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1 Le mercredi 17 mars 2004
2 [Audience publique]
3 --- L'audience est ouverte à 14 heures 19.
4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
6 l'affaire, s'il vous plaît.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, c'est l'affaire
8 IT-01-47-T, le Procureur contre Enver Hadzihasanovic et Amir Kubura.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
10 Je vais demander aux représentants de l'Accusation de bien vouloir se
11 présenter.
12 M. WITHOPF : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,
13 conseils de la Défense. Pour l'Accusation, Mme Benjamin, Ekkehard Withopf
14 et Ruth Karper, notre assistante.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : je me tourne vers les avocats des accusés.
16 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,
17 Madame, Monsieur les Juges. Pour la Défense du général Enver
18 Hadzihasanovic, Edina Residovic, conseil principal; Stéphane Bourgon, co-
19 conseil; et Mme Mirna Milanovic, notre assistante.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : L'autre équipe de Défense
21 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Pour la
22 Défense de M. Kubura, Rodney Dixon, Fahrudin Ibrisimovic et M. Mulalic,
23 notre assistant.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. La Chambre, pour l'audience d'aujourd'hui,
25 salue toutes les personnes présentes, les représentants du bureau du
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1 Procureur, les avocats des accusés, les accusés, ainsi que tout le
2 personnel de cette salle d'audience, Monsieur le Greffier, Madame
3 l'Huissière, Madame la Sténotypiste, et je ne saurais oublier les
4 interprètes dans les cabines, ainsi que le personnel technique.
5 Nous avons, au programme de la journée d'aujourd'hui, deux témoins. Sans
6 perdre de temps, je vais demander à Mme l'Huissière d'aller chercher le
7 premier témoin.
8 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. Je vais vous demander si vous
10 entendez, dans votre langue, la traduction de mes propos.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Bonjour.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez été appelé à comparaître, en qualité de
13 témoin, par l'Accusation. Pour ce faire, vous devez prêter serment, mais,
14 avant de prêter serment, je me dois de vous identifier en vous posant une
15 série de questions. Tout d'abord, vous devez me donner votre nom et prénom.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Ivo Kolenda.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est votre date de naissance ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] En 1940, le 6 janvier.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans quelle localité ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] A Cukle.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est votre activité actuelle ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis retraité à présent.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : En 1993, quelles étaient, à l'époque, vos fonctions
24 ou qualités ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] En 1993, j'étais déjà retraité.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Est-ce que vous avez déjà témoigné devant
2 un tribunal ou c'est la première fois que vous venez témoigner devant un
3 tribunal ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai jamais témoigné. C'est la
5 première fois aujourd'hui.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Comme vous témoignez à la demande l'Accusation, vous
7 devez prêter serment. Pour ce faire, vous devez lire le texte que Mme
8 l'Huissière va vous présenter. Je vous demande de lire ce texte dans votre
9 langue, qui est la prestation de serment.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
11 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie. Vous pouvez vous asseoir.
13 LE TÉMOIN: IVO KOLENDA [Assermenté]
14 [Le témoin répond par l'interprète]
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant le début de votre interrogatoire, je me dois
16 de vous donner quelques éléments d'information sur la façon dont va se
17 dérouler cette audience qui est consacrée, notamment, à votre témoignage.
18 Vous allez devoir répondre à des questions qui vont vous être posées par
19 les représentants de l'Accusation. Les représentants de l'Accusation sont
20 situés à votre droite. Je pense que c'est Mme Benjamin qui, tout à l'heure,
21 vous posera des questions dans la mesure où elle est derrière le pupitre.
22 Une fois que vous aurez répondu à l'ensemble des questions qui vont vous
23 être posées par le représentant de l'Accusation, les avocats de la Défense,
24 qui sont situés à votre gauche -- ils sont six, mais il n'y en a qu'un ou
25 deux qui vous poseront des questions -- vous poseront des questions aux
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1 fins de vérifier ce que vous avez dit en réponse aux questions posées par
2 l'Accusation, notamment, pour vérifier votre crédibilité, par ailleurs,
3 pour poser des questions sur un contexte général.
4 Les trois Juges, qui sont devant vous, s'ils l'estiment nécessaire, à tout
5 moment, pourront également vous poser des questions aux fins
6 d'éclaircissement de vos réponses.
7 Parfois, les questions sont compliquées. Si vous ne les comprenez pas,
8 demandez à celui, qui vous pose les questions, de la reformuler. Si la
9 question, notamment, vous paraît nébuleuse ou très complexe, n'hésitez pas,
10 à ce moment-là, à demander à ce qu'on vous repose la question. Dans la
11 mesure du possible, essayez de répondre de manière complète et précise.
12 Bien que vous allez témoigner sur des faits qui se sont déroulés il y a
13 plus de dix ans, si vous ne savez pas ou si vous avez oublié, dites-le
14 franchement.
15 Comme vous témoignez sous serment, je me dois de vous indiquer que, comme
16 vous avez juré de dire toute la vérité, il est exclu, de votre part, un
17 quelconque mensonge. Dans le cas où vous feriez un faux témoignage, sachez
18 que vous risquez de vous exposer à des poursuites et que les peines prévues
19 pour l'infraction de faux témoignage sont des peines d'amendes et peuvent
20 également aller jusqu'à une peine de prison de sept ans. Par ailleurs,
21 lorsque vous répondez à des questions, si des éléments sont susceptibles
22 d'être un jour retenus à charge contre vous, vous pouvez, à ce moment-là,
23 refuser de répondre à la question. Dans cette hypothèse très particulière,
24 la Chambre, à ce moment-là, peut vous obliger à répondre, mais, dans ce
25 cas, ce que vous diriez à ce moment-là ne pourra pas être un jour retenu
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1 contre vous.
2 Je me devais de vous expliquer tout cela afin que vous saisissiez bien
3 l'importance de votre témoignage.
4 Sans perdre de temps, je me tourne vers le banc de l'Accusation et je vais
5 laisser la parole à Mme Benjamin pour l'interrogatoire principal.
6 Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
7 Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour Madame, Monsieur les Juges.
8 Interrogatoire principal par Mme Henry-Benjamin :
9 Q. [interprétation] Monsieur Kolenda, vous avez indiqué aux Juges de cette
10 Chambre que vous étiez né à Cukle. Pouvez-vous nous dire où se trouve
11 Cukle, dans quelle municipalité ?
12 R. Travnik.
13 Q. Pouvez-vous nous dire quelle était la répartition ethnique de la
14 population de Cukle, je vous prie ?
15 R. Avant la guerre, il y avait des Serbes, des Musulmans et des Croates.
16 Aujourd'hui, il n'y a plus que deux populations représentées, les Musulmans
17 et les Croates. Il n'y a plus de Serbes.
18 Q. Pouvez-vous dire aux Juges de cette Chambre si vous êtes marié et si
19 vous avez des enfants ?
20 R. Je suis marié. J'ai sept enfants. J'avais d'ailleurs eu -- j'en avais
21 sept, mais un de mes fils est mort; aujourd'hui, j'ai six enfants vivants.
22 Q. Merci. Avez-vous jamais appartenu à la JNA ?
23 R. Oui.
24 Q. Pouvez-vous nous dire dans quelle période vous avez servi dans les
25 rangs de la JNA ?
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1 R. De 1961 à 1963.
2 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vous prie de m'excuser. Il s'agit d'un
3 problème de compte rendu d'audience en anglais. A la page 5, ligne -- je ne
4 vois pas très bien quelle ligne -- ce sont les lignes 7 et 8. Il est écrit
5 que le témoin aurait répondu qu'il n'y a plus que deux nationalités dans le
6 village, les Serbes et les Croates, alors que le témoin a dit
7 qu'aujourd'hui n'étaient plus présents dans le village que les membres de
8 deux communautés, les Musulmans et les Croates. Il y a une erreur au compte
9 rendu d'audience en anglais.
10 Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] En effet.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Correct. Effectivement, il a dit qu'il n'y avait
12 plus que des Croates et des Musulmans, alors que la ligne 7, de la page 5,
13 dit qu'il y avait des Serbes et des Croates. Nous rectifions cette ligne.
14 Poursuivez, Madame Benjamin.
15 Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
16 Q. Monsieur Kolenda, pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre quels
17 étaient les rapports entre les Croates et les Musulmans avant le début du
18 conflit qui a éclaté à Cukle ?
19 R. Avant le début du conflit, entre les Musulmans et les Croates, les
20 relations entre eux étaient bonnes.
21 Q. Vous dite "bonnes", mais que voulez-vous dire par là exactement, je
22 vous prie ?
23 R. Nous nous rendions visite les uns aux autres. Lorsqu'un jeune partait à
24 l'armée ou lors de situations de ce genre, nous travaillions les uns avec
25 les autres. Nous étions en bon rapport.
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1 Q. Monsieur Kolenda, est-il arrivé un moment où ces relations se sont
2 tendues ?
3 R. Elles sont devenues moins bonnes lorsque tout cela a commencé déjà en
4 février et mars. Ils ont cessé de travailler les uns avec les autres et la
5 situation s'est aggravée.
6 Q. Au début du mois de juin 1993, pouvez-vous nous dire quelle était
7 l'atmosphère à Cukle, je vous prie ?
8 R. C'était difficile. C'était difficile quand tout a commencé que -- des
9 coups de feu ont commencé et que, dans le village, les uns et les autres
10 ont créé des gardes villageoises et n'ont plus eu confiance les uns dans
11 les autres, et voilà.
12 Q. Merci. Monsieur Kolenda, à présent, je vous demande si vous auriez
13 l'amabilité de relater aux Juges de cette Chambre les événements survenus à
14 la fin du mois de juin 1993 dans leur déroulement.
15 R. Ce jour-là, les événements ont commencé le matin vers 4 heures du
16 matin. Il y a eu une attaque de tous les côtés sur Cukle, Susanj,
17 Grahovcici et Brajkovici. Nous avons été encerclés de tous les côtés. Les
18 soldats sont arrivés de toutes parts. Ils ont d'abord franchi la ligne de
19 Mehurici qu'ils ont enfoncée et c'est là qu'ils ont incendié les premières
20 maisons. Il y avait cinq maisons en feu déjà avant l'aube. Après l'aube,
21 l'attaque a continué et ils ont commencé à pilonner la colline au dessus de
22 Grahovcici. Tout cela a duré avec des coups de feu incessants jusqu'à 9
23 heures. Après quoi, les habitants de Cukle ont commencé à se retirer. Ceux
24 de Gornje Cukle se sont -- ont battu en retraite vers Ovnak et Cekina Kuce.
25 Tout cela a duré jusqu'à midi. J'ai dit à ma femme et à ma belle-sœur --
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1 elle est un peu plus vieille que ma femme, elle est née en 1937, et il y
2 avait aussi des femmes plus jeunes -- j'ai dit qu'il fallait partir, qu'il
3 fallait emmener les enfants, nous ne pouvions plus rester là. Les femmes
4 sont parties les premières. Je suis parti après aux environs de midi. Un
5 grand nombre de soldats sont arrivés d'Orasac et de Donje Cukle, qui nous a
6 défendus, jusqu'à la tombée de la nuit. Pas mal de gens ont été tués. C'est
7 ce jour-là que mon fils a été tué aux environs de 11 heures près des
8 maisons de Babic.
9 Q. Monsieur Kolenda --
10 R. Et --
11 Q. --pouvez-vous nous dire si, à ce moment-là, vos fils étaient avec
12 vous dans la maison ?
13 R. Oui. Mijo était tout près de chez nous et a été tout de suite blessé au
14 bras droit par une balle de fusil de chasse.
15 Q. De quel fils s'agissait-il ?
16 R. De Mijo. Il a été blessé aux environs de 9 heures derrière la maison,
17 par une balle tirée par un fusil de chasse. Il est allé à l'hôpital et on
18 lui a retiré cette balle de la main. Plus tard, mon fils, Petar, est mort
19 aussi aux environs de 11 heures, celui qui est né en 1971. Après cela, nous
20 sommes partis aux environs de midi et je ne sais pas ce qui s'est passé sur
21 place. Mais tout ce que j'ai vu c'est que, quand nous allions vers
22 Grahovcici, il y avait des soldats qui ont ordonné à tous les civils de
23 partir.
24 Q. Lorsque vous avez quitté le village de Cukle, pouvez-vous dire aux
25 Juges ce que vous avez pu voir au moment où vous quittiez le village ?
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1 R. J'ai vu, quand je suis monté un peu plus haut, que ma maison -- quand
2 nous sommes partis dans la direction d'Ovnak, qu'il y avait déjà des
3 soldats qui étaient arrivés et qu'ils avaient déjà fait sortir les chevaux,
4 les vaches et tous les animaux. C'était le moment où on coupait le maïs. Il
5 n'y avait pas mal d'herbe et Marko m'a dit : "Regardes, ils sont en train
6 de laisser sortir les animaux." J'ai dit : "Laisses les faire". Nous nous
7 sommes montés sur la colline et je n'ai plus rien vu du tout.
8 A partir de la maison de Ceka [phon] vers Pokrajcici, quand nous étions en
9 train de continuer notre chemin, vers 6 heures, j'ai vu des maisons en feu
10 et plus loin encore, des maisons en feu en altitude, un peu plus haut. Les
11 maisons de Stipe et d'autres maisons. Il y en avait trois qui étaient en
12 feu. Elles ont été incendiées tout de suite.
13 Les autres n'ont pas été incendiées tout de suite et tous les soirs je
14 regardais ce qui se passait parce que je devais aider les soldats, leur
15 apporter quelque chose. Je donnais un coup d'oeil et je voyais que des
16 nouvelles maisons étaient en feu tous les soirs. Ensuite, il y a eu une
17 trêve. J'ai un ami qui restait pendant les combats là-bas, et il y avait
18 des gens de Kotor Varos, qui étaient arrivés là, qui avaient des bétails,
19 ils avaient des vaches. Ils s'étaient installés là-haut, au-dessus de notre
20 maison. Les autres sont arrivés, ils ont mis le feu à toutes les étables.
21 Mon ami est venu me voir, et il m'a dit : "J'ai mon fils qui est là-bas,
22 des amis. En tous cas, ils ont tous pris, ils se sont tous partagés. Tout
23 cela, maintenant, c'est à eux." Voilà ce qu'il m'a dit.
24 Q. Monsieur Kolenda, pourriez-vous nous apporter votre aide, en nous
25 disant que, lorsque vous dites : "Ils ont incendié le maison", ils ont fait
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1 sortir les chevaux," de qui parlez vous lorsque vous dites "ils" ?
2 R. C'était des soldats. Il y avait le 3e Corps d'armée, la 7e Musulmane qui
3 circulait par là. Tout cela, c'étaient des soldats musulmans -- des
4 Musulmanes.
5 Q. Pourquoi parlez-vous précisément du 3e Corps et de la 7e Brigade
6 musulmane ? Avez-vous des raisons de soupçonner plus particulièrement les
7 soldats de ces unités ?
8 R. Je pense que oui parce que, deux ou trois fois, des attaques ont été
9 tentées sur notre armée à Grahovcici et Usice. Il y a deux soldats qui
10 étaient déjà tombés avant le début des combats, ils ont essayé après, ils
11 se sont sans doute regroupés, pour rendre l'attaque plus facile, et c'est
12 comme cela que cela s'est passé. Quand on va vers les maisons de Ceka, on
13 voyait qu'il y avait beaucoup de soldats là-bas. Ils venaient de tous les
14 côtés de la montagne, ils venaient aussi de Zenica, de Han Bila, nous
15 étions totalement encerclés.
16 Q. Pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre quel était l'aspect du village
17 de Cukle une semaine après ces combats ?
18 R. A Cukle, tout le monde était à son domicile, personne ne sortait pour
19 se promener dehors, et rien n'était détruit.
20 Q. Quel était l'aspect des maisons à Cukle ?
21 R. Avant ou après les combats ?
22 Q. Après les combats, le lendemain.
23 R. Après les combats, c'était inimaginable, celui qui n'aurait pas vu le
24 village n'aurait pas pu y croire. Il n'y avait plus de toits sur les
25 maisons. Encore aujourd'hui, certaines maisons ne sont pas restaurées.
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1 Personne n'est revenu, ni à Orasac, ni à Cukle, ni dans les environs, ni à
2 Miletici. Il n'y a plus que des ruines partout, alors qu'il y avait à peine
3 une trentaine de maisons. On voit les murs nus, et certaines maisons, qui
4 n'ont plus d'étages, alors qu'elles en avaient deux, il ne reste plus
5 qu'une et demie.
6 Q. Votre maison, pourriez-vous dire quel était son apparence, une semaine
7 après les combats ?
8 R. Pour autant que j'ai pu le voir, quand j'ai apporté à manger aux
9 soldats, depuis là haut, on voyait des voitures qui emportaient des choses
10 des maisons et, de temps en temps, on mettait le feu à une maison. Jusqu'à
11 la trêve, je ne suis pas retourné chez moi. Après la trêve, je suis
12 retourné et j'ai vu des choses de plus près. J'ai vu ce qui restait. On est
13 allé en autobus.
14 Q. Quel était l'état de votre maison lorsque vous l'avez vue ?
15 R. Quand je suis arrivé, mes deux maisons -- parce que j'avais deux
16 maisons -- les étables étaient complètement incendiées. Toutes avaient
17 brûlé, il y en avait une où le toit était complètement détruit, l'autre pas
18 encore complètement, mais j'ai dû refaire une de les étables.
19 Q. Etes-vous resté à Novo Bila après le conflit ?
20 R. J'étais à Stara Bila pendant le conflit. Nous étions dans une maison,
21 nous n'avions pas de place. Il y avait des réfugiés qui étaient arrivés de
22 partout. La maison avait deux étages et nous étions 28 dans la même maison,
23 six par pièce. On ne pouvait même pas se retourner, on était serré comme
24 les doigts d'une main. C'était comme cela, jusqu'à là trêve. Après la
25 trêve, je suis resté dans la maison de Pero Kalic, jusqu'à ce que ma maison
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1 soit réparée. J'étais le premier à dire que je voulais rentrer chez moi, et
2 je suis rentré le 1er, et cela fait cinq ans que je suis rentré aujourd'hui.
3 Q. Pouviez-vous dire aux Juges de la Chambre où vous habitez
4 actuellement ?
5 R. J'habite à Cukle.
6 Q. Pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre quel est la nature, la qualité
7 des rapports entre les Croates et les Musulmanes de Cukle aujourd'hui ?
8 R. Disant que les plus âgés arrivent encore à communiquer, à parler, mais
9 pour les plus jeunes, ce qui ont une trentaine d'années, ils nous disent
10 pas bonjour. J'ai eu quelques problèmes quand je suis rentré. Quand les
11 enfants étaient petits, quand ils avaient deux ou trois ans, maintenant,
12 ils vont à l'école, en fait, il avait sept ou huit ans quand on est revenu.
13 Ils disaient "Sala Malakum", mais je ne disais rien. Ils disaient "Sala
14 Malakum", mais je me taisais. Quelquefois, je leur disais : "C'est cela que
15 les enseignants vous apprennent ? " Ils ne répondaient pas. Un chauffeur
16 est arrivé d'Alivodja [phon], et je lui ai dit cela, et il est allé vers
17 les instituteurs et a tout expliqué. Alors, ils ont arrêté de m'insulter.
18 Les enfants vont et viennent, aujourd'hui, sans problème. Mais j'ai eu des
19 problèmes lorsque je suis rentré au début. Mais, maintenant, tout va bien,
20 Dieu merci.
21 Q. Merci, Monsieur Kolenda.
22 Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Monsieur le Président, Madame,
23 Monsieur les Juges, je n'ai plus de questions pour ce témoin.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Kolenda, j'ai une question à vous poser.
25 Suite à une réponse que vous avez donnée, Vous avez expliqué qu'il y a eu
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1 une attaque, et que vous avez invité des membres de votre famille à quitter
2 votre maison, après que votre fils ait été blessé à la main. Vous avez
3 expliqué qu'il y avait des soldats. Mais ce que nous ne savons pas -- ces
4 soldats, est-ce que vous les avez vus et, si vous les avez vus, ils étaient
5 à quelle distance de vous-même ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils étaient environ 500 mètres de moi, un
7 petit peu en dessous de la maison. Je me trouvais sur une colline. On était
8 en train de regarder ce qui se passait, et ce n'était pas uniquement vers
9 ce côté. Si on connaît la manière dont se présente les lieux, vous pouvez -
10 - c'est ce que j'ai vu. Ils venaient de tous les côtés.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous les avez vus, vous étiez à 500 mètres. Quand
12 vous les avez vus, vous pouvez décrire leurs tenus ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils avaient des uniformes verts olive
14 habituels.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez indiqué qu'ils appartenaient au 3e Corps,
16 ou la 7e Brigade Musulmane. Qu'est-ce qui vous permettait de le dire ?
17 C'est une déduction ou est-ce que vous avez des éléments qui appuient de ce
18 que vous dites ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas corroborer ce que j'ai dit,
20 mais ils venaient uniquement de Cukle et de Mehurici. Il n'y avait pas
21 autant de soldats à cet endroit. C'était obligé qu'ils se soient préparés
22 pour faire partir les gens de Cukle, Orasac, Miletici, Brajkovici,
23 Grahovcici, Susanj.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, vous avez --
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Avec une seule section, on ne peut pas libérer
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1 autant de territoires. Or, tout cela s'est passé en l'espace d'une seule
2 journée.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez dit qu'au départ, vous aviez vu des
4 maisons en feu dès l'attaque. Ces maisons, elles ont été incendiées
5 comment ? Oui, je vous demande si --
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait trois des maisons et des étables
7 auxquelles on avait mis le feu, trois maisons et deux étables. Les maisons
8 de mes frères, qui se trouvaient un petit peu au-dessus de la mienne, à 600
9 mètres au-dessus à peu près, en amont par rapport à ma maison.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites que ce sont les maisons de vos frères --
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : -- et on a mis le feu --
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Comment je peux le savoir ? Je n'étais pas à
14 côté.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Mais vous les avez vues en feu vous-même ? Vous les
16 avez vues brûler de l'endroit où vous étiez ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je les ai vues. On pouvait voir d'où
18 c'était Donje Cukle, Gornje Cukle, Ovnak. On pouvait tout voir d'où
19 j'étais. Il n'y a que Susanj et Koljevici qu'on ne pouvait pas voir.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : A côté des maisons en feu, vous avez vu des soldats
21 ou il n'y avait personne à côté ?
22 R. Non, on ne pouvait pas voir cela. Ce n'est pas assez près.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Je vais demander aux Défenseurs s'ils ont
24 des questions à poser dans le cadre du contre-interrogatoire, mais
25 certainement ils ont des questions. Vous avez la parole.
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1 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.
2 Effectivement, nous avons quelques questions à poser à M. Kolenda.
3 Contre-interrogatoire par Mme Residovic :
4 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. Je m'appelle Edina
5 Residovic et je suis l'avocate du général Hadzihasanovic. Comme vous l'a
6 déjà expliqué le président de la Chambre de première instance, je vais vous
7 poser un certain nombre de questions et je vais vous demander d'y répondre
8 si vous connaissez la réponse, bien entendu. Si je ne suis pas assez claire
9 dans mes questions, n'hésitez pas à me le faire savoir et j'essaierai de
10 reformuler, à ce moment-là, ma question de manière plus claire.
11 Monsieur Kolenda, vous nous avez dit que vous habitiez à Cukle dans la
12 municipalité de Travnik, n'est-ce pas ?
13 R. Oui.
14 Q. En fait, votre maison se trouvait à Novo Selo. C'est une partie de
15 Cukle qui s'appelle Novo Selo, n'est-ce pas ?
16 R. Oui. Oui, Ovnak, Novo Selo et Cukle. On était à côté de Cukle ainsi que
17 Grahovcici, et cetera.
18 Q. En fait, votre village était un village distinct du village de Cukle,
19 même s'il y appartenait, n'est-ce pas ?
20 R. Oui, c'est exact. C'était séparé.
21 Q. Gornje Cukle est un village où on trouvait aussi bien des Musulmans et
22 des Croates avant la guerre, comme dans votre ville, n'est-ce pas ?
23 R. Oui.
24 Q. Les maisons musulmanes se trouvaient au milieu et les maisons croates
25 se trouvaient plutôt vers l'extérieur, n'est-ce pas ?
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1 R. Oui.
2 Q. Il y avait d'autres villages croates autour, Ovnak, Susanj et
3 Grahovcici, n'est-ce pas ?
4 R. Ovnak se trouvait le plus près de Novo Selo, environ à deux kilomètres.
5 R. Non, Ovnak se trouve environ 300 mètres de ma maison. Quand on a
6 installé le téléphone, ils se sont rendus compte que c'était exactement 300
7 mètres de distance.
8 Q. Pour Grahovcici, c'est un peu plus loin, cinq ou six kilomètres, n'est-
9 ce pas ?
10 R. A deux kilomètres de chez moi. Grahovcici est à deux kilomètres de ma
11 maison.
12 Q. Avant la guerre, il y avait une section du HVO à Donje Cukle, qui
13 appartenait à la compagnie qui avait son poste de commandement à
14 Grahovcici, n'est-ce pas ?
15 R. Oui.
16 Q. Une vingtaine de personnes de Novo Selo appartenait au HVO, n'est-ce
17 pas ?
18 R. Même pas 20, une dizaine. Il n'y avait pas autant de jeunes hommes.
19 Q. Au début, ces hommes du HVO, avec des membres de l'armée, sont allés
20 sur le mont Vlasic pour faire face aux forces serbes, n'est-ce pas ?
21 R. Oui. Mon Petar était là également.
22 Q. Cependant, en réponse à une question de l'Accusation, vous avez dit
23 qu'en février ou en mars, les relations entre le HVO et l'armée s'étaient
24 détériorées et que, par la suite, les membres du HVO ne se rendaient plus
25 sur le mont Vlasic. Ils faisaient des patrouilles dans le village, et ils
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1 ont installé des fortifications autour du village.
2 R. Non. Ils allaient ensemble. Quand ils revenaient, à ce moment-là, ils
3 ont leur ont pris leurs armes, ils les ont capturés, ils ont confisqué un
4 camion. Quelques heures plus tard, ils les ont laissé partir. Mon fils est
5 revenu vers 3 heures, ensuite les relations se sont détériorées. Ils ne
6 sont plus allés sur les lignes ensemble.
7 Q. A Ovnak, à environ 300 mètres de votre maison, il y avait un poste de
8 contrôle du HVO, n'est-ce pas ?
9 R. Oui.
10 Q. Il y avait un point de contrôle.
11 R. Oui.
12 Q. Après le désarmement de la Brigade de Jure Francetic, à Zenica, en
13 1993, certains des soldats de cette brigade sont arrivés dans votre région
14 et se sont intégrés à l'unité à laquelle appartenait votre unité.
15 R. Oui, en partie. Ils sont tous partis pour Nova Bila pendant la nuit.
16 Seuls quelques-uns d'entre eux sont restés, environ une dizaine d'hommes de
17 l'unité Francetic sont restés. Ils s'en allaient, pendant la nuit,
18 lorsqu'ils étaient envoyés pour mener une opération.
19 Q. A ce moment-là, ils ont mis en place des lignes fortifiées, à partir
20 d'Ovnak en direction de Grahovcici, n'est-ce pas ?
21 R. Oui.
22 Q. En face du point de contrôle d'Ovnak, les gens qui venaient de Zenica à
23 Travnik n'arrivaient pas souvent à passer parce que le HVO les renvoyait
24 lorsqu'ils arrivaient au point de contrôle, n'est-ce pas ?
25 R. Oui. Mais ils faisaient également prisonniers -- ils faisaient des
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1 prisonniers au point de contrôle. On ne pouvait pas passer. Certains jeunes
2 hommes ont été fait prisonniers. C'est ce que j'ai déjà déclaré, il y a des
3 gens qui ont été fait prisonniers.
4 Q. Au début du mois de juin, huit autocars, qui transportaient des hommes
5 du HVO, ont été capturés. Ils étaient censés se rendre à Turbe, sur les
6 lignes de défense. Est-ce que vous le savez ?
7 R. Oui, on les a fait rebrousser chemin, je le sais.
8 Q. Au tout petit matin, le 8 juin, vous dites avoir entendu des tirs en
9 provenance de Mehurici, et Zagrdja. Est-ce exact ?
10 R. Oui.
11 Q. Ces villages se trouvent à une certaine distance de votre village.
12 R. Oui. Mais ils sont allés, à partir de là, à Mrkonje; les lignes se
13 trouvaient jusqu'à côté de Mrkonje.
14 Q. Les premières lignes tenues par le HVO se trouvaient à la sortie de
15 Cukle, à Mrkonje.
16 R. Oui, à environ 50 mètres, il y avait une ligne. Il y avait la ligne
17 tenue par le HVO, la ligne de l'ABiH et la ligne du HVO étaient proches.
18 Q. Ce matin-là, à Cukle, on a vu commencer l'attaque contre Mrkonje et les
19 maisons, que vous avez mentionnées, ont été incendiées, n'est-ce pas?
20 R. Oui.
21 Q. Comme vous étiez chez vous, vous n'avez pas pu voir concrètement
22 comment on avait mis le feu à ces maisons, qui avait mis le feu ?
23 R. Non. C'était à deux kilomètres de chez moi, deux kilomètres, je n'ai
24 pas vu.
25 Q. Vous nous avez dit qu'avec d'autres habitants du village, vous êtes
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1 partis en direction d'Ovnak.
2 R. Ovnak et Cekina Kuce.
3 Q. De Cekina Kuce, vous l'avez expliqué précédemment, vous avez pu voir
4 que des soldats avait fait sortir un cheval et une vache de votre étable.
5 R. Oui.
6 Q. La dernière chose, que vous avez vue, c'était ce cheval et cette vache
7 en train de brouter dans un champ. Ensuite, vous êtes parti et vous n'avez
8 pas vu ce qui s'est produit ensuite.
9 R. C'est exact.
10 Q. Vers 15 heures l'après-midi, vous avez pris la direction de Pokrajcici,
11 où il y avait des camions qui vous attendaient. Ces camions vous ont tous
12 emmenés à Nova Bila ?
13 R. Ce n'était pas vers 15 heures, mais quand la nuit est tombée parce qu'il
14 y avait une mine et on ne pouvait pas partir avant. On a attendu à Cekina
15 Kuce avec les hommes, les femmes et les enfants jusqu'à la nuit. On a
16 attendu à 22 heures environ, que la nuit tombe.
17 Q. Pendant que vous attendiez à Cekina Kuce, des gens d'Orasac sont
18 également arrivés -- des habitants d'Orasac. Ils se sont joints à des
19 soldats -- à des membres du HVO d'Orasac, n'est-ce pas ?
20 R. Oui. Oui. Ils se sont retirés à partir d'Orasac et de Donje Cukle, vers
21 9 heures. Les femmes et les enfants sont arrivés. Tout le monde s'est
22 retiré et ces hommes armés assuraient la protection de tout ce monde.
23 Q. Réponse à une question qui nous a été posée par le président de la
24 Chambre, vous nous avez expliqué que vous avez pu voir qu'on avait incendié
25 la maison de votre frère -- ou de vos frères.
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1 R. Oui, de mes deux frères -- ou deux de mes frères, en tout cas.
2 Q. Vous avez pu observer cela alors que l'on vous avait donné pour mission
3 d'amener de l'eau et des vivres au HVO sur les lignes de Prokrajcici ?
4 R. Non. C'est la nuit où -- je parlais de la nuit où les maisons ont été
5 incendiées. Mais, plus tard, on m'a donné cette mission et il y a 12 autres
6 maisons et étables qui ont été incendiées. Je peux donner les noms des
7 personnes concernées. J'avais deux maisons, mon frère avait deux maisons,
8 mon frère, Zorko, avait deux maisons, Stipo avait deux maisons, Niko Baric
9 avait deux maisons, Vinko avait une étable; 12 maisons et étables ont été
10 incendiées. Chaque jour, on apprenait qu'une nouvelle maison était en
11 flamme.
12 Q. Tout cela vous l'avez vu de Pjescara qui se trouve à sept ou huit
13 kilomètres de votre village, n'est-ce pas ?
14 R. Oui. Oui, je crois que c'est à peu près la distance en question.
15 Q. Tout ce que vous avez vu de cette distance c'était de la fumée pendant
16 toute cette période ?
17 R. Oui.
18 Q. Vous n'étiez pas en mesure de voir comment on mettait le feu aux
19 maisons ou qui le faisait ?
20 R. Non. Mais les gens en parlaient. Les gens de Kotor Varos et les gens
21 qui venaient d'Ovnak aussi en parlaient. Ils disaient : "Ton voisin, Ridja
22 [phon], ne nous a rien laissé faire. Ils ont mis le feu aux étables." Je
23 suis allé voir un de mes amis. Je lui ai demandé -- demandé à mon ami :
24 "Qu'est-ce que vous cherchez ?" Il a dit : "J'avais des amis, Ivo et Marko,
25 dans les champs."
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1 Q. En fait, tout cela sont des choses que vous avez apprises beaucoup plus
2 tard ?
3 R. Oui, beaucoup plus tard au moment où la trêve a été mise en place.
4 Q. Cette trêve, elle date des accords de Washington en 1994, et la
5 première fois que vous êtes allé au village c'était en 1995, n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. Vous êtes retourné au village en 1999, n'est-ce pas, dans votre
8 maison ?
9 R. Oui.
10 Q. Merci beaucoup, Monsieur Kolenda.
11 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je n'ai plus de questions. Merci, Monsieur
12 le Président.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Je me tourne vers les autres Défenseurs.
14 Monsieur Dixon.
15 M. DIXON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Comme vous
16 le savez, M. Kubura ne fait l'objet dans l'acte d'accusation d'aucune
17 charge relative au village de Cukle or, c'est sur ce village que le témoin
18 -- c'est de ce village que le témoin nous parle pendant sa déposition. Nous
19 n'avons pas de questions pour ce témoin au nom de notre client, M. Kubura.
20 Merci.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Dixon.
22 Je me tourne vers Mme Benjamin ou M. Withopf. Est-ce que vous voulez poser
23 des questions supplémentaires ?
24 Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me le
25 permettez, j'aurais une question à poser au témoin.
Page 4484
1 Nouvel interrogatoire par Mme Henry-Benjamin :
2 Q. Monsieur le Témoin, vous nous expliquer que votre maison se trouvait à
3 Novo Selo, c'est bien cela ?
4 R. Oui.
5 Q. Quand vous avez dû quitter le village, vous êtes allé à Pokrajcici,
6 n'est-ce pas ?
7 R. Grahovcici.
8 Q. Mais, quand vous êtes allé apporter des vivres aux soldats, vous êtes
9 allé dans quelle zone, comment cela s'appelle ?
10 R. C'est Pokrajcici. Pokrajcici.
11 Q. Pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre quelle est la distance qui
12 sépare Pokrajcici de Novo Selo ?
13 R. Environ huit kilomètres. Il y a huit kilomètres environ entre Novo Selo
14 et Pokrajcici, mais on peut emprunter un chemin moins long aussi.
15 Q. Mais est-ce qu'il serait exact de dire que, de votre point de vue, à
16 Pokrajcici, vous étiez en mesure de voir les maisons incendiées à Novo
17 Selo ?
18 R. C'est une colline. On peut voir la totalité du village, et Ovnak. La
19 vue était très dégagée.
20 Q. Qu'avez-vous vu ?
21 R. On a vu les maisons le soir qui brûlaient, mais cela ne brûlait pas
22 pendant la journée. Mais, quand on amenait les vivres, on voyait toujours
23 qu'il y avait deux ou trois maisons qui brûlaient jusqu'à ce que toutes les
24 maisons aient été détruites par les flammes. Il y a des maisons qu'ils
25 n'ont pas incendiées parce qu'elles étaient habitées, mais dès que les gens
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1 partaient, aussitôt ils les incendiaient.
2 Q. Vous avez vu ces maisons en flamme et ceci un jour ou deux après le
3 conflit, n'est-ce pas ?
4 R. Oui. Oui, deux jours après ou même peut-être plus tard.
5 Mme HENRY-BENJAMIN : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le
6 Président. Je n'ai plus de questions supplémentaires à poser à ce témoin.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie, Madame Benjamin.
8 Monsieur Kolenda, le -- votre témoignage vient de s'achever. L'Accusation
9 vous a posé des questions, la Défense également et des Juges vous ont
10 également posé aux fins d'éclaircissement. Nous vous remercions d'être venu
11 témoigner à La Haye surtout sur des événements qui sont douloureux pour
12 vous dans la mesure où vous nous avez indiqué que vous aviez perdu, lors de
13 ces événements, votre fils.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai perdu mon fils et, à Pjescara, Josip a
15 été blessé. Le 12 juin. Il était né en 1974. C'est le 12 juin, trois jours
16 plus tard. Il a été handicapé par cela. Il a eu beaucoup de mal à
17 recommencer à marcher. Il y a eu un obus qui a touché le balcon. Il y en a
18 deux. Il y en a un qui a été très gravement blessé et il y a un qui a été
19 blessé -- un fils qui a été blessé. Mais l'autre a été seulement légèrement
20 blessé.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre vous remercie d'avoir apporté votre
22 concours à la manifestation de la vérité. Je vous souhaite, au nom des
23 Juges, au bon retour dans votre pays. Je vais demander à Mme --
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout ce que j'ai dit conforme à la réalité. Je
25 n'aurais rien pu dire d'autre. Je dois vous remercier, moi aussi.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais demander à Mme l'Huissière de bien vouloir
2 vous accompagner à la porte de la salle d'audience.
3 [Le témoin se retire]
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Je me tourne vers les représentants de l'Accusation.
5 Nous avons un deuxième témoin. Sur le "planning", il y a indiqué, M.
6 Tomislav Mikulic. C'est bien cela, Monsieur Withopf ?
7 M. WITHOPF : [interprétation] C'est bien cela, Monsieur le Président, et le
8 témoin est là.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons attendre le retour de Mme l'Huissière,
10 qui va aller chercher se temoin.
11 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. Je vais d'abord vérifier que vous
13 entendez bien mes propos dans votre langue, grâce aux interprètes.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vous entends bien.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez été cité, en qualité de témoin
16 d'Accusation, pour témoigner sur des événements qui se sont déroulés dans
17 1993. Dans le cadre de votre témoignage, qui va être recueilli, et avant
18 votre prestation de serment, je me dois recueillir des éléments à fin de
19 vous identifier. Pour ce faire, vous allez m'indiquer votre nom et prénom.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Tomislav Mikulic.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Quels sont votre date de naissance et le lieu de
22 naissance ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 28 juillet 1962, à Potkralj, municipalité
24 de Donji Vakuf.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est votre profession ou activité actuelle ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis ingénieur mécanique diplômé.
2 Actuellement, je travaille en tant que concepteur de systèmes de
3 climatisation et de chauffage centrale.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est votre -- la ville où vous résidez
5 actuellement ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Actuellement, j'habite à Valpovo, qui se
7 trouve à une vingtaine de kilomètres de Osijek.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : En 1993, à l'époque, que faisiez vous au point de
9 vue d'activité professionnelle ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais membre du HVO.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous étiez militaire ou membre civil du HVO ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais un soldat, j'étais un militaire.
13 J'étais chargé du personnel au sein du bataillon.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous déjà témoigné devant un tribunal, ou c'est
15 la première fois de votre vie que vous témoignez ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la première fois que je comparais devant
17 le tribunal.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans le cadre du témoignage, qui va être recueilli,
19 vous devez prêter serment. Pour ce faire, vous devez dire le texte que Mme
20 l'Huissière vous présente. Je vous demande de bien vouloir le lire.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
22 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
23 LE TÉMOIN: TOMISLAV MIKULIC
24 [Le témoin répond par l'interprète]
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie. Vous pouvez vous asseoir.
Page 4488
1 Avant de donner la parole à l'Accusation pour son interrogatoire
2 principale, je vais vous donner comme -- nous le faisons pour tous les
3 témoins -- quelques éléments d'information sur le façon devrait se dérouler
4 cette audience, de tant que c'est la première fois que vous témoignez au
5 justice, et vous pouvez être un peu stressé ou désorienté par les lieux.
6 Vous avez été cité comme témoin par l'Accusation, et vous devez répondre à
7 des questions qui vont vous être posées tout à l'heure par le représentant
8 de l'Accusation, qui est derrière le pupitre en plastique transparent. Les
9 questions, qui vont vous être posées, si elles vous paraissent trop
10 compliquées ou complexes, vous pouvez, à ce moment-là, demander à celui,
11 qui vous pose les questions, de vous reposer la question afin que vous
12 puissiez bien répondre aux questions posées. Le représentant de
13 l'Accusation est situé à votre droite.
14 Une fois que l'Accusation aurait terminé ses questions, la Défense, qui est
15 située à votre gauche, vous posera également des questions dans le cadre de
16 la procédure dite d'interrogatoire principal et contre-interrogatoire. Les
17 questions seront posées à partir des éléments qui vous ont été fournis par
18 des questions de l'Accusation, mais la Défense, dans ses questions,
19 s'appuiera sur le témoignage que vous aviez signé lors de l'enquête du
20 bureau du Procureur, s'appuiera certainement sur les questions, qui vous
21 sont posées par l'Accusation, et pourra également vous poser des questions
22 de contexte générale. Par ailleurs, je dois vous informer également que la
23 Défense a, dans le cadre de sa mission de défense, certainement procédé à
24 sa propre enquête sur ces événements, et peut également vous poser des
25 questions qui n'apparaîtront peut-être pas dans votre témoignage écrit.
Page 4489
1 Par ailleurs, les trois Juges, qui sont devant vous, pourront, s'ils
2 l'estiment nécessaire, à tout moment, vous poser des questions aux fins
3 d'éclaircissement de certains points qui pourraient apparaître, pour les
4 Juges, nébuleux.
5 Comme vous avez prêté serment de dire toute la vérité, et rien que la
6 vérité, ce serment entraîne évidemment, de votre part, le fait de tout dire
7 et de ne pas mentir. Si jamais vous faisiez un faux témoignage, vous pouvez
8 vous exposer à des poursuites du fait du faux témoignage, qui est une
9 infraction qui est punie par une peine, soit d'amende, ou une peine de
10 prison, qui peut aller jusqu'à sept ans. Voir également, des deux peines
11 qui peuvent se cumuler.
12 Compte tenu que vous avez été militaire du HVO, il se peut -- la Chambre
13 ignore de l'entendre les questions qui vont vous être posées, que, dans le
14 cadre des réponses que vous allez être amené à faire aux questions, vous
15 pouviez, dans certaines hypothèses, indiquer des éléments qui pourraient
16 être, un jour, un charge contre vous. Dans cette hypothèse, vous pouvez
17 refuser de répondre car vous ne pouvez pas témoigner contre vous, en
18 apportant des éléments qui pourraient se retourner contre vous. Mais, dans
19 cette hypothèse qui est très particulière, à ce moment-là, la Chambre peut
20 vous demander de répondre néanmoins et, à cette occasion, votre réponse ne
21 pourra pas être utilisé contre vous.
22 Voilà, c'est une disposition tout à fait particulière du règlement, de
23 prendre des procédures qui nous régissent. Je devais de vous donner ces
24 explications afin de permettre que votre témoignage puisse s'accomplir dans
25 les meilleures conditions possibles.
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1 Si vous y trouvez une difficulté quelconque au cours de cette audience,
2 faites en part les Juges qui sont devant vous. Il nous reste à peu près 25
3 minutes avant le break. Sans perdre de temps, je me tourne vers le
4 représentant de l'Accusation et je lui laisse la parole pour son
5 interrogatoire principal.
6 Interrogatoire principal par M. Withopf :
7 M. WITHOPF : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,
8 Madame, Monsieur les Juges.
9 Q. Bonjour, Monsieur Mikulic.
10 R. Bonjour.
11 Q. Monsieur Mikulic, avez-vous jamais été membre de l'armée populaire
12 yougoslave, de la JNA ?
13 R. Oui.
14 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, dire à la Chambre de première instance
15 pendant quelle période cela était le cas.
16 R. Pour ce qui est de l'armée populaire yougoslave, j'y ai fait mon
17 service militaire à partir du 8 octobre 1971 jusqu'au 27 août 1972. Au
18 début, j'étais dans l'école des officiers de réserve à Bileca et ce
19 jusqu'au 1er avril. Par la suite, j'ai été muté à Zagreb, et c'est à Zagreb
20 que je suis resté jusqu'à la fin de mon service militaire.
21 Q. Lorsque vous êtes sorti de la JNA, en 1982, aviez-vous un grade ?
22 R. Lorsque je suis sorti de l'armée et ce, conformément au règlement de
23 l'école des officiers de réserve, par automatisme, j'avais le grade de
24 sous-lieutenant de réserve.
25 Q. Monsieur Mikulic, alors où viviez-vous au début de l'année 1993 ?
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1 R. Au début de 1993, je ne me rendais pas chez moi puisque j'ai été
2 intégré, de manière permanente, dans mon unité, qui était à Bugojno.
3 Q. Depuis quand viviez-vous à Bugojno ?
4 R. Depuis la création de la 2e Compagnie, j'étais dans la 2e Bataillon
5 depuis sa création et c'était depuis le 4 juin 1992.
6 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, dire à la Chambre de première instance
7 quelle était la composition ethnique de Bugojno au début de l'année 1993.
8 R. Au début de 1993, la composition ethnique, et ce par rapport à 1991 ou
9 par rapport à ce qui était le cas au début de la guerre, cette situation a
10 considérablement changé. Il y a beaucoup de Bosniens de Donji Vakuf, des
11 réfugiés qui sont arrivés en avril 1992, environ 12 000 de ces personnes.
12 En octobre 1992, il y a eu des Bosniens de Jajce qui sont arrivés, ce qui a
13 perturbé considérablement la composition ethnique. La grande majorité de la
14 population était désormais bosnienne.
15 Q. Quelle était la situation avant l'arrivée des réfugiés ?
16 R. Avant le début de la guerre, c'est-à-dire, avant l'arrivée des
17 réfugiés, et ce de manière approximative, pour ce qui est des pourcentages,
18 il y avait à peu près 41 % de Bosniens, 36 % de Croates, environ 18 % de
19 Serbes et les autres; c'étaient des personnes qui se déclaraient, pour la
20 plupart, des yougoslaves.
21 Q. Pour ce qui est de ces pourcentages, Monsieur Mikulic, comment est-ce
22 que cela se traduit au niveau des chiffres ? Combien d'habitants est-ce que
23 cela représente ?
24 R. Pour ce qui est des Croates, il y en avait près de 16 000; les
25 Bosniens, à peu près 19 500; les Serbes, me semble-t-il, environ 8 000.
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1 Q. Pour autant que vous le sachiez, Monsieur Mikulic, qui sont les gens
2 qui possédaient la majorité des terres ? De quelle appartenance ethnique
3 étaient-ils ?
4 R. C'est la population croate qui possédait la majorité des terres,
5 d'après les chiffres qui n'étaient pas secrets. C'était de l'ordre de 68 %
6 des terres qui étaient entre leurs mains.
7 Q. Monsieur Mikulic, vous avez déjà dit à la Chambre de première instance
8 qu'en 1993 vous êtes devenu membre du HVO. Pourriez-vous nous dire quelle
9 est l'Unité du HVO de Bugojno dont vous êtes devenu membre ?
10 R. Depuis sa constitution, je suis devenu membre du 2e Bataillon de la 104e
11 Brigade du HVO.
12 Q. La 104e Brigade du HVO, est-ce une brigade qu'on désignait d'un autre
13 nom aussi ?
14 R. On l'appelait aussi Brigade Eugen Kvaternik, d'après un grand patriote
15 croate.
16 Q. Quelles étaient vos tâches au sein de cette unité, Monsieur Mikulic ?
17 R. Dès le début, j'ai dit que j'étais chargé du personnel au sein du
18 bataillon. J'étais chargé de tenir le registre des soldats qui étaient soit
19 affectés à une autre unité soit mutés ailleurs. Dans ce deuxième cas, il
20 fallait que je les raye de nos listes. Je délivrais aussi des certificats
21 ou des autorisations, notamment pour que les soldats puissent se rendre en
22 permission, pour rendre visite à leur famille en Croatie en particulier.
23 Q. En vous acquittant de ces tâches que vous venez de préciser, avez-vous
24 jamais pris part à des opérations de combat ?
25 R. Pour ce qui est des opérations de combat, je n'y ai pris part que
Page 4493
1 pendant les derniers jours lorsqu'il y a eu un conflit entre l'ABiH et le
2 HVO.
3 Q. S'il vous plaît, pourriez-vous nous préciser un petit peu lorsque vous
4 parlez des quelques derniers jours. De quelle date s'agit-il ?
5 R. Officiellement, les conflits entre l'ABiH et le HVO à Bugojno ont
6 commencé le 18 juillet, tôt dans la matinée, à 4 heures ou 5 heures de la
7 matinée. Ces conflits se sont poursuivis jusqu'au 25 juillet. La dernière
8 unité qui s'est rendue c'était la nôtre, le 2e Bataillon. C'était en fin
9 d'après-midi, vers 7 heures et demie du soir, vers les 20 heures du soir.
10 Q. En plus de ce 2e Bataillon de la brigade Eugen Kvaternik, est-ce qu'il
11 y avait, à Bugojno, d'autres unités militaires qui y étaient stationnées ?
12 R. A Bugojno, il y avait une brigade qui, elle, était composée de trois
13 bataillons. Il y avait aussi des détachements autonomes qui étaient,
14 généralement, constitués par des individus qui, eux, avaient leur propre
15 armée.
16 Q. L'ABiH, avait-elle ses unités militaires qu'on tenait à Bugojno au
17 début de l'année 1993 ?
18 R. Au début de 1993, au début, l'ABiH s'est constituée en puisant dans la
19 Défense territoriale et, après, elle a eu l'appellation officielle qui est
20 celle de l'ABiH.
21 Q. Pour autant que vous vous en souveniez, est-ce qu'il y avait une
22 brigade de l'ABiH stationnée à Bugojno ? Il y en avait-il une et, si oui,
23 laquelle ?
24 R. A Bugojno, il y avait la 307e Brigade motorisée. Ceci étant dit, ils
25 avaient des unités autonomes. Pour ce qui est de celles-ci,
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1 je ne peux rien affirmer avec certitude à leur sujet. Je ne sais pas
2 exactement comment elles s'appelaient.
3 Q. Pour autant que vous le sachiez, qui était le commandant de la 307e
4 Brigade de l'ABiH à Bugojno ?
5 R. Avant le conflit avec le HVO, le commandant était M. Tahir Granic.
6 Q. Plus tard ?
7 R. Plus tard, il a été remplacé par Farouk Aganovic. Je ne suis pas tout à
8 fait sûr qu'il s'appelait Beganovic. Je suis à 90 % sûr que c'était
9 Aganovic. Il était appelé aussi Youpi, et il travaillait comme concierge
10 dans une grande surface avant la guerre.
11 Q. Plus tôt aujourd'hui, Monsieur Mikulic, vous avez dit qu'au début de
12 l'année 1993, il y a eu l'arrivé des milliers de réfugiés musulmans à
13 Bugojno. Parmi ces réfugiés musulmans, est-ce qu'il y avait des hommes en
14 âge de combattre ?
15 R. Naturellement. Il y avait des hommes aptes au combat.
16 Q. Pour autant que vous le sachiez, ces hommes en âge de combattre qui
17 faisaient parti de ce groupe de réfugiés musulmans, sont-ils devenus
18 membres de la 307e Brigade de l'ABiH à Bugojno.
19 R. Ils sont entrés dans les rangs de l'ABiH, pour autant que je le sache,
20 c'est la 307e, parce que je ne pense pas qu'il y en a eu d'autres. Il y en
21 a eu un petit nombre qui ont rejoint le HVO. Comme je l'ai déjà dit, ces
22 gens se sont retrouvés sans toit, il fallait bien qu'ils gagnent leurs
23 vies, qu'ils trouvent de quoi se nourrir.
24 Q. Un petit nombre de réfugiés musulmans a rejoint le HVO d'après ce que
25 vous dites. Alors, est-ce qu'ils sont restés au sein du HVO ?
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1 R. Pour la plupart, vers la fin du mois de mars, ils ont quittés le HVO,
2 ils étaient obligés de devenir membre de l'ABiH. Il y avait déjà des
3 conflits dans la zone de Bugojno, ils ne pouvaient pas rester au sein du
4 HVO. Ils n'ont pas été chassés du HVO, ils l'ont fait sur leurs propres
5 demandes.
6 Q. En parlant de chiffres, dans le secteur de Bugojno, quelle est l'armée
7 qui était la plus importante, la plus grande ? Le HVO, ou l'ABiH?
8 R. Sans doute, c'était cinq à un pour ce qui est de l'ABiH. Voir même sa
9 supériorité, était-elle le plus grande.
10 Q. Monsieur Mikulic, vous avez parlez précédemment du début du conflit
11 entre le HVO et l'ABiH à Bugojno, et vous avez dit que pendant ces derniers
12 moments, vous y avez pris part. Vous y avez pris part à l'appuie des
13 opérations de combat du HVO. A un moment quelconque pendant ce conflit,
14 avez-vous été capturé ?
15 R. Le 25 juillet, lorsque nous avons eu l'information juste, grâce à la
16 radio Zagreb, une journaliste, Vesna Koric, qui faisait le flash
17 d'information de 17 heures, a pris la parole, et a dit que toute la ville
18 était passée sous le contrôle de l'ABiH. Elle a dit que les seuls combats
19 qui continuaient, c'étaient des combats qui concernaient le 2e Bataillon,
20 et je dois dire que les représentants de l'ABiH nous avaient appelés deux
21 jours plutôt à nous rendre, mais nous ne l'avons pas fait.
22 Q. Vous êtes-vous rendus ce jour-là, le 25 juillet 1993 ?
23 R. Oui, toute l'unité, tous ces membres qui étaient sur place, à savoir le
24 commandement, et les gardes.
25 Q. Vous-même, vous êtes-vous rendu aussi ?
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1 R. Oui.
2 Q. A qui vous êtes-vous rendu ?
3 R. Aux soldats de l'ABiH.
4 Q. C'était des soldats qui appartenaient à quelle unité de l'ABiH?
5 R. C'était des soldats de la 307e Brigade.
6 Q. Après votre reddition, où vous a-t-on amené?
7 R. A proximité, il y avait l'état major de l'ABiH, et l'école élémentaire
8 Stipo Cerek, et c'est dans le gymnase de cette école primaire que nous
9 avons été amenés.
10 Q. Pouvez-vous, s'il vous plaît, dire à la Chambre de première instance ce
11 qui vous était arrivé à vous, ainsi qu'à d'autres personnes qui s'étaient
12 rendus à ce moment-là, ce qui vous étaient arrivés dans les locaux de
13 l'école élémentaire Stipo Cerek ?
14 R. A l'arrivé dans l'école Stipo Cerek, un des soldats du village voisin,
15 quelqu'un que je connaissais de vue, mais je ne connaissais pas vraiment
16 son nom, il a pris mes lunettes, mon canif, ainsi que la photo de ma fille
17 de deux ans, et il m'a dit que je n'aurait plus besoin de cela. Lorsque
18 nous sommes arrivés dans le gymnase, il a fallu s'allonger à plat ventre,
19 les visages tournés vers le sol, et on a été battu. On a reçu des coups de
20 bottes, pour l'essentiel, dans le dos et à la tête. On a enlevé les
21 montres, les bijoux, pour donner aux soldats.
22 J'ai eu la chance, moi, je ne sais pas comment j'y suis parvenu, mais j'ai
23 pu préservé mon alliance, qui est resté à mon droit.
24 Q. Monsieur Mikulic, vous-même, avez-vous été battu ?
25 R. Oui.
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1 Q. Que pouvez-vous nous dire au sujet des uniformes ?
2 R. On n'avait pas vraiment la possibilité d'observer, de regarder autour,
3 parce qu'il a fallu qu'on se couche à plat ventre, et on touche le sol du
4 front. Ce qu'on pouvait voir, c'est que c'était des soldats de l'ABiH,
5 c'était des membres de la 307e Brigade. Ce que je peux dire, c'est que dans
6 ce bois, lorsqu'on entendait des injures, qu'on pouvait distinguer en
7 particulier trois femmes.
8 Q. Ces trois femmes, étaient elles aussi membres de la 307e Brigade ?
9 R. Elles portaient des uniformes militaires, et comme c'était déjà au
10 crépuscule, je n'ai pas pu distinguer leurs insignes, je n'était pas
11 suffisamment près d'elles, pour pouvoir le voir.
12 Q. Les objets de valeur qui vous ont été confisqués, à vous-même et à
13 d'autres soldats, pour autant que vous le sachiez, est-ce que ceci a été
14 restitué ?
15 R. Je pense que cela n'a pas été restitué, parmi les membres de l'ABiH,
16 personne n'a pu tenir un registre officielle de ce qui c'est passé, de ce
17 qui a été pris car c'était dans une espèce de cône que cela s'était passé.
18 Q. Dans l'école Stipo Djerek, vous, ainsi que d'autres soldats du HVO,
19 est-ce que vous avez eu le droit de garder vos uniformes?
20 R. J'étais toujours en uniforme. On m'a seulement enlevé mon anorak. Mais
21 quand on est entré dans le gymnase, j'ai pu voir que quelques-uns de nos
22 soldats ne portaient plus que des sous-vêtements.
23 Q. Les soldats que vous avez vu plus tard à l'école primaire et qui
24 n'avaient plus que des sous-vêtements, étaient-ce des soldats qui faisaient
25 partie de ceux qui étaient détenus après avoir été capturés, qui étaient
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1 détenus à l'école Stipo Djerek ?
2 R. Oui. Je peux citer trois noms concrètement parce qu'on faisait parti
3 d'une même unité.
4 Q. Pouvez-vous, s'il vous plaît, nous citer ces noms ?
5 R. Ivica Sisto, Ivica Klepic et Ivo Barnjak. Ivo Barnjak et Ivica Klepic
6 avaient des crânes fracassés.
7 Q. Ils avaient des blessures à la tête ? Ces blessures étaient-elles le
8 résultat des passages à tabac qu'ils ont subis pour autant que vous le
9 sachiez ?
10 R. Oui, cela je le sais avec certitude qu'ils ont été battus à l'école
11 Stipo Djerek.
12 Q. L'avez-vous vu vous-même ?
13 R. Non. Je n'avais pas la possibilité de voir qui que ce soit. Comme je
14 vous l'ai déjà dit, on touchait le sol de notre front. Au moment où on
15 s'est rendu, je sais parce qu'on était rassemblé. Je sais qu'à ce moment-
16 là, ils n'étaient pas blessés. Ils n'avaient pas de blessures avant que
17 l'on arrive à l'école.
18 Q. Monsieur Mikulic, vous-même, ainsi que les autres soldats, pendant
19 combien de temps avez-vous été détenus à l'école Stipo Djerek ?
20 R. Entre une heure et demie et deux heures.
21 Q. Après cette une heure et demie ou deux heures, où est-ce qu'on vous a
22 emmené ?
23 R. Par la suite, on a été emmené à l'école secondaire Mahmut Busatlija. On
24 a pratiquement couru en ayant nos mains sur la nuque ces deux kilomètres,
25 cette distance. Il fallait qu'on crie à 2allah-U-Ekber" et il fallait qu'on
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1 chante des chansons au sujet du HVO. Quand on passait à côté des soldats --
2 ou plutôt ceux qui nous escortaient, ils nous ont asséné des coups avec des
3 crosses de fusil dans le dos. J'étais l'un de ceux qui ont reçu des coups.
4 Q. Qui vous a emmené de l'école Stipo Djerek à l'école Mahmut Busatlija ?
5 R. C'était vers 21 heures, 21 heures 30. Je ne sais pas exactement. On ne
6 pouvait pas regarder la montre. C'étaient des membres de l'armée de Bosnie-
7 Herzégovine. Je ne sais pas si la police militaire était déjà sur place.
8 Cela, je -- on ne pouvait pas le voir.
9 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, ce serait peut-être un
10 moment où on pourrait faire une pause.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Effectivement. Il est 4 heures moins quart. Nous
12 allons faire une pause de 25 minutes. Nous reprendrons l'audience à 6
13 heures 10.
14 M. LE GREFFIER : [interprétation] Veuillez vous lever.
15 --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.
16 --- L'audience est reprise à 18 heures 10.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Withopf, vous avez à nouveau la parole.
18 M. WITHOPF : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président,
19 Madame, Monsieur les Juges.
20 Q. Monsieur Mikulic, quand vous êtes arrivé dans l'école Mahmut Busatlija,
21 où vous a-t-on fait entrer ?
22 R. Quand on est arrivé, où on nous a emmenés, je ne comprends pas la
23 question. Où on nous a fait entrer dans l'école Mahmut Busatlija ? C'est
24 cela que vous me demander ?
25 Q. Oui, et quel endroit dans l'école Mahmut Busatlija vous a-t-on fait
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1 entrer ?
2 R. Quand on est arrivé dans l'école Mahmut Busatlija, on nous a fait
3 entrer dans la salle de sport et, à l'entrée de ce gymnase, une haie de
4 soldats de l'ABiH a été constituée et, pour l'essentiel, nous avons reçu
5 des coups sur le dos. Nous sommes entrés dans ce gymnase où il faisait
6 nuit. Nous avions les mains sur la nuque. Ensuite, un commandant est entré
7 derrière nous. Je crois que c'était le numéro 1 ou le numéro 2 de l'ABiH
8 parmi les commandants de celle-ci, Nijaz Bevrnja, qui était surnommé Beni.
9 Le nom du commandant était Nijaz Bevernja. C'était un camarade -- c'était
10 un de mes camarades d'école par le passé. Il nous a insultés, il a insulté
11 nos mères Oustachi, et il a dit qu'il nous tuerait tous si nous faisions le
12 moindre geste. Nous avons dû garder les mains sur la nuque pendant une
13 heure et demie à peu près, après quoi, il nous a autorisé à baisser les
14 bras, à les mettre le long du corps. Nous avons encore dû rester debout,
15 dans cette position, pendant deux heures. A ce moment-là, il nous a
16 autorisés à nous asseoir en position accroupie avec les genoux repliés.
17 Nous sommes restés dans cette position jusqu'au matin.
18 Q. Cet homme, dont vous avez dit qu'il s'appelait Nijaz --
19 malheureusement, son nom de famille n'est pas apparu au compte rendu
20 d'audience en anglais -- pourriez-vous, je vous prie, me redire son nom de
21 famille ?
22 R. Bevrnja. B-E-V-R-N-J-A.
23 Q. Quelles étaient ses fonctions à l'époque ?
24 R. C'était l'un des plus importants commandants de la 307e Brigade de la
25 Police militaire.
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1 Q. Quelles étaient ses fonctions dans ce lieu de détention ? Je veux
2 parler de l'école Mahmut Busatlija ?
3 R. Il est arrivé là uniquement ce soir-là. Par la suite, je ne l'ai pas vu
4 souvent. Un jour, je lui ai même demandé de me donner un livre pour que je
5 puisse lire, mais il n'a pas prononcé un seul mot. Il faisait partie du
6 commandement de la police militaire dans l'école Mahmut Busatlija.
7 Q. Monsieur Mikulic, je vais à présent vous montrer une photo, avec
8 l'autorisation des Juges, qu'il s'agit de la pièce à conviction de
9 l'Accusation P58. Puisque cette pièce fait déjà partie de la procédure, je
10 demande l'autorisation de la soumettre au témoin, grâce au logiciel
11 Sanction.
12 Monsieur Mikulic, je vous demanderais de jeter un coup d'œil à la
13 photographie qui se trouve sur l'écran devant vous et de dire aux Juges de
14 cette Chambre ce que vous voyez sur cette photographie.
15 R. C'est le lycée Mahmut Busatlija de Bugojno.
16 Q. Est-ce bien dans le gymnase de ce bâtiment que vous avez été détenu ?
17 R. Oui, mais, sur cette photographie, on ne voit pas le gymnase.
18 0Q. Pour le compte rendu d'audience, j'indique que le témoin, Tomislav
19 Mikulic, a reconnu le bâtiment qui constituait la pièce à conviction de
20 l'Accusation P58 comme représentant le lycée Mahmut Busatlija.
21 Q. Monsieur Mikulic, avec la permission des Juges de cette Chambre, je
22 vais, à présent, vous montrer une autre photographie. Celle-ci fait déjà
23 partie de la procédure, mais elle a été versée sous pli scellé. Par
24 conséquent, l'Accusation en demande les versions papier. Monsieur Mikulic,
25 veuillez jeter un coup d'œil à cette photographie d'un peu plus près et
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1 dites aux Juges ce que vous voyez sur cette photographie.
2 R. Ceci est le gymnase du lycée Mahmut Busatlija où, en tant qu'élève,
3 j'ai pratiqué le sport pendant deux ans.
4 Q. Est-ce que c'est le gymnase de l'école Mahmut Busatlija dans lequel
5 vous avez été maintenu en détention ?
6 R. Oui, c'est la salle de sport dans laquelle nous étions en détention.
7 Q. Combien de temps avez-vous été détenu dans ce gymnase, Monsieur
8 Mikulic ?
9 R. Nous sommes restés dans ce gymnase du 25 juillet jusqu'au 1er août 1993.
10 Q. Vous dites "nous". Je vous demande combien d'autres personnes ont été
11 détenues dans ce gymnase.
12 R. Nous étions une soixantaine dans ce gymnase, entre 50 et 60 personnes.
13 Q. Ce groupe de 50 à 60 personnes, était-il constitué uniquement de
14 soldats du HVO ?
15 R. Oui.
16 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
17 Juges, je demande le versement au dossier de cette photographie.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, vous nous donnez un numéro
19 pour la photo du gymnase.
20 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, il faudrait peut-être, Monsieur Withopf, que
22 l'intéressé marque son nom et authentifie ledit document.
23 Monsieur le Témoin, sur le document qu'on vous donne, marquez votre nom,
24 votre prénom et la date d'aujourd'hui.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce le 18 aujourd'hui ?
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1 M. WITHOPF : [interprétation] Nous sommes le 17 aujourd'hui.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, un numéro.
3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agira de la
4 pièce à conviction P94.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.
6 Continuez, Monsieur Withopf.
7 M. WITHOPF : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
8 Q. Pendant votre détention dans ce lycée, étiez-vous sous la garde de
9 quelqu'un ?
10 R. Pendant la journée, il y avait deux soldats et, la nuit, en général,
11 trois.
12 Q. Les soldats qui vous gardaient appartenaient à quelle armée ?
13 R. Ils étaient représentants de l'ABiH, de la 307e Brigade de la police
14 militaire. J'ai dit que ce bâtiment était l'endroit où se trouvait le
15 commandement de la police militaire de l'ABiH.
16 Q. Monsieur Mikulic, comment avez-vous appris qu'il s'agissait de la 307e
17 Brigade et de la police militaire de cette brigade ?
18 R. Je savais que le commandement se trouvait là car la liberté de
19 circulation était garantie en ville. La seule chose que l'on pouvait
20 craindre, c'étaient les obus qui tombaient depuis les positions serbes. Il
21 n'y avait aucun problème à savoir où étaient stationnées les unités. Les
22 Bosniens savaient où se trouvaient les Unités du HVO et nous, de même, nous
23 savions où étaient stationnées les Unités de l'ABiH.
24 Q. Les gardes, qui se trouvaient dans le bâtiment de ce lycée, portaient-
25 ils des emblèmes particuliers sur leur uniforme ?
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1 R. Ils arboraient les insignes de la 307e Brigade et, bien entendu, ceux
2 qui faisaient partie de la police militaire arboraient en plus l'emblème de
3 la police militaire.
4 Q. Les insignes dont vous venez de parler, pouvait-on y lire littéralement
5 "307e Brigade" ?
6 R. Mais oui.
7 Q. Pendant la durée de votre détention dans le gymnase de cette école vous
8 êtes-vous rendu compte que l'on frappait certaines personnes ?
9 R. J'ai vu des gens qui avaient été frappés, mais je n'ai pas vu, je n'ai
10 pas assisté aux passages à tabac. Je les ai vus avant qu'ils ne soient
11 frappés et après, quand ils revenaient.
12 Q. Les gens qui étaient frappés, étaient-ils des détenus tout comme vous ?
13 R. Oui, nous étions ensemble depuis le 25.
14 Q. Pourriez-vous, je vous prie, dire aux Juges de la Chambre comment
15 s'appelaient les détenus qui ont été frappés ?
16 R. Il y en a un dont je ne me rappelle pas le nom et pour les deux autres,
17 il s'agit de Josip Skaro, qui était un ancien gardien de but de club de
18 football, et l'autre s'appelait Dragan Subasic. Skaro avait le dos
19 complètement couvert d'ecchymoses, complètement violet et noir, suite aux
20 passages à tabac dont il a fait l'objet. Ses jambes et son visage étaient
21 dans un état tout à fait similaire.
22 Q. Est-ce que l'un d'entre eux vous a dit, Monsieur Mikulic, qui les avait
23 frappés ?
24 R. Josip Skaro a dit qu'il en avait reconnu un, mais que
25 c'était Nijaz Bevrnja qui l'avait frappé. Nous, pour ce qui nous concerne,
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1 nous avons entendu les bruits du passage à tabac. Nous avons entendu le
2 bruit de chaises que l'on déplaçait parce que cela se passait dans une
3 salle de classe voisine.
4 Q. Vous-même, avez-vous été frappé ?
5 R. Non.
6 Q. Pendant votre détention dans le gymnase de cette école avez-vous appris
7 que le bâtiment dans lequel vous vous trouviez servait de lieu de détention
8 pour d'autres ?
9 R. On entrait dans le gymnase par un couloir et nous avons pu voir dans ce
10 couloir des représentants du MUP de la police militaire et des soldats qui
11 avaient été capturés chez eux parce que pour aller aux toilettes nous
12 devions traverser ce couloir.
13 Q. Après votre détention dans le gymnase de cette école, où vous a-t-on
14 emmené, si on vous a emmené quelque part ?
15 R. Le premier août, on nous a entassé dans un camion qui servait à
16 transporter des explosifs par le passé dans l'entreprise Slavko Rodic où je
17 travaillais. Je travaillais à des vérifications des techniques sur les
18 détonateurs. Je savais très bien à quoi cela servait parce que j'allais sur
19 les terrains de tir de l'ancienne JNA par le passé pour effectuer ces
20 essais, ces tests. Senad Sijamija était le chauffeur de ce camion et il
21 avait été aussi chauffeur de l'entreprise Slavko Rodic par le passé,
22 entreprise que l'on appelait OKP, où l'on faisait des essais pour vérifier
23 la qualité de la production.
24 On a été entassé dans ce camion et il y a à peine 500 mètres entre le lycée
25 et l'entrepôt de meuble mais il nous a fallu une heure et demie pour
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1 couvrir cette distance. La plupart d'entre nous avait déjà la nausée parce
2 que nous étions debout sans pouvoir se raccrocher à quoi que ce soit dans
3 ce camion parce qu'il n'y avait rien à quoi se raccrocher.
4 Q. Qui, Monsieur Mikulic, vous a fait monter à bord de ce camion ?
5 R. Des représentants de la police militaire.
6 Q. Vous étiez combien à monter à bord de ce camion ?
7 R. Le groupe entier qui se trouvait dans le gymnase du lycée a été
8 transféré à bord de ce camion jusqu'à l'entrepôt de meuble.
9 Q. Lorsque vous êtes arrivé à cet entrepôt de meuble, où vous a-t-on fait
10 entrer ?
11 R. Nous sommes passé par le rez-de-chaussée qui était illuminé mais plus
12 de la moitié des vitres avaient sautées. On nous a fait entrer dans la cave
13 où il n'y avait pas de fenêtres. Là nous avons trouvé l'horreur. En effet,
14 les égouts avaient éclatés, il y avait environ 15 à 20 centimètres d'eau
15 dans cette cave avec des excréments et la puanteur était terrible.
16 L'atmosphère était tout à fait étouffante. Au fond, il y avait des espèces
17 de bidons qui contenaient de l'eau distillée et des bancs d'école sur
18 lesquels certains ont réussi à s'asseoir ou à s'allonger.
19 Q. A votre connaissance, combien de personnes ont été détenues dans la
20 cave de cet entrepôt du magasin Slavonija ?
21 R. Comme je l'ai dit, il faisait sombre dans cette cave mais je sais que
22 nous y avons vu des membres de la police militaire, quelques membres du MUP
23 et d'autres hommes arrêtés chez eux dans leur appartement.
24 Q. Les membres de la police militaire et les membres du MUP dont vous
25 venez de parler dans votre dernière réponse, étaient-ils croates ?
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1 R. Oui.
2 Q. Y avait-ils des gardes qui vous surveillaient pendant votre détention
3 dans cet entrepôt de meuble Slavonija ?
4 R. Les gardes étaient au rez-de-chaussée, un étage au-dessus de nous
5 puisque depuis la cave nous ne pouvions aller nulle part sans passer devant
6 les gardes. Ceux-ci ne ressentaient pas le besoin de rester à nos côtés.
7 Ils étaient à l'étage au-dessus, il y avait des membres de la police
8 militaire et, notamment, M. Enes Sijamija, qui était sergent de la police
9 militaire et dont je connais le nom.
10 Q. Les membres de la police militaire, notamment ce M. Enes Sijamija,
11 appartenaient à quelle armée ?
12 R. Ils étaient membres de l'ABiH. Je ne suis pas au courant de la présence
13 à Bugojno d'une quelconque autre brigade que la 307e.
14 Q. Pourriez-vous, je vous prie, décrire à l'intention des Juges de la
15 Chambre les conditions d'existence qui étaient les vôtres dans ce sous-sol
16 dans l'entrepôt de meuble Slavonija.
17 R. J'ai déjà dit qu'il y avait entre 15 et 20 centimètres d'eau mêlée à
18 des excréments. Alors, de quelles conditions d'existence pouvez-vous
19 parler ? Il n'y avait pas d'autre lumière que l'espèce de lueur qui tombait
20 des escaliers. L'atmosphère était étouffante. Il était difficile de
21 respirer. C'était l'horreur.
22 Q. Combien de temps vous-même et les autres ont-ils été détenus dans le
23 sous-sol de cet entrepôt de meuble Slavonija ?
24 R. Moi-même et les autres membres du groupe avons tous quitté l'entrepôt
25 de meuble le même jour et nous avons été transféré jusqu'à l'école primaire
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1 Vojin Paleksic qui se trouve non loin de l'ancien stade Iskrad.
2 Q. Par quel moyen de transport avez-vous été transféré jusqu'à l'école
3 Vojin Paleksic ?
4 R. Nous sommes allés à pied jusqu'à l'école Vojin Paleksic.
5 Q. Étiez-vous volontaire pour aller dans l'école Vojin Paleksic ?
6 R. Il n'y avait aucun volontariat là-bas, Monsieur. Là-bas, on faisait ce
7 qu'on nous disait de faire.
8 Q. Qui vous a escorté depuis l'entrepôt de meuble Slavonija jusqu'à
9 l'école Vojin Paleksic, si quelqu'un vous a escorté ?
10 R. Evidemment, c'est escorté par la police militaire que nous sommes allés
11 jusqu'à l'école Vojin Paleksic.
12 Q. Quelle distance sépare l'école Vojin Paleksic de l'entrepôt de meuble
13 Slavonija ?
14 R. Je crois que cette distance est un maximum d'un kilomètre et demi, pas
15 plus en tout cas.
16 Q. Combien de temps avez-vous été détenu dans l'école Vojin Paleksic ?
17 R. Nous sommes restés une quinzaine de jours, au maximum 18, dans l'école
18 Vojin Paleksic. Mais une quinzaine de jours en tout cas.
19 Q. En quel lieu précis de l'école Vojin Paleksic avez-vous été
20 emprisonné ?
21 R. Nous étions dans le gymnase de l'école Vojin Paleksic qui avait les
22 dimensions statutaires d'un terrain de basket et où il y avait de la
23 lumière. Il y avait un parquet au sol. Il faisait suffisamment chaud. Nous
24 n'étions pas frigorifiés. Il y avait suffisamment d'air dans cet endroit.
25 C'était l'été, le sol n'était pas froid non plus.
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1 Q. Combien étiez-vous dans ce gymnase de l'école Vojin Paleksic, enfermés
2 au même temps ?
3 R. Je pense que nous étions 240 ou 250 durant ces quelques premiers jours
4 ou, en tout cas, les deux premiers jours.
5 Q. Ces 240 ou 250, en étaient-ils tous des soldats ou y avait-il également
6 des civils parmi les détenus ?
7 R. Il y avait deux ou trois civils peut-être, mais la majorité était des
8 soldats qui avaient été arrêtés au sein de leur unité, à moins d'avoir été
9 arrêtés chez eux, à leurs domiciles. Certains avaient été arrêtés, en
10 qualité de civils car, à ce moment-là, ils ne participaient pas activement
11 au combat.
12 Q. Parmi les civils, y avait-ils également des jeunes gens ?
13 R. Il y avait deux jeunes garçons de 16 ans, qui ont été échangés le 19
14 mars 1994, et il y avait aussi un vieillard qui avait 70 ou 75 ans. Je
15 dirais même 75.
16 Q. Pourriez-vous, je vous prie, décrire pour les Juges de cette Chambre
17 les conditions d'existence dans cette école Vojin Paleksic, s'agissant de
18 la nourriture que vous avez eue, les conditions d'hygiène, et de votre vie
19 quotidienne ?
20 R. L'alimentation était un problème dans toute la ville pendant toute
21 cette période. Il y avait très peu d'eau disponible et, parmi les détenus,
22 il y en avait cinq ou six qui avait une petite bouteille d'eau -- un petit
23 bidon d'eau, dans lequel on se trouvait un litre ou un litre et demi de jus
24 de fruit. Comme je l'ai dit, on nous autorisait à recevoir de l'eau. Je ne
25 dirais pas qu'on nous empêchait de disposer d'eau, mais l'eau manquait, de
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1 façon générale. Ce qu'ils avaient fait à se procurer pendant la nuit, c'est
2 ce qu'ils buvaient. Ils nous distribuaient de l'eau quand ils avaient de
3 l'eau à distribuer, mais il n'y en avait pas suffisamment pour tout le
4 monde. On comptait sur les toilettes de l'école et, comme je l'ai dit, il y
5 avait beaucoup de lumière et il faisait chaud parce que c'était l'été.
6 S'agissant de la nourriture, elle n'était pas suffisante, et elle n'est
7 arrivée que le lendemain pour la première fois. Pour 250 d'entre nous, nous
8 recevions six miches de pain et une ration classique de nourriture cuite,
9 mais cette ration n'était pas suffisante. Je dirais qu'on recevait à peine
10 100 à 150 millilitres de soupe. Dans l'école Vojin Paleksic, ils ont
11 organisé des interrogatoires par des Juges pour les autorités bosniennes.
12 J'ai été interrogé par un certain Mesud Duvnjak, et j'ai appris, par la
13 suite, d'un parent de mon épouse, que M. Duvnjak était chef adjoint de la
14 police de Kupres, et dirigeant du SDA de Bugojno. En fait, Dzevad Majic
15 était le seul responsable réellement important.
16 Je dois dire que M. Duvnjak m'a traité assez bien, malgré les petites
17 provocations qu'il se livrait au cours de l'interrogatoire. Mais un dossier
18 a été établi, et des notes on été prises de ce que j'ai dit, que j'ai
19 finalement signé.
20 Q. Monsieur Mikulic, au cours de votre détention dans le gymnase de
21 l'école, dans l'entrepôt de meubles Slavonija et dans l'école Vojin
22 Paleksic, avez-vous perdu du poids ?
23 R. La période n'était pas longue. Je n'ai pas pu perdre beaucoup de poids
24 pendant une période si courte. A peine six ou sept kilos, je ne sais pas
25 exactement. On ne peut pas perdre beaucoup de poids en une dizaine de
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1 jours. Mais le premier route, lorsqu'on a amené travailler, cela s'est
2 passé quand j'ai été transféré à l'entrepôt de meubles. Ils ont demandé une
3 dizaine de volontaires pour les aider à décharger des fournitures médicales
4 destinées à l'hôpital, et la distance entre l'hôpital et l'entrepôt de
5 meubles correspondait à une minute à peine de marche à pied. Mais, quand
6 nous sommes sortis de l'entrepôt de meubles, on nous a, en fait, fait
7 monter dans une camionnette, et nous sommes rendus compte que nous
8 n'allions pas à l'hôpital parce qu'ils ne nous auraient pas amenés en
9 camionnette pour couvrir ces 100 mètres, ou 150 mètres à peine qui séparait
10 l'hôpital de l'entrepôt de meubles. Ils nous ont en faits amener dans le
11 village de Crnice, où ils nous ont amenés jusqu'au cimetière. Nous y avons
12 trouvé un certain nombre de tranchées qui étaient déjà creusées dans le
13 seuil récemment. Il y avait aussi des tombeaux qui n'étaient pas encore
14 totalement creusés. Des gens en étaient enterrés dans ces tombes, des
15 habitants du village de Vrbanja, et nous étions censés creuser encore six
16 ou sept autres tombes, mais je ne me souviens pas du nombre exact.
17 Q. Quand on a vous fait sortir, est-ce que vous avez été passé à tabac ?
18 R. Quand on nous a faits sortir ainsi, on ne nous a pas frappés.
19 Q. Avez-vous été soumis à d'autre mauvais traitements ?
20 R. Dans l'entrepôt de meubles, non. Non, nous n'avons pas soumis des
21 sévices physiques.
22 Q. Mais ce je veux dire, Monsieur Mikulic, c'est la chose suivant : je
23 pense au moment vous avez passé dehors de l'Unité de Détention pendant que
24 vous creviez les tombes, les fosses.
25 R. Quand on a fini de creuser ces fosses, Velagic, qui appartenait à la
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1 police militaire -- je sais que son père s'appelait Fehko, il avait un café
2 dans le quartier de Vrbanja -- il m'a choisi, Zeljko Milos, Franjo Ribic et
3 Bosko Djerek. Il nous a choisis pour aller avec lui, pour l'accompagner au
4 village de Vrbanja, à Zeleni Put. C'est ainsi que s'appelle cet endroit,
5 Zeleni Put, en traduction. On est parti à pied à travers les champs. On a
6 emprunté un sentier ou un espèce de chemin qui se pourrait emprunter des
7 chariots. Pendant toute cette période, Velagic nous donnait des coups sur
8 les épaules, sur la tête. Il nous donnait des coups a moyen de sa matraque
9 de policier. On a été amené à Zeleni Put, cette zone de Vrbanja, et là il
10 fallait qu'on sorte des victimes bosniennes d'une maison. Ces victimes,
11 elles y avaient été rassemblées. Je ne sais pas si tous ces gens venaient
12 de Vrbanja.
13 Comme il faisait très chaud et comme les victimes étaient déjà là depuis
14 plusieurs jours, vous pouvez déjà voir qu'elles avaient commencé à se
15 décomposer, leurs corps avaient commencé à se décomposer. Il y avait des
16 vers sur les corps. Les corps étaient enveloppés de plastique. Nous étions
17 deux par victime, pour reporter chaque victime, et nous les avons placés à
18 l'arrière d'un petit fourgon de type de TAM -- une petite fourgonnette de
19 type TAM, sur la remorque de ce petit fourgon. Pendant ce temps, un autre
20 Velagic, Muhko, c'était un cousin de celui qui nous avait escortés à cet
21 endroit et, lui aussi, il ne cessait de nous asséner des coups au moyen de
22 sa matraque, dans le dos, sur la tête. Quand on a eu à charger quatre
23 cadavres à bord du camion, on devait attendre que la fourgonnette emmène
24 les victimes au cimetière et revienne.
25 Dans l'intervalle, Muhko Velagic -- d'ailleurs Muhko c'est un surnom, je
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1 dois le dire, c'est un surnom qui est généralement donné aux gens dont le
2 prénom est soit Muhamed ou Muharem. Pendant tout ce temps, il nous a
3 frappés. Il nous a assénés des coups dans le dos, sur les épaules, au
4 niveau des reins, sur la tête. Quand il était trop fatigué, qu'il n'avait
5 plus la force de nous frapper, à ce moment-là, il nous a forcés, chacun
6 notre tour, à prendre une matraque pour nous asséner mutuellement des
7 coups. Pendant que lui nous frappait, on devait s'allonger sur une espèce
8 de rampe où se trouvait du verre brisé qui venait des maisons -- du verre
9 brisé, et on était là face contre terre, et aussi sur le dos, et il nous
10 frappait.
11 Les gens s'étaient réunis. Certains pleuraient leurs morts, d'autres nous
12 insultaient. J'ai reconnu un gynécologue, Reuf Hadzibegovic, un médecin.
13 C'était un homme bien connu qui jouissait d'un certain prestige, mais il
14 n'a jamais essayé de rétablir le calme parmi ces congénères, même si, bien
15 entendu, dans ce genre de situation, c'est toujours assez difficile, mais
16 il y en avait qui prenaient des pierres et qui nous les jetaient.
17 Après avoir chargé tous les morts à bord du camion, nous nous sommes rendus
18 compte que M. Velagic semblait avoir changé d'avis puisqu'il nous a
19 autorisés à boire autant d'eau que nous le souhaitions et il nous a
20 autorisés également à nous laver.
21 Nous sommes retournés à Crnice, là où se trouvait le cimetière, mais à un
22 endroit différent de celui où nous avions creusé les fosses. On est allé à
23 Zarasla Medza [phon]. Là il y avait des buissons, des tailles de deux ou
24 trois mètres de haut. Il se trouvait là une dizaine de soldats de l'ABiH,
25 ils n'étaient pas là en qualité officielle. Je ne sais pas exactement
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1 pourquoi, ils se trouvaient là. Moi-même et Zdravko Juricic, qui était
2 enseignant de mathématiques avant la guerre et qui, pendant un moment,
3 avait même été le directeur de l'école primaire de Bugojno, ainsi que les
4 autres, Zeljko Milos, Zeljko Buljac [phon] et Franjo Ribic. On devait
5 creuser de nouveau des fosses parce qu'elles avaient été creusées, mais
6 elles n'étaient pas assez profondes.
7 Les soldats de l'ABiH nous provoquaient, nous invectivaient. L'un d'entre
8 eux portait un uniforme de camouflage flambant neuf et, de temps à autre,
9 il nous lançait une pierre de la taille d'un poing, et j'ai été touché par
10 certaines de ces pierres, par deux ou trois de ces pierres, au niveau du
11 front. J'avais une coupure à la tête, mais je n'ai pas trop saigné. Il ne
12 cessait de nous insulter. Je ne connaissais pas cet homme, mais, lui, il me
13 connaissait. Il a dit : "Regardes comme il est grand ce boucher." Il a
14 insulté ma mère en la traitant d'Oustacha. Zdravko a dit que c'était un
15 vieil âne et que c'était lui qui nous avait incités à commettre des crimes
16 contre les Bosniens.
17 A un moment donné, je l'ai vu s'emparer d'une grande pierre qui faisait,
18 disons, la dimension de deux poings. Il l'a lancée en ma direction. Fort
19 heureusement, je n'ai été touché que sur le côté gauche de la tête, si bien
20 que je porte toujours une cicatrice à cet endroit, en forme de "Y". J'ai
21 été coupé à la tête. J'ai commencé à pleurer. J'étais à genoux, comme un
22 boxeur qui vient de recevoir des coups sur le "ring" et qui s'apprête à
23 tomber. La dernière chose que j'ai vue c'est quand il s'est emparé d'une
24 pelle et il s'apprêtait à m'achever avec le côté tranchant de la pelle.
25 Mais fort heureusement, Zdravko a réagi très vite. Il s'est rendu compte de
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1 ce que l'autre allait faire. Il s'est jeté sur moi et il a crié: "Mais ils
2 vont nous tuer."
3 Zdravko a reçu un coup au coude, et le soldat, le même soldat, s'est emparé
4 d'une barre de fer. On appelle cela un "cuskija" en Bosnie. C'est utilisé
5 quand on construit une espèce de masse. C'est utilisé pour enfoncer les
6 poteaux dans le sol, quand on construit une clôture. Avec cela, il est
7 arrivé à toucher Frano Ribic au niveau de l'oreille, au-dessus de
8 l'oreille, où il a reçu fort heureusement, il n'a reçu qu'une égratignure.
9 Il n'a pas été blessé grièvement.
10 Q. Monsieur Mikulic, je vais vous interrompre et je voudrais vous demander
11 si, à ce jour, vous souffrez encore des séquelles de ces passages à tabac
12 très violents dont vous venez de nous parler, ainsi que des autres sévices
13 dont vous avez été victime, et que vous venez de décrire à la Chambre. Est-
14 ce que vous en souffrez toujours aujourd'hui ?
15 R. Au moment où on a quitté le camp, on m'a fait un électro-
16 encéphalogramme et on s'est rendu compte, à ce moment-là, que j'avais des
17 lésions dans la partie postérieure de la tête là où les os -- les
18 cartilages entre les os se sont liés. J'avais des lésions à cet endroit.
19 Quand le temps change, j'éprouve une douleur à la tête et souvent ma
20 tension artérielle augmente et descend rapidement. Il m'est arrivé d'avoir
21 une tension qui ne soit pas supérieure à 60/90. J'ai aussi mal aux
22 articulations. J'ai toujours froid après toute cette période passée à
23 coucher par terre sur le béton et j'ai une ischiatique aussi. Mais le pire
24 de tout, c'est que tout cela, je ne serai jamais en mesure de m'en remettre
25 parce que je n'arrive jamais à dormir suffisamment, même quand j'ai dormi,
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1 je ne me sens pas reposé. Mes moyens physiques et physiologiques sont
2 grandement diminués par rapport à ce qu'ils étaient précédemment.
3 Q. Cet endroit, cette zone où vous avez subi tous ces vices, vous l'avez
4 ensuite quitté. A ce moment-là, où vous a-t-on emmené après ?
5 R. Après le cimetière, on nous a emmenés de nouveau à l'entrepôt de
6 meuble.
7 Q. Monsieur Mikulic, revenons maintenant à l'école Vojin Paleksic. Je vais
8 maintenant vous montrer une nouvelle photographie avec la permission de la
9 Chambre de première instance. Il s'agit d'une photographie, qui a déjà été
10 versée au dossier et qui porte la cote P60. Nous allons vous présenter
11 cette photographie au moyen du logiciel de présentation électronique des
12 données de Sanction.
13 Monsieur Mikulic, veuillez, je vous prie, examiner la photographie qui est
14 à l'écran devant vous, et nous dire de quoi il s'agit.
15 R. Il s'agit d'une photographie que nous montre l'école Vojin Paleksic à
16 Bugojno dans le quartier d'Endik [phon], à côté du vieux stade de football
17 Iskra.
18 Q. Est-ce que c'est l'école où vous avez été enfermée en 1993 ?
19 R. Oui.
20 Q. Je signale pour le compte rendu d'audience que le témoin vient
21 d'identifier, le bâtiment qui se trouve sur la photographie P60, pièce à
22 conviction de l'Accusation. Il nous a dit qu'il s'agissait de l'école Vojin
23 Paleksic où il avait été détenu.
24 Maintenant, avec de nouveau la permission de la Chambre de première
25 instance et toujours en utilisant le logiciel Sanction, je vais vous
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1 montrer une autre photographie, une photographie qui a déjà été versée au
2 dossier, la photographie P61. Monsieur Mikulic, je vous demande de regarder
3 la photographie qui apparaît à l'écran. Veuillez, je vous prie, dire aux
4 Juges ce que l'on voit ici.
5 R. Il s'agit du gymnase de l'école primaire Vojin Paleksic.
6 Q. Est-ce qu'il s'agit du gymnase où vous-même et les autres détenus
7 avaient été enfermés au cours de ce mois d'août 1993 ?
8 R. Oui. Oui, moi-même je dormais juste en dessous du panier, que l'on voit
9 à l'écran.
10 M. WITHOPF : [interprétation] Je précise, pour le compte rendu d'audience
11 que le témoin a identifié le gymnase de l'école Vojin Paleksic où il était
12 détenu sur la photographie de l'Accusation P61, lieu où il était détenu en
13 août 1993.
14 Q. Après l'école Vojin Paleksic, où vous a-t-on emmenés ?
15 R. Après l'école Vojin Paleksic, on nous a emmenés au stade Iskra.
16 Q. Monsieur Mikulic, vous souvenez-vous de la date même si elle n'est
17 qu'approximative ? De la date où l'on vous a emmenés au stade Iskra ?
18 R. Je ne me souviens pas de la date précise, mais, en tout cas, c'était à
19 la mi-août, entre le 15 et le 18 août, mais je ne sais pas exactement
20 pendant laquelle de ces trois journées cela s'est passé exactement.
21 Q. Nous parlons, n'est-ce pas, d'août 1993 ?
22 R. Oui, oui, oui.
23 Q. Est-ce que toutes les personnes qui étaient détenues à l'école Vojin
24 Paleksic ont été emmenées au stade Iskra ?
25 R. Le stade Iskra constituait le camp final, disons, la destination
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1 finale, de tous les prisonniers de Bugojno.
2 Q. A quelle distance le stade Iskra se trouve-t-il de l'école Vojin
3 Paleksic ?
4 R. La distance n'est pas supérieure, je pense, à un kilomètre 500.
5 Q. Il y avait combien de personnes détenues au stade Iskra ?
6 R. Je crois qu'au départ, il y avait plus de 400 personnes.
7 Q. Quelle était l'appartenance ethnique de ces 400 personnes
8 -- de ces 400 détenus ?
9 R. Un soldat dont la mère était musulmane, et 14 ou 15 soldats qui
10 venaient de mariages mixtes entre des Serbes et des Croates. Il y avait
11 également deux personnes d'origine slovène, mais qui habitaient depuis
12 longtemps à Bugojno et qui se déclaraient certainement en tant que Croates.
13 On peut dire que plus de 99 % des gens, même s'il faudrait calculer ce
14 pourcentage avec précision, mais je dirais que plus de 97 à 98 % des gens
15 étaient croates.
16 Q. Ces détenus, est-ce que c'étaient tous des soldats ou il y avait parmi
17 eux des civils également ?
18 R. Au départ, il y avait également des civils.
19 Q. Combien de temps vous-même et les autres détenus êtes restés au stade
20 Iskra ?
21 R. J'y suis resté jusqu'au 19 mars 1994. A ce moment-là, quelques 300
22 prisonniers, qui se trouvaient au stade Iskra, font l'objet d'un échange.
23 Je crois que le chiffre définitif était de 296.
24 Q. Pendant votre détention au stade Iskra, étiez-vous gardé ?
25 R. Quelques jours, sans doute, avant notre arrivé au stade Iskra, le stade
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1 avait été réaménagé pour faire un véritable camp. Il y avait des miradors,
2 avec des nids de mitrailleuses. Chaque fois qu'on avait le droit de se
3 promener dans l'enceint du stade, il y avait des soldats auprès de ces
4 mitrailleuses.
5 Q. Vous venez de dire, Monsieur Mikulic, que quelques jours avant votre
6 arrivé, le stade de Iskra avait été réaménagé pour en faire un véritable
7 camp. Que ce que vous voulez dire par là, exactement, quand vous utilisez
8 ce terme de "véritable camp" ?
9 R. C'est bien la simple présence de ces nids de mitrailleuses, la simple
10 présence de gardes qui étaient là pour nous garder pendant qu'on se
11 déplaçaient, pendant qu'on marchaient. Cela me rappelait les films qu'on
12 voit sur les camps Nazis, où on voit ces situations avec des gardes qui
13 surveillent les prisonniers. Généralement, quand on se déplaçait, on avait
14 les mains derrière le dos, on était obligé de parler à voix basse, mais
15 même cela, on n'avait pas le droit de le faire.
16 Q. Est-ce qu'il y avait une clôture autours du stade Iskra ?
17 R. Il y avait une clôture en fil de fer, comme on le voit dans tous les
18 stades de football, mais il y avait aussi une partie du stade où il n'y
19 avait pas de clôture, là où on entre dans les vestiaires. Dans le stade
20 lui-même, on avait mis en place une clôture en fer, renforcé, et il y avait
21 une espèce de kiosk qui servait de point d'entrée, de point de contrôle
22 pour ce qui pénétrait dans le camp.
23 Q. Ces gardes dont vous avez dit qu'ils se tenaient auprès des nids de
24 mitrailleuses, pour reprendre le terme que vous avez employé, est-ce que
25 c'était des civils ou des soldats ?
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1 R. C'était des soldats, mais il y avait aussi des policiers militaires.
2 Q. Des soldats et des policiers militaires de quelle armée ?
3 R. Il s'agissait de la police militaire de l'ABiH.
4 Q. De quelle unité ?
5 R. J'ai déjà dit que, d'après les connaissances que j'avais de la
6 structure de ces formations, je dirais qu'il y avait -- dans ma
7 connaissance, il n'y avait une seule Brigade de l'ABiH à Bugojno.
8 Q. Cette brigade c'était laquelle ?
9 R. La 307e Brigade motorisé.
10 R. Monsieur Mikulic, veuillez, je vous prie, décrire à l'attention des
11 Juges de la Chambre le quotidien dans ce stade Iskra. J'aimerais,
12 notamment, que vous nous parliez des conditions de détention, de l'hygiène,
13 et des vivres qui vous avez été distribués.
14 R. Au stade même, il y avait un seul W.C. et il n'y avait pas de courante.
15 C'est là que l'on se rendait, lorsque c'était nécessaire et il y avait
16 également un fût. On pouvait y amener de l'eau parce qu'il y avait aux
17 environs un petit ruisseau, mais, pour cela, pour aller chercher de l'eau
18 dans ce petit ruisseau, il fallait être escorté par un soldat et ce
19 ruisseau est à une cinquantaine de mètres du stade. Ensuite, ils ont
20 installé trois latrines à l'extérieure, mais on ne pouvait pas toujours y
21 aller. On pouvait aller uniquement quand les gardes nous y autorisaient et
22 souvent ils ne nous donnaient pas la permission d'y aller qu'une seule fois
23 par jour. Quant à moi, j'ai passé la plupart du temps dans une pièce qui
24 était de 11 mètres sur six, et cela, qu'on était 140 à dormir. C'était
25 vraiment très difficile. Il y avait des gens qui avaient des cigarettes et
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1 qui fumaient, et c'était très sale et on étouffait dedans. Au sol, il y
2 avait des petites plantes ou des petites poutres en bois, et on a collé des
3 planches par-dessus. Quelques uns ont eu la chance d'obtenir des
4 couvertures de la part des membres de l'ABiH, mais c'était très, très peu
5 de personnes. Si on cherchait à savoir quel était leur pourcentage,
6 c'était, selon moi, 5 %.
7 Quant à la nourriture, on n'a reçu très peu. Vu le nombre de personnes, on
8 recevait que six miches de pain pour autant de nous. On recevait de
9 gamelles, une ou deux gamelles, pas plein, de nourriture. Un certain nombre
10 de ces gardes, qui étaient en bons termes avec quelques-uns des nôtres, ils
11 nous ont donné conseil de ne pas manger ce qui était dans ces gamelles
12 parce qu'ils faisaient leurs besoins là-dedans. Ils étaient suffisamment
13 honnêtes pour la dire et il y avait beaucoup de problèmes d'estomac et des
14 diarrhées.
15 Le soir, ils faisaient l'appel, ils citaient des noms et ils faisaient
16 sortir ces gens-là pour les passer à tabac. On a fait partir des gens de ce
17 camp pour les amener sur les lignes de combat, et c'est là que pour
18 l'essentiel qu'ils devaient creuser des tranchées et créer des abris pour
19 des soldats de l'ABiH, qui étaient déployés le long de ces lignes de
20 combat.
21 Q. Permettez-moi de vous interrompre pour l'instant, Monsieur Mikulic.
22 Vous avez mentionné précédemment le fait que six ou dix jours se sont
23 passés, dans lesquels vous avez perdu six à huit kilos. Pendant que vous
24 étiez détenu à ce stade Iskra, est-ce que vous avez continué à perdre du
25 poids ?
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1 R. Pendant ce temps-là, quand on était très mal nourri, et cela a duré
2 jusqu'à la fin du mois d'octobre, j'ai perdu plus de 25 kilos. Je peux vous
3 l'affirmer, en toute conscience, et je ne pouvais même pas marcher
4 normalement. J'étais obligé de me retenir quelques pas de chercher appui.
5 Je posais les mains sur l'estomac. J'étais recourbé et j'ai ce malheur à
6 savoir de manger trois très petites tranches de pain en dix jours.
7 Q. Pour autant que vous le sachiez, Monsieur Mikulic, les autres détenus
8 ont-ils également perdu du poids ?
9 R. On ne pourrait pas se peser, mais on pouvait voir, c'est tout. On
10 pouvait voir nos visages émaciés et torturés.
11 Q. Monsieur Mikulic, il y a quelques minutes, vous avez évoqué des
12 passages à tabac à ce stade de football d'Iskra. Pourriez-vous donner
13 quelques détails à ce sujet, à la Chambre de première instance.
14 R. Les coups étaient assénés le soir, à la nuit tombée. On faisait
15 l'appel, mais, quant à savoir qui le faisait, comment cela se faisait, je
16 ne connaissais pas les noms des soldats. La seule chose, c'est qu'on
17 entendait le nom et le prénom de quelqu'un et cette personne sortait. Voir
18 même, on ne les emmenait pas au loin pour qu'on n'entende pas. On les
19 frappait près du stade, on entendait des cris, ce dont je suis certain, et
20 cela je peux l'affirmer aujourd'hui aussi. C'est que chacun d'entre nous
21 pouvait reconnaître l'un des responsables de la relève, Djopo. Il a pris
22 part à ces appels et à ces passages à tabac.
23 Q. Pour autant que vous le sachiez, Monsieur Mikulic, quelle a été la
24 fréquence de ces passages à tabac ?
25 R. Il est arrivé que cela se passe tous les soirs et, vraisemblablement,
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1 lorsqu'au niveau supérieur politique ou militaire, par exemple, on en était
2 informé, cela s'arrêtait pendant quelques temps, et cela revenait. Il n'y
3 avait pas vraiment une régularité, il n'y avait pas de règle.
4 Q. Monsieur Mikulic, après votre arrivée à ce stade du club de foot Iskra,
5 après votre arrivée à cet endroit en août 1993, il s'est passé combien de
6 temps avant que ces passages à tabac ne commencent et qu'ils ne deviennent
7 quelque chose de fréquent ?
8 R. Mais ces passages à tabac qui se sont déroulés de la manière dont je
9 les décris, cela a continué jusqu'à la mi-novembre.
10 Q. C'était déjà commencé en août ?
11 R. Oui, oui.
12 Q. Cela s'est produit régulièrement entre le mois d'août 1993 et la mi-
13 novembre 1993 ?
14 R. Comme je viens de vous le dire, cela se produisait pendant plusieurs
15 soirées de suite, cela s'interrompait et cela reprenait. Il n'y avait pas
16 vraiment de méthode de régularité. Cela dépendait des gardes qui
17 constituaient une équipe, une relève. Je sais aussi qu'il y avait aussi des
18 gardes corrects, et quand ils étaient, eux, de service, on savait qu'on ne
19 serait pas passé à tabac.
20 Q. Est-ce qu'il y avait des gardes qui se conduisaient différemment ?
21 R. Qu'entendez-vous par "d'autres gardes" ? Vous pensez aux gardes qui
22 appartenaient à d'autres unités ?
23 R. Monsieur Mikulic, vous étiez en train de dire que, lorsque certains
24 gardes étaient de service, ils se comportaient correctement, et vous étiez
25 presque certains que vous ne seriez pas battus. Alors, j'aimerais savoir
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1 s'il y avait aussi des gardes qui prenaient part à ces appels pour frapper
2 des gens et qui prenaient part à ces passages à tabac.
3 R. J'ai dit qu'il y avait l'un des commandants qui s'appelait DJopo et il
4 y avait un policier militaire, Mustafica était son nom, je connais bien son
5 frère, son frère et ses proches, c'est une très belle famille. Avant de
6 rencontrer ce policier militaire, j'ai même passé deux nuits chez son frère
7 parce que j'ai fait mes études avec son fils. A ce moment-là, il m'a parlé
8 de son frère, enfin, le frère que j'allais rencontrer en tant que policier
9 militaire, et il me disait que c'était un homme qui n'était pas bien, qui
10 harcelait son père et sa mère. Il était âgé de 22 ou 23 ans à l'époque et
11 il avait déjà été marié deux ou trois fois.
12 Q. Monsieur Mikulic, qu'alliez vous dire au sujet de ce policier militaire
13 qui s'appelle DJopo ou Mustafica ?
14 R. C'est-à-dire que, lorsque DJopo était chef d'une relève -- je pense
15 qu'il y avait entre huit à dix gardes qui constituaient une équipe -- à ce
16 moment-là, on avait peur. On se disait qu'il allait y avoir des passages à
17 tabac, et là, le plus souvent, c'était le cas. Dans son équipe, il y avait
18 dit à Salkic, un ex-joueur de foot d'Iskra, et celui-là, il nous a souvent
19 défendus. Il n'acceptait pas qu'il y ait des passages à tabac, mais Salkic,
20 lui-même, l'a menacé. Après, il a dit à un neveu qui était un ami de DJopo
21 qu'il n'avait pas le droit de nous défendre. Il a défendu aussi Kasimir
22 Kajic, qui était son témoin de mariage, qui était lui aussi un footballeur
23 d'Iskra. A plusieurs reprises, celui-ci a été passé à tabac. Comme je l'ai
24 déjà dit, un certain nombre de détenus, que Mustafica a battus
25 personnellement lorsqu'il les a fait sortir. Ce que je peux dire, c'est
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1 qu'il nous a enlevé des effets personnels, enfin, des choses qu'on avait
2 sur nous. Il est arrivé même qu'il emmène des détenus chez eux pour qu'ils
3 prennent un bain et il en a profité pour prendre des choses chez eux.
4 Q. Je vous remercie, Monsieur Mikulic.
5 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
6 Juges, mon interrogatoire principal est terminé.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Withopf. Il est à peu près l'heure
8 du break. Le mieux c'est de s'interrompre et de reprendre pour le contre-
9 interrogatoire aux environs de 5 heures 55.
10 --- L'audience est suspendue à 17 heures 28.
11 --- L'audience est reprise à 17 heures 56.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Je donne la parole à la Défense.
13 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.
14 Contre-interrogatoire par Mme Residovic :
15 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Mikulic. Je m'appelle Edina Residovic
16 et je défends le général Enver Hadzihasanovic. Je vous fais part de ma
17 compassion pour l'expérience difficile que vous avez vécue, mais je pense
18 que vous comprendrez que j'ai un certain nombre de questions à vous poser
19 au sujet du contexte général, ainsi qu'au sujet des faits qui ont fait
20 l'objet déjà des questions auxquelles vous avez répondues de la part de mon
21 collègue de l'Accusation.
22 Monsieur Mikulic, est-il exact que vous êtes né à Potkralj, qui se trouve
23 dans la municipalité de Donji Vakuf et qu'avant la guerre et pendant la
24 guerre également, c'est-à-dire, jusqu'à l'échange que vous avez subi, vous
25 viviez à Bugojno ?
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1 R. Je vivais à Potkralj dans la maison de mes parents jusqu'en 1992.
2 Q. En 1992, vous avez déménagé dans un autre appartement à Bugojno, n'est-
3 ce pas ?
4 R. Non. C'est quand je suis entré dans mon unité que je ne suis allé à la
5 maison que cinq fois cette année-là.
6 Q. Avant la guerre, vous travailliez dans l'entreprise Slavko Rodic, en
7 tant qu'ingénieur, n'est-ce pas ? J'attends parce que votre réponse n'est
8 pas entrée dans le compte rendu d'audience en anglais.
9 R. Oui. Je travaillais à l'entreprise Slavko Rodic en tant que technicien.
10 Q. Pour être plus précise, l'endroit où vous travailliez était un domaine
11 militaire, n'est-ce pas ?
12 R. Oui. La plupart des objets fabriqués à l'usine Slavko Rodic étaient à
13 usage militaire.
14 Q. Les Juges de la Chambre connaissent déjà la situation de Bugojno en
15 Bosnie-Herzégovine, mais j'ai tout de même quelques questions à vous poser
16 afin de confirmer un certain nombre de faits qui ont déjà été établis
17 précédemment.
18 Est-il exact que Bugojno se trouve dans la partie supérieure du cours de la
19 rivière Vrbas dans ce qu'il est convenu d'appeler la vallée de Skopalj ?
20 R. Oui, c'est exact mais lorsque vous dites : "Ce qu'il est convenu
21 d'appeler", ce n'est pas un terme opportun parce que ceci est un lieu
22 géographique bien précis.
23 Q. Excusez-moi.
24 R. On le trouve en toutes lettres sur la carte.
25 Q. Cette région se trouve entre le mont Vranica et le mont Radosa et à une
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1 largeur de 20 kilomètres environ sur trois à huit kilomètres de long,
2 n'est-ce pas ?
3 R. Oui, c'est à peu près la dimension de la vallée qui va de Donji Vakuf à
4 Gornji Vakuf.
5 Q. Lorsque l'on remonte, en amont, le long de la rivière, dans cette
6 vallée, à une distance de 18 kilomètres environ, on trouve la ville de
7 Gornji Vakuf, et en aval, à une distance de 12 kilomètres environ, on
8 trouve Donji Vakuf, n'est-ce pas ?
9 R. Oui, ce sont des distances à vol d'oiseaux et elles sont
10 approximatives. La rivière Vrbas suit une ligne droite de Gornji Vakuf à
11 Donji Vakuf.
12 Q. Est-il exact, Monsieur Mikulic, qu'au cours des dix dernières années,
13 en tout cas les dix dernières années avant la guerre, Bugojno était un
14 centre économique actif et que c'était l'un des centres industriels les
15 plus importants de Bosnie-Herzégovine avant la guerre ?
16 R. Je pense qu'il y a eu une période de développement important qui a
17 démarré en 1975 ou en 1976 et ne s'est pas poursuivie jusqu'en 1999, mais
18 plutôt 1998, date à laquelle la crise a démarré dans l'ex-Yougoslavie. Les
19 entreprises avaient des résultats moins bons que par le passé, mais pendant
20 12 ans, Bugojno se développait très rapidement par rapport aux autres
21 régions de Bosnie-Herzégovine et des autres républiques de l'Ex-
22 Yougoslavie.
23 Q. Vous pouvez certainement confirmer qu'au début de la guerre en 1992, en
24 Bosnie-Herzégovine, les forces serbes ont occupé immédiatement Donji Vakuf
25 ainsi que le col Komer et que, puisque la route qui se trouvait là était la
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1 principale route pour aller à Travnik, Sarajevo et Zenica, celle-ci ne
2 pouvait plus être utilisée, n'est-ce pas ?
3 R. Oui.
4 Q. L'autre route utilisable était celle qui passait par Rostovo, qui
5 permettait d'aller à Novi Travnik et à Travnik, n'est-ce pas ?
6 R. J'avais emprunté cette route deux ans avant la guerre en effet.
7 Q. Bugojno pouvait également permettre d'accéder à l'Herzégovine, c'est-à-
8 dire au sud de la Bosnie-Herzégovine, en passant par Gornji Vakuf, Prozor
9 et Jablanica également, n'est-ce pas ?
10 R. Oui, c'était la grande route, la route principale de la république.
11 Q. Cette route qui traverse Prozor était, en 1992 et 1993, sous le
12 contrôle du HVO, n'est-ce pas ?
13 R. Pas entièrement. Voyez-vous, il y avait des sections de cette route où
14 les Bosniens Musulmans étaient majoritaires, mais, dans l'ensemble, là où
15 il n'y avait pas d'affrontements armés, la route était ouverte.
16 Q. Vous avez dit qu'en 1992, vous avez immédiatement rejoint les rangs du
17 HVO, au mois de juin, n'est-ce pas ?
18 R. Oui.
19 Q. A ce moment-là, il y avait un quartier général municipal de la Défense
20 territoriale à Bugojno, à savoir la structure militaire légitime de Bosnie-
21 Herzégovine, n'est-ce pas ?
22 R. Oui.
23 Q. Vous n'êtes pas entré dans la Défense territoriale, mais dans le 2e
24 Bataillon de la Brigade Eugen Kvaternik du HVO, n'est-ce pas ?
25 R. En effet.
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1 Q. Vous travailliez à l'état major dans le domaine administratif, mais
2 vous étiez tout de même un soldat à part entière, vous portiez un uniforme
3 et vous aviez des armes, n'est-ce pas ?
4 R. J'ai reçu des armes au mois de mars, au moment où un de mes amis
5 bosnien a abandonné son équipement et son arme. A ce moment-là, j'ai reçu
6 un fusil.
7 Q. Le QG de votre brigade se trouvait sur le mont Gorica à Tito Villa,
8 n'est-ce pas, qui constituait l'un des points surplombant la ville ?
9 R. Oui.
10 Q. Votre brigade, dans la hiérarchie du HVO, avait son QG à Grude, n'est-
11 ce pas ?
12 R. Oui, le QG était Grude.
13 Q. Vous saviez qu'à ce moment-là, la décision de créer la communauté
14 croate d'Herceg-Bosna avait déjà été prise, communauté croate d'Herceg-
15 Bosna qui comprenait trois municipalités de Bosnie-Herzégovine et,
16 notamment, la municipalité de Bugojno, n'est-ce pas ?
17 R. Oui.
18 Q. En fait, selon les décisions de création de la communauté croate
19 d'Herceg-Bosna, des Unités du HVO ont été constituées en tant que seules
20 unités armées réglementaires sur le territoire de cette importante
21 communauté, n'est-ce pas ?
22 R. Il y a eu des complications dans les endroits où la population était
23 mixte, et c'est ce qui a créé des problèmes.
24 Q. En raison de la décision des dirigeants de la communauté croate
25 d'Herceg-Bosna de créer des organes militaires parallèles, des unités du
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1 pouvoir civil parallèles ont également été constitués, n'est-ce pas ?
2 R. Oui, les Bosniens et les Croates avaient chacun leur structure de
3 pouvoir.
4 Q. Les Croates qui avaient été élus de façon légitime à l'issu d'élection
5 se sont retirés des structures où ils étaient représentés et ont créé des
6 organes civils de pouvoir à Bugojno également, n'est-ce pas ?
7 R. A Bugojno, les élus du HDZ étaient majoritaire, et ce qui s'est fait
8 c'est la même chose que ce qui a été fait dans toutes les structures du
9 parti.
10 Q. Selon ce que vous avez déjà décrit, vous connaissiez les responsables,
11 les organismes chargés d'un certain nombre de fonctions. Vous saviez que le
12 président de la présidence de guerre de la municipalité de Bugojno était
13 Dzevad Mlaco, n'est-ce pas ?
14 R. Pouvez-vous répéter votre question ?
15 Q. Vous saviez qu'à ce moment-là, en 1992 et en 1993, le président de la
16 présidence de Guerre de la municipalité de Bugojno était Dzevad Mlaco,
17 n'est-ce pas ? Le saviez-vous ?
18 R. Dans la région, oui.
19 Q. Le président du conseil croate de défense, président de la structure
20 civile du pouvoir était bien Vladimir Soljic, n'est-ce pas ?
21 R. Oui.
22 Q. La présidence de Guerre de Bugojno, dans cette année 1992 et au cours
23 de l'année 1993 également --
24 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, il y a un problème
25 technique. Les interprètes nous font savoir que la réponse du témoin à
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1 l'une des questions posées par la Défense n'a pas été entendue.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est à la ligne 7, de la page 63. Il faudrait lui
3 reposer la question. -- Vladimir Soljic.
4 Mme RESIDOVIC : [interprétation]
5 Q. Monsieur Mikulic, votre réponse à ma question n'est pas entrée au
6 compte rendu d'audience, à savoir, est-il exact que le président du HVO, en
7 tant que structure civile du pouvoir de Bugojno, était Vladimir Soljic ?
8 R. Oui.
9 Q. Merci. En 1992 et 1993, la présidence de Guerre de Bugojno exerçait le
10 pouvoir effectif aussi bien sur les structures civiles que sur les
11 structures militaires du pouvoir à Bugojno, n'est-ce pas ?
12 R. En effet.
13 Q. Dès le début, même si ces structures étaient distinctes, le
14 commandement du HVO et le commandement de la Défense territoriale se sont
15 efforcés de mettre en place des commandements conjoints. La première
16 réunion à cet effet s'est tenue le 6 mars [comme interprété] 1992. Etes-
17 vous au courant de cela ?
18 R. A ce moment-là, je ne disposais pas de ce genre d'information, je ne
19 peux ni confirmer, ni infirmer cela.
20 Q. Mais vous pouvez sans doute confirmer le fait que ce commandement
21 conjoint n'a jamais existé dans la pratique malgré ces tentatives à
22 Bugojno, n'est-ce pas ?
23 R. [aucune interprétation]
24 Q. Est-il permis de dire qu'en dehors de la Défense territoriale et, plus
25 tard, de l'ABiH et du HVO, il existait également des Unités de la Police
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1 civile à Bugojno ?
2 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Excusez-moi, il a de nouveau un problème.
3 Je vous ai demandé s'il était exact que ce commandement conjoint n'à jamais
4 agit dans la pratique, et votre réponse n'est pas inscrite au compte rendu
5 de l'audience. Pouvez-vous nous dire si c'est exact ?
6 R. Pour autant que je le sache, elle n'a jamais agit réellement.
7 Q. Merci. En dehors du HVO, structure militaire, et de l'ABiH, de
8 structure militaire également, il y avait également à Bugojno la police
9 civile, ainsi que la police civile de réserve, n'est ce pas ?
10 R. Oui.
11 Q. En fait, une partie de la population, apte à porter les armes, une fois
12 que l'état de guerre a été déclaré, a été mobilisé dans les rangs de la
13 police de réserve, et le commandant de cette police de réserve était Nijaz
14 Bevrnja, êtes-vous au courant de cela ?
15 R. Non.
16 Q. En février 1993, en dehors de la Brigade, des unités particulières ont
17 été créées, n'est-ce pas ?
18 R. Oui.
19 Q. Lorsque ces brigades ont été créées, suite à un ordre de mobilisation
20 générale, selon lequel la population croate devait être concerné, des
21 unités ont été créées sur bases territoriales, n'est-ce pas ?
22 R. Oui.
23 Q. Le commandant du Bataillon de la Garde patriotique de Bugojno était
24 Dragan Erkapic, n'est-ce pas ?
25 R. Oui.
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1 Q. Répondant à une question de l'Accusation, vous avez dit qu'à un certain
2 moment, un certain nombre d'habitants bosniens ont également été mobilisés
3 dans les rangs du HVO. Est-il exact que les Unités du HVO, en 1992 et en
4 1993, était beaucoup mieux équipées, beaucoup mieux armées, que les Unités
5 de l'ABiH ?
6 R. S'agissant des armes lourdes, je ne peux rien dire car je ne suis pas
7 au courant, mais s'agissant des armes d'infanteries, j'ai remarqué que
8 l'ABiH, et le HVO disposait des fusils automatiques. Mais je ne peux rien
9 dire de l'artillerie car je ne suis jamais allé sur les positions de
10 l'armée de Bosnie-Herzégovine ou du HVO.
11 Le HVO était mieux équipé, avait des uniformes de meilleure qualité, un
12 meilleur entraînement, des vestes d'hiver, et cetera. S'agissant de la
13 nourriture, les rations alimentaires étaient meilleures, et cela je peux le
14 dire parce que j'ai des renseignements sur ces sujets.
15 Q. Toutes ces unités, ainsi que celle de la Police de réserve, qu'ils
16 s'agissent du HVO ou de l'ABiH, tous les membres de ces unités portaient
17 des uniformes de camouflage et on pouvait les reconnaître qu'aux fonctions
18 des insignes qu'ils portaient sur ces uniformes, n'est-ce pas ?
19 R. Oui. Dans l'ensemble, on pouvait les reconnaître à la fonction des
20 insignes qu'ils portaient sur leurs uniformes puisque les uniformes de
21 camouflage se ressemblent beaucoup, qu'il s'agisse de ceux du HVO ou de
22 ceux de l'ABiH.
23 Q. Vous avez dit qu'en 1992, un grand nombre de réfugiés sont arrivés à
24 Bugojno, d'abord en provenance de la Krajina et de Donji Vakuf et, plus
25 tard, en provenance également de Jajce, après la chute de cette ville. Ceci
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1 est-il exact ?
2 R. Oui.
3 Q. Après la chute de Jajce, des réfugiés croates sont arrivés à Bugojno
4 également, mais la majorité de ces réfugiés croates ne restaient pas à
5 Bugojno puisqu'ils poursuivaient leurs chemin en direction de la Croatie ou
6 d'autre régions qui n'étaient pas dérangées par la guerre, n'est-ce pas ?
7 R. Oui.
8 Q. Les réfugiés bosniens, qui arrivaient totalement démunis, restaient
9 pour la plupart sur le territoire de Bugojno, ce qui, comme vous l'avez
10 dit, il y a quelques instants, a abouti à des changements démographiques
11 importants dans la ville, n'est-ce pas ?
12 R. En effet.
13 Q. Un autre fait a également eu une influence sur ces changements
14 démographiques, à savoir qu'une partie importante de la population croate
15 locale, majoritairement des femmes et des enfants, compte tenu de la guerre
16 et des malheurs de la guerre, à quitté Bugojno pour aller vers d'autres
17 destinations, n'est-ce pas ?
18 R. En effet.
19 Q. Il est permis de dire que juste avant les affrontements armés, au mois
20 de juillet, il ne restait plus à Bugojno que 7 000 à
21 8 000 habitants croates. Est-ce que cette estimation est exacte ?
22 R. Je pense que le chiffre est même inférieur à cela. Il y avait 15 000
23 croates au total, 15 900 peut-être, et il y en a beaucoup qui sont partis à
24 l'étranger, notamment, à l'Allemagne et en Europe occidentale, accompagnés
25 de leurs familles si la chose était possible. Les habitants de la région
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1 qui pourraient partir vers l'Europe occidentale, à cette époque-là, sont
2 allés en Europe occidentale ou vers la Croatie, et je pense que le chiffre
3 que vous avez cité est a peu près exact.
4 Q. Est-il vrai qu'à ce moment-là, déjà de nombreux réfugiés ont investi
5 des maisons abandonnées dans les environs de Bugojno, ainsi que dans la
6 ville elle-même ?
7 R. Les gens n'avaient pas de choix. Il fallait bien qu'ils habitent
8 quelque part. On leur avait donnés des certificats pour des logements
9 temporaires.
10 Q. C'est justement ce que je voulais vous demander. Vous savez que l'état
11 de Bosnie-Herzégovine avait émis des décrets au sujet du [imperceptible]
12 réservé, aux logements qui avaient été laissés abandonnés et que c'étaient
13 les autorités civiles de Bugojno qui prenaient ces genres de décisions,
14 n'est-ce pas ?
15 R. C'est bien cela. Autant que je m'en souviens, avant que les réfugiés ne
16 s'installent dans ces logements, il n'y aurait pas eu d'incident. Quand il
17 y avait des logements vacants, les gens s'y installaient. Il y en avait qui
18 trouvaient des maisons en bon état, d'autres qui s'installaient dans des
19 maisons à moitié démolies, et qui devraient procéder à un certain nombre de
20 réparations pour habiter dans ces maisons.
21 Q. En répondant à une question de l'Accusation, vous avez dit que l'une
22 des tâches qui étaient les vôtres, à l'état majeur, consistait à avoir des
23 certificats. Etes-vous au courant du fait que les Bosniens, qui voulaient
24 quitter Bugojno, avaient besoin de l'autorisation du HVO pour pouvoir
25 traverser les postes de contrôle sous le contrôle du HVO ?
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1 R. Pas seulement à Bugojno, d'ailleurs. Chaque fois qu'il fallait franchir
2 un poste de contrôle pour aller en Croatie ou ailleurs, il y avait des
3 représentants de la police militaire parce que je crois que c'était eux qui
4 effectuaient ce genre de contrôle, qui procédait à un certain nombre de
5 vérifications. Je ne pense pas qu'il s'agissait d'une obligation mise
6 seulement par le HVO de Bugojno, mais que c'était bien une obligation qui
7 est intervenue à la demande des autorités de Tomislavgrad, de Livno et
8 d'autres villes.
9 Q. En dépit du fait que cette obligation existait déjà avant, et c'est la
10 question que je vous pose, êtes-vous au courant du fait que, le 8 avril
11 1993, une réunion s'est tenue à Travnik, une réunion des représentants du
12 HDZ et du HVO de toute cette région de Bosnie, en présence de commandant de
13 la communauté croate d'Herceg-Bosna, et que, durant cette réunion, la
14 question des départs de la ville sans autorisation est abordée ?
15 R. Je ne peux pas répondre à cette question parce que je ne faisais pas
16 partie, à proprement parler, de l'état majeur. J'étais un échelon bien en
17 dessous -- d'ailleurs, à l'état major, au moins deux ou trois niveaux en
18 dessous. Je faisais partie du 2e Bataillon.
19 Q. Merci beaucoup. Vous venez d'apporter une correction à ce que j'ai dit.
20 Vous dites que vous n'étiez pas à l'état major, mais au 2e Bataillon.
21 Compte tenu de l'existence de ces postes de contrôle pour quitter la ville,
22 vous savez sans doute que, dès le printemps de 1993, des incidents mineurs
23 ou majeurs avaient déjà éclatés à ces postes de contrôle. Ceci est-il
24 exact ?
25 R. Oui.
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1 Q. Tout ceci et le fait qu'à Donji Vakuf, qui se trouve à peine à 18
2 kilomètres de Bugojno, il y avait des combats continuels entre l'ABiH et le
3 conseil de la défense croate. Tout ceci a été à l'origine de certaines
4 tensions dans la ville de Bugojno elle-même, n'est-ce pas ?
5 R. Oui, cela tombe sous le sens.
6 Q. Savez-vous que le 9 mai 1993, le HVO a fait prisonnier 38 membres de
7 l'armée au point de contrôle d'Humac. Ensuite, dans la nuit du 9 au 10,
8 l'ABiH a fait prisonnier 20 membres du HVO, le HVO a fait prisonnier sept
9 soldats ou sept membres de l'armée, ce qui n'a fait qu'augmenter les
10 tensions en ville ?
11 R. Je ne peux rien dire s'agissant du nombre de personnes que vous
12 mentionnez parce que je n'ai pas eu de rapports officiels à ce sujet. Mais
13 c'est un fait, ces incidents ont eu lieu et n'ont fait qu'aggraver la
14 situation.
15 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
16 Juges, je constate qu'à plusieurs reprises, mon éminente consoeur présente
17 trois, voire quatre ou même cinq faits dans une seule et même question, ce
18 qui me semble causer problème. Je pense qu'il serait bon de suggérer à mon
19 éminente consoeur de formuler ses questions de manière différente afin
20 qu'une question ne contienne qu'un seul fait et pas plus.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. C'est le cas à la page 69, ligne 8 où à la
22 question, il y a plusieurs points. Pour la clarté de l'audience, il
23 vaudrait mieux, dans la mesure où vous pouvez, lui poser question par
24 question. C'est beaucoup plus clair. C'est plus clair dans l'esprit du
25 témoin qui ne doit pas faire face à ce moment-là, à une avalanche de
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1 questions dans une question.
2 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
3 Je vais poser mes questions comme vous me le suggérer. Je pense,
4 effectivement, que c'est une meilleure façon de procéder.
5 Q. Même si ma question était compliquée, vous y avez répondu. Vous m'avez
6 dit que vous ne connaissiez pas les chiffres exacts mais que vous aviez
7 connaissance des ces incidents, n'est-ce pas ?
8 R. Oui.
9 Q. Vous saviez également que l'ABiH et le HVO s'efforçaient de remédier à
10 ces situations, à ces abus ?
11 R. Des deux côtés, Lucic et Granic, les commandants de chacune des parties
12 en présence faisaient tout ce qui était dans leur pouvoir pour éviter le
13 conflit. Si ces gens-là, avaient eu leur mot à dire, il n'y aurait pas eu
14 de conflits.
15 Q. Mais, étant donné le poste que vous occupiez au sein du Bataillon
16 auquel vous apparteniez, vous savez sans doute que, dans le village de
17 Vrbanja, le 17 juillet au carrefour qui menait vers le village de Kandija,
18 le HVO a mis en place un point de contrôle et qu'immédiatement après, la
19 population de Vrbanja a mis en place un autre point de contrôle. Est-ce que
20 vous savez cela ?
21 R. Je ne dirais pas que c'étaient des gens de Vrbanja. C'étaient plutôt
22 des membres de l'ABiH.
23 Q. Oui, des membres de l'ABiH du village de Vrbanja ont mis en place un
24 autre point de contrôle à quelques 500 mètres. Sur ce point de contrôle, il
25 s'est produit ensuite un affrontement armé au cours duquel des membres de
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1 l'armée ont tué des membres du groupe anti-terroriste du HVO, c'est-à-dire
2 Miroslav Telenta, et plus tard Mijo Vucak lui également a été tué.
3 R. Moi, mes informations que j'ai eues c'étaient qu'ils avaient été tués
4 pratiquement au même moment, c'est-à-dire que Mijo Vucak avait été emmené
5 dans une étable pour être tué.
6 Q. Savez-vous que le même jour, pour enquêter sur la mort de ces deux
7 soldats du HVO, on a mis en place une commission conjointe qui était
8 constituée de quatre membres du MUP de la Bosnie-Herzégovine et de quatre
9 membres du MUP de la communauté croate de Herceg-Bosna ?
10 R. Je l'ignorais. Mais pendant que j'étais prisonnier au lycée, j'ai
11 appris que ce groupe avait fait une enquête sur place et que deux soldats
12 bosniaques avaient été tués. Je connaissais l'un deux personnellement. Il
13 venait d'un village très proche.
14 Q. Ces meurtres et l'attaque du HVO ont marqué le début du conflit à
15 Bugojno, conflit qui ensuite s'est propagé à partir du village de Vrbanja
16 dans toute la ville, n'est-ce pas ?
17 R. Cette semaine-là, il y avait des tensions. Je sais que certains des
18 membres de notre unité avaient été faits prisonniers pour être ensuite
19 immédiatement emmenés au lycée. Mais le conflit armé en tant que tel, parce
20 que ce dont je vous parle c'était le dimanche, mais c'est lundi matin que
21 le conflit en tant que tel a véritablement commencé à 4 heures du matin ou
22 5 heures du matin peut-être.
23 Q. A ce moment-là, comme vous l'avez dit à plusieurs reprises, il y avait
24 simplement une seule brigade de l'ABiH sur place. C'est-à-dire la 307e
25 Brigade à Bugojno. Du côté du HVO, il y avait une brigade, la Brigade Eugen
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1 Kvaternik ainsi que le Bataillon des Doma Brani [phon] n'est-ce pas, la
2 garde villageoise ?
3 R. Oui.
4 Q. Etant donné que vous aviez entendu parler de cet incident au cour
5 duquel deux membres du MUP de Bosnie-Herzégovine avaient également été
6 tués, vous savez sans doute qu'en attaquant Vrbanja, le HVO a tué 54
7 musulmans bosniaques, le village a été incendié et complètement détruit ?
8 R. Je sais que le 1 août, alors que je me trouvais au cimetière de Crnice,
9 j'ai entendu l'imam [phon] que je connaissais de vue parce qu'il venait du
10 village de Porica, je l'ai entendu parler à des anciens, je ne sais pas si
11 c'étaient des gens de Crnice ou de Vrbanja, cela je ne le sais pas, mais en
12 tout cas il leur disait que les victimes de Vrbanja avaient été enterrées
13 et que leur nombre total s'élevait à 19 victimes.
14 Q. En réponse à une question posée par le Procureur, vous avez dit, vous
15 venez de le répéter, vous avez dit que l'on vous avait emmené pour
16 travailler en ville et que, dans ce cas précis, on vous avait emmené
17 creuser des tombes. Maintenant, je voudrais vous demander si vous savez
18 que, jusqu'à la fin 1993, et pour ce genre de travaux, c'étaient les
19 autorités civiles de Bugojno de la municipalité de Bugojno qui étaient
20 responsables de ce genre de mission ?
21 R. Oui, sans doute les autorités civiles parce que j'y ai vu certains de
22 nos médecins.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, M. Withopf.
24 M. WITHOPF : [interprétation] Dans sa dernière question, je pense qu'il y a
25 un petit problème -- la dernière question posée par ma consoeur, vu la
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1 décision rendue par la Chambre de première instance le 16 mars 2004 au
2 sujet des travaux forcés. En vertu de cette décision, les travaux forcés ne
3 sont pas une question au sujet desquels les partis sont autorisés à poser
4 des questions directrices. Je m'oppose à ce type de questions.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Vu la décision qui a été rendue, excluez de l'acte
6 d'accusation toute référence au traitement inhumain et, notamment, aux
7 travaux forcés mais je ne pense pas que vous aviez l'intention d'aborder
8 cette question puisque c'est à votre demande que nous avons tranché ce
9 problème. Votre question devait avoir une autre connotation. Pouvez-vous
10 répondre sur ce point précis ?
11 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons reçu
12 votre décision aujourd'hui, nous en connaissons la teneur. Je me limite aux
13 questions abordées pendant l'interrogatoire principal du Procureur. Le
14 Procureur, qui n'a cessé d'interroger le témoin au sujet de ce qui se
15 passait en dehors de la prison où il était détenu. Deuxièmement, je
16 souhaiterais interroger le témoin au sujet de la chaîne de commandement, de
17 la filière hiérarchique, étant donné qu'au cours de l'interrogatoire
18 principal, le témoin a parlé de tout ce qui s'était passé au cimetière de
19 Vrbanja ainsi qu'à Crnice. Mais je n'ai pas l'intention de poursuivre ces
20 questions encore plus loin. Je voudrais simplement établir, déterminer
21 quelles étaient les filières hiérarchiques. Je voudrais également régler
22 les questions de subordination, de rapport hiérarchique à Bugojno même.
23 Etant donné que le témoin a répondu à ma question, je souhaiterais lui
24 demander d'examiner un document dont nous allons demander que lui soit
25 attribuer une cote aux fins d'identification uniquement, et afin que je
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1 puisse passer à ma question suivante. Je souhaiterais présenter un
2 document, qui est celui-ci.
3 Ce document, peut-il être présenté au témoin, s'il vous plaît.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Posez-lui la question.
5 Mme RESIDOVIC : [interprétation]
6 Q. Monsieur Mikulic, vous voyez ce document. Je sais que vous n'avez pas
7 eu la possibilité de voir ce document précédemment, mais la question que je
8 vais vous poser à son sujet est la suivante : Est-il exact que le
9 présidence de Guerre de la municipalité de Bugojno était l'organe civil qui
10 détenait le pouvoir à Bugojno ?
11 R. La présidence de Guerre était sans doute à la fois -- une instance à la
12 fois civile et militaire à Bugojno.
13 Q. Le conseil exécutif était en réalité le gouvernement de Bugojno à
14 l'époque, n'est-ce pas ?
15 R. Vous me posez des questions au sujet de points sur lesquels je ne
16 saurais me prononcer parce que je n'étais pas présent.
17 Q. Connaissez-vous le rôle que Zair Mujo [phon] à Bugojno à l'époque ?
18 R. Il me semble que c'était le président, Zair Mujo [phon], il travaillait
19 à TBM. Je sais que c'était quelqu'un de très bien, mais je ne sais pas ce
20 qu'il a fait pendant la guerre. Je sais qu'il était chef de quelque chose,
21 mais je ne sais pas de quoi. Je ne peux pas vous aider à ce sujet.
22 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, étant donné qu'il
23 s'agit là, d'un document pertinent, mais que nous ne pouvons pas attendre
24 du témoin qu'il authentifie ce document, nous souhaiterions que ce document
25 reçoive un numéro d'identification, s'il vous plaît.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux demander quelque chose ?
2 Quel est l'intérêt de présenter ce document et de me le montrer à moi ?
3 Est-ce que vous voulez prouver que nous, en tant que prisonniers, ne
4 travaillions pas en ville effectivement, qu'on n'allait pas creuser des
5 tranchées au front ? Je ne comprends pas la signification de ce document.
6 Mme RESIDOVIC : [interprétation]
7 Q. Je n'ai jamais remis en question la teneur de votre déposition. J'ai
8 déjà expliqué que dans la chaîne de commandement -- pour ce qui est de la
9 chaîne de commandement, en tant qu'équipe de la Défense, nous sommes en
10 train de démontrer un certain nombre de faits est d'établir un certain
11 nombre de faits, y compris celui des travaux forcés réalisés à Bugojno.
12 R. Moi, j'ai vu des équipes de travail, des amis, des Croates, des
13 ingénieurs, des médecins qui nettoyaient les rues.
14 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce qu'on
15 pourrait avoir une cote pour ce document, s'il vous plaît ? M. WITHOPF :
16 [interprétation] Monsieur le Président, s'il s'agit uniquement de donner un
17 numéro d'identification à ce document, nous n'avons pas d'objection, s'il
18 s'agit uniquement d'identification. Cependant, j'aimerais que notre
19 éminente consoeur informe à la fois la Chambre et l'Accusation de l'origine
20 -- de la provenance de ce document.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, c'est ce que nous avions à chaque fois indiqué.
22 Ce document vient de quelle source ?
23 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Au cours des enquêtes, pendant la mise en
24 état, nos enquêteurs ont travaillé dans les archives de la municipalité de
25 Bugojno, et ce document et un autre document que je vais montrer au témoin
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1 viennent des archives de Bugojno.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Monsieur le Greffier, donnez-nous un
3 numéro aux fins d'identification, B/C/S et anglais.
4 M. LE GREFFIER : [interprétation] Pour ce qui est du document en B/C/S, il
5 s'agira de la cote DH62 aux fins d'identification; et pour la traduction en
6 anglais, DH62/E pour identification.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. Poursuivez.
8 Mme RESIDOVIC : [interprétation]
9 Q. Monsieur Mikulic, il nous reste seulement quelques questions à vous
10 poser. Est-il exact qu'avant la guerre, il n'y avait pas de prisons à
11 Bugojno, en dehors d'une sorte de cellule ou de zone de détention au poste
12 de police ?
13 R. Je sais que le HVO a mis en place une prison à l'école élémentaire de
14 Gracanica où des Serbes étaient emprisonnés, mais en très petit nombre.
15 Q. Il est possible qu'on se soit mal compris parce que, moi, ma question
16 était de savoir si, avant la guerre, il était bien exact qu'il n'y avait
17 pas de prisons à Bugojno. On envoyait les prisonniers au KP Dom de Zenica,
18 n'est-ce pas ?
19 R. A ma connaissance, il n'y avait pas de prison à Bugojno, autant que je
20 m'en souvienne et aussi loin que je puisse m'en souvenir.
21 Q. En réponse à une question posée par l'Accusation, vous nous avez dit
22 que vous êtes arrivés au stade d'Iskra au cours de la deuxième moitié du
23 mois d'août et que ce stade était une prison qui accueillait tous les
24 prisonniers du HVO, n'est-ce pas ?
25 R. Oui.
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1 Q. Précédemment, tous les lieux où vous-même et les autres étiez détenus
2 étaient des lieux de détention temporaires, n'est-ce pas ?
3 R. Probablement puisqu'on n'y est pas resté très longtemps.
4 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Maintenant, j'aimerais que l'on présente
5 au témoin le deuxième et le dernier document que j'ai l'intention de lui
6 présenter. Nous disposons de suffisamment d'exemplaires pour les Juges de
7 la Chambre et pour l'Accusation.
8 Q. Avant que vous n'examiniez ce document, je voudrais savoir si vous
9 connaissez un dénommé Mermed Salukovic.
10 R. Je crois qu'il y avait quelqu'un dans une entreprise du bâtiment,
11 Gorica Bugojno, qui portait ce nom. Je crois que c'était un des directeurs
12 là-bas. C'est ce que disaient les détenus qui travaillaient à Gorica. Ils
13 disaient que c'était un de leurs collègues et qu'il avait occupé le poste
14 de chef de la prison pendant qu'ils étaient à l'école Vojin Paleksic. Cela
15 je le sais avec certitude.
16 Q. Merci. Maintenant, examinons ce document. (67-68)D'après ce qu'on voit
17 sur le document lui-même, il constitue une décision portant sur la
18 nomination des directeurs des centres de Détention temporaires à Bugojno.
19 R. C'est cela.
20 Q. Ce document emmène de la municipalité de Bugojno, de la présidence de
21 Guerre et, comme vous venez de le dire, c'était une instance de pouvoirs à
22 la fois civile et militaire.
23 R. Oui.
24 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, compte tenu du fait
25 que ce document est pertinent, compte tenu de la teneur de ce document, et
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1 qu'il concerne directement tout les chefs de l'accusation eu égard à
2 Bugojno, et vu aussi que le témoin vient de confirmer qu'il savait que la
3 personne concernée par cette décision était le directeur de cette prison,
4 je propose le versement au dossier de ce document.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je vous poser une question ?
6 Malheureusement, nous n'étions pas des prisonniers. Nous étions des
7 esclaves. Les prisonniers, ils subissaient des interrogatoires, on
8 détermine la peine. Nous, nous n'avons rien de cela, malheureusement.
9 Nombreux de mes amis ont été liquidés, éliminés de la manière la plus
10 brutale qu'il soit. Or, je pense que ceci ne se passe pas dans des prisons.
11 Je pense, effectivement, que ce document a pu exister, mais le fait est que
12 la réalité ne correspond pas à cela.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Withopf, pour ces observations sur le
14 deuxième document, le Chambre fait constater plusieurs éléments. Tout
15 d'abord, le deuxième document a été établi antérieurement pour les
16 documents, le 28 juillet. Le président de la municipalité de guerre était
17 M. Dzevad Mlaco. Le second document a été établi le 24 septembre 1993, et
18 le président apparemment a changé, puisque c'est M. Zair Nevo.
19 Deuxième remarque, ces deux documents font référence à un autre document
20 qui est les "guidelines". Le deuxième fait référence aux Articles 9 ou 10,
21 et le premier à l'Article 3. Mais on constate que le premier document, qui
22 a été fourni, a été délivré au commandant de la 307e Brigade mécanisée,
23 alors que le deuxième document ne fait mention d'aucun estimateur. Par
24 ailleurs, dans le deuxième document, il n'est pas indiqué que ce document
25 sera publié à la Gazette officielle de la municipalité de Bugojno, ce qui
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1 avait été le cas dans le premier document.
2 Si les documents apparaissent concordant quant à la forme, il y a quand
3 même des différences quant au fond et, notamment, quant à la liste de
4 diffusion mentionnée. C'était les observations que je voulais faire
5 paraître avant de recevoir les observations de l'Accusation.
6 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
7 Juges, l'Accusation partage vos préoccupations au sujet de ce document, les
8 mêmes préoccupations que vous venez de faire valoir, Monsieur le Président.
9 L'Accusation soulève une objection quant au versement de ce document au
10 dossier, et ce pour toute une série de raisons supplémentaires. Le témoin
11 n'était pas en mesure de formuler un commentaire au sujet de ce document,
12 au-delà de la teneur, elle-même, de ce document. Ce document se réfère à
13 une prison provisoire, temporaire, et j'insiste sur le singulier, tandis
14 que mon éminente collègue, dans ces questions, a formulé ces expressions au
15 pluriel. Elle a parlé "des prisons temporaires".
16 Enfin, si l'Accusation soulève une objection au versement de ce document au
17 dossier, c'est pour la raison suivante. L'Accusation n'arrive pas à voir
18 quelle est la pertinence de ce document ? Ce document ne dit rien au sujet
19 de cette prison. Personne ne sait si l'un des six centres de Détention de
20 Bugojno est effectivement concerné par ce document, Monsieur le Président.
21 Par conséquent, comme je viens de le dire, et pour des raisons
22 supplémentaires que je viens de préciser, l'Accusation s'oppose au
23 versement de ce document au dossier, et nous opposons également à ce qu'on
24 l'attribue une cote à la fin d'identification à ce document.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans la mesure où on a donné un numéro pour
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1 l'identification du premier, on va le donner pour un deuxième, et la
2 Chambre délibérera sur la question de savoir ce que nous ferons du
3 document, néanmoins que la Défense veut rajouter quelque chose.
4 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, merci. Je
5 tiens à répondre à un certain nombre de dilemmes dont vous avez faits état.
6 Le deuxième document -- en réalité, le deuxième document que j'ai montré,
7 qui porte la date du 28 juillet 1993, qui précède le premier, a été émis
8 par la présidence de Guerre, et c'est celle-ci qui joue le rôle d'une
9 assemblée municipale en temps de guerre. C'est le président, Dzevad Mlaco,
10 qui a signé ce document. Lorsque j'ai posé mes questions au témoin, le
11 témoin m'a répondu qu'il savait qui était le président de la présidence de
12 Guerre en 1992 et en 1993, c'est ce qui figure au compte rendu d'audience.
13 L'autre document émane du comité exécutif de la présidence de Guerre. Dans
14 notre contexte, c'est bien le gouvernement. Ce n'est pas l'assemblée
15 municipale, c'est le gouvernement. Il s'agit là de deux instances
16 différentes, et c'est la raison, pour laquelle ce que vous venez de citer
17 comme étant des différences, s'explique.
18 Un autre point, pour ce qui est d'adresser le document, il me semble que
19 chacune des instances -- chacun des organes décide de la liste destinataire
20 de sa décision. La présidence de Guerre, dans ce document du 28 juillet
21 1993, précise que cette décision sur la nomination, puisqu'il s'agit bien
22 d'un acte a part, entre en vigueur sur le champ. Il ne s'agit pas d'une
23 décision qui couvre quelque chose de manière générale. Il s'agit d'une
24 décision particulière et il n'y a pas lieu de la publier dans le journal
25 officiel.
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1 C'est pour ce qui est de sa forme, et pour ce qui est de la teneur, je
2 crois avoir expliqué les raisons pour lesquels la Défense estime que ce
3 document est pertinent. Ensuite, lorsque j'ai demandé au témoin s'il savait
4 qui était Mehmed Sadikovic, le témoin m'a répondu très clairement qu'il le
5 savait que cet homme a été directeur de la prison lorsque le témoin se
6 trouvait dans l'un des centres de Détention. Je ne sais plus si c'était le
7 lycée ou à l'entrepôt de meubles, mais je suis sûr que cela figure dans le
8 compte rendu de l'audience, en tant qu'il y en était la réponse témoin --
9 fournie par le témoin. Par conséquent, j'estime que le document est
10 pertinent, et je maintiens la demande de la Défense en fin de versement de
11 ce document.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons donner un numéro provisoire afin
13 d'identification, et nous en délibérerons antérieurement. Monsieur le
14 Greffier ?
15 M. LE GREFFIER : [interprétation] Dans la version B/C/S, il s'agit du
16 document DH63, la traduction anglaise DH63/E.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
18 Poursuivez.
19 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
20 Q. Monsieur Mikulic, je tiens à vous remercier. Je n'ai pas d'autres
21 questions à vous poser. Je vous remercie de m'avoir répondu.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que les autres Défenseurs veulent poser des
23 questions ?
24 M. DIXON : [interprétation] Non, Monsieur le Président, nous n'avons pas de
25 questions à poser à ce témoin, compte tenu du fait que l'on rapproche pas à
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1 M. Kubura des questions qui concernent la déposition de ce témoin. Merci.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Dixon.
3 Monsieur Withopf, est-ce que vous avez des questions supplémentaires pour
4 les dix minutes qui nous restent ?
5 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
6 Juges, l'Accusation n'a plus de questions. Je vous remercie.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.
8 Mais, Monsieur le Témoin, votre --
9 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est moi qui vous remercie.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : -- votre témoignage est terminé. Vous avez répondu
11 tant aux questions de l'Accusation qu'aux questions de la Défense. La
12 Défense avait bien pris soin de vous dire que, malgré le traumatisme que
13 vous aviez eu à la suite de ces événements, elle devait jouer son rôle
14 également de Défense en vous posant des questions. C'est dans ce cadre
15 général que s'est déroulé votre interrogatoire. Nous vous remercions d'être
16 venu témoigner à La Haye. Nous vous souhaitons un beau voyage de retour. Je
17 vais demander à Mme l'Huissière de bien vouloir vous raccompagner à la
18 porte de la salle d'audience.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est moi qui vous remercie.
20 [Le témoin se retire]
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour les quelques minutes qui nous restent, je
22 souhaiterais interroger la Défense sur la question de la maquette. Où en
23 est-on sur la maquette ? Vous nous avez indiqué la dernière fois que vous
24 étiez en train d'étudier la question et je pensais d'avoir très rapidement
25 sous les yeux --
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1 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président. Il me fait plaisir de vous
2 offrir quelques explications à ce sujet. Tout d'abord, j'aimerais profiter
3 de l'occasion pour remercier le Greffe du Tribunal qui nous a vraiment
4 facilité la tâche afin que notre maquette soit d'abord transportée vers le
5 Tribunal. La maquette est présentement entreposée dans une salle tout près
6 de la salle d'audience et prête à être utilisée. Nous devions l'utiliser
7 pour le témoin qui a été retiré la semaine dernière puisqu'il était un
8 témoin que nous pensions était le meilleur témoin pour pouvoir éclairer --
9 apporter certaines informations à la Chambre sur la maquette elle-même. Dès
10 la comparution d'un prochain témoin qui pourra utiliser efficacement cette
11 maquette, nous comptons l'utiliser à ce moment. Merci Monsieur le
12 Président.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Maître Bourgon, de ces explications. Je me
14 tourne vers M. Withopf.
15 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
16 Juges, comme je l'ai déjà dit à plusieurs reprises, sur le principe,
17 l'Accusation ne s'opposera pas à ce que l'on se serve de cette maquette.
18 Ceci étant dit, avant que l'on ne commence à l'utiliser, l'Accusation
19 souhaiterait avoir quelques précisions, quelques réponses à des questions.
20 Alors, il serait peut-être utile à la fois pour la Chambre et pour
21 l'Accusation, de savoir qui est l'auteur de cette maquette ? A quel moment
22 l'a-t-on faite ? Dans quel but l'a-t-on fabriquée ? Aussi, quelle est
23 l'échelle de cette maquette ? Lorsque l'Accusation aura eu l'occasion de
24 voir la maquette, il y aura peut-être d'autres points qu'elle souhaitera
25 soulever. Par conséquent, nous nous réservons le droit de formuler quelques
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1 commentaires supplémentaires par la suite.
2 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, sur le champ, nous
3 sommes en mesure de le dire à la fois à vous et aux collègues de
4 l'Accusation. Alors, cette maquette a été fabriquée au sein de l'armée de
5 la fédération de Bosnie-Herzégovine. Cela fait plus d'un an, en fait, qu'on
6 a commencé. La maquette n'ayant pas été complètement terminée, nous avons
7 adressé une requête à l'armée de la fédération pour que -- pour les besoins
8 de ce procès, pour que nous puissions nous servir de cette maquette pendant
9 le procès si la Chambre de première instance jugeait utile, aussi pour le
10 versement de la maquette en tant que pièce à conviction, que l'armée nous
11 permette d'accéder à la maquette. L'armée nous a répondu favorablement et
12 c'est à ce moment-là que nous avons informé la Chambre, en lui faisant
13 savoir que nous serons peut-être en mesure d'obtenir une maquette de cette
14 région.
15 Alors, je précise que ce sont vraisemblablement des experts militaires, au
16 sein de l'armée de la fédération, qui sont les auteurs de la maquette. Je
17 ne peux pas vous citer sur le champ l'échelle de celle-ci. Mes collègues
18 sont en train de me dire que c'est une échelle de 50 000. Il s'agit
19 uniquement d'une représentation géographique de la région. J'ajoute qu'au
20 sein de l'armée de la fédération, cette maquette a existé depuis bien
21 longtemps. Mais une partie de la maquette, vraisemblablement pour l'affaire
22 Blaskic, a été communiqué soit au Procureur, soit à la Défense, je ne peux
23 pas vous le dire précisément maintenant, et on s'en ait servi dans cette
24 affaire. C'est la raison pour laquelle cette partie-là de la maquette a été
25 retravaillée. Sur la maquette, elle-même, on voit qu'il y a quelques
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1 légères différences. Sur le plan technique, c'est un petit peu différemment
2 fait, mais il s'agit d'une maquette identique.
3 Alors, Monsieur le Président, nous ne souhaitons pas soulever toute une
4 série de questions devant la Chambre. Comme nous avons la maquette ici dans
5 le bâtiment, nous pouvons tout à fait la montrer au Procureur. Si elle a
6 des questions supplémentaires, nous nous proposons de lui répondre à
7 celles-ci. Nous estimons aussi que nous aurons des témoins internationaux
8 qui viendront déposer et que cela serait peut-être un bon moment pour la
9 présenter. Merci.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. A ce stade, je pense que la meilleure solution
11 serait que l'Accusation, avec la Défense, conjointement, voient de visu la
12 maquette qui se trouve dans les locaux. Elle serait à des milliers de
13 kilomètres, on comprendrait, mais elle est là.
14 Monsieur Withopf, vous avez certainement quelques minutes à consacrer à
15 l'examen visuel de cette maquette. Voyez-la avec la Défense, ce qui vous
16 permettra d'en étudier tout le champ de cette maquette. A ce moment-là,
17 vous nous direz, en ce qui vous concerne, y a-t-il problème ou pas. Mais
18 c'est une maquette qui a été confectionnée par l'armée, à l'échelle de 1 :
19 50 000, une maquette géographique. On ne voit pas où pourrait exister un
20 problème, mais peut-être que vous en trouverez un. Mais pour le trouver
21 encore, faut-il que vous visualisiez cette maquette. Le mieux c'est que
22 vous alliez voir la maquette et vous nous fassiez part de vos -- de votre
23 opinion après avoir vu cette maquette. Ceci peut se faire dans le cadre
24 d'un échange des pièces entre les parties.
25 Monsieur Withopf, je vous redonne la parole.
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1 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
2 Juges, ceci correspond parfaitement à ce que l'Accusation aurait souhaité
3 suggérer. J'en serais extrêmement reconnaissant à mes éminents collègues de
4 la Défense s'ils pouvaient nous informer, ou plutôt s'ils pouvaient
5 informer, à la fois, la Chambre et le Procureur de la branche ou de l'Unité
6 de l'armée qui a réalisé cette maquette et dans quel but. Quel a été
7 l'objectif militaire qui a présidé à la réalisation de cette maquette ?
8 Alors, là, ceci pourrait constituer un problème. Je suis sûr que nos
9 collègues de la Défense peuvent nous répondre.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, l'Accusation voudrait savoir quelle est la
11 branche ou l'Unité de l'ABiH qui a confectionné la maquette. La deuxième
12 question, quel état l'objet ? Mais il semble que vous avez déjà répondu
13 puisque vous avez indiqué qu'une partie de la maquette a déjà servi dans un
14 dossier qui a déjà été évoqué dans le Tribunal, et je pense que c'était
15 également pour le même objet. Mais peut-être que vous pouvez à ce stade
16 répondre aux interrogations de l'Accusation. Maître Bourgon.
17 M. BOURGON : Merci, Monsieur le Président. Les précisions que nous pouvons
18 apporter à la Chambre, à ce stade-ci, c'est que, dans la plupart des armées
19 du monde, Monsieur le Président, il y a des maquettes d'un territoire où
20 une armée est censée faire des opérations et que, très régulièrement, il
21 arrive qu'on prépare des maquettes qui sont préparées normalement par le
22 service des Maquettes de l'armée en question, de façon à permettre l'étude
23 du terrain pour que les officiers d'état major puissent savoir là où ils
24 seraient appelés à mener les opérations. Dans le cas de cette maquette, il
25 s'agit, comme je l'ai indiqué à la Chambre un peu plus tôt, d'une partie
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1 d'une maquette qui est beaucoup plus grande, qui fait presque toute la
2 pièce ici, qui représente la Bosnie au complet. Nous avons réussi à obtenir
3 une partie de cette maquette, soit la région représentée, ou du moins la
4 région visée, par l'acte d'accusation. Alors, Monsieur le Président, il n'y
5 a pas de cachette. Je suis certain que mon confrère, lorsqu'il sera à même
6 de voir cette maquette, pourra voir que ce n'est qu'une aide visuelle afin
7 de permettre à toutes les parties présentes et impliquées dans ce procès,
8 de mieux voir le terrain avec, surtout, ce qui est la partie la plus
9 intéressante, c'est le relief, de voir les montagnes et de bien comprendre
10 les distances entre chacune des villes. Merci, Monsieur le Président.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Le mieux, Monsieur Withopf, c'est que vous voyez la
12 maquette et, ensuite, la Chambre sera prête pour écouter vos conclusions
13 après la vision de cette maquette.
14 L'audience est achevée. Il est 19 heures. J'invite tout le monde à revenir
15 demain pour l'audience qui commencera à 9 heures du matin. Merci.
16 --- L'audience est levée à 19 heures 01 et reprendra le jeudi 18 mars 2004,
17 à 9 heures 00.
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