, des pioches et des

8 mouiller -- des serviettes mouillés et nouées. Vous entendrez des victimes

9 témoigner qu'on les a battus jusqu'à ce qu'elles ne puissent plus se

10 mouvoir, jusqu'à ce qu'elles perdent connaissance. Vous entendrez une

11 victime qui a été forcée à enlever ces vêtements avant qu'on ne le batte

12 avec des poings, des matraques, des tringles métalliques et ainsi qu'une

13 chaise jusqu'à ce que la victime a perdu connaissance.

14 Dans tous ces bâtiments, les détenus qui étaient enfermés dans l'ex-caserne

15 de la JNA étaient battus à partir de leur arrivés. On les battait de jour,

16 de nuit, pendant les interrogatoires, on les a battu pour toute une série

17 de raisons afin de les intimider et afin de les humilier. Et parfois, on

18 les battait sans qu'il y ait une raison quelconque à cela. Tout comme dans

19 l'école de musique de Zenica, des passages à tabac systématiques et brutaux

20 ont eu pour connaissance, la mort d'au moins un des prisonniers.

21 Cette fois-ci la victime était un détenu croate de Bosnie, jeune, une

22 victime sonnée du mauvais traitement systématique et brutal effectués par

23 les subordonnés de l'accusé Hadzihasanovic. Il est mort par passage à tabac

24 en mai 1993. Au cours de la nuit, les gardes ont fait sortir la victime

25 afin qu'elle subisse encore un passage à tabac brutal, ils l'ont ramené

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1 dans la cellule de détention, il était dans un très mauvais état. Les

2 prisonniers ont appelé les gardes afin qu'ils viennent en aide du

3 prisonnier, mais ils ne l'ont pas fait. Et le lendemain matin, le

4 prisonnier était mort.

5 Pas loin de Travnik, à Mehurici, le 3e Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine

6 avait une -- un autre centre de détention parmi lesquels l'école primaire

7 de Mehurici. La photo suivante montre la salle des sports dans laquelle les

8 détenus ont été incarcérés, il y avait plusieurs centaines de Croates de

9 Bosnie, de Maline surtout les civiles qui étaient détenus dans ce centre de

10 détention. Ils étaient installés dans des conditions difficiles, ils

11 étaient entassés et ils n'avaient pas suffisamment de nourriture, ni d'eau.

12 En ce qui concerne, l'hygiène et la possibilité de se laver, les conditions

13 étaient très mauvaises. Les prisonniers, plusieurs centaines d'entre eux

14 avaient accès à un seul toilette -- à une seule toilette, et puis un sceau

15 d'eau chaude devait leur suffire à tous pendant toute la journée et devait

16 suffire afin de laver les bébés et afin d'aider à penser les plaies de

17 personnes blessées.

18 Les détenus recevaient très peu de nourriture, vous allez entendre une

19 victime, une femme qui va raconter qu'elle n'avait que 30 kilos après sa

20 libération. Les passages à tabac étaient tout à fait habituels à l'école

21 primaire de Mehurici. Vous allez entendre des victimes qui vont dire que

22 des hommes considérés par les gardes comme des membres du HVO étaient

23 sélectionnés pour les interrogatoires et les passages à tabac.

24 Un autre centre de détention que le 3e Corps d'armée faisait fonctionner à

25 Mehurici, était dans la forge qui se trouvait seulement à quelques

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1 centaines de mètres de l'école primaire de Mehurici. La photo suivante vous

2 montre l'extérieur et l'intérieur de la forge et puis, vous pouvez voir sur

3 ces photographies à quel point le lieu de détention a été confiné. Et puis,

4 la photo suivante vous donne une bonne impression des conditions dans

5 lesquelles tout le monde s'était retrouvé entassé à l'intérieur.

6 Vous allez entendre des victimes décrire de quelle manière la subordonné de

7 l'accusé Hadzihasanovic ont détenu 13 prisonniers dans trois garages sans

8 fenêtres de dimension de trois mètres carré. Vous allez entendre des

9 victimes qui vous diront qu'ils devraient -- qu'ils devaient dormir par

10 terre sur du béton et qu'ils avaient seulement un sceau en plastique comme

11 toilette. Mais ce qui est le pire c'est que, comme d'autres -- dans

12 d'autres centres de détention, les passages à tabac brutaux avec des bâtons

13 de bois était une chose de routine quotidienne. Un témoin vous décrira

14 comment un soldat est entré dans le garage, il lui a donné un coup de pied

15 dans le visage, ce qui a provoqué que celui-ci perd plusieurs de ces dents.

16 Ensuite, vous avez les photographies qui vous montrent la première région

17 et ensuite la deuxième le bâtiment du camp de Orasac, cette photographie

18 qui est devant vous pour le moment, Madame, Messieurs les Juges, vous

19 montre la maison blanche qui est à gauche et puis ici se trouvait le camp

20 de Orasac. Le camp de Orasac était dirigé par les Moudjahiddines, les

21 Moudjahiddines qui étaient notoires à cause de leur brutalité. Et

22 effectivement, ils étaient d'une grande brutalité.

23 En octobre 1993, les Moudjahiddines ont enlevé à plusieurs reprises des

24 civiles bosno croate de Travnik, ils couvraient leurs corps, ils les

25 mettaient dans des véhicules et ils les amenaient à Orasac où on les

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1 passait à tabac quotidiennement pendant plusieurs heures. Vous allez

2 entendre des victimes qui vont décrire ces passages à tabac systématiques,

3 ils vont décrire comment les prisonniers lorsqu'ils utilisaient les

4 toilettes, devaient passer par la haie des soldats qui les tabassaient.

5 Ensuite, vous allez entendre une victime qui décrira comment un garde a

6 chauffé une barre métallique et a forcé un prisonnier à la tenir. Ensuite

7 d'autres témoins vont décrire toute sorte de harcèlement physique et

8 psychologique qu'ils ont subi.

9 Il ne faut pas s'étonner que tout comme à l'école de musique de Zenica et

10 dans l'ancienne caserne de la JNA Travnik, la brutalité systématique dans

11 le camp de Orasac a eu pour résultat la mort de moins un prisonnier. Cette

12 fois-ci, Madame, Messieurs les Juges, la mort n'était pas le résultat de

13 passage à tabac. Cette fois-ci la mort de la victime était le résultat

14 d'une décapitation. Une décapitation qui peut seulement être décrite comme

15 une décapitation rituelle.

16 Vous allez entendre des témoins, des témoins qui devaient observer ce

17 meurtre horrible, qui vont vous donner les détails concernant le 20 octobre

18 1993, lorsque les Moudjahiddines subordonnés à l'accusé Hadzihasanovic ont

19 fait sortir Dragan Popovic, un civil bosno croate avec d'autres prisonniers

20 de sa cellule et ils les ont alignés devant un trou fraîchement creusé.

21 Un moudjahidine a emmené Dragan Popovic de l'autre côté du trou et lui a

22 tranché la gorge et un autre moudjahidine lui a coupé la tête en la

23 séparant de son corps. Le commandant des Moudjahiddines a forcé les ordres

24 prisonniers à embrasser le front et la bouche de Dragan Popovic et de sa

25 tête après sa décapitation. Et puis pour terminer, deux prisonniers ont été

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1 forcés d'enterrer le corps dans la tombe préparée en avance.

2 La municipalité de Kakanj constitue une autre scène de crime commis par le

3 3 Corps d'armée dans leur centre de détention. A Kakanj, le troisième

4 bataillon de la 7e Brigade de montagne musulmane, unité subordonnée aux

5 deux accusés a utilisé le motel Sretno. Le motel Sretno est un grand

6 bâtiment situé sur la route entre Sarajevo et Zenica, le long de

7 l'autoroute. Nous avons préparé des photos montrant le bâtiment de

8 l'extérieur. Dans la cave se trouvaient plusieurs petites cellules dans

9 lesquelles les prisonniers étaient détenus. Dans le motel Sretno des

10 passages à tabac systématiques d'une grande brutalité quotidienne se

11 déroulaient au jour le jour, vous allez entendre des victimes qui vont

12 décrire de tels passages à tabac effectués avec des matraques, des bâtons,

13 des crochets métalliques et des crosses de fusil. D'autres victimes vont

14 décrire de quelle manière les prisonniers ont été forcés à se battre

15 mutuellement. Vous allez entendre une victime qui va vous raconter de

16 quelle manière on a passé à tabac avec le manche de balai en bois jusqu'à

17 ce qu'il est perdu connaissance et lorsqu'il s'est réveillé les soldats

18 urinaient sur lui. Ensuite, vous allez entendre une victime qui a reçu sur

19 son rein droit à coups de matraque de police après qu'il a dit au garde

20 qu'il avait de problèmes de rein. Ce témoin après sa libération a eu deux

21 reins déplacés, six côtes brisées et des vertèbres très endommagées.

22 Le 3e Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine n'avait pas des centres de

23 détention seulement les municipalités de Zenica, Travnik et Kakanj mais

24 également dans la petite ville de Bugojno où ils ont détenu des centaines

25 de prisonniers de guerre et civils surtout croates. En 1993, le 3e Corps

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1 d'armée de Bosnie-Herzégovine et son groupe opérationnel Zapad de la police

2 militaire et les soldats du groupe opérationnel Zapad 7e Brigade du 3e Corps

3 d'armée de Bosnie-Herzégovine a utilisé le bâtiment du lycée Gimnazija, le

4 bâtiment du couvent qui s'appelait le centre de Marxist le salon des

5 meubles, le Slavonija et le stade du club de foot Iskra de même que l'école

6 élémentaire Vojin Paleksic et la banque de Bosnie-Herzégovine en temps que

7 centre de détention provisoire. Ces six centres de détention se trouvaient

8 dans une région très limitée et vous verrez ici la photographie où il est

9 possible de constater que parfois seulement quelques centaines de mètres

10 séparaient ces centres de détention les uns des autres.

11 Le 3e Corps d'armée a transféré ces prisonniers parmi ces centres de

12 détention différents en les faisant quitter un centre pour se retrouver

13 dans un autre. Maintenant nous allons vous montrer une photographie qui

14 montre le bâtiment du lycée Gimnazija. Première photo vous montre

15 l'extérieur du bâtiment et puis les trois photos qui suivent montrent les

16 cellules. Les cellules extrêmement petites qui se trouvaient dans la cave.

17 Il y avait trois cellules l'une à côté de l'autre, toute de même taille qui

18 était toute extrêmement petite. Et puis la cinquième photographie vous

19 montre le hall de ce bâtiment du lycée Gimnazija.

20 Le bâtiment de Gimnazija était un centre de détention extrêmement brutal

21 dans lequel les soldats subordonnés à l'accusé Hadzihasanovic ont détenu à

22 la fois des civils et des soldats du HVO. Vous avez vu les trois cellules

23 sur les photographies. Chacune de ces cellules étaient extrêmement petites

24 et avec peu de ventilation, il n'y avait aucun point d'eau à l'intérieur.

25 Et vous allez entendre une victime qui va vous raconter comment à un moment

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1 donné pendant plusieurs jours l'une de ces cellules contenaient autour de

2 45 prisonniers croates. Les prisonniers qui sont arrivés par la suite

3 également ont fait l'objet de passages à tabac systématiques et brutaux

4 commis par les gardes du 3e Corps d'armée.

5 Et dans le bâtiment de Gimnazija les passages à tabac se déroulaient au

6 jour le jour également. Toutes les nuits les gardes faisaient sortir des

7 prisonniers à l'extérieur et les passaient à tabac. Une victime va vous

8 décrire un passage à tabac particulièrement sévère pendant lequel ses mains

9 étaient ligotées derrière son dos, on lui a donné des coups de pied dans la

10 région des reins et on l'a tabassé avec un câble électronique pendant une

11 heure avant qu'il ait perdu connaissance. Cette même victime a perdu 50

12 kilos pendant son incarcération et il n'était pas le seul puisque d'autres

13 détenus ont également souffert d'inflammation et il faut savoir qu'ils

14 recevaient souvent juste un petit peu d'eau avec des lentilles et de pain

15 une seule fois par jour.

16 Une forme de traitement cruel a été constitué par le fait que les

17 prisonniers de l'école Gimnazija devaient donner leur sang des prisonniers

18 également, devaient effectuer des travaux forcés. Les soldats du 3e Corps

19 d'armée ont mis à mal les vies des détenus en les forçant de creuser les

20 tranchées sur la ligne de front. Un autre centre détention qui faisait

21 partie du système des centres de détention du 3e Corps d'armée à Bugojno

22 était le bâtiment du couvent.

23 Nous allons tout d'abord vous montrer six photographies. Ces photographies,

24 Madame, Messieurs les Juges, je vous montre le bâtiment du couvent, celui

25 qui est devant vous le montre de l'extérieur, ce bâtiment s'appelait

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1 également le centre Marxist donc vous le voyez ici de l'extérieur, ensuite

2 la photo suivante montre l'une des cellules de l'extérieur et les trois

3 photos à suivre vont illustrer les conditions difficiles qui régnaient dans

4 les deux cellules à l'intérieur du bâtiment du couvent. Des petites

5 cellules dans la cave, des cellules trop petites et puis la dernière

6 photographie que nous allons vous montrer dans quelques secondes vous donne

7 l'impression de la vue dont bénéficiaient les détenus de l'intérieur de ce

8 centre de détention. Et vous verrez que ce centre de détention n'était pas

9 loin mais dans le centre de Bugojno.

10 Les prisonniers détenus au bâtiment du couvent ont subi les mauvais

11 traitements de nature semblable à ceux qui étaient dans le bâtiment de

12 Gimnazija. Les gardes subordonnées de l'accusé Hadzihasanovic détenaient le

13 prisonnier dans des conditions pas hygiéniques et ne leur donnaient pas

14 suffisamment de nourriture. Et encore une fois, ils étaient tabassés de

15 manière systématique -- ont été tabassé de manière systématique, le

16 prisonnier du HVO. Et puis, tout comme c'était le cas dans d'autres -- dans

17 tous les autres centres de détention à Bugojno, les prisonniers du couvent

18 devaient effectuer des travaux forcés. Tous les jours, on les faisait

19 sortir afin qu'ils recueillent les corps sur les lignes de front et afin

20 qu'ils creusent des tombes, tout comme c'était le cas dans l'école de

21 musique à Zenica, dans l'ancienne caserne de la JNA à Travnik, et dans le

22 camp d'Orasac. Un prisonnier a été assassiné par les subordonnés de

23 l'accusé Hadzihasanovic. Vous allez entendre des témoins qui vont déposer

24 sur le meurtre brutal de Mario Zrno, un prisonnier du HVO. Lorsqu'on l'a

25 fait sortir pour qu'il effectue des travaux forcés alors qu'il était

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1 affaibli par manque de nourriture et par des travaux physiques durs, il a

2 perdu connaissance. Les soldats du 3e Corps d'armée l'ont ensuite passé à

3 tabac jusqu'à ce qu'il perde totalement connaissance. Ensuite, il a été

4 ramené au bâtiment du couvent à Bugojno. Le rapport soumis au MUP de

5 Zenica, la station de sécurité d'état a décrit Mario Zrno en tant que

6 prisonnier de guerre, passé à tabac, couvert de bleus et torturé jusqu'à

7 mort.

8 A une distance pas grande, par rapport au couvent, le 3e Corps d'armée

9 utilisait le salon des meubles, Slavonija, en tant que centre de détention

10 temporaire. La photo suivante vous montre l'extérieur de ce salon des

11 meubles, Slavonija. Il s'agissait d'un bâtiment qui se trouvait au centre-

12 ville de Bugojno. Puis, nous avons préparé une autre photographie qui vous

13 montre les cellules qui se trouvaient dans la cave, au sous-sol, et ce de

14 l'intérieur. Cette pièce que vous avez devant vous est peut-être le pire

15 centre de détention à Bugojno. Les soldats du 3e Corps d'armée, subordonnés

16 à l'accusé Hadzihasanovic, ont détenus les prisonniers dans ce sous-sol. La

17 pièce était petite et sombre.

18 Et par terre, il y avait environ 10 à 15 centimètres d'eau. Les passages à

19 tabac quotidiens étaient d'une grande brutalité. Ils commençaient le

20 premier jour après l'arrivée des prisonniers. On faisait sortir les

21 prisonniers un à un, et on les passait à tabac, un à un. Et les passages à

22 tabac ne s'arrêtaient pas jusqu'à leur libération. Vous allez entendre une

23 victime qui va décrire comment on l'a forcé à s'allonger par terre sur son

24 ventre, et il a été tabassé par quatre ou cinq soldats à la fois. On lui

25 donnait des coups de pied, et puis on le battait avec une matraque en

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1 caoutchouc. Et puis, on marchait sur ses doigts avec des bottes. Puis, vous

2 allez entendre des témoins qui vont parler du passage à tabac à l'aide d'un

3 tuyau métallique, d'une barre métallique et d'un bat en bois, qui a duré

4 pendant plus d'une demi-heure, alors qu'on le menaçait de mort en plaçant

5 un fusil contre sa tête. Dans le salon des meubles, Slavonija, les détenus

6 devaient également sortir pour effectuer des travaux forcés. Ils devaient

7 creuser les tombes. Ils étaient passés à tabac tous les jours et ils

8 étaient forcés à se battre mutuellement. Une fois, lorsqu'ils creusaient

9 les tombes, les gardes ont jeté de grandes pierres sur les prisonniers en

10 brisant la tête d'un prisonnier et en blessant des autres. Et encore une

11 fois, dans le salon des meubles de Slavonija, au moins un prisonnier est

12 mort en résultat du passage à tabac brutal commis des subordonnés de

13 l'accusé Hadzihasanovic.

14 Le 5 août 1993, les gardes ont demandé aux prisonniers de monter à l'étage.

15 Les prisonniers étaient passés à tabac de manière brutale, un par un, par

16 quatre ou cinq soldats, avec des tuyaux métalliques, avec des barres, avec

17 des bats en bois. Un des prisonniers, Mladen Havranek, n'a pas survécu à ce

18 passage à tabac brutal. Vous allez entendre des témoins qui vont décrire

19 comment il s'est effondré lorsqu'ils les retournaient en bas. Il a été

20 passé à tabac jusqu'à ce qu'il ait perdu connaissance. Il n'avait plus de

21 pouls. Il ne respirait plus. Les autres prisonniers ont pris son corps,

22 l'ont monté à l'étage et ont laissé son corps auprès des gardes. Le même

23 document qui décrivait la mort de Mario Zrno décrit l' Mladen Havranek en

24 tant que prisonnier de guerre que l'on a fait sortir d'un groupe de

25 prisonniers, qu'on a passé à tabac jusqu'à ce qu'il était couvert de bleus,

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1 et qui est mort dans les armes des prisonniers sur la route de l'hôpital.

2 Un autre centre de détention, qui était à la fois large, grand et

3 notoirement connu, était le stade du club de football Iskra. Il s'agissait

4 d'un stade très grand, ce qui est montré dans la série de photographies

5 suivante. Les deux premières photographies nous montrent le stade Iskra de

6 l'extérieur. Les photographies suivantes vous montrent les vestiaires de

7 l'intérieur, qui étaient utilisés comme des cellules. Et vous allez voir

8 qu'il s'agissait là des cellules qui étaient vraiment petites. Le stade

9 Iskra était un centre de détention très connu. Plusieurs centaines des

10 détenus du HVO sont passés par là. Tout comme un grand nombre de civils

11 croates. Et puis, parmi les détenus, se trouvaient également des Serbes de

12 Bugojno. Les gardes du 3e Corps d'armée, subordonnés à l'accusé

13 Hadzihasanovic, ont soumis les détenus au même traitements cruel,

14 systématique que celui qui était réservé aux détenus d'autres centres de

15 détention à Bugojno. Le même traitement cruel, systématique voulait dire

16 des passages à tabac, des menaces et des travaux forcés sur les lignes de

17 fronts. Vous allez entendre des victimes qui représentent des centaines de

18 victimes qui avaient été détenues là-bas qui vont décrire les passages à

19 tabac systématiques. Vous avez vu des photographies des vestiaires.

20 Vous allez entendre des victimes qui vont vous dire que 140 prisonniers

21 étaient détenus dans une telle pièce de dimension de 1 sur -- 11 sur 6

22 mètres. Vous allez entendre d'autres victimes qui vont vous raconter que

23 300 prisonniers ont été entassés dans deux vestiaires, une petite pièce et

24 le hall. Vous allez entendre des victimes qui vont décrire le peu de

25 nourriture qu'ils recevaient. Treize morceaux de pain et 20 litres de soupe

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1 qui était constituée surtout d'eau, pour 300 détenus, tous les jours

2 pendant plusieurs semaines d'affilées.

3 Ensuite, nous avons préparé des photographies qui vous montrent l'école

4 primaire de Vojin Paleksic. La première photographie la montre de

5 l'extérieur et la deuxième photographie vous montre la salle de sport dans

6 laquelle les détenus ont été enfermés. L'école primaire Vojin Paleksic

7 était simplement une autre prison qui faisait partie du système des centres

8 de détention, soit un Corps d'armée à Bugojno. Le même modèle systématique

9 de mauvais traitements infligés aux détenus se répétait dans ce centre de

10 détention également. Les subordonnés à l'accusé Hadzihasanovic ont entassé

11 environ 300 prisonniers dans la salle des sports dont la taille

12 correspondait à peu près à la taille d'une salle de basket. Les détenus ont

13 été passés à tabac de manière brutale et régulière. On les battait avec des

14 matraques. Vous allez entendre une victime qui va décrire tels passages à

15 tabac commis par six soldats qui a provoqué la perte de connaissance du

16 détenu. Et comme c'était typique pour les centres de détention à Bugojno,

17 des prisonniers de l'école primaire de Vojin Paleksic devaient également

18 sortir, afin de creuser les tranchées sur les lignes de front contre les

19 Serbes, ce qui les exposaient de manière constante aux tirs ennemis.

20 Les deux dernières photographies illustrent la banque de Bosnie-

21 Herzégovine, le bâtiment de la banque. Encore une fois, nous avons d'abord

22 la vue de l'extérieur. Et ensuite la deuxième photographie vous montre une

23 cellule au sous-sol de l'intérieur, ce qui vous donne une plutôt bonne

24 impression des conditions qui régnaient dans ce centre de détention, tout

25 comme c'était le cas dans le salon des meubles Slavonija. Le sous-sol du

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1 bâtiment de la banque de Bosnie-Herzégovine était couvert par plusieurs

2 centimètres d'eau. Les prisonniers bosno-croates ont été entassés dans

3 quelques très petites cellules. Vous allez entendre une victime qui va

4 décrire la manière dont quatre prisonniers ont été détenus dans une cellule

5 dont les dimensions étaient 1,5 sur deux mètres.

6 Dans le bâtiment de la banque de Bosnie-Herzégovine, les subordonnés de

7 l'accusé Hadzihasanovic ont également passé à tabac et harcelé de manière

8 systématique les détenus. Vous allez entendre des victimes qui vont donner

9 les détails des passages à tabac de nature brutale, à ce point-là que

10 plusieurs détenus perdaient connaissance.

11 Voilà, Madame et Messieurs, les crimes qui sont à la base des chefs 3 et 4

12 de l'acte d'accusation, assassinats et traitement cruel.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour des raisons techniques, -- pendant vingt

14 minutes et nous reprendrons donc à 10 heures 50.

15 --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.

16 --- L'audience est reprise à 10 heures 55.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : [interprétation] Donc, faites entrer les accusés.

18 Bien, vous pouvez vous asseoir.

19 Bien, Monsieur le Procureur, vous pouvez donc continuer.

20 M. WITHOPF : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, des

21 subordonnés des deux accusés avaient déjà commis les crimes que j'ai

22 évoqués avant la pause. Mais les subordonnés des deux accusés ont commis

23 d'autres crimes que cela. Au cours des activités de combat ou après avoir

24 terminé celles-ci, les soldats du 3e Corps de l'armée de Bosnie-Herzégovine

25 se sont livrés de façon répétée à des actes de pillage et de destruction

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1 sans aucune justification militaire. Ils ont pillé et détruit les foyers de

2 Croates et de Serbes de Bosnie, les bâtiments et les biens personnels de

3 ceux-ci.

4 Pendant toute la période couverte par l'acte d'accusation, des soldats du

5 3e Corps, subordonnés aux accusés, se sont livrés à des actes de pillage et

6 de destruction de biens privés et publics. Ceci est survenu dans divers

7 lieux géographiques de la zone de responsabilité du 3e Corps. Les attaques

8 du 3e Corps étaient souvent suivies d'actes violents, de pillages et

9 d'incendies de propriétés appartenant à des civils serbes et croates de

10 Bosnie. Et c'est devenu une caractéristique courante à la suite d'attaques

11 entreprises par les effectifs du 3e Corps.

12 Vous allez voir la prochaine carte. Elle vous montre ces différents lieux.

13 Vous le constaterez à l'examen de cette carte, les subordonnés, les accusés

14 ont pillé, ont détruit par incendie, des maisons, pas à une longue distance

15 du QG mais tout près de celui-ci. Et tout ceci s'est passé pratiquement

16 sous les yeux des accusés. Les subordonnés des deux accusés, pendant et où

17 après l'attaque de Miletici, ont fait éruption dans les foyers des

18 villageois pour en emporter leurs effets personnels et leur bétail. Il y a

19 eu toute une série d'attaques très importantes de la part du 3e Corps de

20 l'armée de Bosnie-Herzégovine en juin 1993 en Bosnie centrale. Ils ont

21 pillé et brûlé des maisons de Guca Gora, à Maline, à Cukle dans la

22 municipalité de Travnik ainsi que Susanj à Ovnak, à Brajkovici, et à

23 Grahovcici. Vous le voyez, ces derniers villages font partie de la

24 municipalité de Zenica.

25 Les témoins à charge, des villageois aussi bien que des soldats du 3e Corps

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1 viendront vous dire que les soldats du 3e Corps estimaient que les

2 voitures, les camions, les tracteurs, les meubles, les appareils ménagers,

3 les téléviseurs, les magnétophones, les radios, les frigidaires, les

4 cuisinières et les machines à laver des résidents qu'ils forçaient à fuir

5 les combats. Ils les considéraient comme leurs biens personnels.

6 A Cukle, les soldats ont même reçu instruction par haut-parleur, au

7 mégaphone de tout sortir des maisons avant de les brûler dans le village.

8 Dans ce même village, les soldats subordonnés à l'accusé ont forcé les

9 villageois à leur donner leurs objets de valeur ainsi que leur argent. Les

10 actes les plus impudents de pillages et d'incendies volontaires se sont

11 produits sous les yeux des responsables du maintien de la paix suédois à

12 Vares en novembre 1993. Les soldats de le 7e Brigade de montagne musulmane

13 subordonnés à l'accusé Kubura avaient participé à la prise de Vares, qui

14 était jusque là sous contrôle du HVR. Après cela, ils ont dû ambuler dans

15 les rues en tirant dans les fenêtres et en démolissant les voitures. Au

16 cours de cet acte auquel ont assisté des représentants des médias

17 internationaux, ils ont pillé et brûlé des maisons dont des bâtiments de la

18 ville ainsi que des commerces. Ils se sont emparés de véhicules,

19 d'autocars, de camions remplis de vivres et ils ont laissé derrière eux une

20 ville dévastée.

21 Les soldats du 3e Corps n'ont pas non plus épargné les lieux de culte,

22 pourtant protégés en tant que monuments culturels et religieux par les

23 conventions de Genève. Début juin 1993, il y a des attaques du 3e Corps et

24 les soldats causent des dommages considérables au monastère de Guca Gora

25 ainsi qu'à l'église Jean-Baptiste de Travnik. A Guca Gora, qui est un haut

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1 lieu, un symbole de la foi catholique en Bosnie centrale, des subordonnés

2 de l'accusé Hadzihasanovic ont recouvert d'excréments les murs et les

3 bancs, ont brisé les vitraux et ont recouvert les murs de graffitis et ils

4 ont essayé de démolir une grande fresque du mur se trouvant derrière

5 l'autel. Des subordonnés de l'accusé Hadzihasanovic ont également endommagé

6 l'église St Jean-Baptiste par des actes de vandalisme perpétrés sur les

7 sculptures, les peintures et les orgues et en endommageant les vitraux. Là

8 aussi comme à Guca Gora les murs étaient recouverts de graffitis. Les

9 stalles et les fresques étaient enduites de peinture.

10 Voilà les crimes qui sont à la base de l'acte d'accusation dressé contre

11 les accusés.

12 Les subordonnés des accusés et non les accusés eux-mêmes ont commis ces

13 crimes. Cependant ces deux accusés sont tenus responsables individuellement

14 et pénalement en application de l'Article 7(3) du statut, responsabilité du

15 supérieur hiérarchique. Pourquoi ? Parce qu'ils n'ont pas empêché que ces

16 crimes soient commis et ils n'ont pas non plus punis les auteurs de ces

17 crimes. Plusieurs questions vont surgir au cours de ce procès. Les

18 questions décisives sont celles qui sont en rapport avec la responsabilité

19 pénale visée par l'Article 7(3) du statut de notre Tribunal. A cet égard,

20 Madame et Messieurs les Juges, l'Accusation va apporter la preuve qu'il

21 existait un rapport subordonné supérieur entre les accusés et les auteurs

22 présumés de ces crimes. L'Accusation prouvera que les accusés savaient ou

23 avaient des raisons de savoir que les auteurs s'apprêtaient à commettre ces

24 actes criminels ou l'avaient fait. En d'autres termes, que les accusés

25 étaient au courant de l'existence et de la commission de ces crimes.

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1 L'Accusation va également prouver quelque chose qui va au cœur même de

2 cette affaire, que les accusés n'ont pas pris les mesures nécessaires et

3 raisonnables pour empêcher ces actes criminels ou pour en punir les

4 auteurs.

5 L'accusé Hadzihasanovic, le colonel Kubura, ils étaient les supérieurs

6 hiérarchiques des auteurs présumés. Ils avaient le contrôle effectif de

7 leurs subordonnés, de ceux qui ont commis les crimes. Les deux accusés

8 avaient la possibilité matérielle d'empêcher ces infractions ou d'en punir

9 les principaux auteurs. Les deux accusés ont fait la preuve de leurs

10 autorités de jure et de facto.

11 A partir du 14 novembre 1992, le général Hadzihasanovic était le commandant

12 du 3e Corps de la Bosnie-Herzégovine. Il est resté jusqu'au moment où il a

13 été nommé chef de l'état major suprême de la Bosnie-Herzégovine, le 1er

14 novembre 1993. En qualité de commandant du 3e Corps, il avait sous ses

15 ordres plusieurs groupes opérationnels, des brigades et d'autres unités. Il

16 y avait parmi ces unités, celles dont les membres ont commis les crimes

17 repris dans l'acte d'accusation. A savoir, la 7e Brigade musulmane de

18 montagne, le 313e Brigade de montagne, la 306e Brigade de montagne, la 314e

19 Brigade de montagne, la 17e Brigade de montagne de la Krajina, la 307e

20 Brigade ainsi que la police militaire du groupe opérationnel Zapad.

21 L'accusé Hadzihasanovic était, s'agissant de ces différentes unités leur

22 commandant de jure et de facto.

23 L'accusé Hadzihasanovic a donné de nombreux ordres à ses subordonnés qui

24 ont commis les crimes présumés. La mise en œuvre de ces ordres et les

25 rapports qui ont été fait, prouvent qu'il exerçait ce contrôle. Ces

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1 documents vous montreront que l'accusé Hadzihasanovic a fait tout ce qui

2 était exigé de la part d'un commandant militaire au poste que lui occupait.

3 Nous allons prouver que l'accusé Hadzihasanovic a décidé de la structure

4 organique du 3e Corps. C'est lui qui a décidé notamment de la formation des

5 groupes opérationnels GO, de la subordonnée des unités sous ces groupes

6 opérationnels, de la nomination, de la promotion et de la mise à pied des

7 commandants subordonnés. Nous verserons au dossier de la présente instance

8 beaucoup d'ordres d'instructions, de directives données par l'accusé

9 Hadzihasanovic pour ce qui est du déploiement d'effectifs, de la

10 planification, de la préparation et de la mise en œuvre d'opérations

11 militaires.

12 Le colonel Kubura est devenu le commandant adjoint de la 7e Brigade

13 musulmane de montagne, le 1er avril 1993. A partir de ce moment-là, il avait

14 le contrôle de jure et de facto de la brigade. Le 21 juillet 1993, il a été

15 nommé Commandant de la brigade, poste qu'il a occupé jusqu'au 16 mars 1994,

16 au moment où il a été nommé commandant de la 1e Brigade musulmane de

17 montagne de 1e Corps d'armée. L'Accusation va vous présenter des documents

18 militaires, des documents de l'armée de Bosnie-Herzégovine semblables à

19 ceux relatifs à l'accusé Hadzihasanovic. Et ces documents prouveront

20 l'autorité délurée et de facto qu'exerçait l'accusé Kubura.

21 A l'instar du général Hadzihasanovic, le colonel Kubura donnait des ordres,

22 des instructions, des directives ont vu de la préparation de combats armés

23 sur le terrain, en vue de la planification et de la menée d'action

24 militaire, transmettait des décisions de commandement supérieur à

25 commandement subordonné et le contrôle de la mise en œuvre de ces

Page 383

1 différents décisions et ordres.

2 Madame et Messieurs les Juge, je parle maintenant de façon plus précise de

3 la subordination des Moudjahiddines en tant que facette particulière de la

4 différente relation de subordination. Les Moudjahiddines se sont des

5 combattants musulmans étrangers qui viennent surtout de pays islamistes.

6 Ils ont -- ils étaient subordonnés au commandement du 3e Corps, et étaient

7 eux aussi, déployés dans le secteur de la 7e Brigade de montagne musulmane.

8 Ces hommes ont commis de nombreux crimes contre la population civile et les

9 prisonniers de Guerre pendant toute la durée couverte par l'acte

10 d'accusation ont commis notamment des crimes qui font partie de cet acte

11 d'accusation.

12 Nous allons vous présenter des moyens de preuve que ce soit des témoignages

13 de témoins ou de documents qui montreront qu'à leur arrivé à partir de

14 milieu de 1992, ces Moudjahiddines ont été utilisés par le commandement du

15 3e Corps pour servir d'aide aux unités du 3e Corps dans des attaques menées

16 contre l'ennemi et en particulier pour être à la tête de ces attaques et

17 pour se charger des actions de combat plus difficile.

18 Vous allez entendre des témoins qui viendront dans ce prétoire vous dire

19 que les Moudjahiddines étaient les troupes de chocs, d'autres témoins

20 venant même du 3e Corps apporteront la preuve que ces hommes étaient

21 utilisés pour servir de faire lance des ces actions militaires entreprises

22 par le 3e Corps. Les moyens de preuve présentés par l'Accusation vous

23 montreront également que ces Moudjahiddines étaient notamment utilisés dans

24 des actions de combats menés par la 7e Brigade musulmane de montagne.

25 Enfin, le 13 août 1993, après que l'accusé Hadzihasanovic eut demandé au

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1 commandement suprême de le faire, les Moudjahiddines du 3e Corps d'armée

2 ont été déployés pour constituer un détachement séparé, appelé El Mudjahid

3 [phon] qu'il lui était directement subordonné.

4 Nos preuves vous montreront qu'à leur arrivée, les Moudjahiddines ont été

5 intégrés dans la structure militaire de 3e Corps d'armé y compris dans la 7e

6 Brigade musulmane de montagne. Grâce à nos moyens, nous apporteront la

7 preuve que les deux accusés, le générale Hadzihasanovic, et le colonel

8 Kubura exerçaient un contrôle effectif sur ces Moudjahiddines, que tous

9 deux avaient la possibilité effective de prévenir ces infractions ou de

10 punir les auteurs de ces crimes, à savoir, les Moudjahiddines.

11 Les deux accusés savaient ou avaient des raisons de savoir que les auteurs

12 s'apprêtaient à commettre des crimes ou l'avaient déjà fait. Nous allons

13 vous présenter des moyens de preuve tant par le biais de témoins que par

14 des preuves documentaires qui démontreront que les deux accusés avaient

15 connaissance d'un nombre important des crimes repris dans l'acte

16 d'accusation. Ils savaient tout particulièrement qu'il se passait des

17 assassinats, des exécutions, des massacres. Ces meurtres quelques jours à

18 peine après avoir été commis, étaient de notoriété publique, on les

19 connaissait de façon détaillée, on savait notamment le fait que des

20 subordonnés des accusés les avaient commis, et sans l'ombre d'un doute. Il

21 est certain que les accusés en ont eu du vent.

22 Les moyens de preuve présentés par l'Accusation démontreront qu'à de

23 nombreuses reprises, les accusés ont été informés, mis au courant de ceci

24 par le HVO, par les représentants de la mission des observateurs européens,

25 le CMM ainsi que par la FORPRONU, mais ils recevaient des informations dans

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1 ce sens de leurs propres supérieurs qui demandaient des renseignements.

2 Nous avons des documents comme les ordres donnés par les accusés, les

3 rapports qu'ils ont fourni aux échelons supérieurs à eux dans la filiale

4 hiérarchique, tout ceci révélera le fait qu'ils disposaient de cette

5 connaissance.

6 Soyons plus concret, s'agissant de l'exécution à Dusina, l'accusé

7 Hadzihasanovic, très peu de temps après la survenue [sic] de l'incident et

8 nous parlons d'une question d'heure simplement avait une connaissance

9 directe des accusations portées à l'encontre de soldat qu'il lui était

10 subordonné. Nous allons verser au dossier un communiqué de presse émanant

11 du 3e Corps et disant que Zvonko Rajic est là je cite :

12 "Extrémiste notoire ici de ces soldats les plus loyaux, ont été tués au

13 cours de cet affrontement."

14 Nous allons verser au dossier un rapport venant de l'accusé Hadzihasanovic

15 portant la date du 27 janvier 1993, le lendemain de l'attaque. Il fait

16 rapport au commandement suprême de l'armée de Bosnie-Herzégovine à propos

17 d'une réunion qui s'est déroulée la veille, le 26 janvier 1993, à laquelle,

18 il y a son adjoint Dzemo Merdan -- le colonel Blaskic responsable de la

19 zone opérationnelle du HVO en Bosnie centrale et la FORPRONU. Réunion au

20 cours de laquelle, le colonel Blaskic dit qu'il va faire capoter et

21 interrompre les négociations du fait de la mort de ce membre du HVO.

22 Nous allons également verser au dossier un autre rapport venant toujours de

23 l'accusé Hadzihasanovic, et adressé au commandant suprême de la VIH

24 s'agissant d'allégation entendue à la radio et télévision croate qui dit et

25 là je cite :

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1 "Nous rejetons tous ces mensonges disséminés par la HTV à propos de

2 massacre présumé de la population croate, ainsi que le mensonge concernant

3 le fait que cet soldat du HVO sans arme, aurait été assassiné."

4 Mais qu'est-ce que ceci signifie, Madame et Messieurs les Juges, ça veut

5 dire que l'accusé Hadzihasanovic savait que le 26 janvier 1993, ses

6 subordonnés avaient capturé des soldats du HVO, il savait que six ou sept

7 soldats du HVO dont le commandant local du HVO avaient été tués à Dusina ce

8 jour-là. Il savait aussi que les Croates reprochaient à l'armée de Bosnie-

9 Herzégovine de les avoir tués après que ces hommes se furent rendus.

10 L'accusé Hadzihasanovic avait aussi une connaissance directe des

11 assassinats commis à Miletici, les moyens de preuve que nous allons vous

12 présenter, montreront que le lendemain de l'exécution le 25 avril 1993,

13 Merdan l'adjoint de l'accusé Hadzihasanovic et un représentant de le CMM se

14 sont rendus à Miletici pour mener une enquête suite à la nouvelle d'un

15 massacre. A la suite de cette visite le CMM a rédigé un rapport confirmant

16 qu'il y avait eu torture et assassinat de quatre victimes croates.

17 Un autre document apportera la preuve de ce que le 6 mai 1993 à la 306e

18 Brigade de montagne a fait rapport aux services du commandement du 3e Corps

19 chargé de la morale de la formation de la propagande et des questions

20 religieuses, rapport concernant Miletici et disant qu'on réponse au fait

21 qu'un arabe avait été blessé. Les Moudjahiddines avaient tué cinq citoyens

22 croates. Un jour plus tard, le 7 mai 1993, le bureau des informations de

23 Bosnie centrale du HVO écrivait à l'ECMM, au CIC, à la FORPRONU ainsi qu'au

24 commandement du 3e Corps et donné des informations précises à propos des

25 assassinats commis à Miletici. Ceci a aussi fait la une des médias

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1 internationaux.

2 Le 15 mai 1993, le rapporteur spécial des Nations Unies faisait rapport au

3 Conseil de sécurité. Voici ce qu'il disait :

4 "Notre personnel sur le terrain s'est rendu au village de Miletici, au nord

5 de Vitez pour y recueillir des témoignages selon lesquels, vers le 16

6 avril, des membres des forces gouvernementales venant de villages voisins

7 et des Moudjahiddines ont encerclé le village, ont choisi parmi les hommes

8 cinq jeunes croates et en ont torturé certains avant de les exécuter."

9 Ceci nous permettra de prouver que l'accusé Hadzihasanovic, en très peu de

10 temps j'insiste, avait recueilli de plusieurs sources des renseignements

11 détaillés montrant que ses subordonnés avaient assassiné des soldats du HVO

12 qui s'était pourtant rendus.

13 S'agissant de l'accusé Kubura, nous allons produire toute une série de

14 documents, documents de l'armée de Bosnie-Herzégovine, lesquels prouveront

15 qu'avant les assassinats de Miletici, Kubura connaissait le comportement

16 criminel de ses soldats subordonnés. Et c'est lui-même, l'accusé Kubura,

17 qui le 8 avril 1993, suite à une plainte déposée par le commandant de la

18 306e Brigade de montagnes, faisait état de ce qu'il a décrit comme étant :

19 "Le comportement inacceptable de certains membres de la Brigade."

20 Parlons maintenant du massacre de Maline Bikosi et de la connaissance

21 directe qu'en avait les accusés. Ce n'est pas un incident mineur que le

22 massacre de Maline Bikosi puisque 24 croates ont été tués. Ce n'était pas

23 un incident mineur, non plus, pour le secteur, la zone de responsabilités

24 du 3e Corps. Et tout le monde était au courant peu de temps après que ce

25 massacre a été commis. Il n'est pas surprenant que ceci ait été porté à la

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1 connaissance du commandement suprême de l'armée de Bosnie-Herzégovine.

2 Nous allons présenter des moyens de preuve, vous montrant Madame et

3 Messieurs les Juges, que le 20 juin 1993, après que ces informations eu été

4 reçues, l'adjoint du commandant de l'armée de Bosnie-Herzégovine, Siba

5 [phon], s'est rendu à Zenica pour y voir l'accusé Hadzihasanovic. Il lui a

6 demandé, s'il était au courant du fait que 35 personnes avaient été

7 exécutées à Bikosi. La Défense ne conteste pas que le 9 août 1993,

8 l'adjoint de l'accusé Hadzihasanovic, Dzemo Merdan, accompagné d'un

9 représentant de l'ECMM se soit rendu à Bikosi pour y examiner trois fosses.

10 Merdan, qui était l'adjoint de l'accusé Hadzihasanovic, n'aurait pas pu

11 participer à cette mission sans que l'accusé Hadzihasanovic ne le sache.

12 Tout comme ce fut le cas avec les assassinats de Miletici, le massacre de

13 Maline Bikosi a été très suivi par la communauté internationale. Il y a eu

14 une enquête menée par le rapporteur spécial des Nations Unies et suite à

15 cela, le commandant suprême de l'armée de Bosnie-Herzégovine, Delick, au

16 nom du président de la présidence Izetbegovic, a écrit à l'accusé

17 Hadzihasanovic et lui demandait des informations à propos de ce massacre

18 présumé de Maline, le 8 juin 1993.Tout ceci, Madame et Messieurs les Juges,

19 montre que l'accusé Hadzihasanovic était au courant de l'existence de ces

20 crimes.

21 C'est vrai aussi de l'accusé Kubura, lui aussi, était au courant des

22 actions entreprises par ses subordonnés. L'Accusation va demander le

23 versement au dossier d'un document montrant que le 20 juin 1993, l'accusé

24 Kubura a donné un ordre à ses commandants subordonnés, ordre qui consistait

25 à ce qu'il n'y ait pas de "cas négatifs". De plus, cet ordre est une suite

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1 à l'ordre donné par Kubura qui dit :

2 "Qu'il faut traiter les prisonniers de Guerre, surtout les blessés, dans le

3 respect des conventions de Genève." Ceci, cet ordre est donné quelques

4 jours à peine après le massacre.

5 Il y a le caractère public des crimes commis. Ces deux éléments conjugués

6 forcent à une seule conclusion. C'est que l'accusé Kubura tout comme

7 l'accusé Hadzihasanovic avait vraiment connaissance du massacre. Dans bon

8 nombre de cas, les deux accusés étaient également au courant des crimes

9 commis par leurs subordonnés dans les lieux de détention. Certains de ces

10 lieux de détention, par exemple, l'école de musique de Zenica et le stade

11 de football du FC Iskra Bugojno étaient de sinistre réputation. Pourquoi ?

12 Parce que les détenus étaient soumis à des traitements inhumains. De

13 tristes et de sinistres réputations parce que les détenus étaient en but à

14 des sévices brutaux.

15 Ils étaient connus aussi parce que les supérieurs de l'accusé ou des

16 accusés ont fait part de leurs préoccupations à l'égard des accusés, à

17 l'intention des accusés, leur ont donné l'ordre de s'assurer que les

18 prisonniers étaient traités conformément aux dispositions des conventions

19 de Genève. Les mauvais traitements réservés aux prisonniers qui étaient

20 détenus à l'école de musique de Zenica, et bien, ils étaient

21 particulièrement de triste réputation dans le sens où cela a fait l'objet

22 de nombreuses plaintes, non seulement des organisations internationales

23 telles que les observateurs de la communauté européenne et le comité

24 international de la Croix rouge mais aussi à l'adresse du commandement du

25 3e Corps et de la 7e Brigade de montagnes musulmane.

Page 390

1 Nous allons vous présenter un rapport qui montre qu'en date du 7 mai 1993,

2 le bureau d'information du HVO a informé le commandement du 3e Corps des

3 mauvais traitements extrêmes qui ont été infligés aux prisonniers détenus à

4 l'école de musique de Zenica. Un autre document nous montrera que l'accusé

5 Hadzihasanovic a rencontré le représentant de l'ECMM le même jour afin de

6 discuter de la situation qui prévalait à l'école de musique de Zenica. Et

7 nous allons citer à la barre un témoin. A l'époque, il était juge de la

8 cour militaire du district de Zenica. Et actuellement, il est nommé au

9 tribunal d'état de Bosnie-Herzégovine qui, en date du 13 juin 1993, a

10 informé l'accusé Hadzihasanovic des plaintes au sujet des mauvais

11 traitements et des passages à tabac des prisonniers.

12 L'accusé Hadzihasanovic a répliqué en disant qu'il avait été mis au

13 courant, qu'il en avait entendu parler mais qu'il avait procédé à des

14 vérifications, "et que c'était OK." Ce n'était pas OK, Madame, Messieurs

15 les Juges, pas du tout. Cinq jours après cette réunion, Jozo Maracic a

16 succombé. Il avait été passé à tabac. Il avait été battu à mort par des

17 subordonnés de l'accusé Hadzihasanovic. Il a été tué à un kilomètre de

18 distance seulement du QG de l'accusé Hadzihasanovic. Il a été tué à deux

19 kilomètres seulement de distance du QG de l'accusé Kubura. Il a été tué par

20 les subordonnés directs de celui-ci.

21 L'accusé Kubura, non seulement, était effectivement au courant des mauvais

22 traitements réservés aux prisonniers à l'école de musique de Zenica mais il

23 était au courant également des passages à tabac brutaux du motel Sretno. Il

24 le savait parce qu'une victime le lui a relaté. Et vous aurez l'occasion

25 d'entendre cet ex-détenu. Il vous décrira comment lui, après sa libération,

Page 391

1 a été pris par les soldats du HVO à une réunion qui s'est tenue entre le

2 HVO et l'armée de Bosnie-Herzégovine, sous la tutelle de la FORPRONU.

3 L'accusé Kubura était un haut représentant de l'armée de Bosnie-Herzégovine

4 lors de cette réunion. Et pendant celle-ci, la victime a informé les

5 participants, y compris l'accusé Kubura, des blessures qui lui avait été

6 infligées par les gardes du 3e Corps d'armée au motel Sretno. Il s'agissait

7 de six côtes cassées, de vertèbres sérieusement déplacées, de deux reins

8 déplacés, et tout ceci a été provoqué par des passages à tabac brutaux, à

9 l'aide d'une matraque de police.

10 L'accusé Hadzihasanovic était également effectivement au courant des crimes

11 qui étaient commis par ses subordonnés au motel Sretno. A l'époque, il

12 vivait à Kakanj. Il vivait à Kakanj, à quelques centaines de mètres

13 seulement de distance du motel Sretno. Pendant qu'il y résidait, il était

14 au courant de ces mauvais traitements. Il était au courant de cela parce

15 qu'il en avait été informé. Nous allons présenter et proposer au versement

16 des documents qui montrent qu'il était informé par le HVO au sujet du

17 mauvais traitement des prisonniers à Kakanj, au motel Sretno. Et il pouvait

18 se reposer au moins sur deux sources. Tout d'abord, le 21 mai 1993, une

19 lettre de protestation a été adressée. Et encore une fois, le 21 juin 1993,

20 à l'occasion d'une réunion qui s'est tenue au QG du bataillon britannique.

21 S'agissant maintenant des autres centres de détention, et bien, l'accusé

22 Hadzihasanovic avait été informé. Il a été informé dans toute la mesure

23 nécessaire -- nécessaire à diligenter des enquêtes supplémentaires. Aux

24 centres de détention des municipalités de Travnik et de Bugojno, et bien,

25 il constituait partie intégrante de la structure organisée du réseau de

Page 392

1 centres de détention au sein de la zone de la responsabilité du 3e Corps.

2 Et les prisonniers étaient déplacés d'un centre de détention à un autre.

3 Parfois, ils traversaient les frontières des municipalités, les zones de

4 responsabilité des unités militaires, ce qui nécessitait une planification,

5 une logistique et des effectifs. Il s'agissait de déplacements organisés.

6 Et cela nécessitait aussi l'approbation de la part de l'accusé

7 Hadzihasanovic.

8 Enfin, comme vous pouvez le voir à la carte, vous verrez les distances. Et

9 bien, les distances entre les centres de détention et le QG de l'accusé

10 Hadzihasanovic étaient faibles. Dans plusieurs cas, elles étaient de moins

11 de 20 kilomètres. L'accusé connaissait sa zone de responsabilité. Il la

12 connaissait bien. Souvent, il avait l'occasion de se rendre sur le terrain.

13 Il se rendait dans des secteurs où étaient situés les centres de détention.

14 Et puis, les gens parlaient des crimes. C'étaient à la fois des civils et

15 des soldats, des deux parties qui en parlaient. Et l'accusé Hadzihasanovic,

16 lui aussi, s'est adressé aux gens.

17 L'accusé Hadzihasanovic était effectivement au courant des traitements

18 cruels réservés aux détenus au sein de l'école de musique de Zenica. Il

19 était effectivement au courant des mauvais traitements, des traitements

20 cruels des détenus au motel Sretno. Il était effectivement au courant de

21 l'existence d'autres centres de détention. Il a été au courant des crimes

22 commis à l'école de musique de Zenica et au motel Sretno. Par conséquent,

23 il avait des raisons de savoir que des traitements cruels étaient infligés

24 aux détenus dans d'autres centres de détention.

25 Madame, Messieurs les Juges, les deux accusés étaient au courant également

Page 393

1 des pillages. Et ils étaient au courant des destructions arbitraires. Vous

2 aurez l'occasion d'entendre le témoignage d'un témoin, membre des officiers

3 supérieurs du commandement de l'unité subordonnée à l'accusé

4 Hadzihasanovic. Il déposera que des pillages commis par des membres du 3e

5 Corps et l'incendie des biens croates et serbes étaient de règle dans la

6 zone de responsabilité du 3e Corps, et ce, pendant toute la période

7 couverte par l'acte d'accusation. Ceci a été tellement régulier et

8 habituel, que l'accusé Hadzihasanovic, bien mis au courant de cela, a

9 ordonné à plusieurs reprises à ses commandants subordonnés d'empêcher les

10 soldats de l'armée de Bosnie-Herzégovine, et je cite : "De voler, de

11 piller, d'incendier les biens".

12 Nous allons présenter des moyens de preuve montrant en détails qu'il était

13 au courant même de l'unité -- du nom de l'unité subordonnée ou de celles

14 qui étaient les plus actives dans ce comportement illégal. Et il était au

15 courant des incidents spécifiques de pillages et de destruction, comme

16 celle de Guca Gora, après l'attaque le 8 juin 1993. Et quelques jours plus

17 tard, le 16 juin 1993, il a envoyé un ordre à la 306e Brigade, ou à son

18 commandement, spécifiquement se référant à ce qui s'était produit. Nous

19 allons, Monsieur le Président, Madame le Juge, montrer un document, et je

20 cite la teneur de ce document :

21 "Durant et après les activités de combat, dans votre zone de

22 responsabilité, il y a eu des pillages et des incendies, à une grande

23 échelle, de bâtiments appartenant à la population croate."

24 Non seulement l'accusé Hadzihasanovic était-il au courant -- au courant de

25 celui-ci et des autres incidents spécifiques de pillages et d'incendies des

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1 maisons, l'accusé Kubura était lui aussi au courant. Et nous allons

2 présenter un document, un ordre de l'accusé Kubura à ses subordonnés, en

3 date du 20 juin 1993, où il déclare : "qu'il y a eu des incidents

4 d'arrestation illégale de civils, de pillages de leurs biens et de leurs

5 maisons."

6 En particulier, l'accusé Kubura avait connaissance des pillages et des

7 incendies des maisons commis par ses subordonnés à Vares. Un document dont

8 nous proposerons le versement au dossier est un ordre émanant du commandant

9 du 16e Corps -- 6e Corps, groupe opérationnel 1 Visoko, du 4 novembre 1993,

10 qui demande que l'on arrête tous les actes non autorisés, que l'on retire -

11 - replie l'armée en disant qu'il s'agit d'un ordre personnel, émanant du

12 commandant suprême, et qu'il faut qu'il soit exécuté par le commandant de

13 la 7e Brigade de montagne musulmane. Conformément à cela, l'accusé Kubura,

14 et ce en date du 5 novembre 1993, a donné l'ordre à tous les membres de la

15 7e Brigade de montagne musulmane de sortir de Vares immédiatement. Il a

16 interdit leur stationnement à cet endroit sans son approbation.

17 Mais cela va plus loin que ça. Un membre de la 7e Brigade de montagne

18 musulmane, qui a pris part aux pillages de Vares, viendra déposer -- il

19 déposera, en disant qu'il n'y a pas eu d'intervention de la part des

20 commandants du 3e Corps, s'agissant de ce pillage, parce qu'eux aussi ils

21 se sont servis qu'en -- en prélevant une partie de ce butin de guerre.

22 La destruction et les dommages intentionnels affligés aux institutions, aux

23 lieux de culte, ont été commis par des subordonnés de l'accusé

24 Hadzihasanovic. Il était effectivement au courant des dommages au monastère

25 de Guca Gora, et également au sujet du dommage de l'église St Jean-Baptiste

Page 395

1 de Travnik. Et ce n'était pas par hasard que le 10 juin 1993, deux jours

2 après l'attaque principale conduite par l'armée de Bosnie-Herzégovine

3 contre Guca Gora, il a émis un ordre déclarant que les dommages et la

4 destruction des lieux de cultes, des institutions religieuses, étaient

5 interdits. Et ce n'était pas une simple coïncidence.

6 Alors, une semaine plus tard, le 17 juin 1993, l'accusé a assisté à une

7 réunion avec Siber, le commandant adjoint de l'armée de Bosnie-Herzégovine

8 et l'archevêque Puljic. Vous aurez la possibilité d'entendre la déposition

9 du témoin qui vous décrira que l'archevêque l'a informé que l'intérieur de

10 l'église de Travnik avait été détruit. Et l'accusé Hadzihasanovic a

11 répliqué en disant qu'il avait perçu des difficultés, des troubles dans la

12 région.

13 Madame, Messieurs les Juges, les deux accusés n'ont pas pris des mesures

14 nécessaires et raisonnables afin d'empêcher la commission des actes

15 criminels ou afin de punir les auteurs de ceci. Alors quelle était la

16 mesure nécessaire et raisonnable, que les deux accusés auraient dû

17 prendre ? Les mesures afin de prévenir la commission de crimes telles que

18 stipulées dans les conventions de Genève et dans le protocole additionnel

19 1, bien connu à l'époque des deux accusés. Ces dispositions comprennent le

20 fait qu'il convient d'instruire, les commandants subordonnés, les soldats

21 de leurs devoirs conformément au droit international. Le fait d'ordonner

22 aux subordonnés de respecter le droit international humanitaire et que

23 toutes les violations de celui-ci doivent être punis. Le fait d'imposer des

24 mesures de discipline suffisantes afin d'assurer le respect des

25 dispositions du droit international humanitaire, le suivi des zones de

Page 396

1 commandements subordonnés et de s'assurer que toute les mesures nécessaires

2 afin de respecter et de mettre en œuvre les dispositions du droit

3 international humanitaire sont prises. Imposer des mesures de discipline au

4 commandant qui ne mette pas en œuvre toutes les mesures nécessaires afin

5 d'observer -- de se conformer au droit international humanitaire y compris

6 la relève de ces commandants de leurs fonctions. Donner des ordres que

7 toute violation du droit international humanitaire doit s'arrêter

8 immédiatement, donc par les subordonnés et faire rapport -- faire état de

9 la violation du droit international au supérieur. Dépêcher des enquêtes des

10 supérieurs qui ont étouffé les violations du droit international

11 humanitaire et diligenter des enquêtes à l'encontre des subordonnés qui ont

12 commis des infractions du droit international humanitaire.

13 Madame, Messieurs les Juges, notre expert témoin militaire démontrera que

14 les deux accusés auraient pu prendre ces mesures, compte tenu des

15 conditions qui ont prévalu à l'époque. Il s'agit de mesures que les deux

16 accusés auraient dû prendre afin de punir les crimes commis par leurs

17 subordonnés. Et ces mesures comprennent le fait de diligenter immédiatement

18 une enquête afin de s'assurer, si oui ou non, il y a eu violation du droit

19 international humanitaire. Et si oui, d'enquêter sur les circonstances de

20 la commission du crime, les témoins pertinents et d'autres moyens de preuve

21 ainsi que l'identité des auteurs doivent être constatée. Si les auteurs

22 avaient été identifiés, il convenait de détenir ces auteurs et de les

23 remettre à des autorités judiciaires compétentes en la matière. Il fallait

24 obtenir des rapports au sujet des résultats des enquêtes et imposer des

25 mesures disciplinaires au commandant subordonné. Il fallait s'assurer, si

Page 397

1 la gravité du crime nécessitait une action disciplinaire ou une enquête au

2 pénal, si la gravité du crime nécessitait qu'une action disciplinaire soit

3 entreprise, il fallait immédiatement entreprendre des mesures afin de

4 déterminer la responsabilité en la matière des violations de la discipline

5 et prononcer des mesures disciplinaires. Et si la gravité des crimes

6 nécessitait une enquête au pénal, il fallait personnellement immédiatement

7 entreprendre toutes les mesures nécessaires afin que l'affaire en l'espèce

8 soit transférée à l'organe compétent en l'espèce.

9 Les accusés auraient pu prendre ces mesures conformément au système

10 disciplinaire de la hiérarchie militaire qui fonctionnait et qui avait été

11 mis sur pied fin 1992. Et bien, ces instruments juridiques comprenaient un

12 ordre sur la mise en œuvre des règles du droit international militaire dans

13 les forces armées de la République de Bosnie-Herzégovine. La règle de

14 service des organes militaires, de sécurité militaire, le règlement de

15 service de la police militaire et un manuel sur la discipline militaire.

16 Les règlements, les décrets avaient été promulgués afin de mettre sur pied

17 trois cours distinctes. Chacune avait sa juridiction distinctement définie.

18 A savoir, il s'agissait des cours militaires spéciales, des cours

19 disciplinaires militaires et ce qui est le plus important en l'espèce, des

20 cours militaires du district.

21 Le 3e Corps avait un système de poursuite en cas d'infractions commises par

22 les militaires pendant toute la période couverte par l'acte d'accusation.

23 L'accusé Hadzihasanovic, en tant que commandant du Corps, avait mis sur

24 pied une cour militaire -- de discipline militaire du corps d'armée début

25 1993. Il a exigé qu'il y ait des nominations de juges, du procureur et du

Page 398

1 greffe. Et il a pris ces dispositions afin que ce soit fait. De nombreux

2 soldats avaient fait l'objet de mesures disciplinaires prononcées par cette

3 cour disciplinaire du 3e Corps tout au long de la période couverte par

4 l'acte d'accusation. Et le 3e Corps avait également un département

5 juridique qui a fonctionné, et qui fournissait des conseils à l'accusé

6 Hadzihasanovic sur des questions de droit.

7 Les cours militaires du district et les bureaux du Procureur au niveau du

8 district ont fonctionné pendant tout la période couverte par l'acte

9 d'accusation et ont poursuivi de nombreux soldats du 3e Corps, à l'encontre

10 desquelles des allégations avaient été prononcées. Vous entendrez ici les

11 dépositions vous montrant que cette cour avait besoin de recevoir un

12 rapport avant de pouvoir diligenter des enquêtes et poursuivre, pour des

13 crimes allégués, donc à l'encontre des soldats du 3e Corps. Ils déposeront

14 disant que ces cours ont mené des enquêtes à l'encontre des soldats du 3e

15 Corps lorsqu'elles avaient reçu des rapports émanant du commandement et des

16 unités du 3e Corps. Cependant ils déposeront aussi qu'ils n'ont pas lancé

17 des poursuites à l'encontre d'un quelconque des soldats du 3e Corps pour

18 des crimes qualifiés de crimes de guerre commis à l'encontre de la

19 population civile ou des prisonniers de guerre.

20 Et nous démontrerons que ce système d'enquêtes au pénal et de poursuites a

21 fonctionné lorsque le 3e Corps décidait de s'en servir, de l'appliquer.

22 L'accusé l'a fait fonctionner à l'encontre des soldats du HVO. L'accusé l'a

23 également fait fonctionner à l'encontre des soldats de l'armée de Bosnie-

24 Herzégovine lorsque la sécurité de ces unités subordonnées était menacée.

25 L'accusé l'a également fait fonctionner dans des cas d'infractions

Page 399

1 disciplinaires mineures ou lorsque le niveau de préparation au combat des

2 unités sous son commandement était menacé. Mais l'accusé ne l'a pas fait

3 fonctionner lorsqu'il s'agissait d'enquêter ou de punir l'un quelconque des

4 auteurs qui avaient commis des crimes tels qu'allégués à l'acte

5 d'accusation.

6 Nous allons présenter des moyens de preuve qui ont permis à l'expert

7 militaire d'arriver à la conclusion que les deux accusés avaient les moyens

8 à leur disposition afin de respecter leurs devoirs d'un point de vue

9 juridique. L'accusé avait les moyens qui lui permettaient de lancer des

10 enquêtes. Il avait les moyens à sa disposition lui permettant de fournir au

11 bureau du Procureur de district donc militaire les rapports qui lui

12 auraient permis de lancer des poursuites. L'accusé Hadzihasanovic avait

13 l'obligation d'ordonner une investigation lorsqu'il s'agissait

14 d'allégations d'actes criminels commis par ses subordonnés. Il avait aussi

15 les moyens d'agir. Le 3e Corps avait un bataillon de police militaire

16 subordonné à l'accusé Hadzihasanovic, à son chef d'état major où il y avait

17 entre 250 et 300 hommes, qui étaient stationnés près du KP Dom de Zenica.

18 Chacune des brigades du 3e Corps, y compris bien entendu la 7e Brigade

19 musulmane de montagne, avait sa propre police militaire.

20 Nous inviterons la Chambre à citer en tant que témoin

21 le chef de la sécurité du 3e Corps, c'était l'officier le plus haut placé

22 au sein des services de sécurité militaire du 3e Corps à l'époque. Il

23 déposera que le commandant de chacune des brigades était tenu, conformément

24 au droit international et conformément au droit militaire intègre, de

25 lancer des enquêtes au sujet des infractions alléguées dont il avait été

Page 400

1 mis au courant, lorsqu'il avait des raisons de suspecter que ses

2 subordonnés avaient commis des crimes. Ceci comprenait aussi son devoir de

3 faire rapport au procureur militaire du district et le commandant du corps

4 d'armée pouvait signer des rapports comportant des allégations d'actes

5 criminels ayant été commis à l'adresse du procureur militaire du district.

6 Il déposera, qu'il ne se souvient pas si l'accusé avait signé l'un

7 quelconque des rapports demandant que le bureau du Procureur se saisisse

8 d'une affaire. Il déposera aussi, disons qu'il aurait été au courant si

9 l'un quelconque des commandants de brigade avait été puni, avait été relevé

10 du commandement de ses fonctions pour n'avoir pas puni ou empêcher qu'il y

11 ait des activités criminelles commises par les subordonnés. Il ne sait pas

12 si l'un quelconque des commandants de brigade avait été puni ou relevé de

13 ses fonctions pour cette raison pendant qu'il a été chef de la sécurité.

14 Et à l'instar de l'accusé Hadzihasanovic, l'accusé Kubura n'a pas employé

15 les moyens qui étaient à sa disposition afin de lancer des enquêtes au

16 sujet des crimes allégués et ont été commis par ses subordonnés. Et à

17 l'instar de l'accusé Hadzihasanovic, il ne sait pas servi de la police

18 militaire qui a été assignée à la 7e Brigade musulmane placée sous son

19 commandement, sous son commandement effectif. Les deux accusés n'ont pas

20 puni les crimes tels qu'allégués à l'acte d'accusation. Ce faisant et, ne

21 se servant pas d'autres moyens tels que décrit, les deux accusés n'ont pas

22 empêché la commission de crimes qui figurent à l'acte d'accusation.

23 Madame, Messieurs les Juges, à présent, je souhaite dire quelques mots au

24 sujet des moyens de preuve de l'Accusation. Nous allons démontrer notre

25 thèse par le truchement de la déposition des dizaines de témoins et de

Page 401

1 surcroît, nous allons proposer au versement plusieurs centaines de

2 documents. Nous allons présenter également des photographies et des

3 enregistrements vidéo. Les témoins qui déposeront au sujet des crimes

4 commis par les subordonnées des accusés seront des témoins oculaires des

5 meurtres, seront des victimes des crimes commis dans les centres de

6 détention. Et des témoins oculaires d'autres crimes tel qu'allégué à l'acte

7 d'accusation. Les témoins qui déposeront au sujet des éléments de la

8 responsabilité de supérieurs hiérarchiques des accusés seront, pour la

9 plupart, des témoins internationaux tels que des anciens membres de l'ECMM

10 et de la FORPRONU.

11 Le Procureur se propose aussi de citer à la barre des procureurs

12 militaires, des juges et des membres de l'équipe juridique du 3e Corps

13 d'armée. Nous allons citer à la barre l'ex-commandant en second de l'armée

14 de Bosnie-Herzégovine qui a dit à l'accusé Hadzihasanovic qu'il y avait des

15 crimes de commis par ses subordonnés. Un certain nombre de témoins qui

16 étaient des proches des collaborateurs qui étaient des soldats du 3e Corps

17 viendront compléter la liste des témoins de l'Accusation. Les documents que

18 nous nous proposons de verser au dossier en tant que pièces à conviction,

19 pour la plupart, viennent des archives de l'armée de Bosnie-Herzégovine et

20 de nombreux ont été signés par l'accusé.

21 Pour conclure, les éléments de preuve de l'Accusation prouveront la

22 culpabilité des deux accusés. Madame, Messieurs les Juges, j'en ai terminé

23 avec ma déclaration liminaire.

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Procureur. Conformément à

25 l'Article 84 du règlement de procédures et de preuves, la partie, donc la

Page 402

1 Défense, peut s'il le souhaite faire une déclaration liminaire. Donc, je

2 pose donc la question à la Défense de M. Hadzihasanovic.

3 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, tout comme nous

4 l'avons déjà dit, la Défense du général Hadzihasanovic prononcera sa

5 déclaration liminaire avant de présenter ses moyens de preuve.

6 Par conséquent, il n'y a aura pas de déclaration liminaire, pour notre part

7 aujourd'hui. Je confirme également que je me suis renseignée au sujet de la

8 question que vous aviez posée à mon client, à savoir, mon client maintient

9 sa position. Il ne souhaite pas exercer son droit, conformément à l'Article

10 84 bis.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie, Maître.

12 Pour la Défense de M. Kubura ?

13 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, la Défense du

14 colonel Kubura partage la position de la Défense du général Hadzihasanovic

15 sur les deux points, à savoir, la déclaration liminaire et l'Article 84

16 bis. En d'autres termes, l'accusé qui est notre client, ne prendra pas la

17 parole aujourd'hui.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie. Bien, donc la Chambre constate que

19 les parties ne feront pas de déclarations liminaires et que les accusés

20 renoncent donc au droit qu'ils détiennent de l'Article 84 bis.

21 De ce fait, nous pouvons donc commencer la présentation des moyens de

22 preuve. Et donc, l'Accusation avait prévu de faire venir donc, un premier

23 témoin.

24 M. WITHOPF : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. Le

25 Procureur propose que l'on procède à une pause d'abord. Mais avant la

Page 403

1 pause, je souhaite profiter de l'occasion pour vous présenter les membres

2 de l'équipe du bureau du Procureur, mise à part moi-même, notre équipe est

3 constituée de trois juristes d'expérience, M. David Re, un juriste

4 d'Australie, ensuite, M. Daryl Mundis des Etats-Unis et M. Chester Stamp se

5 joindra à l'équipe du bureau du Procureur très prochainement. Il est

6 juriste de la Jamaïque.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Procureur.

8 Pour la présentation donc de l'équipe de l'Accusation. Il est environ donc

9 midi, il m'apparaît donc préférable de faire une pause qui durera donc de

10 11 heures 55 à 12 heures 25 et nous reprendrons ensuite, donc l'audience

11 par le témoin et nous irons donc jusqu'à la fin, donc, de cette audience

12 sans pause ultérieure.

13 --- L'audience est suspendue à 11 heures 56.

14 --- L'audience est reprise à 12 heures 26.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : [interprétation] J'aimerais demander aux accusés

16 s'ils entendent bien l'interprète ? Vous entendez l'interprète ?

17 L'ACCUSÉ HADZIHASANOVIC : [interprétation] J'entends bien, Monsieur le

18 Président.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, nous allons donc commencer la présentation des

20 témoins de l'Accusation. Il est midi et demi. Nous avons jusqu'à 13 heures

21 45. Donc, l'Accusation pourrait procéder à son interrogatoire jusqu'à 13

22 heures 45, et puis de là, nous ferions le contre-interrogatoire puisque ce

23 témoin est prévu sur deux jours. C'est bien ça ?

24 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, effectivement, le

25 Procureur considère que ce témoin sera ici pour les deux jours,

Page 404

1 effectivement.

2 Le Procureur cite à la barre, Zeljko Cvijanovic.

3 Monsieur le Président, en attendant que le témoin n'arrive, je souhaite

4 informer la Chambre que ce témoin déposera surtout au sujet du meurtre

5 allégué de Zvonko Rajic, à Dusina.

6 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

7 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, est-ce que vous entendez ?

9 Un instant. Bien.

10 Est-ce que vous pourrez donner votre nom, prénom et date de naissance.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis Zeljko Cvijanovic, né le 28 juillet

12 1967, dans la municipalité de Zenica.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Et quel est votre domicile actuel ?

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je réside à Busovaca. Je suis chauffeur de

15 formation, et actuellement, j'ai le statut d'invalide à 80 %, donc je ne

16 travaille pas.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous allez lire la déclaration du témoin que M.

18 l'Huissier vous présente.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

20 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

21 LE TÉMOIN : ZELJKO CVIJANOVIC [Assermenté]

22 [Le témoin répond par l'interprète]

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie. Vous pouvez vous asseoir.

24 Bien. Je donne donc la parole à l'Accusation pour l'interrogatoire.

25 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

Page 405

1 Interrogatoire principal par M. Mundis :

2 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, vous nous avez dit que votre

3 occupation actuelle est celle du chauffeur, même si vous êtes invalidé. Et

4 avant la guerre, quel était votre métier ?

5 R. Pareil, avant la guerre, je travaillais comme chauffeur. J'avais un

6 camion privé, et il est resté devant ma maison, mais il a été mis à feu et

7 il reste tel quel devant ma maison que j'ai quittée.

8 Q. Monsieur le Témoin, avant la guerre en Bosnie centrale, est-ce que vous

9 avez fait votre service militaire obligatoire au sein de la JNA ?

10 R. Oui.

11 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire quand, où et quels étaient vos devoirs

12 militaires ?

13 R. J'ai fais mon service militaire au sein de l'armée populaire yougoslave

14 à Bitola. J'ai été recruté au sein de l'infanterie. Après ma formation,

15 j'ai été à Bitola et j'ai été le commandant du peloton médical. Et j'étais

16 donc chargé du centre médical à Bitola. Il s'agissait donc de la même ville

17 que celle dans laquelle j'avais fait mon service jusqu'alors.

18 Q. Pendant quelles années avez-vous fait votre service au sein de la JNA ?

19 R. C'était en 1977 -- 1987.

20 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous pourriez dire aux Juges où vous

21 avez vécu après le mois de janvier 1992 ?

22 R. Je vivais à Lasva. C'est là que je suis né aussi. Et j'y suis resté

23 jusqu'à notre arrestation et jusqu'à ce que l'on ne nous ait expulsés de

24 là. J'y ai vécu avec ma famille.

25 Q. Monsieur le Témoin, dans quelle municipalité se trouve le village de

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1 Lasva ?

2 R. Le village de Lasva, où se trouvait ma maison et où je vivais, faisait

3 partie de la municipalité de Zenica. Cependant, il s'agit d'un endroit où

4 se rencontrent les municipalités de Zenica, de Kakanj et de Busovaca, donc

5 ces trois municipalités-là. Et ma maison, la maison dans laquelle je

6 vivais, se trouvait sur le territoire de la municipalité de Zenica.

7 Q. Est-ce que vous pourriez décrire brièvement, à la Chambre de première

8 instance, les conditions qui régnaient au village de Lasva en 1992, en ce

9 qui concerne l'appartenance ethnique de la population de cette ville.

10 R. S'agissant de la population croate, elle s'élevait à environ 56 foyers.

11 En ce qui concerne les foyers serbes, ils étaient un peu plus nombreux,

12 mais la population majoritaire était musulmane.

13 Q. Vous considérez que vous êtes membre de quel groupe ethnique vous-

14 même ?

15 R. Mon père est Serbe et ma mère est Croate. Je préfère ne pas choisir.

16 J'aime mes deux parents. Ils ont le mérite de m'avoir donné la vie.

17 Q. Est-ce qu'à un moment donné, en 1992, les tensions interethniques à

18 Lasva se sont intensifiées ?

19 R. Oui, effectivement. La situation est devenue extrêmement tendue. Tout

20 d'abord, à l'époque, des personnes appartenant au groupe ethnique serbe ont

21 été harcelées à Lasva. Et à ce moment-là, ils se sont adressés aux Croates

22 pour recevoir de l'aide. Et immédiatement, ceci a provoqué des tensions

23 entre les Croates et les Musulmans. Et bien sûr, il existait des tensions à

24 l'encontre des Serbes également puisque des lignes de front avaient déjà

25 été établies, le long desquelles les Serbes faisaient la guerre contre les

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1 Musulmans.

2 Q. Est-ce qu'à un moment donné, en 1992, vous êtes devenu membre d'une

3 organisation militaire, Monsieur le Témoin ?

4 R. Oui, effectivement. Etant donné que j'étais tenu de faire mon service

5 militaire, la loi m'obligeait, la loi qui s'appliquait en ex-Yougoslavie à

6 l'époque, m'obligeait de répondre à la mobilisation et de m'acquitter de

7 mes devoirs civils. A l'époque, je pouvais choisir puisqu'il existait

8 l'armée de Bosnie-Herzégovine et le conseil de la Défense croate. Il

9 s'agissait de deux forces armées légales, donc on pouvait opter pour une

10 pour l'autre librement. Et moi, bien sûr, j'ai opté pour le conseil croate

11 -- conseil de la Défense croate.

12 Q. Et le conseil de la Défense croate est connu sous l'abréviation du HVO.

13 Est-ce exact ?

14 R. Oui, c'est exact.

15 Q. Est-ce que vous vous souvenez, approximativement, en quel mois de 1992

16 vous avez rejoint les rangs du HVO ?

17 R. Je pense que c'était autour du début du mois d'avril.

18 Q. Est-ce que vous pourriez décrire à la Chambre de première instance

19 l'interaction entre le HVO et l'armée de Bosnie-Herzégovine à Lasva et aux

20 alentours, au cours de l'année 1992.

21 R. Et bien les rapports entre l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO à

22 l'époque, donc tout au début paraissaient normaux. On travaille ensemble,

23 il y a eu plus de tensions mais la population avait peur. Donc le soir, on

24 avait des patrouilles constituées de deux soldats croates du HVO et de

25 soldats musulmans appartenant à la Défense territoriale. C'est ainsi que ça

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1 s'appelait à l'époque et c'est ainsi que les choses fonctionnaient au

2 début.

3 Q. Monsieur le Témoin, vous avez dit qu'il y avait de plus en plus de

4 tensions et que la population avait peur le soir. De quoi avait-elle peur,

5 la population, à ce moment-là ?

6 R. Oui, comme je l'ai dit, les lignes de front avaient déjà été établies

7 contre le camp serbe. Et à ce moment-là, les citoyens serbes ont été

8 expulsés, malmenés, tués, torturés, et bien sûr ceux qui ont survécu ce

9 calvaire, venaient chercher de l'aide et ils se sont adressés au commandant

10 de l'époque, Zvonko Rajic, qui était en charge du peloton dont nous

11 faisions partie. Et bien évidemment, la partie tierce a interprété cela

12 comme soutien donné aux Serbes et c'est ce qui a provoqué les tensions qui

13 ont commencé à monter à partir de ce moment-là. Par conséquent, la

14 coopération entre les Croates et les Musulmans est devenue de plus en plus

15 difficile par la suite.

16 Q. Monsieur le Témoin, vous avez mentionné Zvonko Rajic en tant que chef

17 du peloton. Est-ce que vous pourriez nous dire quelles l'unité dont Zvonko

18 Rajic était en charge, qu'il commandait ?

19 R. Zvonko Rajic était chargé d'un groupe des locaux de Lasva. Il

20 s'agissait d'une unité indépendante, ils s'étaient organisés eux-mêmes, les

21 habitants de Lasva, ils étaient minoritaires et lui, il était mobilisé au

22 sein du HVO. Le commandement, le quartier général était à Busovaca, et M.

23 Zvonko était en charge des hommes aptes à combattre à Lasva.

24 Q. Est-ce que cette unité qu'il commandait, était exclusivement une unité

25 du HVO ?

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1 R. Oui, il s'agissait exclusivement d'une unité du HVO, rien de plus.

2 Q. Est-ce qu'à un moment donné des combats ont éclaté à Lasva ?

3 R. Je ne comprends pas la question. Est-ce que vous pourriez me la

4 répéter ?

5 Q. Est-ce qu'à un moment donné des combats ont éclaté dans le village de

6 Lasva ou aux alentours ?

7 R. Vous voulez dire entre la population croate et musulmane ?

8 Q. Oui, entre la population croate et musulmane à Lasva ?

9 R. Oui, effectivement c'est ce qui s'est produit le 26 janvier dans la

10 matinée vers 5 heures et demie du matin.

11 Q. Vous parlez de quelle année lorsque vous dites au mois de janvier ?

12 R. 1993.

13 Q. Est-ce que vous vous souvenez où vous étiez tôt le matin du 26 janvier

14 1993 ?

15 R. Oui, j'étais dans mon lit, je dormais.

16 Q. Comment avez-vous été réveillé ce matin-là ?

17 R. J'ai été réveillé par ma mère qui était prise de panique parce que des

18 tirs qui retentissaient à l'intérieur de la maison l'avaient réveillée.

19 Q. Et qu'avez-vous fait après que votre mère vous a réveillé ?

20 R. Je me suis levé, je suis sorti, j'ai constaté que l'on tirait sur la

21 maison, des collines aux alentours et encore aujourd'hui on voit des traces

22 sur les murs. Nous étions pris de panique, nous ne savions pas quoi faire.

23 Mon père, ma mère, mon frère étaient dans la maison, tous. Et on se

24 demandait ce qu'on devait faire.

25 Q. Est-ce que vous êtes allé quelque part ce matin-là, Monsieur le Témoin,

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1 tôt dans la matinée ?

2 R. Oui, au bout de quelques minutes, un cousin est venu. Auparavant il

3 avait vu Zvonko Rajic et il nous a dit qu'on avait été attaqué et que nous

4 devions tous nous réunir au billard, à la maison de Kristo. C'est une

5 maison dans laquelle on se regroupait d'habitude, Srecko Kristo.

6 Q. Est-ce que cette pièce, où il y avait le billard, était connue

7 également comme café ou endroit où vous vous regroupiez pour prendre votre

8 café ?

9 R. Oui, tous les locaux connaissaient cet endroit. Il s'agissait

10 simplement d'un café ordinaire de village et on se réunissait tous là-bas.

11 C'était tenu par un voisin à nous et tout le monde le savait.

12 Q. Lorsque vous êtes arrivé à cette pièce avec des billards ou à ce café,

13 est-ce que d'autres personnes s'y trouvaient déjà ?

14 R. Oui. Lorsque moi et mon frère nous y sommes arrivés, nous avons trouvé

15 déjà sur place nos voisins et nos amis qui étaient eux aussi pris de

16 panique et complètement désabusés.

17 Q. Est-ce que ces amis et ces voisins étaient tous membres de l'unité

18 locale du HVO ?

19 R. Oui, à ce moment-là lorsque j'y suis arrivé.

20 Q. Est-ce que vous vous souvenez des vêtements que vous portiez et si vous

21 étiez armé à ce moment-là ?

22 R. Oui, je portais des vêtements que j'avais à la maison plutôt j'ai mis

23 mon pantalon de camouflage et mon blouson de camouflage -- ma chemise de

24 camouflage et un blouson civil que je portais à l'époque et puis j'avais

25 également une kalachnikov qui m'avait été confiée puisque nous avions reçu

Page 411

1 les ordres de Zvonko selon lesquels il fallait qu'on s'y regroupe tous.

2 Q. Et les autres soldats du HVO, qui étaient sur place ce matin-là, est-ce

3 qu'ils étaient vêtus de manière semblable et est-ce qu'ils étaient armés de

4 manière semblable ?

5 R. Oui, en fonction des armes qui étaient confiées aux personnes

6 différentes, ils les ont apportées avec eux.

7 Q. Est-ce que Zvonko Rajic était présent lorsque vous êtes arrivés ?

8 R. Non, pas au moment où je suis arrivé mais au bout de quelques minutes,

9 il est arrivé.

10 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous vous souvenez approximativement à

11 quelle heure vous êtes arrivé au café ou à la pièce avec des billards ?

12 R. C'était environ 6 heures moins le quart ou peut-être vers 6 heures.

13 Q. Le groupe des soldats qui était au café ce matin-là, qu'a-t-il fait ?

14 Qu'avez-vous fait ce matin-là ?

15 R. Non. Nous étions pris de court, affolés, pris de paniques, bien sûr, et

16 puis une incertitude totale régnait, on ne sait pas quoi faire, Rajic

17 essayé de contacter le commandement à Busovaca. Il avait un Motorola mais

18 il était difficile d'entrer en contact avec eux.

19 Q. Zvonko Rajic, a-t-il donné les ordres aux soldats regroupés dans ce

20 café d'aller ou que ce soit ce matin-là ?

21 R. Oui. Il a reçu l'information selon laquelle, il y avait des combats qui

22 se déroulaient sur la colline de Dusina et nous avions effectivement

23 entendu des tirs et puis il a entendu dire qu'il y avait de nombreux

24 blessés et tués. Il nous a demandé de former un groupe de plusieurs

25 volontaires pour aller au haut et voir ce qui se passait.

Page 412

1 Q. Est-ce que vous pourriez expliquer dans la Chambre quelle était la

2 distance entre Lasva et Dusina ?

3 R. Lasva l'endroit où se trouve nos maisons c'est près de la gare c'est

4 dans une vallée, alors que Dusina est la colline, est à une altitude

5 supérieur donc lorsqu'ils sont en haut ils ont une très bonne vue sur nous.

6 Et quant à la distance, elle est d'environ trois kilomètres entre nous et

7 Dusina et Lasva.

8 Q. Lorsque vous dites trois kilomètres, ce serait trois kilomètres en

9 prenant la route ou à vol d'oiseau.

10 R. Oui. En prenant la route. Si l'on prend la route la distance est

11 d'environ trois kilomètres et à vol d'oiseaux il s'agit d'une distance bien

12 moindre et on peut voir très bien les maisons, on peut même voir les gens

13 qui marchent devant les maisons.

14 Q. Quelle est la distance approximative entre Lasva et Dusina à vol

15 d'oiseaux ?

16 R. Je ne saurais vous dire exactement quelle est la distance à vol

17 d'oiseaux mais je peux vous dire qu'on pourrait voir les gens travaillés

18 dans les champs devant leur maison et ce genre de choses.

19 Q. Monsieur le Témoin, vous avez dit que Zvonko Rajic a demandé que deux

20 volontaires aillent à Dusina pour voir ce qui se passait. Est-ce

21 qu'effectivement deux volontaires se sont rendus à Dusina ce matin-là ?

22 R. Oui. C'est exact. Zvonko a demandé des volontaires mais bien sûr on

23 était affolé, on était pris de paniques et on hésitait. Pendant qu'on

24 hésitait personne n'avait suffisamment de courage pour dire c'est moi ou

25 c'est moi. Donc on s'est dit tout simplement, on va tous y aller et le

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1 même sort sera réservé à tous. Entre temps, lorsque nous avons pris cette

2 décision nous avons décidé de partir et lorsque nous avons -- nous sommes

3 sortis du café, on a ouvert des tirs contre nous. Donc nous sommes revenus

4 à l'intérieur, nous étions pris de court, nous ne savions pas quoi faire.

5 Zvonko a dit qu'il fallait absolument qu'on trouve un moyen de sortir, on

6 n'est ressorti encore une fois, on a ouvert les tirs [sic] contre nous. A

7 ce moment-là, on a remarqué deux soldats armés et on leur a demandé

8 d'entrer avec nous.

9 Q. Excusez-moi, je vais vous interrompre. Vous avez dit que vous avez vu

10 deux soldats armés en équipement de combats. Est-ce que ces deux soldats

11 qui étaient armés étaient également membres du HVO ?

12 R. Non. Ils étaient membres de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Un monsieur

13 était Visoko de confession musulmane et l'autre il était de confession

14 musulmane également, il était de Nemila ils portaient des uniformes de

15 camouflage, ils étaient armés, ils avaient des pleins équipements de guerre

16 et puis ils portaient des bandes vertes avec des inscriptions arables. L'un

17 portait une bande autour de sa tête et l'autre autour de son bras droit.

18 Q. Monsieur le Témoin, les soldats qui tiraient sur votre unité, l'unité

19 du HVO, est-ce qu'ils étaient des soldats de l'armée de Bosnie-

20 Herzégovine ?

21 R. Oui. Ils étaient sur les collines aux alentours en face de nos maisons.

22 Puisque comme je vous le dis, nous étions dans une vallée et nos maisons

23 étaient l'une à côté de l'autre, les maisons croates étaient regroupées

24 aussi.

25 Q. Au moment où vous avez vu ces deux soldats musulmans armés qui

Page 414

1 s'approchaient par la route, est-ce que quelqu'un de votre unité a tiré sur

2 ces hommes ?

3 R. Non. Nous les avons appelés pour qu'ils viennent à l'intérieur, c'est

4 ce qu'ils ont fait. Ils ont entré avec nous dans ce café où nous nous

5 trouvions. Lorsqu'ils sont entrés armés jusqu'aux dents là aussi les gens

6 étaient vraiment terrifiés. En effet, nous avions à la manche ou à

7 l'uniforme l'insigne du HVO. Nous avons compris qu'eux appartenaient à une

8 autre armée et que quelques parts ils s'étaient perdus parmi nous.

9 Q. Monsieur le Témoin, savez-vous pourquoi votre unité n'a pas ouvert le

10 feu sur ces deux soldats musulmans ?

11 R. Ils n'avaient pas de raison de le faire. Ces hommes étaient sur la

12 route, nous étions vraiment perplexes, on ne savait pas ce qui se passait.

13 Nous savions que la veille il y avait eu des combats autour de Busovaca

14 entre les forces croates et les forces musulmanes mais nous, nous étions

15 neutres, nous ne nous sommes pas du tout mêlés de ça, c'était l'ordre

16 donnée par Zvonko. Il ne permettait pas la moindre exaction. Pourquoi dès

17 lors aurions-nous tiré ? Parce que ces soldats aussi ils étaient perdus et

18 ils sont entrés avec nous à l'intérieur, donc pour se protéger parce qu'eux

19 aussi étaient ébranlés. Il ne servait rien de tirer sur eux.

20 Q. Mise à part cette inscription en écriture arabe, est-ce que vous auriez

21 remarqué d'autres insignes ou écussons arborés par ces hommes ?

22 R. Ces deux soldats, non, j'ai rien vu de particulier. Tout ce que j'ai vu

23 c'était le ruban vert qu'ils avaient autour de la tête avec ces mots en

24 écriture arabe. On s'est assis, on a parlé dans le café.

25 Q. De quoi leur avez-vous parlé ?

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1 R. Et bien, pousser par la peur ou la curiosité, nous leur avons demandé

2 ce qui passait, il ne semblait pas savoir. Ils étaient un peu perdus, parce

3 qu'après tout, c'étaient des soldats que nous étions censés attaquer. Et

4 d'abord, ils n'ont rien cru parce qu'eux aussi étaient sous le coup de ce

5 qui s'était passé. Ils s'attendaient à ce que nous opposions une

6 résistance. Ils s'attendaient à ce qu'il y ait un affrontement ou à ce

7 qu'ils soient victimes de mauvais traitements. C'était leur impression. On

8 voyait bien qu'ils étaient tout à fait stressés. Un certain temps s'était

9 écoulé, nous avions commencé à parler. Nous leur avions demandé ce qui se

10 passait, et ils ne comprenaient pas ce qui se passait. Ils nous ont demandé

11 combien nous étions, combien d'habitants il y avait, quelles étaient nos

12 conditions de vie. Nous leur avons répondu, nous leur avons dit combien il

13 y avait d'habitants. Et il leur était impossible de comprendre ce qui se

14 passait. On leur avait dit que nous étions vraiment des effectifs très

15 nombreux, dotés de chars, que nous étions une espèce de détachement ou

16 d'unité spéciale, des choses sans queue ni tête.

17 Q. Est-ce qu'au cours de cet entretien, ils vous ont donné une idée

18 quelconque s'agissant de l'importance numérique de leurs effectifs ?

19 R. Oui. Ils se demandaient eux-mêmes pourquoi il fallait autant de soldats

20 alors qu'il n'y avait que 50 ou 60 foyers. Eux aussi étaient un peu choqués

21 par la chose. Ils étaient incrédules, difficile pour eux de comprendre que

22 les choses se déroulaient comme elles étaient en train de se dérouler.

23 Q. Mais est-ce que vous vous souvenez du nombre approximatif de soldats

24 quand ils se parlaient entre eux ? Je veux dire le nombre de soldats qu'ils

25 avaient eux ?

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1 R. Ils n'ont pas donné de chiffre exact, non. Mais ils ont mentionné des

2 unités, et ils disaient, mais pourquoi faut-il autant d'unités de la

3 brigade ? C'était assez incroyable. C'est ce genre de choses qu'ils ont

4 dit.

5 Q. Mais vous souvenez-vous si ces hommes ont donné une indication des

6 brigades -- ou de la brigade concernée ?

7 R. Oui, ils ont parlé de la 303e de Montagne; ils ont parlé aussi d'une

8 brigade de Visoko; ils ont parlé de la 7e Brigade musulmane; et ils nous

9 ont parlé de la Défense territoriale locale, puis de la Ligue patriotique

10 et de l'armée régulière de Bosnie-Herzégovine.

11 Q. Vous venez d'énumérer certaines unités. Est-ce qu'elles sont toutes les

12 unités de l'armée de Bosnie-Herzégovine ?

13 R. Oui. Quant à savoir, si c'étaient des unités spéciales ou autres, je ne

14 sais pas, mais elles étaient sous les ordres de l'armée de Bosnie-

15 Herzégovine puisqu'elles combattaient avec celle-ci, c'était naturel.

16 Q. Est-ce qu'à un moment donné l'unité du HVO a quitté ce café où elle se

17 trouvait au cours de la matinée du 26 janvier 1993 ?

18 R. Oui.

19 Q. Savez-vous à quel moment, approximativement, cette unité est partie et

20 quelle fût sa destination ?

21 R. Nous avons eu cet entretien. Je ne sais pas combien de temps il a duré.

22 En tout cas, nous nous sommes mis en route. Nous étions une dizaine de

23 soldats à peu près, et nous sommes allés en direction de Vranjaca, en

24 passant par chez nous d'abord. Nous sommes donc montés en direction de

25 Vranjaca de Brdo.

Page 417

1 Q. Par rapport à Dusina, où se trouve le village de Brdo ?

2 R. En fait, ce village fait partie de Dusina. Avant d'arriver à Dusina, il

3 y a un hameau, et c'est là que se trouvaient plusieurs foyers croates. Le

4 reste, 99 % des maisons ou des foyers, c'étaient des Musulmans.

5 Q. Pourriez-vous nous dire comment s'est déplacée votre unité alors que

6 vous montiez vers Brdo ?

7 R. Lorsque nous nous sommes mis en route, nous avons longé nos maisons,

8 puis nous, nous sommes montés. C'était surtout un territoire croate, et

9 entre les maisons, ils ont tiré depuis les collines environnantes sur nous.

10 Il y avait Gornja Visnjica, Korvacevo [phon]. C'est de là qu'ils ont tiré

11 sur nous. Nous avons dû passer d'une maison à l'autre. Là il y avait une

12 espèce de petit bosquet. Nous sommes passés par là et nous sommes montés

13 par là.

14 Q. Vous dites, ils ont tiré sur vous, mais savez-vous quels sont les

15 effectifs militaires qui ont tiré sur vous ?

16 R. C'est l'armée de Bosnie-Herzégovine et la Défense territoriale qui a

17 tiré sur nous. C'est eux qui se trouvaient dans ces environs-là, pas nous.

18 Q. Poursuivez, Monsieur. Dites-nous ce qui s'est passé au moment où vous

19 êtes passés -- arrivés à la station du transmetteur.

20 R. Nous y sommes arrivés. On était là, dans une vallée très large. Le

21 terrain était dégagé tout autour, et on pouvait voir depuis Dusina et

22 depuis les collines environnantes. Ils ont tiré sur nous de cette zone-là

23 aussi, à l'aide d'artillerie lourde et d'armes légères également. Nous

24 avons dû essayer de nous protéger en contrebas d'une petite colline, en

25 rampant, et nous avons réussi à parvenir au village de Brdo même en passant

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1 par Radakove Kuce -- sur plan de Radakove Kuce.

2 Q. Connaissez-vous un certain Drago Rados ?

3 R. Oui.

4 Q. Qui est cet homme ? Où habite-t-il ?

5 R. Il habitait à Brdo, sur les hauteurs, et c'est lui qui commandait à

6 Dusina le service, une section militaire. Il commandait les hommes en âge

7 de porter les armes là.

8 Q. Donc c'était le commandant de cette section du HVO à Dusina ?

9 R. Oui.

10 Q. Savez-vous s'il y a eu une liaison, une communication quelconque, entre

11 Zvonko Rajic et Drago Rados, le matin du 26 janvier 1993 ?

12 R. Je pense que oui parce qu'il avait entendu Zvonko. Il avait un émetteur

13 transmetteur -- un émetteur récepteur, et il a dit qu'ils avaient attaqué,

14 qu'il y avait des tués et des blessés. Il a demandé de l'aide. Il a demandé

15 de l'aide à Zvonko. Il lui a demandé ce qu'il fallait faire.

16 Q. L'unité du HVO dont vous faisiez partie et qui se trouvait sous le

17 commandement de Zvonko Rajic, est-elle allée à la maison de Drago Rados à

18 Brdo ?

19 R. Oui, c'est exact. Donc nous étions un peu en sur plan de la maison. Il

20 y a quelques pruniers, et c'est juste à côté que se trouve la maison de

21 Perica Rados. Ce sont des parents. Il y avait, derrière chez lui, des

22 pruniers, mais on n'a pas pu passer parce qu'on a ouvert le feu sur nous.

23 De l'autre côté de la rue, il y avait des maisons musulmanes, et c'est là

24 que se trouvaient les positions de l'armée de Bosnie-Herzégovine, et c'est

25 de là qu'ils ont tiré sur nous.

Page 419

1 Q. Est-ce que vous avez réussi, vous et votre unité, à établir un contact

2 physique avec Drago Rados ce matin-là ?

3 R. Oui. Nous avons commencé à monter et, dès que nous l'avons fait, ils

4 ont tiré sur nous. Nous avons donc dû rebrousser chemin. Il avait une

5 petite hauteur et, en fait, nous nous sommes cachés derrière le verger de

6 prunier. On a été pris de panique, nous ne savions par trop ce qu'il

7 fallait faire parce que tout ceci était très surprenant pour nous, on ne

8 s'y attendait pas. On ne savait pas trop quoi faire. Zvonko a essayé de

9 contacter le commandement à l'aide de Motorola à Busovaca et il a été très

10 difficile d'établir une liaison.

11 Q. Est-ce qu'un moment donné, ce matin-là, Drago Rados a rejoint votre

12 unité ?

13 R. Oui, nous avons de nouveau essayé de nous mettre en route, mais, cette

14 fois-là, on a décidé de tirer sur eux et pour essayer de parvenir jusqu'à

15 la maison de Perica Rados pour prêter secours à ces hommes qui s'y

16 trouvaient, pour qu'ils réussissent à sortir et pour savoir ce qui se

17 passait en général. Nous sommes parvenus, puis Mijo Ljubicic est arrivé

18 avec Perica et Drago Rados.

19 Q. Vous souvenez-vous de l'heure approximative qui pouvait être ce matin-

20 là lorsque vous avez vu Drago Rados ?

21 R. C'était au cours de la matinée, assez tôt, je ne peux pas vous dire

22 exactement à quelle heure il était. On n'a pas pris la peine de regarder

23 l'heure, mais il était peut-être huit ou neuf du matin.

24 Q. Est-ce que, plus tard au cours de la journée, vous avez vu une colonne

25 de civils depuis l'endroit où vous vous trouviez à Brdo ?

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1 R. Oui, Drago Rados est arrivé et l'autre Perica, mais ils étaient un peu

2 perdu. Et Mijo Ljubicic a dit ceci : "Mon père a été tué, mort devant la

3 maison." Et il a ajouté d'avoir vu un vieillard répondant lui aussi au nom

4 de Rados, on l'appelait Cica, sans connaître son nom de famille, et lui

5 aussi était par terre à l'endroit où il avait été tué. C'est ce que Mijo

6 nous a dit.

7 Q. J'aimerais tirer au clair une de vos réponses, lorsque Mijo Ljubicic a

8 mentionné un père qui avait été tué, est-ce que c'était son père qui avait

9 été tué ou est-ce que c'était votre père à vous ?

10 R. C'était son père à lui parce qu'ils s'étaient trouvés ensemble dans la

11 maison et, au moment où on avait commencé à tirer, son père était sorti

12 encourant de la maison et c'est comme ça qu'il avait été tué, M. Mijo

13 Ljubicic a sauté par la fenêtre pour sortir, il a laissé sur place son père

14 et il s'est mis à courir en direction de la maison de Perica.

15 Q. Pourriez-vous dire aux Juges comment se composait ce groupe de civils

16 que vous avez vu ce jour-là depuis l'endroit où vous étiez à Brdo ?

17 R. On a parlé entre nous, on se demandait ce qu'il fallait faire et Zvonko

18 a essayé d'établir la communication avec quelqu'un, mais, en général, on

19 était pris de peur et un moment donné, depuis le village de Dusina, on

20 regardait la vallée et nous avons vu un groupe de civils qui avaient à sa

21 tête des soldats armés.

22 Q. Est-ce que ce groupe suivit la route ?

23 R. Dans la route, il allait plutôt dans le sens opposé. Ces gens

24 s'approchaient de nous, ils franchissaient un pré, c'est une région de pré,

25 de prairies, de champs.

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1 Q. Vous souvenez-vous de nombre de personne, je demande un chiffre

2 approximatif. Il y avait combien de civils dans ce groupe ?

3 R. Il y avait des gens, des membres de notre famille, des femmes, des

4 enfants, des personnes âgées qui avaient survécues au calvaire de Dusina.

5 Q. Mais ces gens venaient de quel village ou de quelle ville ?

6 R. En fait, c'étaient nos voisins, pris par la peur, le soir ils étaient

7 rassemblés dans une maison, se disant qu'ils étaient davantage en sécurité

8 s'ils étaient ensemble. Ils sont allés à la maison de Marko Rajic à Dusina.

9 En fait, ils étaient dans la cave de la maison, ils se sont dits qu'ils

10 étaient ensemble, et bien, rien ne leur arriveraient.

11 Q. Donc ils venaient de Dusina où de la direction de Dusina vers l'endroit

12 où vous trouviez vous à Brdo. C'est bien cela ?

13 R. Oui.

14 Q. Pourriez-vous nous dire, de façon approximative, combien il y avait de

15 civils dans ce groupe ?

16 R. Grosso modo une vingtaine, peut-être 25.

17 Q. Pourriez-vous estimer la distance qui vous séparait ? Quand je dis

18 "vous", je parle de votre Unité du HVO, vous de ces personnes ?

19 R. 150, 200 mètres, c'était un espace dégagé, en fait, il se trouvait dans

20 un pré. Et les soldats armés se trouvaient là aussi, ils les suivaient.

21 Q. Ce groupe c'est donc approché de la position que vous occupiez à Brdo.

22 Que leur est-il arrivé à ces gens ?

23 R. Ils se sont arrêtés derrière une vieille maison là aussi, il y a un

24 petit vergé de prunier. Je pense qu'il y avait un certain Pasko, un

25 habitant de Brdo. Ces gens se trouvaient derrière sa maison, et M. Edin

Page 422

1 Hakanovic, s'est adressé à eux.

2 Q. Qui est Edin Hakanovic? Est-ce que vous connaissiez cet homme avant la

3 guerre ?

4 R. Oui. Il habitait à Brdo, même s'il était originaire de Lasva. Je le

5 connais parce qu'on a grandi ensemble. Avant la guerre, c'était un

6 policier, il travaillait à Visoko. Il a suivi un cours, c'était un

7 ingénieur civil puis il a suivi une formation et il a trouvé du travail

8 comme policier.

9 Q. De l'endroit où vous étiez à Brdo. Vous est-il possible d'entendre ce

10 que disait Edin Hakanovic à ce groupe de civils ?

11 R. Je ne comprends pas votre question. Est-ce que vous pourriez la

12 répéter ?

13 Q. Il y a quelques instants, vous nous avez dit que ce groupe de civils,

14 c'était arrêté à un vergé de prunier et que Edin Hakanovic s'était adressé

15 à eux. Depuis l'endroit, depuis votre position à Brdo, pourriez-vous

16 entendre ce qui se disait ?

17 R. On n'avait pas compris. Il ne s'est pas adressé aux civils, il appelait

18 Zvonko.

19 Q. Ah, je vois. Donc Edin Hakanovic s'adressait à Zvonko Rajic qui lui se

20 trouvait avec vous et l'Unité du HVO à Brdo. C'est cela ?

21 R. Oui, on était couché l'un à côté de l'autre.

22 Q. Edin Hakanovic qu'a-t-il dit à Zvonko Rajic ?

23 R. Il lui a dit de sortir et il lui a dit que les hommes devaient se

24 rendre. Et que s'il le faisait, il arrêterait de tirer. Il a demandé ou il

25 a dit à son -- qu'il fallait négocier.

Page 423

1 Q. Quelle était la distance séparant Edin Hakanovic au moment où il tenait

2 ces propos et Zvonko Rajic ?

3 R. Je dirais une centaine de mètres parce qu'il était possible d'entendre

4 cet homme qui parlait à haute voix.

5 Q. Et est-ce que Zvonko Rajic, sur ces entrefaites a accepté de négocier

6 avec Edin Hakanovic ?

7 R. Oui. Zvonko a bien essayé de négocier, il a demandé à Edin ce qui se

8 passait, ce qu'ils étaient en train de faire. M. Hakanovic a dit, qu'il

9 allait envoyer la femme de Drago Rados pour qu'elle nous donne des

10 explications afin qu'il n'ait pas à hurler ces explications.

11 Q. Est-ce que la femme de Drago Rados s'est approchée de votre unité du

12 HVO ?

13 R. Oui. Ils l'ont autorisée à franchir, à traverser ce pré, elle est

14 arrivée près de nous, il n'y a pas de tirs ni d'une part ni de l'autre. La

15 femme, elle était tout à fait ébranlée. Elle était vraiment sous le coup

16 d'un traumatisme. Elle a dit, c'est la première chose qu'elle a dite, "ils

17 vont tous nous tuer." Elle a dit qu'un massacre avait commencé à Dusina,

18 qu'ils avaient tué tous les hommes en âge de combattre, qu'ils avaient fait

19 sortir des hommes, justement, les hommes en âge de porter les armes de la

20 cave de Marko Rajic, ils les avaient abattus. Et elle a dit, si Zvonko ne

21 se rend pas, ils vont être tués aussi.

22 Q. A quel moment Zvonko s'est-il rendu précisément ? A ce moment-là ?

23 R. Non. Elle a dû retourner. Nous, nous étions toujours aussi perdus. Là,

24 où nous étions sans trop savoir ce qu'on allait faire ensuite. Zvonko ne

25 voulait pas prendre de décisions tout seul. Lui aussi voulait établir le

Page 424

1 contact avec le commandement principal à Busovaca. Grâce à son Motorola, il

2 a effectué plusieurs tentatives et une d'entre elles a abouti. Il a réussi

3 avoir un contact avec le commandement. L'officier commandant a donné

4 l'ordre à Zvonko de négocier et de faire l'impossible pour veiller à éviter

5 qu'il y ait des tués [sic]. Il devait le faire à tout prix et qu'eux pour

6 leur part allaient faire de leur mieux pour envoyer des observateurs

7 onusiens afin de bénéficier d'un peu de sécurité.

8 Q. Et qu'a fait Zvonko Rajic après avoir reçu cet ordre de son supérieur à

9 Busovaca ?

10 R. Il était aussi perdu quant à savoir ce qu'il fallait faire. Il faisait

11 moins 5 pourtant il était en train de transpirer. Il suait. Il était

12 incapable de parler. Il m'a dit : "Appelle Edin." C'est ce que j'ai fait,

13 bien entendu. Edin a réagi à mon appel. Zvonko lui a demandé de lui donner

14 des garanties de promettre qu'il ne ferait de tort à personne, de mal plus

15 exactement à personne. Et il a dit, qu'il faudrait aller tous au bâtiment

16 de l'école, là où en général, il y avait des réunions pour entamer des

17 négociations. Et c'est ce qu'Edin leur a demandé de faire.

18 Q. Mais qu'a fait Zvonko Rajic après avoir entendu ceci de la part d'Edin

19 Hakanovic?

20 R. Edin Hakanovic a effectivement donné des garanties. Il a dit qu'il n'y

21 aurait aucun problème à ce qu'il vienne. Qu'on pouvait se mettre en route

22 sans problème vers l'endroit où se trouvait Zvonko et Zvonko nous a demandé

23 si parmi nous il y avait des volontaires pour l'accompagner afin qu'il

24 n'aille pas tout seul.

25 Nous avons tous gardé le silence parce que tout le monde, bien sûr, avait

Page 425

1 peur. Vu ce que la femme de Drago venait de nous raconter, vu tout ce qui

2 se passait aussi de façon générale, personne n'a eu le courage de se porter

3 volontaire pour l'accompagner. Ivica Filipovic a alors dit ceci, "Zvonko ne

4 peut aller tout seul, il faut que l'un d'entre nous l'accompagne." Franjo

5 Batinic s'est levé et s'est porté volontaire, Vario [phon] Rados aussi a

6 dit qu'il allait l'accompagner. Drago Rados lui aussi s'est levé ainsi que

7 Kristo Jozo et Srecko Kristo, tous ce sont portés volontaires pour

8 l'accompagner, aussi Viktor Kristo qui était le frère de Kristo. Ils se

9 sont tous portés volontaires. Moi, j'étais à côté de Zvonko et de Velimir

10 Kristo et il nous a dit que nous deux, nous devrions aussi l'accompagner.

11 Moi, j'ai refusé, je n'ai pas osé parce que j'ai dit que je ne les croyais

12 pas, et que je croyais qu'ils allaient de toute façon nous tuer tous.

13 Zvonko s'est alors levé et il a dit à Edin de partir. Donc ils sont tous

14 levés et ils sont partis par le pré et Edin a dit qu'il fallait sortir une

15 balle du canon puisqu'ils avaient tous évidemment des fusils en disant

16 qu'ils allaient rien leur arriver. Donc ils sont partis directement vers

17 les autres.

18 Q. Monsieur le Témoin, une fois que ces six ou sept hommes sont partis

19 avec Zvonko Rajic, vous avez dit que vous êtes resté vous-même sur la

20 colline. Alors pouvez-vous nous dire combien d'autres soldats du HVO sont

21 restés avec vous pendant que les autres sont partis vers Edin Hakanovic ?

22 R. On était sept ou huit à être restés. Zvonko, lorsqu'il est parti, il

23 nous a dit : "Si tu remarques quoi que ce soit, il faut les tuer," et c'est

24 ce qu'il nous a demandé. Il nous a dit qu'il fallait les tuer, qu'il ne

25 fallait pas les laisser sortir vivants.

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1 Q. Lorsque vous dites, nous allons les tuer, à qui se référait-il ?

2 R. Et il pensait à Zvonko et ces gars qui étaient partis avec lui.

3 Q. Pour être sûr d'avoir compris. Vous nous dites que Zvonko vous a dit à

4 vous et aux autres hommes, qui sont restés sur la colline, de lui tirer

5 dessus, de tirer sur Zvonko et sur les autres soldats du HVO, si vous aviez

6 l'impression qu'on allait les capturer.

7 R. Non. Pas qu'on allait les capturer mais qu'on allait leur faire du mal,

8 du tort ou quelque chose de ce genre. C'est ce que Zvonko nous a demandé à

9 nous, de les tuer. Donc j'étais là avec Velo Kristo, Kresimir Kristo, Ivica

10 Kristo, il y avait aussi des noms Kristo, on était à peu près huit. Je

11 n'arrive pas à m'en rappeler tout à fait parce que c'était bon --

12 Q. A ce moment-là, ce groupe de civils, que vous aviez vous, se trouvait

13 toujours en bas à côté de ces pruniers ou étaient-ils partis ailleurs ?

14 R. Non. Ils étaient toujours dans ce pré. Et ce jusqu'à ce qu'ils ne

15 partent, ne rejoignent enfin la route et Edin.

16 Q. Et une fois qu'ils ont atteint la route et Edin Hakanovic, ils sont

17 partis vers où ?

18 R. Quand Zvonko et ces six soldats qui étaient avec lui et quand ils se

19 sont approchés Edin Hakanovic et bien c'est un endroit qui est un peu en

20 haut par rapport à la maison de Drago Rados, donc ils se rapprochaient

21 d'eux, et des maisons aux alentours on a vu sortir des membres de l'armée

22 de Bosnie-Herzégovine qui étaient armés et à ce moment-là, ils ont désarmé

23 Zvonko et ces six hommes, ils leur ont placé des canons de fusil sur le

24 front. Et quant aux civils, et bien, ce n'était pas vers nous qu'ils sont

25 partis. Ils les ont escortés tout droit vers la route principale qui

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1 descend vers Lasva.

2 Q. Et qu'est-il advenu de ce groupe qui est parti avec Zvonko Rajic, afin

3 de négocier avec Edin Hakanovic ?

4 R. Quand ils se sont rapprochés à une distance de quelques mètres d'Edin,

5 les soldats sont sortis de leur dos et les ont encerclés, ils leur ont pris

6 leurs armes, ils les ont donc désarmés, et ils leur ont enjoints, placé les

7 mains sur la nuque. A Zvonko, et bien, ils lui ont pris son émetteur-

8 récepteur. Je crois qu'il avait aussi un pistolet. Ils lui ont pris tout

9 ça.

10 Q. Et pendant combien de temps sont-ils restés à cet endroit, à peu près ?

11 R. Pas pendant longtemps, quelques minutes. Edin, et bien, il les ont

12 emmenés sur la route, en descendant vers Lasva. Nous, on regardait donc. On

13 ne savait pas quoi faire. On a été pris de panique. Donc on regardait ce

14 qu'ils allaient -- en fait, où ils allaient les emmener. Et c'était à peu

15 près en haut par rapport à la maison d'Edin. Il y a donc un chemin qui part

16 vers le transmetteur, et c'est là qu'ils se sont restés un petit peu. On a

17 entendu des discussions, des propos assez forts. Et on a entendu un coup de

18 feu. C'est là qu'il y a eu des bruits. Des voix qui étaient très fortes

19 pouvaient être entendues, et ça a duré quelques minutes, peut-être un quart

20 d'heure, 20 minutes. Et ensuite, on les a revus. Ils étaient en train de

21 revenir, ils ont rebroussé chemin.

22 Q. Permettez-moi de vous interrompre. Alors, au bout de 15 ou 20 minutes,

23 vous les avez vus revenir, donc ils remontaient la colline en provenance de

24 Lasva, c'est ça ?

25 R. Non. Ils n'avaient pas quitté la colline. Là, à peut-être, à quelques

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1 centaines de mètres par rapport à l'eau, il y a eu des propos assez forts

2 échangés, on a entendu le coup de feu. C'est là qu'ils se sont arrêtés

3 pendant un quart d'heure ou 20 minutes. Et ils ont rebroussé chemin pour

4 revenir là d'où ils étaient partis.

5 Q. Lorsque vous dites, le même endroit d'où ils étaient partis, c'est bien

6 l'endroit d'où Zvonko Rajic était descendu pour discuter avec Edin

7 Hakanovic ?

8 R. Oui, c'est là, à côté de l'eau. Là où il s'était arrêté.

9 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Ce sont

10 des questions directrices que pose le Procureur. Merci.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : [interprétation] Oui, Monsieur le Procureur, reposé

12 votre question moins directive.

13 M. MUNDIS : [interprétation]

14 Q. Témoin, où se trouvait Zvonko Rajic au moment où vous dites qu'il est

15 reparti et revenu ?

16 R. Il n'est pas revenu. Ils l'ont porté car il était blessé à ce moment-

17 là. Et il a été blessé à la hanche de la jambe droite. Donc c'est Perica,

18 Rados, Franjo Batinic et son frère, Drago qui le portaient. Donc c'était

19 après ce coup de feu et cette dispute, au moment où ils se sont mis à

20 rebrousser chemin. Donc Zvonko ne marchait pas. Il se faisait porter. Il

21 était blessé à la cuisse.

22 Q. Et vous-même, vous vous trouviez à quel endroit lorsque vous l'avez

23 vu ?

24 R. Moi et les autres de mes camarades, et bien, on n'avait pas changé de

25 place. On était toujours au même endroit. On était dans ce pré. C'est un

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1 endroit un peu particulier. C'est un petit peu en sur plan. On pouvait voir

2 la route en contrebas et tout ce qui se passait. Donc il y avait une petite

3 colline et une vallée, le long de laquelle il y avait ce chemin, devant ces

4 maisons, et donc on pouvait tout voir devant nous, en contrebas.

5 Q. Vous étiez à quelle distance, à peu près, par rapport Zvonko Rajic et

6 cet autre groupe ?

7 R. Et bien, je ne peux pas vous le dire avec exactitude, mais à vol

8 d'oiseau, peut-être 50, 70 mètres. On pouvait se voir. On pouvait se

9 reconnaître. Je viens de vous dire, si on parlait un peu plus fort, on

10 était même capable de distinguer les mots, d'entendre la conversation.

11 Q. Donc au moment où vous avez vu Zvonko Rajic blessé, est-ce que vous

12 étiez en mesure d'entendre les conversations ?

13 R. Oui. On entendait des gémissements. Il disait que ça lui faisait mal et

14 il demandait à Edin si c'était bien ça les garanties qu'il avait offertes.

15 Il demandait ce qui était en train de se passer. On a entendu tout ça. Et

16 ensuite, après cela, ils ont descendu -- posé Zvonko en bas, dans le lit de

17 ce cours d'eau, dans la boue. Et alors les soldats, qui étaient avec lui,

18 devaient garder leurs mains sur la nuque et devaient regarder par terre,

19 droit devant Zvonko.

20 Q. Il y avait à peu près combien de soldats, membres de l'armée de Bosnie-

21 Herzégovine à ce moment-là avec Edin Hakanovic ? Il y en avait combien ?

22 R. Dans les parages, et bien, il y avait peut-être une dizaine, pas mal.

23 Et on a vu à un moment arriver un groupe d'à peu près cinq ou six soldats.

24 Q. Etaient-ce des soldats de l'armée de Bosnie-Herzégovine ou des soldats

25 du HVO, ceux que vous avez vus arriver ?

Page 430

1 R. C'était l'armée de Bosnie-Herzégovine. Il y avait un homme qui avait un

2 gilet par balle, et il était accompagné de gars qui avaient un uniforme de

3 camouflage vert avec des gilets noirs et j'ai dit qu'ils avaient des rubans

4 autour du front.

5 Q. Savez-vous, parmi ces soldats de l'armée de Bosnie-Herzégovine, qui

6 étaient ces gens ? Avez-vous pu les reconnaître ?

7 R. A ce moment-là, je n'ai pas pu le faire. Mais on écoutait ce qui était

8 en train de se produire, et de ce qui était en train de se dire. Et Zvonko

9 gisait blessé, il perdait beaucoup de sang. Et il a reconnu, dans ce groupe

10 de soldats qui s'approchait, il a reconnu un homme. Et celui-ci voulait le

11 soigner et l'emmener voir un médecin, mais ils ont tourné ça en dérision.

12 Ils ont commencé à les molester.

13 Q. Pouvez-vous être un peu plus précis, s'il vous plaît ? Donc au sujet du

14 mauvais traitement qui leur a été infligé, pouvez-vous nous préciser de

15 quoi il s'agit ?

16 R. Oui. Alors, il y a eu des mauvais traitements. Zvonko gisait par terre.

17 Ils lui ont donné des coups de pied. Puis cet homme qui est arrivé avec ce

18 groupe, il a sorti un scorpion, un pistolet scorpion, pistolet automatique,

19 et il s'est tourné vers Zvonko, et il lui a dit : "Je vais t'administrer

20 les premiers soins," et il lui a tiré une rafale à la tête. Et il s'est

21 retourné. Et puis, à côté de Zvonko, il y avait tout d'abord Drago Rados.

22 C'était le premier à côté de lui. Et donc lorsqu'il a tiré ces balles dans

23 -- sur Zvonko, il s'est tourné vers Drago. Il a posé le pistolet sur le

24 front et il a tiré, mais il n'y avait plus de balles dedans. C'était la

25 volonté d'Allah, s'est-il écrié. "Allah-u-ekber," on répondu les autres.

Page 431

1 Q. Monsieur le Témoin, lorsqu'on a abattu Zvonko Rajic, à quelle distance

2 étiez-vous ?

3 R. J'étais toujours au même endroit. J'étais au même endroit d'où Zvonko a

4 négocié, je n'avais pas bougé. Donc c'est à peu près comme je l'ai dit à

5 une distance de 50 ou 70 mètres à vol d'oiseau. On pouvait voir, donc on

6 était un petit peu en amont, en sur plan, on pouvait voir en contrebas. Et

7 ces gens qui étaient avec Zvonko grâce à dieu et bien ils sont toujours

8 envie, tous les six, ils l'ont vu, ils ont vu la scène. Après on leur a

9 ligoté les mains dans le dos et on les a emmenés vers le camion ou plutôt

10 vers l'embranchement de Lasva, parce que de l'autre côté on va vers la

11 forêt. M. Zvonko est resté par terre, il gisait par terre dans la boue.

12 Q. Vous avez pu voir tout ça. Pouvez-vous dire à la Chambre ce qui est

13 arrivé à Zvonko Rajic ? Comment ça s'est passé lorsqu'on lui a tiré

14 dessus ?

15 R. Pour ce qui est de Zvonko Rajic, il est resté donc par terre, il gisait

16 par terre, il était tué. Nous, nous étions là-haut et nous ne savions que

17 faire. Donc il gisait toujours en bas et eux ils se sont un petit séparés,

18 ils sont allés chercher dans les maisons, fouiller dans les maisons pour

19 voir s'il restait encore quelqu'un et nous on était dans le pré, dans les

20 buissons. Et puis à ce moment-là, on a été pris de panique et on ne savait

21 pas ce qu'il fallait faire.

22 Et à ce moment-là, Dragan Kristo est arrivé, il nous a rejoints. Il nous a

23 dits que nous devions partir vers l'école, qu'il fallait qu'on se rende,

24 qu'il avait croisé des civils et qu'à Dusina tout le monde avait été tué et

25 que si on ne descendait pas nous, qu'ils allaient tuer tous les autres.

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1 Q. Monsieur le Témoin, si je puis vous interrompre un instant, pour

2 revenir un instant à la question qui concerne Zvonko Rajic. La personne qui

3 a tué Zvonko Rajic. Est-ce que c'est quelqu'un que vous connaissez ? Vous

4 pouvez l'identifier ?

5 R. Oui, son nom est Serif Patkovic.

6 Q. Connaissiez-vous Serif Patkovic d'avant la guerre ? Ou avez-vous jamais

7 eu l'occasion de le voir avant le 26 janvier 1993 ?

8 R. Je ne connaissais pas ce monsieur. Je ne le connaissais pas

9 personnellement. Mais il avait négocié avec Zvonko, donc je savais qui il

10 était. Et je savais à l'époque, qu'il faisait partie de la 7e Brigade

11 musulmane, je savais qu'il commandait la 7e Musulmane. Ça c'est ce qu'on

12 disait, on savait à l'époque. Et quand il y a eu des incidents, et de

13 nombreux problèmes au sujet de Zvonko, en fait je ne connaissais pas

14 personnellement, je n'étais pas très proche de cet homme, mais je savais

15 qu'il y était. Et après ce qui s'est passé à Dusina, lorsque Dragan est

16 venu nous voir, ce même monsieur est venu à l'école et il nous a cité par

17 nos noms, celui qui a tué Zvonko. IL s'est présenté lui-même.

18 Q. Monsieur le Témoin, savez-vous à peu près à quelle distance de Zvonko

19 Rajic était Serif Patkovic au moment où il a tué Zvonko Rajic ?

20 R. Il lui a même posé son pied sur le corps. Il était juste à côté de lui

21 en se tenant debout, et c'est de cette position-là -- dans cette position-

22 là, qu'il lui a vidé ces balles dans la tête -- tirer les balles ses balles

23 dans la tête.

24 Q. Monsieur le Témoin, vous venez de dire que vous êtes allé à l'école.

25 Etes-vous réellement allé à l'école ce 26 janvier 1993 après avoir vu

Page 433

1 comment on a tué Zvonko Rajic ?

2 R. Oui, nous et les quelques soldats qui étions restés là-haut, lorsque

3 Dragan est arrivé -- est venu nous rejoindre, nous sommes descendus par le

4 même chemin, par où nous étions arrivés. Donc on est descendu en passant

5 par nos maisons, on est arrivé au café où il y avait le billard et c'est là

6 qu'il y avait les deux soldats qu'on avait quitté, les deux soldats de

7 l'armée de Bosnie-Herzégovine. Et il y avait des hommes un peu plus âgés

8 qui s'étaient mis à l'abri à cet endroit. Il y avait aussi des gens qui

9 étaient restés dans le village, qui n'avaient pas eu le temps de partir là-

10 haut comme nous et qui sont arrivés plus tard.

11 M. MUINDIS : [interprétation] Monsieur le Président, je vois l'heure. De

12 toute évidence, je ne pourrais pas en terminer avec l'interrogatoire

13 principal de ce témoin aujourd'hui. Il me restera encore 15 minutes d'après

14 mes estimations pour demain matin.

15 M. LA JUGE ANTONETTI : Donc, Monsieur le Témoin, vous reviendrez donc

16 demain. L'audience commencera donc demain matin à 9 heures. Et donc vous

17 serez soumis à l'interrogatoire de l'Accusation pour une durée de 15

18 minutes et la Défense des accusés vous posera donc des questions dans le

19 cadre du contre-interrogatoire. D'ici demain bien entendu, vous ne devez

20 avoir aucun contact ni avec l'Accusation ni avec la Défense.

21 Voilà, donc il est 13 heures 45. Je déclare donc l'audience suspendue et

22 donc elle reprendra demain.

23 --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le mardi 3 décembre

24 2003, à 9 heures 00.

25