International Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le lundi 26 avril 2004

2 [Audience publique]

3 --- L'audience est ouverte à 14 heures 18.

4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame la Greffière, pouvez-vous appeler le numéro

6 de l'affaire, s'il vous plaît.

7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Affaire numéro IT-01-47-T, le Procureur

8 contre Enver Hadzihasanovic et Amir Kubura.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Madame la Greffière.

10 Je vais demander aux représentants de l'Accusation de bien vouloir se

11 présenter.

12 M. WITHOPF : [interprétation] Bon après-midi, Madame le Juge, Messieurs les

13 Juges. Mme Benjamin; moi-même, M. Withopf; et Ruth Karper.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Withopf.

15 Je vais demander aux avocats de bien vouloir se présenter.

16 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Bon après-midi, Madame, Messieurs les

17 Juges. Nous représentons les intérêts du général Hadzihasanovic. Je

18 m'appelle Edina Residovic, conseil principal; accompagnée de Stéphane

19 Bourgon, co-conseil; et de Mme Milanovic, qui est notre assistante

20 juridique. Merci.

21 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges,

22 nous défendons les intérêts de M. Kubura. Nous sommes Rodney Dixon, Me

23 Ibrisimovic, et nous avons M. Mulalic, qui est notre assistant.

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. La Chambre, après ce "weekend", salue toutes

25 les personnes présentes, les représentants de l'Accusation, les avocats,

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1 les accusés, ainsi que le personnel de cette salle d'audience et, tout

2 particulièrement, Mme la Greffière, qui va nous assister cette semaine.

3 Je joins une autre salutation aux interprètes, aux sténotypistes, ainsi

4 qu'aux personnels du service de Sécurité.

5 Nous avons aujourd'hui la poursuite de l'audition d'un témoin qui a

6 témoigné vendredi. Son témoignage doit se poursuivre par un contre-

7 interrogatoire. Via le juriste de la Chambre, j'ai appris que la Défense

8 voulait nous faire part de représentation. Je leur donne la parole.

9 M. BOURGON : Bonjour, Madame le Juge. Bonjour, Monsieur le Juge. Bonjour,

10 Monsieur le Président.

11 Monsieur le Président, à ce stade-ci, au moment de débuter le contre-

12 interrogatoire du témoin, qui est présentement devant la Chambre, le

13 lieutenant-colonel Chambers, nous aimerions obtenir certaines

14 clarifications concernant la décision de la Chambre, qui traite de la durée

15 des contre-interrogatoires. Monsieur le Président, notre compréhension de

16 la décision de la Chambre est que la Défense ne doit pas -- ou ne devrait

17 pas utiliser plus d'un point cinq fois

18 -- une fois et demie le temps utilisé par l'Accusation pour le

19 contre-interrogatoire. Ce temps serait destiné à la fois aux représentants

20 des deux accusés.

21 Monsieur le Président, cela nous pose certains problèmes dans la

22 présentation de la preuve et pour les motifs suivants : les témoins, qui

23 sont présentement devant la Chambre pour les deux dernières semaines et

24 pour les semaines à venir, sont des témoins internationaux. A plusieurs

25 reprises, Monsieur le Président, les témoins internationaux seront, de

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1 notre avis, nous allons avoir besoin d'avantage de temps que l'Accusation.

2 L'Accusation a l'avantage d'avoir rencontré le témoin. Il s'agit de son

3 témoin. Le témoin en question a déjà mentionné à l'Accusation ce qu'il va,

4 entre autres, ce qu'il a à dire devant cette Chambre. Il n'y a pas de

5 surprises de ce côté-là.

6 L'Accusation a déposé ou tente de faire admettre au dossier une multitude

7 de documents, dont plusieurs ont à voir avec les témoins internationaux.

8 Lorsqu'un témoin international se présente, si l'Accusation n'utilise qu'un

9 seul document préparé par le témoin en question, il s'agit du document qui

10 va soutenir sa cause comme le veut la procédure devant le Tribunal. Il se

11 peut, Monsieur le Président, que, du côté de la Défense, nous ayons à

12 produire plusieurs documents qui ont un lien avec ce témoin, ce qui, de

13 fait, nécessitera plus de temps. Vous aurez sûrement compris, Monsieur le

14 Président, que les questions qui sont débattues devant cette Chambre, au

15 cours des récentes semaines et au cours des semaines à venir, sont des

16 questions qui vont au cœur du débat, au cœur du litige de ce procès. A cet

17 effet, Monsieur le Président, il est très important pour nous que la

18 Défense puisse avoir le temps nécessaire pour bien présenter -- d'au moins

19 bien utiliser les témoins de la partie adverse pour faire ressortir sa

20 cause et sa théorie, le cas échéant.

21 Je crois qu'il est important, Monsieur le Président, de mentionner

22 certaines statistiques concernant le temps utilisé jusqu'à ce jour par la

23 Défense. Nous avons fait le compte à l'aide, à la fois des documents

24 préparés par le Greffier de la Chambre, ainsi que par nos propres dossiers

25 concernant les témoins. Selon nos statistiques, Monsieur le Président, le

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1 temps total utilisé par l'Accusation jusqu'à ce jour, serait de 84 heures

2 et 57 minutes. Le temps total utilisé par la Défense serait de 57 heures et

3 six minutes. Nous sommes, Monsieur le Président, à 67 % à peu près du temps

4 utilisé par l'Accusation. Ces données excluent à la fois le témoin Garrod,

5 puisque ce dernier n'a pas encore passé par la phase du contre-

6 interrogatoire, de même que le témoin Chambers.Sur le nombre de témoins qui

7 ont subi un contre-interrogatoire de la part de la Défense, nous avons pris

8 moins de temps que l'Accusation dans 57 % des cas, dont trois témoins

9 internationaux, où pour 78 % des témoins, nous avons été plus court que

10 l'Accusation. Pour certains témoins, Monsieur le Président, effectivement,

11 nous avons été plus long. Cela s'est produit à 16 reprises. A 16 reprises,

12 soit 22 % des témoins, nous avons pris plus de temps que l'Accusation. Dans

13 à peu près un témoin sur deux, ou 48 % des cas, la Défense a pris moins de

14 la moitié du temps qui a été utilisé par l'Accusation.

15 En fait, Monsieur le Président, à la fois, pour des raisons d'être en

16 mesure de présenter la Défense de l'accusé et de bien représenter les

17 intérêts des accusés, dans un but de ne pas vouloir perdre aucun temps

18 devant la Chambre, nous comprenons fort bien que, si la Chambre venait à

19 croire que nos arguments étaient non pertinents ou étaient présentés d'une

20 façon qui ferait perdre du temps à la Chambre, de se voir couper du temps

21 serait tout à fait normal, à notre avis. Toutefois, Monsieur le Président,

22 nous vous demandons, respectueusement, la possibilité d'avoir le temps

23 nécessaire pour faire nos contre-interrogatoires. De là, notre demande de

24 clarification, nous souhaitons que la décision de la Chambre s'applique à

25 la durée de la preuve, dans son entièreté, c'est-à-dire que, lorsque tous

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1 les témoins de l'Accusation auront été entendus, nous n'aurons certainement

2 pas dépassé une fois et demi le temps utilisé par l'Accusation, mais de le

3 faire, témoin par témoin, cela pourrait nous causer préjudice. A titre

4 d'exemple, Monsieur le Président, le témoin d'aujourd'hui, lorsque la

5 Chambre nous a indiqué la semaine dernière, que nous serions limités à un

6 contre-interrogatoire d'une heure et 43 minutes si j'ai le chiffre bien

7 exact, nous croyons, Monsieur le Président, qu'aujourd'hui, nous aurons

8 besoin de deux heures et 30 minutes, c'est-à-dire, les deux accusés

9 compris. Comme je l'ai expliqué un peu plus tôt, la raison principale de la

10 durée du contre-interrogatoire d'aujourd'hui sera liée à la présentation et

11 à la discussion de documents qui seront plus nombreux que les documents

12 montrés au témoin lors de l'interrogatoire principal. Merci, Monsieur le

13 Président.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Maître Bourgon.

15 Est-ce que les autres Défenseurs veulent, sur ce problème, intervenir ?

16 Monsieur Dixon.

17 M. DIXON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

18 Question pratique, je crois comprendre, et l'Accusation va sans doute vous

19 informer davantage, le deuxième témoin prévu aujourd'hui a décidé de ne

20 plus déposer, ce qui veut dire que, de toute façon, nous aurons

21 suffisamment de temps pour terminer le contre-interrogatoire de M. Chambers

22 sans que ceci ait une incidence quelconque sur le calendrier. Ceci mis à

23 part, nous pouvons dire, au nom de M. Kubura, que nous avons examiné les

24 questions que nous voulions poser et que nous pourrons terminer ces

25 questions, dans le temps prévu.

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Dixon.

2 Monsieur Withopf, sur ce problème de fond, quelles sont les observations de

3 l'Accusation ?

4 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, Madame et Monsieur les

5 Juges, nous sommes quelque peu préoccupés. Nous avons peur que ceci ne

6 devienne quelque chose de systématique et qu'à l'avenir, la Défense veuille

7 à ce point contre-interroger les témoins à charge que ceux-ci soient en

8 contravention ou en conflit avec la décision récemment prise par la

9 Chambre.

10 Autre préoccupation qui est la nôtre, s'il y a systématicité, ceci peut

11 avoir une incidence tout à fait délétère sur le calendrier des témoins à

12 charge, calendrier que nous avons communiqué tant à la Défense qu'aux Juges

13 de la Chambre tout récemment.

14 Je tiens à préciser un point, notamment, il y a, bien sûr, les témoins

15 internationaux. Nous rencontrons, nous, en tant que l'Accusation, ces

16 témoins, mais les avocats de la Défense rencontrent également les témoins

17 internationaux de l'Accusation avant que ceux-ci ne comparaissent devant

18 vous.

19 Ceci étant dit, nous ne nous opposons pas -- je le répète, nous ne sommes

20 pas opposés à ce que la Défense dispose d'un temps supérieur, pour autant

21 que certaines conditions soient remplies. Première condition, il faudrait

22 que la Défense fournisse, à l'Accusation et aux Juges, des raisons motivées

23 pour demander une prorogation du temps qu'ils auront pour contre-interroger

24 ces témoins, raisons qui sembleraient raisonnables à première vue; et la

25 Défense n'aurait le droit de poser que des questions qui semblent avoir une

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1 certaine pertinence; troisième condition, l'Accusation tient beaucoup à ce

2 dernier point, troisième condition, c'est que, plus tard au cours du

3 procès, à savoir, au moment de la présentation des témoins à décharge, que

4 l'Accusation, elle aussi, suivant le cas, dispose davantage de temps pour

5 procéder au contre-interrogatoire de ces témoins.

6 S'agissant du présent contre-interrogatoire puisque nous parlons du témoin

7 Chambers, nous n'avons pas d'objection à la requête déposée par la Défense.

8 Merci.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Withopf.

10 La Chambre va se retirer quelques instants pour délibérer. Je rappelle,

11 néanmoins, que nous avions décidé, par une décision orale antérieure, de

12 limiter la durée du contre-interrogatoire à 50 % de temps supplémentaire

13 qui serait accordé au Défenseur, ce qui veut dire, par exemple, si

14 l'Accusation prend une heure, la Défense aura une heure et demie; si

15 l'Accusation prend deux heures, la Défense aura trois heures, enfin aura

16 50% du temps supplémentaire, on multiplie par 1,5.

17 Les Défenseurs, qui ont étudié le timing jusqu'à présent, nous indiquent,

18 de manière générale, que la Défense a moins utilisé son temps que

19 l'Accusation et qu'à 16 reprises, soit 22 % du temps, la Défense a dépassé

20 le temps pris par l'Accusation. Concernant, plus particulièrement, les

21 observateurs internationaux, la Défense nous indique que, compte tenu du

22 fait que ceux-ci sont importants, nous sommes au cœur du sujet, la Défense

23 souhaite, dans le cadre du contre-interrogatoire, produire des documents,

24 évidemment cela risque de prendre un peu plus de temps que par rapport à la

25 durée de l'interrogatoire principal.

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1 A titre de compromis, la Défense prend l'engagement, nous a-t-elle dit tout

2 à l'heure, qu'en tout état de cause, s'il apparaît que le temps sera

3 dépassé pour quelques témoins, la Défense s'est engagée à ce que,

4 globalement, elle n'excédera pas 50 % du temps qui lui est accordé en plus,

5 concernant l'ensemble des témoins.

6 C'est ce qu'il nous a été dit tout à l'heure. Dans le cas de l'espèce,

7 alors que les calculs nous emmenaient à une heure 43 minutes, la Défense

8 nous fait savoir qu'elle aura, dans le cas présent, besoin de 2 heures 30.

9 L'Accusation en réponse, nous a dit qu'elle est consciente du problème,

10 mais que, par ailleurs, il ne faudrait pas non plus que la Défense utilise

11 le temps à des fins qui pourraient porter préjudice à la bonne marche du

12 procès. Dans ces conditions, nous allons nous retirer. Cela va durer

13 quelques minutes et nous vous dirons qu'elle va être notre décision sur la

14 clarification.

15 --- La pause est prise à 14 heures 34.

16 --- La pause est terminée à 14 heures 38.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre, qui a delibere sur cette question, après

18 avoir entendu les observations de la Défense, ainsi que les observations de

19 l'Accusation, à ce stade, la Chambre estime qu'il n'y a lieu à revenir sur

20 sa décision antérieure, à savoir que la Défense est autorisée à avoir 50 %

21 de temps supplémentaire par rapport à l'Accusation.

22 En revanche, en raison de circonstances exceptionnelles liées à l'audition

23 de certains témoins dits internationaux, la Défense, par requête spéciale

24 motivée et explicitée, peut être autorisée à dépasser ce temps qui lui est

25 imparti. Encore, faut-il que, dans le contre-interrogatoire, les questions

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1 posées soient des questions pertinentes et aillent elles-mêmes au cœur du

2 sujet, et que celles-là ne soient pas non plus des questions qui n'ont pas

3 d'efficacité parce que, dans cette hypothèse, tout le monde perd du temps

4 et on arrive à dépasser largement le temps qui est imparti. C'est la

5 première observation.

6 La deuxième observation, comme vous l'avez constaté, compte tenu de la

7 nature très technique et militaire des questions posées, la Chambre est

8 amenée elle-même à poser, parfois et de plus en plus, des questions. Suite

9 aux questions que la Chambre posent, la Défense a également du temps à

10 reposer également des questions. Ce temps, pour le moment, n'est pas

11 comptabilisé, mais c'est un temps que vous utilisez largement. A ce propos,

12 nous estimons également que, lorsque les Juges posent des questions à la

13 fin de l'audience, les Juges vous redonnent la parole pour que vous posiez

14 des questions.

15 La jurisprudence, dans cette matière indique, de manière générale, qu'après

16 les Juges, en théorie, les parties ne reposent pas de questions, sauf dans

17 deux hypothèses bien précises, soit il y a des erreurs matériels qui sont

18 faites dans les réponses du témoin aux questions des Juges, soit parce que

19 le témoin apporte des éléments nouveaux qui, si de la part de la Défense ne

20 font pas l'objet d'une question, pourraient porter préjudice aux accusés.

21 C'est -- la jurisprudence est très précise en la matière.

22 Mais jusqu'à présent, la Chambre a une interprétation assez libérale en

23 vous permettant de poser largement des questions. De manière générale, là

24 aussi, si les Juges prennent dix minutes pour poser des questions, prenez

25 dix minutes, pas une demi-heure. Parce que, sinon, on n'arrivera pas à

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1 terminer l'audience dans le délai imparti. Ceci étant dit, nous maintenons

2 notre décision de vous donner 50 % de temps supplémentaire. Nous estimons

3 que, si les questions sont bien centrées, bien posées, c'est largement

4 suffisant, mais en cas de problèmes ou de circonstances exceptionnelles,

5 demandez-nous l'autorisation pour dépasser le temps.

6 Peut-être que, pour le témoin -- dans le contre-interrogatoire qui va

7 intervenir, vous avez peut-être plusieurs documents à introduire. A ce

8 moment-là, nous comprendrons que le temps d'introduire le document, de les

9 présenter, de recevoir ses observations, d'avoir le point de vue de

10 l'Accusation, cela peut justifier le temps.

11 Dans la mesure où, pour le témoin, vous nous avez demandé un bonus de 45

12 minutes, disons que, si vous posez bien les questions, il ne sera peut-être

13 pas utile de passer le temps imparti, mais nous verrons bien, en fonction

14 des documents que vous avez à produire, peut-être que cela sera justifié.

15 Mais nous allons exercer un contrôle vigilant sur le temps.

16 Pour éviter de perdre du temps, nous allons faire introduire immédiatement

17 le témoin.

18 Monsieur l'Huissier, pouvez-vous aller chercher notre témoin ?

19 Il serait bon également, si vous avez, par exemple, cinq, six, sept

20 documents, juste avant de commencer le contre-interrogatoire, de nous dire

21 que vous envisagez de verser cinq, six, sept documents. C'est une

22 indication peut-être qu'en fonction des réponses, cela ne sera peut-être

23 pas nécessaire, mais, comme vous avez déjà préparé le contre-

24 interrogatoire, vous êtes à même de savoir si vous allez verser des pièces

25 ou pas.

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1 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour -- bon après-midi.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce "weekend" -- pour votre contre-interrogatoire se

5 poursuive. Je pense que votre "weekend" a été agréable.

6 Je vais donner la parole aux Défenseurs, qui vont commencer le contre-

7 interrogatoire.

8 Maître Residovic, vous avez la parole.

9 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

10 LE TÉMOIN: GUY PHILIP CHAMBERS [Reprise]

11 [Le témoin répond par l'interprète]

12 Contre-interrogatoire par Mme Residovic :

13 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Chambers. Je m'appelle Edina

14 Residovic et, avec mon collègue, M. Stéphane Bourgon, je suis là pour

15 défendre -- assurer la Défense du général Hadzihasanovic.

16 Nous nous sommes rencontrés la semaine passée. Nous nous sommes entretenus

17 au sujet de ce que vous saviez nous dire, n'est-ce pas ?

18 R. C'est exact, tout à fait.

19 Q. En outre, avant cela, vous avez eu une rencontre avec M. Bourgon à

20 Londres, n'est-ce pas ?

21 R. Exact.

22 Q. Comme vous avez répondu aux questions de mon éminent confrère du bureau

23 du Procureur en Bosnie-Herzégovine, vous avez exercé des fonctions depuis

24 1993 jusqu'à avril 1994, n'est-ce pas ?

25 R. Exact.

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1 Q. Pendant tout ce temps, si j'ai bien compris, vous avez fait partie du

2 Département de la Formation militaire auprès du QG de la FORPRONU chargé de

3 la Bosnie-Herzégovine et dont le siège, ce qui c'est là, n'est-ce pas ?

4 R. Exact.

5 Q. Vos fonctions primordiales à ce travail pourraient être décrites, en

6 disant qu'il s'agissait de collecter et de recouper les informations,

7 provenance de sources variées, et de procéder à des évaluations de ces

8 informations pour effectuer une redistribution, une rediffusion, par la

9 suite. Etait-ce, d'une manière générale, là votre travail ?

10 R. Là aussi, vous avez raison. Je devais faire l'évaluation des sources,

11 des renseignements venant de plusieurs sources et de bonne information, de

12 l'apprécier de façon à essayer de prévoir quelles seraient les activités de

13 conflit armé, les combats à venir, pour voir où passer l'aide humanitaire

14 par l'itinéraire le plus sûr. Je relayais ces renseignements à plusieurs

15 sources à l'intérieur de la Bosnie, et à l'extérieur aussi de la Bosnie.

16 Q. Comme vous l'avez dit, vous aviez, pour compétence personnelle, le

17 secteur couvert par le Bataillon à Vitez, le Bataillon canadien à -- et le

18 Bataillon français à Sarajevo, n'est-ce pas ?

19 R. Oui. Visoko, c'était le Bataillon canadien; Sarajevo, c'était le 3e

20 Bataillon français. Effectivement, le BritBat se trouvait dans la zone de

21 Vitez.

22 Q. Si j'ai bien compris, vos sources avaient été des sources d'officiers

23 chargés d'information militaire de ces trois bataillons, et les officiers

24 de liaison du Royaume Uni, la MCCE, et d'autres organisations non

25 gouvernementales, et autres, n'est-ce pas ?

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1 R. Oui.

2 Q. Vous rédigiez hebdomadairement des résumés des informations

3 importantes, et vous les envoyaient sur le terrain, vers le QG de la

4 FORPRONU à Zagreb, à l'UNHCR, ainsi qu'aux services de Renseignements

5 nationaux pour les besoins des gouvernements respectifs, n'est-ce

6 pas ?

7 R. Correct, exact.

8 Q. Parfois, comme vous l'avez déjà témoigné, en posant --

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Residovic, je vous interrompe. Vous lui

10 posiez la question -- la question a été posée déjà, mais ce n'est pas le

11 sens de ma question.

12 A la ligne 6, de la page 12, vous dites que l'intéressé envoie ses

13 informations aux services de Renseignements nationaux. Il ne me semble pas

14 qu'il a dit cela sur les questions posées par l'Accusation.

15 Si vous -- je vais vous poser la question, Monsieur le Témoin. Le Défense

16 vous dit que vous rédigez vos rapports à destination de l'ONU, de l'UNHCR,

17 et des services de Renseignements. Cela voudrait dire, par la question, que

18 vous aviez un lien direct avec les services de Renseignements des

19 différents pays qui étaient sur place; est-ce bien le sens de la question,

20 et le sens de votre réponse ? Parce que cela ne paraissait pas clair

21 vendredi dernier. Que pouvez-vous dire ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Chaque grande nation contributrice aux

23 Nations Unis renvoyait les résumés d'information militaires et des résumés

24 visuels -- ce sont des documents que je compilais tous les dimanches. Ils

25 étaient renvoyés en passant par les filières de communications nationales.

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1 Ils étaient renvoyés aux ministères de la Défense nationale, respectivement

2 et je suppose que les services de Renseignements -- enfin, je le suppose,

3 les services de Renseignements de chaque gouvernement national lisaient ces

4 résumés.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous supposez. La question n'était pas tout à fait

6 dans la même optique. Elle semble dire que vous aviez, vous, un lien direct

7 avec les services de Renseignements, alors que vous expliquez que cela

8 passait par la voie hiérarchique, et s'allait au ministère de la Défense,

9 qui pouvait --

10 Poursuivez, Maître Residovic. La réponse n'était pas tout à fait ce que

11 vous intentiez-vous dans votre question.

12 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vous remercie. La question était celle

13 de savoir -- ou plutôt, de se référer à la déclaration de M. Chambers

14 auprès du bureau du Procureur dans le courant de l'enquête, mais je pense,

15 Monsieur le Président, que le témoin à clarifié la situation.

16 Q. Monsieur Chambers, comme vous l'avez dit, vous avez rédigé des rapports

17 par thèmes, au sujet de quoi vous vous êtes entretenu avec le bureau du

18 Procureur en date du vendredi passé, n'est-ce pas ?

19 R. J'ai parlé surtout vendredi en prétoire avec l'Accusation, mais,

20 effectivement, la jeudi, la veille, j'avais parlé avec l'Accusation.

21 Q. S'agissant de toutes vos informations, qu'il s'agisse d'information,

22 des rapports réguliers, quotidiens, hebdomadaires, ou de rapports spéciaux

23 par thèmes, pour vous la source principale, c'étaient les documents que

24 vous receviez au préalable, soit de la part des bataillons sur le terrain,

25 soit de la part des organisations autres, n'est-ce pas ?

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1 R. Oui. Tous les résumés hebdomadaires venaient des bataillons, comme vous

2 venez de le dire, et, d'un temps à autre, on me demandait de rédiger un

3 rapport spécial, portant sur un sujet particulier, précis.

4 Q. Les faits, que vous avez énoncés dans vos rapports hebdomadaires, et

5 leur exactitude, dépendaient de l'exactitude qui vous parvenait du terrain,

6 et qui vous était communiqué, n'est-ce

7 pas ?

8 R. Tout à fait exact. J'étais tributaire de ce qui me faisait rapport, et

9 de l'exactitude de ces rapports, bien entendu.

10 Q. Par conséquent, si nous partons d'une hypothèse, à savoir que, dans les

11 rapports que vous receviez, certains faits seraient trouvés imprécis ou

12 inexacts. En tant que tels, ils étaient retransmis vers autrui par le

13 billet de vos rapports, n'est-ce pas ?

14 R. Forcément, c'était inévitable. Il arrivait qu'on me fasse rapport de

15 quelque chose, dans le cadre des rapports d'informations hebdomadaires, de

16 quelque chose qui n'avait pas été tout à fait corroborée, et pour lequel il

17 n'y avait pas eu d'information de suivi, ce qui veut dire qu'il se pouvait

18 qu'il y ait, dans ces rapports-là, quelques inexactitudes.

19 Q. En fait, vous interveniez dans la mesure du possible, partant des

20 informations qui vous ont été mises à disposition, mais vous n'aviez pas

21 pour mission, ni pour possibilité, de vérifier l'exactitude des

22 informations qui parvenaient jusqu'à vous.

23 R. C'est exact. Je n'étais pas en mesure de vérifier -- de corroborer

24 chacun des rapports que je recevais, mais, à l'évidence, dans la mesure du

25 possible, nous essayions d'établir un lien entre deux ou trois rapports, et

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1 disons que c'est l'effort de corroboration au maximum qu'on pouvait faire,

2 c'est vrai.

3 Q. Pouviez-vous être d'accord avec moi pour dire, Monsieur Chambers, qu'en

4 cas où il vous parvenait des informations autres, pour ce qui est des

5 sources fiables ou pas, les conclusions que vous tiriez dans vos rapports

6 hebdomadaires pouvaient, elles aussi, être tout à fait autres.

7 R. Bien entendu, oui.

8 Q. Parfois, il arrivait que, dans vos analyses, vous repreniez tout

9 simplement des conclusions, des commentaires, de la part -- ou formulés, de

10 la part des bataillons sur le terrain, en estimant que cela se trouvait

11 d'être tout à fait exact, et tout à fait vérifié; est-ce que cela arrivait,

12 effectivement ?

13 R. En règle général, nous pensions que les renseignements, que nous

14 fournissaient les bataillons, et la plupart de nos sources de

15 renseignements, étaient exacts. Dans la mesure où ceci leur avait été

16 rapporté, ou encore qu'ils avaient observés telle ou telle activité. Ce

17 n'était pas toujours vrai dans tous les cas, bien entendu, mais de façon

18 générale, les renseignements étaient précis, tels qu'ils nous étaient

19 rapportés venaient de source digne de fois, tout à fait fiable. Il s'est

20 présenté des situations où quelquefois lorsque vous aviez une rubrique

21 d'une seule ligne qui provenait d'un individu ou d'un bataillon, qui se

22 répercutait dans le rapport de renseignement hebdomadaire et que c'était

23 une ligne isolée qui n'avait pas nécessairement eu de vérifications. C'est

24 vrai aussi.

25 Q. Monsieur Chambers, est-ce que j'interprète à juste titre ce que vous

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1 avez apporté comme réponse à l'occasion des entretiens que nous avons eus

2 avant votre témoignage, à savoir que les informations sur les combattants

3 étrangers vous provenaient de la part d'individus, et que ces informations

4 sur les Moudjahiddines vous parvenaient essentiellement de la part du HVO.

5 C'est bien ce que vous nous avez dit, n'est-ce pas ?

6 R. Non. Je pense vous avoir dit vendredi, et au cours de réunions que

7 j'avais eues auparavant avec vous, c'est que, s'agissant de la plupart des

8 renseignements concernant les Moudjahiddines, la plupart venaient du

9 Bataillon britannique et d'autres sources. Le Bataillon britannique, lui-

10 même, peut éventuellement avoir reçu, tiré tenu certaines de ces

11 informations, renseignements du HVO, ou encore du commandant de l'ABiH en

12 personne.

13 Q. Merci. Ce que je pensais, c'est non pas que vous receviez

14 personnellement ces renseignements, mais les informations militaires du

15 bataillon. Ces renseignements leur parvenaient à eux de la bouche de

16 particuliers, d'individus. C'est bien ce que vous nous avez indiqué, n'est-

17 ce pas ?

18 R. Le bataillon tenait ces informations d'individus, c'est vrai. C'est sur

19 quoi le bataillon me faisait rapport à moi.

20 Q. Vous, en personne, vous n'avez pas eu de documents officiels qui

21 viendraient vous parler de Moudjahiddines en Bosnie centrale, n'est-ce

22 pas ?

23 R. Si vous entendez par "documents officiels", documents appartenant à

24 l'une ou l'autre des factions belligérantes, c'est exact. Tous les

25 documents produits par les bataillons, étaient des documents officiels;

Page 6088

1 cependant, nous n'avions pas de documents venant de l'une ou l'autre des

2 parties belligérantes. C'est vrai.

3 Q. Monsieur Chambers, avait-il été possible pour vous de recevoir des

4 renseignements émanant de sources variées, des bataillons, des

5 organisations internationales, les observateurs, sur un même événement, et

6 que leurs conclusions ou leurs commentaires au sujet de ces mêmes

7 événements aient souvent été différentes ?

8 R. La FORPRONU, ces forces de protection des Nations Unies et ses

9 effectifs, des observateurs militaires des Nations Unies, les observateurs

10 militaires de la Communauté européenne et d'autres individus de ces mêmes

11 organisations ou organisations analogues tiraient souvent des conclusions

12 très semblables s'agissant d'un événement. Quelquefois, il y avait des

13 divergences de vue de la part des factions belligérantes, HVO et ABiH. En

14 règle générale, ces pays donateurs ou contributeurs, sur tel ou tel

15 événement précis, avaient un avis très comparable s'agissant de savoir ce

16 qui s'était passé.

17 Q. Monsieur Chambers, je vous demande à présent de me dire si vous seriez

18 d'accord avec une déclaration, celle du général Williams qui, ici, la

19 semaine passée, est venu témoigner et qui, au sujet de ce problème, a dit

20 ce qui suit. Je cite la page 57, ligne 8 à 12 : "Il est un fait irréfutable

21 que les informations --"

22 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Withopf.

24 M. WITHOPF : [interprétation] Puis-je interrompre, Monsieur le Président ?

25 Car je ne comprends pas pourquoi une référence est faite à une autre

Page 6089

1 déposition prononcée par un autre témoin, ici dans ce prétoire. Il se peut

2 que le témoin, quelle qu'en soit la raison d'ailleurs, ait des liens avec

3 certains témoins. Cela peut avoir une incidence par rapport aux questions

4 qui lui sont posées. L'Accusation ne comprend pas en vertu de quelle raison

5 est-ce que l'on pose au témoin une question portant sur la déposition

6 prononcée par un autre témoin dans ce Tribunal et portant sur la même

7 question.

8 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président --

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Residovic, que dites-vous ?

10 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je crois qu'il est

11 conforme aux règlements de ce Tribunal et à la pratique judiciaire, que de

12 faire savoir au témoin quels sont les éléments de preuve qui ont été agréés

13 par le Tribunal ou qui ont été présentés devant ce Tribunal. Etant donné

14 que le général Williams ait témoigné devant le présent Tribunal, je crois

15 qu'il serait tout à fait justifié de faire part d'une partie de son

16 témoignage à ce témoin-ci ou à quelque autre témoin que ce soit.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour vous résumer, vous demandez au témoin une

18 opinion sur un témoignage. C'est cela ?

19 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Ce que je souhaite, c'est demander au

20 témoin s'il serait d'accord avec un fait allégué par un témoin, à savoir,

21 M. Williams cité ici et en corrélation avec les questions que j'ai posées

22 au témoin pour ce qui est d'avoir obtenu des informations contradictoires

23 émanant d'organisations variées se trouvant toutes sur le terrain.

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Posez votre question. La Chambre appréciera.

25 Mme RESIDOVIC : [interprétation]

Page 6090

1 Q. Monsieur Chambers, je veux vous citer une partie des dires du général

2 Williams sur la même question. Il a témoigné devant cette Chambre. Il a dit

3 que le fait que ces interprétations contradictoires aient été possibles, se

4 trouvait tout à fait possible. Je cite: "Il est tout à fait irréfutable,

5 disant que les informations parvenant de sources différentes dépeignaient

6 une situation de façon variée. Il y avait également risque de voir

7 plusieurs personnes créer un problème en transformant des rumeurs en

8 quelque chose de palpable tout en répétant la même allégation plusieurs

9 fois de suite."

10 Ma question est la suivante : pouvez-vous, partant de votre expérience

11 personnelle, être d'accord avec cette constatation qui a été faite par un

12 témoin autre devant la même Chambre ?

13 R. Oui, effectivement. Je suppose que le chef de brigade Williams, auquel

14 vous avez fait allusion, a été, à l'époque, le lieutenant-colonel Williams

15 qui commandait le Bataillon britannique à Vitez. Si tel est le cas, il est

16 évident que de nombreux renseignements que j'ai reçus émanaient de sa

17 cellule d'information, de renseignement militaire. Il s'agissait de son

18 personnel au niveau de son QG. Il faut savoir que son personnel, lui-même,

19 était beaucoup plus proche des factions belligérantes, le HVO, l'ABiH. Par

20 conséquent, je suis sûr, qu'étant donné qu'il a parlé, qu'il a dit qu'il

21 avait tendance à entendre des versions contradictoires des événements

22 émanant de chaque partie qui était engagée dans la bataille.

23 Ma position était différente car, en quelque sorte, je recevais des

24 renseignements qui avaient déjà été triés sur le volet, qui avaient déjà

25 été évalués par son personnel et par lui-même, ce qui fait que, lorsqu'il y

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1 avait des idées exagérées ou excessives de la part d'une des factions

2 belligérantes, c'était filtré. Nous avions une version des événements qui

3 était en quelque sorte beaucoup moins exagérée.

4 Q. Vous serez tout à fait d'accord pour dire qu'au cas, où une rumeur

5 venait à être répétée plusieurs fois de suite dans un rapport déterminé, il

6 y avait danger de voir cette rumeur gagner en poids ?

7 R. Oui, je suis d'accord. Cela était toujours un risque et toujours un

8 risque en renseignement militaire ou en matière de renseignement. C'est

9 exact. Je peux accepter que l'on pourrait accorder un certain poids à un

10 renseignement, qui a été entendu à deux ou trois reprises pendant un

11 certain laps de temps, effectivement.

12 Q. Votre rapport sur les Moudjahiddines et le 7e Brigade musulmane, celui

13 que vous avez envoyé en date du 2 novembre 1993, était la résultante d'une

14 requête de la part du général Chambers datée du 1er septembre 1993, n'est-ce

15 pas ?

16 R. Oui.

17 Q. Etant donné que cette requête vous est arrivée le

18 1er novembre à 13 heures et que vous avez répondu à 15 heures 43, le temps

19 imparti, pour que vous rédigiez votre réponse, s'est avéré tout à fait

20 court.

21 R. Oui.

22 Q. C'est la raison pour laquelle vous vous êtes appuyé sur le rapport tout

23 fait du capitaine Whitely de l'armée britannique. Ce dernier s'est trouvé à

24 exercer des fonctions au commandement du Bataillon britannique avant que

25 vous n'arriviez vous-même, n'est-ce pas ?

Page 6092

1 R. Pas exactement. Je me souviens parfaitement de la soirée du 1er novembre

2 pendant laquelle j'ai rédigé ce rapport. Je m'en souviens très, très bien.

3 Je me souviens de trois heures de cette soirée du 1er novembre. Il y avait

4 des éléments qui m'avaient été donnés par le capitaine Whitley. Il y avait

5 également des éléments qui m'avaient été transmis à propos des

6 Moudjahiddines. La plupart de ces éléments avaient été transmis par le

7 Bataillon britannique à Vitez. On peut utiliser le mot de fusion de

8 renseignements : certains que je savais, d'autres qui émanaient du

9 capitaine Whitley, d'autres qui se trouvaient dans des rapports qui

10 m'avaient été envoyés par le Bataillon britannique.

11 Q. Cependant, vous n'avez pas disposé de suffisamment de temps pour

12 examiner dans le détail toutes les informations qui, dans le courant de

13 1993, étaient parvenues au commandement de Kiseljak, n'est-ce pas ?

14 R. J'avais eu le temps pour placer les choses dans leur contexte. Je vous

15 rappelle ce que j'avais dit vendredi. Il s'agissait d'une requête

16 d'information rapide de la part du personnel du général Chambers. Ils m'ont

17 posé, en quelque sorte, un certain nombre de questions. J'ai répondu à ces

18 questions. Parce que je me suis rendu compte que ceux qui se trouvaient à

19 Vincenza, il s'agissait de la

20 5e Force aérienne tactique alliée, ne savaient rien des Moudjahiddines. Ils

21 ne savaient pas de qui il s'agissait, ils ne savaient pas ce qu'ils

22 faisaient, et ils souhaitaient obtenir des renseignements. Il y avait des

23 questions, très, très précises dans la télécopie qui m'a été envoyée. J'ai

24 répondu aux questions dans l'ordre qu'elles m'avaient été posées. Vous avez

25 d'ailleurs les pages de la télécopie. Vous avez cette télécopie de quatre

Page 6093

1 pages. Vous verrez très, très clairement les questions qui sont soulignées

2 et les réponses que j'ai apportées à ces questions précises.

3 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je voudrais que l'on montre au témoin la

4 pièce DH108. Il s'agit d'un bulletin d'information

5 numéro 32, du 31 mai 1993.

6 J'ai dit DH108 et pas DH8, comme on l'indique sur le compte rendu

7 d'audience.

8 Q. Je vous demanderais de vous penchez à l'intitulé "Zenica", point 3.

9 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Withopf.

11 M. WITHOPF : [interprétation] Quelques questions d'ordre techniques. Est-ce

12 que le témoin aurait l'amabilité de placer ce document sur le

13 rétroprojecteur, puisque nous n'avons pas ce document nous-mêmes.

14 Mme RESIDOVIC : [interprétation]

15 Q. Monsieur Chambers, est-il exact de dire que, dans ce paragraphe, on

16 voit bien que l'officier de liaison a eu une réunion avec certains

17 Moudjahiddines, qu'à la fin du premier paragraphe, à l'alinéa 3, il

18 affirmerait qu'ils ne se trouveraient pas, selon lui, sous le contrôle du

19 3e Corps ?

20 R. Un petit moment, je vous prie.

21 Oui, la photocopie est de qualité médiocre. Je peux voir, effectivement,

22 qu'il est question du "3e Corps", à la fin du paragraphe. Je peux tout à

23 fait accepter qu'il pensait, à l'époque, qu'ils n'assuraient pas,

24 effectivement, le contrôle.

25 Q. A l'alinéa 4, de ce même bulletin d'information militaire, on voit que

Page 6094

1 l'officier de liaison a eu une réunion avec le commandant Jasmin Saric avec

2 un autre commandant aussi bien, qu'en page 2, il s'avère vrai que ce

3 commandant Saric avait donné l'impression du fait que ces Moudjahiddines ne

4 se trouvaient pas sous l'autorité du

5 3e Corps.

6 R. Oui, je pense que c'est, effectivement, ce qui a été écrit à l'époque.

7 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'aimerais qu'on montre maintenant au

8 témoin la pièce DH72. Il s'agit d'un bulletin d'information numéro 46, du

9 14 juin.

10 Q. Ici, il s'agit d'un bulletin d'information militaire où, au point 1, il

11 est question d'une réunion du commandant du Bataillon britannique avec le

12 général Hadzihasanovic. Si vous voulez bien vous pencher sur la fin du

13 texte, vous y verrez, en septième ligne à compter du bas, on voit que

14 l'adjoint du commandant, M. Merdan, y indique que les Moudjahiddines ne

15 sont pas sous le contrôle effectif du 3e Corps. On voit également que

16 Hadzihasanovic a montré la lettre qu'il a rédigée à l'intention du

17 commandant supérieur, où il a demandé à ce que le problème des

18 Moudjahiddines soit résolu. Est-ce que c'est bien ce qui découle de ce

19 bulletin d'information militaire ou pas ?

20 R. Oui, il semblerait qu'il demande au commandement supérieur la

21 possibilité de pouvoir "régler ce qu'il considère comme un problème."

22 Mme RESIDOVIC : [interprétation] J'aimerais que l'on montre au témoin le

23 DH73, qui est une pièce de la Défense également. Oui, c'est la date du 13

24 juin, toujours.

25 Q. Je pense que vous serez d'accord avec moi pour dire que vous n'avez pas

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1 vu ce document auparavant.

2 R. C'est exact. Je n'avais pas vu ce document auparavant.

3 Q. Les appréciations formulées dans ces bulletins d'information militaire,

4 ainsi que le document que vous avez vu tout à l'heure, si vous aviez

5 examiné la chose dans le détail au moment où il fallait répondre à la

6 télécopie du général Chambers, cela aurait certainement, je pense, influer

7 sur les positions que vous avez formulées dans votre réponse. Seriez-vous

8 d'accord avec moi, pour qualifier cela ainsi ?

9 R. Ce document que vous me montrez maintenant, aurait pu avoir une

10 incidence, bien que je n'aie pas eu la possibilité de l'étudier par le

11 menu. Le milinfosum précédent n'aurait pas forcément eu une incidence sur

12 la réponse que j'ai donnée au général Chambers en novembre, à savoir, cinq

13 ou six mois après ces milinfosums et cinq mois après cette lettre, puisque

14 c'était le moment où j'écrivais cela. Je peux tout à fait accepter sans

15 pour autant l'avoir consulté de façon détaillée, qu'il semblerait qu'il

16 s'agisse d'une lettre envoyée à Delic par, je pense, Hadzihasanovic. Je

17 suis en train de parcourir cette lettre maintenant.

18 Oui. Il semblerait écrire à Delic pour lui demander son opinion. Il lui

19 demande ce qu'il faudrait faire du 3e Corps, effectivement.

20 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vais demander à présent que ces deux

21 documents soient restitués à qui de droit, et que l'on montre la pièce à

22 conviction P563, qui est une pièce de l'Accusation. Ces trois documents

23 doivent être restitués au Greffier. A présent, il faudrait que nous

24 montrions ou nous fassions voir au témoin la pièce P163. Il s'agit d'un

25 bulletin d'information daté du 27 juin.

Page 6096

1 Q. Monsieur Chambers, je vous demanderais, pour ce qui est de ce bulletin

2 d'information du 27 juin, de vous pencher sur le commentaire qui figure

3 tout au bout.

4 R. C'est de ce commentaire-là que vous souhaitez parler ?

5 Q. Serait-il exact de dire que ce commentaire nous montre que les

6 informations afférentes aux étrangers dans cette 7e Brigade musulmane,

7 provenaient du commandant Nakic, qui est membre du conseil croate de la

8 Défense du HVO ?

9 R. Oui, dans ce rapport, c'est, effectivement, l'impression que nous

10 avons.

11 Q. En pratique, ce commentaire témoignage d'autres choses par rapport aux

12 documents précédents que je vous ai déjà montrés, et affirme que pour sa

13 part, que les Moudjahiddines étaient placés sous le contrôle, n'est-ce

14 pas ?

15 R. Est-ce que je pourrais le lire un petit moment, je vous prie?

16 Je dois vous avouer que je suis un peu perplexe, parce que je ne suis pas

17 très sûr de ce qu'il essaie de dire. Est-ce qu'il essaie de dire qu'ils

18 sont sous contrôle ou qu'ils ne sont pas sous contrôle ? Il dit : "Si cela

19 est exact, tous les doutes à propos du contrôle ou du manque de contrôle

20 des Moudjahiddines seraient terminés." Je ne suis pas très sûr de ce qu'il

21 entend. Est-ce qu'il n'y aura plus de confusion parce qu'il considère

22 qu'ils sont sous contrôle, ou est-ce que lui, n'a plus de problèmes et

23 comprend la situation, parce qu'ils ne sont pas placés sous contrôle ?

24 Q. La dernière partie de la phrase dirait qu'à l'avis de celui qui fait le

25 commentaire, qu'à présent, il croit que la

Page 6097

1 7e Brigade musulmane et les Moudjahiddines, c'est une seule et même chose.

2 R. Oui, c'est apparemment, visiblement ce qu'il dit. Il dit que les

3 Moudjahiddines et la 7e Bridage musulmane semblent être la même chose.

4 C'est ce qu'il dit.

5 Q. La source d'une telle conclusion vient du commandant Nakic, qui est le

6 commandant du HVO. C'est ce qu'il découlerait de ce commentaire, n'est-ce

7 pas ?

8 R. Oui, je pense en effet que c'est la source probable de ce document.

9 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Monsieur Withopf.

11 M. WITHOPF : [interprétation] A plusieurs reprises, le témoin a fait des

12 déclarations sans pour autant avoir véritablement consulté ou eu le temps

13 de lire. C'est ainsi qu'il a commencé ces phrases. Est-ce que mon estimée

14 consoeur pourrait donner au témoin le temps suffisant pour qu'il puisse

15 consulter et lire les documents, pour qu'il puisse présenter un point de

16 vue informé sur la question.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Maître Residovic, laissez au témoin le temps de

18 lire, parce que si vous lui mettez un document sous les yeux et vous lui

19 posez dans la foulée votre question, la réponse risque d'être amputée d'une

20 partie de la vérité. Vous pouvez peut-être reformuler votre question,

21 puisque là il a pris le temps de le lire.

22 Ce que vous voulez démontrer, c'est que la source de ce renseignement vient

23 du HVO ?

24 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Oui. C'est une première information.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : [aucune interprétation]

Page 6098

1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai cela.

2 Mme RESIDOVIC : [interprétation]

3 Q. Pouvez-vous être d'accord avec moi pour dire que ce commentaire a été

4 réitéré dans plusieurs informations concernant la 7e Bridage musulmane et

5 les Moudjahiddines, qui ont été envoyées par le Bataillon britannique vers

6 le commandant de la FORPRONU .

7 R. Oui. Je pense que, notamment, au début. J'entends par cela, au début de

8 l'année 1993, de nombreuses personnes ont utilisé le terme "Moudjahiddines"

9 lorsqu'ils faisaient état de la 7e Brigade. Certaines personnes le

10 faisaient sans exactitude et sans certitude, parce qu'ils n'avaient pas

11 compris les structures de l'époque. Au fil du temps, les gens ont fini par

12 faire la part des choses et faire la différence entre les Moudjahiddines et

13 la 7e Brigade musulmane. Ils se sont rendus compte qu'il s'agissait peut-

14 être de deux entités qui faisaient partie du même organe. Au début,

15 j'accepte le fait que ces deux expressions, "les Moudjahiddines" et "la 7e

16 Brigade" étaient utilisés l'un pour l'autre lorsque les gens s'exprimaient.

17 Q. je vous remercie.

18 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je voudrais, à présent, que ce document

19 soit restitué au Greffier, et que l'on montre au témoin une pièce de

20 l'Accusation, P376. Il s'agit d'un rapport de l'équipe de surveillance, qui

21 est daté du 20 octobre.

22 Q. A présent, Monsieur Chambers, je vous demanderais de prendre lecture

23 page 2, point 7.2.

24 R. Oui, je l'ai lu.

25 Q. Etes-vous d'accord avec moi pour dire que dans ce rapport, la question

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1 qui se pose, est celle du contrôle exercé à l'égard des Moudjahiddines.

2 C'est une question qui fait l'objet encore d'un grand point

3 d'interrogation.

4 R. Oui, il semblerait que les observateurs de la Communauté européenne, à

5 ce moment-là, ont été d'avis qu'ils n'étaient pas placés sous contrôle.

6 Effectivement.

7 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je voudrais que l'on montre maintenant la

8 pièce P176 au témoin. Il s'agit également d'un rapport journalier de

9 l'ECMM, daté du 27 octobre 1993.

10 Q. Je voudrais que vous vous référiez à la page 2,

11 le paragraphe 7, le commentaire qui y figure. Je voudrais également que

12 vous nous parliez des réponses qui figurent aux points A, B et C.

13 Une fois de plus, Monsieur Chambers, est-ce que ce rapport fait apparaître

14 avec clarté le fait que l'armée prend des mesures, et s'efforce de placer

15 ces Moudjahiddines sous contrôle, mais que, de façon évidente, ils ne se

16 trouvaient pas sous le contrôle de l'ABiH ?

17 R. Il semblerait, effectivement, que des éléments des Moudjahiddines

18 n'étaient pas placés sous contrôle ou agissaient de façon indépendante. A

19 ce moment-là, je peux accepter cela comme correspondant à la vérité.

20 Q. Ces rapports de la MCCE ont été établis avant votre rapport. Si vous

21 aviez pu les consulter ces rapports, ils auraient pu avoir un effet sur

22 votre propre rapport du 2 novembre, n'est-ce pas ?

23 R. C'est vrai, d'une façon générale. Ici, à l'encontre de ce rapport

24 précis, je relève qu'il n'ait été publié que trois jours avant qu'il y ait

25 une demande d'information émanant du général Chambers. J'avais coutume de

Page 6100

1 lire tous ces rapports de l'ECMM. Ils passaient par moi. Il se peut que

2 j'aie lu celui-ci aussi. Je ne m'en souviens plus exactement. Vous m'avez

3 demandé si ceci pouvait avoir une incidence sur le général Chambers dans ma

4 réponse. Il se peut que j'aie déjà eu en tête ces informations. Le

5 contraire est peut-être tout aussi vrai. En ce qui concerne cet élément-ci,

6 je ne pense pas qu'il aurait changé le message global que je transmettais

7 au général Chambers. Je reconnais que c'est là un fragment d'un tableau

8 plus complet.

9 Q. Merci.

10 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vais demander qu'on montre maintenant

11 au témoin la pièce de l'Accusation P181. Il s'agit d'un rapport de la MCCE,

12 le centre Régional de Zenica, daté du

13 3 novembre 1993.

14 Q. Je vais vous demander d'examiner la deuxième page et, plus précisément,

15 le paragraphe 10.

16 R. C'est le paragraphe, 10 de la page 8 ?

17 Q. Oui.

18 R. Celui qui commence par les mots suivants : "Quand on lui a demandé à

19 propos des Moudjahiddines, il a dit qu'il y avait plusieurs types" ? Oui,

20 j'ai lu ce passage.

21 Q. Est-il exact de dire que, si on examine ce rapport, on peut en conclure

22 que lors d'une réunion qui s'est tenue avec le commandant adjoint du 3e

23 Corps d'armée, ce dernier, a fait clairement comprendre que les

24 Moudjahiddines ne se trouvaient pas sous contrôle, qu'il y avait des

25 tentatives qui étaient entreprises soit pour les renvoyer dans leurs pays

Page 6101

1 d'origine, soit pour les maîtriser, qu'il y avait aussi d'autres groupes

2 qui s'appelaient, eux-mêmes, "Moudjahiddines", mais qui n'étaient pas des

3 combattants étrangers. Est-ce que c'est, en quelques mots, la synthèse de

4 ce dixième paragraphe ?

5 R. Oui. Cependant, je pense que nous avons, vous-même et moi, utilisé ce

6 terme de "contrôle" pendant un certain temps. Je pense qu'il faudrait que

7 nous l'expliquions et que nous disions chacun ce que nous intentons par le

8 terme, "contrôle". Quand je pense à "contrôle", je pense à la sanction

9 disciplinaire par contraste avec le commandement. Je pense qu'il y a une

10 certaine séparation entre ces deux termes. Peut-être voudrez-vous me poser

11 des questions, fort bien, si c'est le cas.

12 Stricto sensu, le terme de "contrôle", c'est de savoir si on pouvait les

13 maîtriser, en avoir la maîtrise. Je dirais, effectivement, qu'il y avait

14 des individus qui échappaient au contrôle et qui n'étaient pas sous

15 contrôle maîtrisé, parce qu'ils n'acceptaient pas la discipline et, là,

16 j'accepte votre idée.

17 Q. Vous acceptez l'idée qu'à l'occasion de cette réunion, Enver

18 Hadzihasanovic avait dit très clairement que les étrangers posaient

19 problème, et qu'ils essayaient d'en venir à bout de ce problème, soit en

20 les envoyant à l'extérieur -- en les renvoyant de la Bosnie-Herzégovine ou

21 en essayant de les intégrer au sein de l'ABiH ?

22 R. Tout à fait, mais je pensais que cette réunion avait lieu avec le

23 conseiller politique, le commandant Merdan.

24 Q. Oui. Première partie, on fait état d'une réunion avec M. Merdan, mais,

25 à la page 7, vous le verrez, on poursuit le texte avec une conversation

Page 6102

1 avec Enver Hadzihasanovic, commandant du 3e Corps d'armée de l'ABiH. Ce

2 paragraphe, en fait, mention, n'est-ce pas ?

3 R. Je comprends.

4 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président.

5 Monsieur Withopf.

6 M. WITHOPF : [interprétation] On pose des questions au témoin à propos de

7 ce document. C'est une modalité de questionnement qui me semble

8 problématique puisque Me Residovic ne fait rien d'autre que de demander une

9 paraphrase au document -- de la teneur du document. Le témoin ne se

10 trouvait présent à aucune de ces réunions, réunions aux cours desquelles

11 ces propos ont été tenus. Comme voulez-vous que le témoin fasse un autre

12 commentaire que ce qui est simplement la teneur du document ? Je pense que

13 la façon dont Me Residovic pose les questions pose problème.

14 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, permettez-moi de

15 réagir.

16 Vendredi dernier, le témoin a expliqué sa mission, en quoi elle consistait,

17 et il a dit qu'il recevait tous les renseignements, qu'il analysait ces

18 documents. Il l'a confirmé en réponse à une question que je lui ai posée.

19 Par conséquent, le témoin est une personne qui ne peut pas témoigner à

20 propos de faits, mais qui est tout à fait à même de fournir une analyse des

21 documents qu'il a reçus, qui lui étaient envoyés. C'est la raison pour

22 laquelle je présente au témoin des documents que, forcément, il a reçus au

23 commandement de la FORPRONU à Kiseljak, et documents qui ont fait, sans

24 doute, l'objet de commentaires de sa part dans ses rapports qu'il a écrits.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, mais la question qui se pose sur le dernier

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1 document, est-ce qu'il a vu --

2 Monsieur le Témoin, le document que vous avez sous les yeux, est-ce que

3 vous l'avez vu -- vous vous rappelez l'avoir vu, ce document ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai vu pratiquement tous les documents. Je ne

5 me souviens pas de façon très précise de celui-ci. Cependant, il est quasi

6 certain que je l'aurais reçu, ce document. Ceci étant le cas, si je l'ai

7 reçu, je l'ai lu. Bien sûr, il y a de cela maintenant 11 ans. Je ne peux

8 pas vous dire de façon catégorique que j'ai lu ce document auparavant, non.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous enregistrons votre réponse.

10 Je vais interrompre parce qu'il est quasiment le temps de l'heure imparti.

11 Nous reprendrons à 16 heures.

12 --- L'audience est suspendue à 15 heures 39.

13 --- L'audience est reprise à 16 heures 20.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience reprend. La Chambre vous prie de

15 l'excuser de ce petit retard.

16 Nous souhaitons que, dans le cas des questions qui sont posées, que la

17 Défense aille vite à l'essentiel et évite de reposer des questions qui ont

18 déjà été posées. Je pense que cela peut être compliqué, mais nous avons

19 constaté, tout à l'heure, qu'il y a des questions auxquelles l'intéressé

20 avait déjà répondu qui n'apportent rien de nouveau.

21 Par ailleurs, on a un petit mystère. Nous ne savons pas si les Défenseurs

22 de M. Kubura vont aussi prendre du temps.

23 Est-ce que Monsieur Dixon, vous avez prévu d'intervenir dans le contre-

24 interrogatoire ou pas ?

25 M. DIXON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, nous avons prévu de

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1 le faire mais nous n'avons pas beaucoup de questions. 30 à 40 minutes au

2 maximum, vraiment au maximum.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Residovic.

4 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je suis à mi-

5 parcours. Je tiens à vous affirmer du fait que j'aimerais montrer au témoin

6 quatre pièces de l'Accusation qui ont trait à la même chose, à savoir les

7 informations qu'il a transmises à M. Chambers. Je voudrais aussi demander

8 le versement de cinq nouveaux documents. Je demande à la Chambre de

9 première instance l'autorisation de poursuivre mon contre-interrogatoire.

10 Je voudrais maintenant que soit montrée, au témoin, la pièce de

11 l'Accusation 379. Il s'agit d'une lettre envoyée par le général Williams au

12 commandement de la FORPRONU. La date est celle du 5 décembre 1993, et il y

13 a quelques annexes.

14 Q. Je vais, tout d'abord, vous demander d'examiner cette lettre qui porte

15 la date du 26 novembre et qui vient du capitaine Guinness. Deuxième

16 paragraphe, dernière phrase de ce paragraphe.

17 R. Je l'ai lu.

18 Q. Apparemment, ceci montre que le capitaine Guinness affirmait, le 26

19 novembre, que les Moudjahiddines échappaient à tout contrôle. C'est bien ce

20 que dit le document ?

21 R. Apparemment, il est dit que certains éléments échappent au contrôle.

22 Q. Veuillez examiner la lettre que le colonel Williams, aujourd'hui

23 général, mais, à l'époque, il était colonel. Il a envoyé cette lettre au

24 général de brigade Ramsay. Page 1, paragraphe 1, dernière phrase.

25 R. Oui.

Page 6105

1 Q. Est-ce que ce document montre également qu'il n'apparaît pas clairement

2 si les Moudjahiddines se trouvaient sous le contrôle du 3e Corps d'armée.

3 En convenez-vous ?

4 R. Je le répète. Permettez-moi de revenir à cette question du contrôle et

5 du commandement. J'accepte, tout à fait, l'idée qu'il y avait des éléments

6 des Moudjahiddines qui n'étaient pas contrôlés, qui agissaient en dehors de

7 toute structure de commandement et de toute norme s'y appliquant. Mais la

8 question du commandement est peut-être une question distincte -- séparée.

9 Q. Merci de cette précision. Si c'est nécessaire, c'est une question à

10 laquelle nous pourrons revenir.

11 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Peut-on maintenant montrer au témoin un

12 document qui vient du centre Régional de la MCCE et qui porte la date du 29

13 -- du 18 décembre 1993. Nous avons suffisamment d'exemplaires que ce

14 document soit distribué à tous les participants présents dans le prétoire

15 ainsi qu'à nos collègues et confrères.

16 Q. Monsieur Chambers, veuillez examiner l'entête "15 décembre", cette

17 rubrique-là, qui se trouve à la page 5. C'est le deuxième paragraphe qui

18 m'intéresse.

19 R. Celui qui commence par "le convoi de l'itinéraire blanc --"

20 Q. Non, vous avez reçu un rapport hebdomadaire qui porte la date du 18

21 décembre, n'est-ce pas ?

22 R. Oui.

23 Q. Page 5, sous la rubrique du 15 décembre, le point 2 est celui-ci, on

24 dit que : "Les officiers de liaison du Groupe opérationnel de la Krajina de

25 Bosnie --"

Page 6106

1 R. Oui, maintenant, je le vois. Je l'ai. Je suis en train de le lire.

2 Q. Fort bien, merci. Ce rapport semble montrer, lui aussi, que l'officier

3 de liaison de la Krajina de Bosnie vous a informé du fait que les

4 Moudjahiddines échappaient au contrôle.

5 R. Oui, c'est apparemment ce que dit ce rapport, effectivement.

6 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Etant donné que ce document porte la date

7 du 18 décembre, document qui vient de la Bosnie centrale, je vous soumets -

8 - je demande le versement de ce document que nous avons reçu sur CD de

9 l'Accusation. C'est un document que M. Chambers avait remis à l'Accusation.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Withopf.

11 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, c'est peut-être une

12 question purement technique, mais la question posée était celle-ci : Ce

13 rapport semble montrer, lui aussi, que l'officier de liaison de la Krajina

14 de Bosnie vous avait, vous, avait informé du fait que les Moudjahiddines

15 échappaient au contrôle. L'Accusation croit comprendre que le témoin n'a

16 pas parlé en personne à l'officier de liaison du Groupe opérationnel de la

17 Bosanska Krajina -- la Krajina de Bosnie, au moment de la rédaction de ce

18 rapport. C'est peut-être une question de compte rendu d'audience, et je

19 voudrais simplement demander à Me Residovic de tirer cette question au

20 clair.

21 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Oui, merci. Je disais simplement que le

22 témoin avait reçu des renseignements de l'officier de liaison du Groupe

23 opérationnel de Krajina de Bosnie et que, d'après ce rapport, il semblait

24 que les Moudjahiddines étaient incontrôlables. C'est un rapport

25 hebdomadaire qui porte la date du 18 décembre, et c'est là un document

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1 remis par le témoin au bureau du Procureur.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, effectivement.

3 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je demande le versement du présent

4 document au dossier.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

6 Monsieur Withopf.

7 M. WITHOPF : [interprétation] Pas d'objections.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame la Greffière, vous nous donnez un numéro pour

9 ce document.

10 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce DH130.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

12 Poursuivez.

13 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Peut-on maintenant montrer au témoin un

14 rapport qui porte la date du 29 décembre 1993 et qui vient du centre

15 Régional de Zenica. Nous parlons toujours de la MCCE. Je crois que nous

16 avons suffisamment d'exemplaires pour toutes les personnes présentes.

17 Q. Je vous demande, Monsieur Chambers, d'examiner la page qui porte le

18 numéro ZA00772, qui est plus exactement le sous-point E.

19 R. J'ai lu. Merci.

20 Q. Conviendrez-vous avec moi que le commandant Alagic dit très clairement

21 ici que les Moudjahiddines étaient incontrôlables et qu'on leur avait prié

22 de respecter les lois du pays et de rejoindre les rangs de l'ABiH, faute de

23 quoi ils seraient considérés comme étant des unités paramilitaires ? Est-ce

24 bien ce que dit ce rapport ?

25 R. Apparemment, oui, et que certaines mesures avaient été prises par M.

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1 Alagic à l'encontre de certaines Unités de Moudjahiddines qui étaient, à ce

2 moment-là, parties. C'est exact, effectivement.

3 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, étant donné qu'il

4 s'agit d'un document de la MCCE, la Défense proposerait, en ce moment-ci,

5 que l'on lui accorde une cote d'identification à ce document et, s'agissant

6 de celui-ci, nous demanderons son versement au dossier lorsque nous aurons

7 un témoin de cette mission de la MCCE ici.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Withopf.

9 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, pas d'objections à

10 nouveau.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : Un numéro aux fins d'identification.

12 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] DH131 ID marqué aux fins

13 d'identification.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

15 Mme RESIDOVIC : [interprétation]

16 Q. Monsieur Chambers, est-il exact de dire que le rapport que vous ai

17 montré, et ce rapport, ayant d'ailleurs précédé celui que vous avez adressé

18 à l'intention du général Chambers, tout comme du reste, ceux qui ont été

19 communiqués par la suite nous montrent la vraie présence d'un problème,

20 pour ce qui est du contrôle à l'égard des Moudjahiddines, et nous disent

21 que ces Moudjahiddines ne sont pas sous le contrôle du 3e Corps. Seriez-

22 vous d'accord avec cette conclusion, ou pas

23 R. Certes, je suis d'accord pour dire qu'il y avait un problème pour ce

24 qui était de certains éléments des Moudjahiddines. Il s'agissait, en fait,

25 d'éléments -- comment pourrais-je dire -- d'éléments délinquants ou

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1 [imperceptible], qui avaient pu mener à bien des actions indépendantes et

2 qui dépassaient justement les normes et les conditions de contrôle telles

3 que nous le comprenons. Mais, pour revenir à la question du contrôle et du

4 commandement, et pour faire la différence entre un groupe dont certains

5 étaient des Moudjahiddines et qui pensaient être placés sous le

6 commandement d'une autorité supérieure, ou est-ce qu'il s'agissait de

7 savoir s'il y avait certains éléments qui pensaient être indépendants et

8 pouvoir agir en toute indépendance du commandement militaire.

9 Q. Monsieur Chambers, pouvez-vous nous confirmer le fait que dans

10 l'exercice de vos fonctions, il vous est parvenu plusieurs rapports de la

11 part du BritBat, mais aussi de la part d'autres organisations

12 internationales où il a été question de conflits survenus entre les

13 Moudjahiddines et les membres de l'ABiH ?

14 R. C'est exact, oui.

15 Q. Vous saviez également que les Moudjahiddines ont effectué une attaque à

16 main armée à l'encontre du commandant de cette 7e Brigade musulmane, M.

17 Kubura. Saviez-vous des informations à ce sujet-là ou pas ?

18 R. Non. Non, non, je ne le savais pas. Non, non.

19 Q. Aviez-vous des informations disant que ces Moudjahiddines s'étaient

20 attaqués également à certains membres de la 17e Brigade de la Krajina ?

21 R. Je savais qu'il y avait des frictions entre la 7e Brigade musulmane et

22 entre la 17e Brigade de la Krajina. J'ai entendu parler d'une menace de la

23 part d'un commandant de la 17e Brigade de la Krajina. Il s'agissait, en

24 fait, de demander à l'un des commandants de la 7e Brigade musulmane, qui

25 répondait au nom de Abu Haris, et qui commandait une compagnie de

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1 Moudjahiddines dans la zone de Mehurici, de déposer les mortiers. Je savais

2 -- j'étais au courant du fait qu'il existaient des frictions et que, dans

3 certains cas, cela a abouti à des menaces, des menaces d'actes hostiles.

4 Q. Si je puis me permettre de vous faire une suggestion. Je vous

5 demanderais de me dire si vous êtes d'accord avec moi pour affirmer que ce

6 commandant était le commandant Cuskic, qui a adressé ce type de menaces à

7 l'intention des Moudjahiddines à Mehurici et non pas à l'intention de la 7e

8 Brigade musulmane.

9 R. Le commandant à qui je fais allusion pourrait être le commandant

10 Cuskic, mais je pense qu'il était le commandant de la 17e Brigade, à

11 l'époque, et sa menace a été proférée à l'égard du commandant qui répondait

12 au nom d'Abu Haris et qui commandait la majorité des Moudjahiddines, qui

13 étaient des ressortissants étrangers.

14 Q. En août, vous obteniez des informations, disant qu'il y avait des

15 conflits entre la population bosnienne sur le territoire du 3e Corps

16 d'armée et les Moudjahiddines. D'autre part, chose dont il a été question

17 dans les rapports des observateurs de la MCCE, étiez-vous au courant de ce

18 type d'observation ?

19 R. Je ne peux pas me souvenir d'un événement précis. Toutefois, je suis

20 conscient du fait que les Moudjahiddines n'étaient pas véritablement prisés

21 de la population locale, du fait de leur opinion extrêmement intégristes et

22 du fait de leur comportement. Je sais qu'il y avait des frictions, des

23 tensions entre les Moudjahiddines et la population locale.

24 Q. Cependant, ces informations au sujet de conflits entre certaines

25 brigades de l'armée et les Moudjahiddines, et le mécontentement de la

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1 population à l'égard des Moudjahiddines, vous ne les avez pas insérées dans

2 les rapports que vous avez rédigés à l'intention du général Chambers. Vrai

3 ou faux ?

4 R. En fait, je pense que j'ai indiqué, dans mon rapport, que les

5 Moudjahiddines n'étaient pas particulièrement prisés de la population

6 locale. Je pense que j'ai utilisé ces mots ou des mots assez semblables, et

7 je pense également que, dans cette télécopie de quatre pages auxquelles

8 nous avons fait allusion, je pense que j'ai également indiqué qu'il y avait

9 eu des tensions et des frictions au sein de l'Armée bosnienne.

10 Q. Non, merci. De façon indirecte, je viens de le vérifier. Vous l'avez

11 dit, mais vous ne l'avez pas -- vous n'avez pas implicitement mentionné la

12 17e Brigade de la Krajina.

13 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je voudrais que l'on montre au témoin la

14 pièce de l'Accusation P223. Il s'agit d'un rapport daté du 2 novembre

15 envoyé par ce témoin-ci, suite à une demande formulée par le général

16 Chambers.

17 Q. Vous devez vous rappeler ce rapport forcément. Je vais, tout de suite,

18 vous demander s'il est exact de dire qu'au paragraphe 1 de la réponse, vous

19 indiquez vous-même que vous avez joint une représentation graphique, qui

20 suivant les informations les plus récentes, constitue la structure de

21 commandement de cette 7e Brigade musulmane. Est-ce que c'est bien ce que

22 votre rapport indique à ce sujet ?

23 R. Oui, tout à fait.

24 Q. Je voudrais à présent demander que l'on traite quelque peu des

25 renseignements qui figurent dans cette représentation graphique, et je

Page 6112

1 voudrais que vous vous penchiez dessus une fois de plus. C'est ce qui se

2 trouve joint à votre rapport.

3 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je voudrais qu'avec cette pièce à

4 conviction, on montre au témoin la pièce P123 en parallèle.

5 Q. La pièce à conviction que l'on vous montre à présent est un ordre

6 émanant -- concernant la création du 3e Corps et c'est daté du 9 novembre

7 1992.

8 R. Oui.

9 Q. Je vous demanderais, Monsieur Chambers, de vous pencher rapidement sur

10 les points 1,1.1, 2, et cetera -- de vous pencher sur les noms des

11 localités qui désignent la zone de responsabilité du 3e Corps. Cela se

12 termine par 1.13.

13 R. Oui. Oui. Cela y est, je l'ai vu.

14 Q. Est-il exact de dire que, dans cet ordre-ci, il n'est pas fait état de

15 Maglaj en sa qualité de secteur ouvert par le 3e Corps ?

16 R. Oui. Effectivement, je peux accepter cela.

17 Q. Est-il exact de dire qu'en répondant aux questions de mon éminent

18 confrère, vous avez indiqué à un moment donné que tout ce qui figurait à

19 l'intérieur de ce petit rectangle constituait des faits vérifiés ?

20 R. Oui. J'avais dit en réponse à une question posée par l'Accusation que,

21 lorsqu'il s'agissait d'informations et de renseignements connus, cela a été

22 mis dans des encadrés avec des chiffres et les encadrés avec une croix au

23 milieu, alors que lorsque les informations n'étaient pas connues, nous

24 laissions cela vide.

25 Q. Sur cet organigramme, il apparaît que la 7e Brigade musulmane se

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1 trouverait à Maglaj. "Maglaj" figure sous cette espèce de maisonnette,

2 n'est-ce pas ?

3 R. Oui. C'est exact. Mais je me souviens également que vendredi, lorsque

4 j'ai répondu à une question posée par l'Accusation, j'avais dit qu'à

5 l'époque Maglaj était une enclave vers lesquelles les troupes de la

6 FORPRONU n'étaient pas allées. Nous avions très, très peu de renseignements

7 sur l'enclave de Maglaj de ce fait.

8 Q. Par voie de conséquences, ce fait pour ce qui est de votre organigramme

9 indique que vous ne pouvez pas affirmer avec certitude que le fait soit un

10 fait avéré.

11 R. Oui. Je ne peux pas vous dire en toute certitude qu'il y avait à Maglaj

12 un bataillon, à savoir, le 4e Bataillon de la 7e Brigade.

13 Q. Dans la colonne où il est question de la structure de commandement sous

14 "Travnik", l'on voit le nom du commandant de ce 1er Bataillon, Asim Koricic,

15 n'est-ce pas ?

16 R. C'est ce qui est indiqué par l'organigramme, effectivement. Je ne me

17 souviens pas s'il était le commandant à l'époque.

18 Q. D'après ce que vous avez fourni comme réponse à mon éminent confrère,

19 cela serait censé être un fait vérifié, n'est-ce pas ?

20 R. C'est exact. Oui.

21 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je demanderais à ce que l'on montre au

22 témoin une des responsables supérieurs du QG de la brigade et des officiers

23 supérieurs travaillant dans les salles de l'école à compter du 12 janvier

24 1993. Il s'agit d'un document de la 7e Brigade musulmane, et nous avons

25 obtenu celui-ci des mains du bureau du Procureur.

Page 6114

1 Q. Il s'agit d'un document daté du 12 janvier 1993, et comme vous pouvez

2 le voir, au point "1" il est indiqué que Koricic Asim est le commandant de

3 la 7e Bridage musulmane. Est-ce que c'est bien cela qui découle de ce

4 document, Monsieur ?

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Withopf.

6 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, je soulève une

7 objection par rapport à ces questions, et ce, pour deux raisons : dans un

8 premier temps, le nom, qui est mentionné sur la pièce à conviction de

9 l'Accusation P123, n'est pas Asim Koricic. Ce n'est pas le nom qui se

10 trouve mentionner dans le document qui est montré maintenant au témoin et

11 qui porte la date du 12 janvier 1993. S'il y a une différence entre les

12 deux documents, je dirais que le document du 12 janvier 1993 porte sur la

13 situation qui prévalait le 12 janvier 1993, alors que l'autre document est

14 un document relatif à la situation ultérieure, la situation du reste de

15 l'année 1993. Pour ces deux raisons, je présente une objection par rapport

16 aux questions qui ont été posées au témoin.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. La Défense, pouvez-vous expliciter le point

18 soulevé par l'Accusation qui conteste que le document P123 porte le nom de

19 "Koricic" ?

20 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit d'une

21 personne qui est connue du bureau du Procureur et qui se trouvait être au

22 début le commandant de la 7e Brigade musulmane avant qu'Amir Kubura ne le

23 remplace à ses fonctions. Etant donné que le témoin témoignant et répondant

24 aux questions du bureau du Procureur a indiqué que c'était des faits avérés

25 et que cela a été vrai pour

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1 le 2 novembre, ma question suivante à l'intention du témoin est celle de

2 savoir si à quelque moment que ce soit, il aurait obtenu une information ou

3 un document, qui dirait qu'Asim Koricic serait, effectivement, devenu

4 commandant du bataillon.

5 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président.

6 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Monsieur Withopf.

7 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, il est vrai, et

8 l'Accusation le sait parfaitement, il est vrai, disais-je, qu'un dénommé,

9 Asim Koricic, était le commandant de la 7e Brigade musulmane à un moment

10 donné, mais le document auquel fait allusion ma consoeur porte un nom

11 différent. Il ne s'agit pas du commandant de la 7e Brigade. Il s'agit du

12 commandant du 1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane, ce qui, de toute

13 évidence, correspond à une différence. J'aimerais également attirer

14 l'attention des Juges sur le document que la Défense est en train de

15 montrer au témoin, car il semblerait que ce document fait partie des

16 documents qui font l'objet de contestation de la part de la Défense,

17 puisqu'il se trouve sur la liste des documents contestés, ce qui me semble

18 assez étrange.

19 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, vous savez que la

20 Défense a contesté les documents sur des bases variées, et la raison

21 principale c'est que sur certains documents notre attention est, notamment,

22 de les faire vérifier par le témoignage des témoins. Je ne m'entends pas à

23 ce que ce témoin identifie le document en question, mais le témoin a

24 confirmé que les faits figurant dans les cases étaient vérifiés, notamment,

25 avec la situation qui a prévalu au moment de la rédaction du rapport. Ce

Page 6116

1 que nous souhaitons montrer c'est que le témoin à l'époque n'a pas disposé

2 de faits véridiques. C'est ce que la Défense veut démontrer. Je crois que

3 le témoin a tout au début clairement indiqué que s'il avait disposé

4 d'informations différentes, ces rapports auraient été différents.

5 Je voudrais lui demander maintenant :

6 Q. Oui ou non, Monsieur Chambers, il vous a été donné d'obtenir à quelque

7 moment que ce soit des documents qui indiqueraient que l'ex-commandant de

8 la 7e Brigade musulmane à un moment donné serait devenu commandant du

9 bataillon Travnik ?

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur Withopf.

11 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais soulever

12 une objection par rapport à cette question, parce que le nom qui se trouve

13 sur le document qui a été donné par le témoin est apparemment différent du

14 nom que nous avons dans le document du

15 12 janvier 1993, et de surcroît, la Défense a présenté des objections à ce

16 que l'Accusation présente le document du 12 janvier 1993 et le fasse verser

17 au dossier pour la raison que cela ne correspond pas à la période couverte

18 par l'acte d'accusation. La Défense, apparemment, semble se contredire,

19 soit le document peut être utilisé, soit il ne peut pas être utilisé. La

20 raison principale, en fait, vient du fait que nous avons deux noms

21 différents sur deux documents. De toute évidence, les noms sont différents.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Dans le document P223, apparaît sous "Travnik,

23 commandant Asim Koricic." C'est bien la question que vous voulez poser pour

24 montrer que la mention du fait qu'il serait le commandant de la 7e Brigade

25 serait contradictoire avec le fait qu'il y ait au P223 le nom de ce

Page 6117

1 commandant à Travnik ? Explicitez votre question parce qu'on a du mal à

2 vous suivre, Maître Residovic.

3 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, d'après les dires

4 de l'acte d'accusation, le premier commandant de la 7e Brigade musulmane

5 avait été Asim Koricic, qui, par la suite, s'est dirigé, d'après l'acte

6 d'accusation, c'est en avril qu'Amir Kubura est devenu commandant de cette

7 unité. Il est vrai qu'il y a une faute de frappe. Il manque une lettre "I",

8 mais il a indiqué que la même personne, or en novembre, s'est trouvée être

9 le commandant d'un bataillon et est un fait qui est porté sur

10 l'organigramme. Je pense que le témoin avait disposé de renseignements

11 erronés concernant les noms des commandants de la 7e Brigade musulmane, et

12 je voudrais que le témoin me réponde.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur Withopf. Je vais vous donner la

14 parole.

15 Mais la question est très simple : Monsieur le Témoin, on a un document qui

16 est la liste des officiers de la 7e Brigade, ce document date du 12 janvier

17 1993. En numéro 1, il y a marqué Asim Koricic. Dans le document, que vous

18 établissez en novembre, c'est-à-dire, plusieurs mois après, on a comme

19 commandant de bataillon, c'est-à-dire, en dessous, le nom d'Asim Koricic.

20 Il y a une grosse question.

21 Est-ce que le document, que vous établissez en novembre, ne porterait pas

22 une erreur colossale ? Car le M. Asim Koricic aurait été en quelque sorte

23 rétrogradé et se trouverait commander un bataillon à Travnik, alors que,

24 dans le document que vous avez sous les yeux, il est numéro 1 ? Quelle

25 explication donnez-vous ? Oui, si c'est la personne.

Page 6118

1 C'est-à-dire que la question que la Défense vous pose, cela voudrait dire

2 que, dans votre document, c'est la même personne. Est-ce que pour vous

3 c'est la même personne ou c'est deux personnes différentes ? Car, si c'est

4 la même personne, il y a un problème. Si c'est deux personnes différentes,

5 il n'y a pas de problème. Que dites-vous ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'en sais rien, Monsieur. Voilà ma réponse.

7 Tout ce que je sais c'est que le nouveau document, que j'ai présenté ici

8 qui montre Assis Koricic comme commandant de brigade, le 12 janvier 1993,

9 11 mois plus tard, c'était Kubura qui était le commandant. Qu'est-il advenu

10 d'Asim Koricic, je n'en sais rien. Vous voyez qu'il y a, dans la liste, un

11 "Asim Koricic" qui maintenant reste, à savoir, s'il s'agit de la même

12 personne ou non, je n'en sais rien.

13 Je suis d'accord avec vous, Monsieur. Il serait très peu probable que, 11

14 mois plus tard, le même homme soit rétrogradé commandant de bataillon. Ceci

15 étant dit, je ne sais pas s'il s'agit du même homme.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Poursuivez.

17 Mme RESIDOVIC : [interprétation]

18 Q. Monsieur Chambers, si je vous disais -- ou plutôt, si vous aviez

19 disposé de ces documents, de documents qui indiqueraient que le commandant

20 du 2e Bataillon à Zenica n'a jamais été Hidan Kisanovic [phon], mais que

21 c'était M. Patkovic et que le commandant du 3e Bataillon à Kakanj, Nihad

22 Catic, a cessé d'être commandant de ce bataillon-là au mois de juin 1993,

23 si vous avez disposé de ces documents-là, ce que vous avez rédigé n'aurait

24 pas été une présentation de la situation véritable, n'est-ce pas ?

25 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président.

Page 6119

1 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Withopf.

2 M. WITHOPF : [interprétation] Mon estimé consoeur, qui est sur la Défense

3 du général Hadzihasanovic, essaie de faire en sorte que le témoin se livre

4 à des spéculations, ce qui n'est certainement pas l'objectif de la

5 déposition du témoin.

6 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, la Défense est en

7 train de présenter des thèses qui, dans le courant de ce procès,

8 s'avéreront être exactes. Le témoin nous a dit qu'il a rédigé des rapports

9 et des organigrammes partant de ce qu'il savait à l'époque. Etant donné

10 qu'il a déjà jugé que, s'il avait disposé d'informations autres, il aurait

11 fait des rapports différents, je lui demande s'il avait eu connaissance de

12 ces faits-là, si l'organigramme qu'il a établi se présenterait bel et bien

13 tel quel.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, je vais vous donner la parole, Monsieur

15 Withopf.

16 La question, elle est assez simple : dans l'hypothèse où Koricic Asim c'est

17 le même, au moment en novembre quand vous faites votre tableau, est-ce que

18 vous auriez indiqué la même chose ou vous auriez modifié votre tableau ? La

19 question, elle est, dans la mesure où c'est la même personne, si c'est deux

20 personnes différentes.

21 L'avocat vous dit : si vous aviez eu cette liste et que vous auriez vu que

22 Koricic était numéro 1, est-ce que vous l'auriez marqué dans votre tableau

23 comme chef de bataillon ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Probablement pas, Monsieur. Si je peux me

25 permettre de préciser quelque chose. Cela sera d'ailleurs peut-être utile

Page 6120

1 pour les Juges, ou peut-être pas.

2 Vous me posez une question, et il me semble que vous me demandez si ce qui

3 est inscrit dans le tableau représentait l'exactitude et une certitude au

4 moment où cela a été imprimé. Si vous m'aviez posé cette question, je vous

5 aurais dit que, lorsque nous mettions des noms et des localités dans ce

6 genre de tableau, cela signifiait qu'à un moment donné, nous avions obtenu

7 des informations à ce sujet. A un moment donné, de toute évidence, les

8 faits changent, les commandants changent, les unités changent ou se

9 déplacent. Il se peut qu'il y ait eu des changements au niveau de la

10 structure de l'ABiH. Peut-être dans certains cas, un à deux mois

11 auparavant, et peut-être que les renseignements ne nous avaient pas été

12 transmis, ce qui fait que, lorsque nous rédigions ce tableau, nous ne le

13 savions pas et, par conséquent, les informations que vous avez sur ce

14 tableau peuvent correspondrent à des informations anciennes.

15 Mme RESIDOVIC : [interprétation]

16 Q. Merci. En autre, Monsieur Chambers --

17 M. LE JUGE ANTONETTI : M. Withopf voulait dire quelque chose, mais il s'est

18 rassis. Monsieur Withopf, que vouliez-vous dire ? Je vous ai demandé

19 d'attendre la réponse du témoin avant de vous donner la parole.

20 M. WITHOPF : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Le témoin a

21 justement précisé la question que je souhaitais aborder.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Poursuivez.

23 Mme RESIDOVIC : [interprétation]

24 Q. Monsieur Chambers, vous n'avez pas eu l'opportunité de voir l'ordre

25 portant formation de la 7e Brigade musulmane, n'est-ce pas ?

Page 6121

1 R. Non, je ne l'ai pas vu.

2 Q. Si je vous disais que la 7e Brigade musulmane, conformément à l'ordre

3 en question, ne comportait que trois bataillons à l'époque, alors votre

4 organigramme qui montre un quatrième bataillon de cette 7e Brigade

5 musulmane ne correspondrait pas du tout à la structure de la 7e Brigade

6 musulmane, n'est-ce pas ?

7 R. Oui. C'est exact. Bien que je pense que vous avez certainement attiré

8 notre attention, sur la note numéro 4, Brigade de Maglaj, où il est indiqué

9 : "La brigade Maglaj ne se trouve probablement plus dans le secteur de

10 Maglaj."

11 Q. Merci. Cependant, vous seriez d'accord avec moi pour dire que le

12 renseignement au terme duquel la 7e Brigade musulmane comporte sept --

13 quatre bataillons ne correspondent pas à la réalité des faits ?

14 R. Oui. Je peux marquer mon accord avec cela.

15 Q. Dans votre rapport, vous indiquez que la 7e Brigade musulmane est la

16 seule Brigade de Manœuvre; c'est bien ce que vous dites ?

17 R. Non. Ce n'est pas exact car, en ce qui me concerne, une Brigade de

18 Manœuvre est une brigade qui peut manœuvrer en cas de défense --

19 d'offensive ou quelque soit le type d'opération militaire que vous menez à

20 bien. De toute évidence, l'ABiH avait un certain nombre de Brigades de

21 Manœuvre. J'ai toutefois dit qu'il y avait des Brigades de Manœuvre qui

22 étaient surtout utilisées au moment d'attaque.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : A ce stade, la Chambre se pose la question de savoir

24 si les Défenseurs de M. Kubura et Me Dixon ne voulaient pas, sans attendre

25 tout à l'heure, poser une question au témoin sur ce problème parce que,

Page 6122

1 dans le document, la 7e Brigade est sous le commandant de M. Kubura avec la

2 Travnik comme chef de bataillon, M. Asim Koricic.

3 Me Dixon, vous ne voulez pas intervenir à ce stade.

4 M. DIXON : [interprétation] Monsieur le Président, je préfèrerais conserver

5 mes questions à la fin, après que Mme Residovic en a terminé. Mais je

6 voulais de toute évidence poser au témoin un certain nombre de questions à

7 ce sujet.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre voulait en avoir le cœur net et, comme

9 vous étiez cachée, je ne vous voyais pas.

10 Mme RESIDOVIC : [interprétation]

11 Q. Monsieur Chambers, dans cet organigramme, vous avez également placé

12 dans une case qu'il a été créé une 8e Brigade musulmane, et on voit en

13 dessous "Zenica Mehurici," à côté du nom, il y a un point d'interrogation.

14 Cela doit signifier que vous avez connaissance sur la création de cette 8e

15 Brigade musulmane, mais vous ignorez le nom, c'est bien ce que cela veut

16 dire ?

17 R. Oui. À l'époque, nous avions entendu des bruits qui couraient à propos

18 de discussions qui portaient sur l'éventualité de la création d'une 8e

19 Brigade. D'ailleurs, nous n'en connaissions pas le nom, d'où le point

20 d'interrogation, et vous avez la référence qui est donnée Zenica-Mehurici

21 et c'est parce que nous supposions que le QG se trouvait là.

22 Je dois vous avouer que je ne me souviens pas si la 8e Brigade avait déjà

23 été formée ou si elle était en train d'être formée. Je pense que c'est la

24 deuxième possibilité qui est probablement vraisemblable, à savoir, elle

25 était en pleine formation à l'époque.

Page 6123

1 Q. Il n'en demeure pas moins qu'en répondant aux questions de l'Accusation,

2 vous avez dit que vos informations disaient que, dans cette brigade, il n'y

3 avait que des combattants étrangers. C'est bien ce qui est dit ?

4 R. Non. Non, non, ce n'est pas exact. J'ai dit de façon très, très claire

5 lors de ma déposition et dans la télécopie, que la brigade était composée

6 d'un nombre compris entre 500 à 800 combattants, et j'ai dit que sur ce

7 nombre, que quelques 200 environ étaient des Moudjahiddines, et que les

8 autres éléments de la brigade étaient soit des Musulmans intégristes

9 bosniens par opposition aux étrangers. Je n'ai jamais indiqué que la 7e

10 Brigade musulmane était exclusivement composée de combattants étrangers. Je

11 ne l'ai jamais dit.

12 Q. Je m'excuse. Il soit probable que je me sois trompée en formulant mes

13 questions. Peut-être ne nous sommes pas bien compris. Je vous ai demandé la

14 chose au sujet de la 8e Brigade musulmane parce qu'en bas, dans les

15 explications à l'alinéa 3, il y était indiqué que vous estimiez que cette

16 8e Brigade musulmane serait constituée uniquement d'étrangers; est-ce

17 exact ?

18 R. Oui. Je pense que l'intention de l'Armée bosnienne était d'essayer de

19 forcer, et j'utilise le mot à essayer de forcer, disais-je, les

20 Moudjahiddines dans une seule unité formée. Il s'agissait de les rassembler

21 tous les Moudjahiddines dans une brigade qui aurait été connue sous le nom

22 de 8e Brigade, effectivement.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Residovic, nous faisons le calcul, et vous

24 avez quasiment utilisé déjà deux heures. Il vous reste combien de temps ?

25 Parce que là, comme M. Dixon nous dit, qu'il lui faudra 30 minutes, on va

Page 6124

1 dépasser le temps qui vous était imparti. Quelles sont les raisons

2 exceptionnelles ? Il vous faut combien de temps encore ?

3 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je touche à la fin,

4 en effet, mais je crois avoir besoin d'une quinzaine de minutes.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : 15 minutes. Vous avez des nouveaux documents ou

6 pas ?

7 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Oui, j'ai deux documents, et une pièce de

8 l'Accusation qui a déjà été versée au dossier.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous allez pouvoir poursuivre, mais je voudrais

10 demander au témoin une petite précision.

11 Puisqu'on est sur la 8e Brigade, dans le tableau où il est marqué, "El

12 Mujahed" avec un point d'interrogation, il y a le carré, il y a "Zenica-

13 Mehurici" et, en dessous, il y a "YJ 18 205." Cela veut dire quoi ? Qu'est-

14 ce que cela veut dire ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur, il s'agit de la référence de la

16 carte. Il s'agit du point sur la carte où se trouvait leur QG.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

18 Maître Residovic.

19 Mme RESIDOVIC : [interprétation]

20 Q. Ai-je bien compris, Monsieur Chambers, que vous venez de dire qu'il y a

21 eu des indications, disant qu'une 8e Brigade musulmane était en cours de

22 formation ? C'est bien ce que vous avez dit ?

23 R. C'est exact.

24 Q. Cela signifierait que votre rapport ou plutôt vos rapports pouvaient

25 contenir certains faits éventuellement autres et non seulement des faits au

Page 6125

1 sujet desquels vous aviez une certitude absolue.

2 R. Dans le cas de la 8e Brigade musulmane, c'est exact.

3 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je vous demanderais de montrer au témoin

4 le bulletin d'informations militaire 156, daté du 1er octobre, ainsi que le

5 rapport rédigé en date du 24 octobre à l'attention du commandant de la

6 FORPRONU à Kiseljak.

7 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Residovic, sur la liste que vous avez déposé,

9 qu'est-ce que vous voulez faire de ce document ? Vous en demandez le

10 versement, vous le retire ?

11 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président, je retire ce

12 document. On n'en parlera lorsque l'on passera au document.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Withopf.

14 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, je trouve que cette

15 procédure est assez peu usuelle. La Défense montre au témoin un document,

16 un document qu'elle a obtenu de l'Accusation. Il s'agit d'un document qui

17 est contesté par la Défense, et les raisons sont expliquées dans la motion

18 relative aux documents contestés. Ils utilisent ce document pour poser au

19 témoin un certain nombre de questions et, lorsqu'on leur demande s'ils

20 souhaitent verser ce document au dossier ou le marquer aux fins

21 d'identification, ils nous répondent : "Nous discuterons de ce document

22 lorsque nous aurons la décision des Juges à propos du document." C'est une

23 procédure, il ne me semble pas tout à fait équitable, quelques soient les

24 circonstances. D'ailleurs, soit la Défense conteste un document, soit elle

25 -- et cela signifie qu'elle ne l'utilise pas -- soit elle accepte le

Page 6126

1 document, en tant que pièce à conviction de l'Accusation, mais de demander

2 au témoin de faire des observations sur un document et, ensuite, le

3 contester, cela me semble un peu étrange.

4 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, si mon confrère n'a

5 pas d'objections à formuler -- et j'ai cru comprendre qu'il avait une

6 objection à formuler -- la Défense proposerait à ce que cette pièce-là soit

7 versée au dossier, en tant qu'élément de preuve de la Défense, pour ce qui

8 est de la composition en officiers supérieurs de cette 7e Brigade

9 musulmane.

10 [La Chambre de première instance se concerte]

11 M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre va se retirer quelques minutes. Nous

12 revenons dans quelques minutes.

13 --- La pause est prise à 17 heures 17.

14 --- La pause est terminée à 17 heures 21.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre -- sur le document, liste de la 7e

16 Brigade, avec les officiers, la Défense demande le versement. L'Accusation

17 ne s'y oppose pas. Je vais demander à Mme la Greffière de me donner un

18 numéro définitif.

19 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce DH132, la traduction

20 en anglais portera la cote DH132/E.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce document étant enregistré, c'est le numéro DH132

22 pour le B/C/S et, dans la version anglais, DH132/E. Mais la Chambre, qui

23 admet la recevabilité de ce document, est amenée, néanmoins, à constater

24 que la Défense fait un grand écart, parce qu'au départ, ce document a été

25 contesté et, après, vous en demandez le versement. Il y a parfois une -- il

Page 6127

1 y a une incohérence. Mais on comprend l'utilité également de ce document.

2 C'est pour cela on l'admet. Peut-être que, quand vous l'avez contesté, vous

3 n'en aviez pas vu tout l'intérêt. Voilà la raison.

4 Le deuxième point. Concernant votre temps de parole, qui est déjà dépassé,

5 nous vous en conjurons de respecter le temps qu'on vous a indiqué, sinon,

6 il n'y a plus de maîtrise du temps des uns et des autres. Dans l'hypothèse

7 inverse, le Procureur pouvait aussi prendre beaucoup de temps, en posant

8 ses questions et, à ce moment-là, la Défense, ayant 50 % de temps

9 supplémentaire, dépasserait allégrement une journée d'audience pour un

10 témoin. C'est pour cela que le Procureur essaie de se limiter dans le

11 temps. Vous-mêmes, essayez de vous limiter, d'autant plus que vous savez

12 très bien qu'en posant des questions, ce sont des Juges professionnels qui

13 écoutent et les questions et les réponses, et que les questions que vous

14 posez, ce n'est pas à destination d'un jurée, mais à information de Juges

15 professionnels, qui apprécient immédiatement la portée de la question et la

16 valeur de la réponse. C'est pour cela qu'il vaut mieux aller tout de suite

17 à l'essentiel. Je vous redonne la parole.

18 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur Chambers, je vous demande de vous

19 pencher sur le bulletin d'information militaire du 1er octobre, point B.

20 Serait-il exact de dire que l'on affirme ici qu'il y a création d'une 8e

21 Brigade musulmane, "El Mujahed", qui est constituée de combattants du pays

22 et de combattants étrangers ? Je précise que c'est le 156e des bulletins

23 d'information militaire, daté du 1er octobre.

24 R. Oui, j'ai le même document que vous. Effectivement, ce document dit

25 bien que cette brigade avait été formée. Cela reprend ses informations.

Page 6128

1 Q. Ce serait contraire à ce que vous avez indiqué dans l'organigramme, où

2 il est précisé que cette brigade n'est constituée que d'étrangers; c'est

3 bien exact, n'est-ce pas ?

4 R. Oui, si ce n'est que vous relèverez la date de ce numéro 156. C'est la

5 date du 1 octobre. Je l'ai, sans doute, reçu dans la matinée du 2 octobre,

6 après avoir rédigé mon rapport dont nous avons discuté. Je leur avais

7 rédigé mon rapport la veille, dans la soirée du 1e octobre. Ceci suit

8 immédiatement la télécopie que j'ai envoyée au général Chambers.

9 Q. Merci. Je vous prie de vous pencher sur le rapport du

10 24 octobre et, notamment, "Parties belligérantes", au point B.

11 R. Oui, je suis en train d'examiner ce document.

12 Q. A la sixième ligne, il est posée une question, celle de savoir si, oui

13 ou non, la 8e Brigade musulmane était, effectivement, créée ou pas, n'est-

14 ce pas ?

15 R. Oui, apparemment, c'est le cas.

16 Q. Ces deux rapports du 1e octobre et du 24 octobre, qui sont rédigés

17 avant votre rapport du 2 novembre -- ou plutôt, 30 octobre et

18 2 novembre, parlent des faits qui ne reflètent pas ce qui figure dans votre

19 organigramme -- ou plutôt, parlent des mêmes faits, mais de façon

20 différente. Vous serez d'accord avec moi pour le dire, oui ou non ?

21 R. Un petit oui. C'est seulement en partie que je dis oui car je pense que

22 l'organigramme, qui représentait la 8e Brigade musulmane, était exact au

23 moment où cet organigramme a été rédigé, que c'est corroboré par les

24 rapports écrits que vous avez ici, avant ou après ces télécopies. Ce qui ne

25 s'y trouve pas éventuellement, c'est la ligne que vous avez soulignée, là

Page 6129

1 où on dit qu'aussi bien, il y avait des ressortissants étrangers, mais, un

2 plus haut, titre aussi, des gens de Bosnie.

3 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je demanderais que l'on montre au témoin

4 la pièce de conviction de l'Accusation P378. Il s'agit d'un rapport portant

5 sur les structures organisationnelles du

6 3e et 6e Corps d'armée.

7 Q. Je vous demande de vous pencher sur la teneur du point à l'alinéa 15.

8 R. Oui, compris.

9 Q. Je vous rappelle qu'il y a un document du 27 juin, à savoir, des

10 informations militaires qui comportent un commentaire sur les

11 Moudjahiddines, au sein de la 7e Brigade musulmane, qui est rédigé partant

12 des informations provenant du commandant Nakic, commandant du HVO. Seriez-

13 vous d'accord avec moi pour dire que le point 15 a repris le commentaire

14 qui figurait au bulletin d'information militaire daté du 27 juin ?

15 R. Qu'est-ce que vous voulez dire, qu'il y a certains membres qui

16 s'habillent comme si c'étaient des membres de la 7e Brigade musulmane ?

17 C'est cela que vous voulez dire ?

18 Q. Oui.

19 R. Oui, je conviens que cela s'est peut-être passé, à lire ces rapports.

20 Q. Vous serez d'accord avec moi pour dire que certains commentaires ont

21 été tout simplement copiés dans d'autres rapports, sans pour autant tenir

22 compte de tous les documents et de tous les faits dont nous avons parlés

23 aujourd'hui pour ce qui est de la composition de la 7e Brigade musulmane et

24 des Moudjahiddines, tels qu'on a vu cela devant la Chambre ?

25 R. Je reconnais tout à fait que bon nombre de ces commentaires sont

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1 copiés, proviennent d'un rapport et seront recopiés dans un autre, sans que

2 l'auteur ne corrobore ceci à notre niveau de commandement, au niveau plus

3 élevé de notre commandement, parce qu'il n'était pas possible de le faire,

4 de le vérifier davantage. Ce n'est pas un problème à mes yeux, que de dire

5 oui, effectivement, il y a certaines sections de rapports qui ont été

6 recopiées pour qu'on composer un nouveau rapport.

7 Q. Pour finir, Monsieur Chambers, je vous demanderais si vous êtes

8 d'accord avec moi pour dire qu'à la fin de l'exercice de vos fonctions au

9 commandement de la FORPRONU à Kiseljak, vous n'avez pas eu à avoir une idée

10 tout à fait claire sur les Moudjahiddines, et vous n'êtes pas en mesure de

11 confirmer s'ils faisaient partie de la 7e Brigade musulmane, à savoir s'ils

12 avaient été placés sous le commandement du 3e Corps-là ?

13 R. Je risque de vous répondre longuement. Je pense que nous avons déjà

14 discuté de la question. Je crois que j'avais une si bonne idée de la

15 situation à l'époque que quiconque d'autre dans la FORPRONU. Je suis sur

16 que d'autres témoins auront dit ici dans ce prétoire, qu'on était des

17 observateurs de la guerre de quelqu'un d'autre. Nous n'étions pas des

18 combattants dans la guerre elle-même. Par conséquent, notre degré

19 d'intention et l'intention que l'on pouvait avoir s'agissant de deviner

20 quelles étaient les intentions des belligérants, n'étaient pas du même

21 degré que si nous avions été partie prenante nous-mêmes.

22 Je suppose que j'ai une idée d'ensemble des Moudjahiddines, qui est aussi

23 bonne qui quiconque d'autre. Pour ce qui est de la question du contrôle et

24 du commandement, je pense que cela demeure une question ouverte. A mes

25 yeux, je pense qu'il y avait des éléments qui n'étaient plus contrôlés, qui

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1 agissaient un peu comme des radicaux libres. Je pense qu'il y avait une

2 structure de commandement. La perception de la situation que nous avons à

3 l'époque, c'était que la 7e Brigade musulmane, tombait sous le contrôle du

4 3e Corps d'armée qui, par conséquent, avait des responsabilités

5 administratives ou logistiques pour la 7e Brigade musulmane même si,

6 éventuellement, elle n'en avait pas la contrôle opérationnel.

7 Q. Merci. Pour finir, est-ce que j'ai bien interprété votre réponse assez

8 pittoresque dans le courant de notre entretien, réponse où vous avez dit

9 que vous vous sentiez, comme si vous étiez devant un écran ou un rideau, où

10 il s'agissait de placer certaines images, en se disant qu'elles sont

11 exactes, mais, une fois le rideau ouvert, on voyait souvent une réalité qui

12 était tout à fait autre. Est-ce que j'ai bien interprété ce que vous nous

13 avez dit, à ce moment-là ?

14 R. Oui, c'est une bonne interprétation de votre part de l'analogie que

15 j'ai présentée, mais c'est vrai de toute guerre. Si on regarde la guerre

16 par un rideau, si on regarde le rideau, vous avez quelques éclats, quelques

17 fragments, et on se fait une idée. Evidemment, lorsqu'on ouvre le rideau,

18 11 ans plus tard, lorsque sont apparus de nouveaux témoignages, l'image que

19 vous aviez, à l'époque, n'était peut-être pas celle que vous allez avoir

20 maintenant. C'est vrai de toute guerre, de toute service de Renseignement.

21 Cela ne fait pas l'ombre d'un doute. On essaie de se faire la meilleure

22 vision possible, à l'époque, au moment des faits. L'histoire va peut-être

23 prouver le contraire, montrer que vous avez tort, ou simplement que l'image

24 s'est un peu différente.

25 Q. Merci, colonel Chambers. Merci, Monsieur le Président.

Page 6132

1 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Je demanderais seulement que les deux

2 derniers documents, que j'ai remis au témoin, soient versés au dossier en

3 tant que pièces de conviction de la Défense.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous demandez le versement au dossier du milinfosum

5 numéro 156 du 1e octobre 1993, et le document émanant de FORPRONU, qui

6 concerne l'implantation du plan de paix en Bosnie-Herzégovine; c'est bien

7 cela ?

8 Monsieur Withopf, deux documents officiels.

9 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, pas d'objections.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame la Greffière.

11 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le milinfosum numéro 156 du 1er octobre

12 1993, portera la cote DH133, s'agissant de l'ordre opérationnel pour la

13 mise en œuvre du plan de paix en Bosnie-Herzégovine, en date du 24 octobre

14 1993. Il portera la cote DH134.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

16 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vous remercie de

17 nous avoir fourni l'opportunité de poser toutes nos questions au témoin,

18 jusqu'au bout. Merci une fois de plus.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Il est 6 heures moins 25. On est conduit à faire une

20 nouvelle pause technique. Nous reprendrons à 18 heures. Nous aurons

21 exactement une heure.

22 M. Dixon prendra, nous a-t-il dit, 30 minutes, peut-être moins. Je connais

23 l'esprit de synthèse de Me Dixon, ce sera certainement moins. Ensuite, je

24 donnerai la parole à M. Withopf, qui est aussi animé de grand esprit de

25 synthèse, et les Juges poseront, s'il leur reste du temps, des questions.

Page 6133

1 Nous nous retrouverons à 18 heures.

2 --- L'audience est suspendue à 17 heures 36.

3 --- L'audience est reprise à 18 heures 06.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Dixon, vous avez la parole.

5 M. DIXON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

6 Contre-interrogatoire par M. Dixon :

7 Q. [interprétation] Mon colonel, serait-il exact de dire que ce n'est que

8 très rarement que les sources onusiennes ont recueilli des renseignements

9 de ce qu'ils avaient vu par contraste avec ce qu'ils avaient entendu dire ?

10 R. Tout à fait vrai.

11 Q. Il s'applique à vous aussi, qui était sur le terrain ?

12 R. C'est encore plus vrai pour moi parce que je ne suis pas beaucoup sorti

13 sur le terrain. Je me fiais surtout -- je m'appuyais sur des rapports sur

14 ce qui était rapporté.

15 Q. D'après ce que nous avons entendu dire, les renseignements étaient

16 obtenus des parties belligérantes et des habitants de la région sur le

17 terrain ?

18 R. Oui. C'était surtout à partir des gens -- des locaux que l'on

19 recueillait ces informations.

20 Q. Les Nations Unies ont recueilli des informations, notamment, en se

21 déplaçant dans des véhicules onusiens en donnant des cigarettes et de la

22 sljivovica, en échange d'information.

23 R. Oui, surtout les officiers de liaison britannique qui disait aux

24 commandants des factions belligérantes : buvez un petit coup, prenez une

25 cigarette. Une partie de la conversation c'était, effectivement, la

Page 6134

1 sljivovica, l'alcool de prune, et les cigarettes qui étaient offerts.

2 Q. C'était offert aux habitants des villages quand ils se déplaçaient pour

3 recueillir des renseignements ?

4 R. C'était moins souvent le cas, mais je suis sûr que cela s'est présenté

5 comme situation aussi.

6 Q. Vous conviendrez avec moi pour dire que ce que l'on ne voit pas de ses

7 propres yeux n'est vrai qu'en partie ?

8 R. Je serais d'accord avec vous pour dire qu'on est tout à fait tributaire

9 de l'intégrité de la personne qui vous fournit ces renseignements.

10 Q. Lorsque ces renseignements -- ces informations ne sont pas exactes,

11 c'est consigné dans un rapport et c'est là que cela finit. Cela reste dans

12 un rapport, vous l'avez déjà dit.

13 R. Oui, forcément cela s'est passé aussi.

14 Q. Vous aviez pour rôle d'être à l'écoute de renseignements provenant de

15 diverses sources. Il fallait en faire la synthèse et se faire une idée de

16 ce qui se passait sur le terrain. C'était là votre rôle ?

17 R. C'est exact. Je devais dresser un tableau d'ensemble, avoir une

18 perception, une idée des mouvements, des risques d'attaques et de

19 mouvements, oui. Il s'agissait d'avoir une idée d'ensemble de ce qui s'est

20 passé davantage que de parler de détails précis.

21 Q. En rapport avec les allégations précises que l'on trouve dans votre

22 rapport, à savoir que quelques 200 étrangers, des Moudjahiddines, se

23 trouvaient dans la 7e Brigade, est-ce que c'était une perception -- une

24 impression, c'est le terme que vous avez utilisé maintenant ?

25 R. Oui. Cela provenait, sans doute, d'un rapport, lui-même provenant du

Page 6135

1 Bataillon britannique, établi à partir de plusieurs sources sur une période

2 de temps donné qui aboutissait à ce chiffre et à ce qui était de l'avis du

3 Bataillon britannique, de la façon dont ses soldats faisaient partie de la

4 7e Brigade.

5 Q. Mais vous n'avez pas de preuves dures -- de preuves solides à l'appui

6 de cela, à savoir de ce qu'ils faisaient partie de la structure de la 7e

7 Brigade ?

8 R. Non.

9 Q. Vous avez dit que vous savez qu'un certain Abu Haris, un étranger,

10 était le commandant de la majorité des Moudjahiddines étrangers.

11 R. C'est exact. Ce nom, Abu Haris, ce n'est que phonétique comme

12 transcription. A ma connaissance, nous n'avons jamais eu l'orthographe

13 exacte de son nom. Mais, effectivement, il commandait la plupart des

14 Moudjahiddines et était basé à Mehuriri.

15 Q. Vous avez ajouté qu'il y avait un groupe des affectés -- ou d'étrangers

16 qui était venu lutter pour une guerre sainte, mais qui n'avait pas trouvé

17 leur place en Bosnie centrale.

18 R. Je ne parlais pas, disons, de place topographique.

19 Q. Je voulais dire un foyer.

20 R. Tout à fait. Ils étaient déçus parce qu'ils avaient le sentiment qu'ils

21 étaient venus pour -- combattre dans une Jihad, une guerre sacrée et

22 lorsqu'ils avaient constatés que ce n'était pas l'endroit qu'il fallait,

23 ils étaient déçus.

24 Q. Vous avez dit que ces éléments dont vous venez de parler étaient peut-

25 être un groupe qui était à part, qui était séparé de la 7e Brigade ?

Page 6136

1 R. Très difficile de le savoir. Je n'ai pas de réponse catégorique. Je ne

2 sais pas combien il y avait de Moudjahiddines qui étaient avec Abu Haris

3 et, s'il y avait d'autres groupements plus petits qui étaient séparés, je

4 ne sais pas franchement.

5 Q. Vous avez dit qu'à un moment donné, la 7e Brigade était synonyme des

6 Moudjahiddines, mais cela c'était au début. Mais, apparemment, on a

7 commencé à comprendre qu'il y avait, en fait, deux entités; c'est bien

8 cela ?

9 R. Tout à fait. Ce que j'essayais de faire comprendre, c'est qu'en

10 général, les gens faisaient une confusion entre la notion de

11 "Moudjahiddines" et la 7e Brigade musulmane; cependant, ceux, comme moi,

12 qui ont étudié la situation, de façon plus détaillée, ont compris qu'il y

13 avait deux entités séparées, au sein du même corps. Les Moudjahiddines se

14 trouvaient surtout sous le commandement d'Abu Haris, et vous aviez

15 l'élément bosnien local qui se trouvait au sein de la 7e Brigade.

16 Q. Serait-il exact de dire que la situation en matière de structure du

17 commandement des Moudjahiddines était des plus imprécises ?

18 R. Tout à fait exact.

19 Q. Si vous aviez, vous-même, été un combattant dans cette guerre, il est

20 probable que vous auriez obtenu ces renseignements par des sources idoines

21 de renseignements, mais, comme vous l'avez dit, vous n'étiez pas partie

22 prenante dans cette guerre.

23 R. C'est tout à fait exact. Nous aurions disposé des ressources

24 nécessaires et nous aurions fait l'impossible pour essayer de définir les

25 Moudjahiddines, la 7e Brigade musulmane, en fait, toutes les factions

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1 belligérantes pour mieux les comprendre, mais nous n'avions pas les moyens

2 physiques. Par conséquent, nous nous sommes surtout appuyés sur des

3 rapports de tierce partie. Si cela avait été notre guerre à nous,

4 effectivement, nous aurions consacré davantage de ressources à ce problème-

5 là, en particulier, et nous aurions consacré d'avantage d'énergie pour

6 tirer ceci au clair.

7 Q. Merci. Lorsque vous avez préparé votre rapport à ce propos, vous avez

8 dit que vous l'avez préparé au cours d'une soirée. Il y avait un certain

9 degré d'urgence au niveau de la rédaction de ce rapport ?

10 R. En fait, je l'ai préparé ce soir-là parce que cela me convenait

11 davantage. La plupart des soirées étaient calmes et c'est à ce moment-là

12 que je faisais surtout mes analyses. Ce rapport était arrivé, et j'y avais

13 répondu. J'y ai consacré quelques heures pour le taper, pour faire la

14 recherche aussi pour que cela sorte de mon bureau.

15 Q. Au moment où vous avez préparé votre rapport, vous n'êtes pas allé sur

16 le terrain pour faire davantage de recherches ou d'interroger davantage de

17 personnes ?

18 R. Non.

19 Q. Vous avez dit qu'il se fondait en grande partie sur vos propres

20 renseignements, ceux dont vous disposiez, qu'une partie venait du rapport

21 du capitaine Whitley. C'est cela ?

22 R. Oui. Pratiquement la totalité du rapport, ce n'était pas des choses que

23 j'avais vues moi-même. C'étaient des rapports qui m'avaient été transmis,

24 mais qui venaient surtout du Bataillon britannique Britbat, là dans la zone

25 où vivait la 7e Brigade.

Page 6138

1 Q. Vous avez appris cela après votre arrivée, en

2 septembre 1993.

3 R. Exact.

4 Q. Manifestement, en juin ou juillet 1993, vous n'étiez pas sur les

5 lieux ?

6 R. Non.

7 Q. Le rapport du capitaine Whitley, c'était aussi un rapport qui donnait

8 une impression générale. Vous avez dit qu'il était assez court et qu'il

9 donnait une vue d'ensemble ?

10 R. Oui. Si je me souviens, c'était un rapport qui avait été composé sur

11 toute une période depuis le début de la présence britannique sur le

12 terrain, qu'il donnait une idée de ce que lui l'auteur, était à son avis,

13 la structure de commandement et l'importance réelle en terme numérique des

14 Moudjahiddines.

15 Q. Il ne faisait pas un rapport, mois après mois, de la situation ?

16 R. Non, je ne pense pas que le capitaine Whitley ait fait un rapport tous

17 les mois.

18 Q. Au moment où vous avez préparé votre rapport, vous n'aviez pas

19 rencontré Amir Kubura qui, à ce moment-là, était le commandant de la 7e

20 Brigade ?

21 R. Non. Je ne l'avais pas rencontré, et jusqu'à mon arrivée ici, dans ce

22 prétoire, je ne l'avais pas vu.

23 Q. Savez-vous qu'il était le commandant faisant fonction de la 7e Brigade

24 à partir du 1er avril 1993 ?

25 R. Je ne savais pas.

Page 6139

1 Q. Il exerçait des fonctions de Asim Koricic qui est resté commandant

2 jusqu'au mois d'août 1993 ?

3 R. Non, je ne le savais pas.

4 Q. Vous n'aviez jamais été au QG de la 7e Brigade, n'est-ce pas, à

5 Zenica ?

6 R. Non.

7 Q. Vous ne saviez pas où se trouvait ce QG ?

8 R. Je pense que quelqu'un me l'a indiqué, mais je n'ai jamais été dans ces

9 locaux.

10 Q. Vous n'aviez pas de liste des membres de la brigade ?

11 R. Pas une liste de l'ABiH. Manifestement, nous avions une liste établie

12 par le BritBat, qui disait ce qui est à son avis, était la composition de

13 cette brigade.

14 Q. Vous n'avez pas eu de document ni d'ordre de la

15 7e Brigade ?

16 R. Non.

17 Q. Je ne sais pas si vous avez votre rapport sous les yeux, sans doute que

18 oui; non, on vous l'a pris.

19 R. Peu importe, je crois le connaître assez bien.

20 Q. J'essaie d'avancer rapidement, et peut-être n'allez-vous pas faire

21 référence à ce rapport. Cette 7e Brigade se trouvait sur le commandant du 3e

22 Corps d'armée, et le commandement du 3e Corps donne des instructions

23 opérationnelles. Vous vous souvenez que cela se trouve dans votre rapport ?

24 R. Oui, je me souviens de cela.

25 Q. Vous souvenez-vous avoir dit au paragraphe 13 : "Qu'en dépit des

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1 revendications habituelles du HVO, il n'y a pas d'atrocités connues ou

2 suspectées qui auraient été commises par les Moudjahiddines ?"

3 R. Oui. Je me souviens fort bien avoir écrit cette ligne, C'était

4 l'impression que j'avais à l'époque, alors que j'étais sur le terrain

5 depuis deux mois.

6 Q. Est-ce que vous étiez au courant, à ce moment-là, de l'existence

7 d'autres brigades dans l'armée de Bosnie, pas dans le secteur où la zone de

8 responsabilité du 3e Corps, mais desquels on parlait comme étant des

9 brigades musulmanes ?

10 R. Oui.

11 Q. Il y en avait une dans le 1er Corps d'armée, n'est-ce pas, à Sarajevo,

12 vous vous en souvenez ?

13 R. Je ne m'en souviens pas, mais, sans doute, il y en avait-il une.

14 Q. Il y en avait une aussi à Tuzla dans le 2e Corps d'armée ?

15 R. Oui, celle-là, je me la rappelle.

16 Q. Il y avait d'autres brigades à Jablanica et Konjic dans le 4e Corps

17 d'armée ?

18 R. Sans doute. Vous avez, sans doute, raison.

19 Q. Il y en avait une aussi dans le 6e Corps d'armée ?

20 R. Là, aussi je suppose que vous avez raison.

21 Q. C'étaient des unités de manœuvre ou des unités d'assaut. Vous vous en

22 souvenez ?

23 R. Non, je ne me souviens pas de cela, en particulier.

24 Q. Lorsqu'on utilise le terme ou l'adjectif "Musulmane" quand on parle de

25 brigade, c'était quelque chose tout à fait courant dans l'ABiH, n'est-ce

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1 pas ?

2 R. Oui.

3 Q. Voyons la zone de responsabilité du 3e Corps d'armée. Dans votre

4 rapport, il faudra peut-être que vous le voyiez, mais nous allons peut-être

5 pouvoir nous en passer pour gagner du temps. Il y avait plusieurs brigades

6 d'assaut. C'est comme cela que vous les appelez, n'est-ce pas ?

7 R. Oui.

8 Q. Que vous avez répertorié la 17e Brigade Krajina.

9 R. Il y en avait quatre ou cinq.

10 Q. 4 ou 5 ?

11 R. Une à Janja ?

12 Q. Il y avait la 27e de Banja Luka ?

13 R. Oui.

14 Q. Vous avez dit que c'étaient des indices de combat.

15 R. Oui.

16 Q. Que ces brigades faisaient rarement du travail de défensive, mais

17 qu'elles se concentraient plutôt sur les opérations offensives.

18 R. Exact. C'était surtout vrai de la 7e et de la 17e qui, en général,

19 étaient chargées de mission offensive.

20 Q. Il n'y avait qu'une seule brigade chargée de mission offensive et qui

21 était un indice de combat.

22 R. Oui. La 7e et la 17e sont celles que j'ai suivies de plus près.

23 Q. Vous avez également mentionné qu'une 8e Brigade, la Brigade El Mujahed

24 avait été constituée.

25 R. Oui.

Page 6142

1 Q. Venons-en à votre organigramme qui se trouve à la fin du rapport.

2 J'espère que nous pourrons nous en passer.

3 R. Oui.

4 Q. Vous reconnaissez que ces informations ne sont peut-être pas

5 nécessairement, puisqu'il y a peut-être une évolution dans le temps.

6 R. Exact.

7 Q. Vous ne seriez pas surpris si le commandant du Bataillon de Travnik

8 vous avait dit que c'était Asim Koricic, là il y a une certaine

9 contestation par rapport à l'orthographe, vous ne seriez pas étonné si on

10 disait qu'il n'a jamais été commandant de ce bataillon. Il y avait trois

11 autres individus qui ont été commandant en 1993 et en 1994.

12 R. Oui, j'en conviendrai aisément. Je ne serais pas surpris de la chose,

13 et je n'étais pas surpris à l'époque non plus. Effectivement, les

14 informations, nous les avons consignées dans ces cases de l'organigramme

15 comme nous les comprenions à l'époque. C'est tout.

16 Q. Difficile de répondre à une question, puisque c'est un organigramme qu

17 vous n'avez pas préparé. Vous comprendrez que j'essaie de vérifier

18 l'exactitude du rapport. Est-il exact de dire que c'est un organigramme

19 préparé par d'autres ?

20 R. Je comprends votre question. C'est exact. C'était un organigramme

21 préparé par le Bataillon britannique. Nous avions des exemplaires que je

22 modifiais en fonction de l'arrivage de telle ou telle information. Chacun

23 avait une copie, un exemplaire, et nous échangions nos informations pour

24 les mettre à jour.

25 Q. Pour ce qui est du 2e Bataillon de Zenica. Vous ne seriez pas étonné si

Page 6143

1 la personne qui se trouvait, était simplement un soldat du rang, M.

2 Pasanovic, ce n'était pas le commandant de ce bataillon.

3 R. Oui. Cela me surprendrait par contre. Cela me surprendrait, parce ce

4 serait vraiment une inexactitude grossière venant d'un rapport établi sur

5 le terrain. Enfin c'est possible, tout en étant surprenant.

6 Q. Vous dites que cela vient peut-être d'une source qui n'a peut-être pas

7 été vérifiée. C'est cela, que vous dites ?

8 R. Ce serait très inusité de placer au poste de commandant le nom d'un

9 individu si c'était un seul rapport non vérifié qui nous avait fourni cette

10 information, mais ce n'est pas impossible.

11 Q. C'est possible ?

12 R. Oui.

13 Q. S'agissant de M. Catic, seriez-vous surpris qu'il n'ait pas été le

14 commandant après le mois de juin 1993, du 3e Bataillon ?

15 R. Oui, c'est tout à fait possible. J'en conviens.

16 Q. Selon vos souvenirs, il n'y avait que trois bataillons dans la 7e

17 Brigade; ceux que je viens de mentionner. Les autres qu'on voie dans

18 l'organigramme n'ont jamais été confirmés. C'est bien cela ?

19 R. Oui, c'est exact. Je pense qu'il est important de mettre en exergue le

20 fait que si l'on voit une voie hiérarchique aussi nette que dans la plupart

21 des armées régulières, ce n'était pas nécessairement le cas dans le HVO,

22 dans l'ABiH ou ailleurs non plus. Par exemple, on voit un Bataillon de

23 Maglaj, peut-être qu'il n'existait pas en tant que tel. Le bataillon de

24 Sarajevo dont on ne savait pas grand-chose, il se peut qu'il n'est pas

25 existé de la façon dont nous l'avons décrite.

Page 6144

1 Q. Les 4e et 5e Bataillon, il se peut qu'on les ait confondus avec d'autres

2 brigades musulmanes que j'ai mentionnées auparavant, qui opéraient en

3 dehors de la zone de responsabilité du 3e Corps d'armée, n'est-ce pas ?

4 R. C'est tout à fait possible.

5 Q. Nous poursuivons l'examen à l'organigramme. Nous avons Bataillon de

6 Travnik, Mehurici, qui est mentionné deux fois dans l'organigramme; là et

7 pour la 8e Brigade.

8 R. Oui.

9 Q. On voit le nom d'Abu Haris, n'est-ce pas ?

10 R. Il est mentionné au regard de la compagnie de Mehurici, mais pas sous

11 la 8e Brigade.

12 R. Oui.

13 Q. Pour vous, cela veut dire que les deux étaient basées à Mehurici ?

14 R. Oui. Je le répète, pour préciser les choses. Abu Haris et les

15 Moudjahiddines, ce noyau dur de Moudjahiddines, nous pensions qu'ils

16 étaient basés à Mehurici. C'est au moment où Me Residovic m'a montré les

17 documents, que nous avons pu établir que nous avions un rapport selon

18 lequel ils étaient en train de former une 8e Brigade, qui avait son

19 quartier général à Mehurici. Elle était en voie de constitution au cours du

20 mois d'octobre ou du mois de novembre 1993.

21 Q. Serait-il exact de dire qu'il se pourrait que cet organigramme ne soit

22 pas exact s'agissant de la compagnie de Mehurici, vu ce que vous avez dit

23 précédemment s'agissant de l'imprécision quant à la subordination des

24 Moudjahiddines, la façon dont ils étaient subordonnés dans l'ABiH ?

25 R. Une des rares choses dont je suis à peu près sûr, c'est que c'était

Page 6145

1 bien à Mehurici que les Moudjahiddines avaient leur QG. Cela, j'en suis

2 certain. Je reconnais que nous n'avons pas eu nécessairement une idée

3 complète des niveaux de subordination au sein de l'ABiH en toutes choses.

4 Cela, je le reconnais.

5 Q. Merci. Une dernière question, elle a trait au seul document dont nous

6 demanderons le versement. Ce document vient, mon Colonel, des CD qui

7 proviennent de votre ordinateur et qui ont été communiqués par l'Accusation

8 à la Défense.

9 M. DIXON : [interprétation] J'ai des exemplaires des documents à

10 l'intention des Juges, à l'intention du témoin et de l'Accusation.

11 Q. Le document porte la date du 15 novembre s'agissant de la nécessité à

12 respecter en matière de rapports s'agissant du commandement bosnien. Est-ce

13 que vous vous souvenez que ceci vient de vos CD ? Est-ce que cela faisait

14 partie d'une séance de briefing destinée à ceux qui recueillaient les

15 renseignements ?

16 R. J'essaie vraiment de me souvenir, attendez, pourquoi est-ce que ceci a

17 été fait. Mon souvenir est tout à fait flou. Je ne me souviens pas pourquoi

18 ce document était produit. Je pense que nous avons eu une conférence G2 le

19 15 novembre, avec les officiers chargés du renseignement militaire dans le

20 bataillon, et je pense que cela fait partie d'une présentation.

21 Q. Est-ce le genre d'activité à laquelle vous vous êtes livré ? Vous

22 donniez des lignes directrices à ceux qui recueillaient des renseignements

23 pour votre bureau de façon à ce que vous puissiez préparer vos rapports de

24 la façon la plus précise possible, rapports qui devaient être reliés à vos

25 gouvernements respectifs ?

Page 6146

1 R. Oui. A regarder ce document, je pense que c'est une présentation

2 d'introduction à une nouvelle unité militaire. Si vous voulez, c'est une

3 partie liminaire de toute une journée d'instruction, qui donne une idée de

4 l'ensemble de cette journée d'étude pour expliquer à ces gens ce qu'on

5 attend d'eux. Je pense que c'est cela.

6 Q. Prenez la page 2 de ce document. La rubrique est "Evaluation et

7 Présentation".Ici, vous parlez de l'évaluation qui doit être présentée dans

8 chaque rapport.

9 R. Oui.

10 Q. Pouvez-vous confirmer, d'après ce qui est écrit : "Que c'est à vous de

11 décider de la forme, même si le travail par secteur, travaille bien. Ne

12 vous en faites pas de l'apparence, peu importe si cela ne sort pas d'un

13 manuel d'école militaire."

14 R. Oui.

15 Q. Un peu plus tard, vous dites, autre point de la présentation, vous

16 dites : "Essayez de vous faire une idée viscérale au quotidien de la

17 situation." Finalement, ce revient à cela.

18 R. Oui.

19 Q. En dessous, on dit : "Essayez de faire la synthèse de la semaine. Vous

20 vous faites une idée en quelques mots," entre guillemets.

21 R. Oui.

22 Q. Dernier point. Vous dites : "Ne vous en faites pas si vous vous êtes

23 trompé. C'est souvent le cas, et personne ne le remarque.

24 R. Oui.

25 Q. C'est là une présentation en plusieurs points de ce que vous et

Page 6147

1 d'autres ont fait s'agissant de la façon dont on prépare des rapports

2 d'information militaire. C'est ce que vous avez fait le

3 15 novembre 1993 ?

4 R. Je ne peux pas vous le dire, même si je reconnais qu'il est fort

5 probable que cette présentation ait été faite.

6 Q. Conviendriez-vous que c'est ici un document que l'on a retrouvé dans

7 des renseignements que vous aviez dans votre ordinateur ?

8 R. C'est, sans doute, très vrai.

9 Q. Je vous remercie, je n'ai pas d'autres questions à vous poser.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Dixon.

11 M. DIXON : [interprétation] Oui, la partie la plus importante manquait. Je

12 voulais demander le versement, puisque le témoin a reconnu que ceci faisait

13 partie d'un des documents qu'il a remis à l'Accusation. Il en a fait le

14 commentaire aujourd'hui. Merci.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. La Chambre vous remercie d'être resté dans le

16 cadre horaire qui avait été promis.

17 Monsieur Withopf, sur le document, quelle est la position de l'Accusation

18 sur ce document qui est reconnu par le témoin ?

19 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas

20 d'objections.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame la Greffière, vous nous donnez un numéro ?

22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce DK10.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

24 Monsieur Withopf, pour les questions supplémentaires ?

25 M. WITHOPF : [interprétation] Je serai très bref, Monsieur le Président,

Page 6148

1 pour ce qui est des questions supplémentaires. J'aimerais évoquer quatre

2 thèmes dont deux à des fins de précision seulement.

3 Merci, Monsieur le Président.

4 Nouvel interrogatoire par M. Withopf :

5 Q. Monsieur, voilà quelle est ma première question : Vous avez déjà

6 indiqué que dans votre rapport du 2 novembre 1993, il s'agissait d'une

7 fusion, c'est le mot que vous avez utilisé, d'un rapport qui avait été

8 compilé par le capitaine Whitley, qui se trouvait dans le secteur entre

9 avril et septembre 1993. Il s'agissait de la fusion de ses renseignements

10 et de vos renseignements que vous aviez obtenus après votre arrivée en

11 septembre 1993. Vous avez également fait état d'un rapport qui vous avait

12 été envoyé par le Bataillon britannique. Auriez-vous l'amabilité d'indiquer

13 aux Juges, à quel moment les rapports du bataillon britannique, que vous

14 avez repris dans votre rapport, à quel moment ces renseignements ont été

15 collectés ?

16 R. Oui. Le Bataillon britannique, à l'époque où je me trouvais dans ce

17 secteur, avait été dans le secteur entre avril et octobre. C'était le 1er

18 Bataillon du Prince-de-Galles. Ils avaient eu six mois pendant lesquels ils

19 avaient pu évaluer les milinfosum. Au moment où j'ai compilé le rapport en

20 novembre, ils venaient juste de quitter ou ils étaient en train de quitter

21 le théâtre des opérations en Bosnie pour rentrer en Allemagne. Ils avaient

22 eu six mois de compilation de renseignements.

23 Q. A titre de précision, Monsieur, est-ce que cela signifie que votre

24 rapport s'est fondé sur des renseignements qui avaient été collectés par le

25 Bataillon britannique entre avril et septembre

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1 1993 ?

2 R. C'est exact, pour l'essentiel. Effectivement.

3 Q. Lorsqu'on vous a montré le rapport de la MCCE, qui porte la date du 27

4 octobre 1993, et qui est la pièce à conviction de l'Accusation P176, à la

5 page 27, ligne 17, vous avez dit : "Cela n'est qu'un petit élément d'un

6 ensemble plus important."

7 A quel ensemble plus important faisiez vous allusion ?

8 R. Je ne l'ai vu qu'aujourd'hui, et je me rappelle avoir dit cela, mais je

9 ne me souviens plus à quel propos cela avait été dit. Je pense qu'il

10 s'agissait d'une prise d'otages de la part des Moudjahiddines.

11 Q. Il s'agissait d'une question relative à la subordination des

12 Moudjahiddines, et vous avez dit, mais cela représente un petit élément

13 dans une grande vision d'ensemble.

14 R. Oui, je comprends maintenant. Quand je disais que cela était un petit

15 élément dans un grand ensemble, il faut savoir que nous avons essayé -- et

16 que nous avons déployé des efforts pour essayer de comprendre dans quel

17 contexte l'on pouvait placer la 7e Brigade musulmane par rapport à l'Armée

18 Bosnienne. Parce que nous avions l'impression, et c'était notre point de

19 vue à l'époque, que la 7e Brigade musulmane recevait des instructions

20 opérationnelles depuis les niveaux les plus élevés de l'Armée Bosnienne, et

21 ceci afin de mener à bien des opérations, notamment -- essentiellement, des

22 opérations offensives, et ceux dans la Bosnie-Herzégovine centrale.

23 Toutefois, cela fait partie du contexte plus général. Il est évident qu'ils

24 vivaient, essentiellement, dans le secteur du 3e Corps de la Bosnie, et

25 qu'ils recevaient probablement un soutien logistique -- leurs combustibles,

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1 un soutien en matière d'armes, en matière de transport, et cetera, et

2 qu'ils faisaient partie, en quelques sortes, d'un groupe administrative,

3 qui n'était pas très stricte, du 3e Corps de la Bosnie, et nous comprenons

4 -- en fait, nous avions cru comprendre qu'ils étaient dirigés pour leurs

5 actions opérationnelles au niveau de l'armée.

6 Q. Est-ce que cela signifie, en fait, que le contexte plus général est

7 celui que vous avez inclus dans les renseignements qui font partie de votre

8 rapport du 2 novembre 1993 ?

9 R. Si vous entendez le schéma suivant lequel nous avions la 7e Brigade

10 musulmane, à savoir, la structure de la 7e Brigade musulmane, qui était

11 subordonné au 3e Corps Bosnien pour des questions afférentes, par exemple,

12 à l'administration, je peux accepter cela, et je peux accepter le fait

13 qu'ils recevaient des instructions opérationnelles de la part -- d'un

14 niveau supérieur. Voilà ce que j'entendais.

15 Q. Plus tôt, vous avez indiqué que l'ORBAT faisait partie d'un tableau,

16 elle faisait partie du rapport du 2 novembre 1993. Est-ce que vous vous

17 souvenez -- comment est-ce que cet organigramme et cette information ont

18 été compilés ?

19 R. Oui. Je sais certainement que le Bataillon britannique, entre avril et

20 septembre, avait ce genre de tableau, qui montrait les Corps de l'ABiH avec

21 les brigades, les bataillons tels qu'ils les connaissaient, et je vous ai

22 expliqué déjà vendredi que nous avions à l'extrême droite, nous avions la

23 7e Brigade, qui tombait sous le commandement du 3e Corps de la Bosnie et, à

24 la gauche de cet organigramme, vous avez un certain nombre de brigades et

25 d'autres unités.

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1 Q. Est-ce que cela signifie que l'ORBAT avait -- ou savait exactement quel

2 était la situation entre avril et septembre 1993 ?

3 R. Cela représente une compilation de la situation entre avril et

4 septembre 1993, et j'ai accepté -- j'ai marqué mon accord avec votre estimé

5 consoeur de la Défense. J'ai indiqué qu'il se peut qu'il y ait eu des

6 inexactitudes qui n'aient pas été mises à jour par nos questions.

7 Q. La toute dernière question, Monsieur. La Défense de M. Hadzihasanovic

8 vous a montré un certain nombre de documents, qui incluaient des

9 observations faites par les représentants de l'ABiH. La question que

10 j'aimerais vous poser, mon colonel, est comme suit : à l'époque, et pour ce

11 qui est de la fiabilité des informations, est-ce que vous faisiez la

12 différence entre les informations qui émanaient des sources indépendants, à

13 savoir qui n'émanaient pas des factions belligérantes, et les informations

14 qui émanaient des factions belligérantes ?

15 R. Oui. Nous avons toujours considéré que les rapports, qui émanaient des

16 factions belligérantes, quelles qu'elles soient, et de leurs commandants,

17 comme étant des rapports qui n'étaient pas véridiques, à moins que nous ne

18 puissions prouver qu'ils étaient véridiques. D'après les rapports que nous

19 recevions d'autres sources, de la FORPRONU, d'ONG, et cetera, lorsqu'il

20 s'agissait de rapport qui indiquait ce qu'ils avaient vu, là nous les

21 considérions comme véridiques, à moins que l'on ne puisse prouver qu'ils

22 n'étaient pas véridiques, et que cela ne correspondait pas à la réalité. Il

23 y avait également de nombreux éléments dans leurs rapports, qui étaient

24 reçus de la FORPRONU ou d'organisations non gouvernementales, et qui

25 émanaient des conversations avec des personnes locales. Par conséquent,

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1 nous étions très sceptiques lorsque nous recevions une information, et à

2 moins que cette information ne soit relayée par deux ou trois sources

3 différentes, nous n'acceptions pas ce genre d'information comme

4 correspondant à la vérité.

5 M. WITHOPF : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur. Je n'ai plus

6 d'autres questions à poser au témoin, Monsieur le Président.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Withopf.

8 Monsieur le Témoin, j'ai quelques petites questions à vous poser.

9 Questions de la Cour :

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant votre affectation en Bosnie-Herzégovine, vous

11 avez indiqué que vous avez occupé plusieurs postes. Vous apparaissez un peu

12 comme un spécialiste du renseignement. Est-ce que ce sont vos fonctions

13 antérieures qui vous avez fait affecté au QG afin de vous occuper de la

14 collecte de renseignements sous l'autorité d'un colonel français ?

15 R. Oui, Monsieur. Pour vous dire la vérité, j'ai été envoyé en Bosnie. On

16 m'a donné quatre jours de préavis avant mon départ parce qu'il n'y avait

17 plus beaucoup de personnes à envoyer. A l'époque, j'étais officier

18 d'infanterie. Je venais juste de revenir de l'école militaire de Toronto,

19 et je n'étais pas un expert du renseignement, à l'époque. Je me suis rendu

20 dans cette région pour faire de mon mieux, en tant qu'officier, mais j'ai

21 travaillé pour le colonel Latapie de l'Armée française, qui n'était pas non

22 plus, lui-même, un expert du renseignement, qui était, en fait, un expert -

23 - un officer de combat, et qui avait également eu du service auprès de la

24 Légion étrangère.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Aujourd'hui, avec le passé militaire que vous avez,

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1 si vous aviez à définir une activité de renseignement, est-ce qu'elle doit

2 être le fait de spécialiste, ou d'officiers qui sont dans l'infanterie et

3 qui, du jour au lendemain, aux quatre jours, on leur demande d'aller faire

4 des renseignements ? Qu'est-ce que vous pouvez nous dire ?

5 R. Je vous dirais deux choses, Monsieur. Dans un premier temps, je vous

6 dirais que, bien que je ne sois pas un expert du renseignement, un

7 spécialiste en Irlande du Nord, où j'ai passé quelques trois années et

8 demi, j'ai eu des fonctions associés aux renseignements, quelque sorte ce

9 qui fait que j'ai été quand même relativement bien formé pour ce genre de

10 mission.

11 Il faut savoir que, dans le cadre de ma formation militaire à Sandhurst, et

12 dans le cadre d'autres cours, on vous forme toujours, dans le cadre d'un

13 cycle du renseignement, comme nous l'appelons, ce qui fait que l'on crée

14 des mécanismes pour vous permettre de collecter des renseignements.

15 Que je ne sois pas un spécialiste, j'ai accompli mes fonctions avec une

16 certaine confiance dans ce que je faisais, quoi que je doive dire que, dans

17 un monde idéal, des experts, où le renseignement est véritablement la

18 panage, des experts du renseignement, et c'est à eux que l'on doit confier

19 cette tâche.

20 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie de cette réponse. Vous nous avez

21 dit hier que la collecte de renseignements n'avait que pour objectif de

22 protéger les convois humanitaires et de renseigner vos autorités de

23 tutelle. Concernant la protection des convois humanitaires dans vos

24 fonctions de renseignement, est-ce que vous avez eu connaissance de convois

25 humanitaires qui auraient été attaqués et pillés où des parties du convoi

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1 auraient été dérobées ? Si c'est le cas, quels en étaient les auteurs ?

2 R. Je dirais que cela se passait assez fréquemment, notamment, dans le

3 secteur de Gornji Vakuf, qui était dans le secteur sud du 3e Corps de

4 l'ABiH. Toutefois, les protagonistes ou les auteurs de ces délits, ceux qui

5 tiraient sur les convois, étaient le HVO dans la zone de Gornji Vakuf.

6 Il y a eu d'autres incidents, en vertu desquels les convois humanitaires se

7 sont trouvés au cœur d'un conflit, dans l'enclave de Vitez, entre Novi

8 Travnik et Vitez d'ailleurs. Là, il y a eu une attaque qui a été menée à

9 bien, et il y a eu des tirs de mortiers qui ont tué deux des routiers --

10 des camionneurs à Vitez.

11 Il faut savoir que, dans mon QG de Kiseljak, nous avons perdu un caporal

12 belge, qui a été tué par un tireur d'élite, et un soldat néerlandais, qui a

13 été blessé dans le même camion, alors qu'il revenait dans l'enclave HVO de

14 Kiseljak. Mais nous n'avons jamais su qui avait tiré ces coups de feu et

15 cela ne saura jamais connu d'ailleurs.

16 Les attaques contre les convois étaient relativement fréquentes,

17 effectivement.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : J'en reviens au fameux organigramme, qui a fait

19 l'objet de questions nombreuses, multiples et variées de la Défense. Vous

20 avez indiqué que les rapports, qui étaient établis, étaient destinés à

21 l'ONU, aux ministères des pays qui avaient envoyé des troupes sur place et

22 à toutes autres autorités. Ces rapports, avaient-ils à vos yeux une

23 importance capitale, compte tenu des destinataires qui allaient les lire ?

24 R. Oui. Manifestement, le QG qui nous commandait était le QG de la

25 FORPRONU à Zagreb, bien sûr, il fallait qu'ils sachent ce qui se passait en

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1 Bosnie-Herzégovine. Nos résumés -- nos synthèses d'informations militaires,

2 celles qui comportaient des croquis le dimanche, étaient une façon de

3 présenter des renseignements sur les factions belligérantes en Bosnie-

4 Herzégovine. En fait, ils étaient nos clients les plus importants.

5 Nous avions d'autres clients, comme nous les appelions, d'autres bataillons

6 et d'autres unités qui étaient en Bosnie-Herzégovine et qui pouvaient

7 prendre connaissance de ces évaluations pour savoir ce qui se passait.

8 Il faut également savoir que chaque -- que tous les gouvernements nationaux

9 et tous les ministères de la Défense voulaient, bien entendu, être sur le

10 [imperceptible] et savoir ce qui se passait en Bosnie-Herzégovine parce que

11 cela avait des conséquences pour leurs propres soldats, ou cela pouvait

12 avoir des conséquences pour les décisions de politiques étrangères qui

13 étaient prises par les gouvernements.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans telles conditions, toute erreur a été exclue,

15 compte tenu de l'importance de ces rapports. Votre propre hiérarchie au

16 quartier général, le colonel Latapie et celui qui était au-dessus de lui,

17 est-ce qu'ils vous avaient sensibilisé au fait qu'il fallait faire des

18 rapports les plus proches de la vérité et d'exclure par la même tout risque

19 d'erreur même s'il s'agissait de renseignements ?

20 Monsieur Withopf, vous vous levez parce qu'il doit manquer quelque chose ?

21 M. WITHOPF : [interprétation] Monsieur le Président, il semblerait qu'à la

22 première ligne de votre question, il y ait une erreur qui s'est glissée

23 dans le compte rendu. Il est dit, en anglais, que le mot "erreur" a été

24 remplacé par le mot "zone." "Error" a été remplacé par "area".

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, ce que je voulais dire c'est que, compte tenu

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1 de l'importance de vos rapports, est-ce que votre hiérarchie au quartier

2 général vous avait mis en garde sur tous risques d'erreurs et, notamment,

3 sur le fait qu'il fallait que ces rapports soient le plus proche de la

4 réalité, et que par la même, soient exclues toutes interprétations. Est-ce

5 que vous avez été sensibilisé à cela ou pas ?

6 R. Oui. J'ai été sensibilisé à cela. Dans le monde du renseignement, c'est

7 quelque chose dont on est particulièrement conscient. Il y a une raison

8 pour cela. Il y a un choix qui est très évident. Soit que vous me dites

9 rien et personne ne connaîtra rien ou vous devez utiliser votre bon sens

10 et votre sens du jugement pour savoir ce qui est vraisemblable et probable

11 et ce qui sera utile, il faut que vous fassiez appel à votre sens du

12 jugement toujours pour savoir ce que vous devez inclure et exclure dans un

13 rapport, compte tenu de la probabilité de ce que vous percevez sur le

14 terrain, pour que l'évaluation soit utile. Tous les représentants de cette

15 communauté savent qu'un rapport correspond à une fusion et à une évaluation

16 et que cela ne correspond pas forcément à des faits purs et durs et

17 vérifiés.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez dit qu'il y avait, sur le terrain, 24

19 officiers de liaison. Est-ce que vous aviez des contacts avec ces officiers

20 de liaison pour justement vérifier le contenu de ces rapports ? Est-ce que

21 vous discutiez avec eux des problèmes ou vous ne les voyiez jamais, car ces

22 officiers de liaison, ils étaient en contact normalement avec la population

23 locale et avec les unités HVO ou ABiH ? Est-ce que vous les voyiez et est-

24 ce qu'il y avait des réunions de travail avec eux sur l'évaluation, puisque

25 votre mission était d'évaluer ?

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1 R. Oui, tout à fait. J'ai rencontré certains des officiers de liaison

2 britannique, mais, pour que tout soit bien clair, je vous dirais que les

3 trois secteurs des bataillons dont je m'occupais avaient une cellule

4 d'information militaire. Ces cellules recevaient des renseignements de

5 nombreuses sources, et c'étaient les premiers qui collectaient, évaluaient

6 et m'envoyaient ces renseignements. Lorsque je recevais les rapports de ces

7 trois bataillons, ces renseignements avaient déjà fait l'objet d'une

8 compilation. On avait essayé de corroborer ces renseignements dans la

9 mesure du possible et ils avaient été évalués. Ma fonction consistait à

10 prendre ces trois rapports -- ou ces trois éléments, ces trois rapports, et

11 à les fusionner pour avoir une meilleure vision d'ensemble.

12 Ceci étant dit, j'ai rencontré des officiers de liaison et les 24 officiers

13 de liaison du Royaume-Uni, qui étaient tous des capitaines et appartenaient

14 au Bataillon britannique, aucun autre bataillon n'avait ce genre

15 d'officiers. Lorsque le Bataillon britannique est arrivé, il y avait

16 l'ensemble du Bataillon britannique plus 24 officiers, dont 24 capitaines

17 en l'occurrence dont la tâche était de compiler les renseignements.

18 Ce qui fait que les renseignements reçus du Bataillon britannique étaient

19 beaucoup plus volumineux que les renseignements reçus d'autres secteurs.

20 Toutefois, les officiers de liaison britannique, qui présentaient des

21 rapports au Bataillon britannique à Vitez, pouvaient, bien entendu, parler

22 à la population locale, au HVO, aux commandants locaux, à l'ABiH pour

23 pouvoir tenir compte de ces renseignements dans les rapports qu'ils

24 envoyaient à Vitez.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Ma dernière question : compte tenu de la présence,

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1 comme vous l'avez indiqué, de 200 ou 300 Moudjahiddines, qui, d'après ce

2 que vous avez dit, étaient localisés à Mehurici, est-ce que votre

3 hiérarchie a abordé cette question, et était-il envisagé de mettre

4 l'officier de liaison auprès de la 7e Brigade ? Si cela n'a pas été fait, à

5 votre avis, pourquoi cela n'a pas été fait, compte tenu de l'importance de

6 cette 7e Brigade dans le dispositif général tel qu'il est mentionné dans

7 votre rapport ?

8 R. Je suis d'accord avec ce que vous dites. Autant que je sache, il n'y

9 avait pas d'officier de liaison spécifique qui s'occupait de la 7e Brigade.

10 Je ne sais pas qui devait établir la liaison avec eux de façon routinière.

11 Je ne sais pas, en fait.

12 Je sais qu'il y a eu de nombreuses discussions à propos des Moudjahiddines

13 et à propos de la 7e Brigade, et d'ailleurs, cela est prouvé dans les

14 documents qui m'ont été présentés aujourd'hui. Elles ont été menées à bien

15 par le colonel Williams, à l'époque, qui s'entretenait avec Alagic, Enver

16 Hadzihasanovic, et cetera. On a beaucoup parlé de la 7e Brigade musulmane.

17 Je ne sais pas s'il existait un officier de liaison qui devait s'acquitter

18 de cette tâche, mais je suis d'accord avec vous pour dire qu'un officier de

19 liaison aurait été, en fait, tout à fait idéal. Je ne sais pas pourquoi il

20 n'y en avait pas et peut-être d'ailleurs qu'il y en avait. Je ne suis pas

21 véritablement très bien renseigné sur cela, Monsieur.

22 [La Chambre de première instance se concerte]

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Comme la Défense nous a pris beaucoup de temps,

24 malheureusement, les Juges auraient eu d'autres questions à vous poser,

25 mais le temps n'étant pas extensible. Malheureusement, on ne pourra pas

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1 vous les poser. Compte tenu de fait que la Chambre a posé quelques

2 questions, est-ce que la Défense veut faire préciser ? L'Accusation, bien

3 entendu, et la Défense ?

4 Monsieur Withopf, est-ce que vous voulez faire préciser un point ? Les

5 questions étant précises et les réponses précises, est-ce que vous voulez

6 intervenir ?

7 M. WITHOPF : [interprétation] Non, nous n'avons plus de questions à poser,

8 Monsieur.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : La Défense ? Est-ce que vous avez, en peu de temps,

10 des questions nouvelles à poser suite aux réponses qu'il nous a données ?

11 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Non.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Maître Dixon.

13 M. DIXON : [interprétation] Non.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Témoin, d'être resté pendant plus

15 de deux jours, puisque vous êtes resté à La Haye pendant le "weekend". Vous

16 avez répondu aux questions de l'Accusation, questions des Défenseurs, ainsi

17 qu'aux questions que je vous ai posées. Nous vous en remercions, et nous

18 vous souhaitons un bon voyage de retour dans vos fonctions actuelles.

19 Je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir vous raccompagner.

20 [Le témoin se retire]

21 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience se termine. Comme il a été indiqué,

22 demain nous consacrerons la journée aux questions des documents, selon le

23 schéma que je vous ai indiqué vendredi. J'espère que l'Accusation s'est

24 préparée ainsi que la Défense. Dans la mesure du possible, on verra si,

25 demain, l'Accusation sera en mesure, s'il n'y a pas de retard, à faire

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1 venir le témoin pour jeudi prochain. Si non, il faudra annuler la venue du

2 témoin si nos débats prennent plus de temps que prévu.

3 J'incite, et je ne saurais trop insister sur cette question, d'inviter les

4 parties à être très synthétiques et à exposé clairement les problèmes afin

5 qu'on puisse progresser très rapidement demain et mercredi car, comme vous

6 le savez, la Chambre doit prendre une décision sur l'admissibilité desdits

7 documents qui ont été contestés par la Défense. Je pense que la Défense

8 s'est également préparée à cette audience de demain.

9 A ce stade, est-ce qu'il y a une intervention nouvelle des uns et des

10 autres ?

11 Monsieur Withopf, est-ce que vous avez quelque chose à dire ou à ne pas

12 dire ?

13 M. WITHOPF : [interprétation] Pourrions-nous passer à huis clos partiel. Il

14 s'agit d'un témoin, en fait.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous passons à huis clos partiel, Madame la

16 Greffière.

17 [Audience à huis clos partiel]

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25 [Audience publique]

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience publique vient de reprendre à 19 heures

2 10. Je vais clôturer l'audience de ce jour en invitant toutes les parties à

3 revenir pour l'audience qui commencera demain à 9 heures. Je vous remercie.

4 --- L'audience est levée à 19 heures 09 et reprendra le mardi 27 avril

5 2004, à 9 heures 00.

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