International Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 27 mai 2004

2 [Audience publique]

3 --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Pouvez-vous appeler le numéro de l'affaire ?

6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, Madame,

7 Monsieur les Juges, c'est l'affaire IT-01-47-T, le Procureur contre Enver

8 Hadzihasanovic et Amir Kubura.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Je me tourne vers l'Accusation en leur demandant de

10 bien vouloir se présenter.

11 M. MUNDIS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Bonjour, Monsieur

12 le Président, Madame, Monsieur les Juges. Les conseils pour l'Accusation :

13 Mathias Neuner, Daryl Mundis et notre commis à l'affaire, Andres Vatter,

14 accompagnés aujourd'hui par M. Kyle Wood, notre stagiaire.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Je me tourne vers les avocats.

16 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

17 Monsieur les Juges. Au nom du général Hadzihasanovic, Edina Residovic,

18 Stéphane Bourgon et Alexis Demirdjian, assistant juridique.

19 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Au nom de

20 M. Kubura, Rodney Dixon, Fahrudin Ibrisimovic et Nermin Mulalic, assistant

21 juridique.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour cette journée de jeudi, la Chambre salue toutes

23 les personnes présentes, les représentants de l'Accusation, les avocats,

24 les accusés, ainsi que toutes les personnes de cette salle d'audience.

25 Il est prévu à l'ordre du jour de cette audience, l'audition d'un témoin.

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1 Ah, il y a un problème.

2 Monsieur Mundis. M. Mundis n'entendait pas. Je disais qu'était prévu à

3 l'ordre du jour l'audition d'un témoin. Est-ce que ce témoin est à la

4 disposition de la Chambre, Monsieur Mundis ?

5 M. MUNDIS : [interprétation] Il est, effectivement, là, Monsieur le

6 Président, et je crois qu'il attend dans la salle du témoin.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur l'Huissier, je vous demande de bien vouloir

8 aller chercher ce témoin.

9 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. Je vais d'abord vérifier que vous

11 entendez bien dans vos écouteurs la traduction de mes propos. Si c'est le

12 cas, dites : je vous entends.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vous entends.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Comme c'est bien, on va continuer. Vous avez été

15 cité en qualité de témoin de l'Accusation. Vous allez devoir prêter

16 serment, mais, avant de prêter serment, je me dois de vous identifier, et

17 pour ce faire, je vous demande de me donner votre nom, prénom, date de

18 naissance et nationalité.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Mon nom est Mats Torping. Je suis né le 16

20 avril 1943 à Stockholm en Suède. Je suis un ressortissant suédois.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est actuellement votre profession ou

22 qualité ?

23 LE TÉMOIN : [interprétation] A l'heure actuelle, je suis à la retraite et

24 je demeure officier, lieutenant-colonel dans la réserve de l'armée

25 suédoise.

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : En 1993, en Bosnie-Herzégovine, quelles étaient à

2 l'époque vos fonctions ou qualités en Bosnie-Herzégovine ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais contrôleur de la MCCE de décembre 1992

4 à mars 1993.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous déjà témoigné devant un tribunal national

6 ou un tribunal international sur les faits qui se sont déroulés en Bosnie-

7 Herzégovine ou c'est la première fois que vous témoignez ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas encore déposé devant une

9 juridiction, c'est la première fois.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous demande de bien vouloir lire le texte de la

11 prestation de serment.

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

13 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

14 LE TÉMOIN: MATS TORPING [Assermenté]

15 [Le témoin répond par l'interprète]

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, vous pouvez vous asseoir.

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de donner la parole aux représentants de

19 l'Accusation, je vais vous fournir quelques éléments d'explication sur le

20 déroulement de cette audience.

21 Comme c'est la première fois que vous témoignez devant une juridiction

22 internationale, il m'incombe de vous fournir des informations sur le

23 déroulement de l'audience, qui est prévue ce jour, concernant votre

24 témoignage.

25 Dans un premier temps vous allez répondre à des questions qui vont vous

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1 être posées par le représentant de l'Accusation, qui se trouve à votre

2 droite et qui vous posera des questions dans le cadre de la procédure

3 définit par ce règlement. Cet interrogatoire constitue l'interrogatoire

4 principal.

5 Cet interrogatoire sera d'une certaine durée à l'issue des questions qui

6 seront posées par le représentant de l'Accusation que vous avez eu

7 certainement l'occasion de voir avant ce matin. Les avocats de la Défense

8 qui sont, eux, situés à votre gauche, qui sont sur deux lignes et qui

9 représentent les deux accusés, qui eux, sont au fond de la salle

10 d'audience, vous poseront des questions dans le cadre du contre-

11 interrogatoire. Le contre-interrogatoire est défini comme étant la

12 possibilité pour les avocats de poser des questions pour vérifier la

13 crédibilité du témoin, les dires du témoin ou pour avoir toute précision

14 sur des éléments de contexte susceptibles d'éclairer et de motiver les

15 positions des Défenseurs.

16 Vous verrez que le type de questions sera tout à fait différent des

17 questions posées par l'Accusation. A l'issue de cette phase, l'Accusation

18 peut reposer des questions supplémentaires.

19 Les trois Juges qui sont devant vous peuvent, le règlement le permet, vous

20 poser des questions à tout moment. Les Juges préfèrent attendre la fin de

21 la phase de l'interrogatoire principal, contre-interrogatoire et questions

22 supplémentaires pour poser des questions car bien souvent le type de

23 questions envisagées par les Juges ont été posées par les uns et par les

24 autres. Ce n'est pas la peine d'intervenir, les Juges préférant laisser les

25 parties poser les questions utiles. Ce n'est que lorsque les Juges ont

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1 besoin d'éclaircissements ou constatent qu'il y a des zones d'ombre à

2 éclaircir qu'à ce moment-là, on vous pose des questions.

3 Comme vous le savez, cette procédure vous ne le savez pas ou si vous ne le

4 savez pas, je vous informe, la procédure elle est essentiellement orale et

5 parfois elle est complétée par des preuves écrites qui sont introduites

6 lors de l'audition d'un témoin. Comme la procédure est principalement

7 orale, ce qui importe ce sont les réponses apportées par le témoin aux

8 questions posées d'où l'importance des réponses que vous allez faire.

9 Essayez d'être précis et concis en même temps.

10 Si vous ne vous souvenez pas car les faits remontent à plus de dix ans, il

11 est possible que la mémoire puisse être défaillante, à ce moment-là, vous

12 l'indiquez. Si la question vous parait compliquée ou ténébreuse, à ce

13 moment-là demandez à celui qui vous pose la question de la reformuler afin

14 que vous en compreniez bien le sens. Si vous ne comprenez pas le sens d'une

15 question, demandez à celui qui vous la pose de la reformuler en des termes

16 compréhensibles pour vous.

17 Par ailleurs, je vais vous indiquer également deux autres éléments

18 d'information. Vous allez prêter serment de dire toute la vérité, ce qui

19 exclut toute possibilité de faux témoignages car comme vous le savez, le

20 faux témoignage est une infraction qui peut être sanctionnée. Par ailleurs,

21 il y a également une disposition mais qui ne s'applique pas à votre

22 situation mais que je dois néanmoins rappeler, c'est l'hypothèse dans

23 laquelle un témoin, en raison de la question posée, peut refuser de

24 répondre à la question parce que sa réponse pourrait le cas échéant,

25 constituer des éléments à charge contre lui dans le cadre d'un procès

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1 ultérieur.

2 Dans cette hypothèse comme le prévoient plusieurs pays, notamment, de pays

3 "common law" ou de "civil law," le témoin peut refuser de répondre. Dans

4 cette hypothèse très précise, la Chambre peut enjoindre le témoin de

5 répondre. Dans cette hypothèse lui garantit une forme d'immunité.

6 Voilà de manière très générale la façon dont va se dérouler cet

7 interrogatoire. Je tenais à vous en informer avant, afin que votre audition

8 puisse se dérouler dans les meilleures conditions possibles.

9 Monsieur Mundis, comme vous êtes le seul représentant, je pense que c'est

10 vous qui allez procéder à l'interrogatoire principal.

11 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

12 Interrogatoire principal par M. Mundis :

13 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Torping.

14 R. Bonjour.

15 Q. Monsieur, vous avez dit à la Chambre que vous êtes colonel à la

16 retraite de l'armée suédoise. Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous dire par

17 rapport à l'époque que vous êtes entré dans l'armée suédoise jusqu'au

18 moment où vous avez pris votre retraite, quels ont été les divers postes,

19 diverses missions, divers grades que vous avez eus dans l'armée suédoise en

20 insistant plus particulièrement sur les déploiements internationaux ?

21 R. J'ai commencé mon service militaire, comme appelé, comme tous les

22 hommes en Suède à l'époque en 1962. J'ai été promu sous-lieutenant après

23 une formation jusqu'en 1965 et, au début, j'étais avec un régiment de

24 blindés. Il y avait une formation de soldats et d'appelés et, après cela,

25 je suis allé à l'école de guerre comme instructeur et également à l'école

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1 d'état-major. J'ai également été commandant pour un cours de deux ans pour

2 les blindés.

3 Mon expérience internationale, du point de vue militaire, a commencé

4 lorsque j'ai suivi la formation de Nordic pour les observateurs militaires

5 en Finlande en 1984, et je suis parti pour le Moyen-Orient où je suis allé

6 en Israël dans le cadre de l'organisation de l'UNTSO. J'ai été un

7 observateur militaire pendant un an dans les hauteurs du Golan et du sud du

8 Liban.

9 En 1989 à 1991, pendant un an et demie, j'ai été le chef d'un groupe

10 d'observateurs de l'UNTSO au Golan, qui était stationné à Damas et j'avais

11 également certaines tâches concernant le sud du Liban et Beyrouth.

12 En 1992, j'ai été choisi comme observateur de la Commission européenne de

13 surveillance et je suis l'un des Suédois qui se trouvait là. J'ai eu

14 également une formation complémentaire dans le centre de l'ONU en Suède

15 avant d'aller en décembre à Zagreb. Je suis resté pendant trois mois avec

16 la MCCE, comme observateur tout le temps en Bosnie, excepté une semaine à

17 Split. Ma mission suivante, au plan international, c'était quand j'étais

18 chef d'un groupe d'observateurs à UNTSO; des deux côtés des hauteurs du

19 Golan pour 1995-1996, où j'étais chef de ce groupe d'observateurs. J'avais

20 un grand nombre de tâches, de liaisons avec d'autres forces de l'ONU ainsi

21 qu'avec les Israéliens et les Syriens, ainsi que les autorités militaires

22 libanaises. Mon dernier poste international a été d'être instructeur en

23 chef d'un cours d'observateurs en Allemagne en 1997. J'ai été pendant un

24 mois et demi, à Hamulburg au centre de l'ONU en Allemagne pour la formation

25 pour ceux qui devenaient des observateurs de différents pays en Europe.

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1 Q. Vous nous avez parlé du fait que vous aviez été membre de la MCCE comme

2 observateur fin 1992 et début 1993. Outre cette expérience, avez-vous eu

3 d'autres déploiements en Bosnie-Herzégovine ?

4 R. Oui, après être rentré chez moi au printemps 1993, j'ai presque oublié,

5 je suis devenu membre du 1er Bataillon nordique. Pour ce qui était de la

6 formation de ce bataillon, il appartenait à la FORPRONU lors du printemps

7 et de l'été 1993. J'étais l'officier de liaison en chef du Bataillon

8 nordique de la FORPRONU en septembre 1993 et en avril 1994. Ce bataillon

9 avait comme secteur principal de responsabilité la région de Tuzla.

10 Q. Je voudrais vous remercier et vous demander de centrer maintenant votre

11 attention sur le déploiement de la Mission d'observateurs de la Communauté

12 européenne. Pourriez-vous dire aux membres de la Chambre quel type de

13 briefing particulier --d'information ou instruction particulière vous aviez

14 en ce qui concernait la situation en Bosnie-Herzégovine avant ce

15 déploiement ?

16 R. Avant de me rendre en ex-Yougoslavie, comme d'autres qui sont devenus

17 des observateurs, nous étions deux à aller ensemble, Nous avons reçu

18 beaucoup de renseignements, de briefing concernant la situation en ex-

19 Yougoslavie, au centre de formation de l'ONU. Nous ne savions pas à

20 l'époque dans quelle partie de l'ex-Yougoslavie nous devrions aller, à

21 savoir si c'était la Croatie, la Bosnie ou la Serbie ou que sais-je. Nous

22 avions eu une instruction générale. Nous étions informés de la situation

23 militaire pour autant qu'on la connaissait; la situation politique, la

24 situation sociale également et la situation ethnique. Je pense que j'avais

25 une idée, un tableau assez clair de la situation générale. Lorsque nous

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1 sommes arrivés au quartier général de la MCCE à Zagreb, nous avons eu

2 également le dernier état de la question, de l'évolution concernant la

3 situation. Je crois que nous avons eu une journée et demie de briefings de

4 différents types.

5 Q. Où êtes-vous allé après le briefing au quartier général de la MCCE à

6 Zagreb ?

7 R. Après ces quelques trois jours à Zagreb, je suis parti pour Split parce

8 que j'étais censé être stationné auprès du centre régional de Split. A

9 Split, j'y suis resté pendant trois, quatre jours de plus pour obtenir des

10 renseignements détaillés, des briefings concernant la situation dans le

11 secteur de responsabilité pour ce centre régional de Split et le secteur

12 général du centre régional de Split, zone de responsabilité de cette partie

13 de Bosnie contrôlée par le gouvernement bosnien, je crois. J'ai également

14 assisté à des briefings concernant le travail d'état-major, les procédures

15 standards, du point de vue opérationnel, le fonctionnement de la MCCE au

16 centre régional de Split, donc connaître le terrain.

17 Q. A quelle date êtes-vous arrivé à Split, Monsieur Torping ?

18 R. C'était juste la veille de Noël. C'était le 22 ou le 23 décembre. Je

19 crois que c'était le 22 décembre 1992.

20 Q. Pendant combien de temps êtes-vous resté à Split ?

21 R. Je suis arrivé à Zenica, qui était le poste suivant. C'était le 27

22 décembre, donc quatre ou cinq jours.

23 Q. A l'époque, où vous êtes arrivé à Zenica ? Est-ce qu'il y avait un

24 centre régional de la MCCE créé à Zenica ?

25 R. Non. La seule présence de la MCCE en Bosnie centrale était à Zenica

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1 même, dans la région de Zenica. C'était Team Zenica, qui comportait deux

2 observateurs. L'un d'entre eux étant le chef d'équipe. A l'époque, c'était

3 Jim Guilford qui était le chef de cette équipe. Je remplaçais un autre

4 membre qui devait entrer chez lui. En plus, il y avait également un

5 chauffeur de la MCCE, un

6 sous-officier des forces françaises, et nous avions des interprètes locaux.

7 Toute la présence de la MCCE à Zenica, c'était cela.

8 Q. Si j'ai bien compris, d'après votre réponse, ce centre régional de

9 Zenica a été créé quelque temps après votre arrivée, et vous rendiez compte

10 au centre régional de Split.

11 R. C'est exact.

12 Q. Combien de temps êtes-vous resté en Bosnie centrale, dans cette

13 région ?

14 R. J'ai passé trois mois auprès de la MCCE en Bosnie centrale. Il faut

15 distinguer deux parties. La première partie, c'est à partir du 27 décembre

16 jusqu'au 1er février où je suis parti, où je suis retourné à Split pour une

17 permission. A l'époque, je ne savais pas s'il faudrait que je retourne à

18 l'équipe de Zenica pour quelque nouvelle activité. Au bout de deux

19 semaines, une semaine de permission, et du travail d'état-major au centre

20 de Split, on m'a donné l'ordre de retourner à Zenica. J'y suis retourné, je

21 crois, le 17 février.

22 Q. De quelle année s'agit-il ?

23 R. 1993.

24 Q. A la suite de votre retour au 17 février 1993, combien de temps êtes-

25 vous resté à Zenica ?

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1 R. Je suis resté à Zenica jusqu'à la fin de mon temps auprès de la MCCE.

2 Je crois que j'ai quitté Zenica le 28, peut-être le

3 27 mars 1993. Je suis retourné à Zagreb via Split. Ensuite, je suis rentré

4 chez moi en Suède.

5 Q. Pendant toute la période où vous vous êtes trouvé à Zenica, là encore,

6 je comprends que vous n'y étiez pas pendant deux semaines en février,

7 pendant toute la période de fin décembre 1992 jusqu'à la fin de mars 1993,

8 quel était le secteur de responsabilité qu'était censé surveiller votre

9 équipe ?

10 R. Le secteur de responsabilité de notre équipe, au début, pour la

11 commission de l'ONU -- non, excusez-moi, je ne veux pas dire la commission,

12 mais je vais parler du centre, ce qui est devenu le centre régional en

13 Bosnie centrale, c'est-à-dire, contrôlé par le gouvernement bosnien, ceci

14 représente la région de Zenica à l'est de Kladanj, Visoko, au sud,

15 Kiseljak, Konjic en direction de l'ouest, y compris Gornji Vakuf; dans la

16 direction du nord, Tesanj, et aussi loin qu'on puisse aller jusqu'à la

17 ligne de front des Serbes de Bosnie, jusqu'aux Serbes de Bosnie. Il y avait

18 également Travnik qui était dans notre secteur de responsabilité, au nord

19 de Travnik. Travnik, également ainsi que Grude, faisaient partie de notre

20 secteur de responsabilité et appartenaient aux Serbes de Bosnie. Nous ne

21 pouvions pas aller dans ce secteur, parce que sans cela, on nous tirait

22 dessus.

23 Q. Monsieur Torping, vous avez mentionné les Serbes de Bosnie. Pourriez-

24 vous nous dire quelles étaient les autres parties qui avaient des activités

25 dans la zone que vous surveilliez pendant cette période où vous vous

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1 trouviez ?

2 R. Dans notre secteur de responsabilité, nous avions le HVO,

3 l'organisation militaire des Croates de Bosnie. Il y avait le quartier

4 général à Vitez, et un observateur. Nous n'observions pas seulement la

5 situation militaire, mais également la situation politique, la situation

6 économique, sociale et même ethnique. Nous devions également nous

7 intéresser à avoir des contacts avec les organisations politiques. Je veux

8 parler en l'espèce des Croates de Bosnie par rapport au HDZ.

9 Q. Outre les organisations militaires croates et les partis politiques,

10 quels autres groupes se trouvaient dans le secteur dans la région que vous

11 surveilliez ?

12 R. Outre le HVO, d'un point de vue militaire, il y avait l'ABiH. Il y

13 avait également quelques petites organisations du côté croate, Croates de

14 Bosnie, HOS, qui étaient très limitées mais qui existaient.

15 Q. Monsieur Torping, quelle unité ou unités de l'ABiH se trouvaient dans

16 la région que vous surveilliez ?

17 R. En ce qui concerne l'ABiH, l'unité de contrôle de ce secteur était le

18 3e Corps de l'ABiH.

19 Q. Pourriez-vous nous dire un peu plus au sujet de la première semaine ou

20 les deux premières semaines, disons, où vous vous trouviez en Bosnie ?

21 Quels efforts ont été entrepris pour vous présenter aux chefs les plus

22 importants dans le secteur que vous surveilliez ?

23 R. Je pourrais dire que ma première impression, c'était que la situation à

24 l'intérieur était relativement calme, que nous, en tant qu'équipe, nous

25 n'étions, évidemment, que deux pour surveiller le secteur extrêmement

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1 vaste. Nous n'avions qu'un véhicule. C'était un très grand secteur. J'ai

2 été présenté par le chef d'équipe. J'ai eu des réunions auprès des

3 personnes du 2e Corps, du HVO, le maire, excusez-moi, 2e Corps, je voulais

4 dire 3e Corps. J'ai été présenté au maire de Zenica. J'ai également

5 rencontré des prêtres orthodoxes serbes à Zenica ainsi que des prêtres de

6 l'église catholique à Zenica. Nous avons également eu une réunion avec

7 l'imam ou le représentant de l'imam à Zenica. Nous avons également eu des

8 réunions des représentants de la Croix rouge locale à Zenica. J'ai

9 rencontré le chef de la police de Zenica qui nous a fourni des cartes

10 d'identité civiles, de cartes d'identité nationales, que nous n'avons

11 jamais utilisées.

12 Q. Est-ce que vous avez eu des rencontres avec des personnes du 3e Corps ?

13 Est-ce que vous vous rappelez qui vous avez rencontré du 3e Corps au cours

14 des deux premières semaines de votre déploiement en Bosnie ?

15 R. Je pense que c'était probablement le deuxième ou le troisième jour

16 après mon arrivée à Zenica. Nous avons eu une réunion avec Selmo Cikotic,

17 qui était l'officier de liaison du 3e Corps. Il faut dire qu'il parlait

18 très bien anglais en comparaison de nombreuses autres personnes.

19 Q. A part les officiers de liaison, quelles autres personnes avez-vous

20 rencontrées ?

21 R. En plus des commandants, des commandants locaux, les commandants à

22 différents niveaux, je me rappelle maintenant qu'il y avait un autre

23 officier de liaison. Je ne me rappelle pas exactement ce nom, Husic ou

24 quelque chose comme cela. Son anglais n'était pas très bon, mais Selmo

25 était certainement bien, bien meilleur.

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1 Q. Vous nous avez dit que vous avez rencontré différents commandants à

2 différents niveaux. Dans quelles mesures avez-vous rencontré des officiers

3 supérieurs pour le 3e Corps ?

4 R. Après quelques jours. D'ailleurs, je ne me souviens pas si c'était le 6

5 janvier, par exemple, une réunion était organisée par Selmo avec le

6 commandant du 3e Corps, qui à l'époque était

7 M. Hadzihasanovic. Il s'agissait en quelque sorte d'une réunion destinée à

8 faire connaissance, pour que nous fassions connaissance et pour qu'on nous

9 puissions parler de la situation générale. Je ne me souviens pas si son

10 adjoint, M. Merdan, était présent à cette réunion.

11 Je peux également vous dire que j'ai eu une réunion avec le commandant

12 local du HVO à Zenica. C'était un commandant de brigade.

13 Q. Vous souvenez-vous du nom de cette personne ?

14 R. C'est un nom que j'ai consigné dans mes notes. Si vous donnez ce nom,

15 je m'en souviendrai. Je n'arrive pas moi-même à m'en souvenir tout seul.

16 Q. Monsieur Torping, pendant votre période d'affectation en Bosnie

17 centrale dans le cadre de ce déploiement de la MCCE, combien de fois grosso

18 modo avez-vous rencontré M. Hadzihasanovic ? Combien de réunions avez-vous

19 eues avec lui ?

20 R. Je l'ai rencontré six ou sept fois.

21 Q. Pendant votre période d'affectation en Bosnie centrale, combien de

22 temps avez-vous ou combien de fois plutôt avez-vous rencontré M. Merdan ?

23 R. Au début, cela ne s'est pas passé fréquemment. Plus tard, lorsque la

24 Commission mixte a été créée, il est devenu membre de cette Commission

25 mixte. Je dirais que je l'ai rencontré tous les jours quasiment, parce que

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1 nous travaillions de concert au sein de cette Commission mixte. Il y avait

2 des officiers, d'autres officiers bosniens. Il y avait également moi-même.

3 Il y avait des officiers du HVO, tel que M. Nakic. A la fin de ma période

4 d'affectation, je l'ai rencontré tous les jours.

5 Q. J'aimerais vous poser quelques questions dans un petit moment à propos

6 de cette Commission mixte. Avant de vous poser ces questions, j'aimerais

7 que vous me parliez de votre responsabilité générale et des fonctions que

8 vous deviez assumer, notamment, pendant la période précédant votre

9 permission du mois de février, à savoir, pendant la première phase de votre

10 séjour en Bosnie. Quelles étaient vos responsabilités ?

11 R. En tant que membre de cette équipe, nous devions, je devais superviser

12 et contrôler la situation politique, militaire, sociale, sans oublier la

13 connotation ethnique. Il ne faut pas non plus oublier l'aspect militaire,

14 puisque nous avions forgé une coopération avec le Haut-commissariat des

15 Réfugiés ainsi qu'avec le comité international de la Croix rouge

16 d'ailleurs. Nous présentions nos rapports tous les soirs au centre régional

17 de Split. Nous pensions que notre responsabilité consistait à bien

18 connaître la région, être au courant de la situation, et dans la mesure du

19 possible essayer de trouver une solution aux problèmes.

20 Q. Monsieur Torping, vous nous avez dit que vous avez rencontré un certain

21 nombre de dirigeants politiques, ainsi qu'un des dirigeants militaires.

22 Vous souvenez-vous des dirigeants politiques que vous avez rencontrés dans

23 cette région ?

24 R. J'ai eu des réunions avec le maire. Je pense qu'il s'appelait Besim

25 Spahic. Nous parlions de la situation et, à l'instar d'autres dirigeants

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1 locaux, il nous faisait part des besoins de la population locale. Je pense,

2 par exemple, aux besoins médicaux, aux besoins alimentaires, et cetera, et

3 cetera.

4 Q. Je souhaiterais juste vous demander une petite précision. Vous avez

5 fait état d'une réunion avec le maire qui, d'après ce que vous venez de

6 nous dire, s'appelait Besim Spahic. De quelle ville était-il le maire ?

7 R. C'était le maire de Zenica.

8 Q. Outre le maire de Zenica, avez-vous eu des réunions avec d'autres

9 maires ou avez-vous rencontré d'autres dirigeants politiques ?

10 R. Oui. Lorsque nous nous déplacions dans d'autres zones, en général, nous

11 rencontrions les dirigeants politiques ainsi que les commandants

12 militaires locaux. Par exemple, dans le nord-est, nous sommes allés à

13 Zavidovici. Nous avons rencontré le commandant de la brigade de l'ABiH,

14 ainsi que le dirigeant local dont le nom m'échappe maintenant, et cela

15 s'est fait à Zavidovici.

16 Il y avait également une autre région importante qui était dominée par les

17 Croates. Il s'agissait de la région de Vitez. Là, nous avons eu une réunion

18 avec le maire de Vitez, qui était également un commandant local de la

19 Défense territoriale de Vitez. C'est ce qu'il nous avait dit. Son nom

20 m'échappe vraiment. Je me souviens qu'il dominait bien l'allemand. Nous

21 avons pu communiquer directement avec lui en allemand. Parce que,

22 normalement, nous communiquions par le truchement de nos interprètes. Nous

23 avions quatre interprètes dont un qui était en poste, par jour. Pour ce qui

24 est du reste de la communication, cela se faisait en serbo-croate, langue

25 que je ne comprends pas, langue que Jim Guilford ne comprend pas non plus.

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1 Nous étions entièrement tributaires des interprètes.

2 Q. Monsieur Torping, vous souvenez-vous des thèmes de discussion que vous

3 avez eus avec le maire de Vitez ?

4 R. Oui, je me souviens assez bien. Une réunion a été convoquée et nous

5 nous sommes rendus de Zenica à Vitez. Lorsque nous sommes arrivés à Vitez

6 pour cette réunion, il n'était pas là. Il était parti pour Travnik pour une

7 raison quelconque. Nous nous sommes rendus également à Travnik. Nous

8 l'avons rencontré au niveau de la base locale du HVO à Travnik. Il nous a

9 dit être extrêmement préoccupé car selon lui, il y avait de nombreux

10 combattants Moudjahiddines. Il a mentionné un chiffre, un chiffre

11 approximatif de 2 000. Plus tôt, et d'ailleurs je ne me souviens plus qui

12 nous avait transmis cette information, mais plus tôt, disais-je, on nous

13 avait parlé des Moudjahiddines. C'est la personne, en fait, qui a

14 véritablement parlé de façon plus véhémente de ces Moudjahiddines et qui a

15 fait cette accusation.

16 Q. Monsieur Torping, permettez-moi de vous interrompre, car j'aimerais

17 vous demander si vous vous souvenez de la date approximative de cette

18 réunion avec le maire de Vitez.

19 R. Cela s'est passé vers la mi-janvier. Je ne me souviens pas exactement

20 de la date exacte si je ne consulte pas mes notes.

21 Q. S'agit-il de l'année 1993 ?

22 R. C'est exact.

23 Q. Vous souvenez-vous s'il vous a fourni des renseignements

24 supplémentaires relatifs, par exemple, à l'endroit où se trouvaient ces

25 combattants étrangers dont il a parlé ?

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1 R. Non, pas exactement. Il nous a dit qu'ils pourraient se trouver à

2 Travnik, à l'est de Zenica, au nord de Vitez. A la fin de la réunion avec

3 lui, nous nous sommes rendus à Travnik pour essayer de voir de visu si nous

4 pouvions trouver des traces de ce qu'il avait indiqué. Nous voulions voir,

5 en fait, s'il y avait un QG militaire où nous pourrions nous renseigner sur

6 la situation. Nous avons trouvé un bâtiment où des soldats ont pénétré.

7 Nous avons suivi ces soldats dans ce bâtiment qui se trouvait au centre de

8 Travnik. Nous avons gravé des escaliers. Nous sommes allés au premier ou

9 deuxième étage. Nous avons rencontré un soldat. Il nous a demandé ce que

10 nous faisions. Par l'entremise de nos interprètes, nous avons répondu. Une

11 personne est arrivée, et il s'est présenté comme un commandant ou un

12 officier. Nous lui avons posé la question. Nous lui avons dit que nous

13 voulions savoir s'il y avait des combattants étrangers ou des

14 Moudjahiddines. Cette personne nous a dit qu'il n'y avait pas de

15 combattants étrangers; qu'il n'y avait que des Bosniens au sein de la

16 brigade et qu'il s'agissait d'une partie de la 7e Brigade musulmane.

17 Q. Vous souvenez-vous du nom de la personne avec laquelle vous avez

18 parlé ?

19 R. Non, il n'a pas voulu se présenter. J'ai eu l'impression qu'il n'était

20 pas particulièrement satisfait de nous voir à l'intérieur de ce bâtiment.

21 Ceci étant, il ne nous a pas mis à la porte, mais il n'a pas voulu,

22 véritablement, poursuivre une longue discussion. Il nous a dit qu'il n'y

23 avait pas de combattants étrangers dissimulés au sein de son unité.

24 Q. Il s'était identifié comme un commandant ou un officier chargé

25 d'instruction.

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1 R. Oui.

2 Q. Vous souvenez-vous de sa tenue vestimentaire ?

3 R. Non, pas exactement. Mais comme beaucoup de soldats de l'ABiH, il

4 avait, en fait, un peu la même tenue vestimentaire. Je me souviens qu'il

5 n'avait pas d'écusson parce que nous avons justement regardé là où sont

6 placés les écussons. C'était, en fait, une des façons qui nous permettait

7 d'identifier les différentes unités. Lui, il n'avait pas d'écusson. Mais il

8 y avait beaucoup de soldats qui ne portaient pas d'insignes ou d'écussons.

9 Il n'y avait pas de grades à cette époque.

10 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais que soit

11 consigné, pour le compte rendu d'audience, que le témoin, lorsqu'il a dit,

12 il n'avait pas d'écusson "ici" a montré son épaule gauche.

13 Q. Monsieur Torping, en sus de cette rencontre que vous avez faite dans ce

14 bâtiment à Travnik, avez-vous pris des mesures pour vérifier ou pour

15 évaluer les informations qui portaient sur ces combattants étrangers ?

16 Avez-vous essayé d'obtenir de plus amples renseignements auprès des

17 représentants du 3e Corps ?

18 R. Plus tard, lorsque nous avons rencontré le commandant du 3e Corps, j'ai

19 justement évoqué cette question, et la réponse qui m'a été donnée a été

20 comme suit : "Il n'y a pas de combattants étrangers au sein du 3e Corps. Il

21 n'y a que des soldats bosniens locaux." C'est une réponse que j'ai obtenue

22 d'autres personnes également. Notamment, de la part de M. Merdan, par

23 exemple, et d'autres également.

24 Q. Vous souvenez-vous combien de fois vous avez soulevé cette question

25 auprès de dirigeants du 3e Corps ?

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1 R. Il m'est difficile de le dire, mais je dirais que j'en ai parlé cinq

2 fois peut-être.

3 Q. Monsieur, lorsque vous dites : "Que plus tard, vous avez rencontré le

4 commandant du 3e Corps, j'ai évoqué cette question," à qui faisiez-vous

5 référence ?

6 R. Je faisais référence au commandant du 3e Corps, à savoir, à M.

7 Hadzihasanovic.

8 Q. J'aimerais maintenant évoquer cette Commission mixte dont vous nous

9 avez parlé un peu plus tôt. Quel était le nom officiel de cette Commission

10 mixte à laquelle vous avez fait allusion ?

11 R. Il me semble que c'était le 28 janvier, le responsable du centre

12 régional de Split nous a demandé de créer une commission qui oeuvrerait

13 pour le cessez-le-feu. Il s'agissait d'un cessez-le-feu entre l'ABiH et le

14 HVO à cause des combats qui avaient éclaté dans la région, notamment, au

15 nord et à l'ouest de Busovaca.

16 Q. Pourriez-vous nous fournir de plus amples renseignements à propos de

17 cette Commission mixte à Busovaca ? Comment est-ce que cette commission a

18 été créée, par exemple ?

19 R. Au début, c'était l'équipe de Zenica qui s'est vu confier cette tâche.

20 Nous nous sommes organisés tout près, en fait, de l'endroit où se trouvait

21 le bataillon néerlandais à Busovaca. Il y avait des membres du HVO et de

22 l'ABiH à qui nous avons demandé de participer à cette Commission mixte.

23 L'objectif d'ailleurs étant d'essayer, lorsque les problèmes se posaient,

24 il fallait essayer de résoudre ces problèmes au niveau local et le but

25 était d'essayer d'apaiser, de calmer le jeu et de faire en sorte qu'il n'y

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1 ait plus d'hostilités entre les différents villages, les villages croates,

2 les villages musulmans qui se tiraient les uns sur les autres.

3 Q. Vous nous avez dit qu'il y avait des membres, du HVO et de l'ABiH pour

4 la Bosnie centrale, qui participaient à cette Commission mixte. Vous

5 souvenez-vous des noms des personnes qui représentaient ces deux parties et

6 qui ont participé régulièrement aux réunions de la commission ?

7 R. Pour le 3e Corps, il s'agissait de M. Merdan, l'adjoint qui y

8 participait et pour ce qui est du HVO en Bosnie centrale, il s'agissait de

9 M. Nakic. Il était également l'adjoint du chef d'état-major pour la Bosnie

10 centrale. Nous pensions qu'il s'agissait d'officiers d'hauts grades, qui

11 représentaient les deux parties, ce qui pour nous était un signe positif.

12 Q. Est-ce que cette Commission mixte a été opérationnelle avant que vous

13 ne partiez en permission au début du mois de février 1993 ?

14 R. Oui. Autant que je m'en souvienne, c'est le 28 que la commission a été

15 créée, il y avait des réunions régulières tous les jours ou parfois une

16 fois tous les deux jours. Je ne m'en souviens pas exactement mais parfois,

17 je pense que deux jours après, nous avons obtenu l'information selon

18 laquelle il y avait une situation très, très tendue dans un village qui se

19 trouvait au nord-ouest de Busovaca. Nous sommes partis pour ce secteur. Je

20 ne vous cacherai pas qu'il est assez dangereux de se déplacer entre des

21 personnes qui se tiraient dessus. Il y avait la FORPRONU de Kiseljak, qui

22 nous a apporté un soutien avec un véhicule de transport militaire et, en

23 fait, c'était une compagnie danoise de la FORPRONU qui nous a apporté ce

24 soutien. Nous sommes partis. Il s'agissait de M. Merdan, M. Nakic et moi-

25 même ainsi qu'un autre observateur. Nous nous sommes rendus directement

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1 dans ce village. Le premier village était un village croate de Bosnie. Nous

2 avons essayé de nous renseigner sur ce qui se passait. Nous n'avons pas

3 véritablement vu de combats. Il s'agissait essentiellement, de rumeurs, de

4 bruits qui couraient. Les gens avaient très peur qu'un autre camp les

5 attaque, en fait. Ces membres croates, de ce village, étaient également

6 membres, pour ce qui est des hommes de la milice locale du HVO et

7 lorsqu'ils se sont rendus compte qu'il y avait avec nous un membre de

8 l'ABiH, ils ont été extrêmement hostiles, extrêmement critiques. Ils n'ont

9 pas voulu que nous poursuivions notre chemin.

10 Je dois vous dire que M. Nakic, du HVO, de leur propre camp, a

11 véritablement eu beaucoup de mal à essayer de les convaincre, à essayer de

12 leur dire qu'il s'agissait d'une bonne solution. Finalement, il leur a dit

13 que nous essayons de trouver une solution au problème. Nous avons pu

14 finalement poursuivre notre route mais je dois vous dire que les deux

15 camps, à savoir, en l'occurrence les Croates de Bosnie étaient très, très

16 hostiles et avaient très, très peur de ce que ferait l'autre camp.

17 Q. Monsieur Torping, je me permets de vous interrompre à novueau mais

18 j'aimerais revenir sur ce qui s'est passé lorsque vous êtes revenu de

19 permission. Vous souvenez-vous, dans un premier temps, à quelle date, quand

20 est-ce que vous êtes revenu en Bosnie centrale ?

21 R. C'est le 17 février que je suis revenu et j'étais censé travailler au

22 centre régional de Zenica. J'ai commencé à m'occuper de certaines questions

23 mais j'ai également participé à certaines activités sur le terrain de la

24 Commission mixte parce qu'il n'y avait pas suffisamment de personnes pour

25 le faire.

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1 Q. Pourriez-vous nous dire dans quelles mesures vos responsabilités ont

2 été modifiées pour ce qui est de la Commission mixte et ce à votre retour ?

3 R. Oui. Permettez-moi de remonter dans le temps. Je vous dirais que le

4 premier président de la Commission mixte était un observateur anglais,

5 Jeremy Fleming. Il a été remplacé lorsqu'il est parti en permission, il me

6 semble. Il me semble et c'est un observateur -- pardon, néerlandais, Kees

7 van der Pluijm qui l'a remplacé. Mais, le 24 février, nous avons obtenu un

8 message suivant, lequel à compter du 25 février, je devais être le nouveau

9 président de la Commission mixte de Busovaca, qui était d'ailleurs le nom

10 de la commission, à l'époque.

11 Q. Qui était censé faire -- ou quels étaient les objectifs de la

12 Commission mixte pendant cette période allant de la fin du mois de février

13 au mois de mars 1993 ?

14 R. En général, nous avions les mêmes tâches qu'auparavant. Nous nous

15 rencontrions tous les matins à Busovaca au début et, ensuite, à Vitez, par

16 la suite, nous étions informés de la situation. On nous expliquait où il y

17 avait des zones tendues. Il fallait faire le point de la situation pour

18 savoir quand est-ce et comment est-ce que des mesures devaient être prises.

19 Nous étions, en fait, censés travailler de façon ad hoc et ce, suivant la

20 demande des besoins en quelque sorte.

21 Q. Comment est-ce que les différents membres de la Commission mixte

22 venaient aux réunions de la Commission mixte ?

23 R. A l'époque, la Commission mixte était composée des observateurs de la

24 MCCE. Nous avions, pour l'ABiH, M. Merdan, ainsi que deux autres officiers

25 du 3e Corps. Pour ce qui est du HVO, il y avait toujours M. Nakic et il

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1 avait également avec lui deux officiers de l'état-major du QG du HVO de

2 Vitez. Nous étions huit, plus le chauffeur. Pour ce qui est du transport,

3 la situation était comme suit : nous avions un petit QG à Busovaca à côté

4 de ce Bataillon néerlandais qui s'occupait du transport et de ce fait, je

5 devais moi-même prendre des dispositions pour chercher M. Merdan et les

6 représentants de l'ABiH pour les amener à Busovaca. Il faut savoir que

7 notre petit QG se trouvait près du QG du HVO. Nous faisions la même chose

8 le soir à la fin de notre travail. Nous les ramenions à Zenica et en

9 général, le lieu de rencontre se trouvait près du QG du 3e Corps.

10 Q. Aux fins de précision, vous alliez les chercher près du QG du 3e Corps

11 et vous les rameniez au même endroit ?

12 R. C'est exact.

13 Q. Vous nous avez indiqué qu'il y avait deux membres de l'ABiH qui

14 faisaient partie de la commission et qui accompagnait M. Merdan. Vous

15 souvenez-vous du nom de ces deux personnes ?

16 R. Un s'appelait M. Veser [phon] et l'autre s'appelait M. Sefer -- Sifir -

17 - Sefat, je pense. D'ailleurs, à la fin de ma période d'affectation, il a

18 été remplacé par quelqu'un dont j'ai oublié le nom.

19 Q. Est-ce que ces deux personnes, qui accompagnaient M. Merdan, avaient un

20 grade moins élevé que M. Merdan ou avaient un grade plus élevé que M.

21 Merdan ?

22 R. Ils avaient un grade moins élevé, puisqu'il était l'adjoint du corps,

23 et c'était lui le représentant du chef de l'ABiH au sein de cette

24 commission.

25 Q. Vous nous avez dit que le lieu de rencontre se trouvait près du QG du

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1 3e Corps. Pourriez-vous nous dire où se trouvait le QG du 3e Corps ?

2 R. Le QG du 3e Corps se trouvait près de la grande aciérie de Zenica, dans

3 la partie du nord de la ville, dans un immeuble qui, d'après moi, avait

4 appartenu à la aciérie auparavant. C'était un bâtiment administratif

5 auparavant.

6 Q. N'avez-vous jamais pénétré à l'intérieur du 3e Corps ?

7 R. Chaque fois que nous avions une réunion. Mon collègue et moi-même,

8 puisque nous étions toujours deux, chaque fois que nous avions une réunion

9 avec M. Hadzihasanovic, nous nous rencontrions dans le bâtiment. Je pense

10 que nous nous rencontrions dans la salle qui était la salle de travail de

11 M. Hadzihasanovic.

12 Q. Vous nous avez dit que vous avez rencontré

13 M. Hadzihasanovic à six reprises approximativement. Vous souvenez-vous des

14 thèmes qui ont été abordés pendant ces réunions ?

15 R. Oui. Je pense qu'après la première réunion de présentation, nous avons

16 eu une réunion vers la mi-janvier environ. Tihomir Blaskic, le chef du HVO,

17 avait menacé de pilonner Zenica, et ce, si le 3e Corps renforçait ses

18 forces au nord de Busovaca. Il a menacé de pilonner la ville si ce renfort

19 ou ces renforts continuaient et ne s'arrêtaient pas.

20 Q. Vous souvenez-vous d'autres thèmes dont vous auriez discutés avec M.

21 Hadzihasanovic ?

22 R. Cela s'est passé après. Le HDZ local du HVO a pris contact avec notre

23 équipe. Ils nous ont dit que 14 Croates de Bosnie, dans trois villages qui

24 se trouvaient à l'est de Busovaca, avaient été capturés, et avaient été par

25 la suite tués par des forces musulmanes. Leurs cadavres avaient été amenés

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1 à l'hôpital de Zenica, et des réfugiés des membres de la famille avaient

2 été amenés par autobus à Zenica où ils étaient logés chez des membres de

3 leurs familles. Le HDZ HVO voulait justement que nous les aidions à

4 préciser la situation, ce qui d'ailleurs encore plus important, ils

5 souhaitaient que nous organisions le transport de ces réfugiés à Vitez car

6 ils étaient d'avis que Vitez était une ville beaucoup plus sûre pour ces

7 personnes. C'est une question que nous avons abordée avec

8 M. Hadzihasanovic justement au niveau de son QG.

9 Q. Monsieur Torping, vous avez plus ou moins eu six rencontres avec M.

10 Hadzihasanovic. Est-ce que toutes ces réunions ont été des réunions

11 professionnelles, ou est-ce qu'on pourrait dire de certaines que cela a été

12 des occasions un peu sociales ?

13 R. Il y a eu une réunion purement sociale, disons, le 6 mars, me semble-t-

14 il. La Commission conjointe ou mixte ou plus exactement la partie de la

15 MCCE de cette commission ainsi que la partie de l'ABiH de cette commission

16 ont été invitée à un repas organisé par le commandant du 3e Corps. Cela

17 s'est passé dans une salle de réception qui était adjacente au QG du 3e

18 Corps. La nourriture était bonne, les boissons aussi, l'atmosphère était

19 agréable, amicale. Plus tard, dans la soirée, le commandant du corps nous a

20 invité à aller au sous-sol du bâtiment où se trouvait le 3e Corps. Le

21 commandant du corps nous a montré ce que j'appellerais une centrale de

22 commande ou une salle de contrôle, où on voyait des installations à la

23 disposition du commandement du 3e Corps, la salle des transmissions. Pour

24 moi, c'était là le poste de commandement du commandant du 3e Corps d'armée.

25 C'est de là qu'il commandait et contrôlait ses effectifs.

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1 Q. Permettez-moi de vous poser quelques questions afin de préciser

2 certains détails. Vous avez dit le 6 mars. De quelle année ?

3 R. L'année 1993.

4 Q. Pourriez-vous dire de façon approximative combien de membres de la MCCE

5 avait participé à ce dîner et vous avaient accompagné à ce poste de

6 commandement de contrôle ?

7 R. Je pense que nous étions trois : moi-même, Brad Koski, un Canadien, et

8 un observateur danois, Erik Friis-Pedersen, je pense qu'il était avec nous.

9 Nous avions aussi nos interprètes. Nous en avions besoin pour communiquer,

10 même pour les aspects de société davantage pour les aspects plus sociaux.

11 Q. Quelle a été la finalité de cette réception ? Savez-vous éventuellement

12 pourquoi on vous a, après le dîner, emmené à ce poste de commandement ?

13 R. J'ai eu l'impression que le 3e Corps voulait établir et maintenir de

14 bons rapports avec nous en tant que la MCCE. Etait-ce parce que le

15 commandant du 3e Corps pensait que cette Commission mixte avait un effet

16 favorable sur la situation générale ? Je ne sais pas. Je pense qu'on

17 voulait créer un bon climat de travail. On voulait peut-être que nous, nous

18 comprenions la situation dans laquelle se trouvait la partie bosnienne, le

19 3e Corps, et aussi comprendre comment se présentait la situation à Zenica

20 qui était contrôlée par le gouvernement de Bosnie. Vous m'avez posé une

21 question à propos de cette visite au sous-sol, c'était peut-être là une

22 façon de montrer que le commandant du Corps disposait de certaines

23 ressources, de certains moyens lui permettant d'effectuer son travail, qui

24 consistait à commander et contrôler ses effectifs. Par rapport au début,

25 aux premières réunions, nous avons reçu des briefings sur la situation. A

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1 ce moment-là, j'ai eu l'impression que le commandant du corps pensait qu'il

2 avait des ressources très limitées pour son 3e Corps d'armée, et

3 qu'éventuellement, il rencontrerait des difficultés à avoir un contrôle

4 complet de tous les éléments à tout moment. Je ne sais pas. J'ai eu

5 l'impression que le 3e Corps d'armée disposait de moyens très limités en

6 matière de transmission au début. Il se peut que maintenant, nous sommes

7 début mars, il dispose de meilleurs moyens. Nous avons vu beaucoup de

8 radios que je ne connaissais pas, parce que c'était du matériel de l'ex-

9 Yougoslavie ou peut-être russe, je ne sais pas. En tout cas, il y avait

10 beaucoup d'appareils radio. J'ai vu aussi, me semble-t-il, une

11 télécopieuse. Nous avons vu beaucoup de cartes qui étaient couvertes,

12 dissimulées; nous n'avons pas pu les voir en tant que telles. J'ai eu

13 l'impression que c'était un lieu professionnel de salle de contrôle et de

14 commandement, un lieu qu'utilise un commandant de corps d'armée.

15 Q. Quelle était la dimension de cette pièce, à peu près ?

16 R. Je ne suis pas sûr, disons qu'elle faisait 5 ou 7 mètres carrés, 10 ou

17 15, disons, six mètres carrés. C'était une pièce assez grande. Apparemment,

18 elle était tout à fait à l'abri d'obus.

19 Q. Vous dites : "On disait qu'elle était tout à fait protégée contre les

20 obus." Qui vous l'a dit, et qu'est-ce que cela veut dire ?

21 R. Je ne sais plus exactement qui me l'a dit. C'était peut-être M. Merdan.

22 Car souvent, nous nous déplacions, nous marchions ensemble, toujours par le

23 truchement d'un interprète. A propos du pilonnage, je suppose que la

24 personne qui l'a dit voulait dire que les personnes s'y trouvant, étaient

25 en sécurité même s'il y avait de lourds pilonnages dans cette zone. Ce qui

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1 n'arrivait pas très souvent, mais quand même de temps à autre.

2 Q. Est-ce qu'il y avait des fenêtres dans ce poste de commandement

3 souterrain ?

4 R. Non, je ne me souviens pas qu'il y avait des fenêtres. C'était vraiment

5 souterrain, mais je n'ai pas vérifié avec précision.

6 Q. Pourriez-vous nous dire, approximativement, combien de temps vous avez

7 passé dans ce poste de commandement ?

8 R. Une dizaine de minutes, peut-être quinze, je ne sais pas. Nous ne

9 sommes pas restés longtemps. Nous, on n'était pas pressé. Il n'y avait pas

10 d'hâte. On a pu simplement déambuler et parler de choses et d'autres.

11 Q. Vous avez ajouté que vous aviez vu une télécopieuse, un fax à cet

12 endroit. Est-ce qu'il vous est arrivé d'envoyer un fax, une télécopie, au

13 QG du 3e Corps d'armée ? A combien de reprises l'auriez-vous fait ?

14 R. Au début, avant mon congé à Split, je ne me suis jamais servi de

15 télécopieur. Je ne savais même pas s'ils en avaient. Après, j'ai envoyé au

16 moins une télécopie. On ne s'en est pas trop souvent servis, parce que

17 nous, la MCCE, nous n'avions pas de télécopieuse. Je me suis servi de la

18 machine qu'il y avait au bureau du Haut-commissariat aux Réfugiés. C'est là

19 que j'ai envoyé cette télécopie au 3e Corps.

20 Q. Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre dans quel état se trouvaient

21 les lignes de téléphone terrestres dans la zone que vous avez surveillée ?

22 R. J'ai eu l'impression qu'à l'intérieur de la région de Zenica, quand je

23 dis cela, je dis jusqu'à Kiseljak, Visoko et vers le nord jusqu'à Tesanj,

24 le réseau des PTT marchait souvent, mais toujours, cela c'est certain. A

25 l'intérieur de la région de la ville même de Zenica et des villages

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1 environnants, le réseau fonctionnait plus souvent. Ce qui est certain,

2 c'est qu'il ne fonctionnait pas tout le temps. Si, par exemple, on

3 téléphonait au 3e Corps d'armée, on savait qu'il fallait s'attendre à ce

4 que le téléphone ne marche pas. Dès lors, être prêts à aller au QG du 3e

5 Corps en voiture pour délivrer ce message. Ce n'était pas très efficace en

6 matière de transmission pour nous ou pour quelconque se servait du réseau

7 des PTT. C'est ce qu'ils ont dit, notamment, à l'hôtel où nous étions

8 logés. Le Haut-commissariat nous l'avait dit également. En matière de

9 transmission de communication avec Sarajevo, par exemple, d'après les

10 renseignements que nous avions reçus, il n'y avait plus du tout de liaison

11 téléphonique. On ne pouvait plus se servir de téléphone pour téléphoner

12 depuis Sarajevo ou à Sarajevo.

13 Q. Mis à part cet matériel de transmission que vous avez vue dans ce PC

14 souterrain, savez-vous s'il y avait d'autres systèmes ou moyens de

15 communication utilisés par les hauts dirigeants du

16 3e Corps ?

17 R. Personnellement, je n'ai pas vu de matériel. Je sais qu'à quelques

18 reprises, M. Merdan m'a dit que M. Hadzihasanovic avait été appelé à une

19 réunion avec le commandement suprême de Sarajevo. Je lui ai demandé comment

20 il avait pu apprendre cela, parce que, d'après ce que je savais, il n'était

21 pas possible d'utiliser le réseau téléphonique terrestre, des PTT. J'ai

22 demandé s'ils avaient d'autres moyens de communication, par exemple, des

23 téléphones avec liaison par satellite. M. Merdan m'a répondu par la

24 négative. Il m'a dit qu'ils ne disposaient de ces moyens, mais qu'ils

25 avaient certains moyens de communication par air. Il n'a pas précisé ce que

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1 cela voulait dire. En tout cas, il ne voulait pas me le dire peut-être.

2 C'était en janvier 1993.

3 Q. Est-ce que, plus tard, pendant votre mission, et même après lorsque le

4 NorBat ou d'autres unités du NorBat ont été déployées, est-ce que vous avez

5 reçu de quelqu'un dans le 3e Corps des numéros de téléphone que vous

6 pouviez utiliser ?

7 R. Au moment où j'étais officier chargé de la liaison dans le NorBat en

8 1993 et 1994, de façon occasionnelle, j'ai vu

9 M. Hadzihasanovic et d'autres hauts gradés de l'ABiH, d'autres commandants

10 haut gradés à l'hôtel Tuzla. J'y suis allé, parce que j'ai dû discuter avec

11 la MCCE à Tuzla, qui avait son QG dans ce bâtiment, à cet hôtel. Je suis

12 allé voir cette fois-là

13 M. Hadzihasanovic. Je l'ai salué. Je me suis présenté via un interprète. Je

14 lui ai dit que j'étais officier responsable de la liaison pour le NorBat

15 dans la région de Tuzla. J'ai ajouté que j'avais l'intention d'aller à

16 Zenica pour rendre visite au 3e Corps d'armée, car nous ressentions

17 certains besoins en matière de liaison. A ce moment-là, M. Hadzihasanovic

18 était général. Peut-être par intermédiaire d'un adjudant à lui, j'ai reçu

19 un numéro de téléphone par satellite que je pouvais utiliser pour prévoir

20 cette réunion avec le 3e Corps.

21 Q. Est-ce que vous avez essayé de correspondre avec le

22 3e Corps en utilisant ce numéro de téléphone que vous aviez reçu ?

23 R. J'ai essayé, mais cela ne marchait pas. Je ne sais pas si j'ai essayé

24 une fois ou deux, mais cela n'a pas marché. J'ai utilisé un autre moyen.

25 J'ai utilisé la ligne de la FORPRONU pour prendre contact avec le 3e Corps

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1 et là cela a marché.

2 Q. Vous avez rencontré le général Hadzihasanovic; est-ce que ceci vous a

3 permis de vous faire une idée, s'agissant du professionnalisme qui était le

4 sien sur le plan militaire ?

5 R. Oui. Je ne sais pas si c'est exact ou pas. Ce n'est pas facile à dire

6 mais l'impression qu'il m'a faite c'est qu'en tant que commandant du 3e

7 Corps d'armée c'était vraiment un officier professionnel, de carrière, un

8 homme calme qui jamais ne s'emportait, jamais n'étais surpris. Lorsque nous

9 avons eu des réunions et que nous transmettions des renseignements ou

10 posions des questions, toujours cet homme restait équilibré dans sa façon

11 de se comporter. Il donnait l'impression d'avoir la maîtrise de la

12 situation. En tout cas, il ne voulait pas nous montrer à nous que ce

13 n'était pas le cas.

14 De façon générale, il faisait une impression positive sur nous. Jamais il

15 n'a eu recours à des paroles dures, en tout cas c'est ce que nous avons

16 entendu via les interprètes. En tout cas, il n'a jamais eu de paroles

17 dures. Je crois que si cela avait été le cas, on l'aurait vu à son visage.

18 Un homme très professionnel, équilibré, qui maîtrisait la situation. Voilà

19 en quelques mots ce que je pense de lui.

20 Q. Merci. Venons maintenant au deuxième volet de la période que vous avez

21 passée en Bosnie. Auparavant vous avez dit que, suite à cette mission de la

22 MCCE, vous étiez rentré dans votre régiment ?

23 R. Oui.

24 Q. Vous souvenez-vous de la date approximative à laquelle vous avez appris

25 que vous alliez repartir en Bosnie ?

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1 R. Mon régiment et le commandant de brigade de ce régiment, c'est une

2 organisation particulière en Suède, a reçu pour ordre d'organiser le 1er

3 Bataillon nordique. Cela s'est passé en avril 1993 tout juste après mon

4 retour de Bosnie. Les préparatifs ont commencé par le travail d'état-major

5 cela veut dire que j'ai eu une période de congé après mon retour, mais j'ai

6 participé à ces préparatifs disons à partir du début du mois de mai. A

7 l'époque, nous ne savions pas où nous allions être affecté en tant que

8 bataillon en ex-Yougoslavie. Ce bataillon se composait pour l'essentiel

9 d'effectifs, une compagnie de chars suédois et danois et était soutenu par

10 un dispensaire de campagne norvégien et nous avions aussi une unité

11 hélicoptères norvégienne. Nous avons commencé par la formation des

12 officiers, en mai. J'y ai participé parce que j'avais acquis une certaine

13 expérience tout du moins de la Bosnie centrale et de la situation qui y

14 prévalait.

15 Q. A quel moment avez-vous appris où vous alliez être envoyé pour cette

16 deuxième mission en Bosnie ?

17 R. Je ne sais plus exactement, mais il me semble que je l'ai appris au

18 début août. Jusqu'alors nous ne savions pas. Je suppose que la FORPRONU

19 n'avait toujours pas pris de décisions.

20 Q. Ce régiment où était-il cantonné ? Je parle du régiment où vous avez

21 été envoyé ?

22 R. Je n'ai pas tout à fait compris votre question ?

23 Q. Votre régiment a bien été envoyé en Bosnie, où avez-vous été envoyé ?

24 R. Nous sommes allés dans la région de Tuzla. Ce régiment a été déployé au

25 QG, la compagnie d'état-major dans le bâtiment de l'usine au sud-ouest de

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1 Tuzla au nord de Zavidovici. Il y avait une compagnie qui a été envoyée à

2 l'aérodrome de Tuzla au sud, une compagnie envoyée à Srebrenik, au nord-

3 nord-ouest de Tuzla et une compagnie envoyée à Vares et elle était

4 cantonnée dans un bâtiment d'usine juste à l'est de Vares.

5 Q. Vous dites en anglais "fabric building"; pourriez-vous nous expliquer

6 ce que c'était ?

7 R. Peut-être que je n'utilise pas le bon mot en anglais. C'était un

8 bâtiment industriel. Oui, c'était un bâtiment industriel. Je ne sais pas ce

9 qu'on y avait fait auparavant mais de toute façon il était désaffecté, il

10 n'était plus utilisé et il se trouvait sur la route de Vares en direction

11 de l'est, une fois qu'on a franchi un tunnel assez long.

12 Q. Qui était le commandant de ce NorBat où vous étiez déployé ?

13 R. C'était le colonel Ulf Henricsson. Normalement, il était commandant de

14 la Brigade d'Instruction de mon régiment.

15 Q. Qui était la durée de votre déploiement au sein du NorBat dans cette

16 région ?

17 R. Cela a commencé en septembre. Nous faisions partie du bataillon de

18 l'état-major et, bien sûr, nous avons fait un tour, une mission de

19 reconnaissance, qui a duré quelques jours auparavant, et nous sommes partis

20 avec le Bataillon du Danemark où nous avions eu notre instruction finale.

21 Nous avions suivi cette formation dans le sud-ouest du Danemark et nous

22 avons pris la route, nous sommes allés en voiture, nous avons traversé la

23 Hongrie et nous sommes passés par la base de Plasso [phon] près de

24 Belgrade. C'est ainsi que nous sommes arrivés dans notre zone de

25 responsabilité en passant par Zvornik.

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1 Q. A quel moment êtes-vous arrivé à Tuzla ?

2 R. J'ai oublié la date, excusez-moi. Je l'ai quelque part dans mes notes.

3 Q. Dites-nous approximativement le mois ou l'année ?

4 R. Fin septembre, me semble-t-il.

5 Q. Combien de temps êtes-vous resté dans la zone de Tuzla ?

6 R. Je suis resté dans ce régiment jusqu'à la mi-avril 1994.

7 Q. Vous dites que vous êtes arrivé fin septembre, est-ce que cela veut

8 dire que tous les bataillons nordiques étaient déployés, étaient sur le

9 terrain dans la région à la fin du mois de septembre 1993 ?

10 R. Non, non. Ce n'était pas le cas. Nous avons eu quelques difficultés

11 pour déployer tout le bataillon et surtout la compagnie accompagnée de

12 blindés danoise n'est pas arrivée toute de suite. C'est seulement au

13 printemps 1994 qu'elle est arrivée parce que le gouvernement serbe n'avait

14 pas autorisé le passage de la compagnie par la Serbie parce qu'il y avait

15 les Serbes de Bosnie qui tenaient un certain territoire à Zvornik. Il leur

16 a fallu un certain temps, plusieurs mois pour passer par un autre

17 itinéraire. D'abord, à Venise et en bateau vers Split et, de Split, ils ont

18 pris la route pour arriver à Tuzla, ce qui veut dire qu'ils ont passé

19 beaucoup de temps à attendre leur déploiement dans la région.

20 Q. Pourriez-vous, en quelques mots, nous dire tout d'abord où vous,

21 physiquement, vous étiez cantonné et quelles étaient vos responsabilités en

22 tant qu'haut officier chargé de la liaison pendant votre déploiement dans

23 ce Bataillon nordique ?

24 R. Je faisais partie du QG du bataillon. Avec les autres officiers d'état-

25 major, j'ai été cantonné dans ce qu'on appelait le bâtiment de l'usine.

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1 Normalement, mon travail consistait à rencontrer les différentes parties.

2 J'avais pour mission de faire la liaison avec le 2e Corps de l'ABiH, mais

3 aussi avec les différents Groupes opérationnels qui se trouvaient sous le

4 commandement du 2e Corps, mais aussi avec les Unités du HVO qui existaient.

5 Il y avait certaines Brigades du HVO dans la région de Tuzla et,

6 apparemment, qui se trouvaient sous le commandement non pas du 3e, mais du

7 2e Corps.

8 J'avais aussi pour responsabilité d'avoir des contacts normaux et réguliers

9 avec les personnalités politiques de la région de Tuzla surtout avec le

10 maire de Tuzla, M. Beslagic, mais aussi avec le président du gouvernement

11 régional. J'ai oublié son nom. Mais j'ai eu très peu de contacts avec lui.

12 J'ai aussi maintenu certains contacts avec les différents

13 dirigeants religieux de la région de Tuzla. Je relèverais particulièrement

14 que nous avons essayé d'établir le contact avec ce qui restait de l'église

15 orthodoxe serbe dans la région de Tuzla. L'évêque était parti mais il y

16 avait une personne ou quelques personnes chargées de garder le contact.

17 J'avais pour autres responsabilités d'avoir des liaisons normales avec les

18 autres organisations internationales qui se trouvaient dans la région, le

19 Haut commissariat aux réfugiés, notamment. Il y avait plusieurs

20 organisations non gouvernementales, il y avait aussi le CICR, qui avait un

21 bureau à Zuzla.

22 Q. Merci.

23 R. En fait, nous avons eu des contacts avec plusieurs autres maires,

24 d'autres villes, notamment, de Zavodovici, parce qu'il y a eu de temps à

25 autre des problèmes là-bas.

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1 Q. Merci.

2 M. MUNDIS : [interprétation] Je vois l'heure qu'il est, Monsieur le

3 Président.

4 Je tiens à préciser que j'aurais besoin encore de 10 à 15 minutes après la

5 pause.

6 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Il est 10 heures 30. Nous reprendrons aux

7 environs de 10 heures 55.

8 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

9 --- L'audience est reprise à 10 heures 58.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis, vous pouvez continuer.

11 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Pour le compte

12 rendu, le témoin a essayé de me parler avant que je lui dise de s'arrêter,

13 avant que l'Huissier ne finisse de l'escorter. Le témoin a présenté ses

14 excuses pour cela.

15 Q. Comme je vous l'ai expliqué hier, dès que vous avez fait la

16 déclaration, aucune partie n'a le droit de vous parler. Si ce que vous

17 vouliez dire, c'était pour clarifier une réponse précédente, je vous

18 donnerai certainement la possibilité de le faire sous peu.

19 R. Oui, je voulais simplement dire, parce que j'ai regardé mes notes, et

20 cela m'a clarifié les choses. Le bataillon est arrivé vers la fin de

21 septembre 1993 à Tuzla, dans la région de Tuzla, à savoir, le 30 septembre.

22 Q. Je vous remercie. Vous nous avez dit juste avant la suspension, qu'en

23 votre qualité d'officier le plus ancien, comme officier juriste au NorBat,

24 vous avez rencontré le commandant du

25 2e Corps de l'ABiH. Est-ce que vous vous rappelez le nom de cette

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1 personne ?

2 R. Je dois dire que j'étais officier de liaison et non pas juriste.

3 Q. Excusez-moi.

4 R. Le nom du commandant du 2e Corps à l'époque était Sadic -- Hazim Sadic.

5 Q. Monsieur Torping, vous nous avez également dit que l'une des compagnies

6 du NorBat se trouvait à Vares. Est-ce que vous savez quel corps de l'ABiH

7 avait la responsabilité du secteur de Vares ?

8 R. Nous ne savions pas exactement. Nous avions des opinions divergentes à

9 ce sujet. Je ne peux pas donner une réponse exacte à cause de cela. C'était

10 dans le secteur qui se trouvait entre le

11 2e et le 3e Corps. A notre avis, c'était la responsabilité du

12 2e Corps. Dire également cela, concernant l'organisation du HVO, la brigade

13 du HVO, à Vares, d'après nos renseignements, elle se trouvait sous le

14 commandement du commandant du HVO de Bosnie centrale, Blaskic. Ce n'était

15 pas une situation précise, exacte concernant les différentes frontières, à

16 notre avis.

17 Q. Est-ce que vous vous rappelez, Monsieur Torping, avoir eu des

18 entretiens avec des hauts gradés de l'ABiH sur cette question, avec des

19 officiers de grade élevé ?

20 R. Autant que je me souvienne, lorsque nous avons eu pour la première fois

21 une réunion avec le commandant du 2e Corps, nous avons également donné des

22 renseignements concernant notre déploiement, et à la compagnie dans le

23 secteur de Vares, et nous avons discuté de cette question. Je crois que

24 j'ai obtenu cette réponse que c'était plus ou moins, la responsabilité du

25 2e Corps. Je ne me rappelle pas exactement comment la réponse a été faite.

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1 Q. Monsieur Torping, vous nous avez également dit peu de temps avant la

2 suspension, qu'il y avait des Unités du HVO qui faisaient partie du 2e

3 Corps; est-ce exact ?

4 R. C'est exact. C'était une brigade ou ce qu'on appelait une brigade du

5 HVO dans la région de Tuzla. C'était sous le contrôle du 2e Corps de

6 l'ABiH.

7 Je dois dire également que le chef de l'état-major du 2e Corps, à l'époque,

8 était un Croate de Bosnie, Maka [phon].

9 Q. Monsieur Torping, pourriez-vous expliquer, si vous le savez, aux

10 membres de la Chambre, pourquoi le 2e Corps avait des unités du HVO qui lui

11 étaient affectées ?

12 R. Je crois que la situation dans le nord-est de la Bosnie, dans la région

13 de Tuzla, n'était pas la même du point de vue ethnique, du point de vue

14 politique, qu'en Bosnie centrale.

15 Au nord-est, dans la région de Tuzla, les Croates de Bosnie étaient bien

16 moins nombreux, à notre avis, que ce n'était le cas en Bosnie centrale. Ils

17 étaient tout faibles. A cause de cela, ils ne pensaient pas qu'ils n'aient

18 la moindre chance d'être aussi indépendants, si je peux parler

19 d'indépendance, qu'en Bosnie centrale. Avec cette situation de zone dominée

20 par les Croates de Bosnie en Bosnie centrale, Vitez et ainsi de suite, ils

21 étaient dans la région croate, plus loyaux au gouvernement bosnien, au 2e

22 Corps, à cause de la situation réelle dans la région. Tout au moins,

23 c'était notre opinion au NorBat.

24 Q. Monsieur Torping, je voudrais appeler votre attention sur les premiers

25 jours de novembre 1993. Au cours des premiers jours de ce mois, pourriez-

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1 vous nous dire s'il y a eu des discussions ou communications avec le

2 commandant de ce 2e Corps de l'ABiH ?

3 R. Je crois que c'était le 6 ou peut-être le 8 novembre. Dans la région de

4 Vares, la situation n'était pas claire du tout. Il y avait des combats. Je

5 me trouvais dans la région de Tuzla. Le commandant du bataillon, le colonel

6 Henricsson, lui-même, se trouvait dans le secteur de Vares. J'ai été appelé

7 par le commandant du

8 2e corps, et il a fait passer une demande ou un vœu. Il voulait que le

9 NorBat soit redéployé dans le secteur situé entre le 2e Corps et le 3e Corps

10 pour, comme il a dit, essayer d'arrêter le pillage de la 7e Brigade

11 musulmane, la 7e Muslimanski Brigade, d'après ce qu'il a dit, et d'après

12 les renseignements que nous avions, faisaient partie du 3e Corps et

13 combattaient dans le secteur de Vares et à l'est de Vares.

14 Q. Je vais essayer d'éclaircir un point de ce que vous avez dit plus tôt.

15 A ce moment précis, vous n'étiez pas à Vares ?

16 R. Par personnellement, non.

17 Q. Vous nous avez dit que la 7e Brigade Muslimanski faisait certainement

18 partie du 3e Corps. Comment est-ce que vous savez cela ?

19 R. Comment ? Je ne sais pas exactement. On a dit qu'elle faisait partie du

20 3e Corps. Je ne peux pas me rappeler pourquoi. Je suppose que c'étaient des

21 renseignements obtenus de la 8e Compagnie de notre bataillon à Vares. Je

22 suppose que nous avions aussi obtenu ces renseignements du commandement de

23 l'ABiH, des documents de la FORPRONU concernant les factions qui luttaient

24 les unes contre les autres, différentes unités, et depuis longtemps, la 7e

25 Brigade Muslimanski était décrite comme étant une partie de l'unité mobile

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1 du 3e Corps. C'est la raison pour laquelle j'ai déclaré qu'il faisait

2 partie du 3e Corps.

3 Q. Monsieur Torping, pendant la période où vous vous étiez trouvé

4 précédemment en Bosnie centrale, c'est-à-dire, lorsque vous étiez un des

5 membres de la MCCE au cours des premiers mois de 1993, à quel corps

6 appartenait la 7e Brigade musulmane à l'époque ?

7 R. Elle appartenait, à notre avis, à la MCCE et à l'équipe de Zenica au 3e

8 Corps.

9 Q. Vous nous avez dit, il y a un moment, que la 7e Brigade musulmane

10 faisait partie de l'unité mobile du 3e Corps. Qu'est-ce que vous voulez

11 dire par là ?

12 R. Je crois qu'une partie du 3e Corps qui était mobile. Je voudrais dire

13 que la plupart des Unités de l'ABiH, tant pendant la période où j'étais à

14 la MCCE, mais aussi pendant la période où j'étais au NorBat, étaient, si je

15 m'en souviens bien, des Unités de la Défense territoriale, qui étaient

16 déployées normalement le long de la ligne frontière entre les endroits qui

17 étaient contrôlés par le gouvernement de Bosnie et par les régions

18 contrôlées par les Serbes de Bosnie. Ils avaient une partie de leurs unités

19 qui était locale. La Défense territoriale, par exemple, une Brigade à

20 Zavidovici, en faisait partie. Ils envoyaient des soldats peut-être, de

21 façon hebdomadaire ou mensuelle, au front et ils les remplaçaient par

22 d'autres dans cette brigade.

23 A notre avis, en ce qui concerne la 7e Brigade musulmane, elle n'avait pas

24 ces caractéristiques. C'était une unité pour laquelle il était possible de

25 l'utiliser où on voulait, quand on voulait. Elle avait plusieurs bataillons

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1 qui étaient recrutés dans des différentes parties de la Bosnie centrale. Il

2 y avait une partie à Zenica, une partie à Travnik, une partie, je crois, à

3 Kladanj, et cetera, et cetera.

4 Q. Monsieur Torping, vous nous avez parlé de cette discussion que vous

5 avez eue en novembre avec le commandant du 2e Corps. Est-ce que vous vous

6 rappelez de lui avoir demandé quelle était la base des informations qu'il

7 vous avait relayées ou comment il en avait eu connaissance ?

8 R. Non, je ne l'ai pas fait. J'ai supposé que s'il transmettait ces

9 informations et ce voeu, il avait suffisamment de renseignements. Je ne lui

10 ai demandé de quelle manière il les avait obtenus, et ainsi de suite, non.

11 Q. Qu'est-ce que vous avez fait de ces renseignements que vous avez

12 obtenus du commandant du 2e Corps de l'ABiH ?

13 R. J'ai transmis ces informations par radio au commandant du bataillon à

14 Vares. Il était en plein dans toutes ces questions. Il a dit que c'était le

15 désordre le plus total à Vares et à l'est, à cause des violations, et qu'il

16 y avait des possibilités de redéployer le NordBbat immédiatement pour

17 résoudre cette situation.

18 Q. Je voudrais revenir maintenant à quelques questions finales que je

19 souhaiterais vous poser. Après cet événement à Vares, est-ce que vous avez

20 eu d'autres communications avec quiconque du 3e Corps de l'ABiH ?

21 R. Oui. Dans la référence que j'ai dit plus tôt, j'avais obtenu le numéro

22 de téléphone du général Hadzihasanovic à l'hôtel Tuzla. C'était seulement

23 quelques jours avant ces événements, si je me rappelle exactement. Après

24 cela, j'ai eu deux visites pendant le reste de ma tournée à Zenica, en vue

25 d'une coopération d'une liaison avec le 3e Corps. J'ai également rencontré

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1 le colonel Blaskic du quartier général du HVO à Vitez, parce qu'il y avait

2 la région de Vares que nous avions et qui se trouvait sous le contrôle du

3 HVO dans Bosnie centrale.

4 Q. Monsieur Torping, à cette occasion, à l'hôtel Tuzla, est-ce que vous

5 vous rappelez de quoi vous avez parlé avec le général Hadzihasanovic ?

6 R. C'était une réunion très brève, si je peux appeler cela une réunion.

7 J'ai dit : "Bonjour." Je me suis présenté comme étant désormais l'officier

8 de liaison du NorBat, du grade le plus élevé. Je lui ai dit que j'avais

9 l'intention de visiter le 3e Corps à Zenica, notamment ou essentiellement,

10 parce que nous pouvions avoir un certain intérêt dans la région de Vares où

11 nous avions une compagnie, et probablement où le 3e Corps était responsable

12 du point de vue de l'ABiH. Je ne me rappelle pas exactement comment ceci

13 avait été dit ou libellé. Comme je l'ai dit plus tôt, le général

14 Hadzihasanovic a donné une attitude tout à fait positive, et a dit : "Oui."

15 Pendant cette réunion, il m'a passé ce numéro de téléphone dont j'ai

16 compris qu'il s'agissait d'un numéro de téléphone par satellite. Je suis

17 parti. J'ai vu le président Izetbegovic, je crois. Je n'avais aucune raison

18 de rester là lorsqu'une personnalité bosnienne d'haut rang était en train

19 de se réunir.

20 Q. Il était clair, d'après votre réponse, que le président Izetbegovic

21 était arrivé à l'hôtel Tuzla au moment où vous étiez présent ?

22 R. Il était dans l'hôtel. Je pense que je l'ai vu descendre un escalier.

23 C'était une sorte d'hall au rez-de-chaussée. A l'évidence, il s'était

24 trouvé à quelques étages plus haut avant cela. Aussi, le commandant

25 Beslagic est venu à ce moment-là, et ils ont eu une sorte de réunions, je

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1 crois, je ne suis pas sûr.

2 Q. Peu après cet événement à Tuzla, est-ce que vous avez eu des nouveaux

3 contacts avec la hiérarchie du 3e Corps de l'ABiH ?

4 R. Oui. J'ai essayé d'utiliser ce numéro de téléphone pour arranger cette

5 réunion, mais il n'a pas marché. Comme je l'ai dit plus tôt, j'ai essayé

6 d'établir un contact grâce au Bataillon britannique de la FORPRONU à Vitez,

7 et j'ai réussi. Moi-même, ainsi que le commandant de la compagnie, la 8e

8 Compagnie, le major Hakan Birger, certains étaient également présents. Nous

9 sommes partis pour Zenica et nous avons eu une réunion à Zenica avec le

10 général Hadzihasanovic -- non, avec, à l'époque, le CO du 3e Corps,

11 l'officier commandant du 3e Corps qui était M. -- enfin, c'était un général

12 à l'époque, je crois -- Alagic. A ce moment-là, lorsque nous étions dans le

13 bâtiment du quartier général, nous avons eu, à ce moment-là, une réunion

14 avec M. Alagic -- excusez-moi, le général Alagic. Le général Hadzihasanovic

15 est entré dans la pièce de sorte que nous l'avons vu aussi dans ses

16 fonctions de chef d'état-major. Je comprends chef d'état-major de l'ABiH.

17 Q. Est-ce que vous vous rappelez approximativement la date où a eu lieu

18 cette réunion avec le général Alagic ?

19 R. Si je ne me trompe, c'était au début de décembre. Excusez-moi, je n'ai

20 pas la date à l'esprit; je l'ai dans mes papiers.

21 Q. Là encore, M. Torping, il s'agit de quelle année ?

22 R. 1993.

23 Q. Est-ce que vous vous rappelez les sujets de conversation avec le

24 général Alagic à cette réunion début décembre 1993 ?

25 R. Oui. Parce que c'était la première fois que nous, enfin moi-même et le

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1 commandant de compagnie avions le commandant du secteur de Vares ou le

2 NorBat, nous l'avons rencontré. Nous nous sommes présentés, et nous avons

3 présenté le déploiement du NorBat. Il a dit que nous avions intérêt à ce

4 que la situation soit calme dans le secteur, ce qui voulait dire ce qui

5 est, évidemment, le cas puisque la situation était contrôlée par le 3e

6 Corps et ce que je me rappelle c'est ce qu'il a dit : qu'il nous a dit

7 qu'il n'y avait pas de problèmes dans ce secteur. C'est bien cela dont nous

8 avons discuté.

9 Je pense quand ceci a été dit, mais je ne suis pas absolument sûr. Je pense

10 que cette phrase a été dite quand on est arrivé à cette phase de la réunion

11 et que le général Hadzihasanovic est entré. A ce moment-là, nous avons eu

12 une conversation ordinaire à cause de sa question.

13 Q. Deux dernières questions, Monsieur le Témoin. Quand a eu lieu cette

14 dernière réunion ?

15 R. Elle a eu lieu au quartier général du 3e Corps dans cette pièce-là,

16 pour ce que j'y ai compris était le bureau du commandant du 3e Corps et je

17 pense que c'était la même pièce que celle dans laquelle nous avons eu des

18 réunions avec M. Hadzihasanovic par le passé, mais je ne suis pas

19 absolument au clair à ce sujet. C'est dans ce bâtiment et dans cette pièce

20 que le CO -- excusez-moi, le 3e

21 -- que se trouvait le 3e Corps, le commandement de l'officier -- commandant

22 du 3e Corps.

23 Q. Finalement, pour clarifier les choses, cette réunion que vous avez eu

24 avec le général Alagic, vous avez dit que vous aviez discuté du fait que

25 vous aviez un intérêt à ce que la situation reste calme dans le secteur.

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1 Vous vous référiez à quel secteur ?

2 R. Le secteur de Vares qui avait un intérêt commun pour nous le bataillon

3 -- le NorBat et le 3e Corps dans la région de Vares.

4 Q. Je vous remercie, Monsieur Torping.

5 M. MUNDIS : [interprétation] L'Accusation n'a pas d'autres questions,

6 Monsieur le Président.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : D'accord. L'interrogatoire principal étant terminé,

8 je donne la parole à la Défense pour le contre-interrogatoire.

9 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

10 Contre-interrogatoire par Mme Residovic :

11 Q. [interprétation] Bonjour, Colonel Torping. Nous nous sommes déjà

12 rencontré hier et je tiens à vous remercier d'avoir donné aux représentants

13 de la Défense la possibilité de discuter des événements, auxquels vous avez

14 été témoin, qui se sont produits pendant votre mission en Bosnie-

15 Herzégovine. Pour le compte rendu, je me présente encore une fois. Je suis

16 Edina Residovic et je suis conseil pour la Défense du général

17 Hadzihasanovic. J'ai quelques questions à vous poser.

18 En ce qui concerne les sujets, les thèmes sur lesquels mes confrères vous

19 ont posé les questions. Après une certaine formation, vous êtes arrivés à

20 Zenica le 26 ou le 27 décembre 1992; est-ce exact ?

21 R. C'est exact.

22 Q. A l'époque dans cette région de la Bosnie-Herzégovine, la mission de

23 surveillance de l'Europe avait trois équipes : une qui était déployée à

24 Tuzla, une autre qui était déployée à Zenica et la troisième se trouvait à

25 Tomislavgrad; est-ce que c'est exact ?

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1 R. C'est exact en ce qui concerne ce secteur-ci, cette région-là bien sûr.

2 Il y en avait d'autres à Knin, et cetera.

3 Q. Je parle de Bosnie-Herzégovine pour le moment. Est-ce que les trois

4 équipes étaient subordonnées au centre régional qui était situé à Split

5 dans un était voisin, c'est-à-dire, la République de Croatie; c'est exact ?

6 R. C'est exact.

7 Q. Répondant à une question de l'Accusation. Vous nous avez dit que votre

8 secteur de responsabilité où l'endroit où vous accomplissiez votre mission

9 était très vaste, allant de Konjic, Tarcin, Kiseljak, Breza et Kakanj,

10 Maglaj, Tesanj au nord; à l'ouest, Turbe et Travnik; et au sud jusqu'à

11 Gornji Vakuf, y compris Vitez, Busovaca, Fojnica, Visoko et Tomislavgrad;

12 est-ce exact ? Etait-ce bien votre secteur ?

13 R. C'est exact, mais à l'exception de Tomislavgrad. C'était une autre

14 équipe qui s'occupait de Tomislavgrad.

15 Q. Est-ce que j'ai bien compris -- est-ce que votre secteur, au nord et à

16 l'ouest et en partie à l'est, avait été délimité par la ligne de

17 confrontation entre les forces armées de Bosnie-Herzégovine et de l'armée

18 de la Republika Srpska ?

19 R. C'est exact.

20 Q. Lors de leur arrivée en Bosnie-Herzégovine, vous saviez, Colonel, que

21 l'ABiH était l'armée légitime -- la force armée légitime de l'état de

22 Bosnie-Herzégovine qui était devenue membre des Nations Unies. Est-ce que

23 vous étiez au courant de cela ?

24 R. Oui, je l'étais.

25 Q. Comme vous nous l'avez dit, pendant votre mission le 25 mars 1993, à

Page 8180

1 partir du 25 mars, vous n'avez pas eu l'occasion d'aller dans la région qui

2 se trouvait sous le contrôle de la VRS parce que la VRS n'autorisait pas

3 les membres de la Mission européenne d'entrer dans un territoire qui était

4 sous leur contrôle, n'est-ce pas ?

5 R. Je dirais que nous dans notre équipe de Zenica, nous ne pouvions pas

6 entrer ou pénétrer la ligne de confrontation. Nous n'étions pas accepté de

7 l'autre côté. Ils nous tiraient dessus. Quant à savoir s'il y avait

8 d'autres équipes dans le territoire des Serbes de Bosnie, je n'en suis pas

9 absolument sûr, mais il n'y avait pas d'autres équipes près de la ligne de

10 confrontation du côté des Serbes de Bosnie. Cela c'est exact.

11 Q. Je vous remercie, Colonel. Vous avez déjà décrit, de façon détaillée,

12 le fait qu'en tant que membre de la Mission européenne, ce qui vous

13 intéressait c'était de comprendre la situation sociale, politique et du

14 point de vue de la sécurité. Depuis le tout début vous avez établi des

15 contacts avec les civils, les chefs politiques, religieux et militaires

16 dans la région; est-ce bien cela ?

17 R. Oui.

18 Q. Vous avez décrit de façon détaillée toute les réunions auxquelles vous

19 avez participé, vous avez rencontré le commandant du 3e Corps en janvier

20 1993; c'est bien cela ?

21 R. C'est exact. Je crois que c'était le 3 janvier.

22 Q. A partir de la première réunion que vous avez eu avec les commandants

23 du 3e Corps, vous avez pu noter que le 3e Corps et l'ABiH avaient une

24 attitude tout à fait positive à l'égard de la Mission de surveillance et

25 ont immédiatement exprimé le fait qu'ils étaient disposés à faciliter les

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1 choses pour la Mission de contrôle. Ils étaient prêts à coopérer; c'est

2 exact ?

3 R. Ils ont exprimé directement qu'ils étaient prêts à coopérer et ils ont

4 eu une attitude positive à notre égard. C'est notre avis, oui.

5 Q. Ces jours-là à cause de la gravité de la situation et la nécessité de

6 pouvoir remplir pleinement vos fonctions et à la fin du mois de février, le

7 centre régional qui était responsable du territoire de Bosnie-Herzégovine

8 s'est formé à Zenica. Son premier chef était Jean-Pierre Thébault, le

9 diplomate français ?

10 R. C'est exact. C'était l'ambassadeur Thébault.

11 Q. Je vous remercie. Vous avez déjà dit qu'en acquittant de vos fonctions,

12 il vous a été nécessaire fréquemment d'être sur le terrain pour aller

13 rencontrer des représentants de l'armée du HVO, et vous pouviez voir ainsi

14 sur le terrain comment était organisée l'ABiH; c'est exact ?

15 R. C'est exact du point de vue du fait que, lorsque la Commission

16 conjointe a été organisée, nous de la commission, y compris les gens de

17 l'ABiH et du HVO -- les représentants du HVO, nous sommes allés sur le

18 terrain. Avant cela, le chef d'équipe et moi-même, ensuite, un autre

19 membre, nous sommes allés visiter les lieux et nous avons obtenu une

20 certaine appréciation de la situation d'une façon très claire. Oui.

21 Q. Vous avez dit que, lorsque vous êtes arrivé à Zenica, selon votre

22 opinion, la situation était très paisible. Est-il vrai que, peu de temps

23 après cela, c'est-à-dire, vers la mi-janvier, il y avait des conflits

24 ouverts entre l'ABiH et le conseil de Défense croate dans les régions de

25 Novi Travnik, Gornji Vakuf et Busovaca ?

Page 8182

1 R. C'est exact. Je dirais même que, dans le secteur de Gornji Vakuf, cela

2 a commencé légèrement avant, parce que les problèmes -- si je peux les

3 appeler problèmes -- venaient de la région de Busovaca. La région de Gornji

4 Vakuf était beaucoup plus tendue, dès avant les périodes que des zones que

5 vous avez signalées.

6 Q. Dès que vous avez eu connaissance de conflits armés à Gornji Vakuf,

7 vous avez tenté de vous mettre en rapport avec le commandement du 3e Corps

8 de manière à apprendre ce qu'il pourrait faire. Toutefois, votre impression

9 de cette période était que le commandement du 3e Corps avait des liens très

10 insuffisants et savait très peu de ce qui se passait à Gornji Vakuf et que

11 les unités à Gornji Vakuf étaient relativement indépendantes dans leurs

12 opérations des combat. Est-ce que c'est cela que vous avez appris ?

13 R. Je peux exprimer les choses de la manière suivante : nous avons

14 compris, moi et le commandant de mon équipe, que les possibilités d'obtenir

15 des renseignements de Gornji Vakuf étaient assez limitées et peut-être

16 qu'il y aurait des difficultés pour que le commandement du 3e Corps puisse

17 obtenir directement des ordres -- faire parvenir directement des ordres aux

18 commandants subalternes. Mais nous n'étions pas trop sûrs de la situation.

19 En général, elle semblait très compliquée et difficile. Je ne peux pas

20 dire qu'il y avait des ressources très limitées, mais je peux accepter la

21 libellée "ressources limitées". Ce n'était pas une situation facile pour le

22 commandant du 3e Corps, je crois.

23 Q. D'après ce que vous avez pu observer des membres de l'ABiH -- si vous

24 pouvez comparer cela aux membres du conseil de Défense croate, d'après ce

25 que vous avez pu observer, disais-je, avez-vous pu constater qu'ils

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1 n'étaient pas aussi bien équipés, que tous les soldats n'avaient pas

2 d'armes, que certains soldats n'avaient pas un uniforme complet, mais une

3 partie seulement de l'uniforme ? Votre conclusion a été, à l'époque, que le

4 HVO, à cette époque-là, était beaucoup plus puissant que l'ABiH ?

5 R. Je ne suis pas si sûr que cela à propos de l'utilisation du mot

6 "puissant". Il est évident que leurs unités donnaient l'impression d'être

7 mieux habillées, d'être mieux équipées et d'être mieux gérées -- d'être

8 mieux dirigées également. Si la conclusion que l'on doit dégager est que le

9 HVO était plus puissant que l'ABiH ou que le 3e Corps, je ne sais pas si je

10 peux tirer cette conclusion moi-même. Je n'ai pas d'opinion à ce sujet.

11 Q. Je ne vais pas vous poser des questions sur la Commission mixte de

12 Busovaca parce que vous en avez déjà parlé par le menu. Vous avez parlé de

13 sa création, de ses objectifs, de ses tâches. Mais, toutefois, j'aimerais

14 vous poser la question suivante : est-il exact de dire que, lorsque vous

15 vous êtes rendu sur le terrain, en mission avec le commandant adjoint

16 Merdan, vous avez pu constater que les commandants locaux voulaient être

17 indépendants pour ce qui est de leurs opérations de combat et qu'ils ne

18 souhaitaient -- ou qu'ils obéissaient à des ordres qui leur étaient donnés

19 par leur supérieur, avec beaucoup de réticence, et que cela signifiait que,

20 très souvent, l'adjoint Merdan devait véritablement consacrer beaucoup de

21 temps et déployer des efforts pour convaincre les commandants locaux

22 d'obéir aux ordres ? Est-ce que -- d'après les contacts de personnes que

23 vous avez eus, est-ce que c'est l'impression que vous en avez tirée ?

24 R. Oui. En général, oui. Le problème auquel nous nous sommes confrontés

25 très, très souvent était le problème du passage aux postes de contrôle.

Page 8184

1 J'avais cru comprendre que nous avions un représentant à grade très élevé

2 pour le 3e Corps, puisqu'il s'agissait de l'adjoint -- de l'adjoint du

3 chef. Nous avions également le chef d'état-major du HVO de la Bosnie

4 centrale qui était représenté. Il n'aurait pas dû être trop difficile de

5 franchir les postes de contrôles, mais nous avons souvent eu des problèmes.

6 Bien sûr, lorsque nous devions passer par un poste de contrôle dirigé par

7 une Unité du 3e Corps, nous n'avions pas l'autorisation de passer

8 immédiatement. J'ai demandé à M. Merdan de leur expliquer la situation et,

9 dans la mesure du possible, de leur donner l'ordre de nous ouvrir les

10 postes de contrôle. D'après ce que j'ai cru comprendre, il a véritablement

11 déployé des efforts pour ce faire. Parfois, ses efforts étaient couronnés

12 de succès, mais pas toujours. Cela m'a donné l'impression que les

13 commandants locaux, à des niveaux différents, étaient assez réticents

14 lorsqu'il s'agissait d'obéir à des ordres qui émanaient de leurs officiers

15 supérieurs. Parfois, nous obtenions la réponse lorsque j'ai demandé aux

16 interprètes de m'expliquer ce qu'avait dit le commandant local. Parfois, il

17 disait : "Nous ne pouvons pas entrer en contact avec notre commandant. Nous

18 n'avons pas l'autorisation de notre commandant. Si n'avons pas l'aval et

19 l'autorisation de notre commandant, vous ne pouvez pas passer, même si

20 parmi vous il y a des officiers supérieurs."

21 Ils donnaient l'impression de vouloir être indépendants, comme vous l'avez

22 dit vous-même. Il n'était pas très facile de les convaincre qu'il

23 s'agissait d'un ordre qui émanait des échelons supérieurs du 3e Corps.

24 Mais ce que je dois dire également, c'est que M. Merdan n'avait pas de

25 grade, à l'époque, comme tout le monde, d'ailleurs -- c'est le cas de tout

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1 le monde dans l'ABiH. Ils avaient juste un écusson qui indiquait qu'ils

2 appartenaient à l'ABiH, à l'armée gouvernementale. Il n'avait pas de carte,

3 il n'avait pas de documents permettant de l'identifier. D'ailleurs, c'est

4 la même chose pour le HVO. Ils n'avaient pas de cartes permettant de les

5 identifier. Ce n'était pas facile pour un commandant local, si vous ne

6 connaissiez pas la personne, de croire qu'il s'agissait, effectivement,

7 d'un officier à grade supérieur.

8 Je pense que la situation était complexe et difficile. Je pense également

9 que M. Merdan a fait de son mieux pour essayer de les convaincre et pour

10 essayer de leur faire comprendre qu'il s'agissait d'activités qui avaient

11 tout à fait l'aval du commandant du 3e Corps.

12 Q. Vous aviez déjà indiqué que le commandant Hadzihasanovic et son

13 adjoint, Merdan, étaient de bons soldats de métier et qu'ils étaient

14 professionnels, et qu'ils ont fait tout ce qu'il pouvait au vu de la

15 situation. Est-ce que vous seriez d'accord avec moi pour dire qu'il était

16 de leur ressort d'essayer d'instaurer une discipline parmi leurs soldats,

17 et ce, afin d'essayer de créer une armée de métier ? Toutefois, la chaîne

18 de commandement à l'époque n'avait pas entièrement été établie, et c'est la

19 raison pour laquelle vous avez vu les problèmes que vous venez de nous

20 décrire.

21 R. Je ne suis pas en mesure de juger. Je ne sais pas s'ils ont fait de

22 leur mieux pour essayer d'instaurer une certaine discipline au sein de

23 leurs unités. Je ne peux pas répondre à cette question, en fait. Ce que je

24 peux vous dire en revanche, c'est que d'après ce que je pouvais voir,

25 lorsque j'ai rencontré M. Hadzihasanovic et lorsque j'ai travaillé avec M.

Page 8186

1 Merdan, il n'y avait aucune indication, disais-je, qui faisait, qu'ils

2 ignoraient ces éléments du commandement. Une de fois de plus, je ne suis

3 pas en mesure de juger comme vous l'indiquez. Je comprends qu'ils se

4 trouvaient dans une situation difficile et qu'ils avaient une tâche

5 difficile à accomplir.

6 Q. Merci. Vous avez également dit que lors de vos conversations avec le

7 commandant Hadzihasanovic, vous vouliez donner l'impression qu'il

8 maîtrisait la situation, qu'il contrôlait la situation. Etes-vous d'accord

9 avec moi, pour dire que pour un commandant, il est tout à fait normal

10 d'essayer de créer cette impression, d'essayer d'indiquer qu'il maîtrise la

11 situation parce qu'il sait pertinemment que ce fait aura un impact sur vous

12 dans votre situation, ainsi qu'un impact et des incidences pour les autres

13 représentants des organisations internationales et que cette impression se

14 propagerait.

15 Cette impression, suivant laquelle il maîtrisait la situation, était très

16 importante pour lui parce qu'il ne faut pas oublier que cela représentait

17 sa mission. Il ne faut pas oublier non plus le message qu'il voulait

18 transmettre à ses ennemis. Même s'il ne maîtrisait pas entièrement la

19 situation, il voulait véritablement communiquer le message suivant lequel

20 il maîtrisait la situation. Est-ce que d'après vous cela correspond au rôle

21 normal qu'un commandant souhaite jouer ?

22 R. Règle générale, c'est en effet tout à fait normal. Permettez-moi

23 d'ajouter ce qui suit : voilà quelle était mon impression. J'ai eu

24 l'impression qu'à la fin de ma période d'affectation, M. Hadzihasanovic a

25 donné plus l'impression qu'il maîtrisait la situation, comparée à la

Page 8187

1 première phase de ma période d'affectation, comparée aux premières

2 semaines. Est-ce que la situation pour le 3e Corps s'est améliorée au cours

3 des mois, cela je ne sais pas ?

4 Q. Merci. En réponse à une question qui vous a été posée par mon estimé

5 confrère, vous avez indiqué qu'à plusieurs reprises vous avez obtenu des

6 informations que vous avez voulu vérifier. Il y avait eu, par exemple,

7 l'information que vous aviez reçue par le maire croate de Vitez, qui vous

8 avait dit que d'après lui, il y avait quelques 2 000 Moudjahiddines dans la

9 région. Est-il vrai, Colonel, que vous vous êtes rendu auprès de cette

10 unité de l'armée à Travnik, mais que vous vous êtes également rendu dans

11 d'autres endroits mentionnés par le maire ? Je pense, par exemple, aux

12 secteurs qui se trouvent au nord de Vitez, et vous vous êtes rendu à l'est

13 de Zenica parce que vous vouliez, en fait, localiser ces Moudjahiddines.

14 Toutefois, vous n'avez pas pu obtenir de preuve portant sur la présence des

15 Moudjahiddines au sein d'unités du 3e Corps.

16 R. C'est exact. Je peux vous dire qu'après notre visite à Travnik, le

17 lendemain, nous sommes partis pour la région qui se trouve à l'est de

18 Zenica, à l'est du fleuve, et j'ai eu quelques discussions d'ailleurs avec

19 le HCR des Nations Unies afin de voir s'ils avaient vu quelque chose. Il

20 n'y avait pas véritablement d'information, il n'y avait que quelques bruits

21 qui couraient. Nous avons parcouru cette zone qui se trouve à l'est de

22 Zenica, et nous n'avons rien trouvé. Nous sommes retournés à Zenica, et

23 nous nous sommes déplacés par véhicule dans le secteur au nord de Vitez,

24 puisque c'était justement ce secteur qui avait été mentionné par le maire

25 croate de Vitez. Il avait dit que dans ce secteur, il devait normalement y

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1 avoir beaucoup de combattants Moudjahiddines. Nous avons parcouru de

2 longues distances dans notre véhicule, jusqu'au moment où nous sommes

3 arrivés tout près de la ligne de confrontation, et là, nous avons trouvé

4 des personnes de l'ABiH et nous leur avons demandé justement, ils nous ont

5 dit qu'il n'y avait pas d'étrangers, de combattants d'étrangers des

6 Moudjahiddines. Ils appartenaient à l'unité de la 7e Brigade musulmane. Ils

7 ne nous ont pas autorisé à poursuivre notre chemin parce qu'ils nous ont

8 dit que cela était un secteur extrêmement dangereux, nous avons dit que

9 nous pouvions nous y rendre tout seul. Ils ne nous y ont pas autorisés,

10 donc nous sommes revenus sur nos pas. Pendant cette période, nous n'avons

11 jamais trouvé de preuves portant sur la présence des Moudjahiddines au sein

12 de la région du 3e Corps.

13 Q. Colonel, j'aimerais réitérer quelque chose. Vous avez soulevé ce

14 problème auprès du commandant Hadzihasanovic et ensuite auprès de M.

15 Merdan, ainsi qu'avec d'autres officiers. Toutes ces personnes y compris

16 les soldats vous ont dit qu'il n'y avait pas de Moudjahiddines dans aucune

17 unité du 3e Corps; est-ce bien exact ?

18 R. Pour ce qui est des soldats de l'armée de terre, je n'en sais rien.

19 Mais pour ce qui est des officiers, par contre, M. Hadzihasanovic et des

20 autres commandants et de M. Merdan, ils nous ont dit et déclaré qu'il n'y

21 avait pas de soldats étrangers au sein du 3e Corps. Il s'agissait tout

22 simplement, comme ils nous le disaient, de soldats de Bosnie.

23 Pour ce qui est des soldats de l'armée de terre, nous n'en avons pas parlé

24 avec eux et nous n'avons pas véritablement obtenu de véritable réponse à

25 propos de cette question.

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1 Q. Merci. Je pensais qu'à Travnik, au nord de Vitez, vous aviez parlé à

2 des soldats justement qui vous ont dit la même chose. Peut-être que je ne

3 vous avais pas compris. Avez-vous dit que ces soldats justement vous ont

4 dit qu'il n'y avait pas d'étrangers parmi leurs unités ?

5 R. Très bien. Je pense que vous faites référence au moment où nous avons

6 conduit de Vitez vers le nord vers la ligne de confrontation et nous sommes

7 tombés sur une section de l'ABiH. Nous avons parlé à ce qui d'après nous

8 était le commandant local, et il nous a dit qu'il n'y avait pas de soldats

9 étrangers au sein de cette unité. Je ne sais pas si cela était valable pour

10 toutes les unités du 3e Corps, je n'en sais rien. Mais dans cette zone, il

11 a bien déclaré qu'il n'y avait "pas de combattants étrangers."

12 Q. Merci. Lorsque vous avez décrit une de vos réunions avec le commandant

13 Hadzihasanovic, vous nous avez dit que, lors de cette réunion, vous avez

14 parlé d'une menace émise par le colonel Blaskic qui avait menacé de

15 pilonner Zenica si l'ABiH continuait à obtenir des renforts pour ses

16 troupes. Vous souvenez-vous de cette réunion et de cette conversation ?

17 R. Je pense que cela s'est passé en janvier, à la mi-janvier, le 15 ou le

18 16 janvier, et il s'agissait d'un message qui émanait du colonel Blaskic,

19 du HVO, suivant lequel le HVO allait pilonner Zenica, à savoir, la ville de

20 Zenica, je suppose. Si justement les troupes de renforts de l'ABiH

21 continuaient à arriver dans la zone de Busovaca et de Vitez, je suppose, si

22 ces renforts continuaient à arriver, à augmenter parce que c'était cela le

23 point de vue du HVO, je pense que c'était exact puisque les unités du 3e

24 Corps avaient accusé une augmentation dans cette région. Ce fut bien

25 entendu la réaction du HVO et nous en avons parlé avec M. Hadzihasanovic.

Page 8190

1 Q. Je viens juste de parcourir votre déclaration et je vois que cette

2 conversation a eu lieu le 25 janvier; est-ce exact ? Est-il exact de dire

3 que, deux jours plus tard, vous avez entendu des tirs qui venaient de la

4 direction de Busovaca vers le sud-ouest de Zenica ?

5 R. Oui. Cela s'est bien passé en effet le 25 janvier, cet entretien.

6 Pour ce qui est du pilonnage, je ne sais plus exactement si cela s'est

7 passé un ou deux jours après, mais cela s'est passé après. Nous nous

8 étions l'équipe à Zenica qui se trouvait à Zenica et nous avons entendu le

9 matin et je pense que cela s'est passé aux environs de 11 heures du matin,

10 nous avons entendu environ 20 explosions et du fait de notre expérience

11 nous savions qu'il s'agissait d'obus. En fait, la direction de ces obus

12 était la direction sud, à partir de Zenica vers Busovaca. D'où venaient ces

13 obus, cela nous ne le savons pas, mais la direction du pilonnage c'était au

14 sud de Zenica. Il se peut que cela ait eu un lien avec la menace, mais nous

15 n'en savons rien. La menace qui émanait des soldats de Blaskic.

16 Q. D'après ce que vous saviez, il y a eu véritablement des combats dans

17 cette région et du fait du bruit des obus, vous auriez pu conclure qu'il y

18 avait des combats dans cette région; est-ce bien exact ?

19 R. A ce moment précis, ce jour-là, je ne savais pas s'il y avait des

20 combats dans cette direction, au sud de la ville de Zenica. Ceci étant

21 dit, je n'ai pas été surpris parce que je pensais que du fait de ce

22 pilonnage il y avait, effectivement, des combats.

23 Q. Si nous prenons votre déclaration écrite, je peux voir que le même jour

24 vous avez été invité par le HVO de Zenica et que l'on vous a dit, que dans

25 trois villages, qui se trouvent à l'est de Busovaca, 14 Croates avaient été

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1 tués et qu'ils avaient été transportés à l'hôpital de Zenica et que leurs

2 amis et leurs proches, leurs familles, les personnes qui avaient quitté la

3 région se trouvaient également à Zenica et qu'elles demandaient votre aide

4 pour ce qui est de leur transport vers Vites. Est-ce bien cela que vous

5 avez indiqué dans votre déclaration ?

6 R. Oui, c'est ce que j'ai dit plus ou moins mais le HDZ HVO local de

7 Zenica nous a téléphoné et nous a dit que 14 Croates de Bosnie avaient été

8 capturés dans un premier temps, puis tués, et ce dans trois villages, aucun

9 nom ne nous a été donné; il s'agissait de petits villages qui se trouvaient

10 à l'est de Busovaca et il nous a été dit que leurs dépouilles avaient été

11 transportées à l'hôpital de Zenica et que ces personnes du HDZ HVO

12 voulaient se rendre à l'hôpital pour vérifier l'état des cadavres. Ils nous

13 ont également dit que des membres de ces personnes qui avaient été tuées,

14 des réfugiés avaient dû quitter leurs villages et avaient été transportés à

15 Zenica. Cela représentait un autobus. Ces personnes étaient logées chez des

16 amis croates ou des membres de leurs familles à Zenica mais ils voulaient

17 que ces réfugiés soient transportés de façon sûre, hors de Zenica, le plus

18 rapidement possible vers Vites. Cela fut l'objet de notre réunion avec le

19 commandant du 3e Corps.

20 Q. Merci. Vous avez parlé au commandant Hadzihasanovic pour demander

21 l'aide du 3e Corps pour ce qui est du transport sûr de ces familles à Vites

22 et ce, pour qu'ils puissent enterrer ces personnes qui avaient été tuées;

23 est-ce bien exact ?

24 R. C'est exact que nous avons présenté le problème ainsi et que nous avons

25 dit qu'il fallait que ces personnes puissent faire l'objet d'un transport

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1 sûr de Zenica à Vites. Nous avons également indiqué que les cadavres

2 devaient pouvoir être enterrés parce que c'est ce que le HDZ HVO nous

3 avaient demandé. C'est exact.

4 Q. Toutefois, lors de votre conversation avec le commandant

5 Hadzihasanovic, vous ne lui avez jamais dit ce que vous avait relaté le HDZ

6 HVO à propos des assassinats présumés de ces personnes. Vous ne lui avez

7 jamais dit où ces personnes avaient été tuées. Tout ce que vous avez

8 mentionné, c'est que vous aviez besoin de son aide pour assurer le

9 transport de ces familles et pour faire en sorte que les corps puissent

10 être enterrés. Est-ce bien exact ?

11 R. Je lui ai dit que les personnes avaient été tuées. Je ne savais pas le

12 nom des villages, donc je ne pouvais pas les donner au commandant du corps.

13 Au vu de la situation, il fallait résoudre le problème des réfugiés. C'est

14 vrai que nous nous sommes, essentiellement, concentrés là-dessus. C'est

15 exact.

16 Q. Le commandant vous a fourni l'aide requise. Il vous a tout simplement

17 demandé de pouvoir inspecter ces personnes ou de pouvoir vérifier, pour

18 voir si ces personnes n'avaient pas d'armes. Ce qui fut fait, à la suite de

19 quoi ces personnes ont pu quitter Zenica en toute sécurité après que l'on

20 ait vérifié qu'elles n'avaient pas d'armes ?

21 R. Ce n'est pas exactement ce qui s'est passé, mais, en fait, oui. Le

22 commandant du corps a été très positif pour ce qui était du transport de

23 ces personnes vers Vites. Il a dit que cela ne représentait pas un

24 problème. Il a dit que ces personnes pouvaient avoir des armes et que de ce

25 fait il fallait vérifier cela. Si je ne me trompe, il a également dit que

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1 la police militaire du 3e Corps pouvait assumer cette tâche. Je lui ai dit

2 que ces personnes étaient assez effrayées et que si la police militaire du

3 3e Corps venait vérifiez afin de voir s'ils avaient des armes, il se peut

4 que ces personnes aient très peur et deviennent très hostiles. C'est alors

5 que le commandant du corps, si je ne me trompe, a dit : "Très bien, alors,

6 nous pouvons avoir une combinaison d'une patrouille de la police militaire

7 du 3e Corps et la police militaire du HVO qui viendrait de la Brigade du

8 HVO à Zenica." Cela m'a semble être une bonne solution. J'ai transmis ce

9 message au HDZ HVO et je l'ai également transmis au comité international de

10 la Croix rouge.

11 Lorsque je leur ai transmis le message et c'était le lendemain parce que

12 c'était déjà tard, notre équipe a été d'avis qu'il fallait se rendre à

13 l'hôpital pour vérifier, pour voir les corps, parce que le HDZ HVO avait

14 dit qu'il se pouvait que ces personnes aient été mutilées par exemple. Mais

15 le lendemain nous avons obtenu un autre ordre qui consistait à créer une

16 Commission mixte. Nous n'avons jamais eu ni la possibilité, ni le temps de

17 nous rendre à l'hôpital. D'après ce que je crois comprendre à propos du

18 transport vers Vites, cela s'est bien déroulé et, sinon, je pense que

19 j'aurais eu un rapport à ce sujet. Je pense que cela s'est passé sans

20 embûches, sans problèmes, mais je ne le sais pas, je n'ai pas obtenu de

21 rapports à ce sujet.

22 Q. Lorsque vous avez parlé au commandant Hadzihasanovic, vous lui avez dit

23 que cette information vous avait été donnée par le HDZ HVO, que les corps

24 se trouvaient à l'hôpital; toutefois, vous ne lui avez pas dit quelles

25 étaient vos intentions, vous ne lui avez pas dit ce que vous alliez faire,

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1 par la suite, lors de cet entretien que vous avez eu avec lui ?

2 R. C'est exact. Parce qu'à l'époque, je ne savais justement pas quelle

3 allait être l'étape suivante.

4 Q. Bien que vous soyez resté là jusqu'au 25 mars avec une permission de 15

5 jours, vous êtes resté à Zenica j'entends. Vous aviez tant de tâches que

6 vous n'avez pas pu vous occuper de cette question et vous n'avez pas pu

7 vérifier afin de voir si tout s'était déroulé comme cela vous avait été

8 indiqué par le HDZ HVO. En d'autres termes, vous n'avez pas mené à bien une

9 enquête sur cet incident.

10 R. C'est exact. Je ne l'ai pas fait moi-même car le lendemain, à Zenica,

11 on nous a donné l'ordre de former, de créer une Commission mixte, ce qui a

12 été fait avec M. Merdan, représentant de l'ABiH, et M. Nakic qui

13 représentait le HVO. Je pense d'ailleurs, que lors de la première réunion

14 qui a peut-être eu lieu, je ne me souviens pas exactement de la date, mais

15 qui a peut-être eu lieu le 28 ou le 29 mars, [comme interprété] je pense

16 que nous avons examiné cette question, si je m'en souviens bien. Je pense

17 que nous avons tous été d'avis, cela inclus également les membres du HVO,

18 que ce n'était pas une question à laquelle on devait attacher une grande

19 priorité, comparée aux autres questions qu'il fallait essayer de régler au

20 vu de la situation.

21 Q. Si vous vous en souvenez, au cours de cette réunion, et à la demande du

22 HVO, M. Merdan a présenté un rapport à propos des renseignements recueillis

23 par l'armée sur ce qui se passait dans la région et sur la façon dont ces

24 personnes avaient été tuées. Vous vous en souvenez ?

25 R. Non, désolé. Il se pourrait aussi que je n'aie pas été présent à tout

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1 moment de cette réunion. J'avais d'autre chose à régler aussi. Il se peut

2 que mon co-équipier, dans cette commission, ait présidé aux débats à ce

3 moment-là. Cela n'a jamais été mentionné, et je n'ai pas la moindre idée à

4 propos de ce rapport.

5 Q. Même si l'accord de cessez-le-feu conclu fin janvier prévoyait la

6 liberté de circulation, en réponse à une question posée par la partie

7 adverse, vous avez déclaré que vous aviez transporté l'adjoint Merdan et

8 d'autres officiers du 3e Corps quotidiennement depuis Zenica. Je parle ici

9 de personnes qui étaient venues assister à ces réunions de la Commission

10 conjointe. Est-il vrai que pendant votre mission, les membres de l'ABiH

11 n'avaient pas la liberté de circulation dans les zones contrôlées par le

12 HVO ?

13 R. C'est ce que je pense. Ce qui est certain, c'est que les membres de

14 l'ABiH faisant partie de la Commission conjointe, n'étaient pas en sécurité

15 s'ils allaient à Busovaca qui était contrôlée par le HVO. Ils n'étaient pas

16 en sécurité. Il fallait assurer leur protection grâce à ce service de

17 transport. C'était vrai aussi quand on était sur le terrain. En règle

18 générale, on utilisait soit un transporteur de troupes blindé danois, comme

19 je l'ai dit avant la pause, ou un véhicule du même type britannique afin

20 d'assurer la sécurité des membres de la Commission conjointe. Lorsque nous

21 nous trouvions sur un territoire tenu par le HVO, ceci concernait, à ce

22 moment-là, les membres de l'ABiH. L'inverse valait également.

23 Q. Vous avez fait état d'un incident qui avait provoqué la frustration des

24 membres du HVO lorsqu'ils ont vu qu'il y avait un membre de l'ABiH dans

25 votre véhicule et lorsque M. Nakic a essayé de tout faire pour éviter qu'un

Page 8196

1 incident n'éclate.

2 R. Exact.

3 Q. Pendant votre séjour en Bosnie-Herzégovine, vous avez appris, n'est-ce

4 pas, qu'il y avait beaucoup de citoyens bosniens qui avaient été chassés de

5 Kiseljak et de Busovaca. Vous avez rencontré Dario Kordic pour essayer de

6 permettre à ces gens de réintégrer leur foyer.

7 R. C'est exact. J'ai rencontré M. Dario Kordic. Ce fut là un des sujets

8 parmi d'autres que nous avons examiné.

9 Q. Vous avez proposé que les autorités locales aident à la réparation des

10 demeures pour que les gens puissent y revenir. Dario Kordic vous a dit

11 cette fois-là qu'on allait réparer les maisons des Croates, mais pas celles

12 des Musulmans de Bosnie. Parce qu'a-t-il dit que ceux, qui avaient été

13 chassés, ne devraient plus revenir ? Est-ce bien ce que vous avez appris à

14 l'occasion de cette réunion ?

15 R. Je ne me souviens pas exactement des termes exacts utilisés, mais

16 c'était là l'idée générale, oui. M. Kordic n'était pas du tout favorable à

17 l'idée du rapatriement des familles bosniennes. Il n'était pas favorable à

18 l'idée à ce que les Bosniens et les Musulmans de Bosnie reviennent chez eux

19 si ces maisons se trouvaient dans des territoires tenus par le HVO.

20 Q. Mon estimé confrère vous a posé une question. Est-ce qu'en réponse,

21 vous avez fait allusion à une des visites que vous avez effectuée au 3e

22 Corps, plus exactement, dans l'ancien bureau administratif de l'aciérie ?

23 M. Hadzihasanovic vous a emmené au sous-sol pour vous y montrer le centre

24 de transmission et le centre opérationnel.

25 R. Oui.

Page 8197

1 Q. Lorsque vous êtes arrivé au sous-sol, est-ce qu'il vous a été dit que

2 c'était là des locaux qui avaient été créés comme abri nucléaire pour ce

3 bâtiment administratif par les responsables de l'aciérie de Zenica ?

4 R. Je ne me souviens pas. Je ne me souviens pas exactement, mais je me

5 souviens qu'on a dit que ceci avait été construit pour être vraiment à même

6 de protéger contre des pilonnages, des obus. Je ne sais pas exactement, ce

7 pourrait être le cas.

8 Q. Vous avez dit avoir vu des appareils radio à cet endroit.

9 Q. Est-ce que vous y avez regardé de plus près pour voir de quel type ils

10 étaient ?

11 R. Non. Parce que, vous savez, c'était une visite plutôt sociale. Je ne

12 voulais pas abuser de l'hospitalité dont faisait preuve M. Hadzihasanovic.

13 De plus, je ne suis pas expert en appareils radio de fabrication

14 yougoslave. Je n'aurais pas pu apprendre grand-chose. J'ai vu qu'ils

15 étaient nombreux, ces postes, et de type divers. Ils servaient à diverses

16 fonctions.

17 Q. Si je vous disais que ce n'étaient pas des postes radio militaires,

18 mais plutôt des postes de radio amateurs, de marques particulières, BICOM

19 ou Kenwood, BICOM, BICON [phon], en français, est-ce que vous seriez

20 d'accord pour dire que ce ne sont pas là des moyens de transmission solides

21 et fiables à utiliser en temps de guerre ?

22 R. Je crois avoir vu aussi ce type de postes de radio que vous mentionnez,

23 mais je crois avoir vu également des postes militaires. S'agissant des

24 capacités militaires qu'auraient ces installations. Je ne le sais pas. Si

25 ces postes sont utilisés en tant de paix, ils pourraient aussi être dans

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1 une certaine mesure, utiles en temps de guerre, me semble-t-il.

2 Q. Ce que vous avez vu, ce que vous avez appris grâce aux contacts que

3 vous aviez eus avec le 3e Corps pourraient vous mener à croire que le 3e

4 Corps était en contact avec le commandement suprême. A partir de ces

5 renseignements, il vous est impossible d'attester de la qualité de ces

6 communications, de ces contacts entre le 3e Corps et les unités ou brigades

7 subordonnées. C'est exact, n'est-ce pas ?

8 R. C'est vrai. Je ne peux pas avoir d'avis précis à ce sujet. Vous avez

9 raison.

10 Q. Si les communications ou contacts avec les unités subordonnées étaient

11 tributaires de liaisons terrestres, à ce moment-là, vous seriez d'accord

12 pour dire que ces liaisons du réseau PTT étaient souvent en panne, ne

13 fonctionnaient pas. Ce qui veut dire que ce n'étaient pas là des moyens de

14 communications sur lesquels on pouvait se fier.

15 R. C'est vrai. C'était pareil pour nous. C'était sans doute vrai aussi

16 pour le 3e Corps. Ce n'était pas des moyens fiables.

17 Q. Le commandant Hadzihasanovic vous a fait une offre, une invitation afin

18 que vous alliez voir le centre opérationnel, le centre de transmissions,

19 c'était quelque chose d'important pour vous, parce que ceci montrait la

20 confiance qu'avait le commandant du Corps en cette Mission d'observateurs,

21 puisqu'il vous a montré des locaux qui, en général, sont gardés secrets par

22 une armée.

23 R. Oui.

24 Q. Les forces ennemies de l'ABiH, à savoir, le HVO. Le HVO ne vous a

25 jamais montré de tels locaux, n'est-ce pas, de telles installations ?

Page 8199

1 R. Non.

2 Q. Pendant votre mission en Bosnie-Herzégovine, en tant que membre de la

3 MCCE, vous avez eu des discussions à propos d'un règlement politique à la

4 crise qui sévissait en Bosnie-Herzégovine. Cela s'est passé au moment du

5 plan de paix Vance-Owen, n'est-ce pas ? C'est au moment où il était

6 d'actualité ?

7 R. Aujourd'hui, je ne suis trop sûr du moment où on a discuté du plan

8 Vance-Owen. Je n'ai pas vérifié dans mes notes, parce que ceci se situait à

9 un échelon bien plus élevé que celui où moi, je travaillais en tant

10 qu'observateur. Effectivement, je ne peux pas vous répondre.

11 Q. Mon estimé confrère, M. le Procureur, vous a posé une question, et en

12 réponse vous avez expliqué pourquoi les rapports existant entre le HVO de

13 Tuzla et l'ABiH étaient différents, là par rapport à ailleurs. Est-ce que

14 vous êtes d'accord pour dire qu'il y avait une certaine politique du HVO et

15 du HDZ en Bosnie centrale qui cherchait à maîtriser complètement les

16 territoires qui, d'après eux, étaient historiquement les leurs, et que

17 c'était là une des raisons parmi d'autres qui a entraîné ce conflit avec

18 l'ABiH et le début de l'offensive menée sur des Unités de l'ABiH ? Est-ce

19 que ce serait là une des raisons ?

20 R. Cela pourrait, effectivement, être une de ces raisons. Sans nulle

21 doute.

22 Q. Je ne sais pas si vous vous en souvenez. Vous vous souvenez peut-être

23 de certains des détails évoqués au cours des discussions sur le plan Vance-

24 Owen. Convenez-vous avec moi du fait que très souvent cette proposition des

25 règlements ne tenait pas compte de la situation véritable qui se présentait

Page 8200

1 sur le terrain ? Ce fut là une autre raison expliquant la reconnaissance

2 des tensions et, finalement, le conflit qui a éclaté en Bosnie centrale.

3 R. Je dois vous avouer que je ne suis pas suffisamment au courant pour

4 répondre à cette question. Je ne suis pas assez mis à jour. Je ne peux pas

5 vous répondre dans un sens, ni dans l'autre. Comment dire ? Ce n'était pas

6 une question que nous devions examiner à Zenica. Nous avions des problèmes

7 beaucoup plus terre à terre, bien plus pratiques à régler.

8 Q. Une dernière question sur ce point. Je ne sais pas dans quelle mesure

9 vous le savez, mais savez-vous que le 15 janvier, le HVO a délivré un

10 ultimatum à des Unités de l'armée, leur disant de se placer sous le

11 commandement du HVO en l'espace de cinq jours. Comme les Unités de l'ABiH

12 ont rejeté cet ultimatum, le HVO a déclenché une grande offensive à Gornji

13 Vakuf, Novi Travnik, dans ces régions-là, et le 25 janvier aussi dans la

14 région de Busovaca. Etiez-vous au courant de ces faits à l'époque, ou peut-

15 être plus tard en avez-vous appris l'existence pendant votre mission ?

16 R. Vous faites état d'un ultimatum. Je ne me souviens pas avoir été au

17 courant. Qu'il y ait eu début ou augmentation des combats le 25 ou aux

18 alentours de cette date, 25 janvier s'entend, oui. Cet ultimatum non, je ne

19 m'en souviens pas. Je n'ai pas d'information précise à ce sujet.

20 Q. Nous avons déjà évoqué cette question à plusieurs reprises ici dans ce

21 prétoire. Je vous demande si au cours de votre mission, vous étiez au

22 courant du fait que les routes, toutes les artères de communication étaient

23 une des questions cruciales qui se posait pour la survie de la zone et que

24 le contrôle de ces routes était un des principaux instruments, outil du

25 combat dans la zone.

Page 8201

1 R. Je savais que les routes et le contrôle de celles-ci était très

2 important pour les différentes parties, et que de temps à autre, plusieurs

3 routes ont été coupées par l'une ou l'autre partie avec toutes les

4 conséquences que ceci a entraînées pour la partie adverse. C'est exact.

5 Q. Enfin, j'espère que vous serez d'accord avec moi si je vous dis que

6 tous les problèmes découlant de la position du HVO qui a voulu appliquer le

7 plan Vance-Owen par la force et tous les problèmes en rapport avec le

8 barrage des routes; tous ces problèmes vécus par la population et l'armée

9 dans la région, que tout ceci a eu un impact déterminant sur les tâches

10 incombant au commandant du Corps, tâches qu'il ne serait ignoré s'il

11 voulait bien s'acquitter de ses fonctions.

12 R. Je suis tout à fait d'accord avec vous pour dire que c'était l'un des

13 problèmes d'une grande importance pour le commandant du 3e Corps d'armée,

14 qu'il ne lui était pas possible de les ignorer vu la tâche qui était la

15 sienne, qu'on lui avait confiée. Effectivement, il ne pouvait pas les

16 ignorer.

17 Q. Je vous remercie, mon Colonel. Je n'ai pas d'autres questions à vous

18 poser.

19 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

20 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

21 Je donne la parole aux autres Défenseurs.

22 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous

23 n'aurons que quelques questions à poser.

24 Contre-interrogatoire par M. Ibrisimovic:

25 Q. [interprétation] Monsieur Torping, pourrions-nous revenir, rapidement,

Page 8202

1 remonter dans le temps pour arriver à la mi-janvier, moment où vous avez

2 effectué une visite du QG du Bataillon de la 7e Brigade. Cette visite

3 n'était pas annoncée ?

4 R. C'est exact.

5 Q. Si vous êtes allé faire cette visite, c'est parce que les rumeurs

6 circulaient dont vous avez eu vent disant qu'il y avait des combattants

7 étrangers dans la zone.

8 R. C'était la raison principale. Bien sûr, dans notre équipe nous voulions

9 vérifier comment se présentait la situation dans la zone de Travnik-Novi,

10 Travnik-Grude et la meilleure façon de le faire, c'était d'aller sur place

11 soi-même, de rencontrer les gens, de poser des questions, de discuter.

12 C'est exact.

13 Q. Le QG de ce bataillon, il était bien au centre-ville ?

14 R. Oui.

15 Q. Cette fois-là, vous avez parlé au commandant local de la 7e Brigade;

16 n'est-ce pas ?

17 R. Nous sommes entrés dans ce bâtiment où nous avons vu des soldats

18 entrer. Je crois que nous sommes allés au premier ou au deuxième étage, et

19 là nous avons vu des soldats qui sortaient d'une pièce. Nous avons demandé

20 à ces soldats ce qu'ils faisaient. Aussitôt après, est arrivé un homme en

21 uniforme, sans indication de grade et il s'est présenté. Il a dit qu'il

22 était l'officier chargé de l'instruction, le commandant de cette unité

23 apparemment. Il a dit que c'était un Bataillon de la 7e Brigade musulmane.

24 Q. Cet homme vous a dit que cette unité se composait exclusivement de

25 soldats de la région, des Musulmans de Bosnie ?

Page 8203

1 R. Oui. Nous avons demandé quelle unité c'était et s'il était au courant

2 de la présence de Moudjahiddines, de combattants étrangers ? Il a répondu

3 que son unité c'était un bataillon ou une unité de la 7e Brigade musulmane

4 se composant uniquement de Bosniens et qu'il n'y avait dans ses rangs,

5 aucun combattant étranger.

6 Q. Revenons, si vous le voulez bien, aux événements qui se sont produits

7 le lendemain pour apporter une précision, vous l'avez dit à la page 49.

8 Lorsque vous vous êtes trouvé dans le nord de Vitez, vous avez rencontré

9 des membres de la 7e Brigade et vous avez parlé à un commandant local, qui

10 lui aussi était officier de la 7e Brigade; n'est-ce pas ?

11 R. Cela se passait sur le terrain qui se trouve au nord de Vitez vers la

12 ligne de front. Nous sommes arrivés, nous avons vu une section qui

13 contrôlait la route. Nous avons cherché à voir le commandant, une personne

14 est venue. Il n'avait pas d'indication de grade. On n'a pas pu le

15 déterminer, il n'a pas non plus donné son nom mais il a dit qu'il était le

16 commandant et il a ajouté qu'il était le chef, le commandant sur les lieux

17 d'une unité qui appartenait à la 7e Brigade musulmane. Nous leur avons

18 demandé s'ils avaient vu des combattants Moudjahiddines parce qu'il y avait

19 des rumeurs dans ce sens. Il a dit qu'effectivement, dans son unité, dans

20 sa zone, il n'y en avait pas, là au nord de Vitez, localement, qu'il n'y en

21 avait pas. Il nous a dit qu'il ne fallait pas aller plus loin parce qu'à ce

22 moment-là on se trouverait sur le territoire tenu par l'armée ou sur lequel

23 tirait l'armée des Serbes de Bosnie.

24 Q. Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que la première fois que vous

25 êtes allé voir le QG du Bataillon à Travnik, mais aussi le lendemain, vous

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1 n'avez trouvé aucune preuve qui aurait indiqué la présence de combattants

2 étrangers pendant cette inspection ou pendant le temps de votre mission ?

3 R. Pendant mon séjour là, je n'ai trouvé aucune preuve de la présence de

4 combattants étrangers. Si j'ai bien compris votre question, je peux dire

5 que, pendant ce mois-là -- ou ces mois-là jusqu'au mois de mars 1993,

6 pendant que j'étais dans la MCCE, je n'ai trouvé aucune preuve de la

7 présence de Moudjahiddines, de combattants étrangers dans le secteur de

8 responsabilité du 3e Corps d'armée.

9 Q. Revenons au moment où vous revenez en Bosnie, cette fois-ci en tant que

10 membre du NorBat. Début novembre, vous vous êtes trouvé à Tuzla.

11 R. Exact.

12 Q. Vous confirmez que pendant le déroulement des opérations militaires à

13 Vares ou autour de Vares, vous n'êtes pas allé à Vares et vous ne vous êtes

14 jamais trouvé à Vares ?

15 R. Non, au cours de cette période, je n'ai pas été à Vares parce que le

16 commandant du bataillon était là et j'avais des tâches à remplir dans la

17 région de Tuzla.

18 Q. Vous avez reçu des renseignements portant sur des problèmes se posant à

19 Vares et ceci vous est parvenu du commandant du 2e Corps ?

20 R. Oui.

21 Q. Après, vous avez pris contact avec les officiers du NorBat à Vares, qui

22 vous ont parlé des problèmes qu'ils avaient rencontrés dans la ville même ?

23 R. J'ai fait un contact radio avec le commandant du BritBat parce qu'on

24 demandait là directement l'aide du NorBat. Le NorBat demandait de l'aide

25 directement, ce qui veut dire que le colonel Henricsson a dû prendre

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1 position et il était sur place. J'ai transmis ce qu'il demandait, j'ai

2 transmis le message. Le colonel Henricsson a dit que vraiment c'était le

3 désordre le plus complet sur le terrain, sur les lieux et que le seul

4 problème qui se posait entre le 2e Corps et le 3e Corps c'était là un

5 problème que le NorBat et son 1er Bataillon ne pouvaient pas résoudre. En

6 conséquence, la demande a été rejetée, je parle de la demande que j'avais

7 transmise au commandant du 2e Corps.

8 Q. Il a confirmé la nature chaotique de la situation qui prévalait à

9 Vares ?

10 R. Oui, à Vares et à l'est de Vares, vers l'est, le long de la route.

11 Q. Saviez-vous qu'à ce moment, il y avait, outre la 7e Brigade, d'autres

12 unités, il y avait aussi plusieurs milliers de civils ?

13 R. Je savais qu'il y avait plusieurs milliers de civils parce que c'était

14 là les habitants de la ville. Il y avait certains Croates de Bosnie, il y

15 avait quelques centaines de réfugiés au camp, sur le camp de la 8e

16 Compagnie. Je savais que ce n'était pas simplement la 7e Brigade musulmane

17 qui avait attaqué depuis l'ouest, depuis ce territoire de Vares et à l'est

18 de Vares, mais je n'avais pas vraiment d'information parce que c'était les

19 officiers responsables qui étaient sur le terrain qui s'occupaient de la

20 question. C'étaient les officiers du QG qui étaient là et qui s'en

21 occupaient.

22 Q. Merci.

23 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Nous n'avons pas d'autres questions à

24 vous poser, Monsieur le Témoin. Merci, Monsieur le Président.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis, est-ce que vous avez des questions

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1 supplémentaires parce qu'il est 12 heures 30, c'est l'heure de la pause ?

2 M. MUNDIS : [interprétation] Non, pas de questions supplémentaires. Je vous

3 remercie, Monsieur le Président.

4 [La Chambre de première instance se concerte]

5 M. LE JUGE ANTONETTI : On va faire la pause parce que les Juges ont des

6 questions à poser. On reprendra à 1 heure moins cinq.

7 --- L'audience est suspendue à 12 heures 27.

8 --- L'audience est reprise à 12 heures 57.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Les Juges ayant quelques questions à poser, je vais

10 donner la parole au Juge Swart qui va poser des questions au témoin.

11 Questions de la Cour :

12 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Monsieur le Témoin, je voudrais vous

13 poser quelques questions sur la situation générale pendant votre premier

14 séjour en Bosnie, c'est-à-dire, à partir du mois de décembre 1992 jusqu'au

15 mois de mars 1993.

16 Je comprends que vous étiez parmi les premiers observateurs de la MCCE en

17 Bosnie centrale, n'est-ce pas ?

18 R. Je ne sais pas combien il y en a eu avant moi, mais je pense qu'il y en

19 a eu très peu. Nous n'étions que deux en Bosnie centrale comme observateurs

20 au total. Peut-être qu'il y en a eu trois ou quatre autres. Je ne suis pas

21 sûr, parce que nous avions quand même des missions de trois mois,

22 relativement courtes.

23 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Vous avez également mentionné le nom de

24 l'ambassadeur Thébault. Est-ce qu'il se trouvait, lui aussi, à ce moment-

25 là, à Zenica ?

Page 8207

1 R. L'ambassadeur Thébault est venu au cours de ma période, il est devenu

2 le deuxième chef du centre à Split, du centre régional. Il était à Zenica.

3 Je crois que le centre régional de Zenica a été créé à partir du centre

4 régional de Split dans les derniers jours de janvier, du côté du 30 ou du

5 31, quelque chose de ce genre. Ensuite, il est venu à Zenica quelques jours

6 plus tard. A ce moment-là, je n'étais pas là. J'ai dû partir entre le 1er

7 février, et je suis revenu à Zenica le 17 février. A partir de ce moment-

8 là, j'étais là à nouveau. Quand il est arrivé, personnellement, à Zenica,

9 je ne sais pas.

10 M. LE JUGE SWART : [interprétation] A ce moment-là, est-ce que vous aviez

11 déjà ce système pour établir des rapports ou rendre compte que la MCCE a

12 mis au point par la suite, un système de rapport quotidien ?

13 R. Le système existait quand je suis arrivé et avant cela, vers la fin de

14 décembre 1992. Nous avions comme routine d'écrire un rapport quotidien et

15 de l'envoyer par le CAPSAT, notre moyen de communication. Nous l'envoyions

16 tous les jours à Zenica. Je pense que ceci devait être fait avant 19 heures

17 tous les jours.

18 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Dans ces rapports, vos conclusions

19 principales figuraient, n'est-ce pas ?

20 R. Oui.

21 M. LE JUGE SWART : [interprétation] L'autre question que j'ai à vous poser

22 à cet égard : au cours des trois premiers mois de votre séjour, est de

23 savoir si vous aviez des contacts avec d'autres organisations

24 internationales sur une base régulière ?

25 R. J'avais des contacts réguliers avec le HCR à Zenica. Je dirais au moins

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1 une fois par semaine. Souvent, cela dépendait de la situation, plusieurs

2 réunions au cours d'une semaine. Aussi, et peut-être pas aussi régulier,

3 pas moi personnellement, mais l'équipe avait des contacts avec la CICR à

4 Zenica.

5 M. LE JUGE SWART : [interprétation] C'était la Croix rouge internationale

6 ou la Croix rouge locale ?

7 R. C'était la Croix rouge internationale dont il s'agissait. En ce qui

8 concernait la Croix rouge locale, nous rencontrions les chefs, les

9 dirigeants. Nous avions une première réunion à Zenica et je crois, ensuite,

10 je l'ai rencontré une ou deux fois lorsqu'il a transmis des demandes

11 concernant de l'aide qui était demandée. Ce cela n'était pas régulier.

12 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Est-ce que vous aviez aussi des

13 contacts avec la FORPRONU, ou est-ce que déjà ce système était en place à

14 ce moment-là ?

15 R. Il n'y avait pas de FORPRONU à Zenica. C'était une partie de la

16 FORPRONU, c'était un commandement de l'ABiH avec son quartier général à

17 Kiseljak, ainsi que certaines unités : le Bataillon britannique à Vitez,

18 l'Unité française à Kladanj, une Unité canadienne à Visoko. L'organisation

19 était en tant que telle intégrée au commandement ABiH à Kiseljak. Il y

20 avait ce qu'on appelait le OLCE, c'est-à-dire, l'officier de liaison de la

21 MCCE qui était un lien direct avec le commandement. Nous obtenions de lui

22 nos informations. Nous nous rendions souvent à Kiseljak et au quartier

23 général du commandement. J'allais assez souvent, moi-même, au cours de la

24 dernière partie de ma mission, au Bataillon britannique à Vitez ainsi que,

25 comme je l'ai dit, il y avait le Bataillon de transport néerlandais belge

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1 avec son quartier général à Busovaca. Nous avions notre petit PC de la

2 Commission conjointe à côté du Bataillon belge néerlandais. Nous avions des

3 contacts quotidiens.

4 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Si vous dites contacts quotidiens avec

5 la FORPRONU, vous comprenez probablement des échanges d'information, n'est-

6 ce pas ?

7 R. Oui.

8 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Le Bataillon britannique saurait ce que

9 vous faisiez, où vous vous trouviez, quelles étaient vos conclusions. En

10 revanche, vous-mêmes, saviez ce que le Bataillon britannique était en train

11 de faire et quel type d'information il avait ?

12 R. Je dirais que lorsque nous avions quelque chose qui, d'après notre

13 impression, pouvait intéresser le Bataillon britannique, ainsi que le

14 Bataillon néerlandais et belge, nous leur transmettions directement. Nous

15 prenions part ou nous assistions, lorsqu'ils le souhaitaient à des

16 briefings quotidiens du Bataillon britannique, et nous obtenions des

17 renseignements d'eux ainsi que du Bataillon néerlandais belge. Je dirais

18 que nous avions des contacts presque quotidiens avec l'OCLE à Kiseljak, de

19 sorte que nous obtenions des renseignements du commandement de la FORPRONU.

20 Je pense que la direction de l'information de la FORPRONU était plus

21 importante et vice versa, parce que nous n'avions pas autant de

22 renseignements qu'ils n'en avaient en tout. C'était très positif. C'était

23 très ouvert comme échange d'information. Il n'y avait aucun problème avec

24 les contacts du commandement de l'ABiH et les unités dans ce secteur.

25 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Vous nous avez dit que la Commission

Page 8210

1 conjointe de Busovaca avait été créée, avait commencé, si j'ai bien

2 compris, le 28 janvier. C'est exact ?

3 R. Oui. A ce moment-là, comme on l'appelait, je ne me rappelle plus

4 exactement. C'était la Commission conjointe de cessez-le-feu. Elle a

5 commencé à Busovaca. Ensuite, elle a changé de nom au cours des ma

6 permission. Elle s'est appelée la Commission conjointe de Busovaca. A un

7 moment donné, on en parlait comme étant la commission commune de Bosnie

8 centrale. Elle a eu des différents noms, mais c'était toujours la même

9 commission.

10 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Il y avait un cessez-le-feu qui avait

11 été conclu peu de temps après ?

12 R. Si je me rappelle exactement maintenant, c'était le

13 28 janvier 1993. Il y avait eu un accord à Vitez entre le 2e Corps, non,

14 excusez-moi, le 3e Corps et le HVO de la Bosnie centrale d'un cessez-le-feu

15 ainsi que la création de cette Commission conjointe. C'était un accord qui

16 avait été signé, si je ne me trompe pas, par les deux parties.

17 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Vous étiez membre de cette commission ?

18 R. Pas à l'époque, puisque j'étais en permission depuis le

19 1er février. J'ai quitté Zenica et je ne savais pas si devais retourner là-

20 bas à Zenica, ou si j'allais avoir une autre mission, une autre

21 affectation. Au retour de permission, je suis resté au centre régional de

22 Split pendant un certain temps avant de retourner à Zenica. L'idée était

23 que je devais être un officier d'opération à Zenica. En réalité, j'ai

24 commencé à m'occuper de la Commission conjointe. Je me suis mis à sa

25 disposition, parce qu'il était nécessaire d'avoir suffisamment de personnes

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1 dans cette commission, donc, avant que je ne reçoive le 24 février l'ordre

2 de devenir le président suivant de cette Commission conjointe à partir du

3 25 février.

4 M. LE JUGE SWART : [interprétation] A quelle date est-ce que vous êtes

5 devenu un membre de cette commission comme membre actif ? Parce que vous

6 avez dit que vous aviez quitté Split au début février. Quand est-ce que

7 vous êtes revenu ?

8 R. Je suis revenu le 17 février à Zenica.

9 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Le 17.

10 R. Mais, tant qu'un officier, je suis devenu un membre opérationnel de ce

11 centre régional, où je pouvais coopérer, de façon très intense, avec cette

12 commission.

13 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Est-ce que vous aviez eu un rôle actif

14 à jouer dans la création de cette commission avant le 28 ? Est-ce que vous

15 avez participé à ce processus ou pas ?

16 R. J'ai, en partie, participé à ce processus, si je ne me trompe. L'ordre

17 visant en organiser cette Commission conjointe de cessez-le-feu avait été

18 donné le 28 janvier 1993. En tant que l'un des deux membres de l'équipe de

19 Zenica, qui devait créer cette Commission conjointe pour ce qui était de la

20 partie de la MCCE, j'ai pris part aux préparatifs pratiques. Je pense qu'un

21 jour, en particulier, c'était peut-être le 28 ou le 29 ou le 30. J'étais à

22 ce moment-là sorti à un moment donné pour régler certains problèmes avec M.

23 Merdan, M. Nakic pour résoudre des problèmes locaux à un village. Je crois

24 que nous avions discuté de la question plus tôt. J'ai participé en pratique

25 aux travaux de la commission avant de partir en permission.

Page 8212

1 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Ma dernière question sera la question

2 suivante : est-ce qu'il y avait d'autres organes internationaux qui ont

3 participé à la création de cette commission, ou est-ce que la MCCE était le

4 seule ?

5 R. Non. Il y a eu des discussions brièvement avant le 28 à un niveau élevé

6 que mon niveau entre la MCCE et le commandement de l'ABiH, la FORPRONU.

7 D'après ce que j'ai compris, c'était l'officier qui commandait le Bataillon

8 britannique, le colonel Bob Stewart, qui avait pris une part active à ces

9 discussions, de sorte que je dirais qu'il y avait eu une décision qui

10 découlait d'une préparation conjointe, décision de la MCCE.

11 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Tout ceci a été relaté dans les

12 documents que vous obteniez.

13 R. Excusez-moi.

14 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Est-ce que vous aviez des

15 renseignements sur ce processus de négociation du Bataillon britannique ou

16 d'une source ?

17 R. Le 28 janvier. Il faut que je me souvienne. Je vais faire appel à ma

18 mémoire. Officiellement, l'ordre est arrivé sous forme de message de Split,

19 de notre centre régional de Split, qui était de créer cette Commission

20 conjointe et de coopérer avec la FORPRONU, avec les unités de la FORPRONU

21 dans le secteur. Nous avions un contact direct pour une coopération directe

22 avec le Bataillon de transport néerlandais belge et l'autre bataillon,

23 notamment, pour des questions administratives, nous devions être logés dans

24 le bâtiment le plus proche de celui qu'occupait ce bataillon. En ce qui

25 concerne la partie opérationnelle, notre lien le plus important était la

Page 8213

1 cellule opérationnelle du Bataillon britannique avec son quartier général à

2 Vitez. Nous obtenions beaucoup de renseignements très détaillés du

3 Bataillon britannique, mais également du commandement de l'ABiH, à Kiseljak

4 et du centre régional de Split. Le lien le plus proche, je crois, était le

5 lien direct avec le Bataillon britannique à Vitez.

6 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Est-ce que vous savez peut-être -- vous

7 avez mentionné le nom du colonel Stewart comme membre de la FORPRONU qui a

8 participé aux négociations à un niveau très élevé, à un niveau plus élevé

9 que vous pour ce qui est d'un cessez-le-feu ou quelque chose de ce genre;

10 est-ce que vous savez qui étaient les participants du côté croate et du

11 côté bosnien à ce processus ?

12 R. Non. Je n'ai pas les noms de ces personnes. Le colonel Stewart était le

13 commandant du bataillon à Vitez. Excusez-moi, mais je ne peux pas vous

14 donner de noms. Très probablement, c'étaient les représentants du

15 commandant du 3e Corps ainsi que du commandement du HVO de Bosnie centrale.

16 Personnellement, je n'ai pas été informé ni je n'ai pas participé non plus.

17 Je ne connaissais pas les détails concernant ces discussions initiales

18 avant la création de cette Commission conjointe. Le chef d'équipe, à

19 l'époque, à Zenica, était M. Jeremy Fleming, un des observateurs

20 britanniques. Je crois qu'il a participé de façon un peu importante à ces

21 discussions, tandis que moi, je m'occupais des questions sur le terrain au

22 cours de ces journées-là.

23 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Je vous remercie. Maintenant, un sujet

24 tout à fait différent. Vous nous avez parlé des enquêtes que vous avez

25 faites en ce qui concernait les combattants étrangers, les Moudjahiddines.

Page 8214

1 Vous avez soulevé cette question cinq fois du fait que vous pensiez avec

2 les officiers commandants de l'ABiH, vous nous avez dit que vous avez fait

3 des visites au nord de Vitez et à l'est de Zenica. Je vous écoutais, et je

4 me demandais pourquoi vous aviez cet intérêt considérable pour les

5 combattants étrangers. Pourquoi est-ce que vous êtes allé au nord à Vitez,

6 à l'est à Zenica ? Pourquoi est-ce que vous avez soulevé cette question

7 cinq fois de suite auprès des officiers d'un grade élevé ? Quelles étaient

8 vos raisons pour le faire ?

9 R. Mes raisons étaient multiples. Peut-être que ce n'était pas la raison

10 la plus importante, mais c'était que le HVO ou les Croates de Bosnie,

11 spécialement à Vitez, ainsi qu'à Travnik, évoquaient ces questions et cette

12 crainte de ces étrangers, de ces soldats très dangereux et étrangers, comme

13 ils l'avait dit avec aucun commandement, aucun contrôle, qu'ils ne

14 respectaient pas de règles, qu'ils n'avaient pas de règles sur la manière

15 de conduire la guerre, pas de règles normales. Comme on l'a dit plus tôt,

16 le gouvernement bosnien était le représentant légal de l'état, et le 3e

17 Corps de l'ABiH était, pour ainsi dire, l'armée régulière. S'il y avait

18 d'autres unités armées, des formations armées, il n'y avait aucun contrôle,

19 en tous les cas, pas suffisamment de contrôle à leur participation dans

20 cette guerre.

21 C'était important pour nous de le savoir, parce que nous étions

22 observateurs. Nous avions pour mission d'observer pas seulement ce qui se

23 passait au niveau militaire, mais également la situation politique. A notre

24 avis, cela avait une grande importance de voir s'il y avait des combattants

25 étrangers, des Moudjahiddines à l'intérieur de notre secteur de

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1 responsabilité ainsi que du 3e Corps.

2 Je crois que pour revenir au premier motif, c'était

3 une façon si on pouvait trouver des preuves, qu'il n'y avait pas de

4 combattants étrangers. C'était une façon de calmer la situation, en

5 particulier, pour les Croates de Bosnie et pour en quelque sorte désarmer

6 certains chefs croates de Bosnie, des dirigeants qui utilisaient ces

7 rumeurs comme des armes pour accroître les tensions dans le secteur.

8 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Lorsque vous vous êtes rendus au nord

9 de Vitez, que vous vous êtes rapprochés et que vous n'avez pas pu aller au-

10 delà de la ligne de front, pourquoi est-ce que vous vous êtes rendus là ?

11 R. Parce qu'on nous avait dit qu'il était possible de voir des

12 Moudjahiddines dans cette direction. C'était la voie d'accès qu'il fallait

13 emprunter pour se rendre dans cette zone. Nous n'avions pas le choix. C'est

14 la première fois que j'ai eu la possibilité de voir cette région. Ce

15 secteur faisait partie de notre zone de responsabilité. Nous n'avons trouvé

16 aucune indication, mais c'est un risque que nous avons pris.

17 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Vous vous souvenez des endroits où vous

18 vous êtes rendus, ou est-ce que c'est trop vous demander ?

19 R. C'est trop me demander, parce que je suis ici. Vous demandez des noms.

20 J'aurais besoin d'une carte pour préciser tout cela. Tout ce que je peux

21 vous dire, c'était que c'était Vitez direction nord, nord-ouest vers la

22 ligne de front, et c'était peut-être à dix kilomètres environ.

23 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Qui vous a dit que vous pouviez peut-

24 être trouver certains indices là-bas ? Qui vous a dit d'y aller ?

25 R. Je pense que c'est le maire croate de Bosnie, le maire croate de Vitez,

Page 8216

1 en fait, qui nous a indiqué qu'il se pourrait qu'il y ait des

2 Moudjahiddines dans cette direction.

3 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Vous nous avez également dit, et c'est

4 un autre thème de discussion, c'est-à-dire, c'est le dernier thème que

5 j'aimerais aborder avec vous. Vous nous avez dit, disais-je, qu'à la fin du

6 mois de janvier, à Zenica, des membres de la communauté croate vous ont dit

7 que 14 Croates avaient été capturés et avaient été ensuite tués. Ce sont

8 les mots que vous avez vous-même utilisés, "capturés et tués", par la

9 suite; c'est ce que vous avez dit ?

10 R. Oui. C'est l'information que nous avions obtenue. On nous a dit qu'ils

11 avaient, dans un premier temps, été capturés et tués. Bien sûr, s'ils sont

12 capturés et qu'il s'agit de prisonniers de guerre, vous n'avez pas le droit

13 de les tuer. S'ils sont tués pendant le combat, c'est une autre chose mais

14 les représentants du HVO HDZ nous ont dit que ces personnes avaient, dans

15 un premier temps été capturées puis qu'elles avaient été tuées. Si cela est

16 exact, et cela nous ne le savions pas, cela représente un crime de guerre.

17 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Je suis d'accord avec vous à ce sujet

18 mais je souhaitais, dans un premier temps, savoir si vous avez rencontré la

19 personne qui vous a donné cette information ou est-ce que c'est une

20 information que vous avez obtenue autrement ?

21 R. Nous avons reçu un appel téléphonique. On nous a transmis cette

22 information, et la personne du HDZ et HVO puisque, c'était à la fois un

23 homme politique et quelqu'un qui faisait partie, qui était, en fait, un

24 commandant de la défense locale, je ne sais pas exactement. Enfin, toujours

25 est-il qu'il nous a demandé avec ses autres camarades, ses camarades

Page 8217

1 croates de Bosnie, de venir à une réunion dans leur bâtiment; c'est là où

2 ils avaient établi le bureau du HDZ HVO au centre de Zenica. Nous nous

3 sommes rendus dans cet endroit et nous les avons rencontrés et ils nous ont

4 transmis cette information, c'est ce qu'ils nous ont dit. Personne n'a été

5 présenté comme étant un réfugié de ces villages. Je n'ai rencontré personne

6 ainsi. En fait, c'étaient les représentants du HDZ HVO à Zenica qui nous

7 ont transmis cette information et qui nous ont demandé cela.

8 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Vous souvenez-vous s'ils vous ont dit

9 comment eux avaient obtenu l'information ?

10 R. Non, je ne m'en souviens pas. Ils nous ont dit que des réfugiés, des

11 réfugiés, en fait, qui venaient de trois villages, étaient arrivés dans un

12 bus à Zenica et avaient été logés par des amis, des proches, des membres de

13 leurs familles à Zenica. Je suppose qu'ils avaient obtenu ce renseignement

14 de la part de ces personnes, mais ce n'est pas une question que je leur ai

15 posée, en fait.

16 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Vous venez de nous dire que si une

17 personne est tuée après avoir été capturée, cela représente un crime de

18 guerre très, très grave. Dans quelle mesure est-ce que vous avez pris très

19 au sérieux cette information à l'époque ?

20 R. J'ai considéré que cette information, je l'ai prise très au sérieux

21 cette information, parce que je ne savais pas si cela était vrai, mais, si

22 cela était vrai, je me suis dit que cela allait déclencher une escalade de

23 la situation qui était déjà tendue. C'était une période auparavant qui

24 était assez calme, c'était, en fait, le début d'une situation qui était

25 beaucoup plus tendue, hostile, donc il était important de préciser la

Page 8218

1 situation. Ce qui était également encore plus important, c'était

2 l'information dans la pratique que nous avions obtenue parce qu'il y avait

3 ces réfugiés qui avaient le sentiment d'être menacés à Zenica, qu'il

4 fallait transporter à Vitez et que cela allait dans l'intérêt de toutes les

5 parties. C'est la raison pour laquelle que j'ai estimé qu'il fallait

6 essayer de régler ce problème aussi rapidement que possible.

7 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Est-ce que c'est pour cela que vous

8 avez eu le même jour une conversation avec le commandant du 3e Corps ?

9 R. Oui.

10 M. LE JUGE SWART : [interprétation] En réponse à une question qui vous a

11 été posée, vous avez répondu ce qui suit : "Je lui ai dit qu'ils avaient

12 été tués," et, ensuite, j'ai commencé à parler de la question des réfugiés.

13 Ma question porte sur ce que vous avez dit lorsque vous avez dit : "Je lui

14 ai raconté que ces personnes avaient été tuées. Il s'agissait de ces

15 Croates, mais est-ce que vous avez, lorsque vous avez relaté cela, est-ce

16 que vous avez inclus le fait que ces personnes avaient été tuées après

17 avoir été capturées ?

18 R. Oui, c'est l'information que nous avions obtenue; on nous avait dit,

19 ils ont été capturés, puis tués.

20 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Oui. Ce que j'aimerais savoir c'est si

21 vous avez indiqué cela au commandant du 3e Corps.

22 R. Oui, je pense que je l'ai fait. Mais je ne me souviens pas exactement

23 de ce que je lui ai dit lorsque nous lui avons transmis cette information

24 parce que nous étions toujours deux pour ce faire, je ne sais pas qui a dit

25 quoi exactement.

Page 8219

1 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Qui était l'autre personne présente ?

2 R. A ce moment-là, je ne sais plus très bien s'il s'agissait du nouvel

3 observateur néerlandais, Kees van der Pluijm, je ne sais pas s'il était

4 arrivé, si c'était lui ou non. Il faudrait que je voie si j'ai consigné ce

5 renseignement dans mes notes.

6 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Mais, de toute façon, votre personne

7 était un représentant de la MCCE ?

8 R. Oui.

9 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Quelle fut la réaction du commandant

10 lorsque vous lui avez transmis ce message et relaté cela ?

11 R. Autant que je m'en souvienne, il a gardé son calme, il n'a pas eu de

12 réactions particulières. Je pense qu'il m'a dit qu'il n'était pas au

13 courant de cette situation. Après avoir parlé avec lui, j'ai eu

14 l'impression qu'il ne savait peut-être pas que 14 Croates avaient été tués

15 mais j'ai eu l'impression qu'il savait et qu'il avait été mis au courant

16 des combats. Je ne sais pas s'il était au courant dans les trois villages

17 peut-être d'ailleurs que ce n'était pas trois villages, d'ailleurs je ne

18 sais pas, mais qu'il était au courant qu'il y avait eu des combats dans la

19 région de Busovaca, je ne sais pas, en fait.

20 Lorsque nous avons parlé du problème des réfugiés, nous avons mis en

21 exergue le problème des réfugiés justement pour essayer de trouver une

22 solution d'ordre pratique, une solution pour le transport. J'ai eu

23 l'impression que M. Hadzihasanovic souhaitait régler le problème et que

24 bon, il y a eu ce problème d'ordre pratique afin de savoir si ces personnes

25 étaient armées, ou pouvaient être armées, ou n'étaient pas armées, il

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1 s'agissait de solutions pratiques. C'est une réunion qui s'est terminée

2 dans une atmosphère assez positive. Ensuite, je suis allé informer le

3 comité international de la Croix rouge puisque c'était l'organisation qui

4 s'occupait du rapatriement des réfugiés, et cetera, et cetera. J'ai

5 également pris contact avec le HDZ HVO.

6 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Lorsque vous êtes parti et lorsque la

7 question des réfugiés a été réglée, est-ce que vous avez parlé de cet

8 événement avec Monsieur l'ambassadeur Thébault, s'il était déjà présent ?

9 R. Non. Autant que je m'en souvienne, lorsque j'ai rencontré Monsieur

10 l'ambassadeur Thébault, il y avait eu d'autres événements qui s'étaient

11 déroulés, ce n'était plus d'actualité, cela. Bien entendu, j'ai envoyé un

12 rapport au centre régional de Split à propos de cette situation. Le

13 quartier général du centre régional de Split avait été mis au courant de la

14 situation.

15 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Est-ce qu'il y a un rapport de la MCCE

16 à propos de cette conversation ?

17 R. Vous dites ?

18 M. LE JUGE SWART : [interprétation] La question que je vous pose, c'est que

19 cela a fait l'objet d'un rapport de la MCCE.

20 R. Oui, cela doit exister.

21 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Votre réunion avec les Croates, votre

22 conversation avec le général.

23 R. Je ne sais pas dans quelle mesure ce rapport était détaillé. Pour ce

24 qui est de l'incident ou de cette situation, je suis sûr que cela a été

25 consigné, effectivement, dans un rapport quotidien.

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1 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Vous avez également déclaré que vous

2 aviez réussi à organiser un transport en direction de Vitez.

3 R. En fait, ce n'est pas moi qui ai organisé ce transport parce que

4 d'autres choses se sont passées tout de suite après. Nous avons reçu des

5 ordres. Mais si j'ai bien compris, ce transport a été organisé et réalisé

6 puisqu'il n'y a plus eu d'autres demandes qui nous ont été adressées. Ce

7 n'est pas nous qui organisions --

8 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Fort bien.

9 R. -- qui arrêtions les détails pratiques de ce transport.

10 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Vous avez dit que l'équipe devait aller

11 à l'hôpital pour voir les cadavres, pour voir s'il y avait eu des

12 mutilations. Je suppose que c'est une autre déclaration là qui a été faite

13 par des représentants croates.

14 R. Je dirais que les représentants croates de Bosnie, le HDZ de Zenica,

15 nous avaient demandé d'aller à l'hôpital pour ainsi dire contrôler les

16 cadavres. Pourquoi ? Parce que, souvent, lorsque ce genre de situations se

17 présentait, les rumeurs circulaient très vite, de façon exponentielle. On

18 disait que les personnes, les cadavres avaient été mutilés et torturés

19 avant d'être tués. Il est fort probable que le HDZ cherchait une

20 confirmation. Nous, pour nous-même, nous voulions faire une évaluation

21 exacte et objective pour dire oui ou pour dire que non, il n'y avait pas eu

22 de mutilation parce que nous essayions de calmer un peu la situation parce

23 que, sinon, les tensions montaient très rapidement. Le HDZ était intéressé

24 mais nous aussi, mais pour des raisons différentes. Nous voulions contrôler

25 l'état de ces corps.

Page 8222

1 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Mais vous-même, vous n'êtes jamais allé

2 sur place.

3 R. Non, parce que --

4 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Fort bien.

5 R. -- le lendemain, j'ai eu d'autres choses à faire et j'ai reçu d'autres

6 ordres pour régler des choses qui avaient davantage de priorité que cette

7 question-là.

8 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Vous avez ajouté que vous êtes parti le

9 1er février pour revenir, après un certain temps, à Zenica. Avant la pause,

10 vous avez parlé aussi de la Commission conjointe et vous avez dit qu'on

11 avait parlé de la mort de ces 14 Croates à cette commission. Vous avez dit

12 à peu près ceci : "Je me souviens bien, nous avons découvert que cette

13 question n'était pas de la plus haute priorité." C'était aussi ce que

14 pensait le représentant du HVO à la commission. Était-ce avant votre départ

15 pour Split ou après ?

16 R. C'était avant de partir pour Split. Si je me souviens bien, cela a été

17 au moment de la première réunion, après la constitution de la Commission

18 conjointe, lorsque nous avions les deux parties en présence et lorsque nous

19 avons vérifié la situation de façon générale et que nous avons vérifié

20 certains points chauds, en particulier. Cette question a été soulevée sans

21 pour autant que le HVO, M. Nakic, demande que nous poursuivions l'examen

22 des corps. Il y avait d'autres choses que, nous tous ensemble, nous avons

23 trouvés plus importants à faire. Les représentants MCCE de la commission

24 ont pensé qu'il ne fallait pas consacrer le temps que nous avions à cette

25 question parce qu'elle n'était pas aussi importante que d'autres questions,

Page 8223

1 comment dire d'autres questions plus compliquées et plus difficiles à

2 l'époque. Les événements se précipitaient. Il a fallu changé notre emploi

3 du temps, du jour au lendemain, pour savoir ce qui devait nous intéresser.

4 M. LE JUGE SWART : [interprétation] C'est ce que vous pensiez

5 personnellement aussi apparemment.

6 R. Oui.

7 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Merci, Monsieur.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Il reste très peu de temps. J'ai quelques petites

9 précisions, bien qu'il me faudrait plusieurs heures pour vous poser des

10 questions. Comme on est tous limités, je me contenterai de quelques

11 précisions.

12 En répondant au Juge, vous avez indiqué, tout à l'heure, que vous aviez

13 rencontré le commandant de 3e Corps. Pouvez-vous nous indiquer l'heure à

14 laquelle a eu lieu cette rencontre avec le commandant du 3e Corps ? C'était

15 le matin, l'après-midi ou au milieu de la journée ? C'était à quelle heure

16 à peu près ?

17 R. Je suis ici occupé à essayer de me souvenir de la journée précise, de

18 l'heure précise. Je ne pense pas pouvoir le faire. Je pense que c'était

19 dans l'après-midi, en début d'après-midi, éventuellement. Mais je suis

20 navré de devoir vous dire je ne sais pas exactement.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous rencontré le commandant, vous ne parliez

22 pas la langue B/C/S. Vous aviez certainement un interprète avec vous.

23 R. Oui. Voilà comment fonctionnait notre système. Nous avions toujours --

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Je ne vous demande pas quel était le système. Est-ce

25 que vous aviez un interprète avec vous lors de l'entretien avec le

Page 8224

1 commandant du 3e Corps ? Est-ce qu'il y avait un interprète ?

2 R. Exact.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous vous souvenez du nom de l'interprète ?

4 R. Non.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous avez évoqué le fait qu'il y avait eu 14

6 tués, ce qui est quand même un chiffre important, est-ce que dans l'analyse

7 politique, militaire, stratégique, vous vous êtes posé la question de

8 savoir si cet événement, concernant les 14 tués, s'intégrait dans un plan

9 plus général ? Est-ce que vous avez essayé de savoir qu'est-ce qui s'était

10 réellement passé le 26 janvier, sur le plan géographique de la région car

11 vous étiez un observateur. Un observateur, il doit observer. Qu'avez-vous

12 tiré comme conclusion de ce qui s'était passé le 26 janvier ?

13 R. Ma conclusion a été que quelque chose s'était passé. Soit qu'il y avait

14 eu un combat opposant des gens du HVO et des gens du 3e Corps. Quand je dis

15 "des gens", je veux parler de soldats. Soit il y a eu une attaque sous une

16 forme quelconque, menée par des soldats du 3e Corps, de dirigée sur ces

17 trois villages. Je ne savais pas, à l'époque, exactement où ils étaient et

18 je ne savais pas si on essayait de s'emparer de cette partie-là du

19 territoire. Je me suis dit aussi, enfin, nous dans l'équipe, nous en avons

20 discuté et nous nous sommes dit qu'il était plus important de résoudre le

21 problème des réfugiés à Zenica d'abord pour, ensuite, essayer d'élucider la

22 situation sur le terrain. De ce fait, vous m'avez posé la question

23 précédemment, je crois avoir rencontré, effectivement, M. Hadzihasanovic

24 dans l'après-midi. Les heures passaient vite, et il n'était pas trop bon

25 d'aller sur le terrain la nuit -- quand la nuit était tombé, pour des

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1 raisons de sécurité, ce qui veut dire que nous n'avons pas eu beaucoup de

2 temps ce jour-là pour tout faire.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez dit en réponse à une question de la

4 Défense ou de l'Accusation, vous avez dit que vous aviez entendu, ce jour-

5 là, des obus qui tombaient quelque part. Dans votre souvenir, ces obus, ils

6 avaient été tirés par des canons, des mortiers de 120 millimètres ? Car

7 vous êtes un spécialiste, vous avez été dans un régiment de blindés. Le

8 nombre d'obus et les bruits, pour vous, cela se passait à quelle distance

9 de la Zenica ? Cela pouvait signifier quoi en termes militaires ?

10 R. Je me souviens que ces obus étaient à peu près au nombre de 20. J'ai

11 entendu 20 explosions vers 11 heures, sur une période de cinq minutes,

12 disons. Ce bruit venait du sud de Zenica. Nous, nous étions dans la ville

13 de Zenica, dans le centre. Le sud de Zenica, c'était dans la direction de

14 Busovaca. C'est la conclusion que nous avons tirée. Est-ce que c'était des

15 Howitzer, des obusiers de 12,2 millimètres, je ne sais pas, ou si c'étaient

16 d'autres obus. Cela, on n'a pas pu déterminer. Je peux vous dire, vu

17 l'expérience que j'ai avec les blindés, ce n'étaient pas des tirs de

18 blindés, ce n'est pas le bruit que ces tirs font. C'étaient sans doute des

19 tirs d'artillerie ou peut-être des mortiers. Nous avons uniquement pu

20 déterminer cet endroit au bruit entendu, parce qu'il y avait ces tirs au

21 moment où ils partaient, mais on n'entendait pas, ou plus exactement on

22 entendait le bruit du coup, mais on n'a pas pu déterminer d'où venait ce

23 bruit. On n'a pas pu déterminer d'où, de quelle zone ces obus étaient

24 tirés. Quant à la distance qui séparait notre endroit à Zenica, là où nous

25 étions, et l'endroit où a explosé ou ont explosé ces obus, difficile de le

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1 dire, quelques kilomètres. C'était difficile d'être plus exact.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

3 Je regarde l'heure. A mon vif regret, je vais arrêter de poser des

4 questions.

5 Je me tourne vers la Défense.

6 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

7 Contre-interrogatoire supplémentaire par Mme Residovic :

8 Q. [interprétation] Mon Colonel, hier nous avons discuté de cet événement.

9 J'ai attiré votre attention sur le fait que dans deux de vos déclarations

10 préalables, celle de 1997 et l'autre de 2001, on trouve certaines

11 différences lorsque vous relatez cet événement. Nous avons examiné ensemble

12 ces déclarations préalables, et nous avons vu que dans celle de 1997, vous

13 vous contentez de dire que le

14 27 janvier, il y avait eu un pilonnage au sud de Zenica depuis la direction

15 de Busovaca.

16 "J'ai entendu au moins 20 explosions. On nous a appelé du HVO de Zenica

17 pour demander de l'aide. Nous avons été voir le dirigeant du HDZ à Zenica,

18 qui nous a dit que plusieurs hommes avaient été tués, des Croates de Bosnie

19 dans des villages se trouvant à l'est de Busovaca."

20 Dans votre déclaration de 2001, vous parlez plus longuement, avec davantage

21 de détails de cet événement. Je ne parle plus ici du pilonnage. Je vous lis

22 simplement quelques extraits de cette déclaration de 2001 : "Au HDZ de

23 Zenica, j'ai appris que la veille

24 14 Croates avaient été capturés, puis tués dans trois villages à l'est de

25 Busovaca. Aucun nom de villages n'a été donné. Les parents des Croates ont

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1 été amenés à Zenica par bus et ils sont restés chez des amis, des

2 connaissances à Zenica. Je me souviens m'être demandé pourquoi les parents

3 étaient venus à Zenica, une ville qui était dominée par les Musulmans que

4 Busovaca était bien plus près, et que la population était majoritairement

5 croate."

6 Vous poursuivez en disant qu'on vous a demandé de l'aide en matière de

7 transport, vous ajoutez : "Lors d'une réunion avec Hadzihasanovic à 14

8 heures 30 ce jour-là, nous ne sommes pas allés à l'hôpital pour voir les

9 cadavres. Nous avons informé Hadzihasanovic du fait que des villageois

10 croates avaient été tués, ce que nous avions appris des représentants du

11 HDZ."

12 Est-il exact de dire que vous avez consulter vos notes personnelles et que

13 vous avez établi que la version plus correcte était celle que vous aviez

14 fournie en 2001, car dans vos notes, vous aviez consigné que le HDZ vous

15 avait informé que ces Croates avaient été capturés et puis tués; 14 en

16 tout. Ce que vous n'aviez pas dit auparavant, que vous aviez aussi une

17 mention concernant votre rencontre avec le commandant Hadzihasanovic ? Est-

18 ce que c'est bien ce que vous avez dit hier au cours de l'entretien que

19 nous avons eu ?

20 R. Vous voulez dire que c'est bien ce que j'ai fait ?

21 Q. Est-ce que vous avez vérifié ces faits dans vos notes personnelles ?

22 Est-ce que vous avez découvert que ce que vous aviez dit dans votre

23 déclaration de 2001 correspondait à ce que vous aviez consigné dans vos

24 notes personnelles ?

25 R. J'ai effectué cette vérification. Ce qui est dit dans ma déclaration de

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1 2001, correspond à mes notes. Ce qui se trouve dans la déclaration de 1997,

2 c'est peut-être là, parce que, de façon générale, cette déclaration est

3 plus courte. Il y a moins de détails, puisque c'était la première fois que

4 j'étais interrogé. On a parlé de beaucoup de choses qui concernait la

5 Bosnie, mais tous les détails n'ont pas été consignés par les gens qui se

6 sont chargés de l'interrogatoire.

7 Q. Est-il exact, Colonel, que vous avez aussi vérifié pour voir ce que

8 vous aviez dit au commandant Hadzihasanovic dans le cadre de cet

9 entretien ? D'après vos notes, vous lui avez demandé de fournir une

10 assistance pour le transport des réfugiés et pour enterrer ces corps ? Est-

11 ce bien ce que vous avez trouvé dans vos notes ?

12 R. Dans mes notes, j'ai constaté que j'ai dit que je voulais avoir de

13 l'aide, de la coopération de M. Hadzihasanovic, en tout cas du 3e Corps,

14 pour le transport des réfugiés, et pour veiller à ce que ces corps

15 reçoivent une sépulture décente.

16 Q. Etes-vous aussi en mesure de confirmer qu'en réponse à une de mes

17 questions, quand je vous ai demandé si vous aviez parlé au commandant

18 Hadzihasanovic à l'époque, à propos d'assassinats, de crimes et d'autres

19 éléments dont vous avait parlé le HDZ, vous avez répondu que vous n'en

20 aviez pas discuté avec le commandant Hadzihasanovic, mais que vous aviez

21 uniquement demandé son aide pour le transport des parents, des proches et

22 pour l'enterrement de ces corps ? Est-ce bien la réponse que vous m'avez

23 donnée à moi ?

24 R. J'ai informé M. Hadzihasanovic de cette demande et je lui ai relayé les

25 informations exactes ou pas que j'avais reçues du HDZ. Lorsque j'ai discuté

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1 avec M. Hadzihasanovic, nous n'avons pas discuté si cela devait être

2 considéré comme un crime de guerre. Je ne l'ai pas fait. Très vite, nous en

3 sommes venus à discuter de la façon dont il fallait régler ces problèmes

4 pratiques, le problème des réfugiés. Nous nous sommes concentrés sur cette

5 question. L'attitude de M. Hadzihasanovic a été tout à fait positive pour

6 ce qui est de la solution de ces problèmes pratiques. On n'a pas discuté de

7 la question de savoir si c'était un crime de guerre ou pas. Non, il n'y

8 avait pas de raison de le faire vu la situation.

9 Q. Vous avez consulté vos notes, et vous n'avez pas, ce faisant, trouver

10 de notes qui disent que vous aviez informé M. Hadzihasanovic du fait que

11 ces personnes avaient été tuées. Vous l'aviez informé que ces personnes

12 avaient été capturées, puis tuées. C'est là un fait qu'on ne trouve pas

13 dans vos notes, n'est-ce pas ?

14 R. Ce n'est pas exact. Dans mes notes, j'y ai écrit les informations que

15 je recevais ou que j'ai reçues du HDZ, à savoir que ces 14 Croates de

16 Bosnie avaient été capturés, puis tués. C'est ce que les gens du HDZ

17 m'avaient dit. Je n'ai pas vérifié moi-même, je n'ai pas eu l'occasion de

18 le faire. On m'avait dit que ces personnes avaient été capturées, puis

19 tuées.

20 Q. Personnellement, vous ne savez pas s'il y avait

21 14 personnes ou pas, si ces personnes ont été tuées ou pas. Vous ne savez

22 pas si cet événement s'est bien produit ou pas. Vous ne savez pas non plus

23 dans quelle condition ceci se serait produit, puisque vous n'avez pas eu

24 l'occasion de vérifier le moindre de ces faits ?

25 R. C'est exact.

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1 Q. Je vous remercie.

2 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Encore des questions ?

4 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Pas de

5 questions supplémentaires.

6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis ?

7 M. MUNDIS : [interprétation] Pas d'autres questions supplémentaires,

8 Monsieur le Président.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Colonel, nous vous remercions d'être venu

10 témoigné à La Haye. Vous avez répondu aux questions posées par

11 l'Accusation, les Défenseurs et les Juges. Nous vous remercions pour votre

12 contribution à la manifestation de la vérité. Nous vous souhaitons un bon

13 voyage de retour.

14 Je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir vous raccompagner à la

15 porte de la salle d'audience.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

17 [Le témoin se retire]

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis, je vais vous donner la parole pour

19 l'audience de demain. Vous avez la parole.

20 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

21 Le témoin prévu est mentionné dans la lettre que vous aurez reçue et que la

22 Défense a reçue également, sera présent pour être contre-interrogé par la

23 Défense et pour répondre à d'éventuelles questions de votre part. Il y aura

24 peut-être suite à ces questions éventuelles, de nouvelles questions, des

25 questions supplémentaires posées par l'Accusation.

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1 Avec votre autorisation et avec l'aide de tous ceux qui nous aident si bien

2 tout autour du prétoire, je voudrais vous évoquer un sujet, l'espace d'un

3 instant.

4 Hier, votre juriste m'a informé qu'il fallait être prêt à consigner au

5 dossier de l'audience des informations relatives à une réunion qui s'est

6 tenue entre M. Withopf, premier substitut et le juriste de la Chambre à

7 propos d'une ordonnance rendue oralement par la Chambre le 17 mai 2004. Je

8 suis prêt à le faire demain, disons, si le temps le permet. A défaut, je

9 pourrais consigner ceci par écrit et déposer cette écriture si ceci vous

10 aide davantage.

11 Il y a une question que je voulais porter à votre connaissance dans les

12 meilleurs délais. Elle a trait à certains des témoins supplémentaires que

13 vous nous avez enjoint de présenter à la barre.

14 Mme Benjamin, la semaine prochaine, va être en Bosnie. Elle va interroger

15 ces personnes. Il n'est pas probable que toutes ces personnes soient prêtes

16 à témoigner la semaine d'après, celle qui commence le 7 juin. Je demande

17 simplement votre aide. Vous pourriez peut-être nous la prodiguer demain

18 avant le départ de Mme Benjamin pour savoir si la Chambre préférerait que

19 ces témoins soient mis à la disposition de la Chambre quand ils sont prêts,

20 ou si nous avons la malchance d'avoir peut-être un arrêt d'une semaine ou

21 plus, on pourrait faire venir tous ces témoins d'un coup. Ce qui leur

22 permettrait de comparaître tous ensemble plutôt que d'en avoir un le 1er, le

23 7, le 14.

24 J'espère que vous me comprenez, Monsieur le Président. Je ne veux pas me

25 trouver dans une situation où nous n'aurions qu'un ou deux témoins par

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1 semaine pour les prochaines semaines. Je voulais soulever cette question

2 pour que vous nous éclairiez. Ce qui veut dire qu'au moment où Mme Benjamin

3 va rencontrer ces témoins, on pourra leur donner les bonnes informations

4 pour leur dire quand ils seront susceptibles de se trouver ici et qu'elle

5 sache, elle, quels sont vos desiderata ?

6 Merci.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Sur cette question, les Juges en ont discuté entre

8 eux. Bien entendu, c'est à l'Accusation de voir à quel moment approprié

9 elle compte faire venir ces témoins. Vous avez l'entière liberté de

10 manœuvre concernant les dates, les jours, où vous souhaitez voir venir ces

11 témoins. Si vous estimez qu'il faut tous les avoir en même temps, c'est une

12 bonne idée. A priori, il n'y a rien qui s'y opposerait. La seule question

13 que la Chambre a, c'est que les moyens de preuve de l'Accusation soient

14 clôturés dans le courant du mois de juin, et qu'il n'est pas question

15 d'avoir un nombre de trous dans la revue des témoins. Ce que vous pourriez

16 peut-être faire, mais en liaison avec la Défense, c'est peut-être faire un

17 tableau prévisionnel où vous rempliriez les cases des semaines à venir,

18 ensuite vous nous les communiquerez. A ce moment-là, on dira : "Oui, il n'y

19 a aucun problème." Je sais que vous avez d'énormes contraintes; il y a des

20 problèmes de calendrier; il y a le problème des témoins, seront-ils

21 disponibles ou pas. Ce sont de véritables problèmes. La venue sur place

22 d'un des membres de l'Accusation est une bonne chose, puisqu'elle pourra,

23 le cas échéant, savoir quelles sont les disponibilités des uns et des

24 autres.

25 Voilà en l'état, mais nous allons en reparler entre nous. Là, je vous

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1 indique de manière générale l'état de mes réflexions actuelles.

2 Est-ce que sur cette question la Défense aurait des observations à faire

3 valoir, bien qu'il s'agisse de témoins de l'Accusation ? Toute observation

4 est toujours bonne à prendre.

5 Vous avez la parole.

6 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation doit

7 expliquer comment elle a l'intention de faire valoir ses moyens et

8 d'achever cette présentation. Nous sommes parfaitement conscients de cela.

9 Le problème que mon confrère évoque, a certainement une incidence sur les

10 travaux de la Défense. Dans toute la mesure du possible, nous souhaiterions

11 nous entendre pour qu'on puisse entendre les témoins de façon continue

12 plutôt que d'avoir des interruptions une journée entre tel ou tel témoin.

13 S'il est nécessaire d'avoir une interruption, il vaudrait mieux, pensons-

14 nous, avoir une interruption de plusieurs jours qui, à ce moment-là,

15 donnerait à la Défense la possibilité de consacrer ses efforts à la

16 préparation de ses propres thèses et de faire des projets ou des plans.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Les autres avocats.

18 M. DIXON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous n'avons pas

19 d'observations sur la question, Monsieur le Président. C'est vraiment une

20 question de savoir quand les témoins seront disponibles. Il sera sans doute

21 difficile de faire des hypothèses pour le moment à ce sujet. Dès que les

22 enquêtes seront terminées, à ce moment-là, on verra de façon beaucoup plus

23 claire, quel pourrait être le calendrier.

24 Je vous remercie, Monsieur le Président, Monsieur, Madame les Juges.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : De toute façon, le dialogue entre les parties va se

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1 poursuivre. Une des solutions serait un tableau provisionnel à titre

2 indicatif qui permettrait aux uns et aux autres d'y voir plus clair. Entre

3 nous, nous allons réaborder ce problème tel que vous venez de l'exposer.

4 Je m'excuse auprès des interprètes, nous avons été une fois de plus trop

5 long. Je remercie la contribution des uns et des autres. Je vous invite à

6 revenir pour l'audience de demain qui débutera à

7 9 heures du matin.

8 --- L'audience est levée à 13 heures 58 et reprendra le vendredi, 28 mai

9 2004, à 9 heures.

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