Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 23 novembre 2004

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 16.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, pouvez-vous appeler le numéro

6 de l'affaire.

7 M. LE GREFFIER : Merci, Monsieur le Président. Affaire IT-01-47-T, le

8 Procureur contre Enver Hadzihasanovic et Amir Kubura.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. Je vais demander à

10 l'Accusation de bien vouloir se présenter.

11 M. MUNDIS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

12 Monsieur les Juges, conseil de la Défense, toutes les personnes présentes.

13 Daryl Mundis et, encore une fois aujourd'hui, Mlle Hartog, notre stagiaire,

14 et M. Andres Vatter, notre commis aux affaires.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais demander aux avocats de bien vouloir se

16 présenter.

17 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur

18 les Juges, le général Hadzihasanovic est représenté par Edina Residovic,

19 Stéphane Bourgon, co-conseil, et Muriel Cauvin, notre assistante juridique.

20 Merci.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Les autres avocats.

22 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur

23 les Juges, M. Kubura est représenté par Rodney Dixon, Fahrudin Ibrisimovic

24 et Mulalic Nermin, notre assistant juridique.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour cette journée de mardi, la Chambre salue toutes

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1 les personnes présentes, les représentants de l'Accusation, les avocats,

2 les accusés, ainsi que M. le Greffier, qui réapparaît, ainsi que toutes les

3 autres personnes de cette salle d'audience. Nous devons continuer

4 l'audition du témoin. Je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir

5 chercher le témoin.

6 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, mon Général. J'espère que vous entendez la

8 traduction de nos propos. Sans perdre de temps, je vais donner la -- non,

9 il y a un problème de --

10 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

11 LE TÉMOIN: FIKRET CUSKIC [Reprise]

12 [Le témoin répond par l'interprète]

13 Interrogatoire principal par M. Ibrisimovic :

14 Q. [interprétation] Monsieur Cuskic, bonjour.

15 R. Bonjour.

16 Q. Hier, pendant votre déposition, vous avez parlé de la création du

17 Détachement El Moudjahid. Il me semble que le compte rendu d'audience ne

18 reflète pas que cela s'est passé en août 1993.

19 R. Oui, c'était fait en août 1993.

20 Q. A ce moment-là, vous nous avez fait part de votre opinion, une

21 réflexion intéressante, disant que c'était probablement une tentative, pour

22 ce qui est de ces combattants étrangers, de ces Moudjahiddines, donc une

23 tentative de les placer sous le contrôle de l'ABiH; est-ce exact ?

24 R. Oui.

25 Q. Je ne sais pas si je vous ai bien compris. Si je fais une erreur,

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1 corrigez-moi. Votre opinion que vous avez exposée hier a été que, s'il y en

2 avait déjà dans des Unités de l'ABiH, donc sous leur contrôle, il n'y avait

3 pas lieu de créer ce détachement.

4 R. Je pense que j'ai été plutôt clair; par la création de brigades et des

5 corps d'armée, ou plutôt des Unités dans la zone de responsabilité du 3e

6 Corps d'armée, à l'extérieur des unités de l'armée, donc des états-majors

7 de la Défense territoriale et des brigades, il est resté des groupes de

8 Moudjahiddines et peut-être quelques unités du MOS. Ils se sont regroupés

9 dans ce village un peu à l'écart. Il y a eu des camps. Mais ils ne

10 faisaient pas partie des unités de l'armée, d'aucune des unités.

11 Q. La questions des combattants étrangers ou des Moudjahiddines, si je

12 vous ai bien compris hier, devait être résolue à un échelon supérieur du

13 commandement ou par une décision politique. En aucun cas, les commandements

14 des corps d'armée ou le commandement de la brigade ne pouvaient pas en

15 décider.

16 R. Lorsque le commandement du 3e Corps a été constitué, lorsque les

17 commandements inférieurs ont été constitués, on voyait clairement, dans cet

18 ordre, qui était placé sous leur commandement. Donc, on voit qu'ils ne

19 rentrent dans la composition d'aucune unité. D'un point de vue territorial,

20 ils n'appartiennent à aucune municipalité. Ils n'étaient pas de là.

21 Personne n'était compétent pour -- ils étaient très spécifiques. Ils

22 n'avaient pas été liés à la Défense territoriale précédemment, donc

23 personne n'avait des attributions -- des compétences sur eux.

24 Q. Vous n'avez peut-être pas bien compris, à savoir que cette question

25 devait probablement être résolue à un niveau supérieur que le commandement

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1 du corps d'armée, et encore moins, le commandement de la brigade n'avait

2 pas cette possibilité.

3 R. Ce que je sais, c'est que le commandant du corps d'armée n'avait pas

4 cette possibilité et, encore moins, le commandant de la brigade. Je ne peux

5 pas vous dire à 100 % qui était responsable de le faire, mais c'était une

6 question exclusivement politique.

7 Q. Très bien. Revenons maintenant à la partie de votre déposition où vous

8 avez parlé des unités qui, à l'époque, existaient à Travnik. Vous avez dit,

9 entre autre, que le 1er Bataillon de la

10 7e Brigade musulmane était à Travnik.

11 R. Le commandement du 1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane était à

12 Travnik, ainsi que la base, une école, à Medresa. C'était là qu'était

13 cantonné le 1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane.

14 Q. Pendant que vous avez déposé - à page 33, me semble-t-il - vous avez

15 dit que des membres de votre brigade avaient une ligne de responsabilité ou

16 plutôt qu'ils tenaient une ligne face à l'agresseur serbo-monténégrin dans

17 le secteur de Bijelo Bucje.

18 R. Oui.

19 Q. Pouvez-vous nous préciser où cela se trouve ?

20 R. Je vais essayer. Je crois que c'est au sud-ouest de Travnik, donc, si

21 on observe ce front qui va de Turbe, peut-être quatre ou cinq kilomètres

22 vers une position stratégique. C'est un village musulman dans une crevasse,

23 Mradinska [phon] Kamenjas, à proximité immédiat de la ligne de front. Donc,

24 au retour de Visoko - je ne sais pas à peu près combien de temps - mon 3e

25 Bataillon a pris position sur la ligne de défense.

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1 Q. Savez-vous, Monsieur Cuskic, qu'à Bijelo Bucje, il y avait également le

2 1er Bataillon de la 7e Brigade ? Il tenait ces lignes face à l'agresseur

3 serbo-monténégrin ?

4 R. A Bijelo Bucje, il y avait une trentaine de soldats du

5 1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane, donc ce n'était pas un nombre très

6 élevé. Si je ne me trompe pas, lorsque mon bataillon est sorti, ils ont été

7 rattachés à mon 3e Bataillon pour les opérations de combat. Dans la base du

8 bataillon à Travnik, il y avait leurs réserves - peut-être 70 personnes à

9 peu près - dans la ville de Travnik.

10 Q. Pendant votre déposition, page 31, me semble-t-il, vous avez dit que

11 l'une des positions dominantes aux alentours de Travnik, une des côtes

12 placé sous le contrôle du HVO était aussi Hajdarove Njive.

13 R. Oui. C'était une des côtes dominantes. Hélas, dès le mois d'avril, le

14 HVO en tenait un certain nombre des plus importants.

15 Q. Où se situe Hajdarove Njive ?

16 R. Cela se trouve -- si vous regardez la sortie de Travnik vers Zenica à

17 l'est, et le cours de la rivière Lasva, cela se situe au nord. C'est un

18 plateau, peut-être à 800 mètres d'altitude, et il domine l'entrée de la

19 ville de Travnik. Lorsqu'on vient de Vitez, de Zenica, depuis ces

20 positions-là, on peut, en fait, contrôler Plava Voda, la Medresa, donc où

21 les Musulmans ont été situés, ses bataillons. En plus, des 82-millimètres

22 mortiers du HVO, ils avaient aussi une Praga, qui était souvent utilisée et

23 qui a occasionné des blessures parmi les militaires et les civils de la

24 ville.

25 Q. Donc, c'est près de Travnik.

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1 R. Oui, c'est immédiatement à l'entrée de la ville. Je pense que vous

2 savez tous comment est située la ville de Travnik, dans une espèce de

3 cuvette. Il y a des montagnes, le mont de Vilenica et Bukovice, aux

4 alentours. Donc, la ville est cachée en bas. Hajdarove Njive, c'est à l'est

5 de l'entrée de la ville de Travnik. On pourrait dire que c'est pratiquement

6 à côté de l'entrée est de la ville.

7 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous m'y

8 autoriser, je voudrais présenter un document au témoin, pièce de l'acte

9 d'accusation 465. Nous avons suffisamment d'exemplaires pour toutes les

10 personnes présentes. Si M. l'Huissier pourrait nous aider, je voudrais

11 remettre le document au témoin et aux parties.

12 Q. Juste une question avant que vous n'examiniez ce document. Le

13 1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane, il existait dans le cadre du

14 Groupe opérationnel de Bosanska Krajina ?

15 R. Excusez-moi. J'étais en train de lire. Je n'ai pas entendu la question.

16 Q. Ce bataillon existait dans le cadre du Groupe opérationnel de Bosanska

17 Krajina ?

18 R. A ce moment-là, oui.

19 Q. Etes-vous en mesure de reconnaître ce document ?

20 R. C'est l'original qui porte l'écriture du commandant du groupe, M.

21 Alagic. C'est de sa main propre qu'il l'a rédigé. Par la suite, il a été

22 traité au centre de transmission, et il a été transmis qu commandant du 3e

23 Corps, le 8 juin 1993. L'on voit quelle est la situation des lignes face

24 aux Chetniks, l'activité du HVO, l'activité de nos forces propres. Il

25 ressort de cela que le 1er Bataillon a été versé précisément au niveau de

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1 Hajdarove Njive, à cet endroit-là.

2 Q. C'est l'écriture du général Alagic ?

3 R. Oui, c'est exact.

4 Q. Au haut, l'on voit que le rapport concerne la journée du 8 juin 1993 ?

5 R. Oui, c'est absolument exact. C'est son écriture, mais au centre de

6 transmission, on traite le document et on l'envoie par paquet à Zenica.

7 Vous voyez en bas, "Aga". C'est écrit "Aga", c'est, personnellement, Alagic

8 qui écrit. On voit que c'est écrit de sa main.

9 Car la situation était spéciale, à ce moment-là, je l'ai déjà dit, je l'ai

10 souligné pendant ma déposition. Le commandant Alagic n'avait pas

11 suffisamment de personnel dans son commandement parce que ce n'est que vers

12 le 7 ou 8 juin. Compte tenu des problèmes qui se sont imposés dans la zone,

13 il a commencé à nommer les assistants chargés de la Sécurité, des Affaires

14 civiles, à compléter son commandement. C'est lui qui écrivait souvent de sa

15 main propre les documents qui étaient, après, recopiés et traités, et

16 cetera.

17 Q. On voit que c'est écrit à 19 heures. Le rapport, normalement, devait

18 être un rapport qui fait état des activités de combat de la journée

19 écoulée ?

20 R. Oui, de la journée du 8 juin. Vous voyez dans l'entête, le 8 juin 1993

21 et 19 heures 00.

22 Q. Le général Alagic a constitué ce rapport en se fondant sur les rapports

23 émanant du terrain et sur les activités de combat de la journée ?

24 R. Oui, sur les rapports et sur ce qu'il savait, personnellement,

25 directement. Parce que le 8, je pense que le commandant Alagic a réussi à

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1 sortir en passant par les rochers au village de Krpeljici. Je pense qu'il

2 est entré en contact avec un certain nombre de forces sur le terrain, et

3 qu'il a pu installer des postes de commandement avancés, des centres

4 d'opérations et cetera.

5 Q. Au point 2, il est question des activités de votre brigade. Cela

6 reflète vos activités pour la journée mentionnée, donc, des activités de la

7 17e Brigade de Krajina ?

8 R. Oui, c'est exact. C'est que j'ai déjà souligné qu'une partie de mes

9 unités ont réussi à prendre possession sur les lignes que le HVO devaient

10 remettre aux Chetniks d'après leur accord. Les deux localités sont

11 mentionnées, et qu'on a opéré une jonction avec Slimena. On a établi la

12 continuité de la ligne, et on se battait pour le relais de Vilenica.

13 Q. Comme vous l'avez dit, le 1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane était

14 actif au niveau de Hajdarove Njive ?

15 R. Oui. Les activités sont en cours. Il est toujours actif là.

16 Q. En page 2, au point 3, on constate que ce jour-là, la 306e Brigade est

17 la seule qui a agi, qui a eu des opérations de combat. Au point 3.

18 R. Oui. Pour les autres unités, apparemment, il s'agissait plutôt d'opérer

19 une jonction, de reprendre les positions sur les lignes, d'atteindre les

20 lignes établies.

21 Q. Monsieur le Témoin, c'est une manière fidèle de refléter les événements

22 tels qu'ils se sont déroulés le 8 juin ?

23 R. Oui. C'est un rapport officiel qui reflète les événements de cette

24 journée-là.

25 Q. Nous n'avons plus de questions. Merci.

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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci à la Défense. Je vais demander à l'Accusation

2 de poser ses questions.

3 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

4 Contre-interrogatoire par M. Mundis :

5 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur. Je suis Daryl Mundis, et avec mes

6 collègues présents ici aujourd'hui, nous représentons le bureau du

7 Procureur en l'espèce. J'ai des questions à vous poser qui prendront un

8 petit peu moins d'une heure d'après mes estimations. D'emblée, Monsieur, je

9 tiens à vous dire que je ne souhaite nullement vous confondre. Si des

10 questions que je vous pose ne vous semble pas claires, si vous ne les

11 comprenez pas, dites-le-moi, s'il vous plaît, je vais les reformuler pour

12 que vous puissiez les comprendre. M'avez-vous compris ?

13 R. Oui. Je vous ai compris, et je vous en remercie.

14 Q. Merci. Monsieur, hier en répondant à certaines questions qui vous ont

15 été posées par Mme Residovic, vous nous avez parlé de la présence des

16 Unités du MOS, comme vous les avez qualifiées. Lorsque vous dites "MOS,"

17 est-ce que vous vous référez au Muslimanske Snage ?

18 R. Ecoutez. En 1992, sur le territoire, sur le terrain, on utilisait à la

19 fois le terme "MOS" et le terme forces musulmanes. Mais au fond, on se

20 réfère à la même chose.

21 Q. Encore une fois, Monsieur, la période qui nous intéresse, c'est la

22 deuxième moitié de l'année 1992, de juillet à décembre. Au mieux de vos

23 souvenirs et de vos connaissances, quel a été le nombre de membres du MOS

24 dans la zone de Travnik ?

25 R. Je vous ai dit que je suis arrivé dans la municipalité de Travnik vers

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1 le 21 août, et mon unité, le 25 août. A ce moment-là, je ne savais pas ce

2 qui en était des forces musulmanes. Mais pour moi, ma présence là-bas, j'ai

3 pu me faire une idée et, en particulier, à Karaula. Ce chiffre, pour ce qui

4 est des effectifs des forces musulmanes, je pense que cela ne dépassait pas

5 100 personnes dans la municipalité de Travnik, 100 combattants. Je suis

6 pratiquement sûr parce qu'à Karaula, ce Détachement du MOS était

7 pratiquement intégré dans les forces de la défense. A un moment donné, il a

8 disparu. Je pense qu'il comptait à ce moment-là 70 personnes à peu près.

9 Q. Lorsque vous l'appelez "Détachement du MOS", est-ce que vous avez une

10 idée d'une filière hiérarchique ? Est-ce que vous savez qui était le

11 supérieur de ces hommes ? Devant qui répondaient-ils ?

12 R. Je n'avais pas d'information là-dessus. Ils n'étaient pas intégrés aux

13 structures qui étaient les miennes, auxquelles j'appartenais. Mais ils

14 existaient, et dans certaines opérations, ils faisaient leur apparition,

15 ils faisaient part de leur souhait de prendre part aux opérations. C'était,

16 on pourrait dire un principe de volontariat qu'ils suivaient pour agir,

17 pour participer aux opérations.

18 Q. Monsieur, lorsque vous dites qu'ils faisaient part de leur souhait de

19 participer aux combats, est-ce que, personnellement, vous avez eu des

20 contacts avec des personnes faisant partie des forces musulmanes ?

21 R. Je n'ai pas eu de contacts directs, si ce n'est que pendant que j'étais

22 à Karaula. J'ai été en contact avec Asim Koricic, le commandant de

23 l'époque. Il faisait partie de ces forces musulmanes. Comme il était

24 originaire de Bosnie Krajina, on est entré en contact, une partie de ses

25 hommes dans le hameau, Gradina, de Karaula, donc j'étais en contact, à ce

Page 12115

1 moment-là. Comme je vous l'ai déjà dit, je vous dis comment je suis passé

2 d'Igman à Jajce, quel a été mon itinéraire et c'est uniquement dans ce

3 hameau, Gradina, de Karaula, que je les ai rencontrés.

4 Q. Monsieur, lorsque vous nous dites que vous étiez en contact avec le

5 commandant, Asim Koricic, vous rappelez-vous à peu près à quel moment cela

6 a eu lieu ou quelle a été la fréquence de vos contacts avec le commandant

7 Koricic ?

8 R. Cela a été pendant la période, je vais essayer de vous le dire

9 exactement. Le 6 septembre, le 15 novembre, il y a eu la chute de Karaula,

10 entre ces deux moments, il y a eu des contacts parce que Karaula est

11 devenue ma base pour des opérations vers Jajce et, pendant cette période-

12 là, j'ai eu des contacts avec le commandant Koricic.

13 Q. Monsieur, après le 15 novembre 1992, avez-vous eu des contacts avec

14 Asim Koricic ?

15 R. Oui, mais c'est seulement après le 20 janvier parce qu'on a constitué

16 le commandement du 3e Corps, on a constitué le 3e Corps.

17 M. Koricic avec une partie de ses hommes qui avaient été dans les forces

18 musulmanes et il est entré dans la composition de la 7e Brigade musulmane

19 de Zenica, donc nous nous sommes séparés. Je suis resté à Travnik et il est

20 parti à Zenica, et mon premier contact avec lui, cela a été vers le mois de

21 janvier lorsque ma brigade est arrivée à Visoko parce qu'une partie de la

22 7e était déjà, à ce moment-là, à Visoko et c'est là que nous nous sommes

23 retrouvés.

24 Q. Vous avez dit quelques membres du MOS, avec M. Koricic, sont devenus

25 membres de la 7e Brigade musulmane. Savez-vous ce qui est advenu des hommes

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1 du MOS qui ne sont pas devenus membres de la

2 7e Brigade musulmane ?

3 R. Je ne pourrais vous dire avec une exactitude absolue, mais d'après ce

4 que l'expérience m'a montré par la suite, je peux tout à fait vous dire

5 qu'une partie de ces hommes se sont retrouvés dans des forces, mais qu'ils

6 n'ont été intégrés dans aucune des Brigades de l'ABiH ou du 3e Corps, donc,

7 Mehurici, Orsac ensemble avec ces étrangers. Je ne sais pas comment vous

8 définir qui étaient, dans un certain sens, plus extrême, plus extrémistes.

9 Q. Monsieur, je voudrais maintenant que l'on reparle du mois d'août, de

10 l'automne 1992, donc après votre arrivée à Travnik, puis les mois de

11 novembre, décembre 1992. A ce moment-là, saviez vous où se trouvaient le QG

12 du MOS ?

13 R. Non. Encore une fois, je ne suis pas originaire de là, j'avais vécu

14 dans une autre Etat et je suis arrivé avec des hommes vivant dans un autre

15 Etat. Quant au commandement du MOS, il y avait le commandant Koricic qui

16 était à Gradina Karaula, pour les autres, vraiment, je ne pourrais pas vous

17 le dire.

18 Je connaissais le QG de la Défense territoriale de Travnik à Plava de

19 Travnik, le QG régional avec M. Merdan qui était à Zenica, mais eux, je ne

20 sais pas, ils ne m'intéressaient pas, ce n'était pas important pour moi, ce

21 n'était pas un facteur qui était important pour mes opérations de combat et

22 d'ailleurs pour la situation générale dans la zone d'opérations qui n'était

23 pas une force militaire de taille pour que je sois obligé d'en tenir

24 compte.

25 Q. Encore une fois, pendant cette période, qui couvre le temps qui va de

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1 votre arrivée à Travnik jusqu'à la mi-novembre 1992, les membres du MOS

2 portaient-ils un uniforme et des insignes distinctifs ?

3 R. Ils portaient des uniformes et ils avaient des insignes, mais ils

4 étaient très variés. Ce n'était pas comme les Unités de la Défense

5 territoriale, c'était plutôt avec des sabres pour certains, puis avec

6 signes arabes que je ne comprends pas, mais, en tout cas, ce n'était pas

7 des insignes officiels qui étaient réglementés, selon les règles de la

8 Défense territoriale. Il y avait le croissant, la demi ligne, les sabres,

9 mais la Défense territoriale et l'ABiH, nous avions autre chose, donc ce

10 n'était pas ce que nous avions.

11 Q. Monsieur, le nombre de ces forces musulmanes, est-ce des Bosniens du

12 cru, étaient-ce des étrangers, étaient-ce les deux ?

13 R. Dans la MOS, pour autant que je le sache il y avait des étrangers --

14 non, excusez-moi, c'étaient des Bosniens. Pour ce qui est des étrangers, de

15 leur statut à l'époque, je ne pourrais vraiment pas vous le dire. Il y en

16 avait, mais je ne sais pas s'ils étaient intégrés au MOS ou s'ils étaient

17 autonomes. A ce moment-là, ceci ne m'a pas intéressé, je n'ai pas eu

18 l'occasion de m'y intéresser parce que j'étais engagé dans des opérations

19 de combat sur une zone assez large.

20 Pour ce qui est de ceux que je connaissais du MOS, c'étaient des

21 Bosniaques, Koricic, Kokic, et cetera. Ce sont quelques hommes que je

22 connaissais et, à ce moment-là, je n'ai connu aucun étranger.

23 Q. Hormis M. Koricic et M. Kokic, vous souvenez-vous du nom d'autres

24 soldats, d'autres hommes qui faisaient partie du MOS ?

25 R. Non. Pour autant que je le sache, on n'avait personne originaire de

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1 Bosnia Krajina parmi les personnes que je connaissais car j'ai quitté ma

2 ville natale en 1971, je suis allé à Belgrade et j'ai voyagé dans toute la

3 Yougoslavie dans le cadre de l'exercice de mes fonctions.

4 Avant la création de la Brigade, je ne connaissais même pas les membres de

5 mon unité.

6 Q. Pour autant que vous vous souveniez, est-ce que le terme "MOS" a été

7 utilisé pendant toute l'année 1993 ? Est-ce qu'on a cessé de l'utiliser

8 d'ici la fin de l'année 1992 ?

9 R. Voyez-vous, lorsque la Défense territoriale est devenue l'ABiH, de tels

10 termes ont cessé d'être utilisés par les forces bosniennes. La machine de

11 propagande techtnik toutefois a continu à les appeler les forces

12 musulmanes, comme vous le voir dans un certain nombre de documents.

13 Notre allié, le HVO a utilité le terme "forces musulmanes" pour la première

14 fois si bien qu'au sein de l'armée, l'armée de la population bosnienne, ces

15 termes étaient utilisés, mais beaucoup moins chez les gens qui étaient

16 moins instruits mais officiellement, il a cessé d'exister lors que le corps

17 a été créé. Nous n'avions pas d'officiers instruits. Certains soldats ont

18 pu utiliser ce terme, mais, officiellement, il n'était pas utilisé à

19 l'exception de la

20 7e Brigade du 3e Corps qui s'appelait la 7e Brigade musulmane. Cela faisait

21 partie de son intitulé.

22 Q. Savez-vous si ce terme venait des forces musulmanes elles-mêmes ? Hier,

23 vous nous avez dit que M. Koricic avait fait partie du MOS, puis de la 7e

24 Brigade, et qu'il avait pris certains de ses soldats avec lui. Y a-t-il un

25 lien entre ces deux faits ?

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1 R. Excusez-moi, je n'ai pas bien compris votre question. Est-ce que vous

2 voudriez bien la répéter.

3 Q. Je ne suis pas sûre de l'avoir comprise moi-même.

4 Vous nous avez dit que M. Koricic avait été commandant du MOS, qu'il

5 avait quitté les rangs du MOS et avait pris un certain nombre de soldats

6 avec lui, qu'il l'avait rejoint au moment de la création de la 7e Brigade

7 musulmane.

8 R. Je souhaiterais apporter une correction. Il n'était pas le commandant

9 du MOS, mais l'un de commandants locaux que je rencontrais sur le terrain.

10 Je ne sais pas qui était le commandant principal. Lorsque l'ordre a été

11 créé de créer le 3e Corps et les brigades, Koricic est devenu membre de la

12 7e Brigade, et certains hommes l'ont accompagné. C'est devenu le 7e Brigade

13 musulmane.

14 Q. Pouvez-vous nous dire, pour autant que vous le sachiez, ce qu'il est

15 advenu des états-majors de la Défense territoriale, au moment de la

16 création du 3e Corps ? Est-ce que les états-majors de la Défense

17 municipale et de la Défense régional ou les états-majors locaux ont

18 continué à fonctionner ?

19 R. Les règles de conduite de la guerre étaient, essentiellement, fondées

20 sur les doctrines et les règles de service de l'ex-JNA, pour ce qui est de

21 la formation du corps et des brigades. Les états-majors de la Défense

22 territoriale jouaient un rôle moindre, et leur mission était limitée à

23 certaines zones opérationnelles. Je ne peux pas vraiment vous en parler car

24 la 17e Brigade de Krajina dont je faisais partie était une brigade de

25 manœuvre. Je n'étais pas originaire de la région. Peut-être que les

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1 commandants qui avaient des états-majors municipaux sous leurs ordres

2 pourraient vous en dire davantage.

3 Mais en tout état de cause, dans la chaîne de commandement, il y

4 avait d'abord le corps et, ensuite, en dessous, les brigades, pour autant

5 que je m'en souvienne.

6 Q. Lorsque les Groupes opérationnels ont été créés, les ordres émanaient

7 du corps, puis étaient transmis aux groupes opérationnels, puis aux

8 brigades, n'est-ce pas ?

9 R. Pour ce qui est du Groupe opérationnel de Bosanska Krajina, qui était

10 particulier, ce groupe a été créé dans le but d'intégrer les forces de

11 manœuvres libres qui devaient opérer en Bosanska Krajina. C'est pour cela

12 qu'ils ont reçu cette dénomination. Un ordre a stipulé que la 17e Brigade,

13 la 305e Brigade, et la 7e Brigade devaient faire partie de ce Groupe

14 opérationnel, mais ceci ne s'est jamais traduit dans les faits. Les ordres

15 passaient par le commandement du Groupe opérationnel, mais ces deux

16 brigades étaient plus ou moins liées au commandement du corps. Peut-être

17 que certains éléments de la 17e Brigade fonctionnaient ainsi, mais les

18 autres Groupes opérationnels se trouvaient dans une situation différente.

19 Il arrivait toutefois, en fonction de la situation, qu'un ordre soit émis

20 directement à l'intention de la 17e Brigade, parce qu'ils étaient rattachés

21 à l'état-major municipal de Visoko. Ceci arrivait en cas de situation bien

22 particulière ou en cas d'urgence. Il y avait des exceptions, mais, de façon

23 générale, la chaîne de commandement fonctionnait convenablement.

24 Q. A de nombreuses reprises, hier et aujourd'hui, vous avez déclaré que la

25 17e Brigade de Krajina était une brigade de manœuvre. Est-ce que vous

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1 pourriez nous en dire davantage sur ce concept de brigade de manoeuvre ?

2 Qu'entendez-vous par là ?

3 R. Il n'y avait pas vraiment de concept de Brigade de manœuvre. Pour ce

4 qui est de la 17e Brigade, c'était une brigade qui n'était pas composée de

5 personnes originaires de la région, mais plutôt de personnes, qui venaient

6 volontairement d'Europe de l'ouest, afin de lutter pour leur pays. Il y

7 avait également des personnes qui avaient été expulsées de Bosanska

8 Krajina. Pour ce qui est de la méthode d'utilisation, cette brigade était

9 utilisée essentiellement pour les opérations de manœuvre. Si la situation à

10 Visoko devenait difficile, le commandant du corps engageait la 17e Brigade

11 pour prêter assistance. S'il y avait d'autres situations de ce type,

12 l'armée, à l'origine, était créée sur le principe territorial. Ce n'est pas

13 une armée professionnelle. Il s'agissait d'une armée composée d'ouvriers,

14 de paysans, qui ne souhaitaient pas quitter leur domicile. La 17e Brigade

15 avait sa propre caserne, et les conditions de formation étaient meilleures

16 que dans d'autres unités. C'est pour cela qu'elle a été utilisée plus

17 fréquemment pour des opérations de manœuvres.

18 Q. Vous nous avez dit -- à votre connaissance, est-ce qu'il y avait

19 d'autres unités, d'autres brigades ou d'autres bataillons au sein du 3e

20 Corps qui pouvaient être définis comme des unités de manoeuvre ?

21 R. Peut-être dans une moindre mesure, la 7e Brigade pouvait également être

22 utilisée comme une brigade de manœuvre, ainsi que la 305e Brigade de Jajce

23 en 1992 et 1993. Au fil de l'évolution de la situation, les forces se

24 renforçaient et toutes ces mesures ont été prises. Je pense qu'en 1993 et

25 en 1994, certains éléments d'autres unités, des unités entières, pouvaient

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1 être utilisées en dehors de leur municipalité.

2 Q. Vous avez parlé de la présence du 1er Bataillon de la 7e Brigade

3 musulmane de Montagne à Travnik. Au cours de 1993, savez-vous s'il arrivait

4 fréquemment que ce bataillon agisse de concert -- ou conjointement avec des

5 unités de la 17e Brigade de Krajina ?

6 R. J'essaierai d'être aussi précis que possible dans ma réponse. Je pense,

7 qu'en juin 1993, nous avons agi conjointement avec le 1er Bataillon de la 7e

8 Brigade. Comme je l'ai déjà dit, des éléments de ce bataillon ont été

9 rattachés au Bataillon de Bijelo Bucje, si bien qu'ils participaient à des

10 opérations contre le HVO à Hajdarove Njive, Gradac, Dolac. Plus tard,

11 lorsque les Chetniks ont essayé de prendre le contrôle de nos lignes à

12 Bijelo Bucje et à Vilenica, une partie du 1er Bataillon de la 7e Brigade a

13 été utilisée pour mener une contre-attaque et obtenir le contrôle de

14 Mradinska Kamenjas. Je pense que, plus tard, nous avons opéré une jonction

15 avec Zenica, si bien que le bataillon a reçu des ordres qui venaient

16 essentiellement du commandement de Zenica. Je ne peux pas être tout à fait

17 certain, mais je pense, qu'après le mois de septembre ou peut-être

18 décembre, il n'y a plus d'action menée conjointement avec la

19 17e Brigade.

20 Q. Je souhaiterais vous poser quelques questions supplémentaires au vu de

21 la réponse que vous venez de fournir. Vous nous avez dit que des éléments

22 du 1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane de montagne ont été rattachés au

23 bataillon de Bijelo Bucje.

24 R. Oui.

25 Q. Lorsque vous parlez du bataillon à Bijelo Bucje, est-ce que vous pouvez

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1 être plus précis ? De quel bataillon s'agit-il ?

2 R. Je veux parler de mon 3e Bataillon.

3 Q. Donc, le 3e Bataillon de la 17e Brigade de Krajina, n'est-ce pas ?

4 R. C'est exact.

5 Q. Hier, on vous a présenté le document P403 de l'Accusation qui parle du

6 1er Détachement de Sabotage. Ce n'est pas particulièrement ce document qui

7 m'intéresse mais davantage le concept de Détachement de Sabotage. Est-ce

8 que vous pourriez nous en dire davantage sur ce qu'est un Détachement de

9 Sabotage et quelles sont ses missions ?

10 R. Je ne me souviens pas de Détachement de Sabotage. Peut-être que vous

11 voulez parlez d'un ordre dans lequel ou par lequel la 17e Brigade se voit

12 assigner la zone qui va de Vlasic jusqu'à Pakrac Stijene [phon]. Il est

13 question d'un Détachement de Contre-sabotage et non pas de Sabotage.

14 Q. Peut-être que l'Huissier pourrait présenter au témoin la pièce à

15 conviction de l'Accusation P403. Hier, vous nous avez parlé d'un certain

16 nombre d'unités qui était stationné à Travnik, Monsieur. La 17e Brigade de

17 Krajina, comme vous nous l'avez dit, était cantonnée dans l'ancienne

18 caserne de la JNA de Travnik, n'est-ce pas ?

19 R. Oui, oui, c'est exact.

20 Q. Vous nous avez dit un peu plus tôt, aujourd'hui, que le 1er Bataillon de

21 la 7e Brigade musulmane de Montagne était cantonnée dans la Medresa de

22 Travnik ?

23 R. Oui.

24 Q. Le commandement du Groupe opérationnel de Bosanska Krajina était

25 également cantonné dans l'ancienne caserne de la JNA à Travnik, n'est-ce

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1 pas ?

2 R. Au cours de cette période, oui.

3 Q. Nous parlons toujours de l'année 1993. Pouvez-vous nous dire quelles

4 autres Unités du 3e Corps se trouvaient à Travnik au cours de l'année 1993

5 et où se trouvaient leur QG ?

6 R. Hier, je vous ai dit que dans la ville de Travnik se trouvait le

7 commandement de la 312e Brigade. Cette brigade était cantonnée dans

8 l'entreprise de bâtiment de Travnik, et comprenait des forces originaires

9 de la ville de Travnik et des communautés locales. En plus de cela, sur le

10 territoire de la municipalité de Travnik, la 306e Brigade était cantonnée

11 dans le bâtiment administratif de la mine de Han Bila. Il s'agissait

12 essentiellement de personnes originaires de la région de Biljanska et du

13 plateau de Vlasic. Voilà la situation en ce qui concerne la municipalité de

14 Travnik.

15 Q. Merci. Est-ce que vous avez la pièce P403 devant vous ?

16 R. Oui.

17 Q. Est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, examiner le paragraphe 2,

18 alinéa (H) ? Il est fait référence au premier PDO de Travnik. Est-ce que

19 vous voyez cela ?

20 R. Oui, j'en ai parlé. Il s'agit de ce détachement de contre-sabotage, et

21 non pas de sabotage.

22 Q. Merci de cette précision. Est-ce que vous pourriez nous dire ce qu'est

23 un Détachement de Contre-sabotage ? Quelles sont ses fonctions ?

24 R. En guise d'introduction, je dirais tout d'abord que la 17e Brigade n'a

25 jamais pris le contrôle de ce secteur. Ce Détachement de Contre-sabotage ne

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1 m'a jamais vraiment été subordonné non plus. Comme je l'ai dit, avec la

2 création de commandement du corps, les forces principales du corps sont des

3 brigades. Il s'agit là de la majorité des effectifs de la Défense

4 territoriale de Bosnie-Herzégovine, et elles ont été créées sur le principe

5 territorial, comme je l'ai déjà décrit. Pour ce qui est de la 17e Brigade,

6 de la 7e Brigade, et de la brigade de Jajce, elles n'avaient plus de zones,

7 de territoires. Les effectifs venaient de Jajce. Pour autant que je m'en

8 souvienne, d'après la doctrine de l'ancienne JNA, un Détachement de Contre-

9 sabotage en tant qu'événement intégré dans la structure de la Défense

10 territoriale, était chargé de participer à des opérations de contre-

11 sabotage, d'empêcher les infiltrations ennemies, de combattre les forces

12 terroristes, de contrôler le territoire. Il se voit attribuer également des

13 tâches auxiliaires dans le cadre d'opérations de combat; le contrôle de

14 certains secteurs entre deux zones, la protection des postes de

15 commandement, des installations économiques importantes qui pourraient

16 faire l'objet d'activités de sabotage.

17 Q. Je vous remercie.

18 R. Si vous me le permettez, je souhaiterais ajouter que l'intention du

19 commandant du corps était sans doute d'alléger la tâche de la brigade pour

20 ce qui est de ces activités auxiliaires de façon à ce que nous puissions

21 nous concentrer sur notre objectif principal qui était de combattre les

22 Chetniks, et de ce fait, les unités opérationnelles avaient une plus grande

23 liberté d'action.

24 Q. A présent, je souhaiterais vous poser quelques questions au sujet des

25 individus dont nous avons déjà parlé à plusieurs reprises, et que nous

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1 avons appelé les Moudjahiddines.

2 Vous nous avez dit hier que l'un de vos soldats avait été enlevé par ces

3 étrangers. Je pense que vous nous avez dit qu'il avait peut-être trop bu,

4 et qu'ils l'avaient conduit dans un camp. Vous souvenez-vous nous avoir

5 parlé de cela ?

6 R. Oui.

7 Q. Je souhaiterais vous poser des questions au sujet d'une partie de votre

8 déposition, à la page 51 du compte rendu d'audience d'hier, lignes 17 à 19.

9 Dans la traduction en anglais de votre déposition, on peut lire : "J'ai

10 envoyé un message direct par le truchement de certains cercles islamiques à

11 Travnik. Le message était que mes armes visaient leur camp, et que je les

12 attaquerais s'ils ne remettaient pas en liberté mon soldat."

13 R. C'est exact.

14 Q. Lorsque vous dites : "J'ai envoyé un message direct par le truchement

15 de certains cercles islamiques de Travnik," est-ce que vous pourriez

16 développer votre réponse. Qu'entendez-vous par "certains cercles islamiques

17 de Travnik" ?

18 R. J'ai envoyé mon commandant, le commandant d'une batterie d'artillerie

19 afin qu'il contacte le Mufti de Travnik, et qu'il s'entretienne avec lui.

20 Il était déterminé, ferme et convainquant dans ses positions, et je lui ai

21 demandé de demander poliment au Mufti de remettre le message à ses frères,

22 comme il les appelle. De toute évidence, le message leur est parvenu. Je

23 pensais qu'en tant qu'officier religieux, il avait sans doute des contacts

24 avec eux car, dans le truchement des filières militaires officielles, il

25 était impossible de débloquer la situation.

Page 12127

1 Q. Vous souvenez-vous du nom de ce mufti de Travnik auprès duquel vous

2 avez envoyé le commandant de cette division d'artillerie ?

3 R. Il était commandant de bataillon, et non pas de division. Il s'appelait

4 Asmir Redzic.

5 Q. Excusez-moi, M. Asmir Redzic, c'est la personne que vous avez envoyée

6 pour parler au mufti de Travnik, n'est-ce pas ?

7 R. Oui. Le mufti s'appelle Nusret Efendija Avdibegovic. Il est toujours

8 mufti.

9 Q. Merci. Je suppose que le fait que vous leur ayez fait savoir que vos

10 armes étaient dirigées contre leur camp a eu une incidence sur leur

11 réaction et que, suite à cela, ils ont remis en liberté votre soldat.

12 R. Pas tout de suite. Quelques heures plus tard, comme je l'ai dit hier,

13 la délégation est arrivée à ma caserne et a demandé à ce que je les

14 reçoive. Nous avons passé plus de deux heures dans des pourparlers

15 difficiles et, suite à ces pourparlers, il y a eu des excuses, et le soldat

16 a été remis en liberté.

17 Q. Vous venez de dire qu'une délégation était arrivée à votre caserne.

18 Vous souvenez-vous de l'identité de certains des membres de cette

19 délégation ?

20 R. Oui. La plupart d'entre eux, je pense, tout du moins ceux dont je

21 connais le nom. Il y avait le mufti dont je viens de parler, le président

22 de la municipalité, M. Curic, car, dans l'intervalle, il avait entendu

23 parler de la situation tendue et de l'éventualité que cette situation ne se

24 dégrade encore davantage. Au nom des Moudjahiddines, pour les représenter,

25 il y avait Abu Haris, un Arabe qui parlait bien le bosniaque, et un émir.

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1 Je ne me souviens pas de son nom, mais émir signifie commandant. Il y avait

2 également

3 M. Maqtouf.

4 Q. Vous venez de parler d'Abu Haris, un Arabe qui, comme vous l'avez dit,

5 parlait bien le bosniaque. Connaissiez-vous Abu Haris avant qu'il ne vienne

6 vous trouver pour parler de la situation ?

7 R. Oui. Nous avions déjà eu l'occasion de nous rencontrer, si bien que je

8 le connaissais.

9 Q. Au cours de 1993, vous souvenez-vous approximativement du nombre de

10 fois où vous l'avez rencontré, où vous lui avez parlé ?

11 R. Je ne peux pas dire de 1993. La première fois que j'ai rencontré Abu

12 Haris, c'était le premier contact que j'ai eu avec un Arabe, c'était vers

13 le 10 décembre. Par décision du commandant El Moudjahid, ils ont reçu

14 l'ordre participer à des opérations avec la 17e Brigade. Abu Haris était la

15 personne de contact, l'interprète entre moi, mes officiers, et certains

16 éléments de l'Unité El Moudjahid. Au cours des dix jours qui ont suivi, il

17 y a eu plusieurs rencontres -- plusieurs contacts, peut-être tous les deux

18 ou trois jours au cours de cette période.

19 Q. Quel était le rôle exact d'Abu Haris au sein de l'Unité El Moudjahid,

20 si vous le savez ?

21 R. Je ne suis pas en mesure de vous dire quel a été son rôle exact, pas

22 seulement Abu Haris, mais les deux autres également. Ils n'étaient pas

23 structurés de manière logique, selon nous. Il m'a été présenté comme un

24 interprète du détachement. Je ne sais pas s'il jouait un rôle important au

25 sein de ce détachement.

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1 Q. Vous venez de nous parler d'une décision du commandant dont le nom

2 n'apparaît au compte rendu d'audience. On lit le nom "Elmu", "El

3 Moudjahid", [Elmu] au compte rendu d'audience. Donc, par cette décision, on

4 leur a donné l'ordre de participer à des opérations avec la 17e Brigade.

5 Vous souvenez-vous du nom du commandant qui a pris cette décision ?

6 R. Mon supérieur hiérarchique était le commandant du Groupe opérationnel,

7 M. Alagic.

8 Q. Je souhaite être tout à fait clair, afin qu'il n'y ait pas de

9 confusion. Est-ce que le commandant Alagic a émis l'ordre selon lequel ils

10 participeraient à des opérations avec la 17e Brigade, ou vous ai-je mal

11 compris ?

12 R. Non, il n'y a absolument aucune confusion ici. Au début du mois de

13 septembre - je ne suis pas sûr de la date exacte - M. Alagic a donné

14 l'ordre qu'ils participent à ces opérations de combat avec le 17e Brigade.

15 Q. De quelle année parlez-vous ? Septembre de quelle année ?

16 R. En septembre 1993. Car en 1992, il n'y avait pas de Groupe

17 opérationnel, en 1994 non plus.

18 Q. Nous allons revenir à cette délégation qui est venue vous trouver au

19 sujet du soldat qui avait été enlevé. Vous avez dit que M. Maqtouf faisait

20 partie de cette délégation et qu'il était interprète.

21 R. C'est exact.

22 Q. Aviez-vous rencontré M. Maqtouf avant ce jour-là ? Aviez-vous eu des

23 contacts avec lui ?

24 R. Je ne le connaissais pas personnellement. Je savais seulement qu'il

25 avait un vignoble appelé Palma au centre de la ville -- une vidéothèque. Il

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1 était propriétaire de cette vidéothèque située au centre-ville. Je ne sais

2 rien à son sujet. Pendant cette réunion, il faisait partie de la délégation

3 et servait également d'interprète.

4 Q. Je pense qu'une erreur s'est apparue dans le compte rendu d'audience en

5 anglais. On peut voir que M. Maqtouf était propriétaire d'un vignoble

6 appelé Palme. Est-ce que cela correspond à vos souvenirs ?

7 R. Non, une vidéothèque. M. Maqtouf est un Arabe, il ne boit pas de vin.

8 Q. C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité préciser cela.

9 Donc, après que M. Maqtouf est venu en tant que membre de cette délégation

10 et alors qu'il jouait le rôle d'interprète dans le cadre de cette réunion,

11 est-ce que vous l'avez vu, par la suite, pendant la guerre. Je ne parle pas

12 de sa vidéothèque. Mais est-ce que, pendant la guerre, vous l'avez

13 rencontré ultérieurement, avez-vous participé à des réunions au cours

14 desquelles il était présent ?

15 R. Non, pas à la vidéothèque, car je n'avais pas assez de temps libre que

16 j'aurais pu passer en ville. De façon générale, j'étais avec mon unité sur

17 le terrain, dans la zone des opérations et je n'ai jamais l'occasion de

18 rencontrer M. Maqtouf de nouveau.

19 Q. Vous avez dit également hier, à la page 50, lignes 13 à 18, que dans

20 vos contacts avec l'Unité El Moudjahid, vous avez dû avoir un recours aux

21 équipes chargées des négociations. C'est comme cela que vous l'avez dit

22 hier. Est-ce que vous vous en souvenez ?

23 R. Si mes souvenirs sont bons, même après la création du Détachement El

24 Moudjahid ou une partie de ce détachement, j'ai dit qu'il fallait les prier

25 pour qu'ils acceptent cela. Suite à un signe du Dieu, indiquant que tout

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1 allait bien se passer. Est-ce que c'est de cela que vous parlez ? Ils

2 n'étaient comme des autres unités où le commandant pouvait simplement

3 donner l'ordre et être sûr que les subordonnés allaient l'exécuter dans la

4 meilleure manière possible, afin de s'exécuter de la mission confiée.

5 Q. Je vais vous lire une partie de la version en anglais du compte rendu

6 d'audience pour voir si ceci reflète vos propos d'hier. Il s'agit de la

7 page, et cela commence à la ligne 16. Vous avez parlé du détachement El

8 Moudjahid. Voici que vous avez dit : "Cependant, lorsqu'ils ont été

9 constitués, lorsque cette unité a été constituée, vous deviez toujours

10 passer par des équipes de négociateurs pour savoir s'ils allaient

11 participer aux actions ou pas, pour savoir s'ils vont recevoir des signes."

12 R. Oui, signes, oui. C'est plus ou moins cela. Là, je parle de ma propre

13 expérience, et selon mes propres connaissances. Je maintiens ce que j'ai

14 dit.

15 Q. Monsieur, je souhaite vous poser la question suivante : sur la base de

16 votre expérience et sur la base de vos informations, combien de personnes

17 au sein du Détachement El Moudjahid parlait la langue bosniaque ?

18 R. Parmi les étrangers, je pense que c'était seulement Abu Haris qui en

19 parlait. Mais une partie des membres du détachement étaient des Bosniens

20 qui parlaient la langue bosniaque, probablement un certain nombre d'entre

21 eux parlaient l'arabe aussi. Mais je ne sais pas parmi les étrangers qui

22 parlaient le bosniaque, je connaissais seulement Abu Haris.

23 Q. Pourrait-on, Monsieur, que compte tenu du fait que tous les membres de

24 cette unité ne parlaient pas la langue bosniaque, qu'il y avait certaines

25 barrières linguistiques dans les communications avec ce détachement ?

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1 R. Il s'agit là d'une conclusion tout à fait logique. Mais je ne peux pas

2 parler de cela. Je ne faisais pas partie de ce détachement pour pouvoir

3 parler des barrières linguistiques. Je parle des étrangers qui faisaient

4 partie d'El Moujahid, et je sais que c'était seulement Abu Haris qui

5 parlait bosniaque parmi ceux que j'ai pu rencontrés. Mais peut-être parmi

6 les Bosniens, il y en avait qui avait terminé des études dans un pays

7 arabe, peut-être il y avait des imans, et peut-être ceci leur servait pour

8 mieux se comprendre. Mais je ne peux pas en parler parce que vraiment, je

9 ne sais pas.

10 Q. Monsieur, est-ce qu'à un moment donné au printemps ou été 1993, est-ce

11 que vous avez appris que les Moudjahiddines dans le camp de Mehurici

12 détenaient des civils ?

13 R. Excusez-moi. Est-ce que vous pouvez me répéter de quelle période vous

14 parlez ?

15 Q. Au printemps ou été 1993.

16 R. Non.

17 Q. J'ai oublié de vous poser quelques questions tout à l'heure concernant

18 le 1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane de Montagne. Vous nous avez dit

19 que pendant l'année 1993, à un certain moment, y compris juin 1993 et, par

20 la suite, ce bataillon fonctionnait fréquemment avec la 17e Brigade de

21 Krajina. Voici ma question maintenant, Monsieur : est-ce que vous vous

22 souvenez quel était le nom du commandant du 1er Bataillon de la 7e Brigade

23 de Montagne musulmane au cours de la période pendant laquelle ce bataillon

24 opérait de manière conjointe avec votre brigade ?

25 R. Je pense que c'était M. Safet Junuzovic, si mes souvenirs sont bons.

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1 C'était lui le commandant du bataillon.

2 Q. Monsieur, est-ce que vous vous souvenez des noms des commandants de

3 compagnies qui faisaient partie du 1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane

4 de Montagne au cours de la période pendant laquelle ils opéraient avec les

5 unités de votre brigade ?

6 R. Si je ne me trompe, ce qui ne peut pas être exclu non plus, d'un seul

7 nom, Suad Jusufovic. Car il vient de Kozorac, et c'est ma ville natale. Je

8 ne me souviens pas des autres, mais je me souviens de lui. C'est logique,

9 d'ailleurs, car je n'étais pas sans cesse dans la même chaîne de

10 commandement. Puis d'ailleurs, même pour ce qui est des membres de ma

11 brigade et de mes unités, je ne peux pas me rappeler tous les noms, les

12 noms de tous les commandants.

13 Q. Monsieur, au cours de l'année 1993, est-ce que vous vous souvenez quel

14 était le nombre approximatif des combattants étrangers qui pouvaient être

15 qualifiés de Moudjahiddines, et qui étaient présents autour de Travnik,

16 dans la municipalité de Travnik ?

17 R. Pour ce qui est de cette donnée, je pense que personne ne pouvait le

18 savoir. À l'époque, parfois, nous avions quelques estimations. A un moment

19 donné, la décision avait été prise de les surveiller un peu, c'est survenu

20 plus tard. Mais je pense que leur nombre, au total, sur le territoire de la

21 municipalité de Travnik, environ 100 personnes, peut-être 200. Je ne peux

22 pas être sûr. Il faut le prendre avec certaines réserves. Je ne peux pas

23 affirmer qu'il s'agissait certainement de la vérité absolue.

24 Q. Très bien, Monsieur. Vous nous avez dit qu'à un moment donné, il a été

25 décidé qu'il fallait les surveiller. Est-ce que vous savez si ceci a été

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1 mis en oeuvre ? Est-ce qu'ils ont vraiment été surveillés ?

2 R. J'en parle, car le 7e Corps d'armée s'est éteint en février 1996. J'ai

3 commencé à être l'adjoint du commandant du 5e Corps d'armée. Je sais que

4 les services de sécurité étaient chargés de leur surveillance. Mais je ne

5 sais pas si l'on procédait à leur surveillance. De toute façon, mon niveau

6 de commandant n'était pas responsable de cela.

7 Q. Très bien. Encore une fois, afin d'éviter toute confusion, lorsque vous

8 avez dit tout à l'heure qu'une : "Décision avait été prise portant sur le

9 fait qu'il fallait les surveiller," à quel moment approximativement cette

10 décision a-t-elle été prise ?

11 R. Je ne saurais vous le dire avec exactitude.

12 Q. Il s'agissait de l'année 1993 ou beaucoup plus tard ?

13 R. Non. En 1993, nous luttions pour notre survie, l'on constituait notre

14 armée, nos unités. On luttait contre deux ennemis. Nous ne pensions pas à

15 cela. Après tous les problèmes qu'ils ont créés sur ce territoire, le

16 service de sécurité ou la sûreté d'Etat, je ne sais pas, d'après mes

17 informations, ils ont entamé une opération de leur surveillance. Mais je ne

18 peux pas en parler avec précision, car je n'ai pas participé à la

19 planification, ni à la mise en œuvre de cela, ni aux travaux d'analyse. Je

20 l'ai appris plutôt par le biais des médias bosniaques, comme BH, Danis

21 [phon], et cetera.

22 Q. Monsieur, vous venez de dire vous étiez en train de lutter pour votre

23 vie, pour votre survie en 1993. A ce moment-là, est-ce que les

24 Moudjahiddines ont contribué à cette lutte pour la survie ?

25 R. Ecoutez, avec le recul, nous pouvons faire des estimations différentes.

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1 Mais à l'époque, en général, ils étaient plutôt nos alliés. Ils ont

2 contribué à notre survie compte tenu du comportement de la communauté

3 internationale, de nos voisins, de nos anciens alliés, y compris la

4 République de Croatie qui nous a aidé au maximum en 1992 pour que ceci soit

5 coupé court à un moment donné. Le pire, c'était que nos populations massent

6 autour de Zenica et Travnik. Il s'agit là des régions pauvres. Ils ont vu

7 quelque chose de très positif dans ces étrangers qui sont venus de

8 l'extérieur afin de les aider. Par la suite, ils ont compris que ce n'était

9 pas vraiment comme cela. A moment-là, ils ont donné une certaine

10 contribution à notre lutte pour notre survie ?

11 Q. Monsieur, est-ce que vous savez comment ces Moudjahiddines sont

12 venus en Bosnie ?

13 R. Personnellement, je n'ai pas d'information à ce sujet, mais ils

14 pouvaient seulement passer par la République de Croatie, par la dite

15 Herceg-Bosna, je ne sais pas si c'était dans le cadre d'une mission

16 humanitaire ou par le biais de l'engagement de certains services, cela je

17 ne peux pas le dire. Mais le fait c'est qu'ils sont arrivés sur le

18 territoire de la Bosnie centrale. Ils ne sont pas arrivés par voie

19 aérienne, cela est certain également. Ils ont pris les chemins terrestres.

20 Q. Au cours de l'année 1992, est-ce qu'il est vrai de dire que les

21 Bosniens et les Croates de Bonie luttaient les uns au côté des autres

22 contre les Serbes de Bosnie, en Bosnie centrale et ailleurs en Bosnie

23 également ?

24 R. Jusqu'à une certaine date, oui, mais, déjà vers la fin de l'année 1992,

25 non. D'après les documents que j'ai vus hier, ceux-ci m'ont ouvert les yeux

Page 12136

1 et cela m'a fait comprendre que, dès l'automne 1992, le HVO nous traitait

2 la partie adverse, mais je répète, je dois être sincère, j'ai créé une

3 Unité de volontaires sur le territoire de la République de Croatie, j'ai

4 reçu l'assistance de la République de Croatie, la police militaire m'a

5 escorté avec mon unité jusqu'à la frontière. Je recevais le solde de la

6 République de Croatie, c'était jusqu'en 1992. Ma famille, par la suite, a

7 dû quitter le territoire de la République de Croatie; donc quelque chose a

8 changé et ceci a changé au niveau politique.

9 Q. Monsieur, je souhaite que l'on se concentre sur la période, vers la mi-

10 1992, immédiatement après le début de la guerre en Bosnie. A ce moment-là,

11 on était au début de l'automne, disons en août, septembre 1992, les

12 Musulmans de Bosnie et les Croates de Bosnie luttaient les uns au côté des

13 autres contre les Serbes.

14 R. Oui. En général, oui; cependant, dans certaines municipalités dès le

15 mois de juin, il y a eu certaines tensions surtout dans la vallée de Lasva,

16 de Busovaca, à Novi Travnik et Vitez. Mais, en général, ce que vous dites

17 est la vérité. Depuis la vallée de la Neretva jusqu'à Jajce, la vallée de

18 la Sava, les Bosniaques et les Croates luttaient ensemble contre les

19 Chetniks jusqu'en octobre car, en octobre, la situation a changé, de

20 manière radicale, après la chute de Jajce, de Bosanski Brod. Sur la base du

21 document que j'ai vu hier, il est possible de voir qu'ils nous traitaient

22 en tant que partie adverse, ils ont totalement bloqué ces régions, ils

23 procédaient à des pillages, à des vols, confiscations. D'ailleurs, vous

24 avez cela dans le document vous-même.

25 Q. Monsieur, j'ai une seule question avant notre première pause technique.

Page 12137

1 Je vous suggère, Monsieur, que la raison principale pour laquelle les

2 Moudjahiddines sont venus en Bosnie était la lutte contre les Serbes. Est-

3 ce que vous souhaitez faire un commentaire par rapport à cela ?

4 R. J'apprécie votre opinion, beaucoup se basant sur la base de mon

5 expérience, je peux dire qu'ils venaient afin d'aider leurs frères

6 musulmans. Je pense que 90 % ou 100 % d'entre eux ne savaient même pas qui

7 étaient les Chetniks. Cela c'était au cours de la première phase. D'après

8 mon expérience, par la suite, au cours d'une deuxième phase, leur but était

9 plutôt missionnaire. Ils souhaitaient propager leurs manières de pratiquer

10 la religion, de respecter des coutumes, et cetera. Je ne souhaite pas me

11 lancer dans des détails car c'est un long débat, mais, au fond, ils

12 souhaitaient aider les Musulmans de Bosnie dans leur lutte pour la survie

13 dans la Bosnie-Herzégovine. Je pense qu'en 1992, c'était leur but. Par la

14 suite, ceci s'est transformé en autre chose.

15 Q. Merci, Monsieur.

16 M. MUNDIS : [interprétation] Je vois quelle heure il est, Monsieur le

17 Président, je pense j'aurais besoin d'encore 15 à 20 minutes, en fonction

18 des réponses du témoin.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. On va faire la pause, et nous reprendrons vers

20 15 heures 55.

21 --- L'audience est suspendue à 15 heures 33.

22 --- L'audience est reprise à 15 heures 58.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis.

24 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

25 Q. Au cours de la pause, j'ai réexaminé mes notes. En fait, j'avais oublié

Page 12138

1 de vous poser quelques questions concernant l'occasion lors de laquelle

2 l'un de vos soldats a été kidnappé par les Moudjahiddines. Je souhaite que

3 l'on reparle brièvement de cet épisode.

4 Est-ce que vous pourriez nous dire dans quelle mesure M. Salko Beba a

5 participé aux négociations, aux discussions avec les Moudjahiddines afin

6 d'obtenir la libération de ce soldat qui a été enlevé, le soldat de votre

7 brigade ?

8 R. Je ne peux pas vous le dire avec exactitude, car Salko Beba était dans

9 le Groupe opérationnel. J'ai informé le Groupe opérationnel, nous avons

10 essayé de passer par cette filière sans succès. J'ai pris ma décision, car

11 je pensais que la vie de mon membre était menacée. J'ai pensé que j'avais

12 le droit de faire ce que j'ai fait. Salko Beba était l'adjoint du

13 commandant chargé de la sécurité du Groupe opérationnel. Il a certainement

14 joué un rôle, mais j'étais sur le terrain. Cependant, Salko Beba n'était

15 pas directement lié à mes activités. Je ne peux pas vous répondre.

16 Q. Pour clarifier les choses, vous n'êtes pas au courant d'efforts

17 déployés par M. Salko Beba visant à obtenir la libération du soldat de

18 votre brigade qui avait été enlevé par les Moudjahiddines ?

19 R. Non. Je sais qu'il faisait certains efforts, mais je ne sais pas dans

20 quelle mesure. Je sais que ceci n'a pas donné de résultat, mais c'était sa

21 tâche. Il était chargé de la sécurité des personnes. Il était l'adjoint du

22 commandant du groupe. Il n'était pas placé sous mon commandement. De toute

23 façon, ce qu'il faisait n'a pas abouti. Donc, j'ai décidé de résoudre les

24 choses différemment.

25 Q. Je souhaite que l'on parle maintenant d'un sujet tout à fait différent.

Page 12139

1 Tout à l'heure ou plutôt hier, vous nous avez dit à la page 21, lignes 8 à

2 11, vous avez parlé de votre visite auprès de votre famille en Croatie.

3 J'ai quelques questions concernant cela. Dans le compte rendu d'audience,

4 nous pouvons lire : "Souvent, j'allais en Croatie afin de rendre visite à

5 ma famille qui était restée à Rastinja [phon]," je crois.

6 R. Non, Varazdin. Varazdin.

7 Q. Varazdin. Donc votre famille est restée à Varazdin. Est-ce que vous

8 pouvez nous dire de quelle période ceci a eu lieu ? Lorsque vous avez dit

9 hier : "A ce moment-là, j'allais souvent rendre visite à ma famille en

10 Croatie," vous parliez de quelle période de temps ?

11 R. Je peux vous dire de quel mois il s'agissait. Il n'y a pas vraiment de

12 date. Je me suis rendu auprès de ma famille une fois en août, une fois en

13 octobre et une fois au début de décembre, et la dernière fois, en février

14 ou mars. Il s'agissait de quatre ou cinq visites. Mais compte tenu du fait

15 que c'était la guerre, et compte tenu des événements qui se déroulaient, je

16 considère que c'était souvent.

17 Q. Monsieur, lorsque vous dites août, octobre et décembre, je suppose que

18 vous parlez de l'année 1992 ?

19 R. Oui, 1992, et puis fin février, début mars 1993.

20 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire comment avez-vous voyagé en Croatie

21 lors de ces visites ?

22 R. Pour être précis, en août, je suis allé en 4x4. En octobre, j'ai pris

23 un véhicule ou -- non, c'était un bus. Enfin, je suis allé en voiture et je

24 suis revenu en bus. En décembre, c'est en bus et, en mars, je suis allé en

25 bus, et je suis revenu en voiture qui a été confisquée peu avant Mostar au

Page 12140

1 point de contrôle par la police du HVO. Après, j'ai poursuivi mon chemin

2 vers Zenica en bus.

3 Q. Merci. Vous avez également parlé à la page 21, hier, ligne 9, vous avez

4 dit : "Mes combattants retournaient du traitement médical qu'ils recevaient

5 à Londres ou en Croatie." Encore une fois, est-ce que vous pouvez nous dire

6 au cours de quelle période les soldats de votre brigade allaient à

7 l'étranger pour recevoir les soins médicaux ?

8 R. C'était jusqu'en octobre. On trouvait des moyens de le faire. Par

9 exemple, l'hôpital à Split, à Firule. Je pense qu'un lieutenant-colonel de

10 la JNA, un ancien lieutenant-colonel de la JNA y travaillait. Il était né à

11 Bosanska Krajina. Il s'assurait que nos blessés reçoivent les soins là-bas,

12 à Split. Nous utilisions d'autres filières, à travers les organisations

13 humanitaires de Zagreb, par exemple, pour les envoyer à Zagreb. Au début du

14 mois d'octobre, je ne sais pas tout à fait exactement comment, mais il y

15 avait quelqu'un, un homme qui combattait avec nous, et qui était à

16 Ljubljana. Nous avons réussi à envoyer environ 20 blessés à Londres pour

17 qu'ils y reçoivent des soins médicaux car ils n'avaient pas vraiment

18 suffisamment de fournitures médicales en Bosnie-Herzégovine à l'époque. Les

19 hôpitaux étaient mal équipés et il n'y avait pas suffisamment de personnel.

20 C'est pour cela que l'on envoyait nos hommes à l'étranger.

21 Q. Monsieur, vous dites que c'est en octobre. De quelle année ?

22 R. L'année 1992.

23 Q. Je souhaite vous poser quelques questions concernant une autre chose

24 dont vous avez parlé hier à la page 28, lignes 2 à 4. Vous avez parlé du

25 fait que vous avez assisté à une réunion à Travnik à la mi-octobre 1992,

Page 12141

1 lorsque le président de la présidence, M. Izetbegovic était à Travnik ?

2 R. Oui. Cette réunion a commencé à Plava Voda, mais en raison des

3 pilonnages et du fait que les communications téléphoniques étaient

4 interceptées, la réunion s'est déplacée à Han Bila. La plus grande partie

5 de la réunion a eu lieu là-bas, et c'est là que j'y ai assisté.

6 Q. Monsieur, je suppose que compte tenu de la période à laquelle cette

7 réunion a eu lieu, c'était avant l'établissement des unités du 3e Corps

8 d'armée ?

9 R. Je ne peux pas vous le dire avec exactitude, mais c'était avant la

10 chute de Jajce. C'était vers la mi-octobre. Jajce est tombée le 30 octobre.

11 Je me souviens bien que nous avons parlé parmi autre chose de la situation

12 à Jajce. C'était certainement vers le 14, 15 ou le 16 octobre.

13 Q. Lorsque vous dites que certains commandants disaient, parlaient des

14 choses, est-ce que vous savez à quelles unités appartenaient ces

15 commandants ?

16 R. Je vais vous citer dont je me souviens, ceux que je connaissais. Ont

17 assisté à la réunion, le commandant des états-majors municipaux de cette

18 région, de Jajce, Bugojno. Ensuite, les commandants aussi de l'unité de

19 Krajina, le 1er Bataillon et le 7e Bataillon de Krajina. Nous avions une

20 réunion d'information auprès du président Izetbegovic. Nous avons parlé des

21 problèmes que l'on rencontrait. On demandait assistance par rapport à

22 certains problèmes. Nous avons reçu certaines instructions également.

23 Q. Monsieur, est-ce que vous savez si les représentants du MOS ou des

24 forces musulmanes ont également assisté à cette réunion ?

25 R. Non. Comme je l'ai déjà dit, il s'agissait des commandants des états-

Page 12142

1 majors municipaux et des unités, par exemple, l'Unité de Krajina. Mais

2 quant aux forces musulmanes, au moins d'après les informations dont je

3 disposais, je dirais qu'aucun d'entre eux n'a assisté à cette réunion.

4 Q. Monsieur, je souhaite maintenant attirer votre attention sur ce que

5 vous avez dit hier, dans le cadre de votre interrogatoire, en ce qui

6 concerne les mesures qui ont été prises par votre brigade lorsque vous avez

7 pris connaissance des crimes commis par les soldats qui appartenaient à la

8 17e Brigade de Krajina. Hier, vous nous avez parlé du fait que vous

9 sanctionnez des soldats en raison des infractions disciplinaires. Est-ce

10 que vous vous en souvenez ?

11 R. Oui, absolument.

12 Q. Est-ce que vous vous souvenez des noms des soldats qui ont été accusés

13 des infractions ou de violations, de mesures disciplinaires au cours de

14 période pendant laquelle vous étiez le commandant de la 17e Brigade de

15 Krajina ?

16 R. Je me souviens de certains noms peut-être, mais plutôt des surnoms.

17 Car, vous savez, je ne me souviens pas souvent des noms. Il y avait Koljic,

18 Rokic [phon], Nakic, puis Fazlic, Savic, Sivac, Alic. Ce sont simplement

19 quelques-uns des noms dont je me souviens. Ce sont des personnes qui

20 venaient de ma région de Kozarac, donc je m'en souviens un peu mieux. Car,

21 les autres soldats, je ne les connaissais pas. Vous savez, un commandant de

22 brigade ne peut pas connaître 2 000 hommes. Mais là, il s'agit, par

23 exemple, des noms que j'ai retenus.

24 Q. Est-ce que vous vous souvenez de ces infractions ou délits qui ont été

25 commis ? Est-ce que vous vous souvenez si, suite à cela, ces individus ont

Page 12143

1 fait l'objet d'enquêtes ou s'ils ont été poursuivis en justice ?

2 R. Vous savez, il y avait certaines enquêtes et certaines mesures

3 disciplinaires qui ont été prises. Car, il faut faire la différence entre

4 l'infraction disciplinaire et les infractions ou délits qui sont plus

5 graves. En ce qui concerne les infractions disciplinaires, vous savez, dans

6 ma brigade, le niveau d'éducation des personnes était très bas. Parfois,

7 certaines personnes dépensaient de l'argent, une partie des moyens

8 financiers, pour s'acheter de l'alcool. Parfois, par exemple, ils

9 manquaient à assister à la formation, à montrer du respect à son supérieur.

10 Parfois, ils volaient de la nourriture. Je répète, la situation était très

11 difficile, à ce moment-là. Il y avait beaucoup de réfugiés dans une petite

12 région. Il était difficile de nourrir les familles, donc nous faisions des

13 efforts afin de faire fonctionner l'unité par le biais d'une discipline

14 normale.

15 En ce qui concerne les infractions plus graves, la discipline militaire,

16 parfois les hommes ivres commettaient ce genre de délits. Par exemple, ils

17 tiraient dans la ville ou dans la caserne, dans les dortoirs. Ou, par

18 exemple, lorsque le conflit a éclaté - un exemple a été donné hier - ils

19 pillaient des biens. Donc là, il s'agissait déjà de délits, d'actes

20 criminels de pillage, de mise à feu des maisons, et cetera. Il y avait une

21 gradation entre les infractions moins graves, moyennement graves, et actes

22 criminels ou véritables délits.

23 Q. Monsieur, je souhaite vous poser une question concernant les incidents

24 liés aux pillages que vous venez de mentionner. Est-ce que vous vous

25 souvenez des localités auxquelles les soldats de votre brigade ont fait

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1 l'objet d'enquêtes en raison du vol, du pillage ?

2 R. Oui, je m'en souviens. Hier, justement, nous avons mentionné, je pense,

3 ce Muharem Koljic, qui a pris la farine d'une famille croate de Paklarevo

4 [phon], et une plainte a été déposée contre lui. Ensuite, Nukic, qui a

5 passé 60 jours en prison à cause du vol d'un sac de farine. Je le connais

6 personnellement. C'était un cousin distant de moi, et c'est moi-même qui a

7 rendu la sanction de prison en raison de ce vol. Pour la plupart des fois,

8 il s'agissait des vols qui étaient effectués pendant la nuit. On procédait

9 aux vols dans des maisons ou des locaux des commerces, et à chaque que l'on

10 trouvait l'identité des auteurs, on prenait des mesures appropriées.

11 Q. Je veux vous demander une autre chose. Vous avez mentionné également

12 les incendies, les bâtiments qui étaient mis à feu. Est-ce que vous vous

13 souvenez, encore une fois, de localité dans laquelle les soldats de votre

14 brigade ont procédé à ces actes et dans laquelle ils ont fait l'objet

15 d'enquête ?

16 R. Je ne me souviens pas qu'un seul membre de la 17e Brigade ait fait

17 l'objet de poursuites en raison de la mise à feu. Mais vous savez, parfois,

18 mes soldats capturaient les civils qui étaient en train d'incendier des

19 maisons, et en raison de cela, mes services déposaient plainte auprès des

20 autorités civiles. Je me souviens qu'un Bosnien de Dolac a été condamné à

21 plusieurs années de prison à cause du fait qu'il avait incendié une maison.

22 En ce qui concerne ma brigade, je ne me souviens pas des exemples concrets.

23 Nous avons les documents hier. Il y avait des centaines de mesures

24 disciplinaires qui ont été rendues. Je sais que mon unité même s'agissait

25 des maisons incendiées, déposaient des plaintes, mais je ne pense pas qu'il

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1 s'agissait des personnes qui étaient membres de l'unité. Il s'agissait, je

2 pense, d'un homme local.

3 Q. Monsieur, je vais vous poser quelques questions à présent au sujet de

4 l'incident qui s'est produit au poste de contrôle. Vous nous en avez parlé

5 hier. Vous avez dit que cela s'est produit le jour de la plus grande fête

6 musulmane. C'est page 35, lignes 6 à 14 du compte rendu d'audience de hier,

7 qui reprend votre déposition.

8 Monsieur, pouvez-vous nous dire quels sont les habits que vous portiez au

9 moment où cet incident s'est produit ?

10 R. De manière générale, à cette époque, et je pense que c'était le jour en

11 question, je portais l'uniforme américain, un uniforme alpha d'été.

12 Q. Les individus qui étaient en votre compagnie à bord du véhicule, quels

13 sont les vêtements qu'ils portaient ou étiez-vous seul à cette occasion-

14 là ?

15 R. Non, il y avait une camionnette et un véhicule. Dans la camionnette, il

16 y avait ce groupe de musique. Il y avait Alagic, moi, le chauffeur et peut-

17 être un policier militaire à bord du véhicule. On portait tous des

18 uniformes de camouflage, enfin, qui étaient des uniformes réguliers avec

19 l'insigne de l'armée. Il n'y avait pas de grade, à l'époque, comme je l'ai

20 dit hier.

21 Ce qui est absurde, c'est qu'il y a l'ironie de la situation, c'est

22 qu'à Travnik - je pense que c'était au motel - à l'hôtel, on était avec les

23 commandants du HVO, qui étaient nos invités pour ce Bajram. On s'était à

24 peine séparé, on a à peine traversé une petite distance, et on fait l'objet

25 de ce harcèlement. On a été soumis à ce mauvais traitement -- cette

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1 humiliation.

2 Q. Monsieur, ces hommes qui se tenaient à ce poste de contrôle, c'étaient

3 des soldats du HVO; c'est exact ?

4 R. Oui, on sait qui c'était. Le groupe de Toca[phon], comme on les

5 appelait. Zoran, Sinisa, Djukanovic [phon]. Il y a un village qui faisait

6 partie d'une police spéciale du HVO et, souvent, ils se livraient à ce

7 genre de - comment dirais-je - à créer ce genre d'incidents. Pour autant

8 que je le sache, je pense qu'il a été tué dans une escarmouche, une rixe à

9 l'intérieur du HVO, entre les membres du HVO pendant la guerre.

10 Q. Ces membres du groupe Toca, c'est comme cela que vous l'appelez, au

11 moment où vous l'avez vu à ce poste de contrôle, est-ce ils postaient des

12 uniformes militaires ?

13 R. Absolument. Il faut savoir que ce n'était pas un poste de contrôle

14 fixe. C'était un poste de contrôle sur une route secondaire, il a été

15 dressé précisément pour nous là. Vous avez un endroit où cela tourne et la

16 route va vers Travnik, via Skokovi, et cela est un chemin secondaire qui

17 passe par Skokovi, Ilovaca, Bunarevo jusqu'au village de Slimena. Il a été

18 dressé probablement parce qu'on leur a dit, on les a informés, enfin

19 c'était prévu, c'était une embuscade tendue, on a été encerclé de toute

20 part et ils ont pointé leurs armes sur nous.

21 Q. Cet incident que vous nous relatez s'est produit vers le 1er juin 1993

22 R. C'est exact. Au crépuscule, peu avant la soirée parce qu'on a passé la

23 soirée parce qu'on a passé la journée à cette fête à l'hôtel et il avait

24 été prévu des manifestations culturelles à Slimena [phon] pour la soirée et

25 donc, on était en route pour s'y rendre.

Page 12147

1 Q. À ce moment-là, le 1er juin 1993, l'ABiH et le HVO étaient en train de

2 combattre, enfin ils étaient des forces opposées dans un conflit, dans la

3 vallée de la Lasva, n'est-ce pas ?

4 R. Non, Ahmici, la municipalité a été nettoyée en avril et, après, on a

5 ordonné le cessez le feu de la part du commandement supérieur et nous

6 respections ce cessez-le-feu, mais, de manière générale, la situation était

7 ce que je vous ai déjà décrite. Le HVO était prêt le 19 avril à lancer une

8 attaque, une tentative d'attaque par Calibunja [phon], mais il y avait des

9 négociations pendant ce temps-là. En essayant d'empêcher le conflit, on a

10 constitué le commandement conjoint. A la poste de Travnik, ils ont fait un

11 plan d'opération, ils ont essayé par le biais de ce plan d'opération, on a

12 essayé d'éviter le conflit, mais le plan était mis en œuvre et le conflit a

13 éclaté. Mais, à moment-là, il n'y avait pas d'opérations de combat. Je

14 répète, on était avec Leotar, avec Filipovic Rasa, me semble-t-il, aussi à

15 cette fête de Bajram, on était ensemble le même jour. On a été choqué parce

16 qui s'est produit.

17 Q. Je vous remercie.

18 M. MUNDIS : [interprétation] Le bureau du Procureur n'a plus de questions

19 pour vous.

20 M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai quelques questions à vous poser, je vais vous

21 poser une série de questions à moins que la Défense a des questions

22 supplémentaires à poser à l'issue des questions de l'Accusation.

23 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'aurais

24 quelques questions à poser au Général.

25 Nouvel interrogatoire par Mme Residovic :

Page 12148

1 Q. [interprétation] Général, vous avez précisé de quelle manière étaient

2 engagées les unités de l'armée et vous nous avez dit de quelle manière

3 votre brigade, la brigade, qui était composée d'hommes qui étaient soit des

4 volontaires venus de l'étranger, soit des réfugiés, comment elle a été

5 stationnée donc dans cette caserne et comme elle a participé aux opérations

6 de combat. Mon confrère de l'Accusation vous a posé une question à laquelle

7 vous avez répondu, d'après vos souvenirs, à quel moment elle a agi de

8 concert avec des parties du 1er Bataillon de la 7e Brigade musulmane.

9 Ma question sera la suivante, vous rappelez-vous à quel moment des éléments

10 de votre unité, et voire aussi des éléments de la 7e, ont participé à des

11 opérations à l'extérieur de la zone du 3e Corps d'armée lorsque des

12 événements dramatiques se sont produits dans les alentours de Sarajevo ?

13 R. Oui. Au moment de l'offensive des Chetniks sur l'axe Rogoj-Trnovo-

14 Igman, c'était vers le mois d'août 1993, parce que la situation était

15 critique, il y avait un risque que le mont Igman tombe et qu'il y ait un

16 blocus double qui s'en suivrait de la ville de Sarajevo. Suite à l'ordre

17 émanant du commandement du 3e Corps, on a engagé le 1er Bataillon, me

18 semble-t-il, enfin un bataillon de la 7e Musulmane. Je sais que c'est

19 Jusovic qui est parti. Mais, pas formellement, on a constitué dans le cas

20 du Groupe opérationnel de Bosanska Krajina, une unité avec M. Salkic, de

21 Travnik, qui était à sa tête. Il y avait des éléments de la 312e de

22 Travnik, mon

23 4e Bataillon et il y avait des hommes de Jajce, donc ce Détachement

24 Bosanska Krajina a pris part au sauvetage, littéralement, sauvetage du mont

25 Igman. On a arrêté les Chetniks sur le -- mais il n'y avait pas seulement

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1 la 17e, il y avait les forces du Groupe opérationnel Bosanska Krajina et

2 c'était au mois d'août.

3 Q. Merci. Mon confrère vous a cité une partie de votre répons d'hier. Là

4 où vous avez dit que lorsqu'on a tenté de donner des ordres au El Moudjahid

5 après sa création, qu'à ce moment-là, vous avez été forcé à négocier

6 pratiquement avec eux, les prier et qu'en fait, ils n'acceptaient pas le

7 commandement comme l'acceptaient ou comme l'acceptent d'autres unités.

8 Dans cette partie du compte rendu d'audience qui vous a été cité ou

9 mentionné par mon confrère, vous avez dit que de toute évidence ils

10 n'étaient pas placés sous le commandant et le contrôle. Ce qui m'intéresse

11 c'est la chose suivante, compte tenu de la question qui vous a été posée

12 par mon confrère, ces négociations, ces entretiens avec El Moudjahid avec

13 ses représentants, est-ce que c'était dû au fait qu'ils ne parlaient pas

14 bien la langue ou c'était dû à autre chose ? Est-ce que vous avez déjà dit,

15 à savoir qu'ils refusaient le commandement et le contrôle des commandants

16 de l'armée ?

17 R. Pouvez-vous répéter la dernière partie de la question.

18 Q. Mon confrère a affirmé à votre intention ou a abordé un sujet avec

19 vous. Il vous dit que, parmi ces étrangers, il y en avait beaucoup qui ne

20 parlaient pas notre langue. Il vous a demandé si c'est cela qui était cause

21 de malentendus, qui rendait la communication difficile ?

22 Je voudrais savoir si ce que vous avez dit hier, à savoir, le besoin de

23 négocier ou de négocier spécialement avec eux, de les prier lors à toute

24 occasion lors de chaque ordre. Est-ce que c'était dû au fait qu'ils ne

25 comprenaient pas notre langue ou est-ce dû au fait que pendant cette

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1 période-là non plus, ils n'acceptaient pas le commandement et le contrôle

2 des commandants de l'armée ?

3 R. Ceci n'a rien à voir avec la connaissance de la langue. C'était plutôt

4 leur attitude, la manière générale dont ils se comportaient à l'égard de

5 l'armée. Nous avons souvent entendu des commentaires disant que cette armée

6 était une armée pleine de communistes, qu'on n'était pas de vrais musulmans

7 et on pouvait émettre un ordre mais si, eux n'acceptaient pas l'ordre, rien

8 ne pouvait se passer, l'ordre tombait à l'eau. Cela ne pouvait se passer

9 que si d'après certains signes ou prières ils venaient à accepter de

10 participer.

11 Q. Je pense que, maintenant, nous allons dire tirer au clair ce point-là.

12 Pour ce qui est de la question qui a été abordée par mon confrère, qui

13 concernait les raisons pour lesquelles ils sont venus en 1992, lorsque vous

14 avez dit que c'était vraisemblablement pour aider leurs frères musulmans, à

15 ce sujet, je vous prie de me dire la chose suivante : est-ce que le fait

16 que le commun des mortels, l'homme de la rue bosnien était frustré ? Est-ce

17 que le fait qu'il a été frustré et qu'il s'est senti trahi par ses voisins,

18 par l'Europe, par les autres, est-ce que c'était un terroir, un terrain

19 propice à ce que ces Moudjahiddines aient une influence significative

20 auprès des gens ?

21 R. Oui, certainement. Je répète, en particulier dans cette partie de

22 Bosnie-Herzégovine, et là où ils se sont installés en 1992, 1993. De

23 manière générale, lorsqu'on lutte pour sa survie, il y a beaucoup de gens

24 qui sont prêts même à accepter l'aide du diable lui-même si c'est une aide.

25 Ce n'est pas étonnant qu'on les ait traités d'alliés, qu'on les ait traités

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1 de personnes qui allaient nous aider.

2 Q. A ce sujet, Général, ma question sera la suivante : à un moment

3 quelconque, après la création de la 17e Brigade de Krajina, la 17e Brigade

4 a-t-elle agi de concert dans une opération quelle qu'elle soit de combat

5 avec ces Moudjahiddines ?

6 R. En tant que brigade, je l'ai signalé, début septembre 1993, on a eu une

7 opération de combat ensemble, de Kruscica vers Vitez. Enfin, moi, en tant

8 que commandant de la 17e, c'est la seule expérience que j'ai eue avec des

9 éléments de ce détachement El Moudjahid.

10 Q. Mais ma question concerne la période qui précède la création d'El

11 Moudjahid. N'avez-vous jamais eu des contacts, des rapports quels qu'ils

12 soient avec ces Moudjahiddines qui se sont installés dans cette zone au

13 sens large du terme ?

14 R. Non.

15 Q. Vous avez mentionné l'ordre que vous avez reçu de la part du général

16 Alagic. Vous avez ajouté un fait, vous avez dit que ces étrangers ont

17 participé à une opération de combat en septembre avec vous. Pendant ce

18 combat, dites-moi, ce sont-ils comportés précisément de la manière que vous

19 aviez décrite ? Ont-il accepté le commandement ou ont-ils suivi leur propre

20 initiative ?

21 R. En toute responsabilité, je peux vous dire que l'expérience m'a prouvé

22 pendant cette opération de combat, ou plutôt mon expérience a été très

23 négative. En dépit de l'ordre ou même si on a fait des efforts pour que

24 cela se passe d'une bonne manière, et eux, ils ont agi de leur propre chef.

25 Ceci a provoqué des pertes importantes dans mon unité. Ce jour-là, il me

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1 semble que j'ai eu 78 blessés, 16 tombés. Jamais, jamais ne m'est arrivé en

2 tant que commandant de brigade, ni avant, ni après.

3 Q. Merci. Il ne me reste que quelques questions au sujet des mesures

4 prises, un sujet qui a été abordé avec vous par mon éminent confrère. Vous

5 avez dit quelle a été votre attitude à l'égard des mesures disciplinaires

6 prononcées à l'encontre des soldats. Vous avez dit quelles ont été les

7 mesures prises à l'encontre de tout à chacun pour lequel il a été prouvé

8 qu'il était responsable d'une infraction disciplinaire ou d'un crime,

9 délit, et vous avez dit que vous avez agi de la sorte à l'encontre d'un de

10 vos proches si je vous ai bien compris. J'aimerais savoir : quelle était

11 l'attitude de votre commandement supérieur, du commandant Alagic, du

12 général Alagic à l'encontre des auteurs de crimes et délits, et pour ce qui

13 est des mesures à prendre à l'égard de tout soldat pour lequel il a été

14 prouvé qu'il était auteur de ce genre d'actes ?

15 R. Ce que j'ai fait, je l'ai fait sur la base d'ordres, de règles, de loi.

16 M. Alagic était catégorique là-dessus et très rigoureux à l'égard de ses

17 subordonnés. Il demandait que toutes les mesures soient prises au maximum.

18 C'était parfois aussi sur la base des informations qu'il avait lui-même. Il

19 a vu des choses. Je me rappelle d'un événement qui s'est produit près de

20 Guca Gora me semble-t-il ou un membre de la 306e a été vu par lui au moment

21 où l'on emportait des biens d'une maison croate. Personnellement, il a

22 demandé que des poursuites soient engagées à l'encontre de cet homme, et

23 qu'il soit placé en détention. Comment pourrai-je commenter son attitude à

24 cet égard ? Ce serait superflu.

25 Q. Le commandant Alagic est quelqu'un que vous connaissiez très bien, et

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1 vous coopériez de manière très étroite avec lui. Pouvez-vous nous dire

2 suite à cela, pour ce qui est des ordres que vous avez reçus, pour ce qui

3 est des rapports que vous deviez soumettre, pour ce qui est de l'exécution

4 de ces ordres, quelle a été l'attitude du commandant du 3e Corps d'armée eu

5 égard aux faits que tout crime devait faire l'objet d'enquêtes et que tout

6 membre de l'armée qui était auteur de ce genre d'actes devait être

7 sanctionné ?

8 R. Je le sais, le commandant Alagic a été nommé commandant du Groupe

9 opérationnel vers la fin du mois de février. Pendant un moment, j'étais en

10 contact direct avec le commandant du corps. A travers ses instructions, les

11 tâches qui nous ont été confiées, à travers les documents écrits, et cette

12 attitude très claire pour ce qui était de la formation, d'entraînement, de

13 la discipline, des mesures à prendre à l'encontre de tout auteur

14 d'infractions disciplinaires ou autres, la seule conviction que j'ai pu

15 avoir, c'est qu'il était très énergique, très conséquent pour ce qui est de

16 la prise de ce genre de mesures.

17 Q. Mon confrère vous a demandé si vous pouviez vous rappelez des hommes

18 qui ont fait l'objet de sanctions et à l'encontre de qui il y a eu des

19 poursuites au pénal. Ma question est la suivante : vous est-il arrivé qu'un

20 soldat ou qu'un officier pour lequel on a pu déterminer qu'il était auteur

21 d'une infraction disciplinaire ou de crimes, que ceci lui soit pardonné, et

22 qu'on ne le sanctionne pas ?

23 R. Il n'y avait pas de situation où on ne prend pas de mesures. Si on

24 avait constaté une situation, on prenait des mesures disciplinaires, on

25 prononçait des sanctions et des mesures au pénal. Mais il y a eu des cas,

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1 par exemple, d'après la loi en tant que commandant, j'étais compétent

2 d'agir après les deux tiers de la peine purgée. Je pouvais pardonner,

3 gracier. Pour ceux qui s'étaient repentis, pour ceux qui promettaient de ne

4 pas récidiver, on le faisait. Il n'y avait pas de situation où on ne les

5 sanctionnait pas.

6 Q. Général, il me semble avoir terminé avec mes questions. Je vous

7 remercie de m'avoir répondu.

8 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais demander aux autres avocats.

10 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

11 Nouvel interrogatoire par M. Ibrisimovic :

12 Q. [interprétation] Monsieur Cuskic, une question vous a été posée par mon

13 éminent confrère. Vous avez dit que cet incident à ce poste de contrôle

14 s'était produit au début juin 1993; était-ce le 1er juin ?

15 R. Oui.

16 Q. Au moment où le conflit a éclaté entre le HVO et l'ABiH, vous étiez à

17 Travnik ?

18 R. Oui.

19 Q. Le 8 juin 1993, vous rappelez-vous l'endroit où vous étiez ?

20 R. Je crois que j'étais aussi à Travnik.

21 Q. Je vous remercie. Un deuxième point. Je voudrais que l'on précise une

22 chose. Vous avez dit que la 7e Brigade musulmane était la seule à avoir cet

23 intitulé "musulmane" dans le cas du 3e Corps d'armée.

24 R. Oui, pour ce qui est des Unités du 3e Corps d'armée. Il me semble que

25 dans le 4e Corps, il y avait une unité qui s'appelait musulmane.

Page 12155

1 Q. Si je vous disais que dans le 1er, dans le 6e, dans le 4e, il y en avait

2 aussi ?

3 R. D'accord. Oui, c'est exact. Je pense que dans chacun des corps d'armée,

4 il y avait une brigade qui portait cet élément dans son appellation.

5 Q. Une question qui portait sur le MOS ou sur les forces musulmanes et qui

6 vous a été posée par mon confrère. Je voudrais que ce soit tout à fait

7 clair. Hier, je vais citer vos propos, page 48, ligne 19 jusqu'à la page

8 41. Vous avez dit qu'au moment de la création des corps et des brigades, la

9 Défense territoriale et une partie du MOS ont été intégrés dans les unités

10 opérationnelles ou dans les unités de la Défense territoriale qui sont

11 restées sous le contrôle du QG municipal.

12 Q. Ma question est la suivante : lorsqu'on crée les corps et les brigades,

13 les membres du MOS deviennent membres, non seulement du 1er Bataillon de la

14 7e Brigade, mais aussi d'autres Unités de l'ABiH, qui sont créées à

15 Travnik, la 306e, le 312e, le 314e.

16 R. Absolument. Je pense que c'était cela la substance de ma réponse que

17 vous avez citée.

18 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Je vous remercie. Je n'ai plus de

19 questions, Monsieur le Président.

20 M. LE JUGE ANTONETTI : Comme je vous le disais tout à l'heure, j'ai

21 quelques questions à vous poser.

22 Questions de la Cour :

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Si vous voulez, on va revenir tout au début de ce

24 que vous avez dit hier sur les Moudjahiddines et Karaula. C'est à la page

25 48, ligne 2.

Page 12156

1 Vous avez dit que les Moudjahiddines avaient participé à la défense de

2 Karaula; est-ce que vous confirmez cela ?

3 R. Oui, un groupe de Moudjahiddines.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous-même, étiez-vous à Karaula en même temps

5 qu'eux ?

6 R. Non. A ce moment-là, ils étaient stationnés dans un hameau qui

7 s'appelait Gradina. C'était un groupe. Ce n'était pas très grand. A

8 Karaula, il m'est arrivé de passer par là, de m'y arrêter. Il faut savoir

9 que c'était le dernier groupe de villages libres entre la municipalité de

10 Travnik et Jajce. C'était une base pour les opérations de combat, pour

11 l'aide à Jajce, donc il m'est arrivé d'y séjourner, de passer par là quand

12 j'étais à Jajce, et pendant les interruptions, pendant cette période allant

13 du 6 septembre jusqu'au 15 novembre 1992.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Les Moudjahiddines étaient présents dans cette

15 localité entre le mois de septembre et novembre 1992 ?

16 R. Oui.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Indépendamment d'eux, y avait-il d'autres forces,

18 d'autres unités présentes avec eux, à côté d'eux, autour d'eux, ou ils

19 étaient seuls face aux Serbes ?

20 R. Voyez-vous, à Karaula, c'est un ensemble d'agglomération. Il y avait le

21 détachement de Karaula placé sous l'état-major de Travnik. Il y avait, en

22 tout, 100 hommes -- 1 100 hommes. Il y avait les éléments logistiques, les

23 transmissions de mon unité qui y étaient basés. Ce serait à peu près cela.

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous nous confirmez qu'il y avait des soldats

25 appartenant à votre unité qui étaient présents. Ces Moudjahiddines, ils

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1 sont venus tout seul ? Qui leur a demandé de venir ? Vous, qui occupiez le

2 terrain, qu'est-ce qu'ils sont venus faire là ? Aviez-vous besoin d'eux ?

3 R. Voyez-vous, comment sont-ils arrivés, cela je ne peux pas vous le dire

4 parce qu'ils sont arrivés avant moi. J'ai été mis sur le territoire sous le

5 contrôle entre le 8 et le 15 -- jusqu'au 15 novembre, lorsque j'étais

6 chargé de la défense de Karaula. Vraisemblablement, quelqu'un les a amenés

7 pour se sentir plus en sécurité pour la défense parce que ces hommes, qui

8 couvraient une ligne de front de 36 kilomètres, au départ, ils avaient

9 peut-être 100 fusils uniquement à leur disposition. Pour tout homme qui

10 arrivait, l'arme était bienvenu pour défendre les maisons du coin et le

11 village.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, on apprend qu'il y avait une ligne de front

13 qui faisait 36 kilomètres, vous, les Moudjahiddines et des Serbes en face.

14 Est-ce que vous aviez avec eux, les Moudjahiddines, des contacts sur le

15 terrain ? Au minimum, pour éviter pour se tirer dessus ? Comment faisiez-

16 vous sur le plan opérationnel pour vous répartir les opérations sur le

17 terrain ? Parce que des combattants ayant des tenues de combat, comment

18 faire la distinction ? Comment faisiez-vous, sur le plan opérationnel, pour

19 vous répartir le territoire ?

20 R. De toute évidence, je n'ai pas été bien compris. Comme j'ai déjà dit,

21 je suis arrivé à Karaula vers le 5 ou 6 septembre. J'ai été engagé sur le

22 territoire de la municipalité de Jajce, pour aider la municipalité de

23 Jajce. Les Moudjahiddines, ce groupe, était placé dans un hameau appelé

24 Gradina. Mes expériences de combat avec eux sont les suivantes : si

25 j'attaque, si on se met d'accord pour qu'ils participent, de manière

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1 autonome, séparée, on -- pour plusieurs raisons linguistiques,

2 transmissions, il n'y avait pas de téléphone, il n'y avait pas de

3 communication -- donc, eux, ils allaient attaquer sur le côté, à une

4 colline, par exemple. Mon expérience se limite à la défense de Karaula.

5 Jusqu'au 10 et 15 novembre, on n'a pas réussi à participer ensemble à la

6 défense de Karaula. Ils n'ont pas toujours été là, faisant partie de mon

7 unité au combat. Septembre, octobre, la moitié du mois de novembre, peut-

8 être qu'on a coopéré lors de deux combats ensemble. Je n'avais pas de

9 contact avec eux. Je ne les voyais pas tous les jours. Je m'occupais de mes

10 affaires à moi, vers Jajce et les Chetniks. Je ne sais pas si j'ai été

11 assez clair maintenant.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais passer à une autre opération. Vous avez dit

13 en réponse, tout à l'heure, à une question supplémentaire de la Défense, au

14 mois de septembre, dans la région de Vitez, il y a eu une opération

15 conjointe avec l'Unité El Moudjahid. Vous êtes sûr que c'est bien en

16 septembre ?

17 R. Je suis tout à fait certain. Le 18 septembre, pour être tout à fait

18 précis.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Quelques instants auparavant, vous aviez parlé du

20 mont Igman; est-ce que c'est la même région ?

21 R. Le mont Igman est situé près de Sarajevo à plus de 100 kilomètres de

22 Vitez. Cela s'est passé lorsque nous avons envoyé un détachement de

23 Bosanska Krajina au mois d'août, donc cet incident s'est produit le 18

24 septembre.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous nous dites que vous avez envoyé un

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1 détachement au mois d'août au mont Igman. Il y avait qui sur place au mont

2 Igman ?

3 R. Le commandant de Bosanska Krajina et un détachement conjoint ont envoyé

4 ce détachement, et ils appartenaient à la

5 312e Brigade de la 17e. Je pense que c'étaient des hommes de Jajce, et la

6 défense d'Igman était sous la responsabilité du 1er Corps de Sarajevo. C'est

7 eux qui étaient chargés de la défense. Je pense que c'est M. Karavelic qui

8 était commandant à l'époque. Je ne connais pas les détails. Je n'étais pas

9 présent. M. Salkic de Travnik était commandant du détachement. Il était

10 subordonné au 1er Corps. Mais je sais qu'il a mené à bien cette opération

11 avec succès, et le commandant du 1er Corps l'a félicité pour cela.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Sur le mont Igman, est-ce qu'à votre connaissance,

13 la 7e Brigade a également participé à des opérations ou pas ?

14 R. En réponse à une question qui m'a été posée par le conseil de la

15 Défense, j'ai déjà dit que le 1er Corps avait envoyé un bataillon de la 7e

16 Brigade musulmane et un détachement conjoint de Bosanska Krajina, ils ont

17 aidé le 1er Corps à la défense du mont Igman.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Toujours à votre connaissance, est-ce que dans le

19 bataillon de la 7e Brigade, y avait-il des éléments de l'Unité Moudjahid,

20 voire des Moudjahiddines, d'après ce que vous savez.

21 R. Non. Leurs unités étaient dirigées par Jusovic.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais demander à Monsieur le Greffier de sortir la

23 pièce P616 en B/C/S.

24 Je vais vous montrer un document, dans votre langue, mal photocopié, mais

25 je vous demande de le lire. Pouvez-vous nous dire de qui émane ce

Page 12160

1 document ?

2 R. Ce document a été rédigé par Ahmet Adilovic.

3 Q. Il appartenait à quelle unité, ce Ahmet Adilovic ?

4 Q. Mais, je ne sais pas à quelle unité il appartenait. Je sais qu'il était

5 iman à Travnik, il était directeur de la Medresa. Pour ce qui de son unité,

6 je ne sais pas à quelle unité il appartenait. Il est en contact avec moi.

7 Q. Vous le connaissez Adilovic ? Il est adressé à qui ce document ?

8 R. Ce document est adressé au commandement du 3e Corps, au Groupe

9 opérationnel, au département. Il s'agit d'une demande d'hélicoptères.

10 Q. Cette demande d'hélicoptères est faite pour qui ?

11 R. Ce document a été rédigé par la personne dont le nom figure ici. Il est

12 dit que nous connaissons onze personnes, des Arabes et des Turcs qui

13 doivent aller à Igman. Je ne pense pas que ce document soit rédigé en

14 jargon militaire, on ne peut pas voir de quelle structure il s'agit et les

15 termes utilisés sont curieux. Il est dit dans ce document de les

16 transporter par hélicoptère et que cet hélicoptère sera utilisé pour un ou

17 deux vols. Mais les termes utilisés ne sont pas très militaires. Ce

18 document est incohérent, ce n'est pas un document classique militaire. Il

19 n'y a pas de commentaires militaires de quel type que ce soit.

20 Le commandement du 3e Corps a émis un ordre précis dans lequel il a indiqué

21 la manière dont cet hélicoptère serait saisi, il aurait fallu mentionné les

22 coordonnées, l'endroit où l'hélicoptère était sensé atterrir, l'heure et

23 ainsi de suite. J'ai utilisé des hélicoptères pour transporter des blessés

24 de Kruscica à Zenica et c'est la raison pour laquelle je sais cela.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous nous dites que vous ne comprenez pas

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1 pourquoi, 11 personnes, apparemment arabo-turc, devraient aller à Igman par

2 hélicoptère, suite à une réquisition auprès du 3e Corps. Vous n'avez aucune

3 explication à donner ?

4 R. Non, je n'ai pas d'explication à fournir à ce sujet. Des hélicoptères

5 appartenant à l'armée étaient utilisés pour d'autres fins de transport en

6 Bosnie-Herzégovine et ce groupe n'a certainement pas participé à arrêter

7 l'attaque menée par les Chetniks contre Igman. Nos unités ont été

8 transférées en passant par Zenica et ont participé à des opérations de

9 combat, mais je pense que c'était avant cette date, je pense que l'attaque

10 a été arrêtée avant cette date.

11 Q. Tout à l'heure, alors qu'Ahmet Adilovic, vous le connaissez, mais pour

12 vous c'est un imam, il n'est pas militaire ? Il n'est pas sous statut

13 militaire le 27 août 1993 ?

14 R. Ce n'est pas vraiment ce que je dis. Je sais qu'il était imam, qu'il

15 était le directeur de la Medresa de Travnik, mais je ne saurais vous dire

16 s'il était membre de l'armée ou pas. Je sais qu'il était imam et qu'il

17 était directeur de la Medresa, c'est tout ce que je sais à son sujet.

18 Q. Vous ne comprenez pas pourquoi un imam fait une requête à l'autorité

19 militaire pour un hélicoptère. Vous n'avez pas d'explications à fournir.

20 R. Il est dit que le commandant adjoint chargé de la Morale et des

21 Affaires religieuses, de toute façon, son rôle ne relevait de sa

22 responsabilité de toute façon. Seul un commandant de corps peut signer de

23 tels documents. Un commandant de bataillon n'est pas responsable de la

24 communication avec le commandement du corps encore moins un officer chargé

25 de la Morale. En tant que soldat, je ne comprends pas cela. Du point de vue

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1 militaire, c'est un document --

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez la parole. Je passe à un autre sujet.

3 Si j'ai bien compris, vous étiez le commandant de la

4 17e Brigade de la Krajina, c'est bien cela ? De janvier au mois de décembre

5 1993 ?

6 R. Il me faut ajouter quelque chose. A partie de sa création, le 25

7 novembre 1992 jusqu'au 7 avril 1994.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Lorsque vous n'étiez pas sur un théâtre

9 d'opération, vos bureaux, en tant que commandant, où étaient situés vos

10 bureaux, votre bureau, il était où ?

11 R. Mon bureau était à l'étage supérieur du centre du commandement de la

12 brigade. Ce commandement de la brigade était situé dans quelle ville ? A

13 Travnik, le bâtiment du commandement de la brigade.

14 Q. L'ancienne caserne de la JNA ?

15 R. Absolument, oui, c'est ce que je vous dis. C'était dans la caserne.

16 Donc, c'était à l'arrière de ce bâtiment, à l'étage supérieur.

17 Q. En juin 1993, est-ce qu'à votre connaissance, y avait-il des

18 prisonniers détenus dans la caserne de l'ex-JNA ?

19 R. Des prisonniers de guerre ? Oui.

20 Q. Ces prisonniers, ils étaient sous quelle autorité, qui était

21 responsable de leur situation ?

22 R. Jusqu'au moment où le commandement du 3e Corps a régulé la situation,

23 et avant la création de la commission chargée des prisonniers de guerre,

24 naturellement, c'est moi qui étais la personne la plus responsable pour ce

25 qui est de ces prisonniers, mais j'ai délégué cette responsabilité au

Page 12163

1 colonel Salko. Il était mon adjoint chargé de la Morale. C'est lui qui

2 surveillait la situation, et qui me faisait rapport. Pour ce qui est de

3 contrôler la situation, c'était le département de la sécurité militaire, et

4 la police militaire qui étaient chargés de cela.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans votre fonction de responsable, comme vous venez

6 de le dire, est-ce qu'il vous est arrivé, vous, d'aller voir les

7 prisonniers de guerre ? Est-ce que vous avez été les voir ? Est-ce que vous

8 leur avez rendus visite à ceux qui étaient détenus ?

9 R. Non, je ne suis pas allé leur rendre visite pour certaines raisons.

10 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous n'êtes pas allé les voir ?

11 R. Oui, je suis allé les voir, mais je n'ai pas planifié de visite

12 particulière pour aller les voir. Il y avait d'autres raisons pour

13 lesquelles je me rendais dans ce secteur. J'y suis allé en passant.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Lorsque vous les avez vus, il y en a aucun qui s'est

15 plaint de mauvais traitement, de coups, de conditions de détention pas

16 conformes ? Personne ne s'est jamais plaint auprès de vous ?

17 R. Non.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, tout allait bien ?

19 R. Pour autant que je le sache, oui, tout allait bien. D'après les

20 rapports établis par la Croix rouge lorsqu'elle s'est rendue sur place,

21 lorsque le 3e Corps s'est rendu sur place, lorsque Pavo Nikolic s'est rendu

22 sur place, tout le monde a estimé que la situation était satisfaisante.

23 Comme je l'ai dit, les conditions de détention de mes soldats étaient

24 identiques à celles des prisonniers de guerre.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous saviez pourquoi ces personnes étaient

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1 détenues ? Qu'est-ce qu'on leur reprochait au juste ?

2 R. Je ne comprends pas cette question.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Ces personnes qui étaient détenues, pour quelles

4 raisons ils étaient détenus ?

5 R. Hier, j'ai expliqué que le premier, le deuxième et le troisième jour de

6 conflit avec le HVO, nous avions 40 prisonniers de guerre. Après que des

7 enquêtes ont été menées par l'organe chargé de la sécurité, et qu'un

8 rapport selon lequel dix d'entre eux avaient été emprisonnés à Slimena,

9 j'ai ordonné que ces personnes soient libérées. Pour ce qui est des

10 personnes qui avaient été faites prisonnières lors des combats, elles

11 étaient maintenues en prison en tant que prisonniers de guerre jusqu'à ce

12 qu'il soit possible de déterminer s'ils avaient commis des crimes de

13 guerre. Pendant ce temps-là, nous devions les garder en détention.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Si je vous ai bien compris, ceux qui n'ont pas été

15 libérés, il y avait une enquête pour savoir s'ils avaient commis des crimes

16 de guerre. C'est bien ce que vous nous dites ? Il y avait une enquête en

17 cours.

18 R. Absolument.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : L'enquête en cours a été menée par qui ? Qui faisait

20 l'enquête ?

21 R. Les organes chargés de la sécurité.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans le cadre de l'enquête par les organes chargés

23 de la sécurité, est-ce que le procureur militaire devait être, à un moment

24 donné, informé du fait qu'il y avait des gens qui étaient détenus ? Si oui,

25 est-ce qu'il l'a été ?

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1 R. Pour autant que je le sache, c'est un fait. Hier, nous avons pu voir le

2 rapport du service de sécurité du 3e Corps d'armée concernant les personnes

3 qui étaient dans la prison, les prisonniers de guerre.

4 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous le savons parce qu'il y a d'autres témoins qui

5 sont venus avant vous. Nous savons que parmi ces prisonniers, il y en a qui

6 ont été échangés. Comment pouvez-vous expliquer qu'il y a une enquête sur

7 les crimes de guerre, et qu'on échange des prisonniers ? Est-ce que vous

8 avez une explication à donner ?

9 R. Je n'ai pas de commentaire à faire. C'est arrivé ainsi. Cela s'est

10 passé ainsi. Mais par rapport aux personnes contre lesquelles une plainte

11 était déposée, l'organe de la présidence qui en était chargé adoptait un

12 acte d'abolition. C'est seulement à partir de ce moment-là qu'ils étaient

13 échangés. Ceux qui ne faisaient pas partie l'objet de plaintes, ils étaient

14 échangés dans le cadre de l'échange des prisonniers de guerre.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous nous dites quelque chose qu'on n'a jamais

16 entendu jusqu'à présent. C'est à la ligne 7. Vous nous dites que l'organe

17 de la présidence devait prendre un acte permettant l'échange. La

18 présidence, quelle présidence ? La présidence de Guerre ? Vous faites

19 référence à quelle présidence quand vous dites "la présidence" ?

20 R. Je ne peux pas dire que j'ai raison à 100 %. Je ne suis pas juriste, je

21 suis un officier. Mais je pense que c'était la présidence de Bosnie-

22 Herzégovine.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est la présidence au niveau

24 politique ?

25 R. Absolument. Ceci était au-delà de mes ingérences. Ceci se passait à un

Page 12166

1 niveau tout à fait différent, et ceci était effectué par la commission

2 chargée de l'échange, et non pas par les commandants.

3 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous étiez un des plus haut responsable sur place,

4 ce que nous nous dires, et vous comprenez, est important. Si je vous suis,

5 vous nous dites quand il y a un échange, il ne peut y avoir un échange que

6 lorsque la présidence a permis l'échange, et notamment, en indiquant que

7 ceux qui sont échangés, il n'y a pas de suspicion de crimes de guerre à

8 leur encontre. C'est pour cela qu'ils sont échangés. C'est bien ce que vous

9 nous avez dit ?

10 R. Non, je n'ai pas dit cela. J'ai dit les personnes qui font l'objet

11 d'une procédure, qui ont déjà été condamnés et qui sont en train de purger

12 leur peine, pour qu'ils soient échangés, il fallait qu'ils soient graciés

13 d'abord. Mais s'agissant des prisonniers de guerre qui étaient dans des

14 prisons, c'était effectué par les commissions chargées de l'échange, soit

15 du 3e Corps d'armée ou du Groupe opérationnel. Je n'étais pas vraiment

16 impliqué dans cela puisque j'étais commandant de la brigade. J'espère que

17 j'ai été plus clair.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Parfaitement clair. Merci.

19 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. J'ai

20 quelques questions à vous poser au sujet d'une réunion à laquelle vous avez

21 assisté en compagnie d'un autre témoin qui a témoigné dans ce prétoire il y

22 a sept ou huit mois de cela. Cette réunion n'a pas été mentionnée hier, ni

23 aujourd'hui. L'objet de cette réunion n'a pas été débattu. Mais vous êtes

24 la seule personne à laquelle je peux poser ces questions.

25 Vous souvenez-vous avoir assisté à une réunion en novembre 1993 à la

Page 12167

1 caserne de la JNA avec un homme assez âgé, croate ?

2 R. J'ai souvent vu des Croates qui étaient restés à Travnik. Je les ai

3 souvent accueillis. Il vous faut être un peu plus précis si s'il vous

4 plaît.

5 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Ce monsieur aurait été enlevé et détenu

6 dans un camp situé dans les environs de Travnik. Après cela, il a été

7 libéré et conduit au sous-sol de la caserne militaire de Travnik. Vous

8 souvenez-vous, à présent, de la personne dont je parle ?

9 R. Là encore, je ne peux pas vous dire avec précision. Je connais

10 plusieurs personnes. Il y avait un groupe, Rajkovic, Fisci. Mais c'est

11 exact, ils ont été conduits à la caserne, et je pense que certains d'entre

12 eux étaient à la clinique de Travnik, et certains d'entre eux ont été

13 installés dans la cave peut-être. Mais la situation était tout à fait

14 particulière. Nous les avons conduits à la caserne pour les protéger et

15 pour nous assurer qu'ils ne se retrouvent pas dans la même situation que

16 celle dans laquelle ils s'étaient trouvés précédemment. Car, nous pensions

17 que le groupe, qui avait agi dans la manière dont ils étaient contre eux,

18 pourrait essayer d'attenter à leur vie de nouveau, donc il s'agissait d'une

19 mesure, essentiellement, préventive. Ils n'ont pas été traités comme des

20 prisonniers ou des détenus. C'était notre intention, et c'est comme que les

21 membres de la 17e ont traité ces personnes.

22 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Je vous parle de M. Fisic. Vous avez

23 mentionné son nom. Il s'agit d'un homme assez âgé qui a passé quelque temps

24 dans la caserne de Travnik. Je ne souhaite pas aborder la question à savoir

25 s'il était là de son plein gré, pour sa propre protection ou autres. Je

Page 12168

1 souhaiterais vous poser quelques questions au sujet d'une conversation que

2 vous avez eue avec lui, comme il l'a décrite en janvier de cette année

3 devant la Chambre de première instance. Il était là le 30 janvier. Je

4 souhaiterais citer quelques-uns de ses propos.

5 Tout d'abord, à la page 2 270, il vous décrit comme un homme très doux et

6 très humain. Il nous a parlé d'une conversation qu'il a eue avec vous. Il

7 nous a raconté son histoire, qu'il avait été détenu à Orasac, en compagnie

8 d'autres personnes. Il a également décrit la manière dont vous aviez réagi

9 face à cette histoire. C'est de cela que je voudrais vous parler. Selon

10 lui, vous avez dit la chose suivante : "Je ne peux plus supporter cela." Ce

11 sont là vos propos, d'après lui. "Je ne peux plus supporter la situation

12 s'agissant de certaines unités. Je vais clarifier les choses; sinon, je

13 vais partir." Après, selon lui, vous avez dit : "Je vais appeler le

14 président Izetbegovic." Ensuite, il dit : "C'est ce que M. Cuskic a fait,

15 et M. Izetbegovic est venu à Travnik alors que nous étions toujours au

16 sous-sol de la caserne."

17 Donc, je cite sa déposition à la page 2271, du compte rendu d'audience en

18 français.

19 J'ai quelques questions à vous poser au sujet de la conversation que vous

20 avez eue avec lui. Tout d'abord, je souhaiterais vous demander si cela

21 reflète exactement vos propos. Est-ce que vous reconnaissez là vos

22 propos ou est-ce que vous avez dit autre chose ?

23 R. Oui, je reconnais mon point de vue et mon attitude. De manière

24 générale, je pense que c'est très précis et très exact.

25 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Deuxième question : si vous lui dites :

Page 12169

1 "Je vais appeler le président Izetbegovic," c'est ce que vous lui avez dit,

2 mais l'avez-vous fait ?

3 R. Je suis membre de l'armée et je respecte la loi. Je n'ai pas appelé M.

4 Izetbegovic. Je pense, qu'à l'époque, M. Alagic était commandant du 3e

5 Corps, et je voulais que cette question soit débattue au plus haut niveau.

6 Je voulais que le président Izetbegovic soit informé du problème. Je

7 voulais que ce problème soit résolu dans la région, car cela nuisait à

8 notre réputation d'honnêteté. Je ne sais pas si cela était le résultat des

9 actions entreprises par Alagic, mais à la mi-novembre, vers le 15 novembre,

10 M. Izetbegovic s'est, effectivement, rendu à Travnik, et s'est rendu à la

11 caserne.

12 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Merci. Mais vous n'avez aucune manière

13 de savoir si M. Alagic a raconté cette histoire à M. Izetbegovic, Alagic ou

14 quelqu'un d'autre ?

15 R. Non. Je n'ai pas dit cela. Je sais que le général Alagic a informé le

16 président Izetbegovic de cet événement. Il a demandé que le problème posé

17 par le détachement El Moudjahid et le comportement des Moudjahiddines soit

18 résolu. Il a demandé qu'ils soient placés sous contrôle. Il n'a pas

19 seulement informé le président Izetbegovic. Le commandant Alagic s'est

20 également adressé au commandement supérieur et a fait quelques suggestions

21 orales à ce sujet. Orales et écrites également.

22 M. LE JUGE SWART : [interprétation] En parlant de commandement supérieur,

23 vous voulez sans doute parler de l'état-major du commandement à Sarajevo,

24 n'est-ce pas ? M. Delic, notamment.

25 R. [aucune interprétation]

Page 12170

1 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Merci. Savez-vous quelle a été réponse

2 du président Izetbegovic, ou est-ce que cette réponse ne vous a pas été

3 rapportée ?

4 R. je n'ai pas été informé de cela.

5 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Lorsque vous avez entendu son récit,

6 vous avez dit : "Je vais clarifier cela. Sinon, je vais aller moi-même. Je

7 vais appeler le président Izetbegovic." Apparemment, vous étiez tellement

8 mécontent de la situation que vous avez menacé de partir des forces.

9 Qu'est-ce qui vous a rendu tellement malheureux dans cette situation ?

10 R. J'ai été choqué par le comportement et le fait que l'on faisait sortir

11 des civils de leur maison, alors qu'ils étaient totalement innocents.

12 Surtout, lorsque j'ai entendu parler du meurtre de M. Popovic, commis d'une

13 manière tellement atroce et brutale. Je pense que c'était totalement

14 choquant, et en tant qu'homme, j'étais totalement frustré par cela. Je

15 trouvais cela inacceptable. Je ne sais pas comment expliquer cela.

16 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Après que vous avez raconté cela à

17 votre supérieur, M. Alagic, est-ce que vous avez participé personnellement

18 aux développements de la situation qui ont suivi ?

19 R. Oui, car je me suis occupé, en tant que commandant, des visites, des

20 rencontres avec la famille, de la protection. Mais pour ce qui est du

21 reste, je ne sais pas, puisque mes organes n'étaient pas compétents pour

22 cela.

23 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Ma dernière question concernant cette

24 question est la suivante : est-ce que, par hasard, vous avez entendu parler

25 d'une enquête concernant cette affaire menée par la police ou le procureur

Page 12171

1 de la république ou une autre instance ?

2 R. Je ne saurais vous répondre avec exactitude. Je sais qu'une enquête a

3 été menée, je crois, par le service de sécurité militaire. Mais je ne peux

4 pas vous donner de détail quant à savoir qui le faisait, ce qui était fait,

5 à quel niveau, quel bureau du Procureur s'il s'agissait des instances

6 civiles ou pas car les organes militaires sont chargés des membres

7 militaires et les organes civils des autres. Je ne peux pas vous donner une

8 réponse tout à fait précise. Mais quant à mes organes de sécurité, je sais

9 qu'eux, ils n'ont pas participé à cela.

10 M. LE JUGE SWART : [interprétation] D'autre part, hier et aujourd'hui, vous

11 avez dit également que vous avez déposé dans une affaire qui va commencé à

12 se dérouler devant un tribunal en Bosnie concernant une personne qui a

13 participé peut-être aussi à cet événement. Cela, c'est le contexte de ma

14 question.

15 R. Je ne vois pas le contexte. De toute façon, j'ai dit qu'en tant que

16 citoyen de Bosnie-Herzégovine, j'ai été convoqué au bureau du procureur,

17 j'y ai déposé. J'ai dit ce que je savais, et je maintiens tout ce que j'ai

18 dit.

19 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Mais apparemment, ceci ne concerne pas

20 cet événement ou si ?

21 R. Ceci concerne en partie cet événement. Mais je ne sais pas si ceci peut

22 vraiment vous intéresser ici. C'est M. Jonathan Schmidt, le procureur, qui

23 est le plus au courant de cela. Ceci concerne mes connaissances au sujet de

24 M. Meqtouf, et son rôle éventuel de cet événement. J'ai présenté ce que je

25 savais à ce sujet.

Page 12172

1 M. LE JUGE SWART : [interprétation] Très bien. Je souhaite maintenant

2 simplement faire quelques remarques. J'ai fait référence au témoin, Ivo

3 Fisic, avec un F, qui a déposé le 30 janvier 2004. J'ai cité la page 2 271

4 du compte rendu d'audience en français. Je le dis par le compte rendu

5 d'audience.

6 Merci de vos réponses.

7 R. Merci à vous.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Il est cinq heures 20. Le mieux, c'est de faire la

9 pause. Comme cela, nous reprendrons après la pause aux questions

10 éventuelles de l'Accusation et de la Défense. Il est cinq heures 20, on

11 reprendra vers six heures moins quart.

12 --- L'audience est suspendue à 17 heures 21.

13 --- L'audience est reprise à 17 heures 52.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de donner la parole à l'Accusation, je crois

15 qu'il y avait un problème de traduction, alors je vous donne la parole.

16 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, avec tous mes

17 respects, à deux reprises depuis le début, j'ai essayé d'aider la Chambre

18 de première instance et d'attirer votre attention sur le problème de la

19 traduction -- de l'interprétation, afin d'être utile. Je l'ai fait parfois

20 au moment des questions des Juges. Cela s'est passé aujourd'hui aussi. Je

21 souhaite savoir si, pendant que vous posez les questions, si, parfois, nous

22 pouvons être utile à la Chambre s'il faut qu'on demande la parole ou pas.

23 Car, en tant qu'avocat de la Défense, je trouve cela embarrassante si je

24 n'ai pas l'occasion de prendre la parole. Mais, ici, je souhaitais

25 simplement dire que, suite à la fin du débat concernant le document PT669,

Page 12173

1 je souhaitais attirer votre attention sur le fait que la première phrase

2 est mal traduite. Ce document commence par les mots "nous connaissons 11

3 personnes." Or, dans la traduction, il est dit "nous avons 11 personnes."

4 Je considérais qu'il s'agissait là d'une erreur de fond, et je souhaitais

5 attirer l'attention de la Chambre de première instance à cela pour

6 permettre aux interprètes de corriger cette erreur et pour éviter tout

7 malentendu.

8 Merci de m'avoir écoutée. Il s'agit du document P616. Excusez-moi de

9 mon erreur. Il s'agit du document P616. J'ai fait une erreur en indiquant

10 le numéro du document.

11 Merci de m'avoir écoutée.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, il n'y a pas de problème. Quand vous constatez

13 qu'il y a un problème de traduction, levez-vous d'un bond, et -- voilà.

14 Mais, là, j'avais cru que vous vouliez poser une question sur le fond. Oui.

15 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je souhaite

16 simplement compléter ce qui a été dit par Me Residovic. Lorsque le témoin

17 déposait, il a dit le même mot que ce qu'a dit

18 Me Residovic. Elle a dit : "Nous connaissons 11 personnes," et c'est ce qui

19 a été consigné au compte rendu d'audience suite à votre question. Merci.

20 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Effectivement, le document, c'est "we

21 have" et non pas -- donc, "nous avons 11 personnes" et non pas "nous

22 connaissons." Tout à fait.

23 Je vais donner la parole à M. Mundis s'il a des questions à poser suite aux

24 questions que les Juges ont posées.

25 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous n'avons que

Page 12174

1 quelques questions pour ce témoin. Mais avant de faire cela, je souhaite

2 attirer l'attention de la Chambre, et je l'ai déjà dit à la Défense pendant

3 la pause, au cours des questions posées par le Président au témoin

4 concernant la pièce P616, il nous a été dit de reprendre l'original du

5 document de l'unité chargée des pièces à conviction, et pendant la pause,

6 j'ai montré cela à la Défense, et je souhaite maintenant montrer l'original

7 de ce document, P616, en langue bosniaque, afin de pouvoir poser quelques

8 questions au témoin. Je vais certainement mettre cela à la disposition de

9 la Chambre de première instance. Je pense qu'il faudrait montrer cela à

10 l'accusé également car, jusqu'à présent, ils n'ont pas vu l'original du

11 document.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis, vous avez la parole.

13 M. MUNDIS : [interprétation] Merci.

14 Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Mundis :

15 Q. [interprétation] Monsieur, vous avez, devant vous, l'original de la

16 pièce P616. Vous avez vu tout à l'heure la photocopie de ce document. Je

17 souhaite simplement que vous vous penchiez sur l'original de ce document,

18 compte tenu de vos commentaires déjà faits, je souhaite savoir si vous

19 souhaitez clarifier quelque chose maintenant, de manière supplémentaire, ou

20 expliquer, compte tenu que vous pouvez maintenant voir l'original qui

21 contient certaines inscriptions en bleu qui n'étaient pas visibles sur la

22 photocopie.

23 R. On voit clairement qu'il s'agit d'un original enregistré sous ce

24 numéro. Mais malgré cela, je maintiens tous les commentaires que j'ai faits

25 au sujet de ce document, en tant que soldat.

Page 12175

1 Q. Mais clairement, vous voyez, sur ce document, le cachet de l'unité.

2 R. Oui, absolument. Le cachet, de même que le numéro de référence.

3 Q. Je pense que vous nous avez déjà dit que la personne qui a signé le

4 document, M. Adilovic, d'après ce document, était l'adjoint du commandant

5 chargé des affaires religieuses et du moral.

6 R. Je n'ai pas dit qu'il l'était. J'ai dit que c'est son titre dans cette

7 signature. Mais je ne le connais pas en tant que tel. Je le connais en tant

8 qu'imam à Travnik et le directeur de la Medresa à Travnik.

9 Q. C'est exact, Monsieur. Ma question en anglais disait : D'après le

10 document et sa signature, il est indiqué qu'il était à ce poste-là au sein

11 de la 7e Brigade musulmane de Montagne le 27 août 1993 ou autour de cette

12 date ?

13 R. Oui, absolument. C'est ce qu'il est dit dans le document.

14 Q. Est-ce qu'il est clair également sur la base de ce document que M.

15 Adilovic ne donne pas l'ordre concernant un transport en hélicoptère, mais

16 qu'il fait simplement cette demande ?

17 R. Oui, c'est écrit. Mais il s'agit d'un transport des personnes qu'il

18 connaissait. Il ne s'agissait pas des membres de son unité, mais des

19 personnes qu'ils connaissaient. Il s'agissait de 11 Arabes et Turques.

20 Q. Très bien, Monsieur. Je souhaite que l'on --

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans la traduction française, on dit : "Des

22 personnes qui commençaient" Le document dans votre langue,

23 c'est : "Nous connaissons" ou "nous avons 11 personnes" ? Comment vous

24 traduisez dans votre langue la première phrase ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Ici, c'est vraiment tout à fait clair.

Page 12176

1 M. LE JUGE ANTONETTI : Qu'est-ce qui est clair dans votre langue ? Parce

2 qu'il y a une différence. Cette personne, a-t-elle demandé un hélicoptère

3 pour les personnes de sa connaissance ? Si elle dit "nous avons," ce n'est

4 pas tout à fait la même chose. Je vous demande, dans votre langue : qu'est-

5 ce que vous lisez-vous ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis absolument d'accord avec vous. Il

7 suffit de lire pour comprendre. Je vais le lire en langue bosniaque, je

8 vais lire l'original et je demanderai aux interprètes de bien vouloir

9 l'interpréter. Je m'excuse du fait que j'ai été rapide jusqu'à maintenant.

10 "Nous connaissons - en anglais, "we know" 11 personnes, Arabes et Turcs,

11 qui devaient aller au mont Igman. Par conséquent, nous vous demandons de

12 nous accorder leur transport en hélicoptère dans le cadre d'un vol ou deux,

13 si ceci peut être fait de passant. Nous ne demandons pas un vol particulier

14 rien que pour eux."

15 J'ai dit que c'est un document illettré sur le plan militaire. Nous pouvons

16 voir qu'il ne s'agit pas là d'une priorité, mais il demande qu'en passant

17 certaines personnes qu'il connaît soient transportées quelque part.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour cette clarification. Parce que la

19 traduction anglaise, c'est "we have," qui ne correspond pas à "nous

20 connaissons".

21 M. MUNDIS : [interprétation]

22 Q. Monsieur, est-ce que vous vous souvenez ou est-ce que vous avez

23 certaines connaissances concernant les événements qui se sont déroulés sur

24 le mont Igman le 27 août 1993 ou autour de cette date ?

25 R. Non.

Page 12177

1 Q. Merci.

2 M. MUNDIS : [interprétation] Je n'ai plus besoin que le témoin garde ce

3 document. Il est possible de le retirer.

4 Q. J'ai encore une seule question afin d'obtenir une clarification d'une

5 réponse que vous avez donnée à une question de la Chambre de première

6 instance. Il s'agit de la page 54, ligne 20. Vous avez parlé du fait que

7 vous avez délégué vos responsabilités concernant les soins et la protection

8 fournie aux personnes détenues au sous-sol de l'ancienne caserne de la JNA

9 à Travnik. D'après le compte rendu d'audience en anglais, vous avez dit que

10 vous avez délégué ces responsabilités, en anglais, il est écrit : "au

11 colonel Salko, l'adjoint chargé du Morale." Je souhaite vous demander,

12 Monsieur, de nous dire le nom et le prénom de cette personne que vous avez

13 mentionnée en tant que colonel Salko.

14 R. Je pense que j'ai dit son nom et prénom. Il s'agissait du colonel Salko

15 Dedic, mon adjoint chargé du Moral. La raison pour laquelle je l'ai nommé,

16 mis à part les personnes qui étaient responsables de cela, c'est tout

17 d'abord, car il avait épousé une Croate, et il connaissait bien Pavo

18 Nikolic à Travnik. Pour moi, c'était une manière supplémentaire de pouvoir

19 veiller sur ces personnes et les protéger.

20 Q. Merci, Monsieur le Témoin.

21 M. MUNDIS : [interprétation] Le Procureur n'a plus de questions pour ce

22 témoin.

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci à vous.

24 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

25 La Défense.

Page 12178

1 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

2 Nouvel interrogatoire supplémentaire par Mme Residovic :

3 Q. [interprétation] Général, en répondant aux questions du président de la

4 Chambre de première instance concernant les combats à Karaula qui ont eu

5 lieu à partir du 6 septembre jusqu'au début novembre, vous avez dit que

6 dans un petit village, vous avez vu des Moudjahiddines aussi et que vous

7 avez participé avec eux, si j'ai bien compris dans le cadre de deux

8 opérations de combat. Dites-moi, s'il vous plaît, Monsieur le Général, si,

9 mis à part ces Moudjahiddines, d'autres unités ont participé également à la

10 défense de ces lignes, unités qui n'appartenaient pas à l'ABiH, à savoir,

11 le HVO, le HOS et d'autres unités qui étaient prêtes à défendre Jajce et la

12 ville de Travnik ?

13 R. Lors de ma déposition hier, j'ai parlé plus concrètement de cette

14 région de défense entre Travnik et Jajce. Dans la défense de Jajce ont

15 participé aussi les unités du HVO, du HOS, de même que les unités de la

16 Défense territoriale et ma brigade qui s'appelait déjà la 7e Brigade de

17 l'ABiH. Concernant ce groupe de Moudjahiddines qui était à Gradina Karaula,

18 on en parle en terme exagéré, mais il s'agissait d'une unité d'une

19 quinzaine de personnes qui n'étaient pas très important sur le plan des

20 combats. Peut-être psychologiquement, cela voulait dire quelque chose pour

21 la population locale. Mais d'après mon expérience sur la base d'une

22 opération, je ne sais pas si cela a eu lieu le 6 ou le 13. Après, lors de

23 la défense de Karaula, ils ont participé au combat. Au cours de la période,

24 avant la chute de Jajce, je peux dire que la défense de Jajce s'étalait sur

25 une ligne de défense de 136 kilomètres. A la fois, les unités du HVO et du

Page 12179

1 HOS, de la Défense territoriale et de notre brigade y ont participé, de

2 même que les unités que vous avez mentionnées.

3 Q. Est-ce que vous savez où ce groupe de Moudjahiddines est parti après

4 ces événements et ces combats à Karaula ? Est-ce que vous ne les avez

5 jamais rencontré de nouveau ?

6 R. Non.

7 Q. Merci. Le Juge Swart a attiré votre attention sur une partie de votre

8 conversation avec M. Fisic, et vous l'avez confirmée. Dites-moi, Général,

9 s'il vous plaît, lorsque vous avez fait cette demande auprès de M. Fisic,

10 lorsque vous avez transmis cela au nouveau commandant du 3e Corps d'armée,

11 le général Alagic, est-ce que ceci confirmait votre attitude selon laquelle

12 la question des Moudjahiddines pouvait être résolue seulement au niveau

13 politique le plus élevé ?

14 R. Je vais vous faire part de mon opinion personnelle, à savoir, je pense

15 que presque 95 % des officiers de l'ABiH, des officiers qui étaient des

16 anciens officiers de la JNA et qui étaient des commandants dans l'armée de

17 Bosnie-Herzégovine en passant dans la brigade, mais dans d'autres brigades

18 dans la région de Travnik et placées sous le commandement du 3e Corps

19 d'armée. Nous n'étions pas convaincus du bien-fondé de la présence des

20 Moudjahiddines et l'attitude du commandant Alagic et du commandant

21 Hadzihasanovic également était qu'il fallait résoudre cette question, mais

22 il fallait résoudre cela seulement au niveau central, au niveau politique

23 centrale car nous, en tant qu'officiers, nous devions respecter les

24 décisions prises sur le plan central politique.

25 Visiblement le président Izetbegovic donnait des ordres à Delic, et le

Page 12180

1 général Delic donnait des ordres à Hadzihasanovic, et nous respections

2 cette chaîne de commandement et nous étions tenus de la respecter.

3 Q. Encore une question. Vous avez mentionné ou plutôt, nous avons

4 mentionné ces Moudjahiddines qui étaient à Karaula; est-ce que vous saviez,

5 à l'époque, en 1993 ou par la suite, que certains groupes de Moudjahiddines

6 se trouvaient dans d'autres régions, des groupes des Moudjahiddines près de

7 Teslic ou de Konjic, donc dans des parties du pays qui n'ont aucun rapport

8 avec le 3e Corps d'armée ?

9 R. Sincèrement parlant, non, car nous n'avions pas de communications avec

10 eux, Nous étions totalement encerclés pendant un an et, personnellement, je

11 n'avais pas ce genre d'information. Je savais qu'il y en avait dans cette

12 zone-là, la zone des combats car je pouvais communiquer avec les autres

13 dans ces parties là, je parle de la région de Travnik, Zenica et rien

14 d'autre.

15 Q. Très bien, merci beaucoup.

16 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. M.

17 IBRISIMOVIC : [interprétation] Nous n'avons pas de questions

18 supplémentaires, Monsieur le Président. Je vous remercie.

19 M. LE JUGE ANTONETTI : Général, votre édition vient de se terminer. Vous

20 avez répondu hier et aujourd'hui aux questions posées par la Défense,

21 l'Accusation et les Juges. Nous vous remercions d'être venu témoigner à La

22 Haye. Nous vous souhaitons un bon voyage de retour et nous formulons nos

23 meilleurs dans la vie que vous menez actuellement.

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. J'anticipe ma longue retraite. Je vous

25 remercie et je présente mes excuses aux interprètes.

Page 12181

1 [Le témoin se retire]

2 M. LE JUGE ANTONETTI : La Défense, nous avons un témoin. On peut, il nous

3 reste 50 minutes. On peut déjà commencer et on continuera demain parce que

4 le témoin attend. Le fait de nous voir, cela va certainement lui faire

5 plaisir et, ensuite, on continuera demain.

6 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite

7 proposer, en ce moment, des documents; on le fera demain matin, peut-être ?

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Sauf, si cela peut aller vite, oui, je vous donne la

9 parole. Allez, on va gagner quelques minutes. Je vous donne la parole. Non,

10 il est déjà là, on fera demain.

11 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. Je vais d'abord vérifier

13 que vous entendez bien, dans votre langue, la traduction de mes propos. Si

14 c'est le cas, dites : "Je vous entends et je vous comprends."

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous entends et je vous comprends.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez été cité comme témoin par la

17 Défense. Avant de vous faire prêter serment, je me dois de recueillir

18 quelques éléments d'information sur votre identité. Pouvez-vous nous donner

19 votre nom, votre prénom, date de naissance et lieu de naissance.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis Mesud Hadzialic, je suis né le

21 14 février 1956 à Foca, l'Etat de Bosnie-Herzégovine.

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est votre situation professionnelle

23 aujourd'hui ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis professeur à la faculté de

25 l'université de Sarajevo, qui est une faculté qui est consacrée aux Science

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1 qui concerne la circulation.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : En 1992, 1993, aviez-vous une occupation

3 professionnelle à l'époque; si oui, laquelle ?

4 LE TÉMOIN : [interprétation] En 1992 et en 1993, je faisais partie des

5 unités de l'ABiH. Au début de l'année 1992, je travaillais encore dans une

6 institution qui s'appelait : Centre de réparations de Travnik.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Et en 1993 ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais membre de l'ABiH.

9 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans quelle unité et quel grade ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] J'étais dans le QG municipal de la Défense

11 territoriale et, par la suite, je suis parti au sein du

12 3e Corps de l'armée, au bataillon des transmissions. Quant à mon grade,

13 dans l'ex-armée yougoslave populaire, j'avais le grade de Commandant.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous déjà témoigné devant une juridiction

15 internationale ou un juridiction nationale sur les faits qui se sont

16 déroulés dans votre pays en 1992-1993 ou c'est la première fois que vous

17 témoignez.

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai jamais témoigné auparavant, c'est la

19 première fois aujourd'hui.

20 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous demande bien vouloir lire le serment.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

22 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

23 TÉMOIN : MESUD HADZIALIC

24 [Le témoin répond par l'interprète]

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, vous pouvez vous asseoir. Il nous reste trois

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1 quarts d'heure avant la suspension de l'audience qui se terminera à 19

2 heures. Je vais vous fournir quelques éléments d'information, soit la façon

3 dont va se dérouler cette fin d'après-midi et demain. Vous allez devoir

4 répondre à des questions qui vont vous être posées par les avocats des

5 accusés. A l'issue des questions qui seront posées, qui vont prendre demain

6 une partie de la matinée mais qui seront la suite des 45 minutes qui vont

7 commencer tout à l'heure, l'Accusation qui est située à votre droite vous

8 posera des questions dans le cadre d'un contre-interrogatoire. Le contre-

9 interrogatoire a pour objet de vérifier la crédibilité de vos dires et par

10 ailleurs, d'éclaircir certaines des réponses que vous avez fournies aux

11 avocats des accusés.

12 A l'issue de cette phase, les défenseurs pourront vous reposer d'autres

13 questions supplémentaires liées aux questions posées par l'Accusation.

14 Après cela, les trois Juges qui sont devant vous, vous poseront

15 certainement des questions, des questions que les Juges poseront, peuvent

16 être tout à fait différentes de celles qui ont été posées mais elles

17 peuvent aussi se cadrer dans les questions posées par les uns et par les

18 autres.

19 En règle générale, nous posons des questions aux fins d'éclaircissement de

20 vos réponses ou parce que nous voulons combler des lacunes sur certains

21 points qui auraient été portés à notre connaissance.

22 Si les questions vous paraissent compliquées, essayez, à ce moment-là, de

23 répondre le mieux possible car nous n'avons, nous, vous concernant aucun

24 élément écrit et ce que vous me direz qui constituera la teneur de votre

25 témoignage.

Page 12184

1 Il se peut que l'autre partie, voire même le Juge, vous présente en cours

2 de votre auditions, des documents. C'est une possibilité également qui peut

3 apparaître de la procédure. Si les questions vous paraissent trop

4 compliquées, demandez à celui qui vous la pose de la reformuler.

5 Je me dois également d'appeler votre attention sur deux points en

6 particulier. Vous avez prêté serment de dire toute la vérité, donc vous

7 pouvez en conclure qu'il ne faut pas faire de faux témoignages car un faux

8 témoignage est une infraction, il est une infraction dans tous les pays, y

9 compris dans votre juridiction.

10 Par ailleurs, un deuxième élément mais qui ne devrait pas s'appliquer à

11 vous, notre procédure permet, lorsqu'un témoin estime que sa réponse

12 pourrait constituer un des éléments qui peuvent être utilisé à charge

13 contre lui, il peut refuser de répondre. Dans cette hypothèse, qui est très

14 exceptionnel, à ce moment-là, le Chambre peut dire au témoin : "Répondez

15 quand même, et nous vous garantissons une forme d'immunité." Ceci est fait

16 afin de faciliter la manifestation de la vérité. Si, à un moment donné,

17 vous éprouvez une difficulté quelconque, faites-nous part du problème.

18 En règle générale, nous travaillons sur des périodes de temps. Pendant une

19 heure et demi, il y a des questions. Ensuite, il y a une pause d'une demi-

20 heure ou 25 minutes, et nous reprenons une heure et demi ainsi de suite.

21 Voilà, cela ne va pas durer une heure et demi, puisqu'il nous reste

22 plus que 40 minutes. Je veux donner la parole à la Défense, qui va

23 commencer l'interrogatoire principal.

24 Mme RESIDOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

25 Interrogatoire principal par Mme Residovic :

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1 Q. [interprétation] Bonsoir, Monsieur le Professeur Hadzialic.

2 R. Bonsoir.

3 Q. Vous avez entendu des choses très importantes, prononcées par le

4 Président de la Chambre de première instance. Je vais ajouter un

5 avertissement de plus. Nous parlons la même langue. Vous seriez en mesure

6 de répondre immédiatement aux questions que je vous pose : cependant, à la

7 fin, ma question et votre réponse doivent être traduite pour que la Chambre

8 de première instance puisse suivre le contenu de nos entretiens, et pour

9 que nos collègues présents ici dans le prétoire puissent nous suivre

10 également. Je vais vous demander de ménager une pause après ma question, et

11 je vais faire de même. Ce sera la façon la plus efficace d'agir. Nous

12 aiderons au mieux de cette manière-là la Chambre de première instance.

13 M'avez-vous compris ?

14 R. Oui, j'ai compris.

15 Q. Vous avez dit, Monsieur le Professeur Hadzialic, que vous enseignez

16 aujourd'hui à la faculté des Sciences électriques et techniques de

17 l'université de Sarajevo. Pouvez-vous nous dire où vous avez été formé ?

18 R. J'ai terminé en 1978 de cette même faculté à Sarajevo. Après, j'ai

19 servi dans l'armée, et en tant que réserviste de cette armée, j'ai été

20 envoyé servir à Travnik, où j'ai travaillé dans cet institut de maintenance

21 et de réparation. J'ai occupé plusieurs postes, et à la fin j'étais chef

22 chargé des Recherches. J'ai terminé mes études de troisième cycle à la même

23 faculté de Sarajevo. C'est là que j'ai soutenu ma thèse de troisième cycle.

24 Q. Merci. Vous avez dit que vous avez fait votre service dans les rangs de

25 l'armée populaire yougoslave. Y aviez-vous obtenu un grade ? Puisque vous

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1 avez dit que vous étiez commandant, j'aimerais savoir de quelle manière

2 vous êtes devenu commandant de la JNA.

3 R. C'est en 1991, au début de cette année, que je suis devenu commandant.

4 Je le suis devenu grâce aux écoles séminaires que j'ai fréquentées, réservé

5 à ceux qui étaient sortis des facultés civiles. J'ai fait des écoles

6 militaires qui auraient pu me garantir davantage de promotions si la

7 situation aurait évolué d'une manière différente, si ma carrière

8 professionnelle aurait évolué différemment.

9 Q. Si je vous ai bien compris, vous avez commencé immédiatement à

10 travailler dans l'institut de réparation et de maintenance de Travnik.

11 R. Oui. J'étais maître assistant à la faculté des sciences électriques de

12 l'université, jusqu'à ce que je sois nommé à Travnik, et c'est là que j'ai

13 terminé aussi ce parcours professionnel à Travnik.

14 Q. Pouvez-vous nous dire ce que faisait cet institut de réparation et de

15 maintenance de Travnik ?

16 R. C'était une institution militaire dont la tâche principale était de

17 maintenir les moyens de transmission et les systèmes de transmission de

18 l'ex-JNA, de développer et de produire un certain nombre de systèmes, et de

19 produire l'équipement nécessaire à la formation des officiers travaillants

20 sur les transmissions pour l'ex-JNA.

21 Q. Qui dirigeait ce centre, cet institut qui était un institut militaire

22 dans l'ex-RSFY ?

23 R. L'institut était dirigé par le ministère fédéral de la Défense

24 populaire, sous direction -- chargé des aspects techniques, dont le siège

25 était à Belgrade.

Page 12187

1 Q. Concrètement, pouvez-vous nous dire où était situé l'institut à

2 Travnik ?

3 R. Il était au centre de Travnik. Il faut dire que le premier voisin,

4 séparé par une simple clôture, était la caserne de l'ex-armée. Son premier

5 voisin, aujourd'hui, c'est la caserne de l'armée de la Fédération.

6 Q. Lorsque l'armée populaire yougoslave, avec les forces serbes, a attaqué

7 à la Bosnie-Herzégovine; quelle est la situation dans laquelle s'est trouvé

8 votre institution ? Est-ce que vous vous êtes replié avec l'armée populaire

9 yougoslave, ou autre chose s'était produite ?

10 R. Ces jours-là, nous avions des préparatifs avec la Défense territoriale.

11 Nous, les employés et les officiers de l'institut, ceux qui avaient

12 l'intention de rester, nous nous sommes organisés plutôt bien. Nous avons

13 pu établir un contrôle total de toutes les ressources de l'institut, alors

14 que, dans la caserne juste à côté, se trouvait encore l'armée de l'ex-JNA.

15 Avec ses effectifs de réserve, c'était une Unité d'Infanterie.

16 Q. Pourriez-vous nous dire exactement à quel moment l'armée populaire

17 yougoslave s'est repliée de la caserne de Travnik ?

18 R. Les dates exactes, je les connais, mais je ne me rappelle pas les

19 jours. Ce qui est certain, c'est que le retrait de l'armée de Travnik a eu

20 lieu après que nous ayons pris le contrôle, ou plutôt, après que nous avons

21 commencé à diriger l'institut dans ce contexte que je viens d'esquisser. La

22 direction plutôt, nous reconnaissions en tant que nos supérieurs la

23 présidence de Bosnie. C'était peut-être au mois de mai 1992.

24 Q. Vous venez de répondre partiellement la question que j'allais vous

25 poser dans la suite.

Page 12188

1 Qui s'est chargé de la direction de l'institut de Maintenance de Travnik, à

2 partir, de ce moment-là ?

3 R. Puisque les communications ne fonctionnaient pas très bien, à ce

4 moment-là, avec les centres ou avec les autorités d'Etat de Bosnie-

5 Herzégovine, les ministères, la présidence, et ainsi de suite, nous avons

6 envoyé une information, et nous avons envoyé tous les rapports sur la

7 situation qui prévalait à l'institut. Ils nous ont donné le feu vert -- ou

8 plutôt, ils nous ont proposé que la présidence de guerre de Travnik se

9 charge de la direction provisoire ou temporaire de l'institut.

10 Q. La présidence de guerre, s'est-elle chargée de ces directions à un

11 moment donné ? A-t-elle nommée une direction provisoire de l'institut ?

12 R. Oui. La présidence de guerre de Travnik a repris en main, compte tenu

13 de l'évolution des choses, à offrir la direction provisoire. J'ai été nommé

14 directeur temporaire. Ceci étant dit, une collègue du côté croate devait

15 être mon homologue, ou l'équivalent, c'est-à-dire, mon adjoint, mon

16 suppléant pour ce qui est de la direction de l'institut.

17 Q. Monsieur le Professeur, jusqu'à quel moment avez-vous exercé ces

18 fonctions de directeur de l'institut de maintenance de Travnik ?

19 R. Cette période transitoire, ou ce régime de direction transitoire, a

20 duré a peu près jusqu'à la fin de juillet 1992, et c'est, à ce moment-là,

21 qu'on a élu une nouvelle direction, et les organes de surveillance, une

22 forme de conseil de Surveillance de l'institut de Travnik.

23 Q. Après cette période-là, avez-vous continué exercer des fonctions à

24 l'institut de Maintenance de Travnik ? Ce poste, vous a-t-il permis de

25 suivre le travail de l'institut ?

Page 12189

1 R. Oui. Je suis resté dans ce qu'on peut appeler un conseil de

2 surveillance. Et dans cette situation difficile, nous avons pu aider à ce

3 que j'aie marqué seulement la page du texte plus tard, à ce qu'on gère, de

4 manière efficace, les ressources héritées et les ressources que nous avions

5 à ce moment-là de l'institut.

6 Q. A un moment donné, en 1992, Monsieur le Professeur, est-ce que vous

7 avez rejoint les forces armées ? Et si oui, pouvez-vous nous dire de quelle

8 force armée il s'agit ?

9 R. J'ai rejoint la Défense territoriale de Bosnie-Herzégovine. Je me suis

10 présenté d'ailleurs dès le mois d'avril 1992, et réellement, j'ai rejoint

11 le QG de la Défense territoriale au courant de juillet 1992.

12 Q. Qui commandait l'état-major municipal, à ce moment-là ? Vous, rappelez-

13 vous ?

14 R. Je pense que c'était le général de Brigade aujourd'hui. Ribo Haso. Je

15 crois que c'est cette période-là où il est entré en fonction du commandant

16 de l'état-major de la Défense territoriale de Travnik.

17 Q. Quelles sont les fonctions qui vous ont été attribuées à l'état-major

18 municipal ?

19 R. Compte tenu de l'expérience que j'avais dans le domaine de

20 télécommunication ainsi que dans le domaine des communications du point de

21 vue de l'emploi à des fins militaires, j'ai été chargé d'aider ou, c'est-à-

22 dire, d'aider à ce qu'on essaie d'établir un système de communication entre

23 les unités qui faisaient partie de l'état-major municipal et des unités

24 qui, à ce moment-là, étaient placées sous un certain contrôle de l'état-

25 major municipal.

Page 12190

1 Q. Vous nous avez dit ce que faisait l'institut de maintenance avant la

2 guerre. Dites-nous maintenant ce qu'on faisait à l'institut en 1992, et

3 quels sont les moyens qu'il avait à sa disposition cet institut ?

4 R. Je vais tout d'abord vous répondre à la deuxième partie de la question.

5 L'institut a hérité des choses qui étaient, là, confiées pour la

6 maintenance, donc c'étaient des moyens de communication de diverses

7 technologies, de divers emplois. Je dois dire que les systèmes n'étaient

8 pas toujours complets, ceux qu'on avait, mais il se trouvait dans les

9 entrepôts de la direction des communications de Belgrade. L'institut était

10 responsable de développer des systèmes mobiles de communication. Il avait

11 ces entrepôts dans les parages. Donc il est resté un certain nombre de

12 moyens, un certain équipement, et nous avons considéré que c'était un

13 équipement militaire qui était utilisable et qui pouvait être confié aux

14 unités de la Défense territoriale de l'armée.

15 L'institut suivait toujours le même régime, donc il réparait ce qui

16 était à l'entrepôt pour que la qualité de ces équipements soit

17 satisfaisante, et naturellement, on essayait ou plutôt on a commencé à

18 résoudre un certain problème technique pas très important, des problèmes

19 mineurs, pour ce qui est de l'équipement qui s'est trouvé dans les unités

20 de la Défense territoriale. Il s'agissait de l'équipement qui était celui

21 des radios amateurs, des choses comparables.

22 Q. Pendant que vous étiez directeur de cet institut de maintenance,

23 Monsieur le Professeur, pouvez-vous nous dire si ces moyens ont été

24 distribués ou répartis, les moyens qui étaient à la disposition entre les

25 mains de l'institut et, si oui, pouvez-vous nous dire suite à la décision

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1 prise par qui ?

2 R. Pendant cette période-là, j'ai subi des pressions, moi,

3 personnellement, des pressions très importantes des structures militaires

4 du HVO pour ce qui ait une répartition des moyens qui étaient disponibles à

5 l'institut. Puisqu'à l'institut parmi les employés, il avait à la fois des

6 Musulmans ou plutôt des Bosniens et des Croates. Les informations sur les

7 quantités, sur la condition, les états de ces moyens étaient aussi

8 accessibles au HVO. Comme il y avait des pressions quotidiennes qui

9 s'exerçaient de la part du HVO, la seule solution qu'on a pu trouver pour

10 préserver le statut de l'institut, et pour qu'il ne passe pas entre les

11 mains des formations militaires, on a trouvé la solution suivante : suivant

12 les décisions de la présidence de guerre, on répartissait l'équipement qui

13 était disponible, les appareils, les moyens répartissaient entre le HVO et

14 la Défense territoriale de Travnik voire même à l'extérieur, donc hors des

15 rangs de la Défense territoriale de Travnik, les unités qui avaient reçu

16 l'autorisation en bonne et due forme de la présidence de guerre de Travnik.

17 Q. Quel a été le principe adopté par la présidence de guerre pour répartir

18 cet équipement entre la Défense territoriale et le conseil croate de

19 défense ?

20 R. L'équipement a été distribué ou réparti selon le principe un pour un.

21 Donc chaque décision de la présidence suivait cette règle. On n'avait pas

22 toujours le même système ou le même équipement en double, mais on suivait

23 cette règle-là. Il fallait que la nature, le caractère de la pièce soit

24 telle pour que chacune des parties reçoivent la même chose.

25 Q. Votre institut et la présidence de guerre, teniez-vous compte de

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1 l'équipement qui était déjà entre les mains du HVO, c'est-à-dire, de la

2 Défense territoriale ou respectiez-vous ce principe indépendamment de

3 l'équipement qu'ils avaient ?

4 R. Nous, en tant qu'institut, nous n'avions aucun moyen de savoir quel

5 était le niveau d'équipement des Unités du HVO. Nous le savions pour les

6 unités de la Défense territoriale. Donc afin de préserver une normalité à

7 l'institut, pour préserver le calme à l'institut il a bien fallu respecter

8 le principe un pour un.

9 Q. Je vous remercie. Dites-moi jusqu'à quel moment êtes-vous resté au sein

10 de l'état-major municipal, et quelles sont les fonctions que vous avez

11 prises par la suite ?

12 R. J'y suis resté jusqu'à la création du 3e Corps d'armée, et c'est à ce

13 moment-là, que j'ai été affecté au bataillon de transmission du 3e Corps

14 d'armée.

15 Q. Quelles ont été vos tâches principales au sein du bataillon de

16 transmission du 3e Corps d'armée ?

17 R. Puisque le Corps d'armée recouvrait un territoire plus important, plus

18 d'unités, il fallait s'engager davantage sur la formation et l'entraînement

19 de ces unités. J'ai été chargé d'agir ensemble avec les responsables des

20 unités, donc de créer des conditions nous permettant d'établir un système

21 de filières de commandement et de contrôle efficace, c'est-à-dire, de

22 m'assurer que le système de transmission et de communication fonctionne.

23 Q. Sur quoi vous êtes-vous basé ou quelles ont été vos sources pour

24 équiper les systèmes de communication du commandement du 3e Corps et des

25 Unités du 3e Corps ?

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1 R. Pour l'essentiel, pendant cette période-là, on ne peut pas parler

2 d'approvisionnement des unités du commandement par des systèmes de

3 communication, des systèmes complexes qui sont utilisés généralement pour

4 établir une filière de commandement et de contrôle. Il s'agit d'appareils

5 pris, d'appareils simples. L'une des sources c'était l'équipement, hérité

6 de l'ex-JNA et qu'on a pu trouver, ou que les unités ont obtenu des

7 entrepôts de l'institut de Maintenance, suite aux décisions prises par la

8 présidence de guerre. Une partie de cet équipement provenait des entrepôts

9 de la Défense territoriale, un certain nombre d'appareils. Mais pour

10 l'essentiel, c'étaient des appareils, en fait, dans on se sert généralement

11 des radios amateurs.

12 Q. Vous êtes un expert dans le domaine des télécommunications. Dites-nous

13 quel était le niveau de formation des hommes au commandement du 3e Corps et

14 au niveau des unités lorsqu'on a créé ce bataillon de transmission ?

15 R. Lorsque le bataillon de transmission a été créé pour l'essentiel les

16 hommes qui ont été affectés étaient soit des hommes qui avaient fait leur

17 service au sein de la JNA ou des gens qui ne venaient pas de cette arme

18 dans l'ex-JNA, mais qui étaient des radios amateurs.

19 Q. Puisque, Monsieur le Professeur, vous venez de nous dire que vous étiez

20 chargé d'équiper les unités aux moyens de communication, j'aimerais savoir

21 si, à un moment donné, vous avez procédé à la formation des hommes pour

22 établir le système de communication dans le 3e Corps ?

23 R. Compte tenu de cette vaste diversité des moyens et les difficultés de

24 la situation où on a dû faire cela et, compte tenu du fait que ce travail

25 même de transmission est très exigeant parce qu'il faut former les hommes

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1 aux procédures et aux technologies, on a demandé aux responsables d'agir de

2 manière efficace et rapide pour établir, pour mettre sur pied ces

3 procédures et ces technologies.

4 Il a fallu former des individus et des unités en tant qu'entités pour

5 pouvoir s'acquitter de ces tâches parce que nous avons constaté que

6 l'efficacité d'un point de vue technologique, n'était pas satisfaisante et

7 qu'on puisse l'améliorer, grâce à une meilleure formation des hommes.

8 Q. Dites-moi, qui avez-vous formé quelqu'un, et où cette formation a-t-

9 elle eu lieu ?

10 R. Il s'agissait, essentiellement, de soldats qui ont été affectés à des

11 unités de transmission et qui étaient sur le point de l'autre, ainsi que

12 des soldats ou du personnel militaire qui devaient exercer des fonctions de

13 commandement, par la suite. Nous avons commencé par ces personnes. La

14 formation a eu lieu, de façon organisée, à Zenica dans des installations

15 mis à la disposition du Bataillon de Transmission, ainsi qu'à la caserne,

16 et sur le terrain également, où nous avons eu la possibilité de former les

17 gens à l'utilisation de ces appareils.

18 Au début, nous nous sommes particulièrement chargés de la formation dans

19 l'utilisation des appareils de déchiffrage qui étaient destinés à

20 l'utilisation de ceux qui devaient chiffrer ou déchiffrer des documents.

21 Nous devions également former des opérateurs.

22 Q. Comme vous venez de le dire la formation était très importante,

23 formation dans le domaine des systèmes de transmission.

24 Est-ce que ce système de communication avait une importance significative

25 pour le fonctionnement général de l'armée, et notamment, dans le cas du

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1 système de commandement et de contrôle ?

2 R. Pour utiliser les termes de l'OTAN, le système des trois C,

3 commandement, contrôle et communication est très important. Il n'est pas

4 possible de développer un système efficace de contrôle et de commandement

5 sans un système de communication efficace. Et je veux parler aussi bien de

6 la communication que de la sécurité des communications.

7 Q. Vous venez de nous parler -- vous avez déclaré qu'il était très

8 important que le personnel militaire soit convenablement formé pour que les

9 communications soient efficaces. Qu'est-ce qui est également nécessaire ?

10 R. Hormis les effectifs, ce qui est également très important c'est

11 l'équipement, l'intégration et la mise en place de l'équipement dans les

12 conditions données. Comme il s'agissait de technologie très diverses, il

13 fallait déployer des efforts importants pour que cela soit parfaitement

14 fonctionnel.

15 Q. Vous m'avez dit, il y a quelques instants, quelles étaient les

16 principales sources par lesquelles vous avez obtenu cet équipement ? Quel

17 type d'équipement de communication, est-ce que la Défense territoriale

18 avait à sa disposition ? Et, par la suite, l'ABiH ?

19 R. Je vais diviser cela en trois niveaux, compte tenu de la stratégie en

20 vigueur. Pour ce qui est du niveau des combats. Afin de garantir le bon

21 fonctionnement des communications et des transmissions au cours des

22 opérations de combat, l'équipement et le nombre d'appareils mis à notre

23 disposition étaient tout à fait insuffisants.

24 Pour ce qui est de la communication entre les unités, à savoir les

25 bataillons et les commandements de brigades, il était possible d'établir de

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1 telles communications de façon individuelle. Ce qui signifie qu'il fallait

2 cinq canaux, mais qu'un seul canal pouvait être opérationnel.

3 Pour ce qui est du niveau opérationnel entre les commandements de brigades,

4 les commandements d'état-major et le 3e Corps, ces communications étaient

5 possibles, grâce à l'équipement fourni par les radios amateurs, et parfois

6 les centres chargés de l'observation et de l'information.

7 Comme je l'ai dit, les communications au niveau des combats existaient à

8 peine, à l'exception d'appareils amateurs portables qui ne peuvent pas être

9 utilisés dans certaines conditions. Au plan tactique, l'équipement de

10 l'ancienne JNA était utilisé et il s'agissait d'appareils conventionnels

11 pour la plupart, ainsi que d'appareils qui pouvaient être entretenus à

12 Travnik. Pour ce qui est du 3e niveau, il s'agissait essentiellement

13 d'équipements de radios amateurs.

14 Q. Professeur, lorsque ce système a été établi au sein du

15 3e Corps, est-ce que vous aviez des priorités, ou plutôt est-ce que vous

16 vous êtes concentré sur la mise en place d'un système de communication

17 particulier ? Est-ce que vous pourriez décrire la manière dont vous avez

18 établi le système de communication au sein du 3e Corps ?

19 R. L'équipement disponible, ou les priorités plutôt dépendaient de

20 l'équipement disponible. Certains appareils ne pouvaient pas être utilisés

21 pour les combats, ou au plan tactique. Donc l'équipement dont nous

22 disposions dictait les solutions en quelque sorte. Mais au niveau des

23 commandements, nous avons fait de notre mieux pour assurer les échanges

24 d'information entre les commandements d'unités et le commandement du 3e

25 Corps. Nous avons essayé de faire cela.

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1 Q. Dites-moi, je vous prie, à cette époque sur quelle infrastructure vous

2 êtes-vous fondé pour établir ce niveau de priorités des communications

3 entre les unités supérieures et les unités subordonnées ?

4 R. Le concept, l'objectif, de l'ancienne armée et de toute armée dans un

5 territoire donné, est d'utiliser au mieux les ressources des systèmes de

6 communication publique. Les opérateurs, comme nous les appelons

7 aujourd'hui. Dans notre cas particulier, nous avons essayé de mettre à

8 profit les ressources du système postal. Une partie du système de la poste

9 publique qui disposait d'infrastructure et d'un réseau de câbles,

10 commutateurs qui étaient situés à Travnik.

11 Q. Outre ces structures ou cette infrastructure de base, y avait-il

12 d'autres éléments dans la région de Travnik qui pouvaient servir à la mise

13 en place des communications et, le cas échant, avez-vous utilisé cette

14 infrastructure. Si vous ne l'avez pas fait, pourquoi ?

15 R. Hormis ces ressources publiques, il y avait également les ressources

16 fournies par les centres chargés de l'Information et de l'observation. De

17 tels centres ont existé dans toutes les municipalités avant la guerre. Mais

18 nous étions placés dans une situation telle que nous n'avons pas utilisé

19 ces ressources pour la bonne raison que les centres chargés de

20 l'information et de l'observation étaient conçus pour surveiller les vols

21 dans l'espace aérien situé au dessus de la municipalité de Travnik, Novi

22 Travnik ou Bugojno.

23 Au début, nous avons mis de côté ces systèmes, nous aurions pu utiliser le

24 système d'approvisionnement en électricité, mais ils utilisaient des

25 fréquences différentes, donc nous n'avons pas utilisé cela non plus.

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1 Il n'y avait pas d'autres infrastructures solides, en matière de

2 communications, dans la région à l'époque.

3 Q. Compte tenu de la situation qui prévalait à Travnik et notamment dans

4 le conflit d'épuration du terrain, pouvez-nous nous dire s'il était

5 possible d'utiliser cette infrastructure pour établir un système de

6 communications ?

7 R. Je dois vous répondre en deux volets. Si nous parlons des ressources

8 publiques, ces infrastructures de communications pouvaient être mises à

9 profit de façon efficace, par exemple, en utilisant les câbles de la poste

10 de Bosnie-Herzégovine. Mais en raison de controverses au sujet de

11 l'utilisation de ces câbles, controverses incessantes, ces câbles étaient

12 souvent hors d'usage. Donc, nous n'avions pas ces câbles à notre

13 disposition.

14 Mais pour l'organisation pour le système de contrôle et de commandement,

15 les communications radio sont beaucoup plus importantes et il convient de

16 dire que Travnik et les environs, c'est-à-dire, le mont Vlasic et les

17 collines qui se trouvent avant Vlasic et par la direction de Zenica. Dans

18 cette zone, le terrain est difficile. Pour ce qui est de la communication

19 radio, car il faut utiliser des intermédiaires, c'est-à-dire, faire en

20 sorte que tous les participants sont reconnaissables, s'assurer que les

21 communications fonctionnent convenablement où il faut utiliser des

22 fréquences radio libres, pour éviter les obstacles sur le terrain pour

23 faire en sorte que les communications passent mieux.

24 Q. Lorsque vous avez établi le système de communication au sein du 3e

25 Corps et notamment dans le secteur de Travnik, est-ce que vous avez

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1 rencontré des problèmes particuliers en 1993, problèmes qui vous ont

2 empêché de mettre en place un système solide et fiable de communication

3 entre les commandements supérieurs et les commandements subordonnés ?

4 R. Pendant une période, certaines lignes avaient déjà été établies entre

5 les Serbes et l'ABiH et le HVO. Ces lignes avaient dû être sécurisées à

6 l'aide de systèmes câblés et systèmes radio. Étant donné, compte tenu de

7 l'endroit et du secteur qui devait être couvert, notre problème fondamental

8 était le manque ou l'insuffisance de câbles convenables qui résistent au

9 mauvais temps et qui sont placés sous terre. Donc, de tels câbles n'étaient

10 pas disponibles et il était difficile de les trouver. Il y avait également

11 le problème de l'approvisionnement en électricité pour de tels systèmes.

12 Certaines unités étaient déployées dans des endroits où il n'y avait pas

13 d'électricité. S'il n'y avait pas de lignes d'électricité, elles étaient

14 coupées ou endommagées et il n'y avait pas d'autres sources d'énergie ou

15 d'électricité. De temps en temps, malgré tout, on arrivait à trouver un

16 groupe électrogène qui appartenait à l'armée et qui était utilisé par les

17 commandements supérieurs.

18 Il y avait également un manque de batteries car elles n'étaient pas

19 suffisamment entretenues, elles ne pouvaient être rechargées en raison des

20 coupures d'électricité. Il y avait des manquements, des insuffisances. En

21 outre, l'équipement était utilisé dans des conditions pour lesquelles il

22 n'était pas fait. Il y avait des difficultés très graves que nous avons dû

23 essayer de surmonter. Par exemple, nous avions parfois plus de dix

24 personnes ou participants qui utilisaient les mêmes câbles donc, si

25 quelqu'un appelait sur cette ligne, il entendait les neuf autres personnes,

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1 donc, il fallait indiquer son nom, indiquer le nom de la personne à qui il

2 fallait parler.

3 Nous avons rencontré de nombreuses difficultés, mais nous avons fait de

4 notre mieux pour essayer de faire en sorte que les informations puissent

5 être communiquées.

6 M. LE JUGE ANTONETTI : On va interrompre votre audition dans quatre

7 minutes. Donc, professeur, votre témoignage continuera demain. Il

8 commencera, puisque nous sommes là dedans l'après-midi à 14 heures 15, donc

9 soyez présent dès 14 heures 15. D'ici, je vous ai donné l'interdiction de

10 rencontrer l'autre partie puisque vous avez prêté serment, donc maintenant

11 vous êtes le témoin de la justice, vous n'êtes plus le témoin d'une partie,

12 donc d'ici demain, profitez de votre temps, mais surtout ne rencontrez

13 personne.

14 Je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir vous raccompagner.

15 [Le témoin se retire]

16 M. LE JUGE ANTONETTI : En début d'après-midi, demain, à 14 heures 15, je

17 donnerai la parole à la Défense. Que la présentation de ses pièces dont

18 elle va demander le versement, je recueillerai les observations de

19 l'Accusation. S'il n'y a aucune contestation, à ce moment-là, nous

20 demanderons à M. le Greffier de procéder à la numérotation des dites

21 pièces. Si jamais il y avait des contestations, à ce moment-là, nous

22 trancherions la contestation lors de la pause.

23 Par ailleurs, à l'issue de cette phase, je donnerai demain la parole à

24 l'Accusation qui va oralement nous répondre sur la question de la requête

25 orale que vous aviez formulée, nous avons demandé à l'Accusation de nous

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1 répondre avant ce soir, donc cela sera demain.

2 J'ai cru comprendre que l'Accusation aura besoin d'une vingtaine de minutes

3 pour répondes aux questions et, notamment, pour nous indiquer le provenance

4 des documents reçus postérieurement à la présentation de ce moyens de

5 preuve. A l'issue de ce laps de temps, nous ferons revenir le témoin et

6 nous continuerons son audition.

7 S'il n'y plus aucune question, je vais lever la séance et je vous invite à

8 revenir pour l'audience qui débutera demain à 14 heures 15. Je vous

9 remercie.

10 --- L'audience est levée à 18 heures 58 et reprendra le mercredi 24

11 novembre 2004, à 14 heures 15.

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